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Full text of "Histoire de la latinité de Constantinople"

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HISTOIRE 

DE     LA     LATINITÉ 

DE 

CONSTANTINOPLE 


M.   A.    BELIN 

CONSUL-GÉNÉRAL  PRÉS  LAMRASÏiADE  DE  FRANCE  A  CONSTANTINOPLE,      ' 
HEXBRE    HONORAIRE    DU    "  SVLLÛUOS    BELLIMCOS  "    DE    CONSTANTINOPLE, 
MEMBRE    CORRESJ'ONDANT 
«  DELLA   SOCIETA   LIGURE   DI   STORLA   PATRU  »,    ETC. 


DEUXIÈME    ÉDITION 

RÉPARÉE     ET    CONSIUÈHABLEUENT     ACCRUE    PAR     L'aUTEUR 
REVUE.  UltMEIITÉE  ET  CONTIRUËE  JUSQU'i  Wni  TERPS 

Le    R.    p.    ARSÈNE    de    Chatel 

CAPUCINS    DK    PAlllS,    EX-PRÉFET  .APOSTOLIQUE 


AVEC  DEUX  PLANS  ET  DES  GRAVURES 


PARIS 

ALPHONSR  PICARD  ET  FILS,  EDITEURS 

Liàrairet  de»  ArcMceÊ  nationales  et  de  la  Socléti  de  t'Éroie  de*  Charte* 

83,  HUE  Bonaparte,  82 

1894 

Toui  droits   r^sei-ciJs. 


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153T 
,Cfo 


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/^  v-yoo/a 


INTRODUCTION 

A    LA    ^OUVELLE    ÉDITION 


En  1872  M.  Belin,  secrétaire-interprète  et  consal-général 
près  l'ambassade  de  France  à  Constantinople,  publiait  dans  le 
f  Ck)ntemporain  i  une  série  d'études,  intitalées  <  Histoire  de 
l'Église  latine  à  Constantinople.  *  Ces  articles  forent  fort  re- 
marqués alors,  car  on  ne  possédait  aucun  travail  d'ensemble 
sor  la  matière;  aussi  engagea-t-on  l'auteur  &  en  faire  un  tirage 
à  part.  C'est  ce  qu'il  fit,  en  y  ajoutant  de  nombreuses  notes 
complémentaires.  Cette  brochure  fut  enlevée  en  peu  de  temps, 
si  bien  que  plusieurs  années  avant  la  mort  de  l'auteur  il  était 
impossible  d'en  trouver  un  seul  exemplaire. 

C'est  que  M.  Belin  n'était  point  le  premier  venu  et  qu'il  était 
fort  bien  préparé  pour  faire  un  travail  sérieux.  M,  Belin 
François-Alphonse  naquit  à  Paris  le  31  juillet  1817.  II  appar- 
tenait à  une  ancienne  et  honorable  famille  du  Vexin  français', 
dont  la  fortune  fut  emportée  par  la  tourmente  révolutionnaire,  et 
dont  les  membres  quittèrent  pour  la  plupart  le  pays  natal,  11 
s'appliqua  de  bonne  heure  à  l'étude  des  langues  orientales,  sous 
la  direction  de  S.-J.  Marcel,  et  suivit,  au  collège  de  France  et 
à  l'École  spéciale  des  langues  orientales  vivantes,    les  cours 

>  Belin  est  un  vieux  mot  français  qu'on  trouve  à  diverse!  époques  soua 
les  Tormes  :  Belinus,  Blio,  Balin,  lielin,  Hellin,  Heylin,  Bélines  etc.  VîUehar- 
douin  parle  d'un  eieur  de  Héline»  qui  prit  la  croix  en  1200;  un  sieur  Jacques 
Belin  vendait  sa  maison  à  Jacques  Cœur  ;  un  sieur  Belin,  maire  de  Deaune 
■ous  Henrj'  IV  conserva  cette  ville  à  la  France  par  son  courage.  —  Un  sieur 
Paoio  di  Belin,  vénitien,  habitait  Oalata  en  164.'!.  Un  sieur  Fran<;ois  Belin 
était  chancelier  de  l'ambassade  de  France  à  Constantinople  ;  de  17l:i  4  1717, 
il  remplit  trois  fois  les  fonctions  de  chargé  d'affaires  de  Sa  Majesté.  Noua 
trouvons  fort  souvent  sa  signature  dans  nos  archives  du  l.evant. 


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d'arabe,  de  persan,  d'hébreu  et  de  turc,  de  Sylvestre  de  Sacy, 
Baynaud,  E.  Quatremère  et  Joubert. 

Nommé  en  1838  répétiteur  à  l'école  des  Jeanes-de-Langues, 
il  remplit  ces  fonction  jusqu'en  1843,  époque  à  laquelle  il  fut 
nommé  Drogman-Chancelier  du  nouveau  consulat  de  France  à 
Elzeroum  (Arménie).  Appelé  l'année  suivante,  en  la  même  qua- 
lité, à  Salonique,  il  y  fut  pendant  quelques  mois  chargé  de  la 
gestion  de  ce  poste  consulaire.  11  passa  ensuite  au  Caire  (7  sep- 
tembre 1847)  et  géra  aussi  ce  consulat  en  1847.  Il  devint  enfin 
secrétaire-interprète  intérimaire  près  l'ambassade  de  France  à 
Constantinople.  C'est  là  surtout  qu'il  continua  à  utiliser,  au 
service  de  la  France  et  de  l'Église,  les  rares  qualités  dont  la  Pro- 
vidence l'avait  doué. 

Il  fut  envoyé  à  Jérusalem  à  l'époque  de  la  discussion  relative 
au  Lieux  Saints  et  y  resta  jusqu'en  1853.  Il  rentra  alors  en 
France,  pour  y  contracter  mariage  avec  M""  Virginie  Deîaporte, 
fille  de  l'ancien  consul  de  ce  nom.  Peu  après  il  fut  détaché, par 
le  ministre  des  affaires  étrangères,  en  mission  spéciale  auprès 
du  maréchal  de  Saint- Arnaud,  commandant  en  chef  de  l'armée 
française  d'Orient  et  conserva  ce  poste  de  confiance  jusqu'en 
janvier  1855.  Dans  l'intervalle,  en  mai  185'»,  il  avait  été  nommé 
secrétaire-interprète  titulaire.  Il  obtint  en  1862  le  brevet  de 
secrétaire-interprète  de  l'Empereur  et  fut  enfin  nommé  consul- 
général  en  1868.  C'est  donc  à  Constantinople  et  dans  ces  b:ès 
honorables  fonctions  qu'il  passa  les  plus  belles  années  de  son 
utile  existence. 

C'est  laque  nous  l'avons  connu  :  homme  de  devoir  avant  tout, 
appliqué^  malgré  sa  santédébiJe,  aux  travaux  incessants  que  lui 
imposait  sa  charge  et  les  soins  que  demandait  l'éducation  de 
ses  enfants.  Dans  l'intervalle  il  trouvait  le  moyen  de  s'occuper 
des  bonnes  œuvres,  si  nombreuses  à  Constantinople.  Membre  actif 
des  conférences  de  Paint  Vincent  de  Paul,  il  faisait  souvent,  à 
la  fm  del'année,  des  rapports  très  remarqués  sur  les  travaux  de 
cette  institution.  Mais  son  œuvre  de  prédilection  fut  à  propre- 
ment parler  la  fondation,  l'organisation,  le  développement  et 
l'entretien  du  cimetière  catholique  de  Féri-Keuï.  Délégué  par 


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—  7  — 

l'ambassade  de  France  pour  s'occuper  de  la  création  de  ce  cime- 
Uère  en  1S59,  il  fut,  en  1862,  nommé  secrétaire  de  la  commission 
qui  l'administre  et  c'esten  cette  qualité  qu'il  a  fait  chaque  année 
an  rapport,  non  seulement  intéressant  au  point  de  vue  des  faits, 
mais  encore  tout  rempli  d'érudition  et  de  science  et  écrit  avec 
cette  pureté  de  style,  cette  élégance  sobre  et  cette  concision  an- 
tique gui  le  caractérisaient.  Il  ne  cessa  ses  fonctions  laborienses 
qu'en  1875,  sa  santé  ne  lui  permettant  plus  de  les  remplir. 

Il  semble  qu'avec  toutes  ces  occupations  il  devait  lui  rester 
peu  de  temps  pour  les  travaux  littéraires,  et  cependant,  quand 
nous  parcourons  la  liste  de  toutes  ses  publications,  nous  en  trou- 
vons un  si  grand  nombre  qu'elles  pourraient  remplir  la  vie  la 
mieux  occupée  et  la  plus  longue.  Presque  toutes  sont  relatives 
aux  questions  orientales.  Nous  n'en  citerons  qu'un  petit  nombre; 
beaucoup  ont  paru  dans  le  Journal  asiatique  :  Notice  sur  tes 
Chrestoinathtes  orientales,  1843.  —  Fétoua  relatif  à  la 
condition  des  Zimmis  Zêumuts,  1852.  —  Ce  travail  fait  très 
bien  connaître  la  situation  civile  et  politique  des  sujets  non  mu- 
sulmans de  la  Porte.  —  Mémoire  sur  l'usage  et  la  constitu- 
tion fies  biens  de  ^nain-morte,  en  pays  mtisulman,  1853.  — 
Lettre  sur  un  document  relatif  à  Mahomet;  dans  ce  travail 
M.  Belin  établit  l'authenticité  d'une  lettre  adressée  par  Mahomet 
à  Marauc»s  vice-roi  d'Egypte  pour  l'empereur  Héraclius.  Cette 
publication  produisit  une  profonde  impression  dans  tous  les 
pays  musulmans.  —  Ètiides  sur  la  propriété  foncière  en  pays 
mustilman  et  spécialement  en  Turquie,  1862  (248  pages).  — 
Essai  sur  l'histoire  économique  de  la  Turquie,  1865.  —  Du 
régime  des  fiefs  militaires  dans  l'Islamisme  et  principale- 
ment en  Turquie,  1870.  —  Des  capitulations  et  des  traités 
de  la  France,  en  Orient,  1869,  indispensable  à  tous  ceux  qui 
veulent  connaître  l'histoire  des  rapports  extérieurs  de  la  Turquie. 
—  Et  enfin  le  travail  dont  nous  donnons  au  public  la  9^  édition  : 
Histoire  de  l'Église  latine  de  Constantinople,  etc.,  etc. 

Tous  ces  travaux  avaient  attiré  sur  M.  Belin  l'attention  du 
public  lettré  et  lui  avaient  obtenu  de  flatteuses  et  innombrables 
distinctions.  —  Officier  de  la  Légion  d'honneur,  décoré  d'un 


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grand  nombre  d'Ordres  étrangers,  meml^e  de  beaucoup  de 
Sociétés  savantes,  il  était  consulté  avec  £ruit  par  tous  ceux 
qui  s'occnpent  des  questions  orientales  et  leur  donnait  un  con- 
cours que  son  incontestable  compétence  rendait  infiniment 
précieux. 

Il  avait,  avons-nous  dit,  publié  son  Histoire  de  l'Église 
Latine  en  1873  ;  mais  il  ne  s'était  pas  pour  cela  désintéressé 
deson  travail  :  il  lui  avait  même  conservé  one  affection  spéciale. 
Il  ne  se  diasiihulait  pas  qu'il  s'y  trouvait  de  nombreuses  et  im-  - 
portantes  lacunes,  n  continua  donc  de  fouiller  les  archives, 
d'écrire  à  tous  ceux  qui  s'occupent  de  l'histoire  du  Levant, 
réunit  tous  les  livres  qui  paraissaient  sur  ces  sujets  ;  il  amassa 
ainsi  une  quantité  considérable  de  documents  et  s'en  servit 
pour  préparer  une  douxiëme  édition  beaucoup  plus  considé- 
rable et  iplus  complète  que  la  première.  Lorsqu'il  mourut,  le 
IBavril  1877,  dans  la  soixantième  année  de  son  âge  seulement, 
son  œuvre  était  presque  achevée,  et  n'eût  été  le  désir  de  la 
perfectionner  encore,  il  l'eût  imprimée  depuis  longtemps. 

Sa  veuve  et  ses  enfants  conservèrent,  avec  un  soin  religieux, 
non  seulement  sa  mémoire  et  l'bonorabilité  de  son  nom,  mais 
encore  ses  manuscrits  et  ses  notes  etspécialement  cette  Histoire 
da  la  Latinité  de  Constantioople.  Pourquoi  ne  fut-elle  pas  pu- 
bliée plus  tât  ?  C'est  que  la  manière  de  travailler  de  M.  Belin 
réclamaitde  l'éditeur  de  son  œuvre  un  travail  assez  considérable. 
Respectueux  de  l'exactitude  jusqu'au  scrupule,  ami  des  plus 
petits  détails,  avide  des  indications  les  plus  diverses,  il  réunissait 
quantité  de  citations,  en  surchargeait  ses  pages,  de  telle  sorte 
qu'il  était  difficile  da  s'y  reconnaître  sans  une  étude  assidue.De 
plus  les  trois  chapitres  entre  lesquels  il  avait  partagé  son  travail 
primitif  et  qui  convenaient  à  peine  à  une  brochure  de  1 50  pages, 
ne  pouvaient  suffire  à  encadrer  la  masse  des  documents  qu'il 
avait  réunis  ;  enfin  embarrassé  pour  ranger  certaines  parties  de 
son  histoire,  il  avait  classé  les  églises  simplement  selon  l'ordre 
alphabétique,  sans  aucun  égard  à  leur  antiquité  ni  à  leur  im- 
portance. Il  follait  donc  de  ce  chef  un  grand  travail  pour  mettre 
dans  cette  histoire  un  ordre  capable  de  satisfaire  le  lecteur. 


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En  outre  la  Latinité  de  Constantinople  a  été  mieux  coDiiiie 
depuis  20  ans  et  les  progrès  qu'elle  a  faits  depuis  cette  époque 
ont  été  considérables  :  il  fallait  donc  compléter  certains  chapitres 
et  continuer  cette  histoire  jusqu'à  nos  jours.  C'a  été  le  travail  de 
réditeur. 

Il  avait  connu  M.  Belin  en  1876  et  avait  conservé  de  lui  un 
excellent  souvenir  :  il  avait  apprécié  le  travail  publié  en  1873  et 
regrettait  vivement  que  la  seconde  édition  qu'on  lui  avait  an- 
noncée ne  fut  pas  publiée.  Aussi  quand  la  pensée  de  se  charger 
de  préparer  et  de  mener  à  bien  ce  travail  lui  fut  suggérée,  il  y 
consentit  volontiers.  Ce  n'était  pas  du  reste  pour  lui  une  chose 
nouvelle  et  inconnue,  car  il  était  familiarisé  avec  l'histoire  ecclé- 
siastique de  la  Constantinople  moderne  et  ses  recherches  dans 
les  archives  des  couveilts  de  l'Orient  l'y  avaient  préparé,  II  se  mit 
donc  résolument  à  l'œuvre  et  c'est  le  fruit  de  son  labeur  qu'il 
ofTre  aujourd'hui  au  public. 

Son  œuvre  consiste  d'abord  en  une  révision  complète  du  texte 
et  des  notes  qu'il  fallait  mettre  en  ordre,  une  division  ratîo- 
nelle  du  livre  en  parties  et  de  chaque  partie  en  chapitres  homo- 
gènes et  bien  ordonnés.  Chemin  faisant  il  s'est  permis  d'ajouter 
au  texte  de  M.  Belin  certaines  pages  qui  lui  ont  paru  nécessaires 
pour  le  compléter  :  ainsi  la  liste  des  empereurs  et  des  patriarches 
latins,  ainsi  le  récit  des  efforts  tentés  à  diverses  reprises  pour 
amener  l'union  entre  les  deux  Églises  etc. 

Dans  la  deuxième  partie  les  changements  paraissent  plus  nom- 
iH'eux  et  plus  importants,  cependant,  c'est  toujours  l'œuvre  de 
M.  Belin  qui  reste.  Le  premier  chapitre  lui  appartient  tout  en- 
tier, le  3*  a  été  complété  et  on  y  a  ajouté  la  liste  des  ambassa- 
deurs de  France  à  Constantinople  ;  ils  ont  eu  trop  d'influence 
sur  l'histoire  de  la  Latinité  pour  qu'on  puisse  les  négliger.  Il 
eût  été  même  utile  d'ajouter  quelques  détails  sur  le  rôle  qu'ils 
ont  joué,  mais  cela  nous  eût  entraîné  trop  loin.  Les  chapitres  qui 
concernent  les  Églises  et  les  Ordres  religieux  à  Constantinople 
sont  aussi  de  M.  Belin,  seulement  l'éditeur  les  a  rangés  suivant 
leur  ordre  historique  et  les  a  complétés  par  les  documents  trouvés 
dans  les  archives  qae  les  chefe  des  diverses  Communautés  ont 


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—  10  — 

graciensement  mises  à  sa  disposition.  Mais  il  a  fallu  ajouter 
encore  davantage  au  chapitre  qui  contient  la  série  des  chefs  de 
la  hiérarchie  latine  et  essayer  de  faire  connaître  le  rôle  très 
effacé  qu'ils  ont  rempli. 

Dans  la  troisième  partie  l'éditeur  a  nne  plus  grande  part 
il  a  complété  et  continué  l'œuvre  de  M.  Belin  et  l'a  menée  jus- 
qu'au commencement  de  1893.  Il  a  donné  un  soin  tout  spécial  à 
la  statistique  des  œuvres  catholiques  et  du  clergé  latin.  Enfin 
dans  un  chapitre  linal  il  a  essayé  de  résumer  toute  cette  histoire 
et  de  faire  connaître  l'état  actuel  de  la  Latinité  Constantinopo- 
litaine. 

Nous  nous  sommes  demandé  s'il  fallait  marquer  par  une 
dictinctioQ  typographique,  ou  par  d'antres  indications,  ce  qui 
appartenait  à  l'auteur  et  la  part  modeste  de  l'éditeur;  mais  nous 
nous  sommes  déterminé  à  ne  faire  qu'un  seul  texte.  L'auteur  et 
l'éditeur  n'ont  eu  qu'un  seul  but,  faire  connaître  la  vérité  et  ap- 
porter leur  part  à  ce  grand  travail  historique  duquel  doit  sortir 
une  plus  grande  gloire  de  Dieu  et  une  connaissance  plus  appro- 
fondie de  l'Église  catholique  et  de  son  influence  bienfaisante 
dans  le  Levant.  Ce  sera  en  même  temps  une  contribution  à 
l'histoire  de  la  France,  dont  le  rôle  a  été  si  important  dans 
ces  contrées. 

Comme  il  était  juste  l'éditeur  a  soumis  son  travail  à  ses  su- 
périeurs :  c'est  avec  leur  bénOdiction  et  leur  approbation  qu'il 
le  fait  paraître, 

Constantinople  le  15  janvier  1893. 


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AVERTISSEMENT  DE   L'AUTEUR 

AVANT  LA  PREMIÈRE  ÉDITION 


L'étude  que  nous  publions  aujourd'hui  a  été  entreprise  sur  les 
conseils  de  Mgr  Brunoni,  alors  vicaire  apostolique  de  Constan- 
tinople,  présentement  patriarche  latin  d'Antioche.Sans  d'aussi 
vénérables  encouragements,  nous  n'aurions  pu  consentir,  nous 
l'avouons,  à  nous  charger  d'une  tâche  que,  malgré  nos  efforts, 
nous  savions  d'avance  ne  pouvoir  remplir  à  notre  complète 
satisfaction.  Aussi,  n'avons-nous  pas  la  prétention  d'écrire  une 
histoire  proprement  dite  de  l'Égliae  latine  de  Constantinople  ; 
nous  nous  sommes  borné  au  simple  classement  des  matériaux 
qu'il  nous  a  été  donné  de  recueillir,  durant  de  longue  années, 
sur  un  sujet  d'autant  plus  intéressant  pour  nous  qu'il  se  rat- 
tache, dans  plus  d'une  occasion,  à  l'histoire  même  de  la  France. 
D'après  le  plan  que  nous  avons  adopté,  cette  étude  offrira, 
nous  l'espérons,  une  monographie  présentant  l'ensemble  des 
trois  principales  phases  de  l'Église  latine  de  Gonstintinople, 
savoir  ;  à  Byzance,  sous  les  empereurs  grecs,  avant  comme  après 
l'empire  franc,  et  sous  les  sultans  ;  —  à  Galata,  depuis  la  res- 
tauration byzantine  et  sous  la  domination  ottomane  ;  —  enfin  à 
Péra,  depuis  que,  les  relations  avec  l'Europe  étant  devenues  plus 
nombreuses  et  plus  fréquentes,  les  colonies  européennes,  trop 
resserrées  dans  Galata,  ont  ét^  contraintes  d'émigrer  sur  les  hau- 
teurs du  Péra  actuel. 

Ne  nous  dissimulant  point  les  imperfections  de  notre  œuvre,, 
nous  sollicitons  en  sa  faveur  l'indulgence  du  lecteur;  mais  si  les 
défauts  nous  appartiennent,  nous  nous  faisons  un  devoir  de  prier 
toutes  les  personnes  qui  ont  bien  voulu  nous  assister  de  leurs 


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—  12  — 

lumières  ou  de  la  communication  de  documents  eu  leur  posses- 
sion, d'agréer  ici  le  tribut  de  notre  profonde  gratitude.  Dans 
une  cité  comme  celle-ci,  si  fréquemment  ravagée  par  le  feu,  ce 
destructeur  impitoyable  de  tout,  le  concours  qu'on  nous  a  prêté 
avec  tant  d'obligeance  a  été  pour  nous  d'une  valeur  inappré- 
ciable :  grâce  à  lui,  nous  avons  pu  tracer  une  ébauche  de  l'his- 
toire de  l'Église  latine  de  Constantinople  ;  et,  qu'il  nous  soit 
permis  de  le  dire,  ajouter,  sous  certains  rapports,  une  nouvelle 
page  à  l'histoire  même  de  notre  propre  pays,  cette  patrie  tradi- 
tionnelle du  soldat  de  Dieu  ;  Oesia  Det  per  Francos  '  / 

Aussi,  malgré  les  cruelles  épreuves  qui  viennent  de  la  frapper 
si  douloureusement,  la  France,  sous  cette  noble  devise  :  t  Dieu 
et  patrie,  >  se  montrera,  n'en  doutons  pas,  aussi  grande  dans  le 
malheur  qu'elle  fut  glorieuse  dans  la  prospérité;  et  elle  saura 
puiser  dans  sa  foi,  comme  dans  les  enseignements  du  passé,  une 
courageuse  fermeté  pour  supporter  le  présent,  en  même  temps 
qu'une  confiance  énergique  pour  affronter  l'avenir  ! 

In  te.  Domine!  speravi;  non  confundar  in  CBtemum! 

Cette  étude,  nous  l'avons  dit,  sera  partagée  en  trois  parties, 
subdivisées  elle-mêmes  en  chapitres  suivant  l'ordre  chronolo- 
gique. 

Partie  I«  —  La  Latinité  à  Constantinople  (Stamboul.) 
Partie  II'  —  La  Latinité  de  Galata-Péra  (État  ancien.) 
Partie  III*  —  La  Latinité  de  Péra-Galata  (État  actuel.) 

>  «  Tourne-toi  (6  France'}  vers  Je  Christ,  trop  oublié  naguère; 

H  Ce  Dieu  des  cbevatiera 

■c  Qui  t'employa  mille  ans  à  ses  Gestei  de  guerre... 
(Ode  à  la  France.  parM.de  Laprade,  de  l'Académie  françaiie  ;  laFranee, 
du  10  janvier  1871). 


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HISTOIRE 

DE    LA    LATINITÉ 

DE 

CONSTANTINOPLE 


PREMIERE  PARTIE 


LA  LATINITÉ  DB  CONSTANTINOPLE,  DANS  LA  VILLE  PROPREMENT 
DITE,  JDSQUE  ET  APRÈS  LA  CONQUÊTE  OTTOMANE. 


La  ville  de  Constantlnople  comprend,  sur  la  rive  eoropéenae, 
denx  parties  bien  distinctes.  Sur  la  rive  droite  de  la  Corne 
d'Or,  dans  l'enceinte  des  vieilles  murailles  byzantines,  se  presse 
la  ville  ancienne,  habitée  surtout  par  les  musulmans  et  les 
raïas,  grecs  et  arméniens  :  sur  la  rive  gauche,  des  rivages  de 
Galata,  jusqu'aux  hauteurs  de  Péra,  s'étage  la  ville  européenne, 
où  résident  les  représentants  des  Puissances  étrangères,  autour 
desquels  se  groupent  leurs  nationaux  et  les  antres  chrétiens. 
Le  catholicisme  latin  a  commencé  sur  la  rive  droite,  surtout 
autour  des  murailles  de  la  ville,  et  dans  les  environs  du  port. 
C'est  là  que  nous  le  verrons  d'abord,  pendant  la  durée  du 
Bas-Emph-e  et  jusqu'à  la  conquête  ottomane.  Nous  y  dis- 
tinguerons quatre  périodes,  qui  seront  traitées  dans  autant  de 
chapitres. 


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CHAPITRE  PREMIER. 


lATINITÉ  DE  GONSTANTINOPLE  FS>n>ANT  LE  BAS-EHPIRE. 


L'histoire  de  l'Église  latine  de  Constantinople  est,  à  propre- 
ment parler,  celle  de  la  Latinité  elle-même,  dans  cette  partie  du 
monde  ;  elle  a  suivi  les  phases  diverses  de  l'importance,  de  la 
restriction  oa  du  développemeut  des  colonies  latines  dans  cette 
capitale  de  l'Orient.  Déjà,  dès  le  jx'  siècle,  on  relève  de  k 
lettre  251  écrite  par  le  pape  Jean  VIII  (intronisé  le  14  dé- 
cembre 873,  mort  le  11  décembre  883)  k  Basile  le  Macédonien, 
qui  Téga»  de  867  k  886,  l'existence  à  Constantinople,  enti'e  867 
et  88S,  d'une  église  latine  sous  le  vocable  de  S.  Sergius,  con- 
temporainement  au  patriarcat  de  Photius.  Banduri  <  reproduit, 
comme  suit,  les  termes  de  la  lettre  pontificale  :  <  Immensas 
post  Deum  Serenitati  vestrae  grattas  agimus,  primo...  secundo 
autem  quod  monasterium  S.  Sergii"  intra  vestram  rcgïam  ur- 
bem  constitutum,  quod  sancta  Romana  Ecclesia  jure  proprio 


.  '  Imperium  orientale,  Venisa,  1729,  p.  503. 

■  L'église  des  SS-  Sergiu«,  et  Bacchus  bâtie  par  Justinien,  convertie  en 
mosquée  aoua  le  nom  actuel  de  Kutrkuk  ala  Sofia,  et  dite,  jadis,  courent 
d'OrmUtloa,  sise  non  loin  de  l'hippodrcme,  prâa  la  porte  Tchatladi-capou 
n'aurait  pas  été,  selon  M.  le  docteur  Paapati,  donnée  entièrement  aux 
Latins  ;  ceux-ci  auraient  eu,  seulement,  la  faculté  d'y  célébrer  leur  culte, 
en  venant  6.  Constantinople.  Malgré  ce  dire,  on  ne  peut  s'empêcher  de 
constater  que  les  ternfies  de^a  bulle  pontiBcale  sont  formels.  Cette  église 
était  située  du  côté  de  Ih  Propontide,  et  plus  à  l'est  que  Vlanga  et  Coum- 


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—  16  — 

guondam  retiouit,  divina  inspiratione  repleti  pro  honore  Prin- 
cipis  apostolorum,  nostro  prsesulati  reddidtstis.  > 

Dès  991,  ieè  empereurs  Basile  et  Constantin  accordèrent, 
par  chrysobulle,  des  franchises  commerciales,  dans  la  capitale, 
aux  Vénitiens,  tout  en  leur  interdisant  d'enlever  le  commerce 
aux  ÀmalQtains,  Juifs,  Lombards  et  autres,  qui  s'y  livraient 
déjà  •. 

En  994,  les  Vénitiens  établis  à  Constantinople  y  formaient 
une  commune.  Depping  ',  auquel  cette  citation  est  empruntée, 
ne  parle  pas  de  leurs  établissements  religieux;  mais  il  est  pro- 
bable, en  s'appuyant,  par  analogie,  sur  ce  qui  s'est  passé  depuis, 
que  les  intérêts  religieux  ont  dû  être  sauvegardés,  aussi  bien 
que  ceux  de  la  politique  et  du  commerce.  En  effet,  on  a  vu  plus 
tard  que  chaque  nationalité,  en  obtenant  des  empereurs  des 
localités  distinctes  pour  leurs  intérêts  temporels,  acquirent  en 
même  temps  la  faculté  d'avoir  des  églises  ou  mieux  des  cha- 
pelles, ainsi  que  des  lieux  de  sépulture  et  autres,  pour  le  culte 
ou  l'exercice  de  la  charité.  Malheureusement,  les  passions  poli- 
tiques ou  religieuses,  le  feu,  et,  surtout,  cette  indifférence 
affectée  de  part  et  d'autre  pour  les  dissidents  et  leurs  établisse- 
ments religieux,  n'ont  laissé  que  peu  ou  point  de  traces  sur 
les  localités  occupées  par  les  Latins  dans  la  ville  de  Constan- 
tinople, et  rendent  ainsi  plus  que  difficile  toute  recherche  ten- 
dant à  en  déterminer  l'emplacement.  Toutefois,  grâce  au  sa- 
voir et  à  l'amitié  éclairée  de  M.  le  Docteur  Paspati  ^,  il  nous 
sera  permis  de  reconstituer  à  peu  près  et  avec  une  certaine 
exactitude,  le  tracé  des  anciens  emplacements  occupés  par  les 
colonies  Latines,  dans  Mégalopolis,  (la  Grande  Ville,  Constan- 
tinople). 

(  L'ancienne  muraille  de  Constantinople,  du  côté  du  port, 
dit  M.  Paspati,  partait,  à  l'extrémité  E.  du  port,  de  la  pointe  la 
plus  orientale  de  la  Corne  d'or,  on  du  Séraï,  pour  s'élever,  en- 
suite, vers  Saintfr^ophie,  en  passant  entre  cette  église  et 
Sainte-Irène,  qu'elle  laissait  en  dehors  ;  dans  son  parcours,  de 

>  Fonleê  rerum  wutriaearam...  diptomata  et  acta,  douzième  volume  de  le 
collection,  pramler  des  dacumeoU  de  la  république  de  Veniae,  par  lea  doo- 
tears  Tafal  et  Tboma».  Vienne,  1856,  I,  38. 

■  Hltt.  da  eommtroe  entre  le  Leixint  et  l'Europe. 

*  Cf.  Aeta  du  Syllogoi  littéraire  de  Tbnce. 


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—  17  — 

l'est  à  l'ouest,  le  long  du  port,  on  trouvait,  successivement, 
trois  porles  principales  : 

1'  Celle  dite  Néorion,  Orea,  et  par  les  Turcs,  Bâghtché- 
Capou,  t  porte  des  jardins  du  Séraï  ;  » 

2°  Celle  dite  porta  Peramatls  t  porte  du  passage  »  (de 
G-alala  à  Bj-zance),  nommée  plus  tard  Bûtyq-Bâzar  «  du 
marché  au  poisson,  de  la  poissonnerie  »  de  la  juiverie,  sise  à 
l'ouest  du  pont  actuel  de  Carakeuï,  conduisant  de  Galata  à 
-Constantinople,  en  face  de  la  mosquée  leni-Djâmi.  Cette  porte 
faisait  face  au  Mycyr-Tchârchy  t  le  marché  des  épices  ;  •> 

3°  Enfin,  la  porte  dite  Droungarion,  ensuite  porta  Ca- 
raviôn  *  des  navires,  *  et  Zindân  capou,  «  la  porte  de  la 
prison;  t  dénomination  prise  de  la  tour  voisine,  servant  de  prison 
pour  dettes.  Cette  porte  conduisait  à  lemich-iskclê,  t  l'échelle 
.des  fruits,  n 

t  Chacune  des  colonies  franques,  qui  en  avait  obtenu  la 
concession  des  empereurs,  posséda  sur  le  parcoui's  compris 
entre  ces  trois  portes,  un  établissement  central  '  sis  dans  l'en- 
ceinte de  la  ville,  intra  muros,  avec  une  échelle  on  débarca- 
dère, placée  plus  ou  moins  en  prolongation  de  ces  établisse- 
ments, sur  le  rivage,  pour  les  opérations  commerciales. 

«  A  gauche  de  la  porta  Peramatis,  du  côté  de  l'est,  se 
trouvait  un  emplacement  occupé  par  les  Juifs  curaïtes,  et  en- 
globé, depuis,  dans  l'enclos  de  la  mosquée  leni-djâmt'.  Les 
Canutes  possédaient,  dans  cet  endroit,  des  maisons  et  une 
synagogue  ;  il  résulterait,  d'autres  recherches  récentes,  que  ces 
maisons  auraient  été  prises  des  juifs,  par  les  Turcs,  qui  leur 
auraient  donné,  en  échange,  d'autres  habitations  à  Ehâs  Keuï, 
et  leur  auraient  accordé,  en  outre,  l'exemption  du  kharâdj 
pour  quarante  individus  de  leur  eommunanté  ;  quant  à  la  syna- 

'  Emporioa,  cmporium,  embolum,  embalo,(ii(auasi  Funda,  fondicus,  fonti- 
C118,  fundacus;  en  vieux  fraoçais  Fonde,  fundique,  fontigué;  en  Italien  Fon- 
daco,  fonduco,  fontEco;  en  Espagnol  Alfondega,  aifontïga  ;  en  Arabe  Fon- 
doaq  :  Marché,  foire  publique,  lien  où  te  tient  le  marché,  halle,  galerie 
coUTSrte  arec  des  arcades  latérales  pour  les  boutiques,  bazar,  khan,  etc. 

'  Cette  mosquée  fut  construite,  pour  la  première  fois,  en  993=1585,  par 
l'ex-grand  vizir  Ouzdemir-Osman  Pacha,  qui  se  prétendait  descendre  de» 
khalifes  abbassidei.  Elle  fut  ensuite  réédîflée,  pour  ainsi  dire  complètement, 
en  1050=1640,  par  Keucem  Mâh-Pelker  Soultan,  môre  de  Mourad  IV  et  d'I- 
brahim, et  femme  de  Sultan  Ahmed  !•■  (Cf.  Hadiqat  uldjeeùmi,  l,  StS). 


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—  18  — 

gogue,  comme  elle  ne  pouvait  être  aliénée,  on  aurait  accordé 
aus  Caraïtes,  à  titre  de  location  du  terrain,  une  redevance  an- 
nuelle qui  leur  serait  payée  encore  actuellement  (1873),  par 
l'administration  de  la  mosquée'. 

«  A  la  pai'tie  contiguë  au  terrain  caraïte,  du  côté  de  l'est,  se 
trouvait  le  monastère  grec  de  Saint- Antoine,  ayant  une 
échelle  ou  débarcadère  en  dépendant,  sur  le  rivage,  » 

Selon  Ducange-,  les  Amalâtains^,  qui  furent  l'une  des  pre- 
mières colonies  latines  établies  dans  le  Levant,  possédaient  à 
Constant  inople  une  église  dite  «  Deiparse  seuMarife  Àmalphîta- 
rum,  de  Latina'.  > 

'  Cette  information  ne  concorJe  pas  avec  le  témoignage  de  Benjamin  de 
Tudéle,  qui  s'exprime  ainsi  dans  la  relation  <lc  son  vo,vage(II59-ll~3)  ■.«  Il 
n'y  a  point  do  luit»  dans  la  Ville  ;  on  lea  a  transportés  au  delà,  d'un  bras  de 
mer....  Un  compte  à  CP.  2,000  juifs  Rabbinistes,  et  outre  cela,  îOO  Caraïtes, 

de  l'autre  cuti Il  n'est  permis  à  aucun  juif  de  montera  cheval.(ConsuItei 

notre  Fetoua  sur  la  rttmlUioii  r/es  Zimmig.  )  Les  grecs  haïssent  tous  les  juifs 
sans  distinction  des  bons  et  des  méchants...  quand  ils  lea  rencontrent  dans 
les  rues  ils  les  battent,  les  traitent  cruellement,  et  les  tiennent  dans  une  dure 
servitude;  ie  lieu  où  ils  habitent  s'appelle  Pèra.  »  (Voj/n^nrjt  i/u  Moyen 
A'je.  Ed.  Charton,  p.  171.) 

ï  Constantiniipol'i  Christiaiia,  lîb.  II,  I, 

>  A  la  partie  N-E  du  Mont  Athos  sur  une  colline  sise  près  de  la  mer,  et 
appelle  de  nos  jours,"  Morfonouu  (altération  du  terme  A  mal  fi  tain  s),  on  voit 
les  ruines  d'un  ancien  couvent  des  Amalfitains  :  c'est  la  plus  belle  situation 
de  toute  la  Montagne.  I.e  Pérc  Athanasc  de  Trébisonde,  sous  l'Empereur 
Zimmiscâs,(OTCI)  aurait  bâti  ce  couvent,  et  constitué  sa  Régie,  La  renommée 
de  ce  religieux  s'étant  répandue  en  Italie,  quelques  personnes  pieuses  d'A- 
mnlfi  seraient  venues  se  placer  sous  la  direction  du  l'ère,  qui  les  admit 
dans  son  couvent  qui,  de  ses  nouveaux  habitants,  fut  dit  a  Monastère  des 
Amaifltains.  »  La  tangue  latine  était  usitée  dans  ce  couvent,  et,  dans  la 
rédaction  des.Xclesy  relatifs,  on  y  trouTe  encore  deux  copies  des  Chrisobulea 
délivrés  «  au  Monastère  des  Amalfitains  «  par  Alexis  Comnéne  et  par  son 
fils.  Ces  Chrysobules  mentionnent  quelques  villages  et  localités  de  la  plaine 
de  Serrés,  sur  lesquels  ce  irtonastère  exerçait  un  droit  souverain.  II  paraî- 
trait aussi  que  le  couvent  .AmalBtain.  de  CP  était  une  propriâté  dépendant 
de  celui  de  l'Athos.  (Renseignements  dus  à  l'obligeance  de  M.  Aristoclidis, 
«nvoyè  en  mission  au  Mont  Athos,  par  le  Patriarcat  Œcuménique  1874.) 

'  Le  P.  Hélyot,  dans  son  Dictionnaire  dcx  ordre»  i-eligieax,  II,  821 ,  rap- 
porte 1  qu'environ  vers  l'an  10J8,  des  marchands  d'Amalfl,  trafiquant  &  Jé- 
rusalem, obtinrent  du  prince  musulman  qui  y  régnait  alors,  une  église  oïl 
l'on  put  célébrer  l'ofBce  divin  selon  le  rit  de  l'ï^iae  romaine;  cette  église 
était  située  au  quartier  des  chrétiens,  devant  le  temple  de  la  Résurrection... 
elle  fut  appelée  Sainte-Marie  de  la  Latine,  pour  la  distinguer  des  autres 
églises  où  l'on  ne  suivait  pas  le  rit  latin.  ■  Voy.  aussi  p.  740,  741  :  elle  dé- 
pendait des  Bénédictins  du  Mont  Cassin. 


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—  19  — 

D'après  les  privilèges  rapportas  par  Miklotich  et  Muller  '  ils 
habitaient  la  rue  dite  Néro-dromal. 

A  gauche  de  l'échelle  du  monastère  de  Saint-Antoine,  tou- 
jours du  côté  de  l'est,  se  trouvait  l'échelle  des  <  AmalStains,  » 
les  plus  anciens  colons  francs  de  Constantinople. 

Mais  l'autonoraie  de  cette  colonie  disparut  bientôt,  par  les 
dispositions  inscrites  dans  le  privilège  accordé  aux  Vénitiens. 
Sous  Basile  et  son  frère  les  services  rendus  par  la  marine  de 
la  république  à  l'empereur,  contre  les  Normands  de  Robert  * 
Guiscard,  obtim-entà  la  première  (1081-90),  d'après  AnneCom- 
nène,  lienouvelîes  faveurs  :  le  doge  reçut  d'Alexis  l"le  titre  de 
protosecnstos,  et  le  patriarche  vénitien  celui  A'hipertimon; 
l'empereur  attribua  à  ce  dernier  des  honoraires,  aux  églises  de 
Venise  des  subventions  considérables  annuelles",  rendit  les 
Amalfitains  de  Constantinople  tributaires  dans  l'avenir  de 
l'église  bûtie,  îï  Venise,  en  l'honneur  de  l'apôtre-èvangéliste 
Saint  Marc,  donna  aux  Vénitiens  toutes  les  boutiques  {o/Ticinas) 
etles  échelles,  au  nombre  de  trois,  comprises  dans  l'espace  s'é- 
tendant  entre  la  vieille  échelle  juive  et  Bigla^;  l'une  de  ces 
échelles  était  dite  schala  major''.  L'empereur  donna  aussi  à 


"  L'abbaye  de  la  I^atine,  déiliée  à  N.  I).,  en  la  ViQe  de  Hiérusalem.  prés 
de  l'église  du  Saint  Séjjulcre,  de  religieux  de  l'Urdre  de  saint  Henoii,  clO- 
pendait  immédiatement  du  Pntriarclic  de  Hiérusalem.  L'abbi-  ]HDnait  mitre, 
croce  et  anneau,  et  devait  de  service  de  guerre  50  seigeanls.  Ce  monastère 
fut  b.'iti  par  ceux  de  Melft,  en  Italie,  et  l'ut  ainsi  nommé,  à  cause  qu'il  fut 
donné  à  des  moines  Latins...  l-'abbaye  fut  transférée  à  Acre,  après  la  prise 
de  Hiérusalem  par  Saladin.  "  (l-'nmillp^  •l'Otiiri''Mfi;  par  Ducange,  publiées 
par  Guillaume  Rey.  Paris  ISUÎI.  p.  >iîi.)  Cet  ancien  monastère  a  été  con- 
cédé à  la  Prusse  en  1869;  c'est  <!ans  une  de  ses  salles  que  le  ministre 
prussien  fait  le  service  religieu.t.  (Missions  Catholiques  du  30  Janvier  1874.) 
(Il  faut  noter  cependant  que  selon  le  Prof.  Heyd  :  les  couvents  de  !jt- 
SauTeur  et  de  Sainte  Marie  de  infi'ci  auraient  appartenu  aux  Pieans.  Le 
eolonie  rommetriali  ilegii  Italinni  l'n  orir/ile  itct  mclio  Eco.  Venezia  e 
Torino  1866,  !.  7.) 

'  Acta  et  illplomata  grteca,  médii  ter^i  sacra  et  profana...  Vin'loboiue  1865. 
t.  III,  p.  7,  18-20  et  22. 

>  Ces  présantsannuels  furent  stipulés  nécessairement  en  faveur  dft  chacune 
des  nations  qui  obtinrent  des  privilèges  impériaux,  et,  par  le  fait,  constituè- 
rent une  sorte  d'hommage-tige  ou  de  vasselage. 

*  Dita  ailleurs,  p.  48.  97,  Vigla  et  Uigla. 

*  V,  aussi  II.  43  Et  mariiimat  III  Schala»,  gtue  in  prrsdicto  tpatîo  lermi- 
ntmtur.  {Forttet,  p.  5t.) 


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—  20  — 

l'église  Saint-Aktnain  '  le  moulin  voisin  de  cette  église'.  Sainte 
Marie  des  Amalfîtains,  suivit,  sans  doute,  le  sort  de  la  Co- 
lonie, et  passa  aux  mains  des  Vénitiens. 

Lors  de  la  séparation  de  l'Église  ori«itale,  cousoiniaée  en 
1064,  les  lettres  d'excommunication  du  pape  Léon  IX  au  pa- 
triarche grec  Michel  Gérulaire,  déposées  par  les  légats  ponti- 
ficaux sur  l'autel  de  Ste-Sophie,  en  présence  du  patriarche 
et  du  peuple  assemblé,  font  mention  des  c  églises  latines  de 
Gonstantinople  ^.  » 

Quelques  années  plus  tard,  et  après  la  célèbre  bataille  de 
Hastings  (14  octobre  1066),  qui  donna  la  couronne  d'Angleterre 
à  Guillaume  le  Bâtard,  un  noble  anglais,  s'exilant  de  son  pays, 
vint  se  retirer  à  Constantinople  et  y  bâtit  une  église  sous  le 
vocable  de  Saint  Nicolas  et  Saint  Augustin  de  Cantorbêry''; 
mais  cette  seconde  dénomination,  rappelant,  d'ailleurs,  un  sou- 
venir tout  national,  a  fini  par  disparaître  complètement,  et 
l'église  ce  fut  plus  connue  que  sous  le  nom  de  St-Nicolas, 
conservé  jusqu'au  moment  où  elle  fut  enlevée  à  la  latinité. 

Sur  une  tour  des  murailles  de  Constantinople,  sise  entre  la 
porte  d'Andrinople  et  celle  de  Topcapou,  M.  le  docteur  Paspati, 
a  relevé,  il  y  a  quelques  années,  des  inscriptions  funéraires  de 
Fœderati  «  gardes-du- corps  des  empereurs  »;  ces  Varanges  se 
seraient-ils  groupés  autour  de  cette  église  qu'ils  auraient  con- 
sidérée comme  leur  église  nationale  ^  ?  M.  le  docteur  Dethier  a 
envoyé,  de  son. côté,  au  musée  de  Stuttgard,  il  y  a  une  dou- 
zaine d'années,  une  pierre  tombale  de  Varanpe,  trouvée  par 
lui  dans  le  même  endroit. 

'  V.  cî-aprés. 

3  Ne  aerait-ca  pas  là  l'origine  des  fours.  coDcédéB'à  chaque  colonie  ^nque 
ea  Turquie,  jusqu'à  ces  derniers  temps  I 

"  Baronii  critica,  IV,  195;  cf.  aussi /mperinm  orientale  1711,  11,676. 

*  CPlig  ehrhtiana,  W,  90  ;  II.  53.  St.  Augustin  fut  l'apûtre  du  roj-aume 
anglo-saxon  et  le  premier  archevêque  de  Caotorbén*.  (Cf.  Montakmbert,  fe* 
Moine»  d'Occident.  IV,  35B  et  suiv.) 

6  L'ambassade  d'Angletarre  a.  fait  récemment,  assure-t-oa,  des  déiriarehes 
pour  obtenir  la  tranalatiou  de  ces  pierres  au  cimetière  militaire  anglais  de 
Scutari  ;  malheureusement,  ces  démarches  n'ont  pas  abouti  :  cas  précieux 
monuments  ont  été  employés  comme  matériaux  dans  la  construction  de  l'or- 
phelinat dit  Selimle.  Cela  est  d'autant  plus  r^rettable  que  l'incendie  du 
5  juin  1870  a  détruit  les  fac-similé  des  inscriptions  exiatant  tant  chez  M.  Fa- 
*pati  que  dans  \a.Société  littéraire  h^eiUque  de  Përa. 


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—  21  — 

Dans  son  Dictionnaire  de  la  basse  latinité,  Ducange  explique 
ainsi  ce  mot  :  i  Milices  barbares  (étrangères),  que  les  Romains 
prenaient  à  leur  solde.  >  «  Les  Varanges,  dit  M.  Paspati,  avaient 
une  église  particulière  Panaïa  Varanghiotiça  «  N,-D,  des 
"  Varanges,  »  sise  à  la  façade  ouest  de  Ste-Sophie,  et  presque 
contiguë  à  cette  basilique.  »  Je  ne  puis  m'empêclier  de  remar- 
quer ici,  sans  y  attacher,  d'ailleurs,  autrement  d'importance,  le 
rapport  phonétique  existant  entre  les  termes  varanges,  frenk, 
frangos,  t  franc,  »  et  Vlanga,  nom  actuel  d'un  quartier  de 
Constantinople,  dont  on  ignore  l'origine  étymologique  ', 

Mis  en  possession  des  établissements  et  de  l'échelle  des  Amal- 
fitains,  les  Vénitiens  reçurent,  en  même  temps,  la  concession 
de  toutes  les  boutiques  et  tavernes  comprises,  selon  les  termes 
du  privilège  rapporté  par  Miltitz,  entre  l'ancienne  échelle  juive 
dont  il  a  été  parlé  (Bâlyq  bazar),  et  l'endroit  dit  Bigla.  Cette 
localité,  dit  M,  Paspatl,  n'est  pas,  jusqu'à  présent,  bien  déter- 
minée; plusieurs  localités,  d'après  les  historiens  grecs,  auraient 
été  dites  vicia,  »  vigie-.  » 

«  Tout  l'espace  compris  entre  Bâlyq  bazar  et  Zindân  ca~ 
pou,  continue  leD'  Paspatl,  était  dit  Perama,  du  nom  rapporté 
plus  haut,  de  la  première  de  ces  deux  portes,  occupée  par  les 
Vénitiens.  ï 

Dans  l'opinion  de  feu  Henri  Giavany,  le  premier  établissement 
des  Vénitiens  aurait  été  de  l'autre  côté  de  Constantinople,  sur 
la  Propontide,  à  Koum-Capou,  à  l'est  du  quartier  de  Vlanga, 
vers  rextrémité  est  de  la  langue  de  terre  sur  laquelle  s'étend  la 
capitale;  cette  localité  se  trouvait  ainsi  à  l'ouest  de  l'église 
latine  de  St-Sergius,  mentionnée  plus  haut.  Nicola  Barbare, 
dans  son  journal  du  siège  de  Constantinople,  parle  d'un  combat 
naval  survenu  entre  quatre  navires  chrétiens  et  ceux  des  Turcs, 
les  premiers  ayant  jeté  l'ancre  contre  la  ville  de  Constantinople, 
<  pas  loin  de  Vlanga-Bostan,  »  selon  le  D'  Mordtman  ^.  D'après 
le  même  savant,  «  le  palais  du  hailly  vénitien,  orné  de  la  ban- 
dière  de  Saint-MarCj  tout  près  de  l'église  vénitienne  de  Sainte- 

'  V.  Burles  Varegi-angH.Goti  et  Russi.Baldelli-Boni,  Storiai/cWfl  reiaiioni 
aieei'leDoli  dell'  Europa  e  dell'Atia,  Firenïe,  1827.  I,  360. 
*  V.  cî-aprèi  Hur  ce  terme  le  chrysobulle  <Ie  Manuel  Comndne,  1148. 
»  Dethier,  Critoboutoi,  Mon.  hang.  hi»t.  XXII,  2"  partie,  p.  75. 


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Marie,  »  se  trouvait  c  aa  forum  Constantini,  où  il  y  a  la  colonDe  . 
de  porphyre  brûlée,  sans  escalier  '.  » 

On  doit  remarquer  que,  vis-à-via  la  colonne  brûlée,  se  trou- 
vent encore  les  ruines  d'un  klan  dit  par  Busbecq  (Epistola  III), 
caravassara,  en  démolition  de  nos  jours,  pour  élever  sur  cet 
emplacement,  dit  êltchî-hhân,  «  le  khan  des  ambassadeurs,  » 
le  tombeau  de  Fuad  pacha.  C'est  là  que  résidèrent,  sous  les  sul- 
tans ottomans,  les  envoyés  de  Moldavie,  de  Valachie,  de  Baguse, 
de  Transylvanie,  et  même  l'envoyé  de  l'empereur  d'Allemagne, 
comme  roi  de  Hongrie  ;  et  c'est  aussi  là  que_Busbecq,  représen- 
tant de  ce  dernier  prince,  fut,  pour  ainsi  dire,  interné.  <  A  son 
retour  d'Âmasia,  en  1559,  dit  Hammer-,  sultan, Suleïman  fit 
renfermer  Busbecq,  dans  leftAon  des  ambassadeurs,  à  la  co- 
lonne brûlée.  » 

Les  Vénitiens,  descendant  sur  l'autre  côté  du  versant  de  la 
coltine,  vers  le  port,  vinrent-ils,  plus  tard,  s'établir  sur  la  partie 
riveraine  indiquée  par  M.  Paspati  ?  Nous  verrons  plus  bas, 
d'après  Ducange^,  que  «  les  Vénitiens  auraient  demandé  à  l'em- 
pereur Henri,  l'image  hodighitrias,  et  qu'après  l'avoir  enlevée 
de  Sainte-Sophie,  où  elle  avait  été  transportée,  ils  l'auraient 
déposée  dans  l'église  du  Pantocrator^,  dont  le  monastère, 
selon  Hammer^,  était  devenu,  à  la  conquête  franco-vénitienne, 
le  quartier  général  des  Latins.  > 

Enfin,  on  lit  dans  Canale'^...  <  Innanzi  di  recarsi  in  Galata 
(les  Génois},  con  popolar  furore,  uguagliavano  al  suolo  il  mo- 
nastero  (ou  mieux  :  les  dépendances)  del  Pantocrator  [où  Gen- 
nadius,  le  premier  patriarche  grec,  sous  les  Ottomans,  avait  été 
confiné,  après  le  eoneile  de  Florence),  «  ov'erano  la  chiesa,  la 


'  D'  Dethier,  loc.  laad.  p.  75.  KiliOBmfni  alili  ou  Tchamberli  tâck  (V, 
De$cript.  de  CP.  par  le  patriarche  Constantiua,  Comple,  1846,  p.  68,  r-,  et  la 
notice  spéciale  du  D'  Dethiar  sur  ce  monument,  Mon.  hunQ,  hi»t.  vol.  XXIII, 
V  partie,  p.  1183  et  suiv. 

I  Hitt.  de  l'Emp.  ottoman.  VI,  117. 

'  Hiêt.  de  l'Bmp.  de  Conttantinople,  Èdit.  1826,  p.  94. 

»  Aujourd'hui  Kélict  djdmi  (Hammer),  ou  Zelrek  djdmi  {Conttantiniade. 
p.  93),  aise  en  haut  de  la  voie  aboutissaut  vers  la  port,  k  Oun-Capàn.(Cf.  ci- 
après,  LATINITÉ  DB  CP.  SOUS  LES  SULTANS  :  Suinte  Marie. 

'  Loc.  laad.,  IK,  429. 

*  Nuoea  storia.  II,  153. 


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loggia,  il  palazzo  dei  Veneziaai  ';  cosi  lavaranno  l'onla  di  San 
Giovanni  d'Acra  e  la  torra  cola  distratta  da  maggior  rovlDa 
venia  vindicata  ;  délie  piètre  trasportate  in  Genova  da  Ansaldo 
Doria,  edificavasi  la  chieaa  di  San  Giorgio  -.  » 

En  1090,  le  doge,  après  en  avoir  reçu  la  donation  de  l'empe- 
reur ï  per  jain  dictas  impériales  cartulas,  »  fit  don,  à  son  tour, 
an  monastère  de  Saint-Georges,  d'un  Capylion^  avec  ses  atte- 
nanees  et  dépendances,  en  pierre  ou  en  bois,  tant  de  l'intérieur 
qae  du  dehors*. 

Par  un  acte  du  mois  de  juillet,  même  année,  le  doge  Vitalis 
Faletro,  <  imperialis  protosevastos,  »  donna,  à  perpétuité,  au 
même  monastère  de  Saint-Georges,  dans  la  personne  de  l'abbé 
et  de  ses  successeurs,  les  terrains  couverts  et  non  couverts'^, 
maisons  etboutiques  concédées  par  Alexis  I^"",  aises  sous  {tnfra) 
la  ville  de  Gonstantinople  ;  le  tout  compris  dans  le  terrain  s'é- 
tendant  de  Vîgla  à  la  porte  Perftma,  jusqu'à  ia  Juiverie  (iisque 
ad  Judecam),  à  l'exception,  toutefois,  de  la  donation  déjà  faite 
par  l.ui  au  monastère  St-Nico!as,  et  de  la  scala  major,  dont 
il  se  réservait  l'usage  '^. 

«  Scilicet  damus  jam  prefato  monasterio  S.  Gèorgii  ipsum 
<  capyllio  situm  juxta  latus  de  suprascrito  sacro  Vigla,  sicut 

■  Le  traité  de  12G1,  conclu  entre  Michel  Paléologue  et  les  Génois,  avant  la 
restauration  byzantine,  at  cité  plus  bas,  porte,  dans  le  texte  reproduit  par 
Canale  (II,  387)  :  >  E  si  l'omnipotente  Signora  li  concédera  (a  l'empereur) 
che  ricuperi  ed  occupi  la  steaia  citta  de  Coslantinopoh,  i  (jenovesi  vi  avranno 
palazzo,  abitarioni,  posaessioni  eii  inlrati  colla  chiesa  di  Santa-Miria, 
adeaso  tenuta  dai  Veneziani,  colle  logge  circostanti  il  cimitero  e  l'area  del 
casteUo  dei  Veneziani  medesimi...  u 

'  Cf.  ci-aprés  Saint-Georqes,  et  nos  Ti-ailét  et  Capitulntiona  'te  In  France 
en  Orient,  p.  44  ;  de  la  sorte,  les  Génois  satisfirent  à  un  double  sentiment  : 
CAlui  de  la  vengeance  et  celui  de  la  rivalité,  quant  à|  la  domination  dans  les 
mers  d'Orient.  Dans  leurs  querelles  intestines,  que  le  Pape  Alexandre  [V 
essaya  vainement  d'apaiser, les  Pisana  elles  Marseillais  vinrent  en  aide  aux 
Vénitiens,  qui  rasârent  la  tour  d'Acre, appartenant  avx  Génois,  (Sauli,!.  p.  55.) 

'  Taverne  ou  plutùt  auberge  comportant  un  espace  assez  considérable,  où 
l'on  recevait  des  centaines  de  personnes. 

*  Fontes,  p.  43. 

1  Cette  clasaiBcation  d'une  certaine  catégorie  de  propriétés  a  passé  dans  la 
technologie  ottomane,  sous  les  termes  inoiicaqqafal  et  mouatngltiU'it  ;  le  pre- 
mier indiquant  las  terrains  n  à  toiture  ■  sur  lesquels  on  a  élevé  des  construc- 
tions, le  second  les  terrains  sans  conlructions,  rendant  un  produit  agricole. 

•  Id.  p.  57. 


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—  24  — 

<  tenet  uno  ejus  capite  in  ipso  nostro  rfeflmfiM/o  '  atque  cum 
«  tota  sua  loDyitudine  et  latitudine,  cum  capitibus  et  lateribus 
«  suis,  necnon  cum  totis  suis  edificiis,  petrinis  et  ligneis,  sive 
I  cum  totis  ejus  habentis  et  pertinentis  ab  intus  et  foris,  secun- 
€  dura  quod  iiobis  advenit  a  prememorati  Alexii  imperatorls; 

0  Etiam  damus  ergasteriuni  (boutique)  unum  situm  juxta 
latus  de  prenominato  cupyliio,  sicut  respicit  ejus  frons  in  jam 
dicto  nostro  deumbulo  ; 

«  Seeundum  ergasterium,  similiter  damus,  secundum  quod 
est  positum  justa  proprietatem  que  tune  fuit  domini  Berardi, 
ex  alio  latere  Armante  in  proprietale,  que  nunc  est  Sancti 
Nicolai; 

*c  . .  .Verumtatnen  statutum  est  inter  nos  et  vos  prenominatum 
Karinum  abbatem,  ut  ipsa  schala,  que  dicitur  schala  major, 
quem  ndnostrum  usum  retinuimus,  semper  habeat  accensem 
et  dessensem  sine  vestra  et  successorum  contradictione-.  » 

L'église  Saint  Acyndyn  ',  dont  il  a  été  parlé  plus  haut,  avait 
été  donnée,  antérieurement,  par  chrj'sobulle,  aux  doges  véni- 
tiens; par  acte  signé  en  septembre  H  07,  le  doge  Ordelafus 
Faletro,  le~s  évêques,  les  juges  et  le  peuple  vénitien  en  firent 
cession,  dans  les  termes  ci-après,  au  patriarcat  de  Grade,  avec 
tous  ses  biens  et  dépendances,  en  meubles  et  immeubles,  en 
échange,  ii  paraîtrait,  d'une  subvention  annuelle  qu'un  doge 
précédent  s'était  engagé  de  fournir  à  ce  patriarcat'  : 

«  Idcirco  nos  prenominatus  Ordelafus,  D.  G.  Veneeiarum 
dux,  cum  nostris  episcopis  et  judicibus  et  populo  Venetiœ,  cum 
successoribus  et  heredibus  ab  bodie  in  antea  damus  et  conce- 

'  EinboUi. 

»  Fonte»,  p.  55. 

'  Saint  Akindynos,  martyr  <lu quatrième  siècle,  souffrit  à  Mcomédie,  soua 
Diodéiien,  dans  la  même  perEécution  où  mourut  St  Georges.  Leurs  re- 
liques furent  partagées  entre  les  différentes  églises  de  Constantinople,  le 
crâne  de  St  .\kindynos  fut  placé  dans  TL-glIse  des  Sta  Anai^res, 
(Côme  et  Damien).  A  la  prise  de  Constantinople  par  les  croisés,  celte  pré- 
cieuse relique  fut  apportée  en  France,  par  ua  seigneur  de  Franche-Comté, 
et  donnée  par  lui  au  Xfonastére  de  Hosiéres,  où  elle  resta  jusqu'à  la  Révolu- 
tion. Klle  a  été  retrouvée,  portant  encore  la  plaque  d'argent  avec  son  imago 
et  son  nom.  Elle  a  été  reconnue  par  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belle»- 
Letlres,  dans  sa  séance  du  30  Octobre  1891.  (N.  E.) 

*  Par  la  suite,  comme  on  le  verra  ci-aprôs,  dans  an  acte  du  8  Mai  1205, 
un  chapitre  fut  institué  dans  cette  église. 


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—  25  — 

dimus  vobis  quidem,  domÎDO  Johanni  Gradonico,  venerabili 
Gradensi  patriarchEe  etvestris  successoribus  in  perpetuum,  vi- 
âelieet  eccieslam  beati  Archidani  ZMm  omni  suo  territorio  et 
benefitio,  positam  in  regali  urbe  Constantîiiopoli,  quos  est  anti- 
quitus  dejure  et  possessione  nostri  palatii secandum  imperialis 
crisovoli  conârmationem. 

«  Hanc  namque  prenominatametdesignatam  ecclesiam  cum 
toto  suo  thesauro  et  palliis  et  libris  et  cum  omnibus  suis  lia- 
bentiis  et  pertinentiis  ab  intus  et  foris  quas  nunc  babet  et  in 
anteaaiiquo  modo  habitura  est,  cum  suis  ergasteriis  universis 
et  cum  suo  mankipio  et  furno  {moulin  et  four)/  et  cum  om- 
nibus stateris  et  rubis  et  ponderibus  et  cum  cunctis  metris  tam 
oleum  quam  ad  vinum  '  et  cum  omnibus  tabernts  qiire  in 
prœdicta  urbe  subnostra  potestate  esse  videntur...  salua  tamen 
illa  honortficentia  quam  quondam  nostri  communes  legati 
in  eadem  ecclesia  et  tavernishabuerunt'.  » 

Les  privilèges  accordés  d'abord  aux  AmalGtains,  puis  aux 
Vénitiens,  etsurtouties  difficultés  avec  lesquelles  l'empire  était 
aux  prises  de  plus  en  plus,  le  portèrent  à  acheter  encore  d'autres 
alliés-défenseurs^  ;  en  1112,  Alexis  ComnÈne  (1081-1118.)  ac- 
corda aux  Pisanaun  privilège  semblable  à  ceux  octroyés  à  leurs 
devanciers  ;  il  comportait  «  Echelle,  magasin  spécial,  ou  mieux 
marché,  pour  leurs  marchandises,  place  d'honneur  à  Ste  So- 
phie, et  tribune  réservée  à  l'hippodrome,  dans  les  cérémonies  et 
fêtes  publiques.  »  Fanucci  *  rapporte  comme  suit  la  version  ita- 
lienne de  ce  privilège  :  t  Saranno  dati  alla  Cbiesa  Pisana,  nomi- 
nata  Santa  Maria,  ogni  anno  400  monete  d'oro  iperperi,edue 
paramenti  ;  al  dilettissimo  arcivescovo  di  Pisa,  monete  simili 
60  ogni  anno  ed  un  paramento  ;  a  Lamberto  giudice,  a  Carletto 
ed  ad  Antonio  100  monete  simili  ;  e  dopo  la  morte  di  loro  si 

daranno  alla  cbiesa  suddetta Vi  sara  assegnata  una  scala, 

a  cni  debbano  approdare  le  vostre  navi  e  discaricarvisi  ;  vi  sara 
dato  un  luogo  addattato  e  concenienle  con  abitazioni,  acciochè 

'  Droit  de  niesurage,  de  pesage;  le  gi/'iianljn  de  nos  jours, 

'  Sous  réserve  des  boQaeurs  et  droits  dus  aux  représentants  vénitiens, 

dant  cette  église  et  sur  ces  tavernes.  (Fonlet,  p.  €7.) 
'  V.  Nos  TfaMê  et  Cnpitulati'oiit  <le  la  Ffaiire  en  Orient.  (Passim.) 
*  Storia   di   tre  celelii-i  popoli  ileU'Italia,  Veiicjinni.  Genoeexi  e  Fi»ani. 

Lib.  I*,  Pisa  181T,  p.  16S. 


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possîate  riporvi  le  vostre  mercanzie  ed  abitarvi.  Simllmente 
nella  grande  cliiesa  di  Santa  Sofia  di  CPU  ri  sara  assegnaio  un 
posto  onorifico  e  distinto,  dal  santissimo  nostro  patrlarca.  Nel- 
l'ippodi'omo,  ossia  circo  di  CPH,  vi  sara  dato  luogo  distinto  in 
cui  dobbiate  sedere,  voi  Pisani,  nei  giomi  degli  spectacoli  ' 
I  croce  signati  che  anderanno  a  Geruaaiemne  coi  vostri  uotnini 
e  coi  Tostri  legni,  per  cagione  di  militare  contre  i  pagani,  non 
avranno,  o  in  andare,  o  in  ritomare,  impedimento  verruno'...» 

t  Le  terrain  concédé  aux  Plsans,  dît  M.  Paspati,  était  sis  à  l'est 
de  celui  des  Amalfitano-Yénitiens,  comprenant  dans  son  enclos 
la  porte  Bâghtché-Capou.  En  dehors  du  mur  d'enceinte,  et  en 
face  de  ce  terrain,  il  y  avait  aussi  des  magasins,  appartenant  au 
monastère  dit  Apo-Loghotheton  ;  et  devant  eux,  sur  le  rivage, 
se  trouvait  l'échelle  pisane.  » 

En  résumé,  et  pour  faire  saisir  d'un  coup  d'oeil  l'emplacement 
des  divers  établissements  ci-dessus  décrits,  l'enclos  actuel  de 
leni-Djami  comprendrait,  de  Bâlyq-bâzilr  à  Baghtchè-Capou, 
les  anciennes  localités  occupées  par  les  Caraïtes,  le  monastère 
de  Saint-Antoine,  l'établissement  amalfltain,  passé  plus  lard 
aux  Vénitiens,  et  enfin  une  partie  de  celui  des  Pisans. 

c  La  porte  de  Bâghtché-Capou,  ajoute  M,  Paspati,  inalié- 
nable, et  appartenant  au  monastère  Apo-Loghotheton,  était 
surmontée  d'une  grosse  tour,  en  défendant  l'entrée  ;  vis-à-vis, 
sur  le  rivage,  il  y  avait  une  échelle  ou  débarcadère,  désignée,  de- 
puis longtemps,  sous  le  nom  de  Dipli-Scala  t  Échelle  double,  » 
dont  la  jouissance  fut  donnée  aux  Pisans. 

<  De  l'autre  côté  de  Bâghtché-Capou,  à  l'est,  se  trouvait  le 
monastère  Apo-Loghotheton^,  cité  plus  bas,  sous  le  nom  d'é- 
glise du  Saint-Sauceur,  accordée  en  1205,  par  le  cardinal-légat 

1  A  cette  époque,  la  place  résenée,  dans  Ste  Sophie,  aux  rspréMntants 
étrangers  devait  être  [jlutàt  politique  que  religieuse  ;  c'est  probablement  l'o- 
rigine des  tribunea  réservées,  dans  les  églises  latines  aux  ambassadeurs 
des  puissances  protectrices.  Il  en  était  probablement  de  même  ))our  les  tri- 
bunes de  l'hippodrome.  On  peut  consulter  sur  le  cirque  de  CP.  et  les  quatre 
factions,  distinguées  en  deux  groupes  (bleue  ou  veuète  et  blanche,  «  prasna  x, 
vert  (hellène  et  rouge,)  un  intéressant  article  du  Dr.  Detbier(rur<7ui*e  du 
6  mars  1U74.)  arec  ta  description  d'un  bronze  contomiate,  représentant  I« 
triomphe  d'un  vainqueur  à  ces  jeux. 

<  La  version  latine  du  Chrj'sobulïe  de  1113,  concédé  aux  Pisans  est  rap- 
portée in  extenso  dans  les  Rerheivhes  lur  la  Principauté  françaite  île  Ma- 
rée, par  Bachon  Paris  1845,  1, 8,  II,  4. 


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—  37  — 

et  NivelûD,  évèque  de  Soissoas,  aux  PisaQSj  ou  mieux,  au  prieur 
de  leur  église.  (  Ce  monasU>re,  dit  M.  Paspati,  n'était  séparé 
que  par  la  grande  rue,  du  terrain  pisan,  sis  ù  droite  de  Bâghtchè- 
Capou;  il  avait  aussi  une  échelle,  qui,  suivant  sa  propre  condi- 
tion, passa,  avec  lui,  aux  Pisans,  lesquels  possédaient  ainsi  deux 
échelles,  la  Dipli-Scala  et  celle  à'Apo-Loff/iot/ietoti.  » 

En  mO,  les  Vénitiens  avaient  aussi,  dans  Constantinople, 
un  monastère  du  nom  de  i  8t  Georges  de  Pantépopti  '  >  dirigé 
par  un  Prieur,  puis  en  1220,  par  un  Abbé -. 

En  1113,  la  république  envoi-a  le  patriarche  de  Constanti- 
oople  (de  Grade  ?)  en  qualité  d'ambassadeur  auprès  d'Alexis  ï'^, 
à  l'effet  de  solliciter  l'alliance  de  ce  prince  pour  reprendre  la 
Dalmatie  sur  les  Hongrois^.  L'ambassadeur  était  accompagné 
d'une  escorte  de  quatorze  galères. 

Un  chrysobulle  donné  par  Manuel  Comnène,  en  mars  H48, 
fournit,  comme  suit,  la  description  du  quartier  de  Conslanti- 
Dople,  occupé  par  les  Vénitiens,  à  cette  époque  ; 

*  Incipit  ab  ipsa  Vigla*  et  procedit  versus  orientem.  Tenet 
embolum  et  que  versus  septentrionem  et  meridiem  sunt  cum 
solariis  habitacula,  et  procedit  usque  ad  fornicem  conjunctum 
muro  hospitnlts  Sancti  Mnrctani,  comprehendens  et  loca  in 
quibus  stant  octo  numulariorum  tabule.  Ascendit  paululum  ver- 


'  L'élise  de  Pantépopti.  trâs  remarquable  par  la  i>osjtion  élevée  qu'elle 
occupe,  et  qui  lui  valut  probablement  son  nom.  fut  bfttie  par  Anne,  mère 
d'Alexis  Comnéne  ;  elle  a  été  transformée  en  Imaré  (élablieeement  d'assis- 
tance publique)  par  Méhemmed  le  conquérant  ;  puis  en  mosquée  sous  le 
nom  d'Eski  Inutret.  KIIg  «st  sise  non  loin  des  murailles  ;  on  rapen;oit  en 
passant  entre  Oun-Capou  et  njoubaly-capou.  (C',n.ilanlinia-lc.  107.) 

)  Le  Prieur  était  hiérarchiquement  inférieur  à  l'abbé  qui.  dans  le  royaume 
de  Jérusalem,  portait  le  plus  souvent  «  mitre,  croce  et  anneau,  n  Toutefois  le 
prieur  du  St  ïiépulore  i[  qui  élait  Véglise  patrinrchale  de  Hiérusalem  ',  avait 
DOS  seulement  la  prérogative  d'élire  te  Patriarche.  -  avec  les  cbauoines  de 
la  même  église,  qui  étaient  chanoines  réguliers  de  St  Augustin,  mais  encore 
avait  droit  de  porter  mitre  et  anneau,  mais  non  ]'ns  la  Croce.  '  (Rey  Fa- 
mille» il'outre-iner  de  Du  Cnngc.  Paria  1*)9,  p.  83!»)  (N.  E.)  Dans  certain! 
Ordres  religieux,  comme  chez  les  Bénédictins  il  y  a  des  Prieurs  et  des  Ab- 
bés, en  d'autres,  comme  chez  les  Chartreux,  il  n'y  n  que  des  Prieurs.  Les 
Chanoines  Réguliers  n'avaient  généralement  pas  d'abbés. 

'  Fonle».  p,  75. 

*  D'après  M.  le  Dr.  Dethier,  Vjgla  ou  Higla  dr'signait  un  poste  militaire 
(vigie)  coafii  aux  gardes  gothiques,  (\'.  la  Turquie  des  11  déc.  1873,  et 
2  janvier  1873.) 


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—  28  ~ 

sus  meridiem  ab  ipsa  Vigla.  Tenet  iid  modiciim  et  aliud  ent- 
bolum,  et  pervenît  usque  ad  primum  fornicem  ejusdem  embo- 
li,  comprehendens  triclinariura  altum  domîcilium  Miii.  Versus 
orientem  ejusdem  emboli  secundum  d'jas  partes  humilem  do- 
munculum  cum  acclini  tecto  ejusdem  monasterii,  et  que  in 
equali  hujus  est,  modicam  curiam,  que  dicitur  Aristini,  et  ha- 
bet  longitudinem  brachiorum  octo  cum  dimidio  et  latitudinera 
septem  cum  tercia,  Preterea,  que  suot  versus  orientera  habita- 
culadiaconi  Precursoris,  debentibus  obturari  januis  huiusmodi 
habitaculorum,  que  educunt  in  manîfestam  curiam.  Versus 
aquilonem  tria  ergasteria  cerulartornim,  Ycanati'  duas  sta- 
tiones,in  quibus  et  loca  tabularum  duarumnumularioium  ejus- 
dem monasterii  Mill.  Incipit  rursum  ab  ipso  fornice  predlcti 
hospitalis;  tenet  publicam  viam,  que  versus  occasum  est  ejua- 
dem  hospitalis,  et  progreditur  usque  ad  portam  que  est  juxta 
parvum  temptuin  Precursoris.  Exinderursus  dimittens  pre- 
monstratam  portam,  quasi  versus  orientem  transit  per  murum 
cîvitatis,  etpervenit  usque  ad  semitam,  que  dividit  jura  mo- 
nasterii Akimitero.  Exinde  ascendit  modicum  versus  meridiem 
tenens  eamdein  publicam  semitam,  habentem  in  latitudihe  bra- 
chia  tria,  et  ut  dictum  est,  dividentem  mansiones  monasterii 
Akimitero,  et  perveniens  usque  ad  finem  domicilii  ecclesie  Peri- 
■olepti,  ita  ut  a  muro  civitatis  per  equalitatem  ejusmodi  sémite 
usque  ad  Qnem  sint  brachia  viginti  se![.  Flectitur  versus  orien- 
tem, tenens  murum  ecclestœ  Sancti  Nicholai,  relinquens  a 
dextris  quidem  monasteriunt  Sancti  yicholai,  a  sinistris  pi- 
storicum  ergasterium  Sancti  Marciani  quod  est  junctum  man- 
sionibus  Sancti  Nicholai.  Supergreditur  rursus  aliam  tertiam 
semitam,  et  peivenit  usque  ad  aque  cursum,  que  a  Vigla  des- 
cendit, relinquens  a  dextris  alia  habitacula  Sancti  Nicholai,  a 
sinistris  domicilium  i^ancti  Marciani  et  pensionales  domos  mo- 
nasterii Parakymomeni,  Iterum  progreditur  versus  meridiem, 

'  Les  Icomati  étaient  tes  valets  des  Greco-Gotha,  qui  ensuite  devinrent 
eux-mêmes  une  milice  (BibUotheca  Ginera  Medii  ÂCel,  par  Fatkog,  Vienne 
1S13,  p,  37.)  Et  ailleurs  k  les  Icanali  étaient  des  soldats  préposas  à  la  garde 
du  Palais  (Conttantin  Porpkijrogfntte,  III. J  <•  Dans  la  localité  occupée  par 
le*  Vénitiens,  dit  M.  Paspati,  auquel  nous  devons  la  communication  de  ce 
qui  précède  il  y  avait  deux  postes  d'Ifanati.  n  Icanati  iluas  stationesin  qui- 
bus panes  venduntur.  (Tafel  1, 192.)  »  Selon  le  même  M.  Paspati.  la  port» 
IcanalixMi  devait  se  trouver  là  où  est  aujourd'hui  léni-Djami. 


DigilizPdbvGoOt^le 


comprehendens  vacaum  locum  ejusdem  .monasterii  Parakymo- 
meni,  qui  versus  orientem  jacet  domorum  Sancti  Nicholai,  et 
proceditet  regreditur  usque  ad  Viglam,  unde  et  iiicipit,  dimît- 
tens  quidem  a  dextris  domos  monasterit  Snnctt  Marci,&.  si- 
nistris  vero  aque  corsum. 

»  Ejusraodi  deteruiinationis  spatîo  compretienduotur  ea,  que 
sunt  versus  orientem  aque  cursus  descendentis  a  Vigla  versus 
portatn  Canavuci(?). 

(  Habitacula  et  vacuus  magnus  locus,  qui  usque  ad  publicam 
viam  versus  occidentem  progreditnr  Sancti  Marciani  a  muro  ci- 
vitatis  et  usque  ad  embolum,  per  presens  chrysobulum  verbum 
datum.  Et  ea  que  sunt  versus  occidentem  aque  cursus  a  muro 
civitatis,  qui  in  equali  sémite  est,  dividentisjura  monasteni  Aki- 
miton,  et  usque  ad  domos  Sancti  Nicholai'eX  Sancti  Marci, 
cumparvo  loco  monasterii  Parakymomeni.  Et  simpliciter  om- 
nia,  que  inhnbitantur,  et  que  non  inliabitantur,  habitacula  et 
vacua  loca,  in  predicto  spatio  comprehensa.  Adhuc  cum  bis 
comprebenditur  et  que  est  in  litore,  scala  Sancti  Marctant, 
que  a  chrysobasilio  possidetur  ',  cum  universa  ejus  compre- 
hensione  et  continentia,  et  que  in  ea  sunt,  domibus  et  er- 
gasteriis. 

<  His  sic  nb  imperio  nostro  <Ionatis  per  presens  chrysobulum 
verbum  altitudinis  nostre,  exceptis  proximantibus  his  donatis, 
portis  videlicet,  mûris  et  cortinis  murorum  civitatis,  habebunt 
Venetici  bec,  devotionem  et  fidem,  quam  imperio  nostro  debent, 
servantes,  secundum  quod  et  per  ea,  que  prius  adeptl  sunt, 
chrysobula  hanc  servare  tenentur,  cujuscumque  juris  sint,  sive 
ecclesiastici  juris,  sive  rei  publiée,  sive  private,  sive  sancte  do- 
mus,  vel  mouastice,  nulla  actione  locum  exercendi  habente  con- 
tra eos  gratia  borum^...  » 

Au  mois  d'octobre  de  la  mCme  année  H48,  Manuel  Comnène 
renouvela  le  cbrysobule  donné  par  Alexis,  en  confirmant  les  do- 
nations faites  par  ce  prince  à  V église  de  Saint-Marc,  à  Venise, 
Bavoir  :  tout  le  terrain  compris  entre  l'échelle  de  Vigla,  les  bou- 
tiques tenues  par  les  Vénitiens  et  les  drecs,  &  l'échelle  de  Pera- 
ma  f  id  est  transitus  »  avec  les  trois  échelles  comprises  dans 

I  Voyez  ci-deaBUS,  à  l'on  990. 
'  Fonttt,  p.  111. 


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~  30  — 

cet  espace,  comine  aussi  la  donation  du  moulin  à  l'église  Saint- 
Akyndan ' . 

Daas  un  acte  hypothécaire  de  décembre  H50,  dressé  en  fa- 
veur du  religieux;  supérieur  de  Saint-Marc-,  celui-ci  signe  cet 
acte  comme  suit  :  «  Ego  Henrîcus  Vallaressus,  presbyter  et  no- 
tarius,  plebanus^  Stl  Akîndî,  compleci  et  roboravî,  »  ce  qui 
indiquerait,  ainsi  qu'oiLl'a  vu  plus  liaut,  que  cette  église  était 
dite  indifféremment  Saint-Akindan  ou  Saint-Marc.  Gomme  on 
le  remarquera  cî-aprés,  cette  église  était  voisine  du  palais 
ducal,  lors  de  l'occupation  firanco-vénitienne.  Dans  un  acte  da- 
té de  mai  1229*,  on  lit  que  l'une  des  portes  de  la  ville  étaitdite 
«  porte  de  Saint- Marc  ;  >  «  sed  loca  autem  ipsa  hec  sunt  :... 
pecia  vero  una  de  terra  vacua,  posita  infra  murumctvitatis.Ex 
uno  capite  versus  orientera  firmat  in  porta  civitatis  que  dici- 

tur  S.  Marci  per  quani  discurrit  via  publica ex  alio  capite 

versus  occidentem  firmat  in  porta  qua  exitur  ad  Drongarium 
que  dicitur  EbraiUy...  per  quam  portam  via  discurrit  pu- 
blicam.  » 

Au  reste,  la  nouvelle  juridiction  sous  laquelle  Saînt-Akyndan 
avait  été  placé  ne  tirda  pas  à  amener  des  difTicultés  entre  le  su- 
périeur de  cette  église,  «  Dominicus  prior  Sancti  Marci  in  Cons- 
tantinopoli,  Venetorum  jurisdictionis  monasferii  Sancti  Georgii 
de  Veneciis,  »  et  Steplianus,  vicaire  du  patriarche  de  Grade; 
et,  en  présence  du  prieur  de  l'église  Saint-Nlcolas  des  Véni- 
tiens, du  prieur  Ecclesiœ  Stœ  Mariœ  de  Embulo,  du  prêtre 
Zacharias  et  de  Bonifacio  Fulmolo,  t  judices  Venetorum,  »  à 
ce  témoins,  le  supérieur  précité  requit  Sergius,  prêtre  capitu- 
laire,  notaire  apostolique,  de  dresser,  le  12  décembre  1199,  en 
l'église  même  de  Saint  Akyndan,  un  acte  par  lequel,  aux  fins 
de  se  garantir  contre  tout  dommage  ultérieur,  il  plaçait  ladite 
église,  lui  même  et  son  clergé,  les  charges,  bénéfices,  et,  en  un 
mot,  tous  droits  relevant  de  sa  juridiction,  sous  la  protection 


1  Fontes,  p.  75. 

)  «  Une  église  de  S.  Marc  appartenait,  à  Alexandrii?,  depuis  longtemps  a 
Vénitiens.  »  (M.  Giacomo,  Procii-eerbaiu}  iitr  la  réforme  judiciaire 
Egypte,  1870,  p,  136.) 

s  Prêtre,  notaire  et  curé. 

*  Fonte»,  II,  270. 


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—  31  — 

du  pape  Innocent  IK,  et  protestait  solenneltement  contre  le  vi- 
■caire  patriarcal  '.  ' 

En  1157,  le  pape  Adrien  IV,  dans  ses  lettres  à  Henri,  pa- 
triarche de  Grade*,  formait  unesortede  diocèse  des  églises  la- 
tines de  Consttintinople  et  des  autres  villes  de  l'empire,  qu'il 
plaçait  sous  l'autorité  de  ce  prélat  ;  et  il  donnait  à  celui-ci  *  fa- 
culté d'ordonner  et  de  sacrer  des  évèques,  tant  dans  la  capitale 
que  partout  où  besoin  serait.  »  Ces  lettres,  tout  en  ne  faisant 
mention  que  des  églises  *  fréquentées  par  la  multitude  des  Vé- 
nitiens, >  semblent  indiquer,  néanmoins,  que  la  latinité  entière 
de  ce  pays  relevait  de  l'autorité  ecclésiastique  du  patriarche  de 
Grade,  ou  des  évèques  sacrés  par  lui  ^. 

Dès  H42,  l'empereur  Jean  Comnène,  auquel  les  Génois 
avaient  su  se  rendre  utiles,  comme  précédemment  le.s  Véni- 
tiens, fit,  avec  les  ambassadeurs  génois,  en  Cilicie,  un  traité 
remplaçant  par  un  droit  régulier,  tes  taxes  arbitraires  imposées 
jusqu'alors  à  leurs  marchandises*.  Un  peu  plus  tard,  en  1155, 
les  embarras  de  la  an  de  son  règne,  suscités  par  le  passage  de 
l'armée  des  croisés,  l'invasion  de  Roger,  roi  de  Sicile,  etses  dé- 
mêlés avec  le  Sultan  Seldjouqyde  d'Iconium,  engagèrent  l'em- 
pereur Manuel  à  chercher  un  nouvel  appui  en  Occident,  ou  du 
moins  h  y  diminuer  le  nombre  de  ses  adversaires  ;  dans  ce  but, 
il  se  décida  à  envoyer  à  Gènes  un  ambassadeur,  Démétrius  Ma- 
cropolit,  charge  de  proposer  aux  consuls  de  la  république  les 
mêmes  avantages  qu'ans  Pisans,  c'est-à-dire  subside  annuel, 
durant  quatorze  ans,  réduction  des  taxes  douanières,  permission 
de  vivre  en  communauté  dans  la  Capitale^  ;  jouissance  des 
mêmes  faveurs  et  privilèges  que  les  Pisans  j  marché,  échelles, 
présents  annuels  pour  l'archevêque,  les  consuls  et  la  cathédrale, 

1  Fontei.  p.  280. 

'  Grado,  résidence  du  patriarche  rietle  Venaie,  jusqu'en  H51,  é|>oque  Où 
cette  dignité  fut  portée  au  siège  de  \'cnise.  Le  patriarche  de  Grade  Joua  un 
rAle  important  en  685,  dans  l'assemblée  des  ëvéques,  du  clei^,  des  noblaa 
et  du  peuple,  qui  nomma  le  premier  duc  de  Venise  (Lebeau,  IJitt.  du  Bom- 
Emptre,  par  S.  Martin,  XII,  <1.) 

5  BarorUi  eritica,  IV,  586  ;  CPIU  fhntUana.  III.  3. 

*  Miltitz,  Manuel  de»  contiiU  II,  80. 

*  Jusqu'à  cette  époque,  ils  avaient  été  obllgéade  fixer  leurs  habitations  hors 
d«  l'eDceiote  de  CF.,  sur  une  plage  ouverte  et  assez  distante  des  portes.  Mil' 
titz  II,  8. 


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—  32  — 

*  et  dabit  vobia  Dominus  meus  sanctissimus  imperator  înCons- 
tantinopoli  embolum  et  scalas,  cum  coinmeicio  et  omnia  in  ei5 
pertinentibus,  sicut  Pisaoi  habent,...  '  »  En  échange,  l'empereur 
demandait  aux  Génois  de  refuser  leur  concours  k  ses  ennemis, 
et  de  défendre  le  territoire  de  l'empire  comme  leur  propre  pays. 
Cet  acte  fut  accepté  par  les  parties,  réunies  dans  l'église  de  St. 
Laurent,  le  12  octobre  1156;  mais  quoique  consenti  de  part  et 
d'autre,  l'exécution  de  ce  traité,  dans  certaines  clauses,  rencon- 
trait l'opposition  des  étrangers  et  celle  des  Grecs  eux-mêmes, 
qui  voyaient  avec  un  vif  déplaisir  l'établissement  des  Génois 
dans  l'intérieur  de  la  ville  ".  Quoiqu'il  en  soit,  et  selon  Miltitz, 
reproduisant  le  rapport  de  Girol.  t^erra,  les  Génois,  en  IICO, 
y  étant  autorisés,  s'empressèrent  d'acheter  le  couvent  abandonné 
de  Calamos,  (dit  ci-après  Calamaiïos,)_qu'ils  abattirent;  et  sur 
cet  emplacement,  ils  construisirent  un  palitls  «insulaire,  une 
église,  des  loges,  des  bains  et  des  citernes  ^    ■       • 

Cependant,  en  même  temps  qu'ils  négociaient  avec  Manuel, 
les  Génois  ne  voulaient  pas  rompre  avec  l'empereur  Frédéric 
Barberousse  ;  mais  ce  dernier  irrité  du  traité  qu'ils  venaient  de 
conclure,  et  pour  mieux  assurer  ses  projets,  se  chargea  d'exciter 
les  jalousies  que  la  nouvelle  installôjion  des  Génois  il  CP.  avait 
suscitées.  De  son  côté  Manuel,  irrité  de  l'alliance  de  Gènes  avec 
l'Allemagne,  y  donna  aussi  la  main  :  les  Pisans,  qui,  dans  CP., 
étaient  au  nombred'un  millier  d'hommes,  insultèrent  les  300 Gé- 
nois résidants  en  cette  ville  ;  des  insultes>an  en  vint  aux  armes 
(1162';  les  premiers,  plus  nombreux,  envahirent  le  fondouq 
(Eml)olo,  bazar)  génois,  et  le  pillèrent,  après  avoir  massacré 
Octave  RufTo,  l'un  des  Génois  les  plus  notables*. 

Gênes  n'était  pas  la  seule  cité  qui  eut  fait  alliance  avec  Fré- 
déric ;  Pise  avait  agi  de  la  même  façon  ;  aussi  pour  punir  les 
Pisans,  et  de  leur  nouvelle  alliance,  et  de  la  sédition  provoquée 

1  Sauîi,  DeOn  rolonia  degii  Genore»i.  in  Galata.  1831,  I,  19;  II,  181  ;   et 
aussi  Buchon,  Rechercher  tur  la  principattti  françaite  de  Morte,  II,  9. 
»  Mittilz,  Loc.  cit.  11,  81. 

*  Miltitz  id.  Id.  Hur  Iss  mots  Fondoag  et  Loge  voir  nos  Capitulation»  de 
la  Fronce  en  Orient,  26  et  41.  Voir  aussi  plus  loin  Part.  Il  St  George*. 

*  Fanucci,  lot;,  laud.  p.  26  ;  Vincens.  Hitt.  de  la  Républ.  de  Géneê,  PAris 
1842,  I,  167;  Miltitz,  JI,62,  1S3.  Il  semblerait  d'aprâs  les  citations  da  M.  Le 
Chev.  De  Simon),  rapportées  par  Sauli,.  que  cet  Embolo  portait  le  nom  de 
Santa  Croce. 


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—  33  — 

par  eux  dans  CP-,  Manuel  chassa-t-il  ces  derniers  de  la  ville, 
leur,  enlevant  leurs  fondouqs,  leurs  marchandises,  et  les  expul- 
sant même  de  la  Grèce  et  de  toute  la  Romanie.  Puis  il  ouvrit 
avec  eux  des  négociations  pour  les  détacher  de  leur  alliance  avec 
l'Allemagne.  Pressée  entre  les  sollicitations  des  deux  empe- 
reurs, Pise,  pensant  que  Manuel  ne  saurait  spolier  leur  église  de 
Santa  Maria,  fit  don  à  celle-ci  des  marchés,  débarcadères  et 
autres  établissements  que  la  république  po^isédait  à  CP,  ;  puis 
elle  lui  envoya  des  ambast>adeurs  dont  la  mission  n''aboutit  pas, 
ceux-ci  ayant  pour  instructions  de  ne  pas  renoncer  à  l'alliance 
de  leur  puissant  voisin,  l'empereur  Frédéric. 

Gènes,  comme  ses  devancières,  non  contente  de  son  établis- 
sement à  Calamanos,  vînt  aussi  prendre  sa  place  sur  les  rives  de 
la  Corne  d'or  ;  ce  fait  s'accomplit  dans  les  circonstances  sui- 
vantes :  des  dissentiments  s'iHatPnt  produits  entre  Manuel  et  les 
Vénitiens,  le  premier  voulant  arrêter  le  développement  de  leur 
influence  politique  et  commerciale  en  Orient,  les  seconds,  voyant 
chaque  jour  de  nouveaux  émules,  sinon  des  rivaux,  exploiter 
avec  eux  les  avantages  dont  ils  avaient  joui  seuls  jusqu'alors. 
Manuel  ât  faire  successivement,  auprès  de  Guillaume  de  Sicile 
et  du  Doge  (1170)  des  démarches,  qui  d'un  côté  comme  de 
l'autre  restèrent  infructueuses  ;  il  se  plaignit  à  Venise  de  l'in- 
subordination des  sujets  de  la  République,  et  celle-ci,  de  son 
côté  mit  à  la  mer  une  escadre  dont  le  Doge  lui-même  prit  le 
commandement.  Sur  les  représentations  du  gouvernement  de 
Négrepont,  le  doge  consentit  i^  arrêter  sa  marche  et  dépêcha  & 
Manuel  l'évoque  d'Aquilée  et  quelques  autres  personnages,  parmi 
lesquels  se  trouvait  Henri  Dandolo,  poiu*  traiter  de  la  paix  ;  puis 
il  se  retira  à  Chio,  dont  il  s'empara.  L'empereur  qni  voulait 
gagner  du  temps,  retint  le  doge  dans  l'inaction,  et  envoya  des 
négociateurs  à  Gènes  et  Ji  Pise,  pour  engager  la  première  de  ces 
républiques  &  opérer  dans  le  Levant,  et  proposer  à  la  seconde 
le  renouvellement  des  anciens  traités.  Celle-ci  avait  déjà  expédié 
des  envoyés  à  CP.  ;  et  tandis  que  Manuel  traînait  en  longueur  les 
négociations  avec  les  Vénitiens,  il  renouvela  (1172)  avec  ses 
c  aCTectionnés  i  Pisans,  dès  leur  arrivée,  leurs  anciens  privi- 
lèges, leur  restituant,  c  seulement  dans  une  autre  partie  de 
la  ville,  la  It^e,  l'échelle  et  l'église  dont  ils  avaient  été  éloignés 
pomr  co'tains  motifs.  ■  Reconnaissant  qu'il  avait  été  trompé,  le 


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—  34  — 

doge  (le  Venise,  dont  la  flotte  se  trouvait  de  beaucoup  réduite, 
reprit  la  route  de  Venise  j  quant  à  ses  ambassadeurs,  l'un  d'eux, 
Henri  Dandolo,  ayant  été  aveuglé  avec  un  poinçon  d'argent,  ils 
quittèrent  la  capitale  sans  prendre  congé  de  l'empereur,  se 
promettant  bien  de  tirer  vengeance  de  l'acte  de  cruauté  dont 
Dandolo  avait  été  victime  '. 

La  sédition  de  H62,  survenue  dans  CP.  entre  les  Pisans  et 
les  Génois,  amena,  nous  l'avons  vu,  l'expulsion  des  premiers  ; 
les  seconds,  peu  nombreux  périrent  dans  le  massacre  ou  émi- 
grèrent.  Gènes  réclama  du  gouvernement  grec,  par  l'intermé- 
diaire d'envoyés  successifs,  le  remboursement  des  pertes  éprou- 
vées par  ses  nationaux  et  sollicita  de  nouveaux  privilèges,  lui 
assurant  des  garanties  contre  le  retour  de  semblables  excès  ;  elle 
y  parvint  en  Octobre  H69  :  son  envoyé,  Amico  di  Murta,  qui 
avait  rempli  diverses  missions  dans  ce  but,  à  CP.,  obtint  un 
chrysobulle  par  lequel,  (à  cette  date,  établie  par  M.  le  Chev.  de 
Simoni,  dans  une  remarquable  dissertation,  au  Gtomale  U- 
gustico,  1874.)  en  échange  du  secours  que  la  république  s'en- 
gageait de  fournir  à  l'empereur  contre  les  Sarrasins  et  autres 
payens,  celui-ci  promettait  c  dare  civitati  Janue  emt>olum  et 
scalam,  ultra  GPiim,  in  loco  qui  dicitur  Orcu,  in  loco  bono  et 
placabili  etc.  >  La  localité  indiquée  dans  ce  document  est  dite  à 
la  fois  Orcu  et  Créa  par  Sauli=.  M.  de  Simoni  émet  l'opinion  que 
le  chrysobulle  de  H69  ne  reçut  pas  son  exécution,  et  que  la 
concession  faite  aux  Génois  ne  leur  fut  finalement  consignée 
qu'en  avril  suivant,  et  cela  non  pas  à  l'extérieur  de  la  ville,  mais 
dans  l'intérieur  parla  restitution  du  Coparion  (l'endroit  où  l'on 
confectionne  les  rames)  ;  en  effet,  deux  traductions  du  premier 
chrysobulle  portent  l'une  urtr-ô,  l'autre  ^j-an^Constantinopolim, 
tandis  que  dans  le  Chrysobulle  de  maill70,  relatif  à  cette  con- 
cession on  lit  c  constitit  imperium  meum  ut  demutaretur  eis 
hujusmodi  embolus  et  scala,  et  daretur  iUis  t  in  magna  civi- 
tate  >  (traduction  du  terme  grec  Mégalopolis),  et  plus  bas  c  sanci- 
tur  per  presentis  auree  bulle  sigillum  ut  ipsi  possideant  hujus- 
modi embolum  et  scalam  in  magna  civitate,  sicut  illis  tradita 

'  Fanucci,  loc.  laail.  60. 

■  Le  texte  grec  original  dont  M.  Paspati  a  bien  voulu  nouB  donner  com- 
munication porte  0  entoB  •  intra  ou  mieux  iotui,  ce  qui  reproduit  exactement 
le  phone  grec. 


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—  35  — 

sunt  vice  illorum  que  data  fuerant  illis  in  traDsmare  partibus.  > 
II  résulte  de  l'opinion  du  savant  auteur  du  mémoire  précité 
{M.  De  Simoni),  que  la  localité  dite  Orcu  ou  Orca',  hors  de 
CP.,  de  l'autre  c4té  de  la  mer,  en  face  de  la  ville,  fut  accepté 
par  l'envoyé  génois,  conformément  d'ailleurs  à  ses  instructions 
*  embolum  et  scalas  studeas  habere  in  CP. ...  et  si  non  posses. .. 
in  Pera  studeas  habere  »  à  défaut  de  la  concession  dans  Cous- 
tantinople  même  ;  puis  enfin  que  dans  l'intervalle  du  mois  d'oc- 
tobre à  avril,  le  négociateur  parvient  à  obtenir  la  restitution  du 
Coparion,  l'ancien  embolum  génois  dans  CP.  «  in  positione  lo- 
comm  onorii'  videlicet  coparion»  à  l'est. 

Cette  sorte  d'invasion  latine,  quoique  toute  commerciale, 
mais  non  cependant  toujours  pacifique,  ne  tarda  pas  à  soulever 
les  passions  locales  :  déjà,  le  passage  des  bandes  plus  ou  moins 
disciplinées  de  la  première  croisade,  sous  Alexis  I.  Comnène, 
avait  laissé  de  pénibles  souvenirs  dans  l'esprit  des  populations  ; 
«  les  désordres  commis  par  elles  sur  les  terres  de  l'empire  avaient 
fait  considérer  les  Francs  comme  des  ennemis  non  moins  dan- 
gereux que  les  Turcs  Seldjouqydes  »  ;  et,  si  l'on  en  croit  les 
historiens  latins,  t  Alexis  n'aurait  rien  négligé  pour  consom- 
mer, en  Asie,  la  perte  des  croisés^.  »  De  part  et  d'autre,  on 
manqua  aux  engagements  contractés,  et  la  mésintelligence 
éclata  entre  les  Latins  et  les  Grecs.  Pourtant,  certains  empe- 
reurs, comme  Manuel,  s'inspirant,  il  est  Trai,  des  intérêts  poli- 
tiques, surent  comprimer  ces  sentiments;  mais  le  peuple,  étran- 
ger à  cet  ordre  d'idées,  c  tint  les  Latins  en  avereion  >  ;  et  la  mort 
de  Manuel  l'affranchissant  de  la  contrainte  que  lui  imposait  la 
protection  donnée  par  ce  prince  aux  étrangers,  il  se  livra  sans 

■  M.  Dethier  pense  que  l'on  doit  lire  Gréa,  le  Baghtcbé  Capûu  de  nosjouri, 
A  gauche  duquel  ee  trouve  le  néorjon  «  remiie.  aocrage  des  embarcations 
desSultans  »  Cf  Dethier,  Criiaboiilot,  Vie  de  Mahomet  II,  dans  les  Mon. 
hung.  Hi»t.  Iir,  182,  217.  V.  aussi  le  continuateur  de  Pierre  GyHes,  p.  387 
aurea  vel  pulchra  porta.  Maçoudi  (maçoudj  eddahab,)  édition  de  M.  Elarbier 
de  Meyoard,  Paria  1863,  p,  319,  ci(o  dans  sa  description  de  CP.  a  la  porte 
dorée,  bab  eddahab  d 

•  Ce  terme  parait  être  la  reproduction  de  Néorion  «  arsenal  maritime  i    , 
d'où  la  porte  voisine  a  reçu  son  nom  corrompu  en  celui  d'orea  «  ta  belle  »,  le 
Baghtché  Capou  actuel.  La  Neorion  était  un  port  où  se  trouvent  encore  les 
bateaux  (Caltj)  de  parade  des  sultans.  Conittntiniwlv,  par  le  patriarche  Coos- 
tantiua,  CP.  1846,  p.  17. 

'  Millitz.  toc.  laad..  Il,  i,  83  ;  Art  de  cMfler  les  date*. 


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réserve  à  sa  haine  et  la  poussa  jusqu'à  la  frénésie.  «L'ambassa- 
deur génois,  porteur  de  la  ratiâcation  du  traité  conclu  par  la 
république  avec  le  prince  défunt,  fut  mal  accueilli  d'Alexis  II 
Comnène,  son  successeur  ;  et,  selon  certains  rapports,  il  aurait 
été  lui-même  victime  du  mouvement  populaire  de  1182,  dans 
jequel  les  prêtres  Latins  furent  expulsés  de  leurs  églises,  les 
malades  cliassés  des  hôpitaux,  et  les  habitants  paisibles  de  leurs 
foyei-s.  Tout  le  quartier  latin  fut  mis  à  feu  et  à  sang,  sans 
distinction  d'âge,  de  sexe,  de  condition.  Selon  Guillaume  de 
Tyr,  «  les  Latins  massacrés  dans  ce  soulèvement  furent  au 
nombre  de  six  mille,  leurs  maisons  furent  saccagées  et  brûlées; 
ceux  d'entre  eux  qui  échappèrent  au  carnage  se  réfugièrent  sur 
leurs  navires,  et  à  leur  tour  livrèrent  les  îles  et  les  terres  de  la 
Propontide,  au  pillage.  » 

A  la  suite  de  ces  horribles  événements,  dit  Canale  (II,  362), 
on  chanta  <  pietosaraente,  il  Te  Deum,  poichè  il  capo  di  un 
Cardinale  Romano  legato  pontiRcio,  vedesi  separato  del  suo  bu- 
sto  e  trascinato  a  coda  di  cavallo  per  le  strade  délia  città,  fra  î 
barbari  scherzi  di  un  inferocita  ciurmaglia.  > 

Saladin  {Papiers  d'État,)  de  son  côté  écrit  au  Khalife  de 
Bagdad,  Nacir-ledin-lllah,  aux  rives  de  l'Euphrate,  sous  la  date 
de  Djémazi-ul-ewel,  588-1182,  <  Moi  le  serviteur  des  deux 
sanctuaires,  (La  Mecque  et  Médine,)j'ai  reçu  d'Egypte  une 
lettre  m'annonçant  la  capture  d'un  navire  de  guerre  franc,  chargé 
de  fuyards  sortis  de  CP.  à  la  suite  d'une  sédition  qui  a  éclaté 
dans  cette  ville,  entre  les  grecs  et  les  francs.  Le  nombre  des 
fuyards  s'est  élevé  à  50.000  ;  ils  se  sont  jetés  sur  des  navires, 
dont  celui-ci  faisait  partie;  parmi  eux  se  trouvaient  des  per- 
sonnages considérables,  et  des  gens  de  marque  ;  qui  sont  tom- 
bés entre  nos  mains  avec  leurs  trésors  :  les  Guerriers  de  la 
Foi,  une  fois  de  plus,  ont  été  de  la  sorte,  l'objet  des  faveurs  de 
la  bonté  divine  ;  les  nôtres  en  ont  tué  le  plus  grand  nombre  et 
fait  qiiatre  cents  prisonniers.  '  » 

Après  ces  événements,  et  pendant  tout  le  règne  d'Audronic, 
Yénitiens,  Pisans  et  Génois  se  tinrent  éloignés  de  CP.  ;  mais 
quand  son  successeur  Isaac  l'Ange,  parvint  au  trône,  on  songea 
à  renouveler  les  anciennes  relations  et  diverses  tentatives  furent 

'  Manuscrit  arabe  de  ma  ooUeclion. 


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—  37  — 

faites  dans  ce  sens  par  les  uns  et  par  les  autres.  Finalement 
Guglielmo  Tomelio  et  Guido  Spinola  furent  envoyés  de  Gènes  à 
CP,  avec  mission  d'obtenir  le  renouvellement  des  anciens  privi- 
lèges ;  et  en  avril  6700, 10°  indiction  {H92),  l'empereur  rendit 
à  la  république  l'ancien  emboluni  de  Coparia,  avec  son  échelle, 
de  plus  une  seconde  échelle  et  divers  bâtiments,  voisins  de  ce 
bazar  ;  puis  enQn  le  palais  d'une  ancienne  famille  impériale,  de 
Calamanos  ou  Calanitis,  autrefois  d'une  grande  magnificence,  et 
renfermant  deux  églises  '. 

Dans  la  même  année  1192,  les  Pisans  à  leur  tour,  sollicitèrent 
Je  renouvellement  des  privilèges  à  eux  accordés  par  Alescis  et 
Manuel  à  la  Communauté  de  Pise  dans  la  Grande  Ville  de  CP., 
c'est-à-dire  i  l'emboluin,  les  deux  (grandes  églises,  de  l'apôtre 
St.  Pierre  et  de  St.  Nicolas  bilties  antérieurement  dans  l'enceinte 
de  leur  quartier,  l'échelle  maritime  dans  la  localité  dite  Ycanati, 
et  de  plus,  l'envoi  à  Pise  des  dons  et  subsides  habituels.-  »  Le 
chrysobulle  adhérant  à  ces  demandes,  et  signé  €  Isacco,  in 
Christo  signore,imperator  fidèle,  e  rettore  dei  Romani,  Angiolo 
et  juré  I  per  corporal  sacramento  »  est  scellé  du  sceau  des  deux 
églises  des  Pisans  de  CP.  c'est-à-dire  du  chef  des  apôtres,  St. 
Pierre  et  St.  Paul  et  de  St.  Nicolas.  ^ 

Selon  M.  le  Dr.  Dethier,  l'église  des  Pisans  se  trouvait,  sous 
Comnène,  au  Nord  de  Ste-Sophie.  Le  même  savant  a  trouvé  ré- 
cemment dans  les  décombres  d'une  galerie  en  démolition,  con- 
duisant autrefois  de  Ste-Sophie  à  Ste-Irène,  une  brique  comme- 
morative  portant  cette  marque 

t  nETPOY 
MAPT.  H. 

Monogramme  de  MartjTios,  abbè  de  St.  Pierre,  qui  a  signé 
an  Concile  tenu  sous  le  patriarche  Menas,  qui  occupa  le  trône 

'  M.  Paspati  me  ra[iporte  que  dans  l'oraison  funûbra  d'Alexis,  prononcée 
par  EuHtftche,  arche^'Ëque  de  Salonique.  ce  prélat  ilisait  que  les  faveurs  ac- 
cordées par  ce  prince  au.\  Latins,  en  vue  d'obtenir  le  concours  de  l'Europe 
pour  résister  aux  invasions  de  l'Orient,  araient  eu  pour  résultat  de  porter 
l'accroisBcment  des  Latins  dans  la  Capitale,  jus^iu'au  nombre  de  60.000  ; 

'  SimoDÎ  (Chev.  de)  loc.  laurl.  162. 

3  Fanucai,  p.  148.  Le  te\te  grec  de  ce  privilégn  est  rajiporté  en  entier  dans 
les  Acta  et  diplomata  grirr-a.  de  Miklo"ich  et  Muller.  Vienne  18C5,  p,  8.  Et 
par  Buchon  Rei-herchei  Utr  la  prinripnulé  frrrm:<iise  île  Mof<^,  (Appendice.) 


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patriarcal  de  536  à  553.  Cette  galerie  qui  aurait  été  édifiée  en 
536,  pour  le  Concile  présidé  à  OP.  par  le  Pape  Agapit,  et  dans 
lequel  le  patriarche  Antliyme  fut  déposé,  servait  de  lieu  de  pas- 
sage aux  Pères  du  Concile  pour  se  rendre  de  la  métropole  à  Ste- 
Irène;  elle  aurait  été  construite  aux  frais  des  différentes  églises 
de  la  capitale  :  le  supérieur  de  cliacune  des  églises,  ayant  con- 
tribué à  la  construction  de  cette  galerie,  avait  apposé  sa  marque 
sur  quelques-unes  des  briques  fournies  par  ses  soins. 

On  a  trouvé  également  dans  la  même  galerie  une  autre  brique 
au  nom  d'un  abbé  du  monastère  d'Hormisdas,  des  SS.  Sergius 
et  Bacchus,  cité  plus  haut  '. 

Le  cfarysobulle  de  1192,  dans  son  contexte,  mentionne  aussi 
en  ces  termes  *  la  grande  église  érigée  par  les  Pisans,  sous  le 
vocable  du  Saint  Apôtre  Pierre,  i  Dans  la  description  des  terrains 
nouvellement  concédés  aux  Pisans,  il  parle  d'une  ruelle,  sise 
au  nord  de  cette  église,  séparant  la  concession  actuelle,  des  ter- 
rains détruits  du  monastère  de  S.  Antoine;  diverses  bâtisses 
du  môme  monastère  (Kyr  Antoniou)  parallèles  à  la  ruelle  sise 
au  nord  de  St-Pierre,  et  arrivant  jusqu'au  Nêro-dromos,  (Canal) 
des  Amalfitains,  puis  aux  murailles  de  CP.,  et  à  la  porte  Icana- 
tissa-,  dans  les  dites  murailles.  On  lit  aussi  plus  loin  dans  le 
même  diplôme  :  a  il  y  a  là  une  échelle  sise,  ab  antiquo,  dans 
la  partie  extérieure  delà  çorieiNéorion.  vis-à-vis  le  monastère 
apo-logotheton,  et  dite  dipli;  cette  échelle  eSt  fermée,  paral- 
lèlement à  la  voie  publique,  par  des  barrières  {parmaqlyq]  afin 
d'empêcher  eu  ces  endroits  la  construction  des  maisons,  on  y 
voit  seulement  une  échoppe  de  changeur  de  monnaies.  Depuis 
cette  échelle  jusqu'à  celle  du  monastère  de  Kyr  Antonios  & 
i'ouest,  on  en  trouve  trois  autres,  qui  ont,  vers  la  muraille  de 
la  ville,  des  terrains  et  des  bâtisses  en  dépendant.  Des  deux 
échelles  pisanes,  l'une,  à  l'ouest  de  la  porte  Néorion,  possède 
un  terrain  tenant  lieu  de  dépôt,  et  sur  lequel  les  Pisans  élève- 
ront des  baraques  du  genre  de  celles  qui  y  étaient  ;  sur  les  deux 
autres,  il  y  a  des  baraques  neuves.  Cette  échelle,  sise  à  l'ouest 
de  la  DipUcala,  est  d'une  longueur  de  83  coudées  ;  l'autre  a 


,V.  I^  Turquie  du  15  déc.  1873, 

'  M,  Paspati  pense  que  la  porte  Icanatisso  devait  se  trouve 
aujourd'hui  léniDjami. 


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7  pics  1/2  et  se  trouve  éloignée  de  l'échelle  du  monastère  de 
S.  Antoine  de  23  coudées;  de  celui-ci  à  la  mer,  il  y  eu  a  30. 
But  ces  trois  éclielles  '  il  y  a  trois  boutiques  de  changeurs  ;  au 
delà  de  ces  trois  échelles  se  trouve  celle  du  monastère  de 
S.  Antoine,  qui  avec  les  bâtiments  en  dépendant,  et  proches  de 
la  mer,  n'a  pas  été  concédée  aux  Pisans,  et  doit  rester  en  la  pos- 
session de  ce  monastère.  En  dehors  de  l'échelle  de  S.  Antoine, 
non  comprise  dans  la  concession  accordée  aux  Pisans,  Je  leur 
concède  celle  donnée  précédemment  par  moi  à  l'hôpital  des 
40  martyrs,  nouvellement  créé,  elle  a  20  coudées  de  longueur, 
et  avoisine,  à  l'ouest,  la  porte  Ycanatissa  ;  la  longueur  des  bâti- 
ments sis  vers  la  muraille,y  compris  celle  de  la  porte  Ycanatissa, 
est  de  19  coudées;  la  porte  devra  rester  libre  de  toute  cons- 
truction, et  les  Pisans  ne  devront  l'exhausser  d'aucune  bâtisse 
elle  devra  rester  dans  l'état  où  elle  se  trouve  présentement-.  » 

<  A  côté  des  échelles  ainsi  concédée^  aux  Latins,  >  et  qui  rap- 
pellent, SOQS  certains  rapports,  ce  qui  existe  aujourd'hui,  sur  la 
rive  opposée,pour  les  opérations  commerciales  de  la  compagnie 
^nçaise  des  Messageries  maritimes,  »  échelles  sur  lesquelles, 
dit  M.Paapatî,  les  agents  du  fisc  venaient  prélever  certains  droits 
régaliens,  sans  nuire  à  ceux  de  l'administration  de  la  colonie, 
et,  pour  son  compte,  se  trouvaient  encore  d'autres  échelles,  af- 
fectées k  l'usage  des  indigènes,  » 

.Uexis  III  monta  sur  le  trône  en  1105,  après  avoir  enlevé  la 
couronne  à  son  frère  Isaac  l'Ange.  Trois  ans  après  son  avène- 
ment une  nouvelle  rupture  éclata  entre  les  Génois  et  l'empire, 
à  l'occasion  d'actes  de  piraterie,  commis  par  le  génois  Gaffo- 
rio,  d'entente  et  au  nom  de  ses  compatriotes  ;  tant  est-il  que 
l'empereur,  selon  le  rapport  de  Canale^,  en  représailles  de  ces 
hostilités  «  feudi,  possessioni,  mercanzie,  danari  toglieva;  il 
palazzo  consolare  di  Calamos  accordava  ad  alloggio  militare 
per  le  baade  Alemanne,  le  quali  ne  facevano  guasto  ed  obbro- 
brio.  > 


<  Il  parait  ressortir  de  ce  passage  que  l'échelle  des  Amallltains  avait  été 
donnée  également  eux  Pisans. 

i  Je  dois  cette  traduction  de  l'original  grec  à  l'obligeante  amitié  de  M.  Pa- 
ipati.  La  version  latine  est  d'ailleurs  rapjxirlt'e  par  lîuchon,  dans  ses  Re- 
cherrkc*  sur  la  prirwlpnuté  fmiit:nisc  de  Mori'c.  Il,  72. 

»  .Vuoea  HUtarin  rlelta  republi'ea  -li  Genoca  :  Firenze,  ISfiO  p.  365,  II. 


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—  40  — 

Tontefois,  Alexis  oublia  bientôt  ses  rancunes  contre  la  répu- 
blique, et  en  1199,  il  lui  envoya  un  ambassadeur  à  l'efTet  de  re- 
nouveler les  traités  anciens.  On  ne  saurait  dire  si  la  république 
y  répondit  immédiatement  ;  mais  elle  remit  à  Ottobono  délia 
Croce, envoyé  en  ambassade  auprès  de  l'empereur'  des  instruc- 
tions, datées  du  15  juin  1201,  où  l'on  trouve  ce  qui  suit:* 
€  Art.  2,  Sîa  ricuperato  il  palazzo  di  Calamos,  cou  chiesa, 
bagno,  cisterne  d'acqua  corrente  e  corle  consolare,  nell'antico 
modo,  e  restoro  del  palazzo  a  speae  impériale,  per  cui  venga 
restituito  a  quella  forma  e  bontà  che  aveva  quando  fu  concesso 
ai  Genovesi,  e  venne  poi  guastato  e  distrutto  dagli  Alemanni, 
che  l'imperatore  vi  pose  ad  allo^gio. 

<  Z'  Si  riacquistiil  possesso  dell'^m&o/o  e  di  ambi  gli  scali 
che  i  Genovesi  soleano  avère  con  tutte  le  pertinenze,  l'area  e  lo 
spazio  ov'erano  riposte  le  case  loro  ;  similmente  altre  due  case 
con  molini  situati  verso  l'embolo  dei  Pisant,  e  altre  due  verso 
il  tempio  santa  Sofia,  corne  fu  concesso  ai  predetti  legati  Gu- 
glielmo  Tonello  e  Guido  Spinola. 

4°  Si  procacci  il  monastero  al  disotto  l'embolo  genovese 
coH'area  e  le  case  circostanti  âno  agli  scali  che  sono  al  mare,  e 
ciâ  aSinché  l'embolo  cogli  scali  sieno  congiunti,  e  fatto  un  solo 


«  5°  Se  il  monastero  colle  case  non  potessero  ottenersi,  al- 
meno  si  abbia  la  chiesa,  la  quale  ë  posta  tra  l'embolo  ed  il  pa- 
lazzo di  Calamos;  in  tal  modo  saranno  uniti  l'embolo,  il  pa- 
lazzo e  gli  scali  situati  fra  i  Genovesi  e  i  Pisani...  » 

La  concession  génoise,  comprenant  une  étendue  de  terrain 
égale  environ  à  l'ensemble  de  celle  des  Amalûtains  et  des  Pisans 
réunis,  se  trouvait  à  l'est  du  monastère  Apo-Loghotheton, 
et  remontait,  selon  le  témoignage  rapporté  ci-dessus  des  ins- 
tructions données  à  Ottobono  di  Croce,  <  usque  ad  Sanctam 
Sophîam,  >  comme  il  a  été  dit  plus  haut,  c  Getl«  conces- 
sion, ajoute  M.  Paspati,  comprenait  dans  sa  circonscription, 
le  palais  d'une  ancienne  famille  impériale  du  nom  de  Cala- 

'  D'après  les  Arta  Grceca. 

'  Cette  négolàation  aurait  été  couronnée  de  euccés,  jar  le  renouvellement 
des  anciens  privilèges  et  la  restitution  de  l'embolo  et  du  Palais  Calamano 
(ou  Chalama,  suivant  les  textes)  augmentés  de  certains  établissements  et 
d'une  échelle.  Cf.  De  Simoni  l/x:  lawl.  p.  166-168. 


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—  41  — 

mano  '  ou  Botoniatis',ainsi  qu'une  église  grecque  qui  aurait  été 
cédée  aux  Génois;  aux  deux  extrémités  de  ce  terrain,  se  trou- 
vaient aussi  deux  échelles,  dont  la  jouissance  fut  également 
donnée  aux  Génois. 

Canale  répartit  en  trois  époques  principales  les  concessions 
attribuées  aux  Génois  dans  CP. 

La  première,  celles  faites  par  Manuel  (H69),  relativement 
peu  considérables  ; 

La  seconde,  celles  accordées  par  Isaac  (1193),  beaucoup  plus 
importantes,  et  s'étendant  sur  un  plus  grand  espace  ; 

La  troisième  enûn,  les  concessions  encore  plus  nombreuses, 
d'Alexis  (1202)  à  Ottobono,  parmi  lesquelles  des  églises,  dont 
on  lit  la  description  suivante  :  <  Una  chiesa  cou  tribuna  soste- 
nuta  da  qunttro  colonne,  uiia  di  esse  bianca,  sopravi  tavole 
marmoree  ed  archi,  ed  angeli,  e  figure  dorate  ;  nella  chiesa, 
altre  colonne  coii  zone  di  bronzo;  in  mezzo  un  tempietto  di 
legno  dorato,  con  altare  sostenuto  da  quattro  altre  colonne  cou 
due  porte  ;  sopra  quella  che  guardava  ad  occidente  una  sculp- 
tura  rappresentante  l'imagine  di  Gesu  Ghristo  ;  il  pavimento  era 
di  marmo  verde  incrostato  a  diverai  colori... 

«  Un  altra  chiesa  in  rovina  con  colonne,  curiu  consolare, 
bagni  di  acqua  tepida  e  letti  di  bagnanti.'  > 

En  terminant  la  savante  dissertation,  citée  plus  haut,  et  à 
laquelle  nous  avons  fait  d'importants  et  utiles  emprunts,  M.  de 
Simoni''  résume  ainsi  ce  qui  a  trait  aux  échelles  génoises  dans 
CP.  pour  cette  période  c  le  diplAme  de  1 1 70  concéda  aux  Génois 
la  première  échelle,  sise  à  l'est,  au  delà  d'une  des  tours  défendant 
la  muraille  de  la  ville,  h.  la  porte  dite  Bono  ;  par  celui  de  1192, 
on  y  adjoignit  une  autre  échelle,  à  l'est  de  la  première  ;  et  fina- 
lement par  celui  de  1203,  une  troisième  échelle,  sise  à  l'ouest  de 
la  plus  ancienne  ;  toutes  les  trois  ayant  appartenu  au  monastère 
de  Manuel,  ou  de  S.  Pantatèon.  Sur  le  parcours  de  ces  échelles, 
le  long  des  murs,  se  trouvaient  des  habitations  arrivant  jusqu'à 
la  muraille;  et,  çà  et  là,  des  échelles  ou  débarcadères  de  moindre 

I  Deux  princes  du  nom  de  Caloman  régnèrent  sur  lea  Bulgares,  le  premier 
en  1242,  le  second  en  125â.  {An  ih  rMlier  leg  ilnlet.  p.  3S5.) 

)  Nicépbore  Botoniate  Tut  déclaré  em[>ereur  en  Orient  et  ftt  en  cette  qua- 
lité, son  entrée  à  CP.  le  25  mars  1078.  (Art  île  rfri/kr  les  ilnlc».  > 

•  L'^.  laud.  p.  175-176. 


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_  43  ~ 

importance,  construites  en  bois.  Dans  le  chrysobulle  de  1202, 
l'empereur  ne  voulut  pas  accorder  aux  Génois  le  monastère  de 
Manuel,  demandé  par  eux,  il  ne  leur  accorda  qu'une  seule  des 
deux  échelles  sépamat  leui'S  ancienaes  échelles  de  celles  des 
Pisans'.  » 

Les  haines  excitées  de  part  et  d'autre  par  le  soulèvement 
de  1182  s'étant  apaisées,  Gènes  envoya,  en  1301,  un  nouvel 
ambassadeur  auprès  d'Alexis  III  Comnène,  à  l'effet  de  négocier 
le  renouvellement  des  anciens  pactes,  et  d'obtenir  i:  des  maisons 
prés  le  fondac  des  Pisans,  comme  aussi  dans  le  voisinage  de 
Sainte -Sophie  ;  mais  la  marche  des  croisés  franco-vénitiens, 
avec  le  projet  avoué  de  détrôner  ce  prince,  entrava  les  négocia- 
tions et  excita  une  telle  indignation  dans  le  peuple,  que  l'em- 
pereur, envue  de  préserver  lesjoursde  l'envoyé  génois,  l'engagea 
à  retourner  secrètement  dans  son  pays'.  En  elTet,  le  filsd'Isaac 
l'Ange,  devenu  plus  tard  empereur  sous  le  nom  d'Alexis  IV, 
voulant  parvenir  à  la  délivrance  de.  son  père,  Isaac  l'Ange,  dé- 
trôné par  son  oncle  Alexis  III,  s'était  rendu  en  Allemagne, 
puis  en  Italie  et  à  Venise,  pour  solliciter  des  secours^  ;  et  il 
avait  signé  avec  la  sérénissime  république  un  traité  stipulant 
que  l'empereur  son  père,  une  fois  rétabli  sur  le  trône,  s'emploie- 
rait à  l'établissement  de  l'obédience  envers  le  souverain  pontife, 
ainsi  qu'à  la  substitution  du  rit  latin  au  rit  grec  *.  On  sait,  par 
un  livre  de  publication  encore  récente^,  comment  la  conduite 
de  ce  prince,  qualifié  «d'horrible  fléau  de  sa  patrie,  >  fut  ap- 
préciée par  ses  coreligionnaires.  Toutefois,  tiré  de  sa  prison, 
Isaac  l'Ange  fut  replacé  sur  le  trône  avec  son  (ils  par  les  croisés; 
mais  ce  dernier  se  fit  tellement  détester  de  se^  sujets  par  ses 
procédés,  ou  plutôt  par  le  fait  même  de  ses  engagementsenvers 
les  Latins,  et  dont  ceux-ci  réclamaient  l'exécution",  qu'un  cer- 

I  Voir  le  plan  ci-contre  de  CP.  indiquant  les  points  occupés  par  les  diffé- 
rentes colonies  occidentales. 

'  MUtltz,  II,  I,  84 

'  Selon  le  rapport  de  t-'nnwfi,  \,  12,  les  Pisans  mécontents  d'Alexis  III.  à 
cause  des  obstacles  qu'ils  avaient  rencontrés,  dans  le  renouvellement  de 
leurs  privilèges,  auraient  facilité  l'évasion  du  jeune  Alexis. 

•.Sauli,  Utc.  laal.  I,  3t. 

*  Dc»i'i'iplion'leCP.anrieiiiic  et  »no''orHc.parle[)atriarcheConstantiu8,p.81. 

"  Après  la  restauration  d'Isaac  r.\ng8  sur  le  trône,  par  les  Croisés  : 
•  mo.stra  Joffroi  de  Villehardoin,  li  mareschaux  de  Champaigne.  la  parole,  et 


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—  43  — 

taÏD  Murzufle  se  &t  proclamer  empereur,  et  fit  mettre  à  mort  le 
malheureux  protégé  des  Latins.  Croyant  voir,  dans  cet  acte,  la 
violation  des  promesses  qui  leur  avaient  été  faites,  les  Latins, 
entraînés  d'ailleurs  par  les  Vénitiens,  dont  ils  servaient  ainsi  la 
politique  intéressée  et  les  rivalités,  firent  le  siège  de  Gonstan- 
tinople. 

dit  à  l'empereur  Kyrsac  {Kijriot  [taar)  :  Voici  lea  convenances  faites  avec 
votre  flls  :  tôt  el  premier  chief,  mettre  tôt  l'empire  da  Homanie  à  l'obédience 
de  Rome,  dont  il  est  pieçà  partie.  »  {C/uvnique,  éd.  Buchon  1M28,  p.  7^,),  On 
lit  dana  ViUehardouin  (Ed.  de  Paris  1S57,  p.  74)  :  n  toutes  les  rues  par  où 
passèrent  les  ambassadeurs  des  croisés  étaient  garnies,  jusqu'au  palais  dei 
BlaquerncB.  d'Englois  et  de  Danois,  à  totes  les  haches,  u 


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CHAPITRE  U. 


EMPIRE    LATIN    DE    CONSTANTINOrLB. 


Nous  avons  assisté  jusqu'ici  aux  efforts  des  Occidentaux, 
Amalfitains,  Vénitiens,  Génois  et  Pisans,  pour  s'établir  à  CF. 
et  nous  avons  constaté  les  concessions  faites  par  les  empereurs 
grecs,  à  leurs  instances  tet  à  leur  richesse,  L'animosité  à  peine 
déguisée  de  ces  derniers,  leurs  tergiversations  continuelles,  leur 
mauvaise  foi  évidente,  secondées  par  la  haine  à  la  fois  reli- 
gieuse et  nationale  des  Grecs  contre  les  Latins,  avaient  amené 
des  faits  déplorables,  comme  la  catastrophe  de  1 183,  mais  avaient 
animé  semblablement  les  Latins  contre  les  Grecs...  L'orage 
éclata  à  l'occasion  de  la  quatrième  croisade. 

Isaac  l'Ange  avait  été  détrôné,  mis  en  prison  et  aveuglé  par 
son  frère  Alexis  III  :  son  fils  qui  régna  depuis  sous  le  nom 
d'Alexis  IV,  tenta  tous  les  moyens  pour  délivrer  son  père,  le  ré- 
tablir sur  le  trône,  ou,  du  moins  y  monter  lui-même.  Il  envoya 
donc  une  ambassade  aux  croisés  qui  venaient  de  s'emparer  de 
Zara,  29  Nov,  1203.  Il  leur  faisait  les  plus  l)eUe3  promesses  et 
s'engageait,  à  peine  au  pouvoir,  à  les  accompagner  avec  une 
armée  nombreuse  et  à  leur  fournir  d'abondants  subsides.  Les 
croisés  se  laissèrent  tromper,  et  le  lendemain  de  Pâques, 
7  avril,  1303,  ils  se  mettaient  en  route  pour  Constantinople  '. 

1  Les  V<?nitienB  ^laLent  d'accord  arec  Sultan,  Melik-el-Adhel,  qui  leur 
accorda,  eo  reconnaissance  de  ce  qu'ils  avaient  détourné  la  croisade  de 
l'Egypte,  des  privilûges  et  franchises  considéiablea.  {Mas-Lati-le.  Irailéi  de 
paij)  et  lie  commerce,  supplément,  p.  170.) 


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—  45  — 

CependaDt  ie  grand  Pape  Innocent  in  était  formellement  op- 
posé à  cette  expédition.  Entre  autres  manifestations  de  sa  volon- 
té, il  écrivait  aux  évèques  de  Troyes  et  de  Boissons,  qui  se 
IrouTaient  à  l'armée,  une  épltre  (VI,  231-232,)  dans  laquelle, 
après  avoir  rappelé  la  peine  dont  l'avait  affecté  la  prise  de  Zara, 
et  leur  avoir  redit  les  conditions  sévères  et  formelles  qu'il  avait 
mises  à  leur  absolution,  et  la  promesse  que  les  croisés  avaient 
faite  et  renouvelée  solennellement  d'obéir  désormais  aux  in- 
jonctions pontilicales,  il  poursuivait  en  ces  termes  :  t  Nous 
leur  avions  spécialement  interdit  d'occuper  ou  de  piller,  soos 
aucun  prétexte,  les  terres  des  Grecs.  Qu'elles  ne  soient  pas  en- 
tièrement soumises  au  siège  apostolique,  que  des  préjugés  sé- 
culaires les  séparent  encore  de  nous,  que  l'empereur  de  Cons- 
tantinople  ait  usurpé  le  pouvoir  en  déposant  son  frère,  en  lui 
faisant  souffrir  les  plus  cruels  traitements,  ce  n'était  pas  aux 
libérateurs  du  Saint-Sépulcre,  disions-nous,  qu'il  appartenait 
de  juger  ou  de  punir  ces  crimes.  Ils  ont  arboré  l'étendard  du 
salut  dans  un  autre  but,  pour  aller  à  la  conquête  de  la  Terre- 
Sainte.  Par  les  téméraires  engagements  qu'ils  ont  contractés, 
ils  encourent  de  nouveau  l'anathème  ;  car  beaucoup  de  nos 
sages  conseillers  estiment  avec  nous  qu'ils  ne  sont  pas  exempts 
de  parjure,  agissant  contre  leurs  serments  antérieurs.  Sans 
dout«  nous  voudrions  que,  par  leur  influence  morale  et  leurs 
nobles  sentiments,  l'Église  grecque  se  réunit  k  l'Église  Romaine, 
de  manière  à  ne  former  qu'un  seul  troupeau  sous  un  même  pas- 
teur ;  notre  sollicitude  paternelle  doit  néanmoins,  avant  tout, 
maintenir  ses  enfants  dans  la  voie  droite,  ou  les  y  ramener, 
pour  que  leur  exemple  y  rappelle  ensuite  les  frères  séparés. 
Agissez  vous-mêmes  en  ce  sens,  je  vous  en  conjure,  et  je  vous 
l'ordonne,  de  peur  que  vous  ne  soyez  enveloppés  dans  la  con- 
damnation à  laqnelle  vous  les  exposeriez  par  votre  condescen- 
dance. »(Patrol.  lat:  T.  CCXV,  col  261-263.) 

Malgré  tout  cela  les  croisés  persistèrent,  et  la  flotte  arriva, 
le  23  juin  1203,  en  vue  de  CP..  Les  chefs  tinrent  conseil  le  soir, 
dans  une  église  de  Saint-Étienne,  sur  la  cAte  d'Asie  ;  le  lende- 
main, jour  de  saint  Jean-Baptiste  la  flotte  vint  se  déployer 
devant  la  ville,  si  près  des  murailles  que  plusieurs  vaisseaux 
furent  atteints  par  les  traits  et  les  pierres  qu'on  lançait  du  haut 
des  remparts.  Ne  pouvant  forcer  la  chaîne  qui  fermait  l'entrée 


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du  port,  elle  alla  mouiller  à  Chrysopolls,  (Scutari)  ofi  elle  fiit 
rejointe  par  l'armée  de  terre. 

Nous  ne  pouvons  pas  raconter  ici,  par  le  détail,  toutes  les 
péripéties  du  siège,  ni  dire  comment  Isaac  l'Ange  fut  tiré  de 
prison  par  les  croisés,  et  remis  sur  le  trône  pour  y  régner,  de 
concert  avec  son  fils  Alexis  IV,  ni  comment  ce  dernier  fat  dé- 
trôné et  mis  à  mort  par  un  usurpateur,  appelé  Mursuâe,  ni 
comment  les  croisés  se  rendirent  maîtres  de  la  ville,  le  13 
avril  1304,  ni  enfin  comment  ils  furent  amenés  à  constituer  un 
empereur  Latin,  le  comte  de  Flandre,  Baudouin.  Tous  ces 
faits  trouveront  leur  place  dans  les  extraits  que  nous  emprun- 
tons, pour  la  plupart,  aux  écrivains  contemporains  et  que  nous 
reproduisons  dans  leur  naïf  langage. 

On  trouve  dans  Buchon  '  sur  ces  événements  le  rapport  sui- 
vant :  t  Quand  ils  virent  (les  Grecs)  que  li  crestiens  appro- 
choient  de  CP.,  si  firent  une  caine  lever  qui  étoit  près  du  port, 
pour  chou  que  les  nés  n'entraissent  dedans  le  port.  Or  vous 
dirai  combien  chele  caine  était  longue  :  plus  de  trois  b-aitiés 
d'arc;  et  si  étoit  aussi  grosse. comme  le  bras  d'un  homme.  Li 
uns  des  corons  de  chele  caine  estoit  à  une  des  tours  de  CP.,  li 
autres  estoit  à  une  vile  que  on  apele  Père  :  là  manoient  li  Juis 
de  OP.. 

c  Au  chief  de  chele  rue  avait  une  tour,  là  où  li  uns  des  kiés 
de  chele  caine  estoit,  qui  de  CP.  venoit  -.  Chele  tour  estoit 
moult  bien  garnie  pour  ce  qu'ils  savoient  bien  qu'ils  prendroient 
de  chele  part  terre.  Et  en  tel  manière  l'avoient  garnie  pour  la 
caine  garder.  Or  vous  dirai  coment  chele  tours  avoit  nom  :  elle 
avoit  nom  c  le  tours  de  Gaifl((îs>.*Là  fit  Sainct  Pauls  une  par- 
tie de  ses  épistres^.  Or  errèrent  tant,  li  pèlerin  tranchais,  qu'ils 

1  loc.  laud.  I,  p.  <16.  Croiiade  ,1e  CP.,  Mb  /le  la  Bibliot.  Nat  ;  7188,  Ap- 
pe/i'lke  atm  lieckerckes  him.  gur  la  Prinrip,  fran.  de  Marée.  1,  4,  6. 

'  Fanucoî  dit  loc.  laud.  I,  p.  189  ;  une  forte  chaîne  fermait  le  port,  »  dal 
eatteUo  di  Golala  fino  à  l'arropoU.  » 

'  L'auteui  da  cette  chronique  a  confondu  ici  probablement  St.  Paui  aveo 
S.  Andrâ  ;  le  patriarche  Conalaatios,  comme  d'autre  part,  le  Srriptara;  Sa- 
cne  curêuê  compléta»,  (Migne,  Paris  1840),  l'Histoire  uninerselte  da  l'Eglise 
catholique  de  Rokiiincher  (Pari»,  1842)  etc.,  ne  font  aucune  mention  de  la 
venue  à  CP.  de  l'Apôtre  des  Gentils;  le  second  de  ces  ouvrages  dit  seule- 
nient(p.  375)  «  qu'après  avoir  embrassé  les  ildéles  do  la  Troade.S,  Paul 
traversa  l'Hellespont,  pour  se  rendre  eu  Macédoine.  Ses  difréreutes  épitrea 


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—  47  — 

vinrent  près  de  CP.  mais  ne  pooient  entrer  dedans  le  port  ;  ains 
arrivèrent  d'autre  part,  dessus  la  Juerie,  près  d'un  lieu  qu'on 
apele  le  J^oupe^ôeye.  La  arrivèrent  H  franchois  et  prirent  terre. 
Quant  che  vint  le  lendemain,  que  no  gent  furent  arrivé  d'autre 
part  de  CF.,  si  allèrent  assalir  à  le  tour  de  Galatas,  si  ni  ot  mie 
grant  assaut  ;  et  sili  prirent '.  Et  boutèrent  le  fu  en  le  vile  ausJuis, 
et  si  desconflrent  lis  Grifons  de  CP.  venus  pour  le  tour  rescorre. 
Et  moult  y  en  ot  de  noies  quant  on  depescha  le  caine,  qui  sus 
étoient  montés  pour  fuier  en  CP.  en  garison  ;  car  tantôt  come  11 
crestiens  orent  de  prise  chele  tour,  ils  dépêchèrent  le  caine  pour 
les  nés  entrer  dedans  le  vile  et  ils  orent  délivré  le  port,  si 
firent  les  nés  entrer  dans  le  port.  Et  alait  tout  outre,  ousque  au 
cbief,  devant  un  castel  qui  est  au  delà  de  CP.  devers  terre,  qui 
a  nom  Blaqueme,  qui  estoit  un  des  manoirs  l'empereur,  et  là 
estoit-il  le  plus.  > 

Le  même  auteur  ^oute  que  les  croisés  élurent  Murzufle,  pour 
batlly  (Régentl  de  l'empire-  t  celui-ci  les  engages,  pour  que 
meslée  ne  surgit  entre  eux  d'aller  se  hebergier  en  Père,  à  Je 
tour  de  Galatos  où  les  Juis  manoient  devant  qu'ils  fussent  ars; 
et  je  vous  eovoiroie  de  la  viande  asses,  et  querroie  et  pourclie- 
rôle  que  vous  ories  les  convenenches  teles  come  on  les  vous  de- 
veroit.  Franchois  et  Vénitiens  après  en  avoir  conféré  allèrent 
s'établir  à  la  tour  de  Galatas.  > 


ont  été  éerilea  à  Corinthe.  Èphése,  Philipiies  de  Macédoine,  Rome  et  Nico- 
polia.  ■  Le  patriaichB  Constantius  rapporte  (p,  1G3  »  qu'un  peu  au-dessus 
de  Top-HaoB,  (Où  l'apôfre  paraît  avoir  débarqué)  S,  André  prêcha,  à  Fon- 
douglou,  la  parole  de  vérité  aux  Ityzantins,  bâtit  une  église,  et  sacra  Sta- 
cbya,  premier  Ëvéque  de  Byzance.  c 

I  On  Ut  dans  Villehardouin  (.Ed.  île  Wamy.  p.  55-56)  <  159,  le  conseil  de 
DOB  barons  fut  qu'ils  se  logeraient  sur  le  port,  devant  la  tour  de  Galatas,  où 
tenait  la  chaîne  qui  venait  de  CP-,  et  sachez  que  par  cette  chaîne  devait 
entrer  qui  voulait  entrer  au  port  de  CP,,  et  nos  barons  virent  que  s'ils  ns 
prenaient  cette  tour  et  rompaient  cette  chaîne,  ils  étaient  morts  et  mal  lo- 
tii...  160,et  le  lendemain,  quand  vint  l'heure  de  tierce,ceux  de  la  tour  de  Ga- 
latbaa  llrent  une  attaque  avec  ceux  qui,  de  CP.,  venaient  aider  en  barques- 
ISS...  ainsi  fat  pris  lech&leau  de  Galathas,  et  le  port  fut  gagné  par  force:* 

'  Voir  sur  cette  dignité  nos  Traité*  et  Capitulation*  île  la  France  en 
Orient,  p.  36  8t  passim.  Ballos  ou  Bailos  fut  le  terme  employé  plus  tard 
pour  désigner,en  Turquie  les  ambassadeurs  et  consuls  é (rangers. Kiy mol ogi- 
queroent  BailU  ou  Bahulo  •  porte-fardeau  »  équivalent  du  mot  arabe  Ouézîr, 
Véiir,  qui  a  la  même  signification.  Cf.  sur  ce  mot.  Villehardouin  éd.  de 
Pari»  1857,  p.  75. 


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On  lit  dans  les  Fontes  (XII,  309)  sur  ces  événements,  celte 
lettre  de  Hugues, Comte  de  S.  Po!,datéede  1303»  Inde  perresi- 
mus  ad  quandam  turrim  fortissimam,  quœ  Galatha  nuncupa- 
tur,  in  qua  firmabatur  catena  ferrea,  grossa  nimis,  que  posita 
super  ligna  transversa,  mare  transnatabat,  attingebat  usque  ad 

muros  civitatis  :  catena  Ula  portum  servabat In  turri  si- 

quidem  sepe  dicta,  erant  serjanti  anglici,  pisani,  livorniani, 
dachi.  Ad  eam  protegendam  qui  esibant  turrim  et  introibant, 
sicut  et  quando  volebant,  ad  sagittandum  nostros.  > 

Plus  loin  dans  une  chronique  française  inédite  (p.  347.) 
«  Après  eurent  conseil,  se  ils  se  logeroient  devant  la  tour  de 
Galathas,  et  ils  s'y  logèrent.  Jusqu'à  CF.  avait  une  chaîne  moult 
grosse  qui  tenoit  les  nefs,  que  elles  ne  pooient  entrer  au  port, 

sans  le  congié  de  ceux  de  la  tour Ainsi  fu  pris  le  chastel 

de  Galathas  et  le  port  gaignlé.  » 

Déjà,  au  rapport  de  Villehardouin  ',  <  et  pendant  qu'Alexis 
était  en  campagne  avec  son  armée,  il  survint  un  insigne  malheur 
et  un  grand  désastre  à  Constantinople,  an  immense -incendie  al- 
lumé par  une  querelle  entre  les  Grecs  et  les  Latins-,  qui  y  es- 
toient  estagier,  dont  moult  y  en  avoit...  et  quant  li  baron  de 
l'ost  qui,  de  l'aultre  part  du  port,estoieQt  hé^ergié,  virent  ceste 
aventure,  si  en  furent  moult  dolent  et  moult  irié,  et  moult  ea 
eurent  grant  pitié.  Car  ils  virent  ces  hautes  yglîses  et  ces  riches 

palais  fondre et  dura  li  feus  dui  jors  et  dui  nuit,  que  aine 

ne  post  estre  estains  par  nul  home et  tenoit  bien  li  frons  del 

feu,  si  corne  i'.  aloit  ardant,  demi-lieu  de  terre.....  et  tout  li  Latin 

qui  estoient  hébergié  en  CP....,n'i  osèrent  puisdemorer ains 

prirent  leurs  femes  et  leurs  enfans^et  de  leur  avoir  ce  qu'ils 
purent  traire  del  feu  ne  échaper,  et  entrèrent  en  barges  et  ea 
vaissiaus,  et  passèrent  le  port  par  devers  nos  pèlerins  ;  et  ne 
furent  mie  si  poi  que  ils  ne  fussent  encore  quinze  mit  que  pe- 
tit que  grant'''.  > 

Fanucci' rapporte  les  mêmes  faits,  mais  cet  auteur  semble 

I  Ed.  Paulin  Paris,  p.  G5. 

'  Cf.  Bur  les  séditions  su^^*enues,  après  la  restauration  d'Alexîa,  entre  Grecs 
et  Latins,  Derrastalio  CPtinn.  p.  87,  qui  en  donne  les  dates. 

*  On  croirait  lire  dans  oe  passage  de  Villehardouin,  le  récit  du  lamen- 
table incendie  de  Péra,  du  5  juin  1870. 

*  Loc.  laic'l.  p.  204. 


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les  attribuer  &  la  première  arrivée  dea  Franco-Vénitiens  devant 
la  capitale  :  son  récit .  contenant  certains  renseignements  qui 
rentrent  dans  l'objet  même  de  notre  étude,  nous  le  consignerons 
ici  :  c  Les  Grecs  avaient  préparé  seize  grands  brûlots,  chargés 
de  combustibles  et  de  fuoco  {/reco,  s'embrasant  dans  l'eau,  un 
vent  fort  soufQait  et  menaçait  la  flotte  étrangère  d'une  ruine 
complète;  elle  en  fut  préservée  par  l'intrépidité  et  la  direction 
énergique  du  vieux  doge  :  un  navire  pisan,  ancré  dans  le  port 
prit  feu  :  l'armée  française  et  la  flotte  vénitienne  se  mirent  en 
mouvement  ;  alors  les  marchands  pisans  gui  concouraient  à  la 
défense  de  là  ville,  se  virent,  dans  le  tamulte  qui  se  produisit, 
attaqués  par  les  Grecs.  Dans  leur  haine  contre  l'étranger  ceux-ci 
ne  connaissant  plus  ni  devoir,  ni  reconnaissance,  ni  mesure, 
commencèrent  par  donner  le  sac  aux  maisons  et  aux  mosquées 
sarrasines  ;  puis  le  tumulte  se  propagea  entre  Grecs  et  Pisans. 
Du  combat  à  l'arme  blanche  on  en  vînt  à  prendre  les  torches 
et  à  mettre  le  feu  aux  habitations  ;  l'église  de  fit.  Sauveur  des 
Pisans,  sise  nelle  colonne,  près  de  leur  quartier,  et  dont  Be- 
nenali  était  prieur,  lequel  put  à  peine  se  dérober  aux  flammes, 
fut  incendiée.  Cette  ville  devenue  la  proie  du  feu  dans  l'étendue 
d'une  lieue,  offrait  l'aspect  de  la  désolation,  t 

Il  paraît,  d'après  tous  les  historiens  du  temps,  que  les  Pi- 
sans, établis  dans  CP.,  loin  de  prendre  part  aux  opérations  du 
siège,  avec  les  croisés,  se  trouvaient  au  contraire,  du  moins 
dans  le  principe,  dans  les  rangs  de  leurs  adversaires  ;  mais  ils 
abandonnèrent  bientôt  la  cause  des  Grecs,  et  passèrent  sous  les 
drapeaux  des  croisés.  Bonciani,  (rapporté  par  Buchon,  I,  p.  15 
et  II,  p.  23.1  à  ce  sujet  s'exprime  ainsi  :  *  avendo  i  francesi  ed 
i  Yeneziani  tentato  piii  volte  d'impatronlrsi  di  CPli,  che  fra 
l'altre,  rompendo  il  muro  délia  parte  verso  il  mare  che  si  chia- 
mava  «  la  scalà  dell'  imperatore,  >  vi  entrarono  dentro,  ma 
che  furono  gagliardamente  battuti  e  ribattuti  dai  Pisani....  ma 
che  dopo  riconciliati  i  Pisani  ed  i  Veneziani,  combattessero  in 
favor  loro,  il  che  fu  cagioue  di  consegnir  la  vittoria  e  la  presa 
della  città.  > 

Finalement,  <  Le  confanon  de  Saint-Marc  fut  veu  en  une 
des  tours  et  si  ne  sceat-on  qui  li  portai  quant  lesGrecs  le  virent, 
il  se  desconflrent  et  gnerpirent  les  murs...  Entre  ces  choses 
bouta,  ne  say  qui,  le  fea  en  la.  cité  ;  mais  en  la  fin  fu  si  graos 


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—  50  — 

qu'il  ne  peut  estre  estains,  ains  dura  VIII  jours  ou  bien  près, 
parmi  le  travers  de  la  ville;...  tous  les  Latins  de  quelque  terre 
qu'ils  fussent,  ne  osèrent  oncques  puis  demourer  en  la  cité  ;  mais 
entrèrent  ens  barges  et  ens  nefs  a  tout  ce  que  ils  peurent  avoir 
du  leur  et  s'en  allèrent  en  l'ost  des  pèlerins'...  Après  la  Pasque 
fat  cryé  que  tous  apportassent  le  gaaing,  si  corne  il  avoit  été  de- 
visé.... Quant  le  gaaing  fu  apporté  en  trois  églises,  les  Venis- 
siens  en  eurent  la  moitié,  si  corne  leurs  convenances  portoient-.  > 
«  Si  fut  Constantinople  prise  (rapporte  l'auteur  de  la 
Croisade  de  CP.,  précité)  et  vous  dirai  que  li  Francbois  et  li 
Vénissiens  fisent  anchois  qu'ils  assaussisseiit  le  chité.  Ils  éta- 
blirent que  dedans  les  moustiers  on  ne  prendroit  nule  rien,  et 
que  tous  les  avoir  que  on  prendroit  en  le  chitè,  on  les  meteroit 
tous  ensanble,  et  partiroit-on  à  droit  ;  car  li  Vénissiens  avoient 
moitié  partout;  car  issi  fut-il  en  convent,  quand  on  leva  l'es- 
torre  à  Corbya,  que  de  toutes  les  aquestes,  fores *en  le  terre  de 
Jhërusalem,  en  quelconque  terre  que  che  fust,  dovoient-Us  avoir 
le  n-.oitiè.  Après  che,  quant  ils  orent  establi,  si  flst-on  es- 
comenier  à  quatre  Vesques  qui  là  estoient,  li  vesques  de  Sois- 
sons  et  li  vesques  de  Troies,  et  uns  vesques  d'Alemaigne,  qui 
nule  cose  destoumeroïent,  et  che  qu'ils  trouveroient  n'aporte- 
roient,  laù  on  avoit  alvami.  Après  esquemenia-on  chiex  qui 
dedans  moustiers  prendroient  nule  cose,  ne  prestre  ne  moine 
desroberoient  de  cose  qu'il  eussent  sur  aus,  ne  sur  femes  mete- 
roient  main.  Ensi  fut  establi  et  commandé,  et  li  esquemenieraens 
fais.  Devant  che  que  li  Franchois  et  li  A'énissîens  eiitraissent  en 
CP.  ne  presissent,  estoient-ils  pleins  de  la  grâce  du  Sf.  Esprit, 
et  avoient  grant  carité  en  aus;  et  se  cent  Grifons  veissent  dix 
Francbois,  si  s'en  fuissent- ils.  Quant  li  Franchois  prissent  CP. 
ils  avoient  l'escu  Dame  Dieu  embrachiô  devant  aus  ;  et  tantost 
come  furent  ils  ens,  ils  le  gelèrent  jus.  Ils  coururent  premiè- 
rement à  Ste  Église,  et  brisèrent  les  Abeyes  et  reub^rent.  Là 

'  Cf.  Ci-desBUs  le  récit  de  cet  Incendie.  I^  comte  Riant  Hoc.  lawl.  p.  107) 
parle  d'un  épouvantable  incendie  et  de  l'horrible  sac  de  CP.,  inceodie  allumé 
par  Boniface  de  Monfermt  et  les  Allemands  qui  l'entouraient,  ainsi  que  du 
pillage  de  Ste  Sophie  accompli  par  les  clercs  eu7!-mSmes,  qui  se  livrârenl, 
ajoute-t'il,  ouvertement  à  ce  que  Gunther,  par  un  singulier  euphémisme, 
qualiBe  de  saint  brigandage,  (p.  tOâ.) 

)  Il  y  eut  deux  incendies  le  premier  allumi  dana  la  querelle  entre  les 
Grecs  et  les  Pisans,  le  second  à  la  prise  même  de  la  ville. 


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—  51  — 

fu  le  convoitise  si  grant  entr'aas,  que,  qaaiiiques  il  dévoient 
porter  au  moût,  il  portoient  au  vol.  Là  fu  si  grant  le  haine 
entr'aus  que  li  chevaliers  disoient  que  les  povres  gens  avoient 
tout  et  les  povres  gens  disoient  que  li  chevaliers  et  U  prestrea 
avoient  tout  ravi,  dont  il  fu  bien  sentant  à  la  départie.  Et  chil 
qui  plus  en  emblèrent,  che  furent  li  Vénissiens,  qui  par  nuit  le 
portoient  à  lor  n6s.  Dont  il  avint,  quant  ils  orent  prise  GP.  que 
li  Dus  de  Venisse,  qui  estoit  en  le  chité,  vaut  faire  marquié  de 
l'avoir  assauter  as  Franchois,  que  il  feroit  l'avoir  de  la  chit^ 
amasser  as  ses  homes,  et  mettre  d'une  part,  et  les  meubles,  et 
si  donroit  on  à  cascun  chevalier  quatre  cens  marcs,  et  à  cascan 
prestre,  et  à  cascun  serjant  à  queval  tiens  cens  marcs,  et  à 
cascun  home  &  pié  cent  marcs.  Ainsi  l'eust-il  fait  et  créante, 
mais  li  Franchois  ne  le  vautrent  mie  octoier;  ains  on  embla 
on  tant,  et  destouma,  devant  cbe  on  partesist  as  Vénissiens, 
que  de  le  partie  as  Franchois,n'ot  li  chevaliers  que  vingt  marcs, 
et  li  prestres  et  serjant  à  queval  que  dis  marcs,  et  li  serjant  à 
pié  Cinq  marcs'.  » 

En  dehors  de  ces  valeurs  ils  se  partnjîi'rent  les  richesses  des 
églises.  On  peut  consulter  la  fri-s  considérable  liste  de  reli- 
quaires et  objets  précieux  pour  le  culte  qui  furent  enlevés  de 
la  capitale  et  envoyés  en  Europe  par  les  Croisés.  (Dépouilles 
reliyieuses  enlevées  à  CP.  un  XIII^  siècle  pur  lesLaliits,C.tv^ 
Riant,  Paris  1875.  p.  177-911.) 

<  Quant  ils  orent  parti  l'avoir,  si  partirent  le  chité  par  mi  ; 
si  que  li  Vénissiens  en  orent  la  moitié,etli  Franchois  l'autre  moi- 
tié. Et  si  escai  le  partie  des  Franchois  par  devers  le  terre,  et  le 
partie  as  Vénissiens  par  devers  les  mers.  Quant  ils  orent  prise 
le  chité,  si  prisent  conseil  entr'aus  qu'ils  y  feroient  empereur 
et  patriarche.  Et  si  atira  que  se  on  fesoit  empereur  de  decha 
les  monts,  chil  de  delà  les  monts  feroient  patriarche  ;  et  que  li 
Vénissiens  donroient  le  quarte  part  de  leur  chité  à  l'empereur, 
et  li  Franchois  le  quarte  part,  par  devers  Banque  de  lion  {Bu- 
coléon)  Quant  ainsi  orent  atourné,  si  eslut  on  le  comte  Baudoin 
de  Flandres  à  estre  empereur,  et  porta  couronne  ".  » 


'  Bucbon,  ion.  laui.p.  ABU  Appenlicc,  Cmiêade  de  CP., 
blioth.  Nat.  7188. 
s  Buchon,  toc.  laui. 


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—  52  — 

Pour  prévenir  toute  querelle  et  toute  division,les  Croisés  firent 
un  traité  solennel,  dont  voici  les  principales  clauses  i  t  Si  Dieu 
permet  que  la  ville  tombe  en  notre  pouvoir,  tous  continueront 
de  rendre  obéissance  à  leurs  chefs  respectifs,  aux  princes  de  l'ar- 
mée. Les  dépouilles  feites  seront  intégralement  réunies,  pour 
être  distribuées  ensuite,  selon  le  rang  de  chacun  et  son  mérite, 
par  une  commission  nommée  à  cet  etfet;  les  vivres  seront  par- 
tagés suivant  le  nombre  des  bouches.  Tous  les  droits  que  les 
Vénitiens  possédaient  à  CP.  et  dans  l'empire  leur  resteront  in- 
tégralement acquis.  Chacune  des  parties  contractantes  nommera 
sis  délégués  chargés  d'élire,  k  la  pluralité  des  suffrages,  en  tout 
honneur,  Sous  l'unique  inspiration  de  leur  conscience,  celui 
qu'ils  jugeront  le  plus  digne  d'être  empereur.  Le  quart  de  l'em- 
pire relèvera  directement  de  l'élu,  constituera  son  bien  et  son 
apanage,  avec  les  palais  de  Bucoléon  et  de  Blaquernes  ;  les  trois 
autres  quarts  seront  partagés  par  portions  égales  entre  les  Vé- 
nitiens et  les  Français.  Le  patriarche  sera  tiré  de  la  nation  à 
laquelle  n'appartiendra  pas  l'empereur,  et  l'église  de  Ste  Sophie 
lui  sera  remise  comme  siège  de  son  patriarcat.  Une  commission 
composée  de  24  membres,  12  de  chaque  partie,  choisis  parmi 
les  plus  vertueux  et  les  plus  sages,  assignera  les  fiefs,  les  pos- 
sessions et  les  dignités,  en  déterminant  les  rapports  de  subordi- 
nation et  les  chargns  incombant  à  tout  feudataire.  Les  fiefs  se- 
ront transraissibles  par  voie  d'hérédité,  sans  préjudice  pour 
l'organisation  de  l'empire  et  l'autorité  de  l'empereur;  en  mon- 
tant sur  le  trône,  celui-ci  jurera  de  son  côté  l'inviolabilité  du 
partage,  la  stabilité  des  donations.  •»  Innocent  IIL  Ep.  VIT, 
305;  Patrol.  Curs.  compl.  CCXV.Làse  trouve  le  texte  même 
de  la  convention.  Ilisf.  de  l'Ei/Hse.  Darras  t.  28,  p.  187-188. 

Cette  convention  déplut  beaucoup  au  Pape  Innocent  III, 
car  elle  violait  évidemment  les  droits  de  l'Église.  Il  réclama 
donc  contre  quelques-unes  de  ses  prescriptions  et  finit  par  faire 
prévaloir  sa  volonté,  c'est-à-dire  le  droit  et  la  justice. 

Si  le  Pape  Innocent  III  se  décide  enfin  à  féliciter  Baudoin  de 
son  triomphe,  et  à  consacrer  son  règne,  c'est  qu'il  y  voit  la 
réalisation  du  grand  vœu  de  l'Église  romaine,  la  réunion  des 
deux  Églises  sous  un  seul  chef,  le  moyen  de  rappeler  cette 
Église  autrefois  si  fertile  en  doctrines  pures  et  ensuite  obscurcie 
par  l'erreur  et  de  la  ramener,  avec  la  grâce  de  Dieu,  aux  prin- 


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—  53  — 

cipes  fondamentaux  de  la  parole  div  ine  '.  Le  ton  des  lettres  du 
Pape  et  leur  contenu,  ajoute  Hurler,  justifient  pleinement  In- 
nocent d'avoir  voulu  profiter  de  la  conquête  de  GP.  pour  aug- 
menter la  puissance  du  St.  Siège.  Le  lecteur  impartial  pourra, 
en  les  parcourant,  pénétrer  au  fond  de  son  cœur,  et  reconnaître 
sous  quel  point  de  vue  il  envisageait  ces  événements  ^ 

Le  clioix  (lu  comité  des  douze  électeurs,  six  français  et  six 
vénitiens,  s'étant  porté  sur  Baudoin^,  celui-ci  ceignit  la  cou- 
ronne impériale,  dans  Sainte-Sopliie,  le  16  mai  1204^.  Parmi 
les  électeurs  français,  figurait  *  Nevelon,  évèque  de  Soissons.  » 

Puis,  suivant  la  convention,  le  clergé  catholique  conduisit  les 
chanoines  vénitiens  à  Ste-Sophie,  où,  à  l'unanimité,  ils  élurent 
Thomas  Morosini,  patriarche  de  Constantinople  ;  enfin  l'empe- 
reur^ et  le  doge  envoyèrent  à  Rome  des  délégués  chargés  d'ob- 
tenir, pour  cette  élection.la  confirmation  pontificale'''.  Par  ce  fait, 
l'ancienne  juridiction  spirituelle  du  patriarche  délie  Venezte  se 
trouva  recevoir  ainsi  une  nouvelle  et  solennelle  consécration. 

Informé  du  résultat  de  ces  événements,  Innocent  III,  par  sa 
lettre  du  7  décembre  1304,  adressée  i  episcopis  et  abbatibus  in 
exercitu  christiano  apud  Constantinopolim  constitutis,  >  re- 
commanda <  d'établir  des  prêtres  latins,  dans  les  églises  aban- 
données par  les  grecs,  afin  de  rendre  <ï  Dieu  le  culte  qui  lui 
est  dû,  de  conserver  les  biens  ecclésiastiques,  de  se  maintenir 
dans  l'obéissance  du  Siôge  apostolique,  de  célébrer  les  offices 
pour  les  paréissiens  et  de  leur  administrer  les  sacrements. 

Puis,  instruit  de  la  forme  qui  avait  présidé  à  l'élection  du  pa- 
triarche, le  Souverain  Pontife,  par  une  autre  lettre  du  21  jan- 
vier 1205,  adressée  aux  mêmes  évèques,  abbés  et  autres  clercs, 
déclara  que  les  prêtres,  se  disant  chanoines  de  Sainte-Sophie, 
et  qui  s'étaient,  de  la  sorte,  attribué  le  droit  d'élire  le  patriarche, 

I  U  XVI  ep.  105. 

»  L.  VUI. 

'  BuchoD  toc.  t/m-J. 

'  Fleury,  Hittoire  ecrUtiastiqw..  XVI,  87.  D'après  le  Comte  Riant.  Inno- 
cent m,  Philippe  rie  Soualie  et  lionifa'-c  <le  Monfcrrat,  l'aria,  1875.  l'élection 
de  l'empereur  eut  lieu  le  9  mai. 

'  fl  Uauduin  fut  couronné  au  mouatierSainte-Sourrye.  »  (l'Z.  357.) 

•  Conf.  Deeattatio  conttantinnpnHtana.  Mit.  par  Hopf,  p.  !>2,  et  nussi  la 
Prite  'le  rp.  de  Robert  de  Clary,  p.  73,  édUée  par  le  mÉme; 
tiona  dues  à  l'obligeance  de  M.  le  docteur  Detbier. 


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—  54  — 

n'ayant  été  institués  ad  hoc  ni  par  le  Saint-Siège  ni  par  ses  lé- 
gats, Sa  Sainteté,  le  sacré-collège  consulté,  avait  cru  devoir 
blâmer  cette  élection  en  consistoire  public  ;  mais  que,  vu  les 
circonstances  et  dans  la  plénitude  de  son  autorité  pontificale,  le 
pape  nommait  et  confirmait  l'élection  du  patriarche  de  l'Église 
constantinopolitaine  '. 

Le  patriarcat  latin  dura  autant  que  l'empire,  et  compta  dix 
titulaires  résidents,  dont  le  dernier,  Pantaléon  Giustiniani, 
noble  Vénitien,  quitta  Constantinople  en  1261,  après  la  restau- 
ration grecque,  pour  venir  à  Rome,  où  il  mourut,  en  1386.  Lea 
papes  ont  continué  de  nommer  des  patriarches  latins  au  siège 
de  Constantinople;  mais  ceux-ci,  ont,  depuis,  résidé  à  Borne. 
Toutefois,  et  bien  que  la  dignité  patriarcale  fût  exclusivement 
réservée  aux  Vénitiens,  les  Français  ne  furent  pas  écartés  des 
grands  offices  ecclésiastiques:  ainsi,  en  1215,  un  Français,  Le- 
giers,  était  deens  (decan,  chanoine-doyen)  de  Sainte-Sophie  et 
chancelier  de  l'empire  ;  un  autre,  Gautier,  était  t  deens  de  l'é- 
glise de  N.-D.  Panecrante  t  Immaculée-.  » 

La  conquête  latine  réalisa,  pour  le  moment  du  moins,  les  pro- 
messes du  prince  Alexis  :  plusieurs  églises,  et  des  plus  impor- 
tantes, furent  attribuées  aux  Latins  ;  mais,  quoi  qu'il  en  fût,  le 
nombre  de  ces  églises  dut  être  encore  bien  restreint,  comparati- 
vement au  chiffre  total  des  édifices  religieux  de  la  capitale.  Du- 
cange  rapporte  ^  d'après  Théodelus  :  «  an  mc,  qu'il  y  avait  dans 
la  ville  1 ,900  églises  et  360  couvents.  *  Villehardouin  dit,  de  son 
côté  :  *  Des  sanctuaires  ne  convient  mie  à  parler,  que  autant 
en  avoit-il  à  ice  jor  en  la  ville,  come  il  remanant  dou  monde.  > 

Rol)ert  de  Glary  dit,  d'autre  part  :  «  xcu...  que  mes  bons  con- 
terrespeust  nombrer  mie  toutes  les  abeies  de  la  chite;  tant  i  en 
avoit-il,  que  de  moines  que  de  nonains,  entre  les  autres  mous- 
tiers  de  la  ville  hors,  et  si  nombroit-on  qu'il  avoit  bien  large- 
ment en  la  chite  ,"  *  prostrés,  que  moines  que  autres. . .  » 

1  La  série  des  patrïarchos  grecs  a  continué  sans  interruption,  malgré  la 
domination  franque;  la  premier  de  ceux-ci, pour  celte  période,  Michel  V  avait 
transféré  son  siège  à  Nicée. 

*  CPlit  chriatiana.  IV,  56,  63. 
s  Loc.  taïKl.  ni,  8. 

*  30,00UT  A  ceux  que  cette  multiplicité  de  clercs  et  de  moines  surprendrait, 
il  faudrait  rappeler  qu'à  Ste  Sophie  seulement  étaient  attachés  â'25  clercs. 
(Traraiu:  retutifuù  Ikixloii-e  Bynanline.j 


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~  55  — 

Parmi  les  églises  attribuées  aux  Latins,  se  trouvaient  : 

c  Le  mostier  de  Ste  Sopbie,  oii  fu  enterrez  le  doge  Henri  Daa- 
dolo,  à  graat  honor*  ;  puis,  Marie  de  Champagne,  femme  de 
l'empereur  Baudoin  ^  : 

<  Le  mostier  des  A.pdtres,  où  ta  enterrez  Eudes  de  Cham- 
pagne ^  ; 

f  Le  mostier  de  Mgr  S.  Georges  de  la  Mange,  où  fu  enterrez 
à  moult  grant  honor  Hugues  de  S.  Paul'  ; 

€  L'yglise  de  Mgr  sain  Johan  de  l'hospital,  de  Jérusalem,  où 
fa  enterrez  Mahius  de  Monmorenci''.  » 

On  peut  citer  aussi  : 

L'église  de  S.  Acyodyn,  affectée  spécialement  aux  Vénitiens, 
et  relevant  do  patriarche  de  Grade  *  R.  Acyndyn  t  à  l'abri  de 
tout  danger,  >  était,  à  une  certaine  époque,  le  patron  de  l'église 
des  Vénitiens  à  Constantinople  ;  on  en  célébrait  la  fête  le 
20  avril  '. 

Le  monastère  du  Pantocrator  t  Tout-puissant,  »  où  les  La- 
tins, dit  Hammer"  auraient  établi  leur  quartier-général,  et  de- 

'  Ducaoge,  Iii»t.  lU  femp  de  CP..  p.  340. 

•  /rf.  334. 

'  /(/.  p.  108.  •  Le  moustier  des  V[|  apâlrea  ;  si  igisoient  en  cbu  moustier 

VU  cora  d'apostres »  (Robert  de  Clar>-.  l<x:  taud.  p.  68).  Cf.  Pierre  Gylles 

et  son  continuateur,  ('le  Topogi-aphia.  p.  364  et  -lOU)  Ce  temple  aurait  été 
construit,  avec  une  grande  magnjflcence.  par  Constantin  le  Grand  qui  y  au- 
rait été  inhumé,  s'étant  réservé  une  place  aupréa  des  apOtres.  l'iuueun  em- 
pereurs grecs  y  Turent  enterrés  après  lui.  —  A  la  conquête  turque  elle  fut 
transformée  en  palais  patriarcal  pendant  deux  ans  :  puis  Gennadius  ayant 
demandé,  en  Hb5,  au  Sultan,  la  permission  de  transférer  sa  résidence  à 
Psammatia,  peu  de  temps  après  cette  translation  cette  église  fut  abattue,  et 
Sultan  Mehemmed  II,  flt  élever  sur  son  emplacement  la  mosquée  qui  porte 
son  nom.  ConMlimtinia'Ie.  p.  94. 

•  /'/.  p.  138;  sis  à  la  partis  N.  de  la  ville,  baignée  par  la  mer.  (V.  le  plan 
de  Belmontet,  dressé  en  14Z3,  dans  l'imperiam  orientale.) 

'  Villebardouin  Chronique,  éd.  Bucbon,  Paria,  1826,  p.  33. 

•  CPliê  Ckriil.  III,  ai. 

'  Dict.  ilet  Sni'/irit.  ou  Mai-tyrologe  unioertcl,  par  de  S,  Allais  ;  cf.  aussi 
le  Martyrologium  romanum...  Malinea  18j9,  au  ÏO  avril  et  23  août. 

'  //i>(.  'le  l-emp.  otlom.  III,  429.  Cf.  docteur  Delhier,  III,  19.  Selon  ce  sa- 
vant, cette  église  aurait  été,  du  temps  des  I.atins,  i  quasi  eoclesîa  cathedra- 
tia  Borum.  >  Située  sur  la  4'  colline,  l'église  da  Pnntorralor  fut  fondpc  par 
l'impératrice  Irène,  femme  de  Calo-Jean  Comnàne,  qui  monta  sur  le  trône 
an  1118,  elle  fut  achevée  par  son  fll».  Manuel  Comnéne,  lequel  se  fit  repré- 
■enter  dans  l'intérieur,  olTrant  à  Jéaua  la  plan  de  son  église.  Ce  prince  fut 


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—  56  — 

venu  aujourd'hui  Kélicé  ou  Zeirch  Djami.  La  CPUs  chri- 
stlana  dit  seulement  que  ce  monastère  fut  pillé  par  les  Latins, 
à  la  prise  de  la  ville. 

L'église  Saint-Pierre  des  Pisans,  dont  il  a  été  parlé  plus  haut, 
et  mentionnée  dans  une  lettre  du  cardinal  Jean  de  Sainte-Pra- 
lède,  datée  de  l'an  1321,  pontificat  dHonorius  III,  adressée  *  au 
Prieur  de  l'église  Saint-Pierre  des  Pisans  à  CP.  '  »  Cette  église 
est-elle  la  même  que  celle  citée  plus  haut,  et,  plus  bas  (1439), 
dans  le  privilège  de  Jean  Palèologue,  transmettant  aux  Floren- 
tins «  la  sainte  église  du  Bienheureux  Pierre  (ton  ïeron  naon 
tau  macaritou  Petrou]  -? 

Une  église  de  St.  Sauveur  apo  logotheton,  voisine  du  quar- 
tier des  Pisans,  fut  concédée  à  ceux-ci  par  le  cardinal  Légat, 
Pietro  Capuano,  et  l'évêque  de  Soissons,  Nivelon,  après  la  prise 
de  la  ville,  selon  le  diplôme  émané  de  ces  prélats  en  1205,  et 
adressé  «  Priori  Ecclestœ  Pisanorum  CP.  '■'■  » 

La  conduite  des  Pisans  pendant  le  siège,  et  surtout  la  part, 
qui  leur  revenait  dans  le  succès  final,  leur  obtint  non  seulement 
la  confirmation  de  certains  privilèges,  mais  les  fit  même  aug- 
menter sous  certains  rapports.  Baudouin  les  assimila  aux  Véni- 
tiens; et,  si  la  première  dignité  ecclésiastique,  celle  de  Pa- 
triarche, fut  donnée  aux  Vénitiens,  celle  de  Prieur,  \a.  seconde, 
fut  laissée  aux  Pisans.  De  plus  Baudoin  leur  concéda  le  droit 
de  choisir  leur  Consul,  lequel  prononçait  dans  leurs  différents 
sans  l'intervention  des  officiers  impériaux.  (Sans  doute  quant 
aux  Pisans  seulement.)  * 

enterré  à  l'entrée  de  cette  église  ;.et  d"aprés  sa  volonté,  on  a\-a(t  placé  sur 
aa  tombe  la  plaque  de  marbre  rouge  sur  laquelle  on  avait  lavé  et  parfumé 
le  corps  du  Christ,  après  l'avoir  dttaohé  de  la  croix...  A  ia  prise  de  CP. 
par  les  l.atîns.  ceux-ci,  à  cause  de  la  vaste  étendue  et  de  la  position  de  ce 
monastère  dans  la  partie  dominante  de  la  ville,  en  firent  le  quartier  général 
de  l'armée  conquérante.  Anselme,  évéque  d'.\velsbei^  rapporte  (Ducange, 
CP.  Chrittiniia.  IV,  p.  .^4.)  que  lorsqu'il  se  trouvait  à  CP.  en  qualité  d'apo- 
critiaire  de  Lothaire-le-Graad,  auprès  de  Calo-Iani,  11  y  avait  dans  ce  mo- 
nastère sept  cents  moines,  de  la  régie  de  S.  Antoine.'  Pierre  GvUes,  p.  2S3, 
donne  la  description  de  cette  église  au  xvi*  siècle. 

1  CPU»  ChriUiann,  IV,  89. 

'  Acta  grœea.  III,  7.  20,  201.  Cf.  aussi  Millitz,  1,  H,  429,  et  ci-aprés 
S.  Michel,  note. 

'  CPtis  Chrixl.  IV,  55. 

»  Bucbon.  lor.  laitd.  I,  2,  16. 


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—  57  — 

Roaciani  '  s'exprime  ainsi,  sur  ce  sujet  :  «  Ai  Pîsani  furono 
rese  tutte  le  loro  dignità,  cosl  spirituali  come  temporal],  come 
chiaramente  se  vede  per  una  lettera  scritta  dai  vescovi  che  si 
troTarono  in  qoesta  impresa,  (celle  de  1205,  des  évêques  de- 
Soissons,  de  Troyes  et  de  Bethléem,  où  il  est  dit  que  l'église 
dn  St.  Sauceur  est  conférée  à  Benenato,  prieur  des  Pisans  ; 
elle  fut  confirmée  par  le  Légat  apostolique,  qui  donna  de  plus 
anx  Pisansdeox  autres  églises  qu'ils  avaient  autrefois  :  ^.  Pierre 
et  S.  Ntcolas.) 

t  Quella  dignitJi,^/  Prlorato,  continue  Bonciani,  era  la  prima 
dopo  quella  del  patriarcato,  imperrochè  aveva  autorità  il  Priore 
di  usare  le  vesti  e  le  insigne  ponteâcali,  di  benedire  i  corporali, 
consecrare  icalici,  cresimare  i  fanciulli,  dare  glîordini  minori, 
le  qoalî  cose  furoao  concesse  da  Alessandro  IV,  pontefice  ro- 
mane, a  Pietro,  priore  dei  Pisani  in  questo  luogo,  il  quaie 
avendo,  nella  persecusione  di  Andronico  imperatore,  perduto  il 
privileglo  di  tante  dignità  a  lui  concesse,  Benenato  suo  sucees- 
sore,  fece  l'anno  1199  e  l'anno  1201,  a  perpétua  memoria,  esa- 
minare  molti  teatimonii,  alla  presenza  di  Giovanni  di  Giovanni, 
ed  Alberto,  capellanî  d'Innocenzo  III,  summo  pontefice,  e  suoi 
legati  in  CPli,  siccome  si  vede  per  un  contralto  rogato  da  Ra- 
nieri  Giaberti,  notario  apostolico,  che  si  trovava  présente,  che 
ta  piena  fede  del  privileglo  concesso  a  dette  priore,  délia  sua 
perdita,  e  dell'altre  cose  da  me  narrate  di  soprà.  Il  quai  con- 
tratto  fu  fatto  due  volte,  la  prima  nella  seconda  Indlzione,  l'an- 
no 1199,  agli  11  di  Febrajo,  e  l'altra  l'anno  ISOl,  nella  quarta 
Indizione,  ai  19  di  luglio.  > 

Ces  privilèges  leur  furent  renouvelés  par  l'impératrice  Marie 
f  Baiula  imperil  CPli  »  aux  ides  de  février  1214.  (Ainsi  se 
nommait  la  Régente,  ou  Heutenante  de  l'empire.) 

Notre-Dame  des  Blaquernes-,  l'église  du  palais  impérial,  ci- 
tée par  Chateaubriand  dans  le  Génie  du  christianisme,  fut  aussi 
atbibuée  aux  Latins.  Innocent  III,  dans  sa  correspondance, 
parle  des  ûecanl  Btachernarum.  La  fête  de  la  Purification 
était  la  fête  patronale  de  cette  église  ;  les  empereurs  s'y  ren- 

'  Buchon,  II.  26. 

»  Dans  le  linra  de  la  Conquête  île  CP.,  édité  par  Buchon,  II.  4â9,  il  est  fait 
mention  d'une  i  Abbaye  dite  N.  D.  de  la  Blaquerne.  «  V.  dans  Piei-re  Gulte*. 
p.  294  et  418  la  descriplion  île  cette  église  au  xvr  siècle. 


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daient,  accompagnés  du  corps  des  Varanges  composé  de  Bretons, 
de  Germains  et  d'Esclavons  ;  après  le  service  divin  ces  gardes 
du  corps  attendaient  l'empereur,  la  hache  haute  à  la  porte  du 
palais  '. 

Au  témoignage  de  Villehardouin,  une  procession  solennelle 
eut  lieu  «  k  N.-D.  de  Rlaquerne,  le  jour  de  la  fête  de  N.-D.  de 
Chandeleur  (2  février  1206),  à  laquelle  assistait  Henri,  régent  de 
l'empire.  »  Cette  solennité  était  la  fête  pab'onale  de  l'église*. 

Les  croisades  avaient  fait  éclore  plusieurs  Ordres,  hospita- 
liers et  militaires,  qui  reçurent  aussi  leur  part. dans  le  partage 
des  églises  de  OP.  Parmi  les  hospices  latins,  il  y  a  lieu  de  re- 
marquer le  xenodochium  de  Saint-Jean,  donné  par  Manuel  Com- 
nène  (H43-1180)  aux  hospitaliers  de  Jérusalem,  et  dont  le  su- 
périeur portait  ce  titre  :  c  frater  Hîeroaolim.  hospitalis  et  prior 
B.  Joannis  CP.  »  C'est,  probablement,  dans  la  chapelle  de  cet 
hospice  que  fut  inhumé  Mathieu  de  Montmorency^. 

Les  Hospitaliers  reçurent  aussi  de  Baudouin  l'hospice  de 
Saint-Sanison,  sis  entre  Sainte-Sophie  et  Sainte-Irène;*  cet 


'  Le  cérémonial  usité  dans  cett«  occurrence,  (Cf.  Congtaniminde.  p.  61.) 
rappelle  tout  d  fait  cflui  qui  est  obsené  par  les  Sultans  se  rendant  aux 
Bnii-ama,  ou  à  la  fftte  du  Mevloud,  à  la  prière  à  sainte  Sophie,  entourés  de 
hallebardiers  (les  tabenlnrié  d'Egjpte,  sous  les  Sultans  Mamlouks)  Bollailj'i 
ou  piii/ct.  coiffés  de  leur  casque  à  panache,  dérobant,  en  quelque  sorte,  au 
peuple  la  vue  du  souverain. 

'  La  belle  église  de  la  Viei^e  des  Blacherneii.  commencée  par  Pulchérie, 
et  achevée  par  Léon-le-grand,  fut  brûlée  fortuitement  sous  Jean  Paléologue. 
.  Lors  de  la  conquÉle  ottomane  les  débris  du  monastère  furent  employés 
dans  la  reconstruction  de  l'église.  Il  ne  reste  plus  aujourd'hui  de  l'ancien 
couvent  que  quelques  portiques  à  demi  écroulés  et  une  arcade  qui  se  trouve 
prés  de  la  fontaine  sainte,  jaillissant  à  cet  endroit,  et  qui  Jadis  était  une 
tHiignoire  sacrée  des  empereurs.  Dans  la  petite  a\-ant-cour,  où  se  trouve 
l'arcade  à  de  mi -écroulée,  était  jadis  le  baptistère  sacré,  orné  de  plusieurs 
images  en  argent,  et  surtout  celle  de  la  Vierge  Marie,  sur  l'urne  du  baptis- 
tère. Dans  la  voûte  inférieure,  oû  l'on  voit  maintenant  la  sainte  fontaine, 
(AIAKMA)  se  trouvait  autrefois  une  statue  en  marbre  de  la  Vierge,  faite  de 
telle  façon  que  l'eau  coulait  de  ses  mains  dans  le  baptistère  e.xtédeur.  Les 
empereurs,  après  les  cérémonies  et  les  prières  d'usages,  et  revêtus  du  Le'i- 
tium  d'or,  se  plongeaient  trois  fois  dans  le  baptistère  sacré.  {Conttanti- 
rtiade.  p.  112.)  L'église  actuelle,  sise  &  Balat.  rue  Aiazma,  a  été  rendue  au 
culte  par  Sultan  Mahmoud  II.  Elle  est  petite  ;  l'ajasma  restaurée,  parait 
être  l'objet  principal  du  temple. 

ï  CPUt  Chritt.  IV,  114  :  Hiil.  de  l'empire  de  CF.  Parit.  1857,  302. 
•  Dite  aussi  .Ste  Hérin.  —  Ducange  (Buchon).  p.  41. 


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—  59  — 

ordre  militaire  fut  exclu  des  stipulations  du  traité  gréco-génois 
de  1961  '. 

Le  €  célèbre  monastère  »  de  Ste  Marie  de  Virgiotiis-  fut  at- 
tribué aux  Bénédictins  ;  ce  n'était  pas  toutefois  le  premier  éta- 
blîssement  de  l'Ordre  existant  sur  le  territoire  de  l'empire  ;  Ba- 
ronius^  sous  la  date  1119,  nous  donne  le  texte  de  deux  lettres  de 
Pierre  le  Vénérable,  abbé  de  Cluny,  l'une  adressée  au  patriarche 
œcuménique,  l'autre  à  l'empereur  Jean-Calo,  [Calo-Iani,  Com- 
'  néne),  pour  solliciter  la  restitution  d'une  localité  dite  Cicit.ot,^ 
près  CP-,  dépendant  de  l'église  et  du  monastère  de  la  Charité- 
snr-Loire  anciennement  concédée  à  l'Ordre  de  Cluny  :  <  Boga- 
rem  post  îlla,  quod  et  nunc  ergo,  ut  Cluniacensi  ecclesite  et 
monasterio  de  Charitate  locum  qui  Civitot  dicitur,  juxta  CPlim 
positum,  restitui  juberetis.  Dédit  illum  Clnniaco,  et  monaste- 
rio de  Charitate,  etiam  apud  nostros  magni  nominis  et  glorise, 
Imperator  Aleslus.  pater  ejus  :  cui  sicut  in  regno,  sic  multo 
magis  in  justifia  et  pietate,  '  illum  decet  succedere.  »  «  Alexis 
Comnène  I,  avait  donné  an  monastère  de  la  Charité-sur-Loire 
une  localité  dite  CtcUot,  près  de  CF.,  lociilité  qui  avait  été 
usurpée  dans  ta  suite  et  dont  l'abhé  de  Cluny  réclamait  la 
restitution,  t  '■•  Aussi  en  prenant  part  à  la  croisade  qui  devait 
se  rendre  en  Terre  Sainte,  les  abbés  de  Glteaux  n'oublièrent  pas 
ce  que  l'Ordre  devait  k  ses  bienfaiteurs,  et  ceux  d'entre  eux  qui 
faisaient  partie  de  l'armée  Fnmco-Vénitiennne  ne  manquèrent 
pas  de  s'opposer  aux  projets  formés  contre  leur  indépendance. 

f  Deux  abbés  de  Clteaux  avaient  pris  part  à  la  cérémonie  de 
la  prise  de  la  croix,  par  le  marquis  de  Montferrat,  en  lui  atta- 


'  /'/.  iil,  éd.  de  1826.  p.  41.  .-jelon  le  rapport  du  P.  Helyot  (tiy.  tnwl.  ][, 
827),  VOrdre  de  Saint-Samson  de  CP.  et  de  Corinthe,  qui  était  aussi  hospita- 
lier, fut  réuni  à  celui  de  ï5ainl-ieRn  de  Jérusalem,  sous  la  grande  maîtrisa 
de  Villa ret. 

■  Nous  n'avonn  pu.  jusqu'à  présent,  recueillir  aucune  indication  sur  la  po- 
sition  de  ce  monastère  de  Pnnala  Virijiolirn.  qui  signifiait  d'après  M.  Pas- 
pafi  «  Ptichfri  >  la  vie:^  à  la  verge,  aux  broussailles,  à  l'épi. 

»  Ann.  Eccl.  ad  ann.  1119.  Cf.  sur  Civitat.  Chronique  de  Villehardouin, 
pasBîtn. 

*  Kivotos,  l'ancienne  Khios.  aujourd'hui  Oiiemlek.  l'une  des  Echelles-sud 
de  la  mer  de  Marmara. 

'  Indication  due  à  l'obligeance  de  M.  Uruel,  des  Archives  nationales,  de 
Paris. 


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chant  la  croix  sur  les  épaules  ;  ce  même  personnage  se  rendit  à 
l'abbaye  de  Citeaux,  avant  son  départ  pour  la  croisade  '  ;  l'abbé 
de  Vaux  de  Sernay,  de  l'ordre  de  Citeaux,  s'opposa  à  l'attaque 
de  Zara,  par  les  Croisés,  et  leur  en  ût  défense,  de  la  part  du 
pape  Innocent  IIP.  Le  même  abbé  s'opposa  aussi  à  la  marche 
de  l'armée  franco-vénitienne  contre  Constantinople,  ainsi  qu'à 
l'accueil  fait  aux  démarches  du  prince  Alexis^.  Villehardouin 
cite,  de  son  cdté,  comme  un  grand  malheur  pour  l'armée,  la 
mort  de  l'ablKi  de  Los,  de  l'ordre  de  Citeaux,  «  qui  était  un  saint 
homme  et  qui  avait  toujours  travaillé  au  bien  commun  de 
l'armée*.  » 

Comme  nous  l'avons  dit,  le  monastère  de  Ste  Marie  de  Vir- 
giottis  fat  attribué,  après  la  prise  de  CP.  par  les  Croisés,  aux 
Bénédictins  :  il  était  distant  de  deux  bornes  milliaires  de  la 
ville  (Duottus  Inpidlbus  CPU  dissitum),  et  occupé  par  des 
moines  grecs.  Voici  la  version  du  diplôme  latin  de  cette  dona- 
tion, rapporté  par  Gattula^. 

«  Benoit,  par  la  Miséricorde  divine,  cardinal  prêtre  du  titre 
de  Ste  Susanne,  légat  apostolique,  à  notre  vénérable  frère  en 
J.-C.  Roffride,  cardinal  prêtre  du  titre  des  SS.  Pierre  et  Marcel- 
lin,  abbé  du  Mont-Cassin,  ainsi  qu'à  son  Couvent,  salut  en 
N.-S...  Le  devoir  de  notre  dignité  épiscopale  étant  de  choisir 
quiconque  convient  au  service  du  troupeau  confié  à  nos  soins, 
il  nous  incombe  à  nous  revêtu  de  la  charge  de  Légat  dans  l'em- 
pire de  Remanie,  de  veiller  avec  la  plus  grande  vigilance,  à  l'ac- 
complissement de  nos  devoirs.  Or  comme  il  a  plu  i^  la  divine 
Providence,  dans  ses  impénétrables  décrets,  de  remettre  cetem- 


'  Hiitl.  lie  l'empire  île  Constantinople.  par  Ducitnge,  1657,  p.  17. 

'  Sit.  îd.  31.  On  lit  dans  le  livre  du  comte  Riant  :  Iitno-viu  III  eCi'.  Le 
Pape  ne  confirma  le  traité  de  1201,  avec  Venise  {rapporté  à  Troyes,  à  l'as- 
semblé des  Croisés)  qu'à  son  corps  défendant  et  après  un  refus  formel  des 
Génois  et  des  Pisans,  et  en  y  insérant  cette  clause,  que  l'exécution  du  traité 
ne  iwurrait  donner  lieu  à  aucune  attaque  des  Princes  chrétiens  et  serait  sou- 
mis à  la  continuelle  surveillance  du  légat  pontifical. 

'  Id.  44. 

'  !il.  Si.  En  outre  des  abbés  de  Vaux  et  de  Los,  la  Deomlatio  roiiMantmo- 
potitana  dit  :  <•  et  alii  quinque  abbates  Cisterciensis  ordinis...  Crucem  ao- 
cepenint.  x 

»  HUlon'a  AJibntiw  CaiBineii^is.  p.  491.  Original  existantaux  archives  du 
Mont-Cassin. 


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—  til  — - 

pire  aux  mains  des  Latins,  et  comme  de  nombreux  religieux  sont 
venus  dans  ces  contrées  pour  y  faire  le  bien,  nous  avons  jugé 
opportun  d'attribuer  une  large  part  des  bonnes  œuvres  à  ac- 
complir, à  l'Ordre  de  S.  Benoît',  le  premier  instituteur  de  la 
vie  monastique,  et  le  Père  des  Moines,  afni  que  le  nom  de  ce 
saint  religieux  qui  a  illustré  l'univers  par  ses  vertus,  fût  aussi 
proclamé  dans  les  contrées  de  l'Orient.  » 

«  A  ces  causes,  Vénérables  Frères  en  J.-C.  considérant  l'é- 
tendue de  votre  dévotion  envers  l'Église  Romaine,  que  vous  vé- 
nérez spécialement  comme  votre  mère,  et  en  vue  d'augmenter 
encore  plus,  par  votre  entremise,  la  vénération  pour  l'Église 
Romaine  dans  l'empire  de  Remanie,  » 

*  Nous  vous  concédons,  et  par  vous,  à  votre  monastère  du 
Mont-Cassin,  en  vertu  de  l'autorité  à  nous  déléguée  dansl'em- 
pire  de  Romanie,  le  monastère  de  Ste-Marie  de  Virgioti,  sis 
hors  la  ville  de  CP.  à  deux  milles  de  diatance.  (Extra  civita- 
tem  CPtanam,  infra  duo  milliaria  situm)  avec  toutes  ses 
dépendances,  raisons  et  propriétés  ;  à  la  condition  toutefois, 
que  vous  n'en  expulserez  pas  les  moines  grecs  qui  y  de- 
meurent. I 

«  Que  personne  dans  l'avenir  ne  vienne  donc  vous  troubler 
dans  la  possession  de  cette  église  qui  vous  est  ainsi  concédée, 
en  vertu  de  notre  autorité,  par  ce  présent  acte  ;  et  si  quelqu'un 
osait  violer  cet  acte,  qu'il  sache  qu'il  encourra  l'indignation  du 
Dieu  tout-puissant  et  celle  de  ses  saints  Apôtres  Pierre  et  Paul,  » 

»  Donné  à  CF.,  le  6  mars,  de  l'an  du  Seigneur  1206.  > 

Cet  acte  de  donation  fut  confirmé  sommaU'ement,  comme 
suit,  par  Honorius  III  : 

t  Honorius  Episcopua,  servus  servorum  Dei,  dilectis  flliis... 
abbati  et  conventui  Cassinensi,  salutem  et  apostolicam  benedi- 
ctionem.  Justis  fietentium  desideriis  dignum  est  nos  facilem  pre- 
bere  consensum,  et  vota  que  a  rationis  tramîte  non  discordant, 

>  s.  Benoit  fonda  aa  régie  au  mont  Cassin  en  540.  Chateaubriand,  Génie 
du  chriitianiume,  ITI,  179.  V.  sur  la  biï^aphie  de  S.  Benoit,  les  Bénédictins 
et  lea  abbaye»  de  Clairvaux  et  de  Clteaux  ;  Dirt.  tles  ordre*  religieux  du 
P.  Hélyot,  éd.  Migne,  I,  AM;  MilUtz,  I[,  partie  2,  liv.  3,  p,  464  ;  at  surtout  lea 
Moine*  d'Occident,  II,  S-72.  Dans, le  récit  de  la  vie  du  «  Docteur  ani^liqiM, 
du  patriarche  des  moines  d'Occident,  de  ce  grand  soldat  de  Dieu,  >  selon  las 
expresùons  de  M.  de  MontaLembert,  on  retrouve  plus  d'une  affinité  à  établir 
antre  cette  époque  et  le  temps  présent  I 


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—  63  — 

affectu  prosequente  complere.  Ea  propter,  dilecti  in  Christo 
fllii,  vestris  justis  petitionibus  grato  concurrentes  assensu,  ec- 
clesiam  Sancte  Marie  de  Virgiotis  a  bone  memorie  Benedicto, 
portuensi  episcopo,  tune  tituli  Sancte  Susanne presbytère  cardi- 
nali,  apostolice  sodis  legato,  pia  vobis  conslderatione  coUatum, 
sicut  eam  juste  ac  pacifiée  possidetis  ;  vobis  et  per  vos  mona- 
sterio  vestro  auctoritate  apostolica  conûrinamus  et  presentis 
scripti  patrocinio  communimus.  Nuîli  ergo  hominum  liceat  hanc 
paginam  nostre  confirmationis  et  protectionis  infringere,  vel  ei 
ausutemerario  contra  ire.  Si qaisautem  hoc  atteraptarepresunip- 
serit  indigaationem  Omnipotentis  et  Beatoium  Pétri  et  Pauli, 
apostolorum  ejus,  se  noverit  incursurum.  Datutn  Laterani,  III 
nonas  maji,  pontiflcatus  nostii  anno  primo.  {Adest  sigilhim 
plumbeum^ .  » 

Une  autre  bulle  du  même  pontife,  au  même  abbé>  mais  da- 
tée ;  «  Anagnie,  XIII  K/ilendas  Junii,  pontlficatus  nostri 
anno  primo,  »  c'est-à-dire  postérieure  d'un  mois  à  la  précé- 
dente, est  conçue  dans  les  mêmes  termes  que  l'acte  de  donation 
du  Cardinal  Légat,  Benoit,  quant  au  donataire,  à  la  situation 
topographique  de  l'église,  objet  de  la  donation,  et  à  la  condition 
de  résidence  des  moines  grecs  y  demeurant-. 

Que  se  passa-t-il  au  bout  de  quelques  années  entre  les  supé- 
rieurs de  l'église  nouvellement  concédée  aux  Bénédictins?  Y  eut- 
il  quelgu'acte  d'insubordination  de  la  part  des  premiers  envers 
l'abbé  du  mont  Casain?  on  serait  porté  à  le  supposer  d'après  la 
Bulle  [sub  piumbo),  donnée  à  Latran  par  le  même  Pape  Hono- 
rius  III,  le  15  décembre,  l'an  VII  de  notre  pontificat,  et 
adressée  à  l'abbé  et  au  couvent  de  l'église  de  Ste  Marie  de  Vir- 
giotis, les  exhortant  à  recevoir  avec  honneur  et  considération 
les  religieux  qui  leur  seraient  envoyés  du  Mont-Cassin,  dont  ils 
relèvent  et  à  se  soumettre  humblement  et  dévotement  à  leurs 
ordres  ■''. 

Le  mois  précêdent,le  même  Souverain  Pontife,  par  une  buUe 
{sub  piumbo),  confirmait  et  commentait,  en  faveur  du  Mont- 
Cassin,  la  donation  de  l'église  de  Ste  Marie  de  Virgiotis  : 

'  Arcbives  du  Mont'Casain  Caps.  S,  N*  27. 

>  Gattula,  Hltl.  abb.  Castln.  ;  capa.  2,  N''  37.  .  , 

»  Gattula,  id.  Capa.  II,  N-  40. 


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Dans  ce  document  Honorius,  après  avoir  rappelé  comment 
ledit  monastère  avait  été  donné  au  Mont  Cassin,  par  son  Légat, 
ajoat«  :  «  Procuratori  vestro  de  nostro  assignarlt  mandate,  et 
ipsum  in  possessionem  ejusdem  înduxerlt  corporalem.  Nos 
yestris  precibus  inclinati,  monasterium  istud>  sicnt  illud  juste, 
canoDice  et  pacifiée  possidetis,  vobis  et  per  vos  monasterio  Ca- 
sinensi  auctoritate  apostolica  conftrmamtts,  Itberum  et  e.rem- 
ptum,  et  presentis  scripti  patronicio  communimus.  XuUi  ergo 
etc.  Datum  Laterani  II  italend.  Nov.  pont.  Xostri  Anno  VU  '.  » 

Les  religieux  Bénèdictina  conservèrent-ils  cette  possession 
après  la  restauration  grecque?  Nous  ne  saurions  le  dire  ;  nous 
savons  seulement,  d'après  le  rapport  suivant,  emprunté  à  Dq- 
cange  ■  qu'en  1 334,  il  y  avait  encore,  dans  CP.  même  des  reli- 
gieuses de  l'Ordre  de  S.  Benoit.  «  Anno  mcocxxxiv,  monasterium 
monialium  ecclesiaa  Sanctae  Maria;  de  Petreio"  de  Constantino- 
poli,  ordinis  cisterciensium  regulfe  S.  Benedicti.  » 

Les  Fontes  rerum  austrinrcarum  fournissent  en  outre  la 
mention  d'un  assez  grand  nombre  d'églises  qui  paraissent  avoir 
été  desservies  par  les  Latins,  pendant  la  durée  de  l'empire  fran- 
co-vénitien. En  voici  la  liste  par  ordre  alphabétique,  avec  indi- 
cation du  volume  et  de  la  page  où  se  trouvent  les  documents 
en  faisant  mention  : 


1.  S.  AkTDdiD  (1,113,  1S5  ;  Akin- 
dan  II,  280)  ;  S.  Archidaii  de  Coiie- 
t8ntinople(l.67;  11.449)  ;Achindan 
(I.  2S7);S.  Aquindan  (11,449)  ;  S. 
Quintan  (111, 139,3261. 

S.  Ste  .\nastasie  [U,  76j. 

3.  S.  Ange  (II,  227). 

4.  S.  Apollinaire  (1.547). 

5.  S,  Cancian  (1,550;  (W  Cas- 
Bian  II,  aaaée  1255). 

6.  Église  du  cbateau  (I,  547). 

7.  SteCroiï{I,  Î150).. 


8.  S.  Jean-Baptiste  (I,  55i. 

9.  S.  Jean  ClirjsosHiwe  (I,  547). 

10.  S.  Jean  des  Cornes  (11,  4|'. 

11.  S.  Jérémie  (1,  547i,  S.   Véro- 
miejll,341. 

12.  S,  Georges-Majeur  1,  riSO:  II, 
4,270). 

13.  Ste  Herine,^  en  deliors  des 
murs  (II,  4). 

14.  Ste  Luce  (1,547|  ;  Ste  Lucie, 
(1.547). 

15.  S.  Marc  (1,  109, 1Î5.547  ;  JI, 


'  ArchÏT.  du  Mont  CaHsin,  caps.  II,  N*  2j. 

'  Con»tanUnopoU»  chri$tïana,  IV,  63. 

'  Au  quartier  Pétri,  à  Constantinople  (V.  Imperium 
tuellemeut  celui  où  le  .trouve  le  Patriarcat  grec. 

*  Allualon,  suivant  M,  Paapati,  &  un  certain  baur 
église,  dans  une  aorte  de  corne  d'abondanoe. 

<:  Ste  Irène;  vdir  Part,  11^  une  autre  église  de  ce  mj 


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270,  422);  s.  Marc  de  Conatanti-  cliolas  il,  109.  547);  S.  Nicolas-des- 

Dople(l.:i80).  '  Vénitiens?  {l,280i. 

16.  Ste  Marguerite  [1,547,  KOi.  24.  S.  Pantaléon  (1,547). 

17.  Ste  .Marie  <in,65. 139,326);  S5.    Monastère    de    Pantepopti 
OuStc  Marie  de  Erabulo  (1.280);  (11.  422).' 

id.  de  Einbolo  (II,  42ï).  20.  Id.  riu  Pantocralor  fil,  45i. 

18.  Ste  Marie  de  Blakerne  (11.  27.  S.  Paul  (II.  150);  S.  Paul  de 
111).  Conatantinople  |11,76). 

19.  Ste  Marie  de  Carpiano  (11,4).  2«.  S.  Samuel  (1,  550). 

20.  S.  Marcieu  (1.109).  29.  S.  Siiuéoti  (I,  547). 

21.  S.  Martin  (1,53.547).  S,  Mar-  30.  Ste  Sophie  (1.447.547)  ;  l'é- 
tin-Mineur,  Clugiensis  (1.125,5;0).  gliae  de  Conatantinople  \U.  55ft). 

22.  S.  Moyae  (M.  270l.  31.  S.  Sylvestre  (1.  547,  650i. 

23.  S.  Nicolas  (1,55,550)  ;  S.  Ni-  32.  S.  Vite  (I,  550). 

Ces  ('glises,  non  compris  Notre-Dame  des  Blaquernes,  sont  au 
nombre  de  trente  et  une"';  elles  paraissent  avoir  été  desservies 
par  les  Vénitiens  relevant  soit  du  patriarcat  local,  soit  de  celui 
de  Grade,  lequel  comptait  cinq  paroisses,  en  outre  des  autres 
églises  relevant  de  sa  juridiction.  On  verra  plus  bas^,  par  le 
document  du  âmars  1209,que  l'empereur  Baudoin  avait  retenu, 
de  son  côté,  trente  églises,  sur  lesquelles  il  avait  droit  de  nomi- 
nation; et  il  semblerait  également,  d'après  la  lettre  d'Inno- 
cent III*,  qu'il  serait  besoin  de  connaître  aussi  le  nombre  »  des 
églisps  pisanes  et  autres  ne  relevant  pas  de  la  juridiction  du 
patriarcat  local',»  pour  établir,  approximativement,  le  total 
des  églises  desservies  par  les  latins,  à  Constantinople,  pendant 
la  durée  de  l'empire  franco-vénitien. 

Après  son  élection  au  trône  patriarcal,  Morosini  essaya  de 
placer  sous  son  obéissance  l'épiscopat  de  l'île  de  Chypre, 
comme  cela  existait  sous  les  Grecs  ;  «  cet  épiscopat  se  compo- 
sait d'un  archevêque  et  de  trois  évèques  latins.  Le  Pape  fit 
responce  que  cela  ne  se  pouvait  pas  faire,  l'épiscopat  de  cette 

'  Aujourd'hui  Enkl-iinaret  iljami.  (Hadiqal-ul-'ljécdiiiy.)  Ce  livre,  aana 
entrer  m  al  heureusement  dans  aucun  détail  histoiique,  donne  le  ^aorn  de 
34  églises  chrétiennes  qui  auraient  été  changées  en  mosquées  à  CP. 

>  D'après  las  recharches  de  M.  la  Dr.  Paspati.ce  chiffre  se  serait  élevé  à  51. 

»  Fontel,  II,  111. 
-  •  L»-.  laud.,  p.  73. 

'  On  verra,  d'après  un  passage  de  Pachyméres,  relatif  au  couvent  latin 
repris  par  Andronle,  que  les  Pisans.  à  cette  époque,  étaient  placés,  A  CP. 
BOUS  la  juridiction  apitîtaelle  d'un  exarque.  De  nos  jours  ce  nom  est  donné 
encore  aux  chefs  spirituels  de*  Bulgares,  séparés  du  patriarche  oecuménique. 


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—  65  — 

lie  ayant  été  placé  sous  la  juridiction  du  patriarche  de  Hièru- 
salem  ',  avant  que  les  Français  se  fussent  rendus  maîtres  de 
l'empire  d'Orient-.  » 

Un  peu  plus  tard,  le  S9  mai  1205,  Innocent  III,  s'adressant 
au  doge  Henri,  condamne  sévèrement  le  partage,  fait  entre  les 
Vénitiena  et  les  Français,  des  biens  ecclésiastiques,  sauf  la  part 
réservée  pour  l'entretien  honorable  du  clergé.  Sa  Sainteté  ajoute 
que  la  spoliation  du  trésor  et  des  biens  des  églises  constitue  une 
faute  grave  ;  que  le  pape  ne  doit  et  ne  peut  approuver  un  acte 
aussi  contraire  au  serment  fait  par  les  parties  ;  que  cela  serait 
déroger  à  l'honneur  du  Saint-Siège.  Le  pape  adressa  le  même 
bl&me  à  Baadoin. 

Le  30  mars  même  année,  Innocent  III  écrit  au  patriarche 
Thomas  Morosini,  lui  conûrmant,  à  lui  et  à  ses  successeurs,  la 
possession  des  biens  actuels  et  futurs  de  son  église  ;  il  ratifie  les 
privilèges  et  immunités  de  cette  église,  ainsi  que  ses  coutumes 
raisonnables  et  anciennes^  il  confère  le  patlîum  ^  au  patriarche, 
l'autorisant  à  s'en  vêtir,  dans  les  églises  de  sa  juridiction,  aax 
messes  des  fêtes  et  solennités  indiquées  dans  cette  même  lettre  j 
il  lai  accorde  faculté  de  le  conférer,  à  son  tour,  aux  archevêques 
de  sa  juridiction  ;  de  faire  porter  devant  Jui  l'étendard  do  Sei- 
gneur,  c'est-à-dire  la  Crofac,  partout  où  il  se  trouvera,  excepté  à 
Rome  et  là  où  se  trouverait  le  pontife  romain;  comme  aussi 
<  ia  processionihusj  usum  nacci*.  > 

Par  lettre  de  même  date,  le  pape  concédait  également  au  pa- 
triarche la  faculté  de  conférer  les  ordres  et  les  dignités  ecclé- 
siastiques &  tel  qu'il  en  jugerait  digne. 

■  Encore  aujourd'hui  un  vicaire  du  patriarche  latin  de  JéniMlem  «it  ad- 
mloistrateur  spirituel  de  l'iie,  pour  le  rite  latin. 

>  Famille»  d'outre-mer,  p.  844. 

'  \'oîr  aur  l'origine  et  le  aene  lymboliqua  de  c«t  Inaigne  archiépiscopal, 
Le  culte  catholique,  par  l'abbé  Durand,  Paria,  1863.  p.  ISO. 

^  Id.  p,  539.  D'apréaleDiff.  in/".  lofinii.de  Dncange,  mvf uj  ou  naco»  parait 
£trele  caparaçon  dont  on  recouvrait  eniiArement  lea  chevaUK.au  moyen&ge, 
dans  les  aolennitée  publiques.  Le  privilège  de  faire  u»age  du  cherai  blanc 
ainsi  caparaçonné  était  donné,  par  les  papes,  à  certains  dignitaires  ecclé- 
siastiques. On  lit,  dans  une  lettre  d'Alexandre  III  &  l'archeréque  de  Cologne, 
■  Insigne  quoque  festivi  equi,  quod  a  quibusdam  vulgo  naecum  vocatur.., 
confinnainns.  ■  Dansla  lettre  34  d'Innocent  III  A  l'archsTéque  de  Piae,  id. 
Tenet.,  on  lit  aussi  :  s  Denique  ut  Pisana  civitas...  amplius  honoretur,  eqno 
albo  cum  nacho  albo  in  prooeaflionibas  uteodi  tibi  lieenliam  damus.  » 


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Encore  sous  ]a  même  date,  Sa  Sainteté  dit  au  patriarche  : 
€  Dans  le  serment  que,  selon  la  coutume  générale,  vous  aurez 
à  nous  prêter,  lors  de  la  réception  du  palHum,  vous  devrez  sti- 
puler spécialement  que  vous  ne  vendrez  pas  les  biens  relevant 
de  la  mense  de  votre  épîscopat,  que  vous  ne  les  donnerez  ni  en 
don  ni  en  gage,  que  vous  ne  les  inféoderez  ni  ne  les  aliénerez, 
sans  avoir  consulté,  au  préalable,  le  pontife  romain  '. 

Également  à  la  même  date.  Innocent  III  recommande  expres- 
sément au  patriarche  qu'à  son  décès  ou  à  celui  de  ses  succes- 
seurs, on  ne  propose  à  Rome  que  le  candidat  élu  selon  les  règles 
canoniques.  Consacré  d'après  les  usages  ecclésiastiques,  celui-ci 
devra  envoyer  un  d^égué  à  Rome,  pour  y  recevoir,  auprès  du 
corps  de  S.  Pierre,  le  palUum,  insigne  de  la  plénitude  de  la 
dignité  épiscopale  ;  et,  en  le  recevant,  il  prêtera  le  serment  pro- 
noncé par  le  patriarche  actuel  -. 

La  constitution,  à  Constaatînople,  du  patriarcat  latin,  à  cdté 
de  la  juridiction  antérieure  du  patriarche  de  Grade,  devant  né- 
cessairement amener  des  conflits  entre  ces  deux  autorités  ecclé- 
siastiques. Innocent  III,  eu  vue  de  prévenir  les  difllcult^s,  avait 
écrit  à  ce  dernier  t  qu'à  la  sollicitation  de  Morosini,  il  avait 
accordé  à  celui-ci  la  jouissance  complète  des  revenus  ecclésiasti- 
ques, jusqu'à  plus  ample  information  sur  l'état  de  )a  nouvelle 
église  '. 

Toutefois,  et  par  une  déclaration  pour  ainsi  dire  contempo- 
raine (elle  était  datée  du  14  mai  1305},  Thomas  Morosini,  pa- 
triarche de  Constantinople,  muni  du  consentement  du  chapitre 
patriarcal,  déclarait  exemptes  de  sa  juridiction  les  églises  de  la 
capitale  relevant  du  patriarcat  de  Grade,  ou  de  tous  autres  pré- 
lats Vénitiens.  Cet  acte  est  signé  :  «  Nicolas  Tinto,  presb.  et 
pleb.  Sancti  Nicolai,  canon.  S.  Sophiee  CP.  ecciesite,  Nicola 
Thome,  presb.  ecclesiœ  Sancte  Margarite,  canonicus  supra- 
scripte  ecclesie,  >  et  de  cinq  autres  chanoines  de  Sainte-So- 
phie'. 

L'intéressant  recueil  auquel  nous  avons  emprunté  ce  qui  pré- 
cède fournit  aussi  le  texte  de  l'acte  de  réception  du  serment 
prêté,  après  leur  élection,  par  les  chanoines  de  Sainte-Sophie, 


1  Id.  p.  546. 

!  Id.  p.  551.—  '  /t(,  p.  543.  — 


Id.  p.  544, 


DigilizPdbvGoOt^le 


aûn  d'assurer  la  possession  des  canonicats  et  du  patrlnrcat  aux 
Vénitiens  ;  en  voici,  în  extenso,  la  vereion  française  : 

1205.  8  mai. 

*  Au  nom  du  Dieu  éternel;  amen. 

c  En  présence  de  seigneur  Raniero,  Ûls  de  Henri  Dandolo.par 
la  grâce  du  Très-Haut,  doge  de  Venise,  Dalmatie  et  Croatie,  ré- 
gent ;  des  sages  membres  du  Conseil,  savoir  :  comte  Petro  Ziant, 
Henri  Navigaioso,  Petro  Barboni,  Laurentio  Quirino,  Giovanni 
Tomaso,  Philippe,  curé  de  Sainte-Luce  ;  maîtres  Frederico  et 
Philippo,  chanoines  de  Saint-Marc  ; 

f  Les  clercs  ci-après  nommés,  savoir  : 

Adam,  prêtre  de  Saint-Sylvestre, 

JeanBelon,  prêtre  de  Saint-Martin> 

OtoQ  et  Marino,  prêtres  de  Saint-Jérémie, 

Pierre  Sferminus,  prêtre  de  Saint-Apollinaire, 

Jacob  Mariano,  diacre  de  l'église  du  château, 

Mathias  Magliano,  prêtre  de  Saint- Siméon,  prophète, 

Léonard  Balluo,  prêtre  et  curé  de  Saint-Jean-Chryaostôme, 

Nicola  Tinto,  prêtre  et  curé  de  S.  Nichola, 

Nicolas  Thomas,  prêtre  de  Sainte-Marguerite, 

Pierre  Salinbeen,  prêtre  de  Saint- Pan taléon, 

Jean  Marao,  prêtre  de  Sainte-Lucie, 

Pierre  Ruibalo,  clerc  de  Saint- Marc  ', 

<  Ont  prêté,  sur  les  saints  évangiles,  le  serment  d'accomplir 
fidèlement  ce  qui  est  inscrit  dans  les  capituiaires,  savoir  : 

c  Moi  N-,  élu  chanoine  de  l'église  Sainte-Sophie,  je  fais  ser- 
ment de  n'élire  et  de  ne  recevoir,  en  ce  qui  me  concerne,  dans 
ladite  église  de  Sainte-Sophie,  comme  archidiacre,  archiprètre, 
prévôt,  [prepositus),  decan,  trésorier  ou  tout  autre  dignitaire 
de  ladite  église,  et  comme  patriarche  de  Constantlnople, 
qu'un  candidat,  Vénitien  de  nation,  ou  ayant  servi  pendant 
dix  années  dans  une  église  vénitienne.  Je  jure  de  faire  prêter, 
après  son  élection,  un  serment  semblable  à  quiconque  sera  élu 
et  reçu,  de  mon  temps;  et  je  ne  permettrai  jamais  que  ce  prin- 
cipe soit  enfreint  ou  violé. 

'  Toutes  ces  églises  sont  indiquées  dans  la  liste,  rapportée  ci-dessus,  des 
églises  desservies  par  tes  Latins. 


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c  Le  présent  serment  sera  inscrit  dans  les  actes  publics,  et 
transmis,  sans  altération,  aux  mains  du  procureur  de  Saint- 
Marc, 

Fait  dans  l'église  de  Saint-Marc,  prés  le  palais  ducal  '. 

