FROM THE LIBRARY OF
REV. LOUIS FITZGERALD BENSON. D. D.
BEQUEATHED BY HIM TO
THE LIBRARY OF
PRINCETON THEOLOGICAL SEMINARY
Division ■
Seclio. SrP;
"/H/
H ï s T 0/«'
^^•/i^- DEL
//CZt^^ DELA
SUIS SE,
5a Ton voit tout ce qui s'eft paffé de plus
remarquable > depuis l'An 1 5 1 jufqu'ea
l'An 155^., dans les Eglifes des XIII.
Gantons, des Etats Coxfederez ^
qui compofent avec eux le L. Corps
Hel V E T 1 QJJE.^^^
P^r ABRAHAM RUCHAT^M. D. S. E.
& Professeur en Belles Lertres dans
l'Académie de Lausanne.
TOME QJJATRIE'ME.
A G E N E V E 5
Chez MARC-MICHEL B0US<^JET et CoMp,
M D c c X X V X I r,
SOMMAIRE
D U
NEUVIEME LIVRE.
I. /Commencement de Réformatisn j
dans le Pays de Vaud. Let-
tre de G. Farel a'ti Afmiftre André,
Fard prêche a Avenche 3 & court rif-
que d'y être mal-traité. Lettre
du Confe'il de Berne a ceux /Aven-
che. Lettre de fEvêque deLm-
fanne aux mêmes. Commencement de
Réjormatïon a Avenche. Les Fri-
bourgeois s'y oppofent, Difpure de
Farel avec un Moine, Dépuration de
Berne a Friùourg , & a Avenche,
II. Traite' de Berne avec Fii^
bourg fur la Religion de leurs Sujets
communs. Commencement de Réfor-
mat ion a Oibe. Un F, Mineur y
prêche vivement contre Us Réformez i
eft infulté p,:r un Réforme, Tumulte
a, cette occafion. Farel y eft mal-reçu,
Chef^ d'accufarionsj contre le Afoine,
& (es Réponfes. Il efi condamné
à prouver fa doctrine par [^Ecriture y
& s'évade, Farel vouLm prêcher neft
point écouté,
A 2 III.Fa-
SOMMAIRE
1531. III. Farel prêche enfin à Orbe^,
mais eft troublé dans fa prédication. La
Réforme y efi vivement traverfce par
les Piêîres & par le Confeil j &
fotitenu'e par leshtmo'is, Farelyprê-.
che fix jours de fuite, Hiftoïre de P.
ViRET, & i/^G. GrivaTj au-*,
ire Ailniftîe, auffi natif d'Orbe. Excès
des Réformez d'Orbe. Prémiére Ccne\
Réformée a Orbe. Nouveaux excès
des Réformez» Commencement de Ré-
formât ion a Payerne 3 vivement tra^
verfé. Députez de Berne a Avenche
& a Paterne > tour y foutenir laRé^i
formation,
IV. Granson. Farel y prêche^
& court rifque de la vie, Députa-
tion de Berne, Nouveau tumulte
caufé par le zélé impétueux de Fareh
Réformation a Fye & en quelques au-
tres Villages, Nouveau tumulte a
Orbe. Hifloire ^^I. Hollard.
V. Retraite de quelques Rehgieufcs
d'Orbe. Géiiérofité du Prin.e d'Oran-
ge envers quelques Bernois. Nouveau
tumulte & Nouveaux excès des
Réformez a Orbe, Réflexions fur a
fujet. Tumulte a Granfon , caufé pat
les femmes Catholiques, Excès des Ré-
formez de cç liçH la^ Difficulté erttrt
D U Liv. IX.
Be'rjÎe & Fribourg au fujetl
des ydlages Réformez du Balli^ge de
GranTon. Tumu-te a Orbe la veille
de No'él^ caujé par les Catholiques»
Autre A Novalle le jour de No'ely
caufé par les mêmes,
R E G L E M E N s de Bemc & de j
Fr. bourg , pour la Religion de leurs fu-
jets communs. Soins des SAgneurs de
Berne pour les Villages Ré former du
BalUage ^^Granfon.
VI. Pays de Vaud. Son état à j
r égard de la Rdigion, Moud on
paje deux Comédies pieufes , plus
chèrement que plufieur s Sermons. Lau-
sanne. Son état ^ a l'égard de la
Religion, L'Evéque fait battre de
mauvaife monnoye. Mouv^emens a ce
fujet. Invité a la Diète de f Empire ^
il s'excufe d'y aller. Il propofe en vain
un Règlement contre la Réfomation,
Difficulté entre la Fille & le Chupi*
tre. Croifâde publiée contre les Turcs,
L Evêque de Sybn e(l confacré a Lau^
[amie,
VIT. Neuchatel. Troubles
d.tns la Ville & en quelques endroits
du pays, au fujet de la Religion. Tra^
vaux de Fard, Le Lieutenant de Va-
lengin y traverfe la Réforme. Soins
A 5 des
s O MM A î U E
Ï S3Ï» ^'^^ Seigneurs de Berne pour les Re-
fermez de Neuchatel & de Valengin.
Hommage nouveau prêté a U Comteffe
de Neuchatel, Réglemens nouveaux.
Farel mal-traité a S. Blaife eft pro-
tégé par les Bernois. Reformation a 4a
Eole & a la Grate. Difficulté des
Bernois avec la Comteffe de Neuchatel
pour un Couvent,
VIII. Mouvemens pour & con-
tre la F.éformation a Moutiers Grand-
Val. Difficulté entre ceux de Mou-
tiers & le Chapitre, Soins des Ber»
fîois pour Ils Réformez- Le Chapitre
efi protégé par l'Etat de Soleurre.
Les Bernois règlent la Penfîon des
A4':nifîres. Troubles au fujct d'une
Eglife, Accommodement entre les
parties. Nouveaux efforts des Bernois
auprès des Chanoines.
IX. Genève. La Sentence de Fayerne
neji pas exécutée. Alliance renouvelléz
a-vet Berne Fribnurg. Néj^ociations dt*
Duc pour rompre cette Alliance. On for-
I Ç 3 2 . ^ 'h^^ s. Gervais. Proportions des Bernois.
Réponfe conrageufe des Genevois. Vifions.
Genève ejh en grand danger. Projet ac-
co-inme dément rejetté par les Genevôis. Les
deux Villes fe rtivifent oi faveur deGeneve,
Négociations des Bernois en fa faveur au-
près du Duc. Les Cantons refufent dt rc
nouveller leur Alliance avec lui: Semcrv
ce de Réformatim À Genève.
HISTOIRE
HISTOIR E
DE LA
REFORMATION
DELA
SUISSE,
LIVRE NEUVIEME.
Qui contient ce qui ejl arrivé
dans la S u i s s £ R o M A N-
Dfi, CAn M D XXXI.
^^^^ Andis que la Suifle Aile- ' Com*
' i| mAïide étoit dans le trou- mence-
\ -1 ble, dans l agitation & "^Fî^^
L. _ J dans les mouvemens de rration
la guerre ^ h Suifle Romande y plus dans le
tranquille, proficoic des foins & ^'^y^
des travaux de G u i l l a u m e
A4 Fa-
8 Hîjlohe de la Reformât ton
I53Î.FAREL5 de Pierre Viret,
I^C\.m- de quelques autres Miniftres
ment^de ^^^^^ ^ pieux , pour recevoir la
Rétor- lumière de la dodtrine Evangeli-
mation que ; de forte qu'on vit cette an-
dans le x-iQQ la Réformation s'introduire, 6c
de » Al 1
Va UD. ^ avancer rr.eme, dans quelques en-
droits du Pays de Vaud , comme à
^veuche , à Paycrne , & fur tout
à Orbe de à Granfon,
Fa.rel fe trouvoit à' ^^(3^'/?f au
commencement de cette année. Se
voyant fcul , ou à peu près, dans
le Pays de Vaud, a prêcher l'Evan-
gile , il écrivit pendant cette année,
à diverfes fois en France » pour
en faire venir des Minières 5 qui
le fecondaflent dans cette œuvre
importante : Mais il eut peine a
en trouver. Il n'en pût guéres ob-
tenir 3 que lors que la perfécution
de France, les obligea de fedifper-
fer. Il écrivit cntr'autrcs de Mo-
rat à Strasbourg , à un Miniftre Fran-
çois , nommé André', dit For-
tUiiAt 5 qui cherchoit de l'emploi ,
mais qui en auroit voulu trouver
un tranquille > où il ne fût
point expofé à la perfécution. Fa-
relj dis je, lui écrivit le 28. Jan-
vier
de la SuijJe.LlV.iyi. 9
vier 15^1. pour l'encourager ave- 1531*
nir dans le Pays de Vaud j mais
fans lui promettre qu'un Miniftère
fatiguant & peu lucratif. On ne
- fera pas fâché, je penfe 5 de voir
ici un fragment de fa Lettre, par-
ce quelle pourra fervir a faire
mieux connoîrre le génie de ces
tems là.
Fous fouhaitez de favoir , ( lui dit- Lettre
il , ) fur quel pie font ici les affaires ^-^^^^
du Seigneur, A U vérité , elles vont ^jp.j-e^^'
affez bien , en comparaifon des tems André,
pajfeZ' Plufieurs notent clairement les
fourberies de l^ Ante-Chriff , & fon a
d^ ailleurs une grande liberté de parler
de Jesv S'C h r I s t. Mais fi l'on
confidére combien il refte encore de
' chemin a faire y & combien les hum-
mes font éloignez de la pureté , de
[innocence y & de la charité , qui doit
être entre les Chrétiens 5 que vous di*
riez bien que tout va mal ! Il lui
dit un peu plus bas: Cependant U
faut que le laboureur vhe de ce quil
A chez lià y tandis qu'il attend U
moiffon , ce qui eft fort difficile main-
tenant dans ce tems de difctce^ , où
A ^ l'on
* La difette étoit fort grande cette an-
née là tn Suilfe, aii/Ti bien qu'en France.
Voyez M^3Leraiiat l'aa is^i. p. in. ^lo.
lO Ht/loi re de la RJformation
1531. ^'^'^ /^^**^ 4î^o/r que peu et alimens
Lettre pour be Mcoup d'argent. Mais je jai
de Fa^el ijiie fi^fYe Pére Céh'fte n abandonne r
^"^^jj.^^" j^m^/j les fiens. Un peu plus bas
André, encore : Ceux qui entrent dans cette
carrière s'expofnt a une grande épreu-
ve : Je ne veux pas vous promettre
des Montagnes d'ory ayant éprouvé
moi-même des chofes qu'on auro 't peine
a croire de la part de bien des gensy
qui m'ont tourmenté en diveifes ma-
nières 5 Cefi pourquoi mon Fiére 5 fi
vous connoiffez ^Jfcz bien Jésus-
Christ pour pouvoir renfe'gner pu-
l'ornent , fans ces vaines controverfes de
l'Eau (a) ou diiPain (b) , ou des Cen-
fes & des Dîmes (c) , en quoi quel-
ques uns font confifier le Clniliianime >
fans vouloir propof r autre ckofe , fmon
que tous , aya-nt renoncé a toute impié-
• té y & à toute injuflice 5 armez de la
Foi 3 s'amajfcnt un thréfor la-haut, ou
eft J E s u s - C H R I s T a la droite
du Pére 5 payant a chaque Puijfance
& au Glaive y ce qu'il lui doit , foit
Cenfes
{^)&(,c) Cela regarde les controver--
Tes des Anabaptilles.
{b) Cefl: la controverfe de la préfen.
ce réelle du Corps du Seigneur dans
rEuchaiiftic.
de la Suijfe. L i v. I X. XI
CcnkSi foit Dîmes; & cela non feu- 1531.
Icment aux impies , fi leSegneur zeut Farel.
que nous foions fournis a des impies^
mais auffi aux Seigneurs pieux» &
même a ceux-ci avec une affection d'aU"
tant plus grande , qu ils font nos Fré^
res , ne travaillant a autre cho^e qua
planter une foi 5 qui fo 'it opérante par
la charité: Difpojé ^ dis-je ^ de cette
manière, & ne cherchant que les
chofes qui font en haut y & la feule
gloire de Jesus-Christ, vous pourrés
vous mettre en chemin 5 animé a por^
ter la Croix qui eft a la porte. Vous
ne devez fus vous attendre a du re-
pos , mais a de l'occupation : Fous ne
vous repoferex que quand vous ferez
lasy & vous ne moijfonnerez point^que
vous najez fcmé a vos dépens, [a)
Le mois fuivant Farel alla faire
un tour à Neuchatel , pour revoir
& édifier TEglife , qu'il y avoit Autres
plantée : & de là il écrivit encore ^J^pX
une féconde Lettre (le 1 2. Février) rel au
au même Miniftre ^w^fr/, dit For-^'?!^'^.^.
j , A Miniltre
îunat , dans les mêmes termes >
pour l'encourager à venir en ce
Pays. Mais il paroit par une Let-
tre fuivantCj qu'il lui écrivit encore
A ^ de
(«) Ex Epijîçlis Anecdot. no. XVII.
1 2 Hiftolre de la K.éfoY'tr,atiûn
1531. de Alorat , en date du i .Avril , q^ue
Farel. ce Miniftre étoic arrê:é par deux
confidérations : celle de fa femme
qu il ne pouvoic pas quitter , & •
qu'il ne vouioic pas expofer avec
lui à la perfécution \ & celle de
la difette j n'ayant pas apparem-
ment du bien , pour pouvoir prê-
cher à fes propres dépens. Farel
répondit à ces deux difficultez.
Dans la fuite ce Miniftre vint au
Pays de Vaud , &c vers la fin de
Tan ou au commencement de
Tan 1537. il fut établi premier Paf^
teur de l'Eglife de Cuïllj 6c de k
ParoifTe de Fillette. II eut un fils,
ou petit fils, nommé Nîcolus, qui
fut Bourgeois de Laufanne , ôc lié
d'am.itié avec Benedict Arctius Pro-
felfeur en Théologie à Berne, qui
lui dédia un petit Abrégé de ^
Théologie , comme on le voit par
une Lettre, datée du i. Mars 1570.
Farel Mais pour revenit aux travaux
prêche p^^gj . n^^ni de fa patente de
chcy & Berne, il^alla,au commencement
court ment
ri (que
d'y ctre ^ Intitule • Examen Thenlcftcum Sec.
"^^'.K II s'en eft^fait fix Editions dans 14. ans.
traite. 6e. que j'ai , a été faite à Marges l'an
Iy84. par Je.in U' Preux.
de la Suijje. L I v. I X. 1.3
rrent de Mars prêcher à Avînche, 1531.
( qui n'c-ft qu'à deux petites lieues lard à
de iVtorar. ) Il y trouva quelques ^ven-
perfonnes difpofées à 1 écouter ,
mais il y trouva auffi de violen-
tes opolitionsj foit de la part des '
gens du lieu , foit particulièrement
de la parc des Prêtres : deforte
que le de ce mois-là j qui étoit
un Lundi , il s'y fit une e/pèce de
fédition où Farel courut rifque
d'être mal-traité. Les Seigneurs
de Berne l'ayant appris, écrivirent
à la Boargeoifie d'Avenche, la Let-
tre fuivanre :
NÔTRE AMIABLE SALU- LETTRE
T'A T I O N DEVANT MISE, No- ^^j'
blçs > Saiges & Difcrefts : Ao/z^^^^'f/^
fommes advertis du tumulte & incon- ceux
'ventant quefl advenu Lundi demie- c^lAven-
renient pajfé en votre Fille contre Mai- ^ ^'
tre Guillaume Farel notre Serviteur^
par * Fbuî Prêtres , & autres^ de quoi * vos
avons grand "f regraicl : toutes fois f regret.
d\mpws que la cboje cft ainfi paffee,
[uns être fair outrage au dit Farel,
la'iffons pour ce te fois ainfi être: Ce
ne\inmor, gs vous prians & ires acertes
advertijfaus , ci a'fres y mettre ordre^
& ) avoir regard 3 que '■ Nous , .
nous
î 4 Hijloïre de la Kéformation
I 5 3 1 • * nous Serviteurs -i & la foi de Je s us-
F^rd à Christ notre Sauveur ne \foit uinfi
Q^^^' perféqutée > ne ceux qu U annoncent
^ nos trou lés ne motel} es ^ aui rement y met'
t ims ordre nédjjui e. tt p^r ahifi
cetix qui defir rom ouj- la vérité tvan^
geltque laîffes a npoji en paix , &
mcjmement endurer , comme vous eftes
en vi^jiL'UY de ChrejUenne obé.jfamt
t7ire;u:s , que U parole de Dieu aye
place en Fojîve V.lle , & la laijfer an-
t portent y^^^j^ç^y ^ ^ ^ f^gf^x qui la "t pour-
tent & défirent : En (e feiezvoftre
devoir envers Dieu & les hommesj &
a Nous grands pUifirs, Entant priant
Dieu, que vous doint grâce d'accepter
^ fa fainte parole y & de vivre félon
iéel'e, Datum IX, Aiartti anno
D XXX 1.
L'advoyer & Confcil de la
Ville de Berne.
Cadrefle étoit : Aux Nobles -i Saigest
' nos Pourveables > & Difcrets y Chafte-
lain & Confeil cI'Avenche , 4-
Nous bons nmysy & chiers voi-
fins, (a)
D'autre coté le Vicaire d'Avenche
&
W-Tiré des Archiv, d'A venche.
de la SniJJe. L I V. I X. I 5
& le Lieutenant de la J^fticei53î^-
donnèrent avis à l'Ex êque de Lau- Turd à
fanne Sebaftim de Aion'faulcon • (qti Aven-
étoit leur Seigneur Temporel auHi-
bien que fpiiitucl. ) de Tafflire qui
étoit furvenuë dans leur Ville. Il
leur envoya un Religieux Dofleur
en Thé(..lûgie, {a) pOi r } foute-
nir la CaLholiciré contre les piédi-
carions de Farel j & en rriême tems
leur écrivit la lettre fuiv^ante :
A Nos très chicrs , bien amcz > à" Lettrée
fctulx fubgecJs , les nobles y Gt?//- ^ei'Evê-
zerneurs . Confeil , & Communauté 2"«y-^^^
de noftre nUe d'A venche. ne à
ceux
Très chicrs, bien amez & feaulx d^^-vc».
nofire amiable recommandation premife.
Nous avons eftés advertis tant par vof-
tre ricayre que Lieutenant , de *
fnrte qui fuft dernièrement faicly dont
fumes fort despUyfans des continuel-
les infeftations que fon vous donne en
cet affaire , au quel ce nonobftant vous
efles monftré virtueuxy bons & vrais
Creftiens & Catholiques , dont je loué
Dieu y & Nofire Damcy & vous en
fc avons tris bon- gré ^ vous priant &
exor*
{d) MS. Am^^
1 6 Hijîûirc de la K^formatian
1531. exortant paternellement & très affec-
tueufetnenti de vouloer continuer &
bien perceverer , & ce faifant vous
^ profit reporterez U grâce de Lieu 3 *
prouffit a l'ame & au corps ^ & a la
fin la gloire de Paradys : Et pour vous
monftrer le Chemin pour parvenir a
îcelle y Aïonfieur voftre Curé & moy
vous envoyons ung vénérable Docteur
pour vous dire & prêcher ce queft fa-
lutayre & proujjitahle ^ auquel vous
prie donner bonne audience y& luifayre
ajjiftance avecques thonneur & plaifir
que vous pouryez» -^ffffi '^ous re-
commande ceulx de voftre Clergiéy les-
queulx font ceulx quits prient Dieu pour
vous : Au regard de moy , vous me
trouverez toujours voftre bon Pére
fpirltuely Seigneur & Prince. Et quand
quelque chofe rayfonable vouldrés de
moi, foyt en gênerai ou en particuHery
me trouverez enclyn a la faire, quel^
que chofe que l'on vous donne d'en^
tendre a l'oppofite , comme Dieu le
fcjyt , ouquel je prie qui vous ayt,
très chiers bien amez & fcaulx, ^«
fa fainte garde {c) de Laufanne ce 14.
Mars.
L'Lvefjue de LAUZanne,
Cepen-
M Tire des Arch, d'AVENCHE,
de la Suijje. Liv. IX. 17
Cependant la Bourgeoifie d'A-jjjj..
venche écrivit aux Seigneurs de
Berne {a) , de leur piomit de laifler
prêcher psihblemenc la Parole de j^pj^^^'
Dieu. Il s'y trouvoit auffi effcc- ment de
tivement des eens, q* i fouhaitoient Réf;r- ^
de 1 entendre 3 mais il y lui vint en-
core un nouvel cbftacle. Avcncbe
VLtii qu'à i. lieuës de Frihourç. Les fes F?-/-
., ^ • /f bourgeon
Fnbourgeois , autant zelez pour '^^p_
4e foutien de la Catholicité 5 9^- 6 poient.
les Bernois leroient pour la pro-
pagation de la Dodrine Evangeli-
q'je > s'oppoférent à la prédication
de Farel , &c firent tous leurs ef-
forts pour empêcher ceux d'Aven-
che de l'écouter, les en dé:ournant
même par des menaces > 6c par de
mauvais trai;.emens , deforte qre
ces pauvres gens n'étoient pas en
filretc fur les terres de Fribourg.
Et même les Fribourgeois leur dé-
fendirent d'écouter Farel fous peine
d'être mis en prifon, tout autant
qu'on en pourroit attraper, d'ê-
tre traitez comme hérétiques. Le
Do(ffcçur , que TEvêque envoyoit à Difpute
Avenche, y étant arrivé, Farel entra '^^ ^^''^1
bien-tôt en difpute avec lui, fur la ^^^[^"^
Re^ '
'4) MS. An^.
18 Hifloïre de U Kéformation
1 J , Religion. Ce Moine le traita dlié-
A V E N- rétique 3 &: lui dit quelques autres
c H E. injures. Farel voulut le tirer en
droit, devant la Juftice du lieu,
pour avoir occafion de le convain-
cre d'impol^ure. 6c d'enfeigner une
faufTe doiflrine. Cependant les Ré-
formez d'Avenche s'étant plaints
à Berne des véxations des Fribour-
geois , LL. EE. envoyèrent le 2p.
i>ipntn' Mars j deux Députez à Fribourg ,
Berne à P°^^ P^^^^ Seigneurs de TEtatj
JFriboHTg de LiifTer en paix les gens d'i\ven-
che, & tous les autres qui aimoient
l'Evangile , puis qu'ils n'avoient
rien a leur commander 3 les af-
furant qu'on étoit réfolu à Berne
de foutenir Farel ) & tous ceux qui
voudroient l'écouter, & que fi on
les maltraitoit , LL. EE. uferoient
de reprefailles fur qui de droit. De
^ Fribourg , les Députez allèrent à
Avenche Avenche 5 avec Farel 3 & remontrè-
rent à la Bourgeoifie que LL. EE.
fouhairoient qu'ils exécuralTent la
promeiïe, qu'ils leur avoient faite
par leur Lettre, fa voir, de lailTcr
prêcher paifiblement la parole de
Dieu 3 qu'autrement s'il arrivoit
«quelque mal à Farci 3 ou a d'autres,
jour
' deUSuife. Li v. IX. 19
pour cefujet, LL, EE. s'en relTen- I 5 3 î •
riroient, comme fi la chofe étoitAvEN.
faire à eux mêmes? 8c qu'ils pu-^^^*
niroient les coupables , en corps &
en biens. Les Dépurez avoient
auffi reçu ordre de foutenir Farel,
dans fon procès avec le Moine * ;
mais je n'ai pu découvrir quelle
fut rifluë de cette affaire. D'A-
venche ces Députez allèrent à Orbe>
pour le fiajet qu'on va voir.
1 1. Les Bernois & les Fribour-
geois étant divifez de Religion,
comme on l'a vu , il fe préfenta
fou vent des fujets de difficultez en-
tr'eux, à l'occafion des terres qu'ils
poffedoient en commun, favoirles
Balliages de Schvva7tz.bourg^ de Afo»
rat, d^Orbe 3c de Granfon. Les Ber-
nois vouloient y introduire la Ré-
formation , & les Fribourgeois ne
vouloient pas le permettre. Ce-
pendant comme ces derniers n'é-
toient apparemment pas fi forte-
ment attachez à la Religion Catho-
lique , qu'ils l'ont été depuis ; que
d'ailleurs les Bernois avoient pour
eux le Traité de paix , fait entre
les Cantons Tan 152p. les Fribour-
geois
* MS. Awp, m. B. Inftr. îo.
20 Hijîoire de la K.éformatîon
1531. g^ois condefcendirent à un accom^
modemcnt; 6c convinrent avec les
Bernois 5 P- Quz dans ces Balliages
J^^ATTE communs ils fèroit permis à cha-
avecFri-^^^" de fu ivre celle des deux Reli-
^0^/'^ fur gions , qu'il aimeroit le mieux,
la Reli- Jp- Mais qu'au cas qu'une paroifTe
Sh^cCm entière voulût décider à la pluralité
jets coin des voix , quelle Religion elle fui-
muns. vroit, les Seigneurs des deux Villes
envoytroienr leurs Députez , pour
préhder à cetre aiflion , & qu'alors
fi la plural ré des voix l'emportoit
pour la RéFormation , les Carho-
îiq ies n'y auroient plus d'exercice
public de leur Religion, & fi au
contraire la pluralité l'emportoit
pour la MelTe , cela n'empêcheroic
pas que les Réformez n'euflent
toujours libre exercice , 8c que les
Miniftres y prêcheroient la parole
de Dieu 5 ni plus ni moins qu'au-
paravant (^)
Com- La Réformation s'étoit introduite
dans la Ville à: Orbe, dè« l'an 15^0.
ment de i r • j ^
Rtfor- apparemment par les loins de G, Fa-
matioûàyW, mais les Réformez n'y croient
encore qu'en petit nombre , & ils
n'y firent point de bruit , jufqu'à
Tannée
{a) MS. Thomajf, p. i .
de U Suijfe L i v. IX. 21
Tannée fuivante 1551. à roccafion 15 3 1.,
d'un événement qu'on va voir. 11 orbe*.
y avoic dans cette Ville un Frère
Mineur > de Tordre de Saint Fran-
çois, nommé Michel Juliani > Con-
feffeur &: Adminiftrateur des Reli-
gieufes de Sainte Claire d'Orbe , qui VnT^
paflbit pour favant. Il fut choifi M^w^^^r
pour prê:hcr pendant \z Carême ,
& les Réformez furent des pré- d une
miers à l'aller écouter. Il prit de manière
là occafion de déclamer contre les cont^e^^
nouvelles Religions > & s'emporta lesR^^oy-
a dire beaucoup de chofes dures &
fortes contre tous les Réformez,
Ceux d'Orbe en furent fi offencez,
qu'ils écrivirent tout ce qu'il avoit
débité en Chaire , & en compofé-
rent un bon nombre d'articles qu'ils
envoyèrent à Berne. Jost de DrES-
BACHj alors Baillif d'Orbe, l'ex-
horta a fe modérer. Le Confcil &
les Bourgeois 5 qui éroient encore
bons Catholiques pour la plupart^
l'en prièrent auffi , lui remontrant
qu'on relevoit tout ce quil difoir,
& qu'on le mettoit par écrit > &
qu'il feroit mieux de prêcher fa
do^lrine tout fimplement, 5c fans
xîive^iver contre perfonne. MaisiL
con--
2 2 Hïjloire de La K^éformatîon
j ^ 5 j ^ continua fcs emportemens, fans
O R H E. i^i^ri écouter. Un jour donc qu'il dé-
clanioic contre les Moines & les Re-
ligicufes , qui quittoient le Cou-
vent pour jfe marier, il tint ce dif-
cours : Penfez 'vous que ces Prêtres^
(es Moines, ces Moine jfes^ qui fortent
hors de leur Religion , qui ne veulent
pas endurer la peine ni la caftigation^
dont iccux renonçant a leurs vœuxy
pour fe marier & accomplir leurs volup-
tez ch^irnelles , penfez-vous quen iceux
foit accompli & fait m-ariage légitime ?
lia! nenny^mais ils font paillards .paillar'
des, infâmes & deshonefîesyy^pofiats abo-
minables devant Dieu & devant les
l\t{^ir\- hommes, {a) Un Réformé d'entre
un ^Ré- Bourgeois , norrimé ChriHophle
formé. Holardy croyant apparemment que
ce Moine en vouloit à fon frère,
Jean Holardy qui avoit été Prêtre
& Doyen de Fribourg , mais qui
avoit embraffé la Réformation , &
s'étoit marié, eut l'imprudence de
lui crier > quil en avoit menti. Cette
parole excita un vacarme effioya-
ble dansTEglife. Les hommes vou-
loient fortir pour aller aflommer
Holard , mais on leur ferma les por-
tes
deUSuiJJe. Liv. IX. 23
tes des Chapelles où iJs éroienr. Là I 5 3 î •
delTus les femmes fe jettérent furOnBE,
lui 5 comme des furies déchainées, j-umuîte
le prirent par la barbe , la lui arra-à cette
chérent, le dévifagertn: à coups occafioR
d'ongles & de poings , Taii-
roient affommé /fi le Chârekin
d'Orbe y nommé ylntoine ^ gaffe , ne
fût furvenu , qui eut bien de la
peine aie leurôrer d'entre les mains,
pour le faire conduire au fond d'un
cachot. Le BaiJlif ayant apris ce
tumulte 5 par le Maître d'Ecole,
nommé Afarc Romain , accourût 'à
Orbe, où il fit prifonnier le Moine
Juluni 5 qu'on trouva chez une fem-
me 5 & tira Holard de prifon. Le
peuple en fut fi outré de dépit, qu'il
îè jettâ fur le Maître d'Ecole, qui
pour évirer leur fureur , courût
dans l'Eglifè , mais ce fût pour
tomber dans un mai plus grand.
Les femmes qui s'y trouvèrent,
écoutant le Salve Regina^ fe jettérenc
fur lui, le prirent parles cheveux,
& le jetrérent par terre , Se à coups
de pieds &: de poings , elles Tau»
roient aflommé , s'il n'eut été fe-
couru par un honnête Bourgeois,
qui écoit de la Religion. Depuis ce
jour
2 4 Hijloire de la déformation
1531. jour il fut fort long- tems fans
O R B E. ofer aller par les rues: ou s'il y
alioit 5 il étoit accompagné de deux
fergens , qu'or^ lui avoir donnez
pour fa garde , jufques a ce que
les Seigneurs des deux Villes eu-
rent la bonté de le prendre fous
leur prote^ion. (4)
Cependant le peuple s'attroupa
autour du Châreau , où étoit le
Baiilif avec HoUrd & "^ulunï , &C
quand il fortif, ils fe mirent a crier,
pourquoi A avoir arrêté leur beau
Pérejuliam^ & relâché Holard ? Il
leur répondit^^l avoir pris le Moi-
ne par ordre des Seigneurs de Ber-
ne 5 6c relâché Holard fur la caution
qu il avoit donnée. Cependant ils
ne furent pas contens de cette ré-
ponfe & voulurent le prelTer d'a-
vantage^ mais il fe contenta de leur
dircj que s'ils le vouloient prendre
à leur.rifque, ils le pouvoient faire ,
que quant à lui , il ne le leur
confeilioit pas. Lors qu'il fût avan-
cé jufqu'à la grand place , il rencon-
tra les femmes, Dames &: autres,
qui fe jettant à genoux , ôc les lar-
mes aux yeux, fe mirent a crier
mijc-
dela SmlJe, Liv* IX. 25
m fer horde , pour leur beau Pére Ju- 1531
Uanij mais le Baillif fut inexora-
ble 5 difant toujours > qu'il avoit
des ordres qu'il ne pouvoir fe dif.
penfer d'exécuter {a).
Le lendemain la Bourgeoifie en-
vola deux Dépurez, Pierre de Pierre^
fleur. Auteur de l'Hiftoire que je
copie, & François VFerney , pour
aller fe plaindre à Fribourg de ce
qui étoit arrivé. Les Seigneurs de
Fribourg cnvoiérent d eux Confeil-
lers à Berne > pour conférer fur ce
fajet 5 & il fut réfolu d'envoyer des
Députez de part & d'autre à Orbcj
pour le Dimanche fuivant, i^- d'A-
vril > jour de Pâques fleuries, afin de
terminer cette affaire. Les Bernois
amenèrent avec eux Guillaume FareU
dans le delTein de le faire prêcher à
Orbe. Lors que les Vêpres furent ^^^el
dites > il monta promtement en
Chaire, dans le delTein de prêcher :
ce que voyant le peuple, hommes,
femmes , 6c enfans, ils le fuivirent,
non pas pour l'écouter, mais pour
l'en empêcher. Il n'eut pas plutôt
commencé , qu'ils fe mirei^t tous a
fifler, a crier ( en l'appellant chierii
Tom.IK B maùn^
[43/^.7.
26 Hijloîre de la Ké for mat ton
î 53 1 . mhïn , hérétique ^ "Diable > 6c en le
Prbe. chargeant d'autres pareilles injures)
avec un bruit fi horrible , qu'on
n âuroit pas ouï tonner. Farel,
qui étoit accoutumé à de fèmblables
réceptions, ne perdit point courage,
mais perfifta dans le deffein de prê-
cher. Cette fermeté les irrita telle-
ment, quils en vinrent à une fé-
dition 5 où ils faifirent Farel, & le
rnal-rraitérent de coups \ de forte
que le Baillif craignant qu il n'en
arrivât un plus grand mal, le prit
par le bras , ie conduisit hors de
TEglife & Tefcortâ même jufques
en fon logis. Cela ne le rebuta point
encore {a). Le lendemain, à fix heu-
res du matin il voulut prêcher au
milieu de la place j mais il ne pût
point obtenir qu'on récoutâr. Sur
ie foir on affembk le Confeil de la
ville , où les Députez de Berne &
de Fiiboui g fe rendirent avec Farel.
A riffuë du Confeil , les femmes
qui s'éroifcnt attroupées > pour at-
tendre Farel , au milieu de la rue,
ï'ailéf enr empoigner, le jettérent par
terre , ^ voul oient fe mettre a le
•battre > mais un Oentil-homme ac-
crédité.
de laSuiJJè. Liv. IX. 27
té , Qommé Pierre de Glahejfe , le J 53 î*
leur ôta d'entre les mains > leur di- O r b e.
lànt. Mes Dames y pardonnez inoi
pour -cette heure , ]e lai pris a mx
charge \ fur quoi elles le iaiflerenr.
La principale de ces femmes , qui
commandoic toute la troupe, étoic
une Dame de ^qualité Fribourgeoifè
d'orrgine, nommée Elifaheth Reijf ^
qui avoit époufé un Gentil-homme
d'Orbe , nommé Hugonin à' Arnay^
Bien-toc après 5 Dieu lui toucha le
cœur > comme autrefois à Lydie.
Elle & fon mari embrafférent la Ré-
formation >• & y perfévcrérent conf-
tamment jufques à la mort (a).
Le Mardi on afïêmbla k Juliice,
oii afTjRérent les Députez de Fii-
bourg. Le Moine JuU.mi aiant été
tiré de prifon , les Députez de
Berne n, au nom de leurs Maîires 3
propoférent contre luilesCbefs d'ac-
cufacion qu on avoit recueiias de dUcruf^t*
fês fermons > intentant à ce fujet tion por-
une adlion criminelle contre lui :
difant qu'ils étoient coutie Dieu 5 jj^e
6c contre l'autorité de leurs Sci- jHliani^
gneurs de Berne. Je les raporre-
ra: par ordre avec les Réponfes
B z de
W U. ibid.
2 8 HiftoîYC de la déformation
I 531. Juliani, On l'accufoit donc d'a-
Orbe. voir tenu ces difcôurs :
Répon- !• Les pauvres d'Efprit font les
de ^ Afoines , qui ont abandonné le Mon»
JH imi. ^ ^^^^^ entrer en Religion. Il nia de
ravoir dit.
2. Le Pape y les Eveques i & les
autres Eccléfiaftiques y qui ont charge
(Came , (ont ceux a qui l'on doit obéir %
& garder leurs ordonnances^ parce que
toute ame doit être Jujette aux Puijfan*
ces fouveraines 5 & qui réfifie à leurs
puijfancesy réfifie a t ordonnance deDieu ;
Auffi bien que qui ne garde lesComman"
démens de CEgUfe, Il nia de lavoii:
dit de la manière quil eft rap-
porté.
l. Ceux qui amènent la nouvelle
Loi 3 7ie font aucun miracle^ d'où vient
que peu prennent leur Loi , fors un
tas de Aîoines impudiques ^ ^ pail-
lards y Apoftats 5 qui parce quon les
corrige & quon Us contraint dans les
Alonafteres 5 par la difcipline, prennent
cette Loi 3 pour pouvoir fe marier y &
accomplir leurs défirs. Nie de l'avoir
dit, comme il étoit rapporté. ^
4. On doit garder les vœux quon
a faits , & par conféquent ceux qui les
mnpcnty font mécbans ; apoftatSy
îéti^
\
de la Suijfe, Liv. IX. 29
rétiques > comme tous les Moines çwi I 5 3 1 .
fartent de Religion y tous les FrêtresOR^i,
qui fe marient. Il ne faut pas croire
que ce fait un mariage , ni que leurs
femmes foj/ent des femmes légitimes y
mais elles font leurs rïbaudes j kur fait
ne(i que fornication ^ & leurs en-
fans font tous bâtards & illégitimes^
AvQÎié.
5. La Confejfion eji de Commande^
vient y & chacun cfi obligé de fe con^
fejfer aux Prêtres i ainfi que les ladres
dévoient être jugez par les Prêtres de
la Vielle Loi i ainfi la ladrerie fpirituelle
doit être jugée par les Prêtres de U
nouvelle Lot ^ qui font d'autant plus
dignes plus excellensy quils offrent
un plus excellent facrifice que les autres >
qui ofroient des bêtes , au Heu que
ceux ci offrent le précieux corps de «0-
tre Seigneur J e s u s > é' fon Sang»
Avoiié de l'avoir dit félon les com-
mandemens de 1 Eglife.
6. Les Prêtres font A'fédiatcurs en-
tre Dieu& les hommes, A voile, mais
il l'entend lors qu'ils adminiftrent
les Sacrement.
7. Ceux la font méchansm& héréii'-
que s qui détruifent les Images ,0" abat-
tent Us Croix & Ils Crucifix j lesquels
A 3 Notre
30 Hiftoire de la Keformation
ï Ç 3 T . ^^^^^ Mére S. Eglife a ordonné d'strs
O R 1 E, milieu de fEglife^afin que quand
on entre en l'EgliJe on s'en fou-
%'ienne. Défavoué.
8. Tous ceux la font ennemis de U
Croix de C h r i s Tj qui abattent les
Croix > & ne fervent qua leur ventre^
nfant de toutes 'viandes en tout tems ,
héUi ! neft ce pas une chofe déplora-
ble 3 que d'abatre a 'nfi la Sainte Croixy
vit que tant de faints & de faintes ont
été délivrez p^r le figne de la Croix ?
mais tous ceux là feront confondus, qui
nfent atnfi de toutes fortes de viandes^
Nié de l'avoir dit de la manière
<gu'ii eft rapporté.
5». Ce(l un péché mortel y 4e man*
ger de U chair & autres viandes défen-
dues y dans le tems défendu 3 comme
en Carême, Avoiîéj mais qu'il a eu
raiion de le dire.
I o. On efl tenu , foits peine de pê-
ché mortel , d'oujr U Meffe, Avoué
comme ci-defTus.
1 1 . Les méihans hérétiques, nient
que le pain, que le Prêtre confier e-, foit
tranffubftantié au corps précieux de nôtre
Seigneur. A voilé comme les autres.
11. Le Corps de nôtre Seigneur
J«£SUS-Chj\.ist cji aujji bien ci: la.mam
deU Suife. LiV. IX. 31
iun matmais Prêtre ^ d'un bon, 1531»
Avoiié , lors qu'il prononce Iss pa- O r bx,
rôles Sacramentales.
1 1 . Ces méchans hérétiques ,
nient le Sacrement', difent que U feule
foi juflifie ^ fi quelquun avolt comm:s
m péché mortel , comment pourrait- U
être fauvéen crojant ? Nié de Ti voir
dit de cette manière.
14. La Vierge Marie eft U Thréfoh
riére de grase,
15. Les hérétiques-, qui nient quon
doive invoquer Us fa'ints , peuvent ai^
fement être convaincus de faux par It
Can^tnéenne , qui ne pouvant être exau*
cée de Jesus-Chkist sadreffbit aux
apôtres, difant , O amis de DicUa
priez pour moi vôtr« Maître.
Dieu n exauce point les pécheurs^ adrej-^-
fez "VOUS a quelquun des Saints^ L€
même chofe par oit auffi par la Afére
de S, Pierre, Nié de l'avoir dit de
cette manière.
16. Les Saints- chaffint & guérif-
fent de diverfcs maladies j comme S.
Antoine» du feu. Avoué,
1 7. Qui dit que les Livres des A4ac*
cabées ne font point de la S. Ecriture^
il efi hérétique^ & neft point enfant
Ù DicHimu:s de la Sjnagcgu e^Avoué,
B 4 iS.Cf/î
3 2 Hijioire de la Kéformation
ï J3T. '8. Cvft une héréfie, de dire qu'H
Orbe» ^ P^^^^^ Ptirgatoire , & ceux
qui le n'unt font méchans & hérétiques ^
Avoué.
ip. On doit pleurer & gémir pour
les trépajfeXy & faire chanter pro fide->
Uhus ^hrifitanis, Avoiié.
20. Ceux qui ont pris la nouvelle
Loi n'ont aucun bien en eux mais nient
les articles de U Foi. Nié de l'avoii:
dit.
1 1 . Qui trouve fa femme en aduU
tire , ne peut en prendre une autre, fe-
Ion le commandement Dieu. Avoiié de
Ta voir dit , fclon les ordonnances
de l'Eglife.
2 2. Dieu na rien commandé qui
foit impoffible de fa grâce. Avoué,
23. Adorer Dieu en Efprit^ e/i con-
tre les Luthériens, Nié de l'avoir
dit.
Ces Articles ayant été propofezj
Juliani, après quelques tergiverfa-
tionsj répondit comme on vient
de le voir. Sur quoi Ton fie venir
des témoins ^ pour prouver les ar-
ticles qu il avoit niez , & ce jour
fût tout employé à cette difcuflion
jufqu'au foir, tellement qu'on fût
contraint de remettre la décillon au
lende*
delaSuijfe. Liv. IX. 33
lendemain. Jul'uni fut mis en Ii-1531;
berté, & donné en garde à un Orbe.
Gentil-homme , nommé GuilUimie
D^Arnaj, qui voulut bien s'en char-
ger , & le cautionner corps pour
corps, {a)
Le Mecredi de grand matinj 11
Juftice étant f affembiée , les Dé-
putez de Berne demandèrent que
Aiichcl Juluni 5 comme coupable
de lézeMajefté, pour avoir péché
contre Dieu , & contre lautorité
de leurs Seigneurs 5 fut puni en
corps & en biens. Juliani au con-
traire demanda d'être relâché , fou«
tenant n'avoir rien prêché ni dit, qui
fût contre Dieu , ni contre lauco- jj^u^u^i
rité des Seigneurs de Berne , qu'il eft con-
n'étoit pas fi prefomptueux queded^mné i
prêcher quoique ce fût, de lui mê- ^[ Xc^-*^
me 5 & fans l'avoir puifé dans les ti ine pat
Ecritures Saintes. Ces plaidoyez l'Fcn-
étant finis , les Juges décidèrent fore
fagement : Que s'il pouvcit prouver
par l Ecriture ^ tout ce qu 'il avoit dïty
il jeroit abfous. Là defilis il fit un
long difcours , où il entreprit de
prouver par l'Ecriture tout ce qu il
avoit prêché, Ôc prenant tous les
B 5 articles
W MS. Uorn. 10.
34 Hijiôire de la K.cformatiôn
I articles l'un après Kautre > il- tâcha
P^Bs^-de les foutenk par quelque paffage
du Vieux ou du Nouveau Teâa-
ment. Les Juges , qiai étolent tous
Catholiques , furent contens. da
cette Apologie 5 le déclarèrent ab-
fous > & le mirent en liberté. Les
Bernois ne fûrent pas contens de
ce Jugement, & à peine une heure
étoit écoulée, après la féance iînie,
qu'ils l'envoyèrent chercher par des
lergcns pour le prendre, mais on
ne le trouva pas. -Prévoyant bien
ce qui arriveroit , il étoit inceffam-
ment forti de la ViUé; & s'étoit re-
tiré en Bourgogne au grand re-
gret des bonnes Religicufes, dont
Jtiliant il étoit Confeiïeur. Le Dimanche
s évade. f^\y^Yit , jour de Pâques, il vint un
Héraut de Berne , aportant ordre au
Confeil d'Orbe, de faire toute la
diligence pofljble pour arrêter Ju-
lianii mais on lui fit voir que la
chofe n'étoit pas pofTible,
jP^^^ygl II ne faut pas oublier ici que
voulant Farel avant la décifion du procès,
prêcher auquel il fûtpréfent, pria les Ju-
point S^^ ' préfence des Députçz , de
écouté, faire lire la Patente qu'il avoic
xe^ue des Seigneurs de Banc^por-
" • . tant
de la SulJfeLlY. IX. 35
tant ordre à' tous leurs fujcts & l
leurs Bourgeois > que quand Farel
voudroic prêcher , on devoit luv
donner audience 3 le favoriftr & le
foutenir; demandant en conféquen?
ce de cet ordre 5 qu'on lui permit
de prêcher ) & qu'on lui donnât
audience. Mais à peine la parente
fut elle luë, que le peuple , fans
attendre la décifion du Confeil? /ê
mit a crkr tout d'une voix , quH
j'fiff alLit^ quon navcit que faire ds
lui, ni de fa prédication {a).
Le lendemain de Pâques, le Cor>
feil d'Orbf envoya cinq Députez à
Berne , pour faire leurs excufes aa
fujet de ce qui s éroit pafle. Leurs
excules furent reçues en partie , te
en partie rejettées. La ville d'Orbe
fût condamnée à une Amende de
deux cens Ecus d'or au foleil , pour
les émûtes féditisufes donton vient
de parler: Du refte il leur fût dir^
Quon fouhaitoit qu'ils écoutaffenc
les Sermons de Farci j Que cepen-
dant on ne vouloic forcer perfonivc
a y aller & qu'on n'entendoit pas
dempêcher en aucune manière crc
B 6 fai-
) MS. *Xhm. p, iQ. ir«
3 6 Hijîoire de la Kéformation
I 5 3 f . de faire l'office ordinaire dans
O R B E.rEglire.
rard y Lcs Députez étant revenus
^fff^^fi^vec cette réponfe , Faiel qui
niais elt . , -, ^ ^ u v ^ i
troublé avoit ordre de prêcher a Orbe >
dans fa monta enChane un Samedi rnarin>
^ion^^^' ^P^^^ Dmianche Quafimodo après
que l'office fut achevé , mais il n'eut
qu'un très petit nombre d'Audi-
teurs 3 encore fut-il interrompu par
les petics enfans> qui, au miheu
de fon Sermon , fortirent de l'E-
glife, criant heurlantj & faifant
un britit horrible {a).
Le lendemain , qui #toit le Di-
manche 23. d'Avril, Farel monta
encore en Chaire? encouragé par
l'arrivée d'un Seigneur Dépuié de
Berne 3 qui vir.t à Oibc avec le
Baillif. Il prit le rems qu'on alloic
folenmellement en procefTion à i'E-
glife de S. Germant qui étoit hors
de la Ville > mais avant qu'il eut
fî) i, la procelTion rentra, 6c vint
dans l'Eglife où il^ prêchoit. Les
enfans entrèrent le.^ premiers, &fe
mirent d'abord à fiflerîàcj ierjà heur-
1er. IL furent fuivis des Prêtres, qui
entrèrent dans l'Eglife en chantant.
Fareî
{a) id. p. II. 12.
de la SuiJJe. Li v. IX. 37
Farel voyant cela^ne pût faire mieux I 53î»
que de décendre de Chaire 3 ^ (qOikï.^*
retirer, L'après-dii ée il prêcha de
nouveau en préfence du Député
de Berne & du Baillif, &: n'eut
qu'une dizaine d'Auditeurs , com-
me auparavant {a).
Le Député de Berne avoit été I-a R^/or-
envoyé à Orbe , pour rtmiédier à ^^j^^
divers défordres. Les P.êties fai- verfée
foient tous leurs efforts pour dé- par les
tourner le peuple d'aller au prêche, ï*^^"*^^^
&. l'un entr'autres conduifit un jour
le Châcelain dans l'Eglife, pour lui
faire marquer tous les EtiangerSj
qui écoutoietit la parole de Dieu.
Un autre fe tenant fous la porte de
l'Eglife, tandis qu'on pi échoit, fe
mit à crier de toute fa force, pour
intci rompre le PiéJicareur. Le & P^^?^
Co icil y employoït auffi fes foins, ConleiK
6c dépofoit de leurs emplois ceux
d'entr-eux qui avoient du penchant
pour la Réformaaon. En même
tems les Seigneurs de Berne eûient
avii.',que les Keligieufes de S,CUire
faiioient tranfportcr leurs joyaux
& leur argent a Nojeroy en Bour-
gogne, ôc quelles y en vouloient
encore
(4) MS^ Thom. ihià.
38 Hijloire de la ï{éform.ition
ï 5 3 1 . encore envoyer davantage. Le Dé*-
ORBE.putéde Berne voyant TobRination
Réfor-f^yx peuple a ne point écouter Fa-
Sute-"" ' aiTembler le Confeii le jour
nuë pai-xuivant j & leur dit? Que puiiqu'on
les 5fr-^yoit bien écouté Juliam^ lorsqu'il
prêchoit les articles qu'on a vûs>
LL. EE. vouloient qu'on entendit
aufli la réfutation que Farel en vou-
loit faire par leur ordre: Que pour
cette caufe ils vouloient que chaque
Pére de famille allât aux Sermons
d- FareL fous peine de leur indi*-
gnatiun *.
Comme des Prêtres d'Orbe &
quelques autres avoient publié^ que
Farel ne pourroit jamais renverfet
le moindre de ces arucles de Foi>
s'il n'étoit foûtenu des Seigneurs
de Berne 3 qui vouloient l'emporter
par autorité 3 le Dépucé dit de leur
part à i'aîTembléei Que LL. ED.
éroicnt difpofées a les écouter , a
rendre juftice à chacun , &: a n'ufer
d'aucune violences Qu^ils n'avoient
donc qu'a attaquer Farel publique-
ment. Il les exhorta a s'abftcnir
de détourner le peuple, Scd'inter-
rom-
^ B. Inftr.7i. ^ MS. Thm. & MS.
Ami', 121.
delà Snije. Liv. IX. 39
îompre les Prédicateurs > & enfin I S 3 1 •
il déclara aux ConfeiJlers, que LL. O s. £ 2..
EE. ne vouloient fAs foufrir quau^
ounftit dépofé de fa charge ^ pour avoir
^mbraffé la Réformation
Pour donner fatisfaflion au Dé-
puté de Berne on publia cet ordre
par toute la ville. Farel prêcha ^-^f'?
fix jours défaite, & chaque jour ^[ j^^^^
deux fois. Le peuple oI>éic les de iuita-
deux prémicrs jours, mais dès le
troifiéme il ne voulut pas y re-
tourner 5 de Farel n eut plus quefes
auditeurs ordinaires. Ces prémices
delà Réformation dans Orbe étoient
Fierre Viret , les deux frères Ho-
lards , Alarc Romain , Antoine Se-
oreflain > Claude Darbonjcr quel-
ques autres {a),
Pierre V 1 r e t , dont la mé- Hifloire
moire nous fera éternellement en de P. vi*
bcnédi(flion , étoit Bourgeois d'Or-
bè, fils de Guillaume Viret , tondeur
de drap. Il naquit flan 1511. Il
commença fes études dans Orbe
même , & de là fon Pére Tenvoya
àPâ^
* B.inilr. ihU. Se MS. Amf.
{*) MS.rW. II. 13.
t Melch. Ad^a» Vit. Thcologor. fxtc*
fcr. p. 110.
40 Hijloire de la Kéformation
1531. à Paris, où il demeura deux ou
O K £ E. trois ans > & y fît de très - grands
progrès dans les fcierjces. Mais
fur-tout il y fût: éclairé de la lumiè-
re de l'Evangile, & bien-tôt il fut
contraint de s'enfuir pour éviter la
perfécution. Il vint à Orbe quoi
qu'avec peine , où à la follicitation
de Farel il fe voila au Miniftére de
l'Evangile 5 & il travailli telle-
ment auprès de fon Pére & de fa
Mére > qu il eut le bonheur de les
gagner à Je> us-Christ. Il eut deux
frères 5 Antoine ôc Jean j dont le
dernier mourut fans enfans. Il
prêcha pour la première fois à Or-
be, le 6^- de May 1531. De là il
fût envoiè à Granfon , où il prêcha
quelque tems {a)
Dans le même tems les Bernois
envoièrent de nouveaux Députez
Le iz. à Orbe, * pour prendre un Inven-
taire de tous les biens du Couvent
de S^^' Claire, afin d'empêcher aux
Religieufes d'en rien diltraire. Et
comme jufqu'alors les Minifties
avoient é é dans des logis publics*
où ils vivoient à leurs ùslïs , les
Députez curent ordre de ks pour-
voir
W ///. ibideîîï;»
ae La i^mjje, j^i v. i a.. 41
voir d'un logement & d'une pen- ^ 5 3 I »
fion , aux dépens des Couvens, qui O r s e,
avoient le perfomat de quelques Cu-
res (a).
Après Viretj Farel confacra pour^^^'^^^^
Miniftre un nommé George ^ri- ^''/^^j'^^^
VAT > furnommé CMleis , fils de ^atif
Claude Grhat, Bourgeois d'Orbe. d'Orbe»
George Grivat avoir été première-
ment enfant de Chœur à Laufàn-
ne. Etant revenu dans la m.aifon
de fon Pére , le Clergé d'Oibe le
retint pour fon Msître deMufique^
6c il exerça cet emploi environ deux
ans 5 après quoi il embraffa h Ré-
formation 5 au grand regret de fon
Pérc, Il prêcha d'abord à Orbe i«
10, de May: & de là il fût MiniC
tre à Avcnche^ où il demeura jut
qu'à fa mort 5 prêchant avec une
grande fatisfa^flion de fon Eglife,
Il y mourut de pcfte l'an 1550.
laiffant une fen.me & quelques en-
fans {!)),
Les Réformez d'Orbe prirent
courage dans cet intervalle de lems^
fe donnèrent la liberté de fe-
couër le joug des ordonnances de
lEgli-
U) MS. Amp. 111. b.
M MS. Thom, 13. 1-4.
'42 Hîjloire de la K.éformatton
I J 3 rEglIfc Ro Tiaine , négligeant Tob^
Or B E. fervatiofi des fêres , & mangeant
de la viande dans les tems défen-
dus. Cependant quelques-uns d'en-
tfeux abuCérent de la liberté dont
ils jouiffoienr 5 & s'imaginant qu'il
v.xàs étoit de Teffence de la RéformanoBi
ùts Ré- de brifcr les Croix les Images >
formez jj^ n'^q laifférent aucune. De pa*-
relis excès n ont ja mais ece ipprou^
vez par les ge^is fages (4).
Il y avoit à G/anfon deux: Cou-
vents fort riches , Tan de Moi nés
noirs, de Tordre de *S'. Benoit, Se Taii-
trc de Cordeliers Non- Réformez,
De même iî j; avoit à Orbe deux
Couvents, Fun ds Cordeliers, l'au-
tre de Religieufes de S^^* Claire ,
qui étoient joints l'un à l'autre- pac
un Temple bâti entre deuxj en telle,
forte que les Religieu/ès pouvoient,
, fans fortir de leur Mailbn, aller en*
tendre le fervice des Cordeliers »
par une galerie attachée à la mu-
raille de TEglife. Il y avoit même
une porte dérobée > * par où les
deux
(.:,) Idem.
^0\\ l'a découverte il y a environ 4^
ans, lors qu'oa dCmolit h voûte de cecic
tglife.
r de U Smjfe. Liv. IX. 43
deux Couvents avoient communi. 1^3 1 ;
cation enfemblci & dont les Reli-O REE.
gieux & les Rcligieufes favoicnc
bien profiter.
Les Bernois 5 efpérant que la Ré-
formation s'introduiroir enfin dans
les deux Bailliages ^Oïbe & de
Granfon > y envoiérent des Députez,
pour mettre en Inventaire tous les
biens des Eglifes^ & les Fribour-
geois y en envoiérent aulîi , afin
qu'il ne fe fit rien fans eux. Fare!^
qui étoit encore à Orbe, y prêcha ea
leur préfence. Chri/iophle Holard >
voulant fignaler fon zélé > brifâ
publiquement une Image» Le peu-
ple s en plaignit j les Fribourgeois
le firent aufTi. Les Députez de Ber-
ne promirent de l'en cenfurcr. Mais
nonobilant cela , il en abatit en-
core d'autres 5 & il ne ceiTa point
qu'il ne les eut toutes abbatiies.
Dans le même tems, les Députez
de Berne , voyant que Farel n avoic
qu'un fort petit nombre d'auditeurs,
ordonnèrent aux Pierres & aux
femmes de l'aller écouter huit
)0'j.rs durant, ce qui fût fait.
La Peniec6:c étant venuë , *
Fifcl céléi^ra, la S^'^' Cene ave: fon
petit
44 Hiftoirede la Réformât ton
ï S 3 T • P^^i^ Troupeau. Après avoir pré-
Orbe. ché de grand matin, il diftribua
la Communion , avec des hofties
& du vin. Les Réformez reçu-
rent la Communion à genoux.
Prémié- raporte qu entr'aurres paroles
x^ Cene de Liturgie, Farel demandoitaux
Réfor- Communians , s'ils Ce pardonnoicrit
(Xorle. uns aux autres^ oc aiant repon-
du qu'oui, il leur donnoit TEu-
chariftie. C'cft là la première Cène
qui fût célébrée dans Orbe. Les
Communians fûrent. Hugonin d' Ar^
Yiâj *, Chri(tophle Holardy fa Mère,
JeAH Cordtji 3 fa Femme , Guïllau*
me FiiCt, Se George Grivat ^ dont
j'ai parlé. Ap è; qu'ils fè furent
rerirez , le-. Pierres vinrent dans
l'Egli/e à leur tour; pour y chan-
ter la Mefre(^).
Le Mécreii après la Pentecôte j
dernier jour de May , les Religieu-
fes d'Orbe, reçurent un ordre de
Berne d'aller écouter les Sermons
des Minières. Les Religieufes
pour parer ce coup , envt récent
auprès de la PrincelTe d'O arge,
qui refidcrit à Noznoj , la prier
de
^ Dont il a été parlé ci devant p^27*
{a\ Thom, l^. l6.
dslaSuijJe. Lî V. I X. 45
de les recommander à Berne. Cet- 1537.
te Princefle envoya deux Gen-OR»E,
tils - hcmmes à Berne & à Fri-
bourg , pour faire révoquer cet
ordre, mais ils n'obtinrent rien,
Ainfi on leur prêcha trois ans du-
rant, tous les jours >& au bout
de ce tems - là Tordre fût révo-
qué {a).
Le Dimanche 5 2. Juillet, C/;n/- Non.
tophle Holard abatit le grand Autel, J^^'l^^^^
qui étoit au Chœur de la grande jf^^for-
Eglife. Les Catholiques en furent mez
extrêmement affligez & en firent à^orh,
des lamentations tragiques, comme
fi toute la Religion eut été perdue,
ou que Dieu lui-même eût été ar-
raché de fon Trône. Il y avoit à
Orbe fept Eglifes , grandes ou pe-
tires 5 ^ dans ces Eglifes vingt fix
Autels. Chriftophlc Holard , ac-
compagné de dix ou douze autres
Réformez, en renverfa la plûpart^.
Mais ks Catholiques ne lailTérent
pas pour cela de célébrer toûjours
leur
M id. 16,
^ Pierre fleur Hit , qu'il Ics rcnvcrfa
tous, fans en laiflcr v.n fcul dt' relie.
Mais le co. traire paroit par l.i fuite. Vo-
>;ez ce qui eft dit ci drlfous, de ce c]ui
k à Orbe, en'Jauvici 1^32..
'46 Hijloire de la Kéformatiof^
|f53'ï' leurs Oiîîces accoûtumez dans ces
Eglifcs 5 & fe fervoient de table
aulieu d'autel pour dire la Melfe [a],
La Réformation ne s'introduifit
pas à Pajernc ? avec plus de tran-
quillité 5 que dans les autres lieux
I^AYER- du pays. La Ville de Payerne écoic
liée avec celle de Berne, par un An-
cien Traité de Combourgeoifie, ou
d'Alliance défenfive, peut-crre auffi
ancien , que la Ville rnéme de Ber-
ne. Du moins dans un Afle que
j'ai vû , du renouvellement de cette
Alliance, daté du mois de Février
de Tan 1 3 4.3 .'^ il eft dit expreiîsment,
que c-ett^ Alliance étoit ancienne.
C'éroit en vertu de cette Alliance>
que la Ville de Payerne avoir four-
Com- ni du fecours aux Bernois 5 l'an
mence- ir^o. contre le Duc de Savoye.
men: de _ ' ^ , ^ j f,
Referma Dans le même tem.s ceux de Pa-
tion yerne promiirent aux Bernois , de
'^^"^^f^' jailTer prêcher librem.cnt la Réfor-
me Vjlle. . , „ , .
mation chez eux , oc de ne faire
aucune infuke à ceux qui Tembraif.
fercienr. IVlais ces p.'om.cflts fuient
traverfc txécutées. Il^ Liloient tous les
vive- jours quelques infultcs aux Réfor-
ment, mez 5
(a) MS- nom. 17. b. &lg,
^4rftrii/, de rAXl^KN E,
\
deUSui^e. LI^^ rx. 47
inez; empêchoient leurs Bourgeois j j3x,
ôc les autres , 4'embralTcr la Ré-
formation j ne vouloisnt pas per-
mettre qu'on lût la parole de Dieu,
ni qu'on s'en entretint , beau-
coup moins qu'on la prêchât publi-
quement.
On en faifoit tout autant à Avm- ^J^-^""
che , 6c fans aucun égard aux pro-
melîcs, que la Bourgeoifie avoic
faites aux Seigneurs de Berne , ils
punilToient ceux d'entr'eux qui al-
ioient à Moîat , ou ailleurs > écou-
ter les Miniftres.
Dans ce tems-îà la Ville de Ta-
ycrne fouhaita de renouveller fon
Alliance avec Berne. Les Bernois
y confentirent , & députèrent quel-
ques ConfeilJers pour ce fujet , au
commencement de Juin. Ces Dépu- Hépa.
tez paffans à ylvenche, h 3- J^i^^^^^rtî
y âffemblérent le Con/êil , & lui pour
remonticrent de la part de leurs ^omenir
Seigneurs. jgr^'ils étoi-ent fort v
>, furpris de ce q'.ie , contre la pro- Aienche
» meire que le Conlcil leur avoir
» faite, les Réformez étoient in/ultés
inquiétez , Se niême punif , lors
?5 qu'ils aJloient éconier la parole
t) de Dieu: .Q£k la vérité leiu in-
tention
48 Hifioire de la Kcformation
rj3l. >^ tention n'étoit pas , qu'on
forçât perfonne a aller au prê-
che, mais qu'ils fouhaitoient feu-
>j lement> qu'on laiflat à chacun
>, une entière liberté de Confcience,
» pour aller au prêche ou à la Mef.
>j fe >5 . Ils les exhortèrent donc a
s'abftenir de toute violence *.
Député De là les Députez allèrent à
à^P^yel^- pour renouveller l'Alliance,
ns, mais avant qu'e de le faire : ils re-
prochèrent aux Payernois les ava-
nies perpétuelles ^^'ils faifoient
>, aux Réformez , contre la pro-
5> meffe qu'ils avoient donnée à LL.
5, EE. l'année précédente. Ils leur
5> déclarèrent que LL. EE. étoient
très mal-fatisfâites d'une pa-
>, reiile conduite , & qu'ils avoient
>, ordre de leur demander une exé-
cution entière de leurs promefles*
& pleine liberté Confcicnce pour
5, ceux qui voudroient cmbraffer
5, l'Evangile, faute de quoi ils s'en
re^ourneroient fans renouveller
l'Alliance + >, . Il y a apparence
que la réponfè des gens de Payer-
ne ne fût pas fatisfaifante , puifque
l'Al-
^ MS. Amp, m. B. inftr. 77.
■tUS.Amp, & B. inftr.
deU Suife. Lîv. IX. 49
TAlliance ne fût point renouveJîéej i 5 3
& que cette affaire fut différée jus-
qu'au mois de May de Tannée Sui-
vante. Sans doute les Bernois 3
avant que de s'engager de nouveau>
voulurent voir quel fonds il j
avoit à faire fur les promeffes de
ceux de Payerne.
IV. Tous les rnouvemens> qu*oa
âvoit vus à u4vmche , à Payerne^ de
à Ode , contre Farel & la Réfor-
mation qu'il prêchoit, n'étoient que
des bagatelles , en comparaifon de
ceux que l'on vit à Granfon, où il Gr Ac-
courût rifque, plus d'une fois, de^^"^*
perdre la vie. Il alla d'Orbe à
Cranfon dans le Printems, accom-
pagné de Claude de GUuîiràs , MiniS
tre de Tavanes^ dms le deifcin d'y ^^^^^^^^
prêcher. Mais ils y fûrent dabord ^Jrunjb/t,
mal reçus l'un 8c l'autre j ( non- & y
obftant que les Seigneurs de Berne ^^^^^^J^
euifent écrit au Baillif, &:au Piieur, (îi^yie.
JMcoUs de Dksbuih , de lailTer prê-
cher paifîblement la parole de
Dieu 5 ) de forte qu'il n'y pût faire
que peu de fiuir. Le Gaidiendes
Cordelicrs, nommé Frère Guy. s'op-
pofa à Farel , difaiit qu'il e.oic un
héiétique, & que quant à lui A
Tom, IF. C fouiien-
50 Hiftolre de la Keformatîon
I jjï, foutiendroir fa Religion jufquà la
G R A morr. QLielques Réformez voulu-
s o N. rent cnfuire aller au Prieuré d'en-
haut avec Farel, mais les Moines
ne les voulurent pas laifTer entrefi
Le Sacriftain menaça Farel d'un
piftolec , qu'il avoic fous fa robe,
II voulut même tuër le Miniftre de
Tavanesj & enfermer Farel dans
le Cloître 5 & un autre voulut per-
cer le Miniftre de Tavanes d'un
coup de couteau. Lors que de
GUuîïnis y voulut prêcher , on l'en
empêcha par un tumulte, 6c Ton
tint les portes des Temples fer-
mées, pendant quinze jours^ de forte
que les Miniftres furent contraints
de prêcher devant les Temples. Ce-
pendant les Seigneurs de Berne
écrivirent au Baillif, de punir ceux
qui avoient commis ces défordres»
& fur tout ceux qui avoient voulu
affaflTiner le Miniftre de Tavanes ;
mais il n'en fît rien. Bien loin
de là \ les Catholiques fe plaigni-
rent injuftement que les Réformez
avoient voulu entrer par foi ce > au
Prieuré. Là defTus les Bernois y
» Le 12. envoyèrent * deux Dépurez, qui au
fonir de Neuchatd , allèrent à Cran-
« de la Suijje, Liv. IX. jr
fbn > où ils firent venir Farel, pour [ Jjr »"
s'informer exadlement de tout ce Députa-
qui s'étoit pafle. Us exhortèrent ^^"^
la Bourgeoifie , a permettre qu'on Cj-^^nfon
leur annonçât la Parole de Dieu ,
puifqu'il y en avoir quelques-uns
d'entr'eiix qui le fouhaitoient s &
ordonnèrent Que les Eglifes des
deux Couvents fuflent ouvertes>
afin que les Miniftres y puffent pr^
cher > & que tous ceux qui vou-
droient les aller écouter, puflent le
faire fans empêchement j Que per-
fonne n'eut à les rnfulrer , ni les
maltraiter , déclarant que LL. EE.
vouloient abfolument que la Parole
de Dieu fût prêchée. Us cenfu-
rérent aufTi rudement les JVloincrj
qui avoient injnrié Farel, en l'apel-
lant hérétique^ &c fils uejuif , vou-
lant qu'ils piouvallent ces inji^res>
ou qu'ils fe rerra(nalTenr. Enfin ils
cenfurérent à ffi le EailliF , de ce
qu'il n'avoit pas puni celui qui
avoir voulu ti ër le Minilt e de Ta-
vanes 5 d'un coup de couteau, ni
ceux qui avoi.nt caufé du rumulre
pour l'empêcher de piêthei, & qui
avoi'.nt tenu fcin,é(S Ks poit(.s
des Eglifes ; pendant 15. jours. Us
C a allcient
5^ Hijloire de la Tieformathn
*î 5'3 1 . allèrent au Prieuré des BénédidlinSâ
Gran- pour défendre Tacftion dCvS Réfor-
£ o n. niez , & tirèrent le Sacriftain en
caufe j puour avoir voulu enfermer
'^Farel, &l affafliner le.Miniftre de
"Tâvanes *.
Mais ce fut encore pis dans le
■mois de Juin 5 le jour de la *S'. Jcan ^
^ & le lendemain. Depuis le der-
nier tumulte jufqu'alors , tout s'é-
toit terminé à des difpuresjque/vîyf/.
Tiret 6c d'autres? avoient avec les
Moines j particulièrement avec le
Gardien , qui prêchoit comme eux^
tous les Dimanches , & qui paffoit
pour fàvant. Ils fe refutoient les
uns les autres j & l'on s'en tenoit
îà. Mais le 24. Juin , jour de la
^^ou- S, Jean , Farel étant allé aux Cor-
T^ullf^' ^^^i^fs avec Glautinis 5 pour euïr
caiifé îe Sermon d'un Cordelier venu de
par le Laufanne , rinterrompic & le re-
ztle im- £^ fjjj. quQj Châtelain du lieu
dcf^r^l, chargea barel dnijures & de coups
de poings. A ce fîgnal , tous les
Jufticiers , le peuple , les Corde-
liers , & plufieiirs perfonnes qui
étoient venuës d'Yverdun , fe jec-
îérent fur les deux Minilb^s 5 les
chac-
"'^f' MS. Amj>, 111. B. Inftr. 70.
de la Sî^ijje\ L I V . I X. 5-3
chargèrent d'injures 5 de coups de I
piez & de poings, ^ les malrrai-G r a m
terent cruëllenienr. Glautims Técri- ^ ^
vit, le même jour 5 à j^^^w Jaques
de ^^^ATTE V ILLE Scigncur de
Colombier , Député de Berne , qui
fè trotivoit alors à Colombier, belle
terre firuée à 3. lieuës de Granfon^
au bord du Lac, dans le Conté de
Neuchatei. Cependant quelqu'un
ayant donné un faux avis auxCcf^
deiiersj que les Réformez; vouloient
abatre leur grande Croix , ils s'ar^
mcrent, & Hrent quelques difoofis»
tions pour les en emf ècher. De
Vratteviiley ayant reçu la lettre de
GUuîims j partit le * lendemain î .^^
pour Granfon , ce y ecant ariive,
il alla dans le même T emple pour
ouïr le Sermon duCordeliur. Corn*
me il montoit fur la galerie , il
rencontra des Moines qui l'arrête^
rcnt fur les degrez, & ne voulu-
rent pas le laiiïer pafler. Il y ea
eut même un , qui voulut le pout
fer en arriére. Son Vaht repoulTa le
Moine:& le contraignit de remonter.
Il lui feniir une hache fous fa robbe;
après pîuHeurs ciTorrs, bien de
laréfiftancc de la part.duMoineJl la
C 3 lui
54 Hijloire de U Kéformation
îç3î,lui prit, 6c voulut le tuër 5 mais
G R A N ' fon Maître l'en empêcha. Pendant
SON. ce tems-là il y eut un vacarme ef-
froyable dans TEglife. Néanmoins
il n'y eut que du bruit , qui fut
enfin appaifé. De FFattevïlle mit
fon Valec fur les degrez de la ga-
lerie 5 pour empêcher que perfonne
n'entrât ni ne fortit de là. Le Cor-
delier prêcha> après fon Sermon,
Faïel écant monté en Chaire difpu-
ta un peu contre lui, après quoi
il defcendit & fe retira. Cepen-
dant les deux Moines, qui avoient
voulu fermer le pafTage à de Wat-
teville , furent mis en prifon par le
Baillif 5 à Tinflancc de ce Seigneur.
On difoit qu'il y a voit d autres
Moines, qui avoient eu aufllî des
haches, & qu'il y avoit une con-
fpiration fecrére, pour afTa/Tiner les
Miniftres 6c les Réformez , & que
c'étoic pour ce defTein , qu'il étoit
venu tant d'Etrangers armez , par-
ticulièrement de ceux dTverdun.
C'eft-là la relation , que De Vl^dt^
t-:vïlU en écrivit lui-même à LL.
EE. le même jour , 25. Juin *.
H
^ MS. GrooSf.
delaSuiffe, Li v. IX. 5$
Il y eut d abord à Granfon 2. 1^32;
Députez de Berne envoyez pour g r a
Ajoinrs à de WarteviJie > qui son.
examinèrent * le Moine , qui * Le ^%*
avoit eu la hache, & voulurent fa- J"^"*
voir, pourquoi il Tavoit prife?
Il répondit, que cétoit pour em-
pêcher Farel , de rompre le Cruci-
fix , qui éroit fur la galerie , dont
le Couvent lui avoit confié la garde,
Enfuire interrogé, pourquoi il avoit
repouffé De VVdttevïlle ? Il dit,quil
ne le connoiffoit pas , &c. Les
Députez voulurent qu'on mit ces
Moines à la torture j mais la chofê
ne s'exécuta pas +. Ils les firent
feulement attacher à îâ cordô , &
mettre la pierre au pié , mais ils
ne les firent pas tirer. Ces Moines
prateftérent folemnellement 5 quils
navoient eu aucun autre deflein,
que d empêcher Farel , de monter
fur la galerie , afin qu'il n'interrom-
pit pas leur Prédicateur , comme
il avoit fait le jour précédent {a).
On découvrit pourtant une tren-
taine de femmes , qui âvoient
conjuré de faire un mauvais parti à
C 4 Farelj
t Ibid.
W MS. Gronjf,
56 Hijloîre de la ^déformation
Farel ^ entre lesqu'elles il y en
Gran avoit une entr'autres qui avcic
SON. voulu aller fur la galerie ,
avec fon tablier plein de cendres &
de terre , pour jetter dans la bou-
che de Farelj quand il parleroit [a).
Pendant tout le tems de leur pri-
fon les deux Moines, furent bien
traitez : & au bout de quinze jours
on les relâcha (^). Durant ces
quinze jours on mit fix hommes
en garnifon dans leur Couvent ,
pour le garder , & empêcher que
les' Religieux ne s'enfuïlTent , &
n'emportâlTent les biens de la Mai*
foni Ds çes deux Moines ? l'un
s appeîloit Gonclot y l'autre Tiffor,
Deux ans après , ils enibnlicrenÊ
tous deux la Réformation, ^l'un
fût Miniftre à Fontaine proche de
Gran fon 5 ôc l'autre à Bavojie ( c );
& Chavornay.
^^^9^- , Dans cet intervalle Farel alla-
Fye ,^ & prêcher dans les villages du Bal-
en quel- liage. Il fut d'abord écouté favora-
ques au- ble^îcnt dans celui de Fies , ou Fye.
très Vil- « \ • Al/ 1
bges. Après y avoir preihe quelques
jourS:.
M MS. Grooff.
Ib) MS. Thom, 16. b. 17.
(r) ib. 17.
de la Smjfe. Liv. I X. 57
jours , ii y fît tant de fruit , que i 5 31.
les Réformez l'emportèrent en nom- G r a n-
bre fur les Catholiques ^ & profi- son»
tant inceffamment de la conjondu-
re, il fît alTembler \\ Communau-
•téjau commencement de Juillet,pouj:
mettre la Religion en fuffrages 5 Sc
là à la pluralité «des voix la Reli-
gion Réformée y fut introduite, &
la Catholique abolie. Les Sei-
gneurs de Fribourg s'en plaigni-
rent , comme d'une infraâion fait^
à leur autorité , & en firent de
grands Griefs à Berne contre Fareï.
Les Seigneurs de Berne n'approuvè-
rent pas non plus la conduite de
Farel à cet égard. Ils lui en écri-
virent leur fentiment *^ 6c lui or-* r^e 7-
donncrent ds s'abftenir à l'avenir
de ces fortes d'a<fliGns 5 qui ne
convenoient qu'à des Magiftrats
Souverains , ou à leurs Députez :
Cependant , prêchez librement , la
Parole de Dieu, lui difoient-ils j &
lors que vous apercevrez que le Peu-
pk la veut embraffer : ou que la plus
grande partie fera pcrfu.xdée a le fai-
n-y faites le nous [avoir. Nous y envoie^*
rons j^os Députez y pour mettre -la,
derni^e mm a cette affaiie. Ou fi
C 5 4'cu>:
5 8 Hiftoire de la ReformatioH
ï 5 3 1 • ^'^^x mânes ils veulent sajfembler pour
Gra recevoir l'Evangile i nous ne le rejuje^
^ û roris pas. Cela neft pas tonttairey aU
paix Nationale , conclue à Brenigar-
te > que les Fiioourgeois allèguent joU"
vent Il y eut tncore quelques
autres villages , où la MelTe fût
abolie par les paffans.
Non- Le Jeudi 6, Juillet , Chri[lophlc
Holard &c Antoine Tavel alléient
Orée, ^ trouver le nouveau Châtelain , An^
toine "Secreflain , qui avoir été mis à
la place d'Antoine Agafje , & firent
^ entre fes mains une accufation cri»
minelle contre les Prêtres j les ac-
cufant d'être des meuitriers, offrant
de fe rendre prifonniers avec eux.
Là-deffus on les envoïa en prifon>
& l'on ordonna aux Sergens d'y
conduire auffi les Prêtres , Il y en
eut un, nommé Pierre Bovey yhoïumç.
puiffant & vigoureux , qui rélifta
tellement aux Sergens , ôc les bat-
tit fi bien 5 qu'ils le laififérent aller.
Ils n'en prirent qu'un , nommé
JBlaife Floret , qu'ils conduifirent en
prifon. On les traita tous honnê-
msnt, foit pour le logement > foit
pour la nourriture j &. ils avoient
^ ^erne Latin. MiiTiv. 305.
I delaSuife. Liv. IX. 59
Ppermiiïion daller par tout le Châ- IS3I»
teau librement. Mais pour les au- O r b e.
très Prêtres; le peuple fe mit en
armes pour les deffendrej 6c du-
rant fix jours la populace mutinée
fut toujours dans les Eglifes avec
toutes fortes d armes, pour s'oppo-
fèr à tous ceux qui auroient voulu
les faifir , & les empêcher de dire
la Méfie. Le Dimanche p. Juillet,
le Banderet de Pierre fleur fît aflem-
bler toute la Communauté, & leur
demanda, s'ils vouloient tousper-
Cftcr dans la foi de leurs Pérès ?
priant ceux qui étoicnt dans ce
îentimcnt de lever le doigt, 5c les
autres de fc retirer. Là deifus toute
Taffemblée leva le doigt 8c ils protes-
tèrent tous, qu'ils étoient réfolus
de garder la foi , d'imiter lès actions
& les mœurs de leurs Pérès. Après
cette déclaration il fut refolu de
pouffer l'affaire des Prêtres, au nom
de la Bourgeoifie ; & l'on recou-
rut à Fribourg. Les Seigneurs de
Fribourg, ayant apris la détention
du Prêtre, le firent relâcher , &:les
autres demeurèrent en prifon juf.
qu au 22. Juillet, qu'ils furent aiifii
tiargis, Mais les deux Réformer
c 6 ,
60 Hi/loire de la K^formation
1 5 3 1 , HoUrd' & Tavfl , furent repris pe>iî
Orbe, de jours après & conduits en pri-
fon , avec douie ou treize autres,
de leur parti, pour avoir abatu les
Autels, & ils y furent tenus étrci^
tement pendant trois jours , au
pain Se à l'eau *•
Le Dimanche 25. Juillet, Jean?
H G L A K D , ou HouLird, Bourgeois
d'Orbe , frère de Chnftophle , prêcha
Hiiloire< pQUj- I3 première fois à Orlcy dc^
IhUrd!^ vant les Religieufes de S^^- Claire,
îl avoit été dès fon enfance defti-
né par fon Pére à être homme d'E*
glife. Il aprit d'abord laMufique,
c étoit par là qu'il falloit commen-
cer: il s'en dégoûta , & fut à la
guerre pendant quelque peu de
tems, mais il revint à fa prémiére
profeiïîon, fut fait Chantre de
la Chapelle du Duc de Savoye à
Ghambery. De là il prit Tordre
de Prêtrife , &: y vécut fort long-
tems en tiès-bonne réputation. Il
fût Chanoine de TEglife Collégia-
le de S, Nicolas de Fribourg , ^ en-
fiw Doyen j vivant dans une gran^-
de cftime. Dans la fuite ayant ou-
vert les yeux à la lumière de
l'EVaiî-
MS. ThQTTt, 18. 19.
de U Smfe. Li V. IX. 6i
fE/angile, il entretint fecrétement l^'i l.
un commerce de lettres avec les Mi- O r b f.
niftres de Berne ^ ce qui ayant été
découverte il fut mis en prifon. Les
Seigneurs de Berne demandèrent
fa libeTe. A leur confidération
le relâcha j mais il fût banni de
Fabo'jrg. li fe dévoua donc au
S:int Miniftère, & fût d abord Mi-
niftre àla Bonne P'ilU près deBienne.
De là les Bernois l'établirent à Bay
ou Bex 5 dans le Gouvernement
ô^Aîgle. Il fat marié trois fois^ 6c
eut trois enfans de fa féconde fem-
me. Il mourût à Orbe ie 24. Sep-
tembre 15(^9. ayant demandé fon
congé quelque tems auparavant) à
caufe de fon grand âge^ pour vivre
en repos lerefte de fes jours*.
V. Pendant ces troubles de \i
ville d'Orbe, les Réligieu/ès de S^^'-
Claire, qui avoient bonne envie de
fe retirer en Bourgogne 5 avec tous
lés biens de leur Couvent, négociè-
rent fccrérement pour ce dcffein ^^^^^^^"1
avec Madame Philiberte de ques Re-
Luxembourg , PrincefTe d'Orange, ligîcujes.
Elle leur envoyoit routes lesfèmni-
ncs un M'^iiTager, par le moyen du-
quel
MS. Thom, vj, b. ao.
