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Full text of "Histoire des Chichimèques ou des anciens rois de Tezcuco"

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VOYAGES, 



* ORIGINAUX/ 



POUA IBAVIH A l'histoire DE Là DBCOUVEETE 



DE L'AMÉRIQUE. 



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IHPIIIIIBBIS DS FAIH BT TBVITOT, 

RUB RACINB, 28, PRÉS DE L'0D£01f. 






VOYAGES, 

ORIGINAUX 

POUR SERVIR A L* HISTOIRE DE LA DicOUTERTE 

DE L'AMÉRIQUE, 

PDBUiS POUR LA PRBIiliKB FOIS EN FRiNÇUS , 
VAH B. TXaHAVZ-OOKVAVt. 

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HISTOIRE 



ou 

DES ANCIENS ROIS DE TEZGUGO, 

PAR DON FKRN4NDO D'ALVA JXTUtXOCBlTL , 

IMAULITI'. SliR I.B MANUSCRIT (SPAGMOL. 

fteoonde partia. 
ibAditb. 

ABTHUft BBRTRAVD, &IBBAZBZ-ÉBITZUB, 

LIBRAIRE DE LA BÙCeM DE GifoORAPmB DE PARIS, 
RUE HAUTEFEUILLE, H^ 33. 

M. DCCC XL. 



SA-^34i.i'!r 



Harvard Collège LIbrary 

Cift of 
Archibald Cary Coolldge 

and 

Clarence Léonard Hay 

April 7, 1909- 



I 
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I 



^ 



HISTOIRE 



DES CHICHIMÈQUES, 



OU 



DES ANCIENS ROIS DE TEZCUCO, 



TRADUITE SUR LE MANUSCRIT ESPAGNOL. 



SECONDE PARTIE. 



misiTSa 



SECONDE PARTIE. 



CHAPITRE L. 



Couronnement du très-sage et très-prudent Netzahualpiltzint]i- 

Acamapixtli. 



Aussitôt après la mort de Netzahualcoyotzin, 
ses funérailles furent célébrées avec pompe 
et majesté selon les rites mexicains , qu'il est 
inutile de rapporter parce qu'on en trouve 
la description dans différents auteurs moder- 
nes. Ce fut le second empereur Chichimèque 
13. 1 



/ 



2 HISTOIRE 

.4:{ont les funérailles furent célébrées selon ces 
rites; elles eurent lieu en présence des rois 
Axayacatzin de Mexico ^ Ghimalpopocatzin de 
Tlacopan , d'un grand nombre de seigneurs , 
des ambassadeurs des républiques de Tlax- 
callan ^ de Huexotzinco^ de Ghololan y ainsi que 
d'un grand nombre de souverains étrangers , 
et même ennemis ; car il était d'usage dans des 
occasions semblables de les y inviter^ et de 
donner un sauf-conduit à leurs ambassadeurs. 
C'étaient surtout ceux de Michoacan , Panuco 
et Tequantepec. 

Pendant cette cérémonie les frères du jeune 
prince, et particulièrement les trois dont j'ai 
fait mention plus haut, qui avaient été chargés 
de la régence , cherchèrent à le supplanter et 
à se faire proclamer à sa place. Mais les deux 
rois de Mexico et de Tlacopan , auxquels ap- 
partenait l'élection de leur collègue à l'em- 
pire, ayant pénétré leur dessein, résolurent 
d'emmener avec eux à Mexico Netzahualpil- 
tzintli et ses trois frères, ainsi qu'Acapioltzin. 



DES CHICHIMÈQUES. 3 

Ils ordonnèrent à tous les seigneurs de se 
rendre dans cette ville où l'on devait décider 
le choix le plus convenable au bien du pays j 
et prêter serment au nouveau roi. Aussitôt 
qu'il fut arrivé à Mexico, Axayacatzin fit 
asseoir Netzahualpiltzintli et les quatre princes 
dans une salle qui précédait celle du con- 
seil, sur des sièges égaux, et après eux 
tous les chefs et les seigneurs de Tezcuco. 
Deux orateurs habiles, choisis par les rois 
de Mexico et de TIacopan , entrèrent ensuite 
dans cette salle, et après leur avoit* donné 
la bienvenue, ils leur annoncèrent que les 
deux rois avaient hâte de choisir un chef de 
l'empire pour remplacer celui qui venait de 
mourir; et que pour mettre un terme à toutes 
les querelles et à toutes les prétentions ils 
choisiraient celui dorlt les droits leur paraî- 
traient les mieux établis. Après avoir long- 
temps parlé dans ce sens, ils furent rem- 
placés par les capitaines généraux des deux 
rois , accompagnés de plusieurs seigneurs d'un 



4 HISTOIRE 

rang élevé qui apportaient les insignes et les 
ornements dont on avait coutume de revêtir 
les rois quand on leur prétait serment. Ils 
étaient suivis par les deux rois. Les capi- 
taines généraux prirent dans leurs bras le 
jeune Netzahualpiltzintli et remportèrent dans 
la salle du conseil ^ où les deux rois le pla- 
cèrent sur un trône , le revêtirent des orne- 
ments royaux , le couronnèrent , lui remirent 
les insignes de sa dignité , et le proclamèrent 
ix)i de Tezcuco , suprême seigneur des Chi- 
chimèques et l'un des trois chefs de l'empire. 
Quand il eut reçu les félicitations de tout le 
monde ^ chacun prit place selon son raiig et 
son ancienneté, et l'on commença les fêtes 
et les réjouissances à la grande satisfaction 
de tout l'empire. On supprima cependant^ à 
cause de la jeunesse du roi, une partie des 
cérémonies religieuses qui avaient ordinaire- 
ment lieu à cette occasion, et elles ne furent cé- 
lébrées qu'à une époque postérieure. Ses trois 
frères Ichautlatoatzin, Xochiquetzaltzinet He- 



DES CHICHIMÈQUES. 5 

cahuchuetzin , voyant leurs espérances trom- 
pées par le choix des deux rois , se retirèrent 
navrés de douleur et sans prendre congé dans 
la ville de Tezcuco. Quand Netzahualpil - 
tzintli eut passé quelques jours à Mexico , il 
revint à Tezcuco avec les deux rois ses on- 
cles ^ accompagnés d'une suite nombreuse, 
et on V célébra de nouvelles fêtes. Pendant le 
règne de Netzahualcoyotzin et le commence- 
ment de celui de son fils, le roi Axayacatzin 
habita presque toujours la ville de Tezcuco 
qu'il aimait, et dont le climat lui convenait 
davantage. 



CHAPITRE LI. 



Guerre d'Axayacatzin , roi de Mexico , contre Moquihuitziii , 
roi de Tlateloloo , et ses alliés (i). 



Dès que Netzahualcoyotzin fut mort, quel- 
ques seigneurs de l'empire, comme Moqui- 
huitzin de Tlateloloo , Xilomantzin de Cul- 
huacan, et quelques-uns de leurs parents, se 

(i) Les rois de Tlatelolco furent Quauhquauhpitzahuac , qui 



8 HISTOIRE 

révoltèrent et refusèrent d'obéir au roi Axa- 
yacatzin leur suzerain ; il est vrai qu'ils ne 
lui payaient ni tribut ni redevances. Mais 
cependan ils étaient de race mexicaine et ses 
sujets. Il leur fut facile de secouer le joug , 
car à cette époque leur pouvoir était bien 
établi, et il ne leur manquait que l'investi- 
ture pour être souverains, comme cela est 
constaté par les chants que répètent encore 
aujourd'hui les naturels dans leurs fêtes et 
dans leurs danses. Axayacatzin envoya des 
ambassadeurs à ses deux collègues pour les 
avertir de cette révolte et leur demander du 
secours , leur représentant que si l'on ne ré- 
duisait pas les rebelles , l'empire était sur le 
point de se perdre. Les deux rois rassemblè- 
rent en effet leur armée , et se réunirent au 
jour fixé avec celle des Mexicains. Us pénétrè- 
rent sans beaucoup de difficulté dans Tlatelolco 



régna 62 ans ; Tlacateutl , 38 ; Quauhtlacoa , 38 , et Moquihuitz , 
qui était sur le trône depuis neuf ans quand il fut tué par les 
Mexicains. {Sahagun , liv. VllI , chap. U.) 



DES GHIGHIMÈQUËS. 9 

et tuèrent une grande partie des habitants. 
Moquihuitzin se fortifia dans le grand temple , 
et s'y défendit longtemps; mais il fut forcé 
dans ce dernier retranchement. On le jeta du 
haut de la tour ^ et son corps fut mis en pièces. 
On châtia ensuite sévèrement ceux qui avaient 
pris part à sa révolte; c'étaient Xilomantzin^ 
seigneur de Gulhuacan , Zoanenemitl de Cuit- 
lahuac, Tlatolatl et Quauhiacatl de Huitzi- 
lopochco. Ce châtiment imposa à tqjLis les 
seigneurs de l'empire , et depuis ce temps ils 
se montrèrent très-soumis aux trois chefs. 
Cette révolte eut lieu la seconde année du 
règne de Netzahualpiltzintli , la sixième de 
celui d'Axavacatzin , dans l'année Chicome 
Calli qui correspond à 1 463. 



CHAPITRE LU. 



Commencement du règne de NetzahualpiUzintli. — Prudence 
et sagesse qne Dieu lui donna dés son enfance , et qui sont 
trés-yantées par les auteurs. 



La concubine favorite de Netzahuatcoyotzin 
était, ciHnme je Tai dit, celle qui voulait pro- 
curer à ses enfants les places les plus honora- 
bles, et elle essaya même de les fiiire déclarer 
héritiers de Tempire; c'est pourquoi elle avait 
toujours cherché à faire périr les enfants que 



1 2 HISTOIRE 

le roi avait eus avec une princesse mexicaine, 
comme nous l'avons vu à l'égard du prince 
Tetzauhpiltzintli dont elle trama la perte. Dès 
queNetzahualpiltzintli fut monté sur le trône, 
il donna au fils aîné de cette concubine, qui 
n'avait aucun rang et ne possédait que quel- 
ques villages , la ville de Ghiauhtla avec quel- 
ques territoires conquis , ce qui le plaça au 
rang des quatorze grands de l'empire des 
Aculhuas. De cette manière il gagna entière- 
ment cette femme, qui s'opposa même aux 
desseins ambitieux de ses deux autres fils, 
Xochiquetzaltzin et Hecahuehuetzin. 

Le prince Axoquentzin, qui avait eu la plus 
grande part à la conquête de la province de 
Chalco, voyant que le jeune roi était très-, 
disposé à bien traiter ses frères, alla lui de- 
mander la récompense des services qu'il avait 
rendus au roi son père, qui ne lui avait en- 
core rien donné parce qu'il était trop jeune. 
Après avoir écouté la demande de son frère, 
le jeune roi , sans laisser à Acapioltzin qu'on 



DES GHIGHIMÈQUES. 11 

lui avait donné pour tuteur le temps de par- 
ler , fit appeler un peintre , un architecte , un 
maçon et un charpentier , leur ordonna de se 
rendre à Chalco pour y examiner le palais de 
Toteozitecuhtli, roi de cette province, et de 
lui en rendre un compte exact, chacun selon 
sa profession , dans un délai qu'il leur fixa. 
Quand ils furent de retour, le roi leur désigna 
un des endroits les mieux situés de Tezcuco , et 
leur ordonna de construire un palais absolu- 
ment semblable pour le prince Axoquentzin ; 
il lui accorda en outre plusieurs villages dans 
la province de Chalco et dans d'autres. A dater 
de ce moment, Netzahualpiltzintli commença 
à gouverner seul avec tant de prudence et de 
sagacité, que tout le monde en était étonné. 
Il en fut de même pendant les quarante quatre 
années que dura son régne ; il reçut toujours 
avec amour et confiance les avis de son frère 
Acapioltzin et de son conseil. 



CHAPITRE LUI. 



Guerres et conquétei des trois chefs de l'empire. — Mort de 
Xihuitltemoc , seigneur de Xochimilco. 



Parmi les chefs qui aidèrent Axayacatzin 
dans sa guerre contre le roi de Tlatelolco et 
ses alliés ^ on distinguait Xihuitltemoc , sei- 
gneur de Xochimilco, vaillant capitaine et 
très-habile joueur de balle , ce qui fut cause 
de sa perte* Après Theureux succès de cette 



J 



i 6 HISTOIRE 

campagne 9 Axayacatzin fit célébrer des fêtes 
pour divertir ceux qui étaient venus à son se- 
cours. Il y eut entre autres un grand jeu de 
balle auquel le roi avait de grandes préten- 
tions, quoique Xihuitltemoc fût beaucoup 
plus adroit que lui.Le roi, dépité de toujours 
perdre, voulut risquer un grand coup et joua 
le marché et le lac de Mexico contre un jardin 
que son adversaire possédait à Xochimilco. 
Celui-ci , sans craindre la colère du roi , ac- 
cepta l'enjeu et le gagna facilement. Axaya- 
catzin, poussé à bout, ne pensa plus qu'à se 
venger. Xihuitltemoc étant retourné chez lui 
le lendemain , il lui envoya quelques soldats • 
de sa garde sous prétexte de lui faire une 
visite et de lui porter une partie du revenu 
du lac et du marché de Mexico; mais au mo- 
ment où ils le saluaient, ils lui jetèrent au 
cou une guirlande de fleurs dans laquelle ils 
avaient caché une corde et l'étranglèrent ainsi 
à l'aide de quelques seigneurs de Xochimilco. 
Cette sévérité imposa aux autres seigneurs, 



DES GHIGHIMÈQUES. 17 

et tous redoutèrent depuis lors d'ofiFenser le 
roi. 

Les trois rois ayant réuni leur armée, mar- 
chèrent contre les habitants de la province de 
M atlaltzinco , les vainquirent et peuplèrent 
avec les prisonniers la ville de Xalatlahuco. 
Us marchèrent ensuite contre les Ocuiltecas et 
les Otomies , et soumirent toutes les provinces 
habitées par les trois nations , Otomies , Ma- 
zahuas et Matlaltzincas , qui contiennent les 
villes de Xiquipilco, Xocotitlan, Xilotepec, 
Teuhtenanco, Tlacotepec, Calimayan, Ama- 
tepec et Tolocan. Mais ils eurent beaucoup de 
peine à réduire ces trois nations , car elles sont 
très-belliqueuses. Ce fut Xiquipilco qui fit la 
plus vigoureuse résistance ; le roi Axayacatzin 
y courut le plus grand danger : Tlilquetzpalli, 
seigneur de cette province et vaillant capi- 
taine, le serra de si près qu'après lui avoir 
porté plusieurs coups il le blessa grièvement 
à la cuisse et le fit tomber. Il allait l'achever, 

si Quetzalmamalijtzin^ un des quatorze grands 
13 2 



/ 



11^ HISTOIRE 

de Tezcuco et capitaine général de Tarinée, 
ne fut venu à son secours; il se précipita har- 
diment au milieu des ennemis et délivra le roi 
de Mexico. Tlilquetzpalli fut fait prisonnier 
avec beaucoup d'autres vaillants capitaines et 
plus de douze mi lie guerriers. Les troupes im- 
périales y au contraire , ne perdirent pas plus 
de mille hommes. Axayacatzin guérit de ses 
blessures y mais il resta boiteux toute sa vie. 
Quand les trois rois eurent partagé entre eux 
le pays conquis, ils accordèrent des récom- 
penses aux chefs qui les avaient accompagnés 
et leur donnèrent des villages et des terres. 
Quetzalmamalitzin , seigneur du Teotihuacan, 
un des grands de Tezcuco et capitaine général 
de l'armée , reçut en outre des trois rois , pour 
armes et devise, la cuisse d'un roi d'où sor- 
taient des flammes de feu, en mémoire de la 
délivrance d' Axayacatzin. Acapioltzin, tuteur 
du roi de Mexico , reçut pour armes et devise 
trois drapeaux d'or et de plumes et trois tètes 
de même. Nocahuihqui fut nommé seigneur 



DES CHICHIMEQUES. 19 

de Xatlabaubca. Beaucoup d'autres chefs re- 
çurent des armes relatives aux exploits par 
lesquels ils s'étaient distingués. 

Après avoir laissé dans Ips provinces con- 
quises les garnisons nécessaires , les rois re- 
prirent le chemin de leurs états , et quand ils 
furent arrivés à Mexico , ils sacrifièrent dans 
le grand temple tous les prisonniers qu'ils 
avaient faits dans cette guerre. Le roi de Tez- 
cuco eut pour sa part la vallée de Tolocan , 
Maxtlacan , Cohuitzinco et d'autres villes qui 
lui payaient chaque année huit cents charges 
d'étoffes fines travaillées de diverses couleurs, 
en poil de lapin; trois cent soixante-dix 
.charges, plus sept pièces de couvre-pieds en 
plumes, ce qui fait en tout 25,607 pièces d'é- 
toffes de diverses espèces, sans les bijoux d'or 
et les ornements de plumes fines. Chaque vil- 
lage cultivait encore annuellement pour lui 
un champ de maïs qui en produisait une 
grande quantité. Ce fut un certain Yaotl qui 
fut nommé majordome et receveur de tous 



/ 



20 HISTOIRE DES GHIGHIHÈQUES. 

}es tributs. L'on donna aussi aux rois de 
Mexico et de Tlacopan une partie des tributs 
qui, d'après les registres royaux, parait en 
avoir formé le cinquième. 



CHAPITRE LIV. 



Mort d'AxayacaUin. — Il a ponr successeur Tiçotzicatzin. 

Enfants de ces deux rois. 



Axayacatzin , roi de Mexico, mourut, après 
un règne de quatorze ans, de la même maladie 
queNetzahualcoyotzin. Il fut très-regretté par 
ses sujets, car c'était un des princes les plus 
braves qui eussent régné à Mexico; il n'eut de 
supérieur que le grand Motecuhzomatzin pre- 



22 HISTOIRE 

mier du nom. Gomme on peut le voir dans 
les histoires qui ont traité de la vie de ce 
prince, quand on lui eut fait de magnifiques 
obsèques, Chimalpopocatzin et Netzahual- 
piltzintli réunirent les électeurs et furent una- 
nimement d'avis de proclamer à sa place Ti- 
çotzicatzin qui fut le septième roi de Mexico ; 
il était frère du feu roi , fils de Tezozomoc et 
petit-fils de M otecuhzomatzin ; ce dernier n'a- 
vait eu qu'une seule fille légitime, qui eut de 
Tezozomoc trois fils qui régnèrent l'un après 
l'autre, savoir : Axayacatzin, Tiçotzicatzin , 
dont nous parlons maintenant, et Ahuitzotzin 
qui lui succéda. Tiçotzicatzin fut proclamé et 
reçut le serment de ses vassaux avec les mêmes 
cérémonies que ses ancêtres, et Ahuitzotzin, 
son frère cadet, le remplaça dans sa charge de 
gouverneur et capitaine général des Mexicains. 
Je parlerai maintenant de la postérité d'Axa* 
yacatzin. Techotlalatzin , second seigneur dlz- 
tapalapan, fils de Guitlahuatzin , premier du 
nom, épousa Izcoatzin, dont il eut Tizaca- 



DES GHICHIMÈQIJES. 23 

pantzin, seigneur de Xilomenco. (Une des 
femmes ou concubines du roi Netzahualpil- 
tzintli était de cette maison ; elle devint mère 
de Cacama.) Guitlahuatzin , qui hérita de la 
seigneurie d'Iztacpalapan après la mort de son 
aïeul Techotlalatzin , fut ensuite roi de Mexico. 
Le troisième fut Motecuhzoma , qui monta 
aussi sur le trône de Mexico et régnait lors 
de l'arrivée des Espagnols. Il eut d'une autre 
femme ^ qui selon l'opinion commune était la 
reine son épouse légitime, Macuilmalinaltzin, 
qui devait être son héritier à l'empire , Tla- 
cahuepantzin, Metzin , Matlatzica Mantzin y et 
une fille qui fut l'épouse de Netzahualpiltzin- 
tli et fut exécutée pour cause d'adultère. Axa- 
yacatzin eut encore Tezozomoc, père de D. 
Diego Huanitzin Iztlicuechahuac^ seigneur de 
Tula, Matlaltzincatl , Zezepactic et Teyolpa- 
choz. Le roi Tiçotzicatzin fut père de Tezcal- 
popocatzin père de D. Diego Tihuezquititzin, 
qui fut aussi seigneur de Mexico , et de Yao- 
tzin Amaquemetzin. 



CHAPITRE LV, 



Première expédition du roi Netzahualpiltzintli contre les 
habitants d'Âhuilizapan , Tototlan , Oztocticpac et antres 
proyinces de la côte de la mer du Nord. 



Chaque jour paraissait mille années au 
roi Netzahualpiltzintli 9 tant il était pressé 
de livrer des batailles et de tenter la 
fortune. Il se plaignait de sa jeunesse, 
s'exerçait tous les jours au maniement des 
armes , et visitait chaque jour les salles du 



26 HISTOIRE 

palais qui renfermaient les armures et les en- 
seignes avec lesquelles son père avait soumis 
la plus grande partie de l'empire. Mais au- 
cune ne lui allait^ ce qui le remplissait de 
tristesse. Il ne voulait plus ni revêtir les 
insignes royaux, ni se faire servir avec 
pompe. Il fallait que ses instituteurs l'y for- 
çassent. Au lieu de dormir dans son lit de 
parade, il se couchait par terre comme le 
dernier de ses serviteurs. Il fut trouvé ainsi 
par ses frères aînés et quelques seigneurs qui 
vinrent le visiter un matin. Ils lui en firent 
des reproches. On voit dans les histoires ces 
seigneurs qui entrent dans l'appartement 
du roi et le trouvent couché par terre , 
couvert d'un manteau comme ceux dont se 
servaient les pauvres; l'un d'eux, lé prenant 
pour un page, le repoussa du pied et lui 
reprocha sa négligence. Mais quand iî eut 
aperçu sa figure, celui qui lui avait fait cet 
affront le releva en lui demandant hum- 
blement pûrdon. Ils le placèrent sur son 



DES GHICHIMÈQUES. 27 

trône , et après Favoir entretenu des affaires 
publiques ils commencèrent à lui faire des 
représentations, en lui disant que ses sujets 
étaient très-mécontents de ce qu'il n'eût en- 
core assisté à aucune bataille, car quand ils 
allaient à la guerre avec les Mexicains et les 
Tecpanèques , ceux-ci se moquaient d'eux , en 
disant que les Aculhuas avaient pour roi un 
blanc-bec efféminé. Les ornements que nous 
portons sur la tête, aux oreilles et sur la 
figure, nos colliers de pierreries, les sandales 
d'or et les bijoux que nous avons aux pieds , 
les riches manteaux qui nous couvrent , nous 
les avons gagnés, disaient-ils, par nos ex- 
ploits guerriers , et nous nous sommes rendus 
dignes des biens et des honneurs que nous 
possédons. Ces paroles offensèrent le roi, 
qui leur répondit d'un air sévère qu'il les 
remerciaitdu soin qu'ils prenaient de son hon- 
neur, et que s'il n'avait encore assisté à au- 
cune bataille, il était facile de voir que son 
âge seul l'en avait empêché. Mais qu'il espé- 



28 HISTOIRE 

rait que le Dieu créateur de toutes choses lui 
donnerait assez de force et de courage pour 
leur éviter à l'avenir de semblables affronts ^ 
et qu'il voulait assister en personne à l'ex- 
pédition que l'on préparait contre les pro- 
vinces orientales; que, quant à ceux qui se 
vantaient d'avoir gagné les biens dont ils 
jouissaient, non-seulement il leur conserve- 
rait tout ce que son père leur avait donné, 
mais qu'il l'augmenterait s'ils continuaient à 
le bien servir et à se conduire comme de 
loyaux vassaux ; qu'il le ferait avec la plus 
grande joie, et qu'il se souviendrait toujours 
des dernières paroles du roi son père. 
Après avoir entendu ce discours du roi , les 
seigneurs baissèrent humblement la tète, et 
allèrent donner les ordres nécessaires pour 
l'expédition. Quand l'armée fut réunie, elle 
marcha , commandée par le roi en personne , 
contre Ahuilizapan , et soumit cette province , 
ainsi que celles de Tototlan , Oztoctipac et au- 
tres situées à l'ouest sur les côtes de la mer 



DES GHIGHIMÈQUES. 29 

du Nord. Le roi prit de sa main plusieurs chefs 
et guerriers, parmi lesquels il y en avait un 
nommé Tetzahuitl, qui était le plus puissant 
des seigneurs de la côte. Après avoir mis les 
garnisons nécessaires et partagé ses conquêtes 
conformément aux lois de l'empire, il 
rentra triomphant dans la ville de Tezcuco. 
D'après les annales, cette conquête eut lieu 
dans l'année Ome Calli ou 1481. 