Moi,  Jacques  Mariano,  diacre  et  clianoine  de  Sainte-Sopliye, 
m.  m.  ss. 

Moi,  Pierre  Ruibalo,  sous-diacre  et  chanoine  de  Sainte-So- 
phye,  m.  m,  ss. 

Moi,  Jean  Belon,  prêtre  et  chanoine  de  Sainte- Sophye, 
m.  m.  ss. 

Moi,  Mathias  Magliano,  prêtre  et  chanoine  de  Sainte-Sophye, 
m.  m.  ss. 

Moi,  Otto,  prêtre  et  chanoine  de  Sainte-Sophye,  m.  m.  ss. 

Moi,  Adam,  prêtre  et  chanoine  de  l'église  constantinopolitaine 
de  Sainte-Sophie,  m.  m.  ss. 

Moi,  Pierre  Stermînus,  prêtre  et  chanoine  de  Sainte-Sophye, 
m.  m.  ss. 

Moi,  Jean  Marao,  prêtre  et  chanoine,  id. 

Moi,  Nicola  Tinto,  prêtre  et  curé  de  Saint-Nicola,  chanoine 
de  l'église  de  Sainte-Sophye  de  Constantinople,  m,  m.  ss. 

Moi,  Nichola  Thomas,prêtre  et  chanoine  de  l'église  de  Sainte- 
Sophye  de  Constantinople,  id. 

Moi,  Marinus  Vitalis,  prêtre  et  chanoine,  id. 

Moi,  Philippe  de  Lupriolo,  curé  de  l'église  de  Sainte-Luce, 
tt.  ss.  (testis  subscripsi). 

Moi,  Philippe  Russo,  sous-diacre  de  l'église  de  Saint-Marc, 
tt.  ss. 

Moi,  maître  Frédéric,  chanoine  de  Saint-Marc,  tt.  ss. 

Léonard,  curé,  et  Pierre,  requérants  ; 

Moi,  Jean  Kardiaga,  prêtre  et  notaire,  de  ce  requis,  j'ai  écrit, 
parachevé  et  donné  force  légale  à  ce  que  dessus,  selon  ce  que 
j'ai  vu  et  entendu. 

<  Pour  copie  conforme  :  Vivianus,  écrivain,  notaire  et 
juge'.  » 

'  U  est  curieux  de  remarquer  que  ce  serment  était  prtté  dont  Saint-Marc 
et  non  point  dans  Sainte-Sophie.  Un  autre  acte  du  même  genre,  ooua  la 
date  du  14  mai  mime  année,  fut  rédigé  «  in  caméra  camb«llarla  du(»iUs  au- 
)e  venetiane.  » 

I  Fontes,  II,  p.  545. 


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^À 


Mais,  ces  dispositions  exclosives  ne  furent  pas  i^réées  du 
pape  :  Innocent  III  recommanda  au  patriarche  de  ne  pas  main- 
tenir ce  serment,  en  faveur  uniquement  des  Vénitiens  '  et,  tout 
en  ne  s' opposant  pas,  formellement,  à  ce  que  le  patriarche  fût 
vénitien,  sous  réserve,  toutefois,  des  droits  du  Siège  aposto- 
lique, le  pape  insista  énergiquement  pour  que  cette  condition 
ne  fit  pas  l'objet  d'un  acte  écrit,  de  telle  sorte  que  le  canonicat 
et  le  patriarcat  ne  devinssent  pas  ainsi  une  sorte  de  patrimoine 
héréditaire,  possédé  seulement  par  certains  individus,  mais 
soient  accessibles  à  quiconque  observe  la  justice  et  se  rend 
agréable  à  Dieu.  Un  ordre  pontifical,  du  25  août  1206,  enjoint 
même  au  patrîarclie  et  à  son  chapitre  de  recevoir,  comme 
chanoine,  la  personne  recommandée  dans  cet  ordre. 

L'établissement  du  patriarcat  latin  à  Constantinople  avait  créé 
dans  cette  ville,  nous  l'avons  dit,  une  situation  nouvelle,  notam- 
ment en  ce  qui  touchait  l'ancienne  juridiction  du  patriarche  de 
Grade  ;  ceiui-ci  déjà  en  avait  ressenti  les  effets  ;  aussi,  pour  cor- 
roborer l'existence  de  cet  ancien  patriarcat,  le  doge  prescrivit-il 
à  son  podestat,  à  Constantinople,  de  faire  dresser  l'acte  suivant, 
destiné  à  confirmer  et  à  renouveler  les  donations  faites,  anté- 
rieurement, au  patriarcat  de  Grade. 

1206  février'. 

«  An  nom  de  Dieu,  etc. 

€  Voulant  augmenter  de  plus  en  plus  l'importance  et  la  con- 
sidération du  patriarcat  de  Grade, 

*  Nous,  Marina  Geno,  podestat  des  Vénitiens  à  Constanti- 
nople, et  d'ordre  de  seigneur  Pietro  Ziano,  par  la  grâce  du  Dieu 
très  glorieux,  duc  des  Vènétie,  Dalmatie  et  Croatie,  seigneur 
du  quart  et  demi  de  l'empire  romain,  assisté  de  nos  juges  et 
sages  conseillers,  nous  vous  donnons  à  perpétuité,  ainsi  qu'à 
vos  successeurs,  à  vous  Benedicto  Faletro,  par  la  grâce  divine, 
patriarche  de  la  sainte  église  de  Grade,  primat  de  Dalmatie  : 

*  Toutes  nos  échelles,  autrefois  dites  de  notre  commune 


>  On  a  vu  plus  baut  en  etTet,  qu'en  1215,  un  Français  remplis*ait  In 
ohaige  de  décan  (jloyeii)  de  Ste  Sopbie. 

>  Loc.  laa-l.,  tl,  p. 


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—  70  — 

des  Vénitiens,  et  nos  terres  vagttes,  sises  hors  des  murs  de  la 
ville  de  Gonstantinople,  avec  tout  le  rivage  ;  les  petites  échelles 
et  leurs  revenus,  à  partir  de  l'angle  oriental  de  la  tour  du  cou- 
vent de  Saint-Georçes  le  Majeur,...  jusqu'à  une  distance  de 
treize  pieds  au  delà  de  la  tour  de  Sainte-Marie,  à  l'ouest  ;  le 
tout  comprenant  une  étendue  de  quarante-deux  pieds  et  demi, 
en  longueur  ;  auxquelles  échelles  les  Vénitiens  ont  pouvoir  d'a- 
border, avec  leurs  navires,  de  les  y  ancrer,  de  les  y  charger  et 
débarquer,  en  un  mot,  d'y  faire  leurs  opérations,  de  laisser  là 
leurs  barques  et  d'y  habiter,  selon  leurs  convenances  '.  » 

«  Au  milieu  de  ces  propriétés  se  trouve  l'église  de  S.  Akin- 
din  ',  avec  ses  dépendances.  «  Nous  vous  concédons,  en  outre, 
les  propriétés,  terrains  et  maisons  sis  près  de  l'église  de  St. 
Jean  de  Comibus,  comme  auprès  du  portique  de  cette  église 
auquel  aboutit,  d'un  côté,  la  voie  publique  percée  entre  ces  pro- 
priétés et  I  Simionem  >,  l'une  des  extrémités  aboutit  à  une  rue 
allant  des  propriétés  de  Ste  Hérine  à  ladite  voie,  l'autre  au 
quartier  des  Lombards  (in  Lombardis).  » 

«  Nous  vous  concédons  encore  la  propriété  des  terrains  sis, 
avec  deux  arcades,  (cuni  duabusvoltis', auprès  de  la  cour,  [cur- 
tem ,  de  Ste  Hérine,  hors  des  murs,  jusqu'à  ladite  église  de 
Ste  Hérine,  vers  les  propriétés,  qui  jadis,  furent  aux  Alle- 
mands... > 

c  Nous  vous  donnons  également  toutes  nos  propriétéSjCOtitierf  gj 
et  non  couvertes,  nos  terres  et  maisons,  sises  sous  [infra) 
le  mur  de  Gonstantinople,  appartenant  à  la  co^mnunedes  Véni- 
tiens, aboutissant,  d'un  côté,  à  l'ancienne  muraille  de  Sevasto- 
crator,  et  de  l'autre  au  mur  de  la  ville  ;  se  terminant,  d'un  bout 
et  en  ligne  droite,  à  la  rue  allant,  de  la  porte  Ebrayhy,  au  mur 
du  Sevastocrator,  «  in  cuva  Stœ  Mariœ  de  Carpiani,  n  puis, 
traversant  le  mur  et  allant  à  la  mer  j  le  tout,  aussi  bien  la  partie 
hors  du  mur  de  la  ville  que  celle  dite  sous  le  mur  de  la  cité,  a 

■  Dans  un  acte  d'octobre  1296  {Fonte»-  II,  43),  Renedicto  de  Salmaza  se 
■erait  engagé  Â  payer  un  loyer  de...  pour  un  terrain  de  30  pieds  <Ie  long  Bur 
12  de  large,  «  sis  à  Gonstantinople,  en  dehors  des  murs,  à  la  Sikala  inojor, 
«ur  la  rive  de  Perama,  et  qui  relève  du  patriarcat  de  Grade.  « 

*  Le  curé  (pltbanu»)  de  Saiat-Akindin,  arant  d'entrer  en  fonctions,  prêtait 
•erment  de  fidélité  au  patriarche  de  Grade  ;  un  acte  de  ce  genre,  dressé  au 
palais  patriarcal,  le  4  août  1250.  est  rapporte  dans  les  Fo/tfes.  tome  II, 
p.  449. 


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_  7i  — 

été  déterminé  par  nous  et  Jufredus,  maréchal  de  l'empire,  de  ce 
mandé  par  l'emperem-.  » 

A.  la  suite  de  ces  donations  se  trouve  inscrite  la  liste  nomina- 
tive des  propriétés  du  patriarcat  de  Grade,  à  Constaiitinople, 
rangées  sons  les  sept  titres  suivants  : 

€  1°  Iste  sunt  case  extra,  juxta  murum'civitatis  Constanti- 
nopoli.... 

2"  Aput  Drongarium... 

3°  Iste  sunt  case  de  ripa  secus  mare.,. 

4"  Infra  civitatem  apud  S.  Akindanum... 

5°  Ante  S.  Akindanum... 

6°  Apud  S.  Johannem  de  Cornibus.... 

7"  Scala  de  Drongario....  » 

Le  pape,  on  l'a  vu,  s'était  réservé  de  donner  des  instructions 
au  patriarche  latin  de  Constantinople,  après  plus  ample  informa- 
tion snr  l'état  de  son  Église  ;  la  lettre  do  2  août  règle  les  point» 
snivants  : 

<  Les  possesseurs  des  églises  et  biens  ecclésiastiques  relève- 
ront delà  juridiction  patriarcale  de  Constantinople,  à  l'excep- 
tion de  celles  de  ces  églises  qui,  avant  la  prise  de  la  ville  royale, 
auraient  été  distraites  K'guliêrement  de  la  juridiction  patriar- 
cale. * 

Le  Pape  ne  trouve  pas  juste,  non  plus,  de  faire  aucun  tort, 
soit  par  jugement  soit  par  contumace,  à  ceux  dont  ces  églises 
relèvent;  t  la  prudence  conseille  aussi,dit  te  Souverain  Pontife, 
de  ne  pas  exciter  contre  l'empire,  les  Pisans,  Vénitiens  ou  tous 
antres  ayant,  dans  GP.,  de  ces  sortes  d'églises  ;  »  il  engage  le  pa- 
fa'iaiche  à  user  de  conciliation,  jusqu'à  ce  que  l'empire  soit 
solidement  établi;  alors,  si  le  patriarche  juge  équitable  de  pour- 
suivre la  revendication  de  ses  droits,  le  Pape  lui  fera  rendre 
justice. 

ï  Dans  les  églises  habitées  seulement  par  des  grecs,  le  pa- 
triarche devra  placer  des  évoques  grecs,  si  l'on  en  peut  trouver 
de  lidèles  et  dévoués  au  Siège  apostolique,  et  consentant  à  être 
sacrés  par  le  patriarche  ;  dans  les  églises  mixtes,  habitéas  par 
des  grecs  et  des  latins,  le  patriarche  devra  donner  la  préférence 
.  aux  desservants  latins  sur  les  grecs,  i 

€  Quant  à  la  question  de  laisser  les  grecs  officier  dans  leur 
rite  ou  de  les  pous-ter  à  adopter  le  rite  latin,  le  patriarche  devra 


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—  73  — 

les  maintenir  aussi  longtemps  que  possible,  dans  leur  rite,  jus- 
qu'à ce  que,  après  mûre  réflexion,  le  Saint-Siège  eu  ait  décidé 
autrement  >. 

»  En  ce  qui  touche  les  mouastères  grecs  à  convertir  en  cano- 
nicats  séculiers,  le  patriarche  n'en  devra  rien  faire  tant  que  ces 
monastères  seront*  occupés  par  des  réguliers,  grecs  ou  latins  ; 
il  ne  devra  y  placer  de  clercs  séculiers  qu'an  défaut  de  régu- 
liers'. » 

Comme  il  l'avait  annoncé,le  pape  envoya  un  légat  à  Coustan- 
tinople  ;  l'intervention  de  ce  haut  dignitaire  ecclésiastique  se 
produisitdans  la  convention  intervenue  le  5  août  1206,  entre  ce 
prélat  et  le  patriarche  latin,  d'une  part,  l'empereur  Henri,  les 
barons,  l'armée  et  le  peuple,  d'autre  part,  au  sujet  des  anne- 
xions et  conquêtes  pouvant  être  faites  dans  l'avenir. 

«  L'empereur,  du  conseil  et  consentement  des  princes,  ba- 
rons, de  l'armée  et  du  peuple,  fait  don  aux  églises,  sises  en 
dehors  des  murs  de  Constantinople,  de  la  quinzième  partie  des 
terres,  habitations,  forêts,  champs,  vignes,  salines  et  autres  pro- 
priétés, de  quelque  nature  qu'elles  puissent  être,  sauf,  bien  en- 
tendu, ce  qu'elles  possèdent  déjà,  près  des  murs  de  Constanti- 
nople (t  a  porta  Aurea  itsqtce  ad  portam  Blachemam,inf^a 
murum  ipsius  et  mare.  » 

f  Sur  la  douane  à  percevoir,  sous  et  hors  des  murs  de  Cons- 
tantinople, au  nom  de  la  aille,  il  leur  accordait  franchise  du 
quinzième.  * 

«  Les  clercs,  toutes  les  églises,  les  propriétés  en  dépendant,  les 
individus  y  demeurant,  les  religieux  grecs  ou  latins,  les  sécu- 
liers, habitant  avec  eux  le  cloître  des  églises,  ceux  qui  s'y  ré- 
fugieront, seront  affranchis  de  toute  juridiction  laïque, 
selon  la  coutume  de  France  ;  faisant  réserve,  toatefois,  de  l'au- 
torité de  l'Église  romaine,  de  celles  du  patriarche  et  de  l'empe- 
reur-. » 

Comme  complément  à  cette  lettre,  et  sur  l'exposé  qui  lai  en 
avait  été  fait  par  le /patriarche,  que  certains  évêques,  tout  en 
faisant  acte  de  soumission  au  patriarcat  et  ayant  prêté  serment 
d'obéissance  et  de  fidélité  au  Siège  apostolique,  refusaient 

I  Fonte»,  II,  p.  19. 
»  Fonle»,  II,  p.  31. 


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—  73  — 

d'être  sacrés,  selon  l'usage  latin,  Innocent  III  répond  que,  t  si 
les  évèques  déjà  sacrés,  refusent  de  recevoir  une  nouvelle  onc- 
tion, le  patriarche  devra,  sur  ce  point,  fermer  les  yeux;  mais 
que  ceux  qui  devraient  être  sacrés  ultérieurement,  ne  pourront 
Tètre  que  d'après  l'usage  latin,  pai'ce  que,  dit  le  pape,  nous  ne 
pouvons  sacrer,  même  les  grecs,  que  selon  nos  propres  cou- 
tumes'. > 

Malgré  la  prépondérance  dont  ils  jouissaient  sur  Ste  Sophie, 
l'église  patriarcale  ;  les  Vénitiens  se  rendirent  pourtant  cou- 
pables de  la  violation  de  cette  église.  Le  patriarche  fit  au  Pape 
le  récit  détaillé  de  cet  événement  dont  voici  les  circonstances  : 
le  podestat  fit  enlever  violemment  l'ff^one  sur  laquelle,  dicitur, 
S.  Luc  avait,  de  sa  propre  main,  reproduit  les  traits  de  la 
sainte  Vierge  ;  placée  autrefois,  avec  certaines  reliques,  dans 
la  chapelle  du  grand  palais  ",  l'empereur  Henri  aurait  fait  don 
de  cette  image  à  Sainte-Sophie.  Les  Vénitiens,  ne  voyant  pas  la 
réalisation  des  promesses  qui  leur  avaient  été  faites  avant  le 
couronnement  de  Henri,  voulurent  alors  en  assurer  eux-mêmes 
l'exécution  ^  ;  le  podestat  envoya  à  Sainte-Sophie  des  agents  qui 
brisèrent  l'une  des  grandes  portes  de  l'église  ;  et  ils  se  dispo- 
saient k  en  faire  autant  de  celle  du  sanctuaire  où  Vtmage  était 
déposée,  lorsque  le  patriarche,  informé  de  se  qui  se  passait,  ac> 
courut  sur  les  lieux  •-,  voyant  l'imminence  du  sacrilège,  il  mena- 
ça les  envahisseurs  de  l'excommunication  ;  n'ayant  pu  les  ar- 
rêter, le  prélat,  c  candelis  accensis,  »  frappa  publiquement  et 
solennellement  d'excommunication  le  podestat,  son  conseil  et 
les  exécuteurs  de  leurs  ordres.  Les  foudres  ecclésiastiques  n'ar- 
rêtèrent pourtant  pas  les  violateurs  du  sanctuaire  ;  ils  en  bri- 
sèrent les  portes,  s'emparèrent  de  l'image,  et  la  portèrent  dans 
Véfflise  du  Pantocrator''.  Le  patriarche  s'étant  ensuite  rendu 

'  FonUi.  II,  p.  68. 

»  Cf.  plus  haut,  tarmenCde»  chanoine»,  8  mai  1205. 

'  Voyez  ci-dessue,  chap.  i. 

'  M.  le  Dr.  Dethier,  dans  une  note  insérée  au  Lûeunt-Hfifil'l  du 
2i  avril  lt<T6,  dit  :  >  Lorsque  Ibr  croisÊa  I^tiiK  a.ssi(-gârcat  et  prirent  CP., 
l'empereur  flt  faire  une  eorlie  contre  eux,  avec  l'image  de  la  madone 
«  Odi([hitria»  conduisant 'à  la  victoire.  »  La  sortie  fut  malheureuBe.  l'image 
tomba  au  pouvoir  de*  Croisés,  et  fut  envoyée  en  Italie.  Sa  raprorfuction  est 
donnée  par  d'Adncourrt,  dans  son  Histoire  de  l'art  par  les  monument», 
pi.  27.  I,e  comte  ttiani,  (des  Dépoitilleii  i-eligieii»et  etc.  p.  36).  dit  :  ■  la  cé- 


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—  74  — 

auprès  du  légat  pontîQcal,  celui-ci  conûrma  rexcommunication 
et  l'interdit  lancés  contre  toutes  les  églises  du  quartier  habité 
par  les  sacrilèges.  —  Dans  sa  lettre  du  15  janvier  1207,  au  pa- 
triarche, le  pape  conSrnia  les  censures  prononcées  dans  cette 
circonstance  '. 

Ces  scènes  de  désordre,  qui  présentaient  des  symptômes 
qu'on  ne  saurait  méconnaître,  ne  furent  sans  doute  pas  les  seules 
de  ce  genre,  car  le  pape  enjoignait,  le  7  mai'S  1308^,  aux  mem- 
bres du  clergé  de  toutes  les  églises  de  Constantinople,  non  dis- 
traites de  la  juridiction  patriarcale,  «  d'obéir  aux  ordres  du  pa- 
triarche, de  le  reconnaître  comme  le  père,  l'évêque  de  leurs 
âmes,  et  de  lui  rendre  les  honneurs  et  l'obéissance  canoniques; 
il  recommandait,  en  même  temps,  à  l'empereur,  de  prêter  aide 
et  assistance  à  ce  prélat,  afin  que  les  grecs,  clercs  et  séculiers, 
rendent  hommage  à  la  très  sainte  Église  romaine,  à  son  véné- 
rable frère  le  patriarche  de  Constantinople,  et  le  reconnaissent 
pour  leur  père  et  leur  pasteur.  » 

Les  marques  d'insubordination  se  manifestaient,  d'ailleurs, 
sur  plus  d'un  point  :  malgré  la  défense  pontificale  relative  au 
serment  d'exclusivité,  prêté  par  les  chanoines  de  Sainte-Sophie, 
après  leur  élection,  cette  formalité,  comme  le  prouvent  les  actes 
de  novembre  1207  et  d'avril  1308,  ne  continuaitpas  moins  d'être 
accomplie^. 

D'autre  part,  le  patriarche  se  plaignait,  de  son  côté,  au  pape, 
en  mars  même  année,du  refus  dea  Pisans, Lombards, Amalfitains, 

lébre  anacoine  tomba  entre  les  mains  d'Iienri  il'Anjoii,  à  l'embuscade  de  la 
Philée,  elle  fut  attribuée  à  l'abbaye  de  Citeaux.  Puis  il  ajoute  en  note  :  »  l'î-  ' 
dentification  exacte  de  cette  image  (décrite  par  Clari,  Albéric  et  Co^eehale) 
avec  l'une  des  trois  ou  quatre  Iconea  miraculeuses  de  la  Vierge,  conservées 
à  CF.,  est  presque  impossible.  Cette  ancoiane  ne  parait  pas  d'ailleurs  être 
venue  en  Europe.  »  Cf.  Hiant  D^poaiUe»  •■eîigleutet  e'deofeu  à  CP.  au  XUl- 
tiirie  par  le»  Lntira.  p.  53.) 

'  Fonlea,  72. 

'  Il  semblerait  résulter  Je  ce  passage,  qu'il  y  avait  encore  A  Constantinople 
d'autres  juridictions  ecclésiastiques  que  celle  du  patriarche  de  Grade,  ne  re- 
'eTant  pas  de  l'autorité  patriarcale  du  lieu,  n  Vicarius  patriarchsGradensis 
bnrgenses  venetos  liabitatores  civitatis  ejusdem.  sive  maneaDt  in  quinque 
paiTOCchiJB  ejusdem  patriarchee  Gradeusis,  sive  se  transférant  ad  parrochias 
^bi  Bubjectat  seu  ad  parrocbias  Pisanorum  nec  non  etiam  ad  parrochias  îl- 
lorum.  qui  Constaotinopolitano  non  aunt  subditi  patriarchffi,  ecclesiastica 
dlatrictione  compellit...  >•  (ForUet.  II.  73.) 
3  /r/.  II.  p.  75. 


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—  75  — 

Danois,  Anglais  et  autres,  résidant  k  Constantinople,  d'acquitter, 
dans  leurs  paroisses,  les  taxes  respectives  '  ;  et,  ce  n'est  pas 
non  plas  sans  motif  que  le  pape  recommandait,  le  8  mars  1208, 
au  patriarche  de  Grade  et  aux  siens  d'éviter  tout  contact  ou  rela- 
tion avec  les  excommuniés,  et  de  leur  refuser  les  sacrements  '. 

Enfin,  un  diSférend  vint  à  s'élever  aussi  entre  le  patriarche  et 
l'emperenr,  au 'sujet  de  la  nomination  {pt^œposilurœ)  à  trente 
Églises,  et  des  meilleures  de  [infra]  Constantinople,  échues  aux 
ïYançais,  que  l'empereur  Baudoin  aurait  retenues  comme  do- 
nation personnelle,  et  dans  lesquelles  il  pourvoyait  k  la  nomi- 
nation des  supérieurs  et  àécans.  Le  patriarche  demandait  que 
ces  églises  fissent  retour  à  sa  juridiction,  d'autant  pins  que  le 
légat  apostolique  se  seraitadjugë  vingt-trois  de  ces  églises,  sans 
se  prononcer  sur  les  sept  autres,  pour  lesquelles  il  attendait  la 
décision  du  Souverain  Pontife. 

L'empereur,  de  son  c6të,  demandait  au  Siège  apostolique  de 
lui  conlirmer  le  droit  de  nomination  sur  ces  églises,  préten- 
dant n'avoir  pas,  en  cela,  moins  le  droit  que  les  princes  occi- 
dentaux sur  les  églises  de  leurs  contrées. 

En  l'état,  le  pape  déféra  l'examen  du  conflit  &  une  commission 
d'enquête,  formée  d'un  archevêque  et  d'un  évêque,  qui  auraient 
ensuite  à  lui  transmettre  leur  rapport^. 

Une  autre  commission  du  même  genre,  composée  de  deux 
évêqnes  et  du  décan  de  Sainte-Sophie,  fut  chargée  d'examiner 
un  antre  conflit  survenu  entre  le  patriarche  de  Constantinople 
et  celui  de  Grade.  Le  premier  s'était  plaint  au  pape,  de  ce  que, 
malgré  l'autorisation  à  lui  donnée  par  le  Siège  apostolique,  de 
prélever  certaines  taxes  sur  les  Vénitiens,  le  vicaire  du  pa- 
triarche de  Grade  voulait  contraindre  les  bourgeois  vénitiens 
résidant  dans  la  circonscription  des  ctnq  paroisses  de  son  pa- 
triarcat, OH  de  celles  en  relevant,  ou  bien  domiciliés  dans  le  dis- 
trict des  paroisses  des  Pisans,  ou  tous  autres  non  soumis  au 
patriarche  de  Constantinople,  d'acquitter  ces  taxes  entre  ses 
mains,  ne  leur  permettant  pas  de  recevoir  la  bénédiction  nup- 
tiale ailleurs  que  dans  les  églises  de  sa  juridiction,  c'est-à-dire 

'  îd.  II.  p.  68, 
»  /./.  II.  p.  69. 
*  fwilw,  II,  76. 


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—  76  — 

là  où  ils  ne  résidaient  point,  et  cela  même,  quelquefois,  sous 
peine  d'excommunication.  Le  pape  chargea  des  conunisaaires 
de  prononcer  canoniquement^  sauf  appel,  sur  le  point  en 
litige. 

Revenant  ensuite  sur  les  faits  déjà  frappés  de  son  blflme, 
Innocent  III,  sous  la  date  du  23  avril  1208,  adressa  au  patriarche 
de  Constantinople  des  reproches  sévères  sur  l'oubli  de  ses  pro- 
messes ;  il  condamna  de  nouveau  le  principe  d'exclusion  aux 
canonicat  de  Sainte-Sophie,  appliqué  à  tous  autres  que  les  Véni- 
tiens ou  les  prêtres  ayant  desservi,  durant  dix  années,  une  église 
vénitienne  ;  et  il  termine  en  avertissant  le  patriarche  qu'il  pres- 
crit à  ses  commissaires  de  prononcer  sa  suspension.  Une  autre 
lettre,  de  même  date,  enjoint  aux  chanoines  de  Sainte-Sophie 
d'abjurer  le  serment  fait  par  eux  à  cet  égard,  faute  de  quoi  ils 
seront  également  suspendus. 

A  son  tour,  et  revenant  sur  l'affaire  des  églises  à  sa  nomina- 
tion, l'empereur  Henri  porta  plainte  au  pape  de  ce  que  le  pa- 
triarche, sans  prendre  son  avis,  nommait,  de  son  libre  arbitre, 
et  sans  le  consulter,  aux  églises  relevant  de  son  autorité  ;  et  il 
manifestait  le  désir  d'éviter  le  scandale  de  voir  les  supérieurs  et 
le  clergé  de  ces  églises  Frappés  d'excommunication.  Il  parait 
que  l'affaire  aurait  été  jugée  en  faveur  des  prérogatives  de  l'em- 
pereur, car  le  pape  écrit,  le  2  novembre  1209,  qu'il  a  enjoint  au 
patriarche  de  mettre  fin  à  ces  injustes  prétentions,  et  d'éloignei' 
de  ces  églises  les  dignitaires  nommés  par  lui  *. 

Poursuivant  le  cours  de  ses  démarches  antérieures  en  vue 
d'établir  l'indépendance  de  sa  juridiction,  le  patriarche  de  Grade 
requit  et  obtint  de  Mathieu,  patriarche  de  Constantinople,  le 
81  janvier  1321,  la  rédaction  d'un  acte  public  par  lequel  celui- 
ci  déclara  et  reconnut  l'exemption  de  sa  juridiction,  tant  au 
spirituel  qu'au  temporel,  comme  au  temps  des  grecs  pour  les 
églises  vénitiennes  existant  dans  l'empire  romain;  il  s'engageait 
de  plus,  pour  lui  et  ses  successeurs,  et  en  cas  de  violation  de 
cette  promesse,  à  payer  au  patriarcat  de  Grade  une  amende  de 
cent  marcs  d'ai^ent-. 


"  Fontet,  p.  111. 

1  Fonies,  II,  422.  Cf.  ci-dc»suB  14  mai  1S05.  I.c  pape  Alexandre  coDflrma 
cette  exemption  le  11  juillet  125G  (Fonte»,  III,  16.) 


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—  77  — 

C'est  vers  cette  époque,  en  1219,  que  nous  voyons  apparaître 
pour  la  première  fois  en  Orient  des  rellgîeus  nouvellement  ins- 
titués, les  Frères  Mineurs,  appelés  plus  communément  Fran- 
ciscains, du  nom  de  St.  François  d'Assise,  leur  fondateur 
(1183-1224).  Les  religieux  ne  manquaient  pasàCP.  :  nous  avons 
TU  que  les  Bénédictins,  des  diverses  branches  de  l'Ordre,  s'y 
étaient  établis  dès  le  commencement.  Les  Cisterciens,  qui  avaient 
eu  ane  si  large  part  dans  l'organisation  de  la  croisade,  avaient 
eu  aussi  unepartcorrespondante  dans  la  distribution  des  églises^ 
les  religieux  de  Cluny,  ceux  du  Mont  Cassin,  avaient  aussi 
leurs  monastères,  et  nous  avons  même  signalé  un  couvent  de 
religieuses  Cisterciennes.  Nous  avons  noté  aussi  la  présence  des 
Ordres  hospitaliers  ou  militaires.  Tous  ces  Ordres  entraient  fort 
bien  dans  le  système  féodal  que  la  conquête  imposait  à  l'empire 
d'Orient;  ils  ne  se  trouvaient  pas  déplacés  dans  les  conseils,  à 
cdté  des  Barons  bardés  de  fer  ;  ils  s'y  étaient  même  si  bien  unis 
et  inféodés  qu'au  jour  où  l'empire  fut  renversé,  non  seulement 
le  clergé  séculier  qui  faisait  partie  du  système  politique,  mais 
encore  les  religieux,  furent  renversés  avec  lui  et  disparurent  des 
terres  redevenues  grecques.  Les  Frères  Mineurs  et  les  Frères 
Prêcheurs  ou  Dominicains,  au  contraire,  plus  indépendants  des 
circonstances  extérieures,  parce  qu'ils  n'avaient  pas  de  bènéficeB 
ou  de  biens  territoriaux,  destinés,  en  vertu  même  de  leurs  régies, 
à  se  mêler  au  monde,  organisés  pour  vivre  sous  toutes  les  lati- 
tudes et  s'accommoder  à  tous  les  régimes,  restèrent  à  leurs  postes, 
non  seulement  sous  les  empereurs  grecs,  mais  aussi  sons  les 
Sultans.  Us  furent  pendant  des  siècles,  presque  le  seul  clergé 
latin  de  CF.,  comme  nous  le  verrons  plus  tard. 

Le  premier  Frère  Mineur  que  nous  voyons  cité  à  propos  de 
CP.  est  un  certain  Fr.  Lucas  d'Apulie  qui  est  nommé  provincial 
de  Romanie,  ou  de  Grèce  (la  dixième  des  provinces  de  l'Ordre), 
au  grand  chapitre  de  1319,  dit  Chapitre  des  Nattes.  Il  ne  vint 
peut-être  pas  à  CP.  ou  du  moins  11  n'y  resta  pas  bien  longtemps, 
car  en  1220,  il  y  était  remplacé  ijar  F.  Benedetto  d'Arezzo,  un 
grand  et  saint  religieux,  qui  organisa  cette  province  et  la  ât 
reconnaître  par  l'empereur  Robert  de  Conrthenay.  Cette  province 
de  Grèce  comprenait  tout  le  littoral  de  la  Méditerranée,  depuis 
rniyrie,  jusqu'à  CP.,  et  même  l'Asie-Mineure.  Elle  semble'avoir 
été  presque  dès  le  commencemeut  séparée  de  celle  de  Syrie^oa 


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—  78  — 

de  Terre  Sainte.  Fr.  Benedetto  resta  longtemps  en  Orient  et  y 
travailla  beaucoup. 

Les  Frères  Prêcheurs  ou  Dominicains,  vinrent  à  CP.  presque 
en  même  temps  que  les  Franciscains;  mais  il  semble  que  leur 
mission  ne  fut  complètement  organisée  que  par  S.  Hyacinthe,  qui 
y  arriva  vers  1332.  Il  continua  en  Romanie,  ce  qu'il  avait  fait 
en  uu  grand  nombre  d'autres  pays  qu'il  avait  évangélisés,  rece- 
vant des  novices  et  fondant  des  couvents,  partout  où  il  passait. 

Dans  quels  endroits  furent  installés  ces  premiers  religieux  ? 
Les  chroniques  et  les  archives  sont  muettes  à  cet  égard.  Toujours 
est-il  qu'ils  furent  activement  employés  par  les  empereurs  latins. 
Ainsi  nous  voyons  qu'on  leur  confie  les  missions  les  plus  impor- 
tantes, soit  auprès  des  princes,  soit  auprès  des  èvêques  et  des 
conciles,  dans  toutes  les  tentatives  qui  furent  faites  pour  l'union 
de  l'Église  grecque  à  l'Église  Romaine. 

Par  telles  circonstances  que  nous  ignorons,  l'abbé  et  le  cou- 
vent de  Saint-Georges  le  Majeur,  des  Vénitiens,  donnèrent  en  lo- 
cation, par  acte  du  15  octobre  1344,  à  l'archevêque  d'Héraclée, 
l'église  Sainte-Marie  de  Embolo  et  le  monastère  de  Pante- 
popti,  ainsi  que  les  propriétés  en  dépendant.  L'archevêque  pro- 
mettait de  conserver  lesdites  églises,  propriétés  et  dépendances, 
dans  l'état  ofi  il  les  recevait,  et  mieux  si  possible,  de  les  dé- 
fendre «  ad  opus  ipsius  monasterii,  >  de  faire  desservir  Sainte- 
Marie  par  un  prêtre  et  des  clercs,  et,  selon  l'usage,  d'y  faire 
célébrer  solennellement  la  fête  de  S.  Marc.  Il  promettait,  en 
outre,  de  payer  à  l'abbé  ou  à  ses  successeurs  et  au  couvent, 
trente  yperperis  d'or,  de  juste  poids,  à  Constantinople,  en  sep- 
tembre ou  en  mars,  ou  bien  au  départ  des  convois  de  navires 
de  commerce,  ou  comme  on  disait,  aux  passages  de  chrétienté 
en  Levant  ' . 

Cependant  l'empire  Latin  d'Orient  n'était  pas  né  viable.  Bau- 
doin I,  qui  avait  été  élu  empereur  du  consentement  commun, 
ne  put  jamais  néanmoins  exercer  une  autorité  sérieuse,  même 
sur  la  ville  de  CP.  ;  le  doge  de  Venise  se  disait  Seigneur  du 
quart  et  demi  de  l'empire  ;  les  autres  grands  Barons  s'étaient 
fait  des  principautés  presque  indépendantes,  et  s'y  maintenaient 


I  Villehardouin,  éd.  Buchon,  p.  33  et  nos  Capîialationt  de  la  Franre 
Orient,  p.  43. 


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—  79  — 

&  grand  peine  :  les  Vénitiens  s'établissaient  dans  les  lies  et  sur 
les  côtes.  Tous  relevaient  nominalement  de  l'empereur  ;  mais 
occupés  chacun  de  leur  cdté,  ils  le  laissaient  seul  et  affaibli,  en 
face  des  intrigues  des  Grecs,  et  des  attaques  des  Bulgares.  On 
sait  comment  après  des  prodiges  de  valeur,  Baudoin  alla  se 
faire  prendre  à  Andrinople,  et  mourut  en  captivité.  Ce  prince 
était  remarquable  à  tous  égards  ;  sa  vertu  égalait  sa  bravoure, 
mais  les  circonstances  étaient  plus  fortes  que  lui. 

Il  eut  pour  successeur  son  frère  Henri  de  Flandres  (Élu  le 
30  août  1206,  après  16  mois  de  régence.)  Il  arrivait  au  trdne 
au  milieu  de  dllTicultés  inextricables.  Ses  belles  qualités,  ses 
vertus,  sa  vaillance  ne  purent  néanmoins  lui  permettre  de  con- 
solider son  empire,  en  ses  10  ans  de  règne.  Il  mourut  sanspos- 
térité  en  1316. 

Il  y  eut  de  grandes  difficultés  pour  lui  donner  un  successeur; 
mais  enlln  l'atTaire  fut  portée  devant  le  Pape  Honorius  III  qiii 
donna  droit  à  Pierre  de  Courtenay,  comte  d'Auzerre,  qui  pou- 
vait revendiquer  les  droits  de  sa  femme  Yolande,  sœur  de  Bau- 
doin et  d'Henri.  Le  Pape  le  sacra  lui-même,  mais  h  St.  Lau- 
rent, hors  des  murs  de  Rome,  pour  qu'il  n'y  eut  pas  d'atteinte 
portée  à  la  prérogative,  reconnue  au  patriarche  de  CP.,  de  sacrer 
les  empereurs,  (avril  1217).  Dans  son  voyage  pour  aller  prendre 
possession  de  son  empire,  Pierre  tomba  dans  une  embuscade 
dressée  par  Théodore  Comnène,  il  fut  fait  prisonnier  avec  le 
Légat  du  Pape,  pendant  que  toute  leur  suite  était  massacrée.  Il 
mourut  dans  sa  captivité  et  fut  remplacé  par  son  flis,  Robert  de 
Courtenay,  en  1318. 

Robert  n'avait  pas  tes  mêmes  qualités  que  ses  prédécesseurs. 
Plus  adonné  aux  plaisirs  qu'aux  soins  de  son  empire,  il  se  lais- 
sa dépouiller  d'une  partie  de  ses  possessions  :  le  despote  d'É- 
pire,  après  avoir  conquis  le  royaume  de  Thessalonique,  vint 
s'emparer  d'Andrinopie  (1224)  et  se  proclama  empereur.  Le 
Pape  Honorius  III  faisait  cependant  son  possible  pour  lui  pro- 
curer des  secours  :  ainsi  il  écrivait  ù  la  reine  Blanche  de  France  ' 
c  Dieu  a  livré  la  couronne  de  Remanie  aux  mains  des  Francs. 
Ils  ont  fondé  là  comme  une  France  nouvelle.  Mais  à  présent 
BOUS  l'empereur  Robert,  cousin  de  votre  mari,  la  puissance  des 

1  Honor.  Epirt,  V!ir,  1542. 


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—  81)  — 

Francs  a  été  diminuée,  et  déchoit  de  jour  en  jour.  Les  progrès 
de  leurs  ennemis  font  craindre,  si  l'empereur  ne  reçoit  immé- 
diatement des  secours,  qu'une  ruine  irréparable  ne  frappe  les 
Latins,  qu'un  coup  terrible  ne  soit  porté  à  la  prépondérance 
firançaise.  Il  serait  contraire,  non  pas  seulement  aux  conseils 
de  la  Foi,  mais  aussi  à  tous  les  sentiments  d'humanité,  que  le 
Roi  de  France,  que  tous  les  Latins  d'Orient  appellent  «  leur 
Roi  ï,  laissât  périr  sous  les  coups  des  ennemis  de  Dieu,  et 
l'empereur  et  les  Francs  de  CF.,  quand  il  lui  est  facile  de  se- 
courir cet  empire,  dont  la  conquête  fut  une  des  gloires  les  plus 
pures  du  règne  de  son  père,  et  dont  la  perte  serait  une  honte 
ineffaçable  pour  lui-même  et  pour  la  mère-patrie.  » 

Mais  la  parole  du  pape  ne  pouvait  pas  conjurer  les  progrès 
des  ennemis,  et  d'un  autre  côté  les  fautes  de  Robert  paralysaient 
la  bonne  volonté  de  ses  partisans.  Il  ^t  enfin  chassé  par  ses  su- 
jets eux-mêmes  et  alla  mourir  en  Achîde  {1328).  Il  fut  cepen- 
dant aimé  et  soutenu  jusqu'au  bout  par  le  saint  Fr.  Benedetto 
d'Arezzo,  qu'il  avait  établi  à  CP.  et  qui  n'épai^nani  voyages  ni 
fatigues  pour  lui  procurer  des  seconrs. 

Son  successeur  était  un  enfant,  Baudoin  II,  son  fils.  Les 
Latins  de  CP.  voyant  les  difBcultéa  dans  lesquelles  se  trouvait 
l'empire,  ne  crurent  pas  pouvoir  faire  mieux  que  de  mettre  à  leur 
tète  le  vieux  Roi  de  Jérusalem,  dépouillé  de  ses  états,  Jean  de 
Brienne.  Ils  le  prièrent  de  monter  sur  le  trône,  à  la  condition 
qn'il  donnerait  sa  fîlle  en  mariage  <\  Baudoin,  quand  ils  seraient 
d'âge,  et  qu'à  20  ans,  ce  dernier  serait  investi  du  royaume  de 
Nicée  avec  ses  dépendances.  Jean  de  Brienne  était  octogénaire, 
mais  la  pureté  de  ses  mœurs  et  sa  constitution  athlétique  sem- 
blaient lui  promettre  encore  de  nombreuses  années  de  vie  et  de 
luttes.  Voici  le  portrait  qu'en  fait  un  Chroniqueur  contemporain  : 
(  n  était  grand  et  fort,  de  très  haute  stature,  et  si  habile  dans 
les  combats,  qu'on  aurait  dit  un  autre  Charles- Martel.  Quand 
U  était  au  milieu  de  la  mêlée,  il  frappait  si  bien  à  droite  et  à 
gauche,  de  sa  masse  de  fer,  que  les  sarrazios  fuyaient  devant 
lui  comme  s'ils  eussent  vu  le  diable  ou  un  lion  prêt  à  les  dévo- 
rer. En  vérité  il  n'y  eut  pas  en  son  temps  on  chevalier  plus 
brave  qne  lui  dans  tout  le  monde.  On  a  fait  en  son  honneur  une 
chanson  partie  en  latin,  partie  en  français,  que  j'ai  chantée 
bien  souvent.  Cependant  quand  ses  écuyers  l'armaient  avant  le 


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.  Mv.luuJ.:  /.:ji;,i  .(n.V.'j;iiumirliL. 


CONSTANTINOPLE 


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—  81   — 

combat,  ils  le  voyaient  trembler  comme  un  jonc  dans  le  courant 
du  ruisseau,  et  comme  i\s  lui  demandaient  comment,  lui  si  brave 
en  face  de  l'ennemi, il pouvaittrembler  ainsi,  il  répondait  :  «:  je 
n'ai  cure  de  mon  corps;  mais  je  crains  pour  mon  âme^  qui  peut- 
être  n'est  pas  bien  avec  Dieu.  »  c  Mais  après  cela,  il  allait  au  com- 
bat et  ne  redoutait  aucun  ennemi.  '  »  Malgré  son  Age  Jean  de 
Brienne  continua  tant  qu'il  piit  cette  vie  de  combats  incessants, 
souvent  heureux,  mais  au  fond  l'affaiblissant  toujours.  Enfin 
le  vieux  héros  senfit  le  besoin  de  repos  ;  en  1237,  il  renonçait 
au  monde  et  prenait  l'habit  franciscain  des  mains  de  son  ami  le 
Fr.  Benedetto  d'Arezzo,  provincial  de  Romanie.  Il  ne  put  le 
porter  que  peu  de  temps  et  mourut  saintement.  Son  corps  fut 
transporté  en  Italie  et  ses  restes  reposent  fi  .\ssise,  auprès  du 
tombeau  de  S.  François,  où  on  lui  a  élevé  un  monument  digne 
de  lui. 

Il  laissa  à  son  successeur  Baudoin  II  un  trône  chancelant 
et  les  lambeaux  d'un  empire,  que  des  ennemis  de  tout  genre  se 
disputaient  avec  acharnement.  Il  aurait  fallu  un  autre  esprit  et 
un  autre  bras  que  les  siens  pour  les  maintenir.  Malgré  les  se- 
cours que  lui  fournirent  les  Papes  Grégoire  IX,  Innocent  IV,  et 
Alexandre  IV,  il  ne  put  se  soutenir,  et  encore  bien  misérable- 
ment, qne  jusqu'au  25  juillet  1261.  Ce  jour-là  les  Grecs  en- 
traient par  trahison  dans  CP.  :  Baudoin  s'échappait  ù  grand 
peine,  et  s'en  allait  mourir  obscurément  en  Italie.  (1273.) - 

La  conquête  de  CP,  avait  amené  la  réunion  de  tous  les  chré- 
tiens d'Orient  sous  un  même  pasteur  ?  Ce  grand  but  des  efforts 
de  tous  les  Papes  avait  été  atteint  ;  cependant  la  manière  dont 
s'était  effectuée  cette  soumission  ne  pouvait  contenter  tout-à- 
fait  Innocent,  ni  le  rassurer  sur  l'avenir.  II  témoigne  donc  à 
tous  sa  joie  du  retour  de  l'Église  grecque  à  l'obéissance  du 
Saint  Siège;  mais  comme  il  voyait  bien  que  si  l'union  s'était  faite 
extérieurement,  il  n'en  était  pas  ainsi  en  réalité,  il  envoya  pour 
k  procurer  un  Légat,  le  Cardinal  évèque  d'Albano,  Pelage,  avec 
des  lettres  de  recommandation  très  pressantes  (1313).  Pelage 
manqua  de  savoir  faire,  ou  même  il  se  montra  dur,  orgueilleux 
et  violent.  Il  gt  fermer  les  églises,  et  emprisonner  les  moines 

)  Salimbéné  cité  par  P.  Panfllo  da  Mag'.ianoT,  I,  p.  458. 
»  Hittoire  ecclétieutigut,  pa»iim. 


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—  83  —  ^ 

et  les  prêtres  qui  ne  voulaient  pas  se  soumettre,  et  reconnaître 
la  primauté  du  Pape.  Devant  ces  mesures  la  désolation  fut 
grande  à  CP. ,  les  principaux  de  la  Nation  recoururent  à  l'empe- 
reur et  lui  écrivirent  :  t  Etant  d'une  autre  nation  et  aj-ant  un 
autre  pontife,  nous  nous  sommes  soumis  à  votre  puissance 
quant  au  corps  ;  mais  non  pas  quant  à  l'àrae  et  aux  choses  spi- 
rituelles. Nous  sommes  obligés  de  combattre  pour  vous  à  la 
guerre,  mais  il  nous  est  impossible  de  quitter  notre  religion. 
Délivrez-nous  des  maux  qui  nous  menacent,  ou  laissez-nous 
aller  en  liberté  rejoindre  nos  compatriotes.  >  L'empereur  ne 
voulut  pas  se  priver  de  tant  de  braves  gens,  et,  malgré  le  Légat, 
il  fit  ouvrir  les  églises  des  Grecs,  et  mettre  hors  des  prisons 
leurs  moines  et  leurs  prêtres  :  il  apaisa  ainsi  pour  le  moment 
cette  tempête  ;  ce  qui  n'empêcha  pas  un  grand  nombre  d'ecclé- 
siastiques d'aller  trouver  l'empereur  Lascaris  et  le  patriarche, 
Michel  Antorien,  réfugiés  à  Nicée,  qui  les  reçurent  bien,  et  leur 
donnèrent  des  monastères  et  des  églises  '. 

Une  autre  tentative  fut  faite  sous  le  gouvernement  de  Jean  de 
Brieone.  En  i2B2,  cinq  Frères  Mineurs  de  la  province  de  Ro- 
manie,  étant  allés  en  Xatolie  pour  prêcher  la  Foi,  furent  arrêtés 
par  les  Turcs  et  retenus  en  prison  pendant  quelque  temps.  Mis 
en  liberté,  ils  arrivèrent  à  Nicée  où  le  Patriarche  Germain  et 
l'empereur  Vatace  faisaient  alors  leur  résidence.  Les  cinq  Frères 
furent  reçus  humainement  par  le  patriarche,  édiAé  de  leur  pau- 
vreté et  de  leur  zèle.  En  reconnaissance  ils  travaillèrent  à  les 
rapprocher  de  l'Église  romaine,  et  ils  réussirent  si  bien  que  le 
patriarche  et  l'empereur,  (pressés  d'ailleurs  très  vivement  par 
Jean  de  Brienne,)  se  décidèrent  à  écrire  à  Grégoire  IX,  qu'ils 
appelaient  dans  leur  lettre  «  l'excellentissime  Pape  de  l'ancienne 
Rome, le  recteur  du  Siège  apostolique;  »  ils  se  réjouissent  de 
l'espoir  que  leur  ont  donaé  les  cinq  Frères  Mineurs,  de  remettre 
enfin  l'union  entre  les  cinq  grands  patriarches.  Le  Pape  répondit 
à  leur  lettre  et  il  leur  envoya,  comme  Apocrtsiaires,qiia.iiQTe- 
ligieux,  deux  Frères  Mineurs,  Aymon  de  Faversham,  Anglais, 
(qui  devait  devenir  bientôt  général  de  l'Ordre,)  et  Raoul  de 
Reims,  et  deux  Frères  Prêcheurs,  Hugues  et  Pierre.  Leur  lettre 


'  Georgei  AcropoUte,  N.  17,  Htit.  Bg»anl.  CiW  par  Robibaoher  t.   Vil, 
p.  36S. 


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de  créaDce  est  datée  de  Rome,  17  mai,  1233.  Les  conférences 
commencèrent,  en  janvier  1234,  et  se  continuèrent  longtemps, 
à  Nicèe  d'abord,  ensuite  à  Nymphée  ;  mais  après  de  longues 
discussions  où  les  nonces  se  montrèrent  étonnants  par  la  science 
et  l'iiabileté  avec  lesquelles  ils  répondirent  aux  arguments  astu- 
cieux de  leurs  adversaires.  Ils  furent  enfm  obligés  de  repartir, 
(mai  1233)  sans  avoir  obtenu  un  résultat  définitif  •. 

Innocent  IV  (en  1247),  renouvela  ces  tentatives  et  envoya 
comme  Légat  en  Orient,  son  pénitencier,  le  Franciscain  F.  Lau- 
rent; mais  comme  l'empereur  Vatace,  et  le  patriarcbe  Emma- 
nuel Garitopoulo,  avaient  entendu  parler  du  Général  des  Frères 
mineurs,  Fr.  Jean  de  Parme,  ils  envoyèrent  au  Pape  les  deux 
Franciscains  grecs  F.  Tiiomas  et  F.  Salimbéné,  pour  le  deman- 
der en  qualité  de  Légat.  Innocent  IV  se  rendit  volontiers  à  leur 
désir  et  Fr.  Jean  de  Parme  reçut  l'ordre  de  partir  pour  le  Levant. 
Il  resta  en  Grèce  deux  ans  entiers  et  s'y  fit  une  grande  réputa- 
tion de  science  et  de  sainteté  ;  il  aurait  amené  la  réunion  com- 
plète, si  elle  n'avait  pas  été  rendue  impossible  par  l'esprit  astu- 
cieux et  orgueilleux  des  Grecs.-  Fr.  Jean  de  Parme  voulut  plus 
tard  reprendre  ces  négociations,  mais  il  mourut  en  route.  L'É- 
glise l'iionore  comme  bienlieureux  (1289). 

Nous  verrons  encore  d' autres  tentatives  d'union,  même  après 
la  restauration  Bj-zantine,  toujours  avec  un  grand  désir  de 
succès  et  avec  une  pleine  bonne  foi  de  la  part  des  Papes,  pendant 
que  le  plus  souvent  les  empereurs  n'avaient  d'autre  but  que  de 
se  procurer  des  secours  en  hommes  et  eu  argent,  dans  leurs 
luttes  incessantes  contre  les  Turcs, 

A.  tous  ces  détails  sur  l'empire  Latin  de  CP.  nous  croyons 
devoir  ajouter,  pour  être  aussi  complets  que  possible,  la 
série  des  Patriarches  latins,  queltpie  restreint  qu'ait  été  leur  rôle 
et  quelqu'éphémère  qu'ait  été  leur  gouvernement.  Nous  l'em- 
pruntons à  l'ouvrage  de  Le  Quien,  Oriens  Christîanus,  T.  ZIl. 
1°  Tkomds  Morostni.  D'après  l'accord  conclu  avantla  con- 
quête, entre  les  Français  et  les  Vénitiens,  l'empereur  étant  d'une 
nation,  le  patriarche  devait  être  de  l'autre.  Les  croisés  avaient 


1  p.  Panfllo  da  Magliano  Storia  eotnpenl.  di  S,  Franccico  e  di  Francc- 
ani  T.  I,  P.  579  ;  Roihbac.  Vil,  p.  56W75. 
I  P.  PanBlo  da  Msgltano.  Loe.  'wid.  p.  572. 


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commencé  par  mettre  un  chapitre  daas  l'église  de  Ste-Soptiie,  et 
l'avaient  composé  des  clercs  séculiers  qui  avaient  suivi  l'armée, 
pour  la  plupart  Italiens.  Lorsque  Baudoin  eut  été  proclamé  em- 
pereur, les  chanoines  et  les  barons  s'y  assemblèrent,  et  ils 
élurent  patriarche  Thomas  Morosini.  C'était  un  noble  vénitien, 
d'une  vertu  réelle,  qui  était  allé,  jeune  encore,  s'enfermer  dans 
an  monastère  (Portuense),  et  y  donnait  l'exemple  d'une  grande 
régularité.  11  n'était  encore  que  sous-diacre,  et  n'avait  pas  suivi 
la  croisade. 

Innocent  III,  ayant  appris  comment  l'élection  s'était  faite,  la 
déclara  nulle,  comme  provenant  de  prêtres  qui  n'avaient  aucune 
mission,  et  de  laïques.  Cependant  peu  de  temps  après,  il  con- 
sentit à  la  ratifier,  à  cause  du  mérite  personnel  de  l'élu.  II  le 
consacra  même  de  ses  propres  mains,  (1206). 

Le  nouveau  patriarche  passa  par  Venise  pour  aller  prendre 
possession  de  son  siège  ;  mais  là  il  tomba  entre  les  mains  des 
astucieux  et  habiles  conseillers  de  la  Sérénissime  Seigneurie, 
et  soit  faiblesse,  soit  impéritie,  il  s'engagea  par  serment  à  ne 
conférer  de  bénéfices  ecclésiastiques  qu'à  des  sujets  vénitiens. 
Le  pape  Innocent  Itl  veillait,  il  apprit  cet  accord  irrégulier  et  le 
cassa  [21  juin  1306).  Thomas  Morosini  fut  assez  mal  accueilli 
par  la  population,  et  surtout  par  la  portion  française  du  clergé  ; 
mais  il  ne  se  laissa  pas  effraj'er,  et  il  lança  l'excommunication 
contre  les  opposants.  Heureusement  le  Légat  du  Pape,  Benoit, 
était  encore  là,  il  s'interposa  et  amena  la  réconciliation  entre  les 
membres  du  clergé  latin. 

Quant  aux  indigènes,  Georges  Acropolite,  écrivain  du  temps, 
nous  apprend  qu'une  proclamation  des  conquérants  avait  permis 
à  tous  les  habitants  de  rester  à  CP.,  s'ils  voulaient  accepter  la 
loi  des  vainqueurs,  se  soumettre  à  leur  pouvoir  et  reconnaître 
la  Suprématie  du  Pape.  Ceux  qui  ne  voulaient  pas  subir  ces 
conditions  avaient  la  liberté  de  quitter  la  ville.  Beaucoup  de 
Grecs,  et  des  principaux,  profitèrent  de  cette  liberté  et  allèrent 
se  grouper  aatoar  de  Théodore  Lascaris  et  du  patriarche  grec 
réfugiés  à  Nicée. 

L'aspect  du  patriarche  latin  n'avait  du  reste  rien  qui  parlât  à 
leur  imagination.  Il  portait  des  vêtements  si  collants  qu'on  les 
eût  dit  cousas  sur  son  corps;  et,  comme  il  se  rasait  complè- 
tement, il  avait  l'air  d'un  jeane  homme  efféminé.  On  l'accepta 


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—  85  — 

néanmoins,  et  ce  fut  lui  qui  sacra  empereur  Henry  de  Flandres, 
élu  pour  remplacer  son  &ëre  Baudoin,  mort  dans  sa  captivité 
d'AndrinopIe.  Il  fit  ensuite  avec  lui  un  accord  sur  les  biens  ec- 
clésiastiques, les  dîmes,  la  discipline  intérieure  de  l'Église,  etc. 
Après  un  pontiâcat  fort  affairé  et  peu  fécond,  Thomas  Morosini 
s'en  fut  mourir  à  Thessalonique  (Juin  1311). 

8°  Gerçais,  ou  Gérard,  ou  ^cer'ïrrf.  Bientôt  après  la  mort 
de  Thomas,  le  clergé  se  réunit  suivant  les  formes  indiquées  par 
le  droit  pour  lui  donner  un  successeur;  mais  les  chanoines  ne 
purent  se  mettre  d'accord.  Les  uns  voulaient  pour  patriarche  le 
curé  de  S.  Paul  de  Venise,  les  autres  l'archevêque  d'Héraclée. 
L'affaire  fut  donc  dévolue  au  Souverain  Pontife,  qui  évinça  les 
deux  concurrents  et  nomma  un  prêtre  toscan  dont  le  nom  s'écrit 
de  trois  façons  différentes  :  Gerrasius,  Gerartius,Everitrdus. 
Il  assista  au  concile  de  Latran  (1215)  et  en  souscrivit  les  actes, 
en  qualité  de  patriarche  de  CP. 

A  peine  arrivé  dans  sa  ville,  il  se  laissa  griser  par  la  dignité 
dont  il  était  revêtu,  et  voulut  trancher  du  Pape.  Ainsi  il  en- 
'  voyait  des  Légats  à  Latere  dans  les  provinces  de  la  Romanie, 
avec  des  lettres  de  pouvoirs  copiées  sur  les  bulles  des  papes;  il 
empiétait  sur  la  juridiction  des  évèques  et  des  archevi^ques,  et 
voulait  empêcher  tout  recours  à  Home.  On  aurait  dit  que  l'es- 
prit des  Grecs  s'était  emparé  de, sa  personne.  Honorius  III  qui 
avait  succédé  à  Innocent ,  s'éleva  très  fermement  contre  ces  préten- 
tions etcassa  toutesces  ordonnances  (1218).  (Cf.  Raynal.  N"28, 
p.  281).  On  ne  sait  pa»  au  juste  la  date  de  sa  mort,  ce  fut  en  1219 
ou  1220  :  toujours  est-il  qu'en  1221,  il  avait  pour  successeur 
3°  Mathieu  ou  Mathlas.  Thomassin,  (De  veterl  et  nova 
eccles.  disciplina.  Part.  I,Ltb.  I,  Crt/».  26.)  nous  dit  :  t  Après 
la  mort  d'Everard,  les  électeurs  n'ayant  pu  s'entendre  pour  lui 
élire  un  remplaçant,  furent  obligés  de  recourir  au  pape  Hono- 
rius III,  pourlui  demander  un  patriarche.  Honoriusnomma  un 
vénitien,  Mathieu  ou  IMathias  (eptscopus  Aquilanus  ou  mieux 
Equiltnus).  Il  lui  confirma  toutes  les  anciennes  prérogatives 
patriarcales,  entre  autres  celle  de  couronner  l'empereur  et  de 
le  revêtir  des  insignes  de  la  dignité  suprême  ;  mais  il  faisait 
bien  remarquer  en  même  temps  que  l'on  ne  devait  rendre  les 
honneurs  royaux  à  l'empereur,  qu'après  qu'il  aurait  reçu  la  con- 
sécration solennelle.  > 


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Nous  voyons,  le  15  mars  1221,  Mathias  couronner  à  Ste-So- 
phie  Robert  de  Courtenay,  qui  succédait  à  sou  père,  mort  sans 
être  arrivé  à  CP. 

Ce  Mathias  donna  encore  plus  de  sujets  de  plaintes  au  Pape  que 
ses  deux  prédécesseurs.Une  lettre  d'Hoaorlus  II[(rf«  i  7  juin  1222) 
lui  dit  en  substance  :  *  Nous  regrettons  vivement  de  vous  avoir 
élevé  à  cette  haute  dignité.  Nous  espérions  que  vous  donneriez 
le  bon  exemple  et  que  vous  seriez  comme  un  flambeau  dans  la 
maison  de  Dieu,  et  voilà  que  vous  êtes  pour  beaucoup  une  oc- 
casion de  scandale.  Vous  deviez  être  le  Bon  Pasteur,  qui  donne 
sa  vie  pour  ses  brebis,  et  voilà  que  vous  cherchez  uniquement  à 
leur  extorquer  de  l'argent.  Nous  vous  croyions  pieux  et  nous 
apprenons  que  même  vous  ne  célébrez  que  rarement  la  messe; 
nous  vous  pensions  zélé  pour  les  lois  de  l'Église,  et  au  lieu  de 
cela  vous  communiquez  avec  les  excommuniés,  et  vous  leur 
donnez  l'absolution  contre  toutes  les  règles.  Nous  vous  avertis- 
sons paternellement,  revenez  à  de  meilleurs  sentiments,  et  cor- 
rigez-vous. »  Cette  monition  si  ferme  produisit-elle  quelque 
eflfet?  Nous  ne  le  savons  pas  exactement. 

Une  des  mesures  les  plus  importantes  par  lesquelles  il  mar- 
qua son  passage  fut  l'ordonnance  qui  établit  que  toutes  les 
églises  des  Vénitiens  seraient  exemptes  de  la  juridiction  patriar- 
cale de  CP.  et  ne  relèveraient  que  du  Patriarche  de  Grade  ou 
de  Venise.  Elle  eut,  comme  nous  le  verrons  ailleurs,  de  très  sé- 
rieusea  conséquences.  Il  mourut  en  1226. 

4°  Jean  d'Abbeville,  {élu,  non  installé).  Shnon.  Cette  fois 
encore  les  électeurs  ne  purent  s'entendre  pour  choisir  un  suc- 
cesseur au  patriarche  défunt,  et  Honorius  III,  à  qui  par  suite 
le  choix  fiit  dévolu,  nomma  Jean  d'Abbeville,  d'abord  doyen  du 
chapitre  d'Amiens,  puis  Archevêque  de  Besançon.  Ce  prélat 
arriva  à  Rome  au  temps  de  la  mort  de  Honorius.  Le  Pape  Gré- 
goire IX,  son  successeur  sur  le  siège  de  S.  Pierre,  retint  auprès 
de  lui  le  patriarche  nommé,  le  créa  cardinal  évèque  de  Sabine, 
et  en  fit  un  de  ses  principaux  conseillera.  Il  lui  donna  pour  rem- 
plaçant Simon,  archevêque  de  T}t.  On  ne  sait  ni  le  nom  de 
famille  ni  même  la  patrie  de  ce  prélat.  On  sait  peu  de  choses  de 
ses  actes  :  on  le  voit  seulement  apparaître  quelquefois  auprès 
de  Jean  de  Brienne.  Il  était  mort  vers  1233. 

5°  Nicolas.  Ce  patriarche,  né  à  Piacenza,  de  la  famille  de 


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—  87  — 

Castro  Arqaato  de  Porta,  d'abord  archevêque  de  Spolète,  et 
chanoine  de  Latran,  fut  nommé  en  1234,  ou  1235  ;  uiaia  il  n'ar- 
riva à  GP.  qu'en  1236.  Malgré  la  vaillance  et  les  grands  coups 
d'épée  du  vieil  empereur,  les  affaires  d'Orient  pliaient  fort  mai. 
Nicolas,  qui  ne  pouvait  se  battre,  aida  son  prince  de  tous  ses 
revenus,  bien  diminués  du  reste  par  les  conquêtes  ou  les  dépré- 
dations des  Grecs.  Il  se  vit  donc  réduit  presque  à  la  misère  ; 
alors  le  pape  Grégoire  IX  écrivit  aux  évêques  du  Péloponèse  de 
lui  venir  en  aide,  et  de  lui  donner  les  moyens  de  vivre  convena- 
blement, et  de  soutenir  la  dignité  patriarcale. 

En  1243,  Innocent  IV  l'envoya  comme  L^at  en  Europe  pour 
y  prêcher  la  croisade.  Nous  le  voyons  à  Paris  en  1244  ;  il  as- 
siste au  premier  Concile  de  Lyon  en  1245,  et  continue  ensuite 
sa  mission.  Il  mourut  à  Milan,  en  1251,  et  fut  inhumé  dans 
l'église  des  Frères  Mineurs. 

6"  Pantaleo  Qitistîniani.  Sur  la  demande  des  Vénitiens, 
Innocent  IV  nomma  patriarche  Pantaleo  Giustiniani,  d'une  des 
plus  nobles  familles  de  la  République,  1253.  Comme  les  affaires 
d'Orient  allaient  de  mal  en  pis,  sous  le  gouvernement  faible  de 
Baudoin  II,  Innocent  l'envoya  lui  aussi  prêcher  la  croisade; 
mais  comme  les  aumônes  des  fidèles  n'étaient  pas  abondantes,  il 
l'autorisa  ft  hypothéquer  les  biens  de  l'église  pour  garantir  un 
emprunt  destiné  à  couvrir  les  frais  de  la  guerre.  Arrivé  à  CP. 
il  se  trouva  si  pauvre,  que  le  pape  Innocent  chargea  Fr.  Bene- 
detto  d'Arezzo,  provincial  ^es  Franciscains  de  Grèce,  d'engager 
les  prélats  et  les  abbés  de  Remanie  à  lui  assurer  un  revenu  de 
500  marcs  d'argent,  pour  qu'il  eût  de  quoi  vivre  tranquille  et 
remplirhonorablement  ses  fonctions.  Enfin  en  1261,  quand  CP. 
fiit  reprise  par  lesGrecs,  il  fut  obligé  de  partir  avec  Baudoin  IL 
Certains  chroniqueurs  disent  que  leur  vaisseau  fut  pris  par  les 
Sarrazins,  que  le  Soudan  d'Egypte  les  garda  prisonniers  7  ans, 
et  ne  leur  rendit  la  liberté  qu'après  avoir  reçu  pour  eux,  d'Al- 
phonse de  Castille,  une  rançon  de  20.000  livres  d'argent. 
Cependant  ce  récit  ne  semble  pas  exact,  car  le  Pape  Urbain  IV, 
en  1369,  écrit  au  provincial  des  Frères  Mineurs  de  France,  pour 
le  charger  d'aider  Baudoin  et  Giustiniani,  occupés  en  ce  moment 
à  promouvoir  une  croisade  nouvelle.  Il  assista  au  Concile  de 
Lyon,  en  1274,  et  mourut  en  1286. 

7'  Pièrrel.  Comme  il  y  avait  encore  des  catholiques  latins. 


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et  même  des  principautés  latines  dans  le  Levant,  oa  continua 
quelque  temps  encore  de  donner  des  successeurs  à  Pantaleo  Gius- 
tinianl.  Le  premier  fut  Pierre  I  qui  résida  ordinairement  en 
Crète.  Il  fit  acte  ^e  juridiction  en  excommuniant,  par  deux  fois, 
Fr.  Friincus  Libératus,  et  ses  compagnons,  Frères  Mineurs  qui 
ne  voulaient  pas  reconnaître  l'autorité  de  leur  Général.  Il  mourut 
en  1301'. 

8°  Léonard,  son  successeur,  fut  élu  en  des  circonstances 
spéciales.  Jusqu'à  lui  les  chanoines  de  Sainte-Sophie,  chassés 
de  CF.  et  réfugiés  en  Chrétienté,  formaient  une  sorte  de  corps  ; 
mais  en  1302,  il  n'en  restait  plus  qu'un  seul  :  alors  Boni- 
face  VIII  déclara  que  désormais  la  nomination  du  patriarche 
était  réservée  au  Souverain  Pontife. 

Le  dernier  patriarche  ayant  une  juridiction  réelle  fut  le  car- 
dinal Bessarion,  mort  en  1492.  On  continua  jusqu'à  nos  jours 
à  nommer  des  patriarches  latins  de  CP-,  mais  alors  ce  ne  sont 
que  de  simples  dignitaires  de  la  Cour  PontiHcale,  sans  aucune 
autorité.  Cependant  quand  on  établit  une  nouvelle  autorité  ec- 
clésiastique h  CP.  on  respecta  cette  fiction  et  le  prélat  qui  admi- 
nistre le  diocèse  de  CP.  n'a  que  le  titre  de  Vicaire  Patriarcal. 

Ainsi  finit  cette  institution,  éphémère  comme  l'empire,  au 
sort  duquel  elle  était  essentiellement  attachée. 

Selon  Sauli-  l'ambition  des  Vénitiens  de  s'appropriera  eux 
seuls  le  commerce  de  l'Orient,  les  avanies  que  les  Génois 
éprouvèrent,  tant  de  leur  part  que  d^  celle  de  Baudoin  II,  enfin 
la  décadence  de  leur  commerce,  les  portèrent,  excités  d'ailleurs 
par  les  Pisans,  les  Marseillais  et  les  autres  colonies  méditerra- 
néennes, â  guetter  l'occasion  de  prendre  sur  leurs  heureux  rivaux 
une  revanche  éclatante.  La  discorde  se  manifesta  d'abord  en 
SjTie,  et  aboutit  à  l'affaire  de  la  tour  d'Acre,  dont  il  a  été 
parlé  plus  haut.  Michel  Paléologue,  l'un  des  seigneurs  grecs  les 
plus  aventureux,  et  prétendant  ù  la  couronne  impériale,  se  rendit 
en  Thrace  à  la  tèted'une  armée,  occupa  les  Sous-bourgs  de  CP., 

I  11  est  tans  doute  ici  question  du  B.  Liberato,  dont  les  BollaDdist«B  don- 
nent la  vie  au  XXIX  vol.  p.  840.  Il  se  croyait  exempté  de  l'autorité  du  Gé- 
néral de  l'Ordre,  par  un  acte  du  Pape  S,  Célettîn  V.  Cet  acte  fut  annulé 
ensuite  par  Boniface  VIII,  et  les  lollgieux  qui  avaient  été  séparés  de  l'Ordre 
y  rentrée  nt. 

■ -Sauli,  Lo^.  laul.  I.  45. 


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et  vint  mettre  le  siège  devant  le  cnstel  de  Gatatn,  dans  la 
pensée  de  se  rendre  bientôt  maître  du  pays  s'il  pouvait  s'em- 
parerde  ce  point  ;  mais  comme  les  Vénitiens  avaient  un  palais 
dans  l'intérieur  des  murs  de  Galata,  les  elTorts  de  Paléologue 
furent  paralysés  et  il  dut  se  retirer. 

C'est  alors  que  les  Génois,  qui  d'ailleurs  étaient  restés  d'abord 
étrangers  à  la  croisade  Franco- Vénitienne,  profitant  des  circons- 
taoces  qui  s'offraient  à  eux,  résolurent  d'envoyer  des  ambassa- 
deurs auprès  de  Paléologue,  pour  tenter  de  retrouver  leurs 
anciens  avantages.  En  effet  t  quant  Mikhailli  Paleologo  ol  guer- 
royé longnement  par  terre  et  par  mer,  si  s'accorda  avec  les  Ge- 
nevois (Génois),  et  leur  donna  le  lieu  de  Galata  (?  sic),  et  les 
franchit  de  tous  péages,  gabelles  et  usages,  par  toute  Roumanie, 
mais  qu'ils  lui  aidaissent  à  conquérir  son  empire'.  >  Par  le 
traité  de  Nympbie,  conclu  le  13  mai  1261,  Michel  Paléologue 
s'engageait  i  d'y  donner  aux  Génois  à  CF.,  palais,  estai,  pos- 
sessions et  terres,  et  de  plus  Véglise  Ste  Marie,  (alors  possé- 
dée par  les  Vénitiens-.)  A  donc  s'accordèrent  li  Genevois  avec 
l'empereur  Quir  Mikhailli,  et  reçurent  le  lieu  de  Galata,  et  ha- 
bitirent  illec  ^  et  donnèrent  60  galèes  armées,  appareillées  à  ses 
gaiges  ;  et  commencèrent  la  guerre  contre  les  Vénitiens  pour  ce 
qu'ils  maintenaient  l'empereur  Bauduin*,  etpuis  que  li  genevois 
ae  furent  mis  àl'aidede  l'empereur  Quir  Mikhailli,  si  gardèrent 
le  bras  de  S.  Georges  (c'est  la  mer  et  l'estroit  de  CP.)  que  nul 
secors  ne  pooit  venir  à  l'empereur  Baudnin  de  nulle  part,  i 
■  i  Et  quant  li  Grecs  qui  estoient  habités  dedans  la  cité  vi- 
rent que  l'empereur  Bauduin  ne  pooit  tenir  contre  li  grex,  si 
s'accordèrent  avec  l'empereur  grec,  et  le  tirent  entrer  dedans  la 
cité  deCP.  ;  et  l'empereur  Bauduin  vit  cette  trahison,  si  réduisit 

'  Buchon,  Reeherc/tei  Jli»:.  etc.  I,  16. 

'  Miititz,  II,  I,  B6  Depping,  11,  59.  L'empereur  donnera  à  la  commune  gé- 
noise ■  Ëcclesiam  S.  Mari're  quam  modo  tenent  Venetici  cum  logiis  qiiœ 
iotra  ipwtm  eoclesiam,  et  oimfierii  ipsîus  atque  solum  castri  \enetorum  quod 
est  in  ipaa.  civitate...  >  Texte  du  traité  de  !2r>l,  rap|>orté  dane  l'edit  de 
i'HUtoirc  lie  l'empiit  ih  CP.   par  Buîhon,  1836,  p.  2JS  et  auîv. 

■'  Le  fait  n'eut  pas  lieu  aussi  promptement  que  ce  passage  semblerait  le 
faire  croire,  cela  n'eut  lieu  que  plus  tard. 

•  Cette  alliance  dè«  Génois  avec  Paléologue,  contre  l'empire  latin  excita  le 
déplaisir  du  Pape  Urbain  IV,  qui  mit  Gênes  en  interdit.  (Vincens.  Hitt.  de 
Gine*\,  139.) 


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—  90  — 

dedans  le  vieil  palais  du  Xion  (Bucolèon),  et  là  se  tint  longue- 
ment.... etquantil  vit  qu'il  ne  pooit  pliis  souffrir  la  guerre,  si 
entra  en  une  nof,  an  bien  trois  mil  personnes  ;  et  cela  tans  par 
mer,  qu'il  vint  au  château  de  Malvesie....  puis  ala  en  France  '?  > 
Selon  le  rapport  de  M.  Fanucci^  les  Pisans  qui  se  trouvaient 
à  CP.  au  moment  de  ces  revers,  voyant  l'impossibilité  d'une 
défense  eflîcace,  se  retirèrent  dans  leur  quartier,  dans  leurs 
Fondouqs,  dont  ils  fermèi-ent  les  portes,  sans  prendre  parti,  ni 
parles  armes,  ni  autrement,  en  faveur  des  belligérants. Le  César 
Alexis  Stratégopoulo  prit  possession  de  la  capitale  le  25  juil- 
let 1261,  et  Michel  Palèologue,  qui  se  trouvait  en  Asie,  y  fit 
son  entrée  le  14  août  suivant. 

I  BucboD.  Recherche*  »ar  la  princip.  de  Alorée  I,  24  à  27. 
'  Fanucci  Loc.  Icavl.  III,  %*. 


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CHAPITRE  m. 


REaTAL'RATIOM     BYZANTINE. 


Ea  même  temps  que  l'empereur  Baudoin  II,  était  parti 
Giustiniani,  patriarche  Latiu  de  CP.  :  ils  n'avaient  pas  plus  l'un 
que  l'autre  de  racines  dans  le  sol  de  CP.  Le  clergé  des  princi- 
pales églises  avait,  comme  eux,  abandonné  an  pays  où  il  ne 
comptait  presque  pas  de  fidèles.  Michel  Paléologue  avait  fait 
son  entrée  modestement,  il  marchait  à  pied,  sans  ornements 
impériaox,  à  la  suite  de  l'image  de  la  T.  Ste  Vierge,  qu'on  disait 
peinte  par  St  Luc.  Il  la  déposa  au  monastère  de  Stude,  puis 
étant  monté  à  cheval»  il  se  rendit  à  Sainte-Sophie,  pour  rendre 
grâces  à  Dieu,  et  de  là  au  grand  palais  où  il  prit  son  lo- 
gement. 

Un  de  ses  premiers  soins  fut  de  remplir  le  siège  patriarcal, 
vacant  par  la  mort  de  Nicéphore  :  il  se  détermina  à  y  rappeler 
Arsène,  qu'il  en  avait  fait  descendre  quelque  temps  auparavant. 
n  le  conduisit  avec  de  grands  honneurs  à  Sainte-Sophie,  et,  le 
piienant  par  la  main,  il  lui  dit  :  «  Voilà  votre  chaire,  seigneur, 
jonissez-en,  maintenant,  après  en  avoir  été  si  longtemps  privé.» 
Il  le  mit  en  possession  du  patriarcat,  rétablit  en  son  premier 
état  l'église  de  Sainte-Sophie,  et  poarvut  à  la  subsistance  des 
ministres  sacrés,  et  à  la  décence  du  culte  divin. 

Un  peu  plus  tard,  désirant  rétablir  CP.  en  son  antique  état, 
il  mit  un  clei^ë  nombreux,  avec  des  revenus  convenables,  dans 
l'église  des  ApAtres,  et  un  autre  dans  celle  de  N.-D.  des  Bla- 
quernes.  De  plus,  à  l'hôpital  S.  Paul,  destiné  pour  les  orphelins, 


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—  93  — 

il  établit  une  école  de  grammaire,  avec  des  pensions  pour  les 
maîtres  et  pour  les  enfenta.  Il  allait  quelquefois  lui-même  à 
cette  école,  pour  en  connaître  les  élèves,  et  voir  les  progrès 
qu'ils  faisaient  :  il  leur  donnait,  pouf  les  exciter  au  travail, 
des  prix  et  des  congés.  C'est  ainsi  qu'il  agit  partout  où  il  lui 
fut  possible,  cherchant  à  effacer  les  traces  éphémères  du  pas- 
sage des  Latins. 

Ceux  d'entre  eux  qui  étaient  restés  continuaient  à  être  di- 
visés. Quoique  l'appui  des  Génois  eilt  été  plutôt  moral  qu'ef- 
fectif, malgré  la  jonction  de  l'escadre  génoise  à  celle  des  Grecs, 
dans  le  port  de  CP.,  jonction  qui  selon  Fanucci,  amena  l'ami- 
ral vénitien  Michieli  à  conduire  la  sienne  à  Venise  ',  Michel 
Paléologue  n'obser\'a  pas  moins  avec  fidélité  ses  engagements 
envers  ses  alliés  :  il  mit  les  Génois  en  possession  du  palais  et 
de  l'église  des  Vénitiens  '^,  A  quelle  i  Religion  »  la  desser- 
vance  de  cette  église  fut-elle  donnée  par  suite  de  ces  événe- 
ments? Il  est  évident  que  ce  fut  à  des  clercs  nationaux  ou 
bien  à  l'un  des  Ordres  nouveaux  des  Frères  Prêcheurs  ou  des 
Fi-ères  Mineurs,  dont  les  membres  n'avaient  pas  abandonné  le 
'  terrain,  où  leur  zèle  trouvait  ample  matière  à  s'exercer;  mais 
on  ne  sait  lesquels  en  furent  chargés.  Dans  tous  les  cas  elle  dut 
sortir  de  la  juridiction  du  patriarche  de  Grade,  pour  passer  sous 
celle  de  l'archevêque  de  Gênes. 

Encore  selon  Fanucci^,  les  Vénitiens  irrités  de  leur  déposses- 
aion  eii  faveur  de  leurs  rivaux,  se  seraient  portés  eux-mêmes 
vers  le  palais,  dont  ils  enlevèrent  tous  les  emblèmes  nationaux 
et  le  démolirent  ;  mais  d'après  Sauli  ',  ce  furent  les  Génois  qui, 
par  représailles  de  l'affront  d'Acre,  et  cédant  à  leurs  sentiments 
de  rivalité  et  de  vengeance,  démolirent  le  palais  vénitien,  au 
bruit  des  instruments  de  musique,  et  des  acclamations  de 
triomphe,  envoyèrent  les  principales  pierres  de  l'édifice  à  Gènes^ 
pour  y  servir  de  trophée  :  elles  furent  employées  ensuite  à  la 
construction  de  l'église  de  S.  Georges'',  Toutefois  cet  acte  lui- 

^  Fanucci.  toi:  lait  I.  111,2-1. 

ï  Le  Pantocrator,  selon  M.  île  Simoni,  Gîornnle  Lif)usli'-o  I8T6,  283  ;  mais 
peut-être,  d'après  les  termes  du  traité  de  Nymphie,  Ste  ïlarie  de  Embolo. 
î  Loc.  lau-/.  III,  2-1.  —  '  /'/.  II,  63. 
■■■  Ducange,  Hiai.  'le  l'emp.  île  CP.  par  Buchon,  p,  360. 
•  Vinceng.  Hist.  -h  Gvnes.  I,  329. 


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même,  qui  provoqua  le  ressentiment  dissimulé  de  l'empereur, 
comme  aussi  le  nombre  toujours  croissant  des  Génois  venant 
s'établir  à  CP.,  engagèrent  Michel,  par  mesure  préventive  desé- 
curîté,  à  éloigner  ces  hôtes  dangereux.  11  leur  assigna  d'abord 
pour  résidence  Héraclée  de  Thrace  ',  puis  bientât  après,  le  ro- 
cher de  Galata,  vis-à-vis  CP,,  dans  la  région  de  Péra-.  Quant 
aux  Vénitiens  (ce  qui  restait  de  l'ancienne  colonie  de  l'empire 
latin)  et  aux  Pisans,  (dont  on  a  vu  plus  haut  la  prudence  inté- 
ressée,) comme  ils  étaient  en  petitnombre,  l'empereur  leur  per- 
mit de  rester  dans  la  ville,  mais  séparés  les  uns  des  autres''. 
Malgré  cela  Michel  n'obtint  pas  de  cette  mesure  les  résultats 
espérés  ;  les  nouveaux  colons,  hors  d'état  d'ailleurs  de  résister 
victorieusement,  se  déclarèrent  bientôt  en  état  de  rébellion  :  mais 
tont  en  les  ramenant  à  l'obéissance'  Michel,  voulant  établir 
une  sorte  d'équilibre,  et  au  besoin  se  ménager  un  appui  parmi 
leurs  rivaux,  conclut,  le  30  juin  1268,  avec  le  doge  Raniero 
Geno  une  trêve,  dans  laquelle  on  lit  :  *  De  même,  l'empereur 
nous  a  concédé  les  églises,  les  prêtres  et  le  ba/ttême  (?),  selon 
notre  coutume, à  Constantinople  et  autres  lieux  de  son  empire; 
ces  églises,  prêtres  et  baptême  seront  exempts  de  la  juridiction 
impériale,  et  cela  sans  possibilité  de  révocation,  jusqu'à  l'expi- 
ration de  la  présente  trêve''.  > 

Le  19  mars  1277,  le  mÔme  empereur  donna  aussi  un  chri'so- 
bulle,  portant  ce  qui  suit*i  :  i;  Notre  empire  leur  donne,  dans 
Constantinople,  les  maisons  {hospîcia),  sous  les  mui-s  de  la 
ville,  commençant  de  la  porte Trungarion,  venant  kSatnt  Qidn- 
tan,  à  gauche,  et  allant  <  ad  cubain  Sanctœ  Mariœ,  »  vers 
la  rue  des  Ciriers  ~'  \  puis,  allant  jusqu'à  la  porte  de  Perama,  et 

I  Nicéphore  Grigoras  L.  W.  ch.  5.  Pachymères,  Bonn»  1835,  I,  16â... 
M.  Paspati  pense  que  les  G^Dois  auraient  été  envoyés  à  Galata  par  suite  de 
l'agrandi ssemeut  du  palais  impérial,  dont  la  muraille  d'eaceînte  aurait  été 
reculée  vers  le  sud  ;  les  motifs  de  cet  éloignement,  fiireiit  multiples  et,  Bani 
admettre  que  cette  raison  fut  absolue,  il  est  possible  que  l'empereur  s'en 
soit  servi  comme  d'un  prétexte  pour  arriver  à.  ses  Qus,  sans  blesser  ses  an- 
ciens alliés. 

•  Sauli  loe.  cit.  64. 

•  Pachymères  L.  cit.  Buobon,  Hiil.  de  l'Enip.  deCP.  3G0. 

•  CPliê,  eh.  I,  60  iConëtanliniade  160. 
»  Fonte»,  111,  92.  —  •  Id.  111,  p.  139. 

'  La  texte  porte  eurrigiarionim  ;  M.  Paapati  lit  eerulariorum.  En  prolon- 
gtttion  da  la  rue  B^yq-Ba^w,  od  trouve  celles  dee  Ëpoogien,  puie  de*  Mar- 


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de  celle-ci  à  la  porte  de  ïrungarion,  les  maisons  en  dedans 
(aeinlus),  de  la  muraille,  savoir  :  une  maison  pour  l'habitation 
du  batte,  nne  autre  pour  les  conseillers,  et  uiie  autre  pour  ma- 
gasins (pro  cannava)  '  des  objets  de  la  commune  vénitienne  ; 
notre  empire  prendra  à  loyer,  pour  les  marchands  vénitiens  ve- 
nant du  dehors,  vingt-cinq  autres  maisons,  autour  des  trois 
susdites  ;  et  elles  leur  seront  données  gratuitement,  pour  habi- 
tation. 

«  Notre  empire  leur  donnera  également  deux  églises  dans 
Constantinople,  savoir  celle  de  la  très  sainte  Marie,  Mère  de 
Dieu',  et  l'église  de  Saint-Marc^;  notre  empire  leur  concède 
aussi  d'avoir  des  prêtres,  le  baptême,  etc.,  comme  dessus.  » 

Les  auteurs  que  nous  avons  pu  consulter  ne  parlent  point 
d'une  église  spéciale  sous  ce  dernier  vocable  ;  il  est  permis  de 
supposer  que  cette  dénomination  était  employée  dans  le  peuple, 
et  par  métonymie,  pour  désigner  l'église  sur  laquelle,  aux  jours 
de  solennité,  HaiisM  le  pavillon  de  Saint-Marc^  c'est-à-dire 
St.  Akindin  ;  une  semblable  mètonyipie  s'est  reproduite  plus 
tard,  à  l'égard  de  Saint-Paul,  de  Galata,  désignée  dans  cer- 
tains documents,  sous  le  nom  de  Saint- DominiQue,  par  la 
seule  raison  qu'elle  était  desservie  par  les  Pères  Dominicains.  Il 
paraîtrait  donc  résulter  du  teste  précité,  que  les  Vénitiens  furent 
remis  en  possession  de  leurs  églises  de  Saint-Marc,  et  de  celle 
de  la  Très  Sainte  Vierge. 

Une  autre  dénomination  :  Santa  Maria  délie  Grazte,  qu'on 
retrouve  comme  désignant  une  église  latine  de  Ck>Qstantinople, 
paraît  devoir  s'appliquer  encore  au  même  édifice  religieux. 


briere  et  dea  Moum-ijOar  «  Ciriera  ;  u  à  l'entrée  de  celle-ci,  il  existe  une 
petite  mosquée,  dite  de  Hadji-Moustafa,  ancien  chef  des  eunuques,  qui  au- 
rait été  brûlée  trois  ou  quatre  fois,  et  dont  une  partie  des  dépendances  (ea- 
couf)  aurait  ëtâ  vendue. 

'  Cannaea  ou  Canora  d'où  Ca/iruxaro,  olHcier  de  la  maison  de  l'arche' 
vaque  de  Gènes  et  de  certains  couvents  d'Italie. 

t  Cf.  Acta...  Grœca,  111,88;  p.  11,  U  est  fait  mention  de  l'église  U»  peraXoa 
Theotocou  ecclicia  ti»  Piitit,  dite,  dans  la  table,  a  ecclesia  metropolitana 
PJsanorum.  »  On  lit  aussi  dans  le  mâme  index  :  «  o  aloi  Marco*,  ecclesia 
Venetorum  CPlî.  » 

'  Millitz,  11,  1, 19,  Î5,  et,  ci-»prée  S.  Benoit  et  S.  Pierre. 

*  Cr.  Chapitre  t,  p.  11.  Ces  deux  églises  devaient  être  l'anuenne  église 
Sainte-Marie  de  Embolo  et  Saint-Marc,  autrement  dit  Saint- Akindin, 


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-  95  — 

En  13S5,  le  15  juin,  l'empereur  AQdronlc  conclut  avec  le 
doge  Jean  Dandolo  '  une  trêve  de  dix  années  ;  on  Ut  dans  ce 
document,  comme  dans  la  Irève  de  1277,  la  délimitation  du 
quartier  vénitien  et  le  passage  relatif  aux  églises,  aux  prêtres  et 
au  baptême.  Cet  acte  fut  confirmé  le  28  j  uillet  suivant  ". 

Tout  en  ayant  opéré  la  restauration  byzantine  sur  les  ruines 
de  l'empire  latin,  Michel  Palëologue,  selon  la  politique  i'ègui- 
Ubre  qu'il  s'efforçait  de  pratiquer,  comprenant,  comme  certains 
de  ses  prédécesseurs,  que,  bientôt  peut-être,  son  pays  pourrait 
avoir  besoin  de  l'Occident,  ne  voulut  pas  rompre  entièrement 
avec  la  Latinité. 

Nous  avons  vu  les  tentatives  réitérées  qui  avalent  été  faites 
pendant  la  durée  de  l'empire  latin  pour  amener  la  réconciliation 
des  deux  Églises,  de  nouvelles,  mais  aussi  infructueuses  négocia- 
tions, furent  encore  entamées  après  la  restauration  byzantine. 
Ainsi,  comme  Guillaume  de  Viliehardouin,  prince  d'Achaïe, 
secondé  par  les  autres  barons  chrétiens  du  Levant,  faisait  aux 
Grecs  une  guerre  avantageuse,  Michel  Paléologue  dépêcha  au 
pape  Urbain  IV  une  ambassade  composée  de  Maxime  Alufard, 
moine,  Andronic  Muzzalon  et  Michel  Abalante,  pour  le  même 
objet.  Urbain  répondit  (38  juillet  126S)  par  une  letti-e  très 
digne  et  très  paternelle,  et  iui  envoya  quatre  Frères  Mineurs, 
FF.  Simon  d'Auvergne,  Pierre  de  Moras,  Pierre  de  Crest  et 
Boniface  d'Yvrée.  Il  écrivit  en  même  temps  au  prince  d'Achaïe 
pour  l'en  avertir  et  lui  faire  cesser  les  hostilités. 

Comme  les  négociateurs  pontificaux  ne  comprenaient  pas  assez 
le  grec,  l'empereur  demanda  au  Pape  de  lui  envoyer  Nicolas, 
évêque  de  Cortone,  qui  parlait  bien  cette  langue.  Le  Pape  y  con- 
sentit, et  sans  révoquer  la  mission  des  autres,  il  adjoignit  àNi- 
colas  deux  autres  Frères  Mineurs,  F.  Gérard  de  Prato  et  Ff  Rai- 
nier  de  Sienne,  qui  connaissaient  déjà  le  Levant.  Les  nouveaux 
venus,  d'accord  avec  les  anciens  et  avec  les  théologiens  nommés 
par  l'empereur,  dressèrent  une  profession  de  foi  que  tous  sous- 
crivirent. Puis  comme  les  diUicultés  renaissaient  toujours  et 
que  les  Grecs  an  appelaient  à  un  concile  général,  le  Pape,  alors 
Clément  IV,  envoya  de  nouveaux  nonces,  (4  mars  1367),  pris 
cette  fois  parmi  les  Dominicains  ou  FF.  Prêcheurs.  C'est  que 

1  Fonte*,  p.  326.  —  «  M.  p,  345. 


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cette  fois  Baiidoia  II  était  à  Viterbe  auprès  du  Pape,  faisant  un 
traité  avec  Charles  d'Anjou,  roi  de  Sicile,  et  que  tout  parais- 
sait se  préparer  pour  une  grande  expédition  contre  les  Grecs: 
Cette  fois  encore  on  tomba  d'accord  sur  les  ternies  de  la  profes- 
sion de  foi  ;  mais  cette  fois  encore  l'union  ne  fut  pas  effectuée. 
Cependant  Michel,  soit  pour  faire  montre  de  plus  de  bonne  vo- 
lonté, soit  pour  avoir  un  arbitre  plus  puissant  contre  Charles 
d'Anjou,  essaya  d'intéresser  S.  Louis  à  ces  affaires  et  d'obtenir 
sa  médiation. 

Un  autre  pape,  Saint  Grégoire  X,  (en  1272  et  t273),  dut 
encore  se  prêter  à  d'autres  essais.  Il  envoya  quatre  FF.  Mineurs 
FF.  Girolamo  d'Ascoli,  depuis  pape  sous  le  nom  de  Nicolas  IV, 
Bonagrazia  da  Persiceto,  Raymond  Béranger,  et  Bonaventure 
da  Mugello  :  ces  négociateurs  devaient  surtout  préparer  la  ve- 
nue des  envoyés  de  l'empereur  au  Concile  général  de  Lyon.  Ils 
y  réussirent  et  Michel  choisit  pour  le  représenter  ii  cette  assem- 
blée solennelle  l'ancien  patriarche  Germain,  Téophane  métropo- 
litain de  Nicée,  et  quelques  grands  personnages  parmi  lesquels 
le  plus  considérable  était  le  grand  logothète,  Georges  Acropo- 
lite,  l'historien  officiel  de  cette  époque.  Ils  avaient  pour  inter- 
prètes entre  autres  un  Fr.  Mineur,  Jean  de  Balestro,  ou  de  CF., 
qui  jouissait,  même  parmi  les  Grecs,  d'une  grande  réputation 
de  science  et  de  sainteté.  Ils  étaient  procédés  par  deux  des  nonces 
qui  avaient  préparé  leur  départ,  et  portaient  de  riches  présents 
au  Pape  et  aux  principaux  personnages  de  sa  cour  et  du  con- 
cile. Ils  furent  reçus  soienneliement  par  la  plupart  des  membres 
du  concile  et  l'on  commença  immédiatement  les  négocia- 
lions.  Certains  chroniqueurs  disent  que  Michel  Paléologue  lui- 
même  vint  au  concile  de  Lyon,  mais  rien,  ni  dans  les  actes  du 
concile,  ni  dans  la  suite  de  l'histoire,  ne  peut  donner  à  ce  dire 
une  apparence  sérieuse  de  vérité. 

On  sait  comment,  à  la  suite  de  conférences  dans  lesquelles 
S.  Bonaventure,  de  l'Ordre  des  Frères  Mineurs,  cardinal-évéque 
d'Albano,  et  président  du  concile,  sous  le  pape  Grégoire  X,  on 
lomba  d'accord  sur  tous  les  articles,  tels  qu'ils  avaient  été  réglés 
plusieurs  fois  à  CP..  Enfin  à  la  quatrième  session  du  concile, 
le  6  juillet  1374,  la  réunion  fat  prononcée  solennellement  : 
Georges  Acropolite  abjura  le  schisme  en  son  nom  et  au  nom 
de  son  mattre  :  les  prélats  grecs  vinrent  siéger  avec  les  évèques 


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—  97  — 

latins,  on  chanta,  en  latin  et  en  grec,  le  Credo  avec  l'addition 
«  Filioque  »  ;  le  pape  Grégoire  entonna  le  Te  Dewn  au  milieu 
de  la  joie  tmiverselle.  Il  semblait  bien  cette  fois  que  tout  était 
heureusement  terminé  et  que  le  schisme  était  fini.  Les  Pères 
du  concile  Ifl  crurent  ainsi  et  S ,  Bonaventure  en  mourant,  quel- 
ques joui-s  après,  le  14  juillet,  en  remerciait  Diea. 

De  fait  la  décision  du  concile  fut  acceptée  par  l'empereur  Mi- 
chel Palèologue,  qui  signa  et  la  formule  qui  lui  avait  été  en- 
voyée et  son  serment  d'obéissance  au  pape.  Trente-sept  métro- 
politains, soit  de  gré  soit  de  force,  signèrent  l'acte  d'adhésion, 
et  comme  le  patriarche  Joseph  refusa  d'y  souscrire,  on  le  déposa 
et  on  le  remplaça  par  Jean  Veccus,  qui  avait  eu  la  plus  grande 
part  aux  négociations  préliminaires.  Enfin  le  16  janvier  1275, 
on  chanta,  en  latin  et  en  grec,  dans  la  chapelle  du  palais  le  sym- 
bole romain,  et  le  diacre  nomma  solennellement  le  pape  Gré- 
goire au  canon  de  la  messe.  Veccus  et  l'empereur  travaillèrent 
avec  un  zèle  et  même  une  vigueur  qne  l'on  peut  croire  sincères, 
malgré  leur  exagération,  à  rendre  cette  réunion  effective  et  gé- 
nérale ;  mais  ils  rencontrèrent  tant  de  difficultés,  ils  furent  obli- 
gés à  tant  de  tergiversations,  que  Veccus  fut  destitué,  et  que 
Michel  mourut,  excommunié  en  même  temps  par  le  pape  et  par 
les  Grecs  '. 

Andronic  II  Paléologue,  dit  le  vieux,  son  fils  et  son  succes- 
seur, était  opposé  à  l'union  ;  mais  l'intérêt  ramena  cependant  à 
unsemblant  d'union.  Le  jour  de  Pâques,  19  avril  1283,  tous  les 
Grecs  et  les  Latins,  entre  autres  Fr.  Jean  de  Balestro  et  les  autres 
Frères  Mineurs  envoyés  comme  nonc%  ou  apocrïsiaires  assistè- 
rent à  la  messe  célébrée  à  Sainte-Sophie  par  le  patriarche  Joseph, 
rétabli  sur  son  siège  .-  puis  le  lendemain  ce  fut  une  fête  dans 
toute  la  ville,  tous  les  chrétiens  de  tous  les  rites  se  donnaient 
le  baiser  de  paix  et  se  traitaient  de  frères.  Qu'y  avait-il  de  sé- 
rieux au  fond  de  toutes  ces  diverses  alternatives  ?  Faut-il  at- 
frîhuer  toutes  ces  tergiversations  à  la  mauvaise  foi,  ou  bien  à 
une  incurable  légèreté  ?  Toujours  est-il  que  l'historien  a  grand 
peine  à  se  reconnaître  au  milieu  de  ces  changements.  Ce  qu'il 
y  a  de  certain  c'est  qu'à  mesure  que  le  temps  s'écoule  nous 

'  Voir  pour  toutes  ces  négociations  les  bistoriens  eccléHÎaitiques,  spé- 
cialement Rohrbacher,  o  ibî  »,et  Vi(«  lii  S.  Bonaeentura.  dottore  terafiro, 
par  1«  P.  Lndovico  Marcanzoni,  Min.  Conr.  PadoTa.1874,  p.  260  et  suiv. 


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voyons  grandir  le  fossé  qui  sépare  les  deux  Églises,  et  que  mal- 
gré la  bonne  volonté  des  papes  les  esprits  des  Grecs  ne  sont  pas 
disposés  à  la  réunion.  Nous  nous  contenterons  donc  de  noter  en 
passant  les  autres  tentatives  que  nous  trouverons  encore  sur 
notre  route. 

Nous  sommes  heureux  cependant  de  rencontrer  un  fait  qui 
nous  montre  les  chrétiens  de  OP.  sans  distinction  de  rite,  unis 
dans  une  même  pensée.  Fr.  Jean  de  Balastro,  franciscain,  que 
nous  avons  déjà  signalé  plusieurs  fois,  vint  à  mourir  ;  les  Grecs 
l'avaient  en  aussi  grande  vénération  que  les  Latins,  de  plus  le 
jour  de  sa  mort  il  se  produisit  autour  de  son  corps  une  telle 
quantité  de  miracles,  (plus  de  300,  dit  le  chroniqueur,)  que  ses 
obsèques  devinrent  un  triomphe.  Au  lieu  de  la  messe  des  morts, 
les  Grecs  chantèrent  celle  des  confesseurs,  et  au  lieu  du  répons 
funèbre,  l'hymne  des  fêtes.  L'empereur  Andronic  et  les  èvèques 
grecs  demandèrent  au  Pape  sa  canonisation  immédiate'. 

Cependant  les  rois  de  France  conservèrent  le  collège  de  CP.  que 
Philippe-Auguste  avait  établi  à  Paris,  près  de  la  place  Maubert, 
pour  y  recevoir  les  jeunes  grecs,  dans  le  but,  à  n'en  pas  douter, 
de  préparer,  ou  de  cimenter  l'union  de  l'Orient  et  de  rOccidenf. 

Les  Latins  étaient  donc  établis  comme  nous  l'avons  dit, 
dans  la  ville  même,  les  Vénitiens  Sous  la  conduite  de  leur 
Baile,  les  Génois  sous  celle  d'un  Podestat,  les  Pisans  sous 
celle  d'un  Consul,  puis  d'un  Exarque  :  ils  y  avaient  une  cer- 
taine autonomie  et  leurs  églises  nationales  ;  mais  en  dehors  de 
ces  églises  y  en  avait-il  d'autres  à  CP.  du  rite  latin  ?  Nous 
trouvons  la  trace  de  plusieurs,  et  nous  regrettons  que  les  la- 
cunes qui  se  rencontrent  dans  les  archives  des  plus  anciens  cou- 
vents ne  nous  permettent  pas  de  raconter  tout  au  long  leur 
histoire.  Elle  serait  parfois  instructive.  Ainsi  selon  le  rapport 
de  la  Storia  unicersale  délie  missîoni  francescane^,  les 
Frères  Mineurs  et  Prêcheurs  qui,  de  l'agrément  de  l'empereur, 
avaient  acquis  un  terrain  pour  y  bâtir  un  couvent*,  en  commun, 

I  Ckronica  Fralris  Nicoiai  Glatberger,  éd.  Quaraohi,  1888,  p.  88. 
'  Les  Origine»  de  l'Unioersilé  de  Pari'n,  par  l'abbé  Ferret,  Contemporain, 
mai  1876,  p.  831. 
û  Loc.  lau'l.  t.  m.  p.  536. 

'  Pour  comprendre  comment  il  y  avait  à  CP.  un  couvent  qui  appartenait 
IX  Ftérea  Mîneura  et  aux  FF.  PrSchenrs,  il  faut  se  rappe- 


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—  99  — 

eurent  bientôt  à  souffrir  de  nouveaux  ressentiments  :  peu  après 
la  mort  de  Michel  Paiéologue,  le  patriarclie  Athanase  ât,  de 
son  autorité  privée,  raser  le  couvent,  et  attribuer  à  un  usage  pro- 
fane le  local  oi'i  l'on  .ivait  déjà  célébré  les  saints  mystères  et 
inhumé  les  morts.  L'empereur,  qui,  d'ailleurs,  voulait  lui-même 
l'éloigneraent  des  religieux,  leur  offrit  une  indemnité  que  ceux- 
ci  refusèrent  ;  mais,  finalement,  ils  furent  chassés  de  cet  endroit 
et  durent  se  réfugier  daus  l'église  de  Saint-Pierre.  Ceci  se  passait 
en  1307. 

Georges  Pachyiuères  donne  de  ce  fait  le  récit  suivant  qui 
confirme  le  précédent  et  y  ajoute  quelques  détails'.  «  Les 
Frères-  avaient  sollicité  et  obtenu  de  l'empereur  la  permission 
d'acheter  un  terrain  vague,  appartenant  au  public,  dans  le 
voisinage  de  W  agora  »  imarché),  afin  d'y  établir  un  de  leurs 
monastères.  Ils  rencontrèrent  une  vive  opposition,  provoquée 
en  partie  par  l'excès  de  leur  zèle  religieux.  .Aussi  le  Patriarche 
Athanase,  àsonsecondavènement,(I304),  s'était-il  opposé, pour 
ce  motif,  à  l'accomplissement  des  promesses  faites,  en  disant 
que  l'établissement  du  couvent  en  cet  endroit  serait  une  profa- 

kr  un  fait  assez  peu  conau  île  leur  histoire.  On  sait  que  leurs  Fondateurs 
étaient  unis  par  le  lien  d'une  charité  fort  tendre  :  on  sait  nussi  que  leurs  su- 
périeurs, les  BBx  Jean  <!e  Parme  et  Humbert  de  Romans  s'uniren,t  pour  leur 
reuo  m  mander  ensemble  la  même  charité  qui  avait  uni  leurs  Pères.  Mais  les 
deux  Bienheureux  avaient  l'un  et  l'autre  un  grand  r.éle  pour  les  mlssioas 
parmi  les  inlldéles,  c'est  pourijuoi  ils  s'unirent  pour  promouvoir  une  institu- 
tion nouTciie  que,  sur  leur  initiative  sans  doute,  le  pape  Innocent  IV  venait 
d'établir.  Celle  ries  n  Voyageurs  pour  li.-  Christ.  Teller/i-in/tiiti  per  Chnnlo.  » 
En  ce  temps,  dit  Wadding,  i  dans  le  but  de  travailler  elllcacement  à  la 
conversion  des  achigmatiques.  des  hérétiques  et  des  infidèles,  le  S.  Pontife, 
innocent  IV,  choisit  parmi  les  Frères,  Mineurs  et  Prêcheurs,  des  homme» 
pieux  et  doctes,  destinés  à  parcourir  les  contrées  étrangères  à  la  Foi,  pour  y 
répandre  la  parole  divine.  Il  en  fit  une  seule  société,  commune  aux  deux 
Ordres,  et  leur  donna  des  privilèges  spéciaux  trâs  étendue.  Cette  société  se 
développa  rapidement  et  produisit  beaucoup  do  bien,  comme  on  peut  le  con- 
clure de  la  Huile  de  Jean  .\.\II.  a  Gratias  a^mus  »  (1318)  et  de  celle  de 
(irégoire  XI,  "  Quia  in  nostris  desideriis  gerltur,  n  (1.'Î7J).  «  Il  n'est  donc  pas 
étonnant  qu'à  cùté  des  couvents  des  Dominicains  et  des  Franciscains,  dont 
nous  aurons  à  parler  plus  lard,  la  Société  des  o  Pellegrinanti  per  Christo,  » 
ait  eu  son  couvent  spéciiil,  commun  aux  religieux  des  deux  Ordres.  Cf.Pan- 
fdo  da  Magliano  t.  Il,  ch.  17,  Srorin  nnlrenale  ilclle  <iximioi>i  fmnreirnne. 
Histoires  générales  de  l'Église,  .Archives  du  couvent  de  S.  Pierre  à  CP. 
'  Pachyméres,  de  Michnclc  et  Awlroniro  Paleolonis.  Honnœ,  tS.'iû,  II,  21, 
-  Les  Frères,  Fratrir$.  t'i'Oti.  désignation  restée  de  l'empire  lalin,  et  s'ap- 
pliquant  aux  familles  de  S.  François  et  -S.  Dominique. 


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—  100  — 

Dation;  de  leur  côté  les  Frères  résistaient  en  disant  qu'une  lo- 
calité où  avaient  existé  un  monastère,  un  autel  et  des  sépultures, 
et  où  ils  avaient  célébré  les  saints  mystère-^,  ne  pouvait  pas  être 
convertie  en  habitations  publiques.  Le  patriarche  n'en  continua 
pas  moins  à  exciter  le  peuple  ;  il  chercha  même  à  gagner  l'em- 
pereur, qui  finit  par  lui  céder,  et  consentit  à  reprendre  le  terrain, 
pour  le  donner  k  l'amiral  de  la  flotte,  en  ofeant  aux  Frères  une 
indemnité,  que  ceux-ci  ne  voulurent  point  accepter.  Quoi  qu'il 
en  soit,  et  ne  pouvant  plus  résister  davanta^^e,  ils  abandonnèrent 
le  couvent,  y  laissant  les  objets  sacrés  et  autres  qui  s'y  trou- 
vaient, croyant  qu'on  n'en  viendrait  pas  à  des  mesures  de  ri- 
gueur. Mais  poussé  par  le  patriarche,  l'empereur  employant  la 
violence,  ordonna  à  l'exarque  des  Pisans,  voisin  de  ce  monas- 
tère, de  se  faire  accompagner  des  prêtres  desservant  l'église 
S.  Pierre  des  Pisans,  et  de  témoins,  de  se  rendre  au  couventdes 
Francs,  de  reconnaître  tout  ce  qui  pouvait  en  être  enlevé,  et  de 
transporter  scrupuleusement  le  tout  à  S,  Pierre,  par  l'entremise 
des  prêtres  de  cette  église.  Cet  ordre  fut  exécuté'.  Ne  pouvant 
se  venger  des  Grecs,  les  Frères  reportèrent  toute  leur  colère 
sur  l'exarque,  et  s'étant  plaint  au  podestat  des  Grénois,  ils  lui 
demandèrent  justice.Des  embûches  furent  dressées  contre  l'exar- 
que, qui  tomba  gravement  blessé.  Irrité  de  cet  attentat,  l'em- 
pereur fit  chasser  le  podestat  génois  de  sa  présence,  lui  défendit 
de  se  présenter  aux  portes  de  la  ville,  et  demanda  réparation  à 
la  métropole".  » 

En  1340,  Narbonne,  à  son  tour,  obtint  d'Andronic  III  Paléo- 
logue,  dit  le  Jeune,  (1332-1341)  des  privilèges  identiques  à 
ceux  qu'avaient  obtenus  précédemment  les  autres  cités  méditer- 
ranéennes '  ;  cette  commune  eut  aussi  sansdoute  des  établisse- 
ments religieux  dans  CF.  *. 

Le  même  Andronîc  III  voi-ant  que  sans  l'aide  de  Latins,  il 
ne  pourrait  résister  longtemps  à  ses  ennemis,  envoya  Barlaam, 
moine  calabrais,  en  ambassade  auprès  de  Robert,  roi  de  Naples, 

1  Cr.  Heyd  Lo<:  laud..  p.  370. 

^  M.  l'aspali  a  bien  voulu  mo  fournir  la  traduction  de  ce  passage  de  la 
version  grecque. 

»  Depping,  II,  C8,  69. 

'  Un  privilège,  accordé  plus  tard  â  la  même  oommuoe  par  Jean  Faléo- 
,ogue,  est  rapporté  dans  les  Acta  Gneca. 


DigilizedhyGoOt^le 


—  101  — 

de  Philippe  VI  de  Valois,  roi  de  France,  et  du  Pape,  à  Avignon, 
avec  mission  d'exposer  le  désir  qu'avait  l'empereur  de  voir 
l'union  des  deux  Églises  ;  dans  ce  but  ii  sollicitait  la  convo- 
cation d'un  concile  auquel  prendraient  part  les  patriarches  de 
Constantinople,  d'Antioche,  d'Alexandrie  et  de  Jérusalem,  ainsi 
que  la  plupart  des  évèques  de  l'empire.  Il  fut  répondu  à  cet 
envoyé,  que  tant  que  durerait  le  sctiisme,  l'Empereur  ne  pour- 
rait pas  compter  sur  l'assistance  des  Latins  '. 

Jean  Cantacuzène,  régent  pendant  la  minorité  de  Jean  Paléo- 
logue,  (1347-1355),  envoya  aussi  des  ambassadeurs  au  pape 
Clément  VI  avec  la  mission  de  démontrer  au  Souverain  Pontife 
la  nécessité  évidente  pour  toute  la  chrétienté  d'unir  ses  elforts 
contre  les  envahisseurs  de  l'empire.  Le  pontife  tout  en  se  mon- 
trant favorable  à  ces  ouvertures,  opposait  seulement,  comme 
obstacle  à  l'exécution,  la  séparation  des  deux  Églises,  que  l'em- 
pereur se  déclarait  d'ailleurs  très  disposé  à  faire  cesser  par  un 
chaleureux  concours  :  malheureusement  le  Pape  vint  à  mourir 
et  la  solution  qui  alors  semblait  prochaine,  se  trouva  éloignée 
encore  une  fois  '-. 

Jean  Cantacuzène  abdiqua  en  janvier  1355,  et  prit  l'habit 
monastique,  après  le  retour  dans  la  capitale  de  son  ancien  pu- 
pille, Jean  Paléotogue  I,  favorisé  en  cela  par  les  galères  génoises, 
commandées  par  Francesco  Oalatugo.  Toutefois  celui-cî  se 
voyant  bientôt  dans  l'impossibilité  de  résister  aux  progrès  cons- 
tants des  Ottomans,  dut  k  son  tour  solliciter  du  Pape  le  concours 
de  la  chrétienté,  promettant  en  échange  et  par  un  chrysobulle 
solennel,  d'être  prêt,  ainsi  que  la  majorité  de  son  clergé,  &  re- 
connaître la  suprématie  du  Siège  Romain,  et  à  réunir  les  deux 
Églises.  Le  Souverain  Pontife  adhéra  aux  sollicitations  de  l'em- 
pereur, mais  ces  efforts,  pour  le  but  recherché,  restèrent  in- 
fructueux ^, 

Pourtant,  et  sur  l'initiative  de  Pierre  de  Lusignan,  roi  de 
Chypre,  Urbain  V  avait  tenté,  à  Avignon,  de  réunir  les  éléments 
d'une  nouvelle  croisade,  à  laquelle  Charles  IV,  empereur  d'Al- 
lemagne, Charles  V,  roi  de  France,  et  Waldemar  III,  roi  de 

'  Sauli.  loc.  laud.  [,  267. 

>  la.  291. 

»  Id.  [I,  38.  Fanucci  IV.  p.  68. 


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—  103  — 

Danemark,  devaient  prendre  part  ;  mais  craignant  d'une  part  que 
les  Latins  ne  voulussent  profiter  de  l'occasion  pour  relever  leur 
empire  d'Orient,  et  de  l'autre  que  les  Vénitiens  n'eussent  fait  la 
demande  de  cession  de  Ténédos  qu'ti  cette  fin,  Jean  Palt!'ologue 
entrava  l'exécution  du  projet,  puis  se  repentant  presque  aussitôt 
de  sa  résolution,  il  se  décida',  en  1360,  iise  rendre  lui-même  en 
Europe  solliciter,  par  l'entremise  pontificale,  l'appui  de  la  cliré- 
tienté-.  Les  sentiments  de  l'Église  orientale  étaient  d'ailleurs 
assez  partagés,  les  efforts  tentés  par  les  partisans  de  l'union, 
comme  en  sens  inverse  par  ceux  des  opposants^,  durant  la  pé- 
riode qui  s'écoula  entre  le  concile  de  Lyon,  (1274)  et  celui  de 
Florence,  (1439) l'attestent  sufiisamment.  Jean  Paléologue  I  con- 
clut donc  un  traité  avec  le  pape  Urbain  V,  dans  l'espoir  que  quel- 
ques concessions  faites  à  l'Église  Latine  lui  assureraient  la  pro- 
tection de  l'Occident.  Il  se  rendit  à  Rome,  reconnut  la  primauté 
pontificale,  la  procession  du  Saint-Esprit,  et  admit  la  consé- 
cration du  pain  azyme. 

L'empereur  qui,  pour  soutenir  l'éclat  de  son  rang,  avait  été 
conduit  à  faire,  malgré  ses  appréhensions,  des  emprunts  assez 
considérables  aux  Vénitiens,  et  leur  avait  promis  en  garantie  la 
cession  de  Ténédos,  ne  put  tenir  ses  engagements  ;  aussi-  fut-il 
retenu  par  ses  créanciers,  à  son  passage  à  Venise  pour  rentrer 
dans  ses  états,  et  il  ne  dut  la  fin  de  sa  captivité  qu'à  la  vente 
que  Manuel,  son  second  fils,  fit  de  tous  ses  bijoux  pour  lui 
rendre  la  liberté. 

L'Ordre  des  Frères  Mineurs,  établi  depuis  longtemps  à  CP. 
subit,  vers  la  fin  du  xni'  siècle,  et  pendant  le  xiv,  une  crise 
prolongée  qui  pouvait  lui  être  fatale,  mais  qui  finit  par  avoir 
pour  l'Orient  des  conséquences  heureuses.  Depuis  le  temps  de 
sa  fondation,  deux  tendances  opposées  s'étaient  accusées  dans 
l'Ordre  :  les  uns  voulaient  une  observance  stricte  de  la  Règle 
Séraphique,  surtout  quant  à  la  pauvreté,  les  autres,  désirant  cer- 
tains adoucissements  à  ses  rigueurs,  obtenaient  des  Souverains 
Pontifes  quelques  mitigations.  Les  religieux  les  moins  sévères 

I  Sauli,  liy.  lawl.  il. 

'  Art  lie  rèrifter  les  dates. 

»  On  peut  consulter  à  ce  sujet  les  Ai^ta  giti'ca.  où  Be  trouvent  consignées 
de  nombreuses  sentences  synodales  prononcées  contre  la  latinité,  et  de  non 
moinq  nombreux  actes  d'abjuration  en  faveur  de  lagi-rcM. 


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—  103  — 

étaient  ordinairenaent  ceux  qui  habitaient  ies  grandes  villes  et 
peuplaient  les  grands  couvents  ;  les  plus  observants  préféraient 
les  petites  villes  ou  les  solitudes.  On  leur  donna  différents  noms, 
mais  ceux  qui  finirent  par  prévaloir  avec  le  temps  furent  ceux 
de  Conventuels  et  d'Observants. 

De  temps  à  autre  quelque  Frère  zélé  se  mettait  à  prijcher  la 
réforme  dans  l'intérieur  de  l'Ordre,  et  cherchait  à  ramener  la 
Religion  à  sa  primitive  ferveur.  Le  plus  souvent  ils  ne  se  sé- 
paraient pas  pour  cela  de  leurs  Frères,  mais  ils  vivaient  tous 
ensemble,  jusqu'à  ce  que  les  Papes  finissent  par  leur  accorder 
certains  couvents  où  ils  pouvaient  se  sanctifier  à  leur  manière. 
D'autres  fois  ils  se  séparaient  presque  absolument  de  l'Ordpe 
comme  il  arriva  pour  les  Célestins.  Les  principaux  chefs  de  ces 
derniers,  FF.  Thomas  de  Tolentino,  Pierre  deMacératael  Angelo 
Clareno,  furent  envoyés  en  Arménie,  où  ils  firent  de  nombreuses 
conversions.  Le  roi  du  pays  les  pria  d'aller  à  Rome  traiter  avec 
le  pape  S.  Gélestin  V,  1292.  Ils  réussirent  dans  leur  mission  et 
ils  obtinrent  en  même  temps  pour  eux-mêmes  la  permission  de 
vivre  à  part,  sous  le  nom  de  Frères  Célestins,  ou  d'Ermites  du 
pape  Gélestin.  Après  son  abdication,  se  voyant  persécutés  en 
Italie,  ils  se  réfugièrent  en  Achaïe,  et  travaillèrent  énergique- 
ment  à  la  propagation  de  la  Foi.  Après  diverses  péripéties,  cette 
branche  alla  se  fondre  dans  celle  de  l'Observance,  non  sans 
avoir  laissé  des  traces  profondes  de  son  passage  dans  le  Levant. 

Au  reste  la  Province  de  Remanie,  après  la  restauration  bj'san- 
tine,  mais  à  une  date  que  nous  ne  pouvons  préciser,  s'était 
partagée  en  deux.  La  Province  de  Romanie,  avec  3  Custodies, 
Nêgrepont,  Thèbes  et  Chiarenza,  en  tout  13  couvents;  et  le 
Vicariat  d'Orient  avec  3  Custodies,  Constantinople,  7  couvents, 
Trébizonde,  3  couvents  etCauris,  4  couvents'. 

Finalement  la  Régulière  Observance  fut  reconnue  définitive- 
ment par  le  Saint-Siège,  en  1427,  (en  attendant  d'être  complète- 
ment séparée  des  Conventuels,  par  Léon  X,  en  1517)  :  elle  fut 
établie  à  CP.  à  la  suite  des  malheurs  éprouvés  par  l'Ordre  dans 
la  guerre  intervenue  entre  le  roi  de  l'île  de  Chypre  et  le  Soudan 
d'Egypte.  Le  pape  Martin  V,  pour  remédier  aux  maux  de  la  re- 


■  Cnlalogo  'telle  Pi-oeîwic.  e   Vipnrie  tleU'OnUiie  dei  Minori,  nelt'Anno 
,  Hno.  P.  Panaio,  loc.  lau-L  l.  Il,  p.  627. 


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_  104  — 

ligion  dans  ces  contrées,  résolut  d'envoyer  en  qualité  de  visi- 
teur, non  seulement  à  Chypre,  mais  encore  à.  Chio,  à  Pèra,  et 
à  CafFa,  (Grimée)  Fra  Francesco  Spinola,  d'une  noble  famille 
de  Gènes',  religieux  profès  de  l'Ordre  des  FF.  Mineurs,  revêtu 
du  titre  de  «  représentant  du  Ministre  Général  de  l'Ordre  dans 
les  Vicariats  d'Orient,  du  Nord  et  de  Russie,  »  avec  pouvoir 
d'ériger  huit  nouveaux  couvents  dans  ces  contrées. 

Le  pape  Martin  V  munit  Fr.  Spinola  d'une  lettre  pour  l'évêque 
de  Chio  (3  mars  1427),  par  laquelle  il  avertit  ce  prélat  de  l'envoi 
du  visiteur,  avec  un  bon  nombre  de  religieux  de  la  Régulière 
Observance,  pour  travailler  à  la  conversion  de  ces  peuples  ;  Sa 
Sainteté  l'informe  aussi  que  la  piété  des  fidèles  a  fait  don  à 
l'Ordre  de  deux  localités,  l'une  dans  la  ville  même  de  CP., 
l'autre  à  Péra-,  c'est  :\  dire  t  couvent  et  église,  avec  jardin, 
clocher,  cloche,  cimetière,  et  tout  ce  qui  peut  leur  être  utile 
et  nécessaire.  »  Le  pape  avise  aussi  l'évêque  du  pouvoir  qu'a 
Fr.  Francesco  Spinola  «  d'ériger  8  nouveaux  couvents,  sans  qu'il 
ait  aucun  besoin  d'obtenir  de  l'évêque  diocésain  ou  de  tout 
autre  prélat,  aucune  licence  ;  d'y  établir  tel  nombre  de  religieux 
qu'il  jugera  convenable,  et  de  nommer  ou  changera  son  gré  les 
gardiens  de  ces  Communautés.  > 

F.  Francesco  Spinola  parti  de  Rome,  se  rendit  à  Chio  poar 
s'y  concerter  avec  l'évêque  îles  Frères  Mineurs  avaient  un  cou- 
vent dans  ce  diocèse  depuis  longtemps) ,  de  là  il  passa  en  Chypre, 
puis  vint  k  CF.,  et  Fera,  et  passa  ensuite  à  Caffa', 

Sans  entrer  dans  de  plus  amples  détails  le  P.  Barbiéri  de  son 
côté,  dit  dans  son  mémoire  à  Mgr  Coresi  :  «  les  Annales  de 
l'Ordre  Séraphique  disent  que  le  P.  Francesco  Spinola,  noble 
Génois,  de  la  Régulière  Observance,  fut  le  premier  envoyé  et 
autorisé  par  Martin  V,  en  vertu  du  Bref  «  Sacrœ  Relîgionis  » 
(Mai  1437)  à  élablir  cet  Ordre  k  CPK  * 

'  L'n  Spinola  est  archevêque  de  Gènes,  F.  M.,  en  1289;  un  autre,  podestat 
de  la  colonie  génoise  de  CP.  en  1451. 

'  M.  Belin  se  demande  ni  ce  sont  deux  fondations  nouvelles  ou  les  anciens 
couvents  existants  l'un  à  Ci*,  l'autre  à  Galata,  S.  François,  dont  nous  par- 
lerons plus  loin.  Il  ne  me  semble  pas  douteux  que  ce  furent  deux  fondations 
nouvelles,  car  S,  François  a  toujours  appartenu  aux  Convantuels,  qui  avaieDt 
aussi  un  autre  couvent  dans  CP.  m£me. 

'  cr.  Storia  dcUe  miitioni  Francmcane,  IV  p.  472  et  seq. 

•  Archiret  du  Vicariat  patriarcal  de  CP. 


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—  105  — 

L'empereur,  Jean  II,  Paléologue,  continuant  les  traditions 
grecques,  se  rendit  au  concile  de  Florence,  (1439)  où  l'union  des 
deux  Églises  fut  cimentée.  Mais  à  son  retour  dans  ses  états, 
avec  l'intention  de  faire  exécuter  Jes  conditions  consenties,  ce 
prince  désespérant  d'une  part  de  recevoir  l'appui  des  Latins,  et 
craignant  de  l'autre  que  son  zèle  à  seconder  les  vues  pontificales 
ne  lui  aliénât  ses  peuples,  et  ne  lui  attirât  aussi  la  colère  du 
Sultan  ottoman  Murad,  et  par  suite  ne  lui  causât  la  perte  du 
reste  de  ses  états,  ralentit  sa  marche  dans  cette  voie  '.  En  efTet 
peu  après  son  retour,  Marc  d'Ephèse,  le  seul  des  prélats  grecs 
.  qui  eût  refusé  de  souscrire  aux  conditions  du  concile-,  renouvela 
le  schisme,  auquel  d'ailleurs  les  divisions  nées  dans  le  sein 
même  de  la  famille  impériale  donnèrent  une  nouvelle  force. 

Malgré  ces  symptômes,  le  pape  Eugène  IV  envoya  ù  CP.  un 
Commissaire  spécial  chargé  de  diriger  la  construction,  «  intra 
muros,  »  d'un  couvent  et  d'un  église  de  FF,  Mineurs,  sous  le 
vocable  de  sauf  Antonio  degli  cypressi  ^.  L'emplacement  de  la 
nouvelle  église  fut-il  celui  de  l'ancien  couvent  du  même  Ordre 
rasé  du  temps  du  patriarche  Athanase?  II  n'est  pas  hors  de 
raison  de  supposer  que  les  FF.  Mineurs,  nous  l'avons  dit, 
ayant  fini  probablement  par  obtenir  leur  réintégration  dans  leur 
ancien  couvent,  ont  pu  y  rebâtir  une  habitation  provisoire  que 
l'on  agrandit  alors. 

Ce  qu'il  y  a  de  certain  c'est  qu'au  moment  de  la  conquête 
turque  les  FF.  Mineurs  avaient  à  CP.  deux  grands  couvents, 
au  moins.  Suivant  la  tradition  le  dernier  aurait  été  construit 
tout  près  des  murs  de  la  ville,  du  côté  du  port,  non  loin  des 
jardins  du  Séraï.  Terminé  en  1451,  deux  ans  seulement  avant  la 
conquête,  ce  couvent  anrait  été  dékuit  pendant  le  siège,  ou  peu 
après  :  les  religieux  qui  l'habitaient  auraient  été  ou  massacrés 
ou  réduits  en  esclavage'. 

1  Sauli,  toc.  lawL,  p.  U2. 

»  Art  de  rérifter  le$  date»,  300. 

^  Ledoct.  Paapatinoua  fait  remarquer  qu'il  existe  à  Psammatia,  quartier  de 
CP.,une  ancienne  église  byzantine,  dite  S,  George  des  Cyprès  (ti a  IdparisBOu). 

*  Wadding,  Annale* Minorum  al  annum  H5I.  Sloria deUa  mhs'oni  fran- 
cetcane.  IV,  p.  461.  M.  Belin  se  demande  si  le  nom  de  Ht.  Antoine  donné  à 
ce  couvent  ne  viendrait  pas  du  couvent  grec  qui  était  dans  te  voi8ina.get 
Evidemmentit  avait  été  donné  en  l'honneur  du  grand  Saint  Francisc3in,Antoine 
de  Padotie.  N.  E. 


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—  106  — 

Nous   ajouterons    qu'à  l'époque  dont  il  s'agît,  Conslanti- 

nople  renfermait  de  nombreux  espaces  vagues,  inhabités,  sur 
lesquels  se  trouvaient  des  plantations  d'arbres,  de  cyprès  entre 
autres,  comme  l'indique  sur  un  autre  point  la  dénomination  de 
l'église  grecque  de  S.  Georges  des  cyprès,  il  Psammatia. 

Nicolas  V,  successeur  d'Eugène  IV,  envoya  àCP.  le  Cardinal 
Isidore,  archevêque  de  Kiew,  dit  aussi  le  Cardinal  de  Russie, 
afin  d'exhorter  les  Grecs,  par  ses  prédications,  à  embrasser  les 
croyances  et  les  rites  des  Latins,  et  de  veiller  à  soutenir  l'em- 
pereur dans  le  succès  de  cette  œuvre.  Constantin  XII,  Paléo- 
logue,  dit  Dragacês,  appuya  de  son  côté,  le  cardinal;  mais  il  . 
perdit  ainsi  l'affection  de  la  plupart  de  ses  sujets,  et  bien  qu'un 
simulacre  de  réunion  eût  eu  lieu  dans  Sainte-Sophie,  le  13  dé- 
cembre 1452,  en  vue  d'intéresser  l'Europe  à  la  question  d'Orient 
et,  par  ce  moyen,  d'obtenir  son  appui  ',  l'aniniosité  était  à  son 
comble  :  le  clergé  de  la  cour,  les  chapelains  et  les  diacres  assis- 
taient, avec  l'empereur,  au  service  catholique,  célébré  par  le 
cardinal  Isidore,  tandis  que  les  abbés,  les  archimandrites  et  les 
moines  s'en  éloignaient,  et  ne  quittaient  pas  le  cloître  du  Pan- 
tocrator,  l'ancien  quartier-général  des  Latins,  dans  leqtiel  avait 
été  confiné  Gennadius,  présent  et  adhérent  au  concile  de  Flo- 
rence, mais  rallié  depuis  au  parti  de  Marc  d'Éphèse.  De  sa 
retraite,  ce  prélat  lançait  ses  foudres  contre  les  azymites  et  dé- 
nonçait le  décret  de  réunion  comme  wi  acte  impie.  Ses  pa- 
roles, qu'envenimait  encore  la  haine  implacable  du  grand-amiral 
Lucas  Xotaras,  l'homme  le  plus  puissant  de  la  cour,  contre  les 
catholiques,  entraînaient  une  multitude  passionnée.  Cependant, 
et contrairepient  au  propos  de  ce  personnage:  «  plutôt  le  turban 
des  Turcs  que  le  chapeau  d'un  cardinal-,  »  le  peuple  moins 
Tanatique,  et,  cette  fois,  plus  éclairé  sur  ses  véritables  intérêts, 
déclarait  que,  s'il  fallait  opter,  il  préférait  le  joug  des  Latins  à 
celui  des  musulmans,  puisque  les  premiers  croyaient  au  Christ 
et  à  la  Vierge  Marie.  Mais,  au  lieu   de  s'entendre,  Grecs  et 

'  J'iuriinl  'lu  nièga  île  CP,  par  Niuola  Barbara,  publié  par  H.  Cornel,  et 
retraduit  par  le  D.  Dethier.  Moiutm.  Hung.  Hist.  Vol.  XXU,  p.  21. 

^  Sauli.  loc.  Inu-l.  144,  dans  l'une  des  séditions  qui  sUT^rent  à  cette  oc 
cation.  Siuli  Rignale  celle  da  Giorgio  Scolario  qui  refusa  de  reconnaître 
l'empereur  comme  légitime  défenseur  de  laiiatrie,  et  proposait  de  préférence 
le  joug  des  musulmans  à  l'union  avec  les  Latins. 


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—  107  — 

Latins  se  fuyaient,  la  passion  l'emporta  sur  fa  question  de  salut 
public;  et,  par  la  cliute  de  Constantinople,  l'œuvre  de  la  sépa- 
ration fut  définitivement  consommée. 

Durant  le  siège  de  CP.  des  conseils  nationaux  se  tenaient 
dans  les  églises  latines  et  grecques,  pour  discuter  les  moyens  à 
employer  ;  c'est  ainsi  que  des  réunions  de  ce  genre  furent  tenues 
dans  S.  Marc,  (S.  Akindin,  l'église  nationale  des  Vénitiens,) 
Ste  Marie,  S.  Pierre  ;  une  grande  assemblée  présidée  par  l'em- 
pereur, et  à  laquelle  assistait  le  baile  vénitien,  fut  tenue  k 
Sainte-Sophie. 

Nicolas  Barbare  fournit  les  témoignages  suivants  : 

«  El  conselo  di  dodexe,  ma  per  essere  cosa  important  issîma, 
si  trovasemo  vinti  do  zentilhomeni,  »  fut  convoqué  »  in  la 
gieia  di  Sto  Marco  di  CPU,  »  le  jeudi  14  décembre  1452,  s  per 
el  nobel  bomo  magnîfico  Misser  Gerolamo  Minoto,  per  il  sere- 
nîssimo  ducal, de  gno  bailo  di  CP.,  »  à  l'effet  de  statuer  sur  la 
demande  faite  par  «  lo  serenissimo  imperador,  in  la  giexia  di  ?anta 
Sofia,  a  la  presentia  di  messir  bailo,  »  de  retenir  ù  Constantinople 
divers  navires  vénitiens,  en  vue  de  contribuer  à  la  défense  de 
la  capitale  contre  les  Turcs.  Le  conseil  adhéra  à  cette  requête. 

Le  même  conseil  des  douze  se  réunit  encore  le  11  avril  1453, 
(  in  giexia  de  Santa  Maria  di  CPii,  >  et  il  décida,  dans  cette 
séance,  l'incendie  de  la  flotte  turque  qui  se  trouvait  *  dentro 
dal  navarchio  »  de  Pera. 

Le  10  mai  suivant,  le  «  conselo  de  dodexe  >  se  réunit  de  nou- 
veau c  in  la  giexia  uxada  de  Santa  Maria  di  CP,  »  et  nomma  le 
capitaine  Aluvixe  Diédo,  commandant  en  chef  des  forces  mari- 
times réunies  dans  le  port  '. 

Selon  Puseulus  '  un  conseil  de  la  commune  vénitienne  aurait 

'  Nicola  Barbaro,  p.  38. 

■  H  ressort  de  ces  diverses  citations  que,  clie?.  les  Lutins  comme  chez  les 
Grecs.  les  assemblées  politiques  se  tenaient  ikm.^  /ci  cf/li/rs.  La  version  la- 
tine <iu  privilège  accordé  par  Alexis  aux  Vénitiens,  et  rapporté  d'après  Ma- 
rin, par  Miltitï  (I,  p.  301)-  emploie  plusieurs  rois  ii;  terme  err/e-'i'i  Veneto- 
runi.  pour  désigner  le  siège  officiel  de  !a  juridiction  Vénitienne  à  Coastanti- 
Dople,  1  e'-i'Ceêia  répond  au  terme  linxilique.  c'est-à-dire  le  lieu  oïl  siégeaient 
les  magistrats  ;  l'antiquité  n'avait  rien  de  plus  auguste,  n  (Uzanam,  Œurivt 
complétée,  Paris,  1863,  tome  1,  p.  49.  Un  peut  retrouvsr  lit  l'origine  des  an- 
tembléet  nationale»,  ou  réunion  des  notables  des  colonies  françaises  du 
Levant.  (Cf.  à  cet  égard  Féraud  Giraud,  rie  la  Jurid'-'l.  franfaiie  dam  iei 
échelle*  du  Leoanl,  II,  68;  et  sur  les  devoirs  po^r  en  faire  partie,  i'I.  I,  53.) 


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—  108  — 

été  tenu,  durant  le  siège  de  Constantinople,  dans  l'église  de 
Saint-Pierre  Claniger.  C'est  sans  doute  l'ancienne  église  des 
Pjsans,  transférée  ensuite  aox  Florentins,  en  1439,  différents 
conseils  ayant  pu  être  réunis  par  les  colonies  franques  qui  con- 
tribuaient à  la  défense  de  la  capitale.  La  commune  vénitienne 
a  pu  dans  l'une  de  ces  assemblées  se  joindre  à  la  communauté 
pisano-florentine,  dans  son  église  de  St-Plerre,  ou  même  choisir 
cette  localité  par  suite  de  quelque  circonstance  que  nous  ignorons. 

On  sait  le  concours  prêté  par  les  Latins  à  la  défense  de  la 
capitale  comme  aussi  le  sort  qui  échut  au  couvent  des  Obser- 
vantins,  Sont'  Antonio  degli  cypressi.  Il  fut  rasé  et  ses  re- 
ligieux massacrés  ou  réduits  en  esclavage.  On  lit  à  ce  sujet 
dans  la  Cronaca  di  Bologoa  ■  c  alquanti  fratl  dell'osservanza 
di  San  Francesco,  che  furono  presi  nella  detta  città  di  CPli, 
vennero  a  Bologna  e  dissero  tali  novità  »  touchant  la  mort  de 
l'empereur,  la  vente  comme  esclaves  des  moines,  prêtres  et 
religieux,  parmi  lesquels  le  cardinal  Isidore,  qui  parvint  à 
s'échapper  et  à  gagner  Rome,  c  tutte  le  chiese  furono  rubate, 
violate,  vituperate  etc.  x  Le  cardinal  Isidore  Rutheno,  légat  ■ 
pontiflcai,  vendu  lui-même  comme  esclave,  se  sauva  des  mains 
d'un  turc,  moyennant  quelques  aspres. 

Les  deux  églises,  de  Ste-Marie  et  de  St-Nicolas  qui  furent 
laissées,  après  la  conquête,  à  la  latinité  de  Péra-Galata,  furent- 
elles  comprises  virtuellement  dans  la  capitulation  signée  par 
celle-ci  avec  sultan  Mehemmed  le  Conquérant?  Ou  bien,  restant 
fermées  durant  les  premiers  temps  qui  suivirent  la  conquête,  ne 
furent-elles  rendues  au  culte  qu'un  peu  plus  tard  ?  Le  défaut  de 
renseignements  ne  permet  pas  de  résoudre  ces  questions.  Nous 
savons  seulement  que,  malgré  la  part  active  prise  par  Venise  à 
la  défense  de  Constantinople,  et  le  supplice  inRigé  il  son  repré- 
sentant, la  sérénissime  République  ouvrit  bientôt  avec  l'empe- 
reur ottoman  des  négociations  qui  aboutirent  au  privilège  obtenu 
par  elle  le  15  avril  1454 -.  Nicolas  Barbaro  donne  le  projet  de 
cet  acte;  on  y  lit,  articles  :  «procuraretur  omnibus  modis  quod 

'  Muratori,  Smptoi-e»  i-f.  p.  701,  rapporte  del  superiore  dei  Franc«scanj, 
présente  ail'  assedio  ed  alla  presa  di  Cooetantinopoli,  mandalo  ed  amvato  a 
Bologna.  il  4  Luglio  1453.  (DelhJer  lof.  lawl.  p.  935.) 

''  M.  Dethier  loc.  lau-t.  p.  221  tradu[t  ainsi  ■  et  sa  bannière,  signe,  dra- 
peau, Lobia.  n 


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—  109  — 

conâul  iturus  in  CPlim  habent  domum  cum  lobia  plateis  et 
ecclesits,  quos  habebat  baïutus  noster  tempore  Grsecoram,  ut 
nostri  mercatores  habeaat  reâitctum  et  eccleslas  pro  sepvl- 
turts^uïsK  >  Il  ne  fut  fait  droit  qu'en  partie  à  ces  demandes: 
Santa  Maria  ai  CPU,  devenue  propriété  de  l'État,  releva, 
administra tivement,  de  la  communauté  de  Péra;  et  si  les 
Frères  Prêcheurs  s'éloignèrent,  momentanément,  de  cette  église, 
il  est  à  présumer  qu'ils  en  furent  remis  en  possession  depuis 
sa  restitution  an  culte-. 

En  présence  de  ces  événements  politiques  que  le  vainqueur 
fit  connaître  à  tous  les  monarques  orientaux  par  ses  lettres  de 
victoire^  et  qui  furent  d'une  importance  si  considérable  pour 
l'avenir,  l'Europe  si  souvent  sollicitée  à  venir  en  aide  à  la  chré- 
tienté d'Orient,  resta  inerte  et  insensible  ;  la  papauté  seule,  dans 
la  personne  de  Calixte  III  (8  avriM45n  —  6  août  1458),  fit  une 
démonstration,  qui  malgré  son  impuissante  témérité,  ne  mérite 
pas  moins  d'être  signalée.  Tandis  que  le  conquérant  ottoman 
tournait  ses  armes  contre  l'illustre  Huniade,  le  héros  de  la  Hon- 
grie, Calixte  m  équipa  une  flotte  de  quinze  galères,  dont  il* 
donna  le  commandement  supérieur  au  Patriarche  d'Aquilée  puis 
à  Jacques  Cœur,  qui  s'était  retiré  à  Rome  *,  avec  le  titre  de  Ca- 
pitaine général.  Celui-ci  prit  le  commandemsnt  de  l'escadre  et 
la  conduisit  à  Chio,  où  il  mourut,  en  1456. 


>  On  dit  que  les  Arab«a,à  une  certaine  époque,  travestirent  par  mépris,  le 
mot  grec  Eirlixiia  en  celui  de  Afni'cn,  s  Iniibtdum.  »  que  leur  offrait  leur 
langue,  lieu  de»  balaijurea.  FraytaB  3  signalé  déjà  l'analogie  de  ce  dernier 
mot  avec  celui  de  Kenicha.  Synagoga  Jwlaeoi'um  ;  et  on  lit  dans  VEitai  sur 
t  kittoire  et  la  géographie  de  la  Palettine.  par  Derembourg  (I,  34)  ;  »  ansché 
heneëet  fi^ggadolah  •  les  hommes  de  la  grande  réunion,  de  la  grande  syna- 
gogue, la  réunion  des  savants,  des  docteurs,  prêtres  et  laïques. 

'  Voyeï  les  Papier*  d'état  de  Férîdon. 

*  Hiêtoliv  de»  Echelles  du  Lcrant  et  dem  rotum'es,  par  Salvador.  Paris  1854, 
p.  ICÎ. 


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CHAPITRE  IV. 


LATIMTÉ  DE  OOSSTAKTINOPLE  SOUS  LES  SULTA>.-S. 


C'est  le  29  mai  1458,  que  Sultan  Meheramed  Ilentra  victorieux 
à  Constantinople.  Il  pénétra  à  cheval  dans  l'église  de  Ste-Sophie, 
.s'assit  sur  l'autel  et  réduisit  en  esclavage  tout  ce  qui  s'y  ren- 
contra, prêtres,  moines  et  religieuses,  comme  les  nobles  et  le 
peuple.  Beaucoup  d'églises  furent  changées  en  mosquées,  mais 
après  quelque  taraps,  il  consentit  à  en  laisser  quelques-unes 
aux  Grecs.  Les  Latins  n'avaient  pas  un  grand  nombre  d'églises 
sur  la  rive  droite  de  la  Corne  d'or,  elles  subirent  le  sort  com- 
mun. Nous  avons  vu  que  St-Antoine  des  Frères  Mineurs  de 
l'Observance  fut  détruit  ;  nous  nq  possédons  aucun  renseigne- 
ment sur  les  autres  églises  de  religieux  gui  pouvaient  s'y  trou- 
ver, ni  sur  leur  sort.  Avec  le  temps  nous  ne  voyons,  dans  Cons- 
tantinople même,  que  deux  églises  latines,  dont  nous  allons 
parler  en  détail. 

Le  plus  ancien  document  relatif  à  ces  églises  est  une  lettre 
que  la  «  Magnifica  Comunità  >  de  Péra  écrit,  le  18  novembre  1583, 
au  R.  Vicaire  patriarcal  de  Constantinople.  Elle  fait  une  instance 
formelle  pour  maintenir  le  droit  qu'elle  avait,  de  toute  antiquité, 
de  choisir,  sous  la  réserve  de  la  confirmation  de  l'ordinaire, 
les  religieux  qui  devaient  desservir  les  églises  de  St-Xicolas  et 
Ste-llarie  de  Constantinople,  de  Ste-Anne,  St-Benoît,  St-Jean,  St- 
Sébastien,  St-Antoine,  et  St-Georges  dfe  Péra,  suivant  les  Capi- 
tulations qui  lui  avaient  été  consenties,  en  1453,  par  Sultan  Me- 
hemmed  II.  Cette  juridiction  ne  fut  pas  contredite  par  l'évèque 


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—  )11  — 

de  Tinos  visiteur  .postolique.  (Archive»  de  la  Délégation,  Re- 
gLÏè  nJp  2S.  Ces  documents  semblent  empruntes  a„^  ar- 
chires  de  St-Antoine  )  ,„^, 

la  Sainte  image  dite  •  Hodighitrms,  .  le»  Kc.es  ^uu 

c.  François  de  Gaiata,  et  les  Pères  Domm.camsde  Ste  Manc  de 

sur  les  offrandes  des  Hdcles  à  l'occas.on  de  la  fête  (~u  mars 
"'c^iScConstantiuopleavaient  ,nc,,uesre„^  c^men 
plt^,uei,ues  titres  d'ob|i«atio,^pare^,c.^Sr.A„.n. 

a.:'iVreçuerde'ces  églises,  et  il  en  promettait  1,700  l'an  pour 

"utS'de  la  m.m.  date,  et  de  .60  aspres.  «ait  souscrit 
pa^Au  ea  Fontana,  en  faveur  des  mcrues  «S''-.  «  "o™ 
Cr  être  navé  à  première  réquisition.  Ces  oU.gal.on.  ont 
lous^Ss  p"  D.  Giorgio  Perpiuiauo,  évèqne  de  Tinos,  V.s.leur 
"Cr  ::SèmeX..ion  «ian-Batllsta  GiuUbo  .levait 
eaoÔaspres.  aux  m.-mes  églises,  P»y?l>i-  «0°  ."^'l' »™t 

il  de  l'Ordre  aes  cr.  n^:^--^^-^  -■  —        ■ 
que  les  Fontana  se  sont  libérés  »  -'^(^""-fj^'-  ""'  ^""- 


^Cr  ::S  m^X-ion  «ian-Batllsta  GiuUbo  .levait 

.oÔaspres.  -x  m.'.mes  églises,  payables  600  aspres  1  année. 

•ces  tr'ois  obligations  furent  payées  à  la  date  "^"^-^^^ 

vrier  1618,  devant  le  Visiteur.  Fra  Giovanni  Tmoh,  V.caire 

Itérai  de  l'Ordre  des  FF.  Précbeurs  en  Levant,  rec.nna.t 


aue  les  toniana&c  50UI  w",-'^- .- 

Lee  générale,  il  délivre  trois  quittances  spéciales. 

L  ifgentprovenantdecepayementfatemploy  àaelietcrpou 
,  T.  L  ce,  mêmes  églises,  inaivisement,    une  maison 

■trd    s  Z^é^.,.a,;a.a.  (Oahvé  maliala,)  conli- 

Tnî  de  droite  à  Andréa  Fontana,  de  gauche  à  Isa.no  Spa.et,  de 
derrière  à  Esce  (aicha?)  Cad.n. 


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§1- 

Sainte-Marie  ou  la  Madone  de  Constantinople. 

La  dévotioD  à  la  Vierge  a  toujours  été  très  répandue  à  Cods- 
tantinople  ;  Ducange  fournit  la  longue  liste  des  temples  qui  lai 
furent  consacrés  dans  cette  capitale;  mais  Pietro  délia  Valte', 
qui  visita  cette  ville  au  commencement  de  1614,  dit  dans  sa 
lettre  de  la  même  année,  datée  de  cette  capitale  :  <Noi  altri  latinî 
dentro  a  CP. ,  abbiamo  due  sole  Chiesuote,  assai  piccole,  amen- 
due  vicine,  in  v,na  medesima  contrada,  uaa  che  si  chiama 
S.  Nicola,  ë  l'altra  la  Madonha  che  in  Italia,  e  massimamente  in 
Napoli,  è  di  tanta  famosa  divozione,  a  guardia  délia  quale  vi  sta 
un  solo  frate  domenîcano....t  D'après  ce  témoignage,  Santa 
Maria,  malgré  l'importance  relative  qu'elle  pût  avoir,  était  donc 
unepetile  e'i/^îsc,  desservie  par  la  mission  des  Frères  Prêcheurs; 
les  actes  de  la  *  Comunità  de  Pèra  t  établissent,  sons  les  an- 
nées 1618-1627,  que  celle-ci  était  chargée  de  pourvoir  à  sa  des- 
servance. 

Eq  1634,  Redjeb-Paclia,  lieutenant  du  grand-vizir,  profitant 
des  mésintelligences  survenues  entre  l'ambassadeur  de  France 
et  le  résident  impérial,  au  sujet  du  protectorat  religieux,  aurait 
fait  fermer  Xèglise  de  la  Vierge  à  Constantinople,  en  annon- 
çant l'intention  d'en  faire  une  mosquée.  Deux  ans  après,  <  la 
Comunità,  »  par  sa  lettre  de  fin  août  1636,  informait  le  cardi- 
nal <  protettore  di  Levante,  >  qu'elle  venait  de  perdre,  (  il  y  a 
quarante  jours,  >  la  miraculeuse  église  de  la  Madone  de  Cons- 
tantinople-. Ilrésultedu  rapport  du  P.  Giacinto, supérieur  des 
Dominicains,  adressé  au  conseil  de.  la  Propagation  de  la  foi, 


I  Viaggii  di  Pietro  délia  Valle.  Tunn,  1843, 1,  26. 

a  D.  Subiani  (taas  une  lotlre  du  14  octobre  1654,  ([mprimée  par  Michels 
Giustiniani  en  1056,)  fait  le  rapport  suivant  s  l'fglfse  Stc-Maria  in  Blachernis, 
ou  Vlacherniotica,  probablement  du  Rosaire,  dite  encore  aujourd'hui  par  les 
Turcs  »  Gui  Djâmi,  ou  mosquée  des  roses,  vocable  correspondant  à  celui  du 
Rosaire,  était  sise  «  nella  contrada,  communemente  chiamata  Balata ;  n  elle 
fut  enlevée  aux  Frères  Prêcheurs,  il  y  a  environ  35  ans  ».  Malgré  ce  dire  la 
date  de  la  «  Comunità  »  <^tant  précise  doit  Être  préférée  &  toute  autre 


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—  113  — 

le  27  février  1843,  que,  jusque-là,  cette  église  aurait  conservé 
la  protection  vénitienne. 

Dans  cette  église,  selon  le  même  document,  se  trouvait  la 
célèbre  image  c  de  la  Madone  de  Constantinople,  »  conservée,  de 
nos  jours,  dansl'égliseSt-Pi  erre  de  Galata'.  Diverses  opinions  re- 
latives à  cette  image  sont  consignées  dans  le  Mémoire  de  l'abbé 
Giustiniani,  imprimé  à  Borne  en  1656.  Selon  une  relation  du 
couvent  de  Saint-Pierre,  cette  image  aurait  appartenu  au  mo- 
nastère de  Caffa,  d'où  elle  aurait  été  rapportée,  lors  de  l'inva- 
sion tartare,  par  les  religieux  fugitifs,  lesquels  la  déposèrent 
alors  dans  l'église  qui,  pour  ce  motif,  reçut  le  titre  de  Madonna 
dt  Constantinopoli.  Quand  leur  église  fut  transformée  en  mos- 
quée, ces  religieux  ayant  perdu  le  tableau  délia  Madonna, 
s'adressèrent  au  Baile  vénitien,  ancien  protecteur  de  l'église, 
pour  eu  obtenir  la  restitution  ;  et,  après  bien  des  démarches 
faites  par  celui-ci,  l'image  fut  finalement  recouvrée,  et  dépo- 
sée dans  St-Pierre  de  Galata.  Quoique  protégée  par  la  France, 
la  Séréuissime  République  entretenait,  cependant,  dans  cette 
dernière  église,  plusieurs  religieux  chargés  de  travailler  à  la 
propagation  du  culte  de  la  sainte  Vierge.  De  même  que  l'an- 
cienne église  de  Constantinople  était  dédiée  à  la  Très  sainte 
Vierge  du  Rosaire,  ou  simplement  Ste  Marie  du  Rosaire, 
St-Pierre  de  Galata,  par  suite  de  la  translation  de  l'image,  fut 
dit  à  son  tour  chiesa  délia  B.  Vergine  del  Rosario  ;  et,  à 
cette  occasion,  les  papes  l'enrichirent  de  nombreuses  indul- 
gences. 

Selon  une  autre  version,  rapportée  par  Dom  Calmet-,  «  cette 
image  serait  celle  de  Yhodtghitrias  (conductrice^  peinte  par 
St,  Luc,  et  rapportée  de  Jérusalem  par  Eudoxie,  femme  de 
Théodose  le  Jeune,  en  450,  qui  en  fit  don  à  Ste  Pulchérîe,  sa 
belle-sœur-'.  L'image  était  en  grande  vénération,  non  seulement 
chez  les  Grecs,  mais  aussi  dans  le  monde  entier  :  &  Rome,  on 
érigea  en  son  honneur  une  archiconfrérie  aux  frais  de  la  nation 
sicilienne.  A  la  conquête  franque,  cette  image,  dans  laquelle 
les  empereurs  avaient  mis  leur  conûance,  tomba  au  pouvoir 

1  Hammer,  IX,  233.  Cf.  aussi  Jouannin,  La  Turquie,  234. 
*  Rapport  déjà  cité  du  supérieur  de  Saint'Pierre. 
»  V,  ci -après,  cbap.  m. 


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—  lU  - 

des  Latins'.  »  Les  Vénitiens  la  déposèrent,  A&naVégHse  du 
Très  saint  Rosaire,  et  la  confièrent  aax  Frères  Prêcheurs, 
<  les  premiers,  dit  le  rapport  précité,  qui,  sous  le  nom  et  l'habit 
des  frères,  portèrent  à  Gonstantinople  una  parola  ed  una  pre- 
ghiera  :  il  vangelo  ed  il  rosario.  > 

D'après  Du  Gange  ^,  l'empereur  Henri  aurait  fait  tirer  cette 
image  de  la  sainte  chapelle  du  palais  Bncoléon,  où  elle  aurait 
été  portée,  après  la  prise  de  la  ville,  pour  la  transporter  à  Ste- 
Sophie  ;  mais,  k  la  demande  dea  Vénitiens,  il  l'aurait  donnée  à 
ceux-ei  *  ;  le  patriarche  s' étant  opposé  à  la  translation,  les  Vé- 
nitiens auraient  enfoncé  les  portes  du  temple  et  enlevé  l'image 
qu'ils  auraient  portée  dans  l'élise  du  Pantocrator,  d'où  Mi- 
chel Paléologue  l'aurait  reprise  ensuite,  pour  la  restituer  c  à 
l'église  iel'Hodége*.  » 

1  On  lit  dana  la.  Deoattntio  Constantinopolifana,  p.  91,  que  Murzufle  ayant 
été  blcisaé  dans  un  combat  contre  Henri,  frère  du  comte,  perdit  «  omnia  îm- 
perialia,  coronam  scilicet  et  lanceam  et  quandam  jmaginem  glorioMB  Virgi- 
nis,  quEe  aemper  solebat  reges  precedere  in  bello.  tota  de  auro  et  lapidîbua 
precioais.  s 

Lors  du  siâge  de  CoastantlDople,  le  troisième,  par  sultan  Mourad,  les 
Turcs  furent  mis  en  fuite  à  l'apparition  delà  SteVierge(PanBta)  qui  serait  des- 
cendue du  ciel  pour  proléger  les  rot  igîe  use  a, odieusement  promises  aux  séidea. 
D'après  Canano,  cheikh-Uoukari-emir-aullan,  assura  luî-m6mo  que  pendant 
l'assaut,  une  vierge,  revêtue  d'une  robe  violette,  et  jetant  autour  d'elle  un 
éclat  éblouisBant,  s'était  montrée  sur  lea  bastions  extérieurs,  et  que  cette  ap- 
parition mit  les  assiégeants  en  fuite.  Il  ajoute  que  toute  l'armée  conflnna 
par  serment  la  déclaration  du  cheikh,  ot  qu'on  n'osa  plus  douter  de  la  réalité 
du  miracle.  (Hammor,  H  p.  241).  Pendant  le  siège  de  1453,  les  Grecs  n'a- 
vaient d'espoir  qu'en  la  Très  Ste  Vierge  qui, au  dernier  siège,  les  avait  si  mi- 
raculeusement délivrés.  Depuis  la  aemaine  de  Pâques  au  commença  le 
siège,  l'image  miraculeuse  était  exposée  dans  l'église  del'Hodighitria,  située 
au  milieu  de  l'Acropole,  sur  l'emplacement  occupé  autrefois  par  l'autol  de 
Minerve  (id.  p.  421.) 

»  Hist.  de  l'amp.  de  Conitantinople.  1826,  p.  94. 

*  cxiv.  Estait  l'ymage  de  N.  D.,  dit  Robert  de  Clary,  painte  en  une  taule. 
Si  cstoit  cbis  ymagea  si  rikes  que  moult  et  estoit  tous  carkiea  de  likea 
pierrea  précieuses  :  ai  diaoient  li  Griu  que  chou  eatoit  11  premiers  ymages  de 
N.  D.  qui  onques  fust  fait  ne  pourtrais.  En  chel  ymages  ai  avoient  li  Griu  si 
grant  flanche  que  il  l'aouroient  eeur  toute  rien,  et  ai  le  portoîent  cascun  de 
mara  a  pourchession  ;  si  l'aouroient  li  Griu  et  donnoicnt  lui  moult  grans  dons. 
Ore  ne  vonlolent  nient  li  Venicien  souffrir  que  maaaire  (Henri)  fuat  empe* 
reurs,  a'il  n'eussent  chel  3'mage  tant  c'om  leur  donna  cbel  ymage;  puis,  si 
corona  on  monseigneur  H(enri}  a  empereur,  x 

*  l'rès  S.  Georges  in  manganis.  Cf.  Imperium  orientale,  plan  de  Gonstan- 
tinople. Hammer,  II,  419,  4ïl  ;  Critoboulos  {Vie  de  Mahomet),  éditée  et  tra- 


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—  116  — 

Certains  rapports  prétendent  tronver,  dans  la  désignation 
tnrqae  d'une  mosquée  actuelle,  dite  Qul-djàmt,  l'emplace- 
ment de  Ste-Marie  du  Rosaire  ;  mais  ce  temple,  qui,  sous  les 
Grecs,  fut  l'église  de  Ste-Thëodosie,  sise  près  Aïa  capou  t  la 
porte  de  la  Sainte,  >  a  tiré  son  nom  de  celui  de  Triacontafllo  ', 
propriétaire  du  terrain  sur  lequel,  en  iOSl,  l'empereur  Ro- 
main Argyrus  éleva  cette  église  -,  placée  sous  le  vocable  dAïa 
Maria  Periclepti,  t  l'admirable  Vierge  Marie^,  et  dite  aussi, 
du  nom  de  l'ancien  possesseur,  Roûon  amaranton,  t  Rose  qui 
ne  se  fane  pas.  >  A  la  conquête  ottomane,  cette  église,  se- 
lon HammerS  fut  enlevée  aux  Grecs  par  sultan  Mehemmed, 
ainsi  que  sept  autres  temples  chrétiens,  et  convertie  en  magasin 
de  dépôt  pour  l'arsenal;  Selim  II  (1566-1574)  en  fit  une  mos- 
quée ^.  D'après  ces  données,  la  mosquée  actuelle  Gul-Ujàmî  ne 
semble  donc  pas  avoir  été  l'ancienne  église  latine  ;  l'emplace- 
ment doit  en  être  cherché  ailleurs.  Le  P.  Giacinto,  dans  son 
Rapport  précité,  dit  qu'elle  se  trouvait  au  quartier  de  Balat^  ; 
et  comme,  selon  Pietro  délia  Valle,  elle  était  dans  la  même 
contrada  que  celle  de  St-Nicolas,  sise,  d'après  Carbognano, 

duite  par  le  D'  Dethier,  H,  98,  rapporte  que  Hmage  fut  portée  procession- 
nellement  dans  Constaotinople  pendant  le  siège  des  Turcs  ;  et  que,  tombant 
des  mains  des  porteurs,  sans  qu''  ceuji-cî.par  suite  de  sa  pesanteur  miracu- 
leuse, pussent  la  relever,  elle  sembla  présager  ainsi  le  malheur  réservé  &  la 
ville,  M.  Paspati  pense  qu'on  <)oit  lire  hodigkitria*. 

'  Constant! nopolU  ehrisliana,  IV",  G^,  et  le  patriarche  Conslantius.  p.  19,  44. 

'  Cette  église  fut  bâtie  en  1031,  par  ce  prince  qui  y  fut  enterré,  ainsi  que 
Nicéphore  Itotoniate,  après  lui.  Michel  Paléologue  la  Ht  réparer  soigneu- 
sement, et  tous  les  ans,  à  la  Chandeleur,  comme  il  ge  pratiquait  antérieure- 
ment à  Ste  Marie  cles  Blacherncs,  quand  il  se  trouvait  à  Constant! nople  il  se 
rendait  en  grande  pompe  k  celte  église.  Avant  t'incendie  de  1TS2,  on  y  voyait 
encore  l'image  de  cet  empereur  avec  l'auguate  Tliéodora,  ayant  entre  eux 
leur  fils  Constantin.  (Coiiatnntiniitili',  116.)  M.  Paspati  ne  trouve  pas  cette 
appellation  exacte  ■  Aia  Maria  «.  Il  propose  de  la  remplacer  par  celle-ci, 
«  Panaiia  Perivlepti,  »  «  la  vierge  admirée  de  toute  part,  o  Le  patriarche 
Constantius,  lor.  laiid.  rapporte  que  cette  église  passa  aux  Arméniens,  sous 
le  nom  de  Souloit  mOTuiatir,  monastère  de  l'eau. 

*  te  Mater  admîrabilis.  a 

*  Loc.  laud.  III,  429. 

»  Ha'liqat  uMjé:ami,  18G,  et  Uammer,  loc.  laud.  XVIII,  40. 

*  Balat  M  palatium,  *  AboulCéda,  r/i'ographie,  édit.  Reinaud,p,  213,  dit  l'ha- 
bitation du  souverain  est  nommée  I3alat-el-milik,  «  le  palais  du  roi.  >  Balata 
était  la  résidence  de  l'ambassadeur  d'Allemagne,  Cte  de  Leslie  en  IC65.  An< 
ludea  de  St-Benoit. 


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—  118  — 

cité  ci-après,  c  verso  le  mura  délia  città,  tra  il  pal&zzo  di  Cos- 
tantino  e  la  porta  d'Àndemopoli,  >  c'est  donc  dans  cette  région 
qu'a  dû  exister  l'église  de  la  Madone;  enlevée  à  la  latinité  en 
1634,  S0U3  le  règne  de  Murad  IV  ',  elle  a  été  conservée  au  culte 
durant  une  période  de  183  ans  après  la  conquête  ottomane. 


Saint-Nicolas. 

Selon  toute  apparence,  cette  église  fut  la  même  que  celle  fon- 
dée antérieurement  sous  ce  vocable,  par  l'exilé  deHastings.  Le 
voyageur  Pietro  délia  Valle,  dans  le  passage  rapporté  plus  haut, 
dît  que  t  St-Nicolas  et  Ste-Marie  étaient  deux  églises  assez 
petites,  voisines  l'une  de  l'autre,  dans  le  même  quartier  ;  » 
et  Carbognano-précise  en  ces  termes  la  position  de  la  première  : 
<  verso  le  mura  délia  città,  tra  il  palazzo  di  Costantino  e  la  porta 
d'Andernopoli,  si  vede  una  plccola  moschea,  cou  due  cupole 
di  vaga  e  regolar  architettura  ;  ecco  fu  la  chiesa  di  San~Nicold, 
ufllziata  dai  padri  domenicani.  ï 

Mentionnée  dans  une  lettre  de  1616  ou  1617,  de  la  «:  Comunf- 
tà  di  Pera,  >  il  résulte  d'un  procès-verbal  de  1627  que  le  su- 
périeur de  St-Pierre  de  Galata  réclamait,  à  cette  date,  de  la 
«  Comunità  i  l'autorisation  de  recevoir  du  procureur  de  son 
église  (St-Pierre)  le  remboursement  des  avances  faites  par  lui 
et  ses  religieux  pour  l'entretien  du  desservant  des  deux  églises 
de  Constantinople,  Ste-Marie  et  St-Nicolas.  On  a  vu  plus 
haut  qu'en  1614,  d'après  Pietro  délia  Valle,  un  seul  prêtre 
était  chargé  de  la  desservance  de  ces  deux  églises. 

Selon  les  termes  d'une  lettre  émanée  des  mêmes  sources,  et 
adressée  le  8  octobre  1636  «  al  cardinale  protettore  di  Levante.... 
l'église  de  St-Nicolas  aurait  été  perdue,   dit  ce  document, 

■  Ce  prince  occupa  le  trdae  de  1633  à  1640. 

'  Detcriiione  topoifraftca  diContta/Uinopiili.l'94.Cl.  également  une  lettre 
du  supérieur  des  Domintcaina  au  conseil  de  la  Propagation  de  la  Toi,  eu  date 
du  S7  février  1843.  Ma'gré  mes  recherches,  Je  n'ai  pu  parvenir  à  retrouver 
cet  emplacement. 


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—  117  — 

depuis  six  ou  sept  ans,y  soit  :  ea  1639  ou  1630'.  herapport 
précité  du  supériear  des  dominicains  dit  même  qa'elle  aurait 
été  démolie  ;  la  Gomuiiità  regrettait  en  outre  la  perte,  à  cette 
occasion,  de  tre  casait  (hameaux)  catholiques,  altués  ftors  la 
porte  d'Andrinopîe,  et  dont  les  habitants  étaient  devenus,  les 
uns  musulmans,  les  aub'es  grecs  orthodoxes.  La  population 
de  ces  villages  était-elle  le  fruit  de  révangéUsation  des  desser- 
vants de  St-Nicolas,  on  bien  descendait-elle  d'une  colonie  de 
Yaranges,  groupée  autour  de  l'église  ? 

Une  attestation  délivrée  parla  confratemita  di  Sant'Anna, 
le  23  avriI1675,  et  conservée  aux  archives  deSt-PierredeGialata, 
déclare  que  t.  la  chiesa  di  S.  Nicolà  cb'era  nella  città  propria  di 
Costantinopoli  di  rito  latino  era  ufQziata  dalli  BR.  PP.  domoii- 
cani  (quali  oggidl  si  trovano  offiziando  la  chiesa  de!  SS.  aposlo- 
li  Petro  e  Paulo  in  questa  citti  di  Pera)  quantuaque  al  présente 
sia  moschea  di  Turcbl,  presa  dagli  istessi  per  forza.  » 

Selon  le  rapport  précité  du  P.  Glacinto,  vicaire  général 
et  préfet  apostolique  de  la  mission,  l'église  St-Nicolas  était 
sous  la  protection  de  la  France  ;  et  M.  de  Brèves,  ambassadeur  de 
Henri  IV,  aurait,  par  son  intervention,  empêché  qu'elle  ne  fût 
changée  en  mosquée,  un  peu  avant  1600.  M.  de  Brèves,  dans 
la  Relation  de  ses  voyages,  s'exprime  à  ce  sujet  comme  sait; 
c  Peu  de  temps  avant  mon  partement  de  ConstantinopIe,je  sau- 
vai aussi  une  église  nommée  Satnct-Nicolas,  desservie  par  des 
religieux  dominicains,  que  nous  nommons  en  France  Jacobins.  » 

On  conserve  k  St-Pierre  de  Galata,  un  crucifix  d'argent  doré, 
sur  le  pied  duquel  se  trouve  l'Inscription  suivante  :  <  hoc  -{- 

OPDS    FËCIT  FHATER    AOQUSTINUS    DE    COSTENA,   PRIOR   EQCXESI^   STI- 

NicoLAi  cossTANTDJOPOLiENSJS.  »  Le  titra  du  supérieur  de  cette 
église  fut  donc  pour  celle-ci,  comme  pour  St-Pierre  des  Pisans, 
St-Jean  des  hospitaliers  et  autres  églises,  celui  de  prieur,  à  une 
époque  non  déterminée,  d'ailleurs,  par  le  texte  de  l'inscription. 
Le  règne  de  snltan  Murad  IV  mit  fin  aux  derniers  vestiges  de 
la  Latinité  de  Constanttnople  :  des  deux  églises  qu'elle  avait 

■  cr.  8ur  les  cause!  préEUméei  de  cet  év^aernent  Part.  II  ci-apri*,  ch. 
S.  BenoÇt. 

Dans  un  rapport  de  P.  Timonl,  Sl-Nkolas  le  tiouvalt  prés  d»  palais  d« 
ConBtanlÎD,  dit  par  les  Turcs  Tekfoar  tarai}.  Ailleura  dans  lea  mêmes  mé- 
molKs  de  St.  Pierre  elle  est  dite  :  ■  S.  Nicolas  ad  palatium  Conttanttni.  » 


y,'G00g\il 


—  H8  — 

conservées  dans  la  ville  même,  St-Kicolas  fat  perdu  en  1639 
ou  1630,  c'est-à-dire  176  ou  177  ans  après  la  conquête  ot- 
tomane; Ste-Marîe,  on  l'a  vu,  subit  le  môme  sort  sous  le 
règne  du  même  prince,  six  ans  plus  tard  ',  Depuis  lors,  la  Lati- 
nité n'a  plus  possédé  d'établissement  dans  Constantinople,  sauf 
à  l'époque  de  la  giterre  d'Orient,  durant  laquelle  les  sœurs  de 
Saint-Vincent  de  Paul  établirent  une  ambulance,  puis  une 
école,  à  Gulkhanè,  fermées  toutes  deux  en  1860,  à  la  suite  des 
malheureux  événements  de  Syrie. 

L'image  de  S.  Nicolas,  patron  des  jeunes  garçons  et  des  na- 
vigateurs, se  trouvait  sur  une  des  pierres  historiques  de  l'en- 
ceinte fortifiée  de  Galata,  relevées  parM.  Delaunay,  et  dont  ce- 
lai-ci  a  bien  voulu  nous  donner  communication.  Cette  pierre, 
qui  est  de  l'an  1S49,  porte  l'image  du  Saint,  surmontée  de  cette 
inscription  :  c  S.  Nicolans.  >  Â  dextre,  on  voit  l'ècusson  de 
Gênes;  à  sénesfre,  celui  des  Grénois  vassaux  des  Paléologues  ; 
cette  pierre  anrait  été  érigée  sous  le  règne  de  Jean  Paléologue. 
Chacune  des  tours  de  l'enceinte  de  Galata,  ayant  un  nom  par- 
ticulier, celle  sur  laquelle  se  trouvait  cette  pierre  était  dite,  pro- 
bablement, la  Tour  Saint-Nicolas. 

De  tout  ce  qui  précède,  nous  croyons  donc  pouvoir  donner 
quant  &  la  possession  des  églises  latines  h  Constantinople  le  ré- 
sumé suivant  : 

En  ■867-882,  les  Latins  avaient  l'église  des  SPIs  Sergius  et 
Bacchus,  relevant  directement  de  la  juridiction  du  St.-Sicge. 

Les  communes  politiques  ne  semblent  pas  encore  formées. 

Les  premiers  Latins  qui  ont  une  église  nationale,  sont  les 
Amalfltains  qui  ont  l'église  de  Ste-Marie  de  Latina. 

L'autonomie  des  Amal&tains  ne  dure  pas  longtemps,  ils  sont 
remplacés  par  les  Vénitiens  qui,  outre  l'église  susdite,  reçoivent 
i'ôglise  St-Âkindin,  qui  devient  si  bien  leur  propriété  qu'on  ne  la 
nomme  le  plus  souvent  qnel'égliseS.Marc.Cela  dure  jusqu'ùlaûn. 

Les  Anglais  y  eurent  ensuite  une  église  sons  le  vocabble  de 
S.  Nicolas  et  S.  Augustin  de  Cantorbéry,  la  dernière  appellation 
s'effaçant  n'a  plus  laissé  que  S.  Nicolas,  que  nous  retrouvons 
jusqu'à  l'an  1636. 


I  On  verra  plus  loin  §  St-Benott  les  plaintes  formulées  par  Louis  XIII  contr* 
la  situation  Taite  à  cette  époque  A  la  religion  en  Orient. 


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Les  Varanges  avaient  une  église  Panaiia  Varangiotica,  mais 
il  est  difHcile  de  l'identiâer  avec  aucune  de  celles  que  noua 


Les  Pis&ns  et  plus  tard  les  Florentins  ont  eu  une  église  de 
la  Très  Ste  Vierge,  Ste  Marie  de  Embolo,  et  surtout  leur  église 
nationale  S.  Pierre,  ou  S,  Pierre  Claviger. 

Les  Génois  avaient  anasi  leur  église,  dans  leur  concession 
il  semble  que  c'était  une  église  de  S.  Georges. 

Quant  à  l'église  de  Ste  Marie  de  Constantinople,  dont  nous 
avons  parlé,  à  quelle  nation  a-t-eUe  appartenu,  et  quel  était 
son  vocable?  Il  semble  qu'elle  s'estappelée  N.  D.  délie  Grazie  et, 
que  plus  tard  elle  a  appartenu  aux  Dominicains  et  est  devenue 
N.-D.  du  Rosaire. 

A.  ces  églises  nationales,  il  faut  ajouter  celles  que  les  Ordres 
religieux,  Dominicains  et  Franciscains,  possédaient  k  Gonstan- 
tinoplâ  pendant  la  restauration  byzantine. 

L'église  des  Frères  Voyageurs  pour  le  Christ,  dont  nous 
avons  vu  le  sort,  et  qui  était  commune  aux  deux  Ordres  :  en- 
suite celles  dont  nous  venons  de  parler,  de  N.-D.  du  Rosaire  et 
de  St-Nicolas  que  les  Dominicains  avaient  la  charge  de  desservir. 
Ces  deux  dernières  leur  furent  conservées  jusque  vers  1636. 

Les  Franciscains  en  avaient  deux,  celle  de  S.-Antoine  qui  fut 
bâtie  pour  les  religieux  Observants,  comme  nous  l'avons  vu,  et 
une  autre  dont  nous  ignorons  la  situation  exacte,  et  qui  fut 
peu  de  temps  avant  la  conquête  Turque,  attribuée  aussi  aux 
Observants. 


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DEUXIÈME  PARTIE 


LA     LATINITÉ     DE    GALATA-P£BA. 


Dans  la  première  partie  de  ce  travail,  noas  avons  vu  l'his- 
toire de  la  Latinité  dans  la  ville  même  de  Constantinople  :  nous 
pourrions  dire  avec  plus  de  précision,  sur  cette  étroite  bande 
de  terre  qui  s'étend  entre  les  murailles  de  la  ville  et  la  rive 
droite  de  la  Corne  d'or;  car  jamais,  sauf  pendant  la  conquête 
latine,  elle  ne  pénétra  sérieusement  dans  l'intérieur  même  de 
la  cité.  Les  documents  nous  manquent  poar  éclaircir  un  grand 
nombre  de  points,  mais  nous  avons  essayé  de  mettre  en  relief 
ceux  qu'il  a  été  possible  de  réunir. 

Nous  allons  maintenant  voir  la  Latinité  à  l'œuvre  sur  un 
terrain  qui  lui  appartient  presque  absolument,  nous  voulons 
dire  dans  ce  fauboui^  qui  s'étage,  de  l'autre  côté  de  la  Corne 
d'or,  sur  les  collines  qui  font  face  h  Constantinople  et  domi- 
nent l'entrée  du  Bosphore.  Ses  développements  furent  singu- 
lièrement gênés,  d'abord  par  les  Grecs,  ensuite  par  les  Turcs, 
sans  parler  des  compétitions  qui  existèrent  toujours  entre  les 
diverses  nations,  toujours  rivales,  et  souvent  ennemies,  et 
prêtes  à  se  faire  la  guerre  ou  à  se  trahir  réciproquement. 


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—  123  — 

Neaf  chapitres  nous  montreront  aaccessivement  :  la  topo- 
graphie historique  de  Galata-Pèra,  la  c  Magniâca  Comonità 
di  Péra,  »  les  églises  des  Religieux  suivant  l'ordre  chronolo- 
gique de  leur  fondation,  les  églises  aujourd'hui  disparaes, 
et  enfin  la  hiérarchie  ecclésiastique  telle  que  l'ont  faite  les 
siècles. 


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CHAPITRE  I. 


TOPOQRAPHIB  HISTORIQUE   DE  OALATA-PÉHA. 


Noos  avons  va  plus  baat  les  motifs  qui  détermiaèrent  Michel 
Paléologue  à  reléguer  la  colonie  génoise  d'abord  à  Héraclée  de 
Thrace,  puis  dans  la  XIII"  Région,  celle  de  Fera,  sur  le  rocher 
de  Galata;  mais  si  cette  concession  fut  en  quelque  sorte  noa- 
velle,  11  n'en  résulte  pas  cependant  d'une  manière  absolue,  que 
les  Latins  qui  avaient  déjà  un  palais  dans  Péra,  au  temps  de  la 
domination  franque,  et  qui  défendirent  cette  ville  contre  Paléo- 
logue,  n'y  eussent  rien  conservé  de  leurs  anciennes  possessions. 
Pachymères  rapporte  qu'avant  de  faire  aux  Génois  cette  con- 
cession, l'Empereur  ordonna  de  raser  au  niveau  du  sol,  les 
fortiâcations  et  les  ouvrages  de  défense  élevés  à  Qalata,  tant 
vers  l'intérieur,  du  cdté  du  marché,  voisin  de  la  mer,  qu'en 
dehors  du  bourg;  puis  il  prescrivit  aux  Génois  d'habiter  dans 
une  série  de  maisons.étendues  en  longueur  le  plus  possible  ' .  Mais 
les  mesures  que  l'Empereur  avait  cru  devoir  prendre  pour  as- 
surer sa  sécurité,  ne  tardèrent  pas  à  lui  laisser  entrevoir  des 
résultats  tout  différents  de  celui  qu'il  avait  recherché.  En  effet 
la  République  génoise,  par  cette  concession,  parvint  à  la  réali- 
sation de  ses  visées  politiques  :  sa  prépondérance  dans  les  con- 
trées du  Levant  fut  assurée,  du  moins  pour  un  certain  temps, 
et  Galata  devint,  pour  ses  possessions  d'outre-mer,  la  succursale 
de  la  métropole-.  Gènes,  il  est  vrai, procéda  avec  autant  d'habi- 

1  Sauli.  Tom.  I.  Î63.  —  '  Id.  II,  15. 


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—  i;34  - 

leté  qae  de  prudence,  tantôt  victorieuse,  tantôt  vaincue  ;  mais 
sachant  toujours  profiter  des  circonstances,  ellefit  deGalataune 
place  forte  qui  pins  d'une  fois  se  déclara  en  état  d'hostilité  avec 
les  empereurs,  et  traita  avec  eux  de  puissance  à  puissance. 
Noas  allons  assister  au  développement  progressif  de  cette  cité. 

La  dénomination  de  Oalata  attribuée  au  rocher  s'élevant  vis- 
à-vis  de  Byzance,  a  donné  lieu  à  de  nombreuses  conjectures,  sur 
lesquelles  nous  nous  abstiendrons  de  nous  étendre,  la  lumière 
ne  s'étant  pas  encore  faite  sur  ce  point  :  nons  nous  bornerons  k 
consigner  ici  les  sentiments  des  auteurs  les  plus  autorisés, 
laissant  à  la  critique  le  soin  de  se  prononcer  en  dernier  ressort. 

D'après  Denys  de  Byzance,  cet  emplacement  fut  dit  à  cer- 
taine époque,  Sykai,  ou  Sykaena,  à  cause  des  nombreux  figuiers 
qui  s'y  trouvaient'. 

Plus  tard,  à  l'époque  de  Etienne  de  Byzance,  cet  endroit 
prit  le  nom  de  Jncundiana,  ou  Justiniana,  parce  que  Justtnieo 
y  avait  élevé  plusieurs  édifices.  Puis,  à  une  date  que  nous  ne 
pouvons  déterminer,  ce  dernier  nom  fit  place  à  celui  de  Galata. 
Dans  l'opinion  des  Constantinopolitains,  rapporte  Pierre  Grylles, 
cette  appellation  viendrait  de  ce  qa'on  tirait  on  vendait  du  lait 
(gala),  à  cet  endroit^. 

Au  reste,  une  localité  de  l'Épire  porte  aussi  le  nom  de  Galata. 
On  le  trouve  appliqué  à  un  village  près  de  Varna,  et  on  pour- 
rait peut-être  rattacher  &  cette  nomenclature  le  nom  de  Galatz, 
ville  du  bas  Danube. 

D'après  Tzetzès,  poète  et  écrivain  connu,  né  à  Constantinople 
en  1120,  mort  en  1180,  cité  par  Pierre  O-ylles,  les  Gaulois,  dits 
Galates  par  les  Grecs,  ayant,  sous  la  conduite  de  Brennus,  traversé 
le  Bosphore  en  cet  endroit,  lui  laissèrent  leur  nom.  Ce  point  qui 
était  appelé  Fera,  (en  face  ou  vis-à-vis)  ou  plutôt  Pérama,  Cle 
passage),  fut  nommé  finalement,  suppose  notre  auteur,  Galata, 
en  souvenir  de  la  grande  invasion  celtique  ^.  Le  patriarche 
Gonstantius  rapporte  cette  opinion  mais  ne  semble  pas  lui  être 
favorable. 

'  Pierre  GyUea,  de  Topografla.  317  t  32Ï,  40S. 

'  Etienne  de  Byzance  dans  son  Dictionnaire  d'hitloire  et  de  géogro^hU. 
Justioîen  occupa  le  trOne  525-565.  ' 

3  Pierre Oylles,  33J. 


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—  125  — 

L'invasion  celte,  conduite  par  Brennus,  sortit  en  378,  avant 
notre  ère,  des  pays  du  haut  Danube,  et  après  être  descendue 
jusqu'il  Delphes,  d'où  elle  fut  repoassée  elle  se  divisa:  une 
partie  rentra  dans  la  Gaule,  à  l'ouest  de  Lyon,  et  une  autre 
colonne  s'étant  dirigée  vers  la  Thrace,  arriva  jusqu'aux  portes 
de  Byzance  ;  pais  ayanttraversé  le  détroit  passa  en  Asie  Mineure. 
Les  trois  principales  tribus  dont  elle  se  composait,  les  Trocmes, 
les  Tolistoboiens,  et  les  Tectosages,  s'établirent  dans  cette 
partie  de  l'Asie  Mineure  qui  forme  aujourd'hui  la  Province 
d'Angora,  et  qui  d'après  eux  fut  nommée  Oalatie.  Les  Gaulois 
d'Asie  Mineure  sont  désignas  exclusivement  sous  le  nom  de 
Galates,  Galatai,  Keltai,  Kelti,  chez  les  écrivains  grecs,  etOalli 
nom  emprunté  aux  Romains.  St  Paul  a  écrit,  d'Éphèse,  une  do 
ses  épitres  ad  Galntas. 

Léon  le  grammairien  qui  écrivait  son  Histoire  des  empereurs 
d'Orient  vers  1013,  mentionne  le  Fort  de  Galata.  Le  Livre  de 
la  conquête  de  la  Principauté  de  Morée  '  dit  que  «  Mikhailli  Pa- 
leologo  donna  aux  Genevois  le  lieu  de  Galata  »...  adonc  les 
Genevois  reçurent  le  lieu  de  Galatas  et  habitèrent  illec.  > 

Les  divers  auteurs  des  mémoires  sur  les  croisades,  Ville- 
hardouin  entre  autres,  écrivent  Galathas,  Galatas,  Galatat  etc. 

Le  chrysobulle  de  1303,  mentionne  lalocalité  s  apudGalatim  » 
et  le  même  diplôme,  comme  celui  de  l'année  suivante,  cite  le 
f  Castrum  Galathai;  >  le  privilège  de  1353  décrit  la  donation 
faite  par  l'empereur  c  communi  Janue  de  Oallata  ou  Ga- 
lathe  > . 

Enfin  le  voyageur  Ibn  Batouta,  qui  visita  Constantinople  au 
xii'  siècle,  donne  la  description  de  Ghnlatha  etc.  D'autre  part 
le  Juif  Benjamin  de  Tudèle,  qui  visita  Constantinople  à  peu  près 
vers  le  même  temps,  nous  dit  :  •  il  n'y  a  point  de  juifs  dans 
la  ville  de  Constantinople  ;  le  lieu  où  ils  habîtetit  s'appelle 
Péra.  » 

Il  semble  que  pendant  qne  le  nom  de  Galata  fut  conservé 
par  les  Byzantins,  les  colons  Génois  au  contraire  le  délaissèrent 
pour  celui  de  Péyra,  Peyre,  vis-à-vis,  en  face  de  Constantinople, 
vocable  qui  indique  d'une  façon  générale  les  collines  sises  en 
face  de  Constantinople,  de  l'autre  côté  du  port.  Sous  les  Otto- 

'  Bucbon  édit.  Paris  1845,  I,  £6. 


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—  126  — 

mans,  la  dénomination  de  (ïalata  prévalut  et  s'étendit  jusqu'à 
l'emplacement  de  l'ancienne  caserne  des  Pupilles  des  Janis- 
saires, devenue  plus  tard  le  Lycée  de  Galata-Séraï. 

Ce  n'est  qu'aux  deraiers  jours  de  son  existence  que  la  colonie 
génoise  fit  reparaître,  dans  l'inscription  murale  de  1446,  le  nom 
de  Galata  «  svburbani,  Qalatai  cives  »/  mais  on  le  retrouve, 
et  cette  fois  d'une  manière  définitive,  dans  le  texte  grec  de  la 
capitulation  accordée  par  le  conquérant  ottoman  à  la  colonie 
génoise  «  les  archontes  catholiques  de  Qalata  ont  envoyé  à 
la  Porte  de  notre  Seigneurie  etc'.  i 

Dans  la  mélodie  élégîaque  sur  la  prise  de  Coostantinople, 
par  un  prêtre  arménien,  on  lit:  Dans  le  bourg  de  Galata,sou- 
mis  aitœPrancs,  les  principaux  s'étaient  enfuis  par  mer-. 

Malgré  cela,  les  procès-verbaux  de  Ste-Anne.  débris  de  la 
colonie  génoise,  n'en  continuent  pas  moins  l'emploi  du  terme  de 
Péra.  Galata  comme  désignation  de  l'ancienne  ville,  n'apparait 
dans  les  actes  que  le  II  avril  1657,  deux  siècles  après  la  con- 
quête, alors  que  la  distinction  entre  les  deux  localités,  Galata  et 
Péra,  commençait  à  s'introduire  dans  les  mœurs  locales,  le 
premier  désignant  l'ancienne  ville,  le  second  la  nouvelle.  Vers 
le  même  temps  les  archives  de  St-Pierre,  en  plusieurs  docu- 
ments, parlent  indifféremment  de  Galata  et  de  Péra,  comme  de 
la  même  localité.  Et  un  auteur  du  temps  nous  dit  :  c  Galata 
communamente  chiamata  Pera.  >  Un  autre  «  Galata,  sîve 
Péra.  » 

Quant  au  nom  Turc  iBeï-Oglou»,  si  l'on  en  croit  une  tradi- 
tion populaire,  il  désignerait  le  quartier  musulman,  compris  entre 
la  rue  Asraaii-mesdjid  et  le  'Tekié  ;  en  un  mot  l'emplacement 
occupé  actuellement  par  la  chancellerie  russe,  et  qui  avait  été  as- 
signé parSultanMahmoudIau  troisième  fils  du  dernier  empereur 
de  Trèbizonde,  qui  aurait  embrassé  l'islamisme.  (Cf.  Hammer 
II,  81).  Le  Tékié  des  derviches  mèvlèvi  fut  bâti  sous  Sélim  I,  et 
la  mosquée  d'Âsmali-Mesdjid  sous  Baiezid  II.  Un  fils  naturel  du 
Doge  Grilli  qui  sous  sultan  Suleiman,  fut  l'agent  de  la  Porte 
dans  ses  rapports  avec  les  puissances,  estdésigné  par  Féridoun, 
dans  le  c  Journal  de  la  campagne  de  Sultan  Suleiman  en 

■  Hammer,  II,  525. 
>  Dethler.  p.  241. 


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—  127  — 

Hongrie,  >  comme  sait,  <  le  Bei-Oglou  franc,  gui  habite 
Galata.  » 

De  tout  ce  qai  précède,  il  résulte  donc  que  la  localité  qui  nous 
occupe,  fat  désignée  en  même  temps,  pour  ainsi  dire,  par  deux 
dénominations  ;  l'une  officielle,  c  Galata,  >  employée  dans  les 
actes  publics  de  l'empire,  ou  dans  ceux  qui  lai  étaient  adressés, 
l'autre  populaire  et  intérieure  :  t.  Péra  »  usitée  parmi  les  étrangers, 
en  vue  peut-être  de  constater  leur  rupture  complète  avec  le 
passé  et  leur  indépendance.  Il  en  fut  de  même  après  la  conquête 
ottomane,  quand  la  population  galatiote  se  transporta  sur  l'em- 
■  placement  de  la  nouvelle  ville,  Péra  actuel,  celle-ci,  comme 
l'ancienne  reçut  deux  dénominations  ;  l'une  officielle  «  Bei- 
Oglou  »  l'autre  populaire,  <  Péra,  »  adoptée  par  les  étrangers, 
et  dans  les  docaments,  écrits  en  langue  étrangère,  de  la  muni- 
cipalité de  cette  ville. 

Quoiqu'il  en  soit  de  ces  controverses  étymologiques  et  topo- 
graphiques, lorsque  les  Gténois  furent  établis  à  Galata,  les  Vé- 
nitiens ne  purent  voir  leurs  rivaux  s'installer  sur  leurs  ruines 
sans  un  sentiment  de  vive  jalousie  ;  aussi  ayant  résolu  d'en  tirer 
vengeance,  ils  envoyèrent  une  flotte,  commandée  par  Morosini, 
an  début  du  règne  d'Andronic  JI,  mettre  le  siège  devant  Galata, 
qu'ils  réduisirent  en  cendres.  Impuissants  dans  la  résistance, 
les  Génois,  avec  tout  ce  qu'ils  possédaient,  s'étaient  réfugiés 
dans  la  ville  impériale  '.  Puis  la  paix  intervenue  entre  les  belli- 
gérants, ayant  rendu  un  peu  de  calme  à  la  colonie,  elle  en  pro- 
fita ponr  réparer  les  dommages  soufferts';  et,  pour  se  garantir 
contre  le  retour  d'une  nouvelle  attaque,  elle  entoura  ses  ha- 
bitations d'un  fossé,  qu'elle  étendit  même  au  delà  du  terrain 
précédemment  occapé  ^.  En  outre,  en  vue  sans  doute  de  par- 
venir à  la  même  fin,  certaines  négociations  étant  entamées  avec 
Temperear,  elle  resta  neutre  pendant  une  nouvelle  expédition 
vénitienne  qui,  sous  les  ordres  de  Giustiniani,  vint  devant  la 
Capitale,  et  imposa  à  Andronic  de  fort  dures  conditions.  Ces 
négociations  avaient  pour  bat  d'obtenir  de  l'empereur  l'autori- 


'  Du  Cange  Conêtantinopoli»  ehriitiana.  1, 60;  atti  detla  Société  ligure  eto. 
II,  355. 

•  SbhU,  m,  la. 

*  CpUê  Chriêt.  ib. 


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—  128  — 

sation  de  s'étendre  dans  Galata  et  de  s'y  fortifier.  Elles  abou- 
tirent en  partie  ;  car  peu  après  l'expédition  de  Giustiniani,  c'est- 
à-dire  en  mai  1303,  les  limites  du  bourg  génois  furent  déterminées 
d'une  manière  précise,  comme  l'indique  le  chrysobulle  dont 
nous  traduisons,  en  partie,  le  texte  latin  '. 

1303.  «...  D'ordre  de  notre  très  puissant  et  saint  empereur,  la 
localité  concédée  et  donnée,  à  Galata,  à  l'illustre  communauté 
génoise  est  délimitée  comme  suit  :  La  ligne  frontière  commence 
de  la  marine,  près  de  l'échelle  dite  de  l'ancien  arsenal,  distante 
de  celle-ci  de  27  pas,  de  7  palmes  l'un,  elle  monte  ensuite  vers 
le  nord,  laissant  à  gauche,  à  3  pas  de  distance,  les  limites  de 
St-Jean,  prophète  et  précurseur;  puis  entre  dans  la  vigne  de 
Perdlcarios,  dont  elle  prend  4  pas,  arrive  jusqu'au  fossé  de  cette 
vigne,  ce  qui  fait,  en  tout,  depuis  la  marine  jusqu'au  dit 
fossé,  90  pas,  de  7  palmes  l'un. 

(  Delà  elle  va  directement,  vers  l'est,  à  travers  cette  vigne, 
dont  elle  prend  4  pas,  et  arrive,  en  ligne  droite,  à  la  vigne  du 
monastère  de  Lipsios,  laissant  à  gauche,  à  34  pas  de  là,  l'église 
du  saint  et  grand  martyr  Théodnie.  Elle  passe  ensuite  à  travers 
cette  vigne,  à  la  distance  de  54  pas  du  mur  séparant  la  vigne 
dite  Macropita.  Elle  passe  ensuite  par  le  puits  de  l'église  de 
Ste-Iréne,  ancien  cimetiôre,  {lieu  de  sépulture)  des  Génois-  ; 
puis  à  travers  la  vigne  du  logothète  Stratioticos,  autrefois 
Kinami,  à  la  distance  de  3  pas  j  elle  se  rapproche  encore  de  ce 
mur,  et  va  joindre  celui  d'une  autre  vigne  appartenant  au  même 
personnage,  laquelle  se  trouve  à  l'oppostte,  en  face  la  porte  de 
l'église  du  grand  et  saint  martyr,  St  George,  éloignée  de  là  de 
28  pas.  Enfin  cette  partie  depuis  la  vigne  de  Perdicarios,  jus- 
qu'au mur  de  la  seconde  vigne  de  logothète  Stratioticos,  autre- 
fois Kinami,  comprend  une  étendue  de  217pas^. 

€  Là  elle  descend  vers  le  sud,  laissant  à  gauche,  à  une  dis- 
tance de  10  pas,  l'église  des  SS.  Anargyres. 

<  Puis  elle  se  tourne  un  peu  vers  l'est,  laissant  cette  même 
église  à  gauche,  pour  se  diriger  à  la  distance  de  14  pas,  vers 
l'hospice  du  Loghothète  Stratioticos. 

i  Sauli.  lof.  lau'I.  1, 132.  Document"  IX. 

»  Voyez  c[-après  Ste-Irêne. 

s  Cette  ligne  allait  probablement  jusqu'à  la  ruelle  Hadji-Ali,  d'Oii  elle 
allait  rejoindra  la  porte  Wolvoda,  à  Jùksek  Qalilirim. 


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—  129  — 

<  Ensuite  elle  revient  vers  le  sud,  laissant  à  gauche,  à  la  dis- 
tance de  6  pas,  l'église  de  St-Nicolas  ; 

t  Elie  reprend,  de  nouveau,  dans  une  distance  de  30  pas  vers 
l'est,  laissant  à  gauche  la  même  église,  dont  elle  est  éloignée  de 
8  pas; 

t  Elle  redescend  ensuite  vers  le  sud,  et  va,  en  droite  ligne 
à  la  mer,  laissant  Mitre  elle  et  le  mur  du  château  de  Gnlata  une 
distance  de  75  pas.  11  y  a  aussi  au  mur  de  la  vigne  du  logho- 
thète  Stratioticos,  autrefois  Kinami,  jusqu'à  la  mariae,  75  pas. 
(  De  là  elle  tourne  un  peu  à  l'ouest,  vers  la  marine,  pour 
aboutir  au  point  où  ellea  commencé;  cette  partie  est  339pas. 
(  Telles  sont  les  limites  du  terrain  donné  et  concédé  comme 
dessus,  à  Galata,  par  notre  puissant  et  saint  empereur,  à  l'illustre 
commune  de  Gènes. 

<  Un  espace  de  60  coudées  (Cubitum)  devra  rester  libre  et 
sans  habitations,  sur  toute  l'étendue  de  ces  confins,  de  même 
que  le  long  des  hospices,  où  résident  des  prêtres  desservant  les 
églises  précitées;  grecs  ou  autres  n'auront  point  la  faculté  d'é- 
lever d'habitations  sur  cet  espace, 

«  De  même  l'espace  compris  entre  la  mer  et  cette  limite  jus- 
qu'au château  de  Oulata,  sera  libre  de  toute  habitation,  dans 
toute  la  largeur  dudit  château,  comme  aussi  dans  l'espace  pré- 
cité, de  60  coudées.  Ainsi  l'a  prescrit  et  ordonné  notre  paissant 
et  saint  empereur.  Fait  le  1"  mai  6811  '  (1303).  » 

A  la  suite  de  cet  édit,  les  Galatiotes  élargirent  leur  fossé, 
dans  lequel  ils  pouvaient  détourner  l'eau  de  la  mer  ;  ils  posèrent 
des  balistes,  avec  lesquelles  ils  pouvaient  lancer  des  pierres  an 
loin,  et  ârent  de  leurs  habitations  autant  de  petites  poternes, 
d'où  ils  pouvaient  combattre  en  sûreté.  La  ville  était  dès  lors 
constituée  '. 

Ceci  acquis  et  poursuivant  toujours  leur  but,  c'est-à-dire 
V agrandissement  de  leur  cité,  et  l'autorisation  de  s'y  forti- 
fier, les  Génois  obtinrent,  l'année  suivante  1304,  du  même  em- 
pereur, Andronic  le  vieux,  un  nouveau  chrysobulle,  confirmatif 
du  précédent,  et  consacrant  l'existence  du  fossé  d'enceinte. 
Cet  acte  autorise  en  outre  les  Génois,  à  bâtir  des  maisons  et 

'  Voir  le  plan  ci-contre  de  Galata. 
*  Conttanlinopolit  ChritCiana  HI,  3. 


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—  130  — 

autres  édifices  offrant  solidité  et  sécnrité,  et  à  construire  aussi 
des  bains,  des  marchés,  comme  aussi  des  églises,  desservies  se- 
lon le  rite  latin  ;  il  spécifie  de  plus  le  maïutien,  sous  la  juri- 
diction du  patriarche,  des  trois  églises  grecques  du  même 
lieu,  qui  seront  desservies  par  des  prêtres  grecs,  y  célébrant 
l'office  selon  leur  rite. 

Voici  la  version  française  du  document  de  1304  '  : 

1304.  «...  1"  Les  Génois  auront  dans  Galata,  la  localité  qu'ils 
ont  désiré  être  fixée  et  déterminée,  dans  une  forme  quadran- 
gulatre,  et  qui  est  entourée  par  le  fossé  creusé  tout  fiutour. 

«  Nous  voulons  et  ordonnons  que,  tout  autour  de  cette  loca- 
lité, il  soit  mesuré  un  espace  de  terrain  de  60  coudées,  qui  res- 
tera entièrement  libre  de  toute  habitation  quelconque,  comme 
aussi  autour  du  mtcr  du  château  de  Galata,  dans  toute  sa 
longueur,  jusqu'aux  confins  des  Génois  ;  de  même  il  y  aura  un 
espace  entièrement  libre  d'habitations,  entre  le  fossé  et  la  mer, 
et  il  ne  sera  permis  à  personne  d'y  élever  aucune  habitation 
quelconque.  Les  Génois  auront  faculté  et  pouvoir  défaire  à  leur 
gré,  des  maisons,  constructions  et  autres  édifices  solides,  ofi'rant 
toute  sécurité,  à  l'exception  d'un  mur  de  forteresse,  (d'enceinte), 
que  nous  ne  voulons  pas  permettre  audit  lieu. 

(  Item,  les  Génois  jouiront  en  toute  liberté  et  sans  nul  em- 
pêchement, de  ce  qu'ils  ont  et  auront  audit  lieu...  Loge,  bains, 
leurs  propres  églises,  un  prêtre  ou  des  prêtres  génois  ou 
latins... 

»  Item,  comme  il  y  a,  danscelieu,iro^j  églises  grecques,  sur 
lesquelles  S.S.  le  patriarche  grec  a  toute  juridiction,  les  prêtres 
grecs  devront  avoir  ces  églises,  y  chanter  et  célébrer  selon  qu'il 
sera  ordonné  par  M.  S.  le  Très  saint  patriarche  général.-...  » 


1  Cf.  Sauli,  1,  132,  n,  211. 

*  Quelles  étaient  ces  églises!  Il  n'existe  pas  actuellement  d'église  grecque 
dans  l'ancien  Galata  as  1303  et  1304.  et  l'on  ne  saurait,  je  penae,  les  cher- 
cher parmi  les  anciennes  églises  latines.  Pour  St-François,  on  trouvera  ci- 
aprés  une  inscription  de  1304,  pour  St-Paul  une  autre  de  I32S.  quant  A 
St -Georges  cette  église  servait  de  aépullure  aux  Génois  avant  1303.  Les  églises 
grecques  de  Galata,  au  nombre  de  trois  d'abord,  puis  de  quatre  ensuite,  n'ex- 
istaient que  dans  l'enceinte  de  Marufo  Balthasar  ;  ces  églises  sont  St-Spiri- 
dion,  cédée  aux  Chiotes.  qui  en  ont  la  pleine  et  entière  administration,  dite 
aujourd'hui  St-Jcan  ;  St-Nicolas  ;  l'église  du  Christ,  et  enQn  Tëglise  de  la 
Vierge  de  Ca/fa.  Les  trois  piemiéres  seraient  celles  dont  il  est  question  ici,  la 


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—  131  — 

Cette  nouvelle  concession  ne  répondait  pourtant  pas  encore 
à  l'ambition  des  Galatiotes  ;  toutefois  s'appuyant  sur  le  chryso- 
bulle impérial  ils  étendirentles  limites  de  leur  ville,  la  munirent 
de  somptueux  et  solides  édifices,  l'entourèrent  d'un  fossé,  et 
contrairement  aux  stipulations  expresses  du  clirysobulle,  ils 
élevèrent  des  murailles  et  se  fortifièrent  d'une  façon  sé- 
rieuse t  ;  puis  le  premier  magistrat  qui,  selon  l'usage  du  temps, 
était  AiiAbbate  âel  popolo,  se  présenta  devant  l'empereur  et 
lui  notifia  que  lui-même  était  dans  la  nécessité  de  faire  alliance 
avec  les  Catalans,  fortifiés  eux-mêmes  dans  Gallipoli-. 

D'autre  part  la  République,  sous  Andronic  III,  le  Jeune,  avait 
enlevé  à  l'empire  les  lies  de  Chio  et  de  Mételin  ;  aussi,  enfiée  de 
ce  succès,  la  colonie  galatiote,  qui  d'ailleurs  s'était  beaucoup 
augmentée  par  suite  de  l'extension  de  son  commerce,  fit  creuser 
it,  une  plus  grande  profondeur  le  fossé  entourant  la  ville,  et, 
sous  prétexte  d'habitations  particulières,  elle  fit  élever  peu  h 
peu  de  grosses  tours,  pouvant  servir  à  la  défense  ;  enfin  par  ses 
intelligences  à  la  cour,  {Imperit  procuratoribus  larf/llime 
comiptis),  le  gouvernement  colonial  obtint  la  pleine  faculté 
d'obtenir  les  Vignes  des  alentours,  en  dehors  des  limites  fixées 
par  le  traité,  comme  aussi  de  bâtir  sur  les  hauteurs  voisines 
{in  vicino  colle),  de  splendîdes  habitations  qu'on  eut  soin  de 
fortifier  pour  le  cas  d'hostilité  avec  Byzance. 

Mais  l'empereur  ayant  à  cœur  de  se  venger  de  l'affaire  de  Mé- 
telin, (qui  avait  été  occupé  par  la  flotte  génoise)  et  d'a'53urer  la 
sécurité  de  sa  capitale  contre  ses  ambitieux  voisins,  avant  de 
partir  pour  l'Archipel,  parcourut  les  hauteurs  de  Galata,  détruisit 
les  édifices,  (Casamentf),  récemment  construits,  enleva  les  ap- 
provisionnements de  guerre  qui  s'y  trouvaient  accumulés,  et 

quatrième  paraissant,  d'après  sa  dénomination  ir.Sme,  devoir  Être  poht  prieure 
à  la  conquête  musulmane.  Certains  supposent  toutefois  qu'il  en  fut  de  Galata 
comme  de  Coustautinople  où  les  églises  latiues  étaient  autrefois  grecques: 
les  inoriplions  que  nous  venons  de  citer  ne  permettent  pas  d'adojjter  cetto 
conjecture  ;  le  patriarche  grec  Tonstantius  doute  m6me  que  St-l(enolt  fut 
tlans  le  principe  une  église  orthodoxe.  Quoi  qu'il  en  soit,  il  me  i>arail  ),lus 
naturel  de  penser  que  les  G<''nois,  devenus  plus  indépendants,  n;l<^guèrent 
les  trois  églixes  grecques  ta  où  elles  sont  aujourd'hui,  eu  leur  conservant  leur 
ancien  vocable.  M.  Paspati  me  dit  que  jusqu'en  1804,  il  n'y  avait  pas  d'éjjlise 
grecque  dans  Péra.  et  que  celle  de  la  Vierge  de  Caffa,  à  Galata,  était  la 
paroisse  orthodoxe  de  Péra. 
>  SauU,  1, 159,  —  *  Id.  aoâ. 


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—  182  — 

sans  vouloir  enteeprendre  le  siège  de  la  ville  même,  il  en  fit  le 
blocus  rigoureux,  de  telle  ftçon  qu'au  bout  de  six  jours,  le 
peuple  contraignit  ses  magistrats  de  solliciter  la  paix.  L'empe- 
reur la  leur  accorda,  à  la  condition  de  se  maintenir  dorénavant 
dans  la  limite  des  traités  < . 

A  la  mort  d'Andronic  III,  arrivée  le  15  juin  1341,  les  Gala- 
tiotes  se  sentant  assez  forts  pour  intervenir  entre  les  compéti- 
teurs à  l'empire,  et  pour  peser  aussi  peut-être,  par  l'effet  de  leur 
décision,  sur  le  rétablissement  de  l'ordre,  résolurent,  avant  de 
se  prononcer,  de  procéder  à  une  enquête  ;  ils  chargèrent  de  cette 
mission  deux  religieux,  dont  l'un,  le  Père  c  Enrico,  {Sabau- 
dus),  supérieur  du  couvent  des  Observantins  de  Galata  »  avait 
en  outre  des  liens  de  parenté  avec  l'impératrice  Anne,  veuve 
d'Andronic  m.  S'étant  rendus  au  camp,  ces  religieux  décou- 
vrirent les  manœuvres  artificieuses  d'Apocampe,  l'adversaire  du 
Régent  Cantacuzëne,  et  ils  instruisirent  l'impératrice  du  résultat 
de  leur  mission.  Apocampe  voyant  son  crédit  eh  déclin,  s'aban- 
donna à  de  tels  excès  que  bon  nombre  de  Constantinopolitains 
durent  quitter  la  capitale  et  chercher  un  refuge  dans  (lalata-. 
A  la  suite  de  ces  événements  Cantacuzène  fut  revêtu  de  la  di- 
gnité impériale  ;  mais  ce  prince  ayant  voulu  reconstituer  la  ma- 
rine grecque  pour  lutter  avec  quelque  avantage  contre  ses  enne- 
mis, vit  bientôt  ses  efforts  neutralisés  par  les  Génois,  jaloux  de 
conserver  leur  supériorité  navale.  Ils  lui  créèrent  d'incessantes 
difficultés  et  sollicitèrent  de  nouveau  l'autorisation  d'occuper 
les  collines  de  Galata.  Pénétrant  leurs  desseins,  Cantacuzène  ne  " 
manquait  pas  de  leur  opposer  des  refus,  mais  pendant  ce  temps 
les  Galatiotes  ne  cessaient  pas  d'amasser  les  matériaux  destinés 
à  commencer  les  travaux,  dès  que  l'autorisation  attendue  leur 
serait  accordée.  Aussi  l'empereur,  après  une  expédition  enThrace 
contre  les  Turcs,  ayant  dû  différer  son  retour  dans  sa  capitale,  les 
G-alatiotes  crurent  l'occasion  favorable  :  ils  armèrent  leurs  navires, 
et  interdirent  tout  trafic  entre  Constantinople  et  le  dehors.  De  leur 
côté  les  Grecs  murèrent  les  portes  de  leur  ville,  et  à  leur  tour  rom- 
pirent toute  communication  avec  Galata.  Cette  ville  habituée  à 
vivre  de  ses  relations  avec  la  capitale,  se  hâfa  d'envoyer  des  dé- 
putés à  l'impératrice  pour  solliciter  son  pardon,  tout  en  lui  de- 

1  Sauli.  I.  252.  —  «  Id.  ib.  275. 


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—  133  — 

mandant  de  s'abstenir  de  réparer  et  de  reconstituer  sa  flotte. 
L'impératrice  en  ayant  référé  à  l'empereur,  celui-ci  ordonna  de 
donner  l'assaut  &  Galata.  Instruits  de  cette  résolution,  les  Giala- 
tiotes  se  préparèrent  à  la  résistance.  Tout  d'abord  ils  mirent  le 
feu  à  des  galères  impériales  et  à  quelques  autres  navires  ancrés 
dans  le  port,  et  empêchèrent  tout  navire  chargé  d'y  entrer.  En 
même  temps  la  population  de  tout  flge,  de  tout  sexe  et  de  toute 
condition,  employée  auztravauz  des  fortifications,  creusait  les 
fossés,  murait  les  bastions  et  travaillait  partout  avec  la  plus 
grande  activité.  L'impératrice  de  son  cdté  soutenait  et  encoura- 
geait les  efforts  des  siens.  Son  fils  Manuel  rendaitauz  Galatiotes 
tout  le  mal  qu'ils  faisaient  k  la  capitale,  et  incendiait  leurs  mai- 
sons et  les  constructions  élevées  en  dehors  de  l'enceinte  du 
bourg.  Enclins  à  ne  pas  faire  grand  compte  des  Grecs,  les  Gala- 
tiotes ne  s'inquiétèrent  pas  grandement,  tout  d'abord,  de  ces 
hostilités  ;  mais  la  ténacité  et  la  persévérance  de  leurs  adversaires 
finirent  par  les  engager  à  faire  des  propositions  de  paix  ;  et  ils 
trouvèrent  l'empereur  disposé  à  les  accueillir,  à  la  condition 
toutefois  que  leurs  tours  seraient  rasées,  ainsi  que  les  forti- 
fications élevées  par  eux  en  dehors  .des  limites  tracées  par  ses 
prédécesseurs.  Rentré  dans  sa  capitale  pour  y  suivre  ces  né- 
gociations, Cantacuzène  se  trouva  en  présence  des  plaintes 
de  son  peuple,  et  surtout  du  patriarche  Isidore,  qui  le  poussè- 
rent à  tirer  vengeance  des  Galatiotes.  Quels  que  fussent  ses 
efforts  pour  calmer  cette  irritation,  et  faire  tenir  ua  langage 
plus  conforme  à  la  raison  et  aux  vrais  intérêts  de  l'empire,  il 
fut  obligé  de  céder  à  l'opinion  publique  et  de  se  préparer  au 
combat  ■. 

Une  galère  de  Rhodes,  envoyée  en  mission  par  le  Grand 
Maître,  chercha  à  interposer  ses  bons  offices  j  l'empereur  ne  vou- 
lut ou  ne  put  consentir  à  entendre  aucune  proposition,  avant  la 
démolition  des  ouvrages  de  défense  élevés  par  les  Galatiotes, 
tant  dans  leur  ville  que  au  delà  des  terrains  à  eux  régulièrement 
concédés.  Ne  pouvant  consentir  à  ces  conditions,  les  Galatiotes 
se  préparèrent  à  combattre,  après  avoir  rais  sur  la  galère  rho- 
dienne  leurs  femmes,  leurs  enfants  et  leurs  trésors.  L'armée 
grecque  occupait  les  hauteurs  pour  fondre  ensuite  sur  Galata 

1  SauU,  ih.,  203. 


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—  134  — 

dès  que  l'attaque  par  mer  aurait  commencé  ;  mais  l'Inhabileté 
et  surtout  rindiscipliue  des  marins  de  la  flotte  grecque  l'obli- 
gèrent à  se  retirer.  Sur  ces  entrefaites  le  bruit  s'étant  répandu 
de  l'arrivée  aux  iles  des  Princes  d'un  gros  navire  génois,  deux 
trirèmes  impériales  furent  envoyées  à  sa  rencontre  j  le  navire 
génois  se  défendit  si  vaillamment  qu'il  s'empara  des  trirèmes  et 
les  ramena  prisonnières  &  Galata.  La  flotte  impériale  se  décida 
pourtant  à  prendre  la  mer  et  offrir  le  combat,  mais  elle  fut  dis- 
persée par  un  vent  violent  qui  fit  évanouir  toute  espérance  de 
succès.  Une  paniqua  s'empara  des  équipages  et  gagna  les  troupes 
postées  sur  les  hauteurs,  aussi  bien  que  la  population  accourue 
sur  les  murs  de  Constantinople.  II  eût  été  facile  aux  Galatiotes, 
au  milieu  d'un  tel  désarroi,  d'entrer  dans  la  capitale  ;  ils  se 
bornèrent  à  solliciter  la  paix*. 