62 Htjloire de U Réformation
I S 3 1 • S"^^ ^^'^^ donnoient de
Orbe, leurs nouvelles, & envoyoient en
Bourgogne , la plupart des orne-
mens deTEglife, & leurs plus pré-
cieux meubles. Enfin , le 2 8. Juillet,
dix fept d'entr'elles fortirent de nuit
de leur Couvent, efcortées de deux
Religieux , & du Banderet de Pier-
refleur , qui étoit aufTi de leur Com-
plot, & qui, (comme il nous l'a-
prend lui même,) fondoit en lar-
mes à la vtië de ce trifte Speftacle.
Elles montèrent hors de la ville,
fur des chariots, que la Princeffe
leur avoit envoyez , & elles allè-
rent à Aoferojf , où cette généreufê
Dame les reçût avec grande joye,
les attendant avec toute fa Nobleffe»
Elle les logea dans la maifon du
Seigneur de VFufiens , où elle les
entretint environ un an {a). Je
remarquerai ici à cette occafîon, que
Tannée précédente 1530, le Prince
Généro- à^Otarge , qui commandoit une ar-
fité du mée Navale dans la Méditerranée 3
d'o an ^^^"^ trouvé fur des VailTeaux ,
ge erv"' quantité de Bourgeois & de Sujets
vers de Berne prifonniers , qui avoient
quel- été dans les guerres de France &
notSt
W MS. Thom-ii, o, 11.
dtUSuijfe. Liv. IX. 63
de Naplesj les délivra généreufe- 1531.
ment de leur captivité. Les Sei-OREE.
gneurs de Berne, l'ayant appris, en
écrivirent * à la PrinceiTe fa M ère , ^j^ful^y
pour Taffurer de leur reconnoiffan- isso.'
ce (4). Ils la prioient en même
tems d'avoir la bonté, quand elle
ccriroit au Prince Ton fils , de lui
marquer qu'il leur fera plaifir de
leur envoyer les noms de tous ceux
qu'il avoir délivrez, afin qu'iL fâ-
chent qui font ceux d'entr'eux, qui
font mortfi » ou encore en vie , &
qu'ils le prient inftamn.ent de re-
chercher encore tous ceux qui fe-
ront ou pourront être iur les V^aif.
féaux 5 lui offrant toute forte de re-
connoilTance.
Mais pour revenir à nos Reli-
gieufcs d'Orbe 5 le bruit de leur
évafion s'étant répandu dans la
Ville, le Bâillif alla voir l'Abbe/Te:,
& lui demanda , pourquoi fcs filles
5\'toïent retirées ? L'Abbefle répon-
dit , que la f^im &: la difettc les
avaient chalTées , & que d'ailleurs '
elles éroitnt perpétuellement en
crainte de quelque mauvais traite-
ment
W tatin. Miffiy. 2i^j.b>
64 Hifloïre de la format ion
ï'5 3 F . nient (/î). En effet elles étoienî
© R. B H, pauvres , & j'ai trouvé dans les
Regrres du Confèii de Moudon,
qu'elles firent quêcer alors par le
pays , apparemment pour leur
voyage 5 6c le 27. Juillet, veille
de leur départ , le Confeil de Mou-
don leur fît donner deux florins
de Savoy e par Charité. L'AbbelTe
demanda aufTi au Baillif permi/Tion
de fe retirer , avec les autres Reli-
gieufes, -qui étoient reftées, mais
il la leur refufa , & mit à la porte
de leur Couvent une garde d'une
douzaine ds jeunes hommes , tous
Réformes pour les empêcher de
l^ou- {çfiix^ fans permifïîon ( ^ ). Cette
^X^'^'aaion du Baillif mit le peuple
en fureur. Conduit par les prin-
cipaux & les plus apparens dont
étoit nôtre Auteur le Banderet de
T'/Vz-r'^/c^r^ils allèrent tous demander
qu'il 6tât cette garde, &; laiiTât ou-
vrir le Couvent, afin que chacun
pât entrer dans- l'Eglife. D'abord
li le refufa vrnais voyant en fuite
que le tumulte alloit en augmen-
tant, 5c craignant? qu'il nea arr>
vât
(î) MS. Thom, J. c.
Ibl MS. 'lijQm.'h'c.
de 'U Suîfje. L I V. I X. 6 S
vât plus de mal , d'autant plus V^Sf»
que c ecoit alors * la fêre de ^S". P f
Germain , Patron de la Ville , li let.
renvoya ces gardes , & fit ouvrir
le Couvent, après quoi le peuple
y entra en foule. Cependant, com^
me cette émûte étoit d'u» mauvais
exemple, le Baillif fit mettre en
prifon i*, ceux des pl^s apparens, + Le^J-
qui en avoient éré les Auteurs. Le
Confcil envoïa fur le champ deux
Dépurez à Berne fîc à Fribourg ,
pour follicirer leur élargiffcment. Ils
l'obtinrent, mais à condition qu3
ces gen&-là payeroient cent écus
d'amende pour leur foulévemens
{a). Ils prétendirent la payer de U
bouife commune de la Bourgeoifiej
Mais lès Seigneurs de Berne s'y
oppoférent, ïc voulurent qu'ils la
payalTent chacun de fon bien pro-
pre , ( puifque les Réformez, qui
étoient aufli Bouigeois , n'avoient
point cû de part à cette fcditionj )
à moins qu'on ne permit aufli aux
Réformez de payer leurs frais de
la bourfe commune (^}, Mais en-
fin ils eurent encore la bonté de
leur
[n) MS. Thom, 23 ,
(-^1 lalh. fiN-
66 Hijlûire de la Kéformatloft'
ï 53 î. 1^"^ quitter cette Amende , auiïi-
Orbe, bien que ceux de Fribourg {a).
Dans ce tems là les ReJigieufês
de S^^- Claire reçurent une nouvelle
mortiHcation. Quelques Réformez»
animez d'un zèle indi/cret &c im-
pétueux >eûllérent un jour enfoncer
Nou- la Grande Porte du Chœur de leur
J"^.^^^^ Eglife 5 <k ,en démolirent les Au-
l?éf<,r- tels*. Ce n*eft qu'avec peine que
f^^Z' je raporte ces fortes d'actions &
d'autres femblables j Mais enfin la
vérité de THiftoire le demande. &
il ne m'eft pas permis de les fup-
primcr , fans me rendre coupable
de partialité. Bailleurs il eft bon
de fiire remarquer à nos Adverfai-
res, que nous n'apiouvons nulle-»
"Réflex^ ment la mauvaife conduite de quel*
ton> fur quej particuliers de nôtre Commu-
lu;et. ^-^^ . ^ ^A^jç ^,te. Religion
eft fort éloignée d'autorifer ce qui
fent le tumulte, la violence >
îa fédition. Sans doute ces gens-
là s'imaginoient faire en cela une
Aâion agréable à Dieu , parce qu'il
a donné cette Loi touchant les Ido-
lâtres , & les inftrumens de leur
Idok«
deUSuilfe. Liv. IX. 67
fdolatrie* : V'ous démolinz leurs Au- 1531;
'e'.s, vous br frez leurs Statues y Vous q r î £•
:o'n€iez let*^^ bocages : & vous bru-
, trez au feu Ituis images taillées. Mais
Is auroient dû conHciérer , que
:et ordre s'adrefle au Peuple en
Co'ps, & à fes M.îgiftrars : ÔC
ion aux particuliers ; &: qu'il faut
.aiiïer aux PuifTances , le foin de
:es fortes de chai gemens > qià ne
Deuvent fê faire, félon les régies du
Droit des Gens> que par leur au-
:oriré. Quand les Juifs fe mirent
fil faire des encenfemens au Serpent
fa'rain , aucun Particulier de Je-
i'ufalem, ni du Royaume de Juda>
iliucun Saciifîcareur , aucun Pro-
ohête , n'entreprit de le brifer de
"on autorité propre j quoi qu'on
Ijic manquât pas alors de gens pieux
3c zUez: rr ais ce fut le Roi Ezé-
:hias , qui le^fît brifer {a). Après
:out il convient, félon la régie de
*Apô^re S,Paul{b), ^ félon Tefprit
le l'Evangile ? que tout fe fafle
ians l'Eglife , az/ec ordre & avec
Uenféance,
II
* Deuteron. VII. 1/. ^.
[^] II. Kois. XVIII. 4.
' lb^ l. C'jrinth, XIV. ^c.
68 Hiftoirc de la Rcformation
j. ^ ^ j , Il ne faut donc pas tant s'éron-
O-RBE. fi Catholiques regard oient
de mauvais œil & la Réformatioa
& les Réformez. On ne peut pas
changer de fentiment, en matière
de Religion, comme on changçii ha-
bit j ce qu'on s'eft accoutumé dès
fon enfance > à regarder a\'«c véné^
ration , comme quelque chofe de
fàcré, on ne peut pas fouffiir tran-
quiienient qu on le dérruife , ou
qu'on le renverfe. Ce n'efl pas ea
bfifant tumuîtUâirement i«s Idoles^
qu'on ramène les Idolâtres > on ne
fait que les irriter. Il faut les
éclairer, & les engager à brifer eux*
mêmes leurs Idoles de lec.rs propresij
mains. Mnis il efl tems de repreiv
drele/îi de monHifioire.
Les Religieufes de S^'^- Claire itw
ritées du défordre qu'on avoit fait
dans leur Eglife , ne pûrent plus^
vivre à Orbe. Elles £rent prier les'
Seig. leurs de Berne 5c de Fribourg^'
de leur permettre de fe retirer, fou-
haitant de fuivre leurs Compagnesf
en Bourgogne. En même tem«
elles dépêchèrent un MelTagcr à h
Princcfie d'Orange , & à leur Supé
rieur , pour grier l'une ôc l'autr»
I deUSuijfe. LlT. IX. 69
le les recevoir. La Princeffe & ie j 531
îupériegr répondirent, C^'elles pou- Orbe
'oient venir en Bourgogne , &
[u'elles y feroient bien reçues ;
nais (^u il faloit auparavanr, qu'elles
iffenc quarantaine dans quelque lieu
carré, à caufe de la pefle qui
toit alors à Orbe , & dans une
•onne partie du Pays de Vaud. Le
lévot Banderet àt P'ierrcfliur offrit
,e leur prêter, pour ce deffein, une
lâifon qu il avoit à Baumes {a) vil-
âge ficué au pié de la Montagne>
iir la grande route de Bourgogne,
^es Seigneurs de Berne leur permi-
enc de fe retirer avec tous leurs
iens i & voulurent même que le
Jaillif les cfcortât jufqu aux fron-
iéres (^) , Mais ceux de Fribourg
le voulurent pas les laiffer partir :
\C pour les engager à refter, ils
eur promirent d envoyer des Dé-
)Utez à Berne ; & de taire mettre
e fi bons ordres, qu'on ne les in-
|uiéteroit plus à l'avenir ((). Ainfi
files rtRérent.
Les mouvemens tumultueux con-
inuérent à Cranjori , pendant toute
I / u c) MS. Thom.z^. i<j. 16.
iù'jlu Inftr. iij.
70 Hijloîrc de la K^fcrmatton
I 5 3 T. l'Automne , au fujet de Ja Religion,
G R AN- ce qui engagea les Seigneurs de
soN.j Berne d'y envoyer des Députez, le
iS.Sepremb. pour encourager les
Réformez, & exhorter les autres à
laifTer prêcher tranquillement la pa-
role de Dieu. Ces Députez furent
aulTi chargez d'en faire autant i
Echalens. Pour le coup les Réfor-
mez de Granfon étoi-?nt la partie
fouffiante. Un Dimanche du mois
de Septembre , comme ils ctoient
dans le Temple , occupez à écou
ter leur Minifire , & qu'ils y de-
menroient trop long-tems au gr
Tumulte Catholiques, ceux-ci impatieni
caufé d'entendre la Mefle lâchèrent leur*
par les femmes , qui entrèrent efFiontémenI)
Catholi- ^^^^ grand bruit i pour in ter*
ques. rompre leur dévotion. Les Réfor«
mez voulurent les repouflcr,& les
mettre hors du Temple, mais elles
ctoient en fi grand nombre, qu'tl-*
les furent les plus fortes, & la fu^
reur leur foi inilTant des arn es ek
les les ch«fle'e- 'f. Elles fe p irent
particulièrement aux trois Minifi
très, qui fe nouvéïenr là F.oel , G<i*
v it , & froment , ksqutls elles
atâlciâuéreat extiêiiiement y 8c
de la Suijjè. Ll V. IX. Jl
leur déchirèrent tout le vifage. El-
les en vouloient principalement à ^*
Farel , & fans le fecours (Xyintoine
Froment, qui étoit avec lui , il au-
roit couru rifque d'être affommé.
De VVattev'ille , ancien Avoyer de
Bernej arriva bien-tôt après à Gran-
(bn, pour prendre information de
cette affaire. Il fut fuivi d'autres
Députez , qui y vinrent avec ceux
de Fribourg, pour le même fujet :
mais il ne pûrent convenir de
rien > & s'en retournèrent fans rien
faire *.
Cet accident ne rebuta point les
Réformez de Granfon, & ne les
empêcha point de faire un nouvel
éclat quelque tems après. Vers la ^xcit
fin de l'Automne , ils allèrent , de
leur prop-e autoriré , brifer quel-
ques Autels dans TEglife des Cor-
deliers. Les Dépurez de Fribourg
irritez de cette a<flion , comme on
le peut penfer , fîient mettie en
prifon Fard & d'autres Minières,
avec quelques peifonnes de Grarijon
& d'TvQnan. Les Seigneurs de Berne
n*appiouvoWnt nullement la con-
duite des Réforn.ez. Cependant ils
ne
MS. Thm, 14. MS. Crooff:
72 Hîfloire de U PJformario'a
1531. ne voulurent pas les abandonner
G RA N- non plus 5 pour ne pas paroître
^ ^ ^* abandonner la Religion. Ils écrivi-
rent donc au Baillif de Granfon, de
les relâcher. Mais comme il étoit
Fribourgeois , il n'en voulût rien
faire. Il fe nommoit Jean Keiff,
Les Bernois s'adreflerent donc au
Gonfeil de Fribourg, & lui en écri-
virent deux fois > après quoi les
prifonniers fûrent élargis {a),
DifficuL y e^it encore de nouveaux dif-
té entre férens entre les deux Etats, au fu-
jBerne& jgt dcs Villages de ce Bailliage- là,
au" aîiei avoient embrafle la Réforma-
des Vil tion^ les Bernois voulans que h
lagesRé- Meffe y fut abfoîument abolie ; &
du *^Bal- Fribourgeois s'y oppofant vi-
iiâ<rc de vemenr. Les deux Etats envoyé-
Granfon, rent chacun des Députez à Gran-
fon, pour travailler à un accom-
modement fur cette affaire. Ceux
de Berne voulurent abfoîument , .
fuivant les inftruâ:iony qu'ils avoient I
remues 5 i°' Que la Mtffe fût entiè-
rement abolie, dans les lieux où
on l'avoir lejettée à la pluralité des
voix : & 2°- Que ceux qui avoient
mal-traité Farci ôc les autres , fuA
fenc
[/t] MS. Groof,
de la SuijfeLlV. IX. 73
fent punis. Ils cenfurérent même i 531.
le Baillif , qui avoir voulu faire G r a n-
prendre Antoine Froment , parce son.
qu'il avoir fecouru Farel. Ils de-
mandèrent aufli que le Baillif payât
Tcntretien ds Miniftres. Les
Députez de Berne ^ de Fribourg
convinrent enfsmble fur le premier
Article , qui étoit de laifler rubfiC.
ter le Traire qui avoir été fair^ fur
rabcliiion de la MelTe , à la plura-
lité des fufFrages ; mais ceux de
Fribourg demandèrent qu'on reti-
rât Fdïel de Granfon. Il étoit le
principal objet de leur haine par-
ce qu'ils le regardoient comrr:e le
prémier auteur de i'introduclion de
la Doflrine Réformée dans ces
Quartiers-là. Les Bernois , pour
le bien de paix , eurent la com-
plaifance de leur accorder leur de-
mande , 8c tinrent parole. Farel fe ,
retira. Mais il n'en fût pas de mê-
me de l'autre coté. Api es le dé-
part des uns & des autres . le
Baillif rétablit la Mefle dans les
lieux où elle avoit été abolie j
Berne s'en plaignit à Fribourg le 8.
Noven.bre, mais inutilement
MS. Groofi;
, .. Tenu IF. D II
74 Hijloire de la K^formation
1531» Il fui vint encore un noiivtl em-
O R B E. barras entre les deux Etats de Ber-
ne 6c de Fj iboui g , au fujet de trou-
bles qui s'élevéïent à Orbe entre
les Réformez & les Catholiques,
& qui éclatèrent la veille de Ncël
'Tumulte L'occafîon en fût que les
à On EE Réformez voulurent s'aflembler
^^^Vcjlledans l'Eglife Paroifllale , à fept
caufè heures du foir. Les Catholiques
par les leur avoient fouvent reproché, de
Catholi- dorimr comme des pourceaux dans leurs
lits 3 tandis que les Catholiques
étoient dans TEglifê , occupez à
chanter les louanges de Dieu. Afin
donc de fe laver de ce reproche >
ils voulurent célébrer la Vigile de
Noël, par une aflemblée Religieufe,
& piirent pour ce delTein Theure
que je viens de dire. Les Catho-
liques qui avoient la Clé de l'E-
glife, la leur refufércnt j ccà pour-
quoi ils y entrèrent par force, ÔC y
pfêché-ent. LV.fTemblée fût fort
nombreufe, parce qu'il y vint plu-
fieurs perfonnes , qui n'ofpient pas
y parcître de jnui ; de forte qu'ils
enrendoi'^nt les Catholiques , qui >
pafTant regardant par la porte >
difoient , Le Viable y en a bUn tant
de la Suiffe. Liv. IX. 7J
»r^. Tandis qu'il étoknt occupez [^3 F.'
à écouter Je Sennon de leur Minit O r b e.
tre , les Ca:holi4ues s'âcrroupérenr,
& foie pour les inf ilrer, foie qu'ils
trouvairent que leur Sermon étoic
trop long, ils alléienc Tonner Ma-
tines à neuf heures da foir \ ce
qui obligea les Réformez à fe re-
tirer : &: les Catholiques entrèrent
dans l'Eglife après eux. Comme
les Réformez fe retifoient chez eux
paifiblement &cfans aucun tumulte,
quelque mauvais efprit fie counr le
bruit, OuWs alloient dans l'Eglife
de S. Claire , pour y brifer tour.
Là deffus les Catholiques , fortune
à la hâte de l'Eglife les allèrent
chercher, les attaquèrent à main
armée , fendirent la têre à quelques-
uns , & en blefférent d'autres. Les
Réformez allèrent à Berne, au nom-
bre de^rv, en porter leurs^ plain-
tes , ayant à leur tête Pierre I^tret,
Outre la violence qu'on vient de
voir, ils fe plaignirent encore, qu'on
enfonçoit leurs portes , 6^ qu'on
biifoit lejrs fenêr es à coups de
pie- res,deforte qu'ils n'è oient p'-»int
en fureié dans leurs maifons. Les
Catholiques l'ayant lu , coururent
D 2 à
76 Hijîoirc de la J^c formation
1^31. à Berne après eux, au nombre de
O KE E. On écouta les deux par-
ties, & on les renvoia, leur di/ant.
qu'on leur donneroit bien-îôt ré-
ponfe
Tumul- Cependant le jour même deNcël,
W/ ^î' ^^^^ défordre dans le
jmi/ de Village de Novalle , au Bailliage de
Nocl. Gianlon. Les Réformtz, voulant
entrer dans l'Eglifê , pour y enten-
dre la parole de Dieu . &c faire leur
fcrvice 5 les Catholiques > incitez par
Je Baillif , ne voulurent point leur
en permettre Fentrée ; 8c les gens
du. Seigneur rrr^y dirent, que
FEglife n'étoit point fur les terres
de Berne & de Fiibourg, & qu'ils
n'y avoient rien à voir. Les Ré-
formez prcflant pour fe faire don-
ner la Clé, les Catholiques afliflez
par ceux de l^uygelle & de Longe-
l'ille , k mutinèrent, coururent aux
armes , & en blefférent quelques-
uns , entr'autres le Miniftre , qui
eut la têre fendue. Certe affnre
fut porfée à Berne. Le Baillif de
Granfon y fut cité, pour rendre
conpte de fa conduite. Le Chan-
celier de Berne & Farel,lLi foutin-
rent
* MS. Tho?». 2,7. b. 28, MS. Groojf,
de U Smjje. L i v. I X. 77
rcnt en face, que c'écoit lui qui 1^3 f,
avoic incité les Catholiques a cette Gka\-
émuie : & les Catholiques même son.
de Vujgeïïe s'excuférent , rejettant la
faute fur le Baillif, qui leur avoic
ordonné de faire ce qu'ils avoient
fait *. Les Réformez de la Pa-
roi (Te, accu fér en tau ffi le Curé àç.Vnj-
gclie d'avoir eu la principale part à
cette fédition. Ils fe plaignirent
en même tems > que ceux d'Yver-
dun, zèlez Catholiques ôc des plus
ardensJes menaçoient quand ils paC-
foientpar leur Viile, &venoient mê-
me les mal-traiter jufques chez euxf.
Il étoit de la prudence des deux
Etats 5 d'arrêter le cours de ces ^égu^
défordres, par de bons Réglemens. g^J^^ç^
C eft aufli ce qu'ils firent. Ils eurent "p^.;.
une Conférence enfemble à Berne, bourg ,
vers la fin de Janvier 1 5 : 2. & là le Po^^
3o.du même mois, ils convinrent en- ^^.^^^
femble de VU. Articles , dont je fujets
rapporterai ici la fubftance. com-
^ I. Que leurs fujsts des deux Re- ^^^'J^
ligions vivroient enfemble en paix,
II. Que les Réformez auroient un
Terni le, <^^ns lequel ils pourroient
faire prêcher la Parole de Dieu tous
D 3 les .
*MS.^>v;/M23.B.Inftr.i40.i4i.tMS.Gr^'?7.
78 HiPoiYt de la Keformation
Orbe les jours, fans aucune contradiftion ^
& 6c que de leur côté ils ne troubleroient
so^N^eiî P^^"^ f lus les Catholiques dans
15 32. ^^"^ Me iTe.
III. Que chacun de ces fujets
aura pleine liberté de Confcience>
d'aller au Prèthe^ ou à la Mejfe.
IV. Que la Aleffe demeurera abo-
lie 5 dans les lieux où elle Ta été
à la pluralité des voix, ^'elle
flibfiftera dans les lieux où on l'a
gardée 5 cependant permis toûjours
aux Réformez de ces lieux là d'a-
voir le Prêche,
V. Que les Mtniflres Se les Prê--
très dans leurs Sermons, ne don-
neront plus des noms injurieux à
leurs Adverfaires : mais qu'ils fe
contenteront de propofer leiirs fenti-
mens , & de réfuter la do(flrine op-
pofée par de bonnes raifons.
VI. Que nul ne devra infulter qui
que ce foit > pour caufe de Reli-
gion > ni par parole, ni par voye
de fait > fous peine de trois jours &
trois nuits de prifon , au pain 3c
à l'eau 5 & de payer un Ecu d'or
d'amende, au fortir de prifon;&que
ceux qui n'auront pas dequoi payer
l'amende, feront remis où laiflez
en
I de la Suijfe. L I V. IX. 79
en prifon , pour y erre encore tout O r b b
amant de tems. Qu'on infligera aux ^ ^
femmes h moitié de cette peine Se s on, en
de cette Amende. 1532,
VII. ^'il fera défendu de rien
gâter ni détruire dans les Egliies >
6ns l'autorité des Seigneurs *.
On envoya des Députez des deux
Villes 5 pour publier ces ordonnan-
ces à Orl?e &c à Granfon : & en même
tems les Seigneurs de Berne écrivi-
rent à Farel , le 10. Février 1532.
pour lui donner avis &au?: autres
Minières Tes Collègues 5 de cet ac-
commodement, & de ces ordon-
nances , qu'ils avoient faites avec
ceux de Fribourg 5 l'exhortant 5 lui
particulièrement à les obferven afin
d'être en bon exempbie aux au-
tres t.
Les Députez des deux Etats fu-
rent arrêtez par de nouvelles dif- Nouvel-
fîcultez qui s'élevèrent entr'eux, & les diffi-
s'en retournèrent fans rien faire, ciiltez.
Un nommé Jaques Collon 5 & deux
autres , ayant renverfé les Images à
Echalens, avoient été mis en prifon,
& appliquez a la queftion. Les Ber-
D 4 nois
^ MS. Groojf,
80 Hîjloire de la Réformation
^ &^ ^ nois avoient écrit aux Fribourgeois,
Gr AN- P^^*^ P^^^^ f^'fe arrêter ces
so N. en procédures, jufqu à l'arrivée de leurs
1532. Députez 5 mais inutilement. Les
Dépurez de Berne avoient ordre
de demander réJargifTement de ces
prifonniers, fous caution Bourgeoi-
fe 5 ji'fqu'à ce qu'ils fuflent punis
comme ils Tavoient mérité. Ils
avoient aulTi ordre de s'informera
O'be , touchint le tumulte qui y
étoir arrivé la veille de Noël 3 de
punir les coupables & de faire ren-
dre juftice par des Juges impar-
tiaux , à ceux qui avoient été blet
fez 5 de faire donner des penfions
aux Miniftres dCOrbe ScdcGranfon,
&c à ceux de la Campagne y d'ex-
horter le Confeil d'Orbe à ne pas
dépofer 5 pour caufe de Religion,
ceux d'entr'eux qui étoient Réfor
mezj de faire que les Catholique
; fe contentafTent des Autels , qui
étoient demeurez debout , fans re-
lever ceux qui étoient abatus ? ni
en faire de nouveaux (4). Ainf
les Députez de Berne, fuivant leurs
ordres , ne vouloient pas permet
tre qu'on relevât les Autels abatusi
U) M5. Anjp, lis. B. Inftr. 159,
deUSîiîjfe. LiV. IX. 81
& ordonnèrent qu'on remic par ^
terre ceux qui avoienc é:é relevez. ^ ^''^
D'autre côté les Députez de Fri-
bourg défendirent aux Réformez,
d'aller prêcher dans l'Eglife de 5'.
CUhe 5 ce qui fut fait {a), EnHn
pourtant les deux Etats convinrent
cnfcmble , au fujef des Autels. Le
Dimanche Mars , les Députez
de Berne & de Fribourg retour-
nèrent à Orbe, pour exécuter les
articles dont on étoic convenu: &
le lendemain ayant fait affembler
tous les chefs de famille , ils y
publièrent l'ordonnance dont on a
parlé. Ces Députez eurent aufîl
ordre de donner une penfîon &
lin logement au Minière d'Orbc>
& à quelques .autres, qui jufqu'alors
avoieiit é é dans des Logis : &
pour la penfion , o:i devoit la
prendre fur la moitié djs piében-
des,qui fe donnoient à d.s Béné-
ficiaires Etrange'^s ou abfens, qui
par làétoient portées hors du pay.s
les Seigneurs de Be.ne abandon-
nant cette moitié ^our les Minif-
tres {b\
D 5 Après
MS. T/^o/w. l8. b.
W li?. B. Inih. 148.
82 Hiftûîre de la Kéformation
G R A N- Après avoir fini ce qu'il y avoit
à faire à Orhe^i les Députez de Ber-
ne & de Fribourg allèrent à C??'^»-
Çon le Lundi 4. Mars, &y publié-^
rent la même ordonnance. Dans*
ces deux Villes , il fut permis aux
Catholiques de relever leurs Autels,
qui avoient été abatus \ & ils s'y
employèrent avec une telle ardeur^
qu'ils furent tous rétablis au bout
de deux jours {à). De là les Dé-
Soiwi des putez de Berne allèrent vifiter les
Seignrs. yii]ages^ q^ii avoient embrafle U
p^^^jfj^5 Réformation 5 à la pluralité des
Villages voix , favoir 5 Gy , Champagne 5 jy,
Kcfor- Provence > Novelles , & quelques
Balfiage ^"^^^5. Ils avoient ordre d'y éta-
blir des Miniftres > d'en faire délo-
frn. geF les Prêtres . & de donner leurs
penfions aux Miniftres. Pour ce
qui eft des Paroifles , où la diver-
fîté des Religions fubfiftoit encore,
ils avoient ordre d'y établir auffi
des Miniftres , afin que ceux qui
fouhaitoient d'entendre la parole de
Dieu, pûffent avoir cette édifica*
tion ^ & de donner à ces Miniftres>
la part que les Seigneurs de Berne
contribuoient pour faire les penfions
WMS.rWso. \
' deU Suijfe. LiV. IX. 83
des Bénéficiaires Etrangers cù ab-
fens , comme dans le Balliage
d'Orbe (4).
VI. Il eft à remarquer que de Î531.
tout le ?iijs dé \f A \j D y il n'y P^^ys
eut que les 4. endroits, dont on^^^^*
Tient de parler , Avmch^ > Payerncy
& les Balliages d'Orbe & de Gran-
[on, où il fe fit quelques mouve-
mens pour y introduire la Réfor-
mation : à ^venche à Payer ne , ^on etac
parce que ces deux Villes étoient ^^^f^^^
zWiéçs de Berne j Se que les Ber- llgion.
ncis y appuyoient les Miniftres j
qui entrcprenoient d'y prêcher : 8c
dans les deux Balliages d'Orbe &
de GranfoUi parce qu'ils font fous
la domination des Bernois , au/Tî-
bien que fous celle des Fribour-
gcois. Dans tout le refte du Pays
de yaud y qui dépendoit , en par-
tie du Duc de Savoye , en partie de
TEvêque de Laufanne , on éroic
plongé dans Tignorance 3c dans la
bigotterie, autant qu'on le pou-
voit être dans le fond de l'Italie
^ de l'Efpagne ; 8c les E di t s ,
publiez par les Etats du Pays, (l'an
J525. ) contre ceux qui y prêche-
D 6 roient
(a) MS. Am^. 115. b. B. Inftr.uyu
84 Hijloire de la ^déformation
I 5 3 1 . roient la nouvelle Do<ftrine, renou-
veliez Tan 1527. 6c confirmez par
l'autorité du Duc de Savoye *,
étoient fî rigoureux & fi prelTansj
que 3 d'entreprendre d'y prêcher ,
c'étoit s'expofer à une mort cer-
taine 5 de gayeté de cœur, & fans
aucun fruit.
^ o u- ^ Aloudon , qui étoit alors la
Capitale du Pays de Vaud, on avoit
un Curé 5 qui abandonnoit à d'au-
tres le foin de prêcher la Dod^rine du
Salut. Le Théâtre y 'tenoit lieu d
la Chaire, & les Conduiîleurs du
peuple 3 au lieu de lui procurer des'
inftiu<fîions falutaires tirées de la
ParcJe de Dieu , le repaifToient de
Comédies pieufes, félon le goût
de ce Siècle là. Ainfi cette aniiée
153Ï. le Confeil de cette Ville>
ordonna de payer 10. florins de
Savoye aux Comédiens, qui , le
Dimanche des Rameaux 5 a voient
jcilé une partie de la Pafllon du
Seigneur, & le Lundi après Pâques,
^ fa Réfurredion. Ils donnèrent en
le de^ ' "^^^^ tems 7. florins 2. fcls 5 mpn-
MoH.îon noie de Laufànne, à un Prêcre
Etraii-
Voyez le Tom. I. pag. & $07. ^
de laSuijfe. Liv. IX. 8S
Etranger, qui leur avoit prêché j jjj-;
pendant le Carême : de forte que paye
les deux Comédies furent payées plus deux Co-
chérement que tous les Sermons du pifjf^^^ ^
Prêtre. Au mois de Septembre plus che
fuivant, ils donnèrent encore 60. rement
fols, de Laufanne, à 12. Corné- ^"^^^.P^"^
diens , qui le 24. d'Août , fête de mons.
la ^S". Barthelem), avoient joiié une
hiftoire pieufe, appellée le Pauvre
commun *.
A Laufanne les chofes n'alloient Lausah
pas ir.KUX, quoique ce fût une Ville
Epifcopale ^ où il y avoit un Col-
lège de 32. Chanoines ; deux Cou-
vens de Religieux, l'un de Domi- ^^J} ^taç .
nicains , & 1 autre de Corddiers , ^^l^j^ç,
&c cinq Eglifes ParoifTiales. Tant ligion.
d'Ecdéfialliques > qui auroient dû
être une Source de lumière falu-
taire , pour la Ville & pour fon
territoire, croient tout autant de
Chiens muëts , où plutôt de Con-
duifleurs aveugles , qui vivoient
dans une ignorance honteufe , &
dans une corruption extrême. Oh
n'a pour en être convaincu , qu'à
fe fouvenir de ce que l'Evêque Se^
baflien de MontfuulcGu écrivoitaux
Seigneurs
' ^ Regitres de Mondan,
86 Hijloîre de la BJfermation
I 53 1 . Seigneurs de Berne l'an 1527. Qu ïi
navdit perfonne ajfez verfé dans l'E-
criture S^^' pour ajfifter a leur DifpU'
te Le bon Evêque ne penfoit
qu'à fes plaifirs, & à fes intérêts
terriens , comme tout fon Clergé.
Et cette année fon avarice lui attira
de nouvelles difficultez 5 pour les-
quelles il fe brouilla avec la Bour-
L'Evê- geoilîe. Il fît battre de la Monnoye>
que de d'un titre & d'un poids trop bas>
nThk ^o*^^^^ teneur du Traité d'ac-
battre commodément , que les trois Vil-
de mau- les Souveraines de fon Diocéfe
vaife Berne^ Fribourn-^ &c Soleurre, avoient
fait, quelques années auparavant,
entre lui & la Ville de Laufanne,
Cette Monnoye, ayant été trou-
vée trop légère, par l'épreuve qu'on
en fît à Zurich , à Baie & en Valais;
les Bernois & les Fribourgeois fi-
rent prendre le Maître de la Mon-
noye , & le firent mettre en prifon.
Interrogé fur fa Monnoye , il dé-
clara qu'il Tavoit ainfi faite par
ordre de l'Evêque. Ils écrivirent
^ Le 25. donc à ce Prélat, & lui marqué-
Mais. . , A/l 1 •
rent une journée, au 27. May, lui
déclarant , qu'ils vouloient en-
voyer
^ Voyez Tcm» II. pag. lo.
de la Suijfe. L I v. I X. 87
voyer des Députez à Laufanne , ÏSSï-
pour avoir raifon de lui. Les Dé- Lausam
putez de Berne & de Fiibourg,
dans une Conférence qu ils eurent Mouvez
cnfemble le i8.AvriL décrétèrent, »»^»^ à
Que TEvêque > n'ayant pas obfervé ^^^5"^!^
le Traité dont j'ai parlé , il avoit Diocéfe
encouru l'amende, qui y avoit éré
impofée : qu'on lui en écriroit 5 &
que les Trois Villes fufmenrionnées
Texhorteroient à reparer les pertes
qu'il avoit caufées au public, par
la légèreté de fa Monnoye : & que
s'il ne le vouloit pas faire , on met-
troit la main fur les terres de fon
Eglife 5 & fur fes fujets. La Ville
de Soleurre fe joignit à eux dans
cette affaire. Ainfi pour exécuter leur
réfolution promtement , ils avan-
cèrent la journée qu'ils avoient
marquée à l'Evêque de Laufânne>
& la mirent au 8. de May > où les
Trois Villes envoyeroient leurs
Députez , pour mettre ordre fa
Monnoye , & faire faire le procès
au Maître de la Monnoye , comme
fauflaire (^). Mais malgré les foins
de ces Trois Villes , pour le ré-
tabliflement ôc la réforme de cette
Mon--
8 8 Hijloire de la déformation
1531. Monnoye, l'Evêque foutint le Maî-
•L'Evé- tre de fa Monnoye , qui continua
de La u-<i'en battre fur le même pié. Les
ANNE. L^uf^nnois envoyèrent * des Dé-
Decenib*' P^^^^ ^ leurs Alliez de Berne &
de Fribourg, pour s'en plaindre.
Ils les prièrent en même tems 5 de
leur aider à faire établir Douze Ju-
rez dans la Cour temporelle de l'E-
vêque;afin quelajufticey fût mieux
adminiftrée , au lieu que j afqu'alors
il n y en avoit que deux [a]. Je
n*ai pas appris quelle fût TilTue de
cette affaire.
Il eft incertain fi quelqu'un
entreprit > cette année - là , de
prêcher la Dod ine des Réformez
à Laufanne. Voici feulement ce que
j'ai trouvé qui peut y avoir quel-
que raport. L'Empereur Chrales
V. convoqua la Diète de l'Empire
d'Allemagne à Spire y pour le 16»
Septembre , & y invita entr'aurres
les Evêques d^Geneve , de Laufati'
ne d<. de Sjon Celui de Lau-
fanne s'excufa d'y aller en per-
fonne, & y envoya deux Dépu-
tez > pour y paroître en fon nom>
Conrad Trader , Provincial des Au-
' (^) Manuel de Lanflmnc. guftins
^ ^avion Liv. III- p. m. CO*
' deUSuife. Liv. IX. 89
giiflins 5 &: y^'^w de Cottonaj y Châ- i ^'^ l ,
noine de Neucharel. Il les char- L'Eve-
gea d'une Lettre pour TEmpereur,
où il lui difoit , Qu'il ne pouzoit pas
all:r Itn-même a la Diète fans s'ex-
pofer a une grande perte , ja préfence invité a
étant neceffaire a Laufanne , où il f^^lJy^^^.
trouvait dans une Conjon^ure dan- pire , j1
gereufe~y & dans de grandes occupa-^ f^^^^^^
tions y pour maintenir les Droits de^^'"^^^^^
fon EgUfe , & ceux de la Foi Catho-
lique, Il leur donna au/Ti procu-
re , pour p êter hon mage à TEm-
pereur en fon xiDxn {a),'
Dans ce tems-ià furvint la guerre
de Cappel entre les Cantons > com-
me on la vu dans le livre précé-
dent. Les Laufannois , quoique
toûjours Catholiques j donnèrent
dù fecours aux Bernois > comme
ils y écoient obligez par leur Traité
d'Alhance. Ce fut là encore une
nouvelle occaHon de brouillerie en-
tr'eux 5 & leur Evêque. Il fur-
vint à c°tte occafion une chofe,
qui me fait j'iger , qu'il y avoit
alors
(^a) Tiré des Copie: de ces deux Piè-
ces . qui foiit dans les Archiv. de Berne,
entre les l'up.iout. Elles font datées du
mois de Septembre.
90 Hiflûire de la K^formation
Ijjl, alors à Lâufanne, parmi la Bour-
L'Evê geoifie , quelques perfonnes qui
^ue de avoient du penchant pour la Ré-
jgg^^^'^^ formation : Peut-ê^e Taveifion
qu'on y avoit pour l'Evêque , 6c
le mépris & l'indignation , dont on
y étoit animé contre le Ckrgé ,
avoit bonne pârt à ce penchant.
Quoi qu'il en foit , aptes la guerre
des Cantons > 6c le Traité de paix>
dont elle fut fuivie , l'Evêquc pre-
nant courage , & croyant fans dou-
te Toccafion favorable pour affer-
mir la Religion Catholique , vou-
lut impofer un nouveau Serment à>
la Bourgeoific contre la Réforma-
tion. L'Evêque, quoique Prince
de la Ville de fon Territoire ,
n'y avoit pas pourtant une auto-
rité âbfolue. Ses fujets partageoient
L'Eve- avec lui le pouvoir Législatif : &
que pro- [\ ne pouvoit faire aucune Loi nou-
vain un ^^^^^ > ^^"^ participation des IIL
Régie. Etats de la Ville, * qui étoient
«;fY^^,"compofez , du Clergé , delà No-
f^rma-'^'^l^ffe, & des Bourgeois. Il fît
lion. donc affembler le peuple dans TE-
glife Cathédrale de Nôtre Dame, à
cri public , ôc leur propofa de faire
une
* Voyez le FÎAcitHm gener/tle MS*
de la Suife. L l v. I X. 91
une Ordonnance 5 qui défendit de 1537,
parler de l'Evangile, en bien ou enLAusAw
mal, fous peine de trois eftrappa-^'^*
des de corde. Mais le peuple ne
voulut point accepter ce règle-
ment. Et eux , de leur côté,
lui demandèrent , qu'il remit fon
Tribunal de Juftice fur un meilleur
pié 5 & qu'il y établit douze Jurez,
ou AflefTeurs , au lieu qu'il n'y ea
avoit que deux ou trois j encore
n*avoient-ils point de ferment,- de
forte que la juftice y étoit mal ad-
miniftiée (4).
Les Laufannois eurent aufll des Oifîîciiî,
difficultez avec les Chanoines ^^^y^^}^^
leur Eglife Cathédrale, tant au fu- ^
jet des trois Places fortes , qui ap- chapitré
partenoient au Chapitre , qu'à l'oc-
cafion de la guerre de Mufs. Corn-
me les Seigneurs de Berne leur de-
mandèrent * 80. Hommes pour en-* lc 7.
voycr au fecours des Grifons ; &
ceux de Fribourg, f dix; leCon-t Le n.
feil fit cottifer toute la Bourgeois
fie, pour foutenir cette dépenfe; &
trouvant raifonnable, que les Ec-
cléfiaftiques contribuallent auftl-
bien que les autres , il demanda
92 Hiftoire de UKcformation
^^^^ Chapitre, & 200. âU
La USA N refte du Clergé. Le Clergé Sécu-
lier contribua de bon cœur ce qui
étoit en fon pouvoir , & donna
400. florins. Mais les Chanoines
refuférent de payer la fomme qu'on
leur den.andoit , difant , Qu\\^
avoient déjà beaucoup contribué
pour la Ville, & fe plaignant de ce
que le Confeil leur retenoit encore
les Places , dont on lui avoit con- .1
fié la garde , Tannée précédente, j
( Le Confeil les avoit retenuës *
jufqu alors 5 parce que les Chanoi-
nes refufoient de payer la dépenfe
que la Ville avoit faire pour les
garder. ) Pour obliger les Chanoi-
nes à faire leur devoir d'une ma-
nière ou d'une autre, dans cette
occafion , le Confeil les chargea de
fournir 50. Hommes > de leurs fu-
jets 5 pour \a guerre dont il s'a^if- ;
foit 3 de les envoyer , & des les en-
tretenir aux dépens de leur Cha-
pitre. Cette brouillerie rraina quel-
que tems. Enfin , vers la fin de
Juin, les parties s'accommodèrent*.
Les Chonoines s'engagèrent de
payer à la Ville 250. Ecus d'oc
pour
^ Man. LmÇ, 365.
de la Suiffe, LiV. IX. 93
pour dédommagement, ou rem- 1531,
bourfêment de fes dépenfes 5 & le Lausan
Confeil leur rendit leurs trois Pk-
ces, favoir le?: Bourgs, Villages &
Châteaux, de iS*. PveTi^ Bom-Mmùn,
& f.ffcïîin':s.
La même année un AmbafTadeur
de Ferdinand, Roi de Hon-
grie 6c de Bohême, envoyé en
SiiûTQ , pour demander aux Can-
tons un fecours , d'Homme ou
d'argent contre les Turcs , fut
aufi'i à Lau Tanne , & demanda ce
fecours au Confeil * , lui faifantune * Le 27.
defciiption touchante & pathéti-
que des ravages horribles , que les
Turcs avoient fait dans l'Autriche
& dans la Hongrie, peu de tems
auparavant. QneJcjues jours * Marl'^'
après, cet Ambaiïadeur , ou quel-
que autre pour lui , propofa au
Confeil, de faire publier une Oo/-
f.tde contre les Turcs , dont le Pape
f . * 11. L COU"
avoit 5 lans doute, accorde la Bulle ne les
à ce Prince. Le Confeil rejctta cette Turcs,
proportion , difant pour raifon ,
■^u'on ne pouvoir pas réfifter aux
rcs '. Il confcntit pourtant à fai- -
l e faire des proceHlons , à l'inten-
ticn de cette Cioifade , & permit
. de
94 Hijloïrede la Bs^é formation
1531» de contribuer pour fon bon fuccès,
à tous ceux qui voudroient le fai-
re de leur bon gré. Dans ce tems-
là la Pefte faifoit du ravage à Lau-
fànne aux environs *.
L'Evê- Ce fut vraifemblablement cette
que de année 1531. que le nouvel Evcque
inUaîléà^^ ^S)^^^ ^^//^/V , Adrien de
Laufan. RiEDMATTEN, fût inftallé fo-
lemnellemcnt à Laufanne. Après
avoir été élu Tan 1529. il fut trois
ans , fans pouvoir obtenir du Pape
la confirmation de fon éle(ftion
L'ayant enfin obtenue 5 il vint
Laulanne , cii il fut facré par Se'
bafiien De Montfaulcon , en préfena
de la Nobltfle Valiaifanne , qui
l'a voit accompagné à cette Céré-j
monie. Ce Piélat renouvella l'ai
liance du Valais avec les VII. Can-
tons Catholic]ues. La forter^lTe^
Majoria-, qui eft à Syon , ayant
é:é confumée par le feu, il la rebâ-
tit beaucoup plus belle qu'elle
n'étoit auparavant, 6^ dans peu de
tems. On lui donna la li iiaf ge,
d'avoir conduit TErat de VaiLis
avec btai'conp de Prudence de
Modération, 6c d'y avoir nuintenu
delà Suijfe. Liv. IX. 9J
la paix &: la tranquillité jufqu'à fa I53ï«
mort , qui arriva Tan I547« eut
pour Succefltur Jean Jordan
qui marcha fur fes traces *.
VIF. Je reviens à l'Hiftoire de N e u-
nôtre RéFormation. La Suire de ^y^uUes
celle de Netuhfitcl, Se de ral ngin. dans la
ne fut pas plus rrarquille qte le ^"^^ ^
^ ^ T r> L f en quel-
commeiicemenr. Les Catnoiiques quesen-
de Neuchatel ne voulurent pas ce- droits
der à la pluralité des SufFfages, & P-'^ys
r / A- I l au fuiet
conleiverent toujours leur cuJte , l^Re-
nfant niéme de rrienaces contre les ligion.
Réformez , dilant que le Marquis
de NwUchatel vicndroit bientôt, &
"eroit remettje la chofe fur le tapis>
pour ê re palTée à Ja pluralité des
voix. Enfin ils faifoient dire la
Vlcfle fecretrement dans leurs mai-
fons. La ParoifTe de BoudeviliiLTSy
qui efl dans le Comté de
mais de la dépcTdnnce de Neucha-
tcl > ayant embialTé la Rtforma-
tion , De Pran^in , Gou\'erneur du
Pays, voulut les en punir ^ con- :
fifqucr leurs bien.v (^).
Fard étant à Ntucharel , entra Travaux
en difpute avec le Vicaire de la ^
Ville/'"'
^ Sirrder. Vallcfîa p. m. i^g. I6S>.
(«) MS. -4/7>/>. 110. b.
96 Hîjloïre de la Réformation
I S 3 I . Ville 5 qui le traira d^hérétique, lui
NEu- & tous ceux qui mépiifoient la
CHATEL p^j.ç| voulut le tircT en
droit 5 pour Tobligcr à prouver fon
accufation , ou à fe rerraifler. Ayant
voulu p,êchcr à Corcelles le même
Vicaire foulcva les gens du lieu, &
les ergsgea à cou»ir en armes dans
FEglife 5 pour réfifter à ce Miuiftre,#
Ten chaffer *. A Bevay . où il
y avoir un Prieuré , les Paroi/Tiens
fouhaitrérent d'entendre prêcher la
dodrine Evangelique , & il y alla
quelques Miniftres pour la leur an-
noncer. Mais le Curé & les Moi-
nes s'y oppofércnt avec violence j
& routes les fois qu'un Miniftre
prêchoit dans TEglile de ce lieu-là, J
ces pieux Ecdéfiaftiques prenoienti
les armes? & appelloient des gens
de Boiidry , pour chaffer le Minif-
tre 5 ôc même ils en maltraitèrent
quelques uns , les chargèrent d'in-
jurts. les battirent & les chaffé-
rent [a).
Le Lieu- A Valengin, Claude , Sei*
^àt^Vale-i S"^"^ Bdlegardc , Lieutenant 8c
.v-'^ tra- Gouverneur du Comté , faifoit auffi
tous
* MS. Amp. 120.
OO Idem, ib. & Inftr. 34-
deUSuife. Li v. IX. 97
Itous fes efforts > pour soppofer à l J31.
rétablilTement de la Réformaticn verfe la
dans ce pays -là. Il ne ceffoit d'in-
fulter, & de bouche & par écrit, ae^ toute
ceux qui aimoient la parole de fa force.
Dieu. Il faifoit toute forte d'ava-
nies & d'infultes aux Miniflres 5
mal-traitoit les Prêtres qui fe ma-
rioient , publioit fous le nom de la
Comteffe, des Edits févéres • qui dé-
fendoient d'écouter les Miniftres 5
& faifoit payer de greffes amendes
à ceux qui y contrtvenoient j ou-
tre les autres mauvais traitemens
qu'il leur faifoit par avions & par
paroles, les chaigeant d'injures, &
les effrayant par fès menaces {a).
Nonobftant fes oppofitions, il y
avoit diverfes Eglifes dans le Com-
ité de Valengin , où les Paroi/Tiens
ijfouhaitoient d'entendre prêcher la
cljparole de Dieu. En particulier la
Paroilfe de Domhrejfon avoit réfolu,
à la pluralité des voix , d'embrat
kt la Réformation. Cependant le
Gouverneur y faifoit dire laMefTe
par force , "6c défendit même à ces
bonnes gens > d'aller écouter la pà-
role de Dieu, avec menace de pu-
Tom, IK E nition
['i] MS. H(Hchat. 164.
98 Hijloire de la^éformation
Ijjl.niiion en corps &: en biens (po-
sons Les Seigneurs de Berne 5 apre-
des Sei-nant toutes ces chofes,en fuient
ieï/r«« f^^^ indignez , & regardèrent la
pour les conduite de ces gejis-là, comme
Réfor- une cfpècc d'infulte qu'on leur fai-
^eucht^ foit. lis en écrivirent plufieurs
tel & fois à la Comttffe de Palengin 5 &
deF^/f^^à fon Lieutenant; mais leurs Le t-
très ne produifiicnt aucun eifet,
Ceft pourquoi aynnt reçû des plain-
tes rcïtcees > des Réformez qu'il y
avoit da»u les Ccmrez de Neucha-
tel &: de Vâlergin , ils réfoluren
d'y apporter du remède d'une ma
niére plus efficace. Ils y envoyé
rent donc deux Députez, le 10
Janvier 1531. avec ordre lO.d'af-
Éfler Farci dans laffaire cl'honneur>
qu'il avoit avec le Vicaire de Neu-,
chatel , Se de procurer qu'on lui
fit juftice dans la Ville même, fans
être renvoyé ailleurs ; & au cas que
le Vicaire voulut appeller héréti^
ques , tous ceux qui méprifoient la
Meffe > alors les Députez dévoient,
au nom de leurs Seigneurs , faire
partie au Vicaiie, & lui demander
réparation. Ils dévoient aufli 20,
fe
W MS. Amp. 110. B.Inftr.34,
delà SuiJJe. Liv. IX. 99
{t plaindre de la conduire violen- ^53 T.
te du même Vicaire, 6l de celle des ckatel
Moir.ef & du Curé de Bevay. Ils
furent charge? derepiéfenter, qu'une
pareille conduite déplaifoir beau-
coup à LL. EE. qui voyoient que
cela fe faifoit an mépris de Dieu ,
8c pour les ii.fultei 5 ^« ainfî ils
icmaF^doient qu'on s'abtb'nt à l'a-
irenir de femblables chofes > pour
viter les maux qui en pourroient
irriver , proteftant que, fi Ton fai-
oit quelque violence , ou quelque
nfulte à Farel , ou à quelque au-
MiniftrC} LL. EE. s'en reffen-
iroient tour comme fi la chofc eut
té faire à eux n.êmes. Enfin ils
toient chargez d'engager les Ca-
holiques de Neucharel , à fe fou-
ncttre au règlement de Religion
[ui avoit été fait , déclarant que
nflLL. EE. étoient réfolus de main-
m enir les Réformez,
ti- De Neucharel les Députez eurent
1< idre daller à Valengin , lO. de-
nî! lander que ceux qui avoienr bartu
iii 'arcl fuifent punis > & 20. exhor-
i« BT le Lieutenant de Valengin , à
xccuter ce que LL..EE. lui avoient
1 crit ^. E 2 II
* MS. Amp. 110. B. inflr. 54-
1 00 Hïjlclre de la déformation
1^31. Il fembloit que cette Dépiitation
IPN E u- devoit produire un bon effet i ce-
CHATEL pendant elle ne produifit rien. Le
Gouverneur de Valengin fut à Ber-
ne , & promit aux Seigneurs de
cette Ville tout ce qu'ils voulurent;
^ mais il ne tint rien : ôc les mêmes
fiijets de plaintes continuèrent.
Ainfi les Bernois renvoyèrent
* Le 20. bien-tôt après * dan^ ces lieux-là
Mars. jjj^e nouvelle Dèputation 5 plus
nombreufê que la précédente , corn-
pofèe de troi^ Seigneurs de TEtât. .
Ils eurent ordre de parler fortement |
aux Catholiques de Neuchatel, j
de les exhorter à fe défifter de leurs
delTeins & de leurs menaces, les
affûrant que, foit que le Marquis
vint à Neuchatel , ou non 5 LL.
EE. ne foufriroient jamais 3 que la
Rèformation fût mife en compro-
mis 5 &: expofèe de nouveau à la
pluralité des voix y pour rétablir U
Meffe, mais qu'il étoient réfolus de iii
maintenir les Réformez de toutes m ^
leurs forces. Ils dévoient au/Ti ex-lr
horter De Prangin^ à laiffer en paixl
les gens de BoudeviUicrs *. | ^
Les Députez furent auiïi chargez;
d'alleiHf
* MS. Amp, 120. b.B. Inftr. 44-
delaSuijfe. Liv. IX. ICI
daller deNeuchatel à Valengin, & 'S?
de parler fortement à la Comteffe
du pays 5 &: à fon Lieutenant. Ils
dévoient les faire reffouvenir tous
deux, des Lettres qu'on leur avoit
écrites , & en particulier reprocher
au Gouverneur , la conduite qu'il
tenoit 5 contre les promeffes qu'il
leur avoit faites > lors qu'il avoir
été à Berne. En particulier ils dé-
voient parler fur le fujet dei'Eglife
de Dombrejfon à la Comteffe, & dire
nettement au Gouverneur , qu'il
eût à lâiffer en paix ces bonnes
gens, qui avoient embraffé TEvan-
ile, qu'il rendit même les amen-,
des , qu'il leur avoit extorquées j
& que fi à l'avenir il continuoit à
leur vouloir du mal , LL. EE. fe
fèrviroient de la force pour y met-
tre ordre , étant réfolus de main-
tenir leurs Bourgeois dans toutes
leurs libertez , & fur tout dans la
profefilonde la pure Religion Chré-
icnne. Ils eurent ordre enfin, de
epréfênter à la Comteffe, les biens
que LL. EE. lui avoient faits , à
Elle & à fon Mari défunt , &: de
affû rer 5 qu'ils étoient toujours
ortcz de la même bienveillance
E 3 pour
ï 02 Hilloire de la Ejformation
1531. pour Elle, ôc pour la foutenir dans
Valen- tous fes droits > par raport aux
chofes temporelles, pourvû qu'elle
lailTât à Tes fujets liberté de Con-
fcience. Ils dévoient auiTi exhorter
les fujets, à rendre à leur Dame,
tout ce qai lui écoit dû légitime-
mène
Jîommût. Cette année le Marquis de Ro-
ge non- thclin , F R a N ç o i s> d'Orléans^ fils
^1^"^]^ aine de \x Comtefle deNeuchatel,
Pri !cef- vint à Neuchatelj, pour y recevoir
^ '^^ les hommages de la Bourgeoise &
^cuc •i'^^35ger,s Pays, au nom de la
Princ-ilTe fi Mére , & du Duc de
Longue ville Louis d'Orléans, fon
FréiC aine. Il y prêta le ferment
accoutumé en leur Nom , à la
Bourgcoifie 5 le 6, d'Avril , pro-
mettant de garder leurs libertez &
leurs franchifes , écrices de non
écrites ; Se le même jour les Neu-,
chatelois lui prêtèrent au/Ti ferment V
de fidélité , comme repréfentant la
Princelle *.
Il
M MS. Amp, 110. b.
^ Lé nom & les titres de la PrincefTe
croient , Jeanne de Hochherg , Ducheff,- dc
L'ingu.euille , M4rijuife de Rotkelin ^ Com.
tejfe de D'^nols , N.uchutel, & de Tan^'
c^rvUle, Vîs-Cojnrejfc de M^l/m dcc.
deUSuife. Li v. IX. lo3
11 leur accorda auHi quelques pe- j ^ 5 f .
tits privilèges nouveaux , & quel- ^ ^'
ques réglemens, pour l'adminiftra- ckatel*
tien des affaires publiques ; Entr au-
tres y les Neucharelois ayant de-
mandé, que les Eccléfiaftiques. né
fuffenc plus membres du Tribunal "
SoQverain de la Juftice 5 comme
pai lcpaffé, ce Piince le leur ac-
corda \ &c par un Règlement prp- RegU^
vifio ici , il leur fubftitua l Erat de ^^^^
la Nobleffe & les ValTaux, pour y Ç-^ibu
tenir le premier rang. Les Officiers nal Sou-
de la Princeffe y dévoient tenir le verain.
fécond : Et le troifiéine devoit être
rempli par quatre Confeillers de
. Keuchatel, auxquels il joignit les
«quatre Bandere's, de Nmch^tel , du
î Landcron , de Boudrj , & de Vau^
'ravirs. Cet Aûe cft daté du Jeu-
di Saint, II. d'Avril 1551 (a).
Ce Prince fit aufTi un accommo-
dement avec TEvêque titulaire de
•yi/c, P'ince àt Ponuttu , au fujet
les difficultez, qui s'écoient élevées
nrre les deux Etats , pour la Ju-
:fdif\ion du village de Ligri'tres ,
lOnt les appels dévoient fe porter
cvant un Tribunal , comporé de
E 4 quatre
MS. A".'«fW.7J. ^
104 Hiftoire de U Réformat ion
I «quatre Jufticicrs de Landeron , &
N E u- quatre de la Bonneville , aflemblé
cHAiEL j^^ç le lieu 5 fous la préfidence du
Châtelain de Landeron (4).
Régie. Il fe fit auffi dans le même tems
pour la q^s^^^s Réglemens Eccléfiaftiques,
reftitu- particuliérc^Tient pour les biens qui
tioa des a voient été léguez à TEglife de
guez à Nsuchatel, pour des ufâges fuperfti-
l'Eglife. tieux. Les Neuchatelois , à l'exem-
ple de leurs Voifins de Berne &
de Bienne , demandèrent qu'on ret
tituât ces biens aux familles qui les
avoient léguez ^ jufqu'à la quatriè-
me génération. George De
Rive, Seigneur de Prengin Se de
(jr4^^"C(?«r5 Gouverneur duComté>
leur accorda l«ur demande, au nom
de la Princeffej & établit une Cham-
bre j pour examiner les prétentions
de ceux qui redemanderoient ces
fortes de biens. Elle fut compofée"
du Maire de Neuchatel j comme
Juge député de la part de la Prîn-
ceflej^ de huitConfeillers députez
de la part de la Bourgeoifie.On leur
prefcrivit les Réglemens 5 qu'il dé-
voient fuivrc dans leurs jugemcnsj
par exemple , de faire donner cau-
{a) Uîd. p. i<)5.
de laSuife. Liv. IX. 105
tion de reftiturion , par les deman- 1531^
deurs , en cas que TEglife retour-
nât dans fon premier état, ceft-à-
dire , à la Religion Catholique 5
jou au cas qu il fe trouvât un Pa-
rent plus proche qu'eux , de ne
!point toucher aux biens léguez,
ipar les Princes , par les Chanoines*
par les Prêtres, ni par la Noblefle :
& de n'accorder aucune reftiturion
aux bâtards , ni à leur pofl:t5rité(^) .
Quelque tems après, Guillaume F are l
Farel > toujours animé d'un zèle ar-
dent pour lavancement du régne
de Dieu, &: pour la réformation de
l'Egli/è dans le Comté de Neu^
chateLj alla du côré de S. Blaïje ,
gros village, au bord du Lac, à
une lieiie de Neuchatel, & y dif-
puta de Religion avec le Curé. En-
tr'autres il lui parla vivement con-
tre la MefTe. Le Curé en fut cho- ,
/ o 1 • j- ,1 , . / . mal trai
que 5 oc lui dit, qu il etoit un he- s.
rétique'-y &c le Lieutenant du lieu, s^^i/^.
qui fe trouva préfent, s'écria qu'on
devoir le pendre ^ & fît un fi grand
bruit que tout le peuple accourût en
armes , dèforte qu'il s'en falut peu,
que Farel ne fut maflacré. Les Ber-
E 5 nois
I06 Hijloire de laBJformation
I j 3 1 , nois , en ayant eu avis > envoye-
* Le 12. rcnt * deux Députez à S, Blaijè *
F A R B L poiïr tirer en caufe ie Curé du lieu;
protégé lui demander qu il prouvât par TE-
Bernois ^^^^^^^ ^ ^^^ avoit dit, ou qu'il
' fe retraôât : ôc Ton chargea leMi-
niftre de Ncuchatel , nommé ^w-
toine Marcourt , de plaider la caufè
de Farel. Ils demandèrent auffi
que le Lieutenant de ^S". BUife fut
châtié 5 pour le tumulte qu'il avoit
excité. De là ils paflerenr à Neu-
chatel j pour demander que l'Eglife
payât à Farel la dépenfe , qu 'il
avoit faite tandis qu'il leur avoit
prêché, & qu'ils pouvûffent leur
Minière d'une penfion (a).
g ^ Environ le même tems un Théo-
CHATEL logicn Catholique du pays , nom-
phle^Fa Ch)iflophie Fabri , nonr^mé aulïî
^r/. Libeitet , tmbralTa la Réformationj
& fut d'abord établi Paftcur à Ntu-
fhatel. Dans la fuite il fut appelé
Si Boifdivil iers, Il fut lié d'une ami-
tié fort étroite avec Farel , comme!
il paroit par diverfcs Lettres de ce,
dernier *.
Dans
M MS. Amp. iii.b. I22.1nn:r.69.
eUUSuiJfe. Liv. TX. 107
Dans le même tems les gens de^o.'^ I î3 T.
&de GïAtç embrafférentla Réfor- Réfor-
mation 5 vers le commencement de
l'Eté, mais ils eurent beaucoup de j^^^^^.^
traverfes à effuyer. Le Curé d^Pon*
tarettfe leur prêcha durant quelque
tems : mais dans la fuite il chan-
gea , & prêcha tout le contraire de
ce qu'il leur avoit enfeignc , tâ-
chant de tout fon pouvoir , foit ^^75"
... r ' r 1 m^nt tra
publiquement 5 loit en lecret 5 d« verfée ,
les faire rentrer dans riJolatric, par ,1c
Leur Miniftre cenfura fou vent ce ^^^^^
Cure , Texhorta chaiitablement
à fe corriger > ou du moins à laif^
fer en paix les Réformez. Comme
il ne pouvoit rien gagner fur fon
cfprit, il demanda fouvent jiiftice
contre lui 5 f^ns pouvoir l'obtenir,
ce qui rendoit ce C jré plus hardi
à travailler à féJuire le peuple.
Pendant to* t le rcfte de laniiée ,
c'cft-à-dire , Te^pace He fix o j fept
mois ; ils furent opprimez 6c in- &■ par
quiétez par ceux d- Boudry , qui ^^^"^ de
allèrent fouvent les troubler, dans ^'
leurs éxcrcices leligieax , pour Us
empêcher d'ouïr la parole de Dieu,
fonnant liur Cloche , criant , fc
mocqu^t. entrant 6c forianrj allant
E (î &
. 108 Hifloire de UK.efor7nation
Î53l.^ venanr, ajoutant à toutes
:Boie & ces infolences , de grandes mena-
LaGrfite ces &. des injures. Non contens
de cela, ils les attaquèrent plu-
fîeurs fois , ufant de violence con-
tr'eux 5 tellement qu'il ne tenoitpas
à eu3( qu'il n'y eût des gens blet
fez ou tuez. Ces pauvres gens
foulTrirent toûjours patiemment ces
outrages, fans fe vanger. Ils fe
contentèrent d'en porter leurs plain-
tes au Châtelain de Boudry, &
au Gouverneur du Comté 5 auffi-
bien que de Tinjurtice qu'on leur
faifoit , de vouloir qu'ils fe cotti-
' fàfTent pour entretenir leur MiniC-
tre. Mais qu elle juftice pouvoient-
ils attendre de gens animez d'un
zélé furieux pour le Papifme ? Ils
furent durant fept mois plus de
50. fois 3 tant auprès du Gouver-
neur, qu'auprès du Châtelain de^
Boudry, Hcmy Boga , mais fans
rien obtenir. Ces deux hommes
les ballotoient impitoiablement, les.
renvoyant toûjours de l'un à l'au-
tre. Bien plus, le Châtelain de
Boudry leur faifoit toute forte d'a-
vanies & d'injuftices , & favoiifoit .
toujours les Catholiques contr'eux.
On
de la Suife,Llv. I X. 109
On y publia une ordonnance 5 1531,
qui porroit , que les deux Religions boU é*
auroient leur libre exercice dans LaGrate
TEglifè , Se que pour Tordre elles
alterneroienr. Mais cet ordre fût
violé deux fois par les Catholiques^
dans peu de jours 5 & le jour de
Noël les Réformez ne purent pas
avoir Tun des Calices ^ pour célé-
brer la S, Céne. Ces bonnes gensj
après avoir porté inutilement leurs
plaintes au Gouverneur du Pays>
& au Châtelain de Boudry , les
portèrent enfin au Confeil d'Etat,
le lendemain de Noël. Ils lui re-
pr^fientérent , en même tems , que
iur les inftances réitérées qu'ils
avoient faites > pour faire a/îigner
une penlîon à leur Miniftre, on ne
leur avoit offert que deux muids
de blé, 3. Muids de vin, & 30.
florins d'argent, avec 4. florins pour
le loyer d'une maifon : Que ces
offres n etoient point raifonnables,
puifque la Cure avoit de fort
grands revenus *.
Cette année les Bernois eurent Difficul-
encore
MS. de M. Se hou far t.
110 Hilloîre de la Réformation
1531, encore une fois t une petite diffi-
té des ^^^^^ ^^^^ Comteffe de Neucha-
Bernois tel, au fujet du Couvent de S. Jean
avec la d'Erlach, dont ils avoient fait un
Balliage. Le Marquis François
Neuclu- fon Fils agilTant en fon nom , en-
tel, au voya ( vers la fin d'Avril, ) des Dé-
TAbba- P"^^^ ^ Berne 5 pour demander la
ye de -S", moitié des biens de ce Couvent ,
Jean foutenant qu'elle lui appartenoit
dErlach ^roît. Les Bernois répondi-
*Lci.Mai rent *, à fes Députez , Qu'ils étoient
fort furpris d une parellk demande ,
Que ce Couvent leur 'uppartenoh tout
entier , étant fur leurs terres , Que
la Thiele fait la borne entre les t^r^
Tes de Neuchatel & d'Erlach 3 ou
Cerlier (a).
Mouvc- VIII. Il y eut aulTi quelques
mens troubles dans la Prévôté de Aïou-
tiers Grand-Fat , au fujet de la Ré-
contre 1* • « «i r • 1
Rèfor- formation > ils ne le terminèrent
mation ~ même qu'avec peine. D'un côté
tieff^^' les chanoines du lieu vouloient
Grand- perfévéret dans l'exercice de leur
Val, foit ancienne Religion 3 & étoient
t Ils en avoient eu déjaune, pour le
même fujet, avec les Cantons, l'an 152.8.
Voy. Tom. 11. p. 318.
(a) B. /«A. p. 64.
dt U Suijfe. LiV. IX. I M
apuyez par TEvêque de Bâle & 1531.
par les Seigneurs de Soleurre, qui Ha Pr£.
prièrent ceux de Berne* 5 de laiffer
à ces Chanoines le libre exercice * Le ^^.
de leur Religion , & d'interpofer
leurs foins pour qu'on leur payât
les Cenfes & les Dîmes qu'on t
leur devoir. Mais dautre côté
les gens de Aloitt'iers croient fermes
dans la réfolution de vivre félon
la Réformation de Berne , qu'ils
avoient embralTée unanimémenr.
Les Seigneurs de Berne promi-
rent de faire payer aux Chanoines
leurs Cenfes & leurs Dîmes , ce-
pendant à condi-ion qu'ils donne-
ïoient un entretien honorable à
deux Minières de la Paroilfe, & à
ceux des deux Paroiifes de Sornctan
& de Court: mais en même tems
ils ne voulurent plus fouffrir que
les Chanoines exerçaffe t l.ur Re-
ligion d nslelieu, puifqu'ils dé-
voient en être regardez comme les
ParoilTiens ? &c même comme le
plus petit nombre + d'entr'cux. Ce
refus irritâtes Chanoines? qui dé-
char-
t Apolog. 68. Hctthg. 557.
I Apûlo^. iàiU,
ï 1 2 Hiftotre de U Kéformatioa
I 5 3 T . chargèrent leur colère fur les Mi-
LaPre- niftres 3 qu'on avoit fait venir de
VOTE. France , & les maltraitèrent en di-
verfes manières {a),
Difiîcul- Il y eut encore un autre /ûjet de
ceux" de Réformez de A4oH'
MoHtters ^^^^^ demandèrent au Chapitre l'u-
& le fage de la Grande Eglife, pour y
Chapi- f^ïj-e lejjj-s exercices de Religion 5
mais Is Chapitre la leurrefufa. &: le
Maire du lieu maltraita tellement
les Miniftres François qu'on y avoit
envoyez, qu'ils s'en retournèrent
en France. Et dans le même tems
les Seigneurs de Soleurre mirent un
Gouverneur à Moutiers Gra-nd-Valy
dans le deffein de foutenir les Cha-
noines.
Les Bernois 5 ayant appris tou-
tes ces chofes envoyèrent des Dé-
putez àA<fot{tiers , le 19. Avril, pour
exhorter les Chanoines à embraffer
la Rèformation , 6c à lailTer aux
Réformez du lieu Tufage de la
Soins Grande Eglife , leur reprèfentant,
des Ber. puifqu'on y avoit embraffè la
les Ré- Rèformation a la pluralité des voix,
formez. & qu'on avoit déjà cédé aux Ré-
formez la petite Eglife, on devoir
auiïi
W MS.Crcof,
I ile la Suife^ LîV.lX. 113
âu/Ti quiter TEglife de S, Germain^ I531,
qui étoit rEgiife Paroifliale , 6c La Pre-
qu il valoir mieux que les Chanoi- vote.
nés le fiflent honnêtement & dans
les formes , que d'artendre que le
Peuple le fît fans autorite & tu-
I multuairement , LL. EE. étant ré-
folus de foutenir les Réformez. Ces
Députez préfentérent en même rems
au Peuple Jean Holard , ancien
Doyen de Fribourg, les priant de
la part de LL, EE. de l'agréer pour
leur Miniftre; 5c les avertirent en
particulier 3 que fi les Chanoines
refufoicnt de lui payer une penfion>
ils pourroient implorer le fecours
de LL. EE. pour fe faire donner
des biens d'Eglifè 5 ce qui leur étoit
néceffaire? 8c qu'on ne manqueroit
pas de les foutenir (4). Après avoir
exécuté leurs ordres à Afouîiersy ils
allèrent dans les villages de Grande
Vd & de" Corrandeitn ? pour aflTjfter
a l'aflcmblée, où l'on devoir, à la
requête des Peuples, décider l'état
de la Religion à la pluralité des
voix, & les aflïirer de la protedion
de LL. EE. en cas qu'ils embraf-
faffent l'Evangile (^).
Les
W MS, Amp. m. b. B. lr>fir. ^4. M /./.
1 1 4 Hifloire de la Ké formation
Ï53I. Les Chanoines ne voidurent
lAPRE-rien faire de ce qu'on leur deman-
TOTE. doit, ni embrafler la Réforme» ni
céder TEglife de S. Germu 'tn aux Pa-
roinfiens 5 & fe contentèrent de
laiffer au Miniftre une petite Eglife
qui étoit au deffous; offrant cepen-;
dant de fournir une penfion à un
Minière de Moutiers, & à celui de
Sornetan, Et dans le même tems
ils firent éclater leur reffentimcnt
contre les Bernois , en refivfant de
prêter de l'argent au Peuple de
cette Vallée , qui éioit obligé, félon
fon Traité d'Alliance , de donner
quelques Soldats aux Bernois pour
la guerre > mais qui éroit fi pau-
vre, qu'il n'avoit pas le moyen de
leur payer leur Solde. Ces véné-
rables Eccléfîaftiques recoururent
aux Seigneurs de Soleurre, qui les
^ Le z7. pr^ égeoient 5 & qui écrivirent à
Avril. 'Beinc en leur faveur * priant qu*cn
Le Cha- lâiffât en paix? comme eux nujfi
pitre eft navoient point dejje'm de troubler les
protège haVna)2S du l eu dans la Réformationt
pnr les ,., . / /r/ ;
Seio--rs. <7« il^ avoient cnwyajjee , plus que
de^So' le Alïmftre qui la prêJjoit: Ajoutant
leurre, qu'ils prioient qu'on ne leur mît
point d'impôt pour caufe de
guerre
de la Suiffe. L I v. I X. 1 1 5
guerre &c. Les Bernois répondi- I53[.
rent*: „ Que cq n'avoir pas éréiAPRE-
le deflein des gens de la Prév ôté, JÔte.
yy de metrre un impôt fur Je Cha- Avrif.
yy pitre 5 mais <^ue fe trouvant pau-
5> vres , ils Tavoicnt prié de leur
yy prêter de l'argent pour les frais
>, de leurs Soldats : Que pour ce
yy qui regardoit la Religion , les
yy bonnes gens de Moîiii.'rs avoient
yy embrafle la Réfo mation tous en-
yy femble , &: unanimémentj & que
yy 1 Eglife , dans laquelle les Cha-
yy noines vouloientconrinuer Texer-
yy cice de leurs Cé'émonies, étant
>j la véiirable & ancienne Eglifô •«
yy P^roiiïiale du lieu , ils ne pou-
yy voieu pas permertre que ks
yy Chanoines , membres de cette
yy EgliTe , filTent fede à part : Que
yy cela étoit contre le Traité de paix
yy de la Suiffe . Se contre la pra-
yy tique des Magiftrars de Soleurre,
qui permettoient eux-mêmes à
leurs fujets d'abolir le Papifme
yy dans les lieux , où la pluralité
>j le fouhaitoit : Qua cette condi-
» tion ils engageroient les gens du
».P^ys , à payer à ces Chanoines,
yy leurs
1 1 6 Hifloirc de la K^formation
î S 3 1 • " ^^^^^ Cenfes 3 leurs Dîmes ,
LaPke- yy &C. *
VOTE. Les Bernois, voyant que le def-
fein^ des Chanoines étoit de chaf-
fer les Miniftres du Pays , en les
contraignant faute de fubfiflance ,
de s'en retourner en France t com-
me la chofe étoit déjà arrivée à
quelques-uns {a) : ils réglèrent eux-
mêmes la penfion que les Chanoi-
nes dévoient payer à ces MiniC-
très 5 & leur en -donnèrent avis, le
5. Mai 5 les exhortant amiable-
mcnt , à s'y conformer , comme
auffi à renoncer à leurs débauches,
les ^ leyrs Concubines. Ils leur
Z\q^i^^ Jir^nz auffi entendre qu'ils avoient
Ta pen. pris cette réfolution, pour empê-
lîon des cher que les gens du lieu ne fu
très? " portaflfent à quelque violence 5 au
cas que les Chanoines perféveraf-
fent dans leur (ù) refus. En effet
ces gens - là formèrent le deiTein
d'entrer dans l'Eglife de S, Ger-
main) qui étoit leur Eglife Paroiffia-
le , & de s'en emparer. Là-defTus
i«
Apolog, 70. 71. . ,
t Alexandre le Bel avoit prêche à Sor»
neinriy Se Maître Thomas à Conrt,
(a) Hottinç. 1. c. Apol. ^y.
(^) Apolog. S 1.52-. S3-
de la Suife. Liv. IX. II7
le bruit fe répandit à Sôleurrcjqu'ils f 53K
vouloient démolir le Monaftère: &LaPre-
les Magiftrats de cette Ville la en vote.
ccri virent à ceux de Berne j * pot^^Mat^^^"
les prier de ne pas le permettre t.
Ceux-ci leur répondirent le lende-
main, &: les informèrent du véri-
table deffein des gens du Pays.
Quinze jours ^piès, ceux de So-
Icune députèrent un Confeiller à
Berne , pour intercéder en faveur
des ChanoincSi qui fe plaignoient
que. la penfîon, que LL. EE. avoient
réglée aux Mi- ifties éroit trop forte.
( Cette penfîon n'étoir pourtant ,
que de 40. Ecus par an , ou la va-
leur, pour foutes chofes.) Les Sei-
gneurs de Berne trouvèrent la
plainte des Chanoines injufte , &
: e voulurent rien changer à leur
icglement. Ils déclarèrent même >
que fi ces McHTieurs nè vouloient
pas payer ces penfions de bonne
grâce , ils mettroient la main fur
leur revenus , & en prèléveroient
la valeur des 40. Ecus, après quoi
ils leur laifferoient le reftc: Car,
difoient-ils , rien nefl j>lus jufte que
de fuhe ferv'tr les dignes , à Centre'
tien
t /^/^.73. 74.
I 5 3 1 • 11 8 HiJloîYe de la BJformation
//fw di:s Préduateurs de la Parole de
D'uu, Enfin ils prièrent leurs Al-
liez de Scleun e, d'engager les Cha-
noines à ie conformer au fentiment
de leur Paroifle, qui avoit em-
braffc unanimement la Réforrna-
tion & a renoncer a leur Idolâtrie.
Mais les Chanoines? ne tinrent au-
cun compte de tous les avertifle-
mens qu'on leur avoit adrelTtz.
Troulhs Ainfi les gens de Mouticrs^ après
au fujet avoir attendu long- tcms inurile-
ci une
Eglife, ment 3 s'emparèrent de TEglife de
S. Germain > le 15. Juillet, & par le
moyen de quelques perfonnes qui
furent commifes pour ce deffein ils
y démolirentles Autels &: les Images
& les brûlèrent (a) Les Chanomes ir-
ritez les menacèrent de faire venir >
avec le fecours de Soleurre> des gens
qui les châtieroient & brûleroient
leurs maifons. Ils firent plus. Non-
feulement ils ne voulurent pas
leur payer les penfions qui avoienc
été réglées ; mais encore les Prêtres
& les Moines battirent maltrai-
tèrent cruellement le Miniftre Clau-
de de Clautinis , & quatre autres {b)
ôc
(/») Apolog. 74. 75-75.
{b) MS. Groojf,^
de la SuiJJe.Lw. IX. I19
& lesf perfécutérent avec tant d a- 1537.
:harnement: que ces pauvres MI-LaPre-
niftres , n'ayant d autre afyle que ^^^i.
la procedlion des Bernois 5 Te vi-
rent contraints d'implorer le fecours
du Baillif de Mdavv,
Les gens de Moutiersj de leur
:6îé recoururent aux Seigneurs de
Berne, & les Chanoines à ceux de
ieSoleurre, avec q -i leur Chapi-
:re avoit un Traité de Combour-
^eoific. De-là 3 nouvelles difficul-
ez encre les deux Etacs. Mais el-
es furent terminées amiableinent,
lans une Conférence , qui fe tint
i JVloutiers * , à la requêre de ceux ^q^j/'
:e Soleurre , entre les Députez des
ieux Villes , en prefence de ceux
de l'Evéque t. On y convint lO. Acconv
Que les Chanoines payeroient aux mode-
■^'iîiiftres la pcnfion qui leur avoit
rr ' \ 1 tre les
c affjgnee : 20. les gens du ^^j^^p^j.
Pays payeroient à TEvêque & au nés &:
[Chapitre les Cenfes les Dîmes, 1" g^"^
qu'ils leur dévoient, go. Que les ^"P^'^^^'
Chanoines n'entreprendroitnt plus
de rien innover contre la lé^orma-
rion du pays. 40. Enfin qu'ils fe
défcroient de leurs Concubines,
dont
t Apolog. -76, jy, 78.
120 Hïftûirc de la Keformation
I 5 3 î , dont le Commerce fcandalifoit le
La Pre- monde (^).
YÔTE, Dans ce tems-la les gens de
MervïllU > qui font aiifli alliez de
Eerne , avoient embrafle la Réfor-
mation. Nonobftant ce chargement
ceux de Aiotzvveil 5 dont ils étoi-
ent Paroiiliens > voi loient les obli-
ger à garder ôc obferver les Céré- •
monies d. l'Eglifc Romaine commet
auparavant ; mais les Députez dei.
Berne leur dirent , que rintenrioni
de LL. EE. ctoit , qu'ils lailTafTent?!
en repos leurs Bouigcois de Mer^'
'vïUie *.
Il y avoit dans cette Vallée là
quelques perfonnes^ qui fe faifoient
de U peine de payer des Cenfes &
des Dîmes a des Prélats Catholi-
ques 5 comme à ces Chanoines &
à TAbbé de Bellelaj. Les Bernois>
l'ayant appris par la bouche de
^ leurs Députez écrivirent à ces gens
Août/' là.*&les exhortèrent fortement
à rendre à chacun ce qu'ils lui dé-
voient > comme une chcfe juftc
& raifonnable j d'autant , leur difoi-
cnt-ils j que la parole de Dieu naf-
porti
W Id. 8r.82.
de la Suijje, L i v. I X. 1 2 I
orîe pas une liberté charnelle y com- 1531.
■'16 vous vous l'imaginez , mais une La Pre'
'berté (tejprit & de confâenie (a), vôt£w^
Les Chanoines de leur coté ne-
roient pas plus empreffez à remplir
:ous les articles de cet accommo-
icment. Ils ne quittèrent point
eurs Concubines;. ÔC deshonoroient
es femmes d'honneur > & ils en-
/oyoient des Prêtres par les Villa-
ges & les hameaux , pour y dire
a Mefle. Les Chanoines ont été
dans leur origine des Pafteurs d'E-
^lifej qui s'etoient liez à vivre en-
semble fous de certaines régies ,
DU Canons , c'eft pourquoi on leur
donna le nom de Canonici , Chanou-
lesi comme pour dire, Pafteurs ré-
'Jez* Si ces MefTieurs euflent répon-
du au but de leur inftitution , ils
luroient fait eux-mêmes toutes
[es fondions de bons Pafteurs > Se
on n auroit pas eu befoin d'au-
bes Miniftres. Mais vivant dans le
dérèglement Se dans une parfaite
oifiveté ne fâchant faire autre cho-
fe que de réciter leurs Offices , &
laiffant périr fans inftruftion leurs
ouailles, de la graifte defquelles
Tom, ir. F ' ils
ji^'S* 81. 83.
u
122 Hïjldïre de U ^déformation
I 5 3 1 . ils s'engraiffoient : il étoit bien jut
IaPre- te qu'on leur ôtât, au moins, une
voT£. partie de leurs rentes pour les don-
ner à des PaReurs fidèles & zélez.
