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Full text of "Histoire de la Réformation de la Suisse .."

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FROM  THE  LIBRARY  OF 
REV.  LOUIS  FITZGERALD  BENSON.  D.  D. 

BEQUEATHED  BY  HIM  TO 
THE  LIBRARY  OF 
PRINCETON  THEOLOGICAL  SEMINARY 


Division  ■ 
Seclio.  SrP; 

"/H/ 


H  ï  s  T  0/«' 

^^•/i^-  DEL 
//CZt^^  DELA 

SUIS  SE, 

5a  Ton  voit  tout  ce  qui  s'eft  paffé  de  plus 
remarquable  >  depuis  l'An  1 5 1  jufqu'ea 
l'An  155^.,  dans  les  Eglifes  des  XIII. 
Gantons,  des  Etats  Coxfederez  ^ 
qui  compofent  avec  eux  le  L.  Corps 

Hel  V  E  T  1  QJJE.^^^ 

P^r  ABRAHAM  RUCHAT^M.  D.  S.  E. 
&  Professeur  en  Belles  Lertres  dans 
l'Académie  de  Lausanne. 

TOME  QJJATRIE'ME. 


A    G  E  N  E  V  E  5 

Chez  MARC-MICHEL  B0US<^JET  et  CoMp, 

M  D  c  c  X  X  V  X  I  r, 


SOMMAIRE 


D  U 

NEUVIEME  LIVRE. 

I.  /Commencement  de  Réformatisn  j 

dans  le  Pays  de  Vaud.  Let- 
tre de  G.  Farel  a'ti  Afmiftre  André, 
Fard  prêche  a  Avenche  3  &  court  rif- 
que  d'y  être  mal-traité.  Lettre 
du  Confe'il  de  Berne  a  ceux  /Aven- 
che. Lettre  de  fEvêque  deLm- 
fanne  aux  mêmes.  Commencement  de 
Réjormatïon  a  Avenche.  Les  Fri- 
bourgeois  s'y  oppofent,  Difpure  de 
Farel  avec  un  Moine,  Dépuration  de 
Berne  a  Friùourg ,  &  a  Avenche, 

II.  Traite'  de  Berne  avec Fii^ 
bourg  fur  la  Religion  de  leurs  Sujets 
communs.  Commencement  de  Réfor- 
mat  ion  a  Oibe.  Un  F,  Mineur  y 
prêche  vivement  contre  Us  Réformez  i 
eft  infulté  p,:r  un  Réforme,  Tumulte 
a,  cette  occafion.  Farel  y  eft  mal-reçu, 
Chef^  d'accufarionsj  contre  le  Afoine, 
&  (es  Réponfes.  Il  efi  condamné 
à  prouver  fa  doctrine  par  [^Ecriture y 
&  s'évade,  Farel  vouLm prêcher  neft 
point  écouté, 

A  2  III.Fa- 


SOMMAIRE 

1531.     III.  Farel  prêche  enfin  à  Orbe^, 
mais  eft  troublé  dans  fa  prédication.  La 
Réforme  y  efi  vivement  traverfce  par 
les  Piêîres  &  par  le  Confeil  j  & 
fotitenu'e  par  leshtmo'is,  Farelyprê-. 
che  fix  jours  de  fuite,  Hiftoïre  de  P. 
ViRET,  &  i/^G.  GrivaTj  au-*, 
ire  Ailniftîe,  auffi  natif  d'Orbe.  Excès 
des  Réformez  d'Orbe.  Prémiére  Ccne\ 
Réformée  a  Orbe.   Nouveaux  excès 
des  Réformez»  Commencement  de  Ré- 
formât ion  a  Payerne  3  vivement  tra^ 
verfé.  Députez  de  Berne  a  Avenche 
&  a  Paterne >  tour  y  foutenir  laRé^i 
formation, 

IV.  Granson.  Farel  y  prêche^ 
&  court  rifque  de  la  vie,  Députa- 
tion  de  Berne,  Nouveau  tumulte 
caufé  par  le  zélé  impétueux  de  Fareh 
Réformation  a  Fye  &  en  quelques  au- 
tres Villages,  Nouveau  tumulte  a 
Orbe.  Hifloire  ^^I.  Hollard. 

V.  Retraite  de  quelques  Rehgieufcs 
d'Orbe.  Géiiérofité  du  Prin.e  d'Oran- 
ge envers  quelques  Bernois.  Nouveau 
tumulte  &  Nouveaux  excès  des 
Réformez  a  Orbe,  Réflexions  fur  a 
fujet.  Tumulte  a  Granfon ,  caufé  pat 
les  femmes  Catholiques,  Excès  des  Ré- 
formez de  cç  liçH  la^  Difficulté  erttrt 


D  U   Liv.  IX. 

Be'rjÎe  &  Fribourg  au  fujetl 
des  ydlages  Réformez  du  Balli^ge  de 
GranTon.  Tumu-te  a  Orbe  la  veille 
de  No'él^  caujé  par  les  Catholiques» 
Autre  A  Novalle  le  jour  de  No'ely 
caufé  par  les  mêmes, 

R  E  G  L  E  M  E  N  s  de  Bemc  &  de  j 
Fr.  bourg  ,  pour  la  Religion  de  leurs  fu- 
jets  communs.  Soins  des  SAgneurs  de 
Berne  pour  les  Villages  Ré  former  du 
BalUage  ^^Granfon. 

VI.  Pays  de  Vaud.  Son  état  à  j 
r  égard  de  la  Rdigion,  Moud  on 
paje  deux  Comédies  pieufes  ,  plus 
chèrement  que  plufieur s  Sermons.  Lau- 
sanne. Son  état  ^  a  l'égard  de  la 
Religion,  L'Evéque  fait  battre  de 
mauvaife  monnoye.  Mouv^emens  a  ce 
fujet.  Invité  a  la  Diète  de  f  Empire  ^ 
il  s'excufe  d'y  aller.  Il  propofe  en  vain 
un  Règlement  contre  la  Réfomation, 
Difficulté  entre  la  Fille  &  le  Chupi* 
tre.  Croifâde  publiée  contre  les  Turcs, 
L  Evêque  de  Sybn  e(l  confacré  a  Lau^ 
[amie, 

VIT.  Neuchatel.  Troubles 
d.tns  la  Ville  &  en  quelques  endroits 
du  pays,  au  fujet  de  la  Religion.  Tra^ 
vaux  de  Fard,  Le  Lieutenant  de  Va- 
lengin  y  traverfe  la  Réforme.  Soins 
A  5  des 


s  O  MM  A  î  U  E 

Ï  S3Ï»  ^'^^  Seigneurs  de  Berne  pour  les  Re- 
fermez de  Neuchatel  &  de  Valengin. 
Hommage  nouveau  prêté  a  U  Comteffe 
de  Neuchatel,  Réglemens  nouveaux. 
Farel  mal-traité  a  S.  Blaife  eft  pro- 
tégé par  les  Bernois.  Reformation  a  4a 
Eole  &  a  la  Grate.  Difficulté  des 
Bernois  avec  la  Comteffe  de  Neuchatel 
pour  un  Couvent, 

VIII.  Mouvemens  pour  &  con- 
tre la  F.éformation  a  Moutiers  Grand- 
Val.  Difficulté  entre  ceux  de  Mou- 
tiers  &  le  Chapitre,  Soins  des  Ber» 
fîois  pour  Ils  Réformez-  Le  Chapitre 
efi  protégé  par  l'Etat  de  Soleurre. 
Les  Bernois  règlent  la  Penfîon  des 
A4':nifîres.  Troubles  au  fujct  d'une 
Eglife,  Accommodement  entre  les 
parties.  Nouveaux  efforts  des  Bernois 
auprès  des  Chanoines. 

IX.  Genève.  La  Sentence  de  Fayerne 
neji  pas  exécutée.  Alliance  renouvelléz 
a-vet  Berne  Fribnurg.  Néj^ociations  dt* 
Duc  pour  rompre  cette  Alliance.     On  for- 

I  Ç  3  2 .  ^  'h^^   s.  Gervais.    Proportions  des  Bernois. 

Réponfe  conrageufe  des  Genevois.  Vifions. 
Genève  ejh  en  grand  danger.  Projet  ac- 
co-inme dément  rejetté  par  les  Genevôis.  Les 
deux  Villes  fe  rtivifent  oi  faveur  deGeneve, 
Négociations  des  Bernois  en  fa  faveur  au- 
près du  Duc.  Les  Cantons  refufent  dt  rc 
nouveller  leur  Alliance  avec  lui:  Semcrv 
ce  de  Réformatim  À  Genève. 

HISTOIRE 


HISTOIR  E 

DE  LA 

REFORMATION 

DELA 

SUISSE, 

LIVRE  NEUVIEME. 

Qui  contient  ce  qui  ejl  arrivé 
dans  la  S  u  i  s  s  £  R  o  M  A  N- 
Dfi,  CAn  M  D  XXXI. 

^^^^  Andis  que  la  Suifle  Aile-  '  Com* 
'  i|  mAïide  étoit  dans  le  trou-  mence- 

\  -1  ble,  dans  l  agitation  &  "^Fî^^ 

L.    _    J  dans  les  mouvemens  de  rration 
la  guerre  ^  h  Suifle  Romande  y  plus  dans  le 
tranquille,  proficoic  des   foins  &  ^'^y^ 
des  travaux  de  G  u  i  l  l  a  u  m  e 
A4  Fa- 


8    Hîjlohe  de  la  Reformât  ton 

I53Î.FAREL5  de  Pierre  Viret, 
I^C\.m-  de  quelques  autres  Miniftres 
ment^de  ^^^^^  ^  pieux  ,  pour  recevoir  la 
Rétor-  lumière  de  la  dodtrine  Evangeli- 
mation  que  ;  de  forte  qu'on  vit  cette  an- 
dans  le  x-iQQ  la  Réformation  s'introduire,  6c 

de    »  Al  1 

Va  UD.  ^  avancer  rr.eme,  dans  quelques  en- 
droits du  Pays  de  Vaud  ,  comme  à 
^veuche ,  à  Paycrne  ,  &  fur  tout 
à  Orbe  de  à  Granfon, 

Fa.rel  fe  trouvoit  à' ^^(3^'/?f  au 
commencement  de  cette  année.  Se 
voyant  fcul ,  ou  à  peu  près,  dans 
le  Pays  de  Vaud,  a  prêcher  l'Evan- 
gile ,  il  écrivit  pendant  cette  année, 
à  diverfes  fois  en  France  »  pour 
en  faire  venir  des  Minières  5  qui 
le  fecondaflent  dans  cette  œuvre 
importante  :  Mais  il  eut  peine  a 
en  trouver.  Il  n'en  pût  guéres  ob- 
tenir 3  que  lors  que  la  perfécution 
de  France,  les  obligea  de  fedifper- 
fer.  Il  écrivit  cntr'autrcs  de  Mo- 
rat  à  Strasbourg ,  à  un  Miniftre  Fran- 
çois ,  nommé  André',  dit  For- 
tUiiAt  5  qui  cherchoit  de  l'emploi  , 
mais  qui  en  auroit  voulu  trouver 
un  tranquille  >  où  il  ne  fût 
point  expofé  à  la  perfécution.  Fa- 
relj  dis  je,  lui  écrivit  le  28.  Jan- 
vier 


de  la  SuijJe.LlV.iyi.  9 

vier  15^1.  pour  l'encourager  ave-  1531* 
nir  dans  le  Pays  de  Vaud  j  mais 
fans  lui  promettre  qu'un  Miniftère 
fatiguant  &  peu  lucratif.  On  ne 
-  fera  pas  fâché,  je  penfe  5  de  voir 
ici  un  fragment  de  fa  Lettre,  par- 
ce quelle  pourra  fervir  a  faire 
mieux  connoîrre  le  génie  de  ces 
tems  là. 

Fous  fouhaitez  de  favoir  ,  (  lui  dit-  Lettre 
il ,  )  fur  quel  pie  font  ici  les  affaires  ^-^^^^ 
du  Seigneur,  A  U  vérité  ,  elles  vont  ^jp.j-e^^' 
affez  bien  ,  en  comparaifon  des  tems  André, 
pajfeZ'  Plufieurs  notent  clairement  les 
fourberies  de  l^ Ante-Chriff ,  &  fon  a 
d^ ailleurs  une  grande  liberté  de  parler 
de  Jesv  S'C  h  r  I  s  t.  Mais  fi  l'on 
confidére  combien  il  refte  encore  de 
'  chemin  a  faire  y  &  combien  les  hum- 
mes  font  éloignez  de  la  pureté  ,  de 
[innocence  y  &  de  la  charité  ,  qui  doit 
être  entre  les  Chrétiens  5  que  vous  di* 
riez  bien  que  tout  va  mal  !  Il  lui 
dit  un  peu  plus  bas:  Cependant  U 
faut  que  le  laboureur  vhe  de  ce  quil 
A  chez  lià  y  tandis  qu'il  attend  U 
moiffon ,  ce  qui  eft  fort  difficile  main- 
tenant dans  ce  tems  de  difctce^  ,  où 
A  ^  l'on 
*  La  difette  étoit  fort  grande  cette  an- 
née là  tn  Suilfe,  aii/Ti  bien  qu'en  France. 
Voyez  M^3Leraiiat  l'aa  is^i.  p.  in.  ^lo. 


lO  Ht/loi  re  de  la  RJformation 

1531.  ^'^'^      /^^**^  4î^o/r  que  peu  et alimens 
Lettre  pour  be  Mcoup  d'argent.     Mais  je  jai 
de  Fa^el  ijiie  fi^fYe  Pére  Céh'fte  n  abandonne  r 
^"^^jj.^^"  j^m^/j  les  fiens.    Un  peu  plus  bas 
André,    encore  :  Ceux  qui  entrent  dans  cette 
carrière  s'expofnt  a  une  grande  épreu- 
ve :  Je  ne  veux  pas  vous  promettre 
des  Montagnes  d'ory  ayant  éprouvé 
moi-même  des  chofes  qu'on  auro  't  peine 
a  croire  de  la  part  de  bien  des  gensy 
qui  m'ont  tourmenté  en  diveifes  ma- 
nières 5  Cefi  pourquoi  mon  Fiére  5  fi 
vous  connoiffez  ^Jfcz  bien  Jésus- 
Christ  pour  pouvoir  renfe'gner  pu- 
l'ornent ,  fans  ces  vaines  controverfes  de 
l'Eau  (a)  ou  diiPain  (b)  ,  ou  des  Cen- 
fes  &  des  Dîmes  (c)  ,  en  quoi  quel- 
ques uns  font  confifier  le  Clniliianime  > 
fans  vouloir  propof  r  autre  ckofe  ,  fmon 
que  tous ,  aya-nt  renoncé  a  toute  impié- 
•    té  y  &  à  toute  injuflice  5  armez  de  la 
Foi  3  s'amajfcnt  un  thréfor  la-haut,  ou 
eft  J  E  s  u  s  -  C  H  R I  s  T     a  la  droite 
du  Pére  5  payant  a  chaque  Puijfance 
&  au  Glaive  y  ce  qu'il  lui  doit ,  foit 

Cenfes 

{^)&(,c)  Cela  regarde  les  controver-- 
Tes  des  Anabaptilles. 

{b)  Cefl:  la  controverfe  de  la  préfen. 
ce  réelle  du  Corps  du  Seigneur  dans 
rEuchaiiftic. 


de  la  Suijfe.  L  i  v.  I X.  XI 

CcnkSi  foit  Dîmes;  &  cela  non  feu-  1531. 
Icment  aux  impies  ,  fi  leSegneur  zeut  Farel. 
que  nous  foions  fournis  a  des  impies^ 
mais  auffi  aux  Seigneurs  pieux»  & 
même  a  ceux-ci  avec  une  affection  d'aU" 
tant  plus  grande ,  qu  ils  font  nos  Fré^ 
res ,  ne  travaillant  a  autre  cho^e  qua 
planter  une  foi  5  qui  fo  'it  opérante  par 
la  charité:  Difpojé  ^  dis-je  ^  de  cette 
manière,  &  ne  cherchant  que  les 
chofes  qui  font  en  haut  y  &  la  feule 
gloire  de  Jesus-Christ,  vous  pourrés 
vous  mettre  en  chemin  5  animé  a  por^ 
ter  la  Croix  qui  eft  a  la  porte.  Vous 
ne  devez  fus  vous  attendre  a  du  re- 
pos ,  mais  a  de  l'occupation  :  Fous  ne 
vous  repoferex  que  quand  vous  ferez 
lasy  &  vous  ne  moijfonnerez  point^que 
vous  najez  fcmé  a  vos  dépens,  [a) 

Le  mois  fuivant  Farel  alla  faire 
un  tour  à  Neuchatel ,  pour  revoir 
&  édifier  TEglife  ,  qu'il  y  avoit  Autres 
plantée  :  &  de  là  il  écrivit  encore  ^J^pX 
une  féconde  Lettre  (le  1 2.  Février)  rel  au 

au  même  Miniftre  ^w^fr/,  dit  For-^'?!^'^.^. 

j        ,         A  Miniltre 
îunat ,  dans  les  mêmes  termes  > 

pour  l'encourager  à    venir  en  ce 
Pays.    Mais  il  paroit  par  une  Let- 
tre fuivantCj  qu'il  lui  écrivit  encore 
A  ^  de 

(«)  Ex  Epijîçlis  Anecdot.  no. XVII. 


1 2  Hiftolre  de  la  K.éfoY'tr,atiûn 

1531.  de  Alorat ,  en  date  du  i  .Avril ,  q^ue 
Farel.  ce  Miniftre  étoic  arrê:é  par  deux 
confidérations  :  celle  de  fa  femme 
qu  il  ne  pouvoic  pas  quitter ,  &  • 
qu'il  ne  vouioic  pas  expofer  avec 
lui  à  la  perfécution  \  &  celle  de 
la  difette  j  n'ayant  pas  apparem- 
ment du  bien  ,  pour  pouvoir  prê- 
cher à  fes  propres  dépens.  Farel 
répondit  à  ces  deux  difficultez. 
Dans  la  fuite  ce  Miniftre  vint  au 
Pays  de  Vaud  ,  &c  vers  la  fin  de 
Tan  ou  au  commencement  de 

Tan  1537.  il  fut  établi  premier  Paf^ 
teur  de  l'Eglife  de  Cuïllj  6c  de  k 
ParoifTe  de  Fillette.    II  eut  un  fils, 
ou  petit  fils,  nommé  Nîcolus,  qui 
fut  Bourgeois  de  Laufanne ,  ôc  lié 
d'am.itié  avec  Benedict  Arctius  Pro- 
felfeur  en  Théologie  à  Berne,  qui 
lui  dédia  un  petit  Abrégé  de  ^ 
Théologie  ,  comme  on  le  voit  par 
une  Lettre,  datée  du  i.  Mars  1570. 
Farel     Mais  pour  revenit  aux  travaux 
prêche        p^^gj  .  n^^ni  de  fa  patente  de 
chcy  &  Berne,  il^alla,au  commencement 
court  ment 
ri  (que 

d'y  ctre  ^  Intitule  •  Examen  Thenlcftcum  Sec. 
"^^'.K  II  s'en  eft^fait  fix  Editions  dans  14.  ans. 
traite.  6e.  que  j'ai ,  a  été  faite  à  Marges  l'an 

Iy84.  par  Je.in  U' Preux. 


de  la  Suijje.  L I  v.  I X.  1.3 

rrent  de  Mars  prêcher  à  Avînche,  1531. 
(  qui  n'c-ft  qu'à  deux  petites  lieues  lard  à 
de  iVtorar.  )    Il  y  trouva  quelques  ^ven- 
perfonnes  difpofées    à  1  écouter  , 
mais  il  y  trouva  auffi  de  violen- 
tes opolitionsj  foit  de  la  part  des  ' 
gens  du  lieu  ,  foit  particulièrement 
de  la  parc  des  Prêtres  :  deforte 
que  le      de  ce  mois-là  j  qui  étoit 
un  Lundi ,  il  s'y  fit  une  e/pèce  de 
fédition    où   Farel  courut  rifque 
d'être  mal-traité.     Les  Seigneurs 
de  Berne  l'ayant  appris,  écrivirent 
à  la  Boargeoifie  d'Avenche,  la  Let- 
tre fuivanre  : 

NÔTRE  AMIABLE  SALU-  LETTRE 
T'A  T  I  O  N     DEVANT    MISE,  No-  ^^j' 

blçs  >  Saiges  &   Difcrefts  :  Ao/z^^^^'f/^ 
fommes  advertis  du  tumulte  &  incon-  ceux 
'ventant  quefl  advenu  Lundi  demie-  c^lAven- 
renient  pajfé  en  votre  Fille  contre  Mai-  ^  ^' 
tre  Guillaume  Farel  notre  Serviteur^ 
par  *  Fbuî  Prêtres ,  &  autres^  de  quoi    *  vos 
avons  grand  "f  regraicl  :  toutes  fois  f  regret. 
d\mpws  que  la  cboje  cft  ainfi  paffee, 
[uns  être  fair  outrage  au  dit  Farel, 
la'iffons  pour  ce  te  fois  ainfi  être:  Ce 
ne\inmor, gs  vous  prians  &  ires  acertes 
advertijfaus ,  ci  a'fres  y  mettre  ordre^ 
&  )  avoir  regard  3    que  '■  Nous  ,  . 

nous 


î  4  Hijloïre  de  la  Kéformation 

I  5  3 1  •  *  nous  Serviteurs -i  &  la  foi  de  Je  s  us- 
F^rd   à  Christ  notre  Sauveur  ne \foit  uinfi 
Q^^^'  perféqutée  >  ne  ceux  qu   U  annoncent 
^  nos    trou  lés  ne  motel} es  ^  aui rement  y  met' 
t  ims  ordre  nédjjui  e.    tt  p^r  ahifi 
cetix  qui  defir  rom  ouj-  la  vérité  tvan^ 
geltque  laîffes  a  npoji      en  paix  ,  & 
mcjmement  endurer ,  comme  vous  eftes 
en  vi^jiL'UY  de   ChrejUenne  obé.jfamt 
t7ire;u:s  ,  que  U  parole  de  Dieu  aye 
place  en  Fojîve  V.lle  ,  &  la  laijfer  an- 
t  portent  y^^^j^ç^y  ^  ^         ^  f^gf^x  qui  la  "t  pour- 
tent  &  défirent  :  En  (e  feiezvoftre 
devoir  envers  Dieu  &  les  hommesj  & 
a  Nous  grands  pUifirs,  Entant  priant 
Dieu,  que  vous  doint  grâce  d'accepter 
^  fa  fainte  parole  y  &  de  vivre  félon 
iéel'e,      Datum    IX,   Aiartti  anno 
D  XXX 1. 

L'advoyer  &  Confcil  de  la 
Ville  de  Berne. 

Cadrefle  étoit  :  Aux  Nobles  -i  Saigest 
'  nos       Pourveables  >  &  Difcrets  y  Chafte- 
lain  &  Confeil  cI'Avenche  ,  4- 
Nous  bons  nmysy  &   chiers  voi- 
fins,  (a) 

D'autre  coté  le  Vicaire  d'Avenche 

& 

W-Tiré  des  Archiv,  d'A  venche. 


de  la  SniJJe.  L I V.  I X.     I  5 

&    le   Lieutenant  de    la  J^fticei53î^- 
donnèrent  avis  à  l'Ex  êque  de  Lau-  Turd  à 
fanne  Sebaftim  de  Aion'faulcon  •  (qti  Aven- 
étoit  leur  Seigneur  Temporel  auHi- 
bien  que  fpiiitucl.  )  de  Tafflire  qui 
étoit  furvenuë  dans  leur  Ville.  Il 
leur  envoya  un  Religieux  Dofleur 
en  Thé(..lûgie,  {a)  pOi  r  }  foute- 
nir  la  CaLholiciré  contre  les  piédi- 
carions  de  Farel  j  &  en  rriême  tems 
leur  écrivit  la  lettre  fuiv^ante  : 


A  Nos  très  chicrs ,  bien  amcz  >  à"  Lettrée 
fctulx  fubgecJs  ,  les  nobles  y  Gt?//- ^ei'Evê- 
zerneurs  .  Confeil ,  &  Communauté  2"«y-^^^ 
de  noftre  nUe  d'A  venche.      ne  à 

ceux 

Très  chicrs,  bien  amez  &  feaulx  d^^-vc». 
nofire  amiable  recommandation  premife. 
Nous  avons  eftés  advertis  tant  par  vof- 
tre  ricayre  que  Lieutenant ,  de  * 
fnrte  qui  fuft  dernièrement  faicly  dont 
fumes  fort  despUyfans  des  continuel- 
les  infeftations  que  fon  vous  donne  en 
cet  affaire ,  au  quel  ce  nonobftant  vous 
efles  monftré  virtueuxy  bons  &  vrais 
Creftiens  &  Catholiques  ,  dont  je  loué 
Dieu  y  &  Nofire  Damcy  &  vous  en 
fc  avons  tris  bon- gré  ^  vous  priant  & 

exor* 

{d)  MS.  Am^^ 


1 6  Hijîûirc  de  la  K^formatian 

1531.  exortant  paternellement  &  très  affec- 
tueufetnenti  de  vouloer  continuer  & 
bien  perceverer  ,  &  ce  faifant  vous 

^  profit  reporterez  U  grâce  de  Lieu  3  * 
prouffit  a  l'ame  &  au  corps  ^  &  a  la 
fin  la  gloire  de  Paradys  :  Et  pour  vous 
monftrer  le  Chemin  pour  parvenir  a 
îcelle  y  Aïonfieur  voftre  Curé  &  moy 
vous  envoyons  ung  vénérable  Docteur 
pour  vous  dire  &  prêcher  ce  queft  fa- 
lutayre  &  proujjitahle  ^  auquel  vous 
prie  donner  bonne  audience  y&  luifayre 
ajjiftance  avecques  thonneur  &  plaifir 
que  vous  pouryez»  -^ffffi  '^ous  re- 
commande ceulx  de  voftre  Clergiéy  les- 
queulx  font  ceulx  quits  prient  Dieu  pour 
vous  :  Au  regard  de  moy  ,  vous  me 
trouverez  toujours  voftre  bon  Pére 
fpirltuely  Seigneur  &  Prince.  Et  quand 
quelque  chofe  rayfonable  vouldrés  de 
moi,  foyt  en  gênerai  ou  en  particuHery 
me  trouverez  enclyn  a  la  faire,  quel^ 
que  chofe  que  l'on  vous  donne  d'en^ 
tendre  a  l'oppofite ,  comme  Dieu  le 
fcjyt  ,  ouquel  je  prie  qui  vous  ayt, 
très  chiers  bien  amez  &  fcaulx,  ^« 
fa  fainte  garde  {c)  de  Laufanne  ce  14. 
Mars. 

L'Lvefjue  de  LAUZanne, 

Cepen- 

M  Tire  des  Arch,  d'AVENCHE, 


de  la  Suijje.  Liv.  IX.  17 

Cependant  la  Bourgeoifie  d'A-jjjj.. 
venche  écrivit  aux  Seigneurs  de 
Berne  {a)  ,  de  leur  piomit  de  laifler 
prêcher  psihblemenc  la  Parole  de  j^pj^^^' 
Dieu.    Il  s'y  trouvoit  auffi  effcc-  ment  de 
tivement  des  eens,  q*  i  fouhaitoient  Réf;r-  ^ 
de  1  entendre  3  mais  il  y  lui  vint  en- 
core  un  nouvel  cbftacle.  Avcncbe 
VLtii  qu'à  i.  lieuës  de  Frihourç.  Les  fes  F?-/- 

.,     ^         •  /f  bourgeon 

Fnbourgeois  ,  autant  zelez  pour  '^^p_ 
4e  foutien  de  la  Catholicité  5  9^-  6  poient. 
les  Bernois  leroient  pour  la  pro- 
pagation de  la  Dodrine  Evangeli- 
q'je  >  s'oppoférent  à  la  prédication 
de  Farel ,  &c  firent  tous  leurs  ef- 
forts pour  empêcher  ceux  d'Aven- 
che  de  l'écouter,  les  en  dé:ournant 
même  par  des  menaces  >  6c  par  de 
mauvais  trai;.emens ,  deforte  qre 
ces  pauvres  gens  n'étoient  pas  en 
filretc  fur  les  terres  de  Fribourg. 
Et  même  les  Fribourgeois  leur  dé- 
fendirent d'écouter  Farel  fous  peine 
d'être  mis  en  prifon,  tout  autant 
qu'on  en  pourroit  attraper,  d'ê- 
tre traitez  comme  hérétiques.  Le 
Do(ffcçur  ,  que  TEvêque  envoyoit  à  Difpute 
Avenche,  y  étant  arrivé,  Farel  entra  '^^  ^^''^1 
bien-tôt  en  difpute  avec  lui,  fur  la  ^^^[^"^ 

Re^  ' 

'4)  MS.  An^. 


18  Hifloïre  de  U  Kéformation 

1  J     ,  Religion.  Ce  Moine  le  traita  dlié- 
A  V  E  N-  rétique  3  &:  lui  dit  quelques  autres 
c  H  E.    injures.    Farel  voulut  le  tirer  en 
droit,  devant  la  Juftice  du  lieu, 
pour  avoir  occafion  de  le  convain- 
cre d'impol^ure.  6c  d'enfeigner  une 
faufTe  doiflrine.  Cependant  les  Ré- 
formez d'Avenche  s'étant  plaints 
à  Berne  des  véxations  des  Fribour- 
geois  ,  LL.  EE.  envoyèrent  le  2p. 
i>ipntn'  Mars  j  deux  Députez  à  Fribourg , 
Berne  à  P°^^  P^^^^       Seigneurs  de  TEtatj 
JFriboHTg  de  LiifTer  en  paix  les  gens  d'i\ven- 
che,  &  tous  les  autres  qui  aimoient 
l'Evangile  ,  puis   qu'ils  n'avoient 
rien  a  leur    commander  3  les  af- 
furant  qu'on  étoit  réfolu  à  Berne 
de  foutenir  Farel  )  &  tous  ceux  qui 
voudroient  l'écouter,  &  que  fi  on 
les  maltraitoit ,  LL.  EE.  uferoient 
de  reprefailles  fur  qui  de  droit.  De 
^  Fribourg ,  les  Députez  allèrent  à 
Avenche  Avenche  5  avec  Farel  3  &  remontrè- 
rent à  la  Bourgeoifie  que  LL.  EE. 
fouhairoient  qu'ils  exécuralTent  la 
promeiïe,  qu'ils  leur  avoient  faite 
par  leur  Lettre,  fa  voir,  de  lailTcr 
prêcher  paifiblement  la  parole  de 
Dieu  3    qu'autrement  s'il  arrivoit 
«quelque  mal  à  Farci  3  ou  a  d'autres, 

jour 


'     deUSuife.  Li  v.  IX.  19 

pour  cefujet,  LL,  EE.  s'en  relTen- I  5  3  î  • 
riroient,  comme  fi  la  chofe  étoitAvEN. 
faire  à  eux  mêmes?  8c  qu'ils  pu-^^^* 
niroient  les  coupables  ,  en  corps  & 
en  biens.    Les  Dépurez  avoient 
auffi  reçu  ordre  de  foutenir  Farel, 
dans  fon  procès  avec  le  Moine  *  ; 
mais   je  n'ai  pu  découvrir  quelle 
fut  rifluë  de  cette  affaire.  D'A- 
venche  ces  Députez  allèrent  à  Orbe> 
pour  le  fiajet  qu'on  va  voir. 

1 1.  Les  Bernois  &  les  Fribour- 
geois  étant  divifez  de  Religion, 
comme  on  l'a  vu  ,  il  fe  préfenta 
fou  vent  des  fujets  de  difficultez  en- 
tr'eux,  à  l'occafion  des  terres  qu'ils 
poffedoient  en  commun,  favoirles 
Balliages  de  Schvva7tz.bourg^  de  Afo» 
rat,  d^Orbe  3c  de  Granfon.  Les  Ber- 
nois vouloient  y  introduire  la  Ré- 
formation  ,  &  les  Fribourgeois  ne 
vouloient  pas  le  permettre.  Ce- 
pendant comme  ces  derniers  n'é- 
toient  apparemment  pas  fi  forte- 
ment attachez  à  la  Religion  Catho- 
lique ,  qu'ils  l'ont  été  depuis  ;  que 
d'ailleurs  les  Bernois  avoient  pour 
eux  le  Traité  de  paix  ,  fait  entre 
les  Cantons  Tan  152p.  les  Fribour- 
geois 

*  MS.  Awp,  m.  B.  Inftr.  îo. 


20  Hijîoire  de  la  K.éformatîon 

1531.  g^ois  condefcendirent  à  un  accom^ 
modemcnt;  6c  convinrent  avec  les 
Bernois  5  P-  Quz  dans  ces  Balliages 
J^^ATTE  communs  ils  fèroit  permis  à  cha- 
avecFri-^^^"  de  fu ivre  celle  des  deux  Reli- 
^0^/'^ fur  gions  ,  qu'il  aimeroit   le  mieux, 
la  Reli-  Jp-  Mais  qu'au  cas  qu'une  paroifTe 
Sh^cCm  entière  voulût  décider  à  la  pluralité 
jets  coin  des  voix  ,  quelle  Religion  elle  fui- 
muns.    vroit,  les  Seigneurs  des  deux  Villes 
envoytroienr  leurs  Députez  ,  pour 
préhder  à  cetre  aiflion  ,  &  qu'alors 
fi  la  plural  ré  des  voix  l'emportoit 
pour  la  RéFormation  ,  les  Carho- 
îiq  ies  n'y  auroient  plus  d'exercice 
public  de  leur  Religion,  &  fi  au 
contraire  la  pluralité  l'emportoit 
pour  la  MelTe ,  cela  n'empêcheroic 
pas  que   les    Réformez  n'euflent 
toujours  libre  exercice  ,  8c  que  les 
Miniftres  y  prêcheroient  la  parole 
de  Dieu  5  ni  plus  ni  moins  qu'au- 
paravant (^) 
Com-     La  Réformation  s'étoit  introduite 

dans  la  Ville  à: Orbe,  dè«  l'an  15^0. 

ment  de  i    r  •     j  ^ 

Rtfor-    apparemment  par  les  loins  de  G,  Fa- 

matioûàyW,  mais  les  Réformez  n'y  croient 

encore  qu'en  petit  nombre  ,  &  ils 

n'y  firent  point  de  bruit ,  jufqu'à 

Tannée 

{a)  MS.  Thomajf,  p.  i . 


de  U  Suijfe  L  i  v.  IX.  21 

Tannée  fuivante  1551.  à  roccafion  15 3 1., 
d'un  événement  qu'on  va  voir.  11  orbe*. 
y  avoic  dans  cette  Ville  un  Frère 
Mineur  >  de  Tordre  de  Saint  Fran- 
çois,  nommé  Michel  Juliani  >  Con- 
feffeur  &:  Adminiftrateur  des  Reli- 
gieufes  de  Sainte  Claire  d'Orbe  ,  qui  VnT^ 
paflbit  pour  favant.    Il  fut  choifi  M^w^^^r 
pour  prê:hcr  pendant  \z  Carême , 
&  les  Réformez  furent   des   pré-  d  une 
miers  à  l'aller  écouter.    Il  prit  de  manière 
là  occafion  de  déclamer  contre  les  cont^e^^ 
nouvelles  Religions  >  &  s'emporta  lesR^^oy- 
a  dire  beaucoup  de  chofes  dures  & 
fortes  contre  tous  les  Réformez, 
Ceux  d'Orbe  en  furent  fi  offencez, 
qu'ils  écrivirent  tout  ce  qu'il  avoit 
débité  en  Chaire  ,  &  en  compofé- 
rent  un  bon  nombre  d'articles  qu'ils 
envoyèrent  à  Berne.  Jost  de  DrES- 
BACHj  alors  Baillif  d'Orbe,  l'ex- 
horta a  fe  modérer.  Le  Confcil  & 
les  Bourgeois  5  qui  éroient  encore 
bons  Catholiques  pour  la  plupart^ 
l'en  prièrent  auffi ,  lui  remontrant 
qu'on  relevoit  tout  ce  quil  difoir, 
&  qu'on  le  mettoit  par  écrit  >  & 
qu'il  feroit  mieux   de  prêcher  fa 
do^lrine  tout  fimplement,  5c  fans 
xîive^iver  contre  perfonne.  MaisiL 

con-- 


2  2  Hïjloire  de  La  K^éformatîon 

j  ^  5  j  ^  continua    fcs   emportemens,  fans 
O  R  H  E.  i^i^ri  écouter.  Un  jour  donc  qu'il  dé- 
clanioic  contre  les  Moines  &  les  Re- 
ligicufes  ,   qui  quittoient  le  Cou- 
vent pour  jfe  marier,  il  tint  ce  dif- 
cours  :  Penfez  'vous  que  ces  Prêtres^ 
(es  Moines,  ces  Moine jfes^  qui  fortent 
hors  de  leur  Religion  ,  qui  ne  veulent 
pas  endurer  la  peine  ni  la  caftigation^ 
dont  iccux  renonçant  a  leurs  vœuxy 
pour  fe  marier  &  accomplir  leurs  volup- 
tez  ch^irnelles ,  penfez-vous  quen  iceux 
foit  accompli  &  fait  m-ariage  légitime  ? 
lia!  nenny^mais  ils  font  paillards  .paillar' 
des, infâmes  &  deshonefîesyy^pofiats  abo- 
minables devant  Dieu  &  devant  les 
l\t{^ir\-  hommes,  {a)   Un  Réformé  d'entre 
un  ^Ré-      Bourgeois  ,  norrimé  ChriHophle 
formé.   Holardy  croyant  apparemment  que 
ce  Moine  en  vouloit  à  fon  frère, 
Jean  Holardy  qui  avoit  été  Prêtre 
&  Doyen  de  Fribourg  ,  mais  qui 
avoit  embraffé  la  Réformation  ,  & 
s'étoit  marié,  eut  l'imprudence  de 
lui  crier  >  quil  en  avoit  menti.  Cette 
parole  excita  un  vacarme  effioya- 
ble  dansTEglife.  Les  hommes  vou- 
loient  fortir  pour  aller  aflommer 
Holard ,  mais  on  leur  ferma  les  por- 
tes 


deUSuiJJe.  Liv.  IX.  23 

tes  des  Chapelles  où  iJs  éroienr.  Là  I  5  3  î  • 
delTus  les  femmes  fe  jettérent  furOnBE, 
lui  5  comme  des  furies  déchainées,  j-umuîte 
le  prirent  par  la  barbe  ,  la  lui  arra-à  cette 
chérent,  le  dévifagertn:  à  coups occafioR 
d'ongles  &  de  poings  ,  Taii- 
roient  affommé  /fi  le  Chârekin 
d'Orbe  y  nommé  ylntoine  ^ gaffe  ,  ne 
fût  furvenu ,  qui  eut  bien  de  la 
peine  aie  leurôrer  d'entre  les  mains, 
pour  le  faire  conduire  au  fond  d'un 
cachot.  Le  BaiJlif  ayant  apris  ce 
tumulte  5  par  le  Maître  d'Ecole, 
nommé  Afarc  Romain  ,  accourût  'à 
Orbe,  où  il  fit  prifonnier  le  Moine 
Juluni  5  qu'on  trouva  chez  une  fem- 
me 5  &  tira  Holard  de  prifon.  Le 
peuple  en  fut  fi  outré  de  dépit,  qu'il 
îè  jettâ  fur  le  Maître  d'Ecole,  qui 
pour  évirer  leur  fureur ,  courût 
dans  l'Eglifè  ,  mais  ce  fût  pour 
tomber  dans  un  mai  plus  grand. 
Les  femmes  qui  s'y  trouvèrent, 
écoutant  le  Salve  Regina^  fe  jettérenc 
fur  lui,  le  prirent  parles  cheveux, 
&  le  jetrérent  par  terre  ,  Se  à  coups 
de  pieds  &:  de  poings  ,  elles  Tau» 
roient  aflommé  ,  s'il  n'eut  été  fe- 
couru  par  un  honnête  Bourgeois, 
qui  écoit  de  la  Religion.  Depuis  ce 

jour 


2  4  Hijloire  de  la  déformation 

1531.  jour  il  fut  fort  long-  tems  fans 
O  R  B  E.  ofer  aller  par  les  rues:  ou  s'il  y 
alioit  5  il  étoit  accompagné  de  deux 
fergens ,  qu'or^  lui  avoir  donnez 
pour  fa  garde  ,  jufques  a  ce  que 
les  Seigneurs  des  deux  Villes  eu- 
rent la  bonté  de  le  prendre  fous 
leur  prote^ion.  (4) 

Cependant  le  peuple  s'attroupa 
autour  du  Châreau ,  où  étoit  le 
Baiilif  avec  HoUrd  &  "^ulunï ,  &C 
quand  il  fortif,  ils  fe  mirent  a  crier, 
pourquoi  A  avoir  arrêté  leur  beau 
Pérejuliam^  &  relâché  Holard  ?  Il 
leur  répondit^^l  avoir  pris  le  Moi- 
ne par  ordre  des  Seigneurs  de  Ber- 
ne 5  6c  relâché  Holard  fur  la  caution 
qu  il  avoit  donnée.  Cependant  ils 
ne  furent  pas  contens  de  cette  ré- 
ponfe  &  voulurent  le  prelTer  d'a- 
vantage^ mais  il  fe  contenta  de  leur 
dircj  que  s'ils  le  vouloient  prendre 
à  leur.rifque,  ils  le  pouvoient  faire  , 
que  quant  à  lui ,  il  ne  le  leur 
confeilioit  pas.  Lors  qu'il  fût  avan- 
cé jufqu'à  la  grand  place ,  il  rencon- 
tra les  femmes,  Dames  &:  autres, 
qui  fe  jettant  à  genoux  ,  ôc  les  lar- 
mes aux  yeux,  fe  mirent  a  crier 

mijc- 


dela  SmlJe,  Liv*  IX.  25 
m  fer  horde ,  pour  leur  beau  Pére  Ju-  1531 
Uanij  mais  le  Baillif  fut  inexora- 
ble  5  difant  toujours  >  qu'il  avoit 
des  ordres  qu'il  ne  pouvoir  fe  dif. 
penfer  d'exécuter  {a). 

Le  lendemain  la  Bourgeoifie  en- 
vola deux  Dépurez,  Pierre  de  Pierre^ 
fleur.  Auteur  de  l'Hiftoire  que  je 
copie,  &  François  VFerney  ,  pour 
aller  fe  plaindre  à  Fribourg  de  ce 
qui  étoit  arrivé.  Les  Seigneurs  de 
Fribourg  cnvoiérent  d  eux  Confeil- 
lers  à  Berne  >  pour  conférer  fur  ce 
fajet  5  &  il  fut  réfolu  d'envoyer  des 
Députez  de  part  &  d'autre  à  Orbcj 
pour  le  Dimanche  fuivant,  i^-  d'A- 
vril >  jour  de  Pâques  fleuries,  afin  de 
terminer  cette  affaire.  Les  Bernois 
amenèrent  avec  eux  Guillaume  FareU 
dans  le  delTein  de  le  faire  prêcher  à 
Orbe.  Lors  que  les  Vêpres  furent  ^^^el 
dites  >  il  monta  promtement  en 
Chaire,  dans  le  delTein  de  prêcher  : 
ce  que  voyant  le  peuple,  hommes, 
femmes ,  6c  enfans,  ils  le  fuivirent, 
non  pas  pour  l'écouter,  mais  pour 
l'en  empêcher.  Il  n'eut  pas  plutôt 
commencé  ,  qu'ils  fe  mirei^t  tous  a 
fifler,  a  crier  (  en  l'appellant  chierii 
Tom.IK  B  maùn^ 

[43/^.7. 


26  Hijloîre  de  la  Ké for  mat  ton 

î  53 1 .  mhïn  ,  hérétique  ^  "Diable  >  6c  en  le 
Prbe.  chargeant  d'autres  pareilles  injures) 
avec  un  bruit  fi  horrible  ,  qu'on 
n  âuroit  pas  ouï  tonner.  Farel, 
qui  étoit  accoutumé  à  de  fèmblables 
réceptions,  ne  perdit  point  courage, 
mais  perfifta  dans  le  deffein  de  prê- 
cher. Cette  fermeté  les  irrita  telle- 
ment, quils  en  vinrent  à  une  fé- 
dition  5  où  ils  faifirent  Farel,  &  le 
rnal-rraitérent  de  coups  \  de  forte 
que  le  Baillif  craignant  qu  il  n'en 
arrivât  un  plus  grand  mal,  le  prit 
par  le  bras  ,  ie  conduisit  hors  de 
TEglife  &  Tefcortâ  même  jufques 
en  fon  logis.  Cela  ne  le  rebuta  point 
encore  {a).  Le  lendemain,  à  fix  heu- 
res du  matin  il  voulut  prêcher  au 
milieu  de  la  place  j  mais  il  ne  pût 
point  obtenir  qu'on  récoutâr.  Sur 
ie  foir  on  affembk  le  Confeil  de  la 
ville  ,  où  les  Députez  de  Berne  & 
de  Fiiboui  g  fe  rendirent  avec  Farel. 
A  riffuë  du  Confeil ,  les  femmes 
qui  s'éroifcnt  attroupées  >  pour  at- 
tendre Farel ,  au  milieu  de  la  rue, 
ï'ailéf enr  empoigner,  le  jettérent  par 
terre  ,  ^  voul oient  fe  mettre  a  le 
•battre  >  mais  un  Oentil-homme  ac- 
crédité. 


de  laSuiJJè.  Liv.  IX.  27 

té  ,  Qommé  Pierre  de  Glahejfe  ,  le  J  53  î* 
leur  ôta  d'entre  les  mains  >  leur  di-  O  r  b  e. 
lànt.  Mes  Dames  y  pardonnez  inoi 
pour  -cette   heure ,  ]e  lai  pris  a  mx 
charge  \  fur  quoi  elles  le  iaiflerenr. 
La  principale  de  ces  femmes  ,  qui 
commandoic  toute  la  troupe,  étoic 
une  Dame  de  ^qualité  Fribourgeoifè 
d'orrgine,  nommée  Elifaheth  Reijf  ^ 
qui  avoit  époufé  un  Gentil-homme 
d'Orbe ,  nommé  Hugonin  à' Arnay^ 
Bien-toc  après  5  Dieu  lui  toucha  le 
cœur  >  comme  autrefois  à  Lydie. 
Elle  &  fon  mari  embrafférent  la  Ré- 
formation >•  &  y  perfévcrérent  conf- 
tamment  jufques  à  la  mort  (a). 

Le  Mardi  on  afïêmbla  k  Juliice, 
oii  afTjRérent  les  Députez  de  Fii- 
bourg.    Le  Moine  JuU.mi  aiant  été 
tiré  de  prifon  ,   les   Députez  de 
Berne  n,  au  nom  de  leurs  Maîires  3 
propoférent  contre  luilesCbefs  d'ac- 
cufacion  qu  on  avoit  recueiias  de  dUcruf^t* 
fês  fermons  >  intentant  à  ce  fujet  tion  por- 
une  adlion  criminelle  contre  lui  : 
difant  qu'ils  étoient  coutie  Dieu  5  jj^e 
6c  contre  l'autorité  de  leurs  Sci- jHliani^ 
gneurs  de  Berne.    Je  les  raporre- 
ra:  par  ordre  avec  les  Réponfes 
B  z  de 

W  U.  ibid. 


2  8    HiftoîYC  de  la  déformation 

I  531.      Juliani,   On  l'accufoit  donc  d'a- 

Orbe.  voir  tenu  ces  difcôurs  : 

Répon-      !•  Les  pauvres  d'Efprit  font  les 
de  ^  Afoines ,  qui  ont  abandonné  le  Mon» 

JH  imi.      ^  ^^^^^  entrer  en  Religion.  Il  nia  de 
ravoir  dit. 

2.  Le  Pape  y  les  Eveques  i  &  les 
autres  Eccléfiaftiques  y  qui  ont  charge 
(Came ,  (ont  ceux  a  qui  l'on  doit  obéir  % 
&  garder  leurs  ordonnances^  parce  que 
toute  ame  doit  être  Jujette  aux  Puijfan* 
ces  fouveraines  5  &  qui  réfifie  à  leurs 
puijfancesy  réfifie  a  t ordonnance  deDieu  ; 
Auffi  bien  que  qui  ne  garde  lesComman" 
démens  de  CEgUfe,  Il  nia  de  lavoii: 
dit  de  la  manière  quil  eft  rap- 
porté. 

l.  Ceux  qui  amènent  la  nouvelle 
Loi  3  7ie  font  aucun  miracle^  d'où  vient 
que  peu  prennent  leur  Loi  ,  fors  un 
tas  de  Aîoines  impudiques  ^  ^  pail- 
lards y  Apoftats  5  qui  parce  quon  les 
corrige  &  quon  Us  contraint  dans  les 
Alonafteres  5  par  la  difcipline, prennent 
cette  Loi  3  pour  pouvoir  fe  marier  y  & 
accomplir  leurs  défirs.  Nie  de  l'avoir 
dit,  comme  il  étoit  rapporté.  ^ 

4.  On  doit  garder  les  vœux  quon 
a  faits ,  &  par  conféquent  ceux  qui  les 
mnpcnty  font  mécbans  ;  apoftatSy 

îéti^ 


\ 


de  la  Suijfe,  Liv.  IX.  29 

rétiques  >  comme  tous  les  Moines  çwi  I  5  3 1 . 
fartent  de  Religion  y  tous  les  FrêtresOR^i, 
qui  fe  marient.  Il  ne  faut  pas  croire 
que  ce  fait  un  mariage  ,  ni  que  leurs 
femmes  foj/ent  des  femmes  légitimes  y 
mais  elles  font  leurs  rïbaudes  j  kur  fait 
ne(i  que  fornication  ^  &  leurs  en- 
fans  font  tous  bâtards  &  illégitimes^ 
AvQÎié. 

5.  La  Confejfion  eji  de  Commande^ 
vient  y  &  chacun  cfi  obligé  de  fe  con^ 
fejfer  aux  Prêtres  i  ainfi  que  les  ladres 
dévoient  être  jugez  par  les  Prêtres  de 
la  Vielle  Loi  i  ainfi  la  ladrerie  fpirituelle 
doit  être  jugée  par  les  Prêtres  de  U 
nouvelle  Lot  ^  qui  font  d'autant  plus 
dignes  plus  excellensy  quils  offrent 
un  plus  excellent  facrifice  que  les  autres > 
qui  ofroient  des  bêtes  ,  au  Heu  que 
ceux  ci  offrent  le  précieux  corps  de  «0- 
tre  Seigneur  J  e  s  u  s  >  é'  fon  Sang» 
Avoiié  de  l'avoir  dit  félon  les  com- 
mandemens  de  1  Eglife. 

6.  Les  Prêtres  font  A'fédiatcurs  en- 
tre Dieu&  les  hommes,  A  voile,  mais 
il  l'entend  lors  qu'ils  adminiftrent 
les  Sacrement. 

7.  Ceux  la  font  méchansm&  héréii'- 
que  s  qui  détruifent  les  Images  ,0"  abat- 
tent Us  Croix  &  Ils  Crucifix  j  lesquels 

A  3  Notre 


30  Hiftoire  de  la  Keformation 

ï  Ç  3  T .  ^^^^^  Mére  S.  Eglife  a  ordonné  d'strs 
O  R  1 E,  milieu  de  fEglife^afin  que  quand 

on  entre  en  l'EgliJe  on  s'en  fou- 
%'ienne.  Défavoué. 

8.  Tous  ceux  la  font  ennemis  de  U 
Croix  de  C  h  r  i  s  Tj  qui  abattent  les 
Croix  >  &  ne  fervent  qua  leur  ventre^ 
nfant  de  toutes  'viandes  en  tout  tems , 
héUi  !  neft  ce  pas  une  chofe  déplora- 
ble 3  que  d'abatre  a  'nfi  la  Sainte  Croixy 
vit  que  tant  de  faints  &  de  faintes  ont 
été  délivrez  p^r  le  figne  de  la  Croix  ? 
mais  tous  ceux  là  feront  confondus,  qui 
nfent  atnfi  de  toutes  fortes  de  viandes^ 
Nié  de  l'avoir  dit  de  la  manière 
<gu'ii  eft  rapporté. 

5».  Ce(l  un  péché  mortel  y  4e  man* 
ger  de  U  chair  &  autres  viandes  défen- 
dues y  dans  le  tems  défendu  3  comme 
en  Carême,  Avoiîéj  mais  qu'il  a  eu 
raiion  de  le  dire. 

I  o.  On  efl  tenu ,  foits  peine  de  pê- 
ché  mortel ,  d'oujr  U  Meffe,  Avoué 
comme  ci-defTus. 

1 1 .  Les  méihans  hérétiques,  nient 
que  le  pain,  que  le  Prêtre  confier e-,  foit 
tranffubftantié  au  corps  précieux  de  nôtre 
Seigneur.  A  voilé  comme  les  autres. 

11.  Le  Corps  de  nôtre  Seigneur 
J«£SUS-Chj\.ist  cji  aujji  bien  ci:  la.mam 


deU  Suife.  LiV.  IX.  31 

iun  matmais  Prêtre  ^  d'un  bon,  1531» 
Avoiié  ,  lors  qu'il  prononce  Iss  pa-  O  r  bx, 
rôles  Sacramentales. 

1 1 .  Ces  méchans  hérétiques  , 
nient  le  Sacrement',  difent  que  U  feule 
foi  juflifie  ^  fi  quelquun  avolt  comm:s 
m  péché  mortel ,  comment  pourrait-  U 
être  fauvéen  crojant  ?  Nié  de  Ti voir 
dit  de  cette  manière. 

14.  La  Vierge  Marie  eft  U  Thréfoh 
riére  de  grase, 

15.  Les  hérétiques-,  qui  nient  quon 
doive  invoquer  Us  fa'ints ,  peuvent  ai^ 
fement  être  convaincus  de  faux  par  It 
Can^tnéenne  ,  qui  ne  pouvant  être  exau* 
cée  de  Jesus-Chkist  sadreffbit  aux 
apôtres,  difant  ,  O  amis  de  DicUa 
priez  pour  moi  vôtr«  Maître. 
Dieu  n  exauce  point  les  pécheurs^  adrej-^- 
fez  "VOUS  a  quelquun  des  Saints^  L€ 
même  chofe  par  oit  auffi  par  la  Afére 
de  S,  Pierre,  Nié  de  l'avoir  dit  de 
cette  manière. 

16.  Les  Saints-  chaffint  &  guérif- 
fent  de  diverfcs  maladies  j  comme  S. 
Antoine»  du  feu.  Avoué, 

1 7.  Qui  dit  que  les  Livres  des  A4ac* 
cabées  ne  font  point  de  la  S.  Ecriture^ 
il  efi  hérétique^  &  neft  point  enfant 
Ù  DicHimu:s  de  la  Sjnagcgu e^Avoué, 

B  4  iS.Cf/î 


3  2  Hijioire  de  la  Kéformation 
ï  J3T.      '8.  Cvft  une  héréfie,  de  dire  qu'H 
Orbe»       ^  P^^^^^      Ptirgatoire  ,  &  ceux 

qui  le  n'unt  font  méchans  &  hérétiques ^ 

Avoué. 

ip.  On  doit  pleurer  &  gémir  pour 
les  trépajfeXy  &  faire  chanter  pro  fide-> 
Uhus  ^hrifitanis,  Avoiié. 

20.  Ceux  qui  ont  pris  la  nouvelle 
Loi  n'ont  aucun  bien  en  eux  mais  nient 
les  articles  de  U  Foi.  Nié  de  l'avoii: 
dit. 

1 1 .  Qui  trouve  fa  femme  en  aduU 
tire ,  ne  peut  en  prendre  une  autre,  fe- 
Ion  le  commandement  Dieu.  Avoiié  de 
Ta  voir  dit ,  fclon  les  ordonnances 
de  l'Eglife. 

2  2.  Dieu  na  rien  commandé  qui 
foit  impoffible  de  fa  grâce.  Avoué, 

23.  Adorer  Dieu  en  Efprit^  e/i  con- 
tre les  Luthériens,  Nié  de  l'avoir 
dit. 

Ces  Articles  ayant  été  propofezj 
Juliani,  après  quelques  tergiverfa- 
tionsj  répondit  comme  on  vient 
de  le  voir.  Sur  quoi  Ton  fie  venir 
des  témoins  ^  pour  prouver  les  ar- 
ticles qu  il  avoit  niez  ,  &  ce  jour 
fût  tout  employé  à  cette  difcuflion 
jufqu'au  foir,  tellement  qu'on  fût 
contraint  de  remettre  la  décillon  au 

lende* 


delaSuijfe.  Liv.  IX.  33 

lendemain.  Jul'uni  fut  mis  en  Ii-1531; 
berté,  &  donné  en  garde   à   un  Orbe. 
Gentil-homme  ,  nommé  GuilUimie 
D^Arnaj,  qui  voulut  bien  s'en  char- 
ger ,  &  le  cautionner  corps  pour 
corps,  {a) 

Le  Mecredi  de  grand  matinj  11 
Juftice  étant  f  affembiée  ,  les  Dé- 
putez de  Berne  demandèrent  que 
Aiichcl  Juluni  5  comme  coupable 
de  lézeMajefté,  pour  avoir  péché 
contre  Dieu  ,  &  contre  lautorité 
de  leurs  Seigneurs  5  fut  puni  en 
corps  &  en  biens.  Juliani  au  con- 
traire demanda  d'être  relâché  ,  fou« 
tenant  n'avoir  rien  prêché  ni  dit,  qui 
fût  contre  Dieu  ,  ni  contre  lauco-  jj^u^u^i 
rité  des  Seigneurs  de  Berne  ,  qu'il  eft  con- 
n'étoit  pas  fi  prefomptueux  queded^mné  i 
prêcher  quoique  ce  fût,  de  lui  mê-  ^[ Xc^-*^ 
me  5  &  fans  l'avoir  puifé  dans  les  ti  ine  pat 
Ecritures  Saintes.    Ces  plaidoyez  l'Fcn- 
étant  finis  ,  les  Juges  décidèrent  fore 
fagement  :  Que  s'il  pouvcit  prouver 
par  l Ecriture  ^  tout  ce  qu  'il  avoit  dïty 
il  jeroit  abfous.    Là  defilis  il  fit  un 
long  difcours  ,  où  il  entreprit  de 
prouver  par  l'Ecriture  tout  ce  qu  il 
avoit  prêché,  Ôc  prenant  tous  les 
B  5  articles 

W  MS.  Uorn.  10. 


34  Hijiôire  de  la  K.cformatiôn 

I         articles  l'un  après  Kautre  >  il-  tâcha 
P^Bs^-de  les  foutenk  par  quelque  paffage 
du  Vieux  ou  du  Nouveau  Teâa- 
ment.    Les  Juges ,  qiai  étolent  tous 
Catholiques  ,  furent   contens.  da 
cette  Apologie  5  le  déclarèrent  ab- 
fous  >  &  le  mirent  en  liberté.  Les 
Bernois  ne  fûrent  pas  contens  de 
ce  Jugement,  &  à  peine  une  heure 
étoit  écoulée,  après  la  féance  iînie, 
qu'ils  l'envoyèrent  chercher  par  des 
lergcns  pour  le  prendre,  mais  on 
ne  le  trouva  pas.  -Prévoyant  bien 
ce  qui  arriveroit ,  il  étoit  inceffam- 
ment  forti  de  la  ViUé;  &  s'étoit  re- 
tiré en  Bourgogne    au  grand  re- 
gret des  bonnes  Religicufes,  dont 
Jtiliant  il  étoit  Confeiïeur.    Le  Dimanche 
s  évade.  f^\y^Yit ,  jour  de  Pâques,  il  vint  un 
Héraut  de  Berne ,  aportant  ordre  au 
Confeil  d'Orbe,  de  faire  toute  la 
diligence  pofljble  pour  arrêter  Ju- 
lianii  mais  on  lui  fit  voir  que  la 
chofe  n'étoit  pas  pofTible, 
jP^^^ygl      II  ne  faut  pas  oublier  ici que 
voulant  Farel  avant  la  décifion  du  procès, 
prêcher  auquel  il  fûtpréfent,  pria  les  Ju- 
point     S^^  '       préfence  des  Députçz  ,  de 
écouté,  faire  lire  la   Patente  qu'il  avoic 
xe^ue  des  Seigneurs  de  Banc^por- 
"    • .  tant 


de  la  SulJfeLlY.  IX.  35 

tant  ordre  à'  tous  leurs  fujcts  &  l 
leurs  Bourgeois  >  que  quand  Farel 
voudroic  prêcher  ,  on  devoit  luv 
donner  audience  3  le  favoriftr  &  le 
foutenir;  demandant  en  conféquen? 
ce  de  cet  ordre  5  qu'on  lui  permit 
de  prêcher  )  &  qu'on  lui  donnât 
audience.  Mais  à  peine  la  parente 
fut  elle  luë,  que  le  peuple  ,  fans 
attendre  la  décifion  du  Confeil?  /ê 
mit  a  crkr  tout  d'une  voix  ,  quH 
j'fiff  alLit^  quon  navcit  que  faire  ds 
lui,  ni  de  fa  prédication  {a). 

Le  lendemain  de  Pâques,  le  Cor> 
feil  d'Orbf  envoya  cinq  Députez  à 
Berne ,  pour  faire  leurs  excufes  aa 
fujet  de  ce  qui  s  éroit  pafle.  Leurs 
excules  furent  reçues  en  partie ,  te 
en  partie  rejettées.  La  ville  d'Orbe 
fût  condamnée  à  une  Amende  de 
deux  cens  Ecus  d'or  au  foleil ,  pour 
les  émûtes  féditisufes  donton  vient 
de  parler:  Du  refte  il  leur  fût  dir^ 
Quon  fouhaitoit  qu'ils  écoutaffenc 
les  Sermons  de  Farci  j  Que  cepen- 
dant on  ne  vouloic  forcer  perfonivc 
a  y  aller  &  qu'on  n'entendoit  pas 
dempêcher  en  aucune  manière  crc 
B  6  fai- 


)  MS.  *Xhm.  p,  iQ.  ir« 


3  6  Hijîoire  de  la  Kéformation 

I  5  3  f .  de  faire  l'office  ordinaire  dans 
O  R  B  E.rEglire. 

rard  y  Lcs  Députez  étant  revenus 

^fff^^fi^vec   cette    réponfe  ,    Faiel  qui 
niais  elt       .        ,       -,  ^     ^  u      v    ^  i 
troublé  avoit  ordre  de  prêcher  a  Orbe  > 

dans  fa  monta  enChane  un  Samedi  rnarin> 
^ion^^^'  ^P^^^  Dmianche  Quafimodo  après 
que  l'office  fut  achevé ,  mais  il  n'eut 
qu'un  très  petit  nombre  d'Audi- 
teurs 3  encore  fut-il  interrompu  par 
les  petics  enfans>  qui,  au  miheu 
de  fon  Sermon  ,  fortirent  de  l'E- 
glife,  criant  heurlantj  &  faifant 
un  britit  horrible  {a). 

Le  lendemain  ,  qui  #toit  le  Di- 
manche 23.  d'Avril,  Farel  monta 
encore  en  Chaire?  encouragé  par 
l'arrivée  d'un  Seigneur  Dépuié  de 
Berne 3  qui  vir.t  à  Oibc  avec  le 
Baillif.  Il  prit  le  rems  qu'on  alloic 
folenmellement  en  procefTion  à  i'E- 
glife  de  S.  Germant  qui  étoit  hors 
de  la  Ville  >  mais  avant  qu'il  eut 
fî)  i,  la  procelTion  rentra,  6c  vint 
dans  l'Eglife  où  il^  prêchoit.  Les 
enfans  entrèrent  le.^  premiers,  &fe 
mirent  d'abord  à  fiflerîàcj  ierjà  heur- 
1er.  IL  furent  fuivis  des  Prêtres,  qui 
entrèrent  dans  l'Eglife  en  chantant. 

Fareî 

{a)  id.  p.  II.  12. 


de  la  SuiJJe.  Li  v.  IX.  37 

Farel  voyant  cela^ne  pût  faire  mieux  I  53î» 
que  de  décendre  de  Chaire  3  ^  (qOikï.^* 
retirer,  L'après-dii  ée  il  prêcha  de 
nouveau  en  préfence  du  Député 
de  Berne  &  du  Baillif,  &:  n'eut 
qu'une  dizaine  d'Auditeurs  ,  com- 
me auparavant  {a). 

Le  Député  de  Berne  avoit  été  I-a  R^/or- 
envoyé  à  Orbe  ,  pour  rtmiédier  à  ^^j^^ 
divers  défordres.    Les  P.êties  fai- verfée 
foient  tous  leurs  efforts  pour  dé-  par  les 
tourner  le  peuple  d'aller  au  prêche,  ï*^^"*^^^ 
&.  l'un  entr'autres  conduifit  un  jour 
le  Châcelain  dans  l'Eglife,  pour  lui 
faire  marquer  tous  les  EtiangerSj 
qui  écoutoietit  la  parole  de  Dieu. 
Un  autre  fe  tenant  fous  la  porte  de 
l'Eglife,  tandis  qu'on  pi échoit,  fe 
mit  à  crier  de  toute  fa  force,  pour 
intci  rompre   le  PiéJicareur.     Le  &  P^^?^ 
Co  icil  y  employoït  auffi  fes  foins,  ConleiK 
6c  dépofoit  de  leurs  emplois  ceux 
d'entr-eux  qui  avoient  du  penchant 
pour  la  Réformaaon.     En  même 
tems  les  Seigneurs  de  Berne  eûient 
avii.',que  les  Keligieufes  de  S,CUire 
faiioient  tranfportcr  leurs  joyaux 
&  leur  argent  a  Nojeroy  en  Bour- 
gogne,  ôc  quelles  y  en  vouloient 

encore 

(4)  MS^  Thom.  ihià. 


38  Hijloire  de  la  ï{éform.ition 

ï  5  3 1 .  encore  envoyer  davantage.  Le  Dé*- 
ORBE.putéde  Berne  voyant  TobRination 
Réfor-f^yx  peuple  a  ne  point  écouter  Fa- 
Sute-""       '       aiTembler  le  Confeii  le  jour 
nuë  pai-xuivant  j  &  leur  dit?  Que  puiiqu'on 
les  5fr-^yoit  bien  écouté  Juliam^  lorsqu'il 
prêchoit  les  articles  qu'on  a  vûs> 
LL.  EE.  vouloient  qu'on  entendit 
aufli  la  réfutation  que  Farel  en  vou- 
loit  faire  par  leur  ordre:  Que  pour 
cette  caufe  ils  vouloient  que  chaque 
Pére  de  famille  allât  aux  Sermons 
d-  FareL  fous  peine  de  leur  indi*- 
gnatiun  *. 

Comme  des  Prêtres  d'Orbe  & 
quelques  autres  avoient  publié^  que 
Farel  ne  pourroit  jamais  renverfet 
le  moindre  de  ces  arucles  de  Foi> 
s'il  n'étoit  foûtenu  des  Seigneurs 
de  Berne  3  qui  vouloient  l'emporter 
par  autorité  3  le  Dépucé  dit  de  leur 
part  à  i'aîTembléei  Que  LL.  ED. 
éroicnt  difpofées  a  les  écouter ,  a 
rendre  juftice  à  chacun  ,  &:  a  n'ufer 
d'aucune  violences  Qu^ils  n'avoient 
donc  qu'a  attaquer  Farel  publique- 
ment. Il  les  exhorta  a  s'abftcnir 
de  détourner  le  peuple,  Scd'inter- 

rom- 


^  B.  Inftr.7i.  ^  MS.  Thm.  &  MS. 
Ami',  121. 


delà  Snije.  Liv.  IX.  39 

îompre  les  Prédicateurs  >  &  enfin  I  S  3 1  • 
il  déclara  aux  ConfeiJlers,  que  LL.  O  s.  £  2.. 
EE.  ne  vouloient  fAs  foufrir  quau^ 
ounftit  dépofé  de  fa  charge  ^  pour  avoir 
^mbraffé  la  Réformation 

Pour  donner  fatisfaflion  au  Dé- 
puté de  Berne  on  publia  cet  ordre 
par  toute  la  ville.    Farel  prêcha  ^-^f'? 
fix  jours  défaite,  &  chaque  jour  ^[  j^^^^ 
deux  fois.     Le  peuple  oI>éic  les  de  iuita- 
deux  prémicrs  jours,  mais  dès  le 
troifiéme  il  ne  voulut  pas  y  re- 
tourner 5  de  Farel  n  eut  plus  quefes 
auditeurs  ordinaires.  Ces  prémices 
delà  Réformation  dans  Orbe  étoient 
Fierre  Viret ,  les  deux  frères  Ho- 
lards ,  Alarc  Romain  ,  Antoine  Se- 
oreflain  >  Claude  Darbonjcr  quel- 
ques autres  {a), 

Pierre  V 1  r  e  t  ,  dont  la  mé-  Hifloire 
moire  nous  fera  éternellement  en  de  P.  vi* 
bcnédi(flion  ,  étoit  Bourgeois  d'Or- 
bè,  fils  de  Guillaume  Viret ,  tondeur 
de  drap.  Il  naquit  flan  1511.  Il 
commença  fes  études  dans  Orbe 
même ,  &  de  là  fon  Pére  Tenvoya 

àPâ^ 

*  B.inilr.  ihU.  Se  MS.  Amf. 
{*)  MS.rW.  II.  13. 
t  Melch.  Ad^a»  Vit.  Thcologor.  fxtc* 
fcr.  p.  110. 


40  Hijloire  de  la  Kéformation 

1531.  à  Paris,  où  il  demeura  deux  ou 
O  K  £  E.  trois  ans  >  &  y  fît  de  très  -  grands 
progrès  dans  les  fcierjces.  Mais 
fur-tout  il  y  fût:  éclairé  de  la  lumiè- 
re de  l'Evangile,  &  bien-tôt  il  fut 
contraint  de  s'enfuir  pour  éviter  la 
perfécution.  Il  vint  à  Orbe  quoi 
qu'avec  peine ,  où  à  la  follicitation 
de  Farel  il  fe  voila  au  Miniftére  de 
l'Evangile  5  &  il  travailli  telle- 
ment auprès  de  fon  Pére  &  de  fa 
Mére  >  qu  il  eut  le  bonheur  de  les 
gagner  à  Je>  us-Christ.  Il  eut  deux 
frères  5  Antoine  ôc  Jean  j  dont  le 
dernier  mourut  fans  enfans.  Il 
prêcha  pour  la  première  fois  à  Or- 
be, le  6^-  de  May  1531.  De  là  il 
fût  envoiè  à  Granfon ,  où  il  prêcha 
quelque  tems  {a) 

Dans  le  même  tems  les  Bernois 
envoièrent  de  nouveaux  Députez 
Le  iz.  à  Orbe,  *  pour  prendre  un  Inven- 
taire  de  tous  les  biens  du  Couvent 
de  S^^'  Claire,  afin  d'empêcher  aux 
Religieufes  d'en  rien  diltraire.  Et 
comme  jufqu'alors  les  Minifties 
avoient  é  é  dans  des  logis  publics* 
où  ils  vivoient  à  leurs  ùslïs  ,  les 
Députez  curent  ordre  de  ks  pour- 
voir 

W  ///.  ibideîîï;» 


ae  La  i^mjje,  j^i  v.  i  a..  41 

voir  d'un  logement  &  d'une  pen-  ^  5  3  I  » 
fion ,  aux  dépens  des  Couvens,  qui  O  r  s  e, 
avoient  le perfomat  de  quelques  Cu- 
res (a). 

Après  Viretj  Farel  confacra  pour^^^'^^^^ 
Miniftre  un  nommé  George  ^ri- ^''/^^j'^^^ 
VAT  >   furnommé  CMleis  ,  fils  de  ^atif 
Claude  Grhat,  Bourgeois  d'Orbe.  d'Orbe» 
George  Grivat  avoir  été  première- 
ment enfant  de  Chœur  à  Laufàn- 
ne.    Etant  revenu  dans  la  m.aifon 
de  fon  Pére  ,  le  Clergé  d'Oibe  le 
retint  pour  fon  Msître  deMufique^ 
6c  il  exerça  cet  emploi  environ  deux 
ans  5  après  quoi  il  embraffa  h  Ré- 
formation  5  au  grand  regret  de  fon 
Pérc,    Il  prêcha  d'abord  à  Orbe  i« 
10,  de  May:  &  de  là  il  fût  MiniC 
tre  à  Avcnche^  où  il  demeura  jut 
qu'à  fa  mort  5  prêchant  avec  une 
grande  fatisfa^flion  de  fon  Eglife, 
Il  y  mourut  de  pcfte  l'an  1550. 
laiffant  une  fen.me  &  quelques  en- 
fans  {!)), 

Les  Réformez    d'Orbe  prirent 
courage  dans  cet  intervalle  de  lems^ 
fe  donnèrent  la  liberté  de  fe- 
couër  le  joug  des  ordonnances  de 

lEgli- 

U)  MS.  Amp.  111.  b. 
M  MS.  Thom,  13.  1-4. 


'42  Hîjloire  de  la  K.éformatton 

I  J  3     rEglIfc  Ro  Tiaine ,  négligeant  Tob^ 
Or  B  E.  fervatiofi  des  fêres  ,  &  mangeant 
de  la  viande  dans  les  tems  défen- 
dus. Cependant  quelques-uns  d'en- 
tfeux  abuCérent  de  la  liberté  dont 
ils  jouiffoienr  5  &  s'imaginant  qu'il 
v.xàs  étoit  de  Teffence  de  la  RéformanoBi 
ùts  Ré- de  brifcr  les  Croix       les  Images  > 
formez  jj^  n'^q  laifférent  aucune.    De  pa*- 
relis  excès  n  ont  ja  mais  ece  ipprou^ 
vez  par  les  ge^is  fages  (4). 

Il  y  avoit  à  G/anfon  deux:  Cou- 
vents fort  riches  ,  Tan  de  Moi  nés 
noirs,  de  Tordre  de  *S'.  Benoit,  Se  Taii- 
trc  de  Cordeliers  Non- Réformez, 
De  même  iî  j;  avoit  à  Orbe  deux 
Couvents,  Fun  ds  Cordeliers,  l'au- 
tre de  Religieufes  de  S^^*  Claire  , 
qui  étoient  joints  l'un  à  l'autre-  pac 
un  Temple  bâti  entre  deuxj  en  telle, 
forte  que  les  Religieu/ès  pouvoient, 
,  fans  fortir  de  leur  Mailbn,  aller  en* 
tendre  le  fervice  des  Cordeliers  » 
par  une  galerie  attachée  à  la  mu- 
raille de  TEglife.  Il  y  avoit  même 
une  porte  dérobée  >  *  par  où  les 

deux 

(.:,)  Idem. 

^0\\  l'a  découverte  il  y  a  environ  4^ 
ans,  lors  qu'oa  dCmolit  h  voûte  de  cecic 
tglife. 


r       de  U  Smjfe.  Liv.  IX.  43 

deux  Couvents  avoient  communi.  1^3 1  ; 
cation  enfemblci  &  dont  les  Reli-O  REE. 
gieux  &  les  Rcligieufes  favoicnc 
bien  profiter. 

Les  Bernois  5  efpérant  que  la  Ré- 
formation s'introduiroir  enfin  dans 
les  deux  Bailliages  ^Oïbe  &  de 
Granfon  >  y  envoiérent  des  Députez, 
pour  mettre  en  Inventaire  tous  les 
biens  des  Eglifes^  &  les  Fribour- 
geois  y  en  envoiérent  aulîi ,  afin 
qu'il  ne  fe  fit  rien  fans  eux.  Fare!^ 
qui  étoit  encore  à  Orbe,  y  prêcha  ea 
leur  préfence.  Chri/iophle  Holard  > 
voulant  fignaler  fon  zélé  >  brifâ 
publiquement  une  Image»  Le  peu- 
ple s  en  plaignit  j  les  Fribourgeois 
le  firent  aufTi.  Les  Députez  de  Ber- 
ne promirent  de  l'en  cenfurcr.  Mais 
nonobilant  cela ,  il  en  abatit  en- 
core d'autres  5  &  il  ne  ceiTa  point 
qu'il  ne  les  eut  toutes  abbatiies. 
Dans  le  même  tems,  les  Députez 
de  Berne  ,  voyant  que  Farel  n  avoic 
qu'un  fort  petit  nombre  d'auditeurs, 
ordonnèrent  aux  Pierres  &  aux 
femmes  de  l'aller  écouter  huit 
)0'j.rs  durant,  ce  qui  fût  fait. 

La  Peniec6:c  étant  venuë  ,  * 
Fifcl  céléi^ra,  la  S^'^'  Cene  ave:  fon 

petit 


44  Hiftoirede  la  Réformât  ton 

ï  S  3  T  •  P^^i^  Troupeau.    Après  avoir  pré- 
Orbe.  ché  de  grand  matin,  il  diftribua 
la  Communion  ,  avec  des  hofties 
&  du  vin.    Les  Réformez  reçu- 
rent la    Communion  à  genoux. 
Prémié-       raporte  qu  entr'aurres  paroles 
x^  Cene  de  Liturgie,  Farel  demandoitaux 
Réfor-    Communians  ,  s'ils  Ce  pardonnoicrit 
(Xorle.        uns  aux  autres^  oc  aiant  repon- 
du qu'oui,  il  leur  donnoit  TEu- 
chariftie.    C'cft  là  la  première  Cène 
qui  fût  célébrée  dans  Orbe.  Les 
Communians  fûrent.  Hugonin  d' Ar^ 
Yiâj  *,  Chri(tophle  Holardy  fa  Mère, 
JeAH  Cordtji  3  fa  Femme  ,  Guïllau* 
me  FiiCt,  Se  George  Grivat  ^  dont 
j'ai  parlé.    Ap  è;  qu'ils  fè  furent 
rerirez  ,  le-.  Pierres  vinrent  dans 
l'Egli/e  à  leur  tour;  pour  y  chan- 
ter la  Mefre(^). 

Le  Mécreii  après  la  Pentecôte  j 
dernier  jour  de  May  ,  les  Religieu- 
fes  d'Orbe,  reçurent  un  ordre  de 
Berne  d'aller  écouter  les  Sermons 
des  Minières.  Les  Religieufes 
pour  parer  ce  coup  ,  envt  récent 
auprès  de  la  PrincelTe  d'O  arge, 
qui  refidcrit  à  Noznoj ,  la  prier 

de 

^  Dont  il  a  été  parlé  ci  devant  p^27* 
{a\  Thom,  l^.  l6. 


dslaSuijJe.  Lî  V.  I  X.  45 
de  les  recommander  à  Berne.  Cet-  1537. 
te  Princefle  envoya  deux  Gen-OR»E, 
tils  -  hcmmes  à  Berne  &  à  Fri- 
bourg ,  pour  faire  révoquer  cet 
ordre,  mais  ils  n'obtinrent  rien, 
Ainfi  on  leur  prêcha  trois  ans  du- 
rant, tous  les  jours  >&  au  bout 
de  ce  tems  -  là  Tordre  fût  révo- 
qué {a). 

Le  Dimanche 5  2.  Juillet,  C/;n/-  Non. 
tophle  Holard  abatit  le  grand  Autel,  J^^'l^^^^ 
qui  étoit  au  Chœur  de  la  grande  jf^^for- 
Eglife.    Les  Catholiques  en  furent  mez 
extrêmement  affligez  &  en  firent  à^orh, 
des  lamentations  tragiques, comme 
fi  toute  la  Religion  eut  été  perdue, 
ou  que  Dieu  lui-même  eût  été  ar- 
raché de  fon  Trône.    Il  y  avoit  à 
Orbe  fept  Eglifes ,  grandes  ou  pe- 
tires  5  ^  dans  ces  Eglifes  vingt  fix 
Autels.    Chriftophlc  Holard  ,  ac- 
compagné de  dix  ou  douze  autres 
Réformez,  en  renverfa  la  plûpart^. 
Mais  ks  Catholiques  ne  lailTérent 
pas  pour  cela  de  célébrer  toûjours 

leur 

M  id.  16, 

^  Pierre  fleur  Hit ,  qu'il  Ics  rcnvcrfa 
tous,  fans  en  laiflcr  v.n  fcul  dt'  relie. 
Mais  le  co.  traire  paroit  par  l.i  fuite.  Vo- 
>;ez  ce  qui  eft  dit  ci  drlfous,  de  ce  c]ui 
k        à  Orbe,  en'Jauvici  1^32.. 


'46  Hijloire  de  la  Kéformatiof^ 

|f53'ï'  leurs  Oiîîces  accoûtumez  dans  ces 
Eglifcs  5  &  fe  fervoient  de  table 
aulieu  d'autel  pour  dire  la  Melfe  [a], 
La  Réformation  ne  s'introduifit 
pas  à  Pajernc  ?  avec  plus  de  tran- 
quillité 5  que  dans  les  autres  lieux 

I^AYER-  du  pays.  La  Ville  de  Payerne  écoic 
liée  avec  celle  de  Berne,  par  un  An- 
cien Traité  de  Combourgeoifie,  ou 
d'Alliance  défenfive,  peut-crre  auffi 
ancien  ,  que  la  Ville  rnéme  de  Ber- 
ne. Du  moins  dans  un  Afle  que 
j'ai  vû ,  du  renouvellement  de  cette 
Alliance,  daté  du  mois  de  Février 
de  Tan  1 3  4.3  .'^  il  eft  dit  expreiîsment, 
que  c-ett^  Alliance  étoit  ancienne. 
C'éroit  en  vertu  de  cette  Alliance> 
que  la  Ville  de  Payerne  avoir  four- 
Com-  ni  du  fecours  aux  Bernois  5  l'an 

mence-  ir^o.  contre  le  Duc  de  Savoye. 
men:  de  _  '  ^     ,      ^  j  f, 

Referma  Dans  le  même  tem.s  ceux  de  Pa- 

tion       yerne  promiirent  aux  Bernois  ,  de 

'^^"^^f^'  jailTer  prêcher  librem.cnt  la  Réfor- 
me Vjlle.       .       ,  „     ,  . 

mation  chez  eux  ,  oc  de  ne  faire 

aucune  infuke  à  ceux  qui  Tembraif. 

fercienr.  IVlais  ces  p.'om.cflts  fuient 
traverfc  txécutées.  Il^  Liloient  tous  les 
vive-  jours  quelques  infultcs  aux  Réfor- 
ment, mez  5 

(a)  MS-  nom.  17.  b.  &lg, 
^4rftrii/,  de  rAXl^KN  E, 


\ 


deUSui^e.  LI^^  rx.  47 

inez;  empêchoient  leurs  Bourgeois  j  j3x, 
ôc  les  autres ,  4'embralTcr  la  Ré- 
formation  j  ne  vouloisnt  pas  per- 
mettre qu'on  lût  la  parole  de  Dieu, 
ni  qu'on  s'en  entretint ,  beau- 
coup moins  qu'on  la  prêchât  publi- 
quement. 

On  en  faifoit  tout  autant  à  Avm-  ^J^-^"" 
che ,  6c  fans  aucun  égard  aux  pro- 
melîcs,  que  la  Bourgeoifie  avoic 
faites  aux  Seigneurs  de  Berne  ,  ils 
punilToient  ceux  d'entr'eux  qui  al- 
ioient  à  Moîat ,  ou  ailleurs  >  écou- 
ter les  Miniftres. 

Dans  ce  tems-îà  la  Ville  de  Ta- 
ycrne  fouhaita  de  renouveller  fon 
Alliance  avec  Berne.   Les  Bernois 
y  confentirent ,  &  députèrent  quel- 
ques ConfeilJers  pour  ce  fujet ,  au 
commencement  de  Juin.  Ces  Dépu-  Hépa. 
tez  paffans  à  ylvenche,  h  3-  J^i^^^^^rtî 
y  âffemblérent  le  Con/êil ,  &  lui  pour 
remonticrent  de  la  part  de  leurs  ^omenir 
Seigneurs.        jgr^'ils  étoi-ent  fort  v 
>,  furpris  de  ce  q'.ie  ,  contre  la  pro-  Aienche 
»  meire  que  le  Conlcil  leur  avoir 
»  faite,  les  Réformez  étoient  in/ultés 

inquiétez  ,  Se  niême  punif ,  lors 
?5  qu'ils  aJloient  éconier  la  parole 
t)  de  Dieu:  .Q£k  la  vérité  leiu  in- 
tention 


48  Hifioire  de  la  Kcformation 

rj3l.  >^  tention    n'étoit    pas  ,  qu'on 
forçât  perfonne  a  aller  au  prê- 
che,  mais  qu'ils  fouhaitoient  feu- 
>j  lement>  qu'on  laiflat  à  chacun 
>,  une  entière  liberté  de  Confcience, 
»  pour  aller  au  prêche  ou  à  la  Mef. 
>j  fe  >5  .    Ils  les  exhortèrent  donc  a 
s'abftenir  de  toute  violence  *. 
Député      De  là  les  Députez    allèrent  à 
à^P^yel^-  pour  renouveller  l'Alliance, 

ns,       mais  avant  qu'e  de  le  faire  :  ils  re- 
prochèrent aux  Payernois  les  ava- 
nies perpétuelles     ^^'ils  faifoient 
>,  aux  Réformez  ,   contre  la  pro- 
5>  meffe  qu'ils  avoient  donnée  à  LL. 
5,  EE.  l'année  précédente.    Ils  leur 
5>  déclarèrent  que  LL.  EE.  étoient 
très   mal-fatisfâites  d'une  pa- 
>,  reiile  conduite  ,  &  qu'ils  avoient 
>,  ordre  de  leur  demander  une  exé- 
cution  entière  de  leurs  promefles* 
&  pleine  liberté  Confcicnce  pour 
5,  ceux  qui  voudroient  cmbraffer 
5,  l'Evangile,  faute  de  quoi  ils  s'en 
re^ourneroient  fans  renouveller 
l'Alliance  +  >, .  Il  y  a  apparence 
que  la  réponfè  des  gens  de  Payer- 
ne  ne  fût  pas  fatisfaifante  ,  puifque 

l'Al- 

^  MS.  Amp,  m.  B.  inftr.  77. 
■tUS.Amp,  &  B.  inftr. 


deU  Suife.  Lîv.  IX.  49 

TAlliance  ne  fût  point  renouveJîéej  i  5  3 
&  que  cette  affaire  fut  différée  jus- 
qu'au mois  de  May  de  Tannée  Sui- 
vante. Sans  doute  les  Bernois  3 
avant  que  de  s'engager  de  nouveau> 
voulurent  voir  quel  fonds  il  j 
avoit  à  faire  fur  les  promeffes  de 
ceux  de  Payerne. 

IV.  Tous  les  rnouvemens>  qu*oa 
âvoit  vus  à  u4vmche  ,  à  Payerne^  de 
à  Ode  ,  contre  Farel  &  la  Réfor- 
mation  qu'il  prêchoit,  n'étoient  que 
des  bagatelles  ,  en  comparaifon  de 
ceux  que  l'on  vit  à  Granfon,  où  il  Gr  Ac- 
courût rifque,  plus  d'une  fois,  de^^"^* 
perdre  la  vie.    Il  alla  d'Orbe  à 
Cranfon  dans  le  Printems,  accom- 
pagné de  Claude  de  GUuîiràs ,  MiniS 
tre  de  Tavanes^  dms  le  deifcin  d'y  ^^^^^^^^ 
prêcher.    Mais  ils  y  fûrent  dabord  ^Jrunjb/t, 
mal  reçus  l'un  8c  l'autre  j  (  non-  &  y 
obftant  que  les  Seigneurs  de  Berne  ^^^^^^J^ 
euifent  écrit  au  Baillif,  &:au  Piieur,  (îi^yie. 
JMcoUs  de  Dksbuih ,  de  lailTer  prê- 
cher  paifîblement    la    parole  de 
Dieu  5  )  de  forte  qu'il  n'y  pût  faire 
que  peu  de  fiuir.  Le  Gaidiendes 
Cordelicrs,  nommé  Frère  Guy.  s'op- 
pofa  à  Farel  ,  difaiit  qu'il  e.oic  un 
héiétique,  &  que  quant  à  lui  A 
Tom,  IF.         C  fouiien- 


50  Hiftolre  de  la  Keformatîon 

I  jjï,  foutiendroir  fa  Religion  jufquà  la 
G  R  A    morr.    QLielques  Réformez  voulu- 
s  o  N.    rent  cnfuire  aller  au  Prieuré  d'en- 
haut  avec  Farel,  mais  les  Moines 
ne  les  voulurent  pas  laifTer  entrefi 
Le  Sacriftain  menaça  Farel  d'un 
piftolec ,  qu'il  avoic  fous  fa  robe, 
II  voulut  même  tuër  le  Miniftre  de 
Tavanesj  &  enfermer  Farel  dans 
le  Cloître  5  &  un  autre  voulut  per- 
cer le  Miniftre  de  Tavanes  d'un 
coup  de  couteau.     Lors   que  de 
GUuîïnis  y  voulut  prêcher ,  on  l'en 
empêcha  par  un  tumulte,  6c  Ton 
tint  les  portes  des  Temples  fer- 
mées, pendant  quinze  jours^  de  forte 
que  les  Miniftres  furent  contraints 
de  prêcher  devant  les  Temples.  Ce- 
pendant les   Seigneurs  de  Berne 
écrivirent  au  Baillif,  de  punir  ceux 
qui  avoient  commis  ces  défordres» 
&  fur  tout  ceux  qui  avoient  voulu 
affaflTiner  le  Miniftre  de  Tavanes  ; 
mais  il  n'en  fît   rien.     Bien  loin 
de  là  \  les  Catholiques  fe  plaigni- 
rent injuftement  que  les  Réformez 
avoient  voulu  entrer  par  foi  ce  >  au 
Prieuré.   Là  defTus  les  Bernois  y 
»  Le  12.  envoyèrent  *  deux  Dépurez,  qui  au 
fonir  de  Neuchatd ,  allèrent  à  Cran- 


«      de  la  Suijje,  Liv.  IX.  jr 

fbn  >  où  ils  firent  venir  Farel,  pour  [  Jjr  »" 
s'informer  exadlement  de  tout  ce  Députa- 
qui  s'étoit  pafle.  Us  exhortèrent  ^^"^ 
la  Bourgeoifie ,  a  permettre  qu'on  Cj-^^nfon 
leur  annonçât  la  Parole  de  Dieu  , 
puifqu'il  y  en  avoir  quelques-uns 
d'entr'eiix  qui  le  fouhaitoient  s  & 
ordonnèrent  Que  les  Eglifes  des 
deux  Couvents  fuflent  ouvertes> 
afin  que  les  Miniftres  y  puffent  pr^ 
cher  >  &  que  tous  ceux  qui  vou- 
droient  les  aller  écouter,  puflent  le 
faire  fans  empêchement  j  Que  per- 
fonne  n'eut  à  les  rnfulrer  ,  ni  les 
maltraiter  ,  déclarant  que  LL.  EE. 
vouloient  abfolument  que  la  Parole 
de  Dieu  fût  prêchée.  Us  cenfu- 
rérent  aufTi  rudement  les  JVloincrj 
qui  avoient  injnrié  Farel,  en  l'apel- 
lant  hérétique^  &c  fils  uejuif ,  vou- 
lant qu'ils  piouvallent  ces  inji^res> 
ou  qu'ils  fe  rerra(nalTenr.  Enfin  ils 
cenfurérent  à  ffi  le  EailliF  ,  de  ce 
qu'il  n'avoit  pas  puni  celui  qui 
avoir  voulu  ti  ër  le  Minilt  e  de Ta- 
vanes  5  d'un  coup  de  couteau,  ni 
ceux  qui  avoi.nt  caufé  du  rumulre 
pour  l'empêcher  de  piêthei,  &  qui 
avoi'.nt  tenu  fcin,é(S  Ks  poit(.s 
des  Eglifes  ;  pendant  15.  jours.  Us 
C  a  allcient 


5^  Hijloire  de  la  Tieformathn 

*î  5'3 1 .  allèrent  au  Prieuré  des  BénédidlinSâ 
Gran- pour  défendre  Tacftion  dCvS  Réfor- 
£  o  n.     niez  ,  &  tirèrent  le  Sacriftain  en 
caufe  j  puour  avoir  voulu  enfermer 
'^Farel,  &l  affafliner  le.Miniftre  de 
"Tâvanes  *. 

Mais  ce  fut  encore  pis  dans  le 
■mois  de  Juin  5  le  jour  de  la  *S'.  Jcan  ^ 
^     &  le  lendemain.    Depuis  le  der- 
nier tumulte  jufqu'alors  ,  tout  s'é- 
toit  terminé  à  des  difpuresjque/vîyf/. 
Tiret  6c  d'autres?  avoient  avec  les 
Moines  j  particulièrement  avec  le 
Gardien  ,  qui  prêchoit  comme  eux^ 
tous  les  Dimanches  ,  &  qui  paffoit 
pour  fàvant.    Ils  fe  refutoient  les 
uns  les  autres  j  &  l'on  s'en  tenoit 
îà.    Mais  le  24.  Juin  ,  jour  de  la 
^^ou-  S,  Jean  ,  Farel  étant  allé  aux  Cor- 
T^ullf^'  ^^^i^fs  avec  Glautinis  5   pour  euïr 
caiifé     îe  Sermon  d'un  Cordelier  venu  de 
par  le  Laufanne ,  rinterrompic  &  le  re- 
ztle  im-  £^     fjjj.  quQj      Châtelain  du  lieu 
dcf^r^l,  chargea  barel  dnijures  &  de  coups 
de  poings.    A  ce  fîgnal  ,  tous  les 
Jufticiers  ,  le  peuple ,  les  Corde- 
liers ,   &  plufieiirs  perfonnes  qui 
étoient  venuës  d'Yverdun ,  fe  jec- 
îérent  fur  les  deux  Minilb^s  5  les 

chac- 

"'^f'  MS.  Amj>,  111.  B.  Inftr.  70. 


de  la  Sî^ijje\  L I V .  I X.  5-3 

chargèrent  d'injures  5  de  coups  de  I 
piez  &  de  poings,  ^  les  malrrai-G r  a  m 
terent  cruëllenienr.  Glautims  Técri-  ^  ^ 
vit,  le  même  jour  5  à  j^^^w  Jaques 
de  ^^^ATTE  V  ILLE  Scigncur  de 
Colombier  ,  Député  de  Berne  ,  qui 
fè  trotivoit  alors  à  Colombier,  belle 
terre  firuée  à  3.  lieuës  de  Granfon^ 
au  bord  du  Lac,  dans  le  Conté  de 
Neuchatei.  Cependant  quelqu'un 
ayant  donné  un  faux  avis  auxCcf^ 
deiiersj  que  les  Réformez;  vouloient 
abatre  leur  grande  Croix  ,  ils  s'ar^ 
mcrent,  &  Hrent  quelques  difoofis» 
tions  pour  les  en  emf  ècher.  De 
Vratteviiley  ayant  reçu  la  lettre  de 
GUuîims  j  partit  le  *  lendemain  î  .^^ 
pour  Granfon  ,  ce  y  ecant  ariive, 
il  alla  dans  le  même  T  emple  pour 
ouïr  le  Sermon  duCordeliur.  Corn* 
me  il  montoit  fur  la  galerie ,  il 
rencontra  des  Moines  qui  l'arrête^ 
rcnt  fur  les  degrez,  &  ne  voulu- 
rent pas  le  laiiïer  pafler.  Il  y  ea 
eut  même  un  ,  qui  voulut  le  pout 
fer  en  arriére.  Son  Vaht  repoulTa  le 
Moine:&  le  contraignit  de  remonter. 
Il  lui  feniir  une  hache  fous  fa  robbe; 

après  pîuHeurs  ciTorrs,     bien  de 
laréfiftancc  de  la  part.duMoineJl  la 
C  3  lui 


54  Hijloire  de  U  Kéformation 

îç3î,lui  prit,  6c  voulut  le  tuër  5  mais 
G  R  A  N  '  fon  Maître  l'en  empêcha.  Pendant 
SON.  ce  tems-là  il  y  eut  un  vacarme  ef- 
froyable dans  TEglife.  Néanmoins 
il  n'y  eut  que  du  bruit ,  qui  fut 
enfin  appaifé.  De  FFattevïlle  mit 
fon  Valec  fur  les  degrez  de  la  ga- 
lerie 5  pour  empêcher  que  perfonne 
n'entrât  ni  ne  fortit  de  là.  Le  Cor- 
delier  prêcha>  après  fon  Sermon, 
Faïel  écant  monté  en  Chaire  difpu- 
ta  un  peu  contre  lui,  après  quoi 
il  defcendit  &  fe  retira.  Cepen- 
dant les  deux  Moines,  qui  avoient 
voulu  fermer  le  pafTage  à  de  Wat- 
teville ,  furent  mis  en  prifon  par  le 
Baillif  5  à  Tinflancc  de  ce  Seigneur. 
On  difoit  qu'il  y  a  voit  d  autres 
Moines,  qui  avoient  eu  aufllî  des 
haches,  &  qu'il  y  avoit  une  con- 
fpiration  fecrére,  pour  afTa/Tiner  les 
Miniftres  6c  les  Réformez ,  &  que 
c'étoic  pour  ce  defTein ,  qu'il  étoit 
venu  tant  d'Etrangers  armez ,  par- 
ticulièrement de  ceux  dTverdun. 
C'eft-là  la  relation  ,  que  De  Vl^dt^ 
t-:vïlU  en  écrivit  lui-même  à  LL. 
EE.  le  même  jour  ,  25.  Juin  *. 

H 

^  MS.  GrooSf. 


delaSuiffe,  Li  v.  IX.  5$ 

Il  y  eut  d  abord  à  Granfon  2.  1^32; 
Députez  de  Berne  envoyez  pour  g  r  a 
Ajoinrs    à   de   WarteviJie  >  qui  son. 
examinèrent    *  le  Moine  ,   qui  *  Le  ^%* 
avoit  eu  la  hache,  &  voulurent  fa- J"^"* 
voir,  pourquoi  il    Tavoit  prife? 
Il  répondit,  que  cétoit  pour  em- 
pêcher Farel ,  de  rompre  le  Cruci- 
fix ,  qui  éroit  fur  la  galerie ,  dont 
le  Couvent  lui  avoit  confié  la  garde, 
Enfuire  interrogé,  pourquoi  il  avoit 
repouffé  De  VVdttevïlle  ?  Il  dit,quil 
ne  le  connoiffoit  pas  ,  &c.  Les 
Députez  voulurent  qu'on  mit  ces 
Moines  à  la  torture  j  mais  la  chofê 
ne  s'exécuta  pas  +.    Ils  les  firent 
feulement  attacher  à  îâ  cordô  ,  & 
mettre  la  pierre  au  pié  ,  mais  ils 
ne  les  firent  pas  tirer.  Ces  Moines 
prateftérent  folemnellement  5  quils 
navoient  eu  aucun  autre  deflein, 
que  d  empêcher  Farel ,  de  monter 
fur  la  galerie ,  afin  qu'il  n'interrom- 
pit pas  leur  Prédicateur ,  comme 
il  avoit  fait  le  jour  précédent  {a). 
On  découvrit  pourtant  une  tren- 
taine de  femmes  ,    qui  âvoient 
conjuré  de  faire  un  mauvais  parti  à 
C  4  Farelj 

t  Ibid. 

W  MS.  Gronjf, 


56  Hijloîre  de  la  ^déformation 

Farel  ^  entre  lesqu'elles    il  y  en 
Gran  avoit  une   entr'autres  qui  avcic 
SON.     voulu    aller     fur    la    galerie  , 
avec  fon  tablier  plein  de  cendres  & 
de  terre  ,  pour  jetter  dans  la  bou- 
che de  Farelj  quand  il  parleroit  [a). 
Pendant  tout  le  tems  de  leur  pri- 
fon  les  deux  Moines,  furent  bien 
traitez  :  &  au  bout  de  quinze  jours 
on  les  relâcha  (^).    Durant  ces 
quinze  jours  on  mit  fix  hommes 
en  garnifon  dans  leur  Couvent , 
pour  le  garder  ,  &  empêcher  que 
les'  Religieux  ne  s'enfuïlTent  ,  & 
n'emportâlTent  les  biens  de  la  Mai* 
foni  Ds  çes  deux  Moines  ?  l'un 
s  appeîloit  Gonclot  y     l'autre  Tiffor, 
Deux  ans  après  ,  ils  enibnlicrenÊ 
tous  deux  la  Réformation,  ^l'un 
fût  Miniftre  à  Fontaine  proche  de 
Gran  fon  5  ôc  l'autre  à  Bavojie  (  c  ); 
&  Chavornay. 
^^^9^-  ,     Dans  cet  intervalle  Farel  alla- 
Fye  ,^  &  prêcher  dans  les  villages  du  Bal- 
en  quel-  liage.  Il  fut  d'abord  écouté  favora- 

ques  au-  ble^îcnt  dans  celui  de  Fies ,  ou  Fye. 
très  Vil-  «     \  •         Al/  1 

bges.    Après  y  avoir  preihe  quelques 

jourS:. 


M  MS.  Grooff. 

Ib)  MS.  Thom,  16.  b.  17. 

(r)  ib.  17. 


de  la  Smjfe.  Liv.  I  X.  57 

jours  ,  ii  y  fît  tant  de  fruit  ,  que  i  5  31. 
les  Réformez  l'emportèrent  en  nom-  G  r  a  n- 
bre  fur  les  Catholiques  ^  &  profi-  son» 
tant  inceffamment  de  la  conjondu- 
re,  il  fît  alTembler  \\  Communau- 
•téjau  commencement  de  Juillet,pouj: 
mettre  la  Religion  en  fuffrages  5  Sc 
là  à  la  pluralité  «des  voix  la  Reli- 
gion Réformée  y  fut  introduite,  & 
la  Catholique  abolie.  Les  Sei- 
gneurs de  Fribourg  s'en  plaigni- 
rent ,  comme  d'une  infraâion  fait^ 
à  leur  autorité ,  &  en  firent  de 
grands  Griefs  à  Berne  contre  Fareï. 
Les  Seigneurs  de  Berne  n'approuvè- 
rent pas  non  plus  la  conduite  de 
Farel  à  cet  égard.  Ils  lui  en  écri- 
virent leur  fentiment  *^  6c  lui  or-*  r^e  7- 
donncrent  ds  s'abftenir  à  l'avenir 
de  ces  fortes  d'a<fliGns  5  qui  ne 
convenoient  qu'à  des  Magiftrats 
Souverains ,  ou  à  leurs  Députez  : 
Cependant  ,  prêchez  librement  ,  la 
Parole  de  Dieu,  lui  difoient-ils  j  & 
lors  que  vous  apercevrez  que  le  Peu- 
pk  la  veut  embraffer  :  ou  que  la  plus 
grande  partie  fera  pcrfu.xdée  a  le  fai- 
n-y  faites  le  nous  [avoir.  Nous  y  envoie^* 
rons  j^os  Députez  y  pour  mettre  -la, 
derni^e  mm  a  cette  affaiie.  Ou  fi 
C  5  4'cu>: 


5  8  Hiftoire  de  la  ReformatioH 

ï  5  3 1  •  ^'^^x  mânes  ils  veulent  sajfembler  pour 
Gra     recevoir  l'Evangile i  nous  ne  le  rejuje^ 
^  û        roris  pas.    Cela  neft  pas  tonttairey  aU 
paix  Nationale  ,  conclue  à  Brenigar- 
te  >  que  les  Fiioourgeois  allèguent  joU" 
vent      Il  y  eut  tncore  quelques 
autres  villages  ,  où  la  MelTe  fût 
abolie  par  les  paffans. 
Non-      Le  Jeudi  6,  Juillet  ,  Chri[lophlc 
Holard  &c  Antoine   Tavel  alléient 
Orée,  ^  trouver  le  nouveau  Châtelain  ,  An^ 
toine  "Secreflain ,  qui  avoir  été  mis  à 
la  place  d'Antoine  Agafje ,  &  firent 
^     entre  fes  mains  une  accufation  cri» 
minelle  contre  les  Prêtres  j  les  ac- 
cufant  d'être  des  meuitriers,  offrant 
de  fe  rendre  prifonniers  avec  eux. 
Là-deffus  on  les  envoïa  en  prifon> 
&  l'on  ordonna  aux  Sergens  d'y 
conduire  auffi  les  Prêtres ,  Il  y  en 
eut  un,  nommé  Pierre  Bovey yhoïumç. 
puiffant  &  vigoureux ,  qui  rélifta 
tellement  aux  Sergens  ,  ôc  les  bat- 
tit fi  bien  5  qu'ils  le  laififérent  aller. 
Ils  n'en  prirent  qu'un  ,  nommé 
JBlaife  Floret ,  qu'ils  conduifirent  en 
prifon.    On  les  traita  tous  honnê- 
msnt,  foit  pour  le  logement  >  foit 
pour  la  nourriture  j  &.  ils  avoient 

^  ^erne  Latin.  MiiTiv.  305. 


I      delaSuife.  Liv.  IX.  59 

Ppermiiïion  daller  par  tout  le  Châ-  IS3I» 
teau  librement.  Mais  pour  les  au-  O  r  b  e. 
très  Prêtres;  le  peuple  fe  mit  en 
armes  pour  les  deffendrej  6c  du- 
rant fix  jours  la  populace  mutinée 
fut  toujours  dans  les  Eglifes  avec 
toutes  fortes  d  armes,  pour  s'oppo- 
fèr  à  tous  ceux  qui  auroient  voulu 
les  faifir ,  &  les  empêcher  de  dire 
la  Méfie.  Le  Dimanche  p.  Juillet, 
le  Banderet  de  Pierre  fleur  fît  aflem- 
bler  toute  la  Communauté,  &  leur 
demanda,  s'ils  vouloient  tousper- 
Cftcr  dans  la  foi  de  leurs  Pérès  ? 
priant  ceux  qui  étoicnt  dans  ce 
îentimcnt  de  lever  le  doigt,  5c  les 
autres  de  fc  retirer.  Là  deifus  toute 
Taffemblée  leva  le  doigt  8c  ils  protes- 
tèrent tous,  qu'ils  étoient  réfolus 
de  garder  la  foi ,  d'imiter  lès  actions 
&  les  mœurs  de  leurs  Pérès.  Après 
cette  déclaration  il  fut  refolu  de 
pouffer  l'affaire  des  Prêtres,  au  nom 
de  la  Bourgeoifie  ;  &  l'on  recou- 
rut à  Fribourg.  Les  Seigneurs  de 
Fribourg,  ayant  apris  la  détention 
du  Prêtre,  le  firent  relâcher ,  &:les 
autres  demeurèrent  en  prifon  juf. 
qu  au  22.  Juillet,  qu'ils  furent  aiifii 
tiargis,  Mais  les  deux  Réformer 

c  6  , 


60  Hi/loire  de  la  K^formation 

1 5  3 1 ,  HoUrd'  &  Tavfl ,  furent  repris  pe>iî 
Orbe,  de  jours  après  &  conduits  en  pri- 
fon  ,  avec  douie  ou  treize  autres, 
de  leur  parti,  pour  avoir  abatu  les 
Autels,  &  ils  y  furent  tenus  étrci^ 
tement  pendant  trois  jours  ,  au 
pain  Se  à  l'eau  *• 

Le  Dimanche  25.  Juillet,  Jean? 
H  G  L  A  K  D ,  ou  HouLird,  Bourgeois 
d'Orbe ,  frère  de  Chnftophle ,  prêcha 
Hiiloire<  pQUj- I3  première  fois  à  Orlcy  dc^ 
IhUrd!^  vant  les  Religieufes  de  S^^-  Claire, 
îl  avoit  été  dès  fon  enfance  defti- 
né  par  fon  Pére  à  être  homme  d'E* 
glife.  Il  aprit  d'abord  laMufique, 
c  étoit  par  là  qu'il  falloit  commen- 
cer: il  s'en  dégoûta  ,  &  fut  à  la 
guerre  pendant  quelque  peu  de 
tems,  mais  il  revint  à  fa  prémiére 
profeiïîon,  fut  fait  Chantre  de 
la  Chapelle  du  Duc  de  Savoye  à 
Ghambery.  De  là  il  prit  Tordre 
de  Prêtrife  ,  &:  y  vécut  fort  long- 
tems  en  tiès-bonne  réputation.  Il 
fût  Chanoine  de  TEglife  Collégia- 
le de  S,  Nicolas  de  Fribourg ,  ^  en- 
fiw  Doyen  j  vivant  dans  une  gran^- 
de  cftime.  Dans  la  fuite  ayant  ou- 
vert les   yeux  à  la  lumière  de 

l'EVaiî- 

MS.  ThQTTt,  18.  19. 


de  U  Smfe.  Li  V.  IX.  6i 

fE/angile,  il  entretint  fecrétement  l^'i  l. 
un  commerce  de  lettres  avec  les  Mi-  O  r  b  f. 
niftres  de  Berne  ^  ce  qui  ayant  été 
découverte  il  fut  mis  en  prifon.  Les 
Seigneurs  de  Berne  demandèrent 
fa  libeTe.  A  leur  confidération 
le  relâcha  j  mais  il  fût  banni  de 
Fabo'jrg.  li  fe  dévoua  donc  au 
S:int  Miniftère,  &  fût  d abord  Mi- 
niftre  àla  Bonne  P'ilU  près  deBienne. 
De  là  les  Bernois  l'établirent  à  Bay 
ou  Bex  5  dans  le  Gouvernement 
ô^Aîgle.  Il  fat  marié  trois  fois^  6c 
eut  trois  enfans  de  fa  féconde  fem- 
me. Il  mourût  à  Orbe  ie  24.  Sep- 
tembre 15(^9.  ayant  demandé  fon 
congé  quelque  tems  auparavant)  à 
caufe  de  fon  grand  âge^  pour  vivre 
en  repos  lerefte  de  fes  jours*. 

V.  Pendant  ces  troubles  de  \i 
ville  d'Orbe,  les  Réligieu/ès  de  S^^'- 
Claire,  qui  avoient  bonne  envie  de 
fe  retirer  en  Bourgogne  5  avec  tous 
lés  biens  de  leur  Couvent,  négociè- 
rent fccrérement   pour  ce  dcffein  ^^^^^^^"1 
avec  Madame  Philiberte  de  ques Re- 
Luxembourg  ,  PrincefTe    d'Orange,  ligîcujes. 
Elle  leur  envoyoit  routes  lesfèmni- 
ncs  un  M'^iiTager,  par  le  moyen  du- 
quel 

MS.  Thom,  vj,  b.  ao. 