Cette  modeste  attitude  leur  fut  peut-être  commandée  d'ail- 
leurs par  des  instructions  que  des  messagers  spéciaux  appor- 
taient de  Gènes  aux  magistrats  de  la  colonie.  La  métropole  blâ- 
mait hautement  la  conduite  antérieure  des  colons;  elle  leur 
enjoignait  d'abandonner  le  terrain  usurpé,  de  réparer  le  tort  fait 
par  eux  aux  habitants  de  la  capitale,  et  de  s'engager  par  ser- 
ment à  ne  plus  renouveler  dans  l'avenir  de  pareils  faits.  Ces  en- 
voyés se  rendirent  ensuite  auprès  de  Cantacuzène,  lui  décla- 
rèrent être  prêts  à  remettre  aux  mains  de  son  fils  les  fortifications 
nouvellement  élevées,  et  lui  comptèrent  une  somme  importante, 
à  répartir,  comme  indemnité,  entre  ceux  de  ses  sujets  qui  pou- 
vaient y  avoir  droit.  L'empereur  répondit  qu'il  avait  entrepris 
cette  lutte  plutôt  en  vue  de  conserver  les  droits  mêmes  de  la 
métropole  que  pour  la  minime  parcelle  du  terrain  injustement 


■  Ibn  Batouta  ^i,  dans  la  longae  sârie  de  ses  voyages,  accomplis  entre  1325 
et  1354.  visita  Constantinople,  fait  de  GaUta  U  de»criptioD  suivante  :  «  Cialata 
située  sur  la  rive  occidentale  de  la  rivière, /a  Corne  rf'Or,  est  affectée  particu- 
lidremenl  à  la  résidence  des  chrétiens  francs,  génois,  vénitiens,  romains  at 
français.  L'empereur  de  Constantinople  est  leur  suzerain,  il  leur  donne  un 
chef  appelé  Cornes,  (comte),  qui  paie  un  tribut  à  l'empereur  ;  tbutefoia  ils  se 
mettent  souvent  en  état  de  rébellion  contre  l'empereur  qui  les  châtie,  et 
l'accord  ne  se  rétablit  que  par  l'intervention  pontificale.  lia  font  tout  le  com- 
merce, leur  port  est  vaste  et  contient  plus  de  cent  gros  navires,  quant  aux 
petits  on  ne  saurait  les  compter;  les  marchés  (souqs)  sont  beaux,  mais 
sales,  une  petite  rivière  dégoûtante  les  traverse  :  leurs  églises  sont  aussi  fort 
■aies  et  n'offrent  rien  de  beau.  *  Ed.  Defrémerj-,  Paris  1854,  II,  I,  32. 


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—  135  — 

Qsurpèe,  et  qu'il  était  disposé  à  l'accorder  de  bonne  grâce  aux 
envoyés  de  la  République  '. 

A  cette  même  époque  une  flotte  vénitienne,  sous  les  ordres  de 
Marino  Ruggieri,  ravagea  toutes  les  colonies  génoises  d'Orient, 
et  vint  aussi  devant  Galata  qu'elle  surprit.  Depuis  leurs  suc- 
cès les  Ctalatiotes  négligeaient  de  fermer,  la  nuit,  les  portes  de 
la  ville  :  les  envahisseurs  entièrent  donc  sans  coup  férir  ;  mais 
au  lieu  d'en  occuper  les  points  principaux,  ils  se  livrèrent  au 
pillage,  et  de  la  sorte,  ayant  laissé  aux.  habitants  le  temps  de  se 
reconnaître,  ces  derniers  finirent  par  se  défendre  et  même  chas- 
ser les  Vénitiens.  Ceux-ci  recherchèrent  alors  l'alHance  de  l'em- 
pereur, mais  Gantacozène  redoutant  les  uns  aussi  bien  que  les 
antres,  laissa  traîner  les  choses  en  longueur,  se  bornant  à  offrir 
aux  Vénitiens  le  renouvellement  de  leurs  privilèges  abrogés  -. 

Gènes  agissait  vis-à-vis  de  l'empire,  avec  plus  de  sagesse  que 
sa  colonie  galatiote.  Celle-ci  croyant  que  l'alliance  avec  Venise 
n'avait  manqué  que  par  l'effet  du  peu  d'avantages  des  propositions 
de  ses  rivaux,  recommença  les  hostilités  contre  Constantinople  et 
an  moyen  de  ses  balistes,  lança  une  énorme  pierre  dans  la  ville 
même.  L'empereur  fit  des  plaintes  dont  le  podestat  ne  tint  aucun 
compte.  Le  lendemain  il  y  faisait  lancer  une  autre  pierre.  Devant 
de  telles  insolences,  Cantacuzène  regretta  de  n'avoir  pas  accepté 
les  propositions  vénitiennes,  et  déclara  aux  Galatiotes  que  tout 
étant  dès  lors  rompu  entre  eux,  il  leur  donnait  huit  jours  pour 
enlever  leurs  marchandises  de  Constantinople  et  régler  leurs 
comptes.  Au  même  temps,  la  flotte  vénitienne  étant  rentrée  dans 
les  eaux  de  Constantinople,  Cantacuzène  se  mit  en  rapport  avec 
son  chef,  et  conclut  le  traité  d'alliance  recherché  par  la  Républi- 
que ;  il  prit  ensuite  ses  dispositions  pour  assiéger  Galata  du  côté 
de  terre.  Ses  troupes  mirent  encore  le  feu  aux  habitations  gala- 
tiotes bâties  hors  des  murailles  ^,  et  formant  de  la  même  façon 
que  de  l'autre  cAtë,  (à  Constantihople)  un  quartier  dit  de  la  Ma- 
rine*. Puis  faisant  sortir  en  même  temps  sa  flotte  de  la  Dersana 
des  sept  échelles,  il  la  divisa  en  deux  escadres,  l'une  destinée  i 

>  Sauli,  ib.,  313.  Vincens  Wi*(.  de  la  Riip.  de  Cinet.  f.  484  et  seq. 

•  Sauli,  330.  —  »  Id.  337. 

*  C'est  là  qu'on  voyait  encore,  avant  la  démolition  des  murailles,  la  douane, 
l'intendance  militaire,  et  les  boutiques  des  marchands  dont  le  commerce 
avait  spécialement  rapport  A  la  marine. 


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—  136  — 

opérer  devant  Galata,  l'autre  chargée  de  ruioer  les  établissements 
génois  de  la  Mer  Noire.  L'empereur  et  l'amiral  vénitien  reTinrent 
pour  attaquer  Galata  que  les  troupes  impériales  devaient  battoe 
par  terre.  Gênes  ayant  envoyé  un  secours  de  60  galères,  l'amiral 
vénitien  se  porta  à  sa  rencontre  et  fut  battu  ;  l'amiral  génois 
voulant  profiter  de  ce  succès,  fit  aussitôt  voile  pour  Galata  ;  mais 
un  vent  contraire  l'obligea  à  relâcher  dans  le  port  d'Héraclée  de 
Thrace,  afin  d'éviter  un  désastre  '. 

A  la  nouvelle  de  l'arrivée  de  l'escadre  génoise,  l'emperenr 
s'était  mis  en  état  de  défense,  et  de  leur  cdté,  les  confédérés 
vénitiens  et  catalans,  ayant  pu  s'avancer  par  suite  d'un  vent  fa- 
vorable, ils  se  portèrent  sur  Galata.  La  rencontre  eut  lieu  de 
nuit;  mais  le  vent  ayant  changé,  le  désordre  se  mit  parmi  les 
alliés  qui  éprouvèrent  de  graves  dommages.  Les  galères  cata- 
lanes capturées  furent  envoyées  à  Gênes  ■. 

Malgré  cela  et  en  présence  des  ennemis  contre  lesquels  il  avait 
à  faire  face,  l'amiral  génois,  Paganino  Doria,  rechercha  l'ai* 
liance  de  Sultan  Orkhan,  qui  se  disposa  à  faire  passer  des 
troupes  en  Europe.  De  son  côté  Cantacuzène  pressait  l'amiral 
vénitien  d'agir  ;  mais  au  bout  de  quelques  jours  celui-ci  mit  & 
la  voile  et  quitta  Constantinople  pour  n'y  plus  revenir.  Dès  lors, 
se  trouvant  privé  du  secours  sur  lequel  il  avait  compté,  l'em- 
pereur se  décida  à  traiter  avec  les  Galatîptes,  et  à  accéder  à  leurs 
demandes.  Le  traité  fut  conclu  le  16  mai  1352.  Il  renouvelait 
les  anciennes  capitulations,  tout  en  laissant  valables  celles  con- 
clues entre  l'amiral  Paganino  et  Sultan  Orkhan'.  Voici  les  prin- 
cipales dispositions  de  cet  acte  : 

1352.  ï Pour  nous,  confirmant  les  conventions  anciennes 

et  nouvelles,  existant  entre  l'empire  et  la  commune  de  Gènes, 
avec  la  réserve  toutefois,  que  la  paix  et  les  actes  passés  entre  le 
seigneur  amiral  et  l'émir  Orkhan-Beï  seront  maintenues,  non- 
obstant les  dites  conventions.  Item,  notre  empire  fait  gra- 
cieusement don,  par  ce  pacte,  à  la  commune  génoise  de  Galata, 
du  terrain  avec  fossé,  se  dirigeant  jusqu'au  château  de  la 
Ste  Croix,  [Castellum.  Sanctœ  CtnLCts.)^.  Ni  latins  ni  grecs 

'  Sauli.  3G0.  —  '  Id.  368. 
'  Sauli,  359.  Cf.  Conniantiniailo.  p.  160. 

*  Cest  probablement  au;:  environs  de  ce  château  qu'on  pourrait  recher- 
cher Vemfiolo  lii  Santa  Crore,  dont  parle  M.  De  Simoni,  Gi'ornale  liguiUco, 


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—  137  — 

ne  poarront  b&tir  maison  ou  aatre  édifice  nouveaD,  jusqu'à  la 
distance  de  100  coudées,  à  partir  dudit  fossé.  AiDsi  cet  espace 
de  100  coudées  existera  à  partir  du  commencement  de  Galata, 
jusqu'au  château  de  la  Ste  Croix,  et,  de  ce  château,  jxtsqu' à 
la  Tour  de  Tracerios... 

c  Dressé  par  Thomas  Aelan,  notaire  de  la  commune  génoise 
de  Constantinople,  au  saint  palais  de  Blaquemes,  en  présence 
des  témoins,  grecs  et  génois,  l'an  6860  de  la  création  du  monde, 
selon  l'ère  des  Romains  {Romèon)  :  mats  1352,  selon  l'ère  des 
latins  [de  l'Incarnation  de  N.-S.  J.-G.)  '.  > 

Depuis  lors  la  colonie  ne  cesse  d'étendre  et  d' augmenter  ses 
moyens  de  défense:  aussi  put-elte  soutenir  des  luttes  fréquentes 
et  sanglantes  contre  Jean  Paléologue,  Ûls  de  Manuel,  et  ût-elle 
plus  d'une  fois  le  siège  de  Constantinople. 

Il  parait  également  d'après  ce  que  rapporte  Froissart,  {cité 
par  Du  Gange),  année  1385,  que  dani;  l'intervalle  compris  entre 
cette  date  et  le  chrysobulle  de  135S,  la  colonie  avait  pris  posses- 
sion du  château  de  Galata,  lequel  dans  les  précédents  chryso- 
bulles, était  maintenu  sous  l'autorité  impériale,  c  Et  (les  Ga- 
latiotes)  tiennent,  dit  Froissart,  la  ville  et  le  châtcl  de  Père, 
qui  sied  en  mer  devant  Constantinople  (ancien  castrum 
Sanctœ  Cruels),  et  la  font  garder  h  leurs  frais  et  dëpent,  et  )a 
rafroichissent  trois  ou  quatre  fois  l'an  de  tout  ce  qui  est  néces- 
saire. Les  Tartares,  les  Tores  ont  aucune  fois  essié  comment 
ils  le  penssent  avoir  ;  mais  ils  n'en  peuvent  venir  k  chef  ;  ain- 
çois  quand  ils  i  sont  venus  ils  î  ont  plus  pris  que  mis,  car  Père 
sied  sur  une  roche,  et  n'i  a  qu'ime  seule  entrée,  les  Genevois 
l'ont  grandement  forti&ée'-.  > 

Débarrassés  dès  lors  de  toute  entrave,  les  Galatiotes  reprirent 
lenrs  anciens  projets  qu'ils  mirent  à  exécution.  Ils  entourèrent 
leur  ville  d'une  enceinte  fortifiée,  qu'au  fur  et  à  mesure  des  cir- 
constances, et  selon  les  besoins,  ils  portaient  plus  loin,  jusqu'au 

p,  149,  155  :  Embolitm  et  arnlam  itwlea*  habera  in  Contlanlinopoti...  et  êi 
ibi  non  pouefi.  in  Fera  êtwlcat  ha/ierc  ;  ([nslructions  d'Amico  di  Murât) 
159,  160.  Ces  citations  iniuisent  &  supposer  que  le  rhàleau  êîê  au  bord  île  la 
mer,  portait  le  oom  de  Catlrum  .Slot  C.rivi*.  et  la  principale  tour  à  laquelts 
fl  fut  relié  par  une  muraille,  au  sommet  de  la  ville,  Chriiieam  turrim,  tur 
laquelle  flotta  ensuile  l'étendard  de  Gènes,  à  l'elligie  du  Christ. 

•  V.  le  texte  complet  de  ce  document.  Sauli,  II,  316,  N-  XI. 

'  Du  Cange. 


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point  où  nous  l'avons  vue  nous-mêmes  il  y  a  peu  d'années,  c'est- 
à-dire  entourant  l'ancien  et  le  nouveau  Galata,  depuis  l'arsenal 
militaire  d'une  part,  jusqu'à  Top  Khané  de  l'autre;  et  en&n 
se  terminant,  pour  la  partie  supérieure  à  la  tour  de  Galata. 
(Ces  murailles  ont  été  démolies  par  la  Muoicipalilé  de  Péra, 
en  1864.) 

Le  gouvernement  de  la  colonie,  d'après  M.  Promis  dans  sa 
préface  des  Stàtuli  délia  colohîa  çenovese  di  Pera  ',  était 
formé  de  la  manière  suivante  : 

»  Le  Podestat,  envoyé  de  Grênes  chaque  année,  avec  le  titre 
de  Pûtestas  Januensis  in  imperio  Romanice,  ayant  le  gou- 
vernement et  l'administration  suprêmes  de  la  colonie  ; 

<  Il  était  assisté  d'un  grand  conseil  composé  de  34  membres, 
dits  probt  honiines,  et  d'un  petit  conseil  de  6  membres,  com- 
posé par  moitié  de  patriciens  et  de  plébéiens. 

<  II  avait  la  qualité  de  ministre  résident  auprès  de  l'em- 
pereur. 

(  Le  podestat  rendait  la  justice  par  l'entremise  d'un  vicaire, 
et  il  expédiait  les  affaires  par  celle  d'un  chancelier  envoyé  de 
Gènes,  ou  choisi  parmi  les  notables  de  la  commune. 

<  Un  ttffizio  di  mercanzîa,  composé  de  huit  des  principaux 
habitants,  était  chargé  des  affaires  commerciales  ; 

(  Un  clavario,  i  trésorier  >  était  chargé  de  la  garde  du 
trésor  et  des  archives. 

c  Par  imitation,  sans  doute,  de  ce  qui  avait  lieu  dans  la  mé- 
tropole, un  abate  del  commune  e  popolo  di  Pera,  existait 
aussi  dans  cette  ville,  aux  xiv*  et  xv'  siècles,  conjointement 
avec  le  podestat  ;  iMChino  Ptetrarossa,  exerçait  cette  charge 
en  1427'. 

c  Lé  cbef  religieux  était  le  recteur  de  l'église  de  St-Michel, 
patron  de  Péra,  en  sa  qualité  de  vicaire  de  l'arcbevêqae  de 
Gènes.  » 

Les  Génois  avaient  des  ateliers  monétaires  dans  leurscolonies 
de  Theodosie,  (Caffa),  d'Ammokhosto,  de  Chypre  et  de  Chio  ; 
mais  on  ne  connaissait  pas  de  monnaies  frappées  par  eux  à  Péra. 

1  Turin  1871,  dont  nous  devons  la  communication  à  l'obligeance  de  M.  da 
Simoni. 
•  M.  Promis  et  Lobero,  Memorie  Storiche  del  Banco  di  S.  Giorgio.  Geao- 


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—  189  — 

Grâce  à  M.  Paul  Lambros  ',  nous  possédons  l'empreinte  de  deux 
monnaies  d'or,  frappées,  ahustoement,  dit  cet  auteur,  à  Péra, 
et  trouvées  la  premiôre  à  Smyrne,  la  seconde  à  Constantinople. 

La  première  de  ces  monnaies  frappée  sous  Philippe-Marie 
Visconti,  duc  de  Milan,  porte  d'un  côté,  l'image  de  l'apôtre 
St-Pierre,  tenant  dans  sa  main  gauche  un  livre,  et,  de  sa  main 
droite,  remettant  au  Duc  agenouillé  devant  lui,  l'étendard  à  la 
croix  de  Gènes  :  on  lit  en  exergue,  cette  inscription  :  F.  M. 
MEDIOL.  D.  ET  CÔIS.  lA.  <  Philippus-Marta  Mediolani  aux, 
et  communitatis  lanuœ.  »  Sous  le  Mton  de  l'étendard,  on  voit 
le  Différend,  ou  marque  de  l'atelier  monétaire,  P.  (Péra),  en 
caractère  gothique.  Au  revers  se  trouve  l'image  du  Christ  bénis- 
sant de  la  main  droite,  et  tenant  l'évangile  dans  la  main  gauche. 
Dans  l'ellipse,  à  droite  sont  placées  quatre  étoiles,  et  à  gauche  . 
cinq  :  enfin  on  lit  en  exergue  :  SIT.  T.  XTE.  DAT.  Q.  T. 
REGIS.  ISTE.  DVCTVS.  <  SU  tibf,  Christe.  datus.  quem  tu 
reffis  tste  ducatus.  » 

La  seconde  monnaie  porte  à  l'avers  :  T.  G.  DVX.  lAN.  «  Tho- 
mas Campofregoso ,  dux  lanuœ.  »"  Au  centre  est  placée  l'image 
de  S.  Laurent^  tenant  dans  la  main  gauche  un  livre,  et  de  la 
droite,  remettant  au  duc,  agenouillé  devant  lui,  l'étendard  à  la 
croix  de  Gènes  ;  au-dessous  la  marque  P.  (Péra),  en  lettre  go- 
thique. Le  revers  est  semblable  à  celui  de  la  monnaie  précédente. 

Selon  M.  Delaunay,  archiviste  du  bureau,  technique  de  la 
municipalité  du  VI'  cercle,  (Galata-Péra-Pancaldi)  qui  en  a  fait 
le  relevé  géométrique,  les  murailles  de  Galata  s'étendaient  sur 
un  parcours  de  3800  mètres.  Leur  démolition  a  laissé  à  la  voie 
publique  un  espace  libre  de  plus  9000  mètres,  soit  à  peu  près  la 
40°  partie  de  la  cité  génoise  ^.  Elles  étaient  percées  de  cinq  portes 
et  flanquées  de  vingt^uatre  tours,  y  compris  celle  du  Ghrist,dite 

■  Anef-lata  aitmitmata  etc.  Athènes  18T2.  (en  grec)  La  fabrication  âw 
moDoaies  ne  fut  pas  toujours  permise  dani  les  colonies  génoises,  elle  fut 
même  interdite  aous  dea  peines  aâvéres,  comme  le  porte  l'acte  Z7I  îles  Sta- 
Uiti  dcUa  rolonia  genovt.se  di  Pera.  déjà  cité^. 

■  S.  [.surent  martyrisé,  sur  la  gril,  est  le  patron  de  la  cathédrale  de  Génca. 
>  Pierre  GijUen  dît  que  le  périmètre  de  Galftta  s'étend  aur-un  parcours  de 

1 40!)  pas,  que  six  j>ortes  du  mur  d'enceinte  ouvraient  sur  la  mer  ',  qu'entre 
la  muraille  et  la  mer  se  trouvait  un  espace  vague,  occupé  par  des  auberges, 
deataveTTies  et  des  magaaios,  et  employa  également  pour  le  déchargemeot 
dea  navirea. 


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—  140  — 

abusivement  tour  de  Galata  '.  L'enceinte  extérieure  renfermait 
quatre  sections,  séparées  entre  elles  par  ane  muraille  fortifiée  elle- 
même  de  tours  intérieures,  et  indiquant  les  développements  suc- 
cessifs de  la  colonie  ^.  Les  inscriptions  historiques  des  murailles, 
relevées  par  M.  Delaunay,  et  rapportées  dans  s^Notice  précitée, 
établissent  la  date  de  la  construction  ou  de  la  réparation  des 
différentes  parties  de  ces  fortifications  3.  Les  pierres  originales 
déposées  d'abord  dans  l'enclos  d'un  petit  cimetière  turc,  aux 
Petits  Champs,  ont  été  ensuite  transportées,  sur  les  démarches 
de  l'ambassade  de  France,  provoquées  par  nos  sollicitations, 
dans  la  partie  inférieure  de  la  Tour  de  Galata,  et  finalement 
dans  la  partie  du  Vieux  Serai,  sur  le  sol  environnant  Tchinibiii- 
Kiochk,  oii  est  placé  le  Musée  impérial  ottoman  *.  A  l'aide  de 
.  ces  précieux  monuments,  on  peut  suivre  pas  à  pas  les  dévelop- 
pements successifs  de  la  colonie  galatiote  et  il  est  permis  de 
supposer  que  bien  que  la  démolition  de  ces  murailles  ait  été  or- 
donnée par  les  empereurs,  à  la  suite  des  luttes  survenues  entre 
eux  et  la  colonie,  il  en  fut  de  même  alors  que  plus  tard,  à  l'é- 
poque de  la  conquête  ottomane,  c'est-à-dire  <  que  le  supérieur 
ou  l'ancien  ne  les  fît  pas  abattre  complètement;  et  qu'après 
avoir  fait  acte  d'autorité  sur  une  partie,  le  vainqueur  laissa  le 
reste  subsister.  » 

Nous  donnons  ici  la  description  sommaire  de  ces  monuments 
pour  lesquels  nous  avons  suivi,  sauf  quelques  corrections  in- 
diquées par  l'inspection  des  photographies,  la  recensio  de  son 
premier  travail,  donné  par  M.  Delaunay  dans  l'Univers,  revue 
orientale^  cahiers  de  novembre  1874  à  mars  1875. 

Du  côté  de  la  ville  de  Galata,  vers  l'arsenal,  au-dessus  delà 
porte  d'Azab-capou,  donnant  entrée  de  la  mer  dans  la  muraille 

1  Contlnntiniaih,  p.  1G2,  Notice  aur  le  oieua:  Galata,  (Pèra  des  Génoit) 
pur  M.  Delaunay. 

*  Voir  le  plan  ci-dessus. 

*  A  la  demande  de  la  Sor.ietà  di  utoria  palria,  la  municîi)alité  de  Gènes, 
moyennant  l'assistance  du  Ministère  flegli  afjari  eileri  a  fait  relever,  jiar  les 
soins  de  la  légation  d'Italie  à  Constantinopla  la  photogra[>hie  de  ces  mo- 
numents (juillet  1ST5)  préservés  ainsi  de  toute  destruction  ou  disparition 
ultérieure.  La  col'ection  de  ces  monuments  s'élâve  au  chifTre  de  di\'buit 
planches. 

*  Ce  kiosque  d'après  la  belle  inscription  qui  en  décore  l'entrée,  a  été  cOD»- 
truit  en  877  de  l'Hégire  (1471)  par  sultan  Méhemmed  le  conquérant. 


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■  141  ■ 


d'enceinte,  à  partir  du  Vehtt  Tersana  de  1804,  laquelle  mn- 
raiUea'arrôteen  équerresurlarue  Yanyq,  dont  elle  forme  l'angle, 
se  trouvaient  les  trois  Poussons  ci-dessous,  aujourd'hui  dis- 
joints, mais  autrefois  rénnis  l'un  à  l'autre  sur  l'emplacement 
primitir. 

L'ècusson  du  centre  aux  armes  de  Gènes  avec  les  quatre  B 
contournés,  indiquant  la  suzeraineté  des  Paléolognes  qui  avaient 
donné  ces  armes  à  la  co- 
lonie génoise,  à  titre  d'hon- 
neur, et  en  même  temps 
comme  signe  de  sa  vassa- 
lité à  l'empire  ;  les  deux 
autres  écussons,  le  deztre 
et  le  sénestre,  sont  celui 
de  la  sérénissime  République.  Ces  écussons  ne  sont  accompa- 
gnés d'aucune  inscription  explicative,  ni  de  date;  mais  la  posi- 
tion de  l'ècusson  de  vassalité  en  abtme,  c'est-à-dire  à  la  place 
d'honneur,  indique  sufOsamment  qu'elle  date  des  premiers 
temps  de  la  colonie. 

1335.  Sur  la  tour  carrée  de  la  rue  Woïvoda,  en  avant  de  la 
porte  de  même  nom  ouvrant  autrefois  dans  l'intérieur  de  la 
même  rue,  en  entrant  par  la  montée  de  lùkcek  qaidyryra,  en 
face  du  corps  de  garde  central  de  police,  dit  encore  de  nos  jours 
i  le  Woïvode  »  M.  Delaunay  a  relevé  l'inâcription  suivante,  sur- 
montant deux  écussons  de  cette  forme. 

t  M.  CGC.  XXX.  V. 

Ici  on  peut  croire  déjà  h  des  velléités  d'indépendance  :  quoique 
se  trouvant  encore  à  la  place  d'honneur,  l'ècusson  de  vassalité 
n'est  plus  comme  en  1335,  en 
abîme  ;  bientôt  on  le  verra  dispa- 
raître tout  à  fait.  Cette  pierre,  qui 
ne  se  trouve  pas  dans  la  collec- 
tion des  photographies,  serait  de  la 
même  année  que  celle  que  nous 
donnerons  plus  bas,  en  fac-similé, 
au  Chapitre  m  St-François. 

1349.  Parvenae  quelques  années  plus  tard,  à  porter  ses  mu- 
railles jusqu'à  la  Tour  du  Christ,  la  colonie,  tout  en  gardant 


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—  U2  — 

«QCore  un  semblant  de  vassalité  k  l'empire,  se  croit  pourtant 
assez  puissante  déjà,  pour  rejeter  à  la  seconde  place  le  signe  qui 
en  est  le  témoignage.  Ainsi  sur  la  haute  tour  carrée  dominant 
la  porte  de  Galata,  ouvrant  sur  Péra,  au  sommet  de  la  montée 
dite  lùkcek  qaldyrym,  elle  place  au-dessus  d'une  fenêtre  grillée, 
à  la  hauteur  d'environ  18  mètres  au-dessus  du  niveau  du  sol, 
une  pierre  sur  laquelle  je  crois  bien  lire  : 

t  M.  CGC.  XXX.  VIIII. 

Au-dessous  on  voit  à  dextre  (la  gauche  du  spectateur)  l'écus-' 
son  de  Gènes,  puis,  en  abime,  une  image  de  Saint,  que  M.  De- 
launay  croit  être  celle  de  St  Nicolas,  dont  il  croit  lire  le  nom  à 
droite  et  à  gauche  de  la  tète  du  Saint  :  à  sénestre  (la  droite  du 
spectateur)  i'ècusson  de  la  colonie, 
contourné  des  quatre  B,  des  Paléo- 
I  I    ('\    [~â  pn      logues,  relégué  k  la  deuxième  place. 

1    i  .  \ 1      Cette  pierre  n'est  pas  accompagnée 

V        /     Lu'    \.^  ^/      d'inscription  explicative,  mais  le 
\^|  y  \^  y^     fait  seul  de  la  position  respective 


des  écussons  indique  sulTisamment  la  situation  nouvelle  qu'elle 
s'était  faite  vis-à-vis  de  l'empire.  A  l'angle  droit  du  second  écus- 
son  se  trouve  un  trigramme  ou  tétragramme,  que  M.  Delaunay 
propose  de  lire  ainsi  P.  S.  R.  Per  Serenissima  Republica. 

Ici  s'arrêtent  dans  nos  monuments  les  traces  de  vassalité 
de  la  colonie  :  dorénavant  l'écusson  de  la  République  figure  seul 
avec  ceux  de  son  premier  magistrat  ou  du  Podestat,  sur  les  mu- 
railles de  sa  puissante  colonie. 

Les  efforts  de  Cantacuzène,  malgré  leur  énergie,  furent  im- 
puissants à  la  maintenir.  Ce  prince  fut  obligé  de  se  résigner  k 
ce  sacrifice,  et  l'acte  de  1353  ouvrit  pour  les  Galatiotes  une 
ère  de  complète  indépendance,  qui  devait  durer  tout  un  siècle, 
jusqu'à  la  conquête  de  Constantinopic  par  les  Ottomans.  Depuis 
cette  époque  en  effet,  l'enceinte  de  la  ville  génoise  reçut  d'im- 
portants compléments,  que  les  podestats  tinrent  à  honneur  de 
constater  par  des  inscriptions,  (ci-après),  où  ne  figurent  plus 
désormais  que  leurs  propres  écussons  et  ceux  des  doges  de  la 
métropole. 

1387.  Côté  de  terre  N.  0.  sur  la  première  tour  de  la  muraille 
d'enceinte,  à  partir  de  celle  du  Christ,  en  allant  vers  l'arsenal  : 


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pierre  aor  laquelle  on  lit  cette  inscription,  tracée  en  caractères 
gothiques  assez  grossiers  : 

t  M.  CCG.  LXXX.  VII.  HOC,  OPS. 

FACTAVIT.  TEMPORE_NOBrLIS.  DNI.  RAFAËL  DAVFÛA 

PTS.   PEIRAE. 

Au>des30QS  et  au  centre,  l'image  d'un  archange,  ailé,  nimbé, 
Têtu  d'une  tunique  courte  et  d'un  manteau  militaire  :  il  est 
chaussé  de  sandales  à  bandelettes,  et  tient,  dans  sa  main  droite 
une  épée  nue,  et  dans  la  gauche,  le  fourreau.  Cette  Image  est- 
elle  celle  de  St  Michel,  «:  le  protecteur  de  la  colonie  i  ou  celle 
de  l'archange  Raphaël,  en  l'honneur  du  podestat  Rafaël  Doria 
qui  l'érigea  '  ?  A  droite  de  l'archange,  au-dessous  de  l'inscrip- 
tion, se  trouve  l'écusson  de  Gènes,  à  sénestre,  celui  du  podes- 
tat, aigle  couronnée,  aux  ailes  abaissées. 

1397.  Sur  la  dernière  tour,  sise  au  bord  du  fossé,  du  côté  de 
Cassim-Pacha,  on  a  trouvé  une  pierre  commèmorative,  portant 
comme  suit  en  grands  et  beaux  caractères  gothiques,  la  date  de 
sa  construction. 

t  M.  CGC.  LXXXX.  VII. 

«  au-dessous  l'écusson  de  Gênes  en  abime,  à  dextre  et  à  sé- 
nestre, an  écusson  barré  de  sept  pièces  ;  à  cette  date  Gênes  n'a- 
vait pas  de  duc  :  elle  était  gouvernée  par  Vallerand  de  Luxem- 
bourg, comte  de  St-Pol  et  de  Ligny,  pour  le  roi  de  France, 
Charles  VI.  L'écusson  n'étant  pas  celui  du  gouverneur  français, 
appartient  certainement  au  podestat  de  Péra,  qui  aura  voulu  de 
la  sorte,  protester  contre  la  domination  étrangère  ^.  » 

1400.  Côté  de  la  mer,  rue  Moum-khané,  au  bas  de  la  mu- 
raille, se  trouvait  une  pierre  portant  une  inscription,  et  des 
écnssons  :  en  voici  la  description  :  f  M.     CCCC. 

(U  y  a  peut-être  une  lacune,  la  pierre  étant  très  fruste)  :  au-des- 
sous trois  ëcussoDs,  celui  du  centre  à  la  croix  de  Gènes,  ceux  de 

<  L'imago  représeote  assurément  St.  Michel  :  l'archange  Raphaûl  n'étant 
jamais  armé.  Ed. 

*  Delannay,  loe.  laud.  déo>  1874,  p.  llS.Vo^'ez  sur  la  critique  de  ces  ina- 
criptiont  le  P.  Vigoa  :  Alli  delta  Societd  ligurv.  Dr  Déthier  et  Delau- 
my  ISGa. 


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dextre  et  de  sénestre  sont  méconnaissables.  Au-dessous  on  lit 
l'inscription  suivante  tracée  en  caractères  gothiques  élégants  : 

ITALICVM.  JVBAR.  LVXR.  R  (eipublicie).  DVX.  MED  (iator) 

DE  FRANCHI. 
GAVDEAT  ERGO.  JANVA.  A.  Ima.   SUE.  TATO.  DVGE. 

GVBERNATA. 
IVBENTE.  P(re)SIDE.  PERE.  DE.  FRANCIS.  POTE  (sta)  TE 

FILIPO'. 

L'endroit  où  cette  pierre  a  été  trouvée  n'est  pas,  très  proba- 
blement, celui  de  son  emplacement  primitif  ;  du  reste  elle  avait 
été  enduite  d'une  couche  de  chaux  que  M.  Delaunay  a  fait  enle- 
ver, pour  mettre  l'inscription  au  jour  '. 

1404.  Côté  de  terre,  0,  ;  rue  Hiçar-dibi,  *  le  pied  de  la  forte- 
resse »  n'  1  ;  tour  devenue  propriété  de  la  mission  des  Laza- 
ristes. Inscription  en  caractères  gothiques,  grossièrement  tracée. 

t  TVRRIS.  ISTA  FVrr  FACTA.  TEM 
PORE.  REGIMINIS.  EGREGIl.  VIRI. 
DNI.  lOHANNIS.  SAVLI.  HONORABILIS 
POTESTATIS.  PEYRE.  M.  CGCC.  IIII. 

Au-dessous,  trois  écussons  :  celui  du  centre  à  la  croix  de 
Gênes,  celui  de  dextre  à  l'aigle  contourné,  au  vol  abaissé,  qui 
peut  être  celui  de  Boussicault,  alors  gouverneur  de  Gènes,  ou 
celui  du  podestat,  qui  en  répétant  le  sien,  aurait  voulu  protester 
contre  la  restauration  étrangère  ;  à  sénestre  celui  du  podestat 
Sauli.  Sous  ces  trois  écussons,  on  lit  ce  complément  d'inscrip- 
tion, qui  fixe  la  date  précise  du  monument. 

DIE.  PRIMA.  NOVEMBRIS.'" 

1423  ?  Du  côté  de  la  terre,  rue  Khan  daq,  t  fossé  »,  se  trou- 
vait la  tour  St'BaHhélemy ,  la  troisième  à  partir  de  celle 

1  De  Franchi,  nommé  par  les  seigneurs,  capitaine  de  la  Bépublitiue  aurait 
remplacé  Boccanegra  acclamé  par  le  peuple  après  avoir  chassé  le  gouverneur 
français.  Callard  de  Calleville  ;  mais  ce  gouvernement  dura  peu  ;  les  Fran- 
çais rentrèrent  bientôt  dans  Gènes  et  l'autorité  plus  que  sévère  de  Boussi- 
cault, engagea  peut-être  le  podestat  Philippe  de  Franchi  à  dissimuler  le  mo- 
nument qui  conservait  la  mémoire  de  cet  événement. 

"  Il  faut  dira  que  M.  de  Simoni  pense  qu'il  faudrait  lire  1430,  au  lieu 
de  UOO. 


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—  U5  — 

du  Christ,  Tis-ii-Tis  d'un  corps  de  garde  de  Zabltè  :  sur 
cette  tour  se  trouvait  une  pierre  portant  l'image  du  Saint, 
drapée  et  oimbée,  surmontée  du  nom  de  l'apôtre  grossièrement 
tracé,  accompagné  de  deux  ëcussons,  répétés  à  gauche  et  à 
droite  :  les  deux  d'en  haut,  à  la  croix  de  Gènes,  ceux  d'en  bas,  à 
la  face  échiquetée,  au  clief  chargé  d'un  fer  de  lance  (Armes 
parlantes  des  Spinola.)  Cette  pierre  est  sans  date  :  ne  portant 
pas  le  signe  de  vassalité,  elle  ne  peut  être  attribuée  aux  mem- 
bres de  cette  famille  qui  régirent  la  colonie  au  temps  de  la  do- 
mination grecque  :  c'est  pourquoi  nous  l'avons  placée,  sauf 
meilleure  et  plus  exacte  attribution,  à  l'année  1433,  où  Zaccaria 
Spinola  fut,  d'après  M.  Belgrano,  podestat  de  la  colonie.  Ne 
connaissant  dans  Galata  l'existence  d'aucune  église  sous  le 
vocable  de  St-Barthélemy,  et  chaque  tour  étant  placée,  selon 
toute  apparence,  sous  le  vocable  d'un  Saint,  il  est  possible  que 
douze  d'entre  elles  aient  reçu  chacune  le  nom  d'un  apôtre.  D'a> 
près  les  Slaluti  délia  colonia  genovese  di  Pera,  l'abbé  de 
St-Barthôlemy,  à  Gênes,  n'était  pas  soumis  k  l'obligation  du 
serment,  quand  son  témoignage  était  requis  par  les  tribunaux  '. 

1435.  Côté  de  la  mer  ;  première  tour  de  la  muraille  d'en- 
ceinte, rue  Stoupoudji,  près  Azab-capou-djami,  entre  les  n°'  5 
et  7,  à  l'extrémité  0-S.  de  la  ville. 

Trois  écussons.  Gênes  subissant  alors  la  domination  des  ducs 
de  Milan,  l'écusson  du  milieu  est  en  émail  plein,  c'est-à-dice 
sans  signes  héraldiques,  c'est  comme  une  sorte  de  protestation 
contre  le  joug  étranger  ;  celui  de  dextre  est  aux  armes  de  Gènes, 
celui  de  sénestre  à  celles  des  Marinis.  Au-dessous  une  inscrip- 
tion en  beaux  et  grands  caractères  gothiques. 

_  t  M.  CGC.  XXX.  V.  TËPORE.  SPECTA 
BILI.  DNI.  STEPHANI.,  DE  MARINIS.  POTAT. 

1441.  Côté  de  la  mer  :  tourelle  n*  7,  rue  Dtbbagh  Khoma, 
<  tannerie,  »  o&  se  trouvait  la  muraille  d'enceinte,  du  côté  delà 
mer,  en  face  des  Messageries  Maritimes  françaises.  Cette  tou- 
relle portait,  au-dessus  de  son  couronnement,  trois  écussons  ; 
au  centre  celai  de  Gènes,  à  dextre  celai  du  dc^e,  Gampofregoso, 

t  Uns  égliM  de  Veniae  était  dédiée  à  ce  Saint  ;  et  en  1390,  1«  curé  de  cett« 
église  exen^it  A  ConstantiDople  les  fonctions  de  notaire  des  Vénitisni.cbaii- 
celier  du  Balle.  Aeta  grteca,  III,  110. 


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à  sénestre  celui  du  podestat  SpiDOla  :  au-dessous,  l'inscription 
suivante,  en  caractères  gothiques  i 

SPECTABILIS.  NOBILIS.  DNS. 
NICOLA.VS.  ANTHONI.  SPINVLA.. 
POTAS.  PERE.  HOC  OPVS.  FIERI. 
IVBSIT.  M.  CCCC.  XXXX.  I.  DIE:  XX. 
AUGVSTI  ». 

1443.  Rue  Khan-Daq,  à  56  mètres  de  la  tour  St-Barthélemy, 
vis-à-vis  le  poste  de  Zabliè,  du  cimetière  musulman,  en  allant 
vers  le  pont  d'Azab-capou,  se  trouve  dans  la  maison  d'Ali  effen- 
di,  près  du  sommet  de  la  quatrième  tour,  une  pierre  portant 
trois  écussons,  les  mêmes  qae  ceux  de  la  pierre  de  1441,  sur- 
montant l'inscription  saivante,  tracée  en  beau  gothique  ; 

t  SPECTABILIS.  ET  NOBILIS.  DOMINVS. 
NICOLAVS.  ANTONIVS.  SPINVLA.  QuoNDAM.  DÎ5L 
THOME.  POTESTAS.  PEIiE.  lANVENSlV.  INTO. 
TO.  IMPERIO.  ROMANIE.  CONSTOVI.  FECIT.HANC. 
TVRRÎ.  IN.  PAVGIS.  DIEBVS.  COCTRUGT. 
M.CCCC.XXXX.II. 

DIE.  Vini.  MAY. 

Dans  les  démolitions  de  cette  tour,  M.  0  Mahony,  architecte 
de  la  municipalité  de  Péra-Galata,  a  trouvé  une  grande  pierre 
portant  l'image,  en  pied,  de  la  Ste  Vierge,  tenant  l'Enfant  Jésus 
sur  son  bras  gauche,  et  ayant,  à  chacun  de  ses  côtés,  un  Saint 
barbu,  nimbé,  portant  un  vêtement  ecclésiastique,  avec  une 
crois  sur  chaque  épaule.  Ces  images  grossièrement  gravées  an 
trait,  sans  modelé,  se  trouvent,  avec  les  autres  pierres  prove- 
nant des  murailles  de  Galata,  dans  le  jardin  du  Yieus  Sera!, 
autour  de  Tchnili  Kioehk.  La  présence  de  cette  pierre  sur  la 
tour,  rapprochée  du  vocable  de  celle-ci,  comme  telles  autres 
figures  de  Saints,  sur  les  tours  placées  sous  leur  invocation, 
établit  parfaitement  le  lieu  auquel  elle  appartenait. 


'  Les  mémoires  ds  M.  le  Chevalier  Belgroao,  secrétaire  géniral  de  la  So- 

rietà  ligure,  mentionnent  les  noms  de  cinq  peraonnagea  de  cette  famille,  qui 
auraient  occupé  la  charge  de  podestat  de  Péra,  Bavoir  Inghello  <1£T6),  Ber- 
nabo  (1300  et  135S),  Zaccaria  (1423),  Gianetto  (1437).  et  Njcolo  Antonio 
(1441-43.) 


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—  147  — 

Dans  la  même  rne  Ehan-daq,  cdté  de  terre,  à  peu  prëB  là  où 
se  trouvent  aajourd'Iiui  (1875)  les  bureaux  du  journal  La  Tur- 
quie, sur  la  tour  Ste-Marie,  la  deuxième  après  celle  du  Christ, 
inscription  gothique  élégante  :  trois  écussons,  de  Gènes  au 
centre,  du  doge  Campofregoso  à  dexbe,  da  podestat  Spînola  à 
sénestre  :  au-dessous  on  lit  : 

t  SPECTABIL.  NOBiC.  VIR.  DNS.  NIGOLAVS 
ANTHS.  SPmVLA.  POTESTAS  PEIRE.  lANVEN 
SM.  IN.  TOTO.  IMPIO.  ROMANIE.  TPRE.  SVI. 
REGIMINIS.  ANNI  SCVDI.  IVXTT  HANC.  SCDAM. 
TVRIM.  CONSTRVI.  M.  CCCC.  XXXX.  II.  DIE.  XX.  0 
CTobris.  ManDAN.  VOCHARI.  S.  MARIAM.  f . 

Une  pierre  à  l'image  de  la  Ste  Vierge,  identique  à  celle  dé- 
crite ci-dessus,  a  été  également  trouvée  dans  cette  seconde  toar 
bâtie  par  ce  même  podestat,  dorant  la  seconde  année  de  son 
gouvernement,  et  dédiée  par  lui,  comme  la  précédente,  à  Ste 
Marie.  Toutefois  cette  seconde  tour  ne  fut  achevée  que  l'année 
suivante  14i3,  par  le  successeur  de  Spinola,  comme  l'indique 
l'inscription  ci-après  :  trois  écussons,  celui  de  Gènes  au  centre, 
de  doge  Rafaël  Adorno  à  sénestre,  et  celui  du  podestat  Boruet 
de  Grimaldi  à  dextre.  Au-dessous  en  beaux  caractères  Cou- 
âques,  cette  inscription  ; 

t  TVRRIS  HEG.  FVIT.  PERFICTA.  TE 
MPORE.  SPECTABILIS.  DNI.  EORVELIs. 
DE.  GRDIALDIS.  M.  CCCC.  XXXX.  lU. 
1445.  Sur  la  tour  sise  rue  Qalé,  c  de  la  forteresse,  >  en  face 
l'impasse  Khourma  muraille  du  câté  Ë.  de  la  terre,  se  trouvait 
une  pierre  portant  l'inscription  suivante,  en  beaux  caractères 
gothiques. 

t  M.  CCCC.  XXXX.  V.  COMPLEIA.  EST. 
HEG.  TMtRIS.  TEMPORE.  POTESTACL 
E.  SPECTABILIS.  DM.  BALD.ASARIS.  M. 
ARRUFI.  DE.  MEXSE.  MAIL 

Au-dessous  trois  écussons  ;  au  centre,  celui  de  Gênes,  h 
dextre  celui  du  doge  Rafaël,  et  à  sénestre  celui  du  podestat 
Mamifo, 


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—  148  — 

1446.  A  partir  de  lagh-capou,  jasqu'à  la  me  Motun-khanë, 
lea  murailles,  du  côté  de  terre,  ne  portaient  Qi  inscription,  ni 
marque  quelconque.  Dans  la  rue  Moum-kbané  au  contraire,  on 
a  trouvé  un  certain  nombre  d'inscriptions,  dont  l'une  a  été  A^ 
rapportée  plus  haut,  (année  1400).  Les  murs  de  la  grande  en* 
ceinte  fortiûëe,  sur  la  partie  s'étendant  de  la  Tour  du  Christ, 
&  Moum-khané-eapou,  portaient,  sur  la  face  extérieure,  des  ins- 
criptions commémoratives  ;  &  partir  de  la  rue  Moum-kbané, 
elles  étaient  placées  à  l'intérieur  et  dans  la  ville  même.  Sur  la 
porte  Moum-khané  se  trouvait  une  pierre  dont  voici  la  des- 
cription : 

Trois  écossons,  les  mêmes  que  les  précédents,  an-dessous^ 
l'inscription  suivante  en  beaux  caractères  gothiques  : 

iSS.  ÎS.  CCHC.  XXXX.  VI.  MAY. 
EREXIT.  MARRVFVS.  BALDASSAR.  ISTA. 
MENU.  PLVS.  ALnS.  NOBILE.  FEGIT.  OPVS. 
GRANDIS.  IS.  ASPECTV.  FORMOSV.  HVMAN. 

HABVNDA. 
ELOQVIO.  INGENIO^IVSTCIAQVE.  PARI. 
HEC.  SIBI.  SERVABVT.  ROMANV.  MVNERA. 

NOMEN. 
CUNQVE.  DUS.  DIVUM.  CVNQVE.  CELERE.  YIRIS. 

Le  mur  d'enceinte,  comme  le  dit  cette  inscription,  fat  donc 
élevé  par  le  podestat  MarrufTo,  et  ces  fortifications,  considérées 
alors  comme  une  œuvre  grandiose,  digne  de  perpétuer  à  jamais- 
la  mémoire  de  ce  magistrat,  aussi  bien  parmi  les  immortels  que 
parmi  les  humains.  ^ 

Le  même  podestat  fit  aussi  exhausser  la  Tour  du  Christ, 
comme  l'indique  l'inscription  ci-après,  placée  au-dessus  de  la 
porte  dite  Sirkédji-capou,  conduisant  à  la  Cité  française. 

En  tète  trois  écussons,  les  mêmes  que  ceux  des  deux  inscrip- 
tions précédentes  ;  an-dessous,  cette  inscription  eu  beaux  ca- 
ractères latins,  d'un  bon  style. 

ArAQHI.  TYXHI. 
BALTASSARI.  B.  F.  MARUFO.  GALATEAE.  HVIVS  BYZAN 
TIANAE.  PERAE.  THRacio.  IN.  BOSPHORO.  CLARISSIMAE. 
GENVENSrVM.  COLONIAE.  B.  M.  PRAETORI. 


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—  149^ 

OV.    MAGISTRA.TVM.  QVEM.  SV3CEPEEIAT.  DIGNE  GE- 

BENDO. 
SUBURBANIS.  HAC.  IN.  PARTE.  MOENÏBVS.  AMPLIATIS. 

ET- AD. 
CHRISTEAM.  TVRRIM.  ANAVISTATIS.    PRISCAE.   ALTI- 

TVDINIS. 
DVPLO.  COLLATIS.GOLlem.  IPSAM.  TUTIOREM.  EXIMIAE. 

PROFA. 

ATAM.  EXORNATAMQ.  FORE.  CVRAVIT. 

GENVENSES.  AC.  SVBVRBANI.  GALATEI  CIVES.  COLo- 

NIQVE.  DEDERE. 

A  l'angle  gauche,  se  trouve  un  signe  que  nous  ne  savons  pas 
expliquer,  puis  ce  caractère  YJ^S.  M-,  et  peut-être  la  date,  in- 
déchififrable  '. 

Cette  inscription  parait  avoir  été  gravée  en  témoignage  de 
la  reconnaissance  des  Galatiotes  pour  les  travaux  accomplis  par 
leur  illustre  podestat;  elle  n'affecte  pas  le  langage  direct  d^ 
inscriptions  précédentes,  mais  s'exprime  au  nom  des  colons  et 
citoyens  génois  du  bourg  de  Galata.  Elle  offre  aussi  cela  de  par- 
ticulier qu'elle  est  la  première  tracée  en  caractères  latins,  afiSr- 
mant  ainsi  la  puissance  purement  latine  dans  ces  contrées. 

La  date  de  l'inscription  se  trouve  peut-être,  nous  l'avons  dit, 
à  la  suite  du  monogramme  du  Ctirist,  mais  nous  ne  saurions 
l'afBrmer.  Seulement  on  peut  attribuer  l'érection  de  ce  monument 
à  1446,  d'après  le  passage  suivant  du  patriarche  Constantius ^. 
(  La  Tour  du  Christ,  dit  cet  auteur,  fut  bâtie  par  Anastase  le 
Dicore  ;  elle  fut  ensuite  exhaussée  par  les  Génois,  en  1446.  >  Le 
même  auteur  dit  aussi  ^  :  t  En  1446,  les  Génois,  voyant  les 
progrès  des  Turcs,  firent  rehausser  leurs  murailles,  les  forti- 
fièrent et  y  pratiquèrent  douze  portas.  > 

1447.  Dans  la  maison  n"  5,  de  la  rue  Eeumurdju,  détruite 
depuis  par  un  incendie,  en  remontant  le  long  de  la  muraille 
N.  se  trouvait  une  pierre  portant  une  inscription.  En  tète  trois 
Poussons,  au  centre  celui  de  Gènes,  à  dextre  du  duc  Giano  de 

'  Ce  moDogramme  YnS-  M.  rappelle  celui  que  Jeanne  d'Arc  avait  but 
eon  étendar.l.  [1  devait  venir  des  Frâres  Mineurs  Réfonnés  qui  comme  niaient 
A  se  répandre  partout. 

•  Loc.  laud.  J6!.  —  *  Id.  161. 


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Gampo&egoso,  à  séaestre  celai  du  podestat  Luchino  de  Facio  ; 
au-dessous  l'inscription  suivante, en  beaux  caractères  gothiques: 

SPECTTABILIS.  ET  EGREGIVS.  DOffiïS. 
LVGHNVS.  DE.  FACIO.  POTAS.  HOS  MVROS. 
CONSTRVI.  FECrr.  M.  CCCC.  XXXX.  VU. 

1448.  Côté  de  la  mer  ;  sur  le  mur  d'un  magasin,  n'existant 

plus  aujourd'hui,  dans  Khaviar-Khan,  se  trouvait  une  pierre, 

portant  des  écnssons  presque  entièrement  détruits,  par  les  clous 

qu'on  y  avait  enfoncés  pour  suspendre  les  marchandises;  an-' 

•  dessous,  l'inscription  suivante  : 

SVB.  FELICr.  DOMINIO.  ILLVSTRISSIMI.  lANVS.  DE. 
CAMPO.  FREGOSO.    lANVENSIVM.  DVCIS.  DIGNISSIMI. 

REGENTE. 
SPECTARILI.  DOMINO.  BENEDICTO.  DE  VIVALDI.  PO- 

TESTATE.. 
PERAE.  M.  CGGG.  XXXX.  VIII.  DIE.  XX.  DEGEMRRIS. 

M.  Delaunay  a  pu  relever  ce  texte,  aujourd'hui  iacomplet. 
Dans  la  collection  photographique  on  n'en  retrouve  plus  que 
des  fragments,  tracés  d'ailleurs  en  beaux  caractères  gothiques. 

1453.  Enfin,  dans  une  maison  du  c6té  de  terre,  sise  dans 
l'enceinte  de  la  Tour  du  Christ,  on  a  retrouvé  cette  curieuse 
inscription  en  beaux  caractères  gothiques  : 

t  M.  GCCG.  LU.  DIE.  Prima.  APRILIS. 
NICOLAVS.  PAPA.  QVINTVS.  lANVENSIS. 

Au-dessous  la  tiare  pontificale,  s'élevant  entre  les  mots 
PAPA  et  QVINTVS,  au-dessous  de  la  tiare, les  clefs  de  S.Pierre. 

Trois  écnssons  :  au  centre  celui  de  Gênes,  à  dextre  celui  du 
doge  Campofregoso,  àséneatre  celui  du  podestat  Lomellini,puis 
l'inscription  ci-après: 

TEMPORE.  spectabilis  Domini  ANGELI.  lOHannIS.  LOM. 
ELINI.  P0TESTATI3.  PERE.  SVB.  DVCatu.ILLustrissimi. 
Domini.  D.  PETRI. DE.  CAMPO.FRegoso.IANuensium.DVGIS. 

1513.  L'inscription  suivante  inédite,  nous  a  été  gracieuse- 
ment communiquée,  avec  la  note  qui  l'accompagne,  par  M.  le 


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—  161  — 

B""  Alfred  Testa,  fils  du  B"  Igoace  Testa,  auteur  du  Recueil 
des  Traités  de  la  Porte  Ottomane. 

Cette  note  attestée  conforme  par  lui,  est  extraite  des  pa- 
piers  de  soa  graud-père,  Antoine  Testa  :  elle  est  ainsi  conçue  : 
(Nous  traduisons  littéralement  de  l'Italien,)  J'ai  trouvé  une 
pierre  à  demi  rompue,  mais  qui  existe  encore,  et  qui  se  con- 
serve depuis  le  temps  de  Charles  Testa,  premier  Drogman 
de  la  Cour  impériale  d'Autriche,  dans  sa  propre  maison,  ré- 
cemment construite  en  pierre,  aux  Quatre-Cbemins,  à  cfité  de 
la  Maison  Franchini.  Cette  pierre  à  laquelle  il  manque  un  mor- 
ceau, et  précisément  celui  qui  contenait  les  armes  de  la  famille, 
porte  l'inscription  suivante  : 

....MDXIII'. 

ENIA.  HOEC 

TERREMOTV.  DISTBUTA. 
ANDREAS.  TESTA, 
PROPRIO.  AERE. 
REEDIFI 
CAVIT. 

'  Hamner,  Hi'at.  deVempire  otlom.  IV, 98,  dit  ce  qui  suit,  à  l'anoée  MDX 
ou  MDXI.  x  Le  14  8ept«inbre  15U0  ContilaiitiDopIâ  fut  ébranlée  par  le  plus 
violent  tremblement  de  terre  dont  EOn  histoire  ait  gardé  le  souvenir.  109  mos- 
quées, 1070  maisons,  la  totalité  des  remparts  de  la  ville  du  ■^■'li'  'le  tn  te.rref?) 
]k  plus  grande  partie  de  ceux  du  côté  de  la  mer,  les  7  Tours  (t)  les  murs  du 
Serai  depuis  la  mer  jusqu'à  Kaghtché-capou,  Turent  ruinés  de  fond  en  com- 
ble, et  un  grand  nomtire  d'édifices  s'éi:roulérent  ;  plusieurs  milliers  d'indi- 
vidus Turent  eosevelis  sous  les  décombres....  Ce  tremblement  de  terre  tint, 
durant  45  jours,  Constantinople  et  les  provinces  d'Europe  et  d'Asie  en  de 
continualIeH  alarmes...  la  mer  furieuse  roulait  «es  vagues  au-dessus  des 
murs  de  Constanlinople  et  de  Galata,  inon<Iant  les  rues  ds  la  ville  basée  et 
du  faubourg.  Dans  Ste-Sophie.  l'enduit,  recouvrant  les  mosaïques  byzan- 
tines, tomba  entièrement,  et  l'on  vit  reparaître  les  gigantesques  images  des 
évangélistes,  comme  si  ceu.\-ci,  par  leur  présence,  eussent  voulu  protéger  les 
églises  chrétiennes,  qui  furunt  tiMles  ppiiraiicfH  au  milieu  de  cette  ruine  gé- 
nérale. Sultan  Haiezid  fit  dresser  dans  le  jardin  du  Serai,  une  tente  légère, 

BOUS  laquelle  il  demeura  lU  jours I.orsque  la  fureur  des  éléments  parut 

apaisée,  il  convoqua  un  Divan,  pour  le  rétablissement  immédiat  desinurs  de 

Conatantinopte dans  l'espace  do  dix  mois,  du   10  juin  llilO,  au  3fl  mars 

1511,  les  murs   de  Constanlinople  et  de  Galata   furent  restaurés  ;  on  3    em- 
ploya 3,tKXI  maçons,  3,000  muallems comme  journaliers,  et  «00  lahia  comme 
chaufourniers.  Un  auteur  ri.\e  à  73,000  le  nombre  des  hommes  employés  à 
ces  travaux  de  restauration,  n 
Le  fragment  de  l'inscription  Testa  attribue  la  restauration,  faite  à  ses  frais, 


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—  159  — 

(  Cet  André  Testa  est  le  premier  de  cette  famille  que  nous 
trouvons  établi  à  Constantinople.  On  ne  sait  à  quelle  époque 
elle  y  était  venue,  de  Chio,  son  lieu  d'origine.  Est-ce  quand  les 
Génois  se  rendirent  maîtres  de  cette  lie  après  la  prise  de  Cons- 
tantinople? Était-elle  à  Galata  antérieurement?  La  seconde  sup- 
position semble  plus  probable,  puisqu'elle  était  en  état  de  re- 
lever à  ses  frais  un  mur  de  la  ville,  70  ans  après  cette  data 
douloureuse.  On  peut  donc  croire  qu'il  était  le  fils  d'un  de  ces 
Génois  qui  furent  compris  dans  la  capitulation  avecMehemmed  I^ 
en  1453.  On  sait  qu'après  cette  capitulation,  Mehemmed  qui  avait 
d'abord  démoli  une  partie  des  murs  de  la  cité,Iaissa  les  habitants 
les  rétablir  à  leurs  propres  frais.  Après  le  tremblement  de  terre, 
il  est  donc  vraisemblable  qu'un  Testa  fut  assez  généreux  et  as- 
sez riche  pour  en  rétablir  une  partie,  et  c'est  en  mémoire  de 
cette  action  généreuse  que  fut  (gravée  l'Inscription  ci-dessus, 
qui  se  conserve  jusqu'à  présent  dans  la  maison  de  cette  famille 
appartenant  aujourd'hui  à  M.Charles  Testa.  (Mgr  Charles  Tes- 
ta, de  la  même  famille,  longtemps  vicaire  général,  puis  ëvëque 
de  Phacuse,  a  vécu  et  est  mort  dans  lu  même  maison.)  i 

A  ma  demande,  M.  Alfred  Testa  a  bien  voulu  faire  des  re- 
cherches pour  retrouver  cette  pierre,  comme  aussi  l'endroit  des 
murs  où  elle  avait  été  placée  :  ses  investigations  sont  restées 
sans  snccès  ;  la  pierre  retirée,  pour  une  raison  quelconque,  de 
l'endroit  où  elle  avait  été  placée,  a  disparu,  et  l'on  ignore  au- 
jourd'hui ce  qu'elle  est  devenue.  Toutefois,  comme  on  ne  sau- 
rait mettre  en  doute  l'existence  de  cette  inscription,  une  partie 
de  la  figure,  et  le  texte  étant  conservés  dans  les  papiers  de  la 
famille,  ce  document,  à  part  tout  intérêt  particulier,  offre  cette 
importance  qu'il  atteste  une  fois  de  plus  «  la  conservation  des 
murailles  de  Galata  par  les  vainqueurs,  et  constate  en  outre  la 
faculté  laissée  à  ses  habitants  d'en  réparer  les  parties  d^adées 
ou  tombées  en  ruine.  > 

En  somme  l'ensemble  des  fortifications  de  Galata  se  compo- 
sait donc  :  de  l'enceinte,  successivement  reculée  et  agrandie 


à  l'an  1513.  11  faudrait  peut-âtre  subslituer  la  date  de  1510  ou  1511  à  celle 
de  1513,  D'après  Uiovio  {Fotti  illii^tri  ,/i  RHim,  dans  Sansovino).  11  est  en 
effet  difKcile  d'admettre  que  celte  |>artie  de  la  restauration  des  mure  de  Ga- 
lata n'ait  élé  accomplie  qu'au  bout  dn  4  années,  après  le  désastre  dont  l'ina- 
cription  elle-même  fait  mention. 


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—  153  — 

jusqu'aux  limites  indiquées  aa  plan  ci-dessus,  et  comprenant, 
du  côté  de  la  mer,  le  château  de  Qalata,  où  se  trouvait,  à  la 
pointe,  la  tour  de  la  chaîne,  plus  haut  du  côté  de  la  terre 
l'enceinte  fortifiée  de  St-Benoit,  et  enÛB  la  Tour  du  Christ, 
dominant  le  tout,  vigie  défensive,  du  cétéde  la  terre,  comme 
celle  de  la  Chaîne  du  cdté  de  la  mer. 

St-Beooit,  ou  plutôt  son  enclos,  paraît  en  effet  avoir  été  lui- 
même  un  ouvrage  de  défense,  complément  du  château  de  Ga^ 
tata,  et  de  la  Tour  du  ChiHst,  et  les  reliant  entre  eux,  en  de- 
hors de  la  délimitation  de  1303  et  1304.  Cet  enclos  formait  un 
carré  long  entouré  de  tous  côtés  par  une  muraille  crénelée,  dé- 
fendue, au  moins  sur  deux  de  ses  angles,  N-O  et  N-E,  par  de 
grosses  tours  rondes.  St-François  et  St-Paul,  dont  il  sera  parlé 
plus  loin,  n'avaient  pas  d'enceintes  fortifiées,  ces  couvents  étant 
dans  l'intérieur  de  l'enceinte.  Enfin  la  tour  carrée  du  beffroi  de 
St-Benolt  parait  elle-même  avoir  été  la  tour  de  vigie  de  cet 
ouvrage  militaire'. 

Mais  revenons  en  arrière  pour  reprendre  la  suite  des  événe- 
ments, après  nous  en  être  écartés  fort  longtemps.  En  1386,  la 
commune  s'engagea,  par  traité,  à  prendre  les  armes  pour  la  dé- 
fense de  l'empire,  contre  les  ennemis  extérieurs  ;  ce  qui  ne  l'em- 
pêcha pas,  l'année  suivante,  de  confirmer,  auprès  de  Sultan 
Murad,  les  engagements  contractés  antérieurement  par  elle,  avec 
Orkhan  -.  Aussi  quelques  années  plustard,  la  métropole  envoyait- 
elle  quelques  forces  au  secours  de  son  allié,  l'empereur  grec, 
contre  Baïezid  lildirim.  Le  roi  de  France,  de  son  cùté,  fit  ar- 
mer k  Gènes  deux  galères,  sur  lesquelles  Boucicault  s'embarqua. 
n  se  rendait  en  Asie  avec  ses  preux;  mais  ayant  appris  que  Péra 
et  les  fiiubonrgsdeConstantinopIe  étaient  attaqués  par  les  Turcs, 
il  y  conduisit  ses  chevaliers.  Ce  secours  inattendu  déconcerta 
l'ennemi,  et  Péra  fut  sauvé.  Ces  nobles  aventuriers  protégèrent 
le  pays  durant  un  an.  Les  Ottomans  n'en  continuaient  pas  moins 
de  menacer  la  colline  de  Péra,  qu'ils  considéraient  comme  le 
principal  boulevard  de  Constantlnople.  Le  redoutable  rival  tar- 
tare  des  Ottomans,  Timour,  instruit  que  les  chrétiens  étaient, 


'  Voir  sur  Tart  militaire  dus  croisé»,  l' h' (ic/e  uni 
lUitn-re  det  croisé»  en  Syrie.  parO.  Rey.  Pari»  li 
'  Saulf,  II,  S5. 


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—  154  — 

aussi  bien  que  lui,  ennemis  de  BdSeàd,  fit  parvenir  aux  Gala- 
tiotes  ses  encourageioents  et  leur  envoya  des  présents'.  Ceux- 
ci  y  répondirent  par  des  démonstrations,  en  arborant  solennel- 
lement, dans  Péra,  le  drapeau  du  conquérant  mongol.  Celui-ci 
les  délivra  de  Baïezld  ;  mais  cependant  il  ravagea  les  colonies 
génoises  de  Smyrne  et  de  Phokia.  Manuel  parcourut  la  France 
et  l'Angleterre,  pour  y  solliciter  des  secours  ;  il  vint  aussi  à 
Gtênes,  où  il  fut  reçu  par  Boucicault,  avec  de  grands  honneurs. 
L'état  lui  promit  l'envoi  de  trois  galères  armées,-  qui  devaient 
surtout  pourvoir  à  la  défense  de  Péra,  et  lui  donna  en  présent 
3,000  florins  2. 

Toutefois,  et  peu  de  temps  après  que  sultan  Méhemmed  II  eut 
élevé,  sur  la  rive  droite  du  Bosphore,  une  forteresse  semblable 
à  celle  que  son  père  avait  construite  sur  la  rive  gauche,  aux 
Eaux  douces,  les  Galatiotes  effrayés  des  événements  qui  s'an- 
Qonçaient  dans  un  très  prochain  avenir,  envoyèrent  au  sultan 
deux  députés  qui  renouvelèrent  avec  lui  les  anciens  traités*. 
Nous  avons  eu  communication  d'un  t  commandement  conte- 
nant des  privilèges,  en  forme  de  capitulations,  accordées  aux 
Génois,  natifs,  habitants  de  Galuta  et  aux  Galatiotes,  par  Sul- 
tan Mebemmed  II,  et  daté  d'AndrinopIe,  le  7  sefer,  855  — 1451 
de  Jésus-Christ,  dans  la  personne  de  Peroz,  Gara,  Ayoz,  Agor- 
tez  et  Arcaz  (?,)  princes  et  ambassadeurs  de  la  ville  de  Galata, 
demandant  particulièrement  de  Francisco,  agent  du  sultan,  de 

'  yiaceaa,  Higioire  'le  la  Ri'puhUqnc  de  Génaa.  112  et  aeq.Timour  ne  raisait 
que  suivre,  en  cela,  la  politique  de  ses  prâdëcesBeura  :  ainsi,  tnndis  qu'à 
Boukkhara  et  à  Samarqand,  les  BoIda.ts  deDjinguiz  tran  s  formaient  les  mos- 
quées i:iiécuries,leschrétiens]ouissaient  d'une  grande  liberté  dans  ses  états; 
dans  le  camp  mime  de  lloulagau,  le  destructeur  du  Khalifat,  par  la  grande 
épouse  de  ce  prince.  Les  Khans  mongols  entretenaient  des  correspondances 
atfec  leapnnces  chrétiens,  notamment  avec  les  rois  de  ^'^inoe  ;  la  formule 
du  signe  de  la  croix  se  lisait  sur  les  monnaies  de  certains  d'entre  eux  ;  enfin 
l'on  crutà  la  possibilité  d'une  alliance  entre  eux  et  les  croisés  ;  mais  malgré 
les  apparences  qui  purent  donner  le  change  à  rt:urope,  ces  peuplades, 
indifTérentes,  pour  le  fond,  ù  toute  croyance  religieuse  quelconque,  n'avaient 
d'autre  but  que  la  domination  ;  et  quoique  devenus  musulmans,  Qhazan- 
khan,  Khouda-Baudé  et  Timour  n'en  furent  pas  moins  les  ennemis  de  leurs 
nouveaux  coreligionnaires,  ijuand  ceux-ci  étalent  un  obstacle  a  l'exercice 
de  leur  domination.  (V.  Aoj  Triiiti'K  el  C/ipiliilolions  de  la  Frarwc  en  Orient, 
p.  40.) 

'  V.  Vincens.  toc.  lau-l.  p,  119, 120. 

3  Sauli,  II,  149. 


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—  155  — 

traiter  av«c  ce  prince,  leqnel  leur  accorde  des  garanties,  immu- 
nités, pour  leur  commerce,  leurs  navires,  leurs  personnes,  etc  ' .  » 

D'autre  part,  Gênes  vint  au  secours  de  la  capitale  byzantine, 
menacée  de  plus  en  plus  :  elle  lui  envoya  deux  galères  sous  le 
commandement  de  Ctiovanni  Giustiniani,  qui  deux  ans  avant 
le  siège  de  Constantinople  avait  accepté  le  titre  de  podestat  de 
Crimée^. 

Quoi  qu'il  en  soit,  la  colonie  galatiote  jouait,  en  quelque 
sorte,  un  double  jen  :  elle  défendait  l'empire,  et  en  même  temps, 
cbercbait  à  se  ménager  la  bienveillance  de  I'3ssaillant\  Pen- 
dant ce  temps,  l'empereur  qui  s'était  préparé  à  la  mort,  par  la 
réception  des  sacrements,  se  dirigea  vers  la  porte  St-Romain, 
pour  la  défendre.  Il  succomba  au  milieu  des  siens,  et  la  capitale 
tomba  elle-même  au  pouvoir  des  Turcs  *.  Beaucoup  de  Génois 
qui  avaient  combattu  pour  l'empereur  furent  tués,  d'autres  se 
retirèrent  sur  leurs  navires,  ou  sur  ceux  des  Vénitiens  ;  les 
autres  enfin,  restés  spectateurs,  se  jetèrent  néanmoins  dans 
leurs  navires  arec  leurs  trésors.  MaisMëhemmed  ne  voulant  pas 
compromettre  le  résultat  de  la  conquête,  députa  vers  eux 
Saqnos  Pacha,  pour  les  engager  à  ne  pas  déserter  les  lieux,  leur 
donnant  en  même  temps  l'assurance  du  renouvellement  des 
traités  conclus  par  eux  avec  les  empereurs  grecs.  Après  en  avoir  ' 
délibéré,  les  cbefe'  de  la  colonie  décidèrent  d'envoyer  au  vain- 
queur les  clefsdeleur  ville.  Celui-ci  parut  les  recevoir  avec  bon- 
té, et  les  Galatiotes,  croyant  l'avoir  apaisé,  lui  députèrent  en- 
suite des  messagers  pour  solliciter  le  renouvellement  des 
privilèges  byzantins.  Changeant  alors  de  visage,  sultan  Me* 
hemmed  reprocha  aux  Galatiotes  le  manque  de  sincérité  de  leur 
conduite,  et  leur  attribua  l'insuccès  de  ses  premières  opérations, 
par  les  secours  qu'ils  avaient  donnés  à  l'empereur  ;  ils  durent 
dès  lors  renoncer  au  renouvellement  pur  et  simple  de  leurs  ca- 
pitulations avec  les  Grecs  ^,  et  se  contenter  de  celles  que  le 
vainqueur  leur  accorda.  Selon  le  rapport  de  Sauli  ^,  le  podestat 

1  Une  version  française  de  cette  capitulation  se  trouve  dans  les  archives 
de  rAmbasiade  de  France.  Renueil  ileê  Traitég,  etc.  II. 
!  Sailli,  II,  153. 
ï  W-,  162.—  '  /</.,169. 
>•  Hammer,  ITI,  168. 
•Sauli,  lor.  lau'l.  11,172. 


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—  156  - 

de  Galata  ■  n'aurait  pas  Toala  signer  l'acte  de  capitalation,  qui 
fut  rédigé  seulement  au  nom  des  bourgeois  sub  nomine  bur- 
genstum.) 

Le  conseil  supérieur  de  Gènes,  vu  l'impossibilité  où  se  troa- 
vait  la  République  de  faire  passer  des  forces  suffisantes  en 
Orient,  décida  de  remettre  les  affaires  de  la  Mer  noire  al  ma- 
gistrato  di  San  Giorgio,  et  lui  transmit  toute  sa  souveraineté 
sui' les  autres  contrées  de  l'Orient;  en  un  mot  la  République  se 
dépouilla,  ainsi  que  l'U/flsio  de  Romanie,  de  toute  sa  souve- 
raineté, en  faveur  du  Magistrato  di  San  Qtorgio-. 

On  Ut  dans  une  relation  contemporaine,  relative  aux  événe- 
ments qui  précédèrent  la  chute  de  Constantinople  ^  ;  «  XXVI. 
Peyre  n'avoit  eu  nul  assault,  et  estoit  la  plus  grande  part  des 
Peyriens  à  Constantinople  pour  deffendre.  Ceulx  qui  estoient 
à  Peyre,  qui  neavoient  rien  esté  de  leurs  biens,  délibérèrent  de 
bailler  les  clefe  au  Turc,  et  se  recommander  à  luy,  et  luy  offrir 
la  cité,  où  il  s'y  avoit  en  tout  six  cens  de  hommes  et  de 
femmes,  montèrent  sur  une  nef  de  Gennevois  pour  s'en  aller 
ensemble  audit  Jacques  (?)  que  une  accoinsaire  chargée  de 
femmes  de  Peyre  fut  prise  des  Turcs,  i  Christoforo  Ricbîero* 
dit  que  ï  les  conditions  de  la  capitulation  ne  furent  pas  obser- 
vées, et  que  Pèra  n'aurait  pas  échappé  aux  horreurs  d'un  siège.  » 

On  trouve  également  dans  le  R.  P.  Vigna'  d'après  il  Pe- 
ratto  :  «  Après  dix  (?)  ans  de  siège,  Mehemmed  II,  roi  des  Turcs, 
s'était  rendu  maître,  le  29  mai  1453,  de  la  cité  de  Constanti- 
nople, capitale  de  l'empire  grec  ;  mais  on  avait  eu  soin,  quelque 
temps  auparavant,  de  transporter  dans  la  ville  voisine,  de  Fera, 

'  Selon  une  note  ^^VAtgedio  di  Conitantinopoli,  ce  poilestat  aurait  été  An- 
geio  Zaccâri&.-et  d'après  Serra,  A ngelo  Giovanni  l.omellini.  Selon  M.  Is 
Chev.  de  Sîmoni,  Memorie  délia  conqaUta  di  Conttanlînopoli  de  Aiiamo  Hi 
Mootaldo,  le  Podestat  de  Péra,  alors  en  service  était  [/)mellini.  Cr.  aussi 
Pueculusaoaoté  parle  D'  Dethier,  p.  340. 

'  Sauiî,  II,  173. 

'  Rcl'itiim  du  Florentin  Giacomo  Tbidaldi.  présent  à  la  prise  de  Constan- 
tinople le  X.\IX  may,  1453  (TAegaiirut  nr.Du.s  anrrdotorum.  l'aria  1717)  /n- 
formatiofi»  enrayées  en  1453,  tant  par  Francisco  de  Franc,  à  Mgr  ie  Car- 
dinal d'Avignon,  que  par  Jehan  Dlanchin  et  Jacques  Tedalrli,  marchand 
florentin,  sur  la  prinse  de  Constantinople.  (Dethier,  loc.  taud.  887,904.) 

•  Rapporté  par  .Sansovino,  p.  6(1.  Venise,  1564. 

»  ïaitstr<uii>ne  Morira...  ilelVanlii-kiasima  Meta  di  Sta  Maria  di Cattello, 
inCenoea,  parle   R.  P.   Vigna,   Gènes  1864.  p.  139. 


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—  157  — 

alors  au  pouvoir  des  Génois,  an  grand  nombre  de  saintes  re- 
tiques. En  1461  <,  avant  que  cette  cité  de  Péra  tombAt  entre  les 
mains  des  Turcs,  ces  reliqnes  forent  envoyées  à  Gènes  et  distri- 
buées, en  même  temps  que  bien  des  ]ivres  et  autres  choses  de 
prix,  entre  les  églises  et  les  principaux  monastères,  par  quel- 
ques patriciens  députés  à  cet  effet  par  le  sérénissime  gouverne- 
ment. Dans  le  monastère  de  Sta-Maria  di  Castello,  le  !'■'  oc- 
tobre 1461,  (après  que  les  administrateurs  de  l'église  eurent 
pris  l'engagement  de  restituer  leur  dépôt  aux  églises  d'où  ils 
avaient  été  tirés,  si  jamais  ces  pays  revenaient  au  pouvoir  des 
chrétiens,  comme  il  eonste  d'un  papier,  conservé  dans  la  sacris- 
tie, dressé  par  Giacomo  Bracelli,  notaire  public,  et  signé  par  les 
seigneurs  Paolo  Lorenzo,  et  Baldassare  ûiustiniani),  on  déposa 
les  reliques  suivantes  :  trois  croix  d'argent  contenant  des  frag- 
ments de  la  Sainte  Croix  ;  les  reliques  de  St  Paul  et  de  St  Bar- 
tiiélemy  apôtres  ;  de  St  Lazare,  le  ressuscité  ;  de  St  Denys, 
évèque  et  martyr;  de  St  Constantin,  empereur;  de  Ste  Agathe, 
de  St  Jean-Baptiste  ;  des  SS.  Martin  et  Rafaël,  évèques  ;  des 
88.  Grégoire,  Urbain,  Philippe,  Daniel;  de  Ste  Marguerite  ;  des 
SS.  Martyrs  Maurice,  Ignace, Pierre  de  Vérone,  Biaise  ;  un  doigt 
de  Ste  Madeleine  et  de  St  Laurent,  un  bras  et  la  main  de 
Ste  Praxède  ;  une  partie  de  la  main  de  St  Etienne  premier  martjT  ; 
enBn  des  morceaux  du  cilice  de  SIe  Catherine  et  de  la  chappe  de 
St  Vincent  Ferrier.  0  y  déposa  encore  deux  corbeilles,  l'une 
d'argent,  l'autre  de  serpentine,  pleines  aussi  de  diverses  reliques 
sans  nom.  On  y  déposa  encore  différents  autres  objets,  entre 
autres  vingt-quatre  valûmes  et  la  sainte  image  Notre-Dame, 
dite  de  St  Luc-  travaillée  sur  argent,  et  ornée  de  perles  et 
d'un  anneau  précieux  :  elle  est  encore  exposée  chaque  jour  b. 
la  vénération  des  fidèles  sur  l'autel  de  l'Assomption.  > 

La  capitulation  donnée  par  sultan  Mehemmed  aux  Péro-Ga- 
latiotes  laissait  à  ceux-ci  c  leurs  biens,  maisons,  magasins, 
vignes,  moulins,  navires,  barqnes,  etc.,  et  elle  leur  accordait  le 

<  Ne  faut-il  pas  lira  1451  f  date  qui  tomipoDdrait  aux  apprUenaion*  Jn*- 
plrâe>  aux  Galatiolea  par  aultan  Mehemmed,  avec  lequel,  en  cette  même 
aonée,  U*  conolurent  une  lorte  de  capitulation,  comme  on  a  vu  plus  haut  T 

*  E«t-il  encore  question  de  l'Hodighitrîaa,  dont  il  a  <té  parlé  plua  haul(N.D. 
de  Coaitanlloople)!  Il  pantttialt  aaaez  qu'il  eat  ici  question  d'un  de  caa  nom- 
breux tableaux  que  l'on  attribue  &  St  Luc. 


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—  158  — 

libre  trafic  daus  tout  l'empire, l'âxemptioa  de  doaane,du  service 
forcé,  moyennaDt  paiement  de  la  capitation;  la  conservation 
de  leurs  églises,  de  leurs  cbants.  Tout  en  interdisant  l'usage 
des  cloches,  elle  promettait  de  ne  pas  convertir  les  églises  en 
mosquées,  mais  interdisait  d'en  construire  de  nouvelles  '  ;  elle 
laissait  le  jugement  des  affaires  commerciales  à  un  ancien,  élu 
par  la  commune,  et  autorisait  l'élection  d'un  des  membres  de 
celle-ci  pour  l'administration  de  ses  affaires-.  > 

D'après  Hammer,ciDq  jours  après  la  chute  de  Coostantinople, 
sultan  Mebemmed  se  serait  rendu  à  Galata  pour  y  faire  exécu- 
ter les  démolitions  stipulées  dans  la  capitulation  :  f  Na  khalaço 
ton  castron  tou.  Je  démolirai  le  château',  >  Selon  Sauli*,  le 
sultan  fit  démolir  les  murailles  seulement  du  côté  de  terre, 
laissant  debout  celles  qui  regardaient  la  mer  ;  il  ordonna  ensuite 
que  les  maisons  et  magasins  des  fuyards  fussent  mis  sous  scel-^ 
lés,  après  inventaire  de  leur  contenu,  pour  le  tout  être  remis 
aux  légitimes  propriétaires,  dans  le  cas  où  ceux-ci  rentreraient 
à  leur  domicile,  dans  le  terme  de  trois  mois.  Un  navire  leur  fut 
expédié,  pour  les  informer  de  ces  dispositions.  Il  ne  parait  pas 
que  cet  appel  fat  entendu  et  que  Galata  reprit  son  ancienne 
physionomie  :  loin  de  là  ;  bon  nombre  de  ses  habitants  émi- 
grèrent  ;  il  se  dépeupla,  et  pour  longtemps  :  <  Galata,  dit  le 
'  baileCt.  Moro,  en  1 590, prima abitato  da  Cristiani...  è  occupato 
al  présente  per  la  maggior  parte  da  Turcbi,  tanto  dentro, 
quanto  aU'intomo  ^  > 

Les  rapports  relatifs  au  sort  de  Galata  après  la  prise  de  cette 
ville,  bien  que  constatés  par  de  nombreux  témoignages,  pa- 
raissent, en  apparence  du  moins,  être  contredits  par  les  faits. 
Sansovino*  termine  sa  lettre  adressée  de  Chio  au  pape  Nico- 
las V,  le  17  août  1453,par  le  récit  de  la  capitulation  des  envoyés 

'  Cf.  mon  fetva  sur  la  condition  des  Zlminia. 

*  Hammer,  loc.  laud.  \l,  525.  Négocialiom  de  la  France  ilann  le  Leeant,  I," 
CXIX.  Selon  Hammer,  XII,  120,  cette  capitulation  aurait  été  renouvelle 
en  1613. 

ï  Hammer,  II,  523. 

*  Loc.  laud.  II,  172. 

*  Relation!  renetc,  3*  térie,  III,  334. 

■  Notices  et  extraits  de  mst.  pièces  diplomatiques  tirées  des  archives  de 
G4QBS,  XI;  reproduite  aiiss!  daus  Sauli,  II,  163. 


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—  159  — 

pérotes,  et  ajoate  que  le  sultan  ordonna  la  démolition  c  delta 
toTTe  dt  Santa  Croce,  au  haut  de  laquelle  se  trouvait  une 
croix  ',  et  que  cette  tour  fut  ruinée  jusqu'aux  fondements.  » 
Le  même  témoignage  est  rendu  par  le  cardinal  Isidore  Ruthe- 
no,  dans  sa  lettre  au  pape,  après  la  prise  de  la  ville  '  ;  <  Turcbi 
occuparono  Fera,  poco  di  lungl,  sptanando  le  sue  mura 
flno  a  terra.  Délie  campane  dî  cbiesa,  fecerono  bombarde, 
Ttiandarono  a  terra  ta  torre  del  Croce,  in  cima  délia  quale 
era  un  gran  croce.  >  Crasius^  rapporte  aussi  les  mêmes  faits. 
Enfin,  on  lit  dans  la  version  latine  d'une  lettre  datée  de  Péra, 
le  33  juin  1453,  et  publiée  par  Sylvestre'  de  Sacy*  :  le  sultan... 
<  burgos  et  partem  fossorum  de  Castro  dirut  fecit,  turrîm 
Sanctœ  Cruels  dlrui  fecit'^...  Selon  les  renseignements  qui 
nous  ont  été  fournis  par  S.  E.  Ahmed  Vefyq  effendi,  d'après  les 
bistorieus  turcs,  sultan  Mehemmed  aurait  ordonné,  en  effet,  la 
démolition  de  la  tour  du  Cbrîst  et  des  murailles  d'enceinte  ; 
mais  il  se  serait  contenté  de  faire  couper  seulement  la  tour  de 
dix  archines^  dans  sa  hauteur,  et  de  raser  çà  et  là  les  murailles 
sur  une  étendue  de  40  arcbines.  Après  avoir  ainsi  fait  acte  de 
souveraineté,  le  sultan  n'aurait  pas  été  plus  loin  ;  et  Saghanos- 
Pacha,  signataire,  pour  sultan  Mehemmed,  de  la  capitulation 
galatiote,  et  dont  l'un  des  descendants  vivait  encore  en  1868, 
aurait  fait  ensuite  relever  la  tour,  en  y  remplaçant  la  croix  gé- 
noise par  le  drapeau  ottoman. 

Depuis  la  publication  de  la  première  édition  de  ce  travail, 
j'ai  été  assez  heureux,  grâce  à  la  libéralité  de  M.  le  B""  Alfred 
Testa,  pour  avoir  communication  de  documents  appartenant  à 
la  succession  de  son  père,  le  B""  Ignace  Testa  :  le  premier  est 

1  Édit.  de  1564,  p.  61,  verso. 

*  Les  armes  de  G6nes  se  composaient  d'une  croix,  partageant  l'écusson  de 
part  en  part. 

'  Sansovino,  p.  G3. 

*  Turco-Grœna,  p.  54. 

'  On  voit  ici  clairement  établie  la  distinction  entra  le  château  de  Galata 
et,  la  Tour  de  Sainte-Croix.  Jean  de  Lastic,  grand  maître  de  Rhodes,  écrit 
aussi  dans  sa  btdU  t  Robert  de  Latil,  prieur  d'Angleterre,  d'Irlande  et  d'E- 
cosse :  Peram,  cinilatem  Janaansium,  »inc  armis,  magnas  Teucer  prwfatUÊ 

obtinuit,  muros   ejua  solo  œquavjt,  incolis  censum  imposuit (Dethier, 

880.) 

*  L'archiae  est  à,e  65  centimâtrcs. 


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l'original  grec  de  la  capitulation  galatiote,  dont  voici  la  descrip- 
tion exacte  : 

f  En  tète,  en  caractères  turcs  le  Toughra  impérial,  dans  le- 
quel on  lit  le  nom  du  conquérant,  «  Mehemmed,  >  puis  au- 
dessons,  le  texte  grec,  dans  lequel  je  lis,  avec  M.  Dethier,  i  na 
ml  khalaçà  ton  castron  tou,  >  je  ne  détruirai  pas  la  place, 
(  le  cb&teau,  l'enceinte  fortifiée.  >  Le  négatif  employé  au  lieu  de 
l'affirmatif  de  la  version  Hammer;  le  texte  entier  de  cette  ver- 
sion est  moins  humiliant  et  plus  honorable,  dit  M.  Dethier,  que 
la  version  donnée  par  Hammer.  Le  document  se  termine  par  ces 
mots  écrits  en  caractères  turco-arabes  ;  Tahriran  fl  eoà/Oiirt 
djemasi  ul  eioel  sêne'i  seba  au  khamsin  au  temân-mUébi 
maqàmi  costantiniié  ■■ 

et  plus  bas  au  milieu  de  la  page,  de  petit  format  d'ailleurs, 
et  roulée  autour  d'un  petit  rouleau  en  bois,  Hatvara-ho  Za- 
ghanos  elfaqyr,  c  donné  dans  la  dernière  décade  de  Djémazi- 
ewel  857  —  de  notre  résidence  de  Constantinople. 

écrit  par  Zaghanos  le  pauvre.  > 

M.  Alfred  Testa  a  bien  voulu  aussi  nous  communiquer  le  re- 
nouvellement turc  de  la  capitulation  galatiote,  donné  par  sultan 
Ahmed,  en  1022  de  l'Hégire.  Après  le  préambule,  on  y  trouve 
rapporté,  littéralement,  la  capitulation,  citée  plus  haut  et  signée 
pour  sultan  Mehemmed,par  Sagbanos.On  ylitle  passage  turc  sui- 
vant, traduction  âdèle  de  la  phrase  grecque  reproduite  ci-dessus  : 

ben  dahht  uzerlertné  asker  ilé  vamp,  calàlerêni  iiqup 
hharalf  etméïêim  <  de  plus,  je  ne  marcherai  pas  contre  eux 
pour  détruire  et  renverser  leur  forteresse....  les  habitants  con- 
serveront leurs  églises  et  leur  culte;  mais  11  leur  est  interdit  de 
sonner  les  cloches  (  Tchân]  ou  de  se  servir  de  crécelles  (niqous.) 
Je  ne  convertirai  pas  leurs  églises  en  mosquées,  mais  ils  ne 
pourront  pas  en  élever  de  nouvelles  <.  > 

Une  version  française  de  ce  document  existant  dans  les  archi- 
ves de  l'ambassade  [Recueil  des  Traités,  etc.)  porte  :  f  Je  n'irai 
pas  contre  eux  avec  des  troupes  pour  détruire  leur  château.  > 

D'autre  part  nous  lisons  dans  une  traduction  française  de  la 
eapitolation  galatiote,  existant  dans  les  archives  des  RR.  PP. 
Capucins  de  Péra  : 

<  V.  DOtre  fetaa  sur  la  condition  dei  tinunit. 


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i  ■   *   ■ 


TOUR    DE    GALATA 


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—  161  — 

(  Tous  les  Seigneurs  de  Galata  ont  envoyé  Ici,  à  la  porte  de 
mon  empire,  les  honnorés  seigneurs,  le  Seigneur  Babila-Para- 
vezo  et  le  Seigneur  Marque  le  Drifrancos,  (peut-être  Babilano 
Pallavicini  et  Marco  De^anchis)  et  leur  interprète  Bangoutze 
(peut-être  Pugliuzzi,  nommé  depuis  le  5  juin  1447,  par  la  si- 
gnorta  de  Gênes,  interprète  de  la  colonie,  (de  Simoni,  loc. 
laud.  307.)  Us  se  soumettent  et  se  font  sujets  de  nia  gran- 
deur  etque  je  ne  ruinerai  pas  leur  château....  qu'ils  auront 

leurs  églises  où  ils  officieront,  pourvu  qu'ils  ne  battent  point 
de  cloches  ny  simandi'es;  que  je  ne  ferai  point  mosquées  de 
leurs  église,  et  n'en  fairont  pas  d'aultres....  et  qu'il  n'y  aura 

point  de  Turcs  parmy  eux,  mais  en  dehors et  ces  mesmes 

Galatiotes  auront  pouvoir  de  créer  un  proto  ieros  pour  accom- 
moder les  différents  des  marchands....  le  présent  serment  a  été 
escrit,  et  ma  grandeur  l'a  signé  l'an  6961,  Ind.  I'  à  Constanti- 
nople le  1" octobre'.  > 

'LeLibro  maesiro  delta  Comunità  dt  Fera  (Voir  ci-après) 
contient  aussi  une  version  italienne  de  la  capitulation  galatlote, 
on  y  lit  :  t  Et  en  signe  d'amitié,  ils  m'ont  présenté  les  clefs  de 
leur  ville,  et  se  sont  fait  ainsi  nos  sujets  :  nous  les  avons  donc 
acceptas  en  cette  condition,  et  ils  pourront  vivre,  se  régir  et  se 
gouoerner  comme  ils  l'ont  fait  par  le  f?issk, sans  que  je  puisse 
aller,  avec  mon  armée,  occuper  ou  ruiner  leur  ville.  » 

La  relation  de  Cristoforo  Richiero  parait  donner  l'explication 
de  la  contradiction  existant  entre  le  texte  de  la  capitulation  et 
les  faits  rapportés  parles  contemporains;  «:  ma  poi  assallata 
Fera  inimichevolmente  e  ciotata  la  ferle  publica,  si  messe  a 
for^wrtre  le  chiese,  i  palazzi  e  le  mura'.  »  Ce  rapport  concor- 
derait avec  le  dire  de  Hammer,  quant  à  l'effet,  tout  en  différant 
quanta  la  cause. 

Enfin  nous  rappellerons  ici  l'inscription  ci-dessus,  de  1513, 
à  laquelle  nous  ajouterons  le  passage  suivant,  emprunté  aux 
actes  f  della  Comunità  di  Fera,  >  du  8  octobre  1636,  et  du  7  dé- 
cembre 1640,  où  celle-ci,  dans  l'énoncé  de  ses  dépenses,  men- 
tionne celles  faites  n  pour  la  réparation  aux  murs  de  la  ville, 
attenant  aux  églises.  > 

Dans  l'opinion  d'Ahmed  Vefiq  effendi,  sultan  Mehemmed  n'au- 

1  Sao«ovino,  III,  p.  66.     , 


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—  163  — 

rait  fait  abattre  qu'nne  sorte  de  mur  d'enceinte,  entourant  un 
terrain  sis  du  côté  des  Petits  champs  (de  l'arsenal)  dans  leqael 
se  serait  trouvée  une  église  de  Ste-Vënérande. 

Le  professenr  Heyd  est  aussi  d'avis,  d'après  M.  de  Mas-La- 
trie, que  les  démolitions  de  Péra  ne  durent  être  que  partielles 
et  superficielles. 

Le  Patriarche  Constantius  ;'163)  dit  aussi  :  <  les  murailles  du 
côté  de  la  terre  furent  abattues  par  Mahomet  II,  deux  se- 
maines après  la  prise  de  Conslantînople,  >  et  on  verra  plus  loin 
le  rapport  du  prêtre  arménien,  reproduit  par  M,  Dethier,  disant 
que  «  sur  l'ordre  du  maître,  les  Qalatiotes  rasèrent  leurs  murs 
du  côté  de  la  terre.  » 

On  lit  les  mêmes  dispositions  dans  un  firman  délivré  à  la  Na- 
tion franqne  de  Galata,  sur  sa  requête,  à  la  date  de  Mouharrem 
1026-1616,  où  le  texte  de  cette  capitulation  est  rapporté  in 
extenso (  Je  n'irai  point  sur  eux  avec  des  troupes,  pour  dé- 
molir leur  château ils  garderont  leurs  églises  et  feront  lec- 
tures selon  leur  loi,  mais  ne  sonneront  point  de  cloches je 

ne  prendrai  point  leurs  églises  pour  en  faire  des  mosquées,  mais 
ils  n'en  bâtiront  point-  de  nouvelles.,..  » 

Ces  capitulations  furent  encore  renouvelées  dans  la  1™  décade 
de  Rebi-alther  1033-1640,  P.  C.  (La  version  de  cette  capitu- 
lation donnée  par  Zorzo  Dolflni,  Asseâio  e  presa  di  Constan- 
tinopoli,  n'est  pas  exacte.  Dethier,  1040.) 

Dans  un  autre  renouvellement,  aussi  de  Mouharrem,  1026- 

1616,  on  ajoute  les   conditions  marquées  ailleurs  :  c ils 

constitueront  parmi  eux  la  personne  qu'ils  voudront,  pour  être 
leur  prévôt  dans  leurs  affaîros.  >  De  la  part  des  chrétiens,  ces 
engagements  ont  été  tenus;  on  n'en  peut  dire  autant  de  l'autre 
partie.  (V.  ci-après  St-Prancois  et  St-Paul.) 

M.  le  Dr.  Dethier  incline  à  penser  que  <  la  tour  du  Christ 
ou  de  la  Croix  »  était  celle  qui  se  trouvait  près  de  la  douane 
actuelle  de  Galata,  et  à  laquelle  la  chaîne  était  attachée.  Cette 
tour,  ajoute-t-il,  parait  avoir  eu  aussi  une  horloge  ;  et,  pour 
cette  raison,  on  l'aura  nommée  aussi  <  tour  de  l'Horloge.  »  Mal- 
gré l'importance  que  dût  avoir,  sous  certains  rapports,  cette 
tour,  destinée  à  la  défense,  et  surtout  à  la  fermeture  du  port, 
elle  ne  parait  pas,  cependant,  d'après  les  dessins  les  plus  anciens 
que  nous  possédons,  avoir  été  la  principale  des  tours  da  l'en- 


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_  163  — 

ceinte  ;  et  l'horloge  dont  parle  le  prêtre  arménien  cité  par  M.  De- 
thier,  pourrait  se  rapporter  à  la  tour  actuelle  de  Galata,  qui  aurait 
«n  son  beffroi,  destiné,  de  la  tour  vigie,  de  la  tour  maîtresse, 
voisine  de  l'hdtel  des  Podestats,  aujourd'hui  le  Khan  Franchini, 
sis  k  l'angle  des  rues  Perchembè-Bazar  et  Tchiuac,  auquel,  selon 
«ertains  dires,  elle  était  reliée  par  une  voie  souterraine,  &  ap- 
peler, en  cas  de  besoin,  )a  population  galatîote  à  la  défense  de 
la  cité  '. 

Selon  M.  Delaunay  <  l'extérieur  de  cet  hôtel,  ou  Hôtel-de- 
ville  aurait  beaucoup  souffert;  le  splendide  escalier  qui  y  con- 
duisait a  été  démoli,  les  étages  supérieurs  ont  subi  des  transfor- 
mations regrettables.  La  salle  du  conseil  serait  pourtant  encore 
reconnaissable.  >  Dans  le  vestibule  actuel  du  Khan  Franchini, 
oa  retrouve,  couverte  d'un  badigeon,  une  pierre  commémorative, 
malheureusement  sans  date,  et  dont  M.  Delaunay  ne  reproduit 
pas  le  texte,  mais  sur  laquelle  se  trouvent  les  armes  d'ua  Uarl- 
nis,  podestat  de  Péra. 

<  La  ville,  dit  le  marquis  Serra,  {Storia  dt  Qenova,  par  Ca- 
nale,  II,  397),  est  entourée  d'une  grosse  muraille,  avec  de  nom- 
breuses tours  :  elle  a  7  portes,  dont  3  du  côté  de  Constantinople  : 
la  plus  orientale  se  nomme  de  la  Chaîne,  parce  que  pour  fermer 
le  port  on  tend,  de  là  à  la  porte  Oréa,  sous  l'Acropole,  une  chaîne 
«n  fer,  soutenue  par  des  piles  de  bois  en  plusieurs  endroits. 
{Nous  trouvons  cette  chaîne  mentionnée  aux  deux  sièges  de 
Constantinople  1204  et  1453.)  Elle  s'abaissa  devant  les  Turcs  et 
se  referma  aussitôt,  la  perte  de  ceux-ci  fut  grande  et  leur  con- 
fusion telle,  que  sultan  Mchemmed,  irrité  de  cette  humiliation, 
voulut  faire  empaler  son  grand-amiral,  Ealtadji-Oglou.  (Ham- 
mer.)  Trois  fois  les  Génois  élargirent  l'enceinte  de  leur  cité,  et 
l'on  y  voit  encore  un  triple  mur  du  côté  du  couchant,  un  double 
du  côté  du  levant...  A  la  cime  de  la  ville  s'élève  une  grande  tour 
«emblable  ;\  celle  dn  palais  ducal  de  la  métropole,  (à  la  diffé- 
cence  que  ceîîe  de  Gônes  est  carrée  et  que  celle  de  Galata  est 
ronde)  :  elle  s'appelle  encore  aujourd'hui,  la  Tour  des  Génois.  ■ 
Selon  M.  Delaunay,  la  Tour  du  Christ,  biîtie  sur  la  cime  de  la 


■  Actuellement  la  Tour  de  Galata  sert  de  vigie  A  un  poRte  de  pompiers 
chaînés  de  signaler  les  inceodies  qui  vieDoeat  à  se  déclarer  sur  tel  ou  tel 
point  de  U  ville. 


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—  164  — 

colline  de  Oalata,  à  une  altitude  de  47  m.  s'élève  de  la  base  aa 
sommet  à  une  hauteur  de  42  m.  45  cm.  '. 

De  ce  qui  précède  et  de  la  comparaison  des  textes,  il  résulte 
que  deux  tours  principales  contribuaient,  l'une  du  câté  de  la 
terre  et  l'autre  du  côté  de  la  mer,  à  la  défense  de  la  colonie  gé- 
noise. Celle  du  cdté  de  la  mer,  à  laquelle  était  attachée  la  chaîne 
qui  fermait  le  port,  existait  avant  l'arrivée  des  premiers  croi- 
sés à  Constantinople.  Elle  retomba  avec  la  ville  au  pouvoir 
des  Grecs  en  1261,  et  resta  entre  leurs  mains  assez  longtemps 
après  la  constitution  de  la  colonie.  Elle  passa  aux  Génois,  à 
une  époque  que  nous  ne  pouvons  préciser.  C'est  elle  qui  est 
mentionnée  par  Villehardouin,  f  la  tour  de  Galathas,  oii  la 
chaeine  fermait  qui  movait  devant  Constantinople.  »  Elle  dé- 
pendait d'un  ensemble  de  forUftcations  que  l'on  a  appelé  le 
Castrum  Sanctœ  Crucis,  ou  Chastel  de  Père,  <  qui  sied  en 
mer  devant  Constantinople,  t  dit  Froissart.  C'est  celle  dont  les 
croisés  crurent  devoir  se  rendre  maîtres  dès  leur  arrivée  sous  les 
murailles  de  la  ville.  Selon  le  rapport  de  S.  E.  Ahmed  Vefiq 
effendi,  cité  plus  haut,  le  Château  de  la  chaîne  n'aurait  pas 
été  détruit  par  sultan  Mebemmed,  mais  bien  par  l'explosion 
d'une  poudrière  établie  en  cet  endroit.  Cette  explosion  eut  lieu  à 
une  époque  inconnue,  mais  relativement  récente. 

La  seconde  tour  existe  encore,  elle  se  nommait  autrefois  la 
Tour  du  Christ,  (Chrtstea  turris),  elle  fut  encore  désignée 
parle  nom  de  Tour  de  Péra,  c'est  là  que  les  prisonniers  de 
Gerbi  furent  renfermés.  Officiellement  elle  est  Galata  Quallé- 
cy,  la  Tour  de  Galata.  Peut-être  démolie  en  partie  par  le  con- 
quérant, elle  fut  réparée  et  conservée,  jusqu'à  nos  jours.  Sultan 
Sélim  III,  en  1791,  la  fit  réparer  après  un  incendie.  Sultan  Mah- 
moud la  fit  rebâtir  après  un  nouveau  désastre,  en  1824.  Depuis 
elle  a  subi  encore  une  autre  transformation  dans  sa  partie  su- 
périeure, qui  était  simplement  conique,  il  y  a  moins  de  vingt  ans 
(1875).  II  y  a  lieu  d'ajouter  que  jusqu'à  ces  derniers  temps  nous 
avons  TU,  avant  la  démolition  de  l'enceinte  fortifiée  de  Galata, 
la  partie  entourant  le  mamelon  sur  lequel  elle  s'élève,  garnie 
d'embrasures  pour  les  canons,  ce  qui  n'existait  nulle  part  ail- 

'  pour  avoir  une  idée  de  l'aspect  que  préBentaït  Galata,  voir  les  plana  pu- 
bliés dam  le  travail  remarquable  de  M.  la  Dr.  Mordtmann,  Reçue  de  l'art 
chrétien,  anoée  1691,  pp.  204,  3S3,  371,  479. 


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—  165  — 

lenrs,  et  peut  fournir  un  indice  de  l'importance  attachée  à  cette 
position  tant  par  les  Génois  que  par  les  Turcs. 

La  colonie  génoise,  après  nne  existence  autonome  de  deux 
siècles  environ,  disparut  avec  l'empire  grec,  qu'elle  avait  presque 
toujours  combattu.  Durant  cette  période  et  celle  qui  la  précéda, 
c'est-à-dire  lorsque  les  Latins  habitaient  encore  la  ville  même 
de  Constantinople,  la  Latinité  peut  compter  deox  périodes  bien 
distinctes,  celle  pendant  laquelle  Venise  exerça  la  prépondé- 
rance, mais  sans  exclure  les  autres  nations,  et  celle  pendant  la- 
quelle Gènes  l'emporta  :  alors,  comme  elle  était  chez  elle  à  Ga- 
lata,  sa  domination  fut  exclusive,  même  au  point  de  vue  religieux. 
Sa  puissance  fat  détruite,  mais  comme  la  religion  catholique  n'est 
attachée  à  aucnne  bannière  politique,  elle  continua  à  vivre, 
même  sons  l'empire  du  croissant. 


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LA  «  MAOranCA  GOMONITA  M  FERA.  »  —  PROTECTORAT  DE  LA  FBANCB. 
■  POPULATION  LATINE, 


Nous  avons  vu  comment  était  organisée  la  colonie  do  Galata 
80QS  la  domination  génoise.  Au  moment  de  la  capitulation,  ac- 
cordée par  sultan  Mehemmed,  le  podestat,  qui  représentait  le 
pouvoir  central  de  la  métropole,  n'ayant  pas  voulu  signer  la  ca- 
pitalation,  et  s'étant  retiré,  il  n'était  resté  en  face  du  conqué- 
rant qu'une  réunion  de  Bourgeois,  qui  ne  tarda  pas  h  s'organi- 
ser comme  nous  aurons  à  le  dire  bientôt.  Mais  il  est  k  remarquer 
qae,pour  la  colonie  galatiota,  comme  pour  toutes  les  nationalités 
que  l'empire  ottoman  absorba  peu  à  peu,  c'est  bien  moins  avec 
an  peuple  qu'avec  une  communauté  religieuse  que  le  conqué- 
rant veut  avoir  à  traiter.  Plus  tard  il  entrera  en  relations  ami- 
cales avec  les  puissances  occidentales  et  conclura  avec  elles  des 
traités  ou  capitulations,  mais  pour  le  moment  il  n'est  ques- 
tion que  d'une  concession  faite  à  des  sujets  nouveaux,  donnés 
par  la  conquête. 

On  peut  considérer  cette  capitulation  de  Mehemmed  II,  comme 
l'origine  de  la  communauté  dite  des  Latins,  Latin  raiacy,  ad- 
ministrant, jusqu'à  nos  jours,  dans  tout  l'empire,  les  affaires 
des  Latins,  sujets  de  la  Porte.  Le  chef  de  la  chancellerie  des 
IaUhs  à  Gonstantinople  est  en  possession  d'un  sceau  portant 
en  turc  cette  inscription  :  c  N.  Chef  de  la  communauté  des 
Ratas  latins,  Véhïfi-milleti  réâïâï  ladn.  >  Celui-ci  a  auprès  de 
lui  un  fonctionnaire  ou  Moukhtar  (chef  de  quartier),  pour  Ga- 


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—  167  — 

lata,  dit  :  Mou)ûitàri  mahallêi  ghalata,  milleti  latîn.  Des 
cbanceileries  latines  sont  aussi  établies  à  Brousse,  Chio,  Smyrna, 
st  dans  quelques  autres  localités  ;  elles  relèvent  de  celle  de 
Gonstantinopte,  celle-ci  à  son  tour  relève  du  ministère  ottoman 
des  affaires  étrangères,  témoignage  évident  de  son  caractère  ori- 
ginel d'estranéité.  II  est  à  remarquer  cependant  que  cette  auto- 
rité ',  quoique  bien  reconnue  par  Ja  Porte,  ne  figure  point  dans 
leSal-Naroé,  on  annuaire  ottoman-. 

Quelle  forme  prit  la  nouvelle  administration  de  Galata,  après 
la  conquête  ottomane?  Elle  dut,  nécessairement,  être  réglée  d'a- 
près les  bases  de  la  capitulation  ;  mais  les  renseignements  fout  dé- 
fout; seulement,  et  d'après  une  copie  d'anciens  documents,  eux- 
mêmes  incomplets^,  il  résulterait  que  les  notables  de  la  ville  se 
swaient  constitués  en  un  corps  municipal,civiletreligieui,  sous 
le  titre  de  <  Confraternité  deSainte-Anne;  >àquelleépoque  cela 
eut-il  lieu  ?  fut-ce  immédiatement  après  la  conquête  ?  On  pour- 
rait supposer  le  contraire,  en  considérant  l'espoir  que  Gènes  avait 
conservé  d'obtenir,  de  sultan  Mehemmed,  une  fois  en  paix  avec 
lui,  et,  comme  autrefois,  des  empereurs  byzantins,  la  possession 
de  Galata  ;  mais  la  réponse  de  ce  prince  à  l'ambassadeur  génois 
fit  évanouir  ces  espérances  \  A  propos  d'une  visite  de  sultan 
Murad  III  à  Galata,  en  1584,  l'historien  turc  Selâniki  ^  parle  des 
plaintes  du  peuple  et  des  primats  de  Galata  contre  le  cadi  de 
cette  ville  ;  comme  il  n'aurait  pas  employé  ce  terme  pour  dési- 
gner les  musulmans,  l'historiographe  ottoman  désigne  donc  par 
là  f  les  notables,  les  chefs  de  la  communauté  chrétienne.  » 

La  communauté  latine,  dont  le  chef,  comme  autrefois  l'an- 
cien baile  vénitien  à  Constantinople,  se  décorait  du  titre  de 
Magniflco,  donné  dans  l'antiquité  aux  préfets  de  l'empire  ro- 
main*', la  communauté  latine  était  dirigée  par  un  prieur,  un 
sous-prieur  et  douze  conseillers  '•,  elle  parait  n'avoir  jamais 

'  Voyez  au  sufet  lies  Latins  ou  Cathoiiqiios,  sujets  de  la  Porte,  l'bidni. 
Lettres  nur  la  Turquie.  IS5J,  IT,  385,  et  seq, 
'  V.fiotn  Étale  titr  la  propriété  en  pa'ji  miiiiilman,  p.  177. 
»  ProoÔB-verbaux  de  1603  à  1689  et  (juelquea  pièces  de  179J. 

•  llainmer,  loc.  lau  I.  III,  68. 

•  Page  282. 

•  CVMiUiti,  11,  472  ;  GuiJoI.  Cours  d'h-ttoire  mo-lcrne.  p.  47. 

'  Tous  les  conneiller»  devaient  être  de  rite  catholique  latin,  zmtifs  de  Pé- 
ra,  ou  du  moins,  mari^B  à  des  femmes  pérotes  :  (décision  du  25  avril  I63S). 


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—  168  — 

compté  guère  plus  d'une  trentaine  de  membres  ;  elle  avait  l'ad- 
ministration temporelle  des  églises,  et  nommait  annuellement, 
pour  ciittcune  d'elles,  deux  procureurs  ',  chargés  de  l'adminis- 
tration.de  leurs  biens  immobiliers,  du  produit  des  quêtes,  des 
aumônes,  et  des  taxes  éttiblies  par  la  communauté  ;  tout  pro- 
cureur élu  prieur,  devait  se  démettre  de  là  procure.  (Décision 
du  12  décembre  1617.) 

Dans  les  documents  contenus  encore  dans  les  archives  des 
diverses  communautés  religieuses,  elle  est  ordinairement  appe- 
lée :  (  La  Magniâca  Comunità  di  Pera.  » 

En  1583,  le  18  novembre,  la  t  Magnifica  Comunità  di  Pera» 
fit  une  instance  formelle  auprès  du  Vicaire  patriarcal,  pour  ré- 
clamer les  droits  anciens  qu'elle  avait,  depuis  la  capitulation 
de  Mehemmed  II,  en  i4S3,  de  choisir  (sauf  confirmation  de 
l'Ordinaire),  les  religieux  qui  devaient  desservir  les  églises  lui 
appartenant,  c'est-à-dire  celles  de  Ste-Marie  et  de  St-Nicolas  à 
Constantinople,  et  celles  de  Ste-Anne,  de  St-Benoit,  de  St-Jean, 
de  St-Sébastîen,  de  St-A,ntoine,  et  de  St-Georges  de  Péra.  Ce 
droit  de  nomination  lui  avait  été  contesté  par  l'évêque  de  Tinos, 
visiteur  apostolique,  dans  les  ordonnances  laissées  par  lui  à  l'is- 
sue de  sa  visite.  Il  parait  que  l'on  fit  droit  à  ses  réclamations  ; 
mais  les  procureurs  ne  satisfaisant  pas  à  leurs  obligations,  le 
Père  Ministre  Provincial  des  Conventuels  menaça  d'excommu- 
nication les  procureurs  de  i  la  Magnifica  Comunità  >  qui  ne  ren- 
draient pas  compte  à  la  fin  de  l'année,  selon  les  ordres  des  Visi- 
teurs apostoliques,  de  l'administration  des  églises  et  autres 
établissements  pieux,  confiés  à  chacun  d'eux. 

La  communauté  prélevait  sur  les  recettes,  les  fonds  néces- 
saires à  la  réparation  des  églises,  au  paiement  des  avanies,  etc. 
L'argenterie  des  églises  était  placée  sous  la  garde  des  procureurs 
qui,  sur  inventaire,  en  faisaient  remise,  chaque  année,  à  leurs 
successeurs. 

La  c  Comunità  »  entretenait,  pour  ses  affaires,  une  corres- 
pondance active  avec  un  prince  de  la  Cour  romaine,  dit  t  cardi- 
nale protettore  di  Levante  ;  »  elle  se  serait  plainte  à  ce  prélat, 


Les  procureurs  de  la  Curie  ^piacopale  de  Gènes  s'inliluiai.'n 
j-domino,    ministi-o  e  proonitttort  :  fAtti  ilella  SorleUi  ligure,    1871, 


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en  1606,  «  de  rintroduction,  à  Péra,  du  calendrier  grégorien',  à 
cause  de  la  nouvelle  barrière  que  cela  élèverait  entre  les  catho- 
liques et  les  Grecs  comme  aussi  des  dissentiments  qui  en  résul- 
teraient par  suite  des  alliances  mixtes,  et  elle  aurait  prie  te  car- 
dinal-protecteur d'obtenir,  de  Sa  Sainteté,  la  faculté  de  célébrer 
les  fêtes  selon  l'ancien  calendrier,  comme  cela  avait  été  accordé 
pour  Candie,  Corfou  et  autres  lieux. 

En  1590,  le  Prieur  de  la  Confraternité  de  Ste-Anne,  président 
delà  (  MagniGca  Comunità,  *  était  en  même  temps  procureur 
de  St-François  :  (Ce  n'était  point  contre  les  règlements,  car 
St-François  n'appartenait  pas  à  la  commune).  En  1631,  le  Vicaire 
Patriarcal,  à  la  suite  de  sa  visite  pastorale,  enjoignit  aux  deux 
procureurs  de  la  c  Magniliea  Comunità  di  Fera,  >  sous  peine 
d'excommunication,  de  lui  rendre  compte  de  leur  administration 
des  églises  et  antres  établissements  pieux. 

En  1648  la  même  intimation  leur  fut  faite,  sous  peine  des 
censures  de  l'Église  ;  et  l'année  suivante  l'Ordinaire  enjoignit  à 
Messieurs  les  membres  de  la  «  Comunità  di  Pera,  »  sous  peine 
d'excommunication,  de  fournir  les  comptes  de  leur  administra- 
tion des  églises  de  Galata  que,  depuis  de  longues  années,  ils  re- 
fusaient de  présenter;  comme  aussi  de  restituer  tous  les  produits 
encaissés  par  eux,  et  de  verser  le  mentant  des  pertes  et  dom- 
mages occasionnés  par  les  retards  apportés  dans  la  reddition  de 
leurs  comptes-CommecesMessieurs  ne  voulurent  pas  se  soumettre 
et  rendre  leurs  comptes,  le  R.  P.  Gian-Franceso  Circhi,  d'Ana- 
gni,  Vie.  Patriarcal,  lança  contre  eux  l'excommunication.  Mais 
ce  religieux  ayant  renoncé  à  sa  charge  et  étant  remplacé  par  le 
R.  P.  Severoli  (Fr.  Filippot  min.  Conv.),  la  «  Magnifica  Comunità 
di  Pera  »  lui  présenta  un  mémoire  justificatif  de  son  adminis- 
tration, à  la  suite  duquel,  par  un  acte  du  7  septembre,  non  seu- 
lement il  les  absout,  mais  encore  il  les  comble  de  louanges.  (Il 
est  vrai  que  dans  un  mémoire  subséquent,  il  revient  sur  cette 
appréciation),  1650-1651. 

Il  n'y  avait  pas  que  la  <  Magnifica  Comunità  di  Pera  »  à  s'oc- 
cuper des  communautés,  et  à  s'en  occuper  sans  droit,  en  cer- 


'  Le  Pape  aurait  déjà  recommandé,  à  M.  De  Germigny,  en  1583  (AVgocia- 
tion»,  IV,  231),  de  B'umployor  auprès  des  Grecs,  pour  l'adoption  du  nouveau 
calendrier. 


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—  170  — 

taines  circonstaiicea.  Ainsi,  en  1 648,  défense  est  faite,  par  le  Vi- 
caire patriarcal,  aux  procoreurs  de  St-François,  de- faire  aueune 
location  ou  vente  d'immeubles  appartenant  à  cette  église,  sans  le 
concours  et  l'autorisation  préalables  dn  R.  P.  Provincial.  En 
1675,  le  Vicaire  patriarcal  ordonna  au  procureur  de  St-François 
de  ne  pas  donner  au  supérieur  de  cette  église  telle  somme  dëter- 
minée,  parce  qu'il  n'avait  pas  encore  achevé  son  année  de  pro- 
vincialat;  avis  en  fut  donné  &  la  t  Magniâca  Comunità.  » 
(21  novembre  1675)'.  ^ 

La  (  MagniQca  Comunità  di  Pera  »  donnait  aussi  son  avis 
dans  les  questions  qui  intéressaient  le  bien  de  l'Église.  Ainsi 
elle  s'opposa  dans  le  principe  (1633),  à  la  nomination,  à  Cons- 
tantinople,  d'un  èvëque  suffragant,  pour  divers  motifs,  et  entre 
autres  par  Ja  crainte  que  ce  prélat,  étant  signalé  par  les  Grena- 
dins -  comme  un  ambassadeur  du  pape,  cela  n'amenât  la 
perte  du  peu  d'églises  laissées  au  culte.  Mais  en  1664,  elle  fit 
instance  à  Rome  pour  obtenir,  en  faveur  de  Mgr  RidolO,  évëque 
suffragant.  Vicaire  patriarcal  de  Constantinople,  le  Bérat  de  la 
Porte,  comme  cela  se  pratiquait  pour  les  autres  évèques  de  l'em- 
pire ottoman.  Un  peu  plus  tard,  en  1671,  elle  fit  une  nouvelle 
démarche  auprès  de  la  Propagande,  pour  obtenir  la  nomination 
d'an  Patriarche  Latin  à  Constantinople  ;  un  refus  formel  lui  fut 


Le  S5  mars  1667,  la  (  Magnifica  Comunità  >  fit  instance  au- 
près du  Vicaire  patriarcal,  Mgr  Rîdolfi,  contre  les  FF.  Mineurs 
Réformés,  lesquels,  après  l'incendie  de  leur  couvent  à  Galata, 
en  1660,  avaient  loué  une  maison  appartenant  à  Tommaso  Wlas- 
ti,  et  située  aux  Quatre  Chemins,  et  y  célébraient  les  offices, 
c  au  risque,  disent  les  conseillers,  d'attirer  sur  la  Communauté 
de  nouvelles  avanies  de  la  part  des  Turcs,  et  peut-être  de  faire 
fermer  encore  quelques  églises,  comme  il  était  arrivé  d'autres 
fois.  »  Le  Vicaire  patriarcal  accueillitla  demande  de  la  »  Magni- 
fica Comunità  »  et  défendit  aux  PP.  Réformés  de  persévérer.  Le 
P.  Francesco  Pedauli,  et  le  P.  Giuseppe  da  Salmona  n'ayant  pas 
voulu  obéir  à  ce  monitoire,  furent  suspendus  a  dtotnis  par  le 

>  Toutes  ces  délibérations  sont  extraites  des  archives  de  St-ADtoine. 

•  Maures  expulBés  d'Espagne.  Il  ne  faut  pas  oublier  que  leur  expulsion  fut 
le  prétexte  dont  on  se  servit  pour  prendre  et  changer  en  mosquée  l'église  de 
St-Paul,aetuerement  encore  Arab-DJami. 


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—  171  — 

Vicaire,  rappelés  en  chrétienté  par  la  S.  C.  de  la  Prop^ande,  et 
remplacés  à  Constantinople.  On  voit  par  là  quelle  était  la  terreur 
qu'inspirait  alors  le  pouvoir  des  Ottomans  I 

Les  délibérations  de  la  Comunità  étaient  ordinairement  prises 
en  Ste-Ânne,  ou,  comme  le  portent  certains  documents,  <  in 
casaccia  di  Sant'Anna  :  >  elles  étaient  scellées  de  son  sceau,  le- 
quel, appliqué  sur  une  pièce  de  1675,  Georges  Draperis  étant 
prienr,  portait  l'image  de  Ste  Anne  à  droite,  celle  de  St  Joacbim 
à  gauche,  et  celle  de  la  T.  Ste  Vierge  au  milieu. 

En  1636,  la  «  Communauté  des  Péraux  >  tenait  ses  assem- 
blées les  seconds  dimanches  de  chaque  mois.  Elle  tenait,  en 
double,  un  registre  destiné  à  l'inscription  de  ses  actes,  et  dit 
c  Libro  maestro,  >  ou  <  registro  générale  delta  magntflca 
Comunità  di  Fera;  »  la  plupart  de  ses  procès-verbaux  com- 
mençait par  ces  mots  :  t  Laus  Deo  !  > 

En  certaines  circonstances,  ■  la  Magnifica  Comnnità  >  datait 
ses  délibérations,  del  suo  oratorio,  in  publica  udienza  ; 
d'autres  fois,  comme  dans  an  procès-verbal  du  14  novembre 
AQIO,*.  New  oratorio  dellaMagnifica  Comttnrtâ.»  C'était  alors 
relise  Ste-Anne.  Mais  en  1668,  le  Père  Provincial  des  Con- 
ventuels, commissaire  d'Orient,  se  rendit  à  St-Benott,  dans  une 
chapelle  qui  appartenait  à  la  Magnifica  Comunità,  (l'église 
Ste-Anne  dévorée  par  l'incendie  de  1660  n'avait  pas  encore  été 
reconstruite)  et  là,  devant  les  prieurs,  conseillers  et  autres 
membres  de  la  Confrérie,  devant  les  PP.  Jésuites  et  les  Conven- 
tuels, il  donna  lecture  de  ses  patentes.  La  même  formalité  fut 
remplie  le  30  août  1690'. 

En  un  mot  la  Comunità,  à  l'instar  des  assemblées  nationales 
tenues,  on  l'a  vu  plus  haut,  à  Ste-Sophie  par  les  Grecs,  à  Ste-Ma- 
rie  de  Ct)n3tantinople  par  les  Vénitiens,  sous  la  présidence  de 
leur  baile,  à  St-Michel  de  Gainta  par  les  Génois,  tenait  ses 
séances  dans  une  église,  ordinairement  dans  celle  de  Ste-Anne, 
qui  était  à  proprement  parler  son  siège,  ou  au  besoin  dans  une 
autre  église  ou  chapelle.  Il  y  avait  aussi,  en  Ste-Anne,  une 
grande,  salle,  Casaccia,  qui  servait  aux  réunions.  Le  Vicaire 
patriarcal  les  présidait,  d'un  siège  élevé  au-dessus  des  autres^. 

>  Archives  de  St-Aotoine. 
*  An:hiTea  de  Si-Louis. 


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—  172  " 

Nous  ue  connaissons  qu'un  petit  nombre  de  prieurs  ou  de 
procureurs  de  la  <  Mngnifica  Comunità,  >  nous  allons  donner 
leurs  noms  d'après  les  indications  du  Ltbro  maestro,  nous  y 
ajouterons  ceux  des  procureurs  de  la  Gomunità  et  même  de 
ceux  des  églises  que  nous  connaissons,  pour  conserver  la  mé- 
moire de  bons  et  utiles  citoyens. 

1610,  DomcnicoFornettî,  prietir. 

1611,  Malco  Perone,  prieur,  Antonio  de  Negri,  sous-prieur. 

1614,  Eduardo  da  Gogliano,  prieur. 

1615,  Lazarotto  Draperis,  prieur, Tomaso  Navone,  sous-prieur. 

1618,  A.  de  Negri,  prieur,  Antonio  Grillo,  sous-priem*. 

1619,  Eduardo  da  Gogliano,  prieur,  et  procureur  de  Terra  S". 
1626,  Nîcola  Draperis,  sous-prieur. 

1633,  Stefano  Perone,  prieur,  FrancescoFometti,sous-prieor. 
1670,  Francesco  Testa,  sous-prieur. 
1684,  Tortia,  prieur. 

Les  Procureurs  connus. 
1581,  Bernardo  de  Negri,  procureur  de  St-Pierre. 

1616,  Francesco  de  Negri,  procureur  de  St-Françoîs. 

1618,  F.  de  Negri  et  Lazarotto  Drap»ris,  proc.  de  St-François. 
1626,  Giovanni  d'Andria,  procureur  de  St-Jean. 
G.  Ant.  Grillo,  proc.  de  St-François. 
Malco  Perone,  proc.  de  St-Pierre. 
Bartolomeo  Perone,  proc.  de  St-Georçes. 
Georges  Draperis,  proc,  de  St-Georges. 
Gasparino  Testa,  proc.  de  Ste-Anne. 
Bartolomeo  Galante,  proc.  de  St-Sebastiano. 
En  1631,  la  Gomunità  ne  comptait  que  neuf  membres,  le  plus 
souvent  elle  était  au  complet.  Nous  les  voyons  apparaître  dans 
les  circou'^tances  solennelles  :  ainsi  le  P.  de  Ganillac,  nous  dit  : 
à  l'occasion  des  funérailles  de  M.  de  Salignac,  ambassadeur  de 
France  :  *  Douze  gros  cierges  de  la  Noble  compagnie  de  Ste- 
Amie,  qui  fait  le  corps  de  ville  pour  les  chrétiens  catholiques, 
portés  par  douze,  etc.  »  Le  même  les  désigne  sous  ce  nom  :  t  Mes- 
sieurs de  cette  ville,  messieurs  de  Péra.  »  Les  Négociations 
les  appellent  :  t  les  seigneurs  Pérotz.  > 

Mais  les  jours  de  la  i  Magniâca  Gomunità  di  Pera  >  étaient 
comptés  :  sa  principale  raison  d'être  était  d'administrer  les  biens 


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—  173  — 

commuas,  et  de  pourvoir  aux  nécessités  des  églises  qui  lui  ap' 
pu'tenaieot  encore  ;  or  en  1683,  l'Église  de  Constantinople  avait 
pour  Vicaire  patriarcal  un  liomme  actif  et  enlreprenant,  Mgr 
Gasparini,  les  églises  avaient  passé  en  d'autres  nia)ns,ou  mieux 
avaient  disparu,  dévorées  par  les  incendies  ou  confisquées  par 
les  Turcs  ;  la  plupart  des  catholiques  relevaient  de  leurs  ambas- 
sadeurs et  se  réclamaient  d'eux  dans  leurs  besoins  ou  leurs  dif- 
férends avec  la  Porte  ;  ii  lui  restait  donc  bien  peu  à  faire.  Le  der- 
nier coup  lui  fut  porté  par  le  "Vicaire  patriarcal  qui,  lassé  de  son 
opposition,  parfois  tracassière  et  jalouse,  demanda  au  St-Siège 
et  obtint  de  la  S.  C.  de  la  Propagande  un  décret,  du  17  oc- 
tobre 1683,  qui  lui  enlevait  totalement  dès  mains  l'administra- 
tion des  biens  des  églises.  Elle  essaya,  nonobstant  ce  décret,  de 
nommer  un  procureur  pour  le  couvent  de  St-François  ;  mais  le 
R.  P.  Provincial,  Fr.  Giuseppe  Mazza  de  Péra,  refusa  de  se 
rendre  à  Ste-Anne,  pour  assister  à  la  réunion  de  l'assemblée, 
<  pour  la  raison,  disait-il,  que,  (conformément  k  la  décision  que 
nous  venons  de  citer)  l'adrainistration  des  biens  de  l'église  ap- 
partenait aux  religieux  et  non  aux  laïques  (31  janvier  1685).  » 
Depuis  cette  époque,  nous  la  voyons  encore  apparaître  dans 
quelques  circonstances  solennelles,  mais  c'est  simplementcomme 
confrérie  religieuse,  ou  comme  corporation  d'honneur,  et  non 
plus  comme  revêtue  d'une  puissance  réelle.  Elle  essaya  de  se 
reconstituer  en  1793,  mais  sans  grand  succès.  Nous  la  verrous 
remplacée  par  une  confrérie  de  Ste-Anne,  qui  ne  réclame  aucune 
autorité  sur  les  affaires  de  la  Latinité  de  Constantinople. 

Pour  bien  se  rendre  compte  de  la  transformation  qui  s'était 
opérée  dans  la  situation  des  Latins  de  Péra,  il  faut  faire  atten- 
tion à  deux  nouveaux  éléments  qui  y  avaient  fait  leur  appari- 
tion, l'accroissement  de  la  puissance  spirituelle  de  Rome,  et  le 
protectorat  politique  exercé  par  les  puissances  occidentales. 

A  la  suite  de  la  prise  de  Constantinople  par  les  Turcs  (1453), 
privée  désormais  de  son  autonomie,  la  Latinité  de  Péra,  cher- 
chant dans  la  religion  un  refuge  contre  ses  malheurs,  se  tourna 
vers  Rome,  ofi  le  cardinal  (  protettore  di  Levante  »  était  l'appui, 
le  défenseur  de  ses  intérêts.  Déjà,  dans  les  derniers  jours  de  son 
indépendance,  le  i."  avril  1452,  sous  le  gouvernement  du  po- 
destat Ange-Jean  Lomellini,  elle  avait  placé  les  armes  pontificales 
et  le  nom  du  Souverain  Pontife  occupant  alors  la  chaire  de  St- 


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_  174  — 

Pierre,  <:  Nicolatis  Papa  V  ianueasls,  »  sur  l'une  des  tours  de 
la  ville,  sise  auprès  de  celle  du  Christ  ;  au-dessous,  on  voyait 
les  armes  du  doge,  puis  celles  de  la  Réput>Uque  et  du  podestat. 
Cette  inscription  est  la  seule  de  ce  genre  que  M.  Delaunay  ait 
relevée. 

La  Cour  de  Rome  revendiquait  aussi  une  sorte  d'autorité  su- 
périeure sur  les  biens  des  églises;  et  l'un  des  prélats-visiteurs 
envoyés  par  elle,  l'évèque  de  Tlne,  aurait  rendu,  en  1639,  un  dé- 
cret menaçant  de  l'excommunication  quiconque  aliénerait  ces 
sortes  de  biens.  Forcée  par  la  nécessité  de  contrevenir  à  ce  dé- 
cret, la  Comuntià  fournit,  en  1636,  des  explications  sur  la 
vente  de  certains  biens  ecclésiastiques  qu'elle  avait  dû  effectuer 
pour  la  réparation  de  diverses  églises  tombant  en  ruines  ;  elle 
aurait  aussi  encouru  le  blÂme  du  St-Siëge  à  raison  de  la  réduc- 
tion opérée  par  elle  sur  la  somme  attribuée  à  l'entretien  des 
églises. 

L'établissement  de  la  S.  Congrégation  de  la  Propagande,  des- 
tinée, dans  la  pensée  du  Pape  Grégoire  XV  qui  la  constitua, 
(1622),  à  donner  plus  d'unité  et  d'activité  aux  efforts  des  mis- 
sionnaires envoyés  parmi  les  nations  inâdëles,  ne  tarda  pas  ii 
produire  ses  effets.  Le  nombre  des  missionnaires  s'accrut,  des 
Ordres  nouveaux  vinrent  joindre  leurs  efforts  aux  anciens,  et  les 
missions  catholiques  jouirent  alors  d'une  prospérité  inconnue 
antérieurement.  Les  missions,  tant  anciennes  que  nouvelles  re- 
levant plus  directement  de  cette  autorité,  furent  affranchies,  par 
là  même,  de  leur  dépendance  vis-à-vis  des  gouvernements  lo- 
caux. Ce  n'était  qu'une  force  morale,  il  est  vrai,  car  jamais  le 
St-Siège  ne  put  songer  à  revendiquer,  en  Turquie,  un  protecto- 
rat effectif  :  nous  ne  voyons  pas  même  qu'il  ait  été  jamaU  en 
relations  directes  avec  la  Porte  ;  mais  cette  autorité  ne  s'en  fai- 
sait pas  moins  sentir  aux  fidèles  enfants  de  l'Église. 

Son  action  fut  plus  sensible  encore  lorsque,  en  1653,  le  Saint- 
Siège  commença  à  se  faire  représenter  à  Constantinople,  non 
plus  par  le  supérieur  d'une  des  communautés  religieuses  de 
Péra,  avec  le  titre  de  Vicaire  patriarcal,  mais  par  un  Ëvëque, 
revêtu  du  caractère  sacré,  et  portant  le  titre,  bien  plus  respec- 
table, de  Vicaire  Apostolique,  suffragant  du  Patriarche  de  Cons- 
tantinople. Alors  toutes  les  autres  autorités  furent  amenées  à 
s'abaisser  devant  la  sienne. 


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—  175  — 

L'autre  fait,  plus  important  encore,  fut  l'établissement  du 
protectorat  politique  des  puissances,  et  surtout  celui  de  la 
France. 

Peu  après  la  conquête,  la  République  vénitienne  ayant  rétabli 
ses  relations  avec  Constantinople,  elle  prêta,  sans  doute,  ses 
bons  offices  ainsi  que  son  concoure  moral  et  matériel  &  la  Lati- 
nité de  Galata  ;  mais  bieiîtôt,  la  position  prise  par  la  France  au- 
près de  sultan  Suleïman  assura  un  nouveau  protecteur  à  l'Église. 

Sans  traiter  ici  de  la  protection  donnée  à  la  religion  <,  en  Tur- 
quie  en  général,  et  pour  ue  parler  que  de  la  Latinité  de  la  capi- 
tale, il  sutnt  de  rappeler  la  conservation  de  plusieurs  églises,  due 
à  l'intervention  de  François  l",  la  protection  assurée  aux  divers 
Ordres  religieux,  l'intervention  personnelle  de  Henri  III  (1584) 
en  faveur  du  patriarche  de  Constantinople  (vicaire  patriarcal), 
la  reconstruction  et  la  dotation  de  telles  ou  telles  églises,  dues 
aux  bons  offices  des  ambassadeurs,  non  moins  qu'à  la  munifi- 
cence de  nos  rois,  en  un  mot  l'assistance  efficace  et  constante 
donnée  par  la  France  aux  affaires  de  l'Église.  En  1608,  la  Co- 
munilà  déclarait  M.  de  Brèves  c  protecteur  particulier  et  dé- 
fenseur de  toutes  les  églises  et  monastères,  —  représentant  du 
Roi  très  chrétien,  protecteur  général  des  chrétiens  de  l'empire 
ottoman-,  s  (Quelques  années  auparavant,  sollicitant  l'assistance 
du  doge  de  A'enise,  elle  qualifiait  aussi  ce  prince  de  «  particolar 
protettore  di  tutle  le  chiese  dell'  Oriente.  ») 

Selon  Hammer^,  Marchevilie,  ambassadeur  en  1631,  aurait 
«  donné  le  premier  l'exemple  de  faire  dire,  dans  les  églises,  des 
prières  pour  le  Roi;  »  et  il  aurait  été,  également,  <  le  premier 
qui  fit  élever  un  catafalque,  à  Péra,lor3  de  la  mort  de  Henri  IV.» 
Sans  nous  arrêter  à  l'erreur  évidente  de  nom  pour  ce  dernier  fait, 
il  est  certain  que  ce  mode  d'affirmation  du  protectorat  était  pra- 
tiqué, à  St-François,  antérieurement  à  la  date  indiquée.  En  effet, 
voici  ce  qui  eut  lieu,  dès  que  la  mort  de  Henri  IV  fut  connue  à 
Constantinople  :  <  M.  l'ambassadeur  ne  manqua  à  ce  qui  estoit 

'  Cf.  Feraud-Giraud,  de  la  Jurirlinion  françaixe  dan*  Us  fchdlrii  du  Le- 
eant  et  de  la  BaH>arie,  II.  77  ;  et  nos  Capitulation!  et  traitée  île  la  Franf^ 
en  Orient,  passim. 

■  En  1A:j9,  1«  Patriarche  cecuroâiiique  de  Constantinople  Iui-:n6me  faisait 
supplier  le  roi  de  FraDce  Je  se  déclarer  le  Protecteur  de  l'Kgliio  d'Orient. 

*  Loc.  laad.  IX,  233. 


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—  176  — 

deu  à  la  mémoire  d'un  tel  roy,  faisant  faire  un  ofUce  solennel, 
premièrement,  en  l'esglise  de  St-François,  qui  est  la  principale  en 
cette  ville,  avec  un  bel  appareil  lugubre,  faisant  l'office  Mgr  l'é- 
vèque  d'André,  tout  porté  icy  par  cas  fortuit,  avec  l'assistance 
des  illustrissimes  ambassadeurs  de  Venise  et  de  Raguse,  et  toute 
la  maison  d'Anglotan,  avec  le  beau-frère  de  l'ambassadeur,  qni 
ne  pouvait  assister  en  personne  à  la  messe.  On  se  servit  d'un 
de  nous  (jésuite),  pour  faire  l'oraison  funèbre,  en  italien,  quel- 
que refus  que  nous  en  fisiona,  pour  le  défault  de  langue,  et 
d'aultres  parties.  Dieu  voulut  que  le  discours  fust  aucunement 
passat)le.  Messieurs  de  Venise  y  eurent  une  période  honorable, 
pour  le  propos  des  amis  de  cette  couronne.  » 

Un  service  solennel  eut  lieu  également  à  St-François,  en 
1643,  pour  le  repos  de  l'âme  de  Louis  XIII.  (Voir  ci-après  St- 
François.) 

On  lit  dans  les  mémoires  des  Conventuels  de  St-Antoine  et 
dans  les  archives  de  St-Louis,  des  Capucins,  le  récit  de  longues 
querelles  de  préséance,  entre  les  ambassadeurs,  à  la  suite  des- 
quelles la  Sacrée  Congrégation  recommande  le  ^'icaire  patriarcal 
à  la  protection  du  résident  de  la  République  de  Gênes  ;15  sep- 
tembre 1670)  et  vers  le  même  temps,  le  couvent  de  St-François 
se  réclamait  de  la  protection  effective  de  la  République  de  Ve- 
nise, Ces  faits  eurent-ils  quelque  résultat,  ou  durée,  ou  bien  ne 
furent-ils  qu'un  simple  incident  qui  passa  inaperçu?  Cela  parait 
probable,  car  un  peu  plus  tard,  en  HM'),  le  même  Vicaire  apos- 
tolique, Mgr  RidolQ,  fit  des  démarches  auprès  du  Résident  gé- 
nois pour  se  remettre  en  paix  avec  les  représentants  étrangers, 
contre  lesquels  il  luttait  depuis  1667,  pour  le  maintien  des 
rubriques  imposées  par  l'Église. 

Ces  dissensions  finirent  par  disparaître,  car  en  1684,  les  ob- 
sèques de  Marie-Thérèse  d'Autriche,  femme  de  Louis  XIV, 
furent  célébrées  d'abord  à  St-Louis,  puis  de  la  même  façon  et 
avec  le  même  cérémonial  que  dans  la  chapelle  de  l'ambassade, 
le  18  mars,  à  St-Benoit,  des  Jésuites,  le  20  à  St-Georçes,  des 
Capucins  ;  le  22  à  St-François,  des  Cordeiiers;  et  le  24  à  St- 
Pierre,  des  Dominicains. 

On  lit  dans  un  Mémoire  remis  à  M.  de  Bonnao,  ambassadeur 
en  1716  :  *  Quand  l'ambassadeur  faisait  inviter  les  ministres 
étrangers  h  quelque  cérémonie  religieuse,  soit  dans  sa  chapelle 


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—  177  — 

de  Péra',  soit  dans  les  églises  de  sa  protection,  à  Galata,  pour 
les  priucipales  fêtes  de  l'année,  ou  à  l'occasion  des  Te  Beum 
d'actions  de  grâces  ou  prières  publiques,  pour  le  renouvellement 
de  la  santé  du  Roi,  on  qaelque  événement  important,  il  leur 
laissait  la  droite,  leur  faisait  donner  l'Évangile  à  baiser  les  pre- 
miers, et  ne  se  faisait  encenser  qu'après  eux  ;  puis,  après  la 
prière  ordinaire  pour  le  Roi,  il  faisait  réciter  le  Laudate  Do- 
Tnînum  omnes  gentes  pour  les  princes  dont  les  représentants 
avaient  été  Invités.  Ceux-ci  ne  venaient  jamais  sans  avoir  été 
mandés,  parce  que  l'ambassadeur  était  toujours  libre  de  faire 
DU  de  ne  pas  faire  cette  invitation.  Quand  la  cérémonie  se  fai- 
sait dans  l'une  des  autres  églises  de  la  ville,  ces  ministres  y  ve- 
naient, accompagnés  de  leur  maison  ;  l'ambassadeur  avait 
toujours  la  droite,  dans  la  marche,  qui  se  faisait  sur  deux  liJes, 
précédées  de  janissaires;  dans  les  églises  deGalata,  il  prenait 
aussi  la  droite,  baisait  l'Évangile  et  était  encensé  le  premier^.  » 

On  relève  des  Délibérations  nationales  de  1720,  que  la  na- 
tion fournissait,  annuellement,  des  subsides  au  Vicaire  patriar- 
cal, aux  Capucins  de  St-Louis,  aux  Dominicains  de  St-Pierre, 
aux  Conventuels,  aux  Jésuites  de  St-Benott,  aux  Capucins 
de  St-Georges,  et  même  aux  Récollets  de  Ste-Marie.  Elle  at- 
tribuait également  des  fonds  pour  la  fôte  du  St-Sacrcuient 
au  palais  de  France,  chez  les  Jésuites  et  chez  les  Domini- 
cains-'. 

En  1737,  le  roi  accorda  une  augmentation  de  pension  de 
1000  livres  à  l'archevêque  de  Carthage,  vicaire  pab'iarcal  de 
Conatantinople,  auquel  l'ambassadeur  devait  faire  le  même  trai- 
tement qu'à  un  (ministre)  résident. 

On  lit  dans  la  notice  de  M.  Dacier  sur  le  comte  de  Choiseul- 
Oouflier  :  i  Cet  ambassadeur  a  toujours  mis  au  premier  rang 
de  ses  devoirs  la  protection  de  la  religion  catholique  ;  et  il  n'a 
jamais  perdu  de  vue  les  obligations  que  lui  imposaient  envers 

'  Saint-Louis. 

•  V.  ci-aprés  g  St-Fnançoii  et  St-Ceorget. 

>Oit  sait  que,  depuis  an  certain  nombre  d'années,  le  gouvernement  fran- 
çais alloue  une  subvenlion  considérable  aux  ttablissements  religieux  du  Le- . 
vaut,  ils  reçoivent  en  outre  des  allocations  spéciales  selon  les  circonstances, 
et  des  sommes  non  moins  importantes  Tournies  par  la  Propagation  de 
ta  foi. 

n 


y,'G00g\il 


—  178  — 

elle  la  foi  de  ses  pères  et  le  caractère  d'ambassadeur  du  Roi 
très  chrétien'. 

L'ordonnance  royale  de  Louis  XVI,  datée  de  Versailles,  le 
3  mars  1781,  contient  une  série  d'articles,  (Tit.  I,  Art.  134 
à  157),  relatifs  à  la  protection  du  clergé  latin  en  Turquie. 

An  reste  le  protectorat  a  été,  dans  le  passé,  l'objet  de  pins 
d'une  atteinte  ;  il  a  été  partagé  dans  une  certaine  mesure  avec 
Venise,  puis  avec  l'Autriche-.  Toutefois,  il  est  juste  de  consta- 
ter que,  quelles  que  soient  leurs  tendances  particulières,  les  di- 
verses puissances  catholiques  ont  contribué,  de  leura  propres 
subsides,  à  la  conservation  et  au  maintien  delà  Latinité  deGia- 
lata  ;  en  1793,  l'Autriche  donna  sa  protection  au  vicaire  apos- 
tolique et  &  St-Georges,  Naples  aux  Conventuels  ;  Saint-Benoit, 
les  Capucins  et  les  Dominicains  restèrent  sous  la  protection  de 
la  France'. 

La  protection  générale  du  clergé  latin  par  la  France,  et  nom- 
mément celle  des  Jésuites  et  des  Capucins,  fut  l'objet  d'articles 
spéciaux,  dans  les  capitulations  françaises  de  1678,  rapportées 
par  Fôridoun,  Papiers  d'Etat,  II,  323,  et  en  sommaire,  dans 
Naima,  II,  138.,  (Art.  40  et  seq.  et  Capit.  de  1740,  art.  132,  et 
seq.  La  protection  des  Pères  de  la  Hercl,  et  des  Jésuites  Polo* 
nais  se  trouve  consignée  dans  le  renouvellement  de  la  trêve 
de  Sitvatorok,  signé  à  Vienne  en  1615-1024*.  (Cf.  ci-après 
Chap.  vni.  La  Trinité.) 

Des  trois  églises  restant  à  Galata,  eu  1870,  St-Pierre  et 
St-Benott  sont  prot^ées  par  la  France  ;  St-Oeorges  et  l'hôpital 
en  dépendant,  par  l'Aatricbe,  depuis  que  les  Pères  Bosniaques 
et  plus  tard  les  Lazaristes  allemands  la  possèdent. 

Aux  jours  de  solennités,  le  drapean  français  flotte  sur  les 
églises  du  St-Esprit,  de  St-Pierre  et  de  St-Benott  ;  le  jour  de 
la  Fête  Dieu,  sur  celle  de  St-Louis,  enclavée  dans  l'enceinte  de 
l'ambassade.  Ce  même  pavillon  est  hissé  auasî  sur  le  palais  de 
l'ambassade  tous  les  dimanches.  Le  Vendredi-Saint  il  est  mis 

>  Voyage  pittoretgue  dont  l'empirt  ottoman,  par  le  comte  de  Cboiseat- 
Gourrrier.  Paria  1842,  t.  X. 

.  *  cr.  Hammer,  pauim.  César  Famîn,  hittoire  de  la  riealité  du  protecto- 
rat de*  iglitet  chrétienne*  en  Leoant.  Paria  1853. 

*  Comunitâ  di  Pera, 

*  Chap.  V. 


DigilizPdbvGoOt^le 


—  ilQ  — 

en  beme,  à  mi-mflt.  Tous  les  établissements  ftançais  l'arborent 
le  dimanche. 

Eo  résumé,  le  protectorat  religieux  qui,  plus  d'une  fois,  a 
suscité  de  regrettables  rivalités,  a  été,  selon  les  temps,  entre  les 
mains  de  qui  l'exerçait,  une  sorte  de  reflet  de  la  condition  poli- 
tique générale.  Une  grande  et  belle  page  aura  été  réservée,  sous 
ce  rapport,  par  la  Providence,  dans  les  annales  de  l'Église,  à  la 
Qaule,  cette  terre  fécondée  par  l'évangélisation  des  grands 
évèqnes  des  premiers  siècles,  tels  que  St  Irënée  âeLyon,StDe- 
nis  de  Paris,  St  Hilaire  de  Poitiers,  St  Martin  de  Tours,  St  Ger- 
main d'Auxerre,  St  Rémi  de  Reims,  et  tant  d'autres  illustres 
pontifes  et  saints  doctears.  Dès  les  premiers  mérovingiens,  de- 
venus chrétiens  en  Gaule,  et  contemporainement  aux  pontificats 
des  papes  Pelage  II  et  St  Grégoire  le  Grand  ',  la  France  prélu- 
dait déjà,  en  Occident,  à  la  mission  religieuse  qu'elle  devait 
poursuivre,  à  travers  les  temps  dans  les  contrées  de  l'Orient;  et, 
jusqu'aux  jours  de  ses  dernières  et  inénarrables  infortunes,  rap- 
pelant malheureusement  le  triste  souvenir  des  invasions  d'un 
antre  Age,  elle  se  trouvait  encore  au  poste  d'honneur  qu'elle 
s'était  assigné  pour  la  défense  et  la  protection  de  l'Ëglisel... 
mais  tout  passe,  en  ce  monde  !...  Dieu  seul  est  permanent  !... 
€  Et  juSTniA  EJDs  MU4BT  ïn  stsculum  saicult.'...  > 

La  Turquie  et  l'Europe  ont,  par  des  traités  solennels  reconnu 
&  la  France  ce  droit  de  protectorat  de  l'Église  catholique.  Le 
St-Siège  a  fait  un  devoir  à  ses  Ëvéques  et  à  ses  missionnaires 
d'y  faire  appel,  et  leur  a  défendu  de  se  mettre  sous  une  antre 
protection. 

Mais  il  est  une  autre  question  qu'il  importe  de  traiter  aussi, 
celle  de  la  population  de  la  ville  latine  de  Péra,  à  travers  les 
temps. 

Il  ne  paraît  pas  d'après  Sanll  '',  ce  qui  est  confirmé,  d'ailleurs, 
par  les  Mémoires  de  Sansovîno,  que  la  capitulation  de  Mehem- 
med  n  ait  inspiré  une  grande  sécurité  aux  Pérotes  :  cenx-ej, 
Génois  ou  Vénitiens,  ayant  pris  une  part  plus  on  moins  im* 
portante  à  la  défen-se  de  Constantinople,  ils  émigrèrent  en  grand 
nombre  à  Chio,  où,  bientét,  le  conquérant  ottoman,  en  vue  de 

I  Cr.  lea  Moine*  (fOecident,  par  la  comte  de  MoaUlemb«rt,  II,  140. 
•  Ue.  laud.  11,172. 


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^  180  ~ 

lés  rappeler  dans  leurs  foyers,  fit  prévenir  les  intéressés  que  leurs 
propriétés,  mises  sous  scellé,  seraient  rendues  à  tous  ceux  qui, 
dans  le  délai  de  trois  mois,  viendraient  les  occuper. 

En  1560,  les  Vénitiens  comptaient,  dans  Galata  dix  à  douze 
maisons  de  commerce  '. 

Selon  les  Négociations-,  c  la  population  chrétienne  des 
villes  de  Constantinople,  et  de  Peyra  était,  vers  1573,  de 
40,000  âmes.  » 

Le  20  février  1606,  f  la  population  latine,  écrivait  la  Comu- 
nità  au  cardinal-protecteur,  compte  à  peine  cinquante  mai- 
sons. > 

En  1613,  le  P.  de  Canillac  disait  :  <  Le  petit  nombre  des 
Latins  fait  que  nos  fonctions  sont  moins  fréquentes  que  nous 
le  voudrions*.  > 

En  1614,  Pietro  délia  Yalle  dit,  au  même  sujet  :  «:  II  reste  à 
Péra  peu  de  familles  de  l'ancien  temps,  qui,  tout  en  se  gréci- 
sant  de  vêtements  et  de  costumes,  ont  conservé  le  rit  latin  et  la 
langue  italienne,  concurremment  avec  l'idiome  grec.  > 

En  1616,  les  Francs  de  Galata  «  non  arrivano  a  mille,  »  rap- 
porte Hammer,  d'après  les  bailes  vénitiens*. 

En  1664,  dit  le  P.  Saniger,  (  les  marchands  français  establis 
en  cette  ville,  avec  leurs  femmes  et  leurs  enfants,  étoient  en 
assezbon  petit  nombre.  > 

On  lit  dans  le  Choix  des  lettres  édifiantes  :  c  Le  nombre 
des  catholiques,  A  Constantinople, s'élève  aujourd'hui,  en  1713, 
à  plus  de  douze  mille,  i  Ce  chiffre,  comparéà  celui  des  années 
précédentes,  parait  bien  élevé,  ou  du  moins  il  faudrait  savoir 
de  quelles  catégories  d'individus  on  veut  parler.  En  effet  dans 
un  rapport  du  P.  Tarillon^,  adressé  à  Paris,  le  11  mars  1714, 
au  comte  de  Pontchartrain,  sous-secrétaire  d'état,  on  trouve  ce 
qui  suit  :  f  De  toutes  les  famiUes  qui  habitaient  icy  au  temps 
des  Génois,  il  y  en  a  encore  plusieurs  qui  se  sont  maintenues  & 
Galata  et  à  Péra  ;  ces  personnes  font  entre  elles  trois  à  quatre 

'  Relaiio/ii  eenete,  3'  série,  I,  E74  éd.  d'Albéri. 
»  III,  259. 

'  RelatioTi»  iu  Carayon,  p.  66. 
•  Loc.  taud.  VIII,  227. 

<■  Lettre*  éUiftanle*. Lyon  1819,  p.  17.  Nouceaute  mémoire»  de*  MUêiont  de 
In  Compagnie  de  Jéuta,  Pftria  1715,  p.  4  et  eniv. 


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—  181  — 

cents  personnes.  Les  misfiions  des  ambassadeurs  des  princes 
chrétiens,  et  les  marchands  de  leurs  nations,  font  la  portion  la  - 
plus  distinguée  des  chrétiens  francs  ;  ils  se  montent  à  près  de 
3.000  personnes Il  faut  encore  compter,  parmi  les  catholi- 
ques de  Constantinople  4.000,  ou  5,000  esclaves,  servant  sur 
les  vaisseaux  et  les  galères,  ou  enfermés  dans  le  bagne  du  Grand 
Seigneur,  et  pins  de  20.000  autres  (?)  répandus  dans  les  diverses 
maisons  des  particuliers  <. 

En  1843,  selon  le  Mémoire  déjà  cité  du  supérieur  de  Saint- 
Pierre,  c  le  nombre  des  paroissieos  de  cette  église  s'élevait  à 
mille  environ.  > 

Ces  notions  sur  la  population  de  Péra  sont  bien  vagues,  nous 
sommes  obligés  de  le  reconnaître,  mais  outre  que  dans  les 
siècles  passés  nos  pères  tenaient  peu  à  ces  détails  statistiques, 
même  de  nos  jours  il  est  extrêmement  difficile,  pour  ne  pas  dire 
impossible,  de  axer  un  chiffre  exact,  de  la  population  de  la  ville 
de  Constantinople,  et  même  de  la  population  catholique.  Nous 
tâcherons,  quand  il  s'agira  des  temps  actuels,  de  donner  des 
cbifFres  aussi  approximatifs  que  possible. 

Il  est  une  autre  question  plus  intéressante  encore,  celle  de 
l'état  dans  lequel  vivait  cette  population  chrétienne.  Nous  ne 
pouvons  nous  en  faire  une  idée  par  le  régime  sous  lequel  nous 
nous  trouvons,  surtout  depuis  le  Traité  de  Paris.  (1856.) 

D'abord,  conformément  aux  capitulations  mentionnées  ci- 
dessus,  les  Latins  catholiques  avaient  le  libre  exercice  de  leur 
culte,  et  l'usage  libre  de  leurs  églises.  En  théorie  cette  liberté 
ne  cessa  pas  d'exister;  mais  elle  était  tempérée!?  par  te  système 
des  avanies,  et  quantité  de  vexations,  La  lecture  des  récits  de 
voyages,  et  surtout  les  archives  des  missions  sont  souvent  na- 
vrantes à  ce  sujet.  Nous  pourrions  écrire  de  longues  pages  de 
récits  douloureux.  Chaque  communauté  compte  d'ailleurs  un 
bon  nombre  de  martyrs,  morts  au  bagne,  sur  les  galères,  de 
mauvais  traitements  etc., mais  nous  ne  voulons  pas  faire  ici  cette 
histoire,  lugubre  et  glorieuse  tout  à  la  fois. 

Cependant,  en  temps  ordinaires,  on  y  jouissait  d'une  cer- 
taine liberté.  D'après  la  correspondance  de  la  Comunità  avec 
Rome,  on  faisait  dans  Pèra-Galata,  en  1619,  des  processions  so- 

•  V.  ci-aprés  Tiagnjs. 


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—  182  — 

lennelles,  dans  les  mes  de  la  ville»  les  jeudi  et  vendredi  saints  ; 
I  une  magDi&qae  procession  se  faisait  également,  par  les  rues, 
le  jour  de  Pâques,  avec  une  inanité  de  chandelles  et  de  torches 
allumées.  >  Les  convois,  accompagnés  d'un  grand  cortège  de 
confréries  et  de  religieux,  avaient  lieu  avec  une  liberté  '  qu'on 
ne  saurait  désirer  plus  grande,  même  en  chrétienté.  Les  âdèles 
avaient  coutume  de  se  rendre  au  cimetière,  accompagnés  du 
clergé  des  trots  paroisses  de  Galata,  les  3  et  4  novemhre, 
pour  y  réciter  l'office  des  morts. 

Le  4  novembre  1675,  le  Vicaire  patriarcal  se  rendit  au  Champ 
des  morts,  pour  y  faire  la  cérémonie  accoutumée,  et  par  sa  pré- 
sence mettre  An  à  certaines  difficultés  intestines.  Cette  cérémo- 
nie se  faisait  tous  les  ans,  avec  plus  ou  moins  d'éclat. 

Une  redevance  de  5  aspres  était  payée  au  Capoudjou  de  Ga- 
lata, qui  remettait  en  échange  le  permis  du  Woïvode  pour  faire 
sortir  les  morts  de  l'enceinte.  Il  paraît  qu'une  redevance  était 
également  perçue  par  ce  même  officier  c  pour  les  nopces  comme 
pour  les  morts  '.  » 

Les  processions  de  la  Fête  Dieu  se  faisaient  aussi,  parfois 
même  elles  pouvaient  sortir  des  églises  et  des  cloîtres.  On  re- 
marque que  l'église  et  le  cloître  de  St-François  étaient  riche- 
ment ornés  pour  la  fête  du  (7o**pi«J>omi»i.  Enl730,d'aprèsles 
comptes  de  la  Nation  française  à  Constantinople,  celle-ci  four- 
nit un  subside  <  pour  les  reposoirs  de  la  Fête-Dieu,  au  Palais 
de  France,  ciiez  les  PP.  Jésuites,  et  les  Dominicains.  > 

Depuis  de  longues  années,  et  surtout  depuis  la  guerre  d'O- 
rient, les  processions  de  la  Fête-Dieu  sortent  des  diverses  églises 
et  parcourent  les  rues  avolsinantes,  (ou  du  moins  les  parcou- 

■  H  Les  chrétiens  (Isa  Grecs)  tout  aussi  des  processions  magniflqueti,  dit 
Michel  Febvre  (Ëlat  présent  de  la  Turquie,  1075,  p.  227)  par  les  rues  voi- 
sines de  l'âglise,  où  assistant  le  patriarche,  l'évèque  et  les  prêtres,  tous  en 
chapes,  et  vestua  des  plus  beaux  ornements  qu'ils  aient.  > 

>  La  taxe  des  morts  était,  paratt-îl,  en  usage  en  Orient,  car  on  lit  dans  le 
traité  conclu  par  Florence  avec  l'Éte-pte, en  septembre  Xi^i:  «e  quamln  mori- 
no,  unti  ilelli  luro  merca/lanti.  in  gaalitnque  liinijo  fonte,  panna  (■«.«(■rr  .ii-jiolto 
aUn  rkicsa  ilei  ckriglia/iî,  iecondo  Vutensa.  tenm  pngaiv  nesvtiia  nxin- 
giaria.  i  (Amari,  dorumenti  degli  arehiri  tom-<ini,  Florence  \Wtî,  p.  339, 
343.)  Dans  un  BËrat  concédé  aux  religieux  latins,  en  1070  =  Ifînf;,  à  la  de- 
mande du  Comte  de  Leatie,  ambassadeur  impérial  à  Constanliiopic.  ce  droit 
est  dénommé  TaboiU  ogkhi'ctj.  «  taxe  du  cerceuil  n.  (Document  communiqua 
par  le  R.  P.  Romano,  S.  J,  Recteur  du  collège  de  Sle-Pulchérie.) 


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—  183  — 

raient,  car  elles  ont  été  supprimées  dans  diverses  paroisses.  ) 
Elles  sont  accompagnées  par  les  troupes  et  la  mnsique  turques, 
dont  on  ne  saurait  b'op  louer  l'attitude  dans  ces  cérémonies.  La 
procession  de  St-Benoit  se  fait  le  jeudi  môme  de  la  Fête-Dieu, 
à  l'issue  de  la  grand'  messe  célébrée  par  le  Vicaire  apostolique  ; 
celle  de  St-Pierre  le  dimanche  dans  l'octave,' après  la  messe; 
celle  du  St-Esprit,  le  même  jour  après  les  vêpres  ;  celle  de  St- 
Antoine  le  jeudi  de  l'octave,  dans  l'après-midi.  Leur  parcours 
est  fort  restreint.  Mais  elles  sont  suivies  avec  dévotion  par  les 
catholiques,  et  avec  respect  par  une  foule  de  grecs  et  même  de 
musulmans.  Lesrepoaoirs  sont  fort  beaux. 

Pour  faciliter  l'intelligence  de  nombreux  passages  de  notre 
histoire,  nous  croyons  devoir  intercaler  ici  la  liste  complète  des 
représentants  de  la  France  auprès  de  la  Porte,depui8  François  I, 
jusqu'à  nos  jours.  Elle  terminera  ce  chapitre  consacré,  en  partie, 
au  protectorat  que  la  France  a  esercé  à  Gonstantinople  sur  les 
chrétiens  de  rite  latin. 

Liste  des  Ambassadeurs,  ministres,  agents  et  résidents 
français  à  Constantinople  depuis  1524  jusqu'à  nos  jours  ; 

Frangipaiii  (Jean),  envoyé,  1524. 

Rinçon  (Antoine),  envoyé.  1531. 

LAFOREST  {Jean  de).  1"  Ambassad.  1535. 

1"  Traité  conclu  en  1535, 

Montlue  (Jean  de),  protonotaire.  1536. 

Marillac,  (cousin  de  J.  De  Laforeat)  chargé  d'alf.                   1537. 

Capitaine  Rinçon,  envoyai.  1538. 

CantelmofCésai'l  napolitain,  1539. 

Polin,  baron  de  la  Garde  ;Antoiae)  dît  Cap.  Polin,  envoyé.   1541. 

D'ARAMO.N  (Gabriel),  2' Ambassad.  l.'>17. 

De  Cambray  ichaiioine  de  Bourges},  chargé  d'affaires.  1Ô50. 

Chesneau,  chargé  d'affaires.  1551. 

Retour  de  M.  dAramon.  1552. 

Chesneau,  chargé  d'affaires.  1553. 

CODIGNAC.  valet  de  chambre  du  Roy.  3'  Ambassad.  1554. 

Villemonté,  envoyé.  1555. 

LA  VIGNE  (M.  de).  4'  Ambassad.  1557. 

Petromol,  ou  Petromol  de  la  Norroy,  agent.  1559. 

Dolu,  agent.  1561. 

Petromol,  C009.  et  maître  d'hôtel  du  Roy.  1661. 


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—  184  — 

DU  BOURG,  Sieur  de  Guôrines,  (Ciatide),      5-  Ambassad.  1566. 

II'  Renouvellement  des  Capitulations  :  octobre  1569. 

Grandchamp  (de),  chargé  d'affaires.  1570. 

LaTriquerie,  chargé  d'affaires.  1571. 

DE  NO.-\ILLES  (François),  évéque  d'Acqs,  6'  Ambassad.  1572, 
DE  NOAILLES  (Gilles),  Abbé  de  l'Iale,  7'  Ambassad.  1574. 

Jugé,  chargé  d'affaires.  1577. 

GERMIGNY,  baron  de  Germoles  |le  chevalier  de),  8'  Amb.  1580. 

IIP  Renouvellement  des  traités  ou  Capitulations.  1581. 

Berthier,  chargé  d'affaires.  1584. 

SAVARY,  Seigneur  de  l'Ancosme.  [Jacques],  9*  Ambassad.  15^5. 
SAVARY,  Seigneur  de  Brèves,  (François),  10"  Ambassad.  1589. 

IV'  Renouvellement  des  Traités.  1597, 

DE  GONTAUT-BIRON,  baron  de  Salignac.  (Fr.),  11«  Amb.  1607. 
DE  HARLAY-SANCY,  baron  de  la  Mole,  12*  Ambassad.  1611. 
DE  HARLAY,  comte  de  Césy,  (Philippe),  13'  Ambassad.  1620. 
DE  GOURNAY,  comte  de  Marcheville,  [Henry)  W  Amb.  1631. 
L'ambassadeur  renvoyé  par  la  Porte.  1634. 

Le  comte  de  Césy  reprend  la  gestion  des  affaires.  1G34, 

DELA  HAYE,  seigneur  de  Vanielet  (Jean),  15' Ambassad.  1639. 
Laforest,  chargé  d'affaires,  Blondel,  maréchal  de  camp. 
Roboli,  agent.  1660. 

DE  LA  HAYE,  seigneur  de  Vantelet,(Denis),16'  Ambassad.  1665. 
OLIER,  Marquis  de  Nointel,  (Charles-François),  17°  Amb.  1670. 
Mission  du  chevalier  d'Arvieux,  envoyé  extraordinaire. 

y-  Renouvellement  des  Traités.  1673. 

DE  LA  VERGXE  DE  GUILLERAGUES  (Gabriel -J.js.). 

18'  Ambassad.  1679. 
Fabre  fJ-B.)  chargé  d'iiffalros.  1685. 

DE  GIRARDIiN'  (Pierre),  19°  Ambassad.     id. 

De  Girardin,  abbé,  chargé  d'affaires.  1689. 

DE   CASTAGNERES    DE   CHATEAU.MEUF  (Pierre-An- 
toine), 20'  Ambassad.      id. 
DE  FERRIOL,  baron  d'Argental  (Charles),  21°  Ambassad.  1699. 
Des  ALLEURS  (Pierre  Puchot,  seigneur  de  Clinchamps, 

comte).  i'i°  Ambassad.  1711. 

D'USSON,  marquis  de  Bonnac,  (Jean-Louis),  23'  Ambassad.  1724. 
PICON.  vicomte  d'Andresel  (J-B-L.).  24°  Ambassad.  ,1' 

De  Fonton  (Gasp.),  Cons.  gén.  à  Smyrne,  chargé  d'affaires.  1727. 
VILLENEUVE  (Louis-Sauveur,  marquis  dej  25'  Ambassad.  1 

VI°  Renouvellement  des  Capitulations,  avec  augmenta- 
tion de  quarante-deux  articles  sur  celles  de  1604  et 
de  1673  1740. 


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—  185  — 

Comtede  CASTELLANE  (Michel-Ange),      26'  Ambassad.  1741. 

Comte  DES  ALLEURS  (Roland-Puchot),      27"  Ambassad.  1747. 

M.  Pérote,  agent,  1754. 

De  Peysonnel,  Cons.  gén.  h  Smyrne,  chargé  d'affaires.         1754, 

GRAVIER  COMTE  DE  VERGENNES,  Ministre  plénipo- 
tentiaire. 1755. 

Nommé  ambassadeur,  28"  Ambassad.  1756. 

G"  DE  SAINT-PRlEST{le  chev.  Guignard),  29'  Ambassad.  1768. 

Le  Bas,  chargé  d'affaires,  1776. 

M.  le  Comte  de  Saint-Priest  revient  en  1778. 

Comte  de  CHOISEUL-GOUFFIKR,  30»  Ambassad.  1784. 

M.  de  Choiseul  dSposé  en  1792,  octobre.  '  1792. 

Le  premier  député  du  commerce  charjçé  des  affaires.  1793. 

M.  Doscoches  (Marquis  de  Sainte-Croix),  envoyé  par  la 
Convention  nationale,  sans  caractère  public.  Id. 

M.  de  Chalgrin.  charjçé  d'affaires  du  roi  Louis  XVIII.  !d. 

De  Verninac,  envoyé  extr.  et  ministre  plénip.  de  la  Répu- 
blique française.  1795. 

AUBERT-DUUAYET  (le  Général).  31-  Ambassad.  1796. 

Général  Carra-Saint-Cyr,  chargé  d'affaires.  1798. 

M.  Ruffin,  chargé  d'affaires.  Id. 

Guerre  d'Egypte,  de  1798  à  1802. 

M.  Ruffin  sort  des  Sept  Tonrs  et  gère  les  affaires,  25  août    1801. 
VII"  Paix  (Messidor  an  X).  1802. 

BRUNE.  (Marie-Anne),  maréchal  de  France,  32"  Ambassad.  1803. 
■    M.  Parandier  (P.)  chargé  d'affaires,  déc.  1804. 

M.  Ruffin,  chargé  d'affaires,  sept.  1805. 

SEBASTIAN!  (le  général  Horace)  33"  Ambassad.  1806. 

La  Tour-Maubourg,  marquis  Fay  de  (Florimond),  chargé 
d'affaires.  1808. 

Comte  ANDREOSSY,  lieutenant  général,     31'  Ambassad.  1812. 

M.  Ruffin.  chargé  d'affaires.  1814. 

Marquis  de  RIVIÉRl':.  lieutenant  nénéral,     35'  Ambassad.  1816. 

M.  le  Vicomte  de  Viella,  chargé  d'affaires.  1819. 

LaTOUR-MAUBOL'RG.(marquisFAVde)(Flor.j36"Amb.  1821. 

Comte  di;  Beaurepaire,  chargé  d'affaires.  1823. 

Comte  GUILLI'IMINOT.  lieutenant  général,  37"  Amba«sad.  1826. 

Interruption  des  rapports  entro-la  France  et  la  Porte.  1827. 

Retour  du  général  Guilleminot  h  Constanlinople.  1829. 

Baron  de  Varenne,  chargé  d'affaires.  1831. 

ROUSSIN  iM.  le  vice-amiral  baron),  38'  Ambassad.  1833. 

VIII"  Traité  de  Commerce,  novembre  1838. 

M.  le  Comte  de  PONTOIS,  envoyé  extr.  et  ministre  plénipot.  1839. 


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Le  même,  39"  Ambassad.  1840. 

De  BOURQUENAY,  chargé  d'atf.,  ministre  ptôaip.  1841 

Le  même,  40*  AmbasBad.  1844. 

Le  Général  Aupick,  eovoyé  extr.  et  ministre  plénip.  1848, 

De  LA  VALETTE,  envoyé  extr.  et  ministre  plénip.  1851. 

Le  même,  41*  Ambassad.  1852. 

De  la  COUR.  42'  Ambassad.  1853. 

Le  Général   BARAGUEY  d'HILLIERS,  ambassad.  extr. 

et  plén.,  43-  Ambassad.  1853. 

THOUVENEL,  44'  Ambassad.  1855. 

LA  VALETTE  (le  Marquis  de),  45'  Ambassad.  1860, 

MOUSTIERS  (le  Marquis  de),  46*  Ambassad.  1861, 

BOURÉE,  47'  Ambassad.  1866. 

Ducros-Aubert,  chargé  d  alT.  par  intérim.  1870. 

LA  GUÉRONNIÈRE  (le  Vicomte  de),  48-  Ambassad.  1870. 

VOGUÉ  (le  Comte  de),  49-  Ambassad.  1871. 

BOURGOING,  (le  Comte  de),  ÔO-  Ambassad.  1875, 

FOURNIER,  51'  Ambassad.  l877. 

NOAILLES  (le  Marquis  de),  52"  Ambassad.  1880. 

MONTEBELLO  (le  Comte  de),  53'  Ambassad.  1886 

CAMBON,  54' Ambassad.  1891 


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CHAprraE  III. 

ST-ERANÇOIS  ET  LES  ETIÈBES  MINEURS  CONVENTUELS, 


Nous  avons  vu,  dans  la  première  partie  de  ce  travail,  que  les 
enfants  de  Si  François  d'Assise  vinrent  k  Constantinople  dès  les 
premières  années  de  l'existence  de  leur  Ordre.  Fr.  Lucas  d'Apulie, 
fut  désigné  comme  ministre  de  laProvioce  deRomanie,  en  1319: 
nous  ne  pouvons  pas  constater  sa  venue  en  Orient  ;  mais  en  tout 
cas  Fr.  Benedetto  d'Arezzo,  qui  le  remplaça  dans  la  charge  de 
Provincial,  y  arriva  en  1220.  Il  y  travailla  généreusement  à  l'u- 
uioa  entre  les  grecs  et  les  latins,  et  s'occupa  avec  activité  des 
affaires  delà  chrétienté,  en  Romaoie  et  en  Terre  Sainte.  Il  resta 
dans  le  Levant  jusqu'à  lareprise  de  Constantinople  par  les  Byzan- 
tins et  retourna  mourir  en  Italie,  en  1381.  Mais  avant  de  par- 
tir, il  avait  solidementfondé  son  Ordre  à  Constantinople. Lorsque 
les  Grecs  y  rentrèrent,  les  Franciscains  n'abandonnèrent  pas  la 
partie  pour  cela,  ils  y  restèrent  au  contraire  pour  maintenir  l'in- 
fluence romaine  dans  l'Orient,  Nous  avons  vu  comment  on  leur 
avait  d'abord  disputé,  puis  enlevé  un  couvent  à  Constantinople; 
mais  s'ils  durent  abandonner  Constantinople  (ce  qui  n'est  pas 
certain)  ils  ne  quittèrent  pas  le  pays  ;  ils  avaient,  dès  le  priii- 
cipe,  na  couvent  sur  la  rive  gauche  de  la  Corne  d'Or,  celui  de 
St-Prançois,  qui  resta  pendant  longtemps  la  principale  église  la- 
tine de  Galata  et  en  fut  la  vraie  paroisse;  plus  tard,  quand  le 
St-Siège  se  décida  à  envoyer  un  évêque  à  Constantinople,  St- 
François  devint  naturellement  sa  cathédrale. 

A  quelle  époque  faut-il  faire  remonter  la  fondation  de  l'église 


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de  St-François  ?  Nous  ne  pouvons  répondre  avec  précision  k  cette 
question.  Elle  esistalt  certainement  à  la  restauration  byzantine, 
en  1261,  nous  croyons  même  qu'elle  dut  être  établie  dès  les 
premiers  temps  du  séjour  de  Fr.  Benedetto  d'Arezzo,  antérieu- 
rement à  l'année  1227,  car  malgré  son  nom  de  St-François,  elle 
avait  été  consacrée  tout  d'abord  à  la  T.  Ste  Vierge,  sans  doute 
parce  que  St  François  n'était  pas  encore  canonisé  :  or  il  le  fut 
par  son  ami  et  protecteur,  le  Pape  Grégoire  IX,  le  27  mars  1227. 

Aussi  loin  que  s'élèvent  nos  documents,  nous  voyons  le  cou- 
vent de  St-François  chef-lieu  de  la  Province  de  Remanie,  puis 
à  partir  d'Eugime  IV,  clief-lieu  de  la  Province  d'Orient  :  c'est 
le  nom  qu'elle  conserve  encore  aujourd'hui.  Le  Provincial  des 
Franciscains  jouissait,  depuis  l'origine,  du  titre,  et  remplissait 
les  fonctions  de  vicaire  du  Patriarche  latin  de  Constantinople  ; 
c'est-à-dire  qu'il  remplaçait  le  Patriarche  qui  ne  pouvait  plus 
demeurer  dans  sa  ville.  Comme  nous  l'avons  vu,  la  Province 
de  Romanie  comptait,  en  1400,  trois  custodies,  et  la  Custodie 
de  Constantinople  sept  couvents. 

Nous  avons  aussi  fait  remarquer  qu'un  peu  avant  cette  date, 
à  Constantinople,  comme  dans  tout  l'Ordre  franciscain,  deux 
courants  se  dessinent,  bien  distincts.  Quelques  religieux,  plus 
zélés  observateurs  de  la  Régie,  remplis  de  bonne  volonté  etd'ar- 
deur,  aimant  davantage  la  solitude  et  affectionnant  les  petits 
couvents,  veulent  s'en  tenir  à  la  rigueur  des  paroles  de  St  Fran- 
çois relativement  à  la  pauvreté  et  renoncent  à  toutes  les  permis- 
sions, et  à  tous  les  privilèges  accordés  aux  Frères  Mineurs  par 
'  les  Souverains  Pontifes  :  on  les  appela  de  divers  noms,  mais 
celui  qui  prévalut  fut  celai  d'Observants,  les  autres,  surtout 
ceux  des  grandes  villes  et  des  couvents  considérables,  plus  mê- 
lés au  monde  et  partant  moins  sévères,  acceptèrent  des  Papes 
une  interprétation  moins  rigoureuse  de  la  Règle,  sous  le  rapport 
•  de  la  pauvreté,  quelques  habitudes  pins  bénignes  dans  leurs  ob- 
servances :  on  leur  donna  le  nom  de  Conventuels,  parce  que 
en  général  les  grands  couvents  leur  furent  attribués.  En  France 
on  les  nomma  Cordeliers. 

D'abord  ces  religieux  ne  se  séparèrent  pas  les  uns  des  autres, 
mais  vécurent  ensemble  dans  les  mêmes  maisons,  surtout  ?i  l'é- 
tranger et  dans  les  contrées  infidèles  ;  cependant  peu  à  peu,  ils 
se  séparèrent  complètement,  et  sous  l'influence  de   plusieurs 


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saints,  formèrent  d'abord  des  couvents,  et  enfin  des  Ordres  dis- 
tincts. Pour  ce  qui  nous  occupe  en  ce  moment,  nous  constatons 
qu'en  1445,  le  pape  Eugène  IV  décida  finalement  que  tous  les 
couvants  de  la  Custodie  de  Constantinople  resteraient  aux.  Ob- 
servants à  l'exception  de  celui  de  San  Francesco^qui  serait  attri- 
bué aux  Conventuels.  Plus  tard  encore,  une  autre  division  se 
produisit  dans  l'Ordre,  des  religieux,  pour  revenir  plus  complè- 
tement à  la  forme  de  vie  et  de  costume  de  St  François,  formè- 
rent une  nouvelle  Réforme,  qui  fn!  à  son  tour  séparée  des  autres 
et,  forma  un  Ordre  spécial,  tout  en  restant  parmi  les  vrais  en- 
fants de  St  François,  celui  des  Frères  Mineurs  Capucins.  Ainsi 
les  Franciscains,  remontant  au  même  Père,  observant  la  même 
règle,  et  distingués  par  le  même  signe,  la  Corde  qui  leur  sert 
de  ceinture,  forment  maintenant  trois  Ordres  séparés,  ayant 
chacun  leur  supérieur  général  et  leur  administration  indépen- 
dante :  les  Conventuels,  les  Observantins,  les  Capucins.  St-Ân- 
toine,  Ste-Marie  et  St-Louis,  sont  à  Constantinople  le  siège  de 
ces  trois  branches  de  l'Ordre  franciscain. 

Quoi  qu'il  en  soit,  et  pour  revenir  à  notre  sujet,  nous  avons 
TU  plus  haut  que  sous  le  règne  d'Andronic  II  Paléologue,  suc- 
cesseur de  Michel,  les  Frati,  Minori  e  Predicatort,  avaient 
eu  beaucoup  à  souffrir  de  l'animadversion  des  Grecs;  et  que, 
pour  un  moment  du  moins,  chassés  de  Constantinople  ils  avaient 
été  contraints,  en  1307,  de  se  rabattre  tous  sur  leur  couvent  de 
Péra.  Ce  couvent  lui-même  était  déjà  fort  convoité  par  l'empe- 
reur i  mais  le  concours  des  catholiques  qui  venaient  se  presser 
autour  de  leurs  religieux,  les  consolait  et  les  engageait  même 
à  chercher  avec  eux  les  moyens  de  se  soustraire  aux  mauvais 
traitements  dont  ils  étaient  l'objet. 

Nous  n'avons  pas  de  monument  relatif  à  l'église  de  San  Fran- 
cesco,  antérieur  k  l'année  1304.  Wadding,  le  savant  Annaliste 
des  Frères  Mineurs,  cite  une  inscription  commémorative  funé- 
raire, placée  sur  la  porte  principale  du  temple  à  l'extérieur  :  - 
c  HIC  INFERIUS  EST  SEPULCRUM  D.  D.  GERARDI  ET 
ROBERTI  FRATRUM  COMITUM  DE  MONTE  GUCO  ET  HAE- 
REDUM  SUORUM....  1304-1338.  »  Cette  inscription  postérieure 
d'une  année  seulement  à  la  Délimitation  de  Qalata  de  1303, 
citée  plus  haut,  d'après  Sauli,  est  d'autant  plus  importante 
qu'elle  constate,  pour  cette  époque,  l'existeoce  de  Méglise  ta- 


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—  190  — 

tine  de  St-François,  dans  cet  endroit  même  :  fait  corroboré  par 
une  autre  inscriptioo'. 

En  effet  nous  avons  trouvé,  à  deux  mètresde  profondeur  sous 
le  sol,  lors  de  l'exhumation  du  cimetière  des  Orands  Champs 
de  Péra,  en  1864,  une  pierre  tombale  de  l'année  1335,  prove- 
nant de  St-François  ou  de  son  enclos,  et  que  nous  avons  fait 
placer  dans  le  nouveau  cimetière,  à  la  partie  centrale  du  grand 
ossuaire.  Voici  le  texte  de  cette  inscription  accompagnée  du  fac- 
similé  que  nous  en  avons  fait  relever  : 

SEPULGRUM  DOMINI  ANDRIOLI  DE  PAGANA  ET  HAE- 
REDUM  SUORUM,  QUI  OBIIT  ANNO  DNI  M  CGC  XXX  V. 
DIE  XV  JUNU. 

Cette  inscription  est  de  la  même  année  que  celle  rapportée 
plus  haut,  (Part  n,  Ch.  I.),  lorsque  Galata  reconnaissait  encore 
sa  vassalité  vis-à-vis  des  empereurs  grecs. 

Dans  les  divisions  intestines  survenues  à  la  mort  d'Andro- 
nic  III  (juin  1341),  les  Galatiotes,  avant  de  se  prononcer  pour 
l'un  des  concorrents  &  la  couronne,  chargèrent  deux  religieux  de 
St-François,  dont  l'un  était  le  P.  Enrico,  parent  de  l'impératrice 
Anna,  et  supérieur  des  Mineurs  Observantins  de  Galata,  de 
se  rendre  an  camp,  pour  faire  une  sorte  d'enquête  sur  les  droits 
des  compétiteurs,  et  transmettre  ensuite  son  avis  aux  magistrats 
de  la  colonie^. 

En  1356,  les  Pères  Tomaso,  earmélitain,  et  G-aiUaume,  des 
Mineurs,  furent  envoyés  par  Innocent  VI,  comme  nonces,  auprès 
de  l'empereur  Jean  I"  Paléologue  ;  et,  ne  l'ayant  pas  b-ouvé  à 
Constantinople,  frère  Guillaume  resta  dans  la  capitale,  aân  de 
se  concerter  avec  ses  confrères  les  Mineurs  de  Péra  et  leaPr^- 
cheurs  de  Oalata,  sur  les  mesures  à  prendre  pour  le  succès  de 
leur  mission  ^. 


1  Storia  unioertale  délie  miuioiû  frvnce*cane.  Rome,  1859,  II,  chap,  iv,  186. 

1  Sauli,  Ux.  laud..  I,  £77. 

'  Sloria  uiusertale  deUe  miuioni  fraiKe*eane,  IV,  221  ;  Cf.  Waddîng,  an- 
aée  1356.  Cette  dîatlaction  de  dénomination,  ponr  ta  mâiUe  localité,  pont 
paraître  sin^liére  ;  on  ne  saurait  l'expliquer  autrement  qne  conims  una 
simple  appellation,  chinaie  par  chacune  des  deux  religions  pour  aon  titre 
q>écial  et  partieuliar. 


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—  191  — 

Une  bulle  de  Martin  Y  (1439)  aa  fl*ère  Nicolas,  nonce  aposto- 
lique, cite  les  diocèses  et  villes  de  c  Cafa,  Chio,  Mytilène...  Pa- 
ra, Ticino  di  Constantinopoli  '. 

Les  Annales  Minorum  foornissent  des  détails  intéressants 
«  sar  l'eaglyae  de  St-Françoia  des  Cordeliers,  »  qualifiée  par 
M.  de  Ciermigny,  ambassadeur  de  Henri  ni,  <  de  ddme  ou  esglyse 
cathédrale  ;  >  par  la  Comunitâ,  de  <  grandezza  e  splendore  del 
nome  christiaDO,  in  queste  parti  dell'Oriente..,  domo  di  questa 
città  di  Peyra,...  cbiesa  principale,  >  par  Dacange,  c  d'aedes 
principalis  totios  Galatini  oppidi.  » 

Wadding  donne  la  description  de  cette  église,  et,  entre  autres 
détails,  le  texte  des  pierres  fanéraires  placées  dans  le  temple, 
mais  dont  le  feu  n'a  laissé  aucune  trace  ;  en  voici  le  som- 
maire : 

Près  la  porte  de  la  sacristie  :  «  bontpacids  de  paclo,  amib&tos 

REâNI  BCEUORDll-,  OBITI  1364.    > 

Près  la  porte  conduisant  de  l'église  au  cloître  :  c  JACEnr  kobilis 

Vm  BRANCHA,  DE  SPmOUS;  DEFDNCTDS  ANNO  1890.   > 

Près  le  baptistère  :  c  jacent  andrbas  de  orquldis  andreae 

FIUCS  QUI  ANNO  1433  Dm  PRIU.  NOV.,  BT  LEONABSOS  DB   SPINOLIS 
QDI  DIE  10  SEPT.  OMEBCNT.   > 

Non  loin  de  la  porte  du  cloître,  le  tombeau  en  marbre  c  ma^ 

QNIFICI  DHI  ULinS  CAftOLI   LOUELINI,  PRfFECTI  CLA5ST3  GENUENBI8, 
DBFDNCn  1434  OIE  4  BEPTEUBRI3.  > 

Âu  milieu  de  l'élise  :  c  hic  sepdltds  est  mabcus  DELpmNus, 

PATRICIDS  VENBTDS,  ANHO  1490  DIE  13  JOUI.  > 

Dans  le  cloître  même,  chapelle  Ste-Marie  Madeleine  :  (  jacet 

PmiIFPUS  DE   ARTOIS   COltES  DE  CIC  (sic)  ^I  COMESTABOLI  FRANCIS, 
QUI  OBirr  MIKHALIt3  ANNO  1497  {siC)  DIE  15  JCND^.  > 

<  Storia  xtmeêrtale  deUe  miM.  fr.  IV,  231;  Cf.  WaddÎDg.  année  1356  ;  id. 
p.  472. 

*  Comte  d'Eu,  fait  pritonnier  i  la  oéMbr»bataiUe  de  Nioopolis,  par  sultan 
Balezid,  le  25  Mplembre  1396,  et  mort  à  Mikhalidj ,  Ducange,  Contt.  CkriU. 
p.  M.)  Cette  intcriptioa  sa  TOyait  encore  dans  St-Frangoîa,  en  1656. 

On  lit  dans  lea  archives  des  Missions  capucines  dans  le  Levant  :  ■  Le  19  fé- 
vrier 1656,  le  curé  de  l'église  St-Franç(da  présenta  à  M.  de  La  Haye  une 
lierre  Terdfttre,  comme  étant  un  tombeau,  dans  lequel  on  n'a  rien  trouvé, 
mais  dont  le  oouTercle  portait  l'épitapbe  d'un  comte  d'Artois,  qualifié  conné< 
Uble  de  France,  mort  en...  1394  on  5.  >  (tie). 


DigilizPdbvGoO^le 


—  192  — 
Au  milieu  du  temple  :  t  georgius  andrëas  GRirrr  dugis  veme- 

TIABUM  FILIUS,   QUI  OBIIT  1538  '.    » 

Dans  le  chœur,  du  côté  de  l'épitre  ;  t  jacet  joannes  dold 

ÛALLORUM  REGIS  ORATOR  QUI  IN  «TATIS  33,  m:  CHRISTI  1561,  DIE  JULD 


Dans  la  chapelle  Ste-Anne  :  <  jacet  illusibis  vm  albertus 

DE  VnS  FERDINANDl  ET  MAXIMIUANI  IMPERATORUU  GONSILIARIl'S  ET 
IN  CURIA  OTTOMANIGA  MULTORDM  ANNORDM  ORATOR.  OBIIT  OC.TOBRIS 
1579  J.    » 

Le  baron  de  Preyner,  ministre  impérial,  décédé  le  19  août 
1584,  fut  également  inhumé  à  Saint- François,  à  côté  d'Albert 
de  Wyss*. 

Près  du  baptistère,  on  lisait  sur  le  sol  :  *  vincentio  grade- 
Nico,  EQum,  BAiLO,  1600.  >  Le  nom  de  ce  balle  ne  se  trouve  pas 
dans  la  liste  des  balles,  donnée  parHammer. 

Parmi  les  familles  illustres  dont  les  membres  avaient  leur 
sépulture  à  St-François  se  trouvaient  toutes  celles  qui  ont  laissé 
un  nom  dans  l'histoire  locale. 

Quelques-unes  faisaient  mieux,  elles  donnaient  aussi  de  leurs 
enfants  au  cloître  ;  ainsi  nous  rencontrons  parmi  les  profès  de 
St-François,  d'après  Bonose,  Fr.  Maestro  Bartbolomeo  Lomel- 
lini,  di  Genova,  et  Lodovico  Splnola,  vicario  in  Pera  di  Gons- 
tantinopoli,  etc. 

Cette  église  paraît  ne  pas  avoir  été  placée  seulement  sous  le 
vocable  de  Saint-François,  à  en  croire  l'inscription  suivante, 
placée  au-dessusde  deux  tribunes  séparées,  l'une  pour  les  jeunes 
filles,  l'autre  pour  les  femmes,  que  MgrGiflredusGicala,évêque 
de  Gaffa,  avait  fait  construire  : 

Ad  honorem  Dëi  et  B.  Mari*;  vibginis  et  beati  Francisci  hoc 

OPUS  FECn  FIERI  REVDU3  DOMNUS  PRATER  GiFFREDDS  CiGALA,  DeI 
GRATIA  EPISCOPUS  CAFFENSIS,  OLIM  PROPESSUS  IN  ORDINE  MINORUM 
PRO  CUJUS  SDTFiai  PR.¥aaO  DETUR  SIBI  VriA  fn'EBNA,  AMEN.  1426 
DTE  PRIMO  AUGtJSn. 

'  File  naturel  du  doge,  et  qui  joua  un  râle  important  sous  le  râgne  de  sul- 
tan Sulelman. 

^  Les  Négoriatlon»  ([,  6G3)  et  autres  documents  ne  font  nulle  mendan  de  la 
triste  On  de  est  envoyé  de  Charles  IX. 

>  Lisez  r  1569.  Si<gociat!ons.  III,  96;  Hammer,  VI,  335  et  516. 

*  Hammer,  VI,  174. 


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Selon  le  témoignage  de  Waddiug,  l'église  et  le  cloître  de 
St-Fraaçois  étaient  vastes  et  spacieux  ;  les  rapports  contem- 
porains s'accordent  encore  à  dire  que  l'ancien  enclos  de  l'église 
était  plus  étendu  que  celui  de  la  mosquée  actuelle,  bâtie  sur  ses 
ruines. 

Lies  NégociatiOTis  \  faisant  le  récit  des  rivalités  politiques 
existant  entre  l'envoyé  de  Philippe  II  et  l'erabassadeur  du  roi  de 
France  Henri  III,  nous  donnent  aussi  quelques  détails  sur  ces 
mêmes  rivalités  dans  les  questions  religieuses  ;  ces  conflits  ame- 
nèrent la  clôture  de  l'église  St-François  durant  plusieurs  années  : 
(  J'ay  tousjours  conservé  et  conserve  la  possession  de  précé- 
dence  des  ministres  de  V.  M.,  écrivait  au  roi  M.  de  Germigny, 
le  30  mars  1580,  à  sçavoir  dans  l'esglyse  des  Cordeliers  qui  sert 
comme  de  dôme  ou  esglyse  cathédrale  à  tous  les  ambassadeurs 
chrestiens  y  résidentz,  comme  vostre  ambassadeur,  celuy  de 
l'empereur,  de  Venise  et  Raguze,  où  ils  ont  accoustumé  d'an- 
cienneté, à  la  façon  des  ambassadeurs  à  Rome  et  à  Venize,  d'al- 
ler ouyr  les  messes  grandes  et  offices  de  l'église  aux  festes  so- 
lennelles de  l'année  tous  easemble,  où  j'ay  été,  devant  et  après 
l'accident,  avec  les  dits  ambassadeurs,  qui  même  me  sont  ve- 
nus prendre  en  mon  logis,  pour  m'y  accompaigner-,  laissant 
aller  le  susdit  Mariglian  ^  seul  en  une  autre  esglise  à  part.  > 

M.  de  Germigny  continua  ainsi  le  26  avril  suivant  :  «  Le  sieur 
de  Mariglian  projetait  de  faire  practique  avec  le  bassa  pour  se 
trouver  en  l'église  principale  de  ce  lieu  de  Péra  ;  je  le  devançay, 
faisant  entendre  résolument  au  bassa,  où  il  le  luy  permettrait 
et  ferait  cette  brèche  à  V.  auctorité,  je  ne  l'endurerois  et  y 
emploierois  toutes  mes  forces  et  ma  vie  pour  faire  saige  ledit 
Mariglian  à  l'advenir  et  onltres  ce  prendrois  dès  lors  congé  de 

ce  seigneur et  le  bassa  éclaircy  soudainement,  envoïa  l'ordre 

de  ce  seigneur  audict  Mariglian  de  n'assister  aux  cérémonies 
publiques  là  où  Y.  ambassadeur  seroit,  s'il  ne  vouloit  marcher 
et  prendre  siège  au-dessoubz,  et  qu'où  il  se  mettroit  en  effort 
d'oultre-paaser  ce  commandement,  il  l'envoyeroit  renfermer  en 
son  logis....  Bref,  j'ay  assisté  à  toutes  les  cérémonies  de  la  sep- 

1  Tome  m,  889. 

*  Cf.  plus  haut  g  Protectorat  politique. 

*  L'envoyA  espagnol  ou  mieux  de  l'cmpepeur  d'AUemagna. 


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—  194  — 

maine  sainte  et  festes  de  Pasques,  m'estaot  venu  prendre  en 
mon  logis  le  vice-bayle  des  Vênieiens,  les  Seigneurs  Perotz, 
raguzoj's,  marchands  vénitiens  et  aultres  à  l'accoustumée,  pour 
m'y  accompaîgner  ;  où  ledit  sieur  Mariglian  alla  seulement  une 
fois  ou  deux  en  l'église  Saint-Pierre,  petit  monastère  des  Jaco- 
bins, seul  et  sans  qu'aucun  pêrot  ni  aultre  et  moings  ambas- 
sadeurs nibayles,  s'y  retrouvassent  '.  » 

Le  même  ambassadeur  écrit  encore  au  roy,  le  2  juillet  sui- 
vant- :  «  Je  me  trouvay  à  la  procession  solennelle  de  la  Feste- 
Dieu  dernière,  accompaigné  de  tous  les  Seigneurs  Pèrotz  à  l'ac- 
coustumée,où  toutes  lesesgllses  chrestiennes  de  Constantinople 
et  de  Péra  s'assemblent;  et  fusl  faict  l'office  par  l'évesque  de 
Pcio.  ï 

Selon  Hammer  ^,  sultan  Murad  III,  voulant  les  changer  en 
mosquées,  aurait  fait  fermer  les  églises  de  St-François,  Ste- 
Anne,  et  St-Sëbastien.  Le  dimanche  suivant,  l'ambassadeur 
se  serait  rendu,  avec  une  suite  de  quatre-vingts  Français,  de- 
vant l'église  dont  il  aurait  frappé  la  porte  entonnant  l'hymne 
Attollite  portas  ;  et  il  ne  se  serait  retiré  qu'à  midi,  pour- 
suivi par  les  railleries  des  Turcs  ;  mais,  comme  cela  avait  déjà 
eu  lieu,  un  sacrifice  de  quelques  milliers  de  ducats  aurait 
empêché  l'exécution  du  projet  conçu*. 

De  nouvelles  difiicultés  s'élevèrent  pourtant  encore,  à  propos 
des  mêmes  questions  de  préséance,  en  1585,  avec  le  baile  de  Ve- 
nise. Bertbier,  chargé  d'affaires,  écrit  au  roi,  le  26  mars  de  cette 
année  :  i  Comme  suivant  ce  qui  a  esté  de  tout  temps  de  louable 
coustume...  par  les  ambassadeurs  de  V.  M....  et  pour  en  ce  don- 
ner exemple  et  satisfaction  à  ce  peuple  chrestien,  de  deçà,  aux 
églises  de  Pera,et  mesmement  à  celle  de  Saint-Françoys,  je  se- 
rays  le  dimanche  xvii  du  présent  mois,  allé  à  icelle  pour  y  ouyr 
le  sermon  et  le  service  divin  ;  après  toutesfois  avoir  faict  re- 
connaître à  celluy  des  miens  qui  y  porte  mon  tapis,8i  celluy  du 
baille  des  Vénitiens  y  seroit.  Comme  il  n'estoit  donné  ordre 

'  Cf.  ci-dessus  ;  Protectorat  politique. 

*  Négociationii.  III,  916. 

3  Loc.  lau't.  VU,  IJO. 

>  Moins  affirmati^JouanDin  (Za  ritrç'jie,  169)  dit  eeulementque  M.de  Ger- 
mignj-,  au  moyen  de  quelques  milliers  de  ducata,  empAcha  la  fermeture  d«i 
églises  qu'on  voulait  consacrer  à  rislaniieme. 


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—  195  — 

qu'en  ce  cas  il  meist  le  mien  en  une  aaltre  église,  là  auprèz... 
Mais  non  seulement  cestuy-cy  prins  party  d'y  venir,  mais  il  me 
manda  dire  par  ung  des  siens  quej'eusse  à  lui  céder  le  premier 
lieu.  Sur  ce,  pour  éviter  l'outrageuse  résolution  du  dict  baille, 
venant  h  ceste  an,  accompaîgné,  oultre  les  siens,  de  tout  plain 
de  personnes  de  sa  nation,  j'aurais  pensé  plus  expédient  de 
m'en  partir  de  là,  ayant  mesme  jà,ouy  messe*.  * 

On  relève  plus  loin  de  la  môme  correspondance  que  ce  chargé 
d'affaires  »  auroit  esté  invité  à  se  trouver  à  St-Françoys  par  ung 
marchand  de  la  confraternité  du  St-Sacrement'  érigée  de  deçà 
depuys  un  an  ou  environ  (1584),  ayant  accoustumé  les  confrères 
d'icelle  faire  une  procession  à  certain  dimanche  de  chaque  moys. 
Ce  dont  où  ainsy  seroit  estant  moi  semhlablement  de  la  dite 
confraternité....  Le  baile  ani-oit  encore  [contre  l'antienne  et  in- 
vétérée  usance,  non  oncques  violée  par  aucuns  ministres  de 
princesde  deçà,  ny  des  ambassadeurs  de  V.  M.)  buté  de  vouloir 
forcer,  mesmes  par  audacieuses  menaces,  les  chrestiens  Perrots 
de  l'antienne  confraternité  de  Ste-Anne,  en  ceste  église  de 
St-Françoys,  de  luy  céder  le  pas,  dans  les  cérémonies  de  la  se- 
maine sainte.  En  estant  venus  enfin  iceux  Perrots  jusque  à  ce 
(voyant  l'oultrage  du  personnage,  et  en  vertu  de  leur  ancien 
commandement  et  privilège  de  ce  seigneur  d'estre  maintenuz  en 
la  jouissance  de  leur  église  et  leurs  antiennes  usances  en  icelles, 
dont  de  l'ung  et  l'aultre,  ils  ont  toujours  recogneu  la  pre- 
mière, principale  et  comme  seule  protection  de  V.  M.),  que  de 
s'estre  résolu,  ou  de  faire  clore  les  portes  de  leur  église  au- 
dict  sieur  baile,  comme  il  y  viendroit  avec  ce  desseing,  on  de 
recourir  ouvertement  à  moy  pour  ce  regard.  —  Au  demeurant, 
écrit  encore  Berlhier  à  Henri  III,  le  39  avril  1585,  je  fus  le 
jour  de  Pasques,  à  l'église  de  St-Françoys,  au  service  solen- 
nel d'icelle,  y  bien  reçu  et  honoré  de  tous,  en  considération 
du  grand  respect  que  tous  généralement  de  deçà  ont  de  tou- 


1  Xdr/orialiuna,  IV,  3C7. 

-  Las  procès- verbaux  de  la  Comuni'tâ  font  aussi  mention  ila  l'exis- 
tence de  cette  confrérie.  Comme  la  confrérie  de  Ste-Anne,  celle  du  St-^acre- 
ment',  précédemment  instituie  à  St-Fraaçois,  fut  transférée  i,  St-U»' 
noit  :  ir  Las  marchanda,  dit  le  Père  Tarillon,  s'assemblent  dans  St-Benolt 
pour  leur  confrérie  du  Saint-Sacrement,  qui  est  fort  nombreuse,  et  Où  il  se 
fait  beaucoup  de  bien.  » 


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—  196  — 

jours  ea  du  nom  de  V.  M.,  ofi  le  sieur  bayle  de  Yenise  ne  se 
trouvera*.  » 

Les  Négociations,  qui,  du  reste,  o&ent  une  lacune  à  cette 
époque,  ne  fouroiaaent  aucun  renseigueinent  sur  la  fermeture  de 
St-Françoi3.  On  lit  dans  Jouannin  ^  :  «  Le  caractère  violent 
de  M.  de  Lancosme  le  poussa  à  commettre  dans  l'église  St- 
Georges  (lisez  St-François),  à  Galata,  un  acte  qui  eut  des 
suites  graves  :  le  dimanche  29  mars  1586,  il  enleva  à  main  ar- 
mée la  place  d'honneur  qu'occupait  l'ambassadeur  impérial.  Le 
maintien  du  privilège  explique  cette  action  ;  mais  la  Porte  en 
fut  irritée  ;  l'église  fut  fermée  ;  et  le  grand-vizir  déclara  qu'elle 
ne  serait  rouverte  que  lorsque  M.  de  Lancosme  ne  serait 
pius  fou.  ) 

Le  docteur  Pezzen,  porteur,  en  1587,  du  c  présent  honoraire 
annuel  impérial,  t  Interposa  inutilement  ses  bons  offices  pour  la 
réouverture  de  l'église  ^  ;  le  baile  vénitien  agissait  aussi  de  son 
côté,  et  annonçait  même  (1588)  un  succès  non  encore  obtenu^. 
IL  semble  toutefois,  d'après  la  correspondance  de  M.  de  Lan- 
cosme, du  33  décembre  1587,  que,  dans  ses  négociations  avec 
le  grand-vizir,  celui-ci  faisait  retomber  le  fait  de  la  fermeture 
de  l'église  sur  les  Perrots  eux-mêmes,  et  que  ces  derniers  dé- 
siraient obtenir  un  compromis  entre  les  ambassadeurs  du  roi  et 
de  l'empereur.  Ce  même  dire  est  rapporté  dans  une  lettre  de 
Henri  IV  à  sultan  Murad,  portant  textuellement  ;  «  Nous  avons 
été  averti  par  notre...  ambassadeur...  que,  pour  quelque  con- 
testation qui  advint...  entre  luy  et  l'ambassadeur  de  Hongrie, 
touchant  la  préséance  de  l'église,  fut  pris  occasion  par  les  pro- 
cureurs religieux  du  couvent  de  Saint-François  de  Gallata, 
de  fermer  leur  ^lise,  où  les  ambassadeurs  avaient  coutume 
d'aller  ouïr  le  service  divin  *.  i  Quoi  qu'il  en  fût,  St-Fran- 
çois n'était  pas  rouvert,  et  M.  de  Lancosme  écrit  au  roi 
le  19  février  1586,  «  à  propos  de  l'heureuse  victoire  que  S. 

■  Négoeiatiom,  IV,  381. 

"  La  Turquie,  p.  173. 

ï  Hammer,  VIT,  181. 

»  NégwAationt,  IV,  633. 

s  Testa,  Recueil  rfe*  (raiK*.  III,  8ïâ.  Dans  une  lettre  do  1611,  la  Comuni^, 
dit  que  l'église  fut  fermée,  d'ordrs  du  sultan,  poor  les  mâmea  raisons,  et  de- 
meura ainsi  close  duraat  plusieurs  années. 


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—  197  — 

H.  divine  a  donaée  à  Y.  M.  sur  l'bérésîe,  j'ai  fiaict  assembler 
tous  les  prebstres  et  religieux  qui  sont<i  Constanttnople  et  à 
Fera*,  lesquels  ayant  chanté  les  lonanges  de  Dieu  et  uog  Te 
Deum,  dans  une  des  priacipales  églises,  et  prescbë  publique- 
ment la  grAce  qne  Dieu  avoitfaicte  à  tous  les  chrestiens  par  l'heur 
et  conduite  de  Y.  M.,  tous  univeraellement  ont  invoque  la  béné- 
diction de  Dien  sur  icelle  ;  je  m'y  suis  trouvé  avec  tous  les 
Françoys  et  grande  quantité  de  Perrots  et  aultres  chrestiens^.  > 

A  son  ari-ivée  à  Constantinople,  vers  le  mois  de  mars  1593^, 
M.  de  Brèves  demanda,  au  nom  du  roi,  an  sultan,  la  réouverture 
de  St-François.  Henri  lY  qui,  d'ailleurs,  avait,  de  longue 
date,  entretenu  des  relations  personnelles  avec  saltan  Murad, 
avait  écrit  de  nouveau  à  ce  prince  :  c  Sultan  Amurat,  notre 
très  cher  et  parfait  ami,  i  pour  le  supplier  très  affectueusement 
que  son  bon  plaisir  soit  avoir  agréable,  en  notre  contemplation, 
que  la  dite  t'gllse  soit  ouverte  à  tous  les  chrétiens  ;  donnant,  s'il 
lui  plaît,  sur  ce,  des  recommandations,  de  sorte  qu'il  n'y  soit 
mis  empêchement  par  les  ministres  et  ofBciers  de  S.  H. ,  de  la- 
quelle nous  recevrons  la  dite  concession  à  plaisir,  à  nous  parti- 
culièrement faite  ^  1  La  demande  du  roi  fiit  aussitôt  satisfaite  : 
€  dès  l'arrivée  de  M.  de  Brèves,  dit  Hammer^,  le  sultan  fit  ou- 
vrir l'église  de  Galata,  qui  litait  restée  fermée  jusqu'alors.  »M,  de 
Brèves,  dans  la  Relation  de  ses  voyages,  dit  au  reste,  à  ce 
propos  :  <  Cette  église  est  demeurée  cinq  ou  sis  années  sans 
être  servie  des  religienx  qui  souloient  y  demeurer,  à  cause  d'an 
débat  qui  arriva  entre  l'ambassadeur  de  l'empereur  qui  résidoit 
alors  à  Constantinople  et  celui  de  France,  fondé  sur  la  préséance 
qu'un  chacun  d'eux  prétendoit.  J'ai  eu  le  bonheur  d'y  restablir 
ces  religieux  comme  auparavant.  Ce  fut  en  l'an  1590^  > 

On  sait,  du  reste,  le  crédit  extraordinaire  dont  jouissait  M. de 

>  La  Ijitîniti'  [lOBaédait  encore,  â  ConstantinoplQ,les  deux  églises  de  $t-Ni> 
colas  et  Ste-Marie. 

'  Si'aixintiiM^,  IV,  649. 

»  Hammer,  liaite*  vMUicnt.  \'\\.  252-253. 

*  Testa,  lirrueil  -Ici  traMx.  III,  328. 
»  Lor.  tnu-l.,  VU,  252. 

*  Une  erreur  typographique  donne  15!>0,  qu'il  faut  remplacer  par  15S3;  l'é- 
glise, on  l'a  vu,  fut  fermée  en  1186  ;  en  adoptant  pour  la  durée  de  la  ferme- 
ture le  chitTre  de  six  années  indiqué  par  M.  de  Braves,  on  aurait  1592;  0«t 
ambassa^Ieur,  on  l'a  dit  plus  haut,  est  arrivé  à  son  poste  en  mars  1593. 


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—  198  — 

Brèves  à  la  cour  ottomane,  l'usage  qu'il  en  fît  pour  la  conserva- 
tion au  culte  de  plusieurs  églises,  tant  à  Constantinople  qu'ail- 
leurs, et  notamment  de  celle  du  St-Sépulcre,  que,  plus  d'une 
fois,  on  voulut  changer  en  mosquée  ;  ce  crédit,  nous  l'avons 
rapporté  autre  part,  avait  fait  dire  à  un  historien  turc  :  «  Peu 
s'en  est  fallu  que  l'islam  ne  devint  fou,  par  le  fait  de  ce  damné 
d'ambassadeur  de  France  !  » 

Une  déclaration  des  trois  chefs  d'ordre  de  Péra,  savoir  1"  le 
Père  André  Farga,  de  Venise,  prédicateur  général  et  vicaire  gé- 
néral de  la  congrégation  de  Constantinople,  de  l'Ordre  des  Prê- 
cheurs; 2''fra  Cherubino,  da  Macerata,  de  l'Ordre  des  Mineurs 
de  l'Observance,  gardiende  la  province  de  Marche,  commissaire, 
vicaire  du  patriarche  de  Constantinople  ;  3°  fra  Margalion  de  Péra, 
commissaire  provincial  des  conventuels,  datée  du  33  décembre 
1604,  constate,  à  cet  égard,  s  les  heureux  effets  de  la  puissante  in- 
tervention de  l'ambassadeur  de  France  ;  il  a,  contre  toute  attente, 
fait  ouvrir  et  sauvé  l'église  de  St-François  de  Péra,  grandenr  et 
splendeur  du  nom  chrétien  dans  ces  contrées,  lorsque,  par  suite 
de  la  dispute  de  préséance  entre  les  ambassadeurs  de  K.  M.  T.C. 
et  de  S.  M.  LjClle  avait  été  fermée;  et  qu'il  yavait  danger  ma- 
nifeste de  la  voir  perdue'  ;  »  St-François  était  resté  fermé  de 
1580  i  1593,  c'est-à-dire  durant  environ  sept  années  -  ;  mais,  à 
différentes  reprises,  le  droit  de  conservation  fut  maintenu  par 
les  sacrifices  pécuniaires  que,  dans  l'intervalle,  et  au  moyen  des 
secours  sollicités  de  Rome,  de  Venise,  et  d'ailleurs,  lew  Pérotes 
s'imposèrent,  tanten  numéraire  que  par  la  vente  d'immeubles 
appartenant  aux  diverses  églises  de  Ste-Anne,  St-Benoît, 
San-f'iiovanni  de  l'hôpital,  St-Pierre  et  autres,  pour  le  rachat, 
à  Malte,  de  trente  esclaves  turcs  ^. 

En  1598,  M,  de  Brèves  «  plaida  encore  la  cause  des  Francis- 
cains de  Péra,  auprès  du  mufti  Sead-Eddin  '  ;  c'est  peut-être  à 
ce  fait  que  les  chefs  d'ordre  font  allusion  dans  leur  déclaration 
précitée,  où  il  est  dit  :  <  Dans  une  autre  occasion,  M.  de  Brèves 
a  sauvé  St-François  d'un  danger  manifeste  que  cette  église 

1  Testa,  lo-.luad.,  111,331. 

*  .(  A  la  suite  lie  ce  différend, disent  les  actes  de  la  Comarulâ.  St-François 
resta  ferma  durant  plusieurs  années.  » 

'  Cf.  ComiiniKi,  à  Tannée  1611,  etHammer,  VII,  287. 
»  Hammer,  VII,  362. 


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—  199  — 

avait  couni,  par  suite  d'une  accusation  relative  à  quelques  es- 
claves fugitifs,  et  qui  avait  menacé  la  vie  de  tous  les  religieux 
desservant  la  dite  église.  > 

En  1604,  c  la  chiesa  di  San  Francesco  era  nel  pericolo  di  per- 
dersi,  bavendo  turchi  procurato  che  il  signore,  passando  vi  en- 
trasse, divertito  Bostandji  bachi  ',  » 

Ayant  quitté  l'ambassade  de  Constantinople  pour  celle  de 
Borne,  M.  de  Brèves  n'en  continua  pas  moins  ses  bons  offices  à 
la  Latinité  de  Péra  ;  par  sa  lettre  du  1"  août  1609,  rappelant  la 
réouverture  de  St-François,  due  à  son  énergique  intervention, 
le  danger  que,  sans  lui,  cette  église  et  les  autres  temples  catho- 
liques auraient  couru  dans  l'affaire  des  esclaves  fugitifs,  la  Vo- 
muiiîlà  déclarait  M.  de  Brèves  t  protecteur  et  défenseur  de 
toutes  les  églises  et  monastères  de  Constantinople,  >  et  sollici- 
tait son  appui  auprès  du  Saint-Père. 

En  1618,  et  sans  doute  à  raison  des  sacrifices  continuels  qui 
lui  avaient  été  imposés,  St-François  était  tellement  pauvre,  l'cri- 
vait  la  Comunltà,  le  30  mars,  h  Paul  Y,  *  que,  cbaque  semaine, 
les  desservants  de  cette  église  vont  mendier  leur  pain  dans  les 
maisons,  et  qu'un  frère  va  faire  la  quête  à  chaque  messe.  » 

Eu  1623,  le  6  mai,  la  Sacrée  Congrégation  des  Bites,  sur  une 
instance  du  visiteur  apostolique,  l'évèque  de  Santorin,  décida 
que  c'est  au  Supérieur  de  FF.  MM.  Conventuels  de  Constanti- 
nople et  non  au  Vicaire  patriarcal  qu'il  appartient  de  porter  le 
St-Sacrement,  dans  les  processions  qui  se  font  dans  les  cloîtres 
de  St-François  :  cependant  elle  ajoute  que,  par  ailleurs  le  Vi- 
caire patriarcal  avait  la  préséance  dans  tous  les  actes  auxquels  il 
assiste  en  sa  qualité  de  Vicaire  patriarcal.  Le  Vicaire  patriarcal 
était  alors  Frère  Mineur  observant,  gardien  de  Ste-Maric  Dra- 
■  péris.) 