Non- Ce fut pour cette raiion que les
efforts S^'g^^^^^s de Berne , qui avoient
des Sei- à cœur de foutenir ces Eglifes
gneurs nouvellement plantées, écrivirent *,
deBerne ^ Chanoines , pour leur repro-
desCha- cher encore une fois toutes ces cho-
Doines. fes , les exhorter de nouveau à
4'Août.^°' embrafier la réformation j les fom-~
mant en même tems , eux &: les
Prêtres 3 qui vouloient demeurer
dans le lieu , de fe défaire de leurs
Concubines , ou de les épcufer
dans refpâce d'un mois , fous pei-
ne de fe voir privez de leurs Bé-à
néfices \ enfin d'aller écouter lesf
prêches, & d'y envoyer leurs do--
meftiques. Et comme ces Cha-
noines avoient établi , en quelques
endroits, des Minières ignoransj
peu propres à édifier l'Eglife, ils les
averriffoient de ne plus donnetf
d'Eglife qu à des Miniftres exami-^
nez & approuvez par le Confiftoirtf.
de Berne. Ils leur ndreJférent eii
même tems~un nouveau Miniftre»
nommé y^lexandre LeBil^ quijavoit^
déj*l''
de la Suilj'eLlw IX. i25
'déjà exercé le MiniRére .dans les 1531,
Paroiffcs de Court Se de Sornetan, LaPke-
iavec ordre de lui fournir un lo- vôtè.
gement Cependant le Prévôt
& les Chanoines de Moutiers en-
levèrent leurs ornemens d'Eglife,
j & les envoyèrent à Soleurre, 6c s^y
retirérent enfuite eux mêmes. Ils
^ y firent leur fervice pendant quel-
^ que tems , dans TEglife des Cor-
deliers. Enfin ils établirent leur
^ réfidence à Delémont , ( en Allemand
Teliskrgy ) petite Ville dans ces
montagnes où ce Chapitre fub-
fifte encore, & où ils avoient com-
mencé, il y a quelques années , à
* |bâtir une magnifique Eglife (a),
f IX. Finiflbns l'Hiftoire de la Genève
iRéformation de la Suifle Romande,
'de cette année, par l'article de G e-
^' !neve. Il fembloit que la paix
de ^S*. Julien i dc la Sentence ren-
; Iduë en confequence > à Payer ne ,
' 'par Taffemblée des Députez de IX.
Cantons , & des deux Etats de
il'' IVallais & de S. Gai , dévoient af-
c jfïirer pour long-tems le repos des
^' Genevois s fur tout après la referve
^' F 2 qu'on
124 Hijlûïre delà Réformation
1531. qu'on avûic appofëe à cette Sen-
Genève tence 5 contre les prémiers qui la
violeroient : & que le Duc de Sa-
voyc 5 craignant de perdre le pays
deVaud, laifferoit Genève en paix.
Mais ce ne fût point, cela. On a
déjà vu, dans le Livre Vil. * com-
La Sen- jyjg Qucji k Duc ne voulut accepter
tence de 1 r • i>
Payerne ^^^^^ kiitence quc ce qui 1 ac-
n'eft commodoit. Et dès les premiers
P^pt jours de Janvier 153 ï. il envoya
tàe!^"' un homme d'office à Genève^ pour
y exercer le Vidomnat en fon nomi
avec une Lettre adrt- flee aux Gene-.
vois > ( à qui il donnoit le titre de
fes chers & féaux , comme s'ils euf-
fent été fes fujets 5 ) leur ordon-
nant de le recevoir 3 fous peine de
fon indignation. Les Genevois re-
fuférent de rcconnoître cet homme-
là en cette qualité, jufqu'à ce que
le Duc eût fatisfait aux autres ar-
ticles de la fentence de Payerne ,
& lui demandèrent , Ou étaient les
7000. Ectfs , qu'il devait leur pajer
Et Ou étoit Bonnivard {a).
De plus les Genevois étoient
mal-traitcz dans l^s terres duDuc^
*Ch. XL
Sfivion p. m. SI. ^5.
de laSmlfc.Liy.iyi. 12$
& les GentiJs-hommes de la Ligue 1531.
de la Cueillere tenoient toûjours Genève
la Campagne en armes , de forte
que les Genevois ne pouvoicnt
forrir de la Ville , fans être atta-
qaezj mal-traiccz & bleffez (a). Ce-
pendant ils envoyèrent des Dépu-
tez à Bade 5 pour y voir ratifier, par
la Diète , la fentence de Payerne,
comme on en étoit convenu ; ce
qui fût fait , malgré roppôfition
des AmbafTadeurs de Savoye : Se
il fut réfolu que le Secrétaire, après
en avoir drefie les Aùcs au net en
parchemin , les porteroit par tous
les Cantons j pour y être fcêlez (b).
Sur la En de Février , le Duc
paya 7000. Ecus à Me/Tieurs deFri-
bourg, & fit publier dans fes Etats
défenfe de faire du tort aux Ge- .
nevois j fous peine de la vie (c).
Au commencement de Mars la
Combourgeoifie &c TAlliance des
trois Villes fut jurée & confirmée
de nouveau , par leurs Députez
refpe^ifs. La Cérémonie s'en fit
en particulier à Geneve^le 6. Mars, Alliance
F 3 dans"^^^^"-
{a) Uid,
(/', S-ivion p. m. ^4.
U) Savion p. m. S S-
1 2 6 Hijloire de la Kt formation
ï 5 3 1 . dans le Confeil général. On régak
GENEVE les Députez de Berne & de Frr
bourg, & on les défraya. On
IvecBfr 1^^^ ^"^^ despréfensj mais ceux
de Berne ne voulurent rien pren-
^rïhourg ci^e. On le leur avoit défendu
Les Bernois ayant levé gooo.
hommes pour la guerre de Mtifs^
e#i donnèrent avis aux Genevois
par une Lettre , qui leur fût ap-
portée le 12. Avril , & les priè-
rent da tenir prêts loo. hommes,
pour joindre à leurs troupes, ce qui
fût fait {h\
Cependant le Duc , toûjours ani-
mé du défir de s'approprier le Vi-
domnat, fit demander à l'Evêque
une Déclaration , comme quoi il
reconnoilîoit que le Vidomnat lui
appartenoit. Mais 1 Evêque le re-
fufà , & fit favoir fon refus aux
Genevois (c).
^fjl Dans ce tems-là lesGenevoisjprofi-
^Gerv^iis ^^^^ tranquillité dont ils jouif-
foient, prirent diverfe;; mefures pour
leur fûreté. Ils fortifièrent le Faux-
bourg de S, Gerv.iis, qui jufqu'alors
n avoit été fermé que de gazons ;
ils
(a) U. p. m. ')6.
Lù c) JJ, <j8.
de la Suijje, L i v. I X. 127
ils le fermèrent de murailles, &I53r.
reiivironnérent de folTuz {a). Ils ré- genev£
foliirent en même rems dans leur
Grand Confêilj de punir tous ceux
de leurs Bourgeois , qui du tems
de la guerre, s'étoient joints à leurs
ennemis : & que ceux d'entr'eux,
qui s'étant trouvé hors de la Ville
dans ce tems -là, &: ayant fû le
deiïein de hùrs ennemis, n'y éroient
point revenus > pour aidée à la dé-
fendre, ou qui même par la crainte
de la guerre & par lâcheté , en
étoient fortis, fercient obligez de
prêter de nouveau le ferment, &
de pa/er un tant p^ur la façon
de quelque toifes , des folT^z dé
S.Gervais. Les Eccléfiafliques prê-
tèrent ce ferment entre les mains
des Syndics , en préfence du Vicaire
de rÉvêque (l/).
Cependant le Duc de Savoye fît . ^'■'^'^^
diverfes tentatives auprès de quel- ^^^^
ques Cantons , pour faire calfer Savoye
TAlliance de Genève avec Berne Se
Fribourp, mais inutilement M. Le ïïïï'^î!
16. JuiJJet, les Députez parurent a ce de
Berne , & après quelques autres Genève
propofitions , ils demandèrent , // Jj^^^
F 4 ^i'/- Cantons
{a ù c) Li. <^(j.
128 Htfloire de la Vjformation
t 53 T . ^ejfieurs ^/^ B i r n e voudroient fw-
QiiïiE\i.vojcr une Députation ^ four accom-
pagner le Duc de Savoie , quand il
h oit prendre poffcjfion du Vidomnat
de Gcn.ve > & fi après quil l'aurott
eue y ils voudroient quitter la Bour-
geê'fie de Genève ? Ces Seigneurs ré-
pondirent. Qu'ils s'en tenoient à U
fentence de Pajerne 3 fans autre dé-
claration [4] : & le mois fuivant
ils envoyèrent un Héraut à la Cour
de Savoye, pour demander au Duc,
de payer l'argent qu'il devoit en
Allemagne, & pour lequel ils l'a-
voient cautionné [Ji],
Les Bernois écrivirent aux Ge-
nevois à la fin du mois d'Août,
qu'ils avoient appris qu'on aflem-
bloir des gens de guerre contre Ge-
nève, & qu'ils étoient étonnez ,
qu'on ne leur en donnât point d'a-
vis, les exhortant en même tems
à fe tenir bien fur leur gardes, &
â fè fortifier. Les Genevois ré-
pondirent : Qujls avoient feulement
Apris , que les Princes fe préparoicnt a
fe jetter fur Us Cantons, s ils entroient
en guerre, Les Genevois le crai-
gnoient
B. inftr. 89.
{L) Savicn 1. ç.p.60.
deUSuife. Liv. IX. 129
gnoient beaucoup, parceque par-là £^3 T.
ils couroient rifque de fe voir pri- geneve
vez du fecours des deux Villes, en
cas de befoin. Ceft pourquoi ils
prièrent MefTieurs de Berne de
chercher la paix *.
Mais pour ne pas s'attendre à
un fecours étranger, qui pouvoit
être incertain, ils penféient férieu-
fement à fe fortifier. La Ville de
Genève avoit alors cinq ou fix
Fauxbourgs , qui faifoient enfenî-
ble un fécond corps de Ville? aufïi
grand que la Ville même : Celui
de la Porte de Rive , qui s'étendoit
jufcju'aux Eauxvives : Celui S.
Antoine i qui s'érendoit jufqucs vers
S.f^iUor : Celui de S. Legïer 5 qui
s'avançoit j ifqu'au Pont d'v^rî/e le
long de Plein-PaUts , &: vers la Cor-
ratcrie 5 ju/ques à rHôpiral des
pcftjfcrez : & enfin celui de S,
Cet vais» Afin donc d'arrondir la
Ville , Se de la Hiettre plus aifé-
ment Se plus piomteu ent en état
de défcnfe, on réfolut de démolir
tous (.es Fauxbourgs 3 à la itferve
du Bourg de Four , Sc de celui de
•S*. Cervais , qu'on attacha à la Ville
F 5 par
^ Sstzion 62..
I 30 Hijloire de la K^formatiou
I 5 3 I • P^r des murailles : l'on obligea
G£N£VE les habitans à venir s'établir dans
la Ville. Les pierres & les autres dé-
bris des maifons qu'on y démolit,
fervirent de matériaux? pour conf-
truire les muiailles & les boule-
vards. Pour fournir à toutes ces
dépenfes ^ ks Genevois empruntè-
rent quelques milliers d'écus à
Bâle [a). Mais ce grand changement
ne fe fît pas fi tôt.
Dans le mois de Décembre les
gens da Duc de Savoye firent de
- nouvelles inftances auprès des Sei-
. gneurs de Berne, pour renouvelles
TAlIiance avec ce Prince > & pour
rompre celle de Genève. Ces Sei«.
gneurs répondirent : Que pour les fa-
îisfaire on envojercit demander aux
Genevois j s'il vouloient quher cette
Bouïgeoifie de leur bon gré > ou non f
Que s'ils la vouloient quiter^ les Ber-
nois feroient une Alliance plus étroite
avec la Alaifon de Savoye^ cependant
fous la refèrve /ie garder l'alliance
contractée avec Laujanne (ô), Effcc-
Dcccmu* ^^^^'^"'^^"^ envoyèrent * , trois
Députez à Genève > avec ordre de
tra-
(rt) Savion 1. c.
(l>) i5. Inllr.iSi»
■ delaSuiffe. Li v. IX. IJI
travailler à perfuader les Gevevois> 1531^*
ck renoncer volontairement à leur ^^^'^^^
Alliance , en leur repréfentant (^),
>5 Que Genève n'étoit pas affez ri-
>j che pour payer les fecours qu'il
5> fâudroit lui envoyer, toutes les
>5 fois qu'elle feroit attaquée, puif-
•>y qu'ils n'.ivoient pas même pu
encore leur payer les 25000.
jjEcus, qu'ils leur dévoient pour
» les fi ais de la guerre >,. Les Dé-
putez qui étoient Sebafticn De Dief-
bach 5 Jean Jaques De WattevilU^ &
Jean François Naigndï arrivèrent àOe- 1 532.
né ve le 7. Janvier 1532. après avoir
kik\Gex-i auprès du DuCj pour lui
demander le payement de ce qu'il
devoit à eux ôc à d'autres. Les
Confeils ayant été afTemblez , ces
Députez s'acquittèrent parfaite-
ment de leur commiHlon , particu-
lièrement dans le Confeil général,
qui fut afTemblé le p. du mois ,
tâchant d'engager lesGenevoir, par
la crainte qu'ils vouloierw leur inf- Pro;);-) F.
pirer, à renoncer volontairement à ^t^^
cette Alliance. Apiès qu'ils fc fu- ^J^'^"^^;
rent retirez, les Syndics commu- «^i^jà.
niquérent à la Bourgeoifie la ré-
ponfe^
132 Hijloire de la déformation
ÎS32. ponfe 5 que le Petit & le Grand
G£NEv-£ Confeil avoient renduë à ces Sei-
gneurs. La voici toute entière, &
Réponfe rnot pour mot : Qu 'ils m connoiÇ-
coura- Ç^Yit ^^i/^f appoint ement bon 5 fors
les Bourgeoifie demeure , & la
nevûfs. fentence dernièrement donnée à Payerne
par tous les Meffieurs des Ligues ^ &
quand en les menacera & on leur don-
nera plus de crainte , de tant plus ils
feront fermes O conflans , pour main-
tenir leur dro t jufqua la mort ^ &
que s'ils meurent pour maintenir leur
bon droit , ils fe tiennent pour heu-
reux y toutefois qu'ils fe fient tant a
Dieu & anx Excellences deA/eJfieurs
des deux Filles, qu'ils obfe'ivcront les
fermer ti faits a Dieu entre les hom-
mes, & quand Us devroient engager
tous leurs biens , femmes & enfans, ils
leur payeront tout ce qu ih leur peu*
vent devoir , de forte quils auront oc^
cafiondt fe contenter. Cetre répon-
fe fût agréée de la Bourg^oifîe. &
approuvée tout d'une Voix *. Il
ne Faloit pas moins qu'une pareille
fermeté pour fe foutenir, les giands
dcffeins denmndent un grand cou-
rage. Si les Genevois euflent molli
dâns
de laSuiJJe. Liv. IX.- 133
dans cette rencontre, ils étoientiJ32.
perdus. Des gens auffi courageux Genève
<3ue ceux-là, étoient dignes de
vivre en liberté.
Dans ce tems-là le Duc étant tn-vificnd-
core à Gex y ceux qui y faifoient^^rayante
le ^uet furies murailles 3 rapporté- ^^JJ.*^
rent qu'ils avoient vû de nuit jeptCa- Savoye.
v/iliers, habillez de noin & fans tê-
tes , qui vinrent frapper à la porte.
Cette vifion fit peur au Duc 5 qui
quita Gexy & s'en alla incelTamment
à Chambery [4],
On parloit aufli de vifions i^viJionSc
Genève. Une pauvre Fille , qui de- ^If/^-^*'
meuroit à l'Hôpital, dit avoir vû de Genève*
nuit , une femme vétuë des blanc,
qui la fit lever, pour aller dire à
celui qui lui faifoit le plus de
bien , qu'on devoit faire des pro-
cefTions générales trois jours du-
rant; k's enfans habillez de blanc ^
& que Dieu leur donneroit viifloire
fur leurs ennemis. Les Genevois
reçurent cette vifion , comme un
averriiïement du Ciel , & firent les
proccflions avec beaucoup de dé-
votions & d'humilicé {h).
Us
(^) hL ibid.
u, p. m. 7^
Hijîûtrede la t{,éfoY77iatlou
I 5 32» Ils étoient dans une grande per=-
GtNEvE plexité 5 jamais leur liberté ne
fût en plus grand danger que cette
Genève année. D'un côté le Duc indigné
erand^ de leur fermeté , fit publier , [vers
danger. 1^ fii^ de Janvier, ] défenfe de four-
nir des vivres aux Genevois , fous
peine de la vie, & commandement
à chacun de fc tenir prêt avec Tes
armes > pour marcher au premier
ordre. Il fit avancer lo. mille
Italiens , & 5000. Lanfquenets du
côté de la Bourgogne , pour venir
fondre fur Genève j 6i tout fou
pays d'au delà des Monts éroiten
mouvement [4]. D'autre côté les
Genevois recourant à Meflîeurs de
Berne, pour implorer leur fecours>
y trouvèrent les efprits indifpofez
à leur égard j & foit par les intri-
gues des Agens du Duc , foit qu'en
effet il leur paiût que l'Alliance de
Genève leur étoic oifereufe aux
uns & aux autres , les Seigneurs
de Berne vouloient y renoncer,
dans la penfée que c'étoit là le
moyen le plus court de mettre fin à
toutes l^s diîfjcultez , comme le
Duc le difoit. Il n'en étoit pas
de
(.'0 p. m. 6j, 7^»
dclaSuijfe. Lî v. IX. 135
de même des Fribotirgeois. Ils j ^ j
parurent encore tenir terme pour Genevs
cette Alliance, Ôc à laDicLede Badcj
qui fe tenoit à la fin de Janvier>
lis prièrent les Cantons , d'obliger
le Duc de Savoye à obfeiver leur
fentence donnée à Paycrne 3 & de
prendre Genève fous leur protedlionj
puifque ce Piince contrevenoit à
cette fentence , par la défence des
vivres &: par les autres vexatiops>
qu'il faifoit aux Genevois W- Mais
les Seigneurs de Berne gagnèrent ^^^^J^^'"
ceux de Fribourg , en leur repré- j-ionsdes
fentant parleurs Députez , au com- Bémols
menccment de Février * : Que les ^^i^
... , , bourgeon
Genevois n avoient pas encore puje la ç^^^-^f^Q
folde des troupes^ quon avoit envoyées l'Alllan-
a leur fecotirs , & que s'il faloit en- deGc-
cote en venir a une autre guerre y quu
' in arriveroit de même , & que les
Genevois ne pajeroient rien , comme ils
y étoïent pourtant obligez : Que d'ail'
leurs y les Députez des Commnnautcz
de leur Pays avoient été a Berne ^ &
leur avoient déclaré , qu'ils ne donne-
rotent aucun fecours pour des finan-
ces quon contracteroit a leur infcu^ou
coutve
11.70.
^ ï!i% lïijtf, 144.
136 HïjîoiYe de la Kéfermation
1532. contre Icifr grê y & Que ^ fi même ils
Ceuive alloient a Genévr y ils vouloient être
payez : Q^je quand ils j [croient > fi
les Genevois ne les pay oient pas , [ ce
qu'ils ne pourvoient pas faire , ] les
foUats fe mutiner oient y & pourroient
piller h Ville y comme il fer oit peut'
être arrivé la dernière fois , fi fon n'y
avoit pas mis ordre, Quainfi cette
Alliance leur était plus onereufe, quu^
tîle , aux uns & aux autres. Ils
étoient convenus de certains arti-
cles de pacification , propofez par
les Agens du Duc. Ces articles
Projet étoient : lo. Que le Duc ofFroitde
mode-"" 8^'^^^ ^ ^^^^'^^^
ment Oli^^ Y fût remis en pofleiïion de
propofé fes prééminences ; 30. ^'on abolit
^ar^^du^^ Boujgeoifie , le Traité de S.
ïhic. Julien , &: la fenrence de Payerne :
40. Qu on choifit des Arbitres, pour
terminer toutes les difïicultez des
parties dans quatre ans : oifrant
encore d'engager le pays de Vaud>
particulièrement Romont & Tverdun^
s'il contreveiioit à ces articles W,
Ain fi Fribourg étant gagné , les
deux Villes envoyèrent leurs Dé-
putez à Genève 3 pour exhorter
les '
W Rofet II, C. 6U
de la Suiffe. LiV. IX. 137
les Genevois à accepter ces arti- 1532.
des : Mais tous les Confeils affem- Genevé
blez 5 les 6. 7. 8. & 9. de Février,
leur rendirent la même réponfè^qu ils
avoient Lite aux Bernois un mois
auparavant 3 déclarant que du refle
ils uferoient envers le Duc de toute
rhonnêteré & l'amitié qu'il pour- Rejette
roit fouhaitcer raifonnablement, & P^^^^j^^^^.^
lui feroient tout honneur & fer-
vice po/Tible *. Ils envoyèrent des
Députez à Berne & à Fribourgjpour
porter les Seigneurs de ces deux Vil-
les, à des réfolutions plus favora-
bles pour eux. Ces Députez pa-
rurent à Berne & à Fribourg de-
vant les Grands Confeils > fu-
rent fi bien parler y qu'ils les tou-
chèrent de pitié, & obtinrent d'eux
un Décret, Quon garderait Cylllian-
ce , & qu'on engageroit le Duc de }^-^]^^^^^
Savoy e a relâcher les vivres aux Ge- ravifent
nevois qu'on les fecourroit ^ en en fa-
'ras de b^foin [/;]. Et le 16. Février, ""^^ij^
les Agens du Duc ayant fait de
nouvelles inftances auprès des Ber-
nois , ils leur répondirent j Qu 'ils
vouloient bien lenotivtller avec le Duc
^ S^tvhn III. p, m. 70.71. MS. Groof.
(«} Sdvion 1. c- 71. ^
î 3 8 Hijlôire de la Kéformathn
l ^"^l' -^lli^nce du Duc Philibert,
Genève maïs fous la referve , que C Alliance
de^ Genève fuùfiff croit , tout li
tems pour lequel on ravoit contracléei
qui éîoît de i^, ans ^ oifranc ce-
pendant leur Médiation, pour ac-
commoder les parties (a). Et vers
la fin du même mois , les deux
Villes écrivirent au Duc, pour l'ex-
horter à relâcher les vivres aux
Genevois , &c pour lui demander
le payement des Tommes qu'il leur
devoit , devoir 14000. Ecus aux
Bernois Se 17000. aux Fiibour-
geois {ù). D'abord le Duc répon-
dit aux deux Villes , & par lettres,
& par l'organe , de Bellegarde , fon
Envoyé, QuA avoit permis libre
commerce avec Genève. Cepen-
dant il n'en étoit rien, & les Ge-
nevois , fe trouvant toujours dans
la foufrance , s'en plaignirent à
leur Alliez. Là-deffus les Fribour-
geois prirent feu , & vouloient
qu'on déclaiât la guerre au Duc.
Mais les Bernois les en diflliadérent
par leurs Députez, le 18» M.irs, en
leur repréfentant : Que le Duc de
(a) B. r?î/?r. 147.
delà Sîiîjfe. Ll V. IX. 139
Savoje les ayant ajfàré & par Lettres^ j 532.
& par [on Envoyé ^ qu'il avoit r^?/^- geneve
vert le commerce avec les Genevois^
ils ne pouvaient pas croire quil eut
menti : Que cC ailleurs l'iffue de la
guerre était toujours incertaine j Quon
ne feroit aucun bien aux Genevois, &
qu il ny auroit que les pauvres & les
innocens qui en fouffr iraient : Que
d'ailleurs ils avaient un Député
auprès du Duc , chargé de lui parler
fortement fur ce Sujet ^ &quilfaloit
du moins attendre fa réponfe L'é-
vénement fit voir qu'ils avoient rai-
fon. La Députation de Berne opé-
ra fi bien, que le même jour, 18.
Mars, le Duc de Savoye rétablit
la liberté du commerce arec Ge-
nève [a).
Cependant les Genevois profi- -
tant de la bonne dilpoiition de ^ç^nois
leurs Alliez des deux Villes , de- auprès
mandèrent d'être ouis devant la ^^^^
Diéie des Cantons, pour y porter ^"^^/^j^
leur plaintes , contre le Duc de Sa- Gencve.
voyc, des diverfes infraftions qu'il
avoit faites au Traité de S. Julien,
^ Uîd.
f» Kofet II. 6^.,
140 Hifloîre de la Kjformatîon
1532. & à la fentence de Payerne ( ^ ).
Genève Ils en firent la propofition à Berne.
On leur répondit , le 10. Avril:
„ Que LL. EE. écoisnt fâchées, de
>j ce que le Duc de Savoye n'ob-
5, fervoit pas les Traitez : C^'elles
55 lui offrir oient de juger de Jeurs
difficuir.ezr, & de leur faire droit,
>, s il vouloit , lui , fe foumettrs
>j à leur jugement : finon qu'on
le citeroit par devant les Arbi-
>3 très, qui avoient fait le Traité
>5 & la fentence de Payerne (^) ,5.
En effet les deux Villes propofé-
rent la chofè au Duc j mais il re-
fufà de fbûmettre au jugement
desSuilfes, difant, fièrement [^r ] ,
Qn^ïl étoit Prince , 8c qu 'il navoit
que faire , de pUider avec Genève,
Les Bernois ne fe rebutèrent point.
Ils envoyèrent , le mê'ne mois, des
Députez au Duc , pour lui pro-
poser certains articles nouveaux
d'accommodement. Comme l'af-
faire trainoit en longueur, les Dé-
putez de Genève à Berne firent de
nouvelles inflanccs auprès desMa-
giftrats.
{a) id. Ch. r><^.
{h\ B. infir. 159.
delà Suijfe. Liv. IX. 141
giftrats. On leur répondit Je 28. i 532.
Avril : y^Quon les prioit d'avoir un Genève
peu patience > j'ifqu'à-ce qu'on
>, eui^apris le fuccès de leur nou-
T^elk tentative auprès du Duc »
5, dont on fê promettoit un bon ef-
» fet : Que fi l'on ne pouvoir rien
obtenir du Duc par amitié ,
>, qu'il fût dans le tort, alors les
„ Bernois 5 félon leur promeffe,
>j aideroicnt aux Genevois > à leur
» faire rendre juftice W.
Dans une Dléte des Cantons af^
Amblée en Eté, le Duc de Savoye Les c?;?^
fit follicitcr les Cantons,
ticuliérement Iss Bernois à renou- J^^^^ç^
veller leur Alliance avec lui. Il nouvel-
y. envoya, dans ce deffein en Am-
bâffade le Comte à! Ent< emont , le ^.^^'^^"j^
Prcfident Lambert ^ Se deux autres Duc de
gens d'Office , avec le Seigneur '^'^'^9'^»
(ïEfiavajer i mais les Cantons le
lui refuférent , en lui demandant
le payement des penfions qu'il leur
devoit *. Les Bernois en particu-
lier
^ Cette Alliance du Duc avec touj les
Cantons avoit été faite l'an 1511. Par le
dernier article le Duc s'étoit engagé à
payer annuellement 100. Ecus d'or à cha-
que
1 42 Hîjloïre de la I\éformation
lS32.1icr le lui refuférenc au fil , parce
Genève qu'il demandoit toujours rabolitioii
de rAlliance de Genève, & de la
fentence de Payerne [.^].
Cependant le Duc ne payoit
point ce qu'il devoit aux Bernois &
aux Fribourgeois , nonobftant les
follicitations réitérées qu'ils lui
avoient faites. Enfin > à l'entrée
de l'Automne , les Fribourgeois >
perdant patience , vouloienc tout
de bon lui déclarer la guerre , 6c
ils écrivirent aux Bernoisjqu'ils vou-
loient s'emparer du Pays de Vaud.
Les Bernois leur envoyèrent des Dé-
g^^ç<^j^y- putez*,pour tâcher de les adoucir &
de les difluader d'entreprendr-c une
telle guerre [^].Les Fribourgeois fe
laifférent perluader , &: la guerre
n'eut pas lieu pour le coup. D'au-
tre coté le Duc ne cefTa de follici-
ter les deux Villes 5 à renoncer à
TAlliance de Genève. Il demanda
auil'i la même chofe> à l'égard de
celle
qii-e Cnnton. Guïchenon a fupprimè cet
article dans Ton Hiftoire p. 624. Cette
Alliance n'avoir été contrariée que peur
2^. ans. Vov. S'/w/^r Rep. Helver. p.m.
258. is^.
(a) Stettler II. <J6. b.
W MS. j^mp, izC. b. B. In/lr. 116.
USuife. Liv. IX. 143
celle de Laufannc. Dans le mois 1532.
de Novembre , il y envoya encore Genève
un AmbafTadeur , pour les prier de
le mettre en poffefTion de Tes préé-
minences dans la Ville de Genève,
de le délier de l'engagement du
pays de Vaud 5 de quirer l'Al-
liance de Laufannc. Les Seigneurs ,
des deux Villes lui répondirent ,
d'un commun accord ; Qii'i/i étoient
contens de mettre le Duc en poffejfion
de ce qu 'il dcvoit avoir a Genève^ &
de Cj accompagner , pourvu qu aupa-
ravant il donnât aux G e n e vois
une Lettre de fureté , bien fignée &
fçèllée ■ comme la fcntence de Pajernc
Coïdonnoit , c'eft-à-dîre une promejfe
authentique i de ne leur faire aucun
tort 5 ni en leurs perfounes ni en leurs
biens : Qu' afrh que le Duc fe fera
aquitc du dernier payement qîtil doit
faire a Noël prochain > des 21. mille
Ecus quil leur doit > ils agiront avec
tant det modération , envers lui > au
fujet de cet engagement de fon Pajs ,
quil aura l'eu d^être fat' sf ait: QuV;;-
fin ils veulent garder C Alliance de
Laufanne & l'otjc.ver [,;].
Parmi toutes ces agitations de la ^^^^^^^^
Ville
•5 W M6. Amp. 117. B. Ujlr.izs^,
1 44 Hijlûîre de la R^éformation
î 532. Ville de Génère 3 & fes mouve-
deRéfor mens pour la confervation de fa
mation liberté , la Reformaion y faifoitpeu
a^Gene- progrès. Cependant il s'y trou-
voic plufieurs bonnes âmes 5 qui
foupiroient après un fi heureux
changement. Voici ce que Farel en
écrivoit deGranfonjà Zuingle,le i.
Oflob. 1531. J'apens que Genève
penfe a emhajfer ] es u s - Chkist»
S'ils nétoient par retenus par la crahu
te des Fribourgcois , ils embrajfe^
rotent l'Evangile , fans différer davan*
tage. Il feroit a fouhaiter , que d'aU"
très perfonnes euffent autxnt a cœur
les intérêts de Jes us-Christ,
comme ces gens-là [les Friboiirgeois]
fe montrent zélez pour les intérêts du
Pape, Les P.ipifïes du lieu 3 comptant
fur leur protection mettent les fidèles
en prifon , fans écouta leurs défenfesy
& leur font divirfes iniquirez fans que
perfonne les en empêche. Jus eft in
armis. Leur droit efl dans leurs ar»
mes *.
* Hotting, 557.
Fin du IX. Livre,
SOM-
SOMMAIRE
D U
DIXIEME LIVRE.
I. ^Ynode de Birne. Hiftolre l $32^
\J de Sim. Sulzer. Nouveaux Re-
G L E M E N s de Religion a Zurich>
a Schaifhoufe & a Baie. Les Cha-
noines de Mouriers Grand- Val maU
traitent les Réformez- Négociations
des Seigneurs de Berne & de Soleurre
^ ce fujet. Plaintes des gens du
Pajfs, Les Troubles continuent, Tra^
ivaux de Farel a Valcngin 5 &
de¥ A^K\ a Boudri.
II. Appenze ll tient ferme pour
la Réformation, Tumulte a Glaris
AU fujet de la Religion. Les Réfor^
viez tiennent ferme. Nouvexux Trou-
bles. Accommodement. Arti les du
Traite*. Caractère de Valentin
Tfchoudi. RitabUffement de ï Abbé
de S. Gai. Accommodement entre la
Fille & iAbhé. Traite' frovi*
fionnel entre C Abbé & fes Sujets Ré-
formez» Le Tockebourg retourne
far force fous le joug de fAùbé de S,
Cal.
, To?n. /r. C III. Zu-
SOMMAIRE
Î532» Zurich. Edit contre U
Mefe , & pour lufage de la S. Céne.
Ennius cherche a nuire aux Zuricois.
IL anime contreux les Cantons Catho-
liques a roccafion de cet Edit, Zu-
rich & Berne protègent les Réformez
de Bremgarte & Mellingue. Z«-
rich accommodé avec les Cantons zé-
lez* Ennius sejforce inutilement de
brouiller les Cantons,
IV. Intrigues de quatre Cantons
Catholiques autres de C Empereur : La
guerre des Turcs les fa t échouer t
Paix de Religion en Allemagne,
V. Troubles du Luthéranifme.
Efforts de Luther contre les
ZuiNGLiENS. Travaux de B u-
c E R pour la réunion des Frotefians,
Troubles de l'y^nabaptifme. Confé-
rence des Miniflres de S. Gai avec un
Anabaptifte, Autre Conférence a
Zcffingue de plufieurs Mmiftres du
Canton de Btrne avec plufieurs Ana
baptifles, Berne en punit quel-
ques-uns a caufe de leur opiniâtretés
Nouvel Edit contreux,
VFo Pays de Faud. Viret difputi
il Oîbc nvec un A/oine, Nouveaux
troubles. Nouveaux Minifires dam
Is Balli.tge de Granfon. BiJloi>e de
Jeam
DU Livre X.
Jean Le Comte, Troubles ^(^52^
Granfon, ^ Onnensj 4 Payerne.
Alliance renouvellée entre Ber-
ne & Payerne. Le Confnl de Paycr^
ne mal-traite les Réformez > nonobf-
tant fes promejfes. Lettre Paftorale
de FareL Réglemcns louables de Ve-
vay. Voyage du Duc de Savoye dans le \
fays deVaudJl péfide aux Etat s ajfem^
liez à Morgts. Réfléxton fur ce voyage,
VIL Propofitions captieufesy^i
V* Cantons Catholiques )i la Ville de
SoLEURRE. On en fait fortir le
Aïinifîre. Calme d'un an, JSIou-
veaux Troubles. Relation des Ca- 1 $32»^
tholiques. Relation des Réformés. Nar*
ration ^/^Stettler. Les Réformés
fortenî de Soleurre, Négociations des
CantonSy & particulièrement de celui de^
Berne furcefujet. Sentiment desBcrnois.
VllL Le Fape foUlclte Zurich à ren^
trer d.ms le feln de l'Eglife Romaine y
iuî promet pour cela de l'argent. L&s Cari'
tons Catholit]ues font Alliance avec le Pape ,
Cb" lej VaUalfanj, A L L I A N C E partU
tuUtre de Berne avec Baie. Mouvimenx
des Bernois <^ des Friùourgeols, Prudence
des Laufannoîs, Alliance Fribourg
de Soleurre avec les V, Cantons. Les
'Réformes mal-traités à Soleurre y en fartent.
Conférence , des Etats Réformés à. Berne»
leurs ReprcfcntationS à ceux de Soleurre. I 5 3"4«
J^îouvelle Conférence de V'II. Cantons. Veih-
Qketé (it ^uelqHti Réformés de Soleurre. Les
SOMMAIRE DuLiv.X.
Rif/t^lés de'\^ SoLet^re dlclarent laGUerrz x
lars ennemis^ Sont défavoUés par les Bernois.
^532. Genève. Les apparences n'y font
point f^Dorables à la Réformation. -Cé
Clergé s y rend, odieux. Tumuhe a Voc~
cafion de quelcjtus affiches : Un Chanoine
eji blejfé. Farel & Saunkr enfeignmt à Ge^
neue, Farel, cenfuré parle Confeil répond'
courageufemcnt, li ejl cité devant le Co?T^
feil Epifcopal ^ <Ùr- y parle avec fermeté;^
Il y efi maltraité ' ô* court ri/que d'être
tHc, Il eji chafjè de l a Ville avec Saunier
X. Froment va à Genève.- // s y don-
ne pour Aiattre d'Ecole, y fait du fruit,
£/? fccondé par le Cor délier Boquet. Cort^
*v,erJion tnerueilUufe d'une Femme bigotte^
Stience extraordinaire d'une petite Fille,
Nouveau tumulte al' cgcajîci^ d'Hne.difput&.
de Religion.
I 533' F'^^^'î'^^"^ prêche a> Genève ^^ns la
. ph.ce du marché. Il efl obligé de quitter
Genève. Fribourg s'oppofe vivement à
* la Réformât ion d& Genève.^, Les Refor^
niés (ont opprimés Genève ils font des
Ajfemblées, Avant ur a du P. Rt)bert Oli-
vetan. Lettre du Confeil Ae Berne a celui
de Genève, Conjuration des Catholiques
contre les Réfor mes . Sédition 18. ^^^^s»
Elle efi arpaifée par des Négocions de Frh
bourg. Règlement pour la Paix, ,
XIJ. Incendiaires en Suiffe, Zurich r/-
•i%hlit l'Ecole de Cappel. Progrès de U
RéformAtion dans les Grtfons,. Aravv éîA*
élit un Co'lege^ Soins tJ es Bernois pour les
Béformés dt Rremgarte &c, & pottr les
Réformés fujets de l'Ahbé de St- Gall.
Troubles à Glaris. Accommodement entre
les Chanoines les gens de la Prévôté^
Chanoines fcandaleux. Différend entre
Bienne & le Comte de Val engin. Bçrn
' ^tMt les Çatechifmes^ I^IS
149
HISTOIRE
DE LA
RÉFORiMATION
DE LA-
S u I S S e;
LIVRE DIXIEME.
Qui comprend le Sr n ode de
Berne , les autres princi-
paux Evénemens de l'An
M D XXX II. é quelques-
uns des deux années fuivantes.
N a pû remarquer ci- Raifons
deffus.Que les ^«w/V ^'^îr'
ne paroilioiein pas Bt-^o/s
fort emprelTez pour pour les
les intérêts des Genevois, Sans ^"^^^^^-^^
^ , ce Cjtnt"
G 3 doute ir
150 Hi/ioire de la BJ formation
1532. doute ce n éroit pas faute de cou-
B^RN E rage : mais cela venoit uniquement,
de ce que Genève étant encore
alors attachée à la Religion Catho-
lique, & aflez éloignée d'eux pour
qu'ils la crûlTent incapable de leur
donner jamais aucun fecoûrs con-
fidérable \ pour ces raifons ils la
regardoient comme une Ville , à la
liberté de laquelle ils ne dévoient
pas beaucoup s'intéreffer : & ils fc
lafféfent bien-tôt des grands em-
barras qu'elle leur cauîoir. Mais
dès qu'elle eut embraffé la Réfor-
mation , ou même dès qu'elle pa-
rut feulement vouloir l'embraffer 5
dès là ils changèrent entièrement
en fa faveur 3 8c foutinrent vigou-
reufement fes intérêts. En effet on
ne peut rien ajouter au zèle > qu'ils
faifoient alors paroicre pour la Ré-
formation & aux foins qu'ils (è
donnoient foit pour la foûrenir
dans les endroits où elle étoit éta-
blie j foit pour l'introduire dans
ceux, ovi elle ne letoit pas encore:
On en a déjà vû diverfcs preuves
ci-deffus s on en verra encore d'au-
tres dans la fuite.
Pendant qu'ils travailloient pour
la
de laSuife. Ll V. X. lyi
la Réformation des autres j ils s'oc- I S32*
cupoient aufli du foin de perfection- Synodede
ner la leur propre. Le mauvais ^^^n^*
fliccès de leur dernière guerre , &
divers défordres confidérables, qui
fe firent alors fentir dans leur Can-
ton , leur firent penfer à chercher
des moyens efficaces pour approcher
de cette perfeâion 5 le plus qu'il
fèroit pofllble. Ils n'en trouvèrent
point de meilleur , que de confUl-
ter tous leurs Pafteurs , pour
étabh'r folidement leur Réforma-
tion 5 par des Ordonnances fages
de conformes à TEvangile. Dans
ce delTein , ils convoquèrent dans
la Capitale un Synode de tous
les Eccléfiafiiques de leur Canton,
au commencement de l'année 1532.
Il s'y trouva 230. Minières > qui
furent affemblés depuis le 9. Jan-
vier 5 jufqu'au 14, &c qui convin-
rent entr'eux des Régies , qu'ils
dévoient obferver dans l'exercice
de leur Miniftère, foit à l'égard
de leurs Inftrufïions , foit à l'é-
grrd de leur conduite. Ces régies ,
véritablement Chrétiennes ^ furent
rédigées par écrit en langue Alh-
n\àndc,p^lFrelJJgangCapit07î, Théo-
G 4 logien
152 Hiflûin de la Réformât io^^'
I i32 ^^ê^^^ ^® Strasboui^, qui fe ren-
bAne * ^^"^^^ Synode. On les impri-
ma d'abord en cette langue à Baie ^
& bien-tôt après en Latin > de la
traduction de Simon Sultzer.
Benhtold Haller , Pafteur & Réfor-
mateur de Berne , rendit témoigna-
ge à Capiton , qu'il y avoit pris
plus de peine , qu'on n'auroit ofé
lui en demander : & pour cette
caufe il Tappelloit le Pére de l'E-
glife de Berne {a).
Ces Actes du Synode de.
Berne furent réimprimez en Al-
kmandàBerne l'an ido8. in 40. "h
,t ç'eftLa Tradu<flion Latine fut aufïï
dont réimprimée vers le milieu du Sié-
fe7y>'' cle dernier: Cbriftophle Luthard, Pro-
fefleur en Théologie à BernCj l'in-
féra toute entière dans un gros
Traité de Controverfe , qu'il écri-
vit contre un Docteur de Fri-
bourg *.
Dans le Texte Allemand y on
voit d'abord un Edit t de LL. EE.
( a ) Hettîng, 645. de
* Difputationis Bernenjii &:c. E x p n-
C A ï I o . <& coyitrct. Adverf^rios , prAc'tpue
Jacob. Schiller, SfC Frîburg. DecAnum &c.
ér officiaUm &c. Defensio. Bernx-
1660. In folio.
t J'ai mis cet Edit à la fin des Adlç^,
pour fiiivre l'ordre des tenas.
de la SuiJfe.Liv, X. I53'
de Berne qui confirme ces A(fles jj^/ji
du Synode , & leur donne for- Berhe^
ce de Loix. Us y ordonnent , de
les lire toutes les années dans les
aflemblées des Minières, qui fe
tiendront au mois de Mai, de les
.éclaircir, & de les renouveller, &:
défendent d'y retrancher quoique
ce foit : Elfes font datées du 14^
Janvier 1532. Il y a ensuite une
Préface du Synode ^ en forme de
Lettre 5 adreflee aux Seigneurs de
Berne > oà Ton traite de la puiP.
(ânce des Magiftrats, dans les affai-
res Eccléfiaftiques 3 &: de Tufage
& des bornes de cette puilTance :
La Préface eft fuivie des Canons^ ou
Réglemens du Synode ? partagez erl
44. Chapitres. Ces Adles font af-
fuiéiiient fort beaûx; on y trouve
beaucoup d'onâion ; Ôc ils refpi-
rent > a mon [en s y un cfprit tout
Evangclique. Ils méritoient donc
bien dêtie publiez de nouveau, ^
dans une Lirgue plus connue que»-
l'Allemande. C'cft pourquoi j'ai
ciû devoir les donner ici tout en-
tiers , traduit.*, fidélcntcnt en Fran-
çois j pout rédificarion des Lcc-
G 5 tcurs
154 Hifiôire de U Kéformation
JS32. teurs pieux , & particulièrement
pour rinftruftion des Miniftres de
l'Evangile. Mais pour ne pas trop
inierroiîipre le fîl de ma narration,
Hifloir renvoyé à la fin de ce Tome.
àtSh^^m Traduftion Lati-
Mx^er, ne des A(fles de ce Synode étoic
l'ouvrage de Simon Sulz^r, Comme
ce Théologien a fait quelque figu-
re dans nos Eglifcs 5 il ne fera pas
inutile de faire, en peu de mots,
fon Hiftoire. Il étoit d'une naif^
fince médiocre , fils d'un Barbier
Imerlaken, Il étudia les Langues
Grecque &, Latine avec beaucoup
de fuccès à Lucerne > fou?; 0/ycald
MjLoniMSy & à Bâle, fous Henri
GUrean, Après la mort de fon
Pére ne trouvant point demploi
pour exercer fon talent , il fe mit
à Stas bourg dans la boutique d'un
Barbier , pour apprendre fa pro-
fcfTion, Les Seigneurs de Berne
ayant envoyé quelque Députez à
St;a'bouîg, l'an 15^0. ces Dépu-
tez y apprirent le fort de ce jeune
homme ^ fes bonnes qualitez. A leur
retour à Berne , ils en firent rap-
port à leurs Seigneurs? qui fouhai-
tant de ramalfcr des gens favans
dans
de la Suilfe. Liv. X! 155
dans leur Ville , & jugeant t^ue j 5 3 î .
Sulzer pourroit un jour rendre de Sulzer
bons fervices à fa Parrie , lui en-
voyèrent de l'argent, afin quil pût
vaquer tranquillement à Tétude >
6c le recommandèrent en même
tems * aux d<;ux Miniftres de * Le^ 30,
Strasbourg, Bucer 3c Cap ton , les 15V0.
priant d'avoir foin de lui, de l'en-
courager à étudier, Se de^leur don-
ner avis de fcs progrès. De là il
retourna à Baie , où il fe m'it en
penGon chez Si?jion Cfj/n£USy ]ix(c]Uâ^ ,
ce qu'il y obtint l'emploi de Prin-
cipal du Collège. Enfin l'an 153^.
il alla à Berne, où on le retint^
pour exercer le Miniftére & rem-
plir en même tems la Chaire de
Profeffeur en Langue Grecque t.
Après le Synode, les Seigneurs
de Berne renouvellérent leur Ed it
contre le Papifme , & dans le cours
de Tannée ils firent encore divers
réglemens particuliers de réforma-
tion. Par un E d 1 t du XI, y^^^i^^
Avril, ils interdirent abfolument i ineriic
Tufage de la Langue Latine , dans -^ux .Vo-
les Ades des Notaires, foit publics, j^'l'e'''dc
foie particuliers ; ( comme une pra- Lfi-
G 6 tique
t MS. Gr9oJ[. Hottiiîg. 544-
156 Hijîoire de la Réformât lorz
1532. tique abflirde, puifque cette Lan-
Bexne. gue étoic éteinte , éc inintelligible^
pour le commun des Hommes,)
ordonnant que tout fût éciit en la
Langue naturelle du Pays. Par un au-
tre E d i T5 du 50. Juilletjils ordon-
nèrent lo. A tous ceux, à qui Ton
âvoit laiiTc lapoffe/rion de quelques
Chapelles > de repréfenter leurs
Droits devant les Confîftoiresj afîa
d'éviter les abus : IIo. A tous les
Patrons & CoDateurs d'Eglifes, de
donner un état exadl de tous les
fonds & revenus attachez aux Cu-
res , & de le faire enregîtrer ,
afin qu'ils ne puffent jamais les
aliéner.
Dès le commencement de leur
Réformation , ils avoient pris entre
leurs mains les biens & les rentes
des Chapitres ruraux de leur Cane-
ton 3 mais ils les leur rendirent
bien^tôt à tous 5 à la referve de
celui de Buren. Enfin pourtant
ils les rendirent ^ufii à ce dernier*,
après qu'il les en eut prié inflam-
ment,
Ndu-^ a 2 u r I c h s depuis l'an 1 5 2
^'l^^^m avoit tenu oj dinairement deux
de Reli- Synodes par an, çompofez de tous
les
* Le 2
février.
de la Suijfe. L i v. X. I 5 7
les Minriftres du Canton, comme T 532.
je lai remarqué * ci-delTus"-> &cl'an gi^" ^
Je 8. Avril, il avojc été or- ^^'""^^^
donné que Ton conrinueroit exac-
tement à l'avenir cet ufage, favoir>
dans le Printems & en Automne.
IVJais on n'avoic point encore de
règlement fixe pour Tordre du Sy«-
node: & lesMagiftrats n'en avoicnc
point encore fait, pour l'entretien
& la dignité de l'état de TEglife.
On pourvût donc à cette affaire
Tan 1532. On en dreffa des Ré-
glemens & les Magiftrats les mu-
nirent de leur autorité. On mit
aufll en bon état la Bibliothèque
des Chanoines , par les foins de
PdlicAii j &. on l'augmenta, en ache-
tant les Livres & les Manufcrits
de Zujyigle (4),
AScHAfFHousE, on mit en à Sch^i^-
pièces, après la Fêce de Pâque , ^'^^'-/^^
les Images, qui étoient demeurées
de refte (^}.
A B A L E on fit auflfl divers ré* SciBale
glemens utiles de Réformarion.
Tous les Pafteurs 3c les Minières
de
* Liv. IV.
(m) Hotting. 6 :4»
(0 i«. 6^0.
158 Hifloire de la Réformât ion
IS32.de la Ville tinrent une affemblée,
B A L E. pour délibérer fur les moyens, de
mettre la Difcipliae Ecdéfiaftique
fur un pied véritablement Evange-
lique. yf^olffgang Capiton, s'y trou-
va, &: y montra It même zélé pour
la gloire de Dieu , qu'il avbit fait
voir à Berne (a). Les Magiftrats
y publièrent auffi un nouvel E d i t
contre les Vices , pour réformer les
mœurs de leur Citoiens , aufli-bien
que leur croiance. Mais particu-
lièrement ils fermèrent une Maifon
de débauche , qu*on y avoit lailTé
fubfirter jufqu'alors, depuis le tems
du Papifrne 5 6c l'interdirent pour
toûjour^, comme un fcandale public,
une tache à la Relig^ion Chrétienne»
de une fource de corruption pour
la jeuneffe. Il y avoit quatre ans
, que lesMiinftres a voient foUicité inu-
tilement cette Réformation , par
leurs Sermons & par leurs difcours
particuliers : On avoit lailTé fubfif-
ter cette Maifon de débauche ,
parce que le commun Peuple étoit
prévenu de la penfée> qu'elle étoit
nécelTaire, pour mettre à couvert
l'honneur des filles & des femmes
ver-
(a) Id. 6^
de la SuiJ[e. L l v. X. 159
vertueufes, contre la pétulance de 1532.
la jeuneffe. Six ans auparavant le b a l
feu du Ciel avoir confumé Ôc ré-
duit en eciidre une autre maifon
de la même nature , dans la Ruë
appellée AJalzgaffe, On n'y avoit
point fait d'attention : mais cette
année la MaîtrelTe de cette derniè-
re Maifon ayant éié aflaffinée j ce
Crime réveilla le zélé des MagiA
trats , & kur fi: faire cette refor-
me fi néccffaire (a).
On s'employa au/Ti à mettre VU- Rctablif-
niverfué Sc les Collèges en bon ^^^^^} .
E:at5 pour y avoir un féminaire
dt Savans , & de gens propres à
feivir utilement leur Patrie» en
toute forte d'Emplois. On convertit
en Collège le Couvent des Au^uft 'tns»
Or. fie de celui des Domini ains une
Maifon d'inftîudion > qu'on ap-
pella la Saptence , pour l'éducation
d'un certain hombie de jeunes Bâ-
lois. On choifit tjois Seigneurs de
l'Etat 5 pour être Infpecflcurs ou
Commis fur l'Univerfi é , (avoir ^
Fodolf Frey, F uiolin F.etff ^ Hiti i'
Rlhncr y Chancelier. Ils rci dirent
à rUniverfité fa Jurildi^ion avec
fss
î 60 Hifîoire de la Keformatton
rj52.fes Livres , fes Regiftres 8c fes
E A I E. Joyaux , que les Magiftrars avoienc
eu depuis quelque teins en garde :
Ge qui fe fît dans le mois de Sep-
tembre. On pourvût rUniverfité^
de bons ProfefTeurs , pour enfei-
gner la Religion Réformée , & oa
leur âfligna des penfîons convena*
bles. Dès-lors les Sciences ôc les
beaux Arts fleurirent plus que ja-
mais à Bâle, 6c fe communiquè-
rent aux Pays voifins^ tant dans
la Suiffe que dehors 5 par les fa-
vans Hommes qui s'y formèrent.
Le premier Relieur de l'Univerfitr,
depuis fa Réformation & fon réra»-
blilTement 5 fut Oswald B^s^r,
Doifleur en Médecine , élu Re<fleur
l'an 1 5 3 2 j natif du TtïoU & l'an-
née fuivante> ce fut Paul Conftanfh
Phrygionj de S, blettftatt en
Alface, Dodleur en Théologie , ou
( comme on parloir alors , ) en Ecri-
ture Sainte {a).
Règle- On lit aufii quelques Règle-
con^tre ME NS contre le P^pifme j cntrau-
la M^i/?. très il fut défendu daller entendre
la Meffe dans les Pays Etrange rs,
Se l'on en rendoic cette raifon j Qn^
puis
(^) Id. il^id. & VFurfiis, VIIL Ch. 14.
de la SmJJe. L I v. X. i 6l
puisqu'on Favoit abolie fuivant 1 532»^
les Inftrudions de la Parole de B a jl e
Dieu , & qu'on avoit rétabli à fa
place le véritable ufage de la Céne
du Seigneur , on dévoie s'en con-
tenter. Il fut au/Tî refolu , par
rapport à 1 exercice de la Difcipli- y^ç^^^
ne Eccléfiaftique, fi un Hom- de fo'i^*/
me après avoir été fufpendu de ctplù^e^
la Communion pour fes dérégle-
mens , demeuroit un mois entier
fans fè repentir , &c fans fe recon-
cilier avec l'Eglife , on le banni-
roit de la Ville ^ du Pays , juC-
qu'à-ce qu'il fe fut corrigé {(?).
Il fembla que le Ciel voulût bé-
nir les Bâlois , à caufe des bons
Réglemens de Réforme qu'ils
avoient faits. Ils avoient été atta-
quez l'an 1515. par les Payfans
rebelles , des Balliages de Bom-
berg 8c de l^f^allenbourg , & des quar-
tiers de Liei htfialt , ou Licflcl , &f
de Fahrnsùjyg : Sc par la média-
tion des Députez de Zurich, de
B^rne 3 & de Soleurre> ils avoient
fait avec eux un certain Traité, qui
ks avoit fatisfait. Dans la fuite
il'
/i'':irf}if. 1. c. pag. ^10.
ï 62 Hijîoire de la K.éfoYmattûn
I Ç32. il arriva î que durant la ftérilité des
Ba L E. années 1530. ôc 1531. la difette &
la cherté des vivres étant fort gran-
des 5 les Magiftrats de Râle firent
venir Tan 1530. de Biberach de
Memmingue & de Schaffhoufe , des
grains donc ils diftribuércnt cha-
que femaine, à un prix modique,
plus de 150. facs aux pauvres
Bourgeois j jufqu a la récolte de
l'année fuivante. Us étendirent
aufTi leurs foins charitables aux Pay-
fans de leur Canton , 6c leur fi-
rent beaucoup de bien. Cette an-
née donc ( 1 532. ) ces Payfans vin-
rent à Baie, de leur propre mou-
vc vient, fs préfenrérent devant le
Confcil, & confeffant humblement
la rébellion dont ils s'étoient ren-
dus coupables l'an 1525. ils remi-
rent volontairement entre les mains
de leurs Seigneurs , l'inftrument du
Traité qui avoit été fait alors avec
eux, les priant de leur pardonner
& de les laifTer dans leurs anciens
ufages, ce qui leur fut accordé
N'oublions pas de remarquer, que
les Chanoines de Eâle , qui en
étoient fortis lors de la Réfor-
mation
(«) 1, c. pag. 587- KUnhr, sf.
de U Suijfe. Liv. X. 163
mation de cette Ville ? demandé- I 532*
rent permifTjon d'y rentrer. On la B a 1 1.
leur accorda 5 au cas qu'ils vou-
îiifTent fe conf^ormer à la Réforma-
tion de Ja V\\h{a), Mais cett«
condition n'étant pas de leur goût,
ils fixèrent leur demeure à Fribourg
en Brifgavv , avec leurs Concubi-
nes 5 comme on l'a déjà dit *
ailleurs.
Les Chanoines de la Cathédrale La Pre-
de Baie me font penfer à ceux de vote»
Moutiers Grand-Fal , ou de la Pré-
vôté y qui éroient de la même trem- ^
pe> aufli-bien que du même Dio-
céfe. Ces vénérables Ecdéfiafti-
ques avoient été fouvent exhortez
par les Seigneurs de Berne , tant
de bouche que par écrit, à renon-
cer au commerce de leurs Concu-
bines , à ne point inquiéter les Ré-
formez > & à payer aux MiniftreSj
les penfions qui leur avoient été
aflignées. Mais l'habitude du vice
avoit pris de trop fortes racines
chez eux, pour qu'ils fe corrigeât
fent. Ils ne voulurent rien faire
de
(il) Hotting, 6^0.
Tom. Il> p. 16%,
! 64 Hiftoire de U B^tformatton
Î 532. de ce dont on étoit convenutTus
La Pre- leur fujer. Ils gardèrent leurs Con-
vôte'. cubines. Ils maltraitèrent les Réfor-
LesCha-mez en diverfes manières. Vers
nomes le commencement dç Tannée 153 2.
tiers mal ^® Prévôt 5 accompagné
traitent de quelques autres Catholiques a
les Ré- ^lla attaquer de nuit le Miniftre
iormez. jg^/^^^/^^^ j^ns fa maifon, & com-
mit divers aftes d'infolence & de
violence contre lui 8c contre fa
femme. Au fortir de la 5 accom^
pagné des mêmes perfonnes , &: mê-
me d'^ quelques-uns dQ ces Chanoines^
tous armez de fufîls , d'épées &: de
harnois , il alla dans une hôtelle-.
rie publique, où il y avoit One
nôce de gens de la Paroifle.
Ces dévoîs Catholiques infultè-
rent les gens de la nôce qui ne
penfoient point à eux j &c aux pa-
roles outrageantes joignant les
voyes de fait 5 il« les mal-traitë-
rent d'une manière infâme. Le Mi-
mftre de les ParoifTiens s'en plai-
gnirent aux Seigneurs de Berne.
* Le li.^ . / • • ^ vie ^ Mr A
Janvier. Ceux-ci en cciivirent ^ albveque
de
t Voy. ci-denus Lib.IX. Ch. VUU
4. M?s M noires ne difenî pas fi ce
fils ctoic bâtard ou légitime.
deU Suijje. Lrv. X. l Ô J
de Baie, pour lui demander jufli-iy32*
ce, 6c le prièrent de marquer uneiAPRE-
journée pour ce fujet> afin qu'ils y^^,^^ -
puffent envoyer leur Députez {a) fi^îTdes
&:c. L'Evêquc leur répondit fortSeign".
civilement*. Qj/il avoir un ^^^^^'^f^^^'
5, grand chagrin de cette affaire : /^^^^^^"^^
5, Que cependant il les prioit de ne ce fujet.
„ pas demander un Tribunal ex- jg^y^-^'/;
traordinaire, pour punir les Gou-
y) pables: mais de lui laiffer le
^) foin de cette punition , leur pro-
o> mettant de s'y prendre de telle
yy forte , que femblable cas n'arri-
y) veroit plus 5 & qu'il en auroit
-55 de la reconnoîflance. Ouarit zux
^) Concubines des Chanoines:, qu'il
leur avoit déjà févérement défen-
5, du d'en tenir, & qu'il le leur
yy défendroit encore &c. (l?) „.
Les Chanoines, profitant de leur
Alliance avecSoleurre , recoururent
aux Magiftrats de cette Ville , qui
prirent en main leurs intérêts , 8c
en écrivirent t aux Seigneurs dejanwcr'^'
Berne. Ils leur difoient
5) les gens du Pays ne vouloient
?j pas payer aux Chanoines leurs
Dîmes
I66 Hidoire de U déformation
1532. » Dîmes & leurs Cenfes , ôc pré*
La Pre- « tendoienc que ces Meiïieurs de"
▼ÔTE. „ voient répondre , fur ce difFé-
» rend , devant les [uges du Pays :
Que cette prétcnfion ne les ac-
» commodoit pas, puifque les gens
>, duPjiys étant intérelTez dans cette
„ affaire , ils feroient Juges ôc Par-
j> ties : QifAs prioient donc LL.
5, EE. de commander a ces gens là
>j de s'aquiter de ce qu ils dévoient
5> aux Chanoines : Que fi cela ne fer-
voit de rien; les Chanoines étoient
>, prêts à foutenir leurs Droits, de-
vant TEvêque , leur Seigneur, ou
» devant le Tribunal qu'il établi-
>, roit: QujM cas que cela n'ac-
commociât pas les gens du Pays,
a en ce cas il faloit faire un Tri-
>, bunal compofé de deux Confeil-
>, Icrs de l'Evêque, de deux de
Berne & de deux de Soleurre:
3, & qu'ils offroient de s'y fou-
35 mettre : Enfin, fî cela ne pou-
voit pas avoir lieu, ils offroient
3> de paroitrc devanr la Diète des
9, Cantons , ^'ainfi ils prioient les
Seigneurs de B.rne , d'ei gager
5, les gens de cette Vallée , à ac-
j> cepter l'une ou l autie de ces
oifiesj
UC Lie sJH'lJJfi* JU.iv. jr^é * /
j, offres, au cas qu'ils ne vouluffent f 532.
pas payer leurs red«vances deiAPaE-
55 bonne grâce {a) 3, . Les Seigneurs vote*.
deBerne^répondirent „ Que com- * Le 2.
5, me ils avoient trouvé raifonna-
5, hle, que leurs Alliez de la Pré-
3>vôtc > après avoir embraffé la
j, Réformation , euffenc part aux
5, biens d'Eglife , pour rentretien
5, de leurs Pafteurs ôcc. il l«ur pa-
j5 roiffoit aufTi jufte , qu'ils payaf-
5, fent aux Chanoines les Cenfes
3, qu'ils leur dévoient M 53.
Les affaires demeurèrent ainfi
brouillées pendant plufieurs mois »
entre les Chanoines & les gens du
Pays : Enfin les Chanoines 3 im-
patiens d'en venir à une condu-
fionj envoyèrent des Députez à So-
leurrcj prier ces Seigneurs de les
protéger, & de les foucenir contre
leurs parties. Ces Seigneurs en
écrivirent * à ceux de Berne , les
priant de leur aider à mettre ces
gens-la à la raifon [t]. Il y avoit
Cu , quelque tems auparavant 3 une
Conférence entre les Députez de
Berne
U) Ibid.^-y, 88,
{b\ ihid. 88. 89.
(0 iliid, by. iW.
168 Hïfiôire U K^cformatio'^
;32. Berne & de Soleurre , où ils
Pr£- étoient convenus j que les Réfor-
* mez de Moutiers laifleroient aux
Chanoines Tufage de leur Eglife
Collégiale , fe contenteroient de
la petite Eglife 5 [comme étant leur
ancienne Eglife Paroi/Tiale , ] pour
y faire leur fervice divin. Mais
les ParoifTiens ne voulurent point
(c foûmettre à ce règlement , 6c
perfiftérent à demander Tufâge de
i'Eglife Collégiale. Ceux de So-
\ leurre s'en plaignirent encore * aux
Bernois, & les prièrent d ordonner
aux ParoiiTiens de ne faire aucun
mouvement, jufqu'à-ce que leurs
deux Villes envoyaffent de nou-
\^cau des Députez, pour terminer
une bonne fois toutes ces affai-
res [^]. Les Seigneurs de Berne y
confentirent , lailférent à ceux de
Solecrre le foin de marquer cette
journée. & leur envoyèrent la let-
tre qu'ils écri voient en conféquence
à leurs Alliez de la Prévôté [A].
Mais la Conférence n'ayant pas pd
avoir iieu, dans le tems qu'on l'a-
voit crû, à caufe de la pefte, qui
régnoit dans ces Quartiers-là > les
Sei-
(4 ^ ) IhiÀ. SX?. 91,
de laSuiffcLlY, X. 169
vS^igneurs de Soleurre la remirent j j 32.
au Mecredi après la S. Martin [4]. l^Pbe.
La Confe'rence fe tint à votf.',
Moutiers au jour marqué. Les Dé-
putez de Berne ? de Soleurre
& de TEvêque s'y trouvèrent ;
& ceux de l'Evêque y préfentérent
aux autres, divers articles de plain-
tes contre les gens du Pays 5 tant
de la part de TEvêque? que de celle
du Chapitre : Ces plaintes reve-
noient toutes a ceci 5 que les gens
duPays refufoient à leurs Seigneurs
diverfes redevancesj dont ils étaient
chargez [^].
La Conférence s'étant terminée
fans fuccès, les gens de la Prévôté
& à^Tavanes en particulier, envoyè-
rent aux Seigneurs de Berne un
Mé^r.oire > qui conrenoit XIJI. Ar-
ticles de plaintes contre l'Evêque
de Baie , & contre les Chanoines
de 5. Germain ou de la Prévôté.
Voici les principaux :
L Ils demandoient , „ Qjion leur vl^intes
„laiffât l'entrée libre de ^ ^gl'^f^ '^^^^^l
3, Collégiale àtS, Germain , ( com-
3> me cela s'étcit pratiqué de tout
Tom, IV, H tems;)
(cl) Uid, s>o. 91.
ï 70 Hïftoïre de U ^déformation
1532. tems, ) pour y batifer leur enfanss
LaPre- & y f^iiire prêcher 55.
'.vote'. il. lis fe plaignoient, Que TE-
3, vêque , dans les conceflations ,
,3 qui intéreffoient leur Commu-
nauté , faifoit venir des Juges
3, Etrangers 6cc,
ni. yy Que l'Evêque & f.s adhé-
35rans avoie jt promis aux Seigneurs
53 de Berne, d'abolir la -^/ljJ/^ dans
,3 ce Piys-là : ce qui n'avoir pt.int
33 été fait; & qu'on l'avoit même
33 rétablie à Coratidslin 3 où ces Met
3 3 fieurs vi voient dans la débau-
53 cne 3 & vouloicnt défendre de
3, prêcher la parole de Dieu.
IV. 33 Que ni TE vêque ni fes gens
33 ne font point en droit , après
„ avoir aboli la Mcffe, de la ré-
tablir 3 à moins qu'ils ne la
3, prouvent par l'Ecriture.
V. 5> Que contre la teneur d'un
^^Edit ^/f Berne 3 admis par l'E-
3, vêque & par fes adhérans, pour
35 la reformation du Pays3 ils chaC-
3, foi en t les Miniftres , de en diver-
5, fes autres manières ils éludoient
3, cet Edit.
VIL i^Que c etoit à tort que les
^, Chanoines les accufoient de leur
lefu-
delà Suîjje. Li v. X. 171
55 refufer leurs Censés & leurs Dî- i 532.
omes; puifque ce n'étoic que laiAPRE-
5) d'i^eite qui les avoit empêchez de^^^^^ -
3> les payer : car ils croient bien ré-
3, folus de s'aquiter d'année en an-
3, née de ce qu'ils leur dévoient,
. IXv Ils demandoient. ^'on
^, obligeât les Chanoines à renon«"
3, cer à leur vie déréglée 3 à leur
fornication^ à leur Tvrognerie Ôcc.
3, parce que s'ils ne le faifoient pass
,3 cela pourroit caufer quelque dé-
53 fordre 3 capable d'entrainer une
j3 grande efFufion de fang : &c.
X. 53 Ils conjuroient les Seigneurs
,3 de Berne, au nom de Dieu, de
,3 leur aider j pour que la Parole
33 de Dieu leur fut prêcbêe librement,
33 & qu'ils ne fuflent pas réduitS3
^33 faute de Miniftres , à la trifte
33 nécefTué de mourir fans confola-
3, tion dans ces tems de pefte, 6c
,,en d'autres 5 & que les Chanoi-
9) nés leur en fourniflent, puis qu'ils
,3 tiroient d'eux les Dîmes & les
33 Cenfes &c.
XI, ,5 Ils les prioient de même
3J de leur aider, pour que le Pa-
9>pi,me fut entièrement aboli parmi
9} eux &c.
H 1 XII. Ils
Î72 Hijloire de la Kéformàticn
1532. 5> fe plaignoient de ce
La Pre- 55 t^iie TEvêque avoin ordonné à
vote'. 55 fon Maréchal, & au Maire de
5, Delcmont 3 d'empêcher qu'on ne
5, prêchât la Parole de Dieu dans
quelques Villages 5 qui la fou*
.r> haitoient : Ordre qui avoir été
33 exécuté &c. {a).
Les plaintes paroiffant graves de
part & d'autre 5 les Seigneurs de
Berne marquèrent une journée à
Bïenne , au -8^* de Décembre, pour
terminer ces difHculcezpar une nou«
Nomnb ^^^^^ Conférence. Ils invitèrent ^
TEvêque de Baie à y envoyer fes
Députez , & ils en firent de même
à l'égard de leurs Alliez de Soleur-
re. Dans cette Conférence les Dé-
putez des III. Etats examinèrent
ies plaintes léciproques des par-
9 ties 3 6c convinrent de quelques
articles, mais ils en prirent d'au-
tres ad Ycfnemum, Ils convinrent
J5 Que les gens de la Prévôté ne
>, feroient obligez de répondre que
35 dans leur Pays , & non devant
5> des Tribunaux Etrangers 5 pour
5> Je différend qu'ils avoient avec
les Chanoines: 11^- Que les Cha-
noineç
{a) Uid, à pag. ^4. ad
deU Suîjjfc. Lî V. X. 173
noines de Moutiers ayant pro- 1532.
55 mis Tan 1 53 1. a embralTer h Ré- La Pre-
1 35 formation, & n'en ayant cepen- vôte'^
,r dant rien fait \ les gens du Pays
5, ne leur payeroient plus défor-
„ mais ni Cenfe ni Dîme 5 jufqu'à-
5, ce qu'ils euffent prouvé par TE-
3, cri cure, que la lyLff: eft bonne &
Les Chanoines nièrent d'avoff
promis d'embrslTcr la Réforma^ion :
,3 mais fei'kmcnt de s'êcre erg.rgez
3, à. ne plus dire la MeiTe à Mou-
tiers i comme effe(flivement ils ns
5,1a difoient plus dans ce lieu là?
3, mais à Corjndelin : Que du refte
,3 ils n'étoient pas là pour di/jju-
,3 ter „ : Ainfi ils refuférent de fe bfescon-
foûmetrre à cette déci/ion des Sei- tinuent.
gneurs de la Conférence, & d'ou-
vrir leur Eglife aux gsns du lieu.
Ceux-ci , de leur côté 3 pei/évére- ^
rent dans la refolution qu'ils avoient
prifc de ne leur payer ni Cenfes
ni Dîmes , jufqu'à ce qu'ils euflcnc
prouvé la Mefle par Tlkricure, de
forte que cette affaire ne pût erre
terminée que Tannée fuivaiire. Cc^
pendant les gens du Pays s'enga-
gèrent de leur bon gré k s'aquiter
H 3 envers
IJ^Hij'Ioirede la formation
1^32. envers FEvêque, de tout ce qu'ils
lui dévoient Xa)^
Quoique G u 1 l a u m e F A-
R E L fût toujours attaché à TE-
Travaux ^^^^^ Morat , cependant fon zè-
de Fa^s pour la Réformation de TEgli-
REL aufe> ne lui permit pas d'y deaieu-
de"^^ tranquilement 3 il alla prêcher
lengin. Cette année dans les montagnes du
Comté de Falengin, En particu-
lier il travailla quelque tems au
Lode y où il difputa même avec le
Caré , fn préfence de la Com-
ttjTe [h).
. ^ Dans le même tems Chris-
Fabri àTo PII LE F A BRI pîêcha à BoU"
JBoudri, du j petite Ville du Comté de Neu-
chatel' Il y fit du progrès , &
au bout de quelque tems il eut un
affez bon nombre d'Auditeurs. Les
Catholiques > irritez contre lui ,
formèrent le delîcin de l'attaquer
à main armée, avec Ton petit trou-
peau 5 un Dimanche qu'il feroit af.
femblé, & de les égorger tous.
Mais heuieufement ce barbare com-
plot fut découvert: Les Magiftrats
de Neuchatel en étant informer j
le
00 îliiL 99' 100. loi.
Mcm. partie.
de la Suiffe L I V. X. 1 75
le firent échouër^ & donnèrent de I532.
bons ordres pour mettre les Catho-
liques hors d état de nuire aux Ré-
formez. Quatre ans après , la Ville
de Boudn cmbraffa la Réforma-
tion {a).
II. Tandis que les Cantons &
les Etats Réformez de la Suifle>
faifoient paroître leur zèle pour la
Réforme de leur Eglifes , les Ca-
tholiques n'en faifoient pas moins
pour le foutien de leur Religion.
Dans le Canton A^^enz.eU^X k(- ^^^"^"^^
femtlée générale du Pays s'érant^^^^*
formée , le dernier Dimanche d'A-
vril, on y éxamina l'affaire de la
Religion à la pluralité des voix :
6c les Réformez l'emportèrent.
Les V, Cantons zèlez leur écri- tient fer
virent de leur Affemblée à'Einfidlen, Tp??"'
pour les prier de lanler célébrer mation,
uneMeffe dans chaque ParonTe, en
faveur de ceux qui le fouhaite-
roient. On leur répondit, (J^on
s en tenoit a ce qui avoir été réglé
par l'ajfemL-iée générale ^ d; par les
Cojifeils. On donne la louange au
Capitaine Berm^eger, d'avoir
H 4 le
(^) Vita Pareil. MSC, apiid Hottîng,.
1 76 Hijloire de la K.éformaùoH'
I 53 2. P^"s contribué à cetteréfolution>
par fon zèle & par fa pieré {à),
Glakis Le même Dimanche, qui éuoit
le 28. d'Avril, rAffemblée générale
du Canton de Claris ayant été con-
voqués , on y vit paroître des Dé-
putez d'UVi & de Schvvitz = au
nom des V. Cantons zèlezj qui
demandèrent , Si l'on vouloit obfcr^
ver le Traité de paix ? Et en mê-
me tems follicitérent les gens du
Pays à fe conformer à eux à l'é-
gard de la Religion. Les Catho-
liques du Canton entendirent ce
difcours avec plaifir. Mais les Ré-
formez répondirent, Quils Jcn te^
mtmt à la promejfe qu'ils avaient
faite dernièrement , en Décembre *^ 8c
demandèrent en même tems^ qu*on
palTât k cho/ê à la plui alité des fuf-
frjges. Les pré T;iers s'y oppoférent
d'abord , mais enfin il falut qu'ils
cédaiTent. Quand on eut fait ren-
trer les Dépucez, & qu'on leur
eut déclaré le fentiinent qui avoit
paffé à la pluralité , les Catholi-
ques ne laifférent pas de pcriî/ler
dans leur premier fenriment. Là-
defllis
(4) Hotttng. 644.
^ Voy. I/v. VrU. Ch. XV.
de la Suijfe. Liv. X. 17,7
deHus il s'éleva un fi grand trouble, 1532*^
que rAffemblée k difTipa confufé-
ment 5 & fans rien conclurre , & lumuhe
il en falut convoquer une autre , le \^^^^
Dimanche fuivant. Dans cette fc- ligion.
conde Affemblée parurent des Dé-
putez des V. Cantons, qui firent les
mêmes propofirions. On y pour-
vût aux Emplois, qui furent rem-
plis par des fujets des deux Re-
ligions. Les Réformez & les Ca-
tholiques examinèrent , chaque-
parti à part, les propofitions de
ces Députez j & les Réformèz y Les Ké^
répondirent ^ tout comme ^Is^^^^^'^^^
a voient fait , dans TAffemblée pré- ferme,
cède n te {à).
Mais tout cela n'étoit rien en-
core en comparaifon des troubles
qui furvinrcnt dans ce Pays-lài-
vers le milieu de Novembre, à
Toccafion des difcours injurieux
que le Prêtre de L'mthd avoir te-
nus, 6c des menaces qu'il avoir
faites contre les Réformez. Ils
voulurent l'en punir , mais il Te
fauva. . Là-dtlTus quelques jeunes ^013.
gens de Nehefels , tÇpms bouillans veaux
^ faaieux 5 du parti Catholi- î>^*'^^^^^-
H 5 que
{a) Hotting, e>44. (^4^.
%
178 Hidoire de UBjdformation
1532.9^65 voulant venger ce Prêtre,
GiARis allèrent attaquer * de nuit le Mi-
Novera'b.' i^i^^-''^ de Mollis y dans le deffeia de
Un Mi ^^^^^^"^ 5 quoique de leur propre
nljlre at- ^vcu 5 ils n euffent aucun fujet
taqui: de de fe plaindre de lui , puifqu'il
chez lui parlé injurieufèmentj
par des d'eux , ni de leur Religion.
Catholi Mais comme il eut le tems de fe
ques. f^uver , quoi qu'avec beaucoup de
peine? ils déchargèrent leur fureur
fur fon ménage & fur fes meubles 5
proférant di ver fes menaces contre
leurs Compatriotes Réformez. Le
lendemain ils fe mirent en armes>
& nonobftant toutes hs exhorta-
tions , qu'on pût' leur faire , ils
demandèrent lepée à la main,
comme ils Tavoient déjà fait, le
5. Mai précédent 5 que tous les Mi-
niftres fuffent chailez du Pays:» &
que leCathulicifnie fût réiâbii dans
toutes lev EgHfes. Mais comn.e la
Méthode de ces ConvertilTcurs
étoit un peu trop violente? ellt^ ne
fe trouva pas du goût de tout ie
Monde. Les gens de Sibxvanden
raportéient les meîuicts de wes
g^nis-ià au L;jî5vî-Am)ran> ou Chef
du Pays , q:_.i convoqua inceifam-
de la Suijje. LiV. X. 179
ment une Aflemblée générale ; niair j j 32,
partagée en deux Corps ^ ^^iv'ant Glaf.is
les deux Religions. Les Réfor-
mez , qui faifoicnt le plus grand
nombre , s'aiTembiérent à Schvv.m^
den y & les Catholiques à G Uns.
Dans la fuite pour êire plus près
les uns des aurres , ils s'avancè-
rent de part & d'autre jufqu a A-Jit-
lœdi, Heureufement pour eux
il s'y trouva des. Députez des V.
Cantons , de l'Abbé de «S". Caly
des Grifons 3c du Tockebcmg , qui Accom^
les accommodèrent ; fans quoi ils
couroient nique de s égorger les
uns les autres. On dit qu'il y
avoit aufîi une Députarion de Zu-
rich en chemin , mais qu'il y eut
quelques malicieux, qui pour l'em-
pêcher d'avancer & de paroître^
coururent à cheval au devant des
Députez:, & leur dirent, Quel^Mt
préfènce n'éroit pas nécelTaire , que
tout étoit terminé. Les Articles
de l'accommodement furent les
fuivans :
I. Que pour le bien de paix , Articles
on feroit fonir du Pays le Minif^
tre de Schwandcn,
IIi Que ceux de Schwanden fc
H 6 pour--
1 80 Hifioire de la déformation
1532. pourvoiroient dans Tefpace d'un
Qi^xiKis mois , d'un autre MïmjÏYe , & d'un
Frétre.
III. Quon liroit publiquement
dans J'EgJife Je Traité de Paix de
la SuifTe , & qu'on robfcrveroic
poné^i^ellemenr.
Les Cnihcliques avoient repro-
ché aux Réforn^çz qu\h avoient
fait venir dans les AfTcmblées des
halitansy * qui n'étoient pas natu-
rels du Pays> & cela, pour faire
le plus grand nombre par leuc
moyen , dans h s affaires de Reli-
gion. Les Réformez leur répon»»
duent: Fous [avez que nous avons
renvoyé les h.ikhans ^ quand il s'efl
agi (T affaire de Religion , toutes les^
fois que l'ous favez fouhaité. Et
comme les Catholiques k plai-
gnoient encore , qu'on n'obfervoit
pas à leur égard, la réfolution
prife à Tbaneherg , 6c qu'on ne pu«
rifToit pas les Gontrcvenans ; les
Réformez les firent fouveni^: de la.
_ faveur qu'ils leur avoient faire à*
cet égard : Quoi que nous fajfions le
plus grand nombre , leur dirent -ils
dans les Co?nmunai{tez ? & dans les
Con-
^ HinderfUjfenj
delaSuife. LiV. X. Igl
Confeils , cependant nous avons bien
voulu y pour vous faire plaifir (^/V«Glari3
que nous yiy fuffions pas obligez , ni
par nos Traitez 7 ni par les Loix du
Pajs^ ) permettre que vous choifijfiez
ftx personnes de voire coté 3 & nous^
fix du notre , pour compofçr un Tri^
bunah charge de punir ceux qui con-
treviendraient au Traité fait entre
nous , au fujet de la Religion : &
nous y avons ajouté le Land - Am-
man 5 comme Préfident , nu , furarbi-^
trcy pour décider en cas de partage (^)»
L'accord ne fut pas d'abord exac*
tement ob/èrvé. La Mefle fut ré-
tablie à Schvvanden'-y mais on n'y
rétablit point de Miniftre , & les
Réformez du lieu , alloient faire
le fervice Divin , à Bettfchvvandeni
qui eft dans le voifinage.
Mais Tan 1538. le Prêtre de
Linthal s'en étant allé 5 le nombre
des Catholiques ayant fort dimi-
nué par la pefte ; & outre cela
le défaut de Pafteur y caufint beau-
coup de défordres , les gcr?s de
Linthal , arrêcérent à la plur.:lité
des voix , Tan 1542. de prier />/- •
doUn Brunner y alors Pafteur âBetts-^
chivan-'
{a] Hottir.g, 647. (748.