62  Htjloire  de  U  Réformation 

I  S  3 1  •  S"^^        ^^'^^         donnoient  de 
Orbe,  leurs  nouvelles,  &  envoyoient  en 
Bourgogne ,  la  plupart  des  orne- 
mens  deTEglife,  &  leurs  plus  pré- 
cieux meubles.  Enfin  ,  le  2  8.  Juillet, 
dix  fept  d'entr'elles  fortirent  de  nuit 
de  leur  Couvent,  efcortées  de  deux 
Religieux ,  &  du  Banderet  de  Pier- 
refleur ,  qui  étoit  aufTi  de  leur  Com- 
plot, &  qui,  (comme  il  nous  l'a- 
prend  lui  même,)  fondoit  en  lar- 
mes à  la  vtië  de  ce  trifte  Speftacle. 
Elles  montèrent  hors  de  la  ville, 
fur  des  chariots,  que  la  Princeffe 
leur  avoit  envoyez  ,  &  elles  allè- 
rent à  Aoferojf ,  où  cette  généreufê 
Dame  les  reçût  avec  grande  joye, 
les  attendant  avec  toute  fa  Nobleffe» 
Elle  les  logea  dans  la  maifon  du 
Seigneur  de  VFufiens ,  où  elle  les 
entretint  environ  un  an  {a).  Je 
remarquerai  ici  à  cette  occafîon,  que 
Tannée  précédente  1530,  le  Prince 
Généro-  à^Otarge ,  qui  commandoit  une  ar- 
fité  du  mée  Navale  dans  la  Méditerranée  3 
d'o  an  ^^^"^  trouvé  fur  des  VailTeaux  , 
ge  erv"'  quantité  de  Bourgeois  &  de  Sujets 
vers      de  Berne  prifonniers  ,  qui  avoient 
quel-     été  dans  les  guerres  de  France  & 

notSt 

W  MS.  Thom-ii,  o,  11. 


dtUSuijfe.  Liv.  IX.  63 

de  Naplesj  les  délivra  généreufe-  1531. 
ment  de  leur  captivité.    Les  Sei-OREE. 
gneurs  de  Berne,  l'ayant  appris,  en 
écrivirent  *  à  la  PrinceiTe  fa  M  ère ,  ^j^ful^y 
pour  Taffurer  de  leur  reconnoiffan-  isso.' 
ce  (4).    Ils  la  prioient  en  même 
tems  d'avoir  la  bonté,  quand  elle 
ccriroit  au  Prince  Ton  fils  ,  de  lui 
marquer  qu'il  leur  fera  plaifir  de 
leur  envoyer  les  noms  de  tous  ceux 
qu'il  avoir  délivrez,  afin  qu'iL  fâ- 
chent qui  font  ceux  d'entr'eux,  qui 
font  mortfi  »  ou  encore  en  vie  ,  & 
qu'ils  le  prient  inftamn.ent  de  re- 
chercher encore  tous  ceux  qui  fe- 
ront ou  pourront  être  iur  les  V^aif. 
féaux  5  lui  offrant  toute  forte  de  re- 
connoilTance. 

Mais  pour  revenir  à  nos  Reli- 
gieufcs  d'Orbe  5  le  bruit  de  leur 
évafion  s'étant  répandu  dans  la 
Ville,  le  Bâillif  alla  voir  l'Abbe/Te:, 
&  lui  demanda ,  pourquoi  fcs  filles 
5\'toïent  retirées  ?  L'Abbefle  répon- 
dit ,  que  la  f^im  &:  la  difettc  les 
avaient  chalTées  ,  &  que  d'ailleurs  ' 
elles  éroitnt  perpétuellement  en 
crainte  de  quelque  mauvais  traite- 
ment 


W      tatin.  Miffiy.  2i^j.b> 


64  Hifloïre  de  la     format  ion 

ï'5  3  F .  nient  (/î).  En  effet  elles  étoienî 
©  R.  B  H,  pauvres  ,  &  j'ai  trouvé  dans  les 
Regrres  du  Confèii  de  Moudon, 
qu'elles  firent  quêcer  alors  par  le 
pays  ,  apparemment  pour  leur 
voyage  5  6c  le  27.  Juillet,  veille 
de  leur  départ ,  le  Confeil  de  Mou- 
don  leur  fît  donner  deux  florins 
de  Savoy e  par  Charité.  L'AbbelTe 
demanda  aufTi  au  Baillif  permi/Tion 
de  fe  retirer ,  avec  les  autres  Reli- 
gieufes,  -qui  étoient  reftées,  mais 
il  la  leur  refufa  ,  &  mit  à  la  porte 
de  leur  Couvent  une  garde  d'une 
douzaine  ds  jeunes  hommes  ,  tous 
Réformes  pour  les  empêcher  de 
l^ou-  {çfiix^  fans  permifïîon  (  ^  ).  Cette 
^X^'^'aaion  du  Baillif  mit  le  peuple 
en  fureur.  Conduit  par  les  prin- 
cipaux &  les  plus  apparens  dont 
étoit  nôtre  Auteur  le  Banderet  de 
T'/Vz-r'^/c^r^ils  allèrent  tous  demander 
qu'il  6tât  cette  garde,  &;  laiiTât  ou- 
vrir le  Couvent,  afin  que  chacun 
pât  entrer  dans-  l'Eglife.  D'abord 
li  le  refufa  vrnais  voyant  en  fuite 
que  le  tumulte  alloit  en  augmen- 
tant, 5c  craignant?  qu'il  nea  arr> 

vât 

(î)  MS.  Thom,  J.  c. 
Ibl  MS.  'lijQm.'h'c. 


de  'U  Suîfje.  L I V.  I  X.    6 S 

vât  plus  de  mal  ,  d'autant  plus  V^Sf» 
que  c  ecoit  alors  *  la  fêre  de  ^S".  P f 
Germain ,  Patron  de  la  Ville  ,  li  let. 
renvoya  ces  gardes  ,  &  fit  ouvrir 
le  Couvent,  après  quoi  le  peuple 
y  entra  en  foule.  Cependant,  com^ 
me  cette  émûte  étoit  d'u»  mauvais 
exemple,  le  Baillif  fit  mettre  en 
prifon  i*,  ceux  des  pl^s  apparens,  +  Le^J- 
qui  en  avoient  éré  les  Auteurs.  Le 
Confcil  envoïa  fur  le  champ  deux 
Dépurez  à  Berne  fîc  à  Fribourg  , 
pour  follicirer  leur  élargiffcment.  Ils 
l'obtinrent,  mais  à  condition  qu3 
ces  gen&-là  payeroient  cent  écus 
d'amende  pour  leur  foulévemens 
{a).  Ils  prétendirent  la  payer  de  U 
bouife  commune  de  la  Bourgeoifiej 
Mais  lès  Seigneurs  de  Berne  s'y 
oppoférent,  ïc  voulurent  qu'ils  la 
payalTent  chacun  de  fon  bien  pro- 
pre ,  (  puifque  les  Réformez,  qui 
étoient  aufli  Bouigeois  ,  n'avoient 
point  cû  de  part  à  cette  fcditionj  ) 
à  moins  qu'on  ne  permit  aufli  aux 
Réformez  de  payer  leurs  frais  de 
la  bourfe  commune  (^},  Mais  en- 
fin ils  eurent  encore  la  bonté  de 

leur 

[n)  MS.  Thom,  23 , 
(-^1     lalh.  fiN- 


66  Hijlûire  de  la  Kéformatloft' 

ï  53  î.  1^"^  quitter  cette  Amende  ,  auiïi- 
Orbe,  bien  que  ceux  de  Fribourg  {a). 

Dans  ce  tems  là  les  ReJigieufês 
de  S^^-  Claire  reçurent  une  nouvelle 
mortiHcation.  Quelques  Réformez» 
animez  d'un  zèle  indi/cret  &c  im- 
pétueux >eûllérent  un  jour  enfoncer 
Nou-  la  Grande  Porte  du  Chœur  de  leur 
J"^.^^^^  Eglife  5   <k  ,en  démolirent  les  Au- 
l?éf<,r-    tels*.    Ce  n*eft  qu'avec  peine  que 
f^^Z'      je  raporte  ces  fortes  d'actions  & 
d'autres  femblables  j  Mais  enfin  la 
vérité  de  THiftoire  le  demande.  & 
il  ne  m'eft  pas  permis  de  les  fup- 
primcr ,  fans  me  rendre  coupable 
de  partialité.    Bailleurs  il  eft  bon 
de  fiire  remarquer  à  nos  Adverfai- 
res,  que  nous  n'apiouvons  nulle-» 
"Réflex^  ment  la  mauvaife  conduite  de  quel* 
ton>  fur  quej  particuliers  de  nôtre  Commu- 
lu;et.  ^-^^  .  ^  ^A^jç  ^,te.  Religion 

eft  fort  éloignée  d'autorifer  ce  qui 
fent  le  tumulte,  la  violence  > 
îa  fédition.  Sans  doute  ces  gens- 
là  s'imaginoient  faire  en  cela  une 
Aâion  agréable  à  Dieu  ,  parce  qu'il 
a  donné  cette  Loi  touchant  les  Ido- 
lâtres ,  &  les  inftrumens  de  leur 

Idok« 


deUSuilfe.  Liv.  IX.  67 

fdolatrie*  :  V'ous  démolinz  leurs  Au-  1531; 
'e'.s,  vous  br  frez  leurs  Statues  y  Vous  q  r  î  £• 
:o'n€iez  let*^^  bocages  :  &  vous  bru- 
,  trez  au  feu  Ituis  images  taillées.  Mais 
Is  auroient  dû  conHciérer  ,  que 
:et  ordre  s'adrefle  au  Peuple  en 
Co'ps,  &  à  fes  M.îgiftrars  :  ÔC 
ion  aux  particuliers  ;  &:  qu'il  faut 
.aiiïer  aux  PuifTances  ,  le  foin  de 
:es  fortes  de  chai  gemens  >  qià  ne 
Deuvent  fê  faire,  félon  les  régies  du 
Droit  des  Gens>  que  par  leur  au- 
:oriré.  Quand  les  Juifs  fe  mirent 
fil  faire  des  encenfemens  au  Serpent 
fa'rain  ,  aucun  Particulier  de  Je- 
i'ufalem,  ni  du  Royaume  de  Juda> 
iliucun  Saciifîcareur  ,  aucun  Pro- 
ohête ,  n'entreprit  de  le  brifer  de 
"on  autorité  propre  j  quoi  qu'on 
Ijic  manquât  pas  alors  de  gens  pieux 
3c  zUez:  rr  ais  ce  fut  le  Roi  Ezé- 
:hias  ,  qui  le^fît  brifer  {a).  Après 
:out  il  convient,  félon  la  régie  de 
*Apô^re  S,Paul{b),  ^  félon  Tefprit 
le  l'Evangile  ?  que  tout  fe  fafle 
ians  l'Eglife  ,  az/ec  ordre  &  avec 
Uenféance, 

II 

*  Deuteron.  VII.  1/.  ^. 
[^]  II.  Kois.  XVIII.  4. 
'  lb^   l.  C'jrinth,  XIV.  ^c. 


68  Hiftoirc  de  la  Rcformation 
j.  ^  ^  j ,  Il  ne  faut  donc  pas  tant  s'éron- 
O-RBE.  fi  Catholiques  regard  oient 
de  mauvais  œil  &  la  Réformatioa 
&  les  Réformez.  On  ne  peut  pas 
changer  de  fentiment,  en  matière 
de  Religion,  comme  on  changçii  ha- 
bit j  ce  qu'on  s'eft  accoutumé  dès 
fon  enfance  >  à  regarder  a\'«c  véné^ 
ration ,  comme  quelque  chofe  de 
fàcré,  on  ne  peut  pas  fouffiir  tran- 
quiienient  qu  on  le  dérruife  ,  ou 
qu'on  le  renverfe.  Ce  n'efl  pas  ea 
bfifant  tumuîtUâirement  i«s  Idoles^ 
qu'on  ramène  les  Idolâtres  >  on  ne 
fait  que  les  irriter.  Il  faut  les 
éclairer,  &  les  engager  à  brifer  eux* 
mêmes  leurs  Idoles  de  lec.rs  propresij 
mains.  Mnis  il  efl  tems  de  repreiv 
drele/îi  de  monHifioire. 

Les  Religieufes  de  S^'^-  Claire  itw 
ritées  du  défordre  qu'on  avoit  fait 
dans   leur  Eglife ,  ne  pûrent  plus^ 
vivre  à  Orbe.  Elles  £rent  prier  les' 
Seig. leurs  de  Berne  5c  de  Fribourg^' 
de  leur  permettre  de  fe  retirer,  fou- 
haitant  de  fuivre  leurs  Compagnesf 
en  Bourgogne.     En  même  tem« 
elles  dépêchèrent  un  MelTagcr  à  h 
Princcfie  d'Orange  ,  &  à  leur  Supé 
rieur ,  pour  grier  l'une  ôc  l'autr» 


I     deUSuijfe.  LlT.  IX.  69 

le  les  recevoir.  La  Princeffe  &  ie  j  531 
îupériegr  répondirent,  C^'elles  pou-  Orbe 
'oient  venir  en  Bourgogne  ,  & 
[u'elles  y  feroient  bien  reçues  ; 
nais  (^u  il faloit  auparavanr,  qu'elles 
iffenc  quarantaine  dans  quelque  lieu 
carré,  à  caufe  de  la  pefle  qui 
toit  alors  à  Orbe  ,  &  dans  une 
•onne  partie  du  Pays  de  Vaud.  Le 
lévot  Banderet  àt  P'ierrcfliur  offrit 
,e  leur  prêter, pour  ce  deffein,  une 
lâifon  qu  il  avoit  à  Baumes  {a)  vil- 
âge  ficué  au  pié  de  la  Montagne> 
iir  la  grande  route  de  Bourgogne, 
^es  Seigneurs  de  Berne  leur  permi- 
enc  de  fe  retirer  avec  tous  leurs 
iens  i  &  voulurent  même  que  le 
Jaillif  les  cfcortât  jufqu  aux  fron- 
iéres  (^) ,  Mais  ceux  de  Fribourg 
le  voulurent  pas  les  laiffer  partir  : 
\C  pour  les  engager  à  refter,  ils 
eur  promirent  d  envoyer  des  Dé- 
)Utez  à  Berne  ;  &  de  taire  mettre 
e  fi  bons  ordres,  qu'on  ne  les  in- 
|uiéteroit  plus  à  l'avenir  (().  Ainfi 
files  rtRérent. 
Les  mouvemens  tumultueux  con- 
inuérent  à  Cranjori ,  pendant  toute 

I  /  u  c)  MS.  Thom.z^.  i<j.  16. 
iù'jlu  Inftr.  iij. 


70  Hijloîrc  de  la  K^fcrmatton 

I  5  3  T.  l'Automne ,  au  fujet  de  Ja  Religion, 
G  R  AN- ce  qui  engagea  les  Seigneurs  de 
soN.j    Berne  d'y  envoyer  des  Députez,  le 
iS.Sepremb.  pour  encourager  les 
Réformez,  &  exhorter  les  autres  à 
laifTer  prêcher  tranquillement  la  pa- 
role de  Dieu.    Ces  Députez  furent 
aulTi  chargez  d'en  faire  autant  i 
Echalens.    Pour  le  coup  les  Réfor- 
mez de  Granfon  étoi-?nt  la  partie 
fouffiante.   Un  Dimanche  du  mois 
de  Septembre  ,  comme  ils  ctoient 
dans  le  Temple  ,  occupez  à  écou 
ter  leur  Minifire  ,  &  qu'ils  y  de- 
menroient  trop  long-tems  au  gr 
Tumulte      Catholiques,  ceux-ci  impatieni 
caufé     d'entendre  la  Mefle  lâchèrent  leur* 
par   les  femmes  ,  qui  entrèrent  efFiontémenI) 
Catholi-  ^^^^      grand  bruit  i  pour  in  ter* 
ques.     rompre  leur  dévotion.   Les  Réfor« 
mez  voulurent  les  repouflcr,&  les 
mettre  hors  du  Temple,  mais  elles 
ctoient  en  fi  grand  nombre,  qu'tl-* 
les  furent  les  plus  fortes,  &  la  fu^ 
reur  leur  foi  inilTant  des  arn  es  ek 
les  les  ch«fle'e- 'f.    Elles  fe  p  irent 
particulièrement  aux  trois  Minifi 
très,  qui  fe  nouvéïenr  là  F.oel ,  G<i* 
v  it ,  &  froment  ,   ksqutls  elles 
atâlciâuéreat    extiêiiiement  y  8c 


de  la  Suijjè.  Ll  V.  IX.  Jl 

leur  déchirèrent  tout  le  vifage.  El- 
les  en  vouloient  principalement  à  ^* 
Farel ,  &  fans  le  fecours  (Xyintoine 
Froment,  qui  étoit  avec  lui ,  il  au- 
roit  couru  rifque  d'être  affommé. 
De  VVattev'ille  ,  ancien  Avoyer  de 
Bernej  arriva  bien-tôt  après  à  Gran- 
(bn,  pour  prendre  information  de 
cette  affaire.  Il  fut  fuivi  d'autres 
Députez  ,  qui  y  vinrent  avec  ceux 
de  Fribourg,  pour  le  même  fujet  : 
mais  il  ne  pûrent  convenir  de 
rien  >  &  s'en  retournèrent  fans  rien 
faire  *. 

Cet  accident  ne  rebuta  point  les 
Réformez  de  Granfon,  &  ne  les 
empêcha  point  de  faire  un  nouvel 
éclat  quelque  tems  après.  Vers  la  ^xcit 
fin  de  l'Automne  ,  ils  allèrent  ,  de 
leur  prop-e  autoriré  ,  brifer  quel- 
ques  Autels  dans  TEglife  des  Cor- 
deliers.  Les  Dépurez  de  Fribourg 
irritez  de  cette  a<flion  ,  comme  on 
le  peut  penfer  ,  fîient  mettie  en 
prifon  Fard  &  d'autres  Minières, 
avec  quelques  peifonnes  de  Grarijon 
&  d'TvQnan.  Les  Seigneurs  de  Berne 
n*appiouvoWnt  nullement  la  con- 
duite des  Réforn.ez.  Cependant  ils 

ne 

MS.  Thm,  14.  MS.  Crooff: 


72  Hîfloire  de  U  PJformario'a 

1531.  ne  voulurent  pas  les  abandonner 
G  RA  N- non  plus  5  pour  ne  pas  paroître 
^  ^  ^*    abandonner  la  Religion.  Ils  écrivi- 
rent donc  au  Baillif  de  Granfon,  de 
les  relâcher.  Mais  comme  il  étoit 
Fribourgeois ,  il  n'en  voulût  rien 
faire.    Il  fe  nommoit  Jean  Keiff, 
Les  Bernois  s'adreflerent  donc  au 
Gonfeil  de  Fribourg,  &  lui  en  écri- 
virent deux  fois  >  après  quoi  les 
prifonniers  fûrent  élargis  {a), 
DifficuL        y  e^it  encore  de  nouveaux  dif- 
té  entre  férens  entre  les  deux  Etats,  au  fu- 
jBerne&  jgt  dcs  Villages  de  ce  Bailliage-  là, 
au"  aîiei       avoient  embrafle  la  Réforma- 
des  Vil  tion^  les  Bernois  voulans  que  h 
lagesRé-  Meffe  y  fut  abfoîument  abolie  ;  & 
du  *^Bal-      Fribourgeois  s'y  oppofant  vi- 
iiâ<rc  de  vemenr.    Les  deux  Etats  envoyé- 
Granfon,  rent  chacun  des  Députez  à  Gran- 
fon, pour  travailler  à  un  accom- 
modement fur  cette  affaire.  Ceux 
de  Berne  voulurent  abfoîument ,  . 
fuivant les  inftruâ:iony  qu'ils  avoient  I 
remues  5  i°'  Que  la  Mtffe  fût  entiè- 
rement abolie,  dans  les  lieux  où 
on  l'avoir  lejettée  à  la  pluralité  des 
voix  :  &  2°-  Que  ceux  qui  avoient 
mal-traité  Farci  ôc  les  autres  ,  fuA 

fenc 

[/t]  MS.  Groof, 


de  la  SuijfeLlV.  IX.  73 

fent  punis.  Ils  cenfurérent  même  i  531. 
le  Baillif ,  qui  avoir  voulu  faire  G  r  a  n- 
prendre  Antoine  Froment ,  parce  son. 
qu'il  avoir  fecouru  Farel.  Ils  de- 
mandèrent aufli  que  le  Baillif  payât 
Tcntretien  ds  Miniftres.  Les 
Députez  de  Berne  ^  de  Fribourg 
convinrent  enfsmble  fur  le  premier 
Article  ,  qui  étoit  de  laifler  rubfiC. 
ter  le  Traire  qui  avoir  été  fair^  fur 
rabcliiion  de  la  MelTe  ,  à  la  plura- 
lité des  fufFrages  ;  mais  ceux  de 
Fribourg  demandèrent  qu'on  reti- 
rât Fdïel  de  Granfon.  Il  étoit  le 
principal  objet  de  leur  haine par- 
ce qu'ils  le  regardoient  comrr:e  le 
prémier  auteur  de  i'introduclion  de 
la  Doflrine  Réformée  dans  ces 
Quartiers-là.  Les  Bernois  ,  pour 
le  bien  de  paix  ,  eurent  la  com- 
plaifance  de  leur  accorder  leur  de- 
mande ,  8c  tinrent  parole.  Farel  fe  , 
retira.  Mais  il  n'en  fût  pas  de  mê- 
me de  l'autre  coté.  Api  es  le  dé- 
part des  uns  &  des  autres  .  le 
Baillif  rétablit  la  Mefle  dans  les 
lieux  où  elle  avoit  été  abolie  j 
Berne  s'en  plaignit  à  Fribourg  le  8. 
Noven.bre,  mais  inutilement 

MS.  Groofi; 

,  ..     Tenu  IF.  D  II 


74  Hijloire  de  la  K^formation 

1531»     Il  fui  vint  encore  un  noiivtl  em- 
O  R  B  E.  barras  entre  les  deux  Etats  de  Ber- 
ne 6c  de  Fj iboui g ,  au  fujet  de  trou- 
bles qui   s'élevéïent  à  Orbe  entre 
les  Réformez  &  les  Catholiques, 
&  qui  éclatèrent  la  veille  de  Ncël 
'Tumulte L'occafîon  en  fût  que  les 
à  On  EE  Réformez    voulurent  s'aflembler 
^^^Vcjlledans   l'Eglife   Paroifllale  ,  à  fept 
caufè heures  du  foir.     Les  Catholiques 
par   les  leur  avoient  fouvent  reproché,  de 
Catholi-  dorimr  comme  des  pourceaux  dans  leurs 
lits  3  tandis  que  les  Catholiques 
étoient  dans  TEglifê ,  occupez  à 
chanter  les  louanges  de  Dieu.  Afin 
donc  de  fe  laver  de  ce  reproche  > 
ils  voulurent  célébrer  la  Vigile  de 
Noël,  par  une  aflemblée  Religieufe, 
&  piirent  pour  ce  delTein  Theure 
que  je  viens  de  dire.    Les  Catho- 
liques qui   avoient  la  Clé  de  l'E- 
glife,  la  leur  refufércnt  j  ccà  pour- 
quoi ils  y  entrèrent  par  force,  ÔC  y 
pfêché-ent.     LV.fTemblée  fût  fort 
nombreufe,  parce  qu'il  y  vint  plu- 
fieurs  perfonnes  ,  qui  n'ofpient  pas 
y  parcître  de  jnui  ;  de  forte  qu'ils 
enrendoi'^nt  les  Catholiques  ,  qui  > 
pafTant       regardant  par  la  porte  > 
difoient ,  Le  Viable  y  en  a  bUn  tant 


de  la  Suiffe.  Liv.  IX.  7J 

»r^.    Tandis  qu'il  étoknt  occupez  [^3  F.' 
à  écouter  Je  Sennon  de  leur  Minit  O  r  b  e. 
tre  ,  les  Ca:holi4ues  s'âcrroupérenr, 
&  foie  pour  les  inf  ilrer,  foie  qu'ils 
trouvairent  que  leur  Sermon  étoic 
trop  long,  ils  alléienc  Tonner  Ma- 
tines  à  neuf  heures  da  foir  \  ce 
qui  obligea  les  Réformez  à  fe  re- 
tirer :  &:  les  Catholiques  entrèrent 
dans  l'Eglife  après  eux.  Comme 
les  Réformez  fe  retifoient  chez  eux 
paifiblement  &cfans  aucun  tumulte, 
quelque  mauvais  efprit  fie  counr  le 
bruit,  OuWs  alloient  dans  l'Eglife 
de  S.  Claire  ,  pour  y  brifer  tour. 
Là  deffus  les  Catholiques  ,  fortune 
à  la   hâte  de  l'Eglife  les  allèrent 
chercher,   les  attaquèrent  à  main 
armée  ,  fendirent  la  têre  à  quelques- 
uns  ,  &  en  blefférent  d'autres.  Les 
Réformez  allèrent  à  Berne,  au  nom- 
bre de^rv,  en  porter  leurs^  plain- 
tes ,  ayant  à  leur  tête  Pierre  I^tret, 
Outre  la  violence  qu'on  vient  de 
voir,  ils  fe  plaignirent  encore,  qu'on 
enfonçoit  leurs  portes  ,  6^  qu'on 
biifoit   lejrs    fenêr  es  à  coups  de 
pie- res,deforte  qu'ils  n'è  oient  p'-»int 
en  fureié  dans  leurs  maifons.  Les 
Catholiques  l'ayant  lu  ,  coururent 
D  2  à 


76  Hijîoirc  de  la  J^c formation 

1^31.  à  Berne  après  eux,  au  nombre  de 
O  KE  E.  On  écouta  les    deux  par- 

ties, &  on  les  renvoia,  leur  di/ant. 
qu'on  leur  donneroit  bien-îôt  ré- 
ponfe 

Tumul-  Cependant  le  jour  même  deNcël, 
W/  ^î'  ^^^^       défordre  dans  le 

jmi/  de  Village  de  Novalle  ,  au  Bailliage  de 
Nocl.  Gianlon.  Les  Réformtz,  voulant 
entrer  dans  l'Eglifê  ,  pour  y  enten- 
dre la  parole  de  Dieu  .  &c  faire  leur 
fcrvice  5  les  Catholiques  >  incitez  par 
Je  Baillif ,  ne  voulurent  point  leur 
en  permettre  Fentrée  ;  8c  les  gens 
du. Seigneur  rrr^y  dirent,  que 
FEglife  n'étoit  point  fur  les  terres 
de  Berne  &  de  Fiibourg,  &  qu'ils 
n'y  avoient  rien  à  voir.  Les  Ré- 
formez prcflant  pour  fe  faire  don- 
ner la  Clé,  les  Catholiques  afliflez 
par  ceux  de  l^uygelle  &  de  Longe- 
l'ille  ,  k  mutinèrent,  coururent  aux 
armes ,  &  en  blefférent  quelques- 
uns  ,  entr'autres  le  Miniftre  ,  qui 
eut  la  têre  fendue.  Certe  affnre 
fut  porfée  à  Berne.  Le  Baillif  de 
Granfon  y  fut  cité,  pour  rendre 
conpte  de  fa  conduite.  Le  Chan- 
celier de  Berne  &  Farel,lLi  foutin- 

rent 

*  MS.  Tho?».  2,7.  b.  28,  MS.  Groojf, 


de  U  Smjje.  L  i  v.  I X.  77 

rcnt  en  face,  que  c'écoit  lui  qui  1^3  f, 
avoic  incité  les  Catholiques  a  cette  Gka\- 
émuie  :  &  les  Catholiques  même  son. 
de  Vujgeïïe  s'excuférent ,  rejettant  la 
faute  fur  le  Baillif,  qui  leur  avoic 
ordonné  de  faire  ce  qu'ils  avoient 
fait  *.    Les  Réformez  de  la  Pa- 
roi (Te,  accu  fér  en  tau  ffi  le  Curé  àç.Vnj- 
gclie  d'avoir  eu  la  principale  part  à 
cette  fédition.     Ils  fe  plaignirent 
en  même  tems  >  que  ceux  d'Yver- 
dun,  zèlez  Catholiques  ôc  des  plus 
ardensJes  menaçoient  quand  ils  paC- 
foientpar  leur  Viile,  &venoient  mê- 
me les  mal-traiter  jufques  chez  euxf. 

Il  étoit  de  la  prudence  des  deux 
Etats  5   d'arrêter  le  cours  de  ces  ^égu^ 
défordres,  par  de  bons  Réglemens.  g^J^^ç^ 
C  eft  aufli  ce  qu'ils  firent.  Ils  eurent  "p^.;. 
une  Conférence  enfemble  à  Berne,  bourg  , 
vers  la  fin  de  Janvier  1 5 : 2.  &  là  le  Po^^ 
3o.du  même  mois,  ils  convinrent  en-  ^^.^^^ 
femble  de  VU.  Articles  ,  dont  je  fujets 
rapporterai  ici  la  fubftance.  com- 
^  I.  Que  leurs  fujsts  des  deux  Re- ^^^'J^ 
ligions  vivroient  enfemble  en  paix, 
II.  Que  les  Réformez  auroient  un 
Terni  le,  <^^ns  lequel  ils  pourroient 
faire  prêcher  la  Parole  de  Dieu  tous 

D  3  les  . 

*MS.^>v;/M23.B.Inftr.i40.i4i.tMS.Gr^'?7. 


78  HiPoiYt  de  la  Keformation 
Orbe  les  jours,  fans  aucune  contradiftion  ^ 
&     6c  que  de  leur  côté  ils  ne  troubleroient 
so^N^eiî  P^^"^       f  lus  les  Catholiques  dans 
15  32.  ^^"^  Me iTe. 

III.  Que  chacun  de  ces  fujets 
aura  pleine  liberté  de  Confcience> 
d'aller  au  Prèthe^  ou  à  la  Mejfe. 

IV.  Que  la  Aleffe  demeurera  abo- 
lie 5  dans  les  lieux  où  elle  Ta  été 
à  la  pluralité  des  voix,  ^'elle 
flibfiftera  dans  les  lieux  où  on  l'a 
gardée  5  cependant  permis  toûjours 
aux  Réformez  de  ces  lieux  là  d'a- 
voir le  Prêche, 

V.  Que  les  Mtniflres  Se  les  Prê-- 
très  dans  leurs  Sermons,  ne  don- 
neront plus  des  noms  injurieux  à 
leurs  Adverfaires  :  mais  qu'ils  fe 
contenteront  de  propofer  leiirs  fenti- 
mens ,  &  de  réfuter  la  do(flrine  op- 
pofée  par  de  bonnes  raifons. 

VI.  Que  nul  ne  devra  infulter  qui 
que  ce  foit  >  pour  caufe  de  Reli- 
gion >  ni  par  parole,  ni  par  voye 
de  fait  >  fous  peine  de  trois  jours  & 
trois  nuits  de  prifon  ,  au  pain  3c 
à  l'eau  5  &  de  payer  un  Ecu  d'or 
d'amende,  au  fortir  de  prifon;&que 
ceux  qui  n'auront  pas  dequoi  payer 
l'amende,  feront  remis  où  laiflez 

en 


I       de  la  Suijfe.  L I V.  IX.  79 

en  prifon  ,  pour  y  erre  encore  tout  O  r  b  b 
amant  de  tems.  Qu'on  infligera  aux  ^  ^ 
femmes  h  moitié  de  cette  peine  Se  s  on,  en 
de  cette  Amende.  1532, 

VII.  ^'il  fera  défendu  de  rien 
gâter  ni  détruire  dans  les  Egliies  > 
6ns  l'autorité  des  Seigneurs  *. 

On  envoya  des  Députez  des  deux 
Villes  5  pour  publier  ces  ordonnan- 
ces à  Orl?e  &c  à  Granfon  :  &  en  même 
tems  les  Seigneurs  de  Berne  écrivi- 
rent à  Farel  ,  le  10.  Février  1532. 
pour  lui  donner  avis  &au?:  autres 
Minières  Tes  Collègues  5  de  cet  ac- 
commodement, &  de  ces  ordon- 
nances ,  qu'ils  avoient  faites  avec 
ceux  de  Fribourg  5  l'exhortant  5  lui 
particulièrement  à  les  obferven  afin 
d'être  en  bon  exempbie  aux  au- 
tres t. 

Les  Députez  des  deux  Etats  fu- 
rent arrêtez  par  de  nouvelles  dif-  Nouvel- 
fîcultez  qui  s'élevèrent  entr'eux,  &  les  diffi- 
s'en  retournèrent  fans  rien   faire,  ciiltez. 
Un  nommé  Jaques  Collon  5  &  deux 
autres  ,  ayant  renverfé  les  Images  à 
Echalens,  avoient  été  mis  en  prifon, 
&  appliquez  a  la  queftion.  Les  Ber- 
D  4  nois 

^  MS.  Groojf, 


80  Hîjloire  de  la  Réformation 

^  &^  ^  nois  avoient  écrit  aux  Fribourgeois, 
Gr  AN-  P^^*^  P^^^^  f^'fe  arrêter  ces 
so  N.  en  procédures,  jufqu  à  l'arrivée  de  leurs 
1532.  Députez  5  mais  inutilement.  Les 
Dépurez  de  Berne  avoient  ordre 
de  demander  réJargifTement  de  ces 
prifonniers,  fous  caution  Bourgeoi- 
fe  5  ji'fqu'à  ce  qu'ils  fuflent  punis 
comme  ils  Tavoient  mérité.  Ils 
avoient  aulTi  ordre  de  s'informera 
O'be  ,  touchint  le  tumulte  qui  y 
étoir  arrivé  la  veille  de  Noël  3  de 
punir  les  coupables  &  de  faire  ren- 
dre juftice  par  des  Juges  impar- 
tiaux ,  à  ceux  qui  avoient  été  blet 
fez  5  de  faire  donner  des  penfions 
aux  Miniftres  dCOrbe  ScdcGranfon, 
&c  à  ceux  de  la  Campagne  y  d'ex- 
horter le  Confeil  d'Orbe  à  ne  pas 
dépofer  5  pour  caufe  de  Religion, 
ceux  d'entr'eux  qui  étoient  Réfor 
mezj  de  faire  que  les  Catholique 
;  fe  contentafTent   des  Autels ,  qui 

étoient  demeurez  debout ,  fans  re- 
lever ceux  qui  étoient  abatus  ?  ni 
en  faire  de  nouveaux  (4).  Ainf 
les  Députez  de  Berne,  fuivant  leurs 
ordres  ,  ne  vouloient  pas  permet 
tre  qu'on  relevât  les  Autels  abatusi 


U)  M5.  Anjp,  lis.  B.  Inftr.  159, 


deUSîiîjfe.  LiV.  IX.  81 

&  ordonnèrent  qu'on  remic  par  ^ 
terre  ceux  qui  avoienc  é:é  relevez.  ^  ^''^ 
D'autre  côté  les  Députez  de  Fri- 
bourg  défendirent  aux  Réformez, 
d'aller  prêcher  dans  l'Eglife  de  5'. 
CUhe  5  ce  qui  fut  fait  {a),  EnHn 
pourtant  les  deux  Etats  convinrent 
cnfcmble  ,  au  fujef  des  Autels.  Le 
Dimanche  Mars  ,  les  Députez 
de  Berne  &  de  Fribourg  retour- 
nèrent à  Orbe,  pour  exécuter  les 
articles  dont  on  étoic  convenu:  & 
le  lendemain  ayant  fait  affembler 
tous  les  chefs  de  famille  ,  ils  y 
publièrent  l'ordonnance  dont  on  a 
parlé.  Ces  Députez  eurent  aufîl 
ordre  de  donner  une  penfîon  & 
lin  logement  au  Minière  d'Orbc> 
&  à  quelques  .autres,  qui  jufqu'alors 
avoieiit  é  é  dans  des  Logis  :  & 
pour  la  penfion  ,  o:i  devoit  la 
prendre  fur  la  moitié  djs  piében- 
des,qui  fe  donnoient  à  d.s  Béné- 
ficiaires Etrange'^s  ou  abfens,  qui 
par  làétoient  portées  hors  du  pay.s 
les  Seigneurs  de  Be.ne  abandon- 
nant cette  moitié  ^our  les  Minif- 
tres  {b\ 

D  5  Après 

MS.  T/^o/w.  l8.  b. 

W      li?.  B.  Inih.  148. 


82    Hiftûîre  de  la  Kéformation 

G  R  A  N-     Après  avoir  fini  ce  qu'il  y  avoit 
à  faire  à  Orhe^i  les  Députez  de  Ber- 
ne  &  de  Fribourg  allèrent  à  C??'^»- 
Çon  le  Lundi  4.  Mars,  &y  publié-^ 
rent  la  même  ordonnance.  Dans* 
ces  deux  Villes  ,  il  fut  permis  aux 
Catholiques  de  relever  leurs  Autels, 
qui  avoient  été  abatus  \  &  ils  s'y 
employèrent  avec  une  telle  ardeur^ 
qu'ils  furent  tous  rétablis  au  bout 
de  deux  jours  {à).  De  là  les  Dé- 
Soiwi  des  putez  de  Berne  allèrent  vifiter  les 
Seignrs.  yii]ages^  q^ii  avoient  embrafle  U 
p^^^jfj^5  Réformation  5  à   la  pluralité  des 
Villages  voix ,  favoir  5  Gy  ,  Champagne  5  jy, 
Kcfor-   Provence  >    Novelles ,  &  quelques 
Balfiage  ^"^^^5.    Ils  avoient  ordre  d'y  éta- 
blir  des  Miniftres  >  d'en  faire  délo- 
frn.      geF  les  Prêtres .  &  de  donner  leurs 
penfions  aux  Miniftres.    Pour  ce 
qui  eft  des  Paroifles  ,  où  la  diver- 
fîté  des  Religions  fubfiftoit  encore, 
ils  avoient  ordre  d'y  établir  auffi 
des  Miniftres  ,  afin  que  ceux  qui 
fouhaitoient  d'entendre  la  parole  de 
Dieu,  pûffent  avoir  cette  édifica* 
tion  ^  &  de  donner  à  ces  Miniftres> 
la  part  que  les  Seigneurs  de  Berne 
contribuoient  pour  faire  les  penfions 

WMS.rWso.  \ 


'    deU  Suijfe.  LiV.  IX.  83 

des  Bénéficiaires  Etrangers  cù  ab- 
fens  ,  comme  dans  le  Balliage 
d'Orbe  (4). 

VI.  Il  eft  à  remarquer  que  de  Î531. 
tout  le  ?iijs  dé  \f  A  \j  D  y   il  n'y  P^^ys 
eut  que  les  4.  endroits,  dont  on^^^^* 
Tient  de  parler  ,  Avmch^  >  Payerncy 
&  les  Balliages  d'Orbe  &  de  Gran- 
[on,  où  il  fe  fit  quelques  mouve- 
mens  pour  y  introduire  la  Réfor- 
mation :  à  ^venche        à  Payer  ne  ,  ^on  etac 
parce  que  ces  deux  Villes  étoient  ^^^f^^^ 
zWiéçs  de  Berne  j  Se  que  les  Ber-  llgion. 
ncis  y  appuyoient  les  Miniftres  j 
qui  entrcprenoient  d'y  prêcher  :  8c 
dans  les  deux  Balliages  d'Orbe  & 
de  GranfoUi  parce  qu'ils  font  fous 
la  domination  des  Bernois  ,  au/Tî- 
bien  que  fous  celle  des  Fribour- 
gcois.  Dans  tout  le  refte  du  Pays 
de  yaud  y  qui  dépendoit  ,  en  par- 
tie du  Duc  de  Savoye ,  en  partie  de 
TEvêque  de  Laufanne ,  on  éroic 
plongé  dans  Tignorance  3c  dans  la 
bigotterie,  autant  qu'on   le  pou- 
voit  être  dans  le  fond  de  l'Italie 
^  de  l'Efpagne  ;  8c  les  E  di  t  s  , 
publiez  par  les  Etats  du  Pays,  (l'an 
J525.  )  contre  ceux  qui  y  prêche- 
D  6  roient 
(a)  MS.  Am^.  115.  b.  B.  Inftr.uyu 


84  Hijloire  de  la  ^déformation 

I  5  3 1 .  roient  la  nouvelle  Do<ftrine,  renou- 
veliez Tan  1527.  6c  confirmez  par 
l'autorité  du  Duc  de  Savoye  *, 
étoient  fî  rigoureux  &  fi  prelTansj 
que  3  d'entreprendre  d'y  prêcher  , 
c'étoit  s'expofer  à  une  mort  cer- 
taine 5  de  gayeté  de  cœur,  &  fans 
aucun  fruit. 
^  o  u-     ^  Aloudon  ,  qui  étoit  alors  la 
Capitale  du  Pays  de  Vaud,  on  avoit 
un  Curé  5  qui  abandonnoit  à  d'au- 
tres le  foin  de  prêcher  la  Dod^rine  du 
Salut.  Le  Théâtre  y  'tenoit  lieu  d 
la  Chaire,  &  les  Conduiîleurs  du 
peuple  3  au  lieu  de  lui  procurer  des' 
inftiu<fîions  falutaires  tirées  de  la 
ParcJe  de  Dieu  ,  le  repaifToient  de 
Comédies  pieufes,   félon  le  goût 
de  ce  Siècle  là.    Ainfi  cette  aniiée 
153Ï.   le  Confeil  de   cette  Ville> 
ordonna  de  payer  10.  florins  de 
Savoye  aux  Comédiens,  qui  ,  le 
Dimanche  des   Rameaux  5  a  voient 
jcilé  une  partie  de  la  Pafllon  du 
Seigneur,  &  le  Lundi  après  Pâques, 
^  fa  Réfurredion.    Ils  donnèrent  en 
le  de^  '  "^^^^  tems  7.  florins  2.  fcls  5  mpn- 
MoH.îon  noie  de  Laufànne,   à  un  Prêcre 

Etraii- 

Voyez  le  Tom.  I.  pag.       &  $07.  ^ 


de  laSuijfe.  Liv.  IX.  8S 

Etranger,  qui  leur  avoit  prêché  j  jjj-; 
pendant  le  Carême  :  de  forte  que  paye 
les  deux  Comédies  furent  payées  plus  deux  Co- 
chérement  que  tous  les  Sermons  du  pifjf^^^  ^ 
Prêtre.    Au  mois    de  Septembre  plus  che 
fuivant,  ils  donnèrent  encore  60.  rement 
fols,  de  Laufanne,  à  12.  Corné- ^"^^^.P^"^ 
diens  ,  qui  le  24.  d'Août ,  fête  de  mons. 
la  ^S".  Barthelem),  avoient  joiié  une 
hiftoire  pieufe,  appellée  le  Pauvre 
commun  *. 

A  Laufanne  les  chofes  n'alloient  Lausah 
pas  ir.KUX,  quoique  ce  fût  une  Ville 
Epifcopale  ^  où  il  y  avoit  un  Col- 
lège de  32.  Chanoines  ;  deux  Cou- 
vens  de  Religieux,  l'un  de  Domi-  ^^J}  ^taç . 
nicains ,  &  1  autre  de  Corddiers  ,  ^^l^j^ç, 
&c  cinq  Eglifes  ParoifTiales.    Tant  ligion. 
d'Ecdéfialliques  >  qui  auroient  dû 
être  une  Source  de  lumière  falu- 
taire  ,  pour  la  Ville  &  pour  fon 
territoire,  croient  tout  autant  de 
Chiens  muëts ,  où  plutôt  de  Con- 
duifleurs  aveugles  ,    qui  vivoient 
dans  une  ignorance  honteufe  ,  & 
dans  une  corruption  extrême.  Oh 
n'a  pour  en  être  convaincu  ,  qu'à 
fe  fouvenir  de  ce  que  l'Evêque  Se^ 
baflien  de  MontfuulcGu  écrivoitaux 

Seigneurs 

'  ^  Regitres  de  Mondan, 


86  Hijloîre  de  la  BJfermation 

I  53 1 .  Seigneurs  de  Berne  l'an  1527.  Qu  ïi 
navdit  perfonne  ajfez  verfé  dans  l'E- 
criture S^^'  pour  ajfifter  a  leur  DifpU' 
te       Le  bon  Evêque  ne  penfoit 
qu'à  fes  plaifirs,  &  à  fes  intérêts 
terriens ,  comme  tout  fon  Clergé. 
Et  cette  année  fon  avarice  lui  attira 
de  nouvelles  difficultez  5  pour  les- 
quelles il  fe  brouilla  avec  la  Bour- 
L'Evê-   geoilîe.  Il  fît  battre  de  la  Monnoye> 
que  de  d'un  titre  &  d'un  poids  trop  bas> 
nThk  ^o*^^^^      teneur  du  Traité  d'ac- 
battre    commodément ,  que  les  trois  Vil- 
de  mau- les   Souveraines   de  fon  Diocéfe 
vaife     Berne^  Fribourn-^  &c  Soleurre,  avoient 
fait,  quelques  années  auparavant, 
entre  lui  &  la  Ville  de  Laufanne, 
Cette  Monnoye,  ayant  été  trou- 
vée trop  légère,  par  l'épreuve  qu'on 
en  fît  à  Zurich  ,  à  Baie  &  en  Valais; 
les  Bernois  &  les  Fribourgeois  fi- 
rent prendre  le  Maître  de  la  Mon- 
noye ,  &  le  firent  mettre  en  prifon. 
Interrogé  fur  fa  Monnoye  ,  il  dé- 
clara qu'il  Tavoit  ainfi  faite  par 
ordre  de  l'Evêque.     Ils  écrivirent 

^  Le  25.  donc  à  ce  Prélat,  &  lui  marqué- 
Mais.  .         ,  A/l       1  • 

rent  une  journée,  au  27.  May, lui 
déclarant  ,  qu'ils   vouloient  en- 
voyer 

^  Voyez  Tcm»  II.  pag.  lo. 


de  la  Suijfe.  L I  v.  I X.  87 

voyer  des  Députez  à  Laufanne ,  ÏSSï- 
pour  avoir  raifon  de  lui.  Les  Dé-  Lausam 
putez  de  Berne  &  de  Fiibourg, 
dans  une  Conférence  qu  ils  eurent  Mouvez 
cnfemble  le  i8.AvriL  décrétèrent,  »»^»^  à 
Que  TEvêque  >  n'ayant  pas  obfervé  ^^^5"^!^ 
le  Traité  dont  j'ai  parlé  ,  il  avoit  Diocéfe 
encouru  l'amende,  qui  y  avoit  éré 
impofée  :  qu'on  lui  en  écriroit  5  & 
que  les  Trois  Villes  fufmenrionnées 
Texhorteroient  à  reparer  les  pertes 
qu'il  avoit  caufées  au  public,  par 
la  légèreté  de  fa  Monnoye  :  &  que 
s'il  ne  le  vouloit  pas  faire  ,  on  met- 
troit  la  main  fur  les  terres  de  fon 
Eglife  5  &  fur  fes  fujets.    La  Ville 
de  Soleurre  fe  joignit  à  eux  dans 
cette  affaire.  Ainfi  pour  exécuter  leur 
réfolution  promtement ,  ils  avan- 
cèrent la  journée  qu'ils  avoient 
marquée  à  l'Evêque  de  Laufânne> 
&  la  mirent  au  8.  de  May  >  où  les 
Trois   Villes  envoyeroient  leurs 
Députez ,  pour  mettre   ordre fa 
Monnoye  ,  &  faire  faire  le  procès 
au  Maître  de  la  Monnoye ,  comme 
fauflaire  (^).  Mais  malgré  les  foins 
de  ces  Trois  Villes  ,   pour   le  ré- 
tabliflement  ôc  la  réforme  de  cette 

Mon-- 


8  8  Hijloire  de  la  déformation 

1531.  Monnoye,  l'Evêque  foutint  le  Maî- 
•L'Evé-  tre  de  fa  Monnoye  ,  qui  continua 
de  La u-<i'en  battre  fur  le  même  pié.  Les 
ANNE.  L^uf^nnois  envoyèrent  *  des  Dé- 
Decenib*'  P^^^^  ^  leurs  Alliez  de  Berne  & 
de  Fribourg,  pour  s'en  plaindre. 
Ils  les  prièrent  en  même  tems  5  de 
leur  aider  à  faire  établir  Douze  Ju- 
rez dans  la  Cour  temporelle  de  l'E- 
vêque;afin  quelajufticey  fût  mieux 
adminiftrée ,  au  lieu  que  j  afqu'alors 
il  n  y  en  avoit  que  deux  [a].  Je 
n*ai  pas  appris  quelle  fût  TilTue  de 
cette  affaire. 

Il  eft  incertain  fi  quelqu'un 
entreprit  >  cette  année  -  là ,  de 
prêcher  la  Dod  ine  des  Réformez 
à  Laufanne.  Voici  feulement  ce  que 
j'ai  trouvé  qui  peut  y  avoir  quel- 
que raport.  L'Empereur  Chrales 
V.  convoqua  la  Diète  de  l'Empire 
d'Allemagne  à  Spire  y  pour  le  16» 
Septembre  ,  &  y  invita  entr'aurres 
les  Evêques  d^Geneve  ,  de  Laufati' 
ne  d<.  de  Sjon  Celui  de  Lau- 
fanne s'excufa  d'y  aller  en  per- 
fonne,  &  y  envoya  deux  Dépu- 
tez >  pour  y  paroître  en  fon  nom> 
Conrad  Trader  ,  Provincial  des  Au- 

'  (^)  Manuel  de  Lanflmnc.  guftins 
^  ^avion  Liv.  III-  p.  m.  CO* 


'    deUSuife.  Liv.  IX.  89 

giiflins  5  &:  y^'^w  de  Cottonaj  y  Châ- i  ^'^  l , 
noine  de  Neucharel.    Il  les  char-  L'Eve- 
gea  d'une  Lettre  pour  TEmpereur, 
où  il  lui  difoit  ,  Qu'il  ne  pouzoit  pas 
all:r  Itn-même  a   la  Diète  fans  s'ex- 
pofer  a  une  grande  perte  ,  ja  préfence  invité  a 
étant  neceffaire  a  Laufanne  ,  où  il  f^^lJy^^^. 
trouvait  dans  une   Conjon^ure  dan-  pire  ,  j1 
gereufe~y  &  dans  de  grandes  occupa-^  f^^^^^^ 
tions  y  pour  maintenir  les  Droits  de^^'"^^^^^ 
fon  EgUfe  ,  &  ceux  de  la  Foi  Catho- 
lique,   Il  leur  donna  au/Ti  procu- 
re ,  pour  p  êter  hon  mage  à  TEm- 
pereur  en  fon  xiDxn  {a),' 

Dans  ce  tems-ià  furvint  la  guerre 
de  Cappel  entre  les  Cantons  >  com- 
me on  la  vu  dans  le  livre  précé- 
dent. Les  Laufannois  ,  quoique 
toûjours  Catholiques  j  donnèrent 
dù  fecours  aux  Bernois  >  comme 
ils  y  écoient  obligez  par  leur  Traité 
d'Alhance.  Ce  fut  là  encore  une 
nouvelle  occaHon  de  brouillerie  en- 
tr'eux  5  &  leur  Evêque.  Il  fur- 
vint à  c°tte  occafion  une  chofe, 
qui  me  fait  j'iger  ,   qu'il  y  avoit 

alors 

(^a)  Tiré  des  Copie:  de  ces  deux  Piè- 
ces .  qui  foiit  dans  les  Archiv.  de  Berne, 
entre  les  l'up.iout.  Elles  font  datées  du 
mois  de  Septembre. 


90  Hiflûire  de  la  K^formation 

Ijjl,  alors  à  Lâufanne,  parmi  la  Bour- 
L'Evê     geoifie  ,    quelques  perfonnes  qui 
^ue  de  avoient  du  penchant  pour  la  Ré- 
jgg^^^'^^  formation  :    Peut-ê^e  Taveifion 
qu'on  y  avoit  pour  l'Evêque  ,  6c 
le  mépris  &  l'indignation  ,  dont  on 
y  étoit  animé  contre  le  Ckrgé , 
avoit  bonne  pârt  à  ce  penchant. 
Quoi  qu'il  en  foit ,  aptes  la  guerre 
des  Cantons  >  6c  le  Traité  de  paix> 
dont  elle  fut  fuivie ,  l'Evêquc  pre- 
nant courage ,  &  croyant  fans  dou- 
te Toccafion  favorable  pour  affer- 
mir la  Religion  Catholique  ,  vou- 
lut impofer  un  nouveau  Serment  à> 
la  Bourgeoific  contre  la  Réforma- 
tion.   L'Evêque,  quoique  Prince 
de  la  Ville      de  fon  Territoire  , 
n'y  avoit  pas  pourtant  une  auto- 
rité âbfolue.  Ses  fujets  partageoient 
L'Eve-  avec  lui  le  pouvoir  Législatif  :  & 
que  pro-  [\  ne  pouvoit  faire  aucune  Loi  nou- 
vain  un  ^^^^^  >  ^^"^     participation  des  IIL 
Régie.    Etats  de  la  Ville,  *  qui  étoient 
«;fY^^,"compofez  ,  du  Clergé  ,  delà  No- 
f^rma-'^'^l^ffe,  &  des  Bourgeois.    Il  fît 
lion.      donc  affembler  le  peuple  dans  TE- 
glife  Cathédrale  de  Nôtre  Dame,  à 
cri  public  ,  ôc  leur  propofa  de  faire 

une 

*  Voyez  le  FÎAcitHm  gener/tle  MS* 


de  la  Suife.  L  l  v.  I X.  91 

une  Ordonnance 5  qui  défendit  de  1537, 
parler  de  l'Evangile,  en  bien  ou  enLAusAw 
mal,  fous  peine  de  trois  eftrappa-^'^* 
des  de  corde.    Mais  le  peuple  ne 
voulut  point    accepter    ce  règle- 
ment.    Et    eux ,   de  leur  côté, 
lui  demandèrent ,   qu'il  remit  fon 
Tribunal  de  Juftice  fur  un  meilleur 
pié  5  &  qu'il  y  établit  douze  Jurez, 
ou  AflefTeurs  ,  au  lieu  qu'il  n'y  ea 
avoit  que  deux  ou  trois  j  encore 
n*avoient-ils  point  de  ferment,-  de 
forte  que  la  juftice  y  étoit  mal  ad- 
miniftiée  (4). 

Les  Laufannois  eurent  aufll  des  Oifîîciiî, 
difficultez  avec  les  Chanoines  ^^^y^^}^^ 
leur  Eglife  Cathédrale,  tant  au  fu- ^ 
jet  des  trois  Places  fortes  ,  qui  ap-  chapitré 
partenoient  au  Chapitre  ,  qu'à  l'oc- 
cafion  de  la  guerre  de  Mufs.  Corn- 
me  les  Seigneurs  de  Berne  leur  de- 
mandèrent *  80.  Hommes  pour  en-*  lc  7. 
voycr  au  fecours  des  Grifons  ;  & 
ceux  de  Fribourg,  f  dix;  leCon-t  Le  n. 
feil  fit  cottifer  toute  la  Bourgeois 
fie,  pour  foutenir  cette  dépenfe;  & 
trouvant  raifonnable,  que  les  Ec- 
cléfiaftiques    contribuallent  auftl- 
bien  que  les  autres ,  il  demanda 


92  Hiftoire  de  UKcformation 

^^^^  Chapitre,  &  200.  âU 
La  USA  N  refte  du  Clergé.  Le  Clergé  Sécu- 
lier  contribua  de  bon  cœur  ce  qui 
étoit  en  fon  pouvoir ,  &  donna 
400.  florins.  Mais  les  Chanoines 
refuférent  de  payer  la  fomme  qu'on 
leur  den.andoit ,  difant  ,  Qu\\^ 
avoient  déjà  beaucoup  contribué 
pour  la  Ville,  &  fe  plaignant  de  ce 
que  le  Confeil  leur  retenoit  encore 
les  Places  ,  dont  on  lui  avoit  con-  .1 
fié  la  garde  ,  Tannée  précédente,  j 
(  Le  Confeil  les  avoit  retenuës  * 
jufqu  alors  5  parce  que  les  Chanoi- 
nes refufoient  de  payer  la  dépenfe 
que  la  Ville  avoit  faire  pour  les 
garder.  )  Pour  obliger  les  Chanoi- 
nes à  faire  leur  devoir  d'une  ma- 
nière ou  d'une  autre,  dans  cette 
occafion  ,  le  Confeil  les  chargea  de 
fournir  50.  Hommes  >  de  leurs  fu- 
jets  5  pour  \a  guerre  dont  il  s'a^if-  ; 
foit  3  de  les  envoyer ,  &  des  les  en- 
tretenir aux  dépens  de  leur  Cha- 
pitre. Cette  brouillerie  rraina  quel- 
que tems.  Enfin ,  vers  la  fin  de 
Juin,  les  parties  s'accommodèrent*. 
Les  Chonoines  s'engagèrent  de 
payer  à  la  Ville  250.  Ecus  d'oc 

pour 

^  Man.  LmÇ,  365. 


de  la  Suiffe,  LiV.  IX.  93 

pour   dédommagement,  ou  rem-  1531, 
bourfêment  de  fes  dépenfes  5  &  le  Lausan 
Confeil  leur  rendit  leurs  trois  Pk- 
ces,  favoir  le?:  Bourgs,  Villages  & 
Châteaux,  de  iS*.  PveTi^  Bom-Mmùn, 
&  f.ffcïîin':s. 

La  même  année  un  AmbafTadeur 
de  Ferdinand,  Roi  de  Hon- 
grie 6c  de  Bohême,  envoyé  en 
SiiûTQ ,  pour  demander  aux  Can- 
tons un  fecours  ,  d'Homme  ou 
d'argent  contre    les   Turcs  ,  fut 
aufi'i  à  Lau Tanne ,   &  demanda  ce 
fecours  au  Confeil  *  ,  lui  faifantune  *  Le  27. 
defciiption  touchante   &  pathéti- 
que  des  ravages  horribles  ,  que  les 
Turcs  avoient  fait  dans  l'Autriche 
&  dans  la  Hongrie,  peu  de  tems 
auparavant.     QneJcjues    jours   *  Marl'^' 
après,  cet  Ambaiïadeur  ,   ou  quel- 
que autre  pour  lui ,   propofa  au 
Confeil,  de  faire  publier  une  Oo/- 
f.tde  contre  les  Turcs  ,  dont  le  Pape 

f  .  *        11.  L  COU" 

avoit  5  lans  doute,  accorde  la  Bulle  ne  les 
à  ce  Prince.  Le  Confeil  rejctta  cette  Turcs, 
proportion  ,  difant  pour  raifon  , 
■^u'on    ne  pouvoir  pas  réfifter  aux 

rcs  '.  Il  confcntit  pourtant  à  fai-  - 
l  e  faire  des  proceHlons  ,  à  l'inten- 
ticn  de  cette  Cioifade  ,  &  permit 

.  de 


94  Hijloïrede  la  Bs^é formation 

1531»  de  contribuer  pour  fon  bon  fuccès, 
à  tous  ceux  qui  voudroient  le  fai- 
re de  leur  bon  gré.  Dans  ce  tems- 
là  la  Pefte  faifoit  du  ravage  à  Lau- 
fànne       aux  environs  *. 
L'Evê-      Ce  fut  vraifemblablement  cette 
que  de  année  1531.  que  le  nouvel  Evcque 
inUaîléà^^  ^S)^^^       ^^//^/V ,  Adrien  de 

Laufan.   RiEDMATTEN,    fût    inftallé  fo- 

lemnellemcnt  à  Laufanne.  Après 
avoir  été  élu  Tan  1529.  il  fut  trois 
ans  ,  fans  pouvoir  obtenir  du  Pape 
la   confirmation  de  fon  éle(ftion 
L'ayant  enfin  obtenue  5  il  vint 
Laulanne  ,  cii  il  fut  facré  par  Se' 
bafiien  De  Montfaulcon  ,  en  préfena 
de  la  Nobltfle  Valiaifanne  ,  qui 
l'a  voit  accompagné  à  cette  Céré-j 
monie.    Ce  Piélat  renouvella  l'ai 
liance  du  Valais  avec  les  VII.  Can- 
tons   Catholic]ues.    La  forter^lTe^ 
Majoria-,  qui  eft  à  Syon  ,  ayant 
é:é  confumée  par  le  feu,  il  la  rebâ- 
tit   beaucoup    plus    belle  qu'elle 
n'étoit  auparavant,  6^  dans  peu  de 
tems.    On  lui  donna  la  li  iiaf  ge, 
d'avoir  conduit   TErat   de  VaiLis 
avec  btai'conp  de  Prudence  de 
Modération,  6c  d'y  avoir  nuintenu 


delà  Suijfe.  Liv.  IX.  9J 

la  paix  &:  la  tranquillité  jufqu'à  fa  I53ï« 

mort ,  qui  arriva  Tan  I547«  eut 

pour  Succefltur  Jean  Jordan 

qui  marcha  fur  fes  traces  *. 

VIF.  Je  reviens  à  l'Hiftoire  de  N  e  u- 

nôtre  RéFormation.    La  Suire  de  ^y^uUes 

celle  de  Netuhfitcl,  Se  de  ral  ngin.  dans  la 

ne  fut  pas  plus  rrarquille  qte  le  ^"^^  ^ 
^      ^         T       r>    L  f         en  quel- 
commeiicemenr.    Les  Catnoiiques  quesen- 

de  Neuchatel  ne  voulurent  pas  ce-  droits 

der  à  la  pluralité  des  SufFfages,  &  P-'^ys 
r     /  A-  I  l       au  fuiet 

conleiverent   toujours  leur  cuJte  ,  l^Re- 

nfant  niéme  de  rrienaces  contre  les  ligion. 

Réformez  ,  dilant  que  le  Marquis 

de  NwUchatel  vicndroit  bientôt,  & 

"eroit  remettje  la  chofe  fur  le  tapis> 

pour  ê  re  palTée  à  Ja  pluralité  des 

voix.  Enfin  ils   faifoient   dire  la 

Vlcfle  fecretrement  dans  leurs  mai- 

fons.  La  ParoifTe  de  BoudeviliiLTSy 

qui  efl  dans  le  Comté  de 

mais  de  la  dépcTdnnce  de  Neucha- 

tcl  >  ayant   embialTé  la  Rtforma- 

tion ,  De  Pran^in  ,  Gou\'erneur  du 

Pays,  voulut  les  en  punir ^     con-  : 

fifqucr  leurs  bien.v  (^). 

Fard  étant  à  Ntucharel  ,  entra  Travaux 

en  difpute  avec  le  Vicaire  de  la  ^ 

Ville/'"' 

^  Sirrder.  Vallcfîa  p.  m.  i^g.  I6S>. 
(«)  MS.  -4/7>/>.  110.  b. 


96  Hîjloïre  de  la  Réformation 

I  S  3  I .  Ville  5  qui  le  traira  d^hérétique,  lui 
NEu-  &  tous  ceux  qui  mépiifoient  la 
CHATEL  p^j.ç|  voulut  le  tircT  en 

droit  5  pour  Tobligcr  à  prouver  fon 
accufation  ,  ou  à  fe  rerraifler.  Ayant 
voulu  p,êchcr  à  Corcelles  le  même 
Vicaire  foulcva  les  gens  du  lieu,  & 
les  ergsgea  à  cou»ir  en  armes  dans 
FEglife  5  pour  réfifter  à  ce  Miuiftre,# 

Ten  chaffer  *.  A  Bevay  .  où  il 
y  avoir  un  Prieuré  ,  les  Paroi/Tiens 
fouhaitrérent  d'entendre  prêcher  la 
dodrine  Evangelique  ,  &  il  y  alla 
quelques  Miniftres  pour  la  leur  an- 
noncer. Mais  le  Curé  &  les  Moi- 
nes s'y  oppofércnt  avec  violence  j 
&  routes  les  fois  qu'un  Miniftre 
prêchoit  dans  TEglile  de  ce  lieu-là,  J 
ces  pieux  Ecdéfiaftiques  prenoienti 
les  armes?  &  appelloient  des  gens 
de  Boiidry ,  pour  chaffer  le  Minif- 
tre 5  ôc  même  ils  en  maltraitèrent 
quelques  uns  ,  les  chargèrent  d'in- 
jurts.  les  battirent  &  les  chaffé- 
rent  [a). 

Le  Lieu-  A  Valengin,  Claude  ,  Sei* 
^àt^Vale-i  S"^"^  Bdlegardc  ,  Lieutenant  8c 
.v-'^  tra-  Gouverneur  du  Comté  ,  faifoit  auffi 

tous 


*  MS.  Amp.  120. 

OO  Idem,  ib.  &  Inftr.  34- 


deUSuife.  Li  v.  IX.  97 

Itous  fes  efforts  >  pour  soppofer  à  l  J31. 
rétablilTement  de  la  Réformaticn  verfe  la 
dans  ce  pays -là.  Il  ne  ceffoit  d'in- 
fulter,  &  de  bouche  &  par  écrit,  ae^ toute 
ceux  qui  aimoient  la  parole  de  fa  force. 
Dieu.    Il  faifoit  toute  forte  d'ava- 
nies &  d'infultes  aux  Miniflres  5 
mal-traitoit  les  Prêtres  qui  fe  ma- 
rioient  ,  publioit  fous  le  nom  de  la 
Comteffe,  des  Edits  févéres  •  qui  dé- 
fendoient  d'écouter  les  Miniftres  5 
&  faifoit  payer  de  greffes  amendes 
à  ceux  qui  y  contrtvenoient  j  ou- 
tre les  autres  mauvais  traitemens 
qu'il  leur  faifoit  par  avions  &  par 
paroles,  les  chaigeant  d'injures,  & 
les  effrayant  par  fès  menaces  {a). 
Nonobftant  fes  oppofitions,  il  y 
avoit  diverfes  Eglifes  dans  le  Com- 
ité de  Valengin  ,  où  les  Paroi/Tiens 
ijfouhaitoient  d'entendre  prêcher  la 
cljparole  de  Dieu.    En  particulier  la 
Paroilfe  de  Domhrejfon  avoit  réfolu, 
à  la  pluralité  des  voix ,  d'embrat 
kt  la  Réformation.    Cependant  le 
Gouverneur  y  faifoit  dire  laMefTe 
par  force  ,  "6c  défendit  même  à  ces 
bonnes  gens  >  d'aller  écouter  la  pà- 
role  de  Dieu,  avec  menace  de  pu- 
Tom,  IK  E  nition 

['i]  MS.  H(Hchat.  164. 


98  Hijloire  de  la^éformation 

Ijjl.niiion  en  corps  &:  en  biens  (po- 
sons    Les  Seigneurs  de  Berne  5  apre- 
des  Sei-nant  toutes  ces  chofes,en  fuient 
ieï/r««  f^^^  indignez ,  &  regardèrent  la 
pour  les  conduite  de  ces  gejis-là,  comme 
Réfor-  une  cfpècc  d'infulte  qu'on  leur  fai- 
^eucht^  foit.     lis  en   écrivirent  plufieurs 
tel    &  fois  à  la  Comttffe  de  Palengin  5  & 
deF^/f^^à  fon  Lieutenant;  mais  leurs  Le t- 
très  ne  produifiicnt  aucun  eifet, 
Ceft  pourquoi  aynnt  reçû  des  plain- 
tes rcïtcees  >  des  Réformez  qu'il  y 
avoit  da»u  les  Ccmrez  de  Neucha- 
tel  &:  de  Vâlergin  ,  ils  réfoluren 
d'y  apporter  du  remède  d'une  ma 
niére  plus  efficace.    Ils  y  envoyé 
rent  donc  deux  Députez,  le  10 
Janvier  1531.  avec  ordre  lO.d'af- 
Éfler  Farci  dans  laffaire  cl'honneur> 
qu'il  avoit  avec  le  Vicaire  de  Neu-, 
chatel  ,  Se  de  procurer  qu'on  lui 
fit  juftice  dans  la  Ville  même,  fans 
être  renvoyé  ailleurs  ;  &  au  cas  que 
le  Vicaire  voulut  appeller  héréti^ 
ques  ,  tous  ceux  qui  méprifoient  la 
Meffe  >  alors  les  Députez  dévoient, 
au  nom  de  leurs  Seigneurs ,  faire 
partie  au  Vicaiie,  &  lui  demander 
réparation.    Ils  dévoient  aufli  20, 

fe 

W  MS.  Amp.  110.  B.Inftr.34, 


delà  SuiJJe.  Liv.  IX.  99 
{t  plaindre  de  la  conduire  violen-  ^53 T. 
te  du  même  Vicaire,  6l  de  celle  des  ckatel 
Moir.ef  &  du  Curé  de  Bevay.  Ils 
furent  charge?  derepiéfenter,  qu'une 
pareille  conduite  déplaifoir  beau- 
coup à  LL.  EE.  qui  voyoient  que 
cela  fe  faifoit  an  mépris  de  Dieu , 
8c  pour  les  ii.fultei  5  ^«  ainfî  ils 
icmaF^doient  qu'on  s'abtb'nt  à  l'a- 
irenir  de  femblables  chofes  >  pour 
viter  les  maux  qui  en  pourroient 
irriver  ,  proteftant  que,  fi  Ton  fai- 
oit  quelque  violence ,  ou  quelque 
nfulte  à  Farel ,  ou  à  quelque  au- 
MiniftrC}  LL.  EE.  s'en  reffen- 
iroient  tour  comme  fi  la  chofc  eut 
té  faire  à  eux  n.êmes.    Enfin  ils 
toient  chargez  d'engager  les  Ca- 
holiques  de  Neucharel  ,  à  fe  fou- 
ncttre  au  règlement  de  Religion 
[ui  avoit  été  fait  ,  déclarant  que 
nflLL.  EE.  étoient  réfolus  de  main- 
m  enir  les  Réformez, 
ti-    De  Neucharel  les  Députez  eurent 
1<  idre  daller  à  Valengin  ,  lO.  de- 
nî!  lander  que  ceux  qui  avoienr  bartu 
iii  'arcl  fuifent  punis  >  &  20.  exhor- 
i«  BT  le  Lieutenant  de  Valengin  ,  à 
xccuter  ce  que  LL..EE.  lui  avoient 
1  crit  ^.  E  2  II 

*  MS.  Amp.  110.  B.  inflr.  54- 


1 00  Hïjlclre  de  la  déformation 

1^31.     Il  fembloit  que  cette  Dépiitation 
IPN  E  u-  devoit  produire  un  bon  effet  i  ce- 
CHATEL  pendant  elle  ne  produifit  rien.  Le 
Gouverneur  de  Valengin  fut  à  Ber- 
ne ,  &  promit  aux  Seigneurs  de 
cette  Ville  tout  ce  qu'ils  voulurent; 
^   mais  il  ne  tint  rien  :  ôc  les  mêmes 
fiijets  de  plaintes  continuèrent. 
Ainfi   les  Bernois  renvoyèrent 
*  Le  20.  bien-tôt  après  *  dan^  ces  lieux-là 
Mars.      jjj^e  nouvelle   Dèputation  5  plus 
nombreufê  que  la  précédente ,  corn- 
pofèe  de  troi^  Seigneurs  de  TEtât.  . 
Ils  eurent  ordre  de  parler  fortement  | 
aux  Catholiques  de  Neuchatel,  j 
de  les  exhorter  à  fe  défifter  de  leurs 
delTeins  &  de  leurs  menaces,  les 
affûrant  que,  foit  que  le  Marquis 
vint  à  Neuchatel ,  ou  non  5  LL. 
EE.  ne  foufriroient  jamais  3  que  la 
Rèformation  fût  mife  en  compro- 
mis 5  &:  expofèe  de  nouveau  à  la 
pluralité  des  voix  y  pour  rétablir  U 
Meffe,  mais  qu'il  étoient  réfolus  de  iii 
maintenir  les  Réformez  de  toutes  m  ^ 
leurs  forces.  Ils  dévoient  au/Ti  ex-lr 
horter  De  Prangin^  à  laiffer  en  paixl 
les  gens  de  BoudeviUicrs  *.  |  ^ 

Les  Députez  furent  auiïi  chargez; 

d'alleiHf 


*  MS.  Amp,  120.  b.B.  Inftr.  44- 


delaSuijfe.  Liv.  IX.  ICI 

daller  deNeuchatel  à  Valengin,  &  'S? 
de  parler  fortement  à  la  Comteffe 
du  pays  5  &:  à  fon  Lieutenant.  Ils 
dévoient  les  faire  reffouvenir  tous 
deux,  des  Lettres  qu'on  leur  avoit 
écrites  ,  &  en  particulier  reprocher 
au  Gouverneur ,  la  conduite  qu'il 
tenoit  5  contre  les  promeffes  qu'il 
leur  avoit  faites  >  lors  qu'il  avoir 
été  à  Berne.  En  particulier  ils  dé- 
voient parler  fur  le  fujet  dei'Eglife 
de  Dombrejfon  à  la  Comteffe,  &  dire 
nettement  au  Gouverneur  ,  qu'il 
eût  à  lâiffer  en  paix  ces  bonnes 
gens,  qui  avoient  embraffé  TEvan- 
ile,  qu'il  rendit  même  les  amen-, 
des  ,  qu'il  leur  avoit  extorquées  j 
&  que  fi  à  l'avenir  il  continuoit  à 
leur  vouloir  du  mal ,  LL.  EE.  fe 
fèrviroient  de  la  force  pour  y  met- 
tre ordre  ,  étant  réfolus  de  main- 
tenir leurs  Bourgeois  dans  toutes 
leurs  libertez  ,  &  fur  tout  dans  la 
profefilonde  la  pure  Religion  Chré- 
icnne.  Ils  eurent  ordre  enfin,  de 
epréfênter  à  la  Comteffe,  les  biens 
que  LL.  EE.  lui  avoient  faits  ,  à 
Elle  &  à  fon  Mari  défunt ,  &:  de 
affû  rer  5  qu'ils  étoient  toujours 
ortcz  de  la  même  bienveillance 
E  3  pour 


ï  02  Hilloire  de  la  Ejformation 

1531.  pour  Elle,  ôc  pour  la  foutenir  dans 
Valen-  tous  fes  droits  >  par  raport  aux 
chofes  temporelles,  pourvû  qu'elle 
lailTât  à  Tes  fujets  liberté  de  Con- 
fcience.  Ils  dévoient  auiTi  exhorter 
les  fujets,  à  rendre  à  leur  Dame, 
tout  ce  qai  lui  écoit  dû  légitime- 
mène 

Jîommût.     Cette  année  le  Marquis  de  Ro- 
ge  non-  thclin  ,  F  R  a  N  ç  o  i  s>  d'Orléans^  fils 
^1^"^]^  aine  de  \x  Comtefle  deNeuchatel, 
Pri  !cef- vint  à  Neuchatelj,  pour  y  recevoir 
^  '^^    les  hommages  de  la  Bourgeoise  & 
^cuc  •i'^^35ger,s       Pays,  au  nom  de  la 
Princ-ilTe  fi  Mére ,  &  du  Duc  de 
Longue  ville  Louis  d'Orléans,  fon 
FréiC  aine.    Il  y  prêta  le  ferment 
accoutumé  en  leur  Nom ,  à  la 
Bourgcoifie  5  le  6,  d'Avril ,  pro- 
mettant de  garder  leurs  libertez  & 
leurs  franchifes  ,   écrices  de  non 
écrites  ;  Se  le  même  jour  les  Neu-, 
chatelois  lui  prêtèrent  au/Ti  ferment  V 
de  fidélité  ,  comme  repréfentant  la 
Princelle  *. 

Il 

M  MS.  Amp,  110.  b. 
^  Lé  nom  &  les  titres  de  la  PrincefTe 

croient  ,  Jeanne  de  Hochherg  ,  Ducheff,-  dc 
L'ingu.euille  ,  M4rijuife  de  Rotkelin  ^  Com. 
tejfe  de  D'^nols  ,  N.uchutel,  &  de  Tan^' 
c^rvUle,  Vîs-Cojnrejfc  de  M^l/m  dcc. 


deUSuife.  Li  v.  IX.  lo3 

11  leur  accorda  auHi  quelques  pe-  j  ^  5  f . 
tits  privilèges  nouveaux ,  &  quel-      ^  ^' 
ques  réglemens,  pour  l'adminiftra-  ckatel* 
tien  des  affaires  publiques  ;  Entr  au- 
tres y  les  Neucharelois  ayant  de- 
mandé, que  les  Eccléfiaftiques.  né 
fuffenc  plus  membres  du  Tribunal  " 
SoQverain  de  la   Juftice  5  comme 
pai  lcpaffé,  ce  Piince  le  leur  ac- 
corda \  &c  par  un  Règlement  prp-  RegU^ 
vifio  ici ,  il  leur  fubftitua  l  Erat  de  ^^^^ 
la  Nobleffe  &  les  ValTaux,  pour  y  Ç-^ibu 
tenir  le  premier  rang.  Les  Officiers  nal  Sou- 
de la  Princeffe  y  dévoient  tenir  le  verain. 
fécond  :  Et  le  troifiéine  devoit  être 
rempli  par  quatre   Confeillers  de 
.  Keuchatel,  auxquels  il  joignit  les 
«quatre  Bandere's,  de  Nmch^tel ,  du 
î  Landcron ,  de  Boudrj  ,  &  de  Vau^ 
'ravirs.    Cet  Aûe  cft  daté  du  Jeu- 
di Saint,  II.  d'Avril  1551  (a). 

Ce  Prince  fit  aufTi  un  accommo- 
dement avec  TEvêque  titulaire  de 
•yi/c,  P'ince  àt  Ponuttu  ,  au  fujet 
les  difficultez,  qui  s'écoient  élevées 
nrre  les  deux  Etats  ,  pour  la  Ju- 
:fdif\ion  du  village  de  Ligri'tres  , 
lOnt  les  appels  dévoient  fe  porter 
cvant  un  Tribunal  ,  comporé  de 
E  4  quatre 
MS.  A".'«fW.7J.  ^ 


104  Hiftoire  de  U  Réformat  ion 

I       «quatre  Jufticicrs  de  Landeron  ,  & 
N  E  u-  quatre  de  la  Bonneville  ,  aflemblé 
cHAiEL  j^^ç  le  lieu  5  fous  la  préfidence  du 
Châtelain  de  Landeron  (4). 
Régie.     Il  fe  fit  auffi  dans  le  même  tems 
pour  la  q^s^^^s  Réglemens  Eccléfiaftiques, 
reftitu-  particuliérc^Tient  pour  les  biens  qui 
tioa  des  a  voient  été  léguez  à  TEglife  de 
guez   à  Nsuchatel,  pour  des  ufâges  fuperfti- 
l'Eglife.  tieux.  Les  Neuchatelois ,  à  l'exem- 
ple de  leurs  Voifins  de  Berne  & 
de  Bienne ,  demandèrent  qu'on  ret 
tituât  ces  biens  aux  familles  qui  les 
avoient  léguez  ^  jufqu'à  la  quatriè- 
me génération.     George  De 
Rive,  Seigneur  de  Prengin  Se  de 
(jr4^^"C(?«r5  Gouverneur  duComté> 
leur  accorda  l«ur  demande,  au  nom 
de  la  Princeffej  &  établit  une  Cham- 
bre  j  pour  examiner  les  prétentions 
de  ceux  qui  redemanderoient  ces 
fortes  de  biens.  Elle  fut  compofée" 
du  Maire  de  Neuchatel  j  comme 
Juge  député  de  la  part  de  la  Prîn- 
ceflej^  de  huitConfeillers  députez 
de  la  part  de  la  Bourgeoifie.On  leur 
prefcrivit  les  Réglemens  5  qu'il  dé- 
voient fuivrc  dans  leurs  jugemcnsj 
par  exemple  ,  de  faire  donner  cau- 


{a)  Uîd.  p.  i<)5. 


de  laSuife.  Liv.  IX.  105 

tion  de  reftiturion  ,  par  les  deman-  1531^ 
deurs  ,  en  cas  que  TEglife  retour- 
nât dans  fon  premier  état,  ceft-à- 
dire  ,  à  la  Religion  Catholique  5 
jou  au  cas  qu  il  fe  trouvât  un  Pa- 
rent plus  proche  qu'eux  ,  de  ne 
!point  toucher  aux  biens  léguez, 
ipar  les  Princes ,  par  les  Chanoines* 
par  les  Prêtres,  ni  par  la  Noblefle  : 
&  de  n'accorder  aucune  reftiturion 
aux  bâtards  ,  ni  à  leur  pofl:t5rité(^) . 

Quelque  tems  après,  Guillaume  F  are  l 
Farel  >  toujours  animé  d'un  zèle  ar- 
dent pour  lavancement  du  régne 
de  Dieu,  &:  pour  la  réformation  de 
l'Egli/è  dans  le  Comté  de  Neu^ 
chateLj  alla  du  côré  de  S.  Blaïje  , 
gros  village,  au  bord  du  Lac,  à 
une  lieiie  de  Neuchatel,  &  y  dif- 
puta  de  Religion  avec  le  Curé.  En- 
tr'autres  il  lui  parla  vivement  con- 
tre la  MefTe.    Le  Curé  en  fut  cho-  , 

/  o  1  •  j-  ,1  ,  .  /  .  mal  trai 
que  5  oc  lui  dit,  qu  il  etoit  un  he- s. 

rétique'-y  &c  le  Lieutenant  du  lieu,  s^^i/^. 

qui  fe  trouva  préfent,  s'écria  qu'on 

devoir  le  pendre  ^  &  fît  un  fi  grand 

bruit  que  tout  le  peuple  accourût  en 

armes  ,  dèforte  qu'il  s'en  falut  peu, 

que  Farel  ne  fut  maflacré.  Les  Ber- 

E  5  nois 


I06  Hijloire  de  laBJformation 

I  j  3 1 ,  nois  ,  en  ayant  eu  avis  >  envoye- 
*  Le  12.  rcnt  *  deux  Députez  à  S,  Blaijè  * 
F  A  R  B  L  poiïr  tirer  en  caufe  ie  Curé  du  lieu; 
protégé  lui  demander  qu  il  prouvât  par  TE- 

Bernois  ^^^^^^^      ^  ^^^  avoit  dit,  ou  qu'il 
'  fe  retraôât  :  ôc  Ton  chargea  leMi- 
niftre  de  Ncuchatel ,  nommé  ^w- 
toine  Marcourt ,  de  plaider  la  caufè 
de  Farel.     Ils  demandèrent  auffi 
que  le  Lieutenant  de  ^S".  BUife  fut 
châtié  5  pour  le  tumulte  qu'il  avoit 
excité.    De  là  ils  paflerenr  à  Neu- 
chatel  j  pour  demander  que  l'Eglife 
payât  à  Farel  la  dépenfe  ,    qu  'il 
avoit  faite  tandis  qu'il  leur  avoit 
prêché,  &  qu'ils   pouvûffent  leur 
Minière  d'une  penfion  (a). 
g  ^      Environ  le  même  tems  un  Théo- 
CHATEL  logicn  Catholique  du  pays  ,  nom- 
phle^Fa       Ch)iflophie  Fabri  ,  nonr^mé  aulïî 
^r/.       Libeitet ,  tmbralTa  la  Réformationj 
&  fut  d'abord  établi  Paftcur  à  Ntu- 
fhatel.   Dans  la  fuite  il  fut  appelé 
Si  Boifdivil  iers,  Il  fut  lié  d'une  ami- 
tié fort  étroite  avec  Farel ,  comme! 
il  paroit  par  diverfcs  Lettres  de  ce, 
dernier  *. 

Dans 

M  MS.  Amp.  iii.b.  I22.1nn:r.69. 


eUUSuiJfe.  Liv.  TX.  107 

Dans  le  même  tems  les  gens  de^o.'^  I  î3  T. 
&de     GïAtç  embrafférentla  Réfor-  Réfor- 
mation 5  vers  le  commencement  de 
l'Eté,  mais  ils  eurent  beaucoup  de  j^^^^^.^ 
traverfes  à  effuyer.  Le  Curé  d^Pon* 
tarettfe  leur  prêcha  durant  quelque 
tems  :  mais  dans  la  fuite  il  chan- 
gea ,  &  prêcha  tout  le  contraire  de 
ce  qu'il  leur    avoit  enfeignc  ,  tâ- 
chant de  tout  fon  pouvoir  ,  foit  ^^75" 

...  r  '         r  1    m^nt tra 

publiquement  5  loit  en  lecret  5  d«  verfée , 

les   faire  rentrer  dans  riJolatric,  par  ,1c 

Leur  Miniftre  cenfura  fou  vent  ce  ^^^^^ 

Cure  ,      Texhorta  chaiitablement 

à  fe  corriger  >  ou  du  moins  à  laif^ 

fer  en  paix  les  Réformez.  Comme 

il  ne  pouvoit  rien  gagner  fur  fon 

cfprit,  il  demanda  fouvent  jiiftice 

contre  lui  5  f^ns  pouvoir  l'obtenir, 

ce  qui  rendoit  ce  C  jré  plus  hardi 

à  travailler  à  féJuire  le  peuple. 

Pendant  to*  t  le  rcfte  de  laniiée  , 

c'cft-à-dire ,  Te^pace  He  fix  o  j  fept 

mois  ;  ils  furent  opprimez  6c  in-  &■  par 

quiétez  par  ceux  d-  Boudry  ,   qui  ^^^"^  de 

allèrent  fouvent  les  troubler,  dans  ^' 

leurs  éxcrcices  leligieax  ,  pour  Us 

empêcher  d'ouïr  la  parole  de  Dieu, 

fonnant   liur  Cloche ,  criant ,  fc 

mocqu^t.  entrant  6c  forianrj  allant 

E  (î  & 


.  108  Hifloire  de  UK.efor7nation 

Î53l.^  venanr,       ajoutant  à  toutes 
:Boie  &  ces  infolences  ,  de  grandes  mena- 
LaGrfite  ces  &.  des  injures.     Non  contens 
de  cela,  ils  les  attaquèrent  plu- 
fîeurs  fois  ,  ufant  de  violence  con- 
tr'eux  5  tellement  qu'il  ne  tenoitpas 
à  eu3(  qu'il  n'y  eût  des  gens  blet 
fez  ou  tuez.     Ces  pauvres  gens 
foulTrirent  toûjours  patiemment  ces 
outrages,  fans  fe  vanger.    Ils  fe 
contentèrent  d'en  porter  leurs  plain- 
tes au  Châtelain  de  Boudry,  & 
au  Gouverneur  du  Comté  5  auffi- 
bien  que  de  Tinjurtice  qu'on  leur 
faifoit ,  de  vouloir  qu'ils  fe  cotti- 
'  fàfTent  pour  entretenir  leur  MiniC- 
tre.  Mais  qu  elle  juftice  pouvoient- 
ils  attendre  de  gens  animez  d'un 
zélé  furieux  pour  le  Papifme  ?  Ils 
furent  durant  fept  mois  plus  de 
50.  fois  3  tant  auprès  du  Gouver- 
neur, qu'auprès  du  Châtelain  de^ 
Boudry,  Hcmy  Boga ,  mais  fans 
rien  obtenir.    Ces  deux  hommes 
les  ballotoient  impitoiablement,  les. 
renvoyant  toûjours  de  l'un  à  l'au- 
tre.   Bien  plus,  le  Châtelain  de 
Boudry  leur  faifoit  toute  forte  d'a- 
vanies &  d'injuftices  ,  &  favoiifoit . 
toujours  les  Catholiques  contr'eux. 

On 


de  la  Suife,Llv.  I  X.  109 

On  y  publia  une  ordonnance  5  1531, 
qui  porroit ,  que  les  deux  Religions  boU  é* 
auroient  leur  libre  exercice  dans  LaGrate 
TEglifè  ,  Se  que  pour  Tordre  elles 
alterneroienr.  Mais  cet  ordre  fût 
violé  deux  fois  par  les  Catholiques^ 
dans  peu  de  jours  5  &  le  jour  de 
Noël  les  Réformez  ne  purent  pas 
avoir  Tun  des  Calices  ^  pour  célé- 
brer la  S,  Céne.  Ces  bonnes  gensj 
après  avoir  porté  inutilement  leurs 
plaintes  au  Gouverneur  du  Pays> 
&  au  Châtelain  de  Boudry  ,  les 
portèrent  enfin  au  Confeil  d'Etat, 
le  lendemain  de  Noël.  Ils  lui  re- 
pr^fientérent ,  en  même  tems ,  que 
iur  les  inftances  réitérées  qu'ils 
avoient  faites  >  pour  faire  a/îigner 
une  penlîon  à  leur  Miniftre,  on  ne 
leur  avoit  offert  que  deux  muids 
de  blé,  3. Muids  de  vin,  &  30. 
florins  d'argent,  avec  4.  florins  pour 
le  loyer  d'une  maifon  :  Que  ces 
offres  n  etoient  point  raifonnables, 
puifque  la  Cure  avoit  de  fort 
grands  revenus  *. 

Cette  année  les  Bernois  eurent  Difficul- 

encore 


MS.  de  M.  Se  hou  far  t. 


110  Hilloîre  de  la  Réformation 
1531,  encore  une  fois  t  une  petite  diffi- 
té  des  ^^^^^  ^^^^      Comteffe  de  Neucha- 
Bernois  tel,  au  fujet  du  Couvent  de  S.  Jean 
avec  la  d'Erlach,  dont  ils  avoient  fait  un 
Balliage.    Le  Marquis  François 
Neuclu-  fon  Fils  agilTant  en  fon  nom  ,  en- 
tel,  au  voya  (  vers  la  fin  d'Avril,  )  des  Dé- 
TAbba-  P"^^^  ^  Berne  5  pour  demander  la 
ye  de  -S",  moitié  des  biens  de  ce  Couvent , 
Jean      foutenant  qu'elle  lui  appartenoit 
dErlach      ^roît.    Les   Bernois  répondi- 
*Lci.Mai  rent  *,  à  fes  Députez  ,  Qu'ils  étoient 
fort  furpris  d  une  parellk  demande , 
Que  ce  Couvent  leur  'uppartenoh  tout 
entier  ,  étant  fur  leurs  terres  ,  Que 
la  Thiele  fait  la  borne  entre  les  t^r^ 
Tes  de  Neuchatel  &  d'Erlach  3  ou 
Cerlier  (a). 
Mouvc-      VIII.  Il  y  eut  aulTi  quelques 
mens     troubles  dans  la  Prévôté  de  Aïou- 

tiers  Grand-Fat ,  au  fujet  de  la  Ré- 
contre  1*  •         «    «i        r  •  1 

Rèfor-    formation  >      ils  ne  le  terminèrent 

mation  ~  même  qu'avec  peine.     D'un  côté 

tieff^^'  les  chanoines  du  lieu  vouloient 

Grand-   perfévéret  dans  l'exercice  de  leur 

Val,  foit  ancienne  Religion  3    &  étoient 

t  Ils  en  avoient  eu  déjaune,  pour  le 
même  fujet,  avec  les  Cantons,  l'an  152.8. 
Voy.  Tom.  11.  p.  318. 

(a)  B. /«A.  p.  64. 


dt  U  Suijfe.  LiV.  IX.    I  M 

apuyez  par  TEvêque  de  Bâle     &  1531. 
par  les  Seigneurs  de  Soleurre,  qui  Ha  Pr£. 
prièrent  ceux  de  Berne*  5  de  laiffer 
à  ces  Chanoines  le  libre  exercice  *  Le  ^^. 
de  leur  Religion  ,   &  d'interpofer 
leurs  foins  pour  qu'on  leur  payât 
les  Cenfes  &  les  Dîmes  qu'on  t 
leur  devoir.     Mais  dautre  côté 
les  gens  de  Aloitt'iers  croient  fermes 
dans  la  réfolution  de  vivre  félon 
la  Réformation  de  Berne  ,  qu'ils 
avoient  embralTée  unanimémenr. 

Les  Seigneurs  de  Berne  promi- 
rent de  faire  payer  aux  Chanoines 
leurs  Cenfes  &  leurs  Dîmes ,  ce- 
pendant à  condi-ion  qu'ils  donne- 
ïoient  un  entretien  honorable  à 
deux  Minières  de  la  Paroilfe,  &  à 
ceux  des  deux  Paroiifes  de  Sornctan 
&  de  Court:  mais  en  même  tems 
ils  ne  voulurent  plus  fouffrir  que 
les  Chanoines  exerçaffe  t  l.ur  Re- 
ligion d  nslelieu,  puifqu'ils  dé- 
voient en  être  regardez  comme  les 
ParoilTiens  ?  &c  même  comme  le 
plus  petit  nombre  +  d'entr'cux.  Ce 
refus  irritâtes  Chanoines?  qui  dé- 

char- 

t  Apolog.  68.  Hctthg.  557. 
I  Apûlo^.  iàiU, 


ï  1 2  Hiftotre  de  U  Kéformatioa 

I  5  3  T .  chargèrent  leur  colère  fur  les  Mi- 
LaPre- niftres  3  qu'on  avoit  fait  venir  de 
VOTE.    France  ,  &  les  maltraitèrent  en  di- 

verfes  manières  {a), 
Difiîcul-     Il  y  eut  encore  un  autre  /ûjet  de 
ceux"  de  Réformez  de  A4oH' 

MoHtters  ^^^^^  demandèrent  au  Chapitre  l'u- 
&  le  fage  de  la  Grande  Eglife,  pour  y 
Chapi-  f^ïj-e  lejjj-s  exercices  de  Religion  5 
mais  Is  Chapitre  la  leurrefufa.  &:  le 
Maire  du  lieu  maltraita  tellement 
les  Miniftres  François  qu'on  y  avoit 
envoyez,  qu'ils  s'en  retournèrent 
en  France.  Et  dans  le  même  tems 
les  Seigneurs  de  Soleurre  mirent  un 
Gouverneur  à  Moutiers  Gra-nd-Valy 
dans  le  deffein  de  foutenir  les  Cha- 
noines. 

Les  Bernois  5  ayant  appris  tou- 
tes ces  chofes  envoyèrent  des  Dé- 
putez àA<fot{tiers  ,  le  19.  Avril,  pour 
exhorter  les  Chanoines  à  embraffer 
la  Rèformation  ,  6c  à  lailTer  aux 
Réformez   du   lieu  Tufage  de  la 
Soins  Grande  Eglife  ,  leur  reprèfentant, 
des  Ber.        puifqu'on  y  avoit  embraffè  la 
les  Ré-  Rèformation  a  la  pluralité  des  voix, 
formez.  &  qu'on  avoit  déjà  cédé   aux  Ré- 
formez la  petite  Eglife,  on  devoir 

auiïi 

W  MS.Crcof, 


I     ile  la  Suife^  LîV.lX.  113 

âu/Ti  quiter  TEglife  de  S,  Germain^  I531, 
qui  étoit  rEgiife  Paroifliale  ,  6c  La  Pre- 
qu  il  valoir  mieux  que  les  Chanoi-  vote. 
nés  le  fiflent  honnêtement  &  dans 
les  formes  ,  que  d'artendre  que  le 
Peuple  le  fît  fans  autorite  &  tu- 
I  multuairement ,  LL.  EE.  étant  ré- 
folus  de  foutenir  les  Réformez.  Ces 
Députez  préfentérent  en  même  rems 
au  Peuple  Jean  Holard  ,  ancien 
Doyen  de  Fribourg,  les  priant  de 
la  part  de  LL,  EE.  de  l'agréer  pour 
leur  Miniftre;  5c  les  avertirent  en 
particulier  3  que  fi  les  Chanoines 
refufoicnt  de  lui  payer  une  penfion> 
ils  pourroient  implorer  le  fecours 
de  LL.  EE.  pour  fe  faire  donner 
des  biens  d'Eglifè  5  ce  qui  leur  étoit 
néceffaire?  8c  qu'on  ne  manqueroit 
pas  de  les  foutenir  (4).  Après  avoir 
exécuté  leurs  ordres  à  Afouîiersy  ils 
allèrent  dans  les  villages  de  Grande 
Vd  &  de"  Corrandeitn  ?  pour  aflTjfter 
a  l'aflcmblée,  où  l'on  devoir,  à  la 
requête  des  Peuples,  décider  l'état 
de  la  Religion  à  la  pluralité  des 
voix,  &  les  aflïirer  de  la  protedion 
de  LL.  EE.  en  cas  qu'ils  embraf- 
faffent  l'Evangile  (^). 

Les 

W  MS,  Amp.  m.  b.  B.  lr>fir.  ^4.  M  /./. 


1 1 4  Hifloire  de  la  Ké formation 

Ï53I.     Les   Chanoines   ne  voidurent 
lAPRE-rien  faire  de  ce  qu'on  leur  deman- 
TOTE.    doit,  ni  embrafler  la  Réforme»  ni 
céder  TEglife  de  S.  Germu  'tn  aux  Pa- 
roinfiens  5   &  fe  contentèrent  de 
laiffer  au  Miniftre  une  petite  Eglife 
qui  étoit  au  deffous;  offrant  cepen-; 
dant  de  fournir  une  penfion  à  un 
Minière  de  Moutiers,  &  à  celui  de 
Sornetan,    Et  dans  le  même  tems 
ils  firent  éclater  leur  reffentimcnt 
contre  les  Bernois  ,  en  refivfant  de 
prêter  de   l'argent  au  Peuple  de 
cette  Vallée  ,  qui  éioit  obligé,  félon 
fon  Traité  d'Alliance  ,  de  donner 
quelques  Soldats  aux  Bernois  pour 
la  guerre  >  mais  qui  éroit  fi  pau- 
vre, qu'il  n'avoit  pas  le  moyen  de 
leur  payer  leur  Solde.    Ces  véné- 
rables  Eccléfîaftiques  recoururent 
aux  Seigneurs  de  Soleurre,  qui  les 
^  Le  z7.  pr^  égeoient  5  &  qui  écrivirent  à 
Avril.    'Beinc  en  leur  faveur  *  priant  qu*cn 
Le  Cha-      lâiffât  en  paix?  comme  eux  nujfi 
pitre  eft  navoient  point  dejje'm  de  troubler  les 

protège  haVna)2S  du  l  eu  dans  la  Réformationt 
pnr  les      ,.,        .  /    /r/  ; 

Seio--rs.  <7«  il^  avoient  cnwyajjee  ,        plus  que 

de^So'  le  Alïmftre  qui  la  prêJjoit:  Ajoutant 

leurre,  qu'ils  prioient  qu'on  ne  leur  mît 

point    d'impôt    pour    caufe  de 

guerre 


de  la  Suiffe.  L I  v.  I  X.     1 1  5 

guerre  &c.  Les  Bernois  répondi-  I53[. 
rent*:  „  Que  cq  n'avoir  pas  éréiAPRE- 

le  deflein  des  gens  de  la  Prév  ôté,  JÔte. 
yy  de  metrre  un  impôt  fur  Je  Cha- Avrif. 
yy  pitre  5  mais  <^ue  fe  trouvant  pau- 
5>  vres  ,  ils  Tavoicnt  prié  de  leur 
yy  prêter  de  l'argent  pour  les  frais 
>,  de  leurs  Soldats  :    Que  pour  ce 
yy  qui  regardoit  la  Religion  ,  les 
yy  bonnes  gens  de  Moîiii.'rs  avoient 
yy  embrafle  la  Réfo  mation  tous  en- 
yy  femble  ,  &:  unanimémentj  &  que 
yy  1  Eglife  ,  dans  laquelle  les  Cha- 
yy  noines  vouloientconrinuer  Texer- 
yy  cice  de  leurs  Cé'émonies,  étant 
>j  la  véiirable  &   ancienne  Eglifô  •« 
yy  P^roiiïiale  du  lieu  ,  ils  ne  pou- 
yy  voieu  pas   permertre  que  ks 
yy  Chanoines  ,   membres   de  cette 
yy  EgliTe ,  filTent  fede  à  part  :  Que 
yy  cela  étoit  contre  le  Traité  de  paix 
yy  de  la  Suiffe  .  Se  contre  la  pra- 
yy  tique  des  Magiftrars  de  Soleurre, 
qui  permettoient  eux-mêmes  à 
leurs  fujets  d'abolir  le  Papifme 
yy  dans  les  lieux  ,  où  la  pluralité 
>j  le  fouhaitoit  :  Qua  cette  condi- 
»  tion  ils  engageroient  les  gens  du 
».P^ys ,  à  payer  à  ces  Chanoines, 

yy  leurs 


1 1 6  Hifloirc  de  la  K^formation 

î  S  3 1  •  "  ^^^^^  Cenfes  3  leurs  Dîmes , 
LaPke-  yy  &C.  * 

VOTE.  Les  Bernois,  voyant  que  le  def- 
fein^  des  Chanoines  étoit  de  chaf- 
fer  les  Miniftres  du  Pays  ,  en  les 
contraignant  faute  de  fubfiflance , 
de  s'en  retourner  en  France  t  com- 
me la  chofe  étoit  déjà  arrivée  à 
quelques-uns  {a)  :  ils  réglèrent  eux- 
mêmes  la  penfion  que  les  Chanoi- 
nes dévoient  payer  à  ces  MiniC- 
très  5  &  leur  en  -donnèrent  avis,  le 
5.  Mai  5  les  exhortant  amiable- 
mcnt ,  à  s'y  conformer ,  comme 
auffi  à  renoncer  à  leurs  débauches, 
les  ^  leyrs  Concubines.    Ils  leur 

Z\q^i^^  Jir^nz  auffi  entendre  qu'ils  avoient 
Ta  pen.  pris  cette  réfolution,  pour  empê- 
lîon  des  cher  que  les  gens  du  lieu  ne  fu 
très?  "    portaflfent  à  quelque  violence  5  au 
cas  que  les  Chanoines  perféveraf- 
fent  dans  leur  (ù)  refus.    En  effet 
ces  gens  -  là  formèrent  le  deiTein 
d'entrer  dans  l'Eglife  de  S,  Ger- 
main) qui  étoit  leur  Eglife  Paroiffia- 
le  ,  &  de  s'en  emparer.  Là-defTus 

i« 

Apolog,  70.  71.       .  , 
t  Alexandre  le  Bel  avoit  prêche  à  Sor» 
neinriy  Se  Maître  Thomas  à  Conrt, 
(a)  Hottinç.  1.  c.  Apol.  ^y. 

(^)  Apolog.  S  1.52-.  S3- 


de  la  Suife.  Liv.  IX.  II7 

le  bruit  fe  répandit  à  Sôleurrcjqu'ils  f  53K 
vouloient  démolir  le  Monaftère:  &LaPre- 
les  Magiftrats  de  cette  Ville  la  en  vote. 
ccri virent  à  ceux  de  Berne  j  *  pot^^Mat^^^" 
les  prier  de  ne  pas  le  permettre  t. 
Ceux-ci  leur  répondirent  le  lende- 
main, &:  les  informèrent  du  véri- 
table deffein  des  gens  du  Pays. 
Quinze  jours  ^piès,  ceux  de  So- 
Icune  députèrent  un  Confeiller  à 
Berne ,  pour  intercéder  en  faveur 
des  ChanoincSi  qui  fe  plaignoient 
que. la  penfîon,  que  LL.  EE.  avoient 
réglée  aux  Mi-  ifties  éroit  trop  forte. 
(  Cette  penfîon  n'étoir  pourtant , 
que  de  40.  Ecus  par  an  ,  ou  la  va- 
leur, pour  foutes  chofes.)  Les  Sei- 
gneurs de  Berne  trouvèrent  la 
plainte  des  Chanoines  injufte  ,  & 
:  e  voulurent  rien  changer  à  leur 
icglement.  Ils  déclarèrent  même  > 
que  fi  ces  McHTieurs  nè  vouloient 
pas  payer  ces  penfions  de  bonne 
grâce ,  ils  mettroient  la  main  fur 
leur  revenus  ,  &  en  prèléveroient 
la  valeur  des  40.  Ecus,  après  quoi 
ils  leur  laifferoient  le  reftc:  Car, 
difoient-ils  ,  rien  nefl  j>lus  jufte  que 
de  fuhe  ferv'tr  les  dignes  ,  à  Centre' 

tien 

t /^/^.73.  74. 


I  5  3 1  •  11 8  HiJloîYe  de  la  BJformation 

//fw  di:s  Préduateurs  de  la  Parole  de 
D'uu,  Enfin  ils  prièrent  leurs  Al- 
liez de  Scleun  e,  d'engager  les  Cha- 
noines à  ie  conformer  au  fentiment 
de  leur  Paroifle,  qui  avoit  em- 
braffc  unanimement  la  Réforrna- 
tion  &  a  renoncer  a  leur  Idolâtrie. 
Mais  les  Chanoines?  ne  tinrent  au- 
cun compte  de  tous  les  avertifle- 
mens  qu'on  leur  avoit  adrelTtz. 
Troulhs  Ainfi  les  gens  de  Mouticrs^  après 

au  fujet  avoir  attendu  long-  tcms  inurile- 

ci  une 

Eglife,  ment  3  s'emparèrent  de  TEglife  de 
S.  Germain  >  le  15.  Juillet,  &  par  le 
moyen  de  quelques  perfonnes  qui 
furent  commifes  pour  ce  deffein  ils 
y  démolirentles  Autels  &:  les  Images 
&  les  brûlèrent  (a)  Les  Chanomes  ir- 
ritez les  menacèrent  de  faire  venir  > 
avec  le  fecours  de  Soleurre>  des  gens 
qui  les  châtieroient  &  brûleroient 
leurs  maifons.  Ils  firent  plus.  Non- 
feulement  ils  ne  voulurent  pas 
leur  payer  les  penfions  qui  avoienc 
été  réglées  ;  mais  encore  les  Prêtres 
&  les  Moines  battirent  maltrai- 
tèrent cruellement  le  Miniftre  Clau- 
de de  Clautinis  ,  &  quatre  autres  {b) 

ôc 

(/»)  Apolog.  74.  75-75. 
{b)  MS.  Groojf,^ 


de  la  SuiJJe.Lw.  IX.  I19 

&  lesf  perfécutérent  avec  tant  d  a- 1537. 
:harnement:  que  ces  pauvres  MI-LaPre- 
niftres ,  n'ayant  d  autre  afyle  que  ^^^i. 
la  procedlion  des  Bernois  5  Te  vi- 
rent contraints  d'implorer  le  fecours 
du  Baillif  de  Mdavv, 

Les  gens  de  Moutiersj  de  leur 
:6îé  recoururent  aux  Seigneurs  de 
Berne,  &  les  Chanoines  à  ceux  de 
ieSoleurre,  avec  q  -i  leur  Chapi- 
:re  avoit  un  Traité  de  Combour- 
^eoific.  De-là  3  nouvelles  difficul- 
ez  encre  les  deux  Etacs.  Mais  el- 
es  furent  terminées  amiableinent, 
lans  une  Conférence  ,  qui  fe  tint 
i  JVloutiers  *  ,  à  la  requêre  de  ceux  ^q^j/' 
:e  Soleurre  ,  entre  les  Députez  des 
ieux  Villes ,  en  prefence  de  ceux 
de  l'Evéque  t.  On  y  convint  lO.  Acconv 
Que  les  Chanoines  payeroient  aux  mode- 

■^'iîiiftres  la  pcnfion  qui  leur  avoit 

rr     '  \  1    tre  les 

c  affjgnee  :  20.        les  gens  du  ^^j^^p^j. 

Pays  payeroient  à  TEvêque  &  au  nés  &: 

[Chapitre  les  Cenfes      les  Dîmes,  1"  g^"^ 

qu'ils  leur  dévoient,   go.  Que  les  ^"P^'^^^' 

Chanoines  n'entreprendroitnt  plus 

de  rien  innover  contre  la  lé^orma- 

rion  du  pays.  40.  Enfin  qu'ils  fe 

défcroient  de  leurs  Concubines, 

dont 

t  Apolog.  -76,  jy,  78. 


120  Hïftûirc  de  la  Keformation 

I  5  3  î ,  dont  le  Commerce  fcandalifoit  le 
La  Pre-  monde  (^). 

YÔTE,        Dans  ce   tems-la   les  gens  de 
MervïllU  >  qui  font  aiifli  alliez  de 
Eerne  ,  avoient  embrafle  la  Réfor- 
mation. Nonobftant  ce  chargement 
ceux  de  Aiotzvveil  5  dont  ils  étoi- 
ent  Paroiiliens  >  voi  loient  les  obli- 
ger à  garder  ôc  obferver  les  Céré- • 
monies  d.  l'Eglifc  Romaine  commet 
auparavant  ;  mais  les  Députez  dei. 
Berne  leur  dirent ,  que  rintenrioni 
de  LL.  EE.  ctoit ,  qu'ils  lailTafTent?! 
en  repos  leurs  Bouigcois  de  Mer^' 
'vïUie  *. 

Il  y  avoit  dans  cette  Vallée  là 
quelques  perfonnes^  qui  fe  faifoient 
de  U  peine  de  payer  des  Cenfes  & 
des  Dîmes  a  des  Prélats  Catholi- 
ques 5  comme  à  ces  Chanoines  & 
à  TAbbé  de  Bellelaj.  Les  Bernois> 
l'ayant  appris  par  la  bouche  de 
^  leurs  Députez  écrivirent  à  ces  gens 
Août/'  là.*&les  exhortèrent  fortement 
à  rendre  à  chacun  ce  qu'ils  lui  dé- 
voient >  comme  une  chcfe  juftc 
&  raifonnable  j  d'autant ,  leur  difoi- 
cnt-ils  j  que  la  parole  de  Dieu  naf- 

porti 

W  Id.  8r.82. 


de  la  Suijje,  L  i  v.  I X.     1 2  I 

orîe  pas  une  liberté  charnelle  y  com-  1531. 
■'16  vous  vous  l'imaginez  ,  mais  une  La  Pre' 

'berté    (tejprit   &  de  confâenie  (a),  vôt£w^ 

Les  Chanoines  de  leur  coté  ne- 
roient  pas  plus  empreffez  à  remplir 
:ous  les  articles  de  cet  accommo- 
icment.    Ils   ne   quittèrent  point 
eurs  Concubines;.  ÔC  deshonoroient 
es  femmes  d'honneur  >  &  ils  en- 
/oyoient  des  Prêtres  par  les  Villa- 
ges &  les  hameaux  ,  pour  y  dire 
a  Mefle.  Les  Chanoines  ont  été 
dans  leur  origine  des  Pafteurs  d'E- 
^lifej  qui  s'etoient  liez  à  vivre  en- 
semble fous  de  certaines  régies , 
DU  Canons  ,  c'eft  pourquoi  on  leur 
donna  le  nom  de  Canonici ,  Chanou- 
lesi  comme  pour  dire,  Pafteurs  ré- 
'Jez*  Si  ces  MefTieurs  euflent  répon- 
du au  but  de  leur  inftitution  ,  ils 
luroient    fait  eux-mêmes  toutes 
[es  fondions  de  bons  Pafteurs  >  Se 
on   n  auroit  pas  eu  befoin  d'au- 
bes Miniftres.  Mais  vivant  dans  le 
dérèglement  Se  dans   une  parfaite 
oifiveté  ne  fâchant  faire  autre  cho- 
fe  que  de  réciter  leurs  Offices  ,  & 
laiffant  périr  fans  inftruftion  leurs 
ouailles,  de  la  graifte  defquelles 
Tom,  ir.  F  '  ils 

ji^'S*  81.  83. 

u 


122  Hïjldïre  de  U  ^déformation 

I  5  3 1 .  ils  s'engraiffoient  :  il  étoit  bien  jut 
IaPre-  te  qu'on  leur  ôtât,  au  moins,  une 
voT£.    partie  de  leurs  rentes  pour  les  don- 
ner à  des  PaReurs  fidèles  &  zélez. 
Non-  Ce  fut  pour  cette  raiion    que  les 
efforts    S^'g^^^^^s  de  Berne  ,  qui  avoient 
des  Sei-  à  cœur  de   foutenir  ces  Eglifes 
gneurs    nouvellement  plantées,  écrivirent  *, 
deBerne  ^      Chanoines  ,  pour  leur  repro- 
desCha-  cher  encore  une  fois  toutes  ces  cho- 
Doines.  fes  ,  les  exhorter  de  nouveau  à 
4'Août.^°'  embrafier  la  réformation  j  les  fom-~ 
mant  en  même  tems  ,  eux  &:  les 
Prêtres  3  qui   vouloient  demeurer 
dans  le  lieu  ,  de  fe  défaire  de  leurs 
Concubines  ,   ou  de  les  épcufer 
dans  refpâce  d'un  mois  ,  fous  pei- 
ne de  fe  voir  privez  de  leurs  Bé-à 
néfices  \  enfin  d'aller   écouter  lesf 
prêches,  &  d'y  envoyer  leurs  do-- 
meftiques.     Et  comme  ces  Cha- 
noines avoient  établi ,  en  quelques 
endroits,  des  Minières  ignoransj 
peu  propres  à  édifier  l'Eglife,  ils  les 
averriffoient  de   ne   plus  donnetf 
d'Eglife  qu  à  des  Miniftres  exami-^ 
nez  &  approuvez  par  le  Confiftoirtf. 
de  Berne.     Ils  leur  ndreJférent  eii 
même  tems~un  nouveau  Miniftre» 
nommé  y^lexandre  LeBil^  quijavoit^ 

déj*l'' 


de  la  Suilj'eLlw  IX.  i25 

'déjà  exercé  le  MiniRére  .dans  les  1531, 
Paroiffcs  de  Court  Se  de  Sornetan,  LaPke- 
iavec  ordre  de  lui  fournir  un  lo-  vôtè. 
gement        Cependant  le  Prévôt 
&  les  Chanoines  de  Moutiers  en- 
levèrent leurs  ornemens  d'Eglife, 
j    &  les  envoyèrent  à  Soleurre,  6c  s^y 
retirérent  enfuite  eux  mêmes.  Ils 
^    y  firent  leur  fervice  pendant  quel- 
^    que  tems  ,  dans  TEglife  des  Cor- 
deliers.    Enfin  ils  établirent  leur 
^    réfidence  à  Delémont ,  (  en  Allemand 
Teliskrgy  )  petite  Ville    dans  ces 
montagnes    où  ce  Chapitre  fub- 
fifte  encore,  &  où  ils  avoient  com- 
mencé, il  y  a  quelques  années  ,  à 
*  |bâtir  une  magnifique  Eglife  (a), 
f       IX.   Finiflbns  l'Hiftoire  de  la  Genève 
iRéformation  de  la  Suifle  Romande, 
'de  cette  année,  par  l'article  de  G  e- 
^'  !neve.    Il  fembloit  que  la  paix 
de  ^S*.  Julien  i  dc  la  Sentence  ren- 
;  Iduë  en  confequence  >   à  Payer  ne  , 
'  'par  Taffemblée  des  Députez  de  IX. 