En  1633,  l'Évoque  de  Santorin,  visiteur  apostolùiiio,  fixe 
le  personnel  religieux  de  SI-Fran(:ois  it'six  prêtres  et  deux 
laïques,  et  à  45,000  aspresla  pension  qui  devaitleur  être  comp- 
tée par  les  procureurs,  pour  leur  entretien  et  les  réparations 
de  l'église. 

En  1633,  St-François  aurait  été  mis  sous  scellé,  aio-si  que 
d'autres  églises,  ce  qui,  avec  la  réparation  des  églises  attenant 

'  Hammer,  d'après  les  Baile^  rt'nitien»,  VHI,  iSli. 


y,'G00g\il 


—  200  — 

aux  murs  de  la  ville,  aurait  occasionné  à  la  Latinité  de  Galata 
de  nouveaux  sacrifices  ;  aussi  dut-on  réduire  le  personnel  ecclé- 
siastique de  St-François  à  quatre  prêtres  et  un  iai'que,  et 
l'allocation  annuelle  de  15,000  aspres,  soit  net  30,000  aspres 
ou  250  realî,  auxquels  venaient  s'ajouter  150  realt  pour  le 
service  de  trois  chapelles,  une  fois  la  semaine  l'une',  celui 
du  bagne,  les  mariages,  baptêmes,  enterrements,  bénédiction 
des  maisons,  deux  fois  l'an,  les  offrandes  durant  l'année,  la 
caisse  particulière  du  couvent,  les  confessions  et  legs. 

Au  milieu  de  toutes  ces  difficultés  les  religieux  de  St-Prançois 
continuaient,  comme  ils  pouvaient,  leur  ministère,  ils  s'occu- 
paient même  de  l'œuvre  à  laquelle  l'Ordre  avait  travaillé  avec 
tant  de  sollicitude,  la  réunion  de  l'Église  grecque  à  l'Église  ro- 
maine. L'an  1637,  le  P.  Mattre,  Angelo  Petrica,  commissaire 
général  d'Orient  pour  les  FF.  MM.  Conventuels,  et  Vicaire  pa- 
triarcal, détermina  le  patriarche  grec,  Veni,  à  tenir  un  synode 
où  fut  prise,  par  les  Grecs,  la  résolution  de  se  réunir  aux  La- 
tins. Mais  l'émoi  causé  par  cette  résolution  fut  tel  que  l'on  cons- 
pira contre  le  patriarche  et  qu'on  parvint  à  le  faire  empaler,  sur 
la  place  publique.  Quant  an  P.  Angelo,  il  eut  grand  peine  à 
sauver  sa  vie,  en  fuyant  en  chrétienté. 

Enfin,  le  16  mars,  selon  Hammer,  le  18  selon  les  archives  de 
St-Antoine,  1639,  l'antique  église  de  St-François,  qui  avait  été 
si  longtemps  la  première  de  Galata,  et  qu'on  regardait  comme 
une  des  merveilles  de  l'Orient  fut  détruite  par  un  incendie.  U 
semble  que  le  désastre  fut  dû  à  la  malveillance  des  Grecs,  irri- 
tés encore  de  ce  que  le  patriarche  avait  voulu  se  faire  catho- 
lique. En  tout  cas  le  couvent  fut  pillé  et  dévasté  entièrement. 

C'est  bien  à  cette  église  qu'il  faut  appliquer  la  description 
que  nous  trouvons  dans  les  auteurs.  On  lit  en  effet  dans  Maca- 
rius,  patriarche  non  uni  d'Antioche-,  la  description  suivante 
de  St-François,  qui  paraît  répondre  parfaitement  à  cette  épo- 
que :  *  Then  \ve  viewed  the  church  of  the  franhs,  which 
has  been  burnt  (britlée)  ;  whicb  egunlled  Santa  Softa,  in 
heigt  and  size,  and  form,  and  structure  ;  and  was  adorned  inside 
and  out  with  mosaic  paintings  and  gildings  of  tbe  dominical 

'  St-Antoine,  St-Jean,  Sl-Sébastien  ! 
*  Loi-,  law/.,p.  28. 


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—  201  — 

feast,  over  the  door,  od  the  whole,  is  a  painting,  in  mosaic,  of 
the  assumption  of  our  Lady.  AU  the  inscriptions  are  in  the 

frank  language but  is  ruined,  and  deserted,  and  altogether 

in  the  hands  of  the  Franks.  »  Nous  avons  ensaite  visité  l'église 
des  Francs,  qui  a  été  brûlée  depuis,  elle  égalait  Ste-Sophie  pour 
la  hauteur,  la  grandeur,  la  forme  et  la  structure.  Elle  était 
ornée  à  l'intérieur  et  à  l'extérieur  de  peintures  en  mosaïques 
représentant  les  faits  évangéliques  :  par  dessus  tout  on  admi- 
rait sur  la  porte  une  mosaïque  représentant  l'Assomption  de 
Notre-Dame.  Toutes  les  inscriptions  sont  en  langue  franque  ; 
mais  elle  est  ruinée  et  abandonnée  quoique  (oi^ours  aux  mains 
des  Francs. 

Cette  description  est  confirmée  par  le  rapport  de  M.  de  Brèves, 
dans  la  Relation  de  ses  voyages  ;  t  L'une  des  églises  de  Pera 
est  servie  par  des  Cordeliers  conventuels,  qui  est  richement  et 
superbement  bâtie,  et  se  nomme  St-François,  enrichie  de 
mosaïques  par  le  dedans  ;  joignant  cette  église,  il  y  en  a  une 
autre  qui  en  dépend,  nommée  Saincte-Anne. , .  Tous  ces  bâti- 
ments n'ont  pas  esté  bastis  pour  3  ou  400,000  écus.  »  Cetto 
somme,  considérable  popr  le  temps,  indique  suffisamment  l'im- 
portance de  St-François  et  de  ses  dépendances. 

On  dut  racheter  le  terrain,  pour  4,500  reali.  i  St-Fran- 
çois,  écrit  alors  la  Comunità,  ne  possède  plus  qu'une  seule 
maison;  et  celle-ci  encore  devra  être  vendue,  si  le  général  des 
Conventuels  n'envoie  des  fonds  pour  rebâtir  l'église.  »  Mais  se- 
lon Hammer  '  le  «  Divan  »  ne  permit  pas  aux  chrétiens  (ou 
mieux  li  la  communauté  latine)  de  réédifier  l'église  de  Oalata, 
coasumée  par  les  flammes  au  commencement  de  cette  année  ;  » 
et,  plus  loin-,  le  même  auteur  rapporte  que  Qara-Moustafa, 
grand-vizir  de  sultan  Ibrahim  (de  décembre  1638  à  mars  1643), 
aurait  «  changé  San  Francesco  en  mosquée  ;  >  ce  dernier  dire 
n'est  pas  entièrement  exact  :  on  fit,  en  effet,  de  grandes  difBcul- 
tés  ;  mais,  finalement,  l'église  fut  reconstruite  auprès  des  ruines 
de  l'ancien  édifice  ;  et,  d'après  le  même  savant,  l 'internonce im- 
périal Kinsky  aurait  fourni  six  cents  écus  pour  cette  recons- 
truction. 

I  Cf.  Comunità,  k  l'année  1611,  et  Hammer,  VU,  287. 
>  Hammer,  VII,  362. 


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—  202  — 

Il  parait  toutefois  que  les  proportions  de  la  nouvelle  église 
furent  bien  plus  reslreintes.  En  effet  le  Père  Giovanni  Mercredi- 
ai,  Provincial  d'Orient,  et  (c'est  la  première  fois  que  nous 
voyons  cette  appellation,  qui  sera  désormais  ordinaire),  Préfet 
apostolique  des  missions  de  Valachie  et  de  Moldavie,  Vicaire 
patriarcal  trouvant  que  le  seul  autel  qui  existait  dans  l'église 
nouvellement  relevée,  de  St,-Fraûçois,  ne  suffisait  pas  pour  le 
service  religieux,  en  fit  élever  un  autre  dans  la  chapelle  qui 
servait  de  sacristie,  et  le  consacra  à  Notre-Dame  délia  Sa- 
lute.  Pour  avoir  des  ressources  il  se  recommanda  au  baile  de 
Venise  et  à  toute  la  nation,  il  en  obtint  des  fonds,  et  na  sieur 
Paul  de  Belin  fit  don  k  cet  autel  d'un  beau  tableau  de  la  Madone. 

La  <  Magnifica  Comunità  di  Pera  n  passait  annuellement 
36,000  aspres  au  couvent  de  St-François,  mais  comme  cela  ne 
sufiisait  point  à  l'entretien  de  six  prêtres  et  de  deux  lais,  néces- 
saires pour  le  service  de  cette  église,  qui  était  la  mère  desautres 
et  la  cathédrale,  le  supérieur  demanda  que  ce  subside  fût  aug- 
menté. La  f  Magnifica  Comunità»  lui  accorda,  le  19  mars  1643, 
un  secours  de  4,000  aspres  une  fois  donnés,  et  promit  2,000 
aspres  par  an  pour  le  médecin  et  le  pharmacien.  Elle  consentit 
encore  à  ce  que  le  produit  des  offrandes  et  des  quêtes  passât  di- 
rectement dans  la  caisse  du  couvent  au  lieu  d'entrer  dans  celle 
du  procureur  de  l'église.  Elle  établit  en  même  temps  que  les  au- 
mônes faites  au  quêteur  appartiendraient  aux  religieux,  sans 
que  le  procureur  eût  à  s'y  ingérer  en  quoi  que  ce  fût.  (Archioes 
de  S(-Antolne.)  Jusque-là  c'était  le  procureur  qui  tenait  toutes 
les  clefs,  et  touchait  tous  les  deniers. 

Le  5  août  de  la  même  année,  1643,  «  un  service  solennel  se 
fit  dans  l'église  de  St-François,  pour  le  repos  de  l'âme  du  Roi 
Louis  XIII,  de  glorieuse  mémoire  ;  tout  était  tendu  de  noir  ;  le 
cloître  était  en  boucassin,  l'église  à  plein  en  drap,  et  le  cata- 
falque en  velours;  ce  dernier,  ainsi  que  l'autel, chargé  de  gros 
flambeaux.  L'ambassadeur  et  son  secrétaire,  tous  deux  en  ha- 
bits de  deuil, assistèrentà  la  cérémonie;  le  secrétaire  de  l'ambas- 
sade d'Angleterre  s'y  trouva  aussi  ;  mais  n'ayant  d'autre  place 
que  celle  que  le  hasard  lui  donna,  parce  qu'il  n'a  pas  rang  en 
l'absence  de  son  chef.  » 

«  M.  le  baile  avaitprécédé  de  quelques  minutes  notre  ambas- 
sadeur à  l'église,  pour  obvier  à  ce  qu'on  vît  par  les  rues,  sa  li- 


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vrèc  ea  gala,  mèlôe  k  celle  de  notre  ambassadeur,  qui  était, 
ainsi  que  sa  maison,  en  grand  deuil  ;  on  ne  déféra  aucun  hon- 
neur ecclésiastique  aux  autres  pendant  la  messe  ;  et  le  Libéra 
chanté,  ceux-ci  ne  donnèrent  pas  l'aspersion,  autour  du  cata- 
falque, comme  cela  se  fait  en  France.  (Archives  des  Capucins.) 

En  1657,  un  difTérend  assez  grave  s'éleva  entre  le  t  ministre 
provincial,  commissaire-général  des  Mineurs-conventuels  de 
St-Françoia  »  et  la  Comunità,  k  propos  de  la  construction, 
dans  son  église,  d'une  chapelle,  où  le  premier  voulait  fonder  la 
confrérie  des  agonisants,  sous  le  patronage  de  sSt-Antoine 
de  Padoue  ;  »  cette  querelle,  dans  laquelle  intervint  officiellement 
M.  de  La  Haye,  ambassadeur  de  France,  se  prolongea  durant 
deux  années. 

En  1660,  le  16  avril,  te  couvent  et  la  nouvelle  église  de  St- 
François,  bâtie  auprès  des  ruines  de  l'ancienne  et  grande  église, 
furent  encore  la  proie  d'un  incendie,  qui  dévora  c  les  deux-tiers 
de  Galata.  »  Il  ne  resta  autre  chose  de  ces  établissements  que 
des  murs  en  ruine  ;  «  pour  le  moment,  lit-on  dans  les  Archives 
des  PP.  Conventuels,  les  religieux  ne  trouvèrent  d'autre  asile 
qu'au  bagne  du  Grand  Seigneur,  auprès  de  M.  Proni,  écri- 
vain en  chef;  >  puis  ils  passèrent  aux  Quatre  Rues,  aux  vignes 
dePéra,  cicino  ai  palazzo  del  ministro  di  Francia,  dsin'inne 
maison  que  l'Ordre  y  possédait  depuis  longtemps,  jusqu'à  ce  que 
le  couvent  de  Galata  pût  être  rendu  habitable.  Le  P.  Pasqnatini, 
provincial,  partit  en  août  pour  la  Chrétienté  :  il  se  rendit  à  Pa- 
ris, où  il  recueillit  500  doublons  d'Espagne,  qui  servirent  au 
rachat  du  terrain  du  couvent  et  de  l'église  incendiés.  Les  Turcs 
retinrent  d'abord  l'emplacement  de  la  grande  église  et  le  terrain 
du  four  et  de- la  maison  contigue;  finalement  Messieurs  de  la 
Communauté,  du  consentement  de  Mgr  ïeoli  firent  l'achat 
simulé  desdits  lieux;  mais  ce  ne  fut  qu'à  grand  peine  qu'on 
put  avoir  les  Hodjets  [titres  de  propriété  ;  et  encore  n'obtint-on, 
le  2  juillet  1062,  que  la  permission  de  biUir  le  couvent  mais 
non  l'église.  » 

De  nombreux  objets  provenant  des  églises  incendiées,  ayant 
été  retenus  par  ceux  qui  les  avaient  sauvés  du  feu,  Mgr  Ridolfl 
dut  menacer,  quatre  ans  après,  de  l'excommunication,  quiconque 
tarderait  davantage  à  les  restituer.  Dans  cette  même  année  on 
dut  vendre  toute  l'argenterie  des  confréries  du  St-Sacrement  et 


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de  St-François,  pour  racheter  des  Turcs,  les  hospices  et  église 
de  St-Jean-Baptiste,  retenus  par  eux  depuis  l'incendie  de  1660. 

Des  démarches  furent  faites,  mais  en  vain,  auprès  do  gou-  - 
vernement  local,  pour  obtenir  la  reconstruction  de  l'église  de 
St-François,  par  les  représentants  d'Allemagne  et  de  Venise. 

te  20  mai  1666,  une  supplique  fut  adressée,  au  nom  du  Sou- 
verain Pontife,  au  Baile  de  Venise,  Ballerini,  grand  cliancelier, 
pour  qu'il  obtint  de  la  Porte, l'autorisation  de  rebâtir  un  simple 
oratoire,  sur  l'emplacement  de  l'église  incendiée  de  St-François. 
Le  terrain  ayant  été  conservé  par  la  protection  de  la  Sérénissime 
République  de  Venise,  après  le  désastre  de  1660  :  ce  fut  le  com- 
mencement du  protectorat  vénUien  à  St-François,  et  il  parait 
avoir  été  confirmé  en  cette  année  1666. 

Mgr  Ridolfi  manda  en  c  chrétienté  »  le  supérieur  de  St-François, 
afin  d'y  recueillir  des  aumônes  pour  la  reconstruction  de  cette 
église.  L'Espagne,  le  Portugal  et  la  Sicile  lui  fournirent  des 
subsides,  Le  10  avril  suivant,  le  vicaire  patriarcal  écrivit  au  Baile 
Molino,  qui  se  trouvait  à  la  Canée,  pour  le  prier  d'employer 
ses  bons  offices  auprès  du  grand  vizir,  afin  d'obtenir  l'autorisa- 
tion de  relever  St-François  ;  et,  quelques  mois  après  il  sollicitait 
pour  le  même  objet  des  subsides  du  Pape  et  de  la  Propagande, 

En&n  l'année  suivante,  1669,  après  la  reddition  de  Candie, 
l'amiral  vénitien  Morosini,  en  faisant  la  remise  de  l'ile  de  Crète, 
obtint,  du  vizir  Haçan,  la  reconstruction  de  St-François.  Les 
travaux  toutefois  ne  furent  commencés  que  Je  18  aoflt  1670  ;  et 
le  25  décemlve  suivant  on  y  célébra  la  première  messe.  Venise 
avait  fourni  pour  cet  objet  3.000  talents,  le  Pape  1.000,  et  la 
S.  Congrégation  600,  l'Espagne  1.000,  le  Portugal  300;  on  en 
emprunta  aussi  800  sur  la  maison  des  Pères  aux  Quatre  Bues, 
le  chevalier  Moysio  Monico  en  prêta  100,  Mgr  Ridolfi,  67  ;  enfin 
on  vendit  une  partie  de  l'argenterie  qui  produisit  90  talents. 
Le  19  mars  1671,  la  nouvelle  église  fut  bénite  par  Mgr  Ridolfi, 
en  présence  de  Baile  Luïgi  Molino  ;  les  armes  de  la  République 
furent  placées  sur  la  porte  principale,  et  le  tableau  de  St  Marc 
auprès  du  grand  autel. 

On  lit  dans  les  Actes  de  la  Comunità  à  propos  de  cette  cons- 
truction : 

*  Grâce  à  l'intervention  du  baile  de  Venise,  on  obtint,  en  1670, 
la  permission  de  rebâtir  l'église  en  pierres  ;  et,  quand  elle  fut 


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terminée,  Mgr  Riâolfi  en  fit  la  bénédiction.  >  On  lit,  à  ce  sujet, 
dans  Cbardin  :  «  Le  baile  Molino  eut  beaucoup  de  peine  à  faire 
rebâtir  à  Galata,  faubourg  de  Constaotinople,  Yégtise  des  Vé- 
nitiens, que  le  feu  avait  consumée.  Le  baile  fît  tant  d'efforts, 
en  cette  circonstance,  pour  lever  les  obstacles  qui  survenaient 
de  tous  côtés,  qu'il  en  mourut  »  la  peine  ;  mais,  par  bonheur, 
l'oavrage  était  presque  terminé,  t  Luigi  Molino,  qui  avait  été 
envoyé  à  Constant!  no  pie  eo  qualité  de  ministre  extraordinaire 
délia  Republica  veneta  mourut  à  Péra,  le  26  août  1671  et  fut 
inhumé  à  St-François. 

Les  Annales  de  la  résidence  de  Si-Benoît,  s'expriment  ainsi 
i  ce  sujet  :  <  Lea  catholiques  ont  eu  la  consolation  cette  an- 
née 1671,  de  voir  enfin  rebâtir  l'église  et  le  monastère  de  Stn 
François.  La  première  messe  y  a  été  dite  le  jour  de  laSt  Joseph, 
à  laquelle  assista  M.  Molin,  ambassadeur  de  la  République,  qui 
avait  beaucoup  contribué  à  la  bâtisse.  > 

Les  renseignements  ci-dessus  dont  nous  sommes  redevables 
à  l'obligeance  des  RR.  PP.  Conventuels  de  St-Antoine,  répon- 
dent aux  questions  posées  dans  la  première  édition  de  notre 
travail,  et  les  confirment  en  partie  :  nous  disions  en  effet,  à  ce 
sujet  : 

Comment  et  à  quelle  époque  St-François  devint-il  l'église 
des  Vénitiens  ?  Les  actes  de  la  Comunità  élablissent  qu'en 
1657,  l'ambassade  de  France  intervint  ofilciellement  entre  cette 
église  et  la  Comunità  :  ce  ne  serait  donc  qu'entre  cette  date 
et  1670,  époque  de  la  reconstruction  de  l'édifice,  que  pourrait 
&&*€  placé  ce  changement  de  protection,  devena  la  conséquence 
des  démarches  du  haile  pour  la  reconstruction,  démarches  dont 
le  souvenir,  conservé  dans  le  paj-s,  se  trouve  conflrmé  par  le  té- 
moignage de  Chardin.  Venise  ne  faisait,  d'ailleurs,  que  suivre 
en  cela  son  ancienne  politique  :  on  a  vu  plus  haut  la  suite  des 
tentatives  réitérées,  à  différentes  époques,  par  les  balles  véni- 
tiens, afin  d'établir  leur  prépondérance  religieuse,  soit  sur  <:  la 
principale  église  de  Galata,  »  soit  sur  St-Benott,  par  les  difficul- 
tés quïils  contribuërant  k  opposer  à  l'établissement  des  jésuites 
français  dans  cette  abbaye.  Cette  ambition  se  trouvait  dès  lors 
satisfaite,  du  moins  en  apparence  ;  mais  elle  ne  fut  peut-être 
pas  étrangère  à  la  décision  prise  en  1731,  par  le  R.  P.  Général 
des  Conventuels  déclarantque  ses  religieux  seraient  placés  Amb- 


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navant  sous  la  protection  de  la  France.  Toutefois,  on  va  le  voir, 
cette  protection  n'était  point  exclnsive,  loin  de  là,  et  elle  ad- 
mettait encore  certaine  prépondérance  en  faveur  de  celle  qu'on 
avait  voulu  annuler. 

Durant  le  temps  qu'ils  restèrent  privés  de  leur  église,  les  Con- 
ventuels n'en  continuèrent  pas  moins  l'exercice  de  leurs  fonc- 
tions curiales,  probablement  à  St-Benolt,  la  seule  église  épar- 
gnée par  l'incendie  de  1660.  En  tout  cas  c'est  à  St-Benolt  que 
se  faisaient  les  cérémonies  ofQcielles  :  ainsi  c'est  là  que  se  fit 
l'installation  ou  la  prise  de  possession  de  Mgr  Ridotfi  le  30  no- 
vembre 1663,  c'est  là  que  se  faisaient  aussi  les  processions  so- 
lennelles et  toutes  les  grandes  fonctions.  Les  confréries  y  trans- 
portèrent aussi  leurs  réunions,  spécialement  celle  de  Ste-Anne, 
dont  le  prieur  était  le  chef  de  la  i  Magniâca  Comunità  i. 

La  chrétienté  latine  de  Constantinople  n'ayant  pas  d'év&que, 
n'avait  pas  à  proprement  parler  de  cathédrale,  mais  quand,  à  la 
place  du  simple  Vicaire  patriarcal,  ordinairement  religieux  de 
St-François,  on  envoya  un  évèque,  sufEragant  du  patriarche,  il 
choisit  naturellement  pour  cathédrale  la  principale  église,  celle 
de  St-François.  Des  que  le  nouvel  édifice  fut  achevé  il  recouvra 
tous  ses  droits  anciens.  Le  28  mai  la  procession  du  Corpus- 
Domini  s'y  fit  solennellement;  quatre  reposoirs  étaient  dressés 
dans  le  cloître,  en  l'honneur  de  St  Louis  et  de  St  Marc,  par  les 
deux  Nations,  du  Rosaire  par  la  Confrérie,  et  de  Ste  Anne  par 
la  <  Magnifica  Comunità  di  Para.  »  Le  baile  de  Venise,  et  l'am- 
bassadeur de  France,  M.  de  Nointel  assistaient  à  la  cérémonie: 
des  contestations  s'élevèrent  entre  eux.  M.  de  Nointel  voulut 
faire  enlever  l'image  de  St  Marc  de  l'autel  où  elle  était  placée, 
ce  qui  lui  fut  refusé  ;  mais  le  lendemain  vendredi,  pendant  les 
vêpres,  il  lit  enlever  par  un  de  ses  domestiques  les  armes  de  Ve- 
nise qui  étaient  arborées  sur  la  grande  porte. 

La  première  procession  de  la  confrérie  du  St-Sacrement,  après 
la  restauration  de  l'église,  eut  lieu  le  20  novembre  1672,  celle 
du  Sacro  Cordone,  le  37  du  même  mois,  toutes  les  deux  pré- 
sidées par  Mgr  Ridolfi.  Les  processions  de  la  confrérie  de  Ste- 
Anne  recommencèrent  aussi  le  29  novembre.  Mais  ce  ne  fut  que 
le  21  mars  de  l'année  suivante  1673,  que  fut  bénite  la  nouvelle 
chapelle  de  Ste-Anne,  reconstruite  dans  les  cloîtres  de  St-Fran- 
çois,  comme  auparavant.  Ce  qui  rendit  ce  jour  plus  mémorable 


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_  207  — 

c'est  la  démarche  que  fit  le  patriarche  grec  pour  obtenir  une 
réconciliation  entre  son  peuple  et  les  Latins. 

En  1674,  le  5  novembre,  sur  la  permission  du  Caïmacan  de 
Constantinople  et  du  Woïvode  de  Galata,  Isaac  de  Bovi,  flam- 
mingo,  fut  inhumé  le  premier  après  la  reconstruction  de 
l'église,  dans  la  chapelle  St-Antoine,  à  St-François. 

En  1675,  la  procession  de  la  Ste  Épine  fut  faite  solennelle- 
ment, aux  flambeaux,  dans  les  cloîtres  de  St-François. 

Le  4  juin  1676,  la  procession  de  la  Fête-Dieu  se  fit  pontifi- 
calement,  avec  l'assistance  des  représentants  de  France  et  de 
Venise;  à  l'autel  de  St-Louis,  on  chanta  le  psaume  Exaudiat 
et  l'oraison  du  Saint  ;  à  l'autel  St-Marc  le  Laudate  Domtnum 
omnes  gentes,  et  l'oraison  de  St-Marc. 

La  protection  de  Venise  avait,  par  le  fait,  amené  plus  d'un 
conflit  entre  le  baile  et  l'ambassadeur  de  France,  elle  en  provo- 
qua aussi  entre  les  Vénitiens  et  les  religieux.  En  1678,  le  baile 
Donati  ayant  prétendu,  en  sa  qualité  de  protecteur  de  St-Fran- 
çois, avoir  la  haute  direction  du  couvent,  le  R.  P.  Général  des 
Conventuels,  par  une  lettre  du  14  août  1680,  refusa  de  se  sou- 
mettre à  cette  extgeance,  et  ne  voulut  pas  laisser  entre  ses 
malus  les  clefs  des  maisons  possédées  par  le  couvent.  En  même 
temps  il  déclarait  commissaire  général  et  supérieur  du  couvent, 
Mgr  Gasparini,  qui  avait  succédé  comme  Vicaire  patriarcal, 
suffragant,  à  Mgr  Ridolfl,  11  avril  1678. 

Il  réussit  à  établir  une  règle  fixe  pour  la  préséance  entre  l'am- 
bassadeur et  le  haile. 

Il  eut  à  prendre  une  résolution  plus  importante,  demanda  et 
obtint  de  la  Sacrée  Congrégation  de  la  Propagande  un  décret  qui 
enlevait  absolument  aux  Seigneurs  Pérots  l'administration  des 
revenus  du  couvent  (17  octobre  1682).  De  son  côté  le  Père  Pro- 
vincial refusa,  à  la  fin  de  janvier  1685,  d'intervenir  dans  l'élec- 
tion qui  devait  se  faire  à  Ste-Anne,  par  la  i  Magnifica  Corau- 
nità  >  d'un  procureur  pour  le  couvent  de  St-François  ;  mais  la 
ï  Magnifica  Comunità  »  de  son  côté,  considérant  que  les  conti- 
nuels sacrifices  imposés  à  la  Latinité,  tant  pour  ta  reconstruction 
que  pour  la  conservation  de  St-François,  avaient  amené  un  tel 
déficit  dans  ses  finances,  qu'il  lui  était  impossible  de  faire  da- 
vantage, résolut,  par  décision  du  28  janvier  1685,  de  ne  plus 
nommer  de  procureur  pour  cette  église,  et  d'en  abandonner  l'ad- 


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minîatration  temporelle  à  qui  voudrait  bien  s'en  chaîner.  De  fait 
la  *  Magnîâca  Comuaità  >  avait  vécu,  sa  seule  raison  d'être 
étant  depuis  longtemps  l'administration  temporelle  des  biens 


St-Françoi3  ne  lui  survécut  pas  bien  longtemps.  Le  5  mai  1696, 
à  l'occasion  des  illuminations  faites  pour  la  naissance  d'un  fils 
du  sultan,  il  se  déclara  dans  Galata,  un  incendie  considérable,  qui 
consuma  dix  mille  maisons  et  toutes  les  églises  grecques.  Celles 
des  Latins  furent  grandement  endommagées  :  St-François  per- 
dit tous  les  immeubles  dont  il  tirait  ses  revenus  ;  il  ne  lui  resta 
plus  que  la  maison  qu'il  possédait  depuis  longtemps  aux  Vi- 
gnes de  Péra,  près  du  palais  de  l'ambassade  de  France,  aux 
Quatre  Rues. 

L'église  était  restée  presque  intacte;  mais,  par  un  décret  de 
sultan  Mustafa  II,  6  mars  1697,  le  couvent,  l'église  de  St-fYan- 
çois  et  tout  ce  que  contenait  leur  »  rectnto  >  furent  conâsqués; 
le  4  octobre  suivant  l'église  fut  en  partie  démolle,  (diroccata), 
et  finalement  convertie  en  mosquée,  soas  le  nom  de  léni'djàmi, 
f  nouvelle  mosquée  *. 

Le  fait  en  lui-même  est  clair,  et  tous  les  auteurs  sont  d'ac- 
cord en  cela  avec  les  archives  de  St-Ântoine  ;  mais  quand  on 
veut  expliquer  cette  conDscation,  si  contraire  aux  capitula- 
tions, les  documents  varient  beaucoup.  Nous  allons  en  citer 
quelques-uns. 

Le  naturaliste  voyageur,  Tournefort,  qui  visitait  Constanti- 
nople  quelques  années  seulement  après  les  événements,  nous 
dit  :  (  Les  Cordeliers  étaient  curés  à  Galata,  mais  leur  église, 
depuis  que  le  feu  s'y  prit,  a  été  changée  en  mosquée,  appelée 
par  les  Francs  •  la  mosquée  de  St-François  »  et  par  les  turca 
c  la  mosquée  de  la  Validé  »  qui  règne  à  présent  et  qui  a 
contribué  à  la  faire  bâtir.  >  Il  se  fait  ensuite  l'écho  d'un  bruit 
malveillant,  qu'on  avait  fait  courir  contre  les  religieux,  ainsi 
qu'il  arrivait  souvent  à  cette  époque,  nous  ne  le  répéterons  pas 
après  lai. 

D'autre  partBenofe,  s'exprime  de  la  sorte  :  f  l'anno  1696,  in 
Galata  di  Constantinopoli,  il  di  5  marzo,  per  la  terza  volta,  il 
fuoco  consuma  il  nostro  convento,  con  un  gran  numéro  di  case  ; 
si  era  brugiato  l'anno  1639,  e  poi  nel  1660,  e  quindi  era  stato 
rialzato,  specialmente  dalla  pietà  délia  Republica  veneta,  da  cui 


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—  209  — 

prendeva  il  nome.  Nel  darsi  relazione  al  gran  Signore  dell'iii' 
cendio,  deltosi  dal  retatore,  che  era  arso  anche  il  laogo  dei  Pa~ 
dri  veneziani,  con  li  qaaii  aveva  gaerra,  commando  che  la 
chiesa,  rimasta  intatta,  fosse  convertita  in  moschea  ;  e  cosi  fu 
perduto  quel  nostro  antichissimo  soggiorno  ;  ta  perd  eretto  un 
altro  convento  in  Pera,  per  il  quale  il  re  di  Spagna  diede  co- 
piosa  elemosina.  »  [Loc.  latid.) 

Selon  Hammer  '  f  la  sultane  Validé  s'était  naguères  approprié, 
dans  le  faubourg  de  Galata,  l'emplacement  d'une  église  incen- 
diée et  y  avait  fait  construire  une  mosquée.  > 

Le  Hadîqat  el-djéoami^  dit  simplement  :  c  là  se  trouvait 
une  église  qui  fut  brûlée  ;  et  comme  l'autorisation  légale  ne  fut 
pas  accordée  pour  la  reconstruction,  le  terrain  /esta  quelque 
temps  à  l'état  vague  ;  puis  la  sultane  Gulnouch  EmetuoUah, 
€  servante  de  Dieu,  >  mère  de  sultan  Moustafa  II,  y  bâtit  en 
1109-1697,  une  mosquée,  qui  reçut  le  nom  de  léni-djàmt,  ou 
Validé-djàmt^.  » 

Hammer,  dans  un  autre  endroit*,  rapport*  que  *  l'église  des 
Minorités  aurait  été  rasée,  lors  de  la  dernière  rupture  entre  la 
Porte  et  la  République  de  Venise,  et  on  aurait  élevé  une  mos- 
quée sur  son  emplacement  ji  ce  dernier  dire  s'accorde  avec  celui 
qui  est  consigné  dans  les  archives  des  Conventuels,  dans  un  vo- 
lume de  memoranda  provenant  de  l'ancien  couvent  môme  de  St- 
François,  et  soustrait  aux  flammes. 

On  est  donc  autorisé  à  affirmer  avec  raison,  d'après  tous  cts 
témoignages,  que  la  participation  des  Vénitiens  aux  hostilités 
combinées  de  l'.^utriche,  de  la  Pologne  et  de  la  Russie,  contre 
la  Turquie,  ne  fut  pas  entièrement  étrangère  à  la  perte  définîtive 
de  St-François. 

L'acte  diplomatique  vénitien  qui,  &  la  paix  de  Carlowicz,  mit 
fin  aux  hostilités',  ne  stipule  rien  de  spécial  pour  les  églises, 
et  se  borne  à  rappeler,  art.  14,  c  que  les  affaires  religieuses  se- 
ront traitées  de  la  façon  déterminée  par  les  anciens  firmans.  > 

"  Hammer,  XII,  119. 

*  Le  Jardin,  des  mosgaiva.  Il,  34. 

*  Raehid,  seconde  éd.,  in-S-,  H,  472. 

*  Hammer,  XU,  411. 

*  NfgoKÎationt. 


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—  810  — 

Aucune  allusion  n'y  est  faite  à  l'église  dite,  par  Chardiu,  des 
Vénitiens, 

La  perte  de  oette  église  étant  consommée,  des  mesures  furent 
prises  touchant  les  sépultures  du  cimetière  qui  se  trouvait 
dans  son  enclos;  et  les  procès-verbaux  des  délibérations  na- 
tionales, sans  spécifier,  d'ailleurs,  si  ce  fut  pour  tout  ou  partie, 
constatent  que  t  la  Nation  û'ançalse  fit  procéder,  à  ses  frais, 
à  l'exhumation  des  os  des  morts  qui  estoient  dans  l'esglise  de 
St-François,  à  Galata,  et  les  ât  transporter  au  cimetière  de 
BeattlouK  > 

Derrière  cet  édifice,  et  de  l'autre  côté  de  la  rue,  dite  autrefois 
ieni  âjami  soqaffhp,et  actuellement  medrécé-sogaghy, laquelle 
a  été  prise  sur  l'ancien  enclos  de  l'église,  se  trouve  un  medrécé 
€  collège  »  bâti  par  Mebemmed  Pacha,  kiahia  de  la  sultane,  puis 
vizir.  Par  opposition  à  St^Pau],  dit,  par  les  Turcs,  djâmii- 
kébir  <  la  grande  mosquée,  »  celle-ci  est  dénommée  djamii- 
djedîd,  équivalent  arabe  de  l'expression  turque,  (  nouvelle 
mosquée;  >  mais  l'ancien  nom  a  été  conservé  ;  et  les  titres  des 
propriétésvoisines,  de  1232=1816etl279=l 862,  portent  qu'elles 
sont  sises  dans  le  quartier  de  San  Francesco  -.  Je  serais  assez 
porté  à  chercher  l'emplacement  de  l'ancienne  église  Ste-Anne, 
gui  était  «  net  recinto  »  de  St-François,  mais  en  dehors  de  la 
clôture,  et  qui  du  reste  appartenait  à  la  <  Magnifica  Comunità  » 
et  non  au  couvent  qui  l'englobait  dans  son  enceinte,  à  la  place 
de  la  petite  mosquée  du  médressè.  L'école  du  couvent,  était  au- 
près de  l'église  Ste-A.nne,  et  la  tradition  se  serait  maintenue  ici 
encore,  malgré  le  changement  de  culte. 

Bj'santios  rapporte^  que  les  maisons  chrétiennes  du  voisinage 
furent  démolies,  comme  cela  avait  été  pratiqué  pour  St-Paul  ; 
toutefois  cela  ne  dut  avoir  lieu  que  dans  une  proportion  minime, 
ou  pour  peu  de  temps,  car  le  quartier  ne  fut  pas  envahi  par  les 
musulmans  comme  celui  d'Arab-djami.  Les  chrétiens  ne  ces- 
sèrent pas  de  l'occuper  pour  les  affaires  de  leur  commerce  ;  il 
n'en  est  pas  de  même  pour  l'ancienne  église  St-PauI. 

La  mosquée  actuelle,  de  petite  dimension,  est  b&tie  en  pierres 

'  ProcéB-verbal  du  18  juin  1607. 

•  V.  Compte-rendu  du  cimetière.  1865.  p.  24  ;  1867,  p.  43. 

»  Tome  H,  69. 


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—  211  — 

et  recouverte  d'une  enveloppe  en  bots  ;  la  partie  regardant  la 
mer  parait  appartenir  k  l'ancienne  construction  de  l'église  ;  on 
n'y  trouve  plus  aucune  trace  d'inscriptions  latines.  L'imam  nous 
rapportait,  en  1865,  que  la  partie  de  gauche,  affectée  présente- 
ment aux  ablutions,  était  le  couvent  ou  habitation  des  religieux  ; 
snr  la  partie  de  droite,  ajoutait-U,  on  avait  fait  des  excavations 
qui  auraient  mis  à  nu  une  certaine  <iuàntité  d'ossements  liu- 
mains. 

A  la  suite  de  ces  événements,  le  Vicaire  patriarcal,  Mgr  Gas- 
parini,  resta  sans  cathédrale  et  sans  logement  ;  il  ne  laissa  pas 
que  de  s'occuper  de  son  devoir  :  ainsi  il  prescrivit  au  P.  Pro- 
vincial de  faire  rentrer  dans  le  trésor  la  relique  de  Notre  Père 
St  François,  qui  avait  été  confiée  au  sieur  Pellagro  ;  il  prescrivit 
aussi  de  réunir  tout  le  mobilier  de  l'église  et  celui  des  religieux 
chez  le  sieur  d'Andria,  et  défendit  d'en  rien  distraire  autrement 
qu'en  présence  et  du  consentement  des  Frères.  Puis  il  acheta,  de 
ses  deniers,  une  maison  sise  sur  la  rue  Dàm-dùm,  à  l'angle  sep- 
tentrional de  la  ruelle  de  Venise  ;  cette  maison  servit  de  demeure 
à  lui  et  à  ses  successeurs,  mais  comme  elle  fut  trois  fois  la  proie 
des  flammes,  la  Sacrée  Congrégation  se  lassa  de  la  relever  et 
prescrivit  d'en  vendre  l'emplacement.  Dès  lors  le  Vicaire  patri- 
arcal fut  logé  dans  une  maison,  louée  aux  frais  de  la  Propagande. 
(Archives  des  Conventuels). 

Quant  aux  religieux  ils  se  réfugièrent  dans  la  petite  maison 
qu'ils  avaient  aux  Quatre  Rues,  près  du  palais  de  France, dans 
les  Vignes  de  Pèra,  et  qui  était  louée  120  piastres  l'an.  Ils. y 
étaient  très  resserrés  mais  ils  y  avaient  cependant  une  petite 
chapelle  dédiée  elle  aussi,  à  St  François. 

Pour  les  fonctions  du  ministère  paroissial,  sous  la  date  du 
25  octobre  1704,  ils  passèrent  avec  les  Jésuites  de  St-Benoit  une 
convention  en  vertu  de  laquelle  ils  se  servirent  de  leur  église,et 
y  firent  leurs  fonctions,  à  certaines  conditions  :  ils  y  restèrent 
vingt-huit  ans,  jusqu'à  ce  que,  par  l'intervention  de  la  France, 
ils  eussent  obtenu  un  firman  pour  élever  une  petite  église  en 
bois  en  l'honneur  de  St  Antoine  de  Padoue,  auprès  du  Palais 
de  France  ;1724). 

Ils  firent  aussi  un  autre  accord,  du  même  jour,  avec  le  P. 
Francesco  di  Cavosino,  premier  préfet  des  FF.  MM.  Réfor- 
mes de  Ste-Marie  pour  faire,  au  besoin,  leurs  fonctions  dans 


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—  212  — 

son  église.  L'accord  se  fit  lâoyeunant  la  cession  de  la  Quarte 
fnnèraire.  Nous  retrouverons,  plus  tard  le  noaveau  couvent  de 
St-Ântoine  et  nous  dirons  quelles  furent  ses  péripéties. 

Ainsi  finit  )e  Couvent  de  St- François,  le  plus  ancien  et  le  pre- 
mier de  Constantinople.  Les  religieux  ijai  le  peuplèrent  étaient 
tantôt  envoyés  de  l'Italie  ou  des  autres  provinces,  tantdt  Fils  du 
couvent,  c'est-à-dire  reçus  là  même,  car  ce  n'est  qu'en  1704 
qu'on  défendît  strictement  aux  couvents  du  Levant  de  recevoir 
des  novices.  Ds  furent  mêlés  très  intimement  à  la  vie  de  la  ville 
de  Galata,  ils  en  furent  généreusement  soutenus,  mais  ils  rem- 
plirent toujours,  toutes  les  fonctions  du  ministère  qui  lenr  fu- 
rent demandées.  Le  voyageur  ne  traverse  pas  sans  un  certain 
serrement  de  cœur  la  cour  de  la  mosquée  qui  remplace  cette  vé- 
nérable institution. 


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CHAPITRE  IV. 


LES   ÉGLISÏ3    ST-PAOL,    ST-HEHHE    DE   QALATA. 
LES  FRÈRES  PRÊCHEURS  OU  DOIONICAINS. 


§1- 

St-Paul. 

L'histoire  des  Dominicains  à  Constantinople  se  partage  en 
trois  périodes  bien  distinctes,  celle  de  la  fondation  de  1333 
&  1335,  celle  des  Frères  Voyageurs  pour  le  Christ,  (Fratres 
Peregrinantes  pro  Christo),  jusqu'en  1601,  et  celle  de  la 
Congrégation  d'Orient,  depuis  le  commencement  du  xTn*^  siècle 
jusqu'à  nos  jours. 

Que  les  Dominicains  soient  venus  à  Constantinople  dès  le 
commencement  de  leur  Institut,  c'est  un  fait  incontesté.  En  de- 
hors même  de  tout  témoignage  positif  on  le  pourrait  afllrmer  : 
ils  formaient  un  corps  de  prédicatears,  actif  et  puissant  dès 
l'origine,  ils  étaient  entre  les  mains  des  Souverains  Pontifes  un 
levier  irrésistible,  pour  agir  sur  les  âmes  :  aussi,du  vivant  même 
de  leur  fondateur  furent-ils  envoyés  chez  les  peuples  infidèles 
pour  y  porter  le  nom  de  Notre-Seigneur, 

Parmi  les  plus  fameux  missionnaires  de  ces  temps  primitifs, 
l'histoire  nous  cite  St  Hyacinthe  (1183-1257),  qui  avait  reçu  le 
saint  habit  religieux  des  maina  de  St  Dominique  lui-même.  La 
tradition  le  regarde  comme  le  fondateur  de  la  mission  domini- 
caine de  Constantinople.  Il  est  vrai  que  son  histoire  ne  le  dit 
pas  formellement  ;  mais  elle  nous  le  montre  parcourant  l'AUe- 


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—  214  — 

magne,  la  Pologne,  la  Russie,  venaDt  en  Crimée  et  dans  l'Archi- 
pel grec,  et  fondant  partout  des  couvents.  II  dut  donc  passer  à 
Constantinople  et  y  établir  ses  frères,  si  déjà  ils  ne  l'y  avaient 
précède.  C'est  donc,  au  plus  tard,  à  cette  date  (1233),  que  nous 
faisons  remonter  la  fondation  de  cette  mission.  En  tout  cas  nous 
avons  vu,  dans  la  première  partie  de  ce  travail,  les  Dominicains  se 
mêler  aux  Franciscains  avant  la  reprise  de  Constantinople  par  les 
Grecs,  1261.  En  1298,  d'après  Echard,  Frère  Bernard-Guillaume 
deGail]ac,vint  se  fixer  à  Constantinople  et  y  fonda  un  deuxième 
couvent,  <  car,  ajoute-t-il,  l'Ordre  en  avait  déjà  un  premier,  de- 
puis 1233.  II  traduisit  en  grec  les  œuvres  de  St  Thomas  d'Âquin.  i 

Ce  qui  favorisa  le  plus  l'extension  des  Frères  Prôcheura  en 
Orient,  ce  fut  l'institution  de  la  société  des  Frères  Voyageurs 
pour  le  Christ.  Nous  avons  vu  que  le  Pape  Innocent  IV,  sur 
les  instances  du  B.  Jean  de  Parme,  Général  des  Franciscains  et 
du  B.  Humbertde  Romans, Général  des  Dominicains,  avait  com- 
mencé cette  société,  en  1351  ou  1353.  Et  nous  avons  constaté 
l'existence  à  Constantinople  d'un  couvent  où  Frères  Prêcheurs 
et  Frères  Mineurs  vivaient  ensemble,  et  travaillaient  de  concert 
à  la  même  oeuvre.  Cette  société  de  missionnaires  dura  longtemps: 
le  Pape  Jean  XXII  lui  donna  un  nouvel  essor  par  sa  bulle  Gra- 
ttas eglmus,  1318;  et  le  Pape  Grégoire  XI,  en  1374,  la  recom- 
manda et  l'encouragea  encore  fortement.  Elle  formait  une  Con- 
grégation particulière  dans  l'Ordre,  gouvernée  par  un  Vicaire 
général,  élu  par  le  Chapitre  de  l'Ordre. 

II  semble  néanmoins  que  le  mélange  des  deux  Instituts,  Do- 
minicains et  Franciscains,  ne  persévéra  pas  longtemps  à  Cons- 
tantinople, les  derniers  se  séparèrent  peu  à  peu  pour  travailler 
en  particulier.  La  société  des  c  Frati  Pellegrlnantt  per  Chri- 
sto  »  devint  une  institution  toute  dominicaine  ;  mais  les  religieux 
des  deux  Ordres  conservèrent  toujours  entre  eux  les  relations 
les  plus  charitables  et  les  plus  cordiales. 

Comme  la  Société  n'avait  pas  de  couvents  à  elle,  le  Général 
Hugues  de  Vaucemain  lui  eu  assigna  deux,  que  l'on  disait  fon- 
dés par  St  Hyacinthe,  celui  de  Caffa  en  Crimée,  et  celui  de  St 
Paul  à  Constantinople.  Plus  tard,  on  lui  en  attribua  dix  autres, 
détachés  de  différentes  provinces. 

Le  Vicaire  général  résidait  d'abord  en  Crimée,  à  CafTa,  mo- 
nastère plus  centra],  mais  plus  tard,  quand  cette  ville  fut  prise 


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—  315  — 

par  Tamerlan,  il  vint  se  fixer  à  St-Paul.  Le  dernier  Vicaire  gé- 
néral de  la  Société  des  Frères  Vopageurs  pour  le  Christ  fat 
le  P.  Maître  Eustachio  Fontana.  Avant  de  partir  pour  l'Italit 
(1601),  il  signa  un  inventaire  i  délie  cose  appartenenti  alla  chie'» 
sa  e  convento  di  S.  Piero,  in  Fera  dell'Ordine  dei  Frati  Predica- 
tori,  ftitto  nel  tempo  di  governo  del  M.  E.  P.  Maestro  Eusta- 
chio Fontana,  délia  Congregazjone  délia  Terra  dei  Peregrinanti, 
e  della  cbiesa  suddetta  del  medemmo  ordine,  Vicario,  ed  alla 
presenza  dei  procuratori  sottoscritti>  del  P.  Fr  Arcangelo  di 
Metelino,  e  del  P.  Fr.  Alberto  di  Imola,  del  detto  Ordine.  Die 
I  Aprilis  160^ .  i  Cette  note  se  trouve,  autographe,  dans  les  ar- 
chives de  St-Pierre. 

La  Congrégation  des  Frères  Prêcheurs  d'Orient,  devait  ex- 
ister déjà,  puisqu'elle  pouvait  accepter  des  couvents  et  dea 
œuvres,  mais  c'est  la  première  fois  qu'elle  apparaît  dans  notre 
histoire  locale,  désormais  c'est  elle  que  nous  verrons  à  l'œuvre 
dans  le  Levant.  Elle  était,  jusqu'à  ces  derniers  jours,  gouvernée 
par  le  T.  R.  P.  Vicaire  général  de  la  Congrégation  d'Orient.  Elle 
avait  pour  siège  le  couvent  et  l'église  de  St-Pierre  de  Galata. 

L'église  de  St-Paul,  tour  à  tour  consacrée  aux  cultes  musul- 
man et  chrétien,  aurait  été  construite, pour  la  première  fois,  l'an 
97  de  l'hégire  (715  de  J.-G.},  par  Moslema,  général  du  khalife 
Ommiade  Oualidlbn  Abdul-Melik,  selon  le  texte'  de  l'inscrip- 

'  Ractidé  par  le  Hti'Uqat  et  djérâmi,  d'après  Qaratehélebi-Zâdd  et  Hodji- 
KbaUa,  II,  p.  31  ;  Cf.  aussi  d'UhssoD,  TMeau  de  l'empire  ottoman,  II.  4S3. 

L'inscription  placée  sur  la  porte  d'Arab-djami,  rapporte  que  Mouslëma 
fut  envoyé,  à  la  tète  d'une  armée  de  50.000  hommes,  pour  Taire  le  siège  de 
Constant! nople,  qu'il  prit  la  ville  et  imposa  à  l'empereur  une  contribution 
considérable,  avec  laquelle  il  élfva  une  mosquée,  à  laquelle  il  donna  le  Dom 
d'Arab-Djami  :  il  aurait  occupé  la  ville  sept  ans. 

Hadji'khaira  cite,  en  97==7]5,  la  prise  de  Galata  par  Mosléma  et  la  oona- 
truction  d'Arab-djami. 

Qaratubelebi  Zadè  dit,  sur  cette  eoipédilioD  :  ■  selon  une  version  arabe, 
Arab-djami  a  été  bâtie  A  cette  époque  par  Mosléma.  d 

Ce  temple  resta-t-îl  à  l'état  do  mosquée  ou  fut-il  donné  au  culte  chrétlent 
Je  n'ai  entre  les  mains  aucun  document  qui  ma  permette  de  résoudre  cette 
question.  Il  est  certain  seulement  que  les  musulmaus  avaient  à  Conatanti- 
nople  des  mosquées,  du  temps  des  empereurs  grecs.  Elles  furent,  nous  dit-on 
brûlées  dans  une  sédition.  Mais  sous  l'empire  latin,  il  est  certain  que  cet  édi- 
fice fut  donné  ù  St  Hyacinthe  et  aux  Dominicains.  Ils  y  restèrent  après  la 
restauration  bysanline,  jusqu'à  l'invasion  par  les  Grenadins. 

D'un  autre  cûté  M.  Paspali  espérait  pouvoir  prouver  que  Sl-Paul  a  appa^ 
tenu  aux  Grecs  à  une  époque  îi 


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—  216  — 

tioD  tnrqae  encastrée  dans  le  mor  droit  de  la  nef  latérale  de  la 
mosquée  actuelle.  Constantinopla  fut  encore  assiégé,  par  les 
Ommiades,  en  739,  et,  par  Haronn  Errachid,  en  780  et  798. 
bepaîs,  le3  musulmans  ne  firent  plus  de  tentative  contre  cette 
capitale,  jusqu'en  1S96,  sous  sultan  Bù'ezid  Ildirim.  Mais  pea- 
daat  tous  ces  sièges  cet  édifice  put  servir  au  culte  musulman. 
Quoi  qu'il  en  soit,  l'on  assure  que  l'église  actuelle  fut  fondée 
ou  du  moins  occupée  par  St  Hyacinthe  lui-même  '.  La  Comu- 
nttà,  dans  ses  Actes,  la  désigne  sous  le  nom  de  San  Domentco, 
eu  raison,  sans  doute  du  titre  des  religieux  la  desservant".  La 
forme  de  sa  construction,  vaste  et  hardie,  rappelle  l'architecture 
du  temps  ;  l'édifice  se  compose  d'une  grande  nef  conduisaut  au 
chœur,  et  de  deux  nefs  latérales  aboutissant  chacune  à  une 
chapelle.  Le  clocher  devenu  aujourd'hui  minaret,  et  appliqué 
à  la  partie  extérieure  de  l'édifice,  est  une  tour  carrée,  couronnée 
d'un  campanile'.  Le  sol  intérieur  du  temple,  recouvert  d'un 
plancher,  (enlevé  momentanément  pendant  la  guerre  d'Orient) 
est  couvert  de  pierres  funéraires  de  l'époque  ;  on  voit  encore 
l'une  d'elles  sous  le  porche  de  la  grande  porte  latérale  de  gauche  ; 
elle  porte  le  millésime  i833.  En  voici  la  reproduction  : 

t  M.  CGC.  XX.  m.  DIE  XV  IULII.  HIC.  ÏACET.  ODONIS 
SALVAIGVS.  FILI^^.  DLM.  DOM.  SALVAIGI.  Cette  inscrip- 
tion est  accompagnée  des  aroies  de  la  famille  Salvaigo.  Un  Guil- 
laume Salvaigo  figure  parmi  les  conseillers  de  la  Comunità,dans 
ufie  lettre  au  P.  Supérieur  des  Dominicains  (31  octobre  1618^.) 

'  Rapport  du  R.  P,  Giacinto  Sura  Vicaire  général,  Préfet  Apostolique  de 
la  mission  des  DomiDÎCBini  au  Supérisiir  Général  de  son  Ordre.  Il  dit  ex- 
preHaément  :  «la  chieaa  che  sf  crede  essere  Tondata  da  S.  Giadnta,era  siluala 
in  Galata...  pochi  passi  distante  del  luogo  ove  trovasi  l'attualc  contento;  era 
eostrutta  in  pietra,  tre  narate  Bemigotiche,  ed  pra  dedicala  ail'  apostolo  S. 
Paolo....  Questa  cbiesa  fù  dagli  Granatini  à  viva  Torza  presa  e  convertita  in 
moschea,  che  ha  nome  Arab-dj'àmi.  »  Voir  aussi  le  Mémoire  mtren^t  à  la 
Congrégation  de  la  Propagation  de  la  foi  etc.,  17  février  1843.  Cf.  Mi'moire 
du  P.  Barbieri.  à  Mgr  Corresi.  Carbognano,  loc.  laiid. 

■  11  existe,  dans  la  sacristie  ds  St-Pierre  une  table  de  noyer  aur  laquelle, 
dit-on,  St  Hyacinthe  et  se*  compagnons  auraient  pris  leura  repas  ;  mais  ce 
dire  n'est  pas  considéré  comme  authentiqua. 

*  La  forme  de  cette  tour  et  de  aa  flèche  est  tout  à  fait  identique,  nous 
nappOTte  le  R.  P.  Cambiaso,  vicaire  actuel  de  St-Pterre,  à  celle  des  couvents 
de  Dominicains  fondés  k  Cbierf  et  à  Finale. 

*  Notice  de  M.  Oelaunaj. 


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—  217  — 

Les  Dominicaias  conservèrent  cette  église  jusqu'à  l'émigration 
en  Turquie  des  Maures  d'Espagne',  laquelle  commença  à  la 
cbute  du  royaume  de  Qrenade  et  continua  sous  les  rois  Phi- 
lippe II  et  Philippe  III.  Cette  tradition  locale,  rapportée  aussi 
par  Carbognano*,  est  également  consignée  dans  le  rapport  du  su- 
périeur de  la  Mission  (1843)  an  Père  Général.  Ce  rapport  fixe  à 
l'an  1535  la  date  de  cette  spoliation,  i  come  consta,  dit-il,  da 
eerti  documenti  esîstenti.  >  En  reprèsaille  des  poursuites  exer- 
cées contre  eux  par  les  memhres  du  saint-ofRce,  les  Arabes  ex- 
pulsés d'Espagne  chassèrent  les  Dominicains  de  leur  église  de 
St-Paul,  comme  du  couveat  en  dépendant;  et  ils  auraient  fait 
subir  le  même  sort  à  St-Benolt,  si,  pour  conserver  celle-ci  au 
culte,  l'ambassadeur  de  France  n'en  eût  demandé  et  obtenu  la 
donation  au  roi  de  France.  Cette  donation  serait  de  1540,  date 
qui  concorderait  assez  avec  la  perte  de  St-PauP. 

D'après  Bysantios*,  les  maisons  voisines  de  St-Paul  qui  ap- 
partenaient aux  Chrétiens  furent  démolies,  et  le  quartier  devint 
ainsi  tout  &&iit  musulman.  Dans  cette  même  année  il  y  eut  aussi 
une  irruption  de  Janissaires  qui,  au  nombre  de  deux  mille 
€  voulaient  forcer  le  dit  lieu  de  Perre  ^  ce  qu'ils  eussent  fait,  si 
ceux  de  dedans  ne  s'y  fussent  opposés.  »  Convertie  en  mosquée, 
l'église  de  St-Paul  reçut  le  nom  d'Arab-djami,  t  mosquée  des 
Arabes  >  rappelant  à  la  fois  sa  première  fondation  et  la  cause 
de  sa  restitution  au  culte  musulman  j  elle  est  dite  aussi:  Djamii- 
kébir,  «  la  grande  mosquée.  * 

■  Cea  Maures  réfugiés  à  Constant inople  sont  appelés  par  la  Ctxnunità,  Grs- 
natini,  et  par  un  rapport  françois  Granatois.  L'expulsion  en  masse  eut  tieu 
en  1S71,  mais  beaucoup  avaient  drijà  du  fuir  le  pays  avant  cette  date,  et  leur 
arrivée  avait  excité  un  grand  émoi  à  Constantinople.  L'Exode  dura  longtemps: 
M.  de  Juyé  transmettait  à  Henri  III,  en  mars  1579,  les  plaintes  du  Sultan  de 
Constantinople  touchant  quelques  Granatins  qui,  passant  à  Marseille  pour  vs' 
nir  Â  Constantinople  y  auraient  été  retenus.  Kn  16S3,  la  Comunjtà  faisant  des 
objections  ft  la  nomination  d'un  évËque,  disait  :  s  les  Grenadins,  qui  ont  déjà 
provoqué  la  mort  du  Vicaire  patriarcal  (Sangallo)  et  qui  convoitent  sans  cesse 
nos  églises  ne  manqueraient  pasd'nser  dece  prétexte  pouratteindre  leur  but.* 

*  Lo^.  iaii'l.  p.  59  :  ■  Regnando  Solimano  I'.  ad  istanza  dei  Mon  disoac- 
ciati  délia  Spagna,  fu  convertita  in  moschea.  • 

>  D'après  Carbognano.  cet  événement  aurait  eu  lieu  en  1525.  Toumerort 
qui  partit  de  Paris  en  1700,  dit  à  ce  a\iiet(llelalion,  etc.,  p.  7)  i«  Cette  église 
fut  confisquée  sur  les  Dominicains,  ily  b  environ  cent  ans(t)» 

*  Turco  (Grecia), 

*  Nfgoeiaiion»,  I,  ZS3, 


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■  218  - 


§11- 
Eglise  St-Pierre  et  St-Paul. 

A  quelle  époque  remonte  la  fondation  de  cette  église?  Les  do- 
cuments connus  ne  nous  ot&'ent  à  ce  Bujet  aucune  donnée  posi- 
tive. La  plus  ancienne  mention  qui  en  est  faite  nous  est  signalée 
par  le  B.  P.  Ligier,  archiviste  général  des  Dominicains  à  Rome: 
il  nous  dit  que  le  B.  Raymond  de  Capoue,  maître  général  de 
l'Ordre,  confesseur  et  historien  de  Ste  Catherine  de  Sienne,  et 
son  auxiliaire  puissant  dans  l'œuvre  de  réforme  qu'elle  avait 
entreprise,  écrivait,  sous  la  date  du  5  mars  1387,  et  du  11  avril 
1390,  aux  religieuses  de  Ste-Catherine  établies  à  Fera,  dans 
l'église  de  St-Pierre  ',  et  en  même  temps  aux  religieux  Domini- 
cains de  St-Paul  de  Constaolinople. 

D'autre  part,  on  lit  dans  les  documents  de  la  c  Comunità  di 
Fera,  t  dans  une  lettre  de  celle-ci  écrite  le  30  mars  1618,  au 
Pape  Paul  V,  à  propos  d'un  conflit  survenu  entre  elle  et  le  P. 
Général  des  Dominicains,  concernant  la  desservance  d'églises 
entre  leurs  mains  et  qu'ils  ne  voulaient  pas  remettra  à  la  Comu- 
nità. (....  Les  Pères  de  St-Dominique  habitent  le  monastère  de 
St-Pierre  comme  hâtes  >  et  plus  bas  :  <  ils  ne  sont  pas  réelle- 
ment malties  du  monastère  de  St-Fîerre,  attendu  qu'il  était  au- 
paravant un  couvent-  de  religieuses,  et  quand,  il  y  a  bien  des 
années,  Mahomet  II  prit  la  cité,  les  Turcs  ont  pris  le  couvent 
de  St-Dominique  et  l'ont  transformé  en  mosquée  (!),  alors  les 
pauvres  Pères  Dominicains,  étant  restés  sans  église,  furent  logés 
provisoirement  dans  ledit  monastère  de  St-Pierre,  où  ils  ont  oon- 
tinuë  d'habiter  jusqu'à  ce  jour....  > 

'  I^  H-  P-  Cambiaso,  supérieur  actuel  <le  St-Pierre,  pease  que  la  patronne 
de  ces  religieuses  était  Ste  Catherine  d'Alexandrie,  vierge  et  martyre.  Les 
Dominicaine  ont  encore  un  monastère  de  religieuses  de  leur  Ordre  à  San- 
torin,  sous  le  m6me  vocable.  Cependant  les  lettres  citâea  du  B.  Raymond  de 
Cai>oue  feraient  aisément  supposer  que  ces  religieuses  avaient  adopté  la 
régie  des  ManteliaCe.  si  Tort  répandues  à  cette  époque  par  Sle  Catherine  de 
Sienne,  Bile  spirituelle  du  Bienheureux,  morte  en  llîâO,  mais  béatifiée  seule- 
ment en  1^61. 


DigilizPdbvGoOt^le 


—  219  — 

Dans  un  autre  document  de  la  même  Comunità,  daté  du  29  dé- 
cembre 1621,  on  lit  eacore  :  <  ....  lorsque  à  la  prise  de  Constanti- 
nople  le  sultan  Mehenimed  concéda  spontanément  aux  magni- 
fiques citoyens  de  Péra,  leurs  maisons,  leurs  jardins,  leurs  pos- 
sessions, moulins  etc.:  il  leur  a  donné  spécialement  toutes  les 
églises  et  tous  les  monastères  qui  s'y  trouvaient,  pour  qu'ils 
fussent  <  leurs  »  en  toute  liberté  :  il  a  seulement  enlevé  les 
cloches  qui  s'y  trouvaient.  Us,  les  Pêrotes,  ont  donc  conservé 
ces  églises  et  les  ont  administrées  et  fait  desservir,  comme  vrais 
propriétaires,  suivant  leurs  usages  sans  que  personne  y  ait  mis  le 
moindre  olfStacle.  Ces  citoyens  de  Péra,  ayant  ainsi  le  patronage 
des  églises,  quand  ils  virent  que  l'église  de  Sl-PauI,  qui  était 
autrefois  desservie  par  les  Dominicains,  fût  seule  prise  par  les 
Turcs  et  changée  en  mosquée,  ils  eurent  pitié  de  ces  pauvres 
Pères  qui  étaient  ainsi  restés  sans  église,  ils  ont  donc  fait  partir 
de  St-Pierre  les  religieuses  qui  s'y  trouvaient,  et  y  ont  installé 
provisoirement  les  Pères  de  St-Dominique  ',..  t 

A  l'appui  de  cette  affirmation  on  Ut  dans  le  mémoire  du  P. 
Barbieri,  (1817,1  :  »  après  leur  expulsion  de  St-Paul,  les  Domi- 
nicains obtinrent  de  la  <  MagniSca  Comunità  di  Pera  »,  un  autre 
endroit  avec  église,  où  se  trouvaient  certaines  religieuses,  et  qu'ils 
possèdent  actuellement,  sous  le  titre  de  St-Pierre,  y  exerçant 
charge  d'âmes,  ab  i/nmemorabili  temporel. 

Ce  double  rapport  de  la  Comunità  et  cette  affirmation  du 
P.  Barbieri  ne  concordent  pas  du  tout  avec  les  documents  four- 
nis par  les  supérieurs  de  la  Mission,  d'après  leurs  archives,  ni 
avec  les  traditions  les  plus  anciennes  du  couvent.  Ces  sources 
nous  disent  en  effet  que  les  Dominicains,  chassés  par  les  Arabes 
Grenadins  de  leur  église  de  St-Paul,  furent  accueillis  chez  un 
noble  vénitien,  nommé  Ângelo  Zaccaria,  dont  la  maison,  entourée 
d'un  jardin  communiquant  avec  St-Paul,  leur  permit  de  sauver 
quelques  objets  du  pillage  résultant  de  cette  invasion.  Ce  géné- 
reux chrétien  donna  sa  maison  et  le  terrain  qui  en  dépendait*  et  ■ 
c'est  là.  que  s'élève  aujourdbui  le  couvent  de  St-Pierre.  11  aurait 

1  Dits,  an  France,  JacobiDa  (Thévenot.  p.  51  ;  d'Arvieux,  IV,  490),  parce 
que  leur  première  maison  était  sise  dans  U  rua  St-Jacques. 

*  Archives  do  St-Antoine  et  du  VicatiEit. 

■  L'acte  de  cette  donation  serait  conservé  dans  les  archives  des  Oomiai* 
cain*. 


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—  220  — 

fait  plus  encore,  il  avait  un  droit  de  patronage  sur  la  petite 
église  de  St-Pierre  toute  voisine,  et  il  l'affecta  au  service  des 
religieux  dépossédés. 

VHistoria  Missionîs  CP.  0.  P.  noua  dit  :  <  Au  commence- 
ment du  XVI*  siècle  Angelo  Zaccaria  donna  aux  religieux  de 
l'Ordre  des  Frères  Prêcheurs,  le  temple  des  saints  Apôtres  Pierre 
et  Paul,  avec  les  maisons  avoisinantes,  dont  il  avait  le  patronat. 
Ainsi  nos  religieux  expulsés  des  autres  maisons  qu'ils  avaient, 
se  retirèrent  en  cet  asile.  Par  la  suite  des  temps  ce  couvent  fut 
plusieurs  fois  la  proie  des  flammes  et  le  terrain  sur  lequel  il  est 
construit  retomba  au  domaine  public,  ou  myrî,  comme  on  dit, 
mais  par  la  grâce  du  Dieu  Tout-Puissant  et  les  soins  des  supé- 
rieurs, il  a  été  toujours  conservé  à  l'Ordre.  > 

Les  Archives  de  St-Pierre  nous  donnent,  à  l'appui  de  ce  dire 
an  document  de  1561 ,  dont  une  copie  sur  feuille  volante  mais 
parfaitement  authentiquée  par  l'autorité  civile  et  ecclésiastique 
du  temps,  est  conservée  jusqu'à  ce  jour. 


c  Nel  Nome  di  Dio,  Amen. 

(  Nell'anno  délia  salutifera  Incarnationedel  N.  S.  G.  Cr.  1561, 
Indizione  quinta,  nel  tempo  de!  pontificato  del  Smo  in  Xro  Pa- 
dre  e  Pne  Pio,  per  divina  Providenzat'apa  IV,  a  di  26  del  mese 
di  Gennajo  del  medesimo  anno  ; 

f  On  dit  qu'il  est  certain  (nous  traduisons  le  texte  italien)  que 
sous  la  date  du  20  avril  1535,  le  seigneur  Angelo  Zaccaria,  fils 
de  Pierre-Antoine,  de  Péra,  comme  patron  et  procureur  actuel 
de  cette  église  de  St-Pierre,  à  raison  du  patronage  et  du  domaine 
qu'avait  leur  prédécesseur  ledit  S.  Angelo;  tant  par  droit  que 
par  coutume,  depuis  un  temps  immémorial,  confirmé  par  un  ex- 
ercice constant  et  pacifique  dès  l'origine  :  a  donné  et  concédé 
pour  lui-même,  ses  successeurs  et  ses  descendants  à  perpétuité.. . 
la  susdite  église  et  chapelle  de  Str-Pierre  et  Paul,  située  dans  la 
cité  de  Péra,  avec  son  jardin,  ses  appartenances  et  dépendances, 
au  R.  P.  Fr.  Luca  de  Péra,  de  l'Ordre  des  Frères  Prêcheurs  de 
St--Dominique,  alors  vicaire  de  ladite  église...  à  la  charge  pour 
les  dits  Frères  de  donner  chaque  année,  en  signe  de  reconnais- 
sance dudit  droit  de  patronage,  au  S.  Angelo,  un  cierge  le  jour 


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de  la  fête  de  la  Purification  de  la  B.  V.  Marie....  De  plus,  en 
vertu  de  cet  accord,  les  Frères  seront  obligés  de  célébrer  chaque 
semaine  une  messe  des  défunts  pour  ledit  S.  Angelo  et  ses  pa- 
rents décédés.  > 

(  Cette  donation  est  renouvelée  en  l'année  1561,  comme  le 
dit  le  document  cité.  Elle  est  acceptée  par  tous  les  Frères  pré- 
sents,au  nom  de  leur  Ordre,en  présence  de  nombreux  témoins, 
dont  tous  les  religieux  de  St-François.  » 

La  réalité  de  cette  donation  par  Zaccaria  est  reconnue  par 
diverses  pièces,  entre  autres  par  un  décret  de  Mgr  Fonton(181i;. 
Plusieurs  pièces  des  archiver  s'y  réfèrent,  et  l'on  peut  dire  que 
c'est  la  tradition  dominicaine  entière. 

Nous  ne  nous  prononcerons  pas  sur  cette  controverse,  entre 
les  Dominicains  et  la  Comunîtà,  nous  avouons  isependant  qu'il 
est  difficile  de  comprendre  un  droit  de  patronage  séculier  dans 
l'état  oh  se  trouvait  la  Latinité  de  Galata  au  xvi*  siècle. 

Les  mentions  de  St-Pierre  sont  peu  nombreuses  jusqu'à  l'é- 
poque de  sa  jonction  à  la  Congrégation  générale  des  Frères  Prê- 
cheurs d'Orient.  Crusios  (1584)  ne  parle  pas  de  St-Paul,  qui 
n'existait  plus,  mais  il  cite  St-Pierre. 

M.  de  Germigny,  dans  le  récit  de  ses  démêlés  avec  le  repré- 
sentant hongrois,  cite  (1580)  d'église  St-Pîerre  petit  monastère 
de  Jacobins,  où  le  second  se  rendit  pour  entendre  l'office.  » 

En  janvier  1581,  le  R.  P.  mro  Arcangelo  Gorpi,  est  désigné 
sous  le  titre  de  «  Vicario,  fi  prior  di  San  Pietro  »  ;  mais  au  mois 
de  mai  suivant  on  l'appelle  ;  «  Vicario  e  procuratore  di  S.  Pietro 
e  commissario  sopra  i  Latini.  > 

St-Pierre,  comme  les  autres  églises  de  Galata,  vendit  une 
partie  des  immeubles  qui  lui  étaient  attachés,  pour  contribuer  à 
la  conservation  de  St-François,  après  la  fermeture  de  cette  égli-se, 
en  1586-1593. 

En  1601,  comme  nous  l'avons  dit,  le  gouvernement  des  Do- 
minicains d'Orient  subît  un  changement  notable  :  il  passa  de  la 
Société  des  Frères  Pellegrinanti  pro  Christo  à  la  Congréga- 
tion des  Frères  Prêcheurs  de  l'Orient;  le  passage  est  indiqué 
dans  les  livres  de  compte  du  Couvent  par  une  note  :  (  toutes 
les  choses  contenues  dans  le  présent  inventaire  ont  été  remises 
aux  procureurs  de  l'église  de  St-Pierre,  les  Sieurs  Oliviero  di 
Olivieri,  et  Antonio  Negri,  de  Péra,  et  au  P.  Arcangelo  (Corpi) 


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de  Metelino,  religieux  du  même  Ordre  en  la  présence  âa  P.  Al- 
berto d'Imola.  » 

En  1603,  nous  trouvons  comme  supérieur  à  St-Pierre  avec 
les  titres  de  Vicaire  général  de  l'Ordre  des  Frères  prêcheurs,  de 
la  Congrégation  de  Gonstantinopie,  Prédicateur  général.  Com- 
missaire Apostolique  pour  les  églises  et  chrétiens  du  Levant, 
Frère  Jonantès,  Andréa  Carga,  ou  Farga,  dé  Venise  qui  fut  un 
peu  plus  tard  nommé  évëque  de  Syra,  et  mourut  martyrisé 
cruellement  en  1617,  [il  avait  été  sacré  en  1611.)  On  commença 
son  procès  de  canonisation,  mais  Le  malheur  des  temps  empê- 
cha de  poursuivre  cette  atTaire.  Sous  son  administration  eut  lieu 
la  reconstruction,  au  moins  partielle  de  l'église  St-Pierre  il603- 
1604)  :  les  livres  de  compte  du  couvent  nous  disent  encore  à 
quel  prix  s'élevèrent  les  dépenses  faites  pour  cette  construction. 
Cette  église  dura  cinquante^ept  ans,  jusqu'en  1660,  au  grand 
incendie  de  Galata. 

Les  différents  couvents  de  Gonstantinopie  aimaient  à  se 
rendre  de  mutuels  services  :  ainsi  nous  voyons  que  les  Domini- 
cains de  Ste-Marie  de  Gonstantinopie  et  ceux  de  St-François  de 
Qalata  assistaient  aux  fêtes  de  St-Pierre  et  avaient  leur  part 
dans  les  offrandes  qu'y  faisaient  les  Mêles.  Ainsi  que  nous  l'a- 
vons vu,  (Première  Partie,)  les  Dominicains  avaient  encore  les 
deux  petites  églises  de  Ste-Marie  et  de  St-Nlcolas  en  Gonstanti- 
nopie. 

C'est  encore  sous  le  même  P.  Andréa  Carga,  que  l'église  de 
St-Pierre  fut  reconnue  comme  placée  sous  la  protection  de  la 
France,  par  un  fîrman  de  Sultan  Ahmed  I,  sous  l'ambassade  de 
M.  de  Salignac,  1608.  Ce  firman  fut  renouvelé  en  1731,  pen- 
dant l'ambassade  de  M.  de  Villeneuve,  et  par  un  Khatti-chérif 
de  sefer  1218=1804,  sous  l'ambassade  du  maréchal  Brune. 
Mais  déjà  même  avant  cette  date  de  1608,  la  France  avait  fait 
acte  de  protection,  à  l'égard  des  Dominicains,  lorsque  M.  de 
Brèves  avait  empêché  les  Turcs  de  s'emparer  de  St-Nicolas 
comme  nous  l'avons  dit  P.  1,  Ch.  rv. 

En  1611,  St-Pierre  était  desservi  par  cinq  religieux  ayant  un 
revenu  quotidien  de  demi  thalari,  destiné  à  pourvoir  à  la  fois 
au  service  de  l'église  et  aux  besoins  personnels  de  la  commu- 
nauté. Les  comptes  étaient  tenus  par  les  procureurs  nommés 
par  la  c  Magnifica  Comunità  i  et  l'on  voit  que  ces  procureurs 


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ItUques  n'avaient  pas  toujours  pour  les  religieux  les  égaras  dé- 
sirables. 

Les  luttes  mêmes  ne  manquaient  pas  entre  les  religieux  de 
tous  les  Ordres  et  les  administrateurs  de  la  <  Magnifica  Comu- 
nità.  »  En  1618, une  supplique  est  adressée  par  elle  au  Vicaire 
patriarcal  P.  Oiuseppe  de  Bruni,  de  Venise,  Gardien  de  Ste-Ma- 
rie  Drapéris,  contre  les  Dominicains  de  St-Pierre,  le  requérant 
d'intimer  au  R.  P.  Glo.  Batti-sta  Turoli,  dominicain,  vicaire  gé- 
néral d'Orient,  et  ce  sous  les  peines  canoniques  d'avoir  k  céder 
les  clefs  et  l'usage  de  l'église  de  St-Georges,  dont  son  Ordre 
jouissait  depuis  dis.  ans,  et  qui  cependant  avait  été  administrée 
avant  lui  par  des  prêtres  séculiers  et  des  religieux  de  divers 
Ordres.  Le  Vicaire  patriarcal  donna  raison  à  la  Comunitù,  comme 
nous  le  dirons  (Ch.  vn,),  et  l'église  Str<3eorges  fut,  quefqaes 
années  après,  donnée  aux  Capucins. 

En  1686,  une  grande  tristesse  était  réservée  à  la  Latinité  de 
CP.  Ju.squ'alors  deux  églises  lui  étaient  restées,  seules  de  toutes 
celles  qu'elle  avait  possédées  sur  la  rive  droite  de  la  Corne  d'Or; 
mais  à  cette  date,  à  la  suite  d'événements  sur  lesquels  nous 
n'avons  pas  h  revenir,  ces  deux  églises  Ini  furent  enlevées.  Les 
Frères  Prêcheurs  *  exilés  >,  dit  le  supérieur  des  Dominicains, 
vinrent  frapper  à  la  porte  c  dell'  osptzio  dt  S.  Pietro  i  j  il 
leur  fut  ouvert  et  ils  n'y  portèrent  d'autre  dot  que  celle  du 
Christ,  une  extrême  pauvreté.  Mais  Dieu  les  en  récompensa 
bientôt  :  ils  obtinrent  un  trésor  d'un  prix  inestimable  :  le  baile 
de  Venise  obtint  de  la  Porte  qu'EIle  leur  rendrait  l'image  mira- 
culeuse de  la  Madone,  qui  fut  depuis  vénérée  dans  l'église  St- 
PieiTe. 

La  Comunità  suscita  aussi  contre  St-Pierre,  en  1G51  et 
1653,  des  dilHcultés  semblables  à  celles  qu'elle  souleva,  à  dif- 
férentes époques,  contre  Ste-Marie  et  St-Benoit.  II  est  juste 
de  reconnaître  d'ailleurs,  que  l'admiiiistration  des  biens  de  St- 
Pierre  était  régie  par  deux  procureurs,  nommés  par  la  Comu- 
nitù. Ce  différend  fut  soumis,  par  la  Sacrée  Congrégation  de  la 
Propagande,  au  jugement  du  Vicaire  patriarcal  qui  décida,  en 
avril  1657,  que  l'un  des  deux  procureurs  serait  toujours  choisi 
dans  la  famille  Drapéris,  et  l'autre  nommé  par  ia  Comunità. 

Du  reste,  et  comme  les  autres  religieux  à  diverses  époques, 
les  «  Pères  de  St-Pierre  furent  persécutés  et  menés  au  Cadi,  le 


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35  mai  1654,  pour  larecherchede  trois  enfantsd'une  chrétienne 
ducouventde  St-Pierre  quisefit  turq»e9que,parcolèreou  dépit, 
et  menacés  d'être  pris  de  nouveau  et  leur  église  brûlée,  s'ils  sa 
trouvaient  là  cachés.. . .  Les  Dominicains  portèrent  leur  argenterie 
à  St-(ieorges,  dans  la  crainte  qu'ils  avaient,  mais  l'ambassadeur 
de  France  intervint,  à  la  prière  du  Père  Thomas,  {des  Capucins).» 

<  A  la  fête  du  Corpus  Domini,  le  7  juin  1634,  le  R.  P.  Tho- 
mas, capucin,  en  sa  qualité  de  pro-vicaire  patriarcal,  célébra  la 
messe  solennelle  à  St-Pierre  et  porta  ie  T.  S.  Sacrement  à  la 
Proces.sion  des  Pères  Dominicains,  assisté  de  religieux  conven- 
tuels et  observantins,  comme  diacre  et  sous-diacre.  M.  de  la 
Haye  et  toute  sa  cour  y  assistaient,  avec  son  aumônier....  Les 
aumôniers  d'Allemagne  et  de  Raguse  ont  assisté  à  tout  et  porté 
le  dais,  avec  un  cordelier  et  un  observantin  :  la  coutume  était 
que  le  Sr.  Drapéris  et  autres  séculiers  le  fassent;  mais  à  cause 
que  c'était  l'ordinaire  qui  of&ciait,  lesdits  Pères  Dominicains 
ont  voulu  qu'il  fût  porté  par  des  prêtres.  > 

Nous  ne  parlons  pas  de  ces  malheurs  qui  étaient  ordinaires 
dans  ces  temps,  par  exemple  des  avanies  et  des  pestes.  Ainsi 
nous  voyons  qu'à  certains  moments  tous  les  religieux  sont  obli- 
gés d'abandonner  ensemble  le  couvent,  à  cause  de  la  peste,  et 
de  se  réfugier  en  qaelqu' endroit  écarté.  Les  Dominicains  de  St- 
Pierre  avaient  reçu,  en  1629,  par  cession  d'Edoardo  da  Gagliano, 
une  vigne  de  la  contenance  de  quatorze  deuQums,qui  avait  coûté 
34,000  aspres  au  vendour,le  tout  à  St-Dlmitri  ;  c'est  là  qu'ils  se 
réfugient  alors  ;  mais  c'est  pour  eux  l'occasion  de  nouvelles  dé- 
penses. 

St-Pierre  et  le  couvent  en  dépendant  furent  détruits  par 
l'incendie  de  IGGO  ;  et  le  tableau  de  la  Madone  de  Constantt- 
nople,  ayant  été  sauvé  des  flammes  par  l'un  des  notables  de  la 
Comunltà,  le  sieur  Olivieri,  celui-ci  fut  invité,  par  décision  de 
la  Comunità  du  13  mars  1662,  après  la  reconstruction  de  l'é- 
glise, à  le  restituer  à  l'église  des  saints  Pierre  et  Paul  de  Gala- 
ta.  Selon  le  rapport  précité  du  supérieur  de  la  mission,  ce  ta- 
bleau peint  en  bois,  et  placé  derrière  le  maltre-autel,  était 
entièrement  revêtu  d'argent,  et  ne  laissait  voir  que  la  tète  de 
l'Enfant-Jésus  et  celle  de  sa  sainte  Mère  '  ;  il  est  exposé,  aujour- 

'  Carbognano  fait  le  mAma  i^oit.  (p.  58.) 


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—  225  — 

d'huijà  la  vénération  des  fidèles  (1870),  au-dessus  de  l'autel  de 
la  première  chapelle,  à  droite,  en  entrant  dans  l'église.  La  res- 
tauration de  l'image,  telle  qu'elle  existe  présentement,  date  de 
l'époque  où  les  Dominicains  de  St-Pierre  passèrent  sous  la 
protection  française,  ce  qu'indiquent  les  c  fleurs  de  lis  »  dont  le 
manteau  de  la  Vierge  est  parsemé  ;  il  représente  la  vision  de 
St  Dominique,  dans  laquelle  le  saint  fondateur  de  l'Ordre  s'étant 
plaint  à  la  Vierge  do  ne  pas  voir  ses  enfants  auprès  d'elle,  la 
Ste  Vierge,  ouvrant  les  bras,  lui  fait  voir  tous  les  saints, 
papes,  rois,  reines  et  autres  personnages,  illustrés  par  leur  saîur 
teté,  qu'elle  couvrait  de  son  manteau.  La  tète  et  la  poitrine 
seules  appartiennent  à  l'ancien  tableau,  le  reste  date  de  sa  res- 
tauration. 

Cet  incendie  (de  1660)  réduisit  à  la  plus  grande  détresse  le 
Couvent  de  St-Pierre.  De  toute  l'église  il  n'était  resté  debout  que 
les  portes  de  fer,  et  des  vingt  maisonnettes  adjacentes,  qui  for- 
maient toute  la  propriété  des  religieux,  il  n'en  demeurait  que 
sept.  Ils  se  virent  encore  sur  le  point  de  tout  perdre  :  les  Turcs 
ârent  mettre  le  terrain  aux  enchères  publiques.  Les  religieux 
durent  le  racheter  de  leurs  deniers,  et  encore  dépenser  beaucoup 
pour  se  ménager  la  bienveillance  de  certains  agents  de  l'auto- 
rité, 1661  ;  l'année  suivante  il  fallut  recommencer  encore,  faire 
des  cadeaux  à  l'aga  des  janissaires,  au  meltter-bachi,  au  Woi- 
vode  de  Galata,  etc,  etc.  ;  ainsi  que  10,000  aspres  à  divers, 
par  l'entremise  de  M.  Roboly,  agent  d'affaires'  de  l'ambassade 
française,  en  l'absence  de  l'ambassadeur,  pour  recouvrer  le  ter- 
rain et  garder  la  petite  église  provisoire,  qui  était  auparavant 
le  ri'fectoire  des  religieux.  Cette  petite  église  provisoire  avait 
été  déjà  l'occasion  d'une  avanie  de  12,000  aspres  au  Woivode 
de  Galata,  parce  qu'on  l'avait  ouverte  sans  la  permission  né- 
cessaire. 

Pour  comble  d'infortune,  deuX  Pères  furent  emprisonnés  à 
cause  de  toutes  ces  difficultés  et  il  fallut  encore  débourser  une 
somme  assez  forte  pour  leur  délivrance. 

Enfin  un  Hudjet  fut  dressé  et  enregistré  au  mekèhmô  de  Ga- 
lata, en  1669,  pour  garantir  la  propriété  de  la  cour  et  des 
chambres  du  couvent  contre  toute  possibilité  de  spoliation  fu- 
ture. Nous  trouvons  qu'en  somme,  avant  de  pouvoir  se  mettre  à 
la  reconstruction  de  leur  couvent,  les  Dominicains  durent  dépen- 


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ser  plus  de  100,000  aspres.  Le  nouveau  couvent  fut  pauvre  et 
petit,  misérablemeut  meublé,  comme  il  appert  d'uQ  inventaire 
du  temps.  Ce  ne  sera  que  peu  à  peu  à  l'aide  de  sérieuses  écono- 
mies, et  de  secours  venus  un  peu  de  tous  les  câtés,  que  l'on 
réussira  à  avoir  une  habitation  convenable  et  une  église  suffisante. 

Les  ambassadeurs  des  puissances,  surtout  celui  de  la  France, 
contribuèrent  de  leur  mieux  à  réparer  les  ruines  de  St-Pierre. 
La  République  de  Gènes  elle-même  ne  lui  retira  pas  sa  bienveil- 
lance, et  nous  trouvons  que  son  représentant  choisit  St-Pierre 
poar  le  lien  de  sa  sépulture,  1671.  Il  est  vrai  qu'elle  avait  de- 
mandé une  église  spéciale,  en  1666,  mais  il  lui  avait  été  répon- 
du, par  la  Porte,  qu'il  ne  fallait  rien  innover  à  ce  sujet,  qu'elle 
avait  &  sa  portée  les  églises  de  St-Pierre  et  de  St-Benolt  et 
qu'elle  pouvait  en  user.  Ainsi  elle  n'avait  plus  rien  dans  cette 
ville  qui  lui  avait  appartenu  si  longtemps  I 

I^a  mission  de  St-Pierre  fit,  en  1689,  une  grande  perte  par 
la  mort  <  del  célèbre  P.  Oregorio  Cyrîacense  »,  religieux  Ar- 
ménien. Ce  fut  le  premier  misslonn»ù-e  qui  s'appliqua  et 
réussit,  à  la  conversion  des  Arméniens.  Il  était  né  A  Brousse  ; 
élevé  par  nos  Pères,  il  avait  pris  l'habit  de  l'Ordre.  Il  fut  le 
premier  curé  des  pestiférés,  car  auparavant  c'était  un  curé 
quelconque  qui  allait  à  leur  secours,  celai  qui  était  appelé  le 
premier.  En  dehors  des  temps  de  contagion,  le  Père  s'occupait 
activement  de  la  conversion  de  ses  compatriotes,  et  ne  reculait 
devant  aucun  voyage  et  aucune  fatigue,  pour  arriver  à  ce  ré- 
sultat :  c  il  y  opéra  des  fruits  merveilleux,  et  c'e^t  depuis  lui 
que  notre  église  de  St-Pierre  devint  comme  la  paroisse  des  Ar- 
méniens catholiques.  »  Les  Arméniens  en  conservèrent  une 
grande  reconnaissance  ans  Dominicains,  et  nous  trouvons  à  plu- 
sieurs reprises  dans  leurs  archives  des  dons  ou  des  legs,  venant 
de  bienfaiteurs  de  cette  nation.  Le  P.  Gregorio  fut  victime  de 
son  zèle  et  mourut  de  la  peste,  en  assistant  les  malades.  Il  fut 
inhumé  au  cimetière  de  Beolou(Bey-oglou),  Grand-Champs  de 
Pancaldi,  où  l'on  conduisait  ordinairement  ceux  qui  mouraient 
de  peste. 

Les  incendies  et  les  avanies  n'étaient  point  les  seules  causes 
de  ruine  pour  les  communautés  :  nous  trouvons  sous  le  vica- 
riat du  R.  P.  Fr.  Antonino  Guiducci,  de  Chio,  (1691-1693)  que 
son  prédécesseur,    P.  Domenico  Timoni,  lui    avait  laissé  en 


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caisse  une  somme  assez  considérable  en  Manghurt,  sorte  de 
papier-monnaie,  mais  lorsque  le  P.  Antonino  voulut  régler  la 
situation,  il  se  trouva  que  les  Manghuri  avaient  tellement  di- 
minué de  valeur,  qu'une  oke  de  viande  en  vint  à  coûter  35  et 
38  aspres  ;  même  un  peu  plus  tard,  cette  monnaie  fat  tout  k  fait 
dépréciée,  et  le  gouvernement  qui  l'avait  émise  cessa  de  la  re- 
connaître. Nous  avons  vu  la  même  chose  en  d'autres  temps,  ici 
et  ailleurs.  Ce  Père  Fr.  Antonino  fut  de  nouveau  nommé  Vi- 
caire général  d'Orieut  quelques  années  après,  il  mit  en  bon  ordre 
tout  le  couvent  et  laissa  de  bonnes  traces  de  sa  double  adminis- 
tration. Il  sut  y  intéresser  les  bienfaiteurs  et  spécialement  la 
confrérie  du  Rosaire,  Schuola  del  Rosario.  Surtont  nous  re- 
marquons qu'il  fit  réparer  et  embellir  le  <  quadre  de  la  Madone, 
dite  Hodighitrias,  »  et  une  superbe  bannière  que  les  religieux 
avaient  pu  soustraire  au  désastre  deChio. 

Les  Dominicains  avaient  aussi  une  maison  de  rapport  aux 
Quatre  Rues  de  Péra,  mais  l'incendie  de  1700  la  réduisit  en 
cendres.  Il  fallut  encore  se  mettre  en  frais  pour  la  reconstruire, 
et  conserver  au  couvent  cette  source  de  revenus. 

Pendant  le  vicariat  du  R.  P.  Tommaso  de  Via,  de  Chio, 
(1702-1706) le  couvent  de  St-Pierrequi  avait  été  déjà  mis  sous 
la  protection  française  en  1608,  mais  qui  était  resté  en  réalité 
sous  celle  de  Venise,  passa  effectivement  sous  le  drapeau  fran- 
çais. Voici  à  quelle  occasion  ;  on  se  souvient  que  l'image  vé- 
nérée de  la  Madone  avait  été  rendue  aux  religieux  Domini- 
cains sur  les  instances  du  baile  de  Venise  :  la  République  en 
profita,  vers  cette  date,  1703,  pour  prétendre  à  sa  possession  ; 
elle  donna  donc  à  son  représentant  l'ordre  de  s'emparer  de  cette 
précieuse  image  et  de  l'envoyer  à  Venise.  Les  religieux,  disent 
les  arûhives,tenaientbeaucoupàVenise,mais  ils  tenaient  encore 
plus  à  l'image  sainte  ;  ils  refusèrent  donc  ce  qu'on  leur  deman- 
dait et  il  en  résulta  nn  si  grand  refroidissement  entre  eux  que, 
en  décembre  1705,  l'tîglîse  St-Pierre  passa  définitivement  sous 
la  protection  de  la  France.  Le  livre  des  comptes  nous  parle  d'un 
festin  qui  fut  donné  à  cette  occasion.  La  République  néanmoins 
se  retira  tout  à  fait  de  ces  religieux,  et  elle  discontinua  le  subside 
annuel  de  cent  quarante-quatre  tballers  qu'elle  avait  coutume 
de  donner  pour  rétribuer  celui  des  Pères  qui  faisait  le  service 
de  l'autel  où  l'on  vénérait  la  sainte  image. 


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A  partir  de  cette  époque  l'église  de  St-Pierre  ent  plus  d'im- 
portance et  devint  comme  la  paroisse  française  de  Galata.  Et  de 
son  cAté  la  France  lui  assura  de  larges  subsides  et  une  protection 
efficace,  tant  auprès  de  la  Porte  qu'auprès  de  la  Cour  Romaine. 
Les  Registres  du  couvent  nous  disent  ce  que  faisaient  les  reli- 
gieux pour  reconnaître  cette  protection....  tNous  sommes  tenus 
et  obligés  de  prier  pour  le  roi,particulièrement  nous  mentionnons 
solennellement  son  nom  le  Vendredi  et  le  Samedi  saints,  puis 
toutes  les  fois  que  nous  donnons  la  bénédiction  du  T.  S.  Sa- 
crement, après  le  Tantum  ergo  nous  chantons  trois  fois  le 
Domine  salvum  fac  regem,  le  Glorta  Patri,  et  l'oraison.  Le 
jour  de  St  Louis,  et  de  r.\s.somption,  nous  faisons  des  prières 
pour  le  roi  et  nous  chantons  le  Psaume  Exaiidint.  Le  jour  de 
St  Louis  toute  la  nation  assiste  à  la  raes.se  solennelle  dans  notre 
église,  et  on  y  chante  le  Te  Deum,  etc.  » 

En  1731,1e  21  juillet,  le  couvent  et  l'église  de  St-Pierre 
furent  encore  détruits  par  un  incendie,  qui  consuma  une  grande 
partie  de  Galata;  mais  ils  furent  relevés  sur  un  firman  obtenu 
ii  Ln  demande  du  marquis  de  Villeneuve,  ambassadeur  de 
France.  La  première  pierre  fut  posée  le  13  novembre  de  la 
même  année  ;  la  construction  était  achevée  le  printemps  sui- 
vant, et  l'existence  de  l'église  de  St-Pierre  qui  n'était  que 
tolérée,  depuis  l'incendie  de  1660,  fut  enfin  officiellement  re- 
connue. La  bénédiction  fut  faite  par  le  Vicaire  général,  Fr. 
Bartolomeo  Dimitrl  de  Ragiise  le  14  mars  1733,  avec  licence 
de  l'archevêque  deCarthage,  Vicaire  patriarcal,  (Francesco  Gi- 
rolamo  Bona)  :  la  première  messe  y  fut  célébrée  comme  en  ca- 
chette :  les  religieux  reprirent  possession  du  couvent  et  recom- 
mencèrent les  offices  dans  l'église  le  l"avril.c  Pendant  trois  ans 
ils  célébrèrent  une  messe  chaque  jour  pour  les  bienfaitcure  qui 
les  avaient  aidés  à  cette  reconstruction,  et  ils  dijent  trois  messes 
pour  chacun  de  ceux  qui  vinrent  à  mourir  pendant  ce  même 
temps.  » 

Les  secours  reçus  n'avaient  pas  suffi  pour  ces  travaux,  aussi 
le  couvent  était-il  obéré  de  dettes  énormes.  Le  R.  P.  Vicaire 
s'en  alla  en  Chrétienté,  et  revint  après  bien  des  mois  plus  riche 
de  bonnes  paroles  que  d'argent  sonnant.  Il  réunit  'k  son  retour 
le  conseil  de  la  communauté  et  on  décida-  qu'il  fallait  vendre 
tout  ce  que  l'on  possédait  pour  se  libérer.  On  obtint  la  permis- 


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—  229  — 

sion  du  Saint-Siège,  et  l'autorisation  de  la  Sôrénissime  répu- 
blique de  Gênes.  On  vendit  même  la  maison  des  Quatre  Rues; 
mais  ce  ne  fut  qu'en  1763  que  le  couvent  se  trouva  libre  enfin  de 
toutes  ses  dettes. 

n  ne  faudrait  pas  croire  que  pour  cela  les  religieux  ne  s'occu- 
passent plus  des  âmes  :  ils  continuaient  leur  ministère  :  ainsi 
nous  voyons  qu'en  1733  on  fait  venir  de  Smyrne  un  Père  Fr. 
Eiiseblo  Franzozini  pour  prêcher  le  carême,  il  s'y  distingua  si 
bien  et  y  fit  de  si  grands  fruits  que  le  R.  P.  Général  ne  lui  per- 
mit pas  d'aller  à  la  mission  de  Naxivan  à  laquelle  il  était  desti- 
né, mais  le  retint  à  CP.  Il  apprit  très  bien  le  Turc  et  se  dévoua 
au  service  des  Arméniens,  en  convertit  un  grand  nombre  et 
maintint  les  aubes  dans  la  foi.  II  fut  un  peu  plus  tard  supé- 
rieur du  couvent  et  Vicaire  général  de  la  Congrégation  d'Orient, 
puis  Provincial  d'Arménie,  et  enfin  Vicaire  apostolique. 

Les  angoisses  des  temps  présents  ne  leur  faisaient  pas  oublier 
la  reconnaissance  pour  les  bienfaits  anciens  :  ainsi  nous  trou- 
vons dans  les  archives,  sous  la  date  du  1"  mai  1756  :  <  ayant 
trouvé  dans  les  papiers  du  couvent  que  la  communauté  avait  l'o- 
bligation  de  célébrer  une  messe  chaque  semaine  pour  Angelo 
Zaccaria,  le  fondateur  du  couvent,  et  ne  sachant  pas  pour  quelle 
raison  on  a  cessé  de  le  faire,  noua  prenons  en  chapitre  la  réso- 
lution de  la  reprendre,  à  commencer  du  présent  mois.  > 

Sous  le  vicariat  du  R.  P.  Fr.  Mariano  Timoni  :  en  décembre 
1763,toutes  les  dettes  étant  enfin  payées,  le  supérieur,  en  signe  de 
reconnaissance  envers  la  Bonté  divine,propose  de  partager  avec  les 
pauvres  les  ressources  qu'EUe  envoie  :  cà  runanimité,les  religieux 
promettent  de  donner  aux  pauvres  le  cinquième  de  tous  leurs 
revenus.» 

Pendant  les  années  de  détresse  qu'avait  traversées  le  couvent 
de  St-Pierre  on  avait  dû  diminuer  le  nombre  des  religieux  et 
relAcber  un  peu  de  la  régularité  ;  mais  quand  on  fut  déchargé 
du  fardeau  écrasant  des  dettes,  on  augmenta  le  nombre  des 
Pères  et  ils  purent  s'appliquer  avec  zèle  aux  œuvres  de  la  mis- 
sion, L'Historia  Uissionts  Constantinopolttanœ  0.  P.  noua 
dit  quel  était.en  1772,  l'état  delà  maison  :  t  On  y  compte  cinq 
prêtres,  sous  la  direction  du  R.  P.  Fr.  Marianua  Timoni,  Vicaire 
général  :  ces  religieux,  pour  satisfaire  à  leurs  obligations  et 
glorifier  Dieu,  ont  tous  les  dimanches  et  jours  de  fêtes  deux 


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sermons,,  l'an  en  Turc,  l'autre  en  Grec,  ils  chantent  ensuite  la 
messe  solennelle.  Pendant  le  carême  il  y  a  de  plus  un  sermon 
italien  chaque  vendredi  :  on  ne  peut  faire  davantage  car  les 
autres  jours  sont  pris  par  des  prédications  dans  les  autres 
églises.  Nous  remplissons  ces  fonctions  chacun  à  notre  tour,  et 
tous  nous  nous  appliquons  à  entendre  les  confessions  des  fi- 
dèles à  l'occasion  des  jours  de  fêtes.  Dans  les  autres  jours,  après 
avoir  récité  dans  l'église  les  heures  canoniques,  chacun  s'ap- 
plique religieusement  à  son  office,  i 

Pour  satisfaire  à  la  dévotion  des  fidèles,  on  avait  établi  dans 
l'église  de  St-Pierre  diverses  confréries  :  1°  celle  du'  Rosaire, 
comme  dans  toutes  les  églises  des  Frères  Prêcheurs.  La  fête  se 
célébrait  le  premier  dimanche  d'octobre  et  l'on  faisait  une  pro- 
cession solennelle  dans  les  rues  qui  avoisinent  le  couvent.  Nous 
en  parlerons  dans  la  dernière  partie  de  ce  travail. 

S"  La  confrérie  du  Sacré-Cœur  de  Jésus.  Elle  fut  érigée  en 
1784,  par  M.  do  Villeneuve,  qui  se  rendit  devant  l'autel  élevé 
ad  hoc,  entouré  de  ses  nationaux,  et  en  fit  lui-même  l'inaugu- 
ration. Le  Pape  Clément  XII  confirma  cette  confrérie  par  bulles 
pontificales,  l'enrichit  de  privilèges  et  d'indulgences,  et  en  dres- 
sa lui-même  le  règlement.  Cette  confrérie  existait  encore  en 
1829.  L'ambassadeur  de  France  avait  le  droit  de  nommer,  ou 
du  moins  de  confirmer  les  prieurs  de  la  confrérie,  et  nous 
voyons  même  que  pendant  la  guerre  de  l'indépendance  de  la  . 
Grèce,  les  relations  diplomatiques  étant  interrompues  entre  la 
Porte  et  la  France,  le  ministre  de  Hollande  M.  Van  Zuyien, 
chargé  des  affaires  de  nos  nationaux  à  CP.,rendit,  le  15  avril  1839, 
un  décret  par  lequel  MM.  David  Glavany  et  Joachim  Gravier 
étaient  nommés  prieurs  de  l'institution  du  Sacré-Cœur  de  Jé- 
sus en  remplacement  de  MM.  Baudouy  et  Hip.  Crespin,  prieurs 
sortants. 

3°  Une  confrérie  de  St-Grégotre  l'UIumiDateur  fut  aussi  insti- 
tuée dans  l'église  St-Pîerre,  nous  ne  savons  que!  a  été  son  sort. 
Toutefois,  lors  des  afi'aires  arméno-catholiques  de  1761,  St- 
Pierre,  où  des  arméniens  s'étaient  réfugiés,  fut  violé,  comme 
St-Georges  et  St-Benoit,  et  les  réfugiés,  conduits  au  bagne 
d'où  ils  furent  bientôt  renvoyés, 

4"  Enfin  les  Capucins  qui  occupaient  l'église  voisine,  de  St- 
Georges,  l'ayant  vendue  à  la  S.  G.  de  la  Propagande,  pour  le 


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—  231  — 

service  du  Vicaire  Apostolique,  Mgr  Fracchia,  qui  jusqu'alors 
n'avait  pas  de  cathédrale,  on  transféra  dans  St-Picore  la  confré- 
rie de  3t-Boch.qui  existait  à  St-Georges  depuis  1707.  Cependant 
le  couvent  n'accepta  que  le  service  spirituel  de  la  confrérie,  mais 
ne  voulut  pas  s'ingérer  dans  l'œuvre  du  rachat  des  captifs  qui  y 
était  annexée.  Diverses  négociations  furent  engagées  à  ce  sujet 
et  tranchées  enfin  pai  l'autorité  du  Vicaire  Apostolique. 

Mais  vers  la  fin  du  xvm*  siècle,  les  relations  diplomatiques 
étant  rompues  entre  la  France  et  la  Porte,  et  le  couvent  se  trou- 
vant de  fait  sans  protection  efficace,  quelques  chrétiens  de 
Chio  voulurent  en  profiter  pour  se  faire  adjuger  l'église  de  St- 
Pierre  par  le  gouvernement  ottoman.  Us  réassirent  à  obtenir  un 
flrman  qui  la  leur  attribuait,  et  ils  le  présentèrent  à  la  commu- 
nauté, novembre  1799.  U  Mlat  un  monitolre  énergique  de  Mgr 
Fonton  contre  ces  audacieux  envahisBeurs,et  de  plus  une  action 
vigoureuse  de  la  part  de  tons  les  Ministres  et  drt^^ans  qui 
étaient  restés  à  leur  poste,  pour  faire  rapporter  c»  firman  et 
maintenir  les  religieux  en  la  possession  de  leur  église.  EnlQn  un 
khatti-chérif  de  Sefer  1318=1804,  rétablit  le  protectorat  de  la 
France  et  rendit  la  paix  aux  religieux. 

Depuis  que  l'église  St-Qeorges  eut  passé  entre  les  mains  du 
Vicaire  apostolique,  celle  de  St-Pierre  devint  de  plus  en  plus  la 
paroisse  des  Français  :  même  en  1835,  les  documents  de  la  dé- 
putation  française  déclarent  que  cette  ^Use  était  considérée 
c  comme  la  paroisse  du  commerce  français.  > 

Jusqu'à  la  date  à  laquelle  nous  sommes  arrivés  la  Congréga- 
tion d'Orient  des  Frères  Prêcheurs,  gouvernée  par  son  Vicaire 
général,  se  suffisait  presque  à  elle-même  :  elle  recevait  bien,  il 
est  vrai,  des  religieux  du  dehors,  d'Italie  surtout,  mais  elle  avait 
on  grand  nombre  de  ses  membres  que  nous  voyons  appelés  J^/^ 
des  couvents  :  nous  constatons  même  que  souvent  la  S.  C.  de 
la  Propagande  choisit  parmi  ces  religieux  les  évëques  du  Levant, 
ou  les  Vicaires  apostoliques  de  CP.,  mais  nous  allons  arriver  à 
une  autre  période  où  il  lui  faudra  recourir  à  une  province  parti- 
culière, afin  de  maintenir  dans  ses  établissements  un  nombre 
suffisant  de  religieux  pour  en  assurer  le  service'. 

<  Tous  l«s  délaita  contenu)  dans  lea  pagei  ci-dawui,  sont  extraits  des  ar- 
ohivea  de  St-Pierre,  mises  gracieusement  A  notre  disposition.  U  nous  a  sem- 
blé inutile  d'y  renvoyer  &  chaque  alinéa.  (Note  de  l'Editeur.) 


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CHAPITRE  V. 


•   LES  PÈRES    JÉSinTES. 


Les  origines  de  St-Benolt,  église  et  abbaye  {Chiesa  éAbba- 
zià)  et  de  son  enclos,  sis  daiis  la  troisième- enceinte  de  Galata, 
rue  Kèmer-alty,  sont  assez  obscures,  Tournefort  dit  que  cette 
église  f  était  aux  Bénédictins  du  temps  des  Génois'.  »  Carbo- 
gnano  de  son  côté  nous  dit  que  c  l'antica  chiesa  di  san  Bene- 
detto  posseduta  già,  nei  tempi  addîetro,  corne  si  ha  per  comun 
fe^izione,  dai  monaci  Benedettini-.  »  Mais  à  quelle  époque  re- 
monte la  construction  de  cette  abbaye?  À  quelle  date  les  Béné- 
dictins en  prirent-ils  possession  ?  C'est  là  ce  que  nous  voudrions 
établir  aussi  clairement  que  possible,  d'après  les  communica- 
tions qui  nous  "ont  été  faites  gracieusement  de  différents  côtés. 

Il  est  certain  d'abord  qae  même  avant  de  prendre  position  à 
Galata,  l'Ordre  de  St-Benolt  possédait  déjà  des  établissements  à 
CP.  Il  en  avait  eu  même  du  temps  des  empereurs  grecs,  avant  la 
conquête  Franco- Vénitienne.De  plus  nous  avons  vu  que  quelques 
abbés  de  l'Ordre  de  Clteaux  se  trouvaient  dans  l'armée  qui 
s'empara  de  GP.  en  1205.  Par  l'ordre  du  Pape  Innocent  III,  ils 
firent  d'abord  opposition  aux  desseins  des  croisés,  mais  ils  les 
suivirent  néanmoins  jusqu'au  bout,  et  ils  eurent  part  aux  dé- 
pouilles. Aussi  les  voyons-nous  dans  GP.  en  plusieurs  endroits. 
L'Ordre  de  Gluny  lui-même,  quoique  la  part  qu'il  a  prise  à  la 

'  Tournefort.  Voyage  en  Orient. 
I  Opère  dtato.  - 


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conquête  soit  moins  évidente,  obtint  cependant  plusieurs  églises. 
Quel  fut  le  sort  des  uns  et  des  autres  après  la  restauration  by- 
zantine ?  Purent-ils  se  maintenir  dans  les  monastères  qu'on  leur 
avait  a.ssîgaés?Nousne  pouvons  répondre  bien  catégoriquement 
à  ces  questions,  dans  l'état  actuel  de  nos  connaissances.  II  semble 
plutôt  qu'ils  ne  restèrent  pas  dans  CP.  même  ;  mais  nous  y  voyons 
un  monastère  de  Nonnes  Cisterciennes  en  1334.  Les  religieux 
avaient  dû  se  retirer  dans  la  possession  génoise,  à  Galata,  et 
s'y  établir,  nous  seroble-t-il. 

Des  documents  dont  le  R.  P.  Romano,  S.  J.,  recteur  du  col- 
lège de  Ste-Pulcbérie,  nonsa  donné  communication,  nous  disent 
que  <  Instabat  orator  (le  comte  de  Leslie,  ambassadeur  de 
l'empereur  Léopo ta  II J  ut  aliqna  saltem,  ex  deletis  incendio 
tomplis,  restaurarentur,  omnia  quippe  perieraat,  excepto  sacel- 
lo  Patrum  Societatis  Jesu,  sumptibus  reipublicœ  Januensis  ere- 
cto,  sedenteUrbano  V,  et  honori  divfe  Virginis  Matris  et  S.  Be- 
nedicti  consecrato,  anno  1427,  ac  denique  sacrae  Benedictinorum 
familise  quondam  commisse.  >  (Taffener  S.  J.') 

Cette  note  est  précieuse,  elle  assigne  une  date  précise  à  la 
fondation  de  St-Benolt,  le  règne  de  Urbain  V,  (1362-1370).  Elle 
dit  encore  que  cette  église  a  été  consacrée  en  1437.  Construite 
aux  frais  de  la  République  génoise,  elle  fut  probablement  élevée 
sous  le  règne  de  Cantacuzène,  à  l'époque  où  la  colonie  franque 
acquit  sa  pleine  autonomie.  Le  style  du  beffroy  de  St-Benoit  est 
d'ailleurs  entièrement  semblable  à  celui  des  constructions  qui 
bordent  la  rue  de  Percbembé-bazar  et  datent  de  ce  temps-là. 
Ce  dire  est  consacré,  même  de  nos  jours,  par  la  tradition  popu- 
laire qui  désigne  parfois  cette  église  sous  le  nom  de  Djenécy- 
keliçacy  c  l'église  des  Génois,  i  II  semble  que  par  la  suite  elle 
devint  la  principale  église  de  la  ville  et  succéda  en  cette  qualité 
à  celle  de  St-Michel.  Cette  dernière,  détruite  par  l'escadre  vé- 
nitienne en  1396,  réédifiée  en  1303,  existait  encore  en  1336. 
Des  événements  que  nous  ignorons  auraient  amené  sa  destruc- 


■  Le  p.  Paul  Taffener,  aé  à  Clagearurth,  en  CarioUiie,  en  I6JS,  entra  au 
noviciat  de  la  Compagnie  en  1628.  il  enseigna  lea  humanités  durant  quatre 
ans.  devint  recteur  du  collage  de  Styr,  puis  exerça  le  ministère  à  Vienne 
Le  comte  de  i.eslie, ambassadeur  de  l.éopold  M  près  la  Porte  Ottomane, l'at- 
tacha à  sa  mission  en  qualité  d'aumânier.  (Bibliothèque  des  écrivains  de  la 
C.  de  J.) 


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tton  et  déterminé  la  République  à  construire  celle  de  St-Be- 
noit.  (?)  Toujours  d'après  le  P.  Taflfeoer  il  paraît  que  la  nouvelle 
église  aurait  été  placée  sous  le  double  vocable  de  la  B.  Vierge 
Marie  et  de  St-Benolt. 

Un  autre  docament  nous  fait  avancer  davantage  dans  la  ques- 
tion et  la  précise.  Il  est  dû  au  R.  P.  Quandel,  bibliothécaire  de 
l'abbaye  du  Mont-Cassin.  Dans  les  notes  qu'il  a  bien  voulu  nous 
envoyer,  nous  voyons  ce  qui  suit  : 

€  S.  Mariœ  Miserioordiae  in  Fera. 

f  Monasterium  S.  MarJse  Misericordise  in  Pera,  prope  Con- 
stantinopolim,  unitur  congrégation!  a  Nicolao  V,  anno  1449, 
seâ  posseasio  capta  est  anno  1450,  cum  monasterio  S.  Benedi- 
cti,  ibidem  illi  unito-.  Anno  1557,  fiiit  institutus  procurator  a 
Congregatione  Fr.  Stephanus  Gattaluzius,  ordlnis  Prasdicato- 
rum,  ad  regendum  pnedictum  monasterium,  et  ad  exîgendum 
fructus,  cum  promissione  solvendi  tertiam  partem  fructuum 
congregationi,  sed  quia  nihil  unquam  solvit,  fuit  contra  eum 
lata  sententia,  a  vicario  urbis,  ad  restituendam  et  relasandara 
procura tionem,  una  cum  fructibus,  sub  die  27  mart.  1560;  uti 
ex  actis  D.  Simeonis  Grugnetti  lîquet.  * 

(  Ab  anno  1449,  usque  ad  annum  1550  numerantur  qninqae 
professi . 

(  D.  Bartholomeus  a  Janua  (anni  professionis)  21  mars  1439. 

c  D.  Jo.  Baptista  de  Pera,  8  7br.  1449  ; 

c  D.  Basilius  de  Pera,  3  apr.  1449  ; 

e  D.  Ambrosius  de  Portugallo,  25  dec.  1449  ; 

(  D.  Bartolomeus  de  Pera,  21  mar.  1450.  > 

De  ce  document,  officiel,  on  recueille  que  deux  établisse- 
ments coexistaient  ensemble,  presque  sur  le  même  terrain,  1°  le 
monastère  de  Ste-Marie  de  la  Miséricorde,  3°  celui  de  St-Benolt. 
Cette  dualité  se  maintient  pour  ainsi  dire  jusqu'au  xvn°  siècle, 
même  après  que  les  Jésuites  y  furent  installés,  car  on  trouve 
une  lettre  de  la  Comunità,  à  M.  de  Brèves,  alors  ambassadeur 

'  Nicolas  V  est  ce  Pape  génois  dont  noul  avons  vu  le  Dom  Eur  une  ins- 
cription des  muraillea  de  la  ville  (1447-1455.) 

*  Ce  fait  est  confirmé  par  les  Archivem  de»  Capucins  de  St'Louia,  comme 
nous  le  verrons  plus  bas  à  propos  de  St  Josepb  de  Léonjase. 


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à  Rome,  en  date  du  30  mars  16i0,  qui  raconte  que  les  Jésuites 
c  ont  établi  dans  la  chapelle  extérieure,  voisine  de  l'église,  une 
congrégation,  et  que  chaque  samedi  matin,  son  EIxc.  l'ambassa- 
deor  de  France,  M-  de  Salignac,  et  beaucoup  d'antres  y  vont 
avec  une  grande  dévotion.  » 

Les  Bénédictins  du  Mont-Cassin  n'entrèrent  en  possession 
qu'en  1450'.  Ce  n'était  que  trois  ans  avant  la  conquête  otto- 
mane. Ils  continuèrent  de  l'occuper  quelque  temps  encore  ; 
mais  ils  l'abandonaërent  ensuite,  puisque  en  1557  ils  donnent 
procuration  poor  l'administrer  et  en  percevoir  les  revenus, 
dont  le  tiers  devait  revenir  au  Mont-Cassin.  Le  dominicain 
qu'ils  avaient  choisi  comme  mandataire,  n'ayant  pas  tenu  ses 
engagements,  ils  recoururent  au  Vicaire  patriarcal  pour  l'y  obli- 
ger, ou  lui  faire  rendre  sa  {owiaration. 

II  semble  que  les  Dominicains  aient  eu  pendant  quelque  temps 
la  charge  de  desservir  cette  église,  car  dans  une  supplique  au 
R.  P.  Général  des  Dominicains  la  Comunità  dit  :  «  Nous  prieur 
et  gouverneurs  de  la  commune,  ayant  mis  des  Pères  de  St-Do- 
minique  dans  l'église  de  St-Benolt,  etc.  >  Cette  lettre  est  de 
1618.  (21  oct.) 

Il  est  dit  de  plus  dnns  une  lettre  de  la  même  Comunità  au 
B.  P.  Général  des  Conventuels,  sous  la  date  du  80  juillet  1616  : 
<  II  y  a  quarante  ans  que  vos  Pères  desservent  l'église  de  St- 
Benoit,  »  par  conséquent  vers  1576. 

Mais  il  est  un  autre  fait  plus  singulier.  Le  P.  Barbieri,  dans 
son  mémoire  souvent  cité,  nous  dit  que  les  Frères  Mineurs  de 
l'Observance  qui  étaient  établis  à  CP.  dans  le  couvent  de  St- 
Antoine  des  Cyprès,  en  ayant  été  chassés  lors  de  la  prise  de  CP. 
par  sultan  Mehemmed,  1453  (Plusieurs  furent  égorgés,  d'autres 


'  Le  R,  P.  Qiuindel,  auquel  nous  devons  déjà  de  précieux  renaeignementa, 
eo  ajoute  un  autre  qui  jelta  encore  un  peu  de  jour  sur  1b  question  obscure 
qui  nous  occupe  en  ce  moment,  a  L'égtiae  de  St-Itenolt,  et  le  monastère  dont 
elle  dépendait,  était  occupée  par  Ici  Bénédictins  dés  son  origine.  Au  xv'  siâcle 
les  Bénédictins  d'Italie,  pour  divers  motifs,  et  surtout  pour  ee  soustraire  au:i 
abus  de  la  Commande,  se  réunirent  en  une  congrégation  dite,  dans  le  prin- 
cipe, de  Ste-Justine  de  Padoue,  où  i!e  s'établirent,  et  ensuite  du  Mont-CasBin, 
quand  ce  célèbre  monastère  s'y  rallia.  Les  Papes  favorisèrent  cette  congré- 
gation ;  et  toutes  les  fois  qu'ils  en  trouvèrent  l'opportunité,  ils  lui  adjoigni- 
lent  les  autres  monastères  ;  de  ce  nombra  fut  celui  de  Ste-Marie  de  la 
Miséricorde  de  Fera.  ■ 


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réduits  en  esclavage,  comme  nous  l'avons  dit),  la  c  Magniûca 
Comunità  >  mit  à  leur  disposition  le  couvent  de  St-Benolt.  Cette 
concession  n'était  que  provisoire,  mais  cette  occupation  dura 
jusqu'à  l'arrivée- des  Jésuites  en  1583.  Alors  une  dame  pieuse 
leur  donna  Ste-Marle  Drapëris,  comme  nous  le  dirons  en  son 
temps. 

Enfin  nous  verrons  plus  bas  que  les  premiers  Capucins  venus 
à  Péra,  après  la  première  disparition  des  Jésuites,  furent  aussi 
reçus  !i  St-Benoît,  et  que  St  Joseph  de  Lèotiisse  y  fut  miracu- 
leusemeut  conduit.  Ces  choses,  si  contradictoires  eu  apparence, 
s'accordent  cependant  si  l'on  tient  compte  de  l'existence  de 
deux  églises,  et  de  deux  couvents  voisins,  qui  ne  furent  confon- 
dus que  plus  tard,  mais  que  l'on  désignait  cependant  sous  le 
nom  générique  de  St-Benoît,  parce  qu'ils  étaient  voisins  et  dans 
le  même  enclos. 

Pierre  Gylles,  reproduit  par  Du  Cange,  cite  le  nom  de  St- 
Benoit,  et  signale  <  sa  magnifique  citerne,  déjà  dépouillée  de 
ses  chambres,  ainsi  que  des  trois  cents  colonnes  qui  en  soute- 
naient la  voûte,  et  convertie,  de  son  temps  en  champ  de  culture, 
pour  les  besoins  du  desservant  du  temple.  » 

Grâce  à  la  protection  française,  St-Benolt,  menacé  de  subir 
le  même  sort  que  St-Paul,  fut  conservé  au  culte  chrétien.  Excité 
par  l'expulsion  des  Maures  d'Espagne  réfugiés  dans  ses  États, 
sultan  Snleïman  avait  résolu  d'abattre  cette  église,  ou  de  la 
changer  en  mosquée  ;  mais  <  l'ambassadeur  de  France  fit  en 
sorte  que  le  roi  l'autoris&t  à  demander,  en  son  nom,  ladite 
église,  pour  en  faire  nue  chapelle  royale,  à  l'usage  de  l'ambas- 
sade de  France'.  •  Il  obtint  cette  donation  du  sultan,  vers  1540-. 

Le  P.  Barbieri  rapporte  le  même  fait,  mais  il  attribue  la  con- 
cession de  St-Benolt  t  alla  pace  di  1535,  pel  commodo  dell' 
ambasciatore  di  Francesco  I",  che  doveva  stabilirsi  in  GPli.  » 
Le  premier  traité  conclu  entre  la  Porte  et  la  France  est,  comme 
on  la  sait,  de  1535.  Quatre  firmans  datés  de  1609, 1617,  1619 
et  1638,  confirmèrent  la  donation  de  sultan  Suleïman. 

I  On  lit  dans  VEtlnt  de*  mUtiona  de  GrÈce,  prfiienlé  ù  .ViV.  SS.  fe.i  arche- 
eiqut».  écéijuen  et  députée  du  clergé  de  France  en  l'année  1695,  p.  12  :  «  Pour 
servir  à  la  nation,  et  encore  plus  pour  empêcher  qu'elle  ne  fut  convertie  en 
mosquée,  selOD  les  ordres  que  le  sultan  en  avait  déjà  donnés,  h 

»  Topographia,32S.  ConitantinopoUt  Chrîtt.  EV,  82,  113. 


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—  237  — 

Depuis  lors,  selon  les  Annales  de  la  résidence  des  PP.  Jé- 
suites, les  Ambassadeurs  de  France  firent  desservir  cette  église 
par  des  prêtres  nommés  par  eux. 

Un  peu  plus  tard  les  catholiques  de  Péra  et  de  Galata,  dont 
le  nombre  décroissait  toujours,  au  point  que,  selon  certains  rap- 
ports, ils  n'étaient  plus  que  dix-sept  familles  seulement  (?}/ 
résolurent  de  demander  au  Pape  l'envoi  de  quelques  Pères  de  la 
Compagnie  de  Jésus  ;  ils  sollicitèrent  à  cet  effet  l'intervention  de 
M.  de  Germigny,  baron  de  Germoles,  ambassadeur  de  France,  et 
celle  de  Morosini,  Balle  de  Venise.  On  leur  accorda  leur  demande. 

La  nouvelle  mission  avait  pour  supérieur  le  P.  Mancinelli ', 
italien,  accompagné  des  PP.  Honoré  Gaze,  de  Marseille,  et  Mau- 
rice Timpanizza  de  Raguse,  et  des  Frères  Martin,  de  Marseille,  et 
François,  grec  de  nation.  Parfis  de  Rome  pour  Venise,  ils  mi- 
rent à  la  voile  le  15  juin  et  arrivèrent  à  CP.  le  8novembrel583. 

L'ambassadeur  de  France  et  le  baile  Morosini  les  logèrent  en 
leurs  palais,  puis  les  Pères  prirent  possession  de  St-Benoît,  le 
18  novembre  1583.  M.  de  Germigny  informa  le  roi,  comme 
suit,  de  leur  arrivée  à  GP, 

<  Et  y  (ici)  arrivoient  trois  pères  jésuites^,  mandés  par  N.  S. 
P.  le  pape,  à  la  requeste  et  instance  des  chrestiens  Perots,  pour 
l'effect  de  l'instruction  de  leurs  enfants  ;  par  lesquels  Sa  Sainteté 
m'aurait  escript  un  bref  aux  fins  de  les  recevoir  et  tenir  soubz 


'  LeP. Jules  Mancinelli, tiëA  Macérata  dans  les  Marches, lit  si 
Rome  (1 558-1 5(iO).  Après  qu'il  eut  terminé  ses  études,  il  fut  appliquô  au  mï- 
DÎstdre  de  la  prédication.  Kon  éloquence  était  si  persuasive  que  son  discours 
était  souvent  ioterrompu  par  les  sanglots  de  ses  auditeurs.  On  l'employa  en- 
suite aux  missions  en  Kurope,  en  Asie  et  même  en  Afrique.  Les  Souverains 
Ponlires,  surtout  (iré^'oire  XIII,  lui  donnèrent  les  plus  larges  facullc-s  l'Ouï 
admettra  tes  hérétiques  et  los  scbismatiques  dans  le  sein  de  l't^lise  catho- 
lique. Après  son  court  apostolat  à  CP.,  il  continua  ses  courses  apo8toli(]ues 
en  Algérie,  revinten  Italie,  parcourut  l'Allemagne, la  Valachie,  la  Moldavie, 
la  Pok^ne,  etc.  Il  mourut  à  Naples  le  14  août  1GI8  àrftgedeplus  de  quatre- 
vingts  ans.  II  laissa  une  grande  réputation  de  sainteté  et  Ibs  Jésuites  l'hono- 
rent comme  Vénérable.  (V.  Symbolrc  a-l  illduti-anilam  Er-rleai"'  Orienlalîx, 
etc.,  p.  OSO.auctore  R.  F.  Nicolao  Nillos.  S.  J,  Inspruok,  IHM.î.) 

»  L'Ordre  des  Jésuites  fut  fondé  en  1534,  par  Ignace  de  Loyola,  (Ils  d'un 
gentilhomme  de  la  proïince  de  GuipuBcoa,  et  approuvé  par  le  pape  l'nul  III, 
le  27  septembre  1510. 

'  Le  pape  avait  également  adressé  un  autre  bref,  en  Taveur  dps  Pérès,  au 
baile  (!e  Venise,  Morosini  (Carayon,  p.  4).  lequel,  dit  VExtiit  i/o  Mifaliins. 
p.  12,  i  aurait  fait  une  aumûne  considérable  pour  meubler  et  réparer  l'églUe.  ■ 


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la  protection  de  V.  M.,  et  les  faire  loger  et  accommoder  au  mo- 
nastère St-Benoît  comme  estant,  dès  le  temps  de  sultan  Suley- 
nan,  soubz  la  garde  et  protection  particulière  de  V.  M.,  ce  qne 
j'ay  très-volontiers  faict'.  » 

(  Le  35  août  suivant  (1584),  M.  de  Germigny,  à  qui  cette 
église  appartient  de  droit,  leur  ât  expédier  deux  patentes  ;  l'une 
en  latin,  pour  les  chrétiens,  mentionne  les  divers  breTs  du  pape  ; 
l'autre  en  italien,  pour  les  Turcs,  sans  mention  du  Pape,  cons- 
tate la  donation  faite  par  le  sultan.  La  patente  latine  préconise 
le  zèle  des  Rois  T.  G.  à  soutenir  la  religion  en  Levant,  ce  qui 
est  d'ailleurs  coustalé  par  l'empressement  que  le  Roi  a  montré 
pour  se  faire  remettre  l'église  que  le  sultan  voulait  convertir  en 
mosquée.  >  M.  de  Germigny  établit,  par  suite,  le  droit  que  les 
ambassadeurs  ont  eu,  dès  lors,  de  nommer  des  recteurs,  et  des 
économes,  pour  la  desservance  de  cette  église,  citant  même 
parmi  eux  les  pères  Antoine  de  Chio  et  François  Pastes,  tous 
deux  franciscains  ;  il  termine  en  disant  t  que  c'est  sur  les  re- 
présentations des  chrétiens  de  Péra  qu'il  a  demandé  et  obtenu 
la  venue  des  jésuites  ;  >  enûn,  <  qu'il  s'est  déterminé,  conduit 
par  l'esprit  de  religion  du  roi,  à  leur  affecter  pour  logement  l'é- 
glise de  St-Benoit,  et  que,  sur  la  demande  du  souverain  pontife, 
il  les  recevait  sous  la  protection  spéciale  de  S.  M.  » 

Cette  patente  se  termine  ainsi  :  (  donné  aux  Vignes  de  Péra, 
le  35  août  1584.  » 

Le  lendemain  le  Baile  vénitien  leur  expédia  d'autres  lettres- 
patentes,  dans  lesquelles  on  lit  :  c  Les  Pères  étant  arrivés  le 
8  novembre  1583,  et  étant  entrés  au  lieii  de  St-Benolt,  par  ordre 
de  Sa  Sainteté,  qui  a  voulu,  par  un  bref  de  même  teneur,  qu'Elle 
nous  a  adressé,  qu'il  leur  soit  assigné,  pour  y  faire  leur  résidence, 
comme  l'ont  demandé  les  Seigneurs  Pérotes. . . .  Nous  avons,  par 
charité,  subvenu  à  leur  nécessité  de  quelque  petite  aumône,  la- 
quelle nous  déclarons,  aûn  qu'en  tout  temps  ils  puissent  être 
les  maîtres  de  ce  que  nous  leur  donnons....  tant  pour  le  service 
du  culte  divin,  que  pour  l'avantage  de  leur  maison.  »...  ï  Aux 
Vignes  de  Péra,  le  26  août  1584'.  » 

I  Négocialion*.  IV,  231. 

'  Cf.  aussi  P,  Carayon,  p.  4.  et  VEalnt  de*  Mixtio/i*.  etc.  où  il  est  dit  que 
Morosini  •  aurait  fait  une  aumAne  considérable,  pour  réparer  et  meubler 

l'église-  » 


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Les  Jésuites  se  mirent  aussitôt  à  l'ceuvre,  et  les  documents 
de  l'époque,  Estât  de  la  Mission  de  Grèce,  sartoat,  nous  di- 
sent :  (  Tout  occupés  qu'étaient  les  Pères  de  leurs  prédications, 
ils  ne  laissèrent  point  d'ouvrir  une  école  pour  l'éducation  de  la 
jeunesse  \  les  enfants  schfsmatiques,  aussi  bien  que  les  catholi- 
ques, la  remplirent  incontinent }  leurs  parente  même  les  y  ac- 
compagnaient pour  profiter  de  l'instruction  que  l'on  faisait  à 
leurs  en&nts.  Outre  ces  occupations,  il  fallait  que  les  mission- 
naires trouvassent  le  temps  d'aller  dans  les  prisons  et  dans  les  ' 
hâpitauz....  il  leur  fallait  aussi  donner  des  heures  aux  prêtres 
et  aax  évèquea  qui  voulaient  avoir  avec  eux  des  conférences 
particulières.  Le  patriarche  d'Antioche  et  celui  d'Alexandrie  vin- 
rent souvent  consulter  le  P.  Mancinelli,  sur  diverses  questions, 
de  conscience,  certains  doutes  qu'ils  avaient  :  ils  finirent  pai  se 
trouver  si  persuadés  de  la  vérité  de  la  religion  catholique  et  de 
la  primauté  de  l'Église  romaine,  qu'ils  écrivirent  au  Pape  pour 
lui  témoigner  leur  soumission  ;  (Michel,  patriarche  d'Antioche, 
reçut  plus  tard,  par  l'entremise  du  Père,  le  palltum,  que  le 
Souverain  Pontife  lui  envoya.) 

f  Les  métropolitains  d'Éphèse  et  de  Césarée  suivirent  leur 
exemple,  et  souscrivirent  de  leur  main  l'acte  de  leur  obéissance. 
Deux  autres  métropolitains,  et  des  principaux  de  la  Grèce,  firent 
la  même  chose.  Le  patriarche  des  Arméniens  et  l'archevêque  de 
Crota,  patriarche  et  primat  de  toute  l'Albanie,  après  bien  des 
conférences,  voulurent  aller  à  Rome  pour  preuve  de  leur  retour 
sincère  à  l'unité  catholique.  Jérémie,  patriarche  de  CP.,  députa 
deux  de  ses  prêtres  pour  porter  au  Souverain  Pontife  la  protes- 
tation de  sa  Foi.  > 

<  Or  ces  travaux  ne  sufTisaient  pas  aux  Pères  :  ils  y  joignirent 
la  mission  du  bagne  où  se  trouvaient  plus  de  quatre  mille  for- 
çats. Ils  s'y  rendaient  le  soir,  y  faisaient  chanter  les  vêpres,  en- 
tendaient les  confessions,  qui  duraient  souvent  la  nuit  entière  ; 
et  le  lendemain  matin  avant  qu'on  appelât  les  esclaves  au  tra- 
vail, on  disait  la  sainte  messe,  après  laquelle  les  Pères  distri- 
buaient leurs  aamônes  '.  > 

Le  Père  Mancinelli  fut  appelé  en  Europe  pour  les  besoins  de 
la  mission  qui  demandait  de  nouveaux  ouvriers  évangéliques. 

'  Doeumenti  officiel*.  Cf.  aussi  Carayon,  loc.  laud.  p.  4. 


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—  240  — 

Ses  confrères  moururent  de  la  peste  '.  M.  de  Laneosme  écrivait 
au  roi,  le  23  mai  1586,  t  de  cinq  jésuites  envoyés  par  lo  deffunct 
pape  Grégoire,  en  l'église  St-Benolt,  qui  est  soubz  la  protection 
de  V.M.,  il  n'en  estoit  resté  que  ung,  les  aultres  estans  morts 
de  peste,  lequel  avoit  escript  à  son  général  pour  avoir  des  com- 
paignons  ;  mais  le  pape  Sixte  V  ayant  résolu  de  ne  vouloir  rien 
donner  ponr  les  entretenir,  cela  a  faict  que  ce  dernier  a  été  ré- 
voiqué,  et  s'en  est  allé  depuis  huict  jours,  laissant  l'église  dé- 
■  sorte  j  s'il  semblait  k  V.  M.  d'écrire  à  Sa  Sainteté  pour  y  faire 
envoyer  ou  des  bons  hommes  ou  des  cnppuchins,  ce  seroit 
l'honneur  de  V.  M.,  et  la  consolation  des  chrestîens  qui  sont 
ici=.  » 

Cette  demande  de  l'ambassadeur  fut  eiaucée  ;  en  effet,  on  lit 
dans  les  archives  des  PP.  Capucins  de  St-Louîs,  t  que  l'an  1587, 
le  R.  P.  Général  de  l'Ordre  décida  l'envoi  en  Turquie  d'une 
mission  de  religieux  de  son  Ordre,  composée  de  trois  prêtres, 
les  PP.  Pietro  délia  Groce,  supérieur,  Dionigi  da  Roma,  et  Egi- 
dio  di  Sta  Maria.  Ce  dernier  ayant  été  empêché  au  moment  du 
départ,  par  raison  d'infirmité,  il  fut  remplacé  par  le  P.  Joseph 
et  le  fr.  Grégoire  de  Léonisse,  l'un  prêtre  l'autre  laïque  3. 

«  A  leur  arrivée  les  Capucins  eurent  pour  habitation  un  lieu 
à  demi  ruiné,  qui  acait  été  aux  religieux  de  Si-Benoît  ;  et 
l'église,  petite,  étant  encore  en  état  de  servir,  ils  bâtirent  au- 
tour, de  petites  cellules,  où  ils  restèrent  environ  deux  ans*.  > 

«  Le  P.  Joseph  de  Léonisse  qui  n'avait  pu  partir  avec  les 


1  On  retrouva  les  restes  de  trois  <le  ce»  religieux,  lians  la  crypte  de  St- 
Benolt,  lors  du  dépôt  qu'on  y  fit  des  restes  de  M.  de  Halignac  (Carayon,  lor. 
lau'I.  40,  51).  I^  nom  du  I'.  Cbizzola.  avec  la  date  de  ISS.i,  se  trouve  inscrit 
Bur  la  pierre  tombale  des  PI'.  Jésuites,  morts  de  peste  à  Conalantinople,  de 
IStiri  à  ITjG  ;  cette  pierre  a  été  transportée  de  l'ancien  cimetière  des  Grands- 
Champs,  à  l'éra,  dans  l'église  du  Saint-Ksprit.  (Comple-rci-hi  ilii  einiet.  la- 
tin m-A.  p.  26.) 

<  Un  appelait  populairement  Bons-Hommes,  les  religieux  Minimes,  fondés 
par  st  Frani;ois  de  Paulc.  Ils  devaient  ce  surnom  au  roi  I^uis  XI  qui  avait 
fait  venir  en  France  leur  fondateur  et  le  gardait  auprès  de  lui.  Il  l'appelait 
son  Don-Homme,  et.  du  l'ère  le  nom  passa  aux  enfants. 

>  filorin  dette  Migxini'i  i/ei  Cappwdni,  Roma,  I,  â-l.  On  trouve  dans  ce 
mitme  volume,  p.  471,  le  texte  du  bref  de  Sixte  V,  constitutif  <le  la  mission, 
ainsi  que  les  lettres  d'obédience  données  par  le  P.  Général  aux  premiers 
Péri!S  désignés,  puis  au  P.  Joseph  de  Léonisse,  en  juin  et  août  IjUl. 

*  ArrMeei  de*  Cnpwiii»  île  Pcra.  Palmier  Séraphiijne.  4  févr. 


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—  241  — 

autres  débarqua  sur  la  côte  de  Thrace  ;  ne  sachaDt  pas  oîi  trou- 
ver ses  frères,  il  fut  accosté  par  un  charmaDt  enfant  qui  le  prit 
par  la  maia  et  le  conduisit  à  travers  les  rues  de  CP.  jusqu'à 
Yêglise  de  Notre-Dame,  comprise  dans  le  couvent  où  rési- 
daient les  religieux  qui  l'avaient  précédé.  Ce  couvent,  qui  avait 
appartenu  aux  Bénédictins,  était  en  très  mauvais  état,  mais  heu- 
reusement l'église  était  en  des  conditions  plus  satisfaisantes.  A 
peine  arrivé  l'enfant  disparut'.  »  Le  P.  Rocco  dit  aussi  ;  (  Nos 
religieux  furent  placés,  «  in  una  chiesuia  semi-dlruta,  un 
giorno  dei  figli  di  San  Benedetto  occupata.  >  (C'était  sans  doute 
l'église  de  Notre-Dame  de  Miséricorde,  dont  il  a  été  question 
plus  haut.) 

(  Destiné  au  service  du  bagne,  le  P.  Joseph  se  dévoua,  avec 
un  zèle  et  une  charité  héroïques,  au  bien  des  galériens,  surtout 
durant  les  ravages  d'une  pesle  terrible.  Il  fut  atteint  lui-même 
par  le  fléau,  mais  11  put  en  guérir,  après  de  longues  souffrances. 
Moins  heureux  que  lui,  ses  deux  Frères  succombèrent  aux  at- 
teintes de  cette  cruelle  maladie  ;  (leurs  restes  sont  probablement 
ceux  que  l'on  trouva  dans  la  crypte  de  St-Benoit,  quand  on  vou- 
lut y  déposer  le  corps  de  M.  de  Salignac.)  Resté  seul  avec  son 
compatriote  le  Fr.  Grégoire,  le  P.  Joseph,  loin  de  ralentir  son 
zèle  dans  ses  travaux  apostoliques,  ne  cessa  au  contraire  de 
l'enflammer  davantage.  Mis  en  prison  une  première  fois,  il  en 
sortit  par  l'intervention  du  baile  de  Venise  ;  puis  ayant  voulu 
porter  sa  prédication  jusque  devant  le  sultan,  il  fut  condamné 
au  supplice  de  la  pendaison  aux  crochets.  Après  être  resté  trois 
jours  et  trois  nuits  dans  cette  position,  et  bien  que  l'on  eût  es- 
sayé de  le  brûler  au  moyen  d'un  grand  feu  allumé  sous  son  gi- 
bet, il  fat  détaché  de  la  potence  par  un  ange,  qui  lui  apporta  dos 
aliments,  et  lui  ordonna  de  partir  pour  l'Italie.  Le  P.  Joseph 
était  resté  deux  ans  à  GP.  >  (Né  en  1556,  dans  la  petite  ville  de 
Léonissa,  il  mourut  à  Amatrice,  le  4  février  1613,  flgé  de  cin- 
quante-sept ans,  et  fut  canonisé  en  1746,  par  Benoit  XIV^.) 

Cependant  *  après  le  départ  du  P.  Mancinelli,  en  1585,  l'église 
de  St-Benott  retourna,  comme  auparavant,  au  roi  de  France  et 

1  Rorbacher,  Vie*  ilen  SainI».  CarayoD,  Relation  inédite  p.  51.  —  Ci-.les- 
aous,  S.  Georges,  cb.  VII. 
>  Storia  dello  ml$*ioni  dai  Cappuecini,  P.  Roooo  (U  Ceaiuale,  I. 


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—  34i3  — 

à  ses  ambassadeors  en  Levant,  jasqa'eo  1604,  où  M.  de  Brèves 
obtint  de  la  Porte  la  permission  nécessaire  pour  y  établir  des 
Pères  français,  de  la  Compagnie  de  Jësos.  En  mai  1605,  l'am- 
bassadeur envoya  au  roi  les  patentes  du  Grand  Seigneur  à  cet 
effet  ;  mais  l'aSaire,  pom*  diverses  causes,  fut  retardée  jusqu'en 
1609  '.  .. 

Durant  cette  longue  période,  des  rivalités  s'étaient  produites  ; 
et,  en  septembre  1609,  la  Comunità  informa  le  pape  Paul  V 
f  de  l'installation  à  St-Benolt,  par  l'ôvêque  de  Tine  ',  »  visiteur 
apostolique  en  tout  le  Levant,  *  de  la  confrérie  de  la  charité, 
à  laquelle  on  s'affilie  avec  grand  empressement,  »  ainsi  que  du 
désir  de  cet  évëque  d'établir,  contre  le  gré  de  l'ambassadeur, 
l'A^pf/a/ dans  l'abbaye  de  St-6enoit.  Ces  dispositions  étaient  di- 
rigées contre  la  nouvelle  mission  des  Jésuites,  partie  de  Paris  le 
SI  janvier  1609  ;  composée  des  PP.  Cbarles  Qobin  (mort  de  peste 
en  IdlS),  Guillaume  Levesque,  et  du  frère  Colomb,  elle  aug- 
menta en  route  du  frère  Viar,  et  du  P.  de  Canillac,  supérieur'. 

La  mission  rencontra  aussitôt  des  diSicultés,  réelles  ou  sup- 
posées, pour  la  question  de  résidence  ;  t  car,  dit  le  P.  de  Ca- 
nillac, les  mieux  pratiqués  de  ce  lieu  ne  cuidaient  pas  que  le 
monastère  de  St-Benolt,  où  nos  Pères  avoieut  jadis  fait  leur 
résidence,  fat  propre  à  nos  fonctions,  pour  estre  écarté  de  la 
demeure  des  Latins,  entouré  des  Grecs  et  des  Arméniens,  > 
Aussi  M.  de  Saliguac,  persuadé,d6  son  côté,  par  les  gens  du  pays, 
avait  déjà  loué,  pour  les  Pères,  «  une  maison  belle  et  bien 
située,  au  milieu  de  la  demeure  des  Latins  *  i  ;  mais  la  diffi- 
culté estoit  de  trouver  église  propre  et  commode,  y  ayant  seule- 
ment une  petite  église  ou  chapelle,  voisine  de  quelques  cin- 

'  Annale»  de  la  Rfiidence.  et  Histoire  des  Turc»  de  Verdier.Vie  de  Sultaa 
Ahmed  1.  ParÎB,  1665.  I,  336. 

»  Tine  relevait  encore  de  la  juriiiîclion  occlësiasiique  de  Venise  (Carayoo, 
loc.  laud.  1864,  p.  Iiî5>.  Cf.  plus  haut,le  passage  relatif  à  la  juridiction  ccclé- 
siastiqae  du  patriarche  de  Grade.  D'aprâe  les  archives  de  St-Pierre  de 
Galata.  cet  évêque  était  Giorgio  Perpîniano. 

»  Cf.  Eilat  de»  Miuion*  de  Grtce.p.  31. 

*  «  Les  Parcs  Jésuites  ont  été  placés,  écrit  la  ComaniCà  &  M.  de  BrâTee, 
le  17  octobre  1609,  dans  la  maison  du  S'  Giorgio  Mamoretto,  bâtie  dans  le 
jardin  acheté  par  celui-ci,  du  sieur  Dane.  >  Les  Latins  habitaient  encore 
presque  exclusivement,  l'ancien  Galata,  compris  dans  l'enceinte  de  1303- 
1304,  tandis  que  St-Benott  sa  trouve  dans  le  nouveau  au  milieu  des  églises 
grecques  et  arménienoeB. 


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—  243  — 

qaante  pas,  dicte  St-SëbastieD,  qui  o'ètoit  ofliciée  qu'une  ou  deux 
fois  l'an  '  ;  l'ambassadear  ât  demander  Vttëage  de  cette  église 
au  visiteur  apostolique,  avec  réserve,  néanmoins,  de  St-Benott; 
mais  S.  G.  répondit  que  c'étoit  trop,  et  qu'une  suffîsoit  ;  aussi, 
avoit-ii  destiné  le  dit  St- Benoit  à  un  hôpital,  qu'il  avoit  projeté 
avec  les  «  Messieurs  de  la  ville.  > 

Les  Turcs  avaient  été  travaillés,  d'autre  part,  contre  la  rèins- 
tallation  des  Jésuites,  car  l'ambassadeur  se  trouvant  chez  t  le 
Bascha,  celui-ci,  à  propos  de  quelque  chose  qui  touchait  le 
Vénitien,  dit  avoir  sceu  que  quelques  prebtres  latins  estoient 
venus  de  nouveau,  personnages  dangereux  et  haïs  de  tout 
le  monde,  et  qu'il  estoit  meilleur  qu'ils  s'en  retournassent  en 
leur  païs  au  plus  tôt.  »  De  son  c(>\.k,%i contrairement nw  désir 
du  pape,  l'évêque  visiteur,  tenant  à  fermer  St-Benolt  aux  reli- 
gieux français,  insistait  pour  l'installation  de  l'hôpital  dans 
l'abbaye,  tandis  que  les  Pérotes  faisaient  valoir  n  l'incommo- 
dité pour  eux  >  d'envoyer  leurs  enfants  dans  ce  quartier  de 
ville  (St-Benolt),  éloigné  de  la  demeure  de  France.  -  > 

Finalement,  les  Pères  furent  mis  en  possession  de  St-Sébas- 
tien  ;  et  le  jour  de  leur  installation,  le  20  septembre  160D,  ils 
chantèrent  une  messe  solennelle  dans  cette  église,  en  présence 
de  l'ambassadeur  et  des  principaux  du  lieu,  c  A  leur  insti- 
gation, fut  établie  dans  leur  église  le  28  novembre,  la  Con- 
grégation de'  Notre-Dame ,  dans  laquelle  M.  de  Salignac 
s'inscrivit  le  premier,  avec  ses  drograans  et  son  aumônier, 
devenu  depuis  évéque  de  Milo  ^.  Chaque  dimanche,  les  Pères 
ârent  des  prédications  qui,  avant  eux,  n'avaient  lieu  que  du- 
rant l'avent  et  le  carême  ;_  et  ils  ouvrirent  des  classes,  «  même 

1  Carayon,  tof.  Itmd.,  27. 

'  Cette  résidence,  de  Francs,  se  trouvait-elle,  comme  t'indiquent  certaines 
fratlitionB,  dans  le  KbanFranchini.à  l'angle  de  la  rue  de  St-Georges  et  celle 
de  l'erchembé-BazaT,  autrefois  te  palais  des  podestats,  ou  plutôt  dans  l'en- 
clos actuel  des  maisons  de  Sit-I*ierre  tlja.  dernière  maison  à  droite,  dans  la 
prolongation  de  la  rue  Tchinar  f  Sur  l'angle  rentrant  de  la'muraille  de  cette 
maison,  occupée  longtemps  par  la  banque  ottomane,  et  fafsaat  saillie,  on 
voit  encore  l'écuason  aux  armes  de  France,  sculpté  eorelief  sur  la  muraille. 
Noua  ajouterons  que  dans  les  réparations  jotérieuros  faites  pour  cette 
banque,  en  1873,  ou  avait  trouvé  de  vieu^ï  registres,  pouvant  provenir  de 
l'ambassade  de  France  ou  de  sa  ohancetlerie.  On  a  vu  plus  haut  que  le 
quartier  St-f  ierre  était  particulièrement  occupé  par  la  Nation  française. 

•  Loc.  laud..  VIT,  166. 


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—  244  — 

sans  livres  ».  Dans  une  lettre  au  pape,  la  Comunità  confesse 
que,  jusqu'à  l'arrivée  des  jésuites,  lesenCants  latins  ne  savaient 
pas  dire  leur  Pater. 

Mais  si  la  restauration  des  Pères  paraissait  avoir  été  acceptée, 
sous  certains  rapports,  elle  ne  l'avait  pas  été  sous  d'autres  :  le 
haile  B^nrtïen, auquel,  selon  Hammer',  s'étaient  joints  l'envoyé 
anglais  et  Vévêque  de  Tine,  rendirent  les  jésuites  suspecta  à  la 
Porte  les  présentant  comme  des  causes  de  discorde  et  des  enne- 
mis de  l'Etat  ;  leur  habitation  fut  envahie  le  dimanche  13  dé- 
cembre 1609  par  le  soubacM  et  ses  ^ents,  qui  conduisirent  ces 
religieux  au  palais  du  Bascha.d'où  l'ambassadeur,  accouru  aussi- 
tôt, les  ramena  en  liberté  -.  »  Ils  passèrent  tranquillement  *.  le 
premier  jour  de  l'an  et  la  feste  de  St  Sébastien',  titulaire  de  l'é- 
glise; mais  la  veille  du  jour  de  la  Conversion  de  St  Paul,l'ambas- 
sadeur  receut,  de  nouveau,  commendement  de  chasser  ces  reli- 
gieux, accusés  d'être  des  hommes  séditieux,  espions  du  pape, 
et  de  l'Espagne  *,  ordre  qui  fut  réitéré,  une  fols  chaque  mois 
pour  le  moins,  jusqu'au  mois  de...  oCi  on  leur  dit  :  c  Puisque 
l'ambassadeur  s'opiniâtre  tant  à  vous  retenir,  eh  bien  !  restez  ^  !  > 
Sur  la  proposition  de  M.  de  Salignac,  Henri  IV  avait  assigné 
aux  Pères  Jésuites  une  pension  suffisante  pour  l'entretien  de 
dix  missionnaires.  » 

L'habitation  des  Pères  menaçant  de  tomber  en  ruines,  on  dut 
revenir  sur  la  question  de  St-Benoit;  le  visiteur  apostolique  se 
maintint,  d'abord,  dans  son  système  d'opposition  ;  puis,  crai- 
gnant de  compromettre  le  sort  de  son  hôpital,  et  blâmé,  d'ail- 
leurs, par  le  pape  Paul  V,  qui  n'accueillait  nullement  ses  motife 
avoués  de  l'exclusion,  il  finit  par  donner  son  adhésion;  et  les 
Pères  furent  remis  en  possession  de  St-Benolt,  dans  t  la  dernière 
sepmaine  avant  le  Carême  »  (le  15  février  1610).  La  Comunità 
avait  proposé  au  pape  de  donner  aux  Jésuites  '^  St-Qeorges, 

'  Hammer,  VIII,  166.  —  »  CarajTon,  te.  lawl.  27. 

*  Dana  DOtre  calendrier,  cette  fête  est  indiquée  au  20  janvier. 

•  Cette  accusation  est  rapportée  dans  VEstat  ile>  Mistloii»,  p.  Zi,  comme 
dans  Hammer  VIII,  1G6.  Sous  le  même  préte.xte,  ita  auraient  été  expulsés, 
plus  tard,  de  divers  pointa  de  l'empire  (Hammer,  IX,  114). 

*  Carayon,  foc.  iawL  39. 

•  Hammer,  ce  dont  ne  parlent  ni  le  P.  Carajon,  ni  la  Comanilà,  ajoute 
que  .St«-Marie  Drapéris  aurait  été  refusée  à  ces  relipeux  ;  il  ne  parait  pas 
que  la  deman  le  en  ait  jamais  été  faite. 


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—  245  — 

occupée  alors  par  les  Dominicaics.  Enfin,  réinstallés  dans  leur 
^lise,  les  Pères  commencèrent  aussitôt  leurs  exercices  religieux 
et  scolaires  '.  <  On  preschoit  les  jeudy  et  dimanche  matin, 
en  italien,  selon  la  distribution  des  églises  de  ce  lieu  ;  et  le 
vendredy  soir,  exposant  le  Saïnt-Sacrement,  après  un  dévot 
Stabat  Mater,  on  discourait  sur  quelques  mystères  de  la 


f  La  St  Benotst  qui  escbeut  en  ce  saint  temps,  fut  solennel- 
lement festée,  avec  un  bel  appareil;  entre  autres  d'un  théâtre, 
en  demi-rond,  de  degrés  sur  l'autel»  gamy  de  lampes,  sur  le 
milieu  duquel  estoît  te  Saint-Sacrement,  exposé  pour  les  qua- 
rante heures,  qui  vont  chaque  dimanche,  en  l'une  des  églises 
de  Péra,  par  l'ordonnance  de  Mgr  le  visiteur  apostolique.  Il  y 
eut  sermon  le  matin,  en  italien,  et  le  soir  en  français...  C'estoit 
grand  dommage  que  ceste  église,  vénérable  pour  son  antiquité, 
rare  pour  son  assiette,  belle  pour  ses  mosaïques,  qui,  naïfvement 
et  richement,  représentent,  en  espaliers,  sur  les  pans  de  mu- 
railles, les  principaux  mystères  de  la  vie  et  passion  de  N.  S., 
demeura  serrée  (fermée)  toute  l'année,  excepté  le  jour  du  saint, 
se  ruinant  sensiblement,  en  danger  de  s'ensevelir  en  brief,  dans 
ses  propres  ruines...^  Ilya  deux  maltresses  portes  pour  entreren 
l'esglise,  l'une  pour  les  hommes,  et  l'autre  pour  les  femmes,  qui 
ont  leur  lieu  distingué  par  un  treillis  de  bois,  avec  une  tribune 
au-dessus  pour  les  vierges,  qui,  en  ces  quartiers,  ne  s'osent 
montrer,  non  pas  même  à  leurs  proches  ;  et,  pour  ce,  vont  rare- 
ment ez-esglises,  et  ce,  k  la  poincte  du  jour.  Le  bout  de  ces 
galeries  (nefs  latérales)  s'abboutit  à  un  treillis  de  fer  qui  serre 
une  gentille  chapelle  voûtée  et  desdiée  à  V Annonciation  '  de 
la  Vierge,   où  les  congrégations  s'asseDi4:ilent,  laquelle  feu 

'  Dans  une  lettre  écrite  â  M.  de  Urèves.  à  Rome,  le  20  mars  IGIO.  ta 
Comitnità  dit  que  «  les  Pérès  ont  une  école  qui  ne  compte  sinon  trente  élèves 

'  CaMyoQ,  Ion.  laul..42.  I-e  patriarche  Maoarius('Afi  Tmi-cU  of  Mai-ariua, 
patrinifh  of  Aniiorhe :  \jiaàon.  18^6.  p.  27)  donne  une  deacription  à  peu  pré» 
semblable  de  St-Benolt,  qui,  selon  lui,  aurait  appartenu  ancienDement  aux 
orthaloxe»  (t). 

*  Aujourd'hui  chapelle  Sie-Anne.  I.a  Comunità  écrit  à  M.  de  Hréves,  alors 
ambassadeur  à  Home,  le  20  mars  IGlO  :  n  Depuis  leur  retour  à  St-Benolt,  tes 
jésuites  ont  établi  la  Congrégation  /Ir  la  ti-it-triiiile  Vierge,  dans  ta  chapelle 
du  dehors,  voisina  de  l'église  ;  l'ambassadeur  de  Krance  et  nombre  d'autres 
personnes  vont,  chaque  samedi,  pratiquer  cette  sainte  dévotion.  > 


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—  346  — 

M.  l'ambassadeur  a  faict  magnifiquement  peindre  par  un  peintre 
grec,  avec  les  armes  du  Boy  T.  C.  et  les  siennes,  et  a  décoré 
d'un  beaa  parement  blanc ,  onvragé  à  la  persienne ,  avec  la 
chasuble  de  damas  blanc  aussy  <,  > 

Loin  de  voir  leurs  écoles  moins  fréquentées  depuis  leur  retour 
à  St-Benoit,  c  les  grecs,  les  juife  même,  y  envoyoîent  leurs 
enfants  '  ;  et  q>iant  à  leur  église,  ils  y  virent  affluer  des  péni- 
tents grecs  et  latins,  régnicoles  -  et  étrangers  ;  et  les  françoia  la 
consîdéroîent  comme  leur  principale  et  plus  chérie  paroisse... 
M.  l'ambassadeur  avoit  folct  accommoder  une  chambre,  tout 
prèz  du  jubé  de  l'église,  tout  exprès,  les  trois  derniers  jours  ds 
la  passion,  pour  vacqua-  plus  librement  à  sa  dévotion  '.  » 

«  Le  pénultième  jour  de  juillet,  veille  de  la  feste  de  notre 
B.  P.  Ignace,  que  jadis,  le  dimanche  précédent,  dit  le  Père  de 
Canillac,  le  R.  P.  vice-patriarche  (qui  nous  montre  grande  affec- 
tion) par  un  fort  honorable  cartel,  avoit  faict  publier  par  toutes 
les  églises  de  ce  lieu,  on  fit  un  service  pour  Henri  IV  défunct  ; 
et  ensuite  on  chanta,  dans  St-Benoit,  les  premières  vespres  so- 
lennellement avec  un  appareil  meslangé  de  joye  et  de  deuil.  Le 
chœur  et  autels  estoient  richement  parés  de  blanc,  et  la  nef 
tendue  en  blanc  et  noir,  parsemée  de  fleurs  de  lys  et  de  larmes  ; 
et  sur  le  milieu,  y  avoit  une  magniflque  chapelle  ardente,  sur 
quatre  colonnes  blanches  et  noires,  en  façon  de  marbre,  meslè 
avec  des  pantes  de  brocatel  blanc  et  noir,  et  un  drap  d'or  sur 
le  cercueil,  bandé  d'une  bande  de  velours  noir.  M.  l'ambassa- 
deur passa  cette  nuict  chez  nous  et  la  suivante.  Le  lendemain, 

'  Carayon,  loc.  C!iu4.  43. 

<  Le  même  auteur  ajoute  plus  loin  (p.  58)»  qu'ils  avaient  dans  leurs  classes 
divers  religieux...  des  caloyers  grecs  avec  un  diacre  et  plus  de  cinquante 
enfants,  tant  grecs  que  francs  ;  aux  uns  on  apprend  à  lire,  aux  autres  les 
grammaires  grecque  et  latine,  o  Baudier,  citi!  par  Hamraer  (VIII,  16fi),  dit 
que  D  les  Jésuites  fondèrent  une  école  de  niathi^maliques.  s  Selon  les  Lettre» 
et  aiicrilote»  lie  Cyrille  Lin-ari»,  patriarche  de  CP..  Amsterdam,  1718  ;  i  Ce 
collège  était  destiné  à  l'enseignement  gratuit,  «ou»  pri'tej:te  de  rharitf,  de  la 
grammaire,  des  langues  et  des  arts  libéraux.  » 

s  Dans  le  Bérat  préci'é.  délivré  au  comte  do  Leslie,  1076=1665,  il  est  dit  : 
0  que  les  Jésuites  et  tous  les  autres  religieux  du  rite  latin,  ne  seront  pas 
troubiés  par  les  évéques  grecs,  serbes  et  bulgares,  dans  les  églises  actuelle- 
ment en  leur  possession.  'lû  anliqno.  non  plus  que  dans  celles  des  Kalas, 
dépendant  spiritnellement  d'eux,  quand  ils  accompliront  dans  ces  églises 
leurs  pratiques  religieuses  selon  le  rite  latin.  >• 

'  Carayon,  loc.  lawl.  p.  43-45. 


DigilizPdbvGoOt^le 


—  347  — 

nn  de  nos  Pères  chanta  la  grand'messe  du  sainct...  Oo  y  com- 
mença les  quarante  heures,  pour  prier,  tant  pour  l'âme  du  roy 
deffunct,  que  pour  l'heureux  règne  du  nouveau  roy  Louis  XIII  ; 
et,  sur  la  clôture  de  k  dicte  oraison,  on  ât  nn  autre  office  so- 
lennel lugubre,  où  le  P.  Antoine,  cordelier,  bon  prédicateur,  âst, 
à  ma  réquisition,  un  petit  panégyrique...  La  chapelle  ardente 
demeura  tendue  quarante  jours  durant,  avec  la  messe  tons  les 
jours  pour  l'âme  du  roy  '.  » 

f  M.  de  Salignac,  continue  le  même  Père,  m'avolt  recom- 
mande de  fester  le  jour  de  St  Louys,  arec  singulier  appareil, 
désirant  introduire  celte  feste  icy,  comme  solennelle,  pour  la 
nation  françoise  \  ce  qui  fust  faict  avec  grand'messe  et  sermon, 
où  tous  les  religieux  furent  invités,  avec  le  R.  P.  vicair©- 
patriarcal,  qui  chanta  la  messe  ^.  > 

Peu  après,  la  mission  perdit  son  zélé  protecteur;  M.  de  Sa- 
lignac mourut  le  13  octobre  1610,  c  après  avoir  légué  une 
bonne  partie  de  ses  livres  à  St-6enolt  ^.  >  Le  P.  de  CaniUac  fait 
ainsi  le  récit  de  ses  funérailles  et  de  l'impression  produite  par 
cet  événement  :  <  On  ne  sçauroit  bonnement  exprimer  les  re- 
grets de  toute  sorte  de  gens  de  condition  et  de  religion  à  ce 
sujet.  Le  jour  suivant,  nous  tendîmes  nostre  esglise  en  noir  ; 
et,  sur  l'heure  de  midi,  qui  revient  &  la  quarte  de  nostre  hor- 
loge françois  en  été,  on  flst  le  convoy  honorablement  ;  nos  petits 
escholiers,  avec  des  cierges  allumés,  alloient  les  premiers,  suivis 
de  plusieurs  autres  estrangiers;  puis  venoient  les  religieux,  et, 
après,  les  domestiques  (gens  de  la  maison).  Douze  gros  cierges 
de  la  noble  compagnie  de  Ste-Anne,  qui  faict  le  Corps  de  la 
Ville,  pour  les  chrestiens  catholiques,  portés  par  douze,  vestns 

'  >  Chez  les  Bénédictins,  depuis  le  viir  BÎécle,  chaque  fois  qu'il  mourait  un 
religieux,  on  était  dans  l'usage  de  fairecélébrer  la  messe  et  donner  sa  pitance 
aux  pauvres  à  son  intention.  —  En  Helgique,  les  trenlenaires  se  célèbrent 
encore, après  les  funéraittes,  par  toutes  lés  famlUes  chrétiennes.  »  (Les  Moineê 
d'Oeci'/enI,  I,  102.) 

'  11  semblerait  mâme  qu'à  un  moment  l'église  de  St-Benolt  fut  désignéa 
BOUS  le  nom  de  St-Louis,  comme  il  résulte  du  texte  suivant  cité  par  Hammer 
(.YII,  19U).  1  I  Prancesi  ...anco  in  tempo  délia  pacé.  ottenero  licenza  di  ri- 
fabricare  due  chiese,  l'una  SUOiorgio.  l'altra  St-Lodovioo,  in  Galata,  •  Cette 
reconstruction  ne  fut  probablement  que  partielle  et  se  borna  à  certaines 
parties  du  monastère  incendiées  en  1660. 

■  Ce  fut  en  exécution  de  ses  volontés  que  M.  de  Salignao  fut  inhumé  dans 
l'Oise  des  Jésuites. 


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—  348  — 

en  sacs,  qui  représentent  les  douze  apostres  et  n'avoient  cou- 
tume de  marcher  que  pour  la  procession  du  Sainct-Sacrement, 
prëcëdoient  immédiatement  le  cercueil,  couvert,  h  la  mode  de 
France,  d'un  drap  de  velour  noir,  avec  la  croix  de  satin  blanc. 
Snivoit  M.  de  Cariât,  frère  du  defifunct,  assisté  des  illustrissimes 
ambassadeurs  d'Angleterre  et  de  Venise,  avec  toute  leui'  suite, 
qui  tous  conduisirent  le  corps  en  nostre  esglise,  le  posant  soubs 
la  chapelle  et  ouyrent  l'office  de  l'enterrement.  Mais  nous  le 
mismes  puis  en  son  lieu  de  repos,  la  nuict,  à  huis  clos...  en  la 
voûte...  De  là  à  six  ou  sept  jours,  on  ûct  le  service  solennel, 
avec  une  oraison  funèbre,  faicte  par  le  mesme  des  nostres  qui 
fist  celle  du  roy,  non  sans  larmes  des  auditeurs.  Pour  nous, 
nous  ne  pouvions  faire  plus  grande  perle,  pour  l'assistance  et 
secours  humains,  en  tous  ces  quartiers  '.  » 

La  peste  ayant  exercé  ses  ravages  durant  toute  l'année  1611 
et  partie  de  1612,  M.  de  Harlay-Sancy  fit  retirer  les  Pères  en 
un  quartier  de  son  logis  c  l'espace  quasi  de  trois  mois,  jusqu'à 
ce  que  le  voisinage  fat  nettoyé  d'infection.  Nonobstant  la  con- 
tagion, les  Pères  n'ont  pas  laissé  d'avoir  toujours  quelques  com- 
muniants en  leur  église,  et  de  faire  quelque  briefve  exhortation, 
tant  en  la  mesme  esglise  qu'estant  retirez  chez  M.  l'ambassa- 
deur, ayant  introduit  un  sermon  tous  les  ans  en  sa  chapelle  ;  et 
tant  qu'ils  demeurèrent  au  loçts  de  France,  les  enfants  des 
principaux  de  Fera  y  venoient,  du  gré  de  M.  l'ambassadeur,  y 
prendre  leurs  leçons.  La  procession  du  saint-sacrement  eut  lieu 
autour  de  l'église  -...  Â  la  même  époque,  les  marchands  et 
mariniers  françois  ont  aussi  commencé  une  congrégation,  sous 
le  nom  de  Notre-Dame  de  Bon-Voyage,  venants,  tandis  qu'ils 
se  retrouvent  icy,  dire  les  heures  de  N.-D.  en  la  chapelle  que 
M.  de  Salignac  fit  peindre  et  orner.  >  M.  l'ambassadeur  voulut 
en  être,  et  son  exemple  y  attira  les  plus  considérables  d'entre 
les  chrétiens  (Estât  des  missions  de  Grèce,  41). 

L'épidémie  dont  il  vient  d'être-  parlé  enleva  «  le  P.  Charles 
Gobin  ^,  le  Frère  Claude,  elle  faillit  emporter  le  P.  de  Canillac, 
supérieuret,  leP.  Antoine  Frégate,qu'on  dut  transportera  Ghio, 

'  Carayon,  lof..  lawl. 
■  Carayon,  loc.  laud.  p.  65. 

1  Carayon,  loc.  lawl.  59.  La  pierre  tombale  des  Jésuites  morts  de  peste 
porte,  à  l'an  161£,  le  Dom  du  P.  Gobin. 


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—  349  — 

laissaot  seulement  dans  la  maison  le  P.  Guillaume  Levesque 
atteint  de  paralysie.  >  Les  Annales  de  la  Résidence  se  louent 
(  du  secours  plein  de  charité  qu'elle  reçut  alors  des  Domini- 
cains et  des  religieux  des  deux  communautés  de  St-François  : 
elles  ajoutent  que  c'est  à  eux  que  la  mission  doit  sa  conserva- 
tion. > 

Au  reste,  et  k  la  suite  des  bonnes  œuvres  accomplies  durant 
la  période  contagieuse,  la  mission  de  St-Benolt  avait  pu  ra- 
cheter, pour  y  établir  les  classes,  une  maison  dépendant  jadis 
du  monastère;  et  l'église  avait  été  «  réparée  et  ajancée.  Un 
chevalier  de  Malte  qui,  attendant  son  rachat,  avoit  fréquenté  la 
congrégation  de  Notre-Dame,  envoya  un  très  beau  tableau 
de  la  Conceplion,  principale  feste  de  la  Congrégation  ;  et 
Mgr  l'ambassadeur  fict  faicg  un  autre  tableau  pour  le  grand 
autel,  qui  est  d'une  Ste  Trinité  sur  le  haut,  et,  au-dessous, 
un  St  Louys,  royalement  vestu,  et  le  bienheureux  P.  Ignace, 
avec  un  Jésus  en  main,  qui  accompagnent  le  tabernacle  posé  au 
milieu.  Les  armes  du  roy  sont  du  costé  de  St  Louys,  et  celles 
de  Mgr  l'ambassadeur  du  costé  du  bienheureux  Père  '.  >  On 
voit  encore,  à  la  Mission  (des  Lazaristes),  un  ancien  tableau  re- 
présentant St  Ignace  en  cbasuble,ettenant,  dans  sa  main  droite, 
un  livre  ouvert  snr  lequel  on  lit  k  droite  :  Ad  majorem  Det 
glortam,  et  sur  la  page  de  gauche  :  Constitutiones  Societa- 
tis  Jesu.  > 

La  mort  de  Henri  IV,  et  celle  de  son  ambassadeur,  M.  de  Sa- 
lignac,  modifièrent  singulièrement  la  situation  desPères  Jésuites 
à  CP.  Le  baile  de  Venise  qui  déjà  s'était  montré  hostile  à  leur 
rétablissement  à  CP.  c  sachant  les  Pères  brouillés  avec  la 
République  depuis  1605,  recommença  ses  menées  contre  eux, 
et  ne  cessa  de  les  faire  persécuter  et  de  chercher  à  obtenir 
leur  expulsion  de  Turquie.  Pour  cacher  son  jeu,  il  enveloppa 
dans  leur  cause  le  P.  de  St-Gal,  ou  Sangalto,  Vicaire  patriar- 
cal, vénitien  et  franciscain,  qu'il  se  flattait  d'ailleurs  de  tirer 
d'affaire.  Celui-ci  et  tous  les  Pères  Jésuites  furent  mis  au 
cachot  à  CP. 

Le  sultan,  d'ailleurs,  était  fort  irrité  de  ce  que  <  l'ambassa- 
deur de  l'empereur  était  entré  dans  Constantinople  tambour 

'  CarayoQ,  lo~..  laud.  64-68. 


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—  250  — 

battant  et  enseignes  déployées  '...  Le  bruit  couroit  qa'il  y  avoit 
beaucoup  -  de  milliers  déguisés  venus  avec  ]ai,  et  sont  à  Cons- 
tantinople  et  en  Galata,  en  habits  de  juifs  et  de  grecs,  qu'il  y 
avoit  quantité  d'armes  dans  les  églises  et  dans  les  maisons  des 
ambassadeurs  ;  qu'on  vouloit  sooblever  les  grecs  ;  que  les 
cosaques  ëktient  de  la  partie.  II  en  résulta  l'ordre  à  chacun  de 
porter  sou  babit  selon  sa  nation,  et  defTense  de  porter  chapeau 
qu'aux  françois,  et  aux  françois  d'habits  de  grecs.  On  fit  une 
recherche  partout  et  un  rôle  de  tons  les  chrestiene.  Le  grand 
seigneur  commanda,  pour  avoir  plus  tôt  fait,  de  tuer  tous  les 
françois,  sans  en  excepter  aucun...  L'ambassadeur  étant  allé 
au  Bâcha  solliciter  pour  les  Pères  Jésuites,  le  grand  seigneur 
Qt  intercepter  la  circulation  entre  Constantinople  et  Galata; 
l'ambassadeur,  au  retour,  ne  put  continuer  sa  route  ;  et,  pendant 
qu'il  était  allé  chez  le  mufti,  ceux  qui  l'accompagnaient  fail- 
lirent être  massacrés  ;  en&n,  le  bascha  envoya  un  ordre  écrit  de 
sa  main  et  l'un  des  siens  pour  accompagner  l'ambassadeur,  faire 
passer  tout  son  train  à  Galata,  et  le  conduire  à  son  logis  ;  cette 
même  nuit,  et  sur  une  fausse  alerte,  les  turcs  se  soulèvent,  an 
nombre  d'un  millier  d'hommes,  avec  les  intentions  les  plus  si- 
nistres ;  les  Pères  Jésuites  i  (tirent  prins.  Il  n'y  avoit  celuy  qui 
ne  dèsespër&t  de  leur  vie  ;  aussi,  un  bon  père  cordelier,  vicaire 
patriarcal,  qui  fut  pris  avec  eux,  et  mis  en  la  mesme  prison, 

■  Caravon,  87.  lettre  de  M.  de  Moranvilliers,  du  27  janvier  1617.  Tl  est 
question  ici  de  Czernim  qui  Ht  san  entrée  à  CP.  en  juin  1616,  précédé  dans 
aon  cortège  «  do  cinq  trompettes  et  de  tambours,  et  d'un  enseigne  portant 
QD  étendard  représentant  d'un  côté  le  Christ  sur  la  croix,  et  de  l'autre,  l'afgle 
d'Autriche.  .  (Hammer,  VIII,  227.) 

*  Hammer  r&pporte  à  ce  sujet  (VIII,  238).  une  ancienne  tradition,  d'aprto 
laquelle  «  l'empire  serait  en  danger  de  perte,  lorsque  J'étendart  de  la  croix 
flotterait  dans  CP.  >  Tous  les  habitants  et  le  sultan  lui-même  prirent  l'a- 
larme :  les  bruits  les  plus  contradictoires  circulèrent  dans  la  ville  :  Les 
églises,  les  cloîtres  et  tes  maisonn  des  chrétiens  regorgeaient  d'armes,  disait- 
on,  et  les  Grecs  devaient  s'en  servir  pour  secouer  le  joug.  Les  cosaques 
étaient  sur  le  point  d'envahir  de  nouveau  les  oâtes  de  la  mer  Noire  et  de 
pénétrer  dans  le  canal  de  Cf.  Enfin,  disait-on,  les  Jésuites  avaient  l'inten- 
tîon  fie  s'emparer  de  la  ville,  (/ambassadeur  impérial,  Czernim,  fut  gardé  A 
vue;  toutes  les  maisons  chrétiennes  furent  visitées,  le  vicaire  général  des 
Franciscains  fut  jeté  à  la  mer,  et  quatre  Jésuites  furent  emprisonnés  aux 
Sept-Tours  ;  le  sultan  lui-même  fit  des  rondes  pendant  la  nuit,  accompagné 
de  ses  (5ardes.  Cependant  lorsque  l'on  reconnut^  fausseté  de  ces  bruits,  on 
rendit  la  liberté  à  Czernim,  le  4  septembre,  et  on  lui  promit  une  satisftictioD, 
qu'il  n'obtint  jamais.  > 


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—  261  — 

ftit  &it  mourir,  trois  jonrs  après,  en  présence  du  grand  seigneur 
qui  fut  à  cheval,  tout  le  long  de  la  nuit,  à  Constantinople.  Les 
Jésuites  furent  seuls  pris  avec  le  vicaire  patriarcal  ;  on  n'alla 
pas  aux  autres  églises,  et  si  passe-t-on  tout  auprès  en  les  me- 
nant, et  puis,  on  se  demande  si  c'est  Yéglise  que  demandent 
les  Vénitiens  '.  > 

Les  Jésuites  reconnus  innocents  furent  mis  en  liberté,  pen- 
dant que  le  P.  Sangallo  Ait  étranglé  dans  sa  prison.  In-ité  de 
ce  résnltatile  baîle  les  ât  remettre  en  prison. M.  de  Sancy,  alors 
ambassadeur  de  France,  depuis  évëque  de  St-Malo,  épousant  leur 
cause,  comme  celle  de  l'Église  et  de  la  Nation,  les  délivra  de 
nouveau  ;  mais  on  agit  de  telle  sorte  que  le  caïmacam  décida 
que  des  six  missionnaires  emprisonnés  aux  Dardanelles,  quatre 
seraient  embarques,  et  deux  seulement  resteraient  auprès  de 
l'ambassadeur.  »  Bientôt,  la  trêve  intervenue  entre  la  Porte  et 
l'empereur  Mathias,  stipula  que  <  les  Jésuites  auraient  le  libre 
exercice  de  leur  ministère  dans  tout  l'empire  ottoman.  '  » 

c  La  vraie  raison  des  persécutions  excitées  à  CP.  contre  les 
Jésuites  à  cette  époque,  à  l'instigation  des  Vénitiens,  se  trouve 
dans  la  haine  de  la  République  de  Yenise  envers  la  Compagnie, 
haine  qui  suscita  la  première  et  la  plus  acharnée  des  persécu- 
tions qu'elle  ait  subies.  Les  Pères  avaient  découvert  et  signalé 
les  menées  de  fra  Paolo  Sarpi,  qui  voulait  protestantiser  Venise, 
n  commença  par  brouiller  Rome  avec  Venise,  St-Pierre  avec 
St-Marc,  pour  une  question  d'immunité  ecclésiastique.  Paul  V 
excommunia  la  République.  Les  Jésuites  prirent  le  parti  du 
Pape  :  oo  confisqua  tous  leurs  biens,  on  en  mit  quelques-una 
en  prison,  tous  les  autres  furent  expulsés  du  territoire.  Les  Ca- 
pucins, les  Minimes  et  les  Thëatins  eurent  le  même  sort.  Le 
Pape  se  réconcilia  avec  la  Sërénissime  Seigneurie,  mais  la  haine 
contre  les  Jésaites  était  si  grande  que  le  décret  d'exil  porté 
contre  eux  ne  fut  rapporté  qu'après  cinquante  ans.  Pendant 
toute  la  durée  de  cette  lutte  la  République  ponrsuivit  les  Jé- 
suites dans  tous  les  pays,  par  le  moyen  de  ses  ambassadeurs. 
C'est  donc  à  cela,  en  dernière  analyse,  qu'il  faut  attribuer  les 


'  Carayon.  lue.  laul.  87-89.  [^ttre  de  M,   de  Moranvillîera,  docteur  da 
Sorbonne,  daté  du  27  janvier  1617. 
>  Annale*  de  la  Rétideiice,  et  aussi  Hstat  des  miteions  de  Grèce,  p.  44. 


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—  352  — 

difficultés  suscitées  par  le  balle  des  Vénitiens  à  CP.  à  cette 
époque.  Après  comme  avant,  nous  voyons  au  contraire  les  re- 
présentants de  la  S.  Seigneurie  donner  aux  Jésuites  des  marques 
constantes  de  leurliienveillance'.  > 

Toutes  sortes  de  calomnies  avaient  été  répandues  contre  les 
Pères  ;  t  malgré  cela,  l'ambassadeur  parvient,  au  prix  de  grands 
sacrifices,  à  les  tirer  du  péril  où  ils  se  trouvent  ;  leurs  malveil- 
lants sollicitent  au  moins  leur  expulsion  ;  mais  l'ambassadeur 
obtient  uu  fîrman  déclarant  leur  innocence  ;  donnant  permission 
à  deux  d'entre  eux  de  retourner  pour  le  présent,  et  permettant 
qu'à  l'advenir  il  puisse  en  venir  d'autres  de  France-.  » 

Sous  le  règne  de  sultan  Murad  IV  (1623-1640),  il  se  produisit 
diverses  circonstances  qui,  pour  le  moment,  du  moins,  vinrent 
troubler  cette  situation  :  dès  leur  arrivée,  les  Jésuites  s'étaient 
ménagé  des  intelligences  avec  le  haut  clergé  arménien  ;  ils 
avaient  aussi  prêché  k  réunion  des  deux  rits  grec  et  latin  ; 
des  conversions  avaient  eu  lieu  ■'',  le  patriarche  grec  <  leur  au- 
roit  manifesté  le  désir  d'estre  uni  avec  l'Église  latine  *  ;  et  il  in- 
vita les  Pères  à  assister,  dans  son  église,  à  la  fête  de  l'Epiphanie, 
où  il  concélébra  avec  le  patriarche  d'Alexandrie.  »  Mais  ce 
Patriarche  fut  remplacé,  le  9  nov.  1622  par  Cyrille  Lucaris. 

Celui-ci  raconte  lui-même  dans  les  Lettres  qui  lui  sont  attri- 
buées, les  noirs  complots  ourdis  par  les  Jésuites  contre  l'au- 
teur des  Lettres^,  et  la  correspondance  entretenue  par  celui-ci 
avec  les  représentants  d'Angleterre  et  de  Hollande,  l'archevêque 
de  Cantorbéry,  les  t  très-grands  et  magnifiques  seigneurs,  séna- 
teurs, docteurs,  ministres,  etc.,  de  la  république  de  Genève  ^.  > 

*  Note  du  R-  P.  Samut,  S.  J.  recteur  du  collège  de  Sle-Pulchérie. 

*  /'/.  97. 

»  Hammer.  loc.  laud.  VIII,  106. 
'  Carayon,  ioff.  laud.  62. 

*  P.  204.  Voir  aussi  le'rapport  du  baile  vénitien,  cité  parHammer.VIII,344. 
s  On  a  vu,  par  les  jodrnaux  de  Turquie,  dans  la  première  moitïi!  lie  1870, 

l'accueil  fait  par  le  patriarche  grec  à  un  archevêque  de  son  rit,  revenant  de 
Londres,  et  lui  transmettant  les  sentiments  favorables  du  clergé  anglican 
pour  une  union  avec  l'Église  grecque.  Antérieurement,  le  patriarche  grec  avait 
autorisé,  [lar  mandement,  l'Inhuniation,  au  besoin,  des  anglicans  dans  les 
ciroetiéreB  orthodoxes.  (Impartinl  du  28  février  1870.)  Dans  le  courant 
d'avril  1874;  uns  dépulation,  composée  de  quatre  Vieux-Catholiques,  est 
venue  présenter  au  patriarche  grec  de  CP.  une  lettre  de  Dollinger,  l'invitant 


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Pais,  seloD  le  rapport  de  Hammer  ',  t  Harlay,  excité  par  les 
Jésiiites,provoqua  la  déposition  du  patriarche  Cyrille,  qu'on  accu- 
sait, non  sans  quelque  raison,  d'être  calviniste.  »  Déposé  le  1" 
avril  1 623,  les  grecs  offrirent  50,000  écus  pour  qu'on  leur  rendit 
leur  patriarche  ;  l'ambassadeur  de  France  appuj'a  les  prétentions 
des  Jésuites,  cettx  d'Angleterre  et  de  Venise  les  demandes 
des  Grecs ''sde  part  et  d'autre,  les  passions  étaient  surexcitées  ; 
et  l'on  ne  peut  s'empêcher  de  penser  que  l'hostilité  jnanifestée 
contre  les  Pères  avait  pour  principal  mobile  des  rivalités  essen- 
tiellement politiques,  venant  en  aide  aux  dissentiments  reli- 
gieux; —  les  rapports  vénitiens,  et  les  actes  du  baile  Nani, 
<  homme  distingué,  dit  Hammer,  mais  adversaire  ardent  des 
Jésuites,  >  semblent  établir  ce  fait  ^, 

Cyrille  Lucaris*,  qui  avait  déjà  administré  le  siège  de  CP, 
pendant  denx  années,  ambitionnait  encore  la  dignité  patriar- 
cale, il  fit  un  accord  avec  le  résident  hollandais,  par  lequel 
celui-ci  devait  lui  fournir  les  moyens  pécuniaires  de  parvenir 
à  ses  ans  ;  en  retour,  il  promettait,  en  cas  de  succès,  d'en- 
voyer en  Hollande  un  certain  nombre  de  jeunes  gens  pour  y 
être  instruits  dans  le  Calvinisme.  On  fit  venir  de  la  Hollande 
des  caractères  avec  lesquels  on   imprima  le  catéchisme    de 

à  envoyer  au  congrès  qui  devait  se  tenir  à  [Jonn  trois  docteurs  en  théologie, 
alîn  de  discuter  l'union  des  dilTerentes  églises  protestantes  et  grecques- 
orientales.  l'Eglise  de  CP,  étant  reconnue  par  les  Vieui-Catholiques  comme 
ayant  conservé  le  véritable  dépdt  de  la  Foi  1  invitation  parait  avoir  été  ac- 
ceptés. (Leeartt-Hi'rali.)  Le  Slamhiid  du  21i  octobre  1875  contient  une  lettre 
d'un  anglais  qui  s'est  fait  ordonner  prêtre  de  l'Eglise  orthodoxe,  et  qui  a 
Tonde  une  église  orientale  à  Car  JilT  en  \ngletcrre. 

■  to<;.  tawK  VIII.  344. 

»  Hammer.  VIII,  345. 

«  Hammer,  VIII,  220,  année  1G1G  ;  221-323  ;  X,  31.  Les  Vénitiens  étaient 
alliés  de  la  France,  mais  adversaires  déclarés  de  la  Compagnie,  depuis  son 
expulsion  du  territoire  de  la  République,  en  1600.  (Carayon,  loc.  tawL,  93.) 

*  Cyrille  Lucaris  fut  élevé  au  siège  patriarcal  de  CP.  le  5  novembre  1622  ; 
déposé,  en  1624,  par  les  évèques  réunis  en  concile,  scandalisés  de  sa  doctrine 
protestante  sur  l'Eucharistie,  il  fut  réintégré  par  les  soins  du  Ministre  de 
Hollande,  en  lG2â  ;  chassé  et  exilé  en  1G31,  il  remonta  pour  la  troisième  fois 
sur  son  siège  en  1635  ;  chassé  do  nouveau  au  bout  de  quatorze  mois,  Il  en 
reprit  possession  pour  la  quatrième  fois  en  1G3G;  l'année  suivante  il  fut 
exilé  A  Rhodes  ;  en  1637,  il  parvint  â.  se  faire  replacer  pour  la  cinquième  fois 
sur  le  siège  de  CP.  ;  mais  cette  fois  encore,  à  cause  de  -ses  doctrines  ca!- 
vinistes.il  fut  de  nouveau  déposé  en  1638,exilé  sur  les  bords  du  Ponl^Kuxia  : 
il  fui  étranglé  eu  route  et  enterré  en  terre  \  rofane. 


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—  254  — 

Calvin,  traduit  en  grec.  Informé  de  ces  fuits,  M.  de  Césy  en  ins- 
truisit le  grand  vizir  et  le  mufti  ;  l'imprimerie  fut  saisie  et  trans- 
portée chez  le  Caïmacara. 

t  Les  ambassadeurs  protestants,  appuyés,  dit-on,  par  le  re- 
présentant de  Venise,  se  mirent  en  mouvement,  et  les  Pères 
Jésuites  ayant  été  accusés  d'être  les  auteurs  de  cette  confisca- 
tion, furent  envoyés  sous  bonne  escorte  à  Chio  ;  mais  Césy 
obtint  leuc  rappel  et  de  plus,  assisté  du  mufti,  un  firman 
(juillet  1637)  enjoignant  à  tous  les  ofliciers  de  les  laisser  occuper 
paisiblement  leur  église  de  St-Benoît,  autant  qu'ils  voudraient, 
pourvu  qu'ils  fussent  Français  et  non  d'une  autre  nation.  > 

En  1628,  de  nouvelles  tentatives  ayant  été  faîtes  pour  la  réu- 
nion des  deux  églises,  des  désordres  se  reproduisirent  :  les 
jésuites  reçurent  l'ordre  de  quitter  Constautinople  et  de  s'em- 
barquer immédiatement;  et  quels  qu'eussent  été  les  efforts  de 
Philippe  de  Harlay,  ils  auraient  été  expulsés'. 

En  effet  c  au  mois  de  juin  1628,  le  Woivode  de  Galata,  par 
ordre  du  Vizir,  se  saisit  des  Jésuites,  et  non  seulement  de  leurs 
personnes,  mais  aussi  de  tous  leurs  ornements,  livres  et  escrip- 
tures,  qu'il  trouva  dans  leur  couvent  de  St-Benoit;  et  ensuite 
les  mena  au  caïmacan  de  CP.  Regeb-pacha  ;  Mr.  l'ambassadeur, 
comte  de  Gézy,  voulant  défendre  les  RR.  PP.  de  l'avanie  qu'on 
leur  avait  faite,  afin  que  le  Grand-Seigneur  les  fit  chasser  de 
CP.,  y  passa  pour  aller  trouver  le  caïmacan  et  lui  faire  entendre 
raison  :  la  négociation  fut  longue  et  coûU,  en  cadeaux  , 
1905  piastres,  t  On  lit  plus  loin  dans  les  mêmes  archives  :  i  le 
comte  de  Césy  s'était  retiré  h.  cette  époque  à  Buiukdéré,  à  cause 
de  la  peste,  et  le  P.  Martin  (mort  de  peste  en  1662)  etle  P.  d'Au- 
truy  Jésuites,  avec  lui,  qui  n'avaient  point  été  pris,  ni  chas.sés 
par  le  grand  vizir,  comme  avaient  été  tous  leurs  autres  Pères 
et  Frères,  logés  dans  la  maison  de  St-Benoit,  dès  le  mois  de 
février,  pour  une  certaine  avanie  qui  leur  fut  faite  à  l'occa- 
sion des  Hollandais.  Le  dit  Sieur  ambassadeur  ayant  obtenu 
avec  une  dépense  de  9000  piastres  et  plus,  permission  de  réta- 
blir les  dits  Pères  Jésuites  à  St-Benoit,  ils  y  retournèrent  le 
14  juillet  1628.  >  Toutefois,  les  instructions  de  Louis  XIU  à 
son  ambassadeur,  Marcbeville,  envoyé  en  Levant  en  1631,  sem- 

'  Hammer,  lor.  laii  L,  IX,  112. 


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—  355  — 

blent  attester  qae  l'expulsion  n'eut  pas  lieu  complètement  :  «  H 
(l'ambassadeur)  maiiitiendra,di8ent-elle3,  les  religieux  en  la  pos- 
session de  leurs  établissements...  il  n'y  en  a  point  parmi  eux 
qui  ayent  souffert  plus  souvent  que  les  pères  jésuites,  lesquels 
ont  encore,  depuis  un  an,  esté  menacés  d'estre  bannis  de  Cona- 
tantinople,  et  n'cjnt  échappé  à  cela  que  par  la  dextérité  et  dili- 
gence du  comte  de  Gésy  '.  > 

En  1634,  la  mission  comptait  seulement  quatre  Pères  et  deux 
Frères,  et  à  la  suite  du  retour  de  Syrie  du  Capitan-pacha,  oà 
il  avait  été  soumettre  ie  <  prince  de  Séyde,  >  et  qui  avait  fait 
esclaves  plusieurs  français  et  cinq  Capucins  ;  l'ambassadeur 
s'employa  activement  de  leur  délivrance.  Au  même  temps  le 
Bostandji-bachi  et  le  cadileskier  parcoururent  la  ville,  accom- 
pagnés de  scribes,  fouillant  les  maisons,  en  pillant  quelques- 
unes  :  ils  firent  de  même  chez  les  religieux,  et  les  mêmes  per- 
quisitions earent  lieu  à  St-Benoit,  dans  la  maison,  l'ofHce,  l'église 
et  la  sacristie'. 

<  L'année  suivante,  le  24  janvier,  >  toutes  les  églises  latines 
furent  mises  sous  scellé,  et  le  lendemain,  à  une  heure  et  demie, 
un  notaire  vint  mettre  le  sceau  à  l'église  des  Pères  Jésuites... 
Les  maisons  des  marchands  européens  furent  l'objet  de  perqui- 
sitions, leurs  armes  de  toute  sorte  furent  saisies  et  transportées 
au  sérail  là  oCi  l'on  déposait  les  trophées  pris  sur  les  ennemis 
en  campagne.  > 

«  Les  églises  restaient  fermées,  et  comme  on  ne  pouvait  comp- 
ter sur  le  crédit  des  représentants  étrangers  pour  les  faire  rou- 
vrir, les  habitants  de  Galata  agirent  directement  en  s' appuyant 
sur  les  capitulations  accordées  lorsqu'ils  s'étaient  rcndtis  li- 
brement à  sultan  Mehemmed  II.Après  un  don  de  4000  piastres, 
remis  en  secret,  ces  églises  furent  rouvertes  le  36  janvier, 
ee  qu'on  n'espérait  pas,    car   on  savait   qu'un  des  maures-'* 

'  Carayon,  lor.  laud..  168.  C'est  vers  cette  période,  aous  le  régne  de  Mu- 
rad  IV,  que  fut  perdue,  à  Constantinople,  l'êgliae  St->'icoliis,  protégée  par  la 
France  ;  ces  circonstancea  ne  furent  peut-Atre  pas  étrangères  à  cet  événe- 
ment; Sle-Marie  de  Conslantinople,  bous  protertion  Bi'nitiennc,  fut  perdue 
aussi,  quelques  années  après,  sous  !e  régne  du  même  prince. 

'  .archives  de  l'ambassade  de  France. 

'  Du  Verdier,  loc.  laud.  I,  3.19,  rapporte  que  x  les  maures  de  Grenade  m 
réfueiérenl  en  Turquie,  et  principalement  à  Péra,  où  ils  furent  si  bien  ac- 
cueillis que  l'un  d'eux  fut  fait  Ca-ly  de  la  ville,  ce  qui  releva  le  courage  des 


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—  256  — 

appelés  ici  Orenatois,  (parce  qu'ils  viennent  du  royaume  de 
Grenade),  avait  promis  20,000  piastres  si  on  lui  promettait  de 
faire  de  l'éirlise  de  St-François  une  mosquée.  On  craignait  la 
même  chose  pour  l'église  des  Jésuites,  dédiée  à  la  Ste  Vierge 
et  à  St  Benoit.  Le  procureur  de  celle-ci  fut  menacé  de  la  pen- 
daison s'il  ne  produisait  pas  le  firmaii  autorisant  la  bâtisse  d'une 
certaine  galerie.  Ce  document  ayant  été  exhibé,  il  fut  délivré.  » 

<  Grâce  au  zèle  de  J.  B.  Salvaio  ',  drogman  de  Venise,  l'é- 
giise  de  St-Benoit  fut  la  première  rouverte  ;  ce  dernier  ayant  été 
cette  année,  fait  prieur,  selon  l'usage,  afin  qu'il  s'employât  au 
soin  et  à  la  régie  de  toutes  les  églises  de  Galata  :  il  mit  en 
gage  tous  les  bijouz  et  joyaux  de  sa  femme  pour  payer  la 
somme  demandée  par  le  capitan-pacha,  pour  la  restitution  de 
ces  églises  ;  ensuite  cette  somme  ne  pouvant  se  rendre,  les  Mes- 
sieurs de  Galata  jugèrent  à  propos  de  vendre  quelques  mat- 
sorts  dont  le  revenu  était  employé  à  la  réparation  des  églises. 
C'est  à  cette  occasion  qu'une  des  maisons  de  St-Benoit  fut  ven- 
due, ainsi  que  toute  l'argenterie  des  églises,-  la  République 
de  Venise  donna  1,000  piastres  ".  » 

Malgré  tous  ces  troubles,  les  Pères  ne  continuaient  pas  moins 
les  exercices  de  la  mission,  leurs  prédications  en  grec,  en  italien 
et  en  français,  le  catéchisme  sur  les  navires,  l'école,  etc. 

Dans  cette  même  année  1635,  l'ordinaire  permit  l'accomplis- 
sement du  devoir  pascal  dans  St-Benoit^  ;  mais  par  décrets  de 
1647  et  4651,  la  S,  Congrégation  interdit  aux  Jésuites  de  s'in- 
gérer dans  l'exercice  des  fonctions  curiales,  sauf  permission  de 
l'ordinaire  et  des  curés  compétents. 

En  1637,  année  de  la  mort  de  leur  ancien  adversaire,  le  pa- 
triarche Cyrille,  le  siège  patriarcal  fut  occupé  par  Carfila,  ou 

autres  ;  ils  entreprirent  de  chasser  les  juifs  de  ce  lieu-!à  et  de  mettre  à  bas  - 
toutes  les  Synagogues...  Grâce  au  Cad_v,ils  exécutèrent  leur  entreprise  ;  ils 
eussent  agi  da  même  envers  les  chrétiens,  ai  M.  do  Sancy,  ambassadeur  de 
France,  par  son  crédit  auprès  du  grand  vizir,  qu'il  rendit  leur  protecteur,  en 
menaçant  de  les  faire  périr  eux-mâmes  s'ils  attentaient  encore  quelque  chose 
contre  eux,  en  quelque  façon  que  ce  fut.  » 

'  V.  St  Paul,  le  texte  d'une  inscription  tombale  portant  ce  même  nom. 

'  Annalei  de  la  Résidence,  etc. 

'  Cette  faculté  existe  encore  aujourd'hui,  mais  seulement  pour  les  per- 
sonnes habitant  l'encloB  St-Benoit  ;  pour  celles-ci,  cette  église  est  regardée 
comme  paroisse. 


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—  257  — 

mieux  Cyrille  de  Berée,  au  contraire,  protecteur  déclaré  des 
jésuites'. 

En  décembre  1640,  l'allocatiou  annuelle  attribuée  par  la  Co- 
munità  à  St-Benoit,  fut  réduite,  à  raison  de  la  diminution  des 
ressources,  à  6,000  aspres  -. 

En  1653,  les  revenus  annuels  de  cette  église  étant  de  26,000 
aspres  par  an,  sur  lesquell^  on  ne  loi  en  allouait  que  8,000,  le 
supérieur  demanda  que  ce  cbiffre  fût  porté  an  double,  à  partir 
de  ladite  année,  à  titre  de  frais  de  nourriture  et  de  vêtement  des 
pères,  de  cire  et  d'huile  pour  l'église;  cette  demande  fut  agréée; 
pui3,toute  allocation  fut  retirée  durant  trois  années^.  (Les  biens 
de  l'église  étalent  alors  administrés  par  des  procureurs  nommés 
par  la  Comunità  qui  en  retenaient,  comme  on  voit,  la  plus 
grande  partie.) 

Le  patriarcbe  d'Antioche,  déjà  cité,  nous  donne,  de  St-Beuoit, 
Ja  description  suivante  :  «  Proni  this  ve  passed  by  to  a  very 
large  church,  wicb  was  one  of  tbe  most  magnificënt  churches 
belunging  to  the  orthodox  religion,  in  tbe  grecian  empire,  and 
is  a  présent  in  the  bands  of  Frank  jesuits.  It  is  very  ancient  and 
lofty  and  is  paincted  ail  over,  in  mosaic,-  with  the  festival  of 
our  Lord,  explalned  in  greek  characters.  Tbe  belfry  (beffroi)  la 
high,  and  of  ancient  structure^,  t 

Le  16avrill660,  toutes  leséglises  latines  de  Galata,  St-Fran- 
çois,  Ste- Anne,  St-Sébastien,  Ste-Marie,  St-George8,et  St-Pierrc, 
devinrent  la  proie  des  flammes;  St-Benoit  seul,  d'après  les  ar- 
chives des  Capucins,  échappa  au  feu  ;  mais,  dans  le  tumulte, 
cette  église  fut  pillée.  La  Confrérie  de  Ste-Anne  s'y  établit  pro- 
visoirement ;  elle  y  fit  comme  d'usage,  la  procession  de  Pâques, 
deux  heures  avant  le  jour  ;  a:  on  porte  à  cette  procession,  disent 
les  Annales,  une  résurrection  avec  beaucoup  de  bannières  et 
de  torches....  la  messe  se  chante  ensuite,  i 

Selon   une  version  de  l'incendie,  rapportée  dans  Annales  de 

'  Hammer.  IX,  30G.  d'apris  Kycaut  et  Sagredo. 

>  Aqlctuf.  Cf.  no»  EagaU  lar  VhUtoire  dconomigue  de  la  Targuie,  p.  31  et  suiv, 

"  Carayon,  loe.  laud.,  97-103. 

»  The  TraceU  of  Maeariiig  pniriarch  of  Antlorhe.  London,  183G,  p.  27. 
Traduit  de  l'arabe  par  le  fils  de  l'autear,  l'archidiacre  Paul,  et  publié  aux 
frai»  du  Comilé  de»  Iraduetiom.  Cette  description  se  rapproche  beaucoup 
de  celte  du  P.  de  CaDiltac,  rapportée  plus  haut. 

17 


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—  358  — 

la  résidence,  t  tout  fut  brûlé,  >  (peut-être  toute  l'habitation  de» 
Pères)  ;  une  autre  relation  qui  vient  immédiatement  après  celle- 
ci,  dit  au  contraire  que  i  l'égliseavec  les  deux  galeries  latérales, 
ainsi  que  la  chapelle  de  N.-D-,  la  sacristie  et  ses  dépendances, 
échappèrent  au  feu  ;  sauf  quelques  dégâts  s' élevant  à  une  valeur 
de  plus  de  500  piastres  ;  et  que  cinq  ou  six  petites  maisons 
appartenant  à  la  mission  furent  brûlées.  *  Cette  version  con- 
cordant seule  avec  les  témoignages  rapportés  ailleurs  parait 
plus  véridique.  Plus  loin  on  lit  encore  daus  les  mêmes  Annales, 
'  d'après  un  manuscrit  de  1663  :  «  Notre  église  à  présent  est  la 
seule  du  rite  latin  les  six  autres  ayant  été  brûlées  dans  l'in- 
ceodie  de  1660.  Aussi  reçoit-elle  un  grand  concours  de  lidèles.i 

St-Benoit  se  trouvant  ainsi  la  seule  église  latine  laissée  de- 
bout, c'est  là  que  Mgr  Ridolfi,  après  sa  nomination  comme  suf- 
fra^ant  de  CP.,  prit  possession  de  son  autorité  ;  c'est  peut-être 
aussi  pour  ce  motif  que  les  Jésuites,  par  l'entremise  de  M.  de 
Roboly,  chargé  d'affaires  de  France,  sollicitèrent,  en  1663, 
l'érection  de  leur  église  en  paroisse.  Cette  demande  ne  fut  pas 
agréée.  Toutefois  c'est  probablement  pour  la  même  raiso»  qu'en 
166Î,  à  la  demande  de  la  Comunilà,  la  fête  de  St  Benoit  fut 
déclarée  fête  de  précepte,  par  ce  suffragant  patriarcal,  Mgr  Ri- 
dolfi. 

Il  était  question  alors,  en  1662,  disent  encore  les  Annales, 
d'établir  une  école  pour  les  Grecs  k  CP.,  près  du  patriarcat 
grec  :  la  maison  où  elle  devait  être  établie  se  trouvait,  en  même 
temps  proche  du  résident  de  l'empereur,  (habitant  à  Balata, 
comme  on  l'a  vu)  dans  la  chapelle  duquel  on  aurait  pu  aller 
tous  les  jours  dire  la  messe  ou  chez  le  résident  de  Raguse,  qui 
n'est  pas  éloigné  du  patriarcat. 

Pour  l'année  1664,  le  P.  Sauger  fait,  comme  suit,  le  rapport 
des  travaux  de  la  mission  :  «  Tous  les  dimanches  de  l'avent  et 
du  caresme,  on  a  preschè  en  françois;  nous  faisons  le  caté- 
chisme aux  marins,  à  nos  barques  et  vaisseaux  allant  et  venant 
en  France;  nous  allons  tous  les  dimanches  au  grand  bagne  du 
grand  seigneur  qui  renferme  deux  mille  esclaves  de  toutes  na- 
tions, et  particulièrement  des  françois'.  Nous  y  allons  prescher,  . 

'  l.ep  esdaveR  sont  l'objet  de  stipulations  parliculiéres  dans  les  capitula- 
tions françaises  de  1535,  1559,  1581,  1604,  1«T3,  ViO.  (Voyez  nos  CapUtda- 
tii;/i«  rt  rrniti'f  de  la  Francien  Orient.) 


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Goofessser  et  chanter  la  grande  messe'.  Nous  avons  de  plus 
pour  mission  les  Sept-Tours-,  qui  est  la  prison  des  gentils- 
hommes, capitaines  et  chevaliers  de  Malte,  pris  par  les  turcgs. 
Nous  avons  aussi  l'école,  composée  non-seulement  de  petits 
françois,  mais  encore  de  plusieurs  petits  grec»,  de  l'un  et  de 
l'autre  rit  ;  nous  avons  un  très  grand  nombre  de  grecs  frans, 
c'est-à-dire  du  rit  romain,  que  nous  instruisons,  confessons,  et 
à  qui  nous  ■ser\'on3  comme  de  curez,  pour  n'y  avoir  point 
d'autre  église  que  la  nôtre.  Nous  avons  plusieurs  grecs  qui  ont 
bien  plus  de  contiance  en  nous  qu'en  leurs  papas  ;  leurs  femmes 
ne  manquent  pas  de  venir  se  confesser  à  nous,  pour  évister  l'a- 
varice de  leurs  papas,  ù  qui  il  faut  donner  une  somme  d'argent 
toutes  les  fois.  Je  fais  la  doctrine  chrestienne  en  grec  vulgaire,  à 
tous  ces  petits  grecs  et  aux  petits  escholiers  qui  y  veulent  as- 
sister. Tous  les  vendredis  de  carême,  nous  faisons  les  exhorta- 
tions en  grec  ;  notre  R.  P.  supérieur  apreud  le  grec  littéral  à 
plusiei4,r3  papa-s,  dans  les  écoles  desquels  nous  pouvons  aller 
faire  le  catéchisme  tous  les  jours,  si  nous  le  voulons,  et  je  ne 
perds  pas  l'espoir  de  prêcher,  l'un  de  ces  jours,  dans  quelque 
grande  paroisse  de  ce  pays.  Des  prédications  en  langue  italienne 
avaient  également  lieu  presque  tous  les  dimanches.  >  Tant  de 
zèle,  couronné  d'un  pareil  succès,  devait  soulever  encore  quel- 
ques orages;  aussi,  le  15  février  IGGi,  l'habitation  des  pères 
fut-elle  envahie  de  nouveau  par  les  turcs,  qui  saisirent  l'un 
d'eux  et  le  conduisirent  chez  le  cadi  ;  il  fut  bientôt  reiachô  et 
l'affaire  en  resta  là^,  »  Pour  mettre  fin  à  ces  traca.sserics,  .M.  de 
Nointel  fit  insérer,  dans  les  capitulations  de  l(î73,  l'article  35, 
ainsi  conçu  :  t  On  n'inquiétera  pas  les  deux  ordres  de  religieux 
français,  à  savoir  ies  jésuites  et  les  capucins,  sur  les  églises 
qu'ils  tiennent  en  Galata  depuis  longtemps,  ni  sur  toutes  les 
autres  choses  qu'ils  ont  en  leur  possession*.  » 

I  Carayon,  243-232. 

'  Les  l'èras  Jégiiites  ayant  été  accusés  d'avoir  facilité  l'évasion  du  com- 
mandeur de  Hcaujean,  emprisonné  aux  S«pt-Toura,  par  l'escadre  royale  qui 
avait  amené  M.  de  Nointel  ;  il  leur  fut  interdit  de  servir  dorénavant  cette 
mission  ;  mais  comme  il  se  trouvait  là  quelques  AUamands,  depuis  la 
troisième  guerre  de  Hongrie,  le  résident  de  l'empereur  obtint  quelque  teinps 
après,  qu'un  Père  de  St  François  irait  y  dire  la  messe  aux  principales  fêtes. 

'  Carayon.  foc.  lau-I.,  103.  —  '  Cf.  Hammer,  XT,  SU.  Cette  même  dispo- 
sition a  étâ  reproduite  dans  les  capitulations  de  1740. 


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_  260  — 

En  1666,  sous  la  supériorité  du  P.  Nicolas  Vabois',  il  s'é- 
leva, disent  les  Annales,  des  difficultés  avec  les  Messieurs  de 
Péra  ;  ceux-ci  croyant  avoir  droit  sur  l'église  de  St-Benoit  et 
les  biens  qui  y  sont  attachés,  et  cela  en  vertu  de  leurs  capitula- 
tions avec  les  Turcs,  et  que  les  Pères  en  conséquence  sont  leurs 
chapelains  ou  vicaires.  L'évèque  de  Calamine,  Vicaire  aposto- 
lique, [MgrRidolfi,  1662-1677),  lit  porterie  procèsà  la  S.  Con- 
grégation qui,  après  plusieurs  années  de  discussion,  condamna 
les  Messieurs  de  Pêra  "•.  » 

St-François  n'étant  point  encore  rebâti  la  procession  de  la 
Fête-Dieu  eut  lieu  le  5  juin  1669,  à  St-Benoit  ;  le  P.  Vignau 
était  alors  supérieur.  M.  de  la  Haye,  ambassadeur  de  France,  as- 
sista ofTicielIement  à  la  cérémonie.  M.  de  Nointel,  assista  égale- 
ment, le  31  juillet,  1671,  dans  la  même  église,  à  la  messe  solen- 
nelle célébrée  pour  la  St  Ignace,  par  le  Vicaire  patriarcal, 
suffragant,  II  y  vint  aussi  le  jour  do  St  Louis,  quoiqu'il  fût  en 
campagne,  pour  assister,  avec  la  Nation,  à  l'Exaudiat  chanté 
pour  le  roi. 

Les  Annales  rappellent  également  que  les  Jésuites  prêchèrent 
le  jubilé  de  1670,  c  chez  eux  et  au  bagne  ;  et  qu'ils  allèrent  prê- 
cher le  carême  dans  l'église  grecque  de  S.  Dimitry,  à  nne  de- 
mi-lieue d'ici   » 

En  vue  sans  doute  de  faciliter  dans  leurs  relations  locales, 
l'exercice  de  leur  ministère,  les  Jésuites  avaient  adopté  le  cos- 
tume du  pays,  mais  la  S.  Congrégation  de  la  Propagande  leur 
prescrivit,  le  5  décembre  1673,  d'atiandonner  le  Coîpaq,  et  de 
le  remplacer  par  le  chapeau  ecclésiastique  ;  un  peu  plus  tard, 
le  3  décembre  1674,  il  leur  fut  également  enjoint  de  quitter  le 
férédjé  ou  bénich  et  de  reprendre  le  mantello. 

En  mai  1674,  *  le  roi  très  chrétien  leur  conféra  le  titre  de 
chapelains  royaux  et  consulaires.  Ce  titre,  ou  mieux,  la 
qualité  de  chapelains  des  Français  en  Levant,  leur  fut  con- 
firmé par  édit  de  Gateau-Cambrésis,  le  17  mai  1675,  sans  toute- 
fois porter  atteinte  aux  droits  anciens  des  Capucins,  comme 

'  Le  P.  Vabois  fut  d'abord  supérieur  à  Smyrne  (rapport  du  P.  Boiléve, 
daté  de  Smyrne  le  24  août  1657),  il  mourut  à  CP.  en  1686  ;  son  nom  figure 
sur  la  pierre  affectée  aux  Pères  victimes  de  la  peste.  (V.  ei-apràs,  le 
St-Esprit). 

1  Arcb.  de  l'ambassade  et  de  la  Réaiden>:e  de  St-Benoit. 


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chapelains  de  l'ambassade  et  des  chapelles  consulaires.  Après 
de  longues  discussions,  il  fut  reconnu  que  ce  titre,  sans  donner 
aux  PP.  Jésuites  des  attributions  réelles,  avait  pour  but  surtout 
de  leur  conférer  plus  de  coosidératioQ  dans  le  pays,  et  par  suite 
une  protection  plus  assurée'. 

Le  P.  Nicolas  de  Ste-Geneviève,  qui  en  1665,  fut  laissé  à 
CP.  par  Mgr  Ridolfl,  en  qualité  de  provicaire,  mourut  de  peste, 
en  1680,  âgé  de  84  ans.  «  L'èvêque  latin  présida  à  ses  obsèques 
auxquelles  assistèrent  les  cours  des  ambassadeurs  de  France,  de 
l'Empire  et  de  Gennes  ;  il  avait  passé  plus  de  vingt-huit  ans 
h  CP.  et  avait  dirigé  la  Congrégation  de  N.-D.,  à  laquelle  les 
principaux  de  la  Nation  se  font  un  honneur  d'appartenir  ;  enfin 
il  avait. rédigé  pour  les  nouveaux  missionnaires  un  Lexicon 
grec  vulgaire,  d'un  très  grand  usa^e  pour  apprendre  cette 
langue".  > 

Les  Annales  de  laRésidence  mentionnentcommeil  suit  «l'in- 
cendie de  notre  église,  et  son  rétablissement  avec  une  voAte  :  > 
c  L'année  1686,  arriva  l'incendie  de  notre  église,  lequel  fut 
causé  par  un  cierge  que  le  sacristain  avait  laissé  allumé  sur 
un  autel  en  fermant  l'église.  Le  P.  Besnier,  par  ses  relations 
personnelles  avec  le  mufty,  contribua  beaucoup  à  obtenir  la 
reconstruction  de  cette  église,  surtout  il  obtint  la  permis- 
sion de  la  voftter  et  de  la  couvrir  en  plomb,' ce  qui  est  un  pri- 
vilège de  mosquée  :  on  dit  aussi  que  ce  mufty  fit  présent  au 
P.  Besnier  des  colonnes  de  marbre  qui  font  le  vestibule  de 
l'église.  I 

Si  l'influence  du  P.  Beroier  sur  le  mufty  fut  utile  pour  obte- 
nir l'autorisation  de  reconstruire  l'église  de  St-Benoit,  il  fallut 
cependant  l'intervention  active  de  l'ambassadeur,  M.  de  Girar- 
din  pour  en  obtenir  le  firman.  De  plus  il  contribua  largement 
aux  dépenses  comme  l'indique  l'inscription  ci-après,  encore 
existante,  et  placée  au-dessus  de  la  grand'porte  d'entrée  de 
l'église  : 


•  p.  Barbieri.  li^.  laul.  Le  P.  Rocco,  dans  Utoria  'telle mlààloni  lUi  Cap- 
pucini  III,  rsô.  rapport*  presque  en  entier,  la  version  italienne  du  ce  do- 


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Ad  M.VJOREH  DeI  OI^RIAM.  S.  BENEDICn  patroni  gloriosi  pris- 

TINUM  DECOS  ATQUE  lUMORT^LEM  HONOREM  TEMPLUM  HOC  RESTAU- 
RATUM  FUIT  ASNO  DnI  1687. 

