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Full text of "Histoire de Sainte-Barbe : collége, communauté, institution"

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Qlo 



HISTOIRE 



DE 



SAINTE -BARBE 



PARIS. — IMPRIMERIE DE CH. LAHURE 
Rue de Fleurus, 9 



HISTOIRE 



DE 



I « 



SAINTE-BARBE 

COLLÈGE, COMMUNAUTÉ, INSTITUTION 



^PAR 

J.^QUICHERAT 

Professeur à racole impériale des Chartes 



TOME TROISIÈME 



PARIS 

LIBRAIRIE DE L. HACHETTE ET C" 

BOULBVARD SAINT-GERMAIN, N« 77 

1864 

Droih de traduction réaitvé 



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HISTOIRE 






DE 



SAINTE-BARBE. 



QUATRIÈME PARTIE. 

SAINTE-BARBE MODERNE. 



CHAPITRE I. 



Les établisseidexits dUnstruction publique à Paris après la crise révolu- 
tiounaire. — M. de Linne-iu sous-directeur à Tlnstitut des Boursiers 
de rE|;alité, depuis Prytanée français. — Restauration de Sainte- 
Barbe sous le nom de Collège des Sciences et des Arts. -^ Société de 
M. de Lanneau et de M. Miellé. 



Après avoir tout détruit en matière d'enseignement^ 
pour être plus sûre que ce qui se referait ne ressem- 
blerait pas à ce qui avait existé auparavant^ la Révo- 
lution légua aux régimes qui lui succédèrent beaucoup 
de lois sur le papier, des programmes magnifiques et 
l'appélit qui résulte d'une privation prolongée. 



3 HISTOIRE 

Les Écoles centrales furent la forme sous laquelle 
on essaya celle de ses conceptions qui tendait à rem- 
placer Tinstruction donnée autrefois dans les collèges. 
Mais les Écoles centrales eurent le malheur de se 
ressentir de la politique du moment qui les vit éclore. 
On mutila les projets atitérieurs, afin de détruire toute 
apparence de l'oppression dont on avait tant souffert 
au nom de l'Égalité et de la Souveraineté du peuple. 
On se lais3a conduire par la préoccupation exclusive de 
ne pas faire du corps enseignant un nouveau clergé, et 
de ne pas usurper le droit des citoyens. La République 
se dessaisit, par le fait, de l'éducation de la jeunesse, et 
ne prit à sa charge qu'une partie de l'instruction. Le 
soin de débrouiller les esprits, celui d'y faire entrer 
les éléments des coiînaissances et les idées premières 
en toutes choses, elle laissa cela aux particuliers, sans 
se demander si les particuliers étaient capables de se 
tirer d'une tâche si difficile. Ce fut assez pour elle 
d'imposer la distribution des éludes et d'en gouverner 
l'esprit à partir de l'âge où la raison commence à se 
former. Le régime des classes fut aboli ; il y eut, à la 
place^ des cours libres où l'on fut admis sans avoir 
d'autres formalités à remplir que celles de l'inscription 
et d'une légère rétribution que Ton payait aux pro- 
, fesseurs. Ceux-ci furent nommés à l'examen par un 
jury départemental. Leur unique obligation fut de s'ac- 
quitter exactement de leurs leçons sous la surveillance 
de l'un d'entre eux, qui était le président de l'École. 

La création de cinq Écoles centrales avait été 
décrétée pour Paris. 11 n'y en eut jamais que trois ; 
celles du Panthéon, des Quatre-Nations et de la rue 
Saint-Antoine, établies respectivement dans les ci- 



DE SAINÏE-BARBE. 3 

devant Abbaye de Sainte-Geneviève, Collège Mazarin 
et Noviciat des Jésuites. 

Outre ces établissements, la capitale posséda l'In- 
stitut des Boursiers de l'Égalité (ancien collège Louis- 
le-Grand), exclusivement réservé aux jeunes gens 
dont l'éducation était payée soit par les fondations 
anciennes, soit par le gouvernement'. Là un corps 
de professeurs appartenant tous à la ci-devant Uni- 
versité s'essayaient péniblement à oublier les vieux 
programmes, afin de se conformer au vœu des lois. 
La plupart des élèves n'apprenaient guère autre 
chose que le français, l'histoire et les sciences exactes 
ou naturelles* Quelques-uns seulement, qui dési- 
raient acquérir la connaissance approfondie de la 
littérature, suivaient les Écoles centrales. Tous, étant 
pensionnaires, accomplissaient leur travail sous la 
surveillance de sous- maîtres. 

M. Champagne, que la Révolution avait rendu prin- 
cipal de Louîs-le-Grand en 1791, garda le gouverne- 
ment de la maison sous tous les régimes qui suivirent, 
et se trouva en dernier lieu directeur de l'Institut des 
Boursiers. C'était un homme d'un esprit très-orné et 
passionné pour son état, mais dépourvu des façons qui' 
imposent à la jeunesse. Il déploya une activité et un 
courage à toute épreuve pour défendre l'existence de 
rétablissement contre ceux qui parlaient de le détruire ; 
il l'empêcha de succomber à la langueur produite en 
94 par la suspension provisoire des bourses et par la 
présence d'une partie des élèves sous les drapeaux. 
Lorsque les circonstances lui eurent permis de le 

i i Ci-dessus^ t. II, p^ 24S et suivi 



4 HISTOIRE 

repeupler et qu'il se trouva eu face d'une multitude 
plus émancipée que celle qu'il avait connue autrefois, 
il laissa voir qu'une qualité essentielle lui manquait. 

Le ministre Letourneux, prévenu qu'il était néces- 
saire, de mettre auprès de M. Champagne un homme 
en état de le compléter, apprit en même temps que, si 
quelqu'un au monde était fait pour remplir cet office, 
c'était M. de Lanneau, employé comme sous-chef dans 
son ministère. En conséquence, M. de Lanneau, ou, 
pour parler le langage du temps, le citoyen Lanneau fut 
nommé sous-directeur de l'Institut central des Boursiers 
de l'Égalité le 26 vendémiaire an VI (i 7 octobre 1 797). 

Nous venons de nommer le troisième fondateur de 
Sainte-Barbe. Il est à propos d'indiquer par suite de 
quelles vicissitudes ce célèbre instituteur rentra, à l'âge 
de quarante ans, dans une carrière d'où les événements 
l'avaient éloigné, après qu'il y eut été conduit d'abord 
par leliasard. 

Pierre-Antoine-Victor de Lanneau de Marey, fils 
d'un gentilhomme du bailliage de Semur, naquit le 
24 décembre 1758 au château de Bard-lès-Époisses. Il 
était le neuvième de dix-huit enfants. Il fut élevé pour 
•la profession des armes, d'abord au collège de La 
Flèche, puis à l'École militaire de Paris. Sa famille 
avait des droits héréditaires sur un canonieat à la 
cathédrale de Langres. Celui des enfants à qui ce 
bénéfice était destiné étant mort, le père désigna pour 
le remplacer le jeune Victor, qui venait après daijs 
l'ordre de naissance. Celui-ci ne se sentait aucun goût 
pour l'état ecclésiastique : forcé néanmoins de céder 
à une volonté inflexible, il se fit prêtre ; mais ne pou- 
vant pas souffrir la vie fastueuse et inoccupée qui était 



DE SAINTE-BARBE. 5 

celle des nobles dans les chapitres, il tourna ses vues 
ailleurs, et embrassa la profession de Tbëalin. L'ordre 
utile desThéatins se consacrait à renseignement. M. de 
Lanneau n'eut pas à se repentir d'avoir porté son choix 
de ce côté. Les plus belles facultés pour l'éducation se 
révélèrent en lui. Il se fit remarquer dans la direction 
du collège de Tulle, qu'il occupait lorsque la Révolu- 
tion éclata. 

Quoique sorti d'ime famille où le changement de 
régime ne fut pas bien reçu, il s'associa avec transport 
aux nobles espérances qui furent celles du plus grand 
nombre. Lorsque les ordres religieux furent supprimés, 
des amis, qui voulaient voir sa sagesse et ses talents 
employés au service de la patrie, le rappelèrent en 
Bourgogne. 11 prêta serment à la Constitution, et fut 
élu presque en même temps vicaire de l'évêque consti- 
tutionnel d'Autun et membre suppléant de l'Assemblée 
législative. Il n'eut pas l'occasion de remplir ce dernier 
mandat, refusa celui de député à la Convention, mais 
se soumit au vœu de la population d'Autun en accep- 
tant les fonctions de maire. Quant au sacerdoce, 
comme il l'avait subi par contrainte, il le quitta sans 
regret. De l'administration de la municipalité il passa 
à celle du district. Transporté un moment à la prési- 
dence du tribunal criminel du département de Saône- 
et-Loire, rétabli au district d'Autun à la demande 
générale, il exerçait les pouvoirs redoutables d'agent 
national, lorsqu'il fut accusé de modérantisme, traîné 
à Paris et incarcéré au Luxembourg. Il dut son salut 
à l'énergique défense que.Carnol présenta pour lui au 
Comité de Salut public. C'était huit jours avant le 
9 thermidor. Frappé simplement de destitution, il 



6 * HISTOIRE 

s'éloigna en toute hâte pour aller reprendre à Autun la 
direction d'une imprimerie qu'il avait menée de front 
avec les affaires publiques, car ses emplois ne furent 
jamais rétribués. Bientôt il eut à se défendre devant 
le parti de la réaction de ce que le gouvernement de la 
Terreur n'avait pas fait tomber sa tête. Traduit au 
tribunal criminel de Chalon-sur-Saône, et victorieuse- 
ment acquitté, il revint à Paris, dans la pensée qu'il y 
exercerait plus tranquillement sa profession d'impri- 
meur; mais il n'était pas encore au bout de ses maux. 
A Paris il fut dénoncé comme un homme dangereux, 
confié à la garde d un garnisaire, et, pour s'être sous- 
trait à cette surveillance , recherché par la police à 
laquelle il n'échappa qu'en s'ensevelissant dans une 
cachette. Enfin il trouva le repos dans une place qui 
lui fut donnée au bureau des musées et bibliothèques 
établi près le ministère de Tlntérieur. 

M. de Lanneau eut pour chef de division, au mi- 
nistère, le littérateur Ginguené. Dès qu'il se fut fait 
connaître de cet honnête homme, il trouva en lui un 
patron plein de zèle, qui s'employa à lui procurer une 
place plus digne de son mérite. On le pressa un mo- 
ment d'accepler la direction de l'Opéra, qui était de- 
venue vacante. « Avec quelle grâce, dit un de ses 
biographes, il racontait cet épisode de sa vie, et faisait 
ressortir le contre-sens où la bienveillance avait en- 
traîné ses protecteurs! Avec quelle gaieté il se suppo- 
sait acceptant ces étranges fonctions, et composait sur 
cette donnée un roman de quelques minutes^! » 

1. Louis Quicherat, Notice sur P.-A.-V. de Lanneau, fonda- 
teur [et chef de l'institution de Saînte-Barbe. In- 8®. Hachette, 
Paris, 1830. 



DE SAINTK-BARBE. 7 

Le poste de sons-direcleur à rinstitut des Boursiers 
s'ëtant présente sur ces entrefaites, entre la fortune 
dans une sphère qui n'était pas la siejine, et une con- 
dition plus modeste pour laquelle il sentit renaître 
toute ;5on afîection, M. de Lanneau n'hésita point un 
seul instant. 

Il y a, pour ce,uxqui conduisent la jeunesse, comme 
pour ceux qui commandent les armées, un don de 
nature qui opère indépendamment de tout ce qu'ils 
peuvent apporter dans leurs fonctions d'habileté, de 
savoir, d'expérience. M. de Lanneau était doué de 
cette faculté précieuse. Son geste, son regard, le tim- 
bre desa voix exerçaient autour de lui un véritable 
prestige. 11 suffisait qu'il fût en présence pour dissi- 
per les projets de Tétourderie, et faire rentrer sous 
terre les fauteurs du désordre. Dès que M. Champa- 
gne se montra escorté de ce redoutable lieutenant, 
il obtint la soumission de ses élèves de tout âge. Les an- 
ciens abus furent réformés comme par enchatitement. 
Trop de latitude laissé aux sous-maitres avait produit 
presque autant de règlements qu'il y avait de quar- 
tiers. Tout fut réduit à une loi uniforme. De vieux 
boursiers d'ayant la Révolution, qui se prétendaient 
adoptés à tout jamais par la patrie, parce qu'ils avaient 
obtenu de conserver leur pension pendant leurs 
études de médecine, ou parce qu'ils avaient fait les 
premières campagnes de la République, se virent obli- 
gés enfin de quitter la place. L'ordre et la bonne te- 
nue régnèrent dans la maison; l'enseignement put 
être amélioré, et Tardeur fut extrême. On regretta 
dans le public qu'un établissement si bien conduit 
ne fût pas accessible au plus grand nombre. 



8 HISTOIRE 

Il y avait à Paris beaucoup de pensionuats^ tenus 
par d'anciens maîtres ès-arts, qui continuèrent à 
exercer, pendant la Révolution, sans presque rien 
changer à leurs habitudes d'autrefois. Plusieurs de 
ces maisons étaient parfaitement dirigées, mais elles 
ne renfermaient chacune qu'un petit nombre d'é- 
lèves. A. cause de cela, les familles leur reprochaient 
de ne pas offrir assez d'aliment à l'émulation. Les 
familles, soit dit en passant, tenaient beaucoup moins 
que ne l'avaient supposé les législateurs de l'an III à 
la prérogative de diriger elles-mêmes les études de 
leurs enfants. Beaucoup d'entre elles sentaient que 
des gens occupés de leurs affaires ne peuvent pas 
s'adonner à ce soin, et que, pour le jeune âge, le tra- 
vail n'est fructueux qu'avec la régularité de la vie 
scolastique; elles appelaient donc de tous leurs vœux 
le rétablissement de ces grandes écoles, où la réunion 
de beaucoup d'enfants leur semblait essentiellement 
propre à échauffer le zèle et à préparer des hommes 
pour le conjmerce de la vie. 

A la fin de l'an VI, M. de Lanneau conçut le des- 
sein de fonder une maison de ce genre. Dès son en- 
trée à l'Institut des Boursiers, il eut chez lui un enfant 
(le jeune Gatteaux, aujourd'hui membre de l'Acadé- 
mie des Beaux-Arts) dont il avait entrepris aupara- 
vant réducation particulière. Marié, déjà père de 
famille et n'étant pas encore en possession du débris 
qui lui revenait du bien de ses ancêtres, il ajouta 
deux ou trois autres élèves à celui-là : c'était un 
moyen pour lui d'augmenter ses appointements très 
modiques de sous-directeur, car pour la peine qu'il 
se donnait^ la République ne lui comptait que deux 



DE SAINTE-BARBE. 9 

mille francs par an. L'idée lui vint de faire sortir de 
son petit pensionnat domestique une' nouvelle Sainte* 
Barbe. 

Personne n'avait oublié le nom de Sainte-Barbe, 
maintenu si célèbre jusqu'à la dispersion de la Com- 
munauté; mais c'est surtout à l'Institut dès Bour- 
siers que ce nom était resté vivant. Ceux dont il 
était la propriété subsistaient encore. Il servait à 
désigner, parmi les enfants de l'Égalité, les sujets 
élevés aux frais de Robert Dugast et de Simon Me- 
nassier; pour M. Champagne, petit-neveu de Simon 
Menassier, ce nom était un titre de famille. Aussi, 
M. Champagne fut il ravi du projet de son collabora- 
teur, et il le favorisa de tout son pouvoir, mais sans 
consentir à se priver pour cela d'un concours dont il 
sentait tout le prix. Il évoqua le souvenir de l'an- 
cienne Sainte-Barbe, qui s'était développée sous des 
supérieurs domiciliés au Plessis, et il fit refuser la 
démission que M. de Lanneau présenta dès lors au 
gouvernement. 

On n'était point entreprenant en ce temps-là 
comme on l'est aujourd'hui; d'ailleurs, les ressources 
auraient manqué pour monter tout d'abord un grand 
établissement. Si bonne opinion que M. de Lanneau 
eût de son entreprise, il voulut néanmoins commen- 
cer doucement et à titre d'essai. Il loua la partie de 
Sainte -Barbe qui avait formé en dernier lieu le col- 
lège. On se rappelle que c'était la chapelle, construite 
en 1695 sur la rue des Chiens, et l'aile de bâtimenls 
perpendiculaire à la rue de Reiras, laquelle s'élevait 
sur le fonds primitif du docteur Jean Hubert. M. de 
Lanneau fit mettre le local en état de recevoir les 



iO HISTOIRE 

enfants qu'il avait en pension chez lui^ avec plusieurs 
autres qui lui furent présentés aussitôt qu'il eut émis 
son prospectus. 

Il partagea le soin de cette petite famille avec un 
associé qui devait résider auprès d'elle et la surveiller 
continuellement. Enfm il demanda au ministre de Tin- 
térieur Tautorisation de faire suivre les leçons du Pry- 
tanée français ( c'est le nom* que l'institut des Bour- 
siers venait de prendre ) à ceux de ses élèves qui ne 
seraient pas en âge d'aller aux Écoles centrales. En 
ce point résidait le caractère tout particulier que 
M. de Lanneau , de concert avec M. Champagne , en- 
tendait donner à son institution. Dans la pensée de 
l'un fet de l'autre, elle devait compléter le bel établis- 
sement de la rue Saint-Jacques ; elle était appelée à 
devenir une succursale d'élèves payants, annexée à 
l'école des élèves gratuits. 

Les dispositions avaient été prises de manière à pou- 
voir entrer en exercice au commencement de l'an VII; 
mais comme il y avait de grandes réparations à faire 
aux bâtiments loués , le troupeau ne put pas être mis 
pour l'épocjue indiquée dans son nouveau bercail. 
' Le 25 brumaire an V!I (15 novembre 1798), Fran- 
çois de Neufcbâteau, ministre de l'Intérieur pour 
la seconde fois, accorda à M. de Lanneau et à son 
associé, M. Miellé, l'objet de leur demande relative- 
ment à la fréquentation du Prytanée par leurs élèves. 
Cette faveur fut annoncée, dans la lettre d'envoi , comme 
une marque de la satisfaction du gouvernement « en- 
vers des citoyens qui consacraient leurs veilles à la 
propagation de l'instruction publique *et de la morale 
républicaine. » 



DE SAINTE-BARBE. il 

I^ temps comportait toujours ce langage, mais ii 
ne comportait pas encore qu^un établissement d'in- 
struction publique fût mis sous le patronage des saints. 
M. de Lanneau, qui voulait autant que possible ressus* . 
citer Sainte-Barbe et qui tenait singulièrement à la 
gloire du nom , ne put pas vaincre sur ce point les 
scrupules du ministre. Forcé de prendre la dénomir 
nation de Collège 4es Sciences et des Arts , il y ajouta 
entre parenthèses ci-deifant Sainte-Barbé ^ et peu après 
Sainte- Barbe tout court. 

Le 1 4 frimaire suivant , jour qui correspondait au 
4 décembre 1 798 , fêle de sainte Barbe , l'entrée en 
possession du collège eut lieu, moyennant que M. de 
Lanneau y envoya coucher un élève, parce que 
les travaux n'étaient pas encore achevés. Les autres 
vinrent seulement quelques semaines après. M. Char- 
tier-Desrieux , qui fut successivement sous-préfet à 
Mortagne, à Saint -Pol et à Belléme, se rappelait avoir 
fait ce service pendant une ou deux décades à partir 
du 1®' nivôse an VU. 

La maison, dès qu'elle fut en activité, s'éleva au 
rang des premiers pensionnats de Paris. On y vit arriver 
bientôt les fils de plusieurs membres des.deux assem- 
blées et celui de Roger-Ducos , l'un des cinq direc- 
teurs de la République. Cela fut d'un effet décisif dans 
le public; avant la fin de la seconde année, il fallut 
augmenter le local en y ajoutant le reste des bâtiments 
de l'ancien collège , la partie de Sainte-Barbe qui {ivait 
été vendue jadis à l'Université*. 

L'aile sur la rue des Chiens, depuis l'encognure de 

i . Voyez ci-dessus, tome II, p. 175. 



il , HISTOIRE 

la rue des Cholets jusqu'à l'ancienne chapelle, avait 
été abattue; l'autre aile, sur la rue de Reims, après 
avoir servi d'atelier pour l'entreprise des moulins à 
.bras, allait éprouver le même sort, lorsqu'elle fut 
achetée par M. Champagne en prévision du besoin 
qu'en aurait bientôt son collaborateur. 

M. Champagne de son chef n'avait point de for- 
tune, mais il avait épousé la veuve du ministre Le- 
brun, qui eut la tête tranchée en 93. Cette dame jouis- 
sait d'une certaine aisance. Elle avait des enfants de 
son premier mari. Le beau-père ne craignit pas de 
hasarder une partie du patrimoine de sa famille adop- 
tive sur les destinées d'un établissement formé par 
M. de Lanneau. Il mit la maison de Sainte-Barbe en 
réparation, et obtint de l'administration du Prytanée 
d'y faire conduire à ses frais le trop-plein des eaux 
d'Arcueil amenées dans cet établissement. Aussitôt 
que les choses furent en état , on rétablit la cuisine , le 
réfectoire et les salles d'études aux lieux où elles avaient 
été anciennement. 

Le fondateur était déjà assuré du succès futur de 
son entreprise; mais il n'éprouvait qu'une médiocre 
satisfaction qjiant à la manière dont il y était secondé. 
Son associé, ancien lazariste, se recommandait plus 
par le talent que par !a conduite. C'était un de ces 
épicuriens comme le règne de Louis XV n'en produisit 
que trop , un homme enclin au plaisir, et qui , dès 
qu'il se vit sur le chemin de la fortune , ne songea 
plus qu'à se livrer aux distractions du monde. M. de 
Lanneau songeait déjà à se débarrasser de lui, lors- 
qu'eut lieu le coup d'État du 18 brumaire. Bientôt 
s'éventèrent les projets du nouveau gouvernement sur 



DE SAINTE-BARBE. 13 

le Prytanée. On parlait d'y* introduire des pension- 
naires payants , puis de le scinder en quatre sections, 
et la raison que Ton donnaft au ministère pour ce mor- 
cellement , c'est qu'une maison d'éducation ne pou- 
vait pas bien marcher lorsque le nombre des élèves 
dépassait deux cents. Cela n'était pas flatteur pour le 
sous-directeur qui avait si bien mis au pas les quatre 
cents élèves du Prytanée. 

M. de Lanneau prévit que le changement annoncé 
en appellerait d'autres, et qu'au milieu des essais qui al- 
laient recommencer, sa position comme fonctionnaire 
public n'aurait plus de fixité : il prit le parti de consa- 
crer désormais tous ses soins à son propre établisse- 
ment. Ni les prières de M. Champagne, ni les regrets 
des professeurs, exprimés par Luce de Lancival, qui 
fit une églogue à ce sujet , ne purent le retenir. 11 de- 
manda son congé, que Lucien Bonaparte, alors mi- 
nistre de l'Intérieur, lui accorda dans les termes les 
plus honorables. Il alla demeurer à Sainte-Barbe au 
mois de janvier 1 800. 

Il était temps qu'il vint chez lui. Grâce à son asso- 
cié, sous Içs apparences d'une prospérité toujours 
croissante , la ruine était déjà avancée. L'administra- 
tion de M. Miellé, mise à jour, laissa apparaître un dé- 
ficit de 54000 francs. M. de Lanneau lui offrit de 
rompre à l'amiable; mais lui, qui trouvait la place 
bonne et qui n'en pouvait pas être déboulé de si tôt . 
d'après son contrat , fit longtemps la sourde oreille à 
toutes les propositions. Pour obtenir son désistement, 
il fallut lui abandonner pour des années les bénéfices 
de l'entreprise naissante. On peut dire qu'il s'éloigna 
par un pont d'or, et son associé n'en eut pas de re-' 



14 HISTOIRE 

gret ^ car il eût donné de son sang et de sa chair pour 
racheter Terreur de son choix. 



CHAPITRE U. 



Règlement de la nouvelle Sainte-Barbe. — Caractère de la direction de 
M. do Lanneau. — L'instruction aux Écoles centrales. — Change- 
ments introduits dan» ces écoles. — Succès du collège des Sciences et 
des Arts dans les concours. — Rupture avec le Prytanée. — Création 
des lycées. — Sainte-Barbe, Ecole secondaire. 



M. de Lanneau y en annonçant au public l'ouverture 
de son établissement, avait promis de renouer par le 
Collège des Sciences et des Arls les destinées de l'an- 
cienne Sainte-Barbe*. Cette célèbre maison fut effec- 
tivement son modèle. Il s'appropria ce qu'il put re- 
cueillir des règles qu'on y avait jadis observées. 
Plusieurs lui furent inconnues, parce qu'elles étaient 
tombées en désuétude avant la Révolution ; d'autres 
avaient cessé d'être applicables. Toujours est-il qu'il 
imita les traits les plus importants, la hiérarchie, 
Tordre du travail, la ponctualité sévère, la modestie, 
la simplicité, et cet air de maison paternelle à la fa- 
veur duquel se rétablit l'esprit de famille remarqué 
autrefois dans la Communauté. 

1 . Premier prospectus du Collège des Sciences et des Arts, 2 
pages in-S^ de rimprimerie de Bertrand Quinquet, imprimeur du 
Prytanée français. Le titre.est : « Collège des Sciences et des Arts, 
'ci-deyant collège Sainte-Barbe, à Paris. * 



DE SAIJNTE-BARBE. 15 

M'imite pas qui veut. Les copies que Ton fait des 
choses n'ont de valeur qu'autant qu'on y sait mettre 
du sien. Nous avons dit quelle figure le restaurateur 
de Sainte^Barbe avait faite au Prytanée, et l'on sait 
déjà que son gouvernement sur la jeunesse était em- 
preint d'une marque particulieFC. Son talent apparut 
dans tout son jour lorsqu'il se mit à l'œuvre sur un 
terrain à lui, et dans un temps où il y avait encore 
beaucoup de liberté. 

Le premier acte de sa direction fut d'écrire, sous le 
titre de règlement*, un véritable De Officiis, un traité 
des devoirs par lesquels il entendait enchaîner tout le 
monde dans sa maison, et lui le* premier, car le cha- 
pitre qui concerne le directeur n'est pas celui qui 
contient les obligations les moins nombreuses. II re- 
toucha plusieurs fois ce travail pour l'accommoder 
aux métamorphoses incessantes dont la politique 
affecta Tordre social, et par suite l'éducation publique, 
dans les premières années du présent siècle. La par- 
•tie dogmatique se montre surtout développée dans la 
rédaction de 1806*. M. de Lanneau s'y est peint lui- 
même dès les premières ligne*s*, voici comment il 
débute : 

tt Tout voir, tout embrasser, pénétrer, animer tout, 



1 . Règlements du collège des Sciences et des Arts, ci-devant 
Sainte-Barbe. Paris, Laurent aîné, imprimeur du Collège des 
Sciences et des Arts (58 pages in-8*»). 

2. Règlement général du Collège de Saînte-Barbej école secon- 
daire du département de la Seine. Paris, imprimerie de D. 
Colas, 1806 (li2 pages in- 8°). — Réimprimé en partie dans le 
Recueil de Lettres de P.-A.-V. de Lanneau (publié par M. E. 
de Lanneau) In-8», Paris, 1851. 



d6 HISTOIRES 

être partout le conseil et le modèle, posséder le dou- 
ble avantage d'un caractère ferme et pliant^ d'un 
jugement docile et sévère, -des vues libérales, un dés- 
intéressement parfait, telles sont les qualités, tels 
sont les devoirs d'un directeur de collège. » 
' Tout voir, dit-il : et en effet il voyait tout. Cette 
tâche, déjà difficile lorsqu'elle s'étendit à la totalité 
de l'emplacement occupé par Tancienne Sainte- 
Barbe, M. de Lanneau l'accomplit avec la même vi- 
gilance après que son troupeau fut disséminé sur une 
plus vaste superficie. Jamais l'œil du maître ne fut 
plus constamment ouvert. Il ne se contentait pas des 
rapports qui lui retenaient plusieurs fois par jour de 
l'inspection faite par ses subordonnés. Il se chargeait 
lui-même du rôle d'inspecteur, et ses tournées n'a- 
vaient pas d'heure fixe. A tout moment du jour et de 
la nuit, le désordre qui aurait cherché à se dérober 
dans des cachettes ou à profiter des ténèbres, était 
menacé de sa présence. Lorsqu'on s'y attendait le 
moins, le bruit de son passe-partout se faisait enten-. 
dre dans les serrures, Ja lumière de sa lanterne sourde 
dessinait dans l'ombre s&n profil redouté. On le savait, 
et la crainte d'être surpris dissipait les mauvais des- 
seins. 

Pénétrant, il l'était comme personne à l'égard de 
l'enfance. Il lisait au fond des âmes, connai^ait en 
peu de temps le caractère ainsi que les dispositions de 
ses nouveaux élèves, et sa manière de parler ^à chacun 
était conforme au jugepfient qu'il avait porté sur lui. 
Comme il les savait tous par cœur, il les dépeignait 
admirablement dans les rapports qu'il rendait sur leur 
compte à la fin de chaque trimestre. Ces récapitu- 



DE SAINTE-BARBE. 17 

lations périodiques ne suffisaient point à sa sollicitude. 
Une immense correspondance le tenait en communi- 
cation perpétuelle avec la plupart des familles. 11 sou- 
mettait aux parents ses observations et ses vues, féli- 
citait ceux-ci des progrès accomplis par leurs enfants 
dans la voie du bien, ou adjurait ceux-là de lui venir 
.en aide , lorsque ses efforts éprouvaient de la résis- 
tance; et il leur enseignait la Conduite qu'ils devaient 
tenir de leur côte. ♦ 

Il savait animer, vivifier tout autour de lui, donner 
à rémulation- une énergie incroyable, et le plus sou- 
vent il lui suffisait pour cela d'une simple démonstra- 
tion. Une fois que Tune de ses classes s'était laissé 
battre d'une 'manière honteuse à la composition de 
l'Ecole centrale, il fit tendre en noir^endant toute la 
journée, le devant de la salle d'étude, de même que 
l'on tend la façade d'une maison mortuaire. Un sou- 
rire à l'un, un froncement de sourcils à la vue d'un 
autre rappelaient aux élèves qu'il était informé dç 
leur conduite de tous les moments. Quand il leur par- 
lait, c'était en termes vifs, brefs et d'un effet tou- 
jours certain. Il .possédait à un haut degré le talent 
des allocutions qui conviennent au jeeme âge. Les 
barbistes du temps du Consulat, transportés par ses 
discours, les comparaient, dans leur qaïf enthou- 
siasme, à ceux de l'homme étonnant cfui fascinait alors 
les armées de la France, et la France elle-même, et 
déjà une partie du monde. Le Directeur leur faisait 
entendre sa parole régulièrement dans une assemblée 
générale du collège, qui se tenait tous les mois. Ses 
harangues, sans cesse rajeunies par l'expression et par 
le tour, avaient pour sujet uniforme le devoir. C'é- 
lu 2 



18 HISTOIRE 

talent de vérital>les mercuriales, nourries d'allusions à 
rélat présent de la discipline et du travail dans la 
maison* La louange ou le blâme y étaient 4écernés 
publiquement à ceux qui s'étaient signalés, soit en 
bien soit en mal, et Vambition aussi bien que la crainte 
d'être nommé produisaient un effet sensible sur la 
conduite de chacun. 

Cette mise en scène s6 ressentant un peu trop de 
répoque à laquelle «lie avait été inaugurée, M. de 
Lanneau fut obligé d'y renoncer* à l'établissement de 
l'Université impériale. Depuis lors, ce fut le dimanche, 
à la distribution des bulletins desortie ou exeat^ qu'il 
manifesta solennelTement sa puissai^ce. Tous les bul- 
letins étaient sur son bureau, et les élèves de chaquQ 
classe venaient clgns l'ordre alphabétique chercher le 
leur. Le cabinet de la Direction avait à ce moment 
la majesté d'un tribunal. Le cœur battait bien fort, 
quand on se voyait en présence du juge; on atten- 
dait, les yeux baissés, la sentence qui allait sortir de sa 
bouche. 11 adressait à chacun une apostrophe en rapport 
avec les notes de la .semaine. Si celles-ci étaient trop 
mauvaises, il donnait à ses paroles un effet plus sai- 
sissant en déchirant Yexeat. 

Lorsqu'il s'agissait de maintenir une mesure prise 
dans l'intérêt du bon ordre, il était inébranlable. Ni 
les larmes des mères, ni les sollicitations des grands 
n'avaient le pouvoir de l'amollir , et pour mettre en 
évidence le côté raisonnable de ses dédisions, il savait 
s'y prendre de telle sorte que les personnes éconduites 
s'éloignaient de lui sans murmurer. À Foccasion de 
l'une des premières fêtes de Pâques qui furent célé- 
brées après le rétablissement du culte, il avait dit 



DE SAINTE-BARBE. 10 

qu'aucun élève ne sortirait avant midk Cependant le 
préfet de la Seine envoie chercher son fils dès le ma- 
tin. Un fonctionnaire important de la ville s'était 
chargé de la c&mmission. Il prie en termes pres- 
sants, il dit que M. Frochot demande cela comme un 
service. Le directeur de Sainte-Barbe refuse à plu- 
sieurs reprises; et comme son interlocuteur insiste 
toujours, il sort avec lui dans la cour, fait sonner 
la cloche qui donnait le signal des assemblées, et 
quand tous les écoliers sont réunis : <c Trouvez-vous 
juste, leur dît-il, que Frochot sorte, lorsque vous êtes 
tous consignés jusqu'à midi? » On^deviife avec quelle 
énergie fut prononcé le non qui décida la victoire du 
Directeur sur l'envoyé du préfet. 

Sa fermeté n'était point cette roideur compassée qui 
procède comme par une impulsion mécanique. Il sa- 
vait pratiquer avec un tact parfait l'art de la flexibilité ; 
il la recommandait sans cesse à ses collaborateurs. H 
s'étudiait à leur faire distinguer les mauvais penchants 
d'avec l'étourderie à laquelle est condamnée l'enfance ; 
il leur enseignait la mesure, l'attention, l'esprit de 
suite, et voulait que dans la distribution des peines ils 
tinssent compte du tempérament, du caractère, des 
habitudes connues des délinquants. Il s'égayait de 
ridée, qui s'était pro(Juite au milieu du débordement 
des théories, de soumettre l'écolier à un code pénal 
invariable, afin de le soustraire à l'arbitraire du maître. 
« Pourquoi, disait-il, ne ferait-on pas pour le méde- 
cin un code invariable de retiièdes? » Les avis, les 
encouragements, lee prières mêriie lui semblaient les 
moyens qu'on devait préférer, avant d'en venir aux 
punitions. C'étaient les seuls dont il fît usage pour sa 



20 HISTOIRE 

part. Il disait awc raison qu'une autorité supérieure de 
collège qui donne àe^ pensums est une autorité perdue. 
Soji rôle était de sauctidbner l'application des lois, 
après qu'elle avait été faite par ses ^bordonnés. Si 
par hasard il ajoutait quelque chose, c'était une mar- 
que à lui, suggérée par la circonstance, et qui, sans 
aggraver la peine, était capable d'en faire mieux res- 
sortir la légitimité. Une fois, par exemple, qu'une 
bande excitée par le printemps était allée cueillir du 
lilas dans un jardin fermé, à la campagne, les délin- 
quants, ayant été mis pour le repas suivant au pain 
et à l'abondance, trouvèrent, en se mettant à table, 
chacun un brin de lilas planté pour mémoire dans sa 
ration de pain. Ceux qui subissaient de pareilles puni- 
tions étaient les premiers à les approuver. 

11 conserva, sauf sur deux points, la gradation de 
châtiments établie dans l'ancienne Sainte-Barbe. Au 
désœuvrement du cachot, il substitua h salle de re- 
flexion, la réclusion accompagnée d'un travail forcé 
de plume ou de ipémoire. Quant à l'abolition du fouet, 
il n'eut pas à la prononcer ; elle fut le fait de la Révo- 
lutiod. Son expérience cependant lui avait appris 
qu'il est des sujets intraitables, chez qui l'audace unie 
à la bassesse de cœur défie tous les moyens que la 
raison suggère. De tels enfants, qui sont une calamité 
dans un collège, il les chassait de chez lui, et il lais- 
sait h décider à l'autorité paternelle si la seule res- 
source qui lui restât n'était pas de recourir à une hi- 
deuse extrémité. 

l^ar la vie qu'il menait, il ét£iit l'exemple de sa 
maison. A la façon dont il avait compris ses devoirs, 
il ne lui restait pas de loisir. Pour lui, jamais de di- 



DE SAINTE-BARBE. 21 

verdissement, pas de réunions brillantes, pas de fré- 
quentation de société, pas de spectacles. La présence 
de M. de Lanneaii à la première représentation de 
V Hector de Luce de Lancival, avec qui il était re&té 
intimement lié depuis le Prytanée, fit époque dans la 
mémoire de ses élèves. Son unique distraction étail 
de recevoir à sa table ses amis, bommes distingués 
pour la plupart dans renseignement, dans la science 
ou dans les lettres, et dont la rencontre dans un col- 
lége ne pouvait causer de surprise à personne : un Ar- 
nâult, un JLaromiguière, un Le vaillant, MM. Desre- 
naudes, Champagne, Mahérault, Goiïaux, Gail, l'abbé 
Thibault, Tabbé de Pradt, Luce de Lancival, que nous 
venons de nommer. 

Son désintéressement, qui fut à toute épreuve, lui 
fit toujours une loi de n'accepter qu'après information 
les enfants qu'on lui présentait. 11 ne suffisait pas 
qu'on payât pour être ipsçrit au nombre de ses élèves ; 
il fallait d'abord qu'on lui apportât de bons antécé- 
dents. 11 aimait mieux les sujets d'une condition mé- 
diocre que ceux qui étaient liés soit dans l'opulence, 
soit avec l'éclat d'un grand nom ; il appréhendait de 
la part de ceux-ci des goûls frivoles ou des prétenrions 
d'un^xemple dangereux, et il appréhendait non moins 
de la part de leurs parents des habitudes de condes- 
cendance incompatibles avec la bonne discipline. En 
général il se défiait des familles. L'expérience lui avait 
appris combien celles d'un rang élevé secondent mal 
les efforts de l'instituteur. Aussi, quand il lui en venait, 
voulait-il prendre ses précautions vis-à-vis d'ellé§.*ll 
leur montrait sa maison par ses côtés les moins 
attrayants, son • règlement par les articles les plus 



22 HISTOIRE 

sévères. Si les gens, effrayes, ne revenaient plus, il s'en 
réjouissait, comme ayant détourné par sa franchise 
une occasion de malentendus et probablement une 
source de désordres. 

Mais la vertu pour lui ne se concentrait pas dans' 
rétroite limite qui consiste à fuir les calculs de Tintérét. 
Son cœur brûlait d'une charité ardente, et dès le com- 
mencement il fit sortir de son administration une 
source de bienfaits, d'autant plus méritoires qu'ils 
restèrent le plus souvent un secret entre le bienfaiteur 
et l'obligé. On peut dire que la plus grande partie de 
ses bénéfices s'en allèrent en bonnes œuvres par le 
nombre d'élèves gratuits ou à prix réduit qu'il entre- 
tint dans sa* maison. Les aveux de la reconnaissance 
ont appris cela dans la suite. Plusieurs furent exprimés 
sur sa tombe. Nous répéterons un mot plein de déli- 
catesse divulgué, à ce moment suprême, par l'hono- 
rable M. Bellaigue, qui fut député de l'Yonne en 1830. 

M. Bellaigue était élève de Sainte-Barbe en l'an XII, 
lorsqu'il perdit son père, dont la profession faisait toute 
la fortune. Le correspondant de la famille étant venu 
exposer à M. de I^nneau la situation de l'orphelin et 
l'impossibilité de le laisser dans la maison, il reçut 
pour réponse cçs propres paroles : « Je vois au con- 
traire l'impossibilité qu'il en sorte. » 

Nous avons entendu raconter un trait pareil au sujet 
de quatre frères dont le père avait fait faillite. M. de 
Lanneau dit à la personne qui venait pour les retirer : 
a Moi qui n'ai pas fait faillite, j'entends garder dans ma 
m'aison des enfants qui y ont toujours ^onné le bon 
exemple. » On ne saura jamais le nombre de ceux qui 
ont donné lieu à des actions' de ce genre. Tout bon 



DE SAINTE-BARBE. 23 

sujet devenait pour le directeur de Sainte-Barbe un 
fils d'adoption y dont il ne consentait plus à se séparer. 
Aux traits qui viennent d'être esquissés, tout le 
mondé a déjà reconnu un instituteur de la meilleure 
• école« En effet Rollin était le maître de qui M. de 
Lanneaii prenait le plus souvent conseil. Il avait tou- 
jours sur son bureau le Traité des études. Il disait que 
tout instituteur plus amoureux du bien que de la 
nouveauté devait savoir ce livre par cœur. Une telle 
parole serait peut-être vulgaire ai^jourd'hui ; elle ne 
rétait pas §n un temps où la plupart des esprits avancés 
répudiaient l'expérience des générations antérieures 
comme inconciliable avec le progrès. En sachant dis- 
cerner, dans l'héritage du passé, les choses qui avaient 
fait leur temps de celles qui constituent le fonds im- 
muable de la sagesse . humaine, le restaurateur de 
Sainte- Barbe mérita de passer aux yeux de ses contem- 
porains pour l'homme quf comprenait le mieux 
l'organisation d'un collège. Cet hommage lui fut rendu 
par François de Neufchâteau , par Fourcroy , par 
Frochot, par Lacépède, lorsqu'ils venaient présider les 
exercices publics de la maison ; par M. de Fontanes, 
lorsqu'il faisait, pour son instruction de grand maître,, 
une étude particulière du règlement dont nous par- 
lions tout à l'heure; par l'abbé Sicard, lorsqu'il vantait 
comme « un monument de la connaissance la plus 
parfaite de toutes les parties qui regardent la conduite 
des jeunes gensS) des instructions que M. de Lanneau 
lui avait tracées sur sa demande pour l'Institut des 



1. Recueil de Lettres de P.-A.-V. de Lanneau (in-8o, Paris, 
4851), p. 362. 



24 HISTOIRE 

Sourds-Muets; par MM. Massin, Goubaux^ Guyet de 
. Fernex, Jubé, Dufau, et tant d'autres instituteurs re- 
nommés, qui, de même, empruntèrent d'utiles dispo- 
sitions au code de Sainle-Barbe ou se guidèrent par les 
conseils de son chef; enfin par le dernier oratorîen' 
placé à la tête de Juilly, le vénérable P. Miel, qui, ne 
sachant encore en quelles mains il remettrait cette 
maison, pensa plus d'une fois à M. de Lanueau, et dit 
avec l'expression du. regret : w Voilà l'homme qu'il 
nous faudrait pour continuer notre œuvre. » 

C'est assez anticiper sur les événemenls, Revenons 
à Tan Vil qui fut le premier de l'existence de la nouvelle 
Sainte-Barbe. 

11 n'y avait alors ni législation ni autorité qui réglas- 
sent la forme des études dans les maisons d'éducation. 
Le gouvernement exhortait lea chefs de ces établisse- 
ments à envoyer la partie mûre de leurs élèves aux 
Écoles centrales, par conséquent à, introduire chez 
* eux un ordre et des méthodes qui répondissent au 
nouveau système; mais la plupart se moquaient du 
nouveau système, ne voulaient entendre parler que de 
l'ancien, et ne .se rendirent pas à une invitation qui 
n'était pas suivie de contrainte. Une conception très- 
élevée, et au fond de laquelle apparaissait l'avantage 
d'une liberté immense, ne parut pas à M. de I^nneau 
devoir être traitée avec ce dédain. 11 crut les Écoles 
centrales capables de durer et de se perfectionner par 
la pratique, si chacun se prétait à en favoriser le 
développement. D'ailleurs, après une si fâcheuse in- 
terruption des études, le premier des devoirs n'était-il 
pas de profiter de ce qui existait pour les remettre en 
activité ? 



DE SAIJVTE-BARBE. 25 

Les Écoles centrales, avons-nous dit, ne donnaient 
pas toutes les parties de l'instruction, mais seulement 
les parties supérieures de l'instruction. Par leur pro- 
gramme, elles sont à comparer tout ensemble aux 
hautes classes des Ivcées actuels et aux Facultés. Elles 
prenaient les langues anciennes au point où l'élude de 
celles-ci peut être combinée avec celle du mécanisme 
de la pensée, et, dans leur enseignement, la logique 
ne faisait qu'un avec les humanités. Le devoir des 
professeurs était d'exposer chaque chose par son côté 
rationnel : le vocabulaire par les radicaux, la gram- 
maire par ses ressources comparatives, le langage par 
ses procédés comme instrument de l'intelligence. 
L'analyse des auteurs grecs et latins devait être un 
moyen d'amener les jeunes gens à la connaissance ap- 
profondie du français. Des leçons 4'éioquence, de 
poésie, de grammaire générale, complétaient rensei- 
gnement littéraire. Des cours de géographie et d'his- 
toire, de législation, de mathématiques, de sciences 
naturelles et de dessin, étaient professés simultanément 
pour ouvrir aux esprits l'accès de toutes les connais- 
sances utiles. Cette vaste et sérieuse instruction était 
distribuée en trois étapes, dans le parcours desquelles 
on pouvait s'arrêter sans inconvénient, ou négliger 
telle partie pour laquelle on ne se serait pas senti de 
disposition. Une bibliothèque publique, ouverte près 
de chaque école, devait fournir les ressources néces- 
saires pour l'étude. L'ancienne Bibliothèque de Sainte- 
Geneviève, administrée par Daunou, fut, dès l'an Vy 
accessible aiix élèves de l'École du Panthéon, et servie 
avec l'intelligence supérieure de l'homme qui avait 
tracé les programmes du nouvel enseignement. 



26 HISTOIRE 

Il est évident que ce système avait du bon , car il a 
formé les esprits les plus puissants de notre siècle ; 
mais il est évident aussi qu'il supposait une instruc- 
tion préliminaire donnée à ceux qui venaient s'asseoir 
sur les bancs de l'École centrale. Avant d'arriver là , 
il eut été indispensable de passer par Je degré secon- 
daire inscrit dans le plan de Condorcet. C'est cette 
initiation que les maîtres de pension auraient dû don* 
ner/et qu'ils ne donnèrent pas. Les uns continuèrent 
à exercer en pédagogues de l'ancien régime; les autres, 
dès qu'ils virent quelque part des professeurs rétribués 
par l'État, se débarrassèrent des leurs , et envoyèrent 
aux Écoles centrales des élèves le plus souvent inca- 
pables d'y profiter. Des littérateurs chargés d'un en- 
seignement transcendant virent arriver à leurs cours 
des jeunes gens qui savaient à peine décliner ou mettre 
l'orthographe, efJ'on s'indigna que ceux-ci ne com- 
prissent rien aux leçons. 

Que fallait-il faire? Rétablir aux frais de la Répu- 
blique le rouage qui manquait au mécanisme , et. en 
même temps pourvoir par des mesures efficaces au 
recrutement des élèves. Mais il n'était plus temps 
d'exécuter cela. Trop de personnes étaient intéressées 
à ce que les écoles républicaines succombassent sous les 
plaintes inconsidérées de ceux qui leur reprochaient 
de n'avoir pas remplacé les collèges. Tout l'effort des 
hommes de la Révolution , réunis pour sauver ces 
écoles , ne réussit qu'à remplir davantage le cadre de 
l'enseignement afin d'y faire entrer les premiers prin- 
cipes. Encore cela n'eut-il lieu qu'à Paris , et grâce 
à M. Frochot, préfet de la Seine, investi comme 
tel de la direction supérieure des Écoles de la capi- 



DÉ SAINTE-BARBE. 27 

taie. Par raugmentation du nombre des chaires 
et de celui des matières d'enseignement dans la partie 
des langues anciennes , Téchelle fut graduée de ma- 
nière à rappeler le plus possible l'instruction classique 
d'autrefois. Tel fut Tétat des choses depuis le com- 
mencement de l'an X (année scolaire 1801-1802), 

». de sorte que les trois Écoles de Paris, à la fin de leur 
existence, furent à très-peu de chose près ce que sont 
les gymnases, de l'Allemagne , ce qu'avaient été pour 

* Jes martinets du seizième siècle les collèges de l'Uni- 
versité de Paris. 

Après comme avant cette réforme, M. deLanneau 
s'employa avec une entière loyauté, et malgré la mau- 
vaise humeur de beaucoup de personnes*, à faire sortir 
de l'ordre établi tous les fruits qu'il pouvait rendre. Déjà 
son séjour au Prytanée avait été marqué par une dis- 
tribution de l'enseignement telle, «que les cours de 
cette maison fussent d'abord un acheminement et plus 

• tard un complément à ceux des Écoles centrales. Dès 
1 800,1e Collège des Sciences et des Arts reçut la mpme 
organisation. Il y eut sept classes, dont les élèves, sui- 
vant leurs dispositions et leur mérite, furent envoyés 
soit au Panthéon soit au Prytanée , ou même dans ces 
deux établissements à' la fois, tandis que les autres 
reçurent leur instruction à Tintérieur. Les professeurs 
de la maison servirent en même temps de répétiteurs 
aux élèves qui étudiaient dehors. En outre, des cours 
supplémentaires, par exemple pour la- géographie , 
pour l'italien , pour l'anglais et pour l'allemand , fu- 
rent communs aux sujets de toutes les catégories dans 

1 . Décade philosophique de Pan IX, 4* trimestre, p. 41 7. 



2a . HISTOIRE 

les six classes supérieures, accouplées deux par deux 
ou trois par trois. 

Pour comprendre le vocabulaire scolaslique de ce 
temps-1^ , il ne faut pas perdre de vue le programme 
révolutionnaire, qui renfermait les études dans des 
cours spéciaux. 11 y eut ainsi les cours de mathéma- 
J:iques, d'hisloire, de belles-lettres, de langues an- 
ciennes, de grammaire, etc. On ne connaissait plus les 
noms de rhétorique et inhumanités^ lossqu'ils furent 
restaurés en Tan VIII, à l'usage du Prytanée seulement. 
Uhorreur des termes, anciens avait été poussée à uq 
excès embarrassant pour la conversation. Au lieu de 
thème et ifersion , il fallait dire traduction de français 
en latin et traduction de latin en français. 

Dans les cours, les années ou classes étaient distin- 
guées par leur nombre ordinal, niais dans- Tordre in- 
verse de celui qui était anciennement consacré, et 
auquel on* revint peu après dans les lycées. La pre- 
mière classe du cours, aux Écoles centrales, était celle • 
des* élèves qui commençaient. Au Collège des Sciences 
et des Arts, pour plus de commodité, les sept classes 
ne- formèrent qu'une seule série, et furent désignées 
simplement par les adjectifs ordinaux. Ce qui serait 
aujourd'hui la septième, s'appelait la prenaière. 

Telle est la forme sous laquelle rétablissement de 
M. deLanneau commença à acquérir sa grande répu- 
tation. Il fit parler de lui aux distributions des prix 
de Tan IX. Jusqu'alors un seul établissement privé 
s'était rendu célèbre par ses Succès aux écoles publi- 
ques dont il suivait les cours. C'était la maison de 
M. Lepître, qui envoyait des élèves à la fois au Pan- 
tbéon et aux Quatre-îNations. Pour la première fois 



DE SAINTE-BARBE. 29 

ces enfants gâlés de la victoire reconnurent avec sur- 
prise qu'ils avaient des rivaux. Au Panthéon les cou- 
ronnes ftirent partagées entre les Lepître et les Lan- 
neau avec une égalité qui excita les applaudissements 
du public. 

Dans une lulte encore plus solennelle , les Lepilre 
furent distancés. M. Frocbot avait rétabli celte année 
même l'équivalent • de l'ancien concours général de 
rUniversilé, en faisant composer «ntre elles les Ecoles 
centrales. Le Collège des Sciences et des Arts y rem- 
porta les deux grands prix des sciences *, les deux de 
grec' et trois accessits. Plusieurs couronnes au Pry- 
tanée complétèrent ce brillant succès. 

Une circonstance particulière augmenta l'effet du 
triomphe obtenu au concours général. C'était la con- 
difion du lauréat dont le nom fut proclamé le premier. 
Voici ce qu'on lit à ce sujet dans \ej)làgasin encyclo- 
pédique de Millin '^ : 

« L'écolier à qui le premier prix de mathématiques 
a été adjugé se nomme Ducros, jeune berger du dé- 
partement de la Drôme*, qui au pied d'un chêne et 
au milieu de ses brebis, privé de tout maître, il y a 
trois ans, étudiait et dévorait les livres sans autres se- 
cours que ceux d'une forte passion pour les sciences. 
L'examen qu'il a soutenu à ^l'École centrale kur les 
mathématiques et sur la physique a été une espèce de 

1 . Élèves Ducros et Segond. 

2. ÉlèvesBotti et Hello. 

3. An IX, t. 111, p. 122. 

4. Il y a Somme par erreur dans le Magasin encyclopédique et 
dans le Moniteur du il fructidor. Joseph Ducros était né à 
Marianne, hameau du Dauphiné. 



30 HISTOIRE 

prodige, bien honorable pour la maison à laquelle il 
doit ses étonnants progrès. Un particulier a demandé 
à voir le jeune Ducros, et lui a assuré une pension de 
1200 livres. ». 

Les succès de Tan X dépassèrent tonte mesure. 
Vingt-cinq nominations, tant prix qu'accessits, échu- 
rent à notre collège au seul concours général, et il 
fut publié partout que la maison de Sainte-Barbe avait 
retrouvé ses anciennes habitudes^ 

Le morcellement du Prytanée avait donné nais- 
sance à quatre sections ou collèges, dont un seul resta 
à Paris, les autres ayant été transportés àCompiègne, 
Fontainebleau et Saint-Cyr.- Le collège de Paris fut 
laissé sous la direction de M. Champagne. Il occupa 
toujours Tancien local de Louis-le-Grand ; mais l'ordre 
des études y éprouva tout d'abord des changements 
qui en rendirent la fréquenlatioii moins commode 
pour les nouveaux barbistes. L'esprit des jeunes ci- 
toyens du Prytanée, devenus l'objet des gâteries du 
Premier Consul, changea aussi. Ils commencèrent à 
regarder du haut de leur grandeur leurs camarades de 
la rue de Reims; ils les appelèrent é^rô^^j. Bientôt 
s'accon)plirent des modifications plus radicales. Une 
loi fut votée en 1 802 pour remplacer lés Écoles cen- 
trales des départements par des- lycées, qui devaient 
être établis sur le pied des anciens collèges. Si les 
Écoles de Paris furent épargnées provisoirement, ce 
fut à cause des nombreuses réclamations qui s'élevè- 
rent en leur faveur; mais le gouvernement travailla à 
les ruiner daps l'opinion en affichant sa préférence 

i i Moniteur du 9 fructidor an Xi 



DE SAIJVTEBARBK. 31 

pour la section du Prytanée. Enfm cet établissement 
prit, en 1 803, le nom de Ijcee de Paris\ et devint mie 
sorte de noviciat où Pon fit passer des enfants attirés 
de toutes les parties de la République pour les en- 
voyer ensuite porter des habitudes uniformes dans les 
autres lycées. Depuis lors, M. *de Lanneau n'y envoya 
plus d'élèves. Ce que sa maison perdit à cette rupture 
fut compensé par la fréquentation simultanée de toutes 
les Écoles centrales, de sorte que Sainte-Barbe eut des 
représentants et aux cours du Panthéon, et à ceux de 
la rue Saint- Antoine, et à ceux dés Quatre -Nations. 
Ces derniers venaient d'être transportés dans les bâti- 
ments du Plessis, le palais des Quatre-Nations étant 
devenu celui de l'Institut. 

C'est en Tan X que M. de Lanneau prit résolument 
pour son collège le nom de Sainte-Barbe; il y joignit 
le Mrçd^ eco/e secondaire^ en vertu de la loi du 1 1 flo- 
réal (1^'mai 1802), qui avait constitué les lycées. Cette 
loi, la première qui limita la liberté d'enseignement, 
reconnut et classa au second rang dans l'ordre hié- 
rarchique, et sous la surveillance des préfets, tous les 
établissements communaux ou particuliers assez im-< 
portants pour qu'on y enseignât le français, le latin et 
les éléments des sciences exactes. Les principes des 
sciences expérimentales, la morale, la logique, la rhé- 
torique (on affecta de remettre en honneur ces deiix 
dernières dénominations), enfin toutes les parties su- 
périeures de l'instruction classique furent l'attribut 
exclusif des lycées. A. cela près, les écoles secondaires 

. 1 . A partir du i "" vendémiaire an XII (24 septembre 1 803), par 
arrêté du gouvernement de la République en date du 20 praiiial 
an XI (10 juin 1803). 



32 . HISTOIRE 

étaient recommandées à la protection et aux encou- 
rageo^enls du gouvernement; Celui-ci devait les ré- 
coiiipenser quand elles le mériteraient, soit en leur 
accordant gratuitement le local, soit en conférant des 
bourses d^ns les lycées à ceux de leurs élèves qui se 
distingueraient le plus, soit enfin en décernant des 
gratifications à leurs directeurs. 

Tout cela n'était encore qu'un acheminement à une 
autre législation, car la marche à reculons devenait si 
accélérée que ce qui se faisait un jour ne convenait 
déjà plus quelque temps après. Partout l'arbitraire 
débordait de façon à déconcerter ceux même qui 
avaient la m^in au gouvernement; et pour les particu- 
liers tant soit peu en évidence, toute démarche pou- 
vait devenir Compromettante, si elle n'était pas cal- 
culée en vue de plaire au chef de l'État. De là, des 
difficultés qui allaient naître pour le directeur de 
Sainte-Barbe, car le calcul n'avait jamais eu de place 
dans sa conduite, ni la flatterie dans son langage, 
. Un malheureux enfant, à qui la guillotine avait en- 
levé son père et sa mère avant qu'il les eût pu con- 
naître, fut adopté par la République, et placé en Tan IX 
au Prylanée de Paris *. C'était le fils de Camille 
Desmoulins et de Lucile Duplessis. Il ne lui restait 
que sa grand'mère maternelle, donf il était la conso- 
l^ttion et la vie. Lorsque l'on forma les lycées des dé- 
partements avec des boursiers envoyés du Prytanée, le 
jeune Horace Desmoulins fut désigné pour le lycée de 
Bordeaux. C'était donner le coup de la mort à Mftie Du- 
plessis : elle porta au ministère ses supplications et ses 

1. Arrêté du Premier Consul en date du 8 vendémiaire an IX, 



DE SAINTE-BARBE. 33 

larmes. Fourcroy, »qui était déjà directeur de Tinstruc* 
tion publique , crut qu*il serait facile d'effacer de la 
liste le nom de l'enfant : son pouvoir y échoua, de 
sorte que, pour -tirer la pauvre vieille dame de l'alter- 
native où elle se trouvait de se séparer de son petit- 
fils ou de renoncer à lui faire faire son éducation, il 
n'eut pas d'autre ressource que de s'adresser à Thu- 
manité de M. de Lanneau. Si malsonnant que fût alors 
le nom de Desmoulins, si peu assurée que se montrât 
la faveur de Fourcroy, M.- de Lanneau s'empressa de 
recevoir l'orphelin au nombre de ses pensionnaires 
gratuits*. 

De pareils actes n'étaient pas une bonne recom- 
mandation pour obtenir les avantages promis par la 
loi de floréal. Aussi, lorsque le directeur de Sainte- 
Barbe demanda la concession gratuite de la partie du 
collège qui était -restée dans le domaine de l'État, il se 
vit dans le cas des solliciteurs auxquels on juge à 
propos de ne pas répondre. Cependant M. Frochot 
lui-même avait transmis sa demande dans les termes 
les plus expressifs", et tous les rapports du préfet n'a- 
vaient cessé, depuis l'origine, de représenter sa maison 
comme le modèle des Ecoles secondaires du départe- 
ment. Elle était inscrite la première sur la liste de ces 
écoles. Enfin, si quelqu'un avait des titres aux récom- 
penses promises, n'était-ce pas l'homme dont l'éloge 
était dans toutes les bouches? 

En cela, comme dans tout le reste, M. de Lanneau 
subit sans se plaindre les exigences du temps. N'ayant 



1. 5 brumaire an XII (18 octobre 1803). ' 

2. Lettre da 22 pluviôse an XIII (11 février 1805). 

m 3 



34 HISTOIRE 

qu'un but devant les yeux, il eut .pour doctrine con- 
stante de chercher à faire le mieux possible en obéis- 
sant aux lois établies, mais aussi en fuyant les moyens 
de succès qu'il eût fallu acheter par du servilisme. 
Il resta indépendant, tout en pratiquant la soumission. 
Il réforma ses programmes autant de fois qu'il fallut 
les réformer ; et lorsque les Écoles centrales furent sup- 
primées, à la fin de l'an XII, sans attendre qu'on le 
lui dît, il envoya cent élèves aux lycées Napoléon et 
Charlemagne, qui remplaçaient les Ecoles du Panthéon 
et de la rue Saint-Antoine. Sa maison, par l'impor- 
tance, valait déjà un lycée; elle serait devenue telle s'il 
avait consenti à en abandonner la' propriété. Elle 
comptait plus de trois cents pensionnaires. Les projets 
d'extension, qui avaient été le rêve de l'ancienne Com- 
munauté, s'étaient accomplis sans le concours du gou- 
vernement, par l'intelligence d'un simple particulier : 
Sainte-Barbe occupait tout l'espace entre les quatre 
rues de Reims, des Sept- Voies, des Chiens et des 
Cholets. En six ans, elle avait fait plus que durant les 
trois siècles et demi de sa première existence. Il 
fallait qu'elle eût en elle un principe de vie bien puis- 
sant, pour s'être ainsi développée au souffle d'un vent 
peu favorable pour elle, et dont la direction changeait 
à toute heure. 



DE SAINTE-BARBE. 35 



CHAPITRE III. 



Fêtes patriotiques. — Rétablissement du culte catholique à Sainte- 
Barbe. — Régime de la maison sous le Consulat. — Vaugirard 
et le Lendit. — Exercices du corps. î— Ardeur de la jeunesse. — So- 
lennité des distributions de prix.— Barjaud. — Élèyes couronnés à 
l'Institut. 



Nous réunirons dans ce chapitre et dans le suivant, 
sans trop chercher à établir de lien dans le récit, quel- 
ques souvenirs qui se placent entre la fondation du 
Collège des Sciences et des Arts et celle de T Université 
impériale- 
Peu de temps après leur installation dans les bâti- 
ments de Sainte-Barbe (on se rappellera que ce fut en 
Fan VII, répondant à l'année scolaire 1798-1799), les 
élèves de M. de Lanneau eurent le divertissement 
d'une fête pafriotique qui eut lieu à l'École centrale 
du Panthéon. Le 30 nivôse*, jour consacré à la com- 
mémoration de la Souveraineté du peuple, toute la 
jeunesse qui fréquentait les cours de l'Ecole fut réunie, 
conjointement avec celle du Pry tanée, dans le cloître de 
Tancienne abbaye de Sainte-Geneviève. La munici- 
palité était présente, et le Directoire représenté par 
un commissaire. Le professeur Mabérault prononça 
un discours, qui fut suivi de la plantation d'un arbre 

1. 19 janvier 1799. 



36 HISTOIRE 

de. la liberté. Ensuite il y eut des rondes autour de 
Tarbre, et les élèves du Prytanée, qui apprenaient la 
musique depuis lin an, chantèrent, de façon à mériter 
les applaudissements de l'assistance, un hymne dont 
Grétry avait composé la musique ^ 

Le 10 germinal suivant', il y eut une autre fête, 
celle de la Jeunesse. Elle fut présidée pareillement par 
les autorités municipales. Tous les professeurs, institu- 
teurs et institutrices de ^arrondissement y avaient été 
invités. Les jeunes gens et les jeunes filles de chaque 
établissement désignés comme les plus accomplis par 
leur caractère et par leur conduite reçurent des prix 
de vertu, consistant en une couronne nouée avec des 
rubans tricolores. On procéda ensuite à l'armement 
des garçons qui avaient atteint Tâge de seize ans, en 
conférant à chacun d'eux le sabre, symbole de leur 
incorporation à la garde nationale; enfin, on délivra 
des cartes civiques à tous ceux qui entraient dans leur 
vingtième année. 

Ces diverses distributions furent intercalées dans 
une cantate composée sur le modèle du Carmen sas- 
culare d'Horace. Le poète Paru y en aPvait fourni les 
paroles. Elle commence par cette strophe, qui se 
chantait à deux voix : 

De l'hiver le courroux expire; 

L'aquilon fuit devant Zephire : 
Naissez, beaux jours, voici le riant germinal. 

Il calme les airs qu'il épure, 

Et du réveil de la nature 
Son souffle caressant a donné le signal. 

i. Décade philosophique^ an VII, 2« trimestre, p. 55. 
2. 30 mars 1799. 



DE SAINTE-BARBE. 37 

Le chœur répondait à plusieurs reprises : 

Salut, immortelle patrie, 
Pour toi nous réservons la douceur de nos chants. 

Salut, mère auguste et chérie, 
Fixe un regard d'amour sur tes nouveaux enfants^ 

Les fêtes de ce genre approchaient de leur fin. 
Elles formèrent, sous le Directoire, une partie de ce 
qu'on pourrait appeler le culte officiel de Tépoque, 
culte qui était complété, les jours de décadi, par la 
lecture publique des lois. Conformément aux pres- 
criptions de l'autorité^ les élèves du Collège des 
Sciences et des Arts étaient conduits régulièrement 
dans le temple décadaire du quartier pour entendre 
cette lecture. Leur directeur les soumit en outre à 
une pratique de tous les jours, consistant en un court 
exercice sur la morale, par lequel le travail commen- 
çait le matin et finissait le soir. Un texte lu tout haut 
et commenté par le maître, dans chaque salle d'étude, 
devenait pour les élèves un sujet d'interrogations et, 
au besoin, de résumés écrits*. 

Aussitôt après le 18 brumaire, les lois qui gênaient 
l'exercice du culte catholique cessèrent d'être obser- 
vées, et l'on parla de rétablir l'instruction chrétienne, 
dans les établissements publics et privés, comme l'une 
des bases essentielles de l'éducation de la jeunesse. 
Les professeurs de l'ancienne Université s'associèrent 
généralement à cette réclamation, en faveur de la- 
quelle plaidait une partie de la presse. Le gouverne- 

. 1. Moniteur du 3 et du i 4 germinal, an VII. 
2. Règlements du Collège des Sciences et des Arts (an VIII), 
chap. lV,tit. 2. 



38 HISTOIRE 

ment, pour ce qui le concernait, subordonna la Vne- 
sure au rëtablissemeiU du culte catholique romain, 
qui était entré dans les desseins du Premier Consul, de 
sorte que c'est en 1802 seulement, après la publica- 
tion du Concordat, qu'un oratoire fut établi dans 
chacune des sections du Prytanée. M. de Lanneau, 
plus libre dans ses allures, répondit aussi avec plus 
de promptitude au vœu général. Dès que les offices 
furent célébrés régulièrement dans son quartier, il 
conduisit ses élèves à ceux de Saint-Benoit. Un peu 
plus tard, lorsque les paroisses eurent été rétablies, il 
eut à Saint-Étienne-du-Mont une chapelle particulière, 
dont un aumônier attaché à son collège desservait 
Tautel. Enfin, à cause du désordre inévitable qu'en- 
gendraient les allées et venues à la paroisse, il de- 
manda et obtint Tautorisation de faire célébrer le 
culte dans sa maison. L'ancienne chapelle, bâtie en 
1695, avait été affectée à d'autres usages et entière- 
ment défigurée. Plutôt que de la remettre en état, il 
parut plus commode d'en bâtir une nouvelle. L'em- 
placement choisi fut le dessus d'une aile basse, dis- 
tribuée en salles d'étude, laquelle avait été élevée dès 
l'an IX, sur le vide laissé le long de la rue de Reims, 
entre le bâtiment reconstruit par la ci-devant Univer- 
sité et celui de Robert Dugast*. La consécration eut 
lieu à la rentrée des classes de 1 807. 

Le règlement du Collège imprimé l'an VIII con- 
tient une disposition organique qui ne se retrouve 
plus dans celui de 1806. Le premier de chaque 
mois, et plus souvent, s'il était besoin, les maîtres 

i. Voyez tomes I, p. 305, et II, p. d82. 



DE SAINTE-BARBE. 39 

se réunissaient en présence du directeur, ou des 
deux directeurs tant qu'il y en eut deux. Cette 
assemblée s'appelait le Conseil d instruction^ Toutes 
les observations relatives aux études et à la tenue 
des élèves y étaient apportées. On exposait ce qu'on 
avait fait, et ce qu'il semblait qu'on pourrait faire; 
on discutait les points douteux qui s'étaient pré- 
sentés quant à l'interprétation ou à l'application 
des lois établies; enfin on prononçait les peines 
encourues pour les cas graves, dont le jugement était 
expressément réservé à ce tribunal. Ce qui s'était dit 
ou fait au Conseil d'instruction déterminait le tour et 
le ton des mercuriales de M. de Lanneau. 

Le régime de Sainte-Barbe, qui passait pour dur il 
y a trente ans, l'était encore un peu plus au commen- 
cement du siècle. Les élèves, par exemple, n'avaient 
pas d'autre salle de toilette que la cour, et cela en toute 
saison. La fontaine d'Arcueil, qui leur donnait l'eau 
pour boire, la leur versait aussi pour se laver. L'hiver, 
si la gelée obstruait les conduits, on leur apportait des 
seaux remplis à la rivière, dont ils étaient obligés de 
casser la glace pour y plonger les mains. De même, en 
toute saison, ils restaient la tête nue à l'intérieur, 
et aucun ne savait ce que c'était cjue porter double 
habit par le froid. Les parents acceptaient cela, ne 
connaissant pas encore l'art, si perfectionné aujour- 
d'hui^ de détruire la force physique des enfants par 
les raffinements de l'éducation première. Aussi, lors- 
que l'académicien Arnault, présidant la distribution 
des prix de l'an IX, félicitait ses jeunes auditeurs, 
parmi lesquels était son propre fils, de ce que leurs 
instituteurs « s'étudiaient à semer les fleurs sous leurs 



40 HISTOIRE 

pas * y n cette expression poétique ne s'appliquait 
point à un régime de délices dont personne n'avait 
alors l'idée; elle était un honlmage au talent déployé 
par la direction pour rendre aux écoliers le séjour du 
collège attrayant. 

Dès 1 800, l'idée du Premier Consul fut d'assujettir la 
■jeunesse des écoles au régime militaire. C'est pourquoi 
on donna aux élèves du Prytanée un habillement à 
peu près semblable à celui de l'ancienne école de 
Brienne. Comme marque d'égalité, et comme élément 
de propreté, l'uniforme plut à notre Directeur; il en 
fit prendre un à ses élèves, mais qui n'était nullement 
militaire par l'apparence, car il consistait en une 
culotte bleue et un habit de même couleur à grands 
revers, avec un gilet rouge et un chapeau rond. Sur les 
boutons de l'habit était inscrit le nom du Collège des 
Sciences et des Arts. Ce vêlement n'eut l'approbation 
ni du gouvernement ni des familles. Il dura peu. 

L'idée d'une maison de campagne semblable à celle 
qui tient une si grande place dans l'histoire de la Com- 
munauté, ne fit qu'un, dans l'esprit de M. de Lanneau, 
avec le dessein de restaurer Sainte-Barbe. Pendant sa 
société avec M. Miellé, il se procura l'usage d'un 
pavillon et du vaste jardin de l'ancienne abbaye de 
Port'Royal (aujourd'hui la Maternité), où il envoyait 
jouer les enfants les jours de quintidi. Il loua ensuite 
une maison à Gentilly, pour plus de conformité avec 
la tradition de l'ancienne Sainte-Barbe^ qu'il voulait 
faire revivre. Enfin il prit à bailà Vaugirard, en 1802, 



i. Distribution des prix du Collège des Sciences et des Arts, ci- 
devant Saiate-Barbe, an IX. — In-4''. 



1 



DE SAINTEBAUBE. 41 

la propriété qui avait servi de maison de campagne 
aux ci-devant élèves philosophes de Saint-Sulpice*. 
Sainte^Barbe garda la ' jouissance de cette maison 
jusqu'en 1820. Les élèves y étaient menés le jeudi. 
Leur longue file, bien connue du peuple de Paris et 
que nul n'eût cherché à rompre impunément, s'ache- 
minait par la rue de Vaugirard. M. de Lanneau lui- 
même, s'avançant dans sa sévère et belle tenue , fer- 
mait la marche. Une charrette suivait, qui portait les 
vivres. 

Une cérémonie que le Directeur introduisit dans les 
usages de Sainte-Barbe, après l'abolition des fêtes 
républicaines, fut célébrée à Vaugirard plusieurs 
années de suite. On l'appelait le Lendit; mais ce Lendit 
n'avait de l'ancien que le nom et la saison. Le 10 juin, 
de bon matin, les grands jeunes gens des cours de 
mathématiques et de belles-lettres étaient envoyés en 
promenade à Saint-Cloud, où ils s'approvisionnaient 
de mirlitons. Tout le collège se trouvait réuni dans 
l'après-midi à la maison de Vaugirard, et là commen- 
çait un concours à l'instar des jeux olympiques. Des 
rubans .tendus sur des pieux circonscrivaient une 
arène. Des prix étaient proposés pour la course et 
pour le saut. Un jury d'élèves, siégeant à côté du 
Directeur, réglait l'épreuve, et proclamait les vain- 
queurs. Les récompenses étaient des boîtes garnies 
d'objets à l'usage des écoliers. 

Cette mise en scène intéressait vivement les élèves ; 
elle les excitait à se livrer pendant le cours de l'année 
à des exercices du même genire, et c'est ce que voulait 

1. L'abbé Gaudreau, Histoire de Vaugirard, p. iS3. ^ 



42 HISTOIRE 

M. de Lanneau. Dans son système, les récréations 
devaient être employées à se donner du mouvement. 
Les jeux que Ton joue accroupi ou assis n'étaient pas 
de son goût. Quand il voyait des enfants occupés de la 
sorte, il imaginait des moyens pour les déranger et les 
mêler bon gré mal gré aux ébats de leurs camarades 
plus turbulents. De là son approbation pour le jeu de 
balle, dont il donna la mesure unjour, en allongeant de 
quelques minutes la récréation, pour laisser le temps de 
finir une partie qui tenait tout le collège en admiration. 

La natation était encore un exercice dont il faisait 
le plus grand cas ; tous ses élèves l'apprenaient dans 
les premiers temps du collège, et il excitait leur ému- 
lation par uû prix donné à la fin de .l'année. Le 
concours pour ce prix était également très-solennel. 
Il consistait à parcourir sans s'arrêter l'espace entre le 
Pont-National* et celui de la Concorde. Le public, 
amassé sur ces ponts et sur les deux quais, était spec- 
tateur. 

Cette épreuve, d'abord très-applaudie, était déjà 
incompatible avec les mœurs de Tan X; quant au Len- 
dit avec ses prix d'agilité et de souplesse, il cessa lors 
de la création de l'Université impériale. Celle-ci n'ayant 
rien couché de pareil sur ses programmes, n'entendait 
pas que, par la moindre chose ajoutée, on se donnât 
Tapparence de vouloir faire mieux qu'elle. La gym- 
nastique ne fut acceptée que vingt ans plus tard, après 
que le colonel Amoros en eut réglé l'enseignement. 

Les hommes qui furent écoliers sous le Directoire et 
le Consulat ne sont déjà plus très-nombreux ; mais 

i . Aujourd'hui Pont-Royal. 



DE SAINTE-BARBE. 43 

autant on en rencontrei*â, qu'on les interroge sur 
l'impression qui leur reste des années de leurs études : 
ils témoigneront tous de Tardeur extrême qui les 
enflammait eux et leurs condisciples. Un élan de patrio- 
tisme était dans les esprits; on voulait à toute force que 
, la France, la première par les armes, par les sciences 
et par les arts, redevînt aussi la première par les lettres; 
chacun se faisait un devoir de réparer Teffet produit 
par l'interruption passagère de renseignement, et l'or- 
ganisation, beaucoup moins perfectionnée qu'elle n'a 
été depuis, laissait une latitude salutaire à la bonne 
volonté. Ces dispositions furent heureusement secon- 
dées par le talent des professeurs employés dans les 
écoles de l'État. Ceux des Écoles centrales furent 
toujours pris dans l'élite des littérateurs ou des savants, 
et ils tinrent à honneur de s^acquitter dignement de 
leur mission. Pour ne parler que des maîtres dont nos 
barbistes reçurent les leçons, nous trouvons dans le 
nombre des littérateurs tels que Boisjolin, Domergue, 
Sélis, de Saint-Ange; des humanistes tels que Binet, 
Guéroult, Mahérault, GofTaux, Létendart; des natura- 
listes tels que Valraont, Brongniart et Cuvier; les géo- 
mètres Lacroix, Labey et Duport ; le géographe Men- 
telle, et Millin, savant en toute chose, et pour maîtres 
de dessin un Moreau^ un Regnault, un Bachelier. Les 
cadres non moins bien remplis du Prytanée nous offrent 
les noms de Laromiguière, Castel, Luce de LancivaL 

L'animation que des maîtres d'un si grand mérite 
introduisaient dans l'enseignement, entretenue, aug- 
mentée à Sainte -Barbe par l'ascendant de M. de 
Lanneau^ enfantait ces triomphes des concours au delà 
desquels apparaissaient encore d'autres récompenses, 



4^ HISTOIRE 

Stimulant suprême de rémulation. Les services publics 
souffraient delà disette de sujets instruits^ et les hom- 
mes d'Etat n'abandonnaient point à la recommanda- 
tion le soin de leur désigner ceux qu'il était utile d'ac- 
quérir. Ils allaient eux-mêmes faire leur choix dans 
les écoles. Maintes fois les examens généraux et les 
distributions de prix furent pour les ministres ou leurs 
délégués l'occasion de discerner des jeunes gens qu'ils 
ne tardaient pas d'appeler à des emplois; de sorte 
qu'après ses études faites avec succès, on était sûr de 
trouver immédiatement une carrière. Voilà ce que les 
vieillards racontent de cette époque, véritable âge 
d'or pour ceux qui aspiraient aux professions libérales. 
Les distributions de prix, qu'honoraient de leur 
présence les premiers fonctionnaires de la République, 
eurent encore plus de solennité qu'aujourd'hui celles 
du concours général. Il n'y avait qu'une cérémonie 
pour tous les concours généraux et particuliers des 
Écoles centrales. Le lieu ordinaire de la séance était 
le temple de l'Oratoire- Le premier lauréat couronné, 
gardant sa couronne sur sa tête , proclamait les autres 
récompenses; mais avant d'en venir aux proclama- 
tions , on lisait les meilleures pièces de vers composées 
dans les divers cours de littérature. C'est ainsi qu'on 
entendit en l'an XI l'éloge du collège Sainte-Barbe, 
ouvrage du jeune François Barrière, et en l'an XII une 
épître d'adieu , adressée par le même élève à ses maî- 
tres des Écoles centrales *. Barjaud, autre barbiste, fut 

i . Mes adieux aux Écoles centrales et à mes amis de collège, 
Épître par J. F. Barrière, élève du Collège Sainte-Barbe, et de 
M. de Saint-Ange, professeur de belles-lettres à PÉcole centrale de 
Saint-Antoine. — In-8°, Paris, impr. Panckoucke. 



DE SAINTE-BARBE. 45 

admis également en Tan XII à lire des fragments d'un 
poème intitulé Melpomène. 

Barjaud , mort depuis cin(|uante ans ^ appartient à 
rhistoire. Il reçut les applaudissements de ses contem- 
porains; sa fin précoce fut déplorée comme une perte 
pour le pays *. 

Envoyé de Montluçon à Sainte-Barbe à l'âge de 
quinze ans '^ ce jeune homme se plaça aussitôt parmi 
les athlètes qui fondèrent dans les concours la réputa- 
tion du collège. Il s'adonna avec une égale facilité à 
la musique , à la peinture , à la composition des vers; 
c'est par les vers qu'il eut l'ambition de s'illustrer. 
Son premier succès devant le public fut de remporter 
en 1 81 1 le prix d'une joute poétique à laquelle prirent 
part douze cent soixante-trois littérateurs français, la- 
tins, italiens et allemands. Le sujet proposé était la 
naissance du roi de Rome \ Barjaud fut le premier 
dans le concours des auteurs français , et le premier 
encore dans le concours des vainqueurs couronnés 
pour chacune des quatre langues. Sa réputation 
s'étendit par la publication de diverses odes et de 
fragments d'un poème épique sur Charlemagne\ 
Ce dernier ouvrage n'était encore qu'à l'état d'ébauche 
dans sa tête. 11 lui sembla que, pour combler le vide 

i. Moniteur du 4 décembre 1818; Rabbe, Biographie des Con- 
temporains; Supplément de la Biographie universelle deMichaud. 

2. Entré le 25 frimaire an IX (16 décembre 1800). 

3. Hommages poétiques à Leurs Majestés impériales et royales 
sur la naissance du roi de Rome, recueillis et publiés par J.-J. Lucet 
et Eckard. In-4% Paris, 1811. 

4. Odes nationales, Paris, in-18, \ 81 2. — Le passage du r<liémen, 
le Rétablissement de la Pologne, T Anniversaire de la naissance du 
roi de Rome, odes suivies de fragments traduit» de Juvénal, 



46 HISTOIRE 

de plusieurs chants, il avait besoin de s'inspirer par le 
spectacle de la guerre. En conséquence il s'engagea 
en 1813, et partit pour TÂllemagne avec le grade de 
sous-lieutenant au 37® ïéger. Il assista aux deux ba- 
tailles de Bautzen et de Leipsick. Après la première , 
il fut décoré de la main de l'Empereur ; il fut tué à la 
seconde. 

Sairite-Bàrbe conserve là lettre que le préfet de la 
Seine lui écrivit au sujet du poème proposé pour être 
lu à la distribution des prix de l'an XII. Cette pièce est 
tout entière de la main de M. Frochot. Elle est ainsi 
conçue : 

« J'ai reçu et j'ai lu avec intérêt votre poème de 
Melpomène. Cet ouvrage annonce un vrai talent, que 
l'expérience et le goût perfectionneront. Vous êtes en- 
core dans l'âge où l'imagination a besoin d'un guide 
éclairé pour réprimer parfois ses. écarts et pour diriger 
son vol. Consultez souvent un ami sûr; vous le recon- 
naîtrez à la sévérité de ses jugements, comme vous 
reconnaîtrez les ennemis de vos succès à l'exagération 
de leurs éloges. Polissez votre ouvrage et le repolissez, 
voilà tout le secret des grands maîtres. Si vous faites 
comme eux, vous parviendrez au but où tendent vos 
vœux et vos efforts. 

« Vous voyez , Monsieur , que je suis de vos amis , 
et c'est parce que j'ai reconnu dans votre ouvrage le 
germe du talent poétique que je me* suis permis de 
vous faire des observations que vous prendrez sans 
doute en bonne part. 

Ciaudien et Sénèque. In-i2, 1812. — Homère ou rOrigine de 
rUiade et de l'Odyssée, poëme suivi de fragments d'un poëme 
intitulé Charkmagncé Paris, in-18, 18H. 



DE SAINTE-BARBE. 47 

(c J'aurais désiré que vous eussiez pu lire à la dis- 
tribution du concours votre poème en entier; mais il 
m'a semblé que cela n'était guère possible. L'impa- 
tience des concurrents ne saurait supporter la leclure 
d'un ouvrage de longue haleine. Je vous invite donc à 
en faire une analyse, dans laquelle vous insérerez les 
morceaux les plus saillants. Je ne vous les indique pas, 
parce que vous les connaissez aussi bien que moi. 
Vous pourrez d'ailleurs consulter à cet égard M. de 
Lanneau et le professeur de belles-lettres de votre 
école, à qui je ferai part de mes instructions relative- 
ment aux lectures qui auront lieu ^ » 

Quel encouragement pour la jeunesse, lorsqu'elle 
voyait ses travaux être hors du collège l'objet de cette 
attejition paternelle, et que celui qui lui en donnait 
la marque était le premier magistrat de la cité ! 

Il fut établi en 1 803 que les plus brillants lauréats 
du concours général des Écoles centrales seraient pro- 
clamés et récompensés de nouveau , • en même temps 
que ceux du lycée de Paris et du prytanée de Sainl- 
Cyr, dans la séance extraordinaire de l'Institut où le 
ministre de l'Intérieur venait couronner les grands , 
prix de médecine, de peinture, de sculpture, d'ar- 
chitecture et de musique. Les noms barbistes de Paris, 
Feuchères, Darracq, Hello, Brunel, etc., retentirent 
dans ces solennités, qui ne durèrent pa$ longtemps, du 
moins pour les études classiques. La disposition de 
48Q3 fut abolie lors de la création de l'Université im- 
périale, et déjà, depuis 1805, elle se réduisait à pro- 
clamer les deux premiers grands prix dans Tordre des 

1. 22 thermidor an XII (23 août 1804). 



48 HISTOIRE 

sciences et des belles-lettres, remportés au concours 
général des lycées de Paris. Zoé Ducros, non pas Du* 
cros le berger, dont il a été question précédemment, 
mais un jeune Breton de Belle-Isle, qui, en 1805, fut 
pfoclamé de la sorte, à l'honneur du lycéer Impérial, 
Zoé Ducros était un barbiste de la veille. Il avait dû 
à ses éclatants succès dans notre collège l'avantage 
de devenir boursier du gouvernement. 

Le Prytanée et Sainte-Barbe eurent, indépendam- 
ment de tout cela, leurs distributions particulières. 
Celle de Sainte- Barbe avait lieu sous une tente dans 
la grande cour du collège, ou bien dans la nef de l'é- 
glise Saint-Benoit. On y faisait le rappel des succès 
rapportés du dehors par les élèves de la maison, puis 
on décernait les récompenses méritées à la suite des 
exercices intérieurs. 

Il y eut pendant plusieurs années deux prix d'excel- 
lence (un pour chacune des deux sections de l'éta- 
blissement),, que les sujets les plus accomplis rece- 
vaient par les suffrages de leurs condisciples, et ces 
suffrages étaient recueillis au scrutin. C'était, malgré 
l'apparence exclusivement républicaine de la chose, 
un retour aux usages d'avant la Révolution. On lit en 
effet dans les Mémoires secrets de Bachaumont * qu'un 
ancien élève de la Communauté de Sainte-Barbe éta- 
blit dans cette maison, en 1784, un prix pour l'éco- 
lier qui, au jugement de tous ses condisciples, aurait 
réuni au -degré le plus éminent la science et la vertu. 
Le nouvelliste ajoute que le scrutin fut ouvert pour la 
première fois à la séance littéraire du 4 décem- 

1 . Année i 785, 3 janvier. 



DE SÂINTE-BARBE. 49 

bre 1 784, présidée par le recteur de FUniversité, et 
que le nom qui sortit de Fume fut celui de Jean-Bap- 
tiste Perrault, vétéran de rhétorique, natif du diocèse 
de Chalon-sur-Saône. Les résultats des éleclions qui 
eurent lieu dans la nouvelle Sainte-Barbe nous sont 
également connus. Génestal et Gatteaux furent les 
élus de Tan Vill; Hoguer, et Gatteaux une seconde 
fois, ceux de Fan IX. 

Lorsque tout appel au jugement de la multitude 
cessa d'être d'accord avec les institutions du pays, 
M. de Lanneau établit, pour ses élèves les plus avancés 
dans les études, un prix d'honneur qui récompensait 
la meilleure composition en français, prose ou vers. 
Un jury de littérateurs décernait la palme de ce con- 
cours. Ce prix fut remporté par Barjaud en Tan XIL 

Les noms des sujets les plus recommandés, à la 
suite de tant d'épreuves différentes, étaient peints en 
grandes lettres sur des tableaux d'honneur. Cette dis- 
tinction parlait aux yeux de tous. Elle excitait ceux 
qui en étaient l'objet à conserver leur rang, et leurs 
rivaux moins heureux à en conquérir un semblable. 
Comme moyen d'émulation, le directeur distribuait en- 
core des médailles dans le courant de l'année. C'étaient 
des pièces d'argent d'un très-grand module, sur les- 
quelles étaient gravés les noms de l'impétrant et la 
devise Laboris ac meriti prsemium.. Elles portaient 
en légende Scientiarum ariiamque Collegium oUm 
S. Barbara. 

Tant de moyens d'excitation rendirent les nouveaux 

barbistes d'une susceptibilité extrême sur le point 

d'honneur, ce qui eut bien quelquefois ses inconvé- 

^nients. On raconte qu'un jour, la fleur du cours de 

III 4 . 



50 HISTOIRE 

Belles-Lettres convint d'une rencontre à coups de 
poing avec ses rivaux de la maison Lepitre. Ce fut un 
combat semblable en tout à celui des Horaces et 
des Curiaces, car ils étaient trois de chaque côté, et 
l'issue fut la même. Un seul barbiste restant sur. le. 
terrain défit deux Lepitre qui s'étaient maintenus 
sains et saufs. Un homme éminent, qui vit encore, 
figurait parmi ces derniers. Nous pouvons le dire , car 
c'était un valeureux champion, qui, s'il succomba au 
pugilat^ demeura le plus fort au concours général 
des Écoles. Deux ans de suite il remporta le prix 
d'honneur. 



CHAPITRE IV. 



Classe de grec. — Cours de philosophie de Maugras. — Conféreuce de 
Laromiguière. — Cours de littérature. — Nouveau caractère de l*en- 
seignement des mathématiques. • — Professeurs distingués des classes 
d'humanités et de grammaire. — Essai d'enseignement professionnel. 
^- École primaire gratuite. 



Parlons à présent des choses remarquables créées 
à Sain te -Barbe dans la partie des études. C'est' là ce 
qui releva le plus le titre d'École secondaire attribué 
à rétablissement par la loi de 1 802. 
. L'enseignement du grec y fut institué en Tatï IX. 
Voici dans quelles circonstances : 

L'ancienne Université, dans les derniers temps, 
avait tellement négligé Je grec, qu'il fut impossible d'en^ 



DE SAINTE-BARBE. Si 

placer d'abord Tétude parmi les exercices des Écoles 
centrales. Les hellénistes en état de faire les cours ne 
seraient pas parvenus à réunir un auditoire suffisain- 
oient préparé. D'une part, les professeurs élémentaires 
étaient rares; de l'autre, le peu qu'il y en avait n'é- 
taient pas employés. Ni les parents ne voulaient don- 
ner à leurs enfants un surcroit de travail que le 
vulgaire jugeait tout à fait inutile, ni les enfants eux- 
métues ne se sentaient de penchant pour une langue 
qui s'écrit avec des caractères différents de ceux de 
notre alphabet. 

Aux yeux du régénérateur de Sainte-Barbe, la litté- 
rature grecque était à la fois la plus pure source du 
bon goût et la clef de toutes nos connaissances. Il 
ne comprenait pas que Ton put prétendre à former 
des sujets distingués pour les sciences ou pour les arts, 
sans leur ouvrir les trésors de la langue dans laquelle 
ont été exprimées pour la première fois toutes les belles 
conceptions. Sous la République, lorsque la Républi- 
que existait encore de fait, il eut à alléguer une autre 
raison plus spécieuse, mais plus au goût dès hommes 
qui avaient la puissance : c'est que les Français ne 
pouvaient pas se dispenser de connaître (c la langue 
classique des peuples républicains. » Ay^nt présenté 
la chose en ces termes tandis qu'il était au Pry tanée, 
il détermina M. Champagne et le Conseil d'adminis- 
tration de l'établissement à créer une chaire de grec'. 

La chaire de grec du Prytanée fut établie fà l'usage 
non pas de tous les élèves, mais de ceux setilement 

i . Archives de PEmpire, Registre de radministration du Pry- 
tanée, M. 161, séance du 23 brumaire an Vil. 



52 HISTOIRE 

qui s'adonnaient avec succès à Tétude du latin. Plu- 
sieurs de nos barbistes comptèrent parmi ces élèves 
privilégiés, et Tun d'eux (un Génois, nommé Botti) 
dut au grec le second prix du cours des langues an- 
cieniies, qu'il obtint en l'an VIII à l'école du Pan- 
théon. C'était l'année de l'apparition du grec dans les 
Écoles centrales. La chaire particulière de Sainte- 
Barbe fut créée à peu de temps.de là. M. de Lanneau 
rétablit sur le même pied que celle du Prytanée, 
lorsque cessa la communauté d'études entre sa mai- 
son et cet établissement, de sorte que les succès si 
remarqués de l'an IX, dont il a été question précé- 
demment *, furent Tétrenne de l'enseignement du grec 
transplanté ou replanté sur le sol où l'avaient fait 
fructifier jadis à deux reprises les Gouvéa et les Jansé- 
nistes. Les années qui suivirent répondant à ces 
brillants débuts, le collège devint particulièrement 
renommé à cause de ses grécisants. De là , cette 
recommandation consignée dans son règlement de 
1806* : a Le Collège de Sainte-Barbe a e#tant de part 
au renouvellement de l'étude du grec, à l'ouverture 
des écoles de la capitale, qu'il ne pourrait la négliger 
sans renoncer à ce qui fait l'un des plus solides fonde- 
ments de sa réputation. » 

Le premier professeur de grec à Sainte-Barbe fut 
M. Hamoche, ancien professeur du Collège Louîs-le^ 
Grand, où il resta employé jusqu'en l'an ir comme sous- 
directeui^des Boursiers de l'Égalité. Il avait été désigné, 
avec Garât et Mahérault, pour enseigner l'histoire dans 



i . Ci-dessus, p. 29. 
2. titre 8. 



DE SAINTE-BARBE. 53 

les Instituts provisoires projetés par la Commune de 
Paris , lesquels ne fonctionnèrent jamais. N'ayant pas 
pu se faire admettre aux Écoles centrales , M. Hamoche 
offrit ses services à M, de Lanneau. C'était un profes- 
seur instruit, exact, et qui savait se faire écouter ; mais 
il s'occupait de littérature française autant et pliisque 
de grec. Il publia en 1802 un Dictionnaire des rimes. 
D'ailleurs sa méthode d'enseignement était celle de 
l'anpienne Université , une exposition sèche et incom- 
plète, une interprétation terre-à-terre des auteurs, 
d'où était absente l'analyse qui met à jour toutes les 
nuances et, par suite, le véritable génie du langage. 
Aucun des émériles qui furent appelés à restaurer la 
culture du grec dans les écoles ne sut aller plus loin. 
Il en résulta que pendant longtemps cette langue ne 
fut apprise que par une sorte de routine. C'est au point 
que les élèves ne croyaient pas qu'il y eût de règles 
certaines pour trouver le sens d'une version. Ils pro- 
cédaient par tâtonnements, et s'il leur arrivait de trou- 
ver juste ce que l'auteur avait voulu dire, ils regar- 
daient cela comme un coup de fortune. Telle était 
néanmoins l'envie d'apprendre chez quelques-uns, 
qu'ils trouvaient de l'attrait à ces exercices de hasard. 
C'est seulement en 1813 qu'un jeune helléniste d'in- 
clination et de profession, M. Wendel-Heyl, apporta 
dans notre collège les principes de la connaissance du 
grec telle qu'elle s'était formée par les travaux parti- 
culiers de quelques érudits au commencement de ce 
siècle , et telle qu'elle commençait à se propager par 
les leçons de Boissonade à la Faculté des lettres. 

M. Hamoche fut professeur à Bonaparte dès la créa- 
tion de ce lycée. Il y obtint la chaire de rhétorique 



54 HISTOIRE 

en 1810, grâce aux dëmarches actives que M. de Lan- 
neau fit pour lui auprès du grand-maître de l'Uni- 
versité. 

Le directeur de Sainte-Barbe n^avait pas moins la 
philosophie à cœur que le grec. Il est curieux de voir 
ses essais successifs, pour remettre en honneur cette 
partie de l'instruction. 

Les lois républicaines ne- voulaient pas entendre 
parler d'une autre philosophie que de là philosophie 
pratique. D'après le plan tracé par elles, les règles de 
la morale devaient ressortir de l'enseignement de 
l'histoire et de la législation, de même que les règles 
de la logique se rattacher à l'analyse des grands pen- 
seurs. Afin de combler les lacunes de ce programmé 
par trop incomplet, M. de Lanneau^ de concert avec 
MM. Champagne et Laromiguière, combina pour les 
élèves du Prytanée un enseignement gradué de lo- 
gique (on disait alors art de penser) et de morale qui 
conviendrait à tous les âges. Cette innovation fut mise 
en pratique au commencement de l'an VII. Elle a été 
expliquée par M. Champagne lui-même, dans un dis- 
cours qui est un curieux monument des idées de l'é- 
poque*. • 

Ces cours ne durèrent que deux ans. Déjà, lorsque 
M. de Lanneau quitta le Prytanée, ils étaient con- 
damnés, et en Tan IX, on leur substitua une classe 
unique de philosophie, placée à la fin des études. On 
désigna au professeur les livres dans lesquels il devait 

1 . Distribution des prix faite aux élèves du Prytanée français 
par le cit. Quinette, ministre de l'intérieur, le 7 fructidor an VII 
de la République française. In-8*. Paris, Bertrand Quinquet, impr. 
du Prytanée français. 



DE SAINTE-BARBE. 55 

se renfermer,^c*est-à-dîre la logique "de Condillac et 
le De Officîis de Cicéron. L'enseignement consista en 
questions dictées sur des sujets propres à exercer le 
jugement des élèves, et Ton faisait traiter Taflirmative 
par les uns et la négative par les autres ^ C'était un 
retour aussi complet que possible aux errements de 
l'ancienne Université, et, il faut le dire, une satisfac- 
tion donnée à l'opinion publique du moment , car 
l'esprit de réaclioi} n'avait plus de frein. La presse, à 
peu d'exceptions près, battait en brèche renseignement 
révolutionnaire ; elle en accablait les derniers défen- 
seurs par la vertu .de deux mots , devenus tout à 
coup synonymes de tout ce qu'il y avait d'absurde et 
de faux : idéologue et métaphysicien. Ces récrimina- 
tions eurent tant de puissance , que même ce cours 
si restreint qui venait d'être institué au Prytanée, ne 
fut point maintenu. 

La pauvre logique, presque aussitôt bannie que 
rappelée, émigra dans les Écoles centrales; voici 
comment : 

Une question épineuse : <k Un particulier peut-il faire 
une constitution? » proposée au cours de législation 
de l'École des Quatre-Nations (Plessis), fut suivie de 
la réponse : « Non, sans violer la souveraineté du peu- 
ple'. » Cela fit du bruit. On s'en autorisa pour induire 
les professeurs à rayer de leur programme la législation, 
et à mettre à la place une autre matière. Ils proposè- 
rent la morale. On leur fit comprendre que l'économie 
politique aurait plus d'avantage'. Puis, au bout de 

1. Règlement da Prytanée en date du 16 juillet 1801. 

2. Fin de thermidor an X (août 1802). 

3. 29 vetidémiaire an XI (22 oct. 1802). 



36 HISTOIRE 

• 

quelques mois/ réconomie politique dut céder la 
place à la logique. Pour cette dernière, c'était prendre 
bord sur un navire qui déjà faisait eau de toutes parts. 
Les Écoles centrales sombrèrent^ et la logique aurait 
disparu avec elles (car elle ne fit pas partie d'abord 
de l'enseignement des lycées), si elle n'eût pas trouvé 
un refuge à Sainte-Barbe. 

Ce refuge était une cbaire de philosophie didac- 
tique> établie depuis la suppression du cours de légis- 
lation des Écoles centrales, c'est-à-dire depuis le 
commencement de l'an XI, qui répond à l'année sco- 
laire 1802-1803. Il semble que notre Directeur ail 
été guidé dans cette création par le souvenir, encore 
vivant à Sainle-Barbe, de Jean Fernei et de l'auditoire 
si nombreux que ce professeur avait atliré jadis au* 
tour de sa cbaire. Le cours fut institué à l'instar deceut 
du seizième siècle. On y admit la jeunesse du dehors; 
des exercices annuels réunirent une assistance choisie, 
devant laquelle les meilleurs élèves eurent à disserter 
sur des positions rendues publiques par des affiches. 
L'enseignement embrassait, outre la logique, la mo- 
rale et les principes généraux de l'économie politique; 
On ajouta plus tard la psychologie , la théodicée 
et les éléments de la législation ; mais le cours perdit 
sa publicité, et on le combina en partie avec la rhé- 
torique, afin de pouvoir le représenter comme un 
exercice «propre à contenir l'imagination ardente et 
souvent emphatique de la jeunesse ^ » Tel était l'état 
des choses en 1808. Le programme adiché pour la 



1 . Rapport sur la situation de Sainte-Barbe au moment de la 
création de IlJniverûté impériale. 



DE SAINTE-BARBE. 87 

séance publique de cette année porte encore des 
questions sur toutes les matières que nous venons 
d'indiquer, et le nom d'Eugène Scribe figure parmi 
ceux des jeunes gens désignés pour soutenir les 
thèses. Scribe eut l'occasion ^e se distinguer dans une 
autre solennité du même genre, dont on trouvera plus 
loin le récit. * 

L'autorité toléra pendant sept ans le cours de 
Sainte-Barbe. Il fut, depuis 1 805 jusqu'à la création 
de la Faculté des lettres, le seul sur la matière qui 
existât à Paris. Dans le commencement, il contribua 
à la réputation du Collège. Sans avoir été l'objet 
d'une telle vogue que le professeur se soit vu forcé, 
comme Fernel, de débiter ses leçons en plein air, il 
< fut néanmoins trcs-suivi , eu égard surtout aux pré- 
ventions de l'époque. 

Le professeur était M. Maugras, l'antagoniste mal- 
heureux des philosophies étrangères, qui traîna dans 
ses derniers jours le chagrin d'avoir été congédié de 
la Sorbonne pour faire place à Jouffroy. 

Agrégé de l'Université avant la Révolution, M. Mau- 
gras passait en 1791 pour l'homme le plus capable 
d'accommoder Penseignenient de la philosophie aux 
besoins nouveaux de la nation. À la demande du 
gouvernement , il fit au Collège de La Marche un 
cours, qui fut goûté, sur les principes fondamentaux 
de l'association humaine. Lorsque vint la grande 
crise, il se retrancha dans les fonctions de chapelain 
constitutionnel du Collège de l'Égalité, puis il déposa 
l'habit ecclésiastique. Il apporta à Sainte-Barbe une 
doctrine qui se fit jour dans l'Université de Paris, à la 
veille de la Révolution. C'était un assemblage de pria- 



58 HISTOIRE 

eipes empruntés à Descartes, à Mallebranche, et sur- 
tout à Condillac. L'enchaînement n'était pas rigou- 
reux; la pensée dominante était de combattre les 
tendances matérialistes du dix-huitième siècle, mais 
sans placer ailleurs que dans la sensation Torigine des 
idées. * . 

M. Maugras, comme professeur, avait de la clarté, 
du feu, du trait. Il savait intéresser un auditoire, et 
encore mieux, Famuser par ses saillies et ses sorties 
contre quiconque ne partageait pas sa manière de 
voir. Sa nléthode pour faire travailler était excellente; 
avec lui, les jeunes gens profitaient; mais il n'était 
que professeur. Pour lui, la philosdphiè consistait à 
fournir des réponses sur un questionnaire en dehors 
duquel il ne concevait ni ne tolérait rien. Aussi n'eut-il 
pas d'héritier de son système. Il fit des élèves sans 
nombre, et pas un disciple. La part démérite qui lui 
revient est de 3'être voué à remettre en honneur une 
science qui, au moment où il en reprit la profession 
publique, apparaissait aux yeux de la jeunesse comme 
uu épouvantail. 