Cantons ,  &  des  deux  Etats  de 
il''  IVallais  &  de  S.  Gai ,  dévoient  af- 
c  jfïirer  pour  long-tems  le  repos  des 
^'  Genevois  s  fur  tout  après  la  referve 
^'  F  2  qu'on 


124  Hijlûïre  delà  Réformation 
1531.  qu'on  avûic  appofëe  à  cette  Sen- 
Genève  tence  5  contre  les  prémiers  qui  la 
violeroient  :  &  que  le  Duc  de  Sa- 
voyc  5  craignant  de  perdre  le  pays 
deVaud,  laifferoit  Genève  en  paix. 
Mais  ce  ne  fût  point,  cela.    On  a 
déjà  vu,  dans  le  Livre  Vil.  *  com- 
La  Sen-  jyjg  Qucji  k  Duc  ne  voulut  accepter 

tence  de  1  r  •  i> 

Payerne  ^^^^^  kiitence  quc  ce  qui  1  ac- 
n'eft  commodoit.  Et  dès  les  premiers 
P^pt  jours  de  Janvier  153 ï.  il  envoya 
tàe!^"'  un  homme  d'office  à  Genève^  pour 
y  exercer  le  Vidomnat  en  fon  nomi 
avec  une  Lettre  adrt- flee  aux  Gene-. 
vois  >  (  à  qui  il  donnoit  le  titre  de 
fes  chers  &  féaux ,  comme  s'ils  euf- 
fent  été  fes  fujets  5  )  leur  ordon- 
nant de  le  recevoir  3  fous  peine  de 
fon  indignation.  Les  Genevois  re- 
fuférent  de  rcconnoître  cet  homme- 
là  en  cette  qualité,  jufqu'à  ce  que 
le  Duc  eût  fatisfait  aux  autres  ar- 
ticles de  la  fentence  de  Payerne , 
&  lui  demandèrent ,  Ou  étaient  les 
7000.  Ectfs ,  qu'il  devait  leur  pajer 
Et  Ou  étoit  Bonnivard  {a). 

De  plus  les  Genevois  étoient 
mal-traitcz  dans  l^s  terres  duDuc^ 


*Ch.  XL 

Sfivion  p.  m.  SI.  ^5. 


de  laSmlfc.Liy.iyi.  12$ 

&  les  GentiJs-hommes  de  la  Ligue  1531. 
de  la  Cueillere  tenoient  toûjours  Genève 
la  Campagne  en  armes ,  de  forte 
que  les  Genevois  ne  pouvoicnt 
forrir  de  la  Ville ,  fans  être  atta- 
qaezj  mal-traiccz  &  bleffez  (a).  Ce- 
pendant ils  envoyèrent  des  Dépu- 
tez à  Bade  5  pour  y  voir  ratifier,  par 
la  Diète  ,  la  fentence  de  Payerne, 
comme  on  en  étoit  convenu  ;  ce 
qui  fût  fait ,  malgré  roppôfition 
des  AmbafTadeurs  de  Savoye  :  Se 
il  fut  réfolu  que  le  Secrétaire,  après 
en  avoir  drefie  les  Aùcs  au  net  en 
parchemin ,  les  porteroit  par  tous 
les  Cantons  j  pour  y  être  fcêlez  (b). 

Sur  la  En  de  Février  ,  le  Duc 
paya  7000.  Ecus  à  Me/Tieurs  deFri- 
bourg,  &  fit  publier  dans  fes  Etats 
défenfe  de  faire  du  tort  aux  Ge-  . 
nevois  j  fous  peine  de  la  vie  (c). 

Au  commencement  de  Mars  la 
Combourgeoifie  &c  TAlliance  des 
trois  Villes  fut  jurée  &  confirmée 
de  nouveau  ,  par  leurs  Députez 
refpe^ifs.  La  Cérémonie  s'en  fit 
en  particulier  à  Geneve^le  6.  Mars,  Alliance 
F  3  dans"^^^^"- 

{a)  Uid, 

(/',  S-ivion  p.  m.  ^4. 
U)  Savion  p.  m.  S  S- 


1 2  6  Hijloire  de  la  Kt formation 

ï  5  3 1  .  dans  le  Confeil  général.  On  régak 
GENEVE  les  Députez  de  Berne  &  de  Frr 
bourg,  &  on  les  défraya.  On 
IvecBfr  1^^^  ^"^^  despréfensj  mais  ceux 
de  Berne  ne  voulurent  rien  pren- 
^rïhourg  ci^e.  On  le  leur  avoit  défendu 

Les  Bernois  ayant  levé  gooo. 
hommes  pour  la  guerre  de  Mtifs^ 
e#i  donnèrent  avis  aux  Genevois 
par  une  Lettre  ,  qui  leur  fût  ap- 
portée le  12.  Avril  ,  &  les  priè- 
rent da  tenir  prêts  loo.  hommes, 
pour  joindre  à  leurs  troupes,  ce  qui 
fût  fait  {h\ 

Cependant  le  Duc ,  toûjours  ani- 
mé du  défir  de  s'approprier  le  Vi- 
domnat,  fit  demander  à  l'Evêque 
une  Déclaration  ,  comme  quoi  il 
reconnoilîoit  que  le  Vidomnat  lui 
appartenoit.  Mais  1  Evêque  le  re- 
fufà ,  &  fit  favoir  fon  refus  aux 
Genevois  (c). 
^fjl  Dans  ce  tems-là  lesGenevoisjprofi- 
^Gerv^iis  ^^^^  tranquillité  dont  ils  jouif- 
foient,  prirent  diverfe;;  mefures  pour 
leur  fûreté.  Ils  fortifièrent  le  Faux- 
bourg  de  S,  Gerv.iis,  qui  jufqu'alors 
n  avoit  été  fermé  que  de  gazons  ; 

ils 


(a)  U.  p.  m.  ')6. 
Lù  c)  JJ,  <j8. 


de  la  Suijje,  L i  v.  I X.  127 

ils  le  fermèrent  de  murailles,  &I53r. 

reiivironnérent  de  folTuz  {a).  Ils  ré-  genev£ 
foliirent  en  même  rems  dans  leur 
Grand  Confêilj  de  punir  tous  ceux 
de  leurs  Bourgeois  ,  qui  du  tems 
de  la  guerre,  s'étoient  joints  à  leurs 
ennemis  :  &  que  ceux  d'entr'eux, 
qui  s'étant  trouvé  hors  de  la  Ville 
dans  ce  tems -là,  &:  ayant  fû  le 
deiïein  de  hùrs  ennemis,  n'y  éroient 
point  revenus  >  pour  aidée  à  la  dé- 
fendre, ou  qui  même  par  la  crainte 
de  la  guerre  &  par  lâcheté  ,  en 
étoient  fortis,  fercient  obligez  de 
prêter  de  nouveau  le  ferment,  & 
de  pa/er  un  tant  p^ur  la  façon 
de  quelque  toifes  ,  des  folT^z  dé 
S.Gervais.  Les  Eccléfiafliques  prê- 
tèrent ce  ferment  entre  les  mains 
des  Syndics  ,  en  préfence  du  Vicaire 
de  rÉvêque  (l/). 

Cependant  le  Duc  de  Savoye  fît   .  ^'■'^'^^ 
diverfes  tentatives  auprès  de  quel-  ^^^^ 
ques   Cantons  ,   pour  faire  calfer  Savoye 
TAlliance  de  Genève  avec  Berne  Se 
Fribourp,  mais  inutilement  M.  Le  ïïïï'^î! 
16.  JuiJJet,  les  Députez  parurent  a  ce  de 
Berne  ,   &  après   quelques  autres  Genève 
propofitions  ,  ils  demandèrent  ,  //  Jj^^^ 

F  4         ^i'/- Cantons 

{a  ù  c)  Li.  <^(j. 


128  Htfloire  de  la  Vjformation 

t  53  T .  ^ejfieurs  ^/^  B i  r  n  e  voudroient  fw- 
QiiïiE\i.vojcr  une  Députation  ^  four  accom- 
pagner le  Duc  de  Savoie ,  quand  il 
h  oit  prendre  poffcjfion  du  Vidomnat 
de  Gcn.ve  >  &  fi  après  quil  l'aurott 
eue  y  ils  voudroient  quitter  la  Bour- 
geê'fie  de  Genève  ?  Ces  Seigneurs  ré- 
pondirent. Qu'ils  s'en  tenoient  à  U 
fentence  de  Pajerne  3  fans  autre  dé- 
claration [4]  :  &  le  mois  fuivant 
ils  envoyèrent  un  Héraut  à  la  Cour 
de  Savoye,  pour  demander  au  Duc, 
de  payer  l'argent  qu'il  devoit  en 
Allemagne,  &  pour  lequel  ils  l'a- 
voient  cautionné  [Ji], 

Les  Bernois  écrivirent  aux  Ge- 
nevois à  la  fin  du  mois  d'Août, 
qu'ils  avoient  appris  qu'on  aflem- 
bloir  des  gens  de  guerre  contre  Ge- 
nève, &  qu'ils  étoient  étonnez  , 
qu'on  ne  leur  en  donnât  point  d'a- 
vis, les  exhortant  en  même  tems 
à  fe  tenir  bien  fur  leur  gardes,  & 
â  fè  fortifier.  Les  Genevois  ré- 
pondirent :  Qujls  avoient  feulement 
Apris ,  que  les  Princes  fe  préparoicnt  a 
fe  jetter  fur  Us  Cantons,  s  ils  entroient 
en  guerre,    Les  Genevois  le  crai- 

gnoient 

B.  inftr.  89. 

{L)  Savicn  1.  ç.p.60. 


deUSuife.  Liv.  IX.  129 

gnoient  beaucoup,  parceque  par-là  £^3  T. 
ils  couroient  rifque  de  fe  voir  pri-  geneve 
vez  du  fecours  des  deux  Villes,  en 
cas  de  befoin.    Ceft  pourquoi  ils 
prièrent  MefTieurs    de    Berne  de 
chercher  la  paix  *. 

Mais  pour  ne  pas  s'attendre  à 
un  fecours  étranger,  qui  pouvoit 
être  incertain,  ils  penféient  férieu- 
fement  à  fe  fortifier.  La  Ville  de 
Genève  avoit  alors  cinq  ou  fix 
Fauxbourgs  ,  qui  faifoient  enfenî- 
ble  un  fécond  corps  de  Ville?  aufïi 
grand  que  la  Ville  même  :  Celui 
de  la  Porte  de  Rive ,  qui  s'étendoit 
jufcju'aux  Eauxvives  :  Celui  S. 
Antoine i  qui  s'érendoit  jufqucs  vers 
S.f^iUor  :  Celui  de  S.  Legïer  5  qui 
s'avançoit  j  ifqu'au  Pont  d'v^rî/e  le 
long  de  Plein-PaUts ,  &:  vers  la  Cor- 
ratcrie  5  ju/ques  à  rHôpiral  des 
pcftjfcrez  :  &  enfin  celui  de  S, 
Cet  vais»  Afin  donc  d'arrondir  la 
Ville  ,  Se  de  la  Hiettre  plus  aifé- 
ment  Se  plus  piomteu  ent  en  état 
de  défcnfe,  on  réfolut  de  démolir 
tous  (.es  Fauxbourgs  3  à  la  itferve 
du  Bourg  de  Four  ,  Sc  de  celui  de 
•S*.  Cervais ,  qu'on  attacha  à  la  Ville 
F  5  par 

^  Sstzion  62.. 


I  30  Hijloire  de  la  K^formatiou 

I  5  3  I  •  P^r  des  murailles  :  l'on  obligea 
G£N£VE  les  habitans  à  venir  s'établir  dans 
la  Ville.  Les  pierres  &  les  autres  dé- 
bris des  maifons  qu'on  y  démolit, 
fervirent  de  matériaux?  pour  conf- 
truire  les  muiailles  &  les  boule- 
vards. Pour  fournir  à  toutes  ces 
dépenfes  ^  ks  Genevois  empruntè- 
rent quelques  milliers  d'écus  à 
Bâle  [a).  Mais  ce  grand  changement 
ne  fe  fît  pas  fi  tôt. 

Dans  le  mois  de  Décembre  les 
gens  da  Duc  de  Savoye  firent  de 
-  nouvelles  inftances  auprès  des  Sei- 
.  gneurs  de  Berne,  pour  renouvelles 
TAlIiance  avec  ce  Prince  >  &  pour 
rompre  celle  de  Genève.  Ces  Sei«. 
gneurs  répondirent  :  Que  pour  les  fa- 
îisfaire  on  envojercit  demander  aux 
Genevois  j  s'il  vouloient  quher  cette 
Bouïgeoifie  de  leur  bon  gré  >  ou  non  f 
Que  s'ils  la  vouloient  quiter^  les  Ber- 
nois feroient  une  Alliance  plus  étroite 
avec  la  Alaifon  de  Savoye^  cependant 
fous  la  refèrve  /ie  garder  l'alliance 
contractée  avec  Laujanne  (ô),  Effcc- 
Dcccmu*  ^^^^'^"'^^"^  envoyèrent  *  ,  trois 
Députez  à  Genève  >  avec  ordre  de 

tra- 

(rt)  Savion  1.  c. 
(l>)  i5.  Inllr.iSi» 


■    delaSuiffe.  Li  v.  IX.  IJI 

travailler  à  perfuader  les Gevevois>  1531^* 
ck  renoncer  volontairement  à  leur  ^^^'^^^ 
Alliance  ,  en  leur  repréfentant  (^), 
>5  Que  Genève  n'étoit  pas  affez  ri- 
>j  che  pour  payer  les  fecours  qu'il 
5>  fâudroit  lui  envoyer,  toutes  les 
>5  fois  qu'elle  feroit  attaquée,  puif- 
•>y  qu'ils  n'.ivoient  pas   même  pu 
encore  leur   payer  les  25000. 
jjEcus,  qu'ils  leur  dévoient  pour 
»  les  fi  ais  de  la  guerre  >,.  Les  Dé- 
putez qui  étoient  Sebafticn  De  Dief- 
bach  5  Jean  Jaques  De  WattevilU^  & 
Jean  François  Naigndï  arrivèrent  àOe-  1  532. 
né ve  le  7.  Janvier  1532.  après  avoir 
kik\Gex-i  auprès  du  DuCj  pour  lui 
demander  le  payement  de  ce  qu'il 
devoit  à  eux  ôc  à  d'autres.  Les 
Confeils  ayant  été  afTemblez ,  ces 
Députez    s'acquittèrent  parfaite- 
ment de  leur  commiHlon ,  particu- 
lièrement dans  le  Confeil  général, 
qui  fut  afTemblé  le  p.  du  mois  , 
tâchant  d'engager  lesGenevoir,  par 
la  crainte  qu'ils  vouloierw  leur  inf-  Pro;);-)  F. 
pirer,  à  renoncer  volontairement  à  ^t^^ 
cette  Alliance.    Apiès  qu'ils  fc  fu- ^J^'^"^^; 
rent  retirez,  les  Syndics  commu- «^i^jà. 
niquérent  à  la  Bourgeoifie  la  ré- 

ponfe^ 


132  Hijloire  de  la  déformation 

ÎS32.  ponfe  5  que  le  Petit  &  le  Grand 
G£NEv-£  Confeil  avoient  renduë  à  ces  Sei- 
gneurs. La  voici  toute  entière,  & 
Réponfe  rnot  pour  mot  :  Qu  'ils  m  connoiÇ- 
coura-  Ç^Yit  ^^i/^f  appoint ement  bon  5  fors 
les  Bourgeoifie  demeure  ,  &  la 

nevûfs.  fentence  dernièrement  donnée  à  Payerne 
par  tous  les  Meffieurs  des  Ligues  ^  & 
quand  en  les  menacera  &  on  leur  don- 
nera plus  de  crainte  ,  de  tant  plus  ils 
feront  fermes  O  conflans  ,  pour  main- 
tenir leur  dro  t  jufqua  la  mort  ^  & 
que  s'ils  meurent  pour  maintenir  leur 
bon  droit ,  ils  fe  tiennent  pour  heu- 
reux y  toutefois  qu'ils  fe  fient  tant  a 
Dieu  &  anx  Excellences  deA/eJfieurs 
des  deux  Filles,  qu'ils  obfe'ivcront  les 
fermer  ti  faits  a  Dieu  entre  les  hom- 
mes,  &  quand  Us  devroient  engager 
tous  leurs  biens  ,  femmes  &  enfans,  ils 
leur  payeront  tout  ce  qu  ih  leur  peu* 
vent  devoir  ,  de  forte  quils  auront  oc^ 
cafiondt  fe  contenter.  Cetre  répon- 
fe fût  agréée  de  la  Bourg^oifîe.  & 
approuvée  tout  d'une  Voix  *.  Il 
ne  Faloit  pas  moins  qu'une  pareille 
fermeté  pour  fe  foutenir,  les  giands 
dcffeins  denmndent  un  grand  cou- 
rage. Si  les  Genevois  euflent  molli 

dâns 


de  laSuiJJe.  Liv.  IX.-  133 

dans  cette  rencontre,  ils  étoientiJ32. 
perdus.  Des  gens  auffi  courageux  Genève 
<3ue  ceux-là,  étoient  dignes  de 
vivre  en  liberté. 

Dans  ce  tems-là  le  Duc  étant  tn-vificnd- 
core  à  Gex  y  ceux  qui   y  faifoient^^rayante 
le  ^uet  furies  murailles  3  rapporté- ^^JJ.*^ 
rent  qu'ils  avoient  vû  de  nuit  jeptCa-  Savoye. 
v/iliers,  habillez  de  noin  &  fans  tê- 
tes ,  qui  vinrent  frapper  à  la  porte. 
Cette  vifion  fit  peur  au  Duc  5  qui 
quita  Gexy  &  s'en  alla  incelTamment 
à  Chambery  [4], 

On  parloit  aufli   de  vifions  i^viJionSc 
Genève.  Une  pauvre  Fille ,  qui  de-  ^If/^-^*' 
meuroit  à  l'Hôpital,  dit  avoir  vû  de  Genève* 
nuit ,  une  femme  vétuë  des  blanc, 
qui  la  fit  lever,  pour  aller  dire  à 
celui  qui  lui  faifoit  le   plus  de 
bien ,  qu'on  devoit  faire  des  pro- 
cefTions  générales  trois  jours  du- 
rant; k's  enfans  habillez  de  blanc  ^ 
&  que  Dieu  leur  donneroit  viifloire 
fur  leurs  ennemis.    Les  Genevois 
reçurent  cette  vifion  ,  comme  un 
averriiïement  du  Ciel ,  &  firent  les 
proccflions  avec  beaucoup  de  dé- 
votions &  d'humilicé  {h). 

Us 

(^)  hL  ibid. 
u,  p.  m.  7^ 


Hijîûtrede  la  t{,éfoY77iatlou 

I  5  32»  Ils  étoient  dans  une  grande  per=- 
GtNEvE  plexité  5  jamais  leur  liberté  ne 
fût  en  plus  grand  danger  que  cette 
Genève  année.  D'un  côté  le  Duc  indigné 
erand^  de  leur  fermeté  ,  fit  publier  ,  [vers 
danger.  1^  fii^  de  Janvier,  ]  défenfe  de  four- 
nir des  vivres  aux  Genevois  ,  fous 
peine  de  la  vie,  &  commandement 
à  chacun  de  fc  tenir  prêt  avec  Tes 
armes  >  pour  marcher  au  premier 
ordre.  Il  fit  avancer  lo.  mille 
Italiens  ,  &  5000.  Lanfquenets  du 
côté  de  la  Bourgogne  ,  pour  venir 
fondre  fur  Genève  j  6i  tout  fou 
pays  d'au  delà  des  Monts  éroiten 
mouvement  [4].  D'autre  côté  les 
Genevois  recourant  à  Meflîeurs  de 
Berne,  pour  implorer  leur  fecours> 
y  trouvèrent  les  efprits  indifpofez 
à  leur  égard  j  &  foit  par  les  intri- 
gues des  Agens  du  Duc ,  foit  qu'en 
effet  il  leur  paiût  que  l'Alliance  de 
Genève  leur  étoic  oifereufe  aux 
uns  &  aux  autres  ,  les  Seigneurs 
de  Berne  vouloient  y  renoncer, 
dans  la  penfée  que  c'étoit  là  le 
moyen  le  plus  court  de  mettre  fin  à 
toutes  l^s  diîfjcultez ,  comme  le 
Duc  le  difoit.    Il  n'en  étoit  pas 

de 

(.'0      p.  m.  6j,  7^» 


dclaSuijfe.  Lî  v.  IX.  135 

de  même  des  Fribotirgeois.     Ils  j  ^  j 
parurent  encore  tenir  terme  pour  Genevs 
cette  Alliance,  Ôc  à  laDicLede  Badcj 
qui  fe  tenoit  à  la  fin  de  Janvier> 
lis  prièrent  les  Cantons  ,  d'obliger 
le  Duc  de  Savoye  à  obfeiver  leur 
fentence  donnée  à  Paycrne  3  &  de 
prendre  Genève  fous  leur  protedlionj 
puifque  ce  Piince   contrevenoit  à 
cette  fentence  ,  par  la  défence  des 
vivres  &:  par  les  autres  vexatiops> 
qu'il  faifoit  aux  Genevois  W-  Mais 
les  Seigneurs  de  Berne  gagnèrent  ^^^^J^^'" 
ceux  de  Fribourg  ,  en  leur  repré-  j-ionsdes 
fentant  parleurs  Députez  ,  au  com-  Bémols 
menccment  de  Février  *  :  Que  les  ^^i^ 

...  ,  ,  bourgeon 

Genevois  n  avoient  pas  encore  puje  la  ç^^^-^f^Q 
folde  des  troupes^  quon  avoit  envoyées  l'Alllan- 
a  leur  fecotirs ,  &  que  s'il  faloit  en-  deGc- 
cote  en  venir  a  une  autre  guerre  y  quu 
'  in  arriveroit  de  même  ,  &  que  les 
Genevois  ne  pajeroient  rien ,  comme  ils 
y  étoïent  pourtant  obligez  :  Que  d'ail' 
leurs  y  les  Députez  des  Commnnautcz 
de  leur  Pays  avoient  été  a  Berne  ^  & 
leur  avoient  déclaré ,  qu'ils  ne  donne- 
rotent  aucun  fecours  pour  des  finan- 
ces quon  contracteroit  a  leur  infcu^ou 

coutve 

11.70. 

^  ï!i%  lïijtf,  144. 


136  HïjîoiYe  de  la  Kéfermation 

1532.  contre  Icifr  grê  y  &  Que ^  fi  même  ils 
Ceuive  alloient  a  Genévr y  ils  vouloient  être 
payez  :  Q^je  quand  ils  j  [croient  >  fi 
les  Genevois  ne  les  pay oient  pas  ,  [  ce 
qu'ils  ne  pourvoient  pas  faire  ,  ]  les 
foUats  fe  mutiner  oient  y  &  pourroient 
piller  h  Ville  y  comme  il  fer  oit  peut' 
être  arrivé  la  dernière  fois  ,  fi  fon  n'y 
avoit  pas  mis  ordre,  Quainfi  cette 
Alliance  leur  était  plus  onereufe,  quu^ 
tîle  ,  aux  uns  &  aux  autres.  Ils 
étoient  convenus  de  certains  arti- 
cles de  pacification  ,  propofez  par 
les  Agens  du  Duc.  Ces  articles 
Projet  étoient  :  lo.  Que  le  Duc  ofFroitde 

mode-""  8^'^^^  ^  ^^^^'^^^ 
ment     Oli^^  Y  fût  remis  en  pofleiïion  de 
propofé  fes  prééminences  ;  30. ^'on  abolit 
^ar^^du^^  Boujgeoifie  ,  le  Traité  de  S. 
ïhic.     Julien  ,  &:  la  fenrence  de  Payerne  : 
40.  Qu  on  choifit  des  Arbitres,  pour 
terminer  toutes  les  difïicultez  des 
parties  dans  quatre  ans  :  oifrant 
encore  d'engager  le  pays  de  Vaud> 
particulièrement  Romont  &  Tverdun^ 
s'il  contreveiioit  à  ces  articles  W, 

Ain  fi  Fribourg  étant  gagné  ,  les 
deux  Villes  envoyèrent  leurs  Dé- 
putez à  Genève  3  pour  exhorter 

les  ' 

W  Rofet  II,  C.  6U 


de  la  Suiffe.  LiV.  IX.  137 

les  Genevois  à  accepter  ces  arti-  1532. 
des  :  Mais  tous  les  Confeils  affem-  Genevé 
blez  5  les  6.  7.  8.  &  9.  de  Février, 
leur  rendirent  la  même  réponfè^qu  ils 
avoient  Lite  aux  Bernois  un  mois 
auparavant  3  déclarant  que  du  refle 
ils  uferoient  envers  le  Duc  de  toute 
rhonnêteré  &  l'amitié  qu'il  pour-  Rejette 
roit  fouhaitcer  raifonnablement,  &  P^^^^j^^^^.^ 
lui  feroient  tout  honneur  &  fer- 
vice  po/Tible  *.  Ils  envoyèrent  des 
Députez  à  Berne  &  à  Fribourgjpour 
porter  les  Seigneurs  de  ces  deux  Vil- 
les, à  des  réfolutions  plus  favora- 
bles pour  eux.    Ces  Députez  pa- 
rurent à  Berne  &  à  Fribourg  de- 
vant les  Grands  Confeils  >  fu- 
rent fi  bien  parler  y  qu'ils  les  tou- 
chèrent de  pitié,  &  obtinrent  d'eux 
un  Décret,  Quon  garderait  Cylllian- 
ce ,  &  qu'on  engageroit  le  Duc  de  }^-^]^^^^^ 
Savoy e  a  relâcher  les  vivres  aux  Ge-  ravifent 
nevois  qu'on  les  fecourroit  ^  en  en  fa- 

'ras  de  b^foin  [/;].  Et  le  16.  Février,  ""^^ij^ 
les  Agens  du  Duc  ayant  fait  de 
nouvelles  inftances  auprès  des  Ber- 
nois ,  ils  leur  répondirent  j  Qu  'ils 
vouloient  bien  lenotivtller  avec  le  Duc 

^  S^tvhn  III.  p,  m.  70.71.  MS.  Groof. 

(«}  Sdvion  1.  c-  71.  ^ 


î  3  8  Hijlôire  de  la  Kéformathn 

l  ^"^l'  -^lli^nce  du  Duc  Philibert, 
Genève  maïs  fous  la  referve  ,  que  C Alliance 
de^  Genève  fuùfiff croit  ,  tout  li 
tems  pour  lequel  on  ravoit  contracléei 
qui  éîoît  de  i^,  ans  ^  oifranc  ce- 
pendant leur  Médiation,  pour  ac- 
commoder les  parties  (a).  Et  vers 
la  fin  du  même  mois  ,  les  deux 
Villes  écrivirent  au  Duc,  pour  l'ex- 
horter à  relâcher  les  vivres  aux 
Genevois  ,  &c  pour  lui  demander 
le  payement  des  Tommes  qu'il  leur 
devoit ,  devoir  14000.  Ecus  aux 
Bernois  Se  17000.  aux  Fiibour- 
geois  {ù).  D'abord  le  Duc  répon- 
dit aux  deux  Villes  ,  &  par  lettres, 
&  par  l'organe  ,  de  Bellegarde ,  fon 
Envoyé,  QuA  avoit  permis  libre 
commerce  avec  Genève.  Cepen- 
dant il  n'en  étoit  rien,  &  les  Ge- 
nevois ,  fe  trouvant  toujours  dans 
la  foufrance  ,  s'en  plaignirent  à 
leur  Alliez.  Là-deffus  les  Fribour- 
geois  prirent  feu  ,  &  vouloient 
qu'on  déclaiât  la  guerre  au  Duc. 
Mais  les  Bernois  les  en  diflliadérent 
par  leurs  Députez,  le  18»  M.irs,  en 
leur  repréfentant  :  Que  le  Duc  de 

(a)  B.  r?î/?r.  147. 


delà  Sîiîjfe.  Ll  V.  IX.  139 

Savoje  les  ayant  ajfàré  &  par  Lettres^  j  532. 
&  par  [on  Envoyé  ^  qu'il  avoit  r^?/^- geneve 
vert  le  commerce  avec  les  Genevois^ 
ils  ne  pouvaient  pas  croire  quil  eut 
menti  :  Que  cC ailleurs  l'iffue  de  la 
guerre  était  toujours  incertaine  j  Quon 
ne  feroit  aucun  bien  aux  Genevois,  & 
qu  il  ny  auroit  que  les  pauvres  &  les 
innocens  qui  en  fouffr iraient  :  Que 
d'ailleurs  ils  avaient  un  Député 
auprès  du  Duc  ,  chargé  de  lui  parler 
fortement  fur  ce  Sujet  ^  &quilfaloit 
du  moins  attendre  fa  réponfe  L'é- 
vénement fit  voir  qu'ils  avoient  rai- 
fon.  La  Députation  de  Berne  opé- 
ra fi  bien,  que  le  même  jour,  18. 
Mars,  le  Duc  de  Savoye  rétablit 
la  liberté  du  commerce  arec  Ge- 
nève [a). 

Cependant  les  Genevois   profi-  - 
tant  de    la  bonne  dilpoiition    de  ^ç^nois 
leurs  Alliez  des  deux  Villes  ,  de-  auprès 
mandèrent  d'être   ouis  devant   la  ^^^^ 
Diéie  des  Cantons,  pour  y  porter  ^"^^/^j^ 
leur  plaintes  ,  contre  le  Duc  de  Sa-  Gencve. 
voyc,  des  diverfes  infraftions  qu'il 
avoit  faites  au  Traité  de  S.  Julien, 

^  Uîd. 

f»  Kofet  II.  6^., 


140  Hifloîre  de  la  Kjformatîon 

1532.  &  à  la  fentence  de  Payerne  (  ^  ). 
Genève  Ils  en  firent  la  propofition  à  Berne. 
On  leur  répondit ,  le    10.  Avril: 
„  Que  LL.  EE.  écoisnt  fâchées,  de 
>j  ce  que  le  Duc  de  Savoye  n'ob- 
5,  fervoit  pas  les  Traitez  :  C^'elles 
55  lui  offrir  oient  de  juger  de  Jeurs 
difficuir.ezr,  &  de  leur  faire  droit, 
>,  s  il  vouloit ,  lui ,  fe  foumettrs 
>j  à  leur  jugement  :  finon  qu'on 
le  citeroit  par  devant  les  Arbi- 
>3  très,  qui  avoient  fait  le  Traité 
>5  &  la  fentence  de  Payerne  (^)  ,5. 
En  effet   les  deux  Villes  propofé- 
rent  la  chofè  au  Duc  j  mais  il  re- 
fufà  de      fbûmettre  au  jugement 
desSuilfes,  difant,  fièrement  [^r  ]  , 
Qn^ïl  étoit  Prince  ,  8c  qu  'il  navoit 
que  faire ,  de  pUider  avec  Genève, 
Les  Bernois  ne  fe  rebutèrent  point. 
Ils  envoyèrent ,  le  mê'ne  mois,  des 
Députez  au  Duc  ,   pour  lui  pro- 
poser certains   articles  nouveaux 
d'accommodement.    Comme  l'af- 
faire trainoit  en  longueur,  les  Dé- 
putez de  Genève  à  Berne  firent  de 
nouvelles  inflanccs  auprès  desMa- 

giftrats. 

{a)  id.  Ch.  r><^. 

{h\  B.  infir.  159. 


delà  Suijfe.  Liv.  IX.  141 

giftrats.  On  leur  répondit  Je  28.  i  532. 
Avril  :  y^Quon  les  prioit  d'avoir  un  Genève 

peu  patience  >  j'ifqu'à-ce  qu'on 
>,  eui^apris  le  fuccès  de  leur  nou- 

T^elk  tentative  auprès  du  Duc  » 
5,  dont  on  fê  promettoit  un  bon  ef- 
»  fet  :  Que  fi  l'on  ne  pouvoir  rien 

obtenir  du  Duc  par  amitié  , 
>,  qu'il  fût  dans  le  tort,  alors  les 
„  Bernois  5  félon  leur  promeffe, 
>j  aideroicnt  aux  Genevois >  à  leur 
»  faire  rendre  juftice  W. 

Dans  une  Dléte  des  Cantons  af^ 
Amblée  en  Eté,  le  Duc  de Savoye  Les c?;?^ 
fit  follicitcr  les  Cantons, 
ticuliérement  Iss  Bernois  à  renou-  J^^^^ç^ 
veller  leur  Alliance  avec  lui.    Il  nouvel- 
y.  envoya,  dans  ce  deffein  en  Am- 
bâffade  le  Comte  à! Ent<  emont ,  le  ^.^^'^^"j^ 
Prcfident  Lambert ^  Se  deux  autres  Duc  de 
gens  d'Office ,  avec  le  Seigneur  '^'^'^9'^» 
(ïEfiavajer  i  mais  les  Cantons  le 
lui  refuférent ,  en  lui  demandant 
le  payement  des  penfions  qu'il  leur 
devoit  *.    Les  Bernois  en  particu- 
lier 

^  Cette  Alliance  du  Duc  avec  touj  les 
Cantons  avoit  été  faite  l'an  1511.  Par  le 
dernier  article  le  Duc  s'étoit  engagé  à 
payer  annuellement  100.  Ecus  d'or  à  cha- 
que 


1 42  Hîjloïre  de  la  I\éformation 

lS32.1icr  le  lui  refuférenc  au  fil ,  parce 
Genève  qu'il  demandoit  toujours  rabolitioii 
de  rAlliance  de  Genève,  &  de  la 
fentence  de  Payerne  [.^]. 

Cependant  le  Duc  ne  payoit 
point  ce  qu'il  devoit  aux  Bernois  & 
aux  Fribourgeois  ,  nonobftant  les 
follicitations  réitérées  qu'ils  lui 
avoient  faites.  Enfin  >  à  l'entrée 
de  l'Automne  ,  les  Fribourgeois  > 
perdant  patience ,  vouloienc  tout 
de  bon  lui  déclarer  la  guerre  ,  6c 
ils  écrivirent  aux  Bernoisjqu'ils  vou- 
loient  s'emparer  du  Pays  de  Vaud. 
Les  Bernois  leur  envoyèrent  des  Dé- 
g^^ç<^j^y-  putez*,pour  tâcher  de  les  adoucir  & 
de  les  difluader  d'entreprendr-c  une 
telle  guerre  [^].Les  Fribourgeois  fe 
laifférent  perluader ,  &:  la  guerre 
n'eut  pas  lieu  pour  le  coup.  D'au- 
tre coté  le  Duc  ne  cefTa  de  follici- 
ter  les  deux  Villes  5  à  renoncer  à 
TAlliance  de  Genève.  Il  demanda 
auil'i  la  même  chofe>  à  l'égard  de 

celle 

qii-e  Cnnton.  Guïchenon  a  fupprimè  cet 
article  dans  Ton  Hiftoire  p.  624.  Cette 
Alliance  n'avoir  été  contrariée  que  peur 
2^.  ans.  Vov.  S'/w/^r  Rep.  Helver.  p.m. 
258.  is^. 

(a)  Stettler  II.  <J6.  b. 

W  MS.  j^mp,  izC.  b.  B.  In/lr.  116. 


USuife.  Liv.  IX.  143 

celle  de  Laufannc.  Dans  le  mois  1532. 
de  Novembre  ,  il  y  envoya  encore  Genève 
un  AmbafTadeur  ,  pour  les  prier  de 
le  mettre  en  poffefTion  de  Tes  préé- 
minences dans  la  Ville  de  Genève, 
de  le  délier  de  l'engagement  du 
pays  de  Vaud  5  de  quirer  l'Al- 
liance de  Laufannc.  Les  Seigneurs  , 
des  deux  Villes  lui  répondirent , 
d'un  commun  accord  ;  Qii'i/i  étoient 
contens  de  mettre  le  Duc  en  poffejfion 
de  ce  qu  'il  dcvoit  avoir  a  Genève^  & 
de  Cj  accompagner  ,  pourvu  qu  aupa- 
ravant il  donnât  aux  G  e  n  e  vois 
une  Lettre  de  fureté  ,  bien  fignée  & 
fçèllée  ■  comme  la  fcntence  de  Pajernc 
Coïdonnoit  ,  c'eft-à-dîre  une  promejfe 
authentique  i  de  ne  leur  faire  aucun 
tort  5  ni  en  leurs  perfounes  ni  en  leurs 
biens  :  Qu' afrh  que  le  Duc  fe  fera 
aquitc  du  dernier  payement  qîtil  doit 
faire  a  Noël  prochain  >  des  21.  mille 
Ecus  quil  leur  doit  >  ils  agiront  avec 
tant  det  modération  ,  envers  lui  >  au 
fujet  de  cet  engagement  de  fon  Pajs  , 
quil  aura  l'eu  d^être  fat' sf ait:  QuV;;- 
fin  ils  veulent  garder  C Alliance  de 
Laufanne  &  l'otjc.ver  [,;]. 

Parmi  toutes  ces  agitations  de  la  ^^^^^^^^ 

Ville 

•5   W  M6.  Amp.  117.  B.  Ujlr.izs^, 


1 44  Hijlûîre  de  la  R^éformation 

î  532.  Ville  de  Génère  3  &  fes  mouve- 
deRéfor  mens  pour  la  confervation  de  fa 
mation  liberté  ,  la  Reformaion  y  faifoitpeu 
a^Gene-      progrès.  Cependant  il  s'y  trou- 
voic  plufieurs   bonnes  âmes  5  qui 
foupiroient   après   un  fi  heureux 
changement.  Voici  ce  que  Farel  en 
écrivoit  deGranfonjà  Zuingle,le  i. 
Oflob.  1531.  J'apens  que  Genève 
penfe  a  emhajfer  ]  es  u  s  -  Chkist» 
S'ils  nétoient  par  retenus  par  la  crahu 
te  des   Fribourgcois  ,   ils  embrajfe^ 
rotent  l'Evangile  ,  fans  différer  davan* 
tage.  Il  feroit  a  fouhaiter  ,  que  d'aU" 
très  perfonnes  euffent  autxnt  a  cœur 
les  intérêts  de  Jes us-Christ, 
comme  ces  gens-là  [les  Friboiirgeois] 
fe  montrent  zélez  pour  les  intérêts  du 
Pape,     Les  P.ipifïes  du  lieu 3  comptant 
fur  leur  protection  mettent   les  fidèles 
en  prifon  ,  fans  écouta  leurs  défenfesy 
&  leur  font  divirfes  iniquirez  fans  que 
perfonne  les  en  empêche.  Jus  eft  in 
armis.    Leur  droit  efl  dans  leurs  ar» 
mes  *. 

*  Hotting,  557. 

Fin  du  IX.  Livre, 


SOM- 


SOMMAIRE 


D  U 

DIXIEME  LIVRE. 

I.  ^Ynode  de  Birne.    Hiftolre  l  $32^ 

\J  de  Sim.  Sulzer.  Nouveaux  Re- 
G  L  E  M  E  N  s  de  Religion  a  Zurich> 
a  Schaifhoufe  &  a  Baie.  Les  Cha- 
noines de  Mouriers  Grand- Val  maU 
traitent  les  Réformez-  Négociations 
des  Seigneurs  de  Berne  &  de  Soleurre 
^  ce  fujet.  Plaintes  des  gens  du 
Pajfs,  Les  Troubles  continuent,  Tra^ 
ivaux  de  Farel  a  Valcngin  5  & 
de¥  A^K\  a  Boudri. 

II.  Appenze  ll  tient  ferme  pour 
la  Réformation,  Tumulte  a  Glaris 
AU  fujet  de  la  Religion.  Les  Réfor^ 
viez  tiennent  ferme.  Nouvexux  Trou- 
bles. Accommodement.  Arti  les  du 
Traite*.  Caractère  de  Valentin 
Tfchoudi.  RitabUffement  de  ï Abbé 
de  S.  Gai.  Accommodement  entre  la 
Fille  &  iAbhé.  Traite'  frovi* 
fionnel  entre  C Abbé  &  fes  Sujets  Ré- 
formez» Le  Tockebourg  retourne 
far  force  fous  le  joug  de  fAùbé  de  S, 
Cal. 

,  To?n.  /r.  C       III.  Zu- 


SOMMAIRE 

Î532»  Zurich.   Edit  contre  U 

Mefe ,  &  pour  lufage  de  la  S.  Céne. 
Ennius  cherche  a  nuire  aux  Zuricois. 
IL  anime  contreux  les  Cantons  Catho- 
liques a  roccafion  de  cet  Edit,  Zu- 
rich  &  Berne  protègent  les  Réformez 
de  Bremgarte  &  Mellingue.  Z«- 
rich  accommodé  avec  les  Cantons  zé- 
lez*  Ennius  sejforce  inutilement  de 
brouiller  les  Cantons, 

IV.  Intrigues  de  quatre  Cantons 
Catholiques  autres  de  C Empereur  :  La 
guerre  des  Turcs  les  fa  t  échouer t 
Paix  de  Religion  en  Allemagne, 

V.  Troubles  du  Luthéranifme. 
Efforts  de  Luther  contre  les 
ZuiNGLiENS.  Travaux  de  B  u- 
c  E  R  pour  la  réunion  des  Frotefians, 
Troubles  de  l'y^nabaptifme.  Confé- 
rence des  Miniflres  de  S.  Gai  avec  un 
Anabaptifte,  Autre  Conférence  a 
Zcffingue  de  plufieurs  Mmiftres  du 
Canton  de  Btrne  avec  plufieurs  Ana 
baptifles,  Berne  en  punit  quel- 
ques-uns a  caufe  de  leur  opiniâtretés 
Nouvel  Edit  contreux, 

VFo  Pays  de  Faud.  Viret  difputi 
il  Oîbc  nvec  un  A/oine,  Nouveaux 
troubles.    Nouveaux  Minifires  dam 
Is  Balli.tge  de  Granfon.  BiJloi>e  de 

Jeam 


DU  Livre  X. 

Jean  Le  Comte,  Troubles  ^(^52^ 
Granfon,  ^  Onnensj  4  Payerne. 
Alliance  renouvellée  entre  Ber- 
ne &  Payerne.  Le  Confnl  de  Paycr^ 
ne  mal-traite  les  Réformez  >  nonobf- 
tant  fes  promejfes.  Lettre  Paftorale 
de  FareL  Réglemcns  louables  de  Ve- 
vay.  Voyage  du  Duc  de  Savoye  dans  le  \ 
fays  deVaudJl  péfide  aux  Etat  s  ajfem^ 
liez  à  Morgts. Réfléxton  fur  ce  voyage, 
VIL  Propofitions  captieufesy^i 
V*  Cantons  Catholiques  )i  la  Ville  de 
SoLEURRE.  On  en  fait  fortir  le 
Aïinifîre.  Calme  d'un  an,  JSIou- 
veaux  Troubles.  Relation  des  Ca- 1  $32»^ 
tholiques.  Relation  des  Réformés.  Nar* 
ration  ^/^Stettler.  Les  Réformés 
fortenî  de  Soleurre,  Négociations  des 
CantonSy  &  particulièrement  de  celui  de^ 
Berne  furcefujet.  Sentiment  desBcrnois. 

VllL  Le  Fape  foUlclte  Zurich  à  ren^ 
trer  d.ms  le  feln  de  l'Eglife  Romaine  y 
iuî  promet  pour  cela  de  l'argent.    L&s  Cari' 
tons  Catholit]ues  font  Alliance  avec  le  Pape  , 
Cb"   lej   VaUalfanj,    A  L  L  I  A  N  C  E  partU 
tuUtre  de  Berne  avec  Baie.  Mouvimenx 
des  Bernois  <^  des  Friùourgeols,  Prudence 
des  Laufannoîs,  Alliance  Fribourg 
de  Soleurre  avec  les  V,  Cantons.  Les 
'Réformes  mal-traités  à  Soleurre  y  en  fartent. 
Conférence  ,  des  Etats  Réformés  à.  Berne» 
leurs  ReprcfcntationS  à  ceux  de  Soleurre.  I  5  3"4« 
J^îouvelle  Conférence  de  V'II.  Cantons.  Veih- 
Qketé  (it  ^uelqHti  Réformés  de  Soleurre.  Les 


SOMMAIRE  DuLiv.X. 

Rif/t^lés    de'\^  SoLet^re   dlclarent  laGUerrz  x 
lars  ennemis^  Sont  défavoUés  par  les  Bernois. 
^532.  Genève.  Les  apparences  n'y  font 

point  f^Dorables  à  la  Réformation.  -Cé 
Clergé  s  y  rend,  odieux.  Tumuhe  a  Voc~ 
cafion  de  quelcjtus  affiches  :  Un  Chanoine 
eji  blejfé.  Farel  &  Saunkr  enfeignmt  à  Ge^ 
neue,  Farel,  cenfuré  parle  Confeil  répond' 
courageufemcnt,  li  ejl  cité  devant  le  Co?T^ 
feil  Epifcopal  ^  <Ùr-  y  parle  avec  fermeté;^ 
Il  y  efi  maltraité  '  ô*  court  ri/que  d'être 
tHc,  Il  eji  chafjè  de  l a  Ville  avec  Saunier 
X.  Froment  va  à  Genève.-  //  s  y  don- 
ne pour  Aiattre  d'Ecole,  y  fait  du  fruit, 
£/?  fccondé  par  le  Cor  délier  Boquet.  Cort^ 
*v,erJion  tnerueilUufe  d'une  Femme  bigotte^ 
Stience  extraordinaire  d'une  petite  Fille, 
Nouveau  tumulte  al' cgcajîci^  d'Hne.difput&. 
de  Religion. 

I  533'  F'^^^'î'^^"^  prêche  a>  Genève  ^^ns  la 

.  ph.ce  du  marché.  Il  efl  obligé  de  quitter 
Genève.  Fribourg  s'oppofe  vivement  à 
*  la  Réformât  ion  d&  Genève.^,  Les  Refor^ 
niés  (ont  opprimés  Genève  ils  font  des 
Ajfemblées,  Avant ur a  du  P.  Rt)bert  Oli- 
vetan.  Lettre  du  Confeil  Ae  Berne  a  celui 
de  Genève,  Conjuration  des  Catholiques 
contre  les  Réfor  mes .  Sédition 18.  ^^^^s» 
Elle  efi  arpaifée  par  des  Négocions  de  Frh 
bourg.  Règlement  pour  la  Paix,  , 
XIJ.  Incendiaires  en  Suiffe,  Zurich  r/- 
•i%hlit  l'Ecole  de  Cappel.  Progrès  de  U 
RéformAtion  dans  les  Grtfons,.  Aravv  éîA* 
élit  un  Co'lege^  Soins  tJ es  Bernois  pour  les 
Béformés  dt  Rremgarte  &c,  &  pottr  les 
Réformés  fujets  de  l'Ahbé  de  St-  Gall. 
Troubles  à  Glaris.  Accommodement  entre 
les  Chanoines  les  gens  de  la  Prévôté^ 
Chanoines  fcandaleux.  Différend  entre 
Bienne  &  le  Comte  de  Val  engin.  Bçrn 
'  ^tMt  les  Çatechifmes^  I^IS 


149 


HISTOIRE 

DE  LA 

RÉFORiMATION 

DE  LA- 

S  u  I S  S  e; 


LIVRE  DIXIEME. 

Qui  comprend  le  Sr  n  ode  de 
Berne  ,  les  autres  princi- 
paux Evénemens  de  l'An 
M  D  XXX II.  é  quelques- 
uns  des  deux  années  fuivantes. 

N  a  pû  remarquer  ci-  Raifons 

deffus.Que  les  ^«w/V  ^'^îr' 

ne   paroilioiein   pas  Bt-^o/s 

fort  emprelTez   pour  pour  les 

les  intérêts  des    Genevois,     Sans  ^"^^^^^-^^ 
^  ,  ce  Cjtnt" 

G   3  doute  ir 


150  Hi/ioire  de  la  BJ formation 

1532.  doute  ce  n  éroit  pas  faute  de  cou- 
B^RN  E  rage  :  mais  cela  venoit  uniquement, 
de   ce  que   Genève  étant  encore 
alors  attachée  à  la  Religion  Catho- 
lique,  &  aflez  éloignée  d'eux  pour 
qu'ils  la  crûlTent  incapable  de  leur 
donner  jamais  aucun  fecoûrs  con- 
fidérable  \  pour  ces  raifons  ils  la 
regardoient  comme  une  Ville ,  à  la 
liberté  de  laquelle  ils  ne  dévoient 
pas  beaucoup  s'intéreffer  :  &  ils  fc 
lafféfent  bien-tôt  des  grands  em- 
barras qu'elle  leur  cauîoir.  Mais 
dès  qu'elle  eut  embraffé  la  Réfor- 
mation ,  ou  même  dès  qu'elle  pa- 
rut feulement  vouloir  l'embraffer  5 
dès  là  ils  changèrent  entièrement 
en  fa  faveur  3  8c  foutinrent  vigou- 
reufement  fes  intérêts.  En  effet  on 
ne  peut  rien  ajouter  au  zèle  >  qu'ils 
faifoient  alors  paroicre  pour  la  Ré- 
formation &  aux  foins  qu'ils  (è 
donnoient    foit  pour   la  foûrenir 
dans  les  endroits  où  elle  étoit  éta- 
blie j  foit  pour  l'introduire  dans 
ceux,  ovi  elle  ne  letoit  pas  encore: 
On  en  a  déjà  vû  diverfcs  preuves 
ci-deffus  s  on  en  verra  encore  d'au- 
tres dans  la  fuite. 

Pendant  qu'ils  travailloient  pour 

la 


de  laSuife.  Ll  V.  X.  lyi 

la  Réformation  des  autres  j  ils  s'oc-  I  S32* 
cupoient  aufli  du  foin  de  perfection-  Synodede 
ner  la  leur  propre.  Le  mauvais  ^^^n^* 
fliccès  de  leur  dernière  guerre  ,  & 
divers  défordres  confidérables,  qui 
fe  firent  alors  fentir  dans  leur  Can- 
ton ,  leur  firent  penfer  à  chercher 
des  moyens  efficaces  pour  approcher 
de  cette  perfeâion  5  le  plus  qu'il 
fèroit  pofllble.  Ils  n'en  trouvèrent 
point  de  meilleur ,  que  de  confUl- 
ter  tous  leurs  Pafteurs  ,  pour 
étabh'r  folidement  leur  Réforma- 
tion 5  par  des  Ordonnances  fages 
de  conformes  à  TEvangile.  Dans 
ce  delTein  ,  ils  convoquèrent  dans 
la  Capitale  un  Synode  de  tous 
les  Eccléfiafiiques  de  leur  Canton, 
au  commencement  de  l'année  1532. 
Il  s'y  trouva  230.  Minières  >  qui 
furent  affemblés  depuis  le  9.  Jan- 
vier 5  jufqu'au  14,  &c  qui  convin- 
rent entr'eux  des  Régies  ,  qu'ils 
dévoient  obferver  dans  l'exercice 
de  leur  Miniftère,  foit  à  l'égard 
de  leurs  Inftrufïions  ,  foit  à  l'é- 
grrd  de  leur  conduite.  Ces  régies  , 
véritablement  Chrétiennes  ^  furent 
rédigées  par  écrit  en  langue  Alh- 
n\àndc,p^lFrelJJgangCapit07î,  Théo- 
G  4  logien 


152  Hiflûin  de  la  Réformât io^^' 
I  i32  ^^ê^^^  ^®  Strasboui^,  qui  fe  ren- 
bAne  *  ^^"^^^  Synode.  On  les  impri- 
ma d'abord  en  cette  langue  à  Baie  ^ 
&  bien-tôt  après  en  Latin  >  de  la 
traduction  de  Simon  Sultzer. 
Benhtold  Haller  ,  Pafteur  &  Réfor- 
mateur de  Berne ,  rendit  témoigna- 
ge à  Capiton  ,  qu'il  y  avoit  pris 
plus  de  peine ,  qu'on  n'auroit  ofé 
lui  en  demander  :  &  pour  cette 
caufe  il  Tappelloit  le  Pére  de  l'E- 
glife  de  Berne  {a). 

Ces  Actes  du  Synode  de. 
Berne  furent  réimprimez  en  Al- 
kmandàBerne  l'an  ido8.  in  40. "h 
,t  ç'eftLa  Tradu<flion   Latine   fut  aufïï 
dont      réimprimée  vers  le  milieu  du  Sié- 
fe7y>''  cle  dernier:  Cbriftophle  Luthard,  Pro- 
fefleur  en  Théologie  à  BernCj  l'in- 
féra toute  entière  dans  un  gros 
Traité  de  Controverfe  ,  qu'il  écri- 
vit contre  un  Docteur  de  Fri- 
bourg  *. 

Dans  le  Texte  Allemand  y  on 
voit  d'abord  un  Edit  t  de  LL.  EE. 

(  a  )  Hettîng,  645.  de 
*  Difputationis  Bernenjii  &:c.  E  x  p  n- 

C  A  ï  I  o  .  <&  coyitrct.  Adverf^rios ,  prAc'tpue 

Jacob.  Schiller,  SfC  Frîburg.  DecAnum  &c. 

ér  officiaUm  &c.  Defensio.  Bernx- 

1660.  In  folio. 
t  J'ai  mis  cet  Edit  à  la  fin  des  Adlç^, 

pour  fiiivre  l'ordre  des  tenas. 


de  la  SuiJfe.Liv,  X.  I53' 

de  Berne  qui   confirme  ces  A(fles  jj^/ji 
du  Synode ,  &  leur  donne  for-  Berhe^ 
ce  de  Loix.    Us  y  ordonnent ,  de 
les  lire  toutes  les  années  dans  les 
aflemblées  des   Minières,  qui  fe 
tiendront  au  mois  de  Mai,  de  les 
.éclaircir,  &  de  les  renouveller,  &: 
défendent  d'y  retrancher  quoique 
ce  foit  :  Elfes  font  datées  du  14^ 
Janvier  1532.    Il  y  a  ensuite  une 
Préface  du  Synode  ^  en  forme  de 
Lettre  5  adreflee  aux  Seigneurs  de 
Berne  >  oà  Ton  traite  de  la  puiP. 
(ânce  des  Magiftrats,  dans  les  affai- 
res Eccléfiaftiques  3  &:  de  Tufage 
&  des  bornes  de  cette  puilTance  : 
La  Préface  eft  fuivie  des  Canons^  ou 
Réglemens  du  Synode  ?  partagez  erl 
44.  Chapitres.    Ces  Adles  font  af- 
fuiéiiient  fort  beaûx;  on  y  trouve 
beaucoup  d'onâion  ;   Ôc  ils  refpi- 
rent  >  a  mon  [en s  y  un  cfprit  tout 
Evangclique.    Ils  méritoient  donc 
bien  dêtie  publiez  de  nouveau,  ^ 
dans  une  Lirgue  plus  connue  que»- 
l'Allemande.     C'cft  pourquoi  j'ai 
ciû  devoir  les  donner  ici  tout  en- 
tiers ,  traduit.*,  fidélcntcnt  en  Fran- 
çois j   pout  rédificarion  des  Lcc- 
G  5  tcurs 


154  Hifiôire  de  U  Kéformation 

JS32.  teurs  pieux  ,  &  particulièrement 
pour  rinftruftion  des  Miniftres  de 
l'Evangile.  Mais  pour  ne  pas  trop 
inierroiîipre  le  fîl  de  ma  narration, 

Hifloir  renvoyé  à  la  fin  de  ce  Tome. 

àtSh^^m  Traduftion  Lati- 

Mx^er,  ne  des  A(fles  de  ce  Synode  étoic 
l'ouvrage  de  Simon  Sulz^r,  Comme 
ce  Théologien  a  fait  quelque  figu- 
re dans  nos  Eglifcs  5  il  ne  fera  pas 
inutile  de  faire,  en  peu  de  mots, 
fon  Hiftoire.    Il  étoit  d'une  naif^ 
fince  médiocre  ,  fils  d'un  Barbier 
Imerlaken,  Il  étudia  les  Langues 
Grecque  &,  Latine  avec  beaucoup 
de  fuccès  à  Lucerne  >  fou?;  0/ycald 
MjLoniMSy  &  à  Bâle,  fous  Henri 
GUrean,     Après  la  mort  de  fon 
Pére  ne  trouvant  point  demploi 
pour  exercer  fon  talent ,  il  fe  mit 
à  Stas bourg  dans  la  boutique  d'un 
Barbier  ,  pour  apprendre  fa  pro- 
fcfTion,    Les  Seigneurs  de  Berne 
ayant  envoyé  quelque  Députez  à 
St;a'bouîg,  l'an  15^0.  ces  Dépu- 
tez y  apprirent  le  fort  de  ce  jeune 
homme  ^  fes  bonnes  qualitez.  A  leur 
retour  à  Berne ,  ils  en  firent  rap- 
port à  leurs  Seigneurs?  qui  fouhai- 
tant  de  ramalfcr  des  gens  favans 

dans 


de  la  Suilfe.  Liv.  X!  155 

dans  leur  Ville  ,  &  jugeant  t^ue  j  5  3  î  . 
Sulzer  pourroit  un  jour  rendre  de  Sulzer 
bons  fervices   à  fa  Parrie  ,  lui  en- 
voyèrent de  l'argent,  afin  quil  pût 
vaquer  tranquillement  à  Tétude  > 
6c  le  recommandèrent   en  même 
tems  *  aux   d<;ux   Miniftres  de  *  Le^  30, 
Strasbourg,  Bucer  3c  Cap  ton  ,  les  15V0. 
priant  d'avoir  foin  de  lui,  de  l'en- 
courager à  étudier,  Se  de^leur  don- 
ner avis  de  fcs  progrès.    De  là  il 
retourna  à  Baie  ,  où  il  fe  m'it  en 
penGon  chez  Si?jion  Cfj/n£USy  ]ix(c]Uâ^  , 
ce  qu'il  y  obtint  l'emploi  de  Prin- 
cipal du  Collège.  Enfin  l'an  153^. 
il  alla  à  Berne,  où  on  le  retint^ 
pour  exercer  le  Miniftére  &  rem- 
plir en  même  tems  la  Chaire  de 
Profeffeur  en  Langue  Grecque  t. 

Après  le  Synode,  les  Seigneurs 
de  Berne  renouvellérent  leur  Ed  it 
contre  le  Papifme ,  &  dans  le  cours 
de  Tannée  ils  firent  encore  divers 
réglemens  particuliers  de  réforma- 
tion.    Par  un   E  d  1  t    du  XI,  y^^^i^^ 
Avril,  ils  interdirent   abfolument  i  ineriic 
Tufage  de  la  Langue  Latine  ,   dans  -^ux  .Vo- 
les Ades  des  Notaires,  foit  publics,  j^'l'e'''dc 
foie  particuliers  ;  (  comme  une  pra- Lfi- 
G  6  tique 
t  MS.  Gr9oJ[.  Hottiiîg.  544- 


156  Hijîoire  de  la  Réformât lorz 

1532.  tique  abflirde,  puifque  cette  Lan- 
Bexne.  gue  étoic  éteinte  ,  éc  inintelligible^ 
pour  le  commun  des  Hommes,) 
ordonnant  que  tout  fût  éciit  en  la 
Langue  naturelle  du  Pays. Par  un  au- 
tre E  d  i  T5  du  50.  Juilletjils  ordon- 
nèrent lo.  A  tous  ceux,  à  qui  Ton 
âvoit  laiiTc  lapoffe/rion  de  quelques 
Chapelles  >  de  repréfenter  leurs 
Droits  devant  les  Confîftoiresj  afîa 
d'éviter  les  abus  :  IIo.  A  tous  les 
Patrons  &  CoDateurs  d'Eglifes,  de 
donner  un  état  exadl  de  tous  les 
fonds  &  revenus  attachez  aux  Cu- 
res ,  &  de  le  faire  enregîtrer  , 
afin  qu'ils  ne  puffent  jamais  les 
aliéner. 

Dès  le  commencement  de  leur 
Réformation  ,  ils  avoient  pris  entre 
leurs  mains  les  biens  &  les  rentes 
des  Chapitres  ruraux  de  leur  Cane- 
ton 3  mais  ils  les  leur  rendirent 
bien^tôt  à  tous  5  à  la  referve  de 
celui  de  Buren.  Enfin  pourtant 
ils  les  rendirent  ^ufii  à  ce  dernier*, 
après  qu'il  les  en  eut  prié  inflam- 
ment, 

Ndu-^     a  2  u  r  I  c  h  s  depuis  l'an  1 5  2 
^'l^^^m        avoit  tenu  oj  dinairement  deux 
de  Reli-  Synodes  par  an,  çompofez  de  tous 

les 


*  Le  2 
février. 


de  la  Suijfe.  L  i  v.  X.     I  5  7 

les  Minriftres  du  Canton,  comme  T 532. 
je  lai  remarqué  *  ci-delTus"->  &cl'an  gi^"  ^ 
Je  8.  Avril,  il  avojc  été  or- ^^'""^^^ 
donné  que  Ton  conrinueroit  exac- 
tement à  l'avenir  cet  ufage,  favoir> 
dans  le  Printems  &  en  Automne. 
IVJais  on  n'avoic  point  encore  de 
règlement  fixe  pour  Tordre  du  Sy«- 
node:  &  lesMagiftrats  n'en  avoicnc 
point  encore  fait,  pour  l'entretien 
&  la  dignité  de  l'état  de  TEglife. 
On  pourvût  donc  à  cette  affaire 
Tan  1532.  On  en  dreffa  des  Ré- 
glemens  &  les  Magiftrats  les  mu- 
nirent de  leur  autorité.  On  mit 
aufll  en  bon  état  la  Bibliothèque 
des  Chanoines ,  par  les  foins  de 
PdlicAii  j  &.  on  l'augmenta,  en  ache- 
tant les  Livres  &  les  Manufcrits 
de  Zujyigle  (4), 

AScHAfFHousE,  on  mit  en  à  Sch^i^- 
pièces,  après  la  Fêce  de  Pâque ,  ^'^^'-/^^ 
les  Images,  qui  étoient  demeurées 
de  refte  (^}. 

A  B  A  L  E  on  fit  auflfl  divers  ré*  SciBale 
glemens   utiles   de  Réformarion. 
Tous  les  Pafteurs  3c  les  Minières 

de 

*  Liv.  IV. 

(m)  Hotting.  6  :4» 

(0  i«.  6^0. 


158  Hifloire  de  la  Réformât  ion 

IS32.de  la  Ville  tinrent  une  affemblée, 
B  A  L  E.  pour  délibérer  fur  les  moyens,  de 
mettre  la  Difcipliae  Ecdéfiaftique 
fur  un  pied  véritablement  Evange- 
lique.  yf^olffgang  Capiton,  s'y  trou- 
va, &:  y  montra  It  même  zélé  pour 
la  gloire  de  Dieu ,  qu'il  avbit  fait 
voir  à  Berne  (a).  Les  Magiftrats 
y  publièrent  auffi  un  nouvel  E  d  i  t 
contre  les  Vices ,  pour  réformer  les 
mœurs  de  leur  Citoiens  ,  aufli-bien 
que  leur  croiance.  Mais  particu- 
lièrement ils  fermèrent  une  Maifon 
de  débauche  ,  qu*on  y  avoit  lailTé 
fubfirter  jufqu'alors,  depuis  le  tems 
du  Papifrne  5  6c  l'interdirent  pour 
toûjour^,  comme  un  fcandale  public, 
une  tache  à  la  Relig^ion  Chrétienne» 
de  une  fource  de  corruption  pour 
la  jeuneffe.  Il  y  avoit  quatre  ans 
,  que  lesMiinftres  a  voient  foUicité  inu- 
tilement cette  Réformation  ,  par 
leurs  Sermons  &  par  leurs  difcours 
particuliers  :  On  avoit  lailTé  fubfif- 
ter  cette  Maifon  de  débauche , 
parce  que  le  commun  Peuple  étoit 
prévenu  de  la  penfée>  qu'elle  étoit 
nécelTaire,  pour  mettre  à  couvert 
l'honneur  des  filles  &  des  femmes 

ver- 

(a)  Id.  6^ 


de  la  SuiJ[e.  L l  v.  X.  159 

vertueufes,  contre  la  pétulance  de  1532. 
la  jeuneffe.  Six  ans  auparavant  le  b  a  l 
feu  du  Ciel  avoir  confumé  Ôc  ré- 
duit en  eciidre  une  autre  maifon 
de  la  même  nature  ,  dans  la  Ruë 
appellée  AJalzgaffe,  On  n'y  avoit 
point  fait  d'attention  :  mais  cette 
année  la  MaîtrelTe  de  cette  derniè- 
re Maifon  ayant  éié  aflaffinée  j  ce 
Crime  réveilla  le  zélé  des  MagiA 
trats ,  &  kur  fi:  faire  cette  refor- 
me fi  néccffaire  (a). 

On  s'employa  au/Ti  à  mettre  VU-  Rctablif- 
niverfué  Sc  les  Collèges  en  bon  ^^^^^} . 
E:at5  pour  y  avoir  un  féminaire 
dt  Savans  ,  &  de  gens  propres  à 
feivir  utilement  leur  Patrie»  en 
toute  forte  d'Emplois.  On  convertit 
en  Collège  le  Couvent  des  Au^uft  'tns» 
Or.  fie  de  celui  des  Domini  ains  une 
Maifon  d'inftîudion  >  qu'on  ap- 
pella  la  Saptence  ,  pour  l'éducation 
d'un  certain  hombie  de  jeunes  Bâ- 
lois.  On  choifit  tjois  Seigneurs  de 
l'Etat  5  pour  être  Infpecflcurs  ou 
Commis  fur  l'Univerfi  é  ,  (avoir  ^ 
Fodolf  Frey,  F  uiolin  F.etff  ^  Hiti  i' 
Rlhncr  y  Chancelier.  Ils  rci  dirent 
à  rUniverfité  fa  Jurildi^ion  avec 

fss 


î  60  Hifîoire  de  la  Keformatton 

rj52.fes  Livres  ,  fes  Regiftres   8c  fes 
E  A  I  E.  Joyaux  ,  que  les  Magiftrars  avoienc 
eu  depuis  quelque  teins  en  garde  : 
Ge  qui  fe  fît  dans  le  mois  de  Sep- 
tembre.   On  pourvût  rUniverfité^ 
de  bons  ProfefTeurs  ,   pour  enfei- 
gner  la  Religion  Réformée  ,  &  oa 
leur  âfligna  des  penfîons  convena* 
bles.     Dès-lors  les  Sciences  ôc  les 
beaux  Arts  fleurirent  plus  que  ja- 
mais à  Bâle,  6c  fe  communiquè- 
rent aux  Pays  voifins^  tant  dans 
la  Suiffe  que  dehors  5  par  les  fa- 
vans  Hommes  qui  s'y  formèrent. 
Le  premier  Relieur  de  l'Univerfitr, 
depuis  fa  Réformation  &  fon  réra»- 
blilTement  5  fut  Oswald  B^s^r, 
Doifleur  en  Médecine ,  élu  Re<fleur 
l'an  1 5  3  2  j     natif  du  TtïoU  &  l'an- 
née fuivante>  ce  fut  Paul  Conftanfh 
Phrygionj  de  S, blettftatt  en 
Alface,  Dodleur  en  Théologie  ,  ou 
(  comme  on  parloir  alors ,  )  en  Ecri- 
ture Sainte  {a). 
Règle-     On  lit  aufii  quelques  Règle- 
con^tre    ME  NS  contre  le  P^pifme  j  cntrau- 
la  M^i/?.  très  il  fut  défendu  daller  entendre 
la  Meffe  dans  les  Pays  Etrange rs, 
Se  l'on  en  rendoic  cette  raifon  j  Qn^ 

puis 

(^)  Id.  il^id.  &  VFurfiis,  VIIL  Ch.  14. 


de  la  SmJJe.  L I  v.  X.    i  6l 

puisqu'on  Favoit  abolie  fuivant  1 532»^ 
les  Inftrudions  de  la  Parole   de  B  a  jl  e 
Dieu ,  &  qu'on  avoit  rétabli  à  fa 
place  le  véritable  ufage  de  la  Céne 
du  Seigneur  ,  on  dévoie  s'en  con- 
tenter.   Il  fut  au/Tî  refolu  ,  par 
rapport  à  1  exercice  de  la  Difcipli-  y^ç^^^ 
ne  Eccléfiaftique,        fi  un  Hom- de fo'i^*/ 
me    après  avoir  été  fufpendu  de  ctplù^e^ 
la  Communion  pour  fes  dérégle- 
mens  ,  demeuroit  un  mois  entier 
fans  fè  repentir  ,  &c  fans  fe  recon- 
cilier avec  l'Eglife  ,  on  le  banni- 
roit  de  la  Ville  ^  du  Pays  ,  juC- 
qu'à-ce  qu'il  fe  fut  corrigé  {(?). 

Il  fembla  que  le  Ciel  voulût  bé- 
nir les  Bâlois  ,  à  caufe  des  bons 
Réglemens  de  Réforme  qu'ils 
avoient  faits.  Ils  avoient  été  atta- 
quez l'an  1515.  par  les  Payfans 
rebelles  ,  des  Balliages  de  Bom- 
berg  8c  de  l^f^allenbourg ,  &  des  quar- 
tiers de  Liei  htfialt ,  ou  Licflcl ,  &f 
de  Fahrnsùjyg  :  Sc  par  la  média- 
tion des  Députez  de  Zurich,  de 
B^rne  3  &  de  Soleurre>  ils  avoient 
fait  avec  eux  un  certain  Traité,  qui 
ks  avoit  fatisfait.    Dans  la  fuite 

il' 

/i'':irf}if.  1.  c.  pag.  ^10. 


ï  62  Hijîoire  de  la  K.éfoYmattûn 

I  Ç32.  il  arriva  î  que  durant  la  ftérilité  des 
Ba  L  E.  années  1530.  ôc  1531.  la  difette  & 
la  cherté  des  vivres  étant  fort  gran- 
des 5  les  Magiftrats  de  Râle  firent 
venir  Tan  1530.  de  Biberach  de 
Memmingue  &  de  Schaffhoufe  ,  des 
grains  donc  ils  diftribuércnt  cha- 
que femaine,  à  un  prix  modique, 
plus  de  150.  facs  aux  pauvres 
Bourgeois  j  jufqu  a  la  récolte  de 
l'année  fuivante.  Us  étendirent 
aufTi  leurs  foins  charitables  aux  Pay- 
fans  de  leur  Canton  ,  6c  leur  fi- 
rent beaucoup  de  bien.  Cette  an- 
née donc  (  1 532.  )  ces  Payfans  vin- 
rent à  Baie,  de  leur  propre mou- 
vc  vient,  fs  préfenrérent  devant  le 
Confcil,  &  confeffant  humblement 
la  rébellion  dont  ils  s'étoient ren- 
dus coupables  l'an  1525.  ils  remi- 
rent volontairement  entre  les  mains 
de  leurs  Seigneurs ,  l'inftrument  du 
Traité  qui  avoit  été  fait  alors  avec 
eux,  les  priant  de  leur  pardonner 
&  de  les  laifTer  dans  leurs  anciens 
ufages,  ce  qui  leur  fut  accordé 
N'oublions  pas  de  remarquer,  que 
les  Chanoines  de  Eâle ,  qui  en 
étoient  fortis  lors  de  la  Réfor- 
mation 

(«)       1,  c.  pag.  587-  KUnhr,  sf. 


de  U  Suijfe. Liv.  X.  163 

mation  de  cette  Ville  ?  demandé- I  532* 
rent  permifTjon  d'y  rentrer.  On  la  B  a  1 1. 
leur  accorda  5  au  cas  qu'ils  vou- 
îiifTent  fe  conf^ormer  à  la  Réforma- 
tion  de  Ja  V\\h{a),  Mais  cett« 
condition  n'étant  pas  de  leur  goût, 
ils  fixèrent  leur  demeure  à  Fribourg 
en  Brifgavv ,  avec  leurs  Concubi- 
nes 5  comme  on  l'a  déjà  dit  * 
ailleurs. 

Les  Chanoines  de  la  Cathédrale  La  Pre- 
de  Baie  me  font  penfer  à  ceux  de  vote» 
Moutiers  Grand-Fal ,  ou  de  la  Pré- 
vôté y  qui  éroient  de  la  même  trem-  ^ 
pe>  aufli-bien  que  du  même  Dio- 
céfe.    Ces   vénérables  Ecdéfiafti- 
ques  avoient  été  fouvent  exhortez 
par  les  Seigneurs  de  Berne ,  tant 
de  bouche  que  par  écrit,  à  renon- 
cer au  commerce  de  leurs  Concu- 
bines ,  à  ne  point  inquiéter  les  Ré- 
formez >  &  à  payer  aux  MiniftreSj 
les  penfions  qui  leur  avoient  été 
aflignées.  Mais  l'habitude  du  vice 
avoit  pris  de  trop  fortes  racines 
chez  eux,  pour  qu'ils  fe  corrigeât 
fent.    Ils  ne  voulurent  rien  faire 

de 

(il)  Hotting,  6^0. 

Tom.  Il>  p.  16%, 


!  64  Hiftoire  de  U  B^tformatton 

Î  532.  de  ce  dont  on  étoit  convenutTus 
La  Pre-  leur  fujer.  Ils  gardèrent  leurs  Con- 
vôte'.  cubines.  Ils  maltraitèrent  les  Réfor- 
LesCha-mez  en  diverfes  manières.  Vers 
nomes  le  commencement  dç  Tannée  153  2. 
tiers  mal  ^®  Prévôt  5  accompagné 

traitent  de  quelques  autres  Catholiques  a 
les  Ré-  ^lla  attaquer  de  nuit  le  Miniftre 
iormez.  jg^/^^^/^^^  j^ns  fa  maifon,  &  com- 
mit divers  aftes  d'infolence  &  de 
violence  contre  lui  8c  contre  fa 
femme.  Au  fortir  de  la  5  accom^ 
pagné  des  mêmes  perfonnes ,  &:  mê- 
me d'^  quelques-uns  dQ  ces  Chanoines^ 
tous  armez  de  fufîls  ,  d'épées  &:  de 
harnois ,  il  alla  dans  une  hôtelle-. 
rie  publique,  où  il  y  avoit  One 
nôce  de  gens  de  la  Paroifle. 

Ces  dévoîs  Catholiques  infultè- 
rent  les  gens  de  la  nôce  qui  ne 
penfoient  point  à  eux  j  &c  aux  pa- 
roles outrageantes  joignant  les 
voyes  de  fait  5  il«  les  mal-traitë- 
rent  d'une  manière  infâme.  Le  Mi- 
mftre  de  les  ParoifTiens  s'en  plai- 
gnirent aux  Seigneurs  de  Berne. 

*  Le  li.^  .         /    •   •      ^  vie  ^  Mr  A 

Janvier.  Ceux-ci  en  cciivirent  ^  albveque 

de 

t  Voy.  ci-denus  Lib.IX.  Ch.  VUU 

4.  M?s  M noires  ne  difenî  pas  fi  ce 
fils  ctoic  bâtard  ou  légitime. 


deU  Suijje.  Lrv.  X.     l  Ô  J 

de  Baie,  pour  lui  demander  jufli-iy32* 
ce,  6c  le  prièrent  de  marquer  uneiAPRE- 
journée  pour  ce  fujet>  afin  qu'ils  y^^,^^  - 
puffent  envoyer  leur  Députez  {a)  fi^îTdes 
&:c.  L'Evêquc  leur  répondit  fortSeign". 
civilement*.  Qj/il  avoir  un  ^^^^^'^f^^^' 
5,  grand  chagrin  de  cette  affaire  : /^^^^^^"^^ 
5,  Que  cependant  il  les  prioit  de  ne  ce  fujet. 
„  pas  demander  un  Tribunal  ex- jg^y^-^'/; 

traordinaire,  pour  punir  les  Gou- 
y)  pables:  mais  de  lui  laiffer  le 
^)  foin  de  cette  punition  ,  leur  pro- 
o>  mettant  de  s'y  prendre  de  telle 
yy  forte  ,  que  femblable  cas  n'arri- 
y)  veroit  plus  5  &  qu'il  en  auroit 
-55  de  la  reconnoîflance.  Ouarit  zux 
^)  Concubines  des  Chanoines:,  qu'il 
leur  avoit  déjà  févérement  défen- 
5,  du  d'en  tenir,  &  qu'il  le  leur 
yy  défendroit  encore  &c.  (l?)  „. 

Les  Chanoines,  profitant  de  leur 
Alliance  avecSoleurre ,  recoururent 
aux  Magiftrats  de  cette  Ville  ,  qui 
prirent  en  main  leurs  intérêts  ,  8c 
en  écrivirent  t  aux  Seigneurs  dejanwcr'^' 
Berne.  Ils  leur  difoient 
5)  les  gens  du  Pays  ne  vouloient 
?j  pas  payer  aux  Chanoines  leurs 

Dîmes 


I66  Hidoire  de  U déformation 

1532.  »  Dîmes  &  leurs  Cenfes ,  ôc  pré* 
La  Pre-  «  tendoienc  que  ces  Meiïieurs  de" 
▼ÔTE.    „  voient  répondre  ,  fur  ce  difFé- 
»  rend ,  devant  les  [uges  du  Pays  : 

Que  cette  prétcnfion  ne  les  ac- 
»  commodoit  pas,  puifque  les  gens 
>,  duPjiys  étant  intérelTez  dans  cette 
„  affaire ,  ils  feroient  Juges  ôc  Par- 
j>  ties  :  QifAs  prioient  donc  LL. 
5,  EE.  de  commander  a  ces  gens  là 
>j  de  s'aquiter  de  ce  qu  ils  dévoient 
5>  aux  Chanoines  :  Que  fi  cela  ne  fer- 

voit  de  rien;  les  Chanoines  étoient 
>,  prêts  à  foutenir  leurs  Droits,  de- 

vant  TEvêque  ,  leur  Seigneur,  ou 
»  devant  le  Tribunal  qu'il  établi- 
>,  roit:  QujM  cas  que  cela  n'ac- 

commociât  pas  les  gens  du  Pays, 
a  en  ce  cas  il  faloit  faire  un  Tri- 
>,  bunal  compofé  de  deux  Confeil- 
>,  Icrs  de  l'Evêque,  de  deux  de 

Berne  &  de  deux  de  Soleurre: 
3,  &  qu'ils  offroient  de  s'y  fou- 
35  mettre  :  Enfin,       fî  cela  ne  pou- 

voit  pas  avoir  lieu,  ils  offroient 
3>  de  paroitrc  devanr  la  Diète  des 
9,  Cantons ,  ^'ainfi  ils  prioient  les 

Seigneurs  de  B.rne  ,  d'ei  gager 
5,  les  gens  de  cette  Vallée ,  à  ac- 
j>  cepter  l'une  ou  l  autie  de  ces 

oifiesj 


UC  Lie  sJH'lJJfi*    JU.iv.    jr^é         *  / 

j,  offres, au  cas  qu'ils  ne  vouluffent  f  532. 

pas   payer  leurs  red«vances  deiAPaE- 
55  bonne  grâce  {a)  3, .  Les  Seigneurs  vote*. 
deBerne^répondirent     „  Que  com-  *  Le  2. 
5,  me  ils  avoient  trouvé  raifonna- 
5,  hle,  que  leurs  Alliez  de  la  Pré- 
3>vôtc  >  après  avoir  embraffé  la 
j,  Réformation  ,  euffenc  part  aux 
5,  biens  d'Eglife  ,  pour  rentretien 
5,  de  leurs  Pafteurs  ôcc.  il  l«ur  pa- 
j5  roiffoit  aufTi  jufte  ,  qu'ils  payaf- 
5,  fent  aux  Chanoines   les  Cenfes 
3,  qu'ils  leur  dévoient  M  53. 

Les  affaires  demeurèrent  ainfi 
brouillées  pendant  plufieurs  mois  » 
entre  les  Chanoines  &  les  gens  du 
Pays  :  Enfin  les  Chanoines  3  im- 
patiens d'en  venir  à  une  condu- 
fionj  envoyèrent  des  Députez  à  So- 
leurrcj  prier  ces  Seigneurs  de  les 
protéger,  &  de  les  foucenir  contre 
leurs  parties.  Ces  Seigneurs  en 
écrivirent  *  à  ceux  de  Berne  ,  les 
priant  de  leur  aider  à  mettre  ces 
gens-la  à  la  raifon  [t].  Il  y  avoit 
Cu  ,  quelque  tems  auparavant  3  une 
Conférence  entre  les  Députez  de 

Berne 

U)  Ibid.^-y,  88, 

{b\  ihid.  88.  89. 

(0  iliid,  by.  iW. 


168  Hïfiôire     U  K^cformatio'^ 

;32.  Berne  &  de  Soleurre  ,  où  ils 
Pr£-  étoient  convenus  j  que  les  Réfor- 
*  mez  de  Moutiers  laifleroient  aux 
Chanoines  Tufage  de  leur  Eglife 
Collégiale  ,  fe  contenteroient  de 
la  petite  Eglife 5  [comme  étant  leur 
ancienne  Eglife  Paroi/Tiale  ,  ]  pour 
y  faire  leur  fervice  divin.  Mais 
les  ParoifTiens  ne  voulurent  point 
(c  foûmettre  à  ce  règlement ,  6c 
perfiftérent  à  demander  Tufâge  de 
i'Eglife  Collégiale.  Ceux  de  So- 
\  leurre  s'en  plaignirent  encore  *  aux 
Bernois,  &  les  prièrent  d  ordonner 
aux  ParoiiTiens  de  ne  faire  aucun 
mouvement,  jufqu'à-ce  que  leurs 
deux  Villes  envoyaffent  de  nou- 
\^cau  des  Députez,  pour  terminer 
une  bonne  fois  toutes  ces  affai- 
res [^].  Les  Seigneurs  de  Berne  y 
confentirent ,  lailférent  à  ceux  de 
Solecrre  le  foin  de  marquer  cette 
journée.  &  leur  envoyèrent  la  let- 
tre qu'ils  écri voient  en  conféquence 
à  leurs  Alliez  de  la  Prévôté  [A]. 
Mais  la  Conférence  n'ayant  pas  pd 
avoir  iieu,  dans  le  tems  qu'on  l'a- 
voit  crû,  à  caufe  de  la  pefte,  qui 
régnoit  dans  ces  Quartiers-là  >  les 

Sei- 

(4  ^  )  IhiÀ.  SX?.  91, 


de  laSuiffcLlY,  X.  169 

vS^igneurs  de  Soleurre  la  remirent  j  j 32. 
au  Mecredi  après  la  S.  Martin  [4].  l^Pbe. 

La  Confe'rence  fe  tint  à  votf.', 
Moutiers  au  jour  marqué.  Les  Dé- 
putez de  Berne  ?  de  Soleurre 
&  de  TEvêque  s'y  trouvèrent  ; 
&  ceux  de  l'Evêque  y  préfentérent 
aux  autres,  divers  articles  de  plain- 
tes contre  les  gens  du  Pays  5  tant 
de  la  part  de  TEvêque?  que  de  celle 
du  Chapitre  :  Ces  plaintes  reve- 
noient  toutes  a  ceci  5  que  les  gens 
duPays  refufoient  à  leurs  Seigneurs 
diverfes  redevancesj  dont  ils  étaient 
chargez  [^]. 

La  Conférence  s'étant  terminée 
fans  fuccès,  les  gens  de  la  Prévôté 
&  à^Tavanes  en  particulier,  envoyè- 
rent aux  Seigneurs  de  Berne  un 
Mé^r.oire  >  qui  conrenoit  XIJI.  Ar- 
ticles de  plaintes  contre  l'Evêque 
de  Baie  ,  &  contre  les  Chanoines 
de  5.  Germain  ou  de  la  Prévôté. 
Voici  les  principaux  : 

L  Ils  demandoient ,  „  Qjion  leur  vl^intes 
„laiffât  l'entrée  libre  de  ^ ^gl'^f^ '^^^^^l 
3,  Collégiale  àtS,  Germain  ,  (  com- 
3>  me  cela  s'étcit  pratiqué  de  tout 
Tom,  IV,  H  tems;) 

(cl)  Uid,  s>o.  91. 


ï  70  Hïftoïre  de  U  ^déformation 

1532.     tems,  )  pour  y  batifer  leur  enfanss 

LaPre-     &  y  f^iiire  prêcher  55. 

'.vote'.       il.  lis  fe  plaignoient,     Que  TE- 
3,  vêque  ,  dans  les  conceflations , 
,3  qui   intéreffoient  leur  Commu- 
nauté  ,  faifoit  venir  des  Juges 
3,  Etrangers  6cc, 

ni.  yy  Que  l'Evêque  &  f.s  adhé- 
35rans  avoie  jt  promis  aux  Seigneurs 
53  de  Berne,  d'abolir  la  -^/ljJ/^  dans 
,3  ce  Piys-là  :  ce  qui  n'avoir  pt.int 
33  été  fait;  &  qu'on  l'avoit  même 
33  rétablie  à  Coratidslin  3  où  ces  Met 
3  3  fieurs  vi voient  dans  la  débau- 
53  cne  3  &  vouloicnt  défendre  de 
3,  prêcher  la  parole  de  Dieu. 

IV.  33  Que  ni  TE  vêque  ni  fes  gens 
33  ne  font  point  en  droit ,  après 
„  avoir  aboli  la  Mcffe,  de  la  ré- 

tablir  3  à  moins  qu'ils  ne  la 
3,  prouvent  par  l'Ecriture. 

V.  5>  Que  contre  la  teneur  d'un 
^^Edit  ^/f  Berne  3  admis  par  l'E- 
3,  vêque  &  par  fes  adhérans,  pour 
35  la  reformation  du  Pays3  ils  chaC- 
3,  foi  en  t  les  Miniftres  ,  de  en  diver- 
5,  fes  autres  manières  ils  éludoient 
3,  cet  Edit. 

VIL  i^Que  c  etoit  à  tort  que  les 
^,  Chanoines  les  accufoient  de  leur 

lefu- 


delà  Suîjje.  Li  v.  X.  171 

55  refufer  leurs  Censés  &  leurs  Dî-  i  532. 
omes;  puifque  ce  n'étoic  que  laiAPRE- 
5)  d'i^eite  qui  les  avoit  empêchez  de^^^^^  - 
3>  les  payer  :  car  ils  croient  bien  ré- 
3,  folus  de  s'aquiter  d'année  en  an- 
3,  née  de  ce  qu'ils  leur  dévoient, 
.  IXv  Ils  demandoient.  ^'on 
^,  obligeât  les  Chanoines  à  renon«" 
3,  cer  à  leur  vie  déréglée  3  à  leur 
fornication^  à  leur  Tvrognerie  Ôcc. 
3,  parce  que  s'ils  ne  le  faifoient  pass 
,3  cela  pourroit  caufer  quelque  dé- 
53  fordre  3  capable  d'entrainer  une 
j3  grande  efFufion  de  fang  :  &c. 

X.  53  Ils  conjuroient  les  Seigneurs 
,3  de  Berne,  au  nom  de  Dieu,  de 
,3  leur  aider  j  pour  que  la  Parole 
33  de  Dieu  leur  fut  prêcbêe  librement, 
33  &  qu'ils  ne  fuflent  pas  réduitS3 
^33  faute  de  Miniftres  ,   à  la  trifte 

33  nécefTué  de  mourir  fans  confola- 
3,  tion  dans  ces  tems  de  pefte,  6c 
,,en  d'autres  5  &  que  les  Chanoi- 
9)  nés  leur  en  fourniflent,  puis  qu'ils 

,3  tiroient  d'eux  les  Dîmes  &  les 

33  Cenfes  &c. 

XI,  ,5  Ils  les  prioient  de  même 
3J  de  leur  aider,  pour  que  le  Pa- 
9>pi,me  fut  entièrement  aboli  parmi 
9}  eux  &c. 

H  1      XII.  Ils 


Î72  Hijloire  de  la  Kéformàticn 

1532.  5>       fe  plaignoient  de  ce 

La  Pre- 55  t^iie  TEvêque  avoin  ordonné  à 
vote'.  55  fon  Maréchal,  &  au  Maire  de 
5,  Delcmont  3  d'empêcher  qu'on  ne 
5,  prêchât  la  Parole  de  Dieu  dans 
quelques  Villages  5  qui  la  fou* 
.r>  haitoient  :  Ordre  qui  avoir  été 
33  exécuté  &c.  {a). 

Les  plaintes  paroiffant  graves  de 
part  &  d'autre  5  les  Seigneurs  de 
Berne  marquèrent  une  journée  à 
Bïenne ,  au  -8^*  de  Décembre,  pour 
terminer  ces  difHculcezpar  une  nou« 
Nomnb  ^^^^^  Conférence.    Ils  invitèrent  ^ 
TEvêque  de  Baie  à  y  envoyer  fes 
Députez ,  &  ils  en  firent  de  même 
à  l'égard  de  leurs  Alliez  de  Soleur- 
re.    Dans  cette  Conférence  les  Dé- 
putez des  III.  Etats  examinèrent 
ies  plaintes  léciproques  des  par- 
9         ties  3  6c  convinrent  de  quelques 
articles,  mais  ils  en  prirent  d'au- 
tres ad  Ycfnemum,    Ils  convinrent 
J5  Que  les  gens  de  la  Prévôté  ne 
>,  feroient  obligez  de  répondre  que 
35  dans  leur  Pays  ,  &  non  devant 
5>  des  Tribunaux  Etrangers  5  pour 
5>  Je  différend  qu'ils  avoient  avec 
les  Chanoines:  11^- Que  les  Cha- 

noineç 

{a)  Uid,  à  pag.  ^4.  ad 


deU  Suîjjfc.  Lî  V.  X.  173 

noines  de  Moutiers  ayant  pro-  1532. 
55  mis  Tan  1 53 1.  a  embralTer  h  Ré- La Pre- 
1  35  formation,  &  n'en  ayant  cepen-  vôte'^ 
,r  dant  rien  fait  \  les  gens  du  Pays 
5,  ne  leur  payeroient  plus  défor- 
„  mais  ni  Cenfe  ni  Dîme  5  jufqu'à- 
5,  ce  qu'ils  euffent  prouvé  par  TE- 
3,  cri  cure,  que  la  lyLff:  eft  bonne  & 

Les  Chanoines  nièrent  d'avoff 
promis  d'embrslTcr  la  Réforma^ion  : 
,3  mais  fei'kmcnt  de  s'êcre  erg.rgez 
3,  à.  ne  plus  dire  la  MeiTe  à  Mou- 

tiers  i  comme  effe(flivement  ils  ns 
5,1a  difoient  plus  dans  ce  lieu  là? 
3,  mais  à  Corjndelin  :  Que  du  refte 
,3  ils  n'étoient  pas  là  pour  di/jju- 
,3  ter  „  :  Ainfi  ils  refuférent  de  fe  bfescon- 
foûmetrre  à  cette  déci/ion  des  Sei-  tinuent. 
gneurs  de  la  Conférence,  &  d'ou- 
vrir leur  Eglife  aux  gsns  du  lieu. 
Ceux-ci ,  de  leur  côté  3  pei/évére-  ^ 
rent  dans  la  refolution  qu'ils  avoient 
prifc  de  ne  leur  payer  ni  Cenfes 
ni  Dîmes  ,  jufqu'à  ce  qu'ils  euflcnc 
prouvé  la  Mefle  par  Tlkricure,  de 
forte  que  cette  affaire  ne  pût  erre 
terminée  que  Tannée  fuivaiire.  Cc^ 
pendant  les  gens  du  Pays  s'enga- 
gèrent de  leur  bon  gré  k  s'aquiter 
H  3  envers 


IJ^Hij'Ioirede  la  formation 

1^32.  envers  FEvêque,  de  tout  ce  qu'ils 
lui  dévoient  Xa)^ 

Quoique  G  u  1  l  a  u  m  e  F  A- 
R  E  L  fût  toujours  attaché  à  TE- 
Travaux  ^^^^^  Morat ,  cependant  fon  zè- 
de  Fa^s  pour  la  Réformation  de  TEgli- 
REL  aufe>  ne  lui  permit  pas  d'y  deaieu- 
de"^^  tranquilement  3  il  alla  prêcher 

lengin.  Cette  année  dans  les  montagnes  du 
Comté  de  Falengin,  En  particu- 
lier il  travailla  quelque  tems  au 
Lode  y  où  il  difputa  même  avec  le 
Caré ,  fn  préfence  de  la  Com- 
ttjTe  [h). 

.  ^  Dans  le  même  tems  Chris- 
Fabri  àTo  PII  LE  F  A  BRI  pîêcha  à  BoU" 
JBoudri,  du  j  petite  Ville  du  Comté  de  Neu- 
chatel'  Il  y  fit  du  progrès ,  & 
au  bout  de  quelque  tems  il  eut  un 
affez  bon  nombre  d'Auditeurs.  Les 
Catholiques  >  irritez  contre  lui , 
formèrent  le  delîcin  de  l'attaquer 
à  main  armée,  avec  Ton  petit  trou- 
peau 5  un  Dimanche  qu'il  feroit  af. 
femblé,  &  de  les  égorger  tous. 
Mais  heuieufement  ce  barbare  com- 
plot fut  découvert:  Les  Magiftrats 
de  Neuchatel  en  étant  informer  j 

le 

00  îliiL  99'  100.  loi. 
Mcm.  partie. 


de  la  Suiffe  L  I  V.  X.     1 75 

le  firent  échouër^  &  donnèrent  de  I532. 
bons  ordres  pour  mettre  les  Catho- 
liques hors  d  état  de  nuire  aux  Ré- 
formez. Quatre  ans  après  ,  la  Ville 
de  Boudn  cmbraffa  la  Réforma- 
tion {a). 

II.  Tandis  que  les  Cantons  & 
les  Etats  Réformez  de  la  Suifle> 
faifoient  paroître  leur  zèle  pour  la 
Réforme  de  leur  Eglifes ,  les  Ca- 
tholiques n'en  faifoient  pas  moins 
pour  le  foutien  de  leur  Religion. 

Dans  le  Canton    A^^enz.eU^X k(- ^^^"^"^^ 
femtlée  générale  du  Pays  s'érant^^^^* 
formée  ,  le  dernier  Dimanche  d'A- 
vril, on  y  éxamina  l'affaire  de  la 
Religion  à  la  pluralité  des  voix  : 
6c  les  Réformez  l'emportèrent. 

Les  V,  Cantons  zèlez  leur  écri-  tient  fer 
virent  de  leur  Affemblée  à'Einfidlen,  Tp??"' 
pour  les  prier  de  lanler  célébrer  mation, 
uneMeffe  dans  chaque  ParonTe,  en 
faveur  de  ceux  qui  le  fouhaite- 
roient.    On  leur  répondit,  (J^on 
s  en  tenoit  a  ce  qui  avoir  été  réglé 
par   l'ajfemL-iée  générale  ^  d;  par  les 
Cojifeils.    On  donne  la  louange  au 
Capitaine  Berm^eger,  d'avoir 
H  4  le 
(^)  Vita  Pareil.  MSC,  apiid  Hottîng,. 


1 76  Hijloire  de  la  K.éformaùoH' 

I  53  2.     P^"s  contribué  à  cetteréfolution> 
par  fon  zèle  &  par  fa  pieré  {à), 

Glakis      Le  même  Dimanche,  qui  éuoit 
le  28.  d'Avril,  rAffemblée  générale 
du  Canton  de  Claris  ayant  été  con- 
voqués ,  on  y  vit  paroître  des  Dé- 
putez d'UVi  &  de  Schvvitz  =  au 
nom  des  V.  Cantons  zèlezj  qui 
demandèrent ,  Si  l'on  vouloit  obfcr^ 
ver  le  Traité  de  paix  ?  Et  en  mê- 
me tems  follicitérent  les  gens  du 
Pays  à  fe  conformer  à  eux  à  l'é- 
gard de  la  Religion.    Les  Catho- 
liques du  Canton  entendirent  ce 
difcours  avec  plaifir.  Mais  les  Ré- 
formez répondirent,  Quils  Jcn  te^ 
mtmt  à  la  promejfe   qu'ils  avaient 
faite  dernièrement ,  en  Décembre  *^  8c 
demandèrent  en  même  tems^  qu*on 
palTât  k  cho/ê  à  la  plui  alité  des  fuf- 
frjges.  Les  pré  T;iers  s'y  oppoférent 
d'abord  ,  mais  enfin  il  falut  qu'ils 
cédaiTent.    Quand  on  eut  fait  ren- 
trer  les  Dépucez,  &  qu'on  leur 
eut  déclaré  le  fentiinent  qui  avoit 
paffé  à  la  pluralité ,  les  Catholi- 
ques ne  laifférent  pas  de  pcriî/ler 
dans  leur  premier  fenriment.  Là- 

defllis 

(4)  Hotttng.  644. 

^  Voy.  I/v.  VrU.  Ch.  XV. 


de  la  Suijfe.  Liv.  X.  17,7 

deHus  il  s'éleva  un  fi  grand  trouble,  1532*^ 
que  rAffemblée  k  difTipa  confufé- 
ment  5  &  fans  rien  conclurre  ,  &  lumuhe 
il  en  falut  convoquer  une  autre ,  le  \^^^^ 
Dimanche  fuivant.  Dans  cette  fc-  ligion. 
conde  Affemblée  parurent  des  Dé- 
putez des  V.  Cantons,  qui  firent  les 
mêmes  propofirions.    On  y  pour- 
vût aux  Emplois,  qui  furent  rem- 
plis par  des  fujets  des  deux  Re- 
ligions.   Les  Réformez  &  les  Ca- 
tholiques   examinèrent  ,  chaque- 
parti  à  part,  les  propofitions  de 
ces  Députez  j  &  les  Réformèz  y  Les  Ké^ 
répondirent  ^    tout    comme  ^Is^^^^^'^^^ 
a  voient  fait ,  dans  TAffemblée  pré-  ferme, 
cède n te  {à). 

Mais  tout  cela  n'étoit  rien  en- 
core en  comparaifon  des  troubles 
qui  furvinrcnt  dans  ce  Pays-lài- 
vers  le  milieu  de  Novembre,  à 
Toccafion   des  difcours  injurieux 
que  le  Prêtre  de  L'mthd  avoir  te- 
nus, 6c  des  menaces  qu'il  avoir 
faites   contre  les  Réformez.  Ils 
voulurent  l'en  punir ,   mais  il  Te 
fauva.  .  Là-dtlTus  quelques  jeunes  ^013. 
gens  de  Nehefels ,  tÇpms  bouillans  veaux 
^  faaieux  5    du  parti    Catholi-  î>^*'^^^^^- 
H  5  que 

{a)  Hotting,  e>44.  (^4^. 

% 


178  Hidoire  de  UBjdformation 

1532.9^65  voulant  venger  ce  Prêtre, 
GiARis  allèrent  attaquer  *  de  nuit  le  Mi- 
Novera'b.'  i^i^^-''^  de  Mollis  y  dans  le  deffeia  de 
Un  Mi  ^^^^^^"^  5  quoique  de  leur  propre 
nljlre  at-  ^vcu  5  ils  n  euffent  aucun  fujet 
taqui:  de  de  fe  plaindre  de  lui ,  puifqu'il 
chez  lui  parlé  injurieufèmentj 

par  des  d'eux  ,  ni  de  leur  Religion. 
Catholi  Mais  comme  il  eut  le  tems  de  fe 
ques.  f^uver ,  quoi  qu'avec  beaucoup  de 
peine?  ils  déchargèrent  leur  fureur 
fur  fon  ménage  &  fur  fes  meubles  5 
proférant  di  ver  fes  menaces  contre 
leurs  Compatriotes  Réformez.  Le 
lendemain  ils  fe  mirent  en  armes> 
&  nonobftant  toutes  hs  exhorta- 
tions ,  qu'on  pût'  leur  faire  ,  ils 
demandèrent  lepée  à  la  main, 
comme  ils  Tavoient  déjà  fait,  le 
5.  Mai  précédent  5  que  tous  les  Mi- 
niftres  fuffent  chailez  du  Pays:»  & 
que  leCathulicifnie  fût  réiâbii  dans 
toutes  lev  EgHfes.  Mais  comn.e  la 
Méthode  de  ces  ConvertilTcurs 
étoit  un  peu  trop  violente?  ellt^  ne 
fe  trouva  pas  du  goût  de  tout  ie 
Monde.  Les  gens  de  Sibxvanden 
raportéient  les  meîuicts  de  wes 
g^nis-ià  au  L;jî5vî-Am)ran>  ou  Chef 
du  Pays  ,  q:_.i  convoqua  inceifam- 


de  la  Suijje.  LiV.  X.  179 
ment  une  Aflemblée  générale  ;  niair  j  j  32, 
partagée  en  deux  Corps  ^  ^^iv'ant  Glaf.is 
les  deux  Religions.  Les  Réfor- 
mez ,  qui  faifoicnt  le  plus  grand 
nombre ,  s'aiTembiérent  à  Schvv.m^ 
den  y  &  les  Catholiques  à  G  Uns. 
Dans  la  fuite  pour  êire  plus  près 
les  uns  des  aurres  ,  ils  s'avancè- 
rent de  part  &  d'autre  jufqu  a  A-Jit- 
lœdi,  Heureufement  pour  eux 
il  s'y  trouva  des.  Députez  des  V. 
Cantons  ,  de  l'Abbé  de  «S".  Caly 
des  Grifons  3c  du  Tockebcmg ,  qui  Accom^ 
les  accommodèrent  ;  fans  quoi  ils 
couroient  nique  de  s  égorger  les 
uns  les  autres.  On  dit  qu'il  y 
avoit  aufîi  une  Députarion  de  Zu- 
rich en  chemin  ,  mais  qu'il  y  eut 
quelques  malicieux,  qui  pour  l'em- 
pêcher d'avancer  &  de  paroître^ 
coururent  à  cheval  au  devant  des 
Députez:,  &  leur  dirent,  Quel^Mt 
préfènce  n'éroit  pas  nécelTaire  ,  que 
tout  étoit  terminé.  Les  Articles 
de  l'accommodement  furent  les 
fuivans  : 

I.  Que  pour  le  bien  de  paix  ,  Articles 
on  feroit  fonir  du  Pays  le  Minif^ 
tre  de  Schwandcn, 

IIi  Que  ceux  de  Schwanden  fc 
H  6  pour-- 


1 80  Hifioire  de  la  déformation 

1532.  pourvoiroient  dans  Tefpace  d'un 
Qi^xiKis  mois  ,  d'un  autre  MïmjÏYe  ,  &  d'un 
Frétre. 

III.  Quon  liroit  publiquement 
dans  J'EgJife  Je  Traité  de  Paix  de 
la  SuifTe ,  &  qu'on  robfcrveroic 
poné^i^ellemenr. 

Les  Cnihcliques  avoient  repro- 
ché aux  Réforn^çz  qu\h  avoient 
fait  venir  dans  les  AfTcmblées  des 
halitansy  *  qui  n'étoient  pas  natu- 
rels du  Pays>  &  cela,  pour  faire 
le  plus  grand  nombre   par  leuc 
moyen ,  dans  h  s  affaires  de  Reli- 
gion.   Les  Réformez  leur  répon»» 
duent:  Fous  [avez  que  nous  avons 
renvoyé  les  h.ikhans  ^  quand  il  s'efl 
agi  (T affaire  de  Religion ,  toutes  les^ 
fois  que  l'ous  favez  fouhaité.  Et 
comme  les  Catholiques  k  plai- 
gnoient  encore  ,  qu'on  n'obfervoit 
pas  à  leur  égard,  la  réfolution 
prife  à  Tbaneherg ,  6c  qu'on  ne  pu« 
rifToit  pas  les  Gontrcvenans  ;  les 
Réformez  les  firent  fouveni^:  de  la. 
_  faveur  qu'ils  leur  avoient  faire  à* 
cet  égard  :  Quoi  que  nous  fajfions  le 
plus  grand  nombre  ,  leur  dirent -ils 
dans  les  Co?nmunai{tez  ?  &  dans  les 

Con- 

^  HinderfUjfenj 


delaSuife.  LiV.  X.  Igl 

Confeils  ,  cependant  nous  avons  bien 
voulu  y  pour  vous  faire  plaifir  (^/V«Glari3 
que  nous  yiy  fuffions  pas  obligez ,  ni 
par  nos  Traitez  7  ni  par  les  Loix  du 
Pajs^  )  permettre  que  vous  choifijfiez 
ftx  personnes  de  voire  coté  3  &  nous^ 
fix  du  notre  ,  pour  compofçr  un  Tri^ 
bunah  charge  de  punir  ceux  qui  con- 
treviendraient au  Traité  fait  entre 
nous  ,  au  fujet  de  la  Religion  :  & 
nous  y  avons  ajouté  le  Land  -  Am- 
man 5  comme  Préfident  ,  nu  ,  furarbi-^ 
trcy  pour  décider  en  cas  de  partage  (^)» 
L'accord  ne  fut  pas  d'abord  exac* 
tement  ob/èrvé.  La  Mefle  fut  ré- 
tablie à  Schvvanden'-y  mais  on  n'y 
rétablit  point  de  Miniftre  ,  &  les 
Réformez  du  lieu  ,  alloient  faire 
le  fervice  Divin  ,  à  Bettfchvvandeni 
qui  eft  dans  le  voifinage. 

Mais  Tan  1538.  le  Prêtre  de 
Linthal  s'en  étant  allé  5  le  nombre 
des  Catholiques  ayant  fort  dimi- 
nué par  la  pefte  ;  &  outre  cela 
le  défaut  de  Pafteur  y  caufint  beau- 
coup de  défordres  ,  les  gcr?s  de 
Linthal ,  arrêcérent  à  la  plur.:lité 
des  voix  ,  Tan  1542.  de  prier  />/-  • 
doUn  Brunner  y  alors  Pafteur  âBetts-^ 

chivan-' 

{a]  Hottir.g,  647.  (748. 


1 82  Hiftoirc  de  la  BJformation 

1532.  chvvmden  ,  (  &  auparavant  à  Matt 
Claris  Tan  1532.  )  de  leur  annoncer  la 
Ceux  de  p^j-ole      Dieu,  avec  le  confente- 
appel-'   rn^n^       fc-^  Eglifs  ,  &  de  vifiter 
lent  un  chez  eux  les  malades  &  les  mou- 
Minifae  rans.    Brunmr ne  voulut  s'y  ré- 
foudre, que  fur  l  affûrance  qu'on 
lui  donna,  que  les  gens  de  Ltnthd 
le  fouhairoient  unanimement  que 
le  Confeii  d'Etat  Tagieoir.  Avec 
cette  double  preuve  de  fa  voca- 
tion y  il  fervîî  à  la  fois  ces  deux 
Eglifes  >  jufqua  l'an  1555.  qu'il 
fut  appelle  à  Claris  aprèî»  la  mort 
Garafiè- de  Falentin  Tfchoudi  ^         7  étoit 
hmin    Curé.     Ce  P^alentin  Tfchoudi  étoit 
TjchoHdl  un  Homme  fingulier  en  fon  efpè- 
ce,  aufll  -  bien  que  ^ean  Heer  fon 
Vicaire,    Ils   étoient  tous  deux 
mariez  ,  Se  par  •  là  ne  pouvoient 
pas  diie  la  Meffe.     Ceptndant  ils 
éroient  Catholiques  ,  mais  fans 
averfîon  pour  la  Religion  Réfor- 
mée j  deforte  que,  lors  qu'après 
la  guerre  de  Cappel  ,   fi  funefte 
au  parti  Réformé  ,  on  rétablit  les 
Images  &  les  Autels  dans  l'Egli- 
fe  de  Claris  ,    il  dit    aux  Ca- 
tholiques ,  Qu'ils  ne  dévoient  point  fe 
faire  de  peine  de  l'uvoir  pour  Pafieury 


de  la  Suiffe.Li'v.  X.  I83 

puis  qii'îl  ne  vouloit  point  s'oppofer  a  l  J  32 
leur  Religion^  ni  U  critiquer  dans  fes  Glarts 
Sermons  ,  &  qu'il  vouîoh  aller  lui^ 
même  à  la  Aîej^e,  La  plupart  q  en- 
tr'eux  agréèrent  la  chofe ,  parce 
que  d'ailleurs  3  il  étoit  un  Homme 
de  naiflance  ,  confidéré  dans  lelieU;. 

palTablement  favant  s  aufli  il 
leur  tint  parole,  hfi  Doy^n  Schou^ 
1er  difoit  la  Meffe  à  Claris  >  & 
Tjchouui  prêchoit  aux  deux  partis? 
ce  qu'il  fit  jufqu  à  fa  mort.  Cé^  , 
toit  là  le  vrai  moyen  d'éviter  la 
pe  fécunon.  Il  y  eut  cependant 
quelques  Catholiques  zélez  3  qui 
ne  s'accommodoient  pas  de  fes 
Sermons  3  6d  qui  vouloient  avoir 
un  Prêtre  en  forme  pour  Curé  5 
mais  ils  ne  purent  par  l'obte- 
nir *. 