CHAPITRE LVI. 



Netzahualpiltzintli construit un palais et augmente le grand 
temple qu'avait construit son père. — Dépense excessive 
que faisait ce prince. 



Après que Netzahualpiltzintli eut terminé 
d'une manière aussi glorieuse la guerre dont 
je viens de parler, voulant se rendre favorable 
son faux dieu Huitzilopochtli, et excité par le 
conseil des prêtres, il résolut de reconstruire 
avec un nouvel éclat le temple que son père 



32 HISTOIRE 

lui avait élevé. Il en fit Tédifice le plus somp- 
tueux de toute la Nouvelle-Espagne. Il sacri- 
fia lors de son inauguration tous les captifs 
qu'il avait faits dans les dernières guerres. Il 
fit aussi construire un nouveau palais , moins 
grand à la vérité que celui de son père, mais 
beaucoup plus magnifique et d'une plus belle 
architecture. Il y avait des labyrinthes , des 
jardins, des bains, des fontaines, des étangs, 
des lacs et des conduits souterrains qui ame- 
naient en abondance • Teàu du lac dans le^^ 
jardins d'Acatelolco et de Tepetzinco, ainsi 
que dans la ville de Mexico; il donna à un 
étang qui se trouvait en face de la grande 
salle du palais, le nom d'Âhuilizapan , en 
mémoire de la guerre dont je viens de par- 
ler, et pendant toute sa vie il ne construisit 
ni édifice, ni jardin, ni étang, qui ne conservât 
la mémoire de quelqu'une de ses conquêtes. 
L'on voit encore aujourd'hui par leurs ruines 
la grandeur et la puissance de celui qui les 
a construits. 



DES CHICHIMÈQUES. 33 

Je profiterai de roecasion pour parler de 
la grande dépense qu'occasionnaient tous 
ceux qui habitaient ce palais et ceux de son 
père, tant les gens de service que les sei- 
gneurs et les autres nobles. D'après les regis- 
tres royaux on dépensait annuellement dans 
le palais 31,600 fanèguesdemaïs, 243 charges 
de chile de différentes qualités, et 2,000 me- 
sures de sel; 574,010 pièces d'étoffes les plus 
fines et les plus précieuses étaient employées 
à l'habillement des serviteurs ou données 
en présents à la noblesse; elles étaient four- 
nies par les provinces qui appartenaient au 
domaine royal , car les tributs des provinces 
conquises se consei'vaient dans les magasins 
de Tezcuco et de Mexico pour être distribués 
de la manière dont j'ai parlé plus haut, entre 
les enfants et les parents du roi et les seigneurs 
qui se distinguaient soit à la guerre , soit par 
d'autres services. A l'extrémité septentrionale 
du palais, du côté des cuisines, il y avait 

d'immenses greniers où l'on gardait une 
13. 3 



34 HISTOIRE DES GHIGHIMÈQUES. 

quantité de mais et d'autres grains pour les 
années stériles ; chacun de ces greniers pou- 
vait contenir quatre à cinq mille fanègues; ils 
étaient construits de manière à être aérés de 
tous les côtés , de sorte que les grains s'y con- 
servaient pendant de longues années. Les Jar^ 
dins étaient du côté du midi^ de sorte qu'ils 
étaient protégés contre le vent du nord par 
les édifices qui étaient très-élevés. A l'orient, 
il V avait un lac où l'on trouvait des oiseaux 
de toute espèce. 



CHAPITRE LVII. 



Des nombreases concubines de Netzahualpiltzintlî. — De la reine 
Tenacatzihuatzin , son épouse légitime. — Des enfants qu*il 
eut d'elle et de ses concubines. 



L'on voit par les histoires que le roi Netza- 
hualpiltzintli eut plus de deux mille concu- 
bines. Mais^ outre la reine, il y en eut 
quarante avec lesquelles il eut commerce. 
Il en eut cent quarante-quatre enfants, dont 
onze étaient légitimes, ayant la reine pour 



36 HISTOIRE 

mère. L'aine , qui devait hériter de la cou- 
ronne , se nommait Huexotzincatzin. 11 eut 
ensuite une fille, Tiacapantzin , qui épousa 
le prince Macuilmalinatzin, qui devait être 
rhcritier du trône de Mexico, car il était fils 
légitime du roi Axayacatziii; puis Quauhtli- 
yetaczih et Tetlahuehuetzaquiltzin, qui fut 
plus tard nommé D. Pedro; une fille, nom- 
mée Tlacoyehuatzin , qui épousa le seigneur 
de Zocateotitlan, dans la province de Tepeaca ; 
une autre , nommée Teycutzin , qui épousa le 
seigneur de Coatlichan; une troisième, nom- 
mée Xocotzin, qui épousa le seigneur de Te- 
pechpàn; un fils, Goanacochtzin , qui monta 
sur le trône et se fit chrétien sous le nom de 
D.Pedro; Ixtlilxpchitl, qui régna conjointement 
avec son frère sous le nom de D. Fernando 
Cortez ; le dixième fut Nonoalcatzin , et le on- 
zième et dernier, Yoyoxtzin, qui fut plus 
tard appelé D. Georges. La reine était fille lé- 
gitime du prince Xoxocatzin, chef de la mai- 
son d'Atzacualco, une des plus considérables 



DES GHIGIIIMÈQUES. 37 

du royaume de Mexico. 11 l'avait eue de Te- 
yeuhtzin , fille du prince Temiatzin , sœur 
de la reine Azcalxochitzin , mère de Netza- 
hualpiltzintli. De sorte qu'elle était sa cousine 
germaine; c'est pourquoi il la choisit pour 
épouse, quoiqu'elle fût accompagnée de prin- 
cesses mexicaines, filles de roi, comme Té- 
lait la princesse de Xilomenco, sœur aînée 
de Motecuhzoma II, et Cuitlahuatzin de 
Mexico, qui fut mère du roi Cacama. 
De toutes les concubines du roi, celle qu'il 
préférait était celle qu'on nommait la dame 
de Tula , non qu'elle fût du sang des princes 
de cette ville, car elle était fille d'un mar- 
chand; elle était si habile qu'elle pouvait 
lutter avec le roi et les plus sages de son 
royaume. Elle avait aussi un grand talent 
pour la poésie. Tout cela lui donnait une telle 
influence sur le roi qu'elle en obtenait tout 
ce qu'elle voulait. Elle habitait seule, environ- 
néed'unecournombreuseetbrillantc , dans un 
palais que le roi avait fait construire pour elle. 



CHAPITRE LVIII. 



Mort de Tiçoiiicattzin , roi de Mexico. — Ahuitzotzin 

lui succède. 



On ne voit pas dans les annales qu'il soit 
amvé rien d'important dans les cinq ans et 
quelques jours que régna Tiçotzicaltzin , à 
l'exception de la mort de quelques seigneurs 
paissants, comme Techotlalatzin II, seigneur 
d'Iztaepalapan , qui mourut en Ce Tochtli 



40 HISTOIRE 

OU 1482. L'année suivante^ les habitants de 
Quauhnahiiac pénétrèrent dans la province 
d'Atlixco pour attaquer ceux de Huexotzinco; 
mais ceux-ci se défendirent bravement, et les 
mirent en déroute après leur avoir tué beau- 
coup de monde. Quauhpopocatzin , seigneur 
de Coatlichan , mourut en 1 485 , et eut pour 
successeur Xaquintzin. La même année, 
Matlacahuatzin hérita de la seigneurie de Chi- 
malhuacan. 

Ticolzicaltzin mourut en 1486 ou Ghime 
Tochtli. Mais les auteurs varient sur les 
causes de sa mort. Les uns disent que ses 
sujets l'assassiqèrent secrètement ; d'autres 
qu'ils l'empoisonnèrent. Mais l'histoire d'a- 
près laquelle j'écris ne fait aucune mention 
de cela. Les électeurs, réunis aux rois de 
Mexico et de Tlacopan , proclamèrent à sa 
place Ahuitzotzin, célèbre capitaine et pon- 
tife suprême du grand temple ; il était frère 
cadet d'Axayacatzin et de Tiçotzicaltzin. Aus- 
sitôt qu'il fut monté sur le trône il s'occupa 



^ 



DES CHICHIMÈQUES. 41 

d'augmenter et d'embellir les temples de ses 
idoles^ et en construisit de beaucoup plus 
beaux que ceux qu'avaient élevés ses an- 
cêtres. 



n 



CHAPITRE LIX. 



Expédition de Netzahualpiltzintii contre la c6te de NauhtU.— 
Il fait , avec les rois de Mexico et de Tlacopan , la conquête 
de quelques provinces situées sur les côtes de la mer du Sud» 



Dans l'année 1 486^ le roi Netzahualpiltzintii 
réunit son armée et marcha contre la côte 
de Nauhtia , que Ton nomme aujourd'hui Al- 
meria. Il la soumit avec assez de facilité^ mal- 
gré les difficultés que lui opposaient les 
montagnes, et fit prisonniers les princt- 



44 HISTOIRE 

paux chefs et guerriers de cette nation qui 
habite le plat pays de la province des Totona- 
ques. Il prit aussi leur souverain ; de sorte 
qu'il réunit à ses états toute cette pix)vince 
jusqu'à Pan uco; après avoir établi des garni- 
sons et partagé le pays suivant Tusage, il 
retourna àTezcuco victorieux et triomphant. 
Il réunit ensuite son armée avec celle des 
rois de Mexico et de Tlacopan et marcha contre 
les provinces de Ghimantla, Amaxtla, Huas- 
tepec, Tlapan^ Xoconuchco^ Xochtlan^ Amax- 
tlan^ Zapoteca, haute et basse Misteca, et pé- 
nétra jusqu'à celle de Chiapa qu'il parvint à 
soumettre après une longue résistance. Il re- 
vint chargé de dépouilles et suivi de plus de 
cent mille captifs sans avoir perdu plus de sept 
mille hommes; avant de se mettre en route, 
il établit de fortes garnisons dans les villes 
principales et sur les frontières des provinces 
éloignées qui n'étaient pas encore conquises. 
Cette conquête rapide fut une des plus impor- 
tantes que firent les trois chefs de l'empire. 



DES CHICHIMÈQUË8. 45 

Netzahualpiltzintli marcha ensuite contre la 
province de Tizauhcoac qui s'était révoltée 
contre l'empire et dont les habitants avaient 
massacré des marchands de Tezcuco et de 
Mexico qui faisaient le commerce sur leur ter- 
ritoire; Il châtia sévèrement les rebelles, mit 
deS'garnisons dans leurs villes et ramena plus 
de vingt-cinq mille captifs. 

Vers la même époque, il marcha contre la 
province d'Atlixco, une de celles qui étaient 
réservées pour exercer la jeunesse à la guerre 
et fournir des captifs pour les sacrifices. 
Quauhtlitacatzin , seigneur et capitaine gé- 
néral de cette république, vint au-devant de 
lui dans le champ qui était destiné à ces com^ 
bats; il avait choisi les plus braves guerriers 
pour l'accompagner , espérant se couvinr de 
gloire en remportant la victoire contre un roi 
si puissant ; mais Netzahualpiltzintli , plus ha- 
bile que lui, le défit à la première rencontre 
et le fit prisonnier; ce fut un des dix seigneurs 
que, d'après les historiens, le roi de Tezcuco 



46 HISTOIRE DES CHIGHIMÈQUES. 

prit de sa propre main, sans compter un 
grand nombre de capitaines et de guerriers 
dont il n'est pas fait mention individuelle- 
ment. 



CHAPITRE LX. 



Ahiiilzolzin termine le grand temple de Mexico. — Sacrifices 
qui ont lieu à son inauguration. — Mort de Cbimalpopocatzin, 
roi de Tlacopan. — 11 est remplacé par Totoquihuatzin , 
second du nom. 



Le temple de Huitzilopoehtli^ principale 
idole de la nation mexicaine , terminé en Tan- 
née 1487, Chiquei AcatI, était le plus grand 
et le plus somptueux de la ville de Mexico. 
Pour célébrer son inauguration , le roi con- 
voqua ceux de Tezcuco et de Tlacopan ainsi 



48 HISTOIRE 

que tous les grands de Tempire, qui s'y ren- 
dirent en pompe et suivis d'un grand nombre 
de captifs, lesquels , réunis avec ceux du roi de 
Mexico , formèrent un total de 80,400 hommes 
des quatre nations, dont je viens de raconter 
les défaites, savoir : 16,000 de la nation Za- 
potèque, 24,000 de la nation Tlapanèque, 
16,000 de Huexotzinco et Atlixco et 24,400 de 
Tizauhcoac, Tous ces captifs furent sacrifiés 
devant l'idole, et leurs têtes furent enchâssées 
dans des vides que l'on avait laissés exprès 
dans les murailles du temple; l'on sacrifia en- 
suite des captifs qui avaient été pris dans 
d'autres guerres , de sorte qu'il y eut dans le 
courant de l'année plus de 100,000 victimes. 
Les auteurs qui en citent un plus grand nombre 
font entrer dans leur compte celles qui furent 
sacrifiées par la suite. Il y eut une telle bou- 
cherie sous le règne de ce prince , que jamais 
avant ni api*ès lui on ne vit rien de pareil ; 
car outi*e les 1 00,000 victimes on en sacrifia 
beaucoup d'autres pendant son règne, tant à 



DKS GHIGHlMÈQUfcS. 49 

Mexico , à Tezcuco et à Tlacopan que dans les 
autres capitales des provinces soumises à l'em- 
pire. Le démon fit une grande récolte à cette 
époque, car le massacre ne fut pas moins 
grand dans les provinces ennemies de l'em- 
pire (i). 

L'année suivante , .1 489 , Dieu , pour venger 
tant de malheureux , fit mourir plusieurs des 
principaux chefs, entre autres Chimalpopo- 
catzin, roi de Tlacopan, qui, du consentemeF^ 
des deux autres rois , eut pour successeur To- 
toquihuatzin son fils. Dans la même année, 
Tezozomoc fut nommé seigneur d'Atzcapu- 
tzalco ; ce fut le premier depuis la destruction 
de cette ville, et Cuitlahuatzin fut nommé 
seigneur d'Itztacpalapan. Ils étaient tous deux 
du sang royal de Mexico. 



(i) Le nom d'Ahuilzotl est reslé synonyme de fléau. On dit 
encore à Mexico ifulano es mi ahuizote, un tel est mon fléau. 

( f^qyez l'appendix à Vcytia, p. 3o3.) 



13. 



CHAPITRE LXI. 



Guerre de Nezahualpiltzintli contre Huehuetzin de Huexot- 
zinco. — 11 est Tainqueur et fait son ennemi prisonnier. 



On voit dans les histoires que le roi Netza- 
hualpiltzintli et Huehuetzin , seigneur de 
Huexotzinco^ étaient nés le même jour , à la 
même heure, et que les astrologues qui avaient 
tiré leur horoscope avaient dit que Netzahual- 
piltzintli serait vaincu , mais que cependant 



52 HISTOIKE 

on chanterait sa victoire. Cet horoscope in- 
quiétait ces deux princes, et ils désiraient 
sortir de doute. Les frères du jeune roi de 
Tezcuco , jaloux de le voir sur le trône qu'ils 
avaient ambitionné, entretenaient des intel- 
ligences avec son ennemi qu'ils tenaient au 
courant de tous ses projets et même de toutes 
ses pensées. Ayant donc appris que leur frère 
préparait une expédition contre Huexozinco, 
ils l'en avertirent ainsi que du nombre de 
guerriers qu'il devait mener avec lui et de la 
devise qu'il devait porter , recommandant à 
Huehuetzin de prendre avec lui ses plus braves 
soldats et de chercher avant tout à tuer le 
roi , ce qui importait tant à son honneur et à 
ses intérêts. Celui-ci réunit en effet les guer- 
riers les plus renommés, leur montra la de- 
vise que le roi de Tezcuco devait porter dans 
le combat, et leur recommanda de s'attacher 
à lui et de le tuer , car la vie et l'honneur de 
leur chef dépendait de la réussite de ce projet. 
Ils le lui jurèrent. Mais heureusement pour 



DES GHICHIMEQUES. 53 

Nezahualpiitzintli; au moment où le combat 
allait s'engager il fut averti du projet de son 
ennemi et des intelligences que ses frères 
avaient avec lui. Quand il entra dans sa tente 
pour se revêtir de son armure, il fit appeler 
un de ses capitaines qui lui ressemblait beau- 
coup et changea d'armure avec lui , en lui di- 
sant qu'il y allait de l'intérêt de la couronne. 
Il lui promit de grandes récompenses s'il sur- 
vivait à la bataille , et , dans le cas contraire, 
d'avoir soin de sa femme, de ses enfants et de 
tous les membres de sa famille. Ce capitaine 
h remercia de ce qu'il voulait bien lui faire 
l'honneur de l'employer à son service, quoi- 
qu'il y en eut d'autres plus braves que lui 
dans l'armée. Ce capitaine sortit de la tente 
environné des principaux seigneurs et alla se 
placer au poste qu'occupait habituellement le 
roi , pour donner le signal du combat. Le roi, 
revêtu de l'armure du capitaine , plaça autour 
de lui sept guerriers en qui il avait la plus 
grande confiance et qui passaient pour les meil- 



54 . HISTOIRE 

leurs de l'armée; il choisit un poste d'où il 
pouvait facilement attaquer son ennemi corps 
à corps. Les Huexotzincas firent une charge 
impétueuse et environnèrent en peu d'instants 
le malheureux capitaine qui portait l'armure 
royale; en un moment il fut déchiré en mille 
pièces, car il n'y avait dans l'armée ennemie 
ni soldats ni capitaine qui ne voulût avoir un 
lambeau de son corps ou de son armure. Les 
Tezcucains furent repoussés à plus de deux 
cents pas. Les Huexotzincas étaient tellement 
aveuglés par la victoire que Netzahualpil- 
tzintli trouva le moyen de se trouver face 
à face avec Huehuetzin; il l'attaqua comme 
un lion furieux , et , après l'avoir accablé 
de coups, il le saisit au corps pour l'avoir 
vivant et l'emmener captif. Les Huexotzin- 
cas, qui se trouvèrent les moins éloignés, 
vinrent au secours de leur seigneur, et ils au- 
raient réussi à le délivrer si les sept soldats 
que le roi avait chargés de sa garde et sept capi- 
taines qu'il avait déjà vaincus ne leur avaient 



DES CHICHIMBQUES. 55 

opposé une vigoureuse résistance en leur criant 
deç'éloigner et qu'il fallait laisser les deux rois 
vider leurs querelles. Les Tezcucains s'aper- 
eevant dans leur retraite qu'ils n'avaient plus 
leur roi , firent volte-^face et repoussèrent k 
leur tour l'ennemi avec tant de fureur qu'en 
un instant ils arrivèrent à l'endroit où Net- 
zahuajpiltisintli luttait avec Huehuetzin. Net- 
zahualpilt^^intli se voyant isolé et attaqué 
de tous tes icôtés , s'était jeté à terre en- 
trainant son adversaire sur lui , de soKe 
que les ennemis n'osaient le frapper de 
crainte de frappier leur chef. Le roi fut ce- 
pendant blessé à la jambe dans cette occa- 
sion et en resta boiteux toute sa vie. Quand il 
vit arriver les siens qui chassaient les enne- 
mis devant eux, il se retourna, et ayant placé 
son ennemi sous lui il le fit prisonnier. Les 
Huexotzincas furent complètement mis en 
déroute par les Mexicains qui en tuèrent et 
prirent un grand nombre. Netzahualpiltzintli 
revint victorieux à Tezcuco et fit dans la ville 



56 



HISTOIRE DES CHIGHIMÈQUES. 



une entrée triomphante. Cette bataille fut une 
des plus remarquables et des plus disputées 
qui furent livrées par lui ou ses ancêtres, et 
tous les historiens Tout notée comme telle. En 
mémoire de cette victoire , le roi fit faire un 
enclos aussi long que la distance qui le sépa- 
rait des siens quand il se ti^ouva seul au mi- 
lieu des ennemis. C'est celui dont j'ai parlé 
plus haut comme renfermant des oiseaux, et 
qui existe encore aujourd'hui en face du pa- 
lais. Les historiens font observer que l'évé- 
nement de cette bataille justifia complètement 
la prédiction des astrologues. 



CHAPITRE LXII. 



Action extraordinaire de Teuhchimaltzin , noble du sang royal 

de Tezcuco. 



Un des plus célèbres guerriers de cette 
époque était Teuhchimaltzin, qui descendait 
du sang royal de Tezcuco et des empereurs 
chichimèques : il avait passé sa vie dans les 
conquêtes et dans les garnisons des côtes de la 
mer du Sud, de sorte qu'il connaissait par- 



58 HISTOIBE 

faitement ce pays et ses coutumes et en parlait 
la langue aussi couramment que les Naturels, 
ce qui l'encouragea à tenter une entreprise 
hardie. 