M. Maugras conduisait de front son cours de phi- 
losophie dans notre collège avec un cours d'écono- 
mie politique à l'Académie de législation. Cette Aca* 
demie était une école privée où l'on enseignait le 
droit, car la Révolution n'avait pas voulu introduire 
Faction de l'État dans l'étude approfondie des lois. 
Jusqu'au moment où les Écoles de droit, rétablies en 
1804, furent rattachées à l'Universit*?, l'Académie de 
législation se maintint. Pendant la dernière année de 
son existence (1807-1808), M. Maugras donna à 
Sainte-Barbe des répétitions de droit ^ auxquelles 



DE SAINTE-BARBE. Sft 

furent appelés tous les étudiants qui voudraient en 
profiter. Quelque chose de pareil avait déji existé 
dan!^ le temps que la législation faisait partie de ren- 
seignement des Écoles centrales. Jean-Baptiste Teste, 
qui fut depuis ministre et qui eut une si triste fin, ré- 
pétait le cours à Sainte-Barbe. Tout jeune qu'il était, 
il se faisait admirer à la fois de ses élèves et des maî- 
tres qui venaient l'écouter. L'étendue, de son intelli- 
gence et la merveilleuse lucidité de son exposition 
paraissaient quelque chose de surprenant pour son âge. 
En 1805, Laromiguière entreprit, à la grande joie 
de M. de Lanneaii, une conférence qui avait pour objet 
de préparer les élèves au cours de M. Maiigras. C'é- 
tait le général qui se faisait instructeur au service du 
capitaine. Malheureusement notre professeur de phi. 
losophie n'en fut satisfait qu'à moitié, parce qu'il 
n'approuvait pas que Laromiguière eût transformé Con- 
dillac d'une autre façon que la sienne. Aussi les con- 
férences dont nous parlons eurent-elles peu de durée ; 
mais elles ont laissé un souvenir ineffaçable dans la 
mémoire de ceux qui les suivirent. Ils racontent en- 
core, comme si c'était d'hier, l'effet de fascination 
que produisait sur eux la parole de leur mattre, si 
vive, si suave, si pénétrante ; et c'est avec Témotion 
la plus profonde qu'ils se rappellent l'exquise sim- 
plicité de ce grand philosophe (car il fut tel au moins 
par Pesprit et par la vertu), oubliant son âge pour se 
mettre à la portée du leur. Il n'était pas leur profes- 
seur/ mais leur ami, leur conseiller, le directeur de 
leurs âmes. Il s'étudiait à les instruire pour la vie où 
ils étaient sur le point de faire leur entrée. Toutes ses 
leçons, toutes ses conversations tendaient à cette fin. 



60 HISTOIRE 

Il composa pour eux son parallèle entre les plaisirs 
des sens et ceux de Tintelligence, qui devint plus tard 
le sujet d'une de ses plus belles leçons à la Faculté. 
Il leur disait un jour : « Il y a trois choses dont la 
réunion vous procurera le moyen infaillible de réussir 
dans le monde : le travail, la conduite et raménilé; 
puis, lorsque vous aurez réussi, il vous faudra dé- 
ployer une nouvelle vertu, la modération. » 

C'est à table qu'il leur tenait ce propos, car son 
bonheur était d'en réunir deux ou trois le dimanche, 
à son modeste déjeuner, afin de les entretenir avec 
encore plus d'expansion. Quelquefois le repas était 
suivi de promenadeSjj telles que Socrate ou Platon en 
faisaient avec leurs disciples. Le témoin de qui nous 
tenons ces détails se rappelle avoir été conduit par 
Laromîguière au fameux cercle d'Auteuil^ où se réu- 
nissaient auprès de Cabanis les sages de la Révolution, 
les amants malheureux de la philosophie et de la 
liberté : J.-M. Chénier, Andrieux, Daunou, Ginguené, 
Benjamin Constant. 

Le souvenir des conférences de Laromiguîère ap- 
pelle celui de M. Mourre, préfet des études de ce 
temps-là, qui seconda l'entreprise de l'illustre philo- 
sophe. 

M. Mourre fut le frère du baron Mourre, procureur 
général à la Cour impériale, puis à la Cour de cassa- 
tion. Il s'était consacré à l'instruction publique, après 
avoir étudié la médecine. Il fit son chemin dans l'U- 
niversité, devint inspecteur de l'Académie de Tou- 
louse sous les Bourbons, et déploya dans l'exercice de 
ses fonctions le zèle d'un partisan déclaré de l'an- 
cien régime. Mais tels n'étaient pas ses principes à 



DE SAINTE-BARBE. ^ 61 

répoque où il fut employé à Sainte- Barbe* Tout au 
contraire, le dix-huitième siècle n'avait point alors de 
plus fervent disciple. 

M. Mourre s'ëiait approprié avec une parfaite intel- 
ligence ce qu'il y avait de bon dans les systèmes d'é- 
ducation^ avant et depuis la Révolution ; lui-même 
il apportait une foule d'idées et d'expédients à lui 
dans la pratique de l'enseignement^ de sorte que pour 
le perfectionnement des études, il ne reculait devant 
aucune nouveauté. 

il se distingua surtout par des leçons de littérature 
aux rhétoriciens. L'une de ses inventions fut de faire 
corriger par ces jeunes gens eux-mêmes les devoirs 
qu'il leur donnait. Chacun devait écrire sur la com- 
position d'un de ses condisciples, qui lui était sou- 
mise, ses propres remarques, développées et coordon- 
nées à la façon d'un article de critique. L'ordre de 
mérite était assigné d'après le talent déployé dans les 
deux épreuves, composition et correction. La courtoi- 
sie comptait pour Tune des qualités de la seconde. 

Les mêmes leçons furent employées à corriger le 
mode vicieux de récitation qui régnait déjà d^uis un 
temps immémorial dans les écoles^ Le professeur 
exigeait que des apprentis dans l'art oratoire sussent 
mettre à ce qu'ils disaient le ton et l'accent conve- 
nables. Ce fut un premier essai que Sainte-Barbe vit 
reprendre plus tard sur une plus grande échelle^ 
ainsi que nous le montrerons en son lieu. M. Mourre 
était bon maître en cette partie, car il lisait et disait 
à merveille. Il jugea utile de joindre à ses préceptes 
l'exemple des grands acteurs de Tépoque. Plus d'une 
fois il conduisit dans ce but ses élèves au Théâtre* 



62 HISTOIRE 

Français; et de peur qu ils ne perdissent de vue Tin- 
tention du plaisir qu il leur procurait, il voulait qu'au 
retour ils lui fissent des comptes rendus critiques de 
la représentation. 

En toute occasion il s'étudiait de la sorte à exerc^er 
le jugement, en même temps qu'il éveillait l'intelli- 
gence. L'annonce du cours de philosophie revenait 
sans cesse dans ses entretiens. H dépeignait cette 
science comme quelque chose de divin, et avec; un 
enthousiasme si sincère, qu'il enflammait du désir de 
la connaître tous ceux qui l'entendaient parler. La- 
romiguière, qui était son ami, se fit un plaisir d'en- 
treprendre des jeunes gens dont l'esprit était si bien' 
préparé. 

Avant les conférences de littérature par M. Mourre, 
il y en eut du même genre par l'abbé de Cournand. 
On disait l'abbé de Cournand comme on disait l'abbé 
Delille, quoique tous les deux eussent non-seulement 
renoncé à la profession ecclésiastique, mais contracté 
mariage. L'un et l'autre étaient professeurs au Collège 
de France dès avant la Révolution ; mais là ne se bor- 
nait pas la conformité. Pendant la moitié de sa vie;; 
M. de Cournand s'évertua à être le rival de Delille, 
jusque-là qu il fit aussi mie traduction en vers des 
Géorgiques. Lui seul méconnut son infériorité. On ra- 
conte qu'à une distribution de prix de Sainte-Barbe, 
le professeur qui prononçait le discours ayant fait une 
allusion flatteuse au talent de Delille^ M. de Cournand 
prit cela pour lui, et en remercia l'orateur. Cette foi 
robuste en soi-même, dont on pourrait hiultiplier les 
traits, fit souvent rire à ses dépens. Néanmoins la re- 
. connaissance des services qu'il avait rendus à beaucoup 



DE SAIJXTE-BARBE. 63 

d'hommes de lettres, menacés par. le gouvernement 
révolutionnaire, soutint tant qu'il' vécut sa réputation 
de littérateur. 11 aimait fort M. de Lanneau et Sainte- 
Barbe; c'est lui qui forfna la bibliothèque que possédait 
autrefois le collège, et il ne dédaigna point pendant un 
temps de joindre à ses titres celui de bibliothécaire de 
Sainte-Barbe. Ses trois fds, Timoléou^ Périclès et Tha- 
ïes j furent élevés dans notre collège. Nous aurons 
plus loin l'occasion de parler de l'un d'eux. 

M. Mourre eut pour les leçons qu'il donnait à nos 
rhétoriciens un digne successeur en la personne de 
M. Gratiane, agent de change ruiné, qui, heureuse- 
qient pour lui, avait commencé par l'enseignement, et 
s'était senti capable de s'y remettre sur le tard. Ses 
anciens services lui valurent en 1 809 le titre de doc- 
teur es lettres. L'Université, au seuil de laquelle il 
voulut rester, l'envia à Sainte-Barbe. C'était un méri- 
dional, pétillant d'esprit, toqjours neuf dans ses 
leçons, et qui ne laissait pas l'attention des jeunes gens 
se relâcher un seul instant. L'une de ses manières 
de faire était renouvelée du seizième siècle. Il pro- 
posait en classe le développement d'un sujet pris dans 
un auteur. Les élèves^ successivement interrogés, 
indiquaient, chacun selon son sentiment, les traits à 
introduire, les expressions et les tours à employer;* 
puis en faisant le choix de ce qui avait été suggéré de 
mieux, le professeur composait une forme avec 
laquelle il comparait la forme fournie par le modèle. 
Quel exercice plus fructueux que celui-là pour donner 
l'élan aux esprits, et pour les instruire dans l'art si 
difficile de travailler ? 

Le meilleur professeur peut avoir ses petits travers. 



64 HISTOIRE 

M. Gratiane était un élégant, plus entendu qu'il ne 
convient dans sa (frofession aux choses de la toi- 
lette. Il composa un cosmétique qui fit, sous le nom 
d*eau de Ninon^ la fortune d'un parfumeur de Paris. 
L'inventeur, dans son désintéressement, ne s'était pas 
réservé d'autre profit que l'avantage d'un bon diner 
par semaine. On riait de cette aventure, mais pas 
devant lui, parce qu'il savait commander le respect. 
Il mourut en 1813, professant toujours à Sainte- Barbe. 

Un souvenir qui est resté vivant dans la mémoire des 
anciens barbistes est celui d'un cours spécial, où les 
principes du français étaient exposés, comparativement 
avec ceux du latin. Lés jeunes gens qui ont été poussés 
dans les études classiques avant d'avoir une connais- 
sance suffisante de leur lailgue ne sont pas rares 
aujourd'hui ; ils étaient encore plus nombreux il y a 
soixante ans. C'est pour ceux-là que fut créé l'ensei- 
gnement dont il s'agit^ Le directeur du collège en 
réserva la partie principale pour lui-même, et il sut y 
mettre tant d'attrait que les élèves de toutes les classes 
demandaient comme une faveur d'être admis à ses 
leçons. 

Pour la répétition du cours de physique et de 
chimie des Écoles centrales. Sainte- Barbe posséda un 
cabinet d'instruments et un laboratoire. M. Thillaye, 
de l'École de médecine, faisait les démonstrations. Les 
élèves furent soumis, de même que pour la philosophie, 
à répreuve des thèses publiques. Ces exercices restè- 
rent attachés après l'an XIII au cours de mathématiques 
spéciales, qui dès lors exista de fait, sinon par les ter- 
mes, car la division factice des matières d'enseigne- 
ment, qui a scindé les mathématiques en spéciales et 



DE SAINTE-BARBE. 65 

en élémentaires^ s'introduisit d'elle-même par la tyran- 
nie des programmes d'admissions à l'École polytech- 
nique. Les règlements la consacrèrent ensuite. 

L'admission aux écoles spéciales devenue le souve- 
rain régulateur de l'instruction secondaire ^^ns la par- 
lie des sciences exactes, tel fut le premier symptôme 
da mal dont les études souffrent tant aujourd'hui. 
Toutefois, si l'enseignement par sa distribution visait 
d'une «manière trop exclusive à l'utilité, la doc- 
trine des maîtres en présence desquels était placée la 
jeunesse n'exagérait pas cette tendance. Loin de là : 
M. Landry, professeur du Prytanée, qui le fut en même 
temps de Sainte-Barbe jusqu'à la séparation des deux 
établissements, MM. Chauveau et Pommiés, qui se 
partagèrent sa succession en 1803, étaient des esprits 
distingués et extrêmement cultivés, à qui la pratique 
de l^enseignement des sciences exactes n'avait fait 
perdre ni le goût des lettres ni l'habitude de philoso- 
pher. Il y avait toujours place dans leurs leçons pour 
les idées générales et pour les aperçus comparatifs, de 
telle sorte que les mathématiques n'apparussent à 
l'esprit de leurs jeunes auditeurs que pour ce qu'elles 
sont dans le vaste domaine de l'esprit humain. La 
doctrine de la spécialisation prématurée des connais- 
sances aurait trouvé chez tous ces professeurs de 
solides adversaires, s'ils avaient vécu assez longtemps 
pour l'entendre prêcher. Nous n'en voulons pour 
preuve que ce passage d'un discours prononcé par 
M. Landry à la distribution des prix du lycée Impérial 
en 4807: 

ic L'éducation publique ne forme des hommes pour 
aucune profession en particulier. Ce ne sont point des 
m 5 



66 niSTOIRE 

orateurs, des poêles, des philosophes, des savants 
qu'on attend de nous. Lorsque nos élèves sortent de 
nos mains, ils trouvent d'autres écoles, d'autres leçons, 
d'autres études à faire, qui les disposent d'une manière 
spéciale à, l'état qu'ils embrassent. Nous sommes 
quittes envers les familles, quand nous pouvons leur 
répondre : Vos enfants ont profité de nos soins ; ils 
sont capables de réussir dans ce qu 41s entreprendront. 
Nous sommes quittes envers la société, (|uand nous 
pouvons lui dire : La jeunesse qui nous a été confiée 
promet de bons citoyens et des hommes qui sauront 
se rendre utiles. » 

Puis, s'adressant aux jeunes gens eux-mêmes^ 
M. Landry ajoutait : « Lorsque vous aurez choisi un 
état, il faudra bien, pour réussir, que vous adoptiez 
un ordre de travail pour ne plus le quitter ; mais tant 
que vous serez élèves, évitez toute préoccupation 
exclusive. 11 y a des connaissances qu'il n'est plus 
permis de n'avoir pas, et qui doivent nécessairement 
faire partie de la provision que vous amassez pour la 
vie. » 

Ces idées étaient celles de tous les mathématiciens, 
il y a cinquante ans. Lacroix, dont plusieurs de nos 
barbisles reçurent les leçons pendant qu'il fut attaché 
à l'École centrale des Quatre-Nations, les fit entendre 
dans sa chaire, avant de les développer dans son Essai 
sur renseignement. Un illustre disciple de cette grande 
école, feu Poinsot, ne pensait pas autrement. Il s'ex- 
prima en ce«sens,aveb sa finesse hatiituelle, dans plu- 
sieurs visites dont il honora notre collège, lorsqu'une 
division spéciale y fut créée pour l'étude des sciences. 

Il est bon de remarquer que M. Cliauveau, qui a 



DE SAINTE-BARBE. 67 

été nommé tout à l'heure , était frère de Cbauveau- 
Lagarde, et, de même que celuÎK^î , «ancien barbistede 
la Communauté. Professeur en l'Université de Paris , 
il enseignait les mathématiques à Mazarin lors de la 
fermeture de ce collège, et il les enseigna depuis à l'É- 
cole centrale de Chartres. Quant à M. Pommiés , plus 
jeune que M. Chauveau , il terminait ses études juste 
au moment que les études cessèrent. Tous deux furent 
appelés au lycée Napoléon dès 1 804 ; ils y professcyent 
simultanément, tout en continuant leurs leçons à 
Sainte-Barbe. Celles de M. Pommiés ne finirent que 
par sa mort, arrivée en 1827. 

Notre collège, forcé de subir la division ofTicielle 
des études scientifiques , chercha et réussit à se dis- 
tinguer par le nombre des élèves aspirants aux écoles 
qu^il faisait recevoir. Dans un mémoire adressé à Four- 
croy le T*" janvier 1808, M. de Lanneau exposait que, 
depuis le commencement du siècle , il n'y avait pas 
d'année que sa maison n'eût donné quatre i cinq et 
six élèves à l'École polytechnique. En quatre ans l'É- 
cole impériale de Fontainebleau en avait reçu plus de 
soixante, «lesquels, ajoutait-il, le commandant m'a 
dit à moi-même s'être assez distingués pour qu'aucun 
ne soit sorti sans avoir un grade. » Ces résultats étaient 
considérables par rapport au nombre des sujets pré- 
sentés par la maison. 

Les classes de latin établies dans l'intérieur du col- 
lège pour le plus grand nombre des élèves , c'est-à- 
^ire pour ceux qu'on n'espérait pas de voir briller 
aux écoles publiques , ces classes si recommandables 
par les services qu'elles rendirent aux familles, furent 
confiées dès l'origine à des maîtres habilement choi^ 



68 HISTOIRE 

sis. C'est dans le personnel des Écoles centrales et des 
lycées, parmi les hommes qui avaient une longue pra- 
tique de l'enseignement, que le directeur dé Sainte- 
Barbe alla chercher de préférence ses professeurs. 
Nommons les plus distingues : 

M. Arrachard, qui avait occupé la chaire de gram- 
maire générale à l'École centrale du Morbihan, et qui 
obtint celle d'éloquence au lycée de Rouen en 1 805 ; 
M. Mérandon, professeur de grammaire générale aussi 
à l'Ecole centrale de Saône et-Loire, ancien chanoine 
d'Autun , qui avait partagé la bonne et la mauvaise 
fortune de M. de Lanneau en 93 et 94; MM. Manget , 
de l'École du Calvados , et Lartois , de l'École de 
l'Eure*, ce dernier reçu à Sainte-Barbe sur les vives 
recommandations de Fourcroy, qui n'avait pas réussi 
à le placer dans un lycée; M. Millon, de l'École du 
Panthéon , puis du Lycée Napoléon et enfin de la Fa- 
culté des lettres, barbiste d'avant la Révolution, ex- 
bibliothécaire du prince de Condé, correspondant de 
Voltaire et du grand Frédéric dans sa jeunesse, très- 
attaché à Sainte -Barbe, et qui protesta par ses 
assiduités auprès d'elle contre les mauvais procédés de 
plusieurs de ses anciens condisciples; M. Létendart, 
de l'École des Quatre-Nations, puis du Lycée Napo- 
léon, ancien élève de Montaigu, professeur accompli, 
au sujet duquel il n'y a que deux mots à dire pour 
rendre le sentiment des élèves qui passèrent sous lui : 
admiration et adoration; M. Caura, professeur du Pies- 
sis avant et pendant la Révolution, élève brillant de 
l'ancienne Sainte-Barbe , entièrement dévoué à la nou- 
velle , décoré du titre de docteur es lettres sous l'Em- 
pire, et de la croix de la Légion d'honneur en 1829; 



DE SAINTEBARBE. 69 

M. Roux, ancien principal du collège de Chàtillon; 
en-Dombes; M. Martin^ sur lequel nous nous arrête- 
rons MU instant , parce qu'il fut un compagnon de la 
jeunesse de M. de Lanneau, et qu'il resta toute la vie 
son ami le plus intime. 

Ils s'étaient connus sous l'habit de thëatin, et avaient 
secondé ensemble , comme vicaires épiscopaux , l'é- 
vêque constitutionnel de Saône-et-Loire. Le collège 
d'Âutun, maintenu en 1793 par leur concours, fut 
l'un de ceux qui eurent l'avantage, exceptionnel de 
subsister jusqu'à l'établissement des Écoles centrales. 
M. Martin prit domicile et racine à Saiote-Barbe dès 
la fondation. N'ayant d'autre ambition que de se rendre 
utile à l'ami dont il était le fidus Jlchates , il se char- 
gea tour à tour des fonctions les plus diverses, selon 
le besoin des circonstances. Associé d'abord à la con- 
duite du collège avec le titre de sous-directeur , il fit 
ensuite la classe de quatrième , puis devint préfet des 
études du Grand-Collège. C'était la vertu même et 
l'homme du monde le plus inoffensif. Il fallut néan- 
moins le mettre à l'écart pendant quelques années, pour 
le soustraire aux vengeances de la Restauration. Il 
prit plus tard la surveillance du Petit-Collège , et la 
conserva jusqu'à la mort de M. de Lanneau, à qui il 
eut le chagrin de survivre. 

Tant qu'il fut permis de croire à la durée du régime 
des Ecoles secondaires, les instituteurs entendus à 
leur profession s'occupèrent de former les maîtres par 
qui ils seraient aidés plus tard. Us confiaient dans cette 
vue la conduite des basses classes à ceux de leurs meil- 
leurs élèves qui annonçaient du goût pour Tenseigne- 
meùt. Aussi bien les professeurs des Écoles centrales 



70 HISTOIRE 

avaient la plupart institué des exercices d'interrogation, 
où les auditeurs les plus avancés de leur cours rem- 
plissaient à l'égard des autres l' office de moniteurs, et 
ces jeunes gens étaient ceux qu'ils désignaient^ lors- 
qu'on leur demandait quelqu'un pour donner des ré- 
pétitions. M. de Lanneau, on le pense bien, ne fut pas 
le dernier à essayer cet emploi des jeunes talents : 
c'était la pratique de l'ordre religieux auquel il avait 
appartenu; c'était aussi la tradition de l'ancienne Sainte- 
Barbe. Dès l'an IX, il chargea de professer la géogra- 
phie aux commençants un brillant lauréat dé son col- 
lège , qui achevait ses études à la fois au Prytanée et 
à l'École centrale du Panthéon , le jeune Hoguer, de- 
puis chef de divisioq au ministère de l'Intérieur. 

Varner, qui a composé, en collaboration avec Scribe 
et d'autres, tant de jolies pièces qu'on joue encore , 
le Mariage de raison ^ le Plus beau jour de la vie^ le 
Précepteur dans [embarras ^ etc., Varner débuta de 
même que M. Hoguer. Tout chargé des palmes du 
concours général de 1805, il fut préposé à l'instruc- 
tion àe% premiers élémentaires ou écoliers de septième. 
La conscription vint le relever de ce poste en 1808. 
Ce fut un si grand chagrin pour ses élèves, que les pau- 
vres enfants se cotisèrent pour lui acheter un homme. 
L'un d'eux, dont le père était dans le haut commerce 
de la boucherie, souscrivit pour un bœuf : passe encore 
pour celui-là ; mais les autres n'avaient à offrir que 
les petits sous de leurs menus plaisirs, et c'est cinq ou 
six mille francs qu'il aurait fallu. Varner fut dragon. 
Par les démarches actives de M. de Lanneau, il passa 
dans l'administration militaire. Rendu à la vie civile 
parle licenciement de la grande armée, il obtint un 



DE SAINTE-BARBE. 71 

emploi à lâ préfecture de la Seine. C'est alors qu'il 
chercha dans la littérature une augmentation au mo- 
dique traitement qui le faisait vivre. Cet homme ré- 
servé , timide , qui se tenait toujours derrière les au- 
tres, fit preuve de beaucoup d'initiative et de courage 
lors de l'invasion du choléra en 1 832 : on s'en sou- 
vient à l'Hôtel-de- Ville. Il s'était déjà révélé de la sorte 
à la retraite de Moscou. Il mourut en 1854 ^ sans lais- 
ser d'autre fortune à ses héritiers que la mémoire de 
ses succès dramatiques et d'une vie exemplaire. La 
dernière lettre qu'il écrivit fut un adieu plein de re- 
connaissance pour les soins que Sainte-Barbe lui avait 
donnés autrefois, et pour ceux qu'elle donnait alors 
à son petit-fîls. 

Revenons à l'idée de faire du collège lui-même la 
pépinière de ses professeurs. Il y fallut renoncer bien- 
tôt. L'Université impériale, après avoir délimité le 
rôle de chacun dans l'enseignement, se réserva à elle 
seule de former et de fournir le personnel. Il n'est pas 
jusqu'à l'emploi de répétiteur qui ne fût soumis à tant 
de formalités, que la plupart des jeunes gens qui dési- 
raient auparavant s'essayer pour cet exercice n'y son- 
gèrent plus. 

Dans la donnée de l'enseignement mixte, qu'aujour- 
d'hui l'on appelle improprewenX professionnel^ Sainte- 
Barbe fit ses essais dès le temps de la République. 
Elle eut en Pan XII une classe de commerce et une 
classe pour le dessin d'architecture et le levé des 
plans. Nous laissons à part le dessin de la figure, dont 
rétude y fut organisée en l'an IX par le sculpteur 
Boichot, de l'ancienne Académie royale, et dirigée en- 
suite par le peintre Debret : cet exercice fit partie, à 



72 HISTOIRE 

toutes les époques, de l'enseignement général de la 
maison. Les destinées des deux autres créations plus 
spéciales ne furent pas brillantes. La classe d'archi- 
tecture n'eut pas de durée ; celle de commerce se main- 
tint pendant trente ans sans avoir produit de résultats 
dont on puisse parler. Tout de suite se révéla Tin- 
convénient qu'il y a à réunir plusieurs cultures sur un 
même sol. On vit se former dans la population du 
collège une caste,inférieure, que les autres appelaient 
par risée \e% pas -latins y et qui ne parvint jamais à se 
relever dans la considération . 

C'est le seul essai d'enseignement où M. deLanneau 
n'ait pas réussi. Lui, néanmoins, attribuant son peu 
de succès aux conditions dans lesquelles il avait été 
obligé d'opérer, persista à croire qu'il y avait place, 
au-dessus de l'école primaire, pour un genre d'instruc- 
tion qui ne serait pas celle du collège. Il y réfléchit 
plus d'une fois, et ses méditations sur ce sujet profitè- 
rent plus tard au fondateur de l'École qui est aujour- 
d'hui le collège Chaptal. Nous reviendrons sur l'ori- 
gine de cet établissement. 

Les enfants pauvres du 12® arrondissement furent 
aussi l'objet de la sollicitude du Directeur de Sainte- 
Barbe. En 1803, il ouvrit en leur faveur une école 
gratuite, qu'il entretint à ses frais et dont il fit une an- 
nexe de son collège. Ce fut un grand bienfait, eu égard 
à l'état de l'instruction primaiie, qui se trouvait pour 
ainsi dire abolie au commencement du siècle actuel. 
Après avoir été l'objet d'une infinité de lois, facilement 
votées, mais jamais exécutées, une dernière l'avait 
mise à la charge des communes, et les conmiunes l'a- 
bandonnèrent à l'industrie privée. Dans les plus 



DE SAINTEBARBE. 73 

grandes villes, même. à Paris, il n*y eut plus que des 
écoles payantes, fermées par conséquent au plus grand 
nombre. On était si étranger à Tidée d'instruire la 
multitude, qu'en 1 801 un citoyen du 1 0* arrondisse- 
ment de Paris ayant contracté l'engagement de fournir 
l'argent nécessaire à l'entretien d'une école gratuite 
pendant trente ans, le maire et lès adjoints qu'il avait 
choisis pour arbitres de sa fondation, au lieu d'en 
faire goûter le bienfait au gros de la population, déci- 
dèrent la création d'un pensionnat pour douze jeiojes "^x 
filles*. 

M. de Lanneau comprenait mieux que cela les be- 
soins du peuple. Dans le plus fort de la Révolution, il 
entretint avec une constante sollicitude l'instruction 
primaire à Autun. À Paris, il ne put pas supporter la vue 
du vagabondage des enfants dans les rues qui avoisi- 
naient Sainte- Barbe. Sur l'emplacement de l'ancienne 
église Saint-Symphoriei), dans la rue desChienis, qui 
par ses démarches allait bientôt s'appeler la rue Jean- 
Hubert, il loua un local où il réunit soixante petits 
garçons, qu'il confia aux soins d'un ci-devant frère de 
la Doctrine chrétienne. Lui-même exerça la surveil- 
lance supérieure de cette école; il y allait faire les 
examens et décerner les récompenses. L'ensergnement 
fut distribué de manière à ne pas retenir les élèves 
plus de deux ans. Une bien belle récompense était 
proposée aux deux premiers parmi les sortants de 
chaque année : ils étaient admis à faire leurs études 
gratuitement dans le collège. 

L'école gratuite de M. de Lanneau, considérée du 

1 . Moniteur du 30 floréal an IX. 



74. HISTOIRE 

temps de TEmpire comme un modèle en son genre, 
eut beaucoup de renommée dans le 12® arrondisse- 
ment. On l'appela dans le peuple la Poule-qui-pondj 
à cause d'une enseigne posée sur le portail par où on 
y entrait, L'évêque actuel d'Orléans, Mgr Dupanloup, 
a reçu là les premiers rudiments de l'instruction qui 
l'a porté au rang qu'il occupe dans l'Église et dans 
les lettres. 



CHAPITRE V. 



Hostilité contre Sainte-Barbe. — Les anciens barhistes de la rédaction 
du Journal des Débats, — Banquet de l'an IX. — Banquet de 1807. 
— Vers latins de Lemaire. — Diffamation dans les journaux. — 
Sainte-Barbe vengée par les jeunes Vatout et Ville main. — Arrêté 
ministériel en sa faveur. 



On était en l'an de grâce. 1807. Il y avait près de 
dix ans que Sainte- Barbe, relevée de ses ruines, j)ros- 
pérait et tenait le premier rang parmi les maisons d'é- 
ducation, non-seulement de Paris, mais de la France 
entière, lorsque surgit une concurrence très-ardente, 
très-tenace, qui devait plus tard appeler à*son aide la 
fureur des passions politiques et une odieuse persé- 
cution. Comme c'est ici le commencement de la lutte 
qui formera le principal épisode dans l'histoire mo- 
derne de notre collège, comme l'événement de 1 807 
a été la semence d'où leva une moisson de douleurs 
pour M. de Lanneau, et comme il est aussi la pre- 



DE SAINTE*BARBE. 75 

mière cause de la splendeur où se trouve porté au- 
jourd'hui rétablissemeut qu'il a fondé, nous retrace- 
rons les faits dans tout leur détail, en les prenant à leur 
origine. 

Aussitôt que le nom de Sainte-Barbe commença à 
reprendre faveur^ on vit le:^ anciens élèves de la Com- 
munauté témoigner à Penvi, mais avec des sentiments 
divers, leur attachement pour ce nom qui était resté 
cher à tous. Ceux-ct s'empressèrent de mettre leurs 
enfants chez M. de Lanneau, ceux-là prirent du ser- 
vice sous ses ordres; d'autres, au contraire, affec- 
tèrent d'établir une ligne de démarcation entre 
Tancienne Sainte-Barbe et la nouvelle. Ce dernier 
sentiment fut celui des barbistes attachés à la rédaction 
du Journal des Débais, 

Nous avons déjà eu l'occasion de dire*que làse trou- 
vèrent réunis, après la Révolution, les abbés de Féletz 
et Mutin, Henri NicoUe, Duvicquet, Dussault, les bon- 
nes plumes du parti monarchique, et en même temps 
la fleur de la génération qu'avaient enivrée les prix 
obtenus sous l'abbé Nicolle. Ces messieurs ne s'étaient 
pas quittés depuis le collège ; ils avaient vécu entre 
eux. Mécontents de tout ce qui se passait, ils s'étaient 
consolés, ou attristés, en conversant de leur enfance, 
de leurs succès, de leurs maîtres. Leur enfance avait 
été la fin du bon temps; leurs succès, les plus prodi- 
gieirs dont eussent jamais retenti les concours, et leurs 
maîtres, des hommes comme on n'en reverrait plus. 
Ils se tenaient de bonne foi pour les derniers Français 
qui eussent été bien élevés, et, dans leur opinion, le 

i. Tomell, p. 409, 



76 HISTOIRE 

nom de leur berceau s'était attaché à leur personne. 
Ils étaient Sainte-Barbe. 

Ce n'est pas qu'ils ignorassent que le nom de 
Sainte-Barbe n'avait été qu'un nom d'emprunt pour 
la Communauté. Ils avaient eu la confidence des tra- 
cas de Joseph Planche, poursuivi par la vraie Sainte- 
Barbe, la Sainte-Barbe propriétaire, pour acquitter les 
dettes que n'avaient pas payées les derniers supérieurs 
de la Sainte-Barbe locataire. Ils savaient cela dans un 
détail que les actes ne peuvent plus nous apprendre; 
mais ils savaient aussi dans quel profond oubli la 
Révolution avait enseveli toutes les choses/ même 
celles de la veille. Comme Sainte-Barbe, collège, et 
Sainte-Barbe, communauté, avaient toujours été con- 
fondus parle public, et qu'ils s'étaient adjugé le profit 
de cette erreur, c'était pour eux un chagrin mortel 
d'entendre un nouveau public dire toujours Sainte- 
Barbe, et jamais le Collège des Sciences et des arts, 
lorsqu'il s'agissait de l'établissement de M. deLanneau. 
C'est pourquoi , grossissant leur nombre de ceux de 
leurs condisciples du Plessis avec qui ils étaient restés 
unis d'amitié, ils préparèrent une manifestation pour 
le 4 décembre 1800. 

Avant la Révolution, les anciens élèves de la Com- 
munauté présents à Paris avaient coutume de se 
réunir le jour de sainte Barbe, pour diner ensemble, 
soit à Sainte- Barbe même, soit à la maison de Gen- 
tilly. Ils se soumettaient à l'ordinaire des écoliers, 
lesquels étaient régalés ce jour-là de dindon rôti, de 
salade aux betteraves et de pommes cuites. Des vers 
latins ou français complétaient le menu. On chantait 
la gloire du collège, et Ton s'égayait par les souvenirs. 



DE SAINTE-BARBE. 77 

C'est cette fête de famille, interrompue depuis dix 
ans, que les rédacteurs des Débats eurent l'idée de ré- 
tablir, mais hors des murs de Sainte- Barbe. Us firent 
seniblant d'ignorer qu'il y eût encore une Sainte- 
Barbe, que le dindon traditionnel y fumât de nouveau 
au diner du 4 décembre, et que les anciens, à qui il 
plaisait de renouer une habitude de leur jeunesse, 
eussent leur couvert mis ce jour-là, non pas à la table 
des élèves, mais à celle du maître. Les personnes dont 
il s'agit n'avaient qu'un dessein, constater le décès 
sans résurrection de la célèbre Sainte-Barbe, et aver- 
tir le public que, de cette maison, il ne restait plus 
que des fils désolés et dispersés. 

Le festin eut lieu chez un restaurateur, qui servit 
du dindon et autre chose que du dindon, car la 
compagnie comptait dans son sein plusieurs des 
belles fourchettes de l'époque. Lemaire, • qui était 
des invités, lut une allocution en vers latins, char- 
mants, comme il savait les faire. C'était une imita- 
tion du discours d'Enée dans le troisième livre de 
l'Enéide. La péroraison fut le serment de renouveler, 
chaque année, la même cérémonie*. Les jours suivants, 
des articles écrits dans le sens que nous indiquions 
tout à l'heure furent servis aux lecteurs de plusieurs 
journaux*. 

Loin de souffrir du désaveu imphcite qui lui avait 
été infligé par le silence observé à son égard, la nou- 

\ , Vers récités par N.-E. Lemaire, ancien maître de Sainte- 
Barbe, à la réunion des anciens élèves de cette maison le i 3 fri- 
maire, an IX (4 décembre iSOO), 4 pages in-8. 

2. Journal des Débats du 15 frimaire an IX; Décade philoso- 
phique de Tan IX, deuxième trimestre, p. 243. 



78 HISTOIRE 

velle Sainte-Barbe ne fît que croître et multiplier ; et 
comme Tappel de Lemaire resta longtemps sans avoir 
de suite, elle put croire que son prodigieux succès 
avait désarmé la prévention. Elle goûtait donc tran- 
quillement les fruits de la considération publique, 
'lorsque le récit d'un nouveau banquet lui dévoila, en 
1807^ tout un plan de campagne dirigé contre safe 
fortune ej contre sa réputation. Cette fois, l'attaque 
cessa d'être indirecte. Voici par quelles circonstances 
elle fut amenée : 

Parmi ceux qui fréquentaient là société des Débats^ 
l'un des pluâ assidus était Joseph Planche. Ce vieux 
barbis^e d'avant la Révolution , que nous avons vu 
se lancer dans la vie politique après la chute de Ro- 
bespierre*, s'en était retiré depuis le 1 3 vendémiaire, 
qui lui causa du désagrément, car il commandait ce 
jour-là l'une des compagnies de la garde nationale, 
qui furent si rudement menées par le général Bona- 
parte. Planche travailla à se faire oublier, en repre- 
nant son ancien métier d'instituteur, qu'il exerça sans 
bruit; puis, en l'an VII, il se fît inscrire parmi les ci- 
toyens tenant pension de jeunes gens à Paris. Son 
établissement était situé rue Neuve-Sainte-Geneviève; 
il acquit assez d'importance pour être porté, en 1803, 
au nombre des Écoles secondaires. On dit qu'il con- 
tenait alors une soixantaine d'élèves. Il y avait de 
l'argent à gagner avec cela ; mais le chef, trop étran- 
ger aux choses de ce monde pour être un adminis- 
trateur diligent, ne sut pas profiter dé la veine. Loin 
de là : ses affaires prirent une si triste tournure, qu'il 

1 . Tome II, p. 409. 



DE SAINTE-BARBE. 70 

s'estima Irès-heureux d'accepter une place de profes- 
seur, qui lui fut offerte en 1806 au lycée Napoléon. 
Il céda son établissement à un autre barbiste de la 
ci-devant Communauté, M. Parmentier, homme plus 
entendu que lui aux calculs^ qui Favait secondé 
jusqu'alors dans sa direction. Celui-ci, pour son dé- * 
but, transporta l'École secondaire de la rue Neuve- 
Sainte-Geneviève dans la rue des Postes, au lieu où 
est aujourd'hui le collège Rollin. 

M. Parmentier n'était pas seul. Il s'appelait légion;, 
il menait à sa suite toute la compagnie des dissidents 
hostiles à la Sainte-Barbe de Lanneau, ou, pour par- 
ler plus juste, il était l'instrument de ceux-ci. Ces 
messieurs l'avaient élu pour endosser leurs exploits, 
pour être le fondateur d'une autre Sainte-Barbe, une 
vraie Sainte-Barbe, qui serait dirigée avec leur con- 
cours et sous leur inspection. Tout d'abord, ils 
donnèrent à M. Parmentier un conseil dç douze 
personnes, prises parmi ceux de leurs amis qui s'enten- 
daient Te mieux à l'enseignement. Ce conseil devait se 
réunir tous les mois, pour donner son avis sur la 
marche des études et sur les améliorations à y intro- 
duire. Ils l'appelèrent le sénat. MM. de Wailly, Plan- 
che, ternaire en firent partie. Quant aux autres soins 
de la direction, ils furent partagés entre M. Parmen- 
tier et un certain abbé Lingois, docteur de l'ex-Sor- 
bonne, jadis intime ami de l'abbé BadueL 

L'abbé Lingois, disait-on, était «run des hommes 
qui avaient le plus réfléchi sur l'éducation» » C'était 
le professeur universel. I! entendait également bien la 
philosophie, les mathématiques et Tart du langage. Il 
était l'auteur d'un traité de géométrie. Comme gram* 



80 HISTOIRE 

mairien, il avait fait un rudiment qui détrônait celui 
de Lhornond. Il doit aux mêmes amis, qui Font si bien 
traité en son vivant, d'avoir son article dans la 5/b- 
graphie universelle^. Là on raconte, comme un trait 
digne d'être recueilli par la postérité, que le jour du 
• supplice de Louis XVI, l'abbé Lingois commençant 
sa classe, dit à ses élèves : « Mes enfants, il s'est passé 
aujourd'hui un événement dont, tout jeunes que vous 
êtes, vous ne verrez pas la fin. » En revanche, on a 
oublié, de dire que ce grand pédagogiste avait pro- 
posé de retrancher, des exercices auxquels on soumet 
l'enfance, la cullure de la mémoire'; que ce docteur 
imperturbable au milieu des convulsions politiques 
prêta serment à la constitution civile du clergé, et 
qu'il consentit à prendre la direction du Plessis, lors- 
qu'on en dépouilla l'abbé Bertrand-Dupuy. Mais il 
s'élait amendé depuis lors, et, par son repentir, il mé- 
rita un commandement dans l'armée qu'on organisait 
contre M. de Lanneau. 

La marche de l'affaire fut extrêmement ténébreuse. 
Beaucoup de choses se firent en petit comité, et à 
l'insu de la plupart de ceux dont on s'était procuré 
les noms pour faire du bruit aux oreilles du public. 

Le 4 décembre 1807 eut lieu le grand banquet de 
la vieille Sainte-Barbe. Il réunit onze personnes!' 
Comme MM. Parmentieret Lingois y assistaient, il de- 
vient manifeste par ce chiffre qu'on n'éta'it pas même 
parvenu à obtenir la présence de tout le sénat; et 
voilà ce qu'était l'unanimité dont on ne tarda pas à se 

i . Dans le supplément, t. LXXI. 

2. Bibliotheca classica latina de Lemaire, Appendix^ p. 86, 
note. 



DE SAINÏE-BARBE. 81 

prévaloir, quand on annonça rétablissement de la rue 
des Postes en le réprésentant comme le résultat d'une 
association de tous les anciens barbistes, comme une 
inspiration née des regrets universels dont la chère 
Communauté ét^it Tobjet, 

La tenue des convives fut, dit-on, pleine de réserve. 
Ils burent à la prospérité de la future entreprise, dont 
ils ne découvrirent entre eux que les côtés légitimes, 
sans mêler aucun propos offensant pour la maison ri- 
vale. Lemaire lut encore des vers latins, qui demaur 
dent qu'on s'y arrête à cause du parti qu'on en tira 
plus tard. 

La facture est exquise, mais la composition est em- 
barrassée; elle sent la contrainte. L'ancien barbiste le 
prend d'abord sur un ton pompeusement comique. Il 
s'adresse à ses collègues, les membres du sénat : 

Salvete, o socii veteres, venerabile salve 
Concilium, patres duodeni alterque senatus, 
Quos de Phœbeis puerorum rébus agentes 
Menstrua luaa videt : tandem solemnia nostrae 
Sedibus incertis celebramus festa patronse. 

Puis vient une tirade à la louange de l'abbé Lin- 
gois, qui représente, dit le poète, les trois grâces de 
rÉcole, la Logique, la Géométrie et la Grammaire, 
qui a réduit la simplicité de Lhomond à confesser 
humblement sa défaite : 

Quem repetit logice, que se geome^a jactat, 
Quem sibi grammatice doctorem vindicat : illum 
Très etenim hae charités sibi quœque adnectere certant ; 
Sed nunc grammatice tenet hune felicior omnem. 
Parturlit methodum quae cuncla obstacula solvit, 
ni ^ 6 



82 HISTOIRE 

Quse caligantes syntaxis discutit umbras, 
Qua puer it rapide per prima elementa volatu... . 
Se victum erubuit simplex Lhomundus, et ictu 
Lsesa uovô rursum Tricoti* expalluit umbra. 

C'est ensuite le tour de M. de Wailly, le traducteur 
d'Horace, alors proviseur du lycéie Napoléon, dont 
l'un des fils, M. Alfred de Wailly, après avoir dirigé 
à son tour le même établissement et rempli les fonc- 
tions d'inspecteur général de l'Université, est aujour- 
d'hui lecteur de l'importante académie de Bordeaux. 
Lemaire félicite M. de Wailly des trentç prix que 
son lycée a obtenus au dernier concours général : en 
quoi il rendait un hommage indirect à nptre Sainte- 
Barbe, qui avait la plus grosse part dans cette moisson 
de. trente prix. 

Mais le dindon traditionnel apparatt sur la table.^ 
Honneur à l'oiseau sacré des barbistes, barhicolis aies 
sanciissimaï Puis un développement sur cette pensée, 
d'où l'auteur s'éloigne bientôt par une boutade d'un 
goût douteux, que lui a inspirée la présence à Paris 
du docteur Gall : « Qu'on porte au docteur le crâne 
de l'oiseau, pour qu'il y cherche la bosse où se sont 
formées toutes les sottises dont les Parisiens font leurs 
délices y et les âneries de la grammaire de Domergue, 
et les calembours de Brunet^ et les traits soi-disant co- 
miques de V Homme aux trais çisages*. Mais non> 
M. Gall a quelque chose de plus sérieux à faire. S'il 
est venu en France, c'est certainement pour étudier 
le crâne des Françaft. Il veut trouver dans la confor- 

1 . Tricot était Tailteur de la grammaire qui fut détrônée par le 
rudiment de Lhomond. 

S. Pièce de la Gaîté^ qui faisait alors courir tout Paris. 



DE SAINTE-BARBE. 

mation de nos têtes le secret des exploits qui font de 
nous la grande nation. » Et le poète entame là-des- 
sus réloge de Napoléon. C'est la fin de la pièce. 

Qui le croirait? cet ouvrage d'un esprit enjoué fut 
choisi pour servir de prospectus à rétablissement de 
la rue des Postes ! Il fut imprimé avec un avertisse- 
ment où l'on instruisait le public qu'un grand vide 
allait être comblé dans l'instruction de la jeunesse ; 
que M. Parmentier allait ouvrir une nouvelle ^ainte- 
Barbe, sinon dans les murs^ du moins sur la règle et 
les principes de l'ancienne; et la coopération de 
l'abbé Lingois ainsi que la formation du conseil des 
Douze étaient annoncées en même temps ^ 

La brochure à peine parue, M. Cussault s'en em- 
para pour en rendre compte dans le Journal des Dé- 
bats, alors Journal de F Empire. Là commença à se 
montrer le fiel de la haine, et la méchante intention 
d'une concurrence qui se proposait de décrier ceux 
dont elle usurpait le titre. Voici en quels termes le 
feuilletoniste commentait les vers inoffensifs de Le- 
maire : 

«L'objet de cette pièce est de célébrer le rétablisse- 
ment de Sainte-Barbe sous les auspices et sous la di- 
rection de MM. Parmentier et Lingois. La joie que ce 
rétablissement cause à tous les anciens élèves de cette 
maison devoît nécessairement s'exprimer en latin, et. 
ne pouvoit avoir un meilleur interprèle que M. Le- 

1» Carmen in sanctœ Barharœ festuni» N. E. Lemaire ad socios 
festum sanctx Barharœ solemni convivio célébrantes. 4807. Une 
demi-feuille in-S**, irapr. Lenormant. Cette pièce est réimprimée, 
sans TÀvertissement, dans ^Appendice à la Bibliothèque latine de 
Lemaire. 



84 HISTOIRE 

maire : c'est dans la langue et sur les instruments de 
son pays qu'une colonie longtemps dispersée doit 
chanter sa réunion. Les vers latins ont sans doute peu 
de faveur aujourd'hui dans le monde : la raison n'en 
est que trop évidente ; à peine veut-on pardonner à un 
journaliste qui en cite quelques-uns. J'espère cepen- 
dant obtenir ma grâce à cause du motif qui m'anime. 
Je crois aussi que quelques personnes se rappelle- 
ront que les vers latins et les compositions latines 
de toute espèce ont été les préludes de tant de beaux 
ouvrages, qui font le charme de la nation françoise et 
la gloire de sa littérature. Boileau, Racine, Voltaire 
s*essayoient, en latin, à bien écrire en françois. M. Le- 
maire n'avoitrien à braver en parlant latin devant des 
barbistes, et sa pièce, imprimée, trouvera encore de 
bons juges qui auroient été très-dignes de l'entendre, 
et qui reconnoitront l'excellent latiniste, l'humaniste 
distingué, dont le nom brillera toujours parmi les sou- 
venirs glorieux de l'ancienne Sainte-Barbe, et dont 
la voix étoit faite pour en célébrer la restauration. Si 
l'on trouve dans ses vers quelques plaisanteries lé- 
gères sur les personnes et sur les choses, du moins 
oq n'y remarque aucune trace de cette amertume 
qui auroit pu, dans une telle circonstance, animer la 
verve d'un autre poète, et que peut-être on auroit 
.pardonnée au zèle d'un vrai* barbiste. Nul emporte- 
ment, nul trait contre ceux qui peuvent avoir spéculé 
sur le nom et la réputation de cette célèbre Commu- 
nauté; nulle allusion aux efforts qu'ils ont faits pour 
se mettre moralement à la place de la Communauté 
détruite, après s'y être mis physiquement. Le poète 
a'a vu sans doute dans cette espèce d'usurpation des 



DE SAINTE-BARBE. 88 

pseudobarbistes qu'un hommage rendu à la gloire 
d'une école fameuse, et la colère poétique a été dés- 



armée*. 



Quelle haine que celle pour qui Tabsence d'insinua- 
tions blessantes dans un ouvrage est un motif d'en 
tempérer Téloge, et comme il devient clair par là que 
l'article de M. Dussault fut moralement et physique- 
ment une mauvaise action ! 

Accusé de spéculation et d'usurpation, traduit de- 
vant l'opinion publique comme un fabricant de pseudo- 
barbistes, M. de Lanneau écrivit immédiatement 
au proviseur du lycée Napoléon pour lui exprimer sa 
surprise de ce que des vers, récités dans une cérémonie 
à laquelle il avait assisté, eussent servi de prétexte à 
des paroles dirigées contre sa propre considération. 
M. de Wailly témoignait journellement la satisfaction 
que lui causaient les élèves de Sainte- Barbe; il leur 
avait fait l'honneur de venir fêter avec eux leur pa- 
tronne, le 5 décembre précédent : était-il possible 
• que sa présence au banquet de la rue des Postes eût 
encouragé l'agression dont M. de Lanneau avait à se 
plaindre ? 

Cette lettre n'était pas encore arrivée à sou 
adresse, que M. de Wailly, prenant les devants, écri- 
vait en ces termes au Directeur de Sainte-Barbe (c'est 
le titre qui est sur l'adresse) : 

« J'ai lu avec peine, Monsieur, dans le Journal de 
r Empire, un article dont quelques phrases semblent 
dirigées contre votre établissement. Je suis entièrement 
étranger à cet article, quoique mon nom s'y trouve 

i , Journal île V Empire ^ n° du 27 décembre 1807. 



86 HISTOIRE 

cité à roccasion d'une pièce de vers latins dont rend 
compte ce journal. î 

«M. Parmentier, élève de la Communauté de Sainte- 
Barbe, où j'ai fait mes études, a désiré que sa maison 
eût uri conseil d'administration, composé d'anciens 
camarades. Je n'ai pas refusé d'en faire partie^ parce 
que je prends et je dois prendre un véritable intérêt et 
à rinslitulion de M. Parmentier et à M* Parmenlier 
lui-méilie. Mais cet intérêt ne me rendra injuste envers 
aucun établissement du même genre, et encore moins 
envers le voire, Monsieur, dont les élèves, ainsi que 
je me plais à le reconnaître, ont par leurs succès essen- 
tiellement contribué à la gloire du lycée Napoléon. Si 
donc, ce que je verrais avec peine, il s'élevait quelque 
difficulté entre M. Parmentier et vous, je vous prie de 
me regarder comme neutre*.» 

Par une autre lettre du même jour, M. de Wailly 
autorisa M. de I^nneau à rendre public son 
désaveu'; maïs la conduite dès choses n'était pas 
dans la main de M. de Wailly, et les regrets qu'il 
exprima n'empêchèrent pas les hostilités de se pour- 
suivre. 

Le Publiciste porta son coup après le Journal de 
FEmpirej et d'une manière encore plus brutale, car 
on y lisait entre autre amabilités : « Sainte-Barbe 
n'existe plus; l'asyle de sa gloire antique est tombé. 
Sur les débris de ses murs, d'adroits étrangers sont 

d. D'après Toriginal, du 29 décembre 1807. 

%, « Vous pouvez direàtoiit le inonde et même écrire que je 
suis tout à fait étranger à cet article. » Cette seconde lettre, fondue 
avec la première, est imprimée dans le Journal de Paris du 2 jan- 
vier 1808, et dans le Publiciste du 4 janvier. 



DE SAINTE-BARBE. 87 

venus élever une nouvelle écc4e, qui s'enrichit du nom 
de l'ancienne encore plus qu'elle ne s'en honore\j» 

Ce fut ensuite le tour du Journal du soir*. 

11 était impossible qu'une attaque si publique restât 
ignorée de la jeunesse, qu'elle concernait aussi. Malgré 
les précautions de M. de Lanneau pour tenir ses 
élèves en dehors du débat, ceux-ci apprirent de quelle 
provocation ils avaient été l'objet, et l'outrage infligé 
à leur cher collège. Un vengeur se leva parmi eux. 
Ce fut le jeune Vatout, alors élève de rhétorique. Facû 
indignatio ifersum ; c'est en vers, et en vers latins, 
pour se mettre au diapason des agresseurs, que cet 
esprit aimable entreprit la défense d'un maître vénéré 
et de la Sainte-Barbe de la rue de Reims, la seule 
Sainte*Barbe, celle dont le nom reposait sur la double 
légitimité d'une transmission régulière, puisqu'elle 
avait été consentie par les ayants droit, et d'une pos» 
session honorable, glorieuse même, puisqu'il n'y avait 
qu^une voix sur la belle tenue de la maison* 

Le poème de Yatout est dans la forme d'une apo- 
strophe adressée par notre Sainte-Barbe à sa rivale : 

Quae nova se nobis fallaci Barbara vultu 

Objicit? * 

Qui êtes-vous donc, dit-elle à ces hommes moroses ? 
Je crois vous reconnaître : 

Dum te, dôctorum patiiim venerande senatus, 
Âspicio, grandes agitantem in pectore curas, 
Agnosco genus ambiguum ingratosque nepotes. 

i. N"" du 3adécembre 1807. 
2. N°du 9 janvier 1808* 



88 HISTOIRE 

Et le discours continue par le ridicule déversé sur 
ceux qui prétendent mort ce qui a tant de vie, par 
réloge de rhomoie qui a relevé les autels de la Sainte, 
par le contraste des titres qu'apporte le triste abbé 
Lingoisy y compris même sa ^meuse grammaire. La 
péroraison est un appel à la concorde. 

Ces vers furent imprimés au commencement de 
Tannée 1808*. Peu après il en parut, imprimée égale- 
ment, une imitation libre en vers français, qu'un 
condisciple de Vatout composa pour les dames qui 
avaient des enfants à Sainte-Barbe*. 

A la façon dont s'étaient exprimés les journaux dé- 
voués aux dissidents, l'instruction était perdue en 
France, et rien n'avait été fait depuis que la Révolution 
avait tout détruit. La cause de notre collège était donc 
aussi celle de la jeune génération. Aussi l'émotion de 
la querelle s'étendit-elle hors des murs de Sainte-Barbe. 
On vit le lycée Impérial (Louis-le-Grand) fournir à 
nos barbistes un auxiliaire, dont le secours est pour 
eux un de leurs titres mémorables. 

Ce nouveau champion était uii élève sortant de 
rhétorique, disciple bien-aimé et admiré de Luce de 
Lancival,qui se faisait suppléer par lui durant ses fré- 
quentes indispositions. Cet écolier hors ligne est 
aujourd'hui M. Villemain. 11 sut être impartial, quoi- 

1 . Carmen in quo juvenis Sanctœ-Barbarx alumnus lace&sitam 
patronam défendit. 1808, Une feuille in-4°, signée à la fin : « Sic 
in signum grati memorisque animi canebat J. V. (Jean. Vatout) 
Sanctse-Barbarae alumnus, recensque rhetorices auditor. » 

2. Défense de Sainte-Barbe par elle-même. Une feuille in-4®, 
signée « P. L. P. (Pierre-Léonard Perry), élève de rhétorique de 
Sainte-Barbe. » De Timprimerie de Colas. 



DE SAINTE-BARBE. 89 

qu'il eût «eu M. Parmentier pour maitre dans le pen- 
sionnat de Planche, où il commença ses études. Avec 
son fin esprit il démêla quel sentiment guidait la plupart 
de ceux qui s'étaient laissé enrôler pour cette triste 
campagne ; il vit de vieux écoliers qui se plaisaient à ' 
prolonger leur enfance, et voulaient vivre à quarante 
ans sur ce qu'ils avaient £aiit à quinze : 

BarbicoldB duri^, proies aeterna parentis 
Defunctae, caesa redivivi a stirpe nepotes, 
Quid vos barbato rursum puerascere vultu, 
Quid vos ore juvat rursum vagire senili? 

A ces éphèbes surannés le jeuue poète oppose ceux 
de la nouvelle génération, non moins assidûment 
exercés à la facture des vers latins^ et qui ne demandent 
qu'à devenir des hommes : 

Ergone, barbicolae veteres, quos altéra versus 
Barbara protulerit iatios ; ut ciyis et ultor 
Vatultus* patriam latiis défendent armis, * 
Omnîa nota parum, aut genti spernenda superbae? 
« Mirantesque nihil nisi quod Libitiaa sacravit, » 
Nobis déesse manus, calâmes aniinumque putastis? 
, Multi suât vates ; ut vos, mihi crédite, multi 
Niinc pâtre Virgilio, Flacco pâtre, versificantur ; ' 
NuUus at, exigua contractus laude, senesoet 
Perpetuum. Multos nova formavere iycaea 
« Et cantare pares et respondere paratos; » 
Nullus at infanti semper balbutiet ore. 

1. C'est ainsi que commençait la pièce composée par Lemaire 
pour le banquet de l'an IX : 

Barbicolae duri (neque enlm sumus ante malorum 
Immemores), 6 yo§y tautis jactata procellis 
Pieridum floboles, <;tc« 

2. Vatout. 



90 HISTOIRE 

La fin est une exhortation aux barbistes modernes 
pour qu'ils continuent à venger par leurs succès la 
gloire de leur maison, pour qu'ils se maintiennent au 
rang où ils se sont placés dans les concours, d'où Fau- 
teur se voit éloigné désormais parson âge*. 

Ces vers, qui valeût bien ceux des lauréats de 
1 780, firent justice de ce qu'il y avait de ridicule dans 
la provocation de la rue des Postes. Mais le côté odieux 
de l'affaire, l'usurpation de propriété et la calomnie, 
demandait aussi répression. Après avoir fait insérer 
dans le Journal de Paris^ la lettre du proviseur de 
Napoléon, M. de Lanneau porta plainte au ministre de 
l'Intérieur. C'était M. Crétet. 

Le 1 9 janvier 1 808, un arrêté du ministre fit défense 
à tout instituteur de donner à son école un autre titre 
que celui qui était spécifié dans l'autorisation en vertu 
de laquelle il exerçait. Le même jour Fourcroy, con- 
seiller d'état, directeur général de l'Instruction publi- 
que, écrivit au préfet de la Seine pour Tinviter « à faire 
signifier à M. Parmentier l'ordre de cesser sur-le- 
champ de donner à son pensionnat le titre de Commu- 
nauté de Sainte-Barbe, le nom de maison de Sainte- 
Barbe appartenant exclusivement à M. de Lannéau, vu 
l'autorisation spéciale en vertu de laquelle il exerce. » 

La lettre de Fourcroy se termine par une menace 
qui montre combien les journaux étaient peu ménagés 
à cette époque : 

i. Carmen, Adolescentes discipuli queruntur suum a barbât is 
discipulis inpodiParnassum, Une denfi-feuille in-8°, impr. de Fain, 
signée à la fin « Canebat A. V. (Abel Villemain), Lycaei Imperialis 
alumnus. » 

2. N« du 2 janvier 1808* 



. DE SAINTE-BARBE. 91 

u Quant aux articles calomnieux insères dans les 
papiers publics au sujet de cette discussion , j'ai invité 
le ministre de la Police générale à réprimer Taudace 
des journalistes qui osent se permettre de diffamer des 
écoles ouvertes sous les auspicQs du gouvernement, et 
des instituteurs avoués par lui. » 

Le maire du 12"" arrondissement, qui favorisait la 
maison de la rue des Postes, reçut à son tour une 
verte semonce pour avoir différé d'exécuter les ordres 
à lui transmis par le Préfet dès le 30 janvier 1 808. Il 
chercha à s'excuser sur ce que plusieurs chefs d'école 
de la circonscription étaient dans le même cas que 
M. Parmentier. M. Frochot lui répondit : m 11 fallait 
exécuter d'abord mon arrêté^ et ensuite me faire con- 
naître les autres instituteurs auxquels pouvait s'ap- * 
pliquer la mesure prise à Tégard de l'un d'eux*. » 

M. de Laqneau resta donc en possession de son 
titre; mais le ressentiment d'une défaite, s'ajoutant aux 
aiïciens ferments de haine, rendit plus implacable 
l'iniraitié des deux ou trois personnes qui avaient ourdi 
le fin de cette trame. On verra comment celte inimitié 
fit explosion de nouveau, lorsque les circonstances s'y 
prêtèrent. 

i . Lettre du 12 mars 1808. 



92 HISTOIRE 



CHAPITRE VI. 



Création de l'Université impériale. — Sainte-Barbe, institution de l'Uni- 
rewité. — • Visite de Tévéque de Casai. — Le cours de philosophie 
transporté au lycée Impérial. — Solennités religieuses célébrées au 
collège en 1808. — Ordre delà chapelle. — Troubles au lycée Napo- 
léon. — AfFaire de Saint Marceflin. — Émigi^ations successives des 
élèves de Sainte-Barbe au lycée Impérial. — Nouvelle division créée 
dans Taucien collège de Reims. 



L'Université impériale fut établie en principe par 
* une loi du 1 mai 1 &06 ; mais cette institution ne 
reçut son véritable caractère et sa portée que par le 
décret organique du 17 mars 1808. Entre la concep- 
tion et l'enfantement, les idées changèrent si souvent 
que Fourci'oy, le rédacteur du décret, s'y reprit, 
dit-on, jusqu'à ving-troîs fois pour Técrire. De ces tâ- 
tonnements sortît la centralisation absolue de l'ensei- 
gnement secondaire dans les mains de l'État. Une 
nouvelle hiérarchie engloba la totalité des maisons 
d'éducation. Les lycées gardaient le premier rang. Les 
anciennes écoles secondaires formèrent deux caté- 
gories : celles qu'entretenaient les communes devin- 
rent les collèges^ et occupèrent le second rang ; celles 
qui appartenaient aux particuliers furent les institu- 
tions j et descendirent au troisième rang. Ensuite ve- 
naient les pensions. 

La différence entre les institutions et les pensions 
consista dans le nombre du personnel et dans la force 



DE SAINTE-BARBE. 93 

de renseignement. A quelque degré qu'apparlinssent 
les écoles, elles furent soumises à la rétribution uni-' 
versitaire. C'était un prélèvement du vingtième sur 
la pension payée par chaque élève , et ce tribut compta 
comme partie de la dotation de TUniversité ; de sorte 
que les institutions et pensions furent condamnées à 
subvenir aux frais de la concurrence par laquelle 
rÉtat se proposait de les combattre. D'ailleurs il resta 
sous-enlendu que les élèves externes suivant les cours 
d'un lycée ou d'un collège continueraient d'acquitter 
la taxe instituée dès le temps des Écoles centrales, et 
qu'on a désignée depuis sous.le nom de frais â! études. 
C'était alors le droit d externe ou droit annuel. 11 était 
distribué entre les professeurs. 

Dans l'ordre des grades établis entre les niembres 
d« l'Université , lés chefs d'institution furent astreints 
à être bacheliers ès-lettres et ès-sciences , les maitres 
de pension simplement bacheliers ès-lettres. Les uns 
et les autres ne purent exercer qu'en vertu d'un di- 
plôme délivré par le grand-maitre^ chef de TOniver- 
sité, diplôme qui était valable seulement pour dix ans, 
et à la délivrance duquel ils prêtaient un serment ainsi 
conçu : w Je jure d'observer les statuts et règlements 
de rÛniversité, et d'obéir au grand-mattre en tout 
ce qu'il commandera pour le service de l'Empereur et 
pour le bien de l'enseignement. » 

M. de Lanneau fut porté sur la liste des chefs d'in- 
stitution de Paris au mois de janvier 1809 ^ Par là 
Sainte-Barbe perdit son titre de collège , mais seule- 

1. Arrêté du 13 janvier 1809. Le diplôme dcKvré en consé- 
quence est du 23 mais suivant. 



9(i HISTOIRE. 

meot dans la langue officielle ; rhabitude, plus forte 
que les décrets, s'obstina à lui conserver ce nom sous 
lequel son rétablissement avait été autorisé. 

Les chefs des maisons qui étaient en exercice àu^ 
moment de la mise à exécution du statut reçurent sans 
examen leurs diplômes de bacheliers. Par une faveur 
particulière, que M. de Lanneau dut à ses longs ser- 
vices comptés depuis le moment où il était entré comme, 
préfet des études au collège de Tulle \ il fut fait doc- 
teur ès-lettres % distinction importante en ce temps-là 
et qui donnait le droit de porter une majestueuse si- 
marre. Un peu plus tard on le nomma officier de l'A- 
cadémie de Paris ^ Il en reçut le brevet en même temps 
que Tex-constituant Dumouchel , l'un dés plus vieux 
élèves de l'ancienne Sainte-Barbe, et de ceux qui furent 
les amis de la nouvelle. 

Aucune masure ne fut prise d'abord pour rattacher» 
les établissements privés aux établissements publics. 
Il avait été dit seulement que le Conseil de l'Université 
discuterait la question relative aux degrés d'instruc- 
tion qui siéraient attribué» à chaque école. Il résulta 
de là que, pendant les deux premières années de l'exis- 
tence de l'Université impériale, les institutions et pen- 
sions se comportèrent comme elles avaient fait' sous 
le régime de la loi de 4802. Pour ne parler que des 
institutions, sur quarante-cinq qu'elles étaient à Pa- 
ris , neuf seulement envoyèrent aux l)'cées la totalité • 
ou partie de leurs élèves. Ce point ne, fut réglé qu*a- 
près la rentrée des classes de l'an 1810 par un arrêté ' 

1. Le 23 juin 1785. 

2. Diplôme en date du 6 octobre 1809. 
3'Le25mar8i81i. 



DE SAINTE-BARBE. «5 

de M. de Fontanes, le grand-mattre sur lequel était 
tombe le choix de ^E^lpereur^ Institutions et pen» 
sions furent obligées d'envoyer tous leurs élèves à 
partir delà sixième ^ soit à un lycée , soit à un collège. 
Il est curieux de voir cette mesure justifiée par des ar- 
rêts du Parlement*. Les institutions purent avoir des 
cours inférieurs au-dessous de la sixième y et pour le 
reste, des répétitions. Les répétitions , et seulement 
dans les basses classes , Jurent l'unique exercice permis 
dans les pensions. Il y avait déjà depuis un an un rè- 
glement ' qui prescrivait aux chefs d'institution et 
maîtres de pension de n^admettre chez eux en qualité 
de répétiteur , précepteur ou même surveillant , au- 
cun individu qui ne fût pourvu d'une* permission spé* 
ciale. I3rï bureau de placement fut établi au chef-lieu 
de l'Université pour surveiller plus Commodément le 
mouvement du personnel dans les maisons particu- 
lières d'éducation. 

Sainte-Barbe, en signe d'obéissance au nouvel ar-- 
rêté, augmenta le contingent qu'elle fournissait au ly- 
cée; mais elle garda encore chez elle la bonne moitié 
de ses élèves , pour qui elle continua son enseigne- 
gnement intérieur. C^était une contravention. Toutes 
les fois quon lui en fit la remarque, elle répondit 



1. Arrêté du 10 novembre i810. 

2, « Vous n'ignorez pas, Messieurs, que dans l'ancienne Univer- 
sité tous les maîtres étaient dans l'usage d'envoyer au collège leurs 

- écoliers dès qu'ils étaient en cinquième, et qu'en dernier Heu les 
arrêts du parlement des 6 août 1776 et 2 avril 1784 leur en 
avaient fait une loi expresse^ » Circulaire aux chefs d'institutions 
et maîtres de pension de la ville de Paris, 10 novembre 1810. 
3; 25 novembre 1809, ^ 



96 HISTOIRE 

que ses classes inlérieures étaient de simples classes 
|>réparatoires, dont les élèves iraient au lycée aussitôt 
qu'ils seraient en état d'en suivre les cours. M. de 
Fontanes, tant qu'il resta grand-maître, voulut bien 
se contenter de cette défaite. Il est certain que l'Uni- 
versité n'y perdait (|ue les frais d'études, impôt qui ne 
figurait pas au budget , et dont elle se souciait médio- 
crement. La rétribution , qui avait bien plus d'impor- 
tance à ses yeux, lui revenait tout entière, étant ac- 
quittée par les élèves de l'intérieur aussi bien que par 
ceux qui suivaient le lycée. 

M. de Lanneau, étant parvenu à maintenir ses 
classes au-dessus de la septième , maintint à plus 
forte raison ses- cours de français et de commerce; 
mais il dut renoncer à la philosophie. Le cours cessa 
à la fin de l'année scolaire 1808-1809; voici dans 
quelles circonstances : 

La philosophie s'étant trouvée absente du plan d'é- 
tudes tracé par M. de Fontanes pour la nouvelle 
Université, Laromiguière réclama contre cet oubli. 
Dans une lettre admirable d'esprit et d'éloquence, il 
prouva qu'abandonner l'étude de la philosophie, 
c'était préparer raffaiblissemént inévitable de la pen- 
sée et la stérilité prochaine de la science. Ses raisons 
impressionnèrent vivement les membres du ConseiL 
On raconte* que dans une discussion qui eut lieu à ce 
sujet, quelqu'un allégua l'exemple du cours de Sainte- 
Barbe. Le chancelier de l'Université voulut voir de 
ses yeux ce que c'était que ce cours. 

Le chancelier de l'Université était le baron de Vil- 
laret, évêquede Casai. 11 vint, tons se faire annoncer, 
à l'exercitîe des thèses de 1809. C'était le jour où Ton 



DE SAINTE-BARBE. 97 

reçut à Paris les bulletins dé la bataille de Wagram. Le 
jeune Scribe argumentait contre Laromiguière en per- 
sonne. Scribe, qui se montra dès son enfance tel qu'il 
ne cessa jamais d'être dans tout le cours de sa vie, un 
esprit ferme et prompt à se retourner en face des 
circonstances, Scribe se tira d'affaire de façon à 
rendre décisive rexpérienoe qu'étail: venu faire le 
prélat. Il trouva même le moyen d'introduire dans 
l'un de ses raisonnements une louange fort bien 
tournée pour l'hommage public que le noble visiteur 
rendait à la science. M. de Yillaret témoigna la satis- 
faction la plus vive : son rappoiH à l'Université fut 
qu'il fs^Uait absolument transporter dans les lycées 
l'enseignement de Sainte-Barbe. 

Au commencement de l'année scolaire 1809-1810, 
M. Maugras se trouvait inscrit comme professeur 
de philosophie sur les cadres du lycée Impérial. Il 
porta dans cet établissement sa méthode, son pro- 
gramme et jusqu'à l'usage des thèses publiques. Son 
départ ne fut pourtant point une rupture avec notre 
collège. Jusqu'aux derniers temps de sa. vie, ce vieux 
professeur y. fit des conférences, où il répéta ses pro- 
pres leçons; cardes la première année d^ son passage 
au lycée, M. de Lanneau obtint d'envoyer à sa 
classe les élèves en philosophie de Sainte-Barbe, quoi- 
que Sainte-Barbe fût encore dans la dépendance • du 
lycée Napoléon. Nos jeunes barbistes, recevant aitysi 
double façon du même maître de philosophie, devin- 
rent imperturbables sur les matières du cours. Tant 
que fut maintenue l'épreuve des thèses, ils en portè- 
rent presque tout le poids. Vavin, dont la maison 
porte le deuil encore récent, figurait à celle de 1810 , 

m 7 



98 HISTOIRE 

et le principal tenant de la même joute fut M. Joseph 
Bernard, député du Var après 1830, aujourd'hui con- 
servateur à la bibliothèque Sainte-Geneviève. La der- 
nière soutenance eut lieu en 1814. M. M^tugras essaya 
de remplacer cet exercice par un autre. Dans la céré- 
monie de la distribution des prix de 1816 au lycée, 
redevenu Collège royal de Louis-le-Grand, il fit in- 
troduire la discussion d'un thème moral entre deux 
de ses élèves, et c'est encore à deux barbistes, Xavier 
Maugras, son neveu, et Partarrieu-Lafosse, qu il confia 
les rôles. Cela ne fut pas recommencé. 

Revenons à M.#le Villaret. Sa visite de 1809 ne 
fut pas la première dont il honora le Collège. Avant 
de se présenter comme grand dignitaire de l'Univer- 
sité, il y était venu comme pontife. C'est lui qui célé- 
bra le salut dans la chapelle de Sainte-Barbe, pour la 
fête du 4 décembre 1808. Il avait été fort question de 
ce modeste sanctuaire à propos d'un service qui y fut 
célébré, le 6 juillet précédent, en l'honneur du défunt 
cardinal de Belloy, archevêque de Paris. La cérémonie 
fut très-belle, M. de Lanneau ayant voulu n'y rien 
épargner, pour témoigner son regret d'un pasteur qui 
avait été pleyi de bonté à l'égard de sa maison et de 
lui-même. Il y eut jusqu'à une oraison funèbre*, laquelle, 
imprimée et répandue dans le public, fut louée comme 
l'qne des meilleures qu'eût inspirées la circonstance ^ 

« 

i. Éloge fanèbre de monseigneur le cardinal de Belloy, arche- 
vêque de Paris^ prononcé dans l'oratoire de la maison de Sainte- 
Barbe, lors du service célébré pour Son Éminence, le samedi 
6 juillet 1808, par Tabbé Siret, vicaire à Saint-Merry. — In-8* 
Paris, Périsse et Compère. 

â. Journal de Paris du 24 aoât i808. 



DE SAINTE-BARBE. 99 

C'est par Toraison funèbre que Tëvêque de Casai fut 
disposé si favorablement envers Sainte-Barbe. Il 8*7 
rendit sans se faire prier, sur l'invitation que lui trans* 
mit un ami de la maison , autrefois prédicateur de 
Louis XVI. A son arrivée au Collège, il fut harangué 
en latin par deux élèves nouvellement sortis de rhé- 
torique, clont Vun était Valout. Le prélat prit plaisir 
^ aux paroles de ces jeunes gens , et encore plus à la 
façon dont Foffice fut accompli sous ses yeux. 

Il est bon de dire qu'à l'égard des cérémonies de 
rÉglise, le directeur de la nouvelle Sainte-Barbe fut 
un peu comme son devancier et son compatriote, le 
bon principal Simon Menassier. La pompe lui plaisait. 
Il régla en conséquence l'ordre de sa chapelle. 

Un vertueux et respectable prêtre de l'ancien sémi- 
naire de Saint^Nicolas, que Henriot a^vait arraché aux 
mains des massacreurs pendant les journées de sep- 
tembre, fut investi des fonctions d'aumônier. C'était 
l'abbé Desmoulins, qui resta fidèle à Sainte-Barbe 
jusqu'à la fin de sa vie. Afin de ménager sa santé, af- 
faiblie par l'émotion du carnage où il avait manqué de 
périr, on lui fit donner de l'aide d'abord par un ecclé- 
siastique de la cathédrale, puis par des prêtres de la 
paroisse. 

Deux jeunes clercs, employés pour le service de 
diacre et de sous-diacre, furent autorisés à faire dans 
la maison les études qui devaient leur ouvrir le sémi<- 
naire. En outre, des élèves externes, auxquels Sainte- 
Barbe donnait gratuitement l'instruction, formèrent 
autour de l'autel une troupe nombreuse d'acolytes, 
ou bien fournirent des voix au lutrin. Le chœur fut 
établi dans les règles, U y eut des chantres, un orga- 



100 HISTOIRE 

nîste, un maître de chapelle. L'organiste n'était rien 
moins que le célèbre Miroir, de Téglise Saint-Eustache, 
et le nom du maître de chapelle, M. Doineau, est 
connu de tous ceux qui savent comment la musique 
religieuse ressuscita en France au commencement de 
ce siècle. 

Dans l'office, chanté tous les dimanches en plain- 
chant ou en faux-bourdon, selon la solennité du jour, 
étaient intercalés des morceaux de musique, dont 
M. Doineau avait dirigé l'étude. Pour les plus grandes 
fêtes, la messe tout entière était exécutée en musique 
et à grand orchestre. 

Tel fut l'exercice du culte à Sainte-Barbe du temps 
de l'Empire. Notons encore que la maison eut un 
prédicateur en titre et un livre d'office à son usage. 

Le livre était intitulé : Manuel chrétien des étu- 
diants. Il contenait l'explication des cérémonies de 
l'Eglise, et des notions sur mille choses relatives à 
la religion, dont les jeunes gens de ce temps-là n'a- 
vaient pas pu être instruits dans leur enfance. M. deLan- 
neau suggéra l'idée de cet ouvrage, qui parut en i 805, 
et le mit entre les mains de ses élèves pour qu'il leur 
servît à la messe de préservatif contre les distractions. 

L^abbé Siret, vicaire à Saint-Merry, puis curé de 
Saint-Séverin, fut le prédicateur dont le Collège en- 
tendit la parole pendant près de vingt ans. C'est lui 
qui prononça l'oraison funèbre du cardinal de Belloy. 
Prêtre austère, réputé janséniste, il avait -dans le di- 
recteur de Sainte-Barbe une telle confiance, qu'il 
prit l'habitude de concerter avec lui le sujet de ses 
instructions. D'innombrables lettres, écrites par M. de 
Lanneau à cette occasion, restèrent longtemps entre 



DE SAINTÊ-BARBE. 101 

les mains de M* Siret, qui les gardait comme un dé* 
pot précieux. Elles fournirent à ce vénérable ecclé- 
siastique des armes pour la défense de celui que l'es- 
prit de parti se plut à dépeindre^ dans un moment, 
comme un apôtre de l'impiété. Plusieurs personnes 
croient entendre encore l'abbé Siret, parlant très- 
haut et partout de cette correspondance, pour laquelle 
il .n'avait pas assez d'admiration , et menaçant de la 
faire imprimer à la honte des accusat^eurs de M. de 
Lanneau. Mais nous n'en sommes encore qu'à l'an 
1810. Ne nous engageons point dans le récit d'une 
persécution que personne alors ne pouvait prévoir. 

Les quelques barbistes qui avaient transporté, sous 
le commandement de Maugras, le théâtre de leurs 
exploits au lycée Impérial , furent rejoints par leurs 
condisciples de toutes les autres classes en 1 81 1 , de 
sorte que les rapports cessèrent entièrement avec le 
lycée Napoléon. Cette scission fut jugée si nécessaire 
que, pendant que M. de Lanneau travaillait à l'opérer, 
elle fut prescrite par le grand-maitre de l'Université 
lui-même. 

La compétition du titre de Sainte-Barbe avait pro- 
duit sur les enfants une émotion qu'empêcha d'abord 
de se calmer leur rencontre de tous les jours avec les 
élèves de M. Parmentier, car l'institution Parmentier 
suivait aussi le lycée ' Napoléon. M. Parmentier , 
homme pacifique et digne instituteur, avait été, nous 
l'avons dit déjà, l'instrument et non l'auteur du com- 
plot de 1807. Iljs'employa de tout son pouvoir à pré- 
venir les effets d'une situation difficile. La paix ne se 
rétablit pas par ses efforts, parce qu'il restait la cir- 
constance, devenue de notoriété publique, que deux 



iO« HISTOIRE 

professeurs et le proviseur du lycée Napoléon faisaient 
partie an sénat de la rue des Postes. Dès lors les élèves 
de M. de Lanneau virent partout de la partialité. Ils 
avaient tort sans doule, mais ces messieurs n'avaient 
pas non plus raison de conserver encore^ après ce qui 
s'était passé, leur patronage sur la maison de M. Par- 
mentier. Vainement ils alléguaient les exemples four- 
nis par Tancienne Université. Ce qui avait été tout 
naturel, avant rla Révolution, entre le Plessis et la 
Communauté de Sainte-Barbe, ne Tétait plus, sous le 
nouveau régime, entre un lycée, établissement de 
l'État, et une institution, établissement particulier, fré- 
quentant le même lycée. IN 'y avait-il pas d'ailleurs la 
circonstance aggravante que l'institution s'était décla* 
rée lennemie d'une autre institution habituée aux 
mêmes classes ? 

M. de Lanneau craignant de blesser M. de Wàilly 
s'il proposait le divorce, la rivalité ne fit que s'aigrir. 
Elle divisa bientôt la jeunesse du lycée en deux camps, 
et tout devint une occasion de rixe. Dans une mêlée 
qui eut lieu à l'entrée de la classe, le 1 8 décembre \ 808, 
un barbiste tomba évanoui d'un mauvais coup que lui 
porta un lycéen. Qu'on juge de l'esclandre qui suivit! 
L'élève blessé était le neveu, d'autres disent le fils du 
grand-maitre de l'Université*. 

Un mot sur ce jeune homme, dont la courte 
existence a été un vrai roman. Il avait nom Saint- 
Marcellin. il fut le plus singulier mélange d'esprit, 
de valeur héroïque et de fatuité. Après avoir versé 
son sang à profusion dans les dernières guerres de 

4. Biographie uniYerselle de Michaud, t. LXXX, p. 357, 



DE SAINTE-BARBE. 103 

rEmpire, il fît des prouesses dignes d'un paladin 
pour les Bourbons, auxquels il resta attaché depuis 
4814. Il a cultivé la littérature avec un certain succès 
et écrit des livrets d'opéras-coniiques (celui de Wallace 
entre autres), dont le nombre n'est surpassé qtfe par 
celui de ses duels. Il périt de la main d'un duelliste de 
profession, qu'il avait gratuitement provoqué. Ramené 
mourant dans sa famille au milieu des apprêts d'un 
bal, il dit à M. de Fontanes, qui lui demandait le nom 
de son meurtrier : « C'est un homme qui tire bien. » 
Avec ses manières aggressives, il est probable qu'il 
avait poussé à bout celui de qui il reçut sa première 
blessure; mais entre condisciples on ne doit pas s'as- 
sommer. 

La douleur de M. de Wailly et les mesures éner- 
giques qui furent prises pour couper court à toute 
manifestation hostile firent fermer les yeux sur ce qui 
s'était passé. La paix sembla scellée entre les écoliers 
par l'accident de Saint-Marcellin ; mais bientôt les 
ombrages recommencèrent à l'occasion des professeurs 
du sénat. De nouvelles plaintes furent portées par le 
directeur de Sainte-Barbe : le proviseur du lycée Na- 
poléon ne les reçut pas bien ; l'amitié que deux hommes 
honorables avaient toujours professée l'un pour l'autre 
s'altéra sensiblement. 

Sur ces entrefaites parut Parrété qui forçait tous les 
chefs d'institution et maîtres de pension d'envoyer, 
dans le délai d'un mois, leurs élèves aux classes des 
lycées (1 novembre 1810). Celles de Napoléon gagnè- 
rent à cela bon nombre de nouveaux trouble-fétes, par- 
ticulièrement les élèves de.l'abbé Liautard, qui, malgré 
leur origine tant soit peu barbiste, se présentèrent en 



i04 HISTOIRE 

ennemis déclarés non-seulement des Lanneau, mais en- 
core des Parmenlier, Nous aurons à revenir sur Tabbé 
Liautard et sur son institution : qu'il suffise de dire ici 
que le lycée devint un enfer, et que M. de Lanneau prit 
enfiif le parti de Ja séparation. H profita de ce qu'un sup- 
plément d'élèves, qu'il se proposait de fournir au lycée, 
avait été désigné pour le lycée Impérial, à cause de 
l'encombrement des classes à Napoléon. Il représenta 
qu'il serait trop incommode pour lui d'avoir à faire 
conduire les élèves d'une même classe, ceux-ci au 
lycée Napoléon, ceux-là au lycée Impérial. Les har- 
bistes, moins les mathématiciens, furent donc attachés 
au lycée Impérial à partir du 1 **■ janvier 1811. 

Les mathématiciens furent laissés à Napoléon parce 
que les cours y passaient pour plus forts qu'au lycée 
Impérial. C'était un fait reconnu des élèves eux-mê- 
mes, qui néanmoins avaient en aversion le professeur 
de spéciales, M. Dinet, l'un des barbistes chagrins 
du temps jadis , l'un des membres du sénat de la rue 
des Postes. Il n'en fallut pas davantage pour entrete- 
nir Feffervescence dans ce coin du lycée, tandis que 
l'animosité se déchaîna de plus belle entre les pen- 
sionnats continuant à fréquenter les classes de latin. 
L'institution Liautard et l'institution Parmentier se 
montrèrent surtout hostiles Tune à l'autre. L'année 
s'écoula tout entière dans le trouble, ainsi qu'elle avait 
commencé. Le grand-maître de l'Université dut aviser 
à un remède. D'après' les rapports des inspecteurs, il 
importait que pas un seul des élèves de M. de Lai|- 
neau ni un seul de M. Parmentier ne restassent au ly- 
cée Napoléon. On ne voyait pas d'ailleurs d'inconvé- 
nient à ce que les deux institutions, retirées du Heu de 



DE SAINTE-BARBE. 105 

leurs anciennes querelles, se trouvassent de nouveau 
côte à côte sur les mêmes bancs. De là une décision, 
notifiée à la rentrée des classes de 181 1 S pour que la 
totalité des barbistes et des Parmentier suivissent dés- 
ormais les classes du lycée Impérial. On s'en remit 
avec raison, pour le succès des premières rencontres, 
à M. de Sermandy qui venait d'être nommé à la place 
de M. Champagne. C'était une main de fer. Malheur 
à qui eût donné le signal ou partagé l'entraînement 
du désordre sous ce redoutable proviseur. Appelé 
avec la mission d'assujettir le lycée à la discipline 
d'un régiment, le jour de son installation il prononça 
d'une voix forte et dure l'éloge de la sévérité. Son 
administration ne cessa pas un seul instant d'être 
la mise en pratique de cette doctrine. Les rancunes 
enfantines, contenues par une crainte salutaire, se 
convertirent en émulation , et ce fut un plaisir de 
voir, aux distributions de prix, l'institution de la rue 
de Reims et celle de la rue des Postes se disputer les 
récompenses. 

L'époque où nous sommes arrivés peut passer pour 
'celle de la plus grande splendeur que la maison ait 
acquise sous la direction de M. de Lanneau. Elle re» 
. gorgeait d'habitants, et chaque rentrée surpassait par 
le nombre des nouveau-venus celle qui l'avait précé- 
dée. Sainte-Barbe exerçait une véritable attraction. 
Deux divisions réparties dans son grand quadrilatère 
étant devenues insuffisantes pour contenir plus de 
quati-e cents pensionnaires, une division de plus fut 
formée en faveur du. jeune âge. Elle prit domicile en 

. 1 . Le 5 octobre. 



iÛ6 HISTOIRE 

1 809 de l'autre côté de la rue, dans une partie du ci* 
devant collège de Reims. 

Nous avons prononcé bien des fois^ dans le cours 
de cette histoire, le nom du collège de Reims. Le mo- 
ment est venu de résumer en quelques pages les desti- 
nées de cet établissement. Ce sera le principal objet 
du chapitre qui suit. 



CHAPITRE VII. 



Origine du collège de Reims. — Sa destruction et sou rétablissement au 
quinzième siècle. — Son enseignement. — Sa mauvaise administra- 
tion. — Faits mémorables qui s*y sont passés. — Relations de Reims 
et dç rancienne Sainte-Barbe. — Installation de la division des plus 
jeunes élèves de M. de Lanneau. — M. Massin. 



Un archevêque de Reims, nommé Gui de Roye, se 
rendant au concile de Pise en 1409, voulut s'arrêter 
dans la petite ville de Voltri, près de Gênes. Comme if 
entrait, on vint le prévenir que le maréchal de sa 
maison, qui Tavait devancé pour préparer les loge- 
ments, était engagé dans une lutte terrible avec les 
autorités du lieu. Il accourut pour mettre le holà. 
Les épées étaient tirées et frappaient sans discerne- 
ment. Le prélat fut atteint d'un coup mortel. Lors- 
qu'on ouvrit son testament, on vit qu'il avait disposé 
d'une partie considérable de ss^ fortune pour fonder 
un collège à l'usage des élèves de son diocèse, qui 
iraient étudier en théologie à l'Université de Paris. 



DE SAINTE-BARBE. 107 

Les jeunes gens qui étaient intéressés à ce legs se réu« 
Dirent aussitôt afin d'en poursuivre Texécutiou. Ils se 
donnèrent pour chef et représentant le célèbre Jean 
Gerson. Ce docteur les constitua en communauté^ et 
leur fit acquérir, en 1 41 2, le spacieux hôtel, alors aban- 
donné, que les premiers ducs de Bourgogne avaient 
habité sur le revers septentrional de la Montagne ^. 

Le nouveau collège éprouva d'une manière cruelle 
la rigueur des révolutions au début desquelles il prit 
naissance. La communauté des clercs rémois, accusée 
de n'être qu'une bande d'Armagnacs, fut pourchassée 
et dispersée en 1418. Non-seulement les études ces- 
sèrent à Reims, mais les titres de la dotation de Gui 
de Roye périrent, et la plupart des fonds qui la com- 
posaient furent usurpés. Les recherches auxquelles on 
se Uvra vingt-cinq ans plus tard ne permirent pas de 
recueillir autre chose que deux maisons situées au fau- 
bourg Saint-Marceau. Charles VII, à l'instigation de 
Gérard Machet, son confesseur, qui avait été l'un des 
clercs enrôlés autrefois sous la conduite de Jean Ger- 
son, réunit ces débris à ceux d'une autre fondation 
champenoise, qui existait depuis le xiii'' siècle dans la 
rue des Cordiers, sous le nom de collège de Rethel, 
et ainsi se forma un second collège de Reims, moins 
riche que le premier, qui se maintint depuis sous 
la tutelle des archevêques de Reims *. On ne sait 
pas le nombre des bourses qui y furent fondées d'a- 
bord. Pour être admis à ces bourses, il fallait être 

1 . Dtt Boulay, Historia Vniversitatis parisiensis, t. V, p. 202 j 
Dubreul, Théâtre d«s atitiquitez de Paris, p. 528. 

2. Dubreul, p. 733 ; Archives de l'Efiapîre, Titres domaniaux d«i 
collège de Reims, S. 6559. 



i08 HISTOIRE 

clerc tonsuré, et pourvu au moins de l'instruction d'un 
élève de secondé dans les autres collèges. Cela ne 
prouve pas cependant qu'il n'y ait jamais eu à Reims 
déclasse inférieure à la rhétorique. Guillaume Cathe- 
lineau d'Angers, qui composa une grammaire pour 
l'instruction du dauphin François, fils de Henri II, 
s'était préparé à ce travail en professant au collège de 
Reims les éléments du latin * ; mais il est certain que 
le seul enseignement par lequel ait brillé cette maison 
fut celui de la philosophie. 

Atteint, aussi bien que Sainte-Barbe, par la ruine 
qui fut la suite des guerres de religion, le collège de 
Reims se releva à deux reprises, sous Henri 111 et sous 
Henri IV. Il dut ces deux restaurations passagères à la 
diligence de son principal, Jean Morel, ami d'Edmond 
Richer et collaborateur de celui-ci dans l'entreprise 
qui consista à faire renaître l'Université de ses cen- 
dres*. Ce Jean Morel s^associa avec le principal du 
Mans, son voisin, pour former par la réunion de leurs 
deux établissements un collège de plein exercice ^ Les 
basses classes se firent au Mans, Reims fournit l'ensei- 
gnement supérieur, et les deux maisons furent mises 
en communication par une galerie de traverse que 
l'on construisit sur la rue Chartière*. Cet état de choses 



1. Gulielmi Cathelinei Andini grammaticas latinx libri II ad 
Delphinum. In-4°., Paris, 1554. 

2. Richer, Historia Aaidemias parisiensis {Ms, de labibl. im- 
périale, suppl. 1. n. 64), t. IV, 1. 1. 

3. Le nom de ce collège était, en 1584, Bhemorum-Cenomàn- 
num. Registre des procureurs de la nation de France, Ms. de la 
bibl. Mazarine, H. 2682 a, fol. 143. Cf. Ibid. fol. 95 et 102. 

4. Défenses de l'Université de Paris et du collège du Mans 



DE SAINTE-BARBE. 109 

cessa en 1607, et dès lors Reims tomba pour toujours 
à l'état de petit collège. Pendant la minorité de 
Louis XIV, Ta Compagnie des usages réformés de la 
librairie, représentée par Gabriel Cramoisy et Adrien 
Topinart, loua pour ses réunions la grande salle des 
exercices *, qui, de même qu'à Sainte-Barbe, formait 
un appendice de la chapelle. Les cours de philosophie 
ne se firent plus que d'une façon très-irrégulière, et 
si Santeul énumère encore des Rémois parmi la jeu- 
liesse avide qui assiégeait la Sorbonne les jours d'exa- 
men, 

Plessaeique, et Bellovaci, Baiique Rhemensesque', 

il faut entendre par cette expression, non pas les élèves 
d'un collège organisé, mais des étudiants en théologie, 
qui avaient leur domicile au collège de Reims. Il est 
certain en effet que, malgré des fondations effectuées 
en 1649, 1699 et 1756, le collège, sous Louis XIV et 
sous Louis XV, ne compta jamais plus d'un boursier 
à la fois : encore cette bourse unique resta-t-elle 
souvent en vacance. Telle était la situation, lorsque 
Reims, de même que les autres petits collèges, fut 
réuni à Louis-le-Grand, après l'expulsion des Jésuites\ 
Généralement, le sort des anciens collèges fut d'être 
mal administrés; mais il n'en est pas qui ait éprouvé 

contre l'usurpation que les Jésuites veulent faire de ce collège et 
de la chapelle y fondée. In-4°, 1632. 

1 . Archives de l'Empire, Titres domaniaux du collège de Reims, 
S. 6559. 

2. Bans la pièce intitulée Victorinus vindicatus, 

3. Comptes-rendus du Bureau d^administration du collège Louis- 
lé 'Grand. 



140 HISTOIRE 

à cet égard plus de disgrâce que celui dont nous par- 
lons. 11 n'eut jamais à sa tête que des hommes qui 
étaient en affaires Tincapacité même, ou Timprobité j 
de sorte qu'on eut beau lui donner, il ne sut rien 
retenir. Il perdit successivement tous ses biens ruraux, 
puis la moitié de son propre fonds, qui lui fut enlevée 
par les subtils principaux du collège Coqueret*, puis 
le terrain au levant de Sainte-Barbe, sur la rue des 
Sept- Voies, dont le collège Fortet se rendit acquéreur 
en 1 577, par suite d'une saisie décrétée pour une mi- 
sérable dette de 80 livres, que Reims ne pouvait pas 
acquitter*. C'est par la même incurie que les bourses 
s'éteignirent Tune après l'autre; que le cadre des 
officiers se réduisit d'abord à deux personnes, puis à 
une seule, car lors de la réunion à Louis-le-Grand, le 
principal cumulait avec son titre ceux de procureur et 
de chapelain'. 

On n'imagine pas les tracas que ce malheureux 
établissement suscita aux archevêques de Reims. Soit 
qu'on cherchât à éluder leur surveillance, soit qu'on 
eût recours à eux lorsqu'on ne savait plus que faire, il 
leur fallait sans cesse intervenir dans des conjonctures 
désagréables. Qui pourrait dire combien de fois ils 
renouvelèrent les statuts ou changèrent les inspecteurs 
chargés de les représenter en cette partie ? Lorsque 
Charles-Maurice Le Tellier accéda au siège de Reims, 
importuné de ce que le même ouvrage était toujours 

1. Voyez ci-dessus, t. I, p. 298. 

2. Archives de l'Empire, Titres domaniaux du collège Fortet, 
S. 6433. 

3. Comptes-reiidus du Bureau d adnuoistratioii de Louis-le- 
Grand. 



DE SAINTE-BARBE. 111 

à recommencer, il résolut de s'y employer lui-même. 
Il vÎDt plusieurs fois se faire rendre les comptes : jamais 
il ne parvint à obtenir une addition en règle \ Cepen* 
dant la maison ëtait alors sous la gouverne du savant 
et vertueux docteur Gerbais, que Bossuet et la plupart 
des grands hommes de Tépoque honorèrent de leur 
amitié; mais ce profond théologien se reposait des 
affaires sur le procureur. Le procureur fut changé. 
Gerbais, en mourant, légua une rente de 600 livres 
pour le rétablissement des bourses', et néanmoins sous 
son successeur tout alla de mal en pis, au point que 
le cardinal de Mailly, qui fut archevêque de Reims 
après Maurice Le Tellier , eut l'idée dé faire maison 
nette, c'est-à-dire de chasser principal et procureur, 
si les choses étaient telles qu'on les lui avait rappor- 
tées* Il chargea du soin de s'en assurer le chanoine 
Legendre, le même dont nous avons déjà cité le nom 
à propos de l'institution du concours général'. Legen- 
dre raconte sa visite en ces termes : 

(c Sur les plaintes qu'on lui faisait depuis longtemps 
(au cardinal de Mailly) de l'état où était le collège de 
Reims à Paris, il me pria d'en faire la visite, comme 
son commissaire, et d'y mettre l'ordre. C'est bien un 
des plus beau^ emplacements qu'il y ait dans le pays 
latin : grand air, grande cour, logements plus que 
raisonnables. J'y trouvai un principal, un procureur et 
point de boursiers, quoiqu'il y eût assez de bien pour 
y en avoir nombre. Depuis trente-quatre ans qu'on 

1 . Procès-verbal de la yisite faite par ce prélat le 2 janvier 1 684.,' 
Archives de l'Université, carton n® 21 . 

2. Goiijet, Mémoîys sur le Collège royal, 2* partie, p« 155. 

3. Tome II, p. 344. 



112 HISTOIRE 

n'y avoit point fait de visite, les revenus s'en étoient 
allés en réparations courantes, sans devis, sans quit-.- 
tances par devant notaires, et en appointements tels 
que le principal et le procureur avoient bien voulu se 
les donner. Ils étoient les seuls créanciers du collège, 
et créanciers d'une rente de plus de mille francs au 
denier vingt. Je la mis au denier cinquante : c'éloit le 
taux de ce temps-là ; Dieu sait comme ils crièrent. J'y 
établis huit boursiers; et pour rendre cet établissement 
solide, je fis des statuts tant de discipline quç 
d'économie. Ils ont servi à policer d'autres collèges, 
et le nouvel historien de la ville de Paris* a cru devoir 
les insérer dans son ouvrage, pour apprendre au lec- 
teur rélat moderne de ce collège. 

« Le procureur et le principal, fâchés de n'être 
plus les maîtres autant que, mal à propos, ils Tavoient 
été jusque là, firent d'abord difficulté de se soumettre. 
Leur résistance ne fut pas longue : pour peu qu'elle eût 
duré, je les aurois destitués, comme ayant mal admi- 
nistré le bien de cette maison depuis plus de vingt ans 
qu'ils en étoient officiers. M. de Mailly avoit de la 
répugnance à leur faire grâce : heureusement pour eux 
une affaire plus importante le détourna de celle-là*. » 

La constitution de l'abbé Legendre n'eut pas plus de 
Tertu que les autres qui l'avaient précédée. Après 
avoir été observée quelque temps, elle tomb^ eo 
désuétude. Ainsi qu'on l'a indiqué précédemment» 
il vint en dernier lieu un principal qui accapara tous 
les offices de la maison. 

1 . Félibien. 

2. Mémoires de Louis Legendre, abbé de £lair fontaine, 1. Vil, 
à l'an 1729. 



DE SAINTE-BARBE. 113 

Si Reims ne brilla jamais de la splendeur d'un grand 
collège, il eut néanmoins sa célébrité^ et ne cessa jamais 
d'être affecté à Fétude. L'opinion de Legendre sur la 
beauté du lieu fut celle de tout le monde dans l'ancien 
temps. Les logements étaient réputés appartements de 
princes au xv® siècle. Dévastés par les émeutiersdu 
parti bourguignon en 1418, on les restaura peu de 
temps après pour y loger les religieuses de Poissy, qui 
étaient venues chercher un refuge dans la capitale^ Si, 
comme on a lieu.de le conjecturer, c'est dans cette 
communauté que se retira sur ses vieux jours la célèbre 
Christine de Pîsan, le collège de Reims serait le lieu 
d'où cette femme poète et patriote salua de ses vers 
l'avènement de Jeanne d'Arc •. 

Après avoir été diminué, par la création du collège 
Coqueret, de tout ce qui avait formé les communs de 
l'hôtel de Bourgogne, le collège champenois resta 
encore l'un des grands emplacements de l'Université. 
II s'étendait de la rue des Sept- Voies àlarueChartière, 
et contenait entre ses bâtiments une longue cour bor- 
dée d'arbres. Les savants de la Renaissance compa- 
raient cela aux jardins d'Acadème ou au Lycée 
d'Athènes. Quiconque était admis à faire un cours 
extraordinaire dans l'Université ambitionnait là faveur 
d'obtenir la grande salle de Reims. Le corse Justiniani, 
appelé en France par François 1", y donna des leçons 
publiques d'hébreu et d'arabe, et l'introduction à la 
grammaire de Moïse Kimahi, imprimée en 1 520 par le 

i. Registres des Gens de Sainte-Geneviève, aux Archives de 
PEmpire, S. i628 eti629. 

2. Procès de condamnation et de réhabilitation de Jeanne d'Arc, 
dite la Pucelle, t. V, p. 3. 

m 8 



• 



il4 HISTOIRE 



même orientaliste, est datée du lycée de Reims*. Sous 
Charlies IX on alla y entendre Minos (Claude Mignault) 
commentant le Théagène de Platon*. Là aussi furent 
professés pendant très-longtemps une partie des cours 
du Collège Royal (Collège de France), qui n'eut pas 
d'abord de donjicile à lui. On voit cela par plusieurs 
des harangues de Denis Lambin. Il est probable que 
Théodore Marcile et Pierre Valens (Starck de Gro- 
ningue), autres professeurs royaux qui logèrent dans 
ce collège du temps de Henri IV, y firent encore des 
leçons'. 

Au rapport de Dubreul, le collège de Reims fut in- 
cendié le 9 octobre \ 550 *. Le dégât dut être bientôt ré- 
paré, car en 1 552 on y donna, en présence de Henri II 
et de sa cour, la première représentation d'une tragédie 
et d'une comédie de Jodelle , toutes deux en vers fran* 
çais. C'était Cléopdtrecaptwe et Eugène ou la rencontre. 
Le théâtre fut dressé dans la cour ; des jeunes gens de 
qualité s'étaient chargés des rôles. Le roi témoigna la 
satisfaction que lui causa ce plaisir nouveau, en faisant 
compter à l'auteur une somme de 500 écus d'or *. 