LuDOvra  Magni  FEUCIBUS  AUSPICIIS  AC  REGIA  MONIFIGENTIA. 

Sur  un  des  piliers  de  l'église,  il  y  a  un  marbre  avec  une  autre 
inscription,  touchant  cet  incendie.  Ce  marbre  est  caché  parle 
tableau  deStJoseph,plaeé  par  le  P.  Monfort;  voici  l'inscription: 

Petrds  Girardinl's,  Ludovigi  magni  ad  portam  ottomanam 

SUPREMi:S  ORATOR,  GmJJCO  NOMINl  NON  IMPAR,  SE  QIIIS  ESSET  TN 
POSTERUM  VEL  AU  IGNE  METUS,  DEXTERITATE  INSATA,  INFRACTOQUE 
ANIMO,  EXPRFSSO  AB  OSMANIS  EDICTO  REGIO,  INSTAURATOM,  ARCUATO 
OPERE  TEMl'LUM  HOC  STI  BEXEDICTI,  REGIA  LUDOVICI  MAONI  AU- 
CTORITATE    AC     MONIFIGENTIA    ^ETERNITATI    CONSECRAVIT.     ANNO    DNI 

MDCLxxxvir,  LEGATioNis  ir. 

A  cette  date  les  missionnaires  Jésuites  de  CP.  étaient  an 
nombre  de  six. 

Neuf  ans  plus  tard,  en  1696,  St-Benoit  fut  encore  détruit  par 
l'incendie  qui  embrasa  presque  tout  Galata;  il  fut  relevé,  l'an- 
née suivante,  par  la  libéralité  de  la  chambre  de  commerce  de 
Marseille,  sous  les  auspices  du  Grand  Roi,  comme  le  constate 
cette  autre  inscription,  qu'on  lit  encore  aujourd'hui,  sous  le 
porche  de  l'église,  à  gauche  de  la  grand'porte  d'entrée  : 

Ad  perpetoam  Rei  memoriam  LuDovmt  magni  nomine  rem  ga- 

THOLICVM  OCTAVUM  JAM  AMXOM  APIID  OtHOMANOS  PROCURANTE  PeTHO 

Antonio  a  Castagnere  barone  a  Chateauneuf,  parisiensis  cubi*: 

SENATORE  TEMPLUM  HOC   IMMANI  VaSTaTUM  INCENDIO  QUO  TOTA  PROPE 

UHBS  Galata  m  non.  mai.  MDCXCVIcoNPLAaRAviTMASsiLiENSiUM 

MERGATORIJM  MONIFIGENTIA  '  ANNO  PROXIME  SEQUENTI  INSTAUHATDM 
EST  AD  MAT,  DeI  GLORIAM. 

I  «  Messieurs  de  la  chambre  royale  ilu  commerce  de  Marseille  •  avaient 
fait  égaloment  rebâtir,  en  l&tô,  l'église  de  St-Louis,  à  ^myrne.  (Carayon,  loc. 


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Le  Père  Braconnier,  témoin  oculaire,  fait  sur  ce  troisième 
Incendie  de  St-Beuolt,  le  rapport  suivant,  {Annales  de  la  Ré- 
sidence.) t  Dans  la  nuit  du  4  au  5  ma!  1696,  le  feu  ayant  pris 
sur  les  onze  heures  du  soir,  dans  une  boutique  du  faubourg  de 
Top-hana,  les  boutiques  voisines  forent  bientdt  entièrement 
consumées,  et  la  flamme  poussée  par  le  vent,  passa  par  dessus 
la  muraille  de  Galata  :  nous  n'hésitâmes  pas  k  prendre  les  me- 
sures accoutumées,  et  nous  nous  h&tames  de  mettre  eu  aflretè 
tout  ce  qui  paraissait  le  mériter  davantage.  Notre  premier 
soin  fut  de  porter  le  Saint  Sacrement  et  tous  nos  vases  sa- 
crés dans  l'un  des  deux  petits  souterrains  sous  notre  église  ; 
nous  continuâmes  toute  la  nuit  à  y  transporter  nos  papiers  les 
plus  nécessaires,  nos  ornements,  etc.  Sur  les  huit  heures  du 
matin  le  feu  ne  paraissait  pas  devoir  s'éloigner  du  rivage  de 
ta  mer  ;  mais  tout  k  coup,  le  vent  ayant  tourné  à  Test,  le  fou 
s'étendit  de  notre  côté.  A  peine  nous  resta-t-il  le  temps  de 
sauver  les  livres  de  la  bibliothèque  en  les  descendant  par  les 
fenêtres  dans  notre  grand  jardin  j  sur  les  dix  heures  du  matin, 
nous  étions  entourés  par  les  flammes  :  une  heure  après  nous 
étions  sans  maison  et  presque  sans  église.  L'ardeur  du  feu 
était  si  grande  que  nos  livres  exposés  dans  le  jardin  s'enflam- 
maient, sans  'que  nous  vissions  tomber  sur  eux  aucune  flam- 
mèche ! 

(  On  fait  état  qu'il  y  eut  6  à  'Î'OOO  maisons  ou  boutiques  con- 
sumées par  le  feu  :  puis  le  vent  ayant  tourné  vers  le  nord,  les 
flammes  furent  rejetées  vers  la  mer,  où  elles  allèrent  s'éteindre 
après  avoir  dévoré  les  deux  tiers  de  Galata.  Galata  n'avait  que 
deux  petites  portes  du  côté  de  Péra,  où  tons  les  fuyards  s'en- 
tassaient pour  échapper  au  feu. 

<  Pour  nous,  nous  flmes  tous  nos  efforts  pour  sauver  les 
restes  de  la  chapelle  de  N.-D.,  qui  sert  d'aile  droite  à  notre 
église;  nous  fûmes  assez  heureux  pour  en  conserver  une  partie, 
ce  qui  nous  a  donné  moyen  de  pouvoir  ouvrir  et  fermer  notre 
église  de  ce  côté-là,  la  porte  de  communication  qu'a  cette  cha- 
pelle avec  le  chœur  de  l'église  n'ayant  pu  brûler  parce  qu'elle  est 
en  fer.  Sans  cela  nous  n'aurions  pu  que  difficilement  continuer 
à  desservir  notre  église,  comme  nous  avons  fait,  par  la  grâce  de 
Dieu,  depuis  ce  temps-là.  Nous  y  dimes  la  messe  dès  le  lende- 
main de  l'incendie  qui  était  un  dimanche,  après  avoir  muré 


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nous-mêmes  la  grande  porte,  d'une  muraille  sèche...  et  nous 
avons  coQtinué  depuis  à  dire  la  messe,  en  nous  retirant  pen- 
dant la  nuit  dans  les  deux  petits  réduits  routés  qui  sont  sous 
l'église.  > 

c  Pour  convaincre  tout  le  monde  que  notre  église  est  encore 
en  état,  nous  y  avons  fait  les  fonctions  du  carême,  c'està-dire, 
qu'après  avoir  fait  faire  une  chaire  et  des  bancs,  par  un  me- 
nuisier français,  et  avoir  fermé  les  fenêtres  avec  de  grands  ri- 
deaux en  attendant  que  nous  puissions  le  faire  autrement,  nous 
y  avons  prêché  et  donné  la  bénédiction  du  St  Sacrement  aux 
jours  ordinaires  ;  on  peut  même  dire  que  le  concours  a  été  plus 
grand  que  de  coutume,  chacun  se  faisant  un  point  de  religion 
de  concourir  à  la  conservatioQ  d'une  église  qui  est  la  seule 
qui  reste  de  l'antiquité,  la  première  que  les  Français  ont  eue 
en  Turquie,  la  plus  belle  qu'ils  aient  actuellement  à  CP-, 
église  que  la  protection  de  nos  rois  a  tant  de  fois  conservée  au 
culte...  > 

(  Enfin  un  firman  fut  rendu.à  la  fin  deChaban,  1108=1697, 
adressé  à  Ibrahim-pacha,  caïmacam  de  CF.,  lui  ordonnant  de 
laisser  rebâtir  notre  église  dans  les  proportions  indiquées  par  le- 
dit firman.  Malgré  de  nombreuses  avanies  l'église  fut  rebtitie  en 
moins  de  deux  mois,  et  le  Caïmacam,  avec  les  principaux  offi- 
ciers de  la  ville  de  Galata,  vinrent  faire  la  visite  de  notre  nou- 
vel édifice  selon  les  termes  du  firman.» 

Cette  église  nouvelle  eut  de  beaux  jours  et  les  Pères  qui 
la  desservaient  travaillèrent  énergiquement  au  bien,  surtout  à 
la  conversion  des  Arméniens  schismatiques.  Le  Père  Taril- 
lon' donne,  de  St^Benolt,  dans  son  rapport  de  l'année  1713, 
la  description  suivante,  qui  parait  devoir  se  rapporter  à  la 
reconstruction  de  cette  église,  en  1696.  t  Notre  église,  dit  ce 
Père,  passe  pour  la  plus  belle  de  toutes  les  églises  chrétiennes  de 
la  Turquie;  les  colonnes  qui  soutiennent  son  vestibule,  la  ba- 
lustrade qui  le  termine,  et  qui  règne  le  long  de  l'escalier  y  con- 
duisant, sont  en  marbre  blanc;  le  corps  de  l'église  est  voûté, 
avec  la  coupole  et  la  couverture  en  plomb  ;  c'est  le  privilège 
des  seules  -mosquées;  la  nef  est  décorée  par  les  sépultures  de 
plusieurs  ambtasadeurs  de  France  et  celle  de  la  jeune  princesse 

1  CAotj;  dct  Lettre»  idlfianttê.  Paria,  1809;  V.  p.  S5. 


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Tékéli  ;  celle  de  la  princesse  Bagotzki,  sa  mère,  est  dans  une 
chapelle  voisine...  Nous  exerçons  tontes  les  fonctions  du  culte 
catholique,  avec  une  liberté  aussi  entière  que  si  nous  étions 
au  milieu  des  Tilles  les  plus  chrétiennes  ;  une  multitude  de  fi- 
dèles des  trois  rites  franc,  grec  et  arménien,  y  assistent  »ucces- 
sivement;  les  pt^dications  s'y  font  en  turc,  en  italien  et  en 
français  ;  les  catéchismes  en  grec  et  en  turc.  Les  hommes  oc- 
cupent la  nef  ;  les  femmes  sont  dans  une  tribune  séparée  et  en- 
tourée de  hautes  jalousies  ;  le  Père  Portier,  supérieur  de  notre 
mission,  a  établi,  pour  chaque  lundi,  deux  instructions  en  turc, 
l'une  le  matin,  pour  les  marabets,  ou  vierges  arméniennes, 
consacrées  à  Dieu,  et  qui  mènent,  chez  leurs  parents,  une  vie 
fort  retirée  et  pénitente  ;  l'autre  en  forme  de  conférence,  pour 
les  jeunes  diacres  et  sous-diacres  arméniens,  destinés  à  devenir, 
plus  tard,  prêtres,  ou  cartabieOs.  » 

II  ajoute  aussi  dans  un  mémoire  adressé  au  comte  de  Pon- 
chartrain,  secrétaire  d'État,  le  4  mars  1714  :  <  Comme  les 
Allemands  n'ont  point  d'église  à  CP.,  c'est  encore  dans  la  nôtre 
qu'ils  font  toutes  leurs  grandes  cérémonies,  mais  toujours  avec 
la  permission  expresse  des  ambassadeurs  français.  Le  comte  de 
Caprera,  un  de  leurs  ambassadeurs,  y  est  inhumé,  et  j'y  ai  vu 
faire  pendant  plusieurs  jours  les  obsèques  des  derniers  empe- 
reurs. » 

Vers  1703,  les  Jésuites  obtinrent,  du  patriarche  arménien,  la 
permission  de  prêcher,  en  langue  turque,  dans  les  églises  de  sa 
nation  ;  «  mais  le  successeur  de  ce  patriarche,  moins  favorable 
que  le  premier,  ayant  été  enlevé  par  M.  de  Ferriol  et  transpor- 
té en  France,  une  persécution  s'ensuivit;  l'arrestation  de  tous 
les  Arméniens  catholiques  fut  ordonnée  ;  bon  nombre  d'entre 
eux  furent  envoyés  au  bagne  ou  aux  galères,  plusieurs  fiirent 
condamnés  à  mort,  et  le  vartabied  Comidas  devint  le  martyr  de 
sa  f  oi  ' .  » 

Les  historiens  turcs  ont  parlé  aussi  du  mouvement  produit 
parmi  les  Arméniens  et  les  Grecs,  par  suite  des  prédications  des 

1  Cf.  Hammer,  XIII,  85,  185  et  suiv.  Lor»  de  la  pereéculion  contre  lea  ar- 
méniens-catholiques, en  18!8,  ceuX'Ci  trouvèrent  une  assistance  non  moins 
efficace  que  dans  le  passé,  auprâs  des  prâtres  lazaristes  ;  le  supérieur  d'a- 
lors aurait,  m'asBure-t-on,  fait  vendre  les  vases  sacrés  de  iit-Benolt,  pour 
venir  en  aide  aux  malheureuses  familtes  exilées, 


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Jésuites.  Rachid  rapporte', sous  la  date  1138=1725,  que  sur  les 
plaintes  des  raïas,  t  dont  la  paix  avait  été  troublée  par  les  reli- 
gieux francs,  défense  fut  faite  à  ceux-ci  de  circuler  dans  l'em- 
pire, et  de  résider  ailleurs  que  dans  les  endroits  où  se  trouve- 
raient des  consuls,  suivant  les  capitulations.  > 

On  lit  aussi  dans  le  Choix  des  Lettres  éditlantes  etc ?  t  que 
les  missionnaires  seront  chassés  de  tous  les  endroita  où  il  n'y 
aurait  pas  de  consul  de  nation  française,  i  Cet  ordre  fut  expédié 
sous  l'ambassade  du  vicomte  d'Andrezel,  qui,  par  ses  démar- 
ches, en  fit  suspendre  l'exécution. 

Les  Jésuites  avaient  fondé  une  imprimerie  à  Constantinople  ; 
et  l'un  d'eux.le  P.  Kruzinski,  traduisit  (1729)  en  langue  turque, 
pour  le  grand  vizir  Ibrahim  pacha,  l'histoire  de  la  guerre  des 
afghans  [Târikhi-Se'Uâh\ 

Malgré  les  faits  sommairement  indiqués  plus  haut,  une  sorte 
d'apaisement  s'ètant  produit,  t:  un  penchant  k  l'union,  dit  un 
document  du  temps,  se  manifesta  chez  les  Arméniens  :  en  1735, 
leur  pâque  tombant  le  même  jour  que  la  nôtre,  ces  derniers  di- 
rigèrent la  procession  qu'ils  font  en  la  ville,  de  manière  à  pas- 
ser devant  l'église  des  Jésuites  de  Galata,  et  ils  y  firent  la  même 
station  que  font  nos  missionnaires  en  passant  devant  la  leur  ^.  t 

En  1744,  une  nouvelle  persécution,  la  troisième  du  siècle, 
s'éleva  encore  contre  les  Arméniens  catholiques  ;  on  leur  défen- 
dit, sous  peine  de  la  potence  et  du  bagne,  de  fréquenter  les 
églises  latines*.  Cette  persécution  se  renouvela  aussi  en  1761  ; 
<  les  églises  des  Jésuites,  des  Capucins  et  des  Dominicains  de 
Galata,  placées  sons  protection  de  France,  furent  violées  le 
22  novembre  ;  et  plus  de  cinquante  Arméniens  qui  s'y  étaient 
réfugiés  furent  conduits  au  bagne*.  » 

'  Racbid.  VI,  SI4,  Ahmed  vefyq  afendi,  Tdrikhi  omndni.  112,  115.  I.e  Bi- 
rat  précjté(1076:^  6.^5)  stipulait  en  faveur  de  toua  les  religieux  latins  la  faculté 
de  résider  dans  tout  l'empire,  comme  aussi  il'alter  et  venir,  par  terre  ou  par 
mer,  sane  être  moleslég  par  personne. 

'  T,  V.  139,  151  etc. 

»  Des  processioDS  noeCuriiex  avaient  lieu,  à  Galata,  les  vendredi  et  samedi 
saints  ;  le  ministre  de  la  marine  pria  l'ambassade  de  France,  en  1749,  d'inter- 
dire,  dorénavant,  ces  processions  aux  Jésuites.  Itcg,  'le»  di'lib.  nnl.,  6  Jukl- 
tet  1740.  Une  procession  nocturne  se  faisait  aussi  à  Sm^me  la  jeudi-saint. 
(D'Arvieux,  Mémoire»,  \.  107.) 

*  Hammer,  XV,  90.  Le  texte  de  ce  Rrman  est  rapporté  par  Hammer,  XIV, 
118.  — */'/.,  XVI,  70. 


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—  267  — . 

Celui  âes  Jésuites  de  ce  temps-là  qai  se  distingua  le  plus  & 
CP.  fut  le  P.  Jacques  Cachod,  qui,  avec  le  nom  de  Père  des  Ar- 
méniens, eut  celui  de  Père  des  esclaves.  <  Il  y  a  huit  ou  dix 
ans  qu'il  est  presque  continuellement  occupé  aux  œuvres  de 
charité,  où  ii  y  a  le  plus  de  péril,  '  soit  dans  le  bagne,  soit  sur 
les  vaisseaux  ou  les  galères  du  Grand-Seigneur.  Les  esclaves 
qui  n'en  peuvent  sertir,  savent  l'y  introduire  par  le  moyen  de 
leurs  gardiens  turcs  avec  qui  ils  sont  d'intelligence.  L'an- 
née 1707,  que  la  peste  fut  si  furieuse  qu'elle  emporta  près  d'un 
tiers  de  CP,,  ce  Père  s'enferma  une  nuit  pour  confesser  les  ga- 
lériens à  fond  de  cale  d'un  navire  turc  et  y  passa  toute  une  nuit 
au  milieu  des  pestiférés...  Il  écrit  lui-même  :  i  de  cinquante- 
deux  esclaves  que  je  confessai  et  communiai  douze  étaient  ma- 
lades et  trois  moururent  avant  que  je  fusse  sorti.  Jugez  quel  air 
je  pouvais  respirer  dans  ce  lien  renfermé  et  sans  la  moindre 
ouverture,»..,  <  C'est  lui  qui  a  reçu  deDieu  le  talent  le  plus  rare 
pour  le  salut  delà  nation  des  Arméniens.  Dans  la  seule  année 
1712,  ce  Père  a  ramené  pri'S  de  quatre  cents  schismatiques  et 
confessé  à  lui  seul  plus  de  trois  mille  personnes.  L'année  dernière 
(1713)  le  nombre  des  schismatiques  convertis  a  presque  monté 
au  double.  Sa  maxime  est  de  paraître  peu  et  d'agir  beaucoup.  Il 
a  toujours  sous  la  main  un  nombre  de  catholiques  zélés  et  sages, 
qui  se  répandent  de  tous  côtés,  et  lui  amènent  sans  bruit  ceux 
qu'ils  ont  disposés  à  se  convertir. Plusieurs  prêtres  et  Vertabieds 
orthodoxes  servent  encore  extrêmement  h.  maintenir  la  foi.  Ils 
sont  comme  les  surveillants  de  leur  nation,  toujours  prêts  à  courir 
où  l'on  a  besoin  d'eux,  et  à  maintenir  l'ordre  dans  les  familles...  i 

C'est  encore  le  P.  Cachod  qui  inspira  à  Mékitar  et  à  d'autres 
vertabieds  de  se  réunir  en  commun,  sous  une  règle,  due  h.  lui- 
môme  au  moins  en  grande  partie,  et  il  contribua  ainsi  à  la  fon- 
dation de  la  Congrégation  des  Mékitaristes. 

Le  P.  Cachod  trouvait  encore  le  moyen  de  s'intéresser  aux 
autres  religieux  de  CP.,  c'est  ainsi  qu'en  1718,  il  peut  prêter 
une  somme  de  500  réaux  aux  PP.  Riforniati  de  Ste  -  Ma- 
rie, et  les  aider  ainsi  à  sortir  de  leurs  embarras  pécuniaires. 
It  fut  aussi  un  aide  précieux  pour  la  princesse  Tékéli  dans  les 
affaires  qu'elle  avait  à  traiter  avec  l'ambassade  française.  Il 
mourut  en  odeur  de  sainteté,  après  une  vie  remplie  de  bonnes 
œuvres  de  tout  genre.  On  l'honore  aussi  comme  Vénérable. 


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Un  autre  Jésaite  remarquable  de  ce  temps,  à  CP.,  fut  le 
P.  Braconnier.  <  Sous  la  protection  de  Louis  XIV,  il  a  main- 
tenu la  foi  parmi  les  chrétiens  de  CP.  ;  il  a  pa  même  ramener  à 
l'Église  catholique  le  fameux  comte  Eraeric  Tékély,  ce  héros 
que  le  luthéranisme  et  l'ambition  poussèrent  dans  les  rangs  de 
l'armée  ottomane.  Il  sut  si  bien  gagner  son  cœur  que  le  comte 
fit,  entre  ses  mains,  abjuration  du  luthéranisme.  Il  mourut  ca- 
tholique romain  près  de  Nicomédie,  ou  Ismidt.  Le  P.  Bracon- 
nier était  missionnaire  avant  tout  ;  mais  son  apostolat  ne  l'em- 
pêchait pas  de  cherchera  instruire  l'Europe,  tout  en  évangéiisant 
les  orientaux.  Il  détermina  la  position  de  l'antique  Philîppes, 
capitale  de  la  Macédoine  ;  et  il  établit  une  mission  ilSalonique. 
Il  prêcha  l'unité  aux  Grecs,  établit  une  maison  pour  recevoir 
ceux  qui  se  convertissaient.  La  contagion  ne  l'effrayait  pas 
plus  que  les  mauvais  traitements,  et  il  poursuivait  son  but  sans 
se  laisser  arrêter  par  aucune  considération.  Aussi  M-  de  Férioi, 
ambassadeur  de  France,  admirant  son  zèle,  redoutait  les  excès 
auxquels  il  se  laissait  entraîner,  c  s'embarrassant  peu  des  diffi- 
cultés qu'if  suscitait  aux  ambassadeurs.  »  II  mourut  en  1716, 
après  une  vie  pleine  de  travaux.  »  \Symbolœ  ad  tUustrandam 
htstorîam  Ecclesiœ  Ortentalis,  etc.  R.  P.  Nicolao  Nilles, 
966-969.) 

En  i731,!è  feu  détruisit  encore  l'église  de  St-Benoît,  comme 
celles  des  Capucins  et  des  Dominicains  ;  la  première  fut  relevée 
l'année  suivante,  comme  le  constate  une  troisième  inscription 
qu'on  voit  encore  maintenant,  à  droite  de  la  porte  d'entrée  du 


D.  0.  M.  Régnante  féliciter  Lud.  XV.  strende  adnitentë  ex- 
CELL.  DD.  March.  de  Villeneuve  extr.  ejus  legato  hoc  sacel- 

LUM  IN  NUPERA  CONFLAGRATIONE  GaLAT-E  PENITUS  COMBUSTDM  SIJIUL 
ET  REUQUA  HLJUS  RELIGIOSE  DOMDS  .EDintaA  EADEM  PESTE  IV"  GOL- 
LAPSA  TOTItlS  ET  LAXIl^  RESTITUA  SUNT  MDCCXXXII. 

Sous  son  ambassade,  M.  de  St-Priest  fit  restaurer  la  pierre 
funéraire  placée,  à  la  mémoire  de  M.  de  Salignac,  dans  la 
chapelle  Ste-Anne,  ou  mieux  de  V Annonciation  de  la  Vierge; 
la  pierre  est  sur  le  sol,  côté  de  l'épitre,  et  porte  l'inscription 
suivante  : 


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D.  0.  M.  Illus.  et  exc,  DD.  Joannes  de  Gontavt  de  Biron^ 
Buto^(I   lŒ    Salaonac,  Régis  christianiss  *  apvd  imperatorem 

OtHOMANVM  ORATORl  TVMVLVM  HVNC  SVIS  SVMPTIBVS  FAGIENDTM  CV- 
RAVIT  LvJWVinvS  CrEDOIN  BENEnaORVM  AOCEPTORVH  MEMOR.  OBOT 
NATVS  ANNOS  57  DIE  13  OCTOBRIS  ASNO  1610.  —  HOG  PIETATIS  MO- 
NfMENTVM  ANTBnELETVMINPIGNVSAMOBIS  RBNOVAHI  JVSSIT  ILL,   ET 

Exc.  DD.  Frangisgvs  Emmaxvel  de  Gvignard  de  Saint-priëst 

EQVES  NOSlLISStMVS  REGIS  GaLUARVM  AD  EAMI^H  AVLAH  IMPERATO- 
RIAM  LEGATUS  ANNO  Dxi  MDGCLXXIII. 

Daiis  la  même  chapelle,  du  côté  opposé,  sons  la  baluslrada 
se  trouvait  cette  autre  inscription,  à  demi  effacée,  dont  on  peut 
lire  seulement  les  mots  suivants  : 

Hic  A8SESVATCR  COR  MOBILE  ET  RE6IUH  EXELLUI  GaIXJARUM  LE- 
QATI  DXI  DnI  PiCON  VICOMITIS  d'AnDREZELLES...  IS  REGI  A  SECRE- 
TI3...  VIRNATUS  ADGRAN...  VARIIS  PUIWmONlIUIS...  APUD...  BELLIQUE 
PAdSQUE...  REUOIONl...  UBIQL'E...  MERITIS  CfNCTIS...  JLLUSTREM 
ANIHAM  DeO  REDOmiT. . .  A.NXO  JÎTATIS  SV£...  MDCGXXVII'^. 

A  notre  prière  et  sur  l'invitation  de  M.  le  marquis  de  Moustier, 
alors  ambassadeur  de  France  k  Gonstantinople,  et  afin  de  pré- 
server les  caractères  de  l'inscription  d'une  disparition  complète, 
MM.  les  Lazaristes  ont  fait  relever  cette  pierre,  en  1866,  et  l'ont 
fait  mettre  de  champ,  sur  la  muraille,  à  l'endroit  même  où  elle 
recouvrait  le  sol. 

Dans  cette  même  chapelle  se  trouvent  les  pierres  tombales  de 
François  Hakoezy  «  electus  Transylvanias  princeps  »  et  de  sa 
femme%  née  Frangipani'. 

'  Plusieurs  auteurs  Tont  remonter  le  titre  de  Roi  très  chrétien  à  Clovis  :  ce 
qui  est  certain,  c'est  que  depuis  I^uis  XI  il  est  devenu  la  qualifl cation 
propre  des  rois  de  France.  (Miltitï,  II, partie  2,  livre  3,  p.  4Ï5.) 

'  Les  arcbives  de  St-Loiria  permettent  de  reconstituer  le  texte  complet. 

>  La  famille  princiére  de  Rakoczy  et  sespareataleBFTangipani.ont  séjour- 
na &  llodoato  :,  une  partie  des  membres  de  la  famille  a  été  inhumée  dans 
cette  ville,  (on  vient  d'y  restaurer  leurs  monuments,  et  en  môme  temps  l'é- 
glise de  la  mission  des  Pérès  Conventuels  qui  les  contient),  une  autre  partie 
A  CampoHorio,  prAs  de  Nicomédie. 

*  Ce  dernier  nom  eat  celui  du  second  envoyé  da  François  I"  à  la  cour  de 
sultan  Suleiman.  Le  premier  eavoyé.  expédié  par  la  Reine-mérc,  ne  put  at- 
teindre le  but  da  Bon  voyage  ;  il  fut  assassiné  en  tiosnie.I.e  second,  Frangipa- 
Qi,  envoyé  par  le  roi  lui-même,  (février  1525),  fut  plus  heureux,  il  put  arri- 


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—  270  — 

Dans  la  nef  de  l'église,  au  pied  de  l'autel  de  St-Joseph,  à 
gauche  du  maltre-autel,  se  trouve  uae  pierre  funéraire,  sur  la- 
quelle on  Ut  cette  belle  et  toachaute  inscription  : 

Hic  JACET  III.  DD,  Theresia.Ill.DD.  De Talman  Cjsaris  apud 

TuftCAS  RESIDENTIS  CONJUX,   VIRTLTE,   SUAVITATË  MOBUM,  PROBITATE 

vrr*:,  modestia  supërior  omnibi's,  nl-lli  sbcunda,  inopcm  et  ga- 

PTIVOROM  NUTRIX  AG  MATER...  OBIIT,  .VNNO  DnI  MDCG VIII,  APRIL  XV, 
âTTATIS  XXX. 

Les  Pères  Jésuites  continuèrent  leur  ministère  avec  fruit, 
jusqu'au  moment  de  leur  suppression.  A  la  suite  du  Bref  de  Clé- 
ment XIV  qui  les  supprimait,  ils  durent  abandonner  leur  église, 
leur  maison  de  St-Benoit,  et  toutes  leurs  œuvres,  et  se  reti- 
rer. Ils  ne  firent  aucune  résistance,  quoique  quelques-uns  res- 
tassent dans  le  pays  (10  août,  1773  .  M.  de  Saint-Priest,  à  qui 
revenait,  en  sa  qualité  d'ambassadeur  de  France,  le  soin  de 
veiller  sur  un  étalïUssement  national,  nomma  M.  Ruflin,  consul 
général,  administrateur  et  économe  des  biens  de  l'église  de  St^ 
Benoit;  il  ordonna  au  supérieur  de  lui  consigner  tous  les  titres 
et  papiers  relatifs  à  la  propriété  dudit  établissement,  et  défendit 
à  quiconque  de  troubler  M.  Ruflin  dans  l'exercice  de  sa  charge. 

Mais  comme  l'aml»assadeur  et  le  Vicaire  patriarcal  Mgr  Baves- 
trelli  étaient  l'un  et  l'autre  élèves  des  Jésuites  et  très  affection- 
nés à  leurs  anciens  maîtres',  ils  s'entendirent  pour  adoucir  le 
coup  qui  leur  était  porté  ;  on  se  contenta  de  leur  signifier  le  dé- 
cret de  suppression,  de  proclamer  leur  sécularisation,  puis  on 
permit  à  ceux  qui  le  voulurent  de  rester  à  St-Benoît,  comme 
prêtres  séculiers,  pour  desservir  l'église. 

Dix  ans  plus  tard  elle  passait  à  la  Congrégation  des  prêtres 
de  la  Mission,  dits  Lazaristes,  qui  la  desservent  encore  aujour- 
d'hui i  mais,  comme  souvenir  des  temps  anciens,  elle  est  encore 
souvent  désignée,  même  de  nos  jours,  sous  le  nom  de  DjizoU- 
hêliçacy,  i  église  des  Jésuites,  n 

Nous  verrons,  dans  la  troisième  partie  de  ce  travail,  son  his- 
toire sous  cette  nouvelle  administration. 

ver  jusqu'à  CP,,  et  en  rapporta  une  letire  conçue  dans  les  termes  les  plus 
amicaux,  (mi-février,  l')2(l).  On  peut  consîdciror  ce  document  comme  1h  pre- 
mier acte  des  négocfalîons,  siiivies  depuis  entre  la  France  et  la  Turquie.) 
>  Archives  de  Ste- Marie,  à  cette  année. 


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CHAPrrRE  VI. 


.'*     MARIE    DRiPÊRIS    (ANCIENNE    ET      NOUVELLE).     —     LES     FRÈRES 

MINEURS   DE  l'oBSERVANCE.  LES  RÉFORMÉS.  —    LES    FïIRES   DE 

TERRE -SAINTE. 


Quand  les  premiers  Frères  Mineurs  de  l'Observance  firent-ils 
leur  apparition  à  CP.,  nous  ne  pouvons  le  dire  avec  une  entière 
certitude  :  nous  voyons  cependant  qu'ils  y  étaient  à  Galata, 
en  1341j  puisque  leur  supérieur,  le  Père  Enrîco  de  Savoie,  fut 
chartfé  d'une  mission  de  pacification  entre  les  Grecs,  dans  les 
différends  qui  s'élevèrent  à  GP.  après  la  mort  d'Andronic  III. 
Mais  ils  ne  furent  constitués  en  un  corps  séparé  qu'en  1437, 
à  la  suite  de  la  mission  du  Père  Francesco  Spinola  de  Gènes, 
dont  nous  avons  parlé. 

Ds  furent  autoriHés  à  se  consti-uire  un  couvent  sous  \es  murs 
de  CP.  vers  l'endroit  que  nous  appelons  aujourd'hui  la  pointe 
dn  Séraï.  Il  fut  consacré  à  St-.\.ntome( deffli  cipressî),  et  ue  fut 
terminé  qu'en  1 453,  deux  ans  avant  la  prise  de  CP.  par  les  Turcs. 
Nous  avons  vu  aussi  quel  fut  le  sort  de  ce  couvent  et  des  reli- 
gieux qui  l'habitaient.  Que  devinrent  ceux  qui  échappèrent  au 
massacre  ou  à  l'esclavage,  et  où  trouvèrent-ils  un  refuge  ? 

D'après  un  document  authentique,  disent  les  archives  de  St- 
Antoine  et  de  Ste-Marie,  la  «  Magnifica  Comuniti  »  les  reçut  k 
Sl^-Benoit,  ou  du  moins  dans  les  dépendances  de  ce  couvent; 
mais  seulement  d'une  façon  précaire  et  provisoire.  Nous  ne 
trouvons  même  rien  dans  l'histoire  particulière  de  St-Benolt 
qui  nous  atteste  leur  séjour  dans  cette  église.  Ils  y  restèrent 


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—  273  — 

jusqu'à  la  venue  des  PP.  Jésuites.  Alors  l'église  et  le  couvent, 
qui  avaient  été  cédés  à  la  France,  furent  affectés  aux  nouveaux 
religieux. 


SI- 

Si-Marie  Drapérts  (ancienne)  les  Observantins. 


Mais  les  Frères  Mineurs  de  l'Observance  ne  restèrent  pas 
longtemps  dans  l'embarras.  Une  certaine  veuve  nommée  Clara 
Bartok  Drapéris  '  leur  offrit  une  maison  et  une  ancienne  église 
qu'elle  possédait  à  titre  privé  à  Galata.  La  maison  était  en  fort 
mauvais  état,  l'église,  petite  et  presque  ruinée,  servait  d'étable  : 
elle  était  dédiée  à  la  ï.  Ste  Vierge  et  avait  une  image  précieuse 
de  la  Madone,  peinte  sur  bois  à  la  manière  orientale  et  remon- 
tant à  une  très  haute  antiquité.  Clara  Bartola  Drapéris,  par  un 
acte  authentique  du  1"  janvier  1584,  donna  aux  religieux  Fran- 
ciscains de  l'Observance  ce  lieu  et  cette  église,  à  cause,  dit-elle, 
de  sa  dévotion  à  St  François  et  aux  Saints  Lieux  de  Jérusalem, 

L'année  d'après,  par  sa  Bulle  *  Sicut  nobts  exponi  fecistis,  t 
du  8  mars  1585,  le  Pape,  Grégoire  XIII,  confirme  cette  donation 
et  accorde  aux  religieux  franciscains  de  l'Observance  qui  étaient 
à  CP.  pour  s'occuper  des  affaires  de  Terre  Sainte  auprès  des 
ambassadeurs  des  princes  chrétiens  et  de  la  Porte  ottomane,  et 
qui  prenaient  aussi  un  grand  soin  des  esclaves  chrétiens  et  des 
autres  fidèles  qui  y  habitaient,  toutes  les  faveurs  spiritueUes  et 
tous  les  privilèges  que  possédaient  les  autres  églises  de  l'Ordre, 
le  tout  sous  l'obédience  et  dans  la  dépendance  du  Ministre  gé- 
néral. 

Les  religieux  se  hâtèrent  de  réparer  la  maison  et  de  recons- 
truire l'église,  qui  de  l'image  de  la  Ste  Vierge  qu'elle  possédait 
et  de  la  donatrice  qui  l'avait  concédée  fut  appelée  «  Ste-Marie 
Drapéris.  »  Elle  était  située,  suivant  les  traditions,  dans  la  partie 
de  Galata  dite  Moum-Khanè,  limitrophe  de  Top-khanè,  à  peu 
près  là  où  se  trouve  aujourd'hui  la  Cité  française.  » 

I  Un  sieur  Luchîno  Drapéris  est  mentionné  dans  le  traité  conclu  entre  le 
podestat  de  Galata,  et  Jean  l'aléologue,  en  1386.  Un  autre,  François  Drape- 


ra-GoOg  Ic 


—  273  — 

Conformément  à  l'usage  local,  Tadmintstration  des  biens  de 
Ste-Marie  Drapéris  était  confiée  à  un  c  Procureur  »  séculier 
ayant  le  titre  de  t  Procurator  dtgnissimus  conventus  San- 
ctœ  Marlœ  >;  les  affaires  des  religieux  étaient  confiées  à  un 
t  Syndictis  apostolicus  hujus  conventus  *,  conformément 
aux  usages  de  l'Ordre,  c'est-à-dire  à  un  personnage  séculier  qui 
prenait,  au  nom  du  St-Siége,  les  intérêts  de  la  commuiiauté. 
Des  personnages  importants  de  la  colonie  latine,  clioisis  par  les 
supérieurs,  remplirent  cette  charge,  souvent  plus  honorifique 
que  réelle. 

Cette  origine  et  cette  situation  n-'empôchèrent  pas  la  «  Ma- 
gnifica  Comuniti'i  t  d'élever  aussi  sur  cette  église  de  Ste-Marie 
des  prétentions  du  même  genre  que  celles  qu'elle  émit  à  di- 
verses époques  sur  d'autres  églises  :  la  S.  C.  de  la  Propagande 
renvoya,  en  1651,  la  solution  de  ce  différend,  entre  un  sieur 
George  Drapéris  représentant  le  couvent  et  la  famille,  et  la  Co- 
munità,  au  tribunal  du  Vicaire  patriarcal  de  Gonstantinople. 

Les  religieux  Observantins  furent  plus  ou  moins  nombreux  à 
Ste-Marie  Drapéris;  mais  ils  s'occupèrent  activement  de  leur 
ministère.  Ils  n'avaient  pas  d'abord  charge  d'&mes,  c'est-à-dire 
qu'ils  n'exerçaient  pas  les  droits  paroissiaux  ;  mais  ils  n'en 
avaient  pas  moins  beaucoup  de  travail  auprès  des  chrétiens  de 
Galata  et  auprès  des  esclaves  renfermés  dans  le  bagne  du  Grand 
Seigneur. 

Les  Réformés,  ou  Récollets,  arrivèrent  à  CP.  vers  1630,  et 
ils  n'eurent  pas  d'abord  d'église  à  eux.  Nous  les  voyons  alors 
dans  le  voisinage  de  St-Pierre,  ils  y  ont  un  petit  hospice,  mais 
c'est  chez  les  Dominicains  qu'ils  vont  célébrer  la  messe  et  faire 
leurs  cérémonies.  Ensuite  ils  sont  à  Ste-Marie  Drapéris,  confon- 
dus avec  les  Ot>.servantins,  sous  le  même  supérieur.  Ensemble 
ils  formaient  une  communauté  d'une  dizaine  de  prêtres,  aux- 
quels s'ajoutaient  quelques  Frères  lais. 

Mais  en  1642,  il  y  eut  un  grand  scandale  :  deux  religieux 
de  Ste-Marie  Drapéris  apostasièrent  et  se  firent  turcs.  Alors  le 
Pape  Urbain. VIII,  par  sa  bulle  t  Religionis  xelus,  etc.  >  du 
5  août  1643,  établit  à  CP.  la  Réforme  de  la  plus  Stricte  Obser- 

rJB,  n^ociant  de  Galata,  créancier  dei  chiotei,  fut  cause  de  la  prise  do  Chio 
par  Buttao  Mehemmed  II.  Des  membres  de  cette  fam[Ue  figurèrent  ù&a»  la 
■  Comunità  di  Pera,  n  et  l'uo  d'eux  en  était  prieur  en  1675. 


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—  274  — 

vanee,  lui  confia  le  couvent  de  Ste-Marie  Drapérîs,  et  conféra 
au  P.  Bonaventura  da  Crema,  gardien  et  commissaire  général 
de  la  costodie  de  CP.,  tous  les  droits  et  privilèges  dont  jouis- 
sait le  précédent  supérieur  des  Observantins  de  Terre  Sainte. 
Il  était  mis  sous  la  dépendance  directe  du  Ministre  général  de 
l'Ordre  des  FF.  MM.  de  l'Oiservance.  C'est  à  partir  de  cette  épo- 
que que  les  Franciscains  de  Ste-Marie  commencèrent  à  exercer 
les  droits  paroissiaux,  que  les  Dominicains  et  les  Conventuels 
étaient  seuls  à  posséder  t  ab  antiquo.  > 

Cependant  la  délimitation  des  paroisses  ne  se  fit  que  plus 
tard,  (33  mars  1725),  par  Mgr  Mauri,  M.  R.  Malgré  cela,  le 
R.  P.  Giovanni  Francesco  Circhi,  M.  Conv.,  Vicaire  patriarcal, 
pour  la  seconde  fois,  dans  sa  visite  du  15  octobre  1649,  prescrit 
au  R.  P.  Bonaventura  da  Crema,  gardien  de  Ste-Marie  Drapéris, 
de  tenir  un  registre  exact  des  baptêmes,  mariages  et  décès,  con- 
formément aux  règlements  ecclésiastiques.  Ces  registres  furent 
sans  doute  commencés  alors  mais  on  n'en  possède  rien  qui  soit 
antérieur  à  l'incendie  de  1660.  Il  semble  néanmoins  que  Ste- 
Marie,  qui  est  appelée  c  parochialis  ecclesia  Beatœ  Mariœ 
Virgints  »  ou  »  Chtesa  parochiale  di  Santa  Mafia  Drapé- 
ris, délia  relïgtone  di  San  Francesco,  minori  ossercanlt 
riformati  »,  avait  une  certaine  juridiction  territoriale. 

Les  Riformati  ne  jouirent  pas  longtemps  de  l'église  de  Ste- 
Marie,  cet  édifice  comme  la  plupart  des  églises  et  couvents  de 
Galata  devint  la  proie  des  flammes,  dans  le  grand  incendie  du 
24  juillet  1660.  Tout  fut  détruit,  et  l'on  ne  put  sauver  que  le 
tableau  de  la  T.  Ste  Vierge  Marie,  que  le  courage  d'un  sieur 
Drapéris  sut  dérober  au  feu. 

Les  religieux,  tant  Observantins  que  Riformati,  restaient  donc 
sans  couvent  :  alors  la  Congrégation  générale  de  l'Observance, 
tenue  à  Valladolid,  décida  le  35  juillet  1661  que  ce  couvent  se- 
rait rétabli  aux  frais  de  la  Terre  Sainte,  car  il  était  indispensable 
de  garder  à  Constantinople  quelques  religieux  pour  les  besoins 
de  la  Palestine,  et  il  fallait  leur  assurer  une  habitation.  On  se 
mit  immédiatement  à  l'œuvre,  et  bientôt  le  bâtiment  fat  en  état 
de  recevoir  ses  botes  ;  malheureusement  on  n'avait  pas  pris 
toutes  les  précautions,  et  l'on  ne  s'était  pas  muni  des  permis- 
sions requises,  aussi  les  autorités  turques  vinrent-elles  en  chas- 
ser les  religieux  et  s'emparèrent  de  la  propriété.  Il  semble  que 


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—  275  — 

cette  confiscation  fiscale  n'ait  eu  lieu  qu'en  1663.  Les  Obser- 
vantins  de  Terre  Sainte  et  les  Rifonnati  de  Ste-Marie  se  trou- 
vaient ainsi  sans  abri.  Le  P.  Cagnizanez,  commissaire  de  Terre 
Sainte,  se  réfugia  chez  les  Conventuels  de  St-François,  qui 
avaient,  dès  1662,  obtenu  l'autorisation  de  relever,  non  pas 
leur  église  mais  leur  couvent.  Nous  allons  suivre  les  autres  dans 
leurs  pénibles  pérégrinations  avant  qu'ils  réussissent  à  se  fixer 
&  Péra. 


su. 

Ste-Marie  Drnpéris  f nouvelle),  Riformati. 


Le  premier  gardien,  commissaire  et  custode  des  Frères  Mi- 
neurs réformés  de  la  plus  Stricte  Observance,  à  CP.,  fut,  comme 
nous  l'avons  vu  ci-dessus,  le  R.  P.  Bonaventura  da  Crema,  de 
la  Province  réformée  de  Breseia.  Il  fut  élu  dans  la  Congrégation 
générale  d'Ara  Cœli,  à  Rome,  en  1642.  Comme  nous  l'avons  ra- 
conté, le  Pape  Urbain  VIII  lui  accorda  tous  les  privilèges  con- 
cédés au  gardien  du  Mont  Sion,  et  au  custode  du  St-Sépulcre, 
commissaire  apostolique  de  Terre  Sainte.  C'est  aussi  à  lui  et  à 
ses  frères  que  fut  attribuée  l'église  de  Ste-Marie  Drapéris.  Ce- 
pendant le  P.  Cagnizarez,  commissaire  de  Terre  Sainte,  continua 
de  résider  avec  les  Riformati  et  la  séparation  ne  fut  complète 
entre  les  deux  branches  qu'après  l'incendie  de  1660. 

Outre  l'image  de  la  Madone,  les  religieux  n'avaient  pu  sauver 
que  bien  peu  de  choses,  quelques  fragments  roussis  d'ornements 
sacrés,  trois  calices  dont  un  grand  d'argent  doré  et  deux  petits 
au  pied  de  cuivre,  nn  ciboire  d'argent  et  un  ostensoir  Ile  cuivre 
doré  :  il  faut  y  ajouter  les  grands  livres  de  chœur,  et  une  caisse 
d'autres  livres  dépareillés.  Ils  se  retirèrent  avec  leur  maigre  tré- 
sor dans  une  petite  maison  qu'on  leur  loua  assez  cher,  et  où  ils 
ne  purent  pas  rester  longtemps.  Ils  devaient  aller  d'ici  de  là 
chercher  leur  subsistance,  et  ils  étaient  obligés,  par  tous  les 
temps,  de  courir  au  secours  des  âmes  dont  ils  avaient  la  chaîne. 
Néanmoins  ils  ne  manquaient  pas  à  leur  devoir,quoi  qu'en  aient 
pu  dire  quelques  malveillants  qui  profitèrent  de  l'occasion  pour 


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demander  à  la  S.  Congrégation  de  Propaganda  Fide  qu'on  leur 
ôtât  les  droits  paroissiaux  qu'ils  ne  pouvaient  plus  exercer, 
n'ayant  pas  d'église  fixe.  Le  nonobre  des  religieux  ainsi  occupés 
fut  variable  suivant  les  circonstances  et  l'abondance  des  Frères, 
deux  ou  trois,  quatre  au  plus. 

En  i667  deux  d'entre  eux  avaient  affermé  d'un  certain  Tom- 
maso  Wlasti,  une  maison  située  aux  Quatre  Rues  de  Péra,il3  y 
ouvrirent  une  petite  chapelle  et  commencèrent  à  y  exercer  leurs 
fonctions  paroissiales;  mais  la  <  MagniflcaComunità»,  craignant 
quelques  nouvelles  avanies  de  la  part  des  Turcs,  le  leur  défen- 
dît, par  t  Ordres  Souverains.  »  Les  religieux  refusèrent  d'o- 
béir :  alors  les  Seigneurs  Pèrotes  firent  instance  auprès  du  Vi- 
caire patriarcal,  M'frRidolfi,  qui  appuya  cette  défense  sous  peine 
de  suspense  a  dtcinis  et  de  privation  d'office.  Le  P.  Francesco 
Pedauli,  supérieur,  et  son  compagnon,  le  P.  Giuseppe  da  Sul- 
mona,  résistèrent,  furent  frappés  de  censures  par  le  Vicaire 
patriarcal,  et  sur  sa  plainte,  rappelés  en  Italie  par  la  S.  Con- 
grégation. Ils  furent  remplacés  à  CP.  par  le  Père  Francesco  da 
Piegaro,  de  la  province  séraphique,  nommé  Custode  en  1668. 

Enfin,  en  1678,  Us  purent  acheter  une  maison  située  à  Péra 
quartier  des  Quatre  Bues,  d'un  certain  Manè,  ils  y  joignirent 
plus  tard,  en  1700,  un  terrain  acheté  de  Dimitro  Savasto,  au 
prix  de  375  piastres  turques,  il  donne  sur  la  rue  Dùm-Di^im  et 
confine  à  l'hospice  des  Pères  de  Terre  Sainte.  Ils  obtinrent,  par 
la  médiation  de  l'intemonce  impérial,  d'y  bâtir  un  hospice  et 
une  église,  en  1691.  Dès  que  leur  église  fut  prête,  ils  y  installè- 
rent solennellement  l'image  de  la  B.  Vierge  qui  avait  été  sauvée 
de  l'incendie  de  Ste-Marie  par  un  Drapéris  et  conservée  dans  sa 
famille  pendant  ces  trente  et  un  ans.  C'est  en  souvenir  de  l'an- 
cienne église  et  de  l'image  vénérée  que  l'on  donna  au  nouvel 
édifice  le  nom  de  l'ancien,  reliant  ainsi  le  passé  au  présent,  la 
Ste-Marie  Drapéris  des  Riformati  prenant  la  place  de  celle  des 
Observantins. 

Cette  église,  achevée  seulement  en  1691,  n'eut  pas  une  longue 
durée.  Dans  la  nuit  du  9  septembre  1697,  elle  devint  la  proie 
des  fiammes  avec  le  couvent  adjacent.  Seule  la  sainte  image  de 
la  B.  Vierge  Marie  fat  encore  sauvée  comme  miraculeusement. 

On  la  releva  immédiatement  de  ses  ruines,  mais  sans  y  mettre 
beaucoup  de  soins  et  avec  de  mauvais  matériaux.  Elle  résista 


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—  277  — 

néanmoias  à  l'incendie  qui  dévora  le  couvent  trois  ans  après, 
en  1700.  Mais  en  1727  elle  fut  ruinée  par  un  tremblement  de 
terre.  Rétablie  peu  de  mois  après,  sur  de  plus  grandes  dimen- 
sions, elle  vit  le  couvent  s'aggnndir  peu  à  peu  et  prendre  les 
limites  qu'il  a  maintenant,  de  la  rue  de  Péra  à  la  rue  Dùm-Dùm 
ou  Toùm-Toùm. 

En  1767,  le  27  octobre,  un  incendie  terrible  ravagea  tout  le 
quartier  de  Péra,  l'église  de  Ste-Marie  fut  détruite,  comme  les 
palais  des  représentants  de  Hollande,  de  Naples  et  de  Russie  : 
celui  de  France  fut  sauvé  grâce  aux  efforts  des  équipages  des 
navires  français  ancrés  dans  le  port  de  CP.  La  résidence  du 
Vicaire  patriarcal  fut  cette  fois  encore  la  proie  des  flammes.  Il 
se  réfugia  d'abord  à  l'hospice  de  Terre  Sainte,  puis  ù  St-Bcnoit, 
et  enfin  il  acheta  pour  sa  résidence  et  sa  cathédrale  le  couvent 
de  St-Georges, 

L'année  d'après,  1768,  la  recommandation  de  l'empereur  Jo- 
seph II  et  les  instances  de  son  internonce  à  CP.  obtinrent  de  la 
Porte  un  firman  '  qui  permettait  de  reconstruire,  en  pierre  et 
avec  une  voûte,  le  couvent  et  l'église,  afin  de  les  mettre  ainsi 
à  l'abri  du  feu.  La  construction  fut  achevée  en  17((9,  et,  le 
18  mars,  le  Vicaire  patriarcal,  Mgr  Roverani,  fit  la  bénédiction 
de  l'église  et  la  dédia  à  c  l'Immaculée  Conception  de  la  B.  Vierge 
Marie  »,  C'est  en  somme  l'église  que  nous  voyons  à  présent,  une 
assez  vaste  construction  d'une  seule  nef  avec  une  galerie  latérale 
à  gauche,  conduisant  aux  tribunes  et  à  la  sacristie.  Nous  en  di- 
rons plus  tard  l'état  actuel. 

En  1785,  la  latinité  de  Péra  fut  sur  le  point  de  perdre  Ste- 
Marie  ;  en  effet,  dit  Carhognano,  cette  église  étant  accablée  sous 
le  poids  de  l'intérêt  des  emprunts  contractés  pour  sa  reconstnic- 
tion,  il  fut  question,  à  cette  époque,  de  la  vendre  aux  non-ca- 
tholiques {acatolici)  ;  mais  le  baron  de  Herbert  Ratkeal,  inter- 
nonce impérial,  sauva  l'église  de  ce  danger,  en  réduisant  le  taux 
de  l'intérêt  à  4  p.  0/0,  et  en  rëpartissant  le  paiement  du  capital, 
qui  liiépassait  250,000  piasb-es,  par  échéance  de  lots  annuels.  En 

1  Hammar,  XV[.  I9S.  Cet  auteur  rapporte  que  le  premier  bérat  obtenu  pat 
lesKirormati  île  Péra  aurait  été  de  107£i=lGC], renouvelé  en  1113=1700.  puii 
en  1118=1706.  Corbognano  dit  que  l'incendie  eut  lieu  en  1*67,  et  la  réédifi- 
cation de  l'église  t  l'anno  tiisgesiienle,  colla  permintione  ilel  goeerno.  ilata 
ail'  iitama  ileW  ! 


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—  278  — 

mémoire  de  cette  bienfaisante  et  salutaire  intervention,  les  Mi- 
neurs Riform.  firent  placer  l'inscription  suivante  sur  l'nne  des 
portes  intérieures,  du  cloître  : 

Magno  vmo  EcMO  Duno  Petro  baboni  de  Herbert  Ratkeal 

INTER.  G:¥SAREO  OB  RESTITLT4M  VIRTDTE  SUA  REU  MISSIONIS  CoSPNa! 
P.  MIN.  STfUCT.  0B3.  S.  FRANQSa  jERE  ALIENO  LABANTEH  :  BJUS 
ALUMNI   .ETERNUM    GRATI     ANIMI    UONUMENTUM   PP.   KaL.    SEXTILI 

MDCCLXXXV. 

Un  autre  accommodement  se  fit  encore  en  1815,  par  le  R.  P. 
Luigi  Cardelli  de  Rome,  Préfet  de  la  mission,  avec  leur  syndic 
apostolique  M.  le  B™  Antonio  Testa,  Chancelier  de  l'internou- 
ciature  Impériale,  qui  prit  sur  lui  toute  la  dette  de  la  mission, 
moyennant  une  hypothèque  sur  quelques  maisons  qui  appar- 
tiennent aux  religieux. 

Les  Riformati  firent,  suivant  les  temps,  appel  à  la  protection 
de  Gènes,  de'  Venise,  ou  de  quelqu'autre  puissance  catholique  : 
les  Turcs  étant  continuellement  en  guerre  avec  la  Chrétienté, 
tantôt  d'un  côté  tantôt  de  l'autre.  Mais  à  partir  du  règne  de  In- 
nocent XI,  ils  passèrent  sous  celle  de  l'Empire  d'Allemagne.  En 
effet,  sur  la  demande  du  Cardinal  Colonitz,  ce  Pape  les  recom- 
manda à  l'empereur  Léopold  I,  et  ce  prince  consentit  à  les  pro- 
téger. L'empereur  Joseph  I,  en  1706,  a  confirmé  cette  disposition 
et  l'empereur  Joseph  II,  comme  nous  l'avons  vu,  marcha  sur  les 
traces  de  ses  prédécesseurs.  Cependant  durant  les  guerres  si  fré- 
qnente.s  entre  l'empire  et  la  Porte,  les  religieux  passaient  sous 
la  protection  de  la  Hollande.  Aujourd'hui  l'église  de  Ste-Marie 
est  l'église  nationale  Austro-Hongroise. 

Les  Riformati,  établis  à  Ste-Marie  Drapéris  en  1643,  formè- 
rent d'abord  une  Gustodie,  dont  le  supérieur  avait  le  titre  de 
Gardien  de  Ste-Marie,  Commissaire  général  de  la  Gustodie  de 
CP.  Ils  étaient  religieux  et  remplissaient  les  fonctions  de  curé, 
comme  nous  le  dirons  ci-après  ;  mais  ils  ne  dépendaient  pas 
de  la  Propagande  et  n'étaient  point  missionnaires.  (Archives  de 
Ste-Marie,  Reg.  F.  25,  V.)  C'était  pour  eux  une  faiblesse  :  ils  le 
reconnurent  au  bout  de  quelque  temps,  et,  sur  la  demande  ins- 
tante du  R.  P.  Gardien,  Custode  et  commissaire  de  CP.,  appuyée 
par  le  Rme  P.  Procureur  général  des  Missions  de  l'Ordre,  la 
S.  C.  de  la  Propagande  prit  sous  sa  protection  cette  Gustodie, 


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—  379  — 

comme  elle  avait  fait  déjà  pour  d'autres  missioDS,  Transylvanie, 
Terre  Sainte,  etc.,  et,  par  un  décret  du  13  novembre  1702,  ac- 
corda la  grâce  demandée.  Pour  achever  la  constitution  de  la 
Gustodie,  la  S.  Congrégation  des  évoques  et  réguliers  accorda 
aux  supérieurs  la  permission  de  recevoir  des  novices  indigènes, 
(9févr.  1704.) 

Enfin  le  13  février  1704,  la  Custodie  de  CP.  fut  érigée  en 
Préfecture  apostolique.  Le  B.  P.  Prancesco  di  Cavorlno,  de  la 
Province  de  St-Nicolas  de  Bari,  qui  était  custode,  fut  nommé 
Préfet  apostolique.  On  lui  assigna  plusieurs  compagnons,  de 
diverses  provinces.  La  Préfecture  comprenait,  outre  la  maison 
de  CP.,  celles  de  Smyrne,  Ghio,  Tlne,  Rodi,  auxquelles  il  fau- 
drait ajouter  celle  de  Mjcone. 

Depuis  le  P.  Francesco  da  Carosino,  le  premier  préfet,  jus- 
qu'au T.R.P.  Andréa  da  Jeune,  préfet  actuel,  on  compte  trente- 
cinq  titulaires,  empruntés  &  différentes  provinces,  le  plus  sou- 
vent italiennes.  Pendant  le  xvm*  siècle  ils  furent  généralement 
nommés  pour  quatre  ans,  dans  ce  siècle  ils  sont  ordinaire- 
ment nommés  c  ad  beneplacUum  i.  Plusieurs  ont  été  sacrés 


A  peu  près  dès  leur  arrivée  à  Ste-Marie  (à  Moum-Khanè),  les 
Riformati  <t  eurent  charge  d'&mes  i,  sans  que  nous  rencontrions 
dans  les  archives  aucun  acte  qui  leur  confère  ce  privilège.  Ce 
fut  sans  doute  pour  favoriser  les  catholiques  qui  étaient  autour 
d'eux  assez  éloignés  des  autres  églises  paroissiales,  placées  à 
l'autre  extrémité  de  Galata.  La  raison  était  encore  plus  forte 
quand  ils  se  furent  installés  à  Péra,  où  aucun  ordre  ne  possé- 
dait juridiction  paroissiale. 

Ces  droits  leur  furent  cependant  disputés  ;  ainsi,  en  1663,  le 
Custode  se  plaignait  à  la  Comunità,  que  l'ordinaire  leur  déniait 
ces  attributions  et  voulait  les  faire  passer  aux  Jésuites  de  St- 
Benott  :  il  la  suppliait  de  ne  pas  permettre  cette  usurpation.  A 
la  même  époque  on  faisait  des  instances  du  même  genre  auprès 
de  la  S.  Congrégation  :  nous  avons  vu  que  ce  fut  sans  succès. 

En  1703  ils  se  réclament  de  ce  titre  de  Curés,  pour  se  sous- 
traire à  la  visite  du  R.  P.  David  de  St-Charles, religieux  Carme, 
envoyé  par  le  St-Siège  pour  se  rendre  compte  de  l'état  des  Mia- 
sions  du  Levant  :  <  Les  Riformati,  disent-Ils,  sont  curés  et  non 
missionnaires.  > 


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—  280  — 

Ils  n'en  étaient  pas  absolument  jaloux  néanmoins,  car  nous 
lisons  dans  leurs  arctiives  (R.  F.  28,  v.)  sous  la  date  du  25  oc- 
tobre 1704  :  «  aujourd'hui  le  P.  Provincial  des  Conventuels,  ac- 
compagné par  le  P.  M.  Faggia,  sont  venus  trouver  le  P.  préfet, 
Francesco  da  Carosino,  pour  lui  demander  de  faire  leurs  offices 
dans  notre  église  ;  le  F,  préfet  leur  a  accordé  avec  bienveillance 
ce  qu'ils  demandaient  et  lesdits  Pères  s'offrirent  à  donner  à  l'é- 
glise «  la  quarte  funéraire  »  suivant  l'usage  de  cette  cité.  » 
Par  contre  nous  les  voyons  réclamer  leurs  droits  sur  leurs 
paroissiens,  quand  ceux-ci  veulent  se  faire  inhumer  dans  d'au- 
tres églises,  comme  en  font  foi  ]eurs  registres  de  catholicité, 

La  délimitation  des  paroisses  de  Péra  fut  faite  en  1725,  nous 
dirons  plus  tard  dans  quelles  conditions  ;  mais  sauf  une  note 
dont  nous  ne  connaissons  pas  la  source  et  qui  est  consignée 
dans  les  Archives  de  Ste-Marie(R.  F.  322,  r.),  nous  ne  pouvons 
rien  dire  sur  le  chiffre  de  la  population  catholique.  D'après  cette 
note:  en  1765,  tous  les  catholiques  de  la  paroisse  sont  au  nombre 
de  361  se  décomposant  ainsi  : 
Catholiques  ayant  maison  propre  et  domiciliés.  .  .  60 
Catholiques  étrangers  ou  en  location  ......     134 

Domestiques  catholiques,  tous  étrangers 67 

Total 261 

Sur  ce  nombre  on  compte  :  Pérotes 73 

Allemands 17 

Français 33 

Italiens 13 

Jérosolimitains  ....  4 

Ragusiens 4 

Insulaires 50 

La  même  note  nous  donne  pour  janvier  1809  un  nombre  de 
685  catholiques,  tant  latins  que  maronites,  grecs  raelchites,  etc. , 
existant  sur  la  paroisse  de  Ste-Marie,  décomposés  ainsi  : 

Communiants  domiciliés,  tant  natifs  qu'étrangers  .     .  339 

Fkifants  non  communiants 145 

Serviteurs,  tous  étrangers 07 

Servantes,  toutes  étrangères 104 

Total 686 


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Nous  trouvons  de  plus  qu'à  diverses  reprises  les  Riformati  out 
rempli  les  fonctions  de  chapelains  auprès  du  baile  de  Venise  ou 
du  résident  de  l'Empire,  mais  sans  continuité. 


Les  Pères  de  Tet^e  Sainte,  FF.  MM.  de  la  Réguli^r 
Observance. 


Il  ne  peut  entrer  dans  notre  cadre  de  faire  ici  l'histoire  des 
Franciscains  en  Terre  Sainte,  mais  seulement  des  représentants 
que  la  Custodie  de  Terre  Sainte  avait  à  GP.  11  semble,  comme 
nous  l'avons  fait  remarquer  Jf=  Part,),  qne  la  Province  de  Ko- 
manie  fut  séparée  de  très  bonne  heure  de  celle  de  Palestine,  mais 
comme  Constantinople  resta  le  centre  de  l'empire  et  que  des  af- 
faires de  plus  d'un  genre  devaient  y  être  traitées,  les  Francis- 
cains durent  y  avoir  toujours  des  représentants.  Cela  fut  néces- 
saire surtout  quand  les  Ottomans  eurent  pris  CP.  On  voit  que 
dès  lors  il  y  eut  quelques  religieux  chargés  de  prendre  les  inté- 
rêts des  Saints  Lieux.  Comment  se  traitaient  ces  affaires,  nous 
ne  pouvons  guère  le  dire  aujourd'hui;  mais  lorsque  la  France 
et  les  autres  puissances  eurent  des  représentants  attitrés  auprès 
de  la  Porte  ottomane,  les  négociations  devinrent  plus  faciles, 
surtout  parce  que  la  France  était  ofHciellement  reconnue  comme 
protectrice  des  intérêts  catholiques  en  Syrie.  Alors  des  religieux 
furent  accrédités  pour  traiter  les  affaires  de  Palestine  auprès  de 
la  Porte  et  des  amliassadears  des  Puissances,  spécialement  de 
la  France. 

Comme  les  Observantins  étaient  chargés  des  Saints  Lieux, 
«'est  eux  aussi  que  nous  trouvons  comme  leurs  représentants  à 
CP.  Ils  habitent  donc  le  couvent  de  l'Observance  sans  se  dis- 
tinguer des  autres.  Cependant  c'est  à  eux  spécialement  que  Dame 
Clara  Bartola  Drapéris  donne  sa  maison  et  l'église  qui  lui  ap- 
partenait, I  à  cause,  dit-elle,  de  son  amour  pour  St  François  et 
pour  les  Saints  Lieux  de  Jérusalem.  > 

Lorsque,  en  16i3,  le  Pape  Urbain  VIII  eut  donné  le  couvent 


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de  Ste-&farie  Drapéris  aux  Riformati  italiens,  il  conféra  au  - 
P.  Gardien  les  privilèges  que  possédait  le  Custode  de  Terre 
Sainte.  Il  brisa  en  même  temps  les  liens  qui  unissaient  les  reli- 
gieux de  CF.  à  ceux  de  la  Palestine,  et  les  rendit  dépendants  du 
seul  Général  de  l'Ordre.  Cependant  l'état  déplorable  des  choses 
en  Syrie  et  la  multiplicité  des  affaires  à  traiter  k  CP.  y  firent 
maintenir  des  religieux  qui  en  fussent  spécialement  chaînés.  Le 
Père  Giovanni  Gagnizarez,  de  Grenade,  fut  nommé  commissaire 
pour  la  Terre  Sainte  par  le  P.  Général,  lequel  pour  régulariser  la 
situation  s'adressa  k  la  S.  Congrégation  en  1647.  Un  décret  de 
1654  établit  enSn  cette  institution  et  reconnaît  le  P.  Cagnizarez 
comme  commissaire  :  il  en  remplit  les  fonctions  pendant  vingt- 
quatre  ADR  '. 

E  commença  d'abord  par  résider  à  Ste-Marie,  mais  après  l'in- 
cendie de  1660,  se  trouvant  sans  abri,  il  obtint  de  la  Congréga- 
tion de  Valladolid  des  subsides  pour  rétablir  son  couvent.  Nous 
avons  vu  comment  cette  tentative  aboutit  à  une  confiscation  de 
la  part  des  autorités  turques. 

Cependant  les  Conventuels  avaient  obtenu  l'autorisation  de 
reb&tir  leur  couvent,  et  c'est  chez  eus  que  le  Père  commissaire 
reçut  une  fraternelle  hospitalité,  qui  dura  longtemps....  jusqu'à 
l'acquisition  de  l'hospice  actuel,  1670.  C'est  en  souvenir  de  ce 
séjour  chez  les  Conventuels  que  les  Pères  de  Terre  Sainte  reçu- 
rent k  leur  tour  dans  leur  hospice  les  Conventuels  sans  abri  après 
les  incendies  de  1734  et  de  1763  ;  ils  leur  avaient  rendu  déjà  le 
service  de  recevoir  et  garder  chez  eux  tous  les  objets  précieux 
du  couvent  qu'on  avait  pu  sauver,  en  1697.  En  échange  les  Con- 
ventuels accordèrent (1763)  au  P.  Commissaire  tpro  temporey 
le  droit  d'officier  dans  leur  église  le  jour  de  la  fête  de  St  Antoine 
de  Padoue,  quand  le  Vicaire  patriarcal  n'y  tient  pas  office  pon- 
tiScal. 

Les  statuts  rédigés  pour  la  Terre  Sainte  dans  la  Congrégation 
générale  de  Valladolid,  en  1661,  furent  confirmés  par  Rome  en 
1663.  Ils  établissent  que  le  Commissariat  temporel  ou  la  pro- 
cure de  Terre  Sainte  k  GP.  serait  désormais  confiée  aux  Obser- 
vantins  espagnols,  sous  la  dépendance  du  Rme  P.  Custode. 

Enfin  les  Pères  de  Terre  Sainte  acquirent  d'an  certain  Draco 

'  Sloria  cronologira  di  Sirla,  del  P.  Gio.  da  Calivria,  Osa.  L.  6,  C.  7. 


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Àlessio,  un  terrain  et  une  maison  situés  auprès  de  la  résidence 
du  baile  de  Venise,  aujourd'hui  l'ambassade  Austro-Hongroise, 
entre  celle-ci  et  l'église  de  Ste-Marie.  Cette  acquisition  parait 
avoir  été  faite  par  parties  :  en  effet  une  propriété  sise  au  quar-, 
lier  Toùm-Toùm,  Rue  del  Bailo,  et  confinant  au  jardin  del  Bal- 
io,  est  achetée,  en  1080=1669-70,  par  on  médecin  hollandais, 
nommé  Henri  Wolde,  comme  prëte-nom  des  religieux,  ainsi 
qu'il  résulte  d'un  acte  passé  en  chancellerie  de  France,  le  S  juin 
1671.  La  totalité  est  ensuite  achetée,  le  9  rebi-ewel  1081=1671, 
par  Sinibaido  Fieschi,  (également  comme  prète-nom  des  Pères 
de  Terre  Sainte,)  résident  de  la  Sérénissîme  République  de 
Gènes.  La  propriété  se  composait  alors  de  six  chambres,  kios- 
que, citerne,  puits,  jardins,  etc.  Le  lendemain  de  ce  jour,  10  re- 
bi-ewel, ce  résident  constituait,  au  mehkémé  de  Qalata,  sa 
propriété  Mnlk,  en  Vacouf  perpétuel,  «  jusqu'au  jour  de  la  ré- 
surrection »  en  faveur  des  Pères  de  Terre  Sainte.  Et  par  acte 
du  S  juillet,  dressé  en  chancellerie  c  del  palazso  del  résidente 
délia  Serenisstma  Republica  di  Genova,  >  il  déclarait  en 
outre  que  cette  propriété,  sise  au  quartier  Toùm-Toùm,  Strada 
del  Bailo,  avait  été  acquise  à  la  demande  du  R.  P.  Commis- 
saire, des  deniers  de  la  Terre  Sainte,  et  était  ainsi  légitime  pro- 
priété de  celle-ci,  » 

Dans  une  autre  déclaration  du  30  juillet  1673,  le  même  rési- 
dent dit  encore  que  le  couvent  de  Terre  Sainte  situé  t  &  Galata 
de  CP.  ou  autrement  dit  aux  vignes  de  Péra,  quoique  bâti,  pour 
plus  de  sécurité,  en  son  propre  nom,  appartient  entièrement  à  la 
Terre  Sainte,  et  que  les  frais  de  construction  et  de  réparations, 
bien  qu'avancés  par  lui,  ont  été  faits  et  soldés  par  la  Terre 
Sainte  et  dûment  acquittés  par  elle.  > 

Cette  première  acquisition  fut  agrandie  successivement  par 
des  donations  ou  des  contrats  postérieurs.  L'hospice  actuel,  et  la 
chapelle  qui  en  dépend,  sont  sous  la  protection  de  la  France. 

Etat  actuel  du  Commissariat. 

Le  commissariat  de  Terre  Sainte  est  resté  sur  le  même  ter- 
rain et  dans  les  mêmes  conditions  que  par  le  passé.  On  peut  dire 
cependant  qu'il  s'est  grandement  amélioré  dans  ces  dernières  an- 


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nées.  Eq  effet  par  une  bonne  et  intelligente  administration,  les 
emplacements  anciens  ont  été  utilisés  pour  la  construction  de 
diverses  maisons  de  rapport,  et  par  suite,  au  lieu  d'être  une 
jcharge  pour  la  Custodie  de  Terre  Sainte,  il  est  devenu  une 
source  de  revenus. 

La  chapelle,  entièrement  reconstruite  par  les  soins  du  R.  P. 
Ënrico  Collado,  commissaire,  a  été  bénite  le  1"  août  1871  par 
Mgr  Franchi,  nonce  apostolique.  Elle  est  placée  sous  l'invoca- 
tion de  N.-D.  des  Sept-Douleurs,  dont  la  fête  se  célèbre  le  ven- 
dredi de  la  Passion.  Le  4  avril  1873,  M.  le  comte  de  Vogué,  ac- 
compagné d'une  partie  du  personnel  de  l'ambassade  de  France, 
assistait  à  la  messe  solennelle  célébrée  dans  cette  chapelle,  pour 
la  fête  patronale,  par  le  R.  P.  Préfet  de  Ste-Marie.  Au  salut  on 
a  chanté  la  prière  accoutumée  pour  la  France. 

L'ècusson  de  Jérusalem,  à  la  croix  cantonnée  de  croisillons, 
surmontée  d'une  couronne  fermée,  est  peint  sur  la  porte  d'en- 
trée du  couvent.  Les  religieux,  comme  il  avait  été  déterminé  dès 
l'origine,  sont  espagnols,  envoyés  par  le  Rme  P.  Custode  de  Jé- 
rusalem, 

Il  ne  s'y  trouve  en  ce  moment  qu'un  Père,  commissaire,  et  un 
Frère  lai. 

Les  Pères  de  Terre  Sainte  ont  été  chapelains  du  baile  de  Ve- 
Hise,  comme  nous  l'avons  remarqué,  plus  tard  ils  ont  été  chargés 
du  service  religieux  de  la  Légation  d'Espagne  :  aujourd'hui  ils 
n'ont  aucune  fonction  en  dehors  du  commissariat. 

Le  sceau  du  supérieur  de  la  maison  porte  la  croix  de  Jérusa- 
lem, et  la  devise  :  Sigillum.  Com.  et  Prœs.  Ter.  Sanci.  Con- 
stantinopoteos. 


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CHAPITRE  VIL 


ST-QEORGBR.   —    ST-L0U13,  LES   RB.    PP.    CàPUCINS. 


Nous  avona  constaté  la  présence  des  disciples  de  St  François 
d'Assise  à  Constantinople  dès  le  commencement  de  l'Ordre,  et 
du  .vivant  même  du  fondateur.  Nous  avons  ensuite  raconté 
l'histoire  locale  des  deux  premières  branches  de  cet  Ordre,  les 
Conventuels  ou  Cordelière,  et  les  Observants,  Soccolants  et  Ré- 
formés, (C.  G.  III  et  VI.)  il  nous  faut  arriver  h  la  troisième 
branche  de  l'Ordre  Franciscain,  les  Frères  Mineurs  Capucins, 
qui  eurent  à  CP.  deux  églises,  dont  une  est  encore  en  leur  pos- 
session. Lem-  Réforme  naquit  dans  le  sein  de  l'Observance  en 
1525,  mais  ne  tarda  pas  à  s'en  séparer.  Après  diverses  péripé- 
ties et  de  nombreuses  oppositions,  dont  nous  n'avons  pas  à  nous 
occuper  ici,  les  Capucins  furent  définitivement  constitués  en  un 
Ordre  religieux,  formant  une  branche  de  l'Ordre  de  St-François, 
distincte  des  deux  autres.  (Bulles  des  Papes  Clément  VII, 
Paul  ni,  Pie  IV  1538-1560,  etc.) 

Nous  parlerons  successivement  des  deux  églises  qu'ils  ont 
eaes  à  CP. 

SI. 
ST-oEOROEs  (église  encore  existante). 

Les  documents  écrits  et  la  tradition  sont  les  deux  sources  de 
l'histoire  :  or  quand  il  s'agit  de  St-Georges,  comme  des  autres 


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églises  de  Galata,  les  plus  anciens  documents  écrits  ne  remon- 
tent pas  au  delil  du  xu[°  siècle.  St-Qeorges  était  cependant  de 
beaucoup  antérieur  k  cette  date  :  il  parait  môme  remonter  anz 
premiers  Ages  du  christianisme,  car  il  semble  devoir  son  origine 
à  i'Atasma,  ou  fontaine  sacrée,  qui  se  trouve  dans  son  en- 
ceinte. Saivant  une  ancienne  tradition  populaire,  cette  fontaine 
était  dédiée  à  une  divinité  payenne,  sans  doute  à  Apollon,  qui 
y  possédait  un  autel  ou  un  temple.  La  Vierge  Irène,  fille  dn  roi, 
ou  prince,  Licinius,  y  fut  amenée,  dans  un  jour  de  fête,  et  som- 
mée de  sacrifier  li  la  divinité  qu'on  y  adorait.  Comme  elle  s'y 
refusa  avec  une  grande  constance,  elle  y  subit  un  douloureux, 
mais  glorieux  martyre.  Les  chrétiens  s'emparèrent  de  son  corps, 
l'ensevelirent  avec  honneur  dans  un  autre  endroit,  et  conser- 
vèrent soigneusement  son  souvenir- 

Lorsque  le  christianisme  fut  vainqueur  du  paganisme,  les 
empereurs,  à  OP.,  comme  ailleurs,  consacrèrent  à  Dieu  et  à  ses 
saints  les  anciens  sanctuaires  des  divinités  payennes,  pour  dé- 
tourner, au  profit  des  nouvelles  croyances,  les  traditions  popu- 
laires difficiles  à  déraciner.  St  Élie  ou  St  Michel  remplacèrent 
Jupiter,  et  St  Georges,  le  chevaher  chrétien,  prit  souvent  les 
autels  d'Apollon  ou  de  Mars.  C'est  ainsi  que  le  culte  du  glorieux 
martyr  dut  s'établir  sur  le  puits  sacré  de  la  montagne  de  Gala- 
ta, où  avait  été  martyrisée  Ste  Irène.  C'est  ainsi  que  le  culte  de 
la  patronne  de  CP.  s'unît  à  celui  du  martyr  de  Nicoraédie,  et 
qu'ils  ont  persisté  ensemble  jusqu'à  nos  jours. 

(  Presque  au  milieu  de  Galata,  là  où  sont  les  habitations  des 
négociants  français,  dit  Carbognano  ',  se  trouve  aussi  l'église  de 
St-Georges 3  sise,  rueTchinar^  sur  la  colline  >  et  dite,  pour  ce 

'  Descrizione  lopograflca  di  CP.,  1Q4. 

1  Cf.  ConstantinopoIiB  Cbristjana  :  L.  IV,  85, 

'  \a  rue  Tcbinar  est  l'une  des  rues  les  plus  rainarquablea  de  Galata  par 
les  souvenirs  qui  s'y  rattachent.  En  gravissant  la  rue  Perche mbê- bazar,  et 
regardant  la  tour  du  Christ,  qui  la  termine,  l'angle  de  cette  rue.  bordant  celle 
de  Perche mbè-bnzar,  est  formé  par  l'ancien  Hôtel  de  ville  ou  des  Podestats, 
transformi!  en  Khan,  ou  réunion  dans  une  même  enceinte  de  comptoirs  da 
commerce  ;  un  peu  plus  loin,  sur  la  partie  gauche  de  la  rue,  se  trouve  l'é- 
glise de  SlrGeoi^es  que  l'on  peut  regarder,  en  quelque  sorte,  comme  a  na- 
tionale >  ;  puis  revenant  en  arriére,  après  avoir  traversé  la  rue  Percbembé- 
bazar.  on  trouve,  au  fond  de  la  prolongation  de  celte  même  rue,  à  droite,  une 
maison  portant  l'écusson  (tes  armes  de  France,  prés  d'une  des  portes  du  local 
occupé  naguère  par  la  Banqua  ottomane,  et  dépen-iant  du  couvent  de  St- 


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motif,  selon  Byzantlos,  S.  Giorgio  a  monte,  ou  S.  Georges 
du  Mont,  suivant  les  archives  des  Capucins.  Le  même  Byzan- 
tlos, sans  d'ailleurs  indiquer  ses  sources,  rapporte  que  St- 
Georges  aurait  été  la  métropole  et  la  cathédrale  des  Génois, 
durant  leur  possession  de  Gatata,  avant  la  conquête  ottomane. 

La  dé  limitation  du  bourg  de  Oalata,  en  1303'  parle  d'une 
^lise  de  St-Georges  c  divini  ac  reverendi  templi  sancti  et  ma- 
gni  martyris  beati  Geoi^il  i,  sans  indiquer  toutefois  le  rit 
auquel  elle  appartenait  ;  certains  archéologues  sans  avoir  égard 
à  la  tradition  et  aux  raisons  rapportées  ci-dessus  inclinent  à  pen- 
ser que  l'église  actuelle  ne  fut  placée  sous  ce  vocable  qu'à  une 
époque  relativement  récente  ;  s'il  en  était  ainsi,  aurait-elle  reçu 
ce  titre  en  souvenir  de  la  mère-pairie,  quand  la  colonie  fut  dé- 
tachée de  la  métropole  ?  St  Georges,  »  le  chevalier  du  Christ,  > 
était,  on  le  sait,  le  protecteur  de  Gênes^  ;  et,  à  la  restauration 
byzantine,  les  débris  du  palais  du  podestat  vénitien  à  Constan- 
tinople,  démoli  par  les  Génois,  furent  envoyés  à  Gênes  par  ceux- 
ci  pour  y  être  employés  à  la  construction  de  l'église  St-Georges, 
dans  la  métropole  ^. 

La  mahone  ou  banque  de  St-Georges  était  l'an  des  princi- 
paux établissements  financiers  du  moyen  âge*;  et  ce  fut  al 
magistrato  di  S.  Giorgio,  dont  les  membres  étaient  dits  com- 
pères de  St  Georges,  que  Gênes,  à  l'époque  de  la  conquête 
ottomane,  remit  la  souveraineté  des  colonies  du  Levante 

Aussi  tout  en  n'étant  pas  la  principale  église  de  Galata,  selon 
l'ordre  hiérarchique  et  religieux,  l'église  St-Georgea  parait-elle 
avoir  succédé,  au  point  de  vue  politique,  à  celle  de  St-Michel  ; 
c'était  là,  qu'en  souvenir  du  protecteur  de  l'ancienne  métropole, 
on  célébrait  la  fête  patronale  et  nationale  de  St  Georges,  pro- 
tecteur de  la  République  de  Gênes. 

Pierre.  Ce  local  fut  occupé,  à  certaine  époque,  par  l'ambassade  rrançalae,  et 
plus  tarJ  par  le  consulat  de  la  même  nation.  (V.  ce  que  nous  disons  à  pro- 
pos de  St-Benoll.) 

<  Sauli,  for.  lauft. 

>  Sauli,  toc.  lau'l.,  II,  75. 

"  Du  Congo,  Hittoire  'le  l'empire  de  CP..  1826,  360. 

*  Depping,  loe.  laud.,  I,  EIT;  II,221;Matastrie,  HUtoIrt  de  l'île  de  Ckgprt, 
m,  64. 

*  Sauli,  loe.  laad.,  II,  173. 


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On  lit  dans  une  lettre  de  M.  de  Germigny,  du  17  mai  1580  ', 
(  le  treizième  du  mois  d'avril  (V,  S.),  pour  la  St  Georges,  ayant 
esté  invité  à  une  fête  solennelle,  par  les  Seigneurs  Pérotz,  en 
l'église  dudit  saint,  je  m'y  trouvai  avec  le  sieur  vice-baile  des 
Vénitiens,  qui  m'accompagna,  ensemble  les  dits  Pérotz,  où  l'è- 
vèque  de  Scio,  estant  à  présent  en  ce  lieu,  fit  l'office  et  ung 
sermon -.  » 

En  1796,  le  T.  R.  Ab.  D.  Guillaume  Marquis,  Vicaire  général 
du  patriarcat  de  CF.,  déclara  Fêtes  de  précepte,  comme  avant 
la  conquête,  le  23  avril,  fête  de  St  Georges,  et  le  16  août,  fête  de 
St  Roch,  le  premier  comme  patron  secondaire  de  la  ville,  le  se- 
cond comme  son  protecteur  contre  la  peste.  Trois  ans  plus  tard, 
Mgr  Fonton  prit  une  décision  du  même  genre,  mais  elle  ne  fut 
pas  approuvée  par  la  S.  Congrégation,  qui  ordonna  que  les  deux 
fêtes  seraient  célébrées  solennellement  à  leur  jour  d'incidence, 
28  avril  et  16  août,  mais  que  la  seconde  seulement  serait 
chômée.  Ce  décret  est  encore  en  vigueur. 

A  l'arrivée  des  Jésuites,  en  1583,  l'ambassadeur  d'Angleterre 
demanda  l'église  St-Georges,  sous  le  prétexte  que  c'était  une 
église  abandonnée.  M.  le  Baile  de  Venise,  pour  lui  ôter  ce  pré- 
texte, y  envoya  son  aumônier  pour  y  dire  la  messe;  et  le  P.  Man- 
cinelli,  jésuite,  y  allait  chaque  jour,  pour  faire  le  catéchisme  aux 
enfants;  par  là  ils  empêchèrent  que  cette  église  ne  devînt  le 
<  prêche  »  des  Anglais^. 

L'église  de  St-Georges  est  citée  par  Crusins*  au  nombre  des 

'  Sfgociationa,  etc.,  [11,904. 

»  V.  St-flenolt.  oh.  V  sup. 

3  1^  baile  vùniden  Matteo  Zane,  dans  son  Mémoire  de  1594  {Reliu.  cen. 
3-  série,  IIl,  405).  rapporte  le  fait  suivant  :  «  L'ambasciatore  d'Inghilterra 
ultimamente  si  i  atlentato  di  domandare  una  ckieita  rattolira  di  Fera,  per  in- 
trodurvi  un  predicatore  calvinista,  che  easo  dice  di  cbiamare  da  Ginevra.  > 
Il  ne  parait  pas.  toutefois,  d'après  les  termes  mêmes  de  ce  dire,  ni  d'apràs  la 
tradition.que  le  fait  ait  jamais  reçu  son  exécution.  Il  existe  actuellement  à  P^- 
ra.quatre  chapelles  protestantes  :  l'une  dans  l'enceinte  du  palaîad'Anglelerre. 
une  autre  dans  celle  du  palais  de  Hollande,la  troisième  dans  celui  d'Allema' 
gne,  et  depuis  la  guerre  de  Crimée,  l'ambassade  d'Angleterre  a  obtenu  la 
concession  d'un  terrain,  sis  sur  la  colline  de  St-Théodore, probablement  làoii 
Bultan  Mehemmed  avait  établi  une  batterie  d'artillerie  contre  la  ville  de  CP. 
(Hammer,  II,  412.)  Sur  ce  terrain  l'ambatsade  anglaise  a  fait  construire  uns 
belle  église,  celle  du  Christ,  dite  aussi  ■  Mémorial  Church  n  :  elle  est  tout 
prés  d'une  mosquâe,  séparée  seulement  par  quelques  mélres- 

*  Turco-Grœcia,  52. 


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huit  églises  de  Péra.  Dans  sa  lettre  dn  21  octobre  1618,  an 
Père  Vicaire  général  des  Dominicains,  la  Comunità  rapporte 
que  St-Geoi^es  aurait  été  desservi,  quelques  années  avant  cette 
date,  par  un  conventuel,  pi)is,  successivement,  par  deux  capu- 
cins, un  prêtre  cbiote,  un  religieux  qui  'g  faisait  la  classe,  et, 
finalement,  par  un  dominicain.  Aa  départ  de  ce  dernier,  le 
vicaire-général  de  ces  réguliers  ayant  voulu  conserver  cette 
desservance,  il  en  résulta  des  démêlés  avec  la  Comunità  ;  %i, 
en  vue  probablement  de  trancher  le  différend,  celle-ci  aurait 
tenté,  en  septembre  1609,  de  faire  donner  ce  monastère  aux  Jé- 
suites, pour  y  établir  une  école  plus  rapprochée  que  l'abbaye 
des  habitations  franques  '  /  elle  s'adressa  à  M.  de  Brèves; 
alors  à  Rome,  en  lui  demandait  de  lui  prêter  son  appui,  dans 
ce  sens>  auprès  du  pape.  Des  ordres  furent  donnés  ;  mais  les 
Dominicains,  sur  l'ordre  de  leur  général,  continuèrent  d'occuper 
St-Georges,  où  ils  administraient  les  sacrements  et  faisaient  la 
classe  '^  ;  d'autre  part,  la  Comunità,  abandonnant  son  premier 
projet,  demanda  le  renvoi  du  difTérend  à  la  décision  du  Vicaire 
patriarcal,  et  consentit  à  ce  que  la  desservance  de  St-Georges 
fût  réservée,  à  tout  jamais,  à  l'un  des  trois  Ordres  :  Mineurs- 
observantins,  Dominicains  ou  Conventuels.  A  la  suite  de  ce 
compromis  et  après  examen,  le  P.  Giuseppe,  des  Mineurs-ob- 
servantins  de  St-François,  gardien-commissaire  de  Ste-Marie  de 
Pêrn,  t  vicario  patriarcale  générale  apostolico  délia  citfà  e  dio- 
cesi  Constantinopolitana,  »  débouta  c  le  vicaire  de  St-Pierre  de 
Péra  »  de  ses  prétentions  ;  il  aurait  ordonné  en  outre,  sous  les 
peines  canoniques,  d'après  le  P.  Barbieri,  citant  les  archives  de 

■  Comme  il  a  été  dit  (ch.  v,  St-Benolt,)  les  habitations  franquca  se  trou- 
vaient surtout  au  quartier  do  Percbembé-bazar,  dans  les  plus  anciennes  en- 
ceintes àe  Galata,  là  où  se  trouvait  aussi  alors  la  résidence  de  l'ambassa- 
deur de  France. 

^  D'après  le  registre  du  Procureur  de  St-Pi«rre,  la  desservant  de  St-Gforges. 
dominicain,  était  qualifié  de  Capellano  di  San  Giorgio,  ses  honoraires  lui 
étaient  ]jayés  au  couvent  de  St-Pierre,  et  se  montaient,  en  1613  et  Ifiia,  à 
720  aspres,  dout  SO  équivalaient  à  un  Aslàni,  ou  talari  au  lion,  de  Hollande. 
—  Les  archives  des  Dominicains  relatent  qua  ces  religieux  dessen'aient 
cette  église  en  1620,  et  qu'un  legs  rut  fait  par  moitié  entre  St-Georges  et 
St-Pierre;  Zorzi  Drapérla  étant  procureur  de  St'Geiirges,  en  1625.  Il  ne 
semble  pas  néaumoins  que  jamais  cette  église  ait  appartenu  aux  Domini- 
cains, quoiqu'ils  en  aient  eu  souvent  la  charge,  taus  doute  à  cause  du  voi- 

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—  290  — 

St-Antoine,  de  remettre  les  clefs  de  St-Georges  à  la  t  Comunità 
di  Para»,  qui  en  était  légitime  propriétaire.  Les  Dominicains 
la  desservaient  alors  depuis  dix  fins. 

Le  27  octobre  suivant,  la  desservance  de  St-Georges  était 
donnée  à  un  Mineur-Observantin  ;  et,  en  mai  1623,  cette  église 
étant  restée  close  depuis  plusieurs  mois,  la  Comunità  y  plaça 
un  desservant  chargé  de  la  tenir  ouverte,  choque  ma.i\a,coTn.me 
d'usage. 

Finalement,  cette  église  et  le  petit  couvent  en  dépendant 
furent  remis,  le  15juillet  1626,  aux  PP.  Capucins, venus  à  Coos- 
tantinople  par  l'entremise  de  M.  de  Cèsy,  ambassadeur  de 
France. 

Selon  un  document  manuscrit  faisant  partie  des  archives  de 
St-Louis,  les  premiers  Capucins  venus  à  CP.  furent  les  Pères 
Giovanni  Juarcz,  de  Castille,et  Giovanni,delaPouille,  (enl551) 
lesquels  ayant  été  arrêtés,  furent  envoyés  en  Egypte,  où  ils  mou- 
rurent dans  les  prisons.  Ces  missionnaires  ne  faisaient  pas  par- 
tie d'une  mission  régulièrement  constituée,  et  ils  ne  furent  pas 
remplacés. 

Mais,  en  1586,  M.  de  Lancosme  avait  proposé  au  roi  de 
remplacer  les  Jésuites  de  St-Benolt  par  des  cappuchlns,  et 
le  20  janvier  1588,  le  même  ambassadeur  écrivait  à  Henri  III, 
qu'il  avait  obtenu,  pour  ces  religieux,  <  ung  commandement  gé- 
nérai, afin  que  tousceux  de  leur  Ordre  pussent  seurementet  li- 
brement aller  et  venir  en  tout  cest  empire.  » 

D'autres  furent  donc  envoyés  à  CP.  en  1587,  (comme  il  est 
dit  Ch.  V,  St-Benolt).  S.  Joseph  de  Léonissa,  fut  le  plus  remar- 
quable de  cette  seconde  colonie  capucine  :  les  uns  succombèrent, 
victimes  de  la  peste,  les  autres  retournèrent  en  Italie.  Enfin, 
en  1635,  les  religieux  de  cet  Ordre  parvinrent  à  s'établir  déGniti- 
vement  en  Levant. 

Le  Cardinal  de  Richelieu  était  ministre  du  Roy  de  France, 
Louis  XIII,  et  le  P.  Joseph  de  Paris,  capucin,  plus  connu  sous 
le  nom  de  Père  Joseph  du  Tremblay,  était  secrétaire  et  conseil- 
ler de  Richelieu.  Or  le  Père  Joseph  avait  spécialement  à  cœur 
la  conversion  de  l'Orient,  comme  en  témoignent  ses  lettres  et 
son  poème,  la  Turciade.  Il  avait  été  nommé,  avec  le  P.  Léo- 
nard de  Paris,  préfet,  pour  dix  ans,  de  toutes  les  missions  des 
Capucins  français,  par  Bref  pontifical  d'Urbain  VIII,  avec  mis- 


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—  291  — 

sion  d'envoyer  des  religieux  en  Levant  et  spécialement  à  CP. 
Les  premiers  Pères  furent  les  PP.  Archange  des  Fossés,  ou  de 
Fossé,  Léonard  de  la  Tour,  Évanjîéliste  de  Reims,  et  Raphaël 
de  I;i  Neuville-Roy,  ou  de  Gompiègne.  Ils  partirent  de  Paris 
le  5  février  1626,  munis  de  lettres  royales  pour  M.  de  Césy,  am- 
bassadeur de  France  en  Levant,  ainsi  que  d'une  ordonnance 
royale  du  30  janvier,  de  la  même  année  recommandant  ces  reli- 
gieux «  à  tous  les  Rois,  princes,  seigneuries,  républiques  et  po- 
tentats des  lieux  de  leur  passage.  »  Arrivés  il  CP.iIsse  rendirent 
aussitôt,  (7  juillet  1026,)  à  «  la  maison  du  Roy,  aupri's  de 
M.  de  Césy,  auquel  ils  présentèrent  les  lettres  de  crédit  du 
Roy.  >  (D'après  des  documents  sérieux,  le  P.  Archange  de  Fos- 
sé, était  parent  de  M.  de  Césy  et  devait,  par  suite  en  être  bien 
connu.)  Pendant  huit  jours,  ils  occupèrent  un  logis  voisin  de 
l'ambassade,  «  pendant  que  lesMessieurs  de  Péra  se  disposaient 
à  les  accommoder  d'une  église  et  d'une  maison.  Du  consente- 
ment de  l'ambassadeur,  ils  allèrent  visiter  le  BaiJe  de  Venise, 
seigneur  Justinien,  le  Cavalier  Ros,  ambassadeur  d'Angleterre, 
et  l'ordinaire  (Vicaire  patriareal)....  Ils  se  rendirent  ensuite 
auprès  de  t  la  Communauté  des  Péraux,»  o,'i  ils  furent  introduits 
le  15  juillet,  en  un  lieu  qu'on  appelle  Ste-Anne.  On  leur  fit 
prendre  place  dans  la  principale  chaire,  destinée  pour  le  Vicaire 
patriarcal,  qui  est  le  Supérieur  ou  directeur  de  la  Communauté  ; 
et  après  le  discours  par  lequel  le  Père  Archange,  supérieur, 
oSrait  ses  services  spirituels  à  la  Communauté,  le  Sieur  Anto- 
naki  de  Negri,  prieur,  drogman  de  France,  souhaita  la  bienve- 
nue aux  religieux,  et  leur  promit  son  assistance.  Le  soir  même 
la  c  Communauté  »  vint  dire  au  Palais  de  France,  qu'ils  avaient 
décidé  de  donner  aux  Capucins  le  choix  de  l'église  St-Jean,  ou 
de  celle  de  St-Geot^es  du  Mont.  Les  Pères  acceptèrent  cette 
dernière  église,  quoique  fort  délabrée;  et  le  dimanche  suivant, 
19  juilletjils  en  prirent  possession'.  Le Supérieur,Père Archange 
des  Fossés,  y  dit  solennellement  la  messe,  en  la  présence  de 


■  Le  L'bro  maetlro  délia  Comunilà  rapporte,  in  exleruo,  le  texte  de  la  pa- 
tente délivrée  aux  Capucins,  et  les  mettant  en  possession  da  St-Oeorges. 
Cette  patente,  datée  de  Péra  le  15  juillet  IGîG.  est  signée  de  Negri,  prieur, 
Nicolo  Dmpéris.  sous-prieur.  Cet  acte  est  suivi  du  récépissé  de  cette  pa- 
tente, remis  à  la  Comunità  par  les  Pores,  sous  la  date  du  17  du  même 
mois.  Elle  est  signée  par  les  quatre  Pères. 


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tous  les  habitants  de  Péra,  cela  a  été  le  premier  établissement 
des  Capucins  Français  dans  le  Levant  ' .  » 

Dans  ces  actes  le  P.  Archange  est  qualifié  de  i  de  prédicateur 
capucin,  supérieur  des  PP.  Capucins  de  Galata  et  Péra,  Custode 
de  la  Custodie  de  Grèce,  quoiqu'indigne.  t  Les  Capucins  de  CF. 
ne  restèrent  pas  longtemps  isolés  dans  le  Levant  ;  vers  le  milieu 
du  siècle,  ils  étaient  partagés  en  trois  Custodies,  relevant  d'au- 
tant de  Provinces  françaises.  La  Province  de  Paris  avait  la  Cus- 
todie de  Grèce,  avec  douze  Stations,  savoir  :  celles  de  Galata  et 
de  Péra  à  GP.,  celles  de  Smyrne,  Chlo,  Athènes,  Napoli  de  Re- 
manie, .  Candie,  Naxie,  Paros,  Milo,  Syra  et  Quoch-adacy  ou 
Scala  nova  dans  le  golfe  d'Éphèse.  La  Province  de  Touraine 
avait,  en  Turquie,  la  Custodie  de  Syrie,  avec  sept  stations,  sa- 
voir :  Nicosie  et  Larnaca  en  l'Ile  de  Chypre,  Alep,  le  Grand 
Caire,  Diarbékir,  Ninive  et  Babylone.  La  Province  de  Bretagne 
avait  la  Custodie  de  Palestine,  avec  sept  stations,  savoir  :  Da- 
mas, Tripoli  de  Syrie,  Barut,  Saide,  et  trois  dans  les  montagnes 
du  Liban. 

Les  Capucins  de  St-Georges  acquirent  bientôt  certains  im- 
meubles, autour  de  leur  église  pour  le  développement  de  leurs 
œuvres.  L'un  des  Hudjets,  (titre  de  propriété),  délivrés  par  le 
Mehkèmè  de  Galata,  en  1040=1630,  porte  que  ces  immeubles, 
acquis  par  l'église  St-Georges,  quartier  de  Bereket-zadi,  à  Ga- 
lata, sont  acquis  au  nom  de  l'ambassadeur  de  France.  Dans 
deux  autres  Hudjets,  l'un  de  1651,  l'église  de  St-Georges  est 
qualifiée  d'  «église  franque  de  Galata,  au  quartier  de  Longiu- 
lazè.  t  Dans  un  autre,  de  1670  elle  est  appelée  i  l'église  Fran- 
que de  Galata,  ayant  un  puitS,  dans  son  enceinte.  » 

En  même  temps  que  les  Pères  prenaient  possession  de  l'é- 
glise de  St^eorges,  t  ils  se  mirent  aussi  dans  la  petite  maison 
qui  y  était  jointe,  du  côté  de  la  tramontane,  la  séparant  en  pe- 
tites cellules,  avec  un  petit  dortoir,  (c'est  ce  qu'on  a  appelé 
depuis  le  petit  couvent).,..  Ils  y  demeurèrent  jusqu'à  l'incendie 
de  Galata,  arrivé  le  11  avril  1660,  où  leur  église  de  St-Georges 
et  cette  petite  maison  furent  brûlées,  avec  six{?)  autres  églises 
latines.  > 


'  Il  était  bien  entendu  que  liis  Capucins  de  St-Georges  venaient  à  CP, 
tema  cura  parochiale,  s  disent  les  mémoires. 


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Dès  leur  arrivée,  les  Capucins  se  livrèrent  avec  zèle  à  tous  les 
travaux  du  ministère,  prédications,  catéchismes,  soins  des  pes- 
tiférés et  des  esclaves  dans  les  bagnes,  conversion  des  héré- 
tiques et  des  schismatiques.  Peu  après,  le  14  juillet  1628,  t  mes- 
sieurs de  la  Communauté  de  Péra  prièrent  le  P.  Archange  qu'ils 
fissent  aussi  l'esciiole  :  notre  habitation  de  St-Giorge  estant 
trop  petite  et  incommode  pour  tel  exercice,  ces  Messieurs  s'of- 
frirent de  louer  pour  cela  an  grand  magasin  fort  clair,  au  coing 
de  la  rue  de  St-Giorge,  de  notre  môme  côté  en  allant  à  St-Pierre.» 

Informé  des  fruits  spirituels  donnés  par  les  missions  des  Ca- 
pucins, le  Roi  Louis  XIII,  en  16S7,  leur  assigna  la  pension  al- 
louée jadis,  par  François  1",  aux  Observantins  de  Terre  Sainte. 
En  1628,  le  22  juillet,  il  leur  délivra  une  patente  signée,  au 
camp  devant  La  Rochelle,  déclarant  que  «  les  capucins  étaient 
placés  sous  sa  protection  spéciale,  et  que  les  Consuls  français 
les  pourraient  loger,  nourrir  et  admettre  pour  leurs  chapelains, 
excepté  ès-saints  lieux,  oii  lesdits  Pères  Cordeliers  ont  des  mo- 
nastères ou  couvents  de  plusieurs  religieux.  »  Ces  patentes 
furent  renouvelées,  confirmées  et  étendues  le  22  février  1644, 
le  17  mai  1675,  le  i"'  mars  1724,  etc.  Les  documents  authen- 
tiques sont  conservés  dans  les  archives  de  St-Louis  de  Péra  : 
ils  ont  été  publiés,  en  partie  dans  V Histoire  des  Missiojis  ca- 
pucines, du  T,  R.  P.  Rocco  da  Cesinale,  (Mgr  Rocco  Cocchia, 
archev.  de  Chîeti).Par  d'autres  lettres  patentes  du  17  août  1718, 
renouvelant  des  patentes  plus  anciennes,  une  pension  de  12,000 
livres,  dont  6,000  pour  les  missions  du  Levant,  fut  constituée 
aux  missions  de  l'Ordre,  sur  les  gabelles  du  Languedoc. 

La  maison  dont  il  a  été  question  plus  haut,  <  en  arrière  de 
l'église  St-Georges,  étant  trop  petite,  le  R.  P.  Joseph  de  Paris, 
ministre  d'état,  envoya  à  M.  de  Gésy,  l'ordre  d'acheter,  «  au 
nom  du  Roy,  comme  étant  acquis  et  payé  de  ses  deniers,  pour 
l'avancement  des  œuvres  de  Capucins,  la  maison  de  Stefani  Pi- 
ron,  jointe  à  l'église  de  St-Georges.  *  Le  premier  Hudjet  de 
cette  propriété  futdressé  en  juillet  ou'aotU  1U37,  et  déposé  aux 
archives  de  l'ambassade  de  France.  Cette  affaire  traîna  toutefois 
en  longueur  par  suite  des  créances  de  tiers  sur  le  vendeur  ;  elle 
fut  portée  en  arbitrage  devant  le  baile  vénitien,  Âloisio  Con- 
tarinî,  et  le  représentant  hollandais,  Cornélius  Haga,  qui  le 
29  juillet  1637,  rendirent  leur  sentence  arbitrale,  ordonnant  la 


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—  294  — 

remise  de  cette  maison  aux  mains  de  M.  de  Césy.  Un  hudjet 
pour  cette  maison  dit  qu'elle  est  située  à  Galata,  au  quartier  de 
Kysyp-Elias(?). 

Les  affaires  de  la  guerre  de  Crète  avaient  motivé,  le  18  mai 
1650,  le  départ  du  «  bail  Soranzo,  pour  Venise,  avec  tous  les 
marchands  vénitiens  ».  Le  3  novembre  1651  *  les  églises  latines 
furent  butlées,  (scellées)  à  l'occasion  d'un  vénitien  que  l'on 
cherchait.  Estant  advertis  que  l'on  avait  bulle  déjà  celle  de  St- 
FVançois,  les  Capucins  retirèrent  promptement  le  St-Sacrement 
de  leur  église  de  St-Georges,  et  les  ornements  de  la  sacristie,  ne 
sachant  pas  ce  pourrait  arriver.  Elles  demeurèrent  bullées 
l'espace  de  dix  jours,  et  ce  fut  le  Woivode  de  Galata  qui  les 
bulla....  lesdites  églises  furent  débuUées  au  nom  de  M.  l'am- 
bassadeur de  la  Haye  ;  et  MM.  Roboly  et  Legrand  qui  avaient 
été  mis  en  prison  le  jour  du  bulland,  pour  le  même  vénitien, 
ont  été  délivrés  par  sa  dite  excellence.  » 

Comme  antérieurement  les  Jésuites,  les  PP.  Capucins  furent 
chargés  aussi  de  négociations  tendant  à  l'union  des  deux  églises 
d'Orient  et  d'Occident.  Le  Père  Archange  des  Fossés,  dans  un 
de  ses  voyages,  présenta  au  Hoi  Très  Chrétien  une  lettre  du 
patriarche  de  CP.  <  suppliant  8a  Majesté  de  se  rendre  protecteur 
de  l'Église  d"Orient  ;  et  remit  en  créance  sur  ledit  Père  de  dire 
à  Sa  Majesté  l'état  de  ladite  église  ;  à  quoi  satisfaisant,  il  a  assu- 
ré S.  M.  que  ledit  patriarche  est  entièrement  orthodoxe,  même 
à  l'égard  du  Pape  et  du  St-Siège.  »  Le  Père  Archange  se  rendit 
aussi  à  Rome,  pour  informer  le  Pape  des  bons  sentiments  dudit 
patriarche.  Puis  il  revint  en  Levant  pour  achever  sa  mission  '. 

Le  Sieur  Torsia,  en  1652,  le  8  août,  prévientle  H.  P.  Thomas 
que  la  Comunità  écrivait  à  la  Sacrée  Congrégation  pour  sollici- 
ter son  élévation  à  la  charge  de  vicaire  patriarcal-. 

Gomme  nous  l'avons  vu  déjà,  «ne  cérémonie  spéciale  réunis- 
sait toute  la  Latinité  pour  la  commémoraison  des  morts.  Le 

I  Archives  des  Capucins.  Mémoire  au  sieur  de  la  Haye  Vantelet,  ambas- 
sadeur en  Levant.  Ce  patriarche  était  probablement  Cyrille  de  BSrée,  pa- 
triarche pour  la  troisième  fois,  et  qui  succéla  à  Cyrille  Lucaris,  lora  de  aa 
deu.^i6me  déposition;  il  fut  lui-mâme  déposé  et  exilé  en  1639.  1^  successeur 
de  ce  dernier,  Parthénios,  conrlanina  en  concile  les  doctrines  calvinistes  de 
Cyrille  [.ucaris. 

'  Le  F.  Thomas,  Cuslode,  est  inscrit  sur  la  pierre  tombale  des  Capucins, 
mort  de  peste  en  167L 


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—  295  — 

3  novembre  1653,  t  le  B.  P.  Thomas,  pro-vicaire  patriarcal, 
alla  otncier  aux  sépultures  de  morts,  assisté  des  carés  et  de  leurs 
religieux,  qu'il  laissa  aller  prier  sur  les  tombes  des  particuliers 
et  se  retira.  Ils  étaient  venus  à  St-G-eorges  le  prendre,  mais  il 
était  déjà  parti,  les  curés  et  autres  religieux  attendirent  le 
P.  Thomas  à  la  porte  de  l'ambassade  où  il  était,  et  allèrent  tous 
en  compagnie  aux  dits  sépulchres.  t 

€  Le  29  du  même  mois,premier  dimanche  de  l'Avent, M.  l'am- 
bassadeur vint  ù  St-Georges,  comme  il  sonlaît  aller  à  St-Fran- 
çois,  quand  le  vicariat  y  était.  Les  religieux  de  St-François,  St- 
Pierre  et  de  Sle^Marie,  tous  venus  pour  aider  au  P.  Tiiomas  à 
clianter  une  messe  haute,  et  ceux  de  St-Prançois  avaient  appor- 
té des  dalmatiques  violettes.  Le  Père  Robert  de  Vantelet  y  prê- 
cha en  français  à  toute  la  nation,  > 

Comme  St-François,  St-Pierre,  Ste-Marie,  Ste-Anne,  St-Sè- 
bastien  et  8t-Jcan,  l'église  de  St-Georges  fut  détruite,  dans 
la  nuit  du  10  au  H  avril  1660,  par  le  feu  c  qui  dévora  pres- 
que toute  la  ville  de  Galata  '  ;  et  mesme  année  fut  ladite  église 
rebasiie  en  forme  de  grand  magasin,  avec  des  chambres  au-des- 
sus pour  oster  tout  soupçon  que  ce  fnst  une  église  ;  mais  se 
doutant  bien  qu'avec  le  temps,  ledit  magasin  serait  converti  en 
église,  tout  le  bâtiment  fut  jeté  par  terre,  et  fut  conQsqué  au 
grand-seigneur  et  par  luy  fait  vacouf.  Puis,  la  mesme  année, la 
place  de  ladite  église  fut  achettëe  par  un  Turc,  pour  y  bastir;  et, 
en  échange  d'icelle,  il  en  donna  une  autre  à  la  mosquée  qui  es- 
toit  plus  à  l'avantage  d'icelle  mosquée  ;  ledit  Turc  vendit  encore 
une  partie  de  ladite  place  à  un  juif,  qui  y  bastit  une  maison  et 
le  reste  demeurant  en  cour,  sans  être  b&ti^.  > 

I  Archives  des  RR.  PP.  Cajmcina. 

»  Danason  Thi'ûtre  de  la  Turquie,  Paria,  1686,  p.  28<,in-4-,  Michel  FebTM 
rapporte  ce  fait,  dans  une  de  ses  parljea  Beuleinent  ;  mais  il  dit  avec  exacti- 
tude que,  ■  si  une  églite  vient  à  se  brûler,  les  Turcs  s'emparent  du  fond, 
c'est-à-dire  du  lieu  sur  lequel  elle  estoit  bastie,  en  sorte  que  les  religieux  ou 
les  chrétiens  auxquels  elle  appartenait  ne  peuvent  plus  rieu  prendre  A  cet 
espace  :ie  terre  qu'elle  occupoit,  ny  le  joindre  à  un  jardin  ou  k  une  court,  à 
moins  qu'on  ne  le  rachelte  d'eux.  .1  St-Georges  fut  dans  ce  cas,  et  il  eo  fut  de 
même,  plus  d'une  fois,  pour  St-Françoia  comme  on  l'a  vu  plus  haut. 

On  peut  consulter  sur  la  conservation,  la  réparation  ou  la  construction  des 
églises  en  pays  ottoman  notre  Étude  sur  la  propriété,  p.  97;  comme  anasl 
lea  dis|>ositions  di  Khatti-bummaium  de  1586,  modiSant  l'ancienne  jurispru- 
dence, tout  en  maintenant  les  principes. 


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On  lit  au  sujet  de  cet  incendie,  dans  un  mémoire  MS.  de  l'é- 
poque :  <  le  cinquièsme  de  may,  jour  que  les  Capucins  de  St- 
Georges  faisaient  l'office  de  St  Georges,  parce  qu'il  était  trans- 
féré, et  que  tous  les  autres  faisaient  l'office  de  St  Marc  aussi 
transféré,  le  feu  a  pris  la  maison  du  pâtissier  qui  demeurait  au 
pied  de  la  mosquée  de  Top-hana,  avec  le  vent  de  tramontane 
très  violent,  environ  une  heure  et  demie  devant  minuit,  dans  le 
temps  que  l'on  faisait  des  réjouissances  pour  la  première  allé  du 

GrandSeigneur Comme  le  vent  était  de  tramontane,  et  que  la 

mosquée  de  Top-hana  était  au-dessus  du  vent,  elle  n'a  point  été 
brûlée;  mais  le  feu  s'est  étendu  avec  tant  d'impétuosité,tout  d'un 
coup,  que  environ  en  vingt  heures  de  temps,  tout  Galata  a  été 
brûlé.  C'était  capable  de  faire  verser  des  larmes  de  sang,  voyant 
cette  si  grande  ville  réduite  en  si  peu  de  temps  dans  un  état  si  dé- 
plorable, qu'il  serait  impossible  avec  toutes  sortes  de  bombardes 
d'en  pouvoir  faire  autant.  On  avait  beaucoup  de  soin  des  hautes 
maisons  au-dessous  du  feu  ;  mais  cela  n'empêchait  pas  que  le 
feu  ne  prit  partout  par  les  charbons  qui  volaient  de  tous  côtés,  i 

M.  de  Nointel,  parti  pour  Constantinople  en  1670,  avait  pour 
instruction  c  de  demander,  en  premier  lieu,  que  les  Capucins 
français  qui  sont  à  Constantinople  pussent  relever  leur  église 
que  le  feu  avait  entièrement  consumée'.  >  La  négociation  abou- 
tit heureusement,  comme  le  constate  l'art.  42  des  Capitulations 
de  1673,  ainsi  conçu  :  (  On  n'inquiétera  pas  les  deux  Ordres  de 
religieux  français  à  savoir  les  Jésuites  et  les  Capucins,  sur  les 
églises  qu'ils  tiennent  en  Galata,  depuis  longtemps....  et,  parce 
que  l'une  de  ces  églises  a  été  brûlée,  nous  permettons  qu'elle 
soit  rebâtie  à  son  premier  état,  et  au  pouvoir  des  Capucins...  » 
Cet  article  c  assurait  aux  Jésuites  et  aux  Capucins  la  possession 
perpétuelle  de  leurs  deux  églises  de  Galata.  *  L'ensemble  de  ces 
dispositions  fut  considéré  d'une  telle  importance  que  les  docu- 
ments contemporains  les  qualifiaient  de  f  rétablissement  de  la 
foi  catholique  dans  l'empire  ottoman^.  > 


"  Chardin,  Voyage».  I,  47  ;  d'Arrîeux  dit,  de  son  côté  (Mémoire»  IV,  490)  : 
■  On  poursuivait,  auprâa  du  grand  lei^eur,  dans  le  temps  que  j'y  étais,  le 
rétablisBement  de  i'égliie  de  St-Georges  dee  Capucina.  • 

'  Cr.  d'.'Vrvieux,  MUmoire»,  IV,  395  ;  Chardin,  I,  63  ;  de*  Tmilfa  et  Jet  «J- 
pitulation»  de  la  France  en  Orient,  p.  1£0.  Les  capitulations  de  1740  ont  re- 
produit, art.  35,  l'art.  42  de  1673. 


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—  297  — 

Les  Capucias  rachetèrent,  pour  3600  piastres,  les  terrains  ac- 
quis «  par  le  turc  et  par  le  juif  >  dont  il  a  été  parlé  ;  et,  le  3  oc- 
tobre 1675,  OD  commença  la  reconstruction  de  l'église  ;  elle  de- 
vait avoir  trois  nefs;  mais  les  cintres  ayant  été  enlevés  trop 
précipitamment,  la  moitié  des  voûtes  s'écroula  ;  et  ce  ne  fut 
qu'au  mois  de  juin  1676,  que  M.  de  Nointel  obtint  une  nouvelle 
autorisation  pour  réparer  la  bâtisse  éboulée  '  ;  l'église  fut  cou- 
verte le  10  août  suivant;  et  le  6jaavier  1677,  <  fut  rebenitte"^ 
par  Mgr  Ridolfi  suffragant  et  vicaire  patriarcal  de  Constantin 
nople  ;  et  la  première  messe  par  luy  célébrée  pontiâcalement,  en 
présence  dudit  sieur  ambassadeur  de  Nointel  et  du  bail  de  Ve- 
nise, le  sieur  Morosini,  avec  un  très  grand  concours  de  peuple.» 

Ce  fut  le  dernier  office  pontifical  célébré  par  cet  évêque,  qui 
mourut  le  15  avril. 

On  a  pu  voir,  jusqu'à  ces  dernières  années,  au-dessus  et  £i 
l'extérieur  de  la  porte  d'entrée  du  temple,  donnant  sur  la  rue, 
gravée  eu  lettres  d'or,  sur  un  marbre  noir,  et  relouée  mainte- 
nant dans  un  coin  de  l'église,  l'inscription  suivante,  constatant 
c^  faits  : 

ANNO  REPARAT^  SALOTIS  1676,  TEMPLUM  HOC  JAMPRIDEM  D. 
QIORQIO  MARTYRI  DICATUM  INGENDH  GENERALIS  BX  PARTE  SUPEHSTES 
EXOTAVrr  INCLYTOM  NOMEV  LUDOVIGI  XIV  SEUPEB  AUGUSTI  ;  DE- 
VASTATOS  FLAMMARUH  VI  PAFUBTES  EREXTr  RE01S  CHRISTIAN  ISSIMl 
SUPREMA  MAJESTAS;  PRISTIN*:  STRUCTURE:  NOVDM  DEÇUS  ADDIDTr 
INGENITA  PIETAS  REGIS  BCCLESI^  PRJMOGENITI  ^  ;  DIE  VOGATIONI  fiEN- 
TIUM  SACRO,  OB  REGIS  REGUU  ADORATIONEM  A  REOIBUS  EXPIJRGARUNT 
HANUS  POSTIFICtE  ANNO  1677.  BEGIO  PATROCINIO  REOIS  A  DEODATI 
SDFFULSrr  ET  GORROBORAVn  OCOLATA  PRUDENTIA  EXfiELLESTISSIMl 
CAROLI  PRANCISa  OLIER,  MARCHIONIS  DE  NOINTEL,  REGH  ORATORIS, 
DJNOVATIONE  INITI  POEDEBIS  CAPTruLUM,  JAM  DJDÈ  A  55  AXMS  INTER- 
BUPTA,    EGREGII;M    PIGNUS    PIETATIS    REGI£    NEC    NON    ET  RELIGIONIS 

'  La  tloria  ilelle  MUtioni  ilei  Cappunfiini,  rapporte  la  version  italienne 
d'un  firman  qui  parait  répondre  à  la  nouvelle  autorisation  dont  il  est  fait 
mentiou  ici,  mais  le  savant  auteur  donae  pour  date  de  ce  document  »  Andri- 
nople,  1676. 

•  Cf.  ci-aprèa  g  St-Pierre. 

'  Le  titre  de  fiU  aîné  île  l'Églite  remonte  aux  premier!  temps  de  la  monar- 
chie française  ;  il  fut  solennel  le  ment  reconnu  par  le  traité  de  Pise  du  tZ  fé- 
vrier 1664,  conclu  entra  le  pape  Clément  IX  et  Louis  XIV, 


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Avrr.t:  au  ipso  pathibcs  GiPucaMS  pbovinci£  parisiensis  missiona.- 

RnS  APOSTOLir.IS  RESTlTtrrUM  ' . 

D'après  le  témoignage  du  P.  Rocco  da  Cesinale,  (Nfgr  Fr.  Roc- 
co  Cocchia,  arch.  de  Chieti,  loc.  lattd.  III,  158.)  qui  rapporte  la 
version  italienne  du  flrman  précité,  et  la  réponse  pontificale  qui 
y  aurait  été  faite  (?),  sultan  Mehemraed  IV  aurait  écrit  au  Sou- 
verain Pontife,  en  1678,  pour  assurer  sa  Sainteté  de  sa  bien- 
veillance envers  les  Capucins. 

Le  13  avril  16B8,  la  Sacrée  Congrégation  ordonna  au  Vicaire 
patriarcal  de  ne  faire  aucune  innovation  dans  le  couvent  de  St- 
Georges.  Le  prélat  avait  occupé  le  jardin  et  voulait  y  faire  des 
changements  :  l'ambassade  de  France  s'y  opposa,  porta  plainte 
à  Rome  et  enfin  eut  gain  de  cause. 

L'incendie  de  1696,  qui  consuma  St-Benott  et  St-François, 
détruisit  seulement  le  couvent  de  St-Geoi^es  ;  l'église  fut  sau- 
vée ;  mais,  dans  l'incendie  ultérieur  du  21  juillet  1731,  le  cou- 
vent devint  encore  la  proie  des  flammes,  et  la  sacristie  fut  aussi 
détruite;  ils  étaient  rebâtis  à  la  fin  de  l'année,  comme  le  cons- 
tate l'Inscription  suivante,  placée  dans  le  couvent,  et  rapportée 
par  Carbognano  -  : 

HOC  r>E\0BIUM  DIE  KXI  iCLH  ANNO  HEP.  SAL.  HDGCXXX.T  INCENDIO 
PE^ITUS  COSSUMiTUM  EXCELLENTISSIMUS  LUDOVICUS  SALVATOR  MAR- 
CHIO  DE  VILLEMEOFVE  REfH  A  SANCTIORIBUS  CONSIUIS  NEC  NON  APCD 
AHMED  m  ET  MAUUOUD  TURfi,  l.MP,  LUDOVICl  XV  QALL.  IMP.  CHRISTIA- 
NISSIMI  LEQATUS,  RELIGIO.NIS  IN  PABTIBUS  ORIENTIS  I>EFENSOR,  CAPOQ- 
NORUM  lîENEFJCËNTISSIMUS  ET  VIGILANTISSIMUS  PROTE(,T0R,  TUTIORI 
ELEGANTIORIQ.  MODO  PR^  EDIFIGARI  (ilTlSSIME  HtOT.URAVrT  ;  CUJUS 
TANTIQ.  IIEN'EPICH  MEM0HIÎ3  REM  POSTERITATI  M4XDAVERB,  DIB  IH 
UART.  MUCCXXXll. 

Cependant  le  couvent  de  St-Georges  n'était  pas  resté  long- 
temps le  principal  établissement  des  Capucins  à  CP.  Dès  1636 

1  Cette  pierre  et  celte  plact^e  intérieurement  dans  le  couvent  en  mémoire 
de  la  cession  do  cette  église  aux  Pérès  Bosniaques,  sous  l'internonciature 
du  Elaron  de  llruck.  ont  été  encastrées  dans  la  muraille,  derrière  le  niultrs- 

»  Lin-,  liiiil.,  p.  37.  En  1730,  la  nation  française  avait  attribué  une  alloca- 
tion annuelle  aux  Capucins.  {Urgintre*  'Ici  délibérât,  nation.) 


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ils  avaient  act^uis  dans  les  Vignes  de  Péra  le  terrain  sur  lequel 
se  trouve  encore  aujourd'hui  le  couvent  et  l'église  de  St-Louis 
de  Péra.  Comme  ils  étaient  chargés  de  tout  le  service  religieux 
de  l'ambassade  de  France,  ils  avaient  dû  suivre  les  ambassa- 
deurs ;  mais  ils  n'abandonnèrent  pas  pour  cela  la  station  de  St- 
Georges.  Un  rapport  adresséà  la  Sacrée  Congrégation,  en  1745, 
par  le  P.  Custode,  et  conservé  dans  les  archives  des  Capucins  de 
Smyme,  nous  dit,  en  ces  termes,  (juel  était  à  cette  date  son  état, 
et  à  quoi  s'occupaient  les  religieux,  qui  l'habitaient. 

t  La  Mission  de  St-Georges  est  située  à  Galata  de  CP.  au  mi- 
lieu de  la  rue  qu'habitent  tous  les  marchands,  Français,  Véni- 
tiens et  quelques  Arméniens,  appartenant  au  rite  catholique. 
Elle  est  très  utile  à  tous  parce  que,  depuis  l'aube  jusqu'il  dix 
heures,  et  le  dimanche,  jusqu'à  midi,  on  y  dit  continuellement 
la  messe,  et  on  y  entend  les  confessions  en  français,  grec,  ita- 
lien et  arménien.  On  y  prêche  tous  les  jeudis  de  carême,  en 
français  ou  en  italien  ;  tous  les  dimanchâs  et  fêtes  on  y  chante 
les  vêpres  et  l'on  donne  la  bénédiction  du  T.  St  Sacrement.  I^es 
troisièmes  dimanches  du  mois,  quaiid  la  persécution  contre  les 
Arméniens  catholiques  n'est  pas  trop  grande,  on  expose  le  T.  St 
Sacrement  et  l'on  prêche  en  arménien,  pour  la  confrérie  du 
Purgatoire  établie  dans  cette  église.  Tous  les  quatrièmes  di- 
manches du  mois,  à  cause  de  la  confrérie,  on  expose  la  relique 
de  St  Hoch,  avant  la  messe  conventuelle,  après  on  fait  la  pro- 
cession du  T.  St  Sacrement  et  on  donne  la  bénédiction. 

(  En  outre  depuis  quelques  années,  on  a  établi  auprès  de  cette 
église,  un  collège  de  Jeunes  gens  des  langues,  de  Naples,  qui 
doivent  être  instruits  et  formés  à  la  pratique  des  langues  fran- 
çaise, latine,  italienne,  turque,  grecque  et  arménienne.  Ce  collège 
qui  fonctionne  ad  instar  de  celui  de  St-Louis,  est  destiné  k 
fournir  des  drogmans  et  interprètes  pour  le  service  du  roi  des 
Deux  Siciles. 

ï  Enfin  on  fait  encore,  toute  l'année,  la  classe  et  le  catéchisme 
à  tous  les  petits  enfants,  français,  italiens,  grecs  et  arméniens. 
Avec  toasces  moyens,  je  puis  assurer  à  Vos  Éminences  que  les 
conversions  sont  nombreuses,  de  (îrecs  et  Arméniens  schisma- 
tiques,  qui  passent  au  rite  latin  après  avoir  fréquenté  notre 
église.  Dans  l'intervalle  de  leurs  travaux  les  Pères  assistent  aussi 
les  malades.  > 


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Nous  avons  reproduit  ce  document  parce  qu^  k  cette  date 
nous  en  possédons  peu  qui  nous  montrent  les  mlssioanaires  à 
l'œuvre,  et  nous  disent  leurs  occupations. 

En  1761,  StrGeorges  fut  profanée,  comme  les  élises  des  Jé- 
suites et  des  Dominicains,  par  l'arrestation  des  Arméniens  ca- 
tholiques c[ui  s'y  étaient  réfugiés  et  qu'on  conduisit  au  bagne'. 

Plus  tard,  M.  de  St-Priest,  comme  il  le  dit  dans  sa  lettre  du 
6  novembre  1 769,  au  duc  de  Choiseul,  eut  l'idée  d'établir  dans  le 
couvent  de  St-Georges  un  iiôpital  pour  la  marine  marchande 
française  ;  on  aurait  payé  aux  religieux  un  loyer  de  300  piastres. 
€  D  y  avait  k  cette  époque  jusqu'à  soixante-dix  navires  français 
dans  le  portde  Contantlnople.  t 

En  1783  les  Capucins,  dont  le  droit  de  propriété  sur  leur 
église  était  établi  par  le  rachat  qu'ils  avaient  fait  du  terrain 
(en  1675,)  vendirent  cette  église  à  Mgr  Fracbia,  vicaire-aposto- 
lique de  Constantinople,  pour  compte  de  la  Propagande.  St- 
Georges  devint  alors  la  résidence  de  Tévêque  suffragant  et  de 
son  clergé  séculier,  ce  que  constate  l'inscription  suivante,  rap- 
portée par  Carbognano  ^  : 

D.  0.  M.  DIVO  GIOEGIO  M.  niCATUM  TEMPLDM  USA  CUM  ADNEXIS  SIBI 
£DIBUS  OLIÎif  HR.  PP.  UiLLIGE  NATION,  CAPUCINORUM  EFFICACISSINEA 
MEDIATIONS  ET  OPERA  EXCELLMI  D.  EMMANUELÎS  FRANGISa  COMITIS  DE 
8.  PRIBST  REGIS  GHRISTIANISSIMI  Al)  POBTAM  OTHOMANAM  ORATOmS 
PER  SAC.  CONGREQ.  DE  PROP.  FIDE  ANNO  REPARAT*  SALUTIB 
MDCCLXXXIV  SUB  EJUSDEM  UAJBSTATIS  TUTELA  ET  PRESIDIO  IN  PERPE- 
TOUM  REMANSUBUM  NUMERATA  PECONIA  COMPARATUM  FUIT. 

La  vente  du  couvent  de  St-Georges  excita  un  certain  étonne- 
ment  parmi  les  Sdèles,  on  peut  cependant  en  donner  les  raisons. 
La  première  était  les  dettes  que  les  Capucins  de  la  Mission 
avalent  dû  contracter  pour  la  reconstruction  de  leur  église  de 
Smyme,  la  S.  C.  de  la  Propagande  leur  avait  avancé  de  l'argent 
et  tenait  à  rentrer  dans  ses  fonds.  La  seconde  était  le  désir  sou- 
vent formulé  par  les  Vicaires  patriarcaux  d'avoir  une  église  et 
une  maison  à  eux,  sans  être  obligés  d'aller  en  demander  à  des 
religieux  ;  la  troisième  était  la  difiîculté  que  commençaient  à 

<  Hammer,  XVI, 
^  L<K.  laud.,  p.  56. 


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—  301  — 

trouver  les  religieux  à  recruter  de  nouveaux  missionnaires,  de- 
puis les  ordonnances  de  la  fameuse  commission  des  réguliers, 
en  1768. 

Les  Capucins  touchèrent  32,000  piastres  pour  prix  de  leur 
couvent,  et  l'archevêque  eut  sa  catliédrale  et  sa  maison.  On  ne 
tarda  pas  néanmoins  k  en  chercher  de  plus  commodes,  et,  en 
1802,  Mgr  Fonton  se  transporta  à  l'église  de  la  T.  Ste  Trinité. 
Jusque  sous  l'épiscopat  de  Mgr  Htllereau,  certaines  solennités, 
auxquelles  assistait  l'ambassadeur  avec  les  deux  députés  de  la 
Nation,  et,  plus  tard,  ceux-ci  seulement,  étaient  célébrées  par  le 
Vicaire  apostolique  à  St-Georges,  notamment  le  Te  Deum  de 
tin  d'année. 

Sur  le  sol  de  l'église,  on  remarque  différentes  pierres  funé- 
raires, parmi  lesquelles  celle  qui  recouvre  la  sépulture  de 
Mgr  Frachia,  à  gauche  et  en  dehors  du  chœur,  côté  de  l'évan- 
gile ;  en  voici  le  texte  : 

D.  0.  M.  FRANaSCUS  ANT0NIU8  FRACHIA,  GONQREG.  S.  J.  BAPTISTa;, 
ARCHIEPISCOPUS  THEODOSIOPOLrTANUS,  VKIAR.  APOSTOLICUS  CONSTAX- 
TISOPOL,  RELiniO>aS  ZELO  HIISOUTATE  PIETATE  OMNIUMQUE  EGREGII3 
VIRTUTUM  OFFirjIS  CELEBERRIMUS  SEMPER  PAÏENS  NUMQUAM  EXCTOENS 
MAGNAS  EMENDICATAS  01*1S  EXl'LENDO  EGESTAT13  SUBSIDIO  EROQAVIT 
PAL'l'ERmUS,  PLTILUS  VIDUIS  CUJU3  STUDIO  ET  OPERA  D.  GIORGIO  M. 
DKIVTUM  TEMPLUM  SIBI  SUISQITE  l'OSTERIS  DILEC.TOOt^  SUO  GIPJIO  COM- 
I'AR.4T(IM  FUIT,  VIXIT  ASXOS  73,  TA.\DEM  DIL'TLllO  (sic)  MOltBO  PA- 
TIENTISSIME  TOLERATO  ANNO  A  PARTL- VIRG.  1795  II  KAL,  NOV.  EJU3 
DE  MANDATO.  H.  O.  E,  ', 

En  outre  de  cette  pierre,  on  voit  celles  de  Jean-François  Ro- 
boly,  négociant,  chargé  des  affaires  de  France  en  16C0,  jusqu'à 
la  venue  de  M.  da  la  Haye,  prédécesseur  du  marquis  de  \oin- 
tel  :  11  mourut  en  1689.  Celle  de  la  femme  de  Jean-Baptiste 
Fabre,  premier  député  du  commerce,  chargé  des  affaires  de  la 
nation,  en  1685,  jusqu'à  l'arrivée  de  M.  De  Girardin,  en  jan- 
vier 1686;  enfin  celle  de  Meynard,  chargé  des  mêmes  fonctions 
en  17..  (pro  regenostro  galllco,  régente...) 

■  Deux  barrettes  sont  nuspendues  à  la  voûte  du  chœur  :  l'une  est  celle  da 
MgrFTaobia  ;  l'autre,  celle  de  Mgr  Pecora,  son  coadjuteur  et  auccesseur, 
décédé  à  Galata,  le  28  février  1796.  (V.  notre  Compte-rendu  '.du  cimet.  cath. 
latin,  1867,  p.  lU.) 


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Après  le  départ  du  Vicaire  patriarcal  pour  Pèra,  l'église  St- 
Georgesfut  desservie  avec  plus  ou  moins  de  régularité,  par  des 
prêtres  séculiers  désignés  par  le  vicariat. 

En  1853,  le  vical-iat  apostolique  de  Constantinople  a  vendu 
l'église  St-Georges  auit  Mineurs-Observantins  bosniaques.  Une 
inscription  latine,  appliquée  dans  la  muraille,  à  l'enti'ée  de  la 
petite  habitation  que  les  PP.  Bosniaques  se  sont  réservée,  cons- 
tate que  cette  église  a  été  réparée  en  1854,  sous  le  régne  de 
S.  M.  sultan  Adul-Medjid,  et  par  les  soins  de  M.  le  baron  de 
Brnck,  internonce  d'Autriche  à  Constantinople. 

Le  courent  fut  acheté  en  même  temps  et  transformé  en  hô- 
pital, destiné  principalement  aux  malades  de  la  marine  Austro- 
Hongroise. 

Mais  cette  destination  du  couvent  de  St-Georges  ne  dura  pas 
longtemps,  en  1882  les  Pères  Bosniaques  le  cédèrent  aux  prêtres 
de  la  Mission  (Lazaristes)  qui  y  ont  établi  une  œuvre  allemande. 
L'hôpital  autrichien  a  été  transféré  ailleurs. 

Près  de  l'autel  de  St-Georges  se  trouve  encore  l'Aiasma,  ou 
puits  sacré,  à  l'eau  duquel  les  gens  du  pays  attachent  une  vertu 
particulière,  et  miraculeuse.  Ils  y  viennent  surtout  en  grand 
nombre  le  jour  de  la  fête  de  St-Georges. 

La  confrérie  de  St-Roch  qui  existait  dans  l'église  de  S-Georges 
fut  transférée  à  St-Pierre.  Elle  est  peu  à  peu  tombée,  et  il  n'en 
reste  de  souvenir  qu'un  plateau  d'argent  qui  servait  aus  quêtes 
des  confrères. 

La  confrérie  des  Ames  du  purgatoire  qui  y  avait  été  établie 
en  1738,  fut  unie  à  celle  du  même  nom  qui  existait  à  St-Louis. 

L'église  de  St-Georges  possédait  quelques  reliques  précieuses, 
de  Ste  Irène,  de  St  Georges,  de  St  Joseph  de  Léonissa,  et  enfin 
de  St  Roch.  On  n'en  conserve  plus  que  les  authentiques. 


su- 

sT-ix)i:is  (paroisse  de  l'ambassade  de  France.) 

Le  mouvement  qui  poussait  la  population  latine  vers  les 
hauteurs  de  Péra  avait  commencé  de  bonne  heure,  mais  il  s'ac- 


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centua  sensiblement  quand  les  ambassadeurs  des  puissances 
chrétiennes,  se  trouvant  trop  à  l'étroit  dans  les  murailles  de 
Galata,  s'y  construisirent  des  demeures,  simples  d'abord,  en- 
suite véritables  palais.  Dès  avant  1635,  nous  voyons  une  assez 
grande  quantité  de  maisons  t  dans  les  vignes  de  Péra.  »  Les 
ambassadeurs  avaient  amené  avec  eux  leurs  cours  fort  nom- 
breuses, ils  y  attirèrent  en  même  temps  un  cortège  d'autres  lia- 
bitants,  désireux  de  vivre  tranquilles  h.  l'ombre  de  leur  protec- 
tion. Mais  les  églises  n'étaient  pjis  aussi  faciles  ;"i  transporter  ou 
à  construire  que  les  malsons  :  les  capitulations  garantissaient, 
il  est  vrai,  l'existence  de  celles  qui  étaient  à  Galata  an  moment 
delà  conquête,  1453,  mais  elles  défendaient  en  même  temps 
d'en  construire  de  nouvelles.  Il  fallait  cependant  pourvoir  aux 
besoins  religieux  de  la  population  de  Péra  :  les  Capucins  furent 
les  premiers  à  s'y  établir,  et  leur  église  de  SI^Louis  est  la  plus 
ancienne  de  toutes  celles  que  nous  y  voyons  aujourd'hui. 

Cet  édifice  religieux  fut  le  premier  qui  ait  été  placé,  il  Cons- 
tantinople,  sous  l'invocation  du  saint  roi,  dont  le  nom,  en 
d'autres  temps,  eut  un  si  grand  retentissement  dans  les  contrées 
de  l'Orient,  et  que  les  historiens  orientaux  désignent  eux- 
mêmes  par  le  titre  de  Melik  elafrendj  i  le  Roi  des  Francs,  »  el 
Francis  <  le  Français,  »  ou  même  Ré  dé  Frans  s  le  Roi  de 
France'.  » 

La  liturgie  du  diocèse  de  Paris  (prose  des  vêpres  de  la  fé- 
rié) retrace,  dans  une  éloquente  brièveté,  les  hauts  faits  de  l'il- 
lustre guerrier  chrétien-  : 

f  Saint  monarque  !  la  gloire  de  Dieu  t'appelle  k  de  nouveaux 
combats  !  Tu  vas  porter  la  guerre  aux  infidèles,  sous  l'étendard 
de  Jésus-Christ;  la  Croix  est  le  gouvernail  de  tes  vais-seaux,  la 
sainte  espérance  en  est  l'ancre  inébranlable  ; 

<  En  mourant,  tu  triomphes  ;  la  mort  t'enlève,  mais  en  même 
temps  t'assure  la  victoire  \  avant  même  la  sépulture,  ton  corps 
est  couvert  de  lauriers  I...  Mais  le  Ciel  te  réserve  un  triomphe 
bien  plus  glorieux  :  les  astres  forment  ta  couronne. 

c  Tes  cendres  rendues  à  la  patrie  seront  pour  elle  une  égide  ; 


'Cf.   Historien*  dex   croita'le»  :  Kitdd  latail-ulaJthbâr,  An   mon  ms.;  A- 
botd-fida,  éd.  deConstantinople,  III,  p.  189. 
*  «  Te  sancte  rursus  Ludovice  pnelia,  etc.* 


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et  pendant  que  ton  ftme,  au  milieu  des  lis  immortels,  repose 
dans  le  sein  de  Dieu,  tes  regards  bienveillants  ne  cesseront  de 
protéger  la  Gaule  !  » 

L'hôpital  de  St-Benoit  parait  n'avoir  été  placé  sous  le  même 
vocable  de  St-Louis  qu'en  1697. 

Dès  l'avènement  de  Louis  XIII,  M.  de  Salignac,  (on  l'a  vu  au 
chapitre  v,  St-Benoît,)  avait  fait  célébrer  la  f&te  de  St  Louis 
f  avec  grand  appareil,  comme  solennelle  pour  la  nation  fran- 
çaise. » 

"Le  renouvellement  du  vœu  par  lequel  Louis  XIII  plaça  la 
France  sous  la  protection  de  la  sainte  Vierge  (1638)  fut-il  célé- 
bré le  15  août  de  chaque  année  dans  la  chapelle  nationale  de 
St-Louis  ',  comme  cela  se  pratique  encore  de  nos  jours  dans  la 
mère-patrie,  ainsi  que  l'attestentles  deux  dernières  strophes  de 
la  prose  de  la  messe  du  jour  (liturgie  du  diocèse  de  Paris)  ? 

Ad  Deum  ut  adeant 
Per  te  vota  transeant  ; 
Non  fas  matrem  rpjici, 
Aniel  tuam  Galliam  ; 
Régi  det  justitiam, 
flebi  pacem  supplici  ! 

Voici  maintenant  comment  s'établit,  d'après  les  Mémoires  des 
Capucins,  la  première  habitation  de  ces  religieux  à  Péra,  où  se 
trouvaient  les  ambassades.  Les  Jésuites  ayant  été  chassés  de  St- 
Benolt  s'étaient  réfugiés  auprès  de  l'ambassadeur  de  France, 
M.  deCézy,alors  àBujuk-dèrè,  à  cause  delà  peste;  mais  lorsque 
les  deux  PP.  Jésuites,  qui  étaient  seuls  tolérés  à  CP.,  purent  ren- 
trer à  St-Benolt,  le  14  juillet  1628,  ils  furent  remplacés  auprès 
de  l'ambassadeur  par  deux  Capucins,  qui  commencèrent  ainsi  à 
remplir  les  fonctions  de  chapelains  de  l'ambassade  de  France. 
La  peste  terminée,  ils  rentrèrent  h  Péra  avec  l'ambassadeur. 

'  La  procession  du  va'U  de  Louis  XIII  avait  lieu  Bolennellement  au  coaau- 
lat  de  France  d'AIep,  en  1681,  selon  le  rapport  du  chevalier  d'Arvieu-i,  con- 
signé dans  aes  Mémoirat  (VI,  177),  lequel  reproduit  le  texte  entier  de  la 
Dêrlaration.  du  roi  Louis  XIII,  par  laquelle  il  met  ton  i-o'jaiimc  toiia  la 
protection,  de  la  trft-tain.te  Vierge.  Avant  la  procession  faite  pour  cette  so- 
lennité, le  consul  d'Arvieux  faisait  lecture  de  cette  Déclaration  à  la  nation 
assemblée.  Jusqu'à  1930,  cette  procession,  à  laquelle  la  famille  royale  assis- 
tait, se  rendait  solennellement  de  l'église  St-Germain  l'AuJterrois,  de  Paria, 
à  l'église  métropolitaine. 


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—  805  — 

Or  l'école  des  Capucins  à  St-Georges  étant  mal  commode  et 
éIoi;;née,  c  MM.  de  la  Communauté  des  Péraux  >  demandèreot 
au  R.  P.  Archange  des  Fossés  d'en  ouvrir  une  autre  dans  leur 
voisinage.  Le  supérieur  se  rendît  à  leurs  instances,  et  comman- 
da au  P.  Ttiomas  de  Paris  et  à  son  compagnon,  qui  étaient  au- 
près de  l'ambassadeur,  d'ouvrir  une  école  près  du  logis  de 
France.  «  Pour  ce  sujet,  disent  les  archives  de  St-Louis,  (Re- 
gistre I,  f.  5.)  ils  prirent  k  louage  une  vieille  maison  qui  appar- 
tenait à  la  Signora  Subrana,  à  30  piastres  par  an,  que  la  t  Co- 
munità»  paj'ait,  et  tous  ceux  de  ce  quartier  se  cotisèrent  de 
sorte  qu'ils  dépensèrent  40  piastres  pour,  accommoder  ladite 
eschole  et  trois  chambrettes  de  planches  au-dessus.  Le  jardin 
de  ladite  maison  aboutissant  au  logis  dudit  aml>assadeur,  on  y 
fit  une  porte  de  communication.  » 

«  Le  P.  Thomas  ouvrit  l'eschole  et  y  vinrent  les  enfants,  peu 
de  temps  après  Pâques  1629  j  mais  il  n'y  eut  pas  d'abord  de 
chapelle  ;  les  Pères  allaient  dire  leur  messe  à  St-Georges.  L'es- 
chole devint  nombreuse,  d'enfants  des  premières  familles  de 
Péra,  les  parents  voyant  les  progrès  des  enfants,  non  seulement 
dans  les  bonnes  lettres,  mais  dans  la  civilité  et  dans  la  pratique 
d'une  vie  vertueuse  et  chrétienne.  » 

Les  RR.  PP.  Capucins  acquirent  en  163'i,  à  Péra,  l'emplace- 
ment dit  Cahona,  agrandi  en  1651-52,  par  d'autres  achats,  où 
se  trouvent  actuellement  la  chapelle  St-Louis,  le  couvent  des 
Pères  et  des  maisons  particulières,  propriété  du  couvent;  le 
tout  formant  un  ilôt,  enclos  et  fermé,  sis  au-dessous  de  !a  léga- 
tion de  Hollande,  et  à  droite  de  la  cour  d'honneur  du  palais  de 
l'ambassade  de  France,  en  venant  de  la  grand'rue  de  Péra. 

La  première  acquisition,  faite  par  M,  de  Marcheville,  am- 
bassadeur de  France  (de  1631  à  1634),  donna  lieu  à  la  rédaction 
d'un  hudjet,  passé  au  mehkèmè  do  Cassim-pacha;,  au  nom  de 
l'amba-ssadeur  de  France,  Henri,  fils  de  Renaut,  (Marcheville,) 
pour  un  emplacement  Mulh,  sis  hors  de  Galata,  an  quartier  dit 
Serai,  (Galata-séraï',)  en  1031=1651,  pour  propriété  mulk,  de 

1  DanB  un  hudjet  racoaf  de  1216  de  l'bégire,  remplacement  de  la  rue  de 
Pologne  cODligu  à  l'ambassade  de  France,  est  dit  emplacement  aia  au  quar- 
tier Toûm-toàm,  dans  la  capitale  de  Oalato  fma/iroucU  gkalatarla,  loùm- 
toàm.  mahuUirindi  kialn  etc.)  L*  texte  de  ces  documents  se  trouve  dans  les 
archives  de  St-Louis.  la  version  italienne  a  été  imprimée  dans  la  Sioria 
délie  miettonl  dei  Cappuccini,  III,  9S. 


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Cocona,  fille  de  Djiban,  à  Louis,  drogman  do  France  ;  dans 
un  autre  hudjet  de  1056=1661,  la  Cocona,  de  qui  les  Pères 
ont  acheté  leur  propriété,  est  dite  Cocona  bînt  Politî,  fille 
d'Hippolyte.  Ce  fut  le  couimencement  de  l'établissement  des 
Capucins  à  Péra. 

Par  Brevet  royal  du  14  juillet  1637,  •/.  le  Roy,  en  considéra- 
tion des  fruits  retirés  de  la  mission  des  Capucins,  et  pour  leur 
donner  le  moyen  de  contribuer  encore  davantage  à  l'instructioa 
et  à  l'édification  du  prochain,  par  l'ouverture  d'une  eschole  où 
l'on  enseignerait  k  la  Jeunesse  ce  qui  est  de  la  piété  et  de  la 
doctrine  chrétienne,  accorda  aux  Capucins,  et  leur  fit  don  d'un 
logement,  qui  est  derrière  un  bastinoent  nommé  Château-Gail- 
lard, en  la  Maison  de  P>ance,  audit  CP.,  lequel  logement  aurait 
été  employé  ci-devant  pour  servir  aux-dits  Capucins;  et  qui 
depuis,  aurait  été  employé  à  d'autres  usages,  pour  estre  doré- 
navant et  à  toujours  ledit  logement  habité  par  lesdits  Capu- 
cins. »  Cette  donation  fut  confirmée  par  un  autre  décret  royal 
du  12  juillet  1638,  donné  à  St-Germain-en-Laye. 

Selon  les  remarques  écrites  de  la  main  du  P.  Romain,  une 
<  veuve  Bon  fit  donation  aux  Capucins  d'une  petite  maison 
qu'elle  avait,  où  fut  plus  tard  bâtie  la  porte  de  la  cour  des 
Jeunes  de  langues  '.  > 

Peu  à  peu  on  fit  dans  la  maison  une  sorte  de  chapelle,  sur- 
tout pour  les  enfants;  mais  ou  la  dissimula  le  mieux  que  l'on 
put  ;  l'autel  était  dans  une  espèce  d'armoire,  fermant  avec  des 
portes  :  on  les  ouvrait  le  matin  pour  la  messe,  on  les  fermait 
ensuite,  et  la  pièce  paraissait  Être  seulement  une  école,  i  On  ad- 
mettait cependant  les  parents  au  service  religieux  qu'on  y  fai- 
sait, ils  étaient  avertis  de  l'heure  parles  escholiers:  >  les  choses 
restèrent  en  cet  état  jusqu'en  1640. 

Le  mois  de  février  1642,les  Capucins  commencèrent  à  dire  la 
messe  pour  l'ambassadeur,  dans  une  grande  salle  attenante  à  son 
palais.  (L'amba-ssadeur  était  alors  M.  de  la  Haye  de  Vantclet.)  La 
communauté  n'était  pas  nombreuse  :  jusqu'à  l'incendie  de  1660, 
elle  ne  se  composait  que  de  deux  religieux,  mais  après  le  dé- 
sastre subi  parSt-Georges.Ies  deux  familles  se  réunirent àPéra, 
et  il  semble  que  dès  lors  cette  maison  devint  la  première  de  CP. 

I  Ltltre  de  M.  de  St-Priest  à  U.  le  duc  de  Choiaeul,  ti  août  1774. 


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—  807  — 

II  fallait  donc  l'agrandir.  En  1653  on  arait  acqnù  la  portion 
de  jardin  enfermée  entre  f  la  salle  du  Roy  et  la  fondation 
royale  »  :  en  1659, 1673,  1731,  on  Qt  de  nouveaux  achats,  mais 
non  sans  peine  et  sans  de  grands  embarras.  Les  religieux  ne 
pouvaient  ordinairement  acquérir  par  eux-mêmes,  il  leur  fallait 
se  servir  d'intermédiaires,  et  ces  derniers  n'étaient  pas  toujours 
bien  fidèles.  Les  archives  des  maisons  religieuses  sont  remplies 
de  pièces  relatives  aux  procès  qu'on  dut  intenter  à  ces  procu- 
reurs pour  se  faire  rendre  justice.  Le  SI  décembre  1729,  les  Ca- 
pucins échangèrent  une  partie  de  leur  jardin,  joignant  la  cban- 
cellerie,  contre  divers  bâtiments  et  dépendances  que  le  vicomte 
d'.\ndressel  avait  fait  construire  à  Belgrade  ;  et  le  29  dé- 
cembre 1733,  ils  acquirent  un  terrain  avec  bâtiments  et  ameu- 
blement de  maison  de  campagne  dans  la  même  localité.  D'après 
un  budjet,  passé  au  mehkèmë  de  Galata  en  1134=1731,  une 
partie  de  cet  immeuble  était  destiné  à  l'habitation  des  c  Jeunes 
de  langues.  > 

Ce  fut  peu  après  1660  que  l'on  bâtit  l'église  de  St-Louis:  la  pre- 
mière épîtaphe  que  nous  y  remarquons  est  celle  de  M.  l'abbé  de 
Nointel,  frère  de  l'ambassadeur,  mort  en  1773.  Ce  n'était  d'a- 
bord qu'une  longue  salle,  dit  le  Père  Romain  :  il  y  ajouta  lui- 
même  les  bas  côtés,  en  1736  :  enfln  du  temps  de  M.  des  Âlleurs 
fils,  (ambassadeur  de  1747-1755),  il  la  reconstruisit  presque  en 
entier,  ce  dont  il  rend  compte  en  ces  termes  :  *  toute  la  dépense 
de  cette  réédiScation  s'est  trouvée  dans  la  charité  des  fidèles,  et 
surtout  de  M.  le  comte  des  Alleurs  et  de  Madame  l'ambassa- 
drice... le  peu  qui  a  été  fourni,  soit  de  la  part  du  Roy,  soit  de 
celle  de  la  Nation,  n'a  été  qu'à  titre  d'aumône....  la  dépense  a 
monté  à  plus  de  9240  livres.  > 

Le  chevalier  d'Arvicux  cite  la  chapelle  du  palais  de  France 
à  l'occasion  du  Te  Deum  que  M.  de  Nointel  y  fit  chanter,  le 
21  juillet  1672,  à  propos  de  la  naissance  d'un  second  duc  d'An- 
jou et  des  grands  avantages  que  le  roi  avait  remporté  sur  les 
Hollandais,  c  Tous  les  religieux  s'assemblèrent  dans  la  grande 
salle  du  Palais  ;  les  nations  amies  s'y  rendirent  aussi  et  firent 
leurs  compliments.  L'évèque  latin  de  la  ville  y  voulait  assister 
pontiiicalement  ;  mais  le  Père  Michel-Ange  de  Paris,  capucin, 
cbapelin  et  aumônier  de  M.  l'ambassadeur  s'y  opposa  et  ne  vou- 
lut jamais  se  relâcher  de  ses  droits  vrais  ou  prétendus,  quelque 


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chose  qu'on  pnt  lui  dire.  Il  officia  donc  dans  la  chapelle  du  pa- 
lais de  France,  et  l'évèque  ne  si  trouva  pas.  Le  chant  du  Can- 
tique fut  accompagné  de  cinq  décharges  de  vingt-cinq  boëtes. 
chacune,  que  l'on  tira  dans  le  boulingrin  du  palais  '.  > 

Le  désaccord  entre  les  Capucins  et  le  Vicaire  patriarcal  ne 
dura  pas  longtemps  cette  fois,  car  nous  voyons  Mgr  Ridolû  ve- 
nir bénir  solennellement  la  chapelle  de  St-Louis,  le  35  août 
1673,  le  jour  de  la  fête  du  Saint.  Elle  fut  alors  déclarée  «  cha- 
pelle ministérielle  >.  L'ambassadeur  de  France  (sans  doute 
M.  de  Nointel.)  avait  pu  obtenir  un  Ûrman  pour  l'ouverture  de 
cette  nouvelle  église. 

Le  gouvernement  français  qui  avait  spécialement  encouragé 
l'établissement  des  Capucins  français  en  Orient,  pour  le  déve- 
loppement de  l'instruction,  songea,  sous  Colbert,  à  tirer  un 
profit  pratique  de  cette  institution,  pour  le  service  de  l'État.  Un 
arrêté  du  Conseil  royal  du  commerce,  en  date  du  18  novembre 
1669,  décida  que,  tous  les  trois  ans,  on  enverrait  au  couvent 
des  Capucins,  à  Constantinople  et  à  Smyrne,  six  Jeunes  de  lan- 
gues: le  31  octobre  de  l'&nnëe  suivante,  le  Conseil  d'état,  en 
confirmant  cette  décision,  résolut  l'envoi  annuel  de  six  Enfants 
de  langues  pendant  trois  années  de  suite  dans  les  mëmea 
échelles  2.  Puis  le  7  juin  1718,  le  Conseil  du  Roi  fixait  à 
douze  le  nombre  des  Jeunes  des  langues,  entretenus  à  GP  ^. 

Ces  jeunes  gens  furent  établis,  dans  le  principe,dans  une  partie 
du  hÂtiment  donné  par  le  Roy  aux  Capucins,  et  qui  servait  en 
même  temps  pour  la  communauté  des  Pères.  En  1673,  un  corps 
de  logis  spécial  fut  construit  par  les  soins  de  M.  de  Nointel, 
pour  l'habitation  des  Jeunes  de  langues,  sous  le  nom  de  «  Col- 
lège des  Pères  Capucins  de  St-Louis.  >  Les  Jeunes  de  langues 
changèrent  plus  tard  de  domicile,  ils  se  trouvaient  en  dernier 
lieu  dans  la  partie  du  couvent  qui  avait  été  aménagée  en  cel- 
lules après  le  dernier  incendie  de  1831.  (Elle  a  disparu  dans  la 
reconstruction  de  1880).  Noua  ne  pouvons  suivre  cette  institu- 
tion dans  toutes  ses  péripéties,  nous  relevons  seulement  quel- 

•  Mémoires  du  Chevalier  d'Arvieux,  loc.  laud.  iv,  434. 

*  Le  R.  P.  Kocco  rapporte  la  vereioa  italienne  de  l'ordonnance  de  St-Ger- 
maln-eu-Laj'e. 

3  Noua  donnons  ici  les  dates  fournies  psr  M.  Declerc,  guide  des  consulats, 
elles  digèrent  un  peu  de  celles  données  par  les  archires  des  Capucins. 


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qoes  chiffres  :  du  10  juillet  1710,  au  1"  janvier  1726,  le  collège 
des  Capucins  a  fourni  au  service  du  Roy  et  de  la  Nation,  qua- 
rante trois  Jeunes  de  Langues,  pour  la  très  grande  majorité 
française,  parmi  lesquels  on  trouve  Ctiarles  Fabre,  1716,  Charles 
Fonton,  1717,  Antoine  Ruffin,  1718,  Jean  Michel  Vanture,  1718, 
Augustin  Fonton,  1734,  Antoine  Dantan,  1723.  En  1736,  les 
Capucins  reçurent  ofGcielIement  de  M.  de  Maupas  la  direction 
du  collège  des  c  Enfants  de  Langues  à  Constantinople,  »  et 
leur  chapelle  fut  entretenue  aux  frais  de  la  Nation. 

€  Le  jeudi  16  mars  1684,  M.  de  Guilleragues,  fit  célébrer, 
pour  le  repos  de  l'âme  de  la  reine,  un  service  funèl)re  dans  la 
chapelle  du  palais  de  France,  desservie  par  les  RR.  PP.  Capu- 
cins de  la  Province  de  Paris  :  toute  la  chapelle  était  tendue  de 
noir,  depuis  le  haut  jusqu'en  has,  le  tout  couvert  de  plusieurs 
écussons  aux  armes  de  la  Reyne  (Marie-Thérèse  d'Auh-iche, 
femme  de  Louis  XIV).  La  représentation  qu'on  avait  élevée 
vers  le  bout  de  la  nef  était  couverte  d'un  drap  mortuaire  char^fé 
de  deux  grands  écussons  aux  armes  de  la  Reyne,  et  brodé  de 
larmes  et  de  fienrs  de  lys,  or  et  argent;  au-dessus  se  trouvait 
un  carreau  avec  la  couronne  d'or  couverte  d'une  crêpe.  La  messe 
fut  célébrée  par  le  vicaire  patriarcal,  et  M.  l'ambassadeur  fut  k 
l'offertoire.  L'office  fini  l'archevêque  avec  la  mitre,  et  les  quatre 
supérietjrs  des  Dominicains,  des  religieux  de  St-Francois,  des 
Capucins  et  des  Jésuites,  vinrent  vers  la  représentation,  précédés 
de  tous  leurs  religieux,  un  cierge  à  la  main,  accomplir  les 
prescriptions  du  rituel  '.  > 

En  1685,  le  24  mars,  le  Père  Urbain,  custode,  demande  au 
Roy  que  la  Chapelle  Royale  de  St  Louis,  serve  de  sépulture 
aux  ambassadeurs.  Un  firman  obtenu  sur  la  demande  de  M.  de 
Girardin,  la  même  année  ou  l'année  suivante  (1097=1685-86} 
adressé  au  Kadi  de  Galata,  enjoint  k  ce  magistrat  de  permettre 
aux  Capucins,  chapelains  de  l'ambassade  de  France,  d'inhumer 
dans  leur  église,  située  hors  de  Galata,  près  du  Palais  de 
France,  les  ambassadeurs,  religieux  et  autres  personnes  de  dis- 
tinction. Nous  donnnerons  plus  bas  la  liste  des  religieux  inhumés 
à  St  Louis,  d'après  la  pierre  tombale  qui  recouvre  l'entrée  âa 
cavean. 

'  Archiïoa  de  l'ambassade  de  France. 


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—  310  — 

M.  le  Marquis  de  Ferriol  sollicita,  en  4702,  la  faculté  d'éri- 
ger en  paroisse,  povr  les  Français,  l'église  de  St-Louis  de 
Péra.  Cette  demandé,  combattue  par  les  Cordeliers  et  les  Ré- 
coUets,  quoique  appuyée  par  le  baile  des  Vénitieas,  ne  fut  pas 
admise  par  le  St-Siëge  ;  mais  la  S.  C.  de  la  Propagande,  par  un 
décret  du  3  décembre  1709,  reconnut,  comme  par  une  carte  de 
transaction,  aux  PP.'  Capucins,  la  faculté  de  donner  la  commu- 
nion pascale  et  les  autres  sacrements  paroissiaux,  aux  officiers 
de  l'ambassade,  tant  du  dedans  que  du  dehors  '.  Ce  droit  était 
antérieur  à  cette  date,  pour  la  chapelle  St-Louis  :  ainsi  dès 
1643  t  au  décès  de  M.  de  Fligny,  parent  de  M.  l'ambassadeur,  le 
P.  Jacques,  revêtu  du  surplis  et  de  l'estolle,  accompagné  du 
P.  Armand  et  de  tous  les  religieux,  fit  la  levée  du  corps,  qu'il 
accompagna  jusqu'à  la  porte  de  la  rue,  où  le  R.  P.  Vicaire  pa- 
triarcal, qui  attendait  là,  le  reçut  dudit  P.  Jacques,  en  qualité 
de  chapelain  de  M.  l'ambassadeur,  et  fut  l'enterrer.  Le  P.  Jacques 
et  le  P.  Armand  ne  furent  pas  plus  loin.  »  Il  en  fut  de  même  à 
la  mort  de  M.  Fonton  interprète  de  France,  en  1753. 

M.  le  comte  desAlleurs,  ambassadeur  de  France  en  1711,  lais- 
sa, en  mourant,  son  cœur  aux  Capucins:  t  il  fut  placé  dans  la 
chapelle  de  St-Eélix",  où  il  est  aujourd'hui.  Le  22  janvier  1716, 
la  cérémonie  funèbre  eut  lieu  avec  toute  la  pompe  possible  ;  l'é- 
glise était  toute  tendue  de  noir,  depuis  le  haut  j  usqu'en  bas  :  une 
belle  pyramide  au  milieu  toute  illuminée,  au  haut  de  laquelle 
on  avait  placé  le  coeur.  La  messe  fut  chantée  par  Mgr  l'archevêque, 
et'l'oraison  funèbre  prononcée  par  le  P.  Thomas  de  Paris,  cus- 
tode, où  se  trouvèrent  leurs  exe.  de  Venise.  » 

Les  f  mémoires  des  Capucins  »  nous  fournissent,  comme 
suit  un  rapport  sur  le  cérémonial  religieux  observé  à  l'arrivée 
des  ambassadeurs  de  France  à  CP.  f  M.  le  Marquis  de  Bonnac 
(1716-1724)  arrivai  CP.  le  4  octobre  1716;  il  fut  reçu  à  la  porte 
de  l'église  par  le  P.  Thomas,  custode,  en  chappe,  avec  le  cru- 

'  Los  archives  de»  Cordeliers,  et  celles  des  Jacobins  font  bien  remarquer 
que  les  Capucins  n'avaient  charge  d'âmes  que  pour  les  seuls  habitants  de 
l'ambassade  :  mais  pour  ceux-là,  uq  religieux  de  St-Louis  est  quatidé.  «  mis- 
sioanaire  apostolique  et  curé  de  l'église  royale  et  paroissiale  de  St-Louis  de 
Péra.  » 

'  St  Félix  de  Cantalîcfl,  né  sur  les  confins  de  l'Ômbrie  en  1513  se  fit  cjtpu- 
cin.  Il  tilt  béatifié  en  1S£5,  et  canonisé  en  nU.  Sa  chapelle  dans  l'église 
de  St-Louis  est  &  droite  en  regardant  le  maltre-autel. 


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—  8tl  — 

cifix  et  l'eau  bénite.  Le  P.  Thomas  de  Paris  prononce  le  com- 
pliment sur  les  marches  de  l'autel  ;  ensuite  on  chanta  le  Te 
Deum,  et  on  reconduisit  l'ambassadeur  chez  lui.  t 

Les  mêmes  «  mémoires  »  nous  font  connaître  les  cérémonies 
observées  à  la  mort  d'un  ambassadeur.  *  Le  26  mars  1726,  le 
Vicomte  d'Andresselles,  successeur  de  M.  de  Bonnac,  rendit  son 
ftme  à  son  Créateur.  Aussitôt  après  les  Capucins  lui  préparèrent 
une  chambre  ardente  avec  un  lit  de  parade,  où  il  resta  jusqu'à 
ce  que  nous  l'enterrâmes,  dans  notre  église,  dans  le  chœur  de 
8t-Fèlix.  Mgr  Mauri,  archevêque  de  Carthage,  chanta  la  messe. 
A  cette  grand'messe  le  R.P.  Thomas,  custode,  prononça  l'orai- 
son funèbre  du  défunt.  L'église  était  toute  tendue  de  noir,  et  la 
chapelle  de  St-Félix  était  comme  une  chapelle  ardente  ;  le  mi- 
lieu où  était  posé  le  corps,  était  un  lit  de  parade  très  beau  et  des 
mieux  entendus,  conduit  par  les  soins  du  P.  Romain  de  Paris, 
préfet  des  Enfants  de  Langues.  Dès  le  grand  matin,  le  27  de 
mars,  on  dit  les  messes  deux  à  deux,  aux  deux  chapelles  que 
l'on  avait  faites  dans  la  chambre  du  lit  de  parade,  et  ces  messes 
se  suivirent  jusqu'à  près  de  midi,  tous  les  religieux  des  cou- 
vents et  les  prêtres  séculiers  y  venant  dire  la  messe.  La  même 
chose  s'observa  le  28,  le  29,  et  le  30  mars  :  les  messes  se  dirent 
dans  notre  église,  €  présente  corpore.  •  Comme  on  avait  ouvert 
le  corps,  le  cœur  fut  confié  au  P.  Thomas  de  Paris,  qui  le  fit 
mettre  pendant  toute  la  cérémonie  où  était  le  corps  exposé,  puis 
on  le  mit  dans  le  même  caveau  où  était  déjà  le  corps.  Plus  tard, 
sur  le  désir  manifesté  par  M.  d'Andresselles,  le  cœur  fut  exhumé 
de  l'endroit  où  il  avait  été  placé,  et  remis,  par  les  Capucins,  aux 
Jésuites,  suivant  acte  de  M.  Belin,  chancelier,  qui  était  avec 
eux.  Trois  mois  après  les  Jésuites  firent  une  cérémonie  publique 
de  ce  cœur  :  ils  y  prononcèrent  une  oraison  funèbre.  * 

c  Le  comte  des  Alleurs,  fils  du  précèdent  ambassadeur,  et 
qui  succéda  en  cette  charge  à  M.  le  comte  de  Castellane,  mou- 
rut k  CP.  en  1754,  et  fut  inhumé  dans  i'église  St-Louis,  des 
Capucins.  > 

Par  décision  du  3  décembre  1725,  la  Nation  se  chargea  de 
l'entretien  des  enfants  trouvés  à  la  porte  de  l'église  de  St-Louis. 

Mais  que  faisaient  les  religieux  qui  la  desservaient?  Les  classes, 
sans  doute,  les  occupaient  beaucoup,  mais  ils  avaient  aussi  un 
ministère  ecclésiastique  très  actif.  St-Louis  était  pour  les  Fran- 


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—  312  — 

çais  de  Péra,réglise  nationale,  comme  nous  dirions  aujourd'hui: 
les  Capucins  les  recevaient  avec  cliaritë,  les  instruisaient  avec 
sollicitude,  et  leur  administraient  les  secours  religieux  dont  ils 
avaient  besoin.  Un  rapport  dressé  par  le  R.  P.  Romain  de  Paris, 
custode  en  1745,  et  adressé  à  la  S.  C.  de  la  Propagande,  nous 
dit  quelles  étaient  à  celte  époque  leurs  occupations  :  nous  le 
trouvons  dans  les  archives  de  St  Polycarpe  de  Smyrne.  Noos  le 
traduisons  de  l'italien,  en  l'abrégeant  un  peu. 

(  La  mission  de  St-Louis  est  située  auprès  du  palais  de  l'am- 
bassadeur de  France,  à  Péra  de  OP.,  et  nos  missionnaires  sont 
employés  premièrement  pour  le  service  de  Son  Excellence  et  de 
sa  cour.  Ils  entendent  les  confessions  de  presque  tous  les  habi- 
tants de  cette  ville  de  Péra,  enseignent  la  doctrine  chrétienne, 
assistent  les  malades,  et  s'occupent  des  officiers  et  des  matelots 
de  la  Nation,  pour  leur  faire  recevoir  tes  sacrements  avant  leur 
sortie  du  port. 

f  II  y  a  dans  la  maison  un  collège  de  jeunes  gens  qui  ap- 
prennent les  langues  :  un  des  missionnaires  est  supérieur,  ud 
autie  maître  de  langue  latine.  La  mission  est  obligée  de  nourrir 
et  d,' entretenir  ces  enfants,  et  de  leur  donner  des  maîtres  qui 
leur  enseignent,  outre  le  latin,  le  français,  l'italien,  le  grec,  l'ar- 
ménien et  le  turc.  Ces  jeunes  gens  sont  au  nombre  de  douze,  et 
se  disposent  à  l'office  de  drogmans,  quand  il  en  faudra  dans  les 
échelles  de  la  Turquie.  A  ces  élèves  s'en  joignent  d'autres,  en 
nombre  égal,  pensionnaires  aussi,  grecs  et  arméniens,  qui 
viennent  pour  apprendre  les  langues  ;  mais  ce  qui  est  de  plus 
grande  importance,  c'est  que  dans  notre  collège  et  sous  notre 
direction,  ils  apprennent  notre  religion  et  contractent  nos 
usages,  de  sorte  que  quand  ils  sortent,  ils  sont  devenus  tout  à 
fait  latins. 

«  En  outre  nous  avons,  à  St-Louis  de  Péra,  une  autre  école  à 
laquelle  nous  admettons  tous  les  petits  enfants,  de  toute  na- 
tion. On  leur  enseigne  surtout  la  religion,  et  on  les  forme  à  la 
piété,  en  les  faisant  assister  à  la  sainte  messe,  aux  fonctions  qui 
se  font  dans  notre  église,  et  en  leur  faisant  faire  chaque  soir  une 
très  dévote  prière  à  Dieu,  à  la  B.  V.  Marie,  à  St  Roch  et  aux 
Saints.  On  leur  apprend  à  prier  pour  l'Église,  pour  N.  S.  P.  le 
Pape,  pour  les  cardinaux  de  la  S.  Congrégation,  pour  le  Roy, 
notre  unique  protecteur,  etc.  A  ces  prières  s'unissent  tous  les 


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—  313  — 

Pères  et  toute  la  Cour.  Tous  les  dimanches  et  toutes  les  fêtes  de 
l'année,  on  chante  les  vêpres  et  l'on  prêche,  après  quoi  on  donne 
la  bénédiction  da  T.  St  Sacrement.  La  semaine  sainte  on  fait 
dans  notre  église  les  mêmes  cérémonies  qui  sont  en  usage  par- 
tout. Toutes  les  cérémonies  se  font  av^c  une  grande  édification 
de  toute  la  chrètienLé  :  les  fidèles  y  assistent  avec  une  grande 
régularité.  Pendant  tout  le  carême  on  fait  chaque  soir  la  prière, 
à  laquelle  assiste  Son  Elxcellence,  avec  toute  sa  Cour,  et  l'on 
donne  la  bénédiction  avec  le  saint  ciboire. 

f  Dans  notre  église  on  peut  entendre  les  confessions,  en  fran- 
çais, italien,  grec  et  tare  ;  c'est  pourquoi  il  s'y  fait  toujours  un 
grand  concours  de  pénitents,  mais  surtout  aux  principales  fêtes 
de  l'année,  et  pour  le  premier  dimanche  du  mois,  à  cause  de  la 
confrérie  de  N.-D.  du  Mont  Carmel,  à  laquelle  sont  affiliés  un 
grand  nombre  de  fidèles  au  grand  profit  de  leurs  flmes.  Par  tous 
les  exercices  qu'ils  font  en  leur  église,  par  le  soin  qu'ils  met- 
tent b.  assister  les  malades,  les  Pères  sont  les  instruments  de 
beaucoup  de  conversions,  si  bien  qu'il  ne  se  passe  guère  de 
jour,  sans  que  l'on  en  voie  quelqu'une,  à  la  grande  joie  de 
l'Église. 

<  Nous  espérons  ériger  bientôt  la  confrérie  du  Purgatoire,  en 
conformité  avec  la  bulle  de  Clément  XII.  Cette  confrérie  n'est 
pas  érigée  en  d'autre  église  :  il  est  vrai  qu'elle  existe  déjà  dans 
nob-e  église  de  St-Georges  de  Galata,  mais  outre  que  c'est  sur- 
tout pour  les  arméniens,  on  peut  dire  encore  que  Galata  est  une 
cité  toute  différente  de  Péra,  et  ces  deux  confréries  ne  se  con- 
trarieront point. 

t  A  St-Louis  nous  nous  occupons  aussi  des  esclaves  fugi- 
tife:  ils  viennent  se  réfugier  à  l'ambassade  de  France,  pour  se 
libérer  du  joug  des  Turcs.  Il  nous  faut  les  vêtir  de  pied  en  cap, 
les  nourrir  etc.  Un  Père  mis.sionnaire  s'occupe  chaque  jour  de 
les  instruire,  de  les  ramener  â  la  condition  de  vrais  chrétiens, 
car  le  plus  souvent  ils  ont  tout  oublié,  et  beaucoup  sont  même 
devenus  renégats.  C'est  un  grand  travail  pour  les  religieux,  une 
grande  charge  et  une  gêne  extrême  pour  la  communauté;  mais 
on  le  fait  volontiers  à  cause  du  bien  produit  par  cette  œuvre. 
Chaque  année  il  ne  s'y  fait  pas  moins  de  deux  cents  conversions  : 
autant  de  gens  que  l'on  rend  ft  la  chrétienté.  Parmi  ces  esclaves, 
il  y  a  des  Français,  des  Italiens,  des  Maltais,  des  Espagnols 


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etc.  Nous  ne  pouvons  faire  cette  œuvre  que  des  aumônes  des 
fidèles  '.  > 

L'église  de  St-Louis  a  subi  diverses  bunsformatioDS  et  agran- 
dissements que  nous  avons  notes  en  passant  :  elle  semble  n'a- 
voir été  d'abord  qu'en  bois  ou  du  moins  en  matériaux  légers 
qui  exigeaient  de  fréquentes  réparations.  Elle  était  cependant 
appelée  <  église  paroissiale  et  royale  de  St-Louis  »  et  l'on  dési- 
rait quelque  chose  de  mieux.  Enfin,  en  1788,  le  R.  P.  Godefroy 
d'Amiens,  alors  custode  et  curé,  depuis  archevêque  de  Naxle,  la 
reconstruisit  entièrement.  Cette  nouvelle  église  était  toute  en 
pierres,  assez  vaste,  le  maltre-autel  était  en  marbre  et  on  lisait 
sur  la  muraille  de  chaque  côté  les  épitaphes  de  quatre  ambas- 
sadeurs de  France,  qui  y  étaient  inhumés.  (Ces  pierres  funéraires 
ont  disparu  dans  l'incendie  de  1831). 

Une  pierre  commémorative  de  la  reconstruction  de  l'église 
avait  été  placée  à  l'intérieur,  elle  a  disparu  comme  les  autres 
dans  le  dernier  incendie  ;  mais  elle  est  rappelée  en  partie  par 
la  plaque  suivante,  placée  k  gauche  de  l'autel  de  N.-D.  dans  la 
nouvelle  église. 

D.  o.  M. 
OODEFRIDUS  DE  LA,  POBTE,  MISSIONUM  ORDINIS  CAPUCINOHUM  AD 
BOSPHORUM  THftACIUM  ALUMNUS,  ARCHffiPISCOPDS  NAXJENSIS.  XV  KAL 
NOV.  A,  D.  lIDCaC.  -CTATIS  SU*!  LXVII,  VITA  PUNCTtlS  ;  HOC  JAfiET 
IN  TEUPLO,  SÛPTIBUS  SUIS-  JAM  ESTRUCTO,  QOOD  INDE  FLAMUA 
DELETUM,  GALLICA  NATIO,  MDOCCXLVII,  ORDINI  EIDEH  SPLENDIDIUS  A. 
FUNDAMBNTIS  RESTITUEBAT, 


*  I.a  positioD  des  Capucins  aupréa  de  l'ambassade  de  France  Tacililait 
cette  (Duvre.  D'autres  voulurent  l'entreprendre,  mais  ils  y  trotivérant  de 
grands  dangers  :  ainsi  dans  les  archives  de  Ste-Marie,  à  l'année  1687,  on 
trouve  que  les  roligiaux  do  cette  mission  ayant  reçu  deux  esclaves  fugi- 
tifs, furent  menaués  par  les  Turcs,  si  bien  qu'ils  firent  passer  ces  esclaves 
chei  les  Capucins  pour  les  abriter  sous  la  protection  française.  Un  ajoute 
même  que  ce  ne  fut  pas  sans  peine  que  le  chargé  d'affaireB  réussit  à  les 
préserver, 

*  Il  semblerait,  d'après  tes  Mitt'wn*  Caihotiquet,  27  septembre  Iâ72,  que 
Mgr  de  la  Porte  no  fut  pas  seul  à  contribuer  à  la  reconstruction  de  St' 
Louis.  L'ambassade  de  France,  après  l'asBasunat.  en  1786,  du  P.  Vincent 
Ruovo.  dans  le  DJéziré,  avait  obtenu  de  la  Porte  ottomane  une  indemnité  do 
9.000  livres  environ,  4ui  fut  envoyée  à  CP.  et  employée,  par  elle,  à  la  recons- 
truction de  l'église  des  Pérès  Capucins  de  cette  ville. 


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—  315  — 

Les  pierres  tombales  que  l'on  remarquait  dans  l'église  de 
St-Louis  étaient  celles  des  comte  des  AUeurs,  vicomte  d'An- 
drezelles,  comte  des  Alleurs  fils,  on  y  ajouta  dans  ce  siècle  celle 
du  général  Aubert-Dubayet  envoyé  de  la  République  en  1797, 
Inhumé  d'abord  dans  l'enceinte  des  murs  de  ramt>assade,  au 
pied  de  l'arbre  de  la  liberté,  le  grand  cyprès  qu'on  voit  encore  à 
gauche  du  grand  méridien  tracé  sur  la  muraille  intérieure  du 
jardin.  Ses  restes  furent  exhumés  en  180i  et  transférés  dans 
l'église,  avec  un  service  religieux. 

Les  autres  sont  celles  qui  suivent 

1751,  3  juin  :  Cécile  Ursule,  fille  du  comte  des  Alleurs  et  de 
la  Comtesse,  née  princesse  Lubomirzka  :  elle  fut  inhumée  sous 
l'autel  de  St-Félix. 

1753, 30  mars  :  Le  Père  Jean-Louis,préfet  des  Jeunes  de  langues, 
fut  inhumé  dans  la  sépulture,  sods  le  grand  autel  de  St-Louis. 

1754,  le  33  novembre  :  Le  comte  Roland  des  AUeurs,  inhumé 
sous  l'autel  de  St-Félix. 

1756,  27  juillet  :  Pierre  Fonton,  premier  drogman,  secrétaire 
interprète  du  Roi,  inhumé  dans  la  sépulture  dans  le  sanctuaire. 

Les  Capucins  continuèrent  leur  ministère  sans  rien  changer 
à  leur  organisation,  jusqu'à  la  révolution  française  :  ils  étaient, 
ainsi  que  nous  l'avons  dit,  gouvernés  par  un  Custode  de  la 
Mission  de  Orêce,  nommé  par  le  Provincial  de  la  Province  de 
Paris  pour  quatre  ans,  mais  pouvant  être  continué,  avec  la  per- 
mission de  la  S.  Congrégation  de  Propagande.  Le  trentième  et 
dernier  fut  ie  R.  P.  Hubert  d'Amiens.  A  l'expiration  de  sa 
charge,  en  janvier  1792,  il  n'y  avait  plus  de  Capucins  organisés 
en  France,  par  suite  de  la  suppression  des  Ordres  religieux  : 
la  S.  Congrégation  le  nomma  donc  Préfet  apostolique  des  mis- 
sions de  l'Ordre  pour  les  lies  de  l'Archipel,  de  l'Asie  mineure,  et 
de  Constantinople.  Celte  première  nomination  était  ad  Qua- 
driennium,  elle  fut  prorogée  jusqu'à  la  mort  du  P.  Hubert 
en  1813.  Avec  lui  commença  la  nouvelle  période  de  l'histoire 
de  S.  Louis,  que  nous  relaterons  dans  la  troisième  partie  de  ce 
b-avail. 


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CHAPITRE  VIII. 


LES  ÉGLISES,  ADJODRD  HO]  DISPARUES, 
DÉPENDANT    DE  LA    (  MACNIFICA   COMUNTTA    DI    PERA. 


U  est  diflîcile,  presque  impossible  même,  de  fixer  le  nombre 
de  ces  édifices  pour  la  période  antérieure  à  la  conquête  otto- 
mane. Il  parait  indubitable  que  les  Latins,  pendant  leur  courte 
domination,  ont  dû  s'emparer  de  plusieurs  églises  de  Galata 
appartenant  aux  Grecs,  mais  ils  durent  en  abandonner  la  plupart 
quand  se  fit  la  restauration  byzantine  ;  toutefois  il  est  de  tra- 
dition locale  que,  postérieurement  à  la  conquête,  ils.  avaient 
conservé  new/"  églises  dans  Galata. 

Crusius  en  cite  huit,  savoir  :  Ste-Ânne,  St-Benoît,  Ste-CIaire, 
St-François,  SWîeorges,  St-Jean,  Ste-Marie,  St-Pierre  ;  avec  les 
deux  églises  de  Constantinople,  on  aurait  un  chiffre  égal  à  celui 
indiqué  ci-après  par  Pierre  Gyllcs  (1546). 

t  Les  Francs,  »  dit  le  même  Pierre  Gylles,  «  ont  environ  dix 
églises  (h  Galata?)  j  »  mais  ce  voyageur  n'en  donne  pas  la  no- 
menclature. 

M.  de  Brèves,  dans  la  Relation  de  ses  voyages*,  dit  sans, 
du  reste,  donner  le  détail  des  noms  :  *  En  la  ville  de  Pèra,  il 
y  a  environ  six  ou  sept  églises,  servies  et  habitées  de  religieux 
latins.  » 

Du  Cange  (1680)  cite  seulement  trots  églises  latines  h  Galata  : 
St-Benoît,  St-François,  St-Pierre. 

'  Page  12  d'une  édition  à  laquelle  le  litre  manque,  mais  que  je  crois  ôtre 


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—  317  — 

La  Comitnità  di  Pera,  dans  une  lettre  au  doge  de  Venise, 
parle  de  douze  églises,  qu'elle  ne  dénomme  pas  :  mais  sa  cor- 
respondance en  cite  onze,  savoir  :  deux  pour  Constanttnople  : 
San  Nicolo,  Ste-Marie  ;  neuf  pour  Gaiata  :  Ste-Anne,  Sant'An- 
tonio,  San  Benetto,  San  Francesco,  San  Giorgio,  San  Giovanni 
de  i'Ospedale,  Santa-Maria,  San  Pietro,  San  Bastiano. 

Les  Atii  délia  Soeietà  ligure  font  mention  d'une  église  de 
St-Clément,  dont  nous  n'avons  trouvé  aucune  trace,  jusqu'à 
présent,  dans  les  documents  locaux. 

Nous  pouvons  cependant  arriver  k  savoir  le  nombre  et  le 
nom  de  toutes  les  églises  de  Péra.  Dans  une  instance  de  t  la 
Magnifica  Gomunità  >  au  Vicaire  patriarcal,  di  1 8  nov.  \  583,  elle 
réclame  la  propriété  de  huit  églises,  à  savoir  :  St-Nicolas  et  Ste- 
Marie  à  CP.,  Sta-Anna,  S.  Benedetto,  S.  Giovanni,  S.  Sebastîa- 
no,  S.  Antonio,  et  S.  Georgio  de  Péra.  Si  à  ces  six  églises  de 
Fera,  existant  en  1583,  nous  ajoutons  celtes  de  St-Michel,  de 
Ste-Irène,  lie  Ste-Claîre,  dont  l'existence  nous  est  indiquée  par' 
les  monuments,  et  les  églises  des  religieux,  St-Paul,  puis  Sts 
Pierre  et  Paul  des  Dominicains  et  St-François  des  Conventuels, 
nous  aurons,  je  crois,  toutes  les  églises  laissées  aux  Latins  par 
la  capitulation  de  1453. 

Plusieurs  de  ces  églises  existent  encore,  mais  la  plupart  ont 
disparu  et  l'on  connaît  à  peine  l'emplacement  de  quelques  au- 
tres. Par  contre  quelques  églises  neuves  sont  venues  prendre  la 
place  des  anciennes  :  nous  traiterons  de  chacune  en  particulier 
consacrant  ce  chapitre  aux  églises,  aujourd'hui  disparues,  de  la 
Comunità. 


M- 

Ste-Anne. 


Les  documents  de  la  Comunità  di  Pera,  qui,  d'ailleurs,  pour 
le  présent,  ne  remontent  pas  au  delà  de  1603,  parlent  de  Ste- 
Anne'  comme  d'une  église  particulière  édiCée  sous  ce  vocable. 

'  •  L'Abbaye  de  Ste-Anne,  près  ta  porte  dite  de  JoMphat,  en  la  ville  de  Hié- 
nisalem,  et  la  piscine  probatique,  auquel' lieu  on  tient  que  la  ^'ierge  prit 


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—  318  — 

Crusius  [Turco-Grœcla)  et  Hammer'  en  font  aussi  une  église 
distincte.  Pierre  Gylles,  dont  le  voyage  ea  Orient  s'effectua  de 
154G  à  1549-,  n'en  fait  nulle  mention.  Du  Gange-*  cite  deux 
temples  de  ce  nom  h  Constantinopte,  et  un  autre  à  Galata,  ce 
dernier  d'après  Crusius,  sans  dire  que  ce  fût  une  église  latine. 

En  1585,  la  confrérie  de  Ste-Anne,  déjà  qualifiée  d'antienne 
à  cette  époque,  existait  t  en  l'église  des  Mineurs  conventuels  de 
St-François.  »  La  confrérie  était  enrichie  d'indulgences,  et  jouis- 
sait du  privilège  d'accomplir,  dans  cette  église,  certaines  céré- 
monies, à  des  jours  marqués  de  l'année:  tElle  avait  aussi  le  droit 
d'aller  au  baiser  de  la  Sainte-Croix,  le  vendredi  sainct,  où  ils 
sont  accoustumés  de  tout  temps,  vestus  comme  ils  sont  de  leurs 
sacz  et  cappes  de  confrérie,  immédiatement  après  les  religieux, 
avec  torches  en  main,  au  baiser  d'icelle  croix*.  »  Wadding*, 
dans  sa  description  de  St-François,  cite  la  chapelle  Ste-Anne, 
où  se  trouvait  l'inscription  funéraire  d'Albert  de  Wyss,  ambas- 
sadeur impérial,  décédé  en  1569^. 

La  Comunitd  parle,  en  1611,  de  la  perte  que  fit  Ste-Anne  de 
divers  immeubles,  à  la  suite  du  différend  survenu  entre  l'am- 
bassadeur de  France  et  le  représentant  hongrois,  lora  de  la  fer- 
meture de  St-François''  ;  et  elle  donne,  comme  suit,  en  1614, 
l'inventaire,  dressé  par  !e  prieur,  des  reliques  existant  dans  c  l'é- 
glise de  Ste-Anne,  »  savoir  :  c  dans  une  petite  botte  d'argent, 
placée  dans  une  petite  armoire  dans  le  mur,  prés  le  grand 
autel  :  un  morceau  de  la  vraie  croix,  reliques  de  St  André, 

naissance,  estoit  de  religieuses  de  l'Ordre  da  St-Benolt,  et  dépendait  immé' 
diatement  du  patriarche  de  Hiérusalem.  n  (l.es  Familles  d'outre-mer,  de  Du 
Cnnge.  publiées  par  M.  Ray.  Paris,  I8fi9,  p.  âlâ.)Devcnu  oMedrècé.collége  », 
sous  l'islamisme,  cet  édifice  a  été  donné  à  la  France  par  le  gouvernement 
olloman,  à  la  suite  de  la  guerre  d'Orient.  Cette  église,  fort  bien  restaurée, 
est  aujourd'hui  cleaservie  par  les  Pérès  Blancs,  ou  missionnaires  de  N.-D. 
d'Afrique  ;  elle  est  un  séminaire  de  Grecs  Melchites. 

'£w.  laud.,  VU,  139. 

*  Selon  te  rapport  do  Pierre  Belon,  son  compagnon  de  voyage,  cité  dans 
les  Xi'g'K-iatiùnt,  1, 622. 

'  Constant,  rkrintiana. 

I  Xi'ijoeiation»,  \\\  369. 

"  Tome  VI,  55. 

«  Voyez  notre  Compte-rcn-lu  du  cimet.  latin  île  CP.  1805,  23. 

'  St-t'ran;oiB  resta  fermé  de  1586  à  1593;  durant  cette  période  de  sept 
années,  la  chapelle  de  âte-Annele  fut  également. 


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—  319  — 

de  St  Christophore,  de  St  Barthélémy,  de  Ste  Euphémie,  des 
SS.  Fabien  et  Sébastiea,  de  Ste  Agnès,  de  St  Nicolas,  de  St  An- 
toine, de  St  Georges  ;  cendres  de  St  Jean-Baptiste,  reliques  de 
St  Ignace,  etc.  '  > 

Ste-Anoe  avait  ses  procurears  ;  «  et  il  était  d'usage,  dît  un 
procès-verbal  du  3  mars  1637,  que  les  procureurs  de  Ste-Anne 
fissent  la  quête,  tous  les  dimanches,  à  la  porte  de  St-François, 
la  tire-lire  en  mains,  pour  l'église  de  Ste-Anne  ;  >  la  Comunttà 
maintint  cet  usage-. 

Le  conseil  de  Ste-Anne,  composé  de  douze  memlfres,  avait 
coutume  de  se  réunir  en  Ste-Anne,  le  12  janvier  de  chaque  an- 
née, pour  assister  à  la  procession  usitée  en  ce  jour.  Nous  n'a- 
vons pu  recueillir  de  renseignements  sur  cette  cérènionle,  qui 
d'ailleurs  n'a  plus  lieu  ;  nous  trouvons  seulement,  dans  le  mé- 
moire du  P.  Barbléri,  déjà  cité,  le  passage  suivant  :  c  le  29  jaur 
vier  1673,  le  Vicaire  patriarcal  ofHcia  pontificalement  dans  St- 
François  et  rétablit  la  procession  de  Ste  Anne;  le  SI  mars 
suivant,  il  bénit  la  nouvelle  église  de  Ste-.^nne,  élevée  dans  les 
cloîtres  de  St-François,  et  officia  à  cette  occasion,  i  Par  décision 
du  20  juillet  1799,  Mgr  Fonton  prescrivit  d'observer  comme 
fête  de  précepte,  (ainsi  que  cela  avait  lieu  avant  la  conquètel, 
le  26  juillet,  en  l'honneur  de  Ste  Anne;  mais  la  S.  C.  de  la 
Propagande  ne  donna  pas  son  approbation  à  cette  mesure. 

Nous  aurons  une  idée  exacte  de  ce  qu'était  Ste-Anne  et 
de  sa  situation,  si  nous  réunissons  toutes  les  données  ci-de.ssus 
k  celles  que  nous  trouverons  dans  le  chapitre  in,  de  St-Fran- 
çois. Dans  l'enceinte  (Recinto),  dite  de  Si-François,  beaucoup 
plus  grande  que  la  cour  actuelle  de  la  mosquée  A'Iéni-djami, 
se  trouvaient  :  1"  l'église  de  St-François,  proprement  dite,  2"  le 

'  Du  Cange  fConslanlinopoli»  Chrittiann)  fournil  de  précieux  rotiseigne- 
menls  sur  le  nombre  considérable  de  saintes  retiques  recueillies  dans  la 
ville  de  CP,  (Mégnlopoli».)  et  qui  faisait  dire  4  Pierre  le  Vénérable,  abbé  de 
Cluny  :  >  plaise  d  Dieu  qu'il  me  soit  donné  de  visiter  un  Jour  cette  jurande 
capitale,  et  d'y  vénérer  les  reliques  des  martyrs  et  des  saints  qui  sont 
réunies  là  comme  dans  un  vaste  cimetière.  »  (Voir  la  Ihte  ilonnce  fuir 
M.  Riant,  citée  plus  haut.)  Une  seule  église  aujourd'hui  pourrait  rivaliser 
avec  ces  églises  Je  CP.,  celle  de  St-Sernin  de  Toulouse. 

•  Des  quêtes  sont  encore  faites,  de  la  sorte,  pour  certaines  œuvres,  les  jours 
de  dimanches  et  fAtes.  à  la  porte  dea  diverses  églises  ;  des  quétt.'s  du  même 
genre  sont  faites  encore  aujourd'hui,  mais  pour  certaines  œuvres  de  bien- 
teisance. 


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couvent  des  Conventuels  et  les  cloîtres  qui  en  dépendaient,  ces 
deu^i  monuments  appartenaient  aux  religieux,  â^  l'église  de  Ste- 
Anne,  appartenant  à  la  «  Magniftca  Comunità,  ■»  4"  une  église 
de  St-Antoine,  qui  fut  prise  par  les  Turcs  avant  tnëme  te  der- 
nier incendie  de  1(>96.  Il  semble  même  que  la  Comunità  avait 
aussi  des  locaux,  non  pour  ses  réunions  générales,  qui  se  te- 
naient publiquement  dans  l'église  même,  mais  pour  les  archives 
et  certaines  réunions  privées.  [La  casaccîa  diS.  Anna.) 

M.  de  Brùves  {Relation  de  ses  voyages)  nous  donne  de  ces 
choses  une  notion  fort  claire,  quand  il  nous  dit  :  «  Joignant 
cette  église  (de  St-François),  il  y  en  a  une  autre  qui  en  dépend, 
nommée  Ste-Anne,  oii  les  chrétiens  du  pays  font  leurs  assem- 
blées, et  y  ont  une  confrérie  fort  dévote.  > 

La  population  catholique  était  organisé&en  confrérie,  suivant 
l'usage  du  temps,  et  les  membres  de  la  <  Magnifica  Comunità  » 
étaient  les  prieurs  de  la  confrérie.  Lorsque,  comme  il  arriva 
plusieurs  fois,  l'église  de  Ste-Anne  était  ruinée  par  un  incendie, 
ou  fermée  par  la  force,  la  confrérie  se  réunissait  ailleurs,  ordi- 
nairement à  St-Benoit,  (jui  appartenait  aussi  à  la  Comunitii,  mais 
aussitôt  que  l'église  de  Ste-Anne  était  restaurée  ou  rouverte,  les 
réunions  de  la  t  Magnifica  Comunîlà  »  et  celles  de  la  confrérie 
recommençaient  à  se  tenir  à  leur  siège  régulier. 

Ainsi  Ste-Anne  devint,  comme  St-François,  la  proie  des  flam- 
mes en  1660,  elle  ne  fut  complètement  reconstruite  qu'en  1674, 
et  pendant  ce  tem,ps  la  confrérie,  comme  nous  l'avons  dit,  célé- 
bra ses  réunions  à  St-Benoît,  elle  retourna  alors  chez  elle,  et  y 
restajusqu'en  1697.  Elle  fut  alors  définitivement  transférée  dans 
l'église  de  St-Benoit  où  elle  se  trouve  aujourd'hui. 

Cette  confrérie  est  dite  actuellement,  des  Chioies;  mais  on  sait 
qu'un  grand  nombre  de  Pérotes  s'étaient  enfuis  à  Chio,  lors  de 
la  conquête  ottomane  (Sauli,  II,  173.),  d'où  certains  seraient  re- 
venus ensuite  à  Péra  et  auraient  donné  leur  nom  à  la  confrérie  de 
Ste-Anne.  Ainsi  que  nous  l'avons  fait  remarquer,  cette  confrérie 
n'est  plus  qu'une  réunion  de  dévotion,qui  reçoit  aussi  des  femmes 
parmi  ses  membres.  Elle  a  été  transfèrée,de  no3Jours,à  St«-Marie. 

La  Comunità  donnait  naturellement  la  priorité  à  Ste-Anne  sur 
les  autres  églises  ;  on  lit  dans  un  de  ses  procès-verbaux,  citant 
le  nom  de  diverses  autres,  i  anco  la  chîesa  dt  Sta  Anna,  che 
doveoa  dire  prima  »  (que  je  devais  citer  la  première). 


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—  321  — 

Comme  il  est  dit  au  ch.  m,  cette  église  fut  comprise  dans 
la  cou&scation  du  couvent  de  St-François.  Sur  l'emplacement 
qu'elle  nous  parait  avoir  occupé  s'élèvent  une  petite  mosquée  et 
une  école  qui  a  donné  son  nom  à  la  rue  MedresséSoghaky . 


St-Michel,  église. 

Il  y  avait  dans  la  ville  de  CP.  un  grand  nombre  d'églises  dé- 
diées à  St  Michel;  les  documents  nous  en  signalent  une  de 
chaque  côte  de  la  Corne  d'Or,  près  des  extrémités  de  la  chaîne 
qui  fermait  l'entrée  de  ce  port.  Était-ce  en  vertu  de  cette  sorte 
de  dédoublement  de  la  cité  que  nous  avons  signalé,  ou  simi»le- 
ment  de  la  dévotion  de  ses  habitants,  nous  ne  saurions  l'afTir- 
mer.  Quoi  qu'il  en  soit,  l'église  de  St-Michel  &  Qalata  dut  avoir 
une  certaine  importance  primordiale,  l'Archange  étant  un  des 
principaux  i  protecteurs  de  la  colonie  galatîote,  Peyrœ  pro- 
tector  et  patromis.  »  Son  image  se  trouvait  sur  une  pierre  en- 
casb-ée  dans  la  muraille  de  la  première  tour  du  fossé  d'enceinte, 
près  de  la  tour  du  Christ,  en  allant  vers  l'arsenal  ;  elle  était 
placée  entre  deux  écussons,  l'un  aux  armes  de  Gènes,  l'autre  à 
celles  du  podestat  d'Aurla  (1387);  la  tête  de  l'archange  est 
.  nimbée  ;  il  tient  dans  la  main  droite  une  épée  dont  le  fourreau 
est  dans  sa  main  gauche,  il  porte  une  tunique  courte,  un  man> 
teau  militaire  recouvre  ses  épaules,  ses  pieds  sont  chaussés  de 
sandales  à  la  romaine. 

Où  se  trouvait  cette  église  de  St-Michel?  Du  Cange,  sans  don- 
ner d'autre  renseignement,  se  borne  k  dire  qu'elle  se  voyait  dans 
Galata.  Le  patriarche  CDnstantius  (p.  161)  dit  :  c  sous  les  em- 
))ereurs  grecs,  Galata  renfermait...  l'église  de  St-Michel.,  >  sans 
dire  si  elle  était  de  rite  grec  ou  latin.  L'auteur  de  la  Notice  sur 
les  fortiâcatioua  de  Galata  pense  que  cette  église  était  sur  l'em- 
placement de  Khaviar-Khan,  à  gauche  de  la  rue  de  Qara-keui 
conduisant  au  pont.  Un  autre  document  nous  la  représente  dans 
le  bas  de  Galata,  dans  la  plaine,  près  de  la  mer. 

Les  archives  de  la  Comunità  sont  entièrement  muettes  h  l'en- 


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droit  de  St-Michel  ;  nous  n'y  avons  trouvé  aucune  mention  de 
cette  église,  dont  l'importance,  pour  l'époque  génoise,  ne  peut 
faire  l'objet  d'un  doute  ;  il  faut  peut-être  dire  pour  expliquer  ce 
silence,  que  la  chute  de  la  colonie  mit  probablement  en  oubli 
le  grand  Archange  et  son  église,  pour  s'attacher  surtout  à 
S.  Georges  le  patron  de  la  mère-patrie.  Mais  les  Atti  délia  So- 
cietà  ligure  dî  storîa  patria(\ol.  II,  p.  354),nou3  permettent 
de  suppléer  dans  une  certaine  mesure  à  l'insuffisance  de  nos 
renseignements  locaux. 

Il  paraîtrait,  d'après  les  Atti,  que  Michel  Paléologue  aurait 
accordé  aux  Génois  la  faculté  d'ériger  dans  Pôra  des  églises 
leur  appartenant  en  propre,  et  dans  lesquelles  leur  clergé  exer- 
cerait les  fonctions  du  culte  selon  les  usages  latins.  Les  Actes 
génois,  lit-on  dans  le  même  recueil,  font  mention  des  églises 
St-Clément,  St-François,  et  plus  souvent  St-Michel.  Le  chef,  ou 
Prévôt  {Preposto,  ou  Prœpositus)  avait  pour  la  colonie,  au 
moins  à  certaines  époques,  le  titre  de  vicaire  général  de  l'arche- 
vêque de  Gènes,  de  qui  dépendait  Galata,  au  spirituel  comme 
an  temporel. 

Heyd  dit  aussi  de  son  cAté  :  c  in  riguardo  religioso,  la  colouïa 
genovese  dipendeva  dell'arcivescovo .  di  Genova,  il  cui  vicario 
générale,  almeno  nei  1335,  fù  it  preposto  di  San  Michèle  in 
Fera'. 

Toutefois  l'église  St-Michel  disparut  bientôt  par  le  fait  des  ri- 
valités Véneto-génoises-  :  «en  effet,  irrités  et  jaloux  des  conces- 
sions faites  aux  Génois  par  Michel  Paléologue,  et  plus  encore  de 
ce  que  Andronic  II  suivait,  sous  ce  rapport,  les  traces  du  restau- 
rateur de  l'empire,  les  vénitiens  envoyèrent  une  escadre  devant 
Peyra  (Galata).  Les  Génois  s'enfuirent  â  CP.,  où  ils  trouvèrent 
un  refuge  ;  mais  l'amiral  Ruggero  Morosini  ravagea  les  environs 
et  mit  le  feu  à  tous  les  édifices  de  la  colonie.  L'église  de  St-Mi- 
chel dont,  trois  années  auparavant,  la  cure  avait  été  donnée  par 
l'archevêque  de  Gènes,  Jacques  de  Voragine,  au  prêtre  Pagano 
di  Caranza,  ne  fat  pas  épargnée  et  devint  la  proie  des  flammes 
(1396).  Après  cet  événement  les  galatiotes  ayant  résolu  de 

'  Voyez  le  Colonie  eommereiali  degli  Italiam  in  Oriente,  nel  madio  eao, 
disaertazione  (tel  prof.  Heyd.  Toriao  e  Venezia.  1866,  1[,  357,  et  d-apréa, 
Hiérarchie  ëpiscopaU!. 

'  Atlt  délia  Soeiefà  ligure,  et  mémoire  de  M.  Belgrano,  L.  L. 


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—  823  — 

relever  ce  temple  dans  le  même  emplacement  qae  l'ancien, 
le  même  archevêque,  pour  constater  son  droit  de  juridiction, 
s'empressa  de  nommw,  comme  administrateur  futur  de  ladite 
église,  et  pour  le  terme  de  dix  années,  le  prêtre  AJdobrando  di 
Corvara  (1397),  à  charge  par  lui  de  compter  une  redevance  de 
30  à  50  lires  par  an,  tant  que  la  trêve  ne  serait  pas  rompue 
entre  les  communes  génoise  et  vénitienne.  Le  texte  de  ce  docu- 
ment et  l'acte  d'ampliation  d' AJdobrando  sont  datés  tous  deux 
du  22  janvier  1297.  Toutefois  le  titulaire  de  la  nouvelle  église 
n'en  conserva  pas  longtemps  l'administration  ;  un  nouveau 
f  Preposto  ï,  le  prêtre  t  Gualterio  de  Vezzano,  preposilus  ec- 
clesiœ  Sti  Mtchaelis  de  Peyra,  et  in  dicto  loco  pro  Domino 
archiepiscopo  Januensi,  in  spiritualibus  vicarius  générales,  >  in- 
tervint à  la  rédaction  de  l'acte  de  délimitation  de  Galata,  en 
1303. 

Le  premier  document  qualifie  Aldoln^ndo  de  <  Capellanus 
ecclesîie  Januensis  »  et  plus  loin  de  t  rector  et  administrator 
ipsius  ecclesiœ  de  novo  edificandse.  > 

A  ces  actes  interviennent  aussi  comme  témoins  deux  Frères 
Prêcheurs,  un  clerc  de  l'archevêché  et  le  Prévôt  de  l'église  de 
Ste-Marie-Magdeleine  de  Gênes. 

L'église  de  St-Michel  fut-elle  reconstruite  ?  Il  le  semble  bien 
puisque  Wadding,  sous  l'année  13S6,  et  à  propos  d'une  contes- 
tation avec  les  Frères  Mineurs  de  St-François,  cite  le  «  Rector 
ecclesiœ  Sancti  Michaelis  de  Peyra,  >  mais  elle  fut  détruite  plus 
tard,  car  en  1584,  Pierre  Gylles  rapporte  (Topographia,  334) 
qu'on  avait  bâti  sur  les  fondements  de  l'église  St-Michel,  un 
Xenodochium,  <  hospice  »  qui  existait  encore  &  son  arrivée 
àCP. 

En  somme  le  caractère  prédominant  et  politique  de  l'église  de 
St-Michel,  sous  les  Génois  et  antérieurement  à  la  conquête  ot- 
tomane, est  suffisamment  attesté  par  le  passage  suivant,  em- 
prunté à  Depping  (L.  L.  II,  3)  :  c  les  consuls  et  marchands  de 
Fera  avaient  coutume  de  tenir  leurs  audiences  auprès  de  l'église 
de  St-Michel.  >  St-Michel  était  donc  comme  le  patron  de  la  co- 
lonie j  et  son  église  était  la  basilique  de  ses  habitants,  qui  se 
réunissaient  dans  ce  temple. 

Quant  à  la  desservance  spirituelle  de  l'église,  les  renseigne- 
ments fournis  par  les  c  MU  >  permettent  d'afSrmer  qu'elle 


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—  824  — 

appartenait  à  des  prêtres  sécaliers,  à  la  nomination  de  l'arche- 
vèque  de  Gdnes,  qae  les  docaments  appellent  parfois  le  Pa- 
triarche,  ou  le  Légat  du  St-Siège  pour  le  Levant. 

Depuis,  St  Michel  n'a  pas  cessé  d'êlre  invoqué,  spécialement 
par  la  Nation  française  :  c'est  en  son  honneur  que  Louis  XI 
institua  l'Ordre  de  St-Michel,  affectô  plus  tard  à  la  récompense 
des  services  civils,  lequel  avec  celui  du  Saint-Esprit,  fondé  par 
Henri  III,  donnait  &  celui  qui  en  était  revêtu,  le  titre  de  Che- 
valier des  Ordres  du  Roi.  Malgré  le  malheur  des  temps  St  Mi- 
chel est  encore  invoqué  aiUourd'bui  comme  un  des  patrons  et 
protecteurs  de  la  France. 


§in. 

St-Jean-Baptiste  (église  et  hôpital.) 

Cette  église  ou  chapelle,  citée  par  Grtisius  comme  la  huitième 
des  églises  latines  de  Galata,  parait  avoir  été  la  chapelle  de 
l'hépital  du  même  nom  :  <  la  chiesa  di  S.  Giovanni,  dove  l'os- 
pedale,  >  dite  aussi  <  chiesa  e  ospedale  di  S°  Zuane  di  Përa.  > 
On  a  vu  dans  la  première  partie,  les  donations  faites  par  Manuel 
Comnène  aux  chevaliers-hospitaliers  de  St-Jean  de  Jérusalem  ; 
St  Jean-Baptiste  était  le  patron  de  cet  Ordre  militaire,  dont 
l'hospice  était  destiné  au  soulagement  des  pèlerins.  Cet  hôpital 
fut-il  transporté  de  CP.  à  Fera,  après  k  restauration  bj-zantine, 
pour  conserver,  de  ce  côté  du  port,  ce  qu'on  avait  perdu  de 
l'autre,  ou  bien  y  avait-il  deux  établissements  distincts?  On  ne 
sait.  Hammer  rapporte  seulement , qu'un  couvent 'de  St-Jean- 
Baptiste  existait  à  CP.  au  quartier  dit  «  Petriion  »  et  qu'il  fut 
pillé  à  la  conquête  ottomane. 

Cet  hôpital  possédait  divers  immeubles,  dont  une  partie  fut 
aliénée,  à  la  suite  de  la  fermeture  de  l'élise  de  St-François 
(1586),  aSn  de  produire  des  fonds  pour  obtenir  la  réouverture 
de  cette  église. 

Comme  les  autres  établissements  religieux,  celui-ci  avait  ses 
procureurs,  chargés  annuellement  de  l'administration  de  l'hôpi- 
tal et  de  l'église. 


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—  325  — 

Nous  avoDs  va  (cb.  vn)  que  la  c  Comunità  >,  sur  la  de- 
mande de  M.  de  Césy,  ambassadeur  de  France,  avait  offert  aux 
Capucins  &  leur  arrivée  à  GP.,  le  cboix  entre  l'église  de  St- 
Cleorges  et  celle  de  StJean.  Les  Capucins  optèrent  pour  SIh 
Ceorges,  quoique  très  délabrée. 

Selon  une  lettre  de  la  <  Comualtà  >,  en  date  de  1618,  San 
Giovanni  était  desservie  par  les  Domioicains,  qui  l'occupaient 
«ncore  en  1643;  époque  où  elle  fut  conâée  à  un  prêtre  cbiote. 
En  somme,  comme  elle  disait  dans  une  lettre  (de  1588],  la 
<  Magnitlca  Comunità  *  la  faisait  desservir  comme  elle  le  vou- 
lait, ou  miens,  comme  elle  pouvait. 

Cet  hdpital  servait  surtout  eu  temps  de  peste,  ce  qui  était 
fréquent,  et  l'on  y  transportait  ceux  qui  étaient  atteints  du  fléau. 
Ainsi  on  1642,  le  P.  Joseph,  tbéatin,  y  fut  transporté,  il  en  fut 
do  môme  en  1649,  pour  Mgr  Subiano  :  se  trouvant  mal  et  soup- 
çonné de  peste,  le  suffragant  fut  emporté,  de  St-François  où 
il  logeait,  A  l'hôpital  St-Jean. 

Cet  établissement  périt  comme  les  autres  dans  le  grand  in- 
cendie  de  1660.  En  1664,  le  ^rrain  et  les  ruines  de  l'hospice  et 
de  l'église  furent  rachetés  des  Turcs,  mais,  d'après  les  mé- 
moires des  Conventuels,  St-Jean  n'était  pas  encore  reconstruit 
en  1666,  car  le  31  juillet  de  cette  année  les  FF.  MM.  Riformati 
sollicitèrent  de  la  Propagande  l'autorisation  de  construire  leur 
couvent  sur  le  terrain  de  l'église  incendiée  en  1660.  Cette  de- 
mande renvoyée  au  Vicariat  de  CP.  ne  fut  pas  accueillie  favo- 
rablement par  Mgr  Ridolfl,  pour  la  raison  que  ce  local  <  servait 
d'asile  aux  pestiférés  et  aux  inQrmes,  sous  le  titre  ancien  de 
ospedale  asststito  dai  Domenicani.  > 

Plus  de  deux  siècles  s'étaient  écoulés  depuis  la  chute  de  sa 
puissante  colonie,  lorsque  Gènes  songeant  à  reprendre  ses  rela- 
tions avec  la  Turquie,  envoya,  en  1666,  selon  Hammer  (XVH, 
443)  le  marquis  de  Durazzo  à  CP.  pour  rouvrir  les  négociations 
&  ce  sujet.  L'arrivée  de  ce  personnage,  si  l'on  en  croit  les  actes 
de  la  Comunità  ût  sensation  à  Galata,  le  conseil  en  prit 
occasion  pour  adresser  à  la  République  une  supplique  en  faveur 
de  son  hôpital,  non  encore  reconstruit  :  <  la  Comunità  et  les 
anciens  de  Péra,  dit-elle  dans  ce  document  daté  du  13  mars  1669, 
ont  été  comblés  de  joie  à  la  vue,  dans  cette  échelle,  de  l'éten- 
dard de  la  République  ;  et  cette  joie  s'est  encore  accrue,  si  c'était 


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possible,  par  les  promesses  de.  son  ambassadeur,  touchant  la 
reconstruction  de  son  bdpital  ;  aussi  en  présence  du  fléau  qui 
désole  sans  cesse  cette  malheureuse  cité,  la  c  Comunità  >  s'est- 
elle  décidée,  encouragée  par  ces  espérances,  de  commencer  sans 
retard,  avec  l'assistance  de  la  Sérënissime  République,  l'exécu- 
tioa  de  cette  œuvre  pie,  et  de  prendre  ses  dispositions  pour  que 
l'établissement  contienne  diverses  petiteschambres  pour  recevoir 
les  malades  frappés  de  peste,  et  en  même  temps  pour  loger  un 
prêtre  qui  leur  administrerait  les  secours  de  la  religion.  »  Le 
projet  ne  paraît  pas  néanmoins  avoir  été  réalisé,  du  moins  sur 
l'emplacement  primitif,  car  dans  le  courant  de  la  même  année, 
1669,  l'hôpital  fut  transféré  à  Péra.  Il  parait  que  les  Domini- 
cains continuèrent  à  le  desservir,  comme  l'attestent  les  archives 
du  couvent  sous  la  date  des  années  1674  et  1675. 