Le puissant seigneur de Zacatula nommé 
Yopicatl Atonal avait alors la réputation d'un 
vaiflant capitaine; plusieurs fois les armées 
impériales avaient essayé de pénétrer sur son 
territoire, soit ensemble, soit séparément, 
mais elles avaient toujours été repoussées sans 
pouvoir l'entamer ; mais comme c'étaient les 
Aculhuas de Tezcuco qui avaient commencé 
cette entreprise d'un côté peu important pour 
les Mexicains et les Tecpanèques, ceux-ci les 
raillaient toujours à ce sujet. Teuhchiraaltzin, 
blessé par ces plaisanteries qui tombaient en 
partie sur lui, alla trouver le roi son raaitre 
et lui demanda la permission d'entrer sur le 
territoire de Zacatula avec quelques marchands 
de Tezcuco qui y faisaient ie commerce , pro- 
mettant de soumetti^e cette province et d'ame- 
ner son soigneur mort ou vif. Le roi ne la lui 



DES CHICHIMÈQUES. 59 

accorda que malgré lui , car il regardait cette 
enti'eprise comme une folie ^ et était convaincu 
que Teuhchimaltzin serait certainement tué 
ou pris. Cependant il pénétra secrètement^ 
avec deux marchands en qui il avait toute 
confiance y dans le Zacatula^ et prenant ainsi 
qu'eux le costume du pays , il se mit à courir 
les foires , attendant l'occasion d'exécuter son 
projet. Malgré ses précautions il fut reconnu^ 
arrêté et conduit devant le seigneur du pays, 
qui le fit enfermer sous bonne garde, dans 
l'intention de le sacrifier à ses idoles lors de 
la première fête. Quand elle fut arrivée, le 
seigneur invita la veille tous les principaux 
chefs à assister à un banquet et à une danse 
solennelle qu'ils avaient l'habitude d'exécuter 
la nuit. Ils burent tellement, selon l'usage 
de cette nation, qu'avant minuit tous les chefs 
et tous les officiers du palais étaient complè- 
tement ivres. Teuhchimaltzin parvint à s'é- 
chapper de l'endroit où il était renfermé , pé- 
nétra dans la salle du festin et commença à 



60 HISTOIRE 

faire toutes les cérémonies qu'il vit faire aux 
autres, qui étaient tellement ivres qu'ils ne 
s'aperçurent pas de sa présence. Quand ils 
furent tous tombés par terre , Teuhchimaltzin 
s'approcha du roi et lui coupa la tête avec un 
couteau qu'il avait apporté, et la mit dans un 
sac ainsi que quelques-uns des joyaux dont le 
prince ornait sa personne; il s'échappa ensuite 
du palais et regagna en toute hâte la frontière 
de l'empire qui n'était pas très-éloignée de ce 
côté-là. Quand les nobles de Zacatula furent 
revenus à eux et qu'ils se furent aperçus du 
coup hardi qu'avait fait leur prisonnier , ils 
résolurent de se soumettre à Netzahualpiltzin- 
tli. Ils dépêchèrent après Teuhchimaltzin un 
envoyé chargé de présents. Quand il fut ar- 
rive au poste impérial de la frontière, il l'en- 
gagea à revenir sur ses pas et à prendre pos- 
session du pays au nom de son maître. Celui- 
ci demanda avant tout des otages pour sa 
sûreté personnelJe et celle de ceux qu'il mè- 
nerait avec lui. On lui donna les fils du der- 



DES GHICHIMÈQUES. 61 

nier seigneur et plusieurs nobles qui restèrent 
entre les mains des officiers tezcucains^ pen- 
dant qu'il alla s'emparer de la forteresse de 
Zacatula et prendre toutes les mesures ordon- 
nées par les lois et les coutumes de l'empire. 
Il plaça sur le trône l'héritier légitime , con- 
firma les nobles dans leurs domaines et leur 
rang, et revint ensuite triomphant à Tezcuco 
où il fut très-bien accueilli. Il présenta au roi 
la tête et les insignes de Yopicatl Atonal , ainsi 
que d'immenses richesses. Le roi le combla 
de faveurs, le fit seigneur de plusieurs vil- 
lages et lui fit élever dans la ville de Tezcuco 
un palais absolument semblable à celui que 
Yopicatl Atonal avait à Zacatula. Cet événe- 
ment était souvent cité par les rois de Tezcuco 
quand ils voulaient détourner leurs sujets et 
leurs enfants du vice de l'ivrognerie. 



CHAPITRE LXllI. 



Guerres et conquêtes de l'empire contre les nations éloignées. 



La province de Zapotlan fut conquise dans 
l'année Matlactii Orne Tecpatl ou 1A92, et en 
1493 celle de Xaltepec qui s'était révoltée. En 
1494, Tlacahuepantzin , un des fils légitimes 
du roi Axayacatzin de Mexico, fut fait prison- 
nier dans un combat, par les habitants d'At- 



k « 



64 HISTOIRE DES GHIGHIMÈQUES. 

lixco et sacrifié aux idoles. En 1495, lai'inée 
des Aeulhuas marcha contre Yltepec, mais 
elle fut mise en déroute après avoir perdu 
beaucoup de monde. En 1496, l'armée réunie 
des trois chefs de l'empire marcha contre 
Tequantepec; mais elle éprouva une défaite 
qui diiginua beaucoup sa réputation. Dieu leur 
fit bien voir combien il était irrité de leurs 
sacrifices humains , mais il leur réservait en- 
core d'autres châtiments. En 1497, ils sou- 
mirent les deux provinces d'Amaxtlan et de 
Xochitlan. 



CHAPITRE LXIV. 



Extrême sévérité de NezahualpiUzintli contre son épouse 

adultère. 



Quand Âxayacatzin et d'autres principaux 

seigneurs avaient envoyé leurs filles à Netza- 

hualpiltzintli y pour qu'il choisît parmi elles 

une reine et une épouse légitime, il avait été 

convenu que Ton j>rendrait pour l'héritier du 

trône, parmi les enfants de toutes les femmes, 
13. 5 



66 HISTOIRE 

celle qui se distinguerait le plus par ses vertus 
et la noblesse de sa race. Parmi elles on remar- 
quait la princesse Chalchiuhnenetzin, fille légi- 
ti medu roi Axayacatzin .Comme elle était encore 
fort jeune, le monarque la fit élever dans un 
palais séparé , et lui donna un grand nombre 
de personnes pour la servir, comme le mé- 
ritait la fille d'un aussi puissant prince que 
l'était son père ; aussi avait-elle à ses ordres 
plus de deux mille personnes pour la servir. 
Malgré sa jeunesse, elle était si rusée et si 
diabolique , que se voyant maîtresse absolue 
dans son palais , et environnée de gens qui la 
craignaient et la respectaient, elle commença 
à se livrer aux vices. Quand elle voyait un 
jeune homme beau et bien fait elle se le faisait 
amener secrètement, et après avoir assouvi 
sa passion elle le faisait massacrer. Elle faisait 
faire ensuite une statue qui représentait son 
portrait, la faisait habiller de riches vête- 
ments et l'ornait de bijoux d'or et de pierre- 
ries. On la plaçait après cela dans sa salle de 



DES CHICHIMÈQUES. 67 

réception. Elle avait fait périr un si grand 
nombre de jeunes gens que la salle était garnie 
presque tout autour de leurs images. Quand 
le roi allait la visiter > et qu'il lui demandait 
ce que c'était que ces statues ^ elle lui répon* 
dait que c'étaient ses dieux , ce qu'il croyait 
d'autant plus facilement , que le respect des 
Mexicains pour leurs idoles était bien connu. 
Mais f comme tes crimes finissent toujours par 
être découverts , la reine épai^na ^ par cer- 
taines considérations^ trois de ses complices 
qui se nommaient Chicuhcoatl , Huitsilibuit- 
zin et Maxtla^ dont l'un était seigneur de 
Tenayucan et l'un des grands du royaume , et 
les deux autres des nobles d'un rang élevéï. 
Le roi reconnut sur l'un d'eux un joyau qu'il 
avait donné à la reine, et quoi-qu'il ne soup^ 
çonuàt aucune trahison , cela lui inspira cé*^ 
pendant quelque défiance. Il alla cette nuit 
même la visiter. Les femmes de service lui 
répondirent qu'elle reposait, croyant que, 
comme à l'ordinaire, il se contenterait de cette 



j 



68 HISTOIRE 

raison ; mais il insista pour pénétrer dans sa 
chambre , et quand il s'approcha du lit pour 
la réveiller il n'y trouva qu'une statue ornée 
d'une chevelure qui ressemblait parfaitement 
à Chalchiuhnenetzin. Le roi voyant cette ima- 
ge^ et l'effroi qui se peignait sur la figure des 
gens du palais^ appela ses gardes et les fit 
tous arrêter. On chercha partout la princesse , 
«et l'on finit par la trouver occupée à danser 
avec ses trois amants , qui furent jetés en pri- 
son ainsi qu'elle. Le roi ordonna aux juges 
du tribunal suprême d'examiner cette affaire : 
ils découvrirent un grand nombre de com- 
plices, tant parmi ses serviteurs que parmi 
les marchands et les ouvriers qui avaient 
fourni tout ce qui était nécessaire pour l'or- 
nement des statues , avaient aidé les amants 
de la princesse à pénétrer dans le palais , ou 
avaient trempé dans leur assassinat. Quand 
l'affaire eut été suffisamment examinée, le roi 
de Tezcuco envoya des ambassadeurs à ceux 
de Mexico et de Tlacopan , pour les instruire 



DES CHIGHIMÈQUËS. 69 

de ce qui s'était passé , et leur annoncer 
le jour où répouse adultère devait être punie 
avec ses complices. Il fit aussi ordonner à 
tous les seigneurs du royaume de se rendre 
à Tezcuco avec leurs femmes et leurs filles , 
quelque jeunes qu'elles fussent , afin qu'elles 
assistassent à ce grand exemple. Il fit aussi 
une trêve avec tous les ennemis de Terapire , 
afin qu'ils pussent y venir librement. Au joui* 
fixé , il arriva à Tezcuco une si grande .quan- 
tité d'étrangers , que la ville , malgré sa vaste 
étendue^ pouvait à peine les contenir. La 
sentence fut exécutée publiquement, et Ton 
étrangla la reine et ses trois amants ; mais , 
par considération pour leur noblesse , leurs 
cadavres furent brûlés avec les statues dont 
j'ai parlé. Leurs complices, qui étaient au 
nombre de plus de deux mille , furent aussi 
étranglés. On jeta leurs cadavres dans une 
fosse creusée dans un ravin près du temple 
du dieu qui punit les adultères. 

Cet exemple sévère obtint l'approbation gé- 



70 HISTOIRE DES CHICHIMSQUES. 

nërale; mais les seigneurs mexicains, parente 
de la reine , furent offensés qu'il eût été si 
public. Mais, sans montrer leur colère, ils 
résolurent de se venger quand ils en trou*- 
veraient l'occasion. Ce ne fut pas sans une 
causé secrète que le roi éprouva un pareil 
afiront > car il fut puni ainsi des moyens in- 
dignes dont le roi son père s'était servi pour 
obtenir sa mère pour épouse. 



CHAPITRE LXV. 



Nouvelles conquêtes des armées impériales. 



Les guerriers de l'empire étaient tellement 
impatients de soumettre de nouveaux pays et 
de nouvelles nations^ qu'ils auraient cru se 
livrer à une honteuse oisiveté , s'ils n'avaient 
pas entrepris quelque expédition y tant pour 
acquérir de la gloire que pour mériter les ré- 



72 HISTOIRE DES GHIGHIMEQUES. 

compenses que leurs souverains leur accor- 
daient généreusement , et rapporter de riches 
dépouilles. Ils allèrent donc attaquer la pro- 
vince de Tehuantepec où ils avaient éprouvé 
plusieurs défaites^ et qui était une des plus 
riches et des plus puissantes de la côte. Us 
pénétrèrent dans ce pays et assiégèrent une 
des villes les plus considérables qui se nom- 
mait Amixtloapan ; ils la prirent et la sac- 
cagèrent après avoir tué plusieurs milliers 
d'ennemis; et cette nation, qui s'était tou- 
jours vaillamment défendue, futcomplétement 
abattue. L'année suivante , Chicome Tecpatl , 
ou 1 500 , ils marchèrent contre la province 
de Xaltepec qui s'était révoltée de nouveau , 
et la saccagèrent tellement qu'elle n'osa plus 
remuer, quoiqu'on lui imposât un double 
tribut , comme on le faisait à toutes celles qui 
essayaient de secouer le joug de l'empire. 



CHAPITRE LXVI. 



Grande inondation de la ville de Mexico causée par une source 

nommée Acuecuezatl (i). 



On voit par les histoires que même les ëlé^ 
ments paraissaient demander vengeance à 
Dieu , et se soulevaient contre le roi Âhuizot* 



(i) Vcjrtz sur les inondations de Mexico Relacion de la 
inundacion de Mexico y del desague que hizo el Virey Mar- 
ques de Montesclaros. Mexico, 1 6 1 1 . 



n 



74 HISTOIRE 

zin qui se montrait si dévoué au culte des 
idoles. Il voulut à cette époque amener à 
Mexico y par un aqueduc construit en ma- 
çonnerie , Teau d'une source nommée Acue- 
cuexatl , près de Huitzilopochco dans la pro- 
vince de Cuyoacan. Mais quand Taqueduc 
fut ouvert, il en sortit une telle abondance 
d'eau qu'elle passait par dessus les murs des 
maisons de la ville , de sorte qu'elle fut inon- 
dée en un instant ; une grande partie des ha- 
bitants furent noyés. Les vagues arrivaient 
avec tant de force de l'autre côté du lac, que 
tout le monde était rempli de terreur, et tous 
ceux qui purent s'échapper abandonnèrent la 
ville. Le roi qui se trouvait dans une salle 
basse de ses jardins la quitta avec tant de 
hâte qu'il se frappa là tête contre une porte, 
et fut si dangereusement blessé qu'il en mou^ 
rfit au bout de quelque temps. Si iJès servi-- 
teurs n'étaient pas venus à son secours , il eût 
été nové. 11 envova des ambassadeurs à Net- 
zahualpiltzintli pour le prier de lui envoyer 



DES GHICHIMÈQUES. 75 

du secours^ afin de Taider à relever la ville de 
Mexico. Celui-ci fut ravi de trouver une oc- 
casion d'être utile aux Mexicains^ parce qu'il 
espérait par là faire cesser la rancune qu'ils 
conservaient contre lui à cause de la mort de 
leur princesse. Il envoya à Huizilopochco 
tous les architectes de son royaume avec une 
quantité d'ouvriers et de canots chargés de 
pievix, de pierres, de chaux et d'autres maté- 
riaux, entra lui-même dans le goufre d'où 
sortait l'eau pour l'examiner, et le fit bou- 
cher par une forte muraille en maçonnerie. 
L'eau s'écoula ensuite peu à peu de la ville 
de Mexico où le roi se rendit pour consoler 
Ahuitzotzin et l'aider à réparer le dégât. 



CHAPITRE LXVII. 



NetzahualpiUzintli apaise nne qnerelle entre les princes 
AcapioUzin et Xochiquetzaltzin ges frères. — 11 punit 
séTerement quelques-uns de ses fils. 



J'ai déjà dit, dans la vie de Netzahualcoyot- 
zin, que les deux princes Acapioltzin et 
Xochiquetzaltzin avaient entrepris la con- 
quête de la province de la Guastèque , l'un 
comme capitaine général de l'armée, et l'autre 
comme commandant le secours qui lui fut 



78 HISTOIRE 

envoyé. Ce dernier manœuvra si bien qu'il 
fit seul la conquête de cette province. C'est 
pourquoi les poètes de cette époque , en célé- 
brant cette guerre, vantèrent ses actions 
héroïques, en même temps que celles de son 
frère , qui , quoique capitaine général , arriva 
trop tard, et n'eut aucun droit, malgré 
quelques faits d'armes, de revendiquer la 
gloire de cette conquête , qui à bon droit ap- 
partenait tout entière à son frère Acapioltzin. 
Mais comme cette question n'avait pas été 
décidée , toutes les fois qu'il y avait une fête, 
les musiciens que chacun des deux frères en- 
trenait dans son palais, chantaient cette vic- 
toire en l'honneur de leur maître, et quand 
ensuite ils se réunissaient sur la grande place 
pour célébrer la danse solennelle, il s'élevait 
des querelles entre eux, leurs amis et leurs 
alliés : enfin les choses en vinrent au point 
qu'il s'engagea un combat, et qu'il y aurait 
-eu un grand nombre de morts des deux 
côtés, si le roi Netzahualpiltzintli n'avait évo- 



DES GHIGHIMÈQUES. 79 

que le jugement de cette affaire. Il fut décidé 
que c'était au prince Acapioltzin que Ton 
devait la victoire. La première fois que l'on 
céld>ra une fête, le roi, sans les avoir pré* 
venus, se rendit sur la place suivi des grands 
du royaume , et se dirigeant du côté où était 
Acapioltzin, il lui donna la place d'honneur, 
et dansa avec lui et les seigneurs qui l'accom- 
pagnaient. Xochiquetzaltzin voyant cela se 
retira avec ses amis et ses musiciens , et n'osa 
jamais renouveler cette querelle. Le roi or- 
donna que ce chant fût nommé Teotlan 
Huastecayotl , c'est-à-dire chant de la con- 
quête de Huasteca, appartenant à la maison 
de Teotlan. 

Ce fut avec cette sagacité que le roi apai- 
sa cette querelle et d'autres qui s'élevèrent. 
Quand il le croyait nécessaire , il faisait exé- 
cuter les lois dans toute leur rigueur sans 
même épargner ses enfants, comme il le fit 
à l'égard du prince Huexotzincatzin , son fils 
aîné, qui devait hériter de l'empire. Celui-ci , 



L . 



80 HISTOIRE 

qui parmi d'autres talents en avait un très- 
grand pour la poésie , composa une épître à 
la dame de Tula , qui était la concubine favo- 
rite de son père. Comme elle cultivait aussi la 
poésie, elle lui fit une réponse en vers, et 
cela amena entre eux une espèce de corres- 
pondance qui fit supposer qu'il la courtisait. 
Les juges examinèrent cette ajBTaire qui, d'a- 
près les lois , était regardée comme un crime 
de haute trahison et punie de mort. Quoique 
le roi son père l'aimât beaucoup , il fit exé- 
cuter la sentence. Le roi fut tellement a£Qigé 
de la perte de son fils qu'il fit murer les 
portes et les fenêtres du palais qu'il habitait : 
c'est pourquoi on le nomma Ixayoc. Netza- 
hualpiltzintli châtia aussi sévèrement son se- 
cond fils nommé Iztacquauhtzin, parce que, de 
son autorité privée et sans autorisation , il 
avait fait construire un palais sans l'avoir 
mérité par aucun fait d'armes ; car les lois ne 
permettaient à personne , même à l'héritier 
de la couronne, de faire construire un palais 



bES CHIGHIMÈQUES. 84 

OU de porter un bandeau de plumes avant 
d'avoir assiste à quatre batailles , et pris de 
sa main quatre guerriers célèbres. Il fallait 
aussi pour cela qu'il eut étudié les sciences^ 
qu'il fût philosophe ^ orateur ou poète , ou 
du moins qu^il se distinguât dans quelque art 
mécanique , et quand on avait rempli toutes 
ces conditions , il fallait encore avoir obtenu 
la pa:*mission du roi y ou l'on était puni de 
mort^ comme cela arriva au prince Iztac- 
quauhtzin. 

Netzahualpiltzintli fit pendre un juge nom- 
mé Ce Quauhtzin^ parce qu'il avait écouté des 
plaidoiries et prononcé des jugements dans 
sa maison. Cela était sévèrement défendu 
aux juges ^ ainsi que de recevoir des présents. 
Les procès ne devaient être décidés que dans 
les salles du palais , en présence de tous les 
juges. Us siégeaient depuis le matin jusqu'à 
midi y prenaient leur repas dans le palais et 
continuaient de siéger jusqu'au coucher du 

soleil. Us ne suspendaient leurs audiences 
13. 6 



82 HIStOIEfi 

qu'à rëpoque des fêtes solennelles , pour 
causé de maladies ou pour d'atitt^s motifs 
graves. Un autre juge ayàtit (hit traitier uki 
procès en longueur, le roi le fit conduire à sa 
maison , dont on mut^a la pointe principale ^ 
de sorte qu'il tie pouvait plus eti èôHit* ^ue 
pat* une petite pottè de derrière* Il lui dé- 
fendit eti dutre de reparaître au palais , 
ou d'avoii^ aucun rapport avec les autres 
membres du tribunal. Il fit tuer une de 
ses filles pour avoir parlé au fils dfun ^i-^ 
gneuf , et deux de ses concubines pour 
avoir bu du vin que Ton ne regardait que 
comme Un remède , et dont l'usage était 
défendu aux femmes sou* peine de la vie. 
Il fit |]iendre un juge poiU* avoir favorisé 
un noble contre un plébéien ; fit revoir 
le procès , et juger en faveur du pauvre. 
Deux de ses -fils s'attribuèrent des prison- 
niers qui avaient été faits par leurs sol- 
dats , quoiqu'ils fussent revenus couverts 

« 

de blessures qui prouvaient leur valeur; 



DES GHICHIMÈQUES. 83 

il les fit étrangler après les avoir fait gué- 
rir. C'était la peine que la loi prononçait 
contre ceux qui s'attribuaient les captifs d'au- 
trui. 



CHAPITRE LXVIÏI. 



NetzahualpiltzinlH améliore la législation et radininistratioà 

de la justice. 



Outre les Juges dont j'ai parlé, les rois de 
Tezcuco avaient des espèces de secrétaires 
qui peignaient avec grand soin les procès qui 
étaient portés à l'audience , et en faisaient le 
rapport au roi et aux juges, de sorte que les 
affaires méine les plus importantes étaient 



86 HISTOIRE 

conduites avec beaucoup d'ordre jusqu'à la 
sentence définitive , qui devait être approuvée 
par le roi ; mais quelque importante que fût 
l'affaire, elle ne devait pas durer plus de 
quatre-vingts jours. Le» autres étaient expé- 
diées sommairement. 

Un de ces secrétaires rapporta au roi que 
le tribunal criminel avait condamné à la 
potence deux adultères , dont l'un était mu- 
sicien et l'autre soldat. Les présidents des 
quatre conseils , auxquels on avait soumis la 
révision de ce jugement, comme on le faisait 
dans toutes les affaires graves, l'avaient con- 
firmé. Il ne restait plus que l'approbation du 
roi qui , prenant le pinceau des mains du se- 
crétaire, tira une barre noire sur la figure 
qui représentait le musicien et ^argna le 
soldat. Le secrétaire rapporta la peinture aux 
présidents des conseils qui, pensant que le roi 
avait violé les lois en épargnant ses soldats , 
vinrent pour lui faire des représentatioiis et 
l'engager k exécuter ce que son père et ses 



DES GlilQHlIlÈQUES. 87 

ancétrei^ avaient ordonné* IVeUahualpiltzintli 

« 

leur répondit que &on devoir était non- 
^ulement de faire eicécuter le3 lois , mais de 
les améliorer , et que dorénavant il ordonnait 
que toutes les fois qu'un soldat ou un homme 
!en état de jporler les armes mmmettrait up 
adultère ^ il serait reloué ^ pour la vie, dans 
les garnisons des frontières de l'empire ; que 
cette punition serait suffisante et qu'elle pro- 
fiterait à l'État; dont un soldat devait être le 
défenseur. Il abolit aussi la loi qui condam- 
nait les fils des esclaves à suivre la condition 
de leurs pères ; csar il y en avait auasi quel- 
quesHuns de ce genre , et ordonna qu'à l'a- 
venir ils jouissent de la liberfaé naturelle que 
Dieu leur avait donnée. 