Quantité de personnages marquants ont habité celte 
maison. Aux noms qui viennent d'être cités, ou qui 
l'ont été auparavant dans le cours de cette histoire, 
ajoutons celui du célèbre théologien Claude d'Es- 

1. Chevillier, Histoire de Pimpriraerie, p. 375. 

2. CL Minois de re litteraria orationes III habita in Academia 
parisien&i^ p. 37. 

3. Goujet, Mémoires sur le Collège royal ^ p. 162 et 189» 

4. Théâtre des antiquitez de Paris, p. 738. 

5. Pasquier, Recherches sur la France^ t.VII, ch. 6; Histoire 
du Théâtre-Français, t. HI, p. 278. 



DE SAINTE-BARBE. 115 

pence \ On en trouverait bien d'autres, si on lisait les 
préfaces de tous les livres de classe ou de théologie 
publiés depuis que Timprimerie existe. Reims était si 
bien considéré comme un botei à T usage des princes 
de la science ou de renseignement , que le premier 
article de l'un de ses règlements prescrivait aux pen- 
sionnaires de porter respect aux personnes distinguées 
qu'ils rencontreraient dans la cour*. Ce règlement est 
moderne; les pensionnaires dont il parle sont ceux 
des pédagogies qui eurent leur domicile dans le col- 
lège. Nous en trouvons une, habituée depuis 1720 aux 
classes du collège de Beauvais, qui survécut à l'Uni- 
versité, et qui, après s'être maintenue pendant toute 
la Révolution, se fondit dans Sainte-Barbe. 

£n 1763, l'École de droit fut transférée dans les 
salles basses de Reims, en attendant l'exécution du 
monument projeté par Soufflot devant la façade de 
l'église Sainte-Geneviève'. 

On ne voit pas que Reims ait jamais eu, malgré le 
voisinage, beaucoup de rapports avec Sainte-Barbe. 
Pour les temps anciens un indice d'hostilité résulte de 
ce fait, qu'un régent de Reims, après la mort de notre 
.Martin Lemaistre, y professa publiquement le sco- 
tisme, bien plus rapproché de la doctrine xéaliste que 



i . Cl. Espencsei theoL Paris, Hodoiporican, seu Sylva cui titu^ 
lus Godo. In-4°, Paris, 1565. La préface est datée, LutetisSy ex xdi- 
bus Rkemmis. 

2. Imprimé en placard sans date de temps ni de lieu. II eat in- 
titulé : « Règlement pour les pensicHinaires et caméristes du col- 
lège de Reims. » 

3. Titres domaniaux de Reims, aux Archives de l'Empire, S, 
6559. 



H6 HISTOIRE 

des principes d'Ockam. Celait Pierre Tartarety de 
Lausanne, dont l'histoire de la philosophie a conservp 
le nom. Il fît plus d'un prosélyte. Toutefois, si les bar» 
bistes s'en fâchèrent d'abord , ils durent passer con-v 
damnation plus tard, lorsqu'ils vireiit leur Jean Major 
emprunter à cet astre quelques-uns de ses «rayons* 
Depuis la Renaissance , la profession littéraire ne fut 
jamais telle à Reims qu'elle ait eu de quoi alarmer ses 
voisins, et lorsque les deux collèges n'eurent plus d'é- 
coliers qui leur appartinssent, tout motif de dissension 
disparut. Sous Louis XIII, Reims fit acte de complai* 
sance envers Sainte-Barbe en offrant un abri aux ma? 
tériaux employés pour la reconstruction de la rue 
d'Ecosse. Henri Berthould, qui faisait faire celte re-» 
construction, témoigna sa gratitude par le don d'une 
chasuble à la chapelle de Reims K 

Voici , probablement avec des lacunes^ la suite des 
principaux qui gouvernèrent le collège champenois, 
depuis son rétablissement par l'annexion de Réthe).^ 

Thomas Gerson*, de la famille de Jean Gerson 
(1446). 

Pierre Marie ou Marié, vers 1460 '. 

Nicole Bourgeois, recteur de l'Université en 1485, . 
chanoine de la Sainte-Chapelle en 1497*. 

i . Comptes du collège Sainte-Barbe, pour les aiinéeç 1635-1638. 
Archives de l'empire, H. 2808*. 

2. Sentence pour le collège de La Marche contre celui de Rethel. 
Archives de Tempire, M. 171. 

3. Procès entre Simon Dugast et Nicole Bourgeois. Ar oisives 
dePEmpire, S. 6559. 

4. Duboulay, Historja Vniversitatis Parisiens fs, t. V, p. 923; 
procès contre Simon Dugast, I. c. 



DE SAINTE-BARBE. 117 

• Dominique le Cirier, vers 1520. Il est le premier 
qui ait pris le titre de principal; ses prédécesseurs 
seraient simplement appelés Matires du collège de 
Reims *. 

Jean Deruel ( 1 533-1 ^0 ). Le promoteur de T Uni- 
versité requit contre lui, en 1549, |a privation des 
privilèges académiques, parce que ses élèves avaient 
fait dans Paris mie promenade au tambour '. 

Jean Vasseur, dont le nom apparaît depuis 1554. 
Il fut l'un des chefs de la résiistance contre les Jésuites, 
et décida Estienne Pasquier à se charger de la défense 
de l'Université *, dans le fameux procès de 1 564. 

Charles Gilmer, institué par arrêt du Parlement 
eti' 1 577 *. 11 fut deux fois recteur. •. 

Jean Morel , auteur de l'association de son collège 
avec celui du Mans, dont nous avons parlé ci-dessus. 
Il vivait encore en 1 627 *. 

i. Acte de 1533 aux: Archives de TEropire, S. 6560. 

2. Archives de l'Université, Reg. 21, fol. 212. 

3. Lettre de Pasquier à Louis de Saint-Marthe, 1. XXI. 

4. Ms. de la bibl. Mazarine, H. 2682A, fol. 135 v. et 145. 

5. foan, Burseti Rutheni ^ In D, Gilmeriiy primarii collegii Rhe^ 
mensiSy secundo rertoris, panegyricum , en tête de l'ouvrage intitulé: 
Âd dominumJo^ Buchëerum^ rectorio magistrats se abdicantem^^t 
Blasium Martinuni^ eidem in rectoratu succedentem, congratulatio 
habita Lutetim in comitiis publicisy anno Domini 1 581 , die martii 23, 
per Carolum Gilmerium^ scholm Rhemensis in Acad, Parisiensi pri- 
marittm. In-8®, Paris, 1581. 

6. Contrat de ladite année, par lequel il loue au libraire Ricber 
a une salle basse qui souloit pardevant servir de troisième classe 
âritEt collège, située sous le premier estage du vieil corps d'hoslel 
dudit collège, qui est yis-a-vis du collège de Mans, joînct et con- 
tigu à Palléf» iquî cbnduict à l'escalier du vieil corps d'hostel et au- 
dit dbllége du Mans, avec une autre salle joigûant celle cy-dèssufe 



H8 HISTOIRE 

Nicolas Barrois, chanoine de Reims, nommé dans 
des titres de 1 642 et 1 646 \ 

Jean Gerbais de i 684 à 1 699 *. C'est au collège de 
Reims, en 1656, que ce docteur avait professé le 
cours de philosophie, qui lui ouvrit les portes de la 
Sorbonne '. 

Jean-Joseph Favart, professeur de théologie au col- 
lège de Navarre, mort en 1 733 *. 

René Vatry, membre de l'Académie des inscriptions 
et belles-lettres, d'abord procureur du collège, puis 
principal après M. Favart. Sa santé l'ayant obligé de se 
démettre de cette fonction en 1 743, il garda néanmoins 
son logement dans la maison*. Sous son principalat et 
sous celui de son successeur jusqu'en 1756, M. Piat, 
qu'on à vu figurer précédemment parmi les Gilotins 
célèbres', exerça, avec le titre de proviseur, une sorte 
d'inspection permanente du collège aux lieu et place 
de l'archevêque de Reims \ 

Ponce François Copette. C'est lui qui mit les bâti- 
ments du collège dans l'état où les trouva M. de Lan- 
neau. Il acheva de détruire les derniers vestiges de 
l'hôtel de Bourgogne, et bouleversa les anciennes dis- 

qui servoit aussi cy-devant de la seconde classe, qui est celle du 
milieu soubz ledit vieil et grand corps d'hostel. » Archives de 
l'Empire, S. 6559. 

1 . Archives de l'Empire, S. 6559. 

2. Archives de l'Empire, S. 6559 et 6560. 

3. Ms. de la bibl. Mazarine, H. 2682A, fol. 91 v. 

4. Archives de l'Empire, S. 6559. 

5. Mémoires de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, 
t. XXXVIII. 

6. Tome 11, p. 269. 

7. Archives de Pfimpire, S. 6560. * 



DE SAINTE-BARBE. 119 

positions. La grande porte d'entrée, qui avait été tour- 
née jusque-là devant Sainte-Barbe, fut établie par sa 
volonté sur la rue des Sept- Voies*. La reconstruction 
qui favorisa ce déplacement eut lieu en i 745. En î 762, 
M. Copette fit refaire le Sorps de logis sur la rue de 
Reims '. Les travaux s'achevaient au moment de la 
réunion du collège à Louis-le-Grand. 

La propriété de Reims, conservée aux Boursiers de 
l'Égalité, fut aliénée vers 1805, pour être convertie 
en rentes , de même que le reste de la dotation du 
Prytanée. Elle fut alors divisée en deux portions, au 
moyen d'un mur que l'on conduisit à peu près par le 
milieu de la cour. Dans la partie orientale était établi 
le petit pensionnat que nous avons mentionné ci-des- 
sus ; il était tenu alors par M. Gravier, successeur d'un 
ancien maître-ès-arts du même nom. M. de Lanneau 
prit en même temps le bâtiment et les élèves. 11 fit 
disposer le local pour qu'il pût recevoir , à la rentrée 
de 1 809, les basses classes de son établissement jus- 
qu'à la septième. 

Le lieutenant à qui revint en partie la tâche d'im- 
planter la loi de Sainte* Barbe sur cette terre nou- 
velle fut M. Massin, alors préfet des études. C'était 
un homme d'un âge déjà mûr, ayant dans l'enseigne- 
ment de longs services, qui furent récompensés à la 
création de l'Université impériale par le grade de doc- 
teur en la Faculté des lettres. Il avait quitté la France 
depuis 1 789, pour suivre à Vienne un jeune seigneur 
polonais, dont il faisait l'éducation. Il s'attacha à la 

i . C'est celle qui 4onne entrée au n^ 1 8 de cette rue. 
2. Mémoire manuscrit sur le collège, daté du 12 mars 1763, et 
Deris de construction, auK Ardiives de TEmpire, S. 6560. 



iâO HISTOIRE 

personne du duc d'Enghieiiy après la dispersion ' tde 
rarmée de Condé. La mort du prince le fit rentrer, ea 
France, si complètement dénué de ressources, qu'il 
se trouva heureux d'être agréé comnae maître d'étude! 
à Sainte*Barbe. Une circpnlltance fortuite révéla sai 
valeur à M. de Lanneau. 

En ce temps-là, le directeur de Sainté-Barbe préâ-j 
dait lui-même au repas des élèves. Les maîtres étaient 
placés au bout des tables, et n'avaient pas à s'occuper de 
la surveillance générale. Un jour, pendant le diner,M«de 
Lanneau est appelé dehors pour une affaire pressante. 
Son absence se prolonge, et les convives commenceBt 
à s'émanciper. Les maîtres recommandent en vain lec 
silence. Alors M. Massin se lève de table, et se plaçant 
au milieu du réfectoire, il parle sur un ton 'dont l'au^^- 
torilé impose sur-le-champ aux élèves. M. de Làfa- 
neau, charmé d'avoir trouvé un homme qui avait dei 
l'initiative et qui savait tenir la jeunesse, saisit la pre- 
mière occasion de faire monter en grade son maître: 
d'étude. 11 lui délégua une partie de ses pouvoirs pour^ 
la direction du travail et le maintien de la discipline. 

Ceux qui furent écoliers en ce temps-là se sou-* 
viennent de M. Massin comme d'un maître qui les 
faisait obéir et travailler. Sa manière n'était pas 
celle de M. de Lanneau. Il était doux et caressant,, 
méticuleux dans toutes les parties de son service, 
s'arrétant volontiers aux menus détails, aimant à i«*=^' 
glementer, à multiplier les écritures et les proclama-;> 
tions. Il n'avait pas encore fait le sacrifice de diverses) 
pratiques surannées que d'autres instituteurs cher- 
chaient alors, et cherchent encore aujourd'hui, à maiîi- 
tenir dans l'éducation. Par exemple, il aurait été hew*; 



DE SAINTÊ-BARBE. i21 

KBUx de voir rétablir à Sainte-Barbe les exercices 
d'apparat, pastorales récitées avec des costumes, re- 
présentations théâtrales en français, en latin, en grec : 
taiites choses que. le Directeur n'approuvait pas, qu'il 
taxait au contraire de démonstrations trompeuses', 
a où quelques élèves, préparés de loin aux dépens d'un 
plius grand nombre, viennent à l'aide de compères 
façonner la réputation d^me maison*. » Mais les dif- 
férences d'opinions, de caractère, de conduite étaient 
efiacées par la confiance sans bornes que le lieutenant 
avait en son chef. M. Massin, à Sainte-Barbe, n eut 
pas d'autre, ambition que de satisfaire M. de Lan- 
neau, persuadé qu'en suivant aveuglément l'impul- 
sion d'un tel homme, il se perfectionnerait dans l'art 
de diriger la jeunesse. 

-fU prit son congé aux vacances de 1810, pour.aller 
fonder une institution à lui dans l'ancien couvent 
des Minimes, près la plaee Royale. Le premier noyau 
de cet établissement fut une dizaine d'élèves, laissés 
par un maitre de pension de ses amis, qui venait de 
.mourir. Personne n'ignore l'illustration del'institulion 
Massin, continuée d'abord par M. Paul Barbet-Mas- 
sini, gendre du fondateur, et aujourd'hui par M. Le- 
SB^ç. Il n'est pas de maison qui ait plus contribué à 
1^ gloire du lycée Charlemagne. . 

^ Jusqu'aux derniers moments de sa longue exis- 
tence*, M. Massin n'a pas cessé de citer M. de 
Lanneau comme le modèle accompli de T institu- 
teur, et notre collège comme la source des tra- 

'i. Lettre à M. de Fontanes, du 23 mars 18i2. 
'■^. M. 'Massin mourut subitement le 17 août 4849, à l'âge de 
qdàtvé-vingt-qùàtre ans. 



122 HISTOIRE 

ditions auxquelles il était redevable des succès de 
son propre établissement. Il disait aussi que M. de 
Lanneau lui avait porté bonheur par les vœux pleins^ 
de cordialité qu'il exprima, en présidant la première 
distribution de prix solennelle qui eut lieu dans la 
maison Massin^en 1818. Le Directeur actuel de Sainte- 
Barbe, à son avènement, trouva cet homme hono- 
rable, sous la férule duquel il avait passé jadis, jouis- 
sant de la considération générale, et porté par son 
mérite autant que par son âge à la tète des chefs 
d'institution de la capitale. Tous deux, en 1848, 
unirent leurs démarches, à divers reprises, afin de 
conjurer de mauvaises mesures dont furent mena- 
cées tantôt les études, tantôt des personnes .recom- 
mandables (du corps enseignant. 



CHAPITRE YIII. 



Projet d'ériger Sainte-Barbe en lycée. — Négociations à ce sujet. — Ri- 
gueurs du régime universitaire. — Fin de l'Empire. — M. Mouzard, 
chef oflGciel de l'institution. — Esprit de la jeunesse sous la première 
Restauration et pendaiU les Cent-jours. — Persécution contre M. de 
Lanneau. — M. Adam substitué à M. Mouzard.— Clôture 'de l'école 
gratuite. 



Napoléon avait pour son Université une sollicitude 
plus que paternelle, et dans l'Université rien ne lui 
était plus cher que les lycées. Ces établissements 
étaient un instrument de sa politique. Sa préférence 



DE SAINTE-BARBE. 123 

pour eux allait au point qu'il aurait voulu tenir dedans 
toute la jeunesse de TEmpire. Un jour qu'il lisait un 
rapport sur Tétat des maisons d'éducation de Paris^ 
voyant Sainte* Barbe portée sur la liste avec le nom* 
bre de cinq cents élèves, il dit : a Comment se fait-il 
qu'un sioiple particulier ait tant de monde dans sa 
maison? » Sa volonté fut aussitôt d'acquérir pour le 
compte de FÉtat et les élèves et le maître avec eux. 
M. de Fontanes reçut l'ordre de s'entendre avec M. de 
Lanneau pour rindemniser de sa propriété, et pour le 
retenir comme proviseur de Sainte-Barbe érigée en 
lycée. Les bâtiments surannés de la rue de Reims, 
jugés indignes de contenir une école du gouverne- 
ment, auraient été abandonnés. L'Empereur avait en 
vue l'ancienne abbaye de Saint-Martin-des-Champs, 
proposée pour ^tre le lieu de la quatrième Ecole cen- 
trale, lorsqu'on n'avait pas encore renoncé à fonder 
une quatrième École centrale à Paris. Mais depuis ce 
temps l'abbaye avait été convertie en Conservatoire 
des arts et métiers. C'est l'objection que fit M. Frochot, 
appelé au Tuileries pour recevoir les instructions de 
l'Empereur. Il dit que l'église et les cloîtres de Saint- 
Martin étaient remplis de machines, pour lesquelles on 
trouverait difficilement de la place ailleurs. « Ces ma- 
cfaineç, ces machines, répliqua Napoléon avec sa viva- 
cité ordinaire, on peut bien les mettre dans les rez- 
de-chaussées du Sénat. » Le mot à peine sorti de sa 
bouche, il ne put s'empêcher de rire de la figure que 
fit le préfet, et abandonnant aussitôt son idée, il dé- 
signa, au lieu de l'abbaye Saint-Martin, le ci-devant 
collège d'Harcburt, dans la rue de la Harpe. 

M. de Lanneau reçut la notification de ce projet 



124 ' HISTOIRE 

avec p!us de déplaisir que de surprise. Il avait plus 
d'un motif d'appréhender quelque chose comme cela. 
Ses notes à instruction publique étaient excellentes';^ 
plus Tadministration avait montré d*exigences, plus û 
avait fait d'efforts pour être toujours en règle aved 
elle. Tandis que la plupart de ses confrères, obsédés) 
des formalités minutieuses auxquelles ils étaient assu- 
jettis, feignaient souvent de ne pas comprendre, afin 
d'amener des retards, la ponctualité du directeur de 
Sainte-Barbe était l'objet d'éloges continuels de 1^ 
part des inspecteurs, des conseillers, et du . grand- 
maître avant tous les autres. C'était toujours lui qu'on 
citait comme modèle aux chefs d'institution récalci- 
trants. M. de Fontanes avait pris l'habitude de l'ap- 
peler « l'Universitaire de l'Université. » Mais cette 
bonne réputation était contrebalancée par celle d'une! 
indépendance que M. de I^anneau laissait trop aper- 
cevoir. Il subissait, sans le trouver de son goût, l'état 
de contrainte et presque de suspicion qu'il avait a 
partager avec les autres personnes de sa profession. 
Chaque fois qu il eut à en dire son opinion, il s'en 
plaignit, non pas comme d'une chose préjudiciable à 
son intérêt, car il se trouvait dans l'une de ces veines 
de prospérité qui défient toute atteinte, mais parce 
que cela blessait ses principes personnels et la dignité' 
de l'instituteur. De là des impressions sur son compte,- 
qui l'empêchèrent d'obtenir toutes les récompenses 
qu'il aurait méritées par ses services. Il sut de bonne' 
heure qu'il ne devait pas comptei" sur la faveur dif 
maître. Lorsqu'il crut démêler, dans l'allure qu'on 
donnait au régime universitaire, l'intention formelle 
db he kik'sér aux écoles privées que le trop-pleîrf 



DE SAINTE-BARBE. i25 

OU le . rebut des écoles de rÉlat, il eut peur de 
son succès. Dans la crainte de se voir déposséder 
de Tœuvre qui lui était si chère, il entra en pourpar- 
I^rs a\ec un proviseur de département, qui n'aurait 
pas été éloigné de se déCaire de son emploi pour 
nr^ndre la direction de Sainte-Barbe. 

La perspective d'érection en lycée ayant rompu 
cette ouverture, la nouvelle affaire fut entamée dans 
le cabinet même de M. de Fontanes. M. de Lanneau 
^*en remit, pour la conduire, à l'amiti^ du comte Ma- 
thieu Dumas et à la diligence de l'avocat chargé du 
contentieux de Sainte- Barbe. Les préliminaires de- 
mandèrent du temps, parce qu'il fallut représenter la 
situation financière de la iSiaison depuis son rétablis- 
sement. Pendant qu'on travaillait à ces comptes, un 
personnage fameux par ses intrigues, Roux-Laborie, 
vint faire accepter ses services, nous ne savons de 
quelle part.. Roux-fiaborie, qu'on trouvait partout, 
quoiqu'il eût été chassé déjà de bien des endroits, et 
chassé avec éclat, Roux-Laborie, ami de tous les én- 
n<emis de Sainte-Barbe, ne pouvait intervenir dans 
une affaire de ce genre que pour en compromettre le 
$uçcès. C'est ce qui eut lieu. Les choses traînèrent en 
fiongueur jusqu'au moment de l'expédition de Russie, 
qui Ht rentrer dans les cartons le travail commencé 
pour le règlement des iiitérêts de M. de Lanneau. 
\ Nous n'entendons pas dire par ce qui précède 
qu'un homme artificieux, s'introduisant dans la dis- 
^ji^^sion d'un marché, ait eu la puissance de contre-» 
bal^^ncer la volonté de l'Empereur: mais il arriva 
ççtte . fois ce dont on eut alors tant d^exeipplçs. Le 
projet dont l'exécution était retardée prit des p^o- 



126 HISTOIRE 

portions plus vastes dans la tête de Napoléon. Au lieu 
d'un lycée nouveau à Paris, il en voulut quatre, 
c'est-à-dire le double de ce qu'il y avait déjà, et il 
résolut 'de multiplier dans la même mesure les lycées 
des départements. 

Cette conception gigantesque fut annoncée dans 
le décret du 15 novembre 1811, qui réglait la juri- 
diction de r Université. Le législateur, sentant lui- 
même qu'il n'accomplirait pas sur-le-champ un si grand 
. nombre de fondations, surtout à la veille de la guerre 
la plus coûteuse qu'il eût encore entreprise, se contenta 
de prescrire une série de mesures qui devaient favo- • 
riser plus tard Texécution de ses vues. Ces mesures 
concernaient particulièrement les établissements 
privés, qu'elles avaient pour but de gêner encore 
davantage dans la concurrence que ceux-ci pouvaient 
faire aux lycées. 

Le décret fut exécuté avec u^e rigueur extrême. 
Pendant quinze mois les chefs d'institution et maîtres 
de' pension furent accablés de circulaires menaçantes 
pour faire ceci et surtout pour ne pas faire cela. Ce 
furent des prohibitions à n'en plus finir. 

Défense d'admettre dans les institutions et. pensions 
des élèves qui n'en suivraient pas tous les exercices* 
(arrêté du 11 janvier 1812). 

Défense des exercices publics et distributions de 
prix dans les mêmes établissements, lorsqu'ils sont 
situés dans une ville pourvue d'un lycée ou d'un 
collège ; défense d'exercer les élèves à la poésie fran- 
çaise (circulaire du 1 8 décembre 1 81 2j- 

Défense de recevoir des élèves de quelque âge que 
ce soit, pensionnaires ou demi -pensionnaires, sans en 



DE SAINTE-BARBE. 127 

avoir référé d'abord aux proviseurs de lycées ou pria* 
cipaux de collèges (circulaire du 1 3 février 1 81 3). 

Défense de s'annoncer autrement que par des 
tableaux dont Tinscription, qui était tout un pro- 
gramme d'études, ne pouvait être modifiée dans 
aucun cas. L'administration avciit réglé pour ces ta- 
bleaux jusqu'à la couleur du fond et des lettres (circu- 
laire du 1 2 avril 1 81 3). Celui des institutions devait 
être noir, et porter en lettres jaunes : « Université im- 
périale. Institution dirigée par M. ***", où l'on enseigne 
les premiers éléments de ]a langue latine et où Ton 
répète l'enseignement du lycée ***. » 

Cettecontraintemesquine et jalouse eut pour accom- 
pagnement une pression incessante exercée en vue 
d'inspirer à la jeunesse l'esprit militaire. Les victoires 
de l'Empereur devinrent pftsque l'unique sujet sur 
lequel il fût permis d'exercer l'imagination des élèves. 
Jusque dans les plus petits pensionnats, les exercices 
scolaires durent être annoncés par le son du tambour^ 
L'uniforme fut prescrit partout, à peine de clôture des 
établissements qui ne s'y soumettraient pas\ Alors 
nos barbistes prirent le chapeau à cornes et le frac 
bleu à collet et parements blancs. Us marchèrent au 
pas ; ils eurent caporaux et sergents, ils n'en firent pas 
mieux leurs devoirs; loin de là, leurs jeunes esprits se 
livrèrent un peu plus qu'il n'aurait fallu aux préoccu- 
pations du jour. Bientôt les conscriptions anticipées 
vinrent prendre plusieurs d'entre eux dans les classes 
de rhétorique et de philosophie. Leur chef, consterné, 



i . Arrêté du i 6 janvier 1 81 2. 

2. Circulaires du 2 et du 30 septembre 1812. 



128 HISTOIRE 

se^considéra comme « un sergent-major d'études lan»; 
guissantes sous le tapage d'un tambour et morcelées^* 
sous les couleurs militaires*. » 

Cependant Napoléon, aux prises avec la fortune, 
affectait de poursuivre, au milieu des plus profond^ 
soucis, Taccomplissement de tous ses desseins. Lelep-^ 
demain de la bataille de Dresde, il reprit ceux qui- 
concernaient TUniversité. Un même décret érigea en 
lycées impériaux les vieilles écoles des villes hanséa- 
tiques et les deux ci-devant collèges de Sorrèze et de- 
Juilly*; des ordres pressants furent envoyés à Paris 
pour qu'on hâtât les^préparatifs des créations décidons 
depuis deux ans. Bientôt un article du Moniteur informa 
le public que les maçons venaient de s'emparer des 
deux collèges contigus d'Harcourt et de Justice 'j, afio: 
de les convertir en un Iftée où l'on pourrait placer . 
quatre cents élèves*. t 

Cette nouvelle allait à l'adresse de M. de Lanneau, 
qui se résigna dès lors à son changement de condition. 
Il attendit, ayant sans cesse devant les yeux le moment 
auquel il ne fallait plus songer à se soustraire. Mais 
avant de se faire entendre pour lui, l'heure fatale sonna 
pour l'Empire. Le territoire fut envahi. LesB.ourbons 
revinrent à la suite des armées alliées. 

Changer de gouvernement ne fut que changer d'in- 
quiétude pour les hommes qui, ayant joué un rôle 
dans la Révolution, ne se sentaient pas d'humeur à 
renier ce qu'il plaisait aux nouveau-venus d'appeler 

1. Lettres de P.-A.-V. de Lanneau, p. 37. 

2. Décret du 29 août d8i3. 

3. Ils occupaient l'emplacement actuel du lycée Saint-Louîs. 

4. Moniteur du 4 septembre 1813. 



DE SAINTE-BARBE, 129 

les irîngt-cînq ans de révolte. A la violence des récri- 
minations et des dénonciations qui Turent les premiers 
fruits du nouveau régime, aux tendances rétrogrades 
qui marquaient tous les acteis du pouvoir, le directeur 
de Sainte-Barbe jugea que, s^il voulait soustraire sa mai- 
son aux atteintes du parti royaliste, il était prudent de 
mettre sa personne à l'écart. Déjà on tenait de cruels 
propos sur son compte, déjà il était l'objet de toutes 
sortes de vexations. Il crut eh voir une dans une 
mesure de rigueur que prirent contre lui les bureaux 
de l'Université. 

L'Université impériale, violemment attaquée dans 
le parti vainqueur, avait dû provisoirement son main- 
tien à la difficulté de satisfaire trop de prétentions 
rivales. Les subalternes, dans leur zèle, s'employèrent 
dès lors à tirer parti de la sévérité de ses lois pour 
tourmenter ceux dont le pouvoir n'était pas content. 
Au milieu de la détresse causée par les événements, 
lorscpie le collège était réduit à la moitié de ses élèves, 
et que, pour l'autre moitié qu'il fallait nourrir tous les 
jours, les recouvrements ne s'effectuaient pas, toutes 
les caisses étant vides ou fermées, M. de Lanneau se 
trouva en retard pour l'acquittement de la rétribution 
universitaire. C'était la première fois que cela lui 
arî*ivait. Il reçut néanmoîtis par le ministère d'un huis- 
sier sommation de payer, avec menace de poursuites. 
Jamais blessure n'atteignit plus profondément une âme 
délicate. Il en pleura, et il mit d'autres larmes dans la 
letti^ qu'il écrivit sur-le-champ au trésorier de l'Uni- 
versité, C'était Delauibre, le célèbre astronome. 

« Je viesps de recevoir pour la première fois, lui 
disait^il, depuis trente ans «et quiôze jours' que je tta- 
m 9 



130 HISTOIRE 

vaille dans rinstruction publique^ le papier des huis* 
siers. Non, Monsieur, je ne croirai jamais que ce soit à 
vous que je doive cette mortification. Vos procédés de 
justice et d'humanité sont trop généralement connus^ 
les égards particuliers dont vous tn'avez houoré quel- 
quefois me sont trop présents, pour que je ne sois pas 
porté à croire qu'on a abusé de votre nom pour humi- 
lier un vétéran, à qui d'ailleurs tant de fois vos plus 
inexorables agents ont rendu justice sur son exactitude 
à s'acquitter envers l'Université. » Et après avoir exposé 
tout ce qui faisait son excuse dans le cas présent, et 
prouvé qu'il s'occupait de se mettre en règle dans le 
plus bref délai, il ajoutait : « Veuillez permettre que 
je le renvoie à son point de départ, ce papier, comme 
ne devant ni ne pouvant figurer dans les archives sans 
tache de ma maison^ » 

Il ne voulut pas attendre que les coups d'épingle 
devinssent des coups de poignard. La combinaison 
par laquelle il crut sauvegarder sa maison fut de faire 
passer son titre dechef d'iostitution à quelqu'un de sa 
famille. Il venait de marier l'une de ses filles avec un 
jeune et brillant professeur du lycée ci-devant Impé- 
rial, alors Louis-le-Grand, M. Mouzard, qui avait 
remporté le prix d'honneur au grand concours de 
1805, et ce gendre s'annonçait comme un digne suc- 
cesseun M. de Lanneau demanda l'autorisation de lui 
céder son établissement ; elle lui fut accordée en tout 
honneur par M. de Fontanes, qui était resté à la tête 
de l'Université. « Vos nombreux élèves, lui écrivit le 
grand-maître, déposent en faveur de votre zèle et dç 

i) Recueil de lettres de P.-A.-Y. de Lanneau, p. 249. 



DE SAINTE-BARBE. 13! 

•votre mérite* L'Université n'oubliera jamais les ser- 
vices que vous avez rendus à l'enseignement', n 

Ces paroles n'étaient malheureusement pas d'un 
prophète, ainsi qu'on ne tardera pas à le voir. 

Malgré les impatients, qui auraient voulu que d'un 
coup de baguette on reftt la jeunesse telle qu'elle avaii 
été avant la Révolution (car c'est toujours avant la Ré- 
volution que ces chimériques esprits allaient chercher 
leur idéal) y les écoliers de 1814 ressemblèrent beau* 
coup à ceux de 4813. S'ils regrettèrent médiocrement 
le gouvernement déchu, qui les avait un peu trop mis 
en coupe réglée^ ils ne ressentirent pas non plus d'a<- 
mour pour le nouveau régime. Le plus grand chan- 
gement que l'on remarqua parmi eux fut un souffle 
d'indépendance dont ils se montrèrent aussitôt agités. 
On avait remplacé les tambours par les cloches, les co* 
cardes tricolores par des cocardes blanches, les corn* 
positions à la louange de l'Empereur par des compo- 
rtions en l'honneur du roi, les Te Deum des victoires 
par des Requiem pour les victimes de la Révolution. 
On s'indigna que ces nouveautés ne produisissent pas 
l'enthouâasme. La contrainte fut employée pour ob- 
tenir des démonstrations, et quand celles-ci ne paru* 
rent pas satisfaisantes, on accusa les maîtres : souvie- 
raine injustice, car les maîtres ne pouvaient pas faire 
que les enfants s'éprissent tout d'un coup pour des 
choses auxquelles leur éducation première ne les avait 
point préparés. On eut beau se servir de la menace; 
on ne parvint point à obtenir des jeunes raisonneurs 

i. Arrêté du 4 novembre 1814; lettre du 7 novembre sui- 
vant. 



132 HISTOIRE 

de collège qu ils regardassent Napoléon comme im 
monstre exécrable et les Bourbons comme des princes 
envoyés du ciel; tout au contraire, on les porta à re-» 
gretter la gloire dont l'Empereur avait environné la 
France, et à regarder d'un mauvais œil le roi qiâ 
était survenu à la faveur de nos infortunes. 

Une ordonnance* ayant scindé l'Université en dix-* 
sept universités locales, gouvernées chacune par^ un 
conseil sous la surveillance d'un évêque, on prit cela 
pour l'annonce du régime monacal qui allait revenir^ 
et réloignement de la jeunesse pour la Restauration 
devint encore plus prononcé. 

Ces dispositions furent cause que les établissements 
de l'Université saluèrent avec allégresse le retour de 
nie d'Elbe; et ce ne fut pas là comme dans la muU 
titude, où Ton vit le découragement et la froideur 
succéder aux premiers transports. Pendant toute la 
durée des Cent-jours, la jeunesse des écoles resta fi- 
dèle à Napoléon. Elle aurait voulu être appelée en 
masse sous les drapeaux. Lorsque Carnot organisa 
Tartillerie destinée à défendre la capitale, des pétitions 
pour y être incorporés furent envoyées par la plupart 
des lycéens qui avaient atteint l'âge de quinze ans. 
Nos baibistes firent la mênie chose à l'insu de leur 
chef. Celui ci ayant adressé des représentations au 
ministre, pour que cette demande fût au moins sou*- 
mise à l'approbation des parents ^, le patriotisme des 
élèves se manifesta d'une autre façon.. Pendant l'une 

1. 17 février 1815. 

2. Lettres adressées le 30 mai 1815 au ministre de l'Intérieur 
et au prince architrésorier de T Empire, alors grand-maître de 
rUniversité. • 



DE SAÎNTE-'BARBE. 133 

de leups^FomeDades à Vaugirard, ils s'échappèrent tous 
eiifiem})le pour aller travailler aux fortificalions qu'on 
élablissait en avant des barrières^ sur la ligne du midi. 
.. Grande consternation parmi ces jeunes gens, lorsque 
a'^vanouit le simulacre du second Empire. La façon 
dont rétranger profita de sa \ictoire ne fut pas de 
nature à les consoler. Ils furent peut-être ceux qui 
dirent avec le plus de douleur la France gardée par 
les bajfonnettes étrangères. Inaccessibles aux sophismes 
de J 'intérêt, et n'imaginant pas qu'il y eût des compen- 
sations à la bonté, ils se regardèrent comme les en- 
fants d'une patrie déshonorée. Les princes qui avaient 
souscrit à tant d'humiliations en restèrent respon- 
sables à leurs yeux; ils vouèrent au gouvernement de 
laBfistauration une inimitié que contribuèrent à entre- 
tenir les encouragements de la presse libérale, et les 
e^cès du parti réactionnaire, et le spectacle public des 
plus honteuses défections. Alors s'ouvrit une série 
d*années mémorables dans l'histoire de l'instruction 
publique, années où l'on vit tout à la fois les études 
fleurir par l'effet d'une rare émulation, et la discipline 
essuyer des échecs continuels de la part de l'esprit de 
jfévolte. Parmi les lycées transformés en collèges 
rpyaux, il en est peu qui n'eurent leur insurrection, 
fit cela dans toute l'étendue de la France. A Paris, ces 
désordres eurent surtout de l'éclat à Louis-le-Grand 
et à Sainte-Barbe. Ils valurent à ces établissements la 
réputation d'être des foyers de libéralisme et de bo- 
napartisme, réputation moins dangereuse à soutenir 
pour le collège royal qui était sous la tutelle de l'État, 
que pour l'institution qui était la propriété d'un 
homme déjà mal noté. 



fS4 HISTOIRE 

Les alarmes, commencèrent pour Sainte-Barbe aus- 
sitôt que fut arboré de nouveau le drapeau blanc. La 
liste d*uDe collecte patriotique, que les élèves mathé- 
maticiens avaient faite entre eux dans le mois de juin, 
fut trouvée au ministère de Tlntérieur. On sut qu'un 
professeur de la maison, M. Saint-Omer, avait étéTin- 
stîgateur de la souscription. Ce fut assez pour que la 
police envoyât faire des menaces à M. de Lanneau; 
On le contraignit de congédier sur-le-champ M. Saint- 
Omer, homme de talent), irréprochable à tous le& 
^ards, qui n'avait agi auprès de ses élèves que pour leur 
6ter de la tête leur projet de s'engager dans l'artillerie. 

L'Université, rétablie pendant les Cent-jours, fut 
attaquée, au conunencement de la seconde Restaura- 
tion, avec encore plus de violence que pendant la 
première. Le gouvernement toutefois n'osa pas re* 
mettre en vigueur l'ordonnance du 1 7 février 181 5. Afin 
d éloigner le moment d'une décision épineuse, il prit 
un moyen terme, qui consista à abolir la dignité 
de grand-maitre. On institua à la place un conseil de 
cinq membres, dont Royer-Collard fut le présidente 
C'est à ce conseil, appelé la Commission de t instruc- 
tion publique^ que Sainte-Barbe eut à rendre compte 
du premier tumulte dont elle fut affligée dans les der- 
niers jours de 1 84 5. Dans cette circonstance pénible, 
M. de Lanneau n'eut qu'à se féliciter de son associa- 
tion arec son gendre. Elle fut cause qu'ils reçurent 
tous les deux des remerctments pour la manière dont 
ils s'étaient employés au rétablissement de Tordre*. 

f . Ordonnance da 15 août 1815, 
2. Voyez ci-après, chap. XI. 



DE SAINTE-BARBE. 18i 

Mais un malheur domestique, en favorisant Texplosion 
de la malveillance^ rendit bientôt plus difficile à ob« 
tenir la justice de la Commission* M. Mouzard mourut 
dans le vingt et unième mois de sa possession \ 

M. de Lanneau^ dont ce douloureux événement 
renversait tous les calculs, se trouva dans un mortel 
embarras. Son fils aine, sur lequel il comptait pour 
remplacer M. Mouzard, n'était pas encore d'âge à 
prendre le gouvernement de la maison « Au lieu -de 
vingt-cinq ans qu'il fallait avoir^ le jeune homme n'en 
avait que vingt, et son apprentissage de la profession, 
interrompu par cinq ans de service militaire, n'était 
pas encore terminé. Le père se vit ainsi dans la né* 
cessité de reprendre d'une manière apparente la di* 
rection de Sainte-Barbe. Fort des services dont il avait 
reçu réloge officiel, et résolu à faire des efforts sur«- 
humains de prudence afin de surmonter les difficultés 
devant lesquelles il s'était effacé en 1814, il se présenta 
pour exercer de nouveau, en attendant que son fils 
eut atteint l'âge légal. Il essuya un refus durement 
motivé sur son état civil. 

La haine de partie en 1815 et années suivantes, 
s'acharna sans paix ni trêve contre les hommes qui 
avaient renoncé à la profession ecclésiastique. Il sem* 
blait qu'aucune garantie ne leur eût été assurée par 
les lois, et qu'ils dussent être les victimes d'un sacri- 
fice expiatoire. Cependant la condition expresse du 
Concordat avait été que l'Église accepterait toutes les 
situations qui s'étaient faites depuis 1 790. Le chef de 
l'Eglise, à qui appartientle pouvoir de lier et de délier, 

1. Juillet 1816. 



136 HISTOIRE 

avait consenti; des actes innombrables, délivrés par 
la chancellerie romaine, en conservaient partout Ife 
témoignage. Nul n'avait le droit d'appeler la Ven- 
geance sur les faits d'un passé aboli. >' 

Quoi qu'il en soit, un député de la Chambre introur 
vable^crul servir son pays et Thuruanité en se livrant^à 
une sortie furibonde contre les hommes dont il s^agtt 1* 
Il s'en prit particulièrement à ceux qui avaient éléertp- 
ployés dans l'enseignement, soit au Prytanée, soit aux 
Écoles centrales. H les dépeignit comme a le plus va 
rebut de la société, » en adjurant le gouvernement de 
les chasser jusqu'au dernier des maisons d'éducation, 
où plusieurs se cachaient encore ; et le gouvernement 
fît flèche de ce bois pour montrer sa vigueur, en jetant 
sur le carreau un certain nombre de victimes. Le signal 
une fois donné, la persécution continua par les soins 
des complaisants qui ne manquaient dans aucune ad^ 
ministration. 

M. de Lanneau avait son induit et tous les actes 
qui le mettaient en règle vis-à-vis de l'Église. Cela ne 
lui servit pas plus que ce qu'il avait fait pour la religion, 
dans le temps que les nouveaux vengeurs de celle-ci se 
cachaient à l'étranger, ou bien gardaient le silence. 
Comme on affectait d'être plus royaliste que le roi,, 
on alTecla aussi d'être plus catholique que le pape. Le 
restaurateur de Sainte-Barbe oblint, pour toute grâce, 
de choisir parmi les personnes autorisées par la loi un 
successeur à M. Mbuzard, décédé. Il subit l'humilia- 
tion qu'on infligerait à un instituteur déclaré déchu de 
ses fonctions par indignité. 11 fallut que, lui présent 

i . Séance du 31 janvier i816. 



DE SAINTE^BARBE. Î%1 

dans sa maison^ un étranger eût la signature et toutes 
lies prérogatives du Directeur. 

Un honorable professeur de Louis -le -Grand, 
M. Adaniy accepta ce rôle, et le remplit pendant trois 
^ns de manière à ménager un cœur dont il connaissait 
loute la délicatesse. La douleur ne laissa pas d'être 
grande pour le chef légitime blessé dans son honneur. 
U ne fut pas moins lésé dans ses intérêts, car on pense 
bien qu'il ne marchanda pas la rétribution d'un 
bonmie qui dut renoncer à sa carrière pour lui rendre 
service. M. Adam eut un intérêt dans les bénéfices de 
la maison. Par là Sainte-Barbe se trouva grevée d'un 
lourd impôt, ajouté à celui qui pesait toujours sur elle 
par suite de l'association malheureuse de M. de I^n- 
!neau avec M. Miellé. 

: Un autre coup non moins cruel suivit cette désas- 
treuse déchéance. 11 partait des mêmes mains. Grâce 
aux explications sans nombre que l'Université, depuis 
qu'elle existait, avait été amenée à donner au sujet de 
la fameuse rétribution, on trouva des textes pour éta- 
blir que ce tribut était exigible des enfants de l'école 
gratuite attachée à Sainte-Barbe. Prétendre que l'État 
devait bénéficier sur une œuvre de charilé, qu'était-ce 
autre chose que défendre par un moyen détourné la 
continuation de cette œuvre? L'établissement de la 
Poule-qui-pond {\it fermé à la fin de 1816* 



138 HISTOIRE 



CHAPITRE IX. 



Représentation de Manlîus demandée par les élèves de Sainte-Barbe. ^ 
Article de M. Dussault dan» les Débats, — - Censure prononcée contre 
M. Adam. — Adoucissement de la Commission de Tlnstruction publi- 
que. — Polémique dans les journaux. — Article d'Eugène Scribe. — 
Banquet dtt 21 décembre 1816. 



Nous allons raconter un événement qui fut peu de 
ohose en lui-même , mais qui ^ par le parti que la 
malveillance s'efforça d'en tirer, eut un retentisse- 
ment énorme et des conséquences que personne n'au- 
rait été dans le cas de prévoir. Il forma entre les élèves 
de M. de Lanneau un lien indissoluble ; il constitua 
autour de Sainte-Barbe une puissance tutélaire fondée 
sur l'amour et le dévouement ; il ouvrit la source d'où 
est sortie la prospérité de l'établissement actuel. C'est 
bien de lui qu'on peut dire^ au point de vue des faits 
dont nous rétablissons l'enchaînement : 

Genus unde latinum, 
Atbanique patres atque altœ mœuia Romae. 

En 1 81 6, on était passionné pour la littérature autant 
que pour la politique. Des vers nouveaux ou une pièce 
de théâtre agitaient le public pendant des semaines 
et des mois. Le Théâtre-Français eut surtout ce privi- 
lège, grâce au talent extraordinaire de Talma. Le grand 
artiste ayant repris dans un nouveau style le rôle de 



DE SAINTE-BARBE. 43» 

Manlius, qu'il avait déjà joue en 1806, on ne parla 
plus que de cela à Paris. Cette vogue alluma les dé- 
sirs de l'impétueuse jeunesse qui était alors casemée 
dans notre collège. Elle eut la fantaisie d'assister à 
une représentation de Manlius. 

A la suite de plusieurs conciliabules, les élèves nom- 
mèrent une députation pour aller solliciter de Talma un 
spectacle composé de Manlius et d'une comédie du ré- 
pertoire de Mlle Mars. C'était beaucoup demander. Les 
deux célèbres acteurs n'avaient pas coutume déjouer 
dans la même représentation, par la raison que chacun 
d'eux faisait salle comble à lui tout seul. Mais les ap- 
plaudissements désintéressés de la jeunesse avaient à 
leurs yeux un prix particulier. On eut la promesse du 
tragédien, qui obtint à son tour celle de Mlle Mars pour 
les Fausses confidences. Le jour désigné pour la re- 
présentation fut celui de la sainte Barbe , qui étant 
toujours célébrée un mercredi, d'après l'ancien usage 
du collège ,^ fournissait aux élèves l'occasion de cou- 
cher chez leurs parents , à cause du congé du lende- 
main. Cette année d'ailleurs l'usage et le calendrier 
étaient d'accord : la fête tombait le mercredi même. 

Ceux qui ont l'habitude des conspirations» savent 
prendre leurs mesures et garder le silence. Tout ré- 
cemment, deux jambons de Mayence, soustraits de 
la cuisine de Sainte-Barbe, étaient sortis du collège 
par les fenêtres , y étaient rentrés tout cuits , et s'é- 
taient trouvés un matin , débités en tranches appétis» 
santés, dans les pupitres des rhétoriciens, sans que la 
Direction , ni les inspecteurs, ni le plus grand nombre 
de ceux qui eurent part au festin , eussent su commaat 
le coup avak pu se faire. Le secret de la représenta^ 



140 HISTOIREr 

lion fut, de même, bien gardé. Cest la veilte sôu- 
kment qu'on apprit au collège, par un ayis veau 
du dehors, la partie, que les élèves avaient concertée 
entre eux. : 

M. de Lanneau n'aimait pas les coalitions , même 
lorsqu'elles étaient formées dans un but innocent* Il 
apprit celle-là avec déplaisir. Le temps lui manqua 
pour la contrecarrer autrement que par un moyen 
terme qu'il prit sur-le-champ, de concert avec le chef, 
officiel de sa maison. Il fut décidé qu'aucun élève ne 
sortirait, à moins qu'il ne fût emmené du collège par 
la personne même qui répondait de lui ; et l'on spii-» 
mit à tous les parents et correspondants qui se pré- 
sentèrent la question de convenance quant à laisser 
aller des écoliers au théâtre. Le scrupule ne portait 
que sur le rassemblement qui allait avoir lieu loin de 
Pœil du maîlre , car le spectacle annoncé promettait 
un plaisir sérieux s'il en fut, et sans danger pour des 
esprits en culture. 

Les familles furent complices de cent cinquante 
jeunes gens qui parurent à la représentation du 4 dé- 
cembre. Ils s'étaient rangés en bon ordre sur plusieurs 
banquettes du parterre. Leur tenue fut parfaite, et 
digue en tout du noble divertissement qu'ils avaient 
sollicité. Talma de son côté se surpassa lui-même. Il 
parut se complaire à produire sur l'imagination de ses 
jeunes auditeurs une de ces impressions profondes, qui 
vivent longtemps dans la mémoire et qui se reprodui- 
sent dans un âge avancé. 41 fut rappelé après la tra-* 
gédie (chose qui n'était pas d'usage en ce tempsr-là), el 
reçut de la part de l'assemblée tout entière les plus 
vifs applaudissements. . 



DE SÀmTEBARBE. 141 

Le lendemain , plusieurs journaux , le Moniteur en 
tête y racontèrent comme un événement digne de mé- 
moire la solennité de la veille. Les articles publiés ne 
porlaientrempreinled'aucunemalveillance.Ons'émer- 
veîllait du talent déployé par Talma et par Mlle Mars, 
et Ton félicitait les élèves de Sainte-Barbe d'avoir ob- 
tenu une si belle représenlalion *. 

Le Journal des Débats, qui s'était tu le premier 
jour, parla sur un autre ton dans son numéro du 
6 décembre. Sous forme d'une lettre adressée au ré- 
dacteur en chef par un ancien barbistè, il lança la plii- 
lippique que voici : 

a Nous avons contracté, pendant vingt-cinq ans de 
désordre, des habitudes ({ui seront difficiles à effacer, 
et qui de temps en temps se reproduisent encore sous 
un gouvernement avec lequel elles forment de singu- 
liers contrastes. Cela ne doit pas nous faire désespérer 
de l'avenir, quoique cela n'embellisse pas le présent; 
car si les influences de la Révolution ont agi durant un 
grand nombre d'années, le temps ne manquera sûre- 
ment pas à celles qui doivent produire des effets plus 
heureux. 

a Telles sont. Monsieur, les réflexions que je faisois 
hier à la Comédie françoise, où elles m'occupèrent 
beaucoup plus que la tragédie de Manlius^ que l'on y 
donnoit, et que le jeu de M. Talma. Je vous dirai même, 
ce qui vous paroîtra bizarre, que le jeu de cet acteur 
ne faisoit que m'y enfoncer davantage. Une jeunesse 
nombreuse, ardente et bruyante remplissoit en partie 
les rangs du parterre, et s'enivroit du plaisir d'admirer 

i. Moniteur du 5 décembre 1816. 



i4â HISTOIRE 

et d'applaadir. Je orus d'abord que toute rAcadémie 
de Paris ëtoit là ; mais j'appris aussitôt que j assistois 
à un spectacle demandé. Eh ! par qui ? On me répondit 
que c'étoit par les élèves delà maison deSainte^Barbe, 
qui, pour célébrer la fête de leur patronne^ avoient 
prié M. Talma de vouloir bien leur donner ManUus. 
Quoi ! m'écriai-je, les écoliers demandent maintenant 
des spectacles ! Et M. Talma lui-même ne sent pas 
toute l'inconvenance d'une pareille démarche ! Mais^ 
ajoutai-je à part moi, pourquoi la vanité, toujours si 
facile à séduire, d'un comédien repousseroit-elle ce 
que n'interdit pas la sévérité des guides de la jeunesse, 
ou ce que permet leur mollesse scandaleuse ? Il seroit 
plaisant qu'un homme de théâtre fit la leçon aux 
directeurs de l'éducation publique, et que la réforme 
morale des maisons où l'on élève nos enfants sortit 
d'une coulisse. Et puis je tombai dans ma rêverie, 
qu'interrompoient fréquemment les applaudissements 
redoublés et le fracas de MM. les barbistes; car c'est 
le nom qu'ils [prennent, et que le chef avisé de la 
maison a grand soin de maintenir, quoique Sainte- 
Barbe ne soit plus Sainte-Barbe , comme il y paroît 
bien. 

« Ce n'étoit pas ainsi que jadis nous fêtions notre 
patronne : nous ne demandions point des spectacles ; 
nous ne nouspermettions pasd'envoyer desambassades 
aux princes de la scène ; nous étions plus modestes, et 
nous nous contentions de composer pour ce grand jour 
et de réciter dans cette solennité quelques pièces dé 
vers latins, qui valoient bien celles que l'on fabrique 
aujourd'hui dans nos brillantes institutions. 

ce Je rends toutefois justice à l'état de Yinslruction 



DE SAINTE-BARBE. 143 

proprement dite* Les ëtudes sont bonnes dans nos 
collèges, et Ton m'assure que, parmi les pseudo^bar* 
histes eux«mémes, il y a des élèves qnî auroient pu 
faire honneur à notre ancienne et. yëritable Sainte- 
Barbe. Mais que de choses à réformer encore dans 
X éducation^ qu'il ne faut pas confondre avec Y instruc- 
tion! En vérité, Monsieur, il faut que nous en venions 
au point où des écoUers ne demanderont plus des 
spectacles : ce ne sera pas encore un degré de perfec- 
tion très-élevé , mais ce sera un scandale public de 
moins, et un commencement de résipiscence dans les 
hommes auxquels est confié le soin de conduire et de 
former la jeunesse. » 

L'ancien barbiste qui avait écrit cela n'était pas 
difficile à reconnaître. L'épithète de pseudo-barbistes, 
donnée aux élèves de M. de Lanneau, et l'insinuation 
de charlatanisme dirigée contre ce respectable institu- 
teur décelaient assez l'ennemi qui, neuf ansauparavant, 
dans le même journal et par les mêmes moyens, avait 
suscité à notre collège une querelle d'un autre genre, 
M. Dussault fut réputé Fauteur de l'article, et il Tétait 
emeffet. 

A peine le journal fut-il distribué, que des person- 
nes charitables se mirent aux champs pour faire 
tomber en bonne terre la semence qu'il contenait. 
Dans la journée même, M. Adam, directeur en nom 
de Sainte- Barbe, fut cité à comparaître le len- 
demain devant la Commission de l'Instruction pu- 
blique. 

M. Adam avait déjà écrit une lettre aux journaux, 
dans laquelle il expliquait la conduite de la direction, 
et déclarait qu'aucun des élèves n'était allé au spec- 



ikk HISTOIRE 

tacle, sinon par la permission de ses parents ^ Il répéta 
ces exctises devant la Commission, qui ne les trouva pas 
suffisantes. On lui dit qu'il aurait dû interdire toute 
sortie le 4 décembre, et pour ne lavoir pas fait, on lui 
infligea la peine de la censure. 

Cela était déjà bien fort; mais la Commission, en- 
traînée par la violence des cris d'alarme qui s'étaient 
fait entendre, porta plus loin la rigueur. Elle enjoignit 
à M. Adam de chasser dans le délai de quinze jours les 
élèves qui avaient été les meneurs de cette partie de 
plaisir, et en attendant que cette mesure fût exécutée, 
elle interdit toute communication entre l'établissement 
et les collèges royaux. Un arrêté en trois articles, où ces 
divers points étaient spécifiés, fut rendu public par son 
insertion dans le journal officiel*. 

Frapper Sainte-Barbe des foudres surannées de 
l'excommunication universitaire, c'était procurer une 
satisfaction pleine de douceur à ceux qui demandaient 
sur tous les tous le retour de l'ancien régime. Par 
contre, l'indignation fut à son comble dans le parti 
libéral. Une affaire de collège devint une affaire 
politique. t 

Soit que la Commission de l'Instruction publique 
reconnût qu'elle était allée trop loin, soit qu'elle n'eût 
frappé si fort que pour fermer la bouche à des amis 
incommodes, une décision nouvelle modéra bientôt la 
sévérité de la première. Les inspecteurs de l'Université 
furent envoyés à Sainte-Barbe pour s'enquérir de la 
discipline et des mœurs de l'établissement. Lorsque 

i . Voir entre autres le Constitutionnel ànl décembre i816. 
2. Moniteur à\x% ùiiCQmhte 1816.- 



I 



DE SAINTE-BAUBE. 145 

ces messieurs eurent été témoins de Tordre qui régnait 
et de rattachement de tous les maîtres à leur devoir, 
lorsqu'ils eurent parcouru ces admirables dossiers où 
l'état moral et intellectuel des élèves était consigné 
dans un style saisissant^ avec la plus ponctuelle exacti- 
tude et un esprit d'observation digne d*un philosopKe, 
lorsqu'ils eurent considéré l'énervement inévitable 
d'une autorité qui, dans un temps de trouble universel, 
était contrainte de se dérober sous un prête-nom, leur 
rapport fut tel que l'interdiction, prononcée d'ab^d, 
fut levée sur-le-champ. Un second arrêté rejeta la faute 
sur le compte des familles, et ne parla plus des élèves 
dont on avait en premier lieu ordonné l'expulsion ^ 

Cependant une violente polémique s'était engagée 
entre les journaux de l'opposition et les Débats. Le 
Constilutionnel fut celui qui comiDattit avec le plus 
d'énergie pour Sainte-Barbe. Il dit des choses justes, 
auxquelles il ne fut pas répondu ; il commit quelques 
inexactitudes relativement au régime des anciens col- 
lèges, et par là il prêta le flanc à la riposte*. Le 
tenant des Débats fut l'abbé de Féletz, qui prit la place 
de M. Dussault, et pour cause. L'abbé de Féletz avait 
étudié dans la Communauté de Sainte-Barbe à une 
époque où la règle qu'on y observait lui permit d'a- 
vancer des choses dont M. Dussault n'aurait point osé 
faii'e honneur à son temps. 

Le 5(?/iFranpa/>, plus réservé que le Constitutionnel^ 
s'attacha à faire ressortir la différence qu'il y avait 
entre la nouvelle Sainte-Barbe, qui était une institution 

i. ilfo/ïfV^wr du 15 décembre. 

2. Constitutionnel àe.s 7, 12 et 14 décembre; Débats du 10 et 
du 13 décembre. 

m 10 



146 HISTOIRE 

destinée à former des citoyens, et l'ancienne, qui avait 
été un séminaire^ 

La Gazette de France accueillit par impartialité une 
lettre plaisante signée : « La moitié plus un des nou- 
veaux barbîstes », qui répondait à une autre lettre de 
« Un abonné, ancien élève de la Communauté de 
Sainte-Barbe », insérée la veille dans la même feuille'. 

Jje Journal général de Fra/zc^ publia le meilleur mor- 
ceau qu'ait inspiré cette controverse'. Ce fut une lettre 
d'Eugène Scribe, qui cacha sa jeunesse (il avait alors 
vingt-cinq ans), et l'autorité récusable d'un vaudevil- 
liste, sous le masque d'un père de famille élevé dans 
Tancienne Communauté. Sainte-Barbe doit enregistrer 
dans ses fastes ce témoignage du dévouement d'un fils 
qu'elle a toujours trouvé auprès d'elle dans ses tribu- 
lations : 

H Et moi aussi. Monsieur, je suis un ancien bar- 
biste. Je viens de lire la réclamation morale et classi- 
que insérée dans le Journal des Débats de vendredi der- 
nier, et j'ai pensé pleurer de joie en reconnaissant le 
style et la manière de notre ancien professeur de troi- 
sième *. C'est lui-même, j'en suis sûr! Je n'ai éprouvé 
qu'un regret, c'est que son discours ne fût point écrit 
en latin. Je sais bien qu'il s'en rapproche beaucoup, 
et qu'on ne peut pas dire que ce soit tout à fait du 
français. Enfin , je vous l'ai dit , je suis barbiste; 
je tiens aux anciens usages ; et quoiqu'il y ait du bon 
dans Racine et dans Voltaire, j'ai pensé, avec notre 

1. N« du 10 décembre 4816. 

2. Gazette de France des 6 et 7 décembre 1816. 
3.-N* du 9 décembre 1816. 

4. M. Dussault. 



DE SAINTE-BARBE. i47 

professeur, qu'on eût mieux fait de laisser Iphigënie 
en vers grecs et de mettre Zaïre en vers latins. Peut- 
• être alors nous eut-on permis , le jour de la sainte 
Barbe, fête de notre patronne, d'aller au parterre des 
Français entendre la tragédie, au lieu de la jouer 
chez nous, comme nous le faisions tous les ans, ce qui 
m'a toujours un peu choqué; car dès ce temps-là 
même, les comédies du révérend père Ducerceau me 
paraissaient moins fortes que celles de Molière*; et 
notre professeur de grec qui, si je m'en souviens, fai- 
sait Philoctète dans Vile de Lemnos\ se rapprochait 
beaucoup plus du genre de Lacave' que de celui de 
Talma. Mais jusqu'à l'heureuse époque où le théâtre, 
ainsi traduit, deviendra classique^ je ne vois point 
pourquoi les jeunes gens, et les barbistes en particu- 
lier, se permettraient d'aller au spectacle, surtout aux 
Français, applaudir Talma. Passe encore pour les Va- 
riétés ou la Porte-Saint-Martin, cela ne tire point à 
conséquence ; mais c^est ce que les écoliers d'à présent 
ne veulent point entendre, et voilà, comme le remar- 
que très-bien notre professeur, une des suites de la 
Révolution. 

a II faut que vous sachiez. Monsieur, que j'ai un 
fils, et un fils unique, que j'ai eu la simplicité de met- 
tre à Sainte-Barbe. J'avoue qu'en le voyant élever 
dans l'amour de sa patrie et de son roi, en voyant son 

A . Allusion à la comédie des Incommodités] de la grandeur y par 
le P. Ducerceau, qui fut jouée en Tan XI dans l'institution Planche. 

S. Le Philoctète de Sophocle ûtaussi partie de la représentation 
de l'an XI. 

3. Acteur médiocre qui remplissait les rôles de confident au 
Théâtre-Français* 



148 HISTOIRE 

esprit et ses lumières s'accroître, sa raison se dévelop- 
per, son cœur se former à toutes les vertus d'un bon 
citoyen, j'avais la bonhomie d'être enchanté, et je ne 
trouvais point que l'estimable chef de son collège fût 
un chef si mal a\fisé. Mais, le croiriez-vous. Monsieur? 
cet enfant, qui faisait mon orgueil et ma joie, était un 
des spectateurs les plus bruyants deManlius! C'est 
moi-même qui, sans me douter des suites de ma con- 
descendance, lui avais permis d'aller passer la soirée 
à se divertir avec ses camarades. Eh bien , Monsieur, 
j'ai eu la douleur de voir mon fils revenir enchanté. 
Toute la soirée il ne m'a parlé que de la tragédie de 
Delafpsse, et il dérangeait toute ma bibliothèque pour 
chercher Tile-Live et la conspiration de Venise de 
Saint-Réal, et il partait de là pour établir des parallèles 
entre Ssilluste et Saint- Real, entre Tite-Live et Tacite; 
il comparait le discours de Rutile à celui de Calilina. 
Je vous avouerai ique j'avais la faiblesse de l'écouter 
avec plaisir, et de trouver que, pour un pseudo-bar- 
biste jinon fils était fort instruit et fort aimable. Je me 
rappelais même que nous autres , anciens barbistes, 
avions beaucoup plus de pédantisme et moins d'in- 
struction réelle, et j'étais fier de mon fils, lorsque le 
lendemain matin, en lisant le journal, j'ai vu le tort 
que nous avions eu, moi de me réjouir et mon fils de 
s'amuser. Mais, ce qui va bien plus vous étonner, c'est 
.l'indignation de mon fils quand j'eus lu, d'un ton 
ferme et sévère, le sermon de mon ancien professeur. 
Il me répondit avec chaleur, mais d'un ton respec- 
tueux, qu'il ne voyait point de passe- temps plus noble 
que celui, qu'on lui reprochait; que lui et ses cama- 
rades avaient applaudi avec transport le premier de 



DE SAINTE-BARBE. 149 

. nos acteurs tragiques parce quMls n'avaient point ëté 
maîtres de leur enthousiasme, et qu'ils ne croyaient 
point qu'il fût défendu à leur âge d'être sensibles à ce 
qui est vrai et sublime. Mais, quand j'en vins à ce qui 
regarde Sainte-Barbe elle-même, il s'écria qu'il ne 
souffrirait point qu'on calomniât ses maîtres et ses in- . 
stituteurs, que Sainte-Barbe avait toujours été l'asile 
de la morale et de la religion ; que dans ces temps de 
deuil et de proscriptions qui pesaient sur la France 
entière, Sainte-Barbe avait ouvert son enceinte aux 
sciences éplorees, et, la première peut-être, rallumé 
le flambeau de l'instruction publique; que son chef 
respectable alliait à une sage fermeté des talents 
qui le font estimer et des vertus qui le font chérir; 
que ses anciens élèves étaient restés ses amis, qu'ils 
prendraient tous sa défense et rendraient justice à la 
vérité. 

«Que vous dirai-je enfin, Monsieur? toutes les 
personnes que j'ai interrogées m'ont répondu de même 
que mon fils, ce qui me jette dans une grande incerti- 
tude; car je ne puis croire que mon professeur de troi- 
sième se soit trompé, ou que son intention ait été de 
calomnier. Mais vous m'avouerez qu'il serait bien 
triste qu'un pseudo-barbiste eût plus de bon sens, de 
raison, et surtout de sincérité qu'un de ces vieux 
et véritables barbistes desquels j'ai l'honneur d'être. » 

Il y avait dans cet article des'faits puisés à de bonnes 
sources, et qui ne furent l'objet d'aucune dénégation. 
H n'y en avait pas assez. Il aurait fallu s'informer avec 
plus de soin, retrouver la condamnation portée contré 
là sainte maison qui, pendant l'agonie de Louis XV, 
son bienfaiteur, avait joué la comédie, et tiré des feux 



i50 HISTOIRE 

d'artifice^; il âurak fallu exhumer de la liste de se» 
élèves les noms des régicides et des prêtres qui avaient 
non-seulement renoncé à leur profession, mais porté 
le marteau et la hache dans les églises. Publier cela^ 
sans réflexion ni commentaires, eût été le moyen le 
plus efficace pour dissiper cette légende menteuse 
d'une ancienne école qui n'aurait produit que des ob- 
servateurs scrupuleux de la vie cléricale,que de fidèles 
appuis deTautel et du trône. 

Les ennuis que cette affaire suscita à M. de Lan- 
neau eurent leur compensation dans les marques 
d'estime qui lui vinrent de tous les côtés à la fois. Â la 
façon dont lui écrivirent un grand nombre de ses 
élèves, qu'il avait perdus de vue depuis leur sortie du 
collège, il reconnut qu'il n'avait pas formé des ingrats. 
D'autres, avec qui il était resté en relation, se disputè- 
rent l'honneur de lui faire accepter leurs services, et 
des personnes qu'il ne connaissait pas le consolèrent 
de sa disgrâce. en prenant l'engagement de lui confier 
leurs enfants aussitôt qu'il serait temps de les mettre 
aux études. De là le prodigieux accroissement du 
collège pendant les années qui suivirent; carie nombre 
des pensionnaires atteignit de nouveau, en 4819 et 
1820, celui que l'Empereur avait trouvé exorbitant 
en 1811. De là une surveillance qui s'organisa entre 
les anciens élèves pour la défense de la réputation et 
des intérêts de leur maître bien aimé. 

Cent cinquante d'entre eux environ, qui étaient 
présents à Paris au mois de décembre 1816, se con- 
certèrent pour protester par une démonstration pu- 

1. Voyez ci-dessus, t. II, p. 336. 



DE SAINTE-BARBE. 151 

blique contre la censure que Sainte-Barbe avait es- 
suyée. Ils demandèrent une nouvelle représentation 
de Manlius et des Fausses confidences. Le ministre de 
la Police , averti de cela , fît défendre le spectacle. 
Alors ils convinrent de se rendre tous ensemble aux 
Français un jour que jouerait Talma, et cette partie 
dé plaisir dut être précédée d'un repas de corps. 

Le banquet eut lieu chez le restaurateur Grignon, 
le 21 décembre. Il fut la contrepartie de ceux que les 
barbistes de la Communauté avaient célébrés en 1 800 
et 1807. On y lut des vers français, des vers latins, 
même des vers grecs; mais il n'y eut pas de dindon. 
C'était un oubli, d'autant plus malencontreux que 
M. JoUy, l'auteur des vers grecs, les avait composés 
en rhonneur du dindon. Vatout, qui était l'un des or- 
donnateurs de la fête, s'excusa en disant que, si l'on 
n'avait point servi cette fois le ôlassique volatile, c'était 
afin que certains aristarques ne criassent pas à la per- 
sonnalité. 

On chanta aussi des chansons où n'était point 
épargné l'adversaire à petit collet dont on venait d'es- 
suyer les attaques. O destinée des choses! l'un des au- 
teurs de ces malicieux couplets, M. Mure, alors avoué 
diligent et compagiion de la plus joviale humeur, vient 
de mourir sous Thabit austère de saint Bruno, après 
avoir administré pendant trente ans les biens temporels 
de la Grande-Chartreuse ! 

La présidence avait été déférée à M. Galteaux. Au 
milieu du festin, cet ancien des anciens, le premier 
élève formé à Paris par M. de Lanneau, et qui comptait 
déjà vingt- sept ans d'âge, réclama le silence pour faire 
entendre sa voix vénérable. 



i5âî HISTOIRE 

« Mes amis, dit-il , nous avions l'intention àidl^flr 
ce soir au Théâtre-Français. Nous avons pensé ' 
une action permise il valait mieux substitue 
action louable. Un de nos camarades n'a pu sr 
à nous parce que des malheurs, qu'il a déjàéf 
l'entrée de la carrière de la vie, lui ont fait 
fortune, et l'ont placé dans la situation la 
cheuse. Nous vous proposons de lui faire remet, 
somme qui était destinée à nos plaisirs de la soirée. » 

La proposition fut accueillie par d'unanimes ap- 
plaudissements, et suivie de toasts en l'honneur de 
M. de Lanneau et de Sainte -Barbe. On se sépara 
en se promettant de recommencer tous les ans la 
même fête *. 

Cette jeunesse fut fidèle à sa parole, fidèle au pré- 
cédent qui avait converti en un acte honorable une 
simple rencontre de circonstance. La charité conso- 
lida les réunions de la Sainte-Barbe ; bientôt il en sortit 
une association qui devint une puissance dévouée au 
salut du collège. Nous en reparlerons au moment 
où son action se fit sentir dans nos affaires inté- 
rieures. 



\ . Comptes rendus de Charles du Rozoir dans le Journal gé-- 
néral de France du 22 décembre, et de Charles Bailleul dans le ' 
Journal du Commerce du 25J décembre 1816. 



DE SAINTE-BARBE. ib3 



CHAPITRE X. 



Ketour offensif pour la possession du nom de Sainte-Barbe. — Voyage 
de l'abbé Nicolle à Paris. — Association dite des anciens élèves de la 
Communauté de Sainte-Barbe. — Arrêté de la Commission de Tln- 
struction publique en faveur de M. de Lanneau. — Retour définitif de 
l'abbé Nicolle en France. — La maison de la rue des Postes, érigée en 
collège de plein exercice, prend le nom de collège Sainte-Barbe. — Ré- 
clamation de M. de Lanneau repoussée par le Conseil royal. — 
Consultation de six avocats. — Dualité de Sainte-Barbe. — Mécomp- 
tes de Tabbé Nicolle. — Serment prononcé au banquet du 4 décem- 
bre 1821. 



Les convives du banquet de 1 81 6 comprirent par- 
faitement que la prédilection pour la rue des Postes 
avait dicté Farticte de M. Dussault; mais ils ne de- 
vinèrent pas le but de Tattaque. Les chefs de la coa- 
lition vaincue en 1807 avaient vu jour à tenter avec 
plus de succès une répétition de la même campagne. 
La guerre pour la possession du nom de Sainte- Barbe 
allait recommencer. 

La circonstance qui ralluma cette convoitise fut la 
nouvelle d'un prochain voyage de Tabbé Nicolle en 
France. L'abbé était intimement lié avec le duc de 
Richelieu, alors chef du cabinet de Louis XVIII. Le 
familier d'un ministre tout-puissant s'annonçait comme 
uii personnage qui aurait les bras longs; d'ailleurs on 
était sûr qu'il s'emploierait pour un objet non moins 
cher à son cœur qu'à celui de ses amis. 11 importait 



154 HISTOIRE 

donc de décrier rétablissement qu'on s'apprêtait à 
dépouiller. 

Tel est le serpent qui se cachait sous Fherbe, 
lors de ce retour offensif où les nôtres ne virent 
que le fait d'une inimitié connue. Dix-huit mois 
s'écoulèrent avant qu'ils comprissent de quoi il s'a* 
gissait réellement. Voyons ce qui se passa dans l'in- 
tervalle. 

A la fin de l'histoire de la Communauté de Sainte- 
Barbe^ nous avons laissé Pabbé NicoUe partant pour 
la Russie* Depuis 93 il ne quitta plus ce pays. Il y 
trouva de quoi exercer son talent d'instituteur et son 
goût particulier pour l'éducation des jeunes gens de 
noble famille. Il établit à Saint-Pétersbourg, sous le 
nom à^ Institut j un pensionnat qui eut de la célébrité. 
Une mission dont il fut chargé dans la Russie méri- 
dionale le mit en relation avec le duc de Richelieu^ 
émigré comme lui, qui employait son exil à créer la 
puissance d'Odessa. Le duc de Richelieu s'était jadis 
rencontré avec l'abbé Nicolle sur les bancs du Plessis. 
Ils renouèrent connaissance, et s'attachèrent l'un à 
l'autre d'une vive amitié. Ce fut une raison pour 
l'abbé de se fixer à Odessa. Il y fonda un lycée, qui 
fut presque aussitôt reconnu comme établissement 
impérial^ et son voyage en France eut pour objet de 
recruter des professeurs dont il avait besoin. 

Il arriva à Paris en 1817, aux acclamations du se'- 
nat de la rue des Postes, ce qui ne donna pas à sa 
présence un grand retentissement. L'âge et la con- 
stante fréquentation du plus grand monde avaient 
aplani les aspérités de son caractère; la forme chez 
lui était exquise, mais le fond n'avait pas changé, et 



DE SAINTE-BARBE. 1S5 

les opinions encore moins. Ce n*est pas en Russie qu'il 
avait pu apprendre à pardonner aux événements de- 
vant lesquels il avait fui. Ses préventions contre tout 
ce qu*il allait voir dans son pays étaient de nature à 
le fourvoyer plus d'une fois, malgré ses efforts pour 
être prudent. 

L'idée de rétablir une nouvelle Sainte-Barbe, avec 
le nom et les armes de l'ancienne, lui ayant été pré- 
sentée comme si elle était venue de lui, il s'en empara 
avec une sorte d'enthousiasme. II. en parla partout 
comme d'un de ses vœux les plus anciens, comme de 
l'une des conséquences nécessaires de la Révolution 
vaincue, si bien que par la suite, faisant de sa parti- 
cipation à l'entreprise une affaire de légitimité, il dit 
à qui voulut l'entendre que sa retraite et sa longue 
absence n'avaient pas plus aboli ses droits sur Sainte- 
Barbe, que les mêmes motifs n'avaient aboli les 
droits de Louis XVIII à la couronne de France. 

C'était, bien entendu, l'institution de la rue des 
Postes qui devait servir à la restauration projetée; 
mais comme une vraie Sainte-Barbe devait avoir un 
supérieur ecclésiastique, et que M. Parmentier n'était 
point dans ce cas^ on se mit d'abord en mesure d'a- 
cheter l'établissement. Il se forma dans ce but une 
association dite des anciens élèves de la Communauté 
de Sainte-Barbe, association de très-peu de personnes, 
à laquelle on s'efforça de donner l'importance du 
nombre en y appelant, sans condition, tout ce qu'on 
put déterrer de barbistes d'avant 91 . Plusieurs per- 
sonnes furent très-étonnées de recevoir, à ce titre, des 
diplômes qu'elles n'avaient pas sollicités. Un hono- 
rable universitaire, successivement proviseur à Ca- 



156 HISTOIRE 

hors, à Napoléonville, à Dijon et à Strasbourg*, au 
lieu de se confondre en remercîments de l'honneijr 
qui lui était fait, envoya la pièce à M. de Lanneau. 

L'abbé Nicolle fut le principal bailleur de fonds; il 
fut aussi le législateur de la Communauté renaissante. 
Il en rédigea les règlements; il créa, en remplacement 
de l'ancien sénat Parmentier, deux conseils, Tun d'ad- 
minislration, l'autre d'enseignement; il choisit pour 
être supérieur son ancien élève l'abbé Cottret, alors 
vicaire général de. l'archevêque de Paris. Après cela 
il retourna en Russie, laissant à ses amis le soin de 
faire le reste.. 

Les arrangements définitifs ne furent pris qu'au 
mois de mai 1818. Le journal des Débats l'apprit au 
public par une réclame et par un prospectus annexé 
au numéro où était la réclame*. L'œuvre était annon- 
cée sous le titre di Association des anciens élèves de la 
Communauté de Sainte-Barbe y institution établie rue 
des Postes^ /^® 34. Le but, comme en 1807, était de 
(c rendre à la société cette célèbre école dont le réta- 
blissement était vivement désiré par un grand nom- 
bre de pères de famille. » On lisait à la fin du pros- 
pectus que c'était particulièrement à M. l'abbé Nicolle, 
aumônier du roi (Louis XVJII lui avait conféré ce 
titre pendant son séjour à Paris), directeur du lycée 
Richelieu à Odessa, et l'un des derniers préfets de 
Sainte-Barbe, qu'était dû le rétablissement de cette 
maison, dont il resterait supérieur honoraire. 

L'interminable dénomination énoncée dans le 



i . M. Le Fèvre. 

2. Journal des Débats du 18 mai 1818. 



DE SAINTE-BARBE. V61 

prospectus ne pouvait pas servir pour T usage ordi* 
naire. Messieurs de la rue des Postes la simplifièrent 
en se disant Nouvelle maison de Sainte-Barbe^ et 
c'est comme directeur de la nouvelle tnaison de 
Sainte-Barbe que Tabbé Coltret signa sa correspon- 
dance. U y eut ainsi deux Sainte-Barbe à Paris. M. de 
Lanneau ne tarda pas à s'en apercevoir par les notes 
à payer de Tabbé Cettret qui furent prë^entées à sa 
comptabilité, par les visites de parents qui vinrent 
demander rue de Reims des enfants dont on n'avait 
jamais entendu parler. Une réclamation^ fondée à la 
fois sur les inconvénients d'une pareille confusion et 
sur la décision rendue en 1808, fut envoyée par 
M. Adam à la Commission de l'Instruction pu- 
blique\ 

La Commission de Tlnstruction publique avait tou- 
jours pour président Royer-Collard, qui, sans avoir de 
tendresse pour notre Sainte-Barbe, n*était pas non plus 
son ennemi. Nous tenons de bonne source que Tillustre 
philosophe, lorsqu'il étudiait en droite passa plusieurs 
années de sa jeunesse au collège de Reims, dans le 
voisinage du nôtre, dont les affaires en ce temps-là ne 
lui étaient point indifférentes, à cause des souvenirs 
de famille qui s'attachaient pour lui à cette maison. 
11 savait à quoi s'en tenir sur l'immaculée Commu- 
nauté; il savait aussi ce que valait M. de Lanneau, 
pour l'avoir vu opérer dans l'Université impériale. 
D'ailleurs, comme, dans toutes les questions il allait 
au fond des choses, il n'était pas disposé à admettre 
qu'un nom de lieu fut transporté par la fantaisie de 

4. Le20atûtl8l8. 



488 HISTOIRE 

quelqu'un à un autre lieu, non plus que sa droiture n'au- 
rait favorisé Fusurpation dans un cas de concurrence. 
Il déguisa sous l'apparence de là mauvaise humeur 
l'acte de justice qu'il arracha à ses collègues de la 
Commission ; il dicta dans le style bourru , dont il 
était coutuinier, la réponse à la lettre de M. Adam. 

La teneur consiste en deux points dont voici la sub- 
stance : » 

La Commission n'a point autorisé M. l'abbé Cottret 
à dénommer son établissement Nouvelle maison 
de Sainle-Barbej et elle lui mande de se restreindre au 
titre à' Institution de TUnii^ersité. 

La Commission vous fait observer aussi que votre 
établissement ne peut pas être désigné sous la simple 
dénomination de Maison de Sainte-Barbe. Ces mots, 
Maison de Sainte-Barbe , ne sont pour vous qu'une 
<lésignation de domicile , et non une qualification de 
l'école. Vous pouvez les ajouter , non pas les substi- 
tuer à \otre titre d'Institution de TUniversité *. 

M. de Lanneau n'en demandait pas davantage. Il 
savait la conditionne son établissement dans l'Univer- 
sité : on la lui avait déjà rappelée plusieurs fois; mais 
il n'était pas en son pouvoir de changer les habitudes 
du public, qui depuis vingt ans appelait sa maison 
Sainte-Barbe tout court, ou même Collège Sainte-^ 
Barbe ^ et, en supposant qu'on eût trouvé un moyen 
de répression contre ceux qui s'exprimaient de la 
sorte , la plupart des universitaires, et probablement 
Royer-CoUard lui-même, l'auraient encourue les pre- 
miers. 

i. Lettre du 15 septembre 1818. 



DE SAINTE-BARBE. i59 

La rue dés Postes fut donc vaincue en 1 81 S, comme 
elle Tavait été en 1808. Il est à croire qu'elle ne se- 
rait plus revenue à la charge, si Royer-CoUard fût resté 
à rinstruction publique et Tabbé Nicolle en Russie. 
Mais le cours des événements fit que Royer-CoUard 
abandonna la direction de l'Université pour se livrer 
entièrement à la politique , et que Tabbé Nicolle eut 
avec Tarcbimandrite et les popçs d'Odessa une que- 
relle qui le ramena en France pour toujours. •. 

On raconte que le clergé russe , jaloux de l'ascen- 
dant que le directeur du lycée Richelieu avait pris 
sur les mères de ses élèves, l'accusa de faire de la pro- 
pagande catholique. Celui-ci courut à Saint-Péters- 
bourg pour se justifier. Il ne réussit pas ; une rup- 
ture s'ensuivit. 

De retour à Paris en 1820, il n'eut qu'à s'élever 
sur l'échelle que lui tendit le duc de Richelieu. On 
lui offrit d'être évéque : il aima mieux siéger dans la 
Commission de l'Instruction publique, alors transfor- 
mée en Conseil royal. Bientôt une ordonnance célèbre, 
rendue à sa suggestion, constitua à Paris un rectorat 
dont les attributions immenses furent remises en ses 
mains ^ 

Nous n'avons point à nous étendre ici sur l'usage 
qu'il fit de sa puissance pour la direction générale de 
l'enseignement. La fermeture du cours de M« Cousin 
à la Faculté des lettres , la suppression de l'École 
normale^ l'ancienne agrégation rétablie, mais avec 
des démarcations et des sujétions qui annulaient l'in- 
dépendance des professeurs, le programme des études 

1. 27 février 1821. 



160 HISTOIRE 

ramené autant que possible à ce qu'il était en 1780, 
des troubles maladroitement comprimés, et en der- 
nier lieu une irritation telle que le gouvernement, pour 
refréner un zèle qui le compromettait, fut obligé de 
replacer, comme du temps de TEmpire, le rectorat 
dans les attributions du Grand-maître, déjà rétabli 
quelque temps auparavant: voilà par quels actes Tabbé 
Nicolle se signala devant le public. 

Sa conduite à Tégard de notre collège ne fut pas 
plus* mesurée. On dirait que l'exercice du pouvoir eut 
pour utilité principale, à ses yeux , rétablissement de 
la contre-Sainte- Barbe, depuis si longtemps en projet, 
tant il fit jouer de ressorts pour parvenir à cette fin. 

En même temps qu'il prenait la supériorité active 
de la maison de la rue des Postes et qu'il en faisait 
passer la régie, des mains de l'abbé Cottret, démis- 
sionnaire, dans celles de son propre frère, M. HeYiri 
Nicolle, ci-devant libraire, il eut soin que l'ordon- 
nance constitutive du rectorat dont il allait être revêtu 
attribuât au recteur même la prérogative de rappor- 
ter au Conseil royal toutes les affaires concernant les 
collèges et les institutions *; de sorte qu'il s'exposa, de 
sa libre volonté, à être le juge prépondérant des causes 
où son école se trouverait partie. 

Il fit encore statuer par la même ordonnance que 
les maisons particulières d'éducation pourraient, à titre 
de récompense, être converties en collèges de plejn 
exercice, sans cesser d'appartenir à des particuliers; et 
afin que l'on comprît mieux où il avait voulu en venir 
par là, cette faveur, à peine inscrite dans la loi , échut 

1 . Titre II, art. 8 de Tordonnance da 27 février i 821 . 



DE SAINTE-BARBE. ICI 

du même coup à l'institution de la rue des Postes et à 
celle de l'abbé Liautard, élève, comme l'abbé Nicolle, 
de l'ancienne Communauté. 

La transformation fut effectuée par un arrêté du Con- 
seil royal , le 28 août 1821 *. Il y eut cette singularité 
que le Conseil ne prit pas sur lui de iDaptiserles deux 
nouveaux collèges. Les noms qu^ils reçurent furent le 
résultat d'arrangements particuliers. M. Liautard reçut 
pour le sien le nom de Collège de Notre-Dame des 
Champs , à cause de la rue où il était établi , et il n'en 
.fut content qu'à demi; car il ne tarda pas de solliciter 
et d'obtenir du Roi lui-même le nom de Stanislas^ 
qui était l'un de ceux que Louis XVIII avait reçus au 
baptême. Quant à l'établissement de MM. Nicolle, dé- 
nommé dans l'arrêté du Conseil Institution de la rue 
des Postes^ connue sous le nom d^ /Association des an- 
ciens élèi^es de la communauté de Sainte-Barbe ^ il de- 
vint le Collège de Sainte-Barbe dans les prospectus et 
dans les articles de journaux qui instruisirent le public 
de son changement de condition '. 11 ne fut tel dans 
PAlmanachde l'Université qu'en 1823. 

Lorsque cette bombe éclata , le diplôme pour la di- 
rection de notre Sainte-Barbe avait passé des mains 
de M. Adam dans celles de M. de Lanneau fils. A la 
vue du conflit qui s'élevait de nouveau, le père ne 
voulut pas qu'un autre que lui reçût les éclaboussures. 
Il crut avoir le droit de réclamer comme propriétaire 
de rétablissement. 11 écrivit au Conseil royal, en rappe- 
lant les deux décisions déjà rendues le 1 9 janvier 1 808 

1. Moniteur du 16 septembre 1 821 . 

2. Moniteur du 1 3 octobre J 821 . 

m 11 



162 HISTOIRE 

et le 15 septembre 1818 au sujet' du nom de Sainte* 
Barbe'. 

Comme l'Université n'avait pas établi de distinction 
entre les propriétaires et les directeurs des maisons 
d'éducation; la réponse fut envoyée à M. de Lanneau 
père , avec la remarque qu'elle s'adressait à son fijs 
plutôt qu'à lui. Cette réponse disait que le Conseil 
royal , en érigeant la maison connue sous le nom, etc. , 
en collège de plein exercice , n'avait rien voulu chan- 
ger à la décision de 1 81 8 ; qu'ainsi M. de Lanneau fils 
restait libre d'ajouter les mots Maison de Sainte-Barbe 
au titre d'institution de l'Université, et que cette dé- 
signation , opposée au titre de collège de plein exercice, 
qui était celui de l'autre maison , empêcherait de con- 
fondre les deux établissements \ 

Cuvier , le grand Cuvier , écrivit en entier de sa mam 
cette lettre^ qu'on ne peut lire sans un sentiment pé- 
nible , car elle contient la défense peu sincère d'une 
thèse insoutenable, en même temps que l'aveu de 
la faiblesse du Conseil, asservi par le tout-puissant 
recteur. On s'évertue à faire comprendre, par les ter- 
mes dans lesquels on s'exprime, qu'on n'a point 
autorisé une usurpation , laquelle cependant on laisse 
subsister. On dit qu'on se conforme à la décision 
de 1818 , lorsqu'on admet la dualité de nom, et qu'au 
contraire la décision de 1818 avait défendu cette 
dualité. On ose prétendre qu'un déterminatif, dont la 
valeur n'est connue que des gens spéciaux, suffira pour 
que le public ne se trompe pas entre les deux Sainte-* 



1. Lettre du 29 septembre 1821. 

2. Lettre du 28 octobre 1821 . 



DE SAINTE-BARBE. 163 

Barbe. Que de mauvaises raisons pour un homme 
consommé dans la pratique des affaires comme Tétait 
Cuvier! Pourquoi faut-il que la force du caractère 
n'accompagne pas toujours l'élévation du talent ! 

Cependant la nouyelle Sainte-Barbe/ ouverte en 
grande cérémonie, faisait redire son inauguration par 
toutes les trompettes de la renommée. Les amis de la 
nôtre , surpris , indignés , accoururent en foule auprès 
de M. de Lanneau pour lui apporter leurs conseils et 
leurs offresdeservice. Des articles que plusieurs d entre 
eux avaient écrits ayant été arrêtés par la censure, ils 
voulaient que Ton fit du bruit, que Ton s'adressât aux 
chefs de l'opposition politique, que Ton employât les 
dispositions particulièrement bienveillantes du général 
Foyetde Benjamin Constant. Peu s'en fallut que la ques- 
tion ne fût portée à la tribune. M. de Lanneau modéra 
cet emportement, il pensa que le Conseil n'avait pas dit 
son dernier mot ; que les membres de ce corps émi- 
nent avaient pu négliger, dans un premier examen, des 
considérations auxquelles la plupart d'entre eux n'é^ 
talent point habitués ; qu'un intérêt commercial rési- 
dait au fond du débat, et qu'en appelant leur atten- 
tion de ce côté, on les amènerait peut-être à réformer 
leur sentence.* Dans cette pensée, il fit appel aux lu- 
mières des plus célèbres jurisconsultes du temps. 

Après un examen approfondi de tous les points de 
fait, de droit, de jurisprudence, Dupin aîné rédigea 
une savante et judicieuse consultation, qu'il envoya à 
Sainte-Barbe, comme un témoignage de sa considéra- 
tion pour un établissement renommé. En terminant sa 
lettre d'envoi, il salua le vénérable instituteur à qui elle 
était adressée par ces paroles, empruntées à Quiuti- 



164 HISTOIRE 

lien : Quod majus emolumenlum rei publicœ afferre 
possumusy quant si erudimus juventutem^ prsesertim 
his temporibusl 

Ijdi consultation, délibérée le 4 décembre 1821 , jour 
de la sainte Barbe ,fut signée de MM. Dupin, Delà- 
croix-Frainville, alors bâtonnier de Tordre des avo- 
cats, Gairal, Hennequin, Berryer fils et Devaux 
(du Cher). Trois semaines après, on en adressa uii 
exemplaire imprimé à chacun des membres du Con- 
seil royal, avec une lettre, imprimée également, dont 
M. de Lanneau père voulut prendre encore sur lui la 
responsabilité, en y apposant sa signature *. 

Cette dernière circonstance procura une porte de 
sortie au Conseil, fort embarrassé de ce qu'il devait 
répondre. Il décida qu'il n'y avait pas lieu de déli- 
bérer sur la réclamation de M. de Lanneau père, son 
fils ayant seul qualité pour faire une pareille dé- 
marche, et c'est à l'abbé Nicolle que fut laissé le plaisir 
de notifier à son adversaire vaincu cet arrêté, monu- 
ment de son propre triomphe *. 

Quoique M. Nicolle offrît courtoisement au fils de 
recommencer la partie d'où le père avait été écarté, 
ou plutôt, parce que M. Nicolle fit cette offre, MM. de 
Lanneau perdirent tout espoir. Ils virent un signe 

1. Consultation pour M. de Lanneau père, fondateur et pro- 
priétaire administrateur de l'Institution, Maison de Sainte-Barbe. 
2 feuilles in-4°, impr. de Crapelet. — Copie de la lettre adressée 
par M. de Lanneau père à M. le président du Conseil royal de 
rinstruction publique, en lui envoyant la consultation relative à 
Tusurpation du titre àe Sainte" Barbe par M. Henri Nicolle, di- 
recteur du collège de plein exercice, rue des Postes (25 décembre 
1821); demi- feuiliein-4\ ; 

2. Arrêté en date du 8 janvier 1822, notifié le 12. - 



DE SAINTE-BARBE. 165 

menaçant dans le choix de leur compétiteur pour être 
Tunique intermédiaire entre le Conseil et eux, el, se 
rappelant le billet signé Richelieu, au moyen duquel 
avait été clos naguère dans le sein du Conseil le débat 
relatif à M. Cousin, ils ne doutèrent point qu'un sem- 
blable écrit ne se trouvât encore dans la poche du rec~ 
teur, lorsque leur affaire reviendrait à la discussion. 
Ils cessèrent donc d'invoquer la justice du Conseil. 

La consultation des avocats établissait la légitimité 
du recours aux tribunaux. On s'abstint après réflexion 
de s'engager dans celte voie, car, le procès gagné, 
comment s'en serait-on tiré avec l'administration ? Et 
puis quel éclat! quelle émotion au dehors! au dedans! 
Afin de ne pas porter là où il ne devait pas être porté 
le drapeau sous lequel s'abritait une jeunesse déjà 
trop agitée, on prit le parti de la résignation. On atten- 
dit des teilips meilleurs et le jour de la justice. 

Dès lors il y eut à Paris deux Sainte-Barbe, une 
bonne et une mauvaise, selon ropinion des personnes; 
et la prédilection elle-même ne sut pas toujours dis- 
cerner l'une de l'autre par le domicile. Qu'on juge 
par là à combien dé méprises donna lieu la force de 
l'habitude parmi les indifférents. Les commissionnaires 
et les cochers de fiacre se dirigèrent le plus souvent 
vers la rue de Reims, lorsqu'ils entendirent prononcer 
le nom de Sainte-Barbe. Des lettres importantes furent 
relardées dans leur marche, des personnes amenées à 
notre collège, lorsqu'elles se proposaient d'aller à l'au- 
tre ; puis, par un revirement subit, qu'on assura être 
un effet des ordres de la police, ce fut presque tou- 
jours au détriment de la Sainte-Parbe de Lanneau que 
les erreurs se reproduisirent. 



166 HISTOIRE 

On raconte de ce temps-là leis plus étranges aven- 
tures. Un élève, envoyé de province à M. de Lanneau, 
fut placé et enregistré dans rétablissementdeMM. Ni- 
colle. En revanche, M. de Lanneau reçut la significa- 
tion d'un jugement rendu contre M. Henri Nicolle 
pour défaut de payement de billets endossés par lui*. 

Nous n'omettrons point un fait qui fut tout aussi 
piquant, quoique d'un autre genre. 

L'abbé Nicolle, ayant réprimé l'essor de la philo- 
sophie, s'imagina mettre désormais cette science en 
brassière, s'il la forçait, dans les collèges, à s'exprimer 
de nouveau en latin, selon l'usage observé avant la 
Révolution; et comme, en introduisant cette utile ré- 
forme, il ne voulut point passer pour un adversaire 
des études philosophiques, il fit adjuger au prix du 
grand concours pour la dissertation latine de philo- 
sophie les mêmes avantages qu'au prix de discours 
latin de la rhétorique. Il est ainsi le créateur du prix 
d'honneur de philosophie. Or le premier qui rem- 
porta cette récompense fut un élève de M. de Lanneau, 
le jeune Edmond de Bussierre, qui a été plus tard le 
baron de Bussierre, pair de France, ambassadeur à 
Naples, puis membre du Conseil d'administration du 
collège, seule dignité qu'il conserve aujourd'hui. 

C'était bien le moins que la pauvre Institution- 
Maison-Sainte- Barbe eût de temps en temps des con- 
solations de ce genre. Son vainqueur l'écrasait. 
Avec lui elle perdit non-seulement le prestige de son 
nom, mais le principal élément de sa force^ ses classes 



i. Constitutionnel des 1*% 2 et 3 août d822; Courrier français 
des 2 et 3 août. 



DE SAINTE-BARBE. 467 

intérieures, qu'elle dut supprimer, parce que ses ex- 
cuses pour les maintenir ne furent plus admises. Il ne 
lui resta de son enseignement propre que le cours 
de commerce et les petites classes des commençants. 

Toutes les rigueurs d*un côté et toutes les faveurs de 
l'autre, du scandale, des embarras pour Tadministra- 
tion des deux établissements, des tracas, des chagrins 
suscités à un homme digne de tous les respects, tels 
furent les fruits de la compétition que Fabbé NicoUe 
poursuivit si despotiquement, et Ton peut ajouter, si 
inutilement, lorsque l'on considère le résultat final ; 
car de tout ce qu'il avait prétendu faire, rien ne s'ac- 
complit. 

A l'entendre, il allait former son école à la ressem- 
blance de l'ancienne Communauté : et son école fut 
tout bonnement un collège privilégié, avec un chef 
propriétaire, assisté d'un ecclésiastique, avec dès pro- 
fesseurs salariés, appartenant à l'instruction publique. 

Il devait constituer un corps enseignant d'une doc- 
trine particulièrement épurée : et lorsqu'il en vint à 
faire son choix, il ne tint compte que du mérite, de 
Sorte qu'il prit du monde de toutes les provenances, 
et que ce fut la Sainte-Barbe de la rue de Reims qui 
hii fournit son professeur de philosophie. Ce profes* 
seur, qui était M. Bouilïet, ne s'engagea au service de 
l'abbé qu'avec l'agrément de M. de Lanneau. 

Il avait promis à la Légitimité que sa maison serait 
pour elle une pépinière de défenseurs r et si l'on re- 
cherche les noms des sujets qu'il eut sous lui, tandis 
qu'il fut supérieur, on verra que la Légitimité n'a pas 
plus trouvé de défenseurs parmi eux que parmi les 
sujets formés dans les autres maisons d^éducation. 



168 . HISTOIRE 

Il s'était flatté d'asseoir sur l'association les bases 
d'un établissement impérissable : et son association, 
composée de lui et de quelques amis de collège qui ne 
voyaient que lui dans l'entreprise, soutenue par son 
argent et par des dons bénévoles, arriva si vite au 
bout de ses ressources, qu'après six ans d'exercice, la 
maison était menacée de faillite, si la ville de Paris ne 
Teût libérée de ses dettes et achetée pour l'exploiter à 
son compte. 

Ainsi, il resta de l'entreprise un collège communal, 
pareil à tous les collèges communaux ; un collège qui 
brilla et brille encore par les études, mais qui n'aurait 
pas eu moins de succès sous un tout autre nom que 
celui qu'il eut d'abord et qu'il ne garda pas; un collège 
enfin pour la création duquel il n'était nécessaire ni 
de changer les lois, ni de violer le droit. 

M. l'abbé NicoUe eut la douleur d'assister à la ruine 
de toutes ses espérances. La révolution de 1 830, pour 
lui sans ménagements, le relégua dans la vie privée, 
où la mort vint le trouver le 2 septembre 1835. Il 
supporta l'adversité avec résignation, s'occupant, dans 
le loisir forcé qui lui fut fait, de composer un livre 
qu'il intitula : Plan d'éducation ou Projet d!un collège 
nou^eau\ « Plan d'éducation » est de trop, car le 
livre ne traite pas de ce qu'on appelle ordinairement 
l'éducation; quant au projet proposé, il laisse trop 
voir le regret de ce que le nouveau collée de Sainte- 
Barbe, après son adoption par la ville de Paris, ait 
cessé d'être une propriété particulière. Mais la distri-. 
bution du travail dans les classes et tout le détail de' 

1. In-8% Paris, Gosselin, 1834. 



DE SAINTE-BARBE. 169 

renseignement, qui forment la partie la plus considé- 
rable de l'ouvrage, sont traités avec une parfaite in- 
telligence. L'auteur montre là les qualités d'un excel- 
lent préfet des études. 11 n'aurait jamais dû être 
davantage dans le gouvernement de l'instruction. 
Plaignons-le d'avoir poussé à l'excès la déférence pour 
un ami, s'il est vrai, comme il le dit dans une de ses 
lettres, qu'il n'accepta sa haute position qiie pour obéir 
à M. de Richelieu \ 

Quant aux maux qu'il a faits à notre Sainte-Barbe, 
qu'ils lui soient pardonnes en considération de l'effet 
qu'ils ont produit. La persécution de 1821 resserra 
entre les élèves de M. de Lanneau les nœuds formés 
par la persécution de 1816. I^ serment d'une union 
))lus étroite fut prononcé au banquet du 4 décembre. 
C'est Vatout qui exprima dans le langage héroï-co- 
mique, qu'il maniait avec tant de grâce, le sentiment 
très-sérieux de ses camarades : 

« Sainte-Barbe, dit-il, Sainte-Barbe, forte de ses 
droits, fidèle aux lois qui les ont consacrés*, ne courbera 
point sa tête sous le knout académique. Je vous atteste, 
oiseau classique, que, par respect pour nos prédéces- 
seurs, nous servons en holocauste dans nos banquets 
de fête ; et toi, légume héréditaire, qui décores les 
flancs de la noble victime! Je vous atteste, vieux murs 
relevés par les mains de notre vénérable mentor! Je 
vous atteste, muses fugitives, vous qu'il a recueillies 
au milieu des orages, vous dont il a réparé les autels ! 
Je vous atteste, enfin, pompes solennelles des combats 
littéraires où nos frères ajoutent chaque année de nou- 

i . Vie de Tabbé Nicolle par Pabbé Frappai (1857), p. 164. 



170 HISTOIRE 

yeaux lauriers aux couronnes qui ceignirent nos jeunes 
fronts ! Vous êtes nos armes, nos appuis, nos titres, 
nos protecteurs au tribunal de l'opinion publique; 
\ous êtes notire légitimité : nous saurons la défendre. 
Les Prométhées de TEstrapade ne déroberont pas le 
feu sacré que Sainte-Barbe a commis à notre garde *. » 



CHAPITRE XI. 



Esprit de révolte parmi les écoliers au commencement de la Restaura- 
tion. — Hostilité avec l'institution Liautard. — L'abbé Liautard. — 
Révolte de 1815. — Les Grecs et les Troyens. — L'abbé Eliçagaray. 

— Révolte de 1817. — Révoltes de i8i9 à Louis-le-Grand et à 
Sainte-Barbe. — Révolte de 1820. — La Saint-Charlemagne de 1824. 

— État prospère des études. — Les maîtres de la nouvelle génération 
à Sainte-Barbe. 



Les mutineries d'écoliers sont de tous les temps et 
de tous les lieux. Il n'y a pas de discipline qui en soit 
préservée. Les maisons où le public croit qu'il n'en ar- 
rive pas sont celles où Ton sait s'y prendre pour les 
tenir secrètes. Peut-être a-t-on raison de chercher à les 
dissimuler. Quant à les tirer de l'oubli après que les an- 
nées en ont efiacé la mémoire, elles n'en valent pas la 
peine. Il n^en faut pas plus parler que de la fièvre 
ou des accès de goutte dont les gens ont pu souffrir 

1. Compte-renda du banquet du 4 décembre 1821, dans les 
Fêtes annuelles des anâens élèves de Sainte-Barbe, 1. 1, p. 60. 



DE SAINTE-BARBE. 171 

en leur vie. L'attention de l'histoire leur est due 
cependant, si elles se présentent à une époque comme 
un fait général^ si elles sont un signe du temps. Tel est 
le caractère des désordres si fréquents dont furent 
affligés, pendant les premières années de la Restaura- 
tion, la plupart des collèges royaux et des grands pen- 
sionnats. C'est pourquoi nous retournerons en arrière 
pour jeter un coup d'œil sur les troubles de ce genre 
qui eurent lieu à Sainte-Barbe, et sur ceux de Louis- 
le-Grand, quand Sainte-Barbe les a ressentis. 