Le  31  octobre  de  cette  dernière  année,  la  i  Comunit;\  :>  de 
Péra  écrivit  à  Rome,  pour  demander  que  le  chapelain  de  l'église 
et  de  l'bâpital  incendiés,  de  St-Giovanni  des  pestiférés,  fût  re- 
gardé comme  curé,  et  pût  exercer  son  ministère  envers  tous  les 
malades  qui  y  seraient  apportés. 

Où  l'hôpital  de  St-Jean  fut-il  enfin  reconstruit,  que  devint-il? 
n  existait  encore  en  1744,  puisque  nous  voyons  que  le  P.  M. 
Ginseppe  Danè,  Mia.  Conv.  et  commissaire  général  de  son 
Ordre,  était  chapelain  de  l'hâpital  de  St-Jean-Baptiste  des 


Il  semble  avoir  été  un  moment  sous  la  protection  vénitienne, 
car  le  Journal  de  la  Résidence  de  St-Benolt  des  Pères  Jésuites 
nous  dit  que  t  le  baile  y  fut  reçu  avec  tous  les  honneurs  dus 
aux  puissances  protectrices  (en  1667).  Nous  verrons,  III*  partie, 
comment  les  hôpitaux  de  Péra  furent  transformés.  Comme  sou- 
venir de  l'église  et  de  l'hôpital  St-Jean,  il  existe  encore  aujour- 
d'hui à  Ste-Marie,  une  confrérie  de  St-Jean-Baptiste,  unie  à 
celle  de  Ste-Ânne. 


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§  IV. 
Ste~  Irène. 

Pierre  Gylles  '  parle  de  trois  églises  de  ce  nom  dans  CP.  ; 
Crusius  (1584),  ne  fait  nulle  mention  d'église  latine  sous  cette 
âénomination  ;  mais  il  en  existait  certainement  une  au  moins, 
dans  Galata,  sans  parler  de  celles  qui  se  trouvaient  en  CP.  : 
nous  lisons  en  eO'et  dans  le  chrysobulle  de  1303,  qui  ûxo  les 
limites  de  la  concession  génoise  au  bourg  de  Galata  -  :  «  transit 
post^  (la  ligne  de  frontière)  per  puttieum  quod  est  in  templo 
sanetœ  Irence,  quod  priùs  habebant  Januenses  pro  cimitero  ^.  > 
Où  était  cette  église  ?  on  ne  peut  faire  à  cet  égard  que  des 
coiyeetures  plus  ou  moins  douteuses. 

La  ligne  frontière  montait  au  nord,  de  la  *  Vêtus  Tersana  >, 
jusqu'au  fossé,  c'estrà-dire  quatre-vingt-dix  pas,  de  sept  palmes 

l'un Elle  va  ensuite  à  l'est  et  à  la  distance  de  deux  mille 

quatre  cents  cinquante-quatre  pas  elle  rencontre  le  puits  de 
Ste  Irène,  ancien  cimetière  des  génois  ;  elle  continue,  et  à  la  dis- 
tance de  vingt-huit  pas,  elle  se  trouve  en  face  de  la  porte  de 
l'église  du  grand  et  saint  martyr  St  Georges,  etc. 

Malgré  ce  texte,  plusieurs  voudraient  identitier  les  deux  églises 
de  St-Georges  et  de  Ste-Irèae,  surtout  à  cause  du  puits  sacré 
que  nous  voyons  encore  à  St-Georges,  et  qui  est  consacré  à 
Ste  Irène.  D'après  eax  le  changement  de  vocable  ne  se  serait 
produit  qu'à  l'époque  oii  les  Génois  s'établirent  à  Galata  :  ils 
auraient  donné  à  leur  cimetière  le  même  patron  qui  protégeait 
la  mère  patrie,  St  Georges.  Mais  il  se  rencontre  une  grande  difS- 
culté  à  ce  système,  c'est  là  simultanéité,  d'après  le  texte  du 
chrysobulle  de  deux  églises,  dédiées  l'une  à  Ste  Irène,  l'autre  à 
St  Georges,  assez  distantes  l'une  de  l'autre.  Nous  laisserons  la 
solution  à  d'autres  plus  habiles. 

Une  autre  question  intéressante  se  pose  encore  ici  :  à  quelle 

1  Topographiii,  p.  244, 

■  Sauti,  1<K.  lawi.,  II,  documenta. 

*  Voir  U  texte,  t'n  extengo,  G.  II,  c.  i. 


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époque  les  Génois  commencèrent-ils  à  être  inhumes  à  Ste-Irène? 
Cet  usage  remontait-il  à  la  première  concession  faite  aux  Génois, 
dans  la  (  grande  ville  x,  en  1169?  Elle  comprenait  des  églises 
et  des  cimetières;  mais  eu  égard  à  l'étroitesse  de  ces  concessions, 
ne  peut-on  pas  supposer  que  les  inhumations  avaient  lieu  sur 
k  colline  de  Péra?  C'eût  été  la  continuation  de  l'usage  ancien, 
de  faire  passer  l'eau  aux  morts  pour  les  conduire  h  leur  der- 
nière demeure.  Plus  tard  l'islamisme  continua  cette  tradition  : 
sur  la  rive  gauche  de  la  Corne  d'or,  à  l'extrémité  des  anciennes 
murailles  de  Galata,  du  cdtè  de  l'arsenal,  près  de  la  porte  dite 
Âzab-capou,  se  trouve  une  échelle  dite  Meit-iskéléci,  t  l'échelle 
des  morts  »  citée  déjà  dans  le  Hadyqat-uldjévarai,  à  propos  de 
la  mosquée  de  Djubalï.  Là  venaient  aborder,  en  imitation  de  la 
tradition  payenne  conservée  à  travers  les  siècles,  malgré  la 
transformation  des  croyances,  et  après  avoir  simulé  ainsi  le 
passage  des  âmes  à  travers  le  Styx,  la  plupart  des  morts  de 
CP.  (du  moins  ceux  de  ce  versant  des  collines),  pour  être  inhu- 
més sur  les  hauteurs  de  Péra.  On  doit  peut-être  rattacher  à 
cette  tradition  la  défense  de  faire  passer  les  morts  sur  les  ponts 
reliant  Galata  à  CP.  Du  reste,  c'était  aussi  par  eau  que  les 
morts  de  Chalcédoine  devaient  passer  pour  aller  se  reposer  à 
Hieriae,  actuellement  Fener-baghtché. 

Quoi  qu'il  en  soit  il  ne  reste  rien  de  l'église  de  Ste-Irène,  s'il 
faut  y  voir  un  édifice  distinct  de  St-Georges,  comme  noua  le 
croyons, 

II  ne  reste  rien  non  plus  d'une  autre  église  de  Ste-ïrène,  jadis 
temple  antique  que  Constantin  transforma  en  église,  et  que 
Justinien  décora  brillamment.  Elle  était  située  à  l'entrée  de  la 
Come-d'or  à  l'endroit  appelé  aujourd'hui  t  Top-Kbanè  »  (Cons- 
tantius,  p.  161). 


8  V. 

StSébastien  (autrement  San-Bastlano),  chapelle. 

L'emplacement  de  cette  église  ou  chapelle,  dite  par  la  Co- 
munità  «  San-Bastiano  »,  est  inconnu;  les  uns  le  fixent  entre 
la  porte  de  Tophana  et  Moum-khâuè,  d'autres  dans  le  Péra  d'au- 


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jonrd'hai.  Od  a  vu  plus  haut  (ch.  v,  St'Benoît)  que,  sur  les 
difUcaltés  opposées  à  la  rëinstallation  des  Jésuites  dans  St-Benoit, 
qui,  disait-on,  était  (  éloigné  de  la  demeure  de  France  ',  »  et 
écarté  de  la  résidence  des  Latins,  M.  de  Salignac  avait  loué  uae 
maison  sise  au  milieu  du  quartier  habité  par  ceux-ci,  et  voisine 
c  de  quelque  cinquante  pas,  d'une  petite  église  ou  chapelle, 
dite  St-Sébastïen,  où  l'on  n'officiait  qu'une  ou  deux  fois  l'an',  i 
Il  résulte  d'une  lettre  écrite  par  la  Comunità  à  M.  de  Brèves, 
le  17  octobre  1609,  que  cette  maison,  appartenant  à  un  sieur 
Giorgio  Mamoretto,  était  bâtie  dans  le  jardin  acheté  par  celui-ci 
du  sieur  Dané. 

On  a  vu  également  plus  haut  que  les  Jésuites  officièrent,  dans 
cette  église,  pour  la  première  fois,  le  20  septembre  1609,  et  la 
desservirent  jusqu'à  leur  retour  &  St-6enolt,  dans  la  dernière 
semaine  précédant  le  carême  de  l'an  1610. 

St-5ébastien  avait  été  fermé,  en  mars  1586,  sous  Murad  III, 
t  en  même  temps  que  SUFrançois  et  Ste-Ànne  ;  et,  comme  ces 
églises,  il  fut  question  de  le  changer  en  mosquée,  mais  ce  projet 
ne  fut  pas  exécuté  ^.  > 

St-Sébastien  avait  aussi  des  procureurs,  chargés  de  l'admi- 
nistration de  ses  biens. 

Cette  église  est  mentionnée  dans  une  lettre  de  la  ComunUà 
au  pape,  en  date  du  14  mai  1619.  Un  acte  de  la  même  origine, 
signé  par  le  procureur  de  cette  église,  atteste  encore  son  exis- 
tence au  1"  janvier  1636. 

S.  Bastiano  contribua,  de  ses  deniers,  au  renouvellement  des 
capitulations  pérotes,  obtenu  par  l'entremise  de  l'ambassadeur 
impérial  Schmidt  (1653). 

EijRn,  cette  chapelle  brûla  en  1660,  comme  les  autres 
églises  de  Qalata.  ainsi  que  l'atteste  le  procès-verbal  de  la 
Comunità  du  6  juin  1661.  St-Sébastien  se  trouvait  donc,  cer- 
tainement, dans  Galata,  et  non  pas  à  Péra.  Que  devint-fl  de- 
puis? Les  démarches  constantes  faites  en  faveur  des  Trîni- 

■  Voyez  ci-desBus  St-Denolt,  chap.  v. 

•  CarayoD,  (or,  Icuid..  p.  27.  Cf.  St-Fntncoia  ei  St-Elenolt. 

>  HammeT  VU,  130,  l'auteur  de  VHiitoire  île  l'Empiré  Ottoman  place  ce 
fait  en  15âl,  bous  rambaisade  de  M.  de  Germigny;  la  correspondance  de 
cet  agent  n'en  parle  pas  ;  Jouannin,  la  Targuie,  p.  173,  l'inscrit  avec  plus 
de  raison  sous  l'année  1SS6. 


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taires,  dont  la  mission  était  consacrée  t  à  la  rédemption  des 
captifs;  >  comme  aussi  l'établissement  de  ces  religieux  à  Péra, 
en  1733  seulement;  et  enfin,  les  pratiques  de  ceux-ci,  touchant 
la  fête  de  SI  Sébastien,  qu'ils  célébraient  dans  leur  église  de 
Péra,  n'offriraient-ils  pas  autant  de  raisons  pouvant  faire  sup- 
poser que  cette  congrégation  fut,  dans  le  principe,  établie  à 
Galata,  dans  le  couvent-église  dé  St-Sébastien,  relevé  d'une 
façon  plus  ou  moins  durable,  après  l'incendie  de  1660? 

Dans  une  note  sans  date,  et  qui,  malgré  des  conjectures  mal 
fondées,  fournit  cepeudant  un  renseignement  intéressant,  on 
lit  :  (  Les  Jésuites  furent  établis,  provisoirement,  dans  la  petite 
maison  de  3t-Sébastien,  à  Péra,  qu'on  suppose  être  dans  le 
terrain  qu'occupent  aujourd'hui  les  Trinitaires,  lesquels  sont 
tenus,  cbaque  année,  de  célébrer  la  fête  de  St  Sébastien  '.  > 

Les  archives  des  Capucins  nous  fournissent  un  renseignement 
qui  nous  permet  d'élucider  le  fait,  en  apparence  inintelligible 
de  ce  double  établissement  des  Jésuites  à  Galata-Péra. 

t  Les  Pères  Jésuites  Polonais,  appuyés  par  le  représentant  de 
Pologne,  demandèrent,  le  30  avril  1653  ou  1654,  l'église  de 
St-Sébastien  pour  s'y  establir,  et  servir  aux  c  esclaves  de  leur 
nation.  La  reyne  de  Pologne,  voulant,  disent-ils,  fonder  ladite 
mission,  au  nombre  de  dix.  Leur  ambassadeur  la  voulait  obtenir 
d'autorité  par  un  Cat-chérif  du  0.  S.;  mais  M.  l'ambassadeur, 
de  la  Haye,  le  faisant  proposer  k  l'amiable  à  la  Communauté  des 
Pérotes,  la  résolution  d'une  commune  voix  a  esté  négative... 
l'ambassadeur  polonais  a  présenté  Ars  au  vizir  pour  obtenir 
St-Sébastien  ;  mais  le  vizir  l'a  décliné  •.  » 


I  VI. 

Ste-Claire,  couvent  et  chapelle. 

Nous  manquons  de  renseignements  sur  l'église  ou  monastère 
de  Ste-Claire.  c  L'intrépide  fille  de  St  François,  dit  Ozauam,  qui 
sort  de  son  couvent  tenant  entre  ses  mains  le  saint  ciboire,  et 

'  Voir  ci-dessous,  g  Vil,  la  Trinité. 

*  Archives  des  Mission*  des  Fâres  (Capucins  dans  le  Levant. 


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qai  met  en  faite  les  inSdèles,  >  avait  une  maison  &  Galata. 
Pirare  Gyllesen  parle  comme  existant  de  son  temps....  t  In  qao 
bodie  spectantur  du»  œdes  sacrs,  quarum  unam  Franci  appel- 
lent Divam  Claram....  »  Crualus  cite  également  une  église  de  ce 
nom  parmi  les  huit  de  Galata.  Du  Gange,  d'après  Crusius,  dé- 
signe Ste-CIaire  comme  (  temple  ou  monastère  encore  existant 
à  Galata  >.  Il  semble,  d'après  les  indications  de  Pierre  Gylles, 
que  cette  église  devait  se  trouver  dans  la  partie  de  Galata  avoi- 
sinant  Top-bana.  Les  Actes  de  la  Comunità  ne  font  aucune 
mention  d'une  église  de  ce  nom.  Elle  aurait  donc  dépendu  de 
St-François,  dont  nous  voyons  que  les  religieux  en  étaient 
chargés'.  Elle  disparut  sans  doute  dans  un  incendie. 


S  VIL 

La  Trinité. 

Nous  rangeons  parmi  les  églises  disparues  celle  de  la  T.  Ste 
Trinité,  bien  qu'elle  existe  encore,  parce  que  rien  ne  la  rattache 
à  l'histoire  actuelle  de  la  Latinité  de  CP.  Elle  a  en  effet  été 
cédée  aux  Arméniens  catholiques,  en  1857.  Noua  auroas  à  men- 
tionner cette  cession  à  sa  date. 

Cette  église  a  pris  son  nom  des  religieux  Xrinitaires,  plus 
exactement  appelés  :  Ordre  de  la  T.  Ste  Trinité  pour  la  Ré- 
demption des  captifs.  Cette  «  Religion,  i  comme  celle  de  Notre- 
Dame  de  la  Merci,  répondait  à  un  besoin  du  temps  de  sa  fonda- 
tion :  ses  membres  faisaient  profession  de  se  dévouer  au  rachat, 
et  quand  ils  ne  pouvaient  les  racheter,  aux  soins,  des  chrétiens 
captifs  dans  les  pays  musulmans.  Ils  furent  fondés  au  commen- 
cement du  xni'  siècle  par  St  Jean  de  Matha  et  St  F''èlix  de 
Valois.  Us  durent  venir  bien  des  fois  dans  le  Levant  et  à  CF., 
pour  remplir  lenr  ministère  de  charité,  mais  on  ne  voit  pas 
qu'ils  y  eussent  d'établissement  fixe.  Ils  sont  mentionnés  en 
première  ligne,  dans  le  premier  renouvellement  de  la  paix,  ou 
trêve,  de  Sitwatorok,  conclue  entre  la  Turquie  et  l'empereur  des 

>  Archives  de  St  Antoine. 


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Romains,  en  1015  =  1606  '.  Cet  Ordre  s'établit  à  Constantinople, 
spécialement  par  la  protection  de  l'Autriche  -  ;  les  ambassadeurs 
impériaux  en  Turquie  comptaient  souvent,  parmi  les  personaes 
de  ieur  suite,  on  ou  deux  religieux  de  cet  Ordre  '.  Toutefois, 
l'église  qui  fait  l'objet  de  ce  paragraphe  fut  élevée, dans  le  prin- 
cipe,  t  pour  le  corps  des  interprètes,  »  en  1699,  à  la  demande 
de  l'ambassadeur  Œttingen  ^  ;  et,  plus  tard,  le  comte  de  Virmont 
se  borna  à  solliciter,  en  faveur  des  Triuitaires,  nn  ou  plusieurs 
firmans,  indiqués  par  Hararaer,  sans  en  faire  connaître  l'objet  •  ; 
de  même,  et  dans  la  crainte  que,  si  ces  religieux  élevaient  <  une 
église  à  Péra,  elle  n'éprouvât  le  même  sort  que  celle  des  mino- 
rités (St-François),  >  qui  avait  été  rasée  (î),  lors  de  la  dernière 
rupture  avec  Venise,  <  M.  de  Dirling,  au  lieu  de  demander, 
pour  ces  religieux,  l'autorisation  de  bâtir  une  église,  sollicita 
seulement  en  leur  faveur  l'autorisation  de  fonder  un  couvent 
lie  frères  hospitaliers  ou  hospice  ".  » 

Selon  certain  témoignage,  qui,  d'ailleurs,  n'indique  pas  la  loca- 
lité, les  Trinitaires  se  seraient  établis,  à  Galata,  1719  ;  cet  éta- 
blissement n'aurait-il  pas  eu  lieu  dans  la  chapelle  St  -Sébastien, 
alFectée,  précédemment,  aux  Jésuites,  dans  les  conditions  rappor- 
tées plus  baut,auchapilrev?L'usage  des  Trinitaires  de  célébrer 
annuellement,  plus  tard,  à  Péra,  la  fôte  de  St  Sébastien  parait 
donner  à  cette  conjecture  quelque  apparence  de  probabilité. 

Le  Ptire  Barbiéri  fait  à  ce  sujet,  le  rapport  suivant  :  c  Dans 
cette  année  1733,  quatre  religieux  de  cet  Ordre,  des  Trinitaires, 
placé  sous  la  protection  de  l'empereur  Charles  VI,  acquirent, 
sur  le  côté  ouest  de  la  rue  Dum-dum  ^,  au-dessous  de  la  pa- 

'  CF,  sur  la  fondatioa  da  cet  Ordre  et  «es  modiOcatjons,  DM.  det  Ordret 
religieii.B  III.  706  ;  Miltitz,  II,  partie  liv.  III,  p.  42.  327.  Ces  religieux  étaient 
dits  en  France  Malhurîrut.  parce  que  leur  première  maiaoo  à  Paris,  fut 
fondée  prêa  d'une  chapelle  consacrée  à  St  Mathurin. 

'  Mission  du  oomta Schlik,  en  1698  (cf.  Hammer,  lor.  Caul..  XII,  461). 

»  Mission  du  comte  de  Virmont,  en  1719  (Hammer,  XIV,  18). 

'  Hammer,  XII.  470. 

»  T.  XIV,  22, 

•  Voyez  Hammer.  tome  XIV.  p.  41. 

'  Actuellement  grande  Rue  de  Péra.Celle-cI  n'a  pas  toujours  porté,  comme 
aujourd'hui,  le  même  nom  dans  toute  sa  longueur,  Beloglou  djaddâci  :  elle 
était  dite  rue  Dùm-dùm  pu  Toùm-toùm  devant  StO'Marie  et  St-Antoine 
(comme  une  grande  partie  de  ce  quartier)  plus  haut  Aga-Djamici-djadôci, 
devant  la  mosquée  Aga-djanii,  etc. 


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roisse  St-ADtoiDe,  un  terrain  oCt  ils  bâtirent  un  hospice  avec 
une  église  ea  bois  ;  ils  y  célébrèrent  les  fonctions  du  culte,  mais 
sans  avoir  chaîne  d'âmes,  conformément  à  un  décret  de  la  S.  G. 
de  la  Propagande,  du  8  avril  1737.  Leur  église  ayant  ét^  incen- 
diée, comme  celle  de  St-Antoine,  le  30  septembre  1762,  ils 
obtinrent  de  sultan  Mustafa  II,  par  l'intervention  de  la  cour  de 
Vienne,  ua  firman  eo  vertu  duquel  ils  rebâtirent  l'hospice,  sept 
maisons  de  location  et  leur  église  en  pierres.  Celle-ci  fut  bénite 
par  Mgr  Roverani,  le  premier  dimanche  de  carême  1770. 

La  paix  de  Belgrade,  conclue  sous  la  médiation  de  la  France, 
c  confirma  les  privilèges  des  religieux  de  l'Ordre  de  la  Trinité  ou 
de  la  Hédemption  des  captifs,  et  stipula  pour  eux  la  liberté  de 
reconstruire  leurs  églises'.  > 

Eu  qualité  t  d'advocatus  Ecclesise  Romanse  "  i  le  comte  Ulefeld 
reçut  pour  instructions  de  réclamer  la  protection  et  la  suze- 
raineté des  Trinitaires  et  des  Franciscains  ^  ;  et,  h  l'avène- 
ment de  l'empereur  François  I",  Penkler,  son  ambassadeur, 
faisant  valoir  la  nécessité  d'y  construire  une  tribune  pour  lui 
et  sa  famille,  obtint  l'autorisation  d'agrandir  l'église  des  Trini- 
taires de  Fera'. 

La  sécularisation  de  l'Ordre  ayant  été  prononcée  par  la  cour 
de  Vienne,  c  l'église  et  les  maisons  comprises  dans  l'enceinte 
sont  présentement  affectées,  dit  Carbognano,  à  la  résidence  de 
l'internonce  impérial  et  de  sa  nombreuse  mission  »  » . 

Par  suite  du  (sened  >  (convention, acte  obligatoire),  intervenu 
entre  Joseph  II  et  la  Porte  ottomane,  relativement  à  la  sécurité 
de  la  bannière  autrichienne  contre  les  pirates  barbaresques,  les 
Trinitaires,  en  l'an  1781  abandonnèrent  leur  établissement  qui 
passa  en  la  possession  de  l'internonce  impérial,  lequel  en  fit  sa 
résidence  personnelle  et  celle  des  employés  de  l'internonciature, 
jusqu'à  l'incendie  de  Fera,  du  14  mars  1799  ;  alors  l'église  resta 

>  Hammer,  loc.  laad.,  XIV,  464. 

*  Charleraagne,  dont  les  empersurs  d'Allemagne  avaîe  nt  la  prétention  d'être 
les  héritiers,  a  n'avait  pas,  dit  Ozanam,  reçu  vainement  le  titre  «  d'avocat  ou 
avoué  de  l'%lise  «  qu'il  couvrait  de  son  glaive  au  dehors,  et  dont  il  faisait 
respecter  les  ordonnances  ou  dedans.  ■ 

"  Id.  XV,  17. 

*  Id.  XV,  90,  130. 

*  Carbognano,  lac.  lau.1.,   é.l.  de  1794,  p.  66. 


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—  334  ~ 

debout  mais  gravement  endommagée,  bien  qu'elle  eût  été  bâtie 
en  pierres. 

D'après  le  Père  Barbiéri,  Mgr  Ponton,  vicaire  apostolique  pa- 
triarcal, trouvant  sa  résidence  de  StrGeorges  de  Galata,  trop 
éloignée  du  centre  de  la  population  catholique  s'employa  pour 
obtenir  de  Sa  M^esté  Césaréenne,  la  concession  de  l'église  et 
d'une  partie  du  terrain  ancien  des  Trinitaires.  Le  siège  vicarial 
fut  donc  transféré  à  la  T.  Ste  Trinité,  le  25  avril  1803.  D'après 
d'autres  informations,  qui  d'ailleurs  viwinent  à  l'appui  du  rap- 
port du  P.  Barbiéri,  le  frère  de  Mgr  Fonton,  vicaire  aposto- 
lique, de  1799  à  1816,  acheta,  de  l'Autriche,  le  couvent  ainsi 
que  l'église  des  Trinitaires,  restée  fermée  depuis  le  départ  de 
ceux-ci,  SOQS  la  réserve  de  laisser  les  armes  autrichiennes  sur 
la  porte  d'entrée,  ainsi  que  la  tribune  de  l'ambassadeur  ;  et  de 
conserver,  à  cette  puissance,  le  Jus  patronattis,  même  en  cas 
d'incendie  ou  de  reconstruction  du  temple. 

La  Confrérie  t  dei  sette  dolori  délia  Beatissima  Virgine  » 
fut  érigée  canoniquement  dans  cette  église  le  1"  mai  1808. 

Cependant,  malgré  la  bonne  volonté  des  Vicaires  patriarcaux, 
il  ne  fut  pas  possible  de  donner  à  cette  église  les  droits  curïaux 
ni  d'en  faire  le  siège  d'une  paroisse. 

NN.  SS.  Fonton  et  Corresi  ont  été  inhumés  dans  la  Trinité, 
le  premier  sous  la  sixième  dalle,  en  dehors  du  chœur  ;  la  pierre 
funéraire  a  été  brisée  dans  l'incendie  de  1831  ;  selon  l'usage,  les 
deux  barrettes  épiscopales  avaient  été  appendues  k  la  voûte  du 
chœur;  mais,  brûlées  dans  le  même  incendie  de  1831,  elles 
n'ont  pas  été  remplacées.  L'inscription  funéraire  de  Mgr  Corresi 
se  trouvait  dans  le  chœur,  du  cûté  du  trône  archiépisco- 
pal, ainsi  qu'une  autre  inscription  relative  à  la  fondation  de 
l'église;  mais,  endommagées  par  l'incendie  de  1831,  ces  ins- 
criptions ont  été  recouvertes  d'un  crépissage.  Quoique  ayant 
assez  souffert  du  feu,  les  murailles  et  la  coupole  ont  pu  être 
conservées,  au  moyen  de  réparations  d'une  certaine  impor- 
tance. 

Desservie  jusqu'alors  par  le  clergé  diocésain,  l'église  de  la 
IVinité  a  été  cédée  aux  Arméniens  catholiques,  vers  le  mois 
d'août  1857,  durant  la  gestion  intérimaire  de  Mgr  Mussabini, 
archevêque  de  Smyrne,  Par  suite  d'un  accord,  auquel  la  Su- 
blime Porte  aurait  tacitement  consenti,  les  armes  d'Autriche  et 


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—  835  — 

la  tribune  de  l'ambassadeur  y  ont  été  conservées,  bien  que  l'é- 
glise ait  passé,  par  le  fait,  sous  la  juridiction  ottomane  '. 

Les  restes  des  deux  vicaires  apostoliques,  inbumés  dans  cette 
église,  y  ont  été  laissés. 


g  VIII. 
Congrégation  de  St-Jean-Baptiste  (Battistint). 

Cette  congrégation  de  Clercs  Réguliers  était  originaire  de 
Gênes  ;  elle  compta  peu  de  ses  membres  à  CP.  Les  premiers 
Battistini  envoyés  en  Orient  étaient  destinés  à  la  mission  de 
Pilippopoli,  en  Bulgarie.  Ils  passèrent  à  CP.  en  1755,  et  furent 
béber];;és  à  St-Antoine  chez  les  Conventuels,  Mgr  Roverani,  qui 
appartenait  à  cet  Institut  et  qui  était  d'abord  Vicaire  aposto- 
lique de  Bulgarie,  fut  envoyé  comme  visiteur  secret  à  CP. 
pour  des  affaires  qui  regardaient  les  Arméniens.  Après  avoir 
rempli  sa  mission  il  retourna  à  son  poste  (1736)  d'où  il  ne  tar- 
da pis  à  être  appelé  à  CP.  en  qualité  d'Archevêque  de  Marcia- 
nopli,  et  Vicaire  apostolique  patriarcal,  1767.  Des  persécutions 
suscitées  contre  ces  missionnaires  par  les  Grecs,  leur  rendirent 
pour  un  temps  le  séjour  de  la  Bulgarie  impossible,  ils  se  réfu- 
gièrent donc  à  CP.  où  ils  reçurent  encore  tous  les  secours  né- 
cessaires des  Mineurs  Conventuels.  La  plupart  d'entre  eux 
purent  retourner  à  leur  mission  ;  mais  quelques-uns  demeu- 
rèrent à  CP.  On  acheta  pour  eux,  en  1771,  uoe  grande  maison 
et  un  terrain  assez  considérable,  sis  à  Péra,  près  d'une  église 
arménienne  en  ruine.  Mgr  Fracchia,  nommé  Vicaire  apostolique 
patriarcal,  en  1778,  était  aussi  de  cette  congrégation.  Ils  ont 
disparu  de  CP.  sans  laisser  de  grandes  traces.  Leur  maison 
après  avoir  subi  diverses  oppositions  fut  enfla  attribuée  aux 
Capucins,  qui  s'en  défirent  plus  tard. 

'  Cest  peut-£tre  uniquement  à  la  présence  des  armes  de  l'Autriche  sur  la 
porte  de  cette  église  que  les  Arméniens  catholiques  ont  dû  de  pouvoir  la 
conserver,  seule  de  toutes  celles  qu'ils  possédaient,  pendant  le  néo-schisme, 
anti-Hasaountiste.  Tous  les  autres  édifices  servant  au  culte,  ou  de  bienfai- 
sance, avaient  tsik  livrés  aux  néo-schlsmatiquas.  Les  derniers  restes  de 
cette  fuoesta  division  ont  heureusement  disparu. 


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SIX. 

Le  Bagne.  —  Si-Antoine. 

A  la  saite  des  invasions  des  Sarrasins,  et  après  les  Croi- 
sades, un  grand  nombre  de  chrétiens  restèrent  prisonniers  en 
Orient  ;  le  nombre  en  fut  encore  augmenté  par  la  conquête 
turque.  Les  Osmanlis,  race  essentiellement  belliqueuse,  avaient 
pour  habitude  de  faire  chaque  année  quelque  expédition  sur  les 
terres  cbrétiennes.Ghaque  année  ils  ramenaient  an  bon  nombre 
de  captif,  pris  les  armes  à  la  main,  ou  emmenés  par  force,  des 
contrées  chrétiennes.  Le  nombre  de  ces  captifs  était  encore 
augmenté  par  ceux  que  les  corsaires  turcs  enlevaient,  soit  dans 
les  lies  de  la  mer  Egée,  soit  sur  les  navires  chrétiens  capturés 
en  pleine  mer,  soit  même  dans  quelques  descentes  heureuses 
SOT  les  rivées  de  l'Italie,  de  la  Provence  ou  de  l'Espagne. 
Nous  trouvons  dans  les  histoires  locales  de  nombreuses  plaintes 
au  sujet  de  ces  ravages  des  corsaires  musulmans. 

Un  peu  plus  tard  les  Capitulations  interdirent,  il  est  vrai,  aux 
Turcs  de  faire  des  captifs  français  ou  de  certaines  autres  na- 
tions ;  mais  souvent  aussi  les  Capitulations  restaient  lettre 
morte,  en  sorte  qu'il  y  avait,  dans  toutes  les  villes  musul- 
manes et  surtout  à  CP.  un  grand  nombre  de  captifs  ou  esclaves 
chrétiens. 

Les  uns  vendus  sur  le  marché  devenaient  la  propriété  des 
particuliers,  et  suivant  l'humeur  de  leurs  maîtres,  ils  étaient 
parfois  assez  bien  traités  ;  mais  alors  naissait  pour  eux  le  dan- 
ger de  se  mêler  plus  intimement  à  la  famille  de  leurs  maîtres, 
en  devenant  musulmans  eux  aussi  ;  les  autres  n'étaient  pas  ven- 
dus, mais  ils  restaient  la  propriété  du  Grand-Seigneur.  On  en 
faisait  deux  parts,  les  uns  étaient  distribués  sur  les  galères,  et 
ils  étaient  attachés  à  leurs  rames  jusqu'à  la  mort;  les  autres 
étaient  appliqués  aux  travaux  publics  ;  alors  on  les  renfermait 
dans  des  bagnes.  Ces  bagnes  étaient  généralement  près  des  ar- 
senaux, et  les  esclaves  en  sortaient  chaque  jour  pour  aller  à 
leurs  ateliers.  A  CP,  nous  voyons  un  de  ces  bagnes  auprès  de 
l'arsenal  de  Qassim-pacha,  un  autre  près  de  celui  de  Top-Kha- 


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OBÉLISQUE  ÉLEVÉ  A  LA  MÉMOIRE 

;S  UBDBCCNS  ET  PHARUACIEKS  DÉCÈDES  DE  L'AFtUÉE  FRANÇAISE  D'Oi 


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—  337  — 

né,  an  antre  à  Bëchiktasch.  Cependant  les  Turcs  ne  traitaient 
pas  de  la  même  façon  tons  leurs  esclaves  :  ceux  dont  ils  pou- 
vaient espérer  une  rançon  étaient  mis  à  part  :  nous  voyons  qu'ils 
étaient  généralement  gardés  aux  Sept-Tours,  la  prisort-  des 
Qentits-hommes. 

he  régime  des  esclaves  chrétiens  était  fort  variable,  suivant 
te  malb-e  auquel  ils  appartenaient.  Ceux  des  bagnes  et  des  ga- 
lères étaient  traités  '  fort  durement,  car  comme  les  expéditions 
annuelles  donnaient  le  moyen  de  combler,  sans  frais,  les  vides 
crensës  par  la  mort, on  n'épargnait  pas  le  travail  et  les  mauvais 
traitements  à  ceux  que  l'on  possédait.  Ils  étaient  de  plus  très 
exposés  à  perdre  la  foi,  car  on  délivrait  et  l'on  plaçait  avanta- 
geusement ceux  qui  se  faisaient  Turcs,  suivant  le  langage  du 
temps. 

Aussi  le  rachat  des  captife  était-il,  au  moyen  âge,  une  des 
grandes  œuvres  de  la  miséricorde  chrétienne.  Deux  Ordres  reli- 
gieux, celui  de  N.-D.  de  la  Merci,  et  celui  de  la  T.  S.  Trinité  y 
consacrèrent  tous  leurs  efforts.  D'autres  encore  s'y  employèrent, 
mais  sans  pouvoir  diminuer  sensiblement  le  nombre  de  ces 
infortunés. 

Les  religieux  établis  dans  GP.  et  dans  les  autres  villes  assu- 
jetties au  croissant,  avaient  donc  poar  mission  spéciale  de  s'oc- 
caper  de  ces  esclaves  chrétiens,  sur  les  galères  et  dans  les  bagnes. 
Nous  les  voyons  tous  employés  à  ce  ministère.  Conventuels, 
Dominicains,  Capucins  et  Jésuites  rivalisent  de  zèle.  Leur 
ministère  était  facilité  par  les  Turcs  eux-mêmes,  qui  laissaient 
à  leurs  esclaves  une  certaine  liberté  et  qui  permettaient  aux 
religieux  l'entrée  des  bagnes.  Le  bakschisch  traditionnel  aidait 
souvent  à  leur  ouvrir  les  portes  de  ces  antres.  Nous  allons  les 
voir  à  l'œuvre. 

Le  bagne  de  Constantinople  ou  *  arsenale  fabbricato...  nel 
porto,  appresso  il  luogo  di  Pera  ',  >  était  rempli  autrefois  des 
c  esclaves  infidèles  faits  sur  les  chrétiens,  pendant  la  guerre'.» 
On  eu  accusait  trois  à  quatre  mille  en  1592^,  deux  mille  en 
1664*,  trois  mille  du  temps  de  M.  de  Girardin  (1686-89)  ;  le 

t  Rekaioni  oenet.,  3-  série,  IK,  347. 
«  E»tat  de*  mittion»  de  Grèce,  p.  88. 
9  Relai.  oenet.,  3*  série,  II,  33S. 
*  CarayOD.  Rel.  inéd.  de»  ir 


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p.  Tarillon  dit  (1712)  :  t  II  faut  encore  compter  parmi  les  ca- 
tholiques, quatre  à  cinq  mille  esclaves,  servant  sur  les  galères, 
ou  enfermés  dans  le  bagne  du  6.-S.,  et  plus  de  vingt  mille 
autres,  répandus  dans  les  maisons  des  particuliers  '.  >  A  la  chnte 
de  Gerbi,  don  Alvarez,  général  espagnol  des  troupes  de  débar- 
quement, y  fut  conduit  avec  les  autres  prisonniers  •  ;  après 
celle  de  Famagouste,  la  peau  du  malheureux  et  héroïque  Ba- 
gradino^  y  fut  exposée  ;  le  dominicain  Calipio,  qui  y  fut  mis 
comme  espton  du  pape,  essaya  de  la  dérober  ;  et,  plus  tard,elle 
fut  rendue  à  Venise,  et  déposée,  dans  une  urne,  dans  l'église 
des  Santi  Giovanni  et  Paolo*. 

En  1593,  après  la  défaite  de  l'armée  turque  devant  Essek,  le 
baron  de  Lobkovitz,  ambassadeur  impérial,  fut  traîné  à  la  suite 
de  l'armée,  et  let>  gentj  de  sa  maison  conduits  au  bagne  ^.  c  L'on 
y  voit  toutes  sortes  de  nations,  dit  le  P.  Saul^er,  jésuite,  en 
1664,  mais  particulièrement  des  Français-,  j'y  al  vu  des  Pari- 
siens, des  Bretons  et  des  Normands''.  > 

Les  Capitulations  contiennent  de  nombreux  articles  relatifs 
à  la  libération  d  es  esclaves  ^  ;  une  confrérie,  celle  du  Satnt- 
Cœur  de  Jésus,  avait  été  instituée,  pour  le  rachat  des  es- 
claves, et  le  produit  de  certaines  taxes  et  amendes^  avait  été 
affecté  au  môme  objet.  Lors  de  la  paix  conclue  sous  la  média- 
tion de  la  France,  M.  de  Villeneuve,  ambassadeur  de  Louis  XV, 
obtint  la  libération  de  trente  prisonniers  allemands,  incarcérés 
au  bagne  de  Constantinople  ". 

On  lit  dans  Tourneforf '",  qu'il  y  avait,  dans  le  bagne,  deux 
chapelles  pour  les  Latins,  l'une  appartenant  au  Roi  de  France, 
l'autre  destinée  à  l'usage  des  Vénitiens,  des  Italiens,  des  Alle^ 
mands  et  des  Polonais.  <  Les  missionnaires,  continue  le  savant 

I  Xoiircaux  Mffitoire^  '/es  Mluloii»,  etc.,  p.  28. 

'  Hàmmer,  VI,  194. 

>  [d.  id.  415.  Cf.  ndai.  rcn.  3"  série,  I,  379. 

*  Hammer,  VI,  5S7. 

*  Hammer,  V[[,  67, 

■  Carayon,  loc.  IntuL.  99.  236,  237. 

'  Voyez  nos  Traité»  et  eapitulation»  de  la  France,  dans  le  Contemporain, 
1369,  paseim. 
s  Délibération*  nationales,  procès- verbaux  àe  1717, 1719, 1725. 

*  Hammer,  XIV,  4G7. 

"I  Voyage  au  Lerant,  11,  5. 


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voyageur,  y  confessent,  disent  la  messe,  administrent  les  sacre- 
ments, et  font  les  exhortations  en  pleine  liberté,  en  donnant 
quelque  gratiScation  au  commandant  du  Bagno.  Les  Grecs  y 
avaient  anssi  une  chapelle.  >  Carbognano',  rapportant  les 
mêmes  faits,  dit  aussi  :  L'une  des  deux  chapelles  latines  <  ap- 
partîeneaî  francesi  e  l'altra  è  commune  a  tutte  le  nazioni.  > 

L'église  grecque  est  la  seule  existant  aujourd'hui  (1870)  ;  et 
dans  une  visite  que  nous  aTons  faite  au  bagne,  en  octobre  1865, 
on  nous  a  montré  des  ruines  qu'on  indiquait  comme  étant  celles 
d'une  chapelle  latine  ;  on  ajouta  que  cette  chapelle  était  dite 
«  Saint-Pierre  ou  Saint- Antoine,  i  Ce  rapport  n'est  consigné  ici 
que  pour  n'omettre  aucun  élément  d'information. 

On  lit,  dans  les  Mantahhtbât  d'Ëvlia  Tchelebi,  que  sultan 
Suleïman  fit  bâtir,  dans  l'arsenal,  le  San-Pavla  ztndâni;  ne 
trouverait-on  pas  là  un  indice  du  titre  de  la  chapelle  '  ? 

Pour  ce  qui  est  de  St-Antoiue,  le  r^istre  des  actes  de  bap- 
tême de  Ste-Marie  Drapéris  mentionne,  au  18  janvier  1668  : 
f  L'ecclesia  Sancti  Antonii  di  Padua,  apud  captivorum  carce- 
res,  vulgô  die  dicto  Bagno  del  Oran  Sîgnore,  In  Casslm 
pacha;  >  et,  au  23  février  1670,  <  la  capella  di  Santo  Antonio 
di  Padua,  al  bagno  del  Gran  Signore.  » 

La  Comunità  rapporte,  en  1618,  que  cette  église  ou  cha- 
pelle aurait  été  desservie,  à  une  certaine  époque,  par  les  Domi- 
nicains; elle  ^oate,  en  1633,  qu'elle  était  fréquentée  par  les 
Grecs,  les  Arméniens,  et  même  par  les  mitsulmans  des  deux 
sexes,  qui,  aHligës  d'inOrmités  réputées  incurables,  venaient  se 
recommander  au  saint,  auprès  duquel  ils  passaient  trois  jours 
et  trois  nuits  ;  après  quoi,  ils  s'en  retournaient  guéris,  t  La 
miraculosa  chiesa  di  Sant' Antonio  '  »  courut  danger  d'être  dé- 
molie, dit  la  Comunità,  en  mars  16S6  :  le  plomb  d'un  maga- 
sin du  Q.  S.  attenant  à  l'église  ayant  été  volé  ;  le  chapelain  fut 
chassé,  et  se  réfugia  chez  l'ambassadeur  de  France  ;  et  l'église 

'  Loe.  laud.,  p.  70. 

■  i  Les  Turcs,  dit  Byzantios  (II,  21),  appellent  la  bagne,  j'ignore  pour- 
quoi, pritOfi  de  Sl-Paul,  ■ 

3  C'aat  probablement  da  cette  église  que  parla  Du  Gange  (lîb.  IV,  81),  d'a- 
près le  P.  Pacifique,  capucin,  in  Itinsrario  Co'iitanlinopolilano.  «  fréquen- 
tée, dit-il,  par  un  grand  nombre  de  Grèce,  à  cause  des  miracles  que  Dieu 
y  opérait.  ■ 


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fat  mise  sous  scellé.  La  réouverture  ayant  été  obtenue  à  prix 
d'argent,  la  desservance  fut  donnée  aux  Mineurs  Observantins 
(16  mai  1626);  le  procureur  comptait  au  chapelain  20  asprcs 
par  jour  pour  son  entretien. 

En  1632,  la  Comunità  décide  que  le  chapelain  et  le  sacris- 
tain pourront  seuls,  dorénavant,  passer  la  nuit  dans  l'église. 

Mise  de  nouveau  sous  scellé,  en  février  1686,  cette  chapelle 
était  encore  fermée,  en  octobre  même  année  ;  les  sacrifices  de  la 
Comunità  ne  parent  obtenir  sa  restitution  au  culte  '. 

Selon  Hammer",  une  femme  du  séraï,  sous  le  règne  de  sul- 
tan Ibrahim,  successeur  de  sultan  Mourad  IV,  aurait  brisé  les 
scellée  apposés  sur  la  porte  de  l'église  ;  et,  après  s'être  baignée 
dans  Vaïasma,  aurait,  de  nouveau,  fermé  la  porte.  Irrité  de 
cette  violation  de  l'ordre  impérial,  le  grand  vizir  Qara  Mous- 
tafa^  aurait,  à  cette  occasion,  changé  l'église  en  mosquée^. 

De  ce  qui  précède,  il  semble  résulter  que  St- Antoine  se  trou- 
vait hors  du  bagne  mais  attenant  aux  magasins  de  l'arsenal  ; 
une  circulation  aussi  fréquente  n'aurait  pu  être  tolérée  dans 
l'intérieur  ;  d'autre  part,  les  actes  de  Ste-Marie  Drapéris  cons- 
tatent qu'un  mariage  fut  célébré,  en  janvier  1668,  t  in  ecclesia 
Sti  Antonii  di  Padua,  apud  captivorum  carceres,  vulgo  dicto 
Baguo  del  Gran  Signore,  in  Cassim  bassà  ;  >  et,  en  février 
1670,  qu'un  baptême  eut  lieu  i  nella  capella  di  Sto  Antonio 
di  Padua,  al  bagne  del  Gr.  S.  >  Si  le  rapport  de  Hammer  est 
exact,  on  peut  être  conduit  à  snpposer,en  tenant  compte  des  in- 
dications fournies  par  les  registres  de  Ste-Marie  Drapéris,  que 
le  vocable  St-Antoine  aurait  été  reporté  à  l'une  des  deux  cha- 
pelles du  Bagne,  vraisemblablement  &  celle  qui  t  était  commune 
à  toutes  les  nations.  > 

D'autre  part  le  fait  du  changement  de  St-Antoine  en  mosquée 
n'est  pas  rapporté  dans  les  mémoires  locaux  qui  constatent  au 
contraire  l'existence  de  cette  église  à  une  époque  postérieure  à 
celle  du  viziratde  Qara-Moustafa.  On  lit  dans  les  mémoires  des 

-  1  Cette  date  correspond  à.  celle  de  la  parte  de  Ste-Marie  de  Conitanti- 
DOple,  detierrie  par  laa  Dominicaine  (voyez  chapitre  I)- 
»  Loc.  laad.,  X,  112. 

*  Grand-Tizir  de  décembre  1638  au  SE  mars  1643. 

*  Toutefofa,  la  liste  des  mosquées  de  CAcim.^cha  ne  fournit  aucune  In- 
dication à  cet  ^rd.  (Hammer,  XVIII.) 


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—  341  — 

P.P.  Conventnela  :  c  Au  bagne,  ou  à  la  prison  des  Sept-Tours, 
et  à  l'arsenal,  aatrement  ait  «Bagno  dl  Cassim-bassà,  i  il  y 
arait  uae  chapelle  b&tie  pour  l'usage  des  latins,  sous  le  vocable 
dd  St-Antoine  de  Padoue,  par  l'écrivaia  Prono,  et  dans  la- 
quelle les  P.P.  Gonveatuela  prêchaient  et  célébraient  les  of- 
fices j  cette  chapelle  fut  bénite  par  Mgr  Ridolti,  le  19  mars  1664. 
Donnée  plus  tard,  en  1688,  aux  Jésuites,  par  Mgr  Gasparini, 
Mgr  Bavestrelli  en  confia  la  direction  aux  prêtres  séculiers, 
après  la  suppression  des  Jésuites.  Elle  avait  été  incendiée 
en  1720,  mais  reconstruite  eo  pierres  presque  aussilôt. 

D'après  la  visite  que  lui  fit  le  Vicaire  patriarcal,  le  37  Join 
1688,  quand  il  la  donna  anx  Jésuites,  l'église  de  St-Antoine  de 
Padoue,  au  bagne  du  Grand  Seigneur,  avait  trois  autels,  le 
maltre-autel,  dédié  à  St  Antoine,  celui  de  droite  à  Ste  Bose  et 
celui  de  gauéhe  aux  Ames  du  Purgatoire. 

A  cété  du  grand  bagne  se  trouvait  le  petit  qui  avait  aussi  son 
service  religieux  :  nous  voyons  en  effet  que  Mgr  Bidolfl,  les  IS 
et  33  décembre  1664,  bénit  deux  chapelles  nouvellement  éri- 
gées sous  le  vocable  de  la  B.  Viei^e  Marie,  dans  le  c  piccolo 
bagno  di  Cassam  pacha  >. 

Dans  la  même  année  1664,  les  Dominicains  desservaient  l'é- 
glise du  bagne  de  Bechiktach,  où  Mgr  ElidolQ  avait  établi  sa  ré- 
sidence d'été,  il  y  officia  pontificalement  le  11  mai  1664.  Cette 
église  avait  deux  cloches. 

Il  y  avait  aussi  un  bagne  aux  Sept-Tours,  et  nous  avons  vu 
que  l'on  y  faisait  un  service  religieux. 

Au  reste,  le  P.  Tarillon,  dans  son  mémoire  déjà  cité,  donne 
du  b^ne  de  Qassim-pacha  et  de  ses  diverses  parties  une  des- 
cription qui  nous  fait  bien  voir  comment  il  était  constitué  en 
1712.  «Le  bagnese  compose  d'une  grande  enceinte,...  au  milieu 
de  laquelle  s'élèvent  deux  gros  bâtiments,  de  figure  presque 
carrée,  mais  de  grandeur  inégale  :  le  plus  grand  s'appelle  le 
grand  bagne  ;  l'autre,  le  petit  bagne...  Dans  un  qimrtter  de 
chaque  bagne,  on  a  pratiqué  une  double  chapelle,  dont  une 
portion  est  pour  les  esclaves  du  rite  franc,  et  l'autre  pour  les 
esclaves  du  rite  grec  et  moscovite.  Ces  chapelles  avaient,  en 
commun,  d'assez  bonnes  cloches  ;  il  y  a  cinq  ou  six  ans  qu'on 
les  leur  a  enlevées  (1706?).  Assez  près  du  petit  bagne,  ou  a 
b&ti  et  orné,  des  anmdnes  des  fidèles,  une  petite  église,  sous  le 


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—  342  — 

titre  de  St-Antotne,  qui  est  assez  biea  fournie  des  meables 
d'autel  nécessaires  ;  c'est  la  chapelle  des  officiers  et  des  ma- 
lades. Les  esclaves  élisent,  tous  les  ans,  un  écrivain  ou  préfet 
du  bagne,  et  sous  lui  un  sacristain,  à  qui  tout  se  donne  pour 
compte,  pour  le  remettre  dans  le  même  état  à  celui  qui  eutre  en 
cbai^e  après  lui'...  Dans  les  temps  de  peste,...  notre  usage  est 
qu'il  n'y  ait  qu'un  seul  Père  au  bagne,  pour  y  demeurer  tout  le 
temps  que  la  maladie  dure.  Celui  qui  en  obtient  la  permission 
du  supérieur  (ce  qui  n'arrive  pas  sans  de  fortes  représentations 
de  la  part  des  autres),  s'y  dispose  pendant  quelques  jours  de 
retraite,  et  prend  congé  de  ses  firères,  comme  s'il  devait  bien- 
tôt mourir....  Le  dernier  jésuite,  mort  dans  cet  exercice  de 
charité,  est  le  P.  Vandermans,  flamand  ;  depuis  lui,  personne 
n'a  plus  été  frappé  de  cette  maladie  qae  le  P.  Besnier,  saisi  de 
la  peste  en  confessant-.  > 

Selon  les  archives  de  Ste-Marïe,  les  sacrements  étaient  admi- 
nistrés aux  esclaves  du  bagne,  de  1667  à  1731,  par  les  réguliers 
de  cette  paroisse;  et,  dans  leur  supplique,  supposée  de  1683,  à 
la  Comvnitâ,  ces  mêmes  religieux  se  plaignaient  de  ce  que 
c  les  Jésuites  se  sont  introdoits,  dernièrement,  dans  le  grand 
bagne,  et  que  monseigneur  leur  en  a  donné  la  cure,  i  On  lit 
cependant  dans  le  Mémoire  du  P.  Saulger,  en  date  du  30  mars 
1664  :  (  Parmi  les  travaux  des  Jésuites  sont  les  galères,  com- 
posées d'un  bon  nombre  d'esclaves  français  ;  deux  de  nos  Pères 
vont,  tous  les  dimanches,  au  grandbagne  du  Qrand  Seigneur... 
nous  y  allons  confesser  et  chanter  la  grand'messe,  avant  le  tra- 
vail. Nous  avons,  de  plus,  pour  mission,  les  Sepl-Tours,  la 
prison  des  gentils-hommes.  Nos  Pères  restent  auprès  des  ma- 
lades ;  te  soir,  ils  retournent  au  bagne,  pour  entretenir,  plus  k 
loiair  ceux  dont  il  faut  soutenir  la  foi.  Durant  les  nuits  entières 
des  veilles  des  grandes  fêtes,  passées  avec  ces  pauvres  gens 
pour  les  confessions,  il  faudrait  voir  la  douleur  de  leur  péni- 
tence, la  ferveur  de  leurs  prières,  leur  soif  de  la  parole  de  Dieu... 
Durant  dix  années  qu'il  demeura  &  Constantinople,  le  P.  Ber- 
nard a  pris  le  soin  des  bagnes;  il  y  passait  souvent  les  jours  et 

'  Cf.  plus  haut,  Comunità  di  Pfra-Oalaia. 

>  I^  nom  du  P.  Besnier  n'est  pas  inscrit  sur  la  pierre  des  Pir«a  Jésuites 
morts  de  peeie.  (Voyez  notre  Compte-i-endu  de  1864.} 


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—  343  — 

les  nuits.  Ce  révérend  missionnaire  est  mort  victime  de  son  zèle 
évangélique;  son  nom  figure,  à  l'année  1683,  sur  la  pierre  fu- 
néraire des  Jésuites  morts  de  peste  K  i 

D'après  l'état  de  la  chrétienté  de  CP.,  présenté  au  St-Siège 
par  Mgr  Teoli,  archevêque  de  Myra,  suffragant  du  pateiarche 
de  CP.  (1653-1663},  les  allemands  et  les  polonais  esclaves,  spé- 
cialement aux  Sept-Tours  où  ils  sont  enfermés,  et  où  se  trouve 
une  nouvelle  chapelle,  avaient  le  plus  grand  besoin  de  mission- 
naires de  leur  nation.  Déjà  le  P.  Giovanni  Circbi,  d'Anagni, 
Vicaire  patriarcal  (1681-1635),  et  de  nouveau  (1648-1651),  avait 
fortement  représenté  à  la  Propagande  la  misère  des  esclaves  du 
bagne  à  CP. 

Dans  une  lettre  du  33  mars  1747,  au  ministre  des  affaires 
étrangères,  M.  de  Castellane  cite  <  les  Jésuites  qui  ont  l'entrée 
du  bagne^.  »  En  temps  de  peste,  ceux-ci  s'enfermaient  avec 
leurs  ouailles,  et  plusieurs  d'entre  eux  y  ont  trouvé  une  mort 
glorieuse  :  ils  sont  tombés  sur  le  champ  de  bataille  de  la  cha- 
rité évangélique!  Remplacés,  à  la  suppression  de  l'Ordre,  par 
MM.  les  Lazaristes,  ceux-ci  ont  dignement  occupé  au  bagne, 
jusqu'en  1818  ou  1830,  le  poste  de  leurs  prédécesseurs;  &  peu 
près  vers  cette  époque,  leur  chapelle  fut  détruite  par  le  feu  ;  on 
sauva  des  flammes  le  tableau  qu'on  voit  présentement  (1870),  à 
St- Benoît,  au-dessus  des  orgues  ;  il  représente  une  scène  de 
rachat  d'esclaves;  un  évêque,  assisté  de  deux  prêtres  en  cos- 
tume de  chœur,  compte  au  personnage,  debout  devant  lui,  le 
prix  de  la  libération  d'esclaves  accroupis  et  garrottés  à  ses  pieds. 

Depuis  que  les  Turcs  ne  font  plus  d'esclaves  chrétiens,  l'œuvre 
du  bagne  n'a  plus  la  même  importance  que  jadis.  Ce  n'est  plus 
qu'une  œuvre  ordinaire  des  prisons,  et  même  peu  considérable  ; 
car  les  européens  des  diverses  nationalités  étant  justiciables  de 
leurs  cours  nationales  de  justice,  il  ne  reste  guère  que  les 
condamnés  raïas,  peu  nombreux  toujours.  Nous  ne  séiiarerons 
donc  pas  ce  qui  reste  à  dire  des  prisonniers  dans  l'état  actuel 
de  ce  que  l'histoire  nous  fournit  des  bagnes  d'autrefois. 

Actuellement,  la  desservance  du  bagne  est  dévolue  aux 

1  Cf.  CarayOQ,  lor.  f(ia<J.,  p.  99.247,  248,252;  Eitaldc»  ininion»  de  Grèce, 
en  1695  ;  et  mon  Comple-rcn/lu  du  cimeliire  catholique  latin  de  Constauti- 
nople  pour  l'année  1864,  p.  26. 

>  Testa,  Recueil  de»  Traita»,  II,  180. 


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~  344  ^ 

H*.  Dominicains  :  le  révérend  et  zélé  curé  de  St-Pierre,  assisté 
d'une  sœur  de  Charité  chaînée  de  cet  office,  a  obtenu,  de  l'au- 
torité locale,  un  petit  emplacement  qu'il  a  converti  en  cha- 
pelle ;  là  on  entend  les  confessions,  on  dit  ]a  messe  et  l'on 
administre  les  sacrements;  on  distribue  aussi,  une  fois  la  se- 
maine, en  numéraire  ou  en  nature,  des  secours  aux  galériens 
latins.  Le  docteur  Fontana,  assisté  de  sœur  Madeleine,  a  créé, 
dans  le  hatgne  (zindân), aa  petit  hôpital  pour  les  malades  latins. 

Le  curé  de  St-Pierre  et  les  sœurs  de  charité  ont  également 
obtenu,  du  ministère  de  la  police,  l'autorisation  d'établir  une 
petite  chapelle  dans  la  prison  de  la  préfecture  de  police  {zabtïé) 
à  Gonstantinople.  Cette  autorisation  avait  été  retirée  ;  aussi  les 
prisonniers  catholiques  latins  étant  restés  dépourvus  de  tout  se- 
cours religieux,  l'ambassade  de  France  a  fait  des  démarches 
auprès  du  ministère  de  la  police  aSn  de  remédier  à  cet  état  de 
choses  :  le  ministère  accueillant  favorablement  les  justes  obser- 
vations gui  lui  étaient  présentées,  a  mis  dans  la  prison  centrale 
deCP.,  sur  la  place  de  sultan  Ahmed, une  chambre  assez  grande 
&  la  disposition  du  curé  de  St-Pierre,  dont  la  juridiction  s'étend 
à  tout  CF.,  afin  d'y  célébrer  la  messe  et  d'y  donner  les  secours 
religieux  aux  détenus  catholiques-latins.  La  nouvelle  chapelle  a 
été  inaugurée,  le  30  mars  1876,  par  le  R.  P.  Marengo,  domini- 
cain, curé  de  St-Pierre, 

Sous  le  titre  d'ceuwe  des  prisons  de  Constantinople,  il  s'est 
formé,  À  cette  occasion,  une  association,  dont  voici  les  résultats 
pour  l'année  1869: 

Recettes  .'Cotisations  [piastres,     gT3    /Mpenses.'Aumànea:  piastres,     717 
Dons  pour  vêtements,    240  Acliat  de  vêtements,    210 

Piastres.     .     .  1062  Piastres.     .     .    927 

Compte -rendu  moral . 

Bienfaiteurs 9 

Visites  aux  prisonniers.     .     .    .     4S 
Libération  de  prisonniers  ...      G 
Vêlements  et  chaussures  distri- 
bués à  trente-trois  prisonniers. 

Résultats  pour  1891  : 

Bienfaiteurs  :  dix  ;  visites  :  douze  ;  prisonniers  libérés  :  trois  ; 
recettes  ;  1,846  piastres  ;  dépenses  :  941  piastres. 


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SX. 

Saint-Jean  Chrysostôme  '. 

Cette  église,  sise  daas  la  graade  rue  de  Péra,  à  gauche,  en 
allant  vers  le  Taqcim,  presque  eu  face  de  la  me  Hava,  fut  cons- 
truite par  Mgr  HîUereau,  qui  en  fit  l'inauguration  en  1S54.  Sa 
Qrandeur  avait  désiré  l'ériger  en  paroisse  ;  mais  certaines  oppo- 
sitions ayant  été  produites  à  la  Propagande,  contre  l'exécution 
de  ce  projet,  l'archevêque  fut  invité  à  l'ajourner.  Le  vaisseau 
de  l'édifice  se  composait  de  trois  nefs,  dont  une,  celle  de  gauche, 
troncpiée  ;  il  avait  plusieurs  tribunes.  Cette  église  qui,  d'ailleurs, 
n'était  portée  qu'à  la  moitié  de  sa  longueur  projetée,  ne  donnait 
pas  sur  la  rue,  comme  cela  est  d'usage  en  Orient,  elle  était  pré- 
cédée d'un  corps  de  logis  contenant  la  résidence  de  l'arche- 
vêque, le  secrétariat,  la  chancellerie. 

C'est  là  que  Mgr  Hillereau  rendit  son  flme  à  Dieu  ;  et  c'est 
dans  cette  église  que  ses  obsèques  furent  célébrées.  M.  le  chargé 
d'affaires  de  France  y  assistait  avec  une  partie  du  personnel  de 
l'ambassade  ;  la  dernière  absoute  a  été  donnée  par  Mgr  Trioche, 
archevêque  de  Babylone,  de  passage  à  Constantînople. 

L'église  St-Jean  Chrysostéma  a  été  détruite  par  le  feu,  dans 
l'incendie  du  5  juin  1870;  la  toiture  s'est  effondrée  sur  le 
sol  ;  les  quatre  murs  seuls  sont  restés  debout  ;  la  résidence  ar- 
chiépiscopale a  entièrement  disparu  ;  elle  contenait  une  biblio- 
thèque ecclésiastique  importante,  dont  on  a  &  regretter  la  perte. 
Au  moment  où  le  feu  se  déclarait  à  l'une  des  extrémités  de  Péra, 
et  s'avançait  avec  une  rapidité  efb^yante,  le  vicaire  apostolique, 
Mgr  Pluym,  officiait  à  l'église  du  St-£^prit,  dont  c'était  la 
tête  patronale  (le  jour  de  la  Pentecôte)  ;  informés  du  danger 
que  courait  l'archevêché,  M.  l'abbé  Testa,  vicaire  général,  Don 
Antonio  Gîorgiovich  et  le  Frère  passioniste  attaché  &  la  personne 
da  Monseigneur,  se  portèrent  en  hflte  sur  le  lieu  du  danger  ; 


■  St  Jean  Chry*o>Wine  fut  élu  patriarche  de  ConatantiDOple  «n  397.  Voyaz 
sur  cet  illustre  docteur,  Montalembert,  U»  Moine*  d'Occident,  1, 121  «t  auiv- 


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—  346  — 

par  leur  zèle  et  leur  courage,  ils  parvinrent  à  sauver  des  flammée 
les  saintes  Espèces,  une  grande  partie  des  ornements  sacerdo- 
taux et  pontificaux,  ainsi  que  les  objets  les  pins  précieux  servant 
au  coite'. 

St-Jean  Chrysostdme,  résidence  du  vicaire  apostolique,  était 
desservi  par  les  prêtres  séculiers  du  diocèse,  au  nombre  de  huit 
prêtres  en  tout,  répartis  entre  cette  église  et  celle  du  St-Esprit. 
St-Jean  Chrysostôme  n'avait  pas  d'école  gratuite  ;  mais  le  Vi- 
cariat y  contribuait,  de  différentes  façons,  à  l'instructioB  d'un 
certain  nombre  d'enfants  pauvres,  tant  chez  les  Frères  de  la 
Doctrine  chrétienne  que  chez  les  Sœurs. 

>  S«Ion  le  rapport  lu  par  le  président  du  conseil  municipal  de  Péra,  dans 
la  eéaoce  du  jeudi  10  Dovembre  1870,  l'Incendie  du  5  juin  aurait  détruit  le 
quart  de  ta  circonicriplion  municipale,  coniumé  3000  maisons,  et  laine 
â),000  Amei  sans  pain  ni  asile. 


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CHAPITRE  IX. 

ORGAMSA-nON  ECXXÊSIASTIQUE  DE  LA.  LATINITÉ  DE  CONSTANTINOPia. 


On  a  TQ,  dans  la  Première  Partie,  que  les  églises  et  les  mo- 
Dastères  de  rite  latin,  qui  se  trouvaient  &  CP.  pendant  tonte  la 
durée  du  Baa-Empire,  étaientsoumis  directement  à  l'autorité  du 
St  Siège,  qui  souvent  les  confiait  à  un  vicaire  pontifical.  Puis, 
lorsque  les  Cités  italiennes  fondèrent  des  colonies  sous  les  murs 
de  la  ville  impériale,  elles  y  envoyèrent  un  clergé  de  leur  choix, 
et  eurent  des  églises  nationales  dans  l'enceinte  de  leurs  conces- 
sions. Nous  l'avons  constaté  spécialement  pour  les  Âmalfitains, 
les  Pisaus,  les  Vénitiens  et  les  Oénots.  Les  Vénitiens  étant  les 
plus  nombreux  et  les  plus  puissants,  il  semble  que  tous  1^ 
liatins  ont  été  pendant  quelque  temps  soumis  à  l'autorité  du 
patriarche  de  cette  nation  :  Âquilèe,  Grade,  ou  Venise,  suivant 
les  époques. 

Lors  de  la  conquête  Franco-Vénitienne,  on  établit  à  CP.  la 
hiérarchie  ecclésiastique,  et,  à  la  tète  de  l'Église  latine,  on  cons- 
titua un  patriarche.  Nous  avons  suivi  toute  la  série  des  patri- 
arches effectif  de  CP.  Après  la  reprise  de  la  cité  par  les  Grecs, 
le  patriarche  avec  son  clergé,  dût  abandonner  l'empire,  où  il  n'y 
avait  plus  de  place  pour  lui  ;  mais  il  conserva  néanmoins  sa  ju- 
ridiction. Il  est  cependant  à  remarquer,  que,  malgré  la  présence 
du  patriarche  local,  le  patriarche  de  Venise  avait  encore  des 
droits  sur  les  églises  vénitiennes,  et  l'archevêque  de  Gènes  sur 
celles  de  sa  nation. 

A  partir  de  1361,  les  Vénitiens  n'eurent  plus  qu'une  place 
tout  h  fait  secondaire  à  CP.  :  les  Génois  y  sont  tout  puissants, 


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—  348  — 

surtout  dans  leur  colonie  de  Galata.  L'archevêque  de  Qènes 
garda  donc  sur  les  églises  qui'  appartenaient  à  la  Comanità,  l'au- 
torité qu'il  possédait  depuis  longtemps }  celles  des  religîeaz  étant 
exemptes  ne  relevaient  guère  que  de  leurs  supérieurs,  locaux  ou 
généraux,  et  du  St  Siège.  Les  choses  n'y  marchaient  pas  toujours 
d'elles-mêmes,  aussi  voyons-nous  les  Souverains  Pontifs  y  en- 
voyer des  visiteurs,  pour  apaiser  des  diflférends  ouréprimer  des 
abus  (1421,  1425). 

Depuis  la  conquête  ottomane,  (1453',  la  ville  de  Gènes  ayant 
abandonné  sa  colonie  à  son  propre  sort,  nous  ne  voyons  plus  son 
cher  spirituel  y  exercer  aucune  juridiction.  Tout  le  pouvoir  ec- 
clésiastique est  concentré  entre  les  mains  du  patriarche  qui 
l'exerce  par  un  vicaire  de  son  choix  ;  c'était  ordinairement  un 
religieux,  le  plus  souvent,  le  supérieur  du  couvent  de  St-Fran- 
çois.  Ce  Vicaire  patriarcal  n'était  point  revêtu  du  caractère 
épiscopal  :  on  redoutait  même,  &  certains  moments,  comme  nous 
l'avons  vu,  la  nomination  d'un  évêque  véritable, 

Cependant,  à  la  suite  de  la  visite  de  l'évêque  de  Santorin,  la 
S.  C.  de  la  Propagande,  en  1634),  manda  au  patriarche  d'en- 
voyer à  GP.,  outre  le  Vicaire  patriarcal,  (qui  était  alors  le  R.  P. 
Guillaume  Vizzanni,  M.  Conventuel),  an  évèque  suffragant,  qu'il 
devait  entretenir  à  ses  frais,  D.  Livio,  doyen  de  Candie,  fot 
choisi  pour  cet  office,  mais  il  ne  put  arriver  h  son  poste  et  mou- 
rut en  Crête,  en  1645. 

L'année  d'après,  la  S.  Congrégation,  <  pour  mieux  subvenir 
aux  besoins  des  âdèles,  >  nomma  elle-même  et  sans  aucune  in- 
gérence du  patriarche,  un  évêque  suflragant  de  CP.,  le  P.  Hya- 
cinthe Subiano,  Ord.  Praed.,  qui  put  prendre  possession  de  son 
église.  Puis  après  quelques  années,  des  conQits  d'attributions 
a'étant  élevés  entre  lui  et  le  Vicaire  pah-iarcal,  la  S.  Congréga- 
tion unit  les  deux  titres  dans  la  même  personne,  (21  novembre 
1651).  Depuis  lors,  et  jusqu'en  1772,  elle  nomma  des  évèques 
titulaires,  (ou  in  paHibus  infidelium),  en  leur  attribuant  le 
titre  de  Vicaire  apostolique,  suffragant  paU-iarcal  de  Constantino- 
ple.  Mais  comme  les  Turcs,  ayant  envahi  l'Ile  de  Crête,  s'étaient 
emparés  de  tous  les  biens  du  patriarcat,  et  que  le  patriarche  ne 
pouvait  plus  rien  pour  son  suffrf^ant,  la  S.  Congrégation  con- 
tinua de  le  nommer  elle  seule.  Enfin  depuis  1773,  elle  a  suppri- 
mé le  titre  de  suffragant  patriarcal  qui  n'avait  plus  de  raison 


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—  349  — 

d'être  et  elle  nomme  simplement  dee  Vicaires  apostoliques  pa- 
triarcaux. Ils  sont  Vicaires  apostoliques  pour  tout  le  district 
qui  leur  est  conâë,  et  Vicaires  patriarcaux  pour  Constantisople. 
Cet  archevêque  jouit  de  la  juridiction  t  ordinaire  »,  d'après  le 
décret  de  Benoit  XIV,  du  15  avril  1752.  Enfin  le  cinq  mars  1868, 
il  a  reçu  le  titre  de  t  Délégué  apostolique  pour  les  Rites  ori- 
entaux >, 

n  est  à  noter  encore  que  pendant  leurs  absences  ou  même 
sans  être  absents,  quand  ils  le  voulaient,  les  Vicaires  patriar- 
caux, les  évéques  suffraganis,  et  les  vicaires  apostoliques,  se 
donnaient  un  vicaire  général  de  leur  choix,  lequel  administrait 
en  vertu  des  pouvoirs  qu'il  tenait  de  lui. 

Ces  préliminaires  étant  posés,  et  ces  distinctions  bien  faites, 
il  nous  sera  plus  facile  de  nous  reconnaître  au  milieu  de  toutes 
les  confusions  de  notre  histoire  locale  '. 

Avant  l'établissement  régulier  des  Vicaires  patriarcaux,  nous 
trouvons  que  l'archevêque  de  Gènes  avait  son  vicaire  à  CP.  Il 
parait  avoir  résidé  à  l'église  de  St-Michel  de  Galata,  mais  nous 
ne  trouvons  pas  de  traces  de  son  administration. 

En  1421  le  patriarche  d'Aquilée  et  l'archevêque  de  Gênes, 
avec  d'autres  évëques,  sont  chargés  d'examiner  une  question 
relative  aux  lieux-saints  ;  le  jugement  fut  rendu  le  7  janvier 
1421,  mais  il  ne  semble  pas  que  les  prélats  soient  venus  en 
Orient  pour  l'examiner. 

Si  l'on  en  croit  les  Négociattons  iT.  I,  303.)  un  patriarche 
d'Aquilée  serait  venu  à  GP.,  en  1532  i?) 

D'an  autre  cdté  Crusius  nous  dit  que  <  Paptstœ,  in  oppido 
Galata  sive  Fera,  generalem  antistitem  totius  orientis  habent, 
cui  titulus  patriarchae  est  (1584).  > 

En  1437,  Fr.  Francesoo  Spinola  de  Gênes,  avait  la  mission  de 
visiter  Chypre,  Chio,  Fera,  Caffa  et  autres  lieux,  comme  nous 
l'avons  dit  ailleurs. 

La  <  Comunità  *,  sans  fixer  de  date,  parle  d'an  évëque  de 
Nona  qui  aurait  été  envoyé  à  CF.,  comme  visiteur  apostolique, 
antérieurement  à  1609.  Les  mémoires  des  Conventuels  nous 
rapportent  une  lettre  de  la  t  Comunità  >  qui  cite  les  procës- 

1  Cr.  la  première  éd.  p.  108  et  109.  Ces  ptëlimiiiairea  Mnt  cODBrméi  par 
la  rcoueîl  officiel  de  la  S.  C.  De  la  Propagande,  Miiaionei  Catholicte,  Rome 
im,  p.  115,  IIG. 


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verbaux  d'une  visite  faite  à  CP.  par  l'évôqne  de  Tiue,  en  1540 
et  en  1588. 

En  1609,  l'évêque  de  Tine  est  encore  choiai  pour  faire  la  vi- 
site de  CP.  mais  en  1633,  c'est  l'évêqne  de  Santorin,  Fr.  Pietro 
de  Marcbis  0.  P.,  qui  est  chargé  de  cette  mission. 

Nous  aurons  à  citer  encore  plusieurs  visiteurs  apostoliques 
dans  le  cours  de  notre  énumération  des  chefs  religieux  de  la  La- 
tinité de  CP.  Nous  en  venons  aux  vicaires  patriarcaux  propre- 
ment dits*. 


LISTE  DES  CHEFS  BELIOIEOX  DE  LA   LATINTFÉ  DE  CONSTAKTINOPLE. 

Vicaires  Patriarcaux. 

R.  P.  N.  N.  Vie.  Patr.  (on  ne  sait  pas  son  nom)  ;  Il  reçoit  une 
instance  de  la  c  Magnifica  Coniunità  >  qui  affirme  ses  droits  sur 
huit  églises  de  OP.,  droits  reconnus  par  l'évêque  de  Tine  dans 
sa  visite.  En  1684,  il  publie  un  décret  de  Grégoire  XIII  qui  éta- 
blit la  préséance  des  Conventuels  sur  les  Observantins  à  CP. 

1599.  Mgr  Bonaventura  Secusi,  da  Caltagirone,  in  Sicilia, 
mintstro  générale  des  FF.  MM.  Observants,  créé  patriarche 
de  CP.  par  Clément  VIII,  meurt  à  Catane. 

1604.  Fr.  Cherubîno  da  Macerata,  M.  0.  Custode  de  la 
Marche,  Vicaire  patriarcal  de  CP.  La  S.  C.  des  Évêques  et  Ré- 
guliers déclare  qoe  l'Ordinaire  ne  peut  sans  de  graves  raisons 
enlever  aux  curés  la  célébration  des  mariages  et  des  bap- 
têmes, etc.  pour  se  les  réserver  personnellement. 

1616.  Le  P.  Fr.  Jean-Baptiste  Sangallo,  da  Monte  Barocchio, 
Vicaire  patriarcal,  et  Min.  Prov.  des  FF.  MM.  Conv.  est  mis  à 
mort  dans  sa  prison  par  les  Turcs.  Les  uns  disent  qu'il  fiit 
étranglé,  les  autres  qu'il  fut  jeté  à  la  mer.  Une  lettre  de  la 
(  Comunità  »  à  la  S.  G.  de  la  Propagande,  dit  que  le  Vicaire  Pa- 
triarcal fut  mis  en  prison  et  condamné  à  mort  par'  le  grand  vizir. 

1618.  Fr.  Gluseppe  de  Bruni,  da  Venezia,  M.  0.  gardien  de 

'  La  Bérie  chronologique  des  ordinatrea  de  CP.  eat  prise  d'une  copie  manus' 
crit«  du  mémoire'préHeDté  à  Mgr  Coreesi,  vie.  apoat.  patr.  de  CP.  par  le  R.  P. 
Barbleri,  en  1SI7.  Elle  est  conservée  dans  les  archives  des  Conventuels,  et 
reprodoito  dans  celles  du  Vicariat. 


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—  351  — 

Ste  Marie,  Vie.  Patr..  Il  ordonne  sous  les  peines  canoniques  au 
R.P.  Turoli,  0.  P.,  de  rendre  les  clefs  de  l'église  de  St-Georges, 
que  sa  communauté  possédait  depuis  dix  ans.  En  1631,1a  t  Ma- 
gnifica  Comnnità  >  fait  la  même  réclamation  pour  l'église  3t- 
Pierre,  desservie  par  les  Dominicains.  Elle  réclame  au  moins 
que  l'on  reconnaisse  son  droit  de  patronage.  En  1622,  Gré- 
goire XV,  de  Bologne,  établit  la  S.  C.  de  la  Propagande. 
1622.  P.  Benedetto  da  VeronS,  M.  0.  Vie.  Patr. 

1636.  P.  M.  F.  Andréa  Gislanti,  da  Firenze,  min.  Prov. 
d'Orient  tenant  place  du  Vie.  Patr.  au  spirituel  et  au  temporel, 
n  fit  la  visite  du  patriarcat,  et  renonça  à  son  ofBce. 

1637.  P.  M.  Fr.  Guglieimo  Foca  da  Perugia,  M.  Conventuel 
Prov.  d'Or.  Vie.  patr.  La  S.  C.  du  St  Office  déclare  que  l'on  ne 
peut  permettre  le  mariage  avec  des  sebismatiqaes  que  si  la 
partie  schismatique  promet  d'abjurer  ses  erreurs  et  de  se  faire 
catholique.  Il  se  démet  en  1639. 

1629.  P.  M.  Fr.  Giovanni  Mauri  délia  Fratta,  M.  C.  Prov.  d'Or. 
Vie.  Patr.  Il  publie  les  nouvelles  constitutions  des  FF.  MM. 
Conventuels,  et  se  démet  en  1631. 

1631.  P.  M.  Fr.  Giovanni  Francesco  d'Anagni,  Cirehi,  M.  C. 
Prov.  d'Or,  Vie.  patr.  Il  fait  la  visite  du  diocèse  et  laisse  en  chaque 
église  des  ordonnances,  suivant  les  besoins.  En  1633,  il  prescrit 
la  tenue  d'un  registre  des  mariages,  à  conserver  à  la  chancel- 
lerie. Il  détermine  les  Fêtes- de  précepte  à  Fera.  H  commande, 
sous  peine  d'excommunication,  aux  procureurs  laïques  des  églises 
de  rendre  leurs  comptes  à  la  fin  de  chaque  année  au  Vie.  patr. 
selon  les  ordonnances  antérieures.  Il  commence  une  longue  lutte 
contre  les  représentants  de  la  France  et  les  religieux  français, 
au  sujet  des  prières  que  l'on  faisait  k  la  messe  pour  le  roi  de 
France. 

1635.  P.  M.  Fr.  Guglieimo  Vizzani  da  Bologna,  M.  G.  Prov. 
d'Or.  Vie.  patr.  Il  établit  des  régies  de  droit  relativement  à  l'ac- 
complissement du  devoir  pascal,  dans  une  des  trois  églises  pa- 
roissiales. Il  meurt  de  peste  et  il  est  inhumé  aux  Grands-Champs, 
17  oct.  1637.  Ses  restes  et  la  pierre  funéraire  qui  les  recouvrait 
ont  été  transportés  en  1864,  de  l'ancien  cimetière  des  Grands- 
ChampSj  à  l'église  de  St-Autoine  à  Péra. 

1637.  P.  M.  Fr.  Angelo  Petricca  da  Sonnino,  M.  G.  Com.  gén. 
d'Or.  Vie.  Patr.  C'est  sous  son  administration  que  le  patriarche 


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—  352  — 

grec  Veni  tint  un  synode  où  fut  décrétée  l'union  des  Grecs  aux 
Latins.  Le  patriarche  fat  empalé,  et  le  Vicaire  patriarcal  fut 
obligé  de  prendre  la  fuite,  en  chrétienté.  D  obtint  de  la  t  Ma- 
gniâca  Comunità  >  l'augmentation  du  subside  qu'elle  donnait 
aux  Conventuels. 

1641.  P.  M.  Fr.  Francesco  Castogna,  da  Staffolo,  des  Marches, 
M.  C,  proT.  d'Or.  Vie.  patr.  D  mourut  de  peste  en  1641  ;  ses 
restes  et  sa  pierre  tumulaire  ont  été  transférés  des  Grands- 
Champs  à  St-Antoine  en  1864. 

1641.  P.  Bac.  Fr.  Andréa  Ridolfl,  délie  Fratte,  d'Urbino,  M.  C. 
n  était  secrétaire  du  précédent  j  à  sa  mort,  il  fat  fait  commis- 
saire général  d'Or,  et  vice-vicaire  patriarcal-,  il  fut  après  son 
remplacement,  l'année  suivante,  nommé  préfet  apostolique  de 
Transylvanie,  puis  commissaire  à  Vienne  et  à  Raguse.  ëd  la 
même  année  le  P.  Archange  des  Fossés,  préfet  des  Capucins, 
fut  nommé,  par  la  S.  Congrégation,  Vie.  général. 

1642.  P.  M.  Fr.  Giovanni  Mercredini  da  Fanano,  de  Modène, 
M.  C.  prov.  d'Or.  préf.  de  Valacbie  et  Moldavie.  Il  arriva  peu 
après  la  restauration  de  l'église  de  St-François,  ensuite  de  l'in- 
cendie de  1639.  Nous  avons  vu  ce  qu'il  fit  pour  l'aggrandir  et 
lui  procurer  des  ressources.  Il  mourut  de  peste  et  fut  inhumé 
aux  Grands-Champs. 

1643.  P.  M.  Fr.  Giovanni  Battiata  Siroli  da  Lugo,  M.  C.  prov. 
d'Or,  préfet  des  deux  Valachies.  D  s'occupa  surtout  de  la  disci- 
pline intérieure  et  de  l'administration  économique  du  couvent 
de  St-François.  Il  se  retira  en  Italie  en  1644 

1645.  P.  Bac.  Fr.  Gregorio  de  Magistris,  d'Alatri.  M.  G. 
Comm.  d'Or,  pro-vic. 

1646.  Mgr.  Hyacinthe  Subiano,  Ord.  praed.  archev.  d'Edesse. 
n  est  nommé  sufCragant  du  patriarche  de  CF.  On  lui  reproche 
de  s'être  montré  trop  facile  à  laisser  introduire  des  abus  contre 
le  cérémonial,  c'est  à  dire  à  permettre  les  prières  officielles  et 
publiques  pour  le  roi  de  France.  Ce  fut  la  source  d'une  infinité 
de  discussions  entre  ses  successeurs  et  les  Jésuites. 

1648.  P.  M.  Fr.  Giovanni  Francesco  Cirehi,  d'Anagni,  pour 
la  seconde  fois.  Il  prescrivit  sous  les  peines  les  plus  sévères  la 
fidélité  aux  règles  canoniques  relatives  à  l'accomplissement  du 
devoir  paacal.  Il  obligea  les  procureurs  laïques  des  églises,  à 
rendre  compte  au  Vicaire  patriarcal,  une  fois  cbaqae  année,  de 


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—  353  — 

leur  administratioD  financière  :  en  plusieurs  visites  saccessives 
il  insista  sur  ce  point  avec  la  plus  grande  énergie.  Il  ânit  par 
excommunier  les  procureurs  des  églises  et  couvents  de  Péra, 
pour  irrégularité  dans  leur  administration.  A  l'occasion  de  la 
guerre,  il  renonça  &  sa  cliarge  et  rentra  en  Chrétienté. 

1651.  P.  M.  Fr.  Filippo  Severoli,  de  Faenza,  M.  C.  prov. 
d'Or.  Vie.  patr.  Les  membres  de  la  <  Magnitlca  Comunità  >  se 
justifièrent  devant  lui  des  charges  qui  leur  avaient  été  imputées 
par  son  prédécesseur  ;  il  leur  donna  l'absolution  des  censures, 
et  les  loua  même  de  leur  administration.  Cependant  on  raconte 
qu'il  laissa  à  son  successeur  un  mémoire  p£tr  lequel  il  justifie 
son  prédécesseur  le  P.  J.  F.  Circhi.  Du  reste  les  Jésuites,  par 
plusieurs  mémoires,  ayant  établi  que  les  procureurs  de  St-Benoit 
touchaient  36.000  aspres  des  revenus  de  leur  église  et  ne  leur 
en  donnaient  que  8.000,  il  les  obligea  à  en  donner  au  moins 
14.000;  quant  au  reste  il  devait  être  appliqué  aux  besoins  de 
l'église.  II  eut  encore  divers  ennuis  et  comme  la  guerre  rendait 
son  administration  plus  diflicile,  il  renonça  à  son  office  et  se 
retira  en  chrétienté. 


Vicaires  apostoliques,  suffragants  patriarcaux. 

1652.  Mgr.  Hyacinthe  Subiano,  0.  P.,  du  couvent  de  St-Pierre, 
le  même  que  plus  haut,  réunît  en  sa  personne  les  deux  titres 
de  sufFragant  et  de  Vicaire  patriarcal,  il  reçut  de  Rome  ses  pa- 
tentes et  les  fit  lire  à  St  Pierre  le  3  aoilt  1  (jô'-i  ' .  Mais  il  rencon- 
tra tant  d'opposition  qu'il  se  retira  bientôt  à  Mmyme,  après 
avoir  établi  son  vicaire  le  P.  Thomas  de  Paris,  capucin. 

165;î.  Mgr.  Bonaventura  Teoli,  da  A'elletri,  M.  C.  Arch.  de 
Mira,  Vie.  Apost.  suffragant  patriarcal  de  CF.  Il  prit  possession 
en  1653  ;  après  de  longues  discussions  entre  la  «  Magnifica  Com- 
munità  >  et  la  famille  Drapéris  relativement  à  la  procure  de 
St  Pierre,  il  établit  qu'il  y  aurait  désormais  deux  procureurs 
pour  cette  église,  l'un  toujours  de  la  famille  Diapéris,  l'autre 
choisi  par  la  «  Magniflca  Comunità  >.  Il  renonça  à  la  charge  et 
rentra  dans  sa  patrie  en  166'^. 

'  Archives  ai  St  Loais. 


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—  354  — 

1663.  Mgr.  Andréa RmolfideileFratte,d'Urbino,M. Conventuel 
érëque  de  Calamine,  Vicaire  apostolique  patriarcal,  sufTragant  d& 
CP.  Il  avait  été  déjà,  en  1641,  Vie.  patr.  Il  arriva  à  CP.  en  nov. 
1663,  et  fat  hébergé  dans  la  maison  qu'avaient  les  Conventuels 
aux  Vignes  de  Péra.  Il  arrivait  en  des  circonstances  difliciles,  le 
grand  incendie  de  1660  avait  détruit  toutes  les  églises,  sauf 
St-Benoit,  et  toutes  choses  semblaient  désorganisées  :de  plus  il 
fallait  lutter  contre  la  <:  Magnifîca  Comunità  i  fort  catholique, 
mais  tenant  beaucoup  à  ses  attributions  anciennes  et  à  son  pa- 
tronage sur  les  églises  :  enfin  il  avait  à  s'opposer  aux  prétentions 
exhorbitantes  des  ambassadeurs  des  puissances  qui  exigeaient 
des  honneurs  refusés  par  les  lois  ecclésiastiques.  Heureuse- 
ment c'était  un  homme  intelligent,  actif  et  ferme  :  son  passage 
à  CP.  laissa  de  longues  traces.  Cependant  une  vie  de  luttes  per- 
pétuelles le  fatiguait  ',  il  donna  donc  sa  démission  et  pria  le 
Gard.  Altieri  de  la  faire  accepter  par  le  Pape.  II  revint  plusieurs 
fois  à  la  charge,  si  bien  qu'en  1(575,  on  lui  nomma  comme  suc- 
cesseur Mgr  Piluzzi,  en  lui  demandant  de  rester  à  sonposte  en 
attendant.  Le  successeur  ne  put  pas  venir,  et  Mgr  Bidolfi  dut 
se  résigner  à  demeurer  à  CP-  Il  y  mourut  le  15  avril  1677. 
Voici  l'épitaphe  que  l'on  grava  sur  sa  tombe: 

D.  0.  M. 

FRATEK  ANDREAS  RIDOLFI. 

NATURA 

ADNEPÛS  FRACÏABUM  GERMEN  HUMILE. 

GRA'ITA 

EPISCOPUS  GAL.^-MIXE  BYSANTII  SUFFRAGANEUS 

PATRIARCALIS 

FATO 

PEREIJRINL'S  A  PATRIA  CIVIS  MUNDI 

VOTO 

PAt'PERTATlS  ALUMXUS  MINORITA  CONVENTUALIS 

OFFICIO 

MI8SI0XUM  PR.EFEGTUS  VICARIUS  APOSTOLICUS 


'  Il  Tut  obligé,  à  causo  de  la  guerre  de  s'absenter  de  CP.  pendant  un  an 
(l'Uir)-! '•'•!>)  ut  se  rérugia  à  Mîlo-  Il  rentra,  [dès  que  les  cïrconetanoea  le  lui 


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—  355  — 

HANC  SAXEAM  EPIGRAPHEM  VIVENS 
SIBI  OBITURO  CONSULTO  POSULT 

UT 

CHRISTOLITUS  CAUSTICA.  PIETATE 

REQUIEM  AETTERNAM 

DEPRECETTUR. 

VIXIT  ANNOS  LXVI 

DEVIXIT  ANNO  MDCLXXVII. 

DIE  XV  APRILIS. 

Il  eut  divers  vicaires  généraux  parmi  lesquels  nous  devons 
citer  P.  M,  Fr.  Mansueto  Lorabardi,  M.  C.  qui  fut  (1668;  en- 
voyé en  chrétienté  quêter  pour  la  reconstruction  de  l'église 
8t-François;  P.  Nicolas  de  8te-Genevlève,  Jésuite,  pendant 
l'absence  du  vicaire  patriarcal  et  du  vie.  gén.  (1665-1666); 
P.  M.  Bernardine  Yalentini  da  Pérugia,  M.  C.  (1668-1670)  etc. 

1675.  MgrVito  Piluzzi  da  Vignanello,  M.  C.  préfet  de  Molda- 
vie et  Valachie  fut  nommé  Vicaire  apostolique,  su&agant  pa- 
triarcal de  GP.  puis  archevêque  de  Marcianopolis.  Il  ne  put  venir 
à  CP.  et  mourut  à  Rome  en  1697,  au  collège  de  la  Propagande. 

1677.  P.  M.  Fr.  Paris  Maria  Boschi  de  Bologne,  M.  C.  Prov. 
d'Orient,  Pro-vicaire  patriarcal,  prit  possession  à  la  mort  de 
Mgr  Ridold.  Il  ne  tarda  pas  à  partir  pour  la  Chrétienté  il  fut 
remplacé  par 

1678,  P.B.  Fr..  Girolamo  Polocaij,  polonais,  M.  C,  comm. 
prov.  d'Or.,  Pro-vicaire  patr.  pendant  quelques  mois. 

1678.  Mgr  Gasparo  Gasparlui  da  Castignano,  autrefois  prov. 
d'Or.  M.  C.  Il  fut  nommé  évèque,  puis  archevêque  de  Spiga, 
Vie.  apost.  patr.  de  CP.  sufïr.  Il  prit  possession  le  3  avril  1678. 
n  avait,  de  la  S.  Congrégation,  l'ordre  de  s'entretenir  à  ses 
frais,  le  couvent  de  St-François  ne  lui  devant  que  le  logement. 
Il  continua  les  luttes  de  ses  prédécesseurs  contre  la  «  Magni- 
fica  Comunità  i  et  les  prétentions  des  ambassadeurs.  Il  parvint 
à  établir  un  règlement  des  préséances  et  des  droits  de  chacun  ; 
mais  ce  fut  sous  son  administration,  que  cessèrent  les  fonctions 
des  Seigneurs  Pérots  de  la  t  Magni&ca  Comunità  >  relativement 
aux  églises.  Il  eut,  le  5  mai  1696,  la  douleur  de  voir  consumer 
par  le  feu  dix  mille  maisons  de  Galata,  entre  autres  le  couvent 
de  St-François  et  toutes  les  maisons  qui  en  dépendaient.  Puis 


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—  356  — 

l'année  d'après,  1697,  les  Turcs  s' étant  emparés  de  St-Françoia, 
pour  en  faire  une  mosquée,  il  se  trouva  sans  catlièârale  et  sans 
maison.  Il  se  réfugia,  comme  nous  l'avons  vu  dans  une  maison 
qu'il  avait  achetée  rue  Dum-dum.  II  mourut  en  1706. 

1703.  Le  B.  P.  David  de  SK:iiarIes,  carme  déchaussé  de  Ift 
congrégation  d'Italie,  nommé  visiteur  apostolique,  par  Clé- 
ment XI,  pour  les  missions  de  Constantinople  et  de  Smyrne,  par 
Bref  du  10  février  1703,  arriva  à  CP.  et  prit  possession  le 
16  nov.  1703.  Il  était  logé  chez  les  FF.  MM.  Observantins,  de 
Terre  Sainte.  Il  demeura  dans  le  Levant  environ  4  ans.  Il 
s'occupa  surtout  de  rétablir  daus  tous  les  couvents  la  régula- 
rité religieuse. 

1706.  P.  M.  Fr.  Raimondo  Galani  de  Raguse,  0.  P.  fui,  à 
la  mort  de  Mgr.  Gasparini  nommé  Vicaire  patriarcal  par  an 
bref  du  19  Avril  1706. 

1709.  Mgr  Raimondo  Galani,  O.P.  fut  nommé  archevêque 
de  Ancyra,  consacré  à  Tioe  pendant  les  troubles  excités  dans 
la  nation  arménienne.  Eu  17S0,  il  renonça  à  sa  charge. 

1730.  Mgr  Giovanni  Battista  Mauri.  Milanais,  deGarbagnato, 
Min.  Reformé,  était  vicaire  apostolique  à  Smyrne  depuis  le 
27  juillet  1718,  quand  des  bulles  du  18  mars  1720,  le  nommè- 
rent Vicaire  apostolique,  suffragant  patriarcal  de  CP.  Il  fut 
consacré  dans  l'église  de  8te-Marie  Brapéris,  par  son  prëde- 
cesseur.  C'était  un  homme  de  mente,  qui  avait  rempli  avec 
honneur  toutes  les  charges  de  son  Ordre.  L'acte  le  plus  remar- 
quable de  son  pontificat  futla  publication,  faite  le  26  N'ov.  1733, 
d'une  lettre  pastorale  par  laquelle,  d'ordre  de  la  S.  Congréga- 
tion de  la  Propagande,  il  était  défendu  à  tous  les  supérieurs  de 
communautés  demeurant  dans  l'empire  ottoman  de  faire  aun 
cune  innovation  dans  leurs  missions,  sans  le  conseil  et  la 
permission  de  l'ambassadeur  de  France,  laquelle  devait  se 
demander  par  l'intermédiaire  du  Vicaire  patriarcal  pro-iempore 
de  CP.,  le  tout  sous  les  peines  de  droit.  Cette  pastorale  devait 
èfarelue  une  fois  l'année  dans  chaque  communauté,  devant  tous 
les  religieux  assemblés.  Une  autre  mesure  importante  fut  la 
division  de  Constantinople  en  paroisses.  Elle  fut  opérée  le 
33  mars  1725.  Il  mourut  de  peste  le  3  avril  1730,  et  fut  in- 
humé aux  Grands-Champs.  Sa  pierre  funéraire  a  été  transportée 
H  Ste-Marie  Drapéris. 


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—  357  — 

1730.  Mgr  P.  Antonio  Balsarini,  lectenr  et  bibliothécaire  des 
archives  romaines,  nommé  évèque  de  Carthagène,  et  Vicaire 
patriarcat  de  CP.  meurt  avant  de  se  rendre  à  son  poste. 

1731.  Mgr  Gïrolamo  Bona,  de  Raguse,  du  cierge  séculier, 
d'abord  évèque  de  Marciana  et  Trébigne,  puis  archevêque  de 
Carthage,  in  parttàus,  est  transféré  &  CP.  comme  Vie.  Apost. 
suflfr.  Patr.  Avec  lui  arrivent  des  prêtres  séculiers,  pour  lesquels 
il  dut  prendre  des  mesures  spéciales.  Il  y  avait  bien  eu  sans 
doute  quelques  ecclésiastiques  séculiers,  employés  comme  au- 
môniers ou  comme  scribes  dans  les  chancelleries,  mais  ils  ne 
comptaient  pas  encore.  Mgr  Bona  en  avait  un  plus  grand  nom- 
bre :  il  leur  imposa  une  règle,  les  obligea  à  venir  aux  cas  de 
conscience  que  leur  faisait  le  P.  Provincial  des  Conventuels,  et 
âla  retraite  annuelle,  qui  devait  se  faii-e  au  lieu  et  au  temps 
fixés  par  lui.  Ils  devaient  aussi  assister  à  certaines  fonctions 
solennelles,  prendre  part  aux  processions,  et  accompagner  l'ar- 
chevêque quand  ils  en  seraient  requis.  En  1742,  il  est,  en 
Congrégation  générale,  nommé  visiteur  apostolique  de  l'Orient, 
pour  3  ans,  les  limites  de  son  pouvoir  de  visiteur,  comme  celles 
de  sa  juridiction  ordinaire  sont  «  toutes  et  chacunes  provinces, 
Terres,  Cités  et  lieux  soumis  présentement  au  domaine  des 
Turcs.  »  On  lui  assigne,  pour  lui  et  son  vice-vicaire  patriarcal, 
une  somme  de  300  Scudi,  sur  le  trésor  papal  et  autant  sur  la 
Propagande.  Ces  pouvoirs  furent  prorogés  pour  deux  ans  en- 
core. Il  reçut  la  défense  de  traiter  aucune  question  religieuse 
avec  les  patriarches  schismatiques  personnellement,  mais  seu- 
lement par  le  canal  de  l'ambassadeur  de  France.  Il  s'appliqua 
pendant  son  administration  à  déraciner  les  abus  qui,  toujours 
les  mêmes,  cherchent  à  se  glisser  dans  le  peuple  levantin.  En 
1750,  il  résigne  la  charge  de  Vicaire  patriarcal  à  son  neveu, 
Biaise  Paoli  de  Raguse. 

Il  eut  pour  vicaires  généraux,  P.  M.  fr.  Francesco  Ant,  Maria 
Razolini  d'Ajolo,  treviziano,  M,  C.  prov.  d'Or,  qui  accomplit  si 
bien  sa  charge,  pendant  la  visite,  que  la  S.  Congrégation  ac- 
corda, en  cette  considération  278  Scudi  romani  à  St-Antoine. 

L'autre  Vicaire  général  fut  P.  Raffaele,  Trentino,  del  Val  di 
Baono,  Min.  Réf.  curé  et  vice-préfet  de  Ste-Marie  Drapéris.  Il 
remplit  ces  fonctions  avec  louange  pendant  près  de  dix  ans. 

1750,  Mgr  Biagio  Paoli  de  Raguse  prit  la  place  de  son  oncle 


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—  358  ~ 

en  qualité  de  Vicaire  patriarcal,  en  mars  1750.  Il  fut  bientôt 
ilommë  archevêque  de  Larisse  et  Vicaire  apostolique,  auffragant 
patriarcal.  11  fit  divers  règlements  pour  empêcher  les  abus  qui 
se  produisaient  dans  le  culte  particulier,  tel  qu'on  était  souvent 
obligé  de  le  faire,  dans  les  maisons.  En  1767,  il  renonça  à  ses 
.   fonctions  et  se  retira  dans  sa  patrie. 

1765,  MgrGiuseppe  Roverani  da  Genova,  de  la  congrégation 
de  St-Jean-Baptiste,  {Batttstint,)  vicaire  apostolique  de  Philîp- 
popoli,  fut  envoyé  à  GP.  comme  visiteur  secret;  quand  il  eut 
pris  ses  renseignements  et  fait  son  rapport  à  la  S.  Congrégation, 
sur  le  Vicaire  patriarcal,  la  situation  des  Arméniens,  et  celle 
des  Âleppins,  il  rentra  dans  sa  mission. 

1767.  Mgr  Roverani,  fut  nommé  archevêque  de Marcianopolis 
en  Bulgarie  et  Vicaire  apostolique,  suffragant  patriarcal  de  CP. 
n  fut  sacré  évoque  à  St  Antoine  par  l'évèque  de  Cliio,  Mgr 
Bavestrelli,  (tous  les  deux  encoururent  l'excommunication  pour 
avoir  omis  la  profession  de  foi  dans  la  cérémonie,  et  ils  en 
furent  absous  par  j)ermission  du  St  Siège).  Les  Pères  Réformés 
de  Ste-Marie  Drapéris  demandaient  une  révision  des  limites  de 
de  leur  paroisse,  mais  la  S.  Congré(;ation  refusa,  répondant  : 
JVihil  tnnocetur.  Dans  l'incendie  du  25  septembre  de  cette 
année,  il  perdit  sa  maison  de  la  ruelle  de  Venise,  qui  brùla  en 
même  temps  que  toutes  celles  de  la  paroisse  Ste  Marie.  Il  se 
retira  d'abord  chez  les  Pères  de  Tej^e  Sainte,  puis  il  alla  ha- 
biter chez  les  Jésuites  de  St-Benoit,  enân  il  prit  à  loyer,  aux 
frais  de  la  Propagande,  une  maison,  qui  brûla  encore  et  le  laissa 
sans  abri.  Il  s'occupa  de  r^ler  la  manière  dont  ses  diocésains 
devaient  remplir  leurs  devoirs  et  publia  plusieurs  ordonnances 
fort  sages.  En  1772,  il  alla  faire  la  visite  de  son  vicariat,  et  à 
son  retour,  il  fut  frappé  par  la  peste  et  mourut  saintement  dans 
sa  maison,  le  2  juillet  1772.  Ses  funérailles  furent  célébrées  le 
lendemain  en  présence  de  deux  évêques  Bavestrelli  et  Riccardini, 
et  de  tout  le  clergé,  tant  séculier  que  régulier.  Il  fut  suivant  la 
coutume  des  temps  de  peste,  inhumé  aux  Grands-Champs.  Sa 
pierre  tombale  a  été  transportée  à  l'église  du  St  Esprit. 

1772,  Son  chancelier,  P.  D.  Antonio  Frachia,  de  Gènes,  de 
la  congrégation  de  St.-Jean-Baptiste,  fut  nommé  vicaire  général 
au  moment  du  départ  de  Mgr  Roverani,  pour  sa  visite,  il  resta 
pro- vicaire  patriarcal  pendant  la  vacance. 


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Vicaires  Apostoliques  patriarcaux  de  Constantinople. 

1773.  Mgr.  Giovanni  Battista  Bauestrelli,  on  Bavestrelli,  de 
CP.  était  évoque  de  Ghio,  II  fat  nommé  Vicaire  apostolique 
patriarcal  de  CP.,  ou  comme  il  dit  en  plusieurs  documents  : 
Vicaire  apostolique  dans  le  patriarcat  de  CP.  Ce  nouveau 
titre  est  remarquable  puisqu'il  fait  disparaître  tout  vestige  de 
dépendance,  même  nominale,  vis  à  vis  du  patriarche.  Il  avait 
été  décidé  quelques  années  auparavant  par  la  S.  Congrégation, 
sur  la  demande  très  fort  motivée  de  l'ambassadeur  de  France  et 
du  Vicaire  patriarcal  d'alors,  que  l'on  ne  prendrait  pour  Vi- 
caire apostolique  de  CP.  aucun  Constantinopolitain  ;  néanmoins, 
sur  les  instances  de  S.  E.  le  Card.  de  Bemis  ambassadeur  de 
France  à  Rome,  qui  en  fut  pressé  par  l'ambassadeur  de  CP.  et 
un  grand  nombre  de  personnages  notables,  et  malgré  le  désir 
du  Pape  Clément  XIV  qui  préférait  Mgr  Riccardinl,  Mgr  Ba- 
vestrelli fut  nommé,  avec  le  titre  d'archevêque  d'Héraclée.  Le 
21  Juillet  1773  le  Pape  Clément  XIV  fit  publier  la  défense,  au 
clerçé,  sous  peine  d'excommunication  réservée,  de  parler  ou 
d'écrire,  pour  ou  contre  la  suppression  des  Jésuites.  II  mourut 
d'apoplexie  le  29  avril  1777  et  fut  inhumé  à  Ste  Marie,  dans  la 
crypte,  sous  l'autel.  L'inscription  funéraire  porte  :  <  Vicar^v4 
patriarcalis  Conslantinopoleos.  > 

1777.  P.  M.  Giovanni  Battista  Fonton,  M.C.  de  Péra,  fut  élu 
par  le  clergé  vicaire  capitulairë,  à  la  pluralité  des  voix.  Il  fut 
maintenu  vicaire  général  par  le  successeur. 

1778.  Mgr  Nicole  Pugliesi  fut  transféré  de  l'évèobé  de  Ra- 
guse  sa  patrie,  au  Vicariat  apostolique  patriarcal  de  CP.  avec  te 
titre  d'Archevêque  de Thessalonique.  Il  pritpossession  le4juin 
et  fut  enlevé  subitement  par  la  peste  le  8  juillet  1778.  On  l'in- 
huma aux  Grands-Champs,  et  sa  pierre  tombale  a  été  trans- 
portée dans  l'église  dn  5t  Esprit. 

1778.  P.  Andréa  da  Brignano,  milanais,  M.  Réformé,  préfet 
de  Ste-Marie  Drapéris,  fut  nommé  vicaire  patriarcal  intérimaire, 
par  la  S.  Congrégation,  le  26  septembre;  mais  il  ne  put  exercer 
ses  fonctions  à  cause  de  l'opposition  des  Pérotes. 

1778.  Mgr  François  Antoine  Frachia,  de  Gênes.  Battisttno, 


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futcréé  archevèquedeThéodosiopolisoù  Erzeroum, en  Arménie, 
în  partîbus,  sacré  ù  Rome  le  13  février  1778;  et  expédié  à  CP. 
comme  Vicaire  apostolique  patriarcal.  En  1789;  le  19  mai,  il 
avait  fait  un  décret  qui  donnait  la  préséance  aux  religieux  sur 
les  prêtres  séculiers,  la  S.  Congrégation  le  31  juillet  de  la  même 
année,  annula  ce  décret  comme  contraire  au  droit  général  et  aux 
décisions  antérieures.  En  1781  le  roi  de  France  Louis  XYI  fit 
promulguer  une  ordonnance,  qui  établit  à  quelles  conditions  les 
prêtres  de  rite  latin  peuvent  jouir  de  la  protection  de  la  France 
dans  tous  les  pays  du  Levant,  soumis  à  la  domination  ottomane. 
En  la  même  année,  le  ^1  Juillet  la  8.  Gong,  publia  un  décret 
par  lequel  elle  reconnaissait  comme  valides  les  mariages  mixtes, 
contractés  dans  ce  vicariat  entre  catholiques  et  schismatiq'ues  ou 
hérétiques,  et  à  plus  forte  raison  ceux  des  orientaux  entre  eux, 
encore  qu'ils  ne  fussent  pas  conformes  au  décret  du  Concile  de 
IVente;  mais  par  contre  elle  déclara  invalides  ceux  des  catho- 
liques qui  n'y  seraient  pas  conformes. 

1783.  le  18  avril,  le  Vicaire  apostolique  entra  en  possession 
de  l'église  St-Georges,  qui  lui  avait  été  vendue  par  les  Capu- 
cins, avec  consentement  du  St-Siège.En  1784-1785,  s'élevèrent 
de  graves  discussions  au  sujet  des  décisions  du  St-Siëge,  rela- 
tives à  l'usure  et  an  prêt  à  intérêt.  Le  Vicaire  apostolique  sou- 
tint, contre  les  ambassadeurs,  les  vraies  doctrines  romaines. 
II  continua  d'administrer  avec  sagesse  malgré  la  difllcultè  des 
temps,  et  mourut  en  novembre  1795.  Il  fut  inhumé  dans  son 
église  St-Georges.  Il  avait  un  coadjuteur  depuis  1788,  et  de- 
puis 1791  il  était  atteint  de  paralysie. 

Avec  lui  finit,  à  proprement  parler,  l'ancien  régime  de  la  Lati- 
nité à  CP.  En  effet  jusqu'alors  bien  qu'il  y  eut  eu  depuis  long- 
temps, un  évèque  à  CP.,  et  que  cet  évêque  fut  parfois  un  prête 
séculier,  il  n'y  avait  pas  de  clergé  séculier  véritable  :  toutes  les 
églises  étaient  des  églises  <  exemptes  >  :  tous  les  prêtres  em- 
ployés dans  le  ministère  étaient  des  religieux,  «  Frati  »  ;  l'ar- 
chevêque lui-même  devait  emprunter  leurs  églises  pour  faire 
ses  fonctions,  et  même,  depuis  la  perte  de  St-François,  il  était 
obligé  de  changer  souvent  d'église  et  de  promener  sa  mitre  et  sa 
crosse  de  Rt-Benoit  à  St-Pierre,  et  de  St-Georges  à  St-Antoine, 
en  passant  par  Ste-Marie,  là  où  l'on  consentait  &  le  recevoir. 
Depuis  Mgr  Fracchia  le  Vicaire  patriarcal  a  une  église,  une  de- 


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maure  à  lui,  iodépendant  de  la  t  Magnifica  Comanità  >  et  des 
religieux,  il  se  constituera  peu  à  peu  un  clergé  :  le  moment 
viendra  où  il  pourra  lui  donner  des  paroisses.  C'est  une  évo- 
lution qui  s'est  opérée  partout  dans  rËglise,que  l'état  politique 
de  la  société  avait  retardée  à  CP.  mais  qui,  devait,  par  la  force 
même  des  choses,  se  réaliser  un  jour  ici  même.  Nous  en  ver- 
rons les  incidents  aa  Ch.  i  de  la  III*  partie  de  ce  travail. 


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TROISIÈME  PARTIE. 


ÉTAT   ACTUEL    DE    LA    LATINITÉ    DE    CONSTAKTINOPLE. 


L'histoire  propremeat  dite  de  la  Latinité  devrait  se  terminer 
avec  la  deuxième  partie  de  ce  travail  ;  mais  notre  but  ne  serait 
pas  atteint  si  nous  ne  présentions  aussi  le  tableau  de  l'état  ac- 
tuel de  l'Église  catholique  latine  à  CP.  C'est  ce  que  nous  nous 
proposons  de  faire  dans  cette  troisième  partie;  mais  comme  le 
présent  est  intimement  lié  au  passé,  nous  rattacherons  ce  qae 
nous  avons  à  dire  aux  choses  que  nous  avons  dites  déjà.  Noos 
reprendrons  par  conséquent  l'histoire  des  anciennes  institutions 
aa  point  où  nous  l'avions  conduite.  Pour  quelques  unes  la  tra- 
dition n'a  pas  été  interrompue,  c'est-à-dire  qu'aucune  crise  n'est 
venue  imiter  leur  vie  ;  pour  d'autres,  au  contraire,  i]  y  a  eu  des 
changements  radicaux  :  notre  récit  ne  commencera  donc  pas 
pour  toutes  &  la  même  date,  mais  nous  le  rendrons  aussi  com- 
plet qu'il  nous  sera  possible. 


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Dis,lizadbvG00>^le 


DD  GOUVERNEME>fT  BOCLÉSIASTIQUE  ET  DE  l' ORGANISATION  PAROISSIALE 
DANS   LE   VIGAMAT   DE   CONSTANTINOPLE. 


SI. 

Du  Gouvernement  ecclésiastique. 

NoQS  avons  raconté  ci-dessus  comment  Mgr  Fraccbia,  après 
avoir  longtemps  attendu  une  église  qui  lui  fut  propre,  avait 
enfin  pris  possession  de  St-Georges,  le  13  avril  1783.  Il  s'ins- 
talla dans  le  couvent,  et  continua  d'administrer  son  église.  En 
1788  il  obtint  un  coadjuteur,  avec  future  succession,  fut  frappé 
de  paralysie  en  1791  et  mourut  en  1795. 

1795,  Il  eut  pour  successeur  Mgr  Fr.  Giulio  d'Ameno,  Min. 
Rif.  de  la  province  de  Milan,  ancien  préfet  de  Ste-Marie,  qui 
fut  créé  archevêque  d'Arabha,  et  Vicaire  apostolique  patriarcal 
de  CP.  Comme  religieux  le  P.  Giulio  Maria  s'était  distingué 
par  sa  régularité  et  son  zÈIe.  Il  devenait  évèque  en  des  temps 
fort  difficiles.  La  révolution  française  faisait  pénétrer  les  idées 
nouvelles  même  à  CP.  La  confrérie  de  Ste-Anne  se  reconstituait 
et  avait  la  prétention  de  succéder  aux  droits  réels  ou  supposés 
de  la  <  Magnilica  Comnnità  >  di  Péra,  d'un  aulxe  côté  la  guerre 
qui  se  déclara  entre  la  Porte  et  la  France  priva  l'église  d'une 
protection  puissante  :  il  administra  avec  sagesse  mais  sans 
grandes  consolations.  Il  fut  trouvé  mort  dans  son  lit  le  28  fé- 
vrier 1796  et  inhumé  à  St-Georges. 

1796.  T.  R.  Seig.  Ab.  Guillaume  Marquis,  de  Péra,  élève  de 


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la  Propagande  et  protonotaire  apostolique,  fut  élu  vicaire  général 
dans  le  patriarcat  de  CP.  Il  s'appliqua  à  faire  observer  les  Fêtes 
de  précepte.  Il  fut  frappé  d'apoplexie  à  Buïuk-déré,  en  1817,  et 
fut  inhumé  à  Ste-Marie  Drapéris.  Il  avait  administré  le  diocèse 
jusqu'en  1799. 

1796.  Mgr  Timoni,  Nicolas,  évêque  de  Chio,  fut  transféré  au 
siège  de  CF.  avec  le  titre'  d'Archevêque  de  Marcianopolis,  par 
bulle  du  3  juin  1796.  Il  n'accepta  pas  et  resta  à  Chio. 

1799.  Mgr  Giovanni  Battista  Fonton,  de  Péra,  Min.  Conv. 
filsdu  couvent  de  St- Antoine,  était  évèque  de  Syra;  il  fut  nommé, 
le  16  mars  1799,  archevêque  de  Marcianopolis,  et  Vicaire  apos- 
tolique dans  le  patriarcat  de  CP.  :  il  prit  possession  le  30  no- 
vembre de  la  même  année,  mais  seulement  comme  administra- 
teur, en  conservant  son  titre  d'évèque  de  SjTa,  parce  que  ses 
bulles  avaient  été  arrêtées  à  cause  de  la  captivité  et  de  la  mort 
de  Pie  VI.  Il  ne  les  reçut  qu'en  juin  1801.  Il  publia  un  petit 
catéchisme,  le  mèrae  qu'il  avait  fait  imprimer  à  Vérone,  pour 
son  diocèse  de  Syra,  En  1802,  il  transporta  sa  résidence  et  son 
siège  cathédral,  de  St-Georges  à  l'église  de  la  Ste-Trinité.  I! 
régla  de  nouveau  ce  qui  concerne  la  célébration  des  Fêtes  de 
précepte,  et  les  préséances.  Il  établit  la  paroisse  de  Buïuk-Déré, 
contlée  aux  Conventuels.  En  1814,  le  21  septembre,  ayant  obtenu 
du  St-Siège  un  coadjuteur,  il  se  fit  accommoder  une  chambre 
à  St-Antoine  et  s'y  retira,  vivant  comme  un  simple  religieux  et 
pratiquant  toutes  les  observances  monacales.  II  mourut  à  Buïuk- 
déré,  le  26  aoftt  1816,  et  fut  inhumé  dans  son  église  cathédrale 
de  la  Ste-ïrinité.  n  a  laissé  une  rente  perpétuelle  pour  les 
pauvres  de  la  paroisse  de  St-Antoine. 

1815.  Mgr  Vincenzo  Corresi  de  Chio,  archevêque  de  Naxie, 
fut  nommé  coadjuteur  du  Vicaire  apostolique  de  CP.  Par  une 
bulle  du  12  octobre  1814,  avec  le  titre  d'archevêque  de  Sardes, 
il  succéda  au  titulaire  le  26  août  1816.  Avec  les  meilleures 
intentions,  il  se  trouva  mêlé  aux  discussions  des  Arméniens  et 
ne  s'en  tira  pas  toujours  au  gré  du  St-8iège.  En  1833,  il  reçut 
comme  coadjuteur,  avec  le  titre  d'archevêque  de  Pétra,  Mgr  Hil- 
lereau,  précédemment  évèque  de  Calédonie  et  Vicaire  aposto- 
lique de  Smyrne.  Il  mourut  le  4  mars  1S35  et  fut  inhumé  dans 
l'église  de  la  T.  S.  Trinité. 

1835.  Mgr  Julien  Hillereau.  C'était  un  prêtre  séculier  fran- 


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—  367  — 

çais,  que  le  zèle  des  âmes  avait  amené,  avec  quelques  compa- 
gnons, pour  travailler  aux  missions  du  Levant.  II  était,  depuis 
peu  de  temps,  vicaire  apostolique  de  Smyrne,  quand  i!  fut 
appelé  à  CP.  en  qualité  de  coadjuteur  de  Mgr  Coresi,  auquel  il 
succéda  le  4  mars  ISSr». 

Un  grand  pape,  Grégoire  XVI,  assis  alors  sur  le  sit'ge  de 
St  Pierre,  donnait  une  puissante  Impulsion  aux  missions  étran- 
gfres.  Un  esprit  nouveau  animait  le  clergé  et  les  catholiques  de 
France.  C'était  le  temps  des  luttes  pour  la  liberté  de  l'Église,  le 
commencement  des  conférences  de  St  Vincent  de  Paul,  la  pre- 
mière floraison  de  la  Propagation  de  la  Foi,  la  renaissance  des 
Ordres  religieux,  etc.  :  tout  s'unissait  pour  donner  au  bien  une 
impulsion  toute  nouvelle  et  d'une  grande  puissance.  Presque 
en  même  temps  que  Mgr  Hillereau,  arriva  à  Constantinople, 
comme  préfet  des  prêtres  de  la  Mission,  mi  homme  de  foi,  doué 
d'un  esprit  élevé  et  d'un  grand  cœur,  rempli  d'un  zMe  aussi  in- 
telligent qu'actif,  M,  Leleu.  Ces  deux  hommes  se  comprirent,  et 
les  œuvres  de  chariti-  et  de  zèle  commencèrent  à  Constantinople. 

D'abord,  en  1839,  M.  Leleu,  voyant  que  les  jeunes  filles 
catholiques  n'avaient  aucun  moyen  de  s'instruire,  fit  venir  les 
premières  Filles  de  la  Charité,  et  les  établit  dans  l'enclos  de 
St-Benoit.  Elles  ne  tardèrent  pas  à  réaliser  les  espérances  que 
l'on  avait  fondées  sur  elles.  En  1842,  M.  Leleu  appela  les  Frères 
des  écoles  chrétiennes,  et  les  installa  dans  les  bâtiments  mêmes 
de  St-Benolt.  En  1840,  on  fondait  la  première  conférence  de 
St  Vincent  de  Paul,  pour  habituer  les  hommes  aux  ministères 
de  la  charité  chrétienne,  et  à  l'accomplissement  de  leurs  devoirs 
religieux.  Vers  le  même  temps  les  Filles  de  la  Charité  ouvraient 
au  Taqcim  leur  seconde  maison,  pour  les  écoles  et  l'hôpital 
français.  Un  peu  plus  tard  les  Frères  durent  quitter  St-Benoit, 
où  leurs  œuvres  se  trouvaient  trop  à  l'étroit:  le  Vicaire  patriarcal 
les  aida  puissamment  à  s'établir  ailleurs  et  à  multiplier  leurs 
écoles,  d'abord  à  Galata,  puis  à  Péra. 

Mgr  Hillereau  n'eut  pas,  il  est  vrai,  l'initiative  de  toutes  ces 
œuvres,  mais  il  eut  du  moins  le  mérite,  peut-être  plus  grand, 
de  les  comprendre,  de  les  adopter  et  de  les  protéger.  Le  clergé 
de  la  ville,  sauf  quelques  prêtres,  se  tenait  dans  l'abstention, 
quand  il  ne  laissait  pas  voir  un  éloignement  non  déguisé  pour 
ces  nouveautés. 


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Mais  il  avait  auesi  ses  œnvres  à  lui.  Dès  1844,  ayant  remar- 
qué que  la  population  continuait  son  naouTemeot  vers  les  hau- 
teurs de  Péra  et  s'était  répandue  déjà  jusqu'à  Pancaldi,  il  eut 
la  pensée  d'y  construire  une  église,  assez  vaste  pour  recevoir  de 
nombreux  fidèles.  Il  ne  pouvait  la  confier  qu'à  des  prêtres  sécu- 
liers, c'est  pourquoi,  en  même  temps  que  les  murailles  de  la 
future  paroisse,  il  élev»,  sur  la  rue,  des  b&timents  destinés,  dans 
sa  pensée,  à  devenir  le  séminaire  patriarcal.  Cette  église  fut 
consacrée  en  1846.  En  même  temps  il  y  érigeait  la  nouvelle 
paroisse  du  Sl^Esprit. 

Quelques  années  après,  voyant  que  toutes  les  églises  de  Péra 
se  trouvaient  réunies  ensemble,  et  comme  accolées  à  l'ambassade 
de  France,  et  que  par  suite  elles  laissaient  sans  secours  religieux 
la  plus  grande  partie  de  la  population  des  hautes  rues  de  Péra 
et  du  Taqcim,  il  acquit  un  terrain  dans  une  situation  remplie 
d'avenir  et  y  construisit  une  église  qu'il  dédia  à  St-Jean-Chry- 
sostôme,  avec  la  pensée  d'y  établir  sa  demeure,  d'en  faire  sa 
cathédrale,  et  même  de  l'ériger  en  paroisse.  Il  ne  put  réaliser  la 
dernière  partie  de  son  programme,  devant  les  oppositions  qu'on 
lui  suscita  en  cour  de  Rome  ;  mais  il  bénit  l'église  et  s'y  trans- 
féra avec  tout  son  clergé,  en  1854. 

Pour  toutes  ces  constructions  Mgr  Hillereau  avait  dépensé 
tontes  les  réserves  du  vicariat  :  elles  ne  suffisaient  pas  :  il  fallut 
donc  recourir  à  des  mesures  extraordinaires.  Pour  cela  il  vendit 
aux  Observantins  de  Bosnie  l'ancienne  église  et  le  couvent  de 
St-Georges,  qui,  des  Capucins,  avait  passé  aux  Vicaires  patriar- 
caux. Puis  il  prépara  la  vente  de  la  récente  cathédrale  de  la 
T.-.Ste-Trinité,  aux  Arméniens  catholiques  ;  mais  cette  dernière 
opération  ne  fut  accomplie  que  par  son  successeur.  Ces  mesures 
suscitèrent  des  réclamations  assez  bruyantes  du  clergé  et  des 
fidèles.  Il  n'eut  pas  longtemps  à  en  souffrir,  il  mourut  subite- 
ment  le  i"  mars  1855.  Avant  de  mourir,  il  s'était  occupé  acti- 
vement de  la  création  d'un  cimetière  catholique  latin,  mais  il 
n'avait  pu  terminer  cette  affaire.  Il  fut  inhumé  dans  l'église  du 
St-Esprit  qu'il  avait  fondée. 

Voici  l'épitaphe  placée  sur  sa  tombe  : 

me  JACET  JULIANUS  MARIA  F.  X.  HILLERAD  NATIONE  GALLUS , 
ARCHIEP.  PETRENSIS  VICARIUS  a'"""''  G"%  PRUDENTIA  CHAEUTATB  IN 


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FAUPERE3,  HORIBL'S,  INQ&NIO,  3CBIPTIS  C0NSPICUU3,  QUI  OONSTAN- 
TISSIUE  PEK  ANNOS  VIGINTI  C""  OUBERNAVIT  ECCLESIAM.  SANCTI 
SPIRITU  ET  S.  NOM.  JE3U  NUNCUPATAS  ECCLESIAS  EREXIT,  DIVERSAS 
MISSIOtœS    INSTITUIT,     OMNIBUS    CHARUS     OBITT     KAL.     MART.     1855. 

j:rATi3  su-E  57  mens.  8. 

n  eutsaos  doute  continué  ses  œuvres  avec  une  nouvelle  activité, 
sous  l'influence  grandissante  de  la  France,  pendant  et  après  la 
guerre  de  Crimée.  Mais  on  peut  dire  que  de  tous  les  Vicaires 
patriarcaux  c'est  lui  qui  a  fait  le  plus  pour  le  diocèse  de  Cens- 
tantinople. 

Pendant  son  administration,  en  1848,  Mgr  Ferrieri  fut  envoyé 
comme  nonce  et  ambassadeur  extraordinaire  dn  S.  P.  Pie  IX, 
aupri'S  de  sultan  ÂbdnI-medjid,  à  la  suite  de  la  visite  que  ce 
prince  lui  avait  fait  faire  précédemment.  Mgr  Ferrieri  arriva  à 
CP.  le  16  janvier  1848  et  remplit  avec  honneur  la  mission  qui 
lui  avait  été  confiée. 

1855,  17  août.  Mgr  Mussabini,  archevêque  de  Smyme,  prit 
l'administration  du  dioct'se,  avec  le  titre  de  pro-vicaire  aposto- 
lique. Il  n'eut  pas  le  temps  de  faire  beaucoup  de  choses  pendant 
sa  courte  administration.  Cependant  ce  fut  lui  qui  acheva  la 
vente  de  l'église  de  la  T.-Ste-Trinité  aux  Arméniens  catholiques. 
C'est  aussi  à  lui  que  l'on  doit  l'érection  de  la  paroisse  de  Scu- 
tari,  qu'il  confia  aux  Lazaristes.  1856. 

1858,  Janvier.  Mgr  Paolo  Brunoni,  précédemment  vicaire 
apostolique  d'Alep,  et  délégué  apostolique  de  la  Syrie  :  il  fut 
transféré  à  Constantinople  avec  le  titre  d'Archevêque  de  Taron. 
En  1SG8,  il  fut  de  plus  nommé  délégué  apostolique  pour  les 
chrétiens  des  Rites  Orientaux. 

Mgr  Brunoni  fut  un  grand  bâtisseur  d'églises,  et  c'est  sous 
son  adininistratioii  que  furent  élevées  le  plus  grand  nombre  de 
celles  que  nous  y  voyons.  Ce  n'est  pas  cependant  qu'il  ait  eu  la 
charge  de  toutes  car  celles  des  réguliers  furent  bâties  en  grande 
partie  à  leurs  frais,  mais  il  les  ennouragea  toutes  et  les  aida  diins 
la  mesure  de  ses  forces.  En  1860  les  PP.  Riformati  construi- 
sirent l'église  de  Prinkipo,  en  1863,  les  Dominicains  celle  de 
Malcri-lteui,  en  1803,  les  Capucins  celle  de  San  Stefano  ;  en 
18(i6,  les  PP.  Conventuels  celle  de  Buyuk-déré.  Mais,  comme 
nous  venons  de  le  dire  ces  ^lises  devaient  être  desservies 


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—  370  — 

par  les  religieux  et  le  vicariat  ne  contribua  que  dans  une  faible 
mesure  à  leur  élévation. 

Uals  il  se  chargea  exclusivement  de  deux  entreprises  consi- 
dérables, la  construction  de  l'église  de  Eadi-keui,  et  la  recons- 
truction de  celle  du  St-Ësprit.  Le  Vicaire  patriarcal  les  mena 
l'une  et  l'autre  à  bonne  fin,  et  le  diocèse  peut  s'enorgueillir  de 
deux  belles  cathédrales.  Mais  Mgr  Brunoni  avait  reçu  des  dettes 
de  ses  deux  prédécesseurs,  ces  constructions  entreprises  un  peu 
inconsidérément,  et  surtout  les  détournements  et  les  dilapida- 
tions des  fonds  commis  par  l'homme  de  confiance  du  vicariat, 
les  augmentèrent  si  bien,  que  l'on  se  trouva  en  face  d'un  passif 
auquel  toutes  les  ressources  locales  ne  pouvaient  plus  suflire. 
Mgr  Brunoni  partit  alors  pour  Rome  afin  d'aviser  aux  moyens 
de  liquider  la  situation,  laissant  pour  administrer  le  vicariat  en 
sou  absence,  un  prêtre  fort  remarquable,  son  vicaire  général, 
M.  l'abbé  Testa,  mort  depuis  évêque  de  Phacusa.  Le  vicariat 
aux  abois  était  sur  le  point  de  faire  banqueroute,  quand  sur  les 
lettres  très  instantes  qui  lui  furent  écrites  de  Constantinople,  le 
Souverain  Pontife  Pie  IX  consentît  à  se  charger  de  la  dette 
énorme,  un  milion  et  demi,  dit-on.  La  Propagande  dut  vendre 
un  de  ses  palais  pour  se  procurer  une  si  forte  somme. 

Mgr  Brunoni,  qui  était  resté  à  Rome,  fut  sur  ces  entrefaites 
nomme  patriarche  latin  d'Antioche,  avec  résidence  à  Rome,  et 
ne  revint  plus  dans  son  diocèse. 

C'est  pendant  l'administration  de  Mgr  Brunoni  que  les  Sœurs 
de  Sion  prirent  possession  des  bâtiments  élevés  par  Mgr  Hille- 
reau  en  avant  de  l'église  du  St-Esprit,  pour  servir  de  séminaire. 
Elles  y  remplaçaient  les  Filles  de  la  Charité,  qui  y  avaient  tenu 
un  pensionnat,  pendant  quelques  années.  Plus  tard  les  Sœurs 
de  Sion  achetèrent  ces  bâtiments  et  s'y  installèrent  définitive- 
ment. 

1869.  Le  33  mai,  Mgnor  Lavaggi,  prélat  domestique  de 
Sa  Sainteté,  fut  envoyé  à  CP.  avec  la  mission  spéciale  de  liqui- 
der la  situation  financière  et  de  gouverner  le  diocèse  au  point 
de  vue  matériel,  M.  Testa  restant  chargé  de  l'administration 
spirituelle. 

1869,  le  3  juin.  Mgr  Joseph  Pluym,  hollandais,  de  l'Ordre  des 
Passionistes,  évêque  de  Nicopolîs,  in  part,  et  vicaire  aposto- 
lique de  Bucarest,  prend  possession  du  vicariat  de  Constanti- 


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—  371  — 

Qople,  en  qualité  d'administrateur  apostolique.  Il  se  rend  au 
Concile  du  Vatican  vers  la  fin  de  novembre  ;  mais,  sur  ces  entre- 
faites, Mgr  Bmnoni  ayant  été  préconisé  patriarche  d'Antioche,  il 
est  envoyé  de  nouveau  à  CP,  comme  titulaire  du  Vicariat  ijatriar- 
cal,  avec  le  titre  d'archevêque  de  Thyane,  in  part. 

Mgr  Pluym,  outre  les  soins  du  vicariat  avait  encore  à  s'oc- 
cuper activement,  en  sa  qualité  de  délégué  apostolique  pour  les 
rites  orientaux,  des  affaires,  alors  extrêmement  embrouillées,  des 
Arméniens  catholiques,  qui  s'engageaient  dans  un  nouveau 
schisme.  Il  y  consacra  tous  ses  soins,  mais  ne  put  parvenir  à 
empêcher  la  division. 

Il  était  à  peine  installé  dans  son  vicariat  qu'une,  grande  épreuve 
vint  fondre  sur  la  ville  :  l'incendie  du  5  juin  1870  dévora  la  plus 
grande  partie  de  Fera,  la  cathédrale  de  St-Jean-Clhrysostôme, 
ainsi  que  le  palais  êpiscopal,  partagea  le  sort  commun.  Meubles, 
bibliothèque,  archives,  rien  ne  fut  épargné,  on  a  pu  seulement 
emporter  le  T.  S.  Sacrement,  et  quelques-uns  des  ornements 
précieux,  laissés  par  Mgr  Hillereau.  Il  se  réfugia  chez  les  Sœurs 
de  Sion,  qui  lui  donnèrent  une  généreuse  hospitalité. 

C'est  pendant  son  administration  que  furent  fondées  les  écoles 
paroissiales  de  Pancaldi,  dirigées ,  celle  des  garçons  par  les 
Frères  des  écoles  chrétiennes,  celle  des  filles  par  les  Sœurs  de 
Sion.  C'est  aussi  dans  le  même  intervalle  de  temps  que  l'on  fit 
l'acquisition  d'une  maison  voisine  de  l'église  pour  le  logement 
du  Vicaire  patriarcal.  C'était  un  saint  prélat,  doué  de  grandes 
vertus;  mais  il  ne  gouverna  pas  longtemps  le  diocèse.  Il  fut 
emporté  par  une  maladie  aiguë,  et  fut  inhumé  dans  la  crypte  de 
l'église  du  St-Esprit,  le  13  janvier  1874.  M.  l'abbé  Testa  resta 
vicaire  général  administrateur  du  diocèse,  aâ  intérim. 

1871 .  Mgr  Alessandro  Franchi,  archevêque  de  Thessalonique, 
fut  envoyé  comme  ambassadeur  extraordinaire  du  St-Siège, 
auprès  de  la  Porte  ottomane,  à  l'occasion  des  difficultés  exis- 
tantes, au  seio'de  la  communauté  arménienne  catholique.  Il  fut 
reçu  avec  de  grands  honneurs  et  s'occupa  avec  zèle  de  sa  mis- 
sion. Nous  n'avons  pas  à  en  raconter  toutes  les  péripéties,  puis- 
qu'elle n'avait  pas  trait  à  la  communauté  latine.  Il  partit  en 
novembre  de  la  même  année.  Il  fut,  un  peu  plus  tard,  nommé 
préfet  de  la  Propagande  et  conserva  toujours  un  hou  souvenir 
de  son  passage  à  CP. 


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—  372  — 

1874,  20  mars.  Mgr  Milani,  (Fra  Seraflno  Milaai,  de  l'Ordre 
des  FF.  MM.  de  l'Observance)  ancien  custode  de  Terre  Sainte, 
fut  d'abord  Dommé  vicaire  apostolique  d'Alep,  archevêque  de 
Trajanopolis,  in  part.,  et  délégué  apostolique  pour  la  Syrie.  Il 
fut  presque  aussitôt  transféré  à  Gonstantinople,  et  y  arriva  le 
33  mars  1874.  Reçu  avec  les  honneurs  dus  à  son  caractère,  U  prit 
possession  du  diocèse  ;  mais  il  ne  fit  qu'y  passer.  Appelé  à  Rome 
par  l'autorité  supérieure,  il  quitta  Gonstantinople,  le  11  no- 
vembre, pour  n'y  pas  revenir.  Il  laissait  encore  pour  adminis- 
trateur, M.  l'abbé  Testa,  avec  le  titre  de  vicaire  général  du 
vicariat. 

1874,  39  décembre.  Mgr  Fr.  Antoine-Marie  Graselli,  des 
FF.  MM.  Conventuels,  fut  nommé  archevêque  de  Colosses,  et 
'Vicaire  apostolique  patriarcal.il  prit  possession  le  39  décembre. 
Pendant  son  administration,  il  établit  1°  les  retraites  annuelles 
pour  le  clergé;  3°  les  conférences  morales  pour  la  solution  des 
cas  de  conscience;  3"  l'adoration  du  T.  S.  Sacrement  une  fois 
chaque  mois  à  Terra  Santa  ;  i"  il  décida  que  chaque  année  on 
rendrait  à  Dieu  de  solennelles  actions  de  grâces  le  dernier  jour 
de  l'année,  le  matin  dans  les  paroisses,  le  soir  dans  la  cathé- 
drale. Il  s'occupa  avec  zèle  de  toutes  les  œuvres  et  remplit  avec 
persévérance  tous  les  devoirs  d'un  bon  évêque.  Il  fut  enfin  ap- 
pelé à  Rome  et  chargé  de  fonctions  importantes  au  collège  de 
la  Propagande. 

1880.  Mgr  Vincenzo  Vanutelii,  fut  choisi  surtout  pour  apaiser 
le  différend  arménien.  II  s'y  appliqua  de  toutes  ses  forces  et  il 
avança  beaucoup  la  solution  de  cette  question.  Il  avait  un  esprit 
larye,  capable  de  comprendre  et  d'encourager  le  bien  ;  c'est  lui 
qui  accueillit  dans  le  vicariat  les  Capucins  français  à  St-Louis, 
les  PP.  Augustins  de  l'Assomption  à  Goum-capou.  II  ne  resta 
pas  longtemps  à  Gonstantinople,  et  fut  remplacé  par 

1883.  Mgr  Louis  Rotelli,  archevêque  de  Pharsaie.  Ce  prélat 
très  cher  au  cœur  du  Souverain  Pontife  Léon  XIII,  resta  lui 
aussi  peu  de  temps  à  Gonstantinople.  Il  y  continua  les  œuvres  de 
ses  prédécesseurs,  avec  un  grand  dévouement,  et  fut  appelé  par 
le  Pape  à  la  nonciature  de  Paris.  Au  bout  de  quelques  années, 
il  fut  élevé  à  la  dignité  cardinalice  et  mourut  jeune  encore. 

1887.  Mgr  .\uguste  Bonnetti,  archevêque  de  Palmyre,  Vicaire 
apostolique  patriarcal  et  délégué  apostolique  pour  les  rites 


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Orientaux,  appartient  à  la  congrôgatâon  des  Prêtres  de  la  Mission, 
ou  Lazaristes.  Après  avoir  vaillamment  travailJé  au  bien  à 
SaloDÎque,  il  fat  élevé  à  la  dignité  épiscopale,  et  bientôt  appelé 
à  Constantinople.  Il  s'est  mis  à  l'œuvre  avec  courage  et  fait  tout 
le  biea  possible  dans  les  circonstances  difficiles  où  se  trouve 
l'ÉglUe. 


§11. 
Organisation  paroissiale. 

Durant  les  trois  [ffemiers  siècles  de  l'Église,  le  terme  paroisse 
désignait,  communément,  le  cercle  de  la  juridictiond'uuévêque, 
c'est-à-dire  une  ville,  autour  de  laquelle  se  groupaient  un 
nombre  plus  ou  moins  considérable  de  bourgs,  de  villages.  Le 
diocèse,  modelé  sur  la  juridiction  civile,  était  le  siège  d'un 
évêque  ou  d'un  patriarcbe,  et  embrassait  plusieurs  paroisses  ; 
c'était  ia  plus  vaste  juridiction,  après  celle  du  Souverain-Pon- 
tife. L'établissement  des  paroisses  ne  date  guère  que  du  vi' 
siècle'. 

Selon  la  Comunità  -,  i  Galata,  depuis  la  conquête  ottomane, 
□'avait  jamais  été  divisé  en  paroisses;  les  diverses  églises  de  la 
ville  formaient  une  seule  chrétienté,  travaillant  dans  le  même 
but,  et  se  prêtant  un  mutuel  concours.  »  Au  reste  ce  n'était  pas 
une  chose  bien  difficile,  car  penciant  de  longues  années  il  n'y 
eut  pas,  à  proprement  parler,  à  CP.  d'autre  clergé  que  les  Frères 
Mineurs,  avec  leur  couvent  de  St-François,  et  les  Frères  Prê- 
cheurs, avec  celui  de  St-Paul,  et  ensuite  celui  de  St-Pierre.  Ces 
religieux  desservaient  non  seulement  leurs  propres  églises,  mais 
encore  celles  de  la  <  MagniSca  Comunità  »,  à  moins  qu'un 
Prieur,  pour  un  motif  quelconque,  n'en  chargeât  quelqu'autre 
prêtre,  séculier  ou  régulier,  sans  que  jamais  ce  fût  une  institu- 
tion durable  :  les  Franciscains  et  les  Dominicains  restaient  tou- 
jours les  seuls  prêtres  ayant  charge  d'âmes  dans  le  vicariat  de 

I  Voyez  t'abbé  Martigny,  Dirt.  ihn  ai 
Chateaubriand.  Gfnie  du  CkrUtianitn 
bourgeoiaic  île  Pari»,  U.  46. 

*  Lettre  au  général  des  dominicainB,  ilu  3  septembre  1611. 


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—  374  — 

CP.  Aussi  lit-on  dans  les  archives  des  Capucins  que,  selon  le 
Vicaire  patriarcal,  le  11  avril  1647,  Mgr  Subiano  suffragant,  les 
églises  de  CP.  c  étaient  paroisses  et  ne  l'étaient  pas  > .  Cependant 
on  appelait  assez  fréquemment  du  nom  de  paroisses  ou  d'églises 
paroissiales,  les  églises  des  religieux  ayant  charge  d'âmes,  les 
Dominicains  et  les  Conventuels,  et  plus  tard  les  Riformati,  en 
1643.  Quand  il  s'agit  des  autres  religieux,  par  exemple  des 
Jésuites  ou  des  Capucins,  et  plus  tard  des  Mathurins  ou  Trini- 
taires,  on  a  bien  soin  de  faire  remarquer,  qu'ils  n'ont  pas  charge 
d'âmes.  S'ils  veulent  sortir  un  peu  de  leurs  attributions,  on 
s'empresse  de  le  leur  reprocher  et  on  porte  plainte,  soit  au  Yi- 
caire  pakiarcal  soit  même  à  la  S.  Congrégation  de  la  Propa- 
gande. 

Tous  les  religieux  des  couvents  susdits  paraissent  avoir  ex- 
ercé les  fonctions  curîales  indifféremment,  sous  la  direction  du 
supérieur  régulier,  mais  quand  il  y  eut  des  évëques  à  CP.  on  ne 
tarda  pas  à  vouloir  régulariser  les  choses,  et  à  donner  à  chacun 
des  attributioas  précises.  Nous  voyons,  en  effet,  que  dans  la 
visite  qu'il  fit  du  vicariat  en  1674,  Mgr  Ridolfi  prescrivit  au 
P.  Provincial  de  St-François,  de  soumettre  à  son  approbation  la 
nomination  qu'il  lui  prescrit  de  faire  de  l'un  de  ses  religieux, 
pour  remplir  les  fonctions  curiales. 

Dans  sa  visite  à  St-François,.  du  31  janvier  1692,  le  Suffra- 
gant vicaire  patriarcal,  Mgr  Gasparini,  prescrit  au  P.  Curé 
d'ouvrir  un  nouveau  registre  destiné  à  l'inscription  des  baptê- 
mes, mariages  et  décès,  selon  le  Rituel  romain,  afin  que  ce  fbt 
un  document  authentique. 

Dans  sa  visite  du  même  jour  à  St-Pierre  et  St-Paul,  des  Do- 
minicains, il  trouve  que  tout  était  en  règle. 

Eu  1682,  trois  des  églises  de  Qalata  exerçaient  les  fonctions 
curiales,  et  la  Comunità,  citant  le  clergé  des  trois  paroisses 
de  Galata,  informe  la  Propagande  que  Mgr  le  Vicaire  veut 
enlever  aux  Mineurs  S.-O,  leur  antique  paroisse,  pour  l'at- 
tribuer aux.  Jésuites  ;  elle  ajoute  qu'elle  ne  saurait  consentir  au 
changement  des  paroisses.  Selon  une  lettre  du  cardinal 
Gualterio  au  marquis  de  Bonnac,  ambassadeur  de  France  à 
Constantinoplc,  (de  1716  à  1734,)  l'idée  de  la  création  d'une 
paroisse  française,  à  Galata,  aurait  été  <  reprise  »  à  cette 
époque;  et  le  cardinal  informait  l'ambassadeur  des  difTieultés 


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—  375  — 

que  la  Propagande  trouvait  à  la  réalisation  de  ce  projet,  ne 
voulant  pas  noire  aux  anciennes  paroisses  et  les  exposer  &  dé- 
périr '. 

Cependant  cet  état  de  choses  avait  plus  d'un  inconvénient 
Les  religieux  n'étant  chargés  d'aucun  territoire  particulier,  il 
B'en  suivait  que  certains  catholiques  étaient  négligés  tandis  que 
l'on  se  disputait  les  autres.  Pendant  les  épidémies,  il  arrivait 
qne  des  malades  étaient  abandonnés  :  on  allait  visiter  ceux  que 
l'on  connaissait,  ou  par  lesquels  on  était  demandé,  les  autres 
restaient  sans  secours.  D'un  autre  cdté  les  malades  riches  et 
leurs  familles  étaient  sollicités  et  tourmentés  pour  choisir  leur 
sépulture  dans  telle  église  plutôt  que  dans  telle  autre.  Les  Vi- 
caires apostoliques  avaient  sans  doute  fait  plusieurs  fois  des 
règlements  et  des  recommandations  pour  obvier  à  ces  inconvé- 
nients ;  mais,  comme  le  disent  avec  naïveté  les  archives  de 
St-Pierre  :  «  les  hommes  sont  plus  portés  à  réclamer  leurs 
droits  qm'ô  faire  leur  devoir*,  et  l'on  retombait  quand 
même  dans  les  abus  du  passé. 

En  vue  donc  de  remédier  aux  inconvénients  résultant,  pour 
l'administration  spirituelle,  de  l'absence  de  délimitation  des 
paroisses,  et  e  d'accord  avec  les  illustrissimes  ambassadeurs  de 
France  et  de  Venise,  ainsi  qu'avec  les  représentants  des  autres 
puissances  catholiques,  >  Mgr  Mauri  fixa,  comme  suit,  le  37 
mars  1725,  la  délimitation  de  chacane  des  trois  paroisses  : 

Nous  donnons  ici  la  traduction  de  la  partie  historique  et  ca- 
nonique du  décret  de  division  des  paroisses  de  CP. 

<  Nous  avons  souvent  observé  que  beaucoup  d'inconvénients 
naissent  de  l'indivision  des  paroisses,  si  bien  que  les  catholi- 
ques étant  libres  de  faire  appel  k  tel  curéqu'ils  aimeront  mieux, 
il  sera  impossible  &  tous  d'avoir  pour  les  Ames  le  soin  que  re- 
commande le  St  Concile  de  Trente,  puisqu'aucua  ne  leur  ap- 
partient en  particulier.  Aucun  curé  ne  peut  librement  exercer 
son  zèle,  puisqu'il  ne  connaît  pas  ses  paroissiens,  et  il  est  im- 


>  A  plusieurs  reprisea  nous  retrouvons  calte  pensée  d'une  paroisse  e;cclu' 
sivement  rrançaiso.  Elle  a  éM  réalisée  dés  1635,  à  Smyrne;  la  paroisse  de 
St  Polycarpe  comprenait,  elle  comprend  encore  aujourd'hui,  toute  la  popu- 
lation rraniraise;  mais  oomme  cet  état  de  choses  a  Huscité,  depuis  l'origine, 
un  grand  nombre  de  diCBeultés,  on  comprend  très  bien  que  la  S.  Congrégation 
n'ait  pas  voulu  tenter  une  nouvelle  expérience. 


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possible  d'avoir  l'état  des  âmes,  surtout  dans  une  grande  cité 
comme  CP.,  le  marché  du  monde,  où  arrivent  des  gens  do  tous 
pays  :  il  en  résulte  donc  un  grand  danger  pour  les  âmes  des 
chrétiens  commis  à  notre  sollicitude  pastorale.  Afin  donc  de 
remplir  notre  devoir  et  de  déchaîner  notre  conscience,  après 
mare  délibération,  et  après  avoir  pris  le  consentement  de  leurs 
Excellences  les  Ambassadeurs  de  France  et  de  Venise  et  des 
autres  représentants  des  nations  catholiques  ;  pour  que  les  curés 
puissent  remplir  leur  devoir  et  que  les  catholiques,  qui  sont 
obligés  de  changer  continuellement  de  domicile,  ne  soient  pas 
privés  de  secours  religieux,  nous  avons  résolu  de  diviser  les  pa- 
roisses, non  suivant  les  familles,  mats  suivant  les  quartiers, 
comme  dans  le  reste  de  la  chrétienté,  réservant  à  nos  successeurs 
de  faire  tous  les  changements  que  les  circonstances  rendront 
nécessaires,  afin  qu'aucune  paroisse  ne  reste  sans  fidèles  et  au- 
cun fidèle  sans  secours  religieux.  > 

(  Paroisse  de  St-Pierre  et  St-Paul,  des  PP.  Dominicains, 
de  Galata,  comprenant  les  catholiques  latins  habitant  la  ville 
même  de  Constantin  opie  et  celle  de  Galata.  i 

(  Paroisse  de  St-Antoine  de  Padoue,  des  PP.  Mineurs  con- 
ventuels, de  Péra,  comprenant  tous  les  latins  habitant  à  l'est, 
depuis  leur  hospice  jusqu'à  tout  Beolo  {Bei-oghlou  ou  Péra); 
à  l'ouest,  de  la  maison  du  drogman  Torsia,  à  tout  Chievaso- 
Khori  et  le  haut  de  Tèpè-bâchi.  t> 

c  Paroisse  de  Ste-Marie-Drapéris  de  Péra,  des  PP.  réfor- 
més de  St-François,  comprenant  tout  le  reste,  c'est-à-dire  des 
Quatre  rues,  à  droite,jusqu'à  la  rampe  de  l'ambassade  do  France; 
à  gauche,  jusqu'à  la  maison  du  drogman  Torsia  ;  puis,  jusqu'à 
la  porte  du  Tekiè  ;  et  enfin,  jusqu'à  Tophana,  Cacimpacha,  le 
bas  de  Tèpè-Bachi  et  San-Dimitri  (dit  aussi  Tatavla.)  » 

(  Au  R.  Curé  des  pestiférés  de  l'hôpital  de  Bei-Oglon,  ap- 
partiendront tous  ceux  qui  seront  atteints  de  ce  mal  (dont  Dieu 
nous  préserve  tous  !)  toutes  les  fois  qu'ils  seront  transportés  à 
cet  hôpital.  > 

c  Quant  aux  catholiques  qui,  pour  leur  santé  ou  pour  leur 
plaisir,  vont  s'établir  pendant  un  temps,  dans  quelque  endroit 
où  il  ne  se  trouve  pas  de  paroisse  déterminée,  ils  restent  sous 
la  juridiction  du  curé  de  leur  domicile  ordinaire,  i 

(  Nous  commandons,  en  vertu  de  la  sainte  bbèissance,  à  tous 


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—  377  — 

les  catholiques  latins  de  notre  obédience  de  reconDattre  leurs 
paroisses  respectives  et  d'y  remplir  leurs  devoirs,  suivant  les 
lois  de  l'église,  surtout  pour  le  précepte  pascal  et  les  autres  sa- 
crements paroissiaux.  Nous  déclarons  que  personne  n'est 
exempt,  ni  privilégié  sous  ce  rapport,  excepté  ceux  qui  le  sont 
,  de  droit,  comme  le  sont  ceux  qui  habitent  dans  les  palais  des 
Excellentissimes  Seigneurs  les  Représentants  des  puissances 
catholiques.  > 

(  Nous  recommandons  en  outre  la  plus  grande  vigilance  et 
le  zèle  le  plus  constant  aux  RR.  PP.  Curés,  pour  expliquer  k 
leurs  paroissiens  la  doctrine  chrétienne  et  leur  administrer  les 
Sacrements.  Qu'aucun  d'entre  eux  n'ose  jamais  s'ingérer  dans 
les  quartiers  qui  ne  leur  appartiennent  pas  et  qu'ils  se  sou- 
viennent bien  qu'il  leur  est  défendu  sous  les  peines  de  droit 

d'entreprendre  sur  la  juridiction  des  autres,  etc » 

(  Donné  à  Péra  dans  notre  résidence  accoutumée ,  le 
20  mars  1725. 

»  Fra  Pier-Battista  Mauri,  Arch.  de  Carthage,  vicaire  Patr. 
CP.  » 

Cette  division  a  été  maintenue  sans  changements  jusqu'au 
milieu  de  notre  siècle. 

Par  un  décret  du  6  juillet  1846,  Mgr  HiUereau  créa  une  qua- 
trième/Jaroï^^e,  celle  du  St-Esprit,  laquelle  s'étend  de  Boumili- 
Hiçar,  inclusivement,  à  l'échelle  de  Fondouqli,  et  comprend  la 
rue  conduisant  de  Fondouqli  au  cimetièregrec  du  Taqcim,  celle 
contournant  ce  cimetière,  la  grande  rue  de  Péra,  jusqu'à  la  rue 
Mislc- Adalar,  celle-ci,  puis  celle  qui,  tournant  à  l'hôpital  alepia, 
suit  le  fond  du  vallon,  entre  Saqyz-agatch  et  le  Madjar,  jusqu'au 
pont  dndérë  de  leni-chehir.  Du  cété  du  nord,  elle  s'étend  jus- 
qu'aux limites  de  la  paroisse  de  Buïuk-dèrè,  le  Maslak  et  Bel- 
grade exclusivement  ;  à  l'ouest,  jusqu'à  la  rivière  qui,  venant 
de  Belgrade,  se  jette  dans  le  port  d'Eïoub,  passe  au-dessous 
d'AU-bei-Keuï  ;  et,  de  là  jusqu'au  dérè  de  leni-chehir,  tout  ce  qui 
se  trouve  en  dehors  des  limites  de  la  paroisse  de  St-Pierre,  comme 
aussi  le  village  de  Tatavla,  dépendant  autrefois  de  Ste-Marie. 

Le  même  archevêque  voulut,  plus  ttrd,  ériger  en  paroisse 
une  cinquième  église,  celle  de  St-Jean-Chrysostome  :  mais  la 
réalisation  de  ce  projet  échoua  par  suite  des  observations  pré- 
sentées à  la  Propagande  par  la  paroisse  intéressée. 


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Jusqu'en  1840,  les  supérieurs  de  communauté  étaient,  en 
même  temps,  curés  de  la  paroisse  desservie  par  leurs  missions 
respectives.  A.  la  suite  de  difficultés  sorrenues  alors  entre  l'ar- 
chevêque et  les  chefe  des  couvents,  une  décision  de  la  Propa- 
gande, de  Cette  môme  année,  prescrivit  à  ceux-ci  de  présenter  à 
l'archevêque  un  de  leurs  religieux,  pour  remplir,  dans  leur 
église,  les  fonctions  curiales,  et  recevoir,  de  l'ordinaire,  l'inves- 
titure réglementaire. 


S  ni. 

Circonscription  paroissiale  et  population 
de  Constantinople. 

Les  paroisses  de  Constantinople  sont  confiées  les  unes  au 
clergé  séculier,  les  autres  au  clergé  régulier  :  nous  les  ènumè- 
.  reroDS  donc  sous  ces  chefs.  Pour  évaluer  le  chiffre  de  la  popu- 
lation catholique,  nous  prenons  celui  des  baptêmes  administrés 
dans  chaque  paroisse  pendant  les  six  années  précédentes,  18S7- 
1892,  aQn  d'avoir  ane  moyenne  :  puis  comme  la  durée  moyenne 
delà  vie  humaine  à  Constantinople  est  évaluée  k  quarante  ans, 
nous  multiplions  le  chiffre  des  naissances  par  quarante  et  nous 
avons  ainsi  le  chiffre  approximatif  de  la  population  catholique. 

A.  —  Paroisses  confiées  au  clergé  séculier. 

i"  Paroisse  du  St-Esprit,  église  cathédrale,  à  Pancaldi. 
Prêtres  séculiers  9  :  baptêmes  en  6  ans  :  '^*  =  102, 33X40  =  4.093 

2"  Kadî-Keui,  Assomption  de  Notre-Dame. 
Prêtres  séculiers  2  :  baptêmes  en  6  ans:  î|!  =  20,16X40-806 

3°  Scutari,  St-Jean-Baptiste. 
Prêtre  Géorgien  1  :  baptêmes  en  6  ans: |'  =  4X40=  160 

B.  —  Paroisses  confiées  au  clergé  régulier. 

1°  Paroisse  St-Pierre,  et  St-Paul,  Galata  et  Stamboul,  Makri- 
Keui. 
Prêtres,  Dominicains  10  :  baptêmes  en  6  ans  :  ^  =  80, 5X40=3.220 


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—  379  — 

3°  Paroisse  St-Antoine,  Péra,  Taqcim. 
Prêtres  FF.  MM.  Convent.  8  :  baptêmes  :  ^*  =  85, 33X40  =  3.453 

3"  Paroisse  Ste-Marie  Drapéris,  Péra,  Tékiè. 
Prêtres  FF.  MM,  Riformati  12:  baptêmes:  !-i§î=  184X40  =7.360 

4"  Paroisse  St-Loais,  Ambassade  de  France. 
Prêtres,  FF.  MM.  Capucins  8  :  baptêmes  9.  Population  totale  y 

compris  l'école  et  le  séminaire  109. 

5"  Paroisse  de  Boyuk-dérè,  Immaculée-Conception  de  N.-D. 
Prêtres  FF.  MM.  Conventuels  4  :  baptêmes  :  '-^  =  31X40  =  1.240 

6"  Paroisse  de  San  Stéfano,  St  Etienne  premier  martyr. 
Prêtres,  FF.  MM.  Capucins  4  :  baptêmes  :  ^"  =  5X40  =  200 

7°  Paroisse  des  Iles,  St-Pacifique,  Prinkipo, 
Prêtres,  FF.  MM.  Riformati  1  ;  baptêmes  :  *-^  =  3X40  =  120 

Réciipitulalion  de  la  population. 


St-Esprit,  Cathédrale. 

2  720 

4  093  + 1  373 

Kadi-keui,  Assomption. 

520 

806+    286 

Scutari,  St-Jean-Baptisto. 

300 

160-      40 

St-Pierre  et  St-Paul. 

8  720 

3  330-    500 

St-Atitoine  de  Padoae. 

4  720 

S  453  - 1  267 

Ste-Marie  Drapéris. 

8  600 

7  360-1  240 

St-Louis  de  France. 

80 

109  +      29 

Byuk-dérè,  Imm,  -Concep.  N.-D. 

1360 

1240-     130 

San  Stéfeno. 

63  , 

200 -H    147 

Prinliipo,  les  Iles. 

90 

120 -(-      30 

32  060 

20  761  - 1  899 

En  somme  la  population  latine  a  diminué  en  ce.s  vingt  ans 
de  1399.  Certaines  paroisses  ont  gagné,  ce  sont  celles  du  St- 
Esprit  et  de  Kadi-keui  surtout.  Les  paroisses  de  Péra  ont  perdu 
beaucoup,  elles  obéissent  h  la  même  loi  que  nous  avons  notée  : 
la  population  se  porte  en  dehors  de  la  ville  et  vers  les  hauteurs. 
Les  pertes  de  la  paroisse  de  St-Pierrc,  dans  la  ville  de  Galata, 
ont  été  atténuées  par  l'augmentation  des  catholiques  auprès  de 
la  gare  et  des  ateliers  des  chemins  de  fer. 


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CR^PITRE  n. 


J'AROISSES    DESSERVIES   PAB  LE  CLERGÉ  SÉCULIER. 


Jusque  vers  la  fin  du  siècle  dernier,  on  ne  voit  pas  dans  la 
ville  de  GP,  de  clergé  séculier  proprement  dit.  Il  s'y  trouvait 
bien  quelques  prêtres  séculiers,  attachés  à  la  personne  des  am- 
bassadeurs, d'autres,  en  plus  grand  nombre,  venus  des  iies  de  la 
mer  Egée,  pour  chercher  fortune  ou  pour  rendre  service,  comme 
chapelains  dans  de  grandes  maisons  :  uu  peu  plus  tard  on  y  vit 
arriver  aussi  quelques  prêtres  levantins  élevés  à  Rome  au  col- 
lège de  la  Propagande  ;  mais  ces  prêtres,  comme  nous  l'avons 
remarqué  déjà,  n'avaient  ni  églises  à  eus,  ni  ministère  ordî- 
nake.  Ils  disaient  la  messe,  soit  dans  les  maisons  particulières, 
soit  dans  les  églises  des  religieux. 

Le  premier  Vicaire  patriarcal  qui  s'en  occupa  otTicielIement 
fut  Mgr  Guillaume  Bona,  prêtre  séculier  lui-même.  Nous  avons 
vu  qu'il  leur  imposa  un  règlement,  les  obligea  à  assister  aux 
conférences  de  morale  que  leur  ferait  le  Père  Provincial  des 
Conventuels,  et  à  la  retraite  annuelle  qu'il  leur  ferait  donner,  au 
temps  et  au  lieu  qu'il  choisirait  lui-même.  Ils  devaient  aussi 
assister  aux  processions  générales  et  accompagner  l'èvêque, 
lorsqu'ils  en  seraient  requis.  Pour  toutes  ces  fonctions  il  devait 
leur  être  assigné  des  places  particulières  dans  le  sanctuaire. 
Us  n'y  avaient  droit  cependant  que  quand  ils  étaient  revêtus  du 
costume  ecclésiastique  et  portaient  la  cotta,  t  soit  sur  la  sou- 
tane si  la  cérémonie  se  fait  dans  l'église,  soit  sous  le  manteau, 
quand  eUe  a  lieu  en  public,  i  Cette  même  ordonnance  leur  in- 


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—  381  — 

terdit  de  faire  la  classe  dans  les  maisons,  sans  la  licence  de 
l'ordinaire  ;  mais  alors  ils  ne  devront  pas  se  contenter  de  faire 
la  classe,  ils  devront  aussi  faire  le  catéchisme  aux  domestiques 
de  la  famille  et  les  instruire  des  principes  de  la  foi.  (Ordonnance 
du  4  mars  4741.) 

Cet  état  de  choses  ne  tarda  pas  à  susciter  quelques  difficultés 
au  sujet  des  préséances  entre  les  prêtres  séculiers  et  les  reli- 
gieux. Un  règlement  de  fait  s'établit  avec  le  temps,  sur  une 
décision  générale  de  la  S.  Congrégation,  <  quedansles  fonctions 
communes  les  religieux  cèdent  le  pas  au  clergé  séculier,  t  Mais 
les  religieux  s'appuyant  sur  ce  que,  d'un  côté  il  n'y  avait  pas 
de  clergé  diocésain  mais  seulement  des  prêtres  étrangers,  et  de 
l'autre  sur  ce  que,  on  ne  pouvait  pas  donner  le  pas  sur  eux  à 
des  étrangers,  dans  les  églises  qui  leur  appartenaient,  obtinrent 
de  Mgr  Fracchia  une  décision  qui  donnait  la  préséance  aux  re- 
ligieux, lesquels  à  vrai  dire  formaient  seuls  le  clergé  de  CP.  et 
seuls  avaient  juridiction.  Cette  décision  (du  19  mars  1780)  fut 
déférée  à  Rome  et  la  S.  Congrégation,  en  assemblée  générale, 
cassa  le  décret  du  Vicaire  patriarcal,  rendit  la  préséance  aux 
prêtres  séculiers  et  ne  lit  d'exception  que  ponr  le  curé,  dans  sa 
propre  église  et  pour  les  fonctions  strictement  paroissiales. 
(31  juillet  1780). 

Peu  de  temps  après  Mgr  Fracchia  avait  une  église,  celle  de 
St-Georges,  oft  il  pouvait  faire  ses  fonctions  tout  à  son  aise  en 
présence  de  ses  prêtres.  Mais  St-Oeorges  n'avait  jamais  été  et 
n'ètaitencore  pas  paroisse  et  le  clergé  diocésain  n'était  pas  en- 
core constitué.  Au  reste  la  population  avait  depuis  des  années 
déjà  émigré  vers  les  hauteurs  de  Péra  :  l'archevêque  se  trouvait 
donc  tout  à  fait  isolé  dans  son  église  et  son  convent,  .\us3i 
MgrFontou  transfcra-t-il  son  siège  archiépiscopal  dans  l'église 
de  la  T.  Ste-Trinitè  {35  avril  1802).  Peu  de  temps  après  il 
précisa  le  droit  de  préséance  du  clergé  séculier,  établissant 
qu'il  ne  passerait  avant  les  religieux  que  s'il  était  en  corps, 
(c'est-à-dire  au  moins  trois  prêtres  en  costume  choral.)  Mais 
l'église  de  la  T.  Ste-Trinité  n'était  pas  encore  paroisse. 

Mgr  Hillereau  ayant  construit,  en  1855,  l'église  de  St-,7ean- 
Chrj'sostome  voulut  l'ériger  en  paroisse  pour  son  clergé  ;  mais 
comme  elle  se  trouvait  très  rapprochée  de  Ste-Marie  et  de  St- 
Antoine  et  qu'elle  aurait  causé  un  tort  grave  aux  droits  acquis, 


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sans  qu'il  y  eut  par  ailleurs  d'avantages  compensateurs,  il  fut 
obligé  d'y  renoncer. 

Mais  le  marne  prélat  ayant  consacré  l'église  dn  St-Esprit,  le 
6  juillet  1846,  en  ât  le  centre  d'une  paroisse,  par  un  décret  du 
lendemain.  C'était  la  première  paroisse  séculière.  Nous  avons 
indiqué  ci-dessus  ses  limites. 


Paroisse  du  St-Esprit.  Prêtres  séculiers. 
\ 

Édifiée  au  faubourg  dePéra,  entre  les  rues  Idjadiïè-Djedidiïé 
et  la  rue  de  Pancaldi  vis-ii-vis  l'extrémité  du  grand  cimetière 
arménien  touchant  aux  terrains  de  l'École  militaire,  cette  église 
a  été  bâtie  en  1846,  par  Mgr  Hillereau,  qui  en  fit  l'église  métro- 
politaine; S.G.  en  fit  la  consécration  le  dimancha  5  juillet  1846; 
et  la  cérémonie  terminée,  une  messe  solennelle  fut  chantée  en  . 
présence  de  M.  le  baron  de  Bourqueney,  ambassadeur  de  France, 
entouré  du  personnel  de  l'ambassade.  M,  l'abbé  Hillereau,  grand- 
vicaire  et  parent  de  l'archevêque,  prononça  le  discours  d'inau- 
guration. Cette  église,  composée  de  trois  nefs,  séparées  l'une  de 
l'autre  par  une  rangée  de  colonnes,  est  la  plus  grande  de  Fera. 

Des  mouvements  de  terrain  ou  toute  autre  cause  ayant  mis, 
récemment,  l'édifice  en  péril,  des  réparations  considérables  ont 
été  exécutées,  en  18(35,  par  les  soins  de  M.  l'abbé  Giorgiovich, 
prêtre  diocésain.  Cette  réédification  est  constatée  par  l'inscrip- 
tion suivante,  placée  au  fronton  de  l'égiise  ; 

D.  0.  M.  Templum  in  suborbano  crescente  in  die  oppujanorcm 

NUMERO  DIFFICILLIMIS  TEMPORIBUS  ERECTtJM    W  PIDEI  C^THOLlat:   TE- 

STiMOMi^u  Spiiutui  Sancto  dic^tdm  a  Juli.\no  Maria-Hujlereau 

PeTRENSI  AEICHIEPIS.  CONST.  SED.  ATOST.  POTEST,  PREI'ECrO  VICE 
BAGBO   MDCGCXLVI,  VALIDIS    TERREMOTIliUS    SUA    MOLE    FATISCENS 

D.N.  Paulus  a  coMiTrous  Brunoni  Taronensis  arcmep.  CP.  pre- 

SUL  JURE  APOSTOUCO  V.  L.  ADNITENTE.  MAXIME.  CLERO.  AERE.  A 
POPULARIBUS.  CONLATO.  NOVO.  MOLIMIXE.  ELEGANTIORl  FORlLi.  SAR- 
TUM.  TECTDM.  RËSTITUn.  MDCGCLXV. 


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Au-dessous,  et  courant  sur  la  frhe,  on  lit  : 

JCSTITIA  ET   PAX  ET   GALDIL'M  IN  SpIRJTU  BANCTO. 

La  bénédiction  de  l'église  restaurée  a  été  faite  par  Mgr  Bru- 
noni,  le  dimanche  31  décembre  1865.  Aux  jours  de  solennité, 
on  arbore  le  pavillon  français  à  droite  du  fronton  ;  et  le  drapeau 
pontifical  à  gauche. 

Devant  l'église,  et  donnant  sur  la  grande  rue  de  Pancaldi, 
Mgr  Hillereau  avait  fait  construire  aussi  un  grand  corps  de  lo- 
gis dont  il  fit,  pendant  un  certain  temps,  la  résidence  archié- 
piscopale, et  qu'il  destinait  k  un  séminaire  diocésain. 

II  existe  aous  l'église,  une  crypte  destinée,  dans  le  principe,  à 
des  caveaux  de  famille,  et  à  gauche  en  entrant,  on  trouve  une 
chapelle  spéciale  dans  laquelle  se  voit  le  cénotaphe  du  vénéré 
fondateur  de  l'église,  Mgr  Hillereau.  Derrière,  appliquées  au 
mur,  on  a  placé  les  pierres  tombales  de  prêtres,  transférées  en 
cet  endroit  par  ordre  de  Mgr  Brunoni,  lors  de  l'exhumation  des 
ossements  des  Grands-Champs,  dont  voici  en  sommaire  les 
inscriptions  : 

1882,  JosEPHUs  RovER.\ra,  vicarius  apostolicos  Coxstantino- 

POLEOS  PESTE  INTEREMPTLS. 

1778.  Nicolaus  Pugliesi,  alumntjs  de  Propaganda  Fini-:,  vica- 

BIUS  APOSTOUCUS  CONSTANTINOPOLEOS  PESTE  INTEREMPTUS. 

Mgr  Brunoni  a  voulu  également  que  les  restes  des  Jésuites, 
presque  tous  français,  morts  de  la  peste,  de  1585  h.  1756,  et  in-  . 
humés  au  cimetière  des  Grands-Champs,  fussent  déposés  dans 
cette  même  crypte,  avec  la  pierre  funéraire  qui  les  recouvrait. 
Cette  pierre  porte  l'inscriptidn  suivante  : 

Patiu:s  SocrETATis  Jesi;  peste  intebemph 
1585.  P.  LuDoviGcs  Ghizzola. 

1612.  P.  Car.  Goblv. 

1613.  P.  Luixiv,  GraNgiër. 
1662.  P.  FiiAXG.  Martin. 

1680.  P.  Nie.  DE  Ste  Geneviève. 
1683.  P.  Pcmus  Bernard. 
1686.  P.  Nie.  V.\D0is. 
1696.  P.  Henricus  Va.nderma.v. 


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1719,  P.  Franc.  Ranoeart: 
1726.  P.  Jacob.  Gachoo. 
1738.  P.  Ans.  Bayle.    . 
1751.  P.  Marc.  Gharot, 
1756.  P.  Petrus  Clerget. 

Les  Pères  Jésuites  du  collège  de  Ste-Puchérie  ont  fait  mettre 
de  champ  cette  pierre  tumulaire,  sur  la  moraille.  Ils  ont  mis  à 
côté  une  autre  pierre  qui  rappelle  la  sépulture  du  R.  P.  Gloriot, 
aumônier  de  l'armée  française  d'Orient,  disposée  par  les  soins 
de  M"'"  la  Marquise  de  Moustier  : 

la  REPOSE,  EN  ATTENDANT  LA  RÉSURRECTION,  LA  DÉPOfILLE  MOR- 
TELLE DU  P.  Joseph  Globiot,  prêtre  pbofès  de  la  Compagnie  de 
Jésus,  né  le  29  avril  1811  ;  il  entra  en  relioion  le  20  octobre 

1832,  ET  mourut,  victime  de   son  zèle  ET  DE  SA  CHARITÉ  POUR  LES 
soldats   de   la  FRANCE,  LE  22  MAI  1855,  DANS  l'hOPITAL   CIVIL   DE 

Fera. 

On  voit  aussi  dans  le  même  caveau,  où  elles  ont  été  transfé- 
rées à  la  même  occasion,  les  deux  pierres  suivantes,  d'anciens 
aumôniers  de  l'hôpital  des  pestiférés  : 

1815.  JOANNES   BaPTISTA  DE   PORTU,  MISS.  CAPELLANU3    HOSPmi 

Sti  Joannis  pestiferantium. 

1834.  D.  Giorgio  Rroo,  di  Tine,  capellano  dei  pestipehati. 

Par  une  faveur  spéciale,  et  en  témoignage  de  son  estime,  Mgr 
Pluym  a  bien  voulu  autoriser  l'inhumation  dans  cette  chapelle, 
d'un  prêtre  français,  M.  l'abbé  Mandonnet,  ancien  curé  de  Ran- 
dan,  en  Auvergne,  décédé  à  l'hospice  du  Taqcim,  le  3  novembre 
1 871 .  En  notre  qualité  d'exécuteur  testamentaire,  et  pour  rappe- 
ler les  vertus  du  défunt  nous  avons  fait  recouvrir  sa  tombe  d'une 
pierre  nêcrologico-historique. 

Dans  la  mCme  crypte,  Mgr  Pluym  a  fait  déposer  les  restes  de 
Mgr  Meletios,  Emmanuel  Stazanero,  archevêque  Grec-uni  de 
Drama,  décédé  à  CP.  le  11  sept.  1879. 

C'est  dans  l'église  du  St-Esprit  qu'ont  eu  lieu,  le  14  janvier 
187  i,  les  funérailles  de  Mgr  Pluyna,  Vicaire  apostolique  patriar- 
cal, décédé  la  veille  dans  sa  résidence  archiépiscopale.  Tout  le 
clergé  latin,  et  les  dignitaires  ecclésiastiques  de  résidence  ou  de 


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passage  h  CP.  et  en  communion  avec  le  St^Siège,  ainsi  que  toutes 
les  congrégations  et  communautés  religieuses  d'hommes  et  de 
femmes,  entourées  d'un  grand  concours  de  fidèles  assistaient 
à  la  cérémonie.  La  messe  chantée  par  les  élèves  du  pensionnat 
de  N.-D.  de  Sion,  a  été  suivie  de  l'oraison  funèhre,  prononcée 
par  le  R.  P.  Bomano,  S.  J.  supérieur  du  collège  de  Ste-Pulché- 
rie.  Les  absoutes  ont  été  données  par  les  supérieurs  des  Domi- 
nicains, des  Riformati,  des  Lazaristes  et  des  Conventuels  ;  Mgr 
Testa  vicaire  général  a  donné  la  dernière.  Le  corps  du  vénérable 
prélat  n  été  ensuite  descendu  dans  la  crypte  et  placé  à  côté  des 
autres  évèques  ses  prédécesseurs.  Par  une  volonté  spéciale,  le 
prélat  a  disposé  que  son  cœur  serait  conservé  dans  la  chapelle 
intérieure  du  pensionnat  de  N.-D.  de  Sion  :  touchant  souvenir 
de  l'hospitalité  reçue  par  le  digne  évêque  dans  cette  pieuse  mai- 
son à  la  suite  de  l'incendie  de  1870  '. 

S.  E.  M.  le  Comte  de  Vogué,  ambassadeur  de  France,  entou- 
ré de  tout  le  personnel  de  l'ambassade,  assistait  oiriciellement  h 
la  cérémonie,  ainsi  que  MM.  les  Ministres  d'Autriche-Hongrie 
et  de  Hollande. 

L'église  du  Sl-Esprit  avait  été  consacrée  déjà  à  l'époque  de 
son  inauguration  :  mais  ayant  été  considérablement  restaurée  et 
presque  reconstruite  en  1865,  Mgr  Graselli,  k  l'occasion  du  don 
d'un  magnifique  autel  fait  à.  sa  paroisse  par  le  curé,  D.  GaJibert, 
décida  d'en  faire  la  consécration  en  même  temps  que  celle  du 
nouvel  autel,  Cette  cérémonie  eut  lieu  le  dimanche  19  décembre 
1875,  tous  les  chefs  d'Ordres  y  avaient  été  convoqués,  M.  de 
Bourgoing,  ambassadeur  de  France  y  assistait  au.ssi,  avec  une 
bonne  partie  de  son  personnel. 

Les  reliques  de  quatre  saints  martyrs,  St  Lin,  pape  et  mar- 
tyr, St  Laurent,  diacre  et  martyr,  St  Crispin  Pomponius,  sol- 
dat et  martyr  (dont  le  corps  repose  dans  l'église  et  dont  la  fête 
se  célèbre  le  quatrième  dimanche  après  Pâques)  enfin  St  Sébas- 
tien, soldat  et  martyi\  Ces  reliques  après  avoir  été  portées  so- 
lennellement en  procession  ont  été  enfermées  dans  le  tombeau 
de  l'autel.  L'archevêque  a  célébré  la  messe  pontificale  et  après 

I  Voir  la  nolioe  nécrologique  que  nous  avons  donnée  dans  le  Courrier  d'O- 
rient, du  16  janvier,  reproduile  par  les  Miasiona  catholiques  du  20  janvier 
1874  ;  et  aussi  notre  comple-rendu  de  l'administration  dea  Cimetières  latins, 
pour  l'exercioe  1873-1874. 

85 


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—  886  — 

l'évangile  il  a  pria  la  parole,  en  grec  d'abord,  puis  en  français, 
pour  dire  que  dans  cette  circonstance  solennelle,  et  en  présence 
du  digne  représentant  de  la  France,  il  se  bornerait  à  exprimer 
une  pensée,  et  à  formuler  une  prière  :  «  une  pensée  toute  de 
reconnaissance  envers  la  France,  cette  puissante  et  constante 
protectrice  du  catliolicisme  ;  une  prière,  celle  de  demander  à 
Dieu  de  couvrir  cette  généreuse  nation,  qui  est  toujoura  restée 
la  fille  ainée  de  l'Église,  et  pour  laquelle  je  résumerai  tous  mes 
vœux  dans  cette  simple  prière  de  tous  les  cœura  chrétiens  :  que 
Dieu  protège  la  France  !  » 

Par  Bulle  du  ^0  janvier  1876,  le  Souverain  Pontife  a  déclaré 
cathédrale,  l'église  du  St-Esprit,  et  lui  a  attribué  les  privilèges 
et  prérogatives  ordinaires  de  ces  églises.  L'anniversaire  de  la 
Dédicace  doit  être  célébrée  suivant  les  canons  et  les  rubriques 
par  tout  le  clergé,  séculier  et  régulier  de  la  ville,  le  second  di- 
manche de  juillet  de  chaque  année.  Un  rescrit  déclare  privilé- 
gié le  maitre-autel  de  la  nouvelle  cathédrale. 

Œuvres  attachées  à  la  paroisse  du  St-Esprit. 

A  l'église  du  St-Esprit  sont  attachées  deux  écoles  paroissiales 
entretenues  par  le  vicariat  patriarcal,  moyennant  les  subsides 
de  la  Propagation  de  la  Foi.  Celle  des  garçons  est  tenue  par  les 
Frères  des  écoles  chrétiennes.  Elle  compte  deux  cent  treize 
élèves,  tous  catholiques.  Celle  des  filles  est  sous  la  direction  des 
Sœurs  de  Sion  :  elle  compte  deux  cent  vingt-trois  élèves,  aussi 
toutes  catholiques. 

Les  enfants  des  écoles  des  Frères  forment  en  même  temps  la 
maîtrise  de  la  cathédrale  :  ils  ont  une  musique  instrumentale 
assez  bien  montée.  Nous  parlerons  ultérieurement  de  ces  écoles. 

La  cathédrale-paroisse  du  St-Esprit  est  desservie  par  des 
prêtres  séculiers  au  nombre  de  neuf. 

Elle  est  le  siège  des  confréries  suivantes. 

1"  La  confrérie  de  N.-D.  des  Sept-Douleurs,  établie  canoni- 
quement  à  la  T.-Ste-Trinité  en  1817,  transférée  plus  tard  à 
St-Jean-Ghrj'sostome  et  enfin  au  St-Esprit.  Elle  compte  actuel- 
lement plus  de  deux  mille  membres. 

2"  Une  Congrégation  de  la  T.  Ste  Vierge,  alBliée  à  celle  de 
Rome,  y  a  aussi  son  centre. 


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3'  On  a  récemment  inauguré  une  ceavre  excellente  pour 
la  persévérance  des  jeunes  gens,  dans  l'école  paroissiale  des 
Frères. 


III. 
Kadi-heui.  Paroisse  de  l'Assomption  de  N.-D. 

La  ville  de  Kadi-keui,  qui  s'élève  sur  l'emplacement  de  l'an- 
cienne Chalcëdoine,  n'était  d'abord  qu'un  viUage  oCi  les  habi- 
tants  de  Gonstantinople  venaient,  pendant  Tété,  chercher  un  air 
plus  frais  et  des  espaces  plus  vastes  :  elle  est  devenue  peu  à  peu 
une  ville  ayant  une  population  fixe  considérable.  Gomme  il  s'y 
trouvait  un  certain  nombre  de  catholiques  latins,  il  fallut  leur 
assurer  un  service  religieux.  Ils  eurent  d'abord  une  petite  cha- 
pelle, mais  enfin  Mgr  Brunoni  résolut  de  leur  élever  une  véri- 
table église.  L'ambassade  de  France  obtint  un  firman  impérial 
de  Chaban  1375=1859,  et  la  première  pierre  fut  posée  le  5  juil- 
let, par  le  Vicaire  apostolique  patriarcal,  en  présence  de  M.  le 
Comte  de  Lallemand,  chargé  d'affaires  de  France.  Quelques-uns 
présument  que  c'est  sur  l'emplacement  de  l'ancienne  église  de 
Ste-Euphémie,'  dans  laquelle  se  tint,  en  451,  le  Concile  de  Chal- 
cëdoine, présidé  parles  Légats  du  Pape  St  Léon  le  Grand.  (??) 

L'église  actuelle,  l'une  des  plus  belles  de  la  latinité  de  CF., 
a  la  forme  d'une  croix  latine  :  elle  contient,  outre  le  maître-au- 
tel, six  chapelles  latérales.  Sur  l'arceau  de  la  coupole,  dominant 
le  centre  de  la  croisée,  du  côté  du  chœur,  on  lit  : 

.-VSSUMPTA  EST  MARIA  IN  CŒLUM  ;  sur  l'arc  en  face  : 
H^C  EST  FIDES  NOSTRA  QVM  VICIT  MUNDUM;  sur  ce- 
lui de  gauche,  au-dessus  de  la  chapelle  de  St-Léon,  un  tableau 
représente  ce  pape  envoyant  les  légats  au  concile,  ou  confir- 
mant ses  décrets,  au-dessus  l'inscription  suivante  :  PETRUS 
FER  LEONEM  LOGUTUS  EST  ;.  en  face,  au-dessus  de  la 

1  Cri.ebeau,  Hist.  du  bas-empire,  XII,  857.  n M,  de  Nointel, dit  Tournefopt, 
assurait  que  les  restes  de  Ste  Euphémie  as  trouvaient  à  un  mille  du  village 
adue!  de  Kadf-keui.  •  Selon  Pierre  Gylles,  rdgUee  de  Ste-Euphémie  aurait 


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chapeUe  de  Ste-Euphémie,  A  SUPPLICIO  EUPHEMIA  AD 
GŒLUM. 

Tous  les  autels  sont  en  marbre  et  ornés  de  tableaux  dont  plu- 
sieurs  ont  été  envoyés  de  Rome  ;  ceux  des  chapelles  de  St-LéoD 
et  de  Ste-Euphémie  ont  été  donnés  par  le  pape  PIE  IX. 

Œuvres  existant  dans  la  paroisse  de  Kadi-heuî. 

Sur  le  territoire  de  la  paroisse  se  trouvent  divers  établisse- 
ments religieux.  Les  Pères  Capucins  de  la  Province  de  Paris, 
qui  desservaient,  depuis  1882,  le  pensionnat  des  Frères,  ont,  en 
1890,  élevé,  au  milieu  d'an  vaste  jardin  un  grand  couvent  dans 
lequel  les  jeunes  religieux  de  leur  province  font  leurs  études 
philosophiques  et  théologiques,  ils  n'exercent  aucun  ministère 
ecclésiastique. 

Les  Religieux  Augastins  de  l'Assomption  ont  à  Fener-bagbt- 
chè,  une  chapelle,  une  grande  maison  qui  leur  sert  de  noviciat, 
une  école  de  garçons  et  une  de  filles.  Les  Frères  des  écoles  chré- 
tiennes ont  un  grand  pensionnat,  très  florissant.  Les  Dames  de 
Sion  un  couvent  et  un  pensionnat.  Les  petites  sœurs  de  l'As- 
somption une  école  de  filles  à  Fener-baghtchè  ;  mais  comme 
tous  ces  établissements  ne  dépendent  pas  directement  de  la  pa- 
roisse nous  en  parlerons  ailleurs. 

Écoles.  Une  école  de  garçons  a  été  ouverte  par  le  vicariat  et 
le  curé  dans  les  dépendances  de  l'église,  en  1878  :  elle  compte 
cinquante-trois  élèves,  qui  sont  instruits  par  trois  maîtres. 

Les  filles  catholiques  suivent  les  classes  des  Sœurs  de  Sion, 
ou  celles  des  Sœurs  de  l'Assomption. 

Les  Confréries  sont  celles  de  la  T.  Ste  Vierge  et  du  Sacré-Cœur. 
Il  s'y  trouve  aussi  une  petite  Fraternité  du  Tiers-Ordre  Fran- 
ciscain dirigée  par  les  PP.  Capucins. 

Une  chapelle,  construite  et  entretenue  par  la  famille  Tubini, 
dans  le  voisinage  de  l'échelle,  reçoit  chaque  dimanche  de  nom- 
breux fidèles. 

été  élevée  sur  les  ruines  d'uD  temple  de  Wniis.  Il  ajoute  qu'elle  rut  ainsi 
numméc  en  l'bonneur  de  la  femme  de  Justin  de  Thrace  qui  la  b&tit.  L'an- 
cienne église  de  Ste'Fuphémie  était  reconnaissable  &  Yatnxma  qu'on  y  véné- 
rait. Il  se  trouve  à  Kadi-keui,  une  église  grecque  de  Ste-Euphémie. 


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§111. 

Scutari.  Paraisse  de  St- Jean-Baptiste. 


Quoique  Scutari  soit  essentiellement  une  ville  turqae,  il  s'y 
trouve  néaamoins  quelques  familles  catholiques,  on  ne  pouvait 
donc  les  abandonner.  Les  Dominicains  en  forent  chargés  quelque 
temps,  pais  la  paroisse  ayant  été  érigée  par  Mgr  Mussabini,  eu 
date  do  31  décembre  1856,  les  Prêtres  de  la  Mission,  dits  Laza> 
ristes,  en  furent  désignés  curés.  La  paroisse  comprend  toute  la 
ville  de  Scutari,  arrive  au  sud  Jusqu'aux  conôns  de  la  paroisse 
de  Kadi-keui,  et  au  nord  jusqu'à  Candilli  exclusivement  où  elle 
rencontre  la  paroisse  de  Bujuk-dërë.  L'église  était  sise  au  quar- 
tier de  Reis-mahallè  ou  léni-mahallé.  Mais  cette  église  ayant 
été  brûlée,  les  Lazaristes  ont  abandonné  le  service  qui  retourna 
au  clergé  séculier. 

Cependant  les  Filles  de  la  Charité  qui,  dès  1859,  avaient 
commencé  à  Scutari  un  internat  et  une  école,  achetèrent,  en 
1884,  une  maison  et  firent  construire  à  côté  une  chapelle  qui 
sert  d'église  aux  catholiques  du  quartier. 

Cette  église  est  desservie  par  un  prètra  Oéorgien  de  Rite 
latin. 

Les  classes  comptent  cent  quatorze  enfants,  douze  garçons  et 
cent  deux  filles.  Comme  elles  ne  sont  pas  une  œuvre  parois- 
siale nous  en  parlerons  ailleurs. 

Etai  du  clergé  séculier  du  vicariat  de  Constantinople. 

Vicaire  Patriarcal.  ïllme  et  Revme  Mgr  D.  Auguste  Bonetti, 
de  la  Congrégation  de  la  Mission,  archevêque  de  Palmyre. 
Résidant  à  Pancaldi,  près  de  la  cathédrale  du  St-Esprit. 

Vicaire  général  :  D.  Jean  Genocchi. 

Clergé  de  la  Mission  :  vingt-six  prêtres  séculiers,  dont  trois 
seulement  sont  indigènes  et  appartiennent  au  Vicariat. 

De  plus  sept  prêtres  de  rites  orientaux  sont  attachés  au  vi' 
cariât,  sans  compter  les  Géorgiens,  etc. 


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—  390  — 

Séminaire.  Les  Capacîns  de  la  ProTÎnce  de  Paris  ont  dans 
lenr  coavent  de  St-Lonis,  &  Constantinople,  un  séminaire  pour 
la  formation  d'un  clergé  séculier,  tant  pour  Constantinople  c[ae 
pour  les  diocèses  voisins.  De  plus  les  Lazaristes,  les  Géorgiens^ 
les  Assomptionistes  et  les  Résurrectionistes,  ont  des  alumnats 
destinés  surtout  à  fournir  des  vocations  à  leurs  instituts. 


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CHAPITRE  m. 

PAROISSES  RÉOULIÈRES,   OU  CONFIÉES  A  DES  REUGIEOX 


Les  religieux  établis  depuis  le  xm'  siècle  à  CP.  et  chargés 
seuls,  pendant  des  siècles,  de  l'administration  des  sacrements, 
ont  conservé  leurs  positions  jusqu'à  présent,  sauf  l'exception 
que  nous  avons  indiquée  au  chapitre  précédent.  Ils  les  ont 
même  augmentées  en  ce  sens  qu'ils  ont  établi  diverses  succur- 
sales, k  mesure  que  le  besoin  s'en  faisait  sentir.  Nous  traite- 
rons de  ces  paroisses  et  de  leurs  œuvres,  selon  le  même  ordre 
que  précédemment,  dan^^  la  seconde  partie. 


SI- 

Paroisses  des  FF.  MM.  Conventuels.  —  St-Antoîne.  — 
Buyuh-déré.  etc. 

Nous  sommes  obligés  de  remonter  un  peu  haut  pour  parler 
des  Pères  Conventuels,  que  nous  avons  laissés  au  moment  où  ils 
étaient  chassés  de  leur  ancien  couvent  de  St-François  de  Gala- 
ta.  Après  la  destruction  de  leur  église  et  la  confiscation  île  leurs 
terrains,  en  1697,  les  religieux  Conventuels  se  réfugièrent  dans 
une  petite  maison  qu'ils  avaient  depuis  longtemps,  aux  vignes  de 
Péra,  sur  l'emplacement  même  de  leur  église  actuelle  de  St-An- 
toiiie.  Ils  y  avaient  déjà  une  petite  chapelle  domestique,  dédiée 


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à  St  François,  ils  s'en  servirent  pour  eux-mêmes,  et  y  admirent 
quelques  fidÀles,  mais  ils  ne  pouvaient  y  exercer  les  fonctions 
curiales. 

Ils  recoururent  donc  aux  PP.  Jésuites  de  St-Benoît,  et  ils  en 
obtinrent,  en  1704,  l'autorisation  de  se  servir  de  leur  église 
pour  leurs  fonctions  curiales  ;  ils  ârent  de  même  à  Ste-Marie, 
avec  les  Pères  Riformati,  comme  nous  l'avons  dit  ailleurs. 

Comme  ils  étaient  sous  la  protection  vénitienne,  et  que  Venise 
était  alors  en  guerre  avec  la  Porte,  ils  restèrent  longtemps  sans 
pouvoir  obtenir  le  firman  nécessaire  pour  la  reconstruction  de 
leur  église  ;  mais  en  1731  le  P.  Général  de  l'Ordre  décida  que 
'  ses  religieux  seraient  de  nouveau  placés  sous  la  protection 
Ërançaise,  comme  presque  tous  les  établissements  catholiques  à 
cette  époque.  L'effet  ne  tarda  pas  à  s'en  faire  sentir,  car  M.  de 
Bonnac,  ambassadeur  de  France,  s'employa  à  faire  concéder  les 
autorisations  prévues  par  les  capitulations  de  1453.  II  fit  plus, 
il  fit  accorder  par  la  France  un  subside  considérable  pour  cette 
construction.  Commencés  en  1724,  le  6  mars,  les  travaux  furent 
terminés  le  24  juillet  suivant,  ce  n'était,  suivant  l'usage,  qu'un 
édifice  en  bois.  L'église  fut  bénite  le  jour  même,  sous  le  vocable 
de  St  .\ntoine  de  Padoue,  par  Mgr  Mauri.  Tous  les  <  droits 
parochiaux  »  de  l'ancienne  église  de  St-François  furent  trans- 
férés à  celle  de  St-Antoine,  qui  n'en  était  que  la  continuation. 
C'est  l'année  suivante,  1725,  que  les  limites  des  paroisses  furent 
fixées  par  le  même  Vicaire  patriarcal. 

Le  20  septembre  1762,  la  nouvelle  église  et  le  couvent  atte- 
nant, furent  détruits  par  le  feu.  Les  religieux  furent  recueillis, 
pour  la  seconde  fois,  chez  les  Pères  de  Terre  Sainte,  FF.  MM. 
de  l'Observance.  L'année  d'après,  M.  de  Vergennes  obtint  de  la 
Porte  l'autorisation  de  reconstruire  l'église  sur  la  rueDum-dum, 
près  du  palais  de  l'ambassade  française.  La  nation  fournît  en- 
core un  subside,  comme  il  résulte  de  l'inscription  ci-après,  rap- 
portée par  Carbognano  ',  mais  qui  n'existe  plus  aujourd'hui  : 

D.  0,  M.  REfiXAXTE  Ldd.  XV  Galli\r[im  imperatore  mijos 
ECCLBSI.E  Min.  Convent.  protbctore  mcnificestissimo  suroît  ab 
IGNE  VENEB.  D.  Antoni  Patavini templum qdod  Exc.  equesD.cab. 

I  Carbopiano,  lor.  laud.,  p.  65. 


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DE  VERr.ENN'ES  GaLLIX  OR.  RESTirUlT  ZELI  OFOC.  FDTUR*:  iÊTVAJl 
MOXUMESTUM  INDUSTRtA  PP.  ELBBMOSIX.  PIORUM  SUB  BEOTUINE 
A.  R.  P.  M.  JOAN.  ChRÏSOSTOMI  PHOVINUALIS  et  HLEFECn  EIlECrUM 

A.  D.  MDCCLXm. 

Cette  fois  l'église  et  le  couvent  avaient  été  reconstruits  en 
pierres,  sur  des  fondements  nouveaux  et  de  forme  plus  élé- 
gante. L'église  comprenait  trois  nefs,  soutenues  par  douze  co- 
,Ioane3  en  granit  oriental.  La  dépense  avait  été  considérable  et 
l'Ordre  avait  alloue  10.000  éctis  (zécchini),  Elle  fut  bénite  par 
le  R.  P.  Fr.  Jean-Chrysostome.  Mgr  Blaggio  Paulî,  Vicaire 
patriarcal,  en  consacra  les  autels,  le  29  octobre  1763.  En  1799, 
cette  église  reçut  plus  d'extension  et  des  embellissements  consi- 
dérables. De  grandes  réparations  y  furent  faites  encore  en  1815  ; 
de  telle  sorte  que  les  religieux  se  trouvèrent  presque  toujours 
dans  les  dettes,  ou  du  moins  dans  la  pauvreté  la  plus  grande. 

Le  1"  septembre  1766,  la  S.  Congrégation  décida,  en  faveur 
des  PP.  Conventuels,  que  les  Âleppins  seraient  compris  dans  la 
circonscription  paroissiale  de  St-Antoine,  comme  les  Latins,  et 
soumis  aux  mêmes  obligations. 

Dans  l'intervalle,  l'ambassadeur  de  France,  pour  élargir  et 
régulariser  la  rue  qui  conduit  à  son  palais,  et  aussi  pour  cons- 
truire un  logement  à  ses  cawasa,  prit  une  langue  de  terrain  sur 
toute  la  longueur  du  couvent  et  tout  le  jardin  qui  y  était  at- 
tenant. Les  religieux  durent  s'y  résigner  et  reçurent  en  dédom- 
magement une  somme  de  6000  livres.  Le  terrain  occupé  par  les 
PP.  Conventuels  est  donc  extrêmement  restreint,  et  quand  la 
rectification  de  la  Grande-Rue  de  Péra  leur  aura  encore  enlevé 
cinq  mètres  sur  toute  la  largeur  de  leur  église,  il  leur  restera 
bien  peu  de  chose. 

Cette  église  qui  avait  coûté  tant  d'argent  et  de  peines  fut  à 
son  tour  dévorée  par  les  flammes,  dans  le  grand  incendie  qui 
détruisit  presque  tout  Péra  en  1831.  Le  palais  de  France  et 
l'église  de  St-Louis  eurent  le  même  sort. 

Les  religieux  n'avaient  pas  encore  payé  toutes  les  dettes 
anciennes  :  ils  ne  pouvaient  fiéanmoins  rester  sans  église  ;  ils 
se  mirent  à  l'œuvre,  et  dès  l'année  suivante,  1832,  ils  avaient  un 
édifice  provisoire,  où  ils  pouvaient  du  moins  célébrer  la  messe 
et  administrer  leur  paroisse.  Quant  à  eux,  ils  avaient,  pour  la 


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troisième  fois,  reçu  une  généreuse  hospitalité  chez  les  Pères  de 
Terre  Sainte.  C'est  ea  souvenir  de  cette  charité,  que  le  Père 
Commissaire  de  Terre  Sainte  a  le  privilège  d'officier  le  jour  de 
la  fête  patronale  de  St-Antoioe,  13  juin,  lorsque  le  Vicaire 
patriarcal  ne  célèbre  pas  lui-même  pontificalement  la  sainte 
messe. 

Pour  couvrir  toutes  leurs  dépenses  les  religieux  s'imposèrent 
de  grandes  privations,  et  de  plus  le  P.  Curé,  Paul  Sardi,  et  le 
P.  M,  Francesco  Carboni  se  tirent  quêteurs  et  parcoururent 
l'Europe  entière,  pour  amasser  des  fonds.  On  parvint  enfin  à 
achever  le  couvent  et  l'église  dans  la  forme  actuelle  et  à  conser- 
ver ainsi  la  plus  ancienne  mission  de  l'Ordre, 

Dans  l'église  de  St-Antoine,  se  trouve  la  chapelle  nationale 
des  Ragusais,  dédiée  à  St  Biaise;  cette  chapelle,  la  plus  rap- 
prochée du  chœur,  à  droite,  est  en  même  temps  dédiée  à  là  Ste 
Vierge  et  à  St  François  ;  la  fête  de  St  Biaise  y  est  célébrée 
solennellement  le  3  février  ;  pendant  longtemps,  cette  chapelle 
était  ornée  d'un  tableau,  donné  par  les  Ragusais,  et  représentant, 
dans  les  cieux,  l'image  de  St  Biaise  dominant  la  ville  de  Raguse 
qu'il  semblait  couvrir  de  sa  protection.  Les  Ragusais  possé- 
daient, dans  l'église  St-Antoine,  un  caveau  national,  pour  les 
inhumations  '. 

On  voit  aussi,  dans  cette  église,  une  chapelle  dédiée  à  StRoeh, 
objet  d'une  dévotion  particulière  à  Gonstantinople,  contre  la 
peste. 

Lors  de  l'exhumation  du  cimetière  des  Grands-Champs,  en 
1864,  les  restes  et  les  pierres  funéraires,  y  existant,  de  quatre 
Vicaires  patriarcaux  de  cet  Ordre,  les  RH.  PP.  Vizzani,  Staffulo, 
MercedrinietdeMgrRidolfi,ontété  transportés  dans  cette  église. 

Voici  les  inscriptions  gravées  sur  ces  pierres  : 

1637.  D.  0.  M. 

Hic  JACET  BEVERENTÏISSrauS  PATEIlGuiLLELMUS  ViZZiNI  A  BONONIA, 
DOCTOR  THBOL.  PaEDICATOIl  GELEBERRIMUS  OHD.  MIN.  CONV.  MINIS. 
MtOVINGI.E  ORIENTIS  AC  VICARIUS  GENERALIS    l'ATHIARGALIS  CONSTAN- 


i  1  13  décembre  1783.  N.  sepulta  fuit  in  ecclesia  Sl\  Antonii  Padavini 
PP.  MM.  Conveatualium,  in  aepulcro  nationis  ragusine.  ■  (Archives  de 
Ste-Marie.) 


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TIN0P0LE03  lATIN.  A  CONOR.  DE  PBOP.  FIDE  DEPUT.  OBIIT  17  0CT0BRI3 

41  cniaTEB  JBT.  sua;,  ann.  ikcarnat.  dni.  1637. 
1641.  D.  0.  M. 

TUMULUM  IN  QUO  QUIBSCIT  RMUS  P.  FhaNCISCUS  STAIFULANL'S, 
PICENNATES  ORD.  MIN  GONV.  PROVINCI^.  0RJHNTI8  MpJISTER.  VIC. 
PATRIARCALIS  BYSANTII  AC  UTRIUSQUE  VALLACH.  MISSION.  PR^ib'ËCrUS. 
OBUT  DIE  15  OCTOBRIS  STATIS  SVJE  ANNO  40.  1641  ■ 

1648.  D.  0.  M. 

Mausolbum  ubi  jacet  RMUS  p.  JoANNsa  Mercredinus  Fananensis 

PROVINCLG  BON.  ORDIN.  iON.  GONV.  PROVINdSÎ.ORIENTlS  HINISTEB  VIC. 
PATRIARCH.  BISANITI  ET  UTRTDSÛUE  VALLACH.  MISS.  Wiaï.  OBIIT  DIE 
6  OCTOBRIS  «TATIS  SU*:  ANN.  42.   1643. 

1677.  LssGRiiTioN  DE  Mgr  Rioolfi,  déjà  rapportée. 

Une  autre  pierre  tombale,  recouvrant  les  restes  des  religieux 
conventuels  morts  de  la  peste  a  été  également  transportée  à 
St-Antoine  à  la  même  époque  :  on  y  lit  ; 

PP.  et  FF.  Min.  Conv.  peste  interempti. 

1754.  P.  Antonils  Bianchi,  brl^nd. 
1769.  P.  Ubaldus  Rochi. 

1778.  P.  M.  Antonius  Pomani,  patav,  Mdj.  Prov.  ac  Prjep. 
Apost. 
1817.  F.  Phiuppus  Bonfils  Maces.  29  Auqust. 

L'église  de  St-Antoine  et  l'habitation  des  Pères  Conventuels 
sont  situées  Grande-Hue  de  Péra,  et  forment  le  côté  gauche  de 
la  rampe  conduisant  à  l'ambassade  de  France. 

Le  supérieur  porte  le  titre  de  Préfet  de  la  mission  des  Mineurs 
Conventuels  ;  le  sceau  des  actes  émanés  de  lui  porte  l'image  de 
St  François,  entourée  de  cet  exergue  :  Sigillum  ministri  pro- 

VINCI.E  OniENTIS  MLN.  CONV.  » 

Il  est  d'usage  de  célébrer  aiinuRllement,  dans  cette  église,  le 
5  janvier,  à  quatre  heures  de  l'après-midi,  la  cérémonie  de  la 
bénédiction  de  l'eau,  ou  du  baptême  de  Notre-Seigneur.  Un 
jeune  enfant,  choisi  parmi  les  paroissiens,  y  représente  St  Jean- 
Baptiste,  sous  le  nom  de  Coînôarodf /.-C. La  mèmecérémonie 


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s'est  établie,  postérienrement,  à  Ste-Marie  Drapéris  ;  elle  est 
suivie  de  la  bénéâiction  des  maisons,  comme  le  samedi-saint. 
La  procession  du  Corpics  Domini  se  fait,  dans  cette  paroisse, 
le  jeudi  de  l'octave  de  la  Fête-Dieu  ;  elle  sort  de  l'église  à  cinq 
heures  de  l'après-midi,  pour  entrer,  par  les  rues  de  Péra  et  de 
Pologne,  dans  l'enceinte  des  jardins  de  l'ambassade  de.France, 
où  deux  reposoirs  sont  dressés  ;  la  procession  fait  une  troisième 
station  dans  St-Louis,  chapelle  de  l'ambassade,  après  quoi  elle 
rentre  dans  l'église  ;  l'étendard  de  8t  Biaise  ouvre  la  marcbe  du 
cortège.  Depuis  ijuelques  années  le  parcours  de  cette  procession 
a  été  encore  abrégé  :  elle  sort  de  l'église,  vient  dans  les  jardins 
de  France  oi'i  elle  trouve  un  reposoir,  fait  une  station  dans  l'église 
St-Louis,  et  rentre  à  St-A,ntoine  au  chant  du  Te  Deum. 

Œuvres  de  la  paroisse  de  St-Antoine. 

1°  Ecoles.  Les  Pères  Conventuels  ont  dans  leur  couvent 
une  école  paroissiale,  sorte  de  maîtrise,  tenue  par  un  religieux; 
on  y  donne  l'enseignement  élémentaire.  La  langue  de  l'école  est 
l'italien,  mais  on  y  enseigne  en  outre  le  français  et  le  grec.  Le 
nombre  des  enfants  qui  la  fréquentent  s'élève  k  quarante  ou 
cinquante.  Ils  sont  en  partie  entretenus  par  la  mission. 

Les  classes  des  flUes  sont  tenues  par  les  Sœurs  italiennes  de 
rimmaculée-Gonception  d'Ivrea,  en  Piémont,  Elles  sont  assis- 
tées par  les  religieux  de  St-A.ntoine.  Le  R.  P.  Préfet,  pro  tem- 
pore  représente,  en  Orient,  l'évêque  d'Ivrea,  supérieur  général 
de  ces  religieuses. 

3'  Hôpitaux.  L'hdpital  italien,  desservi  par  dix  sœurs  de 
l'Immaculée  Conception  d'Ivrea,  est  secouru,  au  spirituel,  par 
les  religieux  de  St-A.ntoine,  qui  y  font  des  fonctions  régulières 
et  y  assistent  les  malades. 

Ils  donnent  aussi  les  secours  spirituels,  quand  on  les  réclame, 
aux  deux  hôpitaux,  Municipal  et  Allemand. 

3°  Associations  et  Confréries.  Le  Tiers-Ordre  de  St-Fran- 
çois  est  établi  régulièrement  à  St-Antoine,  il  y  compte  environ 
cent  dix  membres  qui  assistent  régulièrement  aux  réunions 
mensueile.s. 

4°  U Arckiconfrérie  du  Cordon  de  St-François,  dont  le 
centre  se  trouve  dans  la  Basilique  du  Sacra  Convento  à  As- 


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sise,  est  érigée  à  St^ Antoine,  par  diplômes  du  15  avril  et  14  août 
1734.  Elle  compte  des  membres  très  nombreux. 

5"  Celle  de  St-Antoine  de  Padoue  y  a  été  établie  par  un 
rescrit  de  Benoît  XIV,  en  date  du  15  novembre  1746. 

Les  religieux  de  St-Antoine  sont  au  nombre  de  huit  prêtres 
et  quatre  frères  lais,  de  diverses  provinces. 

3°  Paroisse  de  Ste-Marte  de  Buyuh-déré. 

Buyiik-dèrè  est  un  faubourg  de  Constantinople,  situé  sur  la 
rive  droive  du  Bosphore  de  Thrace,  presque  à  l'entrée  de  la  mer 
Noire.  C'est  une  des  Stations  d'été  les  plus  fréquentées,  et  un 
des  plus  agréables  centres  d'excursions.  Les  ambassadeurs  et 
beaucoup  de  catholiques  lapins  avaient  depuis  longtemps  l'ha- 
bitude d'y  passer  les  mois  d'été,  mais  personne  n'en  était  spé- 
cialement chargé  au  spirituel  :  il  était  même  réglé  que  la  juri- 
diction des  curùs  y  suivait  leurs  paroissiens.  Cependant  il  semble 
que  les  PP.  de  Ste-Marie  y  eurent  une  résidence  et  peut-être 
une  sorte  de  chapelle,  mais  rien  de  bien  régulier  toutefois.  C'est 
en  1807,  le  12  septembre,  que  la  S.  Congrégation  confia  cette 
station  aux  religieux  de  St-Antoine,  à  la  charge  par  eux  d'y  en- 
tretenir un  religieux,  auquel  elle  promettait  de  donner  une  pen- 
sion de  trente  écus  d'or  (zecchini),  qui  du  reste  n'ont  Jamais 
été  payés.  Le  12  avril  1808,  le  Vie.  patriarcal,  notilia  l'ordre 
qu'il  avait  reçu  d'établir  cette  nouvelle  paroisse.  Le  22  juillet 
1811,  il  attribua,  par  ordre  de  la  mt'-me  S.  Congrégation,  les 
droits  paroissiaux  à  la  nouvelle  fondation. 

Ce  ne  fut  pas  sans  quelques  dillicultés  néanmoins,  car  le 
P.  Préfet  de  Ste-Marie,  et  l'internonce  d'Autriche,  B""  Sturmer, 
protestèrent  contre  les  droits  qui  lui  étaient  attribués  ;  mais  la 
Vicaire  patriarcal,  par  un  acte  du  8  juillet  1815,  notifia  à  tous 
les  intéressés,  l'érection  de  la  nouvelle  paroisse  en  forme  cano- 
nique. Enfln,en  l'année  1817,  le  St-Siège  ordonna  à  l'ordinaire 
de  fixer  les  limites  de  la  paroisse  ;  c'est  ce  que  fit  Mgr  tioresi, 
par  un  décret  du  5  juillet  1817.  Elle  va  des  Hiçar,  ou  châteaux 
de  Roumili  et  d'Anadolou,  jusqu'à  Fanaraki  de  la  mer  Noire,  y 
compris  Belgrade.  Mais  on  ne  regardait  comme  paroissiens  que 
ceux  qui  y  avaient  vraiment  leur  domicile,  et  non  ceux  qui  y 
venaient  seulement  passer  la  belle  saison,  ou  chei'cher  un  re- 


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fuge  coDtre  la  peste  :  ceux-là  relevaient  de  leurs  curés  respec- 
tif. Ce  fut  l'occasion  de  nombreuses  dlMcnltés,  si  bien  qu'en 
1845  cette  restriction  fut  levée  et  que  les  Pères  Conventuels  res- 
tèrent vraiment  curés  de  tout  le  territoire  qui  leur  avait  été  as- 
signé. 

Une  paroisse  ne  peut  pas  exister  sans  église  ;  pour  en  cons- 
truire une,  le  St-Siège  autorisa  la  mission  à  contracter  un 
emprunt  de  12.000  écus  d'or  (zecehini),  (1814).  Un  autre  dé- 
cret autorisa  un  nouvel  emprunt  de  3000  écus  d'or,  et  l'on 
eut  une  église,  et  une  habitation  pour  les  religieux  cbai^és  de 
la  desservir,  le  tout  en  bois  et  sans  aucun  style. 

Plus  tard,  l'accroissement  du  nombre  des  fidèles  obligea  les 
religieux  Conventuels  à  bâtir  une  nouvelle  église,  beaucoup  plus 
grande  que  l'ancienne.  La  mission,  pour  cette  conslruction, 
dut  s'imposer  de  très  lourdes  chaînes,  qui  pèsent  encore  sur 
elle. 

L'ancienne  église  en  bois,  qui,  d'ailleurs,  était  une  maison 
particulière,  adaptée  aussi  bien  que  possible  à  sa  nouvelle  des- 
tination, a  été  abandonnée  lors  delà  construction  de  l'église  ac- 
tuelle, bâtie  en  pierres  avec  le  concours  des  dons  des  fidèles,  et 
par  firman  impérial  de  moharrem  1282  (ISjuin  1865),  obtenu  à 
la  demande  de  l'ambassade  de  France.  —  Sur  la  proposition  de 
M.  le  marquis  de  Moustier,  alors  ambassadeur,  le  gouvernement 
français  a  contribué,  par  un  subside,  à  l'édification  de  la  nou- 
velle église. 

Mgr  Brunoni  a  posé  solennellement  la  première  pierre  le 
25  juin  1865  ;  et,  le  8  septembre  1866,  Sa  Grandeur  bénissait 
l'église  et  y  célébrait  pontificalement  la  première  messe. 

On  lit,  sur  la  façade,  au-dessus  de  la  grand'porte  d'entrée, 
l'inscription  suivante  : 

D.  0.  M.  IS  HONOREM  MaBI-E  NASGENllS  AB  ORIOINK  IMMACULATA 
COLLATITIA    FTOELira   STIPE   .KDEM    HANC    IN    AMl-LIOREM    FOBUAM    A 

SOLO  RE3T1TUTAM  FrATRES  t"RANCISCALES  A  CONVENTU  UEUICAVERUNT. 