]Ke|zai3£ialpi)teintli punit ausisi sévèrement 
l'insolence de plusieurs seigneurs ^ et sut se 
jfaire craindre et respecter. Ayant demandé à 
J'un des princes aes frères de lui donner une 
de ses filles pour la placer parmi ses concu- 
bines , celui-ci la lui refusa nettement ^ quoi- 



88 HISTOIRE 

que ce fût la coutume que les rois et les 
seigneurs prissent leurs parentes et leurs 
cousines au delà du second degré pour les 
placer au nomhrede leurs femmes, ce qu'elles 
regardaient comme un grand honneur, puis- 
que leurs enfants pouvaient hériter du trône 
à défaut de descendants légitimes , et rece- 
vaient au moins la seigneurie de quelque ville. 
Quelque temps après , le roi pria son frère de 
lui donner un instrument de musique nom- 
mé teponazdi , qu'il avait eu pour sa part de 
dépouilles dans une conquête et qui passait 
pour le meilleur du pays ; il rendait un son 
doux et harmonieux, quoiqu'on l'entendit à 
la distance de deux ou trois lieues , et plaisait 
beaucoup au roi, qui ofirit de donner en échan- 
ge plusieurs villages et d'autres présents qui en 
excédaient de beaucoup (a valeur. Mais le prince 
le lui refusa encore sans même prendre la 
peine de s'excuser. Le roi alors le lui fit 
enlever de force , et fit saccager et démolir sa 
maison comme celle d'un homme rebelle et 



DES GHIGHIMÈQUES. 89 

désobéissant. Le roi fit ensuite placer ce te- 
ponaztli dans la salle des armes ^ comme une 
dépouille conquise à la guerre , et ordonna 
qu'on ne s'en servît que dans les fêtes et les 
occasions solennelles. Plus tard, les religieux 
de Saint-François le firent mettre en pièces 
et brûler , parce que les Indiens avaient pour 
lui une espèce de vénération. Cet exemple 
efiraya tellement les frères du roi que depuis 
cette époque ils n'osèrent lui résister ni rien 
tramer contre lui. 

11 châtia aussi sévèrement la femme d'un 
gentilhomme de la ville nommé Teanatzin, 
qui , se trouvant dans une danse avec le roi , 
se prit d'une si folle passion pour lui qu'elle 
osa lui déclarer ses sentiments. Le roi la fit 
entrer dans son appartement, mais ayant 
appris , après en» avoir joui , que c'était une 
femme mariée , il la fit étrangler , et fit pré- 
cipiter son corps dans un ravin où l'on jetait 
les cadavres des adultères , et il fit renvover 
au père ses enfants qu'elle avait amenés avec 



90 HISTOIRE 

elle^ en yjqignant de grands présents et des 
femmes pour les servir. Ce gentilhomme qui 
aimait beaucoup sa femme parce qu'elle était 
très»-belle, dit tristement aux messagers du 
roi : (f Pourquoi le roi m'a-*-t-il pris mon 
j), épouse ? pourquoi l'a-ft-il fait tuer? ne 
i) ya)ait-^il pas mieux la laisser vivre et me la 
i) rendre^ à moi qui Taimais tant. » Le roi, 
instruit 4e oes plaintes ^ fit plonger ee gentil-* 
homme dans un cachot ^ avec Tintefition de le 
punir sévèrement du peu de cas qu'il faisait de 
son honneur. Il y resta enfermé pendant fort 
longtemps et y composa un chant fort tou- 
chant^ où il racontait ses malheurs. Comme 
quelques-uns des musiciens étaient ses acpis^ 
ils trouvèrent moyen de le chanter dans une 
fête, en présence du roi. La poésie en était si 

touchante que le roi en fut tout ému y et qu'il 
le fit remettre en liberté et conduire devant 
lui. Alors il lui expliqua la raison qui l'avait 
déterminé à faire exécuter son épouse , qui , 
sans qu'il le sut, lui avait fait violer les lois 



DES GHIGHIMÈQUES. 91 

du royaume y et l'avait si bien trompé par la 
douceur de ses paroles, qu'il n'avait su que 
c'était une femme mariée qu'en apercevant 
ses enfants. Après lui avoir dit tout ce qu'il 
put pour le consoler, il lui donna une belle 
vierge pour épouse, et lui fit beaucoup de 
présents. Quand on tira ce seigneur de prison 
sçs cheveux avaient tellement grandi et blan- 
chi qu'on l'aurait pris pour un sauvage. 



CHAPITRE LXIX. 



Naissance du valeureux prince IitliliLOchitl , et ce qu il fit 

pendant son enfance. 



Rien n'est plus admirable que les c&uvres 
de Dieu et la sagesse mystérieuse avec laquelle 
il dispose toute chose; c'est ce que Ton remar- 
que principalement à la naissance des princes, 
comme cela eut lieu surtout à celle du prince 
Ixtlilxochitl , qui arriva dans les deux pre- 



94 HISTOIRE 

miers mois de l'année 1 500, presqu'à la même 
époque où naissait dans la ville de Gand l'in- 
vincible et puissant empereur D. Carlos , notre 
seigneur de glorieuse mémoire. C'est aussi une 
coïncidence très-remarquable que la naissance 
de D. Fernand Cortez , premier marquis de la 
vallée d'Oaxaca, qui arriva quinze ans aupar- 
ravant , en 1 485 , à la même époque que celle 
de l'hérésiarque Martin Luther, de ce Cortez 
qui devait faire autant de bien à notre sainte 
religion que l'autre lui a fait de mal. 

11 y eut à la naissance d'Ixtlilxochitl une 
foule de présages qui annoncèrent ce qu'il de- 
vait être à l'avenir ; entre autres choses que les 
astrologues et les devins annoncèrent à son 
père, ils lui dirent qu'un jour le prince in- 
troduirait de nouvelles lois et de nouvelles 
coutumes; qu'il serait l'ami d'une nation 
étrangère et l'ennemi de la sienne et de son 
pix)pre sang$ qu'il vengerait un jour tous les 
captifs que l'on égoi^eait et détruirait la reli- 
gion, les dieux et les rites du pays* Ils voulu- 



DES CHIGHIMBQUES. 95 

rent déterminer le roi son pét*e à lui ôter la 
vie; mais celui-H:i répondit qu'il ne fallait pas 
s'opposer aux desseins de Dieu> créateur de 
toutes choses 9 qui avait fait naitM ce fils 
quand le monient approchait où devaient 
s'accomplir les prophéties de ses ancêtres. 
Elles annonçaient qu'il viendrait de nouvelles 
nations s'établir dans le pays; que ce seraient 
tes ûh de Quelt^alcoatl qui devaient venir du 
côté de l'Orient. Ce fut aVec cette réponse 
qu'il congédia les devins cpii lui donnaient ce 
conseil* Dès son enfance , Ixtlilxochitl montra 
tant d'esprit et de vivacité qu'on voyait bien 
oe qu'il Serait un jour. Il faisait l'admiration 
des femmes qui étaient chargées de son édu- 
cation. A l'âge de trois ans^ il tua sa nourrice 
de la manière suivatite : voyant qu'elle se 
faisait faire la cour par un seigneur^ il la pria 
de lui donner à boire^ Cette femme étant 
obligée de se pencher au-dessus du puits pcmr 
en tirer de l'eau avec Une corde, il profita de 
ce moment pour l'y foire tomber; comme le 



96 HISTOIRE 

puits était très^troit , elle s'y noya ^ malgré led 
efforts que l'on fit pour venir à son seoours. 
L'enfant y au contraire^ se mit à ramasser des 
pierres pour les lui jeter. Tout étonné de cette 
conduite , on le mena devant le roi , qui lui 
demanda pourquoi il avait tué sa mère qui 
rélevait et lui donnait son lait. L'enfant , sans 
se troubler, lui répondit que , dans les quatre^ 
vingts lois qu'il avait entendu lire, il était 
défendu de faire la cour aux dames et aux 
servantes du palais , ni à elles de s'y prêter 
sous peine de la vie , et que , voyant sa mère 
s'entretenir avec un noble, il l'avait tuée pour 
obéir à la loi. Le roi avant vérifié le fait, fut 
tout étonné de cette conduite dans un enfant 
si jeune. 

Quand Ixtlilxochitl eut atteint l'âge de sept 
ans, il commença à former un bataillon de 
jeunes garçons. Il fit faire par ses maîtres 
des pelotes et des flèches de glayeul et de 
jonc, qui lui servaient de munitions. Sou- 
vent, quand il venait à en manquer, il pre- 



DES CHICHIMCQUES. 97 

liait des cailloux et en. blessait un grand 
nombre y qui s'en allaient en poussant de 
grands cris et faisant un tel tapage que cela 
troublait la tranquillité de la ville. Le roi était 
fort mécontent de cette conduite , et en faisait 
des reproches à ses maîtres. Deux seigneurs 
conseillèrent au roi de le faire mourir , lui 
représentant qu'un prince qui se montrait 
aussi turbulent dans son enfance, compro- 
mettrait un jour la tranquillité de ^'empire par 
son ambition ; qu'il chercherait à dépouiller ses 
frères et les autres seigneurs. Sans vouloir 
suivre ce conseil , le roi , qui était fort mécon- 
tent de ce désordre , fit venir les maîtres du 
jeune prince, et les réprimanda sévèrement. 
Ceux-ci firent des représentations à leur élève 
et le supplièrent d'éviter d'irriter son père, lui 
l'acontant le conseil qui lui avait été donné; ils 
ajoutèrent qu'il pourrait en coûter la vie non- 
seulement à lui, mais à ceux que l'on accu- 
serait de ses déportements. Ixtlilxochitl prit 
une nuit quatre jeunes gens de sa garde, à la- 

13. * 7 



98 HISTOIRE 

quelle il enseignait Tart militaire et qui avaient 
toute sa confiance, et il se rendit avec eux 
chez ces conseillers, qu'il fit appeler comme 
s'il avait eu à les entretenir de quelque affaire 
importante. Dès qu'ils arrivaient, ces gardes 
les saisissaient, les étranglaient et les pen- 
daient ensuite. Quand on les trouva le lende- 
main dans cet état , on alla prévenir le roi , 
qui fit appeler le prince et lui demanda ce 
qui l'avait excité à commettre un pareil crime 
et à assassiner ses conseillers. Ixtlilxochitl lui 
répondit : Seigneur, je ne les avais jamais 
offensés, et cependant ils ont tramé ma perte; 
si vous n'aviez pas été si sage et si prudent, 
leurs conseils m'auraient coûté la vie, et ce- 
pendant je n'ai violé ni les loi§ ni vos ordres. 
Si je suis belliqueux et si j'aime la guerre, 
c'est la vertu que, par-dessus toutes les autres, 
on aime dans vos États. C'est donc une injus- 
tice de vouloir réprimer mon caractère et une 
cruauté de souhaiter la mort à qui ne vous a 
pas offensé. Je n'ai donc fait que prendre 



DES CHICHIMÈQUES. 99 

l'avance sur eux en leur ôtant la vie, puis- 
qu'ils demandaient ma mort; dans tous les 
cas, je suis le seul coupable, car mes servi- 
teurs , en m'accompagnant , n'ont fait que ce 
qu'ils devaient à leur maître. Le roi trouva 
ces raisons si justes et si bien fondées, qu'il 
ne lui imposa aucun châtiment, d'autant plus 
que cette conduite ne partait pas d'un senti- 
ment bas, mais d'une fierté de caractère qui 
annonçait ce qu'il serait un jour. Le roi se 
contenta donc de lui dire de prendre garde a 
lui, et que, si le conseil que Ton avait attribué 
à ces seigneurs ne s'était pas trouvé véritable, 
il lui en aurait coûté la vie. Ixtlilxochitl n'avait 
alors que dix ou douze ans. Quand il en eut 
quatorze, il alla combattis dans les champs 
de TIaxcallan et de Huexotzinco, où il fit des 
merveilles, de sorte qu'à l'âge de dix-sept 
ans il portait déjà le bandeau et les insignes 
de vaillant capitaine. Vers cette époque, Netza- 
hualpiltzintli vint à mourir, et Ixtlilxochitl 
s'opposa à l'élection du roi Caniaca, son frère. 



CHAPITRE LXX. 



Mortd'Ahuitzotzin, roi de Mexico. — Le fameux Motecuhzoma , 

deuxième du nom , Ini saccède. 



La blessure du roi Âhuitzotzin était si 
grave , que tous les soins que Ton en prit fu- 
rent inutiles , quoiqu'on lui enlevât plusieurs 
esquilles du crâne. Sa mort fut pleurée par 

tous ses sujets , et on lui fit des obsèques 
somptueuses , suivant le rit mexicain. Netza- 



102 HISTOIRE 

hiialpiitzintli et Totoquihuatzin se réunirent 
ensuite avec les électeurs pour lui donner un 
successeur. Ceux-ci avaient jeté les yeux sur 
le prince Manilmalinaltzin, l'aîné des fils lé- 
gitimes du roi Axayacatzin et gendre de Net- 
zahualpiltzintli. Mais celui-ci s'opposa à cette 
élection, parce qu'il ne lui parut pas réunir 
les qualités nécessaires pour une dignité aussi 
élevée, sans se laisser influencer parce qu'il 
était son gendre, époux de sa fille légitime 
Tiyacapantzin. Son influence sur les électeurs 
leur fit donc préférer Motecuhzoraa , qui était 
alors grand -prêtre du temple de Huizilo- 
pochtli; choix dont il eut bien à se repentir, 
comme on le verra par la suite de cette his- 
toire. Quand on eut prêté serment, selon la 
coutume, au nouvel empereur, on célébra des 
fêtes et des réjouissances en son honneur. 
Motecuhzoma fut couronné le jour de Ce 
Cipactli, neuvième du mois Toxcatl,qui était 
le quatrième dans l'année Matlactli Ome AcatI, 
ce qui correspond au 24 mai 1503; c'était 



DES CHIGHIMÈQUES. 103 

Tanniversaire de celui du grand Motecuhzoma^ 
son bisaïeul* Le roi Ahuitzotzin avait épousé 
Tiyacapantzin y fille de Moquihuitzin , dernier 
roi de Tlatelolco, dont j'ai raconté la fin mal- 
heureuse, et d'une fille du grand roi Netza- 
hualcoyotzîn ; il en eut le vaillant Quauhte- 
mozin , dernier roi de Mexico y sur qui cette 
ville fut conquise y et qui, après avoir reçu le 
baptême , prit le nom de D. Fernando, et d'au- 
tres fils nommés Tlacadlel, Motecuhzoma, 
CitlalcoatI, AzcacoatI, Zoyetzin, Quauhtzi- 
mitzin, Xiconoc, Atlixcatzin, Macuilmalina, 
Acamapich, Huitzilihuitl , Machimalcoyatzin 
et Tehuecuetzin. D'après l'opinion commune 
et les relations les plus véritables, le grand 
Motecuhzoma épousa Tayhualcan , fille de 
Totoquihuatzin , roi de TIaeopan, 11 en eut 
trois filles : l'ainée, Miahuaxochitzin, reçut au 
baptême le nom de dona Isabelle; la wSeconde 
celui de doria Mariana. Il eut encore plusieurs 
fils, tels que don Pedro Tlacahuepantzin , 
Tlihuitlmocatzin , Axayaco , Totepehualox et 



104 HISTOIRE 

Ghimalpopocatzin. Doiia Isabelle se maria 
trois fois : la première, avec Âlonso Grado^ 
gentilhomme, natif d'Alcan tara , et l'un des 
pi*incipaux chefs de la conquête; ce mariage 
se fit par ordre de D. Fernand Cortez. Elle 
épousa en secondes noces D. Pedro Gallégo , 
dont elle eut un fils nommé D. Juan d'An- 
drada , de qui descend la maison d'Andrada ; 
et enfin, en tix)isièmes noces, D. Juan Gano, 
de qui descend la maison de Cano. D. Pedro 
Tlacahuepantzin se maria deux fois à la face 
de notre mère la sainte Église ; mais il n'eut 
pas d'enfants. Sa sœur, dona Isabelle, attaqua 
son premier mariage, parce qu'il avait épousé 
sa cousine germaine sans dispenses de Sa 
Sainteté, D. Pedro alla en Espagne pour ob- 
tenir les dispenses nécessaires et pour d'autres 
afiaires ; mais il y resta si longtemps que sa 
femme, le ci^oyant mort, se remaria à Mexico* 
D. Pedro, avant reçu cette nouvelle en débar- 
quant à la Vera-Cruz , ne parla pas des dis- 
penses qu'il apportait, et se rendit àTezcuco, 



DES GHICHIMÈQUES. 105 

OÙ il épousa dona Francisca, filie aînée et 
légitime de D. Pedro Tetlahuehiuzquitiltzin , 
seigneur de cette ville. Dona Isabelle l'ayant 
appris 9 s'opposa de nouveau à ce mariage, à 
cause de celui que son frère avait contracté 
antérieurement ; de sorte que D. Pedro vécut 
séparé de ses deux femmes et n'eut que des 

« 

fils naturels; l'ainé, don Martin Motecuhzoma, 
hérita de son majorât et n'eut pas d'enfants 
de sa cousine dona Maria Axayacatzin , dame 
d'Iztacpalapan. Le majorât retourna donc au 
second fils, D. Luis Quyahuitzin, qui passa 
en Espagne et y a laissé de la postérité. 



I 






CHAPITRE LXXI. 



De dÎTers ëvénemenU qui , d'après les annales , eurent Heu 

à cette époque. 



L'année qui suivit leâacre de Motecuhzoma, 
c'est-à-dire en 1 504 , Tehuchuetzin , seigneur 
de la province de Quauhnahuac, mourut, et 
eut pour successeur Itzcoatzin. Dans les deux 
années suivantes , Mactlactli Orne Calli et Ce 
lochtli, c est-à-dire 1505 et 1506, la disette 



1 08 HISTOIRE 

fut excessive , parce que les récoltes manquè- 
rent partout, excepté dans la province et les 
montagnes de Totonocapan; c'est pourquoi 
cette famine est désignée sous le nom de Nè- 
totocahuiloc, c'est-à-dire, la famine à laquelle 
Totonocapan a remédié. Netzahualpiltzintli , 
Motecuhzoma et Totoquihuatzin ouvrirent 
leurs greniers et vinrent au secours de leurs 
sujets. Ce fut dans cette même année de 1506 
qu'on fit la conquête de la province de Yoco- 
tan , et en 1 507 celle de Tototepec. Ce fut dans 
cette dernière que périrent Ixtlilquechahuac et 
Huitzilihuitzin, seigneurs mexicains. En 1 508, 
le prince Macuilmalinaltzin, héritier légitime 
du trône de Mexico, fut tué dans une bataille 
contre ceux d'Atlixo. D'après l'opinion com- 
mune, c'était un coup monté entre eux et 
Motecuhzoma, qui voulait détruire une occa- 
sion de troubles et qui leur donna les moyens 
de le tuer. Il périt dans le même combat un 
autre seigneur mexicain nommé Izicqua- 
quatzin, et 2,800 hommes. Netzahualpiltzintli 



DES GHICHIMÈQUES. 109 

fut très-irrité de la mort de son gendre et 
composa^ à cette occasion^ un chant nommé 
JVenehualizcuicatl , ou le chant des fourberies 
et des trahisons. Il sentit alors combien il' 
s'était trompé, et le tort qu'il avait eu d'en- 
lever la couronne à l'héritier légitime pour la 
donner à un homme qui était un loup sous 
une peau de mouton j car après la mort de 
Macuilmalinaltzin , Motecuhzoma commença 
à montrer son orgueil : il remplaça par ses 
créatures tous les membres du conseil qui 
avaient été nommés par son père ou par son 
oncle, et poussa la vanité jusqu'à ne plus re- 
garder comme dignes de le servir quelques 
braves soldats sortis du peuple, qui par leur 
vaillance étaient montés au rang de capitaine 
ou à d'autres emplois. Il exila les unsetfitpérir 
les autres. Dans la même année, Tliltecraoct- 
zin hérita de Huexotla après la mort de Cuit- 
lahuatzin. L'année suivante, on fît la con- 
quête de la province de Yopatepec. Vers la 
même époque, Netzahualpiltzintli punit d'une 



110 HISTOIRE I>BS CHIGHIMÈQUES. 

manière exemplaire TesEOzomoe^ seigneur 
d' Atzcaputzalco , qui s'était rendu coupable 
d'adultère. Les juges mexicains ^ pour com- 
plaire à Motecuhzoma^ s'étaient contentés de le 
condamner à l'exil et sa maison à être sacca- 
gée ; les Tecpanèques ajoutèrent k la sentence 
qu'on lui couperait le bout du nez. Mais le 
roi de Tezcuco , qui devait prononcer en der- 
nier ressort , cassa cette sentence et oixlonna 
que , d'après ies lois de son père , il serait 
étranglé et son corps livré aux flammes , ce 
qu'il fit aussitôt exécuter , quoique Motecuh- 
zoma se montrât grandement offensé de cette 
sévérité. 



CHAPITRE LXXII. 



De quelques signes et présages qui annoncèrent la destruction 

de l'empire. 



En l'amiëeMacuilli Tochtli ou 1 54 0, on aper- 
çut du c6té de l'Orient une grande pyramide 
de lumière qui paraissait lancer des flammes ^ 
ce qui répandit le plus grand effroi dans le 
pays. Les plus savants dans l'astrologie et la 
divination ne savaient que dire : ils avaient 



112 HISTOIRE 

cependant^ d'après leurs histoires , une notion 
confuse que le temps approchait où devaient 
s'accomplir les prophéties de Quetzalcoatl 
et des anciens sages. Les deux plus in- 
quiets étaient Motecuhzoma et Netzahualpil- 
tzintliy qui devaient naturellement le plus 
souffrir de la destruction de l'empire. Comme 
le roi de Tezcuco était très-instruit dans toutes 
les sciences, et surtout dans l'astrologie , il 
vit par là et par les prophéties de ses ancêtres 
que sa perte approchait : il ordonna donc aux 
commandants de ses armées d'interrompre 
les hostilités qu'on entretenait toujours avec 
les habitants de Huexotzinco, Tlaxcallan et At- 
Hxco, afin de tenir les guerriers en haleine et 
d'avoir des victimes pour les sacrifices. 11 
voulut aussi que ceux qui étaient chargés de 
la garde des frontières se contentassent de 
les protéger sans faire des incursions dans 
le pays ennemi , car il avait résolu de passer 
dans le repos le peu de temps qui lui restait à 
régner. Motecuhzoma avait le plus grand désir 



DES GHIGHIMÈQUES. 113 

de le consulter sur tous ces présages; mais ils 
étaient trés-mal ensemble ; car le roi de Tez- 
cuco ne pouvait lui pardonner la mort de son 
gendre , et il n'était pas moins irrité du châ- 
timent sévère que l'on avait fait subir à Chal-^ 
chiuhnenetzin sa sœur, au prince Huexot- 
zincatzin son neveu , ainsi qu'à son beau- 
père^ le roi Tezozomoc d'Atzcaputzalco. Les 
deux rois eurent une entrevue j et après avoir 
apaisé leurs anciennes querelles , ils se con- 
sultèrent sur les maux dont le ciel les mena- 
çait. Le roi de Tezcuco dît que tout devait 
s'accomplir sans qu'il y eût moyen de l'em- 
pêcher; et pour prouver à son collègue le 
peu de cas qu'il faisait de ses États , il offi^it 
de les lui jouer à la balle contre trois coqs 
sauvages , dont il ne prendrait que les ergots 
s'il les gagnait ; la partie commença: donc et 
Motecuhzoma ayant gagné deux points était 
tout joyeux voyant qu'il ne lui en manquait 
plus qu'un pour être souverain des Acuihuas. 
Mais le roi de Tezcuco qui lf| avait perdus à 

13. 8 



114 HISTOIRE DES GHIGHIMÈQUES. 

dessein lui dit qu'il n'était pas encore maître 
de l'empire , et qu'il allait lui faire voir com- 
bien les choses de ce monde étaient chan- 
ceuses et périssables ^ puisqu'il allait perdre 
là partie au moment où il la croyait gagnée. 
Motecuhzoma ne put^ en effets malgré tous 
ses efforts , gagner le point qui lui manquait, 
et son adversaire en marqua trois de suite. 
Après ce triomphe , le roi de Tezcuco rentra 
dans sa capitale. Cependant on voyait tous les 
jours de nouveaux signes et de nouveaux pré- 
sages qui annonçaient la chute de l'empire. 