L'Abbé  de  S.  Gai  ,   Diithelm  R^tablif 
JBlaarcr  >  fe  prévalut  au/Ti  des  avan-  fe.rent 
tages  remportez  par  les  Cantons  ^^^^ 
Catholiques  3  pour  fe  remettre  tn-ad, 
polTtflion  de  fon  Abbaye,  dont  la 
diflipation  avoir  été  la  première , 
ou  du  moins  la  principale  fouice 
des  troubles  &:  des  inimitiez  enrre 
les  Cantons.    Il  ne  lai  etoit  reilé 

que 


î84  Hifloire  de  U  Reformât  ion 
ÏS32.qug        Moines,  difperfez  en  ài* 
S-  G'hi  ^^^^  endroits.    Appuyé  des  Can- 
*  tons  de  Lucerne  &  de  Schvvu%,  Sc 
des  Catholiques  dQ.Glaâs  ,  il  ren- 
tra dans  TAbbaye  avec  fes  Moines^, 
le  r.  Mars  15^^.  trois  ans  après 
qîi'on  y  eut  aboli  le  Papifme.  Les 
quatre   Cantons  ,  protefteurs  de 
Accom-  l'Abbaye ,  avec  Berm  &z  Appenxelly 
?node~     iîxent  à  FTeyl  un  accomrnodement 
t^el'Ab-  entre  l'Abbé  &  la  Ville  de  S.  Gai, 
bé  &  la  qui  avoit  acheté  les  bâtimens  de 
J^^^-^^e  l'Abbaye  &   le  Domaine  qui  fe 
,  '        rrouvoit  dans  fa  J  jrifdiction.  Le 
Traité  d'achat  fut  caffé ,  Se  h  Ville 
de  6'.  (7^/  obligée  de  payer  à  FAbbé 
dix  mille  gouldes  pour  les  fruits 
qu'elle  avoit  tirez  ,  comme  aufH 
pour  tous  les  dommages  inté» 
rets.    L'Abbé  fit  clTacer  dans  l  E- 
glifc  Abbatiale  ,  tous  les  paiTages 
de  la  Bible ,  qui  regardent  le  Culte 
des  Images  >  &  qu'on  avoit  écrits 
contre  les  parois  ,  &  l'on  mit  des 
Images  à  leur  place  {a).  Com- 
me l'Abbaye  touche  la  Ville  >  dont 
elle  n'eft  séparée  que  par  une  mu- 
rr.ille  mitoyenne ,  &  qu'il  étoit  à 
craindre  5  que  ce  voifinage..  ne.  fuc 

capable 

'  (.ï)  IJotttfJg,  6^1,  Stnmpf,  Lib.  V.  Ch.  7- 


de  U  SuiJJe.  L I  v.  X.    I  &5 

capable  de  corrompre  les  Réformez;  1 5:32; 
les  Magiftrats  de  la  Ville  firent  dé-  s.  G  al 
fenfe  à  leurs  Bourgeois  *  d  aller  *  Le  14 
vifiter  cette  Eglife     ou  d  autres 
Eglifes  Catholiques  5  ou  d  a/Tiftcr 
à  la  MelTe:,  à  peine  detre  châiicz 
févérement  ;  avec  offre  cependant, 
d'écouter  paifiblcmenc  tous  ceux 
qui   voudroient  leur  donner  de 
meilleures  inftruiflions  par  la  Parole 
de  Dieu.    Cet  Edit  fut  renouvelle 
le  6,  Juillet  [a). 

L'Abbé  ,  prétendant  n  être  point  VAUé 
lié  par  le  Traité  de  paix  des  Can-  entre- 
tons,  voulut  d  abord  chafTcr  tous 
les  Minières  de  fon  Pays  >  Se  abo-  traire  h 
lir  la  Réformation  dans  toutes  les  Réfor- 
EgliTes  de  fa  dépendance.  PluCeurs 
EgliTes  fe  foû  iiirent  5  comme  rf^l 
&CC,  mais  plufieurs  autres  plus  zé- 
lées pour  la  vraie  Religion  ,  im- 
plorèrent le  fecours  des  Seigneurs 
de  Zurich  ;  qui  de  concert  avec  les 
fept  autres  anciens  Cantons ,  inter- 
poférent  leurs  foins  avec  zèle  en 
leur  faveur.   Enfin  dans  une  Con- 
féience  qui  fe  tint  à  Rofcbach  ,  ils 
firent  une   efpèce  d'accommode- 
ment provifionnel   entre  les  par- 
ties. 

{a)  Hotting,  l.  c.  Seul  te  t  p.  m, 


186  Hiftoîre  de  la  Réformât  ion 

1532.  ties.    L'Abbé  s'engagea  de  ne  hw 
S.  Gai.  re  aucune  violence  à  fes  fujets  fur 
la  Religion  ,  &  leur  permit  non- 
feulement  daller  dans  les  Eglifes 
Réformées  du  voifinage  ,  hors  de 
fes  terres  ,  pour  y  afilfter  au  fer- 
vice  divin  ,  mais  même  d'avoir 
des  Miniftres  pour  tous  ceux  qui 
Traité       fouhaiteroient ,  pourvû-que  ce 
provijionnz  fut  point  à  fes   dépens;  & 
^'Abbé^  que  cette  liberté  ne  durât  que  deux 
|^fe5f^_  années.    Il  referva  aulTl  que  cha- 
jets  Ré- que  Miniftre  mettroit  cent  florins 
formez.       ^hxn  en  dépôt ,  au  lieu  de  cau- 
tion ;  pour  affurance  >  qu'il  ne  par- 
kroit   point  contre  le  Traité  de 
Paix.    A  fon  imitation  les  V.  Can- 
tons voulurent  impofer  la  même 
chofe  aux  Miniftres  du  Rheinthal. 
Les  Cantons  Réformez,  Confei- 
gneurs   du   Rheinthal,  voulurent 
aufTi  qu'on  impofât  la  même  cho- 
fe aux  Pierres,  parce  qu'il  y  avoit, 
à  cet  égard  5  parité  d'obhgation 
dnns  les  deux  partis.    Mais,  pat 
î'entremifs  des  autres  Cantons,  les 
deux  partis  fe  défiftérent  de  leur 
prétention  {ci), 

L'Abbé 

{a)  Hotting,  ].  c.  Rzhn  742..  745.  B. 
inftr.  Wr 


de  la  Suife.Liv.yi.  187 

L'Abbé  n  etoit  rentré  en  poffef-  j  532'; 
Ç\o  \  que  des  Anciennes  Terres  des.  G  al 
fou  Abbaye.  îl  reftoic  encore  le 
Tockibourg\  qui  avoit  acheté  li- 
berré  .  &  dont  l'achat  avoir  été 
confie  rrié ,  (  comme  on  la  *  remar- 
qué,) par  les  V.  Cantoris>  dans  la 
paix  qu'ils  avoient  faite  avec  les 
gens  de  C2  Pays  -  là  >  après  la  ba- 
taille de  Cappel.  Mais  l'Abbé  ne 
voulut  point  s'en  tenir  à  ce  Traité. 
Il  piérendit  >  que  les  Cantons  n'é- 
toienc  point  en  droit  de  traiter  au 
piéjudice  d'un  tiers  ,  &  voulut  ren- 
ti<;r  aiiiïi  en  poiTefTion  de  ce  Pays- 
là.  Il  Fut  appuyé  par  ces  mêmes 
Canrons  ,  qui  oubliant  leurs  pro- 
meff  s  5c  leur  Traité  confèntirent 
à  la  caflation  du  Traité  d'achat. 
Il  y  eut  pour  ce  fujet  deux  Con- 
férences ,  dans  le  mois  d'Avril , 
l'une  à  FF jl  l'autre  à  Rapperfcb- 
vvyl.  Les  Tockebourf^cois  ne  vou- 
loient  point  fe  foûmettre  ^  6c  la 
perte  de  leur  liberté  leur  faifbit  en- 
core pL'.s  de  peine,  que  celle  de 
l'argent  qu'ils  avoient  donné  pour 
l'acheter.    Mais,  abandonnez  à^sLeTockt 

Réfor-  b'''''S 

^  ,r       •  ^  rr  rentre 
*  Voy.  ci-deflus  Lîv.  VIII-  Ch,  XI.  &; 


I88  Hifioîre  de  WR^eformation 

f         Réformez  ,  qui  la  leur  avoient  ven- 
parforce  duë  j  preffez  même  parles  C^cho* 
fous   le  liques  ,  qui  la  leur  avoient  alTurée 
jP^I^^'^^  par  un  Traité  folemnel ,  ils  furent 
S,  Gai.  obligez  de  céder  à  la  force  ,  6^  ds 
fe  remettre  fous  Je  joug  de  TAbbé; 
ce  qu'ils  firent  pourtant  à  des  con^ 
ditions  affcz  fupportables ,  fi  feu* 
îement  elles  eulTent  été  obfervées. 
Douze  Chefs   du  Pays  >  avec  le 
Land-Ammaa,allérent  trouver  FAb* 
bé  à  VFjl ,  où  iJ  faifoir  fà  réfiden^ 
ce  5  &  réglèrent  avec  lui  un  Trai- 
té d'accommodement  5  qu'ils  firent 
pour  quatre  ans ,  le  Lundi ,  jour 
de  la  S.  Madelaine,  22.  de  Juillet, 
Ils  y  {^\^\Ahïtni  ,  enrr'autres,  la 
confervation  de  toutes  leurs  Fran- 
chifes  6é  de  leurs  anciens  privilèges 
avec  la  liberté   de  confoence  *. 
L'Abbé  de  ^S".  Jem  dans  ]e  Thour- 
îhal  y  à  l'extrémité  du  Tockebourg^ 
qui   avoit   éré  cbaffé ,    fut  aufîl 
rétabli  {a)  à  peu-près  dans  le  mê- 
me temSa 

III.  La 

^  Voyez  ce  Traité  toat  an  long  dans 
îe  hUnife/te  dcZuKiCH  &  de  Berne,  in- 
titulé 5  Gretndlifhe  Information  ^c.  n^^. 

xxxvir. 


(.«)  Rahrt  745; 


delà  Suijfe,  Lrv.  X.  189 

III.  La  Ville  de  fe  vit  I  532. 

l'auffi,  certe  année-là  3  expofée  à  de  Zurich 
I nouvelles  inquiétudes,  de  la  part 
Ides  Cantons  Catholiques»  à  Tocca- 
fion  dun   Edit  de  Réformations 
I  qu'on  y  publia.    Il  s'y  trouvoit 
encore  des  gens  qui  étoient  toû- 
jours  Papiftes  dans  le  cesur.  Il  y 
«ut  un  Prêtre  ,  dit-on ,  qui  célébra 
la  Meffe  dans  une  Cave  s  mais  il 
iê  fauva  bien  -  tôt.    D'autre  côté 
pour  le  bien  de  paix,  on  ufoit  de 
beaucoup  de  connivence  envers  les 
Toifins  5  ce  qui  donna  occafion  à 
plufieurs  ,  amis  &  ennemis  ,  de 
publier  >  que  bien -tôt  la  Meiïe  fe- 
Toit  rétablie  à  Zurich,    Pour  diiïi- 
per  ces  bruits  injurieux ,  6^  pour 
prévenir  les  troubles  &  les  déTor- 
dres  ,   qui  en   pouvoienr  naîire> 
les  Seigneurs  publièrent  ,  (  fur  la 
fin  de  Mai  >  le   Mecrecii  après  le 
Dimanche  de  la  Trinités  ,  )  un 
Edict  imp-iméj  cù  Ton  difoit  : 
5,  Qi^i 'après  qu'on  y  avoit  aboli  la  ^  i>i  r 
»  MtiTe,  qui  n\ihout\t  qu'a  dminucr  x^^Mejj'e, 
py  confiAérablement  .  é         nnéatitir  &-  pour 
même  la  pajjlon  de  Jesus-Christ, 
qui  eft  lui- feu!  la  vUtune  j'Orr  h  ^^J^^^ 
yy  jfeché  y  &  nmg  fauvcur  ,  &  qu'on 

y 


1 90  Hi/loire  de  la  Bs^éformation 

I  S32.  3>  y  avoic  introduit  le  vé.itable  ufa- 
ZuRicH  :»  ge  de  la  S.  Céne  ,  félon  l'infti- 
parution  de  Jésus  -  Christ 
conformément  à  la  S.  Ecriture, 
>,  pour  la  gloire  de   Dieu ,  pour 
5,  l'augmentation   de   la  Charité 
5,  Chrétienne  ,  8c  pour  l'amende- 
>,  ment  de  la  vie  >  Après  qu'on 
3,  avoit  publié  divers  Edits ,  fur  \ 
5,  tout  en  1530.  contre  plufieurs  ' 
5,  efpéces  de  réglemens  &c. ,  dans  J 
3,  lesquels    Edits    cependant  on 
5,  n'avoit  décerné  aucun  châtiment 
3,  contre  ceux  qui  s  éloignent  de  la 
5,  S.  Céne>  ou  qui  communient 
3>  chez  les  Papiftes  :  Pour  c  e  t- 
p,  TE  CAUSE,  les  Seigneurs  dé- 
claroient  préfentement  que  les 
3,  prémiers  feroient  punis  par  le 
>,  bannilTement  ,  &  les  derniers 
5,  par  une  fimple  exclufion  des  Em- 
„  plois ,  fi  c'étoient  d'ailleurs  des 
gens    qui   n'excitaifent  aucun 
trouble  5  offrant  de  nouveau  5  d'é- 
5,  coûter  tous  ceux  qui  voudroient 
5,  leur  montrer  quelque  chofe  de 
>,  meilleur  par  l'Ecriture  Sainte. 
3,  Pour  conclufion  ils  exhortoient 
leurs  Bourgeois  &  leurs  fujets, 
w  de  demeurer  fmnmenf  attachez 

à  la 


deU  Suijfè.  Liv.  X.  191 

5,  à  la  Parole  de    Dieu  5    félon  1532. 
3,  qu'ils  lavoient  fouvent  promis  :  Zuhich 
5,  &  de  les  afififter  fidèlement,  com- 
5,  me  leurs  JVJagiftrats  légitimes  ^ 
|:5j^«  cas  que  quelqu'un  ^  contre  et 
yy  pé'ance  5  entreprit  de  les  en  dé- 

tourner  par  la  force:  comme  aufïi 
U,  de  ne  rien  dire  >  &  de  ne  rien 

entreprendre  ,  qui  pût  tourner 
yy  au  préjudice  de  la  vérité  Evange^ 
I  yj  lique  3  ou  a,  l' avancement  &  au> 
1 5,  rétablijfement  d'une  Religion  deftïtuéc 
55  ^/(?  fondement  y  telle  que  le  Papif" 
y,  me  dcc.  Car  difoienr-ils  ,  nous 
y  y  fommes  fermement  réfolus,  avec 
3,  la  grâce  de  Dieu  ,  nonobftant 
y,  les  tribulations  6^  les  malheurs* 
3>  que  Dieu  a  fait  venir  fur  nous> 
35  peut-être  à  caufe  de  nos  péchezj 
3,  de  demeurer  courageufement  at- 

tachez  à  la  vérité  ,  que  nous 
yy  avons  connuë  &c.  Sc  de  ne  ja- 
35  mais  foufFrir  ni  tolérer  la  Mefle 
3,  &c.  dans  nôtre  Ville  &  dans 

nôtre  Pays  {a). 

Cet  Edit  donna  lieu  à  un  va- 
carnie  extraordinaire  ,  non  feule- 
ment dans  la  Suifle  ,  mais  même 
en  Allemagne,  où  quelques-uns 

prirent 

{aj  Hotting,  649» 


ï  92  Hiftoire  de  la  Keformation 

15 32.  prirent  la  peine  de  le  porter.  Et 

Zurich  même  à  Ratisbonne ,  où  la  Diète 
de  TEmpire  éroit  alors  affembléca 
où  l'Empereur  Charles  V. 
fe  trouvoit  en  perfonne  3  quel- 
qu'un s'avifa  d  afficher  de  nuit  cet 
Edit  à  la  porte  d'une  Eglife  de 
cette  Ville  Impériale,  où  il  fut  lu 
de  tout  le  Monde  à  la  confufion 
de  ceux  qui  a  voient  affedé  de 
publier  à  lavance,  dans  la  Diétej 
que  la  Ville  de  Zurich  alloic  chan- 
lE.nn\us  ger  de  Religion.    Ennms ,  Evêque 

cherche      p^erolï ,  prit ,  dit-on,  occafîon  de 

aux^^Zu-      ^^^^  ^         vanger  de  Zurich. 

ricois.  Le  Pape  C  LE  ME  NT  VIL  lavoit 
envoyé  en  Allemagne  &  en  Suiffe> 
fous  le  fpécieux  prétexte  d'engagée 
les  Cantons  à  une  expédition  con- 
tre les  Turcs  j  mais  au  fond,  dans 
l'efpérance  que  Zurich,  après  les 
pertes  qu'elle  avoit  fouffertes,  pour- 
roft  fe  refoudre  à  recevoir  de  nou- 
veau Ton  Légat.  Dans  cette  pen- 
fée  il  cSrk  de  leur  payer  la  fclde, 
qu'il  devoit  de  relie  ,  depuis  l'an 
1521.  Mais  non-feulement  on  lui 
refufa  l'expédition  contre  les  Turcs, 
en  cerf  dération  de  ce  qui  s'étoit 
pallé  fous  ce  piéiextç  l'an  1510. 

mais 


de  la  Suijje.  Liv.  X,  1.93 

piais  auffi  toute  la  peine  ,  qu'£w-I532. 
ûm  fe  donna,  de  Lucerne,  pour  rc- Zurich 
gagner  Zurich  ,  fat  entièrement 
perdue.  Dépité  de  ce  mauvais 
îuccès ,  il  s'en  prit  d'abord  à  Hen^ 
ri  BtilUnger  &  à  Lcon  de  Juda  ,  qui 
faifoient  tout  leur  poflïble  pour 
r'allumer  >  par  leurs  Prédications  > 
le  zèle  de  leurs  Auditeurs  3  qui  pa- 
roilToit  ralenti  >  &  même  entière- 
ment éteint  dans  quelques-uns ,  ôc 
qui  s'elForçoient  de  leur  infpirer 
la  confiance  &  le  courage  ,  nécef- 
faires  dans  ces  trilles  &;  péiilieu- 
fes  conjon^urcs.  Ennius  mit  tout 
en  œuvre  >  par  le  moyen  de  fes 
EmilTaires ,  pour  les  décréditer 
dans  Zurich  ,  &  dehors  5  afin  que 
les  troupeaux  fuflent  privez  des 
foins  de  ces  fidèles  Paftcurs.  Mais 
n'ayant  pas  réufll  dans  ce  deffein, 
il  porta  fon  reflentiment  plus  loin  j 
&  de  concert ,  dit-on  ,  avec  d  au- 
tres Prélats,  il  chercha  à  brouiller 
les  Zuricois  avec  les  Cantons  Ca- 
tholiques ,  en  leur  faifant  remar- 
quer ces  mots  de  l'Edit  de  Zurich,' 
Que  U  Alejïe  tend  à  ternir  la  gloire  il  anime 
de  U  pajfion  du  Seigneur.  Il  fit  fes  contre 
efforts  pour  les  animer  contre  Zu-  Cantons 
Tojn.  IVs  I  rich, 


194  Hîjhîre  de  U  K^formati-on 

1532.  rich,  en   leur  faifant  envifager 
Catholi- ces  mots  >  comme  une  injure  con- 
?occa         rhonneur  de  ces  Cantons ,  & 
fion^^de        violarion  du  Traité   de  Paix. 
îcurEdic  Les  Cantons   Catholiques  prirent 
feu  là-dclTus  ;  &  dans  une  Diète 
générale  ,  affemblée  à  Bade  y  au 
commencement  de  Septembre  >  ils 
reprochèrent  ces  mots  aux  Zuri- 
cois  5  &  dans  une  fuivante  ,  qui 
fê  tint  au  commencement  d'Octo- 
bre 3  ils  leur  demandèrent  de  les 
retranclv^r  de  leur  Edit  ;  déclarant 
d'ailleurs  qu'ils   n'avoient  rien  à 
dire  contre  cet  Edit.    Zurich  refu- 
là  de  le  faire  y  ce  qui  donna  lieu 
à  une  difficulté  ,  qui  occupa  plufi- 
eurs  féances  des  Cantons,  jufqu'au 
milieu  de  l'année  fuivante.  Comme 
raffairv*;  étoit  importante,  &  qu'elle 
intéreffoit  toute  la  Réformation  > 
ks  Cantons  Réformez ,  fê  joigni- 
rent aux  Zuricois,  &  firent  caufê 
commune  avec  eux  (4). 
Z'TRicH         furvint  encore  d  antres  aflFai- 
&*^BER-res>  qui  augmentèrent  les  difHcul- 
NE  pro-       entre  les   Cantons.     Les  V. 
îeP^Ré-  Caî^fons  Catholiques  inquiétoient 
formez  les  deux  Villes  de  Bremgurte  &  de 

{a)  Hottlng,  650. 


delà  Suîffe.  Liv.  X.  195 

Mellingue  y  pour  les  obligera  ren-  1532. 
trer  dans  le  Papifme.    Les  Zuri-^.^m  & 
cois  &:  les  Bernois  iîrent  de  leur  ^5 
cô  é  tous  leurs    efforts  pour  les 
fourenir.    Ainfi  dans  une  Diète, 
AlTemblée  à  Bade  ,  après  Pâques> 
ks  Bernois  intercédèrent  vivement 
pour  ces  denx  Villes  ,   en  repré- 
iênranr.   5,  ^«'elles  avoient  été  at 
J5  fez  punies,  Bremgarte  ,   par  une 

amende  de  mille  florins  de  Rhin  : 
5,  6c  Mellingue  ,  par  la  perte  de 
5,  fes  portes  ,  &  Tune  &  l'autre 
„par  la  perte  du  droit  d'élire  leurs 
„  Avoyers:  &:  qu  ainfi  Ton  devoit 
5,  s'en  contenter.  Que  d'ailleurs  la 
5j  Paix  ayant  été  faite,  à  condition 

que  chaque  Canton  co:.fcrve  oit 
5,  fes  droits  fur  les  Terres  Commi:- 
„  nés  ,  il  étoit  jufte  de  confcrver 
5,  Zurich  dans  les  fiens    fur  ces 

Villes  V  Ils  demandèrent  en 
même  tems>  qu'on  affignât  des 
penfions  viagères  aux  Rtligieufes 
de  Tennikin^  qui  s'étoient  mariées. 
Les  Cantons  Catholiques  répondi- 
iylzm.Qu  il  n) avoit plus perjonne  dans 
ï>  cçs  FilU's  y  qui  fouha'îtât  qtion  y 
3$  préchat  la  Doclihie  Réformée  y  éc 
3i  qu  tlles  avoient  promis  par  écrit, 
l  z        99  de 


Î96  Hïjloïre  deU  Refcmation 

I  5  3  2 . 55  de  reprendre  le  Papifine  (/z)  53.  Les 
B  R  E  M-  Députez  de  Berne  ,  pour  la  Diète 
6  ART  E  de  la  S.  Jean  ,  eurent  ordre  d'in- 
tercéder  encore  pour  ces  Villes  ^ 
GUE.  afin  que  les  Cantons  Catholiques:» 
les  laifTaffent  en  paix  au  fujet  de 
la  Religion  ,  en  leur  repréfentant 
de  nouveau,  55  ^'elles  avoient  été 
3>âffezpunieSj&  qu'ils  nepouvoient 
53  pas  croire  ce  qu'on  difoit  de  leur 
/  3,  lâche  changement En  effet 
par  l'information  qu'ils  en  prirent, 
il  fe  trouva  qu'à  Bremgarte  la  plus 
grande  partie  des  Bourgeois  étoient 
encore  attachez  à  la  Réformation. 
C'eft  pourquoi  les  Bernois  en- 
voyant des  Députez  >  pour  une 
Diète  fuivante  >  (  qui  s  alTembloit 
au  comn^encement  de  Septembre ,  ) 
leur  donnèrent  ordre ,  de  foutenir 
fortement  les  Réformez  de  Brem-* 
gartc.  Et  comme  les  Cantons  Ca- 
tholiques avoient  envoyé  un  Edit 
à  Dïetkken ,  au  nom  des  VIII.  an- 
ciens Cantons  ,  (  de  Berne  par 
Berne,  conféquent,  )  portant,  ordre  d'y 
rétablir  la  Méfies  Ces  Députez  fu- 
rent encore  chargez ,  de  faire  des 

repro-! 


de  la  Sîùjfe.  L I V.  X.    1 97 

reproches  à  ces  Cantons,  pour  cette  i  532» 
honteufe  fupercherie  ,  comme  fi  Bekne. 
Berne  avoit  confenti  à  cet  Edit  5 
&  de  leur  déclarer  5  que  fi  jamais 
ils  s  âvifoient  de  mettre  le  nom 
de  Berne  5  à  des  Edits  de  cette 
nature,  pour  des  affaires  de  Reli- 
gion ils  les  en  dédiroient  publi- 
quement (^). 

Ainfi  ces  deux  affaires,  tant  celle 
de  TEdit  de  Zurich ,  que  celle  des 
Réformez  de  Erewgarte  3c  de  Mel^ 
lingue  5  donnèrent  beaucoup  d'em- 
barras aux  Cantons  Evangeliques  ; 
&  occupèrent  les  Diètes  des  Can- 
tons ,  jufqu  au  milieu  de  Tannée 
fuivante.  Dans  une  Diète  Affem- 
blèe  en  Novembre  >  les  Bernois 
pro  poférent  ce  temperamment.Qu'(?« 
Jaijferoit  fubfifter  rEdit  que  les  K 
Cantons  avoient  publié  clans  le  Rhein- 
thaï ,  &  dont  j'ai  parlé  ci-deffus  ; 
&  que  Zurich  garderoit  le  fien^  vil 
que  chaque  Canton  étoit  libre  de  faire 
des  Ordonnances  chez  fol  5  comme  il 
le  jugeoit  à  propos  (b).  Et  comme 
ils  ne  voulurent  pas  fe  contenter 
de  cela,  les  Réformez  leur  offrirent 
I  s  1^ 

(a)  Ibid.  171. 
(^)  Ibid,  11^. 


198  Hifloire  de  la  K^formation 

IÎ32.  le  droit  par  devant  des  arbitres, 
C  A  N-   On  liûia  beaucoup  ,  dans  cette  oc- 
TONs.  cafion,  le  zèle  &  la  fermeté  de 
deux  ExcelJens  Magiftrats  Réfor- 
mez ,  Jaq^ues  Meyer,  Bourg- 
maître  de  Bkle -,  qui  fut  nommé /f 
*  Vmter  P^'^^  '^^^  Gens  de  bien  *:  &  Joachim 
liorum.  Vadian  ,  Bourgmaîtrc  de  5.  Gd. 
Le  p'«  émier  écrivit  à  Bu'l'mger  ,  le 
4.  Dece»!  Jjx-e-:  Exhortez  le  Peuple  a 
de  fe.  ventes  prières ,  à  la  patience^  & 
4  mettre  toute  fa  confiance  en  Dieu. 
Car  Dieu  ,  qui  eft   pour  nous  ,  efl 
fuijfant  ,  &  fouvent  il  nous  ôte  des 
moyens  temporels  afin  que  nous  n  at- 
tendions de  fecours  que  de  lui ,  autre- 
ment  notre  Evangile  fera  trop  jnon- 
dain.    Cejî  uinfi  que  nous  viendrons 
i  bout  de  furmontcr  tout  ^  même  dans 
ce  tems  :  Car  Jésus  -  ChrisTj 
qui  efl  en  nous  ,  demeurera  Seigneur 
&  Roi  y  nonobft^nt  toute  la  fureur 
du  monde.    S'il  faut  que  nous  fouf- 
frions  dans   ces  combats  ,  &  même 
que  nous  y  mourions  ,  c'eft  nôtre  gain. 
Cependant  Dieu  efl  fidèle.    Dans  ù 
tentatim,  il  nous  donne  Cïffu'e  ^  &  ne 
permet  pas  y   que  nous  fopns  tentez 
au  de-la  de  nos  foras.     Il  feioic 
bien  à  fouhaiter  ,  que  le  nombre 


de  U  Suilfe.  Ll  V.  X.  199 

des  Magiftrats  de  ce  Carâdère>  fut  J  532. 

i  un  peu  plus  grand  {a).  C  a  n- 

Les  CanroiiS  Catholiques  ,  ne  ^  o  n  s. 
voulant  point  admettre  d'accom- 

,  modement  ;  i'affaii  e  fut  portée 
devant  la  Diète  générale  ,  pour  en 

!  ji'ger  à  r'gueur  de  droit.    Il  y  eut 
deux  AiTernblées  à  Einfidlen  ,  Tune 
le  16.  Mars  1533.      l'autre  le  22. 
Avril  fuivant.  Les  Juges ,    établis  Z^^fV^ 
pour  terminer  cette  affaire  ,  mirent  j^^odé^ 
fur  le  papier  un   projet  d  accom-  avec  les 
modement ,  qui  fiit  enfin  agréé  par  Cantons 
les  parties,  fans  aucune  autre  dé- 
cifion  *. 

Etwius  s'étoit  flatté  de  pouvoir  Ennius 

brouiller  les  Cantons  entr'eux.    Il  s'efforce 

s'y  étoit  employé  de  toute  fa  for-^  mutile- 
'       =  .    ,    .     .  ment  de 

ce,  reileaient  qu  un  ami  ecrivoit 

de  Baie  à  Farel  ,  qui  étoit  alors  à  1er  les 
Morat ,  en  date  du  9^'^^-  Décembre,  Cantons 
Qu'on  y  craignoit  une  nouvelle  guer- 
re entre  les  Cantons  ^  a  caufe  des  in- 
trigues du  Nonce  du  Pape  a  Lucer- 
«f'(^).  Miis  il  n*eut  pas  la  ciuelle 
fatisfadion  d'en  venir  a  bout  >•  fur 
quoi  Stettler  fait  une  agréable  ré- 
I  4  flexion, 

*  Id.  IhiJ.  BcSratlcr-U.  S7.  a. 
^-«~<?/Epiilo!.incdii-.  N.XXIW 


200  Hi/iotre  de  la  I\e format  ton 

1532.  flexion,  qui  mérite  d'être  rappor» 
tée.    Quand  même  3  dit-il  y  (a)  des 

Fi  ères  Je  querellent  quelquefois  ,  & 
fe  battent}  cependant  ils  fe  réconcilient 
facilement.  Ils  n'oublient  p^oint  l'af- 
fe^'ion  n^iturelle  quils  fe  doivent  ?  & 
trouvent  toujours  dans  leur  propre 
fang  y  plus  de  confiance  ,  que  chez  les 
Etrangers.  Il  eft  à  fouhaiter  que 
cette  réflexion  fe  trouve  toujours 
vraie  parmi  les  Suiffes. 

Dans  l'une  de  ces  Conférences 
d'Einfidle,  les  Catholiques  repro- 
chèrent àux  Zuricois  >  d  avoir  a- 
vcué  dans  ie  dernier  Traité  de 
Paix,  que  la  Religion  Romaine,, 
efi  U  véraable  &  ancienne  Religion» 
Ils  répondirent  >  5,  Quon  ne  pour" 
roit  jamais  le  prouver:  Car,  di- 
5,  foient-ils  ,  le  Traité  ne  porte 
^  3>  pas  ces  termes:  A^ous  /fj  Zuri- 
3;  c  0 1  s  5  avouons  que  la  Religion 
yy  Romaine  efi  la  vraie  &c.  Mais 
yy  les  expreflions  duTraité  quifigni- 
yy  fient  fîmplement  :  JSlous  vous 
yy  laiffons  dans  votre  Religion  ,  que 
yy  vous  appeliez  U  véritable.  Si  tel 
yy  eut  été  nôtre  fentiment  ,  nous 
yy  n'aurions  point  eu    befoin  de 

nous 

(^)  Loc»  çit^ 


de  la  Suijje.  L I  v.  X".  20I 

„  nous  referver   nôtre  Religion.  I  5 32. 
yi  Nous  fommes  difpofez  à  la  fou-  C  a  n  - 
„  tenir ,  au:ç  dépens  de  nos  biens,  ^  ^  ^  s. 
5,  &  de  nôtre  vie  (^). 

IV.  Dans  cette  occafion  les  qua-  '^ntrU 
tre  petits  Cantons  ,  Un ,  SchwitZy  f  y  ^^^^ 
Undnvv.ild ,  8^  ^^fg  i  envoyèrent  ^qj^s  Jm„ 
des  Députez  à  l'Empereur  Char- près  de 
LES  V.  à  la  Diète  de  Ratisbonne,  l'Empe-- 
pour  lui  demander  la  confirma- 
tion de  leurs  libertez,  11  y  a  bien 
de  l'apparence  que  ce  n  étoit  -  îà 
que  le  prétexte-  de  cet  envoi ,  Se 
que  le  but  fecret,  étoit  de  faire 
quelque  Alliance    offenfive  avec 
l'Empereur  &  le  Pape,  contre  les 
Réformez  :  comme  en  effet  Enmus, 
Evêque  de  f^eroli,  y  travailla  cette 
année-là  vigoureufement  {h). 

Et  le  bruit  courut  Tannée  fui- 
vante  1533.  quil  fe  tramoit  une 
Alliance  du  Pape  &  de  TEmpc- 
reur  avec  les  V.  Cantons  :  de  forte 
que  dans  une  Diète  ,  qui  fe  tint 
à  la  fin  de  cette  année  là,  les  Ber- 
nois demandèrent  à  ces  Cantons 
ce  qui  en  étoit,  afin  quils  pulfent 
I  5  1^- 


{a)  Hottîng.6<{2,y 
Q)  StettUr,  /. 


202  Hijioire  delaKéformatlon 

1532.  là-deffus  prendre  leurs  mefures  (4)] 
Ca  n-  Quoi  quil  en  foit,  les  Dépurez 
xo  N  s.  ces IV.  Cantons  furent  parfaitcn;enl 
bien  reçus  de  l'Empereur  ,  ils 
obtinrent  de  lui  ce  qu'ils  fouhai- 
toient  {h). 

Laguer-  Cependant  leur  deffein  n'eut  pas 
Turc"  ^^^^  le  coup.  L'Empereur 

les  fait  âvoit  d'autres  foucis  que  celui  de 
échouer  faire  la  guerre  aux  ProteR«ns.  Les 
Tares  menaçoient  la  Hongrie  &: 
l'Italie  5  Se  méditoient  une  nouvelle 
invafion  dans  l'un  &;  l'autre  de 
ces  Pays ,  du  moins  le  bruit  ea 
couroiî.    Ainfi  l'Empereur  ,  (  qui 
y  étoit  plus  incérefle  ,  qu'aucun 
autre,  à  caufe  de  fes.  Etats  héré- 
ditaires à' Autriche^  &  du  Royau- 
me de  Hongrie ,  qui  étoit  à  fon 
Frère  Ferdinand  ,  )  fît  alors  deux 
chofes:  lo.  Il  dem.anda  du  fecours 
aux  Cantons  en  cas  de  gi  erre  con- 
tre les  Turcs ,    Ôc  fes  Ambaffa- 
deurs>  qui  parurent,  le  10.  Juillet, 
devant   la  Diète  ,  requirent  les 
Cantons  de  fa  part  ,  comme  fai- 
fanr  un  membre  confidérable  de  la 
Nation  Alkaiandej  de  fournir  leur 

con-- 

(4)  B.  Inftr.  519. 
[b]  Stathrl.  c. 


de  laSuiife.  Lî  v.  X.  203 
contingent  de  Troupes  cdntre  l'en-  1532, 
nenni  commun  de  Ja  Chrétienté,  c  a  n  - 
Mais  les  Cantons  ,  g-'gnez  par  les  ton  s. 
intrigues  des  Emiilaires  de  la  Fran- 
ce 5  refuférent  ce  fecours  ?  ré- 
pondirent à  TEmpereur:  Qu  'ils  ne 
pouvo'icnî  pas  lui  aecorder  ce  qu  'il 
fouhaïtoit  y  a  caufe  des  dangers  ,  ou  ils 
ét  oient  expo  fez  eux  mêmes  ^  dans  ces 
tems  fâcheux  &  pleins  de  troubles.  Ce 
refus  n'empêcha  pas  que  l'Empe- 
reur, ne  fit  payer  aux  Cantons  les 
penfions  qu'il  leur  devoit,  com- 
me Prince  d'Autriche,  en  confé- 
quence  de  l'union  héréditaire  de 
iâ  Maifon  avec  les  Cantons  (.3). 

Ferdinand,   Roi  de  Hon-  Mauvai- 
,  grie,  quoi  que  plus  expofé  âux  :^  P^°^^- 
armes  des  Turcs  ?  que  TEmpeieur  fer.i/- 
fon  Frère,  n'eut  pas  là  mêrre  me- ^'««'^Roi 
dération,  où,  fi  l'on  veut,  la  me- 
me  pohtique  :  Il  fit  payer  aux  Can- 
tons  Catholiques  le^s  penfions  qu'il 
leur  devoir  depuis  cinq  ans,  pour 
la  même  Union  héréditaire.  Mais 
par  rapport  à  Zurich  ,  à  Ikrue  d>C 
à  Baie  y  il  leur  fit  dire   par  Ton 
Ambaffadeur  :    „  Qne  puifqu'ils- 
5>  avoient  violé  cette  Alliance,  en 
I  6  dé.- 
W  StetfUrAL  <îS.b.S<J.a- 


20^  Hifloïre  de  U  déformation 

.15 32.  »  détruifant   diverfes  fondations 
pieufes  de  fes  Ancêtres  ,  dont 
ils  avoient  faifi  Jci,  reventes;  il 
>,  avoir  mis  en  dépôt  la  portion 
de  penfion,  qui  leur  étoit  duë  , 
3>  entre  les  mains  du  Baillif  de 
>^  Bade.    Ces  Cantons  furent  cho- 
»  quez  d'un  pareil  reproche;  &: 
5,  dirent ,  .Wils  avoient  obfervè  j 
yy  fidèlement  TAlliance  héréditaire*  ^ 
yy  Se  qu  ils  étofent  réfolus  de  Tob- 
>j  ferver  encore  à  l'avenir*  pourvu 
qu'on  robfervât  à  leur  égard  5 
5,  Que  du  refte  ils  étoient  libres, 
&  maîtres  chez  eux  ;  j^ils  ne 
yy  vouloient  retenir  le  bien  de  per-» 
yy  fonne  5  mais  que  ce  qu'ils  avoient 
yy  gagné  par  l'épée,  ils  étoient  ré-% 
yy  folus  de  le  défendre  auflî  pac 
yy  répée  {a). 
Paix  de    L'autre  choft  que  fit  TEmpereuf 
Religion  pQyr  fç  mettre  en  état ,  lui  &  fon 
^2  j^ç^"  Frère  3  détenir  tête  aux  Turcs,'ce 
°      fut  d'accorder  la  Paix  aux  Protef» 
tans  d'Allemagne^    Il  lui  impor- 
toit  de  regagner  leur  aflfeélion  3c 
de  pacifier  l'Empire.     Ainfi,  par 
rentremife  de  VEhô:tUTdQAfayence 
&  de  l'Electeur  Palatin ,  qui  négo- 
cièrent. 

U)  Id,  ^(î.  b*. 


deUSmJfe,  Liv.  X.  20f 

cierent  cette  affaire  avec  TElcdeur  1532» 
de  Saxe,  &  le  Land-grave  de  Hef- 
fe-Caffel  y  pour  les  deux  partis  5 
qui  en  convinrent  à  Nuremberg , 
le  2  ^ .  Juillet  1532.)  cette  Paix  fut 
réfoluë  X  &  décrétée  dans  la  Diétc 
de  l'Empire-L'Empereur  l'approuva 
&  la  confirma  le  2.  Août  de  la  mê- 
me année.  Il  y  fut  contraint  par 
la  néce/Tité  à  caufe  de  l'irruption 
que  les  Turcs  venoient  de  faire 
dans  fes  Pays  (4), 

V.  Mais  cette   Paix  fut  une  Troul^hi 
pomme  de  difcorde  pour  les  Pro-  [jl^^^.J'^' 
teftans  d'Allemagne,  dont  le  contre-  nifme. 
coup  fe  fit   fentir  à  ceux  de  la 
Suifle  :  Il  avoir  été  ftipulé  entr'au- 
tres  chofes  ,   dans  le  Traité  qui 
en  fut  fait  entre  les  deux  parties  s 
Que  l'on  ne  comprendroit  pas  dans 
cette  Paix  ceux  qui  rejetteroient 
la  Confejfion  cC^^ushourg  ,  fur  la  Cè- 
ne &  fur  le  Batême,  &  par  confé- 
quent  que  les  ZmHgUcus  &  les  Ana* 
baptijîes  en  feroient  exclus  {b), 

Luther  >  délivré  des  fes  inquié* 
tudes  pour  fon  parti,  par  le  moyens 
de  cette  Paix  >  commença  à  parler 

plus 

{a)  Sîeidan.  L.  VIII.  p.  m.  Zl6.  127,.  . 
{h  SUid.  ibid. 


2o  6  Hlftoire  de  la  Ktfor relation 

Ij32.pî^is  haut,  contre  la  mémoire 

les  Difciples  deZuingîe.  qXi'il  n'a- 
EjfForts  "^^^^  fait  auparavant.     Il  écrivit 
de   i-w-même  à  Albert  de  Brandebourg 
thtrçon-D^ç^  de  Pruffe,  pour  le  prier  de 
tre  les  •  .  /    ir  •  i 

Zuin-         point  lounnr  les  Sacramentaires, 

gliens.  comme  il  les  appelloit ,  &  dç  ne 
permettre  pas  que  leur  Do«flrine 
s'introduifit  jamais  dans  fes  Etats, 
lui  repjéfentant  >  qu'autrement  il 
chargeroit  fa  Confcience  d'un  très- 
grand  crime.  Les  Zuricois  trou- 
vèrent cela  fort  étrange  :  tant  par 
ce  qu'ils  ne  fe  fer  oient  pas  attendus, 
qu'un  DOifleur  Protç;ftant  eut  vou- 
lu encore  ksairliger  dans  leur  af- 
flidion:  que  parce  que  cetie  con- 
duite de  Luther  étoit  direcflement 
oppofée  au  Traité  ,  qu'il  avoit  fait 
avec Zuingle  Tan  1 5 25?. dans  laCon- 
Avantu-  férence  de  Marpurg  {u)  C  a  r  l  o s»- 
res  de  t  A  D  >  qui  étoit  alors  Miniftre  à 
Cîji.//-  Zurich  ,  prit  la  plume  pour  écrire 
contre  Luther ,  mais  pour  la  con- 
fervation  de  la  Paix  on  fupprima 
fbn  écrit,  qui  étoic  trop  vif.  Ce 
Miniftre  avoit  été  obligé  de  quiter 
le  Rheinthal ,  après  la  funefte  jour- 
née de  Cappel  à  caufe  du  danger 

où 

H  Satltct      m.38<î.  Hotting,  C60* 


de  U  Suijfe.  Liv.  X.  20/ 

où  il  fe  trouvoir  5  d'êcrç  affa/Tiné,  1  532. 
ou  livré  entre  les  mains  des  Per-  Difputes 
ftcuteurs.  Il  s'éroit  retiré  à  Zurich,  L^^^^^- 
ou,  tant  par  la  recommandation  de 
Capitcn  ,  qu'à  caufe  de  fa  bonne 
conduite  ,  on  lui  confia  unt  Eglife> 
&  on  l'y  faifoic  piêcher  jufqua 
cinq  ou  fix  fois  par  femaine.  L'an 
I  5^4.  il  fut  honorablem.ent  appelle 
à  Bâi^  {a).  Les  Minières  de  Zu- 
rich fe  contenreient  d'écrire  une 
Apologie  de  leur  Dodrine,  qu'ils 
adrefférent  au  Duc  de  PrulTe,  le 
priant  de  ne  pas  mal-tî^aiter  leurs 
Fféres  en  la  Foi.  Ile»  y  joignirent 
le  livre  de  Beitram,  ou  Ratrafnne  ^ 
Prêtre  d'à  îX.  l;éck,  que  Léon  de 
::dx  a  voie  traduit  en  Allemand,  à 
cette  cccâfion  5  &  fait  imprimer  à 
Zurich,  avec  une  Préface,  pour 
montrer  que  la  dcdlrine  de  Zurich 
fur  F;  Sacrement,  n'ércit  nullement 
nouvelle  Afjconius  ne  fa  voit 

quel  parti  on  devoir  prendre  dans 
cette  Conjor.dure.  Il  trouvoir  éga- 
lement des  inconveniens  >  à  écrire 
contre  Luther  ,  &  à  garder  le  fi- 
hiKii,  Bucer  auroit  fouhaité  qu'on  Tinvau:^ 

euî 

(rt)  Hotting,  661. 

(0  Id.        Lavattr  p.  m.  ^;4. 


208  Htjloîre  de  la  K^formatton 

eut  pris  le  dernier  parti.  Il  a  voit 
pour  la  adouci  refprit  de  MeUmhîhon ,  dc 
^esP^^  l'avoit  amené  à  fouhaiter  la  Paix 
teftans?"  ^  ^  promettre  de  faiie  tous 
fes  efforts  ,  pour  y  porter  Luther. 
^ucer  fe  donna  beaucoup  de  peine 
pour  ramener  la  Paix  entre  les 
Eglifes  Protcftantes  d'Allemagne  & 
de  SuiiTe  ,  mais  il  agit  avec  tant 
de  vivacité  envers  les  Suiffes,  qu'il 
fembloit  à  quelques-uns,  qu'il  vou- 
loir fe  rendre  le  Direfteur  de  leurs 
affaires,  &  les  engager  à  fuivre 
fes  Senrimens  j  comme  il  avoit  dé- 
jà fait  à  régard  de  quelques  Villes» 
par  exemple  Sirasbottrg ,  Ulm  &c 
d'autres ,  qu'il  engagea  ,  (  dans  une 
Conférence  des  Proteftans  ,  tenue 
à  Svveinfourt  en  Franconie ,  )  à  figner 
la  Confeffion  d'Ausbourg  ;  ce 
qu'elles  ne  firent  pourtant,  qu'avec 
la  proteftation  folemnclle  ,  que  par 
une  telle  fignature  elles  ne  pré- 
tendoient  s'éloigner  en  rien ,  de  la 
Confcffton  des  ll\  failles  ^  préfentée  à 
l'Empereur  dans  la  Diéte  d'Augs- 
bourg.  Il  repréfentoit  aux  SuiiTes: 
>,  Que  Luther  étant  un  Homme  f^- 
»  vaut  faDo(flrine  faine  daos  tout 
le  lelte»  on  dcvoû  lui  pardon- 
nes; 


de  U  Suijje.  LiV.  X.  209 

,5  ner  la  rudeffe  de  fa  plume,  1532. 

comme  une  foiblefle  h.\xmzmf^  :  Difputei 
„  ^  au  fond ,  Luther  &  Zuingle,  ^"^i^^^^^ 
5,  quoi  qu'ils  parlalTent  difFérem- 

ment  >  étoienc  pourtant  d'accord  ^ 
,3  fur  la  chofe  même  ,   parce  que 
5,  Luther  vouloir  feulement  que 
o  Je  su  s  -  Ch  R 1  s  T    fut  préfent 
3,  dans  la  S.  Céne  5  fans  en  vou- 

loir  déterminer  la  manière  :  Que 
5,  les  Chrétiens  des  deux  partis 
„  appartenoient  également  à  Jesus- 
„  C  H  R 1  s  T  ,  puifqu  ils  le  recon- 
5,  noiflbient  pour  leur  unique  Sau- 
j,  veur  5  6c  qu  ainfi  il  les  regardoit> 
>,  de  part  6c  d'autre ,  comme  des 
3,  Eglifes  en  qui  le  Seigneur  habi- 
55  toit  3j.  U  fe  fervit  du  Miniftére  de 
M)'conius  auprès  de  Zurich  6c  de 
Berne  {a). 

Les  Bernois  eurent  une  Confé- 
rence à  Zoiîîngue  ,  avec  les  Réfor- 
mez de  Soleurre  ,  6c  avecBienne  *.  *  », 
Ils  écrivirent  de  là  à  ceux  de  2u-  ^-^^le^- 
rich,  Onils  ne  voiloient  pei.t  imi- 
ter l'exemple  ^/^  Strasbourg,  en 
embiajfnnt  le  pjiïti  de  Luther -y  6c  les 
exhortèrent  à  demeurer  fermes 
dans  la  vérité,  qu'ils  avoient  iti^iié. 

Les 

{(t)  fiotting.  660.661, 


210  Hijloire  de  la  ^déformation 

1532.  Les  Ziiricois  répondirenr  de  leur 
jyijputes  côté  à  Bucer  :  Qu  'il  séto'it  trop  avan^ 
Luthé-  ,  ^  qf^'ii  de  voit  prendre  çarde  ,  de 
ne  pas  je  laipr  aller  encore  plus 
^  loin,  Myconius  lui  dit  fans  détour  : 
Qii'il  de  voit  prendre  garde ,  qu'il 
ne  lui  arrivât,  comme  à  Urbain 
Rhegius  ,  Minière  d^Ulm ,  qui  avoic 
fcandalifé  Ton  Egîife,  en  renonçant 
à  la  Doftiine  de  Zuingle  ,  pour 
embralTer  celle  de  Luther.  FFcljf' 
gang  Mufiu'us^  Théologien  célébrCj 
qui  étoit  alors  à  Augsbourg  ,  lui 
éc  ivit  ai-fTi  p  écifémenî  la  même 
chofe  'j  &c  lui  remontra  d'une  ma- 
nière convaincante  >  que  fa  mé- 
thode n'étcit  nullerr;ent  propre  à 
reilnir  les  Eglifes  ,  parce  que  Lu- 
ther 8c  Mélanchthon  n.ême  la  re- 
jettoient  (a).  Philippe  5  Land- 
Grave  de  Hejfe-Caffel  5  fit  tous  Tes 
efforts  5  dans  les  Conférences  de 
SibvveinfoHYt  &  de  Nuremberg^  pour 
empêcher  qu'on  n'y  prof  iivit  la 
Dûdrine  de  Zuingle.  Les  Théo- 
logiens de  Confèance  étoient  du  mê- 
me fentinient>  auffi-bien  que  ceux 
à^nljAlt   èc  de    AiansfMj  mais 

tous 


{.'^)  ScHltet  587.  389 


I      de  la  Sulffe.Liy.X.    21  î 

tous  leurs    foins    furent  inuti-jr37. 

AmbroiseBlaarer,  Théo- 
logien de  Confiance ,  paffa  la  plus 
grande  partie  de  cette  année  ,  à 
Ejlingen  i  à  Ifnj -,  &  à  Liuduvv  ;  ^ 
&  il  fe  loiia  beaucoiip  en  paiti- 
culier  de  Ceux  de  Reutlingen  j  di- 
fant  ;  qu'ils  ravoient  tr^iié  d'une 
maniére-rout -à-fait  fraternelK  :L'E- 
glife  à'Ifny  pria  c-jie  de  Z  ijirh,  de 
I  lui  envoyer  quc^Iqu  un  >  qui  pût 
continuer  l'œuvre,  que  Blaa:er  y 
avoit  commencée.  On  y  eiivoya 
un  Théologien  >  nommé  Conrad 
Claufer  (ù). 

A  tous  ces  embarra^N,  canfés  par  Tron- 
ic funefte  Schif  re  du  Luihcrarif- 
me,  qui  retardèrent  les  progrès  de  i,apt^fme 
la  Réformarion  j  il  faut  joindre  les 
troubles  de  Yylnabaptiftne ,  qui  ne 
lui  fut  pas  moins  funefte,  &  qui 
vinrent  enfin  à  bout  de  l'éteindre 
abfolument  dans  Soleurrc. 

Les  Atiabaptïftes  fe  mulnpliérent 
de  nouveau  cette  année  dans  le  Can- 
ton d'Appenztll,  aux  environs. 
Les  Réformez  de  la  Suiffc ,  pour 

tâcher 

{i)  Hottin;^,  C6l. 


2  1 2  HîJÎQÎrc  de  la  Réformat  Ion 

I  53  2. tâcher  de  les  gagner  par  la  dou- 
Anabap.  ceur ,  &  par  la  voie  de  Tinftruc- 
tijics,     tion  revinrent  encore  à  des  Con- 
férences, qu'ils  eurent  avec  eux 
fur  leurs  fentimens.  Il  fe  tint  deux 
•      de  ces  Con  f  e' re  n c  esj  Tune 
à  S.Gal^  Se  l'autre  à  Zoffingue  [a). 

L'occafion  de  la  première  fut , 
qu  un  Anabaptifte  ,  nommé  *]ean 
Marquardi  natif  de  VTeiffenhorn  , 
près  du  Danube,  &  paflablement 
favant ,  vîntes,  G  al  ^  &  entreprit 
dy  enfeigner^  ce  qui  lui  fut  dé- 
fendu par  ordre  du  Bourgmaître 
jfoachim  Vadîan. 
Conféren     Comme  il  continua  nonobftant 
Alini  "      défenfe  ,  on  le  faifit.  On  voulut 
très  de  après  cela  lui  propofer  de  confé- 
S. Ga  L  reravec  les  Miniftres,  mais  il  re- 
/ufabap"  j^^^^   ^^^^^  propofition  'avec  mé- 
tilîe.      pris  )  &  même  Dominique  Zilli)  l'un 
des  Miniftres  de  la  Ville  ,  lui  ayant 
envoyé  par  charité  quelques  vian- 
des, il  les  refufa>  comme  venant 
d'un  Excommunié  ,  te  ne  voulut 
pas  les  goûter.    Cette  obftination 
engagea  le  Sénat  à  ordonner ,  qu'il 
feroit  amené    devant   le  Grand- 
Confeil,   &  là  obligé  de  répon- 
dre 

W  Id.  ibid. 


delaSuife. Liv.  X.  213 

nilîre  aux  cinq  Miniftres  ,  fur  les  1^32» 
Ion  \rticles  controverfés.    Cela  fe  fit  Anabau 
en  jcndant  deux   jours   confécutifs.  ^'^fl'^-.  . 
Il  Pavoua>  qu'un  Pafteur  peut  en 
uni  bonne  confcience  recevoir  de  fes 
Vuditeurs  ce  qui  eft  néceflaire  pour 
on  entretien  s  niais  il  perfévera 
«Jdans  les  autres  articles.    Si  cette 
Conférence  ne  put  pas  le  gagner, 
elle  fervit  du  moins  àconf'erverplu- 
leurs  perfonnes  dans  la  pureté  delà 
Foi  s  parce  qu'on  y  remarqua,  qUe 
*cfprit  de  cette  Se£le  n'étoit  que 
Chicanerie  &  opiniâtreté.    Du  ref- 
te  Afarqîurd  fut  banni  de  la  Ville 
5c  de  fa  Jurifdidlion  [a), 

La  féconde  Conférence  fc  tint  à  Confia 
Zoffingue.     Comme  les  Anabap-  ^^^'^  de 
.  tiftes  du  Caifton  de  Berne  ,  étoient  quesjvii- 
1  en  plus  grand  nombre  dans  Vy^r-  nilhcs  a 
[  gÂVVy  dans  ÏEmmethal  &  aux  en-  zofjinq:ue 
.  virons  j  ce  fut  la  raifon  pourquoi  ^a^^abap- 
;  les  Seigneurs  choifirent  la  Ville  de  diùs. 
:  ZofFingue  pour  y  tenir  cetre  Con- 
férence, Ils  donnèrent  *  fauf-con-  *  lc 
duit  à  tous  les  Anabaptiftes  ,  & 
permifTion  d'y  venir>  de  toute  forte 
d'endroits  t.    H  s  y  en  trouva  23, 

D'autre 

I     W  Hotting,ri6l,66^. 

t  MUr  3pud  Q  ï  I  I  V  M  p.  ^C.  $-  4. 


2  1 4  Hiflûlre  de  la  Réformât  ion 
1-532.  D'autre  coté  il  y  vint  des  Minif. 
Aniùap^  très  des  Vailles  &  des  Cantons  de 
r/y/«?/.  de  ^i/^  ôc  de  .S*o/^«r;(? ,  &:  de 

la  Ville  de  B'ienne.  Mais  il  n'y 
eut  que  les  Miniftres  de  la  Ville  éc 
du  Canton  de  Berne  >  qui  parlè- 
rent 5  afin  de  fermer  la  bouche  aux 
Anabaprifles  qui  n'auroient  pas 
manqué»  difoient-  ils^  de  fe  van- 
ter >  fi  d  autres  euffent  pailé  3  que 
les  Miniftres  du  Pays  naui  oient 
rien  pu  contr  eux  ,  ce  qui  auroic 
affermi  leurs  Sc(fbareurs  dans  leur 
enïêtemenc.  Cette  Conférence  fe 
tint  avec  toute  la  foleninité  polTi- 
ble  5  en  prefence  de  quelques  Sei- 
gneurs de  Berne,  dépurez  pour  y 
afTifter  5  &  fous  la  préfidence  ds 
quatre  gens  d'office  du  Pays  :  Jean 
Zenderj  ancien  Avoyer  de  Zof- 
fingue  y  Jean  Tellsbergher> 
hvoytï  Lent zbou7 g;  Gabriel 
Meyer  Secrétaire  dC 
SiGisMOND  Fret,  Secre  aire 
de  Breuck^  La  Conférence  dura. 
^.  joiirs  entiers.  Elle  commença 
k  I.  de  Juillet 5  &  elle  finit  le 
Les  principaux  Interlucuteurs,  du 
côté  des  Miniftres  ,  furent  Bercb- 
told  JJalln  ,  &c  Gafpar  GroJfr>ian  ,  ou 


de  la  Sîiijfe,  Ll  V.  X.  2î  5 
Mcg.wder ,  tous  deux  Pafteurs  de  i  j 
FEgHle  de  Berne  ,  Sebaftkn  Hoff-  Anz 
î}:ci!ier  ,  MiniTtre  de  Zoffi'^-gue , 
George  Sîehclin  >  Henri  Lhickiy  & 
Henri  Marïker,  Les  Tenans  du 
côté  deî5  Anabaptiftcsj  furent  Alar^ 
tin  f^f^en^ger  5  furnommé  Linkj  > 
Jean  Hotz  y  Michel  Outt  ^  tailleur 
d'habits,  Simon  LantZi  &  Cbri,'icn 
Brucker^  Il  s'y  trouva  aufiTi  un 
certain  André  Rappenflein  >  de  Lu- 
cerne  y  qui  fembioit  faire  l'office 
de  Médiateur  entre  les  deux  par- 
tics.  Les  Afles  furent  recueillis 
pir  trois  Secrétaires  ou  Notaires 
aiTermentez  pour  ce  fujet ,  lavoir 
jean  Glanner^  Secrétaire  du  Confif- 
toire  de  Berne  >  Barthelemi  Schur' 
mxn  y  Secrétaire  de  Zoffingue  & 
Séb.iliien  Hajli  (a)  y  Régent  au  Col- 
lège de  la  même  Ville.  Avant  que 
de  les  faire  imprimer,  les  Seigneurs 
de  Berne  ordonnèrent  aux  quatre 
Préfidens ,  de  fe  les  faire  lire  tout 
entiers  ,  &  de  rendre  témoignage 
ûu  Public,  s'ils  avoient  été  recueil- 
lis fidèlement  ôc  avec  exâ(ftitude  *. 

Ils 

W  Ex  Adis  pag.  1.  3. 

*  Le  témoignage  des  Prcfiden*;  eft  à 
la  fin  des  Ades ,  daté  d'Aravv,  Ôc  du  6, 
Août  isji. 


2 1 6  Hifioire  de  la  K^formatio^ 

1532.^^^  invitèrent  aufTi  les  Anabaptif- 
Anabap-  tcs  ,  à  aller  à  Zoffingue  5  écouter 
*ips.  la  leflure  de  ces  A<ftes  ,  afin  d'en 
dire  leur  fentiment ,  &  leur  don- 
nèrent fauf-conduit  pour  ce  fujet. 
Ils  en  firent  même  chercher  les 
principaux,  pour  les  y  envoyer, 
mais  on  ne  les  trouva  point ,  & 
aucun  deux  ne  parut  à  Zoffingue. 
LL.  EE.  firent  élargir  un  des  Doc- 
teurs de  cette Se<fle,  nommée/;/-//^ 
ten  EruckcTy  (qui  étoit  alors  en  pri- 
fon  à  Berne  5  )  à  condition  qu'il 
iroit  à  Zoffinguej  écouter  cette  Lec-  . 
tnre.  II  le  promit  >  mais  il  n'en 
fit  rien ,  &  difparut.  On  y  envoya 
avec  lui  un  autre  Anabaptifte, 
nommé  Jean  Rjf,  Celui-ci  fe  con- 
tenta d'écouter  quelques  articles  > 
&  s'en  alla  {a).  Ces  Ades  furent 
imprimez,  la  même  année  à  Zurich 
in  12,  en  Langue  Allemande  *. 

Voici 

W  Ibid.  i<;3. 

^  Ils  contiennent  1^5.  feuillets  de  i*- 
pages  chacun  d'un  caraélère  fort  menu, 
j'en  ai  un  Exemplaire,  qnc  j'avois  ache- 
té 5  dans  le  deflein  d'en  donner  un  Ex- 
trait un  peu  étendu  3  à  caufe  de  l'impor- 
tance des  matières ,  qui  y  furent  agitées. 
Mais  je  me  fuis  fenti  les  yeux  fî  fati- 
guez ce  fi  affoiblis  par  U  lecture  des  li- 
vres 


delà  Smfi.  Liv.  X.  21? 

Voici  les  Articles  .  fur  lef-  I  532. 
[uels  roulèrent  les  Conférences,  Ar^Ai^ap. 

I.  V^mour  de  Dieu       du  pro-  ^'■>'^^' 
iha'in  doit  préfider  dans  cette  Confé- 
'ence  >  pour  terminer  toute  difficulté, 

II.  De  la  Mifjlon  des  ^nabaptif- 
es  9  ft  elle  efl  divine  ? 

III.  Ce  que  cefl  que  /'Eglife  ,  & 
dans  quel  parti  efi  la  véritable 
Eglije  ? 

l  V.  De  TExcommunication  ,  ce 

que  cff  :  fi  ce  font  des  particuliers 
qui  la  doivent  exercer  y  ou  bien  l'Egli^ 
fè  ?  Quand  ceft  qu'on  doit  recevoir 
de  nouveau  un  Excommunie  î 

V.  S^il  y  a.  une  Magiftrature  ? 
Qui  font  ceux  qui  la  peuvent  exer^ 
\ctr  ?  Si  le  Ma^ijîrat  Chrétien  peut 
{faire  ufage  du  glaive  ?  Et  jufquou  ou 
doit  lui  obéir  ^ 

VI.  Confeffion  des  Anahaptifies  ati 
pifet  des  Cenfes  &  des  Dîmes. 

VII.  Du  Serment ,  &  fi  hn  doit 
\  jurer  par  le  nom  de  Dieu  ? 

Tom.IV.  K  VIII.D^ 

Vres  Allemands-,  &■  le  caradtcrc  de  celui- 
ci  eft  fi  mauvais  ,  que  j'ai  été  obligé  d'a- 
bandonner mon  delTein  ;  crainte ,  que  je 
n'achevalTe  de  me  gâter  la  vue  5  fi  je 
I  m'opiniatrois  à  le  vouloir  exécuter,  je 
me  fuis  donc  contenté  d'en  extraire  ce 
on  voit  ici. 


218  Hijloire  de  U  déformation 

î532.  VIII.  De  /^Mi/Tion  des  A/mf- 
Anabap'  tves ,  fi  elle  efi  divine  ?  Et  qui  eft 
tifies,     çgif^i  q^^i  j^çj^j.  ^  q^^i  ^^^^  envoyer^ 

IX.  De  l entretien  des  Minières 'y 
fi  leurs  penfions  font  conformes  a  U 
volonté  de  Dieu  ? 

X.  *SÏ  un  Chrétien  peut  tirer  de 
Cenfes  &  des  Dîmes, 

XI.  Du  Batême,  ce  quil  eft 
comment  on  doit  le  pratiquer  ?  &  qui 
c'eft  qu,on  doit  baîïfer  ? 

La  Conférence  ne  prodnifvt  pi 
un  grand  fruic.    Les  Anabaptifti 
n'y  furent  pas  convaincus  de  leurs 
erreurs ,  &  continuèrent  à  troubler^ 
le  Canton  de  Berne  >  autant  que 
On  en  jamais.    On  les  bannit.   Ils  obéi- 
punit    rent ,  mais  ils  revinrent.    A  leur 

à  caufe  géant  dans  1  eau  >  après  quoi  on  les 
de  leur  chalTa  de  nouveau.  Mais  le  ban- 
^f3^^^  nillement  n'ayant  pas  été  fuffifant 
pour  les  arrêter,  &  quekjUes-uns 
étant  rentrez  dans  le  Pays  pour  la 
féconde  fois  y  on  les  punit  lelon 
la  rigueur  des  Loix  ,  à  caufe  de 
leur  opiniâtreté,  &  on  les  noya. 

Ce  genre  de  fupplice  ne  les  ef- 
fraya point  >  6^  ils  fe  multipliè- 
rent plutôt  que  de  diminuer.  Cela 

donna 


de  la  Suijfe.  L  i  v.  X.  219 

tdonna  de  lembarras  aux  Seigneurs  1  532. 
de  Berne  >  qui ,  ne  voyant  mzun  An.ibap^ 
luccès  ,  ni  par  la  douceur,  ni  par 
la  févéricé  ,  examinèrent  de  nou- 
veau mûrement  la  Qijeition  :  S'il 
convenoit  de  faire  mourir  tous  ces  cpi-^ 
niâtres  défoùéiffans  ,  qui  revenoicnt 
toujours  au  Pays^  nonoùfiant  leur  ban- 
mjfement ,  ou  bien  ,  feulement  ceux 
qui  commett oient  des  péchez  fcanda- 
leux  &  éclat  ans  ?  On  confulta  là- 
deffus  la  Régence  de  Strasbourg , 
qui  avoir  auffi  ufé  de  douceur  au 
commencements  mais  qui  depuis 
quelque  rems  ,  traitoit  aufli  ces 
Sc(flaires  avec  plus  de  févérité  {a). 

Il  s'en  trouva  auffi  dans  le 
Thourgaw.  Le  Baîllif  du 
Pays  en  fie  mourir  neuf  ^  de  Ne un^ 
éoren  ,  &  il  en  punit  d'autres  par 
d'autres  fupplices  {b). 

L'année  fui  vante  1535.  les  Ber- Nouvel 
nois   publièrent  un  nouvel  Edit  ^^'^ 
contre  les  Anabapriftes  >  date  du^^j^Jj-^^ 
a.  Mars.  Ils  ordonnoient  aux  Mi- les  Ana- 
niftres,  »,  de  travailler  de  toutes  b^ptiftes 
o  leurs  forces  à  ramener  ces  gens- 
9)  là  par  de  bonnes  :  inftru(flions  , 
99  tirées  de  la  Parole  de  Dieu  : 
K  a       55  Qiie 

[4  ^]  Uotting,  664» 


o  convaincre  &  les  perfuader  on 
'^^^'i>leur  ordonneroit,  au  moins >  de 
5>  garder  leur  créance  pour  eux>  & 
5^  de  demeurer  dans  le  filence  j  leur 
7)  promettant,  qtie  s'ils  le  faifoient, 
5>  on  les  laifferoit  en  paix  :  Que  s'ils 
3,  vouloient  continuer  de  prêcher^ 
>,  &  de  faire  Se£le  à  part,  on  ne 
5,  les  puniroit  plus  comme  aupa- 
53  ravant  y  mais  on  les  enfermeroit 
3>  pour  toute  leur  vie  dans  des 
y,  prifons  >  où  ils  feroient  nourris 
3,  au  pain  6c  à  l'eau,  aux  dépens 
j3  de  l'Etat ,  jufqu  à  leur  mort ,  à 
3,  moins  qu'ils  ne  renonçaient  à 
3,  leur  erreur  (a), 

La  tolérance  que  les  Seigneurs 
de  Berne  accordoient  aux  Anabap- 
tiftes  5  fut  mal-expliquée ,  comme 
fi  LL.  EE.  vouloient  laifler  en  paix, 
non  -  feulement  ceux  qui  étoicnt 
déjà  de  cette  Sedle ,  mais  au/Ti  tous 
ceux  ,  qui,  à  l'avenir  l'embralTe- 
roient,  ôc  fe  fépareroient  de  TE- 
glife.  Afin  donc  que  leurs  Sujets 
ne  s'y  trompaffent  pas,  ils  don* 
Déclara- nércnt  une  nouvelle  Déclaration  , 
tion  qui  datée  du  4.  Avril ,  portant  j  ,y  Qu  il^ 


M  Mandat,  B.  48. 


I      delaSuife.  Liv.  X.  221 

,5  vouîoienr  que  chacun  obfervât  ^l^*^'^" 
b>  leurs  Edits  de  RéFormation  ,  &  ^'^'^^ 
5>  fur-tout,  ceux  qui  avoient  été    ^ } 

de  cette  Sefte  j  &  qu'ils  afliftaf- 
y,  fent  au  Service  Divin  ,   pour  le 

moins  ,  chaque  Dimanche  j 
„  &    qu'ils    fîffent  baptifer  tous 

leurs  enfans  ,  comme  les 
„  autres  ,  fous  la  peine  énon- 
I5,  cée  dans  TEdit  précédent  :  Que 
3,  fur-tout,  fi  les  Anabaptiftes  ns 
3>  vouloient  pas  aller  au  prêche^  ils 
à,  dévoient  être  mis  en  prifon  un 
»  jour  &  une  nuit ,  peur  la  pré-  . 

miére  faute,  deux  jours  &  deux 
3 j  nuits  pour  la  féconde,  &  toû- 
i>  jours  ainfi  „.  Et  comme  il  fe 
trouvoit  des  gens  dans  les  Eglifes, 
qui,  fans  être  Anabaptides  ,  mais 
par  le  pur  effet  d'un  efprit  pro- 
fane 3  ou  par  un  refte  d  attache- 
ment au  P*tpifm€  5  n*âvoicnt  en- 
core jamais  été  ni  au  prêche,  ni 
participé  à  h  vS.  Céne  j  LL.  EE, 
ordonnèrent  que  ces  fortes  de  gens 
fuffent  punis  tout  comme  les  Ana- 
baptiftes, cependant  avec  cette  dé- 
claration ,  que  leur  delTein  n'éroit 
point  de  contraindre  perfonne  d'al- 
ler à  la  Céne  {a). 

W  UM.4y.  K  3  Quel». 


222  Hijloirede  la  K.é formation 

1532.  Qjjeîque  tcms  après,  les  Sei 
gneurs  de  Zurich  confultérent  ceu 
de  Berne  ,  fur  la  Qiieftion  :  fi  Co 
devoir  pun'r  de  mort  les  Anabapttfies^ 
ou  non?  Ceux-ci  leur  cnvoyéren 
pour  réponfe  une  Copie  de  leu 
dernier  Edit  contre  ces  Se^aires  (a^ 
VI,  La  RéForniarion  fît  peu  d 

Vaud.  Il  n'y  eut  que  Payerne  Sc 
les  Balliages  à'Orbe  &  de  Granfgn, 
ch.  el!e  g^gna  du  terrain  ,  encor 
De  fut-ce  pas  fans  troubles. 

Orbe.  chofes  furent  aflez  tranqui 

les  à  Orte  ,  après  la  publicatio 
de  TEdit  3  dont  on  a  parlé,  dès  1 
commencement    de  Tannée,  jut 
'.qu'au  Dimanche  des  Rameaux,  qu'i' 

Difpute  y  difpute  entre  P  1  e  R  R 

de  T/Vt?  V  I  R  E  T  ,  &   un  Moine  nomrr. 

avec  un  R  A  B  A  N  I.    Ce  Moine  prèchoi 
dans  TEghfe  des  Rdigieufcs  d 
Claire^  dont  il  é:oit  Vifitareur 
&  comme  il  exAltoit  le  mérite  des 
œuvres,  Vitet,  apiès  qu'il  eiit:  fini 
l'ariéra  devant  tout  le  penple  , 
réfuta  ce  qu'il  avoit  prêché  ,  lui 
prouvant  par  l'Ecriture  :  Que  noî4s 
fommis  fauvtz  grattât ement  p*ir  la 

Foï 

U]  B.  Infir.  294- 


delà  Suife.  Ll  V.  X.  223 

Foi  en  Je  sus-Christ.  Le  Moine  i  532. 
e  lui  répondit  rien  5  fi  non>  Qu'i/ Or  b  e.. 
oit  bien  jeune  pour  le  démentir^  6c 
fe  retira  tout  confus.     Et  de- 
puis ce  jour  là  il  ne  prêcha  plus  {a)* 
Le  même  jour  Pitrre   Vint  célébra 
a  Céne,  &  il  eut  à  fa  Commu- 
nion 54.  Hommes  ,  &  23.  Fem- 
mes {b). 

Le  Dimanche  7.  Avril ,  il  y  ar-  Nou- 
riva  un  nouveau  rrouble.  Corn-  ^.^^^^^^ 
me  le  Miniftre  prêchoit  trop  long- 
tems  au  gré  des  Catholiques  9  le 
Vicaire  d'Orbe,  nommé  Pierre  Bo^ 
vez  >  fit  former  la  MeiTe  randif- 
u'on  prêchoit  encore.  Les  Réfor- 
mez s'en  plaignirent,  &  on  le  mit 
en  prifon.  D'iutrc  coté^CbriJtophls 
HoUrd  ayant  coupé  le  nez  à  une 
Image  de  S.  Pierre  >  fut  mis  auflî 
en  prifon  au  pain  &:  à  l'eau  pen- 
dant 24.  heures  ,  &  condamné  à 
un  écu  d'amende  qu'il  paya.  Le 
Confeil  dépura  2.  Confcillers,  pour 
aller  à  Fribourg  demander  l'élar- 
gilTement  du  Vicaire  de  leur  Eglifc, 
Les  Seigneurs  de  Fribourg  leur 
donnèrent  un  de  leurs  Confeiilers  , 
K  4  fa- 
[4]  MS.  Thom.  30.  b.  Tard  Epift.Inedit. . 
M  MS.2W.  31. 


224  Hifloire  de  la  ^iformation 

I  532.  f^^'t^if      Chevalier  TarJillArd     q*  ' 
Orb£.        à  Orbe,  &  de  fon  autorité 
fît  foi  tir  de  prifon  le  Vicaire  (4). 

Cette  communion  d'Eglife  exci 
toit  de  tems  en  terr>s  quelque  trou 
ble  entre  les   deux   partis  ,  ce 
pourquoi  les  Bernois,  pour  y  re 
médier,  &  mettre  la  paix,  écri 
virent  aux  Fribourgeois  ,  qui" 
trouvoient  à  propos  que  les  Réfor 
mez  &  les    Catholiques  eulTen 
chacuns  une  Eglife  feparée ,  afi 
qu'ils  n'euffent  plus  rien  à  parta 
ger  enlemble  \   &  envoyant  des 
Députez  à  Orbe  5  &  à  Granfon 
le  12,  d'Avril, ils  leur  recommandè- 
rent cette  affaire;  mais  on  ne  put 
^        rien  conclurre(/'). 

Le  Balliâge  de  Granfon  manquoic 
.de  Minières  5  pour  fervir  lesEgli- 
fes,  qui  embraffoient  la  Reforma- 
tion, Les  Seigneurs  de  Berne  C" 
élurent  4.  tout  à  la  fois^  le  JVlard' 
p  Juillets  favoir,  un  pour  Graii- 
Nou-  fou  y  Gy  Se  Fy  :  un  pour  Aioutagny^ 
veaux    rugelle  3c  I\cve!le  :   le   3e.  pour 

le  Eal-  & 
liage. 


j      de  la  SaiJJèLw.         22  S 

&  le  4^.  ^om Concife^.  Le  même  1  532'. 
jour  ils  donnèrent  avis  dî  cetteGRAN^ 
Eier<flio.n  à    Guillaume  Farel ,    qui  ^  o  n. 
étoit  alors  à  Pvlorat,  avec  ordre  de 
fc  trouver  à  Granfon  le  Vendredi 
fuivant,  pour  y  examiner  ces  4. 
Minières  i  conjointement  avec  le 
Miniftre  de  Granfon  >  &  en  pré- 
fcnce  du  Baillif  (a),.   Comme  ces 
Miniflfcs   ne  font   pas    nommez  ' 
dans  la  Lettre  des   Seigneurs  de 
Berne ,  il  y  a  beaucoup  d'appa- 
rence que  celui  de  Granfon  5  donc 
ils  y  parlent ,  étoit  Jean  le  Comte^ 
qui  vint  à  Granfon  cette  annéc-là, 
&  qui  y  furPafteur  jufqu  a  fa  mort. 
Il  a  laifTé  un  Journal  abrégé  de  fes 
travaux  ,  d'où  j'ai  tiré  ce  qui  fuie. 
Jean  le  Comte  naquit  en  Pi- H^^ojrc 
cardie  >  Tan  1 500.  fon  Père  éroit  Coli/tl 
Sébafïien  le  Comte  ^  de  la  Croix  >  Gen- 
til -  Homme  Picard  ,  natif  à'Eta- 
fies  ;  ^  fa  M  ère  AÏAïie  De  Le  Oiâen 
auffi  Femme  de  qualité.    Dans  fa 
jeuneffe  >  âgé  feulement  de  22.  ans 
il  fut  à  Meaux  y  t  auprès  de  G/ii/- t  L'an 
iaume  Ericonmt  ^  Evêque  de  cette 
K  5  Villc- 

U)  Epid.  inédit.  K/r.  N.  XXI. 

^  Le  Miniftrc  dcConcife  s'appclloicPiE 


226  Hijloirc  de  la  Ke format  ion 

1-532.  Villï.  là  5  avec  "jaques  h  Fevre ,  fon 
j.  L  E  Compati iotc  &  Ion  Précepteur  > 
CoiMTE.  ^yec  Guillaume  Fard  ,  &  deux  au- 
tres Théologiens  5  qui  tous  en- 
femble  prêchoient  ia  pure  Doiflri- 
ne  de  l'Evangik,  fous  les  aufpi- 
ces  &  par  l'autorité  de  ce  Prélat  y 
&  furent  ainfi  les  premiers  >  qui 
travaillèrent  en  France  à  la  Ré- 
formatirn  de  VE^lik»  Mais  Ja 
perfécution  ,  qui  furvint  bien-tôt 
après,  difTîpa  cette  fainte  &  fa» 
vante  ^  e  i  e  Compagnie.  Eriçon^ 
71  î  perdic  coi-nige  ,  5c  fe  retradla  *. 
'Cudl  F^rcl  fe  retira  en  Suiffe  ,  com- 
me on  la  dit  ailleurs  t.  J^^^n  le 
Comte  fe  réfugia  a'/ec  Jaques  le  Fe* 
*vre  }  aupièo  de  Marguerite. 
Rtine  de  Aavare  4-«  Dans  la 
fuite  rAnjrale  de  Banmvet  le  de- 
manda 

B  E  z  E  H^/l.  des  E^l,  Réf.  de  France 
Tom.I.  p. 
t  Voy.  le  Tom.l.  âl'an  1^24.  &  1^2.5. 

4- Marguerite  de  Valois, 
Sœur  unique  de  Tranpla  1.  fut  mariée 
en  premières  noces  l'an  i  ^09.  a  Char- 
les Duc  (^Alenfon  ,  &  en  fécondes 
noces  l'an  i  ^2,7.  â  Henri  D'A  l  b  r  e  t. 
Roi  de  Navarre.  Cette  Princefîe  étoit 
favante  ,  &  aimoit  les  gens  de  Letrres. 
Elle  parut  ,  dans  les  commenccmcas 
avoir  de  bons  Sentimens  pour  la  Réfor- 
mation j  nuis  dans  la  fuite  elle  changea. 


nanda  pour  Précepreur  des  trois  j  532 
Fils  y  qu  elle  avoir  eu  de  l'Amiral  j.  ^  ^ 
on  premier  Mari.  Après  qu'il  eut  Go  Mrs 
exercé  quelque  rems  cet  emploi  > 
omiiie  il  étoit  à  Paris,  quelques 
)ofleurs  fidèles  jertéreiit  les  yeux 
'ur  lui  5  pour  l'envoyer  travailler, 
à  la  Réformarion  du  Canton  de 
erne ,  &  ailleurs.     Il  y  réfifta 
abord ,  mais  il  céda  enfin  aux 
fiances  5  qui  lui  en  furent  faites 
ar  plufieurs  Réformez  3  qui  étoieni 
la  Cour.    Ils  lui  donnèrent  de: 
ettres  de  recommandation  j  adrel' 
ees  à  FaycI  3c  à  Alarcouit  :  ainfi  i 
uitâ  fon   Pays  ,   pour  n'y  re- 
tourner jamais,    il  pafla  à  Lyon  > 
&  après  bien  des  dangers  ,  il  ar- 
riva à  Granfbn  à  la  Foire  de  Mars, 
ii  ne  s'y  arrêta  pas  ,  mais  il  alla 
à  Neuchatel  trouver  Marcourt ,  fon 
ancien  ami  3  qui  fuc  fort  réjoui  par 
les  Lettres  qu'il  avoir  apportévS  de 
Paris  ,  auffi-bien  que  Farel ,  qu'il 
aila  trouver  à  Morat.     De  -  là  ih 
fut  à  Berne,  où  il  fe  fit  connoître 
li  LL.  EE.  qui  rétablirent  Miniftrc 
de  Granfon,    Il  y  prêcha  dès  la 
Pentecôte  3  &  réforma  quelques 
Eglifcs  de  ce  Balliagc 

K  6  L'an 


228  Hijloîre  de  la  i\éfor:72aîion 
1532,     L'an  1554.  il  quitta  FEglife  de 
J.  L  E  Granfon  5 'pour  paifer  à  celle  d« 
Oj^nît E  Romainmotier.    L'an  1558.*  LL." 
Novernb!  EE.  de  Beme  lui  ordonnèrent  d'al 
1er  à  Lanfmne,  exercer  la  ProfeC 
fion  de  la  Lingue  Hébraïque  pai 
intérim  ,    à  la  place  de  Rajmom 
Merlin  ,  en  attendant  qu'on  eût  ui 
autre  Profeffeur.     L'an  15(^7-  lî 
ClâfTe  d'Orbe  &:  de  Granfon  le  rc 
demanda  ,  pour  être  un  fccondi 
fois  Pafteur  de  TEglilede  Granfon 
Il  y  retourna  le  20.  Juillet,  &  y  vé 
eut  encore  5.  ans.    Ses  enfans,  qu 
ont  continué  Ton  Journal  >  noui 
apprennent  qu'il   mourut  le  25 
Juillet  1572.  âge  de  72.  ans, 
fa  Femme ,  Adadelaine  de  Afart'tgn 
'   Fan  1581.  Il  écrivit  divers  ouvr 
ges  de  Théologie  5  mais  ils  n'o 
jamais  été  imprimez.    Il  s'en  fal 
peu,  qu'il   ne   vint  à  bout  un 
fois  ,  de  réformeï  la  Ville  de  Fri 
bourgs  par  l'accès  qu'il  y  avoit  a 
près  des  principaux  Seigneurs  di 
TErat:  ce  qui  lui  donna  occafio 
de  dédier  à  LL.  EE.  de  Fribourj 
un  Livre  fort  étendu  ,  (  qu'il  avoir 
compofé  fous  ce  titre  >  Les  Démé- 
gories)  dti  Comte  d'Eftapks  ,  fur  tous 

les 


de  la  Suife.  Liv.lX,  22? 

les  Dimanches  de  lan ,  les  Sacrerr.ens^  1  5  3  2 
le  Afaruge  ^  &  Us  Tiép.iJfJs ,  écrit  Gr  a  m 
de  (à  main,  avec  une  Epicre  dédi-  ^  °  ^• 
catc ire  , .  datée  du  3 1 .  Juillet  1 549. 
Il  nous  apprend  dans  cette  Epitre, 
que  quand  il  arriva  dans  le  Pays 
de  Vaud  ,  la  divifion ,  que  caufoir 
la  difrèrence  de  Religion  ,  dans  les 
Balliages  d'Orbe  &  de  Granfon  > 
y  produifoit  de  violentes  que- 
relles >  même  entre  les  plus  pro- 
ches y  qu'elles  aboutifloicnt  fou- 
vent  à  des  batteries  8c  à  des 
meurtres,  jufqaes  là  qu'on  vit  à 
Orbe  un  Frère  tuër  fon  Frère,  6c 
de  même  àBonvillars.  J.  le  Comte 
laiffa  trois  Fils  ,  qui  furent  tous 
trois  Minières  :  &  fa  poftérité  à 
toujours  fourni  des  Miniftres  à 
l'Eglile,  de  Pére  en  Fils,  fans  in- 
terruption 5  jufqu'à  prèfcnr. 

Mais  pour  revenir  à  fes  travaux 
de  Granfon,  il  eut  la  confolation 
d'y  gagner,  dans  quelques  mois, 
un  afl^jz  bon  nombre  deperfonnes> 
deforte  ,  que  le  Dimajîchc  après 
Nocl ,  il  y  célébra  la  prémiére  Cè- 
ne paifiblement ,  avec  70.  perfon- 
nés  d'âge,  outre  quelque  jcu- 
iielfc  (4).  Dans 
W  Mcmoir.  de  J.  le  Cowtc.  - 


'  2  3*0  Hlftoire  de  la  K.éformaîîoH 

Î552.  Dans  l'été  ds  cette  année  on 
Gr  A  N-  s'apperçur  que  les  Moines  de  Gran- 
soN.  tiavailloient  à  emporter  hors^ 

du  Pays  les  biens  de  leurs  Cou- 
vens  3  c'eft  pourquoi  ils  furent  mis 
en  prilon  ,  par  ordre  des  Seigneurs 
de  Berne  {a). 

La  Paroifle  d'Tmnan  embraffa  lâ 
Réformation  à    la   pluraliré  des 
voix  5  dans  le  mois  d'Août  j  après 
quoi  les  Payfans   purgèrent  leur 
Eglife  d'Images  &  d'Autels.  En- 
fuite  ,  accompagnez  de  Fard  5  ils 
pafférent  le  Lac,  allèrent  à  Gran- 
fbn>  &  y  renvcrfércnt  quelques 
Autels  &c  quelques  Images  3  mais 
ils  furent  mis  en  prifon ,  &  dére- 
Trou-  nus  affez  long-tems.    Leur  affaire 
bles  à   ayant  été  examinée ,  il  fut  jugé,  le 
^Tol-  ^'  Septembre  ,  qu'ils  avoient  eu 
nsnj,     droit  de  faire  cda  à  Tvonan  ,  mais 
non  à  Granfon  (/;).    A  Otincns  les 
Réformez  firent  la   même  chofe  > 
_    renverférent  les  Images  &  les  Au- 
tels.   Les  Catholiques  ,   pour  (e 
vanger  ,   prirent  le  tems  que  les 
autres  étoient  au  Sermon,  &  en- 
trant dans  le  Temple  en  furie >  al-' 
Jérent  renveifer  la  Chaire  avec  le 

Minif- 

{nb)  MS.  Am^.  125.  b.  B.  Injîr.  15^8. 


de  la  Smjfe.  Liv.  X.  2?! 

Miniftre  qui  prêchoir.  Les  uns  &  [  J  J2. 
les  aunes  furent  punis  {a)  ,  com-  Gr  a  \  - 
me  ils  le  méfitoienr.  son  & 

1;  Il  y  eut  au/n  du  trouble  à  Con-  ^  ^  ^'  * 
^ife  entre  ks  Reformez  6c  les  Ca^ 
tholiques,  en  ce  que  la  pluralité 
des  voix  ayant  éré  pour  la  Mefle 
de  do.  contre  2 les  Réformez  pré- 
tendoient  qu'on  n  avoit  pas  éré  en 
droit  de  faire  une  telle  décifion  , 
foutenant  qu'on  en  avoit  déjà  fait 
une  auparavant  ,  où  la  pluralité 
avoit  été  en  faveur  de  la  Réfor-- 
mation.  Mais  comme  ils  ne  pu- 
rent pas  le  prouver,  les  Seigneurs 
de  Be  ne  confentircnt ,  que  les  Au- 
tels y  fuflent  relevez j  avec  cette 
feferve  expreffe ,  que  chacun  au- 
roir  toujours  la  liberté  d'écouter  la 
Parole  de  Dieu.  Enfin  ils  tinrent 
main  de  bonne  foi  ,  à  faire  obfer- 
vcr  tous  l:s  Articles  de  l'Ordon- 
nance 3  publiée  au  commencement 
de  l'année:  mais  aulTi  ils  vouloient 
que  les  Catholiques  obfervaffent  y 
de  leur  côeé,les  articles  qui  étoienî 
en  faveur  de  la  Réforma  ion.  Ceft 
pourquoi  comme  le:.  Fribourgeois 
îbuhaitoient  ^uc  les  ParoilTeb  de 

0»)  Idem. 


232  Hijloire  de  la  P^éformation 

I  532*  Champagne  ^  ^Onnens ,  cjui- a  voient 
Gp  AN-  embraiïe  laRcforn.ation,  fe  foumif». 

^  fen:  à  ure  nouvelle  délibération, 
cisE.        Bernois  le  réfuférent  {a). 

Il  s'éleva  une  autre,  difiiculté  en- 
tre Berne  &  Fribourg,  au  fujer  de 
l'Article  de  leur  Ordonnance  ,  qui 
portait  >  Que  dans  une  Paroifie  a 
où  les  Catholiques  feroient  le  plus 
grand  nombre,  les  Réformez  pour- 
roient  néanmoins  entendre  tou- 
jours la  Parole  de  Dieu,  Les  Fri- 
bourgeois  ne  vculoient  pas  que 
dans  les  lieux  où  .il  n'y  avoit  que 
deux  ou  trois  Réformez  ,  ils  fuf- 
fent  compris  au  bénéfice  de  cette 
Ordonnance.  Les  Bernois  au  con- 
traire foutinrent  j  que  ces  Réfor- 
mez? dévoient  y  être  compris;  & 
avoir  la  liberté  de  faire  venir  un 
Minidre  pour  leur  prêcher,  pour* 
vu  que  tout  cela  fe  fît  modeftc-? 
ment('^). 

7rw.hks  li  y  eut  cette  année  de  grands 
à  caufe  troubles  à  Payeruc ,  à  caufê  de  la 
de  aRe- j^gjjgjQj^^  Un  Miniftre  ,  dont  je 
Payer-  "  ^1  pas  pu  découvrir  le  nom,  y 
Kt.      prêcha  au  commencement  duPrin- 

tems> 

{a)  MS.  Amp.  114.  B.  hiflr.  16O. 
(^)  MS.  Am\  3:15  b,D.  1^8. 


de  la  Suijfe.  L I  v.  X.     2  33 

tems,  &  y  fie  du  frûit.  Divers  ÎS 
Bourgeois  embraflerent  la  Réfor- 
mation.  Mais  les  Catholiques  y 
oubliant  la  promefle  qu'ils  avoient 
faite  auparavant  aux  Seigneurs  de 
Berne ,  de  permettre  qu'on  prê* 
chat  librement  au  milieu  d'eux  la 
Parole  de  Dieu  ,  ne  laiflTérent  pas 
long-tems  en  repos  le  Miniftre,  ni 
leurs  Concitoyens.  Ils  commen- 
cèrent par  défendre  au  Miniftre  de 
prêcher  j  &;  comme  il  continua 
nonobftant  la  défenfe  >  ils  voulu- 
rent le  chaffer.  En  même  tems 
ils  défendirent  au  Peuple  ,  d'aller 
écouter  le  Miniftre,  6c  de  le  favo- 
ri/er,  fous  peine  de  prifon  &  d'au- 
tres châtimens.  Enfin  3  par  route 
forte  de  menaces  i  d'infultes  ,  & 
de  mauvais  traitemensj  qu'ils  fai*' 
foi<;nt  aux  Réformez  ,  ils  s'elFor- 
çcient  de  les  f^ire  rentrer  dans  le 
Icin  de  TEglife  Romaine  (^). 

Le  bruit  de  ces  'troubles  s'étant 
répandu  dans  le  voifinnge,  le  Ccn- 
fcii  de  Adoudon  députa  à  Payerne 
le  Gouverneur  du  Pays  de  Vaud, 
avec  deux  Confeillcrs  5  environ  le 

tems 


(0  MS.  Amp,  11^. 


234  Hifloire  de  la  Réformât hn 

1532.  tems  de  Pâques  [a)  ^  avec  ordre 
Payer-  d'interpofer  leurs  bons  offices,  pour 
y  rétablir  la  paix    &  le  calme: 
mais  les  (oins  de  ces  Députez  fu- 
rent inutiles  >  &  ils  s'en  retourné- 
péputa-  rent  fans  avoir  rien  fait.  Les  trou- 
V^"^^^bles  continuèrent  à  Payerne  ,  & 
pour  ré- y    mit  en  prifon  pluiieurs 
tablir  le  Bourgeois ,  pour  avoir  embrafle  la 
caJme  à  Réformation.   Le  2  5éme.  Avril ,  le 
'^j>erae,  (^Qfif^iidejvioudon  y  renvoya  d  au- 
tres Députezj  (fon  Châtelain  Jaques 
CERjAT5avecdeuxCon/êillers,)pour 
tâcher  d'appaifer  les  Efprits  >  &  d'y 
ramener  la  tranquilicé  (ù).  Les 
Bernois  ayant  reçu  avis  de  ces 
troubles  >  penfoient  auffi  à  y  met- 
tre ordre,  iorfque  le  Duc  de  Sa- 
voye  leur  envoya  un  Député,  pour 
les  prier  >  P.  de  ne  pas  fe  mêler  de 
fes  Sujets  j  de  leur  laiflcr  obferver 
les  Edics ,  qu'il  avoit  publiez  en 
matière  de  Religion  dans  Tes  Etats  y 
de  dépofer  ou  ôrer  le  Mi'.iftre  de 
Payerne    8d  IP.  pour  fe  plaindre 
de  quelques  fédicieux  de  Payerne, 
qui  difoient  hautement  ,   que  le 
Ducn'avoit  iien  à  leur  comman- 

derj 

Ça)  Regîtr.  deMoudon^. 
ib)  Ibid.. 


de  la  SuiJJe.  LiV.  X.  235 

er ,  &  qu'ils  n'étoient  pas  fes  15  32, 
ujets.  Les  Bernois  répondirent  au  Payer- 
ouverneur  de  Vai/d  5  qui  éroit^E» 
'un  des  Députez  :  »  Que  leur  in- 
tention n'étoit  point  de  déroger 
en  aucune  manière  aux  droits 
»>  dt;  S.  A.  fur  Tes  Sujets  ,  ni  à  fa 
f,  Juïifdi(fbion  ;  Qu2^x  contraire  ils 
>,  les   exhortcroient    plutôt ,  & 
entr'aurres  ceux  de  Payerne  5  à 
>9  rendre  à  leur  Seigneur  tout  ce 
»  qu'ils  lui  dévoient ,   dans  les 
yj  chofes  qui  regardoient  le  Corps 
y,  bc  les  biens  temporels.  Mais 
>,  pour  ce  qui  regardoit  la  conit 
cience  &  la  Religion,  ils  prioicnt 
le  Duc  ,  &  tous  autres  5  de  laif- 
fer  en    paix  les  Réformez  de 
^  P?.yerne ,  &  tous  ceux  de  fes  Su- 
jets  5  qui  foùhaitoient  d'enrendre 
la  Parole  de  Dieu,  &  de  ne  les 
>,  point  il  qi:iécer  pour  ce  fu jet  j 
afin  qu'il  n'en  arrivât  point  de 
yy  défordre  j  car  s'il  les  perfécutoit 
yy  pour  caufe    de   Religion  ,  ils 
j>,  prendi oient    en  main    la  caufc 
„  de  leurs  Alliez  de  Payerne,  avec 
»  q'  I    ils  avoicnt    une  Alliance 
yy  beaucoi  p  plus  ancienne,  qu'avec 
yy  la  Maifon  de  Savoye  (4) 

(4)  MS.  Amp.  l  c.  Le 


2  36  Hïftûire  de  la  BJfûrmation 

1532.     Le  même  jour  >  (  23.  M^y  ,)ies 
Payer-  Bernois  envoyèrent  à  Paytrne  des 
Députez  pour  renouveller  l'Allian- 
Alliance  ce.  Ces  Dépurez  repréfentérent  aux 
veU^e    P^y^^^^^s  '       Négociation  du  Dé- 
entre    P^^^     ^-  Savoye,  6c  la  Ré- 
Bcrne  &  ponfe  qu'ils  lui  avoient  faite,  les 
Fayeme,  exhortant  à  obéir  au  Duc  5  en  tout 
ce  qu'ils  lui  dévoient.  En  même 
tems  ils  fe  plaignirent ,  de  ce  qu'ils 
avoient  tenu  fi  peu  de  compte  des 
promtffes  3   qu'ils   avoient  faites 
aux  Seigneurs  de  Berne,  puis  qu'ils 
perfécutoient  les  Réformez  &  vou- 
loient  chafler  leur  Miniftre.  Ils  les 
exhortèrent  donc  fortement  à  laif- 
fer  en  paix  lesRéformez  d  entr'eux 
6c  leur  Miniftre.    Cette  repréfen- 
tation  parut  produire  quelque  bon 
effet.  Les  Payernois  promirent  de 
nouveau  aux  Seigneurs  de  Berne 
tout  ce  qu'ils  fouhaitoient  :  après 
quoi  l/Alliance  fut  renouvellée  6c 
jurée  de  part  &  d'autre  [a). 

Mais  toutes  ces  promelfes  n'é- 
toient  qu'un  leurre  pour  obtenir  de 
la  Ville  de  Berne  ,  la  continuation 
de  l'Alliance  i  car  bien-tôt  après  le 
départ  des  Députez ,  on  recom- 
mença 

(^)  .MS.  Am^\  U^.  125.  Injîr.  16<J.. 


deU  Suîffe.  Lï  V,  X.  237 

ença,  à  perfécuter   les  Réfor-  1532; 
ez,  à  les  vexer,  à  les  infulter,  Payer- 
aies  mettre  même  en  prifon(^). 
y  avok  alors  à  Payerne  un  Cor- 
elier>  qui  étoic  Réformé  dans  le 
ur,  &  qui  prêchoit  vigoureufe- 
cnt   contre    l'Eglife  Romaine, 
ais   quand  le  Duc  fut  venu  à 
ayerne  ,  le  Dimanche  1 6.  Juin  = 
fe  retira  avec  un  autre  Corde- 
er,  venu  de  Laufanne,  qui  étoit 
uffi  Réforn  é  ib\  Les  Bernois  en- 
oyérent  de  nouveaux  Députez ,  à 
ayerne  pour  leur  reprocher  leur 
anquement  de  parole  ;  mais  ils 
rent  pour  réponfe  s        le  Con- 
l  ne  leur  avoir  promis  autre  cho-  traite 
,  que  de  lailTer  prêcher  l'Evan-  les  Ré- 
ile  comme  on  Tavoit  prêché  dans  formez, 
î  tems  anciens.  C'êtoit  une  mo-  ^^^^ 
ueric  toute  pure  :  AufTi  les  Ber-  promef- 
ois  ne  furent-ils  pas  contens  d*u- 
pareille  réponfe.     Ils  renvoyé- 
cnt  donc  encore  d'autres  Dépu- 
5  le  ^i.  Août  ,  pour  repréfen- 
à  toute  la  Bourgeoific:     Ou  on 
ne   vouloit    pas  les  obliger  à 
quitter  leur  ancienne  Religion  y 

ni 

AmpA.c. 
Ib)  PUntin.  Hjft.  MSC.  del^w/. 


23S  Hifloire  de  la  Kéformation 

î  532.  "  ^  abolir  la  Mefle  ,  ni  hs  au- 
PAYER-^jtres  Cérémonies  Papirtiques  j 
Qu'on  ne  demandoit  d'eux  au- 
35  tre  chofe  >  finon  la  liberté  de 
,5  Confcience>  pour  ceux  qui  fou- 
3>  hâitoient  d'entendre  la  Parole  de 
3,  Dieu  5  &  pour  ceux  qiii  la  leur 
3>  prêchoient  j  Qfœ  c'étoit  à  cette 
35  condition  ,  &  fous  cette  promef- 
3>fe,  que  les  Bernois  avoient  re- 
j>  nouvelle  deux  fois  avec  eux 
5j  leur  Alliance  (4), 5.  Cette  nou- 
velle DéputatioQ  ne  produifit  pas 
de  meilleurs  effets  que  la  précé- 
dente. On  renvoya  les  Députez 
avec  de  belles  paroles  5  mais  on 
continua  à  tourmenter  les  Réfor- 
mez comme  auparavant  ,  ôc  on 
leur  ôta  même  leur  Miniftre.  Ce 
fut  dans  cette  occafion  que  Viret, 
pour  faire  plaifir  à  quelques  Ré- 
former alla  prêcher  à  Payerne  ; 
(  c'étoit  vers  la  fin  de  Septem- 
bre.) D'abord  on  ne  voulut  point 
lui  permettre  de  prêcher  dans  les 
Temples.  Il  fe  mit  donc  à  prê- 
cher dans  les  Maifons.  Après  qu'il 
y  eut  été  pendant  quatre  ou  cinq 
femaines,  il  s'y  excita  un  tumulte 

contre 

(a)  B,  Infir.  2,13.  MS.  Amj^.  l  c. 


L  de  la  Suif e.  h iwX.  239 
'contre  lui  >  qui  Tobligea  d'en  for-  i  532^ 
tir,  de  fcrte  qu'il  perdit  prefque  p^yeb.- 
courage  d'y  travailler  {a).  Cepen-  ne. 
dant; encouragé  par  de  bonnes  aa^es^ 
il  y  retoui'na,  ôcy  demeura  jiifqa  ao 
mois  de  Janvier  fuivant  ,  difpu- 
rant  prefque  tous  les  jours  avec 
Quelqu'un.  Les  Moines  de  TAb- 
baye  ,  craignant  que  cette  nouvelle 
Do£lriiie  n'aboutir  à  les  dépouiller 
de  leurs  biens  ,  fe  mirent  (ous  la 
protection  des  Fribourgeois  ,  qui 
leur  envoyèrent  un  de  leurs  Con- 
feillers ,  nommé  Chriftopble  Pavil^ 
'.ird  3  pour  avoir  foin  d'eux  &  de 
leur  maifon  {b). 

Dans  le  même  rems  F  a  r  e  l  de-  F  a  r  e  l 
neuroit  à  Morat  ,   où  il  écrivit  ^^^^^j^^^^ 
ane  belle  Lettre  Paflorale y  mFïm-  trePafîo^ 
^vois  5  datée  de  cette  Ville,  &  du  î-o/?. 
i<5.  Juillet.  Elle  eft  adreffée  aux 
L^iêres  amateurs  de  la  S,  Parole  de 
Dieu  y  qui  étaient  dans  Coppn  ffiGn  > 
apparemment  en  France.)    il  les 
exhorte  à  la  patience,  à  la  conC- 
tance  ,  à  la  fermeté,  &  à  ne  s'aC- 

furer 

CO  Inter  £///?.  hmlU,  Farel. 


W  MS.  Thom,  53, 


240  Ht fl cire  de  la  l^éformation 

i532.furer  que  fur  la  protedion  du 
Seigneur  {a). 
Régie-  N'oublions  pas  ici  de  remarquer, 
mens  à  la  louange  de  la  Ville  de  Vcvaj^ 
Je  V  £-  ^^'^^^^  fignala  dans  ces  tems  cor- 
y^AY.  rompus  &  déréglez  par  fon  zèle 
pour  le  rétâbliflêment  des  bonnes 
mœurs.  On  peut  juger  que  la  pef- 
te,  qui  ravageoic  alors  le  Pays, 
réveillant  dans  les  confciences  ,  la 
crainte  des  Jugemens  de  Dieu  ,  y 
pût  avoir  quelque  part.  Mais  toû- 
jours  furent-ils  bien  louables ,  de 
devenir  fages,à  Toccafion  des  fléaux 
de  Dieu.  Dès  Tan  1530.  le  Con- 
feil  fit  publier  un  ordre  aux  Fem- 
mes de  mauvaife  vie,  de  vuider 
la  Ville  dans  trois  fois  24,  heu- 
res ,  fous  peine  de  ^o*  fous  d'a- 
mende. Et  cette  année  1532.  ils  le 
renouvellérent  avec  plus  de  févé- 
rité  :  Ordonnant  a  ces  malheureu- 
fesj  de  fortir  dans  24.  lieuresjfous 
la  même  Amende.  Ils  firent  enco- 
re quelques  autres  Ordonnances 
d'une  bonne  &  Chrétienne  po- 
lice ,  par  exemple,  défenfe  de  jouër 
pendant  le  fervice  divin;  &  quel- 
ques autres  réglemens  de  cette  na- 
ture 

W  lurd  Epifu.  inédit.  K.  XXII. 


deUSuiiJe.  Liv.  X.  2M 

|Ure.    Ces  fortes    de   réglemens  j  532. 
)rouvent  la  vé  ité  de  ce  que  j'ai  Vevay-, 
.vancé  dans  mon  Difcours  préli- 
ninaire  >  Qm  les  Laïques  5  géné- 
alement   parlant  ,  étoient  plus 
lonnêres  gens  5  que  les  Eccléfiafti- 
lues  \  Voilà  des  Laïques  qui  chaf^ 
ent  de  leur  Ville  des  Femmes  de 
muvaife  vie  ,    pour  éloigner  le 
;rime  du  milieu  d'eux  5  pendant 
ju'à  4.  lieuës  de  là  j  dans  la  Ca- 
pitale du  Diocèfe,  dans  le  fein  du 
Sandluaire  Catholique,  je  veux  di- 
re à   Laufanne  3  les  Chanoines  & 
es  Religieux  vivoient  publique- 
ment dans  le  défordre,  fans  rete- 
nuë  &  fans  honte ,  avec  des  Fem- 
mes  débauchées,   nonobftant  les 
exhortations   que  les  Magiftrats 
leur  faifoient  faire,  de  changer  de 
îconduite  *. 

i]    Cette  année  le  Duc  de  Savoye  Le  Duc 
jvifita  le  Pays  de  Vaud  ,  qu'il  n'a-  Sa- 
uvoit  pas  vu  depuis  l'an  1523.  Il 
\y  fut  reçu  par  tout>  à  Laufanne  Pays  de 
h  même  3  avec  les  honneurs  dus  à  Vaud. 
jfon  rang.    Il  partit  à^hvïan  le  4. 
de  Juin  ,  &  alla  coucher  au  Châ- 
teau de  Chiliony  où  il  n'avoit  ja- 
*   Tom,  ir.  L  mais 

Voy.  ci-defTus  Liv.  V.  p.  533.  334. 


242  Hijloire  delaKéformation 

t  532.  ^^^^  encore  été.  Le  5e.  qui  étoit 
Voyage  "ri  Mecredi  5  il  alla  à  Vevay ,  où 
du  Duc  il  fut  reçu  par  450.  Soldats  ,  la 
^e''-^*"  plupart  habillez  de  neuf,  de  couleur 
V  A  u  D.  blanches  &  par  200.  jeunes  garçons* 
aufTi  la  plûpart  habillez  de  même 
couleur  portant  en  leurs  mains  des 
Croix  blanches,  &  criant  :  Vi  ve 
S  A  V  G  y  E.  La  Ville  de  Vcvay  em- 
prunta du  Château  de  Glerole  ,  qui 
appartenoit  à  TEvêque  de  Laufan- 
ne ,  dix  Canons  pour  faluër  leur 
Prince>  à  fon  entrée  >  &  à  fon  dé- 
part. LaBourgeoifie  des  deux  en- 
droits>  de  Fevay  &  de  hTour^lui  Bt 
préfcnt  enfembie  de  Cent  Ecus  d'or 
au  Soleil ,  avec  un  beau  Manteau 
de  Damas  blanc,  de  12.  aunes  s 
où  l'on  avoit  mis  12.  aunes  &c  de- 
mi de  franges  d'argent  j  à  fes  La- 
quais ,  de  I  o.  Ecus  d'or ,  &  fix  à 
fes  Ecuyers.  Cela  s'appelloit  la 
joyeufe  entrée^.  De  là  il  alla  au 
Pays  de  V  a  u  d  j  car  dans  ce  tems 
là  Fevay ,  &  tout  ce  qui  eft  à  l'O- 
rient du  Torrent  de  la  Févayfe,  étoit 
cenfé  dvL  Chablais  }  la  Vevayfe  fé- 
paroit  le  Chablais  d'avec  le  Pays 
de  Vaud.    On  croioit,  que  de  Vc- 

vay 


de  lu  Sttijfe.  Ll  V.  X.  243 
v^ây  le  Duc  iroit  droit  à  Moudon,  1532. 
qui  étoit  alors  la  Capitale  des  ter-  p^ys  ce 
res  qu'il  polTédoit  dans  le  Pays  de  V  a  u  d 
Vaud  5  &  le  fiége  ordinaire  des 
Etats  ;  mais  il  trouva  plus  à  pro- 
pos de  les  convoquer  à  A/orges,  ou 
il  fe  rendit  le  Jeudi  6^-  de  Juin. 
I    II  préfida  à  cette  Affembléej  ac-  Il  p^élî- 
conipagné  de  TArchevêque  de  Ta-  ^^^^/V^ 
rantatfe  ,  des  Evêques  de  Laufan-  pavs  Af- 
&  de  Beliejf  y   de  Fr  anç o  i s  (embkz 
DE  MartigueSj  Vicomte    de  ^ 
Luxembourg  y  du  Comte  de  G'r/yj^Vf, 
&  d'un  grand  Cortège  de  Noblef- 
fe  y  de  Savoy e  ,  du  Chablah  &  du 
Pays  de  Vaud.    Il  y  fut  parlé  de 
reparer  les  Places  fortes,   &  les  - 
bonnes  Villes  du  Pays  5  pour  le 
conferver  &  le  garentir  d'inva- 
fion.    On  y  fit  aufTi  des  plaintes 
contre  l'Evêque  6c  le  Chapitre  de 
Laufanne,  parceque  ces  Ecciéfiat 
tiques  refufoient  de  comparoître 
devant  les  Tribunaux  Séculiers  du 
Pays  5  pour  affaires  civiles  ,  quoi- 
que cela  fe  fût  autre-fois  pratiqué 
fans  difficulté  ,  &  qu'ils  ne  refu- 
faffent  pas  de  comparoître  devant 
les  Tribunaux  des  Terres  de  Ber- 
I   ne  &  de  Fribourg  :  ce  qui  fembloic 
L  z  abaiflcr 


244  Hijloïre  deU  RJfûfmtttîon 

i532.abaifrer  l'autorité  du  Duc.  L'E- 
Pays  de  vêque  de  Lau/ànne  ,  qui  étoit  pré- 
Vaud^-çj^j^  répondit.  Que  les  Eccléfiafii- 
que  fiétoient  point  Juridiciables  des 
Tribunaux  fécul'ms  y  &  qu'ils  avaient  ' 
€e  privilège:  Que  fi  par  hazard  les 
Eccléfiaftiqucs  s  étaient  fournis  aux 
Tribunaux  de  Mejjieurs  les  Alliez  > 
4es  Cantons  ,  c  étoit  parce  qu'on  y 
trouvait  mcï.leure  juftice  >  &  plus 
brieve ,  que  dans  les  autres. 