Tous eurent leur aliment dans Timpétuosité d'une 
jeunesse à qui les oreilles tintaient des bruits du de- 
hors, qui avait vu trois gouvernements crouler sous 
ses yeux en quatorze mois, et qui était travaillée des 
regrets dont nous avons déjà eu l'occasion d'expli- 
quer la causée Par là, ces troubles eurent le caractère 
politique, ou, si l'on aime mieux, ils furent le contre- 
coup des événements politiques. Lors même qu'il n'y 
eut au fond que des rivalités ou des rancunes enfan- 
tines, ceux qui y prenaient part crurent obéir à des 
sentiments plus élevés. Ils étaient tout frémissants de 
cette liberté dont le tardif apprentissage commençait 
pour tout le monde ; ils brûlaient de prouver qu'ils 
seraient bientôt des hommes, et des hommes capables 
de relever la patrie humiliée. Quant à la violence 
toujours croissante des coups de mains, elle doit être 
attribuée à la présence, dans les classes, de jeunes gens 
qui, ayant été retirés momentanément du collège en 
1814 et 1815, furent remis plus tard aux études, et 
se trouvèrent mêlés avec des condisciples plus jeunes 

1. Ci-dessus, p. 133 



ili HISTOIRE 

qu'eux, sur lesquels leur âge leur donna de plein droit 
le eommandement. 

Pour prendre les choses au début, il faut mention- 
ner des escapades et débandades auxquelles les bar- 
bistes se livrèrent dès 1 81 4, pour tomber sur les élèves 
de Tabbé Liautard. Nous avons déjà vu Thostilité 
commencer entre les deux institutions. Il est d'autant 
plus à propos d'y revenir que Tabbé Liautard, élève 
de l'ancienne Saintè-Barbe, n'est pas un personnage 
étranger à notre sujet. 

Cet instituteur pouvait se dire, à bien plus juste titre 
que Fabbé Nicolle, le représentant des droits et de 
l'esprit de la ci-devant Communauté. Il ne quitta 
Sainte-Barbe que le jour où la maison fut réduite au 
régime constitutionnel, et il fit partie de la petite 
escouade qui suivit MM. Formantin et Borderies 
dans la rue de Montreuil*. Les patriotes du faubourg 
Saint*Ântoine étant venus balayer aussi ce dernier 
asile, le jeune Liautard ne songea point, après la 
dispersion définitive, à aller rejoindre d'illustres pro- 
tecteurs qu'il comptait dans l'émigration, il obéit aux 
lois, en prenant les armes pour la défense de son pays. 
C'est aux armées et dans le tumulte des sociétés po- 
pulaires, en faisant son devoir et en exposant sa per- 
sonne, qu'il nourrit l'implacable haine dont son édu- 
cation première l'avait animé envers la Révolution. 
Reçu plus tard à l'Ecole polytechnique, il en sortit 
presque aussitôt pour refus du serment de haine à la 
royauté; puis, sous les yeux de ses maîtres Forman- 
tin et Borderies, qu'il avait retrouvés, il se prépara au 

i. Ci-dessus, t. II, p. 404. 



DE SAINTE-BARBE, 173 

sacerdoce aussitôt que les études ecclésiastiques furent 
rétablies en France. Il ouvrit son pensionnat en 1804, 
sans afficher la puérile convoitise du nom de Sainte- 
Barbe, lorsque ce nom était devenu la propriété d'un 
autre. 11 était de ceux à qui les mots importent peu, 
pourvu qu'ils obtiennent les choses. Sa volonté fut de 
tenir une école de royalisme, et il y réussit avec un 
succès qu'il ne fut donné d'obtenir qu'à lui seul de tout 
son parti. 11 ne se compromit pas par des démonstra- 
tions imprudentes. Son moyen consistaà prendre le plus 
grand nombre de ses élèves dans les familles intéres- 
sées au retour des Bourbons, c'est-à-dire dans les 
familles de l'ancienne noblesse, et au contact de cette 
jeunesse, dont l'éducation politique n'était plus à 
faire, il mit des enfants du vulgaire voués d'avance à 
l'état ecclésiastique. Il prépara ainsi l'alliance de l'autel 
et du trône, laquelle il avouait tout haut comme le 
but de ses efforts, mais sans s'expliquer sur le trône 
qu'il avait en vue, de sorte que l'Empereur lui-même 
trouva du bon dans l'abbé Liautard, et que, malgré 
les avertissements de sa police, il se refusa toujours à 
faire fermer l'établissement de cet instituteur, le plus 
indocile de son Universités 

Toutes ces choses ne transpirèrent qu'après le 
changement de gouvernement. Aussitôt qu'elles furent 
connues et comprises, la répulsion instinctive que les 
élèves d§ l'abbé Liautard avaient inspirée lors de leur 
arrivée au milieu de la population écolière se tourna 
en inimitié de parli. C'est alors que nos barbistes. 



i. Mémoires de M. l'abbé Liautard, fondateur du collège Sta- 
nislas, par M. l'abbé Denys, t. I. 



174 HISTOIRE 

SOUS couleur de se mesurer avec des adversaires po- 
litiquesy poursuivirent la veDgeance des coups de 
poing qu'ils avaient reçus en 1810, et qu'ils avaient 
toujours sur le cœur. Les rencontres n'ayant jamais 
eu des conséquences graves, Tautorité universitaire 
n'eut point à en connaitre. Il en fut autrement pour 
les troubles intérieurs. 

C'est la première division de Sainte-Barbe, appelée 
le Grandrcollége , qui fut constamment le théâtre de 
ces troubles. Le Grand-coliége occupait la totalité de 
l'emplacement loué à Tancienne Communauté, c'est- 
à-dire la partie du terrain tournée du côté de Louis- 
le-Grand. Il contenait toutes les hautes classes depuis 
la quatrième. Là gémissaient et grinçaient des dents, 
après la rentrée des classes de 1815, la plupart des 
grands garçons qui, quatre mois auparavant, s'é- 
taient proposés pour la défense de Paris. Ils avaient 
vu Paris rendu sans coup férir. Chaque jour augmen- 
tait leur douleur, qhaque jour leur apprenait de nou* 
veaux traits de l'insolence des alliés et de la fureur de 
la réaction. La discipline dut se resserrer autour d'eux 
dans la crainte de démonstrations compromettantes. 
Leur courroux se tourna alors contre les maîtres qui 
les gardaient si étroitement. Le supplice du maréchal 
Ney, les bruits qui circulaient sur les cours prévôtales 
qu'on allait rétablir, achevèrent de leur tourner la 
tête. L^un des mécontents, d'un caractère énergique, 
et qui exerçait déjà autour de lui l'ascendant d'un chef 
de parti, qu'il fut plus tard, induisit une vingtaine de 
rhétoriciens et de philosophes à protester par l'insur- 
rection contre la justice prévôtale du collège. 

Le 19 décembre 1815, les conjurés s'enfermèrent 



DE SAINTE-BARBE. 17^ 

dans l'ancienne chapelle, divisée alors en plusieurs 
salles d'étude, ils n'en occupaient qu'une pièce, dont 
ils avaient fortement barricade la porte. La Direction 
donna Tordre aux gens de service de les prendre à 
revers par une cloison qui régnait sur l'un des côtés de 
la salle. Il suffit de faire sauter une planche. La résis- 
tance ne fut pas longue. Un projectile lancé à l'aveugle 
par la brèche qui venait de s'ouvrir ayant atteint lé- 
gèrement M. de T^anneau, Témotion que cela produisit 
au dehors fit tomber le courage des assiégés. Us se sou* 
mirent. Des expulsions furent prononcées. La Commis- 
sion de l'Instruction publique en reçut la déclaration 
en même temps que le rapport de ce qui s'était passe. 
En ce moment on ne savait où donner de la tête à 
l'Université. I^ Commission de l'Instruction publique, 
investie à la fois des pouvoirs du Grand-maître et des 
fonctions de l'ex-Conseil impérial, avait à statuer sur 
d'autres désordres du même genre, arrivés en d'autres 
lieux, et sur les dénonciations contre les personnes, 
qu'elle recevait en masse. Elle travaillait sans désem- 
parer à l'épuration du corps enseignant et des collèges, 
destituant les professeurs et les boursiers par centaines» 
Le tour de Sainte-Barbe ne vint qu'au mois de 
janvier 1816. Une enquête fut ordonnée, et sur le 
rapport des inspecteurs, Royer-CoUard, comme pré- 
sident de la Commission, écrivit une lettre de félicita- 
tion pour la promptitude avec laquelle le bon ordre 
avait été rétabli. Ses compliments s'adressaient à 
MM. de Lanneau et Mouzard, chefs de l'Institution, et 
à M. Fayard, leur collaborateur K 

i. Lettre du 23 janvier 1816. 



476 HISTOIRE 

Voici le nom d*un utile et modeste fonctionnaire 
que bien des générations de barbistes ont connu. En- 
tré au collège en 1803, M. Fayard ne prit sa retraite 
définitive qu'en 1840. Sous M. de Lanneau père, il 
remplissait avec un dévouement à toute épreuve rem- 
ploi souvent ingrat d'inspecteur. Sa sévérité un peu 
brusque souleva plus d'une fois la tempête. C'est à lui 
particulièrement qu'en voulaient les révoltés de 1 81 5. 
Il tint pour un titre glorieux Téloge qui lui fut dé- 
cerné en cette circonstance par les chefs suprêmes de 
r Université. 

Tandis que ces choses se passaient en rhétorique, 
l'effervescence affectait d'une manière différente les 
classes placées au-dessous de la rhétorique. 

L'usage s'était depuis longtemps établi que les qua* 
trièmes, à leur arrivée au Grand-collège, payassent 
leur aubaine par des tourments qu'ils subissaient de 
la part des troisièmes. En 1815-1816, les élèves de 
seconde, qui l'année précédente avaient usé de ce 
droit sur les nouveau-venus, le déclarèrent aboli dans 
un accès de libéralisme. Ils signifièrent aux troisièmes 
de s'abstenir de tout mauvais traitement envers leurs 
camarades de la classe inférieure. Cela mit l'hostilité 
entre les deux classes. Elles formèrent deux camps 
sous les noms de Grecs et de'Troyens. Les Grecs 
étaient les élèves de seconde. Ils eurent leur Achille, 
de même que leurs antagonistes eurent leur Hector, et 
l'issue fut la même que sous les murs d'Ilion. Achille 
rossa Hector d'une si belle manière, que celui-ci 
tomba par terre sans connaissance. Achille fut renvoyé 
à ses parents ; mais l'insolence du succès resta dans 
les cœurs de la classe victorieuse, et Ton vit poindre 



DE SAINTE-BARBE. il! 

pour Fannée d'après une rhétorique encore plu^ tur- 
bulente que celle qui était sur les bancs. ' 

Il faut savoir qu'autrefois, à Sainte-Barbe, toutes 
les punitions d'un caractère enfantin cessaient en 
rhétorique. C'était un principe de la politique du Di- 
recteur, qui voulait, en accordant à ses élèves d'un 
certain âge un privilège capable de leur inspirer le 
respect d'eux-mêmes, leur faire accomplir sous ses 
yeux le premier pas vers la virilité* Cette pensée 
philosophique ne s'accordait pas avec le principe de 
l'égalité. L'inconvénient se révéla, lorsqu'à fa fierté 
qui résultait du privilège se mêla l'esprit d'insubor- 
dination. 

Les rhétoriciens de 1816-1817 furent en effet les 
élèves les plus difficiles que M. de Lanneaii, de son 
aveu, ait jamais eu à conduire. C'est d'eux que partit 
l'idée de la représentation de Manlius. Ils se livrèrent 
bientôt à des écarts, d'autant plus graves aux yeux 
de la Commission de l'Instruction publique, qu'entre 
le rapport qu'elle en reçut et les plaintes portées à^ 
cause de l'affaire du Théâtre-Français, son attention 
avait été appelée sur un autre incident. 

Parmi les créatures du nouveau régime, se faisait 
remarquer un abbé Eliçagaray, homme d'une can- ' 
deur étonnante et nourri d'idées de l'autre siècle, qu'il 
exprimait avec la sérénité de sa bonne intention. Ce 
n'est pas qu'il fût toujours calme et pacifique. 11 n'é- 
tait pas méridional pour rien. Il avait ses moments 
de vivacité, dont plus d'un eut à souffrir autour de 
lui. Il avait aussi ses accès d'enthousiasme. L'atten- 
drissement chez lui touchait aux larmes, lorsqu'il ra- 
contait les choses de son jeune temps, surtout les 
m 12 



178 HISTOIRE 

fortes études d'autrefois, et l'enseignement de la phi- 
losophie en latin, et les thèses aussi en latin, que l'on 
soutenait depuis huit heures du matin jusqu'à cinq du 
soir, tenant la riposte prête à tout venant, huvant et 
mangeant sur place, usque ad exslinciionem argument 
torum et dieil 

Tel quel, l'abbé Eliçagaray fut trouvé bon pour être 
mis à la tête de rUniversité. On le nomma coup sur 
coup inspecteur général, puis membre de la Commis- 
sion de rinstruction publique, et plus on le fit 
monter, plus on l'exposa aux sarcasmes de l'opposi- 
tion, qui avait fait de lui son souffre-douleur. Il y prê- 
tait le flanc par la manie qu'il avait de pérorer à tout 
propos. Or le lieu commun de ses allocutions était 
l'éloge du célibat, opposé à l'état de l'homme marié, 
et cela pour en venir à la conclusion que les meilleurs 
instituteurs de la jeunesse étaient les ecclésiastiques. 
Étant en tournée d'inspection à Louis-le-Grand, au 
commencement de 1817, il tint un discours de ce 
^ genre, qui excita les ricanements des élèves. L'abbé, 
un peu déconcerté, interpella l'un des rieurs, qui lui 
répondit par une impertinence \ C'était un barbiste. 
Son compte fut bientôt réglé. M. Adam, comme agent 
responsable (de la direction, le mit dehors, et adressa 
des excuses au dignitaire offensé. Mais quelle impres- 
sion dut emporter celui-ci , déjà indisposé envers 
Sainte-Barbe, prévenu contre MM. de Lanneau , au point 
d'avoir dit un jour au même M. Adam : « Moi, qui 
vous estimais, je vous en veux de conserver cette fa- 
mille à l'Université! » Qu'on juge de quels commen- 

1. 21 janvier 4817. 



De SAINTE-BARBE. i79 

taires fut accompagné le récit de la scène qui s'était 
passée à Louis-le-Grand ! 

Si pareil fait s'était produit dans un temps de calme, 
on aurait vu toute la maison s'efforcer d'en détruire 
l'impression par sa conduite, et les plus grands se se- 
raient rendus les surveillants de la discipline. Tout au 
contraire , c'est ce moment critique que les rhétori- 
ciens choisirent pour exercer leur vengeance contre 
l'inspecteur divisionnaire, qu'ils avaient pris en aver- 
sion, à l'exemple de leurs aînés. Us le frappèrent, après 
l'avoir attiré dans un guet-apens ; et parce que les 
auteurs de ce bel exploit furent chassés, la classe en- 
tière se mit en état de révolte ^ 

Les insurgés se barricadèrent dans leur dortoir, 
après s'être fournis de vivres et mis en état de soute- 
nir un siège. M. de Lanneau établit le blocus et manda 
les parents. La porte s'oifvrit le second jour à la voix 
des pères et des mères. La classe fut licenciée. On pro- 
céda à une épuration sous les yeux de la Commission 
de l'Instruction publique. Après que bon nombre de 
turbulents furent chassés, la Commission arrêta que 
le Directeur aurait à lui rendre compte tous les huit 
jours de l'état de sa maison *. Ceux des rhétoriciens qui 
rentrèrent au bercail sentirent heureusement la gravité 
de cette mesure. Ils se comportèrent de façon à la 
faire bientôt retirer, et de brillants succès au concours 
général et à Loijis-le-Grand rachetèrent les désordres 
de l'année. 

L'année 1818 fut tranqiiille; mais f 81 9 vit naître 



d. 18 mars 1817, 

2. Arrêté du 1**' avril 1817. 



180 HISTOIRE 

une agitation qui passa des collèges royaux, où elle 
se manifesta d'abord, dans presque toutes les maisons 
d'éducation. LaMinen^e fut accusée d'avoir mis le feu 
aux poudres. 

Celte revue, rédigée pres(fue uniquement par des 
académiciens et très-influente, avait ouvert une sou- 
scription pour l'établissement du Champ dasile^ que 
des réfugiés français se proposaient de fonder au 
Texas. Les écoliers, comme bons libéraux, voulurent 
apporter aussi leur offrande. Une collecte, qui s'était 
organisée à Henri IV, fut arrêtée par la vigilance du 
proviseur. Les élèves de Louis-le-Grand eurent plus 
d'adresse. Ils recueillirent entre eux une somme de 
183 francs, et la portèrent an journal, qui ^annonça^ 
Le proviseur, désespéré, ordonna une enquête. Le 
trouble était ainsi à l'avant et à l'arrière de Sainte- 
Barbe; elle en fut gagnée. • 

Le 7 janvier, les plus petits du Grand-collège se bar- 
ricadèrent dans leur classe. Us déchirèrent leurs ca- 
hiers, renversèrent leur encre, brisèrent leurs pupi- 
tres, et pour que la révolte fût dans toutes les règles, 
ils publièrent un manifeste où ils juraient de vivre et 
de mourir libéraux. Sommés de se rendre, ils refusè- 
rent d'abord ; mais ils n'avaient pas le moyen de tenir 
plus d'un jour. Au bout de ce temps, une capitula- 
tion s'établit, et la conséquence fut encore l'expul- 
sion des meneurs. 

Cependant les choses allaient très-mal à Louis-lç- 
Grand. Aux mécontents ' politiques s'était jointe la 
presque totalité du Collège royal, outrée de ce qu'on 

1. La Minerve de d819, t. IV, p. 493. 



DE SAINTE-BARBE. iS\ 

n'avait pas eu le congé habituel de trois jours pour le 
tiou\el an. Toutes les colères se tournèrent alors con- 
tre un surveillant qui passait pour affilié aux Jésuites. 
On complota de le jeter par la fenêtre. Heureusement 
on n'alla pas si loin, mais il y eut de tels désordres le 
15 et le 17 janvier, que la Commission de l'Instruction 
publique fit fermer le collège. L'arrêté fut placardé sur 
la grande porte de la rue Saint-Jacques. Les passants 
purent le lire; bientôt la nouvelle fUt portée par toute 
la ville ^ 

L'interdit fut levé au bout de deux jours, après 
qu'on eut fait un grand nombre de victimes. Vu la 
gravité des circonstances, l'Université enjoignit à tous 
les maîtres de pension et chefs d'institution de con- 
duire eux-mêmes leurs élèves au collège, et de présider, 
sous Jeur responsabilité, à l'entrée ainsi qu'à la sortie 
des classes. 

Si cette précaution empêcha les externes de parti- 
ciper à la révolte, elle n'étouffa pas le feu mal éteint 
qui couvait à l'intérieur. Un nouvel éclat ne put être 
réprimé que par la retraite du proviseur *. C'était 
M. Taillefer, qui fut élevé à la dignité d'inspecteur 
d'Académie. 

La paix rétablie à Louis-le-Grand, les élèves de l'É- 
cole de droit la troublèrent à leur tour. Nous n'avons 
pas à parler de cette nouvelle agitation, qui eut des 
causes plus sérieuses, et qui jeta l'émeute dans la rue ; 
mais nous ne pouvons passer sous silence que Sainte- 
Barbe, toujours sensible aux impressions du dehors, 



1. Journal de Paris ^ n° du J9 janvier 1819. 

2. Constitutionnel du 2 février 1819. 



i82 HISTOIRE 

fut entraînée en ce moment à ourdir un nouveau 
complot. Cette fois, les conspirateurs furent les élèves 
de seconde. La classe se barricada, suivant Tusage. 
Elle' fut réduite par le moyen ingénieux dont se servit 
le maréchal^Lobau lors de l'émeute de la place Ven- 
dome, en 1836. M. de Lanneau envoya chercher les 
pompiers. Une pompe à incendie^ dirigée sur les mu- 
tins par un trou percé dans le plafond, les fit passer 
de la colère au foti rire. Ils se soumirent quand ils 
virent qu'ils ne pouvaient plus garder leur sérieux. 

Les deux affaires de 1819 passèrent inaperçues au 
milieu de la perturbation générale à laquelle l'au- 
torité universitaire eut à porter remède. Il n'en fut 
pas de même d'une autre révolte qui eut lieu au com- 
mencement de 1820. Celle-ci vint seule en son mo- 
menty qui fut celui de l'effervescence produite dans 
l'opinion par les premières nouvelles de la révolution 
d'Espagne; elle fut très-remarquée. 

Nos barbisteiR de troisième traitaient de tyran un 
maître d'études jugé irréprochable par la Direction. 
Un élève ayant été renvoyé sur les plaintes de ce maî- 
tre, les autres écrivirent au Directeur qu'ils voulaient 
être rendus à leur famille , si la mesure prise contre 
l'un d'eux n'était pas immédiatement révoquée; et ils 
eurent l'insolence de demander réponse à une pareille 
lettre. La réponse ne venant point, ils se barricadè- 
rent. Ils firent plus. Ils démolirent une cloison, afin 
de réunir deux salles ensemble, et de se procurer plus 
d'espace dans leurs retranchements. 

M. de Lanneau n'avait jamais vu l'insubordination 
s'en prendre à son autorité. Le cas lui parut assez 
grave pour rendre nécessaire l'emploi des plus grands 



DE SAINTE-BARBE. 183 

moyens. Il fît venir les pompiers armes de la sape, 
/ordonna de percer une épaisse muraille; et entra le 
premier par la.brèche. Le même accident qu'il avait 
éprouvé en 1815 se reproduisit, mais avec plus de 
gravité. 

Comme il se présentait, une pièce de bois poussée 
avec violence l'atteignit à la jambe ; il tomba. Le coup 
avait été lancé avant qu'on eût pu voir qui s'avançait. 
Lorsque l'on reconnut le Directeur , un cri d'ef- 
froi s'échappa de toutes les bouches. Les révoltés 
s'empressèrent autour de lui, l'aidèrent à se relever, 
et lui demandèrent grâce en se reconnaissant vaincus 
et coupables. Jamais n'apparurent les marques d'un 
plus sincère repentir; mais il fallait un châtiment 
exemplaire, après que le devoir avait été si outrageu- 
sement méconnu. La classe fut dissoute et le Conseil 
royal instruit de ce qui s'était passé. Un arrêté dé- 
clara quatorze élèves expulsés de Sainte- Barbe et ex- 
clus de la fréquentation de Louis-le-Grand \ 

Cette sédition, la plus triste de toutes, fut aussi la 
dernière. Une disposition nouvelle, qui fut introduite 
dans la maison, contribua sans doute à empêcher le 
retour de ces scènes affligeantes. La superficie du 
quadrilatère fut partagée en trois cours, de sorte que 
les élèves, à partir de la sixième, formèrent trois divi- 
sions, au lieu de deux. D'autre part, les bons coiiseils 
produisirent plus d'effet, lorsqu'ils s'adressèrent à 
une génération qui n'avait point été remuée par les 
événements de 1814 et 1815. Enfin l'usurpation du 
nom de Sainte-Barbe, qui mit à découvert toute l'hos- 

i. 21 janvier 1820. 



iBk HISTOIRE 

tililé du pouvoir, impressionna vivement Fesprit des 
élèves. Ils comprirent que l'existence de la maison «^ 
était menacée, et qu'il importait de ne. pas fournir de 
nouvelles armes à la malveillance. Dans mainte occa-^ 
sion, on les vit régulariser spontanément leur con- 
duite, se prêter avec docilité, même avec un semblant 
de zèle, à des démonstrations qu'on n'avait pas pu 
obtenir de leurs devanciers. Si cette circonspection se 
démentit un jour par le fait de quelques-unsrd'entre 
eux, il faut l'attribuer à l'imprévu d'une situation qui 
eût entraîné de plus Xortes têtes. 

Le proviseur choisi pour remplacer M. Taillefer à 
Louis-le-Grand avait été M. Malleval, auparavant 
professeur de quatrième au même collège. ^C'était un 
homme parcimonieux, rustique d'apparence, infirme, 
car il ne marchait qu'avec une béquille , mais juste, 
vigilant, intelligent, il dut son élévation à une sévérité 
proverbiale, qui cependant ne lui aliéna jamais là 
jeunesse. Il fut à la tête du collège tel qu'il s'était 
montré dans sa classe. Pendant cinq ans il maintint 
le bon ordre; mais cette longue tranquillité fut attri- 
buée par les royalistes ardents à ce qu'il transigeait 
avec les principes et qu'il laissait carte blanche au 
libéralisme. On l'amena à donner sa démission, sous 
prétexte de santé ; et, comme- s'il eût mis l'établisse- 
ment à deux doigts de sa perte, on nomipa un com- 
missaire extraordinaire pour y rétablir les mœurs. Ce 
réformateur fut M. Berthot, recteur de l'Académie de 
Dijon, homme d'un extérieur imposant et d'une 
humeur inflexible. 

L'arrivée de M, Berthot, inexplicable pour les in- 
ternes de Louis-le-Grand, éveilla parmi eux un sin- 



DE SAINTE-BARBE. i85 

^ulier soupçon. Ils s'imagiaèrent que les Jésuites 
allaient rentrer en possession du collège, et que le 
passage de M. Berthot n'avait d'autre fin que de pré- 
parer les choses à la dévotion des Révérends Pères. 
11 n'en fallut pas davantage pour replonger rétablis- 
sement dans le désordre. Le mécontentement se ma- 
nifesta d'abord dans la chapelle, par le silence que 
gardèrent les élèves, au lieu d'accompagner le chœur, 
comme c'était alors l'usage. De là, la sédition passa 
dansles salles d'étude; des maîtres furent insultés, et 
les sévices qui suivirent, loin de ramener le calme, 
augmentèrent encore l'effervescence. Telle était la ru- 
desse de la répression, qu'une bande de mutins, dont 
l'expulsion avait été prononcée, furent jetés, dit-on^ 
dans la rue, sans qu'on eût prévenu les familles. Par 
contre, une démonstration d'un genre nouveau fut 
complotée entre les sujets qu'on pouvait regarder à 
juste titre comme l'élite du collège. Le trait, comme 
on va voir, était particulièrement cruel, allant à l'a- 
dresse d'un homme bien pensant et qui avait la mission 
expresse de répandre le grain de la bonne doctrine. 
Les collèges royaux, comme aujourd'hui les lycées, 
donnaient, le jour de la Saiot-Charlemagne, un ban- 
quet aux élèves internes et externes qui avaient 
obtenu les premières places dans les compositions des 
quatre premiers mois. A la fête de 1824, comme les 
invités entraient dans le réfectoire de Louis-le- 
Grand, un mot d'ordre lancé par les lycéens parcourut 
les rangs : « Faites passer qu'on ne répondra pas au 
toast du proviseur. » Les barbistes, de même que les 
élèves des autres institutions, recueillirent cet avis, et 
le.transmirent à ceux qui marchaient derrière eux. 



186 HISTOIRE 

Au dessert le proviseur se lève, et de sa voix la plus 
forte propose le toast accoutumé : « Au roi! » Silence 
des élèves ; seuls, les professeurs présents répondent, 
et encore sans ensemble; et ces quelques voix rendent 
l'effet préparé encore plus saisissant. Elles sont ac- 
cueillies par des rires. 

Le puits de Tabime se serait ouvert devant M. Ber- 
thot, qu'on n'aurait pas vu un homme plus altéré. Puis 
la colère succéda à la stupeur. Il sortit de la salle hors 
de lui, et, sans attendre qu'il se fut remis de son émo- 
tion, il courut solliciter un arrêté par lequel tous les 
élèves présents au banquet furent chassés de Louis-le- 
Grand. C'était décapiter le collège. On s'en aperçut à 
la fin de l'année. Cet établissement, qui était toujours 
le premier par ses succès au grand concours, n'eut que 
deux prix à la distribution de 1824. Ce fut M. Màu- 
gras qui proclama le lendemain les prix à la distribu- 
tion particulière du Collège royal. En annonçant ce 
triste résultat, il ne put pas retenir sa langue. « L'an- 
née a perdu son printemps, » dit-il d'un ton qui fit 
comprendre à tout le monde qu'il n'approuvait pas 
la rigueur déployée par M. Berlhot. Le vieux profes- 
seur paya pette parole imprudente. On l'obligea, l'an- 
née suivante, de donner sa démission, en le consolant 
par la promesse qu'il entrerait bientôt à la Sorbonne.. 
Effectivement M. Millon, qui professait l'histoire de la 
philosophie à la Faculté, reçut l'ordre de prendre Mau- 
gras pour suppléant; mais M. Millon, dont cette con- 
trainte violait le droit , profita du premier change- 
ment de ministère pour évincer Maugras, de sorte que 
celui-ci resta finalement immolé. 

Ceux des barbistes qui furent, frappés par la loi 



DE SAINTE-BARBE. 187 

d'expulsion allèrent terminer leur année à Henri IV. 
Leur talent profita au Collège royal qui leur avait donné 
asile. Quant à la direction de Louis-le-Grand, il ne 
lui suffit pas, pour se laver devant le Conseil royal, 
d'avoir tranché si impitoyablement dans le vif; elle 
imputa tr^- injustement aux externes l'idée du com- 
plot auquel ils n'avaient fait que s'associer. Il y eut à 
cette occasion contre Sainte-Barbe une recrudes- 
cence de plaintes et de dénonciations, qui fut cause 
que, pour empêcher cette dangereuse école d'infecter 
de son souffle l'innocente jeunesse du Collège royal, 
les classes de Louis-le-Grand , dédoublées d'abord en 
vue d'une surveillance plus active, reçurent bientôt 
à part les internes et les externes. Cette séparation fut 
maintenue jusqu'en 1829. 

Après le récit des jours néf^tes, il est de toute jus- 
tice d'ajouter que leur retour si fréquent, loin de 
nuire au travail, opéra au contraire sur les écoliers à 
la façon d'un stimulant, de même que ces accès des 
maladies chroniques, dans l'intervalle desquels on se 
sent plus d'énergie que si l'on s'était toujours bien 
porté. C'est là encore un trait caractéristique du temps, 
un fait qui s'étendit à tous les établissements d'in- 
struction publique. La même ardeur qui, mal em- 
ployée par moments, enfanta les tempêtes, se laissa 
tourner le reste du temps en une émulation salu- 
taire, de telle sorte que le niveau des études, fort af- 
faiblies à la fin de l'Empire, se releva partout sous le 
règne de Louis XVIII. 

À Sainte-Barbe, aussi bien que dans les Collèges 
royaux, le mérite de cette régénération revient pour 
une bonne part à la jeunesse du corps enseignant, dé- 



i88 HISTOIRE 

sireuse de faire ses preuves, lorsqu'on était sans cesse 
à lui opposer l'ancien régime et les instituteurs de 
robe longue. Une mention est due à ceux de ces 
jeunes gens, devenus depuis des hommes de mérite, 
qui trouvèrent dans notre collège le premier emploi 
de leur talent. Ce sont des contemporains, sur lesquels 
nous n'aurons pas à nous étendre beaucoup. 

M. Jules Pierrot, formé à l'École normale, huma- 
niste d'un goût consommé, l'un des meilleurs profes- 
seurs de rhétorique de ce siècle-ci, fit, à plusieurs re- 
prises, des conférences à nos rhétoriciens jusqu'en 
1830. Il avait déjà passé par cet emploi lorsqu'il per- 
dit la chaire de rhétorique du collège Bourbon, pour 
avoir, dans le discours latin prononcé à la distribu- 
tion du grand concours de 1819, représenté Mirabeau 
comme le plus éloquent de nos orateurs politiques. A 
la nouvelle de sa disgrâce, M. de Lanneau lui écrivit 
que, puisque l'Université lui fermait sa porte, Sainte- 
Barbe lui ouvrait la sienne ; qu'il y revînt, et qu'il y 
trouverait encore la place qu'il avait précédemment 
Qccupée. M. Pierrot accepta cette offre, et en conserva, 
toute sa vie une inaltérable reconnaissance. On en 
verra une preuve plus loin, par ses bons procédés 
envers notre collège, lorsqu'il fut devenu proviseur de 
Louis-le-Grand. 

M. Desmichels, autre élève de l'ancienne École 
normale, naguère recteur des académies d'Aix et de 
Rouen, qui a contribué par son enseignement et par 
ses livres au réveil des études historiques, entra à 
Sainte-Barbe comme professeur de seconde, à la fin 
de 1816. 

M. Desforges, homme déjà mûr, maïs jeune par le 



DE SAINTE-BARBE. 189 

talent et par les idées, capliva pendant sept ans consé- 
cutifs nos humanistes des classes intérieures. Il fit, de 
1817 à 1823, d'abord la troisième, et ensuite la se- 
conde. Ce fut son beau temps. Des infirmités précoces 
éteignirent ce brillant professeur , qui termina sa car- 
rière universitaire dans Tune des chaires de rhétori- 
que de Louis-le-Grand. 

M. Alexis de Jussieu, qui fut tour^ tour préfet de 
TAin, de la Mayenne, dé la Vendée et de la Vienne, 
servit Sainte-Barbe, avant de s'enrôler dans la poli- 
tique.- C'était un aimable esprit, sympathique à la jeu- 
nesse, sur laquelle il exerçait par sa parole une $orle de 
fascination. D'excellents résultats furent produits par 
un cours de littérature qu'il professa, en 1 823 et années 
suivantes^devant toutes les classes d'humanités réunies. 

Goubaux, instituteur recommandable au premier 
chef sous son nom de Goubaux , dramaturge con- 
stamment applaudi sous le pseudonyme d'Arthur 
Dinaux, enseigna le grec à Sainte-Barbe pendant cinq 
ans. C'était dans le temps que l'étude du grec était en- 
core facultative pour les élèves ins,truits dans l'inté- 
rieur de la maison, état de choses qui cessa en 1821 
seulement, par suite de l'ordonnance qui mit l'examen 
du baccalauréat sur le pied où il est encore aujour- 
d'hui. 

Tout en faisant ses leçons à nos barbistes, Gou- 
baux eut l'idée de fonder un pensionnat, dont il était 
loin de prévoir alors la prospérité future. L'entre- 
prise, au commencement, ne lui rapporta que des 
tribulations. Il aurait succombé, sans l'assistance pa- 
ternelle de M. de Lanneau qui, après l'avoir aidé de 
ses propres moyens, lui fit obtenir du généreux Jac- 



iOO HISTOIRE 

ques Laffîtte une avaâce de fonds. Goubaux a publié 
ce trait de bienfaisance dans un livre qu'il fit paraître en 
1 822*, et en Thonneur du directeur de Sainte- Barbe, il 
donna à son établissement, relevé au moyen du secours 
qu'il avait obtenu, le nom à' Institut Saint-Victor. De 
la rue d'Enfer, où elle était placée d'abord, cette 
maison fut transportée en 1 825 dans la circonscription 
du collège BoiV'bon. Peu à peu son cbef y organisa 
Vetisex^nementàxi professionnel^ auquel elle a fini par 
être entièrement consacrée. La ville de Paris en fit 
l'acquisition en 1845, et lui donna le nom de Collège 
François 1**. C'est aujourd'hui le collège Chaptal. 

Feu Philippe Le Bas , helléniste de l'école de Bois- 
sonade, membre de l'Académie des inscriptions et 
belles-lettres, débuta dans l'enseignement par des 
leçons de grec élémentaire, à Pusage des élèves qui 
devaient suivre plus tard le cours de Goubaux. Il 
quitta Sainte-Barbe aux vacances de 1 820, parce qu'il 
fut appelé à Augsbourg par la reine Hortense, pour 
diriger l'instruction du prince qui est aujourd'hui l'Em- 
pereur des Français. 

M. Hiiguet, mort des suites d'une chute en 1853, 
étant professeur de troisième à Saint- Louis, homme 
de beaucoup d'esprit et d'un talent supérieur pour 
l'enseignement, accomplit à Sainte -Barbe la plus 
grande partie de sa carrière. Il y entra en 1 81 7 comme 
professeur de cinquième; depuis il fut maître de confé- 
rences pour toutes les classes d'humanités. 

MM. Cuvillier-Fleury, Boitard, Louis Hachette exer^ 

i . Esquisses des mœurs françaises à différentes époques, In-8®. 
Paris, Arthus Bertrand, 4822. 



DE SAINTE-BARBE. 191 



cèrent simultanément l'emploi àH examinateur ^ qui 
consistait à lire, pour le contrôle du travail quotidien^ 
les devoirs des élèves suivant les classes du Collège 
royal. Il sera parlé de M. Cuvillier-Fleury dans la 
suite de cette histoire. Boitard est Fauteur des Levons 
de procédure cwile^ le savant regrettable dont la mort 
précoce fut une si grande perte pour l'enseignement 
du droit. M. Hachette, naufragé dé l'Ecole normale 
qui sombra en 1822, s'est fait un nom européen par 
le commerce de la librairie. 

Le dernier ministre de la Justice, aujourd'hui pre- 
mier vice-président du Sénat, M, Delangle, exerça à 
la fois les deux emplois de professeur de septième et 
d'inspecteur du Pelit-collége en 1 81 7. Philippe Dupin, 
qui était son compatriote et son camarade d'en- 
fance, l'exhorta à tourner ses vues du côté du barreau. 
Ainsi lui fut ouvert l'accès aux dignités dont il a at- 
teint le faîte. 

M. Frédéric Dufour, fondateur du Courrier de TAin^ 
membre depuis de longues années du Conseil général 
de son département; M. Jubé, élève de la maison, 
chef d'une institution justement recommandée ; M. La- 
motte, décédé inspecteur de l'enseignement primaire, 
""à l'organisation duquel il travailla avec zèle et intelli- 
gence; M. Cirodde, qui eut le renom, en son vivant, 
d'un admirable professeur de mathématiques; M. Ras- 
pail, dont la vocation première fut l'enseignement, 
remplirent à Sainte-Barbe, entre 1816 et 1821, les 
fonctions de maîtres d'étude. Le dernier était nou- 
vellement sorti du séminaire d'Avignon, où il avait déjà 
régenté en scolastique et en théologie. Il a laissé dans 
la mémoire de ses élèves le souvenir d'un maître re- 



192 HISTOIRE 

douté. Quant à M. Cirodde, on Ta revu plus tard à 
Sainte-Barbe; il fut l'un des professeurs qui contri- 
buèrent aux preniiers succès de l'École préparatoire. 



CHAPITRE XII. 



Retraite de M. de Lanneau père. — Direction de M. de Lanneau fils. — 
Affaire du renouvellement des diplômes des chefs d'institution. — Ré- 
tablissement des séances littéraires dans les deux Sainte-Barbe, — 
Chansons du A décembre. — M. Cuvillier-Fleury préfet des études. — 
Tentatives de réforme en matière de récitation. — Retour de M. de 
Lanneau père au Collège. — Sa mort, r — Détails sur sa personne. 



Au mois de septembre 1823, M. de Lanneau dé- 
posa définitivement le pouvoir, que depuis 1814 il 
n'exerçait plus que sous des noms d'emprunt. En se 
posant comme propriétaire-administrateur de la mai- 
son dans la lutte avec «M. NicoUe, il avait trop affiché 
que c'était lui qui remplissait toujours les fonctions 
de Directeur. On voulait que cela finît. Les menaces 
arrivaient à ses oreilles de tous les côtés et sous toutes 
les formes. Il n'était question de rien moins que de 
fermer l'établissement. C'est pourquoi il jugea le mo- 
ment venu de se soustraire à la tendre déférence d'un 
fils qui faisait tous ses efforts pour le retenir. Il prit 
son exeat^ comme il disait, pour aller goûter le repos 
dans son Tusculum, dans son manoir de Bard. C'était 
le berceau de son enfance, un lieu animé par une po- 
pulation intelligente de vignerons qui mettaient le 



DE SAINTE-BARBE. 193 

nom de Ijinneau et la Chaçte constitutionnelle pres- 
que à régal des bonnes vendanges. Le Directeur de 
Sainte-Barbe régnait sur eux d'un pouvoir incontesté. 
Il n'élait plus leur seigneur, mais leur bon voisin et le 
propriétaire équitable de plusieurs d'entre eux, appli- 
qué constamment à civiliser et à moraliser le pays. Il 
ne fit pas servir à autre fin Tautorité de maire, dont il 
fut investi quelque temps sous le ministère Decazes, 
Dès 1810, il avait fondé une école dans la commune, 
et c'est de sa bourse que l'instituteur fut toujours rétri- 
bué. Ayant semé les bienfaits, il recueillait la recon- 
uaissance. 

Jusque-là, M. de Lanneau s'était rendu tous les ans 
à Bard pour passer ^e temps des vacances, et toujours 
il était parti pour ce voyage avec la joie d'un écolier. 
Ce fut un bonheur pour lui de songer que désormais 
les moments de son séjour au cher village ne seraient 
• *plus comptés. Quoiqu'il sentît qu'il quittait son élé- 
ment, que le collège lui manquerait plus d'une fois, 
il s'éloigna en se consolant et en consolant les siens 
de la pensée que la distance ne l'empêcherait pas de 
surveiller son œuvre, ni de s'en rapprocher aussi 
souvent que le regret de la séparation deviendrait 
trop vif. 

M. Adolphe de Lanneau, qui lui succédait, était 
déjà rompu par une longue habitude au gouverne- 
ment de la maison; mais ce n'est pas sans passer par 
bien des traverses qu'il avait pu s'arrêter à une car- 
rière pour laquelle sa naissance l'avait désigné. Lors- 
qu'il achevait ses études, en 1812, l'idée de la con- 
scription , qu'on voyait devenir de plus en plus 
implacable, tourmentait beaucoup sa famille. Le père 
m 13 



194 HISTOIRE 

fit part de ses iaquiétudes au général Mathieu Dunias^ 
soD ancien condisci[>le et sop ami» qui iui proposa de 
prendre le jeune homme avec lui, et de lui faire pas- 
ser son temps de service le moins durement possible; 
pour commencer y il l'attachait à sa personne en qualité 
de secrétaire. C'est ainsi que M. Adolphe de Lanneau 
fit la campagne de Russie, épreuve plus rude pour lui 
que ne Vavait prévu son protecteur : il y eut les pieds 
gelés. L'année suivante, il eotra dans rintendance mi- 
litaire. Victime de la violation de la capitulation de 
Dresde, il passa dix mois de captivité dans une forte* 
resse de la Bohême. En 1815, âgé seulement de dix- 
neuf ans^ il fut commissaire des guerres delà division 
Foy sur les champs de bataille de Ligny et de Water- 
loo, puis remplit les mêmes fonctions dans le fort do 
Vincennes, jusqu'au jour où le général Daumesnil re- 
mit son commandement. C'est lui qui rédigea la ccht- 
respondance échangée avec les chefs de l'armée alliée/ 
lorsque ceux-ci proposèrent à riiéroïque général une 
honteuse capitulation. Il fut envoyé de là à Dijon, 
sous l'ordonnateur Maret. La mort de M. Mouzard 
lui fit abandonner le service, pour revenir seconder 
son père. 

M. Adolphe de Lanneau servit d'abord à Sainte^ 
Barbe comme préfet des études du petit et du moyen 
Collège. C'était l'époque où M. Adam était en nom 
dans l'établissement. En 1819, quoiqu'il n'eût point 
atteint Page requis pour obtenir le diplôme, il reçut 
le conseil, auquel l'honorable M. Adam s'assoda tout 
le premier, de sollicitai une dispense. U alla voir à cet 
eflet Royer-CoUard, qui fut charme de ses booms far 
çoiis et de sa gravité précoce. L'austère philosophe 



DE SAINTE-BARBE. i95 

eut ayec lui un moment d'expansion. Il lui raconta 
diverses choses de son enfance; il lui demanda, entre 
autres^ si Ton voyait encore son nom, qu'il se souvenait 
d'avoir gravé sUr Tun des arbres du collège de Reims, 
lorsqu'il y demeurait comme étudiant; puis après des 
louanges, bien flatteuses de sa part, au sujet de l'ini- 
tiative qu'avait prise autrefois M. deLanneaupère,etde 
l'influence salutaire exercée par Sainte -Barbe sur le 
rétablissement des études, il accorda au fils une au- 
torisation provisoire ayant valeur de diplôme, jusqu'à 
la délivrance de celui-ci. Il le congédia en Texhortant 
à se marier, à prendre femme (c'est le mot dont il se 
servit), afin d'acquérir plus de poids aux yeux du 
inonde. On voit, parce dernier trait, toute la distance 
qui ^parait Royer-CoUard de son collègue à la Com- 
mission de rinstructioti publique, l'abbé Élîçagaray. 

La levée de boucliers qui procura Texistence à la 
Sainte-Barbe de la rue des Postes trouva M. A. de Lan- 
neau muni de son diplôme. 11 ne demandait pas mieux 
que d'entrer dans la lice ; mais son père jugea préféra- 
ble de le tenir à couvert: il l'empêcha même d'accepter 
la partie, lorsqu'elle fut offerte à lui personnellement 
par l'abbé Nicolle. Celui-ci conclut de là que notre 
Collège avait pris en gré son mauvais sort, et il tenta 
d'obtenir une réconciliation, si elle pouvait avoir lieu 
sans rien changer aux termes dans lesquels on se trou- 
vait départ et d'autre. M. A. de Lanneau, mandé un 
soir en Sorbonne, fut durant un long entretien l'objet 
des caresses et des protestations de bienveillance du 
séduisant abbé. se retira confondu de tant d'amabi- 
lité et de tant de grâce. 

L'abbé Nicolle avait voulu voir, el il avait vu. Le 



196 HISTOIRE 

fils ne lui ayant pas paru d'une pâte plus maniable 
que le père, il ne recommença plus ses avances. La 
guerre contre notre Sainte-Barbe continua sourde- 
ment. C'est alors que se dessina en perspective le pé- 
ril que M. de Lanneau père voulut détourner par sa 
retraite. Mais plus Tinimitié est puérile, plus elle est 
implacable. Aucun sacrifice n'était dans le cas d'as- 
souvir celle à laquelle les nôtres cherchaient à se sous- 
traire. Après que le rival abhorré se fut retiré de la 
scène, on prépara de nouvelles vengeances. L'affaire 
de la Saint-Charlemagne de 1824 en fut l'occasion. 

Du V juin 1822 au 8 avril 1824, pendant vingt- 
deux mois, r Université fut un corps à deux têtes. On 
avait rétabli la dignité de Grand-maître en faveur de 
M. Frayssinous, tout en laissant subsister l'imniense 
pouvoir de l'abbé Nicolle. Il résultait de là, dans la 
haute administration de l'enseignement, une lutte in- 
testine que les autorités cherchaient à pallier de leur 
mieux, et leur façon de prouver leur entente était de 
donner en toute occasion des marques de leur dévoue- 
ment à la même cause. Le refus de porter la santé du 
roi dans un Collège royal, et d'autres indices qui pa- 
rurent non moins alarmants, réunirent le Grand-maî- 
tre et le recteur dans un sentiment commun de 
répression. Une ordonnance fut sollicitée du roi 
pour introduire d'urgence plusieurs réformes dans 
l'instruction publique, réformes dont Tune était 
l'obligation imposée aux chefs d'institution et maî- 
tres de pension de faire renouveler leurs diplômes 
dans le délai de dix-huit mois. Sur ce point M, 
Frayssinous et M. Nicolle étaient d'accord; mais le 
Grand-maître, sans prendre l'avis du recteur, voulut 



DE SAINTE-BARBE. • 491 

profiter de la circonstance pour augmenter Faction du 
pouvoir, en assurant son unitë. Il fit mettre par la 
même ordonnance le rectorat de TAcadémie de Paris 
dans ses propres attributions. 

L'ordonnance royale, promulguée avec cette addi- 
tion, le 8 avril 1824, perça le cœur de Tabbé Nicolle. 
Lui, qui avait été recteur tout-puissant, ne consentit 
pas à devenir seulement la main agissante du Grand- 
maitre investi du rectorat. Il donna sa démission. 

Quant à la mesure concernant les diplômes, elle 
était inintelligible par elle-même, car les diplômes 
avaient été déjà renouvelés dans le temps où Ton avait 
effacé des actes les traces du régime impérial. Un 
commencement d'éclaircissement fut donné par la cir- 
culaire qu'on envoya dans les Académies en même 
temps que le texte de l'ordonnance, (c Des institutions 
et pensions, » y était-il dit, « ayant excité des plaintes 
graves, il y a lieu d'espérer que le délai accordé pour 
le renouvellement des diplômes donnera le temps à 
ceu^ des chefs et maîtres qui auraient des reproches à 
se faire, d'extirper les abus qu'ils ont laissé s'intro- 
duire, et qu'en se conformant à vos sages conseils, ils 
finiront par mériter d'être autorisés à continuer leurs 
fonctions. » 

Ainsi on voulait avoir raison d'un certain nombre 
d'instituteurs dont on n*était pas content, et les rec- 
teurs avaient mission d'amener à résipiscence ces sujets 
mal notés; si non, d'en débarrasser l'Université dans 
le délai presci^it. 

L'explication finale est dans ce qui se passa à l'égard 
de Sainte-Barbe. 

Les diplômes retirés aux instituteurs de l'Académie 



198 . HISTOIRE 

de Paris ne tardèrent pas à leur être rendus. M. A. de 
Lanneaualla comme les autres pour recevoir le sien. 
La pièce manquait à Tappel. L'employé chargé de la 
distribution, après l'avoir cherchée inutilement, dit 
qu'il fallait s'adresser à M. le vice-recteur. Demande 
d'audience au vice-recteur, qui l'accorda, mais ne s'y 
présenta pas. C'est avec son secrétaire que M. de Lan- 
neau eut à s'expliquer. 

Le secrétaire avait préparé son discours. Il dit une 
infinité de choses, dont le sens se réduisait à ceci : 
L'institution de Lanneau était partout renommée à 
cause des bonnnes études qu'on y faisait. Son chef 
actuel se montrait, pour continuer cette réputation, le 
digne élève de son père ; mais il courait des bruits fâ- 
cheux sur les opinions politicpies et religieuses qu'on 
professait dans la maison. Quoiqu'on ne doutât point 
à l'Université et à la Sorbonne que ces bruits ne fus- 
sent dénués de fondement, cependant leur persistance 
exigeait que Ton fît quelque chose pour détromper le 
public. M. de Lanneau fermerait la bouche aux'^é- 
disants, s'il allait un dimanche communier à l'église 
Sainte-Geneviève. 

L'église Sainte-Geneviève ou Panthéon était alors 
desservie par une communauté de missionnaires. Ces 
prêtres, préférés dans un certain parti à ceux des pa- 
roisses, dirigeaient des exercices de piété dont on s'en- 
tretenait beaucoup à Paris. Ils avaient institué des con- 
férences où l'on chantaitdes cantiques en l'honneur de 
la Foi et des Bourbons, avec un accent de provocation 
au retour du bon vieux temps, qui alarmait les amis 
de toutes les libertés. Leur religion, en un mot, était 
imprégnée d'une forte teinte de politique. 



DE SAINTE-BARBE. 499 

M. de Lanoeau ne trouva pas honnête la proposition 
du secrétaire de TÂcadémie ; Tabbé Bumier-Fontanel, 
doyen de la Faculté de théologie, à qui il en fît part, 
en exprima de Tindignation. Le Panthéon ne fut donc 
pas témoin de Tacte à l'accomplissement duquel était 
subordonnée la délivrance du diplôme. Pendant plus 
d'un an, le directeur de Sainte-Barbe fut dans une an- 
goisse extrême, attendant l'arrêt d'expukion qui ne 
pouvait manquer de l'atteindre à l'expiration du délai 
fixé par l'ordonnance. Heureusement M. Frayssinous, 
de Grand-maitre qu'il était, devint dans l'intervalle 
ministre des Affaires ecclésiastiques et de l'Instruction 
publique*; il eut un secrétaire général^ avec lequel on 
put traiter les affaires délicates. 

M. Frayssinous était un ancien de l'Université im- 
périale. Sous Napoléon I", il exerça les fonctions d'in- 
specteur général. Dans ses tournées, il avait pris en es- 
time Sainte-Barbe et Thomme dévoué qui la dirigeait. 
Toutes les fois qu'il abordait M. de Lanneau, son pre- 
mier mot était : « Combien d'élèves chassés cette an- 
née? » Il se réjouissait qu'il y eût toujours une 
réponse dans le sens de sa question, car il avait cou-*- 
tume de dire que c'était à ces exécutions qu'il recon- 
naissait les véritables instituteurs d'avec ceux pour qui 
l'éducation n'est qu'une affaire de commerce. 

Dans sa correspondance avec le directeur de Sainte- 
Barbe il n'usait que de paroles obligeantes. Celui^ 
ayant fait un peu attendre Tun de ces rapports qui^à 
tout instant étaient exigés des chefs d'institution dans 
les dernières années de T Empire, M. Frayssinous lui 

1. Ordonnance royale du 26 août i 824 . 



200 HISTOIRE 

écrivit, lorsqu'il eut reçu sou travail : « Quand on fait 
les choses aussi bien^ il n'est pas étonnant qu'on y 
mette plus de temps que les autres^ » 

Le souvenir de ces bons procédés fit regarder 

I élévation de M. Frayssinous à la dignité de Grand- 
maitre comme un événement heureux pour Sainte- 
Barbe. On ne s'attendit point à sa faveur, qu'il 
lui eût été impossible d'accorder sans manquer à ses 
engagements de parti, mais on espéra de sa justice 
quelque répit aux misères qu'on endurait. Les élèves 
le surent; deux rhétoriciens, Alloury et Albert Berçoet 
composèrent à son intention des vers latins^ qui furent 
bien reçus. C'était à l'occasion du retour du duc d'An- 
gouléme après l'expédition d'Espagne. L'une des piè- 
ces contenait la demande d'un congé, afin que la jeu- 
nesse des écoles put aller voir les réjouissances dont la 
ville fît les frais en l'honneur du prince. Le congé fut 
accordé. 

Lorsque M. Frayssinous, ministre, fut instruit de la 
situation de M. A. de Lanneau dans TafTaire des di- 
plômes, il témoigna n'avoir rien su de ce qui s'était 
passé, et ne cacha pas le déplaisir que cela lui causait. 

II donna des ordres pour que le diplôme fût rendu. 
Ainsi s'évanouit la menace contenue dans l'ordonnance 
de 1824; mais la pauvre Sainte-Barbe saigna long- 
temps de cette blessure. L'acte réparateur n'avait point 
eu de publicité. La malveillance en profita pour conti*- 
Huer à répandre des propos sinistres. On alarmait les 

1. Lettre du 16 novembre 1810. 

2. Séance annuelle de llnstitulion, Maison de Saînte-Barbe, 
dirigée par M. de Lanneau fils. In-8«, 1823, imprimerie de Cra- 
pelet. 



DE SAINTE-BARBE. 201 

familles en leur représentant le peu de garantie d'une 
maison qui ne subsistait que par tolérance, et que, 
d*un moment à l'autre, un commissaire de police pou- 
vait venir faire évacuer. La persistance de la calomnie 
obligea M. A. de Lanneau de faire imprimer, pour la 
rentrée de 1826, une circulaire où il instruisait de la 
vérité ses amis et les parents de ses élèves*. Mais trop 
peu de personnes reçurent cet avertissement, et trop 
d'autres gardèrent leurs préventions. 

L'état des choses resta le même jusqu'à la fin de la 
Restauration. On eut constamment à souffrir des me- 
nées occultes de Tennemi; seulement l'autorité supé- 
rieure ne fut plus mise en jeu pour seconder ces 
menées; et lorsque des agents subalternes cherchèrent 
à molester la maison, sans même avoir besoin de re- 
courir au ministre, elle trouva aide et confort auprès 
de rhonorable M. Rousselle, chargé de la direction de 
r Académie de Paris. 

Cependant le Collège de la rue des Postes poussait 
vivement sa concurrence, et mettait en relief par tous 
les moyens de publicité les jeunes talents qu'avait 
déjà développés dans son sein une culture habile. Les 
élèves de MM. de Fauconpret, Poret, Rinn, Michelet, 
après avoir brillé dans les concours, furent appelés à 
se produire dans des solennités qu'un choix de per- 
sonnages éminents, invités par labbé NicoUe, déco- 
raient de leur présence. C'était la Séance littéraire 
d'autrefois, renouvelée non pas seulement de l'an- 
cienne Sainte-Barbe, mais aussi de la moderne, car 



i . Une page imprimée sous le titre lïaviSy à la date du i^^ juil- 
let j 826. 



203 HISTOIRE 

M. de Lanneau père avait porté dès le commencement 
ces exercices sur son programme, ils avaient lieu deux 
fois par an, à la Saint-Jean et à Noël. Us cessèrent 
lorsque TUniversitë impériale poussa à outrance son 
système d'uniformité. M. A. de Lanneau fut stimulé 
par l'exemple de ses rivaux. Au risque de passer pour 
un plagiaire, lorsqu'il ne faisait que retourner aux 
errements paternels^ il rétablit les séances littéraires 
dans sa maison. 

Les Débats embouchèrent la trompette pour publier 
le mérite des exercices de la rue des Postes. Les 
exercices de la rue de Reims eurent à leur tour des 
panégyristes dans le Constitutionnel^ dans le Globe et 
dans d'autres journaux de la presse qui chantait ]a 
contre - partie des Débats. Pauvre vieille rédaction 
des Débats ! elle jouissait de son reste. Le plaisir 
d'agacer notre Sainte-Barbe, qu'elle se donnait de- 
puis vingt-cinq ans, tirait à sa fin, et elle ne s'en 
doutait nullement. Elle ne prévoyait pas que la 
cocarde allait changer, que l'esprit se transformerait 
du même coup, que les pseudo-barbistes, devenus les 
vrais et seuls barbistes^ seraient sous peu reçus à bras 
ouverts et logés dans tous les coins du journal. Que 
de choses incroyables recèle souvent dans son sein 
l'avenir le moins éloigné I 

Donc, depuis 1823 jusqu'en 1830, nos meilleurs 
humanistes furent admis à faire entendre en public 
des morceaux de leur composition, qui étaient im- 
primés ensuite *. Dans l'auditoire qui les écoutait, il 

1 . Sous le titre de Séance litténUre annuelle^ ou à' Exercice lit' 
téraire annuel^ 7 broch. m-8», 1824-1829, imprimerie Crapelet. 



DE SAINTE-BARBE. 203 

• 

n'y avait pas de ducs et pairs, mais beaucoup 
d'hommes de goût, joints à de grands citoyens. L'or- 
donnateur de ces fêtes fut au commencement M. Cu- 
villier-Fieury, préfet des éludes du collège. Il faut 
noter, comme un signe du temps, qu'une teinte de 
romantisme apparut dans plusieurs des pièces compo- 
sées depuis I8269 soit parce que des professeurs 
introduisaient déjà dans leurs leçons l'analyse des 
meilleurs morceaux de Lamartine et de Chateaubriand, 
soit parce qu'il est impossible, avec le régime scolaire 
de notre siècle, que la jeunesse demeure insensible 
aux impressions dont le monde est affecté. 

Ce serait pécher par omission que d'avoir insisté sur 
la Séance littéraire de Tintérieurdu Collège et de ne rien 
dire de la Séance littéraire du dehors, car on peut ainsi 
appeler le régal de vers et de chansons ajouté aux 
banquets annuels du 4 décembre. Celui de 1 81 6 avait 
eu cet assaisonnement; la même chose, répétée aux 
réunions suivantes, fixa l'usage., si bien qu'il subsiste 
encore aujourd'hui, du moins quant aux chansons. 
Le Collège, sa patronne, la fraternité dont il est le lien, 
furent depuis l'origine le sujet intarissable de ces com- 
positions, pour lesquelles les événements du jour 
fournirent chaque fois la couleur, la' saveur, les traits 
particuliers qui les*distinguent. De charmants esprits 
ont fourni beaucoup à ce répertoire : Va tout. Scribe, 
Varner, Corcellet, Gordon, Bayard, pour ne parler que 
des morts; et un autre mort, dont le nom se présente 
ici, c'est Adolphe Nourrit, l'un des fidèles au rendez- 
vous de chaque année, qui chanta souvent ces chan- 
sons de sa belle et intelligente voix. 

La muse qui se produit à table a le droit d'être sans 



204 HISTOIRE 

façon ^ surtout quand les convives sont tous des ca- 
marades* Celle de Sainte-Barbe a usé de la permis- 
sion, et personne ne s'est jamais choqué de ses négli- 
gences, pourvu qu'elle rendît les sentiments dont on 
était animé. Or c'est ce qu'elle n'a pas une seule 
fois manqué de faire, soit qu'elle le prît sur le ton 
belliqueux ou moqueur, soit qu'elle se montrât sé- 
rieuse ou attendrie. Par là elle est devenue la messa- 
gère qui porte aux absents l'impression du jour, et 
qui va réveiller en eux la mémoire de Tancienne 
amitié* 

Toutes les vicissitudes du collège, tous les événe- 
ments heureux ou glorieux pour ses enfants ont eu 
leur écho dans ces chansons. C'est la chronique du 
dedans et du dehors. Le changement de fortune, et 
peut-être aussi celui des mœurs, ont donné avec le 
temps un tour différent à l'esprit, qui s'est porté de 
plus en plus à la douceur et à l'indulgence. Depuis 
des années on se contente de louer ceux qu'on 
aime, sans mordre ceux qu'on n'aime pas. La plaisan- 
terie, lorsqu'elle trouve sa place, est anodine et ne 
s'en prend qu'aux généralités. 11 n'en fut pas ainsi du 
temps de la Restauration. Les chants du banquet 
étaient alors des chants de guerre et de vengeance. Ils 
exprimèrent par d'incessantes railleries qu'on ne se 
tenait pour battu par aucun des ennemis de l'ordre 
nouveau, qu'on les narguait tous, ultras^ ventrus et 
jésuites, et que, dans la lutte qui s'agitait, les anti- 
ques condisciples Loyola et NicoUe n'auraient pas le 
dernier. Quels éclats de rire, le jour où l'on put met- 
tre en opposition M. Frayssinous, compatissant pour 
Sainte-»Barbe, avec les dominateurs qui croyaient tenir 



DE. SAINTE-BARBE. 205 

ce ministre dans leurs chaînes^ 1 Quelle allégresse, 
lorsque Tun des premiers élèves de M. de Lanneau 
qui atteignît quarante ans, le vicomte Louis Le Mer- 
cier, fut élu député de TOrne, avec le mandai d'aller 
voter pour l'alTranchissement de la presse et contre 
les envahissements de la congrégation^ l 

Mais c'est assez longtemps nous éloigner du collège. 
M. Cuvillier-Fleury, dont le nom a été prononcé tout 
à l'heure, nous y ramènera. 

M. Cuvillier-Fleury, élève de Louis-le-Grand, rem- 
porta le prix d'honneur au concours général de 1 81 9. 
Ce succès eut un retentissement particulier. L'admi- 
nistration du Collège royal fit peindre le portrait dii 
lauréat, ce qui fut l'origine d'un usage constamment 
observé depuis. Le parti libéral se réjouit de voir la 
première palme dans les luttes universitaires méritée 
par un orphelin, dont le père avait été aide-de-camp 
du général Hoche et officier dans le palais du ci- de- 
vant roi de Hollande. C'est à la personne de ce prince 
que s'attacha d'abord M. Fleury. Il alla le rejoindre à 
Florence dans son exil, et lui servit de secrétaire pen- 
dant un an. Revenu en France, il fut recommande 
par M. Malleval, son ancien professeur, à M. de Lan- 
neau. Nous l'avons vu employé à Sainte-Barbe comme 
examinateur. Par la manière dont il s'acquitta d'une 
conférence qui lui fut confiée ensuite, il montra qu'il 
était fait pour un poste plus élevé. INul ne parut plus 
digne au vieux Directeur, qui prenait sa retraite , de 
partager avec son fils le fardeau du gouvernement. 

\, Chanson de Cadet-Gassicourt au banquet de 1824, t. I, 
p. 171 , des Fêtes annuelles des anciens élèves de Sainte-Barbe. 
2. Strophes de James Gordon, aubanquet de 1827, ibid,^ p. 265. 



206 HISTOIRE 

M. Cuvillier-Fleury accéléra de toute Tardeur de sa 
jeunesse l'impulsion déjà donnée, mais avec une at- 
tention extrême à ne pas faire du mieux Fennemi du 
bien. Il n'admit la nouveauté que dans la mesure ap- 
prouvée par M. de Lanneau père, dont M. Adolphe et 
lui ne cessaient d'interroger l'expérience. Par des 
cours supplémentaires, auxquels il s'employa lui- 
même, il tint les hautes classes incessamment occu- 
pées, et il acheva d'éteindre Tesprit de révolte, les 
élèves n'ayant pas le temps de songer à mal faire. Par 
les Séances littéraires, il voulut que ces mêmes jeunes 
gens, mis en présence d'hommes sérieux, entrevissent 
le vaste champ des appUcatious où leur talent aurait à 
s'exercer bientôt; et là encore le résultat ne démentit 
pas son attente. Il n'eut qu'à se louer de l'intelligence 
et du sentiment qui entrèrent dans les compositions. 

Il aurait désiré quelque chose de plus. Choqué du 
ton uniforme qui fait de la récitation des écoliers une 
insupportable psalmodie, il jugeait nécessaire de les 
former à l'art de bien dire: Cet enseignement fit partie 
des programmes de la Renaissance. Sous Louis XIII, 
Jean Grangier le prescrivait encore dans son règle- 
ment du collège de Beauvais^ Comment et pourquoi 
s^est^il perdu? On l'ignore, mais il est certain que le 
mauvais débit de la parole dans les classes procède 
de l'ancienne Université. C'est une routine entretenue 
par on ne sait quel respect humain, qui, parmi les 
jeunes gens, attad^e du ridicule au moindre essai 
d'une intonation plus soignée. 



i. De l'Estat do collège de Dormans, dit de Beaurais, fondé en 
rUniversilé de Paris. lDi-4% 1638. 



DE SAINTE-BARBE. 207 

Pour remédier à ce mal^ Sainte-Barbe avait com- 
mencéy en 1806, des essais qui furent interrompus^ 
toujours par cette malheureuse prétention de T Univer- 
sité naissante à ne pas souffrir que l'on fît dans les 
établissements particuliers autre chose que ce qu'elle 
prescrivait de faire dans les établissements de l'Etat. 
Du temps de la Restauration, ni les conseils, ni l'attrait 
de sa faire entendre en public ne purent surmonter la 
fausse honte de nos bai;bistes. Aux Séances littéraires, 
il fallut que les maîtres lussent pour eux leurs compo- 
sitions. 

M. Cuvillier-Fleury, désolé de cela, résolut d'établir 
des exercices réguliers de déclamation. Une première 
tentative causa plus de dissipation qu'elle n'eut de pro- 
fit. D'ailleurs elle devint un texte pour la médisance, 
qui empoisonna la pure et utile in tenticHi de ce cours. 
Cependant notre préfet des études ne se laissa pas dé- 
courager par les obstacles. U comptait opérer sa ré- 
forme par un autre moyen. Il n'en eut pas le temps. Il 
fut eiAevé à Sainte*Barbe, pour aller faire, dans le pa- 
lais du duc d'Orléans, l'éducation d'un prince qui lui 
doit de posséder, comme consolation dans son infor- 
tune^ non-seulement le goût des belles-lettres, mais 
encore le talent de les cultiver. 

Vers le même temps, notre collège reçut le dernier 
hommage dont il ait été l'objet de la part dé Topinion 
libérale. Il fut choisi par le Comité grec de Paris pour 
recevoir les fils de plusieurs des fondateurs de l'indé- 
pendance hellénique. M. de Lasteyrie^ président du 
Comité, et le général laFayette amenèrent eux-mêmes à 
M. de Lanneau sept de ces enfants, qu'on avait mis 
d'abord dans de petites pensions pour les familiariser 



208 HISTOIRE 

avec le français. Dans le nombre figurait l'un des fils 
de Tamiral Canaris, le malheureux Thémislocle, qui 
périt dernièrement dans Téchauffourée de la gendar- 
merie d'Athènes*. 

Les Grecs furent bien accueillis dans une maison où 
Ton avait salué avec enthousiasme la régénération de 
leur pays. Les désastres de Pargaet d'Ipsara inspirè- 
rent, en 1823 et 1824, Télève Petiljean, Tun des bons 
humanistes de Sainte-Barbe *^ les honneurs de la 
Séance littéraire de 1826 furent pour un Grec de 
Zanthe, Napoléon Zambelly, qui y apporta un avant- 
goût de ces chants nationaux, dont Fauriel allait donner 
la traduction. Zambelly n'était point sous la tutelle 
du Comité philhellène. Les îles Ioniennes, dont 
Zanthe fait partie, jouissant de l'autonomie' sous le 
protectorat anglais, n'avaient pas eu à s'engager dans 
la guerre de l'indépendance. C'est le cas de rappeler 
que ces îles furent à deux reprises réunies à la France, 
du temps de la République et du temps de l'Empire. 
Notre Collège avait eu des rapports avec elles dès Té- 
poque de leur première annexion. Lorsque M. de Lan- 
neau venait de rouvrir la maison, il y reçut deux jeunes 
gens de la famille Bourbaky, envoyés avec d'autres, 
sur l'ordre de Bonaparte, pour prendre à Paris notre 
instruction et nos mœurs. Voilà où en était l'alliance 
hellénique à Sainte-Barbe en 1827. 

Les jeunes protégés du Comité grec furent l'objet 
d'un empressement universel. Dans le grand monde 
libéral, on sollicita comme une faveur la permission 

i. Octobre 1862. 

2. Deux pièces de vers latins, imprimées dans le livret des Scan- 
ces littéraires de i823 et 4824. 



DE SAINTE-BARBE. 209 

de les faire sortir du collège les jours de congé. A une 
représentation du Théâtre-Français, Canaris, qui avait 
dix ans, ayant paru dans la loge du duc d'Orléans, 
tout le parterre se leva et applaudit. Après une mala- 
die que fit cet enfant, dans l'été de 1827, le séjour de 
la campagne fut jugé nécessaire pour le rétablir. La- 
fayette voulait à toute force Tavoir chez lui, à son 
château de La Grange. M. de Lanneau, qui jugeait 
plus salutaire la solitude de Bard, fut obligé , pour 
l'emporter, de revendiquer son droit et celui du raisin 
qui mûrit aux coteaux bourguignons. Les autres per- 
sonnages de marque, dont on se rappelle la sollicitude 
assidue pour la petite colonie grecque, sont le comte 
Capo d'Istrias, Casimir Delavigne , Ambroise Fîrmin- 
Didot, secrétaire du Comité, et Mme Récamier, qui était 
attachée à l'association en qualité de dame quêteuse. 
Cependant M. de Lanneau père, dont l'activité n'a- 
vait pas pu se plier à la vie de campagne, en était re- 
venu à passer la plus grande partie de Tannée à Paris. 
11 emproyait son temps à un cours de français qu'il 
faisait dans une institution de demoiselles, tenue par 
sa fille aînée, Mme Dupré de Lanneau. Après le dé- 
part fort regretté de M. Cuvillier-Flem y, jugeant que 
quatre ans de retraite avaient assoupi lescolères, et que 
sa participation aux travaux de Sainte-Barbe ne ferait 
plus tirer le canon d'alarme, il tint à honneur de 
remplir lui-même les fonctions de préfet des études. 
Il donna à la jeunesse le touchant exemple d'un père 
vétéran , qui consacre sa vieillesse au service et à la 
gloire de son fils. Mais l'entreprise fut au-dessus de sa 
force. Quoique d'une constitution robuste, l'inquié- 
tude sous toutes ses formes n'avait point cessé de fas- 
III • 14 



2i0 HISTOIRE 

saillir depuis quarante ans. Il se sentait miné^ et ne 
voulait ni le dire ni le laisser paraître. 

En deux campagnes, il acheva de s'user. Des dou- 
leurs rhumatismales, qu'il contracta pendant l'automne 
humide et malsain de 1829, s'aggravèrent d'un acci- 
dent de poitrine. Il prit le lit en février, au milieu 
des froids rigoureux de 1830. Des docteurs déjà re- 
nommés, ses anciens élèves, Jules Cloquet, Andral, 
Émeric Smith, Déguise, associèrent inutilement leurs 
efforts à ceux de M. BafTos, médecin en titre de 
la maison. Il expira le 31 mars. Ses dernières pen- 
sées furent pour ce qu'il avait le plus aimé en ce 
monde, ses enfants, son collège, son pays. A plusieurs 
reprises, il exprima le regret de ne pas vivre assez 
pour voir changer le ministère, le funeste ministère 
Polignac, dont gémissaient alors tous les amis de la 
liberté. Il ne prévit pas que les ministres ne tombe- 
raient qu'avec la dynastie, ni qu'une révolution pro- 
chaine réparerait l'injustice dont il avait été victime. 

Ses obsèques furent un bel hommage rendu à ses 
services et à ses vertus. Le cercueil de ce modeste 
instituteur fut suivi d'une escorte aussi nombreuse 
que s'il s'était agi d'un citoyen enlevé à la popularité 
au milieu des triomphes de la vie politique. L'église 
de Saint-Etienne du Mont ne suffit pas pour contenir 
la multitude des assistants. L'abbé Siret, qui était 
encore curé de Saint-Séverin , voulut associer sa pa- 
roisse au deuil profond qu'il portait dans son cœur. Il 
fit sonner le glas au moment où le convoi passa dans 
la rue Saint-Jacques. Lorsqu'on fut arrivé au champ 
du repos, mille bras se disputèrent l'honneur de por- 
ter le corps jusqu'au lieu de lasépulture, et les larmes 



DE SAINTE-BARBE. . 211 

sufFoqùèrent la plupart de ceux qui élevèrent la voix 
pour lui adresser le dernier adieu. 

M. de Lanneau est inhumé au cimetière du Père-la^ 
Chaise, sous un mausolée de marbre qui Fut élevé' par 
souscription. 11 repose là, en vue de la docte mon- 
tagne où s'écoula la dernière moitié de sa vie, à côté 
de Tabbé Sicard et du maréchal Lefebvre, deux 
hommes illustres, qui l'avaient autrefois connu et ap^ 
précié. 

Enlevé de ce monde lorsqu'il venait d'entrer dans 
sa soixante-douzième année, il ne fut point atteint 
par la décrépitude. Jusqu'à sa dernière maladie, il 
conserva la plénitude de ses facultés, la noblesse de 
son maintien et la beauté de son visage. Il était petit 
de taille, mais bien proportionné et portant haut la 
tête. Sa chevelure, rejetée en arrière, à la mode du dix- 
huitième siècle, laissait voir à découvert un front ma- 
gnifique; d'épais sourcils ombrageaient ses yeux noirs 
et perçants, que, suivant l'occasion, il savait rendre 
doux ou courroucés. Tous ses traits étaient façonnés 
dans le grand, et portaient l'empreinte d'une âme 
élevée. Il fut en effet de ces hommes qui, ne consid er- 
rant les choses que par le côté philosophique, mettent 
un assaisonnement de dignité à tout ce qu'ils font, 
disent ou pensent; et c'est par là qu'il rendit si dis- 
tingué son talent à conduire un grand établissement 
d'instruction publique. 

Comme administrateur, il lui manqua de connaître 
le pouvoir de Targent, ou plutôt il ne connut de ce 
pouvoir que l'avantage qu'il y trouvait de se livrer aux 
mouvements de sa bienfaisance. Il éprouvait une 
sorte de pudeur à s'occuper de ses affaires. « L'argent, 



212 HISTOIRE 

les comptes, les chiffres, disait-il, sont la partie hon- 
teuse de notre état. » Il avait encore pour maxime 
qu'un instituteur ne doit pas chercher à s'enrichir. Le 
bon état des finances consistait pour lui à pouvoir 
payer les notes lorsqu'elles étaient présentées. De 
cette façon, il n'eut jamais de réserve. La mauvaise 
gestion de son premier associé et le marché ruineux 
par lequel il y mit fin, Tinfidélité d'agents comptables 
qu'il employa au commencement de son entreprise, 
les désastres de 1814 et de 1815, l'obligation qui lui 
fut imposée de se pourvoir d'un prête-nom en 1816, 
furent pour lui l'occasion de pertes immenses. Malgré 
tout cela, il fit donner à ses frais l'instruction pri- 
maire à plus de quatre cents enfants pendant treize 
ans que subsista sa petite école ; il entretint à Sainte- 
Barbe plus de boursiers qu'il n'y en avait eu dans la 
plupart des collèges fondés de l'ancien régime; il 
fournit la subsistance et souvent paya des pensions de 
retraite aux maîtres et aux domestiques qui avaient 
vieilli dans le service de sa maison. 

Nul homme ne fut plus serviable. Il aida de ses con- 
seils et de ses démarches tous ceux qui eurent besoin 
de lui.* Sa sollicitude était surtout acquise à ses an- 
ciens élèves. 11 les suivait d'un œil attentif apiès 
leur sortie du collège; leurs succès étaient les siens, 
et quand il les revoyait, c'était avec la joie d'un père 
reconnaissant de ce que ses fils ont répondu à son 
attente. 

Les écoliers, devant qui il. avait l'attention de ne 
jamais se départir de sa gravité, ne pouvaient pas 
croire qu'il fût susceptible d'abandon. Us se le figu- 
raient armé toujours de cette parole brève, de ces 



DE SAINTE-BARBE. 2i3 

regards expressifs qui les frappaient de crainte ou 
les remplissaient d'exaltation. Dans son intérieur 
cependant, et partout où cessait l'obligation de la 
discipline, il était familier, affectueux, aimable. 
Quelle que fût la condition de ses interlocuteurs, il 
se mettait avec une aisance sans pareille à leur por- 
tée. Sa conversation était charmante, pleine de raison 
et de vivacité, d'originalité et de grâce, quelquefois 
avec une pointe d'ironie, le grain de sel bourguignon, 
qui chez lui n'a jamais exclu la bienveillance. 

Il écrivait comme il parlait. Quelques lettres, échap- 
pées au naufrage de la vaste correspondance qui occupa 
une partie de .sa vie, ont été recueillies par son plus 
jeune fils, M. Eugène de Lanneau*.. On dirait un mé- 
lange de l'esprit du seizième siècle et de celui des 
temps qui précédèrent la Révolution, mélange accom- 
modé d'un style qui n'appartient qu'à l'auteur. Des 
tours saccadés, des loculions hasardées, des incorrec- 
tions, nulle recherche; mais du feu, de la couleur, 
des traits exquis de sentiment, de beaux raisonne- 
ments et de fines observations, extrêmement bien 
exprimées. 11 eut pour premier maître, sous le toit 
paternel, un secrétaire de Buiïon, qui lui apprit à lire 
dansla prose cadencée de l'illustre écrivain. Ce maître 
était toujours à parler de l'harmonie du langage. Il 
racontait comme quoi M. de BufTon, lorsqu'il avait 
achevé quelque chose, le lui donnait à lire tout haut, 

i. Recueil de lettres de P.. A. Victor de Lanneau, fondateur et 
chef de l'institution de Sainte-Barbe, précédées d'une notice bio- 
graphique par M. L. Quicherat, bibliothécaire à la bibliothèque 
Sainte -Geneviève. — In-8°, Paris, 1831, imprimerie de Duverger; 
tiré à cent-soixante exemplaires. 



2ik HISTOIRE 

en se tenant à un bout de la grande galerie du châ- 
teau de Monlbard, tandis que le secrétaire était à 
l'autre bout, et il jugeait ainsi de l'effet musical de 
son style. Cette école n'aurait point été celle de 
M. de I^anneau, s'il se fût livré à la composition litté- 
raire. Il était fait pour concevoir et exécuter rapide- 
ment. Il était animé du souffle de l'improvisation. 

Il a laissé quelques ouvrages, fruits du loisir de sa 
retraite momentanée, et qui ne sont que des instru- 
ments de travail : un cours gradué de grammaire 
française S plusieurs dictionnaires de poche \ Sa gram- 
maire en valait d'autres qui rapportèrent des millions 
à leurs auteurs. Elle eut un succès dont il fut presque 
honteux ; rien ne put le décider à solliciter pour elle 
l'approbation de l'Université. Le petit dictionnaire 
de la langue française se r^impnme encore aujour- 
d'hui. Son meilleur titre littéraire est le règlement 
de Sainte-Barbe, dont nous avons parlé au commen-^ 
cément de ce volume *. 

A.U moment de sa mort, la plupart des feuilles pu- 



1 . Grammaire des enfants qui passent de la lecture et de récri- 
ture à l'étude du français. In-.I2, 1824, 1825, 1826. ArthusBer* 
trand. «-^ Grammaire élémeotaire par deEnai>^3 et par réponses, 
en faveur des commençants. Ia-12, 1834. — Grammaire fran- 
çaise par demandes et par réponses, en faveur des premières 
ckvsses de latin. In-12, 1824. — Cours ou leçons pratiques de 
grammaire française, smyies de la syntaxe, en faveur du second 
et du troisième âge. In-12, 1824. 

2. Diotionnaire de poch« de )a langue française, rédigé d'après 
r Académie. Gr. in^32, 1824. Baudouin frères. ^^ Dicliennaire 
portatif des rimes françaises, }n-3â, 1828> Fix)meDt, — • Dictiom- 
«ftire de poche latin français, im-^ty 1829, Baudouin. 

3. Ci-dessus, p. 15. 



DE SAINTE-BARBE. 215 

bliques reudireDt hommage à ses services. C'est dans 
le Lycée ^ revue spéciale pour les matières d'enseigne- 
ment, que parut l'article le plus étudié\ Il est de 
M. Louis Quicherat, qui le retoucha depuis pour ser-- 
vir d'introduction au recueil de lettres publié par 
M. Eugène de Lanneau. D'autres notices, composées 
d'après les souvenirs personnels de leurs auteurs, 
ont trouvé leur place dans nos grands répertoires 
biographiques. Citons celles d'Alphonse Rabbe dans 
la Biographie portative des contemporains , de Char- 
les du Rozoir dans le Supplément de la Biographie 
Michaud, de M. Hoguer dans la Nouvelle biographie 
Didot. 

Les traits de M. de Lanneau ont été souvent repro- 
duits. Un tableau du peintre Marlet, qui le représente 
dans le costume des docteurs es lettres de l'Univer- 
sité impériale, décore le parloir de Sainte-Barbe. Son 
portrait en buste, peint par l'ordre du roi Louis- 
Philippe, est placé dans les galeries de Versailles, à 
côté de celui de M. de Fontanes. En 1825, ses an- 
ciens élèves firent frapper en son honneur une mé- 
daille due au burin de leur camarade Gatteaux. Il y a 
en légende, autour de la face, ces mots : Petr. Anl. 
Vict. de Lanneau discipuli memores. Le revers est 
occupé par une inscription dont voici les termes : 
Quod bonarum litterarum disciplinas infaustis tempo- 
ribus abolitas ad erudiendam juventutem in pristinis 
Sanctae Barbarœ sedibus féliciter restituit , ann. 
MDCCXCVIII. C'est à ce type que sont frappées les 



i. N° du 12 août 1830. L'article fut tiré à part à un grand i^om- 
bre d'exemplaires j in-8®, librairie Hachette. 



316 HISTOIRE 

médailles d'argent et de bronze que l'on distribue 
comme récompenses à Sainte-Barbe. 

Son buste en marbre, sculpté par Raggi, servit de 
modèle .pour une copie en ronde bosse que le bar- 
biste Haudebourt, architecte de son tombeau, fit en- 
trer dans la composition du cippe. Une autre copie, 
en pleine sculpture, fut donnée par M. Eugène de 
Lanneau au Collège, qui la conserve religieusement. 
C'est le génie du lieu. Cette image vénérée est trans- 
portée tous les ans dans le salon où se tient le banquet 
du 4 décembre, et pour toutes les cérémonies que le 
Collège accomplit hors de ses murs, on la fait égale- 
ment voyager. C'est la doctrine du gouvernement bar- 
biste que là où est le buste de Victor de Lanneau, là 
est Sainte-Barbe : touchante tradition, qui ne fait 
qu'un de l'œuvre et du fondateur, et qui enseignera 
dans le temps à venir que la Sainte-Barbe moderne 
est fondée sur Tamour dont une jeunesse généreuse 
s^ enflamma pour un homme de bien. 



DE SAINTE-BARBE. 217 



CHAPITRE XIII. 



Révolution de 1830. — Fugitif accueilli à Sainte-Barbe. — Orphelins de 
juillet. — Sainte-Barbe rétablie dans la propriété de son nom. — Revers 
et embarras financiers. — L'Association amicale. — La Société du 
collège. — Âcquisilion de rétablissement par les anciens élèves. — 
Souscription du Roi. — La Commission de surveillance de la Société. 
— Création de l'École préparatoire. — Retraite de M. Adolphe de 
Lanneau. 



Lé 28 juillet 1830, pendant que la classe du malin 
se faisait à Louis-le-Grand, le proviseur, M, Laborie, 
alla dans toutes les salles interrompre la leçon, et pré- 
venir les élèves externes que les maîtres d'étude du 
collège allaient les reconduire dans leurs pensionnats 
respectifs. Il n'y avait rien de bien grave, disait-il ; des 
malveillants, pour alarmer, faisaient partir des boites 
(en ce moment la fusillade éclatait à la place Saint- 
Michel); mais comme la tranquillité n'était pas parfaite, 
l'administration jugeait à propos de prévenir les in- 
quiétudes que les chefs d'établissement pourraient 
concevoir. 

Les barbistes, rentrés chez eux, trouvèrent affichée 
une proclamation de leur chef, qui les invitait au tra- 
vail et leur imposait silence sur des événements qu'ils 
ne devaient pas chercher à pénétrer. Des décharges 
réitérées les avertirent qu'un grand combat se livrait 
à peu de distance. C'était l'attaque de l'Hôtel de Ville. 
Bientôt ils entendirent siffler au-dessus du collège les 



218 HISTOIRE 

boulets tirés de la place de Grève sur le drapeau tri- 
colore, qui flottait déjà au sommet des tours Notre- 
Dame. On ne put pas leur cacher plus longtemps qu'il 
y avait une révolution. 

Sainte-Barbe a fourni beaucoup de ceux qui prirent 
part à ce grand mouvement. Le nom d'un élève ex- 
terne, qui était sorti depuis peu de la classe de com- 
merce, Scroupsal, figure dans la liste des morts gravée 
sur la colonne de juillet. Eugène Moutardier fut blessé 
grièvement sur une barricadé; plus heureux, Gode- 
froi Cavaignac, Thomas, Guinard, passèrent les trois 
jours sous la mitraille sans être atteints. C'est Guinard 
qui planta le drapeau tricolore sur le fronton du Lou- 
vre. Cadet-Gassicourt, Bernard de Rennes, Bert, Adol- 
phe de Lanneau, Ganneron fournirent de beaux traits 
de courage civil. Ganneron, siégeant au tribunal de 
commerce, donna le signal de la résistance au coup 
d'État par un jugement dont le souvenir est devenu 
impérissable. M. de Lanneau, s'échappant à l'appel de 
ses concitoyens pour aller prendre possession de la 
mairie du XIP arrondissement, signa, pendant toute la 
journée du 28 et du 29, les ordres en vertu desquels 
la population du faubourg Saint-Marceau et la garde 
nationale agirent de concert pour la défense des lois. 

Dans la soirée du 29, Sainte-Barbe reçut un hôte 
qu'elle n'attendait pas. Le curé de Saint-Etienne du 
Mont, M. Olivier, qui mourut évéque d'Évreux, vint 
frapper à la porte, déguisé et chargé d'un paquet qui 
contenait les objets les plus précieux de son église. Il 
n'avait jamais montré que de la froideur à l'égard de 
la maison. Assistant au service funèbre de M. de Lan- 
neau pèréy il affligea la fanûUe par son attitude. Quels 



I>E SAINTE-BARBE. 219^ 

reproches n'eût-il pas à se faire, lorsque^ au bout de 
quatre mois, il se vit obligé d'aborder le fils en sup- 
pliant? Celui-ci le remercia de la préférence qu'il 
avait donnée à Sainte-Barbe , et Tassura qu'il était 
dans un lieu tout plein de la religion que les anciens 
professaient pour l'hospitalité. Il le tint caché pen- 
dant plusieurs jours dans une petite chambre sous 
les toits. 

Le pauvre abbé, qui était très-remuant de sa nature, 
souffrît horriblement de sa réclusion* H en serait mort, 
disait-il, si son hôte ne s'était pas prêté à le conduire 
de nuit eu promenade sur les boulevards extérieurs. 
Après que le calme fut rétabli, il n'osa dire sa première 
grand'messe que sous la protection de M. de Lanneau, 
siégeant au banc d œuvre avec son écharpe munici- 
pale. 

Le 13 février 1831 , jour du saccagement de l'arche^ 
véché, il revint non moins alarmé que la première fois, 
et trouva encore le même accueil. 

L'abbé Olivier témoigna sa reconnaissance lors du 
service anniversaire du défunt Directeur, qu'il célébra 
lui-même avec toutes les marques de Taflection et de 
l'émotion. 

Les collèges furent rouverts dès le 2 août 1 830 pour 
l'achèvement des compositions de fin d'année. Sainte- 
fiarbe remporta le prix d'honneur de rhétorique au 
concours général*. A toutes les distributions de prix de 
cette année, on sentit le frémissement de la jeunesse 
exaltée par les derniers événements, et qui s'attendait* 
à être bientôt appelée sur les champs de bataille. La 

i. Élève Oddoul. 



220 HISTOIRE 

suppression des cloches, qui furent remplacées de nou- ^'^^ 

veau par le tambour, renseignement de Texercice des '^®' 

armes introduit dans le premier moment pour les élè- ^"^ 

ves des hautes classes, la nouvelle des révolutions de '™" 

Belgique, de Pologne, d'Italie, entretinrent pendant *P^^ 

plus d'un an cette fièvre, qne finit par dissiper la con- ^^ 

tinuation de la paix. ^pr 

C'est ici le lieu de mentionner un acte de la recon- ^le 

naissance publique, pour l'accomplissement duquel ''^^ 

on choisit plusieurs institutions, du nombre desquelles ;<fed( 

fut Sainte-Barbe. Nous voulons parler de l'éducation ^^jés 

donnée aux orphelins de juillet. Ces pauvres enfants ^500^ 

furent, dans le premier moment, l'objet d'un intérêt «se 

universel. On recueillit des souscriptions à lein» profit ; arlia 

là ville de Paris se chargea de les faire élever. Malheu- finj 

reusement la bonne intention fut gâtée par le peu de i\ 

discernement avec lequel on procéda. Sans tenir ^\^ 

compte des antécédents , sans consulter les disposi- ians 

tions ni l'aptitude, on mit en pension pour étudier, fooi 

comme s'ils avaient été préparés à cela dès l'enfance, sen 

des garçons de douze et quatorze ans, qui jusque là ( 

n'avaient fait que vagabonder dans les rues. Malgré la le 

peine que les maîtres se donnèrent après eux, c'est % 

tout au plus s'ils parvinrent à apprendre l'orthographe. ik 

Ils perdirent au collège le temps qu'il aurait fallu em- s( 

ployer à leur mettre dans la main un métier, de sorte p 

qu'à l'âge où il était trop tard pour qu'ils devinssent i 

des ouvriers, ils se trouvèrent sans moyens d'existence. 1 
Telle est du moins la triste histoire des cinq qui furent 
mis à Sainte-Barbe. 

Cependant M. Gannerou, appelé au Conseil général 
du département, avait ouvert les yeux de M. Odilon 



DE SAINTE-BARBE. 2£l 

Barrot, alors préfet delà Seine, sur rintriguecoiisoni* 
mée en 1821 au détriment de MM. de Lanneau. 11 lui 
avait démontré que la Ville, propriétaire du collège de 
la rue des Postes, ne pouvait pas profiter plus long- 
temps d'une usurpation de nom contraire à tous les 
principes de Téquité et du droit. Le préfet savait déjà 
une partie de l'affaire et par le bruit qu'elle avait fait 
dans le public, et par Tindignation qu'il se rappelait 
avoir vu témoigner à M. Labbey de Pompières, grand- 
père de sa femme, Tun des députés qui s'étaient em- 
ployés dans le temps pour Sainte-Barbe. D'ailleurs 
le gouvernement venait de prendre vis-à-vis de la jeu- 
nesse l'engagement de rompre avec les habitudes de 
partialité. M. le duc de Broglie, ministre de l'Instruc- 
tion publique, avait dit aux lauréats du concours géné- 
ral : (c Les maîtres habiles qui président à vos travaux 
et qui dirigent vos jeunes esprits, trouveront désormais 
dans nos lois et dans le respect de l'administration 
pour ses devoirs une garantie mieux assurée de leurs 
services. » 

Un mémoire tendant à ce que la maison de la rue 
de Reims rentrât dans la propriété exclusive de son 
nom, fut soumis par le préfet lui-même au Conseil gé- 
néral, faisant fonctions de Conseil municipal. Le Con- 
seil adopta à l'unanimité les conclusions de ce mémoire 
par un arrêté en date du 1 Tseptembre 1 830. Le Conseil 
royal de l'Instruction publique put, à son tour, sta- 
tuer dans le même sens, sans avoir à se déjuger; car si 
autrefois il avait érigé en collège l'institution de M. Ni- 
colle, il ne lui avait pas donné le nom de Sainte- 
Barbe. Dans sa séance du 6 octobre, il assura également 
la propriété exclusive de ce nom à rinslilution de M. de 



22i HISTOIRE 

Lanneau^ Quant au collège delà rue des Postes, il fut 
appelé le Collège Rollin par un acte de justice qu*on 
peut regarder comme le digne pendant de Tautre, car 
ce fut consacrer la mémoire du Saint de C Université^ 
que de l'associer à l'existence d'un de nos meilleurs 
établissements d'instruction. Sainte-Barbe se félicite 
d'avoir fourni pour des rivaux qu'elle estime la pensée 
d'un si respectable patronage. C'est M. Delabarre, chef 
de sa comptabilité et l'un de ses plus dévoués fonc- 
tionnaires, qui trouva le nom de Rollin. On le fit par- 
venir par l'Hôtel de Ville au ministère de l'Instruction 
publique. 

Les anciens barbistes, afin de témoigner leur recon- 
naissance à M* Odilon Barrot, le prièrent d'agréer le 
titre de citoyen dans la petite patrie à laquelle il venait 
de restituer son nom. C'est le premier acte de natura- 
lisation qu'ils aient décerné ; et depuis, ils n'ont renou- 
velé la même faveur que deux fois, pour récompenser, 
après plus de vingt ans de service, le dévouement des 
deux directeurs des études, qui aujourd'hui consacrent 
leurs veilles à la prospérité et à la gloire de la maison. 

Le 12 octobre 1830, un banquet fut offert au 
préfet pour célébrer son accession au sein de la famille 
barbiste. Voici sa réponse au toast qui lui fut adressé 
à la fin du repas : 

« Mes amis, c'est trop apprécier un acte si simple 
et si nécessaire. La maison de Sainte-Barbe^ qui a prO" 
duit tant d'exemples de talent^ de vertu, de patrio- 
tisme, devait, comme la France, avoir ses vicissitudes. 



i . Décision signifiée par le ministre de l'Instruction publique, 
le 14 octobre 1830. 



DE SAINTE-BARBE. • 223 

C'est une des gloires de Sainte-Barbe d'avoir soulTerl, 
combattu, triompbé avec elle, et il était juste qu'elle 
redevînt libre quand la France a été affranchie. J'ai 
été heureux de me trouver appelé à lui rendre cette 
justice, et je vous assure que j'ai eu bien besoin de 
me convaincre que c'était un acte de justice, pour me 
persuader que je ne cédais pas dans cette circonstance 
à d'anciens souvenirs et à des affections de fa- 
mille. » 

Quelqu'un manquait à cette fête. C'est le fondateur 
dont l'œuvre venait d'être réhabilitée. Tout le monde 
le sentit et le dit ; personne ne l'exprima mieux que 
son fils*. Quelques mois ajoutés à son existence lui 
auraient apporté cette immense consolation. Empres- 
sons-nous d'ajouter que si la joie du triomphe lui fut 
refusée, il ne connut pas non plus une grande amer- 
tume qui en fut Taccompagnement. 

Son administration désintéressée, souvent mal servie 
et trop peu prévoyante, celle de son fils également 
étrangère à l'esprit d'entreprise , l'obligation où tous 
les deux s'étaient trouvés de faire si longtemps la 
guerre à leurs frais, tout cela avait rendu redoutable 
pour l'établissement le contre-coup des commotions 
extérieures. La révolution de juillet fit apparaître le 
mal dans toute son étendue. Sainte- Barbe fut mise à 
deux doigts de sa perte, à la fois par la crise financière 
qui suivit, et par le revirement qui s'opéra dans les 
esprits le lendemain même de la victoire. Les deux 
grands partis qui venaient de diviser la nation ces- 



n Fêtes annuelles des anciens élèves de Sainte-Barbe, t. II, 
p. 9. 



224 HISTOIRE 

sèrent d'exister. A la place il s'en forma une infinité 
d'autres, en dehors desquels resta la masse, devenue 
tout d'un coup indiflerente. On ne se soucia plus des 
luttes ni des services passés; l'opposition de quinze 
ans fut oubliée ou^ mise au rang des souvenirs im- 
portuns, et notre Collège cessa d'être un lieu où l'on 
se fit gloire par opinion de placer ses enfants. 

Joignez à cela une recherche de bien-être qui devint 
aussitôt la préoccupation du jour, et que les familles 
exigèrent des maisons d'éducation, de sorte que la 
vogue fut pour celles où il y avait cuisine succulente, 
salles d'étude bien chauffées, dortoirs frottés, et le 
reste. Or, la pauvre Sainte-Barbe n'avait rien de tout 
cela à offrir. Son défunt directeur avait toujours af- 
fecté à l'égard de ces choses un superbe dédain. Elle, 
se montrait aux visiteurs avec un air d'austérité qui 
les faisait fuir. 

Pour ces diverses raisons, elle fut délaissée inconti- 
nent. Les rentrées de 1830 et 1831 furent telles, que 
le nombre des élèves pensionnaires tomba à cent-cin- 
quante. 

M. de Lanneau, désespéré, fit part de sa douleur à 
un ancien camarade que la reconnaissance avait atta- 
ché par le lien de la plus étroite amitié à sa faoïille et , 
à Sainte-Barbe. C'était M. Bellaigue, nommé député 
de l'Yonne aux élections de 1830. 

Esprit ferme, d'une sagesse accommodée de beau- 
coup de philosophie, et amoureux de Tordre dans tous 
ses détails, M. Bellaigue aurait été l'associé de M. de 
Lanneau père, en 1 81 4, si son goût l'avait porté à l'édu- 
cation de la jeunesse. Il était fait pour administrer. 
Etant sur les bancs de la rhétorique, il rendit au Coi- 



D£ SAINTE-BARBE. 225 

lëgè de petite services de comptabilité. Lorsqu'il fut 
instruit de sa détresse, il exprima la résolution de le 
sauver. Ses journées étant consacrées tout entières à 
ses devoirs politiques, il prit sur son sommeil pour 
l'accomplissement du nouveau mandat que sa con- 
science lui imposait. Installé dès sis heures du matin 
dans les bureaux de Sainte- Barbe, il dressa le bilan de 
la situation. 

Les créanciers étaient nombreux et pressants. Com- 
ment les satisfaire? On était dans un moment de pé- 
nurie; Targent ne se montrait nulle part. M. Bellaigue 
eut le bon sens de compter comme une ressource Taf- 
fection des anciens barbistes pour la maison. 11 lui 
parut possible de former avec les plus dévoués d'entre 
eux une société en commandite^ dont l'intérêt serait 
de sauver Sainte-Barbe en venant au secours de soq 
digne chef. L'empressement avec lequel fut accueilli 
son projet prouva qu'il avait calculé juste. Les action- 
naires furent fournis par V Association amicale des 
anciens élèves de Sainte-Barbe^ association qui s'é- 
tait formée aux banquets de la Sainte-Barbe, et qu'il 
est temps de faire connaître. 

Nous avons raconlé l'origine de la fête célébrée 
hors du Collège, le 4 décembre de chaque année*. 
Protestation politique contre l'arbitraire, puis hom- 
mage public de reconnaissance envers un maître vé- 
néré, en dernier lieu témoignage et lien de la fraternité 
barbiste, le banquet eut lieu depuis 1816, avec la 
plus grande régularité, et toujours en observant le 
même cérémonial. Une allocution du président pré- 

1. Ci-dessus, p. 151. 

m 15 



%%^ HISTOIRE 

oédait }e repas. On lisait ensuite la correspondance des 
camarades qui, des points du globe les plus éloigné^'i 
faisaient savoir qu'ils s'associaient de cœur au plaisir 
de la réunion, ou qui annonçaient, lorsqu'ils étaient 
plusieurs ensemble, qu'ils fêteraient aussi la patronne 
le même jour, à la même heure. Le banquet de Paris 
fut ainsi répété maintes fois dans de petits cénacles à 
New-York, à la Martinique, à Tîle Bourbon, surtout k 
Alger, depuis la conquête. Les vers et les chansons ve- 
naient au dessert. Dans rinteryalle des services, le 
président portait les toasts suivants : 

m À Sainle^Barbe, et au chef respectable qui a sou« 
tepu la gloire de. cette institution. 

(c A Qos camarades que Téloignement ou des cir-* 
constances malheureuses empêchent d^assister à cette 
réunion. 

(( Aux succès de nos jeunes camarades, les élèves 
actuels de Sainte-Barbe, et de ceux qui leur succé- 
deront. 

a A l'union qui anime cette fête de famille, et à 
l'espoir de la voir se renouveler chaque année. « 

C'est encore dans cet ordre et dans ces termes que 
les santés sont portées aujourd'hui, si non que la pre- 
mière est ainsi conçue ; 

a A Sainte-Barbe et à la mémoire de Victor de L»an- 
neau* i> 

M. de Lanneau père, depuis qu'il se fut démis de 
la direction du Collège, assista plusieurs fois au ban- 
quet. La première fois qu'il y parut, en 1823, le pré- 
sident, qui était Vatouti le fît asseoir à sa place, après 
lui avoir posé, au nom de ses camarades,, une cou- 
ronne sur la tête. 



DE SAINTB-BARBE. jaj7 

Od se rappelle qu'un acte de bienfaisance teromifi 
la fête de 1816. Celles des années suivantes produisi- 
rent d'autres collectes, qui furent offertes tour à tour 
aux naufragés de la Méduse (il y avait dans Je nombre 
le barbiste Mollien, parent de l'ancien ministre de ce 
nom)^ à un vieux maître tombé dans l'indigence, à un 
camarade ruiné par l'incendie de Bercy, à la mère dti 
jeune médecin Mazet, mort victime de son dévoue- 
ment, en allant soigner les pestiféré^ de Barcelone. 

Bientôt se présenta l'idée de régulariser ces bonnes 
œuvres. Plusieurs des fidèles convives du 4 décembre 
avaient pris l'habitude de dîner ensemble le 4 de cha- 
que mois. Dans un de ces petits comités, MIVI. Canuel, 
Crapelet et Quénot développèrent le projet d'une 
association charitable, dont les membres alimente- 
raient par des cotisations annuelles une caisse de se- 
cours. Cette caisse devait être ouverte non-seulement 
aux sociétaires qui tomberaient dans l'infortune, mais 
encore à tous les anciens élèves de Sainte-Barbé, 
pourvu qu'ils eussent passé deux ans d'études ou fait 
seulement leur rhétorique au Collège. Le projet, chau- 
dement accueilli par tous ceux qui en eurent connais- 
sance, fut soumis, au mois de mars 1820, à Tapproba- 
tion du ministre de Thitérieur. C'est dans la réunion 
mensuelle du 4 avril suivant, réunion à laquelle assis- 
tait M. de Lanneau père, que les statuts furent pro- 
mulgués. Aussitôt après l'on fut en mesure de recueil- 
lir les souscriptions. 