»»•» 



CHAPITRE LXXIII. 



Révolte de quelques proTinces conquises , et autres éyénements. 



Le désir que le roi Netzahualpiltzintli avait 
de passer en paix le peu de temps qui lui 
restait à régner lui fit le plus grand tort, car 
l'oisiveté des guerriers causa la révolte de 
plusieurs provinces que l'empire avait con- 
quises. Les. nations Mixtecas , Zapotecas , Yo- 



116 HISTOIRE 

picas y Tototepecas et Tequantepccas , voyant 
que les soldats des garnisons passaient leur 
temps à danser et à se divertir^ profitèrent 
de l'oecasion pour se révolter. Ce désordre 
n'avait pas seulement lieu dans les provinces 
éloignées et nouvellement conquises , mais à 
la cour ' même de Tezcuco , où l'on ne s'occu- 
pait que de plaisirs et de divertissements ; de 
sorte que les sujets se voyant opprimés de 
toutes les manières^ cherchèrent à secouer 
un joug aussi pesant. Gomme les soldats n'é- 
taient pas sur leurs gardes y ils massacrèrent 
les uns y après les avoir invités à des festins , 
et attaquèrent les autres à force ouverte et les 
chassèrent de leur pays , ce qui arriva dans les 
provinces de Coatlixhuacan ^ Zozotlan y Toto- 
tepec , Tequantepec et Yopitzinco , ainsi qu'à 
Oaxaca^ Tlachquiaucho , Malinaltepec et Tla- 
cotepec. Le roi de Tezcuco, qui avait laissé 
son armée se désorganiser, fut obligé d'en for- 
mer une nouvelle, et d'envoyer demander des 
secours aux rois de Mexico et de Tlacopan qui 



DES GHIGHIMÈQUBS. 117 

avaient été plus prudents que lui. Ils soumi- 
rent toutes ces provinces et revinrent avec 
une quantité de dépouilles et de captifs qu'ils 
sacrifièrent à leurs idoles. Parmi eux se trou- 
vaient Zetecpapal, seigneur de la province 
deCoaixtlahuacan^ Nahuixochitl^ seigneur de 
celle de Zocotlan , Malinal de celle de Tlach- 
quiauhco , et beaucoup d^autres seigneurs et 
capitaines. Enfin, ils soumirent toute la Nou- 
velle-Espagne, depuis le pays des Chichimè- 
ques et le royaume du Michoacan, jusqu'aux 
dernières terres qu'avaient possédées très-an- 
ciennement les Toltèques , c'est-à-dire , celles 
de Huimolan , Acalan , Yerapaz et Nicaragua , 
et depuis la mer du Nord jusqu'à la mer du 
Sud, ce qui contient un grand nombre de 
royaumes et de provinces habitées par diffé- 
rentes nations , telles que les Cohuixcas , Yo- 
picas , Cuitlatecas , Chochomas , Mixtecas , 
Zapotecas, Quauhtemaltecas (i), Coatzaqual- 

( I ) Presque tous les auteurs indigènes et plusieurs Espagnols 



118 HISTOIRE DES GHIGHIMÈQUES. 

cas, Nonoalcas, Xicalancas, Totonaques, et 
autres qui furent entièrement subjuguées et 
soumises aux trois chefs de l'empire , lequel 
avait plus de 400 lieues de long entre les 
deux mers. En 1514, la neige tomba avec 
tant d'abondance qu'elle fit périr les arbres 
et les plantes , et détruisit une armée impé- 
riale qui marchait contre la province de 
Palmautlan qui s'était révoltée. 



ont regardé le Guatemala comme soumis à l'empire du Mexique; 
mais je pense que c est une erreur. Voirez Juarros , ffistoria de 
Guatemala. (Guatemala, 1818. Tratado IV, chap. VII.) 



CHAPITRE LXXIV. 



Trahison de Motecnhzoma qui fait périr la fleur des guerriers 
de Tezcuco en les livrant aux Tlaxcaltèques , et se rend par 
ce moyen maître de tout l'empire. 



L'ambition de Motecuhzoma était si grande 
qu'il ne pouvait supporter d'avoir des col- 
lègues et des égaux. Il chercha donc tous les 
moyens, bons ou mauvais, pour s'en débar- 
rasser. C'est pourquoi vers la fin du règne de 
Netzahualpiltzintli , il commit un crime dia- 



1 20 HISTOIRE 

boliqiie. Voyant que les Aeulhuas de Tezcuco 
négligeaient entièrement la guerre^ et qu'ils 
ne s'occupaient que de danses et de fêtes ^ il 
envoya un ambassadeur à ce roi pour lui faire 
des représentations , et lui dire que les dieux 
étaient irrités de ce que depuis quatre ans on 
ne leur eût sacrifié aucun captif de Tlaxcallan 
ni des autres provinces d'où l'on tirait habi- 
tuellement les victimes qui leur étaient of- 
fertes et qui leur plaisaient le plus , mais seu- 
lement des prisonniers faits' dans les provinces 
éloignées où l'on était obligé de faire la guerre 
pour augmenter le territoire de l'empire ou 
le défendre; sacrifices dont ils ne savaient 
aucun gré. Il ajoutait qu'ils laissaient oublier 
les victoires de leurs ancêtres , et ternir l'hon- 
neur du nom Chichimèque et Aeulhuas. Il les 
engageait donc à faire une excursion sur le 
territoire de Tlaxcallan , ajoutant qu'il s'y 
trouverait tel jour avec son armée pour leur 
prêter secours. Netzahualpiltzintli lui répondit 
que ce n'était pas par lâcheté y que ses soldats 



DES GHICHIMÈQUES. 121 

avaient déposé les armes , mais bien parce 
qu'il voulait passer le reste de ses jours dans 
le repos , puisque Tannée Ce Acatl qui les 
menaçait de grands changements était si pro- 
che ; mais que cependant , au jour désigné , 
il enverrait la fleur de son armée dans les 
champs de Tiaxcallan , afin qu'elle prouvât sa 
valeur. Après avoir fait cette réponse, il 
réunit le conseil de la guerre où l'on traça l.e 
plan de cette expédition. Il réunit ensuite les 
capitaines et les guerriers les plus vaillants 
de son armée , qui prirent la route de Tiaxcal- 
lan. Pour éviter toute querelle avec Motecuh- 
zoma, qui commandait lui-même son armée, 
le roi ne voulut pas y aller en personne, mais 
il mit à la tète de ses troupes ses deux fils , 
Acatlemacotzin et Tequanchuatzin , qui s'é- 
taient distingués dans les guerres précédentes. 
Aussitôt que Motecuhzoma eut appris la ré- 
solution de Netzahuapiltzintli , il envoya se- 
crètement des messagers aux chefs de Tiax- 
callan , pour leur dire que le roi de Tezcuco en- 



1 22 HISTOIRE 

voyait contre eux la fleur de son armée , non 
pour Fexercer et se procurer des victimes^ 
conformément à la loi et à la coutume qui 
avait été établie entre leurs ancêtres, mais 
pour ravager leur territoire , piller leur ville 
et s'en emparei^ : ce qui était indigne. Il ajou- 
tait que y ne voulant pas tremper dans une 
pareille trahison , il se faisait un devoir de les 
avertir et de les engager à prendre les devants 
pour que les Âculhuas ne pussent exécuter 
leur mauvais dessein. Que quant à lui il n'ac- 
compagnait leurs ennemis que pour la forme, 
et parce qu'il ne pouvait s'en dispenser ; mais 
qu'il s'engageait à venir à leur secours si 
cela était nécessaire pour les aidera tuer leurs 
ennemis. Le sénat fut fort inquiet de ce mes- 
sage y et de ce que Netzahualpiltzintli oubliait 
l'obligation où il était, non-seulement de 
respecter le territoire de la république, mais 
même de venir à son secours en cas de besoin, 
en reconnaissance des services que les Tlaxcal- 
tèques, qui d'ailleurs étaient de la même race 



DES GHIGHIMÈQUES. 123 

que lui , avaient rendus à son père et à son 
aieul. Ils remercièrent Motecuhzoma de son 
avis, et résolurent de prendre leurs pré- 
cautions contre les Aculhuas. Ils dressèrent 
iine embuscade dans un ravin où ceux-ci 
avaient l'habitude de passer la nuit. On la 
nommait Tlalpepexic; elle est située près de 
la montagne de Quauhtepec. Les Tezcucains 
étaient absolument sans défiance, quoique 
cette nuit-là ils fussent avertis par mille pré- 
sages de leur destruction prochaine. Une quan- 
tité de vautours, oiseaux qui ne se nourrissent 
que de cadavres , volaient sans cesse en tour- 
nant au-dessus d'eux; des flammes sortaient 
de la terre, et la force de l'eau faisait voler 
en l'air des nuages de poussière. Les plus 
vaillants capitaines de leur armée , tels que 
Tezcocsacatl , Temoczin , Zilaltuatl et Ehcate- 
nan, rêvèrent tous les quatre en même temps, 
qu'ils étaient revenus à l'époque de leur en- 
fance , et qu'iJs couraient en pleurant après 
leur mère pour la prier de les prendre dans 



1 24 HISTOIKE 

ses bras. Tout cela leur donna beaucoup à 
penser, et leur fit craindre d'être menacés 
d'un malheur prochain. Ils passèrent donc 
la nuit à causer ensemble , et dès le point du 
jour ils se mirent à manger un morceau sur 
leur bouclier, craignant de n'en pas avoir 
le temps dans la journée. Pendant qu'ils 
mangeaient, une cigale, d'une grandeur 
extraordinaire, vint frapper contre eux et 
tomba morte en se séparant la tête du corps. 
Frappés de ce nouveau présage, ils ne vou- 
lurent pas attendre davantage et appelèrent 
leurs gens en leur disant de s'armer et de 
sortir à la hâte de ce ravin où ils ne pouvaient 
se défendre , car ils craignaient que les enne- 
mis ne leur eussent tendu quelque piège , ce 
qui n'était que trop vrai ; car dès que lesTlax- 
caltèques les virent se lever, ils les attaquè- 
rent de tous les côtés en poussant de grands 
cris, et, sans leur donner le temps de se mettre 
en bataille, ils les chargèrent avec tant de 
fureur qu'ils les massacrèrent presque tous : 



DES CHIGHIMÈQUES. 425 

U nV en eut que très-peu qui réussirent à 
s'échapper, et portèrent à Tezcuco la nouvelle 
de cette trahison. Les quatre capitaines dont 
j'ai parlé et beaucoup d'^autres firent de bril- 
lantes actions et vendirent chèrement leur 
vie. Les deux princes se voyant dangereu- 
sement blessés , et oMigés de se rendre à des 
personnes d'un rang inférieur au leur, sup- 
pliaient leurs adversaires d'achever de leur 
ôter la vie, pour ne pas être traînés en triom- 
phe dans leur ville. Ils luttèrent si vaillam- 
ment qu'on se hâta de les entraîner dans un 
temple qui se trouvait tout près du champ 
de bataille, pour les y sacrifier aux idoles. 
Le sang des morts et des blessés coulait dans 
le ravin comme un fleuve. Le roi Motecuhzo- 
ma, qui se trouvait sur les flancs de la mon- 
tagne de Xacoltepetl avec son armée, regar- 
dait ce spectacle sans faire un seul mouve- 
ment, et se réjouissait de voir périr ainsi la 
fleur de la jeunesse de Tezcuco , ce qui est 
une preuve manifeste de sa trahison. Parmi 



126 HISTOIRE DES GHIGHIMÈQUES. 

ceux qui réussirent à s'échapper et qui appor- 
tèrent cette nouvelle au roi de Tezcuco, se 
trouvait Ghichiquantzin ^ célèbre capitaine. 
Le roi de Tezcuco et les siens en furent d'au- 
tant plus affligés qu'ils y virent la preuve des 
mauvais desseins que Motecuhzoïna nourris- 
sait contre eux. Il avait aussi cherché à faire 
du mal au roi de Tezcuco par le moyen des 
sorciers et des nécromanciens qu'il entrete- 
nait à sa cour : mais celui-ci qui en avait de 
non moins habiles avait paralysé ses efforts. 
Quand Motecuhzoma fut de retour dans sa 
capitale y il ordonna aux villes et villages de 
la province de Ghinampa de cesser de payer 
une certaine redevance qu'ils devaient aux 
rois de Tezcuco^ et montra sa malice dans 
d'autres occasions , comme on le trouve plus 
au long dans le chant qui raconte ce désordre 
et que l'on nomme yacuicatL 



CHAPITRE LXXV. 



Mort de Netzahualpiltzintli. 



Netzahualpiltzintli voyant que Motecuhzo- 
ma empêchait les villes du lac d'acquitter les 
tributs qu'elles avaient toujours payés à son 
père et à lui, et s'était mal comporté envers 
lui en diverses occasions y il lui envoya des 
ambassadeurs pour le sommer d'observer les 



1 28 HISTOIRE 

coutumes de leurs ancêtres. Motecuhzoma 
répondit orgueilleusement aux ambassadeurs 
que le temps où l'empire était gouverné par 
trois chefs allait bientôt cesser; qu'il n'y en 
aurait plus qu'un seul et que ce serait lui ^ 
seigneur de toutes les choses célestes et ter- 
restres, et qu'il engageait le roi de Tezcuco à 
ne plus lui faire de pareilles demandes parce 
qu'il châtierait son audace. Netzahualpiltzintli 
fut d'autant plus af&igé de cette réplique in- 
solente qu'il n'avait pas les moyens de se 
venger. Il se retira donc dans l'intérieur de 
son palais où il passa le reste de ses jours 
dans le chagrin. Il mourut l'an de Matlactli 
Âcatl ou 1515, à l'âge de 52 ans , après en 
avoir régné 44. Quoique l'on cherchât à ca- 
cher sa mort, ses enfants et ses parents l'ap- 
prirent bientôt, et se réunirent pour célébrer 
ses obsèques. Tous les grands du royaume 
y assistèrent, ainsi que les ambassadeurs de 
Motecuhzoma et de Totoquihuatzin , et plu- 
sieurs mexicains et tecpanèques : on observa 



DES CHIGHIMÈQUES. 129 

les mêmes cérémonies qu'à la mort de son 
père^ en brûlant avec son corps beaucoup 
de bijoux, d'or, d'argent et de pierreries, et 
une quantité de panaches et d'ouvrages en 
plumes d'un grand prix. On sacrifia cent es- 
claves mâles et cinq femmes; l'on mit en- 
suite ses cendres dans une urne d'or, que l'on 
plaça dans le grand temple de la ville de Tez- 
cuco qui était celui de Huitzilopochtli. Il eut 
cent quarante-cinq fils, dont quatorze légi- 
times, desquels j'ai parlé plus haut. 

Ainsi finit le roi Netzahualpiltzintli , qui 
n'eut pas moins de vaillance et de mérite que 
son père. 11 fut aussi sévère que lui à faire 
observer les lois, et aussi heureux dans les 
batailles auxquelles il assista en personne. 
Mais sa mort prématurée fut cause de la dis- 
corde qui se mit entre ses enfants, car il n'a- 
vait pas désigné d'héritier. Quelques auteurs 
ont cependant prétendu qu'il avait choisi le 
prince Yoyontzin , le plus jeune de ses fils lé- 
gitimes, ce qui me parait difficile à croire, 
13. 9 



130 HISTOIRE DES CHIGHIMÈQUES. 

car c'était toujours Taîné des enfants qui hé- 
ritait, à moins de causes graves, comme cela 
arriva à l'égard de Techotlalatzin , qui monta 
sur le trône au préjudice de ses frères aines, 
parce qu'il était le seul qui fût toujours resté 
fidèle à son père Quinantzin tandis que les 
autres s'étaient rangés du parti des rebelles, . 
comme nous l'avons vu dans le cours de cette 
histoire. 



CHAPITRE LXXVI. 



•Querelle qui s'ëlèye entre les enfante de NetzithualpiltzintU 

relativement à la succession. 



Aussitôt que Ton eut rendu les honneurs 
funèbres à Netzahualpiitzintli ^ on consulta 
Motecuhzoma et Totoquihuatzin sur Télection 
du nouveau roi, car, comme je viens de le dire, 
il n'avait pas désigné celui de ses fils légitimes 
qui devait lui succéder. Tetlahuehuequitiltzin, 



132 HISTOIRE 

qui pouvait y prétendre à cause du droit d'aî- 
nesse, était peu capable de gouverner un 
royaume aussi grand que celui de Tezcuco, 
principalement dans un moment où l'on avait 
besoin d'un chef brave et habile dans l'art 
militaire, pour pouvoir résister à la fortune 
qui commençait à se montrer contraire. Quel- 
ques chefs s'opposaient cependant à ce qu'on 
choisît Coanacochtzin ou Ixtlilxochitl , tant 
parce qu'ils étaient trop jeunes qu'à cause des 
droits de leur frère aîné, quoique celui-ci fût 
un homme timide et peu propre à la guerre. 
Motecuhzoma profita de ces dissensions pour 
faire monter sur le trône le prince Cacama 
son neveu , fils de sa sœur aînée. Il envova 
donc un ambassadeur pour solliciter les élec- 
teurs et les grands de lui donner leurs voix, 
leur représentant qu'il l'aimait beaucoup, 
qu'il était en âge de gouverner, et que dans 
les guerres précédentes il s'était distingué par 
sa valeur et ses talents, les engageant, quand 
l'élection serait terminée, à venir avec son 



DES CHICHIMÈQUES. 133 

neveu à Mexico afin qu'on lui prêtât serment 
comme on l'avait fait à son père et à son 
aïeul. Cette prétention excita d'abord beau- 
coup d'opposition ^ mais enfin les grands se 
décidèrent à réunir dans une des salles du 
palais les trois princes Gacama, Coanacochtzin 
et Ixtlilxochitl , pour leur annoncer que la vo- 
lonté de Motecuhzoma était que Cacama fût 
proclamé roi et qu'ils ne pouvaient s'y sous- 
traire. Coanacochtzin y quoique le trône lui 
appartint de droite déclara^ soit par afiection 
pour son frère , soit parce qu'il était du 
parti de Motecuhzoma , que cette élection lui 
paraissait très-convenable , attendu que leur 
frère aîné n'était pas en état de gouverner, et 
que Cacama avait déjà prouvé sa valeur. Mais 
Ixtlilxochitl, qui était très-jeune et très-bouil- 
lant , ne put supporter cette tyrannie et cette 
violation des droits légitimes; il s'opposa à 
l'élection, et excita un tel tumulte dans le sé- 
nat, que l'élection ne put avoir lieu et que 
Cacama fut obligé de se réfugier à Mexico 



1 34 HISTOIRE 

pour prier son oncle Motecuhzoma de venir 
à son secours et de le mettre en possession de 
son royaume, Ixtlilxochitl , après avoir eu une 
grande querelle avec son frère Coanacochtzin 
qui soutenait le parti de Cacama , quitta la 
ville et se réfugia dans les montagnes de Mez- 
titlan, invitant à le suivre tous ceux qui vou- 
laient s'opposer à la tyrannie de Motecuh- 
zoma et prendre son parti contre ses frères. 
Les chefs de Meztitlan , qui avaient été ses gou- 
verneurs , le recurent fort bien et soulevèrent 
en sa faveur tous les Totonaques de la mon- 
tagne. Il réunit en peu de temps une nom- 
breuse armée et marcha contre Tezcuco. H 
mit en déroute tous ceux qui voulurent arrê- 
ter sa marche, et après avoir soumis, soit de 
leur plein gré, soit par la force des armes, 
toutes les provinces septentrionales du 
royaume , il mit le siège devant Tezcuco et 
devant Mexico, occupant avec ses troupes 
les villes dé Papalotlan, Acolman, Chiuh- 
nauhtla, Tecacman , Tzompanco et Huehueto- 



DES CHIGHIMÈQUES. fô5 

can; car c'était par là que ses frères pou- 
vaient venir l'attaquer avec les forces que leur 
fournissait Motecuhzoma , dont l'influence 
avait fait reconnaître Cacama pour roi dans 
sa capitale et dans toutes les provinces qui 
n'étaient pas occupées par Ixtlilxochitl. Mote- 
cuhzoma, irrité de l'audace d'Ixtlilxochitl, con- 
voqua son conseil de guerre afin de prendre 
les mesures nécessaires pour arrêter le cours 
de ses succès. Il résolut d'envoyer contre lui 
un de ses plus fiimeux capitaines nommé 
Xochitly cacique d'Iztacpalapan; celui-ci pro- 
mit à MQtecuhzoma de s'emparer de sa per- 
sonne au milieu des siens et de le lui amener^ 
ce qui terminerait d'un seul coup la guerre 
civile et affermirait Cacama sur le trône. Ix- 
tlilxochitl , qui était averti de tout ce qui se 
passait à Mexico, marcha avec une troupe 
choisie au-devant de Xochitl. Quand les deux 
chefs se rencontrèrent , ils ordonnèrent à leurs 
gens de se tenir tranquilles et de les laisser 
combattre seul à seul. Ixtlilxochitl remporta 



L. 