Le  Duc  remit  cette  affaire  à  un 
autre  tems  ,  pour  s'en  informer 
-cxaflement,  &  y  mettre  ordre.  De 
Marges  il  retourna  à  Vevay,  &  le 
Dimanche  fuivant  il  alla  dincr  chez 
le  Baron  du  Chaielard  ,  où  il  fut 
reçu  avec  tous  les  honneurs  dûs 
à  fa  dignité^  &  retourna  coucher 
à  Vevay.  Le  Jeudi  fuivant  >  ig. 
Juin,  il  alla  diner  au  Château 
d'Oran ,  qui  appartenoit  au  Comte 
de  Gruyère. 

Il  prit  de  là  le  chemin  de  Ra- 
mant y  où  il  s'arrêta  jufqu'au  Diman- 
che ide.  qu'il  alla  à  Payerne.  Le 
Mardi  1 8.  il  alla  vifiter  Cudrefin  :  &  ' 
le  Mecredi  ip.  il  fut  à  Eftavuyer» 
-Dans  toutes  ces  Villes ,  il  fut  reçu 
avec  de  grands  honneurs  &  de 

grandes 


dclaSuife.  Liv.  X.  245 

randes  démonftrations  de  joye  [a]»  I  532. 

La  Pefte  étoit  alors  à  YvcrdunjV\Ys  de 
zh  l'empêcha  d'y  aller  (h).     Le  V  a  u  i> 
3udi  20^i]prit  la  route  Lmens 
a  l'Evêque  le  reçût  dans  fon  Châ- 
;au,  au  bruit  du  Canon.    Le  foir 

alla  à  A/oudon,  où  il  coucha, 
a  Ville  lui  fit  préfent  de  dix  flam- 
;aux  de  cire  &  de  8.  pots  d'Hy- 
Dcras  )    pour  rafraichilTement. 
eorge  Demierre  >  qui  en  étoit  Syn- 
I  c,  emprunta  30.  florins  ,  au  nom 
\)  la  Ville  ,  pour  fournir  à  tette 
<;penfe  [c).     Le  Vendredi  21. 
lin ,  le  Duc  vint  à  Laufanne  ,  & 
;  coucha.     Le  Mécredi  aupara- 
i  u,  le  Confeil  des  LX.  avoit  arrêté 
<:  ne  lui  faire  aucune  réception  j 
jais  à  la  follicitation  deTEvéque, 
ti  lui  fie  de  grands  honneurs.  Plus 
r  deux  Cens  Arquebuziers  de  la 
'  lie  lui  allèrent  au  devant  >  non- 
niant  la  pluye  ;  &  le  lendemain 
jrs  de  deux  Mille  Hommes,  tant 
i  Laufanne,  que  des  4.  Paroifles 

<  la  /^4«.v  ,  l'accompngnérent  jufl 

<  à  Fidj  y  avec  b  -aucoup  de  No- 

L  3  blelTe, 

)  VUntln  Hift.  MSC.  àQ  laufunne, 

)  MS.  Thom.  31. 

J  Rcgîtr.  de  Moudon, 

II 


246  Hijloire  de  la  K.é formation 

1532.  blelTc,  8c  TEvêque  même  de  Lau^ 
fanne  {a). 

7  Réfle-  Princes  font  rarement  des 

xion  fur  promenades  jufqu  à  l'extrémité  de 
^e^ïu    ^"^^    Etats  ,    fans   une  grande 
Duc  de  néccflité  >  ou  fans  machiner  quel- 
Savoye.  que  deffein  important.    Il  y  àvoit 
neuf  ans  que  le  Duc  de  Savoye 
n'avoit  été  dans  le  Pays  de  Vaud. 
Il  y  vint  dans  un  tems  que  le 
Nonce  du  Pape  travailloit  à  lier 
une  Ligue  des  Cantons  Catholi- 
ques 3  avec  le  Pape  &  l'Empereur; 
contre  les  Réformez.    Cette  pro- 
menade  du  Duc,  &  les  démarche?  1 
de  i'Evêque  de  Laufanne  me  foni  j 
juger,  qu'il  y  avoir  elfe£livemeni 
quelque  Conjuration  de  cette  na 
îure  fur  le  tapis.    D'abord  que  I 
Duc  fut  arrivé  à  Fevay  ,  l'Evêqu 
y  alla  pour  conférer  avec  lui.  E 
il  envoya  un  Commiffaire  âCuilh 
pour   ordonner  aux  gens  de 
Faux,  de  lever  du  monde,   qu  1 
vouloit  envoyer  à  Fribourg ,  afi)  I 
difoit-il ,  de  maintenir  la  Foi  coi 
îre  les  Luthériens  *.     Mais  toi 
ces  projets  des  Catholiques  s\ 
allèrent  en  fumée  ,    par  l'endro 
{a)  Man.  de  Lauf.  p.  382..  quV 


^  Aixh.  de  VuUîte^ 


de  U  Sui/Je.  L I V .  X.  247 

]u  on  a  *  remarqué  ,  &  la  bonne  i  5320 
Providence  de  Dieu  ,  qui  veilloic 
Dour  les   Réformez  ,  diiïipa  les 
:omplots  de  leurs  ennemis. 

VII.  On  a  vu  ci  -  devant  les  Soi  eux 
■nouvemensj  que  les  Seigneurs  de^^- 
Jîerne  s'étoient  donnés  pendant 
:etre  année  1532.  en  faveur  des 
£glifes  infortunées  de  Brangartc 
le  de  Aiellingue,  lis  ne  s'employé- 
ent  pas  moins  en  faveur  de  celle 
le  Soleurre  ,  mais  avec  aufTi  peu  de 
iiccès.  Le  parti  Catholique  étoit 
:ievenu  fi  fier,  depuis  fa  vidoire 
ie  Cappel  qu'il  étoit  entièrement 
mtrairable. 

Il  y  avoit  déjà  quelque  tems  > 
:omme  on  la  vu  ci  - deffus  t  que 
l'Eglife  Réformée  de  Soleurre  y  étoit 
fur  le  penchant  de  fa  ruine,  trou- 
blée par  les  Anabaptiftes  ,  brouil- 
lée par  les  divifions  de  fes  propres 
iMinillres ,  &  vivement  attaqués 
par  les  Citholiques  leurs  ennemis 
commuiis  ;  qui  donnoient  entrée 
dans  leur  Vaille  aux  Anabaptilles  , 
afin  de  les  détruire  les  uns  par 
les  autres.  Mais  ce  fût  cette  an* 
L  4  nce> 

^  Voyez  ci-defllis  Ch.  IV.  p.  1Q2. 

t  Liv.  YIII.  Ch.  L 


248  Hijioire  de  La  Keformatiou 

1532.  née  5  qu'elle  eût  à  foutenir  le  choc 
le  plus  rode  ,  qui  la  conduifi:  en- 
fin à  fa  ruine  l'année  fuivante, 
Vropofi-     Les  V.  Cantons  zèlez  Catholi- 
îhn^sxap'  ques  commencèrent  la  Tragédie, 
des   V.  ^^"^        Diète,  afTemblée  à  Bade 
Cantons  au  Printems  5  ils  débutèrent  par 
à  la  Vil-  demander  à  la  Ville  de  Sole  une  , 
ieiirre  °  l'une  ou  Fautre  dz  ces  trois  chofes  ; 
ou  qu'elle  leur  payât  mille  Ecus  , 
pour  les  frais  de  la  guerre  ;  ou 
qu'elle  congédiât   fon    Minière , 
Philippe  Grotz  h  ou  enfin  ,  qu'elle 
fe  foûmit  à  un  Jugement  de  droit, 
pour  avoir  aflifté  les  Bernois  con- 
tr'eux  dans  la  guerre  de  Cappel.  Les 
Bernois  trouvèrent  cette  conduite 
-fort  étrange  :  Se  comme  leur  hon- 
neur paroifToit  intèrefle  dans  cette 
affaire,  (puifque  c'étoit  à  l'occalion 
du  fecours  qu'on  leur  avoir  donné, 
que  les  V.  Cantons  h'ifoicnt  cette 
querelle  à  ceux  de  Soleurre  5  )  ils 
*  Le  15-  envoièrent  *  deux  Députez  à  leurs 
'     Alliez  de  Soleurre  ,    avec  ordre 
de  leur  dire  :      ^^ils  trouvoient 
fort  étrange  qu'on  fir  de  paieij[« 
py  les  propoficions  à  un  Etat  libre> 
j^comme  le  leur  ,  Qu'une  telle 
conduite  ne  tendoic  qu'à  Tex- 

tincflion 


deUSuijfe,  Liv.  X.  249 

.5  tinftion  de  la  vérité  au  milieu î  ^32. 

d'eux  :   C^^^'elle  éroit  d'ailleursSoLEUR 
„  oppofée  au  Traité  de  Paix,  puit^E» 
3,  que  le  premier  article  porte,  que 
5,  tous  ceux  qui  avoient  donné  du 

fecours  aux  Bernois  Se  aux  au- 
„  très ,  étoient  compris  dans  la 
p  Paix  :  Que  cependant  les  V.  Can- 

tons  ayant  voulu  >  que  les  fraix 

de  la  guerre  fûlTent  refervez  dans 
^  ce  Traité ,  pour  être  réglez  dans 
^  une  autre  journée,  Berne  y 
j>  âvoit  enfin  confenti  pour  le  bien 
^  de  paix  :  ^'ainfi  ils  exhortoienc 
„&  prioient  leurs  Alliez  de  So- 

leurre,  de  préférer  le  thréfor  in- 
it>  cftimable  de  la  Vérité  Célefte ,  à 
^un  peu  d'argent  5  leur  offrant 
^  d'intercéder  pour  eux  auprès  des 

Cantons,  afin  de  faire  modérer 
^  cette  fomme  ,  fi  elle  leur  paroif- 
99  foit  trop  forte  (4),,. 
;  Les  Bernois  avoient  raifon  de 
dire  ,  que  ces  propofuions  avoient 
pour  but  Textindion  de  la  vérité 
dans  Solcurre,  car  la  fiiite  fit  bien 
voir  ,  que  le:;  Catholiques  du  lieu 
étoient  d'intcUi^eiice  avec  les  V.- 
L  5  Can- 

W  Huffmr IL  B.^i//M6j.  MS.  A}»j^.. 
1-4'  ^» 


2  50  Hïffoire  de  la  RJfoYmatlon 

I  532.  Cantons.    En  elfet  >  ces  propofi- 
SoLEurv  lions  fûrent  une  pomme  de  dit 
^E-       corde  entre  les  Bourgeois  de  So* 
leurre.    Elles  y  produifirent  une. 
divifion  fi  échauffée  >    qu'on  crû 
(]u  elle  ne  fe  termineroit  pas  fan 
cffufion  de  Sang.    Les  Réformez, 
fans  doute  à  Ta  follicitation  des^ 
Bernois  ,  voulurent ,  pour  le  bien 
de  paix,  fe  charger  de  payer  aux 
V.  Cantons  les  mille  écus  >  qu'il 
demandoient.    Mais  ce  n'étoit  pass 
de  l'argent  qu'on  cherchoit.  On 
vouloir  détruire  la  Réformation. 
On   en  Ainfi  les  Réformez  ne  fûrent  pa 
écoutez  de  leurs  Concitoyens  ,>  6 
aiftre.   leur  Miniftre  fut  congédié.  Le 
Réformez  furent   obligez  d'aile 
au  Service  Divin  hors  de  la  Ville 
dans  un  Hameau  voifm  *>  d' 
entretenir   leur  Miniftre  à  leur 
frais  (.i).  Encore  heureux  fi  on  le 
eût  lailfez  en  paifible  poffeflion  de 
ce  peu  de  liberté  !  Mais  la  fureur 
du  zèle  Carholique  n'étoit  pas  enco- 
re fatisfaite.  Cependant  le  parti  Ré- 
formé paroiffoit  encore  fort  dans  le 
Canton  j  puifque  de  44,  ParoifTes 

dons 

Hottlng.  664» 
^  Zouçhvveil . 


deU  Siiijje,  Liv.  X.    2  5  [ 

iont  il  eft  compofé,  il  s'en  troiivoit  £532. 
54.qui  avoient  embraiîé  volontaire-  Soi  eus 
Tient  la  Réformation  à  îa  plurali- 
:i  des  voix. 

Les  Seigneurs  de  Berne  envoié- 
rcnt  de  nouveaux  Députez  à  So- 
eurre,  pour  ce  fujet,  le  31.  Août, 
lyec  ordre  lO.  de  dire  aux  Magit 
trats  ,  o  Ouon  avoit  appris  qu'ils 
,>  vouloient  relever  les  Idoles  *  &;  re* 
U  tablir  k  Meffe  dans  leurs  Ter- 
3>  res  5  6c  même  dans  les  Paroif- 
,5  fes  5  oii  Berne  avoit  la  Haute 

Juftice  &  le  droit  de  Collature,,, 
20,  de  les  détourner  d'un  tel  def^ 
jfein,  en  leur  repréfentant;  o  Q![}^ 
»  étoit  contre  le  Traité  que  les  deux 
„  Etats  avoient  fait  enfembles- 
,>  fuivant  lequel  chaque  parti  de- 
,,voit  demeurer  paifiblement  dans 
5,1c  règlement  qui  avoit  été  fait 
j,  à  la  pluralité  :  ^on  leur  recom- 

mandoit  en  particulier  de  laiffer 
>,  en  paix  ceux  qui  dépendoient  de 
,j Berne,  de  la  maniéie  qu'on  vient 

de  le  dire  j  faute  dequoi  on  les 
"  j,  tireroit  en  caufe  par  devant  des 
n  Juges  5   conformément   a  leurs 
jj-Alliances  mutuelles  [a). 

h  6  n 

U.  ln[î.  196.  MS.  Amp.  11^.  b. 


2  52  Hijloire  delaKeformation 

1532.  Il  fsmbla  que  cette  Dépuration 
SoLEUR  avoit  produit  un  bon  effet.  Les 
s^E-       Seigneurs  de  Soleurre  envoyèrent 

un  Député  à  Berne  5  (dans  le  Mois 
d'Octobre,)  pour  afTûrer  LL.  EE. 
qu'ils  étoient  réfolus  d'obferver 
leurs  Traitez  mutuels  >  anciens  & 
nouveaux  \  &  pour  faire  quelques 
propofitions  au  fujtt  dcKrieg[ieitctjy 
(Paroiffe  du  Canton  de  Soleurre  > 
mais  dépendante  du  Patronat  de 
Berne  ,  )  qui  avoit  réfolu  d'avoir 
tout  à  la  fois  un  Miniftre&  un  Prê- 
*  Le  18.  tre.On  répondit*  à  ce  Député:  yyQue 
©ûobr.  |.^^  comptoit  que  leurs  Alliez  de 
55  Soleurre  obfcrveroientexaâement 
55  lesTraitezr^'on  ne  vouloit  point 
p,  s'oppoferàce  qu'on  mît  un  Prêtre 
„à  Kriegfletten  ,  avec  un  Miniftre: 
,j  ^'ainfi  on  efpéroit  que  là  où 
„  Berne  avoit  la  Haute  Juftice  & 
53  le  Patronat ,  TEtat  de  Soleurre 
35  ne  feroit  aucune  vexation  aux 
5,  Pareilles,  qui  avoient  embraffé 
,i  la  Réformation  de  Berne  [a] 

1533.  Les  chofes  demeurèrent  dans  cet 
Calme  état  5  environ  un  an  :    Mais  vers. 

^' un  au,  la  fin  de  Tannée  fuivante  153 3. .les. 
affaires  fe  brouillèrent  fi  fort  à  So- 
leurre, 

W  ^Jnjir.  Ii8.  MS.  Amp.  127. 


■  de  la  Suijïè.  Li  v.  X.    2  53 

kurre,  que  la  Réformation  en  fut  1 5;33. 
abrolument  b.nnie.  Pendant  leSoiEUK- 
cours  de  cette  année  les  Anabap-i^E» 
tiftes  troublèrent  beaucoup  ces  Egli- 
fes ,  &  en  divers  lieux  ils  refu- 
foient  abfolument  de  fe  foûmettre 
à  leurs  Pafteurs  ,  tellement  que  leur 
opiniâtreté  &  leur  mauvaife  con- 
duite, firent  un  tort  infini  à  la  Ré- 
formation parce  que  les  Catholi- 
ques confondoient  malicieufemenc, 
les  Anabaptifies  avec  les  Réfor- 
mez i  6c  regardoient  les  défordres. 
que  les  prémiers  caufoient  5  com- 
me des  fruits  de  la  nouvelle  Doc- 
wine.  Ce  fut  à  la  fin  d'Oiflobiea. 
1535.  que  les  divifions  des  Bour- 
geois de  Soleurre  en  vinrent  à  ua 
éclat  funefle.  Pendant  le  cours, 
de  Tannée,  les  Réformez  prirent 
patience  >  &  fe  contentèrent  de 
leur  fort ,  lailTant  leurs  Adverfai- 
rcs  gouverner  à  leur  gré.  Mais 
comme  la  violence  de  ces  gens-li 
alloit  en  augmentant,  les  Réfor- 
mez ,  entre  lefquels  il  >  avoit  des 
perfonnes  de  confidération  ,  (-luitrcnlbl 
faifoient  même  près  de  la  Moitié 
du  Grand  8c  du  Petit  Confeil  ,  ) 
ne  voulant  pas  fe  lailTer  mettre  le. 


2  54  Hijlcire  de  la  BJformatîon 

1533.  pie  fur  la  gorge  3  prirent  les  ar- 
SoLEUR  mes  *  pour  fe  défendre.  Comme 
^'^Le  o     ^^^^^       de  grande  conféquen- 
oerob.  '  ce  >  &  mérite  toute  l'attention  du 
Le£leur  ,  pour  bien  juger  de  quel 
côté  étoit  le  droit  ou  le  tort  \  je 
mettrai  ici  >  avec  une  entière  im- 
partialité >  les  relations  que  les 
deux  partis  en  ont  publiées.  Les 
Relation    Catholiques   dirent  ,   5«  après 
^P,.^"^"    avoir  été  bravez  durant  3.  an- 
^     55  nées  5  "S  n  avoient  plus  voulu 
,>  permettre  au  Miniftre  de  prê- 
o  cher  dans  l'Eglife  des  Cordeliers  , 
V  Que  cependant ,  pour  éviter  une 
5>  fédition  ,  on  avoic  cédé  aux  Lw- 
y^îhériens  ^  (comme  ils  les  appel- 
ploient,  )  TEglife  de  Zoucbvveily 
3>  petit  Village  près  de  Soleurre  ; 
^>  Ow'après  y  avoir  fait  tranquille- 
33  ment  leur  Service  Divin  ,  ils 
3>  avoient  machiné  fecrétement  de 
3)  s'emparer  de  l'Arfenal  à  main 
?3  armée  ,  &  de  malTacrer  les  Ca- 
3,  tholiques  à  la  faveur  de  la  nuit: 
3,  ce  que  l'un  des  Conjurez  avoit 
inceffamment  découvert  à  l'A-^ 
3,  voyer.  Que  fur  cet  avis,  TAvoyer 
5>  avoic  promtement  fait  occuper 
}}  l'Eglife  de  ^S*.  Vrfe  ^  de  le  Cime- 

tiéie  s 


I      de  la  SuiJfe.Liv .yi.  2S5 

„  tiére  ,  Se  l'avoit  fait  garder  par  I  5  3  5, 
>,  des  gens  armez,  jg^'avec  le  fe-SoLEua 
ji,  cours  de  quelques  Femmes  3  ils^^* 
„avoient  attendu    1  exécution  du 
complot   des  Luthériens  ,  & 
^«  aiant    appris   qu'ils  s  croient 
,>  emparez  de  TArfenal  y  Se  s'y 
„  étoient  fortifiez;  les  Catholiques 
,î  avoicnt  rempli  de  MoufqucLaires 
>9  toutes  les  Maifons  5  qui  font  aux 
»>  environs  de  TArfenai  >  enforte 
5,  que  les  Luthériens  furent  obligez 
3>  de  fortir  de  la  Ville  3  &  de  fe  rs- 
tirer  dans  le  Fauxbourg  >  &  de- 
là  dans  la  petite  Ville  de  rpled^ 
,j  lisbach.  Oaja^ïks  leur  départ,  les 
„  Catholiques  avoient  engagé  la 
Ville  3  à  fè  lier  par  Serment ,  de 
demeurer  dans  laReligionRomai- 
3,  ne,     à  chaffer  tous  les  Miniftres 
3,  de  la  Ville  &  du  Pays  à  la  re- 
3>  ferve»du  Balliage  de  Bouchberg  ^ 
33  où  les  Payfans  avoient  embraffé 
3,  la  Réformation ,  avec  la  permit- 
fion  du  Magiftrat  [a]. 
Voici  d'autre  coté  ce  que  les  Ré-  Relation 
formez  de  Soleurre  difoient  dans  ^^^^ 
une  Apologie  ,  qu  ils  publièrent  : 

3  3  Ouc 


Cï)  Haffnerj  Solothurnn  Schattl>Ut'K^ll. 


256  Hifioire  de  la  K^formatton 

1533,  ,î  Que  pendant  quelque  tcms  avant 
SoiEUR  3>  qu'ils  fulTent  chalTez,  ils  s'étoient 
vus  menacez  de  tous  côrez  par 
leurs  adverfaires,  Eccléfîaftiques 
>,  &  Séculiers  >  &  même  en  Chai- 
»  re;  &  qu'il  s'étoic  pafle  encore 
7,  dans  la  Vilk  d'autres  chofes,  par 
>,  où  les  Evangeliques  comprirent> 
que  les  Catholiques  avoient  ma- 
chiné  de  mettre  la  main  fur  eux  : 
Que  contre   la  promelTe  ,  qui 
,^  avoit  été  fouvent  faire  de  laiC- 
yy  fer  en  paix  les  Réformez ,  on 
53  avoit  envoie  des  Meffagers  par 
tout  le  Canton,  pour  dire  aux 
yy  Paroiffes,  que  puifque  la  MelTe  j 
yy  étoit  fuivie  du  plus  grand  nom- 
yy  bre  dans  la  Ville ,  il  falloir  que 
yy  les  Sujets  5        ne  vouloient  pas 
«  paffer  pour  féditieùx  6c  rebel- 
»  les  5  rétablirent  au/ïî  la  Meffe> 
j3  8c  fe  foûmiflent  à  cette  plurali- 
yy  té  de  leurs  Seigneurs  :  Que  dans 
yy  cet  intervalle    les  Catholiques 
yy  avoient  dit  aux-Réformez  de  la 
yy  Ville  que  quand  les  Meffagers  fe- 
yy  roient  de  retour  de  la  campagne, 
il  faudioit  qu'ils  allaflent  au lîi  a. 
5,1a  Mefle,  ou  qu'ils  fortilTent  de 
la  Ville^  ou  bieji  qu'ils  le  battif- 

fent. 


de  la  Stiijfe.  L  l  V.  X.  257 

pj  fent  avec  eux:  Que  fur  ces  me-  I 

U  naces  ,  &  d'autres  fembiables  >  Soieur 

L  après  avoir  tenu  confêil  5  ils  s'ar- 

5,  mérent  en  plein  Aliclt ,  &  fe  pof- 

o  térent  près  de  TArfenal  ,  atten- 

„  dant  ce  que  les  Catholiques  vou- 

,j  droient  entreprendre  contr'eux  : 

35  cependant  fans  infuker  ni  atta- 

3>  quer  pcrfonnej  foit  par  de  mau- 

n  vâife  paroles  >  foit  par  des  voies 

>,de  fait.     Mais  que  voyant  les 

Catholiques  animez  d'une  fureur 
«  fans  égale,  enforte  qu'il  y  avoit 
3)  à  craindre  un  grand  malheur,  (i 

l'on  en  fût  venu  aux  mains  ,  ils 
99  prirent  le  parti  de  quitter  volon- 
i,  tairement  &  paifibiement  TAi/è- 
>5  nal,  &  de  fortir  de  la  Ville,  fans 
99  avoir  fait  aucun  mal  à  perfon- 
»  ne  i  ne  demandant  autre  chofe 

perpétuellement  que  la  Paix  & 
j,  la  Juftice.    Enfin  5  que  les  Ré- 

formez ,  qui  faifoient  à  peu  près 
y>  la  moitié  du  Grand  Ôc  du  Petit 
j,  Confeilj  6c  même  de  la  Bour- 
9»  gcoifie  ,  s'étoient  retiiez  pour  le 
9>  bien  de  paix  ,  fur  les  Terres  de 
9,  Berne ,  à  Flnealisbachy  &  à  AT^'IiW- 
i^gcn^  laiifant  leurs  Femmes,  leurs 
n  enfans  ,  6c  leurs  biens  >   à  la 

merci 


2  58  Hiftoire  de  la  déformation 

1533»  "  roc^ci  de  leurs  Adverfaires  :  Que 
SoiEUR  3>  des  Dépotez  de  tous  les  Can- 
RE*  3,  tons>  excepté ^ppenzelU  y  étoient 
55  venus  pour  accommoder  les  Par- 
5,  ties  5  ^'ils  avoient  d'abord  or- 
3,  donné  pour  Préliminaire,  une 
55  Trêve  de  15.  jours ,  &  deman- 
3,  dé  aux  Parties  qu'on  leur  laiffât 
3,  le  pouvoir  de  travailler  à  ajuA 
,>  ter  leur  différend  :  Que  les  Ré- 
35  formez  les  prièrent  de  leur  faire 
55  juftice  avec  impartialité ,  de- 
35  mandèrent  qu'on  leur  donnât 
35  pleine  liberté  de  confcience  ,  ce 
55  qui  leur  fût  d'abord  refufé  par 
les  V,  Cantons  &  par  les  Vallai- 
53  fans.  Que  les  Députez  aiant  en— 
,5  core  propofé  aux  Réformez ,  de  : 
5,  les  laifTer  prononcer  au  fujet  du 
5,  foulévement  ,  dont  ils  étoient.: 
55  pourtant  innocens;  Se  de  fe  fou- 
3,  mettre  à  leur  châtimentjavec  cette 
35  referve ,  que  ce  feroit  fans  pré- 
55  judicc  de  la  liberté  de  confcien-- 
33  ce  qu'ils  demandoient5  ils  dé- 
5,  clarérent  enfin  ,  que  pour  éviter 
,5  une  cfFufion  de  Sang  ,  ils  vou- 
35  loicnt  bien  donner  quelque  ar- 
35  gent^  mais  fous  Texprefle  refcr- 
3,  ve  qu'on  leur  donnât  enfuite  fà- 

li^fac- 


delà  Suijje,  LiV.  X.  259 

5>  tisfadion  fur  la  Religion.  ^^1532^ 
,5  là-deffus  huit  d'entr'eux  furent  Soleuk 
exclus  de  la  pacification,  &  les^E- 
autres  5  condamnez  à  une  amen- 
35  de  de  2.  Mille  florins  de  Rhin  ; 
3,  ^'il  fût  ordonné  à  legard  des 
sj  Réformez,  originaires  de  la  Ville, 
i,  qu'ils  pouvoient  revenir  chez 
,>eux  ,    fans    craindre  aucune 
5,  violence  pour  la  Religion  ;  mais 
*>que  17.  autres  ,   qui  n'étoient 
pas  originaires  Suiffes^  dévoient 
fortir  du  Pays  dans  un  Mois* 
ii{Que  ce  Règlement   avoit  été 
a,  viole  dans  tous  fes  points  ^  en 
3,  ce  que  premièrement ,  peu  de 
j,  tems  après  ,  on  avoit  chafle34, 
3,  Minières  ,  &  établi  à  leur  place» 
33  &  à  main  armée,  des  Prêtres* 
33  qu'on  avoit  fait  venir  d'Alfacc 
0,  &c  du  Brifgaw.)  Que  ce  Règlement 
5>  ayant  été  rapporté  à  ceux,  qui 
)3  étoient  à  Ff^tedlisbach  &  aux  huit^ 
33  quiavoient  été  exclus  de  la  Paix; 
>,  en  les  alTûranr ,  que  les  Bernois 
j,  négôcieroient  avec  la  Ville  de  So- 
),  leurre  ,  à  la  fin  de  Novembre  , 
tant  pour  ces  huit ,  que  pour  laf- 
j,  faire  de  la  Religion  \  lors  que 
les  Bernois  voulurent  exécuter 

ocet 


26o  Hijloirede  la  Kéformation 

I  S33»  article  ,  dont  on  leur  avoir 
SoLEUR  >5  remis  le  foin,  ils  n'âvoient  point 
5,  éré  écoutez.  Que  là-deffus  les 
,5  Réformez  s'établirent  à  But  en  , 
5>  ôc  que  comme  la  trêve  d'une 
5 5  année,  que  quelques  Cantons 
55  avoient  établie  >  n'avoit^  pro- 
,3  duit  aucun  adouciiTement  ils 
5>  avoient  déclaré  une  inimitié  ou- 
5,  verte ,  non  à  leur  Patrie  mais  à 
,5  quelques  particuliers  de  Soleur- 
3>  re  ,  qui  avoient  écé  caufe  de  la 
5,  violation  des  Traitezjqu  on  avoit 
3,  faits  avec  eux  >  comme  a*  leurs 
35  injuftes  perfécuteurs  \  enfuite  de 
„  quoi  eux  (les  Réformez,) avoient 
3>  été  déclarez  par  le  Grand  Con- 
35  feil  de  Soieurre  ,  ennemis  de  la 
3,  Patrie,  &  profcrits  5  fi  bien  qu'on 
3,  avoit  mis  leur  tête  à  prix  ,  ÔC 
3,  promis  cent  florins  de  Rhin  pour 
3,  chacune ,  avec  déclaration  ex- 
prefle,  qu'on  ne  leur  répondroit> 
,5  que  devant  les  Cantons^,,. 

Comme  l'examen  de  ces  trou- 
bles 5  &  des  fuites  qu'ils  eurent  , 
roule  principalement  fur  cette  quef- 
tion,  Qtà  [ont  ceux  qui  ont  été  les 
u^££.  ejfeurs  ,  &  qui  out  cotnploté  d'é^ 

gorger 

Hottiiig.  65-;.  666.667. 


de  la  Snife.LlY.  X.  26l 

^oYger  leurs  advnf  lires  ?  &  que  com-  153 
me  on  vient  de  le  voir,  les  deux  Sole 
parris  s'accuférent  réciproquement^^* 
d'un  tel  complot ,  je   laifle  vo- 
lontiers à  j'iger  aux  Lecteurs  impar- 
tiaux, d:^  quel  côuéa  été  la  violence 
&  l'infraction  des  Loix  &  des  Trai- 
tez.   Je  ne  dirai   qu*un  mot  la- 
deïïus.    Si  Ton  en  veut  juger  par 
Tefprit  violent  &  meurtrier,  qui 
régne  dans  TEglife  Romaine  ,  & 
par  les  Maffacres  que  les  Catholi- 
ques ont  fait  en  d'autres  Pays , 
(  comme  celui  de  la  S,  Barthelemiy 
en  France,  Tan  1572.  Celui  delà 
ralteline  i  Tan  1(^20.    Celui  dVr- 
lande  y  Tan  1^41.  où  il  y  eut  plus 
de  cent  mille  Proteftans  maiTacrez. 
Enfin  celui  des  Vallées  de  Piémont, 
en  1(^55.  )  on  ne  pourra  pas  nier> 
que  la  préfomption  ne  foie  très-for- 
te en  faveur  des  Réformez  de  So- 
leurrc,  &  contre  les  Catholiques. 
Au  moins  on  ne  peut  rien  repro- 
cher de  femblable  au  parti  Ré- 
formé. 

Afin  de  mettre  mieux  les  Lec- 
teurs au  fait  fur  cette  affaire  ,  j'a- 
jouterai ici,  par  voie  de  fupplé- 
mcntjce  que  Stettler  H.fto- 

rien 


262  Hïjlûîre  de  UKéformatîon 

Ï  533.  rien  Bernois  en  dit,  &  ce  que  j'ai 
SoiEUR  trouvé  dans  les  Mémoires  >  que 
j'ai  tiré  de  Berne.    Voici  comme 
Stîttler  en  parle  *. 
Nam-     35  Après  que  ceux  de  Solemre  eu» 
^It^tU^^  o  rent  ôté  aux  Réformez  la  liberté 
'  55  de  confciencïî, quoique  des  44.  Pa- 

P5  roilTes  du  Canton,  il  y  en  eut  54. 
35  qui  enflent  embrafle  la  Réforma- . 

tion ,  avec  permiflion  de  leurs 
5,  Magiftrats  j  cependant  les  per- 
35  fonnes  les  plus  puiflantes  de  i'E- 
^5  tat ,  portèrent  les  chofes  fi  loin, 
55  que  ceux  qui  étoient  refolus  de 
5,  demeurer  dans  la  Religion  Réfor- 
p,  mée ,  furent  obligez  de  fe  foû- 
3»  mettre  ,  vivant  dans  Tinquiétu- 
?,  de  ,  &  laiflant  leurs  adverfaires 
55  gouverner  à  leur  gré.  Mais  com- 
3,  me  quelques-uns  de  ceux  qui  n'é- 
5*  toient  pas  de  la  Religion  Romai- 
5,  ne  étoient  des  perfonnes  de  con- 
9}  fidération  ,  6c  d'un  rang  diftin- 
55  gtié  j  6c  qu'ils  n'étoient  pas  des 
5,  moindres  du  Confeih  ils  ne  fe 
3,  trouvèrent  pas  d'humeur  à  fe 
5>  laifl*er  opprimer  ,  la  chofe  en  vint 
55  à  une  telle  aigreur,  qu'après  s'ê- 
0  tre  long-tems  querellez  ,  il  s'à. 

9;  levai 

^  pag.  ^i.  a. 


de  la  Suife.  Liv.  X.  263 

j  3,  leva  de  grands  troubles  tant  dans  1533, 
i  55  la  ville  que  dans  le  Canton.  Car  Soleub. 

le  30.  Octobre,  quelques  Bour- 
33  geois  prirent  les  armes  de  nuir, 
1 53  6c  quelques-uns  de  ceux  de  la 
55  Campagne  en  firent  autant.  Les 
55  deux  partis  s'approchèrent  Tun 
5,  de  l'autre  ,  6c  quoi  qu'on  ap- 
5,  paifât  ce  tumulte  ,  cependant  le 
I  y,  plus  petit  nombre  fut  obligé  de 
I  53  céder  au  plus  grand  >  fans  qu'il 
53  fe  donnât  pourtant  un  feul  coup 
53  d'épée  :  Les  Réformez  fe  retiré- 
5,  rent  dans  le  faux^bourg  ;  ôcaba- 
'5,  tirent  le  pont  après  eux.  Ceux 
jjdeSoleurre  donnèrent  avis  de  ce 
33  tumulte  3  fort  au  long ,  non- 
33  feulement  à  leurs  Alliez  de  Ber- 
^3  ne,  mais  auffi  à  leur  Baillif  de 
îsLandshout,  Cafpar  Kouttler  :  fur 
,3  quoi  Ton  envoia  de  Berne  deux 
33  Dépurations,  (dont  ia  prémiére 
3,  étoitcompofée  de  l'Ancien  Avoyer 
33D'Erlach  ,  6c  du  Thiéfo- 
3>  rier  Tillman  avec  4.  autres 
1-3*  perfonnes  ^  8c  la  féconde,  de 
j>  Pierre  de  Werd,  Cris- 
»PiN  Fischer,  6c  du  Baillif 
33  de  Landshout ,  qu'on  vient  de 
j>  nommer)  pour  tâcher  de  met- 


2  64  Hiftoire  de  la  Keformatioy^ 

î533-otre  le  paix  entre  les  Parties  5,. 
SoLEUR     J'ajouterai  que  les  Seigneurs  de 
'^^^       Berne  donnèrent  ordre  à  leurs  pré- 
Nomnb.  micrs  Députez  *  d'exhorter  lits 
deux  partis,  à  ne  point  ufer  de 
violence  les  uns  contre  les  autres; 
mais  à  laiffer  à  chacun  liberté  de 
Confcience  >  &  leur  remontrer  le 
tort  qu'ils  avoient  d'en  venir  aux 
mains  >•  contre  la  promeffc  qui  avoit 
été  faite  à  leur  Députés  3  quelque 
tems  auparavant ,  puifqu'une  per- 
fonnè  même  avoit  été  tuée  dans 
le  Fâuxbourg  [a), 

Ststtler  continué  en  ces  termes  [b]  : 
3,  Comme  on  obtint  peu  de  chofe, 
3,  à  caufe  de  la  grande  animofiré 
-  3,  des  Parties  ,  ceux  qui  s'étoient 
v  campez  dans  le  Fâuxbourg  ,  en 
3,  fortirent  en  bon  ordre  >  fous  la 
^,  55 conduite  de  deux  Capitaines, 

Je  A  N     ROGGENEACH    *  dc 

fortent à  j>  Soleune  j   &   Ulrich  Gla-i 
Soleur-  „SER  du  ViHaj^e  d'O^y/z/^^^/ï^fans 
35  Drapeaux  ,  ni  Tambours  5  ni  fî- 
„  fre  5  &  s'arrêtèrent  dans  une 
33  prairie  devant  Ff^utlisbach.  Sur 

.1)  cette 

{a)  us.  Amp.  Inftr.  517. 

pag.  6i.a.  b. 
^  On  prononce  Kockebach. 


de  U  Suijje.  Liv.  X.  265 

lette  démarche  des  Réformez  de  So-  [533. 
■eurre  ,  rHiftorien   fait   une  ré-  Soleur 
iexion,  qui  me  paroit  fort  jufte  ; 
\,  Ils  ne  hrent  pas  grande  atten- 
tion  à  une  Conférence,  qu'on 
>,  avoir  ordonnée  pour  eux.  Ils 
|>,  quittèrent   leur    porte  avanta- 
geux ,  &  fe  campérent-là  ^  {de- 
'  y  VAYit  FP^tcdliibach  )  avec  un  nom- 
,  bre  affez  confidérable  de  Peuple 
y  de  la  Campagne  ,  qui  fe  joignit 
„  à  eux.    Ainfi  ils  donnèrent  au 
plus  grand  nombre  de  la  Bour- 
^  geoifie  (  c'eft-à  dire  aux  Catho- 
liques  )    la  facilité  entière  de 
régler  tout  à  leur  gié.    En  effet, 
ici  encore ,  comme  en  d'autres 
yy  occaîions ,  on  a  vu  la  vérité  de 
j,  la  maxime,  Qm  quitte  U  particy 
yy  la  perd  „.  Si  les  Réformez  de  So- 
leurre  s'étoient  tenus    bien  unis 
dans  le  Fauxbourg  de  la  Ville,  & 
qu*ils  ne  fe  fuiTent  point  féparez  , 
■que  tout  n'eut  été  réglé j  ils  au- 
roient  pù  fe  foutcnir  contre  leurs 
ennemis  ,  qui  furent  enhardis  de 
plus  en  plus ,  par  leur  retraite.  Je 
reviens  à  Stcttler.    „  Sur  ces  en- 
trefaites  ,  dit  il ,  tous  les  Can- 
»  tons ,  à  la  referve  à  yippinzdly 
Tom,  /r.  M 


266  Hljloîre  de  la  K^é formation 

ï  5  33.  >:>  envoiérenî:  des   Députez  à  So- 
Négocta-  yy  leurre ,  qui  firent  un  projet  de 
tions des     pacification,  pour  effayer  d'ac- 
fur  ce      commoder  les  parties  .  &  enten- 
fujet.        dirent  les  raifons  des  uns  &  des 
autres.    Mais  comme ,  malgré 
>,  les  inftantes   foHicitations  des 
55  Bernois  ,  on  ne  pouvcit  guères 
5>  procurer  de  foulagement  à  la  plus 
5j  foiblc  partie  ,  &c  qu'il  couroit 
3,  plufieurs  bruits    étranges  d'un 
5j  certain  fecours  ,  qui  devoit  ve- 
nir  au  parti  le  plus  fort  5  il  pa- 
5,  rut  aux  Députez  des  Cantons 
55  Médiateurs  ^  ï  qae  pour  préve- 
j,  nir  une  guerre  civile  ,  fans  tou- 
53  cher  à  la  Religion  >  le  moyen 
le  pins  fur  étoit  une  Sentence  im- 
5>  partiale.     Mais  ils  ne  purent 
'     3j  l'obtenir  >  qu'à  condition,  que 
^  les    Réformez  reconnoîtroient 
»  en  quelque  forte  leur  faute  5  & 
j^fe  foûmettroient  au  châtiment. 
py  Quelqucs-ons  de  leurs  meilleurs 
^3  amis  leur  confeillérent  ,  &  les 
33  exhortèrent  à  obéir,  fans  préju- 
dice  pourtant  de  leur  Religion. 
33  Plufieurs  de  leurs  plus  grands 
«3  ennemis  étoient    leurs  Juges. 
Aini!  la  Sentence  ne  pouvoit  pas 

yy  ètr€ 


de  U  SuiJJe.  Liv.  X.  267 

[  être  favorable  au  parti  le  plus  i 
foible,  So 
55  Or  entr  autres  articles  ,  il  fut 

Uéglé:  Que  les  Bourgeois  de  So- 
leurre,  qui  étoient  fortis  de  la 
Ville,  paycroient,  pour  punition 
de  leur  fauffe  démarche  ,  2000. 
florins  de  Rhin  ,  avec  la  referve, 
que  huit  perfonnes  ,  favoir?  Jean 
Houg  )  ancien  Bander^t  5  Urfe 
Stark^y   Thréforier,   Jean  Henri 

,  VVinkeli ,  Urfe   Dtirr  ,  Jean  & 

5  Rodolf  Roggenbach,  Henri  Von  Arxy 

>  &  Jean  Hoîibler^  feroient  exclus 
,  de  cet  accommodement.  Item^ 
,  que  17.  perfonneS)  qui  n'éroient 
,  pas  nez  Suifles  3  fortiroient  de  la 
9  Ville  &  du  Canton  ,  avec  leurs 
,  Femmes  ,  leurs  Enfans,  8c  leurs 
,  biens  ,  dans  l'efpace  d'un  mois. 

>  Que  cependant  les  gens  du  Can- 
jton  pourroients'en  retourner  chez 

>  eux  fans  aucun  châtiment  ,  àc 

>  que  par  raport  à  la  Confcience , 
3  ils  pourroient  vivre  en  fureré  5c 
,  en  liberté.  Ainfi  finit  cette  fâ*- 
,  cheufe  affaire  ;  &  dès-l'i  on  ne 
»  parla  plus  gpères  de  la  Rcli- 
^gion  Réformée  à  Soleurre,,, 

Comme  la  narration  de  cetAu- 
M  1  tcur 


268  Hifloire  de  U  K.éformatîon 
1533,  teur  eft  un  peu  féche  >  quil 
'Régocin-  coule  légèrement  fur  des  articles 
t^n  des  importans  ,  j'y  fuppléerai  par  ce 
Cantons     •  ç^^^ ,  Lorsque  tous  les  Cantons 
envoyèrent ,  des  Députez  à  So- 
leurre ,  à  la  referve  de  celui  d'Ap- 
penzell ,  les  V.  Cantons  zélez  6c 
Ffibourg  ,  ne  fe  contentèrent  pas 
d'y  envoyer  les  leurs  ,  mais  de 
plus  ils  prirent  les  armes,  difant 
pour  prétexte  ,   que  les  Bernois 
vouloient  foutenir  auffi  par  les 
armes  les  Réformez  de  Soleurre^à 
quoi  les  Bernois  ne  penfoient  nul- 
lement:, comme  on  le  va  voir  tout 
à  l'heure.  Ceux-ci  chargèrent  leurs 
te  Darti-  Députez  5  (  le  Vendredi  7.  Novem- 
culiérc-  bre  >  )  de  conférer  particulièrement 
2^^^^"^^^^  avec  ceux  des  V.  Cantons  j  »  de 
les  affurer  ,  Que  Berne  ne  vou- 
^jloit  point  employer  les  armes, 
3i  &  ne  chercheroit  jamais  que 
j>jles  voies  de  la  douceur  8c  de 
a  la  Juftice ,  enfin  de  les  engager 
>,  avec  les  autres  Arbitres  ,  à  faire 
que  ces  troubles  fuffent  appai- 
^3  fez  j  &  qu'on  remît  en  vigueur 
les  Edits  &  les  Arrêts  >  &  que 
fi  on  ne  pouvoit  pâs  l'obtenir 
yi  de  ceux  de  Soleurre,  qu'au  moins 

on 


de  la  Suijfe.  L  i  v.  X.  269 
on  donnât  aux  Réformez  une  1533; 
Eglife  près  de  la  Ville  ,    &  lin  Sol  t  u^i 
Miniftre(rf)„.  R^- 
Dans   l'Affemblée  des  Députez 
s  Cantons  ,  les   Réformez  tant 

la  Ville  5  que  du  Pays  j  qui 
toicnt  retirez  fur  les  terres  de 
rne?  demandèrent  quon  les  laif- 

en  paifible  polTefTion  de  la  li- 
rte  de  Religion  ,  qui  leur  ctoit 
quife  par  les  Traitez  &  par  les 

its.  Mais  les  Catholiques  de 
leurre  >  qui  étoient  défoimais  les 
aîtres>  répondirent  >  ^'il  falloit 
émiérement  éxaminer  l'affaiie  de 

fédition  ,  &  la  terminer:  Que 
and  cela  feroit  fait ,  ils  ren- 
oient une  réponfè  convenable  , 

fujet  de  la  Religion  :  &  pour 
leux  endormir  les  Réfoimez^quel- 
es  Confeillers  de  Soleurre  dirent 

particulier  aux  Députez  de  Zu- 
h  &  de  Berne  ,  Qnon  ne  vou- 

faire  violence  à  pcrfonne  fur  Lt 
Ui^ioH'j  &  ils  leur  montrèrent  mê- 
e  le  Strment  qu'on  faifoit  piê- 
r  aux  Bourgeois,  qui  ne  conte- 
ic  rien  d'oppofé  à  la  Religion 
"*ormée(/').  M  3  Huit 

Çu)  MS.  Amp.  1^1.  B.  bi/iy.  310. 
(^j  MS.  Amp.  157.  U.lnjir.  547, 


270  Hijlûlre  de  la  R^cformatioïi 

^33,     Huit  jours  après,  c  cft-à-dire,  le 
Senti-  15.  NoNferribre  ,   les  Députez  de 
■11^    Berne  eurent  ordre  de  dire  aux 
^^"^'l' Arbitres,  Députez  des  Cantons, 
que  Berne  écoit  d'avis  >   que  les 
Séditieux  fuffent  punis.    Ils  fureni 
au/Ti  chargez  d'aller  à  Wiedlisbad 
vers  les  Réformez  deScieturre,  lO 
leur  confeiller  de  la  part  de  LL 
EE.  de  fe  fcûmettre  au  châtiment 
leur  laiiTant  néantmcins  la  liber 
té  de  referver  leur  Religion  ,  o! 
non  ,  5c  de  fe  féparer  les  uns  de 
autres,  ou  de -demeurer  unis  :  20.  d 
leur  déclarer  nettement,  que  le 
Seigneurs  de  Beine  ne  vouloien 
pas   enrreprendie    une  nouvel! 
guerre  pour  eux  ,  afin  de  ne  ps 
s'expofer  à  entendre  dire  dans  j 
fuite,  qu'ils  avoient  eu  du  delToi 
dans  une  affaire  de  Religion  {a\ 
Les  Réformez  nyant  fuivi  le  co) 
feil  des  Seigneurs  de  Berne  ,  ( 
s'étant  fournis  à  la  punition  que 
voudroit  leur  infliger  ,  ksDéput 
de  Berne  eurent  oidre  de  trava 
1er  à  pacifier  les  affaires  de  Religio 
Et  comme  on  foupçonnoit  déj. 
que  les  V.  Cantons  ne  s'en  vc 


W  MS.  Amp.  155. 


droii 


deU  Suiffe.  Liv.  X.  2J\ 

droient  pas  mêler  ,  il  leur  fut  or-  1  533» 
donné  de  Te  joindre  aux  Députez  Soleu?. 
de  Zufich,  Bâle^  Claris,  Alullhoufe^^^- 
S.  Gui  Se  Bienne  ,  d'aller  enfem- 
hle  prier  les  Députez  des  V.  Can-P 
tons  &  de  Fiibourg  ,  de  leur  ai-- 
der  à  faire  la  paix  :  ôc  au  cas  qu'ils 
le  refuTalTent  encore  ,  on  devoit 
lei-ir  dire  :  „  O^'on  voyoit  bien  leur 
d'-lTcin  :  ^'lis  ne  vouloient  pas 
,5  s'emploier  à  faire  cette  paix  > 
5,  parce  qu'ils  cherchoient  à  faire 
j,  naine  une  nouvelle  guerre  deRe- 
9,  ligio:i:  Que  pour  cette  caufeLL. 
35  EE.  décUroieut,  qu'il?  obferve- 
roient  de  leur  côté  l'Alliance  de 
Soleurre  5  en  tout  ce  qui  intéi  ef- 
fe  la,  vie  &:  les  biens,  &  qu'ils 
55  ne  permectroicnt  à  perfonne  ae^ 
5,  paffer  en  armes  par  leurs  terres, 
Enfin  i's  eurent  ord-e,  de  travaiU 
1er  de  toures  leurs  forces  3  à  pro- 
curer aux  Réformez  la  ri;ênjc  li- 
berté de  confcience,  qu'ils  avoienc 
ei'ë  avant  les  troubles  :  &  de  leur 
confcller  ,  de  prier  leurs  Seigneurs^ 
de  remcrrre  le  Jugement  de  cette 
affaire  à  des  Jug'-s  impartiaux,  eii 
leur  propofant  l'exemple  des  Sei- 
xgnçurs  de  Berne  5  qui  cinq  ans  au- 
y.  M  4  para- 


272  Hiftoirede  la  formation 
1 533*  paravant  ,  dans  les  troubles  du 
SoLtuR  Hasle  &  dans  la  rébellion  de  leurs 
Montagnards,  avoient  confenti  de 
fe  laiffer  juger  par  leurs  propres  Su- 
jets (4). 

Les  Députez  des  Cantons  >  af- 
femblez  à  Ff^tedlisbach  y  propoférent 
aux.  parties  un  accommodement, 
confiftant,  en  deux  articles:  lo. 
Quon  n'inquiéteroit  aucun  parti 
pour  caufê  de  Religion.  20»  Que 
les  Etrangers  Réformez  pourroiunc 
s'en  retourner  dans  leur  Pays,  fans 
payer  ni  rançon  ni  amende,  &  que 
les  Bourgeois  ,  qui  s'étoient  foû- 
mis  à  l'amende ,  pourroient  libre- 
ment retourner  chez  eux,  à  la  re- 
ferve  de  huit  :  entre  kfquels  ctoit 
le  Banderet  Houg  [h).  Après  quoi 
les  Députez  des  Cantons ,  pour  ne 
pas  s'arrêter  trop  long-tems  àlcxa-  | 
men  d'une  affaire ,  qui  pourvoit 
être  d'une  longue  difcu/Fion  ,  re- 
mirent le  foin  aux  Bernois,  de  né- 
gocier avec  Soleurre,  pour  TafFaire 
des  huit  exclus  >  &  pour  celle  de 
la  Religion,  Ceux  de  Soleurre 
acceptèrent  tout  cela  ,  promettant 

de 

W  MS.  Amp.  ibid.  &  B.  Inftr.  315. 
ibj  MS.  Amp.  1S6. 


!  .  delaSuife.  Liv.  X.  273 

de  s'y  conformer  :  &  les  V.  Can-  1533. 
tons  ne  s'y  oppoférent  point  (^e).  Soleur 

Les  Bernois  s'aquitérenc  incef- 
famment  de  la  négociation  dont 
on  les  avoit  chargez.  Ils  s'y  em- 
ployèrent avec  beauconp  de  peine 
&  de  dépenfe  ,  mais  fans  fuccès  {b). 
Car  d  abord,  les  Magiftrats  de  So- 
leurre  marquèrent  une  journée  aux 
Bernois  ,  au  commencement  de 
Décembre >  pour  régler  laitaife  des 
huit  Bourgeois  exclus,  fans  faire 
aucune  mention  de  celle  6.%  la  Re- 
ligion. Les  Bernois  en  furent  fort 
furpris,  car-t  difoient-ils,  dans  toute 
U  Négociation  on  a  toujours  ref.  rvé 
la  Religion  ^  &  il  a  toujours  été  dit  > 
quon  ne  feroit  violence  à  perfonne 
feur  CAufa  de  Religion,  Et  pmfque 
le  châtiment  a  été  infligé  aux  Réfor^ 
niez  5  &  qu  ils  l'ont  fubi  5  quainfi  tout 
g(t  terminé  i  a  la  refeive  de  ce  qui 
regarde  /f/ huit  perfonne  s  ^  &  la  Re» 
Hgion,  on  doit  les  finir  toutes  deux^  fi  Ion 
i*Arrêt  des  Cantons -i  &  Piomefle 
de  Meffiiurs  de  Soleurre,  Ils  envo- 
yèrent donc  des  Députez  à  Soleur- 
re,  le  7.  Décembre ,  avec  ordre  de 
M  5  négo- 

{a)  B.  Inftr. 

(b)  lu,  437.  MS.  -r^w/'.  144. 


2  74  Hifiaire  de  la  RJformai  ion 

I  J33.  négocier  pour  ces  deux  affaires,  en 
SoLEUR  commençant  par  la  piémiére  5  niais 
en  forte  cjue  l'une  ne  fe  finit  pas  fans 
l'autre  :       en  cas  de  refus  de  la 
part  de  Meflieurs  de  Soleurre,  ils 
furent  chargez  de  leur  dire  ,  Que 
^eU  étoit  contre  i'Arrèt  des  Cantons  ^ 
&  contre  leur  promrjfe  ;  &  quon  nau- 
Yoit  pAS  attendu  cela  d'eux.  Enfin 
ils  dévoient  fe  retirer  ,  api  es  leur 
avoir  demandé   la    puniaon  de 
qociqncs  S.  jets  de  Soieurre  j  qu* 
injurioi^nt  ceux  de  Berne,  à  caufi 
de  leur  Religion  ,   &   les  appel 
loient  Héreîïjues,    Les  Magiftra 
de  Soieurre  refuférent  tout ,  &  n 
voulurent  plus  fe  fouvenir  de  leur 
prom«-ifes.  G'eft  pourquoi  les  Ber 
ht  27.  nois  recoururent  *aux  autres  Can- 
tons,  pour  obtenir  deux,  qu  o" 
leur  fit  jullice,  &:  que  le  Confei 
de  Soieurre  fatisfit  à    l'Arrêt  d 
leurs  Députez  {a),. 
2^UHicH     VII  L  Parmi  ces  troubles  de  lâ 
SuilTe ,  le  Pape  Clément  VI  ï. 
croyant  l'occafion  favorable,  fit  de 
nouveaux  efforts  par  le  Miniftére 
de  fon  Nonce  Lnnius  pour  y  raf- 
fermir fon  autoiisé.    Il  fit  follici- 

X^t 

f^)  MS^  Anijy.  155. B.  htp,  31^. 


deU  Suijje.  Lîv.  X- 

rer  les  Zuricois  ,  à  rentrer  dans  le  I  533» 
fein  de  l'Eglife  Romaine  ,  en  leur  Le  i>e 
promettant,  (s'ils  le  faifbientO  de 
leur  payer  les  diverfes  Sommes  que  rentrei- 
la  Cour  de  Rome  leur  devoir  de- dans  le 
puis  long  tems.  Ceft-a-dire  ^^"^^'^^Yj^Xi^^ 
que,  (  fuivant  la  Théologie  du  Pa- 
pe  ,  )  une  Somme  due  légitimement  ne  &  lui 
à  une  perfonne  ou  à  un  Etar,  n'eft  promet 
plus  duë ,  .dès  que  cette  perfonne  [^^^^  ['^7. 
ou  cet  Etat  ne  penfe  plus  comme  gem. 
lui  fur  la  Religion  '.Voilà  uneThéo- 
logie  bien  coiT^modeî  On  peut  ac- 
quirer  fes  dettes  à  peu  de  frais  \ 
Je  m'éronne  qre  certaines  Puiffan- 
ces  de  1  Europe  ,  qui-  doivent  de 
greffes  Sommes  aux  Cantons  Ré- 
formez 5  ne  fe  foyent  pas  encore 
aviftz  de  cette  rréthode  abrégée  ^ 
pour  s  aquirer  auprès  d'eux  !  Les 
Zuricois  rejcttérent  avec  indigna-» 
tion  la  proportion  du  Pape  6c  de 
fon  Nonce.    Ils  lui   auroient  die 
volontiers  ,  comme  S.  Pierre  à 
S'moyi  le  Magicien:  Que  ton  argent 
périp  avfc  toi  ^,  Mais  les  Cantons 
Catholiques  ,  gagnez  par  le  Pape^ 
favoir,  Uri  ,  S  hz  vitZy  Undirvvaldy 
Zoug,  ôc  f}:ùourg,  firent  avec  lui 
M  6  uns 

*  Ail.  VIII.  f.  10. 


276  Hijloire  de  la  BJformation 

1533»  une  Alliance  étroite  &  particulière. 
2VRICH  Les  Seigneurs  de  Zurich  s'oppofé- 
rent  à  cette  Alliance  ,  &  prétendi- 
rent 5  Que  comme  les  Cantons  Ca- 
tholiques avoient  ftipulé ,  dans  le 
dernier  Traité  de  Paix ,  que  les 
Réformez  renonceroient  aux  Allian- 
ces étrangères,  qu'ils  avoient  faites 
avec  des  Puiffances  Proteftantes,  il 
étoit  jufte  qu'ils  renonçaffent  aufîî 
à  celle  là,  comme  étant  contraire 
à  leurs  Traitez  mutuels.    La  cho- 
fé  étoit  d'autant  plus  platifible,  que 
Zurich  venoit  de  refufer  tout  ré- 
cemment,  d'entrer  dans  uneAllian* 
ce  contre  le  Pape,  6c  contre  d  au- 
tres Puiffances ,  propofée  par  des 
lesÇ^w- partifans  de  la   France.  Mais 
IToiUj^es  ^^^^^^     des  Catholiques  5  contre 
font  Al-  les  intérêts  du  Chef  de  leur  Re- 
liance    ligion ,  c'eft  prendre  de  gayeté  de 
^^J^^     cœur  une  peine  inutile.  Non-feu- 
lement les  Catholiques  rejettérent 
la  propofirion  des  Zuricois:  mais 
dans  le  deffein  d'enraciner  >  d'aifer- 
mir  Se  d'éternifer ,  s'il  leur  éroit 
poflible,  la  Religion  Romaine  dans 
le  LL.  Corps  Helvétique,  ils  fi- 
rent, bien-iôt  après,  une  Alliance 
particulière  avec  TEvcque  Se  l'Etat 

de 


de  la  SuiJfeLlV.  X.  277 

Vallai s 'y  doni  le  principal  butjj^j^ 
écoic,  de  fe  maintenir  réciproque- avec 
^    ment  dans  leur  Religion  ,  envers  kVal/aU 
&c  contre  tous        Cette  Alliance 
ne:oit  pas  abfolument  nouvelle. 
Trois  Cantons.  Lucerne,  Uri  3c  Un-  C  a  n-w 
urvvaîd  étoient  déjà  liez  par  un ^  ^  5- 
ancien  Traité  de  Combourgeoifie 
ivec  cinq  Diz^^ines  f  du  Vallaisj 

î   Vlais  elle  fut  notivelle  lO.  en  ce 
ue  tous  les  Cantons  Catholiques 

,  entrèrent ,  fa  voir ,  S.  hvziiz>  Zoug-^ 
V  ^rihourg  &  Soleutre^  avec  les  3.  pré- 
'    édens  ,  &  qu'ils  la  contra<fbérenc 

.vec  TEvêque  8>c  tout  l'Etat  de 
;s  /allais  5  compofé  de  7.  Dizaines  s 
J  lonc  les  deux  ,  qui  y  entrèrent 
i  lors  5  font  Lcu  4.  &  Raren»  2^. 
:•  :11e  étoit  nouvelle  encore  >  en  ce 
{  lu'ellc  âvoit  pour  but  principal  la 
.  vcligion.  Elle  fut  (îgnée  le  Me- 
;  redi  17.  Décembre  1533.  6c  re* 
s  ouvellée  au  bout  de  45.  ans.  Tan 
.    578.  le  Lundi  p.  Juin (4). 

D'autre 

I      ^  Uottïng.  67%- 

1  On  nomme  ainfi  en  François  Zehti- 
>i  en  Allemand  ,  les  VII.  parties ,  ou 
^lartiers  de  Pays  ,  qui  compoient  \a 
cpubliquc  du  lUnt-VailaU. 

c  O  Hulunt;.  1.  c.  VV^dklnh  II.  p.  57^.  ; 


278  Hï (foire  de  laK.éformatîon 
I  533«     D'autre  côté  les  Bernois  finirent 
L'Allivin  ^^''^'^  Alliance  avec  la  Ville  de  Bt- 
ce,  de   fa^içcn.    Cette  Capitale  de  la  Ean- 
^^'^''^    .  chc  Comté  avoir  fait  (  Tan  1 5 1 8.  ) 
ftnpn^  T/aité.  d'Alliance  Ôc  de  Com- 
£ii finie.  bourgf:ci{îe  avec  ks  Villes  de  Ber^ 
ne  3  de  Frlbourg  5c  de  Sohurrc  >  poui  j 
TeTpace  de  15.  ans.  Quand  les  15,  | 
ans  furent  écoulez,  le  Vendredi  12» 
Decerribre  153g.  Its  Viiks  de  Ber- 
ne  &  de  BeUncon  3  déclarèrent  que 
leur  Alliance  é:oit  finie  {a).  Une 
pareille  Alliance  étoit  paffaitement 
inutile  aux  Bernois,  fur-tout  depuis 
le  changement  arrivé  dans  la  Rc- 
lion,  &  ne  pouvoit  que  leur  être 
à  charge.  Ainfi  ils  furent  bien  aifes 
de  s'en  voir  débarrafTez.  Mais  dans 
îô  même  tems   qu'ils  fe  détachè- 
rent de  l'Alliance  d'une  Ville  Etran- 
gère &  Catholique,  ils  ferrèrent 
plus  é^joitement  les  nœuds  >  qui 
les  attacboient  à  une  Ville  Helvé. 
îique  &  Réformée,   je  veux  dire 
à  Bàie.    Par  un  Traie é  ,  concli 
Alliance  le  2,  Novembre,  Beriis  &  Baie  ii 
ficreen-  promirent  un  lecours  mutuel,  at 
u-eBerne  cas  qu'o.'i  les  attaquât  >   Tune  01 
l'autre  (^).  Da: 

B.  Jn/ir.  I.  T39.  b. 

W  'B. 519.  i 


de  la  SuiJJe.  Liv.  X.  279 
Dans  ce  tems-là  les  Cantons  Ré-  1535» 
formez  furent  dans  une  grande  in- Mouve- 
quiétiide ,  à  caufs   des  pratiques  mens^ 
fourdes  des  Cantons  Catholiques  > 
8>c  de  leurs  Alliances  ,  loit  avec 
le  Pape  ,  foit  avec  les  Valla'fkns. 
Les  Bernois  en  particulier  prirent 
des  mefures  pour  leur  défenfe  j  fe 
•donnèrent  quelques   mouvemens  > 
&  firent  divers  préparatifs  de  guer- 
re, tout  comme  s'ils  eulTent  écé  à 
iâ  veille  de  fe  voir  attaquez  par 
quelque  ennemi.     Les  Fribourgeois  &  des 
en  prirent  ombrnge.    Ils  armèrent  f^^'^'f^'''^^^ 
de  leur  cô:é,  demandèrent  duTe-"^ 
cours  aux  Laufannois      &  envoyè- 
rent une  Dépuration  à  Berne,  pour 
s'informer  de  la  chofe,  &  en  faire 
des  remontrances  aux  Bernois. 

La  Lettre  des  Seigneurs  de  Fri-  j  534^ 
bourg  fut  portée  à  Laufanne,  le 
Vendredi  après  la  Tous  -  Suints ,  7. 
Novembre,  lue  dans  le  Confeil 
des  LX.  Ces  Seigneurs  y  difoient 
avoir  apris  ,  qu'on  vouloir  les  at- 
taquer; en  coiifèquence  de  quoi 
ils  prioient  leurs  Alliez  de  Lau- 
fanne ,  de  leur  envoyer  un  fccours 
de  cent  Arquebuzicis, 

Les 


280  Hijfoire  de  la  R^éformation 

Ij^^,     Les  Laufannois  foupçonnérent 
Truuen-^^^  Ics  Seigncuis  de  Fiibourg  vou- 
ce  des  loienc  faire  la  guerre  à  TEtat  de 
nof/^"  Berne,  &  léfolus  de  ne  point  fe 
(déclarer  ,   fi  le  cas  arrivoit ,  ils 
conclurrenc  ,   qu'on  n'enrôlleroic 
point  ce  nombre  de  Soldats,  juC- 
qu'à  ce  qu*on  fût  quel  ëtoit  l'en- 
nemi 5  contre  qui  MefTjeurs  de  Fri- 
bourg  vouloienî  les  employer  (^i). 

Six  Semaines  fe  paflerent ,  fans 
qu'on  eut  à  Laufanne  aucune  nou- 
velle de  Fribourg.  Enfin  le  Ven- 
dredi ip.  Décembre  le  Confeil  reçut 
une  Lettre  de  Mcffieurs  de  Fri- 
bourg ,  qui  demandoient  cette  Com- 
pagnie de  cent  Hommes  >  fans  faire 
aucune  mention  des  ennemis,  qu'ils 
avoient  en  vûë.  Ce  filence  affefté 
parut  fufped  aux  Laufannois. 
Pour  s'édaircir  fur  ce  fujet,  ils 
envoyèrent  des  Députez  à  Fri- 
bourg ,  pour  s'informer  du  nom  & 
de  la  qualité  des  ennenns,  contre 
qui  on  vouloir  employer  leurs  Sol- 
dats [b).  Les  Regîrres  ne  nous  ap- 
prennent point  quel  fut  le  luccès 
de  cette  jDéputation.  Maii  la  fuite 

de 

{a)  Mtrw         5i^^.  b. 
{h)  Ibia.  59y. 


de  U  SiiiJle.  LlV.  X.  281 

de  THiftoire  le  fait  affez  connoître.  j  J34, 
Comme  perfonne   n'attaqua  Fri- 
i  bourg  ,   le  Confeil  de  Laufanne 
n^eut  pas  befoin  de  lui  envoyer 
du  fecours. 

En  effet ,  les  Seigneurs  de  Ber-  Bêrhe. 
ne  ayant  entendu  les  remontrant 
ices  des  Députez  de  Fribourg,  leur 
répondirent,  le  Dimanche  4.  Jan- 
ivier  1534.  3>  Qu^oïï  leur  faifoit 
\>y  tort  ,  de  leur  attribuër  quel- 
5,  que  mauvais  deffein,  jÇ^'il  étoit 
„  bien  vrai ,  que  fe  voyant  me- 
^>  nacez  de  tous  cotez  >  ils  avoienc 
,>  averti  tous  leurs  Sujets  de  fe  te- 

,  nir  fur  leurs  gardes ,  pour  être 
prêts  à  fe  défendre  5  mais  que  du 
refte  ils  n'inquiéteroient  jamais 
5,  perfonne ,  ni  pour  caufe  de  Reli* 
„  gion  5  ni  pour  aucun  autre  fujer, 
>,  ne  demandant  rien  ,  finon  qu'on 

,  les  lailTâr  en  paix  ,  0«'ainfi  leurs 
,j,  Alliez  de  Fribourg  nav oient  rien 
j»  à  craindre  de  leur  part.  Ils  fe 
L  plaignirent  de  leur  côié ,  de  ce 
»>  que  les  Fribourgeois ,  avoient  fait 
5>  une  Alliance  particulière  avec  les 
9,  V.  Cantons ,  6c  les  Vaillaifans, 
9»  kur  re.noncfcrfiK  ,  que  cela  étoit 
contre  les  conditions  de  le'jran- 

„cicnne 


282  Hîfloire  de  la  Kéformatton 

I>jj4»cienne    Combourgeoilie  \  Qut 
33  d'ailleurs  une  telle  Alliance  étoit 
,y  fuperfluë>  puifqu'ils  étoient  ré- 
35  folus ,  de  ne  les  inquiéter  jamais 
»  fur  leur  Religion  {a), 
.Mliance     Nonobftant  ces  repréfentations 
le^Fw'        Seigneurs  de  Berne,  ceux  de 
Imrg  &  Fribourg  perfévercrent  dans  leur 
;  dcSoieitr  défiance  y  &  foit  par  ce  principe  > 
T^^  ^^^c  peut-être  au fli  par  fimple  zèle  de 
Cantons  R^^^gio"  j  ils  fe  lièrent  d'une  fa^on 
particulière  ,  (  l'an  1534)  avec  les 
V.  Cantons,  par  une  Alliance  nou- 
velle 5  de  plus  étroite  que  jamais?, 
fous  le  nom  de  Combomgeoïfie  {b). 
Ceux  de  Soleurre  y  entrèrent  aufTi, 
6c  encouragez  par  cette  Alliance  , 
ils  chafféreiic  les  Réfor.ûez  de  leur 
Ville. 

B.rchtold  Haller  écrivit  dans  ce 
tçms-là  à  Bullinger,  le  30.  Décem- 
bre: Cinquante  pif fonnes  font  forties 
de  Soleurre  y  entre  lefcju elles  efl  A/r. 
les  Ré-  H  E  N  R 1  W 1 N  c  K  L  I  ,  fort  honnête 
mahH-  ^^^^^^^^  >  parent  oe  Léon  de  Juda. 
tez  à  So~  Il  navoit  point  eu  de  part  à  ces  trou* 
leurre, Qx\  bU's  i  Cependant  pour  évher  lu  perfé- 
-ortent.  ^p^ipyi  ^  jJ  s'efl  retiré  d'siÙQïd  a  B<inCy 

O. 


delaSmjJe.  Liv.  X.  285 

&  enfuite  a  Bâie,  &  fe  voit  réduit  l  $34- 
dans  fa  Fieillejfe  ^  4  la  trifte  fttua-  Soleç:. 
tion  d'un  Exilé,  Il  avoit  éié  Bail-^^' 
Jif  à  Dornel^  l'an  151 8.  Ha  lier  lui 
écrivit  encore,  que  les  Réformez 
qui  étoient  reftez  dans  la  Ville  j 
écoienc  traitez  fort  indignement. 
BuUinger  avoit  beaucoup  de  confi- 
deration  pour  ce  Baillif  V^inkeli  % 
A  fa  prière  il  compofa  un  petit 
Traité,  Tan  1537.  où  il  montre ^ 
Quelle  eji  l'ancienne  Religion  ,  afin  de 
foriifisr  ceux  qui  en  font  profeC- 
fîon  ,  en  leur  faifant  voir ,  qu'elle 
efl  la  même,  que  celle  que  tous 
les  Anciens  Fidèles,  &  les  Saints^ 
ont  euë  des  la  Ctéation  du  Mon- 
de :  &  pour  fervir  aufTi  d'avertit. 
femcnt  à  ceux  qui  la  perfécutenr. 
Il  dédia  ce  petit  Livre  à  Ff^.nkeli  *. 

Mais  pour  reprendre  le  fil  de  ma 
narration ,  la  démarche  des  Sei- 
gneurs de  Berne  parut  ramener 
ceux  de  Soleurre.  Ils  confentirent 
enfin ,  à  traiter  de  l'affaire  de  la 
Religion  ,  auffi-bien  que  de  celle 
des  huit  Bourgeois  exclus.  Ainfi 
les  Bernois  cnvoiérent  des  Dépu- 
tez à  Soleurre ,  le  5^-  Janvier  1534. 

pour 


284  Hijloire  delà  déformation 

1534,  pour  terminer  ces  deux  affaires. 
SoLEUR  Ils  furent  chargez,  entr'autres  cho- 
fes,  d'exhorter  ceux  de  Soleurre,  à 
laiffer  en  p<^ix  les  Réformez  qui 
s'étoient  retirez  dans  les  terres,  où 
Berne  avoit  la  haute  Juftice  5  &  à  ne 
3e:-  point  inquiéter,  pour  les  obliger 
d'aller  à  la  Melfe  (4).  CesDépurez  al- 
lèrent à  Soleurre:  On  s'affemblât:  On 
entendit  les  accufations  que  les  Ca- 
tholiques portoient  contre  ces  huit 
perfonnes.  On  écouta  auffi  leur 
Apologie.  Les  Députez  de  Berne 
firent  tous  leurs  efforts  pour  y 
mettre  la  paix  \  mais  fans  fuccès. 
Les  Seigneurs  de  Berne:»  ayant  ouï 
le  rapport  de  la  négociation  infruc- 
Qonfli-  tueufe  de  leurs  Députez  >  convo- 
Réfo^^"  quérent ,  dans  leur  Ville  pour  le 
mez  à  ^4^*  Février  ,  une  Conférence  de 
Berne,  tous  les  CantODs  Etats  Réfor- 
mez de  la  SuilTe ,  Zurich  5  Bkle , 
Schdjfhoufe  ^  S,  Gai  y  Afulhoufe  & 
Bienne,  Les  Députez  de  tous  ces 
Etats ,  ayant  ouï  le  rapport  des 
Seigneurs  de  Berne,  les  foins  qu'ils 
avoienr  pris  pour  la  pacification  de 
cette  affaires  &  le  peu  de  fuccès  de 
ces  foins,  ils  réfolurent  d'aller  tous 

en- 

(rf)  MS.  Amp,  156.  B.  Inlb.  3p. 


delaSmlfe.  Liv.  X.  28? 

enfemble  à  Soleurre,  pour  faire  un  i  534; 
dernier  effort  auprès  de  ces  gens-  Reprlfen^ 
ià.     Ils  leur  repiéfencérent     ^/^^  ^^^'^''^^^^ 
„  s'étoic  paffé   dans  la  première  j^^foi-/ 
5,  Conférence  des  Députez  des  Can-  mez  à 
„tonSj  comme  on  Ta  raporté  ci-  ^^"^ 
îjdeffus:  &  les  affûrances  favora- 
5,  bles  ,  que  ces  Meffieurs  avoient 
s,  données  aux  Députez  de  Zt?ri;h 
3^  &c  de  Berne  >  à  Tégard  de  leurs 
>5  Concitoyens  Réformeic.    Ils  leur 
35  niirent  devant  les  yeux  leur  pro- 
33  pre  Serment  de  Bourgeoife,  qui 
35  n'éxigeoit  rien  des  Réformez,  qui 
3,  fût  coiitraire  à  leur  Religion  :  Ils 
3,  les  firent  fouvenir  ,   que  dans 
3y  touces  les  Conférences  il  aveic 
été  rcûjours  refervé  :  Qu  \\  ne  fe- 
33  roit  fait  aucun  tort  ni  violence 
3,  à  aucun  des  deux  partis  pour 
3,  caufe  de  Religion  :    Que  leurs 
33  Concitoyens    Réformez  3  qui 
3,  éioient  enfemble  à  Wicdiisbach, 
>3  comptant   fur    cette  promeffe, 
3)  avoient  renoncé  volontairement 
3>  à  la  Trêve  ordoniiéc  par  les  Ar- 
3,  birres  j   &  que  pour  avoir  la 
33  paix  3  ils  s'éroient  fournis  >  à  la 
53  peine  qu'on  voudrcit  leur  infli- 
jj  ger  5  Que  là-deffus  ils  s  etoient 

5>fépa- 


286  H/Jloire  de  la  K(formatim 

I  534.  5)  réparez  :  ce  qu'ils  n'auroient 
SoiEUR  o  point  fait  5  s'ils  avoient  fû  qu'on 
55  voulut ,  contre  la  Foi  donnée, 
3,  les  inquiéter  fur  leur  Religion: 

mais  qu'ils  fe  feroient  toujours 
5,  tenus  étroitement  unis,  jufqu'à- 
55  ce  qu'ils  en  euflent  eu  une  bon- 
î5  ne  affûrance  :  Que  les  Députez. 
35  de  Berne  5  agiiïant  au  nom  & 

de  la  part  de  tous  les  Cantonsj 
35  félon  la  commiffion  qu'ils  en 
5,  avoient  eue,  n'avoient  pas  vou- 
>,  lu  traiter  de  l'affaire  des  huu 
,5  Bourgeois  5  qu'on  ne  leur  pro- 
35  mit  de  les  laifler  négocier  auffi 
j,  pour  l'affaire  de  la  Religion  5  ce 
3,  qu'ils  avoient  enfin  obtenu  avec 
55  peine  5  après  bien  des  inftances: 
3>  &  qu'après  avoir  terminé  la  pré- 
o>  miére  affaire  5  ils  n'avoient  rien 
,3  pu  obtenir  pour  la  féconde.  Ils 
>5  leur  repréfentérent,  par  une 
3>  telle  conduite  Mefileurs  de  So- 
3>  leurre  faifoient  affront,  non-feu- 
5jlementà  leurs  Alliez  de  Berne, 
9,  mais  auffi  à  tous  les  Cantons  & 
35  Etats  de  la  Suiffe  ,  qui  leur 
3J  avoient  remis  le  foin  de  cette  né- 
55gociation,  puis  qu'après  tant  de 
3,  promeffes  folemneiies  3  ils  vou- 

,5  IqienC 


de  la  Suife.  L I  v.  X.  287 

î)  loient  fc  retra£ler.    Ils  finirent  |  j  34, 
5,  en  les  conjurant  ,  au  nom  deSoiEUF. 
î,  tous  ,  de  leur  permettre  de  trai- 
M  ter  avec  eux  pour  laffaire  de  la 

Religion  5  (faute  de  quoi  on  fe- 

roit  honte  à  ceux  de  cette  Ré- 
-gence,  qui  leur  avoient  fait  ces 

promeffes  ,  )  &  enfin  de  laifler 
;5  les  Réformez  dans  la  paifible 

pofiefllon  de  ce  qui  leur  éroit  ac- 
,3  quis  par  les  Edits  8c  les  Traitez 
,  précédens  ,  ou  du  moins  dans 

I  état  où  ils  étoient  avant  le  fou- 
lévemcnt.    Mais  tous  les  foins 

;  de  ces  bons  Pacificateurs  furent 
5  inutiles  (4) 

II  y  eut  encore  une  nouvelle  af  ^^J^!' 
■imblée,  où  les  Cantons  de  GUris^  rencT^àl 
'le  Fïibourg  &  Appenzell  ^  fe  joi-  VlI.Can 
^nirent  a  ceux  de  Zurich  ÔC  de5fr-  tons. 

ic ,  pour  leur  aider  à  finir  cette  af- 
àire.  Les  Bernois  ordonnèrent  à 
eurs  Dépurez ,  de  confuker  ceux 
les  autres  Cantons  &  des  Villes  , 
Alliées  ,  qui  étoient  entrez  dans 
:etrc  affaire;  &  de  leur  déclarer, 
que  LL.  EE.  ne  pouvoient  pas 
•)  en  bonne  coufcience  abandonner 

,.C€tte 


MS.  Amp.  137.  B.  Injîr.  547. 


288  Hijloire  de  la  Ké formation 

I  J  34.  V  cette  affaire ,  Que  s'ils  le  faifoient 
SoLEURo  ils  ne  pourroienc  pas  s'en  laver 
j>  devant  Dieu  ni  devant  les  Hom« 
,5  mes  5».  Mais  cette  nouvelle  Af- 
femblée  fut  auffi  inutile  que  h 
précédente:  tant  Meflîeurs  de  So- 
leurre  étoient  fixes  à  ne  vouloir 
obferver  ni  Traité,  ni  promeffe  : 
far  quoi  ceux  qui  étoient  enfcm- 
ble  à  Vrtedl'isbacb  fe  difperférent.  Il 
arriva  de  cela>  qu'on  reprochoit 
aux  Bernois  ,  &  aux  autres  Can- 
tons 3  d  avoir  beaucoup  promis  à 
ces  pauvres  gens  de  Sokurre,  mais 
qu'on  ne  Isur  avoit  rien  tenu.  Les 
Magiftirars  ayant  chaffé  tous  ks 
Miniftres,contraignirent  leurs  Bour- 
geois d'aller  à  la  Mefle ,  &  em 
prifonnérent  quelques  perfonnes  di 
Canton^  de  forte  que  non -feule- 
ment les  huit  perfonnes,  mais  auiï 
plufieurs  autres  furent  obligez  di 
quiter  Soleurre  {a). 
Nnrra-  Stntler  finit  fon  récit  des  trou- 
StmUr^  bles  de  Soleurre ,  fur  l'année  15^4 
en  ces  termes  (^):  „  On  eut  encon  * 
3,  de  rembarras  à  Soleurre ,  à  eau 
5,  des  huit  Bourgeois ,  qui  avoien  ' 

55  étt 

(a)  MS.  A:rff.  144.  B.  Injir.  407.  &  M 

(^)  6S-b:&6(5.  a. 


de  la  SuijJe^LlY.X.  289 

»  été  exclus:  Car  quoi  que  les  1534. 

>j  quatre  premiers  ,   le  Banderet  Soleur 

„  Houg^  le  Thréforier  S:arl^^  J*^^' 

„  Hrnri  Vrmkeli ,  &  Vrfs   Durr  , 

55  euflent  fait   leur  Paix  avec  la 

»  Ville  de  Soleurre  >  les  quatre  au- 

5j  très  n'eurent  point  de  part  à  cette 

>5  pacification.  On  fit  divers  effais 

>j  Se  diverfes  négociations,  à  leur 

>j  fujet ,  tant  à  Bade  ,  qu'à  Burent 

55  &  en  d'autres  lieux ^  mais  inu- 

5)  tilement.    Ils  fe  lamcntoient  de 

yy  la  perte  de  leur  liberté  de  Reii- 

>j  gion  j  6c  ne  vouloient  point  fè 

>5  lailTer  conduire  ,  non  plus  que 

55  les  autres  ,  qui  étoienc  exclus. 

>,  L'emportement    de    leur  zile 

5>  caufa  beaucoup  d'incommodité 

>5  à  la  Ville  de  Berne  ,  qui  ne 

3>  vouloir  pas  entrer  en  inimitié , 

pour  l'amour  d'eux  ,  avec  fcs 
>5  bons  8d  fidèles  Alliez  de  Scleurre. 
j>  Il  furvint  encore  quelque  diffi- 
»  culté  au  fujet  de  Kvkgfictten^  de 
»  forte  que,  pendant  toute  cette 
3,  année  ,  les  deux  Villes  furent 
»  dans  l'embarras 

Je  ne  fçii  par  quelle  raifon  l'Hif-  Fermeté 
toricn  Stettler  n'a  pas  voulu  parler  quel- 
plus  clairement.     Voici  le  Corn-  ^1^^^'^^^' 
7m,  IK  N  men- 


290  Hijloire  de  la  Réformation 
I  S34«  mentaire  de  fa   narration.  Avant 
formez  1^  fête  de  Pâques,  il   fe  trouva 
leurre^     niques  Réformez  à  Soleurre,  qui 
déclarèrent ,  c^nils  aimer  oient  mieux 
mourir  que  d'aller  a  la  A^ejfe,  On 
ne  les  fît  pas  mourir.     Mais  au- 
tant valoit-il  ,  puifqu'on    leur  in- 
terdifit  tout  commerce  (^). 
les  Ké-     Quelques  Réftgiez  de  Soleurre  , 
fiigle-:^    habituez  à  Buren ,  indignez  contre 
leurre'  9^^^"^^"^"^      l^wrs  Concitoyens) 
font   la  traitoient   de  Traîtres  6c 

guerre  z  d'Hérétiques  ,  leur  déclarèrent  la 
leurs  en-  guerre  en  forme,  &  uférent  contr'cux 
de  vojes  de  fait.  Cela  fit  grand 
bruit.  Mefljeurs  de  Soleurre  de- 
mandèrent que  ces  gens-la  fuffent 
cirez  à  Bade,  devant  la  Diète  des 
Cantons.  Mais  eux  répondirent, 
qu'ils  comparoîrroient  devant  les 
Seigneurs  de  Berne,  fous  la  pro 
teûion  defquels  ils  s'ètoient  mis , 
avec  offre  de  mourir  fur  le  champ, 
s'il  ètoienr  coupables.  Les  Sei- 
gneurs de  Berne  approuvèrent  cette 
rèponfe  ,  ne  voulant  pas  perdre  les 
droits  de  leur  Jurifdidion  &  même 
de  leur  Souveraineté,  qui  paioiC 

foienfi 

(4)  Hottlng.  667,  ' 


de  la  Smjfe.  Liv.  X.  291 
foient  bleflez  par  la  demande  de  15  34. 
ceux  de  Soleurre  5  &  ils  olFrirent  Soleut^ 
défaire  droit  à  ceux  qui  le  leur  re. 
demanderoient.     Mais   en  même 
tems  ils  n'approuvèrent  point  la 
conduire  de  ces  Réfugiez  de  Soleur- ^^^^''"'J^^^ 
re  5  (  comme  en  effet  elle  n^étoit  Bernois, 
nullement  Evangelique,)     ils  leur 
firent  dire,  de  s'abftenir  de  toute  vh^ 
Icnce  &  de  voje  de  fait  -,  quÀUtre» 
7nent  ils  ne  les  protégeroîent  plus  ;  &C 
donnèrent  avis  de  cette  réfolution 
aux  fix  autres  Cantons  Arbitres. 
Mais   comme  les   cinq  Cantons 
Zéiez  ,   &    celui    de  Soleurre , 
qu'ils  animoient,  ne  voulurent  pas 
fe  contenter  de  cela,    &  menacé- les  p^r- 
rent  même  les  Bernois  de  leur  fai- 
re  la  guerre^ufant  de  divers  difcours  pren- 
également  infolens    &  gioHîers  ,  nentdes 
que  la  graviié  de  l'Hiftoire  ne  me  "^^f^^'^s 

j  o  •  pour 

permet  pas  de  rapporter;  ces  Sei- jear  dé- 

gncurs  crûrent  devoir  prendre  des  fcnfe. 
mefures  pour  leur  fûreré  ,  en  cas 
d*artaque.  Ils  envoyèrent  donc  des 
Députez  par  tout  leur  Canton,  le 
19.  Septembre  ,  pour  inftruire  leurs 
Sujets  de  la  vérité  ,  &  leur  f.ure 
connoîcre  la  Juftice  de  leur  con- 
duite, afin  de  s'alTûrer  de  leur  af- 
N  z  fec 


292  tiijiotre  de  la  Kcformatîon 

1534,  fe<flion  &  de  kur  fidélité  Ceft 
des  Inluii (fiions ,  qui  furent  don- 
nées à  ces  Dépurez  ,  que  j'ai  tiré 
tout  ce  qu'on  vient  de  voir. 
Uoiive-      ^^^^      S^*  regarde  lafFaire  de 
inens  en-  Kriegjfetteny   dont  parle  Stettler, 
tre  les  yoici  ce  que  c'eft  ;  On  fe  prépa- 
f,7^y^^roit  dans  ce  Village  ,  à  célébrer  la 
fiîjet  de  f^ête  de  la  Dédicace  de  fon  Eglife  le 
Krievf  prémier  Dimanche  de  Septembre  > 
qui  étoit  alors  le  6^-  du  Mois  de- 
dié  à  Sair.t  Alagnus,     Un  grand 
Nombre  de  Bourgeois  de  Soieurre 
avoient  refclu  d'y  aller,  8c  d'y 
faire  dire  une  Meffe ,  à  force  ou- 
verte.   Les  Bernois,  après  avoir 
vu  l'opiniâtreté  des  gens  de  So- 
ieurre ,  contre   la  Réformation  , 
avoient  révoqué  la  permiiïion  qu'ils 
leur  avoient  accordée  >  d'avoir  un 
Prêtre  à  KrUg(l(tteru    Lors  donc 
qu'ils  apprirent  leur  deffein,  ils 
écrivirent  aux  Magiflrats  de  So- 
ieurre ,  Qh  Us  ne  le  permcttroient  ja^ 
mais.    Et  d'abord  ils  mirent  des 
troupes  fur  pié  ,  &  les  logèrent  le 
long  àts  frontières  5  pour  voir  ce 
qui  fe  palTeroit,   &  être  en  état 
de  s'y  oppofer.  Le  Confeil  de  So- 
ieurre 


îl  delaSuiJfe.  Liv.  X.  293 
leurre  leur  répondit ,  Ou  il  y  met-  I  534. 
'troit  ordre  lui  même  >  Ôc  pour  le  Sole ui^ 
coup  il  tint  parole  >  TAvoyer  dé-  R^- 
icndii  daller  à  Kriegftecten  à  cette 
'Dédicace  :  ce  que  les  Bernois  ayant 
appris  5  ils  congédièrent  leuis  crou- 
pes. Cependant  cette  levée  de 
boiïtliers  fit  de  l'éclat  dans  la  Suii- 
fe  )  6c  d'abord  cinq  Cantons Zu- 
'ich  i  Claris  ,  Fribourg  y  Sthajfbnuje  & 
Appenxe'l  >  envoyèrent  des  Dépu- 
rez à  Berne  5  pour  pacifier  cette  af- 
faire. Les  Bernois  rendirent  rai- 
fon  de  leur  conduite  à  ces  Dépu- 
iez ,  &  en  même  rems  ih  fe  plai- 
ynii  entde  leurs.AlliezdeSoleurrejeri 
rappellant  tout  ce  qui  s'étoit  pafîé 
într'eux  depuis  le  commencement 
des  ces  troubles  (^0- 

J  ai  crû  devoir  rapporter  ici  tout 
ie  fuite  ce  qui  regarde  ces  trou- 
3les  de  Soleurre  ,  pour  n'en  pas 
'aire  à  deux  fois.    J'ai  voulu  aiififi 
apporter  un  peu  au  long,  tout  ce 
ijue  j'en  ai  découvert ,  pour  faire 
/oir  que  dans  cette  rencontre  on 
ivoit  tout-à-fait  tort  de  blâmer  les 
'  îernois.    Ils  fe  virent  dans  cette 
'  Dccafion  expofcz  aux  reproches  des 
N  g  deux 
00  MS.  Amj>.  141.  B.Inlh".  yj9- 


294  Hiftoire  de  la  déformation 
Ij  34.  deux  partis.  Les  Catholiques 
Sol  EUR  trouvcient  qu'ils  s'y  portoient  avec 
&£.  trop  de  chaleur  pour  les  Réfor- 
mez. Les  Reftigiez  de  Solcurre> 
ou  leurs  partifans,  trouvoicnt  qu'on 
ne  les  avoir  pas  foutenus  affea 
fortement,  &  auroient  voulu  que 
Berne  eut  d'abord  pris  les  ai1ihes> 
ôc  déclaré  la  guerre  à  Soleurre, 
pour  l'amour  d'eux.  Mais  c'étoit 
fans  rai  Ton  ,  car  les  Seigneurs  de 
Berne  ne  trouvèrent  pas  à  propos 
d'ejfpofer  leur  Etat  aux  fuites  pé* 
rilleufcs  d'une  guerre  pour  cette 
querelle,  après  avoir  éprouvé,  que 
les  guerres  de  P.eligion  ne  font  pas 
toujours  favorables  à  la  bonne 
caufe.  Ils  firent  tout  ce  qu'ils  pu- 
rent ,  &  tout  ce  qu*on  pouvoit 
légirimement  exiger  d'eux.  Au 
refte  ces  troubles  de  Soleurre  ne 
furent  appaifez  qu'en  Tannée  i 
comme  nous  le  verrons  dans  la 
fuite. 

1532.     IX.  Si  la  Réformation  perdit  \ 
G  E   E-  Soleurre  y   elle  gagna  du  cô:é  de 
YE»      Genevej8c  à  mefure  qu'elle 
s'éteignoit  dans  la  prémiére  de  ces  , 
Villes  ,  elle  s'avançait  dans  la  fc-  i 
conde,  Il  fembloic  que  le  Seigneur 

voulut 


delà  Suife.  Liv.  X.    29 J 

>ulat  faire  voir  dans  ces  deux  1532. 
'illes  ,  &:  dans  le  rrême  tems^GEN  E- 
jue  fans  fa  bénédi<ftion  tous  ks^'^* 
Imoyens  humains  font  inutiles,  &: 
'que  quand  il  lui  plaie  3  il  peut 
opérer  les  plus  grandes  merveilles 
fans  le  fecours  des  Hommes.  En 
effet  5  la    RéFormation  paroifloit 
établie  à  Soleurre  fur  des  fonde- 
mens  affez  folides ,  pour  y  devoir 
durer  à  perpétuité.  Car  qu'y-a-t-il> 
parmi  les  Hommes ,  fur  quoi  l'on 
doive  mieux  compter,  que  fur  les 
Traitez  &  les  Arrêts  des  Magit 
trats  Souverains?  Cependant  la  Ré- 
formation y  fut  éteinte  au  bout 
d'un  an  ou  deux ,  malgré  les  ef- 
forts des  Réformez.    A  Genève^  au  Les  ap- 
contraire,  les  apparences  n'étoientP^^'^"^^^ 
rien  moins  que  favorables  à  la  Ré- pg,j"^^_ 
formation:  Le  Clergé  y  étoit  puit  vorables 
fant  &  fort  bigot  ,  &  l'ignorance  ^. 
fort  grande.    L'Evêque  ,  Pierre  de^^-^^^^^^ 
la  B.iume  ,  qui  dans   la  fuite  fut 
Cardinal  5  y  avoit   un  puiffant 
parti.    Il  étoit  d'ailleuis  Prince  de 
cette  Ville;  Digni.é,  qui  lui  don-» 
noitun  grand  pouvoir.  Les  mœurs 
des  Genevois  éroicnt  fort  corrom- 
pues; ce  qui  n'ètoit  pas  un  mer- 
K  4  vcilleux 


296  Htjloîre  de  la  Kéformation  | 

1532.  vcilleux  acheminemenî  à  la  Réfor^  \ 
G  E  N  E-  mation  >  comme  on  a  vû  ci  -  det  î 
y  £ .  fus  * ,  que  Bonnivard  Je  leur  repro-  1 
choit.  Ils  étoient  perpétuellement 
harcelez  par  le  Duc  de  Savoye  , 
ce  qui  fembloic  devoir  les  éloigner 
de  penièr  à  toute  autre  chofe  j 
qu  à  la  confervation  de  leur  liber- 
té. Ce  Prince  d'ailleurs  étoit  puit 
fànt  5  appuyé  par  le  Pape  Clément 
VIÎ.  qui  étcit  fbn  ami  ,  par  lis 
Roi  de  France  >  qui  éroit  fon  Ne- 
veu, fils  de  (à  fœur  Lcuyfe.  Gené- 
,  ve  étoit  éloignés  de  tous  les  Etats 
Réformez  ,  entourée  de  tous  côrez 
des  Sujets  du  Duc,  qui  étoient 
nnn-fèuhîiiçnt  ciinemis  de  cette 
Ville  >  mais  dg  plus  fouverainement 
ignorans  U  fuperflitieux.  Enfin  fi 
d'un  côcé  >  les  Bernois  >  leurs  Al- 
liez, les  fcliicitoient  à  permettre 
la  prédication  de  îaDotlrine  Evan-  ' 
gelique,  les  Fribourgeois  ,  d'un  ' 
autre  côté,  s'y  oppofoient  avec  une 
véhémence  fans  égale,  jufqu'à  les 
menacer  de  rompre  l'AHiance  qu'ils 
avoient  avec  eux ,  au  cas  qu'ils 
s'éloignaffent  le  moins  du  Monde 
de  la  Religion  Romaine  au  lieu  que 

les 

^Torn.II.  Liv,  V.  p.  zBu 


de  USuife.Llv.  X.  297 

les  Bernois  n'employèrent  jamais  1532. 
de  femblables  moyens  ,  pour  in-  Gène- 
troduire  la  RéFormation.  Nonobf-  ^  e- 
tant  toutes  ces  difficultez  le  Sei* 
gneur  y  fit  Ton  œuvre»     Il  faut 
voir  par  quels  degrez. 

Il  faut  d'abord  fa  voir  ,  que,  dès  Cler- 
l'an  15^1.  le  Clergé  fe  rendit  fort  gé  fe 
odieux  aux  Genevois  ,  parce  que  ^^^^^^ 
dans  les  embarras,  où  ils  fe  trou- Ge- 
vérent ,  &  par  les  dépenfes  ex-  nevois* 
cefTives  5  qu'ils  furent  obligez  de 
foûtenir ,  tant  pour  fortifier  leur 
Ville,  rebâtir  les  murailles,  &  fer- 
mer le  Fauxbourg  de  S,  Gervais, 
que  pour  payer  les  fommes  qu'ils 
dévoient  aux  Bernois  &  aux  Fri- 
bourgeois  ,  dépenfes  qui  étoient  au 
delTus  de  leurs  forces, ils  ne  pûrent 
jamais  obtenir  de  leurs  Eccléfiafti- 
;  I  ques,  qu'ils  vouluflent  y  contribuer 
'  d'un  fol  :    &:  ces   pauvres  gens 
étoient   alors  tellement  aveugles^ 
par  la  fuperftition ,  qu'ils  auroient 
cru  commettre  un  faciilège  ,  s'ils 
avoient  entrepris    d'obliger  leurs 
Ecdéfiafti'^ues  à  fe  cottifcr  pour  le 
bien  public,  comme  ils  auroient 
ctc  en  droit  de  le  faire.    De  plus 
par  les  divers  endroits ,  qu'on  a 
N  5  vus 


298  Hïjloire  deUR  é format  ion 

1532.  vûs  dans  les  livres  précédcns,  I4 
Ge  N  E- Dodrine  Evangslique  avoit  fait 
peu  à  peu  quelques  petits  progrès 
à  Genève,  mais  ce  fut  principale- 
ment Tan  1532,  qu'elle  y  fît  de 
réclat. 

Tumul-  Au  commencement  deTEté^com- 
cafion^"  parloit  d'un  Jubilé  ,  que^ 

de  quel-  1^  Pape  de  voit  bien -tôt  publier 
quesafE-on  trouva  *  en  divers  endroits  d( 
elles.     1^  Yjjjg  ^        pLicards  imprimez 
juiîf  ^*  qu'on  y  avoit  affichez  pendant  la 
'     nuit,  Tentant  le  Luthéranifme  (com- 
me on  parloit  alors  )    On  y  pr< 
mettoit  un  pardon  général  aux  pé- 
cheurs >  fans  autre  condition  qoe 
celle  d'une  véritable  repentance,  & 
d'une  Foi  vi  ve  en  J  e  s  u  s-C  h  r  1  s  t. 
Le  Clergé  en  fie  beaucoup  de  bruit. 
Il  y  eut  même  quelque  émotion 
dans  la  Ville  à  cette  occafîon  ,  & 
quelques  coups  donnez  y  parce  que 
les  Prêtres  vouloient  les  arracher> 
&  les.  Proteftans  vouloient  les  en 
empêcher.  Entr'aurres  un  Chanoine> 
qui  étoit  Bourgeois  de  Fribourg  ) 
nomme  Pierre  Wernli  t  >  ayant 
trouvé  un  jeune  Genevois;  nommé, 

Jean 

t  Et  non  VtrLy ,  ni'  Verllch  y  comme 
ijuc^ues  François  &  Allemands  ont  écrit* 


delaSuiffe,  Ll  V.  X.  299 

^em  GohUs  i  qui  avoir  affiché  un  î  532. 
de  ces  placards  ,  au  pilier,  devant  Ge  he- 
TEglife  Cathédrale  de  Saint  Pierre,  ^  ^• 
lui  donna  un  fourHet,  &;  tira  fon 
cpée  >  pour  l'en  fraper  :  Car  à  Ge-  UnCha- 
neve  les  Chanoines  portoient  "îj^^^j^^^ 
pée  tout  comme  les  ieculiers  j  tan- 
dis  que  Icpée  fpirituelle,  de  la 
parole  de  Dieu,  étoit  un  meuble 
inconnu  chez  eux.  Coulas  tira.  au/Ti 
fon  épée  pour  fe  défendre,  &  blefla 
le  Chanoine  au  bras.  Il  y  eut 
aufTj  une  batterie  dans  le  Bourg  de 
Four ,  à  la  même  occafion,  où  deux 
Hommes  d'entre  les  partions  du 
Clergé  furent  bleflcz.  Le  Confeil 
de  Fribourg  fut  indigné  de  cette 
infulte  ,  faite  à  la  perfonne  facrée 
d'un  Chanoine  leur  Bourgeois. 
Non  conrens  d'écrire  à  Genève  ils 
y  envoyèrent  un  Député  qui  fe 
plaignit  des  écrits  ,  qu'on  avoit 
aflflchez ,  &  de  la  facilité  qu'oa 
faifoit  paroître  pour  les  nouvelles 
opinions.  On  lui  donna  toute  la 
fatisfaflion  poflible.  On  condam- 
na Coulas ,  à  une  grofle  amende  » 
en  faveur  du  Chanoine  VFlvîiU  , 
qu'il  avoit  bleiïéjôc  Ton  répondit 
aux Fiibourgeois ,  qu'on  étoit  dans 
N  6  une 


300  Hîftoîre  de  la  Ke formation 

1523.  une  férieufe  réfolation  ,  de  vivre 
CeIne- comme  eux  dans  Tancienne  Reli- 
gion.  A  cela  près  3  tout  ce  va- 
carme fe  termina  amiablement» 
Mais  pour  prévenir  des  cas  pareils, 
les  Syndics  ôc  Confeil  de  Genève 
firent  publier  >  à  fon  de  trompe^ 
défenfe  exprefle  >  fous  de  greffes 
peines,  d'entreprendre  aucune  nou- 
veauté 5  &  d'afficher  aucun  écrit  > 
fans  leur  permifTion  ;  ordonnant  à 
chacun  de  vivre  en  paix 

Cependant  le  nombre  des  Ré- 
formez croiffoit  parmi  la  Bour- 
geoifie ,  ôc  même  parmi  les  Magif- 
trats.  Sur  la  fin  du  même  mois 
de  Juin  ,  le  Confeil  fit  prier  le 
Grand  Vicaire,  de  faire  prêcher 
dans  toutes  les  Paroiffes,  &  les 
Couvens  ,  Çelon  la  pure  Do^rine 
contenue  dans  l'Evangile  ,  fans  y  mê' 
1er  aucunes  fables  y  ni  inventions^  hu' 
marnes  ,  afin  qu'ils  vccvff.nt  tous 
dans  une  parfa  ite  union  comme  leurs 
Ancêtres  avoient  vécu  {b).  Au  mois 
d'Août  on  publia  les  Indulgences 

àGe. 

MS.  Chouët  p.  5.  Savion  III.  71* 
Hofet  IL  Ch.  66. 


ib}  MS.  Choiiet  1.  c 


delaSm(fe.  Liv.  X.  30^^- 
L  Genève  de  la  part  du  Pape  [a],  1532. 

Au  mois  de  Septembre.  Guillau-  Ge  n  £• 
ne  Farel  vint  à  Genève  ,  accom-vE» 
Dagné  d'un  autre  Miniftrc  ,  fon 
Compatriote  >  u4ntoine  faunier  ,  na- 
if  de  Moirant  en  Dauphiné.  Ce 
^rand  Homme   animé  d'un  zèle 
nfatigable  pour  l'avancement  du 
légne  du  Seigneur  5  avoir  été  avec 
>aunier  dans  un  Synode  des  Val- 
ées  du  Piémont,  où  l'on  fît  di- 
vers Règlemens  ,  pour  remettre 
fur  un  bon  pié  les  Eglifes  Apof. 
coliques  de  ces  Vallées.    Il  y  fut 
2ntr  autres  ordonné  ,  qu'on  feroit 
une  nouvelle  Tradudion  Françoifb 
de  l'Ecriture  Sainte ,  tant  de  l'An- 
cien que  du  Nouveau  Teftament  : 
&  le  foin  en  fut  donne  à  P.  Robcrt'^^'^Lf^ 
Olhetan  ,  parent  de  Calvin  (b).  Fa-  enfei/ 
Irel  &c  Saunier  étant  à  Berne  ,  on  ^nent 
leur  confeilla   d'aller  à  Genève 
dans  l'efpérance  qu'ils  y  trouve- 
roient  une  grande  MoifTon.    Ils  y 
allèrent,  munis  de  Lettres  de  re- 
commandation des  Seigneurs  de 
Berne.     D'abord  qu'ils  y  furent 
iarrivez,  ils  fe  mirent  à  parler  de 

Reli- 

(^0  Savion  p.  7^  Rofct  I.  c. 

Savion  p.  73-  Rofcc  111.  Ch.I.  & 


302  Hiftoîrede  la  Reformât 1 07^  I 

I  5 32.  Religion  à  tous  ceux  qui  voulu- 
G  E  N  E-  rent  les  écouter  \  &  furent  d'a- 
bord  fuivis  d'un  certain  nombre 
de  Bourgeois  ,  qui  fouhaitoient 
qu'on  introduifit  parmi  eux  la  Ré- 
formation de  Berne  >  quoique  du 
refte,  (comme  parlent  les  deux 
Anciens  Hiftoriens  de  Genève ) 
ils  étoient  de  vie  mondaine  &  dijfo* 
lu'éi  najant  pus  encore  grande  crainte 
de  Die  H  (a). 

Le  bruit  de  ces  difcours  étant 
venu  aux  oreilles  des  Chanoines 
&c  des  Prêtres  ,  ils  réfolurent  de 
s'oppofer ,  à  ces  nouveaufez  ,  avec 
plus  de  foin  qu'auparavant.  Fa^ 
rel  &  Saunier  furent  citez  devant 
le  Confeil.  D'abord  on  les  cenfura 

vive- 

Spanhelm  Geneva  'Rejîltma  :  pag.  41.  Ils 
fe  trompent  feulement  je  penfe  ,  dans  . 
une  petite  circonftance,  en  ce  qu'ils  di- 
fent  que  Farel  vint  à  Genève  à  Ton  re- 
tour de  ce  Syncde:  ce  qui  ne  paroit 
^Lîv.X,  pas  pofTible.  ]'ai  montré  ailleurs  ^  que 
Ch,VL  Farel  étoit  à  Morat  le  9.  Juillet  1^31.  à 
Tvonan  &  à  Granfon  au  mois  d'Août.  Il 
n'a  dont  pu  aller  de  la  aux  Vallées  ,  2S- 
fîfter  à  un  Synode  ,  &  fe  retrouver  à 
Genève  au  mois  de  Septembre.  Cepen- 
dant je  foumets  cette  Critique  au  juge-  • 
ment  de  gens  mieux  inftruits  que  moi.  i 

(4  Savion  1.  c.  .p.  75-  74.  Rofet  UU  i 
Ch.  L 

■  ■  ■ 


delà  Suijfe.  Liv.  X.  30? 

vivement,  comme  des  brouillons, 
&  des  gens  qui  ne  venoient  que  G  e  n  t- 
potir  excirer  des  troubles,  Farel 
iiir-tout  5  qui  étoit  regardé  généra- 
lement comme  le  fléau  des  Prêtres, 
&  pour  cette  raifon  fouveraine* 
ment  haï  des  bigots.  Farci  répcn-  Tareù 
dit ,  Qu';7  néîoït  point  un  trompette  ^^^^"[| 
de  [édition  ,  ma's  Prédicateur  de  la  ^Qq^ç^{[ 
vérité  5  Qu  i/  étoit  prêt  de  facrifier  répond 
non-feulement  toutes  Ces  peines  mais  coura- 
même  fa  vie  pour  cette  Doctrine  Ce-  g^^j^J 
lefle  ^  Que  la  Patente  ,  ou  la  Let* 
t  e  de  Créance ,  dont  LL,  EE,  de 
Berne  r avaient  muni  >  étoit  une prcti^ 
vc  fuffifante  de  fcn  innocence  &  de 
U  bonté  de  fa  DoHrine  ;  &  quon  n& 
potivoit  ni  le  condamner ^  ni  le  ren^ 
vojer  fans  l'entendre ,  fans  fe  rendre 
coupable  de  mépris  pour  Dieu ,  pour 
l'Evangile  ,  &  pour  les  Seigneurs  de 
Berne.    Ce  difcours  &  la  vuë  de 
la  Lettre  de  Créance  des  Seigneurs 
de  Berne  adoucit  Tefprit  des  Con- 
fcillers.  Cependant  on  leur  défen- 
dit de  troubler  la  tranquilité  publique^ 
par  la  prédication  d'/tne  nouvelle  DoC" 
îïine  (4), 


A  pçinc 

(.1)  Spanljclm,  G  en.  J?^.  p,  43. 