1 82 Hiftoirc de la BJformation
1532. chvvmden , ( & auparavant à Matt
Claris Tan 1532. ) de leur annoncer la
Ceux de p^j-ole Dieu, avec le confente-
appel-' rn^n^ fc-^ Eglifs , & de vifiter
lent un chez eux les malades & les mou-
Minifae rans. Brunmr ne voulut s'y ré-
foudre, que fur l affûrance qu'on
lui donna, que les gens de Ltnthd
le fouhairoient unanimement que
le Confeii d'Etat Tagieoir. Avec
cette double preuve de fa voca-
tion y il fervîî à la fois ces deux
Eglifes > jufqua l'an 1555. qu'il
fut appelle à Claris aprèî» la mort
Garafiè- de Falentin Tfchoudi ^ 7 étoit
hmin Curé. Ce P^alentin Tfchoudi étoit
TjchoHdl un Homme fingulier en fon efpè-
ce, aufll - bien que ^ean Heer fon
Vicaire, Ils étoient tous deux
mariez , Se par • là ne pouvoient
pas diie la Meffe. Ceptndant ils
éroient Catholiques , mais fans
averfîon pour la Religion Réfor-
mée j deforte que, lors qu'après
la guerre de Cappel , fi funefte
au parti Réformé , on rétablit les
Images & les Autels dans l'Egli-
fe de Claris , il dit aux Ca-
tholiques , Qu'ils ne dévoient point fe
faire de peine de l'uvoir pour Pafieury
de la Suiffe.Li'v. X. I83
puis qii'îl ne vouloit point s'oppofer a l J 32
leur Religion^ ni U critiquer dans fes Glarts
Sermons , & qu'il vouîoh aller lui^
même à la Aîej^e, La plupart q en-
tr'eux agréèrent la chofe , parce
que d'ailleurs 3 il étoit un Homme
de naiflance , confidéré dans lelieU;.
palTablement favant s aufli il
leur tint parole, hfi Doy^n Schou^
1er difoit la Meffe à Claris > &
Tjchouui prêchoit aux deux partis?
ce qu'il fit jufqu à fa mort. Cé^ ,
toit là le vrai moyen d'éviter la
pe fécunon. Il y eut cependant
quelques Catholiques zélez 3 qui
ne s'accommodoient pas de fes
Sermons 3 6d qui vouloient avoir
un Prêtre en forme pour Curé 5
mais ils ne purent par l'obte-
nir *.
L'Abbé de S. Gai , Diithelm R^tablif
JBlaarcr > fe prévalut au/Ti des avan- fe.rent
tages remportez par les Cantons ^^^^
Catholiques 3 pour fe remettre tn-ad,
polTtflion de fon Abbaye, dont la
diflipation avoir été la première ,
ou du moins la principale fouice
des troubles &: des inimitiez enrre
les Cantons. Il ne lai etoit reilé
que
î84 Hifloire de U Reformât ion
ÏS32.qug Moines, difperfez en ài*
S- G'hi ^^^^ endroits. Appuyé des Can-
* tons de Lucerne & de Schvvu%, Sc
des Catholiques dQ.Glaâs , il ren-
tra dans TAbbaye avec fes Moines^,
le r. Mars 15^^. trois ans après
qîi'on y eut aboli le Papifme. Les
quatre Cantons , protefteurs de
Accom- l'Abbaye , avec Berm &z Appenxelly
?node~ iîxent à FTeyl un accomrnodement
t^el'Ab- entre l'Abbé & la Ville de S. Gai,
bé & la qui avoit acheté les bâtimens de
J^^^-^^e l'Abbaye & le Domaine qui fe
, ' rrouvoit dans fa J jrifdiction. Le
Traité d'achat fut caffé , Se h Ville
de 6'. (7^/ obligée de payer à FAbbé
dix mille gouldes pour les fruits
qu'elle avoit tirez , comme aufH
pour tous les dommages inté»
rets. L'Abbé fit clTacer dans l E-
glifc Abbatiale , tous les paiTages
de la Bible , qui regardent le Culte
des Images > & qu'on avoit écrits
contre les parois , & l'on mit des
Images à leur place {a). Com-
me l'Abbaye touche la Ville > dont
elle n'eft séparée que par une mu-
rr.ille mitoyenne , & qu'il étoit à
craindre 5 que ce voifinage.. ne. fuc
capable
' (.ï) IJotttfJg, 6^1, Stnmpf, Lib. V. Ch. 7-
de U SuiJJe. L I v. X. I &5
capable de corrompre les Réformez; 1 5:32;
les Magiftrats de la Ville firent dé- s. G al
fenfe à leurs Bourgeois * d aller * Le 14
vifiter cette Eglife ou d autres
Eglifes Catholiques 5 ou d a/Tiftcr
à la MelTe:, à peine detre châiicz
févérement ; avec offre cependant,
d'écouter paifiblcmenc tous ceux
qui voudroient leur donner de
meilleures inftruiflions par la Parole
de Dieu. Cet Edit fut renouvelle
le 6, Juillet [a).
L'Abbé , prétendant n être point VAUé
lié par le Traité de paix des Can- entre-
tons, voulut d abord chafTcr tous
les Minières de fon Pays > Se abo- traire h
lir la Réformation dans toutes les Réfor-
EgliTes de fa dépendance. PluCeurs
EgliTes fe foû iiirent 5 comme rf^l
&CC, mais plufieurs autres plus zé-
lées pour la vraie Religion , im-
plorèrent le fecours des Seigneurs
de Zurich ; qui de concert avec les
fept autres anciens Cantons , inter-
poférent leurs foins avec zèle en
leur faveur. Enfin dans une Con-
féience qui fe tint à Rofcbach , ils
firent une efpèce d'accommode-
ment provifionnel entre les par-
ties.
{a) Hotting, l. c. Seul te t p. m,
186 Hiftoîre de la Réformât ion
1532. ties. L'Abbé s'engagea de ne hw
S. Gai. re aucune violence à fes fujets fur
la Religion , & leur permit non-
feulement daller dans les Eglifes
Réformées du voifinage , hors de
fes terres , pour y afilfter au fer-
vice divin , mais même d'avoir
des Miniftres pour tous ceux qui
Traité fouhaiteroient , pourvû-que ce
provijionnz fut point à fes dépens; &
^'Abbé^ que cette liberté ne durât que deux
|^fe5f^_ années. Il referva aulTl que cha-
jets Ré- que Miniftre mettroit cent florins
formez. ^hxn en dépôt , au lieu de cau-
tion ; pour affurance > qu'il ne par-
kroit point contre le Traité de
Paix. A fon imitation les V. Can-
tons voulurent impofer la même
chofe aux Miniftres du Rheinthal.
Les Cantons Réformez, Confei-
gneurs du Rheinthal, voulurent
aufTi qu'on impofât la même cho-
fe aux Pierres, parce qu'il y avoit,
à cet égard 5 parité d'obhgation
dnns les deux partis. Mais, pat
î'entremifs des autres Cantons, les
deux partis fe défiftérent de leur
prétention {ci),
L'Abbé
{a) Hotting, ]. c. Rzhn 742.. 745. B.
inftr. Wr
de la Suife.Liv.yi. 187
L'Abbé n etoit rentré en poffef- j 532';
Ç\o \ que des Anciennes Terres des. G al
fou Abbaye. îl reftoic encore le
Tockibourg\ qui avoit acheté li-
berré . & dont l'achat avoir été
confie rrié , ( comme on la * remar-
qué,) par les V. Cantoris> dans la
paix qu'ils avoient faite avec les
gens de C2 Pays - là > après la ba-
taille de Cappel. Mais l'Abbé ne
voulut point s'en tenir à ce Traité.
Il piérendit > que les Cantons n'é-
toienc point en droit de traiter au
piéjudice d'un tiers , & voulut ren-
ti<;r aiiiïi en poiTefTion de ce Pays-
là. Il Fut appuyé par ces mêmes
Canrons , qui oubliant leurs pro-
meff s 5c leur Traité confèntirent
à la caflation du Traité d'achat.
Il y eut pour ce fujet deux Con-
férences , dans le mois d'Avril ,
l'une à FF jl l'autre à Rapperfcb-
vvyl. Les Tockebourf^cois ne vou-
loient point fe foûmettre ^ 6c la
perte de leur liberté leur faifbit en-
core pL'.s de peine, que celle de
l'argent qu'ils avoient donné pour
l'acheter. Mais, abandonnez à^sLeTockt
Réfor- b'''''S
^ ,r • ^ rr rentre
* Voy. ci-deflus Lîv. VIII- Ch, XI. &;
I88 Hifioîre de WR^eformation
f Réformez , qui la leur avoient ven-
parforce duë j preffez même parles C^cho*
fous le liques , qui la leur avoient alTurée
jP^I^^'^^ par un Traité folemnel , ils furent
S, Gai. obligez de céder à la force , 6^ ds
fe remettre fous Je joug de TAbbé;
ce qu'ils firent pourtant à des con^
ditions affcz fupportables , fi feu*
îement elles eulTent été obfervées.
Douze Chefs du Pays > avec le
Land-Ammaa,allérent trouver FAb*
bé à VFjl , où iJ faifoir fà réfiden^
ce 5 & réglèrent avec lui un Trai-
té d'accommodement 5 qu'ils firent
pour quatre ans , le Lundi , jour
de la S. Madelaine, 22. de Juillet,
Ils y {^\^\Ahïtni , enrr'autres, la
confervation de toutes leurs Fran-
chifes 6é de leurs anciens privilèges
avec la liberté de confoence *.
L'Abbé de ^S". Jem dans ]e Thour-
îhal y à l'extrémité du Tockebourg^
qui avoit éré cbaffé , fut aufîl
rétabli {a) à peu-près dans le mê-
me temSa
III. La
^ Voyez ce Traité toat an long dans
îe hUnife/te dcZuKiCH & de Berne, in-
titulé 5 Gretndlifhe Information ^c. n^^.
xxxvir.
(.«) Rahrt 745;
delà Suijfe, Lrv. X. 189
III. La Ville de fe vit I 532.
l'auffi, certe année-là 3 expofée à de Zurich
I nouvelles inquiétudes, de la part
Ides Cantons Catholiques» à Tocca-
fion dun Edit de Réformations
I qu'on y publia. Il s'y trouvoit
encore des gens qui étoient toû-
jours Papiftes dans le cesur. Il y
«ut un Prêtre , dit-on , qui célébra
la Meffe dans une Cave s mais il
iê fauva bien - tôt. D'autre côté
pour le bien de paix, on ufoit de
beaucoup de connivence envers les
Toifins 5 ce qui donna occafion à
plufieurs , amis & ennemis , de
publier > que bien -tôt la Meiïe fe-
Toit rétablie à Zurich, Pour diiïi-
per ces bruits injurieux , 6^ pour
prévenir les troubles & les déTor-
dres , qui en pouvoienr naîire>
les Seigneurs publièrent , ( fur la
fin de Mai > le Mecrecii après le
Dimanche de la Trinités , ) un
Edict imp-iméj cù Ton difoit :
5, Qi^i 'après qu'on y avoit aboli la ^ i>i r
» MtiTe, qui n\ihout\t qu'a dminucr x^^Mejj'e,
py confiAérablement . é nnéatitir &- pour
même la pajjlon de Jesus-Christ,
qui eft lui- feu! la vUtune j'Orr h ^^J^^^
yy jfeché y & nmg fauvcur , & qu'on
y
1 90 Hi/loire de la Bs^éformation
I S32. 3> y avoic introduit le vé.itable ufa-
ZuRicH :» ge de la S. Céne , félon l'infti-
parution de Jésus - Christ
conformément à la S. Ecriture,
>, pour la gloire de Dieu , pour
5, l'augmentation de la Charité
5, Chrétienne , 8c pour l'amende-
>, ment de la vie > Après qu'on
3, avoit publié divers Edits , fur \
5, tout en 1530. contre plufieurs '
5, efpéces de réglemens &c. , dans J
3, lesquels Edits cependant on
5, n'avoit décerné aucun châtiment
3, contre ceux qui s éloignent de la
5, S. Céne> ou qui communient
3> chez les Papiftes : Pour c e t-
p, TE CAUSE, les Seigneurs dé-
claroient préfentement que les
3, prémiers feroient punis par le
>, bannilTement , & les derniers
5, par une fimple exclufion des Em-
„ plois , fi c'étoient d'ailleurs des
gens qui n'excitaifent aucun
trouble 5 offrant de nouveau 5 d'é-
5, coûter tous ceux qui voudroient
5, leur montrer quelque chofe de
>, meilleur par l'Ecriture Sainte.
3, Pour conclufion ils exhortoient
leurs Bourgeois & leurs fujets,
w de demeurer fmnmenf attachez
à la
deU Suijfè. Liv. X. 191
5, à la Parole de Dieu 5 félon 1532.
3, qu'ils lavoient fouvent promis : Zuhich
5, & de les afififter fidèlement, com-
5, me leurs JVJagiftrats légitimes ^
|:5j^« cas que quelqu'un ^ contre et
yy pé'ance 5 entreprit de les en dé-
tourner par la force: comme aufïi
U, de ne rien dire > & de ne rien
entreprendre , qui pût tourner
yy au préjudice de la vérité Evange^
I yj lique 3 ou a, l' avancement & au>
1 5, rétablijfement d'une Religion deftïtuéc
55 ^/(? fondement y telle que le Papif"
y, me dcc. Car difoienr-ils , nous
y y fommes fermement réfolus, avec
3, la grâce de Dieu , nonobftant
y, les tribulations 6^ les malheurs*
3> que Dieu a fait venir fur nous>
35 peut-être à caufe de nos péchezj
3, de demeurer courageufement at-
tachez à la vérité , que nous
yy avons connuë &c. Sc de ne ja-
35 mais foufFrir ni tolérer la Mefle
3, &c. dans nôtre Ville & dans
nôtre Pays {a).
Cet Edit donna lieu à un va-
carnie extraordinaire , non feule-
ment dans la Suifle , mais même
en Allemagne, où quelques-uns
prirent
{aj Hotting, 649»
ï 92 Hiftoire de la Keformation
15 32. prirent la peine de le porter. Et
Zurich même à Ratisbonne , où la Diète
de TEmpire éroit alors affembléca
où l'Empereur Charles V.
fe trouvoit en perfonne 3 quel-
qu'un s'avifa d afficher de nuit cet
Edit à la porte d'une Eglife de
cette Ville Impériale, où il fut lu
de tout le Monde à la confufion
de ceux qui a voient affedé de
publier à lavance, dans la Diétej
que la Ville de Zurich alloic chan-
lE.nn\us ger de Religion. Ennms , Evêque
cherche p^erolï , prit , dit-on, occafîon de
aux^^Zu- ^^^^ ^ vanger de Zurich.
ricois. Le Pape C LE ME NT VIL lavoit
envoyé en Allemagne & en Suiffe>
fous le fpécieux prétexte d'engagée
les Cantons à une expédition con-
tre les Turcs j mais au fond, dans
l'efpérance que Zurich, après les
pertes qu'elle avoit fouffertes, pour-
roft fe refoudre à recevoir de nou-
veau Ton Légat. Dans cette pen-
fée il cSrk de leur payer la fclde,
qu'il devoit de relie , depuis l'an
1521. Mais non-feulement on lui
refufa l'expédition contre les Turcs,
en cerf dération de ce qui s'étoit
pallé fous ce piéiextç l'an 1510.
mais
de la Suijje. Liv. X, 1.93
piais auffi toute la peine , qu'£w-I532.
ûm fe donna, de Lucerne, pour rc- Zurich
gagner Zurich , fat entièrement
perdue. Dépité de ce mauvais
îuccès , il s'en prit d'abord à Hen^
ri BtilUnger & à Lcon de Juda , qui
faifoient tout leur poflïble pour
r'allumer > par leurs Prédications >
le zèle de leurs Auditeurs 3 qui pa-
roilToit ralenti > & même entière-
ment éteint dans quelques-uns , ôc
qui s'elForçoient de leur infpirer
la confiance & le courage , nécef-
faires dans ces trilles &; péiilieu-
fes conjon^urcs. Ennius mit tout
en œuvre > par le moyen de fes
EmilTaires , pour les décréditer
dans Zurich , & dehors 5 afin que
les troupeaux fuflent privez des
foins de ces fidèles Paftcurs. Mais
n'ayant pas réufll dans ce deffein,
il porta fon reflentiment plus loin j
& de concert , dit-on , avec d au-
tres Prélats, il chercha à brouiller
les Zuricois avec les Cantons Ca-
tholiques , en leur faifant remar-
quer ces mots de l'Edit de Zurich,'
Que U Alejïe tend à ternir la gloire il anime
de U pajfion du Seigneur. Il fit fes contre
efforts pour les animer contre Zu- Cantons
Tojn. IVs I rich,
194 Hîjhîre de U K^formati-on
1532. rich, en leur faifant envifager
Catholi- ces mots > comme une injure con-
?occa rhonneur de ces Cantons , &
fion^^de violarion du Traité de Paix.
îcurEdic Les Cantons Catholiques prirent
feu là-dclTus ; & dans une Diète
générale , affemblée à Bade y au
commencement de Septembre > ils
reprochèrent ces mots aux Zuri-
cois 5 & dans une fuivante , qui
fê tint au commencement d'Octo-
bre 3 ils leur demandèrent de les
retranclv^r de leur Edit ; déclarant
d'ailleurs qu'ils n'avoient rien à
dire contre cet Edit. Zurich refu-
là de le faire y ce qui donna lieu
à une difficulté , qui occupa plufi-
eurs féances des Cantons, jufqu'au
milieu de l'année fuivante. Comme
raffairv*; étoit importante, & qu'elle
intéreffoit toute la Réformation >
ks Cantons Réformez , fê joigni-
rent aux Zuricois, & firent caufê
commune avec eux (4).
Z'TRicH furvint encore d antres aflFai-
&*^BER-res> qui augmentèrent les difHcul-
NE pro- entre les Cantons. Les V.
îeP^Ré- Caî^fons Catholiques inquiétoient
formez les deux Villes de Bremgurte & de
{a) Hottlng, 650.
delà Suîffe. Liv. X. 195
Mellingue y pour les obligera ren- 1532.
trer dans le Papifme. Les Zuri-^.^m &
cois &: les Bernois iîrent de leur ^5
cô é tous leurs efforts pour les
fourenir. Ainfi dans une Diète,
AlTemblée à Bade , après Pâques>
ks Bernois intercédèrent vivement
pour ces denx Villes , en repré-
iênranr. 5, ^«'elles avoient été at
J5 fez punies, Bremgarte , par une
amende de mille florins de Rhin :
5, 6c Mellingue , par la perte de
5, fes portes , & Tune & l'autre
„par la perte du droit d'élire leurs
„ Avoyers: &: qu ainfi Ton devoit
5, s'en contenter. Que d'ailleurs la
5j Paix ayant été faite, à condition
que chaque Canton co:.fcrve oit
5, fes droits fur les Terres Commi:-
„ nés , il étoit jufte de confcrver
5, Zurich dans les fiens fur ces
Villes V Ils demandèrent en
même tems> qu'on affignât des
penfions viagères aux Rtligieufes
de Tennikin^ qui s'étoient mariées.
Les Cantons Catholiques répondi-
iylzm.Qu il n) avoit plus perjonne dans
ï> cçs FilU's y qui fouha'îtât qtion y
3$ préchat la Doclihie Réformée y éc
3i qu tlles avoient promis par écrit,
l z 99 de
Î96 Hïjloïre deU Refcmation
I 5 3 2 . 55 de reprendre le Papifine (/z) 53. Les
B R E M- Députez de Berne , pour la Diète
6 ART E de la S. Jean , eurent ordre d'in-
tercéder encore pour ces Villes ^
GUE. afin que les Cantons Catholiques:»
les laifTaffent en paix au fujet de
la Religion , en leur repréfentant
de nouveau, 55 ^'elles avoient été
3>âffezpunieSj& qu'ils nepouvoient
53 pas croire ce qu'on difoit de leur
/ 3, lâche changement En effet
par l'information qu'ils en prirent,
il fe trouva qu'à Bremgarte la plus
grande partie des Bourgeois étoient
encore attachez à la Réformation.
C'eft pourquoi les Bernois en-
voyant des Députez > pour une
Diète fuivante > ( qui s alTembloit
au comn^encement de Septembre , )
leur donnèrent ordre , de foutenir
fortement les Réformez de Brem-*
gartc. Et comme les Cantons Ca-
tholiques avoient envoyé un Edit
à Dïetkken , au nom des VIII. an-
ciens Cantons , ( de Berne par
Berne, conféquent, ) portant, ordre d'y
rétablir la Méfies Ces Députez fu-
rent encore chargez , de faire des
repro-!
de la Sîùjfe. L I V. X. 1 97
reproches à ces Cantons, pour cette i 532»
honteufe fupercherie , comme fi Bekne.
Berne avoit confenti à cet Edit 5
& de leur déclarer 5 que fi jamais
ils s âvifoient de mettre le nom
de Berne 5 à des Edits de cette
nature, pour des affaires de Reli-
gion ils les en dédiroient publi-
quement (^).
Ainfi ces deux affaires, tant celle
de TEdit de Zurich , que celle des
Réformez de Erewgarte 3c de Mel^
lingue 5 donnèrent beaucoup d'em-
barras aux Cantons Evangeliques ;
& occupèrent les Diètes des Can-
tons , jufqu au milieu de Tannée
fuivante. Dans une Diète Affem-
blèe en Novembre > les Bernois
pro poférent ce temperamment.Qu'(?«
Jaijferoit fubfifter rEdit que les K
Cantons avoient publié clans le Rhein-
thaï , & dont j'ai parlé ci-deffus ;
& que Zurich garderoit le fien^ vil
que chaque Canton étoit libre de faire
des Ordonnances chez fol 5 comme il
le jugeoit à propos (b). Et comme
ils ne voulurent pas fe contenter
de cela, les Réformez leur offrirent
I s 1^
(a) Ibid. 171.
(^) Ibid, 11^.
198 Hifloire de la K^formation
IÎ32. le droit par devant des arbitres,
C A N- On liûia beaucoup , dans cette oc-
TONs. cafion, le zèle & la fermeté de
deux ExcelJens Magiftrats Réfor-
mez , Jaq^ues Meyer, Bourg-
maître de Bkle -, qui fut nommé /f
* Vmter P^'^^ '^^^ Gens de bien *: & Joachim
liorum. Vadian , Bourgmaîtrc de 5. Gd.
Le p'« émier écrivit à Bu'l'mger , le
4. Dece»! Jjx-e-: Exhortez le Peuple a
de fe. ventes prières , à la patience^ &
4 mettre toute fa confiance en Dieu.
Car Dieu , qui eft pour nous , efl
fuijfant , & fouvent il nous ôte des
moyens temporels afin que nous n at-
tendions de fecours que de lui , autre-
ment notre Evangile fera trop jnon-
dain. Cejî uinfi que nous viendrons
i bout de furmontcr tout ^ même dans
ce tems : Car Jésus - ChrisTj
qui efl en nous , demeurera Seigneur
& Roi y nonobft^nt toute la fureur
du monde. S'il faut que nous fouf-
frions dans ces combats , & même
que nous y mourions , c'eft nôtre gain.
Cependant Dieu efl fidèle. Dans ù
tentatim, il nous donne Cïffu'e ^ & ne
permet pas y que nous fopns tentez
au de-la de nos foras. Il feioic
bien à fouhaiter , que le nombre
de U Suilfe. Ll V. X. 199
des Magiftrats de ce Carâdère> fut J 532.
i un peu plus grand {a). C a n-
Les CanroiiS Catholiques , ne ^ o n s.
voulant point admettre d'accom-
, modement ; i'affaii e fut portée
devant la Diète générale , pour en
! ji'ger à r'gueur de droit. Il y eut
deux AiTernblées à Einfidlen , Tune
le 16. Mars 1533. l'autre le 22.
Avril fuivant. Les Juges , établis Z^^fV^
pour terminer cette affaire , mirent j^^odé^
fur le papier un projet d accom- avec les
modement , qui fiit enfin agréé par Cantons
les parties, fans aucune autre dé-
cifion *.
Etwius s'étoit flatté de pouvoir Ennius
brouiller les Cantons entr'eux. Il s'efforce
s'y étoit employé de toute fa for-^ mutile-
' = . , . . ment de
ce, reileaient qu un ami ecrivoit
de Baie à Farel , qui étoit alors à 1er les
Morat , en date du 9^'^^- Décembre, Cantons
Qu'on y craignoit une nouvelle guer-
re entre les Cantons ^ a caufe des in-
trigues du Nonce du Pape a Lucer-
«f'(^). Miis il n*eut pas la ciuelle
fatisfadion d'en venir a bout >• fur
quoi Stettler fait une agréable ré-
I 4 flexion,
* Id. IhiJ. BcSratlcr-U. S7. a.
^-«~<?/Epiilo!.incdii-. N.XXIW
200 Hi/iotre de la I\e format ton
1532. flexion, qui mérite d'être rappor»
tée. Quand même 3 dit-il y (a) des
Fi ères Je querellent quelquefois , &
fe battent} cependant ils fe réconcilient
facilement. Ils n'oublient p^oint l'af-
fe^'ion n^iturelle quils fe doivent ? &
trouvent toujours dans leur propre
fang y plus de confiance , que chez les
Etrangers. Il eft à fouhaiter que
cette réflexion fe trouve toujours
vraie parmi les Suiffes.
Dans l'une de ces Conférences
d'Einfidle, les Catholiques repro-
chèrent àux Zuricois > d avoir a-
vcué dans ie dernier Traité de
Paix, que la Religion Romaine,,
efi U véraable & ancienne Religion»
Ils répondirent > 5, Quon ne pour"
roit jamais le prouver: Car, di-
5, foient-ils , le Traité ne porte
^ 3> pas ces termes: A^ous /fj Zuri-
3; c 0 1 s 5 avouons que la Religion
yy Romaine efi la vraie &c. Mais
yy les expreflions duTraité quifigni-
yy fient fîmplement : JSlous vous
yy laiffons dans votre Religion , que
yy vous appeliez U véritable. Si tel
yy eut été nôtre fentiment , nous
yy n'aurions point eu befoin de
nous
(^) Loc» çit^
de la Suijje. L I v. X". 20I
„ nous referver nôtre Religion. I 5 32.
yi Nous fommes difpofez à la fou- C a n -
„ tenir , au:ç dépens de nos biens, ^ ^ ^ s.
5, & de nôtre vie (^).
IV. Dans cette occafion les qua- '^ntrU
tre petits Cantons , Un , SchwitZy f y ^^^^
Undnvv.ild , 8^ ^^fg i envoyèrent ^qj^s Jm„
des Députez à l'Empereur Char- près de
LES V. à la Diète de Ratisbonne, l'Empe--
pour lui demander la confirma-
tion de leurs libertez, 11 y a bien
de l'apparence que ce n étoit - îà
que le prétexte- de cet envoi , Se
que le but fecret, étoit de faire
quelque Alliance offenfive avec
l'Empereur & le Pape, contre les
Réformez : comme en effet Enmus,
Evêque de f^eroli, y travailla cette
année-là vigoureufement {h).
Et le bruit courut Tannée fui-
vante 1533. quil fe tramoit une
Alliance du Pape & de TEmpc-
reur avec les V. Cantons : de forte
que dans une Diète , qui fe tint
à la fin de cette année là, les Ber-
nois demandèrent à ces Cantons
ce qui en étoit, afin quils pulfent
I 5 1^-
{a) Hottîng.6<{2,y
Q) StettUr, /.
202 Hijioire delaKéformatlon
1532. là-deffus prendre leurs mefures (4)]
Ca n- Quoi quil en foit, les Dépurez
xo N s. ces IV. Cantons furent parfaitcn;enl
bien reçus de l'Empereur , ils
obtinrent de lui ce qu'ils fouhai-
toient {h).
Laguer- Cependant leur deffein n'eut pas
Turc" ^^^^ le coup. L'Empereur
les fait âvoit d'autres foucis que celui de
échouer faire la guerre aux ProteR«ns. Les
Tares menaçoient la Hongrie &:
l'Italie 5 Se méditoient une nouvelle
invafion dans l'un &; l'autre de
ces Pays , du moins le bruit ea
couroiî. Ainfi l'Empereur , ( qui
y étoit plus incérefle , qu'aucun
autre, à caufe de fes. Etats héré-
ditaires à' Autriche^ & du Royau-
me de Hongrie , qui étoit à fon
Frère Ferdinand , ) fît alors deux
chofes: lo. Il dem.anda du fecours
aux Cantons en cas de gi erre con-
tre les Turcs , Ôc fes Ambaffa-
deurs> qui parurent, le 10. Juillet,
devant la Diète , requirent les
Cantons de fa part , comme fai-
fanr un membre confidérable de la
Nation Alkaiandej de fournir leur
con--
(4) B. Inftr. 519.
[b] Stathrl. c.
de laSuiife. Lî v. X. 203
contingent de Troupes cdntre l'en- 1532,
nenni commun de Ja Chrétienté, c a n -
Mais les Cantons , g-'gnez par les ton s.
intrigues des Emiilaires de la Fran-
ce 5 refuférent ce fecours ? ré-
pondirent à TEmpereur: Qu 'ils ne
pouvo'icnî pas lui aecorder ce qu 'il
fouhaïtoit y a caufe des dangers , ou ils
ét oient expo fez eux mêmes ^ dans ces
tems fâcheux & pleins de troubles. Ce
refus n'empêcha pas que l'Empe-
reur, ne fit payer aux Cantons les
penfions qu'il leur devoit, com-
me Prince d'Autriche, en confé-
quence de l'union héréditaire de
iâ Maifon avec les Cantons (.3).
Ferdinand, Roi de Hon- Mauvai-
, grie, quoi que plus expofé âux :^ P^°^^-
armes des Turcs ? que TEmpeieur fer.i/-
fon Frère, n'eut pas là mêrre me- ^'««'^Roi
dération, où, fi l'on veut, la me-
me pohtique : Il fit payer aux Can-
tons Catholiques le^s penfions qu'il
leur devoir depuis cinq ans, pour
la même Union héréditaire. Mais
par rapport à Zurich , à Ikrue d>C
à Baie y il leur fit dire par Ton
Ambaffadeur : „ Qne puifqu'ils-
5> avoient violé cette Alliance, en
I 6 dé.-
W StetfUrAL <îS.b.S<J.a-
20^ Hifloïre de U déformation
.15 32. » détruifant diverfes fondations
pieufes de fes Ancêtres , dont
ils avoient faifi Jci, reventes; il
>, avoir mis en dépôt la portion
de penfion, qui leur étoit duë ,
3> entre les mains du Baillif de
>^ Bade. Ces Cantons furent cho-
» quez d'un pareil reproche; &:
5, dirent , .Wils avoient obfervè j
yy fidèlement TAlliance héréditaire* ^
yy Se qu ils étofent réfolus de Tob-
>j ferver encore à l'avenir* pourvu
qu'on robfervât à leur égard 5
5, Que du refte ils étoient libres,
& maîtres chez eux ; j^ils ne
yy vouloient retenir le bien de per-»
yy fonne 5 mais que ce qu'ils avoient
yy gagné par l'épée, ils étoient ré-%
yy folus de le défendre auflî pac
yy répée {a).
Paix de L'autre choft que fit TEmpereuf
Religion pQyr fç mettre en état , lui & fon
^2 j^ç^" Frère 3 détenir tête aux Turcs,'ce
° fut d'accorder la Paix aux Protef»
tans d'Allemagne^ Il lui impor-
toit de regagner leur aflfeélion 3c
de pacifier l'Empire. Ainfi, par
rentremife de VEhô:tUTdQAfayence
& de l'Electeur Palatin , qui négo-
cièrent.
U) Id, ^(î. b*.
deUSmJfe, Liv. X. 20f
cierent cette affaire avec TElcdeur 1532»
de Saxe, & le Land-grave de Hef-
fe-Caffel y pour les deux partis 5
qui en convinrent à Nuremberg ,
le 2 ^ . Juillet 1532.) cette Paix fut
réfoluë X & décrétée dans la Diétc
de l'Empire-L'Empereur l'approuva
& la confirma le 2. Août de la mê-
me année. Il y fut contraint par
la néce/Tité à caufe de l'irruption
que les Turcs venoient de faire
dans fes Pays (4),
V. Mais cette Paix fut une Troul^hi
pomme de difcorde pour les Pro- [jl^^^.J'^'
teftans d'Allemagne, dont le contre- nifme.
coup fe fit fentir à ceux de la
Suifle : Il avoir été ftipulé entr'au-
tres chofes , dans le Traité qui
en fut fait entre les deux parties s
Que l'on ne comprendroit pas dans
cette Paix ceux qui rejetteroient
la Confejfion cC^^ushourg , fur la Cè-
ne & fur le Batême, & par confé-
quent que les ZmHgUcus & les Ana*
baptijîes en feroient exclus {b),
Luther > délivré des fes inquié*
tudes pour fon parti, par le moyens
de cette Paix > commença à parler
plus
{a) Sîeidan. L. VIII. p. m. Zl6. 127,. .
{h SUid. ibid.
2o 6 Hlftoire de la Ktfor relation
Ij32.pî^is haut, contre la mémoire
les Difciples deZuingîe. qXi'il n'a-
EjfForts "^^^^ fait auparavant. Il écrivit
de i-w-même à Albert de Brandebourg
thtrçon-D^ç^ de Pruffe, pour le prier de
tre les • . / ir • i
Zuin- point lounnr les Sacramentaires,
gliens. comme il les appelloit , & dç ne
permettre pas que leur Do«flrine
s'introduifit jamais dans fes Etats,
lui repjéfentant > qu'autrement il
chargeroit fa Confcience d'un très-
grand crime. Les Zuricois trou-
vèrent cela fort étrange : tant par
ce qu'ils ne fe fer oient pas attendus,
qu'un DOifleur Protç;ftant eut vou-
lu encore ksairliger dans leur af-
flidion: que parce que cetie con-
duite de Luther étoit direcflement
oppofée au Traité , qu'il avoit fait
avec Zuingle Tan 1 5 25?. dans laCon-
Avantu- férence de Marpurg {u) C a r l o s»-
res de t A D > qui étoit alors Miniftre à
Cîji.//- Zurich , prit la plume pour écrire
contre Luther , mais pour la con-
fervation de la Paix on fupprima
fbn écrit, qui étoic trop vif. Ce
Miniftre avoit été obligé de quiter
le Rheinthal , après la funefte jour-
née de Cappel à caufe du danger
où
H Satltct m.38<î. Hotting, C60*
de U Suijfe. Liv. X. 20/
où il fe trouvoir 5 d'êcrç affa/Tiné, 1 532.
ou livré entre les mains des Per- Difputes
ftcuteurs. Il s'éroit retiré à Zurich, L^^^^^-
ou, tant par la recommandation de
Capitcn , qu'à caufe de fa bonne
conduite , on lui confia unt Eglife>
& on l'y faifoic piêcher jufqua
cinq ou fix fois par femaine. L'an
I 5^4. il fut honorablem.ent appelle
à Bâi^ {a). Les Minières de Zu-
rich fe contenreient d'écrire une
Apologie de leur Dodrine, qu'ils
adrefférent au Duc de PrulTe, le
priant de ne pas mal-tî^aiter leurs
Fféres en la Foi. Ile» y joignirent
le livre de Beitram, ou Ratrafnne ^
Prêtre d'à îX. l;éck, que Léon de
::dx a voie traduit en Allemand, à
cette cccâfion 5 & fait imprimer à
Zurich, avec une Préface, pour
montrer que la dcdlrine de Zurich
fur F; Sacrement, n'ércit nullement
nouvelle Afjconius ne fa voit
quel parti on devoir prendre dans
cette Conjor.dure. Il trouvoir éga-
lement des inconveniens > à écrire
contre Luther , & à garder le fi-
hiKii, Bucer auroit fouhaité qu'on Tinvau:^
euî
(rt) Hotting, 661.
(0 Id. Lavattr p. m. ^;4.
208 Htjloîre de la K^formatton
eut pris le dernier parti. Il a voit
pour la adouci refprit de MeUmhîhon , dc
^esP^^ l'avoit amené à fouhaiter la Paix
teftans?" ^ ^ promettre de faiie tous
fes efforts , pour y porter Luther.
^ucer fe donna beaucoup de peine
pour ramener la Paix entre les
Eglifes Protcftantes d'Allemagne &
de SuiiTe , mais il agit avec tant
de vivacité envers les Suiffes, qu'il
fembloit à quelques-uns, qu'il vou-
loir fe rendre le Direfteur de leurs
affaires, & les engager à fuivre
fes Senrimens j comme il avoit dé-
jà fait à régard de quelques Villes»
par exemple Sirasbottrg , Ulm &c
d'autres , qu'il engagea , ( dans une
Conférence des Proteftans , tenue
à Svveinfourt en Franconie , ) à figner
la Confeffion d'Ausbourg ; ce
qu'elles ne firent pourtant, qu'avec
la proteftation folemnclle , que par
une telle fignature elles ne pré-
tendoient s'éloigner en rien , de la
Confcffton des ll\ failles ^ préfentée à
l'Empereur dans la Diéte d'Augs-
bourg. Il repréfentoit aux SuiiTes:
>, Que Luther étant un Homme f^-
» vaut faDo(flrine faine daos tout
le lelte» on dcvoû lui pardon-
nes;
de U Suijje. LiV. X. 209
,5 ner la rudeffe de fa plume, 1532.
comme une foiblefle h.\xmzmf^ : Difputei
„ ^ au fond , Luther & Zuingle, ^"^i^^^^^
5, quoi qu'ils parlalTent difFérem-
ment > étoienc pourtant d'accord ^
,3 fur la chofe même , parce que
5, Luther vouloir feulement que
o Je su s - Ch R 1 s T fut préfent
3, dans la S. Céne 5 fans en vou-
loir déterminer la manière : Que
5, les Chrétiens des deux partis
„ appartenoient également à Jesus-
„ C H R 1 s T , puifqu ils le recon-
5, noiflbient pour leur unique Sau-
j, veur 5 6c qu ainfi il les regardoit>
>, de part 6c d'autre , comme des
3, Eglifes en qui le Seigneur habi-
55 toit 3j. U fe fervit du Miniftére de
M)'conius auprès de Zurich 6c de
Berne {a).
Les Bernois eurent une Confé-
rence à Zoiîîngue , avec les Réfor-
mez de Soleurre , 6c avecBienne *. * »,
Ils écrivirent de là à ceux de 2u- ^-^^le^-
rich, Onils ne voiloient pei.t imi-
ter l'exemple ^/^ Strasbourg, en
embiajfnnt le pjiïti de Luther -y 6c les
exhortèrent à demeurer fermes
dans la vérité, qu'ils avoient iti^iié.
Les
{(t) fiotting. 660.661,
210 Hijloire de la ^déformation
1532. Les Ziiricois répondirenr de leur
jyijputes côté à Bucer : Qu 'il séto'it trop avan^
Luthé- , ^ qf^'ii de voit prendre çarde , de
ne pas je laipr aller encore plus
^ loin, Myconius lui dit fans détour :
Qii'il de voit prendre garde , qu'il
ne lui arrivât, comme à Urbain
Rhegius , Minière d^Ulm , qui avoic
fcandalifé Ton Egîife, en renonçant
à la Doftiine de Zuingle , pour
embralTer celle de Luther. FFcljf'
gang Mufiu'us^ Théologien célébrCj
qui étoit alors à Augsbourg , lui
éc ivit ai-fTi p écifémenî la même
chofe 'j &c lui remontra d'une ma-
nière convaincante > que fa mé-
thode n'étcit nullerr;ent propre à
reilnir les Eglifes , parce que Lu-
ther 8c Mélanchthon n.ême la re-
jettoient (a). Philippe 5 Land-
Grave de Hejfe-Caffel 5 fit tous Tes
efforts 5 dans les Conférences de
SibvveinfoHYt & de Nuremberg^ pour
empêcher qu'on n'y prof iivit la
Dûdrine de Zuingle. Les Théo-
logiens de Confèance étoient du mê-
me fentinient> auffi-bien que ceux
à^nljAlt èc de AiansfMj mais
tous
{.'^) ScHltet 587. 389
I de la Sulffe.Liy.X. 21 î
tous leurs foins furent inuti-jr37.
AmbroiseBlaarer, Théo-
logien de Confiance , paffa la plus
grande partie de cette année , à
Ejlingen i à Ifnj -, & à Liuduvv ; ^
& il fe loiia beaucoiip en paiti-
culier de Ceux de Reutlingen j di-
fant ; qu'ils ravoient tr^iié d'une
maniére-rout -à-fait fraternelK :L'E-
glife à'Ifny pria c-jie de Z ijirh, de
I lui envoyer quc^Iqu un > qui pût
continuer l'œuvre, que Blaa:er y
avoit commencée. On y eiivoya
un Théologien > nommé Conrad
Claufer (ù).
A tous ces embarra^N, canfés par Tron-
ic funefte Schif re du Luihcrarif-
me, qui retardèrent les progrès de i,apt^fme
la Réformarion j il faut joindre les
troubles de Yylnabaptiftne , qui ne
lui fut pas moins funefte, & qui
vinrent enfin à bout de l'éteindre
abfolument dans Soleurrc.
Les Atiabaptïftes fe mulnpliérent
de nouveau cette année dans le Can-
ton d'Appenztll, aux environs.
Les Réformez de la Suiffc , pour
tâcher
{i) Hottin;^, C6l.
2 1 2 HîJÎQÎrc de la Réformat Ion
I 53 2. tâcher de les gagner par la dou-
Anabap. ceur , & par la voie de Tinftruc-
tijics, tion revinrent encore à des Con-
férences, qu'ils eurent avec eux
fur leurs fentimens. Il fe tint deux
• de ces Con f e' re n c esj Tune
à S.Gal^ Se l'autre à Zoffingue [a).
L'occafion de la première fut ,
qu un Anabaptifte , nommé *]ean
Marquardi natif de VTeiffenhorn ,
près du Danube, & paflablement
favant , vîntes, G al ^ & entreprit
dy enfeigner^ ce qui lui fut dé-
fendu par ordre du Bourgmaître
jfoachim Vadîan.
Conféren Comme il continua nonobftant
Alini " défenfe , on le faifit. On voulut
très de après cela lui propofer de confé-
S. Ga L reravec les Miniftres, mais il re-
/ufabap" j^^^^ ^^^^^ propofition 'avec mé-
tilîe. pris ) & même Dominique Zilli) l'un
des Miniftres de la Ville , lui ayant
envoyé par charité quelques vian-
des, il les refufa> comme venant
d'un Excommunié , te ne voulut
pas les goûter. Cette obftination
engagea le Sénat à ordonner , qu'il
feroit amené devant le Grand-
Confeil, & là obligé de répon-
dre
W Id. ibid.
delaSuife. Liv. X. 213
nilîre aux cinq Miniftres , fur les 1^32»
Ion \rticles controverfés. Cela fe fit Anabau
en jcndant deux jours confécutifs. ^'^fl'^-. .
Il Pavoua> qu'un Pafteur peut en
uni bonne confcience recevoir de fes
Vuditeurs ce qui eft néceflaire pour
on entretien s niais il perfévera
«Jdans les autres articles. Si cette
Conférence ne put pas le gagner,
elle fervit du moins àconf'erverplu-
leurs perfonnes dans la pureté delà
Foi s parce qu'on y remarqua, qUe
*cfprit de cette Se£le n'étoit que
Chicanerie & opiniâtreté. Du ref-
te Afarqîurd fut banni de la Ville
5c de fa Jurifdidlion [a),
La féconde Conférence fc tint à Confia
Zoffingue. Comme les Anabap- ^^^'^ de
. tiftes du Caifton de Berne , étoient quesjvii-
1 en plus grand nombre dans Vy^r- nilhcs a
[ gÂVVy dans ÏEmmethal & aux en- zofjinq:ue
. virons j ce fut la raifon pourquoi ^a^^abap-
; les Seigneurs choifirent la Ville de diùs.
: ZofFingue pour y tenir cetre Con-
férence, Ils donnèrent * fauf-con- * lc
duit à tous les Anabaptiftes , &
permifTion d'y venir> de toute forte
d'endroits t. H s y en trouva 23,
D'autre
I W Hotting,ri6l,66^.
t MUr 3pud Q ï I I V M p. ^C. $- 4.
2 1 4 Hiflûlre de la Réformât ion
1-532. D'autre coté il y vint des Minif.
Aniùap^ très des Vailles & des Cantons de
r/y/«?/. de ^i/^ ôc de .S*o/^«r;(? , &: de
la Ville de B'ienne. Mais il n'y
eut que les Miniftres de la Ville éc
du Canton de Berne > qui parlè-
rent 5 afin de fermer la bouche aux
Anabaprifles qui n'auroient pas
manqué» difoient- ils^ de fe van-
ter > fi d autres euffent pailé 3 que
les Miniftres du Pays naui oient
rien pu contr eux , ce qui auroic
affermi leurs Sc(fbareurs dans leur
enïêtemenc. Cette Conférence fe
tint avec toute la foleninité polTi-
ble 5 en prefence de quelques Sei-
gneurs de Berne, dépurez pour y
afTifter 5 & fous la préfidence ds
quatre gens d'office du Pays : Jean
Zenderj ancien Avoyer de Zof-
fingue y Jean Tellsbergher>
hvoytï Lent zbou7 g; Gabriel
Meyer Secrétaire dC
SiGisMOND Fret, Secre aire
de Breuck^ La Conférence dura.
^. joiirs entiers. Elle commença
k I. de Juillet 5 & elle finit le
Les principaux Interlucuteurs, du
côté des Miniftres , furent Bercb-
told JJalln , &c Gafpar GroJfr>ian , ou
de la Sîiijfe, Ll V. X. 2î 5
Mcg.wder , tous deux Pafteurs de i j
FEgHle de Berne , Sebaftkn Hoff- Anz
î}:ci!ier , MiniTtre de Zoffi'^-gue ,
George Sîehclin > Henri Lhickiy &
Henri Marïker, Les Tenans du
côté deî5 Anabaptiftcsj furent Alar^
tin f^f^en^ger 5 furnommé Linkj >
Jean Hotz y Michel Outt ^ tailleur
d'habits, Simon LantZi & Cbri,'icn
Brucker^ Il s'y trouva aufiTi un
certain André Rappenflein > de Lu-
cerne y qui fembioit faire l'office
de Médiateur entre les deux par-
tics. Les Afles furent recueillis
pir trois Secrétaires ou Notaires
aiTermentez pour ce fujet , lavoir
jean Glanner^ Secrétaire du Confif-
toire de Berne > Barthelemi Schur'
mxn y Secrétaire de Zoffingue &
Séb.iliien Hajli (a) y Régent au Col-
lège de la même Ville. Avant que
de les faire imprimer, les Seigneurs
de Berne ordonnèrent aux quatre
Préfidens , de fe les faire lire tout
entiers , & de rendre témoignage
ûu Public, s'ils avoient été recueil-
lis fidèlement ôc avec exâ(ftitude *.
Ils
W Ex Adis pag. 1. 3.
* Le témoignage des Prcfiden*; eft à
la fin des Ades , daté d'Aravv, Ôc du 6,
Août isji.
2 1 6 Hifioire de la K^formatio^
1532.^^^ invitèrent aufTi les Anabaptif-
Anabap- tcs , à aller à Zoffingue 5 écouter
*ips. la leflure de ces A<ftes , afin d'en
dire leur fentiment , & leur don-
nèrent fauf-conduit pour ce fujet.
Ils en firent même chercher les
principaux, pour les y envoyer,
mais on ne les trouva point , &
aucun deux ne parut à Zoffingue.
LL. EE. firent élargir un des Doc-
teurs de cette Se<fle, nommée/;/-//^
ten EruckcTy (qui étoit alors en pri-
fon à Berne 5 ) à condition qu'il
iroit à Zoffinguej écouter cette Lec- .
tnre. II le promit > mais il n'en
fit rien , & difparut. On y envoya
avec lui un autre Anabaptifte,
nommé Jean Rjf, Celui-ci fe con-
tenta d'écouter quelques articles >
& s'en alla {a). Ces Ades furent
imprimez, la même année à Zurich
in 12, en Langue Allemande *.
Voici
W Ibid. i<;3.
^ Ils contiennent 1^5. feuillets de i*-
pages chacun d'un caraélère fort menu,
j'en ai un Exemplaire, qnc j'avois ache-
té 5 dans le deflein d'en donner un Ex-
trait un peu étendu 3 à caufe de l'impor-
tance des matières , qui y furent agitées.
Mais je me fuis fenti les yeux fî fati-
guez ce fi affoiblis par U lecture des li-
vres
delà Smfi. Liv. X. 21?
Voici les Articles . fur lef- I 532.
[uels roulèrent les Conférences, Ar^Ai^ap.
I. V^mour de Dieu du pro- ^'■>'^^'
iha'in doit préfider dans cette Confé-
'ence > pour terminer toute difficulté,
II. De la Mifjlon des ^nabaptif-
es 9 ft elle efl divine ?
III. Ce que cefl que /'Eglife , &
dans quel parti efi la véritable
Eglije ?
l V. De TExcommunication , ce
que cff : fi ce font des particuliers
qui la doivent exercer y ou bien l'Egli^
fè ? Quand ceft qu'on doit recevoir
de nouveau un Excommunie î
V. S^il y a. une Magiftrature ?
Qui font ceux qui la peuvent exer^
\ctr ? Si le Ma^ijîrat Chrétien peut
{faire ufage du glaive ? Et jufquou ou
doit lui obéir ^
VI. Confeffion des Anahaptifies ati
pifet des Cenfes & des Dîmes.
VII. Du Serment , & fi hn doit
\ jurer par le nom de Dieu ?
Tom.IV. K VIII.D^
Vres Allemands-, &■ le caradtcrc de celui-
ci eft fi mauvais , que j'ai été obligé d'a-
bandonner mon delTein ; crainte , que je
n'achevalTe de me gâter la vue 5 fi je
I m'opiniatrois à le vouloir exécuter, je
me fuis donc contenté d'en extraire ce
on voit ici.
218 Hijloire de U déformation
î532. VIII. De /^Mi/Tion des A/mf-
Anabap' tves , fi elle efi divine ? Et qui eft
tifies, çgif^i q^^i j^çj^j. ^ q^^i ^^^^ envoyer^
IX. De l entretien des Minières 'y
fi leurs penfions font conformes a U
volonté de Dieu ?
X. *SÏ un Chrétien peut tirer de
Cenfes & des Dîmes,
XI. Du Batême, ce quil eft
comment on doit le pratiquer ? & qui
c'eft qu,on doit baîïfer ?
La Conférence ne prodnifvt pi
un grand fruic. Les Anabaptifti
n'y furent pas convaincus de leurs
erreurs , & continuèrent à troubler^
le Canton de Berne > autant que
On en jamais. On les bannit. Ils obéi-
punit rent , mais ils revinrent. A leur
à caufe géant dans 1 eau > après quoi on les
de leur chalTa de nouveau. Mais le ban-
^f3^^^ nillement n'ayant pas été fuffifant
pour les arrêter, & quekjUes-uns
étant rentrez dans le Pays pour la
féconde fois y on les punit lelon
la rigueur des Loix , à caufe de
leur opiniâtreté, & on les noya.
Ce genre de fupplice ne les ef-
fraya point > 6^ ils fe multipliè-
rent plutôt que de diminuer. Cela
donna
de la Suijfe. L i v. X. 219
tdonna de lembarras aux Seigneurs 1 532.
de Berne > qui , ne voyant mzun An.ibap^
luccès , ni par la douceur, ni par
la févéricé , examinèrent de nou-
veau mûrement la Qijeition : S'il
convenoit de faire mourir tous ces cpi-^
niâtres défoùéiffans , qui revenoicnt
toujours au Pays^ nonoùfiant leur ban-
mjfement , ou bien , feulement ceux
qui commett oient des péchez fcanda-
leux & éclat ans ? On confulta là-
deffus la Régence de Strasbourg ,
qui avoir auffi ufé de douceur au
commencements mais qui depuis
quelque rems , traitoit aufli ces
Sc(flaires avec plus de févérité {a).
Il s'en trouva auffi dans le
Thourgaw. Le Baîllif du
Pays en fie mourir neuf ^ de Ne un^
éoren , & il en punit d'autres par
d'autres fupplices {b).
L'année fui vante 1535. les Ber- Nouvel
nois publièrent un nouvel Edit ^^'^
contre les Anabapriftes > date du^^j^Jj-^^
a. Mars. Ils ordonnoient aux Mi- les Ana-
niftres, », de travailler de toutes b^ptiftes
o leurs forces à ramener ces gens-
9) là par de bonnes : inftru(flions ,
99 tirées de la Parole de Dieu :
K a 55 Qiie
[4 ^] Uotting, 664»
o convaincre & les perfuader on
'^^^'i>leur ordonneroit, au moins > de
5> garder leur créance pour eux> &
5^ de demeurer dans le filence j leur
7) promettant, qtie s'ils le faifoient,
5> on les laifferoit en paix : Que s'ils
3, vouloient continuer de prêcher^
>, & de faire Se£le à part, on ne
5, les puniroit plus comme aupa-
53 ravant y mais on les enfermeroit
3> pour toute leur vie dans des
y, prifons > où ils feroient nourris
3, au pain 6c à l'eau, aux dépens
j3 de l'Etat , jufqu à leur mort , à
3, moins qu'ils ne renonçaient à
3, leur erreur (a),
La tolérance que les Seigneurs
de Berne accordoient aux Anabap-
tiftes 5 fut mal-expliquée , comme
fi LL. EE. vouloient laifler en paix,
non - feulement ceux qui étoicnt
déjà de cette Sedle , mais au/Ti tous
ceux , qui, à l'avenir l'embralTe-
roient, ôc fe fépareroient de TE-
glife. Afin donc que leurs Sujets
ne s'y trompaffent pas, ils don*
Déclara- nércnt une nouvelle Déclaration ,
tion qui datée du 4. Avril , portant j ,y Qu il^
M Mandat, B. 48.
I delaSuife. Liv. X. 221
,5 vouîoienr que chacun obfervât ^l^*^'^"
b> leurs Edits de RéFormation , & ^'^'^^
5> fur-tout, ceux qui avoient été ^ }
de cette Sefte j & qu'ils afliftaf-
y, fent au Service Divin , pour le
moins , chaque Dimanche j
„ & qu'ils fîffent baptifer tous
leurs enfans , comme les
„ autres , fous la peine énon-
I5, cée dans TEdit précédent : Que
3, fur-tout, fi les Anabaptiftes ns
3> vouloient pas aller au prêche^ ils
à, dévoient être mis en prifon un
» jour & une nuit , peur la pré- .
miére faute, deux jours & deux
3 j nuits pour la féconde, & toû-
i> jours ainfi „. Et comme il fe
trouvoit des gens dans les Eglifes,
qui, fans être Anabaptides , mais
par le pur effet d'un efprit pro-
fane 3 ou par un refte d attache-
ment au P*tpifm€ 5 n*âvoicnt en-
core jamais été ni au prêche, ni
participé à h vS. Céne j LL. EE,
ordonnèrent que ces fortes de gens
fuffent punis tout comme les Ana-
baptiftes, cependant avec cette dé-
claration , que leur delTein n'éroit
point de contraindre perfonne d'al-
ler à la Céne {a).
W UM.4y. K 3 Quel».
222 Hijloirede la K.é formation
1532. Qjjeîque tcms après, les Sei
gneurs de Zurich confultérent ceu
de Berne , fur la Qiieftion : fi Co
devoir pun'r de mort les Anabapttfies^
ou non? Ceux-ci leur cnvoyéren
pour réponfe une Copie de leu
dernier Edit contre ces Se^aires (a^
VI, La RéForniarion fît peu d
Vaud. Il n'y eut que Payerne Sc
les Balliages à'Orbe & de Granfgn,
ch. el!e g^gna du terrain , encor
De fut-ce pas fans troubles.
Orbe. chofes furent aflez tranqui
les à Orte , après la publicatio
de TEdit 3 dont on a parlé, dès 1
commencement de Tannée, jut
'.qu'au Dimanche des Rameaux, qu'i'
Difpute y difpute entre P 1 e R R
de T/Vt? V I R E T , & un Moine nomrr.
avec un R A B A N I. Ce Moine prèchoi
dans TEghfe des Rdigieufcs d
Claire^ dont il é:oit Vifitareur
& comme il exAltoit le mérite des
œuvres, Vitet, apiès qu'il eiit: fini
l'ariéra devant tout le penple ,
réfuta ce qu'il avoit prêché , lui
prouvant par l'Ecriture : Que noî4s
fommis fauvtz grattât ement p*ir la
Foï
U] B. Infir. 294-
delà Suife. Ll V. X. 223
Foi en Je sus-Christ. Le Moine i 532.
e lui répondit rien 5 fi non> Qu'i/ Or b e..
oit bien jeune pour le démentir^ 6c
fe retira tout confus. Et de-
puis ce jour là il ne prêcha plus {a)*
Le même jour Pitrre Vint célébra
a Céne, & il eut à fa Commu-
nion 54. Hommes , & 23. Fem-
mes {b).
Le Dimanche 7. Avril , il y ar- Nou-
riva un nouveau rrouble. Corn- ^.^^^^^^
me le Miniftre prêchoit trop long-
tems au gré des Catholiques 9 le
Vicaire d'Orbe, nommé Pierre Bo^
vez > fit former la MeiTe randif-
u'on prêchoit encore. Les Réfor-
mez s'en plaignirent, & on le mit
en prifon. D'iutrc coté^CbriJtophls
HoUrd ayant coupé le nez à une
Image de S. Pierre > fut mis auflî
en prifon au pain &: à l'eau pen-
dant 24. heures , & condamné à
un écu d'amende qu'il paya. Le
Confeil dépura 2. Confcillers, pour
aller à Fribourg demander l'élar-
gilTement du Vicaire de leur Eglifc,
Les Seigneurs de Fribourg leur
donnèrent un de leurs Confeiilers ,
K 4 fa-
[4] MS. Thom. 30. b. Tard Epift.Inedit. .
M MS.2W. 31.
224 Hifloire de la ^iformation
I 532. f^^'t^if Chevalier TarJillArd q* '
Orb£. à Orbe, & de fon autorité
fît foi tir de prifon le Vicaire (4).
Cette communion d'Eglife exci
toit de tems en terr>s quelque trou
ble entre les deux partis , ce
pourquoi les Bernois, pour y re
médier, & mettre la paix, écri
virent aux Fribourgeois , qui"
trouvoient à propos que les Réfor
mez & les Catholiques eulTen
chacuns une Eglife feparée , afi
qu'ils n'euffent plus rien à parta
ger enlemble \ & envoyant des
Députez à Orbe 5 & à Granfon
le 12, d'Avril, ils leur recommandè-
rent cette affaire; mais on ne put
^ rien conclurre(/').
Le Balliâge de Granfon manquoic
.de Minières 5 pour fervir lesEgli-
fes, qui embraffoient la Reforma-
tion, Les Seigneurs de Berne C"
élurent 4. tout à la fois^ le JVlard'
p Juillets favoir, un pour Graii-
Nou- fou y Gy Se Fy : un pour Aioutagny^
veaux rugelle 3c I\cve!le : le 3e. pour
le Eal- &
liage.
j de la SaiJJèLw. 22 S
& le 4^. ^om Concife^. Le même 1 532'.
jour ils donnèrent avis dî cetteGRAN^
Eier<flio.n à Guillaume Farel , qui ^ o n.
étoit alors à Pvlorat, avec ordre de
fc trouver à Granfon le Vendredi
fuivant, pour y examiner ces 4.
Minières i conjointement avec le
Miniftre de Granfon > & en pré-
fcnce du Baillif (a),. Comme ces
Miniflfcs ne font pas nommez '
dans la Lettre des Seigneurs de
Berne , il y a beaucoup d'appa-
rence que celui de Granfon 5 donc
ils y parlent , étoit Jean le Comte^
qui vint à Granfon cette annéc-là,
& qui y furPafteur jufqu a fa mort.
Il a laifTé un Journal abrégé de fes
travaux , d'où j'ai tiré ce qui fuie.
Jean le Comte naquit en Pi- H^^ojrc
cardie > Tan 1 500. fon Père éroit Coli/tl
Sébafïien le Comte ^ de la Croix > Gen-
til - Homme Picard , natif à'Eta-
fies ; ^ fa M ère AÏAïie De Le Oiâen
auffi Femme de qualité. Dans fa
jeuneffe > âgé feulement de 22. ans
il fut à Meaux y t auprès de G/ii/- t L'an
iaume Ericonmt ^ Evêque de cette
K 5 Villc-
U) Epid. inédit. K/r. N. XXI.
^ Le Miniftrc dcConcife s'appclloicPiE
226 Hijloirc de la Ke format ion
1-532. Villï. là 5 avec "jaques h Fevre , fon
j. L E Compati iotc & Ion Précepteur >
CoiMTE. ^yec Guillaume Fard , & deux au-
tres Théologiens 5 qui tous en-
femble prêchoient ia pure Doiflri-
ne de l'Evangik, fous les aufpi-
ces & par l'autorité de ce Prélat y
& furent ainfi les premiers > qui
travaillèrent en France à la Ré-
formatirn de VE^lik» Mais Ja
perfécution , qui furvint bien-tôt
après, difTîpa cette fainte & fa»
vante ^ e i e Compagnie. Eriçon^
71 î perdic coi-nige , 5c fe retradla *.
'Cudl F^rcl fe retira en Suiffe , com-
me on la dit ailleurs t. J^^^n le
Comte fe réfugia a'/ec Jaques le Fe*
*vre } aupièo de Marguerite.
Rtine de Aavare 4-« Dans la
fuite rAnjrale de Banmvet le de-
manda
B E z E H^/l. des E^l, Réf. de France
Tom.I. p.
t Voy. le Tom.l. âl'an 1^24. & 1^2.5.
4- Marguerite de Valois,
Sœur unique de Tranpla 1. fut mariée
en premières noces l'an i ^09. a Char-
les Duc (^Alenfon , & en fécondes
noces l'an i ^2,7. â Henri D'A l b r e t.
Roi de Navarre. Cette Princefîe étoit
favante , & aimoit les gens de Letrres.
Elle parut , dans les commenccmcas
avoir de bons Sentimens pour la Réfor-
mation j nuis dans la fuite elle changea.
nanda pour Précepreur des trois j 532
Fils y qu elle avoir eu de l'Amiral j. ^ ^
on premier Mari. Après qu'il eut Go Mrs
exercé quelque rems cet emploi >
omiiie il étoit à Paris, quelques
)ofleurs fidèles jertéreiit les yeux
'ur lui 5 pour l'envoyer travailler,
à la Réformarion du Canton de
erne , & ailleurs. Il y réfifta
abord , mais il céda enfin aux
fiances 5 qui lui en furent faites
ar plufieurs Réformez 3 qui étoieni
la Cour. Ils lui donnèrent de:
ettres de recommandation j adrel'
ees à FaycI 3c à Alarcouit : ainfi i
uitâ fon Pays , pour n'y re-
tourner jamais, il pafla à Lyon >
& après bien des dangers , il ar-
riva à Granfbn à la Foire de Mars,
ii ne s'y arrêta pas , mais il alla
à Neuchatel trouver Marcourt , fon
ancien ami 3 qui fuc fort réjoui par
les Lettres qu'il avoir apportévS de
Paris , auffi-bien que Farel , qu'il
aila trouver à Morat. De - là ih
fut à Berne, où il fe fit connoître
li LL. EE. qui rétablirent Miniftrc
de Granfon, Il y prêcha dès la
Pentecôte 3 & réforma quelques
Eglifcs de ce Balliagc
K 6 L'an
228 Hijloîre de la i\éfor:72aîion
1532, L'an 1554. il quitta FEglife de
J. L E Granfon 5 'pour paifer à celle d«
Oj^nît E Romainmotier. L'an 1558.* LL."
Novernb! EE. de Beme lui ordonnèrent d'al
1er à Lanfmne, exercer la ProfeC
fion de la Lingue Hébraïque pai
intérim , à la place de Rajmom
Merlin , en attendant qu'on eût ui
autre Profeffeur. L'an 15(^7- lî
ClâfTe d'Orbe &: de Granfon le rc
demanda , pour être un fccondi
fois Pafteur de TEglilede Granfon
Il y retourna le 20. Juillet, & y vé
eut encore 5. ans. Ses enfans, qu
ont continué Ton Journal > noui
apprennent qu'il mourut le 25
Juillet 1572. âge de 72. ans,
fa Femme , Adadelaine de Afart'tgn
' Fan 1581. Il écrivit divers ouvr
ges de Théologie 5 mais ils n'o
jamais été imprimez. Il s'en fal
peu, qu'il ne vint à bout un
fois , de réformeï la Ville de Fri
bourgs par l'accès qu'il y avoit a
près des principaux Seigneurs di
TErat: ce qui lui donna occafio
de dédier à LL. EE. de Fribourj
un Livre fort étendu , ( qu'il avoir
compofé fous ce titre > Les Démé-
gories) dti Comte d'Eftapks , fur tous
les
de la Suife. Liv.lX, 22?
les Dimanches de lan , les Sacrerr.ens^ 1 5 3 2
le Afaruge ^ & Us Tiép.iJfJs , écrit Gr a m
de (à main, avec une Epicre dédi- ^ ° ^•
catc ire , . datée du 3 1 . Juillet 1 549.
Il nous apprend dans cette Epitre,
que quand il arriva dans le Pays
de Vaud , la divifion , que caufoir
la difrèrence de Religion , dans les
Balliages d'Orbe & de Granfon >
y produifoit de violentes que-
relles > même entre les plus pro-
ches y qu'elles aboutifloicnt fou-
vent à des batteries 8c à des
meurtres, jufqaes là qu'on vit à
Orbe un Frère tuër fon Frère, 6c
de même àBonvillars. J. le Comte
laiffa trois Fils , qui furent tous
trois Minières : & fa poftérité à
toujours fourni des Miniftres à
l'Eglile, de Pére en Fils, fans in-
terruption 5 jufqu'à prèfcnr.
Mais pour revenir à fes travaux
de Granfon, il eut la confolation
d'y gagner, dans quelques mois,
un afl^jz bon nombre deperfonnes>
deforte , que le Dimajîchc après
Nocl , il y célébra la prémiére Cè-
ne paifiblement , avec 70. perfon-
nés d'âge, outre quelque jcu-
iielfc (4). Dans
W Mcmoir. de J. le Cowtc. -
' 2 3*0 Hlftoire de la K.éformaîîoH
Î552. Dans l'été ds cette année on
Gr A N- s'apperçur que les Moines de Gran-
soN. tiavailloient à emporter hors^
du Pays les biens de leurs Cou-
vens 3 c'eft pourquoi ils furent mis
en prilon , par ordre des Seigneurs
de Berne {a).
La Paroifle d'Tmnan embraffa lâ
Réformation à la pluraliré des
voix 5 dans le mois d'Août j après
quoi les Payfans purgèrent leur
Eglife d'Images & d'Autels. En-
fuite , accompagnez de Fard 5 ils
pafférent le Lac, allèrent à Gran-
fbn> & y renvcrfércnt quelques
Autels &c quelques Images 3 mais
ils furent mis en prifon , & dére-
Trou- nus affez long-tems. Leur affaire
bles à ayant été examinée , il fut jugé, le
^Tol- ^' Septembre , qu'ils avoient eu
nsnj, droit de faire cda à Tvonan , mais
non à Granfon (/;). A Otincns les
Réformez firent la même chofe >
_ renverférent les Images & les Au-
tels. Les Catholiques , pour (e
vanger , prirent le tems que les
autres étoient au Sermon, & en-
trant dans le Temple en furie > al-'
Jérent renveifer la Chaire avec le
Minif-
{nb) MS. Am^. 125. b. B. Injîr. 15^8.
de la Smjfe. Liv. X. 2?!
Miniftre qui prêchoir. Les uns & [ J J2.
les aunes furent punis {a) , com- Gr a \ -
me ils le méfitoienr. son &
1; Il y eut au/n du trouble à Con- ^ ^ ^' *
^ife entre ks Reformez 6c les Ca^
tholiques, en ce que la pluralité
des voix ayant éré pour la Mefle
de do. contre 2 les Réformez pré-
tendoient qu'on n avoit pas éré en
droit de faire une telle décifion ,
foutenant qu'on en avoit déjà fait
une auparavant , où la pluralité
avoit été en faveur de la Réfor--
mation. Mais comme ils ne pu-
rent pas le prouver, les Seigneurs
de Be ne confentircnt , que les Au-
tels y fuflent relevez j avec cette
feferve expreffe , que chacun au-
roir toujours la liberté d'écouter la
Parole de Dieu. Enfin ils tinrent
main de bonne foi , à faire obfer-
vcr tous l:s Articles de l'Ordon-
nance 3 publiée au commencement
de l'année: mais aulTi ils vouloient
que les Catholiques obfervaffent y
de leur côeé,les articles qui étoienî
en faveur de la Réforma ion. Ceft
pourquoi comme le:. Fribourgeois
îbuhaitoient ^uc les ParoilTeb de
0») Idem.
232 Hijloire de la P^éformation
I 532* Champagne ^ ^Onnens , cjui- a voient
Gp AN- embraiïe laRcforn.ation, fe foumif».
^ fen: à ure nouvelle délibération,
cisE. Bernois le réfuférent {a).
Il s'éleva une autre, difiiculté en-
tre Berne & Fribourg, au fujer de
l'Article de leur Ordonnance , qui
portait > Que dans une Paroifie a
où les Catholiques feroient le plus
grand nombre, les Réformez pour-
roient néanmoins entendre tou-
jours la Parole de Dieu, Les Fri-
bourgeois ne vculoient pas que
dans les lieux où .il n'y avoit que
deux ou trois Réformez , ils fuf-
fent compris au bénéfice de cette
Ordonnance. Les Bernois au con-
traire foutinrent j que ces Réfor-
mez? dévoient y être compris; &
avoir la liberté de faire venir un
Minidre pour leur prêcher, pour*
vu que tout cela fe fît modeftc-?
ment('^).
7rw.hks li y eut cette année de grands
à caufe troubles à Payeruc , à caufê de la
de aRe- j^gjjgjQj^^ Un Miniftre , dont je
Payer- " ^1 pas pu découvrir le nom, y
Kt. prêcha au commencement duPrin-
tems>
{a) MS. Amp. 114. B. hiflr. 16O.
(^) MS. Am\ 3:15 b,D. 1^8.
de la Suijfe. L I v. X. 2 33
tems, & y fie du frûit. Divers ÎS
Bourgeois embraflerent la Réfor-
mation. Mais les Catholiques y
oubliant la promefle qu'ils avoient
faite auparavant aux Seigneurs de
Berne , de permettre qu'on prê*
chat librement au milieu d'eux la
Parole de Dieu , ne laiflTérent pas
long-tems en repos le Miniftre, ni
leurs Concitoyens. Ils commen-
cèrent par défendre au Miniftre de
prêcher j &; comme il continua
nonobftant la défenfe > ils voulu-
rent le chaffer. En même tems
ils défendirent au Peuple , d'aller
écouter le Miniftre, 6c de le favo-
ri/er, fous peine de prifon & d'au-
tres châtimens. Enfin 3 par route
forte de menaces i d'infultes , &
de mauvais traitemensj qu'ils fai*'
foi<;nt aux Réformez , ils s'elFor-
çcient de les f^ire rentrer dans le
Icin de TEglife Romaine (^).
Le bruit de ces 'troubles s'étant
répandu dans le voifinnge, le Ccn-
fcii de Adoudon députa à Payerne
le Gouverneur du Pays de Vaud,
avec deux Confeillcrs 5 environ le
tems
(0 MS. Amp, 11^.
234 Hifloire de la Réformât hn
1532. tems de Pâques [a) ^ avec ordre
Payer- d'interpofer leurs bons offices, pour
y rétablir la paix & le calme:
mais les (oins de ces Députez fu-
rent inutiles > & ils s'en retourné-
péputa- rent fans avoir rien fait. Les trou-
V^"^^^bles continuèrent à Payerne , &
pour ré- y mit en prifon pluiieurs
tablir le Bourgeois , pour avoir embrafle la
caJme à Réformation. Le 2 5éme. Avril , le
'^j>erae, (^Qfif^iidejvioudon y renvoya d au-
tres Députezj (fon Châtelain Jaques
CERjAT5avecdeuxCon/êillers,)pour
tâcher d'appaifer les Efprits > & d'y
ramener la tranquilicé (ù). Les
Bernois ayant reçu avis de ces
troubles > penfoient auffi à y met-
tre ordre, iorfque le Duc de Sa-
voye leur envoya un Député, pour
les prier > P. de ne pas fe mêler de
fes Sujets j de leur laiflcr obferver
les Edics , qu'il avoit publiez en
matière de Religion dans Tes Etats y
de dépofer ou ôrer le Mi'.iftre de
Payerne 8d IP. pour fe plaindre
de quelques fédicieux de Payerne,
qui difoient hautement , que le
Ducn'avoit iien à leur comman-
derj
Ça) Regîtr. deMoudon^.
ib) Ibid..
de la SuiJJe. LiV. X. 235
er , & qu'ils n'étoient pas fes 15 32,
ujets. Les Bernois répondirent au Payer-
ouverneur de Vai/d 5 qui éroit^E»
'un des Députez : » Que leur in-
tention n'étoit point de déroger
en aucune manière aux droits
»> dt; S. A. fur Tes Sujets , ni à fa
f, Juïifdi(fbion ; Qu2^x contraire ils
>, les exhortcroient plutôt , &
entr'aurres ceux de Payerne 5 à
>9 rendre à leur Seigneur tout ce
» qu'ils lui dévoient , dans les
yj chofes qui regardoient le Corps
y, bc les biens temporels. Mais
>, pour ce qui regardoit la conit
cience & la Religion, ils prioicnt
le Duc , & tous autres 5 de laif-
fer en paix les Réformez de
^ P?.yerne , & tous ceux de fes Su-
jets 5 qui foùhaitoient d'enrendre
la Parole de Dieu, & de ne les
>, point il qi:iécer pour ce fu jet j
afin qu'il n'en arrivât point de
yy défordre j car s'il les perfécutoit
yy pour caufe de Religion , ils
j>, prendi oient en main la caufc
„ de leurs Alliez de Payerne, avec
» q' I ils avoicnt une Alliance
yy beaucoi p plus ancienne, qu'avec
yy la Maifon de Savoye (4)
(4) MS. Amp. l c. Le
2 36 Hïftûire de la BJfûrmation
1532. Le même jour > ( 23. M^y ,)ies
Payer- Bernois envoyèrent à Paytrne des
Députez pour renouveller l'Allian-
Alliance ce. Ces Dépurez repréfentérent aux
veU^e P^y^^^^^s ' Négociation du Dé-
entre P^^^ ^- Savoye, 6c la Ré-
Bcrne & ponfe qu'ils lui avoient faite, les
Fayeme, exhortant à obéir au Duc 5 en tout
ce qu'ils lui dévoient. En même
tems ils fe plaignirent , de ce qu'ils
avoient tenu fi peu de compte des
promtffes 3 qu'ils avoient faites
aux Seigneurs de Berne, puis qu'ils
perfécutoient les Réformez & vou-
loient chafler leur Miniftre. Ils les
exhortèrent donc fortement à laif-
fer en paix lesRéformez d entr'eux
6c leur Miniftre. Cette repréfen-
tation parut produire quelque bon
effet. Les Payernois promirent de
nouveau aux Seigneurs de Berne
tout ce qu'ils fouhaitoient : après
quoi l/Alliance fut renouvellée 6c
jurée de part & d'autre [a).
Mais toutes ces promelfes n'é-
toient qu'un leurre pour obtenir de
la Ville de Berne , la continuation
de l'Alliance i car bien-tôt après le
départ des Députez , on recom-
mença
(^) .MS. Am^\ U^. 125. Injîr. 16<J..
deU Suîffe. Lï V, X. 237
ença, à perfécuter les Réfor- 1532;
ez, à les vexer, à les infulter, Payer-
aies mettre même en prifon(^).
y avok alors à Payerne un Cor-
elier> qui étoic Réformé dans le
ur, & qui prêchoit vigoureufe-
cnt contre l'Eglife Romaine,
ais quand le Duc fut venu à
ayerne , le Dimanche 1 6. Juin =
fe retira avec un autre Corde-
er, venu de Laufanne, qui étoit
uffi Réforn é ib\ Les Bernois en-
oyérent de nouveaux Députez , à
ayerne pour leur reprocher leur
anquement de parole ; mais ils
rent pour réponfe s le Con-
l ne leur avoir promis autre cho- traite
, que de lailTer prêcher l'Evan- les Ré-
ile comme on Tavoit prêché dans formez,
î tems anciens. C'êtoit une mo- ^^^^
ueric toute pure : AufTi les Ber- promef-
ois ne furent-ils pas contens d*u-
pareille réponfe. Ils renvoyé-
cnt donc encore d'autres Dépu-
5 le ^i. Août , pour repréfen-
à toute la Bourgeoific: Ou on
ne vouloit pas les obliger à
quitter leur ancienne Religion y
ni
AmpA.c.
Ib) PUntin. Hjft. MSC. del^w/.
23S Hifloire de la Kéformation
î 532. " ^ abolir la Mefle , ni hs au-
PAYER-^jtres Cérémonies Papirtiques j
Qu'on ne demandoit d'eux au-
35 tre chofe > finon la liberté de
,5 Confcience> pour ceux qui fou-
3> hâitoient d'entendre la Parole de
3, Dieu 5 & pour ceux qiii la leur
3> prêchoient j Qfœ c'étoit à cette
35 condition , & fous cette promef-
3>fe, que les Bernois avoient re-
j> nouvelle deux fois avec eux
5j leur Alliance (4), 5. Cette nou-
velle DéputatioQ ne produifit pas
de meilleurs effets que la précé-
dente. On renvoya les Députez
avec de belles paroles 5 mais on
continua à tourmenter les Réfor-
mez comme auparavant , ôc on
leur ôta même leur Miniftre. Ce
fut dans cette occafion que Viret,
pour faire plaifir à quelques Ré-
former alla prêcher à Payerne ;
( c'étoit vers la fin de Septem-
bre.) D'abord on ne voulut point
lui permettre de prêcher dans les
Temples. Il fe mit donc à prê-
cher dans les Maifons. Après qu'il
y eut été pendant quatre ou cinq
femaines, il s'y excita un tumulte
contre
(a) B, Infir. 2,13. MS. Amj^. l c.
L de la Suif e. h iwX. 239
'contre lui > qui Tobligea d'en for- i 532^
tir, de fcrte qu'il perdit prefque p^yeb.-
courage d'y travailler {a). Cepen- ne.
dant; encouragé par de bonnes aa^es^
il y retoui'na, ôcy demeura jiifqa ao
mois de Janvier fuivant , difpu-
rant prefque tous les jours avec
Quelqu'un. Les Moines de TAb-
baye , craignant que cette nouvelle
Do£lriiie n'aboutir à les dépouiller
de leurs biens , fe mirent (ous la
protection des Fribourgeois , qui
leur envoyèrent un de leurs Con-
feillers , nommé Chriftopble Pavil^
'.ird 3 pour avoir foin d'eux & de
leur maifon {b).
Dans le même rems F a r e l de- F a r e l
neuroit à Morat , où il écrivit ^^^^^j^^^^
ane belle Lettre Paflorale y mFïm- trePafîo^
^vois 5 datée de cette Ville, & du î-o/?.
i<5. Juillet. Elle eft adreffée aux
L^iêres amateurs de la S, Parole de
Dieu y qui étaient dans Coppn ffiGn >
apparemment en France.) il les
exhorte à la patience, à la conC-
tance , à la fermeté, & à ne s'aC-
furer
CO Inter £///?. hmlU, Farel.
W MS. Thom, 53,
240 Ht fl cire de la l^éformation
i532.furer que fur la protedion du
Seigneur {a).
Régie- N'oublions pas ici de remarquer,
mens à la louange de la Ville de Vcvaj^
Je V £- ^^'^^^^ fignala dans ces tems cor-
y^AY. rompus & déréglez par fon zèle
pour le rétâbliflêment des bonnes
mœurs. On peut juger que la pef-
te, qui ravageoic alors le Pays,
réveillant dans les confciences , la
crainte des Jugemens de Dieu , y
pût avoir quelque part. Mais toû-
jours furent-ils bien louables , de
devenir fages,à Toccafion des fléaux
de Dieu. Dès Tan 1530. le Con-
feil fit publier un ordre aux Fem-
mes de mauvaife vie, de vuider
la Ville dans trois fois 24, heu-
res , fous peine de ^o* fous d'a-
mende. Et cette année 1532. ils le
renouvellérent avec plus de févé-
rité : Ordonnant a ces malheureu-
fesj de fortir dans 24. lieuresjfous
la même Amende. Ils firent enco-
re quelques autres Ordonnances
d'une bonne & Chrétienne po-
lice , par exemple, défenfe de jouër
pendant le fervice divin; & quel-
ques autres réglemens de cette na-
ture
W lurd Epifu. inédit. K. XXII.
deUSuiiJe. Liv. X. 2M
|Ure. Ces fortes de réglemens j 532.
)rouvent la vé ité de ce que j'ai Vevay-,
.vancé dans mon Difcours préli-
ninaire > Qm les Laïques 5 géné-
alement parlant , étoient plus
lonnêres gens 5 que les Eccléfiafti-
lues \ Voilà des Laïques qui chaf^
ent de leur Ville des Femmes de
muvaife vie , pour éloigner le
;rime du milieu d'eux 5 pendant
ju'à 4. lieuës de là j dans la Ca-
pitale du Diocèfe, dans le fein du
Sandluaire Catholique, je veux di-
re à Laufanne 3 les Chanoines &
es Religieux vivoient publique-
ment dans le défordre, fans rete-
nuë & fans honte , avec des Fem-
mes débauchées, nonobftant les
exhortations que les Magiftrats
leur faifoient faire, de changer de
îconduite *.
i] Cette année le Duc de Savoye Le Duc
jvifita le Pays de Vaud , qu'il n'a- Sa-
uvoit pas vu depuis l'an 1523. Il
\y fut reçu par tout> à Laufanne Pays de
h même 3 avec les honneurs dus à Vaud.
jfon rang. Il partit à^hvïan le 4.
de Juin , & alla coucher au Châ-
teau de Chiliony où il n'avoit ja-
* Tom, ir. L mais
Voy. ci-defTus Liv. V. p. 533. 334.
242 Hijloire delaKéformation
t 532. ^^^^ encore été. Le 5e. qui étoit
Voyage "ri Mecredi 5 il alla à Vevay , où
du Duc il fut reçu par 450. Soldats , la
^e''-^*" plupart habillez de neuf, de couleur
V A u D. blanches & par 200. jeunes garçons*
aufTi la plûpart habillez de même
couleur portant en leurs mains des
Croix blanches, & criant : Vi ve
S A V G y E. La Ville de Vcvay em-
prunta du Château de Glerole , qui
appartenoit à TEvêque de Laufan-
ne , dix Canons pour faluër leur
Prince> à fon entrée > & à fon dé-
part. LaBourgeoifie des deux en-
droits> de Fevay & de hTour^lui Bt
préfcnt enfembie de Cent Ecus d'or
au Soleil , avec un beau Manteau
de Damas blanc, de 12. aunes s
où l'on avoit mis 12. aunes &c de-
mi de franges d'argent j à fes La-
quais , de I o. Ecus d'or , & fix à
fes Ecuyers. Cela s'appelloit la
joyeufe entrée^. De là il alla au
Pays de V a u d j car dans ce tems
là Fevay , & tout ce qui eft à l'O-
rient du Torrent de la Févayfe, étoit
cenfé dvL Chablais } la Vevayfe fé-
paroit le Chablais d'avec le Pays
de Vaud. On croioit, que de Vc-
vay
de lu Sttijfe. Ll V. X. 243
v^ây le Duc iroit droit à Moudon, 1532.
qui étoit alors la Capitale des ter- p^ys ce
res qu'il polTédoit dans le Pays de V a u d
Vaud 5 & le fiége ordinaire des
Etats ; mais il trouva plus à pro-
pos de les convoquer à A/orges, ou
il fe rendit le Jeudi 6^- de Juin.