136 HISTOIRE 

une victoire facile sur son adversaire, et ayant 
fait apporter une quantité de joncs secs, il le 
fit brûler vif en présence des deux armées, ce 
qui jeta l'effroi parmi ses ennemis. Quand 
Motecuhzoma l'eut appris, il ordonna qu'on 
cessât de le poursuivre, pensant qu'il serait 
plus aisé de s'emparer de sa personne par sur- 
prise. Ixtlilxochitl continua à bloquer Tezcuco 
sans faire aucun mal à ceux qui voulaient en 
sortir, et traitant très-bien les nobles qui ve- 
naient le trouver. Ses frères furent donc obli- 
gés de traiter avec lui, mais il ne voulut jamais 
voir Motecuhzoma, car il le détestait parce 
qu'il avait été cause de la mort de Netzahual- 
piltzintli, que le prince désirait par-dessus tout 
venger. Il fut convenu qu'lxtlilxochitl serait 
capitaine général du royaume de Tezcuco et 
qu'il resterait en possession des provinces du 
nord. Beaucoup de provinces, irritées des tri- 
buts excessifs que leur imposait Motecuhzoma, 
profitèrent de l'occasion de ces désordres pour 
se soulever, car ce roi était aussi cruel que les 



DES CHIGHIMÈQUES. 137 

monarques ses ancêtres avaient été miséri- 
cordieux. Parmi les provinces les plus dispo- 
sées à se soulever, était celle de Totonacapan, 
qui s'étend sur les côtes de la mer du Nord; 
car Dieu avait disposé les choses de la manière 
la plus favorable pour l'introduction de la 
sainte foi catholique dans ce pays. Vers cette 
époque, les armées des trois chefs de l'empire 
soumirent les provinces de Mictlantzinco et 
Xaltianquizco, et leur imposèrent les même 
conditions qu'aux autres dont j'ai parlé plus 
haut; mais ce furent les dernières conquêtes 
de l'empire. Elles eurent lieu dans l'année 
Matlactli Ome Tecpatl ou 1516. 




CHAPITRE LXXVII. 



De l'invincible Fernand Gorte? , premier marquis de la vallée 
d'Oaxaca, et du commencement de son expédition, 



Sous le règne des rois catholiques Ferdinand 
et Isabelle, D. Fernand Cortez naquit, en 
1485, dans la ville de Medellin, en Estrama- 
dure. Il était fils de D. Martin Cortez de 
Monroy et de doiia Catarina Pizarro Alta- 
mirano. Ils étaient nobles et hijos dAlgo , 



1 40 HISTOIRE 

mais plus riches en honneurs qu'en biens de 
la fortune (i). Après deux ans d'humanités, il 
commença à se livrer à l'étude des lois : mais 
bientôt après il changea de résolution et em- 
brassa la carrière des armes. Comme il se 
montrait brave et ambitieux, ses parents lui 
permirent de passer aux Indes pour aller re- 
joindre Nicolas d'Ovando, grand comman- 
deur de Laris et gouverneur de St-Domingue. 
Il arriva dans cette île le jour de Pâques de 
1504; il avait alors dix-neuf ans. Il y passa 
cinq ou six ans, pendant lesquels il lui arriva 
beaucoup d'événements heureux ou malheu- 
reux, et s'y occupa principalement d'agri- 
culture; il passa ensuite à la conquête de 
Cuba, et y épousa dona Catalina Xuarez. 

(i) On trouve sur l'origine de Cortez des versions bien dif- 
férentes. Las Casas {Hisloria de IndiaSy p. 111, chap. 27) dit : 
« J*ai connu son père , qui était un écuyer bien pauvre et bien 
humble. Il était cependant d'ancienne race chrétienne ; on a 
même dit qu'il était gentilhomme. • Argensola {Jnnales de 
Aragon^ liv. 1, chap. 18) fait descendre sa famille deNarnés 
Gortesio , roi de Lombardie et de Toscane , qui avait épousé la 
fille de Favila , roi des Goths. M^is la première opinion me 
paraît de beaucoup la plus vraisemblable. 



DES CHICHIMÈQUES. 141 

On peut voir Thistoire de ce mariage dans les 
histoires de Gomara et d'Herrera. C'est pour- 
quoi je ne m'étendrai pas sur ce sujet. On 
faisait tous les jours de nouvelles découvertes, 
et, en 1517, Francisco Hernandez de Cordova 
découvrit la terre ferme de Yucatan ; mais il fut 
obligé de se rembarquer sans avoir fait autre 
chose que l'apercevoir, parce que les Indiens 
se défendirent vigoureusement et blessèrent 
presque tous les Espagnols. Comme on en avait 
assez vu pour s'assurer que le pays était plus 
riche et plus fertile que les îles, Velazquez ré- 
solut d'en faire la conquête; c'est pourquoi il 
y envoya, en 1518, Juan de Grijalva, son 
neveu, avec une flotte suffisante; il lui donna 
200 Espagnols, et quelques marchandises qu'il 
devait échangier contre de l'or et des objets 
précieux du pays. Grijalva resta si longtemps 
absent, que Velazquez, craignant qu'il n'eût 
fait naufrage, envoya à sa recherche Christo- 
val de Olid, pour le ramener ou l'aider à co- 
loniser ou à conquérir le pays, selon les cir- 



1 42 HISTOIRE 

constances. Mais avant qu'Olid rencontrât 
Grijalva, Pedro de Alvarado, qui avait accom- 
pagné ce dernier, arriva à St-Domingue et 
instruisit Velazquez de la richesse du Yucatan 
et de la quantité d'or que s'était procurée 
Grijalva. Cette bonne nouvelle le décida à 
coloniser ce pays , tant pour étendre notre 
sainte foi catholique que pour gagner de la 
gloire et des richesses. Il réunit du monde 
pour cette expédition; mais, quoicpi'il en 
parlât à plusieurs personnes d'un rang élevé, 
il ne put s'arranger avec aucune autre que 
Fernand Cortez, qui possédait alors deux 
mille ducats dans la maison d'un marchand 
nommé André de Duero , homme prudent et 
qui savait se conduire. Cortez accepta la pror- 
position que Velazquez lui fît de s'associer 
avec lui, et lui dit qu'il irait en personne à 
la découverte et à la conquête de ce pays. 
Quand ils eurent conclu leur traité et obtenu 
la permission des frères Hiéronimites , qui 
gouvernaient alors les îles, et au moment où 



DES GHICHIHÈQUES. 143 

ils s'occupaient de l'armement de leurs na- 
vires, Juan de Grijalva arriva, le 3 octobre 
1518, avec quantité d'or et d'argent, et donna 
de nouveaux détails sur le pays. Velazquez 
alors changea d'avis et voulut empêcher Cortez 
de partir, ce qui excita de grandes querelles 
entre eux. Mais celui-ci emprunta (juatre mille 
ducats, acheta des vaisseaux et tout ce qui 
était nécessaire et partit malgré Velazquez. 
Les amis de Cortez se joignirent à lui , et il 
leur fournit de l'argent et ce dont ils avaient 
besoin. Avant de partir, il fit par-devant no- 
taire une protestation dans laquelle il décla- 
rait que tout se faisait à ses frais et que 
Velazquez n'avait aucune part à cette affaire. 
Quand il fut arrivé à (c/i blanc dans le manu-- 
scrit){\)y AlvarlEido, Olid et les autres amis de 
Velazquez voulurent s'emparer de sa per- 
sonne ; mais il se réfugia dans l'ile de Guani- 
guaniga , où il débarqua tout son monde pour 

(i) Chimalpain dit à la Havane. 



144 HISTOIRE DES GHIGHIMÈQUES. 

le passer en revue; il avait 550 (i) soldats 
espagnols et quelques Indiens de service. Il 
les divisa en onze compagnies^ de cinquante 
hommes chacune ^ et prit pour lui la charge 
de capitaine général. Il avait onze vaisseaux 
portant une bannière à ses armes ^ qui étaient 
un échiquier d'argent et d'azur, chargé 
d'une croix de gueule avec une devise latine 
qui signifiait : Amis , suivons la croix^ car, si 
nous avons la foi, nous vaincrons par ce 
signe. C'est , en effet , par là qu'il a conquis le 
Nouveau-Monde et converti les naturels à 
notre sainte foi catholique. Jamais conquête 
ne fut plus difficile. Alexandre et César n'ont 
jamais tant fait, comme on le verra par la 
suite de cette histoire et par les auteurs que 
j'ai cités plus haut. 

(i) Dans la lettre inédite du corps municipal de Vera-druz à 
l'empereur, il est dit 400 soldats. 



CHAPITRE LXXVIII. 



GoHez commence la conquête de la Nouvel le-Espagne. — 

11 arrive à Potonchan. 



Avant de quitter File de Guanîguaniga , 
Cortez fît une longue harangue à ses soldats ; 
il leur montra le fruit qu'ils pouvaient atten- 
dre de leurs fatigues, et leur représenta le 
grand service qu'ils rendraient à Dieu, s'ils 

entreprenaient cette conquête plutôt pour 
13. 10 



1 46 HISTOIRE 

convertir les nations barbares que pour les dé- 
pouiller de leurs biens. Il quitta cette ile le 28 
février 1519, et donna pour mot d'ordre aux 
siens le nom du bienheureux saint Pierre (i). 
Il alla débarquer dans l'île d'Acozamil (2) 
(Gozumel); les naturels, effrayés, s'enfuirent 
dans les bois , abandonnant leurs maisons et 
leurs biens. On amena cependant à Cortez 
quatre femmes et trois petits enfants; il com- 
prit par signes que l'une d'elles était la femme 
du cacique du pays et la mère de ces enfants. 
Cortez la traita si bien , que son mari s'en- 
hardit à rentrer dans son village, où il logea 
les nôtres et leur fit le meilleur accueih Cortez, 



(i) Ghimalpaia (chap. i) raconte que Cortez étant tombé 
dangereusement malade dans son enfance , et ses parents you- 
lantlui choisir un protecteur au ciel, tirèrent au sorties noms 
des douze apôtres, et qu'il tomba sur saint Pierre. 

(2) L*ile d'Acozamil, que les historiens espagnols ont nommée 
Cozumel , était le principal sanctuaire des habitants du Yuca- 
than. On y venait en pèlerinage de toute la province. Son nom 
veut dire l'Ile des Hirondelles. ( Ployez Gogolludo, Historia de 
Yueaihttn; Chimalpain, cbap. u ; et la note du recueil d^ 
pièces relatives à la conquête du Mexique, qui fait partie de 
cette collection.) 



DES GHICHIMÈQUES. 147 

les voyant rassurés, commença à leur prêcher ^ 
la foi chrétienne , les engageant à adorer une 
croix et une image de Notre Dame, qu'il leur 
montra : ils v consentirent et brisèrent les 
idoles de leur temple, que Gortez remplaça par 
cette croix et cette image, auxquelles les In- 
diens montrèrent la plus grande vénération ; 
ils cessèrent de sacrifier des hommes, et an- 
noncèrent à Gortez que dans le Yucathan il 
V avait des hommes barbus comme lui. Cortez 
y fit envoyer pour s'en assurer; mais les 
messagers tardèrent si longtemps, qu'il ne 
voulut pas les attendre; il prit terre sur la 
côte de Yucathan, vers l'endroit que l'on ap- 
pelle Punta de las mugeres^ et le pays lui 
ayant paru mauvais, il alla de là à Cotoche; 
mais comme le navire de Pedro d'Alvarado 
faisait eau , il fut obligé de retourner à Aco- 
zamil pour le réparer. 

Le premier dimanche de carême, dans 
la matinée, on vit arriver un canot qui 
contenait quatre hommes nus , armés d'arcs 



1 48 HISTOIRE 

et de flèches» Les Espagnols, croyant qu^ils 
venaient pour les attaquer, s'avancèrent au- 
devant d'eux Tëpée à la main; un de ces 
hommes s'avança aussitôt et leur cria en 
langue castillane : « Etes-vous chrétiens? » 
Les nôtres , tout étonnés , lui répondirent : 
(c Oui , nous sommes chrétiens et Espagnols.» 
Cet homme alors se jeta à genoux, et s'écria : 
(( Dieu ! je te remercie de m'avoir tiré d'entre 
les infidèles et les barbares. Quel jour avons- 
nous aujourd'hui, messieurs, n'est-ce pas 
mercredi ? » Les nôtres lui répondirent qu'il 
se trompait , et que c'était dimanche. Il se re- 
leva, et André de Tapia , fort satisfait de cette 
rencontre , le mena à Cortez avec ses compa- 
gnons. Celui-ci lui demanda qui il était et 
d'où il venait. Il répondit qu'il s'appelait Jé- 
rôme d'Aguilar, natif d'Ecija, et qu'en 1511 
il avait fait naufrage près de la Jamaïque , en 
allant du Darien à Saint-Domingue, où il se 
rendait pour chercher de l'argent , à cause de 
la guerre qui s'était élevée entre Diego de 



DES GHIGHIMÈQUES. 149 

Nicueza et Vasco Nunez de Balboa. Ils s'é- 
taient embarqués vingt personnes dans une 
chaloupe ^ dont sept moururent à la mer. Les 
treize autres allèrent débarquer dans la pro- 
vince de Maya, où ils furent pris par les In- 
diens d'un cruel cacique , qui sacrifia Valdivia 
et quatre de ses compagnons, et fit à ses amis 
et à ses compagnons un festin de leur chair. 
11 avait conservé les autres , et les engi^aissait 
pour un nouveau festin ; mais ils trouvèrent 
moyen de s'échapper et de se réfugier chez 
un autre cacique, ennemi du premier, qui les 
avait bien traités pendant toute sa vie. Ses 
héritiers en avaient agi de même. Mais 
tous ses compagnons étaient morts successi- 
vement, et il n'était resté que lui et un certain 
Gonzalo Guerrero, qui s'était marié dans le 
pays, et était devenu très -riche. Ce dernier 
n'avait pas voulu venir avec lui, parce qu'il 
était honteux de se montrer avec les narines 
percées comme les habitants du pays. Tout le 
monde se réjouit de cette rencontre, quoique 



1 50 HISTOIRE 

l'on fût effirayé d'être arrivé dans un pays 
dont }es habitants mangeaient de la chair hu- 
maine. Il fut trè»-heureux pour Cortez d'a- 
voir rencontré cet Aguilar, car îl lui servit 
d'interprète, et sans lui il aurait été bien em- 
barrassé. L'on a regardé comme un miracle 
l'événement qui arriva au vaisseau d'Alva- 
rado, puisque sans cela ils ne se seraient pas 
rencontrés. Le lendemain Cortez dit à Agui- 
lar que, puisqu'il savait la langue des natu- 
rels, il devait leur prêcher la foi chrétienne. 
Il le fit avec tant de succès, qu'il réussit à tes 
convertir ; déjà auparavant ils adoraient une 
croix qu'ils regardaient comme le dieu de la 
pluie. 

Après avoir quitté Acozamil , Cortez arriva 
à la rivière de Tabasco , que Ton nommait de 
Grijalva, parce quecelui-K^i l'avait découverte le 
premier. Cortez l'ayant remontée, trouva un 
village entouré d'une muraille de bois, dans 
laquelle on avait ménagé des meurtrières 
pour lancer des flèches. Un grand nombre de 



J 



DES CHIGHIMÈQUES. 151 

gens armés Tattaquèrent avec des canots^ 
mais il réussit à s'emparer de ce village qui 
se nommait Potonchan ( i ) . Ce fut la première 
conquête que Ton fit sur la terre-ferme. Cor- 
tez coucha cette nuit dans le grand temple 
avec tous ses compagnons^ parce que tous les 
habitants avaient pris la fuite. Le lendemain il 
envoya à la recherche de trois côtés, car il dé- 
sirait beaucoup s'emparer d'un indigène , tant 
pour avoir des renseignements sur le pays 
que pour faire dire au cacique qu'il pouvait 
venir le trouver en toute sûreté. On lui en 
amena trois ou quatre, qu'il renvoya à leur 
maître, en lui faisant dire qu'il n'était pas 
venu pour lui faire du mal, mais pour lui révé- 
ler de grands secrets. Cependant, malgré des 
allées et des venues qui durèrent trois jours, 
le cacique ne voulut jamais venir le trouver. 



( I ) Potonchan veut dire en langue du pays la Rivière Puante^ 
(Chimalpain , chap* 23.) 



CHAPITRE LXXIX 



Voyage de Gortez jusqu'à son arrivée à la YeraCruz. 



Cortez avait ordonné à trois de ses officiers 
d'aller à là découverte et de tâcher de se pro- 
curer des vivres. Les naturels les attaquèrent, 
blessèrent plusieurs Espagnols, tuèrent quel- 
ques Indiens de Cuba, et leur auraient fait un 
mauvais parti si Cortez n'était venu à leur 



1 54 HISTOIRE 

secours. Le lendemain il se mit en marche 
avec cinq cents hommes^ treize chevaux et 
quelques pièces d'artillerie. En traversant 
quelques champs cultivés y il fut attaqué par 
quarante mille Indiens ( i ), et ce ne fut qu'avec 
beaucoup de peine qu'il remporta la vic- 
toire (2). Dans cette affaire^ ses soldats aper- 
çurent le glorieux apôtre saint Jacques qui 
combattait pour eux monté sur un cheval 
blanc. Ce fut la première fois qu'il parut dans 
cette conquête ; mais Cortez prétendit toujours 
que c'était le prince des apôtres , saint Pierre, 
qu'il avait choisi pour son patron et auquel 
il adressait ses prières. Il y eut soixante Es- 
pagnols de blessés; mais les nôtres firent 
bientôt la paix avec les naturels. Tabasco, 



( I ) Ce combat eni lieu contre les Indiens de Cintla. 

{Chimalpain^ ch. 201; Betancourt, r. p. 112.) 

(t) Betancourt rapporte que Cortez ayant débarqué un in- 
terprète indien , nommé Melchior, qu'il arait amené de Cuba , 
pour qu'il tachât de se procurer des renseignements, celui-ci ac-* 
crocha ses habits européens à un arbre , et alla exciter les na- 
turels à attaquer les Espagnols. 

(Betancourt, Teatro mexicano, Mexico, 1698, p. Jia.) 



DES GHICHIMÈQUES. 155 

qui était leprincipal chef de ce pays, ainsi que 
tous les autres caciques et seigneurs , firent 
amitié avec Cortez , lui fournirent des vivres 
en abondance pour toute son armée , et lui 
donnèrent une quantité d^or. Cortez leur de- 
manda où ils le prenaient et s'ils en avaient 
beaucoup; ils lui répondirent qu'ils n'avaient 
pas de minés et qu'ils n'en cherchaient pas , 
car ils voulaient non pas devenir riches, mais 
vivre contents ; ajoutant que s'il se dirigeait 
au couchant il en trouverait tant qu'il vou- 
drait. Us dirent aussi y entre autres choses , que, 
de tous les cavaliers , celui qui combattait le 
premier était celui qui les avait le plus effrayés, 
ce qui prouve bien qu'un des saints apôtres 
était apparu dans cette occasion. C!ortez leur 
expliqua le but de son voyage, en leur disant 
que le roi d'Espagne son maître, qui était le 
plus puissant du monde, l'avait envoyé pour 
leur enseigner la loi évangélique et les tirer 
de l'aveuglement dans lequel ils vivaient. A la 
grande joie des habitants de Potonchan, il 



1 56 HISTOIRE 

plaça une croix dans le grand temple et on y 
célébra la cérémonie du dimanche des Ra-» 
meaux. Il vint un nombre infini de gens qui 
reconnurent le roi d'Espagne pour leur sou- 
verain, et ce furent les premiers sujets qu'eut 
la couronne dans ce pays. Cortez nomma cette 
ville Vittoria ( i ), et l'ayant quittée pour suivre 
le cours de ses découvertes, il arriva sur les 
bords de la rivière de Papalaotlan (2) à laquelle 
on donna le nom de Pedro d'Alvarado, parce 
qu'il fut le premier qui la découvrit. Il con- 
tinua à suivre la côte en se dirigeant vers le 
couchant, et arriva à Saint-Juan-de-Culhua, 
que l'on nomme aujourd'hui d'Ulua, le jeudi 

(0 La ville de la Vittoria fut abandonnée vers le milieu du 
dix-septième siècle, à cause des invasions fréquentes des An- 
glais. On établit les habitants plus loin de la mer, dans un en- 
droit que Ton nomma Villa Hermosa. Mais c'est à Tlacotlapan 
que réside le gouverneur de la province. 

(Clavigero, Storia aniica'di Mexico^ t. lll, p. 1 1.) 

(2) La rivière de Papalaotlan reçoit celles de Guiyotepec, 
Vicilla , Chimantlan , Quauquez , Paltepec , Tuztlan , Teyuci- 
yoacan , et beaucoup d'autres plus petites, qui toutes roulent 
de l'or. Elle forme plusieurs lacs et marais avant son embou- 
chure; le plus grand est entre Otlatitlan et Qauhquez paltepec. 

( Chimalpain , ch. »4« ) 



DES CHIGHIMÈQUES. 157 

de la Cène (i). Avant qu'ils débarquassent, 
Teotlili, qui commandait sur cette côte au 
nom des trois chefs de Tempire, envoya deux 
de ses serviteurs dans un canot pour deman- 
der au chef de la flotte d'où il venait et où il 
allait. Cortez les reçut très-bien, leur fit des 
présents et les chargea de dire à leur maître 
qu'il ne s'efiFrayât pas, et qu'ils venaient seu- 
lement pour lui annoncer des nouvelles qui 
lui seraient fort agréables. Les Espagnols pri- 
rent terre le Vendredi-Saint, et s'établirent 
sur une plage de sable où l'on construisit plus 
tard la Vera-Cruz, à laquelle on donna ce 
nom dès ce jour même, parce que c'était celui 
du vendredi de la Croix (2). Ils y furent visi- 
tés par un grand nombre d'Indiens qui échan- 



(i) Chimalpain (cbap. 26) dit que les Indiens nommaient 
cette île Chascicocan ou Tlle des Coquillages. 11 ajoute que les 
naturels, apercevant la flotte de Gortez, s écrièrent: Amolohua, 
Amolohua , rëunissez-vous ici. Ce qui lui fît donner le nom 
d'Ulua ; d'autres ont prétendu qu elle le tirait des Gulhuas, qui 
y entretenaient une garnison. 

(2) 11 y a eu successivement trois villes foiidées sous le nom 



1 58 HISTOIRE 

gèrent de Vov et des plumes précieuses contre 
des eiseaujc , des aiguilles , des perles de verre 
et autres bagatelles, quoique Gortez eût dé- 
fendu qu'on leur demandât de l'or, pour 
qu^ils ne crussent pas que c'était le but du 
voyage. Deux jours après , c'est-à-dire le 
lundi de Pâques , le gouverneur arriva suivi 
de quatre mille hommes chargés de vivres 
qu'il présenta à Gortez, ainsi que quelques 
bijoux d'or très-riches» Gortez l'embrassa 
et lui présenta une veste de velours et quel- 
ques objets de Gastille dont il parut faire 
le plus grand cas. Âguilar ne comprenait 
plus la langue de ce pays, mais Dieu dai- 
gna y remédier en permettant qu'une des 
femmes que Gortez avait reçues du seigneur 
de Potonchan la comprit parfaitement. Elle 



de la f^era-Cruz. La première; en iSig. près de Chiabuitlan , 
A conservé le nom de F'illarica -, la seconde, en 1 523 ou 24, 
s'appelle m > intenant VJntigua, et enfin la Vera-Craz actuelle, 
<|ai fut fondée vers la fin du seizième siècle par les ordres du 
comte de Monterey , vice-roi de Mexico. 