304  Hijloîre  de  la  déformation 

1532*  A  pdne  ces  deux  Minières  \ 
Tard  ell  étoient-ils  de  retour  dans  leur  Lo- 
v!mt  lé  '  qu'ils  furent  citez  à  compa- 
Confeil  roîrre  devant  j?^*^w;«(7«^,Grand  Vicai- 
Epifco-  re  de  l'E vêque ,  &  fon  Confeil  Epif- 
P^^*  copal,  fous  le  prétexte  d'y  rendre 
raifon  de  leur  Dodrine  5  mais  en 
effet  pour  les  faire  tomber  dans  les 
embûches  qu'on  leur  y  tendoit. 
Le  Confeil  >  craignant  que  les  Ec- 
cléfiaftiques  ne  filTtnt  quelque  coup 
mal-taillé,  qui  pourroit  leur  faire 
perdre  la  protedlion  &  Tamitiè  des 
Seigneurs  de  Berne ,  y  envoya 
deux  Syndics,  Jean  Ballard  3  &  Fran» 
çots  Hugues ,  qui  tirèrent  parole 
des  Eccléfiaftiques  >  qu  il  ne  feroic 
fait  aucun  mal  à  ces  deux  Minif- 
tres  >  au  cas  qu'ils  vouluflent  fou- 
tenir  leur  Do(flrine  contr'eux,  & 
qui  afTiftérent  même  à  leur  AlTem- 
blée,  afin  d'en  modérer  la  vivaci- 
té par  leur  préfence.  Cependant 
ce  n'étoit  nullement  le  delfein  de 
ces  Meflieurs ,  d'entrer  en  difpute 
avec  les  Minières  ,  ni  de  confé- 
rer amiablement  avec  eux  5  com- 
me ç'eut  été  leur  devoir.  Le  Juge 
des  excès,  ou  Procureur  fifcal  de 
l'Evêque  >  dit,  tout  naïvement. 


de  la  Suijje.  Liv.  X.  305 

Qu'/7  nefa'oit  point  difputer  >  &  que  l  ^'^2* 
cela  ne  leur  tourneroit  point  a  comp-  Genê- 
ts i  Ufânt  de  ces  mots  Latins  y  fi"^^' 
difputctur  i  îotum  nojlrtim  inyfierlum 
defiruetur  :  C*eft- à-dire  ,  fi  l'on  dif- 
'  l'te  3  tout  notre  myjiérs  va  être  dé" 
jt,  lis  fs  mirent  donc  à  déco- 
cher des  injures  contre  Farel  ,  en 
lai  difant,  Hens  ça,  înéc/jAnt  Diahle 
^e  Fa:  et  y  que  vas-tii  fa  'tfant  ça  & 
?  D'où  viens  tu  ?  Ques-tu  venu 
.ye  ici  ?  Qui  t'a  fait  venir  en  cette 
/>  pour  la  troubler'^,  Farel  Lur  ré-  Il  y  par- 
odie courageufe.-nenr,  Je  ne  fuis  ^^^^^^^^^ 
jint  Diable.  J'annonce  Jésus- 
Christ  crucifié ,  mort  pour  nos  pé- 
chez >  &  r£jfîîfci:é  pour  notre  jufiifi- 
cation  5  fi  bien  que  celui  qui  croira  en 
lui  j  aura  la  Vie  Etcrntlle  i  mais  qui 
ne  croira  point ,  fera  damné,  A  celle 
fin  pùs-je  envoyé  de  Dieu  y  notre  bon 
J'he  Ambaffadeur  r/t' Jesus-Christ  , 
obligé  de  prêcher  a  ceux  qui  me  vou- 
dtont  ouïr,  &  ne  tache  autre  thofe  fi 
non  qu'on  le  reçoive  par  tout  le  Mon- 
de :&  fuis  venu  en  atie  Vi  le  fOur  cf» 
fayer  ,  s'il  y  a  perfonne ,  qui  me  veuille 
ouir  ;  &  fuis  devant  vous  ,  prêt  de 
rendre  raifon  de  ma  Foi  y  &  de  ce  que 
je  prêche ,  s'il  vous  pLiit  de  m' ouir 

paîiem^ 


306  Hijloire  de  la  Réformation 

^'$32*  patiemmejjt  y  &  maintenir  ce  que  je 
Ge  N  E-  dirai  jufiua.  la  mort  y  n  ayant  autorité 
que  de  Dieu  y  duquel  je  fws  envoyée 
A  ces  mors  ,  l'un  des  Juges  Ec- 
cléfiaftiques  fe  leva ,       ufant  des 
propres  exprenTions  deCaiphs  contre 
Jesus-Ch  RisT,  fe  mit  à  dire  en 
Latin  >  Blaiphemavit ,    non  amplius 
ind'fgemus  tefitbus.    Reus  efi  tnortïs  > 
c'eit-à-dire,  //   a  blafp berné  :  nous 
n  avons  plus  befoln  de  témoins  :  Il  ejl 
coupable  de  mort.  Puis  il  s'écria  en 
bon  François,  fuivant  Tufage  de 
Genève  >  au  Rhône^  au  Rhône  :  (pour  |i 
dire ,  qu'il  faloit  le  jetter  dans  le  I 
Rhône:)  ajoutant  3  //  vaux  mieux 
que  ce  méchant  Luther  meure ,  que  i 
de  t)  aubier  tout  le  Peuple,   Farel  lui  I 
répondit  •  Parle  les  Paroles  de  Dieuy 
&  non  de  Caiphe,    Là-deffus  ils  j 
mirent  tous  à  crier  ,  tué  ,  tue  ce  ' 
Il  y  efi:  Luther  i  lui  crachèrent  au  vifage, 
maltrai-  Je  chargèrent  d'injures,  &  lui  don- 
courtrif  "^''^"^  quelques  coups  de  poing, 
que  d'ê-  Enfuitejfous  prétexte  de  vouloir  dé*! 
tre  tué.  libérer  furfon  fujet,  ils  le  firent  reti- 
rer fur  une  petite  galerie:,  au  bout 
de  laquelle  étoit  un  des  Serviteurs 
du  Grand  Vicaire,  nommé  François 
Civirip  armé  d'une  arquebuze,  qu'il 

lacÙA 


delà  Suijje.  Liv.  X.  307 

Acha  contre  Farel:  mais  heureufc-  i  532* 
lient  il  ne  lui  fît  aucun  mal.  L'unGENE- 
ies  Syndics  ,  Guillaume  Hugues^Ç\ii  v  £• 
'ort  fâché  d'un  tel  excès  commis 
contre  la  parole  donnée,  mais  Tau- 
:re  ,  jean  EalUrd,  partifan  du  Cler- 
gé ne  s'en  foucioit  pas  beaucoup. 
Enfin,  par  Arrêt  du  Confeil  Epif-    i]  efl 
:cpalî  il  fut  ordonné  à  Farel  &  chafle 

à  Saunier  ,  de  vuidcr  incclTamment  f^^^^^i^ 

le  nvec 

i^Ia  Ville,  fous  peine  de  prifon.  Ils  Saunier, 
fe  retiré  ent  donc  ,  efcorrez  ,  jut 

^  ques  à  quelque  diflance  ,  par  plu- 
lueurs  Citoyens  ,  qui  avoient  goû:é 
leur  Do^rine  &  retournèrent  prê- 
cher an  Pays  de  Vaud-i  particuliè- 
rement à  Orbe  6c  à  Granfon^. 

X.  Mais  Genève  ne  demeura  pas 
Icng-tems  fans  Do(fleur.  Le  Dau- 
pliiné  lui  en  envoya  un  tioifîéme 
nommé  Froment ,  dont  le  nom  , 
(comme  le  remarque  agréablement 
Spanheim  f  y)  iemble  avoir  été  def. 

tiné 

Savion  III.  p.  74- 7^-  RofetlII.  Ch. 
l.  Spanh.  1.  c.  44. 45.  Stultet  382,  385. 

t  Pag.  4^.47.  Il  fait  là  allufion  à  un 
autre  jeune  Homme  ,  nommé  Fm  menti  tir, 
qiii  ilans  le  lllmc.  Siècle,  prêcha  le  pré, 
mier  l'Fvangile  dans  les  Qiiartiers  de 
VKthlofùej  cju'i  font  au  bord  de  la  Mer 
RoiiL^^c.    Voy.  Socratc  Liv.  I.  Ch.  XIX, 


308  Hijloire  de  la  Réformation  , 

Ï532.tiné  à  répandre  TEvangile.  Ce  \ 
Ge  NE- jeune  Homme  avoit  été,  pendant 
quelques  années.  Auditeur  &  Dif- 
ciple  de  Farel  >  le  Compagnon  de 
fes  voyages ,  &  fouvent  auffi  des 
perfScutions  qu'il  fouffroic.  Fard, 
connoiflant  fa  pieté  &  fon  zèle  in- 
trépide, le  jugea  très-propre  pour 
arrofer  &  augmenter  la  femcnce 
de  la  Parole  de  Dieu ,  qu  il  avoit 
jettée  dans  Genève.  Il  l'exhorta 
d'y  aller ,  lui  faifant  remarquer , 
que  comme  il  étoic  peu  connua  & 
que  fon  nom  n'avoit  point  encore 
fait  de  bruit  dans  le  monde,  il  y 
pourroit  travailler  en  fureté ,  éc 
que  du  refte  il  devoit  fe  repofer 
Tromem  proteftion  de  Dieu,  JVo- 

va  à  Ge-  f^ï^nt  s'en  defFendit  quelque  tems  > 
nkve,  ne  fe  croiant  pas  affez  de  force  > 
pour  entreprendre  avec  fuccès  un 
Ouvrage  de  cette  importance.  Mais 
enfin  >  prefle  par  Farel ,  il  fe  laifla 
perfuader,  &  fe  rendit  à  Genève 
au  mois  de  Novembre.  Il  s'a- 
dreffa  d'abord  à  ceux  des  Genevois, 
que  Farel  lui  avoit  indiquez  com- 
me de  bons  Réformez.  Mais  n'a- 
yant trouvé  chez  eux  que  de  la 
froideur,  parce  que  les  menaces 


de  U  Suide.  Liv.  X.  309 

^  les  dangers  avoient  ralenti  &IÎ32. 
.refque  éteint  leur  zèle  pour  la  G  e  n  e- 
ériré,  il  fe  trouva  dans  un  grand  ^  ^• 
;mbarras ,  &  ne  croyant  pas  fa 
ie  en  fureté  5  il  penfa  tout  de 
)on  à      retirer.    Mais  comme  il 
ortoi:  de  la  Ville ,  il  fe  fentit  fi  for- 
ement  preffé  en  fa  confcience  3  d'y 
entrer ,  qu'il  ne  pût  refifter  à  ce 
nouvement.    Ainfi  de  retour  dans 
a  V'illcjil chercha  par  quels  moyens 
ecrets  &  détournez  il  pourroit 
infinuër  dans  les  efprits  fans  bruit 

fans  obftade  (4). 

Après  avoir  bien  délibéré  il  lui 
int  dans  l'efprir,  d'imiter  Texem- 
Ic  de  Farel  fon  Maître,  qui  s'éroic 
iitroduit  à   Aigle    fous  le  nom 
l  un  Maître  d*Ecole.    Il  mit  donc 
les  affiches  par  la  Ville  %  pour 
vertir  le  Public,  qu'il  vouloit ap- 
)rendre  à  grands  &  petits    à  lire 
\:  à  écrire  en  François  dans  un 
nois  5  &  quelques  autres  chofes. 
Vinfî  foQs  prétexte  d'enfeigner  à 
ire,  &  à  écrire,  8c  l'Arithmétique,    Il  s'y 
'■<.  de  donner  des  confeils  pour  la  ^^""f,  , 
ante,  il  s  attira  bien-tôt  un  grand  Ire  d  E- 
lombre  de Difciplesjnon-feulement  cok,& 

de 

('0  Spanheim47.  Savion  III.  7S> 


3IO  HiJloÎYe  de  U  'R^éformation 

1532.       la  Jeuneiïe  >  mais  des  perfon- 
y   fait  nés  âgées  ,  à  qui  il  enfeignoit  en 
du  fruit,  rnérne  tems  les  véricez  Evajigeli- 
ques.    De  cette  manière  il  y  fît 
beaucoup  de  fruit ,  parce  que  ceux 
qui  prenoient  goût  à  fa  Doctrine, 
y  amenoient  leurs  parens  ,  leurs 
amis,  &  les  gens  de  leur  connoif- 
fance  ,  Hommes  &  Femmes.  Leur 
nombre  Te   n.ultiplioit    tous  les 
jours  >  quoi  qu'on  en  murmurât 
beaucoup  par  la  Ville  ;  &  malgré 
les  oppofitions  des  Catholiques  , 
dont  le  zèle  ,  bigot  &  ignorant, 
alloit  jufqu'à  dire  que  Us  Fem-mes 
qui  prenoient  goût  à  cette  Doiflri- 
ne,  étoient  enforcelées  {a).   Se?  inf- 
truftions  furent  heureufement  fou- 
tenuës  ,  par  un  Corddier  ,  nom- 
mé   Ckrijîoph'e  Boqujt  ,   qui  étoit 
Eft  fe- Procédant   dans  l'Ame  ,   &:  qui, 
condé    prêchant  l'Avent  à  Genève  ,  ufoit 
par  \q  d'une  grande  modération  dans  fes 
Sermons ,  en  forte  que  Tes  Audi- 
^uef,      teurs,  au  fortir  de  fes  Sermons  ,, 
alloient  en  grand  nombre  entendre 
Froment ,  qui  prêchoic  dans  un< 
Sale  {h).    Le  Peuple  devenoit  par 

i: 

ia)  Savion  III.  7^.  y6.  Rofet  III.  i. 
(^)Savionl.  c  p.  7(5.  Rofet  lU-  Ch.  j 
Spanh.  48. 


de  U  Suiffe,  L I  V.  X. 

là  plus  éclairé.  Les  Réformez  con-  |  532. 
feroient  &   difputoient  entr'eux.  g  t  n  £- 
Ils  lifoient  divers  petits  livres  de  ve. 
Controverfe  qu*on   répandoit  de 
tous  cô  és  ;  mais  ils  s'attachoient 
particulièrement  à  la  lerture  de  l'E- 
criture Sainte  pour  dillinguer,  dans 
la  Religion ,  ce  qui  venoit  véri- 
tablement  de   Dieu  ,  d'avec  les 
Dogmes  5   &   les  pratiques  5  ou 
plûîôt  les  abus  ,  que  les  Hommes 
y  avoient  ajoiuez  (4). 

Il  ne  faut  pas  oublier  ici  une  Conver- 
avanture  des  plus  fînguliéres,  qui  ^^^jj^^^/ 
arriva  dans  ce  tems  -  là  5  &  qui  fe  d'une 
fait  bien  voir  la  puiffance  de  Dieu,  Femme 
pour  tourner  les  cœurs  comme  il  ^^§^^^^' 
lui  plait>  &  quand  il  lui  plait. 
Les  Prêtres  avoient  fait  courir  le 
bruit  ,  &  à  Genève  &  par  tout 
ailleurs      que  les  Prédicateurs  de 
la  nouvelle  Doftrine  étoient  tout 
autant  de  Magiciens ,  qui  avoient 
des  Charretées  de  Diables  à  leuc 
Commandement ,  par  lefquels  ils 
enforceloient  les  oreilles  &c  les  ef^ 
prits  de  leurs  Audiceurs.  Ce  bruit, 
quelque    impertinent    qu'il  fût , 

avoic 

(tf)  MS.  Choul't.  4. 
♦  Voyez  Livre  XIV. 


f 


3 1 2  Hîjlûire  de  la  Re formation  I 

1532.  avoit  vivement  frr.ppé  une  Dame  1 
Ge  N  E-  de  Genève  nommée  Claudine  ,  ex-  \ 
^         traordinairement  bigote  :  de  ma- 
nière que  >  règardant  Froment , 
comme  un  Maîae  Enchanteur,  elle 
réCfta  long  tems  aux  follicirations 
de  fes  Amies  ,  qui  vouloient  l'en- 
gager à  l'aller  écouter,  ne  fût-ce 
que  par  curiofité.    Enfin  pourtant 
elle  (e  laifla  g.igner,  &  fe  réfolut 
à  y  aller,  mais  m.unie  de  toutes 
les  armes  fpirituelles  qu'elle  jugea 
néceiTaires ,  pour  rcpouffer  les  ef- 
forts du  prérendu  Enchanteur,  je 
veux  dire  chargée  de  Croix  ,  des 
Reliques  y^gnus  Dei  5  d'autres 
babioles  de   cetîe  nature.  Ainfi 
équipée  elle  entre  dans  la  Sale  où 
prêchoit  Froment.    Elle  fe  place 
vis-à-vis  de  lui ,  fait  deux  ou  trois 
fîgnes  de  Croix  5  &  (è  recomman- 
de ardemment  à  Dieu  &   à  toiis 
les  Saints  ,  pour  n'être  point  fé- 
duite.    Elle  écoute  Froment  5  & 
d'abord  elle  entre  dans  un  éton- 
•   nement  extraordinaire  ,   ne  trou- 
vant rien  dans  fa  Doiftrine  ,  qui 
fentit  le  grimoire.    Après  le  Ser- 
mon fini  elle  demande  a  Froment» 
s'il  avoit  bien  yi'êché  la  vérité  ?  Il 

lui 


delaSuiJfe,  Liv.  X,  313 
lui  répondit,  Qu'i/  étoh  prêt  a  /«il  532. 
r^rouver  ce  qu'il  avoir  prêché*    Alaisy  G  e  n  £- 
lui  dit  ellc>/^  prouverez  vous  par 
l'Evangile^  Oui,  répondit -il.  La 
A/efe  (repliqua-t-elle,  )  riefi-elle 
ùas  fondée  en  l'Ecriture  ?  Froment 
l  alTûra  que  non  ,  &  qu'on  n'y  en 
trouvoit  pas  même  le  nom,  non 
plus  que  la  chofe.    Enfin  elle  lui 

.  demanda  ?  fi  le  livre,  dont  il  uvoit 
tire  fon  texte,  etoit  le  Nouveau  7 ef- 
rament  ?  Froment  lui  ayant  dit  » 
qu'oui,  elle  le  prie  de  le  lui  prêter 

'  pour  le  lire  chez  elle.  Elle  s'en- 
ferme trois  joors  dans  fa  chambre, 
&  ne  fait  autre  chofe  que  lire  ce 
faint  Livre  ,  mangeant  fort  peu, 
pour  ne  point  perdre  de  tems.  A 
mefure  qu'elle  lit,  elle  fe  fent  faific 
d'admiration,  &  fon  ame  fe  remplit 
de  zèle.  Elle  pleure  à  chaudes  lar- 
mes. Elle  prie  :  Elle  reconnoît  fon 
égarement ,  ÔC  décefte  fa  fuperfti- 
cion.  Au  bout  de  trois  jours  elle 
Fait  venir  chez  elle  Froment,  cet 
Homme  qu'elle  avoit  auparavant 
regardé  avec  tant  d'horreur.  Elle 
lui  demande  une  Conférence  ,  & 
après  l'avoir  entendu  encore  une 
fois,  elle  cmbralTe  fur  le  champ 

Il       Jom./r.  O  la 


3 1 4  Hîjloirc  de  la  K^êformatlon 

1532.  la  Dodrine  Evangelique,  béniffant 
Ge  N     Dieu  de  tout  ibn  cœur,  de  l'avoir 
éclairée.  Elle  fait  plus.  Elle  gagna 
fon  maii  ,  qui  n'écoic  pas  moins 
bigot  qu'elle  l'avoit  été  :  6c  gagna 
aufli  quelques- unes  de  fes  paren- 
tes.   Et  dans  la  fuite  elle  rendit 
toutes  fortes  d'offices  de  Charité 
Chrétienne  aux  fidèles,  qui  ércient 
fugitifs  pour  caufe  de  Religion. 
Quelques  années  après  cette  ame 
fîmpls  5  8c  fans  malice,  eut  le  mal- 
heur de  fe  laiffer  féduire  par  quel- 
ques Anabaptiftes  >   qui  s'étoienc 
gliflez  dans  Genève  ;  mais  Dieu 
lui  fit  encore  la  grâce  de  rccon- 
noitre  cette  nouvelle  efpéce  d'er- 
reur ,  ô:  d'en  fortir 
Science     Dans  le  même  tems  un  Citoien 
dinakc"      Genève ,  zclé  Réformé  ,  nommé 
d'une  pe  Claude  Bernard  y  avoit  une  petite  fille 
Hce  fiJle  de  fept  à  huit  ans  >  qui  étoit  un 
prodige  de  -connoiffance.  Elle  avoit 
une  intelligence  extraordinaire  de 
l'Ecriture  fainte,  &  fort  au  defTus 
de  fon  âge  ,  ce  qui  étoit  d'autant 
plus  admitrible,  que  dans  ce  tems- 
là  l'intelligence  de  l'Ecriture  Sainte 

étoit 

^  Spanh,  1.  c.  pac;.  49.  ^o.  Vita  Farei 
use.  apud  Hottin^T6^y,6'{S. 


Ïdcla  Suife.  Lrv.  X.  3IS 
étoit  une  chofe  extrêmement  rare.  I532. 
Elle  fâifoic  de  tems  en  tems  aux 
■  Prêtres  ,  fur  divers  articles  de  l'E- 
[•criture  >  des  queftions,   qui  les 
î' confondoienc  :    &   ces  honnêtes 
I  gens  ,  pour  couvrir  leur  honte, 
publîoienc  qu'elle    étoit  pofledée. 
;  '  Des  Ambafladeurs  de  France.,  paffaac 
.  '  par  Genève  >  eurent  la  curiolité  de 
'  ^voir  cette  enfant.    Ils  eurent  avec 
•  \  elle  une  ConVerfation  de  trois  heu- 
^  ■  res ,  8c  la  quittèrent  remplis  d  ad- 
miration *. 
i  f     Cependant  les  difputes  des  Ré-  î^^ou- 
^   formez  de  Genève,  avec  leurs Con- ^^^j^^^^jl^^s 
(  :  citoyens  Catholiques  ,    s'êchaufé-  à  l'occa- 
V  rent  extraordinairement ,  de  forte 
I  qu'il  en  naifloic  prefque  tous  les  [^^ 
<  jours  quelque  querelle.    Il  en  ar- religion 
riva  une  le  dernier  jour  de  cette 
même  année  >  qui  faillit  à  avoir 
des  fuites  très  -  fâcheufes.  Quel- 
ques Réformez  5  buvant  avec  un 
Prêtre j  Vicaire  de  l'Eglife  de  la 
Alaguelaine»  entrèrent   eiî  difpute 
avec  lui  ,  fur  quelques  articles  de 
la  Dodrine  de  Froment.    Le  Vi-^ 
caixe  s'obligea  de  prouver  la  fiar:^^  ' 
O  z  par 

*  Uottln^.  ^^8.  ex  Hiftor.  RCform.  Gcii. 
Turittt.MSC. 


3  1 6  Hiftoire  de  la  K(formation 

I  J32.  par  la  Sainte  Ecriture.  On  prit 
Ge  n  £.  jour  pour  c^la  chez  lui,  où  fe  trou- 
vérent  plufieurs  autres  Prêtres. 
Mais  le  Vicaire  ,  au  lieu  d  appor-» 
ter  la  Bible  ,  comme  il  l'avoit  pro- 
mis ,  fe  contenta  de  produire  un 
Théologien  Scholaftique  5  nomme 
Nicolas  De  Lyta^  qui  a  fait  des  glo- 
fes  fur  la  Bible.  Les  Réformez  fe 
moquèrent  de  cette  preuve.  On  s'è- 
chaufa  là-deffus  de  part  5c  d'autre. 
On  en  vint  aux  injures.  Un  des 
Prêtres  mit  Tépée  à  la  main.  Quel- 
cjues  autres  montèrent  au  Clocher, 
éc  fonnérent  le  Tocfin.  Plufieurs 
coururent  aux  armes.  Les  Ecclé- 
fiaftiques  &  les  Catholiques  s  af- 
femblérent  dans  la  roë  des  Chanoï^ 
nés  5  &  les  Réformez  dans  la  place 
de  la  Magdelainc.  Mais  les  Syndics 
&  le  Lieutenant  y  étant  accou- 
rus 5  &  ayant  fait  emprifonner  un 
Prêtre  ,  8c  3.  des  plus  mutins  d'en- 
tre les  Catholiques ,  qui  avoient 
été  les  agreffeurs  >  le  défordre  fut 
appaifé  *. 

Le  foir  ,  le  Confeil  s  étant  At 
femblé ,  fit  défenfe  aux  deux  par- 
tis >   de  s  attaquer  ,  de  quelque 

manié- 

Rofit  III.  Ch-  4.  MS.  Chouët4- 


delà  Sniffè.  Liv.  X.  317 

manière  que  ce  fut-,  ordonna  que  I  532» 
Froment  cefTeroit  de  prêcher  &  for-  Gens- 
tiroic  de  la  Ville,       qu'on  fevE- 
concenreroit  du  Prédicateur  ordi- 
naire qui  étoit  le  Ccrdelier  >  dont 
j'ai  déjà  parlé ,  nommé  Chnftophle 
Boqtiet  ou  Bouquet;  Il  fut  dit  au/ïl, 
qu'on  prieroic  le  Grand  Vicaire  > 
de  punir  les  Prêtres,  qui  avoient 
caule  le  défordre,  &  fonné  le  Toc- 
fin  ,  &  de  prendre  des  mcfures  , 
pour  avoir  dans  toutes  les  Paroif. 
Tes  de  bons  Prédicateurs  ,  qui  prê- 
chaffent  la  Parole  de  Dieu  dans 
toute  fa  pureté  {a), 

XI.  Les  Réformez,  perfuadez  de  I  53  J; 
bonté  de  leur  caufè  &  irritez  de 
infulte  que  les  Prêtres  venoient 
leur  faire,  proreftérent ,  quand 
-  jugement  du  Confeil  leur  fut 
Drononcé^  Qi£ils  iroient  ouïr  la  pa» 
oie  de  Dieu  par  tout  ou  ils  pourroicnîz 
')ue  perfonne  nwvoit  droit  de  la  leur 
Achér.  Us  exhortèrent  Froment  à 
ic  point  fe  rebuter;  &  le  lende- 
nain,  premier  jour  de  Tannée  153  g. 
.près  le  Sermon  de  Bouquet  ,  ils 
lièrent  chez  Froment  en  fi  grand  Froment 
1  ombre  ,  que   la  Sale  où  il  prê- 
O  3  choie 

(.*)  iMS.  Chouu  iù^ 


3 1 8  Hiftoïre  de  U  déformation 
j  ^^3.  choit,  ne  pouvant  contenir  tous 
place  du  ceux  qui  y  venoient,  ils  l'obligé- 
marché.  rent   daller  à  la  place  du  mar- 
llcfta^*^^'       nommée  le  Moiard ,  qui  étoit 
tion  du  pïès  de  là  5  &  on  h  fit  monter 
Peuple,  fur  le  banc  d'une  revendeufc  5  le 
Peuple  lui  criant  3  Prêchez  nous  la 
J^arole  de  Dieu  :  ce  qu'il  fit.  Tan- 
dis qu'il  préchoir,  le  Confeil,  aver- 
ti de  cette  nouveauté  ,  s'afTembla 
inceflammentj  &C  envoya  le  Sautier> 
pour  lui  ordonner  de  fe  taire.  Fro- 
ment répondit,  //  vaut  mieux  obéir 
i  Dieu  quaux  Hommes'^  &  conti- 
nua fon  Sermon.    Le  Confeil  irri- 
té envoia  des  gens  armez  pour  le 
fâiCr  5  mais  il  fut  fauvé  par  quel- 
ques-uns de  fes  Auditeurs  :  &  quel- 
que tems  après  ,  il  fortit  de  Ge- 
nève 5  ne  pouvant  plus  y  demeu- 
rer, à  caufe  des  dangers  oii  il  étoit 
Il  çÇt^y^^oïi  par  le^  Edirs  :  Car  le  fe- 
obligé   cond  de  Janvier  le  Confeil  défen* 
te^r^Ge'  ^'^      prêcher  fans  permifTion  des 
neve.  '  Supérieurs  ^  fous  peine  aux  Con- 
trevenans  >  de  trois  traits  de  cor- 
de pour  la  préniiere  fois  {a).  Fro- 
ment s'en  alla  dans  fon  Eglife  d 

zonm 


(a)  Id.  p.^.  Savionlll.76.77.  RofcC  III. 

Ch.S-Spanh.l.  c.  p.  54^ 


1      delaSuijfe.  Liv.  X.  319 

h;onan  ,  où  il  étoit  Miniftre  de-  j  5  3  j 
■puis  un  an  ou  deux  (4).  G  e  n  e 

1  Dans  ce  tems-là  les  deux  partis  v  e. 
Ictoient  à  peu  près  égaux  à  Gené- 
Ivc  j  foit  parmi  la  Bourgeoifie,  foit 
dans  le  Confeii.  Mais  le  parti  Ca- 
tholique paroiiToit  le  plus  fore  5 
étant  appuié  par  TEvêque  ,  par  le 
Clergé,  &  par  les  Fribourgeois , 
au  lieu  que  les  Réformez  n'éroienc 
foucenus  que  par  les  Bernoii.  En 
effet  les  Ffibourgeois  ne  laiffoient 
perdre  aucune  occâfion  d'exercer 
leur  zèle  à  Genève ,  pour  y  fou- 
tenir  la  vieille  Religion.  Le  Cor- 
delier  Boquet  ,  que  les  Syndic? 
avoient  trouvé  à  propos  de  retenir 
pour  feul  Prédicateur  5  écoit  Pro- 
teftant  dans  l'Ame ,  comme  je  l'ai 
dé/1  remarqué.  Il  avoir  prêché  l'A- 
yent ,  &  s'éroit  fi  bien  ménagé  dès 
le  commencement  ,  que  les  deux 
partis  l'alloient  également  écouter. 
Mais  après  le  départ  de  Froment, 
il  girda  moins  de  mefures.  Il 
î'expiiqua  plus  ouvertement  fur 
•ia  MclTe,  far  le  Ciilcc  des  Saints 
8cc,  ce  qui  le  rendit  odieux  aux 
O  4  Ecclé- 

( ')  Spanh.  l.  c.  il  met  Jumatum  ,  mai^ 
-  i-'Ilfins  Joute  une  fuLicc  d'iinpiclilon. 


320  Hifioire  de  la  Reformatmi 

ï533.Eccléfiaftiques>  &  câufi  de  gran- 
GïNE-des  divifions.    Cependant  leCon- 
feil  ordonna  qu'il  prêcheroic  en- 
core k  Carême,  &  qu'il  feroit  payé 
aux  dépens  des  Curez  des  fept  Pa- 
Trihourg  roiflcs.    Maîs  les  Fribourgcois  la- 
s  oppofe  y^j^j  appris  5  en  firent  tant  de  bruit, 
ment  à  ^  P^*"  ""^  Députation  de  fix  Per- 
laRéfor- fonnes  de  leur  Confeil  >  &  par 
mation        Lettre  menaçante,  qu'on  trou- 
néve.        ^  propos  >  pour  bien  de  paix, 
de  laiffer  aller  Boquet  ^  en  d'autres 
endroits  ,  ou  il  étoit  appelle  pour 
prêcher  le  Carême.    On  le  con- 
gédia donc  ,  &  on  lui  fit  un  pré- 
.  fent  fort  honnête.    Les  Députez 
de  Fribourg  arrivez  à  Genève  >  le 
23  e-  de  Février  5  avoient  déclaré 
aux  Genevois  :  Q^ue  s'ils  vouloient  fe 
faire  Luthériens^  (c'étoit  leur  ftyle) 
Fribourg  r en  onceroit  à  leur  Alliancet 
Les  Genevois  leur   répondirent  5 
Q^ils  vouloient    vivre  comme  leurs 
préde^effeurs  :  Qu'ils  faifoient  tout  leur 
poffîlfle  pour  empêcher  rintrodu^ion 
de  la  nouvelle  Do^rine^  &  même  qu  ils 
avoient  exhorte  le  Ficaire  de  l'Evêque^ 
à  pourfuivre  cette  affaire  vivement^ 
parce  quelle  étoit  Eccléfiaftique ,  &  de 
fin  reffort.    Les  Députez  de  Fri- 
bourg 


ve. 


delaSuifetl^.  X.  321 

bourg  ayant  reçu  cette  réponfes'en  i  533, 
retournèrent  fatisfaits  {a),  G  e  n  i- 

Au  mois  de  May  on  permit  Tim^  v  e. 
prenfion  de  la  Bible  en  François  : 
mais  on  défendit  d'imprimer  les 
livres  de  Controverfejécrits  en  cette 
Langue ,  quoique  les  Bernois  euf- 
fent  demandé  qu'on  le  permit*. 

Environ  ce  tems-làj  Froment^^^ 
.  ayant  entrepris  de  retourner  à  Oc-ç^^^^''^^,^ 
neve,  y  fut  en  grand  danger  de  la  primez 
vie.    Etant  fur  le  Pont  du  Rhône,  à  Gené- 
il  rencontra  une  proceffion  3  avec 
une  grande  troupe  de  Prêtres  ,  qui 
voulurent  l'obliger  à  fê  mettre  à 
genoux  devant  leur  Croix.    Il  le 
refufa.    Là-deffus  une  troupe  de 
Femmes  bigottes  5   qui  fuivoient 
la  proccfTionj  plus  animées  que  les 
Prêtres  3  lui  fauta  dcffus ,  Se  vou- 
lut  le  jetter  dans  le  Rhône  j  mais 
il  fut  garanti  par  quelques  Réfor- 
mez, qui  fe  trouvèrent  là  heureu- 
fement ,  Se  qui  le  tirèrent  de  leurs 
mains  {b), 

La  difperfion  des  Paf^eurs  n'en- 
traîna point  celle  du  Troupeau.  Les 
O  5  Ré. 

(<)  Savion  1.  c.  Rofit  IIL  C.  ^.  Sj>anh.<;4. 

I*  MS.  Chouer. 


322  H}J}oire  de  la  BJformatiûn 
1533»  Réformez  de  Genève  ,  quoique  pri- 
des  ^*^"f  ^  Dodeurs,  ne  laiffoient  pas 

fem-  ^'^^'^         affemblècs  fecretes , 

bices.  n-vais  de  nuit ,  où  les  plus  habiles 
lifoient  1  Ecriture  Sainte  ,  l  expli- 
quoient  le  mieux  qu'ils  pouvoient, 
faifoient  des  prières  >  &  autres 
A(ftes  de  pieté.  Quand  il  venoit 
quelque  Etranger  ,  bien  verfé  dans.i|i" 
la  connoiiïance  de  FEcriture ,  ils^l", 
le  reccvoient .  &;  i  ecoutoi^^nt  avec 
flvidiré.  Ils  érablirent  même  en- 
tr'eiix  une  bourfe ,  pour  le  foula- 
gement  des  pauvres  de  leur  petite 
Troupe,  tant  Etrangers  que  Boijr- 
geois.  Un  jour  entr'autres ,  ils 
s'aiïcmblérent  hors  de  la  Ville , 
dans  un  jardin  du  P(é  l'Evêqtte  > 
■  où,  après  les  exercices  ordinaircs>  ^ 
ils  communièrent  entr'eux,  &  ^*  ^1 
renr  la  Cène  pour  la  prèmière  fois. 
Ils  choifirent  pour  la  leur  diftribuer, 
un  Bonnc:ier  nommé  Jenn  Gueriny 
quiètoit  plein  de  zUe  &  de  pieté, & 
qui  pour  un  Arrifan,  entendoic 
bien  l'Ecriture  Sainte.  Le  Confeilj 
ayant  eu  avis  de  ce  qui  s'ètoic 
pafle,&  prefTè  par  les  Catholiques, 
bannit  G" /im'// 5  qui  fe  retira  zMoNt- 
le'utrd^  où  il  exerça  quelque  tems 

le 


de  USuilJe.  Liv.  X.  323" 

le  Sr.  Miniftére,  &  de  là  il  pafla  1533. 
dans  le  Comté  de  NtushutA^  où  il  G  e  x  £- 
far  aiifli  reçu  Minifire  ,  &  il    y  vE. 
moiirut  Tan  1549  (^). 

Les  Réformez  firent  en  même 
tems   revenir  Farel  j  mais  ayant 
auiïi  été  maltraicé  >   fans  aucun: 
i  égard  pour  (a  Patente  de  Berne,  il 

!fuc  obligé  de  Te  retirer  {b). 
Ces  mauvais  traitemens  ne  fai- 
.  foient  pourtant  pas  perdre  courage 
aux  Reformez  ^  ou  du  moins  ils 
n'empéchoient  pas ,  que  de  tems 
en  rems  ils  ne  filfent  quelque  coup  • 
d'ècht.     Un  jour  entr'autres  urt 
Jacobin  prêchant  dans  le  Couvent 
de  Ton  Ordre  ,  nommé  Palais ^  dé- 
clama horriblement  contre-  ceux 
cu'il  appel! oit   Luthériens,     Il  fe  . 
trouva-h  un  jeune  Homme  ,  nom- 
'iné^^Piirre  Robe  t  Olivetaii  y  parent 
de  Cal'^n,  Se  natif,  comrne  lui,  de 
jSJojorh  en  Picardie,  qui  étoit  chez  ' 
un  Genevois  Proreftant  ,  nommé 
Jean  Chdutcmps  y  en  qnaliré  de  Pré- 
cepteur de  Tes  enfans.     Il  ne  put 
fouffrir  les  criaillerics  du  Jacobin, 
te  le  réfuta  publiquement/ Sa  har- 
O  6  diclTe 
(,0  Id.  îbU.  MS.  Cho.ict.  Hotting.  66'j, 
Ku)  MS.ChoïKC. 


324  Hiftûïre  de  la  Ké formation 

I  S33«  cl^effe  excita  un  grand  trouble  dans 
Ge  N  E"  rAfleniblétr  ,  &  lui  auroit  coûté  la- 
vie  5  s'il  n'eut  été  fauve  par  les 
foins  de  Clavtd&  Bernard  y  &  de  Jean 
Chante mps  fon  Maitre ,  qui  le  ti- 
rèrent de  bonne  heure  d'entre  les 
mains  des  Moines ,  &  le  mirent 
Aventu-  fureté.    Il  fut  condam- 

res  de  né,  par  le  Confeil  y  au  bannifle- 

Hveta?'  ^  Neuchatel,. 

où  il  fit  imprimer  la  Bible  en  Fran- 
çois 5  Tan  1535.  Enfuite  il  fut' 
Rome  l'an  1538.  où  on  Tempoi- 
:  fonna  ,  il  fut  emporté  par  la  force:  ' 
du  poifon,  8c  mourut  à  Ferrare  (a). 
Peu  après  le  bannilTement  d'O- 
livctan  >  au  mois  de  Mars  j  uit 
Etranger»  qui  demcuroit  à  Genè- 
ve depuis  un  an ,  s'avifa  de  dire 
une  fois  dans  une  grande  com- 
pagnie, que  tous  ceux  qui  ?lloient 
à  la  MeiTe  étoientdes  Idolatres>ôc 
des  mauvais  Chrétiens.  Il  n'ea 
falut  pas  d'avantage,  pour  le  chat 
fer  de  la  Ville.  Le  Confeil  le  bannit 
auffij  avec  défenfe  d  y  ren'rer  ja» 
mais  5  fous  peine  de  la  vie  (^). 
Quelques  Bourgeois  >  des  plus 

zèles 

(m)  Savîon  III.  77.  78.  Spanh,^C> 
W  SavÎQn  ],  c» 


delaSuife.  Liv.X.    32  J 

zelez  pour  la  Réformation  5  voyant  j  j  3  5; 
l'état  des  affaires  de  la  Religion  G  e  n 
à   Genève  allèrent  à  Berne;,  fevE. 
plaindre  de  la  conduite  du  Con- 
feil>  &  implorèrent  la  protection 
de  l'Etat.    Les  Seigneurs  de  Ber-  lettre 
ne  écrivirent  aux  Genevois  uneLet-  ^"1^^"' 
tre  extrêmement  forte  fur  ce  qu'ils  Berne  à 
avoient  infulcé  Farel  »  nonobftant  celui  de 
>,  la  Lettre  de  Créance,  qu*il  avoit  Genève 

d'eux  j  ^'ils  avoient  chalfé  Gué" 
>,  fin  ,  &  maltraité  tous  ceux  qui 
entreprenoient  d'y  aller  piêcher 
l'Evangile  ;  enfin  fur  le  peu  de 
»  caà,  qu'ils  avoient  fait  de  leurs 
„  prières  >  pour  l'impre/Tion  des 
5>  livres  dcControverfe ,  concluant, 
>,  que    fi  G^îneve   vculoit  vivre 
avec  eux  en  bonne  intelligence^ 
5,  on  dtvoit  pcrmerrre  la  piédica- 
5jtion  de  l'Evargile  (rf)  „.* 

Cette  Lettre,  qui  arriva  à  Gene- 
ve  le  25e.  Mars  ,  fuc  l'occafion 
d'un  vacaime  terrible  dans  cette 
Ville.  Le  lendemain  plus  de  deux 
cent  Catholiques  ,  animez  par 
les  Prêtres  5  alléient  à  l'Hôtel  de 

Viile> 

(<»)  MS.  Chouêt,  Savl'on  1.  c.  Bened.  Tur-  ' 
lin,  HilK  Rcf  Gcnev.  apud  Scidtu.  An- 
JEvangcl.  p,  lu.  H, 


32  6  H'îjîoire  de  U  Réformaticn 

Ville,  demander  tumultuairemcnî 
Ge  N  E- juftice  5  contre  ceux  qui  Tavoient 
foUicitée.  LeConfeil  renvoia  cette 
troupe  tumultueufe  ,  &c  leur  or- 
donna de  fe  tenir  en  repos  ,  les 
affûrant  qu'on  ne  vouloir  pas  fc 
départir  de  la  Religion  de  leur" 
Pérès  (^).  Le  Confeil  fit  appelle 
les  Réformez  ,  qui  étoient  cauft 
que  les  Seigneurs  de  Berne  avoien 
écrit  cetteLcrtre  ,  les  en  cenfura  5 
leur  fit  défenfe,  de  leur  plus  rie 
écrire  des  affaires  delà  Ville (^). 

Mais  ces  foins  du  Confeil  ne  fu 
rent  pas  fuffifans  ,  pour  appaifec 
la  fëdition.  Comme  le  Grand  Con- 
feil des  Deux  Cents  devoit  s'aC- 
fembler  le  Vendredi  >  2  8^-  Mars» 
pour  délibérer  fur  les  affaires  de  la 
Religion  >  la  nuit  du  Jeudi  au 
Vendredi  î  les  Catholiques  prirent, 
ks  armes  j  &  s'afTembléient  chez 
le  Grand  Vicaire,  où  ,  animez  par 
les  Eccléfiaftiques,  ils  s'engagèrent,/ 
par  un  Serment  folennel,  de  faire  pé- 
rir les  Luthériens  {c).  Le  jour  étant 

venu> 

W  MS.  Chonet  p.  6.  Spanh,  <p.  Rojjgt 
.  III.  Ch.  9. 
■  W  Ko/è/lII.Ch.iO.. 

(c;  Sj'anh.  Le. 


IdelaSmjfc.  LîV.X.  327 
Ivenu  5  plus  de  fept  cents  Hommes  i  53 
armez,  ayant  à  leur  tète  les  Cha- CoW.^- 
noines  ?  &  d'autres  Prêtres   au/li  des 
armez  ,  allèrent  à  TEglife  de  *Sf.  Catholi- 
JP/Vrre  pour  faire  former  le  Tocfin.  cont/c 
Tkm  f  'and.ly  Ciroyen  d'une  ho- les  Ré~ 
nête  famille  ,  zèlé^pour  le  bien  de^^^^-^* 
la  Patrie  ,  8c  qui  Tui  avoit  rendu 
de  grands  fervices  ,  voulut  s'op- 
pofer  à  cette  fédirion  ;  &  pour  cal- 
mer la  fureur  des  Catholiques  ,  il 
leur  repréfenra  les  funeftes  fuites 
de  ces  difTepfons.  Mais  fes  foins 
charitables  furent  mal  recompen- 
fez.  Il  n'en  remporta  que  des  in-  Sédition 
jures  &  des  coups:  on  le  bleffa  J^^^^.^^^* 
d'un  coup  d'épée  &  il  auroit  été 
malTacré  fur  la  phce,  s'il  ne  s'étoic 
promprement  fauvé.    D'autre  cô- 
ré.  Les  Réformez  ,  avertis  fecre- 
tement   par  un  bon  Prêtre  ,  du 
complot  tramé  contr'eux  s'étoienc 
flffemblez  en  petit  nombre,  (  car 
ils  n'étoient  au  plus  que  60.)  dans 
la  maifon  d*un  Citoyen  ,  nommé 
Ni.olus   Baudichon  ,  de  it  Adïifon 
Neuve  ,  où  ils  avoient  déjà  accou- 
tumé de  s'aiïcmbler  5  pour  faire 
leurs  exercices  de  picré  :  De  là  ils  ^ 
ailéienc  dans  la  ruë  da  ^.lem.ws , 


ou 


328  Hïjlûîre  ae  la  Reformat  ion 

1533.011  ils  demeurèrent  la  plupart, 
Gene-&  s'y  préparèrent  à  fe  bien  def- 
fendre  contre  leurs  ennewïis  ,  im- 
plorant le  fecours  de  Dieu.  Le 
Confeil  >  averti  de  cette  émotion, 
envoia  inceffamment  deux  Syndics 
dans  TEglife  de  St,  Pierre  ,  pour 
faire  retirer  les'^  Catholiques  ,  ôc 
deux  autres  à  la  ruë  des  Allemans 
pour  faire  la  même  chofeauxRé 
formez,  mais  inutilement.  Les  Ca 
tholiques ,  ayant  appris  que  le 
autres  étoient  en  armes  >  &  ani 
mez  par  les  Prêtres ,  firent  fonne. 
le  Tocfin  ,  &  s  affemblérent  au  Mo 
lard  >  où  ils  furent  bien-tôt  fuivis 
par  un   grand  nombre  d'autres 
qui  fe  voyoknt  authoriiez  par  1 
plupart  des   Syndics  ,   qui  s'y 
trouvèrent  parmi  eux.  Ils  firent 
venir  de  l'Artillerie,  pour  battre  la 
Mâifbn  de  Baudichon,  dans  la  pen 
fee  que  les  Réformez  y  étoient  en- 
core. Ils  s'avancèrent  pour  les  at- 
taquer, ôc  dans  la  fureur  qui  les 
animoit ,  ils  firent  fermer  ks  por- 
tes de  la  Ville,  afin  qu'il  n'en  pût 
pas  échapper  un  feul.  Ils  alloient 
^'autant  plus  hardiment  à  certe  ex- 
pédition ,  ^ue  TEvêque  leur  avoit 

donna 


de  la  Suijfe.  Liv.  X.  329 

lonné  Carte  blanche^  comme  on 
jarloic  alors ^  c'eft-à  dire  un  blancGENjs- 
Igné  ,  pour  les  alTûrer  qu'il  ap-  v£. 
prouveroit  tout  ce  qu'ils  feroient 
contre  les  Ennemis  de  la  Religion 
Carholique.  On  allure  que  les  feuls 
Prêcres  armez  faifoient  le  nom- 
bre des  500.  Hommes  ,  mais  je 
crains  bien  qu'il  n'y  ait  de  l'er- 
reur dans  ce  compte.  Quoi  qu'il 
en  foit ,  quelque  grand  que  fut 
leur  nombre,  ils  n'ofëient  pas  en- 
core attaquer  les  Réformez,  ^  at- 
tendirent quelques  autres  Com- 
pagnies de  gens  armez,  dont  l'une 
étoit  conduite  par  un  Chanoine  > 
nommé  De  Fegia ,  qui  vouloir  met- 
tre le  feu  lui-même  à  la  maifon  > 
cil  les  Réformez  s'étoient  affem- 
blez.  Le  dernier  Capitaine  étant 
venu,  il  attaqua  l'un  des  Syndics* 
Jean  Phil.ppe  ,  Capitaine  de  la  Ville, 
qui  pafToit  pour  Lurhérien  ,  Se  la 
jetta  par  terre.  Mais  les  Soldats 
de  Jean  Philippe  prirent  îe  parti  de 
leur  Capitaine  ,  bltfférent  fon  ag- 
grefleur  ,  &  di/Tipérent  fa  Com- 
pagnie. Cependant  les  Réformez, 
renforcez  par  un  nombre  confidc- 
ruble  de  Bourgeois  jufqu  à  200* 

Hom- 


330  Hiftûire  de  la  Kéformation 

I  Hommes  ,  s'étoient  rangez  en  ba- 
Ge  NE- taille  5  avoient  repris  courage,  8c 
vE.  s'étoient  mis  à  genoux  pour  prier 
Dieu  >  s^attcndant  d'être  attaquez. 
En  effet  Is  Chanoine  De  Vtgia  s'a- 
vançi  pour  les  attaquer,  mais 
ayant  appris  que  Tautre  Capitai- 
ne 5  fur  qui  il  comptoit  ,  s  etoit 
retiré ,  il  perdit  ceurage  &  re- 
brouffa  vers  le  Molard. 

Jamais  Genève  ne  fe  vit  dans 
un  plus  grand  danger ,  &  il  fem- 
bloit  qu'il  s'alloit  faire  un  maffa- 
cre  horrible  des  deux  cotez.  Car 
jfi  les  Catholiques  étoient  furieux, 
les  Réformez  écoient  réfolus  à 
vendre  chèrement  leur  vie.  L'air 
rentiffoit  des  cris  horribles  >  que 
poulToient  les  Prêtres ,  (  comme 
des  Bacchantes  en  fureur ,  )  &  des 
lamentations  d'une  infinité  de  gens, 
affligez  de  voir  le  Pére  prêt  à 
égorger  fon  Fils  ^  le  Frère  altéré  du 
Sang  de  fon  Frère ,  ôc  les  parens 
de  celui  de  leurs  parens.  Enfin 
racharnement  croit  venu  à  un  tel 
point,  que  nul  n'ofoit  parhr  d'ac- 
commodement 5c  de  paix  ,  de  i 
peut  d'être  traité  comme  Pierre  i 
Vandel  &  de  paffsr  pour  Hérétr-  ' 

que. 


deU  Suijfe,  Liv.  X.  3?I 
que.    Heureufement  la  Providence  I  5  3 
de  Dieu  amena-là  quelques  honê-  Gene- 
îcs   Négoîians  de  Fribourg  ,  quî^^E. 
voyant  avec  douleur  ce  qui  fe  paf- 
foit,  s  emprelTérent  à   appaifer  ce 
tumulte.    Ils  allèrent  d'un  parti 
à  lautre ,  &  les  appellent  par  lès 
tendres  noms  à'^lmls  5c  de  Cow- 
bourgeois  ^  ils  les  exhortétent  à  la 
paix.  Les  Réformez  y  confenrirent 
d  abord  ,  ne  demandant  autre  cho-  Sedi- 
fe  que  de  vivre  en  paix  ,  fuivant  ^!!!î!,;r^^^ 
les  moavemens  de  leur  conkien-  par  des 
ce,  &  n'étant  pas  tant  irritez  con-  ^?égo- 
tre  leurs  Combourgeois  ,  que  con-  p^^^'^^^^^ 
tre  les  Prêtres  ,  qui  étoient  les 
flambeaux  de  la  fédition.  Mais 
ces   bons  Médiateurs  trouvèrent 
plus  de  réfiftance  du  cô:é  des  Ca- 
tholiques.   Ils  eurent  beau  repré- 
fcnter  au\  P. êtres,  Qu'//  leur  con- 
venait  mieux  d'are    à  l  Eglife  ,  & 
d  y  prier  ,  que  de  s'armer  comme  ils 
fu'ijoient  >  &  qu  'ih  dévoient  exhorter 
U  Peuple  a  la  paix  plutôt  que  de  ra- 
nimer a  il  guerre  j  mais  les  Prêtres 
furent  inflexibles.    Ainfi  ces  deux 
Fribourgeois  allèrent  trouver  les 
Magiftiats,   qui   étoient  dans  la 
troupe,  &  leur  répr&fentérent  leur 

devoir 


332  Hiftoire  de  la  Réfarmation  ' 
1533.  devoir,  &  le  mal  qui  alloit  arri- 
G  E  N  E-  ver  de  cette  levée  de  boucliers. 
"Vï*       Alors  les  Confeillers  publièrent  un 
ordre  >  de  fe  difpofer  à  la  paix.  Les- 
Prêtres  au  contraire  exhortèrent  le 
Peuple  à  aller  attaquer  j  mais  IcS' 
Fribourgeois   leur   dirent  ,  Que 
quant  a  eux  y  .ils  ne  voudraient  pas 
confeiller  aux  Genevois ,  de  ségo'gîn 
les  uns  les  autres  >  &  de  fe  mettre» 
les  Pérès  contre  les  Enfans  ,    &  teti 
Fi  ères  contre  les  Frères:  Qtie  d'ailUurr 
les  Réfor?nez  les  attendaient  en  ft  bon*>\ 
ne  dijpojition  ,  qu'ils  aimcroient  mteu% 
(  eux  les  Fvibourgois  )  être  de  liwt\ 
iké ,  que  du  cote  des  Prêtres  , 
quils  ctoient  en  plus  ^rand  nombre  y 
quils  ne  fe  le  figuraient,    Qu^î  fi  les 
Frêtres  voulaient  sji  al  er  frotter ,  ik 
trouveraient  a  qui  parler.  Là-d^-ffusi 
le  Peuple  >  qui  écoit  autour  deuX! 
s  écoula  peu  à  peu  ,  difànt  ,  Nour^ 
ferions  bkn  fols  de  nous  égorger  les  ut^< 
les  autres  pour  C amour  du  Clerge\  Dut 
s  ils  ont  quelque  difficulté  avec  les  Ré^ 
formez  >  ^« '^'^  l^  terminent  entreux'j 
ou  bien  >  quils  difnutènt  avec  eux  par 
l'Ecriture  i  plutôt  que  par  l'Epée,  Les  i 
Prêtres  fe  voyant  abandonnez  dtt  i 
peuple,  fe  laifférent  enfin  gagner» 


de  USuife.  Liv.  X.  333 

Se  confentirent  à  faire  la  paix.  Les  1  533. 
deux  Partis  fe  donnèrent  recipro- 
]uemcnt  des  otages  »  &  le  lende- 
nain  le  Confcil  des  LX.  fit  publier, 
^  fon  de  Trompe  ,  les  Articles  fui- 
^^ants.    „  lO.  Que  les  inimitiez 
)  cefleroienc  entre  les  Eccléfîafti-  mode- 
^  ques  &  les  Laïques  ,  Que  cha-  ment: ou 
)  cun  vivroic  en  paix  >  &  qu'on 
y  ne  feroit  aucune  infulte  à  per-  pour  U 
i  fonne  ,  ni  par  parole  ni  par  paix. 
i  aflion. 

>,  20.  Que  nul  n'eut  à  parler 
,  contre  les  Sacremens  de  TEgli- 
)  fe ,  &  que  chacun  pût  vivre  en 
.  toute  liberté, 
jj  30.  Défenfê  de  manger  de  la 
viande  le  Vendredi  &  le  Samedi. 
»  40.  DéFenfe  de  faire  ou  Me  di- 
re des  cho/cs  capables  de  fcan- 
dalifer. 

„  f  o.  Défenfe  de  prêcher  fans 
la  permiflion  des  Supérieurs  Ec- 
cléfîaftiques  ,  &  des  Syndics. 
»  60,  Défenfe  de  prêw^her  autre 
chofe  ,  que  ce  qu'on  pourroit 
prouver  par  l'Ecritutc  Sainte  „. 
Le  Dimanche  >  30^-  Mars>  les 
culiers  jurèrent  l  obferva  ion  de 
tte  paix  ,   entre  les  maiiis  des 

Syn- 


334  Hijlolre  de  la  K.cformatîon 

1533.  Syndicsj  &  les  Ecdéfiafticjues  er 
Gène-  tre  les  mains  du  Vicaire  de  l'Ev^ 
^  ^'       que  5  à  peine  pour  la  première  foi; 
de  foixante  fols  d'amende  &  pot 
la  féconde,  de  la  même  amenda 
&  de  trois  jours  de  prifon  au  pai 
&  à  l'eau  5  &  pour  la  troifiénie 
de  la  même  amende  encore  &  c 
banniflement  pour  un  an  *. 
Incen-     Xlf.  Pendant  que   les  Gen( 
^niw  étoient  ainfi  divifcz  cntr'cu 

en  '^W^-pQyj.  caufe  de  Religion,  6c  anime 
les  uns  contre  les  autres  comrri 
les  ennemis  les  plus  acharnez,  u 
ennemi  fecrec  des  SuiiTes ,  leur  fu 
cita  des  Incendiaires  ,  pour  fe  var 
ger  deux,  fans  s'expofèr.  Dar 
une  Diette  des  Cantons  aflembh 
à  Einfidley  vers  la  fin  d'Avril,  c 
fut  averti ,  qu'il  y  avoit  dans 
Suifle  un  grand  nombre  de  fcélérat 
&  d'Incendiaires  ,  dont  l'un,  non 
iTié  George  BUri ,  de  Munchtn  Btic 
fée  ,  ayant  éié  pris  à  Fiovvenfelû 
avoit  avoué  ,  que  ant  en  P; 
mont,  avec  trois  de  ks  Can^ 

„  rade 

Savlon  111.78.  81.  ^ofetlll.  CL 
Spitnh.   59.  60,   îhtt'v^r,    Vita  T'.rei 

671.  671.  MS.Chouct.  7-  Ben.  ïum 
1.  c.  35P7. 


deUSuife.  Liv.  X.  335 

„  rades,  le   Carême  dernier,  il  I  5  33. 

avoir  rencontré  un  Seigneur  Ita-  Inceîi- 
,  lien    de  grande  taille,    entre ^^^l^" 
..Tvrée,  &   la  Fal-d' Ao[le -,  Que^''^'"'^'' 
j  cet  Homme  les  avoir  engagez  à 
,  mettre  le  feu  en  divers  endroits^ 

dans  les  Cantons  de  Zurich  & 
5  de  Birne  en  leur  donnant  à  cha- 
5  cun  un  florin  d'or  de  récom- 
5  penfe,  8d  qu'il  leur  avoir  pro- 
^  mis  de  leur  en  donner  tout  au- 
)  tant  pour  chaque  maiion,  qu'ils 
,  réduiroient  en  cendres.  Il  dit 
,  auffi  ,  Qî[\\s  étoient  environ 
,  foixantc  Incendiaires  ,  aflemblez 
,  dans  le  Canton  de  Berne  ;  qu'ils 
,  étoient  prefque  tous  habillez  d*u- 
,  ne  manière  uniforme ,  pour  pou- 
,  voir  fc  reconnoître  entr'euy , 
3  fâvcir  ,  en  curcles  blanches  > 
,  doublées  de  rouge  5  le  canon 
^gauche  découpé,  avec  une  dé- 
o coupure  à  tous  les  deux,  au- 
,  deiïous  du  genoux  ,  à  la  mode 
5  des  Lanfqucnets  >  &  qu'ils  por- 
,  toient  un  petit  bâton  blanc  à  la 
,  main  „.  Les  Cantons  ,  ayant 
écouvert  cette  pernicicLfe  Cofîju- 
arion ,  prirent  de  bonnes  mefurcs 
our  s'en  garantir  ,       par  i\\  ce 

com- 


336  Hîjlôire  de  la Réformatton 

î  533.  ce  complot    abominable  échoua 
Incen-  On  ne  douta  point ,  que  ce  Sei 

^TinHle  S"^"^  Italien  ,  de  grande  taille 
n  mjje,  2^^^  parloit  Blari  >  ne  fut  le  Mar 
quis  de  Alufs  ,  qui  etoit  en  fureu: 
contre  les  Cantons  ,  ^  parriculié 
rement  contre  celui  de  Zurich  & 
de  Berm ,  parce  qu'ils  avoient  L 
plus  aidé  aùxGrifons,  à  renverfe 
fbn  petit  thrône  8c  a  détruire  f 
Tyrannie^  On  le  crut  d  autan 
plus  aifément  qu  on  favoit ,  qu'i 
s*étoit  retire  dans  ces  quartiers  di 
Piémont  *.  Peut-être  fut  ce 
cette  occafion  ,  que  les  Bernois 
apprenant  les  Complots  étrange 
qui  fè  faifoient  contr'eux ,  fe  tin 
rent  fur  leurs  gardes  »  &  envoie 

tLeii.  rent  des  Députez  t  par  tout  leu 

Mars,  p^yj  ^  pour  exhorter  leurs  Sujets 
à  fe  pourvoir  d*armes  Se  de  muni 
trons,  afin  de  pouvoir  fè  défendre 
en  cas  d*attaque.  Sans  doute 
avant  la  découverte  de  ces  Incen 
diaires,  ils  foup^onnoient  quelqu 
ennemi  plus  puiffant  &  plusr  re 
doutable  t« 


StettUr  II.  61.  <Î3.  a.  S^vion  1.  C.  Si 


deUStihfe.  Liv.  X.  337 

Dans  cctems-Jà  les  Sdgneurs  1533, 
ie  Zurich  remirent  fur  pié  l'Ecole  z^irkh 
ie  Cap^d ,  qui  avoit   été   défolée  T^^^^j'^^ 
Dar  la  guerre  de  1551.  ^''^^^^  ^^*/'^- de  Cap- 
a  y  de  Rbynavv ,  qui  en  avoic  été  pel. 
^rieur  ,  &  qui  en  étoi:  TAdmi- 
liftrateur  ,  avoit  reparé  cette  mai- 
Ton  depuis  la  guerre,  dans  refpace 
i'une  année  ,  ôc  à  fa  requifition  , 
le  Confeil  de  Zurich  y  rétablit  TE- 
:oie  le  premier  de  Mars  5  &  y 
mit  quatre  Ecoliers ,  pour  y  être 
entretenus  ,  aux  dépens  de  la  mai- 
fon,  avec  d'autres,  qui  y  furent 
.aux  dépens  de  leurs  parens.  On 
les  enfcignoit  là,  jufques  à  ce  qu'ils 
fulTent  en  état  de  faire  des  étu- 
des plus  confiderables ,     alors  on 
les  faifoit  venir  dans  la  Ville.  L'an 
1541.  rime  Simkr  quitta  cette  ad- 
miniftration  ,  &  prit  un  Miniftére 
dans  le  Frcjawpt ,  avec  la  dignité 
'de Doyen  de  ce  quartier- là  >  &y 
'demeura  jufqu'es  à  l'an  i  557.  qu'il 
'mourut  5  le  9c.  Juillet ,  âgé  de  71. 
ans.  Il  fut  Pérc  du  célèbre  Hifto- 
rien  Jofias  Simler.    Après  lui  on 
confia  ladminiRration  de  cette  mai- 
fon  à  des  gens  ,  qui  ne  s'accom- 
modoient  pas  avec  les  Maîtres  3  ni 
7  (?;;/.  /r,  P  avec 


33S  Hijloire  de  la  Réformât i en 

I  5  3  3 ,  avec  les  Ecoliers.  Ainfi  cette  Eco. 
le  fut  abolie  Tan  1 547.  8c  les  Eco' 
liers  qu'on  y  entretenoit ,  fureni 
incorporez  au  Collège  de  Fraw 
Munflcr  à  Zurich  >  qui  avoit  ét< 
fondé  l'an  1538.  comme  nous  h 
dirons  en  fon  lieu  {a), 

Trogits     Un  Hiftorien  Catholique  nou; 

for^m^*''  ^PP^^^*^  '  ^^^^^  année  -  là  dam 
'tion  le  Pays  des  Grifbns,  plufieurs  Corn- 
dans  les  munautez  embraflerent  la  Réfor- 
Gnlons  nation.  Il  auroit  été  bon  ,  qu'ij 
nous  en  eut  appris  les  noms  {b). 
Aravv  '  Dans  le  même  tems  ceux  de  la 
établit    Ville  ài^TAW  »    établirent  chez 

pour  TE-ducâtion 
^  *     de  leur  jeunefle.  Les  Seigneurs  de 
Berne  les  y  encouragèrent ,  &  leui 
promirent  ,  que  s'ils  ^voient  des 
Ecoliers  ,  de  qui  on  put  concevoir 
de  bonnes  efpérances  >  ils  feroient 
du  bien  à  ce  Collège ,  comme  ils 
en  faifoient  aux  Villes  de  Brouk^&c 
de  Zoffingue  {c). 
Soins     Ces  Seigneurs  continuèrent  cette 
des  Ber-  ^nnée  ,  à  faire  voir  leur  zélé  pom 
k^^Ré- 1*  Réformation.    Les  V.  Cantons 

Câtho^ 

(a)  Hotting^ôy^.  676. 
(è)  Bucelln.  apud  Hor//«^.  57f. 
(r)  B.  l«/?r.  244. 


deUSmjfe.  Liv.  X.  339 

Catholiques  continuèrent  de  leur  1533, 
côté  dans  leur  ardeur  pour  le  Pa-  formez 
pifnie.    Ils  ordonnèrent  aux  Ré-  ^J^f/^^; 
formez  de  Bremgarte  ^    d'aller  k^"^^^^ 
'confelfer  à  Einfidle,  à  la  fête  delà 
Pentecôte  >  &  d'y  communier.  Le 
Baillif  de  Bade  parloit  fort  inju- 
Vicufement  contre  laDodrine  Evan- 
gelique.    Il  avoit  même  dépofé  & 
:hafie,  (js  ne  fai  pourquoi)  le  Mi- 
nière de  Tœgcrfeld  5  Village  mi- 
parti,  près  de  Zurîzach.  Les  Bernois 
krivirent  une  Lettre  fort  civile  ^ 
:es  cinq  Cantons  >  pour  les  prier 
de  lailTer  en  ^aix  les  Réformez  de 
Bïemg^rte.    Mais  comme  ils  n'en 
surent  aucune  réponfe  5  ils  donnè- 
rent ordre  *  à  leurs  Députez  ,  qui  ,  ^-e-i, 
partoient  pour    la    Diette   ordi-  ^ 
laire   de  la  St.  Jean.  lO.  De  de- 
Tiander  une  réponfe  à  ces  Cantons. 
20.  De  fe  plaindre  aux  autres,  de 
leur  injuftice ,  &  de  Tinfra^lion 
qu'ils  faifoient  au  Traité  de  paix 
par  CCS  violences.    30.  De  deman- 
der qu'on  punit  le  Baillif  dp  7?^^^, 
de  ce  qu'il  avoit  mal  parlé  contre 
'la  RéFormation.    Enfin  40.  que  le 
Miniftrc  de  Tœgerfeld  fut  rétabli  (a). 

P  z  L'Abbé 


340  Hifloïrede  U  Kcformatîon 

J533.     L'Abbé  de  S,  Gai  y  à  rimitaîion 
Soins  de  ces  Cantons  ,  malrraitcit  aulT 
.des  Ber-  les  Réformez  de  fes  terres.  Er 
les^Rè'  Particulier  il  ne  vouloit  pas  per- 
formez  mettre  aux  gens  de  Rofchacb  &  d( 
Sujets    VFMktUh ,  de  bârifer  ,  de  bénii 
bè  dt mariages  ,  6c  de  faire  la  Stc 
<Î4//     Cène  3  dans  leurs  Eglifes.  Les  Dé- 
putez de  Berne,  pour  la  Diète; 
qui  s'afTembloit  à  Bade  en  Juillet 
^Lei^.  eurent  ordre,  *  de  prier  ce  Prélat 
Juillet,  que  puifqu'il  permettoit  le  plus  i 
fes  Sujets  >  favoir  >  de  prêcher  & 
de  vivre  dans  la  Religion  Réfor 
mée  ,  il  devoit  aufTi  leur  permet 
tre  le  moins.    Ils  dévoient  encore 
lui  repréfentcr  ,  que  puifijuil  avoi 
été  rétabli  en  vertu  du  traité  de  pat. 
de  Suijfe  ,  il  devoit  obferver  ce  Traita 
a  l'égard  de  fes  Sujets  (a). 
Claris     II  Y  eut  aufli  des  troubles  dan 
le  Canton  de  Claris ,   vers  la  fir 
de  Tannée  3  au  fujet  de  la  Reli 
gion.    Les  Seigneurs  de  Berne  ] 
envoiérent  des  Députez  le  i  8^-  De 
cembre^  pour  contribuer  avec  le; 
autres   Cantons  ,  à  y  rétablir  1; 
paix  Se  la  tranquillité  (^). 

Ce; 


Ibid. 
Q)  Ibid.  318. 


deU  Suîjje.  Li  V.  X.    34 ^ 

Ces  Seigneurs  eurent  aufTi  oc-  1533» 
afion  de  porter  leurs  Soins  fur  les  Accom- 
^glifes  de  la  Vrevoté.    Les  nou- 

fi        l'/v     I  .      ,      /i      /    rnent  en- 

^elles  difîîcultez  ,  qui  s  y  cleve- 
ent  entre  les  Chanoines  de  Mou-  Chanoi- 
ïers  Grand-Fal  &  les  gens  du  Pays, 
)ccupérent  les  Seigneurs  de  Berne  ^  ^^^.^ 
\c  de  Soleurre  prefque  toute  Tan-  Prevô-' 
lée  1535.  Enfin  l'Etat  de  Soleur-  t^'» 
e  ayant  propofé  à  ces  Chanoines 
le  porter  leurs  grieffs  ,  dans  une 
Conférence  qui  fe  tiendroit  à  Ber- 
e  entre  les  Députez  des  deux 
'  illcs  5  &  ceux-ci  y  ayant  con- 
enri,  le  Confeil  de  Soleurre  mar- 
ua  le»i.  Juillet,  pour  cette  Con- 
irence.  Les  parties  y  coniparu- 
ent ,  &:  plaidèrent  leur  caufe.  Les 
)éputez  des  deux  Villc.v  exami- 
érent  la  Sentence  de  Bicnne  ,  &: 
écidérent  :  L  Que  puifque  les 
,  Bourgeois  de  Moutiers  avoienc 
)  eu  de  tout  tems  l'entrée  de  la 
,  Grande  Eglife ,  pour  y  faire 
,  tous  leurs  exercices  de  Religion, 
y  il  étoit  jiifle  qu'ils  l'cuncnt  toû- 
j  jours,  n.  Qui'  d'un  autre  côté,  il 
,  ctoit  auffi  raifonnable  ,  que  ces 
,  gens-là  piy.ilTcnt  aux  Chanoines 
>  leurs  redevances ,  à  forme  de 
P  3       „  leurs 


342  Hijloïre  delà  Réformât  ion 

1533.     leurs  Droits  5  &  leur  obeifTent  I 
IaPre-  «  en  tout  ce  qui  regarde  le  tem-  ' 
voie'.       porel.    Iir.  Que  les  Chanoines 
„  kifleroient  vivre  ces  gens-là  dans 

la  paifible  profeffion  de  laReli- 
^      55  gioh  Réformée  ,   &  qu'ils  four- 
3^niroient  des  penfions  honnêtes  à 

leurs  Minières  ».  IV.  Ils  firent 
quelques  Règlemens>  touchant  les 
Appels  3  &  fur  quelques  autres  Ar- 
ticles ,  qui  concernoient  des  in- 
térêts temporels.  V.  Enfin  ils  or- 
donnèrent >  >j  Qu&  fi  à  l'avenir  il 
yy  s'éievcit  quelque  nouvelle  diifi- 

culte  entre  les  parties  >  les  Sei- 

gneurs  de  Berne  en  décideroient 
3,  avec  ceux  de  Soleurre*. 

Le  25>.  Septembre  fuivant,  cet-  ,„ 
te  affaire  fut  examinée  de  nouveam 
à  Berne >  entre  le  Confeil  de  Ber- 
ne &  les  Députez  de  Soîsurre>  à  la 
prière  de  1  Etat  de  Soleurre,  &  des^ 
gens  de  la  Prévôté,  qui  fouhaitoientt 
qu'on  révoquât  TArticle  des  Ap-i 
pels.  Tout  fut  confirmé  ,  à  h 
referve  de  cet  Article,  qui  fut  en- 
levé pour  les  particuliers ,  avec 

cet 

*  MS.  Amp.  îip.  B.  Inftr.  r66.  Apo- 

log.  à  p.  104.  ad  1O7.  nb\  îrre(>fit  error  PJ- 
l^Q{^raj}hkHs    &  le^hur  Jimii  ^ro  jillii. 


de  U  Suifc.LiY.  X.  343 
et  éclairciflement ,  que  quand  une  1533. 
"ommunauté  ou  un  particulier  fe-iAPRE- 
oit  en  procès  avec  le  Chapitre,  vole'. 
a  partie  acflrice  pourroic  en  ap- 
jeller  à  l'Evêque  de  Baie.    On  ré- 
;Ia  auflî  la  penfion  que  le  Chapi- 
re  devoit  donner  aux  Minières  > 
Ur  les  plaintes  des  gens  du  Pays  [a). 

Il  effà  remarquer,  que  dans  ce  ChnnoU 
ems-là  il  fe  trouva  deux  i^"^^^^  ^^"[J^^^' 
[Chanoines  â  Mou  tiers  i  qui  s'étoient 
endus  fi  abominables  ,  par  leurs 
ifures  5  par  leurs  blafphèmes,  par 
eurs  adultères  ,  &  par  leur  y  vro- 
;nerie  ,  que  TEvêque  même  ne 
lût  les  fouffrir,  &  les  fit  mettre  t 
n  prifon  Le  Prévôt ,  qui  étoit 
leur  tête ,  ne  valoit  guères  m.ieux, 
)uifquil  vivoic  tout  ouvertement 
[ans  un  Commerce  fcandaleux  , 
vec  une  Femme  débauchée ,  & 
ju'il  y  peiTcveroit  encore  l'an 
54.2.  nonobftant  les  fréquentes 
cmonrranccs,  qu'on  lui  avoit  fait  à 
et  égard.  Au  refteles  diffcrens  dcces 
iglifes  ne  furent  pleinement  term.i- 
lez  que  l'an  i  5  3(5  {ù). 

P  4  Les 

GO  B.  Inf^r.  SCO.  Apclo^.  107.  III. 
^  yîpnlog.  1C4. 
•0  ^iottht^.  6<J4  1 


344  Hifloire  de  la  Ré  for  mat  lo» 
1533.     Les  Seigneurs  de  Berne  fe  vi- 
BiEKNE  rent  aulTi   obligez  d'entrer  dans 
^  ^'A-^in  différent  tout  femblable  ,  qui 
S  etoit  eleve  entre  la  Ville  de  Bien- 
ne  &  le  jeune  Comte  de  ChalUnti 
Seigneur  &    Comte  de  Falcngïn, 
La  vieille  ComtéfTe  ,  Mère  de  ce 
Seigneur  étant  morte  cette  année 
là  5  il  recueillit  fa  fucceffion.  Les 
Seigneurs  de  Berne,  avec  qui  cette 
Maifon  avoi:  fait  on  traité  deBour- 
geoifie  5  prirent  cette  occafion  poui 
l'exhorter  de  lailTer  à  fes  Sujets 
pleins  liberté  de  Confeience  5  &  de 
ne  point  inquiéter  >   fur  la  Reli- 
gion ,  les  Eglifes  de  fa  terre  qui 
auroient  embraflé,  ou  qui  embraf- 
feroient  à  Tavenir  la  Réformarion, 
à  la  pluralité  des  fulfrages.    Il  le 
leur  promit.     Mais  les  Catholi- 
ques croient  n'être  pas  obligez  de 
garder  la  Foi  ,  à  ceux  qu'il  leur 
plait  d'appeler  Hérétiques.  Le 
Comte  ne  tint  rien  de  ce  qu'il  avoic 
promis.     Il  fît  deifendre  >  à  ceux 
qui  dévoient  des  Cenfes,  ou  des 
Dîmes  à  l'Ancien  Chapitre  de  St. 
Imier ,  de  les  payer  à  la  Ville  de 
T>i{fe.  Sienne.    Et  comme  le  Village  de 
TQndçn-DûjnkeJfon  eut  embralTé  la  Réfor- 

mation  i 


deUSuife.  Liv.  X.  ?4S" 

nation  5  &  que  les  Biennois,  en  IS33* 
]ualiré  de  Collateurs  ,  y  eurent  tre  L'/c??- 
învoié  un  Miniftre  5  nommé  Pierre  q^^^ 
Marmot  j  le  Curé  du  lieu,  appuie  de  I^/e^- 
:}ar  les   Catholiques  ,  ne  voulut 
point  lui  céder  la  place,  &  la  dé- 
:ifion  de  ce  différent  aiant  été  remife 
lu  jugement  du  Comte>  le  Comr& 
donna  gain  de  caufe  au  Curé,  & 
;ommanda  au  Miniftre  de  vuider 
la  Cure  dans  24,.  heures.  LcsBien- 
nois  s'en  plaignirent  aux  SeigneurS' 
de  Berne,  qui  envolèrent  *  deux  Dé-*  Le  n. 
putez  au  Comte  ,   avec  ordre,  de 
lui  faire  les  mêmes  remontrances  , 
qu'on  avoit  faites  à  fa  Mère,  trois 
ans  auparavant;  „  de  laiifcr  la  Ville 
5,  de  B'ienne  en  poiTefTion  des  biens 
3i  6c  des  Rentes»  qui  provenoienc 
du  Chapitre  de  St,  Imicr  ,  & 
^^de  fon  droit  de  Collature  furies 
Eglifes  de  fa  terre  qui  en  de- 
p^pendoient:  Enfin  de  rétablir  le 
}j  Miniftre  de  Dombrejfon  ,    lui  dé- 
j^darant  qu'ils  ne  permcttroienc 
yy  jamais ,  qu'on  fit  du  tort  à  ces 
),  gens  la,  Qjte  s'il  y  avoit  cicl- 
„  qu'un  ,   qui  contcftât  ce  droit 
>,  de  Collature  ,  à  la  Ville  •  de 
>,  Bienne,  ils  contribueroient  à  lui 
P  5        »  faire 


346  Hi{îoïre  de  la  Kcformation 

1533.  »  faire  rendre  juftice  \  Enfin  qu'on 
BiENNE  >j  le  fommoit  de  fe  fouvcnir  de 
^        „  Ja  promeffe  qu'il  leur  avoir  faite, 

iENGIN  I      r»    1-    •        f  \ 

concernant  la  Religion  \a)  „  . 
Le  Comte,  pour  ne  pas  s'atti- 
rer à  dos  les  Seigneurs  de  Berne, 
qu'il  avoit  intérêt  de  fnénager  y  fit 
fsmblant  de  céder  à  leurs  remon- 
trances ,  6c  ne  fe  mêla  plus  ou- 
vertement de  cette  affaire.  Mais 
il  fit  agir  fous  main  le  Prévôt  de 
St.  Im'm.  Ainfi  ce  Prévôt  foutenu 
par  le  Comte,  porta  l'affaire  à  la 
Diète,  devant  les  Cantons  affem- 
blez  à  Bade.  Les  Cantons  fom-. 
mérent  les  Biennois  de  rendre  rai- 
fon  de  leur  conduite  devant  eux, 
à  la  première  Diète  qui  s'affem- 
bleroit  Tannée  fuivante  j  Mais  les 
Bernois  ne  le  trouvèrent  pas  à  pro- 

^  Le     pos       foutenant  que  les  Cantons 
Mars   n'âvoient  rien   à  leur  comman- 

^'  ^  ^  der  (/»).  Les  Cantons  affemblez  à 
Bade^,  au  mois  de  Mars  renou- 
vellérent  leurs  inftances  auprès  des 
Biennois  en  faveur  du  Prévôt  de 
St.  Imicr  ;  mais  ceux  -  ci  refuférent 
de  rendre  raifon  de  leur  conduite* 
&  de  répondre  au  Prévôt,  autre* 

ment; 


deUSuiJe,  Liv.  X.  347 
ment  que  devant  leurs  Juges  Lé-  1533, 
gidmes.  Et  les  Bernois  perfifté- Bienne 
rent  dans  leur  fentiment  ^^^hnIiI- 
les  Cantons  n'avoient  rien  à  voir  >f  ^'2,. 
dans  cette  affaire  [a].  Avril. 

Dans  une  Diète,  affemblée  à  Ba-  i  ^  ^4- 
de  l'année  1533.  TAmbaffadeur  de 
France  fe  plaignit  d'un  Livret  im- 
primé à  Neuchatel.  Mais  les  Can- 
tons n'ayant  aucune  Authorité  fl 
les  Ncuchatclois,  &  l'affaire  ayan- 
été  renvoyée  à  une  Diète  fuivante, 
avec  celle  de  Valcngin  j  les  Bernois 
furent  d'avis  de  répondre  à  l'Am- 
baffadenr  fur  fa  plainte  j  Quil  poiu 
voit  Aller  a  Neuchatel^  faire  partie 
criminelle  a    Imprimeur  {b). 

Comme  les  Bernois  prenoient 
foin  des  Eglifes  de  leur  voifinage 
&  de  leurs  Alliez  ,  ils  ne  négli- 
geoient  point  les  leurs  propres.  Juf. 
qu'à  cette  année  ils  avoient  per- 
mis 5  a  la  Campagne  j  de  fonner 
pour  les  morts  >  afin  d'avertir  le 
Peuple  qui  étoit  dans  les  champs> 
qu'il  y  avoit  un  mort  à  enfevelir. 
On  abufoit  de  cette  pcrmiflion  ,  & 
quelques-uns  ne   fonnoicnt  que 
quand  le  mort  étoit  enfevcli.  Pour 
P  6  cettç, 
(0  (0  lbid.3^5. 


348  Hiftotre  de  U  Réformation 
j  ^  ^^5^  cette  raiTon  ils  interdirent  cerre  fon-. 
Beh^e  nerie,  par  un  Edic  du  20.  Sep:eni- 
bre ,  foui»  peine  de  10.  Livres  d'a- 
mande.   En  même  teir^  ils  or- 
dorrérent  z.ux  Miniftres,  d'inftiui- 
Ber7ie  k-      U  j^uiieiTc,  dsiis  Ics  Catéchiimes 
î^abijt les  de  Tapies  dinée,  les  Dimanches  & 
Ses!^  jours  de  Fête ,  &  leur  recom- 

mandèrent foi'temtnt  de  s'acquiter 
rcligieufement  de  cette  forâiion  , 
d'une  telle  manière  qu'ils  en  puf- 
fent  rendre  un  bon  Compte  à  Dieu  ^, 
Et  afin  de  s'alTûrer  de  rexécutioç  . 
de  leur  Edit  5  &:  de  leurs  autreifî 
Règlemens  de  Réforme /ils  envoie* 
renr,  deux  jours  après  5  quelqueSr 
uns  des  Minières  de  leur  Viile  « 
pour  aller  prèfider  dans  les  Claffes 
de  leur  Canton ,  chargez  d'y  por^ 
ter  leurs  Ordres,  &  d'examiner  Té? 
tat  des  Eglifes  t- 

Cette  année  le  Seigneur  At  Torrens', 
dont  les  Ancêtres  avoient  ttè  Seigneurs 
de  Jurifliidion  ,  du  Bourg  àAl^le ,  &  de 
fa  ûcpendance  3  fut  reçu  Bourgeois  de 
Berne  le  i6.  Décembre  j  &  il  renonça 
folemnellement  à  toutes  les  prêtent ionSj 
qu'il  pouvoit  avoir  fur  Ai^U.  Il  fut  i|9 
dernier  de  fa  race  (^).  '  ^ 

^  ACTES 

B.  Mandat.  B.  ^r. 
tB.Inftr.191. 
{a)  Stetler  II.  63.  a. 


349 

ACTES 

D  U 

bYNODE  DE  BERNE 

Alllmhl^'  [An  AÎDXXXIL 
Compofc  de  230  pcrfonncsy 
tous  Paftcurs  &  Minifircs 
du  S.  Evangîîe,  dans  !a  Ville 
&  dans  les  Terres  du  Can- 
ton de  Berne: 
cmmcmé  le  9^-  de  Janvier  y 
termine  /e  l^,  du  même  ??wis. 

I  n  t  r  o  d  u  c  t  I  o  Ny 

J^ijlûurs  pn'limin/tire  des  Pères 
du  Synode  ,  adreffc  a  L^L. 
EE.  de  Berne  5  touchant 
ï Autorité  &  le  Pouvoir  du 
Adagijlrat  Civil ,  \  a  ( égard  •\o^x,tx\ 
du  Service  Divine  avec  une  ^Y^^l^"^^. 
r^xhortation  a  ces  mêmes  ôet-  oion. 
gneurs  fur  ce  fujct. 

TtLUSTRES    E  T   Sq     V  £  KA  IN  s 

Seigneurs. 


IL  n'eft  pas  bien  po/Tible  aux 
Pafteurs  ordinaires  &:  ai^x  Mi- 
j^nirtres 


350  ABes  du  Synode  de  Berne  y 

niftres  de  la  Parole  de  Dieu,> 
5,  de  faire  quelque  fruic  dans  l'E- 
>,  glife  ,  &  de  l'y  entretenir  par 

des  Ordonnances  extérieures  j  fi 
>,  le  Magillrat  Civil  ne  joint  fes^ 

foins ,  pour  avancer  cette  bonne 
>,  œuvre.    Car  le  cœur  de  l'Hom- 

me  eft  tout  gâté ,  tout  corrom- 
»  pu  ,  ôc  entièrement  abandonné' 
>5  à  (es  propres  imaginations  &  à. 

fes  défirs.    C  eft  un  mal  qui  eft; 
55  répandu  par  tout  ,    aufll  bienV 
5,  parmi  les  Eccléfiaftiques  3  com- 
»  me  parmi  le  commun  Peuple  y 

&  tout  cela  vient ,  de  ce  qu'il 
^,  y  a  encore  fi  peu  del'Efprit  &  de 
35  la  vertu  de  Dieu  dans  nos  cœurs», 
>,  Or  tout  Magiftrat ,  qui  fait  pro-« 

fclTion  d  être  d'un  Gouvernement 

Chrétien  &  pieux,  eft  obligé  de 
>,  mettre  toute  fon  application ,  à; 
>j  faire  que  dans  l'exercice  de  fou 

pouvoir,  il  foit  le  Lieutenant  8c 

le  Miniftre  de  Dieu ,  &  à  con- 
5>  ferver  parmi  fes  Sujets  la  Doc- 
>j  trine  &  la  vie  Evangelique,  tout 
55  autant  du  moins  qu  elle  s'exer- 
5,  ce  au  dehors  5  &  qu'elle  fe  pra- 
yi  tique  dans  les  chofes  cxtérieu-- 
w  res,    C'eft  de  ces  chofes  qu'il 

»  fau- 


tenu  enl$32^  ïntroducrïon.  3  5 1 

>,  faudra   que  chaque  IVÎagiftrat 
rende  compte  un  jour  devant  le 
redoutable  Tribunal  de  Dieu  , 
,j  Jorfqu'il  jugera  &  condamnera 
le  Monde  par  Jesus-Christ. 
3j  II  eft  donc  vrai  que  le  JVlagif^ 
;jtrat  Civil  doit  procurer  l'avan- 
>,  cernent  des  voycs  de  la  Grâce , 
5,  tout  autant  du  moins  qu'elles 
5,  fe  répandent  dans  les  chofes  ex- 
3,  térieures.    Mais  pour  ce  qui  re- 
garde  ces  voycs  de  la  Grâce,  en- 
>,  tant  qu'elle  fe  déploie  s'a- 
vance  intérieurement   dans  le 
cœur,  c'cft  une  choiê  qui  n'eft 
5)  pas  au  pouvoir  des  Hommes  5 
5,  &:  qui  ne  dépend  d'aucun  Ma- 
5^giftrat,  ni  d'aucune  Créature> 
:)j  quelle  quelle  foit,-  car  les  cho- 
>,  fes  Spirituelles  &  Céleftes  font 
^)  trop  fublimes  3  &  fort  au  deffus 
»  de  tout  pouvoir  civil  &  char- 
»  nel.    Ceft  pourquoi  aucun  Ma- 
^)  giftrat  ne  doit  maitrifcr  les  Con- 
>,  fciences  ,  ni  publier  des  Ordon- 
5,  nances  pour  des  chofes  cxtérieu- 
5>  res  >  par  lefquelles  on  mettroic 
y%  un  joug  fur  les  bonnes  Confcien- 
ces ,  ^  Ton  borneroit  le  S.  Et 
?>pric,  l'empêchant   de  déployer 

toute 


3' 5  2"  Actes  du  Synode  de  Berne 

>3  toute  fon  efficace.    Car  il  n'y  a 
que  Jesus-Ghrist  nôtre  Sei- 
55  gneur,  à  qui  Dieu  a  donné  tout 
>5  pouvoir  3  &  la  promefle  du  S. 

Efprit  5  qui  foie  le  Maîcre  &  le 
ri  Seigneur  des  Confciences.  C'eft 
>j  pour  cette  raifon  que  le  Pape,  les 
3,  Evêques ,   6c  les  Prêtres  ,  avec 
5,  toute  leur  bande  ,  font  tout  au- 
3>  tant  d'An  te  -  Chrifts  ,  &  enfei* 
^^gnent  la  Dodrine  des  Diables  f 
33  parce  qu'ils  entreprennent  tous»fi 
„  de  maitrifer  les  Confciences  à  leur  i 
>,  fantaifie  j  de   faire   des  pêchea . 
35  de  chofes  que   Dieu   n  a  pas  i 
défenduës  >    de,  pardonner  & 
de  faire  grâce  pour  des  chofes 
qui  font  criminelles  devant  Dieu, 
éc  même  de  rnériter  la  grâce  aux 
>,  autres  par  des  œuvres ,  forgées 
&  inventées  dans  leur  Cerveau*. 
>5Atteniârs  qui  font   tout  autant 
3j  de  blafphêmes  ,  que  les  Magif^ 
trats  doivent  bien  fe  garder  de. 
33  foûtenir  ,  mais  pliuôt  les  fuir  &. 
,5  les  éviter  avec  tout  le  foin  pofi.. 
33  fible.  Mais  il  ne  s'enfuit  pas  de- 
là  ,   qu'ils  doivent'  abandonnée. 
5,  le  pouvoir  qu'ils  ont  re^ii  de. 
„  Dieu  pour  ces  chofes,  mais  plûr 

tôt 


tenu  en  1532  Introduction.  353 

„  tôt  l'exercer  ,  autant  qu'il  s'étend 
„  fur  les  chofes  extérieures,  afin 
„  que  k  grâce  ait  fon  cours  libre> 
„  &  foit  avancée,  par  leur  Auto- 
„  rité  5  comme  par  des  ouvriers 

qui  concourent  avec  Dieu.  Il  faut 

donc  qu'ils  ayent  foin  de  gar- 
„  der  la  Saine  Doftrine  ,  d'empè- 
5j  cher  l'erreur  &  la  fédu<flion  ,  de 
5,  punir  tous  les  blafphèmes  &  les 
3,  péchez  manifeftes,  à  l'égard  de 
5,  la  Religion  &  de  la  conduire  de 

la  vi«  ,  de  protéger  la  vérité ,  ÔC 
^,  les  bonnes  mœurs,  &:c. 

»  C'eft  pourquoi,  Jlluftres  &  Sou^ 

verams  Seigneurs ,  comme  Vos 
>j  ExcE  LL  E  NT  c  E  sont  embrafle  fi 
>,  courageufêment  l'Evangile  ,  8c 
,>  l'ont  fait  recevoir  de  vos  Sujets  j 
„  8c  qu'elles  ont  même  prêté  fer- 
2^  ment  là-defTus ,  comme  fur  une 

Loi  particulière  8c  fondamenta- 
>,  le  de  l'Etat,  de  le  maintenir  au 
„  milieu  de  vous  8c  de  tous  les 
„  vôtres,  tant  dans  la  Ville  Capi- 

taie  ,  que  dans  tout  le  Pays, 
»  au/Il  faut- il  déformais  regarder 
,>  vôtre  Gouvernement,  comme  re- 
>,  vêtu  d'une  nouvelle  formic  ,  8c 
,5  chargé  d'une  nouvelle  obligation, 

>i  corn- 


354  Actes  du  Synode  de  berne, 

5,  comme  pour  toute  autre  Loi 
Xi  extérieure  ,  &  vous  ne  pourriez 
5>  jamais  le  quiter  avec  honneur 
»  devant  le  Monde. 

>j  II  eft  vrai  que  votre  Miniftère 
5>  ôc  le  pouvoir  que  vous  avez  à 
l'égard  de  l'Evangile,  ne  fait  ni 
n'a  fait  autre  chofe  que  des 
Hypocrites  >  fi  J'e  s  us-Christ 
même  n'eft  pas  de  la  partie ,  car 
5>  il  y  en  a  plufieurs  »  qui  fuyent 
5>  la  Mefle ,  comme  une  Cérémo- 
»  nie  pleine  de  blafphêmes  ,  qui 
ai  s*accommoderoient  fort  bien  de 
5,  cette  abomination  5  fi  VV.  EE, 
ne  l'avoient  abolie  par  leurs 
>,  Edtts  &  leurs  Alandats,  Mais 
5,  il  n'importe.    Car  le  Miniftère 
3,  même  de  MoiTe  n'a  rien  pû  faire 
55  davantage  avec  la  Loi  de  Dieu, 
5,  qui  cependant  eft  une  Loi  de 
vie  j  il  ne  faloit  pas  pour  cela 
»  qu'il  ceffât  d'inculquer  la  Loi , 
>,  rr/ais  il  devoit  plûrôt  exercer  fon 
>,  office,  &  ainfi  faire  que  la  Loif 
y)  qui  ètoit  vivante ,  fût  une  Let- 
55  tre  morte ,  &  devint  même  Co- 
55  1ère  3c  Mort  pour  la  chair,  parce 
3i  que  Dieu  n'avoit  point  donné 
9)  au  Peuple  i  par  le  Mini(lère  de 

Moife, 


tenu  enlSll^  Introduction  355 
5,  Moïfc,  un  cœur  intelligent  ,  ni 
jj>  des  yeux  éclairez ,  ni  des  oreil- 

les  ouvertes  pour  ouïr,  comme 

ce  Saint  Homme  s'en  plaint  dans 
„  fon  dernier  difcours  5  *  peu  de  ^ 

tems  avant  fa  mort>  après  avoir  ' 

été  avec  eux  durant  quarante 
>,  ans.  C'eft  ainfi  que  les  feuls 
»  efforts  du  Miniftre  extérieur  ra- 
„  portent  peu  de  fruit  devant  Dieu. 

Mais  5  nous  le  difons  encore  une 
„  fois  >  il  n'importe  pour  VV.  EE. 

de  quelle  manière  on  reçoive 
>,  l'Evangile.  Car  VV.  EE.  fou- 
>,  haitoient  de  conduire  chacun  \ 

la  vérité  par  leur  Miniftère  ,  & 
35  d'abolir  tous  les  fcandales  pu- 
3,  blicsj  mais  le  Monde  l'embralîe 
3,  par  rhypocrificj  ce  n'eft  pas  vô- 
3,  tre  faute  ,  il  en  eft  de  vous  * 

comme  de  Moïfe  >  qui  faifoit  fès 
,3  efforts  pour  conduire  le  Peuple 
3>  à  Dieu  3  pour  introduire  & 
5,  entretenir  parmi  eux  une  viç 
sjfaintc  ôc  bien  réglée. 

Et  quoique  ni  vous,  ni  aucun 
3,  pouvoir  humain,  ne  puilTez  faire 
5,  une    bonne   confcience  devant 

Dieu  ;  cependant  le  Minifière  de 
3,  VV,  EE.  fert  a  faire 3  que  la 

3>  pure 

W 


356  Actes  du  Sy/iode  de  Bernti^  ' 

53  pure  Parole  de  Dieu  foit  piê- 
35  chés  parmi  vos  Sujets  ,  que  la 

Grâce ,  leur  (oit  clairement  an- 
jjnoncée,  &  qu'on  les  conduife  à 
55  la  Source  vivante  5  de  laquelle 
5,  feule  on  puife  les  eaux  du  falut, 
?5  fa  voir  à  nôtre  Seigneur  Jesus- 
„  Christ,  qui  eft  nôtre  unique 
5,  Médiateur  \  après  cela  Tembraf- 
y>  fe  qui  voudra.  Et  quand  on 
5,  le  prêcheroit  en  vain  pour  tout 
,>  le  Monde  ,  (  ce  qui  cependant 
J5  n  eft  pas  polïîble  >  )  néanmoins 
55  vous  avez  fait  ce  qui  dépendoit 
35  de  vous,  vous  vous  êtes  aqui- 
55  tez  de  vôtre  devoir,  &  vous 
j,  avez  fauve  vos  Ames  ,  comme 
»,  Moïfe  &  les  bons  Rois  de  juda) 
5,  qui  firent  beaucoup  de  bien  ,  en 
y-,  s'apliquant  à  faire  obferver  la  Loi 
3,  parmi  le  commun  Peuple.  Car 

la  le<îlure  de  la  Loi  ,  &  la  pré- 

dication  de  la  Parole  ,  que  ces 
>,  Rois  faifoient  faire,  fer  voit  à  an- 

noncer  le  jugement  de  Dieu  con- 
5,  tre  les  médians  ,  à  abolir  les 
5,  blafphêmes  notoires»  les  vices, 
j,  les  infamies  &  les  fcandales  y 
55  à  punir  6^  à  reprimer  le  mal,  & 
aj  à  procurer  &  à  faire  régner  le- 

5,  bien  : 


i^nu  enX^ll,  Introducîion  3 57 

bien  :  5c  c'eft  pour  cette  raifon 
>,  que  le  S.  Efprit  donne  tant  de 

louanges  aces  bons  Rois,  dans 
o  l'Ecriture. 

5,  Il  ne  faut  pas  que  les  difcours 
„  de  quelques  Ames  fimples  faffent 
„  de  la  peine  à  VV.  EE.  les 
„  détournent  d'un  deffein  fi  Chré- 
„  tien.  Ils  difent;  Que  le  Chriftia- 
5,  nifme  eft  dans  rinréiieur,  qu'il 
5,  ne  peut  pas  être  gouverné  par 
j,  répée,  mais  qu'il  faut  qu'il  foit 

adminiftré  par  la  Parole  de  Dieuj 
55  Ouz  VV.  EE.  établiffent  une 
),  nouvelle  Papauté  ,  en  voulant 
5,  vous  mêler  des  affaires  de  la 
>,  Foi ,  &c. 

„  Mais  nous  répondons  ^  Que 
5,  cela  feroit  bien  vrai  >  fileMagif^ 
j,  trat  vouloit  violenter  les  Conf^ 
5,  ciences  &:  maitrif^r  la  Liberté 
55  Chrétienne  ,  qui  eft  dans  une 
>,  bonne  confcience  ;  ce  que  Ton  ne 

doit  pas  dire  de  VV,  EE.  dans 
5,  raffaire  dont  il  s'agit  j  puifque 
5  5  vos  foins  fe  tournent  à  faire,  que 
5,  la  vérité  foit  prêchée  clairement  ; 
3,  que  Ton  exhorre  fortement  à  la 
,5  Piété  ;  que  l'on  cenfuic  fana 
5)  crainte  les  vices  des  Sujets  &  des 

3,  Ma- 


358  Actes  du  Synode  de  Berne^ 

„  Magiftrats ,  6c  que  Ton  obferve 
5  3  au  dehors  dans  le  fervice  divin, 
5,  &  en  d'autres  rencontres ,  un  or- 
9>  dre  bien  ménagé,  qui  n'empêche 
5)  point  le  cours  du  S.  Efprit.  Or 
5)  tout  cela  fe  fera  ,  fi  VV.  EE.  ont 
5,  la  bonté  de  confirmer  les  Ordon^ 
35  nances  fuivantes  j  (  dont  nous 
>,fommes  convenus  entre  nous  dans 
5,  ce  Synode  )  pour  l'avancement 
ode  la  gloire  de  Dieu  s  &  fi  vous 
j>  nous  ordonnez  à  nous  tous,  qui" 
9i  devons  prêcher  l'Evangile  dai» 
5,  vôtre  Ville  &  dans  vos  Etats  > 
3,  6c  fi  vous  nous  commandez/ 
5,  comme  à  vos  Sujets 3  de  les  ob-" 
55  ferver.  C'eft  la  grâce  que  nous 
demandons  très  -  humblement  à 
55  VV.  EE.  6c  flous  les  en  prion« 
35  ardemment  pour  Tamour  de 
,j  Dieu  53. 

Voici  nos  Ordonnancés  6c  nos  Ré* 
flexions  y  que  nous  avons  ren- 
fermées dans  les  Chapitres  fui*^ 
vans. 


CHA.J 


tenîi  en  ï  532.  3S9 
CHAPITRE  I. 

ue  nous  (  les  Miniftrcs  )  de* 
njons  nous  aquiter  foigneufe- 
ment  de  notre  devoir, 
Rémiérement,  comme  nois?  les 
Miniftres&Pafteurs,  devons  être 
^7Hhjfadeui s  pour  Christ,  AU" 
lïflres  de  l'Efprit ,  &  Difpcnfateurs 
'es  Alifîeres  de  Dieu,  que 
;'eft  là  le  nom  qui  nous  eft  donno 
lans  l'Ecriture  :  Que  de  même 
uflfi  la  Louable  Seigneurie  deBer- 
e,  &  les  autres  Magiftrats,  font 
ppellez  ,  &  font  effectivement  les 
vîiniftres  de  Dieu  ,  pour  ce  qui 
egarde  les  Ordonnances  extérieu- 
es  i  il  nous  eft  abfolument  né- 
effaire  ?  fclon  les  Loix  que  LL. 
:E.  ont  faites  touchant  TEvangile» 
[ue  nous  prenions  bien  garde  à 
lôtre  MinîAère  à  TEmploi  qui 
;ious  eft  confié  ,  (  lequel  eft  fpiri- 
luel,  intérieur  &  Célefte)  pour  en 
iemplir  toutes  les  fonctions  avec 
bin,  avec  ardeur,  &  de  tout  nô- 
re  pouvoir.  Or  nôtre  Emploi  exi- 
;e  de  nous  deux  chofcs  ,  une  fai- 
te Doctrine  >  6c  une  vie  bien  ré- 
glée ,  tant  pai  rapport  à  nous,  quç 

pac 


36o  Actes  du  Sjnode  de  Berne» 

par  rapport  aux  autres  qui  font 
profeiïion,  avec  nous  ,  d'une  mê- 
me Religion. 

CHAPITRE  II. 

Que  toute  la  Doctrine  fe  ré- 
duit uniquement  a  J  E  S  U  S  - 
Christ. 

T)Our  ce  qui  regarde  laDodrine, 
nous  diions  ,  que  toute  la  fai- 
ne Dodlrine  nefi:  autre  chofe,  que 
la  feule  Parole  éternelle  de  Dieu, 
la  Bonté  &  la  Miféricorde  pater- 
nelle ,  laquelle  il  nous  a  commu- 
niquée par  Jésus- Christ  5  Ô: 
ce  n'eft  autre  chofe  que  JesusI' 
Christ  lui  même,  qui  ^  été  crth 
c'ifié  pour  nos  ûffenfes  ,  &  rtjfufcitê 
^  Rom.  pour  nôtre  Juftification  *  y  afin  que 
^'  nous  fufTions  juftifiez.  Ce  qui  cftl 
contraire  à  cette  Dodlrine,  eftcon^ 
traire  à  nôtre  falut  :  ce  qui  ne  rcn-i 
ferme  pas  ce  que  nous  venons  de 
dire,  ne  peut  jamais  être  appelle 
une  Do<flrine  Chrérienne.  Car  tous 
les  Miniftres  de  l'Evangile  font 
Ambafladeurs  pour  C  h  r  i  s  t  , 
témoins  de  fav  paflion  :  &  ne  doi- 
vent s'appliquer  à  autre  chofe  qu  | 


aire  fa  volonté,  &  exécuter  fes 
Dommandemens  ,  comme  ayant 
té  envoyez  par  leur  Seigneur  uni- 
juement  pour  ce  deffein ,  tout  de 
nême  quelui  5  le  Seigneur  Je  s  us, 
i  été  envoyé  du  Pére,  pour  ma- 
lifefter  aux  Hommes  le  Nom  Se 
a  Gloire  de  fon  Pére  ,  &  rien  au* 
re  i  &  qu il  la  ponctuellement 
le  fidèlement  exécuté  pendant  tou- 
e  fa  vie.  Car  il  a  été  incelTamment 
occupé  aux  affaires  de  fon  Pére  Cé- 
cfte  >  &  n'a  rien  dit  de  par  lui- 
nême  i  mais  a  toujours  enfeigné  » 
linfi  qu'il  avoit  entendu  du  Pére, 

CHAPITRE.  III. 

Ouo/^  ne  doit  propofèr  au  Peu- 
ple la  connoilfame  de  Dieu  ^ 
quen  Jesus-Christ. 

ne  fâuroit  alTez  dire  com- 
bien il  eft  honteux  pour  un 
Miniftre  de  Jesus-Christ,  de 
ne  pas  favoir  le  Commandement 
de  fon  Seigneur ,  &  de  s'embar- 
raffer  d'aunes  affaires  vaines  &  inu- 
tiles i  Se  de  ne  s'occuper  pas  en- 
tièrement des  chofes  qui  regardent 
fon  S  igneur,  ûvoir  nôiie  falut 
Tom.  Jr.  cter- 


362  Actes  du  Synode  de  Berne, 

éternel.    Le  Pére  parle  sncoreau-  1 
jourd'hui  à  nous  par  fon  Fils,  qui 
habite  dans  nos  cœurs  par  le  S, 
Efprit  ;  c*cft  par  lui  que  Dieu  nous 
réconcilie  à  foi  ,  &  c'eft  en  lui 
que  nous  aprfenons  à  connoître  les 
ceuvrcs  de  Dieu  ,  6c  la  douceur 
de  fon  cœur  paternel  &  miféricor- 
dieux  envers  nous.  Ceft  dans  cette 
intelligence  8c  dans  cette  connoif- 
fânce  expérimentale  de  Jésus- 
Christ,  que  le  Fidèle  va  croit 
fant  tous  les  jours ,  à  mefure  que 
ks  exhortations  continuelles  Tex- 
citent  à  cela  même,  au  dehors.  Mais 
cela  ne  fe  fait  pas,  lorfque  les  Mi- 
niftres  parlent  beaucoup  de  Dieu, 
fuivant  une  méthode  Payenne ,  ôc 
qu'ils  ne  font  pas  connoître  cei 
même  Dieu  au  Peuple  en  la  face 
de  Jesus-Christ,  qui  eft  la 
Uehr,  I.  refplmdeur  de  fa  Gloire  ,  &  riniagt 
Coloff,  I.  (jy  la  marque  engravee  de  fa  perfomie% 
ou  ,  de  fa  réelle  Venté.    Si  les  Mi^  j 
niftres  oublient  de  faire  connoître  i 
iaGracedeDieu  en  jEsus-CHRisTf 
leur  Peuple  en  devient  plus  mé-  ; 
chant  &  plus  incrédule  ,  &  il  ft  ! 
trouve ,  à  la  fin  >  fans  Dieu  dans 
le  Monde  3  tout  comme  l'ont  éti  ^ 

les 


terni  e/zl  $32.  363 

les  Payens,  qui  ont  ouï  beaucoup 
caqueter  d'un  Dieu  connu  naturel- 
lement ,  mais  qui  n'ont  rien  apris 
touchant  leur  Pére  miféricordieux, 
qui  eft  au  Ciel.  Ceft  pour  cette 
raifon  ,  que  bien  qu'ils  ayent  con- 
nu Dieu  5  il  ne  l'ont  pas  honoré 
comme  Dieu ,  jufqu'à-ce  que  Jesus- 
Christ  leur  ait  été  annoncé  ,  & 
qu'ils  ayent  crû  en  lui  ;  comme  S. 
Paul  l'écrit  aux  Ephefiens  *  :  Dans^Ch,  II. 
cetems-lày  dit  -  il  vous  étiez  fans 
Christ  ,  &:c.  vous  étiez  fans  ef 
pérance^  &  fans  Dieu  dans  le  Monde^ 

CHAPITRE  IV. 

Que  Jes  us-Christ  efi  le 
"véritable  Fondement, 

(^'Eft  ainfi  que  Je  sus-Christ 
nôtre  Seigneur ,  eft  le  Fonde- 
ment de  tout  l'Edifice  fpirituel  5 
hors  de  lui ,  il  n'y  a  point  de  fa- 
lut  à  attendre  \  mais  en  lui ,  il  n'y 
a  point  de  perte  ni  de  condamna- 
tion à  craindre.  Il  eft  la  Pierre 
angulaire,  le  Rocher,  le  Chemin  > 
la  Vie  ,  &  la  Vérité.  Les  Apôtres 
&  leurs  Difciples  (dont  les  Mmif- 
trcs  doivent  être  les  Imitateurs  > 
Q,  i  comme 


364  Ac^es  du  Synode  de  Berne 

comme  ils  font  leurs  Succeffeurs) 
n'ont  prêché  autre  diofe  que  ce 
Jésus  -  Christ.  Ceft  pour 
cette  caufe  que  S.  Paul  a  miprifé 
la  Juftice  qu'il  avoit  par  la  Loi , 

^  Vhli.  ^  w  entièrement  rejettée*;  &  n'a 
jamais  voulu  >  non  plus  que  tous 
les  autres  Apôtres ,  avoir  d'autre 
fondement  de  fon  falut  ,  que  Je- 
su  s-Chri  ST  feul.  Ceft  ce  que 
nous  voulons  faire  voir  encore  par 
les  paffages  fuivans ,  bien  que  tou- 
te TEcrirure  mène-là.  Tar  la  gra* 
ce  de  Dieu  ,  qui  ma  été  donnée^  dit 
ce  S.  Apôtre  ,  Jaï  pofé  le  fonde- 
vient  5  ôcc.  Nul  ne  peut  pofer  d'au-- 
tve  fondement  que  celui  qui  eft  déjà 

îr.  Co^.  ^^y^^  fa^oir  jESus-CHRisrt» 
rous  êtes  ,  dit-il  ailleurs  >  les  Coni" 
bourgeois  des  Saints  ,  &  les  Domefti' 
ques  de  Dieu }  étant  édifiez  fur  le  fon- 
dément  des  y4pôtres  &  des  Prophètes  ^ 
Jes  us-Chri  st  étant  la  mai* 

4-  "Ejfhef,  frejfe  pierre  du  coin  +.  Si  vous  avez 
goûté ,  dit  S.  Pierre  >  combien  le  Sci^ 
gneuY  eft  doux  >  auquel  vous  êtes 

★  venus  ,  comme  a  la  pierre  vivante %t 

II-  3-  4-  Ce  Je  s  u  s  eft  la  pierre  élue  ,  la  pré* 
cieuf'  pierre  angulaire  ,  dont  il  eft 
parlé ,  Efa.  XX.  ôc  Pfau.  CXVIII. 


tenu  en  I  S32.  36s 
CHAPITRE.  V. 