I II préfida à cette Affembléej ac- Il p^élî-
conipagné de TArchevêque de Ta- ^^^^/V^
rantatfe , des Evêques de Laufan- pavs Af-
& de Beliejf y de Fr anç o i s (embkz
DE MartigueSj Vicomte de ^
Luxembourg y du Comte de G'r/yj^Vf,
& d'un grand Cortège de Noblef-
fe y de Savoy e , du Chablah & du
Pays de Vaud. Il y fut parlé de
reparer les Places fortes, & les -
bonnes Villes du Pays 5 pour le
conferver & le garentir d'inva-
fion. On y fit aufTi des plaintes
contre l'Evêque 6c le Chapitre de
Laufanne, parceque ces Ecciéfiat
tiques refufoient de comparoître
devant les Tribunaux Séculiers du
Pays 5 pour affaires civiles , quoi-
que cela fe fût autre-fois pratiqué
fans difficulté , & qu'ils ne refu-
faffent pas de comparoître devant
les Tribunaux des Terres de Ber-
I ne & de Fribourg : ce qui fembloic
L z abaiflcr
244 Hijloïre deU RJfûfmtttîon
i532.abaifrer l'autorité du Duc. L'E-
Pays de vêque de Lau/ànne , qui étoit pré-
Vaud^-çj^j^ répondit. Que les Eccléfiafii-
que fiétoient point Juridiciables des
Tribunaux fécul'ms y & qu'ils avaient '
€e privilège: Que fi par hazard les
Eccléfiaftiqucs s étaient fournis aux
Tribunaux de Mejjieurs les Alliez >
4es Cantons , c étoit parce qu'on y
trouvait mcï.leure juftice > & plus
brieve , que dans les autres.
Le Duc remit cette affaire à un
autre tems , pour s'en informer
-cxaflement, & y mettre ordre. De
Marges il retourna à Vevay, & le
Dimanche fuivant il alla dincr chez
le Baron du Chaielard , où il fut
reçu avec tous les honneurs dûs
à fa dignité^ & retourna coucher
à Vevay. Le Jeudi fuivant > ig.
Juin, il alla diner au Château
d'Oran , qui appartenoit au Comte
de Gruyère.
Il prit de là le chemin de Ra-
mant y où il s'arrêta jufqu'au Diman-
che ide. qu'il alla à Payerne. Le
Mardi 1 8. il alla vifiter Cudrefin : & '
le Mecredi ip. il fut à Eftavuyer»
-Dans toutes ces Villes , il fut reçu
avec de grands honneurs & de
grandes
dclaSuife. Liv. X. 245
randes démonftrations de joye [a]» I 532.
La Pefte étoit alors à YvcrdunjV\Ys de
zh l'empêcha d'y aller (h). Le V a u i>
3udi 20^i]prit la route Lmens
a l'Evêque le reçût dans fon Châ-
;au, au bruit du Canon. Le foir
alla à A/oudon, où il coucha,
a Ville lui fit préfent de dix flam-
;aux de cire & de 8. pots d'Hy-
Dcras ) pour rafraichilTement.
eorge Demierre > qui en étoit Syn-
I c, emprunta 30. florins , au nom
\) la Ville , pour fournir à tette
<;penfe [c). Le Vendredi 21.
lin , le Duc vint à Laufanne , &
; coucha. Le Mécredi aupara-
i u, le Confeil des LX. avoit arrêté
<: ne lui faire aucune réception j
jais à la follicitation deTEvéque,
ti lui fie de grands honneurs. Plus
r deux Cens Arquebuziers de la
' lie lui allèrent au devant > non-
niant la pluye ; & le lendemain
jrs de deux Mille Hommes, tant
i Laufanne, que des 4. Paroifles
< la /^4«.v , l'accompngnérent jufl
< à Fidj y avec b -aucoup de No-
L 3 blelTe,
) VUntln Hift. MSC. àQ laufunne,
) MS. Thom. 31.
J Rcgîtr. de Moudon,
II
246 Hijloire de la K.é formation
1532. blelTc, 8c TEvêque même de Lau^
fanne {a).
7 Réfle- Princes font rarement des
xion fur promenades jufqu à l'extrémité de
^e^ïu ^"^^ Etats , fans une grande
Duc de néccflité > ou fans machiner quel-
Savoye. que deffein important. Il y àvoit
neuf ans que le Duc de Savoye
n'avoit été dans le Pays de Vaud.
Il y vint dans un tems que le
Nonce du Pape travailloit à lier
une Ligue des Cantons Catholi-
ques 3 avec le Pape & l'Empereur;
contre les Réformez. Cette pro-
menade du Duc, & les démarche? 1
de i'Evêque de Laufanne me foni j
juger, qu'il y avoir elfe£livemeni
quelque Conjuration de cette na
îure fur le tapis. D'abord que I
Duc fut arrivé à Fevay , l'Evêqu
y alla pour conférer avec lui. E
il envoya un Commiffaire âCuilh
pour ordonner aux gens de
Faux, de lever du monde, qu 1
vouloit envoyer à Fribourg , afi) I
difoit-il , de maintenir la Foi coi
îre les Luthériens *. Mais toi
ces projets des Catholiques s\
allèrent en fumée , par l'endro
{a) Man. de Lauf. p. 382.. quV
^ Aixh. de VuUîte^
de U Sui/Je. L I V . X. 247
]u on a * remarqué , & la bonne i 5320
Providence de Dieu , qui veilloic
Dour les Réformez , diiïipa les
:omplots de leurs ennemis.
VII. On a vu ci - devant les Soi eux
■nouvemensj que les Seigneurs de^^-
Jîerne s'étoient donnés pendant
:etre année 1532. en faveur des
£glifes infortunées de Brangartc
le de Aiellingue, lis ne s'employé-
ent pas moins en faveur de celle
le Soleurre , mais avec aufTi peu de
iiccès. Le parti Catholique étoit
:ievenu fi fier, depuis fa vidoire
ie Cappel qu'il étoit entièrement
mtrairable.
Il y avoit déjà quelque tems >
:omme on la vu ci - deffus t que
l'Eglife Réformée de Soleurre y étoit
fur le penchant de fa ruine, trou-
blée par les Anabaptiftes , brouil-
lée par les divifions de fes propres
iMinillres , & vivement attaqués
par les Citholiques leurs ennemis
commuiis ; qui donnoient entrée
dans leur Vaille aux Anabaptilles ,
afin de les détruire les uns par
les autres. Mais ce fût cette an*
L 4 nce>
^ Voyez ci-defllis Ch. IV. p. 1Q2.
t Liv. YIII. Ch. L
248 Hijioire de La Keformatiou
1532. née 5 qu'elle eût à foutenir le choc
le plus rode , qui la conduifi: en-
fin à fa ruine l'année fuivante,
Vropofi- Les V. Cantons zèlez Catholi-
îhn^sxap' ques commencèrent la Tragédie,
des V. ^^"^ Diète, afTemblée à Bade
Cantons au Printems 5 ils débutèrent par
à la Vil- demander à la Ville de Sole une ,
ieiirre ° l'une ou Fautre dz ces trois chofes ;
ou qu'elle leur payât mille Ecus ,
pour les frais de la guerre ; ou
qu'elle congédiât fon Minière ,
Philippe Grotz h ou enfin , qu'elle
fe foûmit à un Jugement de droit,
pour avoir aflifté les Bernois con-
tr'eux dans la guerre de Cappel. Les
Bernois trouvèrent cette conduite
-fort étrange : Se comme leur hon-
neur paroifToit intèrefle dans cette
affaire, (puifque c'étoit à l'occalion
du fecours qu'on leur avoir donné,
que les V. Cantons h'ifoicnt cette
querelle à ceux de Soleurre 5 ) ils
* Le 15- envoièrent * deux Députez à leurs
' Alliez de Soleurre , avec ordre
de leur dire : ^^ils trouvoient
fort étrange qu'on fir de paieij[«
py les propoficions à un Etat libre>
j^comme le leur , Qu'une telle
conduite ne tendoic qu'à Tex-
tincflion
deUSuijfe, Liv. X. 249
.5 tinftion de la vérité au milieu î ^32.
d'eux : C^^^'elle éroit d'ailleursSoLEUR
„ oppofée au Traité de Paix, puit^E»
3, que le premier article porte, que
5, tous ceux qui avoient donné du
fecours aux Bernois Se aux au-
„ très , étoient compris dans la
p Paix : Que cependant les V. Can-
tons ayant voulu > que les fraix
de la guerre fûlTent refervez dans
^ ce Traité , pour être réglez dans
^ une autre journée, Berne y
j> âvoit enfin confenti pour le bien
^ de paix : ^'ainfi ils exhortoienc
„& prioient leurs Alliez de So-
leurre, de préférer le thréfor in-
it> cftimable de la Vérité Célefte , à
^un peu d'argent 5 leur offrant
^ d'intercéder pour eux auprès des
Cantons, afin de faire modérer
^ cette fomme , fi elle leur paroif-
99 foit trop forte (4),,.
; Les Bernois avoient raifon de
dire , que ces propofuions avoient
pour but Textindion de la vérité
dans Solcurre, car la fiiite fit bien
voir , que le:; Catholiques du lieu
étoient d'intcUi^eiice avec les V.-
L 5 Can-
W Huffmr IL B.^i//M6j. MS. A}»j^..
1-4' ^»
2 50 Hïffoire de la RJfoYmatlon
I 532. Cantons. En elfet > ces propofi-
SoLEurv lions fûrent une pomme de dit
^E- corde entre les Bourgeois de So*
leurre. Elles y produifirent une.
divifion fi échauffée > qu'on crû
(]u elle ne fe termineroit pas fan
cffufion de Sang. Les Réformez,
fans doute à Ta follicitation des^
Bernois , voulurent , pour le bien
de paix, fe charger de payer aux
V. Cantons les mille écus > qu'il
demandoient. Mais ce n'étoit pass
de l'argent qu'on cherchoit. On
vouloir détruire la Réformation.
On en Ainfi les Réformez ne fûrent pa
écoutez de leurs Concitoyens ,> 6
aiftre. leur Miniftre fut congédié. Le
Réformez furent obligez d'aile
au Service Divin hors de la Ville
dans un Hameau voifm *> d'
entretenir leur Miniftre à leur
frais (.i). Encore heureux fi on le
eût lailfez en paifible poffeflion de
ce peu de liberté ! Mais la fureur
du zèle Carholique n'étoit pas enco-
re fatisfaite. Cependant le parti Ré-
formé paroiffoit encore fort dans le
Canton j puifque de 44, ParoifTes
dons
Hottlng. 664»
^ Zouçhvveil .
deU Siiijje, Liv. X. 2 5 [
iont il eft compofé, il s'en troiivoit £532.
54.qui avoient embraiîé volontaire- Soi eus
Tient la Réformation à îa plurali-
:i des voix.
Les Seigneurs de Berne envoié-
rcnt de nouveaux Députez à So-
eurre, pour ce fujet, le 31. Août,
lyec ordre lO. de dire aux Magit
trats , o Ouon avoit appris qu'ils
,> vouloient relever les Idoles * &; re*
U tablir k Meffe dans leurs Ter-
3> res 5 6c même dans les Paroif-
,5 fes 5 oii Berne avoit la Haute
Juftice & le droit de Collature,,,
20, de les détourner d'un tel def^
jfein, en leur repréfentant; o Q![}^
» étoit contre le Traité que les deux
„ Etats avoient fait enfembles-
,> fuivant lequel chaque parti de-
,,voit demeurer paifiblement dans
5,1c règlement qui avoit été fait
j, à la pluralité : ^on leur recom-
mandoit en particulier de laiffer
>, en paix ceux qui dépendoient de
,j Berne, de la maniéie qu'on vient
de le dire j faute dequoi on les
" j, tireroit en caufe par devant des
n Juges 5 conformément a leurs
jj-Alliances mutuelles [a).
h 6 n
U. ln[î. 196. MS. Amp. 11^. b.
2 52 Hijloire delaKeformation
1532. Il fsmbla que cette Dépuration
SoLEUR avoit produit un bon effet. Les
s^E- Seigneurs de Soleurre envoyèrent
un Député à Berne 5 (dans le Mois
d'Octobre,) pour afTûrer LL. EE.
qu'ils étoient réfolus d'obferver
leurs Traitez mutuels > anciens &
nouveaux \ & pour faire quelques
propofitions au fujtt dcKrieg[ieitctjy
(Paroiffe du Canton de Soleurre >
mais dépendante du Patronat de
Berne , ) qui avoit réfolu d'avoir
tout à la fois un Miniftre& un Prê-
* Le 18. tre.On répondit* à ce Député: yyQue
©ûobr. |.^^ comptoit que leurs Alliez de
55 Soleurre obfcrveroientexaâement
55 lesTraitezr^'on ne vouloit point
p, s'oppoferàce qu'on mît un Prêtre
„à Kriegfletten , avec un Miniftre:
,j ^'ainfi on efpéroit que là où
„ Berne avoit la Haute Juftice &
53 le Patronat , TEtat de Soleurre
35 ne feroit aucune vexation aux
5, Pareilles, qui avoient embraffé
,i la Réformation de Berne [a]
1533. Les chofes demeurèrent dans cet
Calme état 5 environ un an : Mais vers.
^' un au, la fin de Tannée fuivante 153 3. .les.
affaires fe brouillèrent fi fort à So-
leurre,
W ^Jnjir. Ii8. MS. Amp. 127.
■ de la Suijïè. Li v. X. 2 53
kurre, que la Réformation en fut 1 5;33.
abrolument b.nnie. Pendant leSoiEUK-
cours de cette année les Anabap-i^E»
tiftes troublèrent beaucoup ces Egli-
fes , & en divers lieux ils refu-
foient abfolument de fe foûmettre
à leurs Pafteurs , tellement que leur
opiniâtreté & leur mauvaife con-
duite, firent un tort infini à la Ré-
formation parce que les Catholi-
ques confondoient malicieufemenc,
les Anabaptifies avec les Réfor-
mez i 6c regardoient les défordres.
que les prémiers caufoient 5 com-
me des fruits de la nouvelle Doc-
wine. Ce fut à la fin d'Oiflobiea.
1535. que les divifions des Bour-
geois de Soleurre en vinrent à ua
éclat funefle. Pendant le cours,
de Tannée, les Réformez prirent
patience > & fe contentèrent de
leur fort , lailTant leurs Adverfai-
rcs gouverner à leur gré. Mais
comme la violence de ces gens-li
alloit en augmentant, les Réfor-
mez , entre lefquels il > avoit des
perfonnes de confidération , (-luitrcnlbl
faifoient même près de la Moitié
du Grand 8c du Petit Confeil , )
ne voulant pas fe lailTer mettre le.
2 54 Hijlcire de la BJformatîon
1533. pie fur la gorge 3 prirent les ar-
SoLEUR mes * pour fe défendre. Comme
^'^Le o ^^^^^ de grande conféquen-
oerob. ' ce > & mérite toute l'attention du
Le£leur , pour bien juger de quel
côté étoit le droit ou le tort \ je
mettrai ici > avec une entière im-
partialité > les relations que les
deux partis en ont publiées. Les
Relation Catholiques dirent , 5« après
^P,.^"^" avoir été bravez durant 3. an-
^ 55 nées 5 "S n avoient plus voulu
,> permettre au Miniftre de prê-
o cher dans l'Eglife des Cordeliers ,
V Que cependant , pour éviter une
5> fédition , on avoic cédé aux Lw-
y^îhériens ^ (comme ils les appel-
ploient, ) TEglife de Zoucbvveily
3> petit Village près de Soleurre ;
^> Ow'après y avoir fait tranquille-
33 ment leur Service Divin , ils
3> avoient machiné fecrétement de
3) s'emparer de l'Arfenal à main
?3 armée , & de malTacrer les Ca-
3, tholiques à la faveur de la nuit:
3, ce que l'un des Conjurez avoit
inceffamment découvert à l'A-^
3, voyer. Que fur cet avis, TAvoyer
5> avoic promtement fait occuper
}} l'Eglife de ^S*. Vrfe ^ de le Cime-
tiéie s
I de la SuiJfe.Liv .yi. 2S5
„ tiére , Se l'avoit fait garder par I 5 3 5,
>, des gens armez, jg^'avec le fe-SoLEua
ji, cours de quelques Femmes 3 ils^^*
„avoient attendu 1 exécution du
complot des Luthériens , &
^« aiant appris qu'ils s croient
,> emparez de TArfenal y Se s'y
„ étoient fortifiez; les Catholiques
,î avoicnt rempli de MoufqucLaires
>9 toutes les Maifons 5 qui font aux
»> environs de TArfenai > enforte
5, que les Luthériens furent obligez
3> de fortir de la Ville 3 & de fe rs-
tirer dans le Fauxbourg > & de-
là dans la petite Ville de rpled^
,j lisbach. Oaja^ïks leur départ, les
„ Catholiques avoient engagé la
Ville 3 à fè lier par Serment , de
demeurer dans laReligionRomai-
3, ne, à chaffer tous les Miniftres
3, de la Ville & du Pays à la re-
3> ferve»du Balliage de Bouchberg ^
33 où les Payfans avoient embraffé
3, la Réformation , avec la permit-
fion du Magiftrat [a].
Voici d'autre coté ce que les Ré- Relation
formez de Soleurre difoient dans ^^^^
une Apologie , qu ils publièrent :
3 3 Ouc
Cï) Haffnerj Solothurnn Schattl>Ut'K^ll.
256 Hifioire de la K^formatton
1533, ,î Que pendant quelque tcms avant
SoiEUR 3> qu'ils fulTent chalTez, ils s'étoient
vus menacez de tous côrez par
leurs adverfaires, Eccléfîaftiques
>, & Séculiers > & même en Chai-
» re; & qu'il s'étoic pafle encore
7, dans la Vilk d'autres chofes, par
>, où les Evangeliques comprirent>
que les Catholiques avoient ma-
chiné de mettre la main fur eux :
Que contre la promelTe , qui
,^ avoit été fouvent faire de laiC-
yy fer en paix les Réformez , on
53 avoit envoie des Meffagers par
tout le Canton, pour dire aux
yy Paroiffes, que puifque la MelTe j
yy étoit fuivie du plus grand nom-
yy bre dans la Ville , il falloir que
yy les Sujets 5 ne vouloient pas
« paffer pour féditieùx 6c rebel-
» les 5 rétablirent au/ïî la Meffe>
j3 8c fe foûmiflent à cette plurali-
yy té de leurs Seigneurs : Que dans
yy cet intervalle les Catholiques
yy avoient dit aux-Réformez de la
yy Ville que quand les Meffagers fe-
yy roient de retour de la campagne,
il faudioit qu'ils allaflent au lîi a.
5,1a Mefle, ou qu'ils fortilTent de
la Ville^ ou bieji qu'ils le battif-
fent.
de la Stiijfe. L l V. X. 257
pj fent avec eux: Que fur ces me- I
U naces , & d'autres fembiables > Soieur
L après avoir tenu confêil 5 ils s'ar-
5, mérent en plein Aliclt , & fe pof-
o térent près de TArfenal , atten-
„ dant ce que les Catholiques vou-
,j droient entreprendre contr'eux :
35 cependant fans infuker ni atta-
3> quer pcrfonnej foit par de mau-
n vâife paroles > foit par des voies
>,de fait. Mais que voyant les
Catholiques animez d'une fureur
« fans égale, enforte qu'il y avoit
3) à craindre un grand malheur, (i
l'on en fût venu aux mains , ils
99 prirent le parti de quitter volon-
i, tairement & paifibiement TAi/è-
>5 nal, & de fortir de la Ville, fans
99 avoir fait aucun mal à perfon-
» ne i ne demandant autre chofe
perpétuellement que la Paix &
j, la Juftice. Enfin 5 que les Ré-
formez , qui faifoient à peu près
y> la moitié du Grand Ôc du Petit
j, Confeilj 6c même de la Bour-
9» gcoifie , s'étoient retiiez pour le
9> bien de paix , fur les Terres de
9, Berne , à Flnealisbachy & à AT^'IiW-
i^gcn^ laiifant leurs Femmes, leurs
n enfans , 6c leurs biens > à la
merci
2 58 Hiftoire de la déformation
1533» " roc^ci de leurs Adverfaires : Que
SoiEUR 3> des Dépotez de tous les Can-
RE* 3, tons> excepté ^ppenzelU y étoient
55 venus pour accommoder les Par-
5, ties 5 ^'ils avoient d'abord or-
3, donné pour Préliminaire, une
55 Trêve de 15. jours , & deman-
3, dé aux Parties qu'on leur laiffât
3, le pouvoir de travailler à ajuA
,> ter leur différend : Que les Ré-
35 formez les prièrent de leur faire
55 juftice avec impartialité , de-
35 mandèrent qu'on leur donnât
35 pleine liberté de confcience , ce
55 qui leur fût d'abord refufé par
les V, Cantons & par les Vallai-
53 fans. Que les Députez aiant en—
,5 core propofé aux Réformez , de :
5, les laifTer prononcer au fujet du
5, foulévement , dont ils étoient.:
55 pourtant innocens; Se de fe fou-
3, mettre à leur châtimentjavec cette
35 referve , que ce feroit fans pré-
55 judicc de la liberté de confcien--
33 ce qu'ils demandoient5 ils dé-
5, clarérent enfin , que pour éviter
,5 une cfFufion de Sang , ils vou-
35 loicnt bien donner quelque ar-
35 gent^ mais fous Texprefle refcr-
3, ve qu'on leur donnât enfuite fà-
li^fac-
delà Suijje, LiV. X. 259
5> tisfadion fur la Religion. ^^1532^
,5 là-deffus huit d'entr'eux furent Soleuk
exclus de la pacification, & les^E-
autres 5 condamnez à une amen-
35 de de 2. Mille florins de Rhin ;
3, ^'il fût ordonné à legard des
sj Réformez, originaires de la Ville,
i, qu'ils pouvoient revenir chez
,>eux , fans craindre aucune
5, violence pour la Religion ; mais
*>que 17. autres , qui n'étoient
pas originaires Suiffes^ dévoient
fortir du Pays dans un Mois*
ii{Que ce Règlement avoit été
a, viole dans tous fes points ^ en
3, ce que premièrement , peu de
j, tems après , on avoit chafle34,
3, Minières , & établi à leur place»
33 & à main armée, des Prêtres*
33 qu'on avoit fait venir d'Alfacc
0, &c du Brifgaw.) Que ce Règlement
5> ayant été rapporté à ceux, qui
)3 étoient à Ff^tedlisbach & aux huit^
33 quiavoient été exclus de la Paix;
>, en les alTûranr , que les Bernois
j, négôcieroient avec la Ville de So-
), leurre , à la fin de Novembre ,
tant pour ces huit , que pour laf-
j, faire de la Religion \ lors que
les Bernois voulurent exécuter
ocet
26o Hijloirede la Kéformation
I S33» article , dont on leur avoir
SoLEUR >5 remis le foin, ils n'âvoient point
5, éré écoutez. Que là-deffus les
,5 Réformez s'établirent à But en ,
5> ôc que comme la trêve d'une
5 5 année, que quelques Cantons
55 avoient établie > n'avoit^ pro-
,3 duit aucun adouciiTement ils
5> avoient déclaré une inimitié ou-
5, verte , non à leur Patrie mais à
,5 quelques particuliers de Soleur-
3> re , qui avoient écé caufe de la
5, violation des Traitezjqu on avoit
3, faits avec eux > comme a* leurs
35 injuftes perfécuteurs \ enfuite de
„ quoi eux (les Réformez,) avoient
3> été déclarez par le Grand Con-
35 feil de Soieurre , ennemis de la
3, Patrie, & profcrits 5 fi bien qu'on
3, avoit mis leur tête à prix , ÔC
3, promis cent florins de Rhin pour
3, chacune , avec déclaration ex-
prefle, qu'on ne leur répondroit>
,5 que devant les Cantons^,,.
Comme l'examen de ces trou-
bles 5 & des fuites qu'ils eurent ,
roule principalement fur cette quef-
tion, Qtà [ont ceux qui ont été les
u^££. ejfeurs , & qui out cotnploté d'é^
gorger
Hottiiig. 65-;. 666.667.
de la Snife.LlY. X. 26l
^oYger leurs advnf lires ? & que com- 153
me on vient de le voir, les deux Sole
parris s'accuférent réciproquement^^*
d'un tel complot , je laifle vo-
lontiers à j'iger aux Lecteurs impar-
tiaux, d:^ quel côuéa été la violence
& l'infraction des Loix & des Trai-
tez. Je ne dirai qu*un mot la-
deïïus. Si Ton en veut juger par
Tefprit violent & meurtrier, qui
régne dans TEglife Romaine , &
par les Maffacres que les Catholi-
ques ont fait en d'autres Pays ,
( comme celui de la S, Barthelemiy
en France, Tan 1572. Celui delà
ralteline i Tan 1(^20. Celui dVr-
lande y Tan 1^41. où il y eut plus
de cent mille Proteftans maiTacrez.
Enfin celui des Vallées de Piémont,
en 1(^55. ) on ne pourra pas nier>
que la préfomption ne foie très-for-
te en faveur des Réformez de So-
leurrc, & contre les Catholiques.
Au moins on ne peut rien repro-
cher de femblable au parti Ré-
formé.
Afin de mettre mieux les Lec-
teurs au fait fur cette affaire , j'a-
jouterai ici, par voie de fupplé-
mcntjce que Stettler H.fto-
rien
262 Hïjlûîre de UKéformatîon
Ï 533. rien Bernois en dit, & ce que j'ai
SoiEUR trouvé dans les Mémoires > que
j'ai tiré de Berne. Voici comme
Stîttler en parle *.
Nam- 35 Après que ceux de Solemre eu»
^It^tU^^ o rent ôté aux Réformez la liberté
' 55 de confciencïî, quoique des 44. Pa-
P5 roilTes du Canton, il y en eut 54.
35 qui enflent embrafle la Réforma- .
tion , avec permiflion de leurs
5, Magiftrats j cependant les per-
35 fonnes les plus puiflantes de i'E-
^5 tat , portèrent les chofes fi loin,
55 que ceux qui étoient refolus de
5, demeurer dans la Religion Réfor-
p, mée , furent obligez de fe foû-
3» mettre , vivant dans Tinquiétu-
?, de , & laiflant leurs adverfaires
55 gouverner à leur gré. Mais com-
3, me quelques-uns de ceux qui n'é-
5* toient pas de la Religion Romai-
5, ne étoient des perfonnes de con-
9} fidération , 6c d'un rang diftin-
55 gtié j 6c qu'ils n'étoient pas des
5, moindres du Confeih ils ne fe
3, trouvèrent pas d'humeur à fe
5> laifl*er opprimer , la chofe en vint
55 à une telle aigreur, qu'après s'ê-
0 tre long-tems querellez , il s'à.
9; levai
^ pag. ^i. a.
de la Suife. Liv. X. 263
j 3, leva de grands troubles tant dans 1533,
i 55 la ville que dans le Canton. Car Soleub.
le 30. Octobre, quelques Bour-
33 geois prirent les armes de nuir,
1 53 6c quelques-uns de ceux de la
55 Campagne en firent autant. Les
55 deux partis s'approchèrent Tun
5, de l'autre , 6c quoi qu'on ap-
5, paifât ce tumulte , cependant le
I y, plus petit nombre fut obligé de
I 53 céder au plus grand > fans qu'il
53 fe donnât pourtant un feul coup
53 d'épée : Les Réformez fe retiré-
5, rent dans le faux^bourg ; ôcaba-
'5, tirent le pont après eux. Ceux
jjdeSoleurre donnèrent avis de ce
33 tumulte 3 fort au long , non-
33 feulement à leurs Alliez de Ber-
^3 ne, mais auffi à leur Baillif de
îsLandshout, Cafpar Kouttler : fur
,3 quoi Ton envoia de Berne deux
33 Dépurations, (dont ia prémiére
3, étoitcompofée de l'Ancien Avoyer
33D'Erlach , 6c du Thiéfo-
3> rier Tillman avec 4. autres
1-3* perfonnes ^ 8c la féconde, de
j> Pierre de Werd, Cris-
»PiN Fischer, 6c du Baillif
33 de Landshout , qu'on vient de
j> nommer) pour tâcher de met-
2 64 Hiftoire de la Keformatioy^
î533-otre le paix entre les Parties 5,.
SoLEUR J'ajouterai que les Seigneurs de
'^^^ Berne donnèrent ordre à leurs pré-
Nomnb. micrs Députez * d'exhorter lits
deux partis, à ne point ufer de
violence les uns contre les autres;
mais à laiffer à chacun liberté de
Confcience > & leur remontrer le
tort qu'ils avoient d'en venir aux
mains >• contre la promeffc qui avoit
été faite à leur Députés 3 quelque
tems auparavant , puifqu'une per-
fonnè même avoit été tuée dans
le Fâuxbourg [a),
Ststtler continué en ces termes [b] :
3, Comme on obtint peu de chofe,
3, à caufe de la grande animofiré
- 3, des Parties , ceux qui s'étoient
v campez dans le Fâuxbourg , en
3, fortirent en bon ordre > fous la
^, 55 conduite de deux Capitaines,
Je A N ROGGENEACH * dc
fortent à j> Soleune j & Ulrich Gla-i
Soleur- „SER du ViHaj^e d'O^y/z/^^^/ï^fans
35 Drapeaux , ni Tambours 5 ni fî-
„ fre 5 & s'arrêtèrent dans une
33 prairie devant Ff^utlisbach. Sur
.1) cette
{a) us. Amp. Inftr. 517.
pag. 6i.a. b.
^ On prononce Kockebach.
de U Suijje. Liv. X. 265
lette démarche des Réformez de So- [533.
■eurre , rHiftorien fait une ré- Soleur
iexion, qui me paroit fort jufte ;
\, Ils ne hrent pas grande atten-
tion à une Conférence, qu'on
>, avoir ordonnée pour eux. Ils
|>, quittèrent leur porte avanta-
geux , & fe campérent-là ^ {de-
' y VAYit FP^tcdliibach ) avec un nom-
, bre affez confidérable de Peuple
y de la Campagne , qui fe joignit
„ à eux. Ainfi ils donnèrent au
plus grand nombre de la Bour-
^ geoifie ( c'eft-à dire aux Catho-
liques ) la facilité entière de
régler tout à leur gié. En effet,
ici encore , comme en d'autres
yy occaîions , on a vu la vérité de
j, la maxime, Qm quitte U particy
yy la perd „. Si les Réformez de So-
leurre s'étoient tenus bien unis
dans le Fauxbourg de la Ville, &
qu*ils ne fe fuiTent point féparez ,
■que tout n'eut été réglé j ils au-
roient pù fe foutcnir contre leurs
ennemis , qui furent enhardis de
plus en plus , par leur retraite. Je
reviens à Stcttler. „ Sur ces en-
trefaites , dit il , tous les Can-
» tons , à la referve à yippinzdly
Tom, /r. M
266 Hljloîre de la K^é formation
ï 5 33. >:> envoiérenî: des Députez à So-
Négocta- yy leurre , qui firent un projet de
tions des pacification, pour effayer d'ac-
fur ce commoder les parties . & enten-
fujet. dirent les raifons des uns & des
autres. Mais comme , malgré
>, les inftantes foHicitations des
55 Bernois , on ne pouvcit guères
5> procurer de foulagement à la plus
5j foiblc partie , &c qu'il couroit
3, plufieurs bruits étranges d'un
5j certain fecours , qui devoit ve-
nir au parti le plus fort 5 il pa-
5, rut aux Députez des Cantons
55 Médiateurs ^ ï qae pour préve-
j, nir une guerre civile , fans tou-
53 cher à la Religion > le moyen
le pins fur étoit une Sentence im-
5> partiale. Mais ils ne purent
' 3j l'obtenir > qu'à condition, que
^ les Réformez reconnoîtroient
» en quelque forte leur faute 5 &
j^fe foûmettroient au châtiment.
py Quelqucs-ons de leurs meilleurs
^3 amis leur confeillérent , & les
33 exhortèrent à obéir, fans préju-
dice pourtant de leur Religion.
33 Plufieurs de leurs plus grands
«3 ennemis étoient leurs Juges.
Aini! la Sentence ne pouvoit pas
yy ètr€
de U SuiJJe. Liv. X. 267
[ être favorable au parti le plus i
foible, So
55 Or entr autres articles , il fut
Uéglé: Que les Bourgeois de So-
leurre, qui étoient fortis de la
Ville, paycroient, pour punition
de leur fauffe démarche , 2000.
florins de Rhin , avec la referve,
que huit perfonnes , favoir? Jean
Houg ) ancien Bander^t 5 Urfe
Stark^y Thréforier, Jean Henri
, VVinkeli , Urfe Dtirr , Jean &
5 Rodolf Roggenbach, Henri Von Arxy
> & Jean Hoîibler^ feroient exclus
, de cet accommodement. Item^
, que 17. perfonneS) qui n'éroient
, pas nez Suifles 3 fortiroient de la
9 Ville & du Canton , avec leurs
, Femmes , leurs Enfans, 8c leurs
, biens , dans l'efpace d'un mois.
> Que cependant les gens du Can-
jton pourroients'en retourner chez
> eux fans aucun châtiment , àc
> que par raport à la Confcience ,
3 ils pourroient vivre en fureré 5c
, en liberté. Ainfi finit cette fâ*-
, cheufe affaire ; & dès-l'i on ne
» parla plus gpères de la Rcli-
^gion Réformée à Soleurre,,,
Comme la narration de cetAu-
M 1 tcur
268 Hifloire de U K.éformatîon
1533, teur eft un peu féche > quil
'Régocin- coule légèrement fur des articles
t^n des importans , j'y fuppléerai par ce
Cantons • ç^^^ , Lorsque tous les Cantons
envoyèrent , des Députez à So-
leurre , à la referve de celui d'Ap-
penzell , les V. Cantons zélez 6c
Ffibourg , ne fe contentèrent pas
d'y envoyer les leurs , mais de
plus ils prirent les armes, difant
pour prétexte , que les Bernois
vouloient foutenir auffi par les
armes les Réformez de Soleurre^à
quoi les Bernois ne penfoient nul-
lement:, comme on le va voir tout
à l'heure. Ceux-ci chargèrent leurs
te Darti- Députez 5 ( le Vendredi 7. Novem-
culiérc- bre > ) de conférer particulièrement
2^^^^"^^^^ avec ceux des V. Cantons j » de
les affurer , Que Berne ne vou-
^jloit point employer les armes,
3i & ne chercheroit jamais que
j>jles voies de la douceur 8c de
a la Juftice , enfin de les engager
>, avec les autres Arbitres , à faire
que ces troubles fuffent appai-
^3 fez j & qu'on remît en vigueur
les Edits & les Arrêts > & que
fi on ne pouvoit pâs l'obtenir
yi de ceux de Soleurre, qu'au moins
on
de la Suijfe. L i v. X. 269
on donnât aux Réformez une 1533;
Eglife près de la Ville , & lin Sol t u^i
Miniftre(rf)„. R^-
Dans l'Affemblée des Députez
s Cantons , les Réformez tant
la Ville 5 que du Pays j qui
toicnt retirez fur les terres de
rne? demandèrent quon les laif-
en paifible polTefTion de la li-
rte de Religion , qui leur ctoit
quife par les Traitez & par les
its. Mais les Catholiques de
leurre > qui étoient défoimais les
aîtres> répondirent > ^'il falloit
émiérement éxaminer l'affaiie de
fédition , & la terminer: Que
and cela feroit fait , ils ren-
oient une réponfè convenable ,
fujet de la Religion : & pour
leux endormir les Réfoimez^quel-
es Confeillers de Soleurre dirent
particulier aux Députez de Zu-
h & de Berne , Qnon ne vou-
faire violence à pcrfonne fur Lt
Ui^ioH'j & ils leur montrèrent mê-
e le Strment qu'on faifoit piê-
r aux Bourgeois, qui ne conte-
ic rien d'oppofé à la Religion
"*ormée(/'). M 3 Huit
Çu) MS. Amp. 1^1. B. bi/iy. 310.
(^j MS. Amp. 157. U.lnjir. 547,
270 Hijlûlre de la R^cformatioïi
^33, Huit jours après, c cft-à-dire, le
Senti- 15. NoNferribre , les Députez de
■11^ Berne eurent ordre de dire aux
^^"^'l' Arbitres, Députez des Cantons,
que Berne écoit d'avis > que les
Séditieux fuffent punis. Ils fureni
au/Ti chargez d'aller à Wiedlisbad
vers les Réformez deScieturre, lO
leur confeiller de la part de LL
EE. de fe fcûmettre au châtiment
leur laiiTant néantmcins la liber
té de referver leur Religion , o!
non , 5c de fe féparer les uns de
autres, ou de -demeurer unis : 20. d
leur déclarer nettement, que le
Seigneurs de Beine ne vouloien
pas enrreprendie une nouvel!
guerre pour eux , afin de ne ps
s'expofer à entendre dire dans j
fuite, qu'ils avoient eu du delToi
dans une affaire de Religion {a\
Les Réformez nyant fuivi le co)
feil des Seigneurs de Berne , (
s'étant fournis à la punition que
voudroit leur infliger , ksDéput
de Berne eurent oidre de trava
1er à pacifier les affaires de Religio
Et comme on foupçonnoit déj.
que les V. Cantons ne s'en vc
W MS. Amp. 155.
droii
deU Suiffe. Liv. X. 2J\
droient pas mêler , il leur fut or- 1 533»
donné de Te joindre aux Députez Soleu?.
de Zufich, Bâle^ Claris, Alullhoufe^^^-
S. Gui Se Bienne , d'aller enfem-
hle prier les Députez des V. Can-P
tons & de Fiibourg , de leur ai--
der à faire la paix : ôc au cas qu'ils
le refuTalTent encore , on devoit
lei-ir dire : „ O^'on voyoit bien leur
d'-lTcin : ^'lis ne vouloient pas
,5 s'emploier à faire cette paix >
5, parce qu'ils cherchoient à faire
j, naine une nouvelle guerre deRe-
9, ligio:i: Que pour cette caufeLL.
35 EE. décUroieut, qu'il? obferve-
roient de leur côté l'Alliance de
Soleurre 5 en tout ce qui intéi ef-
fe la, vie &: les biens, & qu'ils
55 ne permectroicnt à perfonne ae^
5, paffer en armes par leurs terres,
Enfin i's eurent ord-e, de travaiU
1er de toures leurs forces 3 à pro-
curer aux Réformez la ri;ênjc li-
berté de confcience, qu'ils avoienc
ei'ë avant les troubles : & de leur
confcller , de prier leurs Seigneurs^
de remcrrre le Jugement de cette
affaire à des Jug'-s impartiaux, eii
leur propofant l'exemple des Sei-
xgnçurs de Berne 5 qui cinq ans au-
y. M 4 para-
272 Hiftoirede la formation
1 533* paravant , dans les troubles du
SoLtuR Hasle & dans la rébellion de leurs
Montagnards, avoient confenti de
fe laiffer juger par leurs propres Su-
jets (4).
Les Députez des Cantons > af-
femblez à Ff^tedlisbach y propoférent
aux. parties un accommodement,
confiftant, en deux articles: lo.
Quon n'inquiéteroit aucun parti
pour caufê de Religion. 20» Que
les Etrangers Réformez pourroiunc
s'en retourner dans leur Pays, fans
payer ni rançon ni amende, & que
les Bourgeois , qui s'étoient foû-
mis à l'amende , pourroient libre-
ment retourner chez eux, à la re-
ferve de huit : entre kfquels ctoit
le Banderet Houg [h). Après quoi
les Députez des Cantons , pour ne
pas s'arrêter trop long-tems àlcxa- |
men d'une affaire , qui pourvoit
être d'une longue difcu/Fion , re-
mirent le foin aux Bernois, de né-
gocier avec Soleurre, pour TafFaire
des huit exclus > & pour celle de
la Religion, Ceux de Soleurre
acceptèrent tout cela , promettant
de
W MS. Amp. ibid. & B. Inftr. 315.
ibj MS. Amp. 1S6.
! . delaSuife. Liv. X. 273
de s'y conformer : & les V. Can- 1533.
tons ne s'y oppoférent point (^e). Soleur
Les Bernois s'aquitérenc incef-
famment de la négociation dont
on les avoit chargez. Ils s'y em-
ployèrent avec beauconp de peine
& de dépenfe , mais fans fuccès {b).
Car d abord, les Magiftrats de So-
leurre marquèrent une journée aux
Bernois , au commencement de
Décembre > pour régler laitaife des
huit Bourgeois exclus, fans faire
aucune mention de celle 6.% la Re-
ligion. Les Bernois en furent fort
furpris, car-t difoient-ils, dans toute
U Négociation on a toujours ref. rvé
la Religion ^ & il a toujours été dit >
quon ne feroit violence à perfonne
feur CAufa de Religion, Et pmfque
le châtiment a été infligé aux Réfor^
niez 5 & qu ils l'ont fubi 5 quainfi tout
g(t terminé i a la refeive de ce qui
regarde /f/ huit perfonne s ^ & la Re»
Hgion, on doit les finir toutes deux^ fi Ion
i*Arrêt des Cantons -i & Piomefle
de Meffiiurs de Soleurre, Ils envo-
yèrent donc des Députez à Soleur-
re, le 7. Décembre , avec ordre de
M 5 négo-
{a) B. Inftr.
(b) lu, 437. MS. -r^w/'. 144.
2 74 Hifiaire de la RJformai ion
I J33. négocier pour ces deux affaires, en
SoLEUR commençant par la piémiére 5 niais
en forte cjue l'une ne fe finit pas fans
l'autre : en cas de refus de la
part de Meflieurs de Soleurre, ils
furent chargez de leur dire , Que
^eU étoit contre i'Arrèt des Cantons ^
& contre leur promrjfe ; & quon nau-
Yoit pAS attendu cela d'eux. Enfin
ils dévoient fe retirer , api es leur
avoir demandé la puniaon de
qociqncs S. jets de Soieurre j qu*
injurioi^nt ceux de Berne, à caufi
de leur Religion , & les appel
loient Héreîïjues, Les Magiftra
de Soieurre refuférent tout , & n
voulurent plus fe fouvenir de leur
prom«-ifes. G'eft pourquoi les Ber
ht 27. nois recoururent *aux autres Can-
tons, pour obtenir deux, qu o"
leur fit jullice, &: que le Confei
de Soieurre fatisfit à l'Arrêt d
leurs Députez {a),.
2^UHicH VII L Parmi ces troubles de lâ
SuilTe , le Pape Clément VI ï.
croyant l'occafion favorable, fit de
nouveaux efforts par le Miniftére
de fon Nonce Lnnius pour y raf-
fermir fon autoiisé. Il fit follici-
X^t
f^) MS^ Anijy. 155. B. htp, 31^.
deU Suijje. Lîv. X-
rer les Zuricois , à rentrer dans le I 533»
fein de l'Eglife Romaine , en leur Le i>e
promettant, (s'ils le faifbientO de
leur payer les diverfes Sommes que rentrei-
la Cour de Rome leur devoir de- dans le
puis long tems. Ceft-a-dire ^^"^^'^^Yj^Xi^^
que, ( fuivant la Théologie du Pa-
pe , ) une Somme due légitimement ne & lui
à une perfonne ou à un Etar, n'eft promet
plus duë , .dès que cette perfonne [^^^^ ['^7.
ou cet Etat ne penfe plus comme gem.
lui fur la Religion '.Voilà uneThéo-
logie bien coiT^modeî On peut ac-
quirer fes dettes à peu de frais \
Je m'éronne qre certaines Puiffan-
ces de 1 Europe , qui- doivent de
greffes Sommes aux Cantons Ré-
formez 5 ne fe foyent pas encore
aviftz de cette rréthode abrégée ^
pour s aquirer auprès d'eux ! Les
Zuricois rejcttérent avec indigna-»
tion la proportion du Pape 6c de
fon Nonce. Ils lui auroient die
volontiers , comme S. Pierre à
S'moyi le Magicien: Que ton argent
périp avfc toi ^, Mais les Cantons
Catholiques , gagnez par le Pape^
favoir, Uri , S hz vitZy Undirvvaldy
Zoug, ôc f}:ùourg, firent avec lui
M 6 uns
* Ail. VIII. f. 10.
276 Hijloire de la BJformation
1533» une Alliance étroite & particulière.
2VRICH Les Seigneurs de Zurich s'oppofé-
rent à cette Alliance , & prétendi-
rent 5 Que comme les Cantons Ca-
tholiques avoient ftipulé , dans le
dernier Traité de Paix , que les
Réformez renonceroient aux Allian-
ces étrangères, qu'ils avoient faites
avec des Puiffances Proteftantes, il
étoit jufte qu'ils renonçaffent aufîî
à celle là, comme étant contraire
à leurs Traitez mutuels. La cho-
fé étoit d'autant plus platifible, que
Zurich venoit de refufer tout ré-
cemment, d'entrer dans uneAllian*
ce contre le Pape, 6c contre d au-
tres Puiffances , propofée par des
lesÇ^w- partifans de la France. Mais
IToiUj^es ^^^^^^ des Catholiques 5 contre
font Al- les intérêts du Chef de leur Re-
liance ligion , c'eft prendre de gayeté de
^^J^^ cœur une peine inutile. Non-feu-
lement les Catholiques rejettérent
la propofirion des Zuricois: mais
dans le deffein d'enraciner > d'aifer-
mir Se d'éternifer , s'il leur éroit
poflible, la Religion Romaine dans
le LL. Corps Helvétique, ils fi-
rent, bien-iôt après, une Alliance
particulière avec TEvcque Se l'Etat
de
de la SuiJfeLlV. X. 277
Vallai s 'y doni le principal butjj^j^
écoic, de fe maintenir réciproque- avec
^ ment dans leur Religion , envers kVal/aU
&c contre tous Cette Alliance
ne:oit pas abfolument nouvelle.
Trois Cantons. Lucerne, Uri 3c Un- C a n-w
urvvaîd étoient déjà liez par un ^ ^ 5-
ancien Traité de Combourgeoifie
ivec cinq Diz^^ines f du Vallaisj
î Vlais elle fut notivelle lO. en ce
ue tous les Cantons Catholiques
, entrèrent , fa voir , S. hvziiz> Zoug-^
V ^rihourg & Soleutre^ avec les 3. pré-
' édens , & qu'ils la contra<fbérenc
.vec TEvêque 8>c tout l'Etat de
;s /allais 5 compofé de 7. Dizaines s
J lonc les deux , qui y entrèrent
i lors 5 font Lcu 4. & Raren» 2^.
:• :11e étoit nouvelle encore > en ce
{ lu'ellc âvoit pour but principal la
. vcligion. Elle fut (îgnée le Me-
; redi 17. Décembre 1533. 6c re*
s ouvellée au bout de 45. ans. Tan
. 578. le Lundi p. Juin (4).
D'autre
I ^ Uottïng. 67%-
1 On nomme ainfi en François Zehti-
>i en Allemand , les VII. parties , ou
^lartiers de Pays , qui compoient \a
cpubliquc du lUnt-VailaU.
c O Hulunt;. 1. c. VV^dklnh II. p. 57^. ;
278 Hï (foire de laK.éformatîon
I 533« D'autre côté les Bernois finirent
L'Allivin ^^''^'^ Alliance avec la Ville de Bt-
ce, de fa^içcn. Cette Capitale de la Ean-
^^'^''^ . chc Comté avoir fait ( Tan 1 5 1 8. )
ftnpn^ T/aité. d'Alliance Ôc de Com-
£ii finie. bourgf:ci{îe avec ks Villes de Ber^
ne 3 de Frlbourg 5c de Sohurrc > poui j
TeTpace de 15. ans. Quand les 15, |
ans furent écoulez, le Vendredi 12»
Decerribre 153g. Its Viiks de Ber-
ne & de BeUncon 3 déclarèrent que
leur Alliance é:oit finie {a). Une
pareille Alliance étoit paffaitement
inutile aux Bernois, fur-tout depuis
le changement arrivé dans la Rc-
lion, & ne pouvoit que leur être
à charge. Ainfi ils furent bien aifes
de s'en voir débarrafTez. Mais dans
îô même tems qu'ils fe détachè-
rent de l'Alliance d'une Ville Etran-
gère & Catholique, ils ferrèrent
plus é^joitement les nœuds > qui
les attacboient à une Ville Helvé.
îique & Réformée, je veux dire
à Bàie. Par un Traie é , concli
Alliance le 2, Novembre, Beriis & Baie ii
ficreen- promirent un lecours mutuel, at
u-eBerne cas qu'o.'i les attaquât > Tune 01
l'autre (^). Da:
B. Jn/ir. I. T39. b.
W 'B. 519. i
de la SuiJJe. Liv. X. 279
Dans ce tems-là les Cantons Ré- 1535»
formez furent dans une grande in- Mouve-
quiétiide , à caufs des pratiques mens^
fourdes des Cantons Catholiques >
8>c de leurs Alliances , loit avec
le Pape , foit avec les Valla'fkns.
Les Bernois en particulier prirent
des mefures pour leur défenfe j fe
•donnèrent quelques mouvemens >
& firent divers préparatifs de guer-
re, tout comme s'ils eulTent écé à
iâ veille de fe voir attaquez par
quelque ennemi. Les Fribourgeois & des
en prirent ombrnge. Ils armèrent f^^'^'f^'''^^^
de leur cô:é, demandèrent duTe-"^
cours aux Laufannois & envoyè-
rent une Dépuration à Berne, pour
s'informer de la chofe, & en faire
des remontrances aux Bernois.
La Lettre des Seigneurs de Fri- j 534^
bourg fut portée à Laufanne, le
Vendredi après la Tous - Suints , 7.
Novembre, lue dans le Confeil
des LX. Ces Seigneurs y difoient
avoir apris , qu'on vouloir les at-
taquer; en coiifèquence de quoi
ils prioient leurs Alliez de Lau-
fanne , de leur envoyer un fccours
de cent Arquebuzicis,
Les
280 Hijfoire de la R^éformation
Ij^^, Les Laufannois foupçonnérent
Truuen-^^^ Ics Seigncuis de Fiibourg vou-
ce des loienc faire la guerre à TEtat de
nof/^" Berne, & léfolus de ne point fe
(déclarer , fi le cas arrivoit , ils
conclurrenc , qu'on n'enrôlleroic
point ce nombre de Soldats, juC-
qu'à ce qu*on fût quel ëtoit l'en-
nemi 5 contre qui MefTjeurs de Fri-
bourg vouloienî les employer (^i).
Six Semaines fe paflerent , fans
qu'on eut à Laufanne aucune nou-
velle de Fribourg. Enfin le Ven-
dredi ip. Décembre le Confeil reçut
une Lettre de Mcffieurs de Fri-
bourg , qui demandoient cette Com-
pagnie de cent Hommes > fans faire
aucune mention des ennemis, qu'ils
avoient en vûë. Ce filence affefté
parut fufped aux Laufannois.
Pour s'édaircir fur ce fujet, ils
envoyèrent des Députez à Fri-
bourg , pour s'informer du nom &
de la qualité des ennenns, contre
qui on vouloir employer leurs Sol-
dats [b). Les Regîrres ne nous ap-
prennent point quel fut le luccès
de cette jDéputation. Maii la fuite
de
{a) Mtrw 5i^^. b.
{h) Ibia. 59y.
de U SiiiJle. LlV. X. 281
de THiftoire le fait affez connoître. j J34,
Comme perfonne n'attaqua Fri-
i bourg , le Confeil de Laufanne
n^eut pas befoin de lui envoyer
du fecours.
En effet , les Seigneurs de Ber- Bêrhe.
ne ayant entendu les remontrant
ices des Députez de Fribourg, leur
répondirent, le Dimanche 4. Jan-
ivier 1534. 3> Qu^oïï leur faifoit
\>y tort , de leur attribuër quel-
5, que mauvais deffein, jÇ^'il étoit
„ bien vrai , que fe voyant me-
^> nacez de tous cotez > ils avoienc
,> averti tous leurs Sujets de fe te-
, nir fur leurs gardes , pour être
prêts à fe défendre 5 mais que du
refte ils n'inquiéteroient jamais
5, perfonne , ni pour caufe de Reli*
„ gion 5 ni pour aucun autre fujer,
>, ne demandant rien , finon qu'on
, les lailTâr en paix , 0«'ainfi leurs
,j, Alliez de Fribourg nav oient rien
j» à craindre de leur part. Ils fe
L plaignirent de leur côié , de ce
»> que les Fribourgeois , avoient fait
5> une Alliance particulière avec les
9, V. Cantons , 6c les Vaillaifans,
9» kur re.noncfcrfiK , que cela étoit
contre les conditions de le'jran-
„cicnne
282 Hîfloire de la Kéformatton
I>jj4»cienne Combourgeoilie \ Qut
33 d'ailleurs une telle Alliance étoit
,y fuperfluë> puifqu'ils étoient ré-
35 folus , de ne les inquiéter jamais
» fur leur Religion {a),
.Mliance Nonobftant ces repréfentations
le^Fw' Seigneurs de Berne, ceux de
Imrg & Fribourg perfévercrent dans leur
; dcSoieitr défiance y & foit par ce principe >
T^^ ^^^c peut-être au fli par fimple zèle de
Cantons R^^^gio" j ils fe lièrent d'une fa^on
particulière , ( l'an 1534) avec les
V. Cantons, par une Alliance nou-
velle 5 de plus étroite que jamais?,
fous le nom de Combomgeoïfie {b).
Ceux de Soleurre y entrèrent aufTi,
6c encouragez par cette Alliance ,
ils chafféreiic les Réfor.ûez de leur
Ville.
B.rchtold Haller écrivit dans ce
tçms-là à Bullinger, le 30. Décem-
bre: Cinquante pif fonnes font forties
de Soleurre y entre lefcju elles efl A/r.
les Ré- H E N R 1 W 1 N c K L I , fort honnête
mahH- ^^^^^^^^ > parent oe Léon de Juda.
tez à So~ Il navoit point eu de part à ces trou*
leurre, Qx\ bU's i Cependant pour évher lu perfé-
-ortent. ^p^ipyi ^ jJ s'efl retiré d'siÙQïd a B<inCy
O.
delaSmjJe. Liv. X. 285
& enfuite a Bâie, & fe voit réduit l $34-
dans fa Fieillejfe ^ 4 la trifte fttua- Soleç:.
tion d'un Exilé, Il avoit éié Bail-^^'
Jif à Dornel^ l'an 151 8. Ha lier lui
écrivit encore, que les Réformez
qui étoient reftez dans la Ville j
écoienc traitez fort indignement.
BuUinger avoit beaucoup de confi-
deration pour ce Baillif V^inkeli %
A fa prière il compofa un petit
Traité, Tan 1537. où il montre ^
Quelle eji l'ancienne Religion , afin de
foriifisr ceux qui en font profeC-
fîon , en leur faifant voir , qu'elle
efl la même, que celle que tous
les Anciens Fidèles, & les Saints^
ont euë des la Ctéation du Mon-
de : & pour fervir aufTi d'avertit.
femcnt à ceux qui la perfécutenr.
Il dédia ce petit Livre à Ff^.nkeli *.
Mais pour reprendre le fil de ma
narration , la démarche des Sei-
gneurs de Berne parut ramener
ceux de Soleurre. Ils confentirent
enfin , à traiter de l'affaire de la
Religion , auffi-bien que de celle
des huit Bourgeois exclus. Ainfi
les Bernois cnvoiérent des Dépu-
tez à Soleurre , le 5^- Janvier 1534.
pour
284 Hijloire delà déformation
1534, pour terminer ces deux affaires.
SoLEUR Ils furent chargez, entr'autres cho-
fes, d'exhorter ceux de Soleurre, à
laiffer en p<^ix les Réformez qui
s'étoient retirez dans les terres, où
Berne avoit la haute Juftice 5 & à ne
3e:- point inquiéter, pour les obliger
d'aller à la Melfe (4). CesDépurez al-
lèrent à Soleurre: On s'affemblât: On
entendit les accufations que les Ca-
tholiques portoient contre ces huit
perfonnes. On écouta auffi leur
Apologie. Les Députez de Berne
firent tous leurs efforts pour y
mettre la paix \ mais fans fuccès.
Les Seigneurs de Berne:» ayant ouï
le rapport de la négociation infruc-
Qonfli- tueufe de leurs Députez > convo-
Réfo^^" quérent , dans leur Ville pour le
mez à ^4^* Février , une Conférence de
Berne, tous les CantODs Etats Réfor-
mez de la SuilTe , Zurich 5 Bkle ,
Schdjfhoufe ^ S, Gai y Afulhoufe &
Bienne, Les Députez de tous ces
Etats , ayant ouï le rapport des
Seigneurs de Berne, les foins qu'ils
avoienr pris pour la pacification de
cette affaires & le peu de fuccès de
ces foins, ils réfolurent d'aller tous
en-
(rf) MS. Amp, 156. B. Inlb. 3p.
delaSmlfe. Liv. X. 28?
enfemble à Soleurre, pour faire un i 534;
dernier effort auprès de ces gens- Reprlfen^
ià. Ils leur repiéfencérent ^/^^ ^^^'^''^^^^
„ s'étoic paffé dans la première j^^foi-/
5, Conférence des Députez des Can- mez à
„tonSj comme on Ta raporté ci- ^^"^
îjdeffus: & les affûrances favora-
5, bles , que ces Meffieurs avoient
s, données aux Députez de Zt?ri;h
3^ &c de Berne > à Tégard de leurs
>5 Concitoyens Réformeic. Ils leur
35 niirent devant les yeux leur pro-
33 pre Serment de Bourgeoife, qui
35 n'éxigeoit rien des Réformez, qui
3, fût coiitraire à leur Religion : Ils
3, les firent fouvenir , que dans
3y touces les Conférences il aveic
été rcûjours refervé : Qu \\ ne fe-
33 roit fait aucun tort ni violence
3, à aucun des deux partis pour
3, caufe de Religion : Que leurs
33 Concitoyens Réformez 3 qui
3, éioient enfemble à Wicdiisbach,
>3 comptant fur cette promeffe,
3) avoient renoncé volontairement
3> à la Trêve ordoniiéc par les Ar-
3, birres j & que pour avoir la
33 paix 3 ils s'éroient fournis > à la
53 peine qu'on voudrcit leur infli-
jj ger 5 Que là-deffus ils s etoient
5>fépa-
286 H/Jloire de la K(formatim
I 534. 5) réparez : ce qu'ils n'auroient
SoiEUR o point fait 5 s'ils avoient fû qu'on
55 voulut , contre la Foi donnée,
3, les inquiéter fur leur Religion:
mais qu'ils fe feroient toujours
5, tenus étroitement unis, jufqu'à-
55 ce qu'ils en euflent eu une bon-
î5 ne affûrance : Que les Députez.
35 de Berne 5 agiiïant au nom &
de la part de tous les Cantonsj
35 félon la commiffion qu'ils en
5, avoient eue, n'avoient pas vou-
>, lu traiter de l'affaire des huu
,5 Bourgeois 5 qu'on ne leur pro-
35 mit de les laifler négocier auffi
j, pour l'affaire de la Religion 5 ce
3, qu'ils avoient enfin obtenu avec
55 peine 5 après bien des inftances:
3> & qu'après avoir terminé la pré-
o> miére affaire 5 ils n'avoient rien
,3 pu obtenir pour la féconde. Ils
>5 leur repréfentérent, par une
3> telle conduite Mefileurs de So-
3> leurre faifoient affront, non-feu-
5jlementà leurs Alliez de Berne,
9, mais auffi à tous les Cantons &
35 Etats de la Suiffe , qui leur
3J avoient remis le foin de cette né-
55gociation, puis qu'après tant de
3, promeffes folemneiies 3 ils vou-
,5 IqienC
de la Suife. L I v. X. 287
î) loient fc retra£ler. Ils finirent | j 34,
5, en les conjurant , au nom deSoiEUF.
î, tous , de leur permettre de trai-
M ter avec eux pour laffaire de la
Religion 5 (faute de quoi on fe-
roit honte à ceux de cette Ré-
-gence, qui leur avoient fait ces
promeffes , ) & enfin de laifler
;5 les Réformez dans la paifible
pofiefllon de ce qui leur éroit ac-
,3 quis par les Edits 8c les Traitez
, précédens , ou du moins dans
I état où ils étoient avant le fou-
lévemcnt. Mais tous les foins
; de ces bons Pacificateurs furent
5 inutiles (4)
II y eut encore une nouvelle af ^^J^!'
■imblée, où les Cantons de GUris^ rencT^àl
'le Fïibourg & Appenzell ^ fe joi- VlI.Can
^nirent a ceux de Zurich ÔC de5fr- tons.
ic , pour leur aider à finir cette af-
àire. Les Bernois ordonnèrent à
eurs Dépurez , de confuker ceux
les autres Cantons & des Villes ,
Alliées , qui étoient entrez dans
:etrc affaire; & de leur déclarer,
que LL. EE. ne pouvoient pas
•) en bonne coufcience abandonner
,.C€tte
MS. Amp. 137. B. Injîr. 547.
288 Hijloire de la Ké formation
I J 34. V cette affaire , Que s'ils le faifoient
SoLEURo ils ne pourroienc pas s'en laver
j> devant Dieu ni devant les Hom«
,5 mes 5». Mais cette nouvelle Af-
femblée fut auffi inutile que h
précédente: tant Meflîeurs de So-
leurre étoient fixes à ne vouloir
obferver ni Traité, ni promeffe :
far quoi ceux qui étoient enfcm-
ble à Vrtedl'isbacb fe difperférent. Il
arriva de cela> qu'on reprochoit
aux Bernois , & aux autres Can-
tons 3 d avoir beaucoup promis à
ces pauvres gens de Sokurre, mais
qu'on ne Isur avoit rien tenu. Les
Magiftirars ayant chaffé tous ks
Miniftres,contraignirent leurs Bour-
geois d'aller à la Mefle , & em
prifonnérent quelques perfonnes di
Canton^ de forte que non -feule-
ment les huit perfonnes, mais auiï
plufieurs autres furent obligez di
quiter Soleurre {a).
Nnrra- Stntler finit fon récit des trou-
StmUr^ bles de Soleurre , fur l'année 15^4
en ces termes (^): „ On eut encon *
3, de rembarras à Soleurre , à eau
5, des huit Bourgeois , qui avoien '
55 étt
(a) MS. A:rff. 144. B. Injir. 407. & M
(^) 6S-b:&6(5. a.
de la SuijJe^LlY.X. 289
» été exclus: Car quoi que les 1534.
>j quatre premiers , le Banderet Soleur
„ Houg^ le Thréforier S:arl^^ J*^^'
„ Hrnri Vrmkeli , & Vrfs Durr ,
55 euflent fait leur Paix avec la
» Ville de Soleurre > les quatre au-
5j très n'eurent point de part à cette
>5 pacification. On fit divers effais
>j Se diverfes négociations, à leur
>j fujet , tant à Bade , qu'à Burent
55 & en d'autres lieux ^ mais inu-
5) tilement. Ils fe lamcntoient de
yy la perte de leur liberté de Reii-
>j gion j 6c ne vouloient point fè
>5 lailTer conduire , non plus que
55 les autres , qui étoienc exclus.
>, L'emportement de leur zile
5> caufa beaucoup d'incommodité
>5 à la Ville de Berne , qui ne
3> vouloir pas entrer en inimitié ,
pour l'amour d'eux , avec fcs
>5 bons 8d fidèles Alliez de Scleurre.
j> Il furvint encore quelque diffi-
» culté au fujet de Kvkgfictten^ de
» forte que, pendant toute cette
3, année , les deux Villes furent
» dans l'embarras
Je ne fçii par quelle raifon l'Hif- Fermeté
toricn Stettler n'a pas voulu parler quel-
plus clairement. Voici le Corn- ^1^^^'^^^'
7m, IK N men-
290 Hijloire de la Réformation
I S34« mentaire de fa narration. Avant
formez 1^ fête de Pâques, il fe trouva
leurre^ niques Réformez à Soleurre, qui
déclarèrent , c^nils aimer oient mieux
mourir que d'aller a la A^ejfe, On
ne les fît pas mourir. Mais au-
tant valoit-il , puifqu'on leur in-
terdifit tout commerce (^).
les Ké- Quelques Réftgiez de Soleurre ,
fiigle-:^ habituez à Buren , indignez contre
leurre' 9^^^"^^"^"^ l^wrs Concitoyens)
font la traitoient de Traîtres 6c
guerre z d'Hérétiques , leur déclarèrent la
leurs en- guerre en forme, & uférent contr'cux
de vojes de fait. Cela fit grand
bruit. Mefljeurs de Soleurre de-
mandèrent que ces gens-la fuffent
cirez à Bade, devant la Diète des
Cantons. Mais eux répondirent,
qu'ils comparoîrroient devant les
Seigneurs de Berne, fous la pro
teûion defquels ils s'ètoient mis ,
avec offre de mourir fur le champ,
s'il ètoienr coupables. Les Sei-
gneurs de Berne approuvèrent cette
rèponfe , ne voulant pas perdre les
droits de leur Jurifdidion & même
de leur Souveraineté, qui paioiC
foienfi
(4) Hottlng. 667, '
de la Smjfe. Liv. X. 291
foient bleflez par la demande de 15 34.
ceux de Soleurre 5 & ils olFrirent Soleut^
défaire droit à ceux qui le leur re.
demanderoient. Mais en même
tems ils n'approuvèrent point la
conduire de ces Réfugiez de Soleur- ^^^^''"'J^^^
re 5 ( comme en effet elle n^étoit Bernois,
nullement Evangelique,) ils leur
firent dire, de s'abftenir de toute vh^
Icnce & de voje de fait -, quÀUtre»
7nent ils ne les protégeroîent plus ; &C
donnèrent avis de cette réfolution
aux fix autres Cantons Arbitres.
Mais comme les cinq Cantons
Zéiez , & celui de Soleurre ,
qu'ils animoient, ne voulurent pas
fe contenter de cela, & menacé- les p^r-
rent même les Bernois de leur fai-
re la guerre^ufant de divers difcours pren-
également infolens & gioHîers , nentdes
que la graviié de l'Hiftoire ne me "^^f^^'^s
j o • pour
permet pas de rapporter; ces Sei- jear dé-
gncurs crûrent devoir prendre des fcnfe.
mefures pour leur fûreré , en cas
d*artaque. Ils envoyèrent donc des
Députez par tout leur Canton, le
19. Septembre , pour inftruire leurs
Sujets de la vérité , & leur f.ure
connoîcre la Juftice de leur con-
duite, afin de s'alTûrer de leur af-
N z fec
292 tiijiotre de la Kcformatîon
1534, fe<flion & de kur fidélité Ceft
des Inluii (fiions , qui furent don-
nées à ces Dépurez , que j'ai tiré
tout ce qu'on vient de voir.
Uoiive- ^^^^ S^* regarde lafFaire de
inens en- Kriegjfetteny dont parle Stettler,
tre les yoici ce que c'eft ; On fe prépa-
f,7^y^^roit dans ce Village , à célébrer la
fiîjet de f^ête de la Dédicace de fon Eglife le
Krievf prémier Dimanche de Septembre >
qui étoit alors le 6^- du Mois de-
dié à Sair.t Alagnus, Un grand
Nombre de Bourgeois de Soieurre
avoient refclu d'y aller, 8c d'y
faire dire une Meffe , à force ou-
verte. Les Bernois, après avoir
vu l'opiniâtreté des gens de So-
ieurre , contre la Réformation ,
avoient révoqué la permiiïion qu'ils
leur avoient accordée > d'avoir un
Prêtre à KrUg(l(tteru Lors donc
qu'ils apprirent leur deffein, ils
écrivirent aux Magiflrats de So-
ieurre , Qh Us ne le permcttroient ja^
mais. Et d'abord ils mirent des
troupes fur pié , & les logèrent le
long àts frontières 5 pour voir ce
qui fe palTeroit, & être en état
de s'y oppofer. Le Confeil de So-
ieurre
îl delaSuiJfe. Liv. X. 293
leurre leur répondit , Ou il y met- I 534.
'troit ordre lui même > Ôc pour le Sole ui^
coup il tint parole > TAvoyer dé- R^-
icndii daller à Kriegftecten à cette
'Dédicace : ce que les Bernois ayant
appris 5 ils congédièrent leuis crou-
pes. Cependant cette levée de
boiïtliers fit de l'éclat dans la Suii-
fe ) 6c d'abord cinq Cantons Zu-
'ich i Claris , Fribourg y Sthajfbnuje &
Appenxe'l > envoyèrent des Dépu-
rez à Berne 5 pour pacifier cette af-
faire. Les Bernois rendirent rai-
fon de leur conduite à ces Dépu-
iez , & en même rems ih fe plai-
ynii entde leurs.AlliezdeSoleurrejeri
rappellant tout ce qui s'étoit pafîé
într'eux depuis le commencement
des ces troubles (^0-
J ai crû devoir rapporter ici tout
ie fuite ce qui regarde ces trou-
3les de Soleurre , pour n'en pas
'aire à deux fois. J'ai voulu aiififi
apporter un peu au long, tout ce
ijue j'en ai découvert , pour faire
/oir que dans cette rencontre on
ivoit tout-à-fait tort de blâmer les
' îernois. Ils fe virent dans cette
' Dccafion expofcz aux reproches des
N g deux
00 MS. Amj>. 141. B.Inlh". yj9-
294 Hiftoire de la déformation
Ij 34. deux partis. Les Catholiques
Sol EUR trouvcient qu'ils s'y portoient avec
&£. trop de chaleur pour les Réfor-
mez. Les Reftigiez de Solcurre>
ou leurs partifans, trouvoicnt qu'on
ne les avoir pas foutenus affea
fortement, & auroient voulu que
Berne eut d'abord pris les ai1ihes>
ôc déclaré la guerre à Soleurre,
pour l'amour d'eux. Mais c'étoit
fans rai Ton , car les Seigneurs de
Berne ne trouvèrent pas à propos
d'ejfpofer leur Etat aux fuites pé*
rilleufcs d'une guerre pour cette
querelle, après avoir éprouvé, que
les guerres de P.eligion ne font pas
toujours favorables à la bonne
caufe. Ils firent tout ce qu'ils pu-
rent , & tout ce qu*on pouvoit
légirimement exiger d'eux. Au
refte ces troubles de Soleurre ne
furent appaifez qu'en Tannée i
comme nous le verrons dans la
fuite.
1532. IX. Si la Réformation perdit \
G E E- Soleurre y elle gagna du cô:é de
YE» Genevej8c à mefure qu'elle
s'éteignoit dans la prémiére de ces ,
Villes , elle s'avançait dans la fc- i
conde, Il fembloic que le Seigneur
voulut
delà Suife. Liv. X. 29 J
>ulat faire voir dans ces deux 1532.
'illes , &: dans le rrême tems^GEN E-
jue fans fa bénédi<ftion tous ks^'^*
Imoyens humains font inutiles, &:
'que quand il lui plaie 3 il peut
opérer les plus grandes merveilles
fans le fecours des Hommes. En
effet 5 la RéFormation paroifloit
établie à Soleurre fur des fonde-
mens affez folides , pour y devoir
durer à perpétuité. Car qu'y-a-t-il>
parmi les Hommes , fur quoi l'on
doive mieux compter, que fur les
Traitez & les Arrêts des Magit
trats Souverains? Cependant la Ré-
formation y fut éteinte au bout
d'un an ou deux , malgré les ef-
forts des Réformez. A Genève^ au Les ap-
contraire, les apparences n'étoientP^^'^"^^^
rien moins que favorables à la Ré- pg,j"^^_
formation: Le Clergé y étoit puit vorables
fant & fort bigot , & l'ignorance ^.
fort grande. L'Evêque , Pierre de^^-^^^^^^
la B.iume , qui dans la fuite fut
Cardinal 5 y avoit un puiffant
parti. Il étoit d'ailleuis Prince de
cette Ville; Digni.é, qui lui don-»
noitun grand pouvoir. Les mœurs
des Genevois éroicnt fort corrom-
pues; ce qui n'ètoit pas un mer-
K 4 vcilleux
296 Htjloîre de la Kéformation |
1532. vcilleux acheminemenî à la Réfor^ \
G E N E- mation > comme on a vû ci - det î
y £ . fus * , que Bonnivard Je leur repro- 1
choit. Ils étoient perpétuellement
harcelez par le Duc de Savoye ,
ce qui fembloic devoir les éloigner
de penièr à toute autre chofe j
qu à la confervation de leur liber-
té. Ce Prince d'ailleurs étoit puit
fànt 5 appuyé par le Pape Clément
VIÎ. qui étcit fbn ami , par lis
Roi de France > qui éroit fon Ne-
veu, fils de (à fœur Lcuyfe. Gené-
, ve étoit éloignés de tous les Etats
Réformez , entourée de tous côrez
des Sujets du Duc, qui étoient
nnn-fèuhîiiçnt ciinemis de cette
Ville > mais dg plus fouverainement
ignorans U fuperflitieux. Enfin fi
d'un côcé > les Bernois > leurs Al-
liez, les fcliicitoient à permettre
la prédication de îaDotlrine Evan- '
gelique, les Fribourgeois , d'un '
autre côté, s'y oppofoient avec une
véhémence fans égale, jufqu'à les
menacer de rompre l'AHiance qu'ils
avoient avec eux , au cas qu'ils
s'éloignaffent le moins du Monde
de la Religion Romaine au lieu que
les
^Torn.II. Liv, V. p. zBu
de USuife.Llv. X. 297
les Bernois n'employèrent jamais 1532.
de femblables moyens , pour in- Gène-
troduire la RéFormation. Nonobf- ^ e-
tant toutes ces difficultez le Sei*
gneur y fit Ton œuvre» Il faut
voir par quels degrez.
Il faut d'abord fa voir , que, dès Cler-
l'an 15^1. le Clergé fe rendit fort gé fe
odieux aux Genevois , parce que ^^^^^^
dans les embarras, où ils fe trou- Ge-
vérent , & par les dépenfes ex- nevois*
cefTives 5 qu'ils furent obligez de
foûtenir , tant pour fortifier leur
Ville, rebâtir les murailles, & fer-
mer le Fauxbourg de S, Gervais,
que pour payer les fommes qu'ils
dévoient aux Bernois & aux Fri-
bourgeois , dépenfes qui étoient au
delTus de leurs forces, ils ne pûrent
jamais obtenir de leurs Eccléfiafti-
; I ques, qu'ils vouluflent y contribuer
' d'un fol : &: ces pauvres gens
étoient alors tellement aveugles^
par la fuperftition , qu'ils auroient
cru commettre un faciilège , s'ils
avoient entrepris d'obliger leurs
Ecdéfiafti'^ues à fe cottifcr pour le
bien public, comme ils auroient
ctc en droit de le faire. De plus
par les divers endroits , qu'on a
N 5 vus
298 Hïjloire deUR é format ion
1532. vûs dans les livres précédcns, I4
Ge N E- Dodrine Evangslique avoit fait
peu à peu quelques petits progrès
à Genève, mais ce fut principale-
ment Tan 1532, qu'elle y fît de
réclat.
Tumul- Au commencement deTEté^com-
cafion^" parloit d'un Jubilé , que^
de quel- 1^ Pape de voit bien -tôt publier
quesafE-on trouva * en divers endroits d(
elles. 1^ Yjjjg ^ pLicards imprimez
juiîf ^* qu'on y avoit affichez pendant la
' nuit, Tentant le Luthéranifme (com-
me on parloit alors ) On y pr<
mettoit un pardon général aux pé-
cheurs > fans autre condition qoe
celle d'une véritable repentance, &
d'une Foi vi ve en J e s u s-C h r 1 s t.
Le Clergé en fie beaucoup de bruit.
Il y eut même quelque émotion
dans la Ville à cette occafîon , &
quelques coups donnez y parce que
les Prêtres vouloient les arracher>
& les. Proteftans vouloient les en
empêcher. Entr'aurres un Chanoine>
qui étoit Bourgeois de Fribourg )
nomme Pierre Wernli t > ayant
trouvé un jeune Genevois; nommé,
Jean
t Et non VtrLy , ni' Verllch y comme
ijuc^ues François & Allemands ont écrit*
delaSuiffe, Ll V. X. 299
^em GohUs i qui avoir affiché un î 532.
de ces placards , au pilier, devant Ge he-
TEglife Cathédrale de Saint Pierre, ^ ^•
lui donna un fourHet, &; tira fon
cpée > pour l'en fraper : Car à Ge- UnCha-
neve les Chanoines portoient "îj^^^j^^^
pée tout comme les ieculiers j tan-
dis que Icpée fpirituelle, de la
parole de Dieu, étoit un meuble
inconnu chez eux. Coulas tira. au/Ti
fon épée pour fe défendre, & blefla
le Chanoine au bras. Il y eut
aufTj une batterie dans le Bourg de
Four , à la même occafion, où deux
Hommes d'entre les partions du
Clergé furent bleflcz. Le Confeil
de Fribourg fut indigné de cette
infulte , faite à la perfonne facrée
d'un Chanoine leur Bourgeois.
Non conrens d'écrire à Genève ils
y envoyèrent un Député qui fe
plaignit des écrits , qu'on avoit
aflflchez , & de la facilité qu'oa
faifoit paroître pour les nouvelles
opinions. On lui donna toute la
fatisfaflion poflible. On condam-
na Coulas , à une grofle amende »
en faveur du Chanoine VFlvîiU ,
qu'il avoit bleiïéjôc Ton répondit
aux Fiibourgeois , qu'on étoit dans
N 6 une
300 Hîftoîre de la Ke formation
1523. une férieufe réfolation , de vivre
CeIne- comme eux dans Tancienne Reli-
gion. A cela près 3 tout ce va-
carme fe termina amiablement»
Mais pour prévenir des cas pareils,
les Syndics ôc Confeil de Genève
firent publier > à fon de trompe^
défenfe exprefle > fous de greffes
peines, d'entreprendre aucune nou-
veauté 5 & d'afficher aucun écrit >
fans leur permifTion ; ordonnant à
chacun de vivre en paix
Cependant le nombre des Ré-
formez croiffoit parmi la Bour-
geoifie , ôc même parmi les Magif-
trats. Sur la fin du même mois
de Juin , le Confeil fit prier le
Grand Vicaire, de faire prêcher
dans toutes les Paroiffes, & les
Couvens , Çelon la pure Do^rine
contenue dans l'Evangile , fans y mê'
1er aucunes fables y ni inventions^ hu'
marnes , afin qu'ils vccvff.nt tous
dans une parfa ite union comme leurs
Ancêtres avoient vécu {b). Au mois
d'Août on publia les Indulgences
àGe.
MS. Chouët p. 5. Savion III. 71*
Hofet IL Ch. 66.
ib} MS. Choiiet 1. c
delaSm(fe. Liv. X. 30^^-
L Genève de la part du Pape [a], 1532.
Au mois de Septembre. Guillau- Ge n £•
ne Farel vint à Genève , accom-vE»
Dagné d'un autre Miniftrc , fon
Compatriote > u4ntoine faunier , na-
if de Moirant en Dauphiné. Ce
^rand Homme animé d'un zèle
nfatigable pour l'avancement du
légne du Seigneur 5 avoir été avec
>aunier dans un Synode des Val-
ées du Piémont, où l'on fît di-
vers Règlemens , pour remettre
fur un bon pié les Eglifes Apof.
coliques de ces Vallées. Il y fut
2ntr autres ordonné , qu'on feroit
une nouvelle Tradudion Françoifb
de l'Ecriture Sainte , tant de l'An-
cien que du Nouveau Teftament :
& le foin en fut donne à P. Robcrt'^^'^Lf^
Olhetan , parent de Calvin (b). Fa- enfei/
Irel &c Saunier étant à Berne , on ^nent
leur confeilla d'aller à Genève
dans l'efpérance qu'ils y trouve-
roient une grande MoifTon. Ils y
allèrent, munis de Lettres de re-
commandation des Seigneurs de
Berne. D'abord qu'ils y furent
iarrivez, ils fe mirent à parler de
Reli-
(^0 Savion p. 7^ Rofct I. c.
Savion p. 73- Rofcc 111. Ch.I. &
302 Hiftoîrede la Reformât 1 07^ I
I 5 32. Religion à tous ceux qui voulu-
G E N E- rent les écouter \ & furent d'a-
bord fuivis d'un certain nombre
de Bourgeois , qui fouhaitoient
qu'on introduifit parmi eux la Ré-
formation de Berne > quoique du
refte, (comme parlent les deux
Anciens Hiftoriens de Genève )
ils étoient de vie mondaine & dijfo*
lu'éi najant pus encore grande crainte
de Die H (a).
Le bruit de ces difcours étant
venu aux oreilles des Chanoines
&c des Prêtres , ils réfolurent de
s'oppofer , à ces nouveaufez , avec
plus de foin qu'auparavant. Fa^
rel & Saunier furent citez devant
le Confeil. D'abord on les cenfura
vive-
Spanhelm Geneva 'Rejîltma : pag. 41. Ils
fe trompent feulement je penfe , dans .
une petite circonftance, en ce qu'ils di-
fent que Farel vint à Genève à Ton re-
tour de ce Syncde: ce qui ne paroit
^Lîv.X, pas pofTible. ]'ai montré ailleurs ^ que
Ch,VL Farel étoit à Morat le 9. Juillet 1^31. à
Tvonan & à Granfon au mois d'Août. Il
n'a dont pu aller de la aux Vallées , 2S-
fîfter à un Synode , & fe retrouver à
Genève au mois de Septembre. Cepen-
dant je foumets cette Critique au juge- •
ment de gens mieux inftruits que moi. i
(4 Savion 1. c. .p. 75- 74. Rofet UU i
Ch. L
■ ■ ■
delà Suijfe. Liv. X. 30?
vivement, comme des brouillons,
& des gens qui ne venoient que G e n t-
potir excirer des troubles, Farel
iiir-tout 5 qui étoit regardé généra-
lement comme le fléau des Prêtres,
& pour cette raifon fouveraine*
ment haï des bigots. Farci répcn- Tareù
dit , Qu';7 néîoït point un trompette ^^^^"[|
de [édition , ma's Prédicateur de la ^Qq^ç^{[
vérité 5 Qu i/ étoit prêt de facrifier répond
non-feulement toutes Ces peines mais coura-
même fa vie pour cette Doctrine Ce- g^^j^J
lefle ^ Que la Patente , ou la Let*
t e de Créance , dont LL, EE, de
Berne r avaient muni > étoit une prcti^
vc fuffifante de fcn innocence & de
U bonté de fa DoHrine ; & quon n&
potivoit ni le condamner ^ ni le ren^
vojer fans l'entendre , fans fe rendre
coupable de mépris pour Dieu , pour
l'Evangile , & pour les Seigneurs de
Berne. Ce difcours & la vuë de
la Lettre de Créance des Seigneurs
de Berne adoucit Tefprit des Con-
fcillers. Cependant on leur défen-
dit de troubler la tranquilité publique^
par la prédication d'/tne nouvelle DoC"
îïine (4),
A pçinc
(.1) Spanljclm, G en. J?^. p, 43.