Ainsi prit naissance \ Associationamicale de Sainte^ 
Barhe^ modèle de tant d'autres du même genre. Le 
seul survivant de ses trois législateurs, M. Quénot, in- 
génieur civil depuis de longues années dans le dépar- 



â2B HISTOIRE 

tement du Lot, ignore certainement le nombre des 
imitations engendrées par cette charte de Tamitié de 
collège, qui parut pour la première fois revêtue despa 
nom*. Les élèves de TÉcole polytechnique, ceux dp 
l'École normale, ceux de TÉcole centrale, ceux d^ 
lycées de Paris, de beaucoup de lycées des déparle? 
ments et de plusieurs grandes institutions, se sojat 
constitués à Tinstar des barbistes, et lesbarbistes n'oiit; 
pas été pour rien dans cette propagande. ^• 

L'Association fut dirigée d*abord par un comité de 
onze personnes, nommées tous les deux ans à la plur 
ralité des voix. Après 1830, le nombre a été porté à 
vingt; depuis 1846, il y a des membres à vie qui s*a^ 
joutent aux élus biennaux : ce sont ceux qui oiçkf, 
exercé pendant vingt années consécutives, par consé;t 
quent qui ont été réélusdix fois de suite. Le droit d'4* 
lectiop appartient à tous les camarades présents au 
banquet du 4 décembre, et c'est dans cette même 
réunion, qui est considérée comme l'assemblée géné^ 
raie de l'Association, que sont lus les rapports concer^ 
nant l'état de la caisse et l'emploi des fonds. 

Le jeu de cette institution fraternelle ne fut bien ré* 
gularisé qu'en 1823. Depuis lors, le compte rendu de 
ses opérations fut imprimé tous les ans dans un livret, 
qui contient en outre le récit du banquet et les cou-* 
plets chantés ^ Le livret (à présent, on l'appelle Anr 
nuaire), augmenté successivement de matières nout 

i. Circulaire et Statuts imprimes en une demi-feiiille in-4% 
sous le titre de Association amicale et ae bienfaisance entre les 
élèves de Sainte-Barbe (Institut/onde M, de Lanneau). Avril, 1820. 

2. la oollectioii.coiiiplète forme cinq volumes in-8* (le sixième 
est commencé) sous le titre de «c Fêtes annuelles des anciens 



DE SAINTE-BARBE.' H^ 

vèHeà,^l devenu la chronique de Sainte-Barbe;mais 
il ne contient pas le détail des secours distribués sur 
lësTonds communs. L'Association pratique rigoureu* 
sèment le précepte que la main gauche doit ignorer 
te que donne la droite. Ses bienfaits restent le secret 
des membres de son comité.- Nous reviendrons plus 
tard sur ce point. 11 importe ici de ne point perdre 
de vue les circonstances qui procurèrent le salut de 
Sainte-Barbe. 

' Ginquante*huii membres de l'Association amicale 
répondirent à Tàppel de M. Bellaigue, et jetèrent les 
bases d'une première société (8 novembre 1831). 
M. de Lanneau devait être le gérant de l'entreprise, 
k^ec le concours de cinq commissaires nommés tons 
les ans en assemblée générale. Les noms qui sor- 
tirent de la première élection furent ceux de MM. Bel- 
laigue, député de l'Yonne; Ganneron, député de Pa- 
ris; Leclercq, libraire; Vavin et Louveau, notaires à 
Paris. Ces messieurs se mirent immédiatement à Tœu- 
vre pour s'acquitter d'une infinité de choses qu'il y 
avait à faire , avant que la Société pût se constituer 
définitivement. 

MM. Christian Dumas et Yatout, l'un aide de camp 
du roi, l'autre son bibliothécaire, étaient des cin- 
quante-huit qui avaient donné leur signature. Leur fa- 
Hiiliarité au château leur permit d'entretenir le roi de 
Cette affaire. 

Le nom de Sainte-Barbe n'était pas ipdifîérent à 
Louis-Philippe. Il se souvenait d'avoir été le condisci- 



élèves de Sainte-Barbe. » — Imprimeries de Gauthier-Laguionie, 
Crapelet, E. Duverger et Remquet, 1 823-1 Ô63. 



i30 HISTOIRE 

pie dés élèvesde la ci-deyatit Communauté au collège du 
Plessis. Il nMgnorait pas non plus la conduite du gouver* 
nement déchu à l'égard de M. de Lanneau, et il avait 
une si haute idée du mérite de cet instituteur que, 
dabs les premiers jours de son règne, il dit à M. Va- 
tbut : « Ah ! si le maître que vous aimiez tant vivait 
encore, il aurait déjà reçu la récompense de ses ser- 
vices et de son dévouement à la jeunesse. Il serait 
entré le premier au Conseil de l'Université. » Il voulut 
faire quelque chose pour la mémoire de celui que la 
mort Pavait empêché de rémunérer. Pour sa part dans 
la souscription ouverte, il donna 5000 francs sur sa 
cassette, qui furent offerts par convenance au nom de 
la reine. 

Au ministère de l'Instruction publique, envers le- 
quel la maison était fort arriérée pour le payement de 
la rétribution universitaire, on obtint un délai qui 
eut la valeur d'une souscription. M. Beliai^ue fut le 
solliciteur de cette grâce. Député opposant et rigide, 
il ne se serait porté dans aucun autre cas à une démar- 
che de ce genre. Lorsqu'il exposa l'objet de sa demande 
à M. de Montalivet, son émotion fut si visible, que 
le ministre lui dit, après l'avoir écouté : a Votre visage 
en dit encore plus que vos paroles. Je sens ce que 
vaut un établissement dont les malheurs touchent si 
vivement les hommes qu'il a formés. Rassurez-vous 
et rassurez vos amis. Sainte-Barbe ne sera pas inquiétée 
par mon administration. » 

Les grâces arrivant ainsi des mêmes régions qui 
naguère n'envoyaient à la pauvre Sainte-Barbe que 
tribulations et soucis, tout semblait marcher à une 
prochaine conclusion, lorsqu'on fut arrêté par un 



DE SAINTErBARBE. 23i 

c^tacle inatteDdu» Deux ou trois créanciers de mau*- 
vaise buinêur refusèrent d'accepter Tatermoiement 
auquel les autres avaient consenti. Grande perplexité 
des commissaires. Ils virent l'imminence d'une saisie, 
et nul autre moyen pour parer ce coup que d'acheter 
l'établissement. 'Devaient-ils engager la Société à ce 
point ? Oui ; car la Société avait pour objet le salut du 
Collège, et par la saisie le Collège périssait^ au détri- 
ment des créanciers eux-mêmes, dont il était l'unique 
gage. Mais rendre une société commerciale proprié- 
taire d'une maison d'éducation était une nouveauté 
devant laquelle reculaient les commissaires. Us ne se 
décidèrent qu'au dernier moment. L'affaire fut con- 
clue dans les couloirs de la Cbambre des députés en- 
tre MM. Bellaigue et Ganneron, agissant pour leurs 
camarades conjointement avec M. Leclercq. Eux trois 
se rendirent acquéreurs de Sainte- Barbe, le SOdécem* 
bre 1 831 , par un acte qui fut enregistré le lendemain, 
à cause de l'urgence. Yavin rédigea les actes* 

Rien ne fut plus désagréable que ce résultat pour les 
créanciers qui s'étaient promis d'user de contrainte. Ils 
prétendirent qu'il y avait eu simulation de vente, et 
attaquèrent le contrat; mais le prix d'acquisition, 
déposé en temps utile à la Caisse des consignations, 
prouva la bonne foi des défendeurs; et comme leurs 
adversaires n'eurent l'envie ni solidairement, ni auôun 
d'eux en particulier, de miser au-dessus de la somme 
versée, laquelle était bien supérieure à la valeur réelle 
de l'établissement, ils laissèrent tomber l'instance après 
un simple jugement sur référé, par lequel le président 
Debelleyme déclara la vente « non-seulement régor 
lière, mais morale. » Morale était bien dit^ car non- 



î 



232 HISTOIRE 

seulement le prix du gdge, qui avait été eulevé dés 
mains des créanciers, fut loyalement partagé entre euir, 
mais en peu d'années tontes les dettes de Tanciennë 
administration furent acquittées avec les bénéfices de 
la nouvelle, bien que celle-ci n'y (ût point obligée. '' 

La Société, devenue propriétaire de Sainte-Barbe, 
ne fut constituée définitivement que par un acte sous 
seings privés eu date du 7 septembre 1832. A parâr 
de ce moment, une nouvelle comptabilité fonctionna, 
et les cinq Commissaires prirent la surveillance des 
intérêts du Collège. M. Adolphe de Lanneau, déli^ 
vré d'une gestion qui était devenue douloureuse, 
put s'adonner d'un esprit plus tranquille aux autres 
soins du gouvernement. Il continua d'être le Directeur 
de Sainte*Barbe. Au-dessous de lui eurent lieu quel^ 
ques changements. Son plus jeune frère, M. Eugène de 
Lanneau, l'assistait depuis deux ans, avec le titre de 
sous*dïrecteur. Leur union s'était formée en vertu d\m 
vœu exprimé par le père à son lit de mort ; elle firt 
dissoute, et un, bientôt après, deux préfets des études 
prirent sur eux les attributions du sous-directeur. 
M* Pelitjean, aujourd'hui conseiller-maître à la Cour 
des Comptes, fut le premier nommé à ces nouvelle^ 
ou, pour parler plus exactement, à ces anciennes fonc- 
lions rétablies. 

Par une formalité que les règlements académiques 
rendaient indispensable, le diplôme en vertu duquel 
l'institution était tenue dut être mis sous un nouveau 
nom jusqu'à l'acquittement des sommes dues à TUni- 
versité. M. Hébert, inspecteur dans la maison depuis 
1810, se prêta à cette fiction en l}omme qui s'était 
interposé plus d'une fois pour servir de bouclier à 



DE SAINTE-BARBE. MB 

^inte*Barbe et à Ici fainille de Lanneau. Le désinté* 
ressèment de ce digne fonctionnaire» pendant tout Je 
temps que dura la même situation, n'eut d'égal que sa 
fidélité. Le surplus de son éloge est dans une lettre que 
M. de jLanneau père lui écrivit à lui-même en 182i : 
Et jL' écolier a sa justice. Au milieu même de certaines 
dispositions guerroyantes contre ses chefs, il reconnaît 
les titres à son respect, il reconnatt ]es vieux services 
qui même ont gêné et réprimé ses désordres ; il apprécie 
la probité de nos devoirs, le zèle qui le remplit : voilà 
les litres que vous lui imposez aujourd'hui*, » 

A deux reprises, en 1836 et 1837, la Société du 
£oIIége appela dans son sein de nouveaux souscrip- 
leurs; à deux reprises aussi elle augmenta le nombre 
des membres de sa Commission de surveillance. Ceux-* 
<^ furent portés à dix en 1834, et à douze en 1836* 
Par suite de cette double réforme et de la retraite mo- 
mentanée de deux membres, de nouveaux noms furent 
ajoutés à ceux que l'on connaît déjà ; nous les donnons 
avec les litres dont ils étaient alors accompagnés : 

MM, Bayard, homme de lettres; Bérenger, juge de 
paix du 6*" arrondissement ; Bixio, docteur en médecine; 
Christian Dumas, aide de camp du Roi ; Alexandre 
labrouste, avoué honoraire ; Eugène Lamy, vice- 
président du tribunal civil de la Seine ; Mandrou, 
marchand de draps; Agathon-Prévost, agent général 
de la Caisse d'épargne ; Vatout, député. 

Le travail augmentait à mesure que plus de personnes 
y prenaient part, tant chacun avait pris au sérieux le 
mandat de surveillance dont il était investi, et par 

i.R€co6ildclettre&de P.-A.-V.deLaniîeau, p. 106. . 



884 aiSTOiK£ 

la suite le zèle se soutint le même, sans éprouver 
ni refroidissement, ni défaillance* C'est là un fait qui 
mérite d'être particulièrement signalé. Il n'est pas rare 
de trouver une personne capable d'un beau mouvez 
ment, d'un acte de courage, d'un sacrifice une fois 
fait; mais quç l'effort ou le sacrifice se prolonge, qu'on 
s'y soumette pendant des années consécutives, que ce 
soit une réunion d'hommes très-occupés ailleurs, char* 
gés de grands devoirs et de 'grands intérêts, qui pren- 
nent sur leur temps de quoi poursuivre, à travers tout 
ce qu'elle a de difficile, de pénible, de scabreux, 
l'œuvre de dévouement qui ne finit pas : un tel spec- 
tacle ne se voit pas communément. Il a été donné par 
la Commission de surveillance de Sainte-Barbe ; il est 
donné encore aujourd'hui par le Conseil d'adminis* 
tration, dans lequel la Commission s'est en dernieVlieu 
transformée. 

Afin de rendre plus sensible à tous les yeux son 
origine et son but, la Société du Collège voulut que ses 
affaires fussent exposées régulièrement au banquet du 
4 décembre, et le rapport qui les concernerait, imprimé 
dans l'Annuaire^ à côté du rapport présenté par l'Asso- 
ciation amicale. On apprit de cette manière en 1 833 
la réalisation de bénéfices qui permettaient déjà de 
satisfaire les créanciers privilégiés', de réparer le ma- 
tériel, de restaurer et de blanchir les vieux murs du 
Collège, de construire de vastes salles de récréation et 
de dessin, enfin de payer les intérêts échus des action- 
naires. Les progrès ultérieurs de l'entreprise furent 
notifiés de même, chacun à l'année qui les vit s'ac 
complir. 

Cependant M. Adolphe de Lanneau, retranché dans 



DE SAINTE-BARBE. . 235 

là direction du Collège, secondait de son mieun les 
efforts de la Commission de surveillance. Il eut la 
consolation de voir que Tëtat de souffrance des affaires 
n'affecta en rien le travail de ses élèves» Le public eut 
beau retirer sa faveur à Sainte-Barbe : Tauréole de la 
sainte fut maintenue dans toute sa splendeur par la 
cohorte réduite qui militait autour de son autel. Prix 
d'honneur de rhétorique au concours général de 
1832*, autre prix d'honneur de rhétorique en 1834', 
prix d'honneur de mathématiques en 1837', et les 
distributions de Louis-le-Grand attestent que, pas une 
fois pendant ces aniaées d'embarras, la part de butin 
rapportée par les barbistes ne fut au-dessous de la 
proportion accoutumée. 

« Sainte- Barbe revivra par nous et pour nous, » 
avait' dit M. Bellaigue au banquet de 1831 , et par ces 
paroles il entendait que l'école dont ses amis et lui 
â' étaient rendus les tuteui*s appartiendrait en propre 
aux fils des anciens barbistes, que ces enfants y se- 
raient reçus avec j l'avantage d'une adoption sérieuse 
et dont les effets ne cesseraient plus de se faire sentir 
aux bien méritants, enfin que la maison, se perpé- 
tuant par l'hérédité, deviendrait le lieu et le lien d'une 
famille impérissable. Ce fut là Une conception noble 
et sensée, qui se produisit avec un merveilleux à pro- 
pos lorsque Ton commençait à parler de la liberté 
d'enseignement, car elle offre l'un des modes les plus 
heureux que l'on puisse introduire dans l'application 
de cette liberté. 

i . Élève Emile Taillefert. 

2. Élève Chairles Uello, prit des nouveaux. 

3. Élève Edouard Harlé. - 



236 ^ HISTOIRE 

MM. Bellaigùe, Ganneron, Hello^ Thieullen, Cadet- 
Gassicourt^ et d'autres encore, avaient déjà rais leurs 
fils sur les bancs où eux-mêmes s'étaient assis autre- 
fois; leur exemple fut de plus en plus imité. Déjeu- 
nes pères de famille vouèrent solennellement à Sainte- 
Barbe leurs enfants, qui balbutiaient encore. Une 
chanson, composée dans ce sentiment pour le fes^ 
lin du 4 décembre 1 833, produisit l'eflfel d'un mani- 
feste. C'est un document historique qui mérite d'être 
rapporté. L'auleur est Bayard, Bayard en qui le public 
applaudissait un de ses vaudevillistes favoris, et que 
Sainte-Barbe a chéri comme- l'un des honnêtes et fer- 
mes cœurs qui se sont prodigués pour elle. 

Pour ce banquet, où noire cœur s'enivre 

D'une amitié qui ne vieillira pas, 

J'allais partir, lorsqu'à voulu me suivre 

Mon jeune fils, que j'ai pris dans mes bras : 

c< Non, j'irai seul; mais un jour sur la liste 

Je t'inscrirai : c'est la dette du cœur. 

Oui, mon enfant, je te ferai barbiste : 

Ce tiire-là te portera bonheur ! ' > 

« Quand Sainte-Barbe accueillit ma jeunesse, 
Que de succès ! Que son ciel était beau ! 
Tu lui paieras ma part dans sa tendresse 
Lorsque la foule entourait son drapeau. 
Pour rajeunir sa gloire qui s'attriste, 
A sa couronne attachons une fleur. 
Oui, mon enfant, je te ferai barbiste : 
Ce titre-là doit te porter bonheur! 

« Sur ses vieux murs tu trouveras peut-être 
Mon nom gravé le jour de nos adieux : 
Mon souvenir, qui par toi va renaître, 
Protégera tes travaux et tes jeux. 



DE SÀlNTE-BARBE. 237 

Pauvre conscrit^ Sainte*Barbe t'assiste ! 
De nos foyers tu soutiendras l'honneur. 
Oui, mou enfant, je te ferai barbiste : 
Ce titre-là doit te porter bonheur ! 

« Quand Sainte-Barbe, échauffant ton génie, 
Taura fait homme et remis à ta foi, 
Pour t'enseigner les routes de la vie. 
Mes vieux amis se souviendront dé moi. 
' Ils feront tous, commis, soldat, artiste, 
La courte échelle à ta jeune vigueur. 
Oui, mon enfant, je te ferai barbiste : 
Ce titre-là doit te porter bonheur ! 

« A ce banquet, où je retiens ta place. 
Tous deux alors nous irons nous asseoir : 
De mes chansons si la veine se glace, 
Tu chanteras pour deux, j*en ai l'espoir; 
Et tu mettras tes enfants sur la liste : 
C'est pour nous deux une dette du cœur. 
Oui, mon enfant, je te ferai barbiste : 
Ce titre-là doit te porter bonheur ! 

Grâce à Taclive propagande qui fut faite par TAsto- 
ciation^amicale, à toutes les rentrées des classes, de- 
puis 1834 y le nombre des élèves nouveaux excéda 
celui des élèves sortants, et les choses prirent dès 
lors une tournure si favorable, que, dans le courant de 
1 835, il fut possible de tenter une nouvelle entreprise. 

Les bâtiments du collège de Reims, vendus sur 
Sainte- Barbe en 1832, avaient été mis en location par 
le nouveau propriétaire. Des visiteurs en soutane 
vinrent explorer les lieux. Évidemment on projetait 
d'établir une maison rivale aux portes de la sainte. 
La question fut agitée aussitôt de prévenir cette con- 
currence. Par quel moyen? En reprenant le vieux 



238 HISTOIRE 

collège, pour installer dans ses murs un institut pré- 
paratoire aux écoles spéciales du gouvernement. 

Les maisons de ce genre commençaient à se multi- 
plier dans Paris : preuve qu'elles étaient utiles. La 
Coaunission de surveillance se laissa persuader. Elle 
chargea des démarches son secrétaire, M. Labrouste. 
On acheta un embryon d'école préparatoire que notre 
illustre mathématicien, M. Duhamel, essayait de faire 
éclore à la vie dans une maison de la rue de Vaugi- 
rard. Une douzaine d'élèves, qui composaient cet éta- 
blissement^ vinrent s'abriter avec leur mattre sous le 
drapeau de Sainte-Barbe, et dès lors fqt constitué 
dans le Collège un ensemble de fortes études, pour 
conduire la jeunesse à toutes les carrières, pour ré- 
pondre à tous les besoins, à tous les vœux des fa- 
milles. 

Lorsque la résurrection fut définitivement accom- 
plie, M. de Lanneau pria ses amis de le relever du 
poste où, depuis qu'il avait dû renoncer à son héri- 
tage, il n'était r^sté que sur leurs instances. Maire 
du Xir arrondissement par l'élection (il fut continué 
par les mêmes suffrages jusqu'en 1848), honoré de 
l'estime et de l'affection de ses concitoyens , à la 
prière desquels il avait refusé une préfecture qu'on 
lui offrait, il éprouvait cependant le besoin d'établir 
aux yeux du public que les malheurs de Sainle-Barbe 
n'avaient point procédé de son fait. La direction de 
l'Institut royal des Sourds-Muets se présenta à lui 
pour fournir cette preuve. Il accepta cette place, qui 
ne l'enlevait ni à ses administrés, ni à l'instruction 
publique, où étaient ses goûts, ni au voisinage de sa 
chère Sainte-Barbe. L'Institut des Sourds-Muets était 



DE SillNTE-BARBE. 139 

organisé, soqs bc^aucoup de rapports, à Tinstar d'un 
hospice : il Tassujettit à la discipline des collèges. Il 
éteignit les dettes, répara entièrennent le matériel, éta- 
blit dix-sept bourses de plus, sans que la subvention 
eût été augmentée, et enfin il «'est retiré, après vingt 
ans d'administration y laissant en réserve de fortes éco- 
nomies. 

C est If 3 avril 1 838, dans l'assemblée générale des 
actionnaires, qu'il prit sa retraite de Sainte-Barbe. Il 
fut pommé en retour président de la Commission de 
surveillance de la Société, et le secrétaire de la Com- 
mission, M. Alexandre Labrouste, fut appelé par les 
mêmes siifTrages à la direction du Collège. 



CHAPITRE XIV. 



M. Labrouste directeur. — - Acqulsitioa de la propriété de Sainte-Barbe. 
— Constitution légale de la Société du collège. — Reconstruction 
des bâtiments. — Affaire de Montaigu. — Consécration de la nouvelle 
cbapelLe. — Fin des traraux. 



M. Labrouste est d'une ancienne famille bordelaise. 
l\ naquit à Paris^ pendant que son père s'acquittait du 
mandat de député au conseil des Cinq*Cents pour le 
département de la Gironde. On le mit très-jeune à 
Sainte-Barbe^, où était déjà son aine et où deux autres 

1. 10 juin i 806. 



UO HISTOIRE 

frères tinrent plus tard le rejoindre. Il fit là toutes ses 
classes. T^e dernier bulletin envoyé à sa famille nous 
dispensera de dire quelle fut sa conduite durant ce 
premier temps d'épreuve. Pour toute observation, il 
n'y a que celle courte phrase, écrite de la main 
de M. de Lanneau : <c Faut-il que nous touchions au 
moment de perdre la vertu et l'exemple du Collège*! » 

M. Labrouste, après avoir fait son droit, acheta 
une charge d'avoué à Paris. Il se comporta entre ses 
confrères de manière à mériter leur considération; 
Andrièux, dont il était devenu l'ami ,en suivant ses 
cours, lui donna sa fille aînée en mariage. 

Il était de ceux qui conservaient dans leur cœur 
le culte de Victor de Lanneau et l'amour de Sainte- 
Barbe. Il assista à la' représentation de JUantius en 
1816, au banquet qui suivit cette représentation, et à 
tous les autres banquets. Il fut de TAssociation ami- 
cale, de la Société des actionnaires et du Conseil de 
celle-ci. Depuis 1835, il y remplit, conjointement avec 
M. Bixio, les fonctions de secrétaire, et par son assi- 
duité, par son entente des affaires, par la persévé- 
rance pleine de douceur Iqu'jl mettait à les conclure, 
il devint aux yeux de tous un homme précieux pour 
l'entreprise. Lorsque celle-ci eut besoin d'un chef uni- 
que, aucun de ceux à qui il fut proposé de l'être ne 
voulant accepter , il arriva à quelqu'un de dire par 
plaisanterie que, puisque M. Labrouste était le plus 
souvent à Sainte-Barbe quand on allait le demander 
à son étude, pour la commodité de ses clients, il ferait 



1. Juillet 181 4, dans le Recueil de lettres de P.-A. -Victor de 
Lanneau, p. 27. 



DE SAINTE-BARBE. 24i 

bien de demeurer tout à fait à Sainte-Barbe. Ce niot 
fît ëclore sa candidature. 

Il s'en défendit d'abord énergiquement. Ses vues 
étaient ailleurs. Il s'acquittait de la supjîléance d'une 
des justices de paix de Paris ayee l'espoir d'être pro- 
chainement nommé à ce siège; plus tard il aurait 
cherché à être juge dans un tribunal de première in- 
stance. Tels étaient ses projets ou plutôt ses rêves 
d'avenir. Tout cela s'évanouit à la mort de son juge de 
paix, dont la succession fut donnée à un autre que lui. 
Alors il fut amené à composition du côté de Sainte- 
Barbe. S'avouant qu'il n'était pas sans goût pour l'édu- 
cation de la jeunesse, et que d'ailleurs il y avait péril, 
si la personne cherchée pour prendre en main le gou- 
vernail ne se trouvait pas sur-le-champ, il se laissa 
métamorphoser par ses amis en directeur du Collège. 

Son acceptation fut à deux conditions : d'abord 
que toutes les dettes de la maison non encore ac- 
quittées, même celles qui n'obligeaient pas la Société, 
seraient éteintes dans le plus bref délai ; ensuite qu'il 
aurait pleine puissance pour le choix de tous les 
maîtres, ses collaborateurs, depuis le plus humble, 
jusqu'au plus élevé en grade. 

Son installation eut lieu le 8 avril 1838. C'était un 
dimanche. Les membres de la Commission de surveil- 
lance l'amenèrent dans la chapelle au moment de la 
messe, et le firent monter dans la stalle du Directeur. 
Après l'office, le comte Christian Dumas prit la parole 
^ pour expliquer aux élèves l'acte important qui s'ac- 
complissait sous leurs yeux. M. Labrouste prononça à 
son tour une allocution, laquelle achevée, il descendit 
dans son cabinet pour délivrer les bulletins de sortie. 

m 16 



242 HISTOIRE 

Le nouY^au Directeur avait la plus haute idée de 
l'œuvre dont il venait de prendre la conduite. Dans 
l'association propriétaire d'un collège, il voyait le 
germe d'une ^communauté impérissable, sans analogue 
et sans rivale, dont la force était loin d'avoir donné sa 
mesure; et la raison lui disait que pour lui, l'agent de; 
cette force, le dépositaire des intérêts de cette com- 
munauté, c'était un devoir de pousser au complet 
développement de. l'une et de l'autre; que le moment 
d'oser était venu; qu'avec des moyens qui n'étaient 
plus ceux d'autrefois, il fallait faire autrement que les, 
devanciers; enfin que ce n'était rien d'avoir empé-* 
ché Sainte-Barbe de périr , si dans peu Sainte-Barbe 
ne se montrait aux yeux du public rajeunie et trans- 
-fôrmée. 

Telle est la politique qu'il résolut d'inspirer à I9 
Couunission de surveillance ; et, pour l'y amener dès le 
début, il mit d'abord à l'ordre du jour la reconstruc- 
tion du Collège. 

Les édifices, dont Marmohtcl déplorait l'état de dé- 
labrement en 1 790 \ n'avaient subi depuis ce temps 
que des recrépîssages et pas .une réparation capitale. 
Les maisons sur la rue des Sept-Voies, ajoutées par. 
M. de Lanneau au périmètre de l'ancienne Sainte- 
Barbe, valaient encore moins. Tout cela avait un air 
de malpropreté et de misère que ne rachetait pas la 
commodité des distributions, car celles-ci étaient telles 
qu'on pouvait les regarder comme un obstacle à la. 
discipline. Rebâtir le tout de fond en comble était donc « 
devenu d'une urgente nécessité. 

1. Voyeat. n, p. 380. 



DE SAINTE-BARBE. 243 

Mais comment rebâtir ? On n'avait pas la propriété 
deFimmeuble; on n'était que locataire. Depuis qua- 
rante ans, la directix)n du Collège subissait le tribut 
d'un loyer énorme; depuis quarante ans, des sommes 
infinies avaientété dépensées en améliorations^ en agen- 
cements, en remaniements, même en constructions 
nouvelles, sur le fonds d'autrui. Les propriétaires, 
comme de raison, profitaient de la convenance; ils 
bénéficiaient le plus possible sur une marchandise 
dont on ne pouvait pas se passer, tout en jouissant 
de la plus douce quiétude, parce qu'on les avait 
habitués à ne s'entendre jamais rien demander. Nul 
"espoir qu'ils consentissent à se charger de la recon- 
struction ; et quand on leur parla de se dessaisir, ils pro- 
posèrent des prix inacceptables par leur exagération. 

• 11 fallut en venir à la pensée douloureuse d'émigrer, 
de transporter ailleurs l'aulel de la sainte, et son culte, 
et le peuple voué à son culte. Les quartiers de la rive 
gauche furent explorés. On proposa tour à tour les 
terrains de l'entrepôt du Gros-Caillou, et ceux de Saint- 
Joseph dans la rue d'Ulm, où s'élève aujourd'hui l'É- 
cole normale supérieure. Mais le Gros-Caillou était 
trop éloigné des collèges royaux et de tout ; mais on 
apprit que le terrain de la rue d'Ulm, miné par les ca- 
tacombes, présenterait de grandes difficultés pour 
bâtir dessus; mais enfin, tout en disant qu'on voulait 
s'en aller, on n'avait pas du tout pris son parti de 
réloignement. 

' La Fortune, qui sourît aux entreprenants (on l'a 
appelée dans l'espèce V étoile de Sainte-Barbe) , la 
Fortune amena sur ces entrefaites un dénoûment 
inattendu. Une maîtresse poutre vint à fléchir dans 



244 HISTOIRE 

un bâtiment sur la rue des Sept- Voies, duquel dé* 
pendait la splidité de plusieurs autres. Toute cette 
partie de la propriété appartenait à la veuve octogé- 
naire de M. Champagne, l'ancien directeur du Pry*- 
tanée. L'accident causa une alerte : la poutre avait 
craqué ; des ouvriers, qui travaillaient dans la pièce 
au-dessous, s'enfuirent en poussant des cris; la police^ 
avertie, envoya l'ordre d'étayer sur-le-champ. Quelle 
occasion pour le Directeur! De sa plume d'avouéi 
qu'il n'avait pas jetée au vent, il eut bientôt fait d'in* 
strumenter contre Mme Champagne^ 

La bonne dame, assignée à fin de démolition et de 
reconstruction, jura qu'elle ne reconstruirait pas/ 
qu'on n'avait pas le droit de l'y contraindre : delà ud 
procès. 

Sainte-Barbe se présenta au combat avec l'assistanoe 
désfntéressée d'un de ses ^mis, M. Baroche, et d'ud 
de ses fils, M. Boinvilliers : l'un et l'autre n'étaient 
encore que des avocats éminents. Le procès, gagné en 
première instance*, est perdu en appel, perdu en ce 
que la Cour remplace par une diminution notable sur 
le prix du bail l'obligation de rebâtir ; mais l'obliga- 
tion de démolir est maintenue*. Mme Champagne 
appréhende de nouveaux soucis; pour se soustraire à 
l'exécution de l'arrêt, elle transige, et ainsi s'ouvre 
pour le Collège la possibilité d'acquérir à un prix 
V raisonnable tout le terrain tenu jusqu'alors en location\ 

i. Jugement du 19 juillet 1839, inséré dans le Mémoire distri«- 
bué pour la cause d'appel, M® Pascault , avoué. — In-4*, impri- 
merie de E. Duverger. 

2. Arrêt rendu par la deuxième chambre, le 49 août 1839. 

3. Promesse de vente sous seings privés, précédant Pacte défi- . 



DE SAINTE-BARBE. 245 

C'est Sâinte-Barbe qui démolira et qui rebâtira pour 
son propre compte. 

Restait la question d'argent, car ce n'est pas avec le 
mince capital social dont on disposait alors qu'on aurait 
fait face à tant de dépenses où l'on allait s'engager. Le 
Directeur le sentait, et le disait plus haut que personne ; 
mais il remontrait à la Commission de surveillance qu'il 
était facile d'augmenter les ressources par une réforme 
. de la Société. En tout état de cause, une telle réforme 
lui paraissait indispensable. On n'avait pas d'existence 
légale ; aucun engagement n'avait été pris à l'égard des 
actionnaires; ni intérêts, ni capital ne leur étaient ga- 
rantis; ils constituaient un groupe sans qualité, sans 
droits, sans pouvoir. 11 était temps de donner plus de 
consistance à l'entreprise : on profiterait de l'occasion 
pour ouvrir la porte aux retardataires, pour recueillir 
Toffrande des amis qui n'avaient pas encore contribué 
et qu'on savait disposés à le faire. 

La Commission étant entrée dans ces vues, des statuts 
furent dressés pour une société commerciale dans la 
forme de celles que l'on appelle anonymes ^ parce 
qu'elles ne portent le nom d'aucun des intéressés, 
société qui devait être composée exclusivement d'an- 
ciens barbistes ou de parents de barbistés. Le capital 
social fut porté de 230 000 francs à 520 000. Afin 
d'empêcher l'envahissement de la spéculation et d'en- 
tretenir l'esprit qui avait animé les premiers bailleurs 

nitif passé le 8 avril 184i, entre Mme Jeanne-Adrienne Chéret, 
veuve d'abord de Pierre-Marie-Henry Tondu-Lebrun, et ensuite 
de Jean-François Champagne, et Mme Civilis-Victoire-Jemmapes- 
Dumouriez Tondu-Lebrun, veuve de Nicolas-Hippolyte Régley, 
d'une part, et la Société de Sainte -Barbe, d'autre part. 



246 HISTOIRE 

de fonds, il fut décidé que, jusqu'au payement iiité«« 
gral de's acquisitions et constructions à ûiire (c'est^àU 
dire dans un terme indéfini), il n'y aurait pas de divi- 
dendes distribués aux actionnaires; mais qu'aprêi 
l'intérêt à cinq pour. cent soldé pour chacune des 
actions émises^ l'excédant des bénéfices qui n'irait 
point au fonds de réserve serait consacré par les man*^ 
dataires de la Société, seuls juges en celte partie, à des 
améiiorations intérieures ou à la rémunération des 
services rendus. La Commission de surveillance de U 
première société, augmentée jusqu'au nombre de 
vingt et un membres, devint Conseil d'administration-. 

Ces statuts , uniques en leur genre par l'exposé qui 
les précède*, sont l'ouvrage de Vavin, alors député 
du onzième arrondissement de Paris, l'un des première 
qui s'étaient dévoués pour le salut de Sainte-Barbe, i 

L'autorisation royale étant nécessaire aux sociétés 
anonymes, les statuts de la nôtre durent être soumis 
au Conseil d'État. On dit que plus d'un de MM. leis 
conseillers ouvrit de grands yeux en voyant une société 
commerciale se constituer pour l'entretien d'une mai- 
son d'éducation. Volontiers on Teùt prise pour une 
congrégation enseignante. Il y eut bien des questions^ 
bien des objections, auxquelles ne se lassèrent pas de 
répondre M.Vatout, lui-même conseiller, et M. Charles 
Paravey, alors maître des requêtes. Après quelques mo- 
difications introduites pour garantir les droits de l'Uni- 
versité, l'acte constitutif fut dressé le 24 février 1841;' 

1, Société de Sainte-B^be, société anonyme constituce par acte 
notarié des 11 juin 1840 et jours suivants^ statuts. — In-4'»,impr. 
de E. Duverger. 

2. Sainte-fiarbe, Société autorisée par ordonnance royale en 



DE SAINTE-BARBE. 247 

en l'étude de M' Aubry, qui avait été auparavant Fétude 
de M® Yavin. La société fut autorisée sous le nom de 
Société de Sainte^Barhe par ordonnance de Louis- 
Philippe, rendue le 47 mars suivant*. Deux autres or- 
donnances (1 8 juin 1 843 et 20 septembre 1 845) lui 
donnèrent depuis une extension nouvelle, et lui permi* 
rent d'élever son capital à six cent mille francs, puis à 
un miIlion^ 

On n'eut pas besoin d'attendre que les ressources 
fassent définitivement constituées pour porter le mar* 
teau sur les bâtiments dont on appréhendait la ruine. 
Leur démolition fut prompte; ils n'opposèrent aucune 
"résistance. Le 8 août 1 840 tout était prêt pour poser la 
première pierre de la grande aile qui fait retour de 
la rue des Sept-Voies sur la rue de Reims; on avait 
destiné à cet usage une pierre retirée des décombres 
du vieil édifice. Ce fut une cérémonie mémorable. 
Une tente avait été dressée dans la cour pour exhiber 
les nouveaux plans. Le Comité de l'Association ami- 
cale et le Conseil d'administration de la Société étaient 
présents. Après une messe de Saint-Esprit , les élèves 
furent amenés, au roulement du tambour, par le 
doyen de la maison, M. Fayard^ qui achevait alors sa 
trente-septième année de service comme inspecteur. 

Lorsqu'on eut fait cercle autour de la fouille, M. La- 
brouste parla, et après lui M. Paravey , qui avait si bien 
soutenu le droit de Sainte-Barbe au Conseil d'État. Le 
Conseil d'administration, dont il était l'organe, n'aurait 

date du 17 mars i841 : exposé, statuts, premiers souscripteurs, 
4841.' — In-8°, iœpr. de£. Duverger. 

1 . Bulletin des lois, Partie supplémentaire, n" 527, J). 260. 

2. Çulletin des lois, P. s., n° 804, p. 377. 



248 HISTOIRE 

pas pu Ëdre exprimer ses sentiments par un cœur plus 
pénétré. M. Paravey, Fun des anciens et brillants élèves 
du Collège, Ta servi dans toutes les occasions avec luiç 
affection filiale. £n terminant son allocution , il dit : 

a Quand les murailles que nous allons bâtir flédn» 
ront à leur tour sous le poids des années, il se trou* 
vera là d'autres barbistes pour les étayer, pour les 
reconstruire; car il y a quelque chose parmi nous 
qui vivra plus que ces murailles : c'est Tesprit qui les 
relève, et voici une pierre qui nous dit que, sous les 
ruines où elle peut retomber, comme sous les ruin^^ 
d'où elle e3t sortie, notre Sainte-Barbe ne périra pas. » 

Les discours étant terminés, le Directeur scella dans 
la pierre, qui avait été creusée exprès en forme d'auge 
la médaille de Victor de Lanneau, un exemplaire im»- 
primé des statuts de la Société, le règlement du Collège, 
le livret du dernier banquet, et une plaque de cuivre 
sur laquelle est gravée Tinscription que voici : 

Ad înstaurandum Sanctae Barbarae gymnasium 
, anno 1430 a Johanne Huberto institutum* 
et anno 1798 a Victore Delanneau restitutum féliciter 
nunc vetustate collapsum 
prisci fraterna societate coniposita discipuli 
novis adstantibus discipulis 
primarium hune lapidem 
. posuere 
die aug. viii annp Domini 1840. 
Et quod omnes uno animo parique studio 
in communem consentîunt et connituntur operam 
nullius hac in tabula nomen 
inscribi voluerunt. 

i , D'après le système historique de Félibien, renversé ci-dessus, 
t. I, p. 3, et t. Il» p. 200, 



DE SAINTE-BARBE. «49 

Ensuite la pierre elle-même fut scellée dans son as- 
aise, aux cris de Vwe Sainte-Barbe ! mille fois répétés 
. par les élèves. 

Les travaux furent poussés avec une promptitude 
extraordinaire, pour un temps on les architectes ne 
possédaient pas encore la baguette magique qu'on 
leur a fait trouver depuis. Le bouquet d'usage fut posé 
le U décembre suivant au faite de TédiGce. Au mois 
•d'octobre 1 841 , le soleil et les vents de la Montagne 
avaient suffisamment séché les plâtres; on put entrer 
en possession. 

Le plan, soigneusement étudié par MM. Théodore 
et Henri Labrouste, frères du Directeur, est digne de 
servir de modèle à toutes les constructions du même 
^enre. Les dégagements sont multipliés et commodes. 
.Toutes les parties aboutissent à des points communs, 
d'où la surveillance peut s'exercer sans se trahir. Les 
dortoirs sont chauffés par des calqrifères; des robi- 
nets y amènent l'eau pour la toilette. Ils restent éclai- 
rés pendant toute la nuit. Chacun est sous la garde 
d'un maître , qui couche dans une cellule élevée au« 
dessus du sol, fermée sur le devant par un simple 
rideau; en outre, un garçon de service a son lit près 
de la porte d'entrée. Dans les quartiers, les élèves ne 
sont plus placés vis-à-via les uns des autres, sur les 
deux côtés d'une table. Us sont tous assis en face de la 
chaire du maître, par rangs qui se tournent le dos. 
Les salles donnent sur un corridor, d'où l'on a vue 
dans chacune par un guichet vitré. C'est l'œil de la 
police. Des choses qui échapperaient à l'attention du 
maître peuvent être aperçyies par ce redoutable car- 
reau. A toute minute la porte peut s'ouvrir, et la voix 



Î50 HISTOIRE 

de l'inspecteur en tournée , ou celle du préfet *de§ 
études^ se faire entendre pour dénoncer un délit. 

Pendant que l'aile de la rue des Sept -Voies était ed 
construction 9 Montaigu^ dont on avait fait une prison 
militaire depuis le commencement du siècle (des bar- 
histes en ont tàté étant élèves de TËcole polytechn- 
nique, et d'autres se rappellent qu'en 4809 et 18f0 
M. de Lanneau y allait rendre visite au général Ma^ 
rescot, son camarade de l'École militaire, emprisonné 
à raison de la capitulation de Baylen), Montaigu dono 
fut enlevé à sa dernière destination, et ses vieux bâti* 
ments restèrent vides^ en attendant qu'on les jetât pai!^ 
terre. Une occasion unique s'offrit ainsi pourleCoUégi^ 
de prendre un accroissement dont il pressentait qu'il 
aurait bientôt besoin; car en réunissant Montaigt; 
à son domaine, il se fût procuré non-seulement âe 
l'espace, mais encore une immense façade sur la 
place du Panthéon. Le Directeur plaida chaudement 
pour ce parti, assez chaudement pour y amener le 
Conseil d'administration, qui n'en voulait point enten-» 
dre parler d'abord. Mais à peine s'était-on décidé^ 
qu'il s'ébruita que le gouvernement avait jeté les yevLit 
sur le terrain de Montaigu pour y transférer la biblio- 
thèque Sainte-Geneviève. Sainte-Barbe se récrie j elle 
se rend en corps chez les' deux ministres que cela 
concernait; elle les touche en leur peignant le dom- 
mage qui résultera pour elle de la construction d'une 
bibliothèque qui va la masquer et l'étouffer; elle est 
admise à négocier l'achat de Montaigu avec l'admi- 
nistration des Travaux publics. 

Le Conseil de la Société ne s'était embarqué dans 
l'afTaire que sur la foi d'une certaine estimation. Le 



DE SAINTE-BARBE. 25f 

piix du ministre des Travaux publics étant beauëoup 
plus fort, la négociation est rompue, abandonnée à 
tout jamais^ malgré les supplications, . les regrets de 
quelque$-uDS. Sainte-fiarbe se passera de Montaigu. 
> L'administration de la Guerre, cependant^ fait imne 
die se ressaisir du vieux collège abandonné. Nouvelle 
alarme pour le nôtre. Va-t-on de nouveau être exposé 
aux regards plongeants d'une population sinistre, où 
bien aura-t-on pour voisins les fiévreux d'un hôpital 
militaire? On se repent alors d'avoir repoussé la bi* 
bliûthèque, voisine honnéfe, tranquille, saine, parfai* 
(ement convenable pour un collège; on conçoit la 
pensée audacieuse d'en ressusciter le projet, et, grâce 
aux intelligences qu'on a dans les hautes régions du 
pouvoir, on y réussit; et vingt-sept députés barbistes 
de toutes les opinions, des mécontents contre le mi** 
nistère et des opposants quand même, qui cette fois 
fois changent de rôle, des radicaux non barbistes, 
mais subjugues par les barbistes, forment la majorité 
qui vote la loi du 7 juin 1843*, consacrant l'étroite 
et perpétuelle union de Sainte-Barbe et de Sainte* 
Geneviève, substituée à l'antique Montaigu. 

Tout n'est pas encore fini. L'alliance avec le Gou-- 
veruement a été à la condition que le Gouvernement 
donnerait à Sainte*Barbe Une entrée du côté du Pan* 
théon. 11 faut que cette partie du traité s'exécute. Le 
Directeur et le Conseil vont avoir à dépenser encore 
une année en démarches, en négociations, en trans- 
actions de l'espèce la plus difficile, et finalement Ton 
n'en pourra sortir qu'au moyen d'une seconde loi , 

1. Promnlgaée le 19 juillet suivant. 



ini HISTOIRE 

par laqaelle sera modifiée la première \ Trois ou 
quatre arrêtés préfectoraux, qui ont été rendus dans 
rintervalle, ne sont point à compter. 

Voici en deux mots ce qui eut lieu« La nouvelle 
bibliothèque prenant la plus grande partie de la rue 
Jean-Hubert, ainsi qu'une maison sur cette rue, qui 
appartenait à Sainte-Barbe, comme dédommagement 
pour celle-ci, on supprima la rue desCholels, dontoii 
lui abandonna la çaoitié ; on lui permit de s'adosser 
à un arrière-corps de la bibliothèque; on lui accorda 
enfin la faculté de pousser Jlisque sur la place du Pan- 
théon un corps de logis dans lequel serait établie son 
entrée principale. Ce dernier bâtiment fut élevé en 
1845 par M. Théodore Labrouste, qui en dessina la 
façade de manière à la mettre en harmonie avec celle 
de la bibliothèque , ouvrage de son frère, M. Henri 
Labrouste. Sur une plaque de marbre noir, dans le 
tympan de la porte , est gravé en lettres d'or le nom 
de Samte'Barbcj et au-dessus du cintre, un écusson 
porte les trois dates qui résument les destinées de l'é* 
tablissement, 1 460, 1 798, 1 841 . 

En 1 846 on démolit l'ancienne et la nouvelle cha- 
pelle, ainsi que les bâtiments élevés par Robert Du- 
gast sur le fonds de Jean Hubert. Ceux-ci , comme 
on l'a déjà expliqué plusieurs fois, tombaient per- 
pendiculairement à la rue de Reims, et se terminaient 
par une tour pentagone, adossée au mur de pignon du 
côté de Montaigu. On n'a pas oublié l'inscription que 
Robert Dugast fit graver sur cette tour, lors de sa* 

4. Loi du 2 juillet i84(i. Bulletin des lois, n» 1107 (5 juillet 
1844). 



DE SAINÏE-BARBE. 2$58 

construction en 1553^ De nouveaux docmnents nous 
ont depuis révélé que Torgueilleux docteur, afin 
d'attirer de loin les regards sur son collège, avait fait 
édifier au soûimet un campanile en charpente, qui 
dominait le quartier. 11 appelait cela |^ Donjon de 
Sainte-Barbe'. 

Avant d'aller rejoindre dans le néant son donjon 
abattu depuis près de deux siècles, la tour reçut la 
visite d'un vénérable grand-oncle de trois jeunes bar- 
bistes alors sur les bancs, M. Benoist de Plailly, maire 
du village de ce nom, sorti de l'ancienne Communauté, 
en 1 778, et l'un des premiers actionnaires de la Société 
de 1 841 . Le vieillard grimpa lestement les cinq étages 
de l'escalier, et montra avec émotion la chambrette 
d'où, soixante-cinq ans auparavant, étant élève de 
philosophie, il avait vu bâtir la coupole du Panthéon. 

A la place des maisons de Robert Dugast» on con-» 
struisit une galerie couverte, qui met en communica- 
tion les nouvelles constructions du sud et du nord. Au 
milieu est engagé un petit arc de triomphe, garni en 
dedans de plaques de marbre pour inscrire les noms 
glorieux du Collège. 

L'année suivante vit s'élever un nouveau corps de 
logis à l'ouest, sur la partie de la ci-devant rue dçs 
Cholets, cédée à Sainte-Barbe. Là furent placés le par- 
loir, les réfectoires, et la chapelle au premier étage. 
Celle-ci est disposée avec élégance, munie d'un bas 
côté et éclairée par une coupole au-dessus du sanc- 
tuaire. Le talent de plusieurs barbistes a été mis. à 

1. Tomel, p. 3055. 

2. Archives de TEmpire, S. 6184, Rapport d'expert, du 28 no- 
vembre 4683. 



â54 HISTOIRE 

contribution pour la décorer. M. Amaury Dûval, avec 
le concours de M. Brunel, Tun de ses élèves, a cou- 
vert de grandes figures peintes le tambour de la cou- 
pole. On y voit Jésus-Christ entouré des petits ehfantsJ 
La frise au-4^ssus est remplie par ce verset de saint 
Jean : Hoc est prasceptummeurn^ utdiligatis irwicerh 
sicut dilexi i^os. L'autel aura quelque jour une statue 
de sainte Barbe, promise par le barbiste Dumont^ 
membre de llnstitut. 

La stalle du Directeur est disposée à l'entrée du 
chœur, du côté de Tévangile. M. Labrouste y a fait 
inscrire les mots: Ego pro eis rogo.XJtx marteau de fer,* 
dont elle est munie et qui sert à régler les mouve- 
ments de l'assistance, est celui dont Victor de Lan-j 
neau et son fils se servirent pour le même usage. 

L'archevêque de Paris, Mgr AflFre, vint faire la con- 
sécration le 4 décembre 1 847, assisté de deux grands 
vicaires, du curé de Saint-Étienne du Mont, et de, 
labbé Marcelli, alors aumônier de la maison. Il fallut 
faire entrer le cortège par une fenêtre, parce qu'il n'y 
avait pas encore d'escalier pour monter à la chapelle. 
Moyennant de riches tentures, les apparences furent 
sauvées. 

Nous avons rapporté précédemment un mot c\x- 
rieux, prononcé par le prélat dans la sacristie*. Ce^ 
n'est pas la seule marque qu'il donna de ses opinions. ". 
S'entretenant avec M. Vavin, qui lui fit tout le temps j 
les honneurs au nom du Conseil, il critiqua comme, 
favorable à Tultramontanisme une récente ordonnance 
du roi, qui reconstituait le chapitt'e de Saint-Denis* 

i. Tome I, p. 1Ô6. 



.DE SAINTE-BARBE. 255 

Après les cérémonies d'usage et la célébratiou de 
l'office, Mgr Aflfre visita rétablissement. Deux rhétori-^ 
ciens, Edmond Villetard et Léon Gautbiez, lui présent 
tèrent une ode de leur façon, sur le rliytbme employé 
par Horace pour chanter la fontaine de Banduse : 

Qui nunc ingrederis limina non prius 
Oii visa tuo, tç, pater optime, 

Grata voce salutat 

Omnis barbicolum domus. 

Us déploraient ensuite le temps , heureusement 
passé, où, leur ancienne chapelle étant démolie, ils 
avaient eu à faire des courses continuelles pour assis- 
ter aux offices ; ils rappelaient les titres historiques de 
la maison à la sollicitude du pasteur; enfin, s'autorisaut 
de l'exemple de Pie IX, qui venait d'octroyer la liberté 
aux Romains, ils demandaient l'objet éternel des dé- 
sirs de l'écolier, un jour de congé en sus de celui de 
la Sainte-Barbe ^ 

L'archevêque accorda le congé, et dit adieu à ces 
enfants, en leur promettant de venir les revoir* Mais il 
ne lui fut pas donné de tenir sa promesse. Six mois 
s'étaient à peine écoulés qu'il tomba, frappé à mort, 
sur une barricade. 

Sa mémoire est conservée d'une manière particu- 
lière au Collège, non-seulement parce qu'il a consacré 
la chapelle, mais parce qu'il l'a dotée des prérogatives 
les plus étendues, à ce point qu'on y accomplit toutes 
les cérémonies qui ont lieu dans les paroisses : ainsi 
on y fait la première communion des élèves, on y 
baptise^ on y marie. Pour les actes qui exigent enre- 

1 . Fêtes annuelle^ de Sainte-Barbe, t. m, p; 468^ 



256 HISTOIRE 

gistrement, on va chercher les registres de la paroisse. 
A rheure qu'il est, la chapelle de Sainte-Barbe a déjà 
été témoin de trois baptêmes et de cinq mariages, 
baptêmes d*enfants qui n'avaient point leurs actes, 
mariages entre de jeunes professeurs et des filles de 
fonctionnaires de la maison. 

L'abbé Marcelli, étant à Rome, avait sollicité une 
grâce particulière pour l'autel qu'il desservait. Dès le 
15 mars 1847, le Saint-Père accorda une indulgence 
pleinière, applicable à tous les fidèles qui viendraient 
prier dans la chapelle de Sainte-Barbe, pendant Toc- 
tave qui précède la fête de la patronne. 

Les événements de 1 848 amenèrent nécessairement 
un temps d'arrêt dans les travaux de construction. On 
se remit à l'œuvre en 1852, et le périmètre du collège 
fut enfin complété par la construction de l'aile qui fait 
face à Louis-le-Grand, sur le bout supprimé de la rue 
de Reinïls. Le Directeur voulut célébrer par une fête 
le jour heureux où finit pour lui un souci qu'il ne 
s'attendait pas alors à voir renaître, le moment où 
fut close la longue période d'activité forcée, pendant 
laquelle il avait fallu, par des déménagements réitérés, 
par des installations provisoires, par des baraquements, 
des campements et mille étranges métamorphoses, ré- 
soudre le problème difficile de rebâtir une maison tou- 
jours habitée, et même de plus en plus habitée. On 
n'eii serait jamais venu à bout, si l'on n'avait pas pu 
disposer des bâtiments du vieux Reims, sur» la rue des 
Sept-Voies, ainsi que du non moins vieil hôtel de 
Marly, qui, avant de disparaître pour toujours, abrita 
entre ses murs quelques dortoirs barbistes. 

11 y eut donc pose de la dernière pierre le 3 décem- 



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DÇ SAINTE-BARBE. 257 

bre 1 853, comme il y avait eu pose de la première le 
8 août 1840. Après une distribution de récompenses 
aux ouvriers du chantier, une pièce d'entablement, 
enrubannée et couronnée, monta prendre sa place aux 
acclaniations de tout le collège. Cette pierre porte en 
inscription les mots Summi fastigia tecti^ avec la date 
de Tan et du jour. 

.Les travaux furent exécutés avec la plus stricte éco- 
nomie. Par un rare phénomène, les dépenses ne dépas- 
sèrent jamais les devis.; elles. restèrent même au-des- 
sous. Mais.il faut remarquer que les architectes, les 
entrepreneurs et la plupart des. fournisseurs furent bar- 
bistes ou parei^tsde barbistes. 

Ganôeron, qtâ ne vjt pas l'opération arriver à son 
terme, avait dit, peu de temps après qu-elle fut commen- 
cée : « Ce n'est pas un million seulement qu'il nous 
faudrait, c'est deux. » Tout le monde sentit qu'il di- 
sait vrai; mais le Directeur et les sages du Conseil 
s'opposèrent à une nouvelle augmentation du fonds 
social. Avec les bénéfices du CoUége, quelques prêts 
d'amis obligeants, et du temps, on put faire face à toutes 
les nécessités. 



17 



288 HISTOIRE 



CHAPITRE XV. 



'NouTcllc discipline. — M. GuéraH, préfet des itudes classiques. — Ré- 
tablissement des classes intérieures. — Classe de philosophie. ^ Succès 
de Sainte-Barbe. — Élèves fameux décédés, — Livres pour rensei- 
gnement barhiste. — Conférences gratuites pour la préparation à la- 
licence es lettres et à l'agrégation. 



Le jour de son entrée en possession, M. Labrouste 
dit aux élèves qu'il venait parmi eux uniquenieî>t pour 
se rendre utile^et. que son ambition serait: salisraite, 
s'il parvenait à se faire aimer. Son visage ne démen- 
tait point ses paroles. Il annonçait à la jeunesse un 
gouvernement paterueK L'aflectiou fut promptemént 
acquise au nouveau Directeur. Après qu'on , Veut vu à 
l'œuvre, le respect s'associa à l'aflection. , 

Apportant la résolution de rajeunir. la discipline et 
de l'asseoir en même temps sur une base inébranlable, 
ses premiers efforts tendirent à ce que les bonnes h^r 
bitudes s'enracinassent promptemént, habitudes de tra- 
vail, d'ordre, de propreté, de politesse, de bienveil- 
lance réciproque et de constante obéissance à la loi. 

Il donna à ses élèves un uniforme élégant et dégagé, 
exempt de prétention à la tenue militaire, et qui les 
(ît reconnaître entre tous les écoliers. Il voulait que, 
signalés à l'attention du public par cet habit, ils mi^-^ 
sent leur amour^propre à se montrer partout discrets 
et bien élevés. Il extirpa les derniers restes de la ty- 



DE SAINTE-BARBE. 259 

rannie exercée par*les anciens à l'égard des nouveaux, 
,en désignant pour chaque nouvel arrivant un patron 
de son âge, chargé de le protéger. Les exceptions et 
dérogations à la règle qu'un long usage avait consa- 
crées (ainsi ce qu'on appelait les priçï/eges des rhéto- 
riciens, ainsi le réfectoire affranchi de surveillance le 
j,ojur de la sainte Barbe), il les abolit, ne pouvant pa,s 
souffrir ridée que les maîtres, pour quelque raison que 
ce fût, restassent jamais désarmés devant les élèves, 
ni que ce qui était le devoir à un âge ne le fût 
pas à un autre. Il ne fit aucun cas des dispositions les 
plus heui^euises, si la soumission n'en était pas l'ac- 
compagnement ; et quand il le fallut, il ne recula pajs 
devant le moyen dont l'emploi avait été la dernière 
ressoui^cé de ses deux prédécesseurs : il renvoya les 
insubordonnés. 

Plusieurs exécutions de ce genre furent nécessaires 
pour introduire lé nouveau règlement dans la classe 
de rhétorique. Il ne les fit pas toutes à là fois, mais 
Tune après l'autre, en mettant de l'intervalle, afin que 
les jeunes ge«s eussent le temps de réfléchir et de 
vehir à résipiscence. A la cinquième victime, la sou- 
mission fut obtenue. 

Toutefois c'est par la:p<^saasioi:i plutôt que par la 
repression qu'il s'appliqua à gouverner. Il eut recours 
«ifeux exhôrtatians particulières, aux proclamations €^ 
<;àUôcutions publiques. Avec l'accent- d'une affection 
^fùcicère et; dans un langage susceptible de toucher la 
Jeunesse, il fit entendre en temps utile les coosfeik de 
la F^on. Il sut parler au. nom de lairerlti, de i'hon- 
Beur, du patriotisme^^aa wK^m Kurtottt de la noble fi^ 
teriiité'doRt il était,) doni: ilest-encore le principal 



260 HISTOIRE 

représentant. Dire ]a gloire et les malheurs de la mab 
son, les efforts de dévouement accomplis pour la sau^ 
ver, la dette contractée envers la grande association^ 
auteur de cette œuvre, par tous ceux qui en profiteni;^ 
rhonneur reçu par des enfants, à l'éducation, au;i 
travaux, ailx succès desquels veillent, avec une soUicir 
tude d'amis, des hommes illustres dans toutes J^s 
carrières; faire appel à tous les sentiments que de telles 
circonstances sont capables d'éveiller; et, pour aug*^ 
menter l'effet des paroles, de temps en temps, à d^s 
heures solennelles et choisies, mettre la jeunesse en 
présence de quelques-uns des patrons du Collège t voilà 
les stimulants les plus efficaces dont usa notre Direc^ 
teur. Rien ne contribua davantage à assurer le présenJL 
et à préparer l'avenir. Par là, l'esprit ancien fut conso- 
lidé, tandis que la maison se formait à des allures 
nouvelles. 

Nous allons dire quels furent, sous le rapport des 
études, les premiers fruits de ce régime. Ce sera ub 
double tableau à retracer, puisque, depuis la créatioiû 
d'un institut scientifique pour la préparation aux 
grandes écoles de l'État, Sainte-Barbe a formé deux 
gouvernements sous un même sceptre. 

Il faut commencer par la division de l'enseignement 
classique. Elle a pour elle l'avantage du nombre, l'ach 
tiquité, les traditions; elle est à proprement parler la 
mère-patrie. Pour la conduite de celle-ci, le nouveau 
Directeur investit de toute l'autorilé d'un [premier 
ministre un homme qu'il avait vu à l'œuvre et avec 
lequel il était sûr de s'entendre, M. Guérard, qui l'as* 
siste encore aujourd'hui avec la même fonction. 

M. Guérard, élève brillant du collège royalde Metz, 



DE SAINTE-BARBE. 261 

pais de l'École normale^ entra à Sainte-Barbe comme 
ndaitre de conférences eu 1831 . Excellent helléniste, il 
ranima le goût du grec. La«vivacité de son esprit, sa ponc- 
tualité, la façon dont il tenait les élèves, lui firent don- 
ner par M.' Adolphe de Lanneau la direction du travail 
an Moyen, puis au Grand-collège, emplois dont il s'ac- 
quitta non moins bien que de ses conférences. 11 avait 
donc fourni des gages suffisants de son mérite en 1 838, 
et en le nommant préfet général des études, M. La- 
brouste ne fit qup récompenser des services déjà an- 
ciens. 

M. Guérard était agrégé de TUniversité. Nommé 
professeur suppléant au collège Saint-Louis, il lui fut 
possible, pendant un temps, de mener de front ses deux 
emplois; mais Toccupation devenant trop considé- 
rable à Sainte-Barbe, il dut renoncer à sa chaire. 
L'Université, pour le retenir, lui offrit la place de cen- 
seur au collège royal de Bourges ; elle lui promit un 
avancement rapide. Il aima mieux se donner à sa patrie 
^tl'adoption. Son mérite s'est déployé à mesure que 
la maison a pris plus d'accroissement. Le bel ordre 
qui y règne est en partie son ouvrage, et la confiance 
du Directeur à son égard est sans limites. 

L'un des premiers soins de la nouvelle direction 
fut de rétablir les classes intérieures au-dessus de la 
septième. Elles avaient été la cause de la supériorité 
<le Sainte-Barbe sur les autres institutions, du temps 
de M. de Lanneau père, et le fils avait cherché à y re- 
venir après 1830. Les lois qui les interdisaient n'é- 
taient plus dignes d'une époque de modération et de 
liberté. Vouloir que .tous les élèves des institutions, 
même les plus nombreuses^ se rendissent en classe 



262 HISTOIRE 

aux collèges royaux, c^éiait surcharger les professeai^^ 
les mettre dans la nécessité de ne donner leur atten^ 
tion qu'à quelques-uns, ou de la répartir entre toua 
dans une mesure insuffisante. Combien d'esprits 
lents^ou légers, ou seulement mal préparés, languissetU^ 
sur les bancs, faute d'utie culture assidue! C'est pouc 
ceux-là que le nouveau Directeur, malgré les proliibi^ 
t.ions toujours subsistantes, osa instituer de nouvefttt 
un enseignement domestique; et la tolérance que 
Sainte-Barbe avait trouvée jacUs auprès de MM. def 
Fontanes et Royer-Collard, lui fut encore acquise de I» 
part de MM. Villemain çt Salvandy. 

Pour organiser renseignement dont il s'agit, oir 
ne chercba aucune recette nouvelle. On fit appe^ 
à la mémoire du passé, on se ressouvint de Victcw» 
de Lanneau précliant sans cesse que le but de l'édtin 
cation libérale doit être d'habituer au travail l'esprit 
des enfants, parce que le travail, par les efforts qu ii 
exige, par la régularité qu'il impose, par l'occupation 
qu'il fournit a l'intelligence, est la garantie de moralité 
la plus sûre. C*est ce vieux, ce gothique précepte que 
l'on chercba surtout à mettre en pratique ; et ce qu'on 
faisait* à cet égard il y a soixante ans, est encore ce 
qui se fait aujourd'hui. 

On a^oin de ne mettre dans les classes qu'un noqn^ 
bre d'élèves dont le professeur puisse surveiller les pro- 
grès. Il faut que tous, dans la mesure de leurs moyepsi 
profitent de l'instruction qu'on leur donne; il ne faut 
pas qu'aucun espère, par de la tranquilité ou par tout 
' autre artifice, parvenir à se faire oublier dans son coin« 
ce Guerre à la paresse » est le mot d'ordre donné par 
le vigilant préfet des études; lui-même est le phis 



DE SAINTE^BARBE. 263 

acharné à la poursuite 'des paresseux. Il les connait 
tous, ne les perd pas de vue un sejil jour^ les harcelle 
sans cesse et met sa gloire à les dompter. Grâce au 
ajstèené dont il a fait une applicaiion si bien enten- 
dii&y la queue des\ classes, sous son commandement, 
n'est pas cette masse inerte qui d'ordinaire ne passe 
par les collèges jque pour y faire nombre; rémulation 
est entre les derniers aussi bien cpi'entre les premiers. 
Le rétablissement des classes intérieures, quoique 
graduel, fut assez rapide. Au bout de trois ans, l'exer- 
cice fut complet, il y eût jusqu'à une chaire de philo- 
sophie. Cette dernière possède déjà son histoire : elle a 
vu la' science qu'elle a pour objet tour à tour portée au 
pinacle, puis humiliée et mutiléév^^l tout nouvellement 
remise en. honneur; elle a flbtle au gré de Tinstabilité 
des programmes ; elle a été. tenijie par {Plusieurs hommes 
de mérite, mais de l'esprit le plus différent. En pre- 
mier Jieu. M. Bouillet^ le vieux barbiste qui militait 
d^à depuis seize ans dans l'Université : il était alors pro» 
fesseur au collège Henri IV. Lorsqu'il fui nommé pro- 
viseur du collège fieurbon, il proposa pour lui succé- 
der à SaihterBarbe M..IIiernslieiin, un normahenqui 
ne larda pas à se rendre trapiste. M.Pellissier, agrégé 
de : rUùiversilç et . docteur . es lettres, vint ensuite. 
Pendant un long. : voyage en Orient, il fut remplacé 
par M. Waddington^Kastus, qui fit en même temps 
un cours libre à la Faculté des letti^s.C'està M. Wad- 
dington qu'est dû un livre remarquable sur Ramus, 
dont il a été question au commencement de cette his* 
toire^ Ce savant occupe aujourd'hui l'une des chaires 

i. Tome I, p. 22». 



Uk HISTOIRE 

du gymnase protestant de Strasbourg. H. Pelliseier, 
revenu depuis longtemps à s>on poste, s'est vou^ tout 
entier à notre Collège. La philosophie exigée pour les 
deux baccalauréats est enseignée par lui dans un 
double cours, qui n'est pas moins écouté des matbe- 
maticiens que des élèves de la division classique, it a 
fait imprimer le résumé de ses leçons de logique % 
lorsque la logique était la seule, partie de la philoso- 
phie autorisée par les décrets. 

Mais revenons au temps, déjà ancien, où fut inau- 
guré le nouvel enseignement barbiste. 

Comme le nombre des élèves allait toujours en 
croissant, qu il y en eut plus de quatre cents en 184A, 
cinq cent soixante*dix en 1845, six cent vingt en 
1846, année à partir de lacjuelle on fut dans Tobliga- 
tion d'en refuser (et cependant ils dépassent aujour- 
d'hui le chiffre de douze cents), Louis-le-Grand ne 
souffrit pas de la formation des classes intérieures. 
Avec les sujets d'élite qu'on lui envoyait, il eut autant 
de barbistes que par le passé et plus de succès au con- 
cours général. Une série de moissons extraordinaires 
en ce genre commença à partir de 1841 . Cette année 
même, les élèves de M. Labrouste rapportèrent de la 
Sorbonne, pour leur quote-part, le prix d'honneur 
et six autres prix. Le préfet de la Seine, présidant Je 
lendemain la distribution de Louis-le-Grand, ne put 
s^empécher de féliciter Sainte- Barbe, et d'exhorter Je 
collège royal à entretenir avec elle une fraternité si 
avantageuse, 

i. Préds d*un cours élémentaire de logique, conformcment aux 
nouveaux programmes. la*12, Paris, Duraud. 



DE SAINTE-BARBE. 265 

Cette recommandation était ini|tile. La fraternité 
fut aussi complète que possible pendant ces années 
d'apaisement des passions et de tolérance universelle. 
Depuis longtemps d'ailleurs, le proviseur de 1830, 
M. Jules Pierrot, avait habitué les pensionnaires et les 
externes de son collège à se regarder comme lesmein- 
bres d'une même famille. Assez souvent, il réunissait 
ie soir dans son cabinet un certain nombre des unset 
des autres, qui s'étaient le plus signaléspar leur travail : 
c'était pour les faire composer sous ses yeux, et tirer 
ensuite de cet exercice la matière d'une belle leçon. 11 
ne les congédiait qu'après qu'ils avaient soupe à sa 
table. 

Les internes de Louis-le-Graïld ne se plaignirent 
donc jamais de l'envahissement des bancs d'honneur 
par leurs voisins, ni de certaines veines de prospérité 
telles pour ceux-ci, qu'il y eut des semaines où 
les premiers de toutes les classes furent de Sainte- 
fiarbe. Jamais un sentiment d'envie ne se fil jour; 
mais il y eut quelquefois de l'étonnement, et l'on se 
demanda par quel talisman Sainte-Barbe assurait ses 
victoires. Si innocente que fut cette question, le Di- 
recteur né voulut pas la laisser passer sans réponse. A 
la première occasion, il donna publiquement à ses 
élèves et aux parents de ses élèves l'explication qu'on 
'demandait. « A ceux, dit-il, qui voudraient savoir par 
quels procédés mystérieux vous avez obtenu vos suc- 
cès, nous répondrons comme le vieux Romain dont 
Pline nous a conservé la simple et victorieuse plai- 
doirie. On l'accusait devant le peuple d'avoir employé 
des maléfices pour se procurer des récoltes plus abon- 
dantes qAe celles de ses voisins. Il se contenta de pré* 



2«6 HISTOIRE^ 

senler au peuple sa belle famille, ses charrues eu bon^ 
état,. ses serviteurs vigoureux et dévoués : « HocnaiiiSy 
dit-il, voilà mes sortilèges ^ » 

De digues sujets, et en grand nombre, ont été (br*> 
mes durant cette époque. Plusieurs sont parvenus 
aujourd'hui à leur maturité, et ils honorent la grandei 
patrie qui emploie leurs talents, de même qu'ils 
avaient honoré la petite pairie de leur enfance.- Maisj; 
par une cruelle fatalilé, ceux sur lesquels on avait 
fondé le plus d'espérance, ceux, que la nature avait 
peut* être le plus richement gratifiés de ses dons, et 
qui s'étaient montrés les modèles de leurs promotions, 
respectives, non.seulementdans l'intérieur du Collège^ . 
mais aux yeux de TUniversité tout entière^ Moneourt^ . 
Lamm, Lisle, Gauthiez et Barbier^Vital, ont été déjà- 
retirés de ce monde. Il ^appartient à dès annales do^^ 
mesti(]ues, comme celles que nous écrivons, d'enre-f 
gistrer la mémoire de ces jeunes gens infortunés. 

Auguste Lamm, israêlite de Metz, pauvre et fier,^ 
eut le malheur de ne pas sentir combien de cœurs 
étaient ouverts autour de lui. Après une courte expé-' 
rience des difficultés auxquelles on doit s'attendre, lors- 
qu'on veut s'avancer tout seul, il perdit le courage de 
vivre. 

Barbier- Vital fut enlevé par une maladie doulou-- 
reuse, lorsqu'il était encore en rhétorique. On pour- 
rait refaire sur lui le livre de X Écolier ifertiieièx^ que. 
les professeurs de l'ancien collège Louis-le-Grand écri- 
virent à la louange du jeune Decalogne, décédé en 1 785. 



i. Discours prononcé à la distribution des prix de 1847, Féte»^ 
annuelles de Sainte-Barbe, t. III, p. 474. .^ . .. 



DE SAIT(T£^BARB£. ^«7 

Barbiér-Vital se sentit mourir; il annonça s0l fin pro-» 
chaîne dans sa dernière composition^ qui fnt une pièce 
de vers latins sur le soleil couchant. Sainte-Barbe con- 
serve sa dernière couronne, remportée au concours 
général de 1850, que ses parents a^^ient envoyée pour 
mietti*e sur son jcercueîl. 

'Jacc|ues^Alaric Lisle mourut dix ans^ après ses étu- 
des 4erminéfes, étant devenu, d'excellent écolier, ex- 
cellent professeur dan& son propre 'collège. A la fin de 
SCI philosophie, il fut gratifié du grand pris^ que Sainte- 
Barbe décerne à l'élève qui, pendant tout le cours de 
ses"* études, s'est placé hors ligne par sa conduite et 
par ses succès. Lorsqu'il se leva pour aller chercher 
cette récompense, tous les lauréats de la journée je- 
tèrent sur lui leurs propres couronnes. Il n'y eut pas 
une mère en ce moment <{ui n'eût souhaité d'avoir 
un tel fili. 'A quoi ces brillants débuts devaient^ils 
aboutir? Lisle se trompa sur sa vocation. Il se crut 
appelé à régénérer Fart dramatique. Il s'isola du 
monde, et s'enfonça dans une application stérile, qui 
lui ravit sa gaieté méridionale^ et la santé, et enfin la 
vie. Ses thèses pour le doctorat*, quelques articles dans 
\e Moniteur ^ la chronique des banquets de la sainte 
Barbe, qu'il a écrite pendant plusieurs années*, et 



1. De Caii Julii Cxsaris eloquentia (dialogue à la manière de 
Cîcéron, dédié à M. A. Labrouste), ln-8% Paris, Durand, 4852. 
— Essai sur les théories dran>atiques de Corneille diaprés ses dis- 
cours e( ses examens (dédié à M. A.. Bixio, ancien représentant du 
'peuple). In-8% Paris, impr. Remquet, i 852. 

2. Fêtes annuelles de Sainte- Barbe, tomes ill et IV. — Inaugu- 
ration du petit coliég<p de Sainte -Barbe» Foniehay aux Roses, ii 
mai 1852* 



268 HISTOIRE 

divers refrains de circonstance, sont les seules produc- 
tions où se révèle son charmant esprit. 

Le Collège a été illustré par deux frères du nom de 
GauthieZy deux enfants exemplairesconquis par M. Gué- 
rard sur le lycée de Metz, dont ils étaient rornement. 
La pauvreté avait été leur première institutrice. Tout 
chargés de palmes scolaires, ils furent admis Fun et 
Tautre à l'École normale. L*aîné mourut peu de 
temps après en être sorti; Joseph Gauthiez s'en 
éloigna en 1852. A la vue de la révolution qui venait 
de s'accomplir, il jugea que la carrière tout à fait li- 
bre du médecin lui conviendrait mieux désormais que 
celle du professeur, et il recommença bravement son 
instruction. Il fut de ces étudiants dans lesquels les 
maîtres de la science discernent leurs futurs succes- 
seurs. L'agrégation de médecine s'offrait à lui dans 
une perspective peu éloignée; il était attaché au ser- 
vice de santé de Sainte- Barbe; l'une des filles de 
M. Guérar4, son bienfaiteur, était devenuç sa compa- 
gne, enOn tout lui souriait, lorsqu'il reçut de la nature 
un avertissement qui ne dut pas tromper sa perspica- 
cité, il sentit son bonheur et la vie lui échapper sans 
proférer une plainte, en conservant jusqu'au dernier 
moment. ia placidité stoïque qui avait été le caractère 
de sa vertu. 

Edme Moncourt est celui de ces jeunes gens qui 
s'avança le plus dans la vie. Il fut amené de Sens par 
M. Bellaigue,«à qui l'avaient révélé ses succès de l'école 
primaire et plus encore la précocité de sa raison. Ja- 
mais peut-être on ne vit un plus brillant élève. Pendant 
cinq ans qu'il étudia à Sainte-Barbe, il remporta qua- 
rante-neuf prix^ dont le prix d'honneur de rhétorique 



DE SAINTE-BARBE. 2^9 

au grand concours. Ses succès en 1 839 firent seusar- 
tion dans le public. Ils intéressèrent même le Roi, qui 
youlut que le jeune lauréat lui fut amené aux Tuile- 
ries, et c'est le comte Christian Dumas qui fit la pré^ 
sentation. 

Moncourt entra le premier à l'École normale, fiit 
reçu le premier au concours pour l'agrégation , et 
passa docteur es lettres à la faveur de tbèses remarr 
quéesy sur des points de critique extrêmement déli- 
cats*. Il professa dans les plus importants lycées de 
nos départements, puis à la Faculté des lettres de Cler- 
inonty et en dernier lieu au lycée Napoléon, dont la 
chaire de seconde lui fut confiée. En même temps, 
il remplissait à titre de suppléant celle de liltcrature 
latine à TÉcole normale. Il succomba dans les der- 
niers jours de 1861 à une brusque maladie. C'est à 
Sens, où il était né, qu'il alla mourir. Toutes les au- 
torités et toutes les écoles de la ville honorèrent ses 
obsèques de leur assistance. 

Moncourt s'était livré avec passion à l'étude du la- 
tin. Il le possédait à fond; il savait l'enseigner et lé 
traduire avec un égal talent. On a de lui une traduction 
de Salluste, plus rigoureuse et aussi élégante qu'aux 
cune autre '. Il a fait aussi, en collaboration avec son 

1 . De parte satirica et comica in tragœdiis Euripidis disserta^ 
t4o academica{àQà\èk^. A. Labrouste, directeur de Sainte-Barbe). 
In-8°, Dijon, Douillier, IBoi. — De -la méthode grammaticale de 
Vaugelas (dédié à M. Bellaigue, ancien député de ITonne). In-8*», 
Paris, Joubert, 1851. 

2. Collection des auteurs latins expliqués par une traduction 
française j en regard, par une société de professeurs. In-12, Paris; 
Dezobry et Madeleine, 1 853 (Conjuration de Catilina)| 1 856 (Guerre 
de Jugurtha). 



270 HISTOIRE 

ancien maitre M* Guérard^ un cours gradué de granit 
maire latine ^ Ce livre est classique à Sainte*-Barbe. Il 
n*a pas la prétention de conduire à la connaissance dé 
la langue par des voies jusqu^à présent inconuues. U 
estledéveloppement de la grammaire de Lhomond; ii 
«kend ou réforme^ là où les corrections étaient néces^ 
saires^ la doctrine du vieux rudiment^ mais en se mo^ 
delant sur lui, et il en conserve Theureuse simplicitéi 

La mention d*uu tel ouvrage est si foncièrement dp 
notre sujet, qu'on nous permettra d'y insister. 

Si M. Guérard, homme essentiellement pratique^ 
* comprend de quel prix sont la clarté et la bi:;ièvet» 
dans les livres de classe, il comprend aussi que les 
conquêtes de l'érudition et les progrès de la critiqqe 
doivent avoir leur place dans renseignement. C'est 
pourquoi le Cours de la grammaire latine est rédigé 
en partie double. A côté du rudiment des élèves, il y 
a le manuel du maitre, où sont répétées les mémei 
règles, avec le développement des exceptions et dès 
cas particuliers qu'il peut être avantageux de signaler^ 
mais dans une mesure dont le professeur restera }e 
juge. M 

Avant la publication du Cours complet de langue 
latine, M. Guérard avait déjà composé, d'après le 
même système de la règle et du développement don- 

i . Cours complet de grartimaire latine, théorie et exercices, par 
MM. Guérard, agrégé de l'Université, préfet des études à Saintes 
Barbe, chevalie/ de la Légion d'honneur ; Concourt, professeut 
au lycée Napoléon, docteur es lettres- (1® Abrégé de la gram- 
maire latine.de Lhomopd; 2^ Éléments de la grammaire latine 
d'après Lhomond; 3* Exercices latins adaptés à la granmudrè 
latine d'après Lhomond; 4** Cours de thèmes latinsf 5^ Courstle 
versions latines), 9 vol. in-12, Paris, Dezobrj. ^ ^ 



D£ SAINTE-^ARBE. 271 

nés à part, ud cours complet de langue française. Gel 
ouvrage en est aujourd'hui à sa huitième édition. 
La première partie, intitulée Petite grammaire des 
Ecoles y est le manuel en usage dans toutes les écoles 
knunicipales de Paris; il sert à Sainte^arbe pour l'en*- 
seignement des basses classes. Viennent ensuite la 
Grammaire élémentaire^^ enseignée jusqu'en sixième^ 
et la Grammaire et compléments^ y enseignée jusqu'en 
quatrième. La doctrine pour ces deux dernières parties, 
a été empruntée surtout de 'Port-Royal; pour la 
première, M. Guerard s'est conformé autant qu'il lui 
a' été possible à la grammaire de Lhomond. Lbomond ' 
est à ses yeux le maitre accompli de l'enfance, celui 
qui a le mieux su la distribution et la forme à donner 
aux choses pour les graver dans des esprits novices. 
C'est pourquoi' il lient à conserver la méthode du 
vieux professeur pour l'enseignement élémentaire du 
français autant que pour celui du latin. On ne s'é* 
tontiera point, après cela^ si Lhomond* est traité à 
Sainte- Barbe comme l'un des génies du «foyer. Lors* 
qu'une statue fut élevée à la mémoire de cet hoquae 
modeste dans sa ville natale de Chaulnes, non-seule<- 
menfc le Directeur en personne ^ assista à la cérémo- 

\p Petit^gramtnaire^ des écoles, reiirennaD{,lei ^yntème complet 
de la conjugaison française et 250 exercices gradués d'analyse, 
d'orthographe et d'applications des règles, grammaticales , par 
M. Guérard, agrégé de4' Université, préfet db^ études du collège 
SMBte-Barbe. In-4 2, Dezobry. • ■ 

2. Grammaire élémentaire d'après Lhomond (livre de l'élève; 
livré du maître : Exercices; Corrigés des cxerdce»)» In«lâ, 
DeEobry . 

3; <Gf amipaîre et eompléiiients (quatre parties; comme pour là 
Grammaire élémentaire). In-1 2, Dezobry. 



i7i HISTOIRE 

nie, mais un rhétoricieo barbîste la célébra par des 
vers lalins^ 

Tout en composant des livres pour les classes infé* 
rieures, M. Guérard, à qui toutes les parties de Tin- 
struction sont également familières, fait lui-même des 
conférences de grec aux rbétoriciens. Bien plus, il 
dirige, il anime un enseignement supérieur dont il 
a doté Sainte-Barbe, et qui est presque devenu une 
institution publique. 

Lesaspirants au grade de licencié es lettres et à Ta- 
grégation de grammaire n'ont guère d'autre ressourcée, 
pour se préparer, que de suivre les cours publics. 
Mais, outre que les professeurs du Collège de France 
et delà Faculté ne choisissent pas leur matière en vue 
des examens, combien de jeunes gens sont empêchés, 
par les occupations qui les font vivre, de suivra i^s 
cours publics ? Tous les maîtres d*étude sont dans ce 
cas. Pour la commodité de ceux delà maison, M. Gué- 
rard se prèii d'abord à leur faire un cours de grec ; 
puis il admit^aux mêmes leçons les employés des éta- 
blissements voisins; puis il représenta au Directeur 
quelle bonne action ce serait que d'instituer des con- 
férences pareilles pour chacune des matières de l'exa** 
men de licence. 11 s'agissait là d'un pur sacrifice, d'une 
chose d'où Sainte- Barbe ne retirerait que de^Thon" 
neur, car pour être utile, il fallait que l'entreprise fût 
entièrement désintéressée. La dépense qu'il y avait 
à faire fut accueillie par le Conseil d'administration, sur 

i . Désiré Laurent, In honorent Caroli Francisci Lhomond^ eut 
statua in oppido Calnis xre conlato posita esty anno Domini 
MDCCCLX^ quarto keil, jun, — In-4**, Paris, imprimerie de 
Remquet. 



DE SAÏNTE-BARBt;. 273 

Tavis favorable du Directeur, et portée au budget du 
Collège. 

Les cours gratuits ou Conférences pour la prépara- 
tion à la licence et à Tagrégation de grammaire fonc- 
tionnent depuis 1 845 avec un succès toujours crois- 
sant. Ils réunissent habituellement une quarantaine 
d^auditeurs, et Ton estime qu'ils ont déjà fourni à 
rUniversité près de deux cents gradués. « Suivez les 
conférences de Sainte- Barbe » a dit plus d'une fois le 
doyen de la Faculté des lettres aux candidats chez les- 
quels Tinstruction péchait par le manque de direc- 
tion. La plupart aujourd'hui n'attendent plus qu'on le 
leur dise. Sur la «foi de la renommée, on vient tout 
droit à Sainte-Barbe des collèges communaux, des ly- 
cées et même des séminaires. 

Les chaires sont occupées par des hommes dont le 
nom dit ce qu'ils valent : MM. Bouchot, Achille Didier, 
Celle père, Despois, Mesnard, Tournier, Vachvrot, 
Vapereau. La plupart sont là depuis l'origine. L*ai- 
mable et regrettable Rigault, lorsqu'il appartenait 
encore à l'Université, déploya son talent dans ces 
conférences. Il fît pendant trois ans des leçons de 
poésie latine et dé composition française, qui sont 
encore préisentes à la mémoire de ceux qui les ont 
entendues. 

M. Guérard partage avec M. Tournier l'enseigne^ 
ment du grec; il s'est réservé tout ce qui tient à la 
traduction du français en grec , genre d'exercice où il 
excelle. 

En voilà assez sur une création dont le lieu est 
Sainte-Barbe, qui vit de la substance et par l'esprit de 
Sainte-Barbe, mais qui n'est pas Sainte-Barbe, 
m 18 



t74 • HISTOIRE 

On va être ramené à celle-ci par VÉcole prépara» 
toire, dont il sera question dans le chapitre suivant. 



CHAPITRE XVI. 

Premiers Directenn des études à FÉcole préparatoire.-^ M, Blanchet. — ^ 
Désordres réprimés. — Caractère de renseignement.— Contrôle iaces- 
sant du travail, — Distribution des cours. — Admissions aax Écoles du 
Gouveruement. — Extension de l'établissement. — La comptabilité 
de Sainte-Barbe. — Économes agents-comptables. — Cérémonies aux- 
quelles assiste le Collège. • 



Nous avons vu la division pour renseignement des 
sciences, ou École préparatoire, se former en 1835 
d'une colonie étrangère, amenée par M. Duhamel *. 
Le Collège y ajouta quelques*uns de ses nourris- 
sons, dont Tun, le jeune Edouard Harlé, commença 
à faire parler de rétablissement par le prix d'honneur 
des sciences, qu'il remporta en 1837. Au bout de cinq 
ans, il y avait déjà quatre-vingts élèves; quinzeen- 
traient du même coup à l'École polytechnique. 

Le fonctionnaire placé à la tête de l'École prépa- 
ratoire porte le titre de Directeur des études. Dans les 
premiers temps, cette direction changea plusieurs fois 
de mains. Le savant M. Duhamel la résigna, au com- 
mencement de 1 837, pour se retrancher dans rensei- 
gnement des mathématiques spéciales. Elle fut donnée 

i « Gi-dessus, p. 238^ 



DE SAIJVTE-BARBE. â7â 

^aloi's à M. Gondinet; un ancien professeur dé la mai- 
son, qui ne resta que jusqu'à la rentrée de 1838. Le 
successeur de M. Gondinet fut M. Pages. Ce dernier 
avait été désigné par MM. Sturm et Liouville comme 
un homme d'un mérite tout à fait supérieur. Malheu- 
reusement il était d'une santé déplorable. Il mourut au 
Collège (31 niai 1841)j en exprimant le vœu que sa 
place fût donnée à M. Blanchet, son camarade à TÉ- 
cole polytechnique, qu'il avait fait venir pour le sup- 
pléer pendant sa dernière maladie. 

M. Blanchet, dont il est question ici, ne doit pas 
être confondu avec le défunt éditeur des œuvres de La 
Place, inspecteur-général de FUniversité dans Tordre 
des sciences, que Sainte-Barbe a compté aussi au nom- 
bre de ses professeurs. Ce dernier était M. Henri Blan- 
.chet; l'autre est M. Alphonse Blancliet. 

Formé tour à tour au collège d'Amiens et à l'École 
polytechnique, M. Alphonse Blandiet annonçait une 
vocation décidée pour l'enseignement. Toutefois, 
avant de l'attacher définitivement à Sainte*Barbe, on 
voulut l'éprouver. Pendant prèsii'un an, il s'acquitta 
de la direction des études, seulement à titre provisoire 
et d'abord avec le concours de M. Abel Pages, officier 
d'artillerie, frère dti défunt Directeur. On traita avec 
lui le 1 5 avril 1 842, lorsqu'on eut acquis l'assurance 
.qu'on ne pouvait pas mieux reneobtfer. 

11 était difficile en effet de faire un meilleur choix. 
M. Blanchet est dans son département ce que M. Gué- 
rard est dans le sien. C'est sous lui et par lui qiie 
l'École préparatoire s'est placée à la tête des maisons 
du même genre; la bonne discipline et les fortes 
études qui font cette supériorité, on les lui dpit; il 



276 HISTOIRE 

]es a coiisliluées, il les tnaïntient sur \e pied où elles 
sont. 

Ses commencements furent laborieux, Jl arriva 
dans un moment où Texlréme accroissement du nom- 
bre des élèves rendait Texercice de l'autorité d'autant 
plus difficile, que cell<yci n'avait point encore ses 
traditions. L'établissement en était seulement à la 
sixièuie année de son existeoce^ et parmi les jeunes 
gens qui le peuplaient, alors comme aujourd'hui, ceux 
qui avaient reçu leur éducation première dans la divi- 
sion classique de Sainte-Barbe formaient une imper- 
ceptible minorité, La plupart étaient d'orij^ine étran- 
gère, et avant de les recevoir dans la maison, on ne 
les avait pas soumis a autant d'inTormations que de- 
puis on a jugé nécessaire d'en prendre à leur égard* 
C'étaient de grands garçons , presque des liommes, 
ayant talé de plusieurs genres de discipline ou n'en 
ayant jamais connu aucune, à qui généralement la 
perspective de Télat militaire donnait Tenvie de s'é- 
mancîper, et que les jours de congé réunissaient au 
dehors à des étudiants arfrancliis de toute contrainte. 
Il n'était pas commode de mettre au pas cette mul- 
titude hétérogène, A deux reprises elle se souleva; à 
deux reprises, le 20 mars 1844 et le 21 janvier 1847, 
Tinsurreclion ayant été complotée pour la nuit, les bâ- 
timents de Reims furent dévastés au milieu des ténè- 
bres, avec un 4umulte et des clameurs dignes de telles 
œuvres de vandales. Chaque fois^ les patrouilles de 
nuit, étonnées du vacarme qui se faisait, prévinrent la 
police, qui accourut avec des détachements de garde 
municipale. 

En 1844, le désordre n'eut pas de cause connue, si- 



■ 



--H 



DE SAINTE-BARBE. ?77 

non qu'il avait été suggéré dans des conventicules te- 
nus au dehors, et dont d'autres écoles préparatoires 
ressentirent également Teffet. C'était une épidémie 
parmi les étudiants en mathématiques. A Sainte- Barbe, 
aucune démonstration n'eut lieu contre les maîtres. 
Tout se passa en saccagement. Lorsque la force armée 
arriva, les révoltés se barricadèrent. Le père de l'un 
d'eux, qui se trouvait être le chef du détachement, 
sut avec autant de prudence que d'énergie forcer, en 
peu de temps toutes les positions. Un certain nombre, 
plutôt que de s'avouer vaincus, s'enfuirent de la mai- 
son à la faveur de l'obscurité. 

La révolte de 1 847 eut son programme, qui était 
la revendication de plusieurs libertés : liberté de fu- 
mer, liberté de porter à l'intérieur d'affreux et mal- 
propres sarraux de toile jaune, dont l'usage s'était 
introduit dans la plupart des écoles préparatoires 
sous prétexte de ne pas salir ses habits avec la craie, 
liberté enfin de se défaire d'un professeur qui déplaisait. 

Le commissaire de police et la garde vinrent à temps 
prêter leur appui à la Direction, qui allait d'un dortoir 
à l'aulre sans arriver à se faire ouvrir les portes. On 
Içs enfonça. Les mutins furent réduits, et dûment in- 
formés qu'ils ne fumeraient pas, qu'ils déposeraient 
les sarraux , que le professeur désigné, homme de 
talent, qui faisait très-bien son devoir, serait main- 
tenu. Comme ils promirent de passer le reste de la 
nuit tranquilles, sous la surveillance de MM. Labrouste 
et Blanchet, la troupe se relira. De l'autre côté de la 
rue, dans la division des études classiques, il fallut 
retenir les élèves, qui, réveillés par le bruit, voulaient 
venir au secours de leur Directeur bien-aimé. 



278 HISTOIRE 

L'issue des deux révoltes fut la même. L'École fut 
dissoute, un grand nombre d'exclusions prononcées 
après enquête, et dans les classes promptement réor- 
ganisées on n'admit de nouveau que les jeunes gens 
qui donnèrent l'engagement écrit de se soumettre à là 
discipline du. Collège. • 

C'est à ce prix que les bons principes d'ordre; de 
régularité, de soumission prirent racine sur le sol de 
la Sainte-Bàrbe scientifique. Ils ont fructifié depuis. 
Les élèves ont francliementadoptéresprilde la maison. 
Le règlement, sans cesse perfectionné sous le rapport 
de l'emploi du. temps, ne laisse plus de place même h 
la pensée de mal faire. Toutes les classes«s'empressent 
et frémissent, comme autant d'essaims, autour de }a 
tâche qui leur est assignée, qu'il faut que chaque élève 
accomplisse en vue de la carrière où son âge le presse 
d'arriver. Un pouvoir sans bornes est acquis au Direc- 
teur des études sur les jeunes gens qui savent que toute 
son application est de préparer, d'assurer leur succès. 

L'enseignement répond de la manière la plus rigou- 
reuse à son objet. Il est préparatoire; il n'a point 
de préférence à lui, point de système. Il suit pas à 
pas les programmes proposés pour l'admission aux 
grandes Écoles du gouvernement. Rien n'a été re- 
tranché de ces programmes, rien n'y a été ajouté. 
Les élèves se prirent un jour de passion pour la mu- 
sique ; ils demandèrent à former entre eux une société 
chorale. Des études, des exercices de chant leur 
étaient nécessaires. On les leur accorda, à condition 
qu'ils en prendraient le temps sur leurs heures de ré- 
création. 

Les classes n'ont pas été scindées comme dans la 



DE SAINTE-BARBE. 279 

division des études classiques, parce qu elles sont for- 
mées chacune de sujets visant tous au même but, de 
qui l'on n'exige pas qu'ils se surpassent les uns les 
autres, mais que l'on force à se maintenir pendant 
toute l'annëe avec la chance de réussir à l'épreuve 
finale. On n'e^t pas admis dans la classe qu'on serait 
incapable de suivre; on est retiré de celle où on aurait 
lâché pied. De cette façon, tous marchent ensemble, 
sinon du même pas, du moins sans se nuire* 

Le mode d'enseignement a pour caractère particu- 
lier un contrôle incessant, qui s'exerce au moyen d'in- 
terrogations appelées colles dans le langage des éco- 
liers, de sorte que les professeurs à qui est confié le 
soin de ces interrogations sont les colleurs. 

On se rappelle les récapitulations prescrites dans 
l'ancienne Université pour empêcher que l'instruction 
d'une semaine, d'un mois ne chassât de la mémoire 
des enfants l'instruction qu'ils avaient reçue la se- 
maine ou le mois d'avant. La nouvelle Université a 
eu tort de ne point rétablir cette précaution salutaire; 
mais les fréquentes interrogations, introduites dès l'o- 
rigine à l'École polytechnique, ont passé de là dans 
l'enseignement préparatoire. C'est l'origine des exa- 
mens dont nous venons de parler. M. Blanchet en a 
porté le système au dernier terme de la perfection. 
Voici comment les choses se passent dans ces épreu- 
ves à huis-clos : 

Deux élèves à la fois, pas davantage, sont mis en 
présence d'un examinateur. C^est le Directeur des 
études lui-même qui a désigné ces élèves; il les^choisit 
et les accouple à son gré, de même qu'il choisit 
entre nue quinzaine de personnes Texaminateur du 



280 HISTOIRE , 

jourix)ur Iclnombi'e de coitplesà examiner, de même 
qu'il chiiisit encore le jour oLi il lui semble bo» que 
IVpreuve ait lieu. Pas d'ordre régulier, pas Je tour de 
rôle, rien de ce qui pourrait faire que les jeunes gens 
fussent nûeuv préparés à un moment qu à ttn autiCf 
ni plus exercé» sur un point au détriinenl du reste- 
l^s questions sont consignées sur un cahier, la valeur 
des réponses traduite en clnifrea, et ces cliiirreîî, addi- 
tionnés tous les trois mois, donnent lieu à un classe- 
ment général par muyeinies^ classement dont le ta- 
bleau est afficlié [jour rinstruction des élèves et des 
familles. Il est impossible d'iiuaginer uneappréclàUou 
du travail plus étpritable, plus sûre, plus tuatliétnaû- 
que. Ceux qu'elle concerne TaccepleiU comme la cei^ 
titudeméme, etils règlentleurs enbrtse»consé<|uence. 

On conçoit combien d'assurance les élèves contrac- 
tent à de tels exercices, combien ils s'y agueriisseot 
pour leurs futurs examens, en se familiarisant avec 
les diverses formes ([ue peuvent prendre les interro- 
gationSy selon It^s divers professeurs. Ce n'est pas tout : 
on les babitue encore a travailler ensemble, à s'inter- 
roger entre eux, par une sorte d'enseignement mu- 
tuel^ aussi profitable a celui qui sait qu'à celui qui ne 
sait pas. 

Les résultats obtenus par M. Blanchetont fait pen- 
dant pktsieurs années 1 etonnemetit du public. Sans 
s'informer de ce qu'était sa méthode, on en parlait 
comme d'une cbose où il y avait de l'extraordinaire j 
voire même du surnatureL On l'appelait culture en 
serre chaude^ système d'' entraînement^ etc. : pures 
eneuis qu'un ministre s'est cbargé dedissipLr» M. For- 
tûul ayant envoyé faire uiie étude du régimede Sainte^ 



DE SAINTE-BARBE. 281 

Barbe afin d'organiser mieux qu'il ne i'élait l'ensei- 
gnement scientifique de ses lycées, les règlements de 
l'Ecole pi éparatoîre, libéralement communiqués, sont 
devenus du domaine public. On a reconnu qu'ils ne 
poussent pas à l'abus des forces de la jeunesse, qu'ils 
n'impliquent Vemploi d'aucun artifice, que pour tout 
mystère, ils tiennent les esprits sans cesse en éveil et 
en marche vers le but qu'il s'agit d'atteindre. 

Les écoles spéciales, auxquelles on prépare, sont au 
Douibre de sept : Ecoles Polytechnique, Normale su- 
périeure (section des Sciences), des Mines (section des 
élèves libres), de la Marine, Centrale des arts et ma- 
nufactures , Forestière , Militaire de Saint-Cyr. Les 
mathématiques étant la partie fondamentale de l'in- 
struction exigée par tous les programiiies , c'est à 
celte science que le plus grand nombre de chaires est 
consacré. Il n'y a pas moins de huit cours distincts de 
mathématiques élémentaires : trois pour trois années 
de préparation à l'École de marine; deux pour les 
aspirants à l'École Centrale; deux pour ceux de Saint- 
Cyr, et un que suivent à la fois les candidats à l'École 
Forestière et tous les élèves qui passeront l'année sui- 
vante en spéciales. Les cours de mathématiques spé- 
ciales sont au nombre de deux, sans compter celui du 
lycée, qui est suivi par une vingtaine d'élèves. 

En 1 850, on s'affranchit tout à fait de la fréquen- 
tation du lycée, qui avait cessé d'être obligatoire en 
vertu de la nouvelle loi sur l'enseignement. La chance 
de remporter le prix d'honneur des sciences au grand 
concours, que le lycée offrait aux élèves, n'était pas à 
mettre en balance, dans leur calcul, avec la chance 
de réussir aux examens telle que la leur offrait l'ensei^ 



283 HISTOIRE 

gnement de la maison. L'École préparatoire n^eut donc 
plus de relations au deliors. Mais^peu après, lorsque 
M. Fortoul iit sa réorganisation de i'enseignemeol 
scientifique dans les lycées, non content d'emprunter 
le système d'études de Sainte- Barbe, il manifesta le 
désir que Saiute-Barbe envoyât de nouveau de ses ma- 
thématiciens à Louisi-le-Grand; et quoique cette de- 
mande arrivât accompagnée d'un décret qui élevait à 
250 francs le prix des frais d'études, néanmoins, afin 
de conserver à Sainte-Barbe le titre à! auxiliaire dé" 
vouée de t enseignement de tÈiat^ qu'elle avait reçu àix 
ministre lui-même, on recomposa pour la classe de 
spéciales de Louis-le-Grand un peloton 'd'élève^s bar* 
bistes. Ce cours a aujourd'hui de la réputation. La 
direction du Collège désigne ceux qui doivent le 
suivre. 

Conjointement avec les cours de mathématiques 
marchent ceux de mécanique, de physique et de 
chimie. 11 y a en outre des conférences, soit sur la 
totalité des cours, soit sur certaines parties des études 
auxquelles les programmes ne donnent que peu de 
place. Enfin l'École possède un cours particulier qui 
prépare sur toutes les matières du baccalauréat es- 
sciences les élèves à qui le diplôme est nécessaire, et 
qui ne l'ont pas encore. 

Pour mener de front les conférences, les cours, les 
interrogations, il faut un personnel très-nombreux. 
C'est avec rélite du corps enseignant que Sainte-Barbe 
a toujours rempli ses cadres. Elle a vu, dès le prin- 
cipe, s'associer à son œuvre des membres de l'In- 
stitut^ les professeurs les plus renommés de la Faculté 
des sciences, de l'Ecole polytechnique, des lycées; et 



DE SAINTE-BARBE. 283 

lorsqu'un décret l'eut privée , eh 1 852 , ' du con- 
cours de ces derniers*, par la promptitude avec la- 
quelle elle put combler ces vides regrettables, elle 
prouva qu'elle avait tous les hommes de talent pour 
alliés. • 

M. filanchet participe de sa personne à renseigne- 
ment. II seconde le travail individuel des élèves, et de 
plu& il professe la géométrie^ sa science de prédilec- 
tion* H y a fait ses preuves aux yeux des connaisseurs 
par un remaniement du traité de Legendre, d'où est 
sorti un livre. tout nouveau, un livre qui, depuis des 
années, est classique eq France, en Suisse et en Alle- 
magneV Depuis quelque temps M/ Blanchet partage 
les soins de son enseignement avec M. Aimé Godart, 
son ancien élève, sur qui nous^ aurons bientôt à re- 
venir. 