Qj£e  ce  nefi  que  -par  J  E  S  U  s  - 
Christ  fcul  immédiate- 
ment  >^  que  Dieu  ejl  reconnu 
mifêric  or  dieux, 

V/f  Ais  qu'a-t-on.  befoin  de  beau- 
coup de   paroles  ?  tous  les 
tréfors  de  la  &  de  la  con- 

noilTance  foat  cachés  en  Jésus - 
Christ  *.  .Pourquoi  un  Prédi- ^  Co/o/7> 
cateur  Chrétien  chercheroit  -  il  la 
fagefle  ei  d'autres  Hiftoires  ou  en 
d'autres  Livres  ,  au  lieu  de  Fairô 
connoî  re  ces  richefles  &  ces  tréfors 
de  Dieu,  favoir  de  Je^us-Christ 
nôtre  Seigneur,  en  quî  toutes  cho- 
fes  font  réunies  ?  On  veut  beaucoup 
raifonner  fur  la  nature  de  Dieu 
tout  puiflant,  fans  parler  de  Je- 
sus-Christ,  mais  cela  efl  fans 
fruit,  puifque  Dieu  s'eft  toujours 
fait  connoîcre  par  fes  œuvres  ,  & 
qu'il  s'eft  clairement  ••donné  à  con- 
noître,  par  les  propriétés  ,*  les. 
dénomiîiations  de  certaines  chofcs 
particulières  ,  comme  dans  le  Tata^^ 
dis»  par  ï^rhe  de  f^te  i  Api  es  ja» 
chute  d'Adam  ,  par  la  fciuence  de 
0.3  ''t- 


366  Acies  du  Synode  dcBernc^ 

U  Femme  ^  à  Abraham  ?  par  Tordre 
qu'il  lui  donna  de  fortir  à'Ur  des 
CaldéenSj  à  fon  Serviteur  5c  à  fon 
Fils  5  par  le  nom  de  Seigneur  & 
Dieu  Abraham:  Enfuite  au  Peuple 
d'Ifraël  par  le  nom  de  Dieu  (CA* 
hraham  >  Jfaac  3  &  de  Jacob,  Dans 
le  Déiert  &c  dans  U  Pays  de  Ca- 
naan on  l'apeloit  ,  le  Dieu  qui 
nous  a  tirés  hors  du  Pays  d'Egypte  > 
&  de  U  Aiaifon  de  Servitude  ,  qui 
a  fait  Alliance  avec  nous  fur  la 
montagne  âUJoreb,  De  même  aufli 
à  caufe  de  cette  Alliance,  l'Arche, 
Is  Temple  6c  la  Ville  de  Jerufà- 
lem  ont  été  apelès  TEternel 
Dieu,  parce  que  par  ces  fignes 
on  entendoit  Dieu  lui-même,  Ainfi 
Dieu  s'eft  donné  à  connoître>  quoi 
qu'obfcurémcnt  5  par  quelques  œu- 
vres de  grâce  ôc  par  certains  évé- 
nemens  ou  fîgnes  particuliers^  com- 
me les  vrais  Chrétiens  aujourd'hui 
le  connoiflent  clairement  &c  certai- 
nement en  Jésus -Christ  nôtre  Sei- 
gneur, fans  fe  tromper.  C'eft  pour- 
quoi il  faut  que  ceux  qui  annoncent 
l'Evangile,  donnent  l'illumination 
de  la  connoiflance  de  la  gloire  dé 
Dieu,  en  la  face  de  Jesus-Christ, 

& 


tenu  en  I  532.  367 

&  non  pas  fans  Jésus  -  Christ, 
ou  hors  de  lui  2.  Cor,  g.  Car  cette 
connoiflance  de  Dieu  qui  n'eft  pas 
fondée  furjESus-CnRisT  fe 
pert  5c  fe  réduit  à  rien  ,  comme 
Ciceron  le  dit  de  Simonides ,  qui  à 
force  de  méditer  &  de  vouloir  apro- 
*  fondir  ce  que  c  etoit  que  Dieu,  en 
vint  enfin  à  ce  point ,  qu'il  fe  tiou- 
va  plus  ignorant  dans  la  connoif- 
fance  de  l3ieu que  lors  qu'il  avoit 
commencé  d'y  penfer.     Les  Juifs 
auflfi  font  privés  encore  aujourd'hui 
de  la  connoiffance  de  Dieu  ,  avec 
toute  leur  Lettre  morte  &  leur 
Arche  de  l'Alliance  ,   car  l'Arche 
n'eft  plus.    Il  y  a  maintenant  un 
nouveau  Symbole  de  Dieu  >  favoir 
que  Dieu  lui  -  même  reconcilie  le 
monde  à  lui  par  Jes  us-Chris  t. 
Auparavant  le  couvercle  de  TAr- 
■  che  étoit  Appelle  le  Propitiatoire  j 
maintenant  Jesus-Christ  lui- 
même  eft  le  vrai  propitiatoire,  de 
la  bouche  duquel  nous  entendons 
la  voix  miféricordieufe  de  Dieu  j 
;  nous  fommes  alTûrés  avec  lui,  6c 
I  nous   avons  un  accès  Libre  au- 
près du  Pérc  par  lui,  comme  Je- 
I  rcmie  le  témoigne  ,  Jls  ne  diront 
'  4  plus 


368  A6f es  du  Synode  de  Berne» 

plus  y  r  Arche  de   l  Allian- 
ce DU  Seigneur;.  Ce  difcours 
ne  montera  plus  dans  leur  cœur  y  ils 
ne  s'en  fouviendront  plus;  mais  Je» 
rufalem  fera  appelée  le  Trône  de  Dieu, 
Là  le  Pfophére  parle  du  régne  de 
Jesus-Christ  &  de  la  Jéru-  i 
jfalem  Célefte  qui  eft  libre  >  &  dans  i 
laquelle  pieu  habite  ,  favoir  dans  ( 
les  cœurs  des  Elus,    Il  fuie  de  là»  > 
que  Dieu  le  Pére  n'eft  bien  connue 
en  vérité,  dans  ce  tems  de  la  grâce, 
que  dans  le  Chef  &  dans  fes  Mem- 
bres, favoir  en  Jefus-Chrift  &  en 
fes  Fidéhs  ,  puifque  c'eft  en  lui 
que  la  grâce  eft  auin  parvenue  aux  i 
Payens  ,  lefquels  ont  été  rendus  l 
participans  de  la  grâce  par  lui  >  , 
fans  Ja  Loi ,  par  fon  Sang  divin,  , 
&  en  l'opération  du  faintElprit, 

CHAPITRE  VL 

Qjdun  Sermon  Chrétien  doh  être  i 
uniqttement  tiré  de  J  £  s  U  s  - 
C  H  R  1  S  T  3        parler  de 
lui, 

^Omme  Dieu  a  toûjours  attaché 
fa  connoilTance  ,  pour  ainfi  di- 
re ,  à  de  certaines  œuvres  fym- 

boles 


tenu  en  X'yll.  369 
ibûles  remarquables  5  &  que  toutes 
ces  chofes  ont  été  des  figures,  des 
ombres  3c  des  types  qui  fe  rapor* 
itoient  à  Jefus  Chrift  ,   lequel  eft 
aparu  dans  les  derniers  tems  ?  3c 
a  parachevé  fa  courfe  dans  la  chair^ 
cft  monté  au  Ciel ,  3c  fe  fait  fen- 
,tir  tous  les  jours  dans  les  Fidé-  < 
les  par  le  S.  Efprit ,  Et  puifque  ce 
n  eft  qu'un  feul  3c  même  myftére 
que  celui  du  Pére  3c  du  Fils  ,  3c 
qu'aufil  nul  ne  peut  connottre  le  Pére 
finon  par  le  Fils  ,  pour  cette  caufé 
il  eft  abfolum.ent  nécefTaire  ,  que 
tous  les  Serviteurs  de  Dieu  ,  qui 
annoncent  le  régne  de  Jefus-Chrift, 
prêchent  foigneufement  nôtre  feul 
Seigneur  Je  s  u  s  5  dont  la  connoif. 
fance  furpalTc  toutes  chofes.  C'eft 
pourquoi  nous  devons  nous  exhor- 
ter fidèlement  les  uns  les  autres, 
à  ce  que  nous  ,  qui  fommes  les 
Miniftres  de  l'Evangile,  prêchions 
uniquement  ce  Jésus  nôtre  Sei- 
gneur, fur  qui  repofc  tout  le  con- 
fcil  de  Dieu  ,  afin  que  nous  ne 
foyons  pas  trouvés  comme  des  Pré- 
dicateurs de  la  Loi,  ou  autrement 
des  Prédicateurs  mondains  ,  n'en- 
feignant  que  les  penfées  de  nôtre 
Qw5  propre 


370  Actes  dri  Synode  de  Berne» 

propie  raifon,  &  que  nous  ne  fo- 
yons  pas  rejettés  du  Seigneur  y 
comme  de  faux  Serviteurs. 

CHAPITRE  VII. 

Qî^il  faut  com?nenc€r  ér  finir  la. 
Do^lrine  U  Vie  Chrétienne^ 
à  la  mort  à  U  réfurreclion 
de  Je  sus-Christ. 

n'eft  pas  encore  afles  que  les 
Minières  ayent  fouvent  dans  la 
bouche  ces  paroles  :  Jefus  -  Chriftj 
notre  Sauveur  y  &  d'autres  fembla»i 
blables  5  &  de  les  due  auPeuple^,! 
car  l'Evangile  du  royaume,  ne  con* 
fîfte  pas  en  fimple  voix  ou  en  fim-- 
pie  parole,  mai?  en  vraie  vertu 
de  Dieu ,  laquelle  faifit  les  cœurr 
des  Fidèles ,  les  change ,  les  re^ 
nouvelle;  &  de  pauvres  pécheursi 
qu'ils  étoient ,  les  rend  Enfans  de^ 
Dieu  ,  &  en  fait   des  Hommes* 
tout  céleftesdont  les  inclinations  ne 
font  plus  charnelles?  mais  divines. 

Or  pour  parvenir  à  ce  bonheur* 
il  faut  commencer  par  la  mort  & 
par  la  réfurreclion  de  Jefus-Chrift,! 
&  a  in  fi  prêcher  en  Ton  nom  \t 
repentance  Se  le  pardon  des  péche^ 


tenu  en  IS32.  yji 

C'eft  là  ce  que  doivent  contenir 
toutes  les  Prédications  Chié  iennes. 

C  eft  ainfi  que  J^-fus  -  Chrift  a 
icommandé  à  fes  Difciples  de  prê- 
cher, ceft  ce  que  les  Apôtres  ont 
obfervé,  c'eft  ce  que  les  Elûs  ont 
embrafle  par  la  Foi  ;  c'eft  ce  que 
le  S.  Efprit  a  confirmé,  &  ce  que  tout 
le  monde  doit  avouer,  fur  quoi  il 
faut  obferver  le  paflage  fuivant  : 
Alors  il  leur  ouvrit  r entendement  y 
afin  quils  compîiffent  les  Ecritures^  & 
il  leur  dit.  Il  eft  ainfe  écrit ,  &  ceft 
ainfi  quil  faîoit  que  /^Christ 
foufrit,  &  rejfufcitat  d'entre  les  morts 
4U  troifiéme  jour  y  &  quil  fit  prêcher 
en  [on  nom  U  repentance ,  &  le  par» 
don  des  péchés  parmi  tous  les  Peuples^ 
Luc.  XXIV. 

Nous  voyons  par  là  que  ce  n  eft 
qu'après  la  réfurre^flion  que  la  pré- 
dication de  la  repentance  Se  du 
pardon  des  péchés  a  eu  lieu,  puif- 
que  c'eft  au  nom  de  celui  qui  a 
foufert ,  qui  ell  mort ,  &c  qui  eft 
reffufcité,  qu'il  faut  prêcher  h  re- 
pentance 6c  la  remifrion||(es  péchés» 
C'eft  pourquoi  il  faut  que  toutes 
les  Prédications  fuient  tournées  de 
ce  côté  làj  afia  déviter  l'erreur,  de 
Q^<î  cor- 


372  Actes  du  Synode  de  Berne» 

corriger  les  mœurs  ,  &  d'avancer 
le  bien.  Il  faut  ajoûter  à  ce!a>  que 
ce  fut  après  fa  réfurrcflion  que  le 
Seigneur  envoya  fesDifciples  pour 
prêcherj  fur  quoi  il  faut  remarquer 
que  fous  la  réfurredlion  ,  il  faut 
aufll  comprendre  tout  le  refte  de 
la  vie  de  Jefus-Chrift ,  favoir,fon 
Afcenfion  dans  le  Ciel ,  &  la  dit 
tribution  du  S.  Efprit  ,  avec  les 
effets  qui  s'en  en  fui  vent  dans  k 
confcience  des  Fidèles. 

Il  faut  aufTi ,  bien  méditer  les 
prédications  de  S.  Pierre  ,  dans  le 
Livre  des  A(fles  des  Apôtres  >  leC 
quelles  contiennent  l'ordre  qu'on 
vient  de  marquer  pour  annoncer 
le  fâlut  par  Jifus  -  Chrift,  kà.  IL 
IV.  V.  XI.  XVII.  XX.  car  elles 
montrent  par  tout  la  mort  &  la 
réfurre(flion  de  Jefus-Chrift,  &  an^- 
noncent  par  là  la  repentance  &  le 
pardon  des  péchés  >  ce  qui  eft  le 
ibmmaire  de  nôtre  Evangile.  Il  eft 
néceflaire  de  méditer  foigneufement 
ces  Sermons  des  Apôtres,  afin  que 
nous  conjpiencions  là  ou  ils  ont 
commence,  &  que  nous  puiffions 
avancer  &  croîwre  en  Jefus-Chrift 
comme  eux. 

Mais 


tenu  en  î  532.  373 

Mais  dira-t-on  5  s'il  faut  com- 
mencer 8c  finir  à  la  mort  &  à  la 
réfurre£lion  de  Jefus-Chrift,  à  quoi 
ferv^enc  donc  les  Evangeliftes  >  qui 
nous  décrivent  fa  naiffance  6c  fa 
vie  ? 

Réponfe,  La  naifTance  &  toute 
la  vie  de  Jefus-Chrift  eft  une  pré- 
paration à  fa  mort,  tellement  que 
toute  la  difpenfation  de  fâ  vie  en 
Ja  chair,  &  faDodrine, a  été  tour- 
née pour  fervir  a  nôtre  Salut ,  puif- 
qu'il  a  été  envoyé  de  fon  Pére  & 
qu'il  eft  venu  au  Monde  pour  fau- 
ver  les  pécheurs,  certainement  il 
S'eft  toujours  fidèlement  aquité  de 
fa  commifTion  >  6c  a  tourné  de  ce 
coté  là  toutes  fes  paroles  8c  fes 
Ceuvres  ,  autrement  il  auroit  cté 
défobéiftant  à  fon  Pére>  ce  qui  eft 
impie  à  penfer.  C'eft  pourquoi 
Tefprit  qui  eft  en  nous,  ne  cherche 
dans  toute  fa  Do£lrine  autre  cho/e 
que  la  parole  de  fa  croix  ôc 
flc  fa  gloire.  De  même  il  con- 
temple les  œuvres  6c  les  mi- 
Mcles  de  Jcfus-Chi  ift  ,  dans  let 
<|liels  il  contemple  le  cours  inté- 
rieur de  la  grâce  ,  6c  Topcration 
(piiituelle  de  Jefus-Chrift  dans  le 

cœuf} 


374  A^es  du  Synode  de  Berne, 

cœur,  fa  voir,  Quzm  lieu  que  nous 
femmes  des  pécheurs  aveugles  & 
fourdfi  ,  il  nous  rend  la  vûe  & 
Touie  pour  entendre  la  voix  vivante 
du  Pére  :  De  boiteux  que  nous 
fommes  ,  il  fait  de  nous  de  vail- 
kns  foldats ,  qui  courent  dans  les 
voyes  de  Dieu  ,  fans  broncher  ;  il 
nous  nettcye  de  la  lèpre  du  péché 
par  fa  grâce  fdutaire,  &  le  pécheuc 
qui  eft  mort ,  il  le  vivifie  par  l'et 
prit  de  la  refurredlion.  Ceft  ainfî 
que  la  Foi  entendant  parler  des 
miracles  que  le  Seigneur  a  fait  ex- 
térieurement, admire  en  même  tems 
beaucoup  plus  les  opérations  inté- 
rieures &  fpirituelles  qu  il  fait  fen- 
tir  tous  les  jours  par  le  S.  Efprit, 
lefquelles  furpaffent  tout  entende-^ 
ment.  La  naiffance  de  Jefus-Chrift 
qui  a  été  faite  par  le  S.  Efprit,  nous 
montre  que  nous  devenons  enfans 
de  Dieu  >  lorfque  ,  outre  nôtre 
naiffance  charnelle ,  nousx  fommes 
aulfi  faits  des  Hommes  nouveaux 
&  céleftes,  par  le  même  S.  Efprit 
que  le  Seigneur  Jefus  nous  donnei 
C'eit  pour  cette  raifon  que  les 
Evangeliftes  décrivent  ainfi  lanaif^ 
iànce  ôc  k  vie  de  Jefus-Chnft;  parce 


tenu  en  l  532.  37S 
que  tout  cela  fert  à  nôtre  Rédemp- 
tion, ôc  que  nôtre  mort  à  la  chair, 
&  nôtre  réfurredlion  félon  l'efprit 
en  Chrift,  y  eft  figurée  5c  repré^ 
fentée, 

CHAPITRE  VIII. 

Comment  il  faut  tirer  de  JesUS- 
Christ  la  connoiffance  deno" 
tre  péché. 


'Apôtre  écrit  que  Bicu  a  entière- 


ment rendu  reiommandable  fa  cha'* 
rité  envers  nous,  en  ce  que  lors  que 
nous  n  étions  que  pécheurs  &^  ennemis 
de  Dieu ,  Christ  cfî  mort  pour 
nous  Rom.  V.  Il  fuit  de  là  que  le 
péché  doit  nous  paroîcre  abomi- 
nable >  &  extrêmement  haiffable  j 
puifquil  a  falu  que  le  Fils  de 
Dieu  mourut  poi-r  nous,  afin  d'en-^ 
lever  de  defifus  nous  ce  fardeau 
du  pé.hé,  il  s'eft  une  fois  offert 
pour  nous  par  le  S.  Efprit,  &  il 
â  trouvé  une  rédemption  é*ernclle.. 

Il  paroit  par  là  quel  fonds  de 
miférc  6c  de  malédi(flion  il  a  dans 
nôtre  ccc^r  puifqu  il  n  en  a  pu  être 
purifié  &  fanftifié  que  par  le  fa- 
crifice  d'une  viftiine  li  précicufe. 


376  Acf-es  du  S'jnodè  de  Berne ^ 

&  par  rafperfion  du  Sang  d'un 
Dieu  ,  car  rien  n  avoit  pû  aupara- 
vant remédier  à  ce  mal. 

Dieu  eft  le  Créateur  de  l'Hom- 
me. Il  faloit  que  l'Homme  fut 
entièrement  dévoué  à  fon  Dieu  j 
Or  cela  n'eft  plus  dans  fa  nature, 
car  il  regarde  aux  Créatures  ,  à  lui 
même  &  à  fon  propre  plaifJrrSc  il 
fait  de  foi -même  une  ^id aie  à  Fa- 
quelle  il  atribue  un  nomieur  di- 
vin,  ^  ii  le  veut  en  effet  avoir  r 
de  là*Vient  que  perfonne  ne  veut 
ècre  méprifé. 

CHAPITRE  IX. 

Que  cejl  en  J  es  U  SfS^u  rist^ 
dr  fans  la  Loi  5  ^ue  l'on  doit 

•  chercher  la  connoijfance  du 
péché, 

T  Es  Apôtres  ont  donné  claire^ 
ment  à  connaître  la  corruption 
de  nôtre  nature  par  la  mort  de  Je- 
fns-  Chrift ,  au  lieu  que  les  Juifs 
n  ont  connu  leur  péché  par  la  Loi 
\  de  Moife  ,  qu'avec  beaucoup  de 
peine.  C'eft  pourquoi  ils  ont  re- 
préfcnté  fîmplement  aux  Payens 
leur  péché  >  &  leur  ont  annoncé 

leur 


tenu  en  1532.  377 
leur  reconciliation  par  Jefus  -  Chrift 
ifans  la  Loi ,  &  ils  n'en  ont  ren- 
voyé aucun  à  Moife.  Car  fi  l'on 
apiend  par  la  Loi ,  à  connoîrre  le 
péché  ,  ce  n'eft  qu'une  œuvre  froi- 
;de  &  morte,  qui  n'a  point  de  vie. 
îQuelle  peine  n'ont  ils  pas  eu  avec 
Jes  Juifs ,  pour  les  détourner  de 
' Aîo'iÇe  &  les  amener  entièrement  à 
Jefus  -  Chrift  ?  &  pourquoi  vou- 
drions nous  donc  détourner  nôtre 
Peuple  de  Jefiis-Chrtft ,  &  le  ra- 
mener fous  la  fervitude  de  la  Loi  ? 

CHAPITRE  X. 

Pourquoi  S.  Paul  a  tant  parlé  de 


R  5  parce  que  de  faux  Apôtres 


s'étoient  glilTés  dans  l'Egli/è  , 
enfeignoienc  la  Loi  comme  né- 
zefTaire  avec  Jefus  -  Chrift  ,  cet 
Apôtre    de  la    vérité,  fut  con- 
traint de  montrer  pour  quel  ufa- 
\z  &  jufques  à  quel  point  Moï- 
e  eft  utile  avec  fon  fervice.  Au- 
lement  il  n'auroit  pas  eu  bcfoin 
l'en  parler  aux  Payens  qui  croioient 
out  fimplement  en  Jefus  -  Chrifl, 
îk  cfpéroient  de  recevoir  de  lui  le 

pardon 


la  Loi  aux  Payens, 


378  Actes  du  Synode  de  Berne-y 

pardon  de  leurs  péchés ,  s  atachant 
à  lui  >  Timitant  &  regardant  à  lui 
dans  toute  leur  conduire  ,  car  ce- 
lui qui  croit  à  Jefus-Chrill  >  a  la 
vie  éternelle.  Ccft  pourquoi  un 
Payen  qui  a  la  Foi,  n'a  que  faire 
de  la  Pédagogie  de  la  Loi ,  il  a  déjà 
obtenu  la  liberté  des  Enfans. 

CHAPITRE  XI. 

Que  les  Juifs  &  lesGQmWs  font 
parvenus  à  la  Foi  i  les  pré- 
pners  fous  la  Loi ,  dr  les  der- 
niers fans  la  Loi. 

/^Ependant     TEglife  affemblée 
^  d'entre  les  Juifs,  a  retenu  U 
Loi  avec  Jefus  -  Chrift  en  liberté 
Chrétienne  ,  &  Ta  gardée  avec  un 
grand  zélé ,  mais  fans  préj'.'dicei 
de  la  confiance  qu'on  doit  avoir  cnii 
Jefus-Chrill,  à  quoi  aufli  ALiUchii 
l'exhorte  en  la  perfonne  de  Dieu 
lorfqu'il  décrit  le  régne  de  Jefus- 
Chrift  ,  Se  qu'il  conclut  &  fcéelte 
toutes  les  Piophédes  :  Souvenés 
*vous  ,  dit-il,  de  la  Loi  de  Aîoife  mon 
Serviteur  ,  auqtu  l  je  donnai  a  Horth 
pour  tout  Ifra'cl  des  fîatuts  &  des  ju 
gmens.    Pourquoi  &  pour  com-t 

bien 


tenu  ۔i  I  532.  379 
ien  de  tems  Dieu  ordonnc-t-il  par 
vlahchic  de  fe  fouvenir  de  la  Loi? 
larce  &  pour  fi  Icng-tems  ,  juA 
[u'à  ce  qu'ils  reconnurent  TimpuiC- 
ance  de  la  Loi,  6c  fon  véritable 
ifage,  c'efl  à-dire,  qu'il  fuffer^t  por- 
es par  elle  à  défirer  ardemment 
a  venue  du  jour  du  Seigneur,  & 
afqu'a  ce  qu  £//^le  Prédicateur  de  k 
epentance  fut  venu ,  &  qu  il  eut 
réparé  le  chemin  du  Seigneur  dans 
i  pécheur  éfrayé.  Quand  cela 
fl  fait ,  le  Miniftére  de  Moïfe  eft 
ni,  &  cependant  il  eft  volontai- 
ement  gardé  fans  commandement 
ar  ceux  qui  y  font  acoutumés,  & 
ui  par  l'exercice  extérieur  de  la 
.oi.  animent  leur  Foi,  6c  fe  ré- 
•réfentent  les  tréfors  intérieurs  du 
Loyaume  des  cicux,  comme  l'Egli- 
e  Apoftolique  Ta  fait  à  Jerufa- 
em  ,  mais  perfonne  d'autre,  C'efl 
Hourquoi  Puul  n'enfeignc  point 
le  renoncer  à  la  Loi ,  mais  il  fe 
harge  lui-même  d'une  purification 
clon  la  Loi  àjerufalem,  par  Ta- 
is des  autres  Apôtres ,  afin  de 
e  faire  regarder  comme  un  Hom- 
ne  qui  reçoit  la  Loi  comme  bon- 
le ,  6c  non  pas  qui  la  rejette 

comme 


380  Actes  du  Synode  de  Bemt 

comme  mauvaife.  D'autre  cote» 
l'Eglife  Apoftolique  de  Jerufalem 
ne  voulue  point  lier  les  Fidèles 
Gentils  à  la  Loi  >  bien  que  quant 
à  eux  5  ils  euflent  tant  de  zèle 
pour  elle  h€t,  XXI.  car  elle  écoit 
utile  aux  Fidèles  d'entre  les  Juifs 
qui  favoient  en  faire  un  bon  ufa- 
ge,  y  étant  acoutumés  dès  leur 
enfance,  ils  fe  reflouvenoient  en 
pratiquant  la  Loi  de  leur  Seigneur 
Jésus  -  Christ  ,  de  fes  dons^de  fes 
grâces, &  de  leurs  péchés.Mais  quant 
aux  Gentils  qui  n'avoient  aucuni 
habitude  avec  la  Loi ,  elle  ne  pou^, 
voit  produire  en  eux  qu'une  faufli 
confiance  dans  les  œuvres  >  foit 
qu'on  l'enfeignât  devant  >  ou  après 
Jefus-Chrift ,  comme  fi  Won  n'avoil 
pas  tout  en  lui.  Les  Jnifs  fidélesjlj 
au  contraire  ,  reconnoiflbient  fort 
bien  '  par  expérience  que  ces  ceuvrcî 
de  la  Loi  leur  étoient  utiles  ,  J 
l'égard  des  figures  8c  de  leur  figni^, 
fications  &  ils  n'avoiènt  pas  liei 
d'apréhender  de  perdre  la  grâce  i 
&  de  fe  rejetter  fous  les  foibl 
élemens  de  ce  monde  ,  tant  qu'i 
perfévéreroient  dans  la  grâce  qu'il 
avoient  obtenue,. 

G  HA 


15 


tenu  en  1^2,2.  381 
CHAPITRE  XII. 

différence  entre  la  manière  de 
prêcher  JesUS  -Christ 
parmi  les  Payens  &  eelle  de 
le  prêcher  parmi  les  Juifs^ 

K  Infi  il  y  a  de  la  différence  en- 
tre le  Miniftére  Apoftolique , 
eftiné  pour  les  Gentils  ,  qui  fut 
Dnfié  à  S,  Paul,  &  le  Miniftére 
es  autres  Apôtres  deftiné  pour 
;s  Juifs,  dont  S,  Pierre  k  fervit.  Ce 
ernier  eft  zèle  pour  la  Loi  fans 
anger  ,  ^cl,  XXI.  Mais  le  pré- 
lier  ne  fe  met  point  en  peine  de 
îLoi,  &  n'a  du  tout  rien  à  faire 
VQC  Moife  que  par  accident,  au- 
int  qu'il  rend  témoignage  à  leur 
ien  aimé  Sauveur,  ik  qu'il  eft  uti- 
I  à  inftruire  ,  à  cenfurer  Se  à  cor- 
ger  Sec.  Mais  nous  qui  venons 
es  Gentils,  Se  qui  avons  à  faire 
vec  des  Gentils,  Se  non  pas  avec 
es  Juifs  ,  nous  devons  annoncer 
i  grâce  en  Jefus-Chrift  fans  la  Loi, 
omme  S.  Paul  avoit  acoutumé  de 
aire  ,  Se  non  pas  nous  mettre  en 
>eine  d'obfcrver  la  Loi  avec  TE- 
,life  de  S.  Pierre  affemblée  à  Jeru- 


382  Actes  du  Synode  de  Berne ^ 

falem,  car  Jefus-Chrift  nous  fufF. 
Que  voulons  nous  davantage 
^Jem*  I.  ■ 

CHAPITRE  Xlir. 

jyoH  vinrent  les  faux  Af  mes. 

T^E  la  vient  que  les  faux  Apô 
très  fe  couvroient  de  Tautho 
rite  de  TEglife  de  Jerufalem  ,  qi 
avoit  un  grand  zèle  pour  la  Loi 
&  fe  vantoit  d'avoir  comminio 
de  fa  part  auprès  des  Gentils,  mai 
contre  la  vérité  ,  6c  tâchoient  d 
détourner  de  la  Foi  les  Gentils  cor 
vertis,  &  de  les  ramener  de  î(|| 
fus-Chrift  à  Moïfe-  Mais  rEglill 
de  Jerufalem  ne  fit  rien  de  ierrB 
blable  ,  &  TApôcre  S.  Paul  s  opqi 
fâ  vivement  à  ces  mêmes  faux  Ap^ 
très  >  exhortant  les  fidèles  Genti 
à  demeurer  fermes  dans  la  purci 
de  la  Foi  9  pour  cela  il  lui  éto 
néceffaire  d'avancer  beaucoup  c 
chofes,  touchant  la  pratique,  T 
fage  &  la  valeur  de  la  Loi 
Moife  ,  non  pas  que  fon  princi 
deffein  fût  de  conduire  par  là  1 
Fidèles  à  une  plus  grande  conno 
fance  du  péché,  duquel  ils  avoie 


tenu  en  IS32.  383 

été  juftifiés  auparavant,  car  Jefus- 
Chrift  nous  donne  une  connoiffance  - 
beaucoup  plus  claire  du  refte  du 
péché  ;  mais  il  a  agité  cette  difpute 
touchant  la  Loi  ,  afin  de  prévenir 
(a  confiance  qu  ils  auroient  pu  met- 
tre en  la  Loi>  comme  une  chofe 
pcrnicieufe,  &  pour  les  affermir 

*  en  Jefus-Chrid  ,  qui  donne  fans 
la  Loi  de  la  Lettre  >  Tefprit  de  la 
Loi  de  vie,  laquelle  fubfifte  éter- 
nellement. 

Ceft  pourquoi  nous  Miniftres  , 
t'oulons  employer  cette  manière 
de  prêcher,  dont  les  Apôtres  fe  font 

,  Ifcrvis  envers  les  Gentils  ,  leur  fai- 
fant  connoître  le  péché  par  Jefus- 
Chrift  fans  la  Loi ,  &  leur  annon- 
çant la  grâce  &  le  pardon  des 
Dechés  par  Jefus  -  Chrift.  Et  s'il 
irrive  que  nous  ayons  à  traiter 
devant  nôtre  Eglife  quelque  texte 
^ui  foit  tourné  contre  les  faux 
\pôtres  &  Douleurs  de  la  Loi,  il 
audra  bien  l'expliquer  nettement, 
nais  cependant  ramener  en  même 
:ems  la  fimplicité  de  fefus-Chîift 
'ans  Ja  Loi  ,  C  eft  cela  qui  fert  à 
élever  un  vrai  édifice  de  Dieu ,  & 
prévient  beaucoup  d  erreurs  ,  lef- 

quelics 


384  Actes  du  Synode  de  Berne» 

quelles  des  gens  fin  pies  peuvent 
fort  facïlemenc  tirer  de  la  Lettre, 
.&  les  foutiennent  enfuite  fans  in» 
telllgence, 

CHAPITRE  XIV. 

De  la  refentance  &  du  pardon 
des  péchez ,  OU  de  la  difpen- 
fat  ion  de  la  grâce. 

A  Près  qu'on  â  tiré  de  la  pâfrion 
de  J  E  s  u  s-C  H  R  1  s  T  8c  de  fon 
entrée  dans  la  gloire  du  Pére  »  une 
folide  connoiffance  du  péché ,  il  en 
découle  naturellement  une  vérita 
ble  repentance ,  c*eft-à-dire,  une  vi 
ve  douleur  &  un  grand  déplaifîr 
d'avoir  cffenfé  Dieu  par  le  péchci 
&  i'efpérance  d'en  obtenir  le  par 
don  ,  parce  que  le  Fils  de  Dieu 
a  été  envoyé  au  monde  par  fon 
Pére  célefte  pour  foufrir  &  pour, 
mourir,  afin  que  par  fâ  mort 
nous  rendit  la  vie  &  la  pofTtfrion 
des  biens  céleftes.    Quand  donc 
le  Pére  a  ainfi  manifefté  fon  Fils  j 
&  l'a  propofé  à  la  confcience,  cela 
,  produit  une  Foi  vive  &  une  fer- 
me confiance  en  cette  grâce  incoiii- 
préhenfible  de  Dieu.    C'eft  là  h 

Foj 


oi  qui  juftifie.  Car  qui  croit  en 
noï ,  dit  le  Seigneur  ,  //  a  Id  vie 
't cruelle.  Il  eft  pujfè  de  U  mort  à 
X  vie,  fon  nom  eft  écrit  dans  le 
l.ivre  de  vie  pour  entrer  dans  le 
Ciel,  où  rien  d'impur  6c  de  fouillé 
ie  peut  entrer. 

Ccft  là  la  manière  ,  dont  le 
Seigneur  dirpenfê  fa  grâce  par  le 
5.  Efprit  ;  Qut  chacun  aprenne  par 
la  mort ,  par  la  rerurre(ftion  &  par 
i'afcenfion  de  Jes  us-Christ  à 
:^enoncer  à  fes  péchés  &:  à  fà  na- 
ture, corrompuë  ,  pour  rechercher 
le  don  de  Dieu  en  Jefus-Chiifti 
Se  à  s  y  confier  entièrement  ;  Et 
:*eft  par  cette  confiance,  que  Ton 
reçoit  la  grâce  par  laquelle  tous 
nos  péchés  pafles  nous  font  par- 
donnés. 

L'Efprit  de  Jcfus-Chrift  y  con- 
tribue au/Ti,  fon  opération  décou- 
vrant &  mettant  au  jour  de  plus 
en  plus  le  péché  caché,  &  la  cor- 
ruption fecrette  des  cœurs,  laquelle 
il  confume  de  jour  en  jour  ,  &  il 
purifie  journellement  le  cœur  com- 
me le  feu  puiifie  l'argent,  il 
le  netroye  de  l'écume  &:  de  la 
cralTe  du  péché.  Car  h  S.  Efprit 
7m.  IK  R       a  deux 


3S6  Ac7es  du  Sjnode  de  Berne* 

a  deux  ouvrages  à  faire  en  nous. 
Le  prémier  eft,  que  par  fa  grâce 
il  rend  les  Fidèles  juftes  &  de 
nouveaux  Hommes,  Le  fécond, 
c'eft  qu'il  nous  aide  à  devenir  lc»i 
héritiers  de  la  vie  éternelle  félon 
nôtre  efpérance  \  ce  qui  fe  fait  lors 
que  nous  demeurons  fermes  dans 
le  combat  de  la  Foi,  que  nous 
mourons  journellement  à  la  chair; 
&:  que  nous  aquerons  des  incli- 
nations  fpirituelles  &  céleftes.  On 
peut  au  fujet  de  la  repentance  ,  &I 
du  pardon  des  péchés  en  Jefus^ 
Chrift ,  méditer  le  paffage  fuivan 
&  d'autres  fèmblables.  Tendons  \ 
U  perfection  >  &  ne  mettons  pas  dt4 
rechef  le  fondement  de  U  repentance 
des  œuvres  mortes  ^  &  de  U  Foi  n 
Dieu  Hebn  VL 

CHAPITRE  XV. 

La  repentance  trouvée  en  Je^ 
SUS'  Christ,  efi  le  fo, 
dément. 

T  A  repentance  eft  le  fondement 
mais  comme  on  Ta  dit,  il  fau» 
la  chercher  en  Jefus-Chrift.    C  e£ 
pourquoi  la  prédication  de  Jefus 

Chrif 


tenu  en  I  532.  lij 

Chrift  eft  celle-ci:  Amendés  vous^ 
ar  le  Royaume  des  cicux  e(i  aproché. 
i:'eft-à-dire,  que  la  caufe  de  la  rc- 
)entance  ou  de  ramendement,  doit 
tre  le  défir  du  Royaume  des  cieux, 
;cquel  eft  préfenté  par  Jefus  -  Chrift 
»our  le  recevoir  ;  ce   qui  arrive 
orfque  le  S.  Efpric  nous  arofe  > 
ous  nettoyé  6^  noiîs  fandlifie  par 
i  Sang  de   Chrift.    Jean  Butifte 
xhorte  aufli  à  la  repentanccjlePcu- 
le  qui  défire  d'échaper  à  la  colère 
e  Dico  ,  &  d'être  préfervé  de  U 
erdition  ;  &  nous  le  devons  imi- 
'.r  en  cela ,  comme  les  Apôrres 
ont  imité  exaftement ,  comme  le 
)nt  voir  les  paflages  fuivans.  Apiès 
uc  S.  Pierre  eut  prouvé  dans  Ton 
:rmon  que  Dieu  avoit  relTufcité 
îfus-Chrift  d'entre  les  morts ,  il 
t  j  Maintenant  ayant  été  élevé  par  U 
xtre  de  Dieu ,  &  ayant  reçu  dn 
he  la  promejfe  du  S,  Efprit  y  il  a 
pandu  ce  que  vous  voyés  &  enten^ 
s  &c.   Que  donc  toute  la  maifon 
/frael  fâche  pour  certain,  que  Dieu  m, 
't  Seigneur  &  Chrift  ce  Jésus  que 
us  avés  crucifié.     Et  comme  ils 
•  renr ,  que  faut-il  que  nous  fajfions  ? 
»  Pierre  répondit  :  Amendés  vous 
K  z  & 


388  Acics  du  Synode  de  Berne ^ 

&  que  chacun  de  vous  foi:  bjtifé  au 
mm  de  Jefus  -  Chrift ,  &  vous  rece- 
^res  le  don  du  S.  Efprit  A<ft.  II.  Le 
Dieu  de  nos  Pères  a  rejfufcité  Jefus^ 
lequel  vous  avés  fait  mourir ,  ie  pen- 
dant au  bois,     C'e^  celm  que  Ditu 
élevé  par  fa  dextre>  pour  être  le  Prin- 
ce &    le  Sauveur  ,  pour  donner  L 
repentance  a  Ifrael  &  la  reni'jfio) 
des  pé.hes  ,   &  nous  fommes  témoin 
de  ce  que  nous  difons  ,  &  le  S.  Ej 
prit  atfffi  &CC.   Aa.  V.  Ceft  là  u 
court  &  parfait  Sermon  j  qui  con 
tient  toute  la  conduite  de  Die 
envers    les   Hommes  par  Jefu 
Chrift. 

CHAPITRE  XVI. 

Le  Àd'jfiére ,  qui  a  été  caché  d 
La  fondation  du  Adonde  ^  ej 
que  Jésus  -  Ch  ri  st  i 
prêché  aux  Payens  fans 
Loi, 

TLs  dirent  :  Dieu  donc  a  auftl  do 
^  né  aux  Payens  la  repenrance  po 
vivre  ^(l,  XI.  dans  lefquels  i 
excellentes  richeffes  du  Myft< 
c*eft-à-Jire  ,  de  Chrift  ,  ont  écc  ( 
voilées  parmi  les  Payens  ,  ap  | 

av  ■ 


tenu  en  I  532.  389 

ivoir  é:é  cachées  dès  la  fordation 
iu  Monde.  Cthii  donc  qui  ayant 
i  prêcher  parmi  les  Gentils ,  veut 
ixciter  la  repenrance  par  la  Loi  , 
:e  fai:  qu'obfcurcir  les  principaux 
vlyftéres  &  la  gloire  de  Jcfùs- 
Dhrift  ,  favoir  que  le  S.  Efprir  eft 
nvoïé  égaltment  par  Jefus-Chrift 
LUX  J'jifs  fous  la  Loi,  &:  aux  Gen- 
ils  Ans  h  Loi.  C'eil  là  ce  qu'il 
"auc  bien  remarquer, 

S.  Paul  érrm:  à  ThefTalonique  > 
)a'la  de  la  Loi  aux  Juifs  trois 
ours  durant.  Il  la  leur  expliqua, 
k.  il  leur  fit  voir  qu'/7  oït  que' 
e  Chrift  fouffrit  &  rejjufcitk  d'entre 
es  moi  rs  ,  &  que  J  e  s  u  s  ,  ie^ 
luel  dit- il  5  ]e  vous  annonce  ,  e!Jt  Is 
:hmst  A(fl.XVir. 

De  même  à  Athènes  :  Di:// dit-il, 
yant  dïfjhr.ulé  les  tems  de  ngneran- 

comm  nde  m.intinAit  a  tcus'  lc$- 
.  omwes  en  tous  lieux  de  je  rcp  nt'r, 
AYce  qu'il  a  dctirth'iné  un  jour  aH-» 
'  el  7  doit  juu'r  le  Alonde  en  juflicef 
ir  niojvnie  qu  .l  a  ctabii  pcu"  ccLt, 
\(jf(oi  ./  a  f^it  F  i  à  chacun  en  le 
'  Iffifatant  d.  s  morts, 

y  ai  t. 'me  igné,  ta:it  au  J:^ifs  quaux 

'.es  y  la  ripintance  emers  Di,u, 

R  i  U 


390  A^es  du  Synode  de  Berne l 
U  Foi  en  Jefus-Chtift  Aa.  XX,'( 


CHAPITRE  XVIL 

Que  ton  peut  aujji  tirer  des  Prfi- 
fhètes^  des  injlru^ions  pour  U 
repentdncc  Chrétienne. 

QUand  donc  on  a  à  expliquer 
^des  paffages  du  vieux  tefta- 
jnent,  qui  traitent  de  la  repentan- 
cc ,  il  faut  toûjours  les  rapoiter  à 
Je/us-Chrift  ,  comme  on  vient  de 
le  faire  voir  ,  pui/que  tous  les  Pro- 
phétes  conduifcnt  à  lui,  comme  ce 
partage  de  Jeremie.  Sï  le  Peufk 
€ontre  lequel  f  aurai  parle  fe  détour^ 
ne  du  mal  &  s  amende  &c.  Il  faut 
entendre  cela  avec  des  oreillesi 
Chrétiennes  >  &  faire  réflexion  que 
ce  n'eft  qu'en  Jefuf  -Chrift  qu'il  faut 
chercher  cette  rcpentance  ,  comme 
ce  neft  qu'en  lui  qu'on  la  peut 
trouver,  afin  que  perfonne  ne  s'i- 
magine, que  le  défir  férieux  qu'il 
1  de  s'amender  vienne  de  lui  mê« 
me  >  lâns  l'opération  de  Jefus-i 
Chrift,  &  ne  fe  perfuade  fauffc-, 
ment  qu'il  cft  bien -tôt  près  dej 
Dieu. 

CHA. 


lOUi 

m 
flic 


m 


tenn  en  IÎ32.  391 
CH  AP  ITRE  XVIII. 

Qi^il  faut  toujours  croitre  dans 
la  connoiffance  de  J  e  s  U  s- 
Christ,  &  que  chacun 
doit  examiner  fa  propre  Foi. 

L  faut  que  cette  Doflrine  que 
nous  venons  d'expofer  ,  croiflfe 
urnellement  dans  les  Eglifes  & 
ans  les  Fidèles,  qui  doivent  s'at 
ûrer  de  plus  en  plus  de  leur  vo- 
lation,  en  examinant  foigneufe- 
nent  &  en  ranimant  leur  Foi.  Car 
quiconque  n*avance  pas  dans  la 
lonnoiffance  &  dans  le  fenrimcnt 
ie  Jefus-Chrift  ,  dccroit  ^  recv  1., 
)U  bien  même  >  il  n'a  jamais  en- 
ore  bien  éré  dans  le  droic  (h  ^min. 
D'eft  à  quoi  fe  vent  les  ex  ho- ta- 
ions  deS.  Pâjl,  dans  lefqtitiles 
es  Payeurs  doivent  s*excrcer  foi- 
jneufement. 

D'autre  côté ,  TEleftion  &  la 
lirace  de  Dieu,  de  laquelle  tojc 
iépcnd  ,  ne  péiit  jamais  ;  ccpen- 
iant  il  faut  enfeigiicr  au  Peiipl»:  de 
examiner  foi-même  ,  &  de  voir  fi 
^ette  éIe<flion  &  fi  cette  volonté  mi- 
éricordieufe  de  Dieu  par  Jesus- 
R  4  Christ 


392  Actes  du  Swode  de  Berne, 
Christ  a  eu  lieu  en  eux  ,  &  a 
éré  exécutée  ou  non  ,  c'eft-à-dirc; 
que  chacun  fâche  ce  qu'il  a  vérita- 
blement reçu  de  Jefus-Chrift  ,  & 
ce  qu'il  lui  manque  en  rintelhgen 
ce  &  en  la  connoilTance  de  Chrift. 
qui  n'cft  autre  chofe  que  le  renou- 
vellement  du  cœur  ,  &  l'Homme 
intérieur,  fpirituel  &  célefte,  qu 
eft  fkns  péché,  entant  qu'il  eil  ne 
de  Dieu  &  qu'il  ne  vient  point  d( 
lach^ir  &  du  Sang.  Car  la  Foi  ef 
une  aflurance  vive  du  cœur.  le 
il  ne  fufKt  pas  d'avoir  uns  fimpl 
perfuafion  ,  comme  cela  fe  fait  danî 
les  affaires  humaines. 

Jufques  ici  nous  avons  parlé  d< 
Ja  Doflfine   de  Jefus-Chrift  ,  qu 
commence  à  fa  mort  &  à  fa  re- 
furre(flion.  Dans  la  mort  de  Jefus 
Chrifl  on  aprend  la  connoiffanci 
du  péché  &  la  véiitable  repcntan 
ce  '-y  on  ap:end  le  pardon  des  pc 
chés  dans  fon  élév-ation  ,  laquelle 
par  1.1  Foi  &:  par  le  don  de  Dieu 
qui  eft  Chrift  en  efprit ,  fertilift 
les  cœurs  des  Elus  par  une  femen- 
ce  àÀ'^iwç,,  &c  engendre  par  cette  fc- 
mence,  incorrupcibl j  pour  le  Ro- 
yaume  des  cieux  ,  des  Hommes  cé- 

lefte*> 


ttnu  en  î  jgy 

lefles,  c'efl-à  dire,  des  Hommes  qui 
commencent  de  tout  leur  cœur  à 
quitter  Is  péché  a  pratiquer  la 
juftice  &  la  vertu  ,  en  éprouvant 
i'amour  de  Dieu  tn  la  Foi.  C'eft 
là  une  Do(ftrine  qu'il  faudroit  pref- 
fer  dans  tous  les  Sermons.  C'efl 
là  ce  que  nous  avions  à  dire  fiir 
l'Article  delà  fîine  Do(flrine.  Nous 
voulons  encore  ajouter  quelque. 
:hofe  touchant  les  Sacremens. 

CHAPITRE  XîX. 

Des  Saints  Sacremens  ,  du 
k    Ba renie  en  général. 

lA  ^'^J^^^^        Sacremens,  voici 
quelle  eft  nôtre  penfée  :  Qne 
fcous  nous   exhortions  foigneufe- 
fcnent  les  uns  les  autres  ,  à  garder 
la  charité  envers  tout  le  Monde 
autant  qu'il  nous  cft  po/Tible  >  de 
que  nous  ne  nous  eng^if^ions  point 
dans  aucune  difpute  ,  particulié-x-- 
ment  au  fujct  des   Saints  Sacre- 
mens, tant  qu'on  nous  biffera  le 
MvAcrc,  qui  cft  le  Seigneur  Jefur-. 
Chrift,  quand  mc;nc  on  ne  nous  le 
l  ilTeroit  pas  fi  clairement,  ^  de 
la  manière   qu'il  le  faudroit ,  de 
R  5  peur 


394  A5fes  du  Synode  de  Berne» 

peur  que  nous  ne  le  perdions  pat 
la  difpuce. 

Car  ks  Sacremens  doivent  nous 
fervir  à  nous  avancer  dans  la  per- 
feftion  ,  &  non  pas  à  exciter  ea  i 
nous  des  mouvemens  de  nos  fens 
charnels.    Si  donc  quelcun  veuti 
opiniâtrement  foûtenir  fon  opinion>i 
il  faut  prudemment  quiter  la  par- 
tie &  détourner  le  difcours  auxi 
cho fes  qui  font  certaines ,  JefqueH 
les  Jefus-Chrifl  lui-même  produit! 
en  nous  par  le  S.  Efprit,  félon  la 
grâce  que  Dieu  a  faite  à  chacun 
en  tout  tems ,  favoir  >  parler  de  la< 
vertu  &  de  I  cfficace  de  la  Foi;  dei 
la  bonne  confcience,  en  quoi  ellel 
confiée  y  combien   de  rems  elle! 
fubfifte,  comment  &  pourquoi  elleS 
peut  déchoir  ,   combien  elle  eft 
tcûjowrs  éloignée  de  l'avancement 
intérieur  &  de  Tacroiffement  de  li 
grâce  >  te  autres  chofes  fembla- 
bles;  pourvû  feulement  que  nous 
nous  étudions  toûjours  à  prévenici 
de  tout  nôtre  pouvoir  les  qucrcl^ 
les  &  les  difputes  >  ^  2.  ne  point 
forger  d'Aiticle  de  Foi  comme  Toit 
fait  d*ordinaire,  pour  lier  les  confcien-^ 
ces  les  uns  des  autres ,  &  pour  les 

obliger 


tenu  en  I  S  32.        39 S 

obliger  d*entrer  dans  fon  fentimsnr. 
Antrcment  on  donne  derechef  oc- 
cafîon  à  toutes  fortes  de  maux  & 
d'abominations  >  &  Ton  ouvre  la 
porte  à  toutes  forces  d'erreurs. 

Or  il  nous  fembleroit  que  la  ma- 
nière la  plus  fûre  pour  bien  parler 
des  Sacremens  eft  celle-ci  :  Premiè- 
rement, que  ce  ne  font  pas  de  fim- 
ples  cérémonies  ,  que  les  Hébreux 
appellent  huk^m  ,  car  elles  ont  été 
des  ombres  66  des  figures  de  Jefus- 
Chrifl  qui  devoit  venir  ,  lequel  cft 
maintenant  préfent  dans  fon  Eglife 
&  y  demeure  jufques  à  la  fin  du 
IVlondc  :  Mais  c»  font  des  Myfté- 
res  de  Dieu  ou  bien  des  Myliéres 
de  l'Eglife  de  Chrirt,  lefquels  pré- 
fentent  exrcrieurement  aux  Fidè- 
les ce  même  Jefus-Chrift  qui  eft 
préfent  en  Efprit  Saint ,  ^qiîi  rem- 
pli: les  cœurs.    Ainfi  nojs  prions 
le  tout  Puiflfdnt,  qu'il  falfe  que  Tu- 
fagcs  des    Sacremeis  foie  parmi 
nous  un  aifle  véritablement  divin, 
&   non   pas   une    fi  itplc  œuvre 
d'Homme,  c'eft  à-dire  ,  qu:  toû-* 
jours  ce  grand  Myi^éic   Dïeu  en 
chair  ,  vi .  c    6c  CioilL    en   r  oii;;  > 
comme  il  nous  e-t   p;c^eirc  vx- 


396  ABes  du  S'jnode  de  Berne ^ 

téiieurement  par  les  Sacremenr. 

En  fécond  lieu  jque  quand  nous 
parlons  des  Sacremens  ,  nous  nous 
fcrvions  d'expreffions  qui  y  foient 
convenables  en  tout  tems  ,  &  qui 
fervent  à  nous  édifier  en  Dieu  par 
Jefus-Chrift  ,  &  que  nous  ne  nous 
inquiétions  point  les  uns  les  au- 
tres par  des  termes  qui  font  ma- 
tière de  difpute  8:  de  querelle.  Ceft 
de  quoi  nous  avons  un  bel  exem- 
ple en  TApôtre  S.Paul,  comme 
quand  il  écrivoit  ainfî  aux  Romains 
qui  avoient  tous  éié  barifés  enje- 
fus  -  Chrift  j  Marchons  honnêtemeuf 
comme  de  jour,  leur  dit-il ,  non  peint 
en  gourmanc  if^  ni  en  Tirognerte  8cc. 
Vîdîs  foyés  revêtus  du  Seigneur  ]ESv%'i 
Christ  ,  &  najés  point  foin  de  lé 
chair  peur  fatisfaire  fes  convoitifts. 

D'autre  côté^écrivant  aux  Gala-, 
tes  3  il  kur  dit:  Maintenant  que  là 
toi  eft  venue  ,  nous  ne  fommes  ^/«>^ 
feus  le  Pédagogue  >  car  vous  ete^ 
tous  Enfaris  de  Dieu  par  la  Toi  en  Je- 
sus-Christ,  car  vous  tous  qui 
avés  été  hatifés ,  vous  avts  éré  rêvé' 
tus  de  J(fus-Chrifl, 

Qu'tft'Ce  que  nous  lifons  là  ?  Le 
S.  EÎprit  s'oublie-t-il  ainfi?  Il  prie 

ks 


tenu  en  n32.  397 

es  Romains  bniifés  de  fe  revêtir 
iu  Seigneur  Jefus-Chrifl ,  &;  quand 
1  pails  auxGalates,  il  change  de 
angage,  5^  il  dit;  que  tous  ceux 
^ui  ont  été  batifés  ont  déjà  été 
evétus  du  Seigneur  Jefus-Chrift. 
Cet  exemple  nous  fait  voir  évi- 
iemment,  qu'il  ne  faut  pas  regar- 
ier  aux  mots,  aux  paroles  6c  aux 
îxpreflTions,  mais  au  fens,  fuivant 
equel  on  retient  ou  l'on  change 
es  exprefîlons  ,   félon  qu'on  le 
:rouve  plus  utile  de  tems  en  tems. 
C'eft  pourquoi  nous  devons  d'au« 
:ant  plus  éviter  les  difputes  de 
TiOrsj       ceux  qui  les  font  5  que 
ie  Myftére  efl  important ,  lequek 
ils  obfcurcfffent  par  leurs  difputes. 
Mais  nous  devons  dire  tantôt  avec 
Ç.  Paul  ,  ^Gjés  Ycvéius  du  nouvA 
Homme  ^  Revctés  F  ai  mure  de  Dieu  ^  les 
armes  de  la  lumière  ;   Révélés  vous 
comme  des  Elus,   De  plus  ,  revêtes 
'^'ous  de  U  vertu  d'en  haut  ,  &  plu- 
sieurs autres  exprcffions  fembla- 
bles  5  loîfqiie  nous  exhortons  TE- 
ghfc  à  s'avancer  dans  la  pié:é ,  6c 
que  nous  voyons  ce  qu'il  manque 
à  n6rre  Ef,life  encore  foible.  Mais 
fi  nous  confidérons  d'autre  côté,  ce 

que 


398  A^es  du  Synode  de  Berne^ 

que  nous  avons  obtenu  de  Dieu>i 
nous  tous  qui  croyons,  &  qui  pan 
le  ba:ême  de  Chiift  avons  été  ba-i 
tifés  au  S.  Efprit ,  &  que  la  cha-i! 
li  é  croit  tout,  nous  pouvons  aufili 
dire  que  nous    tous   qui  avons; 
été  batifés  avons  revêtu  le  Seigneur 
Jefus-Chriftj   &   nous  pouvons 
ajoûter  à  cela>  chers  frères^  revêtes 
de  plus  en  plus  le  Seigneur  Jésus- 
Christ,  car  nous  conûdéronSi 
auffi  d'abord  ce  qui  nous  manque) 
en  notre  chair ,  fi  nous  contem- 
plons la  grâce  de  Dieu  en  nous»i 
afin  que  nous  ne  tombions  pasi 
dans  une  fecrette  complaifànce  pour) 
nous  mêmes. 

Une  chofe  qui  a  toûjotirs  cor-^ 
rompu  l'Eglife  ,  c'eft  que  chacun 
veut  enfeigncr  quelque  chofe  dci 
nouveau  ,  &  qu'il  y  en  a  peu  qui^ 
écoutent  le  véritable  Douleur ,  qiii 
cft  le  S.  Efpiitj  contre  quoi  nous^ 
avons  ici  propofé  la  fimplicité  de< 
Jefus-Chrift,  dans  laquelle  no«si 
voulons  demeurer  avec  laide  de 
Dieu,  &  avec  cela  employer  tous* 
les  moyens  ,  comni^  les  Sacrc-iH 
mens  ,  le  Batcme  ,  la  Céne  &  kl 
Parole  extérieure  t  fans  en  corrom-l 


tenu  en  I  532.  399 

pre  Tufage  par  une  vaine  curiofité. 
Car  en  toutes  chofes  nous  regar- 
dons par  la  Foi  à  nôtre  Jefus- 
Chrift  feul,  ou  du  moins  nous  y 
devons  regarder  ,  Veft  ce  que  nous 
i  favons  fort  bien.  Dieu  nous  faffe 
la  grâce  de  nous  en  aquiter  fidè- 
lement, 

CHAPITRE  XX. 

Du  Batême  en  particulier. 

T  'Eglife  eft  celle  dans  laquelle 
^  Jefus-Chrift  habite,  &  laquelle 
il  conferve  lui-même  félon  l'Hom- 
me intérieur.  Les  Sacrcmens  dç 
cette  Eglife  ne  font  pas  de  fimpks 
fignes»  mais  des  fîgnes  qui  font 
accompagnés  de  la  vertu  fccrete  de 
Dieu  j  comme  par  exemple,  le  St. 
Batême  dans  lequel  leMiniftre  ba- 
tife  avec  de  l'eau,  &  Jefus-Chrift 
batife  en  même  tems  avec  fon  Ef- 
prit.  Il  eft  vrai  que  nous  bâti- 
fons  nos  enfans  ,  mais  c'eft  pour 
les  recevoir  extérieurement  dans 
TEglife  de  Dieu  par  nôtre  batême> 
I  dans  l'erpérai  ce  que  le  Seigneur  fé- 
lon fa  bonté  infinie  dépioyera  fa 
grâce  envers  eux  ,  en  les  batifant 

du 


40  O  A&-es  du  Synode  de  Berne  y 

da  Saint  Efprit,  &  nous  tenons 
ce  Baiême  des  Enfins  ,  pour  un 
vrai  Sacrement. 

Car  nôtre  Foi  s'élève  au  deiTus 
des  chofes  extéi^eures  &  au  deffus 
des  tems  &  des  lieux.  Il  eft  auflî 
une  commémoration  de  ce  Myilé- 
re  pour  l'Homme  fidèle,  car  un  tel 
cft  de  vraye  de  Chrift.  C  eft 

pourquoi  nôtre  Batême  des  Enfans 
efl  un  Sacrement  de  l'Eglife  5  & 
un  grand  MyAére  de  Dieu,  ôc  noa 
pas  une  fimple  cérémonie  >  puif- 
que  nous  fommes  Chrétiens , 
que  nous  n'avons  plus  d'ombrefti 
&  de  figures ,  mais  que  nous  re-> 
prefentons  véiitablement  notre  Foi 
&  nous  la  confirmons  par  le  Sa4 
crem.ent,  que  la  chofe  n'cjft  pas  en^ 
core  éxécutée  dans  l'enfant,  mais^ 
elle  eft  exécutée  en  nous,  qui  foiTM» 
mes  préfens  à  cette  a^ion.  Ec 
nous  favons  que  nous  repréfen* 
tons  parle  Sacrement,  Tajflion  doti 
Dieu  comme  elle  fe  fait  pour  nous.» 
&  en  nous  5  &  non  pas  comme  t 
elle  fubfifte  devant  Dieu  éterner- 
nellemenr,*    C'eft  pourquoi  le  Ba- 
tême cnfevelit  avec  Jefus-Chrift  & 
reffufcire  avec  lui.  Cependant  nou$  \ 

avons^  I 


tenu  en  I  532.  4oi 
avons  cette  liberté  par  Jefûs-Chridj 
que  nous  batifons  celui  que  nous 
efpérons  d'élever  à  mourir  au  pé- 
ché par  Jefus-Chrift.  Ainfi  il  faut 
feulement  bien  prendre  garde  ,  que 
nous  n'adminiftrions  pas  les  Sacre- 
mens  fans  Myftére  ,  autant  qu'il 
dépend  de  nous  ,  &  que  cela  tou- 
che notre  confcience  ;  car  ils  doi- 
vent être  &  demeurer  des  Sacre- 
mens  ,  &  non  pas  être  pratiqués 
pour  une  fimple  cérémonie. 

CHAPITRE  XXr. 

T>e  [ admi/iiftration  du  Batème, 

^'Effc  pourquoi  nciis  prions  & 
exhortons ,  Que  celui  qui  ba- 
tife  accoutume  fon  Peuple,  à  apor- 
ter  leurs  Enfans  le  dimanche  pour 
les  faire  batifer  lorfque  TEglife  eft 
alTemblée.  Car  comme  on  l'a  dit, 
c'eft  un  Sacrement  de  l'Eglife,  c'eft- 
à-dire  du  Peuple  fidèle.  C  eft  pour< 
quoi  il  ne  le  faut  pas  adnMniftrer 
fans  que  TEglife  foit  préfcnte ,  car 
fi  1  Eglifc  n'eft  pas  préfcnte  ,  le 
Baiême  n'eft  point  un  Sacrement 
de  l'Eglife,  mais  un  fimple  lave- 
ment d'enfanr. 

Et 


402  Actes  du  Synode  de  Berne, 

Et  quand  une  fagc  femme  fuper- 
ftitieufe  batife  un  Enfant  dans  la 
nnaifon  ,  comme  on  le  leur  enfei- 
gne  dans  le  Papifme  ,  qui  que  ce 
foit  qui  fe  trouve  là  prefent,  ce 
îi'eft  point  un  batême  ,  car  elle  n'a 
point  d'ordre  de  cela  de  la  part 
de  TEglife  de  Dieu  ,  &  il  y  a  là 
une  Foi  fauffe  ,  parce  que  Ton  pré- 
tend que  fi  l'Enfant  n  etoit  pas  ba- 
tife extérieurement  ,  il  périroit 
éternellement.  Ceft  pourquoi  en 
d'autres  lieux ,  de  bons  Chrétiens 
ne  batifent  point  leurs  Enfans  quand 
ils  font  foibles  &  qu'il  y  a  de 
Taparence ,  ôc  même  qu'il  eft  cer- 
tain qu'ils  mourront  dans  un  mois 
ou  deux.  Il  e(l  nécefTaire  de  ba-^ 
tifer  principalement  à  caufe  des 
Eglifes  Chrétiennes  >  qui  ne  font 
rien  avec  un  Enfant  que  fur  l'et 
perance  de  l'avenir. 

Afin  auffi  que  nous  ayons  tous 
i-  une  uniformité ,  nous  trouvons  à^ 
propos  que  le  Bateme  fe  faffc*  non 
pas  hors  du  Temple  ou  aa  mi- 
lieu ,  mais  ai^près  de  la  Table, 
queTEnfanT  demeure  emmailliotté> 
&  qu'on  ne  lui  batifè  que  la  tête, 
car  cela  eft  caufe  de  plufieurs  ma- 

ladies> 


tenu  en  I  S  32.  403 
ladies  ,  lorfqu'iine  chair  tendre  , 
qui  ne  fait  que  fortir  du  ventre 
de  fa  Mère,  &  qui  n'eft  pas  aceu- 
tumée  à  lair ,  doit  être  plongée 
dans  de  Teau  froide  ou  expofie  a 
Tair  froid.  Là-  deffus  il  ne  faut 
point  s'embaiialTer  de  ce  qu'on  dit 
depuis  long  tsmsj  qu'à  caufe  de  la 
fignificarion  du  Batêmc»il  faut  plon- 
ger TE  ifant  trois  fois  dans  l'eau, 
car  teut  cela  ne  font  que  des  ima- 
ginations d'Homme ,  car  fi  l'on 
vouloit  être  fi  fcrupuleux  à  ob- 
ferver  la  Cgnification  dans  les  cho* 
fes  extérieures,  nous  ne  devrions 
pas  batifer  dans  des  eaux  puifées  > 
ni  avoir  quarante  mefures  d'eau, 
que  les  Juifs  appellent  Sa,tu,  ou 
Sdin ,  félon  leurTalmud:  De  mê- 
me ,  à  caufe  de  la  fignificarion ,  fé- 
lon ce  qui  eft  dit  au  Prophète 
Efaïc  ,  il  faudroit  batifèr  dans  des 
eaux  vives  &  courantes.  Car  les 
eaux  intérieures  8c  fpirituelles  font 
vivantes,  &  roûjours  jailliflantes 
en  vie  éternelle.  Mais  que  devien- 
droit  notre  liberté?  &  quel  em- 
barras n'aurions-nous  pas  pour  ces 
chofes  extérieures  qui  nous  em- 
pêcheroient  de  contempler  les  ac- 
tions 


404  Acles  du  Synode  de  Berne^  ^ 

tions  éternelles  de   Dieu   qui  ft 
font  en  la  Foi.     C'eft  pourquoi , 
Ckers  Frères  &  Compagnons  de  fervke 
en  l'Evangile  //^ Je  sus-Christ, 
nous  voulons  regarder  pliuôt  à  la 
principale  partie  de  nôtre  emploi, 
favoir  à  annoncer  J  e  s  u  s-C  h  r  i  s  t 
nôtre  Seigneur,   &  ne  nous  point 
^«mbarraffer  des  imaginations  des 
efprits  inquiets,  qui  véritablement 
ont  bonne  intention ,  mais  qui  jeN 
tent  les  fimpies  dans  la  fupeifti-» 
tion  à  Tegard  des  chofts  extérieu-* 
res.    Ainfi  nous  avons  refolu  de  i 
garder  l'uniformité  dans  nôtre  ad^  • 
miniftration  du  Batême  >  &  non  i 
pas  de  dire  comme  font  quelques  i 
uns:  Je  fuis  libre  ^  ceft  pourquoi  \ 
'veux  bat'tfer  comme  il  me  plaît,  Quf,  < 
m'importe  ce  que  font  les  autres  1  Non-»  ( 
il  ne  faut  pas  ainfi  faire ,  cher»  i 
Frères  :  Un  Ch  étien  eft  bien  li<^ 
bre,  mais  il  regarde  à  chacun  5  &  : 
il  défîre  de  n'inquiéter  &  de  nff 
fcandalifer  perfonne.    Nous  fom- 
mes  libres ,  mais  efclaves  de  la  jus- 
tice 5  &  fervireurs  de  chacun  pour 
l'amour  de  Jesus-Chri  st.  Et. 
quelle  charité  Ch.'écienne  eft  ctlaj 
que  je  ne  veuille  pas  m'accommo» 

der 


tenu  r;^  I  532.        40 5 

der  à  toute  une  Ville  &  à  tout  un 
Pays  dans  des  chofes  extérieures 
m'y  conformer  ?  Cependant 
nous  efpérons  que  perfonne  ne 
fera  fi  opiniâtre,  qu'il  veuille  fe  fer- 
vir  d'une  Méthode  particulière. 

Or.  comme  le  Bateme  eft  un  Saint 
Sacrement  de  TEglife  Chrétienne  > 
nous  voulons  qu'on  l'adminiftre 
férieufement  gravement,  &  qu'on 
y  life  ,  &  qu'on  explique  quelque 
partage  de  l'Ecrirure  qui  traite  du 
Bacêrne ,  en  expliquant  la  nature 
du  vrai  rSatv^.ie  de  Jesus-Christ 
qui  fe  fait  par  le  S.  Efprlt  ,  par 
lequel  il  renouvelle  8c  engendre 
d'enhayt  les  Enfans  de  Dieu  pour 
la  vie  éternelle.  Et  enfuite  que 
l'on  prie  gi-avement ,  6c  qu'on  y 
joigne  une  Exhortation  au  Peuple  à 
fe  remettre  leur  Bateme  devant  les 
yeux  ,  &  à  le  rendre  tant  plus 
parfait  en  eux-mêmes,  en  mourant 
à  la  chair ,  ôc  en  refTufcicant  félon 
Tefprit. 

Après  cela,  que  l'on  adminiftre 
le  Bateme  avec  des  manier :s  férieu- 
fes  &  graves  ,  &  non  pas  avec 
des  manières  foies  &  ridicules  com- 
me cela  fe  fait  dans  le  Papifme, 

Car, 


406  Actes  du  Synode  de  Berne, 

Car,  comme  on  la  dit  fou  vent, 
le  Batême  n  eft  pas  une  fîmple  cé- 
,rémonie,  mais  un  grand  &  ex- 
cellent Sacrement  &  un  Myftéredci, 
Dieu. 

CHAPITRE  XXIL 

De  la  Céne  du  Seigneur. 

A  regard  de  la  Céne  du  Sei- 
gneur, il  faut  réïtircr  ici  ,  fie 
rappeiler  dans  nôtre  fou  venir,  ce 
que  nous  avons  dit  ci-deffus  des 
Sacremens  en  général?  du  Ba- 
tême. La  Céne  du  Seigneur  eft 
toute  l'affaire  des  Fidèles. 

La  fradtion  du  pain  du  Seigneur 
renferme  aufli  un  Sacrement,  & 
nullement  une  vaine  Cérémonie, 
&  préfente  aux  Fidèles  le  Corps 
&  le  Sang  de  Jesus-Christ, 
qui  eft  mort  pour  nous  éc>  Corps 
&  Sang  de  Christ,  qui  par  le 
S.  Efprit  nous  nourrit  fie  nous 
abreuve  intérieurement.  Comme 
par  la  bouche ,  le  pain  périlTable 
nourrit,  ôc  le  vin  abreuve  le  Corps 
qui  eft  fojet  à  la  deûruûion  *,  ainfi 
aufli  la  Foi  élève  /à  vue  ,  de  l'ob- 
jet temporel  à  celui  qui  eft  éter- 


^  tenu  en  I S  32.  407 

lel  >  &  ainfi  elle  regarde  deux  cho  - 
êsj  la  fxaûion  extérieure  du  pain^ 
k  la  nourriture  intérieure  de  TAme. 
Vinfi  le  Corps  6c  le  précieux  Sang 
le  Jcfus-Chrift  font  dans  laCéne> 
nais  fon  Corps  charnel  n'eft  pas 
enfermé  dans  le  pain  ,  &  le  Sang 
orparel  n*eft  pis  non  plus  dans 
e  vin  ,  comme  la  vieille  erreur  le 
aifoit  accroire.  II  s'enfuit  donc 
]ue  c'cft  un  Sacrement  de  Corn- 
nunion  &  d'Union  ,  puifqu'il  pré- 
ente aux  Fidèles  le  Corps  de  Je- 
bs- Chrift,  duquel  nous  fommes 
ous  les  membres  >  étant  de  (a 
:hair  &  de  fcs  osj  félon  ce  paffa- 
5e:  Le  pain  que  nous  rompons  y  neft* 
l  pas  la  communion  du  corps  de 
Christ?  car  nous  qui  fommes  pln^ 
leurs  ^  fommes  un  pain  &  un  corps  ^ 
•tant  tous  participans  d'un  même  pain, 
De-là  il  eft  aifé  de  comprendre 
:e  que  c'eft  que  difccrner  le  Corps 
iu  Seigneur-^  favoir  ce  Corps  dont 
lous  fommes  nourris  >  &  avec  le- 
quel nous  avons  communion.  Ce- 
lui qui  ne  s'examine  point  foi- 
même  ,  &  s'eftime  être  quelque 
chofe  plus  que  les  autres,  un  tel 
Hpmme  ne  di/cerne  point  le  Corps 

du 


'408  Actes  du  Syfîode  de  Berne,  I 

du  Seigneur;  Il  n'a  point  decommu- 1"' 
nîon  au  Corps  de  Jcfus-Chrift  tan- IW 
dis  qu'il  fe  repofe   ainfi  fur  lui.  ji"' 
même  \  Se  h  manducarion  du  pain 
de  l'Euchaiiftie  eft  pour  lui  5  tout 
comme  s'il  mangeoic  du  pain  com- 
mun 5  fans  MyRéiÇy  fans  Chrift, 
&  ainfi  //  mange  fa  propre  condam-  ^ 
nation.    Et  Jelus- Chrift  convaiiK  ^- 
la  chair  mondaine,  de  péché,  pai  ^ 
fon  Efpric ,  ce  qu'il  ne  fait  pas  '^^ 
encore  dans  un  tel  Homme ,  & 
ainfi  il  n'eft  pas  encore  en  lui. 

Quant  à  la  manière  d'adminif  10»^ 
tter  le  Sacrement  ,  nous  avom 
trouvé  bon  de  nous  fervir  d'Hof 
ties  *  ,  Se  que  fi  quelcun  ne  s'ac-  "i' 
commode  pas  de  petites  Hofties  •  ^ 
il  en  doit  prendre  de  grolTes  >  &  ^ 
les  partager  proprement  en  petit* 
morceaux  :  Il  a  au/Ti  été  convenu 
que  l'on  prêcheroit,   que  chacur  as.' 
doit  prendre  en  fa  main  le  pain  &  C 
la  coupe  du  Seignetir  3  Se  que  ceh  SP 
convient  mieux,  que  de  fe  les  laif 
fer  mettre  dans  la  bcuche.  Que  , 
cependant  s'il  arrive  que  quelcur  . 

n^éranl  s. 

n 

*  Cet  ufage  fut  abcli  l'an  iCo^-  5» 
l'on  ordo^  na  de  le  fervir  de  pain  com- 
mun &  lev«. 


Itenu  en  1532.  409 
rétant  pas  accoutumé  à  cela  ,  re- 
pugnoit  à  cet  ufage  nouveau  5  nous 
lui  mettrons  le  Pain  &  le  Calice  à 
la  bouche ,  jufqu  a-ce  que  cette  ré- 
pugnance lui  pafle  d'elle  -  même, 
C'eft  aufTi  nôtre  coutume  de  cé- 
(lébrer  l'Euchariftie  trois  *  fois  par 
m  ,  à  Pâques  >  à  la  Pentecôte ,  ôc 
à  Noël  j  ce  qui  fè  fait  cependant 
fans  s'attacher  fuperftitieufementau 
:ems,  puifquon  ne  gêne  la  Con- 
science de  perfonne  à  cet  égard  s 
:omme  le  Pape  5  qui  a  ordonné  , 
fous  peine  de  péché  mortel ,  de 
communier  une  fois  tous  les  ans 
1  Pâques.  Cependant  >  il  eft  aifé 
de  juger  quelle  eft  la  Foi  &  li 
Charité  d'un  Homme  3  qui  n'ayant 
:icn  qui  1  empêche  de  communier, 
le  veut  pas  fe  conformer  en  cela  à 
une  Églife  ou  Affemblée  de  gens  de 
bien. 

On  doit  célébrer  la  S.  Cé.ie  avec 
le  plus  grand  férieux  ,  puifqu'elJe 
Tom.  ly.  S  ren- 

*  Depuis  ce  tcms-lâ,  l'an  i^^y.  l'ona 
1  joute  un  quatrième  Tjems,  pour  la  cé- 
lébration delà  S.  Céne,  favoir,  le  com- 
mencemenc  de  Septembre.-  &  l'an  16^^. 
il  fut  ordonné  qu'on  la  célébreroit  huit 
fois  par  an,  favoir  j  deux  joiurs  différens, 
là  chaque  Tcms. 


410  Axîes  du  Synode  de  Berne, 

renferme  tout  ce  que  Dieu  fait  à 
Tame  fidèle.  C'cft  pourquoi  Ton 
doit  expliquer  ce  Myftère  par  la 
Leflure  d'une  Ecriture ,  propre  à 
cet  ufage,  particuliércinent  de  rînf- 
litution  de  la  Céne  du  Seigneur, 
de  la  manière  que  l'Apôtre  S.  Pau 
&  les  Evangeîiftes  l'ont  décrite. 
Cette  le£lure  doit  être  fuivie  d'une, 
prière  compofée  avec  foin  &  faite 
avec  dévotion.  Après  quoi  Ton 
doit  diftribuër  le  Pain  la  Coupe. 
Et  l'on  doit  finir  par  une  AftioT 
de  grâces  ,  félon  que  chacun  fi 
trouve  difpofé.  On  doit  aufli  fai- 
te  mention  ,  qui  font  ceux  à  qu: 
cette  viande  fpirituelle  ne  convien' 
ou  n'appartient  point  ,  favoir,  i 
ceux  qui  ne  font  point  du  Royau 
me  desCieux:  &  donc  S.  Paul  fai 
i'énumeration  î.  Corinth.VI.  Ôcci 
d'autres  endroits. 

Et  comme  cette  matière  nou, 
paroit  encore  trop  profonde  >  & 
que  nous  ne  faifons  que  comment 
cer,  il  nous  faut,  (&  c'eft  aufli 
nôtre  deflein,)  faire  plus  d'attcni 
tion  à  l'édification  intérieure,  qui 
fubfiftc  devant  Dieu  ,  qu'à  Texte  ; 
lieure.    C'eft  pourquoi  nous  nou 

con 


■  itnu  en  I S 32.        41 1 

^'  contentons  du  Confiftoire  ,  autant 
du  moins  qu  on  y  prendra  les  foins 
néceffaires  ,  &  nous  n'entrepren* 
drons  pas  d'abord  de  procéder  plus 
outre  contre  quelcun  psLï  Excommu- 
nication 5  car  les  Confiftoires  peu- 
vent reprimer  les  pécheurs  fcan- 
daleux  ,  garentir   les   Eglifes  de 
mauvais  exemples  ,  8c  par  la  pu- 
nition infligée  au  coupable  ,  Ihî 
donner  occafion  de  renoncer  à  fa 
mauvaife  vie ,  D'ailleurs  nous  de- 
vons  exercer  fort  foigneufement 
la  Cenfure  fraternelle  envers  cha- 
cun.   Et  il  arrive  aufll  tout  na- 
turellement y  que  les  méchans  fc 
réparent  de  nous  par  leur  mauvai- 
fe vie,  &  leur  conduite  infâme  > 
car  ils  n'ont  jamais  bien  été  par- 
mi nous.    Et  s'il  arrivoit  que  ces 
fortes  de  gens,  fe  montrant  enne- 
mis de  l'Evangile  parleurs  difcours 
&  par  leur  conduite  j  voululfent 
cependant  aller  communier  à  la 
Table  du  Seigneur,  chaque  Servi- 
teur de  Dieu  ,  zélé  de  bien  inten- 
tionné, faura  bien  trouver  de  lui- 
même  tous  les  moyens  raifonna- 
bles  pour  foûtenir  l'honneur  de  fon 
Seigneur,  afin  de  n'être  pas  puni  de 
négligence,        S  z  CHA- 


412  Acfes  du  Synode  de  Berne, 

CHAPITRE.  XXIII. 

De  tufage  de  la  Loi  o'  desPro^ 
phètes, 

JL  efl  bien  vrai ,  £omme  nous  le 
voyons  déformais  clairement,  que 
nos  Sacremens  font  de  grands  Myf^ 
téres  de  Dieu,  &  non  pas  des  Cé- 
rémonies toutes  nuës;  &  que  les 
Cérém.onies  &  les  Ordonnances  de 
Moïfe  ne  nous  regardent  p^îint,  & 
que  l'on  ne  doit  point  faire  re« 
tourner  le  Chrétien  en  arriére  5  & 
le  ramener  à  Moifc  &  aux  Prophè- 
tes, pour  fe  former  fur  leur  modèle 
ou  leurs  préceptes  ,   mais  plutôt 
on  exhorte  les  Chrétiens  à  croître 
toujours  &  à  s'avancer  dans  la  con- 
noiflance  de  Jesus-Christ. 
On  objejfle  contre  cela  ;  Nous  na- 
'vons  donc  point  befo'm  de  U  Bible* 
&  nous  ne  devons  point  prêcher  les 
Ecrits  du  Vieux  Teftament.    A  quoi 
nous  oppofons  S.  Paul,  qui  adret 
foit  cette  exhortation  à  fon  Difci- 
pie  Timoihée*:  Demeure  dans  les 
III.  14-  c^Jojes  que  tu  as  aprîfes  >  puijque  des 
17.        ton  enfance  tu  as  la  connoiffancc  des 
Saintes  Lettres,  qui  peuvent  te  ren- 
dre fage  à  faltit ,  par  U  Foi ,  qui 


tenu  e'f2  l'ill'  413 
fyf  f«  J  E  S  u  s-C  H  R  I  s  T.  Toute  Ecri' 
ture  divinement  infpirée ,  ejl  utile  pour 
enfcîgner,  pour  convaincre  ,  pour  corri- 
ger 5  pour  inftïuirc  dans  la  jufiice  > 
afin  que  l'Homme  de  Dieu  [oit  accom^ 
pli  5  &  parfaitement  propre  a  toute 
bonne  œuvre.  Voilà  es  que  dit  l'A- 
pôtre ;  Il  veut  que  Timothée  de- 
meure enlaFoi  en  Jesus-Christ,  6c 
en  mêine  tems  qu'il  ferve  de  la  S. 
Ecriture  &c.  Ainfinous  pouvons  dé- 
couvrir cinq  endroits,  par  où  l'Ecri- 
ture Sainte  Ecriture  nous  eft  d'ufage. 

Pfémiérement  ,  l'Ecriture  ,  c'efl- 
à-dire>  la  Loi  &  les  Prophètes  > 
nous  rend  f  iges  a  falut  ^  c'eft-à  dire? 
nous  conduit  à  Je  s  u  s -C  H  R I  s  T> 
&  nous  aprend  à  croire  en  lui, 
pour  obtenir  le  falut  &  la  vie 
éternelle.  Car  qu'eft-ce  que  Moiïe 
peut  faire  d'autre  par  fes  Comman- 
dement, qui  nous  montrent  com- 
ment nous  devons  être  ,  &  noiis 
menacent  de  la  mort ,  fi  nous  ne 
fommcs  pas  tels,  finon  qu'il  excite 
ix\  nous  un  défit  d'erre  unis  à  ce- 
lui qui  juftifiele  méchant,  8^  don- 
le  l'Homme  intérieur  ,  pour  ne 
pécher  plus  ?  Qjcile  grande  fageffe 
y^-a-t-il,  à  reconnoître  par  le  moyen 
S  i  de 


414  Actes  du  Synode  de  Berne, 

de  la  Loi  &  des  Commandemensj 
qui  nous  animent  contre  Dieu,  que 
nous  devrions  être  fans  convoitife 
charnelle  ?  Et  où  efl:  celui  qui  eft 
tel  par  la  Loi  ?  Perfonne.  Ceft 
pourquoi  elle  nous  rend  fages  & 
prudens  5  pouy  obtenir  le  falutpar 
la  Foi  en  Jesus-Christ  ,  qui  par 
le  S.  Efprit  offre  prémiérement  U 
farole  de  U  Croix  y  qui  Fait  mourir 
la  convoirife,  enfuite  la  parole  de 
la  ou  la  vertu  de  la  Réfur- 

reûion  ,  laquelle  nous  donne  des 
fenrimens  fpiriruels  Célefter. 
C'efl  ainfî  que  la  Loi  eft  bonne  > 
pour  celui  qui  s'en  fcrt  bien.  Et 
à  cela  fervent  les  figures  du  Taber- 
nacle  du  témoignage  5  du  Chandelier 
d'or  5   de  la  TaUe    des  Pains  de 
pïopofitiouy  de  \ Arche  de  t  Alliance  > 
du  San^uaire  ,  comme  au/Ti  tous 
les  Sairifices ,  &  pour  tout  dire  ei> 
un  mot  3  tour  le  fervice  Mofaïquej 
qui  nous  manifefle  ^  nous  fait 
voir  ,  qu'il  n'y  a  rien  de  bon  en 
nous,  c'eft-à-dire,  dans  nôtre  chair  y. 
puifqu'il  nous    tuf^igne  comme 
quoi  nous  fommes  éloignés  de  la 
Sainteté,  t:nr  h  l'égard  de  Dicu> 
qu'à  l'égard  du  prochain  ,  par  rap- 
port 


tenu      lSi2\  415 

port  aux  deuxCommandemenSjqui 
regardent  Dieu  &  le  prochain.  Il 
nous  enfeigne  la  Croix  6c  la  Ré- 
furreiftion  de  Jesus-Christ  ,  dans 
tout  le  Peuple  ,  qui  après  avoir 
été  fouverainement  abaiiTé  eft  éle* 
v^é  >  &  qui  dans  fa  nécelTité  ob- 
:ient  une  délivrance  temporelle  ; 
:ommc  nous  par  une  véritable 
repentance  ,  nous  obtenons  le  fa- 
tut  érernel  ,  lorfque  nous  cro- 
yons  en  Je  sus -Christ,  Tous 
.es  Prophètes  contiennent  la  mè- 
ne choie,  ne  faifant  qu'étendre  dc 
îxpliquer  Moife  ,  renfermant 
les  Hiftoires ,  qui  font  des  ombres 
k  des  figures  de  la  Rédemption  qui 
ift  en  Jésus-  Christ. 

C'eft  Jefus-Chrift  enfin,  que  le  - 
>.  Efprit  a  en  vûë  dans  tous  les 
écrits  de  Moïfe  &  ces  Prophêfes  z, 
l'id  pour  Tamour  de  lui  ,  qtie 
outes  les  œuvres  extéiieujes  de 
)ieu  ont  un  cours,  qui  t(ï  un  em- 
•lème  du  cours  d(i  la  grâce  ,  fe- 
on  qu'elle  s'accomplit  intérieure* 
,rient  par  l'Efpric  de  Jcfus-Chrift* 
it  par  là  Ton  comprend  ce  que  le. 
cigneur  a  voulu  dire,  en  l'Evan- 
ile  félon  S,  Jean  5  Chap.  V.  lorfl 
S  4  qu'il 


41  6  Actes  du  Synode  de  Berne ^ 

¥  y.  45.  qu  il  parle  en  ces  termes*:  5i  vous 
cfoiez  a  M&ife  vous  croiriez  auffi,  4 
moi  >  car  il  a  écrit  de  moi.  Et  dang 
le  même  Chap.  t  Sondez  les  Ecrï- 

40.        turcs  i  car  vous  crojcz  d  avoir  la  vit 
par  elles ,  &  ce  font  elles  qui  ren» 
dent  témoignage  de  moi?  mais  vou 
ne  voulez  p^s  venir  a  moi.   Il  fuit 
de  là  >   que  celui  là  n'entend  pat 
encore  1  Ecriture  >  qui  n'y  trouve 
pas  un  témoignage  >  une  introduc 
tion  ,  6c  tuie  inftrudion  qui  re- 
garde Jefus  -  Chrift.  Que  fi  cepen 
dant,  par  nôtre  ignorance,  il  ar 
rive  que  nous  ne  puifTions  pas  dé- 
couvrir Jefus-Chrift,  dans  tous  les 
endroits  de  l'Ecriture ,  de  la  ma- 
nière qu'on  Ta  dit^  cela  ne  doit 
point  nous  faire  de  peine  ?  car  k 
S.  Efprit  nous  aidera  toujours  de 
plus  en   plus.     Et  comme  dans 
tous  nos  Sermons  nous  devons 
prêcher  Jefus  -  Chrift  feul ,  il  eA 
néceflaireque  nous  nous  attachions, 
à  chaque  fois     à  quelque  endroii 
de  cette  Ecriture ,  qui  nous  repré* 
fente  Jésus  -  Christ  ;  &  enfuitc 
dans  les  autres  endroits,  où  nous 
ne  découvrons  point  Jefus-Chrift, 
y  chercher  quelque  autre  chofe  de 


tenu  en  I  532.  41? 
bon  *5  car  FEcrirure  efl  utile  pour 
toute  forte  de  bonnes  chofes.  Ce- 
lui qui  trouve  quelque  chofe  ds 
bon  dans  l'Ecriture,  a  fait  fans 
doute  quelque  progrès  dans  l'in- 
telligence  d^  ce  S.  Livre. 

En  fécond  lieu  ,  Ecriture  ejf 
utile  pour  enfeigner.  Cet  enft:igne- 
ment  cft  la  connoifiance  des  fruits, 
des  dons  &  des  grâces,  qui  dé- 
coulent de  la  Croix  ^  &  rintclli- 
gence  des  biens  céleftes  ,  devien- 
dra commune  parmi  nous  ,  fi  nous 
continuons  â  nous  exercer  en  Jé- 
sus -  C  h  k  i  s  t  ,  de  la  manière 
qu'on  vient  de  le  dire.  A  cela  ap- 
partiennent les  promelTes  temporel- 
les, que  nous  devons  propofer  fe* 
Ion  la  pieté  ,  &  fpirituellement  en 
Jésus  -  Christ  :  &  enfuitc. 
dans  un  fens  corporel ,  après  & 
autant  que  le  S.  Efprit  a  exercé  en 
nous  un  emploi  plus  relevé.  Que 
fi  cela  ncft  pas  ,  il  eft  à  craindre 
que  dans  les  occafions  nous  ne  prc- 
fentions  au  Peuple  plufieurs  pro- 
mcffes  ,  outre  Jefus-Chrift,  &  hor» 
de  lui  5  lefquclles  n'ont  aucun  ef- 
fet j  ce  qui  nous  convaincroit ,  que 
IQUS  ne  feriv^ns  ni  Apôtres  ni  vé-^ 
S  4  jitâ- 


41 8  Actes  du  Sy/iGCiC  deBcTne^ 

ritables  Prophètes,  étans  furpris  efi 
jnenfcnge,  comme  il  eft  arrivé  à 
quelques-uns,  qui  faifoient  efpérei 
aux  Payfans,  qu'ils  lecevroient  les 
baies  des  ennemis  dans  leur  man- 
che, que  par  la  vertu  de  leur 
Foi  ik  les  repoufferoient  contr*eux. 
Mais  les  Payfans  furent  cruelle- 
ment battus  5  &  ces  faux  Prophè- 
tes n'ont  rien  fait  de  ce  qu'ils 
ont  promis.  C'eft  pourquoi  nous 
qui  ibmmes  Minières  de  rEfprit> 
nous  devons  expliquer  tout  d'une 
manière  fpirituelle ,  ccmime  tout  eft 
fpirituel  &:  vrai  en  Jefus-Chrift.  ' 

En  troifîéme  lieu ,  l'Ecriture  eji 
utile  pour  réfuter  l'erreur.   Car  quoi- 
que nous  ayons  quelque  connoit 
fânce  par  la-  Foi ,  néanmoins  nous 
femmes  encore  remplis  de  ténc»- 
bres  &  d'ignorance.    Mais  quand 
on  allègue  l'Ecriture  contre  rerreur> 
iJ  faut  toujours  le  faire  félon  l'a- 
nalogie de  la  Foi  en  Jefus-Chrift  r 
&  on  ne  la  doit  pas  employer  fé- 
lon la  Lettre  morte  feulement,  com- 
me quelques-uns  ont  de  coutume 
En  quatrième  lieu  ,  elle  eft  uril» 
pour  corriger.  Les  Hiftoires  8c  les 
figures  appliquées  à  nou5  >  four- 

niflant 


tenu  e-a  I  532.  A\9 

ufTan:  d'excellentes  Exhortations^ 
En  cinquième  iiviu  5  Pour  chktter 
jr  reprendre  dans  l.t  JuTî-.  e  ,  c'eft  à- 
iire  j  pour  ccnfarer  les  vices,  aiîn 
que  nous  y  renoncions ,  6^  que 
:ous  dL' venions  gens  de  bien  de- 
vant Dieu. 

Ici  il  faut  bien  prendre  garde  , 
ivant  que  de  cenfurer  quelque  cho- 
e  après  les  Prophètes  ,  de  nous 
Dien  afTûicr ,  de  ce  qui  eft  mau^ 
/ais  devant  Dieu  j  Autrement  nous 
:ious  trouvons  nous  mêmes  ;  faux 
ï^rophêres  ,  difant ,  Ainfi  a  dit  l'E- 
eriiel  »  Il  nous  erdonm  tille  cr  tJlc 
hcfe ,  au  lieu  que  Dieu  par  des 
Deuvres  fuivantes  montreroit,  que 
leile  ou  telle  autre  chofe  lui  eft 
igréable.  Car  c'eft  à  cela  qu'oa 
:onr!oit  un  faux  Prophète  ,  quand 
1  dit  quelque  chofe  au  nom  du 
y;igneiif  j  &  cependant  il  n'en  eft 
den  j  ce.  qu'il  dit  ne  s'accomplit 
pointa  c'eil  la  /./  Parole  que  le  Sei- 
rneur  na  point  prononcée  :  D&mQïon,. 
XVIIL  Dieu  décerns  la  peine  dc 
mort  contre  de  tels  Prophètes,  au 
Chap.  XIII.  du  même  Livre,. 

Il  faut  auiïi  que  les  Cenfuies  des 
Prophètes,  foicnt    tcinperées  6c 


4'20  Acfes  du  Synode  de  Berne  y 

adoucies  dans  nos  ames  Chrétien- 
nes par  rEfpric  de  Jefus-Chrift  ; 
cnforte  qu'au  milieu  de  leur  rudef- 
fe  elles  portent  avec  elles  une  cha- 
rité qui  pénétre  le  cœur,  &  qui 
adouciffe  l'amertume  de  la  cenfure. 

C'eft  ainfi  que  nous  pouvons 
nous  fervir  de  l'Ecriture,  quand 
même  nous  ne  l'entendrions  pas  à 
fond  5  c'eft-à-dire,  que  nous  n'y 
po  jrrions  pas  encore  trouver  Jefus- 
Chiift.  Car  l'Efprit  de  Dieu  en- 
feigne  toutes  fortes  de  bonnes  cho- 
fci  5  toutes  les  bonnes  mœursj  &c. 
feulement  >  mes  chers  Frères  ,  il 
faut  être  bien  attentifs  ,  à  nous  » 
aquiter  fidèlement  de  la  charge  qui 
nous  eft  impofée  >  favoir  j  de  ps^ 
cher  Jefus-Chrift. 


CHAPITRE    XXIV.      '  J 

Dli 

D'attaquer  le  Papifme  dans  les  j| 
Sermons,  A 

\  mi 

CN  fécond  lieu  ,  il  faut  que  les 
Pafteurs  fâchent  bien  les  Lieux 
communs  des  Papiftes ,  &  qu'ils 
les  réfutent  dans  leurs  Sermons  j 
apiès  avoir  propofé  le  Seigneui 

Jésus- 


tenu  en  I  532.  421 
Je  su  s  >  conformément  à  l'Article 
précédent ,  8c  en  peu  de  mots,  & 
cela  de  point  en  point  5  &  tout  de 
de  fuite.  Non  pas  toutes-fois  dans 
un  feul  Sermon  ,  mais  qu'ils  com- 
battent tantôt  une  fauffe  Doélri- 
ne>  tantôt  une  autre,  félon 
qu*il  eft  à  propos.  Cependant  il 
faut  qu'en  cela  le  Miniftre  fe  fâfTe 
un  ordre  pour  ces  matières.  Car 
quoique  le  Pape  foit  aboli  extérieu- 
rement dans  les  Etâts  deLL.EE. 
nos  Souverains  Seigeurs  ,  foit  dans 
les  Villes  foit  à  la  Campagne,  il 
eft  cependant  néceflaire ,  qu'on  inC 
truife  fermement  &  exaftement  les 
pauvres  gens,  afin  que  leur  Confl 
cience  ne  foit  point  troublée  & 
féduite  par  les  adverfaire?. 

Et  afin  que  Ton  comprenne  bien 
nôtre  penfée ,  fuppofé  qu'un  Mi- 
niftre eut  traité  ce  texte  ,  Christ 
4  le  Chef  de  l'Eglife,  &  il  eft  le 
Sauveur  de  fon  Corps  :  &  qu'il  eut 
montré  ,  1,  comme  quoi  l'Eglifc 

de  Je  s  us  -  Chri  ST  ,  eft  un 
3j  Peuple  intérieur  &:  fpirituel ,  & 
5,  que  celui  là  en  eft  un  membre 
51  vivant,  que  Jetus-Christ  gou- 

verne  lui  même,  par  le  S.Efprir^ 


42  2  Actes  du  S-jnode  d^^  Berne ^ 

Si  ^u'il  faïKftifie  en  même  rems 
«  3c  rend  heureux,  fans  la  médian 
33  tion  d'aucune  Créature  :  A  cela 
yy  l'on  pourrait  incelTaniment  ajoû- 

ter  :  Qae  par  conféquent  c'eft 
^  renier  Jefus-Chrift  ,  qi-e  de  dire 

que  le  Pape  foit  fon  Vicaire  ou 

fon  Lieutenant,  car  Jefus-Chrift 
>3  efl:  préfent  lui-même  dans  fon 
„  Eglife,  &  lui  eft  attaché  ,  com- 
3,  me  la  Tête  d'un  corps  eft  atta- 
>j  chée  aux  membres ,  car  c'cft  lui- 
^>  même  qui  communique  auxmem- 
„  bres  de  fon  Corps  la  Vie ,  la 

Force  ôc  l'Efprir ,  Par  où  il  par 
»roit,  que  tout  ce  que  le  Papb 

entreprend  ou  s'attribue  j  en  qua- 
>^  lité  de  Ficaire  ou  Lieutenant  da 
yy  Jesus-Christj  avec  toutes 
99  fes  Ordonnances  &  fes  Interdic- 
yy  rions  >  vient  du  Diable  y  Se  eft 
y9  contre  Jésus  -  Christ  nôtre 
»  Sauveur  :  Sec. 

Ctla  fe  peut  faire  en  plus  ou  en 
moins  de  paroles  >  &  en  expri». 
mant  quelque  article  particuliar  dt^ 
Papifme>  comme  celui  de  la  Mejfe^ 
de  la  Confejfion  AuricuUue  Sec.  fé- 
lon qu'il  conviendra  chaque  fois.. 


CHA- 


I 


CHAPITRE  XXV. 

Des  Exhortations  (jr  dis  Cen- 
fires: 

pUifqua  le  S.  Efprit  doit  parlée 
parles  Miniftres  3  &  prêcher  le 
Salut  du  Monde  ,  qui  eft  nôtre 
Seigneur  Jefus-Chrift  j  que  cet  Ef- 
prit conduit  à  Dieu ,  &c  cenAire  le 
Monde  de  péché  >•  il  faut  que  les 
Minières  dans  toutes  leurs  prédi- 
cations exhortent  les  Hommes  d  al- 
ler a  Jefus  Chrill,  &  de  produire  des 
fruits  de  Juftice,  6c  enfuite  qu'il  cen- 
fure  les  péchez  du  Monde;  non  feu- 
lement les  péchez  extérieurs  &  les. 
vices  gro/Tiers;  que  Ton  doit  toute- 
fois ii traquer  vivement,  mais  aulTi. 
ks  péchez  fpirituels  ,  fecrets  8c  ca- 
chez 5  les  jilufions  de  la  chair  5 
comme,  la  Complaifànce  pour  foi- 
même,  1  Hypocîifie  ,  l  Orgueil  fpi- 
rituel ,  le  manque  d'Amour  frater- 
nelle ,  les  manières  rudes  &:  cho- 
quantes ,  ôc  toute  autre  femblable 
difpofition  du  Cœur ,  defagréabla 
à  Dieu. 

Mais  en  cela  il  cft  nécelTaire  que 
le  Prédicateur  ccnfure,  non  pas, 
par  un  mouvement  chaniel.  >  maisL 

par 


424  Actes  du  Synode  de  Berne  y 

par  un  fentiment  confiant  de  la  véri- 
té, comme  devant  Dieu,&  en  la  pré- 
fence  de  nôtre  Seigneur  Jésus- 
C  H  RI  s  T.    De-là  vient,  qu'il  ne 
cenfurera  jamais  ,  que  par  Teffet 
d'une  charité  vive,  dont  fon  Cœur 
livré  à  Ditu  ,  efl:  rempli  par  fefus- 
Chrift  5  6c  ne  cenfurera  pas  plus 
qu'il  ne  faut ,  pour  produire  de 
l'édifîcarion  chez  fes  Auditeurs  \  ï 
d'autant  qu'il  faut  que  dans  TE-  ^ 
glife  tout  fe  fafle  pour  la  correc-»  q 
tion  des  pécheurs  ,  &  non  pas  par  É 
un  emportement  charnel ,  &;  par  i[ 
querelle  ,  comme  malheureufement  ne 
il  arrive  fou  vent  ,  que  ceux  qui»  ïf 
fe  glorifient  de  ne  faire  que  ce  que  f 
le  Seigneur  leur  a  commandé  ,  ft-  do 
prêchent  eux-mêmes,  exercent  dans  dii 
ces   occafions   leur  haine  contre  k 
leurs    ennemis  ^    8c  aflouviffent  m 
ainfi  leur  paffion  déréglée,  &  par 
là  donnent  lieu  aux  gens  d'appel-  iît 
1er  leur  Miniftère  Cathedra,    JmpU'  do 
dentidt  (une-  Chaire  d'impudence  )  re^ 
au  lieu  de  Cathedra  Ecclefu  y  (  1*.  oe 
Chaire  deTEglife.) 

Il  ne  faut  pas  qu'il  entre  aucu-  k 
ne  aigreur  dans  un  Cœur  qui  en-  i 
treprend  de  prêcher  Jesus-Christ,, 

qui 


tenu  en  I  532.      42  J 

qui  cft  débonnaire  >  mais  la  Cha- 
rité de  Dieu  doit  erre  répandue 
dans  un  tel  cœur  par  le  S.  Efprit, 
qui  lui  eft  donné  >  &  doit  y  con- 
duire fes  Auditeurs.  Quand  donc 
la  Cenfure  neft  pas  tirée  de  la 
connoiiTance  de  J  e  s  u  s  -  Christ, 
félon  la  volonté  de  Dieu  ,  que  la 
rudeiTe  de  la  cenfure  n'eft  pas  tem- 
pérés par  la  douceur  ôc  la  charité, 
&  que  tout  le  Monde  ne  s'apper- 
çoit  pas  5  que  l'on  cherche  uni- 
quement la  gloire  de  Dieu  5  &  le 
faluf  des  Auditeurs ,  ce  n'eft  point 
agir  Chrétiennement.  C'efl  ce  que 
nous  reconnoiiTons  &  que  nous 
avouons  à  la  gloire  de  notre  Sei- 
gneur 6c  de  nôtre  Dieu  >  lequel 
nous  prions  ici,  qu'il  lui  plaife  de 
diriger  nos  Cœurs  &  nos  Langues, 
&  nous  donne  de  tenir  un  jufte 
milieu.  Car  auffi  d'autre  côté  ,  ce 
feroit  très  mal  fait  de  vouloir  gar- 
der le  fîlence  ,  ou  attaquer  trop 
doucement  les  vices.  Celui  qui 
regarde  uniquement  au  Jugement 
de  Dieu,  peut  trouver  alTez  d'inf. 
truiftion  fur  ce  fujet,  dans  les  ré- 
flexions qu'on  vient  de  faire. 
En  cenfurant,  on  ne  doit  point 

s'expri- 


42  6  Aci-es  du  Synode  de  Berne ^ 

s'exprimer  d'une  manière  qui  fente 
un  efpric  léger  &  mondain,  mais 
parler  d'une  manière  qui  marque 
un  efpric  grave  ,  ferme ,  èlevè, 
pour  ne  peine  ternir  la  gloire  de 
Jefus-Chrift,  qui  a  prononcé  libre- 
ment la  cenfure  du  péché  contre  le 
Monde.  Car  dans  TEglife  toutes 
chofes  doivent  fe  faire  avec  bien- 
féance.  Au  lieu  que  quelques-uns 
d'entreux  parlent  d'une  manière 
peu  mefurée  &  fort  groffiére ,  qui 
fait  de  la  peine  aux  oreilles  chat 
tes  j  ce  qu  il  faut  éviter.  C'eft 
pourquoi  nous  nous  exhortons,  & 
nous  nous  conjurons  les  uns  les 
autres,  de  nous  exprimer  d'une 
manière  fage  ,  convenable  8c  mo- 
defte  ,  qui  ferve  à  édifier  ôc  noa 
pas  à  troubler  les  foibles. 

CHAPITRE  XXVI. 

Qui  font  ceuxqii^m  doit  cenfurer^ 

ne  doit  aufli  cenfurer  que  les 
^'^^  Auditeurs  ,  qui  font  préfcnsf 
c'eft  à  eux  jfèuls  qu'on  doit  adieC- 
fer  fon  difcours»  Car  a  quoi  fer- 
viroit-il  ,  que  dans  les  Terres  de 
LL»  EE.  de  Berne,   on  attaqua 

des 


tenu  en  I532.  427 

des  Potentats  &  des  Princes  >  qui 
n'ont  rien  à  démêler  avec  nous  » 
&  qui  ne  veulent  point  avoir  de 
communion  avec  nôtre  Eglife  ?  S» 
Paul  dit  I.  Cor.  XII.  Que  toutes 
chofes  doivent  fe  faire  dans  TEgli- 
;  ;fe  fom  le  bien  du  Corps.  Quel  bien 
^  revient-il  de  cenfurer  vivement  une 
perfonne  qui  eft  abfente,  6c  d'entre- 
tenir fes  Auditeurs  qui  font  préfens^ 
de  ces  paroles  inutiles  5  au  lieu  de 
1!  leur  adrelTer  de  bonnes  inftru(ftions 
&  des  cenfures  dont  ils  auroient 
befoin  ?  C'eft  tout  de  même  que  fi 
Ton  vouloit  donner  du  remède  à  un 
mortjôc  qu'on  laiïïat  périr  un  malade 
dans  fa  maladie.  Celui-ci  auroit  be- 
foin de  remède  a  on  ne  lui  en  donne 
point;&  celui-làjc'efl  à-direjle mort> 
ne  tire  aucun  avantage  de  ce  médi- 
cament ,  finon  qu  il  en  viendra, 
tant  plutôt  à  puër.  Ainfi  nous  ne 
gagnons  rien  fur  les  étrangers,  par 
nos  difcours  emportez  ,  &  nous, 
iaiffons  nôtre  Troupeau  qui  eft 
préfenr  ,  croupir  dans  fes  convoiti* 
fes  charnelles  ,  au  lieu  que  nous 
pourrions.  Se  que  nous  devrions 
fervir  à  Tcn  tirer  par  des  cenfures 
faites  de  la  manière  qu  il  convient. 

Ainfi 


'428  An^es  du  Synode  de  BernCy 

Ainfi  nous  faifons  du  mal  de  tous 
cotez,  en  ne  nous  tenant  pas  à  la 
régie  de  J  E  s  u  s  -  C  H  R  I  s  T  :  cai 
cela  excite  mal- à* propos  de  lai- 
greur  contre  les  abfens ,  dans  les 
tÇpùts  de  nôtre  Troupeau  ,  quj 
nous  en  entend  parler  avec  tani 
de  chaleur ,  6c  le  fait  tomber  dan! 
un  faux  jugement  >  enforte  qui] 
n'eft  point  attentif  à  fe  corriger  foi- 
même  ,  mais  fait  confifter  fa  fa- 
gefle  à  connoître  les  vices  des  au- 
tres. On  ne  doit  donc  point  par- 
1er  des  abfens,  à  moins  que  c^i 
ne  fût  pour  prévenir  quelque  mal, 
dont  on  feroit  menacé,  &  quorj 
aiiroit  lieu  d'appréhender  préfente- 
ment  de  la  part  des  Etrangers,  foh 
dans  les  affaires  corporelles  ,  foili. 
dans  les  affaires  fpirituelles  ,  oH: 
qu'on  le  fit  en  peu  de  mots,  com-i| 
me  en  paffant ,  &  pour  exemple 
pour  garentir  les  bonnes  ames  de, 
ces  fortes  d'impiétez. 

Quant  au  Pape  ,  nous  ne  i< 
pouvons  pas  oublier  ,  car  il  efl 
préfent  avec  fa  puiffance,  &  il  trou- 
ble les  confciencss  de  plu fieurs, fans 
quoi  nous  pourrions  bien  nous 
paffer  de  parler  de  lui  j  par  h  rai- 


tenu  en  1 532.  429 

Ton,  que  nous  avons  bien  autre 
:hofe  >  &  plus  néceffaire  même  à 
"aire  ,  que  de  nous  entrerenér  avec 
es  impures  ordonnances  5  mais 
TOUS  fommes  obligez  d'écarter  les 
îbftacles  ,  qui  empêchent  Tédifica- 
ion  du  Temple  de  Dieu.  Nous 
ic  devons  donc  point  parler  dans 
îos  Sermons  ,  de  ceux  qui  ne  font 
)as  d'entre  nous  ,  à  moins  qu'il 
l'y  eût  quelcun  ,  de  la  part  de  qui 
lous  craindrions  qu'il  ne  revint  un 
our  quelque  mal  à  nos  Eglifes. 
Uors  il  faut  avertir  5  &  ne  point 
e  taire  >  quoi  que  ces  fortes  de 
lifcours  irritent  extrêmement  nos 
.dverfaires  ,  que  nous  fommes 
infi  obligez  néceflairement  d'atta- 
juer.  Car  là  ,  nécefîjcé  y  eft.  Ce- 
)endant  il  eft  aifé  de  diftinguer 
es  niéchans  ,  qui  fe  cherchent  eux 
nêmes  ,  d'avec  ceux  qui  ont  de 
a  probité  &  de  la  piété. 

C'eft*  ainfi  que  S.  Paul  fait  men- 
ion  des  faux  Apôtres,  H"^ menée 
k  Akxiindre  le  forgeron,  qui 
rétoienr  pas  préfens  ,  &  qu*il 
ivertit  de  fe  donner  garde  d'eux, 
que  l'E^Jife  du  Seigneur  pût 
e  garcntir  contre  leurs  entrepriies, 

au 


'430  Actes  du  Syriode  de  Berne, 

au  cas  qu'ils  vinflent  à  Ephefe  : 
Au  refte  il  met  foigneufement  de- 
vant les  yeux  de  ceux  à  qui  il 
écrit  les  bons  exemples  des  Fidè- 
les des  autres  Eglifes  ;  afin  de  les 
animer  par  ce  motif  à  la  repen- 
tance  &  à  lamendement.    Il  y  a 
affez  de  mauvais    exemples  par 
tout  >  fans  qu'il  foit  néceffaire  d'en 
aller  chercher  bien  loin,  mais  pouri 
ce  qui  eft  des  bons  exemples  ,  on 
ne  les  trouve  pas  en  auiïi  grand 
nombre  en  tous  lieux,  C'efl  pour- 
quoi il  eft  n^ceflaire  de  ne  rien 
taire  de  tout  le  bien  ,  que  foni 
les  Fidèles  des  autres  Eglifes. 
Mais  il  y  a  des  gens  qui  font  tout 
le  contraire,  découvrent  la  turpi- 
tude  de  chacun,  &  ne  trouvent 
rien  de  louable  en  qui  que  ce  foit: 
ce  qui  peut  aufli  fe  faire  à  bonm 
intention  ,  favoir  5  parce  qu'on  cf 
plus  attentif  à  faire  qu'on  évite  h 
mal5&  qu'on  s'en  garentifle^  qui 
porter  les  Hommes  à  faire  lebicr 
par  Jesus-Christ;  ce  qu 
eft  pourtant  la  cho(è,  qui  convien 
proprement  aux  Chrétiens. 


CHÀ 


tenu  en  43 i 

CHAPITRE  XXVII. 

jQ^'/7  convient  de  prêcher  la  Vé- 
rite  y  comme  la  tirant  de  t 
criture  &  non  en  Je  fon- 
dant fur  t appui  d aucun  Hom- 
me ou  parti  ^  ni  parce  que 
le  Adagifirat  le  commande. 

J^Es  Pafteurs  doivent  aufTi  em- 
ployer 5  également  pour  tous  , 
le  glaive  de  la  Parole  de  Dieu  ,  & 
n'épargner  perfonne,  foit  Homme 
ou  Femme  ,  Maître  ou  Servireur, 
Ami  ou  Ennemi ,  Magiftrat  ou  Su- 
jet 5  ils  doivent  dire  avec  une  en- 
tière liberté,  ce  qu'ils  trouvent  uti- 
le pour  la  correàion,  félon  la  pa- 
role de  Dieu  :  qui  que  ce  foit ,  à 
qui  la  chofe  puifle  plaire  ou  dé- 
plaire. Mais  ils  ne  doivent  point 
fe  faire  de  parti,  qui  leur  foit  at- 
taché d'une  faÇon  charnelle  j  ni  in- 
troduire des  fa<flions,  par  des  ca- 
bales ou  des  intrigues  \  car  les  af- 
faires de  Dieu  doivent  erre  admi- 
niftrées  avec  fimpliciré  de  cœur> 
avec  droiture  &  fans  biaifer,  & 
fans  regarder  au  jugement  des 
Hommes. 

D'autre 


432  Actes  du  Synode  de  Bernc^  \ 

D'autre  côté  quelques  -  uns  ne 
doivent  pas  ,  comme  Ton  dit ,  ci- 
ter ou  prêcher  uniquement  l'Auto-  « 
rité  deVosExcELLENCESjdi-  % 
fant  >  Que  les  Seigneurs  ont  jugé  &  « 
ordonné  ceci  ou  cela,  &  que  pour  » 
cette  caufe  les  Sujets  doivent  le 
croire  &  Tobferver  \  difcours  qui  Di 
portent  les  fimples  à  regarder  plus  à  «r 
VV.  EE.  qu'à  Dieu  même  ,  dans  le 
les  affaires  de  Religion  j  ce  qui  eft  dei 
un  Article  capital  du  Papifme.  Car  ne 
la  Foi  ne  regarde  qu'à  Dieu  ,  6c  pl 
vient  de  la  parole  vivante  de  Dieu,  lei 
&  de  l'illumination  du  Cœur  5  &  ù 
ne  dépend  point  du  jugement  de  fur 
LL.  EE.  ni  d'aucun  Homme:  Car 
U  Jujie  vît  de  fa  Fol.  ^ 

Vcici  donc  comment  il  convient  0« 
de  patkr  :    La  Louable  Seigneurie 

de  Berne  ,  LL.  EE.  nos  Souv. 