304 Hijloîre de la déformation
1532* A pdne ces deux Minières \
Tard ell étoient-ils de retour dans leur Lo-
v!mt lé ' qu'ils furent citez à compa-
Confeil roîrre devant j?^*^w;«(7«^,Grand Vicai-
Epifco- re de l'E vêque , & fon Confeil Epif-
P^^* copal, fous le prétexte d'y rendre
raifon de leur Dodrine 5 mais en
effet pour les faire tomber dans les
embûches qu'on leur y tendoit.
Le Confeil > craignant que les Ec-
cléfiaftiques ne filTtnt quelque coup
mal-taillé, qui pourroit leur faire
perdre la protedlion & Tamitiè des
Seigneurs de Berne , y envoya
deux Syndics, Jean Ballard 3 & Fran»
çots Hugues , qui tirèrent parole
des Eccléfiaftiques > qu il ne feroic
fait aucun mal à ces deux Minif-
tres > au cas qu'ils vouluflent fou-
tenir leur Do(flrine contr'eux, &
qui afTiftérent même à leur AlTem-
blée, afin d'en modérer la vivaci-
té par leur préfence. Cependant
ce n'étoit nullement le delfein de
ces Meflieurs , d'entrer en difpute
avec les Minières , ni de confé-
rer amiablement avec eux 5 com-
me ç'eut été leur devoir. Le Juge
des excès, ou Procureur fifcal de
l'Evêque > dit, tout naïvement.
de la Suijje. Liv. X. 305
Qu'/7 nefa'oit point difputer > & que l ^'^2*
cela ne leur tourneroit point a comp- Genê-
ts i Ufânt de ces mots Latins y fi"^^'
difputctur i îotum nojlrtim inyfierlum
defiruetur : C*eft- à-dire , fi l'on dif-
' l'te 3 tout notre myjiérs va être dé"
jt, lis fs mirent donc à déco-
cher des injures contre Farel , en
lai difant, Hens ça, înéc/jAnt Diahle
^e Fa: et y que vas-tii fa 'tfant ça &
? D'où viens tu ? Ques-tu venu
.ye ici ? Qui t'a fait venir en cette
/> pour la troubler'^, Farel Lur ré- Il y par-
odie courageufe.-nenr, Je ne fuis ^^^^^^^^^
jint Diable. J'annonce Jésus-
Christ crucifié , mort pour nos pé-
chez > & r£jfîîfci:é pour notre jufiifi-
cation 5 fi bien que celui qui croira en
lui j aura la Vie Etcrntlle i mais qui
ne croira point , fera damné, A celle
fin pùs-je envoyé de Dieu y notre bon
J'he Ambaffadeur r/t' Jesus-Christ ,
obligé de prêcher a ceux qui me vou-
dtont ouïr, & ne tache autre thofe fi
non qu'on le reçoive par tout le Mon-
de :& fuis venu en atie Vi le fOur cf»
fayer , s'il y a perfonne , qui me veuille
ouir ; & fuis devant vous , prêt de
rendre raifon de ma Foi y & de ce que
je prêche , s'il vous pLiit de m' ouir
paîiem^
306 Hijloire de la Réformation
^'$32* patiemmejjt y & maintenir ce que je
Ge N E- dirai jufiua. la mort y n ayant autorité
que de Dieu y duquel je fws envoyée
A ces mors , l'un des Juges Ec-
cléfiaftiques fe leva , ufant des
propres exprenTions deCaiphs contre
Jesus-Ch RisT, fe mit à dire en
Latin > Blaiphemavit , non amplius
ind'fgemus tefitbus. Reus efi tnortïs >
c'eit-à-dire, // a blafp berné : nous
n avons plus befoln de témoins : Il ejl
coupable de mort. Puis il s'écria en
bon François, fuivant Tufage de
Genève > au Rhône^ au Rhône : (pour |i
dire , qu'il faloit le jetter dans le I
Rhône:) ajoutant 3 // vaux mieux
que ce méchant Luther meure , que i
de t) aubier tout le Peuple, Farel lui I
répondit • Parle les Paroles de Dieuy
& non de Caiphe, Là-deffus ils j
mirent tous à crier , tué , tue ce '
Il y efi: Luther i lui crachèrent au vifage,
maltrai- Je chargèrent d'injures, & lui don-
courtrif "^''^"^ quelques coups de poing,
que d'ê- Enfuitejfous prétexte de vouloir dé*!
tre tué. libérer furfon fujet, ils le firent reti-
rer fur une petite galerie:, au bout
de laquelle étoit un des Serviteurs
du Grand Vicaire, nommé François
Civirip armé d'une arquebuze, qu'il
lacÙA
delà Suijje. Liv. X. 307
Acha contre Farel: mais heureufc- i 532*
lient il ne lui fît aucun mal. L'unGENE-
ies Syndics , Guillaume Hugues^Ç\ii v £•
'ort fâché d'un tel excès commis
contre la parole donnée, mais Tau-
:re , jean EalUrd, partifan du Cler-
gé ne s'en foucioit pas beaucoup.
Enfin, par Arrêt du Confeil Epif- i] efl
:cpalî il fut ordonné à Farel & chafle
à Saunier , de vuidcr incclTamment f^^^^^i^
le nvec
i^Ia Ville, fous peine de prifon. Ils Saunier,
fe retiré ent donc , efcorrez , jut
^ ques à quelque diflance , par plu-
lueurs Citoyens , qui avoient goû:é
leur Do^rine & retournèrent prê-
cher an Pays de Vaud-i particuliè-
rement à Orbe 6c à Granfon^.
X. Mais Genève ne demeura pas
Icng-tems fans Do(fleur. Le Dau-
pliiné lui en envoya un tioifîéme
nommé Froment , dont le nom ,
(comme le remarque agréablement
Spanheim f y) iemble avoir été def.
tiné
Savion III. p. 74- 7^- RofetlII. Ch.
l. Spanh. 1. c. 44. 45. Stultet 382, 385.
t Pag. 4^.47. Il fait là allufion à un
autre jeune Homme , nommé Fm menti tir,
qiii ilans le lllmc. Siècle, prêcha le pré,
mier l'Fvangile dans les Qiiartiers de
VKthlofùej cju'i font au bord de la Mer
RoiiL^^c. Voy. Socratc Liv. I. Ch. XIX,
308 Hijloire de la Réformation ,
Ï532.tiné à répandre TEvangile. Ce \
Ge NE- jeune Homme avoit été, pendant
quelques années. Auditeur & Dif-
ciple de Farel > le Compagnon de
fes voyages , & fouvent auffi des
perfScutions qu'il fouffroic. Fard,
connoiflant fa pieté & fon zèle in-
trépide, le jugea très-propre pour
arrofer & augmenter la femcnce
de la Parole de Dieu , qu il avoit
jettée dans Genève. Il l'exhorta
d'y aller , lui faifant remarquer ,
que comme il étoic peu connua &
que fon nom n'avoit point encore
fait de bruit dans le monde, il y
pourroit travailler en fureté , éc
que du refte il devoit fe repofer
Tromem proteftion de Dieu, JVo-
va à Ge- f^ï^nt s'en defFendit quelque tems >
nkve, ne fe croiant pas affez de force >
pour entreprendre avec fuccès un
Ouvrage de cette importance. Mais
enfin > prefle par Farel , il fe laifla
perfuader, & fe rendit à Genève
au mois de Novembre. Il s'a-
dreffa d'abord à ceux des Genevois,
que Farel lui avoit indiquez com-
me de bons Réformez. Mais n'a-
yant trouvé chez eux que de la
froideur, parce que les menaces
de U Suide. Liv. X. 309
^ les dangers avoient ralenti &IÎ32.
.refque éteint leur zèle pour la G e n e-
ériré, il fe trouva dans un grand ^ ^•
;mbarras , & ne croyant pas fa
ie en fureté 5 il penfa tout de
)on à retirer. Mais comme il
ortoi: de la Ville , il fe fentit fi for-
ement preffé en fa confcience 3 d'y
entrer , qu'il ne pût refifter à ce
nouvement. Ainfi de retour dans
a V'illcjil chercha par quels moyens
ecrets & détournez il pourroit
infinuër dans les efprits fans bruit
fans obftade (4).
Après avoir bien délibéré il lui
int dans l'efprir, d'imiter Texem-
Ic de Farel fon Maître, qui s'éroic
iitroduit à Aigle fous le nom
l un Maître d*Ecole. Il mit donc
les affiches par la Ville % pour
vertir le Public, qu'il vouloit ap-
)rendre à grands & petits à lire
\: à écrire en François dans un
nois 5 & quelques autres chofes.
Vinfî foQs prétexte d'enfeigner à
ire, & à écrire, 8c l'Arithmétique, Il s'y
'■<. de donner des confeils pour la ^^""f, ,
ante, il s attira bien-tôt un grand Ire d E-
lombre de Difciplesjnon-feulement cok,&
de
('0 Spanheim47. Savion III. 7S>
3IO HiJloÎYe de U 'R^éformation
1532. la Jeuneiïe > mais des perfon-
y fait nés âgées , à qui il enfeignoit en
du fruit, rnérne tems les véricez Evajigeli-
ques. De cette manière il y fît
beaucoup de fruit , parce que ceux
qui prenoient goût à fa Doctrine,
y amenoient leurs parens , leurs
amis, & les gens de leur connoif-
fance , Hommes & Femmes. Leur
nombre Te n.ultiplioit tous les
jours > quoi qu'on en murmurât
beaucoup par la Ville ; & malgré
les oppofitions des Catholiques ,
dont le zèle , bigot & ignorant,
alloit jufqu'à dire que Us Fem-mes
qui prenoient goût à cette Doiflri-
ne, étoient enforcelées {a). Se? inf-
truftions furent heureufement fou-
tenuës , par un Corddier , nom-
mé Ckrijîoph'e Boqujt , qui étoit
Eft fe- Procédant dans l'Ame , &: qui,
condé prêchant l'Avent à Genève , ufoit
par \q d'une grande modération dans fes
Sermons , en forte que Tes Audi-
^uef, teurs, au fortir de fes Sermons ,,
alloient en grand nombre entendre
Froment , qui prêchoic dans un<
Sale {h). Le Peuple devenoit par
i:
ia) Savion III. 7^. y6. Rofet III. i.
(^)Savionl. c p. 7(5. Rofet lU- Ch. j
Spanh. 48.
de U Suiffe, L I V. X.
là plus éclairé. Les Réformez con- | 532.
feroient & difputoient entr'eux. g t n £-
Ils lifoient divers petits livres de ve.
Controverfe qu*on répandoit de
tous cô és ; mais ils s'attachoient
particulièrement à la lerture de l'E-
criture Sainte pour dillinguer, dans
la Religion , ce qui venoit véri-
tablement de Dieu , d'avec les
Dogmes 5 & les pratiques 5 ou
plûîôt les abus , que les Hommes
y avoient ajoiuez (4).
Il ne faut pas oublier ici une Conver-
avanture des plus fînguliéres, qui ^^^jj^^^/
arriva dans ce tems - là 5 & qui fe d'une
fait bien voir la puiffance de Dieu, Femme
pour tourner les cœurs comme il ^^§^^^^'
lui plait> & quand il lui plait.
Les Prêtres avoient fait courir le
bruit , & à Genève & par tout
ailleurs que les Prédicateurs de
la nouvelle Doftrine étoient tout
autant de Magiciens , qui avoient
des Charretées de Diables à leuc
Commandement , par lefquels ils
enforceloient les oreilles &c les ef^
prits de leurs Audiceurs. Ce bruit,
quelque impertinent qu'il fût ,
avoic
(tf) MS. Choul't. 4.
♦ Voyez Livre XIV.
f
3 1 2 Hîjlûire de la Re formation I
1532. avoit vivement frr.ppé une Dame 1
Ge N E- de Genève nommée Claudine , ex- \
^ traordinairement bigote : de ma-
nière que > règardant Froment ,
comme un Maîae Enchanteur, elle
réCfta long tems aux follicirations
de fes Amies , qui vouloient l'en-
gager à l'aller écouter, ne fût-ce
que par curiofité. Enfin pourtant
elle (e laifla g.igner, & fe réfolut
à y aller, mais m.unie de toutes
les armes fpirituelles qu'elle jugea
néceiTaires , pour rcpouffer les ef-
forts du prérendu Enchanteur, je
veux dire chargée de Croix , des
Reliques y^gnus Dei 5 d'autres
babioles de cetîe nature. Ainfi
équipée elle entre dans la Sale où
prêchoit Froment. Elle fe place
vis-à-vis de lui , fait deux ou trois
fîgnes de Croix 5 & (è recomman-
de ardemment à Dieu & à toiis
les Saints , pour n'être point fé-
duite. Elle écoute Froment 5 &
d'abord elle entre dans un éton-
• nement extraordinaire , ne trou-
vant rien dans fa Doiftrine , qui
fentit le grimoire. Après le Ser-
mon fini elle demande a Froment»
s'il avoit bien yi'êché la vérité ? Il
lui
delaSuiJfe, Liv. X, 313
lui répondit, Qu'i/ étoh prêt a /«il 532.
r^rouver ce qu'il avoir prêché* Alaisy G e n £-
lui dit ellc>/^ prouverez vous par
l'Evangile^ Oui, répondit -il. La
A/efe (repliqua-t-elle, ) riefi-elle
ùas fondée en l'Ecriture ? Froment
l alTûra que non , & qu'on n'y en
trouvoit pas même le nom, non
plus que la chofe. Enfin elle lui
. demanda ? fi le livre, dont il uvoit
tire fon texte, etoit le Nouveau 7 ef-
rament ? Froment lui ayant dit »
qu'oui, elle le prie de le lui prêter
' pour le lire chez elle. Elle s'en-
ferme trois joors dans fa chambre,
& ne fait autre chofe que lire ce
faint Livre , mangeant fort peu,
pour ne point perdre de tems. A
mefure qu'elle lit, elle fe fent faific
d'admiration, & fon ame fe remplit
de zèle. Elle pleure à chaudes lar-
mes. Elle prie : Elle reconnoît fon
égarement , ÔC décefte fa fuperfti-
cion. Au bout de trois jours elle
Fait venir chez elle Froment, cet
Homme qu'elle avoit auparavant
regardé avec tant d'horreur. Elle
lui demande une Conférence , &
après l'avoir entendu encore une
fois, elle cmbralTe fur le champ
Il Jom./r. O la
3 1 4 Hîjloirc de la K^êformatlon
1532. la Dodrine Evangelique, béniffant
Ge N Dieu de tout ibn cœur, de l'avoir
éclairée. Elle fait plus. Elle gagna
fon maii , qui n'écoic pas moins
bigot qu'elle l'avoit été : 6c gagna
aufli quelques- unes de fes paren-
tes. Et dans la fuite elle rendit
toutes fortes d'offices de Charité
Chrétienne aux fidèles, qui ércient
fugitifs pour caufe de Religion.
Quelques années après cette ame
fîmpls 5 8c fans malice, eut le mal-
heur de fe laiffer féduire par quel-
ques Anabaptiftes > qui s'étoienc
gliflez dans Genève ; mais Dieu
lui fit encore la grâce de rccon-
noitre cette nouvelle efpéce d'er-
reur , ô: d'en fortir
Science Dans le même tems un Citoien
dinakc" Genève , zclé Réformé , nommé
d'une pe Claude Bernard y avoit une petite fille
Hce fiJle de fept à huit ans > qui étoit un
prodige de -connoiffance. Elle avoit
une intelligence extraordinaire de
l'Ecriture fainte, & fort au defTus
de fon âge , ce qui étoit d'autant
plus admitrible, que dans ce tems-
là l'intelligence de l'Ecriture Sainte
étoit
^ Spanh, 1. c. pac;. 49. ^o. Vita Farei
use. apud Hottin^T6^y,6'{S.
Ïdcla Suife. Lrv. X. 3IS
étoit une chofe extrêmement rare. I532.
Elle fâifoic de tems en tems aux
■ Prêtres , fur divers articles de l'E-
[•criture > des queftions, qui les
î' confondoienc : & ces honnêtes
I gens , pour couvrir leur honte,
publîoienc qu'elle étoit pofledée.
; ' Des Ambafladeurs de France., paffaac
. ' par Genève > eurent la curiolité de
' ^voir cette enfant. Ils eurent avec
• \ elle une ConVerfation de trois heu-
^ ■ res , 8c la quittèrent remplis d ad-
miration *.
i f Cependant les difputes des Ré- î^^ou-
^ formez de Genève, avec leurs Con- ^^^j^^^^jl^^s
( : citoyens Catholiques , s'êchaufé- à l'occa-
V rent extraordinairement , de forte
I qu'il en naifloic prefque tous les [^^
< jours quelque querelle. Il en ar- religion
riva une le dernier jour de cette
même année > qui faillit à avoir
des fuites très - fâcheufes. Quel-
ques Réformez 5 buvant avec un
Prêtre j Vicaire de l'Eglife de la
Alaguelaine» entrèrent eiî difpute
avec lui , fur quelques articles de
la Dodrine de Froment. Le Vi-^
caixe s'obligea de prouver la fiar:^^ '
O z par
* Uottln^. ^^8. ex Hiftor. RCform. Gcii.
Turittt.MSC.
3 1 6 Hiftoire de la K(formation
I J32. par la Sainte Ecriture. On prit
Ge n £. jour pour c^la chez lui, où fe trou-
vérent plufieurs autres Prêtres.
Mais le Vicaire , au lieu d appor-»
ter la Bible , comme il l'avoit pro-
mis , fe contenta de produire un
Théologien Scholaftique 5 nomme
Nicolas De Lyta^ qui a fait des glo-
fes fur la Bible. Les Réformez fe
moquèrent de cette preuve. On s'è-
chaufa là-deffus de part 5c d'autre.
On en vint aux injures. Un des
Prêtres mit Tépée à la main. Quel-
cjues autres montèrent au Clocher,
éc fonnérent le Tocfin. Plufieurs
coururent aux armes. Les Ecclé-
fiaftiques & les Catholiques s af-
femblérent dans la roë des Chanoï^
nés 5 & les Réformez dans la place
de la Magdelainc. Mais les Syndics
& le Lieutenant y étant accou-
rus 5 & ayant fait emprifonner un
Prêtre , 8c 3. des plus mutins d'en-
tre les Catholiques , qui avoient
été les agreffeurs > le défordre fut
appaifé *.
Le foir , le Confeil s étant At
femblé , fit défenfe aux deux par-
tis > de s attaquer , de quelque
manié-
Rofit III. Ch- 4. MS. Chouët4-
delà Sniffè. Liv. X. 317
manière que ce fut-, ordonna que I 532»
Froment cefTeroit de prêcher & for- Gens-
tiroic de la Ville, qu'on fevE-
concenreroit du Prédicateur ordi-
naire qui étoit le Ccrdelier > dont
j'ai déjà parlé , nommé Chnftophle
Boqtiet ou Bouquet; Il fut dit au/ïl,
qu'on prieroic le Grand Vicaire >
de punir les Prêtres, qui avoient
caule le défordre, & fonné le Toc-
fin , & de prendre des mcfures ,
pour avoir dans toutes les Paroif.
Tes de bons Prédicateurs , qui prê-
chaffent la Parole de Dieu dans
toute fa pureté {a),
XI. Les Réformez, perfuadez de I 53 J;
bonté de leur caufè & irritez de
infulte que les Prêtres venoient
leur faire, proreftérent , quand
- jugement du Confeil leur fut
Drononcé^ Qi£ils iroient ouïr la pa»
oie de Dieu par tout ou ils pourroicnîz
')ue perfonne nwvoit droit de la leur
Achér. Us exhortèrent Froment à
ic point fe rebuter; & le lende-
nain, premier jour de Tannée 153 g.
.près le Sermon de Bouquet , ils
lièrent chez Froment en fi grand Froment
1 ombre , que la Sale où il prê-
O 3 choie
(.*) iMS. Chouu iù^
3 1 8 Hiftoïre de U déformation
j ^^3. choit, ne pouvant contenir tous
place du ceux qui y venoient, ils l'obligé-
marché. rent daller à la place du mar-
llcfta^*^^' nommée le Moiard , qui étoit
tion du pïès de là 5 & on h fit monter
Peuple, fur le banc d'une revendeufc 5 le
Peuple lui criant 3 Prêchez nous la
J^arole de Dieu : ce qu'il fit. Tan-
dis qu'il préchoir, le Confeil, aver-
ti de cette nouveauté , s'afTembla
inceflammentj &C envoya le Sautier>
pour lui ordonner de fe taire. Fro-
ment répondit, // vaut mieux obéir
i Dieu quaux Hommes'^ & conti-
nua fon Sermon. Le Confeil irri-
té envoia des gens armez pour le
fâiCr 5 mais il fut fauvé par quel-
ques-uns de fes Auditeurs : & quel-
que tems après , il fortit de Ge-
nève 5 ne pouvant plus y demeu-
rer, à caufe des dangers oii il étoit
Il çÇt^y^^oïi par le^ Edirs : Car le fe-
obligé cond de Janvier le Confeil défen*
te^r^Ge' ^'^ prêcher fans permifTion des
neve. ' Supérieurs ^ fous peine aux Con-
trevenans > de trois traits de cor-
de pour la préniiere fois {a). Fro-
ment s'en alla dans fon Eglife d
zonm
(a) Id. p.^. Savionlll.76.77. RofcC III.
Ch.S-Spanh.l. c. p. 54^
1 delaSuijfe. Liv. X. 319
h;onan , où il étoit Miniftre de- j 5 3 j
■puis un an ou deux (4). G e n e
1 Dans ce tems-là les deux partis v e.
Ictoient à peu près égaux à Gené-
Ivc j foit parmi la Bourgeoifie, foit
dans le Confeii. Mais le parti Ca-
tholique paroiiToit le plus fore 5
étant appuié par TEvêque , par le
Clergé, & par les Fribourgeois ,
au lieu que les Réformez n'éroienc
foucenus que par les Bernoii. En
effet les Ffibourgeois ne laiffoient
perdre aucune occâfion d'exercer
leur zèle à Genève , pour y fou-
tenir la vieille Religion. Le Cor-
delier Boquet , que les Syndic?
avoient trouvé à propos de retenir
pour feul Prédicateur 5 écoit Pro-
teftant dans l'Ame , comme je l'ai
dé/1 remarqué. Il avoir prêché l'A-
yent , & s'éroit fi bien ménagé dès
le commencement , que les deux
partis l'alloient également écouter.
Mais après le départ de Froment,
il girda moins de mefures. Il
î'expiiqua plus ouvertement fur
•ia MclTe, far le Ciilcc des Saints
8cc, ce qui le rendit odieux aux
O 4 Ecclé-
( ') Spanh. l. c. il met Jumatum , mai^
- i-'Ilfins Joute une fuLicc d'iinpiclilon.
320 Hifioire de la Reformatmi
ï533.Eccléfiaftiques> & câufi de gran-
GïNE-des divifions. Cependant leCon-
feil ordonna qu'il prêcheroic en-
core k Carême, & qu'il feroit payé
aux dépens des Curez des fept Pa-
Trihourg roiflcs. Maîs les Fribourgcois la-
s oppofe y^j^j appris 5 en firent tant de bruit,
ment à ^ P^*" ""^ Députation de fix Per-
laRéfor- fonnes de leur Confeil > & par
mation Lettre menaçante, qu'on trou-
néve. ^ propos > pour bien de paix,
de laiffer aller Boquet ^ en d'autres
endroits , ou il étoit appelle pour
prêcher le Carême. On le con-
gédia donc , & on lui fit un pré-
. fent fort honnête. Les Députez
de Fribourg arrivez à Genève > le
23 e- de Février 5 avoient déclaré
aux Genevois : Q^ue s'ils vouloient fe
faire Luthériens^ (c'étoit leur ftyle)
Fribourg r en onceroit à leur Alliancet
Les Genevois leur répondirent 5
Q^ils vouloient vivre comme leurs
préde^effeurs : Qu'ils faifoient tout leur
poffîlfle pour empêcher rintrodu^ion
de la nouvelle Do^rine^ & même qu ils
avoient exhorte le Ficaire de l'Evêque^
à pourfuivre cette affaire vivement^
parce quelle étoit Eccléfiaftique , & de
fin reffort. Les Députez de Fri-
bourg
ve.
delaSuifetl^. X. 321
bourg ayant reçu cette réponfes'en i 533,
retournèrent fatisfaits {a), G e n i-
Au mois de May on permit Tim^ v e.
prenfion de la Bible en François :
mais on défendit d'imprimer les
livres de Controverfejécrits en cette
Langue , quoique les Bernois euf-
fent demandé qu'on le permit*.
Environ ce tems-làj Froment^^^
. ayant entrepris de retourner à Oc-ç^^^^''^^,^
neve, y fut en grand danger de la primez
vie. Etant fur le Pont du Rhône, à Gené-
il rencontra une proceffion 3 avec
une grande troupe de Prêtres , qui
voulurent l'obliger à fê mettre à
genoux devant leur Croix. Il le
refufa. Là-deffus une troupe de
Femmes bigottes 5 qui fuivoient
la proccfTionj plus animées que les
Prêtres 3 lui fauta dcffus , Se vou-
lut le jetter dans le Rhône j mais
il fut garanti par quelques Réfor-
mez, qui fe trouvèrent là heureu-
fement , Se qui le tirèrent de leurs
mains {b),
La difperfion des Paf^eurs n'en-
traîna point celle du Troupeau. Les
O 5 Ré.
(<) Savion 1. c. Rofit IIL C. ^. Sj>anh.<;4.
I* MS. Chouer.
322 H}J}oire de la BJformatiûn
1533» Réformez de Genève , quoique pri-
des ^*^"f ^ Dodeurs, ne laiffoient pas
fem- ^'^^'^ affemblècs fecretes ,
bices. n-vais de nuit , où les plus habiles
lifoient 1 Ecriture Sainte , l expli-
quoient le mieux qu'ils pouvoient,
faifoient des prières > & autres
A(ftes de pieté. Quand il venoit
quelque Etranger , bien verfé dans.i|i"
la connoiiïance de FEcriture , ils^l",
le reccvoient . &; i ecoutoi^^nt avec
flvidiré. Ils érablirent même en-
tr'eiix une bourfe , pour le foula-
gement des pauvres de leur petite
Troupe, tant Etrangers que Boijr-
geois. Un jour entr'autres , ils
s'aiïcmblérent hors de la Ville ,
dans un jardin du P(é l'Evêqtte >
■ où, après les exercices ordinaircs> ^
ils communièrent entr'eux, & ^* ^1
renr la Cène pour la prèmière fois.
Ils choifirent pour la leur diftribuer,
un Bonnc:ier nommé Jenn Gueriny
quiètoit plein de zUe & de pieté, &
qui pour un Arrifan, entendoic
bien l'Ecriture Sainte. Le Confeilj
ayant eu avis de ce qui s'ètoic
pafle,& prefTè par les Catholiques,
bannit G" /im'// 5 qui fe retira zMoNt-
le'utrd^ où il exerça quelque tems
le
de USuilJe. Liv. X. 323"
le Sr. Miniftére, & de là il pafla 1533.
dans le Comté de NtushutA^ où il G e x £-
far aiifli reçu Minifire , & il y vE.
moiirut Tan 1549 (^).
Les Réformez firent en même
tems revenir Farel j mais ayant
auiïi été maltraicé > fans aucun:
i égard pour (a Patente de Berne, il
!fuc obligé de Te retirer {b).
Ces mauvais traitemens ne fai-
. foient pourtant pas perdre courage
aux Reformez ^ ou du moins ils
n'empéchoient pas , que de tems
en rems ils ne filfent quelque coup •
d'ècht. Un jour entr'autres urt
Jacobin prêchant dans le Couvent
de Ton Ordre , nommé Palais ^ dé-
clama horriblement contre- ceux
cu'il appel! oit Luthériens, Il fe .
trouva-h un jeune Homme , nom-
'iné^^Piirre Robe t Olivetaii y parent
de Cal'^n, Se natif, comrne lui, de
jSJojorh en Picardie, qui étoit chez '
un Genevois Proreftant , nommé
Jean Chdutcmps y en qnaliré de Pré-
cepteur de Tes enfans. Il ne put
fouffrir les criaillerics du Jacobin,
te le réfuta publiquement/ Sa har-
O 6 diclTe
(,0 Id. îbU. MS. Cho.ict. Hotting. 66'j,
Ku) MS.ChoïKC.
324 Hiftûïre de la Ké formation
I S33« cl^effe excita un grand trouble dans
Ge N E" rAfleniblétr , & lui auroit coûté la-
vie 5 s'il n'eut été fauve par les
foins de Clavtd& Bernard y & de Jean
Chante mps fon Maitre , qui le ti-
rèrent de bonne heure d'entre les
mains des Moines , & le mirent
Aventu- fureté. Il fut condam-
res de né, par le Confeil y au bannifle-
Hveta?' ^ Neuchatel,.
où il fit imprimer la Bible en Fran-
çois 5 Tan 1535. Enfuite il fut'
Rome l'an 1538. où on Tempoi-
: fonna , il fut emporté par la force: '
du poifon, 8c mourut à Ferrare (a).
Peu après le bannilTement d'O-
livctan > au mois de Mars j uit
Etranger» qui demcuroit à Genè-
ve depuis un an , s'avifa de dire
une fois dans une grande com-
pagnie, que tous ceux qui ?lloient
à la MeiTe étoientdes Idolatres>ôc
des mauvais Chrétiens. Il n'ea
falut pas d'avantage, pour le chat
fer de la Ville. Le Confeil le bannit
auffij avec défenfe d y ren'rer ja»
mais 5 fous peine de la vie (^).
Quelques Bourgeois > des plus
zèles
(m) Savîon III. 77. 78. Spanh,^C>
W SavÎQn ], c»
delaSuife. Liv.X. 32 J
zelez pour la Réformation 5 voyant j j 3 5;
l'état des affaires de la Religion G e n
à Genève allèrent à Berne;, fevE.
plaindre de la conduite du Con-
feil> & implorèrent la protection
de l'Etat. Les Seigneurs de Ber- lettre
ne écrivirent aux Genevois uneLet- ^"1^^"'
tre extrêmement forte fur ce qu'ils Berne à
avoient infulcé Farel » nonobftant celui de
>, la Lettre de Créance, qu*il avoit Genève
d'eux j ^'ils avoient chalfé Gué"
>, fin , & maltraité tous ceux qui
entreprenoient d'y aller piêcher
l'Evangile ; enfin fur le peu de
» caà, qu'ils avoient fait de leurs
„ prières > pour l'impre/Tion des
5> livres dcControverfe , concluant,
>, que fi G^îneve vculoit vivre
avec eux en bonne intelligence^
5, on dtvoit pcrmerrre la piédica-
5jtion de l'Evargile (rf) „.*
Cette Lettre, qui arriva à Gene-
ve le 25e. Mars , fuc l'occafion
d'un vacaime terrible dans cette
Ville. Le lendemain plus de deux
cent Catholiques , animez par
les Prêtres 5 alléient à l'Hôtel de
Viile>
(<») MS. Chouêt, Savl'on 1. c. Bened. Tur- '
lin, HilK Rcf Gcnev. apud Scidtu. An-
JEvangcl. p, lu. H,
32 6 H'îjîoire de U Réformaticn
Ville, demander tumultuairemcnî
Ge N E- juftice 5 contre ceux qui Tavoient
foUicitée. LeConfeil renvoia cette
troupe tumultueufe , &c leur or-
donna de fe tenir en repos , les
affûrant qu'on ne vouloir pas fc
départir de la Religion de leur"
Pérès (^). Le Confeil fit appelle
les Réformez , qui étoient cauft
que les Seigneurs de Berne avoien
écrit cetteLcrtre , les en cenfura 5
leur fit défenfe, de leur plus rie
écrire des affaires delà Ville (^).
Mais ces foins du Confeil ne fu
rent pas fuffifans , pour appaifec
la fëdition. Comme le Grand Con-
feil des Deux Cents devoit s'aC-
fembler le Vendredi > 2 8^- Mars»
pour délibérer fur les affaires de la
Religion > la nuit du Jeudi au
Vendredi î les Catholiques prirent,
ks armes j & s'afTembléient chez
le Grand Vicaire, où , animez par
les Eccléfiaftiques, ils s'engagèrent,/
par un Serment folennel, de faire pé-
rir les Luthériens {c). Le jour étant
venu>
W MS. Chonet p. 6. Spanh, <p. Rojjgt
. III. Ch. 9.
■ W Ko/è/lII.Ch.iO..
(c; Sj'anh. Le.
IdelaSmjfc. LîV.X. 327
Ivenu 5 plus de fept cents Hommes i 53
armez, ayant à leur tète les Cha- CoW.^-
noines ? & d'autres Prêtres au/li des
armez , allèrent à TEglife de *Sf. Catholi-
JP/Vrre pour faire former le Tocfin. cont/c
Tkm f 'and.ly Ciroyen d'une ho- les Ré~
nête famille , zèlé^pour le bien de^^^^-^*
la Patrie , 8c qui Tui avoit rendu
de grands fervices , voulut s'op-
pofer à cette fédirion ; & pour cal-
mer la fureur des Catholiques , il
leur repréfenra les funeftes fuites
de ces difTepfons. Mais fes foins
charitables furent mal recompen-
fez. Il n'en remporta que des in- Sédition
jures & des coups: on le bleffa J^^^^.^^^*
d'un coup d'épée & il auroit été
malTacré fur la phce, s'il ne s'étoic
promprement fauvé. D'autre cô-
ré. Les Réformez , avertis fecre-
tement par un bon Prêtre , du
complot tramé contr'eux s'étoienc
flffemblez en petit nombre, ( car
ils n'étoient au plus que 60.) dans
la maifon d*un Citoyen , nommé
Ni.olus Baudichon , de it Adïifon
Neuve , où ils avoient déjà accou-
tumé de s'aiïcmbler 5 pour faire
leurs exercices de picré : De là ils ^
ailéienc dans la ruë da ^.lem.ws ,
ou
328 Hïjlûîre ae la Reformat ion
1533.011 ils demeurèrent la plupart,
Gene-& s'y préparèrent à fe bien def-
fendre contre leurs ennewïis , im-
plorant le fecours de Dieu. Le
Confeil > averti de cette émotion,
envoia inceffamment deux Syndics
dans TEglife de St, Pierre , pour
faire retirer les'^ Catholiques , ôc
deux autres à la ruë des Allemans
pour faire la même chofeauxRé
formez, mais inutilement. Les Ca
tholiques , ayant appris que le
autres étoient en armes > & ani
mez par les Prêtres , firent fonne.
le Tocfin , & s affemblérent au Mo
lard > où ils furent bien-tôt fuivis
par un grand nombre d'autres
qui fe voyoknt authoriiez par 1
plupart des Syndics , qui s'y
trouvèrent parmi eux. Ils firent
venir de l'Artillerie, pour battre la
Mâifbn de Baudichon, dans la pen
fee que les Réformez y étoient en-
core. Ils s'avancèrent pour les at-
taquer, ôc dans la fureur qui les
animoit , ils firent fermer ks por-
tes de la Ville, afin qu'il n'en pût
pas échapper un feul. Ils alloient
^'autant plus hardiment à certe ex-
pédition , ^ue TEvêque leur avoit
donna
de la Suijfe. Liv. X. 329
lonné Carte blanche^ comme on
jarloic alors ^ c'eft-à dire un blancGENjs-
Igné , pour les alTûrer qu'il ap- v£.
prouveroit tout ce qu'ils feroient
contre les Ennemis de la Religion
Carholique. On allure que les feuls
Prêcres armez faifoient le nom-
bre des 500. Hommes , mais je
crains bien qu'il n'y ait de l'er-
reur dans ce compte. Quoi qu'il
en foit , quelque grand que fut
leur nombre, ils n'ofëient pas en-
core attaquer les Réformez, ^ at-
tendirent quelques autres Com-
pagnies de gens armez, dont l'une
étoit conduite par un Chanoine >
nommé De Fegia , qui vouloir met-
tre le feu lui-même à la maifon >
cil les Réformez s'étoient affem-
blez. Le dernier Capitaine étant
venu, il attaqua l'un des Syndics*
Jean Phil.ppe , Capitaine de la Ville,
qui pafToit pour Lurhérien , Se la
jetta par terre. Mais les Soldats
de Jean Philippe prirent îe parti de
leur Capitaine , bltfférent fon ag-
grefleur , & di/Tipérent fa Com-
pagnie. Cependant les Réformez,
renforcez par un nombre confidc-
ruble de Bourgeois jufqu à 200*
Hom-
330 Hiftûire de la Kéformation
I Hommes , s'étoient rangez en ba-
Ge NE- taille 5 avoient repris courage, 8c
vE. s'étoient mis à genoux pour prier
Dieu > s^attcndant d'être attaquez.
En effet Is Chanoine De Vtgia s'a-
vançi pour les attaquer, mais
ayant appris que Tautre Capitai-
ne 5 fur qui il comptoit , s etoit
retiré , il perdit ceurage & re-
brouffa vers le Molard.
Jamais Genève ne fe vit dans
un plus grand danger , & il fem-
bloit qu'il s'alloit faire un maffa-
cre horrible des deux cotez. Car
jfi les Catholiques étoient furieux,
les Réformez écoient réfolus à
vendre chèrement leur vie. L'air
rentiffoit des cris horribles > que
poulToient les Prêtres , ( comme
des Bacchantes en fureur , ) & des
lamentations d'une infinité de gens,
affligez de voir le Pére prêt à
égorger fon Fils ^ le Frère altéré du
Sang de fon Frère , ôc les parens
de celui de leurs parens. Enfin
racharnement croit venu à un tel
point, que nul n'ofoit parhr d'ac-
commodement 5c de paix , de i
peut d'être traité comme Pierre i
Vandel & de paffsr pour Hérétr- '
que.
deU Suijfe, Liv. X. 3?I
que. Heureufement la Providence I 5 3
de Dieu amena-là quelques honê- Gene-
îcs Négoîians de Fribourg , quî^^E.
voyant avec douleur ce qui fe paf-
foit, s emprelTérent à appaifer ce
tumulte. Ils allèrent d'un parti
à lautre , & les appellent par lès
tendres noms à'^lmls 5c de Cow-
bourgeois ^ ils les exhortétent à la
paix. Les Réformez y confenrirent
d abord , ne demandant autre cho- Sedi-
fe que de vivre en paix , fuivant ^!!!î!,;r^^^
les moavemens de leur conkien- par des
ce, & n'étant pas tant irritez con- ^?égo-
tre leurs Combourgeois , que con- p^^^'^^^^^
tre les Prêtres , qui étoient les
flambeaux de la fédition. Mais
ces bons Médiateurs trouvèrent
plus de réfiftance du cô:é des Ca-
tholiques. Ils eurent beau repré-
fcnter au\ P. êtres, Qu'// leur con-
venait mieux d'are à l Eglife , &
d y prier , que de s'armer comme ils
fu'ijoient > & qu 'ih dévoient exhorter
U Peuple a la paix plutôt que de ra-
nimer a il guerre j mais les Prêtres
furent inflexibles. Ainfi ces deux
Fribourgeois allèrent trouver les
Magiftiats, qui étoient dans la
troupe, & leur répr&fentérent leur
devoir
332 Hiftoire de la Réfarmation '
1533. devoir, & le mal qui alloit arri-
G E N E- ver de cette levée de boucliers.
"Vï* Alors les Confeillers publièrent un
ordre > de fe difpofer à la paix. Les-
Prêtres au contraire exhortèrent le
Peuple à aller attaquer j mais IcS'
Fribourgeois leur dirent , Que
quant a eux y .ils ne voudraient pas
confeiller aux Genevois , de ségo'gîn
les uns les autres > & de fe mettre»
les Pérès contre les Enfans , & teti
Fi ères contre les Frères: Qtie d'ailUurr
les Réfor?nez les attendaient en ft bon*>\
ne dijpojition , qu'ils aimcroient mteu%
( eux les Fvibourgois ) être de liwt\
iké , que du cote des Prêtres ,
quils ctoient en plus ^rand nombre y
quils ne fe le figuraient, Qu^î fi les
Frêtres voulaient sji al er frotter , ik
trouveraient a qui parler. Là-d^-ffusi
le Peuple > qui écoit autour deuX!
s écoula peu à peu , difànt , Nour^
ferions bkn fols de nous égorger les ut^<
les autres pour C amour du Clerge\ Dut
s ils ont quelque difficulté avec les Ré^
formez > ^« '^'^ l^ terminent entreux'j
ou bien > quils difnutènt avec eux par
l'Ecriture i plutôt que par l'Epée, Les i
Prêtres fe voyant abandonnez dtt i
peuple, fe laifférent enfin gagner»
de USuife. Liv. X. 333
Se confentirent à faire la paix. Les 1 533.
deux Partis fe donnèrent recipro-
]uemcnt des otages » & le lende-
nain le Confcil des LX. fit publier,
^ fon de Trompe , les Articles fui-
^^ants. „ lO. Que les inimitiez
) cefleroienc entre les Eccléfîafti- mode-
^ ques & les Laïques , Que cha- ment: ou
) cun vivroic en paix > & qu'on
y ne feroit aucune infulte à per- pour U
i fonne , ni par parole ni par paix.
i aflion.
>, 20. Que nul n'eut à parler
, contre les Sacremens de TEgli-
) fe , & que chacun pût vivre en
. toute liberté,
jj 30. Défenfê de manger de la
viande le Vendredi & le Samedi.
» 40. DéFenfe de faire ou Me di-
re des cho/cs capables de fcan-
dalifer.
„ f o. Défenfe de prêcher fans
la permiflion des Supérieurs Ec-
cléfîaftiques , & des Syndics.
» 60, Défenfe de prêw^her autre
chofe , que ce qu'on pourroit
prouver par l'Ecritutc Sainte „.
Le Dimanche > 30^- Mars> les
culiers jurèrent l obferva ion de
tte paix , entre les maiiis des
Syn-
334 Hijlolre de la K.cformatîon
1533. Syndicsj & les Ecdéfiafticjues er
Gène- tre les mains du Vicaire de l'Ev^
^ ^' que 5 à peine pour la première foi;
de foixante fols d'amende & pot
la féconde, de la même amenda
& de trois jours de prifon au pai
& à l'eau 5 & pour la troifiénie
de la même amende encore & c
banniflement pour un an *.
Incen- Xlf. Pendant que les Gen(
^niw étoient ainfi divifcz cntr'cu
en '^W^-pQyj. caufe de Religion, 6c anime
les uns contre les autres comrri
les ennemis les plus acharnez, u
ennemi fecrec des SuiiTes , leur fu
cita des Incendiaires , pour fe var
ger deux, fans s'expofèr. Dar
une Diette des Cantons aflembh
à Einfidley vers la fin d'Avril, c
fut averti , qu'il y avoit dans
Suifle un grand nombre de fcélérat
& d'Incendiaires , dont l'un, non
iTié George BUri , de Munchtn Btic
fée , ayant éié pris à Fiovvenfelû
avoit avoué , que ant en P;
mont, avec trois de ks Can^
„ rade
Savlon 111.78. 81. ^ofetlll. CL
Spitnh. 59. 60, îhtt'v^r, Vita T'.rei
671. 671. MS.Chouct. 7- Ben. ïum
1. c. 35P7.
deUSuife. Liv. X. 335
„ rades, le Carême dernier, il I 5 33.
avoir rencontré un Seigneur Ita- Inceîi-
, lien de grande taille, entre ^^^l^"
..Tvrée, & la Fal-d' Ao[le -, Que^''^'"'^''
j cet Homme les avoir engagez à
, mettre le feu en divers endroits^
dans les Cantons de Zurich &
5 de Birne en leur donnant à cha-
5 cun un florin d'or de récom-
5 penfe, 8d qu'il leur avoir pro-
^ mis de leur en donner tout au-
) tant pour chaque maiion, qu'ils
, réduiroient en cendres. Il dit
, auffi , Qî[\\s étoient environ
, foixantc Incendiaires , aflemblez
, dans le Canton de Berne ; qu'ils
, étoient prefque tous habillez d*u-
, ne manière uniforme , pour pou-
, voir fc reconnoître entr'euy ,
3 fâvcir , en curcles blanches >
, doublées de rouge 5 le canon
^gauche découpé, avec une dé-
o coupure à tous les deux, au-
, deiïous du genoux , à la mode
5 des Lanfqucnets > & qu'ils por-
, toient un petit bâton blanc à la
, main „. Les Cantons , ayant
écouvert cette pernicicLfe Cofîju-
arion , prirent de bonnes mefurcs
our s'en garantir , par i\\ ce
com-
336 Hîjlôire de la Réformatton
î 533. ce complot abominable échoua
Incen- On ne douta point , que ce Sei
^TinHle S"^"^ Italien , de grande taille
n mjje, 2^^^ parloit Blari > ne fut le Mar
quis de Alufs , qui etoit en fureu:
contre les Cantons , ^ parriculié
rement contre celui de Zurich &
de Berm , parce qu'ils avoient L
plus aidé aùxGrifons, à renverfe
fbn petit thrône 8c a détruire f
Tyrannie^ On le crut d autan
plus aifément qu on favoit , qu'i
s*étoit retire dans ces quartiers di
Piémont *. Peut-être fut ce
cette occafion , que les Bernois
apprenant les Complots étrange
qui fè faifoient contr'eux , fe tin
rent fur leurs gardes » & envoie
tLeii. rent des Députez t par tout leu
Mars, p^yj ^ pour exhorter leurs Sujets
à fe pourvoir d*armes Se de muni
trons, afin de pouvoir fè défendre
en cas d*attaque. Sans doute
avant la découverte de ces Incen
diaires, ils foup^onnoient quelqu
ennemi plus puiffant & plusr re
doutable t«
StettUr II. 61. <Î3. a. S^vion 1. C. Si
deUStihfe. Liv. X. 337
Dans cctems-Jà les Sdgneurs 1533,
ie Zurich remirent fur pié l'Ecole z^irkh
ie Cap^d , qui avoit été défolée T^^^^j'^^
Dar la guerre de 1551. ^''^^^^ ^^*/'^- de Cap-
a y de Rbynavv , qui en avoic été pel.
^rieur , & qui en étoi: TAdmi-
liftrateur , avoit reparé cette mai-
Ton depuis la guerre, dans refpace
i'une année , ôc à fa requifition ,
le Confeil de Zurich y rétablit TE-
:oie le premier de Mars 5 & y
mit quatre Ecoliers , pour y être
entretenus , aux dépens de la mai-
fon, avec d'autres, qui y furent
.aux dépens de leurs parens. On
les enfcignoit là, jufques à ce qu'ils
fulTent en état de faire des étu-
des plus confiderables , alors on
les faifoit venir dans la Ville. L'an
1541. rime Simkr quitta cette ad-
miniftration , & prit un Miniftére
dans le Frcjawpt , avec la dignité
'de Doyen de ce quartier- là > &y
'demeura jufqu'es à l'an i 557. qu'il
'mourut 5 le 9c. Juillet , âgé de 71.
ans. Il fut Pérc du célèbre Hifto-
rien Jofias Simler. Après lui on
confia ladminiRration de cette mai-
fon à des gens , qui ne s'accom-
modoient pas avec les Maîtres 3 ni
7 (?;;/. /r, P avec
33S Hijloire de la Réformât i en
I 5 3 3 , avec les Ecoliers. Ainfi cette Eco.
le fut abolie Tan 1 547. 8c les Eco'
liers qu'on y entretenoit , fureni
incorporez au Collège de Fraw
Munflcr à Zurich > qui avoit ét<
fondé l'an 1538. comme nous h
dirons en fon lieu {a),
Trogits Un Hiftorien Catholique nou;
for^m^*'' ^PP^^^*^ ' ^^^^^ année - là dam
'tion le Pays des Grifbns, plufieurs Corn-
dans les munautez embraflerent la Réfor-
Gnlons nation. Il auroit été bon , qu'ij
nous en eut appris les noms {b).
Aravv ' Dans le même tems ceux de la
établit Ville ài^TAW » établirent chez
pour TE-ducâtion
^ * de leur jeunefle. Les Seigneurs de
Berne les y encouragèrent , & leui
promirent , que s'ils ^voient des
Ecoliers , de qui on put concevoir
de bonnes efpérances > ils feroient
du bien à ce Collège , comme ils
en faifoient aux Villes de Brouk^&c
de Zoffingue {c).
Soins Ces Seigneurs continuèrent cette
des Ber- ^nnée , à faire voir leur zélé pom
k^^Ré- 1* Réformation. Les V. Cantons
Câtho^
(a) Hotting^ôy^. 676.
(è) Bucelln. apud Hor//«^. 57f.
(r) B. l«/?r. 244.
deUSmjfe. Liv. X. 339
Catholiques continuèrent de leur 1533,
côté dans leur ardeur pour le Pa- formez
pifnie. Ils ordonnèrent aux Ré- ^J^f/^^;
formez de Bremgarte ^ d'aller k^"^^^^
'confelfer à Einfidle, à la fête delà
Pentecôte > & d'y communier. Le
Baillif de Bade parloit fort inju-
Vicufement contre laDodrine Evan-
gelique. Il avoit même dépofé &
:hafie, (js ne fai pourquoi) le Mi-
nière de Tœgcrfeld 5 Village mi-
parti, près de Zurîzach. Les Bernois
krivirent une Lettre fort civile ^
:es cinq Cantons > pour les prier
de lailTer en ^aix les Réformez de
Bïemg^rte. Mais comme ils n'en
surent aucune réponfe 5 ils donnè-
rent ordre * à leurs Députez , qui , ^-e-i,
partoient pour la Diette ordi- ^
laire de la St. Jean. lO. De de-
Tiander une réponfe à ces Cantons.
20. De fe plaindre aux autres, de
leur injuftice , & de Tinfra^lion
qu'ils faifoient au Traité de paix
par CCS violences. 30. De deman-
der qu'on punit le Baillif dp 7?^^^,
de ce qu'il avoit mal parlé contre
'la RéFormation. Enfin 40. que le
Miniftrc de Tœgerfeld fut rétabli (a).
P z L'Abbé
340 Hifloïrede U Kcformatîon
J533. L'Abbé de S, Gai y à rimitaîion
Soins de ces Cantons , malrraitcit aulT
.des Ber- les Réformez de fes terres. Er
les^Rè' Particulier il ne vouloit pas per-
formez mettre aux gens de Rofchacb & d(
Sujets VFMktUh , de bârifer , de bénii
bè dt mariages , 6c de faire la Stc
<Î4// Cène 3 dans leurs Eglifes. Les Dé-
putez de Berne, pour la Diète;
qui s'afTembloit à Bade en Juillet
^Lei^. eurent ordre, * de prier ce Prélat
Juillet, que puifqu'il permettoit le plus i
fes Sujets > favoir > de prêcher &
de vivre dans la Religion Réfor
mée , il devoit aufTi leur permet
tre le moins. Ils dévoient encore
lui repréfentcr , que puifijuil avoi
été rétabli en vertu du traité de pat.
de Suijfe , il devoit obferver ce Traita
a l'égard de fes Sujets (a).
Claris II Y eut aufli des troubles dan
le Canton de Claris , vers la fir
de Tannée 3 au fujet de la Reli
gion. Les Seigneurs de Berne ]
envoiérent des Députez le i 8^- De
cembre^ pour contribuer avec le;
autres Cantons , à y rétablir 1;
paix Se la tranquillité (^).
Ce;
Ibid.
Q) Ibid. 318.
deU Suîjje. Li V. X. 34 ^
Ces Seigneurs eurent aufTi oc- 1533»
afion de porter leurs Soins fur les Accom-
^glifes de la Vrevoté. Les nou-
fi l'/v I . , /i / rnent en-
^elles difîîcultez , qui s y cleve-
ent entre les Chanoines de Mou- Chanoi-
ïers Grand-Fal & les gens du Pays,
)ccupérent les Seigneurs de Berne ^ ^^^.^
\c de Soleurre prefque toute Tan- Prevô-'
lée 1535. Enfin l'Etat de Soleur- t^'»
e ayant propofé à ces Chanoines
le porter leurs grieffs , dans une
Conférence qui fe tiendroit à Ber-
e entre les Députez des deux
' illcs 5 & ceux-ci y ayant con-
enri, le Confeil de Soleurre mar-
ua le»i. Juillet, pour cette Con-
irence. Les parties y coniparu-
ent , &: plaidèrent leur caufe. Les
)éputez des deux Villc.v exami-
érent la Sentence de Bicnne , &:
écidérent : L Que puifque les
, Bourgeois de Moutiers avoienc
) eu de tout tems l'entrée de la
, Grande Eglife , pour y faire
, tous leurs exercices de Religion,
y il étoit jiifle qu'ils l'cuncnt toû-
j jours, n. Qui' d'un autre côté, il
, ctoit auffi raifonnable , que ces
, gens-là piy.ilTcnt aux Chanoines
> leurs redevances , à forme de
P 3 „ leurs
342 Hijloïre delà Réformât ion
1533. leurs Droits 5 & leur obeifTent I
IaPre- « en tout ce qui regarde le tem- '
voie'. porel. Iir. Que les Chanoines
„ kifleroient vivre ces gens-là dans
la paifible profeffion de laReli-
^ 55 gioh Réformée , & qu'ils four-
3^niroient des penfions honnêtes à
leurs Minières ». IV. Ils firent
quelques Règlemens> touchant les
Appels 3 & fur quelques autres Ar-
ticles , qui concernoient des in-
térêts temporels. V. Enfin ils or-
donnèrent > >j Qu& fi à l'avenir il
yy s'éievcit quelque nouvelle diifi-
culte entre les parties > les Sei-
gneurs de Berne en décideroient
3, avec ceux de Soleurre*.
Le 25>. Septembre fuivant, cet- ,„
te affaire fut examinée de nouveam
à Berne > entre le Confeil de Ber-
ne & les Députez de Soîsurre> à la
prière de 1 Etat de Soleurre, & des^
gens de la Prévôté, qui fouhaitoientt
qu'on révoquât TArticle des Ap-i
pels. Tout fut confirmé , à h
referve de cet Article, qui fut en-
levé pour les particuliers , avec
cet
* MS. Amp. îip. B. Inftr. r66. Apo-
log. à p. 104. ad 1O7. nb\ îrre(>fit error PJ-
l^Q{^raj}hkHs & le^hur Jimii ^ro jillii.
de U Suifc.LiY. X. 343
et éclairciflement , que quand une 1533.
"ommunauté ou un particulier fe-iAPRE-
oit en procès avec le Chapitre, vole'.
a partie acflrice pourroic en ap-
jeller à l'Evêque de Baie. On ré-
;Ia auflî la penfion que le Chapi-
re devoit donner aux Minières >
Ur les plaintes des gens du Pays [a).
Il effà remarquer, que dans ce ChnnoU
ems-là il fe trouva deux i^"^^^^ ^^"[J^^^'
[Chanoines â Mou tiers i qui s'étoient
endus fi abominables , par leurs
ifures 5 par leurs blafphèmes, par
eurs adultères , & par leur y vro-
;nerie , que TEvêque même ne
lût les fouffrir, & les fit mettre t
n prifon Le Prévôt , qui étoit
leur tête , ne valoit guères m.ieux,
)uifquil vivoic tout ouvertement
[ans un Commerce fcandaleux ,
vec une Femme débauchée , &
ju'il y peiTcveroit encore l'an
54.2. nonobftant les fréquentes
cmonrranccs, qu'on lui avoit fait à
et égard. Au refteles diffcrens dcces
iglifes ne furent pleinement term.i-
lez que l'an i 5 3(5 {ù).
P 4 Les
GO B. Inf^r. SCO. Apclo^. 107. III.
^ yîpnlog. 1C4.
•0 ^iottht^. 6<J4 1
344 Hifloire de la Ré for mat lo»
1533. Les Seigneurs de Berne fe vi-
BiEKNE rent aulTi obligez d'entrer dans
^ ^'A-^in différent tout femblable , qui
S etoit eleve entre la Ville de Bien-
ne & le jeune Comte de ChalUnti
Seigneur & Comte de Falcngïn,
La vieille ComtéfTe , Mère de ce
Seigneur étant morte cette année
là 5 il recueillit fa fucceffion. Les
Seigneurs de Berne, avec qui cette
Maifon avoi: fait on traité deBour-
geoifie 5 prirent cette occafion poui
l'exhorter de lailTer à fes Sujets
pleins liberté de Confeience 5 & de
ne point inquiéter > fur la Reli-
gion , les Eglifes de fa terre qui
auroient embraflé, ou qui embraf-
feroient à Tavenir la Réformarion,
à la pluralité des fulfrages. Il le
leur promit. Mais les Catholi-
ques croient n'être pas obligez de
garder la Foi , à ceux qu'il leur
plait d'appeler Hérétiques. Le
Comte ne tint rien de ce qu'il avoic
promis. Il fît deifendre > à ceux
qui dévoient des Cenfes, ou des
Dîmes à l'Ancien Chapitre de St.
Imier , de les payer à la Ville de
T>i{fe. Sienne. Et comme le Village de
TQndçn-DûjnkeJfon eut embralTé la Réfor-
mation i
deUSuife. Liv. X. ?4S"
nation 5 & que les Biennois, en IS33*
]ualiré de Collateurs , y eurent tre L'/c??-
învoié un Miniftre 5 nommé Pierre q^^^
Marmot j le Curé du lieu, appuie de I^/e^-
:}ar les Catholiques , ne voulut
point lui céder la place, & la dé-
:ifion de ce différent aiant été remife
lu jugement du Comte> le Comr&
donna gain de caufe au Curé, &
;ommanda au Miniftre de vuider
la Cure dans 24,. heures. LcsBien-
nois s'en plaignirent aux SeigneurS'
de Berne, qui envolèrent * deux Dé-* Le n.
putez au Comte , avec ordre, de
lui faire les mêmes remontrances ,
qu'on avoit faites à fa Mère, trois
ans auparavant; „ de laiifcr la Ville
5, de B'ienne en poiTefTion des biens
3i 6c des Rentes» qui provenoienc
du Chapitre de St, Imicr , &
^^de fon droit de Collature furies
Eglifes de fa terre qui en de-
p^pendoient: Enfin de rétablir le
}j Miniftre de Dombrejfon , lui dé-
j^darant qu'ils ne permcttroienc
yy jamais , qu'on fit du tort à ces
), gens la, Qjte s'il y avoit cicl-
„ qu'un , qui contcftât ce droit
>, de Collature , à la Ville • de
>, Bienne, ils contribueroient à lui
P 5 » faire
346 Hi{îoïre de la Kcformation
1533. » faire rendre juftice \ Enfin qu'on
BiENNE >j le fommoit de fe fouvcnir de
^ „ Ja promeffe qu'il leur avoir faite,
iENGIN I r» 1- • f \
concernant la Religion \a) „ .
Le Comte, pour ne pas s'atti-
rer à dos les Seigneurs de Berne,
qu'il avoit intérêt de fnénager y fit
fsmblant de céder à leurs remon-
trances , 6c ne fe mêla plus ou-
vertement de cette affaire. Mais
il fit agir fous main le Prévôt de
St. Im'm. Ainfi ce Prévôt foutenu
par le Comte, porta l'affaire à la
Diète, devant les Cantons affem-
blez à Bade. Les Cantons fom-.
mérent les Biennois de rendre rai-
fon de leur conduite devant eux,
à la première Diète qui s'affem-
bleroit Tannée fuivante j Mais les
Bernois ne le trouvèrent pas à pro-
^ Le pos foutenant que les Cantons
Mars n'âvoient rien à leur comman-
^' ^ ^ der (/»). Les Cantons affemblez à
Bade^, au mois de Mars renou-
vellérent leurs inftances auprès des
Biennois en faveur du Prévôt de
St. Imicr ; mais ceux - ci refuférent
de rendre raifon de leur conduite*
& de répondre au Prévôt, autre*
ment;
deUSuiJe, Liv. X. 347
ment que devant leurs Juges Lé- 1533,
gidmes. Et les Bernois perfifté- Bienne
rent dans leur fentiment ^^^hnIiI-
les Cantons n'avoient rien à voir >f ^'2,.
dans cette affaire [a]. Avril.
Dans une Diète, affemblée à Ba- i ^ ^4-
de l'année 1533. TAmbaffadeur de
France fe plaignit d'un Livret im-
primé à Neuchatel. Mais les Can-
tons n'ayant aucune Authorité fl
les Ncuchatclois, & l'affaire ayan-
été renvoyée à une Diète fuivante,
avec celle de Valcngin j les Bernois
furent d'avis de répondre à l'Am-
baffadenr fur fa plainte j Quil poiu
voit Aller a Neuchatel^ faire partie
criminelle a Imprimeur {b).
Comme les Bernois prenoient
foin des Eglifes de leur voifinage
& de leurs Alliez , ils ne négli-
geoient point les leurs propres. Juf.
qu'à cette année ils avoient per-
mis 5 a la Campagne j de fonner
pour les morts > afin d'avertir le
Peuple qui étoit dans les champs>
qu'il y avoit un mort à enfevelir.
On abufoit de cette pcrmiflion , &
quelques-uns ne fonnoicnt que
quand le mort étoit enfevcli. Pour
P 6 cettç,
(0 (0 lbid.3^5.
348 Hiftotre de U Réformation
j ^ ^^5^ cette raiTon ils interdirent cerre fon-.
Beh^e nerie, par un Edic du 20. Sep:eni-
bre , foui» peine de 10. Livres d'a-
mande. En même teir^ ils or-
dorrérent z.ux Miniftres, d'inftiui-
Ber7ie k- U j^uiieiTc, dsiis Ics Catéchiimes
î^abijt les de Tapies dinée, les Dimanches &
Ses!^ jours de Fête , & leur recom-
mandèrent foi'temtnt de s'acquiter
rcligieufement de cette forâiion ,
d'une telle manière qu'ils en puf-
fent rendre un bon Compte à Dieu ^,
Et afin de s'alTûrer de rexécutioç .
de leur Edit 5 &: de leurs autreifî
Règlemens de Réforme /ils envoie*
renr, deux jours après 5 quelqueSr
uns des Minières de leur Viile «
pour aller prèfider dans les Claffes
de leur Canton , chargez d'y por^
ter leurs Ordres, & d'examiner Té?
tat des Eglifes t-
Cette année le Seigneur At Torrens',
dont les Ancêtres avoient ttè Seigneurs
de Jurifliidion , du Bourg àAl^le , & de
fa ûcpendance 3 fut reçu Bourgeois de
Berne le i6. Décembre j & il renonça
folemnellement à toutes les prêtent ionSj
qu'il pouvoit avoir fur Ai^U. Il fut i|9
dernier de fa race (^). ' ^
^ ACTES
B. Mandat. B. ^r.
tB.Inftr.191.
{a) Stetler II. 63. a.
349
ACTES
D U
bYNODE DE BERNE
Alllmhl^' [An AÎDXXXIL
Compofc de 230 pcrfonncsy
tous Paftcurs & Minifircs
du S. Evangîîe, dans !a Ville
& dans les Terres du Can-
ton de Berne:
cmmcmé le 9^- de Janvier y
termine /e l^, du même ??wis.
I n t r o d u c t I o Ny
J^ijlûurs pn'limin/tire des Pères
du Synode , adreffc a L^L.
EE. de Berne 5 touchant
ï Autorité & le Pouvoir du
Adagijlrat Civil , \ a ( égard •\o^x,tx\
du Service Divine avec une ^Y^^l^"^^.
r^xhortation a ces mêmes ôet- oion.
gneurs fur ce fujct.
TtLUSTRES E T Sq V £ KA IN s
Seigneurs.
IL n'eft pas bien po/Tible aux
Pafteurs ordinaires &: ai^x Mi-
j^nirtres
350 ABes du Synode de Berne y
niftres de la Parole de Dieu,>
5, de faire quelque fruic dans l'E-
>, glife , & de l'y entretenir par
des Ordonnances extérieures j fi
>, le Magillrat Civil ne joint fes^
foins , pour avancer cette bonne
>, œuvre. Car le cœur de l'Hom-
me eft tout gâté , tout corrom-
» pu , ôc entièrement abandonné'
>5 à (es propres imaginations & à.
fes défirs. C eft un mal qui eft;
55 répandu par tout , aufll bienV
5, parmi les Eccléfiaftiques 3 com-
» me parmi le commun Peuple y
& tout cela vient , de ce qu'il
^, y a encore fi peu del'Efprit & de
35 la vertu de Dieu dans nos cœurs»,
>, Or tout Magiftrat , qui fait pro-«
fclTion d être d'un Gouvernement
Chrétien & pieux, eft obligé de
>, mettre toute fon application , à;
>j faire que dans l'exercice de fou
pouvoir, il foit le Lieutenant 8c
le Miniftre de Dieu , & à con-
5> ferver parmi fes Sujets la Doc-
>j trine & la vie Evangelique, tout
55 autant du moins qu elle s'exer-
5, ce au dehors 5 & qu'elle fe pra-
yi tique dans les chofes cxtérieu--
w res, C'eft de ces chofes qu'il
» fau-
tenu enl$32^ ïntroducrïon. 3 5 1
>, faudra que chaque IVÎagiftrat
rende compte un jour devant le
redoutable Tribunal de Dieu ,
,j Jorfqu'il jugera & condamnera
le Monde par Jesus-Christ.
3j II eft donc vrai que le JVlagif^
;jtrat Civil doit procurer l'avan-
>, cernent des voycs de la Grâce ,
5, tout autant du moins qu'elles
5, fe répandent dans les chofes ex-
3, térieures. Mais pour ce qui re-
garde ces voycs de la Grâce, en-
>, tant qu'elle fe déploie s'a-
vance intérieurement dans le
cœur, c'cft une choiê qui n'eft
5) pas au pouvoir des Hommes 5
5, &: qui ne dépend d'aucun Ma-
5^giftrat, ni d'aucune Créature>
:)j quelle quelle foit,- car les cho-
>, fes Spirituelles & Céleftes font
^) trop fublimes 3 & fort au deffus
» de tout pouvoir civil & char-
» nel. Ceft pourquoi aucun Ma-
^) giftrat ne doit maitrifcr les Con-
>, fciences , ni publier des Ordon-
5, nances pour des chofes cxtérieu-
5> res > par lefquelles on mettroic
y% un joug fur les bonnes Confcien-
ces , ^ Ton borneroit le S. Et
?>pric, l'empêchant de déployer
toute
3' 5 2" Actes du Synode de Berne
>3 toute fon efficace. Car il n'y a
que Jesus-Ghrist nôtre Sei-
55 gneur, à qui Dieu a donné tout
>5 pouvoir 3 & la promefle du S.
Efprit 5 qui foie le Maîcre & le
ri Seigneur des Confciences. C'eft
>j pour cette raifon que le Pape, les
3, Evêques , 6c les Prêtres , avec
5, toute leur bande , font tout au-
3> tant d'An te - Chrifts , & enfei*
^^gnent la Dodrine des Diables f
33 parce qu'ils entreprennent tous»fi
„ de maitrifer les Confciences à leur i
>, fantaifie j de faire des pêchea .
35 de chofes que Dieu n a pas i
défenduës > de, pardonner &
de faire grâce pour des chofes
qui font criminelles devant Dieu,
éc même de rnériter la grâce aux
>, autres par des œuvres , forgées
& inventées dans leur Cerveau*.
>5Atteniârs qui font tout autant
3j de blafphêmes , que les Magif^
trats doivent bien fe garder de.
33 foûtenir , mais pliuôt les fuir &.
,5 les éviter avec tout le foin pofi..
33 fible. Mais il ne s'enfuit pas de-
là , qu'ils doivent' abandonnée.
5, le pouvoir qu'ils ont re^ii de.
„ Dieu pour ces chofes, mais plûr
tôt
tenu en 1532 Introduction. 353
„ tôt l'exercer , autant qu'il s'étend
„ fur les chofes extérieures, afin
„ que k grâce ait fon cours libre>
„ & foit avancée, par leur Auto-
„ rité 5 comme par des ouvriers
qui concourent avec Dieu. Il faut
donc qu'ils ayent foin de gar-
„ der la Saine Doftrine , d'empè-
5j cher l'erreur & la fédu<flion , de
5, punir tous les blafphèmes & les
3, péchez manifeftes, à l'égard de
5, la Religion & de la conduire de
la vi« , de protéger la vérité , ÔC
^, les bonnes mœurs, &:c.
» C'eft pourquoi, Jlluftres & Sou^
verams Seigneurs , comme Vos
>j ExcE LL E NT c E sont embrafle fi
>, courageufêment l'Evangile , 8c
,> l'ont fait recevoir de vos Sujets j
„ 8c qu'elles ont même prêté fer-
2^ ment là-defTus , comme fur une
Loi particulière 8c fondamenta-
>, le de l'Etat, de le maintenir au
„ milieu de vous 8c de tous les
„ vôtres, tant dans la Ville Capi-
taie , que dans tout le Pays,
» au/Il faut- il déformais regarder
,> vôtre Gouvernement, comme re-
>, vêtu d'une nouvelle formic , 8c
,5 chargé d'une nouvelle obligation,
>i corn-
354 Actes du Synode de berne,
5, comme pour toute autre Loi
Xi extérieure , & vous ne pourriez
5> jamais le quiter avec honneur
» devant le Monde.
>j II eft vrai que votre Miniftère
5> ôc le pouvoir que vous avez à
l'égard de l'Evangile, ne fait ni
n'a fait autre chofe que des
Hypocrites > fi J'e s us-Christ
même n'eft pas de la partie , car
5> il y en a plufieurs » qui fuyent
5> la Mefle , comme une Cérémo-
» nie pleine de blafphêmes , qui
ai s*accommoderoient fort bien de
5, cette abomination 5 fi VV. EE,
ne l'avoient abolie par leurs
>, Edtts & leurs Alandats, Mais
5, il n'importe. Car le Miniftère
3, même de MoiTe n'a rien pû faire
55 davantage avec la Loi de Dieu,
5, qui cependant eft une Loi de
vie j il ne faloit pas pour cela
» qu'il ceffât d'inculquer la Loi ,
>, rr/ais il devoit plûrôt exercer fon
>, office, & ainfi faire que la Loif
y) qui ètoit vivante , fût une Let-
55 tre morte , & devint même Co-
55 1ère 3c Mort pour la chair, parce
3i que Dieu n'avoit point donné
9) au Peuple i par le Mini(lère de
Moife,
tenu enlSll^ Introduction 355
5, Moïfc, un cœur intelligent , ni
jj> des yeux éclairez , ni des oreil-
les ouvertes pour ouïr, comme
ce Saint Homme s'en plaint dans
„ fon dernier difcours 5 * peu de ^
tems avant fa mort> après avoir '
été avec eux durant quarante
>, ans. C'eft ainfi que les feuls
» efforts du Miniftre extérieur ra-
„ portent peu de fruit devant Dieu.
Mais 5 nous le difons encore une
„ fois > il n'importe pour VV. EE.
de quelle manière on reçoive
>, l'Evangile. Car VV. EE. fou-
>, haitoient de conduire chacun \
la vérité par leur Miniftère , &
35 d'abolir tous les fcandales pu-
3, blicsj mais le Monde l'embralîe
3, par rhypocrificj ce n'eft pas vô-
3, tre faute , il en eft de vous *
comme de Moïfe > qui faifoit fès
,3 efforts pour conduire le Peuple
3> à Dieu 3 pour introduire &
5, entretenir parmi eux une viç
sjfaintc ôc bien réglée.
Et quoique ni vous, ni aucun
3, pouvoir humain, ne puilTez faire
5, une bonne confcience devant
Dieu ; cependant le Minifière de
3, VV, EE. fert a faire 3 que la
3> pure
W
356 Actes du Sy/iode de Bernti^ '
53 pure Parole de Dieu foit piê-
35 chés parmi vos Sujets , que la
Grâce , leur (oit clairement an-
jjnoncée, & qu'on les conduife à
55 la Source vivante 5 de laquelle
5, feule on puife les eaux du falut,
?5 fa voir à nôtre Seigneur Jesus-
„ Christ, qui eft nôtre unique
5, Médiateur \ après cela Tembraf-
y> fe qui voudra. Et quand on
5, le prêcheroit en vain pour tout
,> le Monde , ( ce qui cependant
J5 n eft pas polïîble > ) néanmoins
55 vous avez fait ce qui dépendoit
35 de vous, vous vous êtes aqui-
55 tez de vôtre devoir, & vous
j, avez fauve vos Ames , comme
», Moïfe & les bons Rois de juda)
5, qui firent beaucoup de bien , en
y-, s'apliquant à faire obferver la Loi
3, parmi le commun Peuple. Car
la le<îlure de la Loi , & la pré-
dication de la Parole , que ces
>, Rois faifoient faire, fer voit à an-
noncer le jugement de Dieu con-
5, tre les médians , à abolir les
5, blafphêmes notoires» les vices,
j, les infamies & les fcandales y
55 à punir 6^ à reprimer le mal, &
aj à procurer & à faire régner le-
5, bien :
i^nu enX^ll, Introducîion 3 57
bien : 5c c'eft pour cette raifon
>, que le S. Efprit donne tant de
louanges aces bons Rois, dans
o l'Ecriture.
5, Il ne faut pas que les difcours
„ de quelques Ames fimples faffent
„ de la peine à VV. EE. les
„ détournent d'un deffein fi Chré-
„ tien. Ils difent; Que le Chriftia-
5, nifme eft dans rinréiieur, qu'il
5, ne peut pas être gouverné par
j, répée, mais qu'il faut qu'il foit
adminiftré par la Parole de Dieuj
55 Ouz VV. EE. établiffent une
), nouvelle Papauté , en voulant
5, vous mêler des affaires de la
>, Foi , &c.
„ Mais nous répondons ^ Que
5, cela feroit bien vrai > fileMagif^
j, trat vouloit violenter les Conf^
5, ciences &: maitrif^r la Liberté
55 Chrétienne , qui eft dans une
>, bonne confcience ; ce que Ton ne
doit pas dire de VV, EE. dans
5, raffaire dont il s'agit j puifque
5 5 vos foins fe tournent à faire, que
5, la vérité foit prêchée clairement ;
3, que Ton exhorre fortement à la
,5 Piété ; que l'on cenfuic fana
5) crainte les vices des Sujets & des
3, Ma-
358 Actes du Synode de Berne^
„ Magiftrats , 6c que Ton obferve
5 3 au dehors dans le fervice divin,
5, & en d'autres rencontres , un or-
9> dre bien ménagé, qui n'empêche
5) point le cours du S. Efprit. Or
5) tout cela fe fera , fi VV. EE. ont
5, la bonté de confirmer les Ordon^
35 nances fuivantes j ( dont nous
>,fommes convenus entre nous dans
5, ce Synode ) pour l'avancement
ode la gloire de Dieu s & fi vous
j> nous ordonnez à nous tous, qui"
9i devons prêcher l'Evangile dai»
5, vôtre Ville & dans vos Etats >
3, 6c fi vous nous commandez/
5, comme à vos Sujets 3 de les ob-"
55 ferver. C'eft la grâce que nous
demandons très - humblement à
55 VV. EE. 6c flous les en prion«
35 ardemment pour Tamour de
,j Dieu 53.
Voici nos Ordonnancés 6c nos Ré*
flexions y que nous avons ren-
fermées dans les Chapitres fui*^
vans.
CHA.J
tenîi en ï 532. 3S9
CHAPITRE I.
ue nous ( les Miniftrcs ) de*
njons nous aquiter foigneufe-
ment de notre devoir,
Rémiérement, comme nois? les
Miniftres&Pafteurs, devons être
^7Hhjfadeui s pour Christ, AU"
lïflres de l'Efprit , & Difpcnfateurs
'es Alifîeres de Dieu, que
;'eft là le nom qui nous eft donno
lans l'Ecriture : Que de même
uflfi la Louable Seigneurie deBer-
e, & les autres Magiftrats, font
ppellez , & font effectivement les
vîiniftres de Dieu , pour ce qui
egarde les Ordonnances extérieu-
es i il nous eft abfolument né-
effaire ? fclon les Loix que LL.
:E. ont faites touchant TEvangile»
[ue nous prenions bien garde à
lôtre MinîAère à TEmploi qui
;ious eft confié , ( lequel eft fpiri-
luel, intérieur & Célefte) pour en
iemplir toutes les fonctions avec
bin, avec ardeur, & de tout nô-
re pouvoir. Or nôtre Emploi exi-
;e de nous deux chofcs , une fai-
te Doctrine > 6c une vie bien ré-
glée , tant pai rapport à nous, quç
pac
36o Actes du Sjnode de Berne»
par rapport aux autres qui font
profeiïion, avec nous , d'une mê-
me Religion.
CHAPITRE II.
Que toute la Doctrine fe ré-
duit uniquement a J E S U S -
Christ.
T)Our ce qui regarde laDodrine,
nous diions , que toute la fai-
ne Dodlrine nefi: autre chofe, que
la feule Parole éternelle de Dieu,
la Bonté & la Miféricorde pater-
nelle , laquelle il nous a commu-
niquée par Jésus- Christ 5 Ô:
ce n'eft autre chofe que JesusI'
Christ lui même, qui ^ été crth
c'ifié pour nos ûffenfes , & rtjfufcitê
^ Rom. pour nôtre Juftification * y afin que
^' nous fufTions juftifiez. Ce qui cftl
contraire à cette Dodlrine, eftcon^
traire à nôtre falut : ce qui ne rcn-i
ferme pas ce que nous venons de
dire, ne peut jamais être appelle
une Do<flrine Chrérienne. Car tous
les Miniftres de l'Evangile font
Ambafladeurs pour C h r i s t ,
témoins de fav paflion : & ne doi-
vent s'appliquer à autre chofe qu |
aire fa volonté, & exécuter fes
Dommandemens , comme ayant
té envoyez par leur Seigneur uni-
juement pour ce deffein , tout de
nême quelui 5 le Seigneur Je s us,
i été envoyé du Pére, pour ma-
lifefter aux Hommes le Nom Se
a Gloire de fon Pére , & rien au*
re i & qu il la ponctuellement
le fidèlement exécuté pendant tou-
e fa vie. Car il a été incelTamment
occupé aux affaires de fon Pére Cé-
cfte > & n'a rien dit de par lui-
nême i mais a toujours enfeigné »
linfi qu'il avoit entendu du Pére,
CHAPITRE. III.
Ouo/^ ne doit propofèr au Peu-
ple la connoilfame de Dieu ^
quen Jesus-Christ.
ne fâuroit alTez dire com-
bien il eft honteux pour un
Miniftre de Jesus-Christ, de
ne pas favoir le Commandement
de fon Seigneur , & de s'embar-
raffer d'aunes affaires vaines & inu-
tiles i Se de ne s'occuper pas en-
tièrement des chofes qui regardent
fon S igneur, ûvoir nôiie falut
Tom. Jr. cter-
362 Actes du Synode de Berne,
éternel. Le Pére parle sncoreau- 1
jourd'hui à nous par fon Fils, qui
habite dans nos cœurs par le S,
Efprit ; c*cft par lui que Dieu nous
réconcilie à foi , & c'eft en lui
que nous aprfenons à connoître les
ceuvrcs de Dieu , 6c la douceur
de fon cœur paternel & miféricor-
dieux envers nous. Ceft dans cette
intelligence 8c dans cette connoif-
fânce expérimentale de Jésus-
Christ, que le Fidèle va croit
fant tous les jours , à mefure que
ks exhortations continuelles Tex-
citent à cela même, au dehors. Mais
cela ne fe fait pas, lorfque les Mi-
niftres parlent beaucoup de Dieu,
fuivant une méthode Payenne , ôc
qu'ils ne font pas connoître cei
même Dieu au Peuple en la face
de Jesus-Christ, qui eft la
Uehr, I. refplmdeur de fa Gloire , & riniagt
Coloff, I. (jy la marque engravee de fa perfomie%
ou , de fa réelle Venté. Si les Mi^ j
niftres oublient de faire connoître i
iaGracedeDieu en jEsus-CHRisTf
leur Peuple en devient plus mé- ;
chant & plus incrédule , & il ft !
trouve , à la fin > fans Dieu dans
le Monde 3 tout comme l'ont éti ^
les
terni e/zl $32. 363
les Payens, qui ont ouï beaucoup
caqueter d'un Dieu connu naturel-
lement , mais qui n'ont rien apris
touchant leur Pére miféricordieux,
qui eft au Ciel. Ceft pour cette
raifon , que bien qu'ils ayent con-
nu Dieu 5 il ne l'ont pas honoré
comme Dieu , jufqu'à-ce que Jesus-
Christ leur ait été annoncé , &
qu'ils ayent crû en lui ; comme S.
Paul l'écrit aux Ephefiens * : Dans^Ch, II.
cetems-lày dit - il vous étiez fans
Christ , &:c. vous étiez fans ef
pérance^ & fans Dieu dans le Monde^
CHAPITRE IV.
Que Jes us-Christ efi le
"véritable Fondement,
(^'Eft ainfi que Je sus-Christ
nôtre Seigneur , eft le Fonde-
ment de tout l'Edifice fpirituel 5
hors de lui , il n'y a point de fa-
lut à attendre \ mais en lui , il n'y
a point de perte ni de condamna-
tion à craindre. Il eft la Pierre
angulaire, le Rocher, le Chemin >
la Vie , & la Vérité. Les Apôtres
& leurs Difciples (dont les Mmif-
trcs doivent être les Imitateurs >
Q, i comme
364 Ac^es du Synode de Berne
comme ils font leurs Succeffeurs)
n'ont prêché autre diofe que ce
Jésus - Christ. Ceft pour
cette caufe que S. Paul a miprifé
la Juftice qu'il avoit par la Loi ,
^ Vhli. ^ w entièrement rejettée*; & n'a
jamais voulu > non plus que tous
les autres Apôtres , avoir d'autre
fondement de fon falut , que Je-
su s-Chri ST feul. Ceft ce que
nous voulons faire voir encore par
les paffages fuivans , bien que tou-
te TEcrirure mène-là. Tar la gra*
ce de Dieu , qui ma été donnée^ dit
ce S. Apôtre , Jaï pofé le fonde-
vient 5 ôcc. Nul ne peut pofer d'au--
tve fondement que celui qui eft déjà
îr. Co^. ^^y^^ fa^oir jESus-CHRisrt»
rous êtes , dit-il ailleurs > les Coni"
bourgeois des Saints , & les Domefti'
ques de Dieu } étant édifiez fur le fon-
dément des y4pôtres & des Prophètes ^
Jes us-Chri st étant la mai*
4- "Ejfhef, frejfe pierre du coin +. Si vous avez
goûté , dit S. Pierre > combien le Sci^
gneuY eft doux > auquel vous êtes
★ venus , comme a la pierre vivante %t
II- 3- 4- Ce Je s u s eft la pierre élue , la pré*
cieuf' pierre angulaire , dont il eft
parlé , Efa. XX. ôc Pfau. CXVIII.
tenu en I S32. 36s
CHAPITRE. V.