Anno  1866. 

Le  sceau  de  la  paroisse  porte  l'image  de  la  Madone,  au  chef  de 
St-François.  L'exergue  :  Sigil.  parochiœ  S.-Mariœ  BuyuMe- 
ren,  ad  Bosphorum  T/iracium. 


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Œuvres  de  la  paroisse. 

1"  Écoles.  Les  Pères  tiennent  une  école  primaire  de  garçons 
qCi  l'on  enseigne  le  français,  l'italien,  l'allemand,  le  grec  et  la 
musique.  Elle  compte  de  soixante  à  soixante-dix  élèves.  L'école 
appartient  à  l'Autriche  et  est  par  conséquent  sous  la  protection 
autrichienne. 

Les  Sœurs  de  l'immaculée  Conception  d'Ivrea  y  ont  une 
(  École  nationale  italienne  >  en  face  de  l'église.  Elle  compte  de 
cent  à  cent  dix  élèves. 

^"Associations.  Le  Tiers-Ordre  de  St-François  (50  membres). 
La  Confrérie  de  St-Roch  très  nombreuse. 

Succursales.  Beicos.  Pacha-baghtchê, 

En  face  de  Buynk-dèrè,  sur  la  côte  d'Asie,  au  fond  d'une 
baie  magnifique  et  profonde,  se  trouve  le  village  de  Beicos. 
Comme  il  s'y  rencontre  quelques  catholiques,  le  P.  Provincial 
y  envoie  un  des  Pères  de  Buyuk-dèrè,  qui  va  y  dire  la  messe, 
les  dimanches  et  fêtes,  et  y  faire  la  classe  quatre  jours  la  se- 
maine. 

Tout  près  de  Beicos,  à  Pacha-baghtchè,  on  a  établi  une  ver- 
rerie qui  occupe  une  trentaine  de  familles  Styriennes,  catho- 
liques. Un  Père,  d'origine  allemande,  va  chaque  dimanche  leur 
dire  la  messe  et  leur  faire  le  catéchisme.  Il  leur  administre  au 
besoin  tous  les  sacrements  paroissiaux. 

Pour  tous  ces  services,  les  Pères  Conventuels  entretiennent  à 
Buyuk-dèrè  quatre  Pères  et  deux  Frères. 


§11- 

Paroisses  des  Pères  Dominicains. 

I.  St-Pierre,  état  actuel. 

L'édifice,  relevé  en  1781,  dura  jusqu'en  1841  ;  à  cette  époque, 
1  vétusté  de  la  construction,  presque  toute  en  bois,  nécessita  la 


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—  400  — 

recoQStruction  de  l'église  sur  un  plan  plus  vaste  et  plus  solide. 
M.  le  comte  dePontois  obtint,  à  cet  effet,  le  firman  nécessaire  ; 
des  secours  furent  envoyés  de  France  et  d'ailleurs  ;  mais  il  est 
juste  d'ajouter,  d'après  le  Journal  de  Constantinople  du  temps, 
«  que  les  Pères  dominicains  supportèrent  la  plus  grande  partie 
de  la  dépense,  afin  que  la  reconstruction  de  leur  église  ne  fût 
pas  une  cause  de  débours  extraordinaires  pour  leurs  parois- 
siens.» Le  roi  Charles- Albert,  de  Sardaigne,  donna  15.000  francs, 
et  la  reine  Marie-Christine  affecta  une  somme  de  800  francs 
à  la  célébration,  à  perpétuité,  d'une  messe,  le  jour  anniversaire 
de  la  mort  de  son  royal  époux,  Charles  Félix. 

La  nouvelle  église,  sise  rue  Perchembè-Bazar,  vit  ajouter  à 
son  nom  antique  des  saints  apôtres  Pierre  et  Paul,  celui  de  la 
Beata  Vergine  ciel  Rosarto.  Elle  compte,  en  outre  du  maltre- 
autel,  deux  chapelles  latérales,  à  droite  et  à  gauche  ;  et  comme 
annexe,  sur  la  droite  du  vaisseau  principal,  une  sorte  d'ora- 
toire où  se  trouve  ta  chapelle  de  Ste-Catherine  de  Sienne.  L'i- 
nauguration en  fut  faite  avec  grande  pompe,  et  un  jubilé  de 
huit  jours  fut  accordé  à  cette  occasion.  Jusqu'alors,  aucune 
église  latine  n'avait  été  con^acr^e  à  Constantinople  '  ;MgrHilIe- 
reau,  vicaire  apostolique,  sollicita,  de  Home,  l'autorisation  de 
consacrer  celle-ci  ;  la  question  fut  laissée  à  son  appréciation. 
Cette  consécration  eut  lieu  le  19  février  1843  :  Mgr  Hillereau 
archevêque  de  Petra,  vicaire  apostolique  de  Constantinople,  fut 
accueilli,  par  une  aftluence  considérable  de  fidèles,  à  la  porte  du 
temple,  occupée  par  un  détachement  des  marins  du  stationnaire 
français /â  Fiecfte.  Les  cérémonies  de  la  consécration  terminées, 
M.  l'ambassadeur  de  P'rance,  protecteur  de  l'église,  et  auquel,  en 
qualité  ï  d'évèque  du  dehors,  »  sont  rendus  les  honneurs  accou- 
tumés, entrait  dans  l'église  et  assistait  à  la  messe  pontificale.  K 
l'élévation  et  à  la  bénédiction,  les  iionncurs  militaires  furent 
rendus  par  la  compagnie  de  débarquement  de  la  Flèche  ;  le 
commandement  militaire  et  le  bruit  du  tambour  qu'on  n'entend 
jamais  dans  les  églises  orientales,  causèrent  h.  toute  l'assistance 
une  émotion  indiclble;et  quand  on  entonna  le  Domine  sa  Icum 


1  Vo\ez  sur  la  ninv-Talion  des  églises,  te  Culte  r-alhiiliqan  ilans  -tet  ri'n*- 
moiiies  et  tes  ai/iiUiolps.  par  l'abbé  Durand,  1868,  8",  pages  418  et  suiv.  et  plus 
haut  g  St-Frarivoi*  et  St-Georges. 


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VUE  CENTRALE  DE  LA  CHAPELLE 


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DijiiizBdbvV^iOOQle 


—  401  — 

fac  Regem,  chacDo  se  croyait  transporté  en  France  dans  une 
église  de  la  mère-patrie. 

(  Quatre  archevêques  ou  évèques  assistaient  le  prélat  consé- 
crateur  : 

c  Mgr  Hassoun,  coadjuteur  du  primat,  et  Mgr  Artin,  évêque 
de  Van,  du  rit  arméno-catholique  ; 

(  Mgr  Mazloum,  patriarche  des  grecs-unis  d'Egypte  et  de 
SjTie,  et  Mgr  lacoub,  évëque  syrien  de  Damas. 

<  Le  rit  latin  fut  pratiqué  solennellement,  pendant  les  six 
jours  restant  de  la  semaine,  par  les  diverses  communautés  reli- 
gieuses de  Péra  et  de  Galata  ;  des  discours  furent  prononcés  en 
toutes  langues  :  en  français,  en  italien,  en  grec,  en  allemand  et 
en  turc.  Les  prêtres  Lazaristes  ouvrirent,  le  lundi,  cette  série 
de  prédications  par  c  l'éloge  de  St  Dominique,  et  la  démons- 
tration du  caractère  propre  à  l'action  sociale  exercée  par  les 
Ordres  monastiques,  du  xii*  au  xvii<  siècle. 

€  Le  chargé  d'affaires  d'Autriche  assista  à  la  cérémonie  du 
vendredi  ;  le  discours,  prononcé  en  allemand,  fut  suivi  d'une 
prière  pour  l'empereur  et  la  famille  impériale. 

<  Le  samedi,  le  marquis  Pareto,  ministre  de  Sardaigne,  as- 
sista à  l'otrice  divin,  célébré  par  les  PP.  Dominicains  ;  et  le  dis- 
cours fut  suivi  du  Domine  saleum  pour  le  roi. 

a  Le  dimanche,  Mgr  Hassoun,  évoque  d'Anazarbo,  oflicia,  se- 
lon le  rit  arméno-catholique  ;  le  discours  fut  prononcé  en  lan- 
gue turque. 

t  Le  jour  suivant,  lundi,  un  service  funèbre  fut  célébré  so- 
lennellement pour  le  repos  de  l'àme  des  fldMes  ensevelis  sous 
l'église  ;  et,  le  même  jour,  les  PP.  Dominicains  appelèrent  à 
leur  table  tous  les  pauvres  de  leur  paroisse;  ils  les  firent  asseoir  à 
leur  place,  et  les  servirent  de  leurs  propres  mains  ;  plusieurs  né- 
gociants acceptèrent  l'invitation  de  participer  ii  cet  acte  de 
charité. 

«  La  piété  des  fidèles,  durant  ces  exercices,  fut  si  grande  que 
cent  confesseurs,  de  rites  différents,  étaient  occupés  à  recevoir, 
tous  les  jours,  les  coufessions  ;  les  communions  s'élevaient  à 
plus  de  mille  par  jour.  > 

Sur  la  première  travée,  au-dessus  de  l'orgue,  on  lit  ; 

VERO  CHRISTI  CULTUI,  PR^OICATOKUM  ORDO.  1842. 


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—  402  — 

Un  peu  plas  loin,  on  Ht,  sur  le  mur,  à  gauche,  l'iDSCriptioQ 
suivante,  rappelant  la  date  de  la  réëdifïcation  et  de  la  consécra- 
tion de  l'église  : 

TEMPLUM  HOC  NUPER  RFJEDIFICATL'M  IXDULGENTIIS  A  SS.  D.  N.  GRE- 
OORIO  XVI  IMPERTmS  LOCLTI.ETIUS  DD.  J.  M.  HttXEREAU,  ARCH.  PE- 
TRE  SEDIS  BYZANTII  VlC.  APOSTOLIC.  SOLEMNITER  CONSECRABAT  XI  KAL. 
MART.   1843. 

De  l'autre  côté,  à  droite,  et  un  peu  en  avant  de  la  chapelle  de 
l'Image  miraculeuse  de  la  Vierge,  on  a  placé,  sur  les  murailles, 
l'inscription  suivante,  rappelant,  de  son  côté,  la  cérémonie  ulté- 
rieure du  couronnement  solennel  de  cette  image,  peu  après  la 
proclamation  du  dogme  de  l'Immaculée  Conception  : 

ASS.P.N.PIO  IT.IX  DE  IMMACITLATOB.  MARIiEV.CONCEPTU  DOGMATS 
PROCLAMATO  DD.  A.  MUSSABINI  ARCH.  S^fYR^■.  SEDE3  CONSTANT.  PBO- 
VIC.  AI'OSTOLlfiUS  THIBl'M  Kl'ISCOI'IS  ADSTANTIBUS  NEC  NON  OALLIARITM 
PR.ESIXE  IMAGINEM  HANC  B.  MARI.T:  V.  ODIGHITRIAS  A  DIVO  LUCA  DEPI- 
CTAU  AUREA  IXSlr.KIEBAT  CORONA  VI  TO.  DECEMBRIS  1855.  CONGHATU- 
LATIONIS  Ef((iO. 

L'église  St-Pierre  et  St-Paul  possède  plusieurs  reliques  de 
Saints.  Au-dessous  de  l'Hodighi  trias,  le  premier  à  droite  en  en- 
trant, se  trouve  le  corps  de  St  René,  ou  du  moins  une  partie  de 
ses  ossements,  provenant  des  catacombes.  Au  second  autel  sont 
les  reliques  de  St  Thomas  ;  à  celui  d'en  face,  celles  de  St  Domi- 
nique. Enfin  dans  le  maître-autel  ont  été  placées  les  reliques  de 
St  Pierre  et  de  St  Paul. 

Comme  édifice,  l'église  latine  de  St-Pierre  est  l'une  des  plus 
belles  de  cette  capitale  ;  elle  est,  d'ailleurs,  l'œuvre  de  l'archi- 
tecte Fossîiti,  l'habile  restaurateur  de  Ste-Sophie.  En  dehors  du 
temple,  dans  la  cour  de  droite,  se  trouve  la  crypte,  destinée 
précédemment  aux  sépullures. 

Le  titre  de  la  paroisse  qui  réunit  dans  son  appellation  le  nom 
des  deux  Saints  Apôtres,  patrons  des  deux  églises  successives 
des  Dominicains,  est  Pmxccia  SS.  Apostol.  Pétri  et  Pauli 
Galntœ  et  BysantU,  Ord.  Prœclic  Le  sceau  du  T.  R.  P.  Vi- 
caire porte  l'image  des  SS.  Patrons  ;  celui  du  P.  Curé  de 
St-Pierre  porte  cette  inseriplion  «  Parochus  SS.  Apost.  Petrt 


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et  Pauli.  t  Ed  1640,  le  sceau  du  couvent  avait  déjà  pour  ex- 
ei^ae  :  1 1  Conv.  SS.  Apost.  Pétri  et  Pauli.  Bysantii.  » 

St-Pierre  est  aujourd'hui  (1893)  la  seule  paroisse  latine  de 
Galata  et  Constantinople  ;  sa  juridiction  s'étend  sur  toute  la 
ville  de  Constantinople,  y  compris  Psammatia  et  les  Sept-Tours 
sur  les  villages  des  deux  rives  du  port,  jusqu'à  l'extrémité 
d'Eïoub,  et  sur  les  navires  ancrés  sur  les  deux  rives  d'Europe  et 
d'Asie,  jusqu'aux  Hicar,  i  les  châteaux  de  Bosphore  >. 

Aux  jours  de  solennité,  le  drapeau  français  est  uboréànn 
màt  de  pavillon  établi  sur  le  mamelon  dépendant  de  St-Pierre 
et  sis  à  droite  de  la  grand'porte  extérieure  de  l'église. 

On  y  célèbre  chaque  année  très  solennellement  la  Fête  et  la 
procession  du  T.  St  Sacrement  et  celles  du  St  Rosaire  :  pour 
ces  processions  on  sort  ordinairement  dans  les  rues  voisines  de 
l'église,  au  milieu  d'une  foule  attentive  et  recueillie. 

Pour  la  première  les  Dominicains  ont  été  investis  par  l'église 
d'un  privilège  particulier  : 

St  Thomas  et  St  Bonaventure  ayant  été  (dit-on)  invités  par  le 
Pape  à  composer  l'office  de  la  solennité  du  Corpus  Domini,  ils 
furent  introduits  en  présence  du  Souverain  Pontife,  pour  lui 
soumettre  leur  œuvre;  St  Thomas  reçut  l'ordre  de  donner,  le 
premier,  lecture  de  son  travail,  et  St  Bonaventure  fut  tellement 
frappé  de  la  supériorité  de  cette  composition,  qu'il  renonça  à 
lire  la  sienne.  En  mémoire  de  ce  chef-d'œuvre,  le  Pape  accorda, 
par  bulle  spéciale,  aux  Dominicains,  le  privilège  de  faire,  eccté- 
rieurement,  la  procession  de  cette  fête,  sans  pouvoir  en  être 
empêchés  par  les  curés  des  paroisses  sur  le  territoire  des- 
quels la  procession  viendrait  à  passer. 

La  procession  du  St  Rosaire  se  taxi  le  premier  dimanche  d'oc- 
tobre de  chaque  année  ;  il  est  diflicile  de  rendre  le  caractère  de 
grandeur  vraiment  religieuse  que  présente,  en  ce  jour,  la  pro- 
cession sortant  de  l'église,  à  l'issue  de  la  grand'messe,  chantée 
pontificalement  par  le  Vicaire  apostolique,  et  se  déroulant  dans 
les  rues  de  Glalata,  au  seul  bruit  des  cloches,  à  la  simple  réci- 
tation du  rosaire,  par  le  R.  P.  vicaire,  au  milieu  d'une  popu- 
lation nombreuse  et  recueillie. 

Les  membres  de  la  confrérie  du  rosaire  marchent  en  ordre, 
précédés  d'un  étendard  bleu,  au  chiffre  de  Marie,  entouré  de 
cette  inscription  ;  «  Società  cattoltca  maltese  di  niutuo  soc- 


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—  404  — 

corso.  »  A  la  procession  de  l'année  1874,  ils  étaient  au  nombre 
de  cent  trente-six,  ayant  tous  fait  la  communion  le  matin.  Les 
confrères  portent  une  aube  blanche  avec  un  cordon  rouge  et 
une  cappe  bleu  de  ciel,  ils  tiennent  en  main  un  cierge  allumé. 
Le  massier,  portant  sa  canne  d'argent,  ouvre  la  marche,  qui  est 
close  par  le  recteur,  portant  suspendue  à  son  cou  la  plaque  d'ar- 
gent de  la  confrérie,  insigne  de  sa  dignité.  La  confrérie  unique- 
ment composée  de  Maltais,  se  réunissait  tous  les  dimanches  à 
St-Pierre,  où  une  instruction  religieuse  lui  était  faite  :  elle  s'oc- 
cupe activement  d'oeuvres  de  piété  et  de  charité  ;  mais  les  réu- 
nions religieuses  ont  cessé,  sauf  l'assistance  aux  processions 
solennelles. 

Presque  en  même  temps  que  leur  église,  et  môme  un  peu 
avant,  en  1S38,  les  religieux  avaient  trouvé  le  moyen  de  rebâtir 
leur  couvent,  et  ils  l'avaient  construit  spacieux,  solide,  con- 
forme aux  exigences  de  la  vie  religieuse.  Ce  n'est  pas  que  le 
nombre  des  Pères  fût  très  considérable,  ni  que  leurs  occupations 
fussent  fort  multipliées  :  la  population  abandonnait  de  plus  en 
plus  Galata,  pour  monter  vers  les  hauteurs  de  Péra,  l'église  de 
St-Pierre  était  de  plus  en  plus  désertée.  D'un  autre  côté,  le  re- 
crutement des  religieux  se  faisait  plus  diFRcilement,  dans  le 
Levant  encore  plus  qu'en  chrétienté,  et  les  prêtres  se  faisaient 
plus  rares.  Il  n'est  donc  pas  étonnant  qu'il  y  ait  eu,  pendant  des 
années,  une  sorte  de  sommeil  religieux,  à  St-Pierre  comme  dans 
les  autres  communautés  de  CP. 

C'est  cependant  à  cette  époque  qu'on  Ht  plusieurs  changements 
dans  le  gouvernement  de  la  maison  de  St-Pierre.  D'abord  le  vi- 
caire général  de  Ja  Congrégation  dominicaine  d'Orient  devint 
Préfet  apostolique,  et  fut  ainsi  relié  plus  étroitement  au  St- 
Siège  et  à  la  S.  Congr^ation  de  la  Propagande,  ensuite  un 
Préfet,  plus  zélé  que  ses  prédécesseurs,  établit  la  vie  commune, 
et  la  récitation  publique  des  heures  canoniales,  depuis  bien 
longtemps  tombée  en  désuétude  :  il  se  proposait  d'y  apporter  de 
bien  autres  modiâcationa,  mais  il  ne  ût  que  passer  et  ne  put  réa- 
liser le  programme  qu'il  avait  conçu. 

Enfin  en  1859  on  nomma  le  R.  P.  Giacinto  Gambiaso,  Pré- 
fet apostolique,  et  vicaire  général  de  la  Congrégation  d'Orient. 
Cet  èminent  religieux,  de  la  Province  de  Piémont,  s'appliqua 
avec  une  constance  soutenue,  et  une  suite  ininterrompue,  à  res- 


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—  405  — 

taurer  son  Ordre  dans  le  Levant  et  son  église  de  St-Pierre  à 
CP.  U  y  implanta  toutes  les  œuvres  que  les  temps  modernes 
réclament,  et  sans  lesquelles  on  ne  peut  faire  aucun  bien 
sérieux. 

Mais  sous  son  administration  se  fît  une  modification  plus  ra- 
dicale encore  dans  la  mission  dominicaine.  En  effet,  en  1857, 
elle  fut  unie  à  U  Province  de  St-Pierre-Martyr,  de  Piémont.  Le 
supérieur  de  la  Mission  qui  était,  depuis  1601,  Vicaire  gén^^l 
de  la  Congrégation  des  Frères  Prêcheurs  d'Orient,  et  ensuite 
Préfet  apostolique  de  CP.,  devint  simple  vicaire  provincial  du 
Provincial  de  Piémont,  Préfet  réel  ;  il  n'eut  plus  que  le  titre  de 
Supérieur  et  pro-préfet.  Il  est  vrai  que  la  S.  Congrégation  lui  a 
conservé  personnellement  ses  droits  et  sa  préséance,  comme 
auparavant,  mais  le  changement  n'en  est  pas  moins  radical  et 
complet.  Cependant  il  n'enleva  rien  à  l'énergie  du  B.  P.  Gia- 
cinto  Cambiaso,  et  n'arrêta  pas  son  activité.  Voici  les  œuvres 
qui  prirent  naissance  dans  la  mission  pendant  son  adminis- 
tration. 

1°  École  des  Frères  à  Gatata. 

Les  Frères  des  écoles  clirétiennes  appelé.^  à  CP.  en  1842, 
comme  nous  le  dirons  plus  loin,  et  établis  d'abord  à  StBenott, 
chez  les  Lazaristes,  y  ouvrirent  des  classes  qui  réunirent  un 
grand  nombre  d'élèves.  Obligés  de  quitter  ce  premier  établis- 
sement, ils  errèrent  en  plusieurs  endroits,  et  enfin  ils  vinrent 
demander  un  asile  au  R.  P.  Cambiaso,  qui  les  reçut  bien  et 
leur  donna  pour  faire  leurs  classes  une  partie  du  couvent  de 
St-Pierre,  au  rez-de-chaussée.  Puis  comme  ce  local  ne  conve- 
nait ni  aux  Dominicains  ni  aux.  Frères,  il  leur  permit  de  se 
construire  une  maison  en  planches  et  des  classes  assez  vastes, 
dans  la  partie  supérieure  de  leur  jardin.  Ces  classes  ayant  été 
consumées  par  un  incendie  (1877),  les  Frères  construisirent, 
sur  le  même  terrain,  une  longue  et  solide  maison,  et  des  classes, 
maliieureusement  trop  petites.  Les  Pères  Dominicains,  en  com- 
pensation de  la  concession  de  leur  terrain  y  trouvent  l'avantage 
d'avoir  là  une  école  paroissiale  gratuite,  et  une  maîtrise  pour 
le  service  de  leur  église.  Le  P.  Curé  de  la  paroisse  s'occupe  de 
l'école  et  y  vient  faire  le  catéchisme  plusieurs  fois  la  semaine 


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3°  t^cole  et  chapelle  d'iédi-koulé. 

La  jparoisse  de  St-Pierre  est  officiellemeot  appelée,  paroisse 
de  Galata  et  de  ByzaQce  :  elle  comprend  dans  son  périmètre 
toute  la  ville  de  Stamboul.  Les  Dominicains  y  possédaient  au- 
trefois deux  églises,  qui  leur  furent  enlevées,  vers  1635,  comme 
nous  l'avons  raconté.  Depuis  cette  époque  il  n'aurait  pas  été 
possible  d'en  ouvrir  d'autres  ou  de  s'établir  sur  ce  côté  de  la 
Corne  d'Or.  Il  y  eût  fallu  un  firman  spécial  que  jamais  le 
Sultan  n'aurait  accordé.  Il  n'y  avait  du  reste  aucun  besoin  d'é- 
glise latine  en  ces  quartiers,  carie  nombredes  catholiques  latins 
égarés  dans  la  ville,  turque  ou  grecque,  était  fort  petit  :  il  ne 
leur  était  pas  difficile  d'ailleurs  d'aller  à  quelque  église  catlio- 
lique  arménienne,  ou  de  venir  à  St-Pierre. 

Cependant  après  la  construction  des  chemins  de  fer  orien- 
taux, quelques  familles  latines,  presque  toutes  étrangères  et 
volantes,  vinrent  s'établir,  les  unes  auprès  de  la  station  de 
Sirkëdjy-Iskélècy,  les  autres,  plus  nombreuses,  auprès  des 
ateliers  de  la  compagnie,  à  lédi-koulè.  Les  Pères  Dominicains 
leur  administraient  les  sacrements,  quand  ils  réclamaient  leur 
ministère.  Mais  ces  catholiques,  peu  fervents,  ne  recouraient 
pas  souvent  à  leurs  prêtres.  On  ne  songeait  donc  que  vaguement 
à  leur  donner  des  écoles  et  une  église.  II  y  avait  dans  cette 
partie  de  la  ville  environ  soixante  familles  latines.  L'arrivée  des 
Pères  Àssomptionnistes  amena  les  Dominicains  à  .s'occuper  de 
cette  partie  de  leur  troupeau. 

Ils  se  mirent  à  l'oeuvre  avec  un  grand  zèle  et  au  prix  de 
grands  sacrifices,  ils  réussirent.  Ils  ouvrirent  d'abord  des  classes 
dans  une  maison  turque,  puis  ils  en  achetèrent  une  plus  grande 
et  s'y  installèrent,  1885.  lis  construisirent  ensuite  une  très 
grande  salle,  faisant  fonction  de  chapelle,  cette  station  est  des- 
servie par  un  religieux  qui  y  demeure  à  poste  fixe,  et  y  remplit 
toutes  les  fonctions  du  ministère  paroissial.  Il  y  a  établi  une 
école  tenue  aujourd'hui  par  les  soeurs  Dominicaines  de  Makri- 
keui.  L'école  compte,  en  1892,  cent  sept  élèves,  dont  soixante- 
seize  latins,  dix-neuf  grecs,  deux  arméniens,  huit  protestants, 
un  juif.  Quant  au  sexe  il  y  a  trente-quatre  garçons,  soixante- 
treize  filles.  La  langue  de  l'école  est  l'italien,  mais  on  y  en- 


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—  407  — 

seigoe  le  français  et  ralIemaDd.  Le  programme  est  celui  des 
écoles  primaires  élémentaires,  on  y  ajoute  pour  les  filles  les 
travaux  h  l'aiguille  et  autres  gui  conviennent  à  leur  sexe. 

La  Mission  des  Dominicains  s'est  occupée,  dans  ces  dernières 
années,  mais  seulement  d'une  façon  passagère,  de  la  mission  de 
Scutari  et  de  celle  de  Prinkipo.  Elle  a  solidement  fondé  celle  de 
Malcri-keui. 


II.  N.-D.  du  Si  Rosaire  de  Mahri-heui,  succursale  de 
St'Pierre  de  Oalata. 

Le  village  de  Makri-keui,  qui  s'élève  probablement  sur  les 
raines  de  l'ancien  palais  de  l'Hebdomon,  est  surtout  habité  par 
des  Grecs  et  des  Arméniens  :  on  y  compte  aussi  un  certain 
nombre  de  familles  latines  :  aussi  fallut-il  s'en  occuper,  dès 
qu'elles  y  devinrent  assez  nombreuses.  Les  FF.  MM.  Conven- 
tuels y  possédaient  une  maison  et  un  terrain,  ils  y  construisirent 
sans  bruit  une  fort  modeste  chapelle,  1849.  C'était  plutôt  une 
cabane  oii  ils  donnaient  aux  catholiques  les  secours  religieux 
dont  ils  avaient  besoin.  Ils  durent,  pour  certaines  raisons  so 
retirer  et  ils  mirent  en  loterie  tout  ce  qu'ils  possédaient.  L'é- 
glise échut  à  un  catholique  latin  qui  offrit  au  Vicaire  patriarcal 
de  lui  donner  en  échange  un  autre  terrain,  sur  lequel  on  poui> 
rait  édifier  une  église  un  peu  plus  convenable.  Mgr  Hillereau 
accepta  et  D.  Angelo  Spartali,  prêtre  séculier,  y  construisit  une 
chapelle  qu'il  bénit  en  1853,  et  qu'il  continua  de  desservir 
pendant  longtemps. 

Mais  celui  qui  avait  donné  le  terrain  étant  mort  avant  qae  les 
formalités  du  transfert  eussent  été  faites,  ses  héritiers  furent 
amenés  à  le , mettre  en  vente  :  l'église  était  sur  le  ^oint  de 
tomber  entre  les  mains  d'un  Turc,  1863.  A  cette  nouvelle  le 
B.  P.  M.  Cambiaso,  vicaire  des  Dominicains  fut  profondément 
ému,  et  sans  prendre  garde  aux  dettes  dont  son  couvent  était 
surchargé,  sans  même  se  donner  le  loisir  de  consulter  ses  sa- 
périenrs,  il  fit  l'acquisition  de  la  propriété.  Les  supérieurs  et 
la  S.  Congrégation  ratifièrent  bientôt  cet  acte,  et  enfin  Mgr 
Brunoni,  Vicaire  patriarcal,  confia  aux  Pères  Dominicains  le 
soin  d'établir  là  ane  paroisse  nouvelle,  qui  serait  une  succnrsale 


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—  408  — 

de  St-Pierre.  II  contribua  m^ine  pour  une  part  notable  à  l'ac- 
quisition, faite  au  nom  et  par  l'intermédiaire  de  l'ambassade  de 
France. 

Cette  église  n'était  encore  que  peu  de  chose,  le  R.  P.  Gam- 
biaso,  y  fit  des  réparations,  des  agrandissements,  il  y  ajouta 
un  petit  couvent  pour  la  résidence  des  religieux,  et  en  prit  pos- 
session en  1864.  Depuis  on  n'a  pas  cessé  d'y  faire,  presque 
chaque  année  des  embellissements  et  des  aut^meotations  nota- 
bles, jusqu'en  1883.  Elle  était  donc  convenable  et  sulUsait  aux 
besoins  des  fidèles  qui  habitent  Makri-keui. 

Mais  en  cette  année  1883,  une  famille  latine  du  pays  ayant 
inopinément  reçu  un  héritage  considérable,  voulut  en  faire  bé-  . 
néficier  la  religion  et  en  consacrer  une  partie  à  la  construction 
d'une  belle  église  à  Makri-keui.  La  première  pierre  fut  posée  le 
25  avril  1884.  Des  diUicultés  administratives  ne  tardèrent  pas  à 
arrêter  les  travaux  pendant  plusieurs  mois  ;  mais  un  Iradé  im- 
périal vint  permettre  ofTiciellement  la  construction  de  l'église,  le 
11  février  1885,  et  dès  le  13  avril  les  travaux  reprenaient  pour 
ne  plus  s'interrompre,  jusqu'à,  la  fin. 

Au  bout  de  trois  ans  l'église  était  achevée.  C'est  un  beau  mo- 
nument de  style  byzantin,  un  des  plus  beaux  édifices  religieux  de 
CP.  et  du  Levant.  Cette  construction  a  encore  grevé  le  budget 
de  St-Pierre,  mais  Dieu  en  est  glorifié  et  les  religieux  peuvent 
en  être  fiers. 

L'église  fut  inaugurée  et  bénite  solennellement,  en  présence 
de  M.  le  comte  de  Montebello,  ambassadeur  de  France  par 
Mgr  Charles  Testa  évêque  de  Phacuaa,  et  vicaire  général  du 
vicariat.  Le  matin  une  dernière  messe  avait  été  dite  dans  l'an- 
cienne église  par  D.  Angelo  Spartali,  qui  l'avait  bénite  et  y  avait 
dit  la  première,  trente-quatre  ans  auparavant.  Le  lendemain  une 
grande  cérémonie  était  accomplie  suivant  le  rite  arménien  par 
S.  B,  Mgr  Azarian,  patriarche  de  Cilicie,  assisté  d'un  nombreux 
clergé  de  son  obédience.  Le  surlendemain  grande  cérémonie 
grecque  par  Mgr  Beniaminos  Euséviadis,  évêque  grec-uni, 
assisté  de  Mgr  Michèle  Petkoff,  évoque  Bulgare-uni  d'Andri- 
nople.  C'est  ce  dernier  prélat  qui  consacrait  les  autels  del'église, 
le  16  juin.  Il  y  avait  longtemps  que  la  Latinité  de  CP.  n'avait 
pas  vu  de  fêtes  aussi  solennelles  que  celles  de  l'inauguration 
de  cette  ^lise,  3,  4,  5  juin  1887.  Le  souvenir  en  sera  perpétué 


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par  une  inscription,  qui  placée  d'attord  sur  la  porte  de  l'église 
été  ensuite  transportée  à  l'intérieur. 

p.   U.  HTACINTHL'S  CAMBtASO...  ASXO  XI  Sll  PR-ESIXATUS... 

HEBDOM1AN.R  DOUUS  O.   P.  AICTOR  JJUClILi;  TEMPLUM 

HOC    ANNO    M.D.Oœ.L.  XXX.V.   H   ...   PltESIXATliS    SUI    XXXV 

SirFFEClT. 


Ecole  des  Sosurs  de  Makri-keuî. 

Une  paroisse,  surtout  de  nos  jours,  n'est  pas  complète  si  elle 
n'a  pas  ses  écoles  bien  organisées.  Les  Pèras  Dominicains  le 
comprirent  vite  et  firent  divers  essais  de  ce  côté;  mais  enfin, 
au  prix  de  très  graitd?i  sacrifices,  ils  firent  venir  de  Mondovi,  en 
Piémont,  des  Sœurs  Dominicaines  et  leur  confièrent  les  écoles  de 
la  paroisse.  Il  y  avait  eu  jadis  des  religieuses  de  cet  Ordre  à 
St^Pierre  de  Galata,  nous  avons  vu  qu'elles  rec'evaient  des  lettres 
du  lî.  Haymond  de  Capoue.  Elles  avaient  dft  cijder  leur  couvent 
aux  Dominicains  expulsés  de  St-Panl.  Les  nouvelles  venues  ne 
faisaient  donc  que  renouer  la  chaîne  des  anciennes  traditions. 

Inaugurée  le  9  août  avec  quinze  élèves,  toutes  catiioliqnea,  la 
cla.'îse,  aux  vacances  suivantes,  en  comptait  quarante,  de  di- 
.verses  conditions.  Avec  le  temps  le  nombre  s'en  est  encore 
accru.  On  a  agrandi  le  local,  multiplié  les  maltresses,  oi^anisé 
toutes  choses  sur  un  excellent  pied  et  on  possède  aujourd'hui 
un  établissement  florissant.  Six  maitresses  y  donnent  l'ensei- 
gnement primaire  supérieur,  k  quatre-vinjçtr-huit  élèves,  dont 
vingt-deux  garçons  et  soixante-six  filles.  Pour  la  religion  trente 
enfants  sont  catholiques  latins,  trois  arméniens, quarante-un  sont 
de  la  religion  grecque,  et  quatorze  arméniens  grégoriens.  Les 
familles  latines  sont  peu  nombreuses,  ce  qui  explique  la  pré- 
dominance de  l'élément  acatholique.  La  tangue  de  l'école  est  le 
français,  mais  on  y  eo.'ieigne  aussi  le  grec,  l'ilalien  et  l'allemand. 
On  les  forme  avec  soin  aux  travaux  de  leur  âge  et  de  leur  sexe. 

\ous  avons  dit  comment  les  sœurs  avaient  fondé  une  succur- 
sale de  leur  école  à  lédi-koulè. 


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§  m. 

Paroisses  des  FF.  MM.  Rtformatt. 

Les  Pères  de  Ste-Marie  ont  en  ce  moment  deux  paroisses, 
l'ancienne,  dont  nous  avons  raconté  l'origine  et  suivi  l'histoire, 
et  une  nouvelle  &  Prinkipo,  dans  les  Iles  des  Princes. 

i°  Ste-Marte  Drapérts. 

La  psroisse  de  Ste-Marie  Drapéris,  si  elle  n'est  que  la  troi- 
sième parmi  les  paroisses  régulières,  est  cependant  la  première 
par  son  importance  et  te  cliiffire  de  sa  population. 

L'église  construite,  comme  nous  l'avons  vu,  en  1769,  a  subi 
diverses  réparations  plus  ou  moins  considérables  ;  mais  en  \  874, 
elle  a  été  restaurée  de  fond  en  comble,  agrandie  et  complétée. 
EUe  forme  une  seule  nef  assez  grande,  avec  des  couloirs 
latéraux  tenant  lieu  de  nefs.  La  voûte  a  été  décorée,  avec  un 
vrai  talent,  dans  le  genre  byzantin.  Elle  est  couverte  de  pein- 
tures symboliques  d'anges  et  de  saints.  Le  long  delà  corniche 
courent  de  longues  bandes  portant  les  représentations  des  lita- 
nies de  la  T.  Ste  Vierge.  Des  vitraux  de  couleur  rappellent  le 
souvenir  de  St  François  et  de  Ste  Claire,  celui  du  fond,  le  St- 
Esprit. 

La  nef  contient  six  autels,  &  droite,  en  allant  de  la  porte  à 
l'autel,  celui  de  Notre-Dame  de  la  Lettre,  en  grande  dévotion 
dans  le  pays,  celui  du  Crucifix  et  celui  de  St-Léonard  de  Port- 
Maurice  :  à  gauche  en  s'avançant  dans  le  même  sens,  ceux  de 
St-Roch,  de  St-Françoîs  et  de  St-,Ioseph.  Au  maitre-antel 
l'image  ancienne  de  Ste  Marie  Drapéris. 

Sous  l'autel  de  St-Roch,  en  1876,  on  a  placé  les  reliques  de 
St  Théophile,  envoyées  de  Rome  par  Mgr  Leopoldo,  ancien  curé 
de  la  mission  :  la  cérémonie  a  été  présidée  par  Mgr  Graselli, 
Vie.  apostolique  patriarcal. 

Diverses  inscriptions  ont  été  placées  originairement,  ou  rap- 
portées dans  cette  église  :  nous  allons  donner  celles  qui  peuvent 
avoir  une  certaine  importance  historique. 


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-*  411  — 

Dans  le  cbœnr,  derrière  le  siège  de  l'ofliciant. 

D.O.M.  Inglyto  benepjLCTobi  suo  excelmo  D.  Antonio  Fran- 
cisco lœ  Broonard.  Boh.  Imp.  Ad  Portam  Ottohanam  imteiwun- 
Tio.XXII  JUNn  1769  aetat.  anno  ltv  hic  condito  patres  hujds 

ECCLESIAE  RIF.  S.  FRANCÛSO  POSUERE  ANNO  1772. 

Sur  la  muraille  de  droite,  entre  les  autels  latéraux  : 
I>.  O.  M.  S.  V.  Pns  Pétri  Phil.  L.B.  ab  Herbert  Rathkeal.  M. 
Rom.  Caes.  aug.  ab  intimis  consilUs.  ac  lcstr.  febe  V  ad  Otto- 

UANAM  POHTAM  DOÏÏINUNTIUS.  OUM  IN  GONQRESSU  PACaS  FeSCHIN. 
OPERAI  SUAM  EQHEaiO  ABBIBUTT.  POSTEA  IPSE  LEGATUS  SiSTOVn 
BELLON  CUM  TURCIS  HÀDD  OMNINO  MIRUM  IN  MODUM  C0MP03UIT.  FRAM- 
MATA  PIRAT.  ARROOANTIA  PONT.  EuX.  NAVœUS  AUSTRUaS  APERIHT... 
ObUT  VII  KAL  MART.  ANNO  A  ChRIST.  NATIVITATE  1802. 

Plus  loin  : 

D.  0.  M.  Hic  jacet  illcstriss.  ac  revebendiss.  DD.  Joannes 
Bapta  Bavestrelli  ouh  vicarius  Suyrnensis  de  iqc  episcopcs 
Chie.\sis.  tandem  AJtcioBPiSGOPUs  Heracleae  et  vicarius  patriah- 
CAU8  Constantinopoleos,...  Obdtdiexx  aprilis.  aetatis  annordh 

66  REPARATAE  SALDTIS  1777. 

Plus  loin,  sur  la  même  muraille  la  pierre  précédemment  pla^ 
cée  dans  le  chœur  en  souvenir  des  services  rendus  à  l'église  par 
rinternonce  de  Brognard. 

Ensuite  celle  qui  fut  consacrée  à  la  mémoire  du  Baron  Casi- 
mir de  Hiibsch,  ministre  de  Danemark,  décédé  le  29  mars  1865. 

A  gauche,  entre  le  deuxième  et  le  troisième  autels  : 

Ci-GiT  Adélaïde  Sophie  Joséphine  Lauotte  Cornisset  épouse 
DE  Joseph  Marie  Jouannin  premier  drooman  de  l'ambassade  de 

RtANCEDÉCÉDÉE  LE  V  AVRIL  1823. 

Sur  le  pilier  de  la  petite  nef  de  gauche  : 

D.  0.  M.  Praeclaho  viro  Ignatio  Maria  de  Cobral  et  Aguirre 

HiSPAN.  REGIS  A  GONSILnS  INTIMIS  AD  REGES  DaN.  ET  SUBT.  KBPO- 
BUCASQUE  BaTAVAS  et  VeNET.  ET  P09TREM0  AD  PORTAM  OtTOM. 
L£0.  EXTRAORDINARIUS  ET  CONJG.  AnNAB  JuUANAE  ViCTOR.  DbWOL- 
LIN  BARONISSAE  DE  LeVEN  POSUTT  A.  S.  1805.  OBIERUNT  1804. 
Vn  ID.  MAD. 


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—  412  — 

Derrière  la  seconde  colonne  de  gauche  on  lit  l'inscription 
suivante,  remplaçant  celle  qui  fut  transportée  antérieurement 
des  Grand^Champs,  et  placée  sous  la  porte  extérieure  de 
l'église. 

Pétri  Bipttstae  Maubi.  Minoris  Rif.  Cabthaginensis  archi- 
episcopi  vicarir  apostolici  gonstannnopoutani.  vita  functi  xi 
nov.  mdgcxxx  qneres  e  sepulchro  commcni  hug  translat. 

AN.    1860. 

En  entrant  dan^  l'église  par  la  grand'porte,  on  voit  sur  la 
colonne  de  droite  l'inscription  suivante,  rappelant  la  visite 
faite,  en  1869,  par  l'empereur  François-Joseph  I,  d'Autriche,  à 
Ste-Marie,  où  il  a  entendu  la  messe,  célébrée  pontiQcalement, 
par  Mgr  Pluym,  vie.  apostolique  patriarcal. 

QUAM 

D.  0.  M. 

NrMI>rB  SL'O  COMPLEVIT  AËDEM  HAXC  S-^TJIAM  huic  e  proemines- 
TIOHI  aUGQESTU  M.A.rESTATE  SUA  ADFUI.SIT.  ImP,  Rex.  FRANCaSCUS  Jo- 

SETHua  I,  AusTRiACUs  Hljngarigus  Plus  Félix  Aucustcs.  Fausto 

ILLI  LUSTRAU  ADSPERSIONE  OMINANTE  ET  AD  ARAM  FAGIENTE  AnTONIO 

JosEPHo  Pluym  apostolicae  sedis  vice  sacro  lbgato  Coloniaf. 

AUQ.  PREQOËtmSSIMIS  0RDINIBU3  SUSPICIENTIBUS  ADCLAMANTIBUS.  III 
KAL.  NOVEM.  M  D  CGC  LXIX  HTMUS  LOCI  MODERATORES  NE  TAM 
AUSPIGATI  SIXQULARISQUE  EVENTUS  MEMORIA  EXCIDERET  OPTIMO  PRIN- 

ciPi  iiTULUM  posn'ju-:. 

Les  travaux  de  restauration  qui  ont  fait  de  Ste-Marie,  pour 
ainsi  dire,  une  nouvelle  église,  étant  terminés,  la  bénédiction  so- 
lennelle en  a  été  faite  le  6  décembre  1874,  par  le  R,  P.  Théo- 
phile préfet  apostolique,  auquel  M.  l'abbé  Testa,  vicaire  général, 
a  voulu  laisser  la  satisfaction  d'accomplir  lui-même  cet  acte. 
La  cérémonie  a  eu  poar  témoins  toutes  les  autorités  ecclésias- 
tiques de  CP.  et  les  membres  de  l'ambassade  d'Autriche-Hon- 
grie. L'inauguration  a  eu  lieu  le  8  décembre,  jour  de  l'Imma- 
culée Conception,  fête  patronale  de  l'église. 

Sur  la  colonne  de  gauche,  à  l'entrée  de  l'église,  on  Ht  l'ins- 
cription suivante,  qui  consacre  le  souvenir  de  cette  importante 
restauration. 


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—  413  — 

TEMPLUM.DEIPAH4E.DIGA.TUM.0LIM.ANaUSTO.L0C0.SOL0.INAEQi;ALI. 
TEMPORIBUS.SOSPiaOSIS.E.POXDAMENTIS.lNFELICl.SUCCESSUjERECnnif. 
XOVlSQnE.IN,DIES.ADGBSSIONIBtJS.DËFOHMATUM.NUNC.PURGATA.VErDS- 
TATE.LUGB.CONVEînBNTIBUS.IXVECrrA.FORNlCE.PARIETIBUSQUE.AFFABRE. 
VERraCDLATIS.  ADMODUM.  R.  P.ThEOPIQLUS.  A,  CaSTINETANO.  DITIONE. 
APOSTOLICA.  PRAEFECTtlS.  PIOBOM.  AERE.  SUBLEVATUS.  LUDOVICO. 
SEEPËLDËR.ARCHITEGrO.OPERlBUS.PERFICrUNDIS.paABPOSrrO.  IN  DECEN- 
TIOREU  FORMAM.  REDEQIT.  SOLEMNl.  POMPA.INAUGDRAVIT.  DIE.  ImMACL- 

LAT0.C0NCEPTUI.VIRGINIS.8AGB0.  VIIIdecembms  m  D  CCGL  XX IV. 

A.  gaucbe,  de  niveau  avec  la  terrasse  qui  conduit  à  l'orgue, 
on  a  construit  une  assez  grande  chapelle  où  le  service  paroissial 
a  été  accompli  pendant  la  durée  des  travaux.  Elle  est  dédiée  à 
St  Pierre  et  sert  maintenant  à  diverses  réunions. 

Cette  église  de  Ste-Marie  est  restée  l'église  nationale  des  su- 
jets de  l'empereur  d'Autriche-Hongrie.  L'ambassadeur  y  a  une 
tribnne  réservée;  et  c'est  là  que  l'on  célèbre  les  fêtes  natio- 
nales, accompagnées  des  prières  pour  le  chef  de  l'État. 

Les  Frères  Mineurs  Réformés  y  sont  au  nombre  de  dix 
prêtres  et  trois  frères  lais,  sous  le  gouvernement  d'un  supérieur 
qui  a  le  titre  de  Préfet  apostolique.  Il  est  nommé  par  la  S.  Con- 
grégation, ad  beneplacitum  ■  autrefois  il  ne  l'était  que  pour 
quatre  ans.  La  mission  dont  il  est  chargé  comprend  avec  Ste- 
Marie,  les  stations  de  Prinkipo,  Smyrne,  Tincs  (deux  maisons) 
Mételino,  Magnésie,  et  Rhodi  ;  les  religieux  y  sont  envoyés  par 
les  supérieurs  généraux  de  l'Ordre  et  viennent  de  plusieurs 
provinces.  Plusieurs  sont  originaires  du  pays.  On  exerce  le 
ministère  surtout  en  grec,  en  italien  et  en  français. 

ŒUVRES  DE  LA  PAROISSE. 

\°  Ecoles.  Les  religieux  ont  eu,  de  tout  temps,  une  école  atte- 
nante à  leur  église,  et  destinée  à  donner  aux  enfonts  l'instruction 
religieuse  et  élémentaire,  en  même  temps  qu'à  assurer  le  ser- 
vice de  l'église.  La  langue  de  l'enseignement  est  l'Italien.  Elle 
est  tenue  par  un  Père  et  compte  trente  élèves. 

Pour  les  filles,  les  religieux  ont  établi  sur  leur  territoire  une 
communauté  de  Sœurs  Franciscaines  dont  la  maison-mère  est  à 


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—  414  — 

Getnona  près  d'Udine,  en  Italie.  Us  y  donnent  l'instruction  re- 
ligieuse et  les  secours  spirituels.  Nous  en  parlerons  en  détail 
dans  un  chapitre  suivant. 

2"  Associations.  Confréries.  Le  Tiers-Ordre  séculier  de 
St-Francois  est  florissant  dans  la  paroisse  :  il  compte  vingt 
hommes  et  deux  cents  femmes.  Les  réunions  de  chaque  mois 
sont  très  exactement  suivies. 

Les  confréries  sont  celles  de  Ste-Anne  de  St-Jean-Baptiste  et 
dn  Sacré-Cœur. 

1°  La  confrérie  de  Ste-Anne  a  été  transférée  de  St-Benolt  à 
Ste-Marie.  Nous  en  parlons  ci-dessous  au  ch.  VI. 

2°  La  confirériedu  Sacré-Cœur  de  Jésus  a  été  canoniquement 
érigée  par  décret  du  13  juin  1815.  Elle  compte  de  nomhreuï 
membres. 

3°  Paroisse  St-Pactfique,  de  Prinhipo. 

Depuis  qu'une  partie  de  la  population  latine  a  pris  l'habitude 
d'aller  passer  l'été  aux  Iles  des  Princes,  il  devenait  nécessaire 
de  lui  assurer  les  secours  religieux.  Et  quand  plusieurs  familles 
s'y  fixèrent  tout  à  fait  il  fallut  y  laisser  un  prêtre  à  demeure. 
C'était  une  mission  indispensable. 

Les  Pères  Dominicains  en  furent  d'abord  chargés,  mais  lors- 
que k  maison  qu'ils  y  avaient  fut  vendue,  ils  abandonnèrent  en 
même  temps  la  mission  (1844).  Le  Vicaire  patriarcal  y  envoya 
alors  un  prêtre  séculier  qui  y  resta  quelques  années.  Enfin  le 
8  février  1860,  Mgr  Brunoni  y  érigea  une  paroisse  et  la  confia 
aux  FF.  MM.  Riformati. 

L'église,  consacrée  à  St  Pacifique  de  S.  Severino,  un  grand 
saint  de  l'Ordre  des  FF.  MM.  de  l'Observance,  fut  bâtie  par  les 
soins  d'un  généreux  bienfaiteur,  sur  un  firman  obtenu  par  l'am- 
bassade de  France  Rebi-akher  1279=1802.  Elle  a  été  bénite  par 
Mgr  Rotelli,  Vie.  apostolique  patriarcal,  le  26  septembre  1866. 

Quoique  la  juridiction  de  cette  paroisse  se  borne  à  la  grande 
ile,  le  curé  est  tenu  cependant  d'assister  spirituellement  les 
Latins  des  autres  lies.  Deux  Pères  Riformati  y  consacrent  leurs 
soins.  La  population  fixe  est  peu  nombreuse,  environ  cent 
vingt  Âmes. 


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ŒCVRES  DE  L\  PAROISSE. 


Le  R.  P.  Préfet  a  établi  dans  cette  lie  une  école  de  filles  tenue 
par  Ie8  Sœurs  Franciscaines  deGemona.  Elles  ont  quatre-vingts 
élèves.  Nous  en  parlerons  au  chapitre  des  écoles. 

Associations  et  confréries.  Le  Tiers-Ordre  de  St-François. 


§  IV. 
Paroisses  des  FF.  MM.  Capucins. 

1°  St-Louts  de  Péra. 

1&  révolution  française  avait  supprimé  les  Ordres  religieux 
et  fermé  les  couvents.  Il  était  donc  impossible  aux  mission- 
naires du  Levant  d'attendre  des  secours  de  la  mère-patrie  ;  il 
arriva  même  que  plusieurs  religieux,  dans  le  commencement 
surtout,  attires  par  je  ne  sais  quelles  idées,  demandèrent  à 
rentrer  en  France.  Ce  fut  pour  toutes  les  missions  une  très 
rude  épreuve. 

Il  eu  résulta  d'abord  une  transformation  dans  le  régime  de  la 
Mission  en  Grèce.  Elle  avait  été  gouvernée  depuis  son  origine 
par  un  Custode,  diïpendant  du  P.  Provincial  de  Paris,  qui  avait 
toute  autorité  pour  envoyer  ou  rappeler  ses  sujets,  d'après  les 
concessions  du  St-Siège.  Quand  la  Province  de  Paris  fut  dis- 
soute, il  fallut  donner  à  la  mission  une  autre  organisation,  et 
la  soumettre  directement  à  la  S.  Congrégation  et  aux  supérieurs 
généraux  de  l'Ordre.  Le  P.  Hubert  d'Amiens,  Custode,  fut  nom- 
mé Préfet  apostolique,  et  conserva  sur  la  mission  la  même  au- 
torité. Mais  ses  supérieurs  français  n'étaient  plus  là  pour  le 
fournir  des  sujets  dont  il  avait  besoin.  Les  supérieurs  généraux 
ne  manquaient  pas  de  bonne  volonté,  mais  l'Europe  entière 
était  bouleversée,  et  les  Ordres  religieux  dans  un  désarroi  com- 
plet. Il  fallait  donc  attendre  longtemps  les  remplaçants  de  ceux 
qui  mouraient,  et  ceux  qu'on  lui  envoyait  étaient  pour  la  plu- 


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—  re- 
part italiens.  C'est  ainsi  que  la  mission,  de  parisienne  qu'elle 
était,  devint  en  fait  italienne.  Le  P.  Hubert  resta  cependant 
Préfet  de  là  mission  et  supérieur  de  St-Louis  jusqu'à  sa  mort, 
arrivée  le  4  février  1813. 

Il  fut  remplacé  par  le  R.  P.  Valentin  de  Terni  et  d'autres  sans 
interruption  jusqu'en  1881.  Mais  comme  d'un  côté  les  œuvres 
françaises  de  la  mission  étaient  toutes  emportées  par  le  courant 
révolutionnaire,  comme  de  l'autre  les  religieux  étaient  peu  nom- 
breux, ils  se  bornèrent  bientôt  au  service  de  l'ambassade  et  au 
petit  ministère  qu'ils  pouvaient  exercer  dans  leur  église.  Ils 
eurent  cependant  une  petite  école,  dans  laquelle  ils  réunirent 
une  trentaine  d'enfants,  auxquels  ils  donnaient  l'instruction 
élémentaire,  et  qui  leur  servaient  dans  les  fonctions  du  culte 
religieux.  La  mission  de  St-Louis  marchait  donc  doucement, 
comme  du  reste  toutes  les  autres  :  jusque  vers  1840  le  catholi- 
cisme était  comme  endormi  dans  Constantinople. 

Or  en  1831  un  grand  incendie  dévora  une  grande  partie  de 
Fera,  entre  autres  le  palais  de  France,  St-Antoine  et  St-Louis. 
II  respecta  l'église  de  ate-Marie.  I^es  PP.  Capucins  se  réfu- 
gièrent dans  une  partie  du  couvent  qui  avait  été  épargné  par  les 
flammes,  et  y  ouvrirent  une  chapelle  provisoire,  où  ils  conti- 
nuèrent le  ministère. 

Lorsqu'ils  voulurent  reconstruire  leur  église,  sur  les  bases 
mêmes  de  l'ancienne,  ils  rencontrèrent  des  difficultés,  et  une 
opposition  formelle  de  la  part  de  l'ambassade  française,  qui 
leur  contestait  le  droit  de  propriété  sur  leur  propre  couvent, 
ou  du  moins  sur  une  partie  de  leur  terrain.  Après  de  longues 
négociations  leur  droit  fut  reconnu  par  le  Conseil  dÉ'tat,  la 
France  s'engagea  même  à  reconstruire  l'église,  en  même  temps 
que  le  palais  de  l'ambassade,  mais  à  la  condition  que  les  Ca- 
pucins céderaient  une  partie  de  leur  terrain  pour  y  faire  les  dé- 
pendances de  l'ambassade.  Ils  avaient  dû  en  céder  déjà  un  peu 
pour  la  construction  de  la  cliancellerie,  et  s'étaient  privés  d'une 
sortie  du  côté  de  Galata;  ils  se  trouvaient  donc  ainsi  fort  res- 
serres; mais  enfin,  en  1846,  leur  église  était  presque  achevée. 
Quoique  le  gouvernement  français  eût  fait  les  principaux  frais, 
les  Capucins  y  avaient  néanmoins  contribué  pour  une  somme 
notable. 

Elle  fut  bénite  par  le  R.  P.  Mauro  da  Léonessa,  alors  Préfet, 


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—  417  — 

le  1"  mai  1847,  ea  présence  de  M.  de  BourqueDay,  ambassa- 
deur, et  d'une  nombreuse  assistance  :  elle  n'était  pas  encore 
complètement  achevée.  On  n'y  a  fait  depuis  d'autre  addition 
que  celle  du  clocher,  élevé  par  les  soins  des  Pères  et  à  leurs  frais. 

En  1882,  lorsque  les  PP.  Capucins  français  eurent  repris  pos- 
session de  leur  ancienne  mission,  ils  trouv^ent  que  l'église 
était  dans  un  grand  délabrement  et  soogèrent  dès  lors  à  une 
restauration  complet*,  c'est-à-dire  à  la  remettre  dans  son  état 
primitif.  Le  P.  Provincial  de  Paris,  Préfet  de  la  mission,  adressa 
□ne  demande  au  gouvernement  français.  Quelques  discussions 
s'élevèrent  encore  au  sujet  de  la  propriété  de  l'église,  mais  elles 
furent  enfin  résolues  en  faveur  des  religieux,  et  le  ministre  des 
affaires  étrangères  accorda  aux  Capucins  une  somme  de  13,500 
francs,  comme  il  avait  été  demandé,  tout  en  reconnaissant  à 
nouveau  les  droits  de  la  Mission.  Les  réparations  furent  faites 
avec  intelligence  et  l'église  reprit  exactement  la  physionomie 
-qu'elle  avait  en  1647. 

Cette  église,  de  médiocre  grandeur,  s'élève  sur  les  bases  de 
l'ancienne  et  dans  les  mêmes  proportions  :  elle  est  agréable  et 
de  bon  goût.  A  la  difTérence  des  autres  églises  de  Péra,  qui  sont 
dans  le  style  byzantin  ou  jésuite,  elle  affecte  plutôt  la  forme  des 
basiliques  romaines. 

La  muraille  extérieure  du  cdté  du  palais  de  l'ambassade  est 
ornée  de  sculptures,  pour  s'harmoniser  avec  les  antres  cons- 
tructions. Ou  y  lit  sur  une  plaque  de  marbre  l'inscription  sui- 
vante : 

D.  0.  M.  SCB  INV.  DIVI  LUDOVia  f^NCXE  REGIS  ANNO  Do- 
MIM  1846,  REGNANTE  LUDOVICO  pHUJPPO  I"  AD  HtEPCLGIDAM  PoB- 
TAM  LBGATO  F.  A.  BARO>JE  DE  BOLTIQUENEY,  -EDIFIGAVIT  P.  L.  LaO- 
HECISQUE,  PARISIENSIS. 

Sur  la  façade  extérieure,  donnant  sur  la  terrasse  réservée,  on 
lit,  dans  le  triangle  symbolique,  léhovak;  et  au-dessous  :  D.  0. 
M.  SOB  Djv.  Mvi  LuDovia  Frangine  régis  an.s-o  D.  1846. 

L'intérieur  est  très  simple  :  une  seule  nef  assez  large,  termi- 
née par  une  abside  carrée,  beaucoup  moins  large,  et  deux  sortes 
d'absidioles  dans  lesquelles  on  a  mis  des  autels.  Le  maltre- 
autel  est  dédié  à  St  Louis,  celui  du  nord  à  la  T.  St«  Vierge,  ce- 
lui du  midi  à  St  Félix  de  Cantalice. 


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—  418  — 

L'église  n'est  pas  voûtée,  piaia  couverte  d'une  double  toiture 
avec  charpente  apparente,  gracieusement  ornée,  dans  le  même 
style  que  les  murailles  et  les  colonnes.  Au  fond  du  cliœur,  des 
peintures  représentent  en  haut  le  Père  Éternel,  à  sa  droite  le 
Sauveur  du  monde,  à  sa  gauche  l'Annonciation  de  N.-D.,  au- 
dessona  St  Louis,  patron  de  l'église.  De  chaque  côté  de  l'autel 
sont  deux  trihunes  destinées,  celle  du  nord  à  l'ambassadenr, 
celle  du  sud  au  personnel  de  l'ambassade. 

Sur  la  ii-ise  autour  du  chœur,  court  l'inscription  suivante  : 

Domine  salvam  fac  remp.  D.  0.  M.  sub  inv.  divi  Ludovict. 
An.  Pom.  m  D  CGC  XLVII.  edifica. 

Dana  la  nef  au-dessus  des  autels  les  noms  des  saints  aux- 
quels ils  sont  consacrés.  Sur  la  frise,  au-dessus  des  arcades 
les  commandements  de  Dieu  en  langue  française.  Dans  les 
angles  formés  par  la  frise  et  la  voûte,  aux  quatre  coins  de 
l'église,  l'image  des  évangélistes.  Au  fond,  en  face  dos  autels, 
des  invocations  à  8t  François  d'Assise  et  à  St  Joseph  de  Léo- 
nîsse. 

Le  mattre-autel  était  en  bois  peint  ;  mais  par  les  soins  du 
R.  P.  Pierre  de  Settignano,  il  a  été  remplacé  par  un  autre  en 
marbre,  à  l'aide  d'un  subside  accordé  à  la  mission  par  la  France, 
durant  l'ambassade  de  M,  de  Thouvenel. 

Sous  la  tribune  à  droite  en  entrant,  se  trouve  la  sépulture  des 
religieux,  qui  avaient  le  droit  d'y  être  inhumés,  par  une  con- 
cession souveraine,  valable  pour  les  religieux  et  les  ambassa- 
deurs. Elle  est  recouverte  de  l'ancienne  pierre  portant  cette  ins- 
cription : 

Séries  Cu-puccinorum  sus  hoc.  tumulo  repultorum  ajb  institu- 
TioNE  n,LORmi  IN  Gr-Ccia  missionum.  Anno  1625. 
1648,  P.  RoBËRTir.s  Bellovagex. 
1648.  P.  Laurentius  Silvanec, 
1648.  P.  HoNORATus  Parisiënsis.  peste  corrept. 
1655.  P.  JoANNE-s  FRANascus  Antissidor.  peste  corrept. 

1661.    F.  COSMAS  SiLVANECT.  LAICUS. 

1665.  p.  Jacobus  PARisiENSia  custos. 
1671.  p.  Thomas  Parisiënsis  CUSTOS. 
1681.   P.  FRANascus  MONTROL.  peste  CORREPTUS. 


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—  M9  — 

1689.  P.  Léo  Parisinus  peste  gorrept. 

1705.  P.  Feiancisciis  Parisinus  peste  corrept. 

1713.  P.  HiEROTHECs  Balserik.  peste  corrept. 

1728.  P.  LuDovicus  Franciscus  Parisinus  superior  Sti  Geor- 

Gn  TESTE  corrept. 

1723.  F.  j£!an)ius  Vennetus  iaicus  peste  corrept. 
1739.  P.  Carolus  DuiiENS.  peste  corrept. 

Sur  les  murailles  on  a  disposé  des  plaques  de  marbre  blanc 
qui  portent  le  souvenir  de  personnes  qui  ont  été  inhumées  dans 
l'église,  ou  qui  se  sont  intéressées  à  son  avantage. 

Au  nord,  en  partant  de  l'autel  de  la  T.  Ste  Vierge, 

1*  Le  nom  de  Mme  Laurécisqne,  femme  de  l'architecte  de 
l'église. 

8'  Un  peu  plus  loin  celui  de  son  fils  mort  presque  en  même 
temps  que  sa  mère,  en  1847 , 

2°  Entre  les  deux  celle  de  Mgr  Godefroy  de  la  Porte,  que  nous 
avons  rapportée  ailleurs. 

3°  M.  Joseph  Vattier  de  Boameville,  drogman,  mort  en  1854. 

De  l'autre  cAté  nous  relevons  les  noms  de 

1*  M.  Jules  deCadalvône,  mort  en  1852. 

2°  De  SitwDd  de  St-Fériol,  attaché  d'ambassade,  mort  en 
1847. 

3°  Nous  citons  tout  entière  l'inscription  qui  regarde  M.  Dan- 
tan,  car  elle  offre  un  intérêt  historique. 

Ici  REPOSE 

Michel  Ange  Dantan, 

PREMIER  interprète  DE  l' AMBASSADE  DE  FRANCE 

PRÈS  LA  Porte  Ottomane, 

NÉ  LE  20  NOVBIffîRE   1763.   DÉCËC^  I£  2  JUIN  1813 

après  AVOra  servi  son  pats  A.VEC  LE  ZÈLE  LE  PLUS  DÉVOUÉ 

PENDANT  TRENTE  ANS 

DONT  TROIS  PASSÉS  EN  CAPTIVnÉ 

AU  CHATEAU  DBS  SePT-ToURS. 

il  emporta  l£s  justes  rëobets  de  sa  fauixe, 

de  son  gouvernement  et  de  ses  alos. 

Ses  enfants  ont  fait  graver  cette  inscription  en  homulace 

TX  I£UR  BESPECn  POUR  SA  MÉMOIRE. 


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4"  Jacques  Fonton,  mort  en  1832. 

5°  Nicolas  Jarosziaski  secrétaire,  mort  en  1890. 

6"  M.  Fourchon  secrétaire,  mort  en  1879. 

T  Comte  de  Vaujany,  baron  de  Châteauneuf,  mort  en  1522. 
Son  neveu  capucin  consacre  son  souvenir. 

8"  Enfin  une  inscription  que  nous  voulons  reproduire  tout 
entière,  car  elle  est  consacrée  à  l'auteur  de  ce  livre. 

In  manus  tlas,  DoMmE,  commendo  kpiritum  mbum,  Ps.  30. 

A.  lA  uÉMoms 

DE  François  Alphonse  Beun, 

CONSUL  GÉNÉRAL,   SECEÉTAIBE  INTERPRÈTE 

PRÈS    l'ambassade  DE    FhANCE   A    CONSTANTINOPLE 

OFFICIER  DE  LA  LÉGION  d'hONNEIT» 

DÉCORÉ  DE   PLUSIEURS    ORDRES    ÉTRANGERS 

DÉCÉDÉ  LE  16  AVRIL  1877  DAJIS  SA  60'  ANNÉE. 

Sa  VIE  A  ÉTÉ  NOBLEIŒNT  REUPUE 

PAR    LES   SERVICES  RENDUS   A  l'ÉgLISE  CATHOLIQUE, 

A  LA  France,  a  l'Oribnt  et  a  la  science. 
Il  laisse  des  regrets  ineffaçables 

au  sein  de  sa  famille  et  de  ses  noheibeux  amis. 
Sa  veuve  désolée,  selon  le  vœu  de  son  uari 

A  PAIT  GBAVHl  GETTE  PIERRE 
AUPRÈS  DES  CENDRES  DE  SON  PLUS  JEUNE  FILS. 

Devant  la  porte  d'entrée,  on  voit  les  deux  pierres  funéraires 
suivantes,  qui,  lors  de  la  pose  du  maître-autel  en  marbre,  ont 
été  transportées  du  chœur  en  cet  endroit. 

D.  0.  M.  la  REPOSE  AUPRÈS  DE  SES  BONS  PARENTS,  THOMAS 
ROFFm,  ÉCUTER,  MEMBRE  DE  LA  LÉQION  d'honNEUB  ET  CHEVALIER  DU 

Saint-Sépulcre,  en  son  vivant  consul  de  S.  M.  T.  G.  a  Saint- 
Jean  d'Acre'  et  a  Barouth;  décédé  a  CP.  le  96  janvier  1825, 
A  l'âge  de  49  ANS.  Il  n'a  survécu  qce  d'une  année  a  son  bespbc- 

TABLE  père'.  —  J.  M.  JOUiNNDJ  ■',  EXÉCUTEUR  DE  SES  VOLONTÉS,  k 

'  Cf.  no»  TraiUt  et  CapiCulationt  de  la  Fraiice  en  Orient. 

>  Ruffin,  aaci«D  secrétaire-lnterprdte  de  l'ambassade,  consul-général  d« 
France,  et  plusieurs  fois  chargé  d'affaires,  notamment  durant  l'expédition 
d'Egypte. 

>  Premier  secrétaire-interprète  du  roi,  à  Paris,  y  déoédé  en  1843, 


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pait  poseh  cette  pierre  de  souvenir,  au  nom  de  sa  sœur  unique 
Rose  Cécile  de  Lesseps  ki  de  ses  nièces.  1835. 

D.  0.  M.  Hic  jacbt  Pefrus  Dubouchet  d'Orgeval  de  Saint- 
André,  BEâlARUH  ORDINUM  EQUES,  BEOIS  CHRISTIANIS3IHI  CONSUL 
CXDONEU  MIS30S,  LBQATUS  IN  PiCTAVIA  DUCIS  LUDOVId  DE  La  RO- 
CHBJAGQUELBIN,  UM  PRO  DeO,  RëGE  ET  pATRIA  FOHTITER  MILITAVIT. 
LUGDUNI  NATU3, 19  DIE  JULII  1788,  CoNSTANTINOPOLl  OMn  DIE  6  OG- 
TOBRIS  1825. 

En  1881,  la  mission  de  St-Louis  sabit  un  grand  changement. 
Nous  avons  vu  que,  fondée  par  le  Père  Joseph  du  Tremblay, 
elle  avait  été  confiée  à  la  Province  des  Capucins  de  Paris,  et 
qu'ensuite,  par  le  fait  des  circonstances,  elle  était  devenue  une 
mission  italienne.  Plusieurs  fois  les  ambassadeurs  s'en  étaient 
plaint  et  avaient  réclamé  le  retour  à  l'ancien  état  de  choses,  sur- 
tout depuis  qu'ils  savaient  que  l'Ordre  s'était  rétabli  à  Paris. 
Cette  demande,  fort  légitime,  n'avait  pu  être  exaucée  pendant 
des  années  ;  mais  enfin  en  1880  le  P.  Arsène,  Provincial  des 
Capucins  de  Paris,  voyant  ses  religieux  expulsés  de  leurs  cou- 
vents, demanda  et  obtint  des  Supérieurs  et  du  St-Siège,  avec 
l'assentiment  de  la  France,  la  concession  de  cette  maison  et  le 
retour  à  l'ancien  état  de  choses  :  le  Provincial  de  Paris  devait 
être  chargé  de  pourvoir  aux  besoins  de  la  mission,  en  qualité  de 
Préfet  apostolique. 

Les  religieux  français  prirent  possession  de  leur  ancienne 
maison  le  27  mai  1881  ;  la  nouvelle  communauté,  installée  par 
le  P.  Arsène,  ne  se  composait  que  de  trois  prêtres  et  trois  frères 
lais,  sons  la  conduite  du  R.  P.  Marcel,  vice-préfet. 

Elle  avait  été  accueillie  avec  faveur  par  l'ambassadeur,  et 
par  la  colonie  française,  avec  grande  joie  par  le  Vicaire  aposto- 
lique patriarcal,  Mgr  Vanutelli,  avec  froideur  par  les  autres  com- 
munautés. Un  des  religieux  italiens  avait  demandé  à  rester  avec 
les  français,  mais  il  ne  persista  que  quelques  jours  dans  sa  ré- 
solution et  alla  rejoindre  ses  compatriotes  à  8.  Stéfano. 

Le  premier  soin  des  nouveaux  religieux  fut  d'établir  dans  la 
maison  l'observance  régulière  et  la  récitation  commune  de  l'of- 
fice divin,  avec  les  modifications  que  réclamait  le  petit  nombre 
des  Pères  et  leurs  occupations  multiples.  Le  second  fut  de  res- 
taurer la  maison  et  de  la  rendre  commode  pour  une  comrau- 


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—  422  — 

nautè  régnlière  ;  la  Province  de  Paria  y  consacra  une  somme 
considérable,  mais  on  y  réussit  très  bien. 

Cependant  le  zèle  des  religieux  demandait  an  autre  aliment 
que  le  petit  ministère  que  lui  fournissaient  l'ambassade  et  l'é- 
glise de  St'Louis.  Le  Souverain  Pontife  pressait  alors  tous  les 
piftb'es  de  l'Orient  de  travailler  à  rapprocher  l'Église  orientale 
de  l'Église  romaine  ;  or  le  grand  moyen  étant  l'éducation  des 
enfants  et  surtout  la  formation  d'un  clergé  indigène  vraiment 
instruit  et  h  la  liauteur  de  sa  mission,  les  supérieurs  de  la 
mission,  se  souvenant  que  de  tout  temps  la  maison  de  3t- 
Louis  avait  été  une  maison  d'éducation,  résolurent  de  renouer, 
encore  sous  ce  rapport,  les  anciennes  traditions  au  nouvel  état 
de  choses.  Le  Père  Préfet  obtint  donc  du  St-Siège  un  décret 
autorisant  l'ouverture  d'une  école  qui  serait  consacrée  à  l'édu- 
cation des  jeunes  clercs,  sans  distinction  de  rites.  Ce  décret  est 
daté  du  16  mai  1882.  On  ât  rapidement  les  appropriations  né- 
cessaires et  l'École  (ou  Collège)  apostolique  orientale  de  St- 
Louis  fat  ouverte  dès  le  4  septemlire  1882. 

Les  commencements  furent  dlMciles  et  les  premières  années 
ingrates  ;  mais  peu  à  peu  les  religieux  se  formèrent  à  l'enseigne- 
ment, les  élèves  à  la  discipline  et  l'ordre  s'établit. 

La  Province  de  Paris  fournissait  les  maîtres  ;  les  diocèses  du 
Levant  les  élèves  :  il  fallait  ausKi  les  ressources.  Les  maisons 
construites  dans  l'enceinte  du  couvent  donnaient  quelque  re- 
venu, la  France  quelques  subsides,  la  Propagation  de  la  Foi  ac- 
Gorda  un  secours  et  l'œuvre  marcha.  Elle  ne  tarda  pas  cepen- 
dant à  avoir  une  autre  ressource  :  quelques  parents  demandèrent 
que  leurs  enfants,  bien  que  ne  se  destinant  pas  au  sacerdoce, 
fussent  admis  à  suivre  les  cours  comme  externes.  On  y  consen- 
tit, après  mûre  délibération,  et  le  prix  de  leurs  mois  d'école 
aide  à  entretenir  les  internes,  dont  l'éducation  complète  est  tout 
à  fait  gratuite,  quelle  que  soit  leur  origine. 

Pendant  que  cette  oeuvre  s'organisait,  les  supérieurs  con- 
sentirent, sur  les  demandes  instantes  des  Frères  des  Écoles 
chrétiennes,  à  donner  des  aumôniers  à  leur  grand  collège  de 
Eadi-Eeni.  Cette  aumônerie  amena,  le  11  septembre  1882, 
l'ouverture  d'une  nouvelle  maison  provisoire  dans  l'enclos  des 
Frères.  Les  Pères  devaient  en  même  temps  aider  au  ministère 
ecclésiastique  de  la  paroisse. 


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—  423  — 

Quelques  années  après,  en  1885  et  1886,  le  R.  P.  Marcel  s'oc- 
cupa d'oue  autre  fondation  importante.  Leâ  œuvres  de  charité 
ne  faisaient  pas  défaut  à  CP.,  mais  il  y  manquait  une  commu- 
nauté de  Sœurs  Gardes-malades.  U  forma  un  comité,  et  prépara 
tout  pour  cette  fondation.  II  y  fut  grandement  aidé  par  un  an- 
cien premier  drogman  de  l'ambassade  de  France,  Ministre  plé- 
nipotentiaire, M.  de  Longeville,  qui  fut  jusqu'au  bout  la  cbe- 
Tille  ouvrière  de  ce  comité.  Enfin  les  Sœurs  Franciscaines  de 
-Calais  arrivèrent  à  Constantinople  le  15  octobre  1886.  Elles 
forent  installées  dans  une  petite  maison  de  la  rue  de  la  Cban- 
«eilerie,  qu'elles  ne  tardèrent  pas  beaucoup  à  quitter  pour  s'é- 
tablir dans  une  autre  maison  plus  commode  et  plus  grande, 
rue  Tom-Tom,  qu'elles  ont  fini  par  acheter.  Elles  s'occupent 
en  même  temps  de  la  lingerie,  et  occasionnellement  de  l'in- 
firmerie de  l'école. 

Mais  l'école  prenant  des  développements,  les  supérieurs  réso- 
lurent de  l'agrandir,  an  risque  même  de  se  priver  des  ressoivces 
^e  la  mission  trouvait  dans  la  location  des  maisons  qui  lai 
appartenaient.  Le  R.  P.  Marcel  réunit  toutes  les  ressources  de  la 
Mission,  le  R.  P.  Prosper,  qui  avait  succédé  au  R.  P.  Arsène, 
en  qualité  de  protincial,  accorda  un  secours  considérable  ï  le 
gouvernement  français  vint  à  l'aide  de  l'œuvre,  comme  aussi  la 
Propagation  de  la  Foi.  On  mena  activement  le  travail  et  à  l'au- 
tomne de  1889,  la  nouvelle  maison  fut  ouverte.  C'est  une  re- 
cons^ction  presque  entière  de  l'ancien  couvent.  Elle  offre,  de 
la  cour,  un  aspect  simple  et  sévère  mais  imposant  par  sa 
masse  et  ses  lignes  harmonieuses.  L'intérieur  est  vaste,  bien 
disposé  et  tout  à  fait  accommodé  à  sa  situation.  IjS.  cour  de 
récréation  est  grande  et  agréable. 

Si  la  province  de  Paris  avait  fait  des  sacrifices  pour  la  re- 
construction de  St-Louis,  elle  fut  la  première  à  en  profiter  :  ses 
jeunes  religieux,  obligés  par  la  persécution  de  quitter  le  sol 
français,  y  furent  fraternellement  accueillis,  en  décembre  1889, 
et  y  restèrent  jusqu'en  septembre  1890.  Ils  inaugurèrent  le 
nouveau  chœur,  disposé  au  deuxième  étage  pour  remplacer  le 
-chœur  qu'ils  avaient  auparavant  près  de  l'autel  et  qui  était  de- 
venu trop  petit  pour  le  nombre  des  religieux. 

Dans  les  premiers  mois  de  cette  année  on  acquit  un  vaste  ter- 
rain à  Kadi-keui,  sur  le  bord  de  la  mer,  et  on  y  éleva  aussi  ra- 


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—  424  — 

pidemeot  que  possible  une  grande  maison  pour  abriter  les  jeunes 
religieux  dont  nous  venons  de  parler.  Ils  en  prirent  possession 
en  septembre  i890. 


Œtn-RES  DE  LA.  MISSION  ST-LOUIS. 

1"  Service  de  l'église.  L'église  St-Louis,  dite  autrefois 
f  Paroissiale  et  Royale  i,  dans  tous  les  actes  officiels,  est 
affectée  au  service  de  l'ambassade  française,  mais  elle  reste  ce- 
pendant une  église  publique.  Le  ministère  s'y  fait  en  français. 
On  y  prêche  régulièrement  pendant  l'A  vent,  tous  les  dimandies 
à  la  messe  de  10  heures  ;  pendant  !e  carême,  le  dimanche  et  le 
mardi,  de  plus  une  retraite  de  dames  la  quatrième  semaine  et 
une  retraite  d'hommes  la  cinquième.  On  y  prêche  encore  tous 
les  jours,  le  mois  de  Marie  et  la  neuvaine  de  N.-D.  du  Mont^ 
Carmel  :  et  enfin  les  quarante  heures.  Cette  église  est  très  fré- 
quentée par  la  Colonie  française  ou  parlant  français  :  les  offices 
s'y  font  suivant  les  usages  de  France  et  avec  gravité.  Les  élèves 
de  l'école,  surtout  ceux  du  séminaire,  y  contribuent  de  leur 
mieux.  • 

2°  Service  de  l'ambassade  française.  Les  Capucins  sont 
aujourd'hui,  comme  il  ya  près  de  trois  cents  ans,  les  aumôniers 
de  l'ambassade  française.  Ils  ont  la  juridiction  paroissiale  dans 
toute  l'enceinte  du  palais  de  France  et  de  la  chancellerie.  La 
messe  officielle  est  fixée  A  10  heures,  elle  est  toujours  très  fré- 
quentée. Pendant  l'été,  quand  l'ambassade  va  à  Thérapia,  ou 
va  dire  la  messe,  les  dimanches  et  fêtes,  dans  la  chapelle  du 
palais. 

3°  AumÔnerie  des  Frères  de  Kadî-keui.  Sur  la  demande 
des  Frères  et  avec  le  consentement  du  Vicariat,  la  Province  a 
accepté  l'aumônerie  des  Frères  et  de  leur  collège.  Deux  Pères 
et  un  Frère  lai  sont  occupés  à  cette  œuvre.  Outre  les  instruc- 
tions religieuses  et  les  catéchismes  qu'ils  font  au  collège,  ils  en 
font  aussi  à  l'école  paroissiale.  Ils  remplissent  en  même  temps 
les  fonctions  d'aumôniers  dans  le  pensionnat  des  Dames  de 
Sion. 


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—  425  — 

4°  Aumônerie  de  l'école  de  St-Mîchel.  La  mission  donne 
encore  tous  les  secours  religieux,  messes,  instructions,  confes- 
sions, etc.,  à  l'école  que  les  Frères  ont  fondée  sous  le  patronage 
de  St  Michel,  rue  de  Agha-Hammam.  Le  nombre  des  enfants 
catholiques  y  étant  relativement  plus  considérable,  on  y  trouve 
aussi  plus  de  consolation. 

5°  Aumônerie  des  Sœurs  Franciscaines.  Ces  religieuses 
ayant  été  appelées  par  ta  mission  et  s'occupant  de  i'ècoie  et  de 
la  sacristie,  il  est  juste  qu'on  leur  donne  tous  les  secours  reli- 
gieux dont  elles  ont  besoin.  Un  Père  est  leur  confesseur,  tous  à 
tour  de  rdle  vont  leur  dire  la  messe  chaque  matin.  Elles  ont  des 
pensionnaires  âgées,  et  quelques  orphelines. 

6"  Catéchismes.  Presque  dès  le  commencement,  les  Pères  se 
sont  occupés  de  donner  l'instruction  religieuse,  et  de  faire  le 
catéchisme  aux  enfants  des  deux  sexes  qui  sont  élevés  dans  leurs 
familles  ou  dans  les  écoles  laïques.  Cette  œuvre  a  pris  un  grand 
développement.  Plusieurs  fois  par  semaine  les  enfants  y  viennent 
avec  assiduité  et  plaisir.  Chaque  année,  le  jour  de  l'Ascension, 
on  fait  solennellement  la  première  communion,  comme  en 
France,  Les  élèves  du  séminaire  vont  en  outre  faire  le  caté- 
chisme, plusieurs  fois  la  semaine,  dans  les  classes  externes  des 
Frères —  à  Galata,  au  Taqcim  et  à  Pancaldi. 

7°  Prédications.  Les  Pères,  outre  les  prédications  dont  nous 
avons  parlé,  sont  encore  demandés  souvent  pour  des  occasions 
extraordinaires,  et  surtout  pour  les  retraites  des  communautés 
et  des  associations,  à  Constantinople,  A  Sm\Tne  et  ailleurs. 

8°  Ècole-Sémînaires.  L'œuvre  la  plus  importante  et  la  plus 
caractéristique  de  la  Mission  c'est  incontestablement  l'école  dont 
nous  avons  raconté  le  commencement  et  le  progrès.  Avec  les 
années,  encore  bien  peu  nombreases,  elle  a  atteint  son  complet 
développement.  Elle  comprend  en  ce  moment  deux  sections,  le 
petit  séminaire  ou  collège  proprement  dit,  et  le  grand  séminaire. 
Au  petit  séminaire  on  fait  toutes  les  études  classiques  ordi- 
naires et  les  élèves  y  font  leurs  humanités  complètes.  Plusieurs 
ont  pu  se  présenter  avec  succès  aux  examens  de  France, 


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—  426  — 

Oaelques-uns  ont  été  reçus  avec  honneur  dans  les  écoles  spé- 
ciales. La  discipline  y  est  forte,  quoique  douce  et  paternelle. 
Les  externes,  qui  doivent  toujours  être  moins  nombreux  que  les 
pensionnaires,  arrivent  dés  le  matin  et  suivent  tous  les  exercices, 
comme  les  autres.  Après  leur  repas,  qu'ils  vont  prendre  en 
famille,  ils  rentrent  à  l'école  jusqu'au  soir. 

Au  grand  séminaire  les  élèves  portent  la  soutane  et  font  les 
études  ecclésiastiques  ordinaires.  La  philosophie  dure  un  an,  la 
théologie  quatre  ans.  On  leur  enseigne  en  même  temps  l'histoire 
ecclésiastique,  l'écriture  sainte  et  le  droit  canonique.  On  le^ 
forme  aux  cérémonies,  au  chant  grégorien  et  à  la  musique. 
Qaelques-uns  sont  déjà  dans  les  Ordres,  les  autres  sont  tous 
clercs. 

Un  des  premiers  élèves  de  l'école,  natif  de  Smyrne  a  été 
ordonné  prêtre  par  son  archevêque,  &  St^Louis  ;  un  autre  entré 
dans  l'Ordre  des  Capucins,  a  été  ordonné  par  le  Vicaire  pa- 
triarcal. 

Les  élèves  du  grand  séminaire  sont  au  nombre  de  douze  : 
Latins  de  divers  diocèses,  sept  ;  Arméniens,  trois  ;  Géorgiens, 
deux. 

Les  élèves  internes  du  petit  séminaire  sont  choisis  par  les 
évëques  des  divers  diocèses  du  Levant.  On  avait  d'abord  admis 
ceux  qui  se  présentaient  d'eux-mêmes,  sans  les  éprouver  suifi- 
samraent,  mais  le  recrutement  fait  de  cette  façon  était  fort  dé- 
fectueux et  les  déchets  considérables.  La  règle  invariable  au- 
jourd'hui est  de  ne  les  admettre  que  sur  la  présentation  des 
évëques  du  Levant,  et  on  les  instruit  pour  eux  spécialement.  On 
les  prie  de  bien  s'assurer  avant  de  les  envoyer,  s'ils  ont  une 
véritable  vocation.  Ils  sont  au  nombre  de  trente-quatre  dont 
vingt-deux  Latins,  neuf  Arméniens,  trois  Géorgiens. 

L^  externes  appartenant  à  de  bonnes  familles  de  Péra  sont 
au  nombre  de  vingl^trois.  » 

9°  Associations  et  confréries.  Confrérie  de  JV,-D.  du 
Mont-Carmel.  Depuis  l'année  1731 ,  la  confrérie  est  établie  dans 
cette  église.  La  solennité  de  la  fêle,  qui  se  célèbre  le  16  juillet, 
«st  précédée  par  une  neuvaine,  fort  suivie.  Elle  comprend  un 
grand  nombre  de  membres  ;  mais  elle  n'a  pas  de  réunions  men- 
suelles. 


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~  437  — 

Les  religieux  de  la  mîssioD  appartiennent  tons  à  la  province 
de  Paris,  comme  autrefois.  Bb  sont  au  nombre  de  onze  prêtres, 
dont  huit  employés  à  St-Louis  et  trois  &  Kadi-keui,  et  de  quatre 
Frères  lais,  dont  trois  à  St'Lonis. 

3*  Paroisse  de  St-Stefano. 

Cette  paroisse  a  été  créée  par  Mgr  Brunoni  par  un  décret  du 
16  décembre  iS63.  L'église  a  été  bâtie  sur  un  ûrman  impérial, 
émané  à  la  demande  de  l'ambassade  de  France,  Chaban,  1281= 
1865.  Elle  a  été  bénite  et  inaugurée,  le  16  juin  1867,  par  le 
R.  F.  Pierre  de  Settignano,  préfet  de  la  mission. 

Cette  paroisse  appartient  aux  FF.  MM.  Capucins  qui  ont  fait 
tous  les  frais  de  sa  construction.  Depuis  que  les  Capucins  de  la 
province  de  Paris  ont  pris  possession  de  leur  ancienne  mission 
de  St-Lonis,  cette  station  dépend  de  la  mission  de  Smyrne.  Dans 
ces  dernières  années,  le  Bév»'  Père  Général  de  l'Ordre  y  a 
établi  nn  noviciat  international  pour  les  missions  de  l'Ordre. 

Les  Religieux  sont  au  nombre  de  cinq  prêtres,  cinq  clercs  et 
quatre  frères  lais. 


ŒUVRES  DE  LA.  PAROISSE. 

Les  Pères  tiennent  une  petite  école  dans  un  des  bâtiments 
attenant  k  l'église.  Ils  doivent  inaugurer  bientôt  une  école  de 
filles  tenue  par  des  religieuses. 

C'est  dans  l'église  grecque  de  ce  villagequeles  croisés  Franco- 
Vénitiens  se  réunirent  en  arrivant  à  CF.  et  délibérèrent  sur  la 
manière  dont  ils  opéreraient  leur  débarquement,  c  Alors  descen- 
dirent à  terre  les  comtes  et  les  barons,  et  le  doge  de  Venise  ;  et 
le  parlement  se  tint  à  l'église  de  St-Étienne...  abbaye  à  trois 
lieues  de  CP  '.  >  Cette  église  (orthodoxe)  a  été  presque  entière- 
ment réédiâée,  en  1844,  par  la  libéralité  d'un  Qdèle. 

'  Histoire  de  la  conquôte  de  CF.,  par  \'illehar(iouin.  éd.  de  Waillv,  1870. 
p.  45. 


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CHAPITRE  IV. 


COMMUNAUTÉS  RELIGIEUSES  d'hOMMES.   ÉCOLES  DE  GARÇO>rS. 


Les  communautés  religieuses  d'hommes,  dont  nous  avons 
parlé  jusqu'ici,  étaient  anciennes  dans  CP.  ;  elles  avaient  été 
mêlées  à  la  vie  de  la  Comunità  :  elles  avaient  eu  aussi,  dans 
une  certaine  mesure,  leur  part,  dans  le  gouvernement  ecclésias- 
tique :  nous  allons  parler  maintenant  de  communautés,  vivant 
de  leur  vie,  et  ne  se  rattachant  que  d'une  manière  indirecte  au 
clergé  diocésain.  Nous  en  trouverons  même  qui  sont  essentielle- 
ment laïques  :  c'est  donc  un  genre  de  choses  tout  à  fait  à  part. 

Nous  en  parlerons  suivant  l'ordre  de  leur  installation  à  CP. 


SI- 

Les  prêtres  de  la  Mission  ou  Lazaristes.  1783. 


Les  prêtres  de  la  Mission  ont  été  fondés  par  St  Vincent  de 
Paul  :  ils  furent  appelés  Lazaristes  quand  ils  se  bansférèrent  à 
]a  Maison  St-Lazare,  à  Paris,  faubourg  St-Denis,  qui  leur  avait 
été  donnée  par  Louis  X.III  en  1632.  St  Vincent  s'était  occupé 
beaucoup,  par  lui-même  et  par  ses  prêtres,  des  cbrètiens  captifs 
chez  les  musulmans  ;  mais  son  attention  et  ses  soins  s'étaient 
dirigés  surtout  du  côté  des  états  barbaresques.  On  ne  voit  pas 
qu'Usaient  fait  aucune  apparition  à  Constantinople  jusqu'à  la 


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—  429  — 

&n  du  xvm'  siècle.  Après  la  suppression  des  Pères  Jésuites 
en  1773,  M.  de  Saint-Priest,  ambassadeur  de  France,  avait  de- 
mandé que  les  Lazaristes  fussent  appelés  à  les  remplacer;  mais 
cette  Congrégation  déclara  par  l'organe  de  M.  Viguier',  préfet 
apostolique  à  Alger,  qu'elle  n'accepterait  la  cession  de  ces  éta- 
blissements, qu'autant  qu'ils  seraient  placés  sous  la  protection 
de  la  France  et  libres  de  toutes  dettes.  Or  les  établissements  des 
Jésuites  dans  le  Levant  étaient  extrêmement  obérés.  Le  gou- 
vernement dn  roi,  après  maintes  délibérations,  consentit  à  amor- 
.  tir  les  dettes,  et  à  protéger  les  Missionnaires.  Un  arrêt  du  roi, 
en  date  du  33  décembre  1780,  donna  donc  aux  Lazaristes 
St-Benolt  et  les  autres  maisons  des  Jésuites  supprimés.  On  s'a- 
dressa alors  à  Rome  pour  avoir  l'approbation  de  la  Propagande  ; 
pour  diverses  raisons  cette  approbation  fut  retardée  jusqu'au 
23  novembre  1782,  M.  Viguier,  premier  supérieur  arriva  enfin  à 
Gonstantinople  le  19  juillet  1783.  II  fut  aussitôt  rais  en  posses- 
sion par  une  ordonnance  de  M.  de  Saint-Priest. 

Les  Lazaristes  commencèrent  un  ministère  difRcile  et  faisaient 
du  bien.  En  1793,  après  la  déposition  et  le  départ  de  M.  de 
Choiseul-GoufSer,  ambassadeur  de  France,  les  députés  du  com- 
merce restèrent  seuls  chargés  des  intérêts  de  la  nation  :  or, 
comme  les  idées  nouvelles  avaient  pénétré  dans  leurs  esprits,  Us 
voulurent  exiger  de  M.  Viguier  le  serment  constitutionnel. 
Celui-ci,  très  attaché  à  l'ancien  régime  et  aux  idées  catholiques, 
refusa  le  serment  :  alors  le  représentant  de  la  France,  en  vertn 
du  droit  ancien,  confirmé  par  les  capitulations,  délégua  quatre 
commissaires  accompagnés  du  chancelier  de  l'ambassade,  pour 
procéder  à  l'inventaire  des  objets  existants  dans  l'église.  À  cette 
occasion  la  f  magnifica  Comunità  »,  qui  avait  cherché  à  se 
reconstituer,  protesta  pour  ceux  de  ces  objets  qui  appartenaient 
à  la  chapelle  de  Ste-Anne  ;  il  lui  fut  répondu  que  l'on  n'y  tou- 
cherait pas  ;  la  t  Comunità  >  fit  des  démarches  auprès  de  la 
Porte,  pour  obtenir  la  consignation  de  l'église deSt-Benolt,  dont 
l'administration  temporelle  avait  été  donnée,  le  17  février  1793, 
à  un  économe  nommé  par  la  Nation.  La  République  n'ayant  pas 
encore  été- reconnue  par  la  Porte,  celle-ci  prit  le  parti  d'ajourner 


I  Autour  d'un  ouvrage  eatîmable  intitulé  :  Élément»  de  la  langue  lurgtie, 
u  TabUt  analytique»  de  la  langue  turque  utuelle.  CoQStautiaople,  In-l-. 


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—  430  — 

sa  décision  ;  seulement  elle  nomma  pour  Inspectear  le  Woivode 
(directeur  de  police)  de  Galata,  et  confia  la  supériorité  k  xm 
missionnaire,  es-Jésuite,  Delenda  ',  né  sujet  ottoman. 

Le  citoyen  général  Aubert-Dubayet,  envoyé  extraordinaire  et 
ministre  plénipotentiaire  de  la  Républit^ue,  en  1797,  confirma, 
proTisoirement,  le  P.  Delenda  dans  sa  supériorité  ;  mais  ayant 
TU  que  l'opposition  aux  Lazaristes  masquait  en  réalité  une  oppo- 
sition à  la  France,  il  nomma  en  qualité  de  supérieur-adminis- 
trateur à  St-Benolt,  M.  Renard,  Lazariste,  ancien  supérieur  de 
Tripoli  et  de  3myme  qui  était  venu  à  Constantinople  pour  ses 
affaires.  C'était  le  16  fructidor  an  V.  Alors  les  Rayas  latins, 
excités  d'ailleurs  par  le  premier  drogmao  d'Angleterre,  M.  Dane, 
et  par  l'internonce  d'Autriche,  le  baron  d'Herbert,  firent  de  nou- 
velles démarches  auprès  de  la  Porte,  pour  obtenir  d'elle  que  la 
France  f(tt  dépossédée  de  St-Benott.  Le  chargé  d'affaires, 
M.  Ruffin,  opposa  à  ces  prétentions  ane  énergique  et  efficace 
résistance.  Enfin  la  Porte  ordonna  an  Woivode  de  Galata  d'aller 
lever  les  scellés  turcs,  précédemment  apposés  ;  et  l'on  remit  à 
cette  occasion,  aux  commissaires  français  une  déclaration  écrite 
portant  que  l'église  et  le  couvent  de  St-Benolt  étaient  c  rendus  > 
aux  ambassadeurs  de  la  République  c  pour  les  administrer, pro- 
t^er  et  posséder,  comme  par  le  passé  -  >. 

Mais  l'expédition  d'Egypte  ayant  amené  une  rupture  entre  1& 
France  et  la  Porte,  M.  RufDn,  qui  avait  soutenu  si  efficacement 
les  Lazaristes,  fut  arrêté  et  enfermé  aux  Sept-Tours.  Les  enne- 
mis des  Lazaristes  reprirent  l'avantage,  et  ceux-ci  furent  expulsés- 
de  St^Benott  et  enfermés  au  palais  de  France,30  septembre  1798. 
M,  Renard  n'en  sortit  que  le  4  décembre.  Il  se  retira  à  Buyuk- 
dérè.  Le  P.  Delenda  fut  encore  nommé  administrateur  de  St- 
Benolt. 

Pendant  qu'il  agissait  contre  les  Lazaristes  à  Constantinople 
le  baron  d'Herbert  agissait  aussi  à  Rome  pour  faire  atti-ibner  à 

'  Le  P.  D«lenda  était  de  iSantorin  et  son  lieu  d'origine  ne  fut  peut-Atrepa» 
étranger  au  choix  qui  fut  fait  de  sa  personne.  Sa  qualité  d'cx-Iésuite  per- 
mettait aux  anciens  religieux  de  -SUBenott  d'espérer  une  réintégration  dans 
leur  Église.  D'autre  part  sa  qualité  de  Raya  était  d'accord  avec  les  préten- 
tion* de  la  confrérie  de  Ste-Anne  qui  cherchait  alors  au  détriment  de  la  Fraoca 
A  reconstituer  la  «  Magnifica  Coiiiuniià  s  de  jadis.  Le  P.  Albini,  également 
ex-Jésuite,  accompagnait  le  P.  Delenda. 

'  Archives  de  l'ambassade  de  France. 


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—  431  -^ 

sa  couronne  la  protection  des  catholiques  du  Levant  ;  mais  le 
cardinal  Àntonelli,  Préfet  de  la  Propagande,  résista  énergique- 
ment  &  cette  prétention  et  maintint  le  privilège  de  la  France. 

Enfin  en  1803,  après  la  conclusion  du  Concordat,  les  Laza- 
ristes furent  reconnus  propriétaires  de  St-Benolt  et  remis  en 
possession  par  M.  Ruffîn,  sorti  des  Sept-Tours,  depuis  le  35  août. 
Hs  en  ont  joui  paisiblement  depuis  lors  '. 

L'église  et  le  couvent  de  St-Benolt  sont  devenus  le  centre  le 
plus  actif  du  zèle  religieux  à  Constantinople.  Les  Missionnaires- 
ontre  le  collège,  s'y  sont  occupés  toujours  de  toutes  les  œuvres^ 
d'enseignement,  d'apostolat  et  de  charité,  établies  par  leurs 
prédécesseurs,  et  de  celles  qu'ils  ont  établies  eux-mêmes. 

Parmi  les  services  qu'Us  ont  rendu  à  la  religion  nous  devons 
signaler  le  secours  puissant  accordé  aux  Arméniens  catholiques, 
pendant  leur  dernière  persécution  (183S).  M.  Bricet,  alors  préfet 
de  la  Mission  les  reçut  &  St-Benolt,  leur  donna  pour  abri  les 
maisons  dépendantes  de  la  Mission  ;  et  leur  rendit  tous  les  ser- 
vices imaginables,  avec  une  générosité  qui  lui  valut  plus  d'une 
fols  les  reproches  de  ses  confrères  et  même  de  ses  supérieurs. 
Les  Arméniens  d'alors  aimaient  à  proclamer  que  si  leur  nation 
avait  pu  surmonter  la  persécution  et  si  enfin  elle  avait  pu  se 
constituer  en  un  corps  indépendant,  c'est  en  grande  partie  à 
M.  Bricet  qu'elle  en  est  redevable. 

L'égliae  de  St-Benolt,  telle  qu'on  la  voit  aujourd'hui,  ne  date 
que  de  1733,  époque  de  sa  dernière  reconstruction  ;  la  tour  du 
hef^i  on  clocher  adossée  sur  l'avant,  au  flanc  droit  de  l'église, 
et  snr  laquelle  Hotte  le  drapeau  français,  aux  jours  de  solen- 
nité ^,  est  seule  ancienne,  elle  parait  dater  du  xm-  siècle.  Par 
l'efi'et  d'une  habitude  traditionnelle,  cette  église  est  souvent 
désignée  par  l'un  des  termes  suivants  :  i  église  des  génois,  église 
des  jésuites,  St-Benolt.  i  Elle  a  été  sérieusement  menacée  par 
l'incendie  qui,  dans  la  nuit  du  30  au  21  février  1865,  détruisit 
la  partie  de  l'enclos  de  St-Benolt  dite  la  maison  de  la  Provi- 
dence; elle  n'a  dû  sa  conservation  qu'au  zèle  et  aux  efforts  des 
officiers  et  matelots  du  stationnaire  français  t'Ajaccio. 


»  Cr.  ci-dessus,  Ste-Marie  île*  VMiti: 


y,'G00g\il 


—  432  — 

L'église  St-Benoit  a  été  restaurée,  et  entièrement  transformée 
à  l'intérieur,  durant  l'été  de  1871,  sous  la  supériorité ieM.  Sal- 
vayre.  Le  tableau  de  l'ancienne  église  du  bagne  a  été  placé  au- 
dessus  de  la  porte  d'entrée  latérale,  et  remplacé,  au-dessus  du 
sanctuaire,  par  l'image  de  St  Vincent  de  Paul,  fondateur  de  la 
congrégation  des  Lazaristes. 

En  outre  de  la  procession  de  Pâques,  dont  il  a  été  parlé  plus 
haut,  les  Lazaristes  font  intérieurement  et  extra  mur  os,  le  jeudi 
du  Corpus  Domini,  à  l'issue  de  la  grand'messe,  la  procession 
de  la  Fête-Dieu  avec  une  grande  pompe.  La  procession  sort,  à 
l'extérieur,  par  la  porte  de  Notre-Dame  de  la  Providence,  et 
rentre  dans  l'enclos  par  celle  du  collège  ;  trois  reposoirs  sont 
dressés  dans  l'intérieur  de  l'enclos  ;  à  la  maison  des  sœurs,  au 
palier  du  grand  escalier  et  dans  la  cour  du  collège. 

Outre  les  inscriptions  dont  nous  avons  parlé  au  chapitre  de 
St-Benolt,  on  voit  dans  l'église,  sur  le  pilier  central,  à  droite 
avant  la  chaire,  les  inscriptions  suivantes  : 

D.  0.  M. 

Ci-o1t  Louis-Flohent  Lkleu,  visiteur  et  préfet  apostouqde 

DES  missions  des  Lazaristës  en  Turquie,  en  Grèce  et  en  Perse, 

FONDATEUR  DES  ÉTABLISSEMENTS  DES  FbËRES  DES  ÉCOLES  CHRÉTIENNES 

ET  DBS  Filles  de  la  Chartié  dans  le  Levant,  décédé  le  11  no- 
vembre 1846,  A  l'ace  de  46  ans. 

A  droite  une  pierre  à  la  mémoire  de 

Piebre-Paul  Gamba,  supérieur  ms  hiëtres  de  la  uission^ 

DÉCÉDÉ  LE  13  MARS  1860,  ÂGÉ  DE  43  ANS. 

A  gauche  : 

Jérusalem. 
A  la  mémoire  de  la  mère  des  pauvres. 

Ci-g1t 
SŒUR  Françoise-Marie  Lesueur,  btlle  de  la  GHARrrÉ,  sopê- 

RIEDRE  DE  LA  MAISON  DE  LA  PROVIDENCE  ET  FONDATRICE  DES  ŒUVRES 
DE  CRAIUTÉ  A  GP.,  DÉGÉDÉE  LE  6  AVRIL  1863,  A  l'aQE  DE  64  ANS. 


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œm'BES  DBS  raÈTRES  DE  LA  MISSION. 

Suivant  l'esprit  de  leur  saint  Fondateur ,  les  Lazaristes  se 
sont  occupés,  depuis  leur  arrivée  à  Constantinople,  i^  faire  le 
bien  sans  bruit  :  ils  ont  avancé  peu  à  peu  et  il  est  venu  un 
moment  où  l'on  a  pu  dire  que  toutes  les  œuvres  de  charité  et 
de  zèle  avaient  leur  inspiration  à  St-Benoit. 

Dès  que  leur  sort  fut  fixé,  en  1804,  ils  ouvrirent  le  collège 
dans  les  anciens  bâtiments  de  St-Benoit,  assez  diminués  par 
l'hôpital  qu'on  y  avait  annexé.  Ils  se  contentèrent  de  cette  occu- 
pation et  du  ministère  de  l'église,  pendant  des  années.  Mais  en 
1839,  les  esprits  en  France  s'étaient  tournés  vers  les  institutions 
religieuses  et  charitables,  c'était  le  moment  où  se  fondaient 
les  grandes  œuvres  catholiques  :  or  il  y  avait  alors  h  CP.  un 
archevêque  français,  intelligent  et  zélé,  Mgr  Hillereaa,  et  à  la 
Mission  un  préfet  jeune,  actif  et  rempli  de  l'esprit  de  Dieu, 
M,  Leleu.  C'est  alors  que  commencèrent  les  institutions  que 
nous  admirons  maintenant  dans  le  Levant. 

Le  collège  de  St-Benott  donnait  l'enseignement  à  la  classe 
supérieure  de  la  société  catholique,  mais  il  n'y  avait  rien  pour 
les  femmes  et  rien  pour  les  garçons  du  peuple,  sauf  les  écoles 
paroissiales,  petites  et  mal  organisées.  M.  Leleu  fit  donc  venir 
les  Filles  de  la  Charité,  1839  ;  en  1841  il  y  appela  les  Frères  des 
Écoles  chrétiennes  et  les  installa  dans  les  bâtiments  mêmes  de 
St-Benolt.  Avec  le  temps  ces  instituts  se  sont  agrandis  d'une 
façon  merveilleuse  et  comptent  de  nombreuses  maisons  tant  à 
CP.  que  dans  le  reste  du  Levant.  D'autres  congrégations  reli- 
gieuses sont  venues  ensuite,  mais  celles-là  ont  donné  le  branle 
après  avoir  ouvert  la  voie. 

De  1846  à  1853,  la  Mission  a  créé  les  Conférences  de  St-Vin- 
cent  de  Paul,  les  Associations  des  Dames  de  charité,  et  des 
Enfants  de  Marie,  et  toutes  ces  œuvres  de  charité  et  de  zèle  qui 
font  tant  de  bien  dans  la  ville.  Elle  a  été  en  un  mot  le  foyer 
d'où  est  parti  presque  tout  le  bien  qui  s'est  opéré  il  CP.  parmi 
les  catholiques.  Les  hérétiques  eux-mêmes  s'en  sont  ressentis 
car  ils  ont  imité  chez  eux  ce  qui  se  faisait  chez  nous. 

On  a  remarqué  de  plus  que  la  première  cloche  qui  ait  été 
entendue  à  Gonstantinople  a  sonné  à  St-Benott. 


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Nous  allons  énumérer  les  principales  œuvres  auxquelles  s'oc- 
cupent Messieurs  l3s  prêtres  de  la  Mission. 

1°  La  Mission.  Dans  la  Maison  de  St-Benolt,  nous  devons 
d'abord  signaler  c  la  Mission  >.  Elle  se  compose  du  Supérieur 
régional,  qui  a  le  titre  et  les  pouvoirs  de  Préfet  apostolique  et 
de  Visiteur  de  tout  le  Levant.  C'est  de  lui  qne  relèvent,  dans  un 
très  large  rayon,  les  maisons  des  Lazaristes  et  des  Filles  de  la 
Charité. 

Un  nombre,  toujours  trop  petit,  de  missionnaires  s'occupe 
sous  sa  direction  du  ministère  ecclésiastique  et  des  oeuvres. 

C'est  d'abord  l'église  publique  de  St-Benolt,  jadis  la  princi- 
pale de  la  Latinité,  elle  a  vu  la  plupart  des  catholiques  latins 
émigrer  vers  Péra,  mais  elle  attire  encore,  surtout  à  certains 
jours,  une  foule  de  fidèles,  qui  viennent  y  entendre  la  prédica- 
tion et  y  recevoir  les  secours  religieux. 

Les  missionnaires  ont  ensuite  la  direction  spirituelle  des 
Filles  de  la  Charité,  répandues  dans  la  ville  et  le  district. 

Ils  ont  fondé  et  continuent  de  diriger  les  associations  des  En- 
fants de  Marie,  des  Dames  de  Charité,  des  Conférences  deSt-Vin- 
cent  de  Paul,  de  la  Société  Tinio,  de  toutes  les  écoles  et  autres 
œuvres  qui  sont  sous  la  direction  des  Filles  de  la  Charité. 

Une  de  leurs  occupations  encore  est  la  traduction  et  l'impres- 
sion en  turc  et  en  grec,  des  livres  catholiques. 

On  peut  dire  que  si  d'autres  qu'eux  travaillent  au  bien,  d'une 
façon  ou  de  l'autre,  les  Lazaristes  s'y  emploient  de  toutes  ces 
manières.  Et  quand  on  les  demande,  ils  vont  encore  prêcher,  en 
toutes  les  langues  si  multiples  du  pays,  dans  les  églises  ou  cha- 
pelles étrangères. 

3"  Collège  de  St-Benott.  Ce  collège,  fondé  en  1804,  est 
incontestablement  le  plus  ancien,  et  il  fut  pendant  près  de 
soixante  ans  le  seul  établissement  catholique  d'enseignement 
littéraire  à  CP.  Il  fonctionna  pendant  longtemps  dans  les  an- 
ciens b&timents  restaurés  et  agrandis;  mais  enl840M.  Leleu,de 
vénérable  mémoire,  le  voyant  trop  à  l'étroit,  à  cause  des  autres 
œuvres  qui  venaient  lui  disputer  sa  place  antique,  le  transféra 
à  Bebek,  dans  une  propriété  acquise  aâ  hoc.  En  1843  il  reçut  du 
roi  Louis-Philippe,  le  titre  de  <  Collège  Royal  i  avec  uncer- 


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—  435  — 

tain  nombre  de  bourses,  qui  lui  sont  encore  continaées  au- 
Jourd'hai. 

En  1867,  anx  vacances  de  Pâques,  poar  diverses  raisons  ex- 
cellentes, et  eu  vue  d'auguienter  le  bien  qu'il  faisait  déjà,  le  col- 
lège fut  ramené  de  Bebek  à  St-Benolt,  et  intallé  dans  les  nou- 
velles constructions  élevées  pour  un  séminaire.  Ces  constructions 
ont  été  depuis  recommencées  à  nouveau  sur  un  plan  général,  et 
le  collège  est  maintenant  un  établissement  parfait,  dans  son 
genre. 

On  y  enseigne  le  latin,  le  français,  le  grec  ancien,  les  sciences 
physiques  et  mathématiques,  les  langues  vivantes  et  en  parti- 
culier le  turc  et  le  grec.  On  y  donne  en  un  mot  une  éducation 
littéraire  et  commerciale  aussi  complète  que  le  réclament  les  be- 
soins du  pays. 

Le  collège  de  St-Benoit  a  eu  pour  élèves  presque  tous  les 
chefs  des  anciennes  familles  du  pays,  et  un  certain  nombre  des 
hommes  publics  de  la  Turquie  contemporaine  lui  doivent,  en 
tout  ou  en  partie,  leur  éducation  et  leur  instruction.  Parmi  ceux 
qui  vivent  encore  on  peut  citer  :  1°  plusieurs  officiers  supé- 
rieurs turcs,  3°  six  Consuls  appartenant  à  diverses  puissances, 
3°  cinq  drogmans  ou  secrétaires  d'ambassades,  4°  cinq  Pachas, 
5°  un  ambassadeur,  6°  un  ministre  d'état,  7°  un  archevêque  ou 
métropolitain  bulgare. 

n  compte  en  ce  moment,  (1"  janvier  1893)  dix  classes  et 
cent  cinquante  élèves,  y  compris  les  séminaristes,  qui  en  suivent 
les  cours. 

Pour  la  nationalité  on  compte  :  Italiens  dix-huit  ;  Français 
trente  ;  Hellènes  vingt-six  ;  Rayas  neuf  ;  Autrichiens  dix  ;  Ar- 
méniens vingt-sept  ;  Géorgiens  trois  ;  Albanais  cinq  ;  Bul- 
gares un  ;  Allemands  sept  ;  Anglais  six  ;  autres  nationalités 
huit. 

Quant  à  la  religion  :  Catholiques  cent  deux  ;  Grecs  ortho- 
doxes quarante  et  un  ;  Protestants  un  ;  Israélites  quatre  ;  mu- 
sulmans deux. 

Depuis  le  commencement  de  l'année  scolaire  1893-1898,  les 
Lazaristes  se  sont  assuré  le  concours  des  Petits  Frères  de  Marie, 
au  nombre  de  sept,  qui  sont  chargés  des  petites  classes  de  fran- 
çais et  de  quelques  cours  et  surveillances. 

Une  Société  amicale  des  anciens  élèves  a  été  fondée  en  1892. 


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—  436  — 

3°  Séminaire.  Une  des  pensées  les  plus  chères  an  cœur  de 
St  Vincent  de  Paul  fut  toujours  l'^ucation  des  jeunes  clercs,  ou 
pour  mieux  dire  la  préparation  de  bons  prêtres  pour  l'Église  de 
Dieu.  Comme  nous  l'avons  fait  remarqaer,  pendant  longtemps 
cette  œuvre  ne  fut  pas  utile  à  Gonstautinople,  puisque  toutes 
les  paroisses  étaient  entre  les  mains  des  religieux  ;  mais  on  com- 
mença à  en  sentir  le  besoin  quand  on  eut  fondé  des  paroisses 
séculières. 

Le  séminaire  fut  fondé  en  1867,  pendant  le  vicariat  de  Mgr 
Pluym,  et  par  l'initiative  de  M.  Devin,  préfet  de  la  Mission.  Les 
élèvent  suivent  les  cours  du  collège  mais  ils  ne  sont  pas  mêlés 
à  ses  élèves  dans  les  exercices  de  la  vie  commune. 

Le  séminaire  compte  en  ce  moment  dix-buit  élèves.  Depuis 
sa  fondation,  il  a  donné  &  l'Église  deux  prêtres  séculiers  ;  un 
Conventuel  ;  trois  Capucins  -,  huit  missionaires  ;  quatre  étu- 
diants en  théologie  ;  un  évéque,  Mgr  MladénofT,  évêque  de  Sata- 
1a,  vicaire  apostolique  des  Bulgares-unis  de  Macédoine  ;  etc. 

Conférence  des  Aspirants.  Pour  accoutumer  leurs  élèves 
aux  œuvres  de  zèle  les  Lazaristes  ont  établi  dans  leur  maison 
de  St-Benolt  une  Conférence  de  St- Vincent  de  Paul,  composée 
exclusivement  d'élèves.  Bile  a  cet  avantage  que  les  jeunes  gens 
qui  en  font  partie  se  trouvent,  à  leur  entrée  dans  le  monde, 
versés  dans  les  conférences  régulières,  et  ne  se  sentent  pas  iso- 
lés. Nous  en  parlerons  à  l'article  des  œuvres  laiques  de  la  cha- 
rité chrétienne. 

4"  Maison  de  St-6eorges...  Œuvre  des  Allemands. 

Nous  avons  vu  comment  l'église  et  le  couvent  de  St-Georges, 
après  avoir  été  cédés  par  le  Vicaire  patriarcal,  avaient  passé  par 
des  péripéties  diverses.  Le  couvent  avait  servi  d'hôpitaJ,  pour 
les  Français  d'abord,  ensuite  pour  les  Autrichiens.  L'église 
avait  été  affectée  aux  Observantins  Bosniaques.  Mais  enfin,  en 
1883,  elle  fut  cédée  aux  Missionnaires  pour  y  établir  leurs 
œuvres  allemandes. 

Cette  œuvre  des  Allemands,  bénie  d'une  façon  toute  spéciale 
par  le  St  Pontife  Léon  XIII,  fut  fondée  en  1873.  Elle  commença 
petitement,  avec  cinq  pauvres  enfants  :  elle  s'est  développée 
avec  les  années.  Le  24  nov.1883,  lors  du  transfert  à  St-Georges, 


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-  437  — 

elle  comptait  tme  soixantaine  de  Slles  et  une  dizaine  de  garçons. 
Elle  forme  aujourd'hai  deax  sections  distinctes,  celles  des  Mis- 
sionnaires et  celle  des  Filles  de  la  Charité,  séparées  par  l'église. 


CEUVRES    DES   MISSIONÏlAntES . 

Personnel  :  quatre  prèti'es  de  la  Mission,  six  frères  coadju- 
tenrs. 

Mission  :  c'est-à-dire  prédications,  les  dimanches  et  fêtes, 
retraites,  même  pour  les  hommes,  confessions,  soin  des  ma- 
lades, etc.,  etc. 

Classes.  D  y  a  à  St-Georgea  six  classes  avec  nn  internat  pour 
les  orphelins  et  les  enfants  pauvres.  Les  internes  sont  au  nombre 
de  cinquante-six,  les  externes  quarante-cinq,  dont  trente  grecs 
orthodoxes. 

œuvRES  nES  rmi^s  de  la.  charité. 

Personnel  :  Sœurs treize. 

Orphelinat:  filles quarante-trois. 

f  garçons  ....  trente. 

Pensionnat  de  jeunes  flUes  .  quarante-cinq. 

Classes  externes quarante. 

Secours  aux  pauvres  allemands,  selon  les  besoins  et  dans  la 
mesure  des  ressources. 

Dans  ces  œuvres  les  religions  et  les  diverses  nationalités  sont 
mêlées  ;  mais  il  s'y  fait  un  bien  réel.  Chaque  année,  on  y  compte 
quelques  conversions,  du  schisme  ou  de  l'infidélité. 


§n. 

Les  Pères  de  la  Compagnie  de  Jéstts.  1864. 

Nous  avons  va  dans  la  deuxième  partie  de  ce  travail,  comment 
les  Pères  Jésuites  firent  le  bien  à  CP.  jusqu'au  jour  de  la  sup- 
pression de  la  Compagnie,  par  le  Pape  Clément  XIV,  en  1773. 


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Plusieurs  d'entre  eux  restèrent  dans  la  ville  et  continuèrent  d'y 
travailler  aux  œuvres  du  ministère  ecclésiastique.  lia  eurent 
même  un  moment  l'espoir  que,  sur  la  demande  du  Tsar,  ils 
pourraient  se  rétablir  à  St-Benolt,  pendant  que  la  France  était 
«n  guerre  avec  la  Turquie  ;  mais  la  paix  se  Qt  et  ces  espérances 
s'évanouirent.  Les  Pères  moururent  l'un  après  l'antre  :  et  ce- 
pendant on  n'oubliait  pas  ceux  qui  avaient  Tait  tant  de  bien 
à  CP.  Lorsque  la  Compagnie  fut  rétablie,  il  fut  plusieurs  fois 
question  de  l'y  rappeler  ;  mais  ce  désir  fat  longtemps  à  se  réa- 
liser. 

Après  leur  expulsion  de  Sicile,  les  PP.  Jésuites  de  cette  Pro- 
vince qui  cberchaient  un  champ  ob  déployer  leur  zèle,  vinrent 
à  Constantinople,  et  ouvrirent,  le  1"  décembre  1S64,  un  ex- 
ternat de  garçons  sous  le  titre  de  c  Collegio  dt  Sta  Pulche- 
ria  1.  Le  supérieur  et  la  plupart  des  religieux  étaient  italiens, 
mais  on  leur  avait  adjoint,  &  diverses  reprises,  des  Jésuites 
français. 

Avec  l'autorisation  de  la  S.  C.  de  la  Propagande,  Mgr  Brur 
noni  a  approuvé  et  confirmé,  par  son  décret  du  3S  mai  1867, 
l'établissement  de  la  Compagnie  à  Constantinople,  la  déclarant 
canoniquement  instituée,  et  accordant  aux  RB.  Pères  la  faculté 
de  vivre  en  communauté,  d'avoir  une  maison  religieuse  avec 
collège  et  église,  réservant  à  l'ordinaire  la  désignation  de  l'em- 
placement ultérieur  de  ce  dernier  édifice. 

Le  collège  de  Ste-Polchérie,  après  avoir  occupé  divers  locaux 
s'est  enfin  fixé  (1891)  dans  un  très  vaste  bâtiment  élevé  sur  un 
terrain  acquis  par  les  Pères  au  point  le  plus  élevé  de  Péra. 


ŒUVRES  DES  RR.  PÈRES  JÉSUITES, 

i*  Le  Collège  de  Ste-Pulchérie.  On  connaît  le  talent  dé- 
ployé par  les  PP.  Jésuites  dans  l'ëducation  de  la  jeunesse  et  les 
succès  qu'ils  ont  obtenu  partout.  A  Constantinople  ils  se  sont 
trouvés  en  présence  d'une  difficulté  locale  qui  leur  a  fait  modi- 
fier leur  manière  accoutumée.  La  population  levantine  n'appré- 
cie pas  une  instruction  qui  n'est  pas  immédiatement  utilisable, 
et  par  suite,  les  études  classiques  proprement  dites  n'y  trouvent 
pas  une  grande  faveur  :  il  a  donc  fallu  joindre  qq  cours  com- 


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—  439  — 

mercial  aux  cours  littéraires,  et  donner  nne  place  prépondérante 
aux  langues  vivantes  sur  le  latin  et  le  grec  antique.  C'est  là  ce 
que  demandent  la  plupart  des  parents  pour  leurs  enfants.  Sauf 
cette  remarque,  nous  pouvons  dire  que  le  collège  de  Ste-Pulchë- 
rie  marche  suivant  les  mêmes  règles  que  tons  les  autres  de  la 
Compagnie. 

Us  ont  établi  parmi  leurs  élèves  les  Congrégations  ordinaires 
de  la  T.  Ste-Vierge,  et  de  St-Louis  de  Gonzague.  Ces  Congré- 
gations sont  présidées,  sous  la  direction  d'un  Père,  par  un  pré- 
fet élu  par  les  confrères. 

Ils  ont  également  établi  parmi  leurs  élèves  la  Congrégation 
instituée  par  le  Pape  Pie  IX  sous  l'invocation  de  St  Jean  Berch- 
mans,  ayant  pour  but  de  dresser  les  enfants  an  s^-vice  des  of- 
fices sacrés. 

2*  La  mission.  Les  Pères  Jésuites  ne  sont  pas  seulement  insti- 
tuteurs, ils  sont  aussi  missionnaires.  Ils  ont  en  cette  qualité  une 
église  ouverte  au  public  et  fort  fréquentée  par  les  âdèles.  Ils  s'y 
adonnent  à  toutes  les  fonctions  du  ministère  ecclésiastique,  qui 
ne  sont  pas  paroissiales.  Ainsi  de  fréquentes  prédications  en  di- 
verses langues,  les  catéchismes,  les  réunions  pieuses  de  tout 
genre,  etc. 

Ils  ont  fondé  l'association  de  la  Ste-Famille,  si  recommandée 
par  le  Pape  Léon  XIII,  pour  introduire  ou  maintenir  dans  les 
familles  les  pratiques  de  la  vie  chrétienne,  spécialement  celle 
de  la  prière  en  commun. 

Enfin  ils  ont  créé  à  Péra,  avec  l'approbation  du  Vicaire  pa- 
triarcal, r  «  association  de  N.-D.  des  Bons  Livres  ».  Elle  est 
formée  de  dames  et  de  jeunes  filles  pieuses.  Elle  a  son  siège  an 
collège  même  de  Ste-Pulchérie,  et  possède  une  bibliothèque  bien 
choisie,  de  plusieurs  milliers  de  volumes.  La  contribution  an- 
nuelle des  membres  de  l'association  est  de  soixante  piastres, 
(15  fr.). 

Un  Père  Jésuite  est  chargé  de  l'enseignement  religieux  au  col- 
lège national  austro-hongrois  de  Constantinople,  établi  dans  les 
dépendances  du  palais  d' Autriche. 

Personnel.  Pour  toutes  ces  œuvres  les  Pères  Jésuites  sont  au 
nombre  de  douze,  deux  scolastiques,  et  quatre  coadjuteurs. 

Les  élèves  du  collège  sont  au  nombre  de  quarante-deux  in- 


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—  440  — 

ternes,  dont  trente-sept  latins  et  trois  arméniens  catholiques  et 
huit  schismatiques  :  les  externes  sont  au  nombre  de  soixante- 
quinze,  dont  trente-sept  latins,  quinze  arméniens  et  un  mel- 
chite  catholique  et  vingt  scbismatiques. 

3°  Les  Jésuites  de  la  Province  de  Lyon,  ayant  été  chargés, 
en  1881, de  la  mission  d'Arménie,  ont  une  procure  àConstanti- 
nople  et  ordinairement  un  Père  pour  veiller  à  leurs  intérêts. 


S  m. 

Les  Pérès  Augustîns  de  l'Assomption.  . 


Fondés  depuis  une  cinquantaine  d'années  seulement,  les  Pères 
Àugustins  de  l'Assomption  forment  une  des  milices  ecclésias- 
tiques les  plus  jeunes,  mais  aussi  les  plus  actives  de  notre 
temps.  Â  la  prédication,  à  l'enseignement,  et  aux  autres  fonc- 
tions du  ministère  accoutumé,  ils  ont  joint  la  presse  et  surtout 
le  journalisme,  comme  un  des  moyens  les  plus  efficaces  de  faire 
lebien  de  nosjours.  Ils  ont  pu  se  faire  ainsi  une  place  à  part 
parmi  les  Ordres  religieux.  A  leur  activité,  qui  se  trouvait  à 
l'étroit  en  France,  le  Pape  Pie  IX  assigna  de  plus  les  missions 
parmi  les  infidèles.  Il  les  envoya  dans  la  partie  bulgare  de  l'em-. 
pire  ottoman  :  c'était  en  1862. 

Convaincus  que  pour  agir  sur  l'islamisme,  jusqu'alors  incon- 
vertissable,  c'était  à  la  tête  que  l'on  devait  s'adresser,  ils  dési- 
raient vivement  s'établir  à  Constantlnople  même,  pour  y  fixer 
le  centre  de  leur  mission.  Mgr  Vanuteili,  alors  Vicaire  aposto- 
lique patriarcal,  non  seulement  se  montrait  favorable  à  ce  projet, 
mais  il  l'encourageait  vivement,  et  pressait  le  R.  P.  Gtalabert, 
supérieur  de  la  mission  de  l'exécuter.  C'est  au  mois  d'oc- 
tobre 1882  que  le  R,  Père  réalisa  cette  fondation. 

L'emplacement  choisi  fut  Stamboul  où  ne  se  trouvait,  depuis 
des  siècles,  aucune  communauté  latine.  Il  faut  reconnaître, 
pour  être  impartial  envers  les  anciens  religieux  de  CF.,  que 
depuis  que  les  turcs  avaient  pris,  pour  en  faire  des  mosquées, 
les  églises  de  N.-D.  du  Rosaire  et  de  St-Nicolas,  il  aurait  été 


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—  441  — 

impossible  d'ouvrir  une  chapelle,  ou  d'établir  une  commanauté 
dans  Stamboul.  Les  Filles  de  la  Charité  qui  l'avalent  tenté  aa 
moment  de  la  guerre  de  Oimëe,  avaient  été  contraintes  d'aban- 
donner la  position  en  1860,  au  moment  des  massacres  du  Liban. 
Le  choix  de  cet  emplacement  poar  la  nouveUe  mission  cansa 
donc  beaucoup  d'étonuement  :  on  considérait  comme  hardie,  et 
même  imprudente,  une  installation  dans  l'intérieur  de  la  cité 
musulmane. 

On  commença  par  les  religieuses.  EHles  s'établirent  dans  une 
inaison  de  location  et  ouvrirent  une  école  et  une  chapelle,  (dé- 
cembre 1883).  Avant  la  fin  de  l'année,  le  nombre  des  élèves  s'é- 
levait à  quarante-deux.  Bientôt  quelques  familles  latines  per- 
dues dans  Stamboul,  sans  prêtres,  sans  églises,  sans  sacrements 
de  leur  rite,  obligés  pour  avoir  la  messe  de  traverser  la  Corne 
d'or  ou  d'aller  dans  les  églises  arméniennes,  commencèrent  à 
fréquenter  la  chapelle  et  à  se  grouper  autour  de  la  nouvelle  com- 
munauté. Depuis  ce  temps-là  î'école  n'a  fait  que  prospérer,  elle 
est  maintenant  fort  bien  établie,  non  loin  de  la  station  de  Coum- 
capoQ  et  compte  de  nombreuses  élève».  Mais  ce  qui  est  le  plus 
apprécié,  c'est  le  dispensaire  et  les  consultations  gratuites,  ce 
sont  surtout  les  visites  des  malades  à  domicile.  Ces  visites  sont 
toujours  regardées  par  les  familles  malheureuses  comme  une 
véritable  bénédiction. 

Un  an  plus  tard,  en  octobre  1883,  le  H.  P.  Joseph  Maubou 
arrivait  avec  sept  religieux.  La  première  maison  qu'avait  louée 
le  P.  Galabert  étant  insufRsante  ponr  la  nouvelle  communauté 
et  ponr  les  œuvres  grandissantes,  on  chercha  un  nouveau  local 
et  on  s'installa  en  plein  quartier  turc.  Il  y  eut  une  grande  explo- 
sion de  colère  de  la  part  des  musulmans  :  ils  lançaient  de 
grosses  pierres  à  travers  les  vitres  et  leur  fureur  alla  même  jus- 
qu'à essayer  de  poignarder  un  religieux.  Celui-ci  fut  préservé 
providentiellement,  car  la  lame  de  l'arme,  dirigée  vers  le  cœur, 
rencontra  la  montre,  en  perça  la  première  boite  et  s'arrêta  sur 
la  seconde,  où  était  collée  une  petite  image  du  fondateur  de  la 
Congrégation,  le  R.  P.  d'Alzon.  Les  religieux  apprirent  depuis 
que  les  deux  assassins  avaient  été  excités  par  les  discours  tenus 
dans  une  école  voisine. 

Cette  tentative,  jointe  à  des  tracasseries  journalières,  obligea 
les  PP.  Assomptionnistes  à  quitter  cette  maison  :  ils  s'instal- 


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—  443  ~ 

lëreot,  noa  loin  de  là,  mais  dans  un  quartier  où  domine  l'élé- 
ment chrétien.  C'est  là  que  l'œuvre  s'est  affermie.  Les  diffi- 
cultés ne  lui  ont  certainement  pas  manqué,  et  elles  durent 
toujours,quoique  avec  moins  de  violence.  Les  grecs  et  les  armé- 
niens qui  entourent  les  Pères,  sont  peut-être  les  plus  opposés 
à  une  installation  déûnitive  de  la  mission.  Les  Pères  couti- 
nueot  avec  courage  et  persévérance  à  leur  faire  tout  le  bien 


lElJVRES  DE  LA.  MISSION. 

1*  École.  Ici  comme  partout,  il  faut  commencer  par  les 
écoles.  I^es  Pères  ont  donc  ouvert  nne  école  qui  est  (réqnentée 
par  autant  d'élèves  qu'elle  en  peut  contenir,  cent  à  cent  quinze, 
dont  nne  trentaine  de  catholiques. 

Trois  fois  la  semaine,  une  classe  du  soir  réunit  une  vingtaine 
d'adultes. 

Il  y  a  aussi  dans  la  maison  une  section  d'internes,  plus  ou 
moins  nombreux,  qui  se  destinent  à  la  vie  religieuse  ou  ecclé- 
siastique, il  y  en  a  en  ce  moment  douze. 

Chapelle.  La  chapelle  est  fréquentée  par  une  trentaine  de 
familles  catholiques,  quelques-unes  latines,  les  autres  des  divers 
rit«s  orientaux.  On  y  administre  les  sacrements,  qui  ne  sont 
pas  paroissiaux  :  les  catéchismes  s'y  font  régulièrement,  et  un 
petit  patronage  réunit  chaque  dimanche  les  enfants  catholiques 
de  cette  région. 

Enfin  la  maison  de  Coum-capou  est  le  centre  de  la  mission 
et  c'est  de  là  que  part  le  développement  de  toutes  les  œuvres 
des  Pères  de  r.\ssomptioQ. 

2°  Maison  de  Fener-baghtché.  En  1886)  les  religieux  de 
l'Assomption  achetaient  à  Fener-baghtchè,  sur  la  côte  d'Asie, 
dans  une  très  l>elle  position,  un  terrain  sur  lequel  se  trouvait 
une  chapelle  publique,  un  moment  desservie  par  un  P.  Capucin. 
Ce  fut  le  centre  d'une  nouvelle  mission.  Non  seulement  les  As- 
somptionnistes  continuèrent  le  service  de  cette  chapelle,  mais  à 
côté  il  ont  construit  une  vaste  maison  dans  laquelle  ils  ont  un 
noviciat  pour  la  Congrégation,  qui  compte  trente  novices,  un 


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—  443  — 

séminaire  pour  les  enfants  pauvres  qui  se  destinent  à  la  vie  ec- 
clésiastique ou  religieuse,  de  six  élèves. 

En  même  temps  ils  ont  ouvert  une  école  externe  pour  les 
enfants  catholiques,  de  vingt  élèves. 

Personnel  des  deux  maisons.  1°  Coum-capou,  quatre  prêtres, 
sept  clercs,  deux  laies  j  3°  Fener-baghichê,  quatre  prêtres, 
trente  clercs^-l  laie. 

S"  Maison  des  Sœurs  Oblates  de  l'Assomption.  En  même 
temps  que  les  Pères,  les  Sœurs  s'établissaient  aossi  à  Fener- 
baghtchè.  Elles  y  ont  un  dispensaire  et  une  école,  comme  à 
Conm-capou. 

4°  La  mission  en  Asie  Mineure.  Le  Vicariat  a  chargé  les 
PP.  Âssomptionnistes  de  la  paroisse  latine  de  Brousse,  et  de 
plusieurs  stations  apostoliques.  Nous  noterons  seulement  Car- 
tal,  où  ils  ont  une  station  fixe,  avec  école,  Ismidt,  ou  Nicomédie, 
Elski-chéir,  où  ils  ont  aussi  écoles  et  dispensaires.  Ils  se  bornent 
àvisiter  an  certain  nombre  d'autres  endroits  où  se  trouvent  quel- 
ques catholiques.  La  S.  Cong.  de  la  Propagande  leur  a  confié 


5 IV. 

Les  Frères  Mineurs  Capucins  de  Paris.  1890. 

k  la  suite  des  mesures  prises  contre  les  communautés  reli- 
gieuses, en  1880,  les  supérieurs  songèrent  à  procurer  à  leurs 
jeunes  gens  des  abris  sûrs  et  tranquilles  où  ils  pourraient  faire 
leur  éducation  religieuse  et  achever  leurs  études  théologiques. 
Us  ne  purent  trouver  qu'à  l'étranger  ces  abris  dont  ils  avaient 
besoin.  C'est  ainsi  que  les  Capucins  de  Paris,  après  avoir  erré 
en  différents  paya,  vinrent  enfin  se  fixer  à  Constantinople,  où 
les  attiraient  du  reste  puissamment  les  religieux  de  leur  pro- 
vince, déjà  établis  à  St-Louis. 

Ub  ont  acquis,  sur  le  bord  de  la  mer,  et  dans  une  magnifique 
position,  une  grande  propriété  et  y  ont  bâti  un  couvent,  con- 


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—  444  — 

forme  aux  traditions  de  leur  Ordre.  Us  y  suivent  les  exercices 
de  leur  règle  et  se  livrent  à  l'étude.  Cependant  les  Pères  rendent 
à  la  paroisse  et  aus  communautés  les  services  qui  sont  compa- 
tibles avec  leurs  occupations.  Ils  n'ont  pas  de  chapelle  ouverte 
au  public. 

Personnel  :  prêtres  six,  clercs  trente,  frères  lais  six,  novices 
quatre. 


IjCs  Frères  des  Écoles  Chrétiennes.  1842. 


L'Église  catholique  a  toujours  regardé  l'instruction  des  en- 
fonts  comme  un  de  ses  devoirs  les  plus  sacrés.  Elle  a  imposé 
aux  prêtres  préposés  aux  paroisses  l'obligation  d'y  donner  les 
soins  les  plus  consciencieux,  par  eux-mêmes  ou  par  des  hommes 
de  leur  choix.  Aussi  a-t-on  vu  partout  s'élever,  à  l'ombre  de 
DOS  églises,  des  écoles  de  tous  les  degrés  :  universités  dans  les 
grandes  villes,  collèges  dans  les  plus  petites,  écoles  élémentaires 
jusque  dans  les  plus  petits  villages.  A  Constantinople  elle  n'a> 
vait  pas  manqué  à  son  devoir  :  les  Jésuites  et  les  Capucins 
avaient  des  écoles  florissantes,  tous  les  autres  couvents  en 
avaient  aussi  de  moindres.  Quand  la  rëvolation  française  eut, 
même  en  Turquie,  bouleversé  l'ordre  ancien,  il  fallut  du  temps 
pour  relever  les  ruines  du  passé  et  rendre  florissantes  les  écoles 
nouvelles.  Les  Prêtres  de  la  Mission  qui  remplaçaient  les 
Jésuites  à  St-Benolt,  avaient  ouvert  leur  collège  dès  1804,  et  le 
soutenaient  au  prix  de  grands  sacrifices.  Mais  il  manquait  des 
écoles  élémentaires  pour  le  peuple. 

Or  il  existe  dans  l'église  plusieurs  instituts  destinés  spécia- 
lement à  donner  aux  petits  enfants  l'enseignement  élémentaire, 
surtout  celai  du  catéchisme.  Parmi  ces  instituts  le  plus  ancien 
et  le  plus  répandu  est  incontestablement  celui  des  Frères  des 
Écoles  Chrétiennes,  fondé  par  le  Bx  J.-B.  de  la  Salle.  Aussi  c'est 
à  eux  qae  M.  Leleu,  préfet  de  St-Benolt,  s'adressa,  quand  il 
Toulutétablir  à  CP.  des  écoles  pour  les  garçons,  comme  il  venait 
d'en  ouvrir  pour  les  filles  avec  les  Sœurs  de  St- Vincent  de  Paul. 


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—  445  — 

C'est  en  1842,  que  les  Frères  ârent  leur  première  apparition  à 
CP.  sous  la  conduite  du  Cher  F.  Urin.  Ils  n'étaient  alors  que 
cinq,  dont  an  pour  les  offices  temporels.  M.  Leieu  les  établit  à 
St-Benoltj  où  ils  constituèrent  une  communauté  distincte  de 
celle  des  Lazaristes,  qui  leur  donnaient  une  généreuse  hospita- 
lité. 

Les  Frères  ouvrirent  quatre  classes,  qui  furent  aussitôt  au 
complet.  Les  enfants  catholiques  de  toute  nationalité  se  pressè- 
rent pour  recevoir  un  enseignement  catholique  et  français.  Il 
n'y  a  pas  de  doute  que  c'est  en  grande  partie  aux  classes  des 
Frères  qu'est  due  la  diffusion  de  notre  langue  et  l'inQuence  que 
la  France  exerce  dans  le  Levant.  Avant  les  écoles  populaires 
des  Frères  et  des  Sœurs,  la  langue  italienne  était  celle  de  la 
majorité  des  catholiques,  celle  de  tout  le  clergé,  et  aussi  celle 
du  commerce  :  elle  perdit  peu  à  peu  du  terrain  et  fut  remplacée 
par  la  langue  française.  La  guerre  de  Crimée  acheva  l'œuvre, 
en  lui  ouvrant  les  portes  des  grandes  administrations  civiles  et 
des  écoles  de  l'État. 

Mais  les  classes  de  St-Benolt  étaient  bien  éloignées  de  la  plus 
grande  partie  des  enfants  catholiques.  Les  Frères  durent  donc, 
en  1848,  ouvrir  une  école  de  quartier  dans  Péra,  prèaduTaqcim. 
Cependant  les  Frères  ne  faisaient  qu'un  seule  communauté  rési- 
dant à  St-Benolt. 

Des  raisons  multiples  amenèrent  dans  la  situation  des  Frères 
un  changement  radical  :  en  1851,  ils  quittèrent  St-Benolt  pour 
vivre  d'une  vie  complètement  indépendante.  Sans  rien  changer, 
pour  le  moment,  à  leur  école  du  Taqcim,  ils  installèrent  leurs 
classes  dans  nne  maison  louée  de  la  rue  luksek-qaldirim,  et  la 
communauté  s'établit  dans  la  maison  Jacob,  auxPetitsChamps: 
quelque  temps  ils  résidèrent  aussi  dans  une  des  maisons  de 
St-Louis,  et  dans  d'autres  locaux  de  location.  C'est  depuis  leur 
établissement  à  Péra  que  les  Frères,  ayant  leur  pleine  indépen- 
dance, purent  donner  libre  champ  à  leur  zèle. 

En  1854,  ils  transportèrent  leurs  classes,  de  la  rue  luksek- 
qaldirim  à  celle  de  Perchembè-basar,  chez  les  PP.  Dominicains, 
qui  leur  cédèrent  d'abord  une  partie  de  leur  couvent,  et  ensuite 
une  de  leurs  maisons  :  ils  n'y  furent  vraiment  installés  néan- 
moins qu'en  1857  quand,  l'intendance  militaire  leur  ayant  donné 
les  débris  des  barraquements  de  l'année  française,  ils  en  firent 


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—  446  — 

construire,  sar  le  terrain  des  Dominicains,  des  écoles  conve- 
nables, qui  durèrent  jusqu'en  1877. 

Cette  même  année  1857  vit  s'opérer  un  progrès  réel  dans  la 
situation  des  Frères  :  ils  louèrent  dans  la  rue  Imam,  au-dessus 
d'Aga-djamici,  une  maison  assez  vaste  où  ils  ouvrirent  un  demi- 
pensionnat,  destiné  à  faire  faire  des  études  plus  complètes  aux 
enfants  des  familles  du  commerce  :  la  communauté  put  aussi 
s'y  établir.  Ils  fondèrent  ensuite  une  école  arménienne,  sur  la 
demande  de  Mgr  Hassoun  ;  mais  elle  n'ent  qu'une  bien  courte 
durée. 

Enân  en  1863,  les  Frères  purent  sortir  de  l'état  précaire  et 
provisoire  où  ils  se  trouvaient  depuis  plus  de  vingt  ans  et  ils 
acquirent,  presque  en  même  temps,  deux  immeubles,  l'un  rue 
Camavoula  pour  les  écoles  primaires,  l'autre  à  Kadi-keui,  pour 
y  fonder  un  pensionnat.  Ils  ne  parent  pas  néanmoins  construire 
immédiatement  le  pensionnat,  mais  ils  en  ouvrirent  les  cours 
dans  de  vastes  bâtiments  situés  à  Hoda,  et  occupés  aujourd'hui 
par  les  Pères  Mékitaristes  :  ils  y  restèrent  quatre  ans. 

L'incendie  de  1870  qui  consuma  le  pensionnat  de  la  me 
Imam  et  les  écoles  de  la  rue  Carnavoula  et  qui  rainait  absolu- 
ment les  Frères,  fut  au  contraire  le  commencement  de  leur 
prospérité.  Ils  en  prolltèrent  pour  construire  le  collège  de 
Kadi-keui,  et  avec  la  suite  du  temps,  tons  leurs  autres  éta- 
blissements. Aujourd'hui  ils  possèdent  à  Constantinople  cinq 
communautés  florissantes,  dont  nous  allons  parler  en  détail. 

1"  Kadi-keui.  Co  lié ffe  français  de  St-Joseph.  1870. 

C'est  en  1863  que  les  Frères  firent  l'acquisition  d'une  magni- 
fique propriété,  sise  à  Kadi-keui,  rue  Ligori-tchechmèci,  pour  y 
construire  un  collège.  Leurs  ressources  avaient  été  épuisées  par 
l'acquisition,  ils  ne  purent  donc  songer  à  construire  tout  d'a- 
bord; mais  quand  l'incendie  de  1870  les  eutdépouillès  de  tout, 
ils  n'avaient  pins  à  hésiter,  il  leur  fallait  une  maison  pour  s'a- 
briter eux-mêmes  et  pour  recevoir  leurs  élèves.  Leurs  ressources 
n'étaient  pas  considérables,  mais  ils  se  décidèrent  quand  même 
à  bâtir  sans  retard  un  premier  corps  de  logis  sur  un  plan  qui 
pourrait  être  continué  plus  tard.  Le  16  août,  le  curé  de  Kadi- 
keui,  bénissait  la  première  pierre  de  la  nouvelle  construction  : 


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—  447  — 

le  1"  novembre  suivant  Mgr  Pluym  bénissait  solennellemeot  le 
nouveau  collège  :  en  soixante-quinze  jours  l'œuvre  avait  été 
menée  &  terme,  et  cela  grâce  au  dévouement  et  à  l'activité  des 
Frères.  Ce  n'était  qu'une  construction  provisoire,  partie  en  bois, 
mais  solide  et  capable  de  durer  longtemps  :  elle  dure  encore 
après  vingt-deux  ans.  Le  but  essentiel  était  obtenu  :  on  pouvait 
recevoir  les  élèves. 

Depuis  cette  époque  les  bâtiments  se  sont  peu  â  pea  accrus, 
OD  a  ajouté  une  chapelle,  deux  corps  de  bâtiments,  des  bangards, 
des  dépendances  de  tout  genre,  en  un  mot  c'est  [aujourd'hui  le 
plus  grand  et  le  mieux  installé  de  tous  les  établissements  d'éda- 
cation  que  les  catholiques  possèdent  à  CP.  :  il  n'a  aucune  pré- 
tention au  grandiose,  mais  il.  ne  manque  ni  de  beauté,  ni  de 
majesté.  Avec  le  temps  on  le  complétera  en  reconstruisant  le 
corps  de  logis  ancien  et  la  façade  principale. 

Le  collège  est  la  résidence  du  F.  Visiteur  de  l'Orient,  et  le 
lieu  ofi  les  frères  viennent  faire  leurs  retraites,  et  se  reposer  de 
leurs  fatigues. 

Le  service  religieux  est  assuré  par  une  convention  conclue 
entre  le  P.  Provincial  des  Capucins  de  Paris  et  le  F.  Visiteur. 
La  mission  de  St-Louis  donnera  un  aumônier  au  collège,  et  les 
Frères  se  chargeront  de  loger,  non  seulement  l'aumdnier  titu- 
laire, mais  aussi  les  religieux  quilui  seront  adjoints  pour  former 
une  petite  communauté,  jusqu'à  ce  qu'il  en  ait  été  arrangé  au- 
trement. Le  collège  des  Frères  à  Kadi-keui,  ressemble,  dans  la 
plupart  des  points,  aux  autres  collèges  que  nous  voyons  en 
France  ;  sons  d'autres  rapports,  il  s'en  sépare  sensiblement.  Il 
faut  donner  aux  enfants  les  notions  de  tontes  les  sciences,  sans 
lesqaelles  il  n'y  aurait  pas  aujourd'hui  surtout  d'éducation  sé- 
rieuse j  il  faut  insister  en  particulier  sur  l'instruction  religieuse 
au  milieu  d'une  population  où  toutes  les  religions  se  coudoient, 
et  oit  ce  mélange  constant  met  en  grand  danger  la  foi  des  ca- 
tholiques ;  mais  à  Constantinople  les  sciences  qui  ont  trait  à 
l'industrie,  à  l'agriculture,  et  à  la  littérature  ancienne,  doivent 
être  mises  de  cété,  comme  complètement  inutiles  pour  une  gé- 
nération qui  ne  sait  s'appliquer  qu'au  commerce,  ou  bien  aux 
diverses  fonctions  civile.^  des  administrations  gouvernementales 
ou  financières.  Les  langues  vivantes  surtout  sont  indispensa- 
bles. La  situation  géographique  de  CP.  sa  population  mélangea 


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—  448  — 

de  tant  de  peuples,  les  exigences  de  son  commerce  demandent 
impérieusement  que  tous  ceus  qui  veulent  y  tenir  une  place  ou 
y  faire  leur  chemin  sachent  plusieurs  langues.  Tous  les  élèves 
doivent  donc,  outre  le  français  qui  est  k  langue  de  l'école,  ap- 
prendre le  grec,  le  turc,  l'anglais,  l'allemand,  etc.  Il  est  ordi- 
naire pour  eux  de  se  servir  dans  la  même  conversation  de 
quatre  ou  cinq  langues  différentes.  Ils  le  font  avec  une  grande 
facilité,  comme  du  reste  tous  les  orientaux.  Cependant  les  vrais 
amis  des  Frères,  et  ceux  qui  connaissent  mieux  les  besoins  du 
pays  regrettent  que  dans  leurs  collèges  et  leurs  écoles  élémen- 
taires, ils  ne  donnent  pas  une  place  plus  sérieuse  encore  aux 
langues  ofiicieUes  du  pays  c'est-à-dire  au  grec,  et  surtout  au 
turc,  car  leurs  élèves  ne  peuvent,  sans  elles,  être  admis  dans 
les  administrations  officielles. 

Ce  genre  d'éducation  répondant  mieux  aux  besoins  et  aux 
goûts  de  la  population  levantine,  il  n'est  pas  étonnant  que  les 
écoles  et  collèges  des  Frères  ne  reçoivent  un  très  grand  nombre 
d'enfants.  On  peut  même  dire  que  les  autres  établissements 
doivent  se  modeler  sur  eux  s'ils  veulent  avoir  des  élèves. 

Parmi  les  beaux-arts,  un  seul  est  apprécié  et  cultivé  dans  ce 
collège,  «  la  musique.  »  Beaucoup  d'élèves  apprennent  le  violon 
et  le  piano.  On  a  formé  dans  le  collège  une  bande,  plus  ou  moins 
fournie  suivant  les  années,  mais  qui  obtient  de  vrais  succès. 

Personnel  :  Religieux  trente  ;  Aumôniers;  les  Pères  Capucins 
de  la  mission  deSt-Louis. 

Élèves  internes  :  cent  vingt-trois,  dont  catholiques,  soixante- 
dix-hait;  schismatiques,  vingt-cinq;  protestants,  deux;- Is- 
raélites, douze;  musulmans,  six.  Externes  :  cent  vingt,  dont 
catholiques,  trente-deux;  schismatiques,  soixante  dix-sept; 
protestant,  un;  Israélites,  huit;  musulmans,  deux. 

Tous  les  élèves  chrétiens  suivent  tous  les  exercices  des 
classes  et  de  la  chapelle  :  les  musulmans  et  les  Israélites  ne 
suivent  pas  les  cours  de  religion  et  ne  vont  point  à  la  chapelle.  H 
en  est  de  même  dans  tous  les  établissements  d'éducation  de  CP. 

2°  École  gratuite  paroissiale  de  Kadi-keui.  1878. 

Depuis  plusieurs  années  Mgr  Grasselli,  vicaire  patriarcal,  et 
M.  l'abbè  de  Negri,  curé  de  Kadi-keui,  sonpiraient  après  une 


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—  449  — 

école  paroissiale,  où  les  enfants  du  pays  pussent  apprendre  leur 
religion  et  les  éléments  âea  sciences  usuelles.  Us  voyaient  avec 
une  grande  peine  ces  enfants  catholiques  abandonnés  à  eux- 
mêmes,  ou  obligés  de  fréquenter  les  écoles  schismatiques.  Mgr 
Qrasselli  insista  auprès  du  F.  Visiteur  pour  obtenir  des  Frères, 
promit  de  leur  faire  un  traitement  suffisant,  et  de  leur  trouver 
un  local  pour  les  classes  :  à  ces  conditions  les  Frères  commen- 
cèrent les  classes  le  2i  octobre  1878.  Ceux  qui  les  tiennent  ap- 
partiennent à  la  communauté  du  collège. 

Personnel  :  Frères,  trois. 

Elèves,  tous  externes  :  cinquante-trois,  dont  catholiques, 
trente  et  un  ;  schismatiques,  vingt-deux. 

Cette  école  donne  de  bons  résultats. 

3".  Écoles  de  Péra  et  Galata. 

1"  Ecole  de  St-Pierre  de  Oalata.  Lorsque  les  Frères  durent 
quitter  St-Benolt  où  leurs  œuvres  se  trouvaient  trop  k  l'étroit, 
la  communauté  alla  s'établir  à  Péra,  mais  on  conserva  encore 
des  classes  à  Galata.  Elles  étaient  installées  dans  la  rue  luksek- 
qaldirim;  mais  elles  y  étaient  mal.  Après  quelques  années,  le 
nouveau  supérieur  de  St-Pierre,  sur  la  paroisse  duquel  elles 
étaient,  les  reçut  dans  le  couvent  même  des  Dominicains,* au 
rez-de-chaussée,  puis  comme  ce  n'était  commode,  ni  pour  les 
Frères  ni  pour  les  religienx,  il  leur  assigna  quelques  petites 
maisons  dépendantes  du  couvent.  Enfin,  en  1857  l'intendance 
française  donna  aux  Frères  les  bois  des  barraquements  qui 
avaient  servi  à  l'armée  pendant  la  guerre  de  Crimée.  On  en  fit 
des  bâtiments  assez  grands  pour  contenir  trois  classes,  sur  un 
terrain  que  les  Pères  Dominicains  leur  laissèrent  poar  un  très 
faible  loyer.  Les  Frères  y  établirent  leurs  classes  de  Oalata 
en  1857. 

En  1870,  les  Dominicains  ayant  compassion  de  la  pauvreté 
des  Frères  qui  avaient  tout  perdu  dans  l'incendie  du  5  juin, 
-cessèrent  même  d'exiger  tout  loyer. 

Le  9  février  1877,  un  grand  désastre  vint  fondre  sur  cette 
maison,  un  jour  de  congé,  en  l'absence  de  tous  les  Frères,  le  feu 
consuma  tout,  sans  qu'il  fût  possible  de  rien  sauver.  Sans  perdre 
■courage,  les  Frères  se  mirent  immédiatement  en  mesure  de  ré- 


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—  450  — 

tablir  leurs  classes,  mais  sur  un  pied  meilleur  et  plus  solide.  A 
certaines  conditions  déterminées  d'avauce,  les  Pères  Domini- 
cains prêtèrent  le  terrain  en  haut  de  leur  jardin,  et  les  Frères  y 
construisirent,  à  leurs  frais,  une  grande  et  belle  maison  qui  pou- 
vait recevoir  quatre  classes  et  de  plus  une  petite  communauté 
indépendante.  Ce  ne  fut  pas  sans  quelques  discussions  parfois 
assez  vives,  même  devant  le  tribunal  du  Consulat  de  France,  et 
devant  celui  du  Vicariat,  que  ces  fondations  furent  achevées; 
mais  depuis  cette  époque  le  bon  accord  n'a  pas  cessé  de  régner 
entre  le  couvent  et  l'école.  Ce  sont  les  enfants  de  l'école  qui 
font  le  service  de  l'église,  et  ce  sont  les  Pères  qui  donnent  aux 
enfants  l'iastruction  religieuse  et  tous  les  secours  spirituels. 

Les  classes  sont  gratuites  et  la  maison  est  entretenue  par  le 
Vicariat  patriarcal,  au  moyen  des  allocations  de  la  Propagation 
de  la  Foi. 

Personnel:  Frères,  six. 

Enfants  :  deux  cent  trente-huit,  dont  lalins,  cent  soixante- 
quinze  ;  grecs  orthodoxes,  cinquante-huit  ;  arméniens,  deux  ; 
israélites,  trois. 

2°  Classes  du  Taqcîm,  rue  Parmaq-capou.  Cette  école 
représente  les  plus  anciennes  que  les  Frères  ont  eues  à  Péra, 
nous  n'avons  donc  pas  à  en  faire  l'histoire.  Dans  sa  forme  ac- 
tuelle elle  ne  remonte  qu'à  l'incendie  de  1870.  En  allant  s'établir 
&  Kadi-keui,  les  Frères  ne  pouvaient  songer  à  abandonner  les 
enfants  de  Péra  :  ils  ne  pouvaient  plus  y  avoir  de  pensionnat  ; 
mais  ils  y  conservèrent  des  classes  externes.  Elles  sont  bien  éta- 
blies sur  un  terrain  qui  appartient  à  l'institut  et  ne  dépendent 
d'aucune  paroisse. 

Personnel  :  Frères  6  ;  aumdnier  :  un  prêtre  séculier. 

Enfanta  :  246,  dont  144  latins,  14  arméniens- catholiques, 
86  grecs  orthodoxes,  3  arméniens  grégoriens. 

3°  Classes  de  Pancaldi.  École  paroissiale  du  St-Esprit. 
Dès  que  l'augmentation  de  la  population  catholique  eut  rendu 
nécessaire  la  construction  d'une  église  et  l'érection  d'une  pa- 
roisse sur  les  hauteurs  de  Pancaldi,  on  songea  à  y  établir  aussi 
des  écoles  pour  les  enfants  des  deux  sexes.  Ce  ne  fut  cependant 
que  Mgr  Pluym  qui,  sur  un  terrain  appartenaat  au  vicariat,  fit 


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—  451  — 

élever  des  classes  convenables.  Les  Sœurs  de  SioQ  se  chargèrent 
d'instruire  les  filles,  et  des  Frères  venaient  chaque  jour  dn  Taq- 
cim  faire  la  classe  aux  garçons.  Les  choses  marchèrent  ainsi 
pendant  des  années,  assez  peu  commodément  pour  les  uns 
comme  pour  les  antres;  mais  enfin  Mgr  Vanutelli  M  construire, 
sur  le  même  terrain,  une  fort  belle  maison  pour  les  classes  et 
pour  les  Frères,  et  abandonna  toute  l'ancienne  aux  Sœurs  de 
N.-D.  de  Sion  qui  purent  y  étendre  leurs  œuvres. 

Cette  école  est  exclusivement  catholique  :  elle  est  entretenue 
par  le  vicariat,  à  l'aide  des  allocations  de  la  Propagation  de  la 
Foi.  Les  élèves  font  le  service  de  la  paroisse  et  de  la  cathédrale. 
On  y  donne  un  soin  tout  particulier  aux  cérémonies  et  aux 
chants.  On  y  a  organisé  une  musique  instrumentale  qui  se  fait 
entendre  dans  les  grandes  cérémonies  et  qui  relève  l'éclat  des 
pompes  religieuses. 

Personnel  :  6  Frères. 

Élèves  :  313,  dont  172  latins  et  41  arméniens,  tous  catho- 
liques. C'est  le  clergé  de  la  paroisse  qui  s'en  occupe. 

4"  Deini-pensionnat  de  Péra,  'me  Agha-hammam.  Les 
écoles  gratuites  étaient  organisées  partout  dans  la  ville  et  mar~ 
chaient  bien  :  il  semblait  donc  qu'il  n'y  avait  plus  rien  k  faire 
qu'à  maintenir  ce  qui  existait  ;  cependant  il  y  avait  beaucoup 
d'enfants  à  Péra  qui  demandaient  une  éducation  plus  soignée 
et  une  instruction  plus  complète  que  celles  que  l'on  reçoit  dans 
les  écoles  populaires.  D'un  autre  câté  les  parents  ne  pouvaient 
pas  tous  mettre  leurs  enfants  en  pension  à  Kadi-k(^i  ;  il  fallait 
donc  aviser.  C'est  en  1886,  le  20  septembre,  que  le  T.  C.  Frère 
Jonathan- Amédée  ouvrit,  rue  Agha-hammam',  le  demi-pension- 
nat, ou  externat  payant,  sous  la  protection  de  St  Michel  ar- 
change. La  première  année,  38  enfants  suivirent  les  cours,  de- 
puis il  a  été  toujours  eu  progressant,  avec  lenteur.  Les  classes 
y  sont  sérieuses,  et  les  enfants  qui  y  passent  toute  la  journée, 
ont  en  même  temps  les  avantages  de  la  vie  de  collège  et  ceux 
de  la  vie  de  famille. 

Personnel  :  7  Frères  ;  aumôniers  ;  les  Pères  Capucins  de  St- 
Louis. 

Élèves  :  93,  dont  71  catholiques,  32  schLsmatiques. 

De  tout  ce  qui  précède  il  résulte  donc  que  les  Frères,  aujour- 


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—  452  — 

d'hui  au  nombre  de  cinquante-cinq,  ont  dans  leurs  classes 
à  peu  près  onze  cents  enfants  (1086)  auxquels  ils  donnent  une 
éducation  chrétienne  et  française  :  on  ne  peut  donc  nier  qu'ils 
ne  fassent  ainsi  un  très  grand  bien.  Ne  serait-il  pas  possible  de 
faire  encore  davantage?  Comment  se  faitril,  par  exemple,  que  les 
Frères  n'aient  pas  une  seule  œuvre  de  persévérance  pour  leurs 
élèves  ?  Les  catholiques  y  sont  au  nombre  de  sept  cents,  il  en 
sort  en  moyenne  cent  cinquante  par  an  :  que  deviennent  ces 
enfants,  et  encore  une  fois  comment  se  fait-il  que  personne 
ne  s'en  occupe,  à  cet  âge  où  ils  auraient  un  si  grand  besoin 
d'une  protection  efficace?  Les  Frères  ont  à  leur  tète  comme  Vi- 
siteur un  homme  remarquable  et  qui  connaît  parfaitement  le 
Levant,  puisqu'il  l'habite  depuis  plus  de  trente  ans  et  qu'il  y 
a  fondé  partout  des  maisons  de  son  institut;  je  me  permets  de 
lui  signaler  cette  lacune.  Son  œuvre  ne  sera  complète  que  quand 
il  l'aura  comblée. 

Mais  en  regardant  en  arrière  et  en  nous  rendant  compte  du 
chemin  parcouru,  nous  ne  pouvons  que  constater  que  les  Frères 
des  Écoles  chrétiennes,  par  leur  modeste  et  persévérante  action, 
ont  contribué  largement  à  répandre  l'instruction  chrétienne  et 
la  langue  française  dans  la  ville  de  Constantinople,  et  qu'ils  y 
tiennent  une  place  très  honorable. 


S  VI. 
Les  Petits  Frères  de  Marte.  1892. 


Les  Prêtres  de  la  Mission  ont  appelé,  au  commencement  de 
l'année  scolaire  1893-1893,  dans  leur  collège  de  St-Benott,  des 
religieux  qui  n'avaient  pas  encore  pénétré  à  Constantinople  :  ce 
*  sont  les  Petits  Frères  de  Marie.  Cet  Institut  a  pris  naissance 
dans  le  diocèse  de  Lyon,  il  y  a  plus  de  cinquante  ans  :  il  a  main- 
tenant sa  maison-mère  à  St-Genis-Lavai,  près  de  Lyon.  Leurs 
fonctions  seront  de  tenir  les  petites  classes  de  français,  et  de 
s'occuper  des  plus  jeunes  enfants  :  ils  ne  forment  pas  une  com- 
munauté spéciale,  mais  ils  vivent  dans  le  collège  de  St-Benoit. 


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Ils  y  sont  au  nombre  de  sept.  Ils  prêtent  aux  prêtres  de  la  Mis- 
sion un  concoors  très  actif. 


RÉCAPITULATION  DU  CLESOÉ,   SÉCUUEB  ET  RÉGUUE». 

Le  Vicaire  apostolique  patriarcal,  Mgr  Auguste  Bonetti,P.M., 
archevêque  de  Palmyre,  délégué  apostolique  pour  les  rites 
orientaux. 

Le  Vicaire  général,  M.  l'abbê  Jean  Genocchi. 

Le  Chancelier  du  Vicariat  patriarcal,  M.  l'abbé  Hollas. 

Les  curas  des  paroisses,  chapelains  des  commanautâs,  etc. 
En  tout  vingt-six  prêtres  séculiers  employés  dans  la  ville,  dont 
trois  indigènes  seuls  incorporés  au  diocèse. 


Clergé  régulier. 

RR.  PP. 

Conventuels. 

Préfet-PrOTincial. 

Prêtres 

12                    Lais 

6 

Dominicains. 

Vicaire. 

id. 

10                     id. 

4 

Obaervantina 

.    Commissaire. 

id. 

2                     id. 

1 

Riformati. 

Préfet. 

id. 

13                     id. 

3 

Capucins. 

ProTJncial  de  Paris. 

Préf. 

id. 

Il                     id. 

3 

id. 

San  Stefano 

id. 

4  Clercs     5   id. 

4 

id. 

Kadi-keui  (couvent) 

id. 

5     id.      29   id. 

8 

Jésuites.    . 

Provincial  de  Sicile 

id. 

12     id.       2   id. 

4 

Lazaristes, 

Préfet. 

id. 

21     id,       i   id. 

13 

Augustins  de  l'Assomption. 

id. 

8     id.     33    id. 

3 

Frères  des  Ecoles  chrétiennes.     53 

Petits  Frères  de  Marie.                   7 

En  tout  : 

Prêtres  séculiers. 
Prêtres  religieux. 
Total  des  prêtres. 

26 
98 

Frères  clercs  ou  scolastiques. 
Frères  lais  ou  coadjuteurs. 
Frères  instituteurs. 


182  •)- 124  =  306 


Le  clergé,  tant  séculier  que  régulier,  s'élève  donc  au  chiffre 
de  306. 


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Ecoles  des  garçons. 


CoDfentuels 

Il 

Riformalî 

CApucins 

Luaristes 

Jésuites.  Assomption  . 


Frères  des  Éc.  chrétiennes. 


Filles  de  la  Charilé  . 


Dominicaines 

Franciscaines  deGémona  . 
SS.  de  l'Immaculée  Conc. 


St-Antoine 30 

Buyuk-dérè 65 

Sl«-Harie 30 

Î'  Gr.  Séminaire  IX 

Ec.apost.OR.  3* 

Externes.  .  .  23 

San  Stefano 8 

c.  o      ,.            ICoUÈge.  .  .  .  150. 

(  Séminaire  .  .  18 

-.  _                     l  Internes  ...  SS 

*'-»'"«"■     iE.l,m»...  iS 

Sle-Pulchérie il7 

„                          (Externes.  .  .  115 
Coum-capou  .  .1 ,  , 

•^           I  Internes ...  18 

Fener-baghlchè 32 

767 

i  Internes  ...  1S3 

ExteiAes.  .  .  120 

Paroisse  ...  53 

St-Pierre 239 

I  Taqcim 240 

Pancaldi 213 

Sl-Hichel 93 

1.084 

Providence IfiO 

Taqdm 30 

luP.i. I  Orphelin,...  80 

i  Apprentis  .  .  18 

I  Si-Georges  .  .  .    Orphelins  .  .  30 

Artigiana 38 

.  Sculari 12 

318 

Makri-keui 20 

lédi-koulè .  3» 

Prinkipo SI 

Péra 2S 

Bujuk-dérè 25_ 

123 

Total  général 2.294 


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—  455  — 

Ce  clergé  paraîtra  nombreux  à  beaucoup  de  nos  lecteurs  fran- 
fais,  mais  il  De  faut  pas  oublier  que  les  catholiques  latins  sont 
perdus  au  milieu  d'une  immense  multitude  d'hommes  de  toutes 
les  religions,  qu'ils  ont  besoin  d'être  soutenus  dans  leurs  lattes 
de  tons  les  jours  pour  conserver  leur  foi,  et  prêtres  et  religieux 
ne  sont  pas  trop  nombreux  pour  maintenir  et  agrandir  les  oeuvres 
qui  existent  à  Gonstantinople. 


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CHAPITRE  V. 

COMMUNiLXJTÊS  REUr.IEUSES  DE  FEMMES.   —  £C0LE3  DE  FILLES. 


Si  la  population  de  Constant!  nople  compte  peu  de  catho- 
liques latins,  ceux-ci  par  contre  possèdent  un  clergé  nombreux, 
et  les  œuvres  d'instruction  et  de  zèle  sont  florissantes  parmi 
eux.  Mais  les  Arméniens  catholiques  ont  un  clergé  beaucoup 
plus  nombreux  encore,  relativement  à  leur  nombre.  Les  Grecs 
orthodoxes  et  les  Arméniens  grégoriens  ont  aussi  beaucoup  de 
prêtres,  de  docteurs  et  de  moines  ;  II  est  cependant  un  point  où 
les  catholiques  l'emportent  incontestablement,  c'est  quand  II 
s'agit  des  Communautés  religieuses  de  femmes.  On  peut  consta> 
ter  que  la  charité  s'y  est  donné  un  libre  et  généreux  essort,  que 
tous  les  besoins  de  l'ûme  et  du  corps  ont  été  prévus  et  sont  se- 
courus par  ces  généreuses  viei^es.  Elles  sont,  là  comme  partout 
une  des  plus  brillantes  floraisons  du  catholicisme.  Nous  regrettons 
de  ne  pouvoir  qu'indiquer  leurs  œuvres  et  le  bien  qu'elles  font. 
Pour  elles,  comme  pour  les  religieux,  nous  procéderons 
suivant  la  date  de  leur  entrée  à  Constantinople. 


§1- 

Les  Filles  de  la  Charité,  ou  Sœurs  de  St-Vîncent  de  Paul. 

II  y  avait  eu  des  religieuses  de  différents  Ordres  à  Constanti- 
nople, dans  les  temps  anciens  et  surtout  pendant  la  conqnéte 
latine.  Quelques  monastères  surrècurent  à  l'empire  franco-vëni- 


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—  457  — 

tien.  Ainsi  nous  voyons  des  Cisterciennes  du  cAté  du  Pbanar, 
des  Clarisses  à  Galata,  des  Dominicaines,  probablement  i  Man- 
tellate  »  à  St-Pierre,  et  d'autres  encore. 

Quelqnes-unes  survécurent  m&me  à  l'empire  grec:  ainsi  nous 
voyons  qu'en  1535,  lors  de  la  prise  de  l'église  St-Paul  par  les 
Arabes  grenadins,  on  donna  aux  Dominicains,  qui  se  trouvaient 
sans  abri,  le  couvent  de  St-Pierre  où  vivaient  encore  quelques 
religieuses  de  leur  Ordre.  C'est  la  dernière  mention  positive  que 
l'on  rencontre  de  couvents  de  femmes.  Cela  se  comprend  aisé- 
ment :  il  n'y  avait  pas  ass^z  de  tranquillité  pour  que  des  reli- 
gieuses cloîtrées,  et  vouées  â  la  vie  contemplative  pussent  se 
développer  et  même  vivre. 

Les  Instituts  de  religieuses  non  clottrées  et  adonnées  aux 
œuvres  de  charité  sont  une  floraison  toute  récente  de  la  grande 
souche  catholique.  Si  St  Vincent  n'en  a  pas  été  l'inventeur,  c'est 
lui  du  moins  qui  en  a  été  le  principal  propagateur.  Quoi  qu'il  en 
soit  les  Filles  de  la  Charité  sont  les  premières  religieuses  qui 
sont  venues  de  France  à  Constantinople. 

C'est  M.  Leleu  qui  les  appela  en  avril  1838,  comme  nous  l'a- 
vons vu  à  l'article  des  Prêtres  de  laMissîon.  Il  fallut  un  grand  cou- 
rage aux  premières  Sœurs  qui  arrivèrent,  pour  aller  dans  les  rues 
de  Galata  et  de  Péra,  et  à  plus  forte  raison  dans  celles  de  Cons- 
tantinople. Les  Turcs  n'étaient  pas  encore  pénétrés  par  l'esprit 
occidental,  et  gardaient  jalousement  leurs  mœurs  antiques. 
Ainsi  l'usage  ne  permettait  pas  aux  femmes,  même  aux  chré- 
tiennes, de  sortir  et  surtout  de  paraître  devant  les  hommes,  sans 
être  strictement  voilées  :  et  ce  fut  un  spectacle  étrange  et  un 
vrai  scandale  que  de  voir  ces  Sœurs  sortir  modestement,  mais 
sans  voile,  au  milieu  des  rues  les  plus  fréquentées.  Mais  quand 
on  les  eut  vues  à  l'œuvre,  accueillir  avec  bonté,  et  soigner  avec 
une  charité  infatigable  tous  les  pauvres  et  tous  les  malades  qui 
se  présentaient,  sans  aucune  distinction  de  race  ou  de  religion, 
l'estime  publique  leur  fut  acquise,  et  la  liberté  leur  fut  laissée 
pleine  et  entière.  Les  Filles  de  la  Charité  ont  su  conserver  et  ac- 
croître encore  cette  estime  ries  premiers  jours  de  leur  arrivée. 
Los  épidémies  et  les  guerres  y  ont  laidement  contribué,  quand 
on  les  a  vues  ne  reculer  devant  aucune  fatigue  et  même  aucun 
danger  pour  faire  un  plus  grand  bien. 

Les  œuvres  des  Filles  de  la  Charité  ont  commencé  petitement, 


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_  458  — 

elles  se  sont  accrues  rapidement,  et  anjourd'hui  elles  sont  nom- 
breuses et  florissaates.  On  compte  dix  Maisons  de  leur  Institut 
à  Constantinople,  ou  dans  les  faubourgs,  et  cent  quarante-huit 
religieuses. 

Nous  allons  d'abord  énumèrer  les  maisons  suivant  la  date  de 
leur  fondation  :  nous  parlerons  ensuite  de  chacune  à  sa  place, 
soit  comme  établissement  d'éducation,  soit  comme  établisse- 
ment charitable,  l' La  Providence,  8  décembre  1839.  2*  Le  Taq- 
cim,  15  juin  1848.  3'  Bebek,  1853.  4"  N.-D.  de  la  Paix,  19  avril 
1857.  5°  Hôpital  municipal,  1865.  a°Tcho(iour-bo3tan,1869.7' 
L'Artigiana,  1873.  8"  St-Georges,  1873-1883.  9'  Gerémia,  1881. 
10"  Scutari,  1883. 

1'  Maison  de  N.-D.  de  la  Providence,  fondée  le 
8  décembre  i839. 

C'est  le  premier  établissement  et  le  berceau  des  Filles  de  la 
Charité  à  Constantinople.  C'est  encore  la  résidence  de  la  supé- 
rieure régionale  ou  visitatrice. 

La  maison  de  la  Providence  s'élève  dans  l'enclos  de  St-Benoit 
sur  l'emplacement  de  l'ancien  couvent  et  de  l'église  de  N.-D.  de 
la  Miséricorde,  qui  fut  uni  à  celui  de  St-Benolt  en  1449,  et 
donné  à  la  Congrégation  du  Mont-Cassin.  Après  la  conquête  mu- 
sulmane les  Frères  Mineurs  de  l'Observance  y  trouvèrent  an 
abri  jusqu'à  la  constructioù  de  St-Marie  Drapéris  en  1583.  Les 
premiers  Capucins  y  furent  reçus  en  1585,  et  St-Joseph  de  Léo- 
nîsse  y  fut  conduit  par  un  ange.  Les  Jésuites  y  établirent  une 
partie  de  leurs  œuvres,  pais  la  conMrie  de  la  charité  et  l'bdpi- 
tal  général.  Le  site  avait  donc  toute  une  histoire,  quand  les  La- 
zaristes y  installèrent  les  Filles  de  la  Charité.  La  vénérable  Sœur 
Lesaeur,  dont  la  population  de  CP.  conserve  religieusement  le 
souvenir,  trouva  bientôt  dans  son  intelligente  et  communicative 
charité  les  ressources  nécessaires  à  l'extension  rapide  des  œuvres 
confiées  à  son  zèle  et  à  son  expérience.  On  y  établit  successive- 
ment une  école  externe,  un  pensionnat,  un  orphelinat,  une  phar- 
macie et  un  dispensaire.  La  maison  était  fort  justement  nommée 
la  Providence,  car  tous  y  venaient  chercher  et  y  trouvaient  les 
secours  dont  ils  avaient  besoin  dans  leurs  misères  physiques  et 
morales. 


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—  459  — 

Le  feu  s'étant  déclaré  dans  cette  partie  de  l'enclos  de  St-Be- 
Dott,  dans  la  nuit  da  20  au  21  février  1865,  la  sœur  Caroline 
(Renaat),  qui,  à  peine  revenue  du  Mexique,  où  elle  avait  dirigé 
le  service  des  ambulances  de  l'armée  française,  avait;  été  appelée 
à  remplacer,  comme  visitatrice,  la  mère  Lesueur,  défunte,  s'oc- 
cupa tout  d'abord  des  orphelines  ;  on  fît  lever  et  babiller,  en 
hAte,  ces  jeunes  allés  que  les  Sœurs  dirigèrent  sur  divers  points, 
afin  de  les  mettre  en  s&reté  ;  pois,  la  sœur  Caroline  courant  à 
la  chapelle,  prit  le  tabernacle  qu'elle  emporta  dans  ses  bras  et 
sauva  des  flammes,  ainsi  que  le  tableau  de  la  Vierge,  placé  au- 
jourd'hui à  l'entrée  de  la  nouvelle  maison  ;  ce  furent  les  senls 
objets  dérobés  &  la  fureur  du  feu  ! 

Ne  voulant  pas  que  le  malheur  dont  les  Sœurs  venaient  d'être 
frappées  arrêtât  le  cours  de  leurs  bonnes  œuvres,  MM.  les  La- 
zaristes placèrent  ces  saintes  filles,  ou  mieux  leurs  classa  et 
leurs  orphelines,  dans  le  bAtiment  qu'Us  venaient  de  construire 
pour  le  séminaire  ;  quant  aux  Sœurs,  elles  se  logèrent  dans  les 
combles  des  misérables  maisons  de  l'enclos  ;  et  l'on  ne  saurait 
dire  quelles  misères  les  courageuses  filles  de  St-Yincent  ont  en- 
durées dans  ces  pauvres  réduits  I  _ 

On  ne  peut  se  rappeler,  sans  une  vive  émotion,  le  spectacle 
qui  s'offilt  aux  yeux  des  catholiques,  quelques  mois  à  peine 
après  l'incendie,  le  jour  de  la  Fête-Dieu  !  Confiante  dans  sa  foi, 
la  Sœur  visitatrice  voulut  que  le  premier  reposoir  de  la  proces- 
sion de  St-Beaott  s'élevât  sur  les  ruines,  presque  encore  fu- 
mantes, de  la  maison  de  la  Providence  l  Toutes  les  pauvres 
Sœurs,  agenouillées  là,  demandaient  à  Dieu  de  bèoir  et  d'exau- 
cer leurs  fervent«s  prières  pour  la  restauration  de  cet  asile  de  la 
charité  I  Leur  vœu  a  été  exaucé  :  le  gouvernement  français,  la 
colonie  et  le  gouvernement  du  sultan  lui-même,  leur  sont  ve- 
nus en  aide  ;  et  moins  de  deux  ans  environ  après  sa  destruc- 
tion, c'est-à-dire  en  avril  1857,  la  nouvelle  maison  de  la 
Providence  rouvrait  ses  portes,  comme  par  le  passé,  à  tous 
les  malheureux.  Toutes  les  anciennes  œuvres  y  ont  été  réta- 
blies (externat- ou vroir,  catéchuménat,  dispensaire),  sauf 
l'orphelinat,  porté  à  Tchoqour-  Bostan,  et  dont  il  sera  parlé 
plus  bas. 

La  Maison  de  N.-D.  de  la  Providence  réunit  un  grand  nombre 
d'œuvres  différentes. 


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—  460  — 

A,  LesŒuvres  de  la  Jeunesse.  l'Asile  des  garçons. 3° 'Asile 
des  ûlles.  3°  Classes  des  petits  garçons.  4*  Classes  des  filles. 
5'  Ouvroir  de  filles.  6°  Atelier  d'ouvrières.  7°  Associations  des 
Enfants  de  Marie.  8^  Association  des  Enfants  de  Marie  mariées. 

B.  Les  (meures  de  Charité.  1°  La  crèche.  2°  Le  dispensaire, 
â*  Visite  des  pauvres  et  des  malades.  4°  Association  des  Dames 
de  Charité.  5°  Association  des  Patronnasses  de  l'oeuvre  des  en- 
fants trouvés. 

ŒUVRES   DE  Là  JEUNESSE. 

1°  Moyenne  annuelle  des  dix  dernières  années. 

i"     Garçons.  120. 

Filles.      395. 

Total       515, 
3'  Crèche. 

Enfants  recueillis.  50. 
«         entretenus.  109. 
3°  Pauvres  et  malades. 

Secours  au  dispensaire.  36.050. 

Secours  à  domicile,  visites.  500. 

Portions  aux  enfants  des  classes.  16.435. 
4°  Associations. 

de  Charité.  200. 

de  Piété.   150. 

Enfants  de  Marie  mariées.  60. 
5°  Sommes  dépensées  depuis  dix  ans. 

par  les  Dames  de  Charité.  77.380. 

par  les  patronnesses  de  la  crèche.  125.766. 
Pour  toutes  ces  œuvres  les  Sœurs  sont  au  nombre  de  trente- 
aix. 

Les  Prêtres  de  la  Mission  en  sont  les  aumôniers. 

3'  Maison  du  Taqcim,  fondée  en  1833. 

L'hôpital  civil  et  militaire  du  Taqcim  appartient  à  la  France 
et  il  est  administré  par  le  consulat  de  France.  Les  Sœurs  y 


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—  461  - 

furent  appelées  en  1846  par  l'ambassade  française.  (Nous  en 
parlerons  dans  un  autre  chapitre).  Peu  de  temps  après  leur  ins- 
tallation au  Taqcim,  les  Sœurs  adjoignirent  à  l'hôpital  l'œuvre 
des  écoles,  celles  des  pauvres  malades  délaissés,  celles  des  En- 
fants de  Marie  et  du  patronage,  etc.  Ces  œuvres,  qui  sont  au- 
jourd'hui dans  un  état  très  prospère,  font  d'autant  plus  de  bien 
qu'elles  sont  placées  dans  un  quartier  très  populeux,  et  qu'il  n'y 
a  pas  à  proximité  d'autre  centre  catholique  pour  les  jeunes  Ûlles. 
Personnel  :  vingt  Sœurs  ;  aumôniers,  les  Prêtres  de  la  Mission. 


A.  Œuvres  de  la  jeunesse.  1°  Classes  de  petits  garçons. 
2°  Classes  des  filles.  3°  Ouvroir  et  atelier  d'ouvrières.  4°  Patro- 
nage des  jeunes  filles.  5°  Association  des  Enfants  de  Marie.  — 
B.  Œuvres  de  Charité.  1"  Hôpital.  2°  Dispensaire.  3°  Visite 
des  malades  pauvres  et  délaissés.  4°  Patronage  des  enfants  pauvres 
des  classes. 

Moyenne  annuelle  des  dix  dernières  années. 

1°  Cla-sses  et  ouvroirs. 

Garçons.     30. 

Filles.       416. 

Total.       446. 
3°  Enfants  pauvres  assistés  par  le  patronage.  120. 
3°  Malades. 

Soignés  au  dispensaire.  7.300. 

Traités  à  l'hôpital.  604. 

Visités  à  domicile.  150. 

Secourus  par  l'association.  120. 
4*  Associations. 

de  Piété.         Enfants  de  Marie.  410. 

f  <  mariées.  50. 

de  Charité.  250. 
5*  Sommes  dépensées  depuis  dis  ans. 

par  l'association  des  pauvres  malades.  87.004. 

par  les  patronnesses  des  enfants  pauvres  des  classes.  36.396. 


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—  462  — 

Ea  somme,  il  est  passé  h  l'hApital,  depuis  que  les  Soeurs  y 
sont,  dix -sept  mille  quatre  cent  soixante-quatre  malades,  dont 
douze  mille  deux  cent  trente-huit  catholiques,  quatre  mille 
cinq  cent  soixante-dix-neaf  iiétérodoxes  et  six  cent  quarante- 
sept  infidèles. 

Il  est  passé  dans  les  classes  environ  six  mille  enfants  dont 
Latins  deux  mille,  Arméniens  catholiques  deux  mille  six  cents, 
Arméniens  grégoriens  huit  cents,  Grecs  orthodoxes  six  cents. 

3°  Maison  Sl-Josepk  de  Bebeh,  fondée  en  1853. 

Cette  maison  a  connu  des  jours  plus  prospères. Toute  réduite 
qu'elle  est,  par  le  malheur  des  temps  et  des  circonstances,  elle 
continue  à  rendre  des  services  précieux  :  elle  instruit  la  jeunesse, 
elle  forme  des  ouvrières,  elle  visite  les  malades  et  secourt  les 
pauvres  dans  la  mesure  de  ses  ressources.  La  chapelle  sert  d'é- 
glise paroissiale  aux  Latins  et  aux  Arméniens  catholiques  du  voi- 
sinage. C'est  le  seul  centre  catliolique  de  ce  côté  du  Bosphore. 
Personnel  :  Sœurs,  cinq  ;  aaménier,  un  prêtre  séculier. 


A.  Œuvres  de  la  jeunesse,  l"  Pensionnat.  2'  Orphelinat. 
3°  Atelier  de  dentelles  et  ouvroir.  4°  Classes  externes.  5'  Asso- 
ciation des  Enfants  de  Marie.  —  B.  Œuvres  de  Charité.  \'  Un 
petit  dispensaire.  3°  Visite  des  pauvres  et  des  malades. 

Moyenne  annuelle  des  dix  dernières  années. 

1°  Œuvres  de  la  Jeunesse.  Quatre-vingts  élèves  de  diverses 
nationalités  et  religions. 
S'  Œuvres  de  Charité.  Suivant  les  ressources  et  les  besoins. 
Conversions  :  Musulmam,  un;  Arménien,  un. 

4°  Maison  de  N.-D.  de  la  Paix  Ouverte.  1879. 

Après  la  guerre  de  Crimée,  le  gouvernement  impérial  otto- 
man, raconte-UoQ,  voulant  reconnaître  les  services  rendos  par 
les  Sœurs  de  St-Vincent  de  Paul,  dans  les  ambulances  de  l'ar- 


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mëe,  soDgea  à  leur  offrir  des  décorations.  Il  fut  répondu  que  la 
meilleure  manière  de  récompenserles  Filles  de  la  Charité  était  de 
leur  procurer  le  moyen  de  faire  plus  de  bien.  A  la  suite  de  cette 
réponse,  sultan  Abdul-Medjid,  sur  la  requête  de  l'ambassade  de 
France,  coucéda  aux  Sœurs,  le  19  avril  1857,  aux  portes  de 
Constantinople,  un  vaste  terrain,  où  elles  construisirent  un  M- 
pital,  qui  en  souvenir  de  son  origine  fut  appelé  N.-D.  de  la 
Paix.  Cette  Maison,  commencée  avec  dix  malades,  a  vite  grandi. 
A  l'hôpital  primitif,  diverses  œuvres  sont  venues  s'adjoindre, 
et  aujourd'hui  c'est  à  la  fois  une  des  maisons  les  plus  considé- 
rables et  ies  plus  prospères  de  Constantinople. 

Personnel  ;  Sœurs  vingt-trois  ;  auméniers  :  les  Prêtres  de  la 
Mission. 

ŒUVRES   DE  LA   MAISON. 

A.  Œuvres  de  la  Jeunesse,  i"  Orphelinat.  2-  Classes.  3'  Ap- 
prentis. 4°  Classes  externes  de  filles.  5°  Associations  des  Enfants 
de  Marie.  —  B.  Œuvres  de  Charité.  1°  Hôpital  pour  malades 
et  infirmes.  2°  Asile  d'aliénés  pour  hommes.  3' Asile  d'aliénées 
pour  les  femmes.  4°  Division  ophtalmique. 

Œuvres  de  la  jeunesse.  1°  Orphelinat.  C'est  le  seul  grand  or- 
phelinat catholique  de  garçons  à  Constantinople.  Il  compte  quatre- 
vingts  enfants  de  tous  pays,  mais  presque  tous  catholiques. 

2°  Apprentis.  Les  apprentis  sont  au  nombre  de  dix-huit,  ré- 
partis en  quatre  ateliers  :  forgerons,  menuisiers,  tailleurs  et  cor- 
donniers. Quelques-uns  aussi  apprennent  le  jardinage. 

3°  Classes  de  filles.  Commencées  en  1870,  elles  comptent  de 
quarante-cinq  à  cinquante  enfants.  On  vient  d'ériger  parmi  elles 
l'association  des  Enfants  de  Marie. 

.  Œuvres  de  Charité.  1»  Hôpital.  Malades  ou  infirmes  soignés 
annuellement:  70. 

3°  Asiles  d'aliénés.  Établissements  modèles  en  ce  genre  ; 
aussi,  soit  comme  installation,  soit  comme  soins,  ils  jouissent 
dans  tout  le  pays  d'une  réputation  bien  méritée.  Cent  soixante- 
quinze  personnes  de  toute  nation  et  de  tout  culte  y  ont  été  soi- 
gnées dans  l'année  qui  vient  de  s'écouler. 


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3°  Division  ophthalmiqae.  Fondée  depuis  deux  ans,  elle  est 
en  pleine  voie  de  prospérité.  Elle  a  traité  dans  l'unnée  cent  cin- 
quante malades. 

Le  personnel  total  de  la  Maison  est  de  quatre  cents  personnes. 
Il  s'y  trouve  une  association  d'Enfants  de  Marie  :  quarante-sept 
membres. 

5°  Hôpital  Municipal,  fondé  en  Î865. 

Cet  bdpital,  comme  l'indique  son  nom,  appartient  à  la  muni- 
cipalité du  VI"  cercle.  Établi  en  1865,  à  la  suite  du  choléra,  sur 
les  débris  d'une  ambulance  de  cholériques,  et  dirigé  depuis  sa 
fondation  par  les  Filles  de  la  Charité,  il  reçoit  gratuitement  à 
toute  henre  de  la  nuit  comme  du  jour,  sans  aucune  formalité 
dilatoire  et  sans  distinction  aucune  de  religion  ni  de  nationalité, 
tous  cenx  qui  se  présentent,  ou  atteints  de  maladies  aiguës,  ou 
blesses  par  quelque  accident. 

Ce  mélange  de  nationalités  et  de  religions  n'a  offert  jamais 
aucune  difficulté  pour  le  service.  Tous  ces  pauvres  gens  sont 
traités  de  la  même  manière,  tous  sont  contents  et  heureux,  bé- 
nissant et  remerciant  Dieu,  cliacun  à  sa  manière,  des  bons  soins 
qu'ils  reçoivent  de  la  part  des  bonnes  c  Marabettes  i  Sœurs. 

L'hApital  contient  quarante  lits. 

Personnel  :  sept  Sœurs  ;  aumôniers,  les  Lazaristes. 

Depuis  sa  fondation  en  1865,  l'hâpital  a  fourni  journées  de 
malades  deux  cent  quarantfi-huit  mille  six  cent  soixante-deux,  et 
soigné,  par  malades  et  blessés,  dix-sept  mille  cent  quarante-huit. 

Ces  malades  et  blessés  appartiennent  à  trente-deux  nations 
différentes.  Nous  ne  les  relèverons  pas  toutes,  nous  remarquons 
seulement  que  les  musulmans  comptent  pour  neuf  mille,  les 
grecs  raïas  pour  deux  mille,  les  Arméniens  pour  mille  neuf 
cent  vingt-cinq,  les  Israélites  pour  cinq  cent  quatre-vingt-six, 
les  Persans  pour  quatre  cents,  les  français  ^<>ur  cinquante- 
trois,  etc.,  etc. 

6'  Maison  St~Joseph  de  Tchoqour^Bostan.  i869. 

Cette  maison  a  été  bâtie  avec  les  dons  du  gouvernement  fran- 
çais, da  haut  commerce  et  de  la  charité  publique,  sur  un  ter- 


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—  465  — 

rein  coDcAdi  parS.M.Ï.SuItaDAbdoI-Azlz.  Commencée  es  1865, 
aprèa  l'incendie  de  la  Providence,  pour  y  transf^r  l'orphelinat 
qui  existait  dans  cette  maison  dtqtuis  1841,  elle  ne  fut  aclievée 
qu'en  1869.  C'est  aujourd'tiui,  non  seulement  le  plus  ancien, 
mais  aussi  le  plus  grand  et  le  plas  bol  arpbeliuat  catholique  de 
filles  qui  existe  &  Constantinopla.  H  compt»  plus  de  deux  cents 
orphelines  qui  appartiennent  à  toutes  les  nations. 

A  l'orphelinat  sont  venues  bientAt  se  joindre  l'œuvre  des 
pauvres  et  celle  des  écoles  externes,  etc.  Tchoqour-Bostan  est . 
aujourd'hui  un  des  principaux  centres  catholiques  d'éducation  < 
et  de  charité. 

Personnel  :  Sœurs,  vingt-sept;  auméniers,  les  prêtres  de 
la  Mission. 


A.  Œuvres  de  la  Jeunesse.  !<•  Orphelinat,  asile,  ateliers  de 
broderie,  classes,  ateliers  de  repassage,  ouvroirs,  -atelier  de 
fleurs  artificielles,  association  des  Enfants  de  Marie.  3°  Pension- 
nat, classes  et  ouvroir.  3°  Externat,  classes,  asile,  ouvroir,  ate- 
lier de  couture,  atelier  de  tissage,  association  des  Enfants  de 
Marie.  —  B.  Œuvres  de  Charité,  i'  Dispensaire.  3°  Visite  des 
pauvres  et  des  malades.  3*  Association  des  Dames  de  Charité. 

1'  Œuvres  de  la  jeunesse.  L'orphelinat  et  le  pensionnat 
comptent  ensemble  deux  cent  vingt-neuf  enfants.  L'externat  en 
compte  à  lui  seul  deux  cent  trente-six,  soit  en  tout  quatre  cent 
soixante-cinq.  Ces  enfants  appartiennent  à  douze  nationalités 
diiférentes,  pour  la  grande  majorité  grecques,  arméniennes  et 
italiennes,  vingt-huit  françaises  seulement.  Quant  à  la  religion 
presque  toutes  les  internes  sont  catholiques  ;  les  externes  schis- 
matiques  sont  peu  nombreuses. 

Depuis  le  1"  janvier  1870,  jusqu'au  !•'  janvier  1887,  il  est 
passé  à  l'orphelinat  sept  cent  quinze,  au  pensionnat  deux  cent 
trente-huit,  à  l'externat  six  cent  cinqnante-deux  enfants.  Â  l'oa- 
vroir  externe  cent  quatorze  jeunes  filles.  Total  mille  sept  cent 
dix-neuf.  On  compte  quelques  conversions  au  catholicisme,  mal- 
heureusement peu  nombreuses. 


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2°  iEuvres  de  chàrité.XA  principale  aaaocUtion'des  Dames 
de  charité  a  sod  centre  et  son  siège  à  l'orphelinat  de  Tchoqonr- 
Bostan.  Elle  a  pour  présidente  ordinaire  l'ambassadrice  de 
France. 

Cette  association  fondée  en  février  1847,  en  même  temps  que 
celle  de  Oalata,  compte  dans  ses  rangs  cent  trente-six  Dames 
appartenant  à  tontes  les  nationd  et  aux  meilleures  classes  de 
la  société.  Elle  a  d'après  son  compte-rendu,  fait  aux  pauvres 
dans  cette  seule  année  cinq  mille  sept  cent  vingt  visites,  assisté 
cent  qoatre-viDgt-quatre  familles,  envoyé  dans  les  hôpitaux 
douze  malades,  secouru  et  médicamenté  à  domicile  cinq  cent 
qaafare-vingt  malades,  dont  vingt  sont  morts  munis  des  sacre- 
ments de  l'Église.  Elle  a  receuilU  pour.  les  pauvres  la  somme 
de  341.383  fr.  C'est  à  peu  près  la  moyenne  annuelle  ordinaire. 

8°  Enfants  de  Marie  :  cent  cinquante  ;  it.  mariées  vingt-deux. 

7"  Maison  de  l'Artigiana,  1872. 

C'est  un  hospice  de  vieillards.  En  1838,  on  Autrichien, 
M.  Gîacomo  Anderllch,  conçut  l'idée  d'établir,  parmi  les  euro- 
péens, artisans  ou  x;ommer(;ant8  de  Constantinople,  une  société 
de  bienfaisance,  qui  prit  le  nom  de  i  Associazione  commerciale 
artigianadipietà).  L'article  premier  des  statuts  déclarait  la 
société  purement  séculière  et  philanthropique. 

<  Dès  la  seconde  année,  racontent  les  opposants,  par  les 
conseils  de  M.  Leleu,  préfet  des  Lazaristes,  et  avec  l'appui  de 
M.  Cor,  premier  drogman  de  l'ambassade  de  France,  deux 
français,  bons  catholiques,  MM.  David  G-Iavany,  et  Jacques 
Allèon,  ainsi  que  plusieurs  membres  du  comité,  entreprhent  de 
donner  à  l'œuvre  une  couleur  religieuse,  et  pour  cela  offrirent 
de  bâtir,  à  leurs  propres  ûms,  une  chapelle  dans  l'établisse- 
ment, pais  d'obtenir,  pour  assurer  sa  défense,  la  protection  de 
l'ambassade  de  France.  Ces  Messieurs  rencontrèrent  la  plus  vive 
opposition  ;  ils  forent  même  destitués  par  l'assemblée  générale  ; 
mais  cela  ne  les  empêcha  pas  de  persévérer  dans  leur  dessein, 
et  il  faut  croire  qu'ils  finirent  par  l'emporter,  puisque  la  cha- 
pelle fut  bâtie,  et  que  l'œuvre  obtint  la  protection,  non  seule- 
ment de  la  France,  mais  encore  de  l'Italie,  de  l'Espagne,  du 
Portugal,  de  la  Hollande,  et  de  la  Belgique,  dont  les  six  dra- 


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~  467  — 

peaux  flottent,  chacun  à  son  tour.de  r6Ie,  sur  les  bâtiments  de 
l'hospice.  >        . 

Ed  1873,1e  comité  en  charge  fit  appel  aux  Filles  de  la  Charité, 
pour  avoir  plus  d'ordre  et  de  régularité,  tant  dans  le  service 
que  dans  les  dépenses  ordinaires.  Depuis  lors  l'oeuvre  a  pris  une 
marche  régulière  et  assurée. 

En  1878,  les  Sœurs  ont  joint  &  l'hospice  un  asile  pour  les 
enfants  da  quartier. 

Personnel  :  Sœurs  six  ;  aumônier  :  un  Prêtre  de  la  Mission. 


i°  Hospice.  Il  se  compose  d'une  série  de  maisonnettes  à  la 
suite  les  unes  des  autres  et  pouvant  loger  des  ménages.  Et  abrite 
actuellement  cinquante^six  vieillards,  dont  trente-trois  hommes 
et  vingt-trois  femmes. 

3°  L'astle  compte  soixante-seize  enfants  des  deux  sexes. 

8»  Hôpital  Gérémia.  iSSî. 

B  avait  pour  destination  primitive  de  recevoir  gratuitement 
les  pauvres  malades  catholiques  de  Constantinople.  Le  manque 
de  ressources  et  les  circonstances  ont  fait  modifier  ce  pro- 
gramme :  Gérémia  reçoit  aujourd'hui  tontes  sortes  de  malades 
gratuits  et  payants,  sans  distinction  de  culte  ni  de  nationalité. 

C'est  la  dernière  venue  des  œuvres  catholiques  de  Constanti- 
nople, la  plus  petite,  la  plus  pauvre  aussi  :  et  pourtaat,  chose 
merveilleuse,  c'est  une  de  celles  où  la  charité  catholique  parait 
triompher  avec  plus  d'éclat. 

\°  Le  petit  hôpital  a  eu  l'honneur  d'être  patronné  parl'ancien 
comité  international  des  ambalances  de  1876,  comité  formé  des 
sommités  diplomatiques,  commerciales  et  financières  du  pays. 
En  1883,  une  fête  organisée  par  ce  comité  à  l'ambassade  de 
Bnssie,  lui  a  donné  11.000  frs.  En  1885,  une  seconde  fête  orga- 
nisée à  la  légation  de  Hollande  a  donné  près  de  10.000. 

2°  Lady  DufTerin,  plus  tard  vice-reine  des  Indes,  étant  am- 
bassadrice d'Angleterre  à  GP.  a  voulu  que  c  la  Dorcas  >,  société 
de  secours  anglaise  et  protestante  qu'elle  dirigeait,  s'entendit 
avec  Gérémia  pour  les  remèdes  h  fournir,  et  avec  les  Sœurs,  pour 


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les  distribntions  à  faire  aux  paarres.  La  même  chose  s'est  con- 
tinnèe  pendant  le  séjour  &  CP.  de  Lady  White,  qni  lui  a  snc- 
cédé. 

3°  Six  médecins,  la  plupart  distingués,  se  sont  chargés, 
comme  adjoints  du  Docteur  priacipal,  de  faire  gratuitement  le 
service  de  la  maison,  ponr  les  traitements,  les  pansements,  les 
consultations  etc.  Or  tous  ces  médecins  sont  grecs  de  re- 
ligion. 

Ce  concours  de  toutes  les  bonnes  volontés,  quelles  que  soient 
les  divergences  de  croyances,  pour  assurer  le  succès  d'une  œu- 
vre de  charité  catholique,  et  faire  ensemble  le  bien,  est  de  bon 
exemple  et  donne  lieu  d'espérer  encore  mieux  de  l'avenir. 
Quant  àl'bumble  hépital,  il  fait  le  bien  qui  est  de  son  ressort  et 
rapproche  les  ftmes  en  soignant  le  corps  des  malades. 

Personnel  :  Sœurs  six;  anmdniera  et  administrateurs:  les 
Prêtres  de  la  Mission. 

HApital.  Consultations  gratuites.  Traitements  ophtalmiques. 

Chaque  année  le  nombre  des  malades  s'accroît,  et  surtout 
celui  des  consultations  gratuites.  Uoe  construction  nouvelle, 
servant  de  prolongement  à  l'hôpital,  vient  d'être  foite  :  elle  porte 
lenom  de  :  (  Smythe  mémorial.  >  Ce  monument  est  élevé,  sur 
le  terrain  de  l'hôpital,  pour  honorer  la  mémoire  de  Sir  I<ïédérik 
Smythe.  Les  amis  du  défunt  y  ont  contribué  pour  une  somme 
de  LT.  500. 


9»  Maison  de  ScutaH,  i883. 

Comme  nous  l'avons  dit,  en  1859,  les  Filles  de  la  Charité 
avaient  commencé  à  Scutari  nn  externat  et  an  internat,  qui 
marchaient  assez  bien,  lorsque,  &  la  suite  des  massacres  de 
SjTïe,  elles  furent  rappelées  et  employées  à  d'autres  œuvres. 

En  1883,  par  manière  d'essai,  elles  ouvrirent  de  nouveau, 
dans  une  maison  de  louage,  une  école  pour  les  rares  catholiques 
du  pays,  qui  en  étaient  absolument  privés.  L'essai  ayant  réussi, 
les  Sœurs  ont  acheté  une  maison  en  1884,  et  y  ont  fait  cons- 
truire une  chapelle  qui  sert  d'église  aux  catholiques  du  quar- 
tier. 

Personnel  :  Sœurs  quatre. 


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A.  de  Jeunesse.  Interost.  Externat.  OaTroir.  Association 
d'Enfants  de  Marie.  —  B.  de  charité.  Un  petit  dispensaire. 
Visite  des  pauvres  malades. 

Classes  :  cent  quatorze  enfants,  dont  douze  garçons  et  cent 
deux  filles. 

Charité.  On  accueille  an  dispensaire  tout  ceux  qui  s'y  [srè- 
senteut,  et  on  visite  les  pauvres  malades,  que  l'on  assiste  autant 
que  les  ressources  le  permettent. 

10»  Si-Oeorges. 

Kons  De  notons  ici  cette  maison  que  pour  mémoire  :  nous  en 
avons  parlé  au  chapitre  consacré  aux  Prêtres  de  la  Mission. 

D  ne  faudrait  pas  terminer  ce  cbapitre  des  Filles  de  la  Charité 
sans  rappeler  qu'elles  avaient  formé  un  fort  beau  pensionnat  à 
Pancaldi,  dans  les  maisons  qni  avoisinent  l'église  du  St-Esprit 
et  qu'elles  l'ont  cédé,  en  pleine  prospérité,  aux  Sœurs  de  Sion 
qui  y  sont  maintenant  encore  installées. 


Les  Sœurs  de  Notre-Dame  de  Ston.  i857. 

Mgr  Hillereau  avait  eu  le  projet,  comme  nous  l'avons  dit  plus 
haut,  d'établir  nn  séminaire  diocésain  dans  les  bâtiments  éle- 
vés par  Ini  en  avant  de  l'église  du  St-Esprit,  sur  la  rue  ;  mais 
n'ayant  pu  exécuter  spn  dessein,  il  dit  à  M.  l'abbé  HUlerean,  sou 
cousin  et  son  vicaire  général,  quelques  jours  seulement  avant  sa 
mort,  qu'il  voulait  offrir  ce  corps  de  logis  aux  Sœurs  de  St-Vin- 
cent  de  Paul,  pour  établir  dans  ce  quartier,  le  pensionnat  créé 
par  elles  à  Galata.  Les  Sœurs,  auxquelles  cette  pensée  était 
connue,  accédèrent  à  ce  désir  et  louèrent  ce  local  pour  la  somme 
annuelle  de  7.000  ou  8.000  francs.  Elles  transportèrent  donc  au 
St-Esprit  leur  pensionnat,  qui  comptait  alors  quatre-vingt-dix 
élèves,  sans  parlw  de  vingt-huit  autres  inscrites  pour  nue  pro- 


,flbvGoOgle 


—  470  — 

chaîne  admission.  Mais  cette  maison  ne  devait  pas  longtemps 
rester  aux  mains  des  Filles  de  la  Charité  :  elle  allait  passer 
hientdt  aux  religieuses  de  Notre-Dame  de  Sion  et  deveair  leur 
principal  établissement  dans  le  Levant. 

L'origine  de  cette  congrégation  se  rattache  à  la  conversion 
cëlèhre  qui  eut  lieu  à  Home,  dans  l'élise  de  S.  Andréa  délie 
Fratte,  le  30  janvier  1843,  à  l'autel  de  la  Vierge  Immaculée. 
Celui  qui  en  fat  l'objet,  depuis  le  R.P.  Alphonse-Marie  Ratis- 
bonne,  <  se  sentit  vivement  pressé,  dès  les  premiers  instants  où 
il  onvrit  les  yeux  à  la  lumière,  de  propager  la. connaissance  de 
la  vérité  parmi  les  Israélites,  et  il  communiqua  cette  pensée  à 
son  frère  Théodore,  missionnaire  apostolique,  alors  sous-direc- 
teur de  l'archiconfrérie  de  N.-D.  des  Victoires.  >  Les  premières 
jeunes  filles  envoyées  par  leurs  parents  pour  se  faire  instruire 
dans  la  foi  catholique,  furent  placées  provisoirement  à  l'ouvroir 
de  la  Providence  dirigé  avec  an  admirable  dévouement  par  les 
sœurs  de  St- Vincent  de  Paul. 

En  juin  1843,  le  sous-directeur  de  l'sDvre  se  rendit  k  Rome 
pour  demander  au  Saint-Père  l'autorisation  de  se  consacrera  la 
conversion  des  brebis  dispersées  du  troupeau  d'Israël  ;  puis  an 
mois  de  mai  de  l'année  suivante,  quelques  pieuses  chrétiennes, 
animées  dn  désir  de  travailler  à  leur  propre  sanctification,  tout 
en  se  dévouant  aux  œuvres  d'éducation,  et  principalement  à  la 
r^énération  des  Israélites,  jetèrent  les  fondements  de  la  con- 
grégation. En  1845,  la  première  maison  ne  suffisant  plus  aux 
développements  de  l'œuvre,  on  la  transporta  dans  une  antre 
plus  grande  et  on  la  plaça  sous  le  patronage  de  Notre-Dame  de 
Sion,  avec  cette  devise  :  c  In  Sion  firmatasum'.  > 

Le  15  janvier  1847,  le  Souverain  Pontife  Pie  IX  l'érigea,  & 
Parts,  par  un  bref  qni  lui  accordait  de  nombreuses  indulgences. 
En  1855,  la  congr^ation  fonda  des  pensionnats  pour  lesjeunes 
chrétiennes,  des  ouvroirs  et  des  orphelinats,  et  des  écoles  pour 
les  pauvres.  Peu  à  peu,  sans  oublier  sa  première  destination  de 

>  Ce  nom  de  N.-D  de  Sion  n'est  pas  nouveau  dans  l'histoire  ;  ■  l'abbayade 
N.-D.  du  Mont  Sion.  en  la  ville  de  Hiérusalem,  de  cbanoines  régulier  de  St- 
Augustin,  dépendait  immédiatement  du  Patriarche.  Elle  eut  d'abord  dea 
Prieurs,  te  lloi  Louis  VII  lui  donna  l'abbaye  de  St-Sanson  d'Orléans.  L'é^iu 
du  Mont-SioQ  était  le  but  de  la  procession  du  St-Sépulcr«,  le  jour  de  la  Pen- 
tecâte.  L'abbé  portait  mttre,  croce  et  anneau.  ■  (Du  Cange,  Familles  d'outre 
mer,  p.  827.) 


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—  471  — 

la  conversion  des  Israélites,  elle  devint  une  instituttoa  d'édu- 
cation, ea  France,  k  l'étranger,  et  soitoat  dans  les  Missions 
parmi  les  infidèles.  Elle  a  -pcis  des  développements  fort  rapides 
et  compte  anjoord'liui  de  oombreases  maisons,  dans  toutes  les 
parties  du  monde. 

De  même  que  l'œuvre  avait  commencé  à  Paris  dans  une 
maison  de  Sœurs  de  St-Vincent  de  Paul,  ainsi  devait-il  en  être 
à  Constantinople.  Les  Sœurs  de  N.-D.  de  Sien  devaient  y  ap- 
par^tre  sous  les  auspices  de  l'apâtre  de  la  Charité.  En  effet,  àla 
snite  d'un  voyagea  CP.  du  B,P.  Th.  Ratisbonne,  sapérienr  et 
fondateur  de  la  congrégation,  celui-ci  sollicita  et  obtint  de 
M.  Etienne  aupérietir  général  des  Lazaristes  et  des  Filles  de  la 
Charité,  avec  l'agrément  de  ta  S.  Congrégation  de  la  Pi;opa- 
gande,la  substitution,  dans  ce  pensionnat,  des  Sœurs  de  N.-D. 
de  Sion,  aux  Filles  de  la  Charité.  Les  nouvelles  religieuses  ar- 
rivèrent à  Oalata  en  octobre  1857,  elles  furent  reçues,  avec 
grande  charité,  &  la  maison  de  la  Providence,  dirigée  alors  par 
la  vénérable  Sœur  Lesueur,  et  furent  bientôt  mises  en  possession 
de  leur  maison  et  du  pensionnat,  en  pleine  prospérité. 

Grâce  à  la  direction  sage  et  intelligente  de  la  première  supé- 
rieure, de  M""*  Rose,  et  de  celles  qui  leur  oAt  succédé  Jusqu'ici, 
cette  maison  a  prospéré.  Le  nombre  des  religieuses  s'est  accru, 
en  même  temps  que  celui  des  élèves  :  on  a  augmenté,  dans  une 
même  proportion  les  bâtiments  qui  servent  aux  unes  et  aux 
autres,  et  pourtant  elles  se  trouvent  encore  i  l'étroit. 

La  Congrégation  de  Notre-Dame  de  Sion  a  été  approuvée  dé- 
finitivement le  8  septembre  1863,  par  le  Souverain  Pontife,  sur 
la  proposition  de  la  Propagande,  qui  pouvait  le  mieux  appré- 
cier ses  services.  Un  décret  du  35  juin  1856  lui  avait  donné  une 
existence  légale.  Elle  possède  actnellement  deux  établissements 
à  CP.  :  celui  de  Pancaldi  et  celui  de  Kadi-keui. 

1*  Établissement  de  Pancaldi. 

n  est  attenant  à  l'église  cathédrale  da  St-Esprit  et  le  sépare 
de  la  rue.  La  maison  communique  directement  avec  les  tribunes 
de  l'église  ;  aussi  pendant  longtemps  les  Sœurs  et  leurs  jeunes 
flUes  furent-elles  chaînées  d'exécuter  les  chants  liturgiques 
dans  les  plus  grandes  cérémonies.  Mgr  Orasselli  déchargea  les 


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—  m  — 

Sœnrs  de  cette  obligation  et  confia  les  chaats  aux  ea&nts  des 
écoles  des  Frères. 

Personnel  de  la  maison  :  soixante-quatre  religieuses,  dont 
trente  Sœurs  de  chceor  occnpées  aux  classes,  et  trente-quatre 
converses  employées  aux  services  de  la  maison  ;  auménier  :  nn 
Prêtre  de  N.-D.  de  Sion. 

ŒOTRES  DE  Là  JXITNES3B. 

1'  Pensionnat.  Élèves  internes  deax  cent  quatre-vingt  cinq, 
dont  soixante-treize  latines,  quatre  arméniennes,  trente-deux 
bulgares  schismatiqnes,  cinquante  grecques  orthodoxes,  dix- 
sept  arméniennes  grégoriennes,  viiigt-deux  Israélites.  Élèves 
demi-pensionnaires  quatre-vingt-sept,  dont  cinquanle-huit  la- 
tines, dix-sept  grecques  orthodoxes,  sept  arméniennes  grégo- 
riennes, deux  catholiques,  deux  Israélites,  trois  protestantes. 

2°  Orphelinat.  Les  Sceurs  entretiennent  gratuitement  dans 
la  maison  quatorze  Jennes  flUes  catholiques,  qu'elles  forment 
aux  travaux  du  ménage,  et  &  la  couture. 