Un mathématicien, dont l'étonnante précocité res- 
tera l'un des faits notables de l'histoire des sciences à 
notre époque, M. Joseph Bertrand, a enseigné à Sainte- 
Barbe dès l'ége de vingt ans, étant déjà professeur sup- 
pléant à la Faculté. L'École préparatoire l'avait eu 
d'abord pour élève, élevé qui^ au dire de ses maîtres, 
aurait été capable le plus souvent de professer la leçon 
qu'il recevait. H fut admis le premier à l'École poly- 
technique en 1 839. Il y serait entré plus tôt, s'il avait 
pu obtenir une dispense d'âge : les règlements furent 
inflexibles. Alors il employa ce qu'il avait de temps 

i . Article i 3 du décret du 1 6 avril i 852. 

.2. Éléments de Géométrie, par A. -M. legendre, avec addi- 
tions et raodiûcations par M. A. Blanchet, ancien élève de l'École^ 
polytechnique, directeur des études mathématiques de Sainte- 
JBarbe. In-8** (figures dans le texte), Paris, Didot. 



184 HISTOIRE 

devant lui à se faire recevoir docteur ès-sciences, et, 
avant seiz^ ans accomplis, il remporta cette palme, qui 
n'ëlait jamais échue à un si jeune homme. L.*asso- 
ciation des barbistes lui témoigna son admiration en 
lui dérërant, cette année même, la présidence du ban- 
quet du 4 décembre. 

La promotion de l'École polytechnique à laquelle 
appartient M. Bertrand est la première qui ait mis en 
renom renseignement scientifique de Sainte- Barbe. 
L'École préparatoire eut non-seulement le premier 
élève admis, mais encore le second (M. Camille Jac- 
quot, un jeune homme accompli, qui mourut à vingt- 
quatre ans), et, avec les deux premiers, six autres, 
placés dans de très-bons rangs, c'est-à-dire huit can- 
didats reçus, sur onze qui avaient été présentés. Le 
nombre a grossi par la suite en proportion de celui 
des élèves. Le plus beau succès en ce genre est celui 
de Tannée 1854 : quarante-quatre barbistes figuraient 
sur la liste d'admission. C'est l'usage que les con- 
scrits de chaque année, le jour qu'ils étrennent leur 
uniforrtie, viennent en corps rendre une visite de 
remerciment au Directeur du collège. Ils sont intro- 
duits par M. Blanchet. A la présentation de 1854, 
M. Labrouste ne put s'empêcher de dire : «Mes en- 
fants, je ne suis point orgueilleux, mais je suis tenté 
vraiment de le devenir, quand je songe que je suis 
le seul en France à qui il soit donné de recevoir une\ 
pareille visite, n 

Les autres écoles du Gouvernement, celles surtout 
dont les portes sont le plus étroites, ont eu de temps 
eh temps à subir de semblables invasions. C'est ainsi 
que l'institut scientifique de Sainte-Barbe se plaît à 



DE SAINTK-BARBE. 285 

rompre la monotonie des nombres qui représentent lé 
produit de ses années communes. 

II y eut un temps que la partie du collège de Reims 
dont avaient disposé MM.de Lanneau fut trouvée spa- 
cieuse pour le nombre d'étudiants qu'on avait à y 
mettre. Tout d'un coup, on se sentit à l'étroit; il fallut 
s'étendre à la fois au nord et au levant, sur les pro- 
priétés contiguês. Aujourd'hui rétablissement occupe 
la presque totalité des anciens collèges de Reims et de 
Coqueret; mais son installation n'est pas définitive. Maî- 
tresse de tout le terrain de Reims, et rentrée en pos- 
session des maisons qui constituaient la dotation 
Dugast, dans les rues du Four et d'Ecosse, Sainte* 
Barbe médite des travaux qui lui procureront l'espace 
dont elle a besoin pour tous ses services, en même 
temps qu'ils contribueront à l'assainissement et à 
l'embellissement du quartier. 

Le lecteur connaît à présent les deux grandes pro- 
vinces de l'empire barbiste. 11 possède le secret de leur 
prospérité ; il sait qu'elles sont devenues ce qu'on les 
voit être par le talent des hommes qui les dirigent. Il 
faut qu'il sache qu'elles ont subsisté par la bonne 
administration. Cette partie est celle où s'est' fait sentir 
particulièrement l'action du Conseil représentant la 
Société du collège. 

Le Conseil, à travers mille difficultés que lui susci- 
tait un capital social insuffisant, a comblé l'ancien dé- 
ficit, acquitté les dettes de la reconnaissance, acheté 
des immeubles importants, exécuté des constructions 
immenses, et augmenté la bonne réputation de l'en* 
treprise, à mesure qu'il a fait prendre à celle-ci une 
plus grande extension. Ses moyens pour accomplir 



286 . HISTOIRE 

tant de belles opérations ont été son dévouement à 
l*œuvre commune, Texpérience, on peut dire le ta- 
lent et la science en affaires de la plupart de ses mem^ 
bres, enfin et surtout la régularité, Tordre rigoureux 
qu'il a introduits en tout ce qui regarde le matériel et 
les finances de la maison. Une comptabilité bien tenue 
lui a fourni ses principales ressources. Cest M. Aga*^ 
thon Prévost, agent général de la Caisse d'épargne^ 
aujourd'hui président du Conseil, qui a organisé 
cette partie du service. Elle embrasse à la fois toutes 
les divisions de l'établissement, et concentre la res- 
ponsabilité sur une seule personne, un fonctionnaire 
remplissant les devoirs d'économe envers le Collège^ 
en même temps qu'il est l'agent comptable de la Se* 
ciele. 

Cet emploi a déjà passé par les mains de deux fitw^ 
laires, qui méritent qu'on parle d'eux à meilleur titre 
que les procureurs de l'ancien régime, mentionnés 
dans les volumes précédents. 

Le premier, M. Fortuné Romet, seconda les efïbrts 
tentés dès 1831 pour relever la maison. H était associa 
avec M. Jubé, l'honorable chef d'institution dont nous 
avons déjà prononcé le nom. Par son entremise fut 
négocié d'abord un projet de fusion entre Sainte- 
Barbe et l'institution Jubé, projet qui échoua. M. Ro- 
met entra alors avec une part importante d'in-" 
térêtdans la première Société de Saiqte-Bàrbç; puisj 
quand on se forma en société anonyme, il renonça 
à cette part, pour devenir économe agent-comptar 
ble avec les attributions qu'on vient d'expliquer. C'est 
lui qui fit souscrire, et avec une promptitude éton- 
nante, les 520 000 francs d'actions émises en premier 



J 



DE SAINTE-BARBE. 287 

lieu. Les deux administrations qui ont employé les 
services de M. Romet n'ont eu qu'à se louer de lui. 
C'était un homme hoanête, entreprenant, et d'une 
vive imagination, qu'il savait faire tourner au profit 
des affaires. Avec lui il n'y avait pas d'embarras à 
redouter. En face des difficultés les plus subites, il se 
montra toujours plein de ressources. Noiis en citerons 
deux exemples, qui se rapportent à des événements 
mémorables. 

En 4838, le musée de Versailles étant encore dans 
sa nouveauté, Louis-Pliilippe eut l'idée d'en faire les ' 
honneurs aux collèges royaux de Paris*. L'invitation 
envoyée au collège Louis-le-Grand s'adressait à la 
fois aux internes et aux externes, par conséquent à 
Sainte-Barbe. Il devait y avoir une collation dans l'O- 
rangerie, pour tenir lieu du dîner que les écoliers font 
dans le milieu du jour. Il est difficile qu'un gala pour 
un nombre indéterminé de convives ne laisse pas à 
désirer. Notre Directeur, dans sa sollicitude pour ses 
élèves, chargea Téconome de veiller à ce que rien ne 
leur manquai. Un coup d'oeil jelé par M. Romet sur 
les préparatifs lui fit apercevoir en effet que le service 
allait pécher d'une étrange façon. 11 eut bientôt trouvé 
à se mettre en mesure par une expédition qu'il exé- 
cuta dans Versailles. On se mit à table. La bonne chère 
et la boisson abondaient, mais le pain était rare, mais 
une partie des enfants n'avaient ni assiettes, ni cou- 
verts, ni verres pour boire. Qu'on juge du dérange- 
ment et des réclamations que cela occasionna. Il n'y 
eut de satisfaction que dans le coin où fonctionnaient 

4» Le jeudi, i 2 juillet* 



288 HISTOIRE 

nos barbistesy pourvus par M. Rotnet de tout ce qui 
manquait aux autres, lis furent assez bons camarades 
pour partager avec les ëlèves de Henri IV, qu'on avait 
placés près dVux. La fête finit par une visite du pa- 
lais, que le Roi, enpersonne,conduisit depuis la Galerie 
des batailles jusqu'à la Salle de spectacle. Là Sa Ma- 
jesté harangua la jeunesse de dessus la scène, et prît 
'congé d'elle. 

L'autre occasion où se signala M. Romet fut la cé- 
rémonie du 15 décembre 1840, pour la translation 
des restes de l'Empereur. Le Directeur voulut procurer 
à ceux de ses élèves qui n'étaient pas sortis le spectacle 
d'un cortège auquel on peut dire que tout Paris as- 
sistait. Une terrasse, située sur l'avenue de NeuîIIy, 
avait été mise à sa disposition. Lés enfants furent en- 
tassés dans des fiacres. Cela faisait une bien longue 
file, pour un jour où il y avait tant de monde dehors; 
d'ailleurs on apprit, aumoment de se mettre en route, 
que la circulation des voitures était interceptée sur 
toute la rive droite au-dessous des Tuileries. M. Ro- 
met se fit fort de surmonter tous les obstacles. Il était 
officier d'état-major de la gardis nationale. Il prit, en 
unifor^me et à cheval, la tête des fiacres, les dirigea 
par le Champ-de Mars, et leur fit traverser toutes les 
baies de soldats, qui non-seulement ne s'opposèrent 
pas, mais qui s'ouvrirent avec respect, comme si c'eût 
été un corps constitué qui passât. 

Encore un trait de cet ingénieux administrateur. 
Lorsque la sollicitude maternelle commença à s'intro- 
duire si avant dans le régime des maisons d'éducation, 
et que Sainte- Barbe n'avait pas encore à se débattre 
contre l'insuffisance du local, il mit une vacherie dans 



DE SAINTE-BARBE. 289 

l'un des rez-de-chàussée de Reims^ afin d'avoir en 
abondance^ pour le déjeuner des petits enfants^ le lait 
pur qu'on ne peut pas se procurer à Paris. Les bétes 
étaient de choix, etl'étable d'une tenue parfaite* Plus 
d'une visiteuse, subjuguée à la vue de cette partie de 
l'établissement, a donné son enfant au Collège pour 
l'amour du lait qu'il y prendrait le matin. 

M. Romet, atteint d'une maladie mor.telle, donnai 
sa démission au commencement de 1849. Le pirec- 
teur, qui nomme, à toutes les places du Collège, a 
encore le droit de présentation à celle-ci. 11 jeta les 
yeux, pour la remplir, sur quelqu'un qui n'y pensait 
guère. 11 alla chercher l'économe du lycée Saint-Louis 
(alors lycée Monge), M. Frôly, homme consommé 
dans sa partie, qu'il avait exercée avec talent et la 
réputation d'une insigne probité dans les collèges 
royaux de Colmar, de Strasbourg et de Lyon. Les 
liens par lesquels l'Université s'attache ses agents comp- 
table^ ne sont pas de ceux que l'on puisse tenir pour 
. indissolubles. M. Frôly accepta les conditions qui lui 
étaient faites .par Sainte-Barbe, et fut nommé le 1 2 fé- 
vrier 1849. Ce jour est resté comme un jour heureux 
pour le Collège dans la'mémoire des membres du Con- 
seil qui firent la nomination. Le baron Thénard, qui 
a si bien connu les affaires de l'Université, disait une 
fois, moitié en riant, moitié avec regret : « Ces mes- 
sieurs de Sainte-Barbe sont tout à fait sans gène. Ils 
ont besoin de quelqu'un pour leur comptabilité : que 
font-ils? Ils nous prennent tout bonnement le meilleur 
économe de tous nos lycées. » 

La complication toujours croissante des^ affaires est 
cause que, depuis quelques années, on a créé un sous- 
m 19 



290 HISTOIRE 

économe en la personne de M. Arthur JacqoiiMt, em- 
ployé auparavant dans les bureaux de la Guerre. 
M. Frôly en a fait son digne élève et son gendre. 



• • CHAPITRE XVII. 

Réyoludoii de 1S48. — Réfogiés des Taîleries à Sainte-Barbe. — École 
d'administration. -«- Journées de juin« -^ L'iafttirgé Raguinard.^- La 
garnison du Panthéon alimentée par le Collège. — Le général Cavai- 
gnac, président du pouvoir exécutif, à la distribution des prix- — 
L'anséc des trois prix d'honneur. — Décorations conférées au Durée- 
teur. — Choléra de 1849. — Affaire des fusils. — Coup d'État du 
4 décembre 1851. 



Dans la nuit du 23 au 24 février 1 848, de rinfan* 
terie et de la cavalerie prirent position sur la place du 
Panthéon, à proximité de Sainte-Barbe. La journée 
du lendemain vil ces troupes se fondre et disparaître, 
sans laisser plus de vestiges que les autres corps qu'on 
avait disséminés dans Paris. La République fut pro- 
clamée^ mais le gouvernemenfde M. Labrouste reis^ 
le même. Le seul changement de quelque importance, 
survenu dans la zone où ce fortuné monarque exer^ 
çait son autorité, fut que le collège Louis-le-Grand 
perdit encore une fois son nom, pour prendre celui de 
lycée Descaries. 

Là même où une révolution se fait le moins sentir, 
elle ne passe pas inaperçue. Celle de février a en à 
Sainte-Barbe ses é|>isodes, qu'il ne &ut pas omettre 
de raconlef . 



DE ^AINTE-B ARBE. 291 

Au milieu de la confusion du premier moment, 
lorsque les uns couraient se cacher, que les autres se 
cherchaient sans parvenir à se joindre, une dame vint 
avec son enfant demander asile à Sainte-Barbe. C'é- 
tait la femme de l'honorable M. Régnier, le précepteur 
du comte de Paris, sorti des Tuileries en compagnie 
du prince et de sa mère, et qui n'était plus revenu. 
Mme Régnier^ dévorée d'inquiétude^ s^ns nouvelles, 
de son mari, sans protection aucune dans le château 
envahi, prit son plus jeune fils par la main, et s'échappa 
ne sachant point où elle allait. Son instinct maternel 
l'amena à notre Collège, où elle avait un autre fils en 
pension. Elle y resta plusieurs jours. Dans sa précipi- 
tation à fuir, elle n'avait rien emporté avec elle. Le 
barbiste Guinard se trouva très à propos investi de 
la garde des Tuileries : il fit lever courtoisement les 
scellés de l'appartement de Mme Régnier, afin qu'elle 
pût s'approvisionner de ce dont elle avait besoin. 

Op peut avoir oublié aujourd'hui, mais on se rap- 
pellera quelque jour l'école que MM. Carnot et Jean 
Reynaud essayèrent d'instituer, pour fournir à l'ad- 
ministration des fonctionnaires préparés comme il. 
convient. L'établissement se ressentit par trop de la 
pénurie du moment et de la parcimonie toute républi- 
caine de ses créateurs. Il fut la pauvreté même. Le 
ministre, désirant que lés élèves fussent surveillés dans 
leur conduite et dirigés dans leur travail sans qu'il en 
coûtât rien à l'État, avait émis le vœu qu'ils fussent 
placés dans les institutions et pensions de Paris. Il 
demanda même si Sainte-Barbe ne consentirait point 
à ajouter à ses autres divisions un internat de ce genre. 
Le Directeur, d'accord avec le Conseil de la maison, 



292 HISTOIRE • 

accepta d'en faire l'essai. Des sujets furent recrutés, et 
Ton décida que des classes préparatoires seraient for- 
mées en faveur des aspirants à la même carrière. Le 
journal officiel proposa à l'imitation des autres éta- 
blissements le bon exemple donné par notre Collège*. 
Ce fut l'occasion pour MM. Alfred Blanche et Boula- 
tignier, professeurs de la nouvelle école déjà nommés 
par le gouvernement, de commencer leur cours à 
Sainte-Barbe, en attendant qu'on eût remis en état 
des salles qui leur avaient été destinées dans ce vieux, 
sombre et maussade Plessis. 

Sainte-Barbe vint encore en aide au gouvernement 
provisoire pour une autre conception qui se fit jour 
dans le même temps. Il s'agissait d'ouvrir un concours 
solennel entre toutes les écoles primaires de Paris ; les 
élèves les plus distingués auraient obtenu l'avantagée 
de faire gratuitement leurs études classiques. Sur la 
proposition de M. Labrouste, qui avait eu voix con- 
sultative dans la discussion du projet, le Conseil 
d'administration du Collège offrit de fournir quelques- 
unes des récompenses promises. 11 mit à la disposi- 
tion du gouvernement quatre bourses entières, pourvu 
que les sujets présentés fissent preuve d'une aptitude 
suffisante, et que le Directeur eût sur eux, comme sur 
ses autres élèves, pleine et entière autorité*. Le minis- 
tre qiccepta, trouvant la condition juste ; niais l'affaire 
n'ayant pas pu avoir d'effet sur le moment, ne fiit pas 
reprise après la retraite de M. Camot, bien que noire 
Collège ait réitéré son offre en 1849. 



1 . Moniteur du 28 avril i 848. 

2. Moniteur du 26 avril i 848. 



DE SAINTE-BARBE. 293 

• Malgré l'agitation du dehors, le travail se soutenait 
parmi les élèves, lorsqu'une douloureuse interruption 
fut causée par les journées de juin. Sainte-Barbe se 
trouva bloquée au milieu de l'insurrection. Tout au 
tour d'elle s'élevèrent de formidables barricades, par- 
ticulièrement au bout de la rue des Sept- Voies et dans 
la rue Saint-Jacques, à la rencontre de la rue des Grès. 
Les insurgés eurent des postes dans les boutiques du 
vieux collège de Reims, dans les bâtiments inachevés 
de la bibliothèque Sainte-Geneviève et dans le Pan- 
théon, qui fut comme leur place d'armes. Des balles 
tombaient dans la cour du Collège, d'autres péné- 
traient par les fenêtres aux étages supérieurs du bâ- 
timent d'entrée. Les écoliers écoutèrent, sérieux et 
recueillis, le bruit de la fusillade et du canon. Il n'y 
eut d'effroi que dans l'une des salles d'étude. Elle 
fpt causée par la vue d'une colonne de flammes, qui 
s'éleva dans la rue des Grès. C'était le feu d'un'liquide 
incendiaire qui avait été répandu pour brûler une 
porte de derrière de l'École de droit. On cherchait à 
s'introduire dans cet édifice, mais en vain, car déjà la 
garde mobile et la garde nationale débouchaient à tra- 
vers les décombres des maisons abattues pour le per- 
cement de la nouvelle rue Soufflot. Bientôt le Pan- 
théon fut enlevé au pas de course. 

M. Guérard, avec d'autres fonctionnaires de la mai- 
son, était sous les armes dans les rangs de la garde 
nationale. Il est reconnu, rue Soufïlot, par un prison- 
nier que des gardes mobiles emmenaient pour le fu- 
siller. C'était un nommé Raguinard, ouvrier ciseleur, 
homme violent qui, lors des dernières élections de la 
garde nationale, s'était constitué dans les clubs l'ad- 



294 HISTOIRE 

versaire acharné de Sainte-Barbe et de tous ceux qu'il 
appelait haineusement les professeurs. Raguinard s'é- 
lance vers M. Guérard, s'attache à lui, l'invoque, le- 
supplie de lui sauver la vie. M. Guérard intercède ef- 
fectivement; il s'emploiede tout son pouvoir pour que 
le malheureux soit conduit.au quartier général du 
Luxembourg. Ses efforts sont inutiles; Raguinard, ar- 
raché de ses mains, est exécuté à quelques pas de 
là. En le fouillant, on trouva dans sa poche une 
espèce de proclamation, où il était écrit que les pre- 
miers à expédier, après la victoire, seraient Guérard, 
Hébert et Duranton fils : M. Guérard, préfet des 
études de Sainte-Barbe; M. Hébert, alors directeur 
des études à l'École normale , et M. Duranton, pro- 
fesseur à rÉcole de droit. Raguinard laissait une pau- 
vre vieille mère dans Tindigence. M. Guérard a pris 
soin d'elle. 

Au plus fort du combat engagé devant le Collège, 
des cris^ dès coups de crosse de fusil se firent entendre 
à la petite entrée sur la rue de Reims. Des insut^s 
cherchaient à enfoncer la porte, voulant traverser la 
maison pour porter secours à leurs amis. M. Labrou^e 
sortit pour apaiser ces furieux. Il les harangua, monté 
sur une pierre. 

« Que venez-vous faire ici, leur dit-il? Non pas 
tuer des enfants, je suppose, ni achever plusieurs de 
vos blessés que je soigne dans mon infirmerie (l'un 
d'eux mourut à Sainte^Barbe). Vous demandez le pas- 
sage pour aller vous battre; mais la sortie est étroite; 
vous n'avancerez que Fun après l'autre sous une grêle 
de balles, à laquelle personne de vous n*échappera. 
Croyez-moi, ce que vous avez de mieux à faire «st de 



-— 1 



DE SAINTE-BARBE. î«5 

rentrer chez vous. » Puis interpellant des gens de 
connaissance qu'il ^aperçut dans la foule, les uns, ou- 
vriers qui travaillaient pour Sainte-fiarbe, les auti^es, 
indigents qui avaient ressenti ses bienfaits, il ies ex- 
horta à donner TeKemple de la retraite. La dispersion 
commença à se mettre dans le rassemblement, qui, 
au bout de quelques minutes, s'était complètement 
écoule* 

Le Panthéon et ses abords ayant été occupés mili- 
tairement, des soldats couchèrent dans les vestibules 
du collège. Toute cette force armée demeura comme 
oubliée, tant que la tranquillité n'eut pas été rétablie 
dans la ville. Aucune subsistance n'arrivait; plus 
de deux mille hommes étaient là, souffrant de la faim. 
Sainte-Barbe partagea avec eux ses provisions. Pen- 
dant trois jours,' ils vinrent au réfectoire cent par cent. 
On leur donna la soupe, le pain et le vin. Le cellier 
n'aurait pas suffi, si les élèves ne s'étaient mis à l'eau 
de leur propre mouvement. Les plus grands d'entre 
ceux-ci s'acquittèrent du service , qui se fit avec nn 
ordre parfait. Au commandement de M. Guérard, les 
mobiles, si indisciplinés ailleurs, rivalisaient de doci- 
lité et de bonne tenue avec les vieux soldats d'Afrique, 
leurs compagnons dans cette campagne. 

Tandis que le Collée était témoin de ces étranges 
scènes, ses vieux enfants accomplissaient dignement 
leur devoir sur tous les points où était le dangar. Lés 
mêmes qui, en juillet 1830, avaient combattu poar 
les lots contre un gouvernement parjure, les défen- 
daient encore cette fois contre une multitude égai^ée. 
Les promotions ultérieures avaient considéralilement 
grossi ieur nombre. De glorieuses victimes tombèrent : 



296 HISTOIRE 

Masson, chef de bataillon de la 11* légion; Mermil- 
liod, artilleur de la garde nationale; Dupont-Delporte, 
capitaine au 7* de ligne. M. Alexandre Bixio, repré- 
sentant du peuple, fut traversé d'une balle, tandis 
qu'il portait des paroles de paix sur les barricades de 
la rue Saint-Jacques. Sa noble femme, conduite par 
le jeune barbiste Lîsle, alla chercher sous le JTeu son 
corps, qu elle rapporta presque inanimé. Tout autre 
eût succombé à une pareille blessure : l'énergique na- 
ture de M. Bixio le sauva. Au bout de six semaines, 
il était sur piedj il présidait la distribution des prix 
du Collège. 

Sainte- Barbe qe reverra jamais une solennité pa- 
reille à celle du 11 août 1848. Douze des anciens 
élèves, portant à leur boutonnière la cocarde de re- 
présentant du peuple , vinrent honorer de leur pré- 
sence le couronnement des jeunes lauréats de Tannée. 
On voyait dans le nombre plusieurs ministres futurs 
de la République ; on y voyait le chef du pouvoir exé- 
cutif, le vertueux général Cavaignac, vers lequel se 
dirigeaient en ce moment les bénédictions de la France 
entière. Il avait habitué depuis longtemps le Collège 
à être fier de lui. Ses succès dans les classes, surtout 
dans celles de mathématiques, furent le prélude de 
ses beaux faits d'armes en Algérie. 

Cavaignac entra, prêtant l'appui de son bras au 
camarade convalescent qui avait été choisi pour être 
le premier dans cette fête de famille. L'émotion était 
à son comble ; mais l'élan des cœurs était contenu par 
la tristesse empreinte sur tous les visages. M. Bixio 
voulut parler debout ; il prononça de nobles et mé- 
lancoliques paroles. Cavaignac lui épargna la fatigue 



DE SAIT«TE-BARBE. 297 

de donner aux jeunes gens les couronnes et l'accolade. 
Les succès obtenus au dehors étaient dignes d'une si 
majestueuse assistance. Le Collège avait recueilli onze 
prix au concours général, et cent et un au Lycée. 

Tous les journaux de 1 848 ont célébré la valeur du 
garde mobile Hyacinthe Martin, qui, sous une grêle de 
balles, alla prendre le drapeau rouge qui ralliait tous les 
efforts de l'insurrection dans la rue de Ménilmontant. 
Cavaignac, à qui il fut amené, lui attacha de sa main 
la croix d'honneur sur la poitrine, en lui disant : « Tu 
l'as bien gagnée ! » Martin était un enfant des rués ; 
il savait à peine lire. Le général le mit à Sainte-Barbe, 
dans l'espoir de le faire entrer plus tard à Saint-Cyr. 
Ce fut la répétition de l'épreuve tentée^avec les or- 
phelins de 1830. Pour être devenu un beau jeune 
homme décoré, Martin n*en fut pas plus propre à con- 
tracter l'habitude du travail. Il avait passé l'âge où l'on 
apprend ; les plus simples éléments des sciences ne 
purent pas se loger dans sa tête. Mortifié de faire si 
triste figure au Collège, tandis que dehors il recevait 
des ovations partout où il se montrait, il renonça aux 
études après six mois d'essai. 

Les événements qui suivirent, pas plus que ceux de 
juin^ et de février , n'affectèrent d'une manière sensi- 
ble la conduite ni l'esprit de la jeunesse. A Sainte- 
Barbe du moihs cela fut ainsi. Si l'on remarqua chez 
les rhétoricîens du temps de la République des dis- 
tractions qui n'eurent pas toujours les muses pour 
objet, il ne se produisit aucun trouble, aucun désordre 
regrettable. Le travail fut excellent, l'émulation sur- 
excitée par l'accroisement continuel du nombre des 
élèves, et par les succès de la maison dans toutes les 



298 HISTOIRE 

luttes où elle envoyait des combattante £a 4 850 elfe 
remporta au concours général les trois prîJL d'hon- 
neur, de mathématiques, de philosophie et de ]4ieto- 
rique. 

Ce fut un succès sans pareil, dont le G>nseîl d'admi- 
nistration a voulu que le souvenir fût conservé par on 
monument. Un tableau, exposé dans le parloir de 
Sainte-Barbe, représente les trois lauréats de 4850, 
Guery en uniforme de l'École polytechnique, Befin 
avec les palmes de normalien sur son habit , Laohelier 
avec Tuniforme de Sainte-Barbe. 

La distribution intérieure où fut proclamé ce ma- 
gnifique résultat eut pour président M. Devinc^^ pré- 
sident du tril^unal de commerce, et pour assistants un 
grand nombre d'Orientaux, sujets delà Sublime-Porte, 
que le Collège compte parmi ses nourrissons ; car de 
même que MM. de Lanneau avaient morigène des 
Grecs , M. Labrouste a morigéné des Turcs , et un 
uléma ainsi qu'un diplomate ottoman sont sortis de 
ses mains. Artin-Dadian, le diplomate S l'un des 
bons barlnstes qu'il y ait, est le premier de sa nation 
qui emporta de Paris le diplôme de bachelier. Le feu 
sultan Âbd-ul-Medjid trouva c^la si honorable qu'il 
voulut avcâr une répétition de l'examen , laquelle 
eut lieu en sa présence et à sa très-grande satisfaction, 
car aussitôt après il envoya à M. Labrouste la décorer 
tionen diamants du Nichan Iftihar. Le firman, conçu 
dans les termes les plus gracîeu]!^ pour Sainte-Barbe 
et pour son directeur, est daté de Stamboul la Bien- 

i . Il est aujourdTiuî premier secrétaire de Fambassade ottomane 
à Paris. 



i 



j 



DE SAINTE-BARBE. «99 

gardée, fin du noble mois dç Zilhidjë, an 1262 de 
rbëgy^e^ 

Cette décoration noos amène à parler de celle de la 
Légion d'honneur, que M. Labrouste reçut au nom du 
président de la République, à la distribution des prix 
de 1849. Ce fut une surprise. M. Lacrosse, alors mi- 
nistre des Travaux publics, invité à présider la cérémo- 
nie, avait pris ses mesures de concert avec son collègue 
de l'Instruction publique. Jamais péroraison ne fit plus 
d'effet que l'acte qui termina le discours du ministre. 
Lorsqu'on vit celui-ci attacher la croix sur la poitrine . 
de son vieux camarade, des cris de transport éclatè- 
rent dans toute l'assemblée. Ils furent redoublés par 
les paroles que prononça le Directeur .'« Mes enfants, 
dit-il, je suis trop ému pour exprimer ma vive et pro- 
fonde reconnaissance de l'honneur qui est fait en ma 
personne à cette maison. Ce n'est point une fausse 
modestie ; mais vous savez, comme moi, que ce n'est 
pas à moi seul que ce ruban est donné, et que, si je 
le partageais entre tous ceux qui l'ont mérité devant 
moi, autour de moi, à côté de moi, il en resterait à 
peine un fil à ma boutonnière. » Le président de la 
République', devenu empereur, a exaucé le vœu de 
M. Labrouste en accordant la même distinction à ses 
deux collaborateurs, MM. Guérard et Blanchet*; et il 
a exaucé le vœu de l'Université et du public en éle- 
vant M. Labrouste lui-même au grade d'officier*. 

La même année 1849, le choléra fit sa seconde ap- 
parition à Paris. Au commencement du mois de juin, 

i Bu 1 au 20 décembre i 846. 

â. Décrets du 13 août 18o3 et du 13 août 1857. 

3. Décret du 13 août 1861. 



300 HISTOIRE 

il atteignît à Saiute-B^*be deux élèves et un domesti- 
que, qui moururent en quelques heures. La nouvelle 
s'en répandit rapidement dans TUniversité. M. de 
Falloux était alors ministre de Tlnstruction publique. 
Dès qu'il sut que le fléau sévissait si cruellement dans 
notre Collège, il y accourut sans se faire annoncer. Il 
eut besoin d'ap"prendre qui il était à M. Labrouste, qui 
ne le connaissait pas. Il lui dit qu'il avait jugé de son 
devoir, lorsque de légitimes alarmes agitaient T un des 
grands établissements de son ressort, de venir les cal- 
mer par sa présence ; qu'il apportait ses encourage- 
ments à la jeunesse de Sainte-Barbe, et qu'il espérait, 
par ses eflbrts joints à ceux du Directeur, arrêter les 
progrès d'un fléau dans les atteintes duquel l'état du 
moral était pour beaucoup. Il parcourut ensuite les 
salles (c'était pendant la classe du soir), et prononça 
dans chacune des paroles qui furent très-bien accueil- 
lies des élèves. Nous aimons à croire que cette visite 
opportune acheva de rétablir l'état sanitaire de la 
maison. On n'eut point de nouveaux cas de choléra à 
enregistrer. 

Sainte-Barbe, si bien traitée par les ministres de qui 
elle relevait, faillit être brouillée avec celui de la 
Guerre : du moins une grosse affaire lui serait surve- 
nue de ce côlé, s'il n'avait tenu qu'à la Direction de 
l'artillerie. Cette administration , chargée d'opérer le 
désarmement de Paris, avait été informée qu'un amas 
de fusils existait dans la maison. L'amas consistait 
en quarante vieux fusils que le Directeur avait achetés, 
afin de procurer un exercice salutaire aux plus grands 
de ses élèves, à défaut d*appareils gymnastiques, pour 
lesquels la place manquait. Afin d'éviter tout accident, 



' ^ 



DE SAINTE-BARBE. 301 

les baïonetles avaient été retirées et les lumières des 
canons enclouées ; mais cette précaution n'empêcha 
pas de considérer la possession de ces armes comme 
menaçante pour la sûreté de l'Etat. Le ministre de la 
Guerre, prévenu par MM. de l'artillerie , ne voulut 
rien entendre de ce qu'on lui fit dire par son collègue 
de l'Instruction publique; un fourgon fut envoyé avec 
l'ordre d'emporter les fusils à Vincennes. Le Collège 
refusa énergiquement d'ouvrir sa porte au fourgon, di- 
sant qu'il ne lâcherait pas ses fusils pour plusieurs bon- 
. nés raisons qu'il avait déjà exposées, et qu'il ferait 
entendre de nouveau à qui de droit. De là le ministre 
invoqué de nouveau, et cette fois converti, Sainte- 
Barbe autorisée par. une décision toute différente delà 
première à garder ses fusils*, enfin la Direction de l'ar- 
tillerie si peu satisfaite que, six mois après, elle revint 
à la charge, notifiant le prochain retour du redouta- 
ble fourgon *. Pour la dispenser de cette peine, on lui 
expédia sur-le-champ la copie de Tacte ministériel 
qu'elle paraissait ne pas connaître. 

Le 4 décembre 1 851 , le Directeur fit son coup d'État. . 
De son autorité privée, il décida que le banquet an- 
nuel des anciens barbistes n'aurait pas lieu, et il alla 
écrire cela de sa main sur le registre déjà ouvert des 
souscriptions. Les sages l'approuvèrent, car quelle 
tournure auraient prise les conversations, lorsque la 
fusillade éclatait tout autour du cénacle, lorsque la 
nouvelle révolution eu train de s'accomplir avait déjà 
fait des heureux et des victimes parmi les convives ac- 



1. Lettre signée d*UautpouI, en date du 2 octobre 1850. 

2. Lettre du 17 mars 1851. 



302 HISTOIRE 

coutumes du festin ? Il importait que la fraternité des 
anciens ne fût point exposée à une épreuve dajjge- 
reuse, parce que dans la fraternité des anciens 
résident Thonneur et la vie du Collège. Celui aux 
mains de qui étaient remises les destinées du Col- 
lège crut faire son devoir en outre-passant son droit. 
Au nom de Tamitié, il tint éloignés les uns des autres 
ceux que Tamilié aurait dû réunir. 

A Sainte-Barbe, il agit avec non moins de décision 
et de fermeté. Il y avait de la fermentation , surtout 
parmi les maîtres d'étude ; les discussions commea* 
çaient. Il exigea le silence d'une manière absolue, il 
dit à ces jeunes gens qu'il concevait leur émotion j que 
malgré son âge , il ne serait pas celui qui leur prê- 
cherait rindifférence en matière de patriotisme et 
d'humanité ; mais que des familles appartenant à tous 
les partis lui avaient confié leurs enfants, que toutes 
les convictions politiques devaient être respectées par 
ses collaborateurs, comme elles l'étaient par lui-même^ 
et qu'il ne souffrirait pas, à ce moment moins que ja- 
.mais, que des débats irritants fussent provoqués parmi 
les élèves par l'exemple des maîtres. Afin d'être plus 
sûr qu'il serait obéi , il fit signer l'engagement que 
chacun prit de se taire. De cette façon les temps diflS- 
ciles purent être traversés sans manifestation d'aucune 
crainte, sans désaveu des actes antérieurs, sans épura- 
tion du personnel employé, sans ingratitude pour les 
services rendus. 



DE SAIRTE-BÀRBE. 303 



CHAPITRE XVIII. 



Fraternités barbistes. — Distributions de vivres au Collège. — La liberté 
d'enseignemeat. ... Iaâ de tS50. — Sappression du certificat d^étu- 
des. — La bifurcation. — Attitude de Sainte-Barbe. — Le Directeur 
appelé au Conseil supérieur de TLastruction publique. 



Après les événements de juin 1848, lorsque la ré- 
flexion eut succédé à la stupeur du premier moment, et 
qu on eut cru reconnaître dans les barricades le mauvais 
conseil de la misère, le cri général fut que l'assistance 
publique, sur le pied où elle s'exerçait, était démon- 
trée insuffisante; qu'il devenait nécessaire, non-seule- 
ment de donner -davantage, mais de tâcher que Tau- 
mône fût un moyen de rapprochement entre le riche 
et le pauvre; qu'on n'arriverait jamais là avec les 
formes administratives ; qu'à Passocialion seule enfin 
il appartenait de prévenir les demandes de secours à 
coups de fusil. Alors ceux qui se sentaient en état de 
soutenir l'indigence cherchèrent à se réunir dans un 
but commun de charité fraternelle. Ce mouvement, 
dirigé dans le douzième arrondissement par le respec- 
table abbé Faudet, alors curé de Saînt-Étienne du 
Mont, donna naissance à diverses sociétés de bienfai- 
sance dont la forme primitive et le nom ne se sont 
(îonservés qu'à Sainte -Barbe. Cela s^appelle encore, 
comme en \ 848, les Fraternités j et voici en quoi les 
Fraternités consistent. 



304 HISTOIRE 

Des familles pauvres sont choisies dans le rayon le 
plus rapproché du Collège, et réparties de telle sorte 
entre les élèves que chaque quartier en a une dont Tas- 
sistance lui est attribuée. Un employé, qui n'a que 
cela à faire et qu'on appelle \e Commissaire des paui^resy 
porte les secours à domicile. Ceux-ci sont puisés a 
une caisse spéciale, où viennent se réunir trois sortes 
de produits : d'abord de petites collectes que les éco- 
liers font entre eux chaque semaine par un prélève- 
ment sur leurs menus plaisirs, puis deux quêtes géné- 
rales qui ont lieu chaque année àlaSainte-Barhte et Je 
jour de la première communion, enfin une légère 
taxe que les règlements ont ajoutée au prix de la pen- 
sion de chaque élève. Celte taxe remplace l'argent 
donné ailleurs pour le cadeau' de la fêle du chef de 
l'établissement, cadeau dont M. Labrouste n'a jamais 
voulu entendre parler, non plus que de la fête. 

Chaque Fraternité a son président, qu'elle élit elle- 
même, et qui se trouve être toujours un bon sujet. Le 
Directeur fait partie de la première Fraternité, sans en 
être président. 

Le devoir du président consiste à tenir le compte 
des collectes, à visiter les pauvres de sa Fraternité en 
compagnie du Commissaire, et à faire les rapports 
soit au Directeur du Collège, soit aux assemblées géné- 
rales qui se tiennent sous la présidence du premier 
aumônier. C'est l'économe de la maison qui est le 
trésorier des Fraternités. Il paye sur des mandats signés 
par le Directeur. 

Plus de quatre-vingts familles, secourues aujour- 
d'hui par les Fraternités, reçoivent des bons de pain, 
de viande, de bois, à prendre sur les fournisseurs de la 



DE SAINTE-BARBE. 305 

maison. C'est entre elles aussi que sont distribués les 
vêtements hors d'usage, le linge et les chaussures 
abandonnés par les élèves, tous objets qui sont 
d'abord réunis avec soin dans un magasin appelé le 
Vestiaire des pauvres. 

L'intérêt des enfants pour cette bonne œuvre est 
très-vif et très-soutenu. Ils disent « ma famille » pour 
désigner la famille qu'ils obligent, et il est arrivé déjà 
pour les gens qui en étaient dignes que le bienfait des 
Fraternités leur a été continué après que leurs jeunes 
protecteurs étaient sortis du collège. 

Sainte-Barbe a une autre manière d'exercer en 
grand la charité par la distribution qu'efle fait de ses 
reliefs. 

Les débris de la table ne sont pas peu de chose 
dans une maison où Ton consomme journellement 
dix-huit cents livres de pain, mille livres de viande, 
et le reste à l'avenant. Autrefois tout ce qui ne se con- 
sommait pas était vendu; mais on s'est aperçu que 
ni les élèves ni les domestiques n'avaient assez de soin 
pour des choses qu'ils savaient destinées à un triste 
commerce. L'attention n'a plus* même besoin d'être 
recommandée aujourd'hui que les restes passent direc- 
tement de la cuisine entre les mains de ceux dont ils 
doivent soulager la détresse. Les indigents du quartier 
sont admis sur cartes à venir retirer leur portion. La 
distribution a lieu tous les jours, en présence du Com- 
missaire des pauvres. Des précautions ont été prises 
pour que cette charité publique et à heure fixe ne prît 
pas un air d'ostentation. Le sentiment dans lequel 
celui qui l'a instituée entend qu'elle soit maintenue 
est exprimé par ces paroles de saint Luc, qui sont tra- 
in 20 



366 HISTOIRE 

cées en lettres de bronze sur le fourneau i Cua% facis 
amâ^wiumj i^oca pauperes. 

Passons à d'autres iaits d'uD intérêt plus général, 
à ceux qui vont être pour nous roccasion d^lndiquer 
les chaDgements survenus depuis quînse ans dans Je 
régime uaiYersiUire, par suite des concessions Eûtes 
tour à tour à la liberté d enseigoementetà la doctrine 
de l'instruction spécialisée dès le jeune âge. 

La liberté d'enseignement fut promise par la Charte 
de 1830; mais pendant dix-neuf ans on ne parvint 
pas à s'entendre sur le moyen de la régler* Une hÀ^ 
présentée par M. Guizot, rentra dans le néant après 
avoir été votée par la Cliambre des députés^ en 1837; 
une seconde loi^ présentée par M, Villemâin, en 4841^ 
fut l'acheminement à une troisikne, ouvrage du même 
minière, qui, a^Mrès être sortie toute mutilée des déli- 
bérations de la Chambre des pairs, fut rapportée à la 
Chambre des députés, et n'arriva point à la discussion ; 
une quatrième, dont M. Salvandy fut l'auteur, occupa 
de nouveau la Chambre des pairs en 1 847 ; enfin les 
législateurs de 1 848 libellèrent aussi leur projet, do^ 
les législateurs de A 849 ne voulurent plus entendre 
parler. 

C'est à ces derniers qu'il était réservé de conduire 
à sa fin cet ouvrage fait el défait tant de fois« Rap- 
portée ayec une célérité extrême et délibérée à trois 
reprises, ainsi que le voulait la Constitution, la loi fut 
promulguée le 1 5 mars 1850. On a dit qu'elle était un 
concordat politique entre le clergé et l'Université. Il 
est certain qu'elle fut votée sous l'empire de préoccu- 
pations étrangères au sujet , et que les parties inté- 
ressées portèrent les yeux ailleurs qu'au but qu'il 



DE SAINTE-BARBE. 307 

s'agissait d'aileîiKlre : le dergé se mantrant fius sou- 
cieux de La latitude qui lui serait laissée dans l'eiisei- 
guemeot que des conditions propres a développer une 
instrufAion forte; rUuiversité, c'est-à-dire les défen- 
seurs d'office de l'Université, ne cherchant qu'à ache- 
ter par des concessions le silence de Tadversaire qui 
déblatérait contre elle, et par-dessus tout, la majorité 
de l'Assemblée, chargée du mandat des pères de fa- 
niille^ comme on parlait alors, cette majorité, éperdue 
et tremblante , acceptant de confiance tout ce <]ui lui 
était offert pour conjurer les fantômes doxii elle éuit 
assaillie. 

Sainte-Barbe , depuis que s'agitait la grande ques- 
tion de l'enseignement , n'était restée étrangère à 
aucun des efforts tentés pour obtenir les réformes 
utiles* Tour à tour elle entra dans la coalition à la- 
quelle succomba l'odieuse rétribution universitaire *; 
elle s'associa aux rédamations , même au procès pro- 
voqués par l'augmentation des frais d'études*; elle 
intervint à propos du programme trop souvent re- 
manié des matières d'enseignement; mais en pré- 
sence de la loi qui s'anuonça en 1 849, ce ne fut plus 
dans les rangs des réformateurs qu'elle porta son dra- 
peau. Quoiqu'elle n'eût qu'à gagner à cette loi, son 
propre intérêt ne lui ferma pas les yeux sur celui du 



1. Immolée dans la séance de la Chambre des députés du 
20 joâllet 1844. 

2. Portés de 60 à 1 00 francs, par une décision du Conseil royal en 
date du 16 septembre 1845, qui ne fut pas publiée dans les jour- 
naux officiels. — Mémoire à consulter contre celte augmaitatîon, 
le 26 mai 1846; pourvoi interjeté au mois de décembre 1848; 
procès commencé au mois de juin 1849. 



308 HISTOIRE 

pays. Elle reconnut dans ce qui se faisait beaucoup 
d'inexpérience, un Irès-niince souci de la liberté dont 
on parlait tant, et le germe de difficultés qui amène- 
raient plus tard le repentir. C'est pourquoi elle prît 
le parti 'de défendre l'Université contre l'Université 
elle-même. 

Cette campagne fut entreprise avec toutes les forces 
de l'enseignement libre laïque, car M. Labrouste était 
dès lors à la tête de l'Association des chefs d'institu- 
tion du département de la Seine. Ce fut une cam- 
pagne malheureuse. Le conseil directeur de l'Associa- 
tion n*'obtînt pas même audience du comité de l'As- 
semblée législative qui examinait la loi d'enseigne- 
ment : il fallut s'adresser à l'Assemblée elle-même. 
Un écrit, imprimé à la hâte et distribue au dernier 
moment*, fournit quelques arguments à la. discussion 
publique. Le directeur de Sainte-Barbe assistait aux 
séances en prévision du caSj qui se présenta efFective- 
ment, oii des députés auraient désiré de plus amples 
explications sur les points touchés dans le mémoire. 
Il eut beau expliquer, et ceux qui le consultaient, 
eurent beau parler : il fut témoin qu'il n'y a pas à 
lutter contre la force d'un torrent. 

Sainte-Barbe put se consoler de sa défaite par le 
profit particulier qu'elle y trouva. En consacrant 
l'existence A' Écoles libres^ fondées et entretenues par 
des particuliers ou par des associations, la loi de 1850 
mit sous la garantie du droit commun un établisse- 
ment qui, bien que toléré jusqu'alors par le pouvoir et 

i . Observations des chefs d'institution et maîtres de pension du 
département de la Seine sur le projet de loi (4 février \ 850) , In-8% 
Paris, impr. de Maulde et Renou. 



DE SAINTE-BARBE. 309 

secondé par la faveur publique, avait nëaomoins 
l'inConvénient de se présenter comme une exception. 

Cet établissement put entrer sans crainte et sans 
embarras dans la carrière nouvdle qui lui était ou- 
verte. Il n'avait pas .d'apprentissage à faire pour 
apprendre à marcher tout seul; l'émancipation ne lui 
apparaissait pas non plus comme l'heureux moment 
qui allait lui permettre de se livrer à la satisfaction de 
secrets désirs. Il garda son organisation antérieure; 
loin de.chercher à rompre les liens qui l'attachaient à 
rUniversîté , il tint à honneur de les resserrer da- 
vantage. La liberté ne lui servit qu'à combattre une 
tendance funeste pour l'avenir des études, que l'on 
vit se manifester aussitôt. 

Lorsqu'à la vue d'une machine compliquée , on 
décide qu'elle irait beaucoup mieux si elle était dé- 
barrassée de telle ou telle de ses pièces, on s'expose à 
porter un faux jugement : l'ordinaire , en pareille cir- 
constance, est que les résultats produits par la sup- 
pression qu'on a demandée sont tout différents de 
ceux auxquels on s'était attendu. C'est ce qui arriva 
aux apôtres de l'enseignement libre lorsqu'ils deman- 
dèrent l'abolition du certificat d'études, exigé aupara^- 
vant pour se présenter à l'examen du baccalauréat. 
Ce certificat, établi à l'origine dans l'intention de 
n'admettre aux grades que les sujets formés par l'Uni- 
versité, était devenu par le fait un préservatif contre 
le danger de l'instruction artificielle; et comme les 
règlements lui avaient ôté déjà une partie de son ca- 
ractère exclusif, puisque le certificat d'études domes- 
tiques signé par le père de famille en pouvait tenir 
lieu, il n'y avait plus qu'un .mot à ajouter pour l'ac- 



3f0 HFISTOIRE 

commoder aa principe de h nouTelle loi. Au fieu ée 
cehj les eolèrea amassées depin longtemps contre k 
malheureux certificat firent explosion. L'aprnîbn la 
plus KE>eraIe fil cause commune arvec celle qui Vesî h 
moins ; on ne roulut plus entendre parler dcr nom ni 
de la chose^ et Femportement fut te), qu'avamt même 
que rœuvre de lëgiislation eût été achevée, il fà}hat 
qu*on vit le monstre immolé par un décret. Le- certî- • 
fîcat d*études fiit supprimé en norembre f 849. 

Pour qui fut le principal avantage de celte mesure? 
Pour ceux des écoliers à qui 3 tarde d'avoir fini leurs 
études, et ceux-là étaient alors phis nombreox qae 
jamais. Déjà fiorissait le système d'éducation domes- 
tique qui consiste à débarrasser la vie de ses pi'élf- 
minairesy et à inspirer aux enfants, dès qu'ils sortent 
des bras de leur nourrice, les goûts, les passions, 
l'esprit calculateur de la maturité. Les coWêges, en 
1 850, étaient pleins d^adolescents scmpirant après une 
position sociale^ très-pressés par conséquent de tenir 
le diplôme de bachelier, qui donne accès aux car- 
rières. Ces garçons reconnurent du premier coup d'orfl 
que , pour être bachelier, il ne s'agissait plus qœ 
d*avoir seize ans accomplis (car une limite d'âge fiât 
maintenue, au préjudice de la liberté) : du plus loin 
qu'il leur fut possible, ils se préparèrent à rexameu. 
Plutôt que d'écouter les leçons des professeurs, i!s 
apprirent par cœur le Manuel de Taspirant au bacca- 
lauréat , les réponses toutes faites aux questionnaires 
des programmes , et beaucoup furent en état de se 
présenter et d'être reçus , sans avoir fait ni phîloso^ 
phie , ni rhétorique. Alors se fortifia et s'étendit la 
concurrence faite aux lycées et collèges par les mai- 



DE SAIKTE-BARBE. 3H 

sons de préparation, que eeux mêmes qiH les fréquen- 
tent appellent, dans no dépioraUé langage, des usines 
otY des fmtrs à bachot. Les ëtudes, au Keu d'être la 
gymnastique qui développe les forces de Fifitell^eiiee, 
menacèrent de se convertir en une corvée de la mé- 
moire ccmtractant, poor fe bescûn d'un moment, des 
connabsances bonnes à être onbiiées aussitôt après. 

La bifurcation j qui vint ensuite, précipita les 
choses dans le sens ou elles inclinaient déjà» 

L'occasion de «cette nouveauté fut une démarche 
faîte auprès du ministre par les chefs d'institotîon de 
Paris , qui trouvaient la partie scientifique de ren- 
seignement des lycées insaffisante pour les jeunes 
gens qui se préparaient aux écoles spéciales du gou- 
vernement. Par une circonstance bizarre, c'est le 
directeur de Sainte-Barbe, c'est ràdversaire le plus 
acharné de tout ce qui devait suivre, qui porta la 
parole comme président de l'association formée entre 
les pétitionnaires. Une commission^ nommée pool* 
examiner la demande, fonctionnait dans le temps que 
M. Fortoul fut porté au ministère. Les circonstances 
donnèrent carrière à Fesprit d'aventure. Au lieu de 
se borner à combler une lacune^ on voulut résoudre 
une question difficile, depuis longtemps agitée, celle 
d'un nouveau degré d'enseignement à créer en faveur 
de cette partie de la jeunesse qui, en vue de certaines 
carrières, poursuit les études classiques jusqu^aax hu- 
manités exclusivement. On justifia l'oj^ortunité d'une 
pareille création par les essais déjà tentés surune pe- 
tite échelle, par les études commencées, sous le der- 
nier ministère de M.Salvandy, pmir une organisation 
générale en ce genre, par les demandes exprimées 



312 HISTOIRE 

dans divers journaux en 1848 et 1849 ; et c'est en re- 
maniant tout le système des études qu'on crut attein- 
dre le but qu'on se proposait. Il n'y eut qu'à choisir 
dans le nombre infini des programmes rédigés depuis 
le commencement du siècle. Le règlement général du 
Prytanée , promulgué le 27 messidor an IX. (1 6 juil- 
let 1801), parait avoir été le type sur lequel on se 
modela. 

Les enfants divisés à partir de l'âge de douze ans 
en cwils et en militaires; les uns et .les autres instruits 
d'une manière différenle, suivant celle des deux caté- 
gories à laquelle ils appartiendraient; les études clas- 
siques conservées pour les Civils, tandis que les Mili- 
taires seraient exercés aux sciences et au français : 
tel était le régime institué par le règlement de l'an IX.. 
Mais ce règlement ne fut pas appliqué, ou, s'il le fut, 
il ne résista pas à la plus courte expérience : on n'en 
voit trace ni dans les statuts postérieurs, ni dans les 
palmarès d'aucune des sections du Prytanée. Il suffit 
néanmoins qu'on le trouvât au Bulletin des lois, et 
qu'il semblât donner raison aux partisans de la spé- 
cialisation précoce des études, pour qu'on le jugeât 
digne d'être ressuscité. On prit cela sans doute pour 
la pensée de Napoléon P', laquelle il aurait été plus 
naturel d'aller chercher dans les programmes de 
l'Université impériale, et dans diverses paroles de 
l'empereur qui nous restent, celles-ci par exemple : 
(c J'aime les sciences mathématiques et physiques ; 
chacune d'elles est une belle application partielle de 
l'esprit humain; mais les lettres, c'est l'esprit humain 
lui-même; c'est l'éducation de l'âme. » 

Quoi qu'il en soit , l'idée de 1 801 ayant été reprise 



DE SAINTE-BARBE. 3i3 

en 1 852, on donna une autre forme au principe de la 
division. Ce fut après la classe de quatrième, c'est-à- 
dire lorsque le plus grand nombre des enfants ont at- 
teint leur quatorzième année, qu'on les sépara. Ils 
devinrent alors écoliers es lettres ou écoliers es scien- 
ces. De peur que les esprits ne fussent rendus étran- 
gers les uns aux autres, s'ils passaient trop brusque- 
ment à un enseignement tout à fait distinct, les deux 
catégories continuèrent de recevoir ensemble pendant 
quelques temps une part commune d'instruction. En 
troisième et en seconde, la classe du matin réunissait 
les nourrissons de la littérature et ceux de la science ; 
la classe du soir les séparait , et ils allaient chercher 
des leçons spéciales sous des professeurs différents. 
C'était comme un troupeau , livré pendant la première 
moitié du jour à l'herbe de la prairie, qu'on aurait 
ensuite partagé en deux l)andes, pour envoyer l'une 
sur la friche et l'autre sur le chaume; mais, après Tan- 
née de seconde, il n'y avait plus que friche et chaume : 
en d'autres termes, la rhétorique et la philosophie ou 
logique furent entièrement spécialisées , de sorte que 
les lycées possédèrent ( et possèdent encore ) une rhé- 
torique-sciences à côté de la rhétorique-lettres , et une 
logique-lettres à côté de la logique-sciences. 

Telle est la distribution d'études , plus nouvelle que 
simple , qui prit le nom de bifurcation , par un em- 
ploi figuré de ce mot. Sur bifurcation on a fait le verbe 
neutre bifurquer. Les jeunes gens disent qu'ils bifur- 
quent, lorsqu'ils se décident pour les sciences ou pour 
les lettres. Bifurquer se prend aussi à l'actif, et Ton 
entend de tendres mères dire qu'elles ont bifurqué ou 
qu'elles bifurqueront leurs fils. 



314 HISTOIHË 

Au bout de chacune des bratoches de la bifinrcft* 
tiof] a été posée 9 c<Mniiie couroimeme»t, la p^Ime de 
bachelier en Tmie ou en Pautre bculte* C'est là le 
prix que sont appelés à cueillir^ à la fin de leurs cornacs 
respectifs , ici les logiciens es lettres, là Ies*lo gifci c aas 
es sciences; mais on y accède aussi, sans être logfi^ 
cien d'aucune sorte, par Véchelte beaucoup pluscotnle 
de la préparation mécanique, de manière que la bifiir- 
cation n'est pasdevenue un remèdeà la sap^pressioii dn 
certificat d^études. Elle a au contraire aggràTe ie? mal 
produit par cette suppression, en ce qu'elfe' a m» an 
peu plus en vue le but d'étroite utilité que le siède 
demande à l'instruction , en ce qu'elle a appelé ks 
enfants à se décider eux-mêmes entre deux dhrectioiis 
dont l'une, offrant en perspeetîre des exercices beaur* 
coup moins pénibles que l'autre, attire tout naturelle- 
ment leur préférence, enfin en ce qu'elle a élaUi ecttre 
des connaissances dénature essentiellement diljTéreftie 
une conformité qui a été préjudiciable à Penseigne*- 
ment de toutes. 

Ni en 1849, ni en 1852, M. Labrouste ne parta^jea 
les belles espérances qui furent ^exprimées dans ïes 
rapports mis en tête des nooreanx décrets. Il soutînt 
que, si le système en vigueur demandait desréformes, 
ce n'était pas sur les points qu^on avait touchés; qtt on 
faisait des choses qui tendaient^ à la destruction des 
études, et que les hommes qui reconnaissaient te 
droit de I^tat en matière d'enseignement, devaient 
s'opposer de tout leur pouvoir à des mesures désas- 
treuses. C*est pourquoi, au lien de se tenir à réc»! et 
de se gouverner à sa guise en se renfermant cbesr lui, 
ainsi qu'il en avait le droit, il resokdt de protester 



DE SAINTE-BARBE. 3iS 

contre les errements de ru»îverâté par la condaite 
qu'il tiendrait, tout en marcbaDt ayec elte. 

D'abord, pour atténaer Teffet du certificat d'éfndes 
supprimé, il mit à l'index: dans sa maiscm, afvant la 
classe de ^philosophie, les n^nneis du baccatancréat,, et 
il déclara rayé des rôles de l^rnte-Barbe font élèire 
qtti se présenterait à Texamen avant d'avoir achevé 
ses études. 

Quant à la biFnrcafion, il la rendit à pen prtès illu- 
soire en tftmsportant à là fin du eowrs cte troisième le 
choix entre les lettres ou les sciences, que les règle- 
ments fixaient à la fin do coors de quatrième. Par là 
en effet il devint impossible aux élèves de quitter la 
filière où ils étaient engagés ; car, n'a jant pas fait la 
troisième-sciences, ils sentaient qu'ils n'auraient pas 
d'avantage à changer de route et à se rendre dans la 
seconde-sciences, pomr laquelle ils n'étaient ^ pré^ 
parés. 

Grâce à cet arrangement, on n'a jamais vu à Sainte- 
Barbe des études communes à deux classes dans un 
moment de la journée, et distinctes dans uii autre 
moment; on n'y a jamais connu non plus qu'une caté- 
gorie d'élèves de troisième; mais comme, à l'issue de 
cette classe, il y a des jeunes gens que leur âge empe^ 
cheVait de se présenter aux écoles spéciales, s'ils étaient 
obligés de faire leurs éludes complètes, on a établi pour 
ceux-là un cours spécial de baccalauréat es sciences, 
qui dure deux ans. Ce cours est fait par des professeurs 
de littérature et par des professeurs de sciences, qui 
restent tout le temp^ attachés à la même promotion ; 
après cela viennent les études de l'École préparatoire 
sous la dh^ection de M. Bïanchet; mais il n'y a abso^ 



316 HISTOIRE 

lument que les retardaires qui profitent de cet expé- 
dient. Les aspirants aux carrières scientifiques, lors- 
qu'ils en ont le temps, passent par toutes les classes 
jusques et y compris la logique, et il arrive presque 
toujours que l'avantage est pour eux dans les études 
de l'École préparatoire. 

Ije directeur de Sainte-Barbe, ne voulant pas que 
l'ordre observé dans sa maison fût un mystère, saisit 
l'occasion de la distribution des prix de 1 854 pour noti- 
fier aux parents présents à cette cérémonie 1# principes 
d'après lesquels il jugeait bon de se gouverner. Peu 
après, pour Tinslruction des familles qui venaient en 
si grand nombre lui présenter leurs enfants, il fît im- 
primer, sous la forme de règlement*, les conditions 
d'études qu'il imposait à ses élèves. Cela fit du bruit. 
On en parla au ministre comme d'un manifeste de 
révolte, au point que le ministre chargea M. Cayx, 
alors vice-recteur de l'Académie de Paris, d'aller aux 
informations. 

M. Cayx vint à Sainte-Barbe. On lui mit sous les 
yeux le règlement imprimé ; on lui donna toutes les 
explications désirables à l'appui. Lorsqu'il eut vu de 
quoi il s agissait, voici ses paroles : « C'est parfait. Je 
ne regrette qu'une chose, c'est que ce règlement ne 
puisse pas être introduit dans les lycées. » 

Les faits ayant été rétablis à leur juste valeur par 
le rapport du vice-recteur, M. Fortoul n'eut pas lieu 
d'être surpris. Il connaissait le sentiment de M. La- 
brouste à L'égard des nouveautés mises à l'ordre du 

i. Sainte-Barbe. Nouveau règlement pour les classes supé- 
rieures, i5 septembre 1855. In-4*», impr. de E, Duverger. 



DE SAINTE BARBE. 317 

jour soit par ses prédécesseurs, soit par lui-même. En 
effet, en 1833, le Directeur de Sainte- Barbe avait reçu 
de l'Empereur une marque de confiance, qu'il a vue 
depuis se renouveler tous les ans. Il avait été nommé 
membre du Conseil supérieur de l'Instraction publi- 
que*. Dès qu'il eut pris séance dans celte haute assem- 
blée, il osa se déclarer opposant à des conceptions 
sur la portée desquelles on se trompait ; il invoqua 
contre elles le témoignage des fait$ et l'autorité de sa 
longue expérience ; et toutes les fois que l'occasion 
s'en présenta, il renouvela ses doléances, en même 
temps que ses démonstrations; de sorte que, par sa 
persévérance, il passe, auprès de quelques-uns, pour 
avoir préparé le mouvement de retraite dont la mort 
de M. Fortoul donna le signal. 

On se rappelle ce qu'a fait M. Rouland pour réparer 
l'état de souffrance où se trouvaient déjà les études lors 
de son avènement au ministère. Parla séparation com- 
plète de l'instruction scientifique et de l'instruction 
littéraire, par la condition du baccalauréat es lettres 
rétablie à l'égard des étudiants en médecine, par les 
recommandations envoyées aux recteurs des divers 
ressorts, un commencement de bien fut obtenu. Le 
chef actuel de l'Université vient de pousser les choses 
un peu plus loin dans la même voie. La loi de Sainte- 
Barbe, c'est-à-dire l'enseignement partagé en deux, 
seulement à partir de la classe de seconde , est pré- 
sentement appliquée à tous les lycées de l'empire. La 
bifurcation paraît condamnée à une fin prochaine; 
mais, vaincue sous une forme, la doctrine de l'instruc- 

1. Décret du 5 janvier 1853. 



318 HISTOIRE 

tîon prématurément spécialisée risque fort de [repa- 
raître sous une autre. Ê^le est dans Tesprît du slède. 
Qui sait si renseignement mixte, planté, comme il va 
Fétre, sur le même sol que les études classiques, ne 
favorisera pas jJus tard sa résurrection? 



CHAPITRE XIX. 



Sainte-Barbe des Champs. — Cérémome d'inauguration. — Referme 
iSnancière dans TAMociation aiaicale. — Réconciliation «oknneLle 
avec la vieille Sainte-Barbe. — Donations et fondations. — Beau trait 
de désintéressement. — Première visite du cardinal Morlot. — Fêtes 
séculaires de 18S8 et de 1860. 



La maison de Fontenay-aux-roses, à laquelle Sainte- 
Barbe doit aujourd'hui une partie de sa célébrité, fat 
fondée en 1852. M. Labrouste, en s'instruisant de 
Thistoire ancienne du Collège, avait été frappé de 
l'entreprise du noviciat de Gentilly, tentée à la veille 
delà Révolution par les supérieurs de l'ancienne Com- 
munauté« Une semblable création lui apparut sur-le- 
champ comme le moyen le plus heureux de préparer 
le recrutenient.d'un grand établissement d'éducation^ 
Il y vit l'avantage de tenir l'enfance tout h fait à l'é- 
cart, entre des murs qui n'eussent point un air de 
prison, dans des conditions où elle contracterait tout 
doucement, sans péril pour sa gaieté et avec profit 
pour sa santé, les habitudes propres à constituer plus 
tard un peuple homogène, docile, ami du devoir. 



DE SAINTE-BARBE. 319 

Fonder une petite Saiate-Barbe en ua lieu salubre 
des faubourgs ou de 1a banlieue de Paris était donc 
depuis longtemps au nombre de ses projets, depuis 
si Jongtamps qu'il ayait p^ssé employer à cela les ter- 
rains vagues de la rue d'Ulm, avant qu'il les proposât 
pour y transporter tout le Collège*. C'était son idée 
favorite. Après 1848, les embarras toujours crois- 
sants que lui créait lexiguïté du local, l'y ramenèrent 
avec plus de force que jamais. Il chercha de nouveau. 
Ayant découvert que le château de Fontenay était en 
vente^ il pressa le Conseil d'administration du CoUége 
de seconder ses vues en décidant l'achat de cet im- 
meuble. 11 eut de la peine à persuader des hoounes 
jMiidents, presque tous engagés dans les ailaires pu- 
bliques, qui ne les voyaient pas brillantes, et qui étaient 
portés par là à mal augurer de toute entreprise particu- 
lière. L'avis de la témérité l'emporta toutefois, parce 
qu'il était au fond celui de la sagesse. Sur le rapport 
Êivorable de M. Rigault, l'un des croyants en l'avenir 
de la nouvelle fondation, le Conseil consentit ; la So- 
ciété, convoquée en assemblée générale, donna à son 
tour son approbation % et l'acquisition fut conclue 
par un acte définitif, le 12 décembre 1851 . 

Les travaux que Sainte-Barbe a fait exécuter dans 
la propriété de Fontenay cmt fourni la preuve qu'elle 
fut: primitivement une villa romaine ; car on a retiré 
du sol des débris de poterie antique et des monnaies 
du temps des Antonins. La maison de plaisance, dé- 
truite à l'époque des invasions et remplacée on ne sait 



i. Ci-dessus, p. 243. 

2. Délibération du 28 novembre i85i. 



320 HISTOIRE 

par quoi pendant les siècles de barbarie^ devint , à 
l'origine de la féodalité, l'un des repaires qu'avai^it 
disposés pour leurs déprédations les barons de Châ- 
teaufort, véritables tyrans de la campagne au sud de 
Paris. Des Chàleaufort, le manoir passa aux seigneurs 
de Marly.En 1286, l'un de ces derniers le donna par 
testament à l'abbaye de Sainte-Geneviève, avec la plus 
grande partie des terres du village. L'abbaye, depuis 
le seizième siècle, se vil forcée d'aliéner pièce par 
pièce ce magnifique domaine. Le château sortit de ses 
mains en 1640. Il fut acheté par un conseiller au 
parlement de Metz , puis passa successivement à des 
gens riches de toute condition. L'abbé Le Beuf, dans 
son Histoire du diocèse de Paris^^ nomme en dernier 
lieu M. Brochand, fournisseur de la maison du Rot 
(1754), qui pourrait bien être celui par les soins de 
qui fut reconstruit Tédifice actuel. La tradition du 
pays fait honneur de cet ouvrage auxécus de M® Bou- 
lard , notaire au Chàtelet de Paris, qui vint après les 
Brochand; mais l'acquisition de la propriété par 
Boulard date seulement de 1 778, et le style du château 
est celui de toutes les maisons de plaisance bâties en 
plein règne de Louis XV. 

Notons en passant que le nom de Boulard fit du 
bruit dans Tancienne Université. Le fils Boulard, 
condisciple des barbistes au Plessis, remporta en 1 770 
le prix d'honneur et deux autres premiers prix au 
grand concours, tergeminis distinctus honoribus. Il 
succéda à son père dans le notariat, et fut l'un des 
fameux bibliomanes de notre siècle. 

1 . Tome IX, p.. 394, 



DE SAINTE-BARBE. . 32i 

11 serait fastidieux de nommer tous les propriétaires 
depuis Boulard le père. 

En 1 823 j un instituteur, qui s est fait remarquer 
par son zèle à propager les nouvelles méthodes, 
M. Morin, établit un pensionnat dans le château de 
Fontenay. C'était l'annexe d'une autre maison floris* 
santé qu'il avait à Paris, rue Louis-le-Grand. Dans 
celle-ci les enfants étaient instruits d'après le système 
Pestalozzi; dans l'autre on donnait l'enseignement 
classique conforinément aux idées de M. Ordinaire, 
ancien recteur de l'Académie de Besançon, qui pro«- 
posait de distribuer les élèves dans les classes comme 
oii fait dans les écoles mutuelles, et d'abréger T étude 
des langues mortes par une gradation plus ration- 
nelle des exercices. Associé de M. Morin, M. Ordinaire 
finit par diriger presque entièrement la pension de 
Fontenay. 11 conquit pour elle le titre d'institution, 
à la suite de diverses épreuves dont M. de Vatimes- 
uil, ministre de l'Instruction publique, ne dédaigna 
pas d'être le juge. 

A. Tinstitution Morin succéda, en 1831, l'institution 
de Cournand. M. de Cournand, fils du littérateur de 
ce nom , était, comme on l'a déjà dit, barbiste ( et 
bon barbiste) du temps de Victor de Lanneau. Il avait 
gagné beaucoup d'argent à faire des éducations par- 
ticulières en Russie. De retour en^Francê, il crut qu'il 
parviendrait à se former une clientèle d'élèves aussi 
riches que les jeunes boyards auxquels il avait eu 
affaire à Saint-Pétersbourg. Il disposa son établisse- 
metit de manière à répondre à toutes les exigences 
de l'éducation qu'on appelle soignée dans le monde. 
Comme il voulait donner une place importante a 

TU ' 21 



322 . HISTOIRE 

l'exercice du cheval, il fit construire un vaste man^e^ H 

qui fait aujourd'hui la plus belle salle de récréation f 

qu'on puisse voir. ^ 

L'entreprise ne réussit pas. A. la place de la gentil- ! 

hommière projetée par M. de Coumand, un M. Rouzée 
ouvrit, sous des auspices tout aussi peu favorables, 
une sorte d'école professionnelle. Finalement le do^ 
maine de Fontenay redevint simple maison de cam- 
pagne. La spéculation commença à le dépecer. L'ha- 
bitation était déjà privée d'une grande partie de ses 
communs, lorsque la Société de Sainte-Barbe l'acheta. 

Avec autant d'activité qu'il avait apporté de déci- 
sion et de secret aux préliminaires du marché, M. La- 
brouste fît mettre les lieux en état par son frère , 
M. Tlîéodore Labrouste. 11 voulait pouvoir prendre 
possession au printemps de 1 852, afîu que la sérénité 
des beaux jours et la vue des fleurs égayassent les 
enfants à leur entrée dans leur nouvelle demeure. 11 
importait d'ailleurs d'exhiber les choses avec leurs 
couleurs les plus riantes, pour la consolation des fa- 
milles qui voyaient dans ce déplacement un dur exil. 
Toutes les dispositions furent achevées pour le mois 
de maL 

Une cérémonie d'installation était de rigueur. Pen- 
dant que le Directeur en méditait le programme, l'ar- 
chevêque de Paris vint donner la confirmation à 
Sainte-Barbe. C'était alors le bon et infortuné M. Sir 
bour. U entendit parler de l'événement qui se prépa- 
rait« Charmé de l'accueil qu'il avait reçu au Collège, 
il se proposa de lui-même pour être le président de 
la fête. On lui demanda son jour; il répondit qu'il 
ne pourrait avoir congé que le 12 mai* 



DE SAINTE-BARBE. 323 

Donc le matin du 12 mai, un train spécial du che- 
min de fer emporta de Paris à toute sapeur la petite 
colonie destinée à Fontenay, et les autorités de Sainte- 
fiarbe, et les membres du Conseil d'administration, 
et une nombreuse escorte de parents qu'on avait invî* 
tés. A l'arrivée, on se dirigea vers l'église du village. 
L'archevêque y était déjà rendu; il siégeait sur un 
trône, ayant à côté de lui son grand vicaire, le savant 
abbé Bautain, si bien placé dans une cérémonie du 
genre de celle qui se préparait. L'abbé Marcelli, au- 
mônier de Sainte-Barbe, monta en chaire pour expo- 
ser les avantages du nouvel établissement, pour 
remercier l'illustre pasteur de la bénédiction qu'il 
venait ajouter à cette utile entreprise, enfin pour an- 
noncer une quête de charité, qui allait marquer la 
bien-venue d'une nouvelle et nombreuse famille au 
milieu de la population de Fontenay. 

Le prélat répondit : « C'est donc pour conserver à 
ces tendres enfants la santé du cocps aussi bien que 
la fraîcheur et la pureté de l'âme que vous les retirez 
dans cette riante solitude ; c'est pour préserver de 
toute altération ces dons des cieux qui ornent l'en- 
fance ! Je ne puis que m'associer de cœur et d'inten- 
tion à cette sainte pensée. J'applaudis aussi de tout 
mon cœur, et je participerai à cette bonne action, à 
cette pieuse aumône que vous voulez placer comme 
une bénédiction aux fondements de la maison nou- 
velle. » 

Après l'office , qui fut célébré pontificalement , on 
s'achemina en procession vers le château. Ce fut 
comme la marche des Hébreux vers la terre promise , 
car la connaissance des lieux était encore le secret du 



334 HISTOIRE 

Directeur et de ses lieutenants. Bientôt se montra le 
fronton du noble édifice, décoré de riuscription 
qui annonçait sa métamorphose : Sainte-Barbe des 
Champs. On entra dans la cour d*honneur. Là eut 
lieu la cérémonie de la bénédiction. Ensuite M. L^t 
brouste prononça une allocution , qui fut suivie de la 
lecture d'une pièce de vers latins , composée pour la 
circonstance. Des évéques en ce temps-là prétendaient 
bannir de Tinstruction l'élude des auteurs profanes de 
l'antiquité. En présentant à Mgr. Sibour le vétéran de 
rhétorique*, auteur des vers qu'il allait entendre, 
M. Labrouste eut soin d'ajouter que Sainte-Barbe con^ 
servait la religion des anciens dans le culte des lettres 
grecques et latines. « Et elle fait bien , » répartit le 
prélat. 

Mgr, Sibour écouta avec une attention e&tréme. 11 
fut sensible à un hommage payé en de bons termes à 
la mémoire de son prédécesseur. Les marques de son 
approbation furent continuelles pendant la lectRrqdes 
strophes de la fin : 

Hic, quae vides parlœta rosaria, 
j£tatis hic ver innocuum puer 

Producet. Hune vobis virentem 

Invideo, puerî, recessum. 

Nos urbe carcer dum retînet niger, 
Immensa vobis arva patent, levis 

Circumdat aer, lux aperto 

Purior in spatio renidet. 

Quid ! tota vobis artificem Deum 
Natura monstràt. Riire Deus patet; 

1. Emile Renan t. 



DE SAÎNTE-BARBE. 325 

Hic rusticos versatur înter. 
Rure habitant pietas fidesque, etc. 

La récompense du poète fut d'être embrassé par le 
prélat. 

Toutes les choses d'apparat étant terminées, la porte 
qtii est au fond du vestibule fut ouverte , et l'assis 
stance fut admise à visiter le parc. Les allées étaient 
fraîchement sablées et vierges de pas humains ; des 
corbeilles de fleurs étincelaient sur l'herbe soigneuse- 
ment peignée des pelouses, et plus loin les touffes de 
lîlas, au-dessus desquels les arbres séculaires arron- 
dissaient leurs voûtes de verdure. Des exclamations 
de surprise et de ravissement sortirent de toutes les 
bouches. On commença à sentir la douceur de la 
déportation dont cette belle résidence allait être 
le lieu. 

Un déjeûner de trois cents cinquante couverts était 
dressé*dans le ci-devant manège. On s'y rendit après 
la promenade. L'archevêque s'acquitta avec grâce et 
bonhomie des fonctions de président. Il accorda la 
parole pour les toasts, il provpqifa aux chansons. La 
sonnette était posée devant lui. Il s'en servit pour 
apaiser un tumulte qui eut lieu au dessert. Les enfants 
ayant été introduits à sa (lemande, au milieu, des cris , 
de joie que suscita«leur entrée , chacun se leva pour 
aller chercher le sien. « Asseyez-vous, dit Mgr. Sibour, 
que chacun resté assis. Les petits sauront mieux trou- 
ver leurs poules. » Puis, appelant à lui ceux qui n'a- 
vaient personne à chercher , il se mit à découper pour 
eux les pâtisseries, qu'il leur distribua avec force ca- 
resses. L'illustre tragédienne Rachel était présente. 



326 HISTOIRE 

Touchée de ce spectacle, elle ne put pas retenir ses 
larmes. 

On en trouvera plus long sur cette fête dans la re- 
lation imprimée de J.-A. Lisle\ Là sont les vers latins 
récités devant Varchevéque, et les chansons de 
M. Mongis et du même Lisle , qui furent chantées 
au dessert. M. Mongis, aujourd'hui conseiller à la 
cour impériale de Paris et membre du Conseil d'ad- 
ministration du Collège y appartient à la grande géné- 
ration des chansonniers de Sainte-Barbe. Lisle a une 
autre facture; il aurait fait école en ce genre, s'il avait 
vécu plus longtemps. Ses couplets sont encore chan- 
tés à Fontenay ; ils sont devenus pour les enfants une 
sorte d'hymne patriotique. 

Le travail commença dès le lendemain, sous la di- 
rection de M. Cugny , choisi parmi les anciens bar- 
bistes avec la confiance qu'il ferait réussir le jeune 
essaim. C'était un homme connaissant bien l'enfance , 
qu'il avait pratiquée longtemps chez M. Massin. On le 
savait capable de se faire obéir et aimer. Il s'acquitta 
de sa tâche avec un dévouement dont sa fin prématu- 
rée donne la mesure. Il fût frappé d'apoplexie le 
28 mai 1 857, à la suite de ses veilles assidues auprès 
d'un élève malade, et sous le coup du chagrin que lui 
causa la mort de cet enfant. 

Son successeur fut M. Léon Bfiblliard , qui exerce 
encore aujourd'hui. M. Molliard est l'un des jeunes 
barbistes formés sous M. Labrouste. Il a passé par 
l'Ecole normale et professé la rhétorique à Moulins 

i. Inauguration du petit collège de Sainte-Ba\;be à Fontenay- 
fiux-Roses, 12 mai 1852. In-8», inapr. de E. Duverger. 



DE SAINTE-BARBE. 327 

. pendant sept ans. Il était Tun des surveillants généraux 
du lycée Louis-le-Grand lorsque son ancien directeur, 
qui ne Tavait pas perdu de vue et qui démêlait en lui 
une aptitude remarquable pour le gouvernement, lui 
proposa la place vacante à Fontenay. 

Le fonctionnaire placé à la tête de Sainte-Barbe 
des Champs relève du Directeur et du préfet des études 
de Paris. Comme c'est par ce dernier que Timpulsion 
lui est transmise , il porte le titre de sous-préfet. Les 
enfants confiés à ses soins sont distribués en un grand 
nombre de classes , de telle sorte qu'ils ne reçoivent 
pas leurs leçons plus d'une vingtaine à la fois. Un 
même professeur suit ses élèves depuis la neuvième 
jusqu'à la sixième. C'est là une sage disposition^ qui 
préserve du trouble que les changements de méthode 
jettent souvent dans les esprits novices. Le travail 
consiste principalement en exercices de grammaire. 
IVL Molliard ne trouve pas au-dessous de sa dignité 
d'enseigner lui-même à tous ces enfants l'orthographe 
d'après de certaines règles d'analogie qui ont été con- 
signées dans un petit livre adusum Sanctœ-Barbarœ*^. 
Depuis plusieurs années^ et bieii avant les nouvelles 
mesures décrétées par l'Université, l'étude élémen- 
taire et la pratique des langues vivantes ont été in- 
scrites dans les programmes de la maison. 

On vient à Fontenay par curiosité, pour voir l'infir- 
merie du Collège, ses dortoirs, sa salle de bains; on 
admire les distributions ingénieuses de ces diverses 



\ . Méthode pratique et simultanée de lecture , d'écriture et 
d'orthographe-, par MM. Molliard et Hinard. In-1 2, Paris, De- 
zobry. 



328 HISTOIRE 

parties -et le luxe qui y règne. Ces choses sont lou- 
vrage des deux habiles architectes à qui est due la 
reconstruction de la maison de Paris. Elles répondent 
au goût du jour; elles enchantent ceux qui ne jugeot 
que par les yeux ; mais ce n'est pas tant de cela que 
Sainte-Barbe des Champs se glorifie que du bon ordre 
dont elle a ëtë un modèle depuis sa fondation. Elle 
sait que, si elle mérite d'être louée, c'est parce que 
tout est réglé chez elle de manière à obtenir le déve- 
loppement promis par les Conditions de sérénité et 
de salubrité où sont placés à la fois les esprits et 
les corps ; sa récompense est dans les résultats qu'dle 
a obtenus. 

Le succès de l'entreprise a dépassé toutes les prévi- 
sions. Quatre-vingt-trois enfants furent le premier 
noyau delà colonie; leur nombre était doublé à la fin 
de 1853; aujourd'hui ils sont quatre cents. On n'avait 
pas encore l'approbation de la vogue, que celle du 
gouvernement se manifesta d'une manière d'autant 
plus flatteuse qu'elle fut indirecte. La première année 
à peine écoulée, le ministre de l'Instruction publique 
voulut doter l'État d'un établissement du même genre. 
Il transforma le château de Vanves, qui était la pro- 
priété deLouis-le-Grand, en une succursale à l'usage 
des plus jeunes élèves du lycée *. Pareille fondation a 
eu lieu depuis près les lycées de Versailles, de Douai, 
de Toulouse, de Bordeaux. Enfin, grâce à l'exemple de 
Sainte-Barbe, le temps li'est peut-être pas éloigné où la 
campagne sera jugée aussi nécessaire pour cultiver l'es- 
prit de la tendre enfance que pour faire pousser le blé. 

1. Arrêté du 28 juin 1833. 






DE SAINTE-BARBE. 3i9 

L'année 1852 fut celle des essais heureux pour 
Sainte-Barbe. Pendant que la maison recevait Tac- 
croissement dont nous venons de parler, l'Association 
amicale doublait tout d'un coup ses ressources en 
modifiant un seul article de ses statuts. 

Ce groupe si important dans l'organisme barbiste 
n'avait pas cessé de s'étendre, surtout depuis 1 830, 
sous l'impulsion intelligente des mandataires qui la 
dirigeaient. Trop de noms seraient à inscrire s'il fial- 
fait dire tous ceux qui travaillèrent pour le bien de 
l'œuvre. La rapidité du récit ne nous permet de men- 
tionner que les plus entreprenants et les plus infati- 
gables : Corcellel , Dufilho, Bonnaire ; Cadet-Gassi- 
courl, aussi ardent pour l'Association que pour la 
cause du libéralisme; de Séligny et Ludovic Roussel, 
longtemps voués aux fonctions laborieuses du secré- 
tariat; Chrislofle, que le deuil d'une population d'ou- 
vriers accompagnait, il y a quelques mois, à sa dernière 
demeure; Eugène Du verger, lui aussi l'ami des. ou- 
vriers, qui consuma sa vie à obliger ses semblables, 
avec l'ambition de rester toujours le bienfaiteur in- 
connu ; Alexandre Bixio. 

M. Bixio entra dans le gouvernement de l'Association 
amicale à la fin de 1832. Maintenu depuis lors par 
une suite non interrompue de réélections, il ne cessa 
pas d'être de la partie laborieuse du Comité, de celle 
à qui arrive la confidence de toutes les infortunes et 
qui s'occupe de les soulager. Une cessa pas non plus 
de travailler à étendre le cercle de l'assistance frater- 
nelle, en recrutant autant de souscripteurs qu'il pou- 
vait découvrir d'anciens barbistes. Il acquit prompte- 
ment l'ascendant exercé par ceux qui apportent avec 



330 HISTOIRE 

eux le mouvement d'où résulte la vie. Il fut coosidéré 
par tous comme Fàme de l'Âssociatiou. 

Jamais les demandes de secours ne furent plus fré- 
quentes ni plus pressantes qu'en i 852, après les bou- 
leversements causés dans un si grand nombre d'exis- 
tences par quatre ans de révolution. A chaque instant 
de nouvelles souffrances étaient dénoncées. Des vieil* 
lards avaient été privés brusquement d'un emploi, que 
leur âge leur interdisait de remplace^ • par un autre; 
des enfants avaient été rendus orphelins par l'exil ou 
par la mort prématurée de leur père; des camarades, 
naguère dans l'opulence, se trouvaient réduits mo- 
mentanément au dénùment le plus complet. Non-seu- 
lement on vit bientôt le fond de la caisse, mais la 
réserve des années précédentes fut entamée. Il fallut 
aviser à augmenter la source d'un revenu dont l'in- 
suffisance était manifeste. Alors M. Bixio proposa de 
fixer un taux à la souscription annuelle, qui jusque là 
avait été arbitraire. Elle fut portée à douze francs. 

La réforme eut assez de succès pour que, dès la pre- 
mière année, tous les secours distribués, le sage tréso- 
rier de l'association, M. Àgathon Prévost, pût placer 
une somme assez ronde à la Caisse d'épargne, dont 
il est l'agent général. Cela fit naître la réflexion, et 
bientôt le désir de posséder des rentes. Jusqu'alors on 
avait vécu au jour, le jour. L'incertitude des ressources 
avait souvent retenu le Comité, lorsqu'il s'était agi de 
décider un bienfait qui devait se prolonger plusieurs 
années de suite. Avoir éprouvé l'inconvénient de ce 
système était une leçon pour y renoncer. M. Bixio 
pensa que, si un certain nombre de sociétaires consen- 
taient à remplacer par un versement de 240 francs 



DE SAINTE-BARBE. 331 

une fois payés leurs versements annuels de douze 
francs, la cotisation ainsi capitalisée et inscrite en rentes 
sur le grand-livre fournirait par son seul revenu une 
source assurée de secours, tandis C|ue le capital, soi- 
gneusement réservé, deviendrait une garantie de plus 
à la perpétuité de l'œuvre. On réalisait d'ailleurs une 
économie notable, en tant qu'une partie des frais de 
perception allait se trouver supprimée. 

En 1 854 ce nouveau mode de souscription fut in- 
troduit dans les statuts, seulement comme chose facul- 
tative ; car la souscription annuelle à 1 2 francs fut 
maintenue. Ceux qui préférèrent la payer gardèrent 
le titre ancien de souscripteurs. On décida que ceux 
qui verseraient le capital de 240 francs auraient leurs 
noms inscrits à perpétuité sur les annuaires de l'Asso- 
ciation, avec le titre àe fondateurs . Fondateur se disait 
autrefois de l'auteur d'un bienfait conféré à un établis- 
sement de main-morte, lorsque ce bienfait était des- 
tiné à rendre des fruits perpétuels. C'est dans cette 
acception, autorisée par l'histoire du Collège, que le 
mot fut rétabli. Les parents et amis des barbistes dé- 
funts, la mort de ceux-ci remontàt-elle au commen- 
cement du siècle, furent admis à faire porter leurs 
noms sur la liste des fondateurs, en s'acquittant pour 
eux 'de la condition prescrite. Enfin on ouvrit une 
liste de donateurs pk)ur ceux qui, de leur vivant ou 
par disposition testamentaire, voudraient ajouter aux 
versements prescrits par les statuts*. 

Le nombre des fondateurs, qui fut tout d'abord de 
deux cent quarante, s'est augmenté d'année en année^ 
sans presque nuire à celui des souscripteurs. Vingt- 
cinq vaillants officiers avaient joyeusement réglé leurs 



332 HISTOIRE 

comptes avec t* Association amicale avant de partir 
pour le siège de Sëbastopfol. Cinq d'entre eux, qui 
ne sont pas revenus, ont ouvert la liste des fondateurs 
défunts \ Celle des fondations commëmoratîves a fait 
aussi de rapides progrès, par la piété des fils, des neveux 
des camarades ou des veuves. Les donations sont 
arrivées également, mais non pas toutes par le chemin 
découvert que leur a tracé lé nouveau statut. Certaines 
âmes ne comprennent pas d'autre bienfaisance que 
celle qui se cache. De là des offrandes anonymes. 
En 1 855, le trésorier reçut une somme de 5780 francs, 
avec cette simple suscription : « Part de l'Association 
barbiste dans une bonne affaire. » 

Souscriptions, fondations, donations, telles sont les 
sources du revenu dont dispose depuis dix ans TAs- 
sociation amicale. Elle est assez riche pour distribuer 
tous les ans de douze à quinze mille francs de secours. 
Son comité directeur, rajeuni par de nouvelles recrues, 
veille avec un soin jaloux à ce que l'œuvre, à la faveur 
de l'extension qu'elle prend sans cesse, ne dévie pas 
de ses errements primitifs. Deux jeunes hommes en- 
tendus autant que dévoués, MM. Eugène Besson, pro- 
fesseur à Sainte-Barbe, et Antonin Bellaigue, avocat à 
la Cour de cassation, sont les examinateurs scrupu- 
leux des titres qui doivent motiver les secours. Toutes 
les demandes ^ont l'objet d'enquêtes sérieuses; les 
bienfaits de l'Association sont le résultat de véritables 
jugements. On a déjà dit qu'ils doivent rester le secret 
de ceux qui les dispensent : la loi le veut ainsi, et l'on 

1 . Larrouy d*Orion, lieutenant-colonel au 97* ; Blanquart de 
Baiileulj capitaine au 86*; Leblanc, lieutenant au 80*; Charles de 
Bonnafos, lieutenant au 74*; Chéi est, aspirant de marine. 



DE SAINTE-BARBE. 333 

n'y a jamais manqué, quoique bien souvent on aurait 
voulu pouvoir publier les efforts de constance et de 
vertu au prix desquels des personnes obligées, consi- 
dérant comme un prêt le don ^qu elles avaient reçu, 
sont parvenues plus tard à le restituer. 

Il ne faut pas omettre de dire qu'en même temps 
que l'Association centupla ses forces par les moyens 
qu'on vient d'indiquer, elle ouvrit son sein à la ci- 
devant Communauté. Cet appel, sollicité par le direc- 
teur de Saint-Barbe, qui est en même temps vice- 
président à vie du comité de bienfaisance, fut une 
démonstration pour établir que la vieille Sainte-Barbe 
et la nouvelle s'étaient définitivement réconciliées. 
M, Labrouste avait vu venir à lui à diverses reprises 
des barbistes d'avant la Révolution, qui lui avaient 
confié avec joie l'éducation de leurs petits-fils. ,Les 
mêmes noms, qui avaient fait la gloire de la maison 
sous l'abbé Baduel, retentissaient de nouveau dans les 
concours; enfin les ombrages étaient si complètement 
effacés que les pKits-neveux de Nicolas-Éloi Lemaire 
lui-même portaient l'uniforme barbiste. Mais les 
vieilles connaissances qu'on avait renouées les années 
précédentes étaient rompues journellement par la 
mort. Il n'en restait plus qu'une en 1853. C'est alors 
que fut suggérée l'idée de consacrer l'union des deux 
époques, en s'agrégeant ce vénérable débris de l'an- 
cien monde. 

M. Vial de Machurin, l'antique barbiste dont il s'agit, 
accepta de la meilleure grâce la camaraderie qui lui 
fut offerte. 11 présida le banquet du 4 décembre, et y 
apporta sa chanson. C'est un aimable vieillard, un 
vrai fils du dix-huitième siècle, et de ceux qui n'ont 



334 HISTOIRE 

pas renié leur père. Ayant tâté des verges de Tâbbé 
INicoUe, il eut soin de rassurer la compagnie sur ses 
senliments à l'endroit de l'ancien régime, et il décla);a 
qu'on ne trouverait pas en lui le laudator iemporis 
acti. Il vit encore. Avec ses quatre-vingt-onze ans il 
distancerait à plus d'un égard bien des hommes qui 
n*én ont pas soixante. 

Les donations et fondations dont on vient de parler 
s'appliquent uniquement aux besoins de la société de 
secours mutuels. Il ne faut pas les confondre avec 
d'autres donations et fondations qui sont faites en 
faveur du Collège. L'usage de ces dernières ne fait, 
pour ainsi dire, que de commencer. En 1853, M. Gar- 
nier, professeur émérite, traducteur d'Hérodien, mou- 
rut à Mortain^ léguant à Sainte-Barbe une somme de 
120jp0 francs. La maison s'est trouvée de même in- 
scrite pour une part de 20 000 francs sur le testament 
d'Eugène Scribe. Lorsque le bon sens public commen- 
çait à discerner le désastreux effet du morcellement 
des études, M. Armand Donon, banquier, l'un des 
membres du Conseil d'administration du Collège, fit 
une fondation magnifique en vue de réveiller dans la 
jeunesse le goût des humanités. Il plaça une sommé 
de 60 000 francs, dont la rente est proposée à pei> 
pétuité. comme récompense à l'élève de Sainte-Barbe 
qui aura remporté au concours général le prix d'hon- 
neur de rhétorique*. Le Conseil barbiste reste libre 
d'allouer au lauréat tout ou partie des arrérages ac- 
cumulés. 

Un financier, venant avec autant de modestie que 

i. Acte du 16 mars d858. 



DE SAINTE-BARBE. 335 

de munificence au secours des études classiques dé- 
faillantes/ voilà une action qui mérite d'être enregis- 
trée. Donnons-lui pour pendant un trait de générosité 
auquel un élève de l'École préparatoire fut porté vers 
ce temps-là par la noblesse de ses sentiments. 

Cet élève, M. Aimé Godart, obtint en 1857 le prix 
d'honneur des sciences. Invité au diner d'apparat où 
le ministre de l'Instruction publique a coutume de 
réunir les principaux lauréats, le. soir de la distribu- 
tion du grand concours , il fut placé à la droite du 
ministre lui-même. Par son bon esprit, par son assu* 
rance modeste^ il plut à M. Roulaod, qui lui fit toutes 
sortes de caresses, et lui promit de lui accorder la 
première faveur qu'il demanderait. 

Cette parole ne fut pas perdue pour M. Godart. Le 
lendemain même, il écrivit au ministre pour lui dire 
que les succès au sujet desquels il avait reçu de lui 
des marques si flatteuses de satisfaction, il les devait 
à M. Bianchet, directem: des études scientifiques à 
Sainte-fearbe , et que ce qu'il avait à lui demander, 
c'était que la croix d'honneur fût accordée à ce savant. 

I^ réponse ne se fît pas attendre. Nous en repro- 
duirons textuellement la teneur : 

«c Vous avez eu raison , Monsieur, de compter sur 
ma promesse, et je vous félicite de votre bonne inspi* 
ration. Vous avez songé avant tout au directeur de vos 
études, à celui qui, par ses soins, a préparé vos suc- 
cès. Vous vous êtes honoré par ce sentiment si louable 
de reconnaissance ; et comme M. filanchet est un 
excellent professeur, et un homme des plus estima- 
bles, je n'ai pas hésité, sur votre demande, à le propo- 
ser pour la décoration. L'Empereur, touché de votre 



336 HISTOIRE 

démarche et appréciant les bons services de M. Blan- 
chet, vient.de le nommer chevalier de. la iégion 
d'honneur. Allez, Monsieur f embrasser votre direc- 
teur, et portez-lui celte bonne nouvelle, que je suis 
heureux de vous donner, n 

Cette lettre arriva le soir, et un soir que M. Blan- 
chet couchait à Sainte-Barbe des Champs. M.Godart, 
qui avait gardé le secret de sa démarche, ne se sentit 
pas de force à garder en lui pendant douze heures le 
secret de la réussite. 11 court à Fontenay ; il a toute 
la peine du monde à se faire ouvrir par le por- 
tier, qui dormait d'un profond Sommeil; il met la 
maison en alerte , et lorsqu'il aperçoit son maître, 
qui s'est levé des premiers, il se jette dans ses bras, 
et lui donne à lire, sans pouvoir prononcer une pa- 
role, la bienheureuse lettre qu'il tenait à la main. 
Cette anecdote a transpiré dans le public. Elle a 
donné à quelqu'un l'occasion de dire que le jeune 
lauréat avait honoré le prix d'honneur. 

Ajoutons que la reconnaissance et le désintéresse- 
ment, par lesquels M. Godart s'est signalé à son premier 
pas dans la carrière, sont devenus dès à présent la 
règle constante de sa vie. Admis à l'École des ponts 
et chaussées, lorsqu'il n'avait qu'à choisir entre les 
occupations qui conduisent promptement à la renom- 
mée et à la fortune, il a préféré revenir à Sainte-Barbe. 
Il s'est attaché par un lien indissoluble à M. Blanchet, 
qu'il seconde dans l'enseignement de l'École prépa- 
ratoire. 

La même année 1857 vit l'accession du cardinal 
Morlot au siège métropolitain de Paris. Étant arche- 
vêque de Tours, le prélat s'était pris d'amitié pour le 



DE SAINTE-BARBE. 337 

directeur de Sainte-Barbe, avec qui îl se rencontrait 
au Conseil supérieur de l'Instruction publique. Notre 
Collège fut l'un des premiers établissements particu- 
liers qu*il honora de sa visite. Il s'y rendit le 2 mai, 
pour la cérémonie de la première communion. Il 
officia en personne, et administra de ses mains le 
sacrement, qui fut immédiatement suivi de la confir- 
mation. 

L'archevêque fut assisté ce jour-là de M. l'abbé 
Darboy, l'un de ses vicaires généraux, aujourd'hui 
♦ son successeur, et non moins bienveillant pour la 
maison. M. Darboy était chargé de l'inspection de 
l'enseignement religieux dans les lycées et collèges. A 
ce litre, Sainte-Barbe lui doit une précieuse acquisi- 
tion : celle de son premier aumônier actuel, M. Va- 
zillier. C'est un homme d'expérience et de talent, qui 
fut aumônier du lycée d'Alger; après l'avoir été de 
l'un de nos régiments d'Afrique. Il donna l'absolution 
[ aux niourants sur le champ de bataille d'Isly. Il sait 

I parler à la jeunesse le langage qui lui convient, et la 

! toucher par des comparaisons tirées du spectacle de 

. tant de choses qu'il a vues. Il s'acquitte des soins de 

I son ministère avec le concours de deux autres ecclé- 

\ siasliques, dont l'un est spécialement attaché à la 

r maison de Fontenay. A Paris, les instructions du 

f carême sont faites par des prédicateurs du dehors. Des 

I personnes de distinction ont sollicité la faveur de 

f venir entendre, dans la chapelle du collège, MM. Frep- 

! pel et Perreyve, de la Faculté de théologie, par qui 

furent prêches les derniers carêmes. Autant qu'elle le 
peut, Sainte-Barbe se fait un devoir de mettre en 
présence de la jeunesse les orateurs de la chaire dont 
m 22 



[ 



I 



338 HISTOIRE 

le mérite est attesté parla voix publique. C'est d'après 
le même principe qu'elle choisit les rabbins et les pas- 
teurs, chargés de donner l'enseignement religieux à 
ceux de ses élèves qui appartiennent au culte Israé- 
lite ou à l'Église réformée. 

L'année 1858 compléta le siècle qui avait vu naître 
le restaurateur de Sainte-Barbe ; car c'est en 1 758, le 
24 décembre, que Victor de Lanneau vint au monde. 
M. Labrouste suggéra à l'administration du Collège de 
célébrer cet anniversaire par une fête, où furent invi- 
tés à la fois les nombreux descendants et les derniers 
amis de celui qui en était le héros. 

En 1860, eut lieu une autre fête séculaire. Sainte- 
Barbe, éclairée sur ses véritables origines, se résigna 
au sacrifice de trente ans d'antiquité, que l'histoire 
retranchait de la date assignée par la légende. Accep- 
tant 1460 pour l'année de sa première fondation, elle 
voulut constater par un acte commémoratif que son 
quatrième siècle révolu la trouvait plus vivante et plus 
brillante que jamais. L'affectueuse bienveillance, dont 
le Directeur était l'objet de la part du ministre de 
l'Instruction publique, permit de donner à celte céré- 
monie un éclat tout particulier. 

M. Rouland avait exprimé plusieurs fois le désir de 
rendre une visite à la maison. On le pria d'y venir le 
14 décembre 1860. La façade sur la place du Pan- 
théon était illuminée et tous les passages garnis de 
tentures, d'arbustes et de fleurs. Un splendide festin 
fut servi dans le parloir, transformé ep triclinium. Le 
ministre y prit placé avec le Conseil des anciens bar- 
bistes et 1 etat-major du Collège. La étaient encore 
plusieurs des illustrations de Sainte-Barbe, entre autres 



DE SAINTE-BARBE. 339 

M. Artaud, vice-recteur de rAcadétnîe, M* Bouillet, 
inspecteur, le baron Lacrosse, sénateur, M. Devinck, 
le général Trochu; puis !e proviseur de Louîs-le- 
Grand, et enfin les membres du Conseil des chefs 
d'institution du département, invités par M, Labrouste, 
leur président, afin qulls partageassent avec lui Thon- 
neur d'une soirée dans laquelle renseignement de 
rÉtat se faisait l'hôte de l'enseignement libre. Ces der- 
nières paroles sont de M. Labrouste lui-même : il en 
fit le texte d'un petit discours qu'il prononça lorsque . 
le moment des toasts fut venu, discours dans lequel 
il n'oublia pas d'évoquer les souvenirs au culte des- 
quels le ministre d'un grand empire n'avait pas dé- 
daigné de s'associer. 

M. Rouland répondit : « Il y a un proverbe latin 
qui dit, pectus disertos facit. Je ressens cette éloquence, 
et pour le prouver, avant que j'ajoute un mot de plus, 
mon cher directeur, embrassons-nous. » 

Les applaudissements, on le pense bien, éclatèrent, 
sans attendre le reste de Tallocution , qui fut sur le 
même ton de chaleureuse cordialité. Ce fut une ho- 
norable récompense, et délicatement donnée. Le mi- 
nistre y ajouta encore, en proposant notre Directeur 
pour le grade d'officier de la Légion d'honneur, qui 
lui fut conféré le 1 5 août suivant. 

Depuis la fêle séculaire de 1860, M. Labrouste a 
répété plus d'une fois : «c Sainte-Barbe a reçu l'acco- 
lade d'un ministre. Redoublons d'efforts pour la 
mettre en état de recevoir la pareille du pouvoir qui 
existera dans quatre cents ans. » 

Ici sera le terme d'un récit qui s'est étendu au delà 



340 HISTOIRE DE SAINTE-BARBE. 

de nos prévisions. Nous espérons que sa longueur 
nous sera pardonnée à cause du grand intervalle de 
temps qu'il embrasse. Nous avons évité les dévelop- 
pements plutôt que nous ne les avons cherchés. Notre 
règle a été de n'admettre que les traits utiles pour 
l'histoire de l'enseignement , sans oublier rien de ce 
qui pourrait profiter plus tard aux continuateurs ou 
aux émules d'une généreuse entreprise. Sainte-Barbe, 
sous la forme à. laquelle les circonstances l'ont ame- 
née, n'est plus seulement un produit exceptionnel de 
l'amitié de collège; elle est devenue un essai réussi 
de la manière dont le droit des pères de famille peut 
être exercé en matière d'instruction publique. Elle est 
le modèle d'un genre d'association tout nouveau , 
honorable s'il en fut, digne d'être imité par les ci- 
toyens qui veulent franchement seconder l'État dans 
la tâche laborieuse d'élever et d'instruire la jeunesse. 
Une semblable création n'est pas destinée à périr. 
Déjà nous la voyons passer des mains de ceux qui 
l'ont formée dans les mains de leurs fils, et ceux-ci la 
légueront à leurs descendants. C'est surtout pour les 
barbistes des générations futures que nous avons écrit 
ce livre, afin qu'il leur 'montre les titres dont ils au- 
ront à conserver le dépôt, afin qu'ils y lisent le 
devoir auquel ils seront tenus envers la mémoire de 
leurs pères. 