{Clavigera , t. 111 , p. 3o. ) 



DES GHICHIMÈQUES. 159 

était née de parents nobles , au village de 
Huilotlan , dans la province de Xalatzinco , et 
était petites-fille du seigneur de ce village; 
quelques marchands l'avaient volée dans son 
enfance pendant la guerre et l'avaient vendue 
à la foire de Xicalanco , près de la province 
de Coatzacualoo : elle avait passé de main en 
main dans celles du seigneur de Potoncfaan ; 
celui-ci l'avait donnée à Cortez qui la con** 
vertit par ses bons traitements à la religion 
K^rétienne, ainsi que ses trois compagnes ; 
elles furent les premières qui reçurent le bap- 
tême à la Nouvelle-Espagne. Elle servit d'in- 
terprète conjointement avec Aguilar^ à qui 
Cortez disait ce qu'il voulait; Âguilar le ré- 
pétait à Marina en langue de Potonchan, 
et celle-ci le traduisait en mexicain. Mais 
heureusement pour Cortez elle apprit très- 
vite la langue espagnole , ce qu'on peut 
regarder comme miraculeux, et fut très- 
utile pour la conversion des naturels et 
l'établissement de notre sainte foi catho- 



1 60 HISTOIRE 

lique. Par la suite elle épousa Âguilar (i). 
Teotlili dîna ce jour-là avec Cortez. Il lui 
dit qu'il gouvernait ce pays au nom des trois 
chefs de Tempire , et qu'il était vassal du grand 
M otecuhzoma , roi de la ville de Mexico , Te- 
nuchtitlan ajoutant que s'il voulait lui ap- 
prendre le motif de son voyage , il en ren- 
drait compte à son maître et aux autres rois. 
Cortez lui fit dire par Marina qu'il était vassal 
du roi D. Carlos d'Espagne ^ seigneur de tout 
l'univers; qu'il venait de sa part pour an- 
noncer au roi de Mexico un secret qui le com- 
blerait de joie , et qu'il le priait d'en faire 
avertir celui-ci en lui demandant où il voulait 
recevoir son ambassade. Teotlili lui répondit 
qu'il se réjouissait d'apprendre de lui qu'il 
existait un autre seigneur aussi puissant que 
Motecuhzoma , et que c'était le roi d'Espagne, 



(i) Aguilar était sons-diacre, ainsi il n épousa pas et ne pou- 
vait épouser Marina , qui devint la femme de Juan Xaramillo , 
un des soldats qui accompagnèrent Cortez au voyage de Hibue- 
bueras. Voyez Ghimalpain. 

(Noie du manuscrit; vojrez aussi Bernaldiaz, ch. 174 ) 



DES CHIGHIMÈ<}UES. t6f 

quoiqu'il eût peine à croire qu'il existât au 
monde rien d'égal à son maître ; qu'au reste 
il lui donnerait avis de son arrivée et pren- 
drait ses ordres. Cortez lui demanda si Mo- 
tecuhzoma avait beaucoup d'or, lui disant 
que c'était un remède contre le mal de cœur 
dont beaucoup de ses soldats étaient affectés. 
Teotlili lui répondit que oui. Il fit ensuite 
peindre , sur une étoffe de coton , le costume 
des Espagnols , leurs chevaux , leurs vaisseaux ^ 
tout ce que Cortez avait apporté, et envoya 
en toute hâte des messagers à Mexico, pour 
porter ce tableau à Motecuhzoma , ainsi qu'à 
Cacama et à Totoquihuatzin , qui régnaient 
alors à Mexico et àTlacopan. L'envoyé fit tant 
de diligence qu'il arriva à Mexico en un jour 

et une nuit. Teotlili retourna àCuetlachtlan (i) 
où il résidait, et laissa Cuetlalpiltoc et quel- 
ques autres chefs avec deux mille Indiens pour 
servir les Espagnols. 

( I ) Aujourd'hui Gotaxta . (Chimalpain , ch . 25.) 

13. il 



1 



CHAPITRE LXXX. 



Conduite de Motecuhzoma en apprenant l'arrivée de Gortez 
et de ses compagnons. ~ Celui-ci a connaissance des factions 
qpi divisent le pays. 



Le message de Teotiili frappa de crainte 
et de stupeur Motecuhzoma^ qui vit que les 
prophéties de ses ancêtres commençaient à 
s'accomplir. Il rassembla tous les seigneurs de 
l'empire pour leur demander leur avis et leur 
communiquer ses pensées, 11 leur dit que si 



1 64 HISTOIRE 

les étrangers qui arrivaient d'Orient étaient 
le dieu Quetzalcoatl et ses enfants^ qu'on at- 
tendait depuis plusieurs siècles, ils voudraient 
les déposséder et s'emparer de tout le pays; 
qu'ainsi il fallait tâcher d'arrêter leurs pas : 
mais que si^ comme ils le disaient, ils étaient 
les ambassadeurs du grand monarque de 
l'Univers, qui demeurait à l'Orient, il fallait 
les recevoir et écouter ce qu'ils avaient à dire. 
Les rois et les seigneurs qui composaient le 
conseil commencèrent à disputer là-dessus; 
mais Motecuhzoma , voyant qu'ails ne con- 
cluaient rien^ dit à son frère Cuetlachua: 
w Avec la permission du roi Cacama,' mon ne- 
veu , qui a le droit de voter le premier, toi qui 
es un homme rempli d'expérience , dis-nous ce 
que tu penses. » Guetlachua répondit briève- 
ment : « Mon avis est , puissant seigneur , que 
tu ne laisses pas entrer dans ta maison qui 
pourra t'en chasser. » Gacamadit au contraire: 
« Ce serait une honte pour vous, pour nous , 
pour tout l'empire, si vous refusiez de rece- 



DES CHICHIMÈQUES. 165 

voir une ambassade d'un aussi puissant sei« 
gneur que Test le roi d'Espagne , à ce qu'on 
dit : car c'est le devoir d'un roi de recevoir 
les ambassadeurs que les autres lui envoient. 
Si ceux-ci cachent quelque trahison , un mo- 
narque a toujours près de lui de braves guer- 
riers et de Taillants capitaines pour le défendre, 
ainsi que des amis et des parents nombreux 
pour garder son honneur et châtier les traî- 
tres. Si cette nouvelle ambassade cache quelque 
perfidie, plus tôt elle viendra à la cour et mieux 
cela vaudra. L'arrêter et la i^lenir serait nui- 
sible à l'empire, tant parce que cela diminue- 
rait sa gloire , que parce que cela ferait penser 
que c'est par faiblesse et par crainte qu'on en 
agit ainsi. Tous ceux qui sont disposés à se 
révolter seront encouragés dans ce dessein 
en voyant qu'on a peur d'une poignée d'é- 
trangers , et ceux-ci auix)nt le temps de con- 
naître le côté faible du pays , et qui sont nos 
amis ou nos ennemis. Gela pourra même en- 
gager les provinces que nous avons conquises 



1 66 HISTOIRE 

à secouer le joug : il faut dofie nous hâter de re- 
cevoir ces étrangers avant qu'ils aient le temps 
d'ouvrir les yeux et de connaître les secrets 
de l'empire. Telle est mon opinion. » Touà les 
seigneurs qui avaient du cœur approuvèrent 
le discours du roi Gacama , et je pense qu'ils 
avaient raison ; mais Motecuhzomà et quel- 
ques autres préférèrent l'avis de Guetlachuaé 
Il résolut donc d'employer tous les moyens 
possibles pour empêcher Cortez de venir à la 
cour. Il répondit dans ce sens aux messagei^s 
de Teotlili , qui , au bout de huit jours , furent 
de retour à la Vera-Cruz , avec la réponse du 
roi , et de riches présents en or et eti étoffes de 
coton. Ils dirent à Cortez que Motecuhzomà, 
roi de Mexico , Cacama , roi de Tezcuco , et 
Totoquihuatzin , roi de Tlacopan , lui souhai- 
taient la bien venue; qu'ils étaient ravis d'ap- 
prendre l'existence d'un prince aussi puissant 
que le roi d'Espagne , qui voulait bien être 
leur ami, et qu'ils se réjouissaient que ce fût 
sous leur règne que des étrangers si vail- 



J 



DES GHICHIMÈQUES. 167 

lants f et dont on n'avait Jamais oui para- 
fer, fussent arrivés dans leur pays : ils 
ajoutèrent qu'ils étaient disposés à fournir à 
l'ambassadeur tout ce dont il aurait besoin ; 
mais qu'ils ne pouvaient le recevoir à leur 
cour, ni venir le trouver à la côte , parce que 
le chemin était trop difficile , et parce qu'il fal- 
lait traverser des pays habités par des peuples 
barbares , ennemis des Mexicains et des Acul«- 
huas. Quand Cortez eut reçu cette réponse, il 
répondit au messager qu'il était décidé à 
aller trouver Motecuhzoma , et qu'il ne pou- 
vait désobéir à son roi qui le lui avait or- 
donné. Teotlili renvoya cette réponse, à son 
maître. Cortez , dans l'intervalle, reçut deux 
ambassadeurs qui lui donnèrent la bien- 
venue au nom d'Ixtlilxochitl (i) , et lui ap- 
prirent la querelle qui existait entre ce prince 

(i) La plupart des historiens espagnols qui , par orgueil na- 
tional , ont parlé le moins possible des secours qu'ils ont reçus 
des naturels, passent kous silence cette ambassade d'Ixtlilxochitl; 
mais Torquemada en fait mention , lir. IV, chap. 38 ; et BeUn- 
court, p. 3, chap. 9. 



1 68 HISTOIRE 

tt ses frères , soutenus par Motecuhzoma , leur 
oncle. Il lui offrait son alliance en lui rendant 
compte de Tétat de l'empire, et du désir qu'il 
avait de venger la mort de son père bien aimé 
Netzahualpiltzintliy en délivrant le royaume 
de Tezcuco des mains des usurpateurs; il lui 
envoya en même temps un présent d'or, d'é- 
toffes de coton et de plumes. Cortez se réjouit 
beaucoup d'apprendre toutes ces querelles, 
et le mécontentement qui régnait parmi les 
chefs contre Motecuhzoma, qui les opprimait. 
11 y vit un moyen d'atteindre plus sûrement 
son but, en appuyant un des deux partis 
jusqu'à ce qu'ils se fussent épuisés tous deux, 
et qu'il pût facilement se rendre maître du 
pays. Les messagers revinrent au bout de dix 
jours avec une nouvelle réponse de Motecuh- 
zoma, qui persistait dans l'intention de ne pas 
recevoir Cortez, ce qui mit fin à toute négo- 
ciation; car celui-ci, voyant qu'il était inébran- 
lable dans sa résolution , se détermina à s'éta- 
blir dans cet endroit et à conquérir le pays: 



DES CHIGHIMÈQUES. 169 

s'étant donc procuré dans les villages voisins 
des vivres et tout ce dont il avait besoin , il 
commença à construire une ville. Après avoir 
harangué ses soldats et leur avoir représenté 
que tout ce qu'il allait faire était nécessaire 
au succès de l'entreprise , il fit venir Fran- 
cisco Hernandez, notaire royal, et là, en 
présence de tout le monde et par un acte so- 
lennel , il prit possession du pays au nom du 
roi Charles , notre maître de glorieuse mé- 
moire. Il créa ensuite alcaldes de la nou- 

• ^^ 

velle colonie Alonzo Fernandez Porto -Car- 

rero et Francisco de Montejo; il nomma des 
régidors , un procureur fiscal , un écrivain , 
des alguazils , enfin tous les membres qui sont 
nécessaires pour former un corps municipal ; 
il leur remit au nom du roi les baguettes , 
insignes de leur charge , et donna à la nou- 
velle ville le nom de Villa - Rica de la Vera- 
Cruz. Par un autre acte , dressé par le même 
notaire, il déposa entre les mains des nou- 
veaux alcaldes chargés de l'administration de 



170 HISTOIRB DES GHICHIMÈQUES. 

la justice , le titre et la charge de capitaine de 
Texpédition de découverte que lui avaient 
donné ^ au nom de S. M. ^ les religieux hiéro* 
nimites qui gouvernaient File d'Hispaniola , 
renonçant en même temps aux pouvoirs qu'il 
tenait de Yelasquez^ commandant de File de 
Cuba, parce que leur autorité ne s'étendait 
pas dans ce nouveau pays qu'ils venaient dt 
découvrir et qu'ils commençaient à coloniser 
comme de loyaux vassaux au nom de S. M* ; 
il fit prendre acte de cette renonciation. Les 
nouveaux membres du conseil municipal 
ayant accepté leur nomination ^ ils se réuni- 
rent, et après avoir fait quelques règlements 
nécessaires pour la bonne administration de 
la nouvelle colonie, ils nommèrent Fernand 
Gortez gouverneur et capitaine général du 
pays , jusqu'à ce que S. M. eût fait connaître 
ses intentions. Cortez, après s'être fait solli- 
citer, accepta cet emploi. 



CHAPITRE LXXXI. 



Entrevue de Gortez arec les seignears de Gempoallan et de 
Quiahuiztlan. — lis lui offrent de se rallier à lai contre 
Motecuhzoma. 



Cortez résolut d'aller à Gempoallan (i), et 
passa la nuit au bord d'une rivière. Le lende- 
main il arriva quelques hommes chargés de 
vivres et de présents , de la part du seigneur 



(i) Les caciques de Gempoallan et de Quiahuiztlan n'étaient 



1 72 HISTOIRE 

de cette province , qui le priait de l'excuser 
s'il n'était pas venu lui-même au-devant de 



point des Mexicaîos, maïs des Totonaques , nation entièrement 
différente par ses mœurs et par sa langue, nouvellement con- 
quise et impatiente d'un joug auquel elle n était pas accoutu- 
mée ; c'est pour cela qu'ils se décidèrent si facilement à se dé- 
clarer en faveur de Cortez. {F", Bernaldiaz , ch. 46 et 47.) Les 
Totonaques prétendaient être sortis des sept cavernes en même 
temps quelesXalpanecas. Ils s'établirent d'abord dans les envi- 
rons de Teotihuacan , et ensuite à Atenamic, où est aujourd'hui 
Zacatlan. Hus tard ils se retirèrent dans les montagnes, où lisse 
croyaient plus en sûreté , et s'étendirent jusqu'à Cempoalliin. 
Le pays qu'ils occupaient se nommait Mizquihuacan. D'après 
leur histoire, ils y étaient depuis environ 800 ans, et avaient eu 
neuf rois, dont chacun avait régné 80 ans , savoir : Orne Acatl, 
qui les avait amenés : celui-ci ne mourut pas, mais disparut su- 
bitement ; Xatontan , Teniztli, Panin , Nahuacatl , Ithualcin- 
teuchtli , Tlaixehuateniztli , Catoxcan; celui-ci eut deux fils, 
Nahuacatl et Ixcahuitl , qui se firent une guerre si cruelle pour 
la succession , que la population fut presque entièrement dé- 
truite, et que le peu de Totonaques qui survécurent furent 
obligés de se réfugier dans les montagnes. Ils élurent parmi eux 
un seigneur nommé Xihuitlpopoca , qui passe pour avoir été 
un grand magicien. Il eut pour successeurs Motecuhzoma et 
Qnauhtlaebuna , qui régnait encore , quoique tributaire des 
Mexicains, lors de l'arrivée de Cortez. (^o^'ez Torquemada, 
liv. m , ch. 18.) 

Plusieurs auteurs ont prétendu que le nom de Gempoallan 
vient de cempoalli , qui veut dire vingt, parce qu'on y tenait une 
grande foire tous les vingt jours. Il ne reste plus que quelques 
raines de cette ville , qui démontrent son ancienne puissance. 
Il ne faut pas la confondre avec une autre Gempoallan dans le 
diocèse de Mexico. [P^çyez Carias de Cortez , Mexico, 1770, 
in-4 , p. 39.) 



DES CHIGHINÈQUES. 173 

lui, parce qu'il était très-gros (i) et très-lourd; 
mais que Cortez était le bienvenu , et qu'il 
l'attendait dans sa maison. Après avoir dé- 
jeuné avec cet envoyé, ils se rendirent à Cem- 
poallan , où le seigneur leur fit la meilleure 
réception. Il leur envoya un présent en or , 
en étoffes et en plumes, et fit ensuite une 
visite à Cortez sans lui parler d'aucune af- 
faire. Quand celui-ci fut de retour chez lui , 
on lui servit un très-beau festin. Au bout de 
quelques jours Cortez fit dire au cacique que 
s'il voulait il Tirait visiter. Le cacique y ayant 
consenti , Cortez se mit en marche avec cin- 
quante soldats, et quand il fut arrivé chez le 
cacique, il lui parla du but de son voyage. 
Quand il eut fini, le cacique lui fit un long dis- 
cours dans lequel il lui rendit compte, par la 
bouche de Marina , de l'état de son royaume, 
et comment ses ancêtres et lui avaient joui 



(I ) 11 était en effet si gros fpie plusieurs historiens espagnols 
ne le désignent que par le nom d>/ cacique gordo. Voyez Ber- 
naldiaz del Gastillo, ch. 4S. 



1 74 HISTOIRE 

d'une paix perpétuelle avant d'être opprimés 
par Motecuhzoma, qui leur imposait chaque 
jour de nouvelles charges. Il Tassuraque non- 
seulement lui 9 mais tous les caciques des pro- 
vinces voisines étaient disposés à prendre 
les armes pour secouer le joug des Mexicains 

et à s'allier avec le roi de Castille ; car quoique 
Motecuhzoma fût très-puissant, il avait des 
ennemis redoutables, tels qu'Ixtlilxochitl , son 
neveu , qui était en rébellion ouverte contre 
lui, Tlaxcallan , Huexotzinco, et d'autres États 
avec lesquels il était en guerre perpétuelle; 
de sorte que si Cortez voulait se joindre à eux, 
il se formei'ait contre les Mexicains une ligue 
à laquelle ils ne pourraient résister. Cortez 
fut très-satisfait de tout cela et promit sa pro- 
tecticwiau cacique, lui disant que le principal 
objet de sa venue était de réparer les torts et 
de punir les tyrans. Parmi les présents que ce 
cacique offrit à Cortez , il y avait huit jeunes 
filles nobles, dont une était sa nièce. Cortez 
retourna à la côte par un autre chemin, ettra- 



Dt» CHICniMÈQUES. 175 

versa la ville de Quiahuiztlan , bâtie sur une 
montagne , et capitale d'une autre province. 
Le cacique lui fit le meilleur accueil , et lui 
dit les mêmes choses que celui deCempoallan. 
Pendant que Cortez était dans cet endroit , les 
collecteurs des tributs dus à Motecuhzoma v 
arrivèrent, ce qui effraya beaucoup le cacique, 
parce qu'il craignait que celui-ci ne s'irritât 
de ce qu'il eût reçu chez lui ces étrangers. 
Cortez l'encouragea , et tant pour lui prouver 
le peu de cas qu'il faisait de la colère de 
Motecuhzoma , que pour le forcer à se mettre 
en rébellion ouverte, il fit arrêter les quatre 
collecteurs ; mais quand la nuit fut venue , il 
en fit amener deux en sa présence, et les remit 
en liberté, les chargeant de dire à Motecuh- 
zoma qu'il le priait d'être son ami , qu'il n'en 
tirerait que des avantages, et qu'il lui révéle- 
rait des mystères inouïs. Quand le cacique de 
Quiahuiztlan vit le lendemain que deux des 
collecteurs étaient partis, et que certainement 
ils le dénonceraient à Motecuhzoma, il n'eut 



176 HISTOIRE DES GHIGHIMÈQUES. 

d'autre ressource que de lever ouvertement 
l'étendard de la révolte, en engageant tous les 
villages de son parti et de sa nation à se join- 
dre à lui, et à refuser le tribut. Ils y consen- 
tirent tous etpromirent àCortez de lui fournir 
cent mille hommes s'il voulait marcher à 
leur tète; ce qui le réjouit beaucoup, car il 
voulait avant tout mettre le trouble dans le 
pays. Il comptait rester l'ami des deux partis 
et les tromper tous les deux. Ce fut cette 
adresse qui causa son succès , et qui lui donna 
le moyen de se rendre maître de l'empire. 
En quittant Quiahuiztlan , il se rendit à Villa- 
Rica de la Vera-Cruz, où étaient ses vaisseaux, 
et fit travailler à sa construction le plus ra- 
pidement possible. 



^^-^-1 



CHAPITRE LXXXII. 



Séjour de Gortez à la Yera-Cruz. — H détruit ses vaisseaux. 



Tous les soldats de Gortez étaient occupés 

à la construction de la Villa-Rica , ainsi qu'un 

grand nombre de naturels ses alliés. Pendant 

que l'on y travaillait avec le plus grand zèle, 

deux neveux de Motecuhzoma , accompagnés 

de quatre vieillards qu'on leur avait donnés 
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DES GHIGHIMÈQUES. 179 

iûle de Tizapantzinco ^ et s'assura de cette 
.iianîère la possession du pays^ car les revoi- 
es mirent le siégé devant cette ville et s'eii 
emparèrent, malgré la vigoureuse résistance 
de la garnison* Mais pour ne pas trop irriter 
Motecuhzoma , €ortez ne permit pas^ qu'on 
{ùllât la ville ni qu'on massacrât les habitants. 
De cette manière les naturels de cette province 
se virent exempts de tout tribut, mais aussi 
dans l'impossibilité d'abandonner le parti de 
Cortez. Quand celui-ci fut de retour à la Vefa- 
Cruz(i), il y trowva soixante^ix Espagnols 
et quinze chevaux ou juments qui v.enaient 
d'arriver , secours qui arrivait fort à propos. 
11 passa tout son monde en revue, et après 
avoir fait le compte du butin , il en prit le 
quint qu'il envoya à Sa Majesté pa<^ Alonzo Her- 
nandez Porto -Carrero et Francisco Montejo. 



(i) Les Espagnols étaient commandés par Francisco de Sau- 
cedo (BemaUitaz , p. 24 , ch. 53; Betancourt , p. 1 18). Ghi- 
malpain ( p. 36 ) fe nomme Salceda ; Solis ( liv. U, ch. i3), qai 
est assez exact dans ce qui est relatif aux Espagnols, prétend 
qu'il n amena que 10 hommes. 