>j  Seigneurs  ont  embiafTc  l'Evan^  |L 

yygÛQy  &  rejetté  la  Meflc  &  d'au-  t/ 

très  cho  fes  5  qui  fe  font  trouvées 

contraires  à  telle  ôc  telle  Ecritu-  U\ 

^>re,-  contiaires  aux  Articles  du  nen 

Symbole. V  &  contraires  à  Tintel-  Gto 

»  ligence  de  Jefus-Chrift  ;  ce  que  }i 

»  vous     comprenez     maintenant  k 

w  vous-mêmes  ,  ôc  nç  pouvez  pas  h 

,}  nier, 


tenu  en  I$'i2.  433 

^  mer,  à  caufe  de  ce  paiTage  de 
yy  l'Ecriture ,  qui  eft  clair ,  &  de 
yy  cette  intelligence  éternelle  de  Je- 
py  sus  -  Christ,  à  quoi  les  Ecritu- 
res  de  l'Ancien  &  du  Nouveau 
Teftament  s'accordent  y,, 
Ceft  pourquoi  vous  devez  prier 
Dieu  ,  qa  il  veuille  vous  le  faire 
encore  mieux  comprendre  >  &  vous 
le  mettre  dans  le  cœur.    Nous  ne 
devons  point  entreprendre  de  met* 
tre  nos  Souverains  Seigneurs  à  la 
place  du  Pape  5  qui  a  dominé  fur 
les  Confciences  ^  ce  qui  confifte  à 
s  apuyer  trop  fur  nôtre  autorité ,  Sc 
fur  le  Magiftrat  Civil. 

CHAPITRE  XXVIIL 

Qu  aucun  Pafteur  ne  doit  attA- 
cher  a  lui  le  commun  Peuple. 

L  y  en  a  d'autres  qui  parlent 
trop  rudement  contre  les  Sei- 
gneurs ,  &  particulièrement  en  leur 
abfcnce,  où  la  chofe  n'ert  nulle- 
ment nécefTaire  ,  &:  eft  fans  fruit. 
Gens  qui,  quand  les  Seigneurs  font 
préfens  ,  &  qu'ils  devroient  ren- 
dre témoignage  à  la  Vérité  ,  les 
flattent  honceufement,  &c  qui  titn- 
7bw,  IV^  T  nent 


434  Acfes  du  Synode  deBerric, 

nent  une  telle  conduite ,  pour  atta- 
cher à  eux  le  commun  Peuple  >  qui 
prend  plaifir  à  entendre  médire  des 
autres  Hommes  ,  &  particulière- 
ment de  leurs  SoûV2rains  Sei- 
gneurs ,  &  les  cenfures  qu'on  leur 
fait. 

En  un  mot,  rien  de  tout  celai. 
n*efl  bon  ,  il  ne  convient  point  à 
un  Miniftre  de  Jefus-Chrill  >  de 
foûme  trc  à  lui-même  ni  les  Su- 
jets,  ni  les  Magiftrats  ,  &  de  fe 
donner  pour  quelque  chofe  :  Mais 
au  contraire,  les  Prédicateurs  &  Mi- 
niftres  de  la  parole  doivent  8c  font 
obligez  d'avancer  Tédifice  de  Dieu, 
&  de  conduire  .abfolument  les  Fi- 
dèles à  Jefus-Chrift  leur  Seigneur, 
Cins  aucun  égard  à  leur  propre  pcr- 
fonne.  Mais  malheureufement  nous 
voulons  être  aimez;  &  n  être  hais 
de  perfonne ,  ce  que  nous  voyons 
que  S.  Paul  n'a  pas  fait ,  lui  qui 
ne  fe  foucioit  point  d'être  jugé  des 
Corinthiens  ,  ni  d'aucun  jugement 
humain.  Ainfi  tout  dépend  ds  ce 
point;  c*eft  que  les  Prédicateurs 
regardent  plûrot  au  Confeil  éter- 
nel de  Dieu ,  pour  parler  après  la 
bouche  de  Dieu^  &  dire  des  chofeS) 

qui 


tenu  en  1532.  435 
qui  puiflcnt  fubfifter  au  dernier  jour 
devant  le  véritable  Juge  ,  plutôt 
que  des  chofes  ,  qui  conviennent 
&  qui  plaifênt  au  pré/ênt  Siècle» 
&  qui  chatouillent  les  oreilles  trop 
délicates. 

Quand  le  cœur  de  l'Orateur 
[Chrétien)  cft  droit,  tout  va  bien# 
&  Ton  obferve  les  réglemens.  Son 
principal  foin  eft  défaire  queje- 
fus  -  Chrift  croifTe  dans  THommc 
intérieur ,  &  qu'on  voye  briller 
dans  l'Eglife  de  Dieu  une  probité, 
qui  parte  du  Coeur,  C'eftdansce 
ieffein  qu  il  exhorte  à  la  prati- 
que des  vertus  >  &  qu  enfin  il  cen- 
fure  s  mais  non  avec  plus  de  vé- 
hémence j  que  l'Efprit  de  J  e  s  u  s- 
Christ  ne  l'y  pouffe  ,  &  qu'il 
Ya  trouvé  Jefus-Chrift  lui-même 
5c  qu'il  ne  l'a  repréfcnté  auparar 
rant  par  fes  difcours.  C'cft  pour- 
quoi  l'on  a  bien  fujet  de  prier  > 
qu*H  plaife  au  Seigneur  d'envoyer 
ie  bons  OHvriers  en  fa  vigne» 


T  t  CHA- 


436  Ac7âS  du  Synode  de  Berne ^ 
CHAPITRE  XXIX. 

Cejl  de  Dieu  qu'il  faut  appren 
dre  ^  quand  on  doit  employé 
la  Sévérité  ou  la  Douceur 
'vers  le  pécheur, 

TL  arrive  fouvent  des  cas  où 
^  févérité  eft  néceflaire  :  quelquefoil 
il  faut  exhorter  en  particulier 
amiablement ,  tantôt  on  épargn 
tantôt  on   attaque  avec  rudefle 
l'un  &  l'autre  pour  l'amour 
Dieu.    Samuel  ne  vouloir  pas  des 
honorer  devant  le  Peuple  le  Ro 
S  A  u  L  5  que  Dieu  avoit  rejette.  £/i 
au  contraire  cenfura  publiquemen 
I  z  E  B  E  L  ,  avec  tous  les  Prêtre 
ide  Bahal ,  8c  le  fit  fort  âprement 
Chacun   d'eux  faifoit  ce  qui  lu 
avoit  éré  ordonné  de  Dieu  :  ce 
pendant  l'un  eft  doux  ;  &  l'autr 
eft  fort  rude  &  févère;  6c  l'un  fi 
l'autre  avoient  pour  objet  des 
cheurs  rej  Jttez  de  Dieu. 

On  ne  peut  pas  bien  donner  de 
régies  fur  ce  qui  convient  à  chacu 
dans  chaque  occafîor,  ^  ni  le  mcfuM 
furl'inî('lligence  c}.il?R,'«i(î:nhumâ 
Rc.  Il  hcx  pou:  cela  un  ji<i*t  n  en'-  fp 

rituc 


tenu  en  1532.  AVf 

rituel  >  qui  fuivra  aifément  fi  nous 
avons  véritablement  à  cœur  de 
faire  la  volonté  de  Dieu  5  "jcan  VII. 
Dieu  exauce  ces  fortes  de  défirs> 
&  donne  ce  qui  eft  néceffaire  ea 
chaque  occafion ,  quand  même  il 
devroit  s'en  enfuivre  toutes  fortes 
d'inconveniens. 

CH  AP  ITRE  XXX. 

Eshortation  a  la  RJgence  de 
B  il'  R  N  £3  nos  Souverains  Sei- 
gneurs. 

A  Infi>  Souverdins  Seigneurs^  quand 
même  on  diroit  quelque  chofe 
le  vif  &  de  trop  haut  contre  W, 
EE.  contre  vos  propres  Perfonnes> 
3U  bien  auffi  contre  les  Baillifs  6c 
'xs  Commandans  du  Pays  5  il 
/DUS  fera  certainement  honorable 
3c  glorieux,  de  ne  le  prendre  point 
:n  mauvaife  part ,  mais  de  confi- 
iérer  par  ordre  Se  au  nom  de  qui, 
e  Pafteur  ou  le  Prédicateur  parle  j 
avoir  ,  qu'il  porte  la  parole  de 
Jefus-lChrift,  comme  un  MefTa^er 
ic  un  Envoyé,  celle  de  fon  Sei- 
gneur ,  de  qui  il  faut  la  prendre 
zn  bonne  part.  Dieu  veut  anéan- 
T  3  tir 


438  ABes  du  Synode  de  Bernt» 

tir  notre    SagelTe    mondaine  en  i 

plufieurs   manières  ,    quelquefois  i 

par  un   Homme  fimple       fans  j 

fcience  >  tel  que  feroit  un  petit  Paf-  [ 

tcur  de  Village  ,   donc  on  fait  c 

peu  de  cas ,  dans  un  tel  cas  vous  j 

faites  un  a^lc  d'obeiflance  de  Foi,  }| 
fi  vous  le  foufFrez  avec  une  en« 

tiére  patience  >  comme  une  cho/è  p 

qui  vous  eft  envoyée  de  Dieu  >  2 
pour  votre  corre<flion. 

VV.  EE.  ne  doivent  pas  non  ii 

plus  s'émouvoir  d'abord  ,  de  ce  fa 

que  peut-être  >  à  vôtre  avis  ,  on  {)( 

en  fait  trop.    Car  n6tre  Nature  eft  2^ 

difpofée  d'une  telle  manière  5  que  cd 

chacun ,  au  milieu  de  fes  défauts,  toi 
veut  toujours  avoir  raifon,  &que 

ce  n'eft  qu'avec  peine  &  chagrin  >  f([, 
qu'il  reçoit  les  cenfures,  celles-là 
même  qu'il  a  méritées     qui  font 

juftes.    Perfonne  ne  veut  avoir  re. 

tort.    De  plus  k    Magiftrat  eft  ji£ 

dans  un  état  fort  dangereux,  à  eau-  p 

fe  de  fon  élévation  ,  en  ce  que  f^fj 
prefque  chacun  le  flatte  en  fa  prè^ 

fencc  5  &  lui  dit  les  chofes  qui  lui  tianc 

pl.-îifent  j  mais  chacun  n'eft  pas  fi  ^\ 
bien  intenrionné  pour  lui  dans  foiT- 

cœur  i   comme  fes  paroles  le  té*  1  \^ 

moignenr^ 


tenu  en  1532.  439 

moigncnt  5  bien  loin  de  là ,  il  y 
a  tel  qui  lui  fouhaire  du  mal  3  & 
qui  cherche  à  lui  nuire  par  der- 
rière. Ainfi  une  cenfure  faire  tout 
ouvertement  vaut**  mieux  qu  une 
amitié  fècrette.  Les  blelTures  d'un 
ami  portent  une  utilité  perpétuelle, 
mais  les  baifèrs  d'un  ennemi  font 
périr.  Il  faut  en  toutes  chofes 
avoir  égard  au  cœur  de  celui  qui 
parle.  Car  certainement  un  mé- 
difant  >  qui  charge  le  Magiftrat 
faufiement  en  fa  préfence  ,  vaut 
beaucoup  mieux  3  qu'un  ami  qui 
aprouve  tout  ce  qu'on  fait  j  car 
celui-ci  produit  la  fécurité  dans 
toutes  fcs  œuvres  ,  aulieu  que  l'au- 
tre ouvre  les  yeux  &  les  re-.îd  at- 
tentifs >  en  forte  qu'un  Souvtrain 
prend  mieux  garde  a  la  conduite* 
&  agit  avec  tant  plus  de  droitu- 
re. Qu'il  eft  honorable  à  un  Ma- 
giftrat ,  d'avoir  le  courage  de  faire 
peu  de  cas  de  ce  qui  fe  dit  con- 
tre lui,  6c  de  ne  pas  prendre  tout  du 
plus  mauvais  côté!  Et  que  fi  li 
tranquillité  publique  ,  &  le  bien 
de  l'Etat  demande  qu'on  reprime 
wi  efprit  contentieux^  que  cela 
fafle  avec  mefure  &  avec  toute  la 
T  4  dou- 


440  AStes  du  Synode  de  Berne 

douceur  polTiWe ,  &  en  montrant 
avec  vérité  ,  qu'on  eft  plus  enclin 
à  traiter  doucement  un  Homme 
trop  rude  dans  la  cenfurc  ,  qu  un 
Chien  muet>  qui  ne  fait  pas  aboyer 
contre  les  vices  ^  comme  en  parle 
le  Prophète. 

Nous  ne  difons  par  pourtaat 
ces  chofes  ,  comme  fî  nous  ap- 
prouvions les  emportemens  &  les 
rodomontades  des  gens  grofllers; 
mais  c'eft  parce  que  la  vérité  cho- 
que ordinairement  &  fait  toujours 
de  la  peine  à  ceux  à  qui  elle  s  a- 
dreffe  ,  &  qu  il  peut  arriver  quel- 
quefois qu'un  pauvre  Pafteur  s*op- 
pofe  à  un  défordre  qui  s'introduit,- 
que  d'autres  ne  prévoyent  pas  en- 
core >  &  ne  croyent  pas  qu'il  doi- 
ve arriver.  Il  eft  donc  néceifaire  que 
VV.  EE.  ufcnt  de  débonnaireté  j  à 
recevoir  des  Cenfures  &  des  remon- 
trances faites  hors  de  faifon,  &  ne 
fbient  pas  trop  promtes  à  prendre 
feu  5  comme  on  parle  j  à  moins 
qu'il  ne  parût  vifîblement  qu'il  s'y 
mêle  une  mauvaifc  intention  &  un 
deflein  pernicieux  ;  alors  il  faut  pu- 
nir fans  doute.  En  quoi  vous  Au- 
rez bien  vous  conduire. 

Nous 


tenu  en  1532.  441 

Nous  parlerons  préfentement 
en  particulier  de  nôtre  Corrciflion, 
comme  s  enfuit. 

CHAPITRE  XXXr. 

En  quoi  il  faut  particulièrement  y 
exhorter  c^cenfurcr  lePeuple. 

ne  peut  pas  en/èigner  Jefus- 
Chrift  3  fans  relever  cenfu- 
Ter  les  erreurs  &:  les  vices  >  & 
fans  exhorter  à  la  connoiffance  & 
à  la  probité,  qui  vient  d'un  cœur 
droit  5  ce  qui  doit  être  le  princi- 
pal dans  l'exhortation  &  la  cenfure. 
Mais  pour  ce  qui  regarde  la  con- 
duite extérieure,  nous  renfermons 
nôtre  fentiment  dans  les  Articles 
fuivans^ 

CHAPITRE  XXXir. 

On  doit  prêcher  L  ohtijjance  en* 
vers  le  Magifirat  ,  tant  du 
Gouvernement  Séculier  que 
de  CEcc  Icjiaftique. 

pRémiérement  5  comme  les  Sujets 
font  portez  naturellement  à  la 
rébellion,  à  la  défcbéiifance  ,  &  de 
mauvaife  volonté  coutrc  leurs  Mar 
T  5  giltratsj, 


\ 


442  Acîcs  dtiS'jnode  de  Berne, 

giftrats  5  &:  les  pauvres  de  même, 
contre  les  riches  ;  que  cependant 
laDifcarde  eft  dife(fleiTient  oppofee 
à  la  Charité  Chrétienne,  laquelle 
eft  la  Livrée  des  Chrétiens  ,  pai 
où  ils  fe  font  connoicre  &  fè  dit 
tinguentdu  Monde  corrompu. Pour 
cette  caufe  il  faut  avoir  grand  foin> 
de  procurer  que  k  Magiftrat  fé* 
culier  foit  maintenu  dans  fa  digni- 
té >  ainfi  que  Dieu  l'a  établi ,  Sc 
qu^on  repréfente  vivement  ce  de- 
voir au  Peuple  ignorante  le  pou- 
voir du  Magiftrat  venant  de  Dieuy 
«n forte  qu'il  faut  k  craindre,  me-» 
me  à  caufe  de  la  confcience  ,  J^om. 
Xni.  Car  quoiqu'un  Chrétien  n  ait 
rien  qui  l'attache  au  Monde  ,  & 
qu'il  foit  foumis  à  toute  Créature^ 
cependant  il  y  eut  cette  erreur  qui 
fe  glilTa  dans  l'Eglife  Apoftoliquc^ 
lkvoir,qne  ces'bonnes  gens  s'imagi- 
Uoient,  que  leur  Bourgeotfie  étant 
céUfte  y  8c  eux  n  ayant  point  ici  bas 
de  Cité  permanente  ,  mais  attendant 
avec  empreffement  celle  qui  e/i  k 
venin  ils  n'a  voient  aucun  intérêt 
aux  defleins  du  IVlagiftrat  Civil  > 
&  navoient  rien  à  faire  avec  lui, 
ce  qui  çft  un  rcnverfemeut  de  l'Or- 

don- 


tenu  en  Ï5T2'.  44^:? 

donnancc  de  Dieu  qui  étrUit deux 
Gouvernemcns  parmi  les  Hommes.. 
Le  Supérieur  6c  le  plus  grand ,  eft 
Spiricuel  &  Célefte  ,  dans  lequel 
Jefus-Chrift  ,  à  qui  feul  appartient 
cet  honneur  ,  eft  feul  Seigneur  t 
régnant  par  fon  Efprit^  &  au  de- 
hors y  fervent  les  Miniftres  de 
î'Efprit,  &  les  Prédicateurs  véri- 
tablement Chétiens, 

Le  plus  petit  Gouvernement  8c 
Finfericur  3  eft  le  Temporel  ,  dans 
lequel  Nos  Souverains  Seigneurs^ 
&  tous  les  autres  M^giftrars  Sou- 
verains ^  en  tout  lieu,  font  établis 
de  Dieu.  Le  Chrétien  eft  fournis 
à  tous  ces  deux  Gouverncmens  : 
Par  raport  à  fa  Confcience  ,  il  eft 
fous  k  Spirituel  ,  dans  lequel  au- 
cune autre  Créature  n'a  rien  à 
voir  ;  c*eft  Dieu  feul  qui  en  eft  k 
Juge:  Mais  à  Tegard  de  fon  Corps 
&:  de  fon  Bien,  \\.  eft  fournis  au 
glaive  ,  &  à  l'ndminiftraiion  exté- 
rieure, l/n  Chrétien  eft  à  la  vé- 
rité Célefte  ;  mais  non  pas  abfo^ 
lument,  tant  qu'il  eft  dans  cette 

I habitation  terreftre  ,  dans  ce  corps 
mortel  :  C'eft  pourquoi  il  ne  doit 
point  fe  fouftraire  à  l'Ordonnance 
T  ^  t€rrcftre3 


444  ABcs  du  Synode  de  Berne-, 

terreftre ,  quoiqu'il  y  doive  croître 
journellement ,  &  devenir  toujours 
plus  célefte.    Car  un  Chrétien  s'a- 
vance &  s'élève  hors  "du  Monde 
&   de  deffous  le  Magiftrat  >  par 
Tondlion  Divine  ^  c'eft4-dire  î  forr 
cœur  &  fes  afFedlions  s'en  déta- 
chent de  plus  en  plus,  aufTi-bien 
que  de  toute  affaire  mondaine.  On 
doit  employer  à  cela  des  Exem- 
ples 3  tirez  fiir  tout  des  Hiftoires 
de  la  Bible  :  où  l'on  voit  manifeC 
tement  que  Dieu  a  puni  des  peu- 
ples dèfobéïffans  >  même  ceux  qui 
s'étoient  foulevez  contre  l'Autori- 
té de  Rois  injuftes>  ju(qu'à-ce  que 
Dieu  les  ait  rejettez  &  dépofez 
lui-rriême  \  l'exemple  de  David,  & 
la  conduire  qu'il  tint  à  l'égard  de 
Saiil  5  que  Dieu  avoit  dépofé,  & 
qu'il  honora  pourtant ,  tandis  qu'il 
étoit  Roy  ,  &  l'épargna  >  mérite 
bien  nôtre  attention, 

Des  Dîmes  &  des  Cenfcs;  com^ 
mem  on  doit  les  fayer  &  les 
recueillir, 

11  fuit  de  là  >  qu*on  eft  obligé 
de  payer  les  Dîmes  ordinaires.  Car 
c  eli  là  une  Ordonnance  extérieure. 


tenu  en  I  532.      44 f 

&  qui  n*eft  point  oppofée  à  la 
Charité  \  ce  qui  eft  clair  par  THif- 
toire  de  JoÇe^h ,  qui  alTujettir  tout 
le  Pays  d'Egypte ,  à  payer  au  Roi 
le  cinquième  de  tous  leurs  revenus. 
C'eft  là  une  vérité  qu'on  peut  en- 
core éclaircir  par  k  Ghap.  XIII. 
de  TEpître  aux  Romains  ;  car  il  ne 
peut  point  y  avoir  de  tribut  >  ou 
de  redevance  plus  raifonnable* 
que  les  Dimesy  puifque  &  celui  qui 
donne  >  8c  celui  qui  reçoit ,  font 
obligez  d  anêter  la  vûë  fur  la  bé*- 
nédiftion  de  Dieu  >  Se  de  prendre 
&c  de  recevoir ,  tel  que  le  grain 
eft  venu,  à  même  gain  &  à  même^ 
perte. 

Pour  ce  qui  eft  des  Ccnfes,  peut- 
être  qu'on  y  pnfl'e  les  bornes  ;>  c'eft- 
au  Magiftrat  à  les  redrefïer>  Se  les 
Mififties  ne  doivent  gueres  s'en 
mêler  j  car  cela  n'eft  pas  le  prin- 
cipal point  de  leur  employ  y  Se 
d'ailleurs  une  telle  affaire  entraîne 
un  changement  des  Conftitutions 
communes  du  Pays  >  lequel  on  ne 
doit  pas  entreprendre  fans  une  ex- 
périence confommée  Se  une  miire 
délibération  de  gen^  fages  Se  habi- 
ks  :  à  moins  qu  on  ne  vit  une  in- 

jufticft 


446  AcTes  du  Synode  de  Berne ^ 

)uftice  manifefte,  comme  on  en  voit 
en  quelxques  endroits  >  dans  les. 
Cenfes  de  blé  &  de  vin.  D'ail- 
leurs chaque  IVliniftre  doit  avertir 
fes  Auditeurs  ,  s'il  arrive  qu'ils  y 
foient  intéreffez ,  qu  il  n'y  a  point 
de  péché  ou  d'injuAice  à  donner  ce 
qu  on  leur  demande  injuftcment  >. 
mais  qu  îl  y  a  du  péché  à  prendre, 
injuftement. 

Il  faut  avoir  devant  les  yeux 
cette  unique  régie ,  c'eft  qu'il  faut 
agir  avec  charité  :  que  chacuri 
faffe  à  l'égard  des  autres  5  ce  qu'il 
voudroit  5  &:  verroit  avec  plaifir>. 
qu'on  fit  à  fon  égard  ,  en  cas^ 
pareil. 

Il  faut  encore  remarquer  avec 
foin  ,  que  ces  fortes  de  chofes  >. 
comme  aufli  acheter ,  6c  vendre  fa 
marchandife  >  &  le  travail  de  fes 
mains  ,  tels  que  font  les  ouvrages- 
des  TTfft  rans  Se  des  Cordonniers ,  Slc^ 
appartiennent  aux  Réglemens  ex- 
térieurs ;  &  doivent  toutes  être 
réglées  en  quelque  manière  feloa 
k  charité  j  &  n'appartiennent  point 
au  pur  &  fimple  Evangile  9  qur 
n  a  pour  objet  que  les  Confcien- 
ces.    Mai5  dans  le  véritable  Chrif* 

tianif* 


um  e?^  I^'i2'  447 

mnifme,  qui  eft  intérieurement  & 
de  lui-même  de  bonne  volonté  5  à; 
fcrvir  le  prochain  ,  on  prête  ,  Se 
l'on  n'en  efpère  rien  en  échange  ^ 
&  même  on  n'y  pofTéde  du  tout 
rien  >  comme  en  propriété.  Mais 
dans  cette  affaire  il  faut  que  cha- 
cun prenne  bien  garde  à  l'efprit 
qui  l'anime  >  à  ne  pas  agir  par 
un  zélé  charnel,  &  ne  point  don- 
ner au  déhors  ce  que  fon  coeur  poC- 
féde  encore.  Il  faut  ç\\xAnaniA^ 
nettoyé  auparavant  fon  cœur,  après 
cela  il  /aura  bien  régler  fa  bourfe» 
C'eft  en  quai  les  pauvres  Anabap^ 
tifjtes  ont  erré,  en  abolilTant  le  Gou- 
vernement extérieur',  autant  qu'en 
eux  eft  >  (ans  k  favoir^  &  en  fe 
contraignant  &  fe  forc^ant  les  uns 
les  autres  à  quiter  leurs  maifons 
&  leurs  biens  ^  à  abandonner  Fem- 
me,  Enfans>  Pcre  &  Mcre,  con- 
tre l'ordonnance  de  Dieu  ,  qui 
yeut ,  que  nou«  attendions  fa  vo* 
cation,  &  que  nous  n'entrepre- 
nions rren  de  nous  mêmes  :  mai>s 
qu'au  refte  nous  préférions  fon 
amour  à  toutes  chofes  ,  &  qra'ainfi 
nous  embrafTions,  fans  aucune  con- 
trainte extéiicurc,  Jefus-Chiift  qui 

opère 


448  Actes  du  Synode  de  Berne., 

opcre  dans  le  cœur ,  &  du  Cœur 
au  dehors  par  les  œuvres  ,  6c  non 
pas  du  dehors  dans  le  cœur,  com- 
me faifoit  le  Miniftère  de  Moife. 

CHAPITRE  XXXIII. 

Qu  il  faut  exhorter  le  Peuple 
à  ohferver  les  Edits  de  hL. 
EE»  C/  sapliquer  particulier 
rement  à  corriger  les  vices 
qui  ont  le  plus  de  vogue  dans 
nos  Eglifes. 

"XjOs  Souverains  Seigneurs  ayant 
-  publié  divers  Edits  de  Ré-- 
formation,  pour  la  corredion  des 
mœurs  >  &:  pour  établir  une  con- 
duite Chrétienne,  Nous  devons, 
nous  autres  Pafteurs  &  Miniftres> 
en  prefler  Tobfervation  avec  foin , 
en  montrant  qu'ils  font  juftes 
conformes  à  l'Ecriture  Sainte;  fic 
que  même  parmi  ks  honnêtes»» 
Payens  on  na  point  foufert  ces, 
fortes  de  vices  j  tels  que  font  1'-^- 
du Itère  >  la  Fornication ,  le  Jl^/aguC'»* 
reliage  ,  VYvrognerie  ,  le  Jeu  ,  les> 
Blafphhn:s  Sc  les  Juremcns ,  6c  par- 
ticuiisiement  Tufagc  d  aller  au  fir- 

ut.  ce 


tenu  en  1 532.  449 

ma  des  Princes  Etrangers  ^  &  de 
faire  la  guerre  pour  de  Targent  ; 
contribuër  par- là  à  faire  des  Veuves 
&  des  Orphelins  *,  chofes  qui  font 
contraires  au  fens  commun  &  à 
l'équité ,  &  qui  n'ont  jamais  été 
approuvées  >  même  parmi  les 
Payens. 

Nous  devons  au/Ti  exhorter  avec 
foin  les  Magiftrats  >  de  foutenir 
ces  Edits,  &  leur  repréfênter  leur 
devoir  &  leur  obligation  envers 
Dieu. 

Nous  devons  au/Ti  nous  autres 
Miniftres  >  faire  attention  à  la  dit 
pofition  de  nôtre  Peuple,  &  à  fes 
palfions  >  &  nous  efforcer  de  le 
conduire  à  Dieu  par  Jésus- 
Christ  par  nôtre  Miniftère  ; 
car  tous  n*ont  pas  les  mêmes  vi- 
ces j  quelquefois  le  change- 
ment de  lage  en  apporte  au/Ti  dans 
les  mœurs  &  dans  les  péchez:  ce 
que  chacun  peut  aifément  appren- 
dre en  converfant  journellement  & 
familièrement  avec  fes  Paroi/Tiens. 
Mais  il  faut  partout  leur  parler  de 
\ Etat  du  A/ariage  ,  de  \  Education 
des  Erifansy  de  la  Correcliori  frater^ 
nelle  ,  6c  contre  les  vices  com- 
muns, 


450     Actes  du  Synode 

muns  >  qui  font  attachez  à  toute 
chair  >  tels  que  font  la  perfidie,  l'en^ 
vie^  la  haine,  le  menfonge  Sc  h  frau- 
dé y  &  autres  fcmblables  œuvres 
de  ténèbres.  Ce  font  là  les  Arti- 
cles cMie  chacun  doit  preffer  avec 
foin  &  application  >  pour  la  cor* 
rc£lion  des  vices, 

CHAPITRE  XXXIV. 

De  tlnftruciion  dé  la  Jeunefcy 
&  de  la  Doctrine  de\  la  Foi  > 
OU  du  Catéchifme* 

^Omme  on  aprend  >  fans  beau- 
coup de  peine  ,  6c  bien  ,  ce 
qu'on  aprend  dans  la  Jeunefle,  & 
que  dans  le  déclin  de  Tâge  on  n'sft 
plus  propre  à  rien  5  &  que  dailleurs 
il  eft  bon  de  porter  le  joug  du  Sei- 
gneur dès  Tenfance  >  qu'enfin  les 
Chrétiens  font  obligez  de  ccnfa- 
crer  leurs  Enfans  particulièrement 
au  Seigneur  ,  en  fa  mort ,  fans 
quoi  ils  fe  trouvent  miférablemenc 
efclaves  des  convoirifes  mondai- 
nes ,  &:  fous  la  puiflance  du  Dia- 
ble >  Pour  ces  raifons>  il  eft  nécef- 
faiie  d'établir  un  Catéchifme ,  ou 
Inftru^ion  Chrétienne ,  où  l'on  apren- 

ne 


de  Berne.  451 

ne  aux  fîmples  ,  &  principalement 
aux  grands  Enfans  ,  à  craindre 
Dieu  &  à  laimer ,  par  J  e  s u  s  • 
Christ^  &  cela  non  en  citant 
beaucoup  de  partages  de  l'Ecritu- 
re >  mais  en  expliquant  le  SymboU 
des  Apôtres ,  &  VOraifoft  Domiincaley 
fur  quoi  l'on  a  déjà  écrit  divers 
petits  Livres.  Mais  cela  feroit  en- 
core plus  efficace  >  fi  avant  tout 
cela,  nous  faifions  tous  nos  eiForts^ 
pour  que  Jefus-Chrift  fe  levât  ôc 
vint  dans  nos  propres  Cœurs. 
Le  feu  dont  nous  ferions  animez 
échauiferoit  bien-tôt  les  efprits  fou- 
pies  des  Enfans  :  Autrement  ce  que 
la  raifon  feule  tire  des  Livres  >  & 
enfei^^ne  aux  autres  Hommes,  n'eflr 
qu'un  ouvfiîge  humain  >  fans  effi- 
cace i  jufqu'à  ce  que  le  grand  Mai- 
tre  le  S.  Efprit  lui  -  même ,  fc 
mette  de  \\  panie  y  &c  crée,  renou* 
velle,  3c  régénère  à  une  vie  célefte 
&  éternelle. 

Il  nous  a  auffi  paru  nécelTaire, 
de  montrer  Jefus-Chrift  tout  entier» 
&  tout  l'ouvrage  de  Dieu  pour 
nôtre  falut ,  par  le  Symbole  des 
Apôrres  ,  comme  auffi  de  faire  voir 
clairement  aux  fimpleso  que  tou- 
tes 


452'     A^es  du  Synode 

tes  les  prières  qu'il  convient  de 
fâircj  font  renfermées  parfaitement, 
clairement  &  avec  allez  d'écenduë 
dans  rOraifon  Dominicale  ,  enfor- 
te  qu  elle  furpafle  tous  les  Pfau- 
mes ,  &  toutes  les  Prières  ,  q^ue 
les  Pcrcs  ayent  jamais  faites. 

CHAPITRE  XXXV. 

Du  Décalogue  >  ou  ,    des  Dix 
Commandemens , 

Quoique  la  paflk)n  &  la  mort 
.de  Je  s  us  -  Chri  ST  ferve  à 
connoîrre  vivement  le  péché  >  & 
à  porter  I  Homme  à  la  repe  itance,. 
cependant  il  eft  bon  &  néceflairej 
que  les  Enfans  fâchent  les  Dix 
Commandemens,  &  que  les  Paf- 
teurs  dans  les  Catéchiîmes  les  leur 
impriment  dans  le  Cœur  5  de  la 
manière  que  le  Seigneur  Ta  fait 
dans  fon  Sermon  fur  la  Montagne, 
Maîth.  V.  VI.  VII.  afin  que  la 
Jeunelfe  apprenne  à  régler  fon  coeur 
devant  Dieu  ,  comme  c'eft  aufli  au 
cœur  que  Dieu  a  particulièrement 
égard.  Il  fêroit  auffi  à  fouhaiter 
que  les  Vieillards  ne  fe  filTent  point 
de  honre  daprendre  les  mêmes 

chofcSi  - 


de  Berne.         45 3 

chofes,  &  de  recevoir  humble- 
ment les  mêmes  inftrtiftions  avec 
&  parmi  les  Enfans  ,  afin  qu^une 
^ois  enfin  nous  devinflîons  tous 
bons  Chrétiens  ,  &  que  nous  n*en 
demeuraflions  pas  à  la  feule  pro- 
feflion  extérieure. 

CHAPITRE  XXXVI. 

Vu  Symbole  des  Apôtres  î  de  /'O- 
raifon  Dominicale ,  &  des 
Dix  Commandemens. 

rpOute  la  Religion  cft  clairement 

-  conteniië  dans  ces  trois  pièces, 
ItSymboky  COraifon  Dominicale  le 
Décalogue.  Le  Symbole  nous  aprend 
à  connoître  Dieu  &  Jésus-Christ  5 
&:  nous  montre  comment  la  Grâce 
£c  la  Vie  commence,  saccroit  & 
s'accomplit.  L'Oraifon  Dominica- 
le cft  la  vraye  prière  Chrétienne  j 
^  pour  ainfi  dire,  la  Cruche  ou 
le  Seau,  avec  lequel  on  puife  cette 
grâce  à  la  fource  de  la  grâce,  qui 
cft  J  E  s  u  s  -  C  H  R  I  s  T ,  on  la  re- 
cueille dans  le  cœur.  Car  celui 
qui  pris  ,  obtient  :  &  fans  la 
prière  c'eft  en  vain  que  la  grnceeft 
©flirte.    La  prière  ouvre  le  cœur 

& 


4S4  Affes  du  Synode 
&rélargit,  pour  ainfi  dire,  afin 
quil  puifle  recevoir  la  grâce.  Et 
pour  ce  qui  eft  des  Dix  Comman- 
demcnsj  ils  font  un  exercice  exté- 
rieur ,  par  lequel  la  chair  eft  mor- 
tifiée, 6c  tournée  à  pouvoir  mieux 
comprendre  fa  corruption  &  fes  pé- 
chez >  &  à  les  retenir  dans  fon 
fouvenirs  quoique  du  refte  il  faille 
auparavant  connoître  le  péché  par 
Je  s  u s  -C  H  R I  s T  &  en  lui ,  fi  Ton 
veut  en  avoir  une  connoilTancc  uti- 
k.  Celui  qui  confidére  les  Com- 
mandemens  >  doit  confidércr  en 
même  tems  >  que  Jesus-Christ  , 
lui  jufte  &  innocent ,  eft  mort  par 
la  préordination  de  Dieu  ,  pour 
ces  péchez  là ,  que  le  Decalogue 
défend.  Ainfi  le  Symbole ,  l'Orai- 
fon  Dominicale  >  &  le  Décalogucj 
font  la  Bible  des  Idiots  &  des 
Enfans,  laquelle  comprend  tout  le 
Chriftianifme.  Car  les  Sacremenr» 
le  Baptême  &  la  S.  Céne  ,  aufti- 
bien  que  la  parole  d*exhortation  ^ 
ne  faifânt  autre  chofe ,  que  de  pré- 
fenter  aux  ames  des  Fidèles  le 
Myftère  de  Dieu  dans  l'Homme, 
il  n*eft  pas  néceffaire  d'en  embar- 
raffer  ielprit  des  Enfans  &  des 

fimple#> 


de  Berne,  45  j 

fimples  ,  qu'autant  que  ces  chofes 
peuvent  leur  fervir  à  connoirre  ce 
iêul  Sauveur  Jésus  -  Christ, 
i|ui  eft  exprimé  de  la  manière  la 
plus  propre  avec  toute  fa  vertu  & 
fon  opération,  dans  ces  trois  piè- 
ces fufmentionnées.    Si  l'on  s'y 
prend  d'une  autre  manière  on  rend 
la  Religion  trop  difficile ,  &  on  la 
charge  de  trop  de  paroles  >  enforte 
que  les  bonnes   gens  d'entre  le 
Peuple  defefpérent  de  pouvoir  ja- 
mais ni  la  comprendre  ni  l'appren- 
dre.   Sur  quoi  il  eft  bon  de  re- 
marquer ,  que  le  Fils  a  déclaré  lui- 
même  en  termes  bien  remarqua- 
bles 3  que  cette  Grac€  incomprehen- 
fible  ,  eft  cachée  à  la  SagelTe  du 
Monde,  6c  eft  manifeftée  aux  pe-  ^•^nh. 
tirs  ôc  à  ceux  qui  ont  peu  d'in- 
telligence,     Ceft  pourquoi  nous 
devons  nous  accommoder  à  la 
portée  des  fimples  ,  &  nous  ren- 
dre intelligibles  ,  autant  qu'il  eft 
po/Tible  5  &  ne  pas  fabriquer  de 
nouveaux  Articles  de  la  connoif- 
fance  de  chaque  dogme. 


CHA- 


456      Acles  du  Synode 
CHAPITRE.  XXXVII. 

De  la  conduite  &  de  ///probité 
des  Adimfiresér  des  P a/leurs 
en  général, 

TL  eft  toujours  vrai  ce  que  dit  lePro- 
phêre,  Tel  qu  eft  le  Sacrificateur^  tel 
eft  le  Peuple:  &  tel  queft  le  Peuple  tel  eii 
le  Sacrificateur,  Car  quand  Dieu  veut 
faire  du  hicn  à  un  Peuple  >  il  lui 
envoyé  des  Prophètes  >  qui  font 
gens  de  bien  v  Fidèles  &  fages  dit 
penfateurs  des  Myftères  de  Dieu , 
par  le  moyen  defqueîs  tout  le 
Peuple  eft  fauve.  C'eft  pourquoi 
le  Peuple  ne  doit  attribuër  la  faute 
qu'à  lui-même ,  s'il  n'eft  pas  pour- 
vû  de  bons  Pafteurs ,  comme  il  le 
devroient  être.  Et  nous  n'avons 
à  nous  plaindre  de  perfonne  qiic  de 
nous-mêmes  >  fi  nôtre  Peuple  eft  fi  1 
pétulant  &  obftiné  dans  fes  vices , 
&  fi  défobeifTant  à  la  vérité  :  car 
nos  péchez  méritent  cela.  Quant 
au  refte  il  y  a  partout  des  cœurs 
fertiles ,  propres  à  porter  des  fruits 
de  juftice  pour  Dieu  ,  fi  nous  étions 
feulement  des  Laboureurs  &  des 
Oi'vriers  «v^ec  Dieu?  diligent  & 
appliquez  à  cet  ouvragé.  C'eft 

pour- 


de  Berne,  457 

pourquoi  chacun  doit  bien  pren- 
dre garde  >  quil  ait  les  qualicez 
que  Dieu  exigeoit  dans  les  Ji'ges, 
du  tems  de  Moïfe  ,  favoir  5  d  être 
{ag^s 'i  entendus,  6>c  reconnus  par- 
mi les  Tribus  5  pour  êcre  gens 
courageux  &  droits  5  craignant  Dieu, 
a?nateurs  de  la  vérité ,  6c  ennemis 
de  l'avarice.  Il  faut  dis-je,  qu'on 
voye  auffj  briller  en  nous  les  mê- 
mes qualitez.  Car  comme  ceux-là 
étoienc  Serviteurs  des  Peuples  pour 
le  temporel,  nous  le  Tommes  pareil- 
lernent  dans  le  Royaume  Céleftede 
Dieu,  afin  que  nôtre  fageile  en  Je- 
sus-Christ  ne  Toit  pas  moin- 
dre que  Tà  été  leur  ombre  &  leur 
type  fous  Moïfe.  Or  nous  enten- 
dons par -là,  cette  SageiTe  &:  cette 
Intelligence,  qui  découle  de  la  Croix 
de  Jcfus-Chrift;  ôc  une  connoif- 
fance  des  Fidèles,  qu'on  ne  tire 
pas  de  la  Chair  &  du  Sang  ,  mais 
qu'on  aquicrt  par  les  fruits  de  1  eC- 
prit>  &:  par  les  Oeuvres  de  Cha- 
rité. Car  S.  Paul  ne  comioit  plus  IL 
perfofîne  félon  la  chair.  On  devroit  ^* 
voir  les  mêmes  fenîiinens  dans 
nousôc  dans  nos  Eglifes  ,  car  nous 
ne  devons  pas  avoir  des  affcvcions 
Jom,IP\  V  char- 


458      Actes  du  Synode 

charnelles.  Il  ne  faut  pas  non  plus 
avoir  égard  à  la  hardiefls  de  bou- 
che ^  de  main  ,  mais  à  une  pa- 
tience confiante  ,  à  une  Charité 
aflive,  qui  vient  d'une  Foi  non 
feinte  ,  laquelle  apporte  avec  foi 
Jésus  -  Christ  ,  qui  eft  la  vérité 
même  >  qui  exclut  toute  ava- 
rice, &  même  toutes  les  convoi- 
tifes  du  cœur.  C  eft  auITi  à  quoi 
^  S.  Pierre  nous  exhorte  :  Paijfez  le 
Troupeau  y  dic-il>  avec  une  promte  af* 
feston  ,  &  non  point  comme  ayant 
domination  fur  l'héritage  du  Seigneur^ 
mais  étant  les  modèles  du  troupeau  , 
I.  Epitre  Ch.  V.  C'eft  ce  que  S. 
Paul  a  fait  ^  &c  nous  a  ordonné 
de  nous  former  fur  fon  modèle,  & 
d'être  fes  imitateurs  ,  autant  qu'il 
I.Co?-.XI  l'a  été  de  Jefus-Chrrft:  Il  faut  donc 
exhorter  le  Peupk  à  nous  imiter, 
8c  à  fuivre  les  exemples  que  nous 
lui  donnons,  fi  du  moins  nôtre 
Do£lrine  &  nos  œuvres  convien- 
nent enfemble  ,  Se  fi  nôtre  cœur 
eft  d'accord  avec  nôtre  bouche  Sc 
nôtre  main.  Mais  helas  î  il  ne 
nous  convient  pas  trop  encore  à 
préfent  5  de  tenir  un  tel  langage  > 
puifque  nous  ne  fommes  pas  en- 
core 


de  Berne.  459 

core  extrêmement  avancez  nous- 
mêmes  dans  les  affaires  fpiriruelles> 
fie  dans  les  œuvres  Chrétiennes. 
JVlâis  nôtre  exemple  fera  pourtant 
en  édification  5  fi  nous  nous  ap- 
pliquons à  bien  remplir  nôtre  char- 
ge dans  l'Eglife,  à  la  bien  condui- 
re» 6e  qu'on  nous  trouve  chez 
nous  &:  dans  nôtre  domeftique  5  de 
bonnes  mœurs  3  gens  de  bien  & 
d'honneur. 

Nous  allons  donc  parler  pre.T/ié- 
rement  de  nôtre  Emploi  j  comme 
s'enfuit. 

CHAPITRE  XXXVIII. 

Comment  les  Pa/leurs  doivent 
étudier  i  dr  lire  C Ecriture* 

r)Uifque  l'Ecriture  rend  l'Homme 
fagc  à  falat ,  par  la  Foi  en  Je- 

s  u  s  -  C  H  R 1  s  T  >  car  tome  l'Ecri-  iii^ 
tuie  efî  divinement  infptrée  ,  propre  a 
inffruire,  a  cenjurer  ,  a  corriger  ^  & 
a  reprendre  dans  Lt  jujlice  ,  afin  que 
\  l'Homme  de  Dieu  [oit  irreprehjnfible  5 
■  &  bien  dffpofJ  pour  toute  bonne  œu- 
vre i  pour  cette  caufe  on  doit  re- 
connoîtrc ,  qu'il  efl  néceflTaire  de 
s'appliquer  foigneufement  à  la  lire. 

\  z  Et 


46 O      Acfes  du  Synode 

ÎEc  dans  cette  leflure  il  faut  oh(tu 
ver  cet  ordre ,  c'eft  de  commencer 
par  la  prière  >  avant  que  de  pren- 
dre la  Bible  entre  les  mains  j  ôc 
cjue  cette  prière  foit  faire  en  efpiit 
en  vérité  :  Cette  prière  de  TEt 
prit  eft  d'une  telle  nature  5  que  le 
S.  Efprit  pouffe  celui  qtii  prie  > 
prémiéremjent  à  rendre  grâces  à 
Dieu  avec  un  amour  ardent,  pour 
les  bienfaits   qu'il  en  a  reçus:  ce 
<^ui  produit  de  la  confo'ation  &  une 
iVt  forte  'y  en  fui  te  il  le  pouffe  à  prier 
le  Seigneur,  de  vouloir  ôter  de 
plus  en  plus  les  maux,  les  vices 
^  les  imperfeiHiions ,  qui  font  at* 
tachez  a  nôtre  nature  5  ce  qui  pro- 
duit un  defir  8c  une  ardmr  5  que  le  1 
Matt.  V.  Seigneur  appelle  fam  &  feif  de  la  f 
juftice,  qui  eft  toujours  fuivie  du  r| 
raffaficment  &  d'un  véritable  bon-i 
heur.    Ainfi  il  eft  évident  ,  que 
la  Prière  eft  une  évacuation  &  une 
préparation  du  Cœur  5  afin  qu'il 
puiffe  comprendre  &  retenir  l'in- 
tention &  le  confeil  de  Dieu ,  qui 
cft  caché  fous  la  Lettre.  Sans  cela 
on  lit  ordinairement  l'Ecriture  S^^- 
fans  dévotion,  comme  une  hiftoirc  \ 
mondaine ,  &  Ton  y  exerce  uni- 
quement 


de  Berne,        46 1 

quement  fa  raifon.  Aiiffi  cela  ne 
produir-il  autre  chofe,  quune  Sa- 
geffe  enflée  ôc  charnelle  ,  que  l'on 
propofe  enfuire  au  pauvre  Peuple* 
comme  venuë  de  Dieu,  6c  tirée  de 
fa  parole.  C'eft  pourquoi  S.  Ja- 
ques die  fc^rt  bien  dans  fonEpitre: 
(  y?  quelcun  d'entre  vous  a  befoin  de  Su" 
gejfe  5  <7«>7  la  demande  a  Lkti  ^  qm 
la  donne  libéralement^  &c.  Chap.  I. 

Quand  on  a  ainfi  préfenré  à  Dieu 
la  prière  d'un  Cœur  pénitent  &  al-  < 
teré  de  la  grâce  ,  alors  il  faut  ou- 
vrir le  Livre  ,  &  le  lire  comme 
la  parole  de  Dieu  5  ainfi  qu'il  eft 
.  véritablement  ,  &  non  pas  comms 
I  la  parole  des  Hommes  \  en  perfé- 
vérant  dans  le  défir  qui  a  ditlé  la 
prière  qu'on  vient  de  faire,  jjf' 
qu*à-ce  qu'on  fente  quelque  peu 
d'intelligence  divine  découler  d  en^ 
haut ,  que  le  Lcfteur  doit  inceffain- 
ment  recueillir  avec  foin ,  &  pen- 
fêr  d'abord  que  le  S.  Efpric  parle 
en  lui ,  pour  le  cenfurer  Se  le  cor- 
riger 5  c'eft-à-dire  ,  le  Lc(fleur  doit 
k  regarder  comme  écarté  de  toutes 
les  Créatures  ,  &  agir  uniquement 
avec  Dieu  ,  avec  un  efprit  fimple 
&  confacré  à  fbn  fcrvice,  6c  ne  pas- 
V  3  (è* 


462      Achs  du  Synode 

le  mettre  en  peine  de  ce  qu  il  doit 
dire  au  Peuple  ,  mais  comment  il 
pourra  lui-même  recevoir  de  Dieu 
de  Rouvciles  lumières. 

Il  faut  alors  que  le  Lcifleur 
compare  enfemble  d'autres  pallages 
de  TEcricure  ,  avec  l'expérience 
que  fa  Foi  a  faite  auparavant , 
lorfqu*ils  pourroient  paroître  op-  , 
pofez  à  rinteliigence  qu'il  auroii'| 
préfentement  5  &c  prier  de  pouvoir 
les  concilier  enfemble >  5c  perféve- 
rer  ccnfbmment  dans  cet  exercice, 
ji;fqu'à-ce  que  la  vérité  de  cette 
même  Ecriti:!re  reluife  vivement 
dans  le  cœur  j  afin  que  cela  foit 
fjivi  d'une  vive  Action  de  grâces |i 
^  d'une  méditation  appliquée  d« 
la  ConnoilTancs  qu'on  a  reçue. 

Enfuiie  il  faut  prendre  en  mai» 
les  Livres  &  ks  Commentaires  i 
qui  ont  été  publiez  de  nôtre  remsj 
&  dans  les  tcms  paffez  ,  6c  lei 
conférer  avec  Tintelligence que  nouff 
avons  obtenue  :  C'eft  ainfi  qu'on* 
peut  les  lire  avec  jugement ,  &| 
avec  profit.  Ah!  quelle  joye  n'cft- 
ce  pas  ,  lorfqu'un  Homme  trouve 
que  Dieu  lui  a  auffi  donné  qiieL: 
que  chofe ,  qui  s'accorde  avec  CC' 

qu€ 


de  Berne.  463 

que  les  autres  ont  reçu  ;  ou  que 
même  les  aurres  n'ont  peut  -  être 
pas  encore  reçû  ?  Cependant  il  ne 
s'en  enfle  point ,  puifqu'il  Ta  obte- 
nu de  la  bonté  de  Dieu,  après  le 
lui  avoir  demandé ,  il  fait  bien 
ce  qui  s'en  enfuivroir,  s'il  tomboit 
dans  la  paiïion  de  la  vaine  gloire. 

Il  eft  bon  auiïi  que  chacun  met- 
tre fes  penfées  par  écrit ,  &  qu'il 
les  compare  avec  celles  qui  /uivront. 
Car  il  faut  toûjours  avancer  dans 
la  voye  de  Dieu  ,  d'autant  plus 
que  la  mémoire  efl  foiLle,  il  nous 
eu  donc  avantageux  d'avoir  dans 
nos  recueils  quelque  chofe  quipuif- 
fe  nous  fervir  dans  l'cccafion  \  Se 
un  tel  exercice  fait  de  nos  ames  un 
Arfenal  bien  fourni  pour  le  fervi- 
ce  de  Dieu  nôtre  Seigneur  j  dans 
lequel  font  mifes  en  referve  des 
armes  fpirituelles ,  pour  repoufler 
les  machinations  de  Satan. 
CHAPITRE  XXXIX. 
Que  Us  Adinifires  doivent  con- 
férer  amiablement  enfemble 
fur  [Ecriture 
tL  feroit  fort  utile  pour  cedeffein, 
que  nous  fu/Tions  toujours  diA 
V  4  pofc 


404      Actes  du  Synode 

pofez  &:  prêts  à  conférer  enfembk 
fur  TEcriture  S^^.  particulièrement 
chacun  avec  Ton  voifin ,  qui  auroit 
auffi  de  la  pieté,  ôc  qui  dcfireroit 
de  croître  en  la  connoifTance  de 
Jefus-Chrifl:  Nôtre  Seigneur.  îl 
faudîoit  auffi  que  tous  nos  difcours 
&  nos  converfations  familières  avec 
tous  les  Hommes  ,  fuflent  de  la 
même  nature,  comme  gens  qui  ati- 
rions  vivement  à  cœur  la  gloire 
de  Dieu,  &  le  règne  de  Je  sus- 
Chris  t.  Ceft  là  ce  que  les  An- 
ciens pratiquoient,  6c  c*eft  ce  qu« 
nous  avons  fait  aufTi  dans  ce  Sié" 
cle  3  des  le  commencement  que 
FEvargile  a  é:c  prêché,  difputant 
avec  chacun  touchant  nôtre  Evan- 
gile, &  contre  le  Pape.  Mais  il 
faut  bien  prendre  garde  de  n'être 
pas  choquans,  ni  emportez  ,  ni 
opiniâtres;  comme  gens  qui  veu- 
lent défendre  à  quelque  prix  que 
ce  foit,  l'opinion  qu'ils  ont  une  foi$ 
ernbraffée.  Car  quand  on  trouve 
dans  un  autre  Homme  quelque 
chofe  de  Jesus-Christ  ,  5-:  de  les 
dons  ,  quelque  petit  que  cela  foit> 
\\  faut  en  rendre  grâces  à  Dicu,^ 
agir  avec  lui  prudemment ,  pour 

Lui 


de  Berne.  46^ 


Uii  nidcràfaire  frihflifier  ce«  dons» 
&  ne  pas  éteindre  les  efprirs  5  par 
là  Hne  aine  tournés  vers  Dieu  par- 
vient à  une  g^dinét  connoifTance 
des  œuvres  de  Dieu.  Ces  Con-t 
verfations  fervent  au/Ti  à  nous  ren- 
dre plus  habiles  à  raifonner  avec 
nos  Paroifîlen^,  &  avec  les  Ad- 
rerfaires  ;  ce  que  les  Enfans 
Dieu  font  d'une  manière  bien  dif- 
férente ,  de  celle  qu'employé  la 
Chair  &  le  Sanî^;  dans  les  alfaires 
de  ce  monde  ,  pour  avoir  gain  de. 
caufe  contre  leurs  Adverfaires. 

CHAPITRE  XL. 

Ccijrment   on  doit    méditer  Us 
Sermons . 

QT/and  on  veut  prêcher ,  on  Ifc 
^ordinairement  des  Sermons 
écrits,  ou  des  Commentaires,  ^ 
l'on  en  tire  des  lambeaux,  autant 
qu'il  en  faut  pour  remplir  Ton 
heure  j  &  Ton  ne  fe  met  pas  beau- 
co'jp  en  peine,  fi  cela  eft  propre 
dans  ce  Siècle  pour  édifier  les  Egh- 
fes  ou  non.  Ccft  là  la  rai  Ton 
pourquoi  Ton  produit  fi  peu  de 
fiuit  qui  foie  de  durée  devant  Dieuu 
V  5^  C'fft 


466      Acîes  du  Sjncde 

Ceft  pourquoi  nous  trouvons  né- 
celTaire  de  nous  exhorter  les  uns 
les  autres  ,  &  nous  aider  Tun  l'au- 
tre de  bon  cœur  j  à  ce  que  chacun 
médire  lui  même  l'Ecriture  ,  qu'il 
en  tire  lui-même  de  lufage,  pour 
h  propre  corr€<îlion ,  comme  il  a 
été  dit  5  &  qu'après  cela  il  réflé- 
chilTe  fur  l'état  de  fon  Egl ife ,  fur 
lequel  il  doit  diriger  fes  travaux, 
&  quelquefois  il  ne  dira  pas  la 
diziéme  partie  des  chofes,  que  Dieu 
lui  aura  communiquées  fur  ce  texte 
de  l'Ecriture.  Car  tout  fe  doit 
faire  pour  l'édification  de  l'Eglife, 
&  il  ne  s'agit  pas  là  d'étaler  fk 
Icience  ou  de  montrer  fon  efprit  ; 
puifque  nous  devons  chercher  uni- 
quement &  de  tout  nôtre  cœur  la 
gloire  de  Dieu  dans  le  fàlut  de  l'E- 
glife par  Jesus-Christ,  & 
rien  de  plus. 

Ainfi  il  n*eft  pas  néceflaire  de 
prefcrire  de  longues  régies  ,  fur  ce 
fujst.  La  vérité  a  fon  fîege  dans  | 
les  ames  ,  &  l'amour  de  Dieu  en  | 
lègle  la  diftribution.  De  cette  ma-  j 
niére  on  n'épargnera  aucun  pécheur,  i 
on  n'ofFenfera  pourtant  perfonnc  i 
par  des  cenfures  aigres  fîins  caufs  >  ■ 

k  1 


de  Berne,  '467 

le  Peuple  qui  écoute  fera  édifié; 
ceux  qui  font  de  dehors  feront  re- 
commandez à  Dieu  j  &c  Ton  n*ex- 
ciîera  pas  tant  de  querelles,  com- 
me cela  fe  fait  mal  -  heureufemcnt 
aujourd'hui  :  dequoi  il  a  été  parlé 
ci -devant  plus  au  long.  Dieu 
veuille  remettre  les  chofes  en  meil- 
leur état  dans  nous  tous.  Amen. 

CHAPITRE  XLL 
i.  I. 

Ou  il  faut  lire  modérément  les 
Livres  profanes. 

peut  bien  cependant  lire  aufîl 
des  Livres  profanes,  comme  par 
exemple  desHiftoires,pourvû  qu'on 
le  faffe  avec  difcernement  avec 
jugement;  &  dans  la  viië  d'y  exer- 
cer Amplement  nôtre  raifon,  &  d'y 
aprendrc  à  connoîrrc  la  rature  des 
affaires  de  ce  monde;  mais  non  d'y 
chercher  ce  qui  peut  fcrvir  à  nôtre 
converfion ,  ni  à   l'édification  de 
l'Eglife.  Ainfi  il  faut  que  toutes  nos 
inftrutîlions  ♦  nos  exhortations,  nos 
cenfures  &  nos  corrcflions  ,  foicnt 
tirées  de  rEfprit  dejLsus-  Christ, 
&  de  rEcdture  S^^-  quoiqu'il  pu  ilFa 
V  6  quel* 


4éS      Acics  du  Sjnock 

c];!elquefois  arriver  ,  qu'on  poui- 
loit  dans  un  Sermon  raporter  en 
peu  de  mots  une  HiPcoire  Payenne, 
ce  que  nous  ne  défendons  pas  j 
Nous  elpérons  pourtant  que  cha- 
cun fera  réflexion  ,  qu'il  eft  Dif- 
penfareur  des Myftères  de  Je  sus- 
Christ,  &  Serviteur  d«  fon  Ef- 
prit  5  &  qu'il  doit  faire  plus  d'u* 
fage  des  Ecrits  de  rEfprit  de  Dieu, 
que  d«  ceux  des  Hommes  r  quoi- 
que helas!  les  Minières  de  la  Cam-» 
pagne  ne  font  pas  trop  attachez  à 
l'étude  3  cependant  ce  n'eft  pas  jfàns 
caufe  que  nous  avons  placé  ici  c^.£ 
avertiilement, 

S.  ir. 

1    Comment  on  doit  prêcher. 

On  doit  prêcher  avec  beaucoup 
de  dévotion,  &  avec  une  Ch^ 
rite  ardente  pour  nos  Auditeurs  , 
pour  les  corriger  &  les  édifier  en 
Dieu  :  Des  Sermons  de  cette  forts 
font  impreflion  fur  les  gens  di 
bien.  Car  c'eft  ainfi  que  les  bre^ 
bis  de  Jesus-Christ  entendent  la 
voix  de  leur  Seigneur  ,  le  vérita- 
ble Pafteur  y  elles  le  reconnoiffent  s 
elles  k  fuiveat;  Au  li§u  que  des 

mvcc' 


de  Berne.  469^ 

*^veé^ive5  gicflléres  ne  font  que 
remplir  d'aigreur  6c  de  trouble  les 
efprits  paifibics,  qui  nu  forrir  d'un 
tel  Sermon;  fe  trouvent  pleins  d'en- 
vie 6-c  de  haine  j  féditieux  &:  por* 
tez  à  msl-faire  5  Quoiqu'en  par- 
lant de  la  forte  5  nous  n'aprou- 
voîis  nullement i  raais  au  contraire^ 
nous  condamnons  abfolument  la 
eond'jite  de  quelques  lâches  efpritSj 
qui  ne  veulent  pas  cenfurer  com- 
me il  faut  ^  &  fc  contentent  ds 
tourner  leurs  difcours  d'une  manié* 
re  propre  à  fc  faire  écouter  avec 
plâifir  5  plutôt  qu'à  édi/îcr.  Ces 
gens -là  devroient  bien  pefer  ces 
Paroles  de  S.  Paul:  fi  je  voulois 
fUire  aux  Hommes^  je  ne  ferois  pits 
Serviteur  de  J  e  s  u  s  -C  h  k  i  s  t. 

CHAPITRE  XLII. 

Qu^on  doit  prêcher  dans  tous  les 
j ornes  frefcrlts^ 

T  L.  EE.  Nos  Souverains  Sei- 
gneurs, ayant  ordonné  dans 
leurs  Edits  de  Réformation,  à  tous 
les  Miniftrcs  >  de  prêcher  le  Di- 
manche ,  le  Lundi ,  le  Mecredi  6c 
fc  Vendredi;  Scnous*  nous  en  ètaiït 

excufcz 


47 O      Actes  du  Synode 

excufer  parce  que  nous  ne  pou- 
vions pas  avoir  des  Auditeurs  j  il 
a  été  trouvé  bon  ,  que  chacun  doit 
s'efforcer  à  prêcher  dans  ces  quatre 
jours  autant  qu'il  lui  fera  pofllbls, 
quand  mêirie  il  n'auroit  qu'un  Au- 
diteur ou  deux.  Le  Seigneur  ne 
s'eft  point  fait  de  peine  de  s'en- 
tretenir avec  une  feule  Femme  Sa- 
maritaine :  pourquoi  un  Miniftre 
de  Jes  us-Christ  fe  feroit- 
il  de  la  peine  de  parler  de  fon 
Seigneur  ,  &  pour  fa  gloire ,  mê- 
me avec  les  perfonnes  du  plus  bas 
rang  du  Monde?  Car  par  devers 
Dieu  il  n'y  a  point  d'acception  de 
perfonnes  :  &  une  Ame  fidèle  vaut 
plus  devant  Dieu  ,  que  le  Monde 
entier.  On  pourroit  aufTi  faire  ces 
fortes  de  Difcours  ,  fur  femaine  > 
dans  le  milieu  du  Temple  ,  fans 
monter  en  Chaire  ,  &  de  la  ma- 
nière la  plus  fimple.  Et  fi  nous 
fommes  fi  promts  a  nous  en  difpen* 
ferc'ell  une  preuve  que  nous  avons 
bien  peu  à  cœur  la  gloire  de  Dieu, 
ou  bien  que  nous  fa^fons  plus  d'at- 
tention au  plus  grand  nombre  > 
qu'au  petit  troupeau  5  &  aux  gens 
de  bien  3  à  qui  nous  devrions  fou- 

haitec 


de  Berne.  471 

hairer  perpétutllement  d'être  uti- 
les. Il  y  a  cependant  plufieurs 
frères  5  qui  fe  font  un  plaifir  de 
prêcher  tous  les  jours»  C'eft  une 
diligence  que  nous  louons  ,  comme 
une  marque  d'un  bon  zèle. 
.  Il  y  a  aufTi  plufieurs  Miniftres, 
qui  ont  plus  d'un  Village  dans 
leur  ParoifTe.  Il  feroit  bien  né- 
ceflaire  qu'on  y  prêchât  au  pauvre 
Peuple  dans  les  autres  Villages,  fur 
femainc  ;  &  qu  on  fît  quelquefois 
deux  Sermons  le  Dimanche.  Il 
faudra  examiner  cette  affaire  dans 
les  ClalTes  ;  parce  que  la  fituatioa 
des  lieux  n'eft  pas  la  même  par 
tout.  En  attendant ,  perfonne  ne 
doit  empêcher  un  Pafteur  diligent, 
d'exercer  fon  emploi  j  car  enfin  int 
truire  Ôc  ramener  ceux  qui  s'éga- 
rent >  eft  un  devoir  de  chaque 
Chrétien  >  mais  particulièrement 
des  Pafteurs.  Et  nous  favons  pour 
certain  ,  quel  fruit  il  en  revient, 
de  parler  de  coeur  &  avec  prières 
à  un  feul  Homm.e  de  bien ,  &  fim- 
ple  5  &:  de  lui  montrer  fon  faluc 
par  Jesus-Christ  :  au  lieu  qu'au- 
trement un  tel  Homme  périt  mi- 
ferablement  dans  fon  ignorance  > 

& 


472*^      A^es  dti  Srdode 

&:  (on  Sang  fera  redemandé  dey 
mains  du  PaReur  ,  qui  comme  un 
fawx  Pafteurnaura  pas  bandé  U' 
brébis  malade. 

CHAPITRE  XLIir. 

j^//7  faut  parler  aux  Auditeur r 
en  particulier, 

/^Omme  nous  femmes  oblrgfz  de 
ne  rien  omettre  ,  pour  amener 
nôtre  Peuple  à  Dieu,  il  ne  fufiFit 
pas  de  prêcher  en  public  dans  TE* 
glife  ParoifTiale  5  ou  dans  tous  les 
Villages,  félon  Tufage  établi  ou 
prefcrit ,  nous  devons  auffi  aller 
trouver  nos  Auditeurs  de  Maifon 
en  Maifon  ,  &  les  inftruire  dilii 
gemment ,  &  en  particulier  >  au- 
tant qu'il  eft  pofTjble  >  de  la  vo}  e 
du  Safe  5  ôc  leur  prêcher  la  rc- 
penrance>  comme  nos  PrédécefTeurs 
les  Apôtres  ont  fai-r.  Car  les  in(î. 
trudions  particulières  pénétrent 
beaucoup  plus  dans  les  Cœurs>quc 
les  difcours  qu'on  adrefie  en  publia 
à  tout  le  Monde, 


CHA- 


de  Berne,  473 
CHAPITRE  XLIV. 

De   la  Vifite   des  malades, 

î  A  principale  partie  de  nôtre  em- 
ploi ,  c  eft  de  confoier  les  affli- 
gez. Ceft  pourquoi  nous  les PaC 
teurs ,  foit  des  Villes  ^  foit  de  la 
Campagne  ,  nous  devons  être  par- 
ticulièrement foigneux  6c  diligens 
à  vifiter  les  malades  ,  pendant 
qu'ils  ont  encore  l'ufage  de  la  rai- 
fon  &  lefprit  libre ,  &  n attendre 
pas  qu'ils  foient  à  rexttêmité. 

Et  c'efl:  ici  Tordre  qu'il  faut  ob- 
ferver  dans  les  inftru^ions  qu  oa 
adrefle  aux  malades  :  On  dok  com- 
mencer par  les  faire  fouvenif  de  la 
grâce  de  Dieu  en  J  e  s  u  s-C  h  ri  s  t, 
qui  fe  tient  %c  fe  veut  tenir  près 
des  fiens  dans  leurs  affligions  ;  & 
leur  repréfenrer,  comment  les  vrais 
Chrétiens  attendent  avec  foin  lave- 
nue  de  leur  Seigneur  ,  6c  de  dé* 
loger  ou  d'être  appeliez  à  fortirdc 
ce  Monde.  Que  s'ils  ne  trou- 
vent pas  cette  dirpofition  en  eux, 
il  faut  pour  les  confoier,  les  con- 
duire à  la  repenrance,  puifque  par 
là  ils  apprennent  à  reconnoîrre  leur 
amour  propre  &  k  foibleiLi  de 

leut. 


474        AEt es  du  Synode 

leur  foi  ,  &  qu'ils  prient  le  Sei- 
gneur  de  leur  augmenter  la  foi , 
afin  que  nous  ,  qui  devons  être 
les  témoins  de  la  vérité  de  Dieu> 
ne  les  jettions  pas  dans  une  fâufle 
confiance. 

Enfuite  il  faut  exhorter  les  At 
fîftans,  à  prendre  occafion  des  dou- 
leurs &  du  danger  du  malade  , 
pour  penfer  aulTi  à  leur  propre 
fragilité  ,  &  à  craindre  auffi  Dieu 
tout  de  bon  :  puisque  toute  con- 
fiance charnelle  efl  absolument  vaine 
&  mal-affurée  ,  Qu'ils  doivent  con- 
fiderer  ,  qu'elle  confolation  c'eft  , 
dans  CCS  affli<flions  ,  d  avoir  un 
Dieu  mifericordieux  ,  &  J.  Chrift 
le  fils  de  Dieu,  pour  fon  Média- 
teur 6c  fon  Avocat  ;  avantage  que 
nous  obtenons  par  la  repentance 
&  ramcndement  de  la  vie  >  &  par 
une  véritable  foi  en  J.  Chrift  : 
Qu'il  y  a  eu  bien  des  gens,  qui 
ont  été  furpris  par  la  mort,  avant 
que  d'être  bien  convertis  ,  s'étans 
endormis  avec  les  Vierges  folles, 
dans  l'attente  de  TEpoux  &c. 

Après  cela  il  faut  fs  mettre  à 
genoux  ,  &  prier  pour  le  malade, 
qu'il  plaife  au  Seigneur  de  Ï2i^\i'' 

ter 


de  Berne.         47  J 

ter  par  fa  grâce  dans  fon  affligions 
&  demander  en  même  tcms  & 
avec  ardeur  au  Seigneur  >  qu'il 
nous  accorde  le  fecours  perpétuel 
de  fa  grâce  dans  les  maux  qui  nous 
arrivent  prérentement>  &dansceux 
qui  nous  doivent  arriver. 

Il  efl  aufli  utile  de  lire  quelques 
endroits  de  S,  Paul ,  ou  des  Evan- 
geljftes  ,  ou  des  autres  Apôtres  , 
qui  traitent  de  Ja  paflion  &  de  la 
rerarre<n:ion  de  J.  Chrift  j  &  de 
les  expliquer  d'tinc  manière  vive 

touchante  &c. 

Cette  efpèce  a  exercice  eft  fou- 
vent  plus  utile  que  dix  Sermons, 
qui  fe  font  dans  l'Eglife^  fans  que 
les  Auditeurs  y  prêtent  beaucoup 
d'attention  j  au  lieu  qu'ici  l'afflic- 
tion les  touche  tous  de  près  5  & 
qu'ils  défirent  tous  la  confolationj 
qu'on  ne  trouve  nulle  part ,  plus 
certainement ,  que  dans  le  Seigneur 
Jefus-Chrift ,  après  qu'en  a  perdu 
ï'erpérance  de  tout  fecours  terrien, 

Jufques  ici  nous  avons  parlé  de 
l'Emploi  des  Pafteurs  ,  comment 
ils  doivent  6  en  aquiter, 


CHA- 


47 6       Acîes  du  Synode 


CHAPITRE  XLV. 


elui  qui  pratique  k  Comman- 


dement, &;quirenfeigne,  fera 
appelle  grand  dans  le  Royaume 
des  Cieux  5  car  ce  ne  font  pas 
ceux  qui  écoutent  la  Loi  >  qui  font 
tenus  pour  juftcs ,  mais  ceux  qui 
li  gardent.  On  voit  le  contraire 
chez  les  Pharifiens  ,  qui  favent 
fort  bien  parler  de  Moyfe  >  &  qui 
chargent  leurs  Eglifes  de  gros  far- 
deaux 3  mais  ils  n'y  touchent  pas 
du  plus  petit  doigt.  Loin  denous 
une  telle  conduite,  de  Nous,  dis- 
je,  qui  fommes  les  Succeffeurs  des 
Apôtres  ■  Au  contraire  ,  puisque 
nous  prêchons  la  Croix  de  J. 
Chrift ,  nous  devons  porter  avec 
nous  en  nôtre  Corps  mortel  ,  la 
mort  de  J.  Chrift  3  6c  prouver 
efficacement  par  une  vie  célefte , 
la  réfurred^ion  de  J.  Chrift ,  à  la^ 
quelle  nous  devons  rendre  témoi- 
gnage» mais  c'eft  ce  que  nous  ne  fai- 


De  U  conduite  que  les  Minif- 
très  doivent  tenir  5  Joit  a 
H égard  deux  mhnes  5  foit  - 
dans  leur  domefiique. 


fons 


de  Berne»  477 

fons  pas  >  fi  nous  attachons  nos 
cœurs  a  ce  monde  ,  comme  font 
les  autres  ,  qui  n'ont  que  des  af- 
fedions  charnelles.  Nous  devons 
avoir  nôtre  domicile  dans  le  Ciel, 
comme  gens  qui  font  relTufcitez 
avec  Jefus-Chrift:  Ceft  par-là  que 
nous  excitons  nos  Eglifes  à  re- 
chercher avec  foin  hs  chofes  qui 
font  véritables j  raifonnables,  ju^es^  pu^ 
res  i  aimables  &  lotiablcs  ,  ce  qu'il 
faut  ^a'elles  appr-ennent  de  nous  3 
quelles  nous  entendent  dire  ,  & 
qu'elles  voyent  en  nous  ;  Ce  fera 
à  ce  prix  -  là  que  nous  paroîtrons 
avec  joye  devant  le  Siège  Judicial 
de  Jefus-Chrift  nôtre  Seigneur  :  &  - 
que  nous  remporterons  dans  fa 
journée  la  louange  d'avoir  bien 
rempli  nôtre  emploi.  C  eft  à  quoi 
TApôtre  S.  Paul  avoit  bien  penie  , 
lorlque  marquant  à  fon  Difciple 
Timothée  les  qu^Jirés  de  ceux  qu'il 
devoit  choifir  pourEvêqucs,  c'eft- 
à-dire  Paftc:urs5  il  lui  dit: 

Il  faut  que  C Evoque  /oit  irré^rc^ 
henfible  ,  mari  cCune  feule  Femme ^fo-» 
bre  y  tempérant  ,  grave  ,  hofpitalier, 
propre  a  enfeigv.er ,  nuileuient  adonné 
au  vin }  ni  violent ,  ni  attaché  à  un 

gain 


478  Acles  du  Synode 
gain  fordide  >  mais  qu  'il  fok  doux  , 
éloigné  de  toute  conteftation  ,  exempt 
d'avarice  ^  quil  fâche  bien  gouverner 
fa  propre  famil.e ,  qu  tl  ait  des  En* 
fans  obeijfans ,  &  dont  les  moeurs  foient 
tout  a  fait  honnêtes. 

Nous  allons  réfléchir  fur  quel- 
cjues-unes  de  ces  cxpreflions,  8c  les 
examiner  ,  laiflant  à  chacun  à  faire 
fes  réflexions  plus  au  long  fur  les 
autres. 

Irreprêhenfible  :  Notre  conduite 
doit  être  de  gens  d'honneur  j  dans 
tout  ce  que  nous  faifons,  ou  que 
nous  ne  faifons  pas  ^  dans  nos  ac- 
tions &  nos  paroles;  en  un  mot> 
dans  tout  ce  qui  peut  être  de  bon 
exemple.  Ainfi  nous  trouvons  bon 
de  ne  pas  méprifer  nôtre  Troupeau, 
{quoique  compofé  de  gens  du  Peuple,) 
mais  cependant,  qu'il  faut  être  ha- 
billé honorablement,  3c  qu'il  y  ait 
quelque  différence  dans  Thabille- 
ment  entre  un  valet  de  boucher 
&  un  Miniftre  de  la  Parole  de 
Dieù:  cir  du  refte^négliger  la  bicn- 
féance  à  cet  egardj  c'eft  la  marque 
d'un  efprit  léger.  Nos  Seigneurs 
défendent  les  habits  découpez 
mais  fi  les'  Pafteurs  ,  qui  doivent 


de  Berne.  479 

être  en  exemple  >  portent  les  ha- 
bits les  plus  immodeftes  qu'il  foit 
pofllble  d'avoirjComment  cela  peut- 
il  être  irrépréhenf^ble  ?  Ce  n'eft 
pas  pourtant  à  dire ,  que  nous 
approuvions  l'aifcdaiion  pharifaï- 
quc  des  hypocrites  >  mai^;  il  faut 
garder  foigneufernenc  un  jufte  mi- 
lieu. 

M  An  d'une  feule  Femme.  Il  veut 
dcfigner  par  là  une  ame  chafte  &c 
pure,  foit  dans  le  mariage  ou  non. 
Car  il  a  égard  à  l'ufage  des  Juifs> 
qui  avoient  alors  plus  d'une  Fem- 
me 5  ce  qui  avoit  l'apparence  d'u- 
ne ame  impudique  >  &  étoit  en 
même  tems  accompagné  de  beau- 
coup de  peine  8c  d'embarras  :  Car 
ceux  qui  font  mariez  ont  beaucoup 
daffli^'ion  en  U  chair.  Cependant 
S.  Paul  ne  rcfufc  pas  une  Femme 
à  l'Evêque  :  mais  ce  qu'il  dit  là 
dans  ces  dernières  paroles,  fe  rap- 
porte à  1  honneur  de  la  famille  , 
ou  aux  foins  des  affaires  de  ce 
Monde  ,  ou  à  ceux  qu'il  faut  k 
donner  pour  plaire  à  une  Femme> 
s'il  a  une  Sœur,  qui  attende  avec 
lui  l'avènement  de  nôtre  Seigneur 
J  E  S  u  s  -  C  II R  I  s  T,  Or  il  faut  qu'H 

foit 


480     Actes  du  Synode 

foie  mari  d'une  feule  Femme,  afin 
qu*il  ait  une  conduite  chafle,  E:  à 
cet  égard  nous  ne  favons  rien  les 
uns  des  autres  qui  foit  à  repren- 
dre >  &  quant  à  la  conduite  ex- 
térieure il  ny  a  aucun  défaut  par- 
mi nous. 

Mais  nous  devons  confîdéreravcc 
grand  foin ,  combien  il  eft  blâma- 
ble &  malféant  à  nous,  de  tenir  des 
Hifcours  mal  honnêtes,  ou  de  bouf- 
fonner  ,  ou  de  plaifanter>  ou  d'ap- 
prouver par  nôtre  filence  ou  autre- 
ment ,  que  d'autres  en  nôtre  pré- 
fence  fe  divertiffcnt  à  parler  de  for- 
nication ,  d  adultère ,  ou  de  galan- 
teries criminelles.  Car  c'eil  con- 
fentir  au  mal>  ce  qui  eft  pire  que 
i'Ade  en  lui  même.  Comment  pou- 
vons nous  faire  écouter  la  S^^-  Pa- 
role avec  refpe(îl  5  fi  nous  tenons 
quelquefois  de  ces  difcours  mal- 
honnêtes ou  de  mauvaife  plaifante- 
îie  j  ou  fi  nous  les  écoutons  >  en 
riant  5  de  la  bouche  des  autres  ? 

Nous  devons  erre  Sobres,  Car 
quelle  feroit  la  dignité  de  nôtre 
Cara£lère>  fi  Ton  nous  voyoit  dans 
les  Tavernes  boire  avec  de  la  Ca- 
naille &  à  des  heures  indues  ; 

comme 


de  Berne.  4S  f 

comme  fi  notre  emploi  ne  confit- 
toit  qu'à  boire  &  à  manger. 

Mais  nous  n*avons  pas  deflçin 
de  pouffer  plus  loin  nos  réflexions 
(iir  ce  fujet.  Quand  la  Croix  de 
Jes  us-Christ  eft  gravée  dans 
un  cœur  5  elle  remédie  bien-tôt  à 
toute  autre  chofe  ,  qui  doit  erre 
le  principal  objet  de  nos  foins  v 
En  attendant  il  faut  s'abftenir  (bi- 
gneufèment  de  tous  les  vices 
grofliers  »  jufqu  à-ce  que  nous  puit 
fions  nous  avancer  à  un  plus  haut 
degré  de  vie  fpirituelle ,  qui  porte 
avec  foi  toutes  les  Vertus  >  ce  qui 
eft  le  but  auquel  fe  rapporte  tout 
'  ce  Synode  5  Dieu  nous  faffe  la 
grâce  d'en  obferver  les  Réglemens. 
Amen  ! 

Or  afin  que  nous  puilTions  per- 
féverer  dans  cet  exercice  Chrétien, 
il  faut  toutes  les  années,  le  pré- 
micr  de  May,  convoquer  un  Sy- 
node de  tous  les  Mini/Ires  de  la 
Capitale  &  du  Canton ,  &  y  ra- 
fraichir  les  règlemens  contenus 
dans  ces  A(ftcs-ci,  De  plus,  nous 
voulons  avoir  toutes  les  années 
deux  Affemblécs  de  Claffes ,  au  cas 
que  LL.  EE.  l'approuvent  j  &:  y 
Tm,  IF.  X  trai- 


482      Actes  du  Synode 

traiter  de  la  même  manière ,  des 
chofes  qui  fervent  à  nôtre  édifica- 
tion ,  &  à  celle  de  nos  Eglifes  ; 
fur  quoi  nous  confulterons  LL.  EE. 
&  prendrons  une  dernière  refolu- 
tion. 

Pour  conclufionjnous  prions  Dieui 
qu  il  lui  plaife  de  nous  conferver, 
&  de  nous  augmenter  ce  qu'il  nous 
a  communiqué  dans  ces  fîx  jours 
avec  tant  de  bonté  :  afin  que  le 
refte  de  notre  vie  foit  entièrement 
employé  à  fa  gloire  >  &  à  1  amen- 
dement de  nos  pauvres  Eglifes. 

Ce  Synode  a  commencé  le  p.  Jan» 
v'ur  i  &  a  fini  le  14,  de  cette  annh 

Fm  des  Actes  duSiNODiè, 
de  BERNE, 


LEDIT 


Edit  de  LL,  EE.de  Berne,  4g» 

I.  Edit  de  LL.  EE.  de  Berne, 
qui  confirme  les  Réglemens 
de  ce  Synode. 

Nous  TAvoyer,  Petit  &  Grand 
Confeil  9  nommez  les  Deux  Cents 
des  Bourgeois  de  Berne  ,  A  tous  & 
un  chacun  de  nos  Pafteurs  &  Minif- 
très  y  qui  habitent  dans  nos  Terres 
&  Pays  ,  &  qui  pré  fi  dent  fur  Nous 
&  fur  nos  Sujets  par  le  Minificre 
de  la  Parole  de  Dieu  ;  Nôtre  amia* 
ble  vSalutation  prémi/ê ,  avec  toute 
forte  de  bien  ^  &  Vous  faifons  fa^ 
voir  par  les  Préfentes: 

«  Après  que  nous  avons  rejet- 
té  le  Papifme  avec  fa  faufTe  con- 
fiance  de  fa  faufle  Doiftrin^  >  il 
5j  y  a  maintenant  quatre  ans  >  Se 
yy  que  nous  avons  embwfsé  le  S. 
^>  Evangile  pour  nous  6c  nos  Sujets, 
>j  tant  de  la  Capitale  que  du  Can- 
yy  ton  ,  après  la  Difpute  que  nous 
>j  fimes  faire  alors  5  &  que  nous  a- 
3,  vons  juré  à  main  levée  3  de  cœur 
yy  &  de  bouche  >  que  nous  obferve- 
3i  rions  avec  le  fecours  de  Dieu  ^ 
y:>  dans  la   Dodrine  &  dans  la 
»a  Conduite 3  tout  comme  les  au- 
X  z  très 


'4'84    Editde  LL.  EE. 

n  très  Ordonnances  5  8c  les  Loix 
»  Civiles  du  Pays  ,  Ce  qui  ne  fe 

peut  pas  bien  exécuter  ccnftam- 
5>  ment  5  à  moins  que  Vous  les 
Minières  des  Eglifes  ,  fembLi- 
^>  blcs  à  une  bonne  fource  toû- 
j>  jours  abondante  en  eau  pure  & 
33  faine  5  m  préfcnriez  au  peu- 
5,  pie,  qui  a  foif  de  la  juftice ,  ujie 
>,  Do(fbrine  faine  &  fpiiituelle,  & 
3,  le  modèle  d'une  vie  édiiiante  8c 
»  bien  réglée  :  Pour  en  venir  a 
yj  bout  ,  Nous  avons  joint  à  nos 

Edits  de.  Réformation  toutes  for- 
»  tes  d'Ordonnances  ,  concernant 
»  Vous  autres  les  Pafteurs  ;  & 
yy  nous  les  avons  fait  propofer  en- 
5>core  à  vos  Synodes  &  à  vosAf- 
yy  femblées.  Cependant  nous  trou- 
53  vons  encore  en  vous  bien  d-es  dé- 
»  fauts  confiderablcs  >  à  l'égard  de 
5,  la  Doflrine  &  de  la  Vie  :  ies- 
5>  quels  mettent  obftacle  à  l'avan- 
ie cernent  de  la  gloire  de  Dieu  9 
^5  &  de  la  probité  &  des  bonnes 
5,  mœurs  parmi  nos  Sujets;  les 
»  corrompent  &  empirent  leur  é- 
79  tat  ,  attirent  fur  nous&  fuc 
55  le  peuple  la  Colère  de  Dieu  :  & 
5>par  là  encore  le  S.  Evangile  eft 

bkf- 


de  Berne i  4^5 

3^  bkfphemé  ,  pour  l'Amour  de 
»  nous,  par  ceux  de  dehors  :  & 
il  ne  faut  pa3  s'en  étonner,  c'eft 
^  parce  qu'ils  ne  découvrent  pas 
»  beaucoup  dans  nos  Sujets  ,  qui 
yi  entendentl'Evangilej  le  Sceau  de 
>5  la  Vérité  ,  qui  eft  une  vie  biea 
réglée  ,  &  une  folide  piété, 
C'eft  ce  que  nous  avons  pris  , 
»  avec  raifon  ,  en  confideration  , 
i>  pour  y  réfléchir  mûrement  : 
>,  D'autant  que  nous  efpérions  de 
3^  trouver  dans  Vous  les  Pafteurs, 
n  8c  dans  le  commun  peuple  j 
y)  beaucoup  plus  de  vive  crainte 
>5  de  Cheu ,  d'amendement  de  vie* 
>5  de  Vertus  &:  de  bonnes  mœurs> 
géiiéralement  de  toutes  fortes 
yy  de  bonnes  qualitez  ,  que  nous 
yj  n'en  avons  trouvé  jufqu  à  pré^ 
5,  fent,  à  nôtre  grand  regret  :  & 
T>  qu'il  n'en  paroit  fenfiblemen: , 
y9  en  particulier  depuis  nos  derniers 
j>  troubles  j  où  nous  avons  vû 
3,  manifeflement  ,  (quand  nous  ne 
^>  l'aurions  pas  déjà  fii  j  )  quels 
j,  défordrcs,  combien  de  mau- 
yy  vaifes  mœurs  la  divifion  a  fait 
>,  éclorre  ,  &  combien  peu  de 
yi  ChrifUanifme  il  y  a  encore  parra 
X  g  nous 


48^  ^^^^  de  LL,  ËE,  de  Berne  &Cn 
»  nous  :  Car,  nonobftantnos  E- 
>j  dits  &  nos  Ordonnances  ,  toutes 
»  forces  de  vices  ont  éclaté  par- 
mi  plufieurs  de  nos  Sujets  des 
Pays  Allemand  &  Romand. 
>3  A  ces  Caufcs ,  commençant  par 
»  nous-mêmes  ?  Nous  nous  fom- 
>j  mes  fait  de  férieufes  remontran- 
5,  ces  les  uns  aux  autres Nous 
>j  nous  femmes  examinez  exac- 
tement  6c  avec  grand  foin,  de 
que]  efprit  chacun  de  nous  eft 
;»  animé  envers  le  DieuTout-puif. 
>,  fant  >  &  envers  fon  S.  Evangi- 
5,16,  favoir,  fi  dans  le  fond,  il  a 
5>  plus  à  cœur  la  confervation  de 
5,  fa  vie  ,  de  fon  honneur  &  de 
fon  bien  >  que  la  polTe/îion  de 
la  vie  célcfte  &  éternelle,  qui 
„  nous  a  été  acquife  par  J.  Chriflj 
qui  nous  cft  annoncée  par  fes 
„  Serviteurs  >  &  qui  eft  communi- 
quée  en  quelque  mefurc  aux  ames 
fidèles  par  le  S.   Efprit  :  Là- 
dcffus  >  nonobftant  les  caUmi- 
„tez  de  CCS  tems-ci,  par  lefquel- 
yy  les  des  Confciences  foibles  ont 
été  fort  affligées  &  ébranlées  s 
>,  la  bonté  paternelle  de  Dieu  par 
J.  Chrifta  (gloire  lui  en  foit  reu- 


qui  confirme  les  ACles  du  Synode,  487 

5,  duë  !  )  n'a  pas  permis  que  nous 
,,foyons  tombez  jufqu'au  point  j 
j,  de  concevoir  quelque  dégoût  pour 
3,  fon  S.  Nom  &  pour  Tes  promeA 
fes  véritables ,  à  i'occafion  de 
,5  cette  Croix  accablante  qu'il  a 
5,  fait  venir  fur  nous  :  Mais  au  con- 
3>  traire  nous  nous  femmes  liez  8c 
j>  engagez  ,  comme  de  nouveau  y 
j,  à  maintenir  le  S.  Evangile,  à  le- 
5,  gard  de  la  Doflrine       a  1  e- 
gard  de  la  Conduite,  parmi  nous 
3,  &  parmi  nos  Sujets,  autant  que 
3,  nôtre  Autorité  peut  s'étendre,  6c 
>,  que  le   Seigneur  nous  en  fera 
j)  la  grâce  :  Ce  que  les  Députez 
de  tous  nos  Sujets  ,  qui  ont  pa- 
5,  ru  devant  nous  ,  il  n'y  a  que  peu 
,>  de  jours  3  ontauffi  fouhaité  que 
,3  nous  fi/Tions,  &   là-dcffus,  ils 
„  ont  eux  -  mêmes  volontairenienc 
3,  remis  en  force  chez  eux  nos 
3,  Edits  précédens  de  Réformation» 
3,  C'eft  pourquoi,  comme  auHi  en 
,partie  pour  remédier  au  dégoût  des 
, autres,  nous  avons  été  occafionnez 
,de  convoquer  un  Synode  de  vous 
>tous,  qui  êtes  nos  Miniflrcs  tc 
,  Pafteurs  ,  ainfi  qu'il  a  été  fait  : 
3  Ayant  donc  été  cfumblez  ici  à 
X  4  Berne 


4S8    Edît  de  LL.  EU,  de  Ber»e, 
5, Berne  I3  5?.  Janvier  delà  pre- 
„  fente  anhée  1532.  vous  vous  êtes 

exhortez  l'un  l'autre  férieufementj 
33  au  delà  de  ce  que  nous  aurions 
,y  penfé  &  efperé ,  3c  même  au  de- 
55  là  de  ce  que  vous  auriez  crû  vous 

mêmes,  de  la  manière  qu'il  eft  ex- 
,5  primé  ci-après  de  mot  à  mot  y  & 
,5  vous  avez  reçu  cette  exhortation 
55  avec  une  grande  unanimité,  &  d« 
,5  très  bon  cœur  :  à  quoi  Dieu  a 
53  tourné  vos  cœurs  intérieurement 

en  fa  grâce  ,  comme  nous  efpé- 
^ronsjôc  y  a  contribué  au  dehors 
35  par  un  de  fes  fidèles  Minières  3c 
5,  Serviteurs.  Veuille  le  Seigneur 
55  Ini-meme  accomplir  cette  ficnne 
5,  œuvre  en  Vous  2<:  en  Nous  ,  de 
53  dans  tous  les  fidèles^  jufqu'à  k 
»  fin  l  Amen. 

o  Là-deffus  vous  avez  5  (Vous 
3j  nos  Pafleurs  &  Miniflrcs ,  )  remis 
5,  ces  A(fles  de  vôtre  AlTeniblée  3  à 
„  Nous  l'Avoyer  >  Petit  Grand 

ConfeiL  en  nous  priant 3  d'en  ea- 
^,  tendre  la  Lecflure,  &  de  les  con- 

firmer,  U.  de  les  munir  de  nô:rs 
53  Autorité  3  au  cas  que  nous  les  ap- 
53  prouvions  :  de  les  oblerver  nojs 
a,  mêmes  .  en  ce  qui  nous  regarde, 

Se 


i^ui  covjirme  les  Acicj  du  Synode,  48^ 

9»  &c  de  vous  ordonner  de  les  ob^ 
J5  ferver:  afin   que  cette  grâce  & 

ce  don  de  Dieu  >  c'eft-à-dire  >  vos 
>j  réâexions  6c  vos  rsmontrances  fi. 
5,  Chrétiennes  ,  ne  tombent  pas 
yy  dans  l'oubli  par  négligence  >  ou 
j>  dans  le  mépris  >  comme  il  arri- 
3>  ve  aifément  3  fi  5  dans  une  affem- 
55  blée  générale  3  des  Ordonnances 

édifiantes  ne  font  pas  confirmées 
55  par  des  Magiftrats  bien  intention- 
>>  nez  :  Ayant  donc  entendu  le 
>y  contenu  de  vôtre  Cahier  ,  nous 
>,  l'avons  extrêmement  approuve  y 
3,  Nous  l'avons  jugé  fait  félon  Dieu 
3>  8c  édifiant 5  ôc  nous  avons  trou- 
j,vé  qu'il  n'y  a  plus  rien  à  faire^ 
o  f  non  que  vous  autres  Minières 
„  3c  Pâfleurs  ,  régliez  vôtre  Doc- 
>,  trine  &:  votre  Conduite,  précifè- 
,>  ment  de  la  manière  qu«  vous  y 
,j  avez  prcfcrite  ;  Car  par- là  l'édi- 
3,  fice  intérieur  ,  célefte  ôc  éternel 
jjcrcîtra  &  s'élèvera  comme  il  y 

a  lieu  de  l'efpcrer  >  on  abolira. 
,3  aufîi  les  excès  &  l'a  pétulance 
,)  de  la  Chair  ;  &  cependant  par 
,>  là  on  laiile  le  cotrs  libre  au  S,. 
,5  Efpri:  ,  3c  au  mouvement  inté- 
>.,  rieur  de  la  Gracc,  qu'il  n'appar- 

tienc 


45>o    Edit  de  LL.  EE,  de  Berner 

3,  tient  à  aucune  Créature  de  gêner 
7i  OU  de  maîtrifer*  comme  vous 
3,  avez  eu  particulièrement  égard  à 
>,  cela  dans  vôtre  Ecrit,  Ainfi, 
5>  nous  avons  approuvé  générale- 
55  ment  ces  Actes  de  vôtre  Sj* 
s,  node  ;  Nous  les  avons  jugé  pro- 
?)  près  à  l'avancement  de  la  gloire  de 
5,  Dieu  5  &  à  la  propagation  du  S, 
Evangile  i  Nous  les  confirmons, 
&  les  corroborons  :  Nous  vou- 
>5  Ions  les  exécuter,  en  tout  ce  qui 
nous  regarde ,  6c  mettre  ordre 
3j  qu  ils  foient  maintenus  de  tous 
,5  nos  Sujets  3  de  la  Capitale  &  du 
5,  Canton  s  comme  aulîî  vous  fou- 
j5  tenir  &  vous  protéger  dans  leur 
53  obfervation  3  vous  autres  3  les 
„  Pafteurs  &  les  Minières  >  afin 
53  que  vous  puifliez  prêcher  Jésus- 
>3  Christ  feul3  rejetter  les  erreurs, 
53  attaquer  &  combattre  fans  crain- 
9,  te  les  vices        les  fcandales  3 
33  tant  des  Seigneurs  &  des  Ma- 
j,  giftrats  ,  que  des  Sujets,  &  mê- 
33  me  les  nôcres  3  fclon  Tordre  de 
„  la  Foi  3  de  la  Charité  ,  &  autanc 
3,  que  les  Auditeurs  en  pourront 
3>  être  édifiez  en  Dieu.  Cependant 
3)  comme  vous  avez  jugé  vous- 
même 


^ui  confirme  les  Acles  du  Synode.  4pi 

5,  même,  que  c'eft  une âftionChré« 
5,  tienne ,  nous  n'ufcrons  point 
j,  de  connivence  envers  vous  >  & 
5,  nous  ne  vous  laifferons  point 
5,  impunis  fi  quelcun  de  vous  n'en- 
55  feigne  pas  d'une  manière  con- 
5>  venable  à  la  gloire  de  Dieu ,  & 
3>  à  la  nature  de  TEfprit  &  édifiante  j 
,>mais  prononce  des  paroles  inju- 
3,  rieufes  prepres  à  détruire  ,  par 
5,  malice  &  par  infolence,  ou  par 
3,  le  mouvement  de  quelque  paf* 

flon  3  foit  que  cek  fe  fafle  con- 
},tre  des  gens  du  Pays,  ou  con- 

tre  des  Etrangers  5  contre  Hom- 
j,  me  ou  Femme  3  contre  les  Ma- 
>,  giftrats  on  les  Sujets,  Cependant 
yy  nous  ne  poufferons  par  la  févé- 
»  rité  trop  loin  contre  qui  que  ce 
»  foit.  Mais  comme  la  plus  grande 
>3  partie  de  ces  A£les  vous  regarde 
>,  vous-mêmes  Vous  &  vôtxe  Em- 
>3  ploi  j  auiïi  nous  voulons  &en- 
, étendons  très  férieufèment,  que 

chacun  de  vous  les  obfèrve  dans 
33  fa  Do(flrinc  &:  dans  fa  Conduire> 
33  foit  à  1  égard  de  fon  Eglife3  foit 
>,  à  l'égard  de  lui  -  même  \  3c  que 
33  vous  vous  y  exhortiez,  &c  vous 
,>  y  animiez  ks  uns  les  autres  s  en 

par- 


4P  2    Bdh  de  LL,  EE,  de  Berner 

yy,  particulier  que  les  Doyens  >  & 
j5.ceux  qui  furpafTenc  les  autres  sn 
habileté ,  6c  en  faint  zélé  5  les 
>^  exhortent,  les  aident  &  les  ani- 
>,  ment,  à  obferver  ces  Réglemens. 
»Que  fi  quelqu'un  s'y  oppofoic  mé.- 
33  chammentj  qu  ilfe  moquât  deces 
j^^leçons  falutaires,qu*il  ne  s'âquittâc 
pas  diligemment  de  fon  cmploi> 
qu'il  vécût  d'une  manière  fcan- 
5)  daleufe>ou  que  par  quelque  au- 
tre  endroit  il  fit  du  mal  à  l'Egli- 
yo  {q  de  Dieu  5  en  contrevenant  à 
yy  un  5  OU  à  plufieurs  articles  de 
>j  ce  Synode ,  un  tel  doit  favoir  , 
yy  qu'il  n'en  demeurera  pas  impuni, 
j>  au  cas  qu'il  nous  foit  ra porté  :. 

mais  il  doit  s'attendre  à  être 
„  puni  de  nous  5  d'une  manière  > 
qui  fera  connoîrre    à  tout  le 
yy  Monde  >  combien  nous  prenons 
55  à  cœur  la  gloire  de  Dieu,  &:  la 
défobéiffance  à  fa  Parole, 
yy  Pour  conclufion  :  Nous  ordon- 
yy  nons&  entendons,  que  cesA(fles 
wfoient  portez  dans  ksSynodes  fui- 
vans  j  qui  fe  tiendront  annuelle- 
yy  ment  au  prémier  de  May ,  ou  cn- 
y^  viron;  qu'on  les  y  life  avec  foin^ 
^.  qu'on  les  cclaircilTe  s  qu'on  les 

explique. 


qui  corrfiïiKC  les  ^Hcs  du  Spicd:,  4P5 

explique  5  &  qu'on  les  renou- 
>,  velle  5  &  qu'on  n'en  laiïTe  tom- 
j>j  ber  aucun  poinr.  Que  fi  ,  au 
a^reftcj  nos  Pafteurs  ou  d'autres 
>j  ^lous  propofent  quelque  chofè  , 

qui  nous  conduife  plus  droit  à 
î>Jes  us-Christ,  &  qui  con- 
>,*contribuë  mieux  à  la  concorde 
>,  commune  &  à  la  Chariré  Chré- 
o  tienne,  félon  la  Parole  de  DieU:> 
55  que  ne  le  font  les  Reglemens  qui 
^jfont  ici  couchez  par  écrit,  nous 
a,  le  recevrons  de  bon  cœur,  &  nous 
33  laifferons  au  S.  Efprit  fon  cours 

libre,  puifqu'il  ne  nous  tourne 
3,  point  en  arriére  du  côté  de  la 
t,,  chair,  mais  nous  pouffe  perpé- 
33  tuellement  à  nous  former  à  Ti- 
3,  rcage  de  Je  s  us  -Chri  st  nôtre 
33  Seigneur.  Veuille  ce  divin  Sau- 
3,  veur  nous  conferver  tous  en  fes 
53  grâces  !  Donné  a  Berne 14.. 
53  Janvier  de  ian  1532, 

Fin  de  t  Edit. 


TABLE 


494 


TABLE 


DES  CHAPITRES 


Contenus  dans  /es  AcT  E  s  DU 
Synode  de  Bhrne 


Chap.    I.  0«e  les  Miniftres  doivent 
s'aquiter  foigneufement  de  leur  de- 
voir. 3^9. 
Chap.  II.  0«e  toute  la  do(5lrine  fe  ré- 
duit uniquement  à  ]  e     s  - 
Christ  ^6o. 
Chap.  III.  (hi'on  ne  doit  propofer  au 
Peuple  la  connoiflànce  de  Dieu  qu'en 
]esus-Christ  5<5r. 
Chap.  IV..  Que  J  E  s  u  s  -  C  H  R  I  s  T  elHc 
véritable  Fondement.  3<^5. 
Chap.  V.  Que  ce  n'ell  que  par  Jésus- 
Christ       feul    immédiatement  > 
que  Dieu  eû  reconnu  mifericordieux. 

36<;. 

Chap.  VI.  0«'un  Sermon  Chrétien  doit 
être  uniquement  tiré  de  JesusChrist 
&  parler  de  lui.  368. 

Chap.  VIL  Of*'il  faut  commencer  &  finir 
la  Do(5lrine  &  h  vie  Chrétienne  à  la 
mort  &  à  la  refuredlion  de  Jesus- 
Christ 570. 

Chap.  VIII.  Comment  il  faut  tirer  de 
Christ  la  connoifTance  de  nôtre 
péché  37^ 

Cnap.  IX.  Que  c'ell  en  Je  sus-Christ 
&  fans  la  Loi  3  que  l'on  doit  chercher 


I  N  TR  G  D  U  T  r  O  N. 


la 


TABLE  4PÏ 

la  connoiflance  du  péché  37^; 

Chap.  X.  Pourquoi  St.  Paul  a  tant  parlé 

»  de  la  Loi  aux  Payens.  377* 

Chap.  XI.  Q^e  les  Juifs  &  les  GemlU 
font  parvenus  à  la  Fol:  les  premiers 
fous  la  Loi  5  &  les  derniers  fan» 
la  Loi.  37S. 

Chap.  XII.  Différence  entre  la  manière  de 
prêcher  Jésus-Christ  parmi  les 
Payens ,  Ôc  celle  de  le  prêcher  parmi 
les  Juifs.  38r. 

Chap.  XIII.  D'oil  vinrent  les  faux 
Apôtres  382.. 

Chap'.  XIV.  De  la  repentanee  &:  du 
pardon  des  péchés  3  ou  de  la  dilpen- 
fation  de  la  grâce.  384. 

Chap.  XV.  La  Repentanee  trouvée  en 
jksus-CHRisT  eit  le  fondement  pag, 

Chap.  XVI.  Le  Myftere  qui  a  été  caché 
dès  la  fondation  du  monde  ,  eft  3  que 
Je  s  us-Christ  ert  prêché  aux  Pa- 
yens fans  la  Loi.  388. 

Chap.  XVII.  O^e  l'on  peut  auffi  tirer 
des  Prophètes  ,  des  inftrudlions  pour 
la  repentanee  chrétienne.  390. 

Chap.  XVin.  gw'il  faut  toujours  croî- 
tre dans  la  connoi/fancc  de  Jésus- 
Christ  Sc  que  chacun  doit  exami- 
ner û  propre  Foy.  39  r. 

Chap.  XIX.  Des  Saints  Sacremens  &  du 
Batême  en  général.  393. 

Chap.  XX.  Du  Batçme  en  particulier  399, 

Chap.  XXI.  De  l'adminiltration  du  Ba- 
tême. 401. 

Chap.  XXII.  De  la  Céne  du  Seigneur  4C(5. 

Chap.  XXIII.  De  l'ufàge  de  la  Loi  &  des 
Prophètes*  Aiz. 

Chap.  XXIV.  D'attaquer  le  Papifme  dans 
les  Sermons.  410. 

Chap. 


49^  ,  TABLE 

Chap.  XXV.  Des  Exhortations  Zz  des 
Cenfures.  41^. 

Chap.  XXVI.  Qui  font  ceux  cju'on  dok 
Cenfurer.  416. 

Chap.  XXyiI.  Q^"û  convient  de  prêcher 
la  vérité  comme  la  tirant  de  l'Écriture 
Stc.  &  non  en  fe  fondant  fur  l'appui 
d'aucun  homme  ou  parti  ,  ni  parce 
que  le  MaQ;i(lrat  le  commande.    43 1« 

Chap.  XXVltl.  O^'anctin  Pafteur  ne 
doit  attacher  à  lui  le  commun  F-eu- 
pie.  455- 

Chap.  XXIX.  C'efl  de  Dieu  qu'il  faut 
apprendre  quand  on  doit  employer 
la  févérité  ou  la  douceur  envers  le 
pécheur.  43^» 

Chap.  XXX.  Exhortation  à  la  Régence  de 
B  E  R  H  Ejnos  SouverainsSeigneurs.437. 

Chap.  XXXI.  Enquoi  il  faut  particulière- 
ment eshoyier  &  cenfarer  le  Peu- 
ple. -  -  441. 

Chap.  XXXII.  On  doit  prêcher  l'obeif- 
fance  envers  le  Magiftrat,  tant  du  Gou- 
vernement féculier  que  de  ÎEccléfîaf- 
tique.  441. 

Chap.  XXXIÎI.  Qui\  faut  exhorter  le 
Peuple  à  obferver  les  Edhs  de  L.  L. 
E.  E.  3c  s'appliquer  particulièrement 
à  corriger  les  vices  ,  qui  ont  le  plus 
de  vogue  dans  nos  Egfifes.  448. 

Chap.  XXXIV.  De  l'Inftru(5lion  de  la 
Jeunclfe  &  de  la  Dodrine  de  la  Foi^ 
on  du  Catechifme  45^» 

Chap.  XXXV.  Du  Décalogue,  0»  desdix 
Commandemens.  4^-. 

Chap.  XXXyi.  Du  Symbole  des  Apôtres; 
de  rOraifon  Dominicale  ,  &  des  Dix 
Commandemens  4^3. 
Chap.  XXXVfl.  De  la  conduite  &  de  la 
jr.'oùité  des  Minillres  &  des  Pafteurs 

en 


TABLE 


en  gcnéral 


Chap.  XXXyiir.  Comment  les  Pafteurs 
doivent  étudier  ,   &  lire  l'Ecriture 

459. 

Chap.  XXXIX.  Que  les  Minières  doi- 
vent conférer  amiablement  enfemble 
far  l'Ecriture  S^^\  A^y-- 

Chap.  XL.  Comment  on  doit  méditer 
les  fermons. 

Chap.  XLl.  Qj£i[  faut  lire  modérément 
les  Livres  profanes  4^j7. 

Cha.  XLH.  Qi^on  doit,  prêcher  dans  tous 
les  jours  prekrits  459- 

Cap..  XJLIII.  ^^'il  faut  p^;lei  ciUX  Audir 

teurs  en  particulier  472 . 

Chap.  XLÎV.  De  la  vifite  des  malades 


Chap. XL V.  De  la  conduite  que  les  Minil- 
.  très  doivent  tenir,  foit  à  leiiard  d'eux 
mêmes  3  foi:  dans  leur  domèllique  476Î 


11 


y. 


ERRA- 


ERRATA, 


Changemcns  dr  Additions  four 
le  Tom.  IV. 

Tdge  10.  Ligne  dernière  qu'il  llfeT^  (^u'otl 
pag.  40.    Lïg.  9-  après  il  fe  VOÙa  ajoute'^ 

quoi  qu'avec  peine. 
M'  82..  lig.  iÇ.  &  16.  Gy,  Champagne, 

Provence  3  ejface-:^  ces  trois  mots» 
P^g'  S^.  lig.       51  /^*/f^  ?o. 

/«^g^.  91.  2^.  oe^  /lfe-7i^  de. 

ICI.  /^^.  II.  aine  ///ec?;,  puîné. 
fag.  153.  /iif.  17.  des  ///èc?;.de. 

141.  /jig-.  15.  ej^^c^'T  des  Cantons 
/'rf^,  i^?.  /^j^.  9.  Elles  font  datées  11/6%, 

Il  eii  datte. 
pag.  170.       13.  ces  Meffieurs  llfcKjcs 

Chanoines. 
pag,  185.  llg'  19'  par  pas.  , 

190.  /?^.  II.  règîemens  llje\  aere- 
glemens. 

/■.i^,  100.  lig.  24.  ejf^c<rc?;^  qui. 

/.i^.  205.  z^;^.  25.  des  llfe%,  de. 
/'^^  208.    /iç.   ip.    Sweinfourt  /^/e^ 
Schweinfourt. 

164.  ilg^  14.  œfingen  Anlïngen. 

fng.  26^.  //.Ç.  17.  &  fuiv.  effaceT^Us  gmU 
iemeps, 

fag.  277-  ^5?-  9.  &  17.  Dizaines  llfe 

Dizains. 
png,  293.       19.  des  /i/'f'^  ae. 

/>4^.  311.  <«        wo«e  ^  XIV.  llfe\  XV 

32-9*  %  8-  des  /f^c^  de.  ^ 
'  P^i*  3^0.  peut  ///«-^  peur 

Z''^^-  3S3.  %.  19.de  /(Kà 

SSi;-  %  '5-  Touhaitoient  lou 
'haiteroient.  lig.  II?,  l'hypocrifie  Hft 
hypocrifie. 


f^^g-  388.  éface^^  dan5  lesquels 

p.ig.  400.       8-  ^  9.  un  tel  eft  de///^-^ 

un  tel  homme  ell  membre  de  la. 
Z'^^.  406.  %.  9.  reitirer  //t/èc?;^  réitérer 
pag.  409.  wi'ï^  *  Itg.  I.  1^39-  ^i/è\iS9î. 
Z^^.  440.       8.  par  /^/ê^  pas. 


\