FIN. 




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APPENDICE 

AUX DEUXIÈME ET TROISIËHE VOLUMES. 



ACTE DE LA FONDATION DE EOBEET DUGAST. 

19 hovemhrc 1563. 
Jesas Maria, 

A tous ceulx qui ces présentes lectres verront, Anthoine Du- 
prat, chevalier, baron de Thiert et de Vileaulx, seigneur de Nan- 
toillet et de Precy, conseillier du roy nostre siré, gentilhomme 
ordinaire de sa chambre et garde de la prevosté de Paris, salut. 
Savoir faisons que, pardevant Françoys Crozon et Pasquier Vallée, 
notaires du roy, nostre dict seigneur, au Ghastellet de Paris, fut 
présent et comparut personnellement noble et scientificque per- 
sonne, maistre Robert Dugast, docteur régent en -la Faculté de 
décret en l'Université de Paris, désirant et toullant convertir, 
muer et emploier son peu de bien temporel et transitoire, qu'il a 
pieu à Dieu luy donner au monde, en chose stable et permanente 
à la gloire et loûenge du souverain qui le luy a donné et au prouf- 
fict et utillité publicque; aiant aussy, long temps a, dévotion et 
certaine délibération à instituer, fonder, doter et arrester à per- 
pétuité ung collège de sept boursiers en sa maison de Saincte- 
Barbe, scituée en la dicte Université de Paris, telle que cy après 
sera speciffié, qu'il a tousjours applicquée à usage de collège, affin 
de vacquer par lesdicts boursiers à prier Dieu pour luy, ses bien- 
faicteurs, et à l'estude : Pour ces causes et aultres plusieurs bonnes 
et saintes à ce le mouvant, du conseil et advis de ses bons amys 



342 APPENDICE. 

eontinnant son ferme propos, intencion et sainct vouloir, a or^ 
donné, institaé, fondé, doté et arresté, comme encores ordonne, 
institue, fonde, dote etarreste le dit collège, en la manière qui 
s'ensuit : 

En premier lieu, veult et ordonne le dict seigneur fondateur 
que en sa dicte maison, de présent appellée le Collège de Saincte- 
Barbe, scituée et assize an Bfont Sainct^HiDûre en lUniversité de 
Paris, soient et demeurent perpétuellement instituez et fondez sept 
personnes on boursiers, estans des lieulx et qualités cy après ré- 
citez, pour j résider continuellement et vacquer aux prières, suf- 
frages, estudes et charges à eulx respectivement ordonnez en ceste 
fondation : 

C'est asçavoir ung principal, comme maistre et administrateur 
et conducteur du dict collège, ung procureur et ung chappellain, 
que ledict fondateur veult et entend estre maistres en la Faculté 
des arts et promeuz en Testât sacerdotal et ordre de prestrise, 
pour dire les messes et senrice institué an dict collège; ou, s'ils 
ne le sont, seront tenuz eulx y faire promouvoir dedans ung an 
précisément après leur institucîon à Testât onquel ils auront esté 
instituez, sans pouvoir sur ce impetrer aucune dispence. Et à 
jùuike de ladiele provotioDy l'an passé, seront ipso facto dedafter 
pxive» du dict estai et bosrsc, pour y instituer \mg aullre en leur 
]iei&, des qaaKtez dessus dictes. 

Et oultre, quatre petiz enffansy qui seront bonraîevs, Batifs et 
piinz^ FuK et premier de la NeiifviUed'AiiliiiOBit,parrQisse Sainct^ 
NiooJas^ diocèse de Beanvais , le second^ de la parrcnsse Sainct-* 
Nicolas de» AUevz-le-Roy, près Poissi^ et le» deux aultres de )» 
parasse Saioct-Hilaire au Mont de Paris, et ions de Faage de dix 
ans wok environ, et nez en loial mariage, pour demourer an diet 
ciiUege et y vacqner à l'estude et acqaem degré de maîstnse è» 
axs aiidiei collège,, dedans dix an» après^ leur insiKtacion» Et ledit 
tenpft de db: ans passé , demouceront les dictes bourses vaccantes 
de. ûicl^ ooBune estans declaréirs decenuaUes par le dict fcnidateur*. 

Bntend tontcfibys et veidt les dicte petîtz boursiers estre advor^ 
tia pfti lediet maistre principal d'ieeUe privation d'après dix ans,, 
ponr le«i dioiiQts coesur et occaskoad'cstBdier et employer le temps 
durant ieeulx dix ans, et au demonraiit iastraicts et endoctrines 
è» ara liberavlx» jusqses à ce qu'ils soient capaUes d'estre maistres 
es a«s : a(llq^tl d^gré seront tcniKi eulx faice' promouvoir dedans 1« 



APPENDICE. a» 

di^t temps ; après lecpiel degré par eulz obtenu, seront préférez 
aux régences du dict collège, s'ils en sont cappables et idojDes. 

£t néant moins, où les dictz petits boursiers, ou aucuns d*eiilx, 
se troaveroient estre negligens ou d'un dur esperit pour estre em» 
ploiez à Testude et vaoquer aux lettres, ou de difficille nature ou 
rebelles à discipline et correction ou rcfractaires, et ne peussent 
estre reduictz à discipline scholasticque : en ces cas, à la rellatioii 
des dictz maistre principal, procureur et chappellain, sans aultre 
information, seront mb bors du dict collège, privez de leurs bour^ 
ses,, et autres des lieulx dessus dicts respectivement mis et insti* 
tuez en leurs places par les Refoitnateurs du dict collège. 

Sans le consentement desquels, néantmoins, ne pourra aucun 
des dicta maistre, procureur, cbappellain ou boursiers, cedder ou 
resigner leurs dicta estats on bourses, parce que le dict fondateur 
a déclaré et dedare, venlt et entend la présente fondation et do- 
tation estre pure, laïcalle, et telle tenue et réputée pour y estre 
poorveu, ainsi que cy après est ordonné, et non auUrement, sur 
peine de nullité de leur institution. 

Pareillement aussi, se les dicta maistre, principal, procureur 
ou chappellain ne se gouversoient en teDe décence, honnesteté et 
conversation que à gens et personnes eedesiasticques appartient^ 
et pour estre exemplaire aux boursiers et jeunes escolfiers, on 
que les dictz procureur ou chappellain voulsissent estre séditieux et 
detractassent d'obéyr au dict maistre principal en honneur et révé- 
rence comme supérieur au dict cc^ége, ou allassent divaguer p»r 
la ville ou sujrvre les tavernes, lieux dissohits, jeux proh^Kz ou 
brigues, ou aussi que le dict maistre principal en son endroict ne 
se conduisoit en telle modestye et gratienseté envers enfai et les 
dictz boursiers, et feust tempestatif et impétueux, ou de mauvaise 
vye et conversation ou pemitieux*exei»p]e au dict collège : en ces 
cas et aultres semblaUes, venlt^ ordonne et entend k dict fonda- 
teur estre contre eulx et chacim d'iceulx cnlpables proceddé par 
les dicts Réformateurs, sur la plaincte qui en sera faicte, à telle 
punition qu'ilz verront estre à faire, de stnte que punition s*en 
ensuive jusques à pHvalionr effeetuelle de leurs estala et bourses ou 
aultrement, ainsi que le cas le méritera, nonobstant la perpétua*» 
tî«» de leurs estata dessus ordonnes. 

Yeolt aussi et ordonne que à chacun d'ieeidx maistre principal, 
procureur et cbapeQain, euk bien et fammestement vivans et 



344 APPENDICE/ 

conversans en leurs estatz et charges, soit paie et haillé chaeun 
an par le dîct procureur sur les biens, rentes et heritaiges après 
déclarez, la somme de cinquante livres tournois ; et à chacun deis 
dictz petitz boursiers la somme de vingt-cinq livres toumoys^ 
pour leur vivre, alimentation et entretenement, le tout aux charges 
à chacun d'eulx respectivement ordonnées et enjoinctes par ceste 
fondation* 

Oultre ce aura et prandra le dict principal au dict collège -trois 
chambres contiguës Tune à Tautre, de telle commodité qu'il 
voudra ellire, les deux pour luy et l'autre pour les dictz quatre 
petitz boursiers, qui seront et demoureront soubz sa charge et 
conduicte. Aussi sera tenu les instituer aux lettres et érudir et 
gouverner en bonnes meurs et toute discipline scholasticque, sans 
aucunement leur permettre parler autrement que latin ne discon* 
tinuer leur estude, et encore de les nourrir en salle en commun 
aux despens de leurs bourses dessus ordonnées. 

Auront aussi les dictz procureur et chappellain et prandront au 
dict collège chacun une chambre commode à leur habitation et 
estât, qui leur sera baillée par ledict maistre principal à la charge 
de résider par eulx aux dictes chambres, et sans qu'ils les puis- 
sent bailler à aultre à louage ni nourrir ou entretenir aucuns enfr 
fans en icelles en leurs charges, si ce n'estoit de l'exprès consen- 
tement du dict principal. 

Entend aussi et veult le dict fondateur que ledict maistre princi- 
pal ne se puisse distraire de l'instruction des meurs et lectres aux 
entrants du dict collège ; ains qu'il verse et vacque continuelle- 
ment, et entretienne les regens nécessaires pour l'exercice de 
l'érudition et discipline scholasticque, faisant les pensions accou- 
tumées es collèges de l'Université de Paris. 

Et à icelle fin le dict fondateur a voulu et ordonné, veult et or- 
donne, que le dict maistre principal, oultre les chambres dessus 
dictes, ait et tienne tout le reste de la maison et collège Saincte- 
Barbe cy après ceddée à la communaulté des dictz boursiers, dont 
sera tenu faire et payer par chacun an à icelle communaulté la 
somme de deux cens livres tournois, payables aux quatre termes 
de l'an accoustumez es mains du dict procureur, qui sera tenu 
incontinant les mettre et déposer au coffre commun cy après desi- 
gné. Et encores icelluy principal entretiendra le dict collège des 
menues réparations accoustumées et selon les us et coustumues de 



APPENDICE. 345 

la yïlte de Paris ; et où ledict maistre principal seroit deffaillant à 
payer et satisfaire du louage d4celle maison et collège qu'il tien- 
dra, seront ses deniers à luy seulz pour sa bourse retenuz et arres- 
tez jusques à ce que satisface de ce qu'il debvra au dict collège, et 
autrement procedder contre luy, ainsi que sera myeulx advisé par 
les dictz Reformateurs cy après nommez. 

Ordonne touteffoys le dict fondateur que, où les dictz procureur 
et ebappellain et chacun d'eulx auroient ou yiendroient à avoir la 
tomme de six vingtz livres tournois chacun an de revenu en tem- 
porel ou bénéfices, eo ipso y leurs estats et bourses soient vaccant 
et conferables à aultres par ceulx qui auront la puissance, cy après 
nommez et déclarez. 

Gomme aussi a déclaré et déclare iceulx estatz et bourses de 
procureur et chappcUain ne pouvoir estre conférez à aucun aiant 
deaablable revenu de six vingtz livres tournois cliacua an en béné- 
fice ou temporel, de sorte que s'il avoit collation ou institution 
des dictes procuracion ou chappellenie, elle soit de faict nulle, et 
le dict estât et bourses impetrables comme vaccants. 

Déclare semblablement icelluy fondateur et entend les dictz per 
tttz boursiers estre prins et elleuz es paroisses dessus dictes, cha- 
cun en son regard, des plus pauvres d'icelles, selon la relation des 
curez, vicaires et gagières ou fabriciens des églises des dictes pa- 
roisses, si touteffois les dicts enfants sont aptes et ydoines à l'e^- 
tude et lettres ; et sHls ne Festoient, est permis 4'en prandre des 
aultres de la dicte paroisse, qui ne soient si pauvres. 

Seront encore les dictz maistre principal, procureur et ebap- 
pellain, et chacun d'eulx en son regard, tenuz^t astrainctz de ser- 
vir en la chapelle du dict collège et dire et cellebrer, en présence 
des dictz petitz boursiers et des aultres escolliers qui seront pour 
le temps au dict collège et par chacune sepmaine de l'an, les mes- 
ses que le dict fondateur veult et ordonne estre dictes : c'est assa- 
voir le dict maistre principal au jour de dimanche, au jour et feste» 
et au jour du mercredi de la ferie; le procureur au lundi des tré- 
passez et au jeudi de la ferie ou dû Sainct-Sacrement ; et le ebap- 
pellain au mardy de la ferie, au vendredi de la Croix et au samedi, 
de Nostre-Dame avec commémoration de saincte Barbe. 

Entend néantmoins le dict fondateur estre réservé au dict prin- 
cipal que aux festes solennelles pourra, si bon luy semble, dire, 
chanter et cellebrer les dictes messes pour la solennité du jour, et 



346 APPENDICE. 

encores toutes et quantes foys qu'il luy plaira, et en deeharger les 
dicts procureur ou chapellttn^ sans pour ce avoir ne demander 
aucun proufEct ou sallaire aultre que ce que cj dessus luy est 
ordonné» 

Toutes lesquelles messes et services seront iceulx maistre prin» 
cipaly procureur ou chappellain tenus et astrainctz dire et conti- 
Duer respectivement, selon qu'elles sont cy dessus assignées et dé- 
clarées, sur peine de privation du fruict et pnmffict de leurs bourses 
d'une semaine entière, pour chacune £aulte qui par eulx y sera 
faicte; lequel proufict à ceste fin seraarresté et converty au pronf^ 
fict commun du collège, si d'aventure n'estoient indisposez par 
malladie : auquel cas sera dicte la messe aux despcsis du <tict col- 
lège, durant icelle malladye, sans diminution de la bourse du dict 
mallade. 

Ordonne aussi, veuh et entend le dict iondatevur que, vaccation 
advenant des dictes maistrise ou principaulté , procui'ati<Hi et 
cbappellenye par mort, dimission, privation ou aultrement en 
quelque manière que ce soict, que les trois Reformateurs du dict 
coUege cy après nommer ellisent une personne idoine^ cappablo et 
suffisant pour le dict estai et bourse vaccant, et qu'il soit natif de 
l'un des diocèses, c'est assavoir d'Évreulx, Rouen, Pans ou Att<^ 
tun, qualifié comme dessus est speciifié, et pareiUement nez en 
loial mariage, comme les dicta boursiers, et nom à aultre ; et que 
par eubc soit présenté à la Court de pariement pour estre par ^le 
à leur présentation institué, et, ce faict, receu on dict collège. 

Entend aussi et veult que à ceste fin les dictz maistre principal, 
procureur ou chappellain, et chacun d'eulx et leurs successeurs, 
soient tenus advertir les dicta Reformateurs d'icelle vaccation soit 
par mort, cession, dimission ou aultrement, sitost qu'elle sera 
venue k leurs congnoîssances, et le leur dénoncer pour le moins '■ 
dedans trois jours après, pour par eulx y estre ponrveu; et pour 
ce faire se transporteront dedans ung mob prochain ensuivant les 
dictes dénonciation et advertissement au dict collège pour y pomv 
veoir et faire la présentation nécessaire pour l'institution aux es^ 
tats vaccaoïts, et, ce faict, le présenter à la dicte Coart*. 

Et où les dicts trois Réformateurs seroient negligens on dekyans 
de eulx assend)ler dedans le dict mois prefix, qui est de trente 
jours, pour faire la dicte présentation, et ne la feroientle dictmoys 
passé, pourra la dicte CÔort, se luyplaist, à la reqoeste des boiir» 



APPENDICE. a47 

siersy îostiiuer au dict estai lors Taceaût une personne qoaliffiée 
comme dessus, sans attendre la nominatîon oo présentation des 
dictz ReformateorSy attendu leur dicte negligenee oa absence. 

Déclare touteffois et entend icejluy fondateur que, en l'absence 
de Ton des dicts trois Réformateurs, les denx prcsens puissent pro- 
cedder à faire la dicte présentation ; mais s'il y en a deux abdens, 
celuy qui se trouvera présent pourra présenter reqoeste à la diète 
Cour pour substituer ung de messieurs d'icelle Court au lien du 
cpnseillier absent pour faire la dicte presentatioD pour ceste fois 
seoJyiAment. Aussi, en Tabscnce du docteur en décret, le plus an* 
cien des docteurs regens après luy sera prins pour la dicte pré- 
sentation; et semblablement en l'absence du cfaancdiier, sera prins 
l'oificjal de Paris, sans touteffoys tirer à conséquence pour le gé- 
néral de la dicte fondation es aultres vaccations à Vadyenir. 

Veult aussi et déclare que^ si c'estoit la maistriseet prittcîpauhé 
qui feust vaccant, en ce cas, que l'un des procureur ou cbappel- 
lain, s'ilz se trouvent cappableset suffisants par les dicts Réforma- 
teurs à exercer le dict estât pour l'instruction et érudition des en- 
fants et administration du dict collège, soient préférez aux aultres ; 
et en cas de ^ ceste pr(»notion, en leur lieu et estât en soit ung 
aultre pourveu, des qnallitez dessus dictes. 

Et en exécutant quand à ce sa dicte présente fondation, vouloir 
et intencion, le dict sieur Dugast, foudateury a n<nnmé et elleu, 
nooune et ellist dès à présent au dict collège pour premier maistre 
principal d'icelle, vénérable et discrette personne maistre Robert 
Certain, prebstre du diocèse de Rouen, naguères procureur du 
dict collège et à présent curé de Sainct-Hilaire; pour procureur, 
comme seconde personne, Alain Mousset, clerc du diocèise de 
Séès, pour teste foys seullement, et sans tirer à conséquence pour 
l'advenir ; et pour ebappellaia, Nicolas le Prince, dere du diocèse 
d'Évreux. £t pour les quatre petitz boursiers a nommé et elleu 
Jehaa ott Robert Mraidet, lequel des deux kiy plaira, de la par- 
roîsse Saind-Hikire,. et Robert Trippier, son filleul, combien 
qu'il ne soit d'icelle parroisse, mais pour ceste fois et sans qu'il smt 
aussi tiré à conséquence pour l'advenir; et pour les deux aultres 
des parrttsaes de JNeufville et les Alleux, les nommera cy après le 
dict fondateur on ledict Certain. 

El après la destitutico, dimissicin ou aultre vaocatioii des dictes 
bourses, seront prins aultres enffans des aages, qualités, lieux et 



348 APPENDICE. 

parroisses dessus dictes et ainsi <[Q'il est cy dessus ordonné, qui se- 
ront instituez en la forme et manière cy après déclarée. 

Ordonne dayantage et veult icelluy fondateur estre dit et celle- 
bré par chacun an en l'église du dict Saint-Hilaire perpétuelle- 
ment quatre obiitz anniversaires solennels de vespres, vigilles, 
recommandaces, et trois haultes messes, èsquelz assisteront et se*- 
ront tenus assister les dictz maistre principal, procureur, chap* 
pellain et boursiers : le premier, le vingtiesme jour de mars, pour 
l'âme de defunct maistre Simon Dugast, en son vivant principal du 
•collège de Coqueret, oncle paternel et bienfaicteur du dict fonda-^ 
teur; le deuxiesme, au troisiesme jour de septembre, pour feu 
Jehan Dugast, père du dict fondateur ; le troisiesme, au second 
jour du moys d'octobre pour defuncte Colette Bucaille, sa mère ; 
et la quatriesme pour luy mesme, qu'il veult et entend estre dit et 
cellebré à tel jour qu'il deceddera de ce monde, selon la volunté 
de Dieu. 

Pour chacun desquelz obiitz veult et ordonne estre baillé et payé 
par les dictz maistre principal, procureur, chappellain et bour- 
siers du dict collège et leurs successeurs à l'ad venir aux curé ou vi- 
caire et prebstres du dict Sainct-Hilaire la somme de cinquante 
solz parîsis, et à l'œuvre et fabricque, ou fabriciens pour elle, la 
somme de quinze solz parisis, fournissantz par eulx èsdictz obiitz 
et chacun d'iceulx des choses décentes, honnestes et accoutumées : 
sçavoir est, quatre torches et six poinctes pour le regard du curé 
ou vicaire; pour le regard des marguilliers , aornement, pain 
et vin. 

Entend néantmoins le dict fondateur que les deniers qui sont et 
seront deubz au dict collège soient coUigez. et receuz par le «dict 
procureur, et pareillement que les sallaires et bourses qui seront 
et debvront estre distribuées et payemens faictz tant ausdictz prin- 
cipal, chapellain, boursiers que aultres, se fsicent et distribuent 
par les mains du dict procureur qui du tout retirera quittance, et 
tiendra le compte aux principal, chappellain et boursiers, lequel 
sera tenu rendre chacun an deux foys, en présence des dictz Re- 
formateurs, et le reliqua qui en sera deu sera mis et déposé en 
ung coffre fermant à trois clefz différentes, dont le dict principal 
aura l'une, le procureur l'autre et le dict chappellain l'autre, à «e 
qu'ils ne le puissent ouvrir l'un sans l'autre, pour la conservation 
des dictz deniers à servir aux choses nécessaires pour l'entretenu- 



APPENDICE. 849 

ment d'icellé fondatioa et réparation da dict collège; et sera le 
dict coffre mis au lieu le plus seur et commode qu'aviseront les 
dicts RefcH'mateurs. Ne- pourra touteffois le dict procureur faire 
faire ou marchander pour les réparations nécessaires ou utilles ne 
auUres du dict collège, sans les dictz maistre principal et chappel- 
lain,et le communicquer aux dictz Reformateurs, ne pareillement 
faire aucuns baulx des héritages du dict collège sans l'exprès con- 
sentement et auctorité des dicts Reformateurs et d'iceulx maistre 
principal et boursiers; lequel procureur ne pourra aussi faire mise 
pour le dict collège, sans le consentement et advis des dictz maistre 
principal et chappellain, exceddant la somme de dix livres tour- 
noys, pour une foys. 

Et pour rentier et parfaict acomplissement et perpétuité de 
ceste présente fondation, ad ce qu'elle demeure ferme et stable à 
jamais, a déclaré et déclare, veult et entend le dict fondateur que 
les Reformateurs, visitateurs et spéculateurs du dict collège soient 
trois ecclesiastioques : Tun conseillier du roy en sa Court de par- 
lement de ceste ville de Paris, et qu'il soit docteur en décret de 
l'Université de Paris, si aucuns en y a lors; et de présent a 
nommé et nomme pour le premier, noble et scientificque per- 
sonne monsieur maistre Baptiste Sapin, docteur en ladicte Faculté 
de décret et conseillier en icelle Court. L'autre soit et sera per- 
pétuellement le chancellierde rUniversité de Paria, et le troisiesme 
le plus ancien docteur régent en icelle Faculté de décret. Et dès 
à présent le dict fondateur a nommé et nomme doctissime per- 
sonne, maistre Jehan Quintin, docteur régent en icelle Faculté; 
après le décès duquel veult et entend le dict fondateur estre en 
son lieu le plus ancien docteur régent d'icelle Faculté, résident et 
lisant actuellement en la dicte Université. 

Ausquelz sieurs Reformateurs et leurs successeurs qui se- 
ront pour le temps a le dict fondateur donné et donne toute 
puissance et auctorité de visiter le dict collège chacun an 
deux foys, pour veoir et congnoistre ce qui y pourroit estre 
defformé et dereiglé, et pour y corriger et reformer ce qu'ilz 
congnoistront en conscience debvoir estre corrigé et amendé : 
à sçavoir, la première visitacion au moys d'octobre, et la se- 
conde au moys d'apvril; et sera faict registre de leurs dictes 
visitations et ordonnances. A chacune d'icelles visitacions sera 
le dict procureur tenu rendre ses comptes devant les dictz 



350 APPENDICE. 

sieurs trois Reform&teurs , le principai et «hapellain; après 
lesquelles visitations et cbacmie d'icelles, le disner honneste et 
modéré, et les dictz comptes âa dict collège renduz par ledict 
procureur et par eulx 012, clox, arres^ez et signez, leur sera par 
le dict procureur à chacun d'eulx baillé et distribué ung escu d*or 
soUeO, le tout aux despens du ifict coUegie par manière de telle 
quelle récompense, combien qu'elle semble indigne, feu leurs 
labeurs, vacation et mérite, les priant eulx contenter, supportant 
la ténuité d'icelle fondation et modicité du bien du dict collège. 

Voulant oultre et ordonnant le dict fondateur que entre les 
mains d'iceulz Reformateurs les dictz maistre principal, procu- 
reur et chapellain, quand seront instituez, avant que exercer leurs 
estatz et charges, facent et prestent le serment de bien et fidelle- 
ment exercer leurs dictz estatz et charges, esquelz sont instituez 
et sans fraulde, et défendront de tout leur pouvoir le contenu en 
ladicte fondation, et s^ilz sçaventet entendent quelque chose faîcte 
au préjudice d'icelle, en advertir les dictz Reformateurs. 

Et pour l'exécution et entretennement d'icelle dotation, de 
toutes et chacunes les choses dessus dictes et en cesie présente 
fondation contenues et escriptes, le dict sieur maistre Robert 
Dugast, fondateur, de son bon gré, bonne, pure, franche et libé- 
rale volonté, sans aucune force, fraulde, erreur, induction, séduc- 
tion, contraincte ou decepvance, luy sur ce bien advisé, conseillé, 
pourveu et délibéré, si comme il disoit, recongnut et confessa et 
par ces présentes recongnoist et confesse en la présente et par 
devant les dictz notaires cy devant nommez et sopbzscriptz, 
comme en droict jugement par devant nous, avoir ceddé, quitté, 
transporté et délaissé, et par ces dictes présentes cedde, quitte, 
"transporte et délaisse dès mainctenant et dès à présent du tout à 
tousjours, promist et encores par ces mesmes présentes lectres 
promect garantir, délivrer et deflPendre envers et contre tx)us de 
tous troubles, debtes, lectres, dons, douaires et obligacions, en- 
gagemens, permutations, cscbanges, ventes, cessions, transportz, 
alliénations et de tous aultres empeschemens generallement quelz- 
conques ausdictz maistre principal, procureur, chapellain et 
boursiers du dict collège, qui sont et seront pour le temps advenir 
au dict collège, nommé Sainte-Barbe, le dict maistre Robert Cer- 
tain, jà nommé, principal, à ce présent, stîpullant et acceptant 
pour luy et les dictz procureur, chapellain et boursiers et leurs 



APPENDICE. 351 

successeurs au temps advenir, les héritages cy après speciffiez et 
déclarez, à icelluy sieur maistre Robert Dugast appartenans de 
son yray et loial acquest, si comme il dict et afiùrme pour vérité, 
c'est assavoir : 

L'énoncé des biens concédés, comme dans l'amortissement de Henri II, rapporté 
précédemment^ tome I, p. 372, sauf que Partide 2 est ainsi conça : 

Une autre maison et jardin, les lieux, aisances et appartenances 
d'icelle, que tient et où est à présent demourant Guillaume Mon- 
det, marchant libraire juré en ladicte Université de Paris, scituée 
et assise audict mont Sainct-Hilaire, et qui se extend jusques au 
collège de Reims, à laquelle pend pour enseigne le Chauderon^ 
tenant au presbitère, jardin et cimetière de la dicte église, et au 
collège de Karembert, d'autre part à la rue d'Ecosse, aboutis- 
sant par derrière à la rue du Four et audit collège de Reims, et 
d'autre bout par devant à la rue Saint-Hilaire, en la censive des 
doyen, chanoynes et chappilre de Saint-Marcel lez Paris, et 
chargée envers eux de douze deniers tournois de cens : à la charge 
tôuteffoys, en ce regard et pour la dicte maison du Chauderon^ 
jardin fet lieulx seullement, de l'aisance, usage et joissance de 
Jehanne Dugast, femme du dict Guillaume Mondet, parente du 
dict fondateur, durant la vie d'elle seullement, en paiant chacun 
an par elle à la communaulté du dict collège Saincte-Barbe la 
somme de quarante-huit escuz d'or solleil , ainsi que icelluy 
Mondet son mary et elle ont accoustumé faire et qu'ilz sont tenuz 
parcontract ou aultrement. Mais ne pourra la dicte Jehanne trans- 
porter son droit viager à quelque personne que ce soit; aultre- 
ment pourront iceulx maistre principal, procureur, chapellain et 
boursiers d'icelluy collège faire leur prouffict de la dicte maison 
pour le dict collège. 

Et le dernier article dans cette autre forme : 

Oultre a donné, ceddé et délaissé pour la fondation dudit col- 
lège la somme de trois cent vingt-huit livres quinze solz tournois 
de rente en plusieurs et diverses parties et constitutions à icelluy 
sieur ceddant, appartenant aussi de son acquest et qu'il a droict de 
prendre et parcepvoir par chacun an sur les Prévost des mar- 
chans et Ëschevins de la dicte ville de Paris, le tout ainsi et par la 



352 APPENDICE. 

manière qu'il est plus à plain contenu et déclaré es lectres de 
constitucions de ce faisans mencion, pour de tous les dictz héri- 
tages et choses ainsi cy dessus ceddez et transportez jouyr, user, 
tenir et d'ores en avant possedder par les dictz maistre principal, 
procureur, chapellain et boursiers du dict collège Saincte -Barbe 
et leurs dictz successeurs on temps advenir, et en faire comme de 
chose à eulx appartenant, en leur enjoignant très expressément 
par icelluy sieur fondateur de d'ores en avant mettre et dépo- 
ser au diot coffre commun, qui sera au dict collège, tous et cha- 
cuns les deniers qui proviendront des fruictz des dictz héritages, 
rentes, biens et possessions, après les choses susdictes acomplies : 
de toutes lesquelles et chacune d'icelles le dict fondateur s'est 
dessaisy et demis, en a vestu et saisy les dictz maistre principal, 
procureur, chapellain et boursiers et leurs successeurs ou temps 
advenir; et pour actuelle tradicion a mis et déposé en la présence 
des -dictz notaires soubzscriptz , entre les mains du dict maistre 
Robert Certain, jà nommé maistre principal, toutes et chacune 
les lectres, tiltres et enseignemens que icelluy Dugast avoit par 
devers luy, servans et faisans mencion des acquisitions par luy 
faictes d'ipeulx héritages et rentes, que le dict fondateur veult et 
ordonne estre mises et déposées au dit coffre commun ou autre 
lieu seur et sauf, pour s'en ayder quand mestier sera, et dont à 
ceste fin a esté faict inventaire à la requeste d'icelluy sieur 
fondateur, en la présence du dict Certain, principal susdict, et. ce 
par les dictz notaires pour la conservation du bien du dict col- 
lège, selon la discrétion des dictz seigneurs Reformateurs, maistre 
principal, procureur et chapellain d'icelluy collège. 

En déclarant et disant d'abondant par le dict sieur fonda- 
teur son intencion et vouUoir estre, s'il est possible et faire se 
peult, de recouvrer et achapter la cinquiesme partie de la dicte 
maison Saincte-Barbe, cy-dessus déclarée, affin d'avoir l'entière 
totallité, et que le dict achapt et recouvrement soit faict par ma- 
nière de permutation et eschange, sans aucune mutacion faire du 
nom de Saincte-Barbe. Pour faire lequel recouvrement pourront 
estre baillées et employez les cinquante livres tournois de renie 
restant, les boursiers payés, d'iceulx trois cent vingt-huit livres 
quinze solz tournois de rente ainsi deues par la dicte ville de 
Paris et sur elle prins et perceuz par chacun an, et de ce qui res- 
tera d'icelle rente sera satisfaict ausdictz maistre principal, pro- 



APPENDICE* 353 

ci)reur, chapellain et boursiers, et le reste mis et déposé an dict 
coffre de communaulté, et raesmes les dictes cinquante livres tour- 
nois au cas que la dicte cinquiesme partie de maison ne peust estre 
recouverte des propriétaires ausquelz elle appartient, pour iceulx 
deniers estre convertiz à Tentretenement de la dicte maison et 
collège Saincte-Barbe et divin service de la dicte chappelle, à la 
charge que, si les dictz de la ville de Paris racheptoient les dictes 
rentes de trois cent vingt-huit livres quinze solz tournois ou au- 
cunes dUcelles, en ce cas veult et ordonne le dict ronda|:eur les 
deniers du dict racbapt incontinant et le plus tost que faire se 
pourra estre emploiez en semblables rentes ou rente, ou bien en 
héritage et terres bien asseurées, du conseil, advis et délibération 
toutefibys des diclz sieurs Reformateurs, avec les diclz maistre 
principal, procureur et chapellain, qui pour lors seront au dict 
collège. 

Toutes lesquelles institutions, fondations, dotacions, ordon- 
nances, déclarations, cessions, transportz, ellections, privations, 
substitucions, nominations, visitacions, corrections et aultres 
quelconques dispositions, ainsi cy dessus déclarées et speceffîées, 
le dict sieur maistre Robert Dugast, fondateur, aiant oy et en- 
tendu la lecture d'icelles qui luy a esté faicte par Pun des dictz 
notaires, l'autre présent, a loées, gréées, ratifBées, approuvées, 
loe, grée, ratifBe, approuve, a pour bien agréables, se y est con- 
senty et accordé, consent et accorde, et icelles a promis tenir 
ferme et stables, perpétuellement es mains des dictz notaires, se- 
lon les qualitez, modifications et spécifications dessus dictes. Et 
oultre, pour plus grande stabilité, fermeté et asseurance de ceste 
dicte présente fondation et contenu cy dessus, a voulu et accordé, 
veult et accorde, en la présence d'iceulx notaires, que par les dictz 
sieurs Reformateurs et au nom des dictz maistre principal , 
procureur, chapellain et boursiers d'icelluy collège soit présenté 
requeste à la dicte court de parlement, à ce que de sa bonne 
grâce et volunté luy plaise ratifier, confermer, approuver et avoir 
agréable toutes et chacune les choses dessus dictes, en acceptant 
aussi par elle tant l'institucion des dictz sept boursiers en icelluy 
collège, que les dictz trois Reformateurs chacun en sa qualité res- 
pectivement : car ainsi Ta voulu et expressément accordé le dict 
sieur maistre Robert Dugast, fondateur, en passant et accor- 
dant les dictes présentes; et d'abondant icelluy çieur fondateur 
III 23 



3»4 APPENDICE. 

a aussi oeddé et transporté, cedde et transporte par ces dictes 
présentes ausdictz du collège ce acceptant par ledict Certain, 
maistre principal, tous et chacuns les droictz de propriété, fonds, 
saisine, seigneurie, possession, noms, raisons, actions, demandes, 
poursuittes et aultres choses generallement quelzconques qu'il a, 
peult et poorroit avoir, prétendre, quereller, demander ores et 
pour le temps advenir en et sur les dictz héritages, rentes et choses 
ainsi cy dessus par luy ceddez et transportez et pour Foccasion 
d'iceiilx ; et s'en est pareillement dessaisy, desmis et desvestu, des- 
saisit, desmect et desvest par les dictes présentes, comme dessus, 
pour ce du tout es mains des dictz notaires, comme en la nostre ■ 
souveraine pour le roy, nostre dict seigneur, pour, au nom et au 
proufiBct d'iceux du collège et leurs successeurs an temps advenir, 
vouUant, consentant et expressément accordant que par le bail 
et obstancion de ces dictes présentes lectres, sans aultre procura- 
tion sur ce avoir ni monstrer, les dict» maistre principal, procu- 
reur, chapellain et boursiers et leurs dictz successeurs en feussent 
et soient du tout saisis, vestuz, mis et receuz en bonne et suffi- 
sante saisine et possession par les seigneurs ' ou dames, celluy ou 
ceulx de qui est, ainsi comme appartiendra; et pour ce faire, vou- 
loir, requérir, demander, consentir et accorder ce estre faict, par- 
tout où besoing sera, le dict seigneur fondateur a faict, nommé, 
ordonné, constitué et estably ses procureur ou procureurs gene- 
raulx et certains messagiers especiaulx et irrévocables, le porteur 
ou porteurs de ces dictes présentes, auquel ou ausquelz ^portant 
icelles il donna et donne plain p9voir, puissance, anctorité et 
mandement especial et irrévocable de ce faire, et tout ce que au 
cas appartiendra et sera nécessaire. 

Lesquelles présentes institucions, fondations, dotacions, ordon- 
nances, déclarations, cessions, transportz, ellections, privations, 
substitucions, nominations, visitacions, correcnons, dispositions 
et toutes et chacunes les choses dessus dictes et en ces présentes 
lectres contenues, déclarées, speciffiées et escriptes, icellny 
sieur fondateur promist avoir pour bien agréables, les tenir 
ferme et stables à tousjours sans jamais à nul jour aucunement y 
contrevenir en quelque sorte ou manière que ce soit; ainçois ren- 
dre, payer et restituer à pur, à plain et sans aucun plaid ou pro- 
cès tous coustz, fraiz, mises, despens, dommaiges et interestz 
qui faictz, euz, souffertz, soosteaaz et encourus seroient par def- 



APPENDICE. 3S5 

fault des choses dessus dictes ou d'aucunes dUcelles, non faictes, 
tenues, entretenues, payées et dauement accomplies, aiosi et par 
la manière comme dict est, et en ce pourchassant, poursuyvant et 
requérant, soubz T obligation et ypothèque de tous et chacuns ses 
aultres biens meubles et immeuble, presens et "advenir, qu'il a 
pour ce du tout soubmis et soubmect à la justice, jurisdiction, 
cohercition et contraincte àe nous et nos successeurs, prevostz de 
Paris, et par toutes aultres courtz, justices et jurisdictions où trou- 
vez seront à ses despens ; et renonça en ce faisant expressément 
à toutes lectres d'estat, de grâce, reliefs, respictz, cessions, dis- 
pensacions et absolutions donnez et à donner , à • tout droict 
escript et non escript, canon et civil, et à toutes aultres choses 
et aydes generallement quelconques à ces lectres contraires, et 
au droict disant generalle renonciation non valloir. 

En tesmoing de ce, nous, à la relation des dictz notaires, avons 
faict mectre 1^ scel de la dicte prevosté de Paris à ces lettres, 
qui passées furent doubles , l'an, mil cinq cent cinquante-six, le 
jeudi dix-neufviesme jour du moys de novembre. 

Signé : Vallée. Crozon. 

En marge : Ce présent contrat de fondation, contenant dîx- 
«ept roUes de parchemin, cestuy comprins, a esté enregistré par 
moy notaire soubzsigné, Crozon. 

Et plus bas : Regestrata audito procuratore générale régis, Pa- 
risiis in prj'lamento, nona die decemhris anno Domini millesimo 
quingentesimo quinquagesimo sexto. Du Tillet. 



II 

BiscouBS d'ouverture ou cours de l^gesl ducbksne 

▲ SAINTE -BAEBE. 
\** octobre -1557. 

Leodegarii a Qucrcu oratiuncula Lutetix habita kal, octob. cum 
auspicaturus esset Tima^um Ciceronis in Aiheneo Barbarano, 
Quae quoridam invaluit apud Romanos éonsuetudo, audi tores, 
ut nemo militiae ascriberetur, qui vel annis septemdecîm miner 
esset, vel major annis quadraginta sex, eadem perinde servanda 
est in exercitu minervali : ut conquisâtores jubeant tyrunculos in 



356 APPENDICE. 

umbraculis el otio prius velitari, quam in solem et pulverem ve- 
niant, diuqne parère imperio anteqaam imperent , imperatores 
vero «tate jam affectes rude donent , quod hi praeduri sint et 
effœti, illi belli rudimentis immaturi. Quam ego legem non ut 
voce modo, sed" vita etiam comprobarem, anno superiore cum me, 
jam rudiarium et inutilem bello Vejanium sentirem, pro virili sum 
conatus inter exauthoratos numerari, sequutus illud Horatianum : 

Solve seoescentem matnre sanos equam^ ne 
Peccet ad extremum ridendus, et ilia dacat. 

Sedenim hoc consilii quod iniveram fregit Jacobus Carpentarius, 
rhetorum et philosopborum hujus Academîae sine coitfroversia 
princeps : qui delectum cum haberet, voluit antiquo me includerè 
ludo et in eisdem secum versari castris. Cui licet illud occinerém, 
ce Non eadem estaetas, non mens,:» tamen cum mea in eum litèratos-' 
que omnes singulari obserrantia, tum dicendi facultate inirifica 
emerito persuasit ut denno mererem. Dedi igitur nomen, et pro 
more, sacramento me obstringens, feci sub illo impèratore stipen- 
dia, nec hercle quasi fcrentarius, sed prœter votum primipilus. 
Ubi igitur in acie, in spécula, in statione, in praesidio annum jam 
integrum transmisissem, manubiarum aipplissimarum partîceps, ' 
de missione (velut causarius) impetranda cogitavi, praesertim cum 

intelligerem nostra castra trophaeis clara, 

« 

Ipsa suis pollere opibus^ nihil indiga nostri, 

vallo et fossa egregié muniri, commeatu affluere, armis vîgere, 
militibus redundare, ducibus florere, déni que omni loco esse quami 
optimo. Quibus ego de rébus ut fortunatus mihi visus sum, quod 
barum pars magna feror, ita laetitia exsilii, quod spes libertatis . 
erat \itaeque quietae; verum, nisi me animus fallit, nun- 
quam servitio me exire licebit, et labor labori succedet, velut 
unda supervenit undam. Nam cum hujus nobilissimi gymnasii 
Barbarani prudentissimus moderator Robertus Certus, vir omni 
virtutum génère conspicuus, audisset nostris auspicîis rem Bur- 
gundianam non infeliciter processisse, mecum agere cœpit ne jam 
otio etinertiaeme dederem; nondum me senem, ac si etiam sene- 
scere canities testaretur, tamen senum quam juvenum industria 
potius uti statuisse, quod nunquam ingenium et rerum prudentia 
velox ante pilos venit, nec cornicatur inepte quem Tonga eiudlit 



APPENDICE. 357 

reram experientia. Itaqua ut LucuUus olim militem, ita nie afiatus 
est : 

I bone, quo virtus tua te'yocat;i pede faasto, 
Grandia laturas meritorum prsemia ; quid stas ? 

Equidem etsi constituissem nuUius posthac jurare in verba n^a- 
gistri, tamen haec vox hlandissima mihi alioqui igna\issimo ani- 
mes addidil, et (si vera fateri \eiini) cristas erexit. Nam si ma- 
gnum hinc honorem sum adeptus, quôd Jacobus Cerpentarius, 
saeculi nostri Chrysippus, ad res accisas, ad parietinas et ruinas 
fulciendas opitulatorem me vocarit, quanto honorifieentius putan^ 
dum est quod non tam ad periculum aut bellum, quam ad parlum 
jamapud Barbaranos triumphum vocer? Non enim minoris laudis 
est profiteri lileras politîores de suggestu Barbarano, quam vel 
Romae triumphare, \el olympionicem fieri : ut enim Divum domus 
Lutetia in ter alias urbes principem locum tenet, ita Lutetianorum 
gymnasiorum longe celeberrimum semper fuit Barbaranum : quod 
iisdem rébus palmam consequutum est, quibus olim Athenae, 
situ loci et disertorum rhetorum acutorumque phllosophorum 
frequentia. Quis enim nescit scholam Barbaranam ob id equum 
durateum passim vocari , quod ut ille ex utero et cavernis in- 
gentibus innumeros principes fudit, ita Barbarana schola prope 
infinitos dicendi disserendique principes suppeditavit ? Hinc 
ab Eburonicum episcopo evocatus Jacobus Ludovicus Strebaeus , 
cujus eruditio quam fuerit multiplex, quam recondita, quam so- 
lida, satis loquuntur ejus laboriosae in Ciceronem annotationes ; 
hinc a duce Longovilleo assumptus Henricus Laberius, Lutetiae 
(dum viveret) ornamentum et dulce jiecus; hinc a Lusitanorum 
rege amplissimis praemiis ad instituendum filium accitus Antonius 
Pinus, \ir non minus dicendo quam scribendo felix ; hinc a Fran- 
cisco, rege Galliarum, optimo patriae et literarum parente, ad re- 
gianj cathedram perducta sunt duo eloquentiae et philosophiae cla- 
rissima lumîna, Bartholomaeus Latomus et Adrianus Turnebus. 
Quorum uterque ut est omnibus ingenuis artibus egregie politus, . 
ita utroque non minus superbit Barbarana schola quam Orpheo 
Galliopea, Lino formosus Apollo. Hinc Tolosam primum, deinde 
Cadurcum, postea Valentiam raptus Antonius Goveanus, de cujus . 
incredibili doctrina nemo dubitat qui illius festiva epigrammata, 
argutum conclusionum librum, acutam in P. Ramum disputatio- 
nem, graves in jus civile commentarios viderit. Sed quid ego haec? 



358 APPENDICE. 

Etsi enim vobis llbet, non tamen forsan licet reliqnos andire 
professores, quorum eniditissimis lectionibus schola Barba-- 
rana nobilitata est. Quorum ego cum tam dissimîlis sim quam vel 
corvus olorum, vel pica philomelarum, futurum metud ne in eo- 
mm suggestQ ita meros de me dem fusus, 

Ut niger, in ripis errât dam forte Caystri, 
Inter Ledseos ridetiir corvns olores : 
Aat ulii mnltisona ferret sacer atthide luctts , 
Improba Cecropias offendit pica querdas. 

Quod si in triviali quodam literario ludo ubi vel rbetorculi 
more anserum strepunt , vel philosophastrî tricantur , literas 
docerem, possem aliquo esse in numéro, ut pumilio inter pyg- 
mseos. Hic vero inter palladios gigantes vix videbor pygmaeus. 
Itaque nemo eorum, qui docendo dîscunt, ausus est nunquam 
ad suggestum Barbaranum aspirare, quod intelligeret in musa- 
rum domo non esse graculis locum. Quot enim grammalicis 
et rhetoribus -hic occurres, tôt Quintilianos judicabis ; quot pbilo- 
sopbiae professores hic habebîs obvios, tôt Platones agnosces; quot 
gymnasiarchas, tôt Calones; quot discipulos, tôt musarum partus : 
ut non abs re Atheneum ita gloriari possit, ut ille apud Ennium 
Africanus ; 

A sole exoriente supra MsBotida, neino 
Est, qui me meritis aequiparare queat. 

Quapropter ut olim bonarum artium studîosi Apolloniam, aut 
Rhodum, aut Atbenas navigabant, sic earumdem rerum candidati 
adr haee Barbarana umbracula velut ad Apollonii diatribam aut 
Socratis platanos adcurrunt, opinantes aeris saiubritatem non 
paulo magis conducere corporibus, quam authorîtatem loci, ubi 
tôt beroes albis equîs triumpharînt, anîmos inflammare ad literas 
capessendas. Quis enim hoc credat Miltiadis trophaea Themistoclem 
dormirenon sivisse, aut Alexandri Magni statuas Julium Caesarem 
ad glofiae studium excitavisse, summorum vero rhetorum et phi- 
losophomm auditoria nil habere stirauîorum ? Equidem praeclafe 
illud, ut caetera omnia, Cîcero :Non errore, sed natura datum no- 
bis est, uft cum ea loca videamus in quibus memoria dignos vires 
acceperimus multum esse versatos, magis moveamur, quàm si 
quando eomm ipsorum aut facta audiamus âut scripla legamus» 
Lochs enîm ipse non modo viromm memoriam afferre videtur^ 



APPENDICE. 359 

sed etiam ipsos pseae in conspectn ponit. Et profecto ni in fer- 
tilihus plantariis si fmtices aot herbae stirpitus avellantur, deci- 
dno tamen semîne noyns aliquîs frutex aut herba renascitur, 
sic ex hac feracissima divinorum ingeniomm Isocratea schola 
cum abeunt erudili professores , eraditionis illomm rémanent 
uberrima seminaria, qaibns virere et vemare non desinit. 
Nec fieri potest quin tantae pulchritudinîs aspectn provocentnr 
incolae, nt eorum similes esse stndeant, quorum laûdatissima in- 
tuentur monimenta. Caeterum ne vetuslate collabescerct (ut mor- 
talia soient) hic locus charitibus et musis sacer, eum redintegravit, 
aut potius ex lapideo marmoreum reddîdit, amplîssimoqne pro- 
ventu locupleta\itRobertus Gasteus, Coqueretic» domus spectatis- 
simus gymnasiarcha, . 

Cui det Nestoreos aetemus Juppiter annos, 
Nestoreiun qnoniam pectus et ora dédit. 

Quis enim buic întegerrimo seni non bene ominetur? quis non 
laeia omnia precetur? quis non immorta^bus majores gratias agat 
quod nobis musas, musis suum restituent musaeum ? Ad quod cum 
me per suarum fortunarum et virtutis haeredem Robertum Certum 
vocaverit, nolentique et diu recusanti munus hoc interpretandi 
(cui me imparem fatebar) obtruscrit, debeo ei quidem quantum 
nunquam soluturus sim pro tam honorifîca de me opinione.* 
Quam si satis cum dignitate et laude sustinere nequeam, nolite, 
obsecro, temeritati aut impudentise potius ascribere, quam obse- 
quiosae humanitati. Is enim semper fui, qui in eam peccare partem 
maluerim, ut parum prudens viderer, quam parum benevolus. 
Quanquam si ea attentio, ea docilitas et comitas mihi nunc pra&- 
stetur, qnae olim cum hic ordinem primnm ducerem, \e\ quae 
proxime apud Burgnndos (qui omnes humanitads numéros erga 
me expleverunt), tam magna pars gravissimi oneris, cui succum- 
berem, detrahetur, ut vix sit futura difficilior perHciendi facultas 
quam fuerit aggrediendi voluntas. Quam rem benignissime vos 
concessuros conQdo, tum ob eam quam in me dûdnm sensistis ad 
provehenda vestra studia propensitatem, tum ob loci hujus am- 
plissimi dîgnitatem, cui linguis et animis favendum, tum ob Cice- 
ronis (quem enarrandum suscepi) celebritatem : qui arcana qua- 
dam vi sus eloquentise non secus ad se omnes allicil quam vel 
magnes femun, \el Caecias nubes; qui incredibili quadam magni- 



360 APPENDICE. 

tadine ingenii snperiores omnesTincit, et posteris spem sai imitandi 
penitus ademit ; qui, non minas gravis et sententiosus philosophas 
quam vehemens et consummatus orator, nomen longius propag^a^t 
qaam Romani suos fines ; qui dono quodam Providenliae genitns 
existinfatur, in quo totas vires eloquentia experiretur. Quapropler 
plénum insolentiae videatur si quis illiys laudes vel conetur cona- 
mendare, quae per se sunt amplissimae, vel recensere, quae sunt in- 
numerae, vel quovis modo demonstrare, quarum lumen oculos 
mentesque praestringit. Itaque cum melius a divinissimis suis ope- 
ribus quam a c^jusquam ore laudetur, omisso praeconio, ejus pra&- 
clarissimum Timaeum dexlris auguriis auspicabor, si precibus a 
vobis impetrarim ut vestra benevolentia nostrae velil industria; 
favere. 
Dixi. 

III 

COLLATION d'une BOCmSE VACANTE A UX ENFAIÏT » 
DE LA PAEOISSE SAINT-HILA1RE. 

46 février 4 570. 

Venerabili et dilecto nostro domino primario collegii dive Bar- 
bare, Parisiis fundati, et ceteris quorum interest, Petrus Lefehitre^ 
in sacratissima théologie facuUate bacchalaureus, rector seu cura- 
tus parrochialis ecclesie Sancti Hilarii in monte Parisiensi, Tho- 
mas Brumen^ Jacobus Pautonnies et Nicolaus SouUarty dicte parro- 
chialis ecclesie matricularii, salutem. Notum vobis facimus quod, 
cum ad nos presentatio ad locum et parvam bursam dicti vestri 
collegii spectet et pertineat ratione nostre parrochialis ecclesie 
S ncti Hilarii, juxta fundationem dicte burse: nos ad eam bursam 
et locum, liberos nunc et vacantes propter absentiam continuam 
Jacobi Hènuiersy illius bursarii et ultimi possessoris pacifici, Lu- • 
dovicum de Harsi, sufQcientem et idoneum, harum série litte- 
ranim pietatis intuitu vobis presentamus. Quocirca vos obnixe 
rogamus quatenus dictum de Harsi ad dictos locum et bursam, 
modo premisso vacantes, recipiatis et admittatis seu recipi et ad- 
mitti faciatis, eumque fructibus, juribus et emolumentis, jtalibns 
bursariis debitis, uti et gaudere pacifiée faciatis, statutis nihilomi- 
nus dicti collegii inviolabiliter observatis. Datum Parisiis, sub 
sigillo prefale nostre parrochialis ecclesie Sancti Hilarii ac signe 



APPENDICE. 361 

providi yiri magîstrî Johannis Decorbre^ public! aucthoritate apo- 
stolica Yenerabiliumque Conservationis privilegiorum apostolico- 
rum aime Universitatis et episcopalis Parisiensis curiarura notarii 
juratiy et in registris episcopatus et préfecture Parisiensis, juxta 
edictum regium, descripti et immatriculât!, Parisiis in vico Na- 
cum commorantis, subsignati. Anno domini millesimo quingente- 
^mo septuagesimo, die décima sexta mensis februarii, presentibus 
ibidem Vincentio Canet et Hieronimo François, Noviomensis et 
Ambianensis respective (Jiocesum, Parisiis commorantibus, testi- 
.bus ad premissa vocatis et rogads. 

jàinsi signé : De mandato dictorum dominorum curati et ma- 
triculariorum parrochialis ecclesie Sancti Hilarii Parisiensis. 
J. CoasYE. 

IV 

CERTIFICAT D^ÉTUDES POUR UN BARBISTE DU TEMPS D* ANTOINE 
DE TREMBLAY. 

1573-1578. 

Nos subsignati, artium magistri, certificamus [dilectum] nos- 
trum discretum virum magistrum Franciscnm Cathereau, dioce- 
sis,..., in artibus magistrum, Parisiis [studuisse] ineisdem artibus 
pet quinquennium, [videlicet] per triennium cum dimidio [a lo- 
gicajlibus inclusive, ante [adeptjionem gradus magisterii, in 
[famajtissimo coUegio divae Barbarie, [sub] discreto viro magis- 
tro Jacobo Mario [Ambjosio, artium magistro, actu Parisiis tu m 
in eisdem artibus et dicto coUegio régente; et post adeptionem 
dicti gradus magisterii, studuisse et continuasse suum studium in 
eisdem artibus per annum cum dimidio, frequentiindo actus et dis- 
putationes dictas Facultatis artium, tam publicas, quam privatas, 
et eisdem continue interessendo : hujusmodi quinquennium in- 
ceptum in festo divi Remigii, prima die mensis octobris, anno 
Domini millesimo quingentesimo septuagesimo tertio, functum et 
revolutum eadem die, anno Domini millesimo quingentesimo sep- 
tuagesimo octavo. Testibus signis nostris manualibus hic ap- 
positis. 

Signé : Marius et A. de T-ramblay, avec patxiphes. 
Au dessous j dune autre main : Supplicuit anno . VIIII^xJ, die 
prima mensis februarii. Signé : LAfnLi. 



362 APPENDICE. 



NOMIMÂTION DB BOURSIEB. CONTRIIRE ▲ LA FONDATION. 
48 mars 1634. 

Nos, Nîcolaus Leclerc^ régis ChristiaDÎssîmi îd snpremo senatu 
Parisiens! consiliarîus clericus decanus, visilator et reformator 
coUegii divaî BarLarœ Duncupati, in dicta Universitate Parisiensi 
fundati, nnivérsis has litteras inspectiiris salutem. Notum facimas 
quod ab bursam ejusdem collegii, per qnondam bonae memorias 
nobilem et scientificum vinim dominum Robertum du Gast^ cum 
Tiveret in dicta Universitate Parisiensi doctorem^egentem indecre* 
torom facultate, nominavimus ingenuum adolescentem Jacobam 
^^ric;f^/,Parisiensem,in dicta Universitate studentem, in et de le- 
gitîmo matrimonio natum, parrocbia Sancti Stepbani, suffîcien- 
ten>, capacem etidonevm, nominavimusacnominamus.Quapropter 
ma ndamus tibi , primario ejusdem collegii divae Barbarse , nti 
recipias prsedictum adolescentem ad idem ofdcium seu bursam 
exercendam cum ejus juribus et perlinentiis, installesque in eodem 
collegio, servatis solennitatibus ad id solitis, jure cujuslibet salvo. 
Datum Farîsiis, sub sîg)Ilo nostro ac signo manuali magistriSan- 
soTïi&Pasquier^ secretarii nostfi, testisqueadpremîssavocati.Anno 
Domini millesîmo , sexcentesîmo trigesimo quarto, décima octava 
mensis martii. Signé : Leclerg. 

De mandato prxfati domini visîtatoris et reformatons. Signé : 
Pasquier. 

VI 

ARRiTS DU CONSEIIi D'iTAT"^NCERNANT LE PROJET d'àNNEXION 
DE SAINTE-BARRE AUX ÉCOLES DE DROIT. 

40 man 4684. 

Veu par le Roy en son Conseil l'arrest rendu en iceluy le 26* mars 
dernier, par lequel S. M. voulant pour\'eoir à Testablissement des 
escolles de la Faculté de droit de Paris en un lien commode, tant 
pour le logement des professeurs que pour Taccez des estudians en 
droit, auroit ordonné que les principaux et officiers des collèges 



APPENDICE. . 363 

de Boorgogâe et de Sainte-Barbe et les professeurs de ladite Fa- 
culté de droit représenteroient par devant les sieurs Boucherat, de 
Bezons et Bignon, conseillers ordinaires en ses conseils, les tiltres 
et actes de leurs fondations et dotations anciens et Testât présent 
desdits collèges, comme aussi qti'ils s'informeroient du nombre et 
qualité des bourses fondées dans FUniTersilé de Paris pour les es- 
tudians en droit, à Teffet de connoistre Tusage qui pourroit estre 
fait desdites bourses, pour, sur l'advis desdits commissaires, estre 
ordonné par S. M. ce qui appartiendroit par raison ; Fadvis des 
sieurs Boucherat, de Bezons et Bignon en conséquence de leur 
protez verbal de la représentation faite, tant par les professeurs 
et docteurs en droit de la Faculté de Paris, que par le principal, 
procureur et chapelain du collège de Sainte-Barbe, des actes et 
tiltres de fondation et de Testât desdits collèges, avec la remons- 
trance du principal du collège de Bourgogne, et du procez verbal 
et rapport fait par M. Goujon, architecte des bastimens du roy, 
en vertu de l'ordonnance des dits commissaires, concernant la vi- 
site par luy faite des bastimens et lieux dépendans desdittes 
escoîes de droit, collèges de Sainte -Barbe et de Bourgogne : 

Sa Majesté estant en son Conseil a ordonné et ordonne que le 
collège de Sainte-Barbe, avec les biens, bastimens et revenus en 
dépendans, seront à tous jours unis ausdites escoUes et Faculté de 
droit et sans en pouvoir jamais estre séparez, à condition toutes- 
fois que le chapelain qui est à présent, et ceux qui seront nommez 
après luy, continueront à faire le service porté par la fonda- 
tion dudit collège aux mesmes droits, proffitz et revenus que les- 
dits chapelains ont droit d'avoir, et que les professeurs de ladite 
Faculté seront tenus de faire jouir les principal et procureur dudit 
collège de Sainte-Barbe qui sont à présent, pendant leur vie seu- 
lement, de tous les proffitz et advantages qui leur appartiennent ; 
aussy de fournir aux boursiers fondez dans ledit collège le révenu 
ordinaire dèsdites bourses, à la charge d'estudier conformément à 
leur fondation. Ordonne S. M. que les quatre professeurs en droit 
qui n'ont point de logement dans lesdites escolles de droit seront 
logez dans ledit collège de Sainte-Barbe. Enjoint Sa Majesté aux- 
dits Sieurs commissaires de faire exécuter le présent arrest et de 
se faire représenter les estats et compte des affaires et revenus du- 
dit collège de Sainte- Barbe et escole de droit pour, à leur rapport, 
y estre pourveuparS. M. que de raison, et pour donner moyen de 



Zbk APPENDICE. 

subsister à ceux qui ne pourroient sans secours employer les an- 
nées portées par Tédi.ct de S. M. pour les estudes de droit cano- 
nique, civil et François. Ordonne que les places et bourses fondées 
dans tous les collèges de TUniversité àe Paris pour les estudians 
en droit ne puissent estre remplie^ par d'autres, et que ceux qui 
ont droit d'y nommer et présenter soient tenus incessamment de 
le faire en faveur de pauvres escoliers qui auront estudié ez lettres 
humaines et en philosophie pour jouir desdites bourses, pendant 
trois ans consécutifs seulement par ceux qui ne prendront que les 
degrez de bachelier et licencié en droit, et jusques à cinq ans par 
ceux qui prendront le degré de docteur ; ei seront tenus ceux qui 
seront pourveus desdites bourses d'employer le temps d'estude 
conformément audict édict et règlemehs desdites Facultez, sinon et 
à faulte de ce faire, seront exclus desdictes bourses, auxquelles 
sera incessamment pourveu par ceux qui ont droit d'y nommer 
d'autres personnes estudians en droit. Et pour éviter qu'il ne se 
commette à l'advenir aucun abus à cet esgard, ordonne S. M. aux 
principaux desdits collèges, où sont fondées lesdites bourses desti- 
nées aux estudians en droit , de se faire représenter exactement 
par lesdits estudians les attestations des professeurs de la Faculté . 
où ils prendront leurs leçons , et d'envoyer au Procureur général 
par chacun an, à la f^sle de saint Martin, un certificat contenant le 
nombre des bourses de leurs collèges destinées aux. estudians en 
droit, le nom de ceux qui les remplissent et le temps de leurs es- 
tudes. Et en conséquence, S. M. enjoint à son Procureur général 
de tenir la main à l'exécution du présent arrest. Signé : Letellirr. 

6 juin 4 682. 

Sur la requeste présentée au Roy estant en son Conseil par les 
principal, procureur, chapelain et boursiers du collège de Sainte- 
Barbe, fondé en FUniversité de Paris, contenant que, les profes- 
seurs de la Faculté de droict de ladite ville leur ayant fait signif- 
fier un arrest du Conseil du dix mars 1681, portant entre autres 
choses que ledit collège, avec les biens, bastimens et revenus en 
deppendans, seroient à toujours unis aux escoUes et Faculté de 
droit aux conditions portées par ledit arrest, les supplians auroient 
fait leurs remonstrances à S. M. ainsy que les recteur, doyens et 
procureurs des nations de ladite Université, sur la surprise qui 



APPENDICE. 565 

avoit esté faitte de la religion de S. M. en Tobtentiop dudit ar- 
rest ; et en attendant que S. M. eiist la bonté de faire droict sur 
lesdiles remonstrances, les supplians ont discontinué de recevoir 
les revenus desdits biens et d'entretenir lesdits bastimens, quoy- 
qu'ils ayent tousjours fait leurs fonctions ordinaires audit collège, 
en sorte que les créanciers d'icelluy, faute de payement des arré- 
rages de leur deub, ont fait saisir tous lesdits revenus et mesme 
fait procéder par saisie réelle au bail judiciaire desdits bastimens, 
de manière que tout est demeuré dans le désordre et dans la con- 
fusion du jour de la signature dudit arrest, lequel (sauf correction) 
ne pouvant se soustenir par les raisons qui ont esté amplement ex- 
pliquées par lesdites remonstrances des supplians^ ont recours à la 
justice ordinaire de S. M., à ce qu'il luy plust revocquer ledit ar- 
rest du Conseil du dix mars 1681, avec deffenses ausdiçts profes- 
seurs de droict et tous autres de s'en servir à peine de trois rail 
livres d'amende et de tous despens, dommages et intérests ; veu 
ladite requeste signée Delaroche, chapelain dudit collège, et Lucas, 
leur advocat au Conseil, ledit arrest du Conseil du iO mars 4681, 
les remonstrances des supplians et de l'Université, titres de la fon- 
dation du collège du 19 novembre 1556, avec l'arrest dudit Par- 
lement portant enregistrement du 9 décembre audit an, et autres 
pièces y attachées ; ouy le rapport du sieur commissaire à ce dé- 
puté, et tout considéré : 

Le Roy estant en son Conseil a receu et reçoit les principal, pro- 
cureur, chapelain et boursiers du collège S^nle-Barbe opposans à 
Texécution de l'arrest du conseil d'Eslat du dixième mars 1 681 ; 
ce faisant, ordonne que les fondations et autres establissemens du- 
dit collège seront acquittés comme auparavant ledit arrest, et que 
par les supérieurs dudit collège la discipline y sera restablie, avec 
deffense aux professeurs de droit canoi|i de troubler les principal, 
procureur, chapelain et boursiers dudit collège en la possession 
d'icelluy, à la charge, par lesdits principal, procureur, chapelain et 
boursiers d'observer les fondations et règlemens qui.seront faicts 
par les supérieurs dudit collège en exécution. Signé : Bazin. 



366 APPENDICE. 

VII 

YISITS DU COLLé&B PàE AOLLIlff. 

4 9 mai ^1696. 

Die 19 maii 1696, lustratum est coUegium Saactae Barbarae, in 
que, iûLerrogatis primario, procuratore, ca pellano et bursariis,coin- 
pertum est accepti et expensi rationes jam ab annis fere duodecim 
redditas non fuisse, idque pivopter primarii negligentiam, qui per 
annos complu res redit uum collegii quaestor fuit. Qua de re audi- 
tus syndicas Universitatis, postquam exposuit ex ejusmodi procu- 
. ratorum in reddendis rationibus incuria certissimam plerumque 
impendere collegiis ruinam, postulavit ut primarius, Disi intra 
unum mensem rationes aliquot suas reddere inceperit, ac nisi eas 
ante trium mensium spatium omnes reddiderit, censeatur ipso facto 
primarii raunere excidisse. Placuit autem, nisi intra mensem reddî 
coeperint a dicto primario rationes suae ac nisi omnes redditas 
fuerint ante' très menses, tum factaî a syndico postulationi rationem 
haberi. 

Item, post redditas a primario rationes intra tempus praescrip- 
tum, placuit a procuratore, qui nunc est, suas reddi intra mensem 
proxime sequentem. 

Item Iradi Universitati duo redditarum rationum exempla,alte- 
rum quidem recentiuip, allerum vero antiquarum, ut, iis perlectis 
cognitoque praesenti rerum statu, mellus deceroi possit quod e col- 
legii re videbitur. 

Rationes autem reddi deinceps quotannis certo ac stato die; ac 
si id procurator fàcere neglexerit,aMit certe rationes suas Superio- 
ribus non exhibuerit, tum post elapsum mensem, placuit eum pro 
singulis septimanis, quibus tali ofûcio defuerit, singulos nummos 
argenteos solvere de suo in rem collegii communem. 

Item placuit singulis diebus sabbati cœtum baberi de rébus ad 
collegium pertinentibus, et quaecumque ex deliberationibus con- 
clusa fuerint, ea in librum et codicem publicum referri. 

Item fieri descriptionemtitulorum omnium et chartarum, rerum- 
que mobilium et suppellectilium quae fuerint ad instruendum ornan- 
dumque capellam comparata. 

Item promulgari vacaliones bursarum in iis locis in quibus id 



APPENDICE. 367 

fieri convenit, neqne de bursis provideri ante duos menses ab ea 
vacationum denuDciatione, quae, ut et biirsaram vacatio, publico 
deliberationum libro inscribetur. 

Item tenebuntur bursarii intra très menses, post confectom phi- 
losophiae cnrsum, adipisci gradum ma|^terii ia artibus , alioquin 
bursa vacabit; ac post illos très menses, qui dictam magisterii. gra- 
dum Don consecati fuerînt, plaçait non procedere illis borsarnm 
emolumenta ; quae si a procuratore solvantur, id ipsios danmo 
fieri. 

Item fient preces in communi, mane et sero, statis horis, et res 
sacra; nec omittet primariiis bursariis doclrinas christianae prae- 
cepta, singulis sabbati diebus, certa et stata hora explicare. 

Item fient a primarlo repetitiones bursariis, qui tenebuntur sin- 
gulis trimestribus exhibere eorum quos audient professorum testi- 
monia, quibus constet eos assidue ac diligenter studere. Nec po- 
terit procurator dictis bursariis fructus bursarum persolvere, nisi 
proférant ejusmodi testimonia, quœ ipsa in reddendis rationibus 
exhibere tenebitur. 

Item placuît duo postica, quibus a via publica aditus in hortum 
et aversam scalam patet, et alia, si quae sint, intra quindecim dies 
lapideis claustris obsepiri. 

Sancitum praeterea ne qua mulîer in coUegii cubicula penè- 
tret, ulqnein ejus ostiariae locum, quae nunc est, novus janitor quam 
primum sofficiatur. Signé : C. Roixor, rector. 



VIII 

I 

nOMINATiaN DE SIMON 1CENÂSSIE& AU PEIUCIPALAT OONFIBMÉE 
PAR LE PARLEMENT. 

2 janvier 1720. 

Veu par la Cour la requeste à elle présentée par Simon Menas- 
sier, prestre du diocèse d'Autlinn, docteur de Sorbonne et procu- 
reur du collège de Sainte-Barbe, fondé en TUniversité de Paris, 
à ce que, pour les causes y contenues, il plût à ladite Cour, veu la 
nomination faite de la personne àa suppliant à la place et office 
de principal dudit collège de Sainte-Barbe par les sieurs supé- 
rieurs et réformateurs dadit collège, an lieu de feu maistre Louis de 



368 APPENDICE. 

la Roche, prestre, principal dudit collège; les lettres de prestrke 
et de doctorat du suppliant : le recevoir et instituer audit ofiicQ 
de maistre et principal dudit collège de Sainte-Barbe et bourse y 
annexée, pour en jouir comme ses prédécesseurs, aux droits, hon- 
neurs, prérogatives, fruits, revenus et émolumens y attribuez ; 

Veu aussy les pièces attachées à ladite requête, signées dudit 
suppliant et Menassièr, son procureur; conclusions du procureur 
général du roy ; 

Ouy le rapport de maistre Hierosme le Feron, conseiller; 

Tout considéré : 

La Cour reçoit et institue le suppliant audit office de maistre et 
principal dudit collège de Sainte-Barbe et bourse y annexée, pour 
en jouir, ainsy que ses prédécesseurs, aux droits, honneurs, préro- 
gatives, fruits, revenus et émolumens y attribuez. 

Fait en parlement, le deux janvier mil sept cent vingt. 
Signé : Dâligre et Leferon. 

IX 

DÉCRET DE l'uNIVERSITÉ A PROPOS i5e PRÉDICATEURS JÉSUITES 

ADMIS A SAINTE-BARBE. ^ 

30 décembre 1732. 

Anno Domini millesimo septingentesimo trigesimo secundo, die 
trigesifno mensis decembris, habita sunt in antecessum comitia 
ordinaria Deputatorum Universitatis apud Rectorem amplissimum 
in coUegio Sorbonae-Plessaeo. 

Quod verba fecit amplissimus Rector, sibi compertum esse 
nonnuUos Jesuitas in coUegio San-Barbarano non ita pridem sa- 
cras habuisse conciones, quod quidem sit Academiae institutis 
maxime contrarium ; si rem ante praesensissel quam perageretur, 
provisurum sane fuisse ne fieret; quoniam autem peracta sit nec 
possit esse infecta, providendum saltem ne quid ex Universitatis 
silentio detrimenti patiantur laudabiles ejus consuetudines atque 
leges. 

Postquam pauca haec praefatus est amplissimus Rector, petiitque 
de bis impraesentiarum deliberari, auditus est magister Edmundus 
Pourchot, syndicus seu procura tor generalis, qui dixit : Ignorare 
neminem Jesuitas, ex quo Hanc in urbem advenerint, fuisse semper 



APPENDICE. 369 

Universitatis aemulos atque adversarios ; in commentariis nostris 
passim legi qaanta in eam variis temporibas moliti sint, ideoque 
minime mirandum si omni publico ciim illis commercio ipsa sem- 
per sibi interdixerit, omnemque iis in sua collegia aditum occlu- 
dere ac praecidere stoduerit ; banc esse legem academicam a majo- 
ribus per manus traditam, ne qiiis ex praedicta societate in loca 
academica admittator ad faciendum quid dicendumve publiée ; cui 
legi quoties fraudem facere aliquem velle Universitas senserit, 
statim eam praesto fuisse ad reprimendos ejusmodi conatus ; neque 
vero repetiturum longius academicae super illa re diligentiae ac se- 
veritatis exempla : intra bos très annos, cum provisores collegii 
Longobardorum unum e dicta societate désignassent ad babendam 
in pi'aedicto collegio sacram concionem, die quae est sancto Patri- 
cio sacra, décima septima martii, statim se, syildico requirente, 
edicto rectorio praedictos provisores sub poexiis academicis vetitos 
id, quod proposuerant , peragere (quod quidem legitur in com- 
mentariis Universitatis, anno 4730, dieiTmartii), et huic edicto, ut 
par erat, obtemperatum j babere igitur Tribunal academicum 
quod hodierna in deliberatione sequeretur, nec dubitandum quin 
e re Universitatis esset ejusmodi legem constanter retineri ac ser- 
>*ri. 

Audito meritissimo syndico, magister Jacobus Leullier, sacri 
ordinis decanus-, domus Sorbojiicae senioi*, Cardinalitii quondam 
primarius summusque* modéra tor, ac deinde parœciae Sancti 
Ludovici in bac urbe pastor , dixit se Universitatis esse anti- 
quissimum magistrum; semper se vidisse hoc pro lege inviolata, 
a majoribus accepta, baberi, ut nulli ex iis bominibus, qui Jesuitae 
dicuntur, liceret verba in locis academicis facere. Quamdiu magis- 
tratum aliquem aut praefecturîim in Universitate gesserit, nunquam 
se passum esse in hanc academicam legem peccari, nec posse, suo 
quidem judicio, ab ea viros academicos, si modo sint fidei quam 
Universitati dederint memores, recedere. 

Idem de illa lege sentire se professi sunt caeteri Deputati. 

Re itaque mature perpensa, sic unanimi omnium sententia 
decretum est : • ^ 

Primo quidem, quod dicuntur aliqui Jesuitae sacras babuisse 
conciones in collegio San-Barbarano, id si factum , Universitas 
contra suam mentem suosque usus ac majorum instituta factum 
esse pronunciat. 

m 24 



370 APPENDICE. 

^ Quontam e nrivis excessit qui tune eraC praedicti collegiî San- 
Barbarani primams, ah ampliorî super illa re perquisitione et 
ab irroganda pœna abstinet Universitas. 

^ Yult Universitas 8uos omnee magistros firmiter atque ccmstao^ 
ter retinere eam legem perantiquam, non ta^ scriptaih quam per 
manus a majoribus traditam, longoque ae perenni usa comproba- 
tam, qoa Tiri religiosi Jesuitae dicti ab omni publîca in Universi- 
tate actione arcentur. Eam legem, quantum opus est, confirmât ac 
rénovât, adeoque primariis ac magistris omnibus, cuju^umque 
sint ordinis, sub pœais ac«demicts mandat ac praecipit, ne suis in 
eoliegiis, sive illa majora sive minora sint, suisve mjscholis aut 
omnino in ullis locis academicis, quemquam ex ea familia, qaae so* 
cietas Jesu vulgo appellalur, verba facere oralionemque ullam sa- 
eram profanamVe habere; prima doclrînae christianae elementa 
(quem catechismum -vocant) exponere; confesâones audire et 
excipere ; ia scholis sive classibus, quum actus exercitationesve 
babentur, disputare aut inteirogare ; atque omnino publicumqnid 
facere aut dicere^ sub quovis praetextu ac nomine, permittant vel 
patiantur. 

4** Placet, ubicumque opu» fuerit, judicium hoc notum fîeri ; 
nominatim vero primario, procura tori et sacellario coUegii Saa- 
Barbarani declarari. 

5* Meminerint magistri omnes academici sibi legibus academîeiis 
interdictum esse ne in scholis praedictae societatis ullo modo dispu- 
tent. Ac ne quis fgnorantiam obtendat, rénovât Universitas con- 
clusiones in eam rem non semel latas, et illam nominatim quaB 
, anno 1621 confecta est, cujus hic est ténor : « Anno i621, die 
13 fnaii.... censuere praeterea dicti DD. deputati monendos esse 
magistros et scholasticos dictae Uni versitatis, ut abstineant a dispn- 
tationibus quae fieri soient apud Jesuitas, sub pœna majoris anî- 
madveTsionis. Et ita per eumdem D. Rectorem conclusum fuit. 
Signatum J. Yon, rector; Duval, de mandato D. Rectoris. » 

Et ita super bis quinque articuiis amplissimus Rector conclusit. 

Signé : Ingout, vice scriba. 



i 



APPENDICE. ^374 



OftDONIfANCE DE M. DB BBAUM01IT, ARCHÏYtQVB DE PARIS^ 
POUR LA BéORGANISATlON DE LA COMMUNAUTÉ DE SAINTE-BABBE. 

' - .24 septembre 4773. 

Christophe, etc.... Sur le compte que nous nous sommes fait 

rendre de la forme et constitution actuelle du gouvernement de la 

• maison et. communauté de SainterBarbe, et voulant remédier aux 

abus qui se seraient déjà introduits, ou prévenir ceux qui pour- 

roient s'introduire par la suite dans cette maison à laquelle toutes 

sortes de motifs nous obligent de prendre un ii\térèt particulier; 

maintenir l'esprit de piété et de régularité qui doit y régner, Éa- 

' voriser le progrès des études pour lesquelles elle a été établie, 

écarter tout ce qui pourroit porter atteinte, à cette juste et néce&- 

f saire subordination qui est le nerf de la discipline et le principal 

fondement du bon ordre ; 

Nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit : 
^ Savoir ; 

* I. Qu'il n'y aura désormais qu'un seul et unique supérieur de 
toute la maison et communauté de Sainte-Barbe, composée de 

' théologiens, philosophes, humanistes ; lequel résidera continuelle- 

f ment dans ladite maison et non ailleurs, et sera revêtu de. toute 

* l'autorité nécessaire pour y maintenir le bon ordre, y faire obser- 
f ver les règlemens et veiller au progrès des études soit de théo- 

* logie et de philosophie, soit de bellesr-leltres et humanités. 

* II. Ce supérieur unique de toute la communauté pourra ètr 
f en même temps chargé de la supériorité immédiate et particulière 

des théologiens et philosophes ; sera logé, nourri, chaufiPé, blanchi, 
^ éclairé aux dépens de la maison, et aura de plus, supposé qu'il 

soit en même temps supérieur particulier des théologiens et phi- 
^ losophes, neuf cents livres d'honoraire. 

III. Il ne dépendra que de nous et de nos successeurs pour le 
gouvernement de la maison et le maintien de la discipline, et tous 
ceux qui seront employés dans ladite maison, à quelque titre que 
ce puisse être, lui seront subordonnés, ainsi qu'il s'observe dans 
les autres séminaires et communautés. 



jif 



37S^| APPENDICE. 

Nous avons nommé et nommons par ces présentes le sieur 
Antoine Baduel, prêtre du diocèse de Saint-Flour, pour remplir 
ladite place de supérieur local de ladite maison, ensemble celle 
de supérieur immédiat et particulier des théologiens et philoso- 
phes, avec tous les droits, honoraires et émolumens marqués dans 
notre présente ordonnance , et ce , pour autant de temps que bon 
nous semblera. 

IV. N'entendons néanmoins, par l'établissement dudit supé« 
rieur local et pour la nomination que nous faisons dudit sieur 
Baduel, nous priver du droit de nommer tel autre ecclésiastique 
que nous jugerons à propos, pour nous représenter dans ladite * 
maison en qualité de notre commissaire, présider en notre nom 
aux exercices intérieurs qui pourroient s'y faire, et nous rendre 
compte de tout ca qu'il croira pouvoir contribuer soit à lavance* 
ment de piété, soit au progrès des études ; et ressentant une satis^ 
faction particulière des soins que le sieur Jean Joseph Seconds, 
prêtre de notre diocèse, docteur de la Maison et Société de Sor- 
bonne, principal du collège duPlessis, se donne depuis long- 
temps à cet égard, nous le nommons pour être notre dit commis- 
saire, en la manière ci-dessus expliquée; et ce, pour aussi 
longtemps que nous le jugerons à propos. 

V. Le supérieur local pourra seul admettre, toujours néan- 
moins' sous notre bon plaisir et après les examens ordinaires, les 
sujets qui se présenteront pour être reçus dans la maison, comme 
aussi pour en exclure ceux qui seroient dans le cas d'être ren- 
voyés, à charge de nous en rendre compte et d'obtenir notre 
agrément. 

VI. Lui seul pourra donner aux sujets de la maison, quels 
qu'ils soient, maîtres ou écoliers, des attestations, soit pour être 
admis aux saints Ordres, soit pour tel autre objet que ce puisse 
être ; et quant à l'envoi aux saints Ordres, il se conformera exac- 
tement au règlement que nous avons déjà donné à ce sujet, et que 
nous renouvelons et confirmons en tant que de besoin, 

VII. Ledit supérieur local signera les permissions de sortir 
dont les jeunes gens, soit théologiens, soit philosophes ou huma- 
nistes, pourront avoir besoin ; excepté néanmoins le cas d'absence 
ou de maladie, auquel cas il sera remplacé par le procureur pour 
le gouvernement de la maison. Ledit supérieur acquittera aussi 
tous les deux jours l'une des deux messes de communauté. 



appendice:. 373 

VIII. Il y aura pareillemement un seul et unique procureur, 
lequel sera chargé de la recelte et de la dépense de toute la mai- 
son, choisi et nommé par nous pour tel temps que nous jugerons 
à propos, et entièrement subordonné au supérieur dans Texercice 
de son emploi. 11 sera logé, nourri, blanchi, éclairé aux dépens 
de la maison, et aura de plus 400 livres d'honoraire. 

IX. Ce procureur arrêtera tous les mois avec le supérieur les 
comptes de la maison, tant en recette qu'en dépense, et le rendra 
tous les ans au mois d'octobre, en présence de tel commissaire 
que nous jugerons à propos de nommer et dudit supérieur. 

X. Il y aura un préfet d'études pour les humanistes, lequel sera 
nommé par nous, constitué dans Tordre de prêtrise, et que nous 
aurons toujours soin de prendre, autant que faire se pourra, parmi 
les élèves de la maison. Il sera subordonné au supérieur, et veil- 
lera spécialement, mais de concert avec ledit supérieur, au bon 
ordre de cette partie importante de la communauté. 

Xf . Le préfet acquittera chaque jour Tune des deux messes de 
communauté. Il sera logé, nourri, blanchi, chauffé, éclairé aux 
dépens de la maison, et aura de plus 400 livrés par an d'hono*- 
raire. 

XII. Il 3» aura dix-huit mai très particuliers occupés pour le 
bien des études dans la dite communauté, dont deux pour la 
théologie, quatre pour la philosophie et douze pour les humanités, 
sauf à en augmenter ou à en diminuer le ^nombre en proportion 
de celui des écoliers. 

XIII. Tous ces maîtres seront nourris, logés, blanchis, éclairés 
aux dépens de la maison. Ceux de théologie auront de plus deux 
voyes de bois par an pour leur chauffage et 1 5o livres d'hono- 
raire; ceux de philosophie, ïo© livres d'honoraire, et le plus 
ancien aura en outre deux voyes de bois. 

XIV. Les maîtres de rhétorique auront aoo livres d'honoraire ; 
ceux de deuxième et de troisième, i5o livres, et ceux dçs basses 
classes, 100 livres chacun. Tous dépendront aussi, en ce qui con- 
cerne l'ordre du travail et des études, du préfet d'humanités sous 
les ordres du supérieur. 

XV. Voulons que notre présente ordonnance soit inscrite sur le 
registre de notre secrétariat ; qu'elle soit notifiée et lue article par 
article à ladite communauté assemblée par l'un de nos vicaires 
généraux que commettrons à cet effet. Enjoignons audit sieur 



Zlk APPENDICE. 

Baduel, supérieur, de \eiDer à ce qu'elle soit exécutée de point en 
point, et à commencer du l*' octobre prochain, et de la faire 
inscrire sur le registre de ladite maison et communauté de Sainte- 
Barbe pour y avoir recours en cas de besoin. 
Donné à Paris, le 24 septembre 1773. 



XI 

ABBÂT DU COHSBII. D*ÉTÂT FOUR mÉGULABISER I^'eXISTEIVCS 
DB Uk GOlUiUNAUTÉ DE SAdTE-KARBE . 

S9 août 4 784. 

Le Roy s*étant fait rendre compte de Tavantage qui résulte, ponr 
renseignement et l'éducation publique, de rétablissement de la 
communauté de Sainte-Barbe, et voulant donner à cette institution 
une existence légale, en lui assurant mie propriété et des secours 
permanents : Sa Majesté a résolu d'acquérir le collège des Gholets 
et les deux autres bâtiments que cette communauté occupe et tieni: 
à loyer de l'Université, et de les donner en pur don à ladite com- 
munauté de Sainte-Barbe. Sa Majesté désirant en «lème temps 
s'assurer de la valeur réelle de ces bàtimens , pour pourvoir, en 
connaissance de cause, au payement de l'indemnité qui sera due à 
raison de ladite aliénation à la Faculté des arts et au tribunal de 
ladite Université : elle a jugé à propos de faire choix d'un certain 
Nombre de commissaires, chargés de suivre et de consommer cette 
opération. En conséquence, ouï le rapport du sieur de Galonné, 
conseiller ordinaire au Conseil royal, contrôleur général des 
finances, le Roy étant en son Conseil a nommé ej; commis, nomme 
et commet les sieurs Moreau de Beaumont et Pajot de Marcheval, 
conseillers d'État, pour, en son nom, acquérir en toiite propriété 
de la Faculté des arts et du tribunal de l'Université de Paris le 
collège des Cholets et les autres bàtimens occupés par la comma- 
nauté de Sainte-Barbe, qu'elle tient à loyer de l'Université ; auto- 
rise en conséquence Sa Majesté lesdits sieurs commissaires à Gxer 
et déterminer le prix de ladite acquisition, qu'ils assigneront sur la 
ferme des Postes, et passer tous actes nécessaires à cet effet, après 
toutefois s'être fait représenter les baux à loyer et toutes les pièces 
qui pourront constater l'état et la valeur desdits bàtimens , qui 



APPENDICE. 375 

serc«it en outre préalablement estimés et décrits par deux aiKhàç- 
tectes experts, àosA l'un sera nommé par lesdits sieur» cofumis-- 
saîr^s, et l'autre par lesdit» tribunaux, de l'Université ; Sa Majesté 
se réservant le droit de penirvoir par des lettres patentes* à la àe^ 
tination ultérieure desdits bÂtimens. 

Fait au Conseil d'État du Roy, Sa Majesté y étante tenu à Ver'- 
saillesy le 29 août 1784. Signé : Le baron de BREfUsun^. 



xn 

tBOCis-VBRBAL BE l'EXÉGGTION FAJTB FOUR RÉBUlAX 
LA COMMUlfAUTÀ t» SAINTB-BABBE ikd SÀGIMB ÊOMSTIlIlTIOffNESi. 

25 avriH79<. 

En continuant la mission dont nous sommes chargés pour l'-exé- 
cution de l'arrêté du Directoire du département^ en date du dix- 
huit avril mil sept cent quatre-vingt-onze ^ nou» nous s^mes 
transportés le lundi, vingt- cinq du même mois d'avril, au collège 
ou communauté de Sainte-Barbe, où étant arrivés vers dix heures 
du matin, nous avons donné lecture dudit arrête à M. Le Mai- 
gnent, en présence de MM. les pensionnaires que nous avions fait 
rassembler dans la chapelle de ladite communauté, où, conformé- 
ment au même arrêté du département, nous avons installé mondit 
sieur Le Maignent en qualité de supérieur de ladite communauté 
de Sainte-Barbe, au lieu de M. Baduel; mais au moment où M. Le 
Maignent se disposait à lire un discours qu'il avait préparé pour 
la circonstance, tous les pensionnaires sont sortis de la chapeDe 
avec précipitation, et l'un d'eux a dit d'un ton élevé qu'ils ne re- 
connaissaient tous pour supérieur que M. Baduel, et que si on les 
forçait à en recevoir un nouveau, ils quitteraient tous la comanu- 
nauté dans le jour; d'autres ont ajouté qu'ils laisseraient le suc- 
cesseur de M. Baduel avee] les dettes que la maisoB a été oUigée 
de contracter,, attendu que ses revenus ne consistent que dans le 
montant des pensions payées par' les élèves. Sortis dans la cour, 
nous avons exhorté les pensionnaires à l'obéissance et à la sou- 
mission ; mais tous nos efforts ayant été absolument san» succès, 
nous avons cru devoir requérir la présence de M. Tur({isiet^ coift- 
odssaire de police de la section de Saiste-GeibeviètÊ, afiade pai*- 



376 APPENDICE. 

yenir, de concert avec lui, à rétablir le calme et la tranquillité dans 
la communauté. M. Turquet survenu, nous lui avons fait part de 
rétat des choses, et il a employé de son côté les moyens de dou- 
ceur et de persuasion, pour engager les pensionnaires à se cou- 
former aux lois en conséquence desquelles il avait été nonuné 
un successeur à M. Baduel; mais tous lesdits pensionnaires ont 
persisté dans la résolution de quitter la communauté de Sainte- 
Barbe, si on leur donnait un nouveau supérieur. Plusieurs des 
maîtres et chefs de cette maison ont montré la même insubordi- 
nation et le même esprit d'indépendance. Leur exemple a été 
suivi par le plus grand nombre des pensionnaires, qui ont déclamé 
avec audace et emportement contre la disposition qui nécessitait 
le changement de leur supérieur et contre les différentes personnes 
chargées de la mettre à exécution. Endn n'ayant pas pu réussir à 
ramener la paix, et voyant que nos exhortations pressantes ne ser- 
vaient qu'à augmenter le trouble, nous nous sommes retirés, après 
avoir prié M. Turquet de surveiller ladite maison, et nous avons 
dressé le présent procès- verbal, que nous avons signé les jour et 
an que dessus. Signé : Cousin. 



XIII 

approbation du rétablissement d'un pensionnat dans le local 
du ci-devant college de sainte -barbe. 

^5 novembre 4798. 

Liberté, Egalité. 

Paris le 25 brumaire an 7 de la République Française une et 
indivisible. 

Le ministre de l'Intérieur aux citoyens Lanneau et Miellé, au 
ci-devant collège de Sainte-Barbe, division du Panthéon. 

Citoyens, je ne puis qu'approuver la formation d'un pensionnat 
dans le local du ci-devant collège de Sainte-Barbe, situé près de 
l'École centrale du Panthéon et du Prytanée. Ce projet est par- 
faitement conforme aux vues du gouvernement, qui désire voir 
de pareils établissements s'élever et se fixer autour des écoles 
nationales. Il s'empressera toujours de seconder les efforts des 



APPENDICE. 377 

citoyens qui, comme vous, consacreront leurs travaux ef leurs 
veilles à la propagation de Tinstruction et de la morale républi- 
caine. En conséquence, d'après votre demande et le rapport qui 
m'a été fait, je consens à ce que ceux des élèves de votre pen- 
sionnat, qui ne seront pas en état de suivre les cours de TÉcole 
du Panthéon, soient admis comme externes aux leçons du Pry- 
tknée, à la condition qu'ils seront examinés par le Directeur et 
les examinateurs de la maison. 

Je transmets au citoyen Champagne avis de la présente décision. 

Salut et fraternité. 

Signé : François de Neufchâteau. 



XIV 

ACCEPTATION DE LA DEMISSION DE M. DE LANNEAU COMME 
SOUS-DlRECTEUR DU PRYTANEE FRANÇAIS. 

29 janvier 4 800. 

Liberté, Égalité, 

Paris, le 9 pluviôse an 8 de la République française, une et 
indivisible. 

Le ministre de Tlntérieur au citoyen Lanneau, directeur du 
Collège des Sciences et arts. 

Citoyen, p'e^t à regret que j'accepte la démission de la place de 
sous directeur du Prytanée Français, que vous m'avez transmise 
le ±1 nivôse. Vous avez su maintenir, par votre zèle et votre acti- 
vité, l'ordre et la discipline dans cette maison d'éducation natio- 
nale. Les longs services que vous avez rendus à l'Instruction* 
publique, ceux que vous vous proposez encore de lui rendre, ne 
peuvent manquer de vous assurer des droits à la reconnaissance 
du Gouvernement. 

Salut et fraternité. 

Signé : Lucien Bonapabte. 

Contresigné : Le chef de la 5" division, Arnault. 



378 APPENDICE. 



XV 

nXMTÈKE DECISION BERDOE P01TB LA K>SSE99IOIf 
DU irOM DE SAlIfTE-BARBK. 

Idjanner 4808. 

Le conseiller d'État à vie, directeur de Vlnstmction pablîqae, 
à Monsieur le conseiller d'État, préfet de la Seine. 

Je m'empresse, Monsieur et cher collègue, de vous transmettre 
ampliation de l'arrêté que Son Excellence le ministre de l'Intérieur 
a i^ndu sur mon rapport. Partageant entièrement l'opinion énon- 
cée dans votre lettre du H, je vous invite à faire signifier à 
M. Parmentier, en vertu de l'arrêté ci-joint, l'ordre de cesser sur 
le champ de donner à son pensionnat le titre de Communauté de 
Sainte-IUirbe, Le nom de Maison de Sainte^Barhe appartient exclu- 
sivement à l'établissement de M. Lannean, vu l'smtorisation spéciale 
en vertu de laquelle il exerce. 

Quant aux articles calomnieux insérés dans les papiers publics 
au sujet de cette discussion, j'ai recueilli l'avis de Son Excellence. 
Il s'est trouvé conforme au vôtre et au mien, et en conséquence j'ai 
invité le ministre de la Police générale à réprimer l'audace des 
journalistes qui osent se permettre de diffamer des écoles ouvertes 
sous les auspices du Gouvernement , *et des instituteurs avoués 
par lui. 

Signé : Foukc&oy. • 

Teneur de P arrêté âa ministre, 
Paris, le 19 jiinvier 4808. 

Le ministre de l'Intérieur, sur le rapport dn conseiller d'État à 
TÎe, directeur général de l'Instruction publique, arrête: 

Il est défendu à tout instituteur de donner à son école un autre 
titre que celui spécifié dans l'autorisation en rerfo de laquelle il 
exerce. 

Le ministre de l'Intérieur, signé: Ckotet. 



APPENDICE. 379 



XVI 

SECONDE DÉCISION HELATIVe à LA POSSESSION DU NOM 
DE SAINTE-BARBE. 

45 septembre 4 848. 

Commission de V Instruction publique. 

A Monsieur Adam, chef d'institution à Paris, 

Monsieur, la Commission n'a point accordé à M. l'abbé C<yte- 
ret l'autorisation de donner à son établissemment le titre de Nou- 
velle maison de Sainte-Barbe^ et elle lui mande de se restreindre à 
celui à^ Institution de t Université ou Institution de M. Cotterety qui 
est le seul reconnu par les règlements. 

Mais la Commission doit vous faire observer en même temps que 
votre établissement ne peut pas être désigné non plus sous la sim- 
ple dénomination de Maison de Sainte-Barbe, La lettre que M. le 
préfet de la Seine vous a écrite le 30jantier 1808 vous permet, il 
est vrai, d'ajouter au titre d'École secondaire (remplacé aujour- 
d'hui par celui d'institution) les mots. Maison Sainte-Barbe ^ 
pour indiquer que votre pensionnat est établi dans le local occupé 
autrefois par cette communauté; mais ces mots Maison Sainte- 
Barbe ne sont qu'une désignation du domicile, et non une quali- 
fication de l'école. En les employant seuls, vous feriez supposer que 
l'ancienne communauté de Sainte-Barbe est rétablie telle qu'elle . 
existait avant la Révolution, tandis que dans l'ordre de la législa- 
tion actuelle, votre institution, soumise au régime universitaire, ne 
peut avoir aucun rapport avec cette ancienne communauté. 
. Votre tableau, vos lettres, les actes d'administration de votre 
établissement, doivent donc nécessairement porter Institfition de 
tUniversitéy titre auquel vous pouvez ajouter, mais non pas 
substituer les mots, Maison Sainte-Barbe. -^aum 

La Commission vous invite à vous conformer pour cet objet aux 
dispositions des règlements dont vous réclamez vous-même l'exé- 
cution, et à lui accuser réception de la présente lettre* 

Recevez, Monsieur , l'assurance de ma considération. 

Signé: Rotb&-Collard« 



380 APPENDICE. 

XVII 

TROISIÈME DECISION RELATIVE A LA POSSESSION DU NOM 
DE SAINTE-BARBE. 

28 octobre 1821. 
Conseil royal de VInstr action publique, 
A Monsieur Lanneau père. 

J'ai communiqué, Monsieur, votre réclamation au Conseil royal. 
Il Aie charge de vous rappeler d'abord qu'il ne peut admettre 
de distinction de propriétaire et de chef d'un établissement d'édu- 
cation. Le chef seul peut être reconnu par le Conseil; ainsi ce 
que j'ai l'honneur de vous écrire s'adresse proprement à M. votre 
fils, aujourd'hui chef de l'institution dont vous avez été le fonda- 
teur. 

Le Conseil royal^ en érigeant la maison connue sous le nom 
à^ Association des anciens élèves de la communauté de Sainte-Earbe 
en collège de plein exercice, n'a rien voulu changer à ce .que la 
Commission de l'Instruction publique avait réglé par la lettre 
qu'elle vous adressa le 15 septembre 1848. 

« Votre établissement, y disait-elle, ne peut être désigné sous 
la simple dénomination de Maison de Sainte- Barbt\ La lettre que 
M. le préfet de la Seine vous a écrite le 30 janvier 1 8n8 vous 
permet, il est vrai, d'ajouter ac titre d'Ecole secondaire (rem- 
placé aujourd'hui par celui d'institution) les mots Maison de 
Sainte-Barbe^ pour indiquer que votre pensionnat est établi dans 
le local occupé autrefois par cette communauté; mais ces mots. 
Maison de Sainte-Barbe^ ne sont qu'une désignation du domicile, 
non une qualification de l'École. En les employant seuls, vous 
feriez supposer que l'ancienne communauté de Sainte-Barbe est 
. rétablie telle qu'elle existait avant la Révolution, tandis que dans 
l'ordre de la législation actuelle, votre institution, soumise au ré- 
gime universitaire, ne peut avoir aucun rapport avec cette com- 
munauté. Votre tableau, vos lettres, les actes d'administration de 
votre établissement, doivent donc nécessairement porter : Insti- 
îutlon de t Université ^ titre auquel vous pouvez ajouter, mais non 
pas substituer les mots Maison de Sainte-Barbe, etc. » 



APPENDICE. 381 

Le Conseil royal n'ayant rien changé à la décision de la Com- 
mission de rinstruction publique, M. votre fils peut continuer 
d'ajouter ces mots, Maison de Sainte-Barbe au titre d'institution 
de l'Université. Cette désignation , la seule que votre éta- 
blissement ait été légalement autorisé à prendre, opposée au 
litre de Collège de, plein exercice, que porte la maison des anciens 
élèves de la communauté de Sainte-Barbe, préviendra sans aucun 
doute les confusions et les méprises que vous paraissez craindre. 

Je vous prie, monsieur, d'agréer l'assurance de ma considéra- 
lion la plus distinguée. 

Si^né : Baron G. Covibr, * 

XVIII 

MEMOIEK DE M. ODILON BABBOT, PBÉFET DE I.A SEINE, 
AU CONSEIL GENERAL. 

\\ septembre 4 830. 

Messieurs , 

En .fondant une institution dans les bâtiments qui ont été le 
siège de l'ancien collège de Sainte-Barbe, M. de Lanneau s'était 
pro|)Osé d'y remettre en vigueur les principes et le mode d'ensei- 
gnement qui avaient fait le succès de cette célèbre maison d'édu- 
cation. 

Il donna donc à son institution le nom de celle qui l'avait pré- 
cédée dans le même local, et prit ainsi l'engagement de se rendre 
digne d'un héritage qu'il était naturellement appelé à recueillir. 

Cet engagement a été rempli. Les nombreux avantages que les 
élèves de M. de Lanneau remportèrent dans les concours généraux, 
et plus encore peut être les succès obtenus par beaucoup d'entre 
eux dans diverses carrières, et que leur reconnaissance rapportait 
à leur digne maitre, attestèrent bientôt l'excellence et la bonne 
direction des études dans l'Institution Maison-Sainte-Barbe. 
, La réputation brillante qu'elle s'était acquise sous cette déno- 
mination datait de plus de vingt années, lorsqu'en 1821 une insti- 
tution rivale, locataire de bâtiments appartenant à la ville et 
située rue des Postes, s'annonça sous le titre de Collège Sainte- 
Barbe. 

M. de Lanneau s'empressa de réclamer contre cette usurpation 



382 APPENDICE. 

qui attaquait la prospérité de son établissement; mais il reconnut 
bientôt que, sous peine de compromettre l'existence même de cet 
établissement, il devait s'arrêter, et attendre des circonstances plus 
favorables pour obtenir la justice qui lui était due à tant de 
titres. t 

M. de Lanneau renouvelle aujourd'hui ses réclamations et tous 
les présente de confiance. C'est à vous, Messieurs, qu'en effet il 
appartient d'y faire droit^ car l'institution de la rue des Postes, 
érigée d'abord en collège de plein exercice, est aujourd'hui une 
sorte de collège communal appartenant à la ville. 

Persuadé, Messieurs, que vous reconnaîtrez avec moi combien 
ces réclamations sont fondées, et que vous vous empresserez de 
les accueillir, puisque la ville ne peut vouloir profiter plus long- 
temps d'une usurpation qui blesse toutes les idées de justice et 
d'équité, j'ai l'honneur de vous proposer de prendre une délibé- 
ration portant que le collège de la rue des Postes cessera immé- 
diatement d'être désigné sous le nom de Sainte-Barbe. 

Je vous proposerai encore. Messieurs, de vous occuper en 
même temps du soin de choisir et d'indiquer le nouveau nom 
que ce collège devra porter à l'avenir. 

Fait à Paris, le 1 i septembre i 830. 

Le conseiller d'État, Préfet. 



XIX 

ABRÉTÉ DU CONSEIL MUNICIPAL DE PARIS RELATIVEMENT AU NOM 
DE SAINTE-BARBE. 

4 7 septembre -1830. 

Le Conseil général du département de la Seine, faisant fonctions 
de Conseil municipal de la ville de Paris, 

Vu là lettre de M. de Lanneau, chef de l'institution de Sainte- 
Barbe, par laquelle il réclame contre l'usurpation de ce titre par 
M. Henri NicoUe, directeur du collège de plein exercice, rue des 
Postes ; . 