3*  École  gratuite,  pour  les  enfants  de  la  paroisse.  Dès 
qu'il  leur  a  été  possible,  les  religieuses  de  N.-D.  de  Sion  ont 
ouvert,  conformément  &  leurs  règles,  nne  école  pour  les  enfants 
pauvres.  Elle  était  d'abord  dans  les  dépendances  du  couvent. 
Mgr  Pluym  fit  construire,  sur  des  terrains  appartenant  au  vica- 
riat, des  écoles  convenables  où  il  établit  les  classes  des  Qlles  et 
celles  des  garçons.  Cette  école  paroissiale  occupe  qaatre  Sœurs, 
qui  y  viennent  du  couvent  voisin.  Elle  est  divisée  en  trois 
classes  qui  contiennent  environ  deux  cents  enfants,  la  plupart 
catholiques,  latines  ou  arméniennes.  On  leur  donne  l'ensei- 
gnement primaire,  et  on  les  forme  aux  travaux  de  leur  sexe. 
Beaucoup  de  ces  enfants  pauvres  reçoivent  de  la  communauté 
des  vêtements  et  an  repas  au  milieu  du  jour. 

4'  Atelier  de  roberie.  Cet  atelier,  dirigé  par  deux  mal- 
tresses séculières  à  gages,  sons  la  surveillance  d'une  religieuse, 
reçoit  ime  vii^^ine  de  Jeunes  filles,  sortant  en  partie  de  l'école, 
les  commençantes  au  pair,  les  anciennes  reçoivent  un  salaire 
proportionné  à  leur  travail. 


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_  473  — 

5*  Association  aes  Enfants  de  Marie.  Cette  œuvre  est 
établie  dans  la  maison  comme  couroanement  de  tout  un  sys- 
tème de  confréries,  destinées  à  favoriser  la  piété  en  même  temps 
qu'à  maintenir  le  bon  esprit  dans  la  maison.  Les  élèves  qui  sont 
sorties  de  la  Maison  ne  cessent  pas  d'en  faire  partie,  et  un  bon 
□oyau  d'entre  elles  viennent  du  dehors  assister  cbaqae  mois  aux 
instructions  qui  leur  sont  données,  ordinairement  par  un  reli- 
gieux àe  la  vUle. 

6°  Œuvre  du  vestiaire.  Elle  a  été  fondée,  sur  l'initiative  de 
Mgr  Pluym,  en  1871  ;  les  associées,  élèves  actuelles  ou  anciennes 
de  l'établissement,  et  an  nombre  de  deux  cents,  payent  une 
piastre  par  mois  et  s'occupent  de  l'achat  ou  de  la  confection  de 
Tëtements  pour  les  enfants  pauvres  des  écoles  de  la  paroisse, 
comme  aussi  de  ceux  du  quartier. 

ŒUVRE  DE  ZÈLE  SURITUEL. 

Association  des  Mères  chrétiennes.  Fondée  par  ]eR.P.  Th. 
Ratisbonne,  cette  association  fut  érigée  en  arcbiconfrérïe  par 
l>ref  ponti&cal  du  11  mars  1856.  Elle  s'est  répandue  dans  tout  le 
monde  catholique,  et  fait  partout  le  pins  grand  bien.  Elle  a 
tonjours  son  siège  dans  la  chapelle  de  la  Maison-mère  des  Sœurs 
de  N.-D,  de  Sîon,  rueN.-D.  des  Champs,  à  Paris.  Elle  fut  établie 
à  CF.  en  1862,  dans  la  chapelle  de  Pancaldi.  Les  réunions  s'y 
font  régulièrement  aux  fêtes  de  l'association,  conformément  au 
manuel.  Les  associées  sont  au  nombre  de  quatre  cents. 

2°  Maison  de  Kadi-heui. 

Sur  les  instances  de  Mgr  Brunont,  une  maison  de  Sœurs  de 
N.-D.  de  Sion  fnt  établie  à  Kadi-keni,  pour  y  pourvoir  aux  be- 
soins de  la  popolation  catholique.  Elle  s'ouvrit  d'abord  dans  les 
dépendances  de  l'église  que  l'on  venait  de  construire  (1863),  puis 
elle  se  transféra  dans  une  propriété  plus  vaste,  acquise  par  la 
congrégation.  Elle  est  placée  sous  l'invocation  de  Ste-Euphëmie. 

Ses  commencements  furent  modestes  et  ses  progrès  assez 
lents,  mais  réguliers  :  aujourd'hui  elle  est  connue  et  appréciée. 

Personnel  :  trente  et  une  Sœurs,  dont  quinze  converses  ;  au- 
môniers :  les  Pères  Capucins. 


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A.    ŒUVRES  DE  JGDNBBSE. 

1*  Pensionnat  et  externat.  Le  Dombre  des  pensionnaires 
a' élève  à  cinquante-trois,  dont  trente  et  une  latines,  cinq  armé- 
niennes catholiqnes,  trois  grecques  orthodoxes  et  dooEO  Israélites. 
Des  externes  au  nombre  de  quatre-vingt-quatorze  sont  admises 
h  suivre  les  mêmes  cours,  dont  trente  et  une  latines,  sept  ar- 
méniennes catholiques,  trente-six  grecques  orthodoxes,  dix  ar- 
méniennes gr^oriennes,  neuf  Israélites,  une  musulmane. 

3*  Orphelinat.  Six  jeunes  allés  catholiques  sont  élevées  dans 
la  maison  de  Kadi-keui,  comme  dans  celle  de  Pancaldi. 

3°  Association  des  Enfants  de  Marte,  pour  les  pension- 
naires et  les  anciennes  élèves. 

B.  ŒCJVRE  DE  ZÈLE. 

Association  des  Mères  Chrétiennes.  Elle  fonctionne  à  Eadi- 
keui,  comme  dans  toutes  les  maisons  del'InatitQt.  Les  associées 
sont  au  nombre  de  quatre-vingt. 


§  m. 

Sœurs  de  Charité  de  l'Immaculée  Conception,  d'Ivrea.  1869. 


Cet  Institut  fondé  sur  le  modèle  des  Filles  de  la  Charité,  a  sa 
maison-mère  à  Ivrea,  en  Italie.  Elles  ont  été  introduites  à  CP. 
en  1869.  Elles  y  sont  au  nombre  de  trente  et  une  et  ont  trois 
établissements. 

1*  Hôpital  Italien  de  Péra.  C'est  un  très  bel  établissenieat 
situé  dans  une  agréable  position,  et  bien  tenu. 

Personnel  :  neuf  Scears,  trois  converses;  aumdniers  :  Pères 
Conventuels  de  St-Ântoine. 


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Pendant  l'snnèe,.  environ  quatre  cent  qaatre-Tingts  malades 
traités,  vingt  aliénés,, soixante  prisonniers. 

2°. École  italienne  de  Péra,  Rue  Agha-hamtnam.  Per- 
sonnel :  dix  Sotais,  dens  converses.  —  Élèves  internes  trente- 
clnq.,externes  cent  quarante,  asile  de  petits  enfonts  quatre-vingt- 
quinze.  Ces  enfants  des  classes  italiennes  sont  en  très  grande 
:  majorité  catholique.  (Vingt-trois  garçons  à  l'asile.) 

La  langue  d«  l'école  est  l'italîMi;  mais  on  y  enseigne  aussi  le 
.  firancaîs,  le  grec  et  les  autres  langues  usitées  dans  le  pays. 

3"  École  italienne  et  asile  enfantin  de  Buyuk-déré.  Per- 
sonnel :  cinq  Sœurs,  deux  converses. 

A  l'école  italienne  cent  vingt  élèves,  dont  quatre-vingt-dix 
catholiques.  A  l'asile  enfantin  quatre-vingts  enfants,  dont  vingt- 
ciDq  garçons. 

L'enseignement  se  donne  aussi  en  italien,  mais  on  y  enseigne 
aussi  les  autres  langues. 

Ces  religieuses  sont  soumises  à  l'autorité  de  l'évëque  d'Ivrea, 
représenté  à  CP.  par  le  P.  Préfet  de  St-Antoine. 


Couvent  de  Ste-Eltsabeth  (Sœurs  du  Tiers-Ordre  de 
Sl-Prançois).  Paroisse  de  Ste-Marie. 

W  y  avait  en  jadis  une  église  et  un  couvent  de  religieuses  de 
Ste-Qaire,  sous  la  direction  des  FF.  MM.  Conventuels,  comme 
noas  l'avons  vn  dans  la  deuxième  partie  de  ce  travail  ■■,  mais 
cette  institution  avait  si  bien  disparu  qae  l'on  n'en  peut  retrou- 
ver aucune  trace. 

Dans  le  coimint  de  ce  siècle,  un  supérienr  de  Ste-Marie  Dra- 
përis  essaya  de  constituer  le  Tiers-Ordre  régulier  à  Constanti- 
nople,  avec  des  éléments  indigènes  ;  mais  soit  que  le  □omla'e 
des  vocations  n'ait  pas  été  suffisant  pour  le  bon  fonctionnement 
de  la  maison,  soit  qne  les  vocations  elles-mêmes  ne  fussent  pas 
assez  sérieuses,  on  fut  obligé  de  demander  à  Rome  l'autorisation 


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—  476  — 

de  laisser  les  religieoses  retonmer  dans  leurs  familles,  et  d'alié- 
ner l'immeulile  qui  leur  serrait  de  couvent,  et  jusqu'à  présent 
aucun  couvent  cloîtré  n'a  pu  s'établir  dans  la  ville. 

Depuis,  les  PP.  Préfets  de  Ste-Marie  tournèrent  leurs  vues 
d'un  autre  c6té.  Désirant  avoir  des  religieuses  de  leur  Ordre 
pour  les  œuvres  paroissiales,  ils  s'adressèrent  &  Borne,  afin  d'en 
obtenir.  Lear  demande  n'ayant  pu  almutir  en  ce  moment,  ils 
résolurent  de  fonder  eux-mêmes  une  communauté  de  religieuses 
tertiaires  indigènes.  Le  23  février  1873,  Mgr  Pluym  donna,  à 
Ste-Marie,  le  costume  religieux  à  cinq  tertiaires  franciscaines, 
et  les  établit  en  communauté,  dans  les  dépendances  du  couvent; 
mais  on  ne  voulait  pas  retomber  dans  le  même  Inconvénient  que 
la  première  fois,  et  l'on  finit  par  obtenir,  pour  diriger  la  mai- 
son, des  religieuses  d'un  couvent  régulier.  C'étaient  les  Sœurs 
Franciscaines  Missionnaires,  de  Gémona,  prés  Udine,  en  Italie. 

Cette  congrégation  était  toute  nouvelle  encore.  Une  dame  du 
grand  monde,  et  possédant  une  fortune  considérable,  voulait 
Caire  une  œuvre  capable  d'aider  les  missionnaires  k  répandre  les 
lumières  de  l'Évangile.  Après  avoir  prié  et  consulté,  elle  se  dé- 
cida  à  fonder  une  congrégation  de  religieuses  dont  le  but  spécial 
serait  d'aller  dans  les  Missions,  tant  pour  soigner  les  malades 
que  pour  instruire  les  enfants.  Elle  essaya  en  France,  puis  à 
Rome,  enfin  elle  rencontra  à  Crémona,  près  Udine,  dans  le 
Frionl,  un  ancien  couvent  de  religieuses  clarisses,  sécularisé 
par  les  révolutions  :  c'est  là  qu'elle  commença  sérieusement  son 
œuvre  sous  la  direction  de  quelques  Pères  de  l'Observance. 

Les  commencements  étaient  beaux,  les  novices,  de  toute  na- 
tion, étaient  nombreuses,  on  espérait  beaucoup  de  l'avenir.  Mais 
les  épreuves  ne  manquèrent  pas,  la  fondatrice  abandonna  son 
Institut, ses  amis  de  la  première  heure  se  tournèrent  contre  lui; 
malgré  tout  il  prospéra  et  it  fut  bientôt  encouragé  par  les  béné- 
dictions du  St-Siège.  Les  religieuses  portent  la  tunique  de  bure 
grise  avec  le  scapulaire  et  la  corde  franciscaine  :  elles  suivent 
la  règle  du  Tiers-Ordre  régulier,  tempérée  par  des  constitutions 
appropriées  au  but  spécial  qu'elles  se  proposent.  Les  premières, 
au  nombre  de  six,  arrivèrent  le  15  novembre  187S,  et  commen- 
cèrent courageusement  leur  œuvre. 

Actuellement  elles  sont  établies,  rue  Drogmanat,  dans  un  as- 
semblage de  maisons  assez  discordantes,  mais  qui  suffisent  à 


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—  477  — 

leurs  œuvres,  tout  en  leor  donnant  le  moyen  de  pratiquor  la 
pauvrets  et  la  mofliBcation. 

Les  Sœnrs  Franciscaines  Missionnaires  ont  dans  Ck>D8tanti- 
nople  deox  établissements,  et  bientôt  nn  troisième. 

\<^  Ste -Elisabeth,  de  Péra. 
Personne  :  religieuses  vingt,  dont  huit  converses. 

ŒUVRES  EC  LA.  3UIS0N. 

lo  Classes  paroissiales  gratuites.  Élèves  soixante.  C'est  la 
première  et  celle  poar  laquelle  elles  sont  venu^  à  GP.  Elles  s'y 
appliquent  avec  un  soin  tout  spécial. 

2"  Externat  payant.  Élèves  cent  vingt.  Internat.  Élèves 
quarante.  Demi-pensionnat,  vingt.  Ces  deux  dernières  œuvres 
ont  été  établies  sur  la  demande  des  familles  de  Péra,  qui  ne 
trouvaient  pas  dans  le  voisinage  d'écoles  catholiques.  Ces  classes 
sont  prospères  et  grandissent  chaque  année. 

La  langue  de  l'école  était  d'abord  l'italien,  mais  on  n'a  pas 
tardé  à  lui  substituer  le  français,  sans  abandonner  pour  cela  l'é- 
tude de  la  langue  italienne.  Le  programme  est  celui  des  écoles 
françaises  du  même  degré.  Les  élèves,  à  la  fm  de  leurs  études, 
se  présentent  aux  examens  de  l'ambassade  française.  L'ensei- 
gnement de  la  doctrine  chrétienne  est  tout  spécialement  soigné 
comme  il  convient  &  une  maison  religieuse.  On  forme  aas.si  les 
élèves  aux  travaux  de  leur  sexe  et  à  l'étude  des  langues  vivantes. 

3°  Les  Sœurs  avaient  commencé  ii  s'occuper  des  malades, 
mais  elles  y  ont  renoncé  depuis  l'établissement  à  CP.  d'une 
communauté  de  Sœars  Garde-malades. 

4°  Elles  s'occupent  aussi  de  l'entretien  de  l'église  de  Ste- 
Marie  Drapéris. 

Anmftniers  :  les  PP.  Riformati  de  Ste-Mirie  Drapéris. 

9o  École  de  Prtnkipo. 

■  En  1883,  les  Sœurs  ont  été  appelées  à  Prinkipo,  pour  y  tenir  ■ 
les  classes.  Elles  y  sont  établies  en  face  de  l'église. 
Personnel  :  Sœurs  quatre,  dont  une  converse  ;  enfants  soi- 


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—  478  — 

xante-boit,  dont  dix-sept  latins,  sept  arméniens  catholiques, 
trois  grecs  orthodoxes,  cinq  juifs,  quatre  musalmans.  Sur  ce 
nombre  on  compté  vingt  et  un  gardons  et  quarante-sept  filles. 

ŒUVRES  :  toutes  les  œuvres  paroissiales. 

Les  Sœurs  Franciscaines  Missionnaires  ont  encore  quelques 
antres  établissements  dans  le  Levant  :  Rhodes,  fondé  en  1873, 
Earagatch,  près  d'Andrinople  en  1891.  Elles  doivent  avoir  bien- 
tôt d'autres  maisons  encore. 

Eïles  sont  placées  soos  la  protection  française,  quoique  le 
personnel  soit  recruté  dans  toutes  les  nations  et  compte  même 
un  assez  bon  nomlure  de  religieuses  indigènes.  Elles  s'accom- 
modent &  toutes  les  exigences  du  pays,  sans  rien  sacrifier  de 
leurs  règle». 


\ 

Sœurs  Domtnicatnes.  1882. 

n  y  avait  eu  jadis  à  CP.  au  moins  un  couvent  de  religieuses 
de  l'Ordre  de  St-Dominique,  à  St-Pierre.  Elles  n'étaient  que  peu 
nombreuses  vers  1535,  lorsque  les  Turcs  s'emparèrent  de  l'église 
de  St-Paol  et  en  chassèrent  les  Frères  Prêcheurs.  EUes  cédèrent 
la  place  à  leurs  Pères,  et  désormais  on  n'entend  plus  parler  de 
religieuses  à  CP.  jusqu'en  1839.  Mais  lorsque  les  Pères  Domini- 
cains ayant  fondé  la  paroisse  de  Makri-keni,  voulurent  lui  don- 
ner des  écoles,  ils  s'adressèrent  à  des  religieuses  de  leur  Ordre 
et  de  leur  pays  et  appelèrent  des  Sœurs  Dominicaines  de  Mod- 
dovi.  Nous  regrettons  de  ne  pouvoir  donner  aucun  renseigne- 
ment snr  cet  Institut  si  méritant. 

Les  Sœurs  du  Tiers-Ordre  de  St-Dominique  ont  i  CP.  deux 
établi^ements. 

i"  Makrt-heui.  Écoles  paroissiales.  Personnel  :  cinq  Sœurs, 
converse  une,  novice  uiie.  Enfants  :  garçons  vingt,  filles  cin- 
quante-huit. La  majorité  des  enfants  appartient  aux  cultes  non 
catholiques. 


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—  479  — 

2°  lêâi-coulé.  EUes  ont  d»ii9  ce  quartier  de  Stamboal  une 
école  de  la  Mission.  —  Personnel  :  Sœurs  trois,  converse  one. 
En^ts  :  garçons,  trente-denx,  filles  soixante  et  une,  en  grande 
majorité  catholiques. 

Nous  avons  donné  ailleurs  les  détails  relatif  &  ces  établisse- 
ments. 


s  VI. 

Sceurs  Auçustines  Obtates  de  l'Assomption.  i882. 


L'Institut  des  Soeurs  Augustlnes  Oblates  de  l'Assomption  est 
uni  à  celui  des  Pères  Augttstins  de  l'Assomption.  Leur  établisse- 
ment à  CP.  provient  de  la  même  pensée,  nous  ne  pouvons  donc, 
pour  l'histoire  de  leur  fondation,  que  renvoyer  à  ce  que  nous 
avons  dit  au  chapitre  précédent.  (Gh.  iv,  §  8.) 

Les  Soeurs  Oblates  de  l'Assomption  ont  dans  CP.  deux  éta- 


la Coum-capou,  maison  principale,  école  et  dispensaire. 
1862.  —  Personnel  :  religieuses  quinze,  dont  deux  bulgares  et 
une  arménienne  ;  aumôniers  :  les  Pères  Augastins  de  l'Assomp- 
tion. —  École.  Quatre-vingt-quinze  élèves,  dont  vingt-cinq 
latins,  cinq  arméniens  catholiques,  quarante  et  un  grecs  ortho- 
doxes, vingt-deux  arméniens  grégoriens,  un  musulman.  — Dis- 
pensaire. On  y  reçoit  au  moins  deux  cent  ciaquante  malades 
par  semaine.  Les  Sœurs  visitent  aussi  les  malades  à  domicile. 
Ces  soins  donnés  aux  malades  font  le  plus  grand  bien. 

2°  Fener-Baghtché,  ou  Phanaràhi.  Personnel  :  deux  reli- 
gieuses. —  École.  Élèves  vingt-deux,  dont  onze  latins,  dix 
arméniens  catholiques. 

Les  Sœurs  Oblates  de  l'Assomption  ont  dans  le  Vicariat  apos- 
tolique de  Constantinople  six  autres  maisons.  Partout  elles  s'oc- 
cupent des  classes  et  soignent  les  malades. 


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s  VII. 

Sœurs  Franciscaines  de  Calais.  1886. 

Les  Sœurs  Fraociscalaes  do  nord  de  la  France  remontent  an 
xHi*  siècle.  Elles  se  dévouaient  surtout  an  soin  des  malades 
dans  les  hôpitaux,  et  à  l'éducation  des  enfonts  pauvres.  Après 
la  Révolution  française,  il  n'en  restait  plus  que  quelques  mai- 
sons, qui  après  avoir  vécu  péniblement  résolurent  de  se  réunir 
en  une  seule  Congrégation.  L'union  fut  effectuée  en  1853  :  alors 
le  noviciat  central  fut  ouvert  et  la  maison-mère  établie  à  Ca- 
lais. Depuis  cette  époque  l'Institut  a  prospéré  :  il  a  de  nom- 
breuses maisons  en  France,  &  l'étranger,  et  surtout  an  Portugal, 
et  dans  les  Missions. 

Parmi  toutes  les  œuvres  de  charité  qui  existent  à  CP.,  il  en 
manquait  une  :  celle  des  garde-malades  à  domicile.  Les  Pères 
Capucins  de  St-Louis  songèrent  à  en  appeler  et  s'adressèrent 
pour  cela  aux  supérieures  de  cet  Institut,  qui  leur  en  envoyèrent 
en  octobre  1886.  Cette  fondation,  comme  nous  l'avons  remarqué 
ci-dessos,  avait  été  préparée  par  an  comité  de  patronage,  com~ 
posé  de  laïques  intelligents  et  charitables.  Après  quelque  temps 
de  souffrance,  les  Sœurs  Franciscaines  ont  pu,  grâce  aux  sa- 
crifices de  la  maison-mère,  acheter  une  propriété  convenable, 
rue  Tom-tom,  auprès  de  l'ambassade  de  France,  et  s'y  établir. 

Ces  religieuses  suivent  la  Règle  du  Tiers-Ordre  régulier  de 
St-Francois,  et  des  Constitutions  approuvées  par  le  St-Siège. 
L'Institut  a  été  depuis  plusieurs  années  approuvé  par  le  Souve- 
rain Pontife. 

Personnel  :  onze  Sœurs  ;  aumôniers  :  les  Pères  Capucins. 


1°  Le  soin  des  matattes  à  domicile.  Les  familles  ne  peu- 
vent pas  toujours  soigner  elles-mêmes  les  malades  qui  leur  sont 
chers,  et  elles  ne  veulent  pas  non  plus  les  envoyer  dans  les  hô- 
pitaux, aussi  le  ministère  des  Sœurs  gardes-malades  est-il  très 
apprécié.  Elles  vont  dans  toutes  les  familles  sans  distinction  de 
nationalité  ou  de  religion. 


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2"  Dames  âgées  ou  infirmes.  Elles  reçoivent  dans  lear  mai- 
son quelques  dames  âgéee  ou  infirmes.  Elles  peuvent  y  être  au 
nombre  de  dix. 

3°  Orphelînat.Eliea  ont  accepté  aussi  quelques  enfants  (douze 
au  plus)  qu'elles  forment  au  travail  toMiuel,  tout  en  leur  don- 
nant une  éducation  simple  et  modeste,  en  rapport  aveo  leur  po- 
sition future. 

4°  Mission  de  St-Louts.  Pour  s'associer  aux  travaux  de  la 
mission  des  PP.  Capucins  de  St- Louis,  elles  se  sont  cliargées  de 
l'entretien  de  la  lingerie  du  séminaire,  et  de  ceUe  de  la  sacristie 
et  de  l'église  ;  au  besoin  elles  soignent  les  enfants  malades  dans 
l'infirmerie  extérieure. 

§  VUI. 
Petites  Sœurs  des  Pauvres.  1893. 

Les  Petites  Sœurs  des  Pauvres  sont  trop  connues  pour  qu'il 
soit  besoin  de  mettre  ici  une  notice  sur  leur  Institut.  Elles  sont 
trop  récentes  à  CP. pour  qu'elles  y  aient  déjà  une  histoire.  Elles 
ont  été  appelées  dans  la  ville  par  un  généreux  bienfaiteur  et  éta- 
blies en  deux  maisons  de  bois  à  Féri-lceui.  Elles  ont  été  bénies 
à  leur  arrivée  par  Mgr  Bonetti,  vicaire  patriarcal,  sont  vues  avec 
bienveillance  par  la  population  de  toute  religion  et  de  toute  na- 
tionalité. Elles  ont  déjà  commencé  leurs  quêtes  ordinaires,  sans 
trop  de  difTicultés. 

Personnel  :  buit  Sœurs,  huit  vieillards. 

Communautés  religieuses  de  femmes. 

Filles  de  la  Charité Maisons  10  Sœurs  148 

Sœurs  N.-D.  de  Sion 

Sœurs  de  l'Immaculée  Goncep.  d'Ivrea. 
Sœurs  Franciscaines  de  Gémona.  .  .  . 
Sœurs  Dominicaines  de  Mondovi  .  .  , 
Sœurs  Oblates  de  l'Assomption  .... 

Sœurs  Franciscaines  de  Calais 

Petites  Sœurs  des  Pauvres 


Il  n'y  a  aucune  communauté  de  religieuses  contemplatives  ; 
toutes  sont  occupées  aux  œuvres  de  charité  ou  de  zèle.  Quelques- 
unes  des  sœurs  sont  originaires  du  pays,  mais  la  plupart  vien- 
Deat  de  Chrétienté. 

SI 


a 

— 

95 

3 

— 

31 

3 

— 

24 

3 

— 

11 

2 

— 

26 

1 

— 

11 

i 

-~ 

8 
364 

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Gomme  il  y  a  306  prêtres  ou  religieux,  il  se  trouve  donc  en 
tout  dans  CoustautiQopIe  306  +  356  =  663  persouues  portant 
le  costume  ecclésiastique  ou  religieux,  du  rite  latiu. 

Écoles  des  ftUes. 

'  u  nj  I  n       j         (Externes  ...  SIS 

I                                     /Orphelines  .  .  40 

_                                i  Externes  .  .  .  4*6 

r'''^"'" Ouvrière....  50 


Filles  de  la  Charité  . 


I  Bebek 

S.~D.  de  la  Paix 

.'si.J03ephdeTcho-(''''P''"'"'^' 
'  Externes  . 


qour-bostan   . 
J  Artigiana  . 


■  '  Pensionnaire:*. 


I                                    I  Orphelines  .  .  43 

St-Ueorges Pensionnaires.  45 

I                                    '  Externes  ...  40 

l'Scutari 118 


y  r.xwrncs   .   .   . 

I  Panculdi '  Demi'pension. 

l  (  Orphelines  .  . 

1     .  (  PlfiV^H 

SS.  de  N.-D.  (le  Sion '  Ecole  paroissialp  .  .    ";         

1  /  Ouvrières .  .  . 

/  i  Internes.  .  .  . 

Kadi-keui t  Externes  .  .  . 

'  Orplielines  .  . 


Dominicaines 

SS.  Obbtes  de  TAssomptio 


SS.  Franciscaines  de  Gémoi 


IMakri-keui  .  ,  . 
'  jlédi-koulè.  .  .  . 

jCoum-capou  .  .  . 
■/Fener-bagli  tollé. 


/  Internes.  .  .  . 
)  jvïlernes  pay. 
I  Demi-pension. 


\  Prinkipo  . 
ipéra.  .  .  . 


SS.  de  l'Immaculée  Concep,  | 


(Internes.  .  . 

'  )  Externes  .  . 

I  „      ,    , .  ,  I  Classes  .  .  . 

('""■'"'-''•"•' |a«I.  .... 

SS.  Franciscaines  de  Calais Orphelines  . 


Tolal  général 3.577 


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Récapitulation. 

Il  résulte  donc  du  tableau  ci-contre  qu'il  y  a  dans  les  écoles 
catholiques  deConstantinople  : 

Garçons 2.294 

Filles 3.577 


Tolal     ,     .     .         5.871 

Sur  ces  cinq  mille  huit  cent  soixante  et  onze  enfants  fré- 
quentant nos  écoles,  trois  mille  cinq  cent  soixante-diz-sept 
filles  et  quatre  cent  quarante  et  un  garçons  fréquentent  les 
classes  des  Sœurs,  soit  en  tout  quatre  mille  dix-huit;  et  mille 
huit  cent  cinquante-trois  seulement  les  classes  des  religieux. 

Environ  un  tiers  des  enfants  n'appartiennent  pas  ù  la  religion 
«atholique.  Nous  avons  noté,  quand  nous  l'avons  su,  le  nombre 
^des  non-catholiqnes  qui  sont  dans  certaines  classes. 

Relativement  aux  congrégations,  nous  remarquons  que  les 
Frères  des  Ecoles  clirétiennes  ont  mille  quatre-vingt-six  élèves, 
les  Filles  de  la  Charité  mille  neuf  cent  quarante-deux  filles  et 
trois  cent  dix-huit  garçons,  en  tout  deux  mille  trois  cent  soi- 
xante enfants.  Les  Sœurs  de  N.-D.  de  Sion  reçoivent  dans  leurs 
classes  sept  cent  cinquante-neuf  jeunes  filles. 

Nota.  Nous  ne  parlons  pas  ici  des  autres  écoles  catholiques 
qui  ne  sont  pas  «  Latines  ».  Les  Arméniens  ont  trois  collèges, 
un  séminaire,  des  écoles  populaires  pour  le^  garçons,  et  de  nom- 
breuses écoles  pour  les  filles. 

Les  Pères  Géorgiens  et  les  Sœurs  de  la  même  nation  ont  aussi 
leurs  écoles,  etc.,  elc. 


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CHAPITRE  VI. 

(EUVRGS  LAÏQUES  DE  CHARITÉ  ET  DE  BIENFAISANCE. 


La  charité  étant  la  première  des  vertus  chrétiennes,  elle  ne 
doit  pas  fleurir  seulement  chez  les  prêtres  on  dans  les  commu- 
nautés religieuses  d'hommes  ou  de  femmes.  Elle  doit  aussi  se 
développer  au  milieu  du  -monde  parmi  les  chrétiens  du  siècle. 
La  ville  de  Gonstantinople  nous  en  fournit  une  preuve  évidente. 
Les  associations,  ou  instituts  de  charité  n'y  sont  pas  nouveaux  : 
nous  en  avons  signalé  plusieurs  dans  son  histoire,  cependant  ce 
n'est  point  par  celles-là  que  nous  commencerons  notre  énumé- 
ration,  mais  bien  par  celles  qu'elles  ont  empruntées  à  nos 
contrées  occidentales. 

Nous  énumérerons  d'abord  celles  qui  se  relient  à  l'apôtre  de 
la  charité,  St  Vincent  de  Paul,  car  elles  forment  le  faisceau  le 
plus  considérable  et  le  plus  puissant. 


M. 

Associations  charitables  qui  se  rattachent  à  St  Vincent 
de  Paul. 


1»  Conférences  de  St-Vincent  de  Paul. 

L'établissement  des  Conférences  à  CP.  remonte  assez  haut, 
n  date  de  1846,  et  la  première  pensée,  comme  aussi  l'organisa- 
UOBj  en  sont  dues  à  M.  Bore,  supérieur  des  Lazaristes  de  CP., 


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—  485  — 

mort  depuis  sapériear  général  de  l'Institut  des  Prëtrea  de  la 
Mission  et  des  Filles  de  la  Charité. 

La  première  fut  constituée  le  6  mars  1816,  à  l'issue  de  la 
messe,  et  les  premières  élections  lui  donnèrent  pour  président 
M.  David  Glavany,  pour  vice-président  M.  de  Bonnant,  et  poor 
secrétaire  M.  Ë.  Bore.  Le  3  mai,  elle  était  agrégée  par  le  conseil 
central  de  Paris,  et  rendue  participante  de  toutes  les  faveurs 
spirituelles  accordées  par  le  Souverain  Pontife  à  l'Institution. 

Les  premiers  commencemeots  fturent  remplis  de  zèle  :  ainsi, 
dès  le  mois  d'avril,  elle  commença  la  publicati<Mi  des  Annales, 
qui  ne  furent  pas  continuées.  En  novembre,  elle  fonda  deux  lits 
à  l'hépital  de  Péra  ;  mais  après  divers  essais,  les  malades  ne 
goûtant  pas  ce  moyen  de  secours,  on  dut  y  renoncer.  Elle  éta- 
blit ensuite  une  bibliothèque,  mais  après  quelques  années  les 
livres  furent  dispersés  et  il  n'en  reste  pas  de  trace.  Elle  fit  di- 
vers autres  essais  qui  ne  furent  pas  poursuivis,  soit  parce  qu'ils 
ne  répondaient  pas  à  un  besoin  réel,  soit  parce  que  l'esprit  de 
suite  manquait  à  ses  membres. 

Les  réunions  se  tenaient  tantôt  à  St-Benott,  tantôt  chez  le 
président  ou  chez  l'un  des  membres.  Pendant  longtemps  ce  fat 
dans  le  couvent  de  St-Àntoine.  Aujourd'hui  elle  est  fixée  à  St- 
,  Benoit.  Elles  étaient  généralement  assez  suivies,  mais  on  y 
constatait  néanmoins  de  grandes  irrégularités.  Les  Conférences 
elles-mêmes  subirent  des  phases  très  diverses,  et  furent  parfois 
sur  le  point  de  disparaître.  A  d'auires  moments  nous  voyons  au 
contraire  plusieurs  Conférences,  une  à  St-Benolt,  une  à  Pan- 
caldi,  une  autre  pour  les  allemands,  sans  compter  celle  des  as- 
pirants. 

Actuellement  la  Conférence  compte  vingt-huit  membres  actife 
ou  souscripteurs.  KUe  a  commencé,  en  18'73,  un  compt&rendu 
annuel  de  ses  œuvres,  le  premier  a  été  fait  par  M.  Belin.  Ses 
œuvres  actuelles  sont  l'assistance  des  pauvres  et  la  visite  des 
femilles.  Le  nombre  de  ces  familles  est  régulièrement  de  cin- 
quante-buit.  Elle  donne  des  aliments,  des  vêtements,  du  char- 
bon, etc.  Elle  entretient  des  orphelins  à  N.-D.  de  la  Paix  et  à 
Tehoqour-Bostan.  Elle  n'a  pas  d'autres  ressources  que  les  con- 
tributions des  membres  et  le  produit  d'une  quête  faite  après  un 
sermon  de  charité  pendant  le  carême.  Elle  a  dépensé  depuis  son 
origine  23,000  fr.     ■ 


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Le  bien  moral  qu'elle  a  opéré  est  plus  considérable  encore  : 
c'est  elle  qui  a  commencé  h  grouper  les  hommes  chrétiens  qui 
avant  cela  ne  se  connaissaient  pas  comme  tels  ;  elle  a  coatribuè 
à  donner  l'élan  à  toutes  les  autres  œuvres  catholiques.  A  elle 
appartient  aussi  l'initiative  de  la  retraite  des  hommes,  qui  se 
prêche  chaque  année  pendant  le  carême  et  qui  fut  inaugurée  par 
M.  Salvayre,  en  1871. 

2"  Conférence  des  asptninls,  au  collège  St-Benoît. 

Elle  fut  fondée  en  1873,  et  elle  est  formée  des  élèves  les 
mieux  notés  du  collège.  En  faire  partie  est  une  récompense  jus- 
tement appréciée.  Son  but  est  de  soulager  les  pauvres,  et  d'i- 
nitier les  jeunes  gens  h  la  pratique  de  la  charité. 

De  1873  à  1877,  elle  essaya  ses  forces  en  patronant  des  en- 
fants orphelins,  en  habillant  des  enfants  pauvres,  en  faisant  la 
classe  k  une  quarantaine  de  petit»  enfants  abandonnés,  en  dis- 
tribuant ses  petites  aumônes.  Enfin  on  1877  elle  adopta  quel- 
ques familles  et  commença  la  visite  régulière  des  pauvres. 
Chaque  semaine  elle  a  ses  séances  où  l'on  disente  les  intérêts 
des  pauvres,  «liaque  semaine  aussi  deux  membres  de  la  Confé- 
rence, ù  tour  de  rôle,  vont,  sous  la  conduite  d'un  directeur, 
visiter  les  familles  adoptées,  et  porter  des  bons  de  pain,  de 
riz,  de  viande,  de  charbon,  d'habits,  etc. 

Le  nombre  des  membres  actifs  est  de  trente,  celui  des  fa- 
milles assistées  de  douze. 

Depuis  son  organisation  définitive,  elle  a  assisté  par  an 
soixante-dix-huit  familles  et  dépensé  environ  800  fr.  par  an. 
Les  membres  de  la  petite  Conférence  passent  naturellement  dans 
la  grande. 

3"  Société  Tinio-catholique.  187i. 

Cette  société,  essentiellement  catholique,  a  un. double  but  : 
le  maintien  des  pratiques  religieuses  tant  parmi  ses  membres 
que  parmi  les  personnes  étrangères  qui  sont  dans  le  rayon  de 
son  influence  \  et  ensuite  le  secours  mutuel  de  Ses  membres  en 
cas  de  maladies  ou  d'autres  accidents. 

Elle  tient  ses  séances  à  St-Benoit,sous  la  direction  d'un  mis- 


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sioimaire,  et  Fait  ses  fêtes  à  l'église  de  la  Mission.  Cette  excel- 
lente société  a  aujourd'hui  soixante  membres,  presque  tous 
chefs  de  familles  nombreuses. 


ASSOGIATIOS'^DE  DAMES,  DEST-VÎNCENT  DE  PAUL. 

1'  Association  des  Dames  de  charité  de  Péra, 
fondée  le  iS  février  1847. 

Cette  association,  comme  toutes  celles  du  même  genre,  a 
pour  but  de  venir  en  aide  aux  pauTres  dans  toutes  leurs  néces- 
sités. 

Elle  compte  cent  trente-sept  Dames,  sous  la  présidence  ordi- 
naire de  Mme  l'Ambassadrice  de  France  à  Constantinople.  Elle 
assiste  régulièrement  cent  quatre-vingt-quatre  familles. 

Depuis  sa  fondation  son  bilan  est  : 

Familles  assistées  régulièrement 7.122 

»              t         extraordinairement  .     .     .     .  5.61S 

Malades  secourus  et  médicaments 15.284 

Visites  aux  pauvres  et  aux  malades     ....  199,350 

Sommes  dépensées  pour  les  pauvres     ....  741.000 

Baptêmes  en  neuf  ans 99 

Mariages  réhabilités 4 


2°  Association  des  Dames  de  charité  c 
fondée  le  18  février  1847. 


■>,  Qaiata, 


Elle  compte  soixante-dix-sept  membres  et  elle  assiste  régu- 
lièrement quatre-vingts  familles. 
Bilan  depuis  la  fondation  : 


Familles  assistées  régulièrement     . 

B              »        extraordinairement 
Visites  aux  pauvres  et  aux  malades 
Portions  aux  enfants  pauvres  des  classes. 
Sommes  dépensées  pour  les  pauvres 
Baptêmes  en  dix  ans    .     .     .     .     . 
Mariages  réhabilités 


2.584 
2.934 
40.800 
73.842 
187.000 
55. 


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3'  Association  des  Dames  de  charité  du  Taqcim, 
fotuiée  en  1853. 

Cette  association  a  pour  bat  principal  le  soin  des  pauvres 
malades  délaissés.  Elle  compte  cent  cinquante-deux  Dames  et 
secourt  annuellement  cent  vingt  malades. 

Bilan  depuis  sa  fondation  ; 

Malades  reçus  et  médicaments 2.430 

Dépenses  faites  pour  ces  malades 177.610 

i,"  Association  des  Demoiselles  Patronnasses  de  la  crèche, 
fondée  en  1872. 

Cette  association,  composée  de  jeanes  demoiselles,  a  pour 
but  de  soutenir  l'œuvre  des  enfants  trouvés.  Elle  compte  cent 
une  patronnesses  et  elle  entretient  chaque  année  en  moyenne 
cent  vingt-cinq  enfants. 

Bilan  depuis  sa  fondation  : 

Enfants  recueillis 560 

Dépenses  faites  pour  leur  entretien 378.500 

Si  à  ces  chiffres  de  l'association  des  Patronnesses  de  la  crèche, 
on  ajoute  ceux  de  la  crèche  elle-même,  on  arrive  au  chiffre  de 
Enfants  recueillis 1.097 

6°  Patronage  des  enfants  pauvres  des  classes  du  Taqcim, 
fondée  en  1872. 

Cette  œuvre  a  pour  but  de  venir  en  aide  aux  enfants  pauvres 
qai  fréquentent  les  classes  du  Taqcim,  en  les  habillant,  en  les 
nourrissant,  en  leur  donnant  le  moyen  de  fréquenter  l'école  et 
le  catéchisme.  Elle  compte  une  cinquantaine  d'associées  et  pa- 
tronne cent  vingt  enfants. 

Bilan  depuis  sa  fondation-  : 

Enfants  patronnés 1.490 

Dépense 44.965 


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Bilan  général  des  huit  associations  de  Charité 
de  SI- Vincent  de  Paul. 

Enfants  recaeillis  par  la  crèche 1.097 

Enfants  assistés  par  le  Patronage 1.490 

Malades  soignés  et  médicamentës 18.000 

Familles  assistées  (cinq  membres  en  moyenne).     .  21.000 

Portions  aux  enfants  pauvres  des  classes.     .     .     .  73.843 

Visites  aux  pauvres  et  aux  malades 343.500 

Sommes  dépensées  (chifîre  net).     .     .     ,     .      fr.  l.SOO.OOO 

GLOmE  A.  DlEO  I 

C'est  ainsi  que  les  prêtres  de  la  Mission  terminent  le  compte- 
rendu  de  leurs  œuvres,  envoyé  au  Souverain  Pontife,  à  l'occa- 
sion de  son  jubilé,  (c'est  là  que  nous  avons  pris  les  chiffres  qne 
nous  avons  donnés,)  c'est  ainsi  qne  nous  terminerons  nous- 
mêmes  cet  exposé  de  ce  qui  se  fait  pour  le  bien  des  Ames  et  des 
corps,  sous  l'inspiration  de  St  Vincent  de  Paul. 

GLomE  i.  Disc  ! 


SU. 

Autres  Associations  charitables. 

i"  Confrérie  de  Ste-Anne. 

Cette  confrérie,  reste  d'une  antique  institution,  f^t  d'abord 
établie  dans  la  chapelle  de  la  Sainte,  en  St-François,  puis 
comme  nous  l'avons  dit,  transférée  à  St-Benolt,  enfin  reconsti- 
tuée dans  l'église  de  Ste-Marie  Drapéris. 

L'existence  de  cette  confrérie  à  St-Benolt  et  la  pratique  des 
exercices  de  la  confrérie,  dans  cette  église,  sont  attestées  par 
les  Mémoires  de  la  confrérie  en  date  de  février  1798  ;  ces  céré- 
monies, les  mêmes  qui,  selon  l'antique  usage,  étaient  pratiquées 
à  St-Fran$oi3,  consistent  dans  le  lavement  des  pieds,  le  Jeudi- 


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—  490  — 

saint,  la  procession  de  Pâques  et  la  messe  patronale,  où  l'on 
prononce  le  panégyrique  de  Ste  Anne.  L'office  religieux  du  jeu- 
di-saint terminé,  les  prieur,  soos-prieur  et  assistant,  ces  deux 
derniers  en  aubes  et  en  cape  jaune,  entrent  dans  le  chœur  ;  au 
même  instant,  un  sous-diacre  lit  l'épître  du  jour;  puis,  un 
diacre,  précédé  de  la  croix  et  des  acolytes,  monte  en  chaire,  et 
y  lit  l'évangile  ;  au  fur  et  &  mesure  de  la  récitation  des  paroles 
évangéliques,  le  prieur  revêt  l'aube,  la  ceinture,  le  cordon  et  la 
serviette  ;  et,  accomplissant  successivement  les  actes  que  nous 
venons  d'énumérer,  lave  les  pieds  à  douze  enfants  ;  les  membres 
de  la  confrérie  distribuent  des  pains  à  chacun  d'eux,  même  à 
l'assistance,  et  entonnent  ensuite  le  Stabat  Mater,  k  la  porte 
de  l'église,  est  suspendu  un  tableau  portant  le  nom  des  prieur, 
sous-prieur  et  des  douze  apôtres  ou  conseillers  ;  l'un  des 
membres  de  la  confrérie  reçoit  les  aumônes,  pour  les  pauvres. 

On  peut  être  porté  à  dire,  avec  quelque  raison,  que  la  céré- 
monie dont  il  vient  d'être  parlé,  est  la  conlinuation,par  le  prieur 
de  Ste-Anne,  d'un  usage  pratiqué,  antérieurement,  par  le  po- 
destat et  le  conseil  des  magistrats  de  la  colonie  génoise  de  Péra. 

Le  jour  de  Pâques,  les  membres  de  la  confrérie,  mais  <  sans 
cappe,  »  portent  une  châsse  d'argent  massif,  contenant  l'image 
du  ï  Rédempteur  ressuscité'.  > 

La  confrérie,  qui  a  aussi  sa  bannière,  possède  dans  sa  cha- 
pelle, à  St-Benoit,  à  droite  du  mattre-autel,  un  a.ssez  grand  ta- 
bleau de  la  Ste  Vierge,  peint  sur  toile,  et  enfermé  dans  un  cadre 
intérieur  d'argent.  La  tète  de  la  Vierge,  nimbée  d'or  et  cou- 
verte d'un  voile  tombant  sur  le  front,  est  noire  ;  les  mains  de 
l'enfant  Jésus,  qu'elle  tient  appuyé  sur  son  bras  gauche,  sont 
d'un  ton  bistré  ;  on  attribue  à  cette  image,  rapportée,  dilnin,  ab 
anttquo,A&  Trébizonde,  où  la  confrérie  aurait  pris  naissance, 
certains  miracles,  opérés  sur  les  malades  chez  lesquels  on  la 
portait  autrefois. 

A  gauche  de  l'autel,  côté  de  l'évangile,  se  trouve  le  tableau 
de  Ste  Anne,  entièrement  d'argent,  sauf  la  tète  et  les  mains 
jointes,  qui  seules  sont  peintes,  et  d'un  ton  également  bistré  : 
au  côté  opposé  de  l'autel,  le  tableau  de  3t  Joachim  est  exacte- 


I  Cette  procession  est  citée  dans   une  plainte  de  la  Comunil'i  au  Saint- 
Père  contre  Mgr  de  Spiga. 


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—  491  — 

ment  dans  les  mêmes  conditions.  Ces  deux  tableaux  paraissent 
être  de  la  même  époque  que  ceiui  de  la  Vierge. 

En  haut  et  au  milieu  du  fronton  de  l'autel,  se  trouve  encore 
an  tableau  de  St  Nicolas,  dont  la  confrérie  célèbre  également  la 
fête.  Ob  y  voit  aussi  une  image  de  St  Itoch,  invoqué  contre  la 
peste. 

La  fête  patronale  de  Sfe  Anne  est  célébrée  solennellement  le 
26  juillet. 

Le  P.  Tarillon,  Jésuite,  nous  fournit  sur  celte  confrérie  et  ses 
usages  tels  qu'ils  existaient  à  St-Benolt,  en  1713,  les  détails 
suivants,  assez  singuliers  : 

€  Les  latins  de  Péra,  dit  le  Père,  ont  aussi,  dans  l'église  de 
la  mission,  leur  association  des  Pénitents,  on  confrérie  de 
Sle-Anne,  établie  depuis  cinq  à  six  siècles'.  Cette  confrérie  a 
des  privilèges  assez  singuliers  :  les  confrères  ont  le  droit  de 
chanter  l'évangile,  avec  une  ètole,  comme  les  diacres-,  et  de 
prendre  du  vin  dans  des  vases,  le  jour  de  Pâques,  après  avoir 
communié^.  Elle  n'était  autrefois  composée  que  des  plus  no- 
tables catholiques  du  pays  ;  mais^  depuis  plusieurs  années,  les 
négociants  français  et  vénitiens  y  sont  entrés,  et  lui  donnent  un 
nouveau  lustre  : 

t  Cette  confrérie  possède  un  riche  trésor  qu'elle  a  toujours 
conservé,  malgré  toutes  les  révolutions  arrivées  dans  cette  ville  : 
ce  trésor  est  une  épine  de  la  couronne  qui  fut  mise  sur  la  tête 
de  Jésus-Christ.  Cette  précieuse  relique  est  vérifiée  par  les 
certiflcals  et  lès  pièces  les  plus  authentiques,  et  donna  lieu 
à  la  procession  qui  se  fait,  depuis  longtemps,  ta  nuit  du 
samedi-saint  et  le  jour  de  Pâques;  en  voici  tout  l'ordre  et 
l'arrangement  :  La  procession  sortit  de  notre  église,  vers  les 
deux  heures  du  matin  et  n'y  rentra  qu'à  quatre.  Une  nombreuse 
troupe  de  violons,  de  haulbois,de  trompettes,  de  cors  de  chasse, 
•choisis  dans  les  palais  des  ambassadeurs,  marchoit  à  la  tète,  et 
faisoit  retentir  toute  la  ville  du  bruit  des  instruments  :  tout 


1  Loc.  lau'l..  V,  25  à  30S. 

^  \  t'une  des  cérénionies  auxquelles  j'ai  assisté,  c'était,  comme  je  l'ai  dit 
plus  haut,  un  prêtre  qui,  en  chaire,  fit  lecture  de  l'évangile. 

^  A  la  première  communion,  j'ai  tu  ausBi.  dans  une  paroisse  de  Péra, 
donner  à  boire  de  l'eau  aux  entants,  après  la  consommation  des  saintes  e^ 


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cela  prëcédoit  trois  riches  bannières,  qui  étotent  environnées  et 
éclairées  par  une  vingtaine  de  torcbes  allumées  ;  les  bannières 
.  ètoient  suivies  de  tous  les  confrères  au  nombre  d'environ  deux 
cents,  qui  marchoient  deux  à  deux,  et  qui  portoient  tous  un 
flambeau.  Leur  habillement  consiste  en  une  espèce  d'aube  de 
toile  blanche  et  âne  ;  il  y  avoit  au  milieu  des  rangs,  à  une  dis- 
tance raisonnable,  deux  choeurs  de  musique,  à  la  façon  du  pays, 
qui  ne  laisse  pas  d'avoir  quelque  chose  d'harmonieux  ;  ils  se 
répondoient  l'un  à  l'autre,  après  avoir  laissé  aux  instruments 
le  temps  de  se  répondre. 

<  Paraissoit  ensuite  un  autel  portatif,  magnifiquement  orné, 
entouré  d'une  cinquantaine  de  cierges  et  de  presque  autant  de 
flambeaux  ;  sur  cet  autel,  s'élevoit  une  résurrection,  dont  le 
travail  m'a  paru  assez  beau  ;  c'est  une  image  de  Jésus-Christ 
ressuscité,  qui  est  placée  dans  une  espèce  de  rotonde,  dont  le 
'  dessus  est  soutenu  par  plusieurs  colonnes  :  le  tout  est  d'ar- 
gent '  ;  on  voyoit  autour  de  cet  autel,  huit  gros  fanaux  dorés  et 
ornés  de  sculptures. 

t  Venoit  après,  le  clergé,  composé  des  cordeliers,  des  récol- 
lets, des  trinitaires,  des  dominicains,  tous  en  chapes,  et  des  jé- 
suites, en  manteaux  longs. 

(  Le  dais,  qui  est  d'un  beau  damas  blanc,  à  grandes  franges 
d'or,  avec  une  magnifique  crépine,  étoit  porté  par  le  prieur  et  les 
trois  principaux  oÉBciers  de  la  confrérie,  habillés  de  blanc, 
comme  le  reste  des  confrères.  Cette  relique,  qui  consiste  en  une 
petits  branche,  revêtue  d'or,  est  enfermée  dans  une  coupe  de 
cristal,  dont  le  couronnement  et  le  pied  sont  de  vermeil.  Le 
dais  étoit  environné  de  quelques  prêtres  en  dalmatique,  d'an 
grand  nombre  de  flambeaux,  et  de  quatre  confrères,  qui  por- 
toient de  grands  vases  d'argent,  remplis  d'eau  de  rose,  dont  ils 
arrosoient  les  assistants  -.  La  procession  étoit  fermée  par  une 
vingtaine  de  confrères  et  par  les  principaux  officiers,  qui  tous 
avoient  un  flambeau. 


1  Cette  même  Résurrection  est  portée  encore  actuellement  (1S73),  par  les 
confrères  de  Stc-Anne,  ilaos  l'enclos  de  St-Beno[t,  à  la  proceEsioii  du  jour  de 
PAques. 

»  J'ai  encore  vu  cet  usage  pratiqué  (1872),  dans  les  églises  grecques,  le 
vendredi-saint  ;  en  entrant  dans  l'église,  les  visiteurs  sont  aspergés  d'eau  de 
rose,  par  les  personnes  placées,  ail  hoe,  &  la  porte  du  temple. 


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—  493  — 

<  Les  arméniens  avoient  demandé  avec  instance  que  la  pri}- 
cession  se  détournAt,  pour  passer  devant  nne  de  leurs  églises  ; 
CD  accorda  cette  grâce  k  l'ëvèque  de  cette  église,  qui  reçut  la 
procession,  lorsqu'elle  passa  devant  le  temple  ;  il  ètoit  en  chape 
et  en  mitre  ;  plusieurs  prêtres  de  son  clergé  l'accompagn  oient, 
et  étoient  précédés  par  une  cinquantaine  de  flambeanx.  La 
procession  s'arrêta  quelques  moments  ;  un  de  nos  diacres  chan- 
ta l'évangile  du  jour,  et  l'oraison  du  patron  de  cette  église  ;  le 
prélat  s'approcha  ;  je  lui  présentai  la  sainte-épine,  et  il  la  baisa, 
avec  une  profonde  vénération... Le  lendemain,jo«r  tfe  Pâques, 
de  grand  matin,  ils  reviennent  (les  confrères  de  8te-Anne)  faire 
une  autre  procession,  le  long  des  principales  rues  de  Galata, 
avec  la  croix  haute,  et  chantant  des  hymnes  ;  de  tout  temps,  ils 
ont  eu  cette  permission.  Les  Turcs  qui  se  rencontrent  sur  leur 
chemin,  sont  les  premiers  h  s'arrêter  et  à  donner  des  marques 
de  leur  respect.  > 

Cette  procession  continua,  sans  doute,  d'avoir  lieu  jus- 
qu'en 1749,époque,  on  l'a  vu  plus  haut,  oi!iles  processions  noc- 
turnes furent  interdites,  à  la  demande  du  capilan-pacha. 

Quant  à  la  sainte  relique,  il  résulte  des  renseignements  dont 
je  suis  redevable  à  Mgr  Testa,  vicaire-général,  camérier  du 
Souverain-Pontife,  qu'elle  se  trouvait  à  St-François,  lors  de 
l'incendie  de  cette  église,  en  1696  ;  elle  fut  sauvée  des  flammes 
par  l'un  de  ses  aïeux  ;  puis,  des  différends  étant  survenus  entre 
sa  famille  (Charles  Testa)  et.la  confrérie,  la  cause  fut  portée  i^ 
Rome,  où  il  fut  décidé  que  la  relique  resterait  aux  mains  de 
ceux  qui  l'avaient  conquise  au  péri]  de  leur  vie.  Cependant,  le 
possesseur  de  cette  relique  consentit  à  la  prêter,  le  vendredi- 
saint,  pour  la  procession  d'usage,  à  la  condition  qu'un  prêtre  de 
St-Benolt  viendrait  la  prendre  et  la  rapporter  chaque  fois.  Cette 
condition  n'ayaqt  pas  été  remplie  du  vivant  du  père  du  vicaire- 
général  actuel,  il  se  refusa  à  la  prêter  désormais.  Au-dessous  de 
la  relique,  à  côté  de  laquelle  se  trouve  aussi  un  morceau  de  la 
vraie  croix,  il  y  a,  dans  un  double  fond  du  reliquaire,  les  docu- 
ments attestant  son  authenticité,  comme  il  est  dit  dans  le  rap- 
port précédent  do  père  Tarillon. 

St-Benolt  possède  présentement  une  autre  sainte  épine,qu'on 
porte,  processlonnellement,  dans  l'église,  à  l'issue  des  ténèbres, 
le  vendredi-saint  ;  elle  est  également  présentée  à  la  vénératioa 


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—  494  —   • 

des  Ûdéles,  le  jour  de  Pâques,  après  la  procession  de  la  Résur- 
rection, par  la  confrériede  Ste-Aime. 

Les  église?  de  Ste-Marie,  à  Pêra,  et  du  Saint-Esprit,  à  Pan- 
caldi,  ont  aussi,  chacune,  une  relique  de  la  sainte  épine,exp03ée 
h  la  véntîration  des  fidèles,  le  vendredi-saint,  à  l'issue  des  té- 
nèbres. 

Les  grecs  ont  conservé  l'usage  de  la  procession  le  vendredi- 
saint;  le  9lî  avril  i872,  vendredi-saint,  ancien  style,  je  me  trou- 
vai sur  le  passage  de  la  procession  sortie  de  l'église  giecque  de 
St-Jean,  àGalata',  k  six  heures  de  l'après-midi,  et  se  dérou- 
lant, au  milieu  d'un  grand  concours  de  peuple,'  dans  les  ruos 
avoislnant  l'église  ;  le  clergé,  précédé  de  la  croix,  entourée  des 
•  csefteria,  <  emblèmes  des  chérubins,  >  de  riches  bannières  et 
lanternes,  portait,  sur  une  espèce  de  dais,  porté  par  quatre 
prêtres,  l'image  du  Christ  mort,  reposant  sur  ce  dais,  symbole 
du  saint  tombeau.  Le  clergé  de  l'église  voisine,  dite  du  Christ, 
se  porta  sur  le  passage  de  la  procession.  —  La  même  procession 
ae  fait,  dans  léglise  épiscopale  de  Pèra,  dans  l'enceinte  du 
cloitre,  autour  du  temple,  sans  sortir  au  dehors. 

Ces  détails  que  nous  avons  donnés  sur  une  ancienne  et  véné- 
rable association  ont  surtout  un  intérêt  rélrospectif  et  histo- 
rique et  nous  transportent  au  Moyen-Age,  ou  du  moins  à  l'an- 
cien régime.  La  confrérie  de  Sle-Aune  s'est  conservée  :  elle  a 
subi,  selon  les  temps,  différentes  phases  de  prospérité,  de  dé- 
cadence et  de  renaissance.  En  dernier  lieu,  elle  se  serait  éteinle 
en  1840,  pour  se  reconstituer,  sous  une  nouvelle  forme,  le  13  d^-- 
lembre  1856,  jour  de  la  première  réunion  de  la  nouvelle  société. 

L'associatiim  de  St-Jean- Baptiste, chargée,  après  l'extinction 
de  celle  de  Ste-Ahne,  du  soin  de  l'hôpital  tien  pestiférés  de 
Pcra,  au  Taqcim,  avait  conservé  une  ombre  d'existence  par  la 
perception  du  loyer  de  son  ancien  hôpital,  loué  aux  sœurs  de 
charité.  Conservé  scrupuleusement,  puis  accru,  dans  une  pro- 
portion considérable,  par  le  prix  de  la  vente  de  ce  même  hôpi- 
tal, faite  à  la  France  en  1862,  te  montant  de  cette  location  finit 
par  former  un  capital  important  qui  permit  à  l'ancienne  société 
de  se  reconstituer  à  nouveau.  Elle  se  compose,  actuellement, de 


I  L'ancienne  é^'ise  de  St-Spiridion,  cédée  aux  Chiotes,  et  dont  il  a  été  par- 
lé plus  haut-  ([jitinité  de  l'éra-Ualila,  note.) 


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—  495  — 

deux  sections,  comptant  chacune  dix-huit  familles,  l'une  pour 
Galata,  dite  plus  spécialement  de  Sle-Anne,  l'autre  pour 
Péra,  dite  de  St- Jean-Baptiste.  Chaque  section  est  dirigée  par 
un  syndic  ou  président-senré taire,  ;issisté  d'un  ou  deux  délé- 
gués, chargés  de  la  distribution  des  secours.  Au  moyen  de  ses 
ressources,  sagement  administrées,  l'œuvre  pourvoit  à  l'entre- 
tien des  orphelins  du  choléra,  au  soutien  des  aliénés,  à  l'éduca- 
tion de  jeunes  fllles  placées  dans  les  pensionnats  religieux,  à 
l'entretien  de  malades,  dans  l'hôpital  dn  Taqcim  ;  de  vieillards, 
dans  l'hoipice  de  V Artigtana  ;  et  à  l'assistance  de  pauvres  hon- 
teux. Elle  a  acheté,  à  Feri-keui,  non  loin  du  cimetière  catho- 
lique latin,  un  terrain  où  l'on  avait  projeté  de  construire  un 
hôpital;  sans  renoncer  A  ce  projet,  la  société  a  fait  élever,  sur 
ce  terrain,un  certain  nombre  de  maisonnettes  bâties  en  briques, 
pour  y  donner  asile,  provisoirement,  aux  victimes  de  l'incendie 
du  5  juin  1870. 

Les  confréries  unies  de  Ste-Anne  et  de  St-Jean-Baptiste  ont 
depuis  quelques  années  transporté  le  siège  de  leurs  réunions  à 
l'église  de  Ste-Marie.  Nous  regretton-s  vivement  do  ne  pouvoir 
donner  de  détails  sur  l'état  de  la  confrérie  depuis  sa  translation 
à  Ste-Marie.  Elle  y  continue  ses  cérémonies  de  la  Semaine- 
Sainte  et  du  jour  de  Piiques  et  a  encore  ses  œuvres  de  charité. 

2"  Association  commerciale  et  artisane  de  piété. 

Fondée  le  1'^'  janvier  1838,  par  les  latins  de  Péra,  à  l'instiga- 
tion zt'Iéc  et  efficace  de  M.  Oiacomo  Anderlich,  cette  associa- 
tion, entièrement  séculière,  possède  à  Pancaldi,  vis-à-vis 
l'École  impi'riale  militaire,  un  hospice  composé  de  quarante- 
deux  petites  maisons,  où  l'on  reçoit  les  veuves  cliargées  de  fa- 
mille, les  vieillards  et  les  infirmes  hors  d'état  de  gagner  leur 
vie.  L'association,  selon  les  statuts,  datés  du  10  mars  1844, 
assiste  toutes  les  infortunes,  sans  distinction  de  culte  ou  de 
nationalité  ;  et  elle  dispose  d'un  revenu  annueî  d'environ  cent 
mille  piastres.  —  En  outre  des  cotisations  d'admission  et  de 
chaque  mois,  les  associés  doivent  faire  la  quête  aux  jours  de 
fête,  au  moins  une  fois  l'an,  en  faveur  de  l'ceuvre,  à  la  porte  des 
églises. 

L'administration  de  l'hospice  avait  été  d'abord  absolument 


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l^qae  et  civile  ;  mais,  poor  faciliter  le  service  et  pour  écono- 
miser les  reasources,  le  conseil  d'admimstration,  après  une 
entente  avec  Mgr  Pluym,  vicaire  patriarcal,  en  remit  la  direc- 
tion aax  -Filles  de  la  Charité.  La  chapelle  de  l'hospice  est  placée 
sous  l'invocation  de  N.-D.  Àuxiliatrice,  et  célèbre  sa  fête  le 
34  mai. 

Pour  les  détails  statistiques  de  l'hôpital  de  l'Artiglana,  voir 
f  les  établissements  dirigés  par  les  PÏUes  de  la  Charité.  » 


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CHAPITRE   VII. 


LES  HOPITAUX  CATHOLIQrES,  ANCIENS  ETMODEBNES. 


Nous  avons  vu  au  Chap.  VIU,  §  III,  de  la  2*  Part,  que  les 
hôpitaux  catholiques  sont  fort  anciens  à  CP.  Leur  nombre  a  été 
encore  augmenté  de  nos  jours,  à  mesure  que  la  charité  chré- 
tienne a  pris  de  nouveaux  développements.  Aux  hépitaux  reli- 
gieux se  sont  venus  joindre  les  établissements  nationaux  :  nous 
ne  parlerons  de  ces  derniers  qu'autant  qu'ils  se  rattachent  à 
notre  sujet,  à  cause  des  religieuses  qui  les  desservent. 


SI- 

Hôpitaux  anciens,  pour  la  plupart  disparus 
oti  fondus  en  d'autres. 

1°  Hôpital  de  St' Jean  (confrérie  de  St-Jean-Baptiste). 

Cet  hfipital,  le  même  que  celui  dit,  autrefois,  <  des  Latins  s 
ou  «  des  Peyrotes,  »  et  qui,  aujourd'hui,  n'existe  plus,  par  suite 
de  la  vente  faite  à  la  France  en  1862',  aurait  été  créé  par  la 
Comunità  di  Péra  vers  1669 -.  Cet  hôpital  fut  alors  géré  et 
administré  par  la  confrérie  de  St-Jean-Baptiste,  issue  de  celle 
de  Ste-Anne,  probablement  à  l'époque  où  l'hôpital  San-Giovan- 
ni  fut  transféré  de  Galata  à  Péra, 

'  Voyez  plus  bas,  Hôpital  français, 

«  Cf.  procô»-vefbal  du  13  mare  1669.  (Comunità  di  Péra.J 


y,'G00g\il 


Il  recat  une  nouvelle  organisation  en  1762  ;  et,  à  cette  date, 
un  sieur  Dantan  '  en  fut  le  procureur  ou  syndic. 

En  1767,  il  s'accrut  de  la  partie  de  t  l'hdpital  St-Louis,  >  ■ 
dont  on  fit  l'acquisition  *. 

Dans  un  Hu^jetde  1174=1760,  cethdpital,  dilAfrendJ  oda- 
lacy,  t  Chambres  des  Francs  >  se  composait  de  sept  chambres 
k  l'étage  supérieur,  et  de  deux  à  l'étage  du  bas  avec  dépen- 
dances pour  le  service.  Il  fut  transféré  alors,  du  nom  de  Bap- 
tiste Navoni,  drogman  de  Venise,  à  celui  de  Bartliélemj-  Testa, 
drogman  d'Autriche. 

Dans  le  rachat  de  cet  immeuble  par  la  France,  en  1862,il  est 
désigné,  dans  l'acte  de  transfert,  sous  le  terme  de  Khastalar 
odacy  <  les  chambres  des  malades  >.  En  1793,  cet  hépital  était 
dit  par  la  Comunità  :  t  ospedale  dei  pestiferati,  >  ou  c  di  San 
Giovanni,  vicino  al  campo  degli  morti  >.  Il  est  désigné  par  les 
documents  français  du  temps  :  «  hôpital  des  catholiques  de  Fe- 
ra ;  hfipital  StJean  des  Peyrotes  ;  >  et  par  Carbognano  :  c  ospe- 
dale degli  appestati  del  rito  latioo.  » 

En  1817,  MM.  Gaspard  Testa  et  Auge  Dantan  en  étaient  les 
procureurs. 

Lors  de  l'exhumation  générale  du  cimetière  latin  des  Grands- 
Champs,  à  Péra,  on  y  a  trouvé  des  pierres  funéraires  portant  ' 
les  inscriptions  suivantes  : 

1815.  Joannis  di  Porta,  miss.  Capellanus  hospitii  Sti  Joannis 
Baptistœ  pestiferantium. 
1834.  D.  Giorgio  RiGo,  di  Tine,  capellano  dei  pestiferanti. 

Ces  deux 'pierres  ont  été  transportées  dans  ia  «rypte  de  l'é- 
glise du  St-Esprit. 

La  conMrle  de  St-Je&n-Baptiste  qui,  d'ailleurs,  n'existait 
plus  que  de  nom,  depuis  longtemps,  s'est  fusionnée,  en  1856, 
avec  celle  de  Ste-Anne. 


-    1  La  famille  Dantan  a  fourni  au  drogmanat  français  da  Levant  plai  d'un 
sujet  distingua. 
!  Voyez  plus  bas,  Hôpital  français. 


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2°  Hôpital  Sf-Benoîi,  ou  St-Louis,  Hospice  des  Latins. 

Hôpital  de  St-Benoît.  —  La  fondation  de  cet  hfipital  fut,  on 
l'a  vu  plus  haut,  l'un  des  motifs  mis  en  avant  pour  s'opposer 
au  rétablissement  des  jésuites,  dans  St-Benoit,  à  leur  seconde 
mission,  en  1609;  mais  le  Souverain-Pontife  n'ayant  pas  paru 
accueillir  ces  prétextes,  on  en  vint  à  une  sorte  de  compromis  : 
les  Pères  furent  réinstallés  dans  l'abbaye;  mais,  de  leur  côté, 
ils  acquiescèrent  à  l'établissement  de  l'hôpital.  Les  Capitula- 
tions de  1673  mentionnent  aussi  cet  hôpital  dans  les  termes 
ci-après,  rapportés  dans  celles  de  1740  ;  «  On  n'inquiétera  pas 
les  Français...  quand  ils  liront  l'évangile,  dans  leur  hôpital  de 
Galata.  » 

On  lit  également  dans  Chardin'  «que  l'ambassadeur  (de 
France)  sera  reconnu  protecteur  de  {'hôpital  des  chrétiens  eu- 
ropéens, qui  est  à  Galata,  et  y  pourra  faire  dire  la  messe.  » 

En  juin  1697,  les  députés  de  la  nation  accordent  une  alloca- 
tion «  à  dom  Pelleyre,  qui  sert  à  l'iiôpital  de  St-Louis  de  Ga- 
lata', pour  louage  de  la  maison  servant  d'hôpital,  et  pour 
commencer  au  plus  tôt,  la  fabrique  nécessaire  pour  le  rétablis- 
sement d'iceluy.  >  Il  résulte  de  la  délibération  prise  à  cet  égard, 
que  l'hôpital  St-Louis  avait  «  esté  brullé  dans  l'incendie  gêné- 
ralle  de  Galata,  durant  l'année  précédente,  1696.  »  La  restaura- 
tion de  l'hôpital  fut  effectuée  et  terminée  en  1698,  aux  frais  de 
la  nation^.  «  Un  maître  apothicaire  de  la  nation  française  »  fut 
attaché  à  l'établissement  en  1704  ;  et,  en  1717,  «  un  médecin 
chirurgien  et  pharmacien  de  la  nation,  fiit  appointé  par  elle,  i 
Le  locaî  de  l'hôpital  se  trouvait  sur  la  droite  du  grand  esca- 
lier, conduisant  de  l'église  à  la  porte  de  l'enclos  ouvrant  sur  la 
rne;  parmi  les  redevances  qu'ils  acquittent  encore  aujourd'hui 
{1870),  les  lazaristes  paient  au  vacouf  celle  <  des  deux  maisons 
servant  d'hôpital.  »  D'après  un  document  de  1794,  cet  éta- 
blissement portait  alors  le  nom  «  d'hôpital  de  la  République 
française.  > 

'  Loe.  lawi.,  1,63. 

■  L'hâpital  de  St-Benolt  eat  désigna  désormais  sous  le  oom  d'Aâpital  St- 

'  Regittre  de»  délibérations  natîonaleê. 


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—  500  — 

Dans  un  document,  de  l'an  VI  (1798)  de  la  république  firan- 
çaise,  cet  élablissement  est  dît  :  «  hospice  de  St-Benolt  de  Ga- 
lata.  > 

Pendant  de  longues  années,  l'hôpital  resta  h  St-Benolt  ;  et  il 
avait  pris,  à  une  certaine  époque,  une  telle  extension,  qu'une 
partie  même  du  local  habité  par  les  missionnaires  était  occupée 
par  les  lits  des  malades.  En  1825,  sinon  pins  tôt,  il  fut  trans- 
féré dans  la  €  casa  vicariale  di  San  Giorgio,  »  dont  la  nation  ac- 
quittait annuellement  le  loyer,et  il  yresta jusqu'en  octobrel840; 
il  fut  alors  transféré  au  Taqcim  de  Péra.  Tant  à  St-Benoît  qu'à 
St-Georges,  l'hôpital  fut  administré  par  le  second  député  ;  le 
□ombre  des  lits,  qui  était  de  huit  en  1834,  fut  porté  à  douze 
en  1840. 


§11. 

Hôpitaux  nationaux  catholiques. 

i"  Hôpital  municipal. 

Bien  que  cet  établissement  ne  rentre  pas  directement  dans  le 
cadre  de  notre  travail,  il  peut  cependant  y  trouver  place,  car  il 
est  desservi  par  les  sœurs  de  Charité.  Fondé  en  1865,  par  la 
municipalité  de  Péra,  à  l'occasion  du  choléra,  pour  tous  les 
malades  de  la  circonscription  municipale,  sans  distinction  de 
culte,  ni  de  nationalité,  il  compte  présentement  quarante-cinq 
lits,  sous  la  direction  d'un  médecin,  M.  le  docteur  Plessa  ;  les 
soins  y  sont  donnés  aux  malades,par  les  sœurs  de  Charité.  (Voir 
au  Chap.V,  §  I,  les  détails  sur  cet  hôpital.) 

S"  Hôpital  austrO'hongrois .  —  Allemand  catholique. 

L'hôpital  austro-hongrois  fut  fondé  par  le  gouvernement  au- 
trichien, probablement  en  1836  ;  mais  les  registres  que  l'on  en 
a  conservé  ne  remontent  qu'à  1840.  A  cette  époque  il  était  établi 
dans  une  maison  située  derrière  le  Taqcim,  à  Sultan-Tchechmè. 
Cet  hôpital,  destiné  principalement  aux  malades  de  la  marine 
austro-hongroise,  a  été  établi  depuis  1854,  dans  l'ancien  cloître. 


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—  501  — 

dit  f  petit  conveDt  des  Capucins,  >  à  SMleorges  ;  il  compte 
trente  lits  ;  la  direction  est  civile,  et  placée  sous  la  haute  sur- 
veillance de  l'ambassade  impériale  et  royale  ;  les  soins  sont  don- 
nés aux  malades  par  des  infirmiers,  sous  la  direction  da  mëde' 
oin  de  l'ambassade  austro-hongroise.  Il  a  été  uni  au  suivant. 

3"  Hôpital  allemand-cathoHque. 

Fondé  eu  1869,  par  la  f  Société  allemande  de  bienfaisance  et 
de  secours,  »  rue  Hammal-bâchi,  vis-à-vis  le  palais  d'Angle- 
terre, cet  hôpital  comptait  une  vingtaine  de  lits,  et  était  desser- 
vi par  trois  sœurs  de  Charité  (deux  allemandes,  une  française). 
Il  a  été  détruit  par  l'incendie  de  Péra  du  5  juin  1870  !  Les 
administrateurs,  MM.  Runzler  (Gustave),  Krebs  (Antonio)  et 
Sefïelders,  qui  s'étaient  portés  sur  le  lieu  du  sinistre,  pour  sau- 
ver les  malades,  ont  péri,  ainsi  que  l'une  des  sœurs,  victimes 
de  leur  dévouement  !  Le  feu  ayant  déjà  envahi  la  chapelle  où 
se  trouvait  le  St-Sacrement,  la  sœur  Marie,  accourue  de  Tcho- 
qour-Bostan  au  secours  de  ses  sœurs  en  religion,  invita  la  sœur 
Joséphine  Kûrth,  flllede  la  Charité,  et  la  sœur  Flora  Angélina, 
ursuline,  présentes,  à  faire,  à  genoux,  leur  acte  de  contrition,  et 
à  communier  ensuite  en  viatique!  ces  saintes  filles  consom- 
mèrent ainsi  les  saintes  espèces  ;  peu  après,  la  sœur  Joséphine 
et'  les  généreux  administrateurs  étaient  enveloppés  par  les 
^mmes  !...  ils  y  trouvèrent  la  mort  tîl...  Les  restes  de  ces  hé- 
ros de  la  charité  ont  été  pieusement  recueillis,  portés  à  St-Be- 
noit,  et  transportés,  après  le  service  funèbre,  célébré  à  Ste-Ma- 
rie,  au  cimetière  de  Feri-Keui.  Quant  à  la  sœur  Marie,  qui, 
prenant  dans  ses  bras  un  enfant  qu'elle  sauva  du  feu,  put 
rentrer  à  l'orphelinat,  elle  rendait  son  âme  à  Dieu  cinq  jours 
après,  au  milieu  de  souffrances  qui  ne  purent  dompter  son 
courage  et  sa  résignation  ! 

Quatre  malades,  les  nommées  Prilschelschlager  (Ida),  Schick 
et  sa  fille  Anna,  et  Anna  Schneider,  eut  péri  dans  les  flammes. 

La  colonie  allemande  catholique  a  rétabli  son  hépital  dans  la 
me  Kmin-djami.  Cet  hôpital  est  desservi  par  des  infirmiers 
laïques.  Le  service  religieux  est  fait  par  un  P.  Observantin,  qui 
réside  à  Ste-Marie.  II  sert  en  même  temps  d'aumônier  à  l'am- 
bassade austro-hongroise. 


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4°  Hôpital  fYançais,  civil  et  7naritime,du  Taqcim. 

L'origine  de  l'hôpital  que,  suivant  on  ancien  document,  «  on 
avait  transporté  '  auprès  des  cimetières,  >  remonte  au  moins 
à  1719;  il  fut  fondé,  à  cette  époque,  sous  le  titre  <  d'hôpital  des 
Français  de  Péra,  i  et  transformé,  en  1734,  sous  celui  «  d'hô- 
pital St-Louis,  »  ou  (  d'hôpital  des  Français  de  la  peste,  à 
Pèra  ;  >  un  autre  aumônier  était  attaché  à  cet  hôpital.  L'aumô- 
nier du  temps  rapporte  que,  sur  cinquante  malades  «  qui  y 
étaient  entrés  en  1719,  il  avait  vu  avec  douleur  que  trois  ou 
.  quatre  d'entre  eux  seulement  avaient  échappé  au  Ûëau  pestilen- 
tiel. >  L'hôpital,  qui  se  composait,  à  cette  époque,  d'une  seule 
chambre,  était  entretenu  sur  la  caisse  nationale  de  l'échelle  de 
Constantinople  '. 

En  1720,  il  est  augmenté  de  quatre  chambres  ;  <  une  place 
est  réservée  à  l'autel,  dans  la  galerie,  non  seulement  pour  la 
consolation  des  malades,  mais  aussi  pour  maintenir  le  droit  de 
dire  la  messe  dans  l'hôpital,  selon  les  capitulations.  >  Dans  la 
même  année,  un  directeur  est  adjoint  aux  deux  députés-admi- 
nistrateurs. 

Dès  cette  époque,  l'aumônier  avait  la  charge  de  curé,  pour 
l'intérieur  de  l'hôpital,  ce  qui  a  été  confirmé  par  décret  de 
Mgr  Mauri  du  24  mars  1795. 

En  1730,  l'hôpital  est  augmenté  par  l'achat  d'une  maison 
contiguti  ;  mais  des  réparations  assez  importantes  ayant  dû  être 
faites  en  1766,  M.  de  Vergennes,  en  vue  de  rétablir  l'équilibre 
dans  le  budget,  propose,  le  25  mai  1767,  de  vendre,  pour 
3,000  piastres,  <c  à  l'hôpital  des  catholiques  de  Péra,  dont  ce- 
lui-ci n'était  séparé  que  par  un  mur,  »  la  maison  enclavée  dans 
<  l'hôpital  St-Louis  ;  »  la  proposition  fut  adoptée. 

'  Suivant  une  nota  du  Bureau  dei  ingénienra  du  i'j'  cercle,  en  data  du 
9  Niçan  1290=1874,  les  terrains  existant  au  Taqcim  derrière  l'hùpital,  fai- 
saient partie  d'un  o  jardin  du  Taqcim,  »  créé  par  sultan  Mahmoud  1,  et  sur 
une  parcelle  duquel  la  Vacouf  aurait  fait  bâtir  des  magasins  aveo  de  nom- 
brenaes  chambrea,  pour  taa  goa-ialdj/ui,  i  inspecteurs  des  eaux  u  et  [es 
taqqa  u  porteura  d'eau  u  ainsi  que  des  baraques,  destinées  â  donner  un 
aaile  spécial  et  provisoire  aux  pauvres  et  aux  victimes  des  incendies  ;  le 
reste  aurait  conservé  le  nom  de  «  jardin  du  Taqcim.  » 

*  Le  titre  de  propriété  de  la  partie  oocou/'de  ce  terrain  est  du  12  rebl-ewel 
1279^6  septembre  1862. 


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—  503  — 

L'enclos  de  l'hôpital  s'accrut  d'un  nouveau  terrain  de  deux 
cent  quarante-six  pics,  dans  la  parlie  longeant  l'église  armèno- 
catholique  de  St-Jean  Chrysostome. 

Enfln,  l'hôpital  fut  complètenaent  transformé,  le  12  octobre 
1840,  par  la  translation  qui  y  fut  faite  alors,  de  l'hôpital  fran- 
çais de  St-Georges,  à  Galata. 

Un  médecin  et  un  économe,  sous  la  surveillance  des  députés 
du  commerce,  furent  attachés  à  l'établissement;  et  ces  derniers 
exprimèrent  h  M.  de  Bourqueney,  ambassadeur,  le  27  dé- 
cembre 1843,  le  désir  de  voir  la  direction  de  l'hôpital  confiée 
aux  sœurs  de  Charité;  ce  vœu  fut  réalisé,  en  1846,  par  la  signa- 
ture d'un  contrat  emphythéotique,  passé  à  Constantin  ople,  le 
■31  décembre  1846,  entre  Mme  la  supérieure-générale  de  la 
communauté  et  les  députés  du  commerce,  à  Constantinople, 
contrat  homologué  plus  tard  par  M.  le  supérieur-général. 

En  1862,  sous  l'ambassade  de  M.  de  Moustier,  le  gouverne- 
ment français  racheta,  pour  la  somme  de  84,770  francs,  le  ter- 
rain vendu,  en  1767,  à  «  l'hôpital  St-Jean  des  Peyrotes,  »  ainsi 
que  le  propre  hôpital  de  ceux-ci  ;  —  l'étendue  totale  de'  ce  ter- 
rain est  de  mille  trois  cent  vingt  pics  environ,  dont  cinq  cent 
vingt  vacouf  ;  ce  qui  porte  l'étendue  totale  actuelle  de  l'empla- 
cement de  l'hôpital  à  cinq  mille  huit  cent  cinquante^trois  pics 
carrés. 

Sœur  Thérèse  (de  Merlis),  supérieure,  munie  du  consente- 
ment des  députés  du  commerce,  a  &it  construire,  vers  la  rue, 
sur  le  nouveau  terrain  acheté  en  1862,  et  durant  l'été  et  l'hiver 
de  1865,  un  corps  de  bâtiment  ayant  magasins  dans  le  bas,  avec 
habitation  au-dessus.  Après  extinction  des  frais  de  construc- 
tion, le  prix  de  location  de  ces  immeubles  sera  une  source  de  re- 
venu pour  l'entretien  de  l'hôpital. 

Avant  la  remise  aux  sœurs  de  l'administration  de  l'hôpital,Ie 
nombre  des  lits  y  contenus  était  de  douze  ;  en  1851,  il  fut  porté 
à  trente-six;  en  1865;  if  était  de  soixante-dix;  en  1871,  le 
nombre  des  lits  était  le  môme;  en  1875)  il  était  seulement  de 
cinquante-sept. 

Les  anciens  b&timents,  affectés  au  service  hospitalier,  mais 
dont  nous  ne  saurions  préciser  la  date,  paraissent  avoir  été  cons- 
'trnîts  sur  la  partie  de  derrière,  parallèlement  à  la  grande  rue  de 
-Péra,  du  côté  de  Valiaé-tchechmé.hos  scbtus  les  plus  anciennes 


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—  504  — 

de  l'hôpital  se  soutiennent  que  le  cabinet  du  médecin  et  le  par- 
loir étaient  de  ce  côté.  Les  salles  des  malades  étaient  au-dessus, 
la  grande  porte  d'entrée  du  même  côté  encore.  Ce  n'est  qu'après 
la  guerre  de  Crimée  que  la  grande  porte  actuelle  a  commencé  à 
être  d'un  usage  habituel,  auparavant  elle  était  comme  con- 
damnée. 

A  leur  œuvre  principale,  les  sœurs  en  ont  adjoint  beaucoup 
d'autres,  que  nous  avons  énumërées  plus  baut,  et  qui  eu  font 
un  des  centres  les  plus  actifs  de  la  charité  chrétienne  à  CP.  ; 
mais  l'œuvre  première  et  celle  qui  donne  le  nom  à  la  maison 
c'est  encore  l'ancienne  :  (  l'Hâpital  français.  > 

Le  nombre  des  malades  traités  dans  l'établissement  est  en 
moyenne  de  six  cent  quatre  par  an.  Le  nombre  des  sœurs  em- 
ployées aux  diverses  œuvres  est  de  vingt. 

Depuis  de  longues  années  on  se  plaint  du  mauvais  «tat  et  de 
l'étroitesse  de  la  maison  :  on  a  fait  différents  projets  de  re- 
consb-uction,  ou  de  déplacement  ;.  on  paraît  détermine  mainte- 
nant à  reconstruire  l'hôpital  à  neuf,  mais  sur  le  même  emplace- 
ment.Le  gouvernement  français  a  alloué  une  somme  considérable 
pour  cet  effet. 

3°  Hôpital  italien. 

La  fondation  de  cet  établissement  remonte  à  la  reprise  des 
relations  entre  Gênes  et  l'empire  ottoman.  Située  dans  la  rue 
Tcbinar  la  nouvelle  maison  fut  construite,  vers  1838,  surtout 
pour  les  marins  sardes.  Depuis  sa  reconstitution  politique,  l'I- 
talie a  donné  plus  d'extension  à  son  hôpital.  Mais  comme  l'en- 
droit où  il  se  trouvait  était  trop  restreint,  on  l'a  transféré  sur 
une  hauteur  entre  Përa  et  Galata,  du  côté  de  Fondouglou,  à 
Deflerdar-iogouchou.  Au  moyen  d'une  souscription  nationale, 
et  d'an  subside  du  gouvernement  on  Ût  l'acquisition  d'un  ter- 
rain, et  on  acheva  la  construction  d'une  très  belle  maison,  par- 
faitement appropriée,  à  son  but.  Bâti  tout  en  pierres  et  en 
briques,  pour  qu'il  soit  à  l'abri  du  feu,  cet  hôpital  peut  conte- 
nir environ  cent  lits  de  malades.  M.  Barrera,  drogman  d'Italie, 
a  été  chargé  de  la  surveillance,  et  l'on  peut  dù^  que  le  résultat 
obtenu  est  dû  en  grande  partie  à  son  zèle  et  à  son  dévouement. 

Les  Filles  de  la  Charité  étaient  d'abord  chargées  du  service 


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—  505  — 

de  cet  hôpital  :  elles  y  ont  été  remplacées  depuis  1869  par  les 
Sœurs  de  l'Immaculée  Conception  d'Ivrea.  Elles  y  sont  au 
nombre  de  oeuf.  La  colonie  italienne  fournit  la  plus  grande 
partie  de  ce  qui  est  nécessaire  pour  l'entretien  de  l'hôpital. 

Plusieurs  autres  puissances  européennes  ont  aussi  des  hôpi- 
taux fort  bien  agencés,  ainsi  l'Angleterre  et  l'Allemagne  ;  mais 
nous  n'avons  pas  à  en  parler,  car  si  les  catholiques  peuvent  y 
être  admis  comme  les  autres,  cependant  il  ne  s'y  fait  pas  de 
service  religieux,  et  ce  ne  sont  pas  des  religieuses  qui  en  sont 
chargées.  Cependant  les  prêtres  catholiques  y  sont  admis  pour 
soigner  leurs  coreligionnaires,  toutes  les  fois  qu'ils  y  sont  ap- 
pelés. Ou  ne  peut  qu'applaudir  à  l'esprit  de  large  tolérance  qui 
anime  les  administrations  de  ces  divers  établissements. 


S  nr. 

Hôpitaux  religieux. 

Ck)mme  nous  l'avons  faitremarquer,outre  ces  établissements 
officiels,  la  charité  privée  a  ouvert,  elle  aussi,  de  très  beaux  hô- 
pitaux :  nous  avons  cité  ceux  :  1°  de  N.-D.  de  la  Paix  ;  2°  de 
l'Artîgiana;  3°  de  Gérémia.  Nous  ne  reviendrons  pas  sur  ce  su- 
jet, mais  il  nous  faut  citer  encore  la  plus  nouvelle  de  toutes  les 
maisons  charitables  deCP.,Gelledes  Petites  Sœurs  des  pauvres. 

4"  Hospice  des  Petites  Sœurs  des  pauvres. 

Ces  religieuses  quoique  très  récentes,  sont  cependant  connues 
de  tout  le  monde  ;  elles  se  sont  répandues  avec  une  merveil- 
leuse rapidité,  et  sont  dans  toutes  les  parties  de  la  terre.  On  les 
désirait  depuis  assez  longtemps  à  CP.  pour  prendre  soin  des 
vieillards  abandonnés.  Un  homme  charitable  leur  a  fait  don 
d'une  maison  à  Feri-keui,  et  elles  sont  venues  s'y  installer 
sans  bruit,  en  novembre  1893.  Elles  ont  été  bien  accueillies  de 
toute  la  population  et  ont  commencé  leurs  quêtes,  avec  pleine 
liberté. 

Elles  ont  déjà  huit  vieillards  des  deux  sexes. 


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CHAPITRE  Vni. 

UBS  GIMBTIÈRBS  CATHOLTQUBS. 


N0U8  ne  croyons  pas  q^ue  ce  soit  ici  le  lieu  de  revenir  sur  ce 
que  nous  avons  dit  ailleurs  des  cimetières,  ces  lieux  du  suprê- 
me repos  (Kimitirion-Dorraitorîum),  où  les  chrétiens  attendent 
le  jour  de  la  résurrection,  du  réveil  (expression  si  bien  rendue 
par  le  terme  arabe  elqyiamé  «  se  mettre  debout  »),  non  plus 
que  sur  l'histoire,  en  quelque  sorte  diplomatique  de  la  mort, 
et  les  stipulations  internationales,  ayant  pour  objet  d'assurer 
l'existence  et  le  respect  des  cimetières  en  certaines  contrées  de 
l'Orient. 

Nous  nous  bornerons  à  rappeler  que  l'établissement  de  l'is- 
lamisme apporta  certaines  restrictions  dans  les  cérémonies 
funéraires  :  ainsi  dans  la  formule  à  peu  près  générale,  de  Yahd 
c  pactum  >  souscrit,  au  fur  et  k  mesure,  par  les  chrétiens  de 
Syrie,  à  Omar-ibn-elhhattâb ,  et  contenant  les  diverses  condi- 
tions, moyennant  lesquelles  le  Kalife  leur  assurait  la  conserva- 
tion de  leur  autonomie  religieuse,  on  lit  :  »  Nous  ne  ferons  pas 
entendre  nos  chants  en  accompagnant  nos  morts...  nous  ne  les 
enterrerons  pas  dans  le  voisinage  des  musulmans.  >  Ces  stipula- 
tions, dans  la  seconde  partie,  quant  au  fond,  n'avaient  rien  de 
€  canonique  »,  pourrait-on  dire,  elles  tombèrent  en  désuétude 
avec  le  temps.  En  effet  le  diplôme  donné  au  patriarche  tienna- 
dius  par  Mehemmed-el-fatyh,  après  la  conquête  de  CP.  porte 
entre  autres  privilèges  :  s  leurs  enterrements  {des  grecs)  seront 
maintenus  d'après  les  rites  et  les  principes  de  l'Église  grecque'.» 

'  Hammer,  III,  4. 


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—  507  — 

En  principe,  les  cimetières  chrétiens,  comme  ceux  des  mu- 
sulmans, furent  placés  hors  des  villes,  au  Caire  comme  à  GP.,à 
Djedda  comme  à  Tunis,  à  Tripoli,  à  Salonique  et  ailleurs  < .  Dans 
les  premiers  temps,  il  faut  le  reconnaître,  l'inhumation  des 
chrétiens  donna  lieu,  plus  d'une  fois,  à  des  faits  regrettables  ; 
et  eu  vue  sans  doute  de  prévenir  leur  retour,  le  fait  m&me  de 
l'inhumation  prit  place  au  nombre  des  stipulations  conclues 
entre  les  communes  européennes  et  les  princes  musulmans  d'A- 
frique et  d'Asie. 

Ainsi  on  lit  dans  un  édit,  donné  par  le  sultan  aioubite  Melik- 
el-aadit,  art,  XXV  :  <  e  non  paghino  niente  per  sui  mortt 
che  moriscono  in  terra  del  soldano,  e  possano  sepelirglt 
nella  sua  chiesa''. 

L'art.  II  du  privilège  concédé  à  Pise,  en  1230,  par  le  roi  de 
Tunis,  porte  aussi  la  stipulation  d'un  cimetière  en  faveur  des 
Pisans  ^. 

Quatre  ans  plus  tard  la  même  nation  signait  une  paix,  ou 
trêve,  de  trente  années  avec  Tunis,  dans  laquelle  on  lit  :  «  In 
quolibet  fontico  débet  fieri  ecclesîa  et  cemeterium.  > 

Dans  le  renouvellement,  pour  trente  autres  années,  de  ce 
dernier  acte,  en  1265,  on  Ut  encore  :  «  E  debbta  a  loro  esse 
facto,  in  ciasckeduno  fondacho,  (id  est  di  Affrlchia  e  di 
Bttggea)  una  ecclesia  e  uno  cimiterio.  » 

De  son  côlé,  et  après  la  mort  de  St  Louis,  victime  de  la  peste 
sur  le  sol  africain  ;  Philippe  le  Hardi,  avant  de  rentrer  en 
France,  passa  avec  le  roi  de  la  Tunisie,  un  traité  où  ae  trouve 
cet  article  :  «  Les  moines  et  les  prêtres  chrétiens  pourront 
résider  dans  les  états  de  l'émir  des  croyants,  qui  leur  don- 
nera un  lieu  où  ils  pourront  bâtir  des  monastères,  des 
église."!  et  enterrer  leurs  morts,  t 

Dans  un  autre  acte  signé  entre  la  commune  de  Pise  et  le 
même  état,  en  1313,  pour  dix  années,  puis  renouvelé  égale- 

,  '  Si  un  chrétien  meurt  à  Djedda.  dit  Itoukhart.  (Voyage  en  Arabie,  1, 17.) 
il  D'est  pas  enterré  dans  la  ville,  mais  dans  une  des  pelitea  lies  de  la  baie.... 
■  A  Tunis,  [lit  d'Ar\'ieux,  le  cimeliâre  dea  chrétiens  est  à  un  quart  de  lieue 
de  la  ville,  hors  la  porte  de  la  marine,  r 

«  Amari,  Dorumenti  ,'c^i  untirki  t<jiKnni.  FCremr,  186î. 

'  Depping.  II,  181.  Les  autres  textes  se  suivent.  Pour  Alexandrie,  on  Ut 
dans  les  Colonie  rommerciiUi  i/egli  ilaliani  m  oriente,  II,  245.  Per  tuti  gli 
europei,  era  riserrato  un  cimltero  attiguo  alla  chiesa  giacobita  di  S.  Michèle. 


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—  508  " 

ment  pour  le  même  nombre  d'années,  on  lit  encore  :  t  Selon 
l'ancien  usage,  un  fondouq  sera  affecté  exclusiveinent  attx 
Pisans  pour  leur  nation  et  il  contiendra  une  église  et  un 
lieu  d'inhumation  ' .  » 

Ultérieurement,  quand  Florence  eut  absorbé  la  commune  pi- 
sane  et  l'eut  annexée  à  son  terntoire,elle  voulut  à  son  tour  jouir, 
«n  Egypte,  des  privilèges  dont  "Vénitiens,  Génois,  Pisans  et 
autres  avaient  été  en  possession  :  et,  à  cet  effet,  elle  envoya  au 
Soudan  une  ambassade  qui  obtint  un  privilège,  sous  forme  de 
firman,  825  =  1423,  portant  cet  article  :  *  E  quando  mortsse 
uno  délit  loro  mercantanti,  in  qualunque  luogo  fosse, 
passa  essere  sepoUo,  alla  chîesa  de'  cristtani  c  seconda 
l'uzanza,  senza  pagare  alchuna  cûsa  e  sema  nessuna 
mangiacia  -.  » 

A  6yzance,comme  dans  les  autres  parties  de  la  cbrétienté,  les 
inhumations  latines  se  faisaient  autour  des  églises,  dans  Va- 
trlum,  et  même  dans  l'intérieur  des  temples'.  l,!idéllmitation 
de  Galata  pour  1303  constate  que  «  l'église  Ste-Irène  servait, 
autrefois,  de  sépulture  aux  Génois  ;  >  et  une  lettre  du  pape 
Martin  V,  de  1427,  rapporte  que  les  Mineurs  avaient  un  cime- 
tière dans  leurs  deux  églises  de  Constantinople  et  de  Pôra  *. 

Le  sol,  actuellefnent  couvert  d'un  plancher,  de  l'église  St- 
Paul  (arab-djamtci),  est  encore  formé  de  pierres  tombales, 
antérieures,  naturellement,  à  la  transformation  de  l'église  en  ■ 
mosquée^;  et  cet  usage  s'est  conservé,  presque  jusqu'à  nos 
jours,  dans  les  diverses  églises  de  Galata  et  de  Péra,  Toutefois, 
il  semblerait  résulter  des  fouilles  pratiquées  durant  ces  dernières 
années  à  Péra,  qu'il  y  eut  aussi,  même  à  l'époque  génoise,  des 
inhumations  faites  en  dehors  des  murs  de  la  ville. 

Durant  la  période  ottomane,  les  inhumations  eurent  lieu  dans 
l'enclos  ou  dans  l'intérieur  même  des  églises,  sauf  en  temps  de 

I  Aman.  loc.  laud-,  8â.  101.  V.  d-deuus  P.  Il,  Ch.  II,  la  <c  Magaiflca  Co> 
munit  di  Péra.  »  Il  semblerait  résulter  de  ce  passage  que  l'inhumation  ap 
TJlle,  dans  ou  autour  l'église,  n'aurait  pas  été  toujours  de  règle. 

3  Cf.  l'abbé  Gorlarti.  Cour»  d'archéologie  xacrêe.  II,  213  ;  Hornstein,  te»  S^- 
paltiiret.  Parie,  ISBS,  p.  125  et  suit.  ;  et  entin  les  Antiquité*  chrétiennat  de 
l'&bbé  Martigny. 

*  Storia  nnieertale  delU  miuioni  france*cane,  IV,  472. 

'  Voyez  Compte-rendu  1864-65,  p.  87. 


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—  509  — 

peste;  et,  d'après  le  texte  de  deux  pierres  tombales,  l'une  de 
1561,  celle  du  docteur  Quackelbe,  médecin  de  Busbecq,  envoyé 
impérial  i  Conatantinople',  l'autre  de  1585,  celle  des  PP.  Jé~ 
suites,les  inhumations  des  victimes  de  la  peste  étaient  faites  au 
cimetière  des  Grands-Champs,  dit  de  Beolo,  Beaulou,  Beï- 
oghloo  (Péra),  devenu  commun,  dans  certaines  conditions,  au 
moins  dès  1615.  C'est  dans  le  même  cimetière  qu'à  la  suite  de 
la  perte  de  St-François  de  Galata,  en  1697,  on  transporta  les 
restes  provenant  de  l'exhomation  de  celui  de  cette  église  :  c  la 
nation  française,  dit  un  document  contemporain,  fit  procéder, 
à  ses  frais,  à  l'exhumation  des  os  des  morts  qui  y  estoient,  et 
les  fit  transporter  au  semetîère  de  Beaulou  ^.  » 

Comme  nous  l'avons  dit  dans  notre  compte-rendu  1863- 
1864,  la  condition  des  inhumations  latines  de  Péra  et  de  Galata 
peut  se  classer  en  trois  périodes  : 

Époque  génoise  :  inhumations  dans  les  églises,  hors  et  non 
loin  des  murs. 

Époque  ottomane  :  inhumations  seulement  dans  l'enclos  ou 
dans  l'intérieur  des  églises,  sauf  en  temps  de  peste. 

Cimetière  des  Grands-Champs  réservé  aux  pestiférés  au  moins 
dès  1561,  devenu  commun  au  moins  depuis  1615,  dates  des 
pierres  tombales  les  plus  anciennes,  pour  l'une  et  l'autre  pé- 
riode, inscrites  sur  notre  inventaire  des  sépultures  de  ce  ci- 
metière ^, 

L'iDsuflïsance  ultérieure  de  ce  cimetière,  non  moins  que  des 
raisons  de  piété,  avaient  conduit  Mgr  Hillereau  à  s'occuper  de 
la  recherche  d'un  autre  emplacement  à  affecter  à  la  même  des- 
tination ;  et,  en  1852,  le  gouvernement  ottoman  offrit  l'échange 
du  terrain  des  Grands-Ohamps  contre  une  autre  localité  de  la 
contenance  d'environ  quarante-quatre  mille  pics  carrés  archi- 
tect«  *,  sise  hors  la  ville,  sur  les  hauteurs  de  Feri-keui. Quoique 
ces  ouvertures  et  les  négociations  qui  en  furent  la  conséquence, 

'  Cf.  Butùegnii  epislola  primo,  HaDOvise,  1629,  p.  78.  Selon  le  aecrétaire 
du  b&ila  vénitien  à  Constantinople,  ta  peite  de  cette  époque  aurait  emporté, 
du  mois  d'août  1560  au  même  mois  1561,  plus  de  80,000  personnes  à  Cona- 
taotinople  et  à  Péra  {Relazioni  cenete,  3"  térie,  III,  308  ;  Négociations  île  la 
Fraiwe  ilam  le  Lerant,  II.  635. 

)  Registre  des  Délibif ration*  nationales,  prooés-Terbat  du  18  juiD  1697. 

s  Comptc-renr/u  1863-64,  p.  27. 

I  Le  pic  architecte  équivaut  à  eoi:<aDte-quinze  centimâtres. 


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n'aient  pas  obtenu  un  résultat  définitif  immédiat,  ce  terrain, 
i^i  devait  être  partagé  entre  les  catholiques  et  les  protestants, 
fut  assigné  aux  inhumations  des  milîlaires  français  décédés 
dans  les  hôpitaux  dePéra. 

Il  est  à  remarquer  qu'autrefois,  lorsqu'il  ne  se  trouvait  pas 
dans  un  endroit  de  cimetière  catholique,  on  inhumait  dans  les 
cimetières  grecs  ;  les  actes  mortuaires  de  Ste-Marie  Drapéria 
constatent  que,  de  1697  à  1734,  diverses  inhumations  ont  été 
faites,  c  seconda  il  rito  délia  santa  romana  chîesa  »  dans 
les  cimetières  grecs  de  Belgrade,  d'Arnaout-keui,  de  St-Dimitri 
(Tatavla),  etc. 

Plus  tard  des  cimetières  distincts  furent  attribuas  aux  ca- 
tholiques :  à  St-Dimitri  (Tatavla), où  les  Pères  Riformati  eurent 
même  une  cbapelle,ainsi  qu'il  i-ésulte  de  l'acte  suivant  :  «  6  no- 
vembre 1731,  N.  sepultus  est  in  sepultura  catholicorum, 
existente  in  pago  quocl  vulgo  dicitur  SU  Dimitri.  »  Cet  acte 
est  d'ailleurs  le  dernier  de  ce  genre,les  morts  étant  ensuite  trans- 
portés au  cimetière  de  Belgrade.  Dans  ce  lieu  les  Pères  du 
même  Ordre  possédaient  aussi  une  maison  et  une  chapelle,  au 
moins  en  1735;  il  y  avait  aussi  IJi,  en  1753,  un  cimetière  ca- 
tholique :  €  S  auffusti,  1733,  N.  animani  Deo  red<fi(lit  in 
pago  dîcto  Belgrado,  et  illic,  in  cemeterio  fidetium  sepul- 
tus est.  ï  On  trouve  une  mention  identique  en  1811, 

A  Buyuk-dérè,  le  cimetière  est  cité  pour  la  première  fois  en 
1801  :  *  6  Jul.  decessit  N.  in  Buyuk-dérê,  et  sepultus  fuit  in 
loco  ad  hune  usum  destinato;...  1816, 19  noc.in  communi 
fldelium  cetneterio,  in  pago  Buyuk-dérè.  i 

En  1786,  il  n'y  avait  pas  à  Thêrapia,  de  cimetière  catho- 
lique, comme  l'atteste  l'acte  mortuaire  suivant:  1 1786,26 jul. 
N.  sepultusest  in  Thêrapia,  penés  cemeterium grecorum.t 

Le  bagne  dont  nous  avons  parlé  plus  haut,  avait  aussi  son 
cimetière,  comme  le  prouve  la  mention  suivante,  tirée  des  ar- 
chives de  Ste-Marie,  sous  la  date  de  167fi  :  c  Afori  N.  schiavo 
dt  Sciabanbeij ,neUa  sua  gâtera,  c  confessato  e  cojnmuni- 
cato  da  tne,  fu  sepolto  nel  cimitero  solito  e  destinato  per 
li  schiavi  cristiani  dt  questa  cita  di  CPli,  Fr.  Francesco 
da  Francacilta,  parocco  di  Sta  Maria  Draperis.  »  Et  plus 
loin  :  «  22  mart.  1680,  passa  a  meglior  vita  l'anima  di  N. 
schiaoo,   da  me  sepolto  nel  bagno  destinato  alli  poveri 


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—  5U  — 

schtavf.  >  Il  est  k  supposer  que  ce  cimetière  était  la  partie  de 
celui  des  Petits-Champs,  nos  loin  de  l'échelle  des  morts,  (  meit- 
isMHci,  t  En  effet,  après  avoir  gravi  la  colline  à  partir  du 
<  meit-îshilict ,  »  dît  aujourd'hui,  Azab-capou,  on  trouvait  à 
droite  cette  partie  du  cimetière  des  Petits-Champs,  dite  Scfia- 
rtihluk  <  la  pourriture  >,  qui  servait  de  lieu  de  sépulture  anx 
esclaves  musulmans,  et,  il  n'y  a  pas  longtemps  aux  pauvres. 
C'est  là  précisément  que,  pendant  la  dernière  épidémie  de  cho- 
léra, on  a  fait,  malgré  les  défenses  de  l'autorité,  l'inhumatioa 
d'un  certain  nombre  de  cholériques,  transportés  de  CP.  Toute- 
fois, si  l'on  en  croit  le  témoignage  d'un  vieillard,  témoin  ocu- 
laire de  ce  qui  se  passait  il  y  a  une  cinquantaine  d'années  (1873), 
I  les  esclaves  non  musulmans  décédés  an  bagne,  étaient  inhu- 
més dans  un  seul  et  même  endroit,  sis  à  l'intérieur,  dans  la 
partie  haute,  du  côté  de  Khas-heui  :  c'était  un  emplacement, 
dépourvu  de  tout  signe  extérieur,  dans  lequel,  selon  les  lugubres 
besoins  de  la  journée,  on  creusait  une  fosse  plus  ou  moins 
grande,  destinée  a.  recevoir,  sans  distinction  de  religion,  et  sans 
l'assistance  de  leurs  pasteurs,  les  cadavres  des  malheureux  pri- 
sonniers. >  Sans  prétendre  aflirmer  ou  infirmer  en  rien  ce  rap- 
port, il  semble  pourtant  peu  probable  qu'à  l'époque  ou  le 
nombre  des  captifs  était  malheureusement  trop  grand,  les  ca- 
davres des  défunts  fussent  inhumés  dans  l'enceinte  même  du 
bagne  :  aussi  et  suivant  une  version,  qui  du  reste  ne  diffère  pas 
beaucoup  de  celle-ci,  et  vient  par  cela  même  la  confirmer,  on 
peut  incliner  à  penser  que  le  lieu  d'inhumation  des  captifs,  tout 
en  se  trouvant  dans  la  même  direction,  était  en  dehors  de  l'ar- 
senal, non  loin  de  la  porte  donnant  du  côté  de  Khas-heui,  sur 
le  Dotmaz-dêré .  Quant  h.  ce  qui  est  de  la  partie  religieuse  de 
l'exposé  ci-dessus,  et  en  admettant  même  que  les  choses  aient 
pu  changer  depuis,  les  registres  de  Ste-Marie  Drapôris  attestent 
que  de  1667  à  1751,  les  sacrements  de  baptême  et  de  mariage 
étaient  administrés  aux  esclaves  du  bagne,  par  le  curé  de  cette 
paroisse,  lequel  administrait  aussi  les  moribonds,  et  assistait 
aux  inhumations,  soit  dans  le  cimetière  du  Bagne,  soit  même 
dans  celui  des  Grands-Champs,  ou  enfin  dans  celui  de  St-Di- 
mitri,  àTatavla'. 

1  Archives  de  Ste'Marie  Drapérîs.  Sur  lea  Bagnes  cens.  Hammer. 


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Actuellement  les  cadavres  des  galériens  chrétiens  sont  livrés 
à  leurs  propres  pasteurs,  pour  être  inhumés  dans  leurs  cime- 
tières respectifs. 

Quoi  qu'il  en  soit  de  cette  revue  funèbre,  la  nécessité  d'un  ci- 
metière catholique  ne  s'en  imposait  pas  moins  impérieusement. 

A  son  arrivée  à  Péra,  Mgr  Brunoni  reprit  les  projets  de  son 
prédécesseur  ;  et,  après  entente  avec  les  ambassades  des  puis- 
sances catholiques,  une  commission  formée  des  délégués  de 
chacune  d'elles  '  reçut  le  mandat  d'aviser  aux  moyens  de  cons- 
tituer régulièrement  le  nouveau  cimetière  de  Feri-keui,  lequel 
cimetière  fut  entièrement  attribué  aux  catholiques,  l'ambassade 
de  France  ayant  obtenu,  en  faveur  de  ceux-ci,  la  concession  de 
la  parcelle  primitivement  destinée  aux  protestants^. 

Dans  sa  première  séance,  tenue  à  l'archevêché,  sous  la  pré- 
sidence du  Vicaire  apostolique,  le  dimanche  30  mai  1859,  la 
commission  jeta  les  bases  du  programme  qu'elle  était  chargée 
d'accomplir;  et,  le  2  avril  1860,  un  mandement  archiépiscopal 
faisant  appel  à  la  piété  des  tîdèles,  en  faveur  de  l'œuvre  du 
cimetière,  fut  lu  dans  les  églises  latines  de  la  capitale.  Puis,  les 
délégués  des  ambassades  ayant  recueilli  chacun  les  offrandes  de 
leurs  compatriotes,  le  total  de  ces  dons  s'éleva,au  1"  janvier  1861, 
au  chiffre  de  363,544  piastres,  dans  lequel  le  gouvernement 
français  et  la  colonie  française  de  Constantinople  figuraient 
pour  243,330  piastres  '.  En  dehors  de  la  souscription  de  leurs 
colonies  respectives,  les  gouvernements  d'Autriche,  de  Belgique, 
d'Espagne  et  d'Italie  ont  également  contribué  de  leurs  dons 
particuliers  en  faveur  de  l'œuvre*. 

Des  statuts,  mûrement  délibérés,  furent  adoptés  le  18  jan- 
vier 1861  ;  après  quoi,  un  comité  permanent,  pria  dans  le  sein 
de  la  commission  générale,  fut  chargé  de  l'exécution  des  tra- 
vaux et  de  l'administration.  Ce  comité  se  réunit  régulièrement 
le  premier  vendredi  de  chaque  mois,  sous  la  présidence  de  Mgr 
l'archevêque,  statue  sur  les  affaires  courantes,  et  dresse  le  pro- 
cès-verbal de  chaque  séance. 

<  L'auteur  du  présent  travail,  délégué  par  l'ambassade  de  France, fut  nom- 
mé secrétaire  de  cette  commission. 

'  Les  frais  de  transfert  de  ce  terrain,  dont  le  titre  est  du  29  chaban  1382 
=  10  janvier  18GG,  ont  été  acquittés  par  la  France, 

s  \'oyCE  notre  Complc-i-cn'hi  1861-62. 

*  \'ojez  Coiii;i(CJi-/-c/i'/ua  1662,  18tî4, 


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—  513  — 

La  commission  se  réunît  en  assemblée  générale,  sauf  les  cas 
extraordinaires,  une  fois  l'an,  au  secrétariat  du  cimetière,  sous 
la  présidence  de  l'archev&que,  le  4  novembre,  premier  jo'ur  de 
l'exercice,  à  l'effet  d'entendre  la  lecture  du  compte-rendu  des 
travaux  du  comité  permanent  d'administration,  procéder  à  une 
sorte  d'inspection  générale  du  cimetière,  et  statuer  sur  les  pro- 
positions oi^aniques  qui  peuvent  lui  être  faites.  Ce  compte- 
rendu  est  imprimé  aux  frais  de  l'administration  '. 

Entreprenant  la  loDgne  série  des  travaux  qu'il  avait  à  faire 
exécuter,  le  comité  a  poursuivi  tout  d'abord  la  construction  du 
mur  d'enceinte,  puis  celle  d'une  maison  d'habitation  pour  l'au- 
mônier, administrateur-délégué,  du  secrétariat,  et  enfin  du  lo- 
gement des  gardiens. 

Le  23  avril  1863,  Mgr  Brunoni  a  posé  solennellement  la 
première  pierre  de  la  chapelle,  appuyée  au  mur  ouest  d'enceinte; 
préalablement,  l'ambassade  avait  obtenu  de  la  Porte  un  Srman, 
daté  de  zilqydë  1379,  autorisant  l'édiâcation  de  cette  chapelle, 
laquelle  se  compose  d'une  rotonde  et  d'une  sorte  d'abside  pour 
l'ante),  avec  tribune  de  chaque  côté;  le  tout  recouvert  d'un 
dôme  au-dessus  duquel  s'élève  le  signe  chrétien  de  la  rédemp- 
tion. Cette  croix,  en  marbre  blajic,  a  été  taillée  dans  l'une  des 
pierres  commémoratives ,  placées,  d'ordre  du  gouvernement 
français,  dans  chacun  des  cimetières  militaires  des  environs  de 
la  capitale^. 

Sur  l'autel  figure  un  grand  tableau  de  la  Vierge  de  Murilto, 
donné  par  le  gouvernement  français  au  cimetière.  L'image  de 
l'Assomption  de  la  sainte  Mère  de  Dieu  semble  être  ici  le  sym- 
bole de  la  douce  espérance,  que  les  âmes  des  fidèles  reposant 
dans  ce  cimetière  se  seront  élevées,  à  la  suite  de  cette  puissante 
Adoocnta  nostra,  et  par  son  intercession,  vers  la  céleste  pa- 
trie, vers  le  séjour  des  bienheureux  ! 

La  rotonde  mesure,  à  l'intérieur,  douze  pics  de  diamètre,  et 
sept  pics  et  demi  du  sol  au  sommet  intérieur  de  la  coupole  ^. 

■  M.  Belin,  auteur  de  ce  travail,  a  eu  une  très  grande  part  à  tout  ce  qui 
■'e«t  fait  pour  le  cimetière.  Ses  rapports  annuels  depuis  l'origine  jusqu'en 
18T4,  ont  été  composés  avec  le  plus  grand  soin  et  renferment  de  très  pré 
cieux  Tenaeignementa.  Note  de  l'éd. 

■  Voir  la  plaocbc. 

'  Le  Pic  (Arohin  ou  ïiva)  arohitecta,  est  de  vingt-quatre  Parmaq  «  ou 
doigts  i  et  correspond  à  soixante-quinze  centimètres. 


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Des  raisons  d'économie  budgétaire  n'ont  pas  permis  de  pous- 
ser les  travaux  avec  l'aclivitè  qu'on  aurait  pu  obtenir  en  d'autres 
circonstances,  et  ce  n'est  qu'en  1872,  qu'il  a  été  pour  ainsi  dire 
terminé.  M.  l'abbé  Gîorgiovich,  ancien  élève  de  la  Propagande  à 
Borne,  adniinistrateur^délégné,  a  lui-même  conçu  le  plan  de 
cette  chapelle,  il  en  a  dirigé  les  travaux;  la  judicieuse  combi- 
naison qui  a  présidé  à  l'ornementation  intérieure  de  l'édiûce  a 
su  réunir,  avec  un  goût  d'une  convenance  remarqual>le,la  gran- 
deur du  style  architectural  à  une  sévère  élégance,  et  joindre  en 
même  temi»s  dans  le  choix  des  emljlèmes  et  des  allègories,ridée 
toujours  redoutable  de  la  mort,  à  celle  d'une  chrétienne  et 
douce  espérance  ! 

La  chapelle,  nous  l'avons  dit,  pràsente  la  forme  d'une  ro- 
tonde, dont  le  contour  intérieur  est  divisé  en  huit  sections  ou 
portiques,  dont  quelques-uns  sont  figurés,  les  autres  donnant 
entrée  soit  dans  la  chapelle  soit  dans  ses  dépendances. 

Deux  des  carrés  sont  destinés  à  recevoir  l'inscription  des  fon- 
dations pieuses  faîtes  au  (;imetière  ;  sur  l'un  on  lit  déjà  la  men- 
tion suivante  : 


MISSION  MILITMIIE  FRANÇAISE. 

MESSE 

A  CËLÉ&ItEK  ANNUELLEMENT    LK   17  MAI, 

POL'R  I,E  REPOS  DE  l'aUE 

DES  MILITAIRES  DÉFUNTS  DE  l' ARMÉE  FRANÇAISE  d'oRIENT. 

La  Mission  militaire  se  composait  alors  de  MM.  de  Lalobbe, 
Géraud,  Vitalis,  Vineaux  et  Favalelli.  Cette  fondation  a  été 
constituée  avec  l'autorisation  préalable  de  M.  le  Ministre  de  la 
guerre. 

La  partie  supérieure  de  chaque  porte,  vraie  ou  simulée,  dont 
l'arc  repose  sur  des  colonnes  teintées,  d'ordre  dorique,  est  sur- 
montée d'un  beau  moulage  allégorique,  se  composant  d'une 
urne  cinéraire,  recouverte  d'un  linceul  ;  au-dessus  et  au  centre 
de  l'arc,  se  trouve  une  aorte  de  médaillon  sur  lequel  sont  gra- 
vés les  textes  suivants  tirés  de  l'Ecriture  Sainte: 

1"  médaillon.  —  Homo,  sigut  eiimum  dïes  ejus,  tanquam 

FLOS  AGRI  SIC  EFFLOREBIT.  (Psatni.) 


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0  MOns!  QUAM  AMilLV  EST  MEHORU  TUA  !   (Eccli.) 

2"  médaillon.  —  Mémento,  homo,  quia  pulvis  es  et  in  rcr.- 
vehem  reverteris.  (Genesis.) 

MeMOR  ESTO  QOOîJIAM  mors  non  TARDAT,  (ECCli.) 

3*  méelaillon.—MiLiTiPL  esit  vita  hominis  super  TEBRAii.  (Job.) 

CURAU   HABE  DE  BONO  S'OMIKE  :  HOC    ENIM  MAGIS  PERMANEBIT  TIBI 

QUAM  MILLE  THESAlTtl  PHETIOSI  ET  MAr.XI.  (Ecclî.) 

4"  Tnédatllon.  —  Sancta  ERfio  et  SALL'BRia  esi-  cooitatio  pro 
DEFTJNcrrs  ExoiiARE,  UT  A  i>ECf:ATis  soLVASTUR.  (Machab.) 

MlâEREMINI  MEI,  KISEREMINI  MEI  !  S.ALTEU  VOS  AMICI  MET,  QUU 
MANUS  DOMINI  TBTIGIT  ME.   (Job.) 

5'  médaillon.  — ■  De  profdndjs  o-amayi  ad  te,  Domine,  Do- 

Mist;  !  EXAUDI  vocEM  mv:am  !  (Psalm.) 

Miserere  mei,  Domixe!  quoniam  infirmus  slti  !  (Psalm.) 

6'  médaillon.   —  Salvcu  me  fac,  I'Roiter  misericordlim 

TiAM.  (Psalm.) 

Cl'M  AITEM'  MOllT.VLE  HOC  INnfERIT  IMMOnTALITATE.\l,  TIINC  FIET 
SERM"    QT'I   SCRIPTUS   est   :    ARSORITA   EST    MORS    IN    VICTORIA  !    (St 

Paul.) 

La  clef  des  arcs  est  formée  'de  moulures  à  emblèmes  fu- 
néraires; chacun  des  portiques  est  séparé  de  l'autre  par  une 
colonne  d'ordre  ionien  supportant  les  assises  de  la  coupole. 
Leur  cliapiteau  est  aussi  décoré  d'embUVmes  funèbres.  Ici,  pour- 
rait-on dire,  ici  finit  la  terre  avec  ses  douleurs  et  l'affreux  dé- 
chirement de  ses  séparations  cruelles!.-.  Là  commence  le  ciel, 
avec  ses  consolantes espéran-cos  !..Icîonest  entouré  d'emblèmes 
offrant  à  l'esprit  l'inéluctable  fin,  l'écroulement  de  l'humanité, 
le  délaissement  de  l'Ame  quittant  la  terre,  l'abandon  de  tout  ce 
qui  semblait  constituer  à  jamais  son  bonheur,  l'elTroi  de  l'homme 
dans  ce  terrible  passage  de  la  vie  au  trépas  ;  enfin  les  ardentes 
invocations  de  la  pauvre  créature,  son  énergique  recours  à  la 
divine  miséricorde,  seul  bien  qui  ne  puisse  lui  être  ravi  !...  Là 
les  allégories  olïertes  aux  regards  attristés,  aux  cœurs  éplorés, 
semblent  faire  entrevoir  une  faible  image  de  la  quiétude  inalté- 
rable de  l'autre  vie,  de  la  félicité  éternelle  t  Oh  !  oui,  comme  le 
dit  l'Écriture,  dans  une  des  inscriptions  ci-dessus  :  «  La  mort 
est  vraiment  vaincue,  absorpta  est  mots  in  Victoria  !  »  Avec 
ses  déchirements,  ses  douleurs,  rtolores  mortis  ;  la  mort  n'est 


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qu'une  nouvelle  et  suprême  épreuve  de  cette  vie,  la  dernière 
étape  de  notre  pèlerinage  dans  cette  vaUée  des  larmes  !  Bientôt, 
car  <  Hodie  mîht  cras  (ibi,  aujourd'hui  c'est  moi,  demain  ce 
sera  vous,  >  ceux  qui  se  sont  tant  aimés  ici-bas,  sépares  pour 
un  moment,  seront  ensuite,  par  la  mort,  réunis  à  jamais,  dans 
le  sein  de  Dieu  !... 

La  coupole  qui  s'élève  avec  hardiesse,  et  reçoit  le  jour  par 
trois  Fenëtr&s,  est  occupée  au  centre  par  un  groupe  de  sculptures 
représentant  le  St-Esprit,  symbole  de  l'amour  ou  de  la  charité, 
planant  dans  l'espace  au  milieu  d'un  rayonnant  soleil,  entouré 
d'une  couronne  de  Chérubins,  et  semblant  assurer  d'avance  aux 
flmes  pécheresses,  mais  repentantes,  le  gage  du  pardon,  de  la 
suprême  et  souveraine  clémence  ! 

A  droite  de  la  chapelle  et  y  attenant,  se  trouve  la  sacristie  ; 
&  gauche  une  salle  d'attente,  destinée  en  même  temps  aux  cas 
de  médecine  légale  ;  au-dessous  de  celle-ci  se  trouve  un  caveau 
de  dépôt  provisoire. 

Par  ta  nature  même  de  sa  situation  sur  la  montagne.Ie  sol  du 
cimetière  offrait  des  variations  assez  importantes  de  terrain, 
comme  aussi  des  obstacles  pour  l'écoulement  des  eaux  et  la  vé- 
gétation ;  le  terrain,  formé  de  roc,  a  dû  être  défoncé,  nivelé 
dans  toute  sa  superficie,  recevoir  une  inclinaison  pour  l'écou- 
lement des  eaux  pluviales,  et  finalement  être  sillonné  par  un 
système  complet  de  drainage.' 

En  même  temps,  et  par  suite  de  la  division  méthodique  du 
cimetière,  selon  les  dispositions  des  statuts,  l'administration  a 
fait  pratiquer  l'exhumation  générale  des  sépultures  militaires 
faites  dans  cette  localité,  durant  la  guerre  d'Orient  ;  et  les  restes 
humains  en  provenant  ont  été  déposés  dans  un  caveau  creusé 
dans  la  partie  ad  hoc  sise  à  droite  de  la  chapelle,  côté  nord,  et 
à  laquelle  on  a  donné  le  nom  de  car^é  militaire.  Sur  ce  ca- 
veau, la  commission  a  fait  élever  un  turaulus,  en  pierres,  en 
forme  de  fortin,  sur  lequel  on  a  gravé  l'inscription  suivante  : 
€  Armée  fbançaise  d'Orient.  la  reposent  les  restes  de  3,000  sol- 
dats, INHUMÉS  DANS  CE  rjMETiÊRE  EN  1854-56-56.  RequtescQnt 
in  pace*  I  * 

Peu  après,  M.  le  maréchal  Randon,  ministre  de  la  guerre, 

>  Voir  la  plancha. 


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prescrivit  à  M.  le  lieuteDaot-coIoael  de  Lalobbe,  chef  de  la  mis- 
sion militaire  &  Constantinople,  de  faire  procéder  à  l'exhuma- 
tion générale  des  cimetières  militaires  français  des  environs 
de  la  capitale,  et  d'en  faire  opérer  la  translation  dans  le  carré 
militaire,  au  cimetière  de  Feri-keui.  Cette  exhumation  a  été 
exécutée  par  les  soins  et  sous  la  direction  de  M.  l'abbé  Giorgio- 
Tich,  assisté  de  M.  de  Lalobbe.  Six  caveaux,  creusés  en  cet  en- 
droit, ont  reçu  les  restes  de  douze  mille  trois  cent  trente-neuf 
soldats  de  l'armée  d'Orient  ;  puis,  faisant  suite  au  premier  tu- 
mulus,  on  a  élevé  un  monument  principal,  et  un  autre  tumu- 
lus  de  même  forme  que  celui  construit  précédemment  par  la 
commission.  Ces  deux  monuments  ont  été  érigés,  d'ordre  et  aux 
frais  du  ministère  de  la  guerre,  sur  le  plan  et  par  1^  soins  de 
M.  l'abbé  Giorgiovich. 

Le  monument  principal  présente  à  la  face  E  la  croix  de  la 
Légion  d'Honneur,  à  l'ouest  les  armes  impériales,  et  au-dessous 
l'iDScriptloQ  suivante  :  <  A.  ia  hémoqie  des  militaires  eb&nçais 

DtiCÉDÉS  A.  CONSTANnNOPLE  PENDANT  LA  âUERRE  d'OBIENT.   U 

Sur  les  trois  autres  faces,  on  lit  : 

C6té  est  :  c  Érigé  en  1865,  sons  le  rèqne  ma  Napoléon  III, 

FAR  ORDRE  DD  llAHÉCHAL  COBilTE  RaNDON,  mNISlBE  DE  LA  QUERBE.  1 

Côté  nord  :  <  Exhuuations  1864.  Qanlidja,  Maslak,  Leveni>* 

TCHIKTLICK.  * 

Côté  sud  :  f  Exhumations  1864.  Malteté,  Fil-damy,  Pri»* 
KIPO.  > 

Aux  localités  indiquées  ici,  on  doit  ajouter  celles  de  Daoud- 
pacha  et  Rami-Tchiniik,  qui,  avec  les  six  précédentes^  formaient 
le  total  des  huit  emplacements  assignés  pour  lieux  d'inhuma- 
tion aux  soldats  français  décèdes. 

Complétant  la  pieuse  pensée  qui  a  présidé  à  la  création  de 
ce  glorieux  champ  de  repos,  l'administration  a  fait  entourer  l'es- 
pace réservé  au  c  Carré  Militaire  »  d'une  chaîne  en  fer,  cou- 
rant sur  des  colosnettes  en  pierre,  au  nombre  de  trente-deux, 
surmontées  chacune  d'un  fer  de  hallebarde. 

En  avant  de  ces  ossuaires,  du  cAté  ouest  de  la  muraille  d'en- 
ceinte, la  commission  a  fait  placer  les  sépultures  des  officiers, 
reconnues  ou  indiquées  par  des  pierres  tombales  ;  ces  sépultures, 


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placées  sur  deux  lignes,  comptent  trois  tombes  d'aumôniers  de 
l'armée,  et  quatre-vingt-treize  tombes  d'officiers,  ou  assimilés. 
Nous  croyons  devoir  donner  ici  la  liste  complète  de  ces  sé- 
pultures, précédées  chacune  de  leur  numéro  d'ordre,  en  par- 
tant du  nord  pour  se  diriger  vers  la  cliapelle,  avec  la  date  du 


1.  Leblanc  (Louis),  adjoint  de  \"  classe  à  l'intendance  mili- 
taire, chevalier  de  la  Légion  d'Honneur;  3  octobre  1854. 

2.  Clavel (Félix-Eugène),  capitaine  d'état-niajor;  6  août  1854. 

3.  B.AILLY  (Pierre-Hyppolite-Henri),  médecin  aide-major  de 
1"  classe  ;  1"  octobre  1854. 

4.  DliiéIiil  (Louis-Eugène-Adolphe),  ■  médecin  aide-major; 
19  octobre  1854'. 

5.  SiLL.iN  (Charles;,  sous-lieuteaant  au  2*  zouaves  ;  26  octobre 
1855. 

9.  Bealcamp  (Eugène-Louis),  *  médecin-major  de  3*  classe; 
8  novembre  1854. 
7. 

8.  FouncADE  (Joseph-Prosper),  capitaine  du  génie;  11  mars 
1855. 

9.  CouÉ  (Armand-Marie),  lieutenant-colonel  au  2*  de  ligne  ; 
29  janvier  1855. 

10. 

11.  BÉHUÉ  (Gabriel),  officier  comptable  des  subsistances  mi- 
litaires; 14  avril  1855. 

12.  De  VutiEt;  (Amédée\  capitaine  au  14*  bataillon  des  chas- 
seurs à  pied;  15  mai  1855, 

13.  Le  Mauff  DE  KERDL"DAi.(Jules-Charles-Marîns),  capitaine  de 
frégate,  chevalier  de  la  Légion  d'Honneur;  20  décembre  1854. 

14.  Mamelët  •  (Charles-Henri-Pierre),  médecin-major  de  1" 
classe  ;  18  mai  1855. 

15.  Delaporte  (Louis-Benoît),  capitaine  du  génie;  H  juil- 
let 1855. 

16.  ViuET  ■  (Félix),  médecin  aide-major  au  52*  de  ligne  ; 
19  août  1855: 


E  marqués  d'un  astérisque  ',  sont  ceux  JfS  memlirea  du  s 
icrits  sur  l'obélisque  du  rond-point. 


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—  519  — 

17.  Mestre  (Raymond)  *,  médecin  principal;  S9  juillet  1855. 

18.  Adrien  (Henri-Albin),  chef  de  bataillon  au  49*  de  ligne  ; 
29  août  1855. 

19.  Toussaint  (Victor),  chef  de  bataillon  du  génie,  chevalier 
de  la  Légion  d'Honneur  ;  6  septembre  1855. 

30.  Villain'e:  (Benjamin),  lieutenant  au  14'  de  ligne;  33  sep- 
tembre 1855. 

31.L.VRDY  (Pierre-.Iefln)*, médecin  aide-major;  8fèvrierl856. 

23.  SiBiLLE (Eugène),  clief  d'escadron  d'artillerie,  oflicier  de  la 
Légion  d'Honneur;  17  octobre  1855, 

23.  Salexia.  (Justin),  aspirant  de  marine;  11  novembre  1855. 

24.  FRETTÉ-D\MicoLKr(Léonor-François)',  médecin-major  de 
1"  classe  ;  10  avril  185C. 

35.  BuDAN  (Antoine-Etienne),  lieutenant  des  sapeurs  pom- 
piers; 31  juillet  1856. 

36.  Demaset  ',  médecin  aide-major;  14  avril  1856. 

37.  •  L'abbé  Barthélémy  Menier,  aumônier  de  l'armée  ;  35  juil- 
let 1855. 

.  38.  *  L'abbé  Baron  de  Reinach  (Adrien-Rodolphe),  chanoine 
honoraire  de  Carcassonne,  aumônier  militaire;  16  mars  1856. 
39.  *  L'abbé  DEsa,Ati,  aumônier  de  l'armée;  18  mars  1856. 

30.  DcpARr;  18  février  1856. 

31.  Le  Ker",  médecin  aide-major;  14  mars  1856. 

32.  PoiNTiGNAN,  officier  comptable  ;  17  mars  1856. 

33.  Perhin  *,  médecin  aide-major  ;  38  mars  1 856. 

34.  Fourmer;  2  avril  1856. 

35.  PcEL*,  médecin-major;  4  avril  1856. 

36.  Pêqat*,  médecin-mïgor;  30  avril  1856. 

37.  Brunbt*,  médecin  aide-major;  25  avril  1856. 
38. 

39.  Galse;37  avril  1856. 

40.  Desblasgs*,  médecin  aide-major;  24  mai  1856. 

41.  BocHON  (Henri-Charies);  26  mai  1856. 

42.  GusTZ  (Joseph)  ;  22  juin  1855. 

43.  Daxin  (François);  22  novembre  1855. 

44.  DuLAc  ',  médecin  aide-major  ;  11  février  1856. 

45.  GuioL  (Alexis-Antoine)  ;  16  février  1856. 

46.  N.  N.  officier  polonais. 

47.  AL.\BERrjABDE  (Jules-Émile)  ;  25  juillet  1855. 


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48.  Ijifaivre;  16  août  1855. 

49.  De  BEUHMA.N  [Eugène);  8  octobre  1855, 

50.  VoLAQE  *,  médecin  principal;  28  février  1856. 

51.  Fayet  (Jacques);  28  avril  1855. 

52.  BouREAux  (Théodore);  16  avril  1855. 

53.  Favel  ;Alexandre),  médecin  de  la  flotte;  11  avril  1855. 

54.  CoNTY,  lieutenant;  4  mai  1855. 

55.  BucHOT  (  ),  capitaine;  5  mai  1855. 

56.  Boule,  capitaine  au  78'  de  ligne;  6  mai  1855. 

57.  Magnix,  soiUî-Ueatenant  au  62»  de  ligne;  6  mai  1855. 

58.  N.;  12  mai  1855. 

59.  Préloy  (Giuillaume),  médecin;  12  mai  1855. 

60.  Ravenet,  sergent;  22  mai  1855. 

61.  Rouget  (Pierre);  9  juin  1855. 

62.  N.,  inârmier-mEtjor  ;  12  juin  1855. 

63.  Lamothe,  Vida!  de  Termes;  22  juin  1855. 

64.  Cambray  (César);  22  juin  1855. 

65.  PoLONENs,  capitaine  aa  82*  de  ligne;  28  juillet  1855. 

66.  L'Hen.  ;  11  août  1855. 

67.  Evrard  (Jean-Baptiste)^  capitaine  au  2*  léger;  16  août 
1855. 

68.  Babbarin;  23  août  1855. 

69.  N.,  sergent;  21  septembre  1855. 

70.  BoRELLY,  capitaine  ;  30  septembre  1855. 

71.  Antoine,  adjudant  en  premier;  6  octobre  1855. 

72.  HouDRY  (Jean)  ;  22  juin  1855. 

73.  GoiLLOT  (Louis);  6  octobre  1855. 

74.  PiENZisKi;  12  octobre  1855, 

75.  N.,  infirmier;  7  février  1856. 

76.  GmAUD,  mécanicien  ;  27  février  1856. 

77.  Wnz  (Paul-Arnaud-Auguste),  capitaine  au  2^  régiment 
de  zouaves  ;  19  novembre  1856. 

78.  Demagni  iLouis),  officier  piémontais  ;  11  octolffe  1856. 

79.  RomoT;  15  mai  1856. 

80.  Laguerhe  (Jean-Baptiste). 

81.  Morandy;  17  avril  1856. 

82.  Bouchez  (Jean-François),  sergent  ;  16  mai  1856. 

83.  Ricard;  38  février  1856. 

84.  Dubois;  3  mai  1856. 


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—  531  — 

85.  Ragu  *,  médecin  aide-major;  4  mars  1856. 

86.  MiLTEMBBROER*,  mëdecin  aide-major;  6  mars  1856. 

87.  BouQUEROL*,  médecin  aide-m^or;8  mars  1856. 

88.  V&LLEAU,  lieutenant;  8  mars  1856. 

89.  N.,  officier;  13  mars  1856. 

90.  N. 

91.  N. 
9a.  N. 

93.  N.,  médecin  ;  27  février  1856. 

94.  Savaète,  médecin  aide-major;  21  février  1856. 

95.  Maechais;  SseptemJwe  1857. 

Au  milieu  du  cimetière,  se  dresse  un  obélisque,  élevé  d'a- 
bord, ailleurs,  par  les  médecins  de  l'armée  d'Orient,  à  la  mé- 
moire de  leurs  confrères  décèdes.  La  commission  a  foit  trans- 
porter cet  obélisque  an  rond-point  du  cimetière,  et  y  a  fait 
graver  les  noms  de  soixante-quinze  médecins  et  pharmaciens 
français,  représentant  le  funèbre  contingent  fourni  à  la  guerre 
d'Orient  par  le  corps  médical  de  l'armée  ' . 

Ce  cbifTre  se  décompose  comme  11  suit  : 

3  médecins  principaux. 
25  médecins  majors. 

38  médecins  aide-majors. 

4  médecins  sous-aide-majors. 
6  pharmaciens  aide-m^ors. 

Sur  le  socle  de  l'obélisque  on  lit  l'inscription  suivante  : 

t 

AUX  MÉDEaNS 

ULITAniES  Fa&NÇAIS 

MORTS 

K  l'abuée  d'orient. 

Voici  la  liste  complète  des  noms  inscrits  sur  les  quatre  faces 
de  cet  obélisque  : 


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Médecins  princtpaicœ. 

Mestre. 

Valage. 
Médechis  majors. 

Lagùze. 

Fratini. 

Peyrusbet. 

PONTIËR. 

MlCHELET. 

PURL. 

Hankn. 

Mercier. 

GOLLT. 

MlCIIBL. 

Tavernier. 

Fretté-Damicourt. 

Bert. 

Bracnwald. 

Pégat. 

Menier. 

1  (rumens. 

MOULIKIER. 

Bealcamp. 

Girard. 

Leclerc. 

Akcinelle. 

Rampo.nt. 

Mamelet. 

Félix. 

Médecins  aide-majors. 


Gérard. 

ViDET. 

Masson. 

Bailly. 

ViLLAIN. 

MlI-mMBEROËR. 

Dl'mas. 

Lardy. 

HOURGUEROL. 

PLA33AN. 

DULAC. 

Leker. 

Stéphany. 

Savaete, 

Perrin. 

Brunet. 

Leclëre. 

PRf;CY. 

DUMÉRIL,  ' 

Cordeau. 

Servi  ï. 

FOUCAUT. 

Fourni  ER. 

GUERY. 

Senaox, 

Desdlancs. 

Forget. 

Barre. 

Mof.INARD. 

GiLLIN. 

ROBELIN. 

Dartigaux. 

Demanet. 

COUZIER. 

Sagne. 

LamarvLle. 

A!  ORGUES. 

Ragu. 
Médecins  sous-aides 

Verneau. 

GODQUIN. 

Sautier. 

Jacob. 

Pharmaciens  aide-majors. 

Fraineau. 

GOSTIER. 

Granal. 

MUSARD. 

Cl.AQI-ART. 

UOL'SSARD. 

DisHizadbvGoOl^le 


Cet  obélisque  qui,  dans  le  principe,  avait  été  placé  daiis  la 
partie  droite  du  cimetière,  a  été  transporté,  avec  l'assistance  des 
marins  du  stationnaire  français,  l'Ajaccio,  commandé  par  M.  de 
Marqiiessac,  à  la  place  qu'il  occupe  aujourd'hui,  sur  uft  terre- 
plein  de  forme  circulaire,  semé  de  gazon  et  planté  de  flears  ; 
quatre  bornes  reliées  entre  elles  par  une  chaîne,  entourent  le 
monument,  posé  au  centre  d'une  corbeille  en  fer  et  reposant 
sur  une  assise  de  pierres  de  taille. 

A  gauche  de  la  chapelle,  et  sur  la  même  ligne  que  le  carré 
mililaire,  s'élève  un  autre  monument,  non  moins  digne  d'in- 
térêt que  les  précédents,  à  un  autre  point  de  vue.  Dès  que  la 
translation,  à  Feri-iceui,  de  l'ancien  cimetière  de  Péra  fat  déci- 
dée, foute  inhumation  fut  interdite  dans  ce  dernier,  par  l'au- 
torité épiscopale,  A  partir  du  27  avril  1859;  et,  au  bout  de  cinq 
années  à  compter  de  cette  date,  la  commission,  de  concert  avec 
les  autorités  municipales  et  sanitaires,  fit  procéder  à  l'exhuma- 
tion du  cimetière  des  Grands-Champs.  Avancée  de  quelques  jours 
à  raison  des  chaleurs,  cette  exhumation  a  été  exécutée  avec  le 
soin,  la  convenance  et  la  régularité  désirables,  du  29  février  au 
27  avril  1864,  sous  la  direction  et  la  surveillance  de  M.  l'abbé 
Giorgiovich,  qui,  depuis  onze  années,  fait  preuve  du  zèle  le  plus 
constant  et  d'un  dévouement  inaltérable  en  faveur  de  l'œuvre 
du  cimetière.  En  môme  temps  que  l'exhumation  se  pratiquait  à 
l'ancien  cimetière  dit  des  Grands-Champs,  la  commission  faisait 
construire,  dans  le  nouveau,  un  grand  caveau  destiné  à  rece- 
voir les  ossements  exhumés,  dont  le  poids  s'est  élevé  à  la  quan- 
tité considérable  de  vingt-deux  mille  oques  environ  '  !  Sur  ce 
caveau,  la  commission  a  fait  exécuter,  d'après  les  plans  et  sous 
la  direction  de  M,  l'abbé  Giorgiovich,  administrateur-délégué 
du  cimetière,  un  grand  sarcophage  d'un  style  simple  et  sévère, 
présentant  uo  carré  plus  haut  et  long  que  large,  accompagné,  à 
chacun  de  ses  quatre  angles,  d'un  obélisque  à  degrés.  Le  monu- 
ment lui-même  et  les  quatre  obélisques  sont  formés  et  revêtus 
des  pierres  tombales,  de  toutes  grandeurs,  recueillies  de  l'ancien 
cimetière,  et  taillées  de  façonà  entrer  en  combinaison  les  unes 
avec  les  autres  -.  Le  surplus  de  ces  pierres,  placées  sur  le  sol, 

'  L'oque  équivaut  à  2  livres  1/4  de  France. 

'  Dans  notre  Comple-ivn/u  1803-01,  nous  avons  donné  l'inventaire  som- 
Tnaire  des  pierres  tombales  tiiific'e»  dans  le  cimûliéro  des  Urands-Champa, 
antérieurement  à  l'e^ihumation. 


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—  524  — 

aatoar  du  moaument,  forme  an  pourtour,  protégé  par  une 
chaîne  courante,  s'appayant  sur  des  bornes  en  pierre. 

Trois  cent  sept  pierres  tombales  ont  été  retirées  de  l'ancien 
cimetière  des  Grands-Champs  ;  de  ces  pierres 

29    sans  inscriptions  ont  été  employées  dans  la  construction  ; 
12    pierres  ecclésiastiques,  transportées  dans  les  églises; 
258    ont  été  placées  sur  le  monument  ou  à  sa  base  \ 

8    ont  été  mises  aux  monuments  nouveaux  élevés  par  les 
familles. 
307 

Au-dessus  de  la  porte  donnant  entrée  dans  le  cavean,  figure 
une  pierre  du  xiv*  siècle,  sur  laquelle  on  lit  une  inscription  la- 
tine, gravée  en  beaux  caractères  gotliiques  ;  cette  pierre  provient 
du  cimetière  de  St-Francoîs  de  Galata,  et  fut  transportée,  de 
là,  à  celui  dit  des  Grands-Champs,  en  1697,  lors  de  l'exhumation 
générale  faite  en  tout  ou  en  partie,  par  les  soins  et  aux  frais 
f  de  la  naUon  française'  ;  >  elle  porte  l'inscription  suivante  : 

SEPDMHDM  DoïCNI  AnDRIOLI    de    PaGANA,  et  HEEÏEDUM   SOORDll, 

QUI  OBirr  ANNO  Dni  MCCCXXXV  dib  xv  junh. 

Cette  pierre  fut  hï)uvée,  lors  de  l'exhumation  générale  du  ci- 
metière des  Grands-Champs,  &  deux  mètres  environ  au-dessous 
du  niveau  extérieur  du  soi  ;  et,  non  loin  de  là,  on  recueillit  aussi 
un  certain  amas  d'ossements,  restes  probables  de  l'exhumation 
de  1697,  qui  ont  été  déposés  dans  l'ossuaire  général,sur  lequel 
on  a  élevé  le  monument  commémoratif,  recouvert,  nous  l'avons 
dit,  des  pierres  tombales  retirées  de  l'ancien  cimetière. 

Ce  monument  offre,  par  le  fait,  un  touchant  symbole  de  la 
catholicité,  en  même  temps  qu'une  page  intéressante  de  l'his- 
toire de  la  Latinité  de  Constantinople,  du  xiv*  siècle  à  la  moitié 
du  XIX'.  En  effet,  les  idiomes  les  plus  hétérogènes,  tels  que 
l'albanais,  l'allemand,  l'anglais,  l'arabe,  l'arménien,  le  crbate» 
le  français,  lè  grec,  l'italien,  le  latin,  le  russe  et  le  turc,  sont 
représentéssnr  ce  vaste  sarcophage;  aussi  bien  que  les  professions 

1  Voyez  ci-dessiiB  St'Fmntolt. 


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—  525  — 

les  plus  diverses  :  clergé,  diplomatie,  magistrature  consulaire, 
sciences,  commerce,  etc.  Nationalités  et  carrières  se  troavent 
ainsi  confondues  dans  la  terrible  égalité  de  la  mort,  et  réunies 
dans  la  douce  unité  de  la  foi  '  !.... 

A.  la  partie  supérieure  de  la  face  E  du  monument,  et  sous  la 
corniche,  on  lit  ce  qui  suit  : 

ANCIEN  aUETIÈRE  DES  GRANDS-^^AMPS 

AU  BEÏ-OGHLOU  (PÉRa). 

EXHUMATION   ET   TRANSLATION  EN  1864. 

PIEBBES  TOMBALES  PROVENANT  DUDIT  CIMEnÈHE. 

OSSUAIRE  GÉNÉRAL  ÉRIGÉ  EN  1870. 

De  profanais. 

Autour  de  la  corniche,  l'administration  a  fait  graver  les  ins- 
criptions suivantes  : 

H  DisH  mei  traneîemnt  et  in  nihilum  redacU  sunt  omnea  artus  meL  > 
i,Joli.  16.) 

i  Heati  mortui  qui  in  DomiDO  moriuntur.  »  (Apocol.  14.) 

•  Christus  resui^na  ex  mortuja  jam  non  moHtur  ;  mors  !111  ultra  non 
dominabitur.  •  (Jlom.  6.) 

■  Non  Dioriar,  eed  vivam  ;  narrabo  op«ra  Domini.  *  (P«.  117.) 

Sur  le  premier  degré  de  l'obélisque  de  gauche,  à  l'est,  au- 
dessus  du  soubassement,  on  remarque  la  pierre  du  xvi°  siècle 
(1561)  placée  jadis  sur  la  tombe  de  Quackelbe,  mort  de  pesto 
en  1561 ,  pierre  qui  inaugura  peut-être  le  cimetière  des  Grands- 
Champs,  comme  lien  d'inhnmation  des  victimes  de  la  peste  ; 
elle  porte  l'inscription  suivante  : 

WILHELMUS  QUACKELBE,  EN  ALIAS  COTURNOSSIUS,  BELGA,  CORTRA- 
CENUS,  UEDICIN^  DOCTOR  ET  OMNIS  PHILOSOPHIE;  PERIXISSIMUS,  CUW 
CON8TANT1N0P0LI  PLURIBL'S  ANNIS  REIPUBL1G£  CHRISTIAN^  NAVASSET 
OPERAM,  TANDEM  QUOD  IN  PATWAM  NEOABATDR,  CHRISTO  DUCE,  VEBTïT 
IN  ŒLUM  ;  OBUr  PESTE  Vm  m.  MAJI  MDLXI. 

Quacicelbe  avait  été  le  médecin  de  Busbecq,  envoyé  extraor- 


'  Compte-rendu  de  l'adminiatration,  du  eimatière  cath.  latin,  pour  1: 
ec  planche. 


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—  526  — 

dinaire  de  Ferdinand  d'Autriche,  roi  de  Hongrie,  auprès  de 
Sultan  Suléiman,  et  auteur  de  lettres  et  de  mémoires  connus  sur 
cette  capitale. 

Sur  ce  monument  on  remarque  encore  les  pierres  tombales 
ci-après  indiquées  : 

1C61 .  Maximilianus  Vischer,  austriacus,  viennensis  patricius. 

1678.  Josephus  Fiëschi,  Venetus  legatus  thesaurius,  peste 
correptus. 

leS'i.  Thomas  Navong,  Ser.  venet.  Beipob.  Interpres. 

1707.  Lucas  Jagelski,  Cœsareus  ad  Portam  interpres,  natus 
in  Silesiam,  denatus  Bysantii,  13  decembris. 

1709,  Lucas  Barga,  Ragusinus,  pro  ead.  Reip,  in  hac  urbe 
consul. 

1715.  Joanoes-Baptista  Navon,  interpres  peritis. 

1726.  Joannes  Forner  Soxnenuold,  Sac,  Cses.  Reg.  Cat, 
Majest.  linguarum  orlentalium  secret,  et  ad  Porta,  ottom.  ■ 
ioterp.  primarîus. 

1740,  David  Magy,  mercator  gallus,  pluries  unanimi  con- 
sensu,  nattonis  su%  res  gessit,  3  octobris. 

1743.  Raymondus  Dugabé  Delahia,  Galliarum  imperat.  a  se- 
cretis  et  orlentalium  idiomal.  interp.  pestilenti  morbo  corrept. 
18  august. 

1768.  Guillaume  Gérard  Dereuo,  envoyé  des  Belges  confé- 
dérés auprès  de  Sultan  Moutafa  lU. 

1778.  Petrus  Roustan,  Gallus,  prim,  interp.  pestilentia  ictus, 

1780.  Giuseppe  Chutta,  interprète  di  S.  M.  l'Imperatore  di 
tutte  le  Russie,  raorto  di  peste. 

1787.  François-Jacques  Le  Bris,  sieur  du  Rest,  français, 
sous-ingén.  construct.  de  la  marine,  mort  de  peste, 

17ÎI9.  Dom.  Jacobus  Janowski,  exe,  lUustr.  Dn.  Pocki,  magni 
Poloniïe  legati,  capellanus,  peste  corrept. 

1793.  Nicolas  Rostaing,  1"  major  du  régim,  des  grenadiers 
de  Sibérie,  au  service  de  S.  M.  l'Empereur  de  toutes  les  Russies, 
attaché  à  l'arabass.  extr.  envoyée  à  la  Porte  ottomane,  après  la 
paix  de  Yassy.  7  décembre. 

1794.  Nicolas-Auguste  Mazuiuer,  cap,  du  génie,  envoyé  par 
la  Convention  nationale,  au  service  de  la  Porte  ott.  23  messi- 
dor an  II. 


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—  537  — 

1801.  Henri  Dubois  de  Lyon,  sous-comm.  cbanc.  de  FraDCe 
à  Bukharest.  16  nivôse,  an  IX. 

1821.  Charles-Jo3eph  de  Lbdoulx,  écuyer,  cens,  de  France  à 
Bhodes. 

1834.  Georgius  Wooo,  esq.  dragoman  to  this  english  em- 
bassy,  to  the  S.  P. 

1852.  Daniel  Dubroca.,  vétérinaire  de  l'armée  française,  et 
fondateur  de  l'école  vétérinaire  de  Constantinople.  Décembre. 

1856.  Gastave-Adolphe  Baumgarten,  ingénieur  en  chef  des 
ponts-et-chaussées  de  France,  chev.  de  la  Légion  d'honn. 
6  octobre. 

Parmi  les  pierres  arméniennes  placées  sur  ce  monument,  il 
s'en  trouve  une  qui  recouvrait  la  tombe  d'un  parent  du  martyr 
Comidas  (de  Carbognano),  misa  mort  le  5  novembre  1709,  et 
dont  les  restes  avaient  été  déposés  par  les  soins  de  sa  fille  au 
clmetii're  de  Balougly  '. 

L'inscription  suivante,  due  à  l'obligeance  éclairée  de  Mgr 
Giacomo  Barozzi,  camérier  honoraire  du  St-Père,  chancelier  de 
l'archevêché,  a  été  gravée,  en  outre,  sur  les  deux  pierres  se 
trouvant  au-dessous  de  celle  de  133"»,  des  deux  côtés  de  la 
porte  d'entrée  du  caveau  : 

MONCMENTUM  HOC  UNUM  IN  OUBE, 

SU.K  IN  DEFU-NOTOS  PIKÏATIS 

IN  REI.IGIONE  DECORUM  IMPICSSI  8TUDU 

FERENNB  TËSTIMOXK'.M 

ASTONU  GIORGIOViai  SAOJmOTIS 

PRESTANTI     INOENIO     EXCOUITATLM 

SOLERTIA  CL-RISQUE  ASSIDUIS 

ABSOLOTUM  EST'-. 


>  Lettres  édiflantes,  1819.  19. 

>  Pour  toutes  ces  dilTérentes  inscriptions  et  en  général  pour  tout  ce  qui 
concerne  la  clmetiéie,  voir  nos  différents  compte  h -rendu  a,  et  les  plaach«a 
ci-contre.  Les  .Vlissions  Catholique*  ont  consacre,  les  tf  mars  1874  et  19  fé- 
vrier I87j,  une  notice  sur  le  cimetière  catholique  de  Kerî-keui.  M.  l'abbé 
Giorgiovlch,  qui  a  été,  (avec  M.  Belin)  le  grand  orgauinateur  du  cimetière, 
fat  nommé  en  1H72  camérier  honoraire  do  Pape  Pie  IX,  sur  la  proposition 
de  Mgr  Franchi.  Cest  une  juste  récompense  des  services  rendus  &  la  cause  ' 
catholique  à  CP-  It  était  ilécoré  de  la  Légion  d'Honneur  pour  ses  bons  ser- 
vices en  qailité  d'aumûnier  des  soldats  français  de  l'armée  d'Orient. 


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—  528  — 

Entre  ce  monament  et  la  chapelle,  la  commission  a  bit  cons- 
truire un  autre  ossuaire,  composé  de  liuit  cellules  souterraines, 
destiné  à  recevoir  les  ossements  provenant  des  carrés  communs, 
renouvelables  par  période  quinquennale.  Une  sorte  de  lanterne, 
de  construction  octogone,  s'élève  au-dessus  de  cet  ossuaire. 

Bâti  dans  un  style  roman-gothique,  cet  ëdiSce  est  octogone  : 
la  partie  supérieure  de  chaque  face  terminée  en  ogive,  contient, 
en  outre  de  l'inscription  historique  rapportée  ci-dessous,  des 
textes  tirés  de  l'Écriture  Sainte  ;  puis  sur  la  table  de  marbre 
placée  au-dessous,  seront  gravés,  au  far  et  à  mesure,  le  millé- 
sime de  la  période  d'inhumation,  et  en  regard,  le  chiffre  des 
morts,ou  mieux,  des  restes  exhumés  des  carrés  communs,  pour 
la  même  durée,  et  déposés  dans  l'ossuaire. 

Au-dessus  de  ta  porte  donnant  entrée  dans  le  caveau  souter- 
rain, on  lit  l'inscription  suivante  : 

OSSL'AIEIE  OÉNÉBAL. 

OHSEMEyrs 

RELEVÉS  DES  CABRÉS  QUINQUENNAUX. 
ÉRIGÉ    EN   1871. 


Puis,  sur  chacune  des  autres  faces  : 

Quis  est  homo  qui  vivit,  et  non  videbit  mortem  î  (Ps.  88.) 
Deficiet  omnis  caro  simul,  et  bomo  in  cinerem  reverletur. 

[Job,  34.) 
Iste  moritur,  robustus  et  sanus,  dives  et  felix.  {Job,  21.) 
Verumtamen  universa  vanîtas,  omnis  homo  vivens.  (i'j.SS.) 
Thesaurizat,  et  iguorat  cui  congregabit  ea.  {Ps.  37.) 
Quoniam  in  te,  Domine,  speravi;   tu  exaudies  me,  Deus 

meus  1  (Ps.  37.) 
Pretiosa  in  conspectu  Domini,mors  sanctorum  ejus.(Pj.  115.) 

A  l'intérieur  de  la  lanterne,  il  s'en  trouve  une  seconde,  repo- 
sant sur  la  partie 'antérieure  de  chacun  des  huit  caveaux,  et  re- 
joignant, en  cintre  tronqué,  la  coupole  principale,  couverte  en 
plomb  et  surmontée  d'une  croix  ;  une  étroite  galerie  intermé- 
diaire donne  passage  entre  cette  double  lanterne  j  dans  le  mur 


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—  529  — 

d«  la  partie  externe,  od  a  pratiqué,  à  l'intérieur,  sept  loculi  par 
travée,  destinés  à  tel  emploi  ultérieur  que  de  besoin,  soit  qua- 
raate-neuf  loculi  pour  les  sept  travées. 

Une  chaîne  en  fer,  reposant  sur  huit  bornes  en  pierre,  en- 
toure le  monument. 

Ce  dernier  monument  constitue,  pour  ainsi  dire,  le  complé- 
ment organique  du  cimetière.  Selon  ses  moyens  de  fortune, 
chacune  des  classes  de  la  société  peut  y  assurer  pour  plus  ou 
moins  de  temps,  autant  que  le  permet  la  courte  durée  des  choses 
de  ce  monde,  le  respect  à  la  sépulture  de  ses  morts  ;  les  pauvres 
seuls  paraissaient  devoir  être  privés  de  cette  consolation  ;  mais 
s'inspiraat  des  enseignements  de  la  Religion,  la  Commission  a 
ambitionné  l'honneur  d'accomplir  ce  pieux  devoir,  et,  doréna- 
vant, les  pauvres,  eux  aitssi,  auront  la  douce  assurance  que  les 
restes  de  ceux  qu'ils  ont  aimés,  seront  conservés,  d'une  manière 
toute  spéciale,  à  leur  vénération  et  à  leurs  respects. 

Le  gouvernement  de  S.  M.  le  Sultan  a  fait  don  à  la  France,  à 
titre  d'annexé  au  c  Cimetière  Militaire  français  >d'un  parcelle  de 
onze  mille  huit  cent  douze  pics,  sise  au  nord,  en  dehors  du  mur 
d'enceinte,  et  régularisant  le  parallélogramme  du  terrain  du  ci- 
metière'. 

D'après  notre  Compte-renduàe  l'administration  du  cimetière 
pour  l'exercice  1870-71,  la  mortalité  dans  la  colonie  catholico- 
latine  de  Gonstantinople,  a  été,  pour  la  période  décennale 
comprise  entre  1861-63  et  1870-71,de  quatre  mille  quatre-vingt- 
dix  décés,so\i  mille  huit-cent  vingt-six  pour  les  cinq  premières 
années,  deux  mille  deux  cent  soixante-quatre  pour  les  secondes. 
Ces  chiiTres,  combinés  avec  ceux  donnés  plus  haut  pour  les 
naissances,  fournissent  des  bases,  on  peut  dire  officielles,  pour 
établir,  d'une  manière  à  peu  près  exacte,  le  quantum  de  la  po- 
pulation latine  de  Gonstantinople^. 

Depuis  la  création  du  nouveau  cimetière,  le  transport  des 
corps,  de  l'église  au  champ  du  repos,  s'effectue  au  moyen  de 
corbillards.  Selon  l'antique  usage  la  levée  da  corps  se  fait  par 


■  Lefl  titres  de  traoarert  de  cette  parcelle  sont  du  90  chaoual  1283  (17  mara 
1866). 

■  On  peut  conaulter,  sur  l'histoire  des  cimetières  de  Canstantiaople,  nos 
Complei-rendu»  annuels,  de  18e£à  1871,  treize  bsctcules. 


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-  530  — 

le  clergé,  à  la  maison  mortuaire',  et  le  transport  jusqu'à  l'é- 
glise est  fait  à  bras.  L'emploi  des  corbillards  a  été  aussi  adopté 
par  les  tirées  et  par  les  Arméniens.' 

Lors  de  l'épidémie  cholérique  qui  sévit  avec  tant  de  force  à 
Constantinople,  en  1865,  l'autorité  locale  interdit  toute  inhuma- 
tion dans  les  églises,  comme  cela  avait  eu  lieu  jusqu'à  cette 
époque,  à  partir  du  27  juillet  de  cette  année.  Une  exception  fut 
faite  pour  les  sépultures  existant  déjà  dans  la  crypte  du  St-Esprit, 
maisil  ne  fut  pas  permis  d'en  construire  de  nouvelles. 

Cimetière  de  Buyiik-dêré.  L'église  latine  de  cette  localité 
possédait  un  terrain  d'environ  mille  pics,  sis  en  haut  de  la  rue 
Kiriko,  et  qui  lui  avait  été  donné  par  Georges  Kiriko.  Cet  em- 
placement servit  de  cimetière  pour  les  Latins,  depuis  les  der- 
nières années  du  siècle  passé  et  fat  enclos  de  murs  en  1856  : 
mais  cet  emplacement,  d'abord  éloT(;!'J  des  habitations,  s'en 
trouvant  par  la  suite  entouré  de  tous  cétés,et  le  conseil  de  santé, 
lors  du  choléra  de  1865,  ayant  interdit  toute  inhumation  dans 
cet  endroit,  M.  Septime  Franchini  gratifia  la  communauté  latine 
de  Buyuk-dérè  d'un  autre  terrain,  de  onze  mille  pics  environ, 
situé  à  un  kilomètre  du  village,  à  l'entrée  de  la  prairie  qu'on 
trouve  au  sortir  de  Buyuk-dérè,  sur  la  droite  de  la  route  qui 
conduit  à  Belgrade.  Toutefois  ce  terrain,  étant  d'un  accès  diili- 
cile,  on.  continua,  après  la  disparition  du  choléra,  d'inhumer 
dans  l'ancien  cimetière,  jusqu'en  1869  ;  alors  la  nouvelle  route 
étant  achevée,  le  conseil  de  santé  renouvela  l'ordre,  qui  fut 
exécuté,  d'inhumer  désormais  en  cet  endroit. 

Par  les  soins  du  R.  P.  Franconi,  M.  C,  curé  de  Buyuk-dérè, 
on  procéda,  en  mars  1875,  à  l'exhumation  des  ossements  de 
l'ancien  cimetière,  que  l'on  transporta  dans  le  nouveau.  Les  re- 
ligieux, aidés  par  les  aumdnes  des  fidèles,  firent  enclore  de 
murs  le  cimetière,  bâtir  une  petite  chapelle,  et  faire  tous  les 
travaux  nécessaires.  Sur  les  parois  de  droite  et  de  gauche  dn 
mur  d'enceinte  on  a  placé  diverses  pierres  tombales  apportées 
de  l'ancien  cimetière,  parmi  lesquelles  nous  avons  relevé  les 
inscriptions  suivantes  : 


1  Voyez,  sur  la  Ievé«  du  corps,  notre  Mémoire  sur  les  rites  funèbres, dans 
e  compte-reudu  de  1865-1866. 


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—  531  — 

Victor  BuTET,  fils  d'Amédée  Butet,  ancien  officier  de  marine, 
et  consul  de  S-  M.  très  chrétienne  en  Egypte,  né  à  Buyuk-dérè, 
le  22  juillet  1797,  y  décédé  le  10  octobre  1799. 

D.  0.  M.  Lucie  Krzanowska,  veuve  du  dernier  chargé  d'af- 
feires  de  Pologne  près  la  Porte  ottomane,  morte  le  92  dé- 
cembre 1833. 

Comme  à  Péra,  le  transport  des  morts  se  fait  au  moyen  d'un 
corbillard, 

Scutart  d'Asie.  Un  cimetière  est  affecté  aux  catholiques  la- 
tins, aux  grecs  et  aux  bulgares  ;  sa  superficie  est  de  treize  Deu- 
nums. 

Kadî-hetti.  Depuis  quelques  années  un  cimetière  a  été  dis- 
posé pour  les  catholiques  de  ce  fauboui^. 

Prînhipo.  Autour  de  l'église  catholique  on  a  réservé  une 
place  pour  les  inhumations  des  rares  catholiques  des  Iles. 

Thérapia.  II  existe  dans  ce  village,  sur  la  hauteur,  vers  la 
partie  gauche  de  la  baie,  un  lieu  de  sépulture,  spécialement  af- 
fecté à  la  marine,  et  dit  «  Cimetière  français  t.  Entouré  de 
murs,  il  renferme  peu  de  tombes  ;  à  l'extrémité  à  droite,  adossé 
à  la  muraille  se  trouve  un  petit  tertre,  surmonté  d'une  croix  de 
marbre,  recouvrant  les  ossements  d'un  certain  nombre  de  ma- 
rins français  ;  derrière,  appliquée  à  la  muraille,  une  plaque  de 
marbre  porte  cette  inscription  : 

Ossuaire  renfërmaxt  les  restes  des  maiuns  ihançais  morts 
EU  1854,  1855  ET  1856,  pendant  la  qdkrre  d'Ohient,  inhumés 
d'abord  dans  l'ancien  ciMEnÈRE  DE  Thebapia  et  dans  celui  de 
Khaiki,  pois  transférés  ra,  kn  1867  et  1868. 

De  profundts! 


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ÉPILOGUE. 


CHAPITRE   FINAL. 


En  arrivant  à  la  un  de  ce  long  travail,  il  est  utile,  noos 
semble-t^il,  de  chercher  à  noua  rendr&.aiJinpte,  par  un  r^ard 
d'ensemble,  de  l'espace  parcouru  et  des  résultats  obtenus,  pen- 
dant les  huit  cents  ou  les  neuf  cents  ans  qu'il  embrasse. 

Nous  avons  vu  successivement  les  premiers  essais  d'impa- 
tronisation  des  Latins  sur  le  territoire  de  l'antique  Byzance:les 
Communes  italiennes  à  peine  constituées  en  républiques  indé- 
pendantes y  arrivent  les  premières,  l'une  après  l'autre.  Elles 
obtiennent  de  la  faveur,  de  l'intérêt,  ou  de  la  faiblesse  des  em- 
pereurs grecs,  des  concessions  qui  vont  en  grandissant  tou- 
jours, s'établissent  à  côté  les  unes  des  autres,  se  jalousant 
toujours,  se  combattant  souvent.  La  politique  habile  des  empe- 
reurs maintient  entre  elles  la  division,  pour  s'assurer  l'empire. 
Us  y  réussissent  jusqu'à  ce  que  leurs  trahisons  répétées  aient 
exaspéré  la  puissante  république  de  Venise  et  l'aient  amenée  à 
détourner  de  son  but  la  cinquième  croisade,  pour  venir  s'em- 
parer de  Constantinople. 

La  Latinité  s'établit  alors  en  maîtresse  à  Byzance  et  y  fonde 
un  Empire.  C'était  un  bien  grand  nom  pour  une  bien  faible 
puissance.  Les  excès  de  cet  empire  exaspèrent  les  Grecs,  ses  di- 
visions le  rendent  impuissant  et  amènent  sa  chute  à  très  brève 
échéance.  L'empereur  Baudoin  s'enfuit,  les  Vénitiens  se  re> 
tirent,  les  Grecs  demeurent  les  maîtres  à  CP.  Cependant  les 
Génois  qui  avaient  séparé  leur  cause  de  celle  de  A'enise  ob- 
tiennent de  rester,  mais  ce  n'est  plus  sur  la  rive  droite  de  la 
Corne  d'Or:  ils  sont  relégués  sur  le  rivage  de  Gaiata  et  sur  les 


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—  533  — 

pentes  du  coteau  de  Péra.  Ils  s'y  établissent,  s'y  font  une  ville 
nouvelle,  soumise  nominalement  à  Byzance,  mais  en  réalité 
presque  indépendante,  et  souvent  ennemie  ;  ils  la  fortifient  et 
l'agrandissent  peu  à  peu.  Cette  domination  de  Galata,  presque 
exclusivement  génoise,  a  quelques  belles  pages  dans  son  his- 
toire. La  Latinité  affirme  sa  force  par  la  construction  de  mas- 
sives murailles,  de  vastes  et  belles  églises,  de  solides  édifices, 
«t  enfin  de  cette  Tour  imposante  qui  reste  aujourd'hui,  seul 
témoin  d'une  puissance  disparue. 

Ne  sachant  ni  s'entendre  avec  les  Grecs,  ni  les  supplanter 
absolument,  les  Génois  durent  succomber  avec  eux,  devant  la 
puissance  formidable  des  Osmanlis,  La  République  s'effaça,  elle 
se  réservait  :  le  conquérant  trouva  devant  lui  pour  traiter  des 
conditions  de  la  reddition  de  la  ville,  non  le  podestat  génois, 
mais  bien  les  notables  t]&0alata,parmi  les  chrétiens  de  rite  latin. 
C'est  aux  chrétiens  ttins  que  Sultan  Mehemmed  accorde  la  ca- 
pitulation, dont  les  conditions  principales  règlent  encore  les 
rapports  des  vainqueur  et  des  vaincus.  Les  notables  se  consti- 
tuent en  une  sorte  de  corps  qui  les  représentera,  et  le  Sultan 
établit  une  chancellerie  qui  traitera  ofTieiellement  les  affaires  de 
la  chrétienté  latine  «  Latin-Raiacy  ».  Suivant  l'usage  du  temps, 
et  k  nécessité  des  circonstances,  ces  notables  forment  une 
confrérie  qui  se  réunit  auprès  de  la  principale  église,  et  attire 
peu  à  peu  ù  elle  toute  l'autorité  qu'il  était  possible  d'avoir  sous 
le  joug  des  Turcs.  Elle  est  connue  sous  le  nom  de  t  la  Magni- 
flca  Comunità  di  Pera  >  et  dure  plus  de  deux  cents  ans. 

Cependant  elle  n'avait  pas  assez  de  ressources  i>our  entre- 
prendre de  bien  grandes  choses,  ni  assez  de  force  pour  résister 
aux  exigences  des  maîtres  musulmans.  Ainsi  elle  ne  put  empê- 
cher les  Turcs  d'enlever  aux  Latins  leurs  églises  de  CP.  et  môme 
leurs  grandes  églises  de  St-Paul  et  de  St-François,  ni  la  plu- 
part de  leurs'  autres  édifices  religieux  :  aussi  le  rôle  des  Prieurs 
et  des  Confrères  de  Ste-Anne  se  réduisait-il  le  plus  souvent  à 
payer  les  amendes  dont  on  frappait  la  chrétienté.  Au  reste  le 
nombre  des  Latins  était  fort  réduit,  ils  paraissaient  même  par- 
fois sur  le  point  de  disparaître  complètement.  Heureusement, 
pour  les  maintenir,  les  églises  leur  restaient,  avec  les  religieux 
qui  les  desservaient.  Elles  forent  pendant  un  long  Intervalle,  le 
seul  centre  de  la  vie  latine  ;  c'est  pourquoi  nous  avons  db  doa- 


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—  534  — 

ner  une  si  large  place  à  l'histoire  des  églises  et  des  religieux  de 
Constantinople. 

Mais  depuis  le  règne  de  Sultan  Suléimau,  un  autre  élément 
entre  en  ligne  de  compte.  Le3  Osmanlis  qui  avaient  étêjusqu'a- 
loi's  en  guerre  continuelle  avec  la  chrétienté  et  qui  restaient 
toujours  armés  contre  l'Empire  germanique,  sur  les  terres  du- 
quel ils  faisaient  chaque  année  quelque  incursion  nouvelle,  en- 
trèrent en  relations  amicales  avec  la  France.  Depuis  1635,  les 
Rois  Très  Chrétiens  entretinrent  presque  constamment  des  am- 
bassadeurs résidant  auprès  de  la  Porte  ottomane.  La  situation 
de  ces  ambassadeurs  était  parfois  bien  précaire,  ils  n'osaient 
pas  parler  bien  haut,  quand  ils  faisaient  des  réclamations;  on 
les  menaçait  parfois  de  les  mettre  aux  Sept-Tours,  mais  cepen- 
dant ils  représentaient  une  grande  puissance  amie,  et  c'est  au- 
près d'eux  que  les  Latins  s'habituèrJGt  à  chercher  un  refuge 
dans  leurs  dangers,  un  secours  dans  leurs  embarras,  et  un  ap- 
pui toujours.  Les  ambassadeurs  de  France  à  CP.,  les  consuls 
français  dans  les  Échelles  devinrent  donc  les  protecteurs  natu- 
rels de  tous  les  chrétiens  du  Levant  :  la  Porte  leur  r^onnut  ce 
droit,  le  St-Siège  le  consacra,  et  les  traités  le  confirmèrent. 

Seulement  ce  fut  la  mort  de  l'autonomie  locale  et  de  la  puis- 
sance de  la  •:  Magni&ca  Comunità  >.  Peu  à  peu  toutes  les  af- 
faires durent  passer  par  la  chancellerie  française, Cette  influence 
ne  s'établit  pas  sans  quelque  lutte.  L'Empire,  quand  il  était  eu 
paix  avec  la  Turquie,  Venise  surtout,  qui  avait  de  grands  inté- 
rêts à  CP.,  réclamèrent,  il  fallut  leur  faire  une  part;  mais  on 
peut  remarquer  que  c'est  quand  l'influence  française  diminue 
que  la  puissance  ottomane  pèse  plus  lourdement  sur  les  chré- 
tiens. Ainsi  les  églises  de  Stamboul  qui  avaient  été  conservées 
à  la  chrétienté  par  l'intervention  de  M.  de  Brèves,  lui  furent 
enlevées  dans  une  crise  qui  obligea  l'ambassadeur  de  France, 
M.  de  Marcheville,  à  disparaître  ;  ainsi  Ste-Marie  Drapéris  (an- 
cienne) fut  enlevée  aux  Observantins,  quand  leur  maison  fut 
devenue  une  possession  espagnole  ;  ainsi  St-François  fut  en- 
levé aux  Conventuels  quand  ils  en  eurent  fait  une  église  véni- 
tienne, etc. 

Cette  protection  fut  donc  un  bonheur  pour  les  Latins,  mais 
elle  fut  en  même  temps  un  obstacle  à  leur  union  et  nuisit  ainsi 
k  leur  force  intrinsèque.  Soutenue  par  le  dehors,  la  Latinité 


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-  535  — 

a'ëtait  pas  t  une  >  au  dedans,elle  était  par  \h  même  plus  faible. 
On  le  vit  mieux  au  xvii'  et  au  xvni"  siècles.  Deux  Ordres  re- 
ligieux, dont  les  membres  se  recrataient  en  France  et  dépen- 
daient de  supérieurs  français,  les  PP'.  Jésuites  et  les  PP.  Capu- 
cins, concentrèrent  presque  toute  la  vie  religieuse  de  Péra  dans 
leurs  églises  de  St-Benoît,  de  St-Georges  et  de  St-Louis;  ce- 
pendant ces  églises  n'étaient  point  des  paroisses;  mais  leurs 
prêtres  étaient  d'accord  avec  la  puissance  prépondérante,  ils 
pouvaient  donc  agir  avec  plus  de  sécurité  et  faire  ainsi  plus  de 
bien.  La  Porte  elle-même  leur  accordait  une  spéciale  liberté, 
tandis  que  les  autres  églises  ne  se  maintenaient  que  par  une 
sorte  d'inertie  et  que  leur  activité  se  bornait,  trop  souvent,  à  ' 
des  disputes  entre  elles  ou  k  des  tracasseries  aux  religieux 
français. 

Une  autre  cause  de  IXlesse  pour  la  Latinité  était  l'absence 
d'un  clief  religieux  capable  de  commander.  Les  Patriarches  de 
CP.  conservaient  leur  titre  et  leur  autorité  nominale,  mais  obli- 
gés de  résider  à  Rome,  ils  devaient  se  faire  représenter  à  CP. 
.  par  un  Vicaire,  le  plus  souvent  supérieur  de  Str-François  ;  mais 
d'un  côté  ce  Vicaire  n'avait  pas  une  grande  autorité,  et,  sans 
caractère  èpiscopal,  il  manquait  de  prestige,  d'un  autre  cOté  il 
ne  résidait,  en  général,  que  peu  de  temps  à  CP.  Ces  changements 
fréquents,  Routés  aux  autres  causes,  que  nous  avons  indi- 
quées, empêchaient  leur  bonne  volonté  d'ôtre  fructueuse. Depuis 
deux  siècles,  il  est  vrai,  le  Vicaire  patriarcal  est  revêtu  du  ca- 
ractère épiscopal,  mais  n'ayant  pas  un  titre  réel,  n'ayant  pas 
même,  tout  d'abord,  d'église  à  lui,  ne  possédant  pas  de  clergé 
qui  lui  appartint  directement,  son  autorité  était  plus  nominale 
que  réelle  ;  souvent,  lorsqu'il  voulait  la  faire  prévaloir,  elle  re- 
vêtait une  apparence  tracassière,  en  contrariant  les  droits  des 
réguliers  sur  lesquels  elle  s'exerçait.  Ces  Vicaires  patriarcaux 
effacés  par  les  ambassadeurs,  jalousés  par  la  <  Comunità  »,  peu 
obéis  par  les  religieux,  obligés  de  faire  mille  compromis  pour 
vivre,  furent  rarement  les  chef^  réels  de  la  Latinité,  mais  il 
leur  était  difBcile  de  faire  mieux.  Nous  avons  noté  les  efforts 
de  quelques-uns  d'entre  eux  ;  mais  nous  avons  constaté,  qu'en 
somme  les  résultats  obtenus  furent  maigres. 

Nous  ne  pouvons  d'ailleurs  nous  figurer,  nous  qui  vivons 
sons  un  régime  de  liberté  relative,  combien  il  était  difficile  à 


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ceux  gui  nous  oot  précédés  d'entreprendre  quelque  chose  de 
sérieux.  Sans  doute  à  l'abri  des  Capitulations  et  sous  la  pro- 
tection de  la  France  ils  pouvaient  à  peu  près  conserver  leurs 
positions  et  continuer  leur  vie;  mais  il  fallait  toujours  appré- 
hender quelques  tracasseries  nouvelles  d'un  pouvoir  arbitraire 
et  capricieux,  des  <:  avanies  x,  tantôt  sous  un  prétexte  taatdt 
sous  un  autre,  des  amendes  qui  épuisaient  les  ressources  des 
couvents  et  celles  de  la  t  Comunità  >.  Surtout  on  se  heurtait 
à  des  difficultés  inextricables,  lorsque,  après  un  de  ces  incen- 
dies, si  fréquents  alors,  on  voulait  rebâtir  une  église.  Ce  n'était 
pas  trop  alors  de  toute  la  puissance  et  de  toute  l'habileté  des 
ambassadeurs,  et  de  toutes  les  ressources  des  Latins,  pour  ob- 
tenir les  Ûrmans  nécessaires  ;  et  encore  tout  fut  parfois  inutile  : 
malgré  tous  les  efforts  le  sol  de  plusieurs  églises  incendiées  fat 
confisqué  par  les  autorités  musulmajcr^.  On  se  plaint  aujour- 
d'hui de  la  peine  que  l'on  éprouve  pour  obtenir  l'autorisation 
d'ouvrir  une  église  ou  une  école;  mais  qu'est-ce  que  tout  cela 
en  comparaison  de  tout  ce  qu'il  fallait  dépenser  jadis  d'habileté 
et  d'argent,  et  souvent  pour  n'aboutir  à  rien. 

Ajoutez  à  toutes  ces  causes  d'infôriorité,  la  pénurie  dans  la-  ' 
quelle  se  trouva  toujours  la  Latinité.  Les  revenus  de  !a  Comu- 
nità étaient  presque  nuls,  ceux  des  églises  n'étaient  pas  consi- 
dérables. Le  Vicaire  patriarcal  n'avait  ni  une  maison  ni  une 
église  ;  il  n'y  avait  pour  faire  face  aux  dépenses  générales  de  la 
Latinité  que  les  contributions  volontaires  ou  forcées  de  ses 
membres,  ou  des  chrétiens  qui  faisaient  le  commerce  dans  le 
Levant.  Et  encore  quand  toutes  les  nations  eurent  des  consuls 
dans  les  Échelles,  les  droits  se  payèrent  aux  consuls  et  non  plus 
à  la  chancellerie  de  Galata.  Et  pourtant  il  fallait  faire  face  à  de 
grandes  nécessités;  toutes  les  églises  de  Péra  ont  été  plusieurs 
fois  dévorées  par  les  flammes,  et  quelques-unes  ont  été  renver- 
sées par  des  tremblements  de  terre.  Les  Ordres  religieux  firent 
les  plus  grands  sacrifices  pour  relever  leurs  églises  et  leurs  cou- 
vents, ils  y  furent  aidés  par  les  ambassadeurs  et  les  cbrétien^ 
du  pays,  mais  il  fallut  abandonner  enfin  les  églises  qui  ne  rele- 
vaient pas  spécialement  d'un  Ordre  religieux.  On  s'étonne 
même  comment  la  bonne  volonté  des  uns  et  des  autres  a  pu  ré- 
sister pendant  si  longtemps  ù  de  si  lourds  sacrifices  et  se  main- 
tenir quand  même. 


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—  537  — 

Heureusement  la  Frauce,  en  preuant  la  protection  des  chré- 
tiens, assumait  aussi  la  charge  de  leur  donner  un  secours  effi- 
cace, 80US  la  forme  de  subventions  pécuniaires  et  autres.  Non 
seulement  les  religieux  français,  Jésuites  et  Capucins,  étaient 
régulièrement  subventionnés  par  leur  gouvernement,  mais  aussi 
les  autres  qui  n'étaient  pas  français,  recurent  maintes  fois  des 
preuves  non  équivoques  de  la  protection  que  leur  accordait  le 
Roi.  Grflce  à  ces  secours, grâce  aux  contributions  des  chambres 
de  commerce,  les  missions  purent  se  maintenir  et  le  catholi- 
cisme se  conserver  à  jConstantinople  jusqu'à  nos  jours. 

Les  prêtres  catholiques,  et  leurs  chefs,  les  Vicaires  patriar- 
caux, auraient-ils  pu  faire  davantage  ?  Auraient-ils  pu,  par 
exemple,  exercer  une  certaine  Influence  sur  les  autres  chrétiens 
et  les  amener  à  l'unit^  de  l'Église  catholique  ?  Il  serait  injuste 
de  dire  que  rien  n'a  tt^^it  dans  ce  aens  :  outre  les  grands  ef- 
forts qui  furent  faits  au  \iB',  au  xiV  siècle  et  môme  au  xv^, 
et  qui  aboutirent  à  l'Union  prononcée  aux  Conciles  de  Lyon  et 
de  Florence,  il  y  eut  d'autres  travaux  enticpris  dans  ce  but. 
Nous  avons  dit  comment  les  Arméniens  catholiques  ont  trouvé 
un  appui  à  yt-Benolt,  à  St-Georgea,  à  St-Pierre,  comment  il  se 
trouva  toujours  des  religieux  qui  se  dévouèrent  à  cette  œuvre, 
on  ramena  quelques  schismatiques,  mais  surtout  on  conserva  la 
foi  dans  le  cœur  de  ceux  qui  étaient  catholiques.  Les  efforts 
échouèrent  sur  la  masse,  elle  est  resiée  aussi  attachée  à  son 
autonomie  et  &  ses  idées  que  jadis,  mais  le  catholicisme  n'a 
pas  reculé  ;  malgré  toutes  ces  causes  de  faiblesse,  il  est  demeu- 
ré dans  les  mêmes  positions  qu'il  occupait  au  moment  de  la 
conquête  ottomane. 

Notre  tâche  ne  serait  pas  complètement  achevée  si,  après 
avoir  raconté  l'histoire  du  passé,  nous  n'envisagions  pas  aussi 
la  situation  présente  de  la  Latinité.  Elle  peutse  considérer  sous 
deux  aspects,  dans  le  peuple  qui  la  compose,  et  dans  les  chefs 
qui  la  gouvernent. 

Las  colonies  latines  sont  nombreuses  h  Constantinople,  mais 
le  seul  lien  qui  les  unit  c'est  l'Église  catholique  ;  or  nous,  voyons 
que  cette  Église  s'est  constituée  avec  une  grande  force  et 
qu'elle  a  afllrmë  son  unité.  Ses  chefs  spirituels  ont  actuellement 
une  autorité  plus  grande  et  mieux  reconnue  de  leurs  fidèles  ;  ils 
sont  soutenus  avec  plus  d'énergie  par  la  Cour  romaine,  et  de- 


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venus  plus  forts,  ils  peuvent  essayer  davantage.  Dans  ce  siècle 
l'Église  latine  a  eu  quelques  «  Évëqaes  »  vraiment  remar- 
quables; je  n'en  citerai  qu'un  :  la  longue  administration  de 
Mgr  Hillereau,  par  exemple,  laissera  des  traces  durables  et  des 
institutions  utiles  ;  il  a  organisé  te  diocèse  et  lui  adonné  toutes 
les  œuvres  nécessaires. 

Ce  n'est  pas,  remarquons-le  bien,  que  les  Vicaires  aposto- 
liques patriarcaux  d'aujourd'hui  puissent  beaucoup  faire  par 
eux-mêmes.  Les  mêmes  causes  qui  ont  empêché  l'action  de 
leurs  prédécesseurs  entravent  aussi  la  leur.  La  plus  grande  par- 
tie du  clergé  qui  dessert  les  églises  ne  leur  appartient  pas  direc- 
tement; je  n'en  veux  pour  preuve  que  ce  fait  :  sur  cent  vingt- 
quatre  prêtres  latins  qui  sont  à  CP,  il  n'y  a  que  vingt-six 
prêtres  séculiers,et  encore  sur  ces  vingt^iiv  il  n'y  en  a  que  trois 
qui  soient  indigènes  et  appartiennent  iifciînocèse  ;  les  autres  vien- 
nent de  l'étranger  ou  des  lies.  Quant. aux  quatre-vingt-dix-huit 
prêtres  réguliers,  ils  sont  des  auxiliaires  utiles  et  puissants, 
mais  ils  ont  leurs  supérieurs  et  c'est  de  cette  autorité  qu'Us  at- 
tendent leur  direction.  Ne  nous  étonnons  donc  pas  si  l'initia- 
tive du  bien  est  venue  surtout  de  ce  côté  ;  ils  ont  pour  eux  le 
nombre,  la  position  acquise,  la  force  de  la  tradition.  Les 
évêques  l'ont  compris,  et  avec  une  sagesse  qui  les  honore,  bien 
loin  de  se  montrer  tracassiers  à  l'égard  des  religieux,  ils  ont 
été  généralement  bienveillants,  et  ils  ont  reçu  avec  reconnais- 
sance une  aide  dont  ils  ne  pouvaient  se  passer. 

Du  reste  la  position  de  ces  Vicaires  apostoliques  est  singu- 
lière ;  bien  que  revêtus  du  caractère  épiscopal  et  d'une  autorité 
€  ordinaire  »,  bien  que  reconnus  comme  prélats  par  leurs  fi- 
dèles, et  même  respectés  en  cette  qualité  par  les  infidèles,  ils 
n'ont  cependant  aucune  place  dans  la  hiérarchie  civile  et  ne 
peuvent  avoir  aucune  relation  directe  avec  le  pouvoir  officiel. 
C'est  par  l'entremise  des  Ambassadeurs  que  doivent  passer 
toutes  leurs  communications  et  leurs  demandes.  Cela  les  met 
donc  dans  une  position  dépendante  et  inférieure,  à  certains 
égards,  tout  en  garantissant  mieux  la  liberté  de  leur  action. 
Ajoutez  à  cela  que  par  suite  de  circonstances  malheureuses  le 
Vicariat  n'a  presque  aucune  ressource  fixe.  Il  est  vrai  que  d'un 
côté  la  S.  C.  de  la  Propagande,  d'un  autre  les  diverses  œuvres 
catholiques,  et  enfin  le  G-ouvernement  français  viennent  à  son 


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—  539  — 

aide  ;  mais  ce  n'en  est  pas  moins  une  existence  précaire  et  ma] 
assurée.  Malgré  tout  le  Vicariat  jouit  d'une  grande  considéra- 
tion et  il  exerce  sur  les  fidèles  une  sérieuse  influence. 

Le  clergé  qui  donne  à  l'évèque  un  concours  cordial  et  actif, 
manque  de  cohésion.  Jusqu'ici  il  n'y  avait  pas  à  CP.  de  sémi- 
naire proprement  dit,  on  ne  conçoit  même  pas  très  bien  com- 
ment on  aurait  pu  songer  à  former  un  clergé  indigène  séculier, 
puisque  l'on  n'aurait  pa.s  eu  d'occupation  à  lui  donner  ;  mais  à 
présent  qu'il  y  a  des  paroisses  séculières  le  besoin  d'un  clergé 
local  se  fait  sentir,  et  par  suite,  celui  d'un  séminaire  pour  le 
former.  On  ne  peut  songer  à  envoyer  à  Rome  tous  les  sujets 
dont  on  a  besoin  et  l'on  ne  peut  se  contenter  des  prêtres  venus 
du  dehors  avec  de  la  bonne  volonté  sans  doute,  mais  ne  possé- 
dant pas  toujours  toute',  les  qualités  de  science  et  de  caractère, 
nécessaires  au  bien  à  nf^Ç-époque.  C'est  pourquoi,  sans  songer 
à  établir  un  séminaire  pour  eux  seuls,  les  Vicaires  patriarcaux 
ont  encouragé  lea  séminaires  de  St-Benolt  et  de  St-Louis.  Es- 
pérons que  ces  établissements  donneront  au  diocèse  des  prêtres 
instruits  et  pieux  capables  de  faire  du  bien  aux  âmes. 

Quant  aux  religieux  curés,  on  ne  peut  nier  qu'ils  ne  s'oc- 
cupent avec  conscience  de  leurs  fonctions  curiales  :  ils  tiennent 
à  leurs  paroissiens  et  leur  administrent  exactement  les  sacre- 
ments, seulement  la  même  cause  qui  a  neutralisé  leurs  efforts 
dans  le  passé  pèse  sur  eux  encore  aujourd'hui.  La  difficuUé  de 
se  recruter  que  les  noviciats  religieux  éprouvent  et  le  manque 
de  choix  dans  les  sujets  qui  composent  les  missions,  rendent 
leur  ministère  moins  effectif.Les  supérieurs  majeurs  ne  peuvent 
faire  davantage,  les  supérieurs  locaux  utilisent  de  leur  mieux 
les  sujets  qu'on  leur  donne,  mais  ils  avouent,  les  uns  et  les 
autres,  qu'ils  désireraient  vivement  quelque  chose  de  mieux 
encore.  Quelques  religieux  ont  fait  de  grands  progrès  en  ce 
sens,  espérons  que  les  autres  ne  resteront  point  en  arrière. 

Il  faut  cependant  reconnaître,  pour  être  juste,  que  le  clergé 
n'a  pas  perdu  son  temps,  depuis  quelques  années.  Les  œuvres 
se  sont  multipliées  d'une  façon  merveilleuse,et  le  «  diocèse  >  de 
Gonslantinople  ne  le  cède  à  aucun  diocèse  du  monde,  ni  pour  le 
nombre  des  prêtres,  ni  pour  celui  des  religieux,  ni  pour  les 
écoles,  les  hôpitaux  et  les  institution^  de  charité.  On  peut  dire, 
comme  nous  l'avons  remarqné,qu'il  ya  eu  depuis  cinquante  ans 


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—  540  — 

à  CP.  une  floraison  catholique  merveilleuse.  Partie  des  Laza- 
ristes et  de  Str-Benoit,  elle  se  continue  toujours  ;  tous  les  prêtres 
séculiers  ou  réguliers  rivalisent  de  zèle  et  d'efforts. 

Les  écoles  élémeataires  reçoivent  une  population  innom- 
brable, les  collèges  de  garçons  et  de  filles  sont  nombreux  et 
bien  fréquentés  ;  les  enfants  reçoivent  partout  une  instruction 
en  rapport  avec  les  exigences  du  temps  et  les  nécessités  de  leur 
avenir.  On' peut  donc  dire,  ea  résumé,  que  ceux  qui  gouvernent 
ont  fait  leur  devoir  et  l'ont  fait  largement,  et  qu'ils  tiennent 
bien  leur  place  à  la  tète  de  la  Latinité. 

Mais  si  du  clergé  nous  en  venons  au  peuple,  comment  pour- 
rons-nous l'apprécier?  Impossible  de  le  juger  en  un  seul  bloc. 
Il  se  compose  en  effet  de  deux  parts  sans  cohésion  entre  elles, 
les  t  Raias  »  ou  chrétiens  indigène^,  l't  les  étrangers,  conser- 
vant leur  nationalité  propre,  Fraiiffif^i  Italiens,  Autrichiens, 
Anglais,  Hellènes,  etc.  C'est  là  pour  1  Église  catholique  une  aulre 
cause  de  faiblesse  et  d'infériorité.Les  Baïas  eux-mêmes  ne  sont 
pas  uns,  quelques-uns  en  effet  appartiennent  à  d'anciennes  fa- 
milles galatiotes  ou  pérotes,  ou  même  viennent  originairement 
des  Iles  grecques,  mais  depuis  de  longues  années  sont  fixés  à 
CP.,  les  autres  viennent  en  ville  'seulement  pour  chercher  le 
moyen  d'amasser  de  l'argent,  sans  avoir  la  pensée  de  s'y  fixer. 
Les  premiers  forment  seuls  la  population  sérieuse  sur  laquelle 
on  peut  compter.  C'est  sur  ces  chrétiens  fixés  dans  le  pays, 
comme  dans  leur  patrie,  que  l'on  peut  s'appuyer  pour  le  bien. 
Quant  à  la  population  levantine  flottante,  si  nombreuse  dans 
toutes  les  villes,  il  faut  bien  s'en  occuper,  mais  il  ne  faut  pas 
s'attendre  à  recevoir  d'elle  une  aide  bien  efficace.  L'important 
est  que  l'on  puisse  ta  préserver  des  mauvaises  influences. 

Restent  donc  les  européenî  proprement  dits  ;  mais  parmi 
ceux-là  il  faut  encore  faire  une  distinction  essentielle;  les  uns 
sont  fixés  dans  le  pays  depuis  longtemps,  parfois  depuis  plu- 
sieurs générations,  ceux-là  sont  assimilables  aux  pérotes  vrais, 
et  forment  avec  eux  la  meilleure  partie  de  la  population.  Les 
autres  viennent  en  Orient  pour  leurs  affaires;  parmi  eux  il  s'en 
trouve  de  fort  bons,  qui  ont  apportC'  avec  eux  les  idées  reli- 
gieuses et  les  habitudes  des  œuvres  de  l'Occident,  ceux-là  ont 
été  pour  la  Latinité  un  puissant  secours,  ils  lui  ont  même  im- 
primé une  impulsion,  dont  on  a  dit  que  les  levantins  peuvent 


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—  641  — 

difficilement  avoir  l'initiative.  Mais  parmi  les  étrangers  beau- 
coup n'ont  que  de  mauvais  principes  et  des  habitudes  déplo- 
rables ;  ils  ont  iioportë  dans  le  Levant  les  idées  d'irréligion  ou 
tout  au  moins  d'IndifTêrence  qu'ils  avaient  dans  leur  patrie,  et 
malheureusement  ils  sont  trop  écoutés  par  les  gens  du  pays.  Il 
faudrait  donc  savoir  éliminer  les  mauvais  éléments  et  grouper  les 
bons  ;  mais  ici  le  sentiment  de  la  nationalité,  si  beau  et  si  noble 
en  lui-même,  devient  un  obstacle.  Chaque  nation  n'est  pas  as- 
sez nombreuse  pour  avoir  ses  œuvres  à  elle  seule,  et  chacune 
craint  de  se  mêler  aux  autres.  Il  faudrait  que  le  clergé  fît  plus 
d'efforts  pour  amener  la  fusion  des  esprits,  au  moins  sur  le  ter- 
rain de  la  religion  et  de  la  cbmté. 

Les  ambassades  étrangères,  officiellement  d'accord,  sont  na- 
turellement jalouses  de  l'inSuence  que  les  autres  peuvent  avoir. 
Quelques-unes  ont  mon*^peu  de  bienveillance  pour  le  privi- 
lège que  les  traités  accordent  à  la  France  de  protéger  les  Latins; 
elles  ont  même  gêné  son  action  autant  qu'il  leur  a  été  possible 
et  se  sont  appliquées  à  le  détruire,  soit  par  une  action  directe, 
soit  en  agissant  indirectement  aupri'S  de  la  Porte.  Malgré  cela 
cette  protection  est  encore  nécessaire  et  elle  se  maintient.  Les 
ambassadeurs  frani^ais  se  succèdent,  les  gouvernements  se  rem- 
placent, mais  les  traditions  restent  ;  on  comprend  à  Paris 
comme  à  CP.  que  le  rôle  de  protectrice  de  la  Religion  catho- 
lique que  la  France  remplit  dans  le  Levant  est  le  meilleur  fon- 
dement de  son  influence.  On  y  persiste  donc  toujours.  On  com- 
prend aussi  à  Rome,  malgré  certaines  tendances  contraires,  que 
cette  protection  de  la  France  est  non  seulement  utile,  mais 
encore  nécessaire  ;  aussi  les  Papes  et  le  Pape  actuel,  plus  vigou- 
reusement encore  que  ses  prédécesseurs,  l'ont  maintenue  tou- 
jours. Je  n'en  veux  pour  preuve  que  les  instructions  que  la  S.  C. 
de  la  Propagande  a  récemment  adressées  aux  évêques  et  aux 
missionnaires  qui  dépendent  d'elle.  On  désirerait  seulement  que 
cette  protection  fût  plus  effective,  tout  en  reconnaissant  que  les 
missionnaires  eux-mêmes  rendent  quelquefois  son  exercice  bien 
difficile. 

Ceux  qui  ne  font  que  passer  dans  le  Levant,  on  môme  ceux 
qui  tout  en  y  résidant  ne  cherchent  pas  à  se  rendre  compte  do 
la  réalité,  se  demandent  ce  que  fait  l'Ëglise  et  quelle  est  sa  po- 
sition dans  les  flmes.  A  cette  question  nous  pouvons  répondre 


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_  542  ~ 

avec  franchise  :  l'Église  se  maintient,  elle  maintient  parmi  ses 
enfants  les  croyances,  les  traditions  et  les  pratiques  chré- 
tiennes. Ce  n'est  pas  à  dire  assurément  que  tous  les  catholiques 
de  CP.  soient  fervents,  hélas  !  plusieurs  se  laissent  entraîner 
par  les  exemples  et  les  doctrines  qui  viennent  de  l'Occident, 
mais  la  masse  reste  fidèle.  L'Église  fait  même  quelques  con- 
quêtes, et  plusieurs  qui  sont  venus  chercher  la  fortune  ont  em- 
porté la  foi.  Les  prêtres,  il  est  vrai,  se  plaignent  d'une  certaine 
diminution  de  ferveur  chez  leurs  paroissiens,  mais  où  troave- 
t-on  aujourd'hui  des  prêtres  qui  ne  se  plaignent  pas  ? ,  On  re- 
proche aux  chrétiens  du  pays  leur  manque  d'initiative  pour  le 
bien  et  l'on  dit  que  c'est  du  dehors  qu'a  dû  venir  l'impulsion 
pour  les  œuvres;  mais  n'ont-ils  pas  le  droit  de  répondre  qu'ils 
ont  eu  du  moins  le  mérite  de  eompiéndre  cette  impulsion  et  de 
la  suivre?  Ils  ajoutent  qu'il  nous  e^V^cile  h  présent  de  parler 
des  œuvres,  puisque  nous  en  avon,3  la-  liberté  ;  mais  que  pen- 
dant des  siècles  ils  ont  soutenu  des  combats  incessants  et  d'au- 
tant plus  méritoires  qu'ils  étaient  inconnus  des  hommes,  et 
qu'ils  ne  pouvaient  aboutir  à  aucun  autre  résultat  que  de  main- 
tenir à  la  chrétienté  une  vie  précaire.  Ils  y  ont  réussi  k  force 
de  sacrifices  :  avouons  qu'ils  ont  fait  une  bonne  œuvre. 

On  nous  adressera  encore  une  question  :  l'Église  catholique 
exerce-t-elle  une  grande  influence  dans  le  pays  ?  Â-t-elle  contri- 
bué à  préparer  l'union  des  esprits  et  des  cœurs  ?  A  cette  ques- 
tion nous  pouvons  répondre  que  son  influence  est  sensible, 
beaucoup  plus  grande  que  ne  le  ferait  supposer  le  petit  nombre 
de  ses  adhérents.  Indépendamment  des  nationalités,  les  catho- 
liques tiennent  une  grande  place  à  Constantinople,  par  leurs 
écoles  et  par  leurs  œuvres.  Ils  ont  maintenu  dans  l'union  les 
Arméniens,  au  milieu  de  toutes  les  persécutions  dont  cette  na- 
tion a  été  l'objet,  ils  l'ont  guidée  au  milieu  des  tentatives  de 
schisme.  Quant  aux  schismatiques,  grecs  orthodoxes  ou  armé- 
niens grégoriens,  nous  ne  pouvons  pas  dire  que  nous  faisons 
parmi  eux  des  conquêtes  sensibles  ;  cependant  nous  recevons 
beaucoup  de  leurs  enfants  dans  nos  écoles  :  ils  y  apprennent  à 
nous  connaître,  à  nous  estimer  et  même  à  nous  aimer  ;  mais 
on  ne  leur  demande  pas  le  sacrifice  de  leur  religion,  et  généra- 
lement ils  sortent  de  nos  écoles  avec  la  même  foi  qu'ils  y  avaient 
apportée  ;  avons-nous  perdu  notre  temps  avec  eux,  au  point  de 


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—  543  — 

vue  religieux?  Non  certes;  ils  ODt  perdu  leurs  préjugés,  ils 
coanaissent  ootre  fol.  S'il»  n'ont  pas  fait  encore  le  pas  décisif 
qui  les  amènera  à  l'unité  complète,  ils  ont  au  moins  diminué  la 
distance  qui  nous  séparait  :  un  jour  viendra  sans  doute  oh  tous 
se  réuniront  dans  la  même  foi  comme  ils  ont  été  unis  dans  la 
même  vie. 

Les  Églises  orientales  elles-mêmes  ont  proâtè  de  la  présence 
de  l'Église  latine.EUes  s'en  sont  rapprochées  en  plusieurs  points 
et  lui  ont  empranté  diverses  pratiques.  De  plus  l'émulation  les 
3  portées  à  faire  pour  leurs  écoles  et  pour  leurs  œuvres  ce 
qu'elles  voyaient  chez  nous  ;  de  ce  côté  encore  nous  avons  fait 
un  bien,  indirect  mais  réel.  Je  ne  parle  pas  évidemment  des  mu- 
sulmans inattaquables  ù  Constantinople,  comme  ailleurs.  Ka 
somme  la  Latinité  tient  sa  place  comme  religion  et  elle  remplit 
toujours  son  rôle  coni^  représentant  de  la  civilisation  occi- 
dentale. 

Ce  n'est  pas  néanfnoins  une  situation  dont  nous  puissions 
nous  contenter  absolument  ;  nous  avons  d'autres  désirs,et  nous 
entretenons  d'autres  espérances.  11  faudrait  que  la  Latinité  pût 
prendre  hautement  la  première  place  dans  notre  société  et  y 
exercer  l'influence  à  laquelle  lui  donne  droit  la  possession  com- 
plète de  la  vérité  ;  elle  réaliserait  ainsi  tout  le  bien  que  lui  per- 
mettent les  ressources  dont  elle  dispose  et  les  sacrifices  qu'elle 
impose  à  ses  prêtres  et  à  ses  religieux.  Mais  comment  amener 
ce  résultat  î  Nous  avons  tout  ce  qui  est  nécessaire  comme 
œuvres  de  préservation  et  de  charité,  nous  pouvons  instruire 
nos  fidèles  et  les  armer  sulTisamment  contre  l'erreur  ;  mais 
sommes-nous  armés  suffisamment  pour  la  conquête  ?  et  n'ou- 
blions-nous pas  qu'une  religion  qui  ne  fait  pas  de  prosélytes 
nouveaux  est  une  religion  destinée  à  disparaître  ? 

Il  faudrait  donc  aborder  résolument  ces  hautes  et  difiîciles 
questions,  mais  comment  y  réussir  ? 

Au  XVI'  siècle,  même  au  xvii*  la  division  entre  les  chrétiens 
orientaux  et  les  Latins  était  moins  tranchée.  Les  Grecs  orttio- 
doxes  et  les  Arméniens  grégoriens  ne  craignaient  pas  de  fré- 
quenter nos  églises,  ils  nous  invitaient  à  officier  et  à  prêcher 
dans  les  leurs.  Aujourd'hui  il  n'en  est  plus  ainsi  :  surtout 
depuis  la  proclamation  de  l'indépendance  de  la  Grèce,  la  religion 
est  derenue  comme  le  palladium  de  la  nationalité  et  toute  in- 


DigilizPdbvGoO^le 


—  544  — 

cursion  sur  ce  terrain  est  considérée  comme  une  attaque  aux 
plus  nobles  sentiments  patriotiques.  Devenir  catholiques  leur 
paraîtrait  abandonner  la  patrie  hellénique  ou  les  espérances 
nationales  de  rArménie.  Il  faut  donc,  pour  se  rencontrer  amica- 
lement, et  exercer  sur  eux  une  influence  sérieuse,  trouver  an 
terrain  neutre.  Mais  lequel?  Peut-être  serait-ce  celui  de  la 
science. 

Les  orientaux  ne  craignent  pas  d'envoyer  leurs  enfunts  à  nos 
petites  écoles  et  à  nos  collèges,  on  y  ébauche  un  rapproche- 
ment :  ne  serait-il  pas  possible  de  le  compléter  en  ouvrant  une 
école  d'enseignement  supérieur,  ou  bien  en  s'adressant  par  la 
voie  de  la  presse  périodique  aux  intelligences  plus  cultivées  ? 
Ne  pourrait-on  pas  leur  montrer  ainsi  que  leurs  préjugés  ne  sont 
pas  fondés  et  qu'Us  seront  encore  plus  forts,  comme  Grecs  ou 
Arméniens,  en  s'nnissant  plus  intig^ient  à  leurs  frères,  les  ca- 
tholiques? Ne  pourrait-on  pas  leur  faire  Toir  que  la  reconnais- 
sance de  la  Suprématie  pontificale,  loin  de  leur  ôter  de  leur 
liberté,  donnerait  un  nouveau  fondement  à  leur  dignité  et  à  leur 
indépendance  nationale  ?  Y  a-tril  d'autres  moyens  d'amener  ce 
résultat  ?  Nous  ne  pouvons  croire  que  la  parole  du  Christ  soit 
fallacieuse  et  nous  espérons,  suivant  sa  promesse,  qu'un  jour 
viendra  où  il  n'y  aura  plus  qu'w"  seul  bercail  et  nn  seul 
pasteur. 

Nous  savons  que  ces  pensées  occupent  sérieusement  l'esprit 
du  grand  Pontife  qui  préside  aux  destinées  de  l'Église,  tel  est 
son  désir  hautement  manifesté  en  mainte  occasion.  Nous  atten- 
dons avec  confiance  les  mesures  qu'il  prendra  pour  amener  ce 
résultat  et  nous  les  seconderons  avec  toute  la  bonne  volonté  et 
l'énei^ie  dont  nous  sommes  capables.  C'est  l'ambition  des  ca- 
tholiques latins  du  Levant  et  celui  qui  a  contribué  à  faire  pa- 
ralfre  ce  travail  sera  heureux  s'il  peut  ajouter  une  page  glorieuse 
à  l'Histoire  de  la  Latinité  de  Gonstantinople. 


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TABLE   DES   MATIÈRES 


Introducjion  à  la  nouvelle  édition .     .     .      5 

AvertÏBsenieDt  de  .l'auteurv-  ■  ....     11 

.PREFERE  PARTIE. 

La  Latinité  de  CenstaptinOpIe  dans  la  ville  proprement  dite, 
'jusque  et  après  la.  conquête  ottomane  _  .     .     ■     ■■_......  1^ 

Chapitre  i.  —  Latinité  de  CP.  pendant  le  Bas-Empirr.  Con- 
cessions pisanes,  vénitiennes,  génoises 15 

Chapitre  II.  —  La  conquête  latine  de  CP.  (1201-1261.)  Les 
Empereurs,  le  clergé  et  les  Patriarches,  les  tentatives  d'u- 
nion entre  les  deux  Eglises 41 

CïiAPiTRE  III.  —  Restauration  byzantine  {1S61-1453.)  Prédo- 
minance génoise,  luttes,  travaux  pour  l'union  des  jlglises.    91 

Chapitre  IV.— latinité  de  Stamboul  (1453-1635.)  S.te-Marie, 
St-Niçoias,  ..  ..•  .  ......     .     .     .     .     .    ,.     .     .     ,  110 


DEUXIÈME  P.AIÎTlft.""    , 

LatinUé  de  Galata-Péra  (126H783.)    ...    .     .    .   -,    .    .121 

Chapitre  I. — Tot)ographiB  historique  de  Galata  (1103-186.4.) 

Les  diverses  enceintes,  les  murailles^  les  églises.  .  .  .  1S3 
ChapïtHe  II.  -La  <  Magnifie»  Gomunilà  di  Péra  »(1453-1682.) 

Organisation  municipale,  protection  de  la  France.  ...  165 
■'•-'■     ■■     ■^■35--    ."- 


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—  546  — 

Chapitre  III.—  St-Françoia  (1220-1696.)  Les  Frères  Mineurs 
Conventuels  ou  Cordeliers 187 

Chapitre  IV.  —  St-Paul,  St-Pierre  (  1232-1535-1838.  )  Les 
Frères  Prêcheurs  ou  Dominicains,  (Jacobins) 213 

Chapitre  V. — St- Benoit.  Les  Pères  de  la  Compagnie  de  Jâsus, 
ou  PP.  Jésuites.  (1583-1773.) 232 

Chapitre  VI.— Sto-Marie  Drapéns(158&-1803.)  Les  Frères 
Mineurs  de  l'Observance.  (1445.)  Les  Riformati.  (1&12.) 
Terra-Santa :    ".     .  271 

Chapitre  VII.  —  St-Georges,  St-Louis.  Les  Frères  Mineurs 
Capucins  de  Paris.  (1626-1792.) 285 

Chapitre  VIII.  —  Les  églises  aujourd'hui  disparues.  1*  Ste- 
Anne;  2>  St-Michel  ;  S*  St Jean-B^ctiate  ;  4*  Ste-Irène  ; 
5*  St-Sébastien  ;  6"  Ste-Claire  ;  7"  V,^4e-Trinité  ;  8»  Con- 
grégation de  S  t-Je  an -Baptiste  ;  9*  L^  Ba^e  et  ses  églises  ; 
10*  St-Jean-Chrysostomc.     ...  - 316 

Chapitse  IX.  —  Organisation  ecclésiastique  de  la  Latinité. 
(1453-1789.)  Vicaires  patriarcaux,  Évëques  suffragants, 
Vicaires  apostoliques  patriarcaux 347 


TROISIEME  PARTIE. 

État  actuel  de  la  Latinité.  (1783-1893.) 363 

CtTAPiTRE  I.  —  Gouvernement  ecclésiastique  et  organisation 
paroissiale,  population  catholique 365 

Chapitre  II. —  Paroisses  séculières.  l*Le  St-Esprit;  2*Kadi- 
Keui  ;  3"  Scutari 380 

Chapitre  Ilf.  —  Paroisses  Régulières.  1*  Paroisses  des  PP. 
Conventuels;  2'  paroisses  des  PP.  Dominicains;  3*  pa- 
roisses des  PP.  Riformati  ;  4*  paroisses  des  PP.  Capucins.  391 

Chapitre  IV.  —  Communautés  religieuses  d'hommes  (non 
paroissiales).  Écoles  de  garçons.  1"  Prêtres  de  la  Mission 
(Lazaristes);  2"  PP.  Jésuites;  3*  PP.  Aoigaslins  de  l' As- 
somption ;  4*  PP.  Capucins  de  Kadi-keui  ;  5"  Frères  des 
Écoles  chrétiennes  ;  6*  FF.  Maristes.  Récapitulation  géné- 
rale du  Clergé.  Tableau  des  écoles 428 


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—  547  — 

Chapitre  V.—CommunautéB  religieuses  de  FemineB.  1°  Filles 
de  la  Charitâ  ;  2'>  Sœurs  de  N.-D.  de  Sîon  ;  3<>  Sœurs  de 
l'Itnmaculée-Ooncepiioii  d'Ivrea;  4*  Sœurs  Franciscaines 
de  Gémona  ;  5*  Sœurs  Dominicaines  de  Mondovi  ;  6*  Sœurs 
Oblatesde  l' Assomption  ;  7*  Sœurs  Franciscaines  de  Calais, 
(Gardes-malades)  ;  8*  Petites  Sœurs  des  Pauvres.  Écoles 

de  filles.  Récapitulation 456 

Chapitre  VI.  —  Œuvres  de  Charité  inspirées  de  St  Vincent. 

Laïques 484 

Chapitre  VII.  —  H^itaux.  Anciens,  Nationaux,  Religieux.  497 
Chapitre  VIII.  —  Les  cimetières,  histoîrfl,  état  actuel.  .  .  506 
Épilogue 532 


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U  on  treuil -sur -Mer.  —  Inip.  N.-I).  îles  Piés.  —  Ern.  Duquat,  diietleur. 


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Montreuil-sur-Mer   -  liiip.  N.-U.  des  PrÉs-  -  Ern.  Duquat,  direoleur. 


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