Qj£e ce nefi que -par J E S U s -
Christ fcul immédiate-
ment >^ que Dieu ejl reconnu
mifêric or dieux,
V/f Ais qu'a-t-on. befoin de beau-
coup de paroles ? tous les
tréfors de la & de la con-
noilTance foat cachés en Jésus -
Christ *. .Pourquoi un Prédi- ^ Co/o/7>
cateur Chrétien chercheroit - il la
fagefle ei d'autres Hiftoires ou en
d'autres Livres , au lieu de Fairô
connoî re ces richefles & ces tréfors
de Dieu, favoir de Je^us-Christ
nôtre Seigneur, en quî toutes cho-
fes font réunies ? On veut beaucoup
raifonner fur la nature de Dieu
tout puiflant, fans parler de Je-
sus-Christ, mais cela efl fans
fruit, puifque Dieu s'eft toujours
fait connoîcre par fes œuvres , &
qu'il s'eft clairement ••donné à con-
noître, par les propriétés ,* les.
dénomiîiations de certaines chofcs
particulières , comme dans le Tata^^
dis» par ï^rhe de f^te i Api es ja»
chute d'Adam , par la fciuence de
0.3 ''t-
366 Acies du Synode dcBernc^
U Femme ^ à Abraham ? par Tordre
qu'il lui donna de fortir à'Ur des
CaldéenSj à fon Serviteur 5c à fon
Fils 5 par le nom de Seigneur &
Dieu Abraham: Enfuite au Peuple
d'Ifraël par le nom de Dieu (CA*
hraham > Jfaac 3 & de Jacob, Dans
le Déiert &c dans U Pays de Ca-
naan on l'apeloit , le Dieu qui
nous a tirés hors du Pays d'Egypte >
& de U Aiaifon de Servitude , qui
a fait Alliance avec nous fur la
montagne âUJoreb, De même aufli
à caufe de cette Alliance, l'Arche,
Is Temple 6c la Ville de Jerufà-
lem ont été apelès TEternel
Dieu, parce que par ces fignes
on entendoit Dieu lui-même, Ainfi
Dieu s'eft donné à connoître> quoi
qu'obfcurémcnt 5 par quelques œu-
vres de grâce ôc par certains évé-
nemens ou fîgnes particuliers^ com-
me les vrais Chrétiens aujourd'hui
le connoiflent clairement &c certai-
nement en Jésus -Christ nôtre Sei-
gneur, fans fe tromper. C'eft pour-
quoi il faut que ceux qui annoncent
l'Evangile, donnent l'illumination
de la connoiflance de la gloire dé
Dieu, en la face de Jesus-Christ,
&
tenu en I 532. 367
& non pas fans Jésus - Christ,
ou hors de lui 2. Cor, g. Car cette
connoiflance de Dieu qui n'eft pas
fondée furjESus-CnRisT fe
pert 5c fe réduit à rien , comme
Ciceron le dit de Simonides , qui à
force de méditer & de vouloir apro-
* fondir ce que c etoit que Dieu, en
vint enfin à ce point , qu'il fe tiou-
va plus ignorant dans la connoif-
fance de l3ieu que lors qu'il avoit
commencé d'y penfer. Les Juifs
auflfi font privés encore aujourd'hui
de la connoiffance de Dieu , avec
toute leur Lettre morte & leur
Arche de l'Alliance , car l'Arche
n'eft plus. Il y a maintenant un
nouveau Symbole de Dieu > favoir
que Dieu lui - même reconcilie le
monde à lui par Jes us-Chris t.
Auparavant le couvercle de TAr-
■ che étoit Appelle le Propitiatoire j
maintenant Jesus-Christ lui-
même eft le vrai propitiatoire, de
la bouche duquel nous entendons
la voix miféricordieufe de Dieu j
; nous fommes alTûrés avec lui, 6c
I nous avons un accès Libre au-
près du Pérc par lui, comme Je-
I rcmie le témoigne , Jls ne diront
' 4 plus
368 A6f es du Synode de Berne»
plus y r Arche de l Allian-
ce DU Seigneur;. Ce difcours
ne montera plus dans leur cœur y ils
ne s'en fouviendront plus; mais Je»
rufalem fera appelée le Trône de Dieu,
Là le Pfophére parle du régne de
Jesus-Christ & de la Jéru- i
jfalem Célefte qui eft libre > & dans i
laquelle pieu habite , favoir dans (
les cœurs des Elus, Il fuie de là» >
que Dieu le Pére n'eft bien connue
en vérité, dans ce tems de la grâce,
que dans le Chef & dans fes Mem-
bres, favoir en Jefus-Chrift & en
fes Fidéhs , puifque c'eft en lui
que la grâce eft auin parvenue aux i
Payens , lefquels ont été rendus l
participans de la grâce par lui > ,
fans Ja Loi , par fon Sang divin, ,
& en l'opération du faintElprit,
CHAPITRE VL
Qjdun Sermon Chrétien doh être i
uniqttement tiré de J £ s U s -
C H R 1 S T 3 parler de
lui,
^Omme Dieu a toûjours attaché
fa connoilTance , pour ainfi di-
re , à de certaines œuvres fym-
boles
tenu en X'yll. 369
ibûles remarquables 5 & que toutes
ces chofes ont été des figures, des
ombres 3c des types qui fe rapor*
itoient à Jefus Chrift , lequel eft
aparu dans les derniers tems ? 3c
a parachevé fa courfe dans la chair^
cft monté au Ciel , 3c fe fait fen-
,tir tous les jours dans les Fidé- <
les par le S. Efprit , Et puifque ce
n eft qu'un feul 3c même myftére
que celui du Pére 3c du Fils , 3c
qu'aufil nul ne peut connottre le Pére
finon par le Fils , pour cette caufé
il eft abfolum.ent nécefTaire , que
tous les Serviteurs de Dieu , qui
annoncent le régne de Jefus-Chrift,
prêchent foigneufement nôtre feul
Seigneur Je s u s 5 dont la connoif.
fance furpalTc toutes chofes. C'eft
pourquoi nous devons nous exhor-
ter fidèlement les uns les autres,
à ce que nous , qui fommes les
Miniftres de l'Evangile, prêchions
uniquement ce Jésus nôtre Sei-
gneur, fur qui repofc tout le con-
fcil de Dieu , afin que nous ne
foyons pas trouvés comme des Pré-
dicateurs de la Loi, ou autrement
des Prédicateurs mondains , n'en-
feignant que les penfées de nôtre
Qw5 propre
370 Actes dri Synode de Berne»
propie raifon, & que nous ne fo-
yons pas rejettés du Seigneur y
comme de faux Serviteurs.
CHAPITRE VII.
Qî^il faut com?nenc€r ér finir la.
Do^lrine U Vie Chrétienne^
à la mort à U réfurreclion
de Je sus-Christ.
n'eft pas encore afles que les
Minières ayent fouvent dans la
bouche ces paroles : Jefus - Chriftj
notre Sauveur y & d'autres fembla»i
blables 5 & de les due auPeuple^,!
car l'Evangile du royaume, ne con*
fîfte pas en fimple voix ou en fim--
pie parole, mai? en vraie vertu
de Dieu , laquelle faifit les cœurr
des Fidèles , les change , les re^
nouvelle; & de pauvres pécheursi
qu'ils étoient , les rend Enfans de^
Dieu , & en fait des Hommes*
tout céleftesdont les inclinations ne
font plus charnelles? mais divines.
Or pour parvenir à ce bonheur*
il faut commencer par la mort &
par la réfurreclion de Jefus-Chrift,!
& a in fi prêcher en Ton nom \t
repentance Se le pardon des péche^
tenu en IS32. yji
C'eft là ce que doivent contenir
toutes les Prédications Chié iennes.
C eft ainfi que J^-fus - Chrift a
icommandé à fes Difciples de prê-
cher, ceft ce que les Apôtres ont
obfervé, c'eft ce que les Elûs ont
embrafle par la Foi ; c'eft ce que
le S. Efprit a confirmé, & ce que tout
le monde doit avouer, fur quoi il
faut obferver le paflage fuivant :
Alors il leur ouvrit r entendement y
afin quils compîiffent les Ecritures^ &
il leur dit. Il eft ainfe écrit , & ceft
ainfi quil faîoit que /^Christ
foufrit, & rejfufcitat d'entre les morts
4U troifiéme jour y & quil fit prêcher
en [on nom U repentance , & le par»
don des péchés parmi tous les Peuples^
Luc. XXIV.
Nous voyons par là que ce n eft
qu'après la réfurre^flion que la pré-
dication de la repentance Se du
pardon des péchés a eu lieu, puif-
que c'eft au nom de celui qui a
foufert , qui ell mort , &c qui eft
reffufcité, qu'il faut prêcher h re-
pentance 6c la remifrion||(es péchés»
C'eft pourquoi il faut que toutes
les Prédications fuient tournées de
ce côté làj afia déviter l'erreur, de
Q^<î cor-
372 Actes du Synode de Berne»
corriger les mœurs , & d'avancer
le bien. Il faut ajoûter à ce!a> que
ce fut après fa réfurrcflion que le
Seigneur envoya fesDifciples pour
prêcherj fur quoi il faut remarquer
que fous la réfurredlion , il faut
aufll comprendre tout le refte de
la vie de Jefus-Chrift , favoir,fon
Afcenfion dans le Ciel , & la dit
tribution du S. Efprit , avec les
effets qui s'en en fui vent dans k
confcience des Fidèles.
Il faut aufTi , bien méditer les
prédications de S. Pierre , dans le
Livre des A(fles des Apôtres > leC
quelles contiennent l'ordre qu'on
vient de marquer pour annoncer
le fâlut par Jifus - Chrift, kà. IL
IV. V. XI. XVII. XX. car elles
montrent par tout la mort & la
réfurre(flion de Jefus-Chrift, & an^-
noncent par là la repentance & le
pardon des péchés > ce qui eft le
ibmmaire de nôtre Evangile. Il eft
néceflaire de méditer foigneufement
ces Sermons des Apôtres, afin que
nous conjpiencions là ou ils ont
commence, & que nous puiffions
avancer & croîwre en Jefus-Chrift
comme eux.
Mais
tenu en î 532. 373
Mais dira-t-on 5 s'il faut com-
mencer 8c finir à la mort & à la
réfurre£lion de Jefus-Chrift, à quoi
ferv^enc donc les Evangeliftes > qui
nous décrivent fa naiffance 6c fa
vie ?
Réponfe, La naifTance & toute
la vie de Jefus-Chrift eft une pré-
paration à fa mort, tellement que
toute la difpenfation de fâ vie en
Ja chair, & faDodrine, a été tour-
née pour fervir a nôtre Salut , puif-
qu'il a été envoyé de fon Pére &
qu'il eft venu au Monde pour fau-
ver les pécheurs, certainement il
S'eft toujours fidèlement aquité de
fa commifTion > 6c a tourné de ce
coté là toutes fes paroles 8c fes
Ceuvres , autrement il auroit cté
défobéiftant à fon Pére> ce qui eft
impie à penfer. C'eft pourquoi
Tefprit qui eft en nous, ne cherche
dans toute fa Do£lrine autre cho/e
que la parole de fa croix ôc
flc fa gloire. De même il con-
temple les œuvres 6c les mi-
Mcles de Jcfus-Chi ift , dans let
<|liels il contemple le cours inté-
rieur de la grâce , 6c Topcration
(piiituelle de Jefus-Chrift dans le
cœuf}
374 A^es du Synode de Berne,
cœur, fa voir, Quzm lieu que nous
femmes des pécheurs aveugles &
fourdfi , il nous rend la vûe &
Touie pour entendre la voix vivante
du Pére : De boiteux que nous
fommes , il fait de nous de vail-
kns foldats , qui courent dans les
voyes de Dieu , fans broncher ; il
nous nettcye de la lèpre du péché
par fa grâce fdutaire, & le pécheuc
qui eft mort , il le vivifie par l'et
prit de la refurredlion. Ceft ainfî
que la Foi entendant parler des
miracles que le Seigneur a fait ex-
térieurement, admire en même tems
beaucoup plus les opérations inté-
rieures & fpirituelles qu il fait fen-
tir tous les jours par le S. Efprit,
lefquelles furpaffent tout entende-^
ment. La naiffance de Jefus-Chrift
qui a été faite par le S. Efprit, nous
montre que nous devenons enfans
de Dieu > lorfque , outre nôtre
naiffance charnelle , nousx fommes
aulfi faits des Hommes nouveaux
& céleftes, par le même S. Efprit
que le Seigneur Jefus nous donnei
C'eit pour cette raifon que les
Evangeliftes décrivent ainfi lanaif^
iànce ôc k vie de Jefus-Chnft; parce
tenu en l 532. 37S
que tout cela fert à nôtre Rédemp-
tion, ôc que nôtre mort à la chair,
& nôtre réfurredlion félon l'efprit
en Chrift, y eft figurée 5c repré^
fentée,
CHAPITRE VIII.
Comment il faut tirer de JesUS-
Christ la connoiffance deno"
tre péché.
'Apôtre écrit que Bicu a entière-
ment rendu reiommandable fa cha'*
rité envers nous, en ce que lors que
nous n étions que pécheurs &^ ennemis
de Dieu , Christ cfî mort pour
nous Rom. V. Il fuit de là que le
péché doit nous paroîcre abomi-
nable > & extrêmement haiffable j
puifquil a falu que le Fils de
Dieu mourut poi-r nous, afin d'en-^
lever de defifus nous ce fardeau
du pé.hé, il s'eft une fois offert
pour nous par le S. Efprit, & il
â trouvé une rédemption é*ernclle..
Il paroit par là quel fonds de
miférc 6c de malédi(flion il a dans
nôtre ccc^r puifqu il n en a pu être
purifié & fanftifié que par le fa-
crifice d'une viftiine li précicufe.
376 Acf-es du S'jnodè de Berne ^
& par rafperfion du Sang d'un
Dieu , car rien n avoit pû aupara-
vant remédier à ce mal.
Dieu eft le Créateur de l'Hom-
me. Il faloit que l'Homme fut
entièrement dévoué à fon Dieu j
Or cela n'eft plus dans fa nature,
car il regarde aux Créatures , à lui
même & à fon propre plaifJrrSc il
fait de foi -même une ^id aie à Fa-
quelle il atribue un nomieur di-
vin, ^ ii le veut en effet avoir r
de là*Vient que perfonne ne veut
ècre méprifé.
CHAPITRE IX.
Que cejl en J es U SfS^u rist^
dr fans la Loi 5 ^ue l'on doit
• chercher la connoijfance du
péché,
T Es Apôtres ont donné claire^
ment à connaître la corruption
de nôtre nature par la mort de Je-
fns- Chrift , au lieu que les Juifs
n ont connu leur péché par la Loi
\ de Moife , qu'avec beaucoup de
peine. C'eft pourquoi ils ont re-
préfcnté fîmplement aux Payens
leur péché > & leur ont annoncé
leur
tenu en 1532. 377
leur reconciliation par Jefus - Chrift
ifans la Loi , & ils n'en ont ren-
voyé aucun à Moife. Car fi l'on
apiend par la Loi , à connoîrre le
péché , ce n'eft qu'une œuvre froi-
;de & morte, qui n'a point de vie.
îQuelle peine n'ont ils pas eu avec
Jes Juifs , pour les détourner de
' Aîo'iÇe & les amener entièrement à
Jefus - Chrift ? & pourquoi vou-
drions nous donc détourner nôtre
Peuple de Jefiis-Chrtft , & le ra-
mener fous la fervitude de la Loi ?
CHAPITRE X.
Pourquoi S. Paul a tant parlé de
R 5 parce que de faux Apôtres
s'étoient glilTés dans l'Egli/è ,
enfeignoienc la Loi comme né-
zefTaire avec Jefus - Chrift , cet
Apôtre de la vérité, fut con-
traint de montrer pour quel ufa-
\z & jufques à quel point Moï-
e eft utile avec fon fervice. Au-
lement il n'auroit pas eu bcfoin
l'en parler aux Payens qui croioient
out fimplement en Jefus - Chrifl,
îk cfpéroient de recevoir de lui le
pardon
la Loi aux Payens,
378 Actes du Synode de Berne-y
pardon de leurs péchés , s atachant
à lui > Timitant & regardant à lui
dans toute leur conduire , car ce-
lui qui croit à Jefus-Chrill > a la
vie éternelle. Ccft pourquoi un
Payen qui a la Foi, n'a que faire
de la Pédagogie de la Loi , il a déjà
obtenu la liberté des Enfans.
CHAPITRE XI.
Que les Juifs & lesGQmWs font
parvenus à la Foi i les pré-
pners fous la Loi , dr les der-
niers fans la Loi.
/^Ependant TEglife affemblée
^ d'entre les Juifs, a retenu U
Loi avec Jefus - Chrift en liberté
Chrétienne , & Ta gardée avec un
grand zélé , mais fans préj'.'dicei
de la confiance qu'on doit avoir cnii
Jefus-Chrill, à quoi aufli ALiUchii
l'exhorte en la perfonne de Dieu
lorfqu'il décrit le régne de Jefus-
Chrift , Se qu'il conclut & fcéelte
toutes les Piophédes : Souvenés
*vous , dit-il, de la Loi de Aîoife mon
Serviteur , auqtu l je donnai a Horth
pour tout Ifra'cl des fîatuts & des ju
gmens. Pourquoi & pour com-t
bien
tenu ۔i I 532. 379
ien de tems Dieu ordonnc-t-il par
vlahchic de fe fouvenir de la Loi?
larce & pour fi Icng-tems , juA
[u'à ce qu'ils reconnurent TimpuiC-
ance de la Loi, 6c fon véritable
ifage, c'efl à-dire, qu'il fuffer^t por-
es par elle à défirer ardemment
a venue du jour du Seigneur, &
afqu'a ce qu £//^le Prédicateur de k
epentance fut venu , & qu il eut
réparé le chemin du Seigneur dans
i pécheur éfrayé. Quand cela
fl fait , le Miniftére de Moïfe eft
ni, & cependant il eft volontai-
ement gardé fans commandement
ar ceux qui y font acoutumés, &
ui par l'exercice extérieur de la
.oi. animent leur Foi, 6c fe ré-
•réfentent les tréfors intérieurs du
Loyaume des cicux, comme l'Egli-
e Apoftolique Ta fait à Jerufa-
em , mais perfonne d'autre, C'efl
Hourquoi Puul n'enfeignc point
le renoncer à la Loi , mais il fe
harge lui-même d'une purification
clon la Loi àjerufalem, par Ta-
is des autres Apôtres , afin de
e faire regarder comme un Hom-
ne qui reçoit la Loi comme bon-
le , 6c non pas qui la rejette
comme
380 Actes du Synode de Bemt
comme mauvaife. D'autre cote»
l'Eglife Apoftolique de Jerufalem
ne voulue point lier les Fidèles
Gentils à la Loi > bien que quant
à eux 5 ils euflent tant de zèle
pour elle h€t, XXI. car elle écoit
utile aux Fidèles d'entre les Juifs
qui favoient en faire un bon ufa-
ge, y étant acoutumés dès leur
enfance, ils fe reflouvenoient en
pratiquant la Loi de leur Seigneur
Jésus - Christ , de fes dons^de fes
grâces, & de leurs péchés.Mais quant
aux Gentils qui n'avoient aucuni
habitude avec la Loi , elle ne pou^,
voit produire en eux qu'une faufli
confiance dans les œuvres > foit
qu'on l'enfeignât devant > ou après
Jefus-Chrift , comme fi Won n'avoil
pas tout en lui. Les Jnifs fidélesjlj
au contraire , reconnoiflbient fort
bien ' par expérience que ces ceuvrcî
de la Loi leur étoient utiles , J
l'égard des figures 8c de leur figni^,
fications & ils n'avoiènt pas liei
d'apréhender de perdre la grâce i
& de fe rejetter fous les foibl
élemens de ce monde , tant qu'i
perfévéreroient dans la grâce qu'il
avoient obtenue,.
G HA
15
tenu en 1^2,2. 381
CHAPITRE XII.
différence entre la manière de
prêcher JesUS -Christ
parmi les Payens & eelle de
le prêcher parmi les Juifs^
K Infi il y a de la différence en-
tre le Miniftére Apoftolique ,
eftiné pour les Gentils , qui fut
Dnfié à S, Paul, & le Miniftére
es autres Apôtres deftiné pour
;s Juifs, dont S, Pierre k fervit. Ce
ernier eft zèle pour la Loi fans
anger , ^cl, XXI. Mais le pré-
lier ne fe met point en peine de
îLoi, & n'a du tout rien à faire
VQC Moife que par accident, au-
int qu'il rend témoignage à leur
ien aimé Sauveur, ik qu'il eft uti-
I à inftruire , à cenfurer Se à cor-
ger Sec. Mais nous qui venons
es Gentils, Se qui avons à faire
vec des Gentils, Se non pas avec
es Juifs , nous devons annoncer
i grâce en Jefus-Chrift fans la Loi,
omme S. Paul avoit acoutumé de
aire , Se non pas nous mettre en
>eine d'obfcrver la Loi avec TE-
,life de S. Pierre affemblée à Jeru-
382 Actes du Synode de Berne ^
falem, car Jefus-Chrift nous fufF.
Que voulons nous davantage
^Jem* I. ■
CHAPITRE Xlir.
jyoH vinrent les faux Af mes.
T^E la vient que les faux Apô
très fe couvroient de Tautho
rite de TEglife de Jerufalem , qi
avoit un grand zèle pour la Loi
& fe vantoit d'avoir comminio
de fa part auprès des Gentils, mai
contre la vérité , 6c tâchoient d
détourner de la Foi les Gentils cor
vertis, & de les ramener de î(||
fus-Chrift à Moïfe- Mais rEglill
de Jerufalem ne fit rien de ierrB
blable , & TApôcre S. Paul s opqi
fâ vivement à ces mêmes faux Ap^
très > exhortant les fidèles Genti
à demeurer fermes dans la purci
de la Foi 9 pour cela il lui éto
néceffaire d'avancer beaucoup c
chofes, touchant la pratique, T
fage & la valeur de la Loi
Moife , non pas que fon princi
deffein fût de conduire par là 1
Fidèles à une plus grande conno
fance du péché, duquel ils avoie
tenu en IS32. 383
été juftifiés auparavant, car Jefus-
Chrift nous donne une connoiffance -
beaucoup plus claire du refte du
péché ; mais il a agité cette difpute
touchant la Loi , afin de prévenir
(a confiance qu ils auroient pu met-
tre en la Loi> comme une chofe
pcrnicieufe, & pour les affermir
* en Jefus-Chrid , qui donne fans
la Loi de la Lettre > Tefprit de la
Loi de vie, laquelle fubfifte éter-
nellement.
Ceft pourquoi nous Miniftres ,
t'oulons employer cette manière
de prêcher, dont les Apôtres fe font
, Ifcrvis envers les Gentils , leur fai-
fant connoître le péché par Jefus-
Chrift fans la Loi , & leur annon-
çant la grâce & le pardon des
Dechés par Jefus - Chrift. Et s'il
irrive que nous ayons à traiter
devant nôtre Eglife quelque texte
^ui foit tourné contre les faux
\pôtres & Douleurs de la Loi, il
audra bien l'expliquer nettement,
nais cependant ramener en même
:ems la fimplicité de fefus-Chîift
'ans Ja Loi , C eft cela qui fert à
élever un vrai édifice de Dieu , &
prévient beaucoup d erreurs , lef-
quelics
384 Actes du Synode de Berne»
quelles des gens fin pies peuvent
fort facïlemenc tirer de la Lettre,
.& les foutiennent enfuite fans in»
telllgence,
CHAPITRE XIV.
De la refentance & du pardon
des péchez , OU de la difpen-
fat ion de la grâce.
A Près qu'on â tiré de la pâfrion
de J E s u s-C H R 1 s T 8c de fon
entrée dans la gloire du Pére » une
folide connoiffance du péché , il en
découle naturellement une vérita
ble repentance , c*eft-à-dire, une vi
ve douleur & un grand déplaifîr
d'avoir cffenfé Dieu par le péchci
& i'efpérance d'en obtenir le par
don , parce que le Fils de Dieu
a été envoyé au monde par fon
Pére célefte pour foufrir & pour,
mourir, afin que par fâ mort
nous rendit la vie & la pofTtfrion
des biens céleftes. Quand donc
le Pére a ainfi manifefté fon Fils j
& l'a propofé à la confcience, cela
, produit une Foi vive & une fer-
me confiance en cette grâce incoiii-
préhenfible de Dieu. C'eft là h
Foj
oi qui juftifie. Car qui croit en
noï , dit le Seigneur , // a Id vie
't cruelle. Il eft pujfè de U mort à
X vie, fon nom eft écrit dans le
l.ivre de vie pour entrer dans le
Ciel, où rien d'impur 6c de fouillé
ie peut entrer.
Ccft là la manière , dont le
Seigneur dirpenfê fa grâce par le
5. Efprit ; Qut chacun aprenne par
la mort , par la rerurre(ftion & par
i'afcenfion de Jes us-Christ à
:^enoncer à fes péchés &: à fà na-
ture, corrompuë , pour rechercher
le don de Dieu en Jefus-Chiifti
Se à s y confier entièrement ; Et
:*eft par cette confiance, que Ton
reçoit la grâce par laquelle tous
nos péchés pafles nous font par-
donnés.
L'Efprit de Jcfus-Chrift y con-
tribue au/Ti, fon opération décou-
vrant & mettant au jour de plus
en plus le péché caché, & la cor-
ruption fecrette des cœurs, laquelle
il confume de jour en jour , & il
purifie journellement le cœur com-
me le feu puiifie l'argent, il
le netroye de l'écume &: de la
cralTe du péché. Car h S. Efprit
7m. IK R a deux
3S6 Ac7es du Sjnode de Berne*
a deux ouvrages à faire en nous.
Le prémier eft, que par fa grâce
il rend les Fidèles juftes & de
nouveaux Hommes, Le fécond,
c'eft qu'il nous aide à devenir lc»i
héritiers de la vie éternelle félon
nôtre efpérance \ ce qui fe fait lors
que nous demeurons fermes dans
le combat de la Foi, que nous
mourons journellement à la chair;
&: que nous aquerons des incli-
nations fpirituelles & céleftes. On
peut au fujet de la repentance , &I
du pardon des péchés en Jefus^
Chrift , méditer le paffage fuivan
& d'autres fèmblables. Tendons \
U perfection > & ne mettons pas dt4
rechef le fondement de U repentance
des œuvres mortes ^ & de U Foi n
Dieu Hebn VL
CHAPITRE XV.
La repentance trouvée en Je^
SUS' Christ, efi le fo,
dément.
T A repentance eft le fondement
mais comme on Ta dit, il fau»
la chercher en Jefus-Chrift. C e£
pourquoi la prédication de Jefus
Chrif
tenu en I 532. lij
Chrift eft celle-ci: Amendés vous^
ar le Royaume des cicux e(i aproché.
i:'eft-à-dire, que la caufe de la rc-
)entance ou de ramendement, doit
tre le défir du Royaume des cieux,
;cquel eft préfenté par Jefus - Chrift
»our le recevoir ; ce qui arrive
orfque le S. Efpric nous arofe >
ous nettoyé 6^ noiîs fandlifie par
i Sang de Chrift. Jean Butifte
xhorte aufli à la repentanccjlePcu-
le qui défire d'échaper à la colère
e Dico , & d'être préfervé de U
erdition ; & nous le devons imi-
'.r en cela , comme les Apôrres
ont imité exaftement , comme le
)nt voir les paflages fuivans. Apiès
uc S. Pierre eut prouvé dans Ton
:rmon que Dieu avoit relTufcité
îfus-Chrift d'entre les morts , il
t j Maintenant ayant été élevé par U
xtre de Dieu , & ayant reçu dn
he la promejfe du S, Efprit y il a
pandu ce que vous voyés & enten^
s &c. Que donc toute la maifon
/frael fâche pour certain, que Dieu m,
't Seigneur & Chrift ce Jésus que
us avés crucifié. Et comme ils
• renr , que faut-il que nous fajfions ?
» Pierre répondit : Amendés vous
K z &
388 Acics du Synode de Berne ^
& que chacun de vous foi: bjtifé au
mm de Jefus - Chrift , & vous rece-
^res le don du S. Efprit A<ft. II. Le
Dieu de nos Pères a rejfufcité Jefus^
lequel vous avés fait mourir , ie pen-
dant au bois, C'e^ celm que Ditu
élevé par fa dextre> pour être le Prin-
ce & le Sauveur , pour donner L
repentance a Ifrael & la reni'jfio)
des pé.hes , & nous fommes témoin
de ce que nous difons , & le S. Ej
prit atfffi &CC. Aa. V. Ceft là u
court & parfait Sermon j qui con
tient toute la conduite de Die
envers les Hommes par Jefu
Chrift.
CHAPITRE XVI.
Le Àd'jfiére , qui a été caché d
La fondation du Adonde ^ ej
que Jésus - Ch ri st i
prêché aux Payens fans
Loi,
TLs dirent : Dieu donc a auftl do
^ né aux Payens la repenrance po
vivre ^(l, XI. dans lefquels i
excellentes richeffes du Myft<
c*eft-à-Jire , de Chrift , ont écc (
voilées parmi les Payens , ap |
av ■
tenu en I 532. 389
ivoir é:é cachées dès la fordation
iu Monde. Cthii donc qui ayant
i prêcher parmi les Gentils , veut
ixciter la repenrance par la Loi ,
:e fai: qu'obfcurcir les principaux
vlyftéres & la gloire de Jcfùs-
Dhrift , favoir que le S. Efprir eft
nvoïé égaltment par Jefus-Chrift
LUX J'jifs fous la Loi, &: aux Gen-
ils Ans h Loi. C'eil là ce qu'il
"auc bien remarquer,
S. Paul érrm: à ThefTalonique >
)a'la de la Loi aux Juifs trois
ours durant. Il la leur expliqua,
k. il leur fit voir qu'/7 oït que'
e Chrift fouffrit & rejjufcitk d'entre
es moi rs , & que J e s u s , ie^
luel dit- il 5 ]e vous annonce , e!Jt Is
:hmst A(fl.XVir.
De même à Athènes : Di:// dit-il,
yant dïfjhr.ulé les tems de ngneran-
comm nde m.intinAit a tcus' lc$-
. omwes en tous lieux de je rcp nt'r,
AYce qu'il a dctirth'iné un jour aH-»
' el 7 doit juu'r le Alonde en juflicef
ir niojvnie qu .l a ctabii pcu" ccLt,
\(jf(oi ./ a f^it F i à chacun en le
' Iffifatant d. s morts,
y ai t. 'me igné, ta:it au J:^ifs quaux
'.es y la ripintance emers Di,u,
R i U
390 A^es du Synode de Berne l
U Foi en Jefus-Chtift Aa. XX,'(
CHAPITRE XVIL
Que ton peut aujji tirer des Prfi-
fhètes^ des injlru^ions pour U
repentdncc Chrétienne.
QUand donc on a à expliquer
^des paffages du vieux tefta-
jnent, qui traitent de la repentan-
cc , il faut toûjours les rapoiter à
Je/us-Chrift , comme on vient de
le faire voir , pui/que tous les Pro-
phétes conduifcnt à lui, comme ce
partage de Jeremie. Sï le Peufk
€ontre lequel f aurai parle fe détour^
ne du mal & s amende &c. Il faut
entendre cela avec des oreillesi
Chrétiennes > & faire réflexion que
ce n'eft qu'en Jefuf -Chrift qu'il faut
chercher cette rcpentance , comme
ce neft qu'en lui qu'on la peut
trouver, afin que perfonne ne s'i-
magine, que le défir férieux qu'il
1 de s'amender vienne de lui mê«
me > lâns l'opération de Jefus-i
Chrift, & ne fe perfuade fauffc-,
ment qu'il cft bien -tôt près dej
Dieu.
CHA.
lOUi
m
flic
m
tenn en IÎ32. 391
CH AP ITRE XVIII.
Qi^il faut toujours croitre dans
la connoiffance de J e s U s-
Christ, & que chacun
doit examiner fa propre Foi.
L faut que cette Doflrine que
nous venons d'expofer , croiflfe
urnellement dans les Eglifes &
ans les Fidèles, qui doivent s'at
ûrer de plus en plus de leur vo-
lation, en examinant foigneufe-
nent & en ranimant leur Foi. Car
quiconque n*avance pas dans la
lonnoiffance & dans le fenrimcnt
ie Jefus-Chrift , dccroit ^ recv 1.,
)U bien même > il n'a jamais en-
ore bien éré dans le droic (h ^min.
D'eft à quoi fe vent les ex ho- ta-
ions deS. Pâjl, dans lefqtitiles
es Payeurs doivent s*excrcer foi-
jneufement.
D'autre côté , TEleftion & la
lirace de Dieu, de laquelle tojc
iépcnd , ne péiit jamais ; ccpen-
iant il faut enfeigiicr au Peiipl»: de
examiner foi-même , & de voir fi
^ette éIe<flion & fi cette volonté mi-
éricordieufe de Dieu par Jesus-
R 4 Christ
392 Actes du Swode de Berne,
Christ a eu lieu en eux , & a
éré exécutée ou non , c'eft-à-dirc;
que chacun fâche ce qu'il a vérita-
blement reçu de Jefus-Chrift , &
ce qu'il lui manque en rintelhgen
ce & en la connoilTance de Chrift.
qui n'cft autre chofe que le renou-
vellement du cœur , & l'Homme
intérieur, fpirituel & célefte, qu
eft fkns péché, entant qu'il eil ne
de Dieu & qu'il ne vient point d(
lach^ir & du Sang. Car la Foi ef
une aflurance vive du cœur. le
il ne fufKt pas d'avoir uns fimpl
perfuafion , comme cela fe fait danî
les affaires humaines.
Jufques ici nous avons parlé d<
Ja Doflfine de Jefus-Chrift , qu
commence à fa mort & à fa re-
furre(flion. Dans la mort de Jefus
Chrifl on aprend la connoiffanci
du péché & la véiitable repcntan
ce '-y on ap:end le pardon des pc
chés dans fon élév-ation , laquelle
par 1.1 Foi &: par le don de Dieu
qui eft Chrift en efprit , fertilift
les cœurs des Elus par une femen-
ce àÀ'^iwç,, &c engendre par cette fc-
mence, incorrupcibl j pour le Ro-
yaume des cieux , des Hommes cé-
lefte*>
ttnu en î jgy
lefles, c'efl-à dire, des Hommes qui
commencent de tout leur cœur à
quitter Is péché a pratiquer la
juftice & la vertu , en éprouvant
i'amour de Dieu tn la Foi. C'eft
là une Do(ftrine qu'il faudroit pref-
fer dans tous les Sermons. C'efl
là ce que nous avions à dire fiir
l'Article delà fîine Do(flrine. Nous
voulons encore ajouter quelque.
:hofe touchant les Sacremens.
CHAPITRE XîX.
Des Saints Sacremens , du
k Ba renie en général.
lA ^'^J^^^^ Sacremens, voici
quelle eft nôtre penfée : Qne
fcous nous exhortions foigneufe-
fcnent les uns les autres , à garder
la charité envers tout le Monde
autant qu'il nous cft po/Tible > de
que nous ne nous eng^if^ions point
dans aucune difpute , particulié-x--
ment au fujct des Saints Sacre-
mens, tant qu'on nous biffera le
MvAcrc, qui cft le Seigneur Jefur-.
Chrift, quand mc;nc on ne nous le
l ilTeroit pas fi clairement, ^ de
la manière qu'il le faudroit , de
R 5 peur
394 A5fes du Synode de Berne»
peur que nous ne le perdions pat
la difpuce.
Car ks Sacremens doivent nous
fervir à nous avancer dans la per-
feftion , & non pas à exciter ea i
nous des mouvemens de nos fens
charnels. Si donc quelcun veuti
opiniâtrement foûtenir fon opinion>i
il faut prudemment quiter la par-
tie & détourner le difcours auxi
cho fes qui font certaines , JefqueH
les Jefus-Chrifl lui-même produit!
en nous par le S. Efprit, félon la
grâce que Dieu a faite à chacun
en tout tems , favoir > parler de la<
vertu & de I cfficace de la Foi; dei
la bonne confcience, en quoi ellel
confiée y combien de rems elle!
fubfifte, comment & pourquoi elleS
peut déchoir , combien elle eft
tcûjowrs éloignée de l'avancement
intérieur & de Tacroiffement de li
grâce > te autres chofes fembla-
bles; pourvû feulement que nous
nous étudions toûjours à prévenici
de tout nôtre pouvoir les qucrcl^
les & les difputes > ^ 2. ne point
forger d'Aiticle de Foi comme Toit
fait d*ordinaire, pour lier les confcien-^
ces les uns des autres , & pour les
obliger
tenu en I S 32. 39 S
obliger d*entrer dans fon fentimsnr.
Antrcment on donne derechef oc-
cafîon à toutes fortes de maux &
d'abominations > & Ton ouvre la
porte à toutes forces d'erreurs.
Or il nous fembleroit que la ma-
nière la plus fûre pour bien parler
des Sacremens eft celle-ci : Premiè-
rement, que ce ne font pas de fim-
ples cérémonies , que les Hébreux
appellent huk^m , car elles ont été
des ombres 66 des figures de Jefus-
Chrifl qui devoit venir , lequel cft
maintenant préfent dans fon Eglife
& y demeure jufques à la fin du
IVlondc : Mais c» font des Myfté-
res de Dieu ou bien des Myliéres
de l'Eglife de Chrirt, lefquels pré-
fentent exrcrieurement aux Fidè-
les ce même Jefus-Chrift qui eft
préfent en Efprit Saint , ^qiîi rem-
pli: les cœurs. Ainfi nojs prions
le tout Puiflfdnt, qu'il falfe que Tu-
fagcs des Sacremeis foie parmi
nous un aifle véritablement divin,
& non pas une fi itplc œuvre
d'Homme, c'eft à-dire , qu: toû-*
jours ce grand Myi^éic Dïeu en
chair , vi . c 6c CioilL en r oii;; >
comme il nous e-t p;c^eirc vx-
396 ABes du S'jnode de Berne ^
téiieurement par les Sacremenr.
En fécond lieu jque quand nous
parlons des Sacremens , nous nous
fcrvions d'expreffions qui y foient
convenables en tout tems , & qui
fervent à nous édifier en Dieu par
Jefus-Chrift , & que nous ne nous
inquiétions point les uns les au-
tres par des termes qui font ma-
tière de difpute 8: de querelle. Ceft
de quoi nous avons un bel exem-
ple en TApôtre S.Paul, comme
quand il écrivoit ainfî aux Romains
qui avoient tous éié barifés enje-
fus - Chrift j Marchons honnêtemeuf
comme de jour, leur dit-il , non peint
en gourmanc if^ ni en Tirognerte 8cc.
Vîdîs foyés revêtus du Seigneur ]ESv%'i
Christ , & najés point foin de lé
chair peur fatisfaire fes convoitifts.
D'autre côté^écrivant aux Gala-,
tes 3 il kur dit: Maintenant que là
toi eft venue , nous ne fommes ^/«>^
feus le Pédagogue > car vous ete^
tous Enfaris de Dieu par la Toi en Je-
sus-Christ, car vous tous qui
avés été hatifés , vous avts éré rêvé'
tus de J(fus-Chrifl,
Qu'tft'Ce que nous lifons là ? Le
S. EÎprit s'oublie-t-il ainfi? Il prie
ks
tenu en n32. 397
es Romains bniifés de fe revêtir
iu Seigneur Jefus-Chrifl , &; quand
1 pails auxGalates, il change de
angage, 5^ il dit; que tous ceux
^ui ont été batifés ont déjà été
evétus du Seigneur Jefus-Chrift.
Cet exemple nous fait voir évi-
iemment, qu'il ne faut pas regar-
ier aux mots, aux paroles 6c aux
îxpreflTions, mais au fens, fuivant
equel on retient ou l'on change
es exprefîlons , félon qu'on le
:rouve plus utile de tems en tems.
C'eft pourquoi nous devons d'au«
:ant plus éviter les difputes de
TiOrsj ceux qui les font 5 que
ie Myftére efl important , lequek
ils obfcurcfffent par leurs difputes.
Mais nous devons dire tantôt avec
Ç. Paul , ^Gjés Ycvéius du nouvA
Homme ^ Revctés F ai mure de Dieu ^ les
armes de la lumière ; Révélés vous
comme des Elus, De plus , revêtes
'^'ous de U vertu d'en haut , & plu-
sieurs autres exprcffions fembla-
bles 5 loîfqiie nous exhortons TE-
ghfc à s'avancer dans la pié:é , 6c
que nous voyons ce qu'il manque
à n6rre Ef,life encore foible. Mais
fi nous confidérons d'autre côté, ce
que
398 A^es du Synode de Berne^
que nous avons obtenu de Dieu>i
nous tous qui croyons, & qui pan
le ba:ême de Chiift avons été ba-i
tifés au S. Efprit , & que la cha-i!
li é croit tout, nous pouvons aufili
dire que nous tous qui avons;
été batifés avons revêtu le Seigneur
Jefus-Chriftj & nous pouvons
ajoûter à cela> chers frères^ revêtes
de plus en plus le Seigneur Jésus-
Christ, car nous conûdéronSi
auffi d'abord ce qui nous manque)
en notre chair , fi nous contem-
plons la grâce de Dieu en nous»i
afin que nous ne tombions pasi
dans une fecrette complaifànce pour)
nous mêmes.
Une chofe qui a toûjotirs cor-^
rompu l'Eglife , c'eft que chacun
veut enfeigncr quelque chofe dci
nouveau , & qu'il y en a peu qui^
écoutent le véritable Douleur , qiii
cft le S. Efpiitj contre quoi nous^
avons ici propofé la fimplicité de<
Jefus-Chrift, dans laquelle no«si
voulons demeurer avec laide de
Dieu, & avec cela employer tous*
les moyens , comni^ les Sacrc-iH
mens , le Batcme , la Céne & kl
Parole extérieure t fans en corrom-l
tenu en I 532. 399
pre Tufage par une vaine curiofité.
Car en toutes chofes nous regar-
dons par la Foi à nôtre Jefus-
Chrift feul, ou du moins nous y
devons regarder , Veft ce que nous
i favons fort bien. Dieu nous faffe
la grâce de nous en aquiter fidè-
lement,
CHAPITRE XX.
Du Batême en particulier.
T 'Eglife eft celle dans laquelle
^ Jefus-Chrift habite, & laquelle
il conferve lui-même félon l'Hom-
me intérieur. Les Sacrcmens dç
cette Eglife ne font pas de fimpks
fignes» mais des fîgnes qui font
accompagnés de la vertu fccrete de
Dieu j comme par exemple, le St.
Batême dans lequel leMiniftre ba-
tife avec de l'eau, & Jefus-Chrift
batife en même tems avec fon Ef-
prit. Il eft vrai que nous bâti-
fons nos enfans , mais c'eft pour
les recevoir extérieurement dans
TEglife de Dieu par nôtre batême>
I dans l'erpérai ce que le Seigneur fé-
lon fa bonté infinie dépioyera fa
grâce envers eux , en les batifant
du
40 O A&-es du Synode de Berne y
da Saint Efprit, & nous tenons
ce Baiême des Enfins , pour un
vrai Sacrement.
Car nôtre Foi s'élève au deiTus
des chofes extéi^eures & au deffus
des tems & des lieux. Il eft auflî
une commémoration de ce Myilé-
re pour l'Homme fidèle, car un tel
cft de vraye de Chrift. C eft
pourquoi nôtre Batême des Enfans
efl un Sacrement de l'Eglife 5 &
un grand MyAére de Dieu, ôc noa
pas une fimple cérémonie > puif-
que nous fommes Chrétiens ,
que nous n'avons plus d'ombrefti
& de figures , mais que nous re->
prefentons véiitablement notre Foi
& nous la confirmons par le Sa4
crem.ent, que la chofe n'cjft pas en^
core éxécutée dans l'enfant, mais^
elle eft exécutée en nous, qui foiTM»
mes préfens à cette a^ion. Ec
nous favons que nous repréfen*
tons parle Sacrement, Tajflion doti
Dieu comme elle fe fait pour nous.»
& en nous 5 & non pas comme t
elle fubfifte devant Dieu éterner-
nellemenr,* C'eft pourquoi le Ba-
tême cnfevelit avec Jefus-Chrift &
reffufcire avec lui. Cependant nou$ \
avons^ I
tenu en I 532. 4oi
avons cette liberté par Jefûs-Chridj
que nous batifons celui que nous
efpérons d'élever à mourir au pé-
ché par Jefus-Chrift. Ainfi il faut
feulement bien prendre garde , que
nous n'adminiftrions pas les Sacre-
mens fans Myftére , autant qu'il
dépend de nous , & que cela tou-
che notre confcience ; car ils doi-
vent être & demeurer des Sacre-
mens , & non pas être pratiqués
pour une fimple cérémonie.
CHAPITRE XXr.
T>e [ admi/iiftration du Batème,
^'Effc pourquoi nciis prions &
exhortons , Que celui qui ba-
tife accoutume fon Peuple, à apor-
ter leurs Enfans le dimanche pour
les faire batifer lorfque TEglife eft
alTemblée. Car comme on l'a dit,
c'eft un Sacrement de l'Eglife, c'eft-
à-dire du Peuple fidèle. C eft pour<
quoi il ne le faut pas adnMniftrer
fans que TEglife foit préfcnte , car
fi 1 Eglifc n'eft pas préfcnte , le
Baiême n'eft point un Sacrement
de l'Eglife, mais un fimple lave-
ment d'enfanr.
Et
402 Actes du Synode de Berne,
Et quand une fagc femme fuper-
ftitieufe batife un Enfant dans la
nnaifon , comme on le leur enfei-
gne dans le Papifme , qui que ce
foit qui fe trouve là prefent, ce
îi'eft point un batême , car elle n'a
point d'ordre de cela de la part
de TEglife de Dieu , & il y a là
une Foi fauffe , parce que Ton pré-
tend que fi l'Enfant n etoit pas ba-
tife extérieurement , il périroit
éternellement. Ceft pourquoi en
d'autres lieux , de bons Chrétiens
ne batifent point leurs Enfans quand
ils font foibles & qu'il y a de
Taparence , ôc même qu'il eft cer-
tain qu'ils mourront dans un mois
ou deux. Il e(l nécefTaire de ba-^
tifer principalement à caufe des
Eglifes Chrétiennes > qui ne font
rien avec un Enfant que fur l'et
perance de l'avenir.
Afin auffi que nous ayons tous
i- une uniformité , nous trouvons à^
propos que le Bateme fe faffc* non
pas hors du Temple ou aa mi-
lieu , mais ai^près de la Table,
queTEnfanT demeure emmailliotté>
& qu'on ne lui batifè que la tête,
car cela eft caufe de plufieurs ma-
ladies>
tenu en I S 32. 403
ladies , lorfqu'iine chair tendre ,
qui ne fait que fortir du ventre
de fa Mère, & qui n'eft pas aceu-
tumée à lair , doit être plongée
dans de Teau froide ou expofie a
Tair froid. Là- deffus il ne faut
point s'embaiialTer de ce qu'on dit
depuis long tsmsj qu'à caufe de la
fignificarion du Batêmc»il faut plon-
ger TE ifant trois fois dans l'eau,
car teut cela ne font que des ima-
ginations d'Homme , car fi l'on
vouloit être fi fcrupuleux à ob-
ferver la Cgnification dans les cho*
fes extérieures, nous ne devrions
pas batifer dans des eaux puifées >
ni avoir quarante mefures d'eau,
que les Juifs appellent Sa,tu, ou
Sdin , félon leurTalmud: De mê-
me , à caufe de la fignificarion , fé-
lon ce qui eft dit au Prophète
Efaïc , il faudroit batifèr dans des
eaux vives & courantes. Car les
eaux intérieures 8c fpirituelles font
vivantes, & roûjours jailliflantes
en vie éternelle. Mais que devien-
droit notre liberté? & quel em-
barras n'aurions-nous pas pour ces
chofes extérieures qui nous em-
pêcheroient de contempler les ac-
tions
404 Acles du Synode de Berne^ ^
tions éternelles de Dieu qui ft
font en la Foi. C'eft pourquoi ,
Ckers Frères & Compagnons de fervke
en l'Evangile //^ Je sus-Christ,
nous voulons regarder pliuôt à la
principale partie de nôtre emploi,
favoir à annoncer J e s u s-C h r i s t
nôtre Seigneur, & ne nous point
^«mbarraffer des imaginations des
efprits inquiets, qui véritablement
ont bonne intention , mais qui jeN
tent les fimpies dans la fupeifti-»
tion à Tegard des chofts extérieu-*
res. Ainfi nous avons refolu de i
garder l'uniformité dans nôtre ad^ •
miniftration du Batême > & non i
pas de dire comme font quelques i
uns: Je fuis libre ^ ceft pourquoi \
'veux bat'tfer comme il me plaît, Quf, <
m'importe ce que font les autres 1 Non-» (
il ne faut pas ainfi faire , cher» i
Frères : Un Ch étien eft bien li<^
bre, mais il regarde à chacun 5 & :
il défîre de n'inquiéter & de nff
fcandalifer perfonne. Nous fom-
mes libres , mais efclaves de la jus-
tice 5 & fervireurs de chacun pour
l'amour de Jesus-Chri st. Et.
quelle charité Ch.'écienne eft ctlaj
que je ne veuille pas m'accommo»
der
tenu r;^ I 532. 40 5
der à toute une Ville & à tout un
Pays dans des chofes extérieures
m'y conformer ? Cependant
nous efpérons que perfonne ne
fera fi opiniâtre, qu'il veuille fe fer-
vir d'une Méthode particulière.
Or. comme le Bateme eft un Saint
Sacrement de TEglife Chrétienne >
nous voulons qu'on l'adminiftre
férieufement gravement, & qu'on
y life , & qu'on explique quelque
partage de l'Ecrirure qui traite du
Bacêrne , en expliquant la nature
du vrai rSatv^.ie de Jesus-Christ
qui fe fait par le S. Efprlt , par
lequel il renouvelle 8c engendre
d'enhayt les Enfans de Dieu pour
la vie éternelle. Et enfuite que
l'on prie gi-avement , 6c qu'on y
joigne une Exhortation au Peuple à
fe remettre leur Bateme devant les
yeux , & à le rendre tant plus
parfait en eux-mêmes, en mourant
à la chair , ôc en refTufcicant félon
Tefprit.
Après cela, que l'on adminiftre
le Bateme avec des manier :s férieu-
fes & graves , & non pas avec
des manières foies & ridicules com-
me cela fe fait dans le Papifme,
Car,
406 Actes du Synode de Berne,
Car, comme on la dit fou vent,
le Batême n eft pas une fîmple cé-
,rémonie, mais un grand & ex-
cellent Sacrement & un Myftéredci,
Dieu.
CHAPITRE XXIL
De la Céne du Seigneur.
A regard de la Céne du Sei-
gneur, il faut réïtircr ici , fie
rappeiler dans nôtre fou venir, ce
que nous avons dit ci-deffus des
Sacremens en général? du Ba-
tême. La Céne du Seigneur eft
toute l'affaire des Fidèles.
La fradtion du pain du Seigneur
renferme aufli un Sacrement, &
nullement une vaine Cérémonie,
& préfente aux Fidèles le Corps
& le Sang de Jesus-Christ,
qui eft mort pour nous éc> Corps
& Sang de Christ, qui par le
S. Efprit nous nourrit fie nous
abreuve intérieurement. Comme
par la bouche , le pain périlTable
nourrit, ôc le vin abreuve le Corps
qui eft fojet à la deûruûion *, ainfi
aufli la Foi élève /à vue , de l'ob-
jet temporel à celui qui eft éter-
^ tenu en I S 32. 407
lel > & ainfi elle regarde deux cho -
êsj la fxaûion extérieure du pain^
k la nourriture intérieure de TAme.
Vinfi le Corps 6c le précieux Sang
le Jcfus-Chrift font dans laCéne>
nais fon Corps charnel n'eft pas
enfermé dans le pain , & le Sang
orparel n*eft pis non plus dans
e vin , comme la vieille erreur le
aifoit accroire. II s'enfuit donc
]ue c'cft un Sacrement de Corn-
nunion & d'Union , puifqu'il pré-
ente aux Fidèles le Corps de Je-
bs- Chrift, duquel nous fommes
ous les membres > étant de (a
:hair & de fcs osj félon ce paffa-
5e: Le pain que nous rompons y neft*
l pas la communion du corps de
Christ? car nous qui fommes pln^
leurs ^ fommes un pain & un corps ^
•tant tous participans d'un même pain,
De-là il eft aifé de comprendre
:e que c'eft que difccrner le Corps
iu Seigneur-^ favoir ce Corps dont
lous fommes nourris > & avec le-
quel nous avons communion. Ce-
lui qui ne s'examine point foi-
même , & s'eftime être quelque
chofe plus que les autres, un tel
Hpmme ne di/cerne point le Corps
du
'408 Actes du Syfîode de Berne, I
du Seigneur; Il n'a point decommu- 1"'
nîon au Corps de Jcfus-Chrift tan- IW
dis qu'il fe repofe ainfi fur lui. ji"'
même \ Se h manducarion du pain
de l'Euchaiiftie eft pour lui 5 tout
comme s'il mangeoic du pain com-
mun 5 fans MyRéiÇy fans Chrift,
& ainfi // mange fa propre condam- ^
nation. Et Jelus- Chrift convaiiK ^-
la chair mondaine, de péché, pai ^
fon Efpric , ce qu'il ne fait pas '^^
encore dans un tel Homme , &
ainfi il n'eft pas encore en lui.
Quant à la manière d'adminif 10»^
tter le Sacrement , nous avom
trouvé bon de nous fervir d'Hof
ties * , Se que fi quelcun ne s'ac- "i'
commode pas de petites Hofties • ^
il en doit prendre de grolTes > & ^
les partager proprement en petit*
morceaux : Il a au/Ti été convenu
que l'on prêcheroit, que chacur as.'
doit prendre en fa main le pain & C
la coupe du Seignetir 3 Se que ceh SP
convient mieux, que de fe les laif
fer mettre dans la bcuche. Que ,
cependant s'il arrive que quelcur .
n^éranl s.
n
* Cet ufage fut abcli l'an iCo^- 5»
l'on ordo^ na de le fervir de pain com-
mun & lev«.
Itenu en 1532. 409
rétant pas accoutumé à cela , re-
pugnoit à cet ufage nouveau 5 nous
lui mettrons le Pain & le Calice à
la bouche , jufqu a-ce que cette ré-
pugnance lui pafle d'elle - même,
C'eft aufTi nôtre coutume de cé-
(lébrer l'Euchariftie trois * fois par
m , à Pâques > à la Pentecôte , ôc
à Noël j ce qui fè fait cependant
fans s'attacher fuperftitieufementau
:ems, puifquon ne gêne la Con-
science de perfonne à cet égard s
:omme le Pape 5 qui a ordonné ,
fous peine de péché mortel , de
communier une fois tous les ans
1 Pâques. Cependant > il eft aifé
de juger quelle eft la Foi & li
Charité d'un Homme 3 qui n'ayant
:icn qui 1 empêche de communier,
le veut pas fe conformer en cela à
une Églife ou Affemblée de gens de
bien.
On doit célébrer la S. Cé.ie avec
le plus grand férieux , puifqu'elJe
Tom. ly. S ren-
* Depuis ce tcms-lâ, l'an i^^y. l'ona
1 joute un quatrième Tjems, pour la cé-
lébration delà S. Céne, favoir, le com-
mencemenc de Septembre.- & l'an 16^^.
il fut ordonné qu'on la célébreroit huit
fois par an, favoir j deux joiurs différens,
là chaque Tcms.
410 Axîes du Synode de Berne,
renferme tout ce que Dieu fait à
Tame fidèle. C'cft pourquoi Ton
doit expliquer ce Myftère par la
Leflure d'une Ecriture , propre à
cet ufage, particuliércinent de rînf-
litution de la Céne du Seigneur,
de la manière que l'Apôtre S. Pau
& les Evangeîiftes l'ont décrite.
Cette le£lure doit être fuivie d'une,
prière compofée avec foin & faite
avec dévotion. Après quoi Ton
doit diftribuër le Pain la Coupe.
Et l'on doit finir par une AftioT
de grâces , félon que chacun fi
trouve difpofé. On doit aufli fai-
te mention , qui font ceux à qu:
cette viande fpirituelle ne convien'
ou n'appartient point , favoir, i
ceux qui ne font point du Royau
me desCieux: & donc S. Paul fai
i'énumeration î. Corinth.VI. Ôcci
d'autres endroits.
Et comme cette matière nou,
paroit encore trop profonde > &
que nous ne faifons que comment
cer, il nous faut, (& c'eft aufli
nôtre deflein,) faire plus d'attcni
tion à l'édification intérieure, qui
fubfiftc devant Dieu , qu'à Texte ;
lieure. C'eft pourquoi nous nou
con
■ itnu en I S 32. 41 1
^' contentons du Confiftoire , autant
du moins qu on y prendra les foins
néceffaires , & nous n'entrepren*
drons pas d'abord de procéder plus
outre contre quelcun psLï Excommu-
nication 5 car les Confiftoires peu-
vent reprimer les pécheurs fcan-
daleux , garentir les Eglifes de
mauvais exemples , 8c par la pu-
nition infligée au coupable , Ihî
donner occafion de renoncer à fa
mauvaife vie , D'ailleurs nous de-
vons exercer fort foigneufement
la Cenfure fraternelle envers cha-
cun. Et il arrive aufll tout na-
turellement y que les méchans fc
réparent de nous par leur mauvai-
fe vie, & leur conduite infâme >
car ils n'ont jamais bien été par-
mi nous. Et s'il arrivoit que ces
fortes de gens, fe montrant enne-
mis de l'Evangile parleurs difcours
& par leur conduite j voululfent
cependant aller communier à la
Table du Seigneur, chaque Servi-
teur de Dieu , zélé de bien inten-
tionné, faura bien trouver de lui-
même tous les moyens raifonna-
bles pour foûtenir l'honneur de fon
Seigneur, afin de n'être pas puni de
négligence, S z CHA-
412 Acfes du Synode de Berne,
CHAPITRE. XXIII.
De tufage de la Loi o' desPro^
phètes,
JL efl bien vrai , £omme nous le
voyons déformais clairement, que
nos Sacremens font de grands Myf^
téres de Dieu, & non pas des Cé-
rémonies toutes nuës; & que les
Cérém.onies & les Ordonnances de
Moïfe ne nous regardent p^îint, &
que l'on ne doit point faire re«
tourner le Chrétien en arriére 5 &
le ramener à Moifc & aux Prophè-
tes, pour fe former fur leur modèle
ou leurs préceptes , mais plutôt
on exhorte les Chrétiens à croître
toujours & à s'avancer dans la con-
noiflance de Jesus-Christ.
On objejfle contre cela ; Nous na-
'vons donc point befo'm de U Bible*
& nous ne devons point prêcher les
Ecrits du Vieux Teftament. A quoi
nous oppofons S. Paul, qui adret
foit cette exhortation à fon Difci-
pie Timoihée*: Demeure dans les
III. 14- c^Jojes que tu as aprîfes > puijque des
17. ton enfance tu as la connoiffancc des
Saintes Lettres, qui peuvent te ren-
dre fage à faltit , par U Foi , qui
tenu e'f2 l'ill' 413
fyf f« J E S u s-C H R I s T. Toute Ecri'
ture divinement infpirée , ejl utile pour
enfcîgner, pour convaincre , pour corri-
ger 5 pour inftïuirc dans la jufiice >
afin que l'Homme de Dieu [oit accom^
pli 5 & parfaitement propre a toute
bonne œuvre. Voilà es que dit l'A-
pôtre ; Il veut que Timothée de-
meure enlaFoi en Jesus-Christ, 6c
en mêine tems qu'il ferve de la S.
Ecriture &c. Ainfinous pouvons dé-
couvrir cinq endroits, par où l'Ecri-
ture Sainte Ecriture nous eft d'ufage.
Pfémiérement , l'Ecriture , c'efl-
à-dire> la Loi & les Prophètes >
nous rend f iges a falut ^ c'eft-à dire?
nous conduit à Je s u s -C H R I s T>
& nous aprend à croire en lui,
pour obtenir le falut & la vie
éternelle. Car qu'eft-ce que Moiïe
peut faire d'autre par fes Comman-
dement, qui nous montrent com-
ment nous devons être , & noiis
menacent de la mort , fi nous ne
fommcs pas tels, finon qu'il excite
ix\ nous un défit d'erre unis à ce-
lui qui juftifiele méchant, 8^ don-
le l'Homme intérieur , pour ne
pécher plus ? Qjcile grande fageffe
y^-a-t-il, à reconnoître par le moyen
S i de
414 Actes du Synode de Berne,
de la Loi & des Commandemensj
qui nous animent contre Dieu, que
nous devrions être fans convoitife
charnelle ? Et où efl: celui qui eft
tel par la Loi ? Perfonne. Ceft
pourquoi elle nous rend fages &
prudens 5 pouy obtenir le falutpar
la Foi en Jesus-Christ , qui par
le S. Efprit offre prémiérement U
farole de U Croix y qui Fait mourir
la convoirife, enfuite la parole de
la ou la vertu de la Réfur-
reûion , laquelle nous donne des
fenrimens fpiriruels Célefter.
C'efl ainfî que la Loi eft bonne >
pour celui qui s'en fcrt bien. Et
à cela fervent les figures du Taber-
nacle du témoignage 5 du Chandelier
d'or 5 de la TaUe des Pains de
pïopofitiouy de \ Arche de t Alliance >
du San^uaire , comme au/Ti tous
les Sairifices , & pour tout dire ei>
un mot 3 tour le fervice Mofaïquej
qui nous manifefle ^ nous fait
voir , qu'il n'y a rien de bon en
nous, c'eft-à-dire, dans nôtre chair y.
puifqu'il nous tuf^igne comme
quoi nous fommes éloignés de la
Sainteté, t:nr h l'égard de Dicu>
qu'à l'égard du prochain , par rap-
port
tenu lSi2\ 415
port aux deuxCommandemenSjqui
regardent Dieu & le prochain. Il
nous enfeigne la Croix 6c la Ré-
furreiftion de Jesus-Christ , dans
tout le Peuple , qui après avoir
été fouverainement abaiiTé eft éle*
v^é > & qui dans fa nécelTité ob-
:ient une délivrance temporelle ;
:ommc nous par une véritable
repentance , nous obtenons le fa-
tut érernel , lorfque nous cro-
yons en Je sus -Christ, Tous
.es Prophètes contiennent la mè-
ne choie, ne faifant qu'étendre dc
îxpliquer Moife , renfermant
les Hiftoires , qui font des ombres
k des figures de la Rédemption qui
ift en Jésus- Christ.
C'eft Jefus-Chrift enfin, que le -
>. Efprit a en vûë dans tous les
écrits de Moïfe & ces Prophêfes z,
l'id pour Tamour de lui , qtie
outes les œuvres extéiieujes de
)ieu ont un cours, qui t(ï un em-
•lème du cours d(i la grâce , fe-
on qu'elle s'accomplit intérieure*
,rient par l'Efpric de Jcfus-Chrift*
it par là Ton comprend ce que le.
cigneur a voulu dire, en l'Evan-
ile félon S, Jean 5 Chap. V. lorfl
S 4 qu'il
41 6 Actes du Synode de Berne ^
¥ y. 45. qu il parle en ces termes*: 5i vous
cfoiez a M&ife vous croiriez auffi, 4
moi > car il a écrit de moi. Et dang
le même Chap. t Sondez les Ecrï-
40. turcs i car vous crojcz d avoir la vit
par elles , & ce font elles qui ren»
dent témoignage de moi? mais vou
ne voulez p^s venir a moi. Il fuit
de là > que celui là n'entend pat
encore 1 Ecriture > qui n'y trouve
pas un témoignage > une introduc
tion , 6c tuie inftrudion qui re-
garde Jefus - Chrift. Que fi cepen
dant, par nôtre ignorance, il ar
rive que nous ne puifTions pas dé-
couvrir Jefus-Chrift, dans tous les
endroits de l'Ecriture , de la ma-
nière qu'on Ta dit^ cela ne doit
point nous faire de peine ? car k
S. Efprit nous aidera toujours de
plus en plus. Et comme dans
tous nos Sermons nous devons
prêcher Jefus - Chrift feul , il eA
néceflaireque nous nous attachions,
à chaque fois à quelque endroii
de cette Ecriture , qui nous repré*
fente Jésus - Christ ; & enfuitc
dans les autres endroits, où nous
ne découvrons point Jefus-Chrift,
y chercher quelque autre chofe de
tenu en I 532. 41?
bon *5 car FEcrirure efl utile pour
toute forte de bonnes chofes. Ce-
lui qui trouve quelque chofe ds
bon dans l'Ecriture, a fait fans
doute quelque progrès dans l'in-
telligence d^ ce S. Livre.
En fécond lieu , Ecriture ejf
utile pour enfeigner. Cet enft:igne-
ment cft la connoifiance des fruits,
des dons & des grâces, qui dé-
coulent de la Croix ^ & rintclli-
gence des biens céleftes , devien-
dra commune parmi nous , fi nous
continuons â nous exercer en Jé-
sus - C h k i s t , de la manière
qu'on vient de le dire. A cela ap-
partiennent les promelTes temporel-
les, que nous devons propofer fe*
Ion la pieté , & fpirituellement en
Jésus - Christ : & enfuitc.
dans un fens corporel , après &
autant que le S. Efprit a exercé en
nous un emploi plus relevé. Que
fi cela ncft pas , il eft à craindre
que dans les occafions nous ne prc-
fentions au Peuple plufieurs pro-
mcffes , outre Jefus-Chrift, & hor»
de lui 5 lefquclles n'ont aucun ef-
fet j ce qui nous convaincroit , que
IQUS ne feriv^ns ni Apôtres ni vé-^
S 4 jitâ-
41 8 Actes du Sy/iGCiC deBcTne^
ritables Prophètes, étans furpris efi
jnenfcnge, comme il eft arrivé à
quelques-uns, qui faifoient efpérei
aux Payfans, qu'ils lecevroient les
baies des ennemis dans leur man-
che, que par la vertu de leur
Foi ik les repoufferoient contr*eux.
Mais les Payfans furent cruelle-
ment battus 5 & ces faux Prophè-
tes n'ont rien fait de ce qu'ils
ont promis. C'eft pourquoi nous
qui ibmmes Minières de rEfprit>
nous devons expliquer tout d'une
manière fpirituelle , ccmime tout eft
fpirituel &: vrai en Jefus-Chrift. '
En troifîéme lieu , l'Ecriture eji
utile pour réfuter l'erreur. Car quoi-
que nous ayons quelque connoit
fânce par la- Foi , néanmoins nous
femmes encore remplis de ténc»-
bres & d'ignorance. Mais quand
on allègue l'Ecriture contre rerreur>
iJ faut toujours le faire félon l'a-
nalogie de la Foi en Jefus-Chrift r
& on ne la doit pas employer fé-
lon la Lettre morte feulement, com-
me quelques-uns ont de coutume
En quatrième lieu , elle eft uril»
pour corriger. Les Hiftoires 8c les
figures appliquées à nou5 > four-
niflant
tenu e-a I 532. A\9
ufTan: d'excellentes Exhortations^
En cinquième iiviu 5 Pour chktter
jr reprendre dans l.t JuTî-. e , c'eft à-
iire j pour ccnfarer les vices, aiîn
que nous y renoncions , 6^ que
:ous dL' venions gens de bien de-
vant Dieu.
Ici il faut bien prendre garde ,
ivant que de cenfurer quelque cho-
e après les Prophètes , de nous
Dien afTûicr , de ce qui eft mau^
/ais devant Dieu j Autrement nous
:ious trouvons nous mêmes ; faux
ï^rophêres , difant , Ainfi a dit l'E-
eriiel » Il nous erdonm tille cr tJlc
hcfe , au lieu que Dieu par des
Deuvres fuivantes montreroit, que
leile ou telle autre chofe lui eft
igréable. Car c'eft à cela qu'oa
:onr!oit un faux Prophète , quand
1 dit quelque chofe au nom du
y;igneiif j & cependant il n'en eft
den j ce. qu'il dit ne s'accomplit
pointa c'eil la /./ Parole que le Sei-
rneur na point prononcée : D&mQïon,.
XVIIL Dieu décerns la peine dc
mort contre de tels Prophètes, au
Chap. XIII. du même Livre,.
Il faut auiïi que les Cenfuies des
Prophètes, foicnt tcinperées 6c
4'20 Acfes du Synode de Berne y
adoucies dans nos ames Chrétien-
nes par rEfpric de Jefus-Chrift ;
cnforte qu'au milieu de leur rudef-
fe elles portent avec elles une cha-
rité qui pénétre le cœur, & qui
adouciffe l'amertume de la cenfure.
C'eft ainfi que nous pouvons
nous fervir de l'Ecriture, quand
même nous ne l'entendrions pas à
fond 5 c'eft-à-dire, que nous n'y
po jrrions pas encore trouver Jefus-
Chiift. Car l'Efprit de Dieu en-
feigne toutes fortes de bonnes cho-
fci 5 toutes les bonnes mœursj &c.
feulement > mes chers Frères , il
faut être bien attentifs , à nous »
aquiter fidèlement de la charge qui
nous eft impofée > favoir j de ps^
cher Jefus-Chrift.
CHAPITRE XXIV. ' J
Dli
D'attaquer le Papifme dans les j|
Sermons, A
\ mi
CN fécond lieu , il faut que les
Pafteurs fâchent bien les Lieux
communs des Papiftes , & qu'ils
les réfutent dans leurs Sermons j
apiès avoir propofé le Seigneui
Jésus-
tenu en I 532. 421
Je su s > conformément à l'Article
précédent , 8c en peu de mots, &
cela de point en point 5 & tout de
de fuite. Non pas toutes-fois dans
un feul Sermon , mais qu'ils com-
battent tantôt une fauffe Doélri-
ne> tantôt une autre, félon
qu*il eft à propos. Cependant il
faut qu'en cela le Miniftre fe fâfTe
un ordre pour ces matières. Car
quoique le Pape foit aboli extérieu-
rement dans les Etâts deLL.EE.
nos Souverains Seigeurs , foit dans
les Villes foit à la Campagne, il
eft cependant néceflaire , qu'on inC
truife fermement & exaftement les
pauvres gens, afin que leur Confl
cience ne foit point troublée &
féduite par les adverfaire?.
Et afin que Ton comprenne bien
nôtre penfée , fuppofé qu'un Mi-
niftre eut traité ce texte , Christ
4 le Chef de l'Eglife, & il eft le
Sauveur de fon Corps : & qu'il eut
montré , 1, comme quoi l'Eglifc
de Je s us - Chri ST , eft un
3j Peuple intérieur &: fpirituel , &
5, que celui là en eft un membre
51 vivant, que Jetus-Christ gou-
verne lui même, par le S.Efprir^
42 2 Actes du S-jnode d^^ Berne ^
Si ^u'il faïKftifie en même rems
« 3c rend heureux, fans la médian
33 tion d'aucune Créature : A cela
yy l'on pourrait incelTaniment ajoû-
ter : Qae par conféquent c'eft
^ renier Jefus-Chrift , qi-e de dire
que le Pape foit fon Vicaire ou
fon Lieutenant, car Jefus-Chrift
>3 efl: préfent lui-même dans fon
„ Eglife, & lui eft attaché , com-
3, me la Tête d'un corps eft atta-
>j chée aux membres , car c'cft lui-
^> même qui communique auxmem-
„ bres de fon Corps la Vie , la
Force ôc l'Efprir , Par où il par
»roit, que tout ce que le Papb
entreprend ou s'attribue j en qua-
>^ lité de Ficaire ou Lieutenant da
yy Jesus-Christj avec toutes
99 fes Ordonnances & fes Interdic-
yy rions > vient du Diable y Se eft
y9 contre Jésus - Christ nôtre
» Sauveur : Sec.
Ctla fe peut faire en plus ou en
moins de paroles > & en expri».
mant quelque article particuliar dt^
Papifme> comme celui de la Mejfe^
de la Confejfion AuricuUue Sec. fé-
lon qu'il conviendra chaque fois..
CHA-
I
CHAPITRE XXV.
Des Exhortations (jr dis Cen-
fires:
pUifqua le S. Efprit doit parlée
parles Miniftres 3 & prêcher le
Salut du Monde , qui eft nôtre
Seigneur Jefus-Chrift j que cet Ef-
prit conduit à Dieu , &c cenAire le
Monde de péché >• il faut que les
Minières dans toutes leurs prédi-
cations exhortent les Hommes d al-
ler a Jefus Chrill, & de produire des
fruits de Juftice, 6c enfuite qu'il cen-
fure les péchez du Monde; non feu-
lement les péchez extérieurs & les.
vices gro/Tiers; que Ton doit toute-
fois ii traquer vivement, mais aulTi.
ks péchez fpirituels , fecrets 8c ca-
chez 5 les jilufions de la chair 5
comme, la Complaifànce pour foi-
même, 1 Hypocîifie , l Orgueil fpi-
rituel , le manque d'Amour frater-
nelle , les manières rudes &: cho-
quantes , ôc toute autre femblable
difpofition du Cœur , defagréabla
à Dieu.
Mais en cela il cft nécelTaire que
le Prédicateur ccnfure, non pas,
par un mouvement chaniel. > maisL
par
424 Actes du Synode de Berne y
par un fentiment confiant de la véri-
té, comme devant Dieu,& en la pré-
fence de nôtre Seigneur Jésus-
C H RI s T. De-là vient, qu'il ne
cenfurera jamais , que par Teffet
d'une charité vive, dont fon Cœur
livré à Ditu , efl: rempli par fefus-
Chrift 5 6c ne cenfurera pas plus
qu'il ne faut , pour produire de
l'édifîcarion chez fes Auditeurs \ ï
d'autant qu'il faut que dans TE- ^
glife tout fe fafle pour la correc-» q
tion des pécheurs , & non pas par É
un emportement charnel , &; par i[
querelle , comme malheureufement ne
il arrive fou vent , que ceux qui» ïf
fe glorifient de ne faire que ce que f
le Seigneur leur a commandé , ft- do
prêchent eux-mêmes, exercent dans dii
ces occafions leur haine contre k
leurs ennemis ^ 8c aflouviffent m
ainfi leur paffion déréglée, & par
là donnent lieu aux gens d'appel- iît
1er leur Miniftère Cathedra, JmpU' do
dentidt (une- Chaire d'impudence ) re^
au lieu de Cathedra Ecclefu y ( 1*. oe
Chaire deTEglife.)
Il ne faut pas qu'il entre aucu- k
ne aigreur dans un Cœur qui en- i
treprend de prêcher Jesus-Christ,,
qui
tenu en I 532. 42 J
qui cft débonnaire > mais la Cha-
rité de Dieu doit erre répandue
dans un tel cœur par le S. Efprit,
qui lui eft donné > & doit y con-
duire fes Auditeurs. Quand donc
la Cenfure neft pas tirée de la
connoiiTance de J e s u s - Christ,
félon la volonté de Dieu , que la
rudeiTe de la cenfure n'eft pas tem-
pérés par la douceur ôc la charité,
& que tout le Monde ne s'apper-
çoit pas 5 que l'on cherche uni-
quement la gloire de Dieu 5 & le
faluf des Auditeurs , ce n'eft point
agir Chrétiennement. C'efl ce que
nous reconnoiiTons & que nous
avouons à la gloire de notre Sei-
gneur 6c de nôtre Dieu > lequel
nous prions ici, qu'il lui plaife de
diriger nos Cœurs & nos Langues,
& nous donne de tenir un jufte
milieu. Car auffi d'autre côté , ce
feroit très mal fait de vouloir gar-
der le fîlence , ou attaquer trop
doucement les vices. Celui qui
regarde uniquement au Jugement
de Dieu, peut trouver alTez d'inf.
truiftion fur ce fujet, dans les ré-
flexions qu'on vient de faire.
En cenfurant, on ne doit point
s'expri-
42 6 Aci-es du Synode de Berne ^
s'exprimer d'une manière qui fente
un efpric léger & mondain, mais
parler d'une manière qui marque
un efpric grave , ferme , èlevè,
pour ne peine ternir la gloire de
Jefus-Chrift, qui a prononcé libre-
ment la cenfure du péché contre le
Monde. Car dans TEglife toutes
chofes doivent fe faire avec bien-
féance. Au lieu que quelques-uns
d'entreux parlent d'une manière
peu mefurée & fort groffiére , qui
fait de la peine aux oreilles chat
tes j ce qu il faut éviter. C'eft
pourquoi nous nous exhortons, &
nous nous conjurons les uns les
autres, de nous exprimer d'une
manière fage , convenable 8c mo-
defte , qui ferve à édifier ôc noa
pas à troubler les foibles.
CHAPITRE XXVI.
Qui font ceuxqii^m doit cenfurer^
ne doit aufli cenfurer que les
^'^^ Auditeurs , qui font préfcnsf
c'eft à eux jfèuls qu'on doit adieC-
fer fon difcours» Car a quoi fer-
viroit-il , que dans les Terres de
LL» EE. de Berne, on attaqua
des
tenu en I532. 427
des Potentats & des Princes > qui
n'ont rien à démêler avec nous »
& qui ne veulent point avoir de
communion avec nôtre Eglife ? S»
Paul dit I. Cor. XII. Que toutes
chofes doivent fe faire dans TEgli-
; ;fe fom le bien du Corps. Quel bien
^ revient-il de cenfurer vivement une
perfonne qui eft abfente, 6c d'entre-
tenir fes Auditeurs qui font préfens^
de ces paroles inutiles 5 au lieu de
1! leur adrelTer de bonnes inftru(ftions
& des cenfures dont ils auroient
befoin ? C'eft tout de même que fi
Ton vouloit donner du remède à un
mortjôc qu'on laiïïat périr un malade
dans fa maladie. Celui-ci auroit be-
foin de remède a on ne lui en donne
point;& celui-làjc'efl à-direjle mort>
ne tire aucun avantage de ce médi-
cament , finon qu il en viendra,
tant plutôt à puër. Ainfi nous ne
gagnons rien fur les étrangers, par
nos difcours emportez , & nous,
iaiffons nôtre Troupeau qui eft
préfenr , croupir dans fes convoiti*
fes charnelles , au lieu que nous
pourrions. Se que nous devrions
fervir à Tcn tirer par des cenfures
faites de la manière qu il convient.
Ainfi
'428 An^es du Synode de BernCy
Ainfi nous faifons du mal de tous
cotez, en ne nous tenant pas à la
régie de J E s u s - C H R I s T : cai
cela excite mal- à* propos de lai-
greur contre les abfens , dans les
tÇpùts de nôtre Troupeau , quj
nous en entend parler avec tani
de chaleur , 6c le fait tomber dan!
un faux jugement > enforte qui]
n'eft point attentif à fe corriger foi-
même , mais fait confifter fa fa-
gefle à connoître les vices des au-
tres. On ne doit donc point par-
1er des abfens, à moins que c^i
ne fût pour prévenir quelque mal,
dont on feroit menacé, & quorj
aiiroit lieu d'appréhender préfente-
ment de la part des Etrangers, foh
dans les affaires corporelles , foili.
dans les affaires fpirituelles , oH:
qu'on le fit en peu de mots, com-i|
me en paffant , & pour exemple
pour garentir les bonnes ames de,
ces fortes d'impiétez.
Quant au Pape , nous ne i<
pouvons pas oublier , car il efl
préfent avec fa puiffance, & il trou-
ble les confciencss de plu fieurs, fans
quoi nous pourrions bien nous
paffer de parler de lui j par h rai-
tenu en 1 532. 429
Ton, que nous avons bien autre
:hofe > & plus néceffaire même à
"aire , que de nous entrerenér avec
es impures ordonnances 5 mais
TOUS fommes obligez d'écarter les
îbftacles , qui empêchent Tédifica-
ion du Temple de Dieu. Nous
ic devons donc point parler dans
îos Sermons , de ceux qui ne font
)as d'entre nous , à moins qu'il
l'y eût quelcun , de la part de qui
lous craindrions qu'il ne revint un
our quelque mal à nos Eglifes.
Uors il faut avertir 5 & ne point
e taire > quoi que ces fortes de
lifcours irritent extrêmement nos
.dverfaires , que nous fommes
infi obligez néceflairement d'atta-
juer. Car là , nécefîjcé y eft. Ce-
)endant il eft aifé de diftinguer
es niéchans , qui fe cherchent eux
nêmes , d'avec ceux qui ont de
a probité & de la piété.
C'eft* ainfi que S. Paul fait men-
ion des faux Apôtres, H"^ menée
k Akxiindre le forgeron, qui
rétoienr pas préfens , & qu*il
ivertit de fe donner garde d'eux,
que l'E^Jife du Seigneur pût
e garcntir contre leurs entrepriies,
au
'430 Actes du Syriode de Berne,
au cas qu'ils vinflent à Ephefe :
Au refte il met foigneufement de-
vant les yeux de ceux à qui il
écrit les bons exemples des Fidè-
les des autres Eglifes ; afin de les
animer par ce motif à la repen-
tance & à lamendement. Il y a
affez de mauvais exemples par
tout > fans qu'il foit néceffaire d'en
aller chercher bien loin, mais pouri
ce qui eft des bons exemples , on
ne les trouve pas en auiïi grand
nombre en tous lieux, C'efl pour-
quoi il eft n^ceflaire de ne rien
taire de tout le bien , que foni
les Fidèles des autres Eglifes.
Mais il y a des gens qui font tout
le contraire, découvrent la turpi-
tude de chacun, & ne trouvent
rien de louable en qui que ce foit:
ce qui peut aufli fe faire à bonm
intention , favoir 5 parce qu'on cf
plus attentif à faire qu'on évite h
mal5& qu'on s'en garentifle^ qui
porter les Hommes à faire lebicr
par Jesus-Christ; ce qu
eft pourtant la cho(è, qui convien
proprement aux Chrétiens.
CHÀ
tenu en 43 i
CHAPITRE XXVII.
jQ^'/7 convient de prêcher la Vé-
rite y comme la tirant de t
criture & non en Je fon-
dant fur t appui d aucun Hom-
me ou parti ^ ni parce que
le Adagifirat le commande.
J^Es Pafteurs doivent aufTi em-
ployer 5 également pour tous ,
le glaive de la Parole de Dieu , &
n'épargner perfonne, foit Homme
ou Femme , Maître ou Servireur,
Ami ou Ennemi , Magiftrat ou Su-
jet 5 ils doivent dire avec une en-
tière liberté, ce qu'ils trouvent uti-
le pour la correàion, félon la pa-
role de Dieu : qui que ce foit , à
qui la chofe puifle plaire ou dé-
plaire. Mais ils ne doivent point
fe faire de parti, qui leur foit at-
taché d'une faÇon charnelle j ni in-
troduire des fa<flions, par des ca-
bales ou des intrigues \ car les af-
faires de Dieu doivent erre admi-
niftrées avec fimpliciré de cœur>
avec droiture & fans biaifer, &
fans regarder au jugement des
Hommes.