Vu la consultation délibérée en faveur de M. de Lanneau par 
six avocats du Barreau de Paris; 



APPENDICE. 383 

Vu le mémoire adressé au Conseil municipal parM. le Préfet de 
la Seine ; 

Considérant que le nom de Sainte-Barbe appartient exclusive- 
ment à la maison d'éducation de M. de Lanneau, qu'il fait partie 
de sa propriété, et que nul ne peut se l'approprier ; 

Considérant que l'usurpation de ce titre tend évidemment à 
porter préjudice à M. de Lanneau, en possession depuis plus de 
trente ans d'une maison d'éducation qui a acquis la réputation la 
plus brillante et la mieux méritée, et d'où sont sortis les hommes 
les plus distingués ; 

Considérant qu'on ne saurait mettre trop d'empressement à 
rendre à M. de Lanneau la justice qu'il sollicite, 
Arrête : 

1» A compter de ce jour, le collège de plein exercice, rue des 
Postes, cessera de porter le nom de Sainte-Barbe, qui appartient 
exclusivement à la maison d'éducation de M. de Lanneau. 

2** Ce collège portera désormais le nom de Collège Rollin, 

3" Il n'est au surplus rien changé aux dispositions et règlements 
qui régissent ce collège. 

Sign^ au registre : L. Beau, président. Le Comte, secrétaire. 



XX 



NOTIFICATION DE LA DÉCISION DU CONSEIL HOYAL DE L IN6TEUCTI0(N 
PUBLIQUE CONFORME A l' ARRETE «DU CONSEIL MUNICIPAL. 

4 4 octobre iS20. 

Ministère de V Instruction publique, 
A Monsieur de Lanneau. 

Monsieur, j'ai l'honneur de vous informer que le Conseil royal 
de l'Instructiori publique, faisant droit aux réclamations que vous 
m'avez adressées, et conformément à la délibération du Conseil 
général du département de la Seine, en date du 17 septembre 
dernier, a décidé dans sa séance du 6 octobre courant que la mai- 
son d'édacation que vous dirigez prendra la dénomination d^Insti- 
tution Sainte-Barbe^ et que le collège de plein exercice établi rue 
des Postes portera le nom de Collège Rollin, 

Je me félicite, Monsieur, d'avoir à vous annoncer une décision 



384 APPENDICE, 

qui rend exclusivement à votre établissement un titre que la dîjftecr- 
tion sage et éclairée de ses chefs a mis en honneur dans TUniver- 
bité et parmi les familles. 

Recevez, Monsieur, Fassura^ce de ma considération distinguée. 

Le ministre de Tinstruction publique et des cultes, signé : Dxjc 
DB Broclie. 

XXI. 

P&EMIEAS STAVJTS DE L'ASSOCIATION AMICALE DES ANCIEEIS ^BEJBVfiS 
DB SAINTE-BARBB. 

4 avril 4 820. 

Exposé. 

Chaque année, le 4 décembre, les élèves de Sainte-Barbe 3e 
réunissent pour resserrer les liens de Tamilié la plus franches,. 
Tamitié de collège , et pour exprimer ensemble le témoignage de 
leur reconnaissance envers le digne instituteur qui conduisit leurs 
premiers pas dans la carrière de la vie. Là, ils se rappellent mu- 
tuellement les souvenirs de leur enfance, donnent des regrets à 
leurs camarades absents, plaignent la destinée de ceux qui ne 
sont plus, applaudissent aux succès de ceux qui se distinguent 
dans les lettres ou dans les sciences, et citent a^ec orgueil les 
noms de leurs amis qui s'illustrent dans la carrière des armes.. 
Ils consacrent à la bienfaisance les derniers instants de leur. réu- 
nion, en venant au secours d'un camarade qui gémit dans l'infor- 
tune, ou d'un professeur à qui Tége et les infirmités ne permet- 
tent plus de continuer ses nobles travaux. Mais ces réunions ne 
sont malheureusement formées que du petit nombre de barbistes 
qui résident ordinairement dans la capitale; tous ceux qui en 
sont éloignés regrettent d'être privés de venir s'asseoir au ban- 
quet de 1 amitié, et de pe pouvoir s'associer au- bienfait de leurs 
anciens camarades. Ces regrets, exprimés depuis quatre années 
par les barbistes disséminés sur le sol de la France ou retenus 
chez l'étranger, ont fait naître l'idée d'une association fondée sur 
l'amitié qu'ils se portent mutuellement, et sur la reconnaissance 
dont ils sont tous pénétrés pour le vénérable directeur de Sainte- 
Barbe, association dont le but unique sera d'établir entre eux un 



APPENDICE. 38S 

centre commun de relations, et de venir au secours d'un élève en 
proie à l'infortune, d'un professeur, maître d'études, ou autres, 
infirmes. Agés, ou hors d'état, par quelque cause que ce soit, d'as- 
surer leur ^existence ; et enfin de toute personne qui aurait été at- 
tachée à l'établissement, comme les concierges, les hommes de 
service, etc., etc. 

L'amitié ne gagnera pas seule à cette assocnation ; les lettres, 
les sciences, les arts, le commerce y trouveront encore un avan- 
tage précieux. Leurs professions ou leurs propriétés retiennent 
des barbistes dans toutes nos provinces et dans les principales 
villes du monde; il n'en est aucun qui ne se fasse un plaisir 
d'obliger un camarade en lui transmettant les renseignements 
qu'on ne peut souvent se procurer que dans telle bibliothèque 
étrangère, dans telle place de commerce, dans telle partie de la 
France ou du globe, etc. 

Ce projet d'association, communiqué à l'ancien chef de l'éta- 
blissement, qui s'est empressé d'y applaudir, proposé dans la réu- 
nion des barbistes le 4 décembre 1819, et déiinitivement adopté 
dans une réunion du 4 avril 1 820 , est ainsi conçu : 

Forme de V Association, 

Aet. !•'. 11 existe entre tous les élèves de Sainte-Barbe une 
Association fondée sur leur amitié mutuelle et sur leur reconnais- 
sance unanime envers leur instituteur. 

AUT. 2. L'oBjet unique de l'Association est d'établir entre eux 
un centre commun de relations amicales, et de venir au secours 
de leurs camarades, de leurs professeurs, inspecteurs, maitre^ 
d'études et serviteurs, qu'une cause quelconque, autre que celle 
d'inconduite, aura précipités dans le malheur. 

Art. 3. L'Association prendra le nom à! Association amicale et 
de bienfaisance des élèves de Sainte^Biirbe, 

Art. 4. Elle sera dirigée par onze élèfes élus à la majorité 
dans une assemblée de barbistes ; les onze élèves élus choisiront 
parmi eux un président, un secrétaire et un trésorier. 

Art. 5. Leurs fonctions dureront deux années, après lesquelles 
il sera procédé à une autre nomination ; les élèves sortants pour- 
ront être renommés. En cas de démission, ou de décès pendant 
l'exercice de leurs fonctions, ils seront également remplacés à la 
m. 25 



386 APPENDICE. 

plaralité des voix dans une réanion, de vingt-'cinq élèves an 
moins. 

Aet. 6* Le président réanira les votes sur les objets mis en dé» 
libération ; sa voix sera comptée ainsi que celle du secrétaire et 
du trésorier. 

Art. 7. Le secrétaire sera chargé de la correspondance géné- 
rale avec les élèves de Paris et ceux des départements et de 
l'étranger, de la rédaction des délibérations et du dépôt des 
papiers et registres de l'Association. 

Abt. 8. Le trésorier demeurera chargé des deniers de l'Asso- 
ciation, dont il ne pourra disposer que sur un mandat signé par 
six au moins des onze administrateurs. * 

Abt. 9. Tous les élèves de Sainte-Barbe sont admis à faire 
partie de TAssociation en versant annuellement, entre les mains 
de l'un des administrateurs, une somme dont la quotité sera fixée 
chaque année, mais qui, dans aucun cas, ne pourra excéder vingt 
francs. Les fonctionnaires du Collège sont également admis à 
souscrire. 

Art. 10. Le montant des souscriptions sera remis au trésorier 
pour en disposer comme il est dit aux articles 8 et 15. 

Art. 11. Chaque année, les administrateurs seront tenus de 
dresser une liste imprimée des souscripteurs, de former un 
compte des recettes et dépenses de ^Association, et de faire con- 
naître remploi des fonds et les causes qui ont déterminé cet 
emploi. 

Art. 12. Cette liste, qui indiquera les nom, prénoms, profes- 
sion et domicile des souscripteurs, sera communiquée avec le 
compte ci-dessus aux élèves, lors de leur réunion du 4 décembre de 
chac[ue année, et envoyée à la même époque à tous les souscrip- 
teurs de Paris, des départements et de l'étranger.. 

Art. 13. Pour avoir droit aux secours de l'Association des 
élèves de Sainte-Barbe, il ne sera pas nécessaire d'être souscrip- 
teur ; il sufiGra d'avoiif été élève, professeur, maître d'études ou . 
serviteur de l'établissement, et de réunir les conditions ci-après : 
1° Les élèves devront avoir fait au moins deux classes au collège 
de Sainte-Barbe, depuis la quatrième inclusivement jusqu'à la 
rhétorique ou les mathématique». La rhétorique et les mathé^ 
matiques spéciales compteront pour deux années ; 2» Les profe»- 
seurs devront avoir occupé aa moins pendant cinq ans l'une des 



APPENDICE. 387 

chaires du eallége, dan» quelque classe que ce soit ; 3"" Les ins- 
pecteurs et maltrea d'études devront avoir rempli cette fonction 
pendant sept ans au moins, dans quelque salle d'étude que ce 
soit ; 4° Les gens et serviteurs de rétablissement devront y être 
restés au moins pendant dix ans aux gages du directeur. Personne 
n'aurait droit aux secours, s'il était sorti de Sainte-Barbe pour 
cause d'inconduite. * 

Art. 14. Les élèves, professeurs, inspecteurs, maîtres d'études 
et serviteurs qui seraient dans le cas de faire à l'Association une 
demande de secours, devront la former et la motiver par écrit, et 
l'adresser au secrétaire ou à l'un* des administrateurs. 

Art. 1 5. Le secrétaire convoquera dans le plias bref délai les 
administrateurs, et leur soumettra la réclamation. Ils délibére- 
ront séance tenante, et, en se conformant aux dispositions de 
l'article 6, fixeront la quotité du secours alloué, et signeront le 
mandat de la somme déterminée. Ce mandat à vue sur le trésorier 
sera par- le secrétaire envoyé dans les vingt-quatre heui*es au 
signataire de la demande. *" » 



XXII. 

STATUtS HÉFOBMis D£ L* ASSOCIATION. 

^852-^854. 

L-— Il existe depuis 1820, entre les anciens élèves du collège 
Sainte-Barbe, une Association fondée sur leur amitié mutuelle. Son 
nom est /Association amicale des anciens barbistes. 

2. — L'objet unique de l'Association est d'établir entre tous les 
anciens barbistes un centre commun de relations amicales, et de 
venir en aide aux camarades malheureux. 

3. — Tout ancien barbiste peut devenir membre de l'Associa- 
tion en versant ou un capital de 24O fr* une fqis payé, ou une co- 
tisation annuelle de 12 fr. — Dans le premifer cas il est fondateur 
de l'Association, son nom est inscrit à perpétuité dans les Annuai- 
res et son versement est converti en inscriptions de rente de 
l'Etat, qui ne peuvent jamais être aliénées. — Dans le secoud cas, 
il est souscripteur annuel^ et son nom est inscrit sur la liste des 
souscripteurs de chacune des années pour lesquelles il verse sa 



388 APPENDICE. 

cotisation. — Tout ancien barbiste qui, outre le capital de fonda- 
teur ( 240 fr. ), verse une somme au moins égale, est inscrit à per- 
pétuité dans les annuaires sur la liste des donateurs ^ et son don est 
converti en inscriptions de rentes de TÉtat, qui ne peuvent jamais 
être aliénées. 

4.^ — Pour avoir recours à l'Association, il n'est pas nécessaire 
d'en être membre; il suffit d'être ancien barbiste. — L'Association 
peut, dans certains cas, venir en aide aux pères, aux mères, aux 
veuves et aux enfants d'anciens barbistes. 

5. — L'assemblée générale des membres de l'Association se réu- 
nit le 4 décembre de chaque année; elle nomme le Comité, entend 
et approuve, s'il y a lieu, les comptes annuels des receltes et 
dépenses. 

6. — Le Comité est composé : !• de vingt membres élus tous 
les deux ans par l'assemblée générale du 4 décembre; 2° de mem- . 
bres à vie (on obtient ce titre après dix élections, c'est-à-dire 
après vingt 'ans d'exercice). — Le «Comité représente et adminis- 
tre l'Association ; il nomme ses présidents, ses secrétaires et son 
trésorier. 

7. — Le trésorier ne peut disposer des fonds que sur un mandat 
signé par sept au moins des membres du Comité. Il dresse, chaque . 
année, la liste des fondateurs, la liste des donateurs, la liste des 
souscripteurs, ainsi que les comptes des recettes et des dépenses, 
sans y énoncer les noms des camarades secourus. Ces comptes, 
s'ils sont approuvés par le Comité, sont soumis à l'approbation de 
l'assemblée générale du 4 décembre , puis imprimés et adressés au 
plus tard en février à tous les membres de l'Association. 



XXIIL 

STATUTS DE LA SOCIÉTÉ DE SAINTE -BARBE , 

Arrêtés par actes passés ^devant M* Aubry, notaire à Paris, les K \ juin 1840 
et 24 février 1841. 

Exposé, 

En quatorze cent trente, dans un emplacement situé sur l'un 
des points les plus élevés et les plus sains de la capitale, Jean Hu- 
bert fonda un collège sous le patronage et le nom de Sainte^ 



APPENDICE. 389 

Barbe, Cet établissement, dont la durée excéda trois siècles et 
demi, fat célèbre par sa dicipline sévère et ses fortes études. Il ne 
• fut fermé qu'après la Révolution de 1789 et par suite des troubles 
du temps. Le quatre décembre mil sept cent quatre-vingt-dix-huit, 
M. Victor de Lanneau vint, dans le même local et sous le même 
nom de Sainte-Barbcj créer un collège. Il y déploya un dévouement 
si complet pour ses élèves, un caractère si désintéressé, si ferme 
et si digne, une appréciation si juste des causes qui peuvent élever 
Tesprit de la jeunesse et exciter son émulation, que bientôt les 
succès les plus brillants couronnèrent ses efforts et semblèrent lui 
présager une longue prospérité. 

Cependant les événements et les vicissitudes de mil huit cent 
quatorze et de mil huit cent quinze eurent pour lui et pour son 
institution de fâcheuses conséquences. Il lutta néanmoins contre la 
mauvaise fortune, soutenu surtout par le respect et rattachement 
de ses élèves anciens et nouveaux, et le collège resta toujours à la 
hauteur de sa renommée, et par le nombre des écoliers, et par 
l'éclat des succès universitaires. Mais après la crise financière de 
mil huit cent trente et un, M. Victor de Lanneau étant décédé et 
M. Adolphe de Lanneau ^ son (ils, lui ayant succédé dans la direction' 
de l'établissement, les anciens élèves crurent que le moment était 
venu pour eux de donner un témoignage solennel de leurs senti- 
ments de reconnaissance pour le' père, d'attachement pour le fils, 
en venant se grouper autour de ce dernier et en apportant les 
fonds nécessaires pour préserver d'un sinistre fatal la maison de 
Sainte-B^rbe et la famille de son fondateur. Ce concours, loyale- 
ment offert, loyalement accepté, sauva le collège, lui rendit une 
nouvelle vie, lui assura une nouvelle gloire. 

Ceux qui apportèrent ainsi leur tribut, se réunirent sous le titre 
de : Association amicale des anciens élèves de Sainte- Barbe\ sans 
toutefois faire constater par actes authentiques le fait et l'objet de 
leur réunion. Seulement et suivant acte du 30 décembre 1831, en- 
registré, MM. Ganneron, Bellaigue et Leclercq, agissant pour eux 
et leurs èamarades, payèrent le fonds de l'établissement, c'est-à- 
dire sa clientèle, son mobilier et les recouvrements en dépendant. 
Par suite, et toujours dans le même esprit de gratitude et de dés- 
intéressement, les anciens élèves se dévouèrent à l'administration 
du collège. 

En mil huit cent trente-huit, M. Adolphe de Lanneau, élu pour 



390 APPENDICE. 

la troisième fois par ses concitoyens maire dn donziènie arronclis- 
sèment, crut devoir résider ses fonctions de directeor ; elles 'fo- 
rent alors déférées à M. Pierre-Victor-Àlexandre Labrouste^ an- 
cien élève de Sainte-Barbe et membre de l'Association. 

L'institution aujourd'hui est en pleine voie de prospérité; !« 
nombre chaque jour croissant des élèves, les prix remportés an 
concours général, les admissions et les succès obtenus à l'Ecole 
polytechnique et aux antr^ Écoles spéciales du gouvernement, 
l'attestent d'une manière bien évidente. Mais les bâtiments ne siiP- 
ûsent pins; plusieurs d'ailleurs sont dans un tel état de vétusté 
qu'ils sont inhabitables et menacés d'une ruine prochaine. Il faut 
donc, ou fermer le collège, renoncer à ce glorieux et utile avenir 
que tout semblait lui garantir, tromper les espérances des nom- 
breux barbistes qui se promettaient de confier à la libérale insti- 
tution où avait été élevée leur enfance, l'enfance de leurs fils, ou 
former une société régulière , puissante , et faire de nouveau nn 
appel aux anciens camarades pour réunir les fonds nécessaires, 
afin d'assurer au collège la propriété de l'immeuble où il est de- 
puis plus de quatre cents ans, afin d'y construire les bâtiments 
convenables ; et afin de lui donner , sous le rapport des études 
aussi bien que sous celui de l'éducation morale, tous les dévelop- 
pements dont il est susceptible. 

C'est ce parti que les fondateurs de la présente Société croient 
devoir adopter. Ils le font avec la conviction que cette entreprise 
est éminemment utile, éminemment morale, qu'elle offre une ga- 
rantie précieuse aux familles, une sécurité complète à ceux qui 
voudront y participer, 

' L'entreprise est éminemment utile : et en effet les barbistes sont 
depuis longtemps unis par une pensée de généreuse fraternité, dont 
aucune autre institution n'offre à ce point l'exemple. Grâce à ce 
titre, les uns, à leur entrée dans le monde, trouvent des guides 
bienveillants ou des protecteurs zélés ; les autres, tombés dans un 
malheur immérité, trouvent des secours à la caisse fondée a cet 
effet et alimentée par des souscriptions annuelles ; d'autres enfin 
lèguent en mourant de jeunes orphelins à la grande famille, qui 
les fait élever à ses frais. Conserver le collège, c'est conserver la 
cause et la source dé tels sentiments, de tels bienfaits, et certes, 
c'est là une œuvre éminemment utile. 

Bîlle est éminemment morale; car une institution ainsi réédifiée, 



APFENDICEL 391 

où les élèves reçoivent de tout ce qui les entoure ce pieux enseâ- 
gnement, que c'est un devoir, un bonheur d^honorer les maiires, 
de payer à eux et à leur mémoire un étemel tribut de reconnais- 
sance ; on les maîtres aussi trouvent partout autour d'eux repro- 
duite cette encourageante vérité que, quand on est bon, dévoué et 
digne envers la jeunesse, on met dans son cœur des germes impé- 
rissables d'amour et de respect : une institution comme ceUe4à 
doit, plus que toute autre, élever Fàme, inciter au bien et doter 
la patrie de bons citoyens. 

Elle offre une garantie précieuse aux familles; car Sainte-Barbe 
est une maison, qui est administrée, surveillée par des hommes 
dont le zèle pour le bien-être des enfants ne peut être mis en 
doute, puisque eux-mêmes ils y placent leurs fils; où l'intérêt indi- 
viduel n'est pas, comme il pourrait l'être dans un établissement 
particulier, le mobile des actes de l'administration; et où cepen^ 
dant, mieux que dans les collèges royaux, dont la règle est néces- 
sairement uniforme et inflexible, on peut, tout en continuant et dé- 
veloppant encore les fortes éludes qui ont fait de toui temps la 
gloire de Sainte-Barbe, donner aux élèves des soins particuliers et 
appropriés à la force', à l'intelligence, à la destination de chacun, 
leur dispenser ainsi les bienfaits d'une éducation commune et gé- 
nérale, en même temps que ceux d'une éducation particulière et 
spéciale. 

L'entreprise eufîn^ car il faut bien aussi examiner en peu de 
mots son mérite financier, offre un placement aussi solide qu'utile 
pour ceux qui voudront y concourir. Les actionnaires seront 
propriétaires d'un immeuble parfaitement situé pour un collège. 
Ils seront aussi propriétaires d'un étabUssement auquel sa vieille 
réputation universitaire et l'active fraternité de tous les barbistes 
assurent une clientèle qui s'accroît chaque jour et qui compte des 
correspondants et des partisans dé%'oués dans toutes las classes de 
la société, dans toutes les parties du monde. , 

Avec ces éléments de succès, la prospérité actuelle du collège ne 
peut que s'accroitre. 

Les fondateurs ont voulu que Tavantftge des propriétaires fût 
toujours subordonné à la moralité de l'institution et ne fût jamais 
.un obstacle aux services qu'elle est appelée à rendre à l'éducation. 
Par ce motif ils ont arrêté qu'une partie des bénéfices serait em- 
ployée en œuvres conformes à l'esfM-it de la fondation, telles que 



392 APPENDICE. 

hommages et rémnnéralions anx anciens maitresy^améliaratinâs en 
faveur des élèves, bourses à des sujets intéressants, etc. ; mais 
après ces dignes emplois, le surplus des produits devra se répartir 
entre les sociétaires, et ce surplus pourra être important. 

En résumé, Ton peut dire que la Société dont il s'agit est l'ap- 
plication à une entreprise généreuse et utile de l'esprit d'assocna- 
tion compris dans toute sa pureté et sa féconde libéralité. . 

Les fondateurs la présentent avec confiance à leurs aocieiis 
camarades ; ils s'adressent à eux et à eux seuls, parce que, grâce 
à cette sympathie qui existe entre eux, l'administration du collège, 
concentrée entre les barbistes, restera fidèle à la pensée de sa 
fondation, conservera cette unité de vues et de principes qui doit 
en perpétuer le succès et en assurer les bienfaits. 

C'est dans cet esprit que les statuts ont été arrêtés comme JJi 
suit : 

Dispositions, 

Art. i". — Il est fondé entre tous ceux qui seront proprié- 
taires des actions ci-après créées sous l'article 7, une Société ano- 
nyme sous le titre de Société de Sainte-Barbe, 

Art. 2. — L'objet de la Société est de conserver et de régir 
l'institution connue sous le nom de Collège Sainte- Barbe {de Lan- 
neau). Son but est de donner à cette institution, sous le rapport 
du bien-être des enfants, de la moralité de l'éducation et de la 
supériorité des études, tous les développements dont elle peut 
encore être susceptible. Les opérations matérielles que la Société 
aura à faire sont, entre autres : 1® l'acquisition, conformément à 
l'article 6 ci-après, de l'établissement de Sainte-Barbe de Lan- 
neau ; 2° l'acquisition des immeubles affectés actuellement à l'éta- 
blissement, et de tous autres dont il pourrait par suite être utile 
d'assurer la propriété à l'Association ; 3** les constructions néces- 
saires, tantj)Our remplacer les bâtiments qui ne présentent plus, 
soit la solidité, soit les convenances suffisantes, que pour donner 
à l'établissement les divisions, les distributions et tous les acces- 
soires que peuvent réclamer les besoins d'un enseignement libéral 
et complet, en même temps que les exigences de l'hygiène et de 
la discipline. 

Art. 3. — Le siège de l'établissement est dans le local où Jean 
Hubert, en \ 430, fonda le premier collège du nom de Sainte- 



APPENDICE. > 393 

• 

:Bailiey et où, le 4 décembre 1798, M. Victor de Lanneau vint 
créer sous le même nom Tinstitution qui y existe aujourd'hui, et 
dont ses anciens élèves veulent assurer et perpétuer la durée. Il 
ne pourra être changé que par délibération de l'assemblée géné- 
rale. — Le domicile de la Société, attybutif de juridiction, est fixé 
à Paris. 

Art. 4. •— La durée de la Société est de cinquante années, à 
partir de l'ordonnance d'autorisation. — La Société pourra être 
renouvelée à l'époque et dans les termes ci-après déterminés à 
l'article 29, paragraphe 3. 

Art. 5. — Le capital de la Société est fixé à cinq cent vingt 
mille francs, complètement souscrits par les personnes dénommées 
en fin des présentes. Ce capital pourra être, pendant le délai 
d'une année, à partir de Tordonnance d'autorisation, porté à six 
cent mille francs, au moyen d'une création de nouvelles actions 
au pair, et ce, en vertu d'une décision du Conseil d'administration, 
qui devra être publiée dans la forme déterminée par la loi du 
31 mars 1833. La délibération prise à cet effet par le Conseil 
d'administration sera soumise à l'approbation du Gouvernement 
dans le délai d'un mois ; elle devra indiquer les noms des sous- 
cripteurs des nouvelles actions émises et le nombre des actions 
souscrites par chacun d'eux. — Toute augmentation qui devrait 
porter ce capital à une somme supérieure à six cent mille francs, 
ou qui serait proposée après l'expiration d'une année à partir de 
l'ordonnance d'autorisation, ne pourrait avoir lieu que dans les 
formes déterminées à l'aticle 29, paragraphe 3. 

Art. 6. — Sur ce capital, le Conseil d'administration est auto- 
risé à employer la somme nécessaire pour le payement de l'éta- 
blissement. Le reste servira au payement des immeubles et à la 
construction des bâtiments nécessaires à l'établissement', ainsi 
qu'au fonds de roulement. 

Art. 7. — § 1". Le fonds social est divisé en mille quarante 
actions de cinq cents francs. « 

§ 2. Toutes les actions sont nominatives. Elles seront extraites 
de registres à souches, et numérotées de un à mille quarante. 
Elles seront, tant sur la souche que sur le titre à délivrer, signées 
du président du Conseil d'administration et du directeur, et visées 
par le trésorier de la Société. — Il sera fait par l'actionnaire une 
élection de domicile à Paris, élection attributive de juridiction, et 



394 o APPENDICE. 

qni servira de règle ponr les avis et communicatiens à eoy^yer à 
chaque associé ; cette électioD de domicile sera nieotioDiiée sur la 
aouche de chaque action. — Toat actionnaire pourra changer son 
domicile élu, |>our^ii qu^il le remplace par un autre également à 
Paris,, et qu'U signe ce changement sur la souche on le fasse 
signifier par acte extra-judiciaire au directeur,' qui devra ea faille 
faire mention à la sooche. — Les titres d'actions seront frappés 
d'mi timbre sec, propre à la Société. Ils porteront un extrait (des 
présents statuts. 

§ 3. Les actions sont payables : un quart dans le mois qui sui- 
vra la date de l'ordonnance d'autorisation, les trois autres quarts 
de quatre mois en quatre naoîs à partir de la même date. — La sous- 
cription d'une action s'effectue en signant quatre engagements ami 
époques concordantes avec les termes ci-dessus indiqués. Ces en- 
gagements ne seront pas négociables par voie d'endossement. Tout 
souscripteur pourra toujours valablement, soit payer de suite le 
montant de l'action, soit anticiper les termes de ses engagements. 
— Lors du payement pour solde d'une action, le titre déiinltif en 
sera remis à l'actionnaire ; 3usqne4à il n'aura qu'un titre provi^ 
soire , nt)minatif , ou promesse d'action non négociable, qui lui 
sera délivré a^ moment de la souscription. < — £ncasde non- 
payement, l'action sera publiquement vmulue par le ministère d'un 
notaire, aux risques et périls du retardataire, à moins que le 
Conseil d'administration ne juge plus convenable de poursuivre Je 
payement des obligations. 

§ 4. Dans le but de conserver autant qme possible à l'Associa- 
tion l'esprit qui a présidé à sa formation, les personnes apparte- 
nant on ayant appartenu à Tnne des trois catégories ci-après indi- 
quées ont été seules admises à souscrire les actions, savoir : élèves 
de Sainte-Barbe ; parents ou alités d'élèves de Sainte-Barbe, en 
lig^ne directe ou collatérale, jusqu'au deuxième degré inclusive- 
ment; professeurs ou fonctionnaires de l'institution depuis six 
années a»i moins. — Si, par^uite de transmission quelconqae, la 
propriété d'une action passe à des personnes n'appartenant à au- 
cune de ces catégories, le Conseil d'administration aura le droit 
de Tacheter pour le compte de la Société, en en remboursant la 
valeur nominale, ainsi que les dividendes restant à distribuer. 
Toutefois, le Conseil devra user de ce droit dans les dens mois du 
jour où, soit le transfert, «oit la mutaftion, aura été inscrksur le 



APPENDICE. 395 

registre dont il va être parlé dans le paragraphe suivant. Si da&s 
ce délai il n'a pas réalisé cet achat ou fait des offires réelles à Feffet 
de le réaliser et d'en payer le prix, conformément à ce qui vient 
d'être dit, la Société sera déchue dudit droit, le Conseil d'adminis- 
tration ne pourra plus l'exercer, et le nouveau propriétaire restera 
valablement saisi de l'action. — Les achats d'actions à opérer, 
comme il vient d'être dit, pour le compte de la Société ne pour- 
ront avoir lieu que sur son fonds de réserve, et les actions ainsi 
achetées devront être conservées comme valeurs de la réserve. 

§ 5. Les transferts s'opèrent et les mutations sont constatées 
par déclarations inscrites sur registres^ à ce destinés, et signées des 
parties intéressées, du directeur et du président du Conseil d'ad- 
ministration. Sur la souche du titrp il est fait mention du transfert 
ou de la mutation. Le cessionnaire ou le successeur aura droit vis- 
à-vis de la Société à tous revenus échus et non encore payés. 

§ C. Les actions sont indivisibles. La Société ne reconnaîtra ni 
transfert partiel, ni copropriété d'action. Lorsqu'il se trouvera 
plusieurs ayants droit à une action, ils devront s'entendre pour 
se faire représenter par un titulaire, qui sera seul reconnu par la 
Société. • 

§ 7. Chaque action donne droit à une part proportionnelle 
dans toutes les valeurs composant l'actif social , et à un prélève- 
ment sur les bénéfices, d'après les bases fixées dans l'article â2. 
Les actions donnent droit en outre aux répartitions qui peuvent 
avoir lieu dans les termes de l'article 2â, paragraphe 4, dernier 
alinéa. 

§ 8. Chaque payement de dividende est constaté par une quit- 
tance de l'actionnaire ou de son fondé de pouvoirs. — Les divi- 
dendes échus, qui ne sont pas réclamés par les ayants droit dans 
les cinq ans du jour de leur exigibilité, déterminée comme il sera 
dit ci-après au paragraphe 4 de l'article 22, sont prescrits au 
profit de La Société. 

Art. 8. — Les actionnaires devront se conformer aux présents 
statuts, qui seront obligatoires pour eux comme s'ils les avaient 
signés. 

Art. 9. — La Société est administrée paij, un Conseil qui sera 
composé de quinze membres au moins, de vingt et un au plus, qui 
seront nommés par l'assemblée générale. Les membres du Conseil 
d'administration doivent être anciens élèves de Sainte- Barbe; îis 



396 APPENDICE, 

doivent aussi être et demeurer, pendant toute la dui^ë de leurs 
fonctions, propriétaires de quatre actions au moins/ 

Art. 10. — Le Conseil d'administration est investi de tous les 
pouvoirs nécessaires pour la gestion et l'administration des affaires 
de la Société. Il dirige l'administration matérielle de Télziblisset 
ment et se concerte avec le directeur pour la direction des études 
et Tadministration morale de l'institution; arrête le tarif des pen* 
sions et statue sur les exceptions qu'il peut être convenable d'y 
apporter ; délibère et statue sur les demandés ou propositions de 
bourses entières ou partielles en faveur d'enfants que recommaii'^ 
derait à la Société, soit la qualité de fils d'anciens baii)istes tombés 
dans le mal|iear, soit toute autre puissante considération.; arrête, 
sur la proposition du directeur, le cadre du personnel de l'ailmi- 
nistration; Gxe les appointements, droits et avantages des (&ao* 
tionnaires, professeurs et employés; fait tous traités à ce sujeti; 
nomme l'agent comptable, et règle ses attributions, appointements 
et avantages, le tout comme il sera dit ci-après à l'article I&5 
règle les dépenses courantes et autorise les dépenses extraordi-»- 
naires; arrête et autorise les acquisitions et aliénations d'immeU'- 
blés et de meubles, les locations et baux, même excédant neuf tus; 
les transactions, emprunts et affectations hypothécaires quHl juge 
convenable de faire pour le compte de la Société, mais cependanl 
avec l'autorisation de l'Assemblée générale pour les aliénations, 
acquisitions et affectations d'immeubles ; transige, compromet, at- 
termoie, et fait toutes conventions pour les intérêts et 1^ affaires: de 
la Société ; autorise toutes poursuites et toutes actions judioiaîre&; 
reçoit les prix de ventes, donne toutes quittances, signe toutes 
mainlevées, même sans payement, lorsqu'il le juge con^nablo:; 
arrête les plans, devis et marchés de constructions; ordonnance 
les mémoires de travaux à payer, les prix de vente à acquitter^ 
achète les actions, comme il a été dit ci- dessus an paragraphe 
quatrième de l'article 7 ; statue sur l'emploi des fonds, arrête les 
comptes de la Société et les répartitions à faire, le tout confor- 
mément aux articles 20, 21 et 22, et sauf l'approbation de l'as* 
semblée générale ; convoque les assemblées générales comme il est 
dit ci- après, article ^3,— Le Conseil d'administration, pour toQ$ 
traités généraux, pour tous contrats et actes d'acquisitions, d'aliér 
nations, de ventes, de baux, de cessions de droits mobiliers oUl 
immobiliers, de transferts de rentes ou autres valeurs, d'obliga- 



APPENDICE. 397 

tions, d'aifectations hypothécaires, de quittances de prix de ventes, 
de mainlevées, de transactions et compromis, de placements et de 
retraits de fonds, nomme spécialement deux de ses membres pour, 
conjointement avec le directeur, signer, au nom de l'Association, 
lesdits traités, contrats et actes. 

Art. 11. — Le Conseil choisit dans son sein un président, un 
vice-président, un secrétaire et un trésorier. Ces nominations sont 
faites tons les ans, dans le mois qui suit rassemblée générale 
annuelle.' — Les président, vice-président et secrétaire ne peuvent 
être réélus, si ce n'est après un an d'intervalle. — Les décisions 
du Conseil sont prises à la majorité des voix; en cas départage, la 
voix du président ou de celui qui le remplace est prépondérante. 
— ^ors les cas où il s'agit de questions qui lui sont personnelles, 
le directeur assiste avec voix délibérative aux séances du Conseil 
d'administration. — Le Conseil peut délibérer valablement au nom* 
bre de sept membres. Les décisions du Conseil d'administration 
doivent être consignées sur un registi^e spécial et signées des mem- 
bres présents. Il en est valablement justifié aux tiers par un extrait 
signé du directeur et du secrétaire du Conseil. — Le Conseil d'ad- 
ministration se réunit au moins une fois par mois. Il se réunit en 
outre toutes les fois qu'il est convoqué par son président, ou par 
le directeur. 

Art. i2. — Le Conseil d'administration nomme un de ses 
membres pour être trésorier; ce trésorier reçoit les fonds des 
actions et en effectue ou fait effectuer l'emploi conformément aux 
décisions du Conseil. 

Art. 13. — § 1. Les membres du Conseil d'administration 
sont nommés par l'assemblée générale. Ce Conseil est renouvelé 
tous les deux ans par tiers. Les. membres sortants peuvent être 
réélus. Les deux premières séries des membres sortants sont indi- 
quées par le sort, la troisième par l'ancienneté. Ainsi, une fois 
6xé, l'ordre de sortie sera toujours suiyi pour le renouvellement. 

§ 2. Sont nommés membres du Conseil d'administration, pour 
en exercer les fonctions jusqu'à la première assemblée générale ;, 
MM. Baudelocque, ancien notaire; Bayard, homme de lettres; 
Bellaigue, avocat, ancien député, membre du Conseil général de 
l'Yonne; Bérenger, juge de paix du sixième arrondissement; 
Bernard (de Rennes), député, conseiller à la Cour de cassation; 
Bixio, docteur en médecine ; Christofle , négociant ; le comte 



39S APPENDICE. 

Christian Damas, aide de camp du Roi ; H. Ganneron, député de 
Paris, vice-président da Conseil général de la Seine ; Eugène Lamy, 
conseiller à la Cour royale de Paris; Leclercq, négociant; le vi- 
comte Louis Le Mercier, député, colonel delà 1 0* légion de la garde 
nationale de Paris; Louveafu, ancien notaire à Paris; Ch. Paravey, 
maître des requêtes au Conseil d'État; Agathon Prévost, agent 
général de la Caisse d'épargne de Paris ; Eugène Scribe, de l'Aca- 
démie française; Vatout, député, conseiller d'État, directeur des 
bâtiments civils et des monuments publics, premier bibliothécaire 
du Roi; Vavin, député de Paris, notaire honoraire. — La première 
assemblée générale arrêtera la composition définitive du Conseil. 

§ 3. Lorsqu'une place vient à vaquer dans le Conseil d'admi- 
nistration, ce conseil y pourvoit provisoirement, jusqu'à la pre- 
mière assemblée générale, qui nomme définitivement. Le rempla- 
çant ne reste en fonctions que jusqu'à l'époque à laquelle devaient 
expirer les fonctions de celui qu'il remplace. 

§ 4. M. Adolphe de Lanneau, ancien directeur de Sainte-Barbe, 
fils aine du fondateur de l'établissement, est nommé présideiat 
honoraire du Conseil d'administration. 

Art. 14. — Les fonctions des membres du Conseil d'adminis- 
tration sont gratuites. Ils ne contractent aucune responsabilité 
personnelle à raison des affaires de la Société. Ils ne répondeiïi: 
(pie de rexécntion de leur mandat. 

Abt. 15. — Le directeur doit consacrer exclusivement son 
temps et ses ^oins à la direction de l'établissement, dans l'intérieur 
duquel il est tenu de demeurer. Il est chargé de la direction dès 
études et de l'administration morale de l'institution, des rapports 
avec les familles, avec l'Université et les collèges royaux. Il se 
concerte sur les points les plus im*portants de cette direction et 
de cette administration avec le Conseil d'administration. Il est 
chargé, pour la gestion des affaires sociales, de tous les actes qui 
ne sont point réservés au Conseil d'administration. Il exécute, en 
ce qui le concerne, les décisions du Conseil. Il représente la 
Société vis-à-vis des tiers et exerce au nom de cette dernière 
toutes poursuites et actions autorisées par le Conseil d'adminis- 
tration. Il signe tous les actes d'administration, soit seul, soit 
conjointement avec deux membres du Conseil d'administration^ 
dans les cas prévus par l'article 40. Le directeur exerce dans l'in- 
térieur de 1 institution, et notamment sur les élèves comme sur 



AP^BKDIGE. 309 

tous les foDctioanaires et employés, une autorité absolue et indé- 
pendante* Il peut admettre ou renvoyer les élèves comme il croit 
devoir le faire. Il nomme jet révoque les professeurs, fonctionnaires 
et employés. Il propose au Conseil toutes les mesures d'administra- 
tion qui lui paraissent utiles. Il assiste à ee Conseil avec voix 
délibérative, comme il est dit à Farticle il. Il surveille Tagent 
comptable et lui donne les instructions qu'il croit convenables* 

Art* 10. — Le directeur jouit d'un traitement fixe de 6000 fr. 
par an, lequel lui est payé à raison de 500 fr. par chaque mois* 
Il a droit, pour lui et son ménage, dans Tintérieur de l'établisse- 
ment, aux logement, nourriture, chauifage, éclairage et blanchis- 
sage. En outre, il a droit aux avantages proportionnels qui seront 
ci-après stipulés en sa faveur sous l'article 22, paragraphe 3. 

Art. 17. — Le directeur actuel est M. Pierre-Victor- Alexandre 
Labrouste, ancien élève de Sainte-Barbe, sauf exécution des lois 
et règlements sur l'Université, 

Art» 18. — En cas de retraite , de décès ou de révocation du 
directeur, il sera pourvu à son remplacement provisoire par le 
Conseil d'administration, et à son remplacement définitif par 
l'assemblée générale, sur la proposition du Conseil, et sauf la 
réserve indiquée dans l'article précédent. Le traité à faire, dans 
ce cas, avec le nouveau directeur par le Conseil d'administration, 
sauf ratification de l'assemblée générale, pourra modifier en tout 
ou en partie les attributions, droits et avantages présentement 
conférés au directeur actuel, sans qu'il soit nécessaire à cet effet 
de remplir les formalités prescrites par l'article 29, paragraphe 3,, 
pour la modification des statuts. 

Art. 19. — Le Conseil d'administration nomme un agent comp- 
table qui est placé,, comme tous les fonctionnaires de l'établisse- 
ment, sous l'autorité du directeur. Le Conseil d'administration 
déterminera les attributions de l'agent comptable et les avantages 
qui lui seront concédés. — L*agent comptable pourra . toujours, 
lorsque le Conseil d'administration le jugera convenable, être 
obligé de fournir un casûonij^ment dont le Conseil déterminera 
la nature et l'importance* Son traitement peut être composé, parti* 
d'une somme fixe annuelle, partie d'une remise proportionnelle 
sur les bénéfices. Les traités à faire à cet égard sont dans les attri- 
butions du Conseil d'administratton. 

Art. 20*-^ 11 est fait tous les aas^ à la date du trente septembre, 



400 APPENDICE. 

un inventaire.général de Tactifet du passif de la Société. Dans cet 
inTenlaire, les immeubles faisant partie de Tactif social sont 
portés pour la valeur des prix d'acquisition, de construction, y 
compris les frais j le mobilier est porté pour la \aleur résultant 
des prix d'acquisition et des frais d'entretien annuel, déduction 
faite de dix pour cent par an pour dépréciation et aroortissement. 
Les sommes restant dues sur les prix des immeubles, sur les con- 
structions et les prix de mobilier, sont portées au passif. Les 
créances non encore recouvrées sont reportées à compte nouveau et 
n'entrent pas dans l'évaluation des produits formant les éléments 
du bénéKce de Tannée. 

Art. 21 . — Le compte annuel servant à établir le bénéfice de 
l'année sera composé, au chapitre de la dépense : des frais d'ad- 
ministration ; des traitements fixes du directeur, des professeurs, 
fonctionnaires et employés ; des intérêts des sommes qui reste- 
raient dues sur les prix d'acquisition des immeubles ; du loyer des 
bâtiments qui seraient occupés par l'établissement, et qui ne 
seraient pas la propriété de la Société ; des frais d'assurances ; des 
frais de réparations menues et grosses, et des frais d'entretien des 
immeubles; des sommes appliquées chaque année à l'amortisse- 
ment du mobilier, en exécution de l'article 20; des frais de 
nourriture, chauffage, éclairage, et toutes autres dépenses concer- 
nant l'entretien des élèves, et, quand il y a lieu, des fonctionnaires 
et employés; des droits universitaires et des impositions de toute 
espèce. — Il sera composé, au chapitre de la recette : des sommes 
reçues pour prix des pensions et rétributions de toute nature ; du 
produit des ventes de résidus provenant de l'établissement; du 
montant des loyers qui pourraient être dus par des tiers pour des 
bâtiments appartenant à la Société ; du revenu des fonds placés 
pour le compte de la Société. 

A»T. 22. — § 1 . Sur les bénéfices annuels, il sera prélevé, 
avant toute autre affectation, les sommes nécessaires pour : payer 
à Mme de Lanneau, veuve de M. Victor de Lanneau, fonda- 
dateur de l'institution, une rente^ annuelle et viagère de trois 
mille francs, laquelle ne sera éteinte qu'au jour du décès de ladite 
dame ; payer une réhte annuelle et viagère de trois mille francs, 
sur la tète et au profit de M. Adolphe de Lanneau, mais réver- 
sible en entier sur la tête de Mme Estelle-Émilie-Zima La Bar- 
rère, son épouse, si elle lui survit, et, après décès du survivant 



APPENDICE. 401 

d'euxy âur la tête et au profit des enfants issus de leur mariage, 
chacun par égale portion. Cette rente, qui n'est pas réversible 
sur la tète des petits-enfants de M. Adolphe de Lanneau, s'é- 
leindra partiellement au fur et à mesure du décès de ses enfants, et 
sera entièrement amortie à la mort du survivant d'eux. — Les 
anciens élèves de Sainte-Barbe déclarent faire donation desdites 
rentes, dans les termes ci-dessus, à la famille de M. de Lanneau, 
leuir ancien maître, comme témoignage de leurs sentiments de 
reconnaissance et de vénération pour lui et madame de Lanneau, 
sa veuvç, d'estime et d'atlacberaent pour leur camarade Adolphe 
de Lanneau, qui a été directeur de l'institution après son père. 
Ces pensions, qui ne seront dues qu'en cas de bénéfices, sont, de 
condition expresse, constituées à titre de pensions alimentaires, 
incessibles et insaisissables. Elle» seront acceptées par les dona- 
taires, s'ils le jugent convenable, et à leurs frais. 

§ 2. Après les sommes nécessaires pour le service des rentes 
dont il vient d'être parlé, il sera prélevé chaque année la^mme 
nécessaire pour répartir entre les actionnaires jusqu'à concur- 
rence d'un premier dividende de cinq pour cent par an des capi« 
taux fournis par eux. 

§ 3. Sur la portion des bénéfices qui sera disponible après les 
prélèvements ci-dessus, un dixième sera prélevé pour former le 
premier élément du fonds de réserve de la Société, fonds. qui se 
complétera au moyen des versements dont il sera parlé sous le 
paragraphe suivant, au quatrième alinéa. Ce fonds de réserve est 
destiné : à suppléer, en cas de besoin, à l'insuffisance du fonds 
de roulement pour le payement de toutes les dépenses ; à assurer, 
jusqu'à concurrence de la somme nécessaire, le payement annuel 
des deux pensions viagères ei-dessus constituées au prolit de 
Madame veuve de Lanneau, et de M. et Madame Adolphe de Lan- 
neau et leurs enfants, et celui du premier dividende de cinq pour 
cent attribué aux actionnaires, comme il est dit ci-dessus; à opé- 
rer, s'il y a lieu, l'achat des actions pour le compte de la Société, 
dans le cas prévu par l'article 7, paragraphe 4. — Quand le 
fonds de réserve aura atteint une somme de cent mille francs au 
delà des fonds nécessaires pour payer les acquisitions ou con- 
structions qui ne seraient point encore soldées, TAssemblée générale 
décidera s'il y a lieu de supprimer on de réduire le prélèvement 
stipulé sous le présent paragraphe* U devra être opéré de nouveau 
m 26 



402 APPENTMCE. 

dans son entier, si le fonds de réserve tombe auMtessoos de csent 
mille firancs. 

§ (i. Le surplus des bénéGees annuels sera employé comnae li- 
sait : Un cinquième sera attribué au directeur; deux cinquièmes 
seront mis à la disposition du Conseil d'administration , qui pourra, 
s*il le juge convenable et comme il Tentendra, les erapk>yeF, soir 
dftns rintérét de la famille de M. Adolpbo de Lanneau, soit dans 
rintérèt de l'institution elle-même, en amélioratioBs iotérieunes, 
eo eneouraçements et récompenses à des professeurs et fonction-^ 
naiites; les deux autres eincpiièmes seront versés au^ fonds de 
roserve tant qu'il n'anra» pas atteint la somme nécessaire 'pour 
assurer le payement intégral des prix des acquisiâons et des 
constructions qu'il serait reconnu utile de faire ultérieurement. 
— Lorsque ce {payement auva été effectué ou sera assuré par le ca- 
pital existant au fonds de xéserve, les deux cinquièmes donfi i£ 
s'agit seront répartis entre les actionnaires au- prorata du mon- 
tant ddp actions de chacun d'yeux. 

§ 5. Ces prélèvements et répartitions seronD arrêtés par le Con>* 
seil d'administration, et de\'roiit être approuvés par l'Assemblée 
générale. Le montant en sera exigible, au profit de chaque ayant? 
di^it, à partir du. lendemain de leur approbadon par l'Assemblée 
générale. 

Abv. 2ô'. -*• Chaque année, dans la première'quinzaine du mois 
de novembre, il y aura une Assemblée générale au sîége de la 
Société. La première a«ira lien du- 1"" au i5 novembre ld41 . -^In- 
dépendamment de ces assemblées ordinaires annuelles, le président 
du Conseil d'administration et le directeur auront ehacun* le droit 
d'en convoquer d'autres, toutes les fois qu'îls^ le croiront conve^ 
sable, et notamment pour l<es motifs dont il' sera ci^aprè» parlé- à 
l'article 29 j paragraphe^ 2. -^ Les coniroeations: seront faites au 
moins dix jours d'avance paorlettres adressées aux actionnaires, smx 
domiciles élus par eux dans leurs actions, et par an^»vis inséré dans 
ynn des journaux désignés pouv les annonces et publications 
]egaks« Ces convocations n'indiqueront l'objet de la réunion qne^ 
pour les assemblées extraordinaires, e'est^à««diro pour celles 
antres que les assemblées anmtelles; 

Akt. 24. — ^Toa& lesaeirànnaifes scmt^adteis à assister e« déli- 
bérer' ans Assemblées générales^ 

Abt. 2t$\ — Saiof le» eas^ préws à Vajpliclb 2#, paragrspHe 3^ 



AJPPEMM'eE. k0^ 

r Assemblée génévale* est régulièrement coastituée par la présence 
du cinquième des aetioimaires, réunissant au moins le cinquième 
des actions, ^i cette' proportion n^est pas atteinte siir une première 
convocation» il en est fait une seconde à quinze jours au moins 
d'intevvalle, et les menobres présents à cette nouvelle réunion dé»* 
libèreot valablement» quels que soienk leur nombre et la* quotité 
d& leurs actions, mais seulement sut des objet» autres que ceux 
désignés ci-après au paoagraphe 3 de Uartide ^. 

Art. 26. — L'Assemiïlée générale choisit elle-même son bureau^ 
qui se compose- d'untpvésidenl» d^un secrétaire et de deux scKula- 
tews. Jïisqu'à k oonstîtntipn du bureau, TAssemblée générale est 
présidée par le présidei»! du Conseil d'admini&lrationv qui désigne 
Ittltméme les secrétaires et scrutateurs prowiseivesi -^Les déliJ)éra- 
tionS) dans toutes les. eirconstances oà il ne s'agit pas de Tutt des 
objels énoncés sous k paragraphe 3: à& Tavticle 29^ sont prises à 
la majorité des veiat des membres présents. En- oais de^ partage, la 
mois du président Iflmiporte. — l<e» délibérations dn FAssemblée 
générale sont constajbées |>ar des prooès-yerbaux signés dtt- président 
et du secrétaire de T Assemblée. Ces procès-verbaux- sont consignés- 
sur uii registre spécial à ce desdné^ quis reste a» siège de la Société. 
-^ILesdélibéraitions de F Assemblée générale^ prises, conformément 
auxstatals, obligent tous les ac(3)oa>iiaij0esi poésents ou» absents. 
— Clioque ppocès-^iferbal signé, comme on. vdent de le dire, du 
président et du serréfeaire de l'Assemblée, es« déGoitif et obliga^* 
toire^ sans qu'il soit nécessaire q«e sa rédaction soit approuva 
par une assemblée subséquente. 

Art. â'7. -r^- Le< directeur, s'il' est actionnaire, fai% partie de 
l'Assemblée générale. Il j a^ comme tout autre aetionfia«re, yqis 
délibéradve sur toutes matières antre» que l'approbatioB^ des 
eomiptes et les questions qui' Ite concernent personnellement. S ne 
peuit nepirésentsr auou» autre actionnaire'. --^ ISne action denne 
droil< à mie ¥ois ; dix actions donnent droit à deux voix ; vingt 
aebon& donnent droit à trois voix, et ainsi de'smte, à raison d'une 
iBoiai patf' diix aotions^ jusqu'à- un maximum de' cinq toîx, qui ne 
peut être dépassé, même par u» aotionnaire qui agirait pour lui 
et UB^ €» plusieurs commeitaDts. 

AtkT. 8H. -r-^- Chaque» actionnatre- peut se ftiîre représenter aux 
assemblée» généiraléss mais seulement pas* un awtre^ aetiénnatre, 
pourvu que oe nm^dM^iv^ ne soi^ pas 11» c&recteur. 



404* APPENDICE. 

Art. 20. — § 1 "'. Les assemblées annuelles ont pour objet : d'en- 
tendre lecture d'un rapport du Conseil d'administration sur les 
opérations et la situation de la Société, et d'un rappo/-t du diiec- 
teur sur la marche de l'Institution et les résultats de l'année sco- 
laire écoulée ; de recevoir et approuver, s'il y a lieu, les comptes 
annuels et les projets de répartition arrêtés par le Conseil d'adnai- 
nistration ; de nommer, lorsqu'il y a lieu, les membres du Conseil 
d'administration ; de délibérer sur tous autres objets qui peuvent 
leur être soumis par le Conseil d'administration. 

§ 2. Les assemblées extraordinaires peuvent, comme il a été 
dit ci-dessus à l'article 23, être convoquées par le président du 
Conseil d'administration ou par le directeur, soit pour prononcer 
sur les remplacements de membres du Conseil d'administration ou 
du directeur, soit pour délibérer et statuer sur l'augmentation du 
fonds social, sur la dissolution anticipée ou le renouvellement de 
la Société, sur des modifications à apporter aux statuts, le tout 
d'après la proposition du Conseil d'administration et comme il va 
être dit ci-après, soit enfin pour délibérer .sur tous autres objets 
concernant la Société. 

§ 3. Les assemblées générales extraordinaires pourront, mais 
sur la proposition seulement du Conseil d'administration, décider, 
soit une augmentation du fonds social, soit la dissolution de la 
Société avant le terme fixé ci-dessus par l'article 4, soit le renou- 
vellement de la Société après l'expiration de ce terme, soit enfin 
des modifications aux statuts ; mais à la condition ; que les convo- 
cations auront énoncé l'objet des assemblées ; que ces assemblées 
ne pourront, sur une première convocation, délibérer que si elles 
représentent la moitié au moins des actions, étant arrêté que, dans 
le cas de non-représentation de cette moitié, des actions, une 
deuxième Assemblée générale sera convoquée dans les délais et les 
formes déterminées par l'article 23, et pourra valablement déli- 
bérer sur les objets de sa convocation, pourvu qu'elle réunisse au 
moins le quart desdites actions ; que les délibérations seront prises 
à la majorité des deux tiers des voix des membres de l'Assemblée 
(les voix toujours comptées d'après la règle ci-dessus établie à 
l'article 27). — En outre, s'il s'agit de l'augmentation du fonds so- 
cial, telle qu'elle est indiquée au dernier alinéa de l'article 5, elle 
ne devra s'effectuer qu'au moyen d'une création de nouvelles actions, 
qui ne pourront être émises au-dessous du pair^ et non au moyen . 



APPENDICE. 405 

d'un appel de fonds aux actions existantes. — S'il s'agit dedissoîu- 
tioii anticipée, elle ne pourra être proposée avant un délai expiré 
de trois années à partir de Pordonnance d'autorisation, et que 
dans le cas où il résultera des comptes et inventaires sociaux une 
perte de plus du tiers des fonds fournis par les actionnaires. — S'il 
s'agit du renouvellement prévu par l'article 3, il ne pourra être 
mis en délibération que, au plus tôt, après la quarante-quatrième • 
année révolue, du jour de l'ordonnance d'autorisation des pré- 
sentes, et, au plus tard, avant le premier mois de la dernière de 
ces cinquante années. En outre, ce renouvellement ne pourra être 
voté et avoir lieu qu'à la condition que la valeur des actions, telle 
qu'elle se trouvera déterminée par les résultats du dernier inven- 
taire annuel, sera remboursée, dans les six mois qui précéderont 
l'expiration desdites cinquante années, à ceux qui ne consentiront 
point au renouvellement, et que le capital des actions ainsi rem- 
boursées sera fourni par de nouvelles souscriptions, à moins de 
réduction du fonds social. Les actionnaires dissidents ne pourront 
dans aucun cas exiger la vente de l'établissement et la licitation 
des immeubles, et ils seront tenus de s'en rapporter aux résultats 
• du dernier inventaire. Le procès-verbal de l'Assemblée constatera 
ceux qui consentiront et ceux qui ne consentiront pas au renou- 
vellement. Quant aux actionnaires non présents à l'Assemblée, ils 
auront un mois, à partir du jour de la communication qui leur 
sera donnée dudit procès-verbal, pour déclarer qu'ils ne consen- 
tent point au renouvellement et entendent être remboursés. Faute 
par eux d'avoir fait ladite déclaration dans ce délai, ils seront 
déchus du droit d'opter, et seront considérés comme renonçant au 
renouvellement et voulant être remboursés. — Les augmentations 
de fonds social, dissolution anticipée et renouvellement de la So- 
ciété, ne pourront avoir lieu que sous l'approbation du gouver- 
nement, conformément à la loi. * 

■ Akt. 30. — En cas de perte des deux tiers du fonds social, la 
dissolution aura lieu de plein droit. — Lors de la dissolution de la 
Société, de quelque manière qu'elle arrive, l'Assemblée générale 
déterminera le mode le plus convenable de liquidation ; elle choi- 
sira et nommera les liquidateurs et fixera l'étendue, de leurs pou- 
voirs et de leurs attributions. L'actif net, y compris le fonds de 
réserve, sera réparti entre tous les actionnaires. 

Art. 31. — Dans aucun cas, les héritiers, représentants ou 



M6 APPENDICE. 

créanciers au directeur on des 'actiomiaîres, laie ponrpont f£affre 
apposer «aucuns scellés «ur les livres, propriélés, 'ou valeurs 'd^ la 
Société, ni pro'voquer aucun inventaire, ils devront s'en rapfpor^er 
anx derniers comptes et inveataires arrhes, il lie pounm ^tre 
apposé de «celles et fait d^inventaires que dans 'un intérêt seoi»!, 
et d'après une décision de l'Assemblée générale. 

AaT. 32. — Tontes les contestations qui pourrawnts^élever^ur 
Texécution des présents statuts seronlt jugées, quels que soient le 
nombre et la qualité des parties intéressées, par trois arbitres, sur 
le choix desquels -les f)arties de^'ront s'entendre dgcas un délai de 
huitaine; à défaut de «quoi ils seront nommés par le présideiit dti 
Tribunal de commerce de la Seine, à la requête de la partie la plus 
diligente.— Les arbitres jugeront en commun, à la tnaj^orité des 
voix, comme amiables compositeurs, sans être soumis «nfc -formes 
ni aux délais de la pi'acédure. Leur décision ne pourra être atta^ 
quée par voie d'appel, recours en cassaitioU) reqnète civile, ni 
autrement. 



XXÏV 

OKJyOSifSASfCBS «OVALES Aff^ROBA^VES 
DE LA .SOCIÉTÉ DU COUIiKGE ET >DE «SES A€CROlSSEBifENT9S'. 

^» du < 7 mars 4 841. 

Loufs^-Psilbippc, roi des Fraialçavis, à tG«us pfrésents et à venir 
^alnt. 

Sur le «rapport de n«^tre inintstre «ecrétairë d'Btat ou déparle- 
ment de rAgricultore et 'du commerce, 

Vu les articles S9 à 37, 40 à 45 du^îode de 'commerce; 

Notre ConseR d'État entendu; 

Nous avons ordonné et ordonnons «ce qui suit : 

Art. 4*^ -«- La Société anonyme, formée 4>Paris «ous -la déno- 
mination de Société de Sainte-Bnrbe^ eét autorisée. 

Sont approuvés les statuts de ladke Société, tels qu'ils «ottt con- 
«enus dans l'acue passé 4e t4 février 4844, ipar devant W Aobry 
'et son coUèguie, notaires à (Paris; lequd '^cte reste ànn^é à da 
présente ordonnatitje. 

Aiit. â. "^ Nous notes^rés^^vonâ de révoqfCMfr (notre ^i^ftoitsdtion, 



APPENMCE. 4017 

en cas de \iolation ou de non exécution des statuts approuvés, 
sans préjudice des droits des tiers. 

Art. 3. — La Société sera tenue de remettre tous les six mois 
un cirait de son état de situation au ministère de Tiigriculture et 
du commerce, au préfet du département de la Seine, à la Chambre 
de commerce, et au greffe du Tribunal de commerce de Paris. 

Art, 4. — Notre ministre secrétaire d'Etat au département de 
l'agriculture et du commerce est chargé de l'exécution de la pré- 
sente ordonnance, qui sera publiée fku Bulletin* des Lois ^ insérée au 
Moniteur et dans un journal d'annonces judiciaires du départe- 
ment de la Seine. 

Signé : Louis-PhiUppe. 

Par le roi, le ministre secrétaire d'Etat au département de 
l'agriculture et du «commerce. i9/^/re ; L. CuNiK^GBiDïkiJNs. 

2« du 18 juin 4843. 

Louis-PniLippc, etc. 

Sur le ri^pport de notre ministre secrétaire d'État au départe- 
ment de l'agriculture et du commerce. 

Vu notre ordonnance royale du »17 mars i84J, iportànt autori- 
sation de la Société anonyme, formée à Paris sous la dénomination 
de Société de Sainte-Barbe^ et approbation de ses statuts^ 

Notre Conseil d'État entendu; 

Nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit : 

Art. l'^'. — La délibération ^prise le 16 mars 1842jpar le Con- 
seil d'administration de la Société de Sainte-Barbe, pour porter le 
capital de cette Société à 600000 francs, au moyen de l'émission 
de 160 actions nouvelles de 500 francs chacune , est approuvée 
telle qu'elle est contenue dans l'acte, passé le 33 mars 184â par- 
devant M" Aubry et son collègue, notaires à Paris; lequel acte 
restera annexé à la présente ordonnance. 

Art. 2. — Notre ministre secrétaire d'État au département de 
l'agriculture et du commerce est chargé de l'exécution de la pré- 
sente ordonnance, qui sera publiée au Bulletin des Lois^ insérée 
au Moniteur et dans un journal d'annonces judiciaires du dépar- 
tement de la Seine. 

Signé : Louis-Philippe. 

ï*ar le roi , le ministre secrétaire d'État au département de 
l'agriculture et du commerce. Signé: L. Cunin-Gri daine. 



408 APPENDICE. 

3" du 20 septembre 4 845. 

Louis-Philippe, etc. 

Sur le rapport de notre ministre secrétaire d^État au dé^jarte- 
nient de Tagriculture et du commerce, 

Vu notre ordonnance du i7 mars 184i, portant autorisation de 
la Société anonyme, fondée à Paris sous la dénomination àe 'Société 
de Sainte-Barbe, et approbation de ses statuts ; 

Vu notre ordonnance du 18 juin 1 843, qui autorise cette Société 
à porter son capital à 600 000 francs; 

Vu la délibération prise, le 25 novembre 1 844, par l'Assemblée 
générale des actionnaires de ladite Société; 

Notre Conseil d'Etat entendu ; 

Nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit : 

Art. 4". -2- La délibération prise, le 25 novembre 1844, par 
TAssemblée générale des actionnaires de ladite Société de Sainte- 
Barbe, pour porter le capital de cette Société à un million, an 
moyen de la création de huit cents nouvelles actions de 500 francs 
chacune, est approuvée telle qu'elle est contenue dans l'acte passé, 
le 30 juin 4 845, par-devant M* Aubry et son collègue, notaires à 
Paris; lequel acte restera annexé à la présente ordonnance. 

Art. 2. — Notre ministre secrétaire d'État au département de 
l'agriculture et du commerce est chargé de l'exécution de la pré- 
sente ordonannce,*qui sera publiée au Bulletin des Lois, insérée 
au Moniteur et dans un journal d'annonces judiciaires du départe- 
ment de la Seine. 

Signé : Louis- Philippe. 

Par le roi, le ministre secrétaire d'État au département de l'agri- 
culture et du commerce. Signé : L, Cunin-Gridaike. 



FASTES DE SAINTE-BARBE 



DEPUIS L'ORIGINE. 



SAINTE-BARBE COLLÈGE SANS DOTATION. 



PRINCIPAUX. 



1460. Lenormant (Geoffroi). 
1465. Lenormant (Jean), 
1474. Lemaistre (Martin). 

1482. Lenormant (Jean), de 

nouveau. 

1483. Bonet (Etienne). 
1497. Fontenay (Pierre de). 
1511. Pelin (Antoine). 
1517. Morel (Mathurin). 



1520, 
1530 
1534. 

1540. 

1548. 
1550. 
1553. 



Gouvéa (Jacques de), Fane. 
Gou\éa (André de). 
Gouvéa (Jacques de), le 

jeune. 
Gou\éa (Jacques de), l'an- 
cien, de nouveau. 
La Halle (Jacques de). 
Phelippeaux (Jean) . 
Du gast (Robert). 



SAINTE-BARBE COLLEGE FONDE. 



PRINCIPAUX. 



1556. Certain (Robert). 

1568. Le Marchand (Nicolas), 

par intérim, 

1569. Tremblay (Antoine de). 
1585. Dinet (Pierre). 

1595. Gazil (Raoul de). 

1596. Le Chappelier (Nicolas). 
1607. Gaultier (François). 



1629. Berthould (Henri). 
1644. Berthould (Jean). 
1693. Delaroche (Louis). 
1719. Men^ssier (Simon). 
1727. Menassier (François) . 
1731* Menassier (Simon), 

nouveau. 
1732. Delamaison (Jacques). 



de 



410 



APPENDICE. 



PROGUREUES. 



1556. Mousset (Alain). 
1621. Gaultier (François). 
1634. Blondel (Jean). 
1647. Vachot (Nicolas). 
1665. Michelin, intrus. 
1684. Menassier (Simon). 



17J9. Menassier (François). 
1727. Delamaison (Jacques). 
1732. Théhault (Pierre). 
1736. Ménage (Philippe). 
1758. Vicaire (Antoine). 



CHAPELAINS. 



1556. Leprince (Nicolas). 1647. 

1563. Colombel (Jean). 1666. 

1564. IlouJlebraque (Robert). 1670. 
1574. Colombel (Jean), de nou- 
veau. 1674. 

1605. Mondard (Nicolas). 1693. 

i€ï!7. Vachot (Constantiû). 1702. 

1646. Vachot (Nicolas). 1730. 



Melleville (Guillaume de). 
Nervet (Pierre). 
Michelin, autorisé à des- 
servir sans titre. 
Delaroche (Louis). 
Delà roche (Guillaume). 
Muguet (Etienne), 
Delaroche (J.-B. Louis). 



Siyp6RtEURS MAJEURS BT RÉFORKAT^GIRâ. 



Doyens d'â^edes conseillers- clercs au .parie ment. 



1556. 


Sapin (Baptiste). 


1683. 


Perrot de la Malmaison. 


1562. 


Lemaistre (Nicole). 


1690. 


Pinon (Etienne) . 


1569. 


Boutin (Déode), 


1700. 


Joly de Fleury (J. Fran- 


1587. 


Brisard (Jacques). 




çois. 


1605. 


Cavoye. 


17*8. 


Lemeusnier (René). 


1616. 


Le Pertier (Français). 


1715. 


Cadeau (Alexandre). 


1623. 


Fortia (Bernard de). 


1725. 


Pucelle (René). 


1632. 


Le Clerc (Nicolas). 


1737. 


Roiyauk. 


1637. 


Pidoux (René). 


1749. 


De Fieube^ de Beau- 


1643. 


Thélis (Gui de>. 




regard. 


1648. 


Viole (Jacques). 


1760. 


Boucher. 


1652. 


Refuge («Henri de): 


1764. 


Mignot ( Alexandre- Jeaa), 


.1665. 


Deskindes (Pajen). 


1775. 


Boucher (Claude). 


1678. 


Lotin de Chartry (Fran- 


1776. 


Sahu^et d^Ë^pagnac. 




:Cois). 


1781. 


'Lenoiri(Pierre-F*rançois) . 



'Cfuineétèers Û€ Notre-Dame et Ht VU^iperMté. 

1556. Duvivier (Antoine). 1678. Coquelin (Nicolas). 

d580. Duvivier (Antoine), ne- 1603. Pirot (iBdme). 

veu du précédent. . 1715. Vivant (François). 

1616. Pierrevive (S^'l'vie<le). 17^7. Baui^ (Bonaventure). 

1625. Contes (Jean-Baptiste de). 1736. ThieFry (Bonaventure). 

1649. Loisel (Pierre). 1783. Chevreuil (Fr. -Charles). 

Dojens iVâge de la JPaculté de décret, puis des droits» 

1556. Qaintin (Jean), 1710* Callesson (Claude). 

-1561. Rivière ( LaurenÇ) . 1 7 1 «7 . Ferrière .( Claude - Joseph 

1 569. Rebertière (Robert de la) . de). 

4 597 . Magnan (Éloi). 1 747.. Xeg6ndre. 

1623. Haynault (Alexandre de). 1 755. Bernard (Nicolas). 

1 642. Artis (Jean 4i'). 1 758. Delarocbe (Louis). 

16dj. Buisine (Philippe de). 1776. Thomassin .(AleKandre- 

1666. Doujat (Jea^). Louis). 

1688. Laloy (Michel de). 1785. Martin (Edme). 

Mandataire chargé de représtfiter^es Supérieurs au Bureau 
d' administration 'de Louis-le-Grand^ depuis 1785, 

Barreau-Desgraftgefe '^ieire-Élife). , 

Administrateurs de Louis - le ^ Grand ^chargés particulièrement 
des affaires de Sainte -Barbe, depuis 1764 jusqu'en il90. 

Terray (Joseph -Marie), seigneur de la ^otte-Tilly, abbé de 
Molesmes, conseiUdr ad parlement. 

Sainfray (Jacques), ^st]â>sti«i2t^du procuredr-gétiéral^ 

Lempereur (Denis), échevin dédains. 

Fourneau (Gui-^Aritoitie)., :^rand maître -<)em]MHrel du collège 
Louis-le^rand. 

Bonnet (Micbol^-Marie), ^and maître «de la 'Société ^oyate de 
Navarre. 

LeCebvre ^'Jlmécourt, «conseiller de «QpjHidlchiambre au ,^pâtr- 
Jement. ^ 

Le Rat de Keredm (l'abbé)^ 

^<R6balirs((J.vB.^uguste), président de la tvokièilie chûftibk*e 
des Ëiiqiïètts. 



41Î APPENDICE. 

Rouhette (François-Théodore), ancien bâtonnier de l'ordre des 
avocats. 

Bérardier (Denis), grand maître temporel de Louîs-le-Grand, 
député à r Assemblée nationale. 

COMMUNAUTÉ DE SAINTE-BARBE. 

sup>:riecrs non résidants. 

i 691 . Durieux (Thomas). 1 754. Thébaull. 

1718. Besoigne (Jérôme), coad- 1757. Seconds (Jean-Joseph). 

juteiir de Durieux jus- 1774. Delécluze et Jolly, délé- 

qu'en 1721. * gués de l'arche vêque de 

1 732 . Gaillande (Noël). Paris. 

1745. Machet (Louis -Auguste) 1777. Delécluze et Le Gorgone de 

et Parquet (Nicolas), Launay. 

conjointement. . 1785. Le Corgne de Launay, 

1748. Machet et Ducrocq (A- seul. 

drien- Maurice). 1790. La municipalité de Paris. 

1749. Ducrocq^ seul. 

SUPÉRIEURS RÉSIDANTS. 

1722. Roussel (Jean -Baptiste), 4773. Baduel (Antoine). 

coadjuteur de Durieux. 1791. Filleul, principal consti- 
1727. Lenglet (François), après tutionnel provisoire. 

la mort de Durieux. ' 

% SUPÉRIEURS DIVISIONNAIRES CONNUS. 

1695. Damery (Thomas). Tandeau (Fr.-Bruno\ 

Buisson (Claude). 1762. Favre (Joseph). 

1707, Delisle (Pierre-François). Labour (Jean) . 

Loyseleur (Jean). 1768. Baduel (Antoine). 

1710. Fournerat. 1 773. Daire, avec titre de préfet. 

1721. Lenglet (François). 1780. Surugues, id. 

Fleury (François-Yves). 1785. Nicolle (Charles), icî. 

1729, Rousbcl (Jean-Baptiste). 1787. Planche (Joseph), àGen- 
Creusot (Nicolas). tilly. ^ 
Lasseray (Claude). 1788. Galtayries (Louis), avec 

1730. Guimbert. avec litre de directeur. 
Salmon (François). 1790. Formantin, préfet. 



APPENDICE. 



413 



PROCUREURS CONNUS. 



1730. Mariez. 

Chrétien. 

Duhamel f 
1 751 . Pig^orier (Joseph). 

1758. Guyon. 

1759. Lé vesque (Abraham). 
1773. Daire. 



1775. Delà pierre. 
1780. Henry. 

1785. Fournier (Victor). 
17*86. Planche (Joseph). 
1788. Borderies ( Etienne -J. 
François). 



SAINTE-BARBE MODERNE. 

DIRECTEURS. 

• 

1798. Victor de Lanneau et 1 81 6. Victor de Lanneau et 
Miellé. Adam. 

1801. Victor de Lanneau, seul. 1819. Victor et Adolphe^e Lan- 

1814. Victor de Lanneauet Mou- neau. 

zard. 1 823 . Adolphe de Lanneau . 

1838. Alexandre Labrouste. 

PRÉFETS DES ETUDES. 



1802. Martin. 
1805. Mourre. 
1807. Massin. 
1810. Forget et Dufau. 

1812. Dufau et Joinval. 

1813. Martin et Dufau. 

1814. Martin. 

1816. Adolphe de Lanneau. 



1823. Cuvillier-Fleury. 

1827. Victor de Lanneau. 

1 830. Eugène de Lanneau, avec 
titre de sous-directeur. 

1833. Petitjean et Taillefert. 

1835. Petitjean et Guérard. 

1836. Guérard et Landry. 
1838. Guérard. 



SOUS-PREFETS. 



A Paris : 
1 840. Cottin (Ernest). 
1859. GefiProy. 
1863. Lamarre (Clovis). 

DIRECTEURS DES ÉTUDES DE L*ÉCOLE PREPARATOIRE. 



A Fontenay : 
1852.Cugny. 
1857. MoUiard (Léon). 



1835. Duhamel. 

1836. Gondinet (Adolphe). 
1838. Pages (Alphonse). 



1841 . Blanchet (Alphonse) et Pa- 

ges (Abel). 

1842. Blanchet (Alphonse). 



41^ 



ÂFPiafODIlCE. 



Mvmàm 



En premier: 

1g07.DesmoaIins. 
i839.Liabeur. 
iSU.MarceUl. 
1855. Neveu. 
1859.Vazillier. 

En second: 
1808.Sombardier. 
1824. Burnier-Fontanel, neveu. 



1827.Bergunion. 

1839. Laurent. . 

1843.Marcelli. 

1 847. SaiaNArromaar. 

1855. Macé. 

1861.Ansadt.' 

A Fontenay . 

185âl. DeBerranger. 
1861.1teney. 



CHEFS DE LA COIf»VABII.ITE, PUIS ECONOMES AGENTSMJOMPTABr-ES . 



1802.Bréon. 

1806. Dubussy.. 

1809, De Sibert de CpmiUonA 



1831.Romet. 
1849.rrôly. 



MEMBRES DU C0XX7R Dm ^ AS^OiCMJ'ION AMICALE. 



Prçmien QomUé^ 
1820. Victor de Lanneau^ puési- 
dent hottovaive ài vie. 
BettaiguA (Glâudbe). 
5)MW6t (Pieff]*^)». 
Caiweli(Prwlenl)v 

Crapelet (GieojpgiasrAdfc.). 
Gatteaux (Edouard). 
Le Roy (Onésime). 
Paravey (Cbarles). 
Poriquet. 
Saucèdek 

Membres introduits par les 

18.20.Vaj»jajli: 
1822.Béreng«rH 

Cad&trGi43«ia)iict.. 



Gordon (Jamesi^v.. 

Scribe (Eugëb«)i. 

Vigier (Achille)*. 
1 824. Bayaiîd (J.-Fi»a»0©is). 

Quickti. 
i826.Corc«JiUti. 

Dumas (ChristiMi^. 

Bnssiterr«3(â£ooiiaed do)*; 
1 828. Dabrin (Paul). 

Le Mercier (le vie. Louis). 

Prévost- (Ajgatbon). 
1 830. BernajfA. (4fit R^ïWs). 

Bonnaire (Flor^<isiaii). 

GaaHQÇQn (Btpp^ejfc. 

Guinard. 

Bahrouste (Alfexandre). 

Mandrou. 

})lQ«Uwi|i^(A4iCJ^pjbi^ 

Oddai^ (£ngè^. 



APPENDI€ir. 



^15 



Pelitjean. 
4832. Bixio (Alexandre). 

Durand de Varelles. 

Petit (Germain) . 

Selî^'ny (Ernest de). 

Taiflefert (Emile). 
i834. Chriatofle (Charites). 

Duverçer (Eugèfie). 

Lamy (Eugène). 
i836.I>^^uisefî}s. 

DuOlliQ. 

Masson. 
1 838 . Gainot (Eiigè/ie) . 

Pascaûlt. 

Roussel (Ludovic)» 

Valmy (K:6Hepffiaini, duc 
de). 
i 840. DesmoQsseQiUL- de Gîvré (le 
baron). 

Jacquot (Camille). 
. Leconte (Casimir). 
iSk2. Citron. 

Lacrosse (le baron). 

Siméon (leiFicomte). 
4844. looss (Louis). 

Saglio (AMîped?)'. 
1840. Clerc (Etoile). 

D'Esparbès dte Eussan. 

Jozon. 

Laverdant (Désiré). 

Mon gis. 

Saglio (Gustave). 
1848. Cavaignac (E^jçène). 

Lisle (Xacques^Alhrîc). 

Saglio (Edmoijd). 
1 850 . Boinvilliers (Ernest) . 

Cliaron (legêaéraf Viafe). 

Etevinck'. 
1852.Besson (Eugène)». 



ChamprQuiu.. 

Dehaynin (Euryale). 

Donon (Armand), 

Lannean (Eugène de). 

Trochu (Jules). 
1 854, Baroche (6me^). 

Coulon (Alfred).. 

Najac, (le comte Emile de). 

Servois.( Gustave). 
1856. Bellaigue^Antonin). 
1858.Béral (Bernard). 

Bertrand (Joseph). 

Ganneron (Frédéric). 

Godftrt? ('^Arimé). 

Lefebvr©'(Paul). 

Z^iou^ilfe (Albert). 
• Pblignac (le- prince de) . 
1 862. Benoist (Constant). 

DoHftts (lldœondj)'. 

Membres à vie après vingt 
années d'exercice, 

Bayard, décédé. 
Bixîo (AfexandY^). 
Bttssierre (te baron de). 
Cadet-Gassiiceurt', décédé. 
Chrwlîofle, décédé. 
Corcellet,. décédé.. 
Dumas (le comte Christian). 
Btaiverger , décédé. 
Labrouste (Alexandre). 
Le Mbrcier (le comte), 

décédé. 
Prévost (Agatfton). 
S c g ibe , décédé; 
Valmy (Kell^mann, duc 

de). 
Tètottt, décédé.* 



416 



APPENDICE. 



MEMBRES DES CONSEILS DE LA SOCIÉTÉ DU COLLÉGK. 



Première commission de 
surveillance. 

i831.Bellaigue (Claude). 

Ganneron (Hippolyte). 
Leclercq . 
Louveaa (Eugène). 
Vavin (Alexis). 

Commission élue. 

i836.Bayard (J. -François). 

Bérenger. 

Bixio (Alexandre). 

Dumas (Christian). 

Ganneron (Hippolyte). 

Labrouste (Alexandre). 

Lamy (Eugène). 

Louveau (Eugène). 

Mandrou. 

Prévost (Agathon). 

Va tout. 

Vavin (Alexis). 
1838.Bellaigue (Claude). 

Christofle (Charles). 

Lanneau (Adolphe de). 

Leclercq. 

Paravey (Charles). 

Conseil (T administration, 

Lanneau (Adolphe de), président 

honoraire à vie. 
Labrouste, directeur du collège, 

membre né. 
1 840. Baudelocque. 

Bayard (J. -François). 
Bellaigue (Claude). 
Bérenger. 
Berhard (de Rennes). 



Bixio (Alexandre). 

Châtelain. 

Christofle (Charles). 

Dumas ^le comte Christian) 

Ganneron (Hippolyte). 

Lamy (Eugène), 

Leclercq. 

Le Mercier (le vicomte) . 

Louveau (Eugène). 

Paravey (Charles). 

Poriquet. 

Prévost (Agathon). 

Rigault (Joachim). 

Scribe (Eugène). 

Vatout. 

Vavin (Alexis). 

Membres nouveaux introduits 
par les élections successives, 

1843. Séligny (Ernest de). 
184 S. Bussierre (le baron de). 
1 847. Ganneron (Hipp.), fils. 

Mongis. 
1848. looss (Louis). 
18S3. Bayard (Eugène). 
1 855. Donon (Armand). 
1858. Ganneron (Frédéric). 
1861.Trochu (Jules). 

1863. Bertrand (Joseph). 
Dehaynin (Gabriel). 
Devinck. 

1 864. Bellaigue (Antonhi). ' 

Conseil actuel, 

1864. Bayard (Eugène). 
Bellaigue (Antonin). 
Bérenger, 



APPENDICE. 417 

Bertrand (Joseph). Lamy (Eugène), 

Bixio (Alexandre). Le Mercier (le comte), dé- 

Bnssierre (le baron de). cédé pendant l'exercice. 

Châtelain. Louveau (Eugène). 

Dehaynin (Gabriel). Mongis. 

Devinck. Paravey (Charles). 

Donon (Armand). Prévost (Agathon). 

Dumas (le comte Chris- Rigault (Joachim). 

tian). Trochu (Jules). 

Ganneron (Frédéric). Bellaigue (Claude), mem- 

looss (Louis). bre honoraire. 

PRÉSIDENTS DES DISTRIBUTIONS DE PRIX, 

Avant t interdiction de cette solennité dans les institutions, 

4800 

iSOi. Arnault, chef de la division de l'Instruction publique, au 
ministère de l'Intérieur, membre de l'Institut national. 

4802.Crétet, conseiller d'État, chargé de l'administration des 
Ponts et chaussées. 

1803 

1804. François de Neufchâteau, président annuel du Sénat conser- 
vateur, membre de l'Institut national. 

1805.Fourcroy, conseiller d'État, directeur général de l'Instruc- 
tion publique, professeur au Muséum d'histoire naturelle, 
membre de l'Institut. 

1806. François de Neufchâteau, une seconde fois. 

1807.Regnault de Saint-Jean-d'Angely, conseiller d'État, grand 
procureur général près la haute Cour impériale, secré- 
taire de Péïat de la famille impériale, membre de l'Ins- 
titut. 

1808. Le comte de Lacépède, président annuel du Sénat, profes- 

seur au Muséum d'histoire naturelle, membre de l'Ins- 
titut. 

1809. Desrenaudes, conseiller titulaire de l'Université impériale. 
iSlO.Desrenaudes, une seconde fois. 

1811. Lacépède, une seconde fois. 



27 



418 APPENDICE. 

Depuis ie rétahUssement des distributions solennelles sous la 
présidence (T anciens harbistes. 

1836.DOZOO» député) conseiller à la Coar royale de Paris. 

1837. Scribe (Eugène), de l'Académie française. 

1838.yatoat, député, conseiller d'État, premier bibliothécaire du 

Roiy directeur des monuments publics'^ membre de la 

Commission de surveillance de Sainte*Barbe. 
\ 839. Ganneron, député, colonel de la 4* légion de la Garde nado- 

nale, membre du Conseil municipal de Paris et 4|e la Coni* 

mission de surveillance de Sainte-Barbe. 
1840. Bernard (de Rennes), député, conseiller à la Cour de cassa* 

tion, membre du Ccmsetl d^administralion de Saiot€- 

Barbe, 
i 841 . Clocpiet (Jules), professeur à la Faculté de médecine, chi- 
rurgien du Roi. 
i 842. |je comte Christian Dumas, député, aide-4e-camp du rm, 

membre du Conseil d'administration de Sainte-Barbe* 
1843.Desclozeaux (Ernest), député, conseiller jd'État, secrétaire 

général du ministère de la Justice. 
1844. Scribe (Eugène), en remplacement • du général Morin, 

membre de Tlnstitut, directeur du Conservatoire des arts 

et métiers (empêché au dernier moment). 

1 845. Le comte Le Mercier, pair de France, colonel de la \ Q" légion 

de la garde nationale, membre 4^ Conseil d'administra- 
tion de Sainte-Barbe. 

1846. De Lanneau (Adolphe), maire du 12* arrondissement de 

Paris, directeur de l'Institut royal des Sourds -Muets, 
ancien directeur de Sainte -Barbe, président honoraire 
du Conseil d'administration de Sainte-Barbe. 

1847. Vavin, député, notaire honoraire, président annuel du Con- 

seil d'administration de Sainte-Barbe 
1848.Bixio, représentant du peuple, vice-président de l'Assemblée 

nationale, membre du Conseil d'adn\inistration de Sainte- 

Barbe. 
1 849. Lacrosse (le baron), représentant du peuple, ministre des 

Travaux publics. 
1850.Devinck, président du Tribunal de commerce, membre du 

Conseil municipal de Paris. 



APPENDICE. 419 

1851.Paravey (Charles), conseiller d'État > président atmiiiel du 
Conseil d'administration de Sainte -Barbe. 

i S52. Lamy (Eugène), conseiller à la Cour d'appel de Paris, mem- 
bre du Conseil d'administration de Sainte-Barbe. 

1853. De Lanneau (Adolphe), directeur de l'Institut impérial des 
Sourds-Muets, etc., pour la seconde fois. 

i 854. Perret, député au Corps-législatif, maire du 8* arrondisse- 
ment de Parisv 

4855. Le comte Siméon, sénateur. 

4850.Boinvilliers, président de section au C<»iseil sd'État. 

i 857. Dabrin (Paul), agent de change honoraire, maire du ^ arron- 
dissement de Paris. 

1^58. Mouzard-Senci^, préfet de 1)a Somme, petit-fih de Victor 
de Lanneau; 

1859. Bouillet, inspecteur de F Académie de l^aris. 

i 860. Levert, préfet d'Alger. 

1861. Mézièresj professeur à la Faiculté des lettres de Paris. 

4862.Perdonnet, administrateur du chemin de fer de l'Est, direc- 
teur de rÉcole centrale de^ arts et manufacturas. 

1863. Petit (Guillaume), ancien manufacturier, député, membre 
du Conseil général de l'Eure. 

PRIÉSIDENTS DU BANQUET ANNUEL DU 4 DECEMBRE. 

1816. Gatteaux (Edouard), graveur en médailles, le plus ancien 

élève de Victor de Lanneau. 

1817. Hoguer, employé au ministère de l'intérieur. 

4818. Le Mercier (le vicomte Louis), colonel en. non activité. 

1819. Varner, chef de bureau à la préfecture de la Seihe. 

1820. Vatout, secrétaire du duc d'Orléans. 

1 821 . Valout, une seconde fois. 

4822. Gordon (James), homme de lettres. 

4823. Victor de Lanneau, directeur de Sainte*Barbe , en reiraiite. 

4824. Scribe (Eugène), homme de lettres. 
4 825. Bayard, bomme de lettres. 

4826. Dumas (Christian), ofiBcier d'état-major. 

4827. Paravey (Charles), avocat. 

4828. Prévost (Agathon), avocat. 

4829. Bernard de.Rennes, avocat. 



un APPENDICE, 

1830. Gaoneron (Hippolyte), député, membre du Conseil Qénép9^. 

de la Seine. 
1831* Bellaigue (Claude), député de T Yonne, membre de lai. Copor. 

mission de surveillance de Sainte-Barbe. 
i832. Nourrit (Adolphe), de l'Académie royale de musique. 
i833. Lamy (Eugène), vice-président du Tribunal de la Seine. 
i834. Wateau, conseiller à la Cour royale d'Amiens. < v - ' 

1 835. D'Esparbès de Lussan, conseiller à la Cour royale de^Parisu > 

1 836. Labrouste (Alexandre), avoué honoraire près la Conr royale 

de Paris> ancien président de la Chambre des avoués, s^» 
crétaire de la Commission, de surveillance de Sainte- 
Barbe. 

1837. Cloquet (Jules), membre de TAcadémie royale de médecine, 

professeur à la Faculté de médecine de Paris. , , 
1838 Lanneau (Adolphe de), ancien directeur de Sainte-Barbe, 
maire du 12* arrondissement de Paris, directeur de 
l'Institut royal des sourds-muets, président de la-Coiur, 
mission de surveillance de Sainte-Barbe. 

1839. Bertrand (Joseph), docteur ès-sciences, .élève deVEcoHpolyfTf 

technique. 

1840. Vavin, député de Paris, membre du Conseil d'administra** ^ 

tion de Sainte-Barbe. 

1841 . Hello, avocat général à la Cour de cassation, 

1842. Dumont, statuaire, membre de Tlnstitut. 

1843. Le baron de Bussierre, pair de France, ministre plénipo- 

tentiaire à Dresde. 

1844. Boinvilliers, avocat. 

1845. De Saint-Aignan, conseiller d'État, ancien préfet du Nord. 
i 846. Marcescheau, consul général de France au Pérou. 

1847. Bouillet, proviseur du collège Bouiison. 

1848. Lacrosse (le baron), vice-président de l'Assemblée na- 

tionale. 

1849. De vinck, président du Tribunal de commerce, membre du 

Conseil général de la Seine. 
1 830. Durand-Claye (Léon), premier sergent-major à l'École po- 
lytechnique. 

1851 . Pas de banquet, 

1852. Froment (Gustave), ancien élève de l'École polytechnique, 

fabricant d'instruments de précision pour les sciences. 



. AT»PENDICE. 42i 

i 833 . Vial de Machurin, élève de l'ancienne Communauté de Sainte- \\ 

Barbe (1784-1789), doyen des barbistes. , { 

lSS4.'Perdonnet, ancien élève de FÉcole polytechnique, admi- 
nistrateur du chemin de fer de Strasbourg. j 

1855, Chrîstbfle (Charles), manufacturier, membre du Conseil j 

d'administration de Sainte-Barbe. | 

J856.'Partarrieu-Lafosse, président à la Cour impériale de Paris. ; 

1 857. Tripier, général du génie, membre du Comité des forlifica- 
* tions. 

1B58. Châtelain, notaire, président annuel du Conseil d'admini- 
stration de Sainte-Barbe. 

1859. Rougeron, juge au Tribunal de première instance de la 

Seine. 

1860. Donon (Armand), banquier, consul général de Turquie à 

Paris, président annuel du Conseil d'administration de 
Sainte-Barbe. \ 

1 861 . Burand-Claye (Alfred), sergent-major à l'École poly- 

technique. 

1862. Artin Dadian Effendi, premier secrétaire de l'ambassade 

ottomane à Paris. 
1863.Trochu, général de division, membre du Comité d'état - 
major, président annuel du Conseil d'administration de 
Sainte -Barbe. 



FIN DU LAVPKNDICË. 



ERRATA. 



Page 11, ligne 17, aa iieu de: M. Cbartier-Desrieax, qoi fut successi- 
Tf méat sous-préfet k Mortagne , à Saint-Pol et à BelléI^e. lisez .* 
M, Chartier-Desrieux, de Bellème, qui fut successiTement sous-préfet 
à Mortagne et à Saint-Pol. 

Page 188, ligne 12, au Heu de: lorsqu'il perdit la chaire de rhétorique 
du collège Bourbon, Usez : lorsqu'il perdit l'emploi d*agrégé de rhé- 
torique au collège Louis -le-Grand. 

Page âOO, ligne A du sommaire, au lieu de : président du pouvoir exé- 
cutif, Usez : chef du pouvoir exécutif. 



TABLE DES MATIÈRES 

CONTENUES DANS LE TROISIÈME VOLUME, 



QUATRIEME PARTIE, SAINTE-BARBE MODERNE. 



Chapitre I. Les établissements d'inslmction publique à Paris 
après la crise révolutionnaire. — M. de Lanneau 
sous-dipecteur à Tlnstitut des Boursiers de l'Éga- 
lité, depuis Prytanée français. — Restauration de 
Sainte-Barbe sous le nom de Collège des Sciences 
et des Arts. — Société de M. de Lanneau et de 
M. Miellé 4 

Chap. II. Règlement de la nouvelle Sainte-Barbe.-— Caractère 
de la direction de M. de Lanneau. — L'instruc- 
tion aux Écoles centrales. — Changements intro- 
duits dans ces écoles. — Succès du collège des 
Sciences et des Arts dans les concours. — Rupture 
avec le Prytanée. — Création des lycées. — Sainte- 
Barbe, École secondaire .^ 14 

Chap. IIL Fêtes patriotiques. — Rétablissement du culte ca- 
tholique à Sainte-Barbe. — Régime, de la maison 
sous le Consulat. — Vaugirard et le Lendit. — 
Exercices du corps. — Ardeur de la jeunesse. — " 
Solennité des distributions de prix.— Barjaud. — 
Élèves couronnés à l'Institut 35 



424 TABLE DES MATIÈRES. 

CHAr. IV. Clause de grec. — Cours de philosophie de Maugra's. 

— Conférfiice de Laromîguière. — Cours de litté- 
rature. — Nouveau caractère de renseignement des 

I mathématiques. — Professeurs distingués des classes 

d'humanités et de grammaire. -— Essai d'ensei* 
'gnement professionnel. — École primaire gratuite. 50 

CuAP. V. Hostilité contre Sainte- Barhe. -^ Les anciens harhis- 
tes de la rédaction du Journal des Débuts. — Ban- 
quet de Tan IX. — Banquet de 4807. — Vers 
latins de Lemaire. — Diffamation dans les jour- 
naux. — Sainte-Barbe vengée par les jeunes Vatout 
et Villemain. ^- Arrêté ministériel en sa faveur. . 74 

Chap. VI. Création de TUniversité impériale. — Sainte-Barbe, 

Institution de l'Université. — Visite de l'évéqae . m ^ 
de CasaU — Le cours de philosophie transporté au 
lycée Impérial. — Solennités religieuses célébrées 
au Collège en 1808. — Ordre de la chapelle. — 
Troubles au lycée Napoléon. — Affairer de Saint- 
Marcellin. i — Émigrations successives des élèves de 
Sainte-Barbe au lycée Impérial. -— Nouvelle divi- 
sion créée dans Taocien collège de Reims 93 

Chap. VII. Origine du collège de Reims. — Sa destruction et sou 
rétablissement au quinzième siècle. — Sou ensei* 
gnement. — Sa mauvaise administration. — Faits 
mémorables qui s*y sont passés. — Relations de 
Reims et de l'ancienne Sainte-Barbe.— Installation 
de la division des plus jeunes élèves de M. de Lan» 
neau. -^ M. Massin 106 

Chap. VIII, Projet d'ériger Sainte-Barbe en lycée. — Négociations 
à ce sujet. — Rigueurs du régime universitaire. — 
Fin de l'Empire. — M. Monzard, chef ofûciel de 
l'institution. —Esprit de la jeunesse sou» la pré* *' < ' 
mière Restauration et pendant' les Cent jours. — 
Persécution contre M. de Lanneau. — M. Adam 
substitué à M. Mouzard. — Clôture de l'École gra- 
tuite 122 

Chap. IX. Représentation de Manlius demandée par les élèves 
de Sainte-Barbe. — Article de M. Dussault dans 
les Débats. — Censure prononcée contre M. Adam. 

— Adoucissement de la Commission de l'Instruc- 
tion publique. — Polémique dans les journaux. — 
Article d'Eugène Scribe.— Banquet du 21 décen^- 

bre 1816 138 



TABLE DES MATIERES. 425 

(iHAP. X. . Retour ofTenaîf pour la possession du nom de 

Sainte-Barbe. — Voyage de l'abbé Nicolle à Paris. ^. 

— Association dite des anciens élèves de la Com- 
munauté de Sainte-Barbe. — Arrêté de la Com- 
mission de ITustruction publique en faveur de • 
Mf de Lanneau.** Retour définitif de Tabbé Ni- 
colle en France. — La maison de la rue des 
Postes, érigée en collège de plein exercice, prend 
le nom de collège Saiute-Barbe. — Réclamation de 
M. de Lanneau repoussée par le Conseil royal. 

— Consultation de six avocats. — Dualité de 
Sainte-farbe. — Mécomptes de l'abbé Nicolle. — 
Serment prononcé au banquet du 4 décem- 
brel82l.... 1S3 

Chab. XI, Esprit de révolte parmi les écoliers au commence- 
ment de la Restauration. — Hostilité avec l'In- 
stitution Liautard. — L'abbé Liautard.-^Révolte 
de f 815. — Les Grecs et les Troyens. — L'abbé 
Éliçagaray. — Révolte de 1817. — Révoltes de 
1819 à Louts-le-Grand et à Sainte-Barbe. — 
Révolte de 1820. — La Saint- Charlemagne de 
. ' ' 182i. — État prospère des études. — Les maîtres 

de la nouvelle génération à Sainte-Barbe 1 70 

Chap. XII. Retraite de M. de Lanneau père. — Direction de 
M. de Lanneau fils.— Affaire du renouvellement 
des diplômes des chefs d'institutioii. — Rétablis- 
sement .des séances littéraires dans les deux 
Sainte-Barbe. — Chansons du 4 décembre. — 
M. Cuvillier-Fleury, préfet des études. — Tenta- 
tives de réforme en matière de récitation. — 
Retour de M. de Lanneau père au Collège. — 
Sa mort. — Détails sur sa personne • 192 

Chap. Xm. Révoluuou de 1830. — Fugitif accueilli à Sainte- 
Barbe. — Orphelins de juillet. — Sainte-Barbe 
rétablie dans la propriété de son nom. -* Revers 
et embarras financiers. — L'Association ami- 
{ cale. — La Société du collège. «- Acquisition 
de l'établissement par les anciens élèves. — 
Souscription du Roi. — Le Conseil de sur- 
veillance de la Société. — Création de l'École 
préparatoire. — • Retraite de M. Adolphe de 
lianneau , 21? 

Chap. XIV. M. Labrouste directeur. *— Acquisition de la pro- 
priété de Sainte-Barbe. — Constitution légale dé 



4€6 TABLE DES MATIÈRES. 

la Société du collège. — Reconstruction des bâ- 
timents. — Anaire deMontaigu. — Consécration 
de la nouvelle chapelle. •«« Fin des travaux 239 

Chat. XV.' Nouvelle discipline. — M. Guérard, préfet des étu- 
des classiques. — Rétablissement des classes inté- 
TÎeUres. — Classe de philosophie. — Succès de 
Sainte-Barbe. — Elèves fameux décédés. — Livres 
pour renseignement barbiste. — Conférences 
gratuites pour la préparation à la lioçnce es 
lettres et à Tagrégation j.. â58 

Cbap. XVL Premiers Directeurs des étudA à TÉcoIe prépara- 
toire.— M. Blanchet. — Désordres réprimés. — 
Caractère de renseignement. — Contrôle inces- 
sant du travail. — Distribution des cours. — Ad- • . 
missions aux Écoles du Gouyeniement. — Ex- 
tension de l'établissement. — La comptabilité de 
Sainte-Barbe. — Économes agent!t-comptabIes. — 
Cérémonies auxquelles assiste le Collège â74 

Chap. XVn: Révolution de 1848. — Réfugiés des Tuileries à 
Sainte-Barbe. — École d'administration. — Jour- 
nées de juin. — L'insurgé Raguinard. — La gar- 
nison du Panthéon alimentée par le Collège. 

— Le général Cavaignac, chef du pouvoir 
exécutif, à la distribution des prix. — L'année 
des trois prix d'honneur. — Décorations confé- 
rées au Directeur.— Choléra de 1849. — Affaire 

des fusils. —Coup d'État du 4 décembre 1851.. 290 

Chap. XVIII. Fraternités barbistes. •— Distributions de vivres au 
Collège. — La liberté d'enseignement. — Loi de 
1850. — Suppression du certificat d'études. — 
La bifurcation. — Attitude de Sainte-Barbe. — 
Le Directeur appelé au Conseil supérieur de l'In- 
struction publique 303 

Chap. XIX. Sainte^Barbe des Champs. — Cérémonie d'inau- 
guration. — Réforme fiiiancière dans T Association 
amicale. — Rècoaciliation solennelle avec la 
vieille Sainte-Barbe. — Donations et fondations. 

— Beau trait de désintéressement. — Première 
visite du cardinal Morlot. — Fêtes séculaires 

de 1858 et de 1860 318 



TABLE DES MATIÈRES. 



4S7 



APPENDICE AUX DEUXiME ET TROrSlislE VOLUMES. 



I. 
II. 

III. 

ÎV. 

V. 
VI. 

VIL 
VIII. 

IX. 

X. 

XI. 

XU.. 

Xllï. 

XIV. 

XV. 

XVI. 

XVII. 

XVIII 

XIX. 

XX. 

XXI. 

XXII. 



Acte de la fondation de Robert Dugàst 3-41 

Discours d'ouTerlurc du cours de Léger Duchesne à Sainte- 
Barbe 355 

Collation d^une bourse vacante à un enfant dé la paroisse 
Saint-Hilaire 360 

Certificat d'études pour un barbiste du temps d'Antoine 
de Tremblay , . 361 

Nomination de boursier, contraire à la fondation 362 

Arrêts du conseil d*État concernant le projet d'annexion 
de Sainte-Barbe aux écoles de droit 362 

Visite du Collège par Rollin 366 

Nomination de Simon Menassier au principalat confirmée 
par le Parlement 367 

Décret de l'Université à propos de prédicateurs jésuites 
admis à Sainte-Barbe 368 

Ordonnance de M. de Beaumont, archevêque de Paris, 
pour la réorganisation de la communauté de Sainte- 
Barbe 37 1 

Arrêt du conseil d'État pour régulariser l'existence de la 
communauté de Sainte-Barbe ; 374 

Procès-verbal de l'exécution faite pour réduire la com- 
munauté de Sainie-Barbe au régime constitutionnel. . . . 375 

Approbation du rétablissement d'un pensionnat dans le 
local du ci-devant collège de Suinte-Barbe 376 

Acceptation de la démission de M. de Lanneau, comme 
sous-directeur du Prytanée français. 377 

Première déei:3ion rendue pour la possession du nom de 
Sainte-Barbe 378 

Seconde décision relative à la possession du nom de Sainte- 
Barbe 379 

Troisième décision relative à la possession du nom de 

Sainte-Barbe 380 

. Mémoire de M. Odilon Barrot, préfet de la Seine, au 

Conseil général. 381 

Arrêté du Conseil municipal de Paris relativement au nom 
de Sainte-Barbe 282 

Notification de la décision du Conseil royal de l'Instruction 
publique, conforme à l'arrêté du Conseil municipal. . . . 383 

Premiers statuts de l'Association amicale des anciens élè- 
ves de Sainte-Barbe 384 

Statuts réformés 387 



4iS TABLE DES MATIERES. 

XXIU. StatnU de la Société du collège 388 

XXIV. Ordonnances royales, approbatives de la Société du col- 
lège et de ses accroissements 400 

Fastes de Sainte-Barbe depuis l'origine 409 



FIN DU TROISIEME ET DERNIER VOLUME. 



Paris. — Imprimerie générale de Cli. Lahure, nie de Fleurus, 9.