D'autre
432 Actes du Synode de Bernc^ \
D'autre côté quelques - uns ne
doivent pas , comme Ton dit , ci-
ter ou prêcher uniquement l'Auto- «
rité deVosExcELLENCESjdi- %
fant > Que les Seigneurs ont jugé & «
ordonné ceci ou cela, & que pour »
cette caufe les Sujets doivent le
croire & Tobferver \ difcours qui Di
portent les fimples à regarder plus à «r
VV. EE. qu'à Dieu même , dans le
les affaires de Religion j ce qui eft dei
un Article capital du Papifme. Car ne
la Foi ne regarde qu'à Dieu , 6c pl
vient de la parole vivante de Dieu, lei
& de l'illumination du Cœur 5 & ù
ne dépend point du jugement de fur
LL. EE. ni d'aucun Homme: Car
U Jujie vît de fa Fol. ^
Vcici donc comment il convient 0«
de patkr : La Louable Seigneurie
de Berne , LL. EE. nos Souv.
>j Seigneurs ont embiafTc l'Evan^ |L
yygÛQy & rejetté la Meflc & d'au- t/
très cho fes 5 qui fe font trouvées
contraires à telle ôc telle Ecritu- U\
^>re,- contiaires aux Articles du nen
Symbole. V & contraires à Tintel- Gto
» ligence de Jefus-Chrift ; ce que }i
» vous comprenez maintenant k
w vous-mêmes , ôc nç pouvez pas h
,} nier,
tenu en I$'i2. 433
^ mer, à caufe de ce paiTage de
yy l'Ecriture , qui eft clair , & de
yy cette intelligence éternelle de Je-
py sus - Christ, à quoi les Ecritu-
res de l'Ancien & du Nouveau
Teftament s'accordent y,,
Ceft pourquoi vous devez prier
Dieu , qa il veuille vous le faire
encore mieux comprendre > & vous
le mettre dans le cœur. Nous ne
devons point entreprendre de met*
tre nos Souverains Seigneurs à la
place du Pape 5 qui a dominé fur
les Confciences ^ ce qui confifte à
s apuyer trop fur nôtre autorité , Sc
fur le Magiftrat Civil.
CHAPITRE XXVIIL
Qu aucun Pafteur ne doit attA-
cher a lui le commun Peuple.
L y en a d'autres qui parlent
trop rudement contre les Sei-
gneurs , & particulièrement en leur
abfcnce, où la chofe n'ert nulle-
ment nécefTaire , &: eft fans fruit.
Gens qui, quand les Seigneurs font
préfens , & qu'ils devroient ren-
dre témoignage à la Vérité , les
flattent honceufement, &c qui titn-
7bw, IV^ T nent
434 Acfes du Synode deBerric,
nent une telle conduite , pour atta-
cher à eux le commun Peuple > qui
prend plaifir à entendre médire des
autres Hommes , & particulière-
ment de leurs SoûV2rains Sei-
gneurs , & les cenfures qu'on leur
fait.
En un mot, rien de tout celai.
n*efl bon , il ne convient point à
un Miniftre de Jefus-Chrill > de
foûme trc à lui-même ni les Su-
jets, ni les Magiftrats , & de fe
donner pour quelque chofe : Mais
au contraire, les Prédicateurs & Mi-
niftres de la parole doivent 8c font
obligez d'avancer Tédifice de Dieu,
& de conduire .abfolument les Fi-
dèles à Jefus-Chrift leur Seigneur,
Cins aucun égard à leur propre pcr-
fonne. Mais malheureufement nous
voulons être aimez; & n être hais
de perfonne , ce que nous voyons
que S. Paul n'a pas fait , lui qui
ne fe foucioit point d'être jugé des
Corinthiens , ni d'aucun jugement
humain. Ainfi tout dépend ds ce
point; c*eft que les Prédicateurs
regardent plûrot au Confeil éter-
nel de Dieu , pour parler après la
bouche de Dieu^ & dire des chofeS)
qui
tenu en 1532. 435
qui puiflcnt fubfifter au dernier jour
devant le véritable Juge , plutôt
que des chofes , qui conviennent
& qui plaifênt au pré/ênt Siècle»
& qui chatouillent les oreilles trop
délicates.
Quand le cœur de l'Orateur
[Chrétien) cft droit, tout va bien#
& Ton obferve les réglemens. Son
principal foin eft défaire queje-
fus - Chrift croifTe dans THommc
intérieur , & qu'on voye briller
dans l'Eglife de Dieu une probité,
qui parte du Coeur, C'eftdansce
ieffein qu il exhorte à la prati-
que des vertus > & qu enfin il cen-
fure s mais non avec plus de vé-
hémence j que l'Efprit de J e s u s-
Christ ne l'y pouffe , & qu'il
Ya trouvé Jefus-Chrift lui-même
5c qu'il ne l'a repréfcnté auparar
rant par fes difcours. C'cft pour-
quoi l'on a bien fujet de prier >
qu*H plaife au Seigneur d'envoyer
ie bons OHvriers en fa vigne»
T t CHA-
436 Ac7âS du Synode de Berne ^
CHAPITRE XXIX.
Cejl de Dieu qu'il faut appren
dre ^ quand on doit employé
la Sévérité ou la Douceur
'vers le pécheur,
TL arrive fouvent des cas où
^ févérité eft néceflaire : quelquefoil
il faut exhorter en particulier
amiablement , tantôt on épargn
tantôt on attaque avec rudefle
l'un & l'autre pour l'amour
Dieu. Samuel ne vouloir pas des
honorer devant le Peuple le Ro
S A u L 5 que Dieu avoit rejette. £/i
au contraire cenfura publiquemen
I z E B E L , avec tous les Prêtre
ide Bahal , 8c le fit fort âprement
Chacun d'eux faifoit ce qui lu
avoit éré ordonné de Dieu : ce
pendant l'un eft doux ; & l'autr
eft fort rude & févère; 6c l'un fi
l'autre avoient pour objet des
cheurs rej Jttez de Dieu.
On ne peut pas bien donner de
régies fur ce qui convient à chacu
dans chaque occafîor, ^ ni le mcfuM
furl'inî('lligence c}.il?R,'«i(î:nhumâ
Rc. Il hcx pou: cela un ji<i*t n en'- fp
rituc
tenu en 1532. AVf
rituel > qui fuivra aifément fi nous
avons véritablement à cœur de
faire la volonté de Dieu 5 "jcan VII.
Dieu exauce ces fortes de défirs>
& donne ce qui eft néceffaire ea
chaque occafion , quand même il
devroit s'en enfuivre toutes fortes
d'inconveniens.
CH AP ITRE XXX.
Eshortation a la RJgence de
B il' R N £3 nos Souverains Sei-
gneurs.
A Infi> Souverdins Seigneurs^ quand
même on diroit quelque chofe
le vif & de trop haut contre W,
EE. contre vos propres Perfonnes>
3U bien auffi contre les Baillifs 6c
'xs Commandans du Pays 5 il
/DUS fera certainement honorable
3c glorieux, de ne le prendre point
:n mauvaife part , mais de confi-
iérer par ordre Se au nom de qui,
e Pafteur ou le Prédicateur parle j
avoir , qu'il porte la parole de
Jefus-lChrift, comme un MefTa^er
ic un Envoyé, celle de fon Sei-
gneur , de qui il faut la prendre
zn bonne part. Dieu veut anéan-
T 3 tir
438 ABes du Synode de Bernt»
tir notre SagelTe mondaine en i
plufieurs manières , quelquefois i
par un Homme fimple fans j
fcience > tel que feroit un petit Paf- [
tcur de Village , donc on fait c
peu de cas , dans un tel cas vous j
faites un a^lc d'obeiflance de Foi, }|
fi vous le foufFrez avec une en«
tiére patience > comme une cho/è p
qui vous eft envoyée de Dieu > 2
pour votre corre<flion.
VV. EE. ne doivent pas non ii
plus s'émouvoir d'abord , de ce fa
que peut-être > à vôtre avis , on {)(
en fait trop. Car n6tre Nature eft 2^
difpofée d'une telle manière 5 que cd
chacun , au milieu de fes défauts, toi
veut toujours avoir raifon, &que
ce n'eft qu'avec peine & chagrin > f([,
qu'il reçoit les cenfures, celles-là
même qu'il a méritées qui font
juftes. Perfonne ne veut avoir re.
tort. De plus k Magiftrat eft ji£
dans un état fort dangereux, à eau- p
fe de fon élévation , en ce que f^fj
prefque chacun le flatte en fa prè^
fencc 5 & lui dit les chofes qui lui tianc
pl.-îifent j mais chacun n'eft pas fi ^\
bien intenrionné pour lui dans foiT-
cœur i comme fes paroles le té* 1 \^
moignenr^
tenu en 1532. 439
moigncnt 5 bien loin de là , il y
a tel qui lui fouhaire du mal 3 &
qui cherche à lui nuire par der-
rière. Ainfi une cenfure faire tout
ouvertement vaut** mieux qu une
amitié fècrette. Les blelTures d'un
ami portent une utilité perpétuelle,
mais les baifèrs d'un ennemi font
périr. Il faut en toutes chofes
avoir égard au cœur de celui qui
parle. Car certainement un mé-
difant > qui charge le Magiftrat
faufiement en fa préfence , vaut
beaucoup mieux 3 qu'un ami qui
aprouve tout ce qu'on fait j car
celui-ci produit la fécurité dans
toutes fcs œuvres , aulieu que l'au-
tre ouvre les yeux & les re-.îd at-
tentifs > en forte qu'un Souvtrain
prend mieux garde a la conduite*
& agit avec tant plus de droitu-
re. Qu'il eft honorable à un Ma-
giftrat , d'avoir le courage de faire
peu de cas de ce qui fe dit con-
tre lui, 6c de ne pas prendre tout du
plus mauvais côté! Et que fi li
tranquillité publique , & le bien
de l'Etat demande qu'on reprime
wi efprit contentieux^ que cela
fafle avec mefure & avec toute la
T 4 dou-
440 AStes du Synode de Berne
douceur polTiWe , & en montrant
avec vérité , qu'on eft plus enclin
à traiter doucement un Homme
trop rude dans la cenfurc , qu un
Chien muet> qui ne fait pas aboyer
contre les vices ^ comme en parle
le Prophète.
Nous ne difons par pourtaat
ces chofes , comme fî nous ap-
prouvions les emportemens & les
rodomontades des gens grofllers;
mais c'eft parce que la vérité cho-
que ordinairement & fait toujours
de la peine à ceux à qui elle s a-
dreffe , & qu il peut arriver quel-
quefois qu'un pauvre Pafteur s*op-
pofe à un défordre qui s'introduit,-
que d'autres ne prévoyent pas en-
core > & ne croyent pas qu'il doi-
ve arriver. Il eft donc néceifaire que
VV. EE. ufcnt de débonnaireté j à
recevoir des Cenfures & des remon-
trances faites hors de faifon, & ne
fbient pas trop promtes à prendre
feu 5 comme on parle j à moins
qu'il ne parût vifîblement qu'il s'y
mêle une mauvaifc intention & un
deflein pernicieux ; alors il faut pu-
nir fans doute. En quoi vous Au-
rez bien vous conduire.
Nous
tenu en 1532. 441
Nous parlerons préfentement
en particulier de nôtre Corrciflion,
comme s enfuit.
CHAPITRE XXXr.
En quoi il faut particulièrement y
exhorter c^cenfurcr lePeuple.
ne peut pas en/èigner Jefus-
Chrift 3 fans relever cenfu-
Ter les erreurs &: les vices > &
fans exhorter à la connoiffance &
à la probité, qui vient d'un cœur
droit 5 ce qui doit être le princi-
pal dans l'exhortation & la cenfure.
Mais pour ce qui regarde la con-
duite extérieure, nous renfermons
nôtre fentiment dans les Articles
fuivans^
CHAPITRE XXXir.
On doit prêcher L ohtijjance en*
vers le Magifirat , tant du
Gouvernement Séculier que
de CEcc Icjiaftique.
pRémiérement 5 comme les Sujets
font portez naturellement à la
rébellion, à la défcbéiifance , & de
mauvaife volonté coutrc leurs Mar
T 5 giltratsj,
\
442 Acîcs dtiS'jnode de Berne,
giftrats 5 &: les pauvres de même,
contre les riches ; que cependant
laDifcarde eft dife(fleiTient oppofee
à la Charité Chrétienne, laquelle
eft la Livrée des Chrétiens , pai
où ils fe font connoicre & fè dit
tinguentdu Monde corrompu. Pour
cette caufe il faut avoir grand foin>
de procurer que k Magiftrat fé*
culier foit maintenu dans fa digni-
té > ainfi que Dieu l'a établi , Sc
qu^on repréfente vivement ce de-
voir au Peuple ignorante le pou-
voir du Magiftrat venant de Dieuy
«n forte qu'il faut k craindre, me-»
me à caufe de la confcience , J^om.
Xni. Car quoiqu'un Chrétien n ait
rien qui l'attache au Monde , &
qu'il foit foumis à toute Créature^
cependant il y eut cette erreur qui
fe glilTa dans l'Eglife Apoftoliquc^
lkvoir,qne ces'bonnes gens s'imagi-
Uoient, que leur Bourgeotfie étant
céUfte y 8c eux n ayant point ici bas
de Cité permanente , mais attendant
avec empreffement celle qui e/i k
venin ils n'a voient aucun intérêt
aux defleins du IVlagiftrat Civil >
& navoient rien à faire avec lui,
ce qui çft un rcnverfemeut de l'Or-
don-
tenu en Ï5T2'. 44^:?
donnancc de Dieu qui étrUit deux
Gouvernemcns parmi les Hommes..
Le Supérieur 6c le plus grand , eft
Spiricuel & Célefte , dans lequel
Jefus-Chrift , à qui feul appartient
cet honneur , eft feul Seigneur t
régnant par fon Efprit^ & au de-
hors y fervent les Miniftres de
î'Efprit, & les Prédicateurs véri-
tablement Chétiens,
Le plus petit Gouvernement 8c
Finfericur 3 eft le Temporel , dans
lequel Nos Souverains Seigneurs^
& tous les autres M^giftrars Sou-
verains ^ en tout lieu, font établis
de Dieu. Le Chrétien eft fournis
à tous ces deux Gouverncmens :
Par raport à fa Confcience , il eft
fous k Spirituel , dans lequel au-
cune autre Créature n'a rien à
voir ; c*eft Dieu feul qui en eft k
Juge: Mais à Tegard de fon Corps
&: de fon Bien, \\. eft fournis au
glaive , & à l'ndminiftraiion exté-
rieure, l/n Chrétien eft à la vé-
rité Célefte ; mais non pas abfo^
lument, tant qu'il eft dans cette
I habitation terreftre , dans ce corps
mortel : C'eft pourquoi il ne doit
point fe fouftraire à l'Ordonnance
T ^ t€rrcftre3
444 ABcs du Synode de Berne-,
terreftre , quoiqu'il y doive croître
journellement , & devenir toujours
plus célefte. Car un Chrétien s'a-
vance & s'élève hors "du Monde
& de deffous le Magiftrat > par
Tondlion Divine ^ c'eft4-dire î forr
cœur & fes afFedlions s'en déta-
chent de plus en plus, aufTi-bien
que de toute affaire mondaine. On
doit employer à cela des Exem-
ples 3 tirez fiir tout des Hiftoires
de la Bible : où l'on voit manifeC
tement que Dieu a puni des peu-
ples dèfobéïffans > même ceux qui
s'étoient foulevez contre l'Autori-
té de Rois injuftes> ju(qu'à-ce que
Dieu les ait rejettez & dépofez
lui-rriême \ l'exemple de David, &
la conduire qu'il tint à l'égard de
Saiil 5 que Dieu avoit dépofé, &
qu'il honora pourtant , tandis qu'il
étoit Roy , & l'épargna > mérite
bien nôtre attention,
Des Dîmes & des Cenfcs; com^
mem on doit les fayer & les
recueillir,
11 fuit de là > qu*on eft obligé
de payer les Dîmes ordinaires. Car
c eli là une Ordonnance extérieure.
tenu en I 532. 44 f
& qui n*eft point oppofée à la
Charité \ ce qui eft clair par THif-
toire de JoÇe^h , qui alTujettir tout
le Pays d'Egypte , à payer au Roi
le cinquième de tous leurs revenus.
C'eft là une vérité qu'on peut en-
core éclaircir par k Ghap. XIII.
de TEpître aux Romains ; car il ne
peut point y avoir de tribut > ou
de redevance plus raifonnable*
que les Dimesy puifque & celui qui
donne > 8c celui qui reçoit , font
obligez d anêter la vûë fur la bé*-
nédiftion de Dieu > Se de prendre
&c de recevoir , tel que le grain
eft venu, à même gain & à même^
perte.
Pour ce qui eft des Ccnfes, peut-
être qu'on y pnfl'e les bornes ;> c'eft-
au Magiftrat à les redrefïer> Se les
Mififties ne doivent gueres s'en
mêler j car cela n'eft pas le prin-
cipal point de leur employ y Se
d'ailleurs une telle affaire entraîne
un changement des Conftitutions
communes du Pays > lequel on ne
doit pas entreprendre fans une ex-
périence confommée Se une miire
délibération de gen^ fages Se habi-
ks : à moins qu on ne vit une in-
jufticft
446 AcTes du Synode de Berne ^
)uftice manifefte, comme on en voit
en quelxques endroits > dans les.
Cenfes de blé & de vin. D'ail-
leurs chaque IVliniftre doit avertir
fes Auditeurs , s'il arrive qu'ils y
foient intéreffez , qu il n'y a point
de péché ou d'injuAice à donner ce
qu on leur demande injuftcment >.
mais qu îl y a du péché à prendre,
injuftement.
Il faut avoir devant les yeux
cette unique régie , c'eft qu'il faut
agir avec charité : que chacuri
faffe à l'égard des autres 5 ce qu'il
voudroit 5 &: verroit avec plaifir>.
qu'on fit à fon égard , en cas^
pareil.
Il faut encore remarquer avec
foin , que ces fortes de chofes >.
comme aufli acheter , 6c vendre fa
marchandife > & le travail de fes
mains , tels que font les ouvrages-
des TTfft rans Se des Cordonniers , Slc^
appartiennent aux Réglemens ex-
térieurs ; & doivent toutes être
réglées en quelque manière feloa
k charité j & n'appartiennent point
au pur & fimple Evangile 9 qur
n a pour objet que les Confcien-
ces. Mai5 dans le véritable Chrif*
tianif*
um e?^ I^'i2' 447
mnifme, qui eft intérieurement &
de lui-même de bonne volonté 5 à;
fcrvir le prochain , on prête , Se
l'on n'en efpère rien en échange ^
& même on n'y pofTéde du tout
rien > comme en propriété. Mais
dans cette affaire il faut que cha-
cun prenne bien garde à l'efprit
qui l'anime > à ne pas agir par
un zélé charnel, & ne point don-
ner au déhors ce que fon coeur poC-
féde encore. Il faut ç\\xAnaniA^
nettoyé auparavant fon cœur, après
cela il /aura bien régler fa bourfe»
C'eft en quai les pauvres Anabap^
tifjtes ont erré, en abolilTant le Gou-
vernement extérieur', autant qu'en
eux eft > (ans k favoir^ & en fe
contraignant & fe forc^ant les uns
les autres à quiter leurs maifons
& leurs biens ^ à abandonner Fem-
me, Enfans> Pcre & Mcre, con-
tre l'ordonnance de Dieu , qui
yeut , que nou« attendions fa vo*
cation, & que nous n'entrepre-
nions rren de nous mêmes : mai>s
qu'au refte nous préférions fon
amour à toutes chofes , & qra'ainfi
nous embrafTions, fans aucune con-
trainte extéiicurc, Jefus-Chiift qui
opère
448 Actes du Synode de Berne.,
opcre dans le cœur , & du Cœur
au dehors par les œuvres , 6c non
pas du dehors dans le cœur, com-
me faifoit le Miniftère de Moife.
CHAPITRE XXXIII.
Qu il faut exhorter le Peuple
à ohferver les Edits de hL.
EE» C/ sapliquer particulier
rement à corriger les vices
qui ont le plus de vogue dans
nos Eglifes.
"XjOs Souverains Seigneurs ayant
- publié divers Edits de Ré--
formation, pour la corredion des
mœurs > &: pour établir une con-
duite Chrétienne, Nous devons,
nous autres Pafteurs & Miniftres>
en prefler Tobfervation avec foin ,
en montrant qu'ils font juftes
conformes à l'Ecriture Sainte; fic
que même parmi ks honnêtes»»
Payens on na point foufert ces,
fortes de vices j tels que font 1'-^-
du Itère > la Fornication , le Jl^/aguC'»*
reliage , VYvrognerie , le Jeu , les>
Blafphhn:s Sc les Juremcns , 6c par-
ticuiisiement Tufagc d aller au fir-
ut. ce
tenu en 1 532. 449
ma des Princes Etrangers ^ & de
faire la guerre pour de Targent ;
contribuër par- là à faire des Veuves
& des Orphelins *, chofes qui font
contraires au fens commun & à
l'équité , & qui n'ont jamais été
approuvées > même parmi les
Payens.
Nous devons au/Ti exhorter avec
foin les Magiftrats > de foutenir
ces Edits, & leur repréfênter leur
devoir & leur obligation envers
Dieu.
Nous devons au/Ti nous autres
Miniftres > faire attention à la dit
pofition de nôtre Peuple, & à fes
palfions > & nous efforcer de le
conduire à Dieu par Jésus-
Christ par nôtre Miniftère ;
car tous n*ont pas les mêmes vi-
ces j quelquefois le change-
ment de lage en apporte au/Ti dans
les mœurs & dans les péchez: ce
que chacun peut aifément appren-
dre en converfant journellement &
familièrement avec fes Paroi/Tiens.
Mais il faut partout leur parler de
\ Etat du A/ariage , de \ Education
des Erifansy de la Correcliori frater^
nelle , 6c contre les vices com-
muns,
450 Actes du Synode
muns > qui font attachez à toute
chair > tels que font la perfidie, l'en^
vie^ la haine, le menfonge Sc h frau-
dé y & autres fcmblables œuvres
de ténèbres. Ce font là les Arti-
cles cMie chacun doit preffer avec
foin & application > pour la cor*
rc£lion des vices,
CHAPITRE XXXIV.
De tlnftruciion dé la Jeunefcy
& de la Doctrine de\ la Foi >
OU du Catéchifme*
^Omme on aprend > fans beau-
coup de peine , 6c bien , ce
qu'on aprend dans la Jeunefle, &
que dans le déclin de Tâge on n'sft
plus propre à rien 5 & que dailleurs
il eft bon de porter le joug du Sei-
gneur dès Tenfance > qu'enfin les
Chrétiens font obligez de ccnfa-
crer leurs Enfans particulièrement
au Seigneur , en fa mort , fans
quoi ils fe trouvent miférablemenc
efclaves des convoirifes mondai-
nes , &: fous la puiflance du Dia-
ble > Pour ces raifons> il eft nécef-
faiie d'établir un Catéchifme , ou
Inftru^ion Chrétienne , où l'on apren-
ne
de Berne. 451
ne aux fîmples , & principalement
aux grands Enfans , à craindre
Dieu & à laimer , par J e s u s •
Christ^ & cela non en citant
beaucoup de partages de l'Ecritu-
re > mais en expliquant le SymboU
des Apôtres , & VOraifoft Domiincaley
fur quoi l'on a déjà écrit divers
petits Livres. Mais cela feroit en-
core plus efficace > fi avant tout
cela, nous faifions tous nos eiForts^
pour que Jefus-Chrift fe levât ôc
vint dans nos propres Cœurs.
Le feu dont nous ferions animez
échauiferoit bien-tôt les efprits fou-
pies des Enfans : Autrement ce que
la raifon feule tire des Livres > &
enfei^^ne aux autres Hommes, n'eflr
qu'un ouvfiîge humain > fans effi-
cace i jufqu'à ce que le grand Mai-
tre le S. Efprit lui - même , fc
mette de \\ panie y &c crée, renou*
velle, 3c régénère à une vie célefte
& éternelle.
Il nous a auffi paru nécelTaire,
de montrer Jefus-Chrift tout entier»
& tout l'ouvrage de Dieu pour
nôtre falut , par le Symbole des
Apôrres , comme auffi de faire voir
clairement aux fimpleso que tou-
tes
452' A^es du Synode
tes les prières qu'il convient de
fâircj font renfermées parfaitement,
clairement & avec allez d'écenduë
dans rOraifon Dominicale , enfor-
te qu elle furpafle tous les Pfau-
mes , & toutes les Prières , q^ue
les Pcrcs ayent jamais faites.
CHAPITRE XXXV.
Du Décalogue > ou , des Dix
Commandemens ,
Quoique la paflk)n & la mort
.de Je s us - Chri ST ferve à
connoîrre vivement le péché > &
à porter I Homme à la repe itance,.
cependant il eft bon & néceflairej
que les Enfans fâchent les Dix
Commandemens, & que les Paf-
teurs dans les Catéchiîmes les leur
impriment dans le Cœur 5 de la
manière que le Seigneur Ta fait
dans fon Sermon fur la Montagne,
Maîth. V. VI. VII. afin que la
Jeunelfe apprenne à régler fon coeur
devant Dieu , comme c'eft aufli au
cœur que Dieu a particulièrement
égard. Il fêroit auffi à fouhaiter
que les Vieillards ne fe filTent point
de honre daprendre les mêmes
chofcSi -
de Berne. 45 3
chofes, & de recevoir humble-
ment les mêmes inftrtiftions avec
& parmi les Enfans , afin qu^une
^ois enfin nous devinflîons tous
bons Chrétiens , & que nous n*en
demeuraflions pas à la feule pro-
feflion extérieure.
CHAPITRE XXXVI.
Vu Symbole des Apôtres î de /'O-
raifon Dominicale , & des
Dix Commandemens.
rpOute la Religion cft clairement
- conteniië dans ces trois pièces,
ItSymboky COraifon Dominicale le
Décalogue. Le Symbole nous aprend
à connoître Dieu & Jésus-Christ 5
&: nous montre comment la Grâce
£c la Vie commence, saccroit &
s'accomplit. L'Oraifon Dominica-
le cft la vraye prière Chrétienne j
^ pour ainfi dire, la Cruche ou
le Seau, avec lequel on puife cette
grâce à la fource de la grâce, qui
cft J E s u s - C H R I s T , on la re-
cueille dans le cœur. Car celui
qui pris , obtient : & fans la
prière c'eft en vain que la grnceeft
©flirte. La prière ouvre le cœur
&
4S4 Affes du Synode
&rélargit, pour ainfi dire, afin
quil puifle recevoir la grâce. Et
pour ce qui eft des Dix Comman-
demcnsj ils font un exercice exté-
rieur , par lequel la chair eft mor-
tifiée, 6c tournée à pouvoir mieux
comprendre fa corruption & fes pé-
chez > & à les retenir dans fon
fouvenirs quoique du refte il faille
auparavant connoître le péché par
Je s u s -C H R I s T & en lui , fi Ton
veut en avoir une connoilTancc uti-
k. Celui qui confidére les Com-
mandemens > doit confidércr en
même tems > que Jesus-Christ ,
lui jufte & innocent , eft mort par
la préordination de Dieu , pour
ces péchez là , que le Decalogue
défend. Ainfi le Symbole , l'Orai-
fon Dominicale > & le Décalogucj
font la Bible des Idiots & des
Enfans, laquelle comprend tout le
Chriftianifme. Car les Sacremenr»
le Baptême & la S. Céne , aufti-
bien que la parole d*exhortation ^
ne faifânt autre chofe , que de pré-
fenter aux ames des Fidèles le
Myftère de Dieu dans l'Homme,
il n*eft pas néceffaire d'en embar-
raffer ielprit des Enfans & des
fimple#>
de Berne, 45 j
fimples , qu'autant que ces chofes
peuvent leur fervir à connoirre ce
iêul Sauveur Jésus - Christ,
i|ui eft exprimé de la manière la
plus propre avec toute fa vertu &
fon opération, dans ces trois piè-
ces fufmentionnées. Si l'on s'y
prend d'une autre manière on rend
la Religion trop difficile , & on la
charge de trop de paroles > enforte
que les bonnes gens d'entre le
Peuple defefpérent de pouvoir ja-
mais ni la comprendre ni l'appren-
dre. Sur quoi il eft bon de re-
marquer , que le Fils a déclaré lui-
même en termes bien remarqua-
bles 3 que cette Grac€ incomprehen-
fible , eft cachée à la SagelTe du
Monde, 6c eft manifeftée aux pe- ^•^nh.
tirs ôc à ceux qui ont peu d'in-
telligence, Ceft pourquoi nous
devons nous accommoder à la
portée des fimples , & nous ren-
dre intelligibles , autant qu'il eft
po/Tible 5 & ne pas fabriquer de
nouveaux Articles de la connoif-
fance de chaque dogme.
CHA-
456 Acles du Synode
CHAPITRE. XXXVII.
De la conduite & de ///probité
des Adimfiresér des P a/leurs
en général,
TL eft toujours vrai ce que dit lePro-
phêre, Tel qu eft le Sacrificateur^ tel
eft le Peuple: & tel queft le Peuple tel eii
le Sacrificateur, Car quand Dieu veut
faire du hicn à un Peuple > il lui
envoyé des Prophètes > qui font
gens de bien v Fidèles & fages dit
penfateurs des Myftères de Dieu ,
par le moyen defqueîs tout le
Peuple eft fauve. C'eft pourquoi
le Peuple ne doit attribuër la faute
qu'à lui-même , s'il n'eft pas pour-
vû de bons Pafteurs , comme il le
devroient être. Et nous n'avons
à nous plaindre de perfonne qiic de
nous-mêmes > fi nôtre Peuple eft fi 1
pétulant & obftiné dans fes vices ,
& fi défobeifTant à la vérité : car
nos péchez méritent cela. Quant
au refte il y a partout des cœurs
fertiles , propres à porter des fruits
de juftice pour Dieu , fi nous étions
feulement des Laboureurs & des
Oi'vriers «v^ec Dieu? diligent &
appliquez à cet ouvragé. C'eft
pour-
de Berne, 457
pourquoi chacun doit bien pren-
dre garde > quil ait les qualicez
que Dieu exigeoit dans les Ji'ges,
du tems de Moïfe , favoir 5 d être
{ag^s 'i entendus, 6>c reconnus par-
mi les Tribus 5 pour êcre gens
courageux & droits 5 craignant Dieu,
a?nateurs de la vérité , 6c ennemis
de l'avarice. Il faut dis-je, qu'on
voye auffj briller en nous les mê-
mes qualitez. Car comme ceux-là
étoienc Serviteurs des Peuples pour
le temporel, nous le Tommes pareil-
lernent dans le Royaume Céleftede
Dieu, afin que nôtre fageile en Je-
sus-Christ ne Toit pas moin-
dre que Tà été leur ombre & leur
type fous Moïfe. Or nous enten-
dons par -là, cette SageiTe &: cette
Intelligence, qui découle de la Croix
de Jcfus-Chrift; ôc une connoif-
fance des Fidèles, qu'on ne tire
pas de la Chair & du Sang , mais
qu'on aquicrt par les fruits de 1 eC-
prit> &: par les Oeuvres de Cha-
rité. Car S. Paul ne comioit plus IL
perfofîne félon la chair. On devroit ^*
voir les mêmes fenîiinens dans
nousôc dans nos Eglifes , car nous
ne devons pas avoir des affcvcions
Jom,IP\ V char-
458 Actes du Synode
charnelles. Il ne faut pas non plus
avoir égard à la hardiefls de bou-
che ^ de main , mais à une pa-
tience confiante , à une Charité
aflive, qui vient d'une Foi non
feinte , laquelle apporte avec foi
Jésus - Christ , qui eft la vérité
même > qui exclut toute ava-
rice, & même toutes les convoi-
tifes du cœur. C eft auITi à quoi
^ S. Pierre nous exhorte : Paijfez le
Troupeau y dic-il> avec une promte af*
feston , & non point comme ayant
domination fur l'héritage du Seigneur^
mais étant les modèles du troupeau ,
I. Epitre Ch. V. C'eft ce que S.
Paul a fait ^ &c nous a ordonné
de nous former fur fon modèle, &
d'être fes imitateurs , autant qu'il
I.Co?-.XI l'a été de Jefus-Chrrft: Il faut donc
exhorter le Peupk à nous imiter,
8c à fuivre les exemples que nous
lui donnons, fi du moins nôtre
Do£lrine & nos œuvres convien-
nent enfemble , Se fi nôtre cœur
eft d'accord avec nôtre bouche Sc
nôtre main. Mais helas î il ne
nous convient pas trop encore à
préfent 5 de tenir un tel langage >
puifque nous ne fommes pas en-
core
de Berne. 459
core extrêmement avancez nous-
mêmes dans les affaires fpiriruelles>
fie dans les œuvres Chrétiennes.
JVlâis nôtre exemple fera pourtant
en édification 5 fi nous nous ap-
pliquons à bien remplir nôtre char-
ge dans l'Eglife, à la bien condui-
re» 6e qu'on nous trouve chez
nous &: dans nôtre domeftique 5 de
bonnes mœurs 3 gens de bien &
d'honneur.
Nous allons donc parler pre.T/ié-
rement de nôtre Emploi j comme
s'enfuit.
CHAPITRE XXXVIII.
Comment les Pa/leurs doivent
étudier i dr lire C Ecriture*
r)Uifque l'Ecriture rend l'Homme
fagc à falat , par la Foi en Je-
s u s - C H R 1 s T > car tome l'Ecri- iii^
tuie efî divinement infptrée , propre a
inffruire, a cenjurer , a corriger ^ &
a reprendre dans Lt jujlice , afin que
\ l'Homme de Dieu [oit irreprehjnfible 5
■ & bien dffpofJ pour toute bonne œu-
vre i pour cette caufe on doit re-
connoîtrc , qu'il efl néceflTaire de
s'appliquer foigneufement à la lire.
\ z Et
46 O Acfes du Synode
ÎEc dans cette leflure il faut oh(tu
ver cet ordre , c'eft de commencer
par la prière > avant que de pren-
dre la Bible entre les mains j ôc
cjue cette prière foit faire en efpiit
en vérité : Cette prière de TEt
prit eft d'une telle nature 5 que le
S. Efprit pouffe celui qtii prie >
prémiéremjent à rendre grâces à
Dieu avec un amour ardent, pour
les bienfaits qu'il en a reçus: ce
<^ui produit de la confo'ation & une
iVt forte 'y en fui te il le pouffe à prier
le Seigneur, de vouloir ôter de
plus en plus les maux, les vices
^ les imperfeiHiions , qui font at*
tachez a nôtre nature 5 ce qui pro-
duit un defir 8c une ardmr 5 que le 1
Matt. V. Seigneur appelle fam & feif de la f
juftice, qui eft toujours fuivie du r|
raffaficment & d'un véritable bon-i
heur. Ainfi il eft évident , que
la Prière eft une évacuation & une
préparation du Cœur 5 afin qu'il
puiffe comprendre & retenir l'in-
tention & le confeil de Dieu , qui
cft caché fous la Lettre. Sans cela
on lit ordinairement l'Ecriture S^^-
fans dévotion, comme une hiftoirc \
mondaine , & Ton y exerce uni-
quement
de Berne, 46 1
quement fa raifon. Aiiffi cela ne
produir-il autre chofe, quune Sa-
geffe enflée ôc charnelle , que l'on
propofe enfuire au pauvre Peuple*
comme venuë de Dieu, 6c tirée de
fa parole. C'eft pourquoi S. Ja-
ques die fc^rt bien dans fonEpitre:
( y? quelcun d'entre vous a befoin de Su"
gejfe 5 <7«>7 la demande a Lkti ^ qm
la donne libéralement^ &c. Chap. I.
Quand on a ainfi préfenré à Dieu
la prière d'un Cœur pénitent & al- <
teré de la grâce , alors il faut ou-
vrir le Livre , & le lire comme
la parole de Dieu 5 ainfi qu'il eft
. véritablement , & non pas comms
I la parole des Hommes \ en perfé-
vérant dans le défir qui a ditlé la
prière qu'on vient de faire, jjf'
qu*à-ce qu'on fente quelque peu
d'intelligence divine découler d en^
haut , que le Lcfteur doit inceffain-
ment recueillir avec foin , & pen-
fêr d'abord que le S. Efpric parle
en lui , pour le cenfurer Se le cor-
riger 5 c'eft-à-dire , le Lc(fleur doit
k regarder comme écarté de toutes
les Créatures , & agir uniquement
avec Dieu , avec un efprit fimple
& confacré à fbn fcrvice, 6c ne pas-
V 3 (è*
462 Achs du Synode
le mettre en peine de ce qu il doit
dire au Peuple , mais comment il
pourra lui-même recevoir de Dieu
de Rouvciles lumières.
Il faut alors que le Lcifleur
compare enfemble d'autres pallages
de TEcricure , avec l'expérience
que fa Foi a faite auparavant ,
lorfqu*ils pourroient paroître op- ,
pofez à rinteliigence qu'il auroii'|
préfentement 5 &c prier de pouvoir
les concilier enfemble > 5c perféve-
rer ccnfbmment dans cet exercice,
ji;fqu'à-ce que la vérité de cette
même Ecriti:!re reluife vivement
dans le cœur j afin que cela foit
fjivi d'une vive Action de grâces |i
^ d'une méditation appliquée d«
la ConnoilTancs qu'on a reçue.
Enfuiie il faut prendre en mai»
les Livres & ks Commentaires i
qui ont été publiez de nôtre remsj
& dans les tcms paffez , 6c lei
conférer avec Tintelligence que nouff
avons obtenue : C'eft ainfi qu'on*
peut les lire avec jugement , &|
avec profit. Ah! quelle joye n'cft-
ce pas , lorfqu'un Homme trouve
que Dieu lui a auffi donné qiieL:
que chofe , qui s'accorde avec CC'
qu€
de Berne. 463
que les autres ont reçu ; ou que
même les aurres n'ont peut - être
pas encore reçû ? Cependant il ne
s'en enfle point , puifqu'il Ta obte-
nu de la bonté de Dieu, après le
lui avoir demandé , il fait bien
ce qui s'en enfuivroir, s'il tomboit
dans la paiïion de la vaine gloire.
Il eft bon auiïi que chacun met-
tre fes penfées par écrit , & qu'il
les compare avec celles qui /uivront.
Car il faut toûjours avancer dans
la voye de Dieu , d'autant plus
que la mémoire efl foiLle, il nous
eu donc avantageux d'avoir dans
nos recueils quelque chofe quipuif-
fe nous fervir dans l'cccafion \ Se
un tel exercice fait de nos ames un
Arfenal bien fourni pour le fervi-
ce de Dieu nôtre Seigneur j dans
lequel font mifes en referve des
armes fpirituelles , pour repoufler
les machinations de Satan.
CHAPITRE XXXIX.
Que Us Adinifires doivent con-
férer amiablement enfemble
fur [Ecriture
tL feroit fort utile pour cedeffein,
que nous fu/Tions toujours diA
V 4 pofc
404 Actes du Synode
pofez &: prêts à conférer enfembk
fur TEcriture S^^. particulièrement
chacun avec Ton voifin , qui auroit
auffi de la pieté, ôc qui dcfireroit
de croître en la connoifTance de
Jefus-Chrifl: Nôtre Seigneur. îl
faudîoit auffi que tous nos difcours
& nos converfations familières avec
tous les Hommes , fuflent de la
même nature, comme gens qui ati-
rions vivement à cœur la gloire
de Dieu, & le règne de Je sus-
Chris t. Ceft là ce que les An-
ciens pratiquoient, 6c c*eft ce qu«
nous avons fait aufTi dans ce Sié"
cle 3 des le commencement que
FEvargile a é:c prêché, difputant
avec chacun touchant nôtre Evan-
gile, & contre le Pape. Mais il
faut bien prendre garde de n'être
pas choquans, ni emportez , ni
opiniâtres; comme gens qui veu-
lent défendre à quelque prix que
ce foit, l'opinion qu'ils ont une foi$
ernbraffée. Car quand on trouve
dans un autre Homme quelque
chofe de Jesus-Christ , 5-: de les
dons , quelque petit que cela foit>
\\ faut en rendre grâces à Dicu,^
agir avec lui prudemment , pour
Lui
de Berne. 46^
Uii nidcràfaire frihflifier ce« dons»
& ne pas éteindre les efprirs 5 par
là Hne aine tournés vers Dieu par-
vient à une g^dinét connoifTance
des œuvres de Dieu. Ces Con-t
verfations fervent au/Ti à nous ren-
dre plus habiles à raifonner avec
nos Paroifîlen^, & avec les Ad-
rerfaires ; ce que les Enfans
Dieu font d'une manière bien dif-
férente , de celle qu'employé la
Chair & le Sanî^; dans les alfaires
de ce monde , pour avoir gain de.
caufe contre leurs Adverfaires.
CHAPITRE XL.
Ccijrment on doit méditer Us
Sermons .
QT/and on veut prêcher , on Ifc
^ordinairement des Sermons
écrits, ou des Commentaires, ^
l'on en tire des lambeaux, autant
qu'il en faut pour remplir Ton
heure j & Ton ne fe met pas beau-
co'jp en peine, fi cela eft propre
dans ce Siècle pour édifier les Egh-
fes ou non. Ccft là la rai Ton
pourquoi Ton produit fi peu de
fiuit qui foie de durée devant Dieuu
V 5^ C'fft
466 Acîes du Sjncde
Ceft pourquoi nous trouvons né-
celTaire de nous exhorter les uns
les autres , & nous aider Tun l'au-
tre de bon cœur j à ce que chacun
médire lui même l'Ecriture , qu'il
en tire lui-même de lufage, pour
h propre corr€<îlion , comme il a
été dit 5 & qu'après cela il réflé-
chilTe fur l'état de fon Egl ife , fur
lequel il doit diriger fes travaux,
& quelquefois il ne dira pas la
diziéme partie des chofes, que Dieu
lui aura communiquées fur ce texte
de l'Ecriture. Car tout fe doit
faire pour l'édification de l'Eglife,
& il ne s'agit pas là d'étaler fk
Icience ou de montrer fon efprit ;
puifque nous devons chercher uni-
quement & de tout nôtre cœur la
gloire de Dieu dans le fàlut de l'E-
glife par Jesus-Christ, &
rien de plus.
Ainfi il n*eft pas néceflaire de
prefcrire de longues régies , fur ce
fujst. La vérité a fon fîege dans |
les ames , & l'amour de Dieu en |
lègle la diftribution. De cette ma- j
niére on n'épargnera aucun pécheur, i
on n'ofFenfera pourtant perfonnc i
par des cenfures aigres fîins caufs > ■
k 1
de Berne, '467
le Peuple qui écoute fera édifié;
ceux qui font de dehors feront re-
commandez à Dieu j &c Ton n*ex-
ciîera pas tant de querelles, com-
me cela fe fait mal - heureufemcnt
aujourd'hui : dequoi il a été parlé
ci -devant plus au long. Dieu
veuille remettre les chofes en meil-
leur état dans nous tous. Amen.
CHAPITRE XLL
i. I.
Ou il faut lire modérément les
Livres profanes.
peut bien cependant lire aufîl
des Livres profanes, comme par
exemple desHiftoires,pourvû qu'on
le faffe avec difcernement avec
jugement; & dans la viië d'y exer-
cer Amplement nôtre raifon, & d'y
aprendrc à connoîrrc la rature des
affaires de ce monde; mais non d'y
chercher ce qui peut fcrvir à nôtre
converfion , ni à l'édification de
l'Eglife. Ainfi il faut que toutes nos
inftrutîlions ♦ nos exhortations, nos
cenfures & nos corrcflions , foicnt
tirées de rEfprit dejLsus- Christ,
& de rEcdture S^^- quoiqu'il pu ilFa
V 6 quel*
4éS Acics du Sjnock
c];!elquefois arriver , qu'on poui-
loit dans un Sermon raporter en
peu de mots une HiPcoire Payenne,
ce que nous ne défendons pas j
Nous elpérons pourtant que cha-
cun fera réflexion , qu'il eft Dif-
penfareur des Myftères de Je sus-
Christ, & Serviteur d« fon Ef-
prit 5 & qu'il doit faire plus d'u*
fage des Ecrits de rEfprit de Dieu,
que d« ceux des Hommes r quoi-
que helas! les Minières de la Cam-»
pagne ne font pas trop attachez à
l'étude 3 cependant ce n'eft pas jfàns
caufe que nous avons placé ici c^.£
avertiilement,
S. ir.
1 Comment on doit prêcher.
On doit prêcher avec beaucoup
de dévotion, & avec une Ch^
rite ardente pour nos Auditeurs ,
pour les corriger & les édifier en
Dieu : Des Sermons de cette forts
font impreflion fur les gens di
bien. Car c'eft ainfi que les bre^
bis de Jesus-Christ entendent la
voix de leur Seigneur , le vérita-
ble Pafteur y elles le reconnoiffent s
elles k fuiveat; Au li§u que des
mvcc'
de Berne. 469^
*^veé^ive5 gicflléres ne font que
remplir d'aigreur 6c de trouble les
efprits paifibics, qui nu forrir d'un
tel Sermon; fe trouvent pleins d'en-
vie 6-c de haine j féditieux &: por*
tez à msl-faire 5 Quoiqu'en par-
lant de la forte 5 nous n'aprou-
voîis nullement i raais au contraire^
nous condamnons abfolument la
eond'jite de quelques lâches efpritSj
qui ne veulent pas cenfurer com-
me il faut ^ & fc contentent ds
tourner leurs difcours d'une manié*
re propre à fc faire écouter avec
plâifir 5 plutôt qu'à édi/îcr. Ces
gens -là devroient bien pefer ces
Paroles de S. Paul: fi je voulois
fUire aux Hommes^ je ne ferois pits
Serviteur de J e s u s -C h k i s t.
CHAPITRE XLII.
Qu^on doit prêcher dans tous les
j ornes frefcrlts^
T L. EE. Nos Souverains Sei-
gneurs, ayant ordonné dans
leurs Edits de Réformation, à tous
les Miniftrcs > de prêcher le Di-
manche , le Lundi , le Mecredi 6c
fc Vendredi; Scnous* nous en ètaiït
excufcz
47 O Actes du Synode
excufer parce que nous ne pou-
vions pas avoir des Auditeurs j il
a été trouvé bon , que chacun doit
s'efforcer à prêcher dans ces quatre
jours autant qu'il lui fera pofllbls,
quand mêirie il n'auroit qu'un Au-
diteur ou deux. Le Seigneur ne
s'eft point fait de peine de s'en-
tretenir avec une feule Femme Sa-
maritaine : pourquoi un Miniftre
de Jes us-Christ fe feroit-
il de la peine de parler de fon
Seigneur , & pour fa gloire , mê-
me avec les perfonnes du plus bas
rang du Monde? Car par devers
Dieu il n'y a point d'acception de
perfonnes : & une Ame fidèle vaut
plus devant Dieu , que le Monde
entier. On pourroit aufTi faire ces
fortes de Difcours , fur femaine >
dans le milieu du Temple , fans
monter en Chaire , & de la ma-
nière la plus fimple. Et fi nous
fommes fi promts a nous en difpen*
ferc'ell une preuve que nous avons
bien peu à cœur la gloire de Dieu,
ou bien que nous fa^fons plus d'at-
tention au plus grand nombre >
qu'au petit troupeau 5 & aux gens
de bien 3 à qui nous devrions fou-
haitec
de Berne. 471
hairer perpétutllement d'être uti-
les. Il y a cependant plufieurs
frères 5 qui fe font un plaifir de
prêcher tous les jours» C'eft une
diligence que nous louons , comme
une marque d'un bon zèle.
. Il y a aufTi plufieurs Miniftres,
qui ont plus d'un Village dans
leur ParoifTe. Il feroit bien né-
ceflaire qu'on y prêchât au pauvre
Peuple dans les autres Villages, fur
femainc ; & qu on fît quelquefois
deux Sermons le Dimanche. Il
faudra examiner cette affaire dans
les ClalTes ; parce que la fituatioa
des lieux n'eft pas la même par
tout. En attendant , perfonne ne
doit empêcher un Pafteur diligent,
d'exercer fon emploi j car enfin int
truire Ôc ramener ceux qui s'éga-
rent > eft un devoir de chaque
Chrétien > mais particulièrement
des Pafteurs. Et nous favons pour
certain , quel fruit il en revient,
de parler de coeur & avec prières
à un feul Homm.e de bien , & fim-
ple 5 &: de lui montrer fon faluc
par Jesus-Christ : au lieu qu'au-
trement un tel Homme périt mi-
ferablement dans fon ignorance >
&
472*^ A^es dti Srdode
&: (on Sang fera redemandé dey
mains du PaReur , qui comme un
fawx Pafteurnaura pas bandé U'
brébis malade.
CHAPITRE XLIir.
j^//7 faut parler aux Auditeur r
en particulier,
/^Omme nous femmes oblrgfz de
ne rien omettre , pour amener
nôtre Peuple à Dieu, il ne fufiFit
pas de prêcher en public dans TE*
glife ParoifTiale 5 ou dans tous les
Villages, félon Tufage établi ou
prefcrit , nous devons auffi aller
trouver nos Auditeurs de Maifon
en Maifon , & les inftruire dilii
gemment , & en particulier > au-
tant qu'il eft pofTjble > de la vo} e
du Safe 5 ôc leur prêcher la rc-
penrance> comme nos PrédécefTeurs
les Apôtres ont fai-r. Car les in(î.
trudions particulières pénétrent
beaucoup plus dans les Cœurs>quc
les difcours qu'on adrefie en publia
à tout le Monde,
CHA-
de Berne, 473
CHAPITRE XLIV.
De la Vifite des malades,
î A principale partie de nôtre em-
ploi , c eft de confoier les affli-
gez. Ceft pourquoi nous les PaC
teurs , foit des Villes ^ foit de la
Campagne , nous devons être par-
ticulièrement foigneux 6c diligens
à vifiter les malades , pendant
qu'ils ont encore l'ufage de la rai-
fon & lefprit libre , & n attendre
pas qu'ils foient à rexttêmité.
Et c'efl: ici Tordre qu'il faut ob-
ferver dans les inftru^ions qu oa
adrefle aux malades : On dok com-
mencer par les faire fouvenif de la
grâce de Dieu en J e s u s-C h ri s t,
qui fe tient %c fe veut tenir près
des fiens dans leurs affligions ; &
leur repréfenrer, comment les vrais
Chrétiens attendent avec foin lave-
nue de leur Seigneur , 6c de dé*
loger ou d'être appeliez à fortirdc
ce Monde. Que s'ils ne trou-
vent pas cette dirpofition en eux,
il faut pour les confoier, les con-
duire à la repenrance, puifque par
là ils apprennent à reconnoîrre leur
amour propre & k foibleiLi de
leut.
474 AEt es du Synode
leur foi , & qu'ils prient le Sei-
gneur de leur augmenter la foi ,
afin que nous , qui devons être
les témoins de la vérité de Dieu>
ne les jettions pas dans une fâufle
confiance.
Enfuite il faut exhorter les At
fîftans, à prendre occafion des dou-
leurs & du danger du malade ,
pour penfer aulTi à leur propre
fragilité , & à craindre auffi Dieu
tout de bon : puisque toute con-
fiance charnelle efl absolument vaine
& mal-affurée , Qu'ils doivent con-
fiderer , qu'elle confolation c'eft ,
dans CCS affli<flions , d avoir un
Dieu mifericordieux , & J. Chrift
le fils de Dieu, pour fon Média-
teur 6c fon Avocat ; avantage que
nous obtenons par la repentance
& ramcndement de la vie > & par
une véritable foi en J. Chrift :
Qu'il y a eu bien des gens, qui
ont été furpris par la mort, avant
que d'être bien convertis , s'étans
endormis avec les Vierges folles,
dans l'attente de TEpoux &c.
Après cela il faut fs mettre à
genoux , & prier pour le malade,
qu'il plaife au Seigneur de Ï2i^\i''
ter
de Berne. 47 J
ter par fa grâce dans fon affligions
& demander en même tcms &
avec ardeur au Seigneur > qu'il
nous accorde le fecours perpétuel
de fa grâce dans les maux qui nous
arrivent prérentement> &dansceux
qui nous doivent arriver.
Il efl aufli utile de lire quelques
endroits de S, Paul , ou des Evan-
geljftes , ou des autres Apôtres ,
qui traitent de Ja paflion & de la
rerarre<n:ion de J. Chrift j & de
les expliquer d'tinc manière vive
touchante &c.
Cette efpèce a exercice eft fou-
vent plus utile que dix Sermons,
qui fe font dans l'Eglife^ fans que
les Auditeurs y prêtent beaucoup
d'attention j au lieu qu'ici l'afflic-
tion les touche tous de près 5 &
qu'ils défirent tous la confolationj
qu'on ne trouve nulle part , plus
certainement , que dans le Seigneur
Jefus-Chrift , après qu'en a perdu
ï'erpérance de tout fecours terrien,
Jufques ici nous avons parlé de
l'Emploi des Pafteurs , comment
ils doivent 6 en aquiter,
CHA-
47 6 Acîes du Synode
CHAPITRE XLV.
elui qui pratique k Comman-
dement, &;quirenfeigne, fera
appelle grand dans le Royaume
des Cieux 5 car ce ne font pas
ceux qui écoutent la Loi > qui font
tenus pour juftcs , mais ceux qui
li gardent. On voit le contraire
chez les Pharifiens , qui favent
fort bien parler de Moyfe > & qui
chargent leurs Eglifes de gros far-
deaux 3 mais ils n'y touchent pas
du plus petit doigt. Loin denous
une telle conduite, de Nous, dis-
je, qui fommes les Succeffeurs des
Apôtres ■ Au contraire , puisque
nous prêchons la Croix de J.
Chrift , nous devons porter avec
nous en nôtre Corps mortel , la
mort de J. Chrift 3 6c prouver
efficacement par une vie célefte ,
la réfurred^ion de J. Chrift , à la^
quelle nous devons rendre témoi-
gnage» mais c'eft ce que nous ne fai-
De U conduite que les Minif-
très doivent tenir 5 Joit a
H égard deux mhnes 5 foit -
dans leur domefiique.
fons
de Berne» 477
fons pas > fi nous attachons nos
cœurs a ce monde , comme font
les autres , qui n'ont que des af-
fedions charnelles. Nous devons
avoir nôtre domicile dans le Ciel,
comme gens qui font relTufcitez
avec Jefus-Chrift: Ceft par-là que
nous excitons nos Eglifes à re-
chercher avec foin hs chofes qui
font véritables j raifonnables, ju^es^ pu^
res i aimables & lotiablcs , ce qu'il
faut ^a'elles appr-ennent de nous 3
quelles nous entendent dire , &
qu'elles voyent en nous ; Ce fera
à ce prix - là que nous paroîtrons
avec joye devant le Siège Judicial
de Jefus-Chrift nôtre Seigneur : & -
que nous remporterons dans fa
journée la louange d'avoir bien
rempli nôtre emploi. C eft à quoi
TApôtre S. Paul avoit bien penie ,
lorlque marquant à fon Difciple
Timothée les qu^Jirés de ceux qu'il
devoit choifir pourEvêqucs, c'eft-
à-dire Paftc:urs5 il lui dit:
Il faut que C Evoque /oit irré^rc^
henfible , mari cCune feule Femme ^fo-»
bre y tempérant , grave , hofpitalier,
propre a enfeigv.er , nuileuient adonné
au vin } ni violent , ni attaché à un
gain
478 Acles du Synode
gain fordide > mais qu 'il fok doux ,
éloigné de toute conteftation , exempt
d'avarice ^ quil fâche bien gouverner
fa propre famil.e , qu tl ait des En*
fans obeijfans , & dont les moeurs foient
tout a fait honnêtes.
Nous allons réfléchir fur quel-
cjues-unes de ces cxpreflions, 8c les
examiner , laiflant à chacun à faire
fes réflexions plus au long fur les
autres.
Irreprêhenfible : Notre conduite
doit être de gens d'honneur j dans
tout ce que nous faifons, ou que
nous ne faifons pas ^ dans nos ac-
tions & nos paroles; en un mot>
dans tout ce qui peut être de bon
exemple. Ainfi nous trouvons bon
de ne pas méprifer nôtre Troupeau,
{quoique compofé de gens du Peuple,)
mais cependant, qu'il faut être ha-
billé honorablement, 3c qu'il y ait
quelque différence dans Thabille-
ment entre un valet de boucher
& un Miniftre de la Parole de
Dieù: cir du refte^négliger la bicn-
féance à cet egardj c'eft la marque
d'un efprit léger. Nos Seigneurs
défendent les habits découpez
mais fi les' Pafteurs , qui doivent
de Berne. 479
être en exemple > portent les ha-
bits les plus immodeftes qu'il foit
pofllble d'avoirjComment cela peut-
il être irrépréhenf^ble ? Ce n'eft
pas pourtant à dire , que nous
approuvions l'aifcdaiion pharifaï-
quc des hypocrites > mai^; il faut
garder foigneufernenc un jufte mi-
lieu.
M An d'une feule Femme. Il veut
dcfigner par là une ame chafte &c
pure, foit dans le mariage ou non.
Car il a égard à l'ufage des Juifs>
qui avoient alors plus d'une Fem-
me 5 ce qui avoit l'apparence d'u-
ne ame impudique > & étoit en
même tems accompagné de beau-
coup de peine 8c d'embarras : Car
ceux qui font mariez ont beaucoup
daffli^'ion en U chair. Cependant
S. Paul ne rcfufc pas une Femme
à l'Evêque : mais ce qu'il dit là
dans ces dernières paroles, fe rap-
porte à 1 honneur de la famille ,
ou aux foins des affaires de ce
Monde , ou à ceux qu'il faut k
donner pour plaire à une Femme>
s'il a une Sœur, qui attende avec
lui l'avènement de nôtre Seigneur
J E S u s - C II R I s T, Or il faut qu'H
foit
480 Actes du Synode
foie mari d'une feule Femme, afin
qu*il ait une conduite chafle, E: à
cet égard nous ne favons rien les
uns des autres qui foit à repren-
dre > & quant à la conduite ex-
térieure il ny a aucun défaut par-
mi nous.
Mais nous devons confîdéreravcc
grand foin , combien il eft blâma-
ble & malféant à nous, de tenir des
Hifcours mal honnêtes, ou de bouf-
fonner , ou de plaifanter> ou d'ap-
prouver par nôtre filence ou autre-
ment , que d'autres en nôtre pré-
fence fe divertiffcnt à parler de for-
nication , d adultère , ou de galan-
teries criminelles. Car c'eil con-
fentir au mal> ce qui eft pire que
i'Ade en lui même. Comment pou-
vons nous faire écouter la S^^- Pa-
role avec refpe(îl 5 fi nous tenons
quelquefois de ces difcours mal-
honnêtes ou de mauvaife plaifante-
îie j ou fi nous les écoutons > en
riant 5 de la bouche des autres ?
Nous devons erre Sobres, Car
quelle feroit la dignité de nôtre
Cara£lère> fi Ton nous voyoit dans
les Tavernes boire avec de la Ca-
naille & à des heures indues ;
comme
de Berne. 4S f
comme fi notre emploi ne confit-
toit qu'à boire & à manger.
Mais nous n*avons pas deflçin
de pouffer plus loin nos réflexions
(iir ce fujet. Quand la Croix de
Jes us-Christ eft gravée dans
un cœur 5 elle remédie bien-tôt à
toute autre chofe , qui doit erre
le principal objet de nos foins v
En attendant il faut s'abftenir (bi-
gneufèment de tous les vices
grofliers » jufqu à-ce que nous puit
fions nous avancer à un plus haut
degré de vie fpirituelle , qui porte
avec foi toutes les Vertus > ce qui
eft le but auquel fe rapporte tout
' ce Synode 5 Dieu nous faffe la
grâce d'en obferver les Réglemens.
Amen !
Or afin que nous puilTions per-
féverer dans cet exercice Chrétien,
il faut toutes les années, le pré-
micr de May, convoquer un Sy-
node de tous les Mini/Ires de la
Capitale & du Canton , & y ra-
fraichir les règlemens contenus
dans ces A(ftcs-ci, De plus, nous
voulons avoir toutes les années
deux Affemblécs de Claffes , au cas
que LL. EE. l'approuvent j &: y
Tm, IF. X trai-
482 Actes du Synode
traiter de la même manière , des
chofes qui fervent à nôtre édifica-
tion , & à celle de nos Eglifes ;
fur quoi nous confulterons LL. EE.
& prendrons une dernière refolu-
tion.
Pour conclufionjnous prions Dieui
qu il lui plaife de nous conferver,
& de nous augmenter ce qu'il nous
a communiqué dans ces fîx jours
avec tant de bonté : afin que le
refte de notre vie foit entièrement
employé à fa gloire > & à 1 amen-
dement de nos pauvres Eglifes.
Ce Synode a commencé le p. Jan»
v'ur i & a fini le 14, de cette annh
Fm des Actes duSiNODiè,
de BERNE,
LEDIT
Edit de LL, EE.de Berne, 4g»
I. Edit de LL. EE. de Berne,
qui confirme les Réglemens
de ce Synode.
Nous TAvoyer, Petit & Grand
Confeil 9 nommez les Deux Cents
des Bourgeois de Berne , A tous &
un chacun de nos Pafteurs & Minif-
très y qui habitent dans nos Terres
& Pays , & qui pré fi dent fur Nous
& fur nos Sujets par le Minificre
de la Parole de Dieu ; Nôtre amia*
ble vSalutation prémi/ê , avec toute
forte de bien ^ & Vous faifons fa^
voir par les Préfentes:
« Après que nous avons rejet-
té le Papifme avec fa faufTe con-
fiance de fa faufle Doiftrin^ > il
5j y a maintenant quatre ans > Se
yy que nous avons embwfsé le S.
^> Evangile pour nous 6c nos Sujets,
>j tant de la Capitale que du Can-
yy ton , après la Difpute que nous
>j fimes faire alors 5 & que nous a-
3, vons juré à main levée 3 de cœur
yy & de bouche > que nous obferve-
3i rions avec le fecours de Dieu ^
y:> dans la Dodrine & dans la
»a Conduite 3 tout comme les au-
X z très
'4'84 Editde LL. EE.
n très Ordonnances 5 8c les Loix
» Civiles du Pays , Ce qui ne fe
peut pas bien exécuter ccnftam-
5> ment 5 à moins que Vous les
Minières des Eglifes , fembLi-
^> blcs à une bonne fource toû-
j> jours abondante en eau pure &
33 faine 5 m préfcnriez au peu-
5, pie, qui a foif de la juftice , ujie
>, Do(fbrine faine & fpiiituelle, &
3, le modèle d'une vie édiiiante 8c
» bien réglée : Pour en venir a
yj bout , Nous avons joint à nos
Edits de. Réformation toutes for-
» tes d'Ordonnances , concernant
» Vous autres les Pafteurs ; &
yy nous les avons fait propofer en-
5>core à vos Synodes & à vosAf-
yy femblées. Cependant nous trou-
53 vons encore en vous bien d-es dé-
» fauts confiderablcs > à l'égard de
5, la Doflrine & de la Vie : ies-
5> quels mettent obftacle à l'avan-
ie cernent de la gloire de Dieu 9
^5 & de la probité & des bonnes
5, mœurs parmi nos Sujets; les
» corrompent & empirent leur é-
79 tat , attirent fur nous& fuc
55 le peuple la Colère de Dieu : &
5>par là encore le S. Evangile eft
bkf-
de Berne i 4^5
3^ bkfphemé , pour l'Amour de
» nous, par ceux de dehors : &
il ne faut pa3 s'en étonner, c'eft
^ parce qu'ils ne découvrent pas
» beaucoup dans nos Sujets , qui
yi entendentl'Evangilej le Sceau de
>5 la Vérité , qui eft une vie biea
réglée , & une folide piété,
C'eft ce que nous avons pris ,
» avec raifon , en confideration ,
i> pour y réfléchir mûrement :
>, D'autant que nous efpérions de
3^ trouver dans Vous les Pafteurs,
n 8c dans le commun peuple j
y) beaucoup plus de vive crainte
>5 de Cheu , d'amendement de vie*
>5 de Vertus &: de bonnes mœurs>
géiiéralement de toutes fortes
yy de bonnes qualitez , que nous
yj n'en avons trouvé jufqu à pré^
5, fent, à nôtre grand regret : &
T> qu'il n'en paroit fenfiblemen: ,
y9 en particulier depuis nos derniers
j> troubles j où nous avons vû
3, manifeflement , (quand nous ne
^> l'aurions pas déjà fii j ) quels
j, défordrcs, combien de mau-
yy vaifes mœurs la divifion a fait
>, éclorre , & combien peu de
yi ChrifUanifme il y a encore parra
X g nous
48^ ^^^^ de LL, ËE, de Berne &Cn
» nous : Car, nonobftantnos E-
>j dits & nos Ordonnances , toutes
» forces de vices ont éclaté par-
mi plufieurs de nos Sujets des
Pays Allemand & Romand.
>3 A ces Caufcs , commençant par
» nous-mêmes ? Nous nous fom-
>j mes fait de férieufes remontran-
5, ces les uns aux autres Nous
>j nous femmes examinez exac-
tement 6c avec grand foin, de
que] efprit chacun de nous eft
;» animé envers le DieuTout-puif.
>, fant > & envers fon S. Evangi-
5,16, favoir, fi dans le fond, il a
5> plus à cœur la confervation de
5, fa vie , de fon honneur & de
fon bien > que la polTe/îion de
la vie célcfte & éternelle, qui
„ nous a été acquife par J. Chriflj
qui nous cft annoncée par fes
„ Serviteurs > & qui eft communi-
quée en quelque mefurc aux ames
fidèles par le S. Efprit : Là-
dcffus > nonobftant les caUmi-
„tez de CCS tems-ci, par lefquel-
yy les des Confciences foibles ont
été fort affligées & ébranlées s
>, la bonté paternelle de Dieu par
J. Chrifta (gloire lui en foit reu-
qui confirme les ACles du Synode, 487
5, duë ! ) n'a pas permis que nous
,,foyons tombez jufqu'au point j
j, de concevoir quelque dégoût pour
3, fon S. Nom & pour Tes promeA
fes véritables , à i'occafion de
,5 cette Croix accablante qu'il a
5, fait venir fur nous : Mais au con-
3> traire nous nous femmes liez 8c
j> engagez , comme de nouveau y
j, à maintenir le S. Evangile, à le-
5, gard de la Doflrine a 1 e-
gard de la Conduite, parmi nous
3, & parmi nos Sujets, autant que
3, nôtre Autorité peut s'étendre, 6c
>, que le Seigneur nous en fera
j) la grâce : Ce que les Députez
de tous nos Sujets , qui ont pa-
5, ru devant nous , il n'y a que peu
,> de jours 3 ontauffi fouhaité que
,3 nous fi/Tions, & là-dcffus, ils
„ ont eux - mêmes volontairenienc
3, remis en force chez eux nos
3, Edits précédens de Réformation»
3, C'eft pourquoi, comme auHi en
,partie pour remédier au dégoût des
, autres, nous avons été occafionnez
,de convoquer un Synode de vous
>tous, qui êtes nos Miniflrcs tc
, Pafteurs , ainfi qu'il a été fait :
3 Ayant donc été cfumblez ici à
X 4 Berne
4S8 Edît de LL. EU, de Ber»e,
5, Berne I3 5?. Janvier delà pre-
„ fente anhée 1532. vous vous êtes
exhortez l'un l'autre férieufementj
33 au delà de ce que nous aurions
,y penfé & efperé , 3c même au de-
55 là de ce que vous auriez crû vous
mêmes, de la manière qu'il eft ex-
,5 primé ci-après de mot à mot y &
,5 vous avez reçu cette exhortation
55 avec une grande unanimité, & d«
,5 très bon cœur : à quoi Dieu a
53 tourné vos cœurs intérieurement
en fa grâce , comme nous efpé-
^ronsjôc y a contribué au dehors
35 par un de fes fidèles Minières 3c
5, Serviteurs. Veuille le Seigneur
55 Ini-meme accomplir cette ficnne
5, œuvre en Vous 2<: en Nous , de
53 dans tous les fidèles^ jufqu'à k
» fin l Amen.
o Là-deffus vous avez 5 (Vous
3j nos Pafleurs & Miniflrcs , ) remis
5, ces A(fles de vôtre AlTeniblée 3 à
„ Nous l'Avoyer > Petit Grand
ConfeiL en nous priant 3 d'en ea-
^, tendre la Lecflure, & de les con-
firmer, U. de les munir de nô:rs
53 Autorité 3 au cas que nous les ap-
53 prouvions : de les oblerver nojs
a, mêmes . en ce qui nous regarde,
Se
i^ui covjirme les Acicj du Synode, 48^
9» &c de vous ordonner de les ob^
J5 ferver: afin que cette grâce &
ce don de Dieu > c'eft-à-dire > vos
>j réâexions 6c vos rsmontrances fi.
5, Chrétiennes , ne tombent pas
yy dans l'oubli par négligence > ou
j> dans le mépris > comme il arri-
3> ve aifément 3 fi 5 dans une affem-
55 blée générale 3 des Ordonnances
édifiantes ne font pas confirmées
55 par des Magiftrats bien intention-
>> nez : Ayant donc entendu le
>y contenu de vôtre Cahier , nous
>, l'avons extrêmement approuve y
3, Nous l'avons jugé fait félon Dieu
3> 8c édifiant 5 ôc nous avons trou-
j,vé qu'il n'y a plus rien à faire^
o f non que vous autres Minières
„ 3c Pâfleurs , régliez vôtre Doc-
>, trine &: votre Conduite, précifè-
,> ment de la manière qu« vous y
,j avez prcfcrite ; Car par- là l'édi-
3, fice intérieur , célefte ôc éternel
jjcrcîtra & s'élèvera comme il y
a lieu de l'efpcrer > on abolira.
,3 aufîi les excès & l'a pétulance
,) de la Chair ; & cependant par
,> là on laiile le cotrs libre au S,.
,5 Efpri: , 3c au mouvement inté-
>., rieur de la Gracc, qu'il n'appar-
tienc
45>o Edit de LL. EE, de Berner
3, tient à aucune Créature de gêner
7i OU de maîtrifer* comme vous
3, avez eu particulièrement égard à
>, cela dans vôtre Ecrit, Ainfi,
5> nous avons approuvé générale-
55 ment ces Actes de vôtre Sj*
s, node ; Nous les avons jugé pro-
?) près à l'avancement de la gloire de
5, Dieu 5 & à la propagation du S,
Evangile i Nous les confirmons,
& les corroborons : Nous vou-
>5 Ions les exécuter, en tout ce qui
nous regarde , 6c mettre ordre
3j qu ils foient maintenus de tous
,5 nos Sujets 3 de la Capitale & du
5, Canton s comme aulîî vous fou-
j5 tenir & vous protéger dans leur
53 obfervation 3 vous autres 3 les
„ Pafteurs & les Minières > afin
53 que vous puifliez prêcher Jésus-
>3 Christ feul3 rejetter les erreurs,
53 attaquer & combattre fans crain-
9, te les vices les fcandales 3
33 tant des Seigneurs & des Ma-
j, giftrats , que des Sujets, & mê-
33 me les nôcres 3 fclon Tordre de
„ la Foi 3 de la Charité , & autanc
3, que les Auditeurs en pourront
3> être édifiez en Dieu. Cependant
3) comme vous avez jugé vous-
même
^ui confirme les Acles du Synode. 4pi
5, même, que c'eft une âftionChré«
5, tienne , nous n'ufcrons point
j, de connivence envers vous > &
5, nous ne vous laifferons point
5, impunis fi quelcun de vous n'en-
55 feigne pas d'une manière con-
5> venable à la gloire de Dieu , &
3> à la nature de TEfprit & édifiante j
,>mais prononce des paroles inju-
3, rieufes prepres à détruire , par
5, malice & par infolence, ou par
3, le mouvement de quelque paf*
flon 3 foit que cek fe fafle con-
},tre des gens du Pays, ou con-
tre des Etrangers 5 contre Hom-
j, me ou Femme 3 contre les Ma-
>, giftrats on les Sujets, Cependant
yy nous ne poufferons par la févé-
» rité trop loin contre qui que ce
» foit. Mais comme la plus grande
>3 partie de ces A£les vous regarde
>, vous-mêmes Vous & vôtxe Em-
>3 ploi j auiïi nous voulons &en-
, étendons très férieufèment, que
chacun de vous les obfèrve dans
33 fa Do(flrinc &: dans fa Conduire>
33 foit à 1 égard de fon Eglife3 foit
>, à l'égard de lui - même \ 3c que
33 vous vous y exhortiez, &c vous
,> y animiez ks uns les autres s en
par-
4P 2 Bdh de LL, EE, de Berner
yy, particulier que les Doyens > &
j5.ceux qui furpafTenc les autres sn
habileté , 6c en faint zélé 5 les
>^ exhortent, les aident & les ani-
>, ment, à obferver ces Réglemens.
»Que fi quelqu'un s'y oppofoic mé.-
33 chammentj qu ilfe moquât deces
j^^leçons falutaires,qu*il ne s'âquittâc
pas diligemment de fon cmploi>
qu'il vécût d'une manière fcan-
5) daleufe>ou que par quelque au-
tre endroit il fit du mal à l'Egli-
yo {q de Dieu 5 en contrevenant à
yy un 5 OU à plufieurs articles de
>j ce Synode , un tel doit favoir ,
yy qu'il n'en demeurera pas impuni,
j> au cas qu'il nous foit ra porté :.
mais il doit s'attendre à être
„ puni de nous 5 d'une manière >
qui fera connoîrre à tout le
yy Monde > combien nous prenons
55 à cœur la gloire de Dieu, &: la
défobéiffance à fa Parole,
yy Pour conclufion : Nous ordon-
yy nons& entendons, que cesA(fles
wfoient portez dans ksSynodes fui-
vans j qui fe tiendront annuelle-
yy ment au prémier de May , ou cn-
y^ viron; qu'on les y life avec foin^
^. qu'on les cclaircilTe s qu'on les
explique.
qui corrfiïiKC les ^Hcs du Spicd:, 4P5
explique 5 & qu'on les renou-
>, velle 5 & qu'on n'en laiïTe tom-
j>j ber aucun poinr. Que fi , au
a^reftcj nos Pafteurs ou d'autres
>j ^lous propofent quelque chofè ,
qui nous conduife plus droit à
î>Jes us-Christ, & qui con-
>,*contribuë mieux à la concorde
>, commune & à la Chariré Chré-
o tienne, félon la Parole de DieU:>
55 que ne le font les Reglemens qui
^jfont ici couchez par écrit, nous
a, le recevrons de bon cœur, & nous
33 laifferons au S. Efprit fon cours
libre, puifqu'il ne nous tourne
3, point en arriére du côté de la
t,, chair, mais nous pouffe perpé-
33 tuellement à nous former à Ti-
3, rcage de Je s us -Chri st nôtre
33 Seigneur. Veuille ce divin Sau-
3, veur nous conferver tous en fes
53 grâces ! Donné a Berne 14..
53 Janvier de ian 1532,
Fin de t Edit.
TABLE
494
TABLE
DES CHAPITRES
Contenus dans /es AcT E s DU
Synode de Bhrne
Chap. I. 0«e les Miniftres doivent
s'aquiter foigneufement de leur de-
voir. 3^9.
Chap. II. 0«e toute la do(5lrine fe ré-
duit uniquement à ] e s -
Christ ^6o.
Chap. III. (hi'on ne doit propofer au
Peuple la connoiflànce de Dieu qu'en
]esus-Christ 5<5r.
Chap. IV.. Que J E s u s - C H R I s T elHc
véritable Fondement. 3<^5.
Chap. V. Que ce n'ell que par Jésus-
Christ feul immédiatement >
que Dieu eû reconnu mifericordieux.
36<;.
Chap. VI. 0«'un Sermon Chrétien doit
être uniquement tiré de JesusChrist
& parler de lui. 368.
Chap. VIL Of*'il faut commencer & finir
la Do(5lrine & h vie Chrétienne à la
mort & à la refuredlion de Jesus-
Christ 570.
Chap. VIII. Comment il faut tirer de
Christ la connoifTance de nôtre
péché 37^
Cnap. IX. Que c'ell en Je sus-Christ
& fans la Loi 3 que l'on doit chercher
I N TR G D U T r O N.
la
TABLE 4PÏ
la connoiflance du péché 37^;
Chap. X. Pourquoi St. Paul a tant parlé
» de la Loi aux Payens. 377*
Chap. XI. Q^e les Juifs & les GemlU
font parvenus à la Fol: les premiers
fous la Loi 5 & les derniers fan»
la Loi. 37S.
Chap. XII. Différence entre la manière de
prêcher Jésus-Christ parmi les
Payens , Ôc celle de le prêcher parmi
les Juifs. 38r.
Chap. XIII. D'oil vinrent les faux
Apôtres 382..
Chap'. XIV. De la repentanee &: du
pardon des péchés 3 ou de la dilpen-
fation de la grâce. 384.
Chap. XV. La Repentanee trouvée en
jksus-CHRisT eit le fondement pag,
Chap. XVI. Le Myftere qui a été caché
dès la fondation du monde , eft 3 que
Je s us-Christ ert prêché aux Pa-
yens fans la Loi. 388.
Chap. XVII. O^e l'on peut auffi tirer
des Prophètes , des inftrudlions pour
la repentanee chrétienne. 390.
Chap. XVin. gw'il faut toujours croî-
tre dans la connoi/fancc de Jésus-
Christ Sc que chacun doit exami-
ner û propre Foy. 39 r.
Chap. XIX. Des Saints Sacremens & du
Batême en général. 393.
Chap. XX. Du Batçme en particulier 399,
Chap. XXI. De l'adminiltration du Ba-
tême. 401.
Chap. XXII. De la Céne du Seigneur 4C(5.
Chap. XXIII. De l'ufàge de la Loi & des
Prophètes* Aiz.
Chap. XXIV. D'attaquer le Papifme dans
les Sermons. 410.
Chap.
49^ , TABLE
Chap. XXV. Des Exhortations Zz des
Cenfures. 41^.
Chap. XXVI. Qui font ceux cju'on dok
Cenfurer. 416.
Chap. XXyiI. Q^"û convient de prêcher
la vérité comme la tirant de l'Écriture
Stc. & non en fe fondant fur l'appui
d'aucun homme ou parti , ni parce
que le MaQ;i(lrat le commande. 43 1«
Chap. XXVltl. O^'anctin Pafteur ne
doit attacher à lui le commun F-eu-
pie. 455-
Chap. XXIX. C'efl de Dieu qu'il faut
apprendre quand on doit employer
la févérité ou la douceur envers le
pécheur. 43^»
Chap. XXX. Exhortation à la Régence de
B E R H Ejnos SouverainsSeigneurs.437.
Chap. XXXI. Enquoi il faut particulière-
ment eshoyier & cenfarer le Peu-
ple. - - 441.
Chap. XXXII. On doit prêcher l'obeif-
fance envers le Magiftrat, tant du Gou-
vernement féculier que de ÎEccléfîaf-
tique. 441.
Chap. XXXIÎI. Qui\ faut exhorter le
Peuple à obferver les Edhs de L. L.
E. E. 3c s'appliquer particulièrement
à corriger les vices , qui ont le plus
de vogue dans nos Egfifes. 448.
Chap. XXXIV. De l'Inftru(5lion de la
Jeunclfe & de la Dodrine de la Foi^
on du Catechifme 45^»
Chap. XXXV. Du Décalogue, 0» desdix
Commandemens. 4^-.
Chap. XXXyi. Du Symbole des Apôtres;
de rOraifon Dominicale , & des Dix
Commandemens 4^3.
Chap. XXXVfl. De la conduite & de la
jr.'oùité des Minillres & des Pafteurs
en
TABLE
en gcnéral
Chap. XXXyiir. Comment les Pafteurs
doivent étudier , & lire l'Ecriture
459.
Chap. XXXIX. Que les Minières doi-
vent conférer amiablement enfemble
far l'Ecriture S^^\ A^y--
Chap. XL. Comment on doit méditer
les fermons.
Chap. XLl. Qj£i[ faut lire modérément
les Livres profanes 4^j7.
Cha. XLH. Qi^on doit, prêcher dans tous
les jours prekrits 459-
Cap.. XJLIII. ^^'il faut p^;lei ciUX Audir
teurs en particulier 472 .
Chap. XLÎV. De la vifite des malades
Chap. XL V. De la conduite que les Minil-
. très doivent tenir, foit à leiiard d'eux
mêmes 3 foi: dans leur domèllique 476Î
11
y.
ERRA-
ERRATA,
Changemcns dr Additions four
le Tom. IV.
Tdge 10. Ligne dernière qu'il llfeT^ (^u'otl
pag. 40. Lïg. 9- après il fe VOÙa ajoute'^
quoi qu'avec peine.
M' 82.. lig. iÇ. & 16. Gy, Champagne,
Provence 3 ejface-:^ ces trois mots»
P^g' S^. lig. 51 /^*/f^ ?o.
/«^g^. 91. 2^. oe^ /lfe-7i^ de.
ICI. /^^. II. aine ///ec?;, puîné.
fag. 153. /iif. 17. des ///èc?;.de.
141. /jig-. 15. ej^^c^'T des Cantons
/'rf^, i^?. /^j^. 9. Elles font datées 11/6%,
Il eii datte.
pag. 170. 13. ces Meffieurs llfcKjcs
Chanoines.
pag, 185. llg' 19' par pas. ,
190. /?^. II. règîemens llje\ aere-
glemens.
/■.i^, 100. lig. 24. ejf^c<rc?;^ qui.
/.i^. 205. z^;^. 25. des llfe%, de.
/'^^ 208. /iç. ip. Sweinfourt /^/e^
Schweinfourt.
164. ilg^ 14. œfingen Anlïngen.
fng. 26^. //.Ç. 17. & fuiv. effaceT^Us gmU
iemeps,
fag. 277- ^5?- 9. & 17. Dizaines llfe
Dizains.
png, 293. 19. des /i/'f'^ ae.
/>4^. 311. <« wo«e ^ XIV. llfe\ XV
32-9* % 8- des /f^c^ de. ^
' P^i* 3^0. peut ///«-^ peur
Z''^^- 3S3. %. 19.de /(Kà
SSi;- % '5- Touhaitoient lou
'haiteroient. lig. II?, l'hypocrifie Hft
hypocrifie.
f^^g- 388. éface^^ dan5 lesquels
p.ig. 400. 8- ^ 9. un tel eft de///^-^
un tel homme ell membre de la.
Z'^^. 406. %. 9. reitirer //t/èc?;^ réitérer
pag. 409. wi'ï^ * Itg. I. 1^39- ^i/è\iS9î.
Z^^. 440. 8. par /^/ê^ pas.
\