1 80 HISTOIRE 

Il écrivit au roi tout ce qui s'était passé ; de- 
mandant une récompense pour ses services , et 
s'engageant à conquérir et à soumettre tout 
le pays y et à prendre Motecuhzoma mort ou 
vif. Le corps municipal , de son côté , supplia 
le roi de confirmer C!ortez dans la charge qu'il 
lui avait donné de capitaine général et de 
grand justicier {capitan jr justicia mayor). A 
cette époque^ les amis de Diego Velazquez 
commencèrent à murmurer contre Ck>rtez , en 
disant qu'il avait usurpé sa charge et s'était 
soustrait à l'autorité de son chef. Mais celui- 
ci fit arrêter les chefs des mécontents , en fit 
pendre deux et fustiger les autres^ ce qui ar- 
rêta cette mutinerie (i). Il se prépara ensuite 
à partir pour Mexico , car tout ce qu'il avait 
fait devenait inutile s'il n'avait pas une en- 
trevue avec Motecuhzoma^ et toute la gloire 



(i) Cortez fit pendre Juan de Escudero et le pilote Gcrmeno, 
fustiger le pilote Gonzalo de Umbria et Alonio Penate , et 
pardonna aux autres. (Cartas de Gortez , Mexico, 1 770, p. 41; 
Ghimalpain , ch. 89. ) 



DES GHICHIMÈQUES. 181 

de son entreprise ëtaît perdue. Beaucoup de 
personnes s'y opposaient cependant, parce 
qu'elles voyaient plus de témérité que de bra- 
voure à s'engager avec cinq centà hommes au 
milieu de millions d'ennemis. Voyant que ses 
prières et ses bonnes raisons étaient inutiles, 
il se détermina à l'une des actions les plus in- 
croyables que l'on ait vues dans l'histoire du 
monde. 11 suborna quelques pilotes pour ve- 
nir lui dire en présence des principaux de 
l'armée que ses vaisseaux étaient rongés des 
vers et hors d'état de naviguer, et gagna 
quelques marins pour pratiquer à fond de 
cale une voie d'eau qui les fit couler. Tout 
cela fut exécuté, et pour que personne ne dé- 
couvrît la ruse, Cortez feignit d'en être très- 
affligé; il déclara que puisqu'il n'y avait pas 
de ressource, il fallait au moins utiliser le 
bois, et fit démolir quatre des meilleurs vais- 
seaux. Ses soldats, s'étant aperçus qu'il les 
trompait ,. voulurent l'empêcher de continuer ; 
mais il fit démolir les autres malgré eux et 



182 HISTOIRE 

n'en conserva qu'un seul. Il réunit ensuite sur 
la place de Villa-Rica tous ceux qui parais- 
saient mécontents y et leur exposa les motifs 
qui Tavaient engagé à détruire les vaisseaux 
contre son, propre intérêt, puisqu'il les avait 
achetés fortdier et que c'était tout ce qu'il pos- 
sédait. Il leur dit tout ce qu'il crut propre à 
les encourager à entreprendre le voyage de 
Mexico; que d'ailleurs il n'y avait plus de re- 
mède, et qu'il ne croyait pas qu'un seul de 
ses soldats fût assez lâche pour estimer sa vie 
plus haut que celle de son général , et pour 
refuser de venir à Mexico , où une si haute 
fortune les attendait ; que cependant , s'il y 
en avait qui eussent le cœur assez faible pour 
vouloir retourner à Cuba, il leur abandonnait 
le seul vaisseau qui lui restât ; mais qu'avant 
peu ils s'en repentiraient et s'en arracheraient 
la barbe en voyant la fortune des autres. Ils 
furent si honteux de ces reproches , qu'il n'y 
en eut pas un seul qui ne lui promit de le 
suivre jusqu'à la mort, et qui ne louât ce qu'il 



DES CHICHINÈQUES. 183 

avait fait. Avant de partir pour Mexico , il en 
avertit les alliés qui s'étaient révoltés contre 
Motecuhzoma , et qui y possédant plus de cin- 
quante villes ou villages, pouvaient lui fournir 
environ cinquante mille hommes ; puis il se 
mit en route, laissant cent cinquante hommes 
à la Vera-Cruz , après avoir levé les obstacles 
que Francisco de Garay , qui était venu de 
Cuba à cet effet, lui avait suscités. 



1 



CHAPITRE LXXXIII 



(Portez part pour Mexico. — Ge qui lui arriva pendant la route. 



Cortez se dirigea d'abord vers Gempoallan ; 
il y renversa les idoles et plaça des images et 
des croix dans les temples. Il en partit le 
16 août 1519 avec mille Indiens de charge, 
treize cents guerriers et quelques otages. Il 
n'avait que quatre cents Espagnols, dont 



1 86 HISTOIRE 

quinze cavaliers; il menait avec lui sept cou- 
le vrines (tirillos). Il traversa d'abord pen" 
dant trois jours le territoire des alliés^ où il fut 
partout bien reçu et fêté. Cette bonne récep- 
tion continua , par ordre de M otecuhzoma , 
quand il fut arrivé dans les provinces qui lui 
étaient soumises; car^ par son adresse, il 
s'était maintenu l'ami des deux partis. Âpres 
avoir traversé pendant trois jours un désert 
sans eau et sans vivres , les Espagnols arri- 
vèrent à Zacatlan (i), où Olienteutl, qui en 
était seigneur , les reçut avec de grandes fêtes 
au nom de Motecuhzoma. Par le moyen de 
Marina^ on prêcha aux indigènes la foi chré- 
tienne, on leur fit connaître le roi d'Espagne, 
et on s'informa de la grandeur et de la ri- 
chesse de Motecuhzoma , du pouvoir et de la 



(i) Glavigero, t. 111 , p. 36, fait observer qu*il s'agit ici de 
Xocotla et non de Zacatlan, qui est à trente milles à l'ouest de 
TIaxcalIan. Betancourt , p. 1 20, écrit aussi Xocotla , ainsi que 
Torquemada , liv. IV, chap. 26. Bernaldiaz (chap. 61), qui 
l'appelle Gocotla , dit que les Espagnols lui donnèrent le nom 
de Gastilblanco. 



DES CHlfiHIMÈQUES. 187 

majesté de son empire , de sa cour , de la si- 
tuation et de la grandeur de la ville de Mexico. 
Cortez resta sept jours à Zacatlan ; il j ren- 
versa les idoles et les remplaça par des croix, 
comme il le faisait partout. Il envoya quatre 
habitants de Cempoallan à Tlaxcallan pour 
prévenir de son arrivée le sénat de cette ré- 
publique, dont il espérait être bien reçu, parce 
qu'ils étaient ennemis des Mexicains. Comme 
les messagers tardaient trop à revenir , il se 
remit en route et arriva à une grande palis- 
sade derrière laquelle se trouvaient quinze 
hommes armés de boucliers et de massues qui 
cherchèrent à s'échapper; mais quand ils virent 
que les cavaliers les atteignaient facilement , 
ils mirent l'épée à la main et se défendirent 
si bravement qu'ils tuèrent deux chevaux. 
Un de ces espions abattit d'un seul revers la 
tête d'un cheval en coupant les rênes du même 
coup (i). Cinq mille Tlaxcaltèques vinrent à 

(i) 11 parut biea extraordinaire que l'on puisse abattre la 
tête d'un cheval avec une épée de cailloux tranchants ; ce fait 



i 88 HISTOIRE 

leur secours ; mais bientôt après le sénat en* 
voya des messagers à Cortez pour s'excuser, 
en attribuant cette attaque aux Otomites de la 
montagne, et l'inviter à entrer dans leur ville. 
Toutefois, d'après les auteurs qui ont écrit sur 
cette histoire, cette invitation cachait une per- 
fidie. Les Espagnols furent attaqués le lende- 
main par mille Tlaxcaltèques, qui, après avoir 
combattu vigoureusement , se retirèrent dans 
l'intention de les attirer dans une embuscade 
déplus de 80, 000 hommes, où ils coururent le 
plus grand danger ; mais il n'en périt aucun , 
quoiqu'il y en eût un grand nombre de bles- 
sés. Us passèrent cette nuit dans un village 
où ils se fortifièrent, et le lendemain, ils fu- 
rent avertis qu'ils allaient être attaqués par 
plus de cent cinquante mille hommes; mais 
Dieu opéra de grands miracles en leur faveur. 
Quand les Tlaxcaltèques furent arrivés près 
des nôtres , ils commencèrent à se moquer de 

est cependant confirmé par Rernaldiaz, chap. 63; Chimalpain» 
chap. 43; Solis, lir. H, eh. 17. 



DES GHIGHIMÈQUES. 189 

leur petit nombre, et leur jetèrent des poules^ 
du mais et des cerises (ceresas), en criant que 
c'était pour les encourager à combattre et 
pour qu'ils ne pussent pas dire qu'on les avait 
pris par la famine. Heureusement pour Cortez, 
les Tlaxcaltèques ne les attaquèrent pas tous 
à la fois, mais par bataillons de vingt mille 
hommes qui se succédaient les uns aux autres 
à mesure qu'ils étaient repoussés. Le combat 
dura deux jours, et las Espagnols ayant tué, 
sans perdre un seul homme, ime quantité de 
Tlaxcaltèques, ceux-ci se persuadèrent qu'ils 
étaient enchantés ou qu'ils étaient des dieux. 
C'est pourquoi ils ne voulurent plus com- 
battre , et envoyèrent le lendemain des pré- 
sents à Cortez en manière de sacrifice (i). 
Celui-ci leur répondit : « Je ne suis pas un 
Dieu , mais un homme mortel comme vous ; 
vous avez eu tort de refuser mon amitié, vous 

(i) Selon Chimalpain (chap. 36), les envoyés de Tlaxcallan 
dirent à Cortez : « Si tu es un dieu cruel , voici des esclaves , 
bois leur sang. Si tu es un dieu bon , voici des plumes et de 
Tencens. Si tu es homme, voici de la viande et du pain. » 



190 HISTOIRE 

voyez ce qui vous en est advenu. » Malgré cda 
il fut attaqué le même jour par vingt mille 
Tiaxcaltèques. Le lendemain cinquante bom^ 
mes charges de vivres arrivèrent au camp de 
Cortez ; mais il les renvoya après leur avoir 
feit couper les poignets, parce qu'il apprît 
d'un capitaine de Cempoaltan , nommé Tioc , 
que c'étaient des espions ; ce qui étonna beau- 
coup les Tlaxcaltèques, qui crurent que Cortez 
avait le don de deviner leurs pensées. Voyant 
la grande valeur de €ortez et des siens , ils 
résolurent de rechercher son amitié , i^jetamt 
tout ce qui s'était passé sur les Otomites et les 
autrtes tribus des montagnes qui avaient pris 
Gortez pour un alKé mexicain. 

A celte époque, le général efifiagnodl reçût 
une nouvelle anvbassade de Moteeuhzofiia, 
qui lui oiirait de se reconnaître pour vassal 
et feudataire du roi de Castille, s'ifl voulait 
renoncer à venir à Mexico. Il les retint quel- 
ques jours , et ce fiït en leur présence qu'il 
combattit les Tlaxcaltèques en les assurant 



DES GHICHIMÈQUES. 191 

qu'il les châtiait ainsi y parce qu'ils étaient les 
ennemis du roi de Mexico. Une nuit que les 
Espagnols avaient campé en rase campagne , 
on aperçut des feux dans l'éloignement. Cor-- 
tez se dirigea de ce côté et arriva à Tzimpan- 
t^inco ^ ville de plus de vingt mille feux. Les 
habitants surpris ne firent aucune résistance 
et le reçurent très-bien , ainsi que ses compa- 
gnons. Ils lui promireq^ même d'apaiser les 
Tiaxcaltèques , et de les amener à feire la 
paix. Quand les Espagnols se virent si prés de 
Mexico, il y en eut auquel le cœur manqua, 
et qui parlèrent de s'arrêter et de retourner à 
la Vera-Cruz; mais Cortez les harangua si 
bien, qu'il ranima le courage des faibles et 
doubla celui des braves. Tous jurèrent de îe sui- 
vre et de mourir, s'il le fallait, dans une aussi 
sainte entreprise. Leurs sénats de Tkxcallan, 
voyant la grande valeur des nôtres , et qu'ils 
ne pouvaient rien contre etix , se décidèrent à 
leur ouvrir leur ville , et à se confédércr avec 
Cortez , considérant que s'il passait à Mexico 



1 92 HISTOIRE 

et s'alliait avec Motecuhzoma y leur perte serait 
consommée; que de libres ils deviendraient 
esclaves des Mexicains^ qui les châtieraient 
cruellement pour les longues guerres qu'ils 
avaient soutenues contre eux. Le sénat envoya 
donc un des premiers seigneurs de la ville , 
nommé Tolimpanecatl Tlacatecuhtli ^ et un 
frère cadet de Xicotencatl, un des quatre 
chefs de la république» Ce dernier était avec 
les Espagnols dès le commencement de la 
guerre. On le leur avait envoyé pour leur 
persuader de se retirer. Quand ils furent ar- 
rivés à Tezcoatzinco, où se trouvait Tarmée de 
Cortez y le principal des ambassadeurs de Mo- 
tecuhzoma^ qui se nommait Âtempanecatl , 
dit à Tolimpanecatl : wQue viens-tu faire ici et 
quel message apportes-tu ? crois-tu avoir af- 
faire à tes égaux pour les recevoir les armes 
à la main? « Voyant qu'il ne répondait pas , il 
continua : « Qui est cause des troubles qui ont 
éclaté à Huitzilihuacan^ Tepetlaxco , Tezmolo- 
can, Teotlatzinco, Tepetzinco, Ocotepec, Tla- 



DES GHIGHIMÈQUES. I^O 

maquazquicac ^ Atlmoyahuacan , Zacalacoyo- 
can, et dans les environs jusqu'à Chololan? 
Je suis curieux de voir et d'entendre ce que 
tu vas dire à Cortez. » Marina était présente à 
cette altercation. L'ambassadeur de Tlaxcallan 
se tourna vers elle et lui dit : a Je veux , en 
présence de notre père le seigneur capitaine 
Cortez, répondre à ce que dit mon parent 
l'ambassadeur mexicain.» Marina luiayantor* 
donné de continuer, il se tourna vers le Mexi- 
cain et lui dit : « As-tu fini? — J'en ai assez dit, 
répliqua celui-ci , voyons ce que tu demandes. 
— Tu as tort, reprit Tolimpanecatl de traiter 
si mal ta patrie la république de Tlaxcallan. 
Prends garde qu'on ne te reproche d'avoir 
usurpé les terres des autres, depuis Guitla- 
hua jusqu'aux provinces de Ghalco , Xaute- 
lolco , Quauhquechollan , Itzoncan , Quauhtin- 
chan 5 Tecomachalco , Tepeyacac et Guixtlan, 
et commettant d'une mer à l'autre mille vexa- 
tions et mille tyrannies sans que personne 

pût t'en empêcher. C'est à cause de toi et de 
13. 13 



194 titstoitiE 

tes trahisoils que j'abhorre le sang de Hue^tot- 
2inco dont je àuis issii , et c'est pour avoir de 
riches vêtements et des vivres en abondance 
que vous avez commis tous les crimes. N'as-^ 
tu pas honte de vouloir employer l'aide de^ 
autres pout assouvir tes passions? Situ veux 
un combat , viens avec moi en rase campagne> 
et tâche de te venger SUr moi. Je consent à 
courir cette chance sans réclamer l'aide de 
personne, car môi^ je tle crains pas la mort. Tu 
m'accuses d'avoir reçu les armes à la main le 

a 

' capitaine Cortez , ton àmi. Apprends que ce 
sont les réfugiés de Zacaxochitlan , Teocal- 
huiyacan , Cuahuacan et Mazahuacan que tu 
as dépouillés et auxquels j'ai donné un asile 
sur mon territoire , qui ont attaqué le côpi^ 
taine Cortez ; mais moi je suis prêt à le servir 
et même à le porter sur mes épaules.» Après 
avoir termi né ce discours, l'ambassadeur Tlàx- 
caltéque se tourna vers Cortez, le pria in- 
stamment, au nom du sénat, de vouloir bien 
se rendre dans leur ville et lui offrit quan- 



DES CHICHIMÈQUES. 195 

titë de sandales {Alpargatas) pour la route. 
Cortez lui répondit^ par la bouche de Marina, 
que le sénat et la noblesse devaient venir le 
chercher là où il était , pour lui prouver leur 
bonne volonté. Au moment où Tolimpane- 
catl allait sortir > Marina le tira à part^ et lui 
ordonna de saisir le lendemain l'ambassadeur 
mexicain , pendant qu'il serait dans le temple 
et de le tuer , puisqu'il leur avait fait tant de 
mal. Cet ordre réjouit beaucoup les Tlaxcal- 
tèques , qui rendirent compte au sénat de la 
bonne volonté que Cortez leur témoignait. 
L'arrivée de ces deux ambassadeurs Tlaxcal- 
tèques déplut beaucioup aux Mexicains y qui 
craignirent que Cortez ne fit alliance avec 
eux ; ils lui dirent de ne pas les croire, qu'ils 
le trompaient , et qu'ils cherchaient à l'attirer 
chez eux pour s'en défaire par trahison. L'un 
d'eux , qui était déjà parti pour rendre compte 
à Motecuhzoma du résultat de sa mission , fit 
dire à Cortez qu'il n'eût aucune confiance dans 
les TIaxcaltèques ; car après avoir dit tout le 



^ 96 HISTOIRE 

mal possible de Motecuhzoma, ils cherchaient 
à attirer les Espagnols dans leur ville pour 
s'allier ensuite avec le roi de Mexico. Tout 
cela mit Cortez dans une grande perplexité ; 
mais enfin , après avoir examiné l'affaire, il se 
décida à en courir la chance , et à chercher 
à plaire à chaque parti pour les dominer tous 
les deux. Il résolut donc d'aller à Tlaxcallan. 
Dès que le sénat en fut informé il se réunit; 
et Xicotencatl, qui était le plus vieux des 
quatre chefs ( i) , leur dit : « Seigneurs, ne per- 
dons pas de temps en discussions inutiles ; il 
faut élire dans chacune des quatre tribus des 
nobles et des gentilshommes pour aller au- 
devant du soleil. Le sénat et les quatre chefs 
ne peuvent y aller en corps. Cette demande 
cache peut-être une trahison pour nous mas- 



(t) Tlaxcallan était divise en quatre quartiers, Tepeticpac, 
Ocotelnico , Tizaltlan et Quyahuiztlan , dont chacun était 
gouverné par un chef héréditaire, qui formaient ensemble le 
pouvoir exécutif de la république* J*expliquerai plus au long 
cette forme de gouvernement dans mes notes sur l'Histoire de 
Tlaxcallan de Gamargo. 



DES CHIGHIMÈQUES. 197 

m 

sacrer ; car nous avons beaucoup d'ennemis 
dans son armée. Quand il verra notre bonne 
réception et combien nous désirons le servir, 
il nous prendra en amitié et croira en notre 
loyauté. Je nomme donc pour aller à ma place 
deux nobles de ma famille^ Apayancatl et 
Tecuachcaotli. Tout le monde approuva son 
avis : Maxiscatzin nomma Tlacatecuhtli et 
Ghicuilitzin Xiuhtlaqui. Le chef de la tribu de 
Quyahuiztlan choisit Ghimalpiltzintli et Qua- 
naltecatl ; celui de Tepeticpac désigna Tzopat- 
zin, Quauchtlapaltzco y Ixiconauhquitecuhtli 
et Hueitlapohtipatzin , Mixcoatzin. Guidés par 
Tolimpanecatl Costomal^ ils allèrent trouver 
Cortez, lui ofiFrirent un présent d'or et de pier - 
reries, et l'invitèrent, au nom du sénat, à se 
rendre à Tlaxcallan où les seigneurs l'atten- 
daient tous en regrettant de ne pouvoir venir 
au-devant de lui. Cortez se réjouit de leur 
venue, et après avoir causé quelque temps 
avec eux, il se mit en route avec son armée; 
on lui fit à Tlaxcallan une réception solen- 



1 



i98 HISTOIRE 

iielle. XicotencatI vint le recevoir à la porte 
de son palais qui était dans le quartier de 
Tlaxcallan. Il était si vieux qu'il était obligé 
de se faire porter par quelques nobles ; il était 
environné des principaux seigneurs de sa 
cour et de sa race qui étaient Mocuetlazatzin, 
Tzicuhcuacatl , Texiucuitlacochecaloatl , Axa- 
yacatzin , Xiuhtecatl , Tonatiuhtzin , Tepo* 
loatecuhtli^ et Tenamazcuicuiltzin. Les chefs 
des trois autres tribus assistèrent aussi à cette 
réception avec leurs principaux chefs. Maxis- 
catzin d'Ocotelulco avait avec lui Tepanecatl, 
Xiquiquilitzin > Chiconquauhtzin , Ixayopilt- 
zin , Tlamazecuhetzin^ Tenaucatl, Zeyecatc- 
cuhtii , Xavacatzin et Galmecahua. A la suite 
du seigneur de Quyahuiztlan , on voyait Cit- 
lalpopocatzin ^ Quanaltecatl , Axoyotsin , Te- 
quanetzin , Tenancacalitzin , Xochicucaloa et 
Izquitecatl. Le seigneur de Tepeticpac Tle- 
huexolotzin menait avec lui, Tlequitlatoatzin, 
Tezopatzin , Galmecahua Quauhatlapapactzo , 
IxcoconauhaquitecuchtlietXipântccuchtli j ils 



DES GHlCamÈQUES. 199 

étitî^nt suivis d'une quantité de nobles et de 
gentilshommes de la province de Tlaxcallan. 
Liorsque Corte* fut arrivé à un endroit nommé 
Tezatlan , ih allèrent au-devant de lui jus^ 
qu'à la porte du palais; Xicotencatl donnait 
un bras k Ma^iacatzin , l'autre à Tequanitzin. 
Quand Cortç;? les eut aperçus , il descendit de 
cheval , ota son bonnet , et leur fit une rêvé- 
reuice très-humble ; Cortez embrassa Xicoten^ 
cafl, et lui dit, par la bouche de Marina, 
qu'il était très - heureux de voir et de con- 
naib^e les principaux seigneurs et nobks 
de la province de Tlaxcallan , et qu'ils pou- 
vaient être çn repos sur le but de $a venue » 
que pe n'était que pour leur bien et pour leur 
liberté. Maxiscatssin lui répondit ; <* Seigneur, 
soye?5 le bien venu dans nos demeures, Yoiâ 
nptre père Xicotencatl et tous les nobles et 
seigneurs de Tlaxcallan qui vous attendaient 
avec; impatience, enbre^ vous reposer. » î^iûo- 
tencaiî lui offrit ensuite de sa propre main 
un bpuquçt de fleurs que tenait Ma^ise^M^^jin ; 



200 HISTOIRE 

Ton commença ensuite à jouer des tambours^ 
des fifres et des trompettes , è déployer les 
bannières. Xicotencatl prit ensuite Cortez par 
le bras et le conduisit dans la grande salle de 
sa maison où on lui servit un festin splendide 
ainsi qu'à ses compagnons y ce qui dura pen- 
dant toutle temps qu'ils passèrentàTlaxcallan. 
Dans ce chapitre et dans les suivants, je ne 
suis pas , en parlant de Tlaxcallan , ce qu'ont 
dit les auteurs qui ont traité de la conquête ^ 
mais ce qu'a écrit Tadeo de Niza de Santa- 
Maiûa , natif de Tepeticpac , dans la relation 
qu'il écrivit par ordre du sénat^ sous le gou- 
vernement de D. Alonzo Gomez^ et qu'il donna 
à frère Pedro Orosco pour le porter en Espagne 
à S. M. Elle fut écrite en 1 528 , et les auteurs 
avaient été témoins oculaires de tout ce qu'ils 
rapportent ; c'étaient Michel Tlazpanquizcat- 
zin, régidor perpétuel et natif de Quyahuiz- 
tlan^ Torribio Tolimpanecatl , D. Antonio 
Colmecahua^ D. Diego de Guzman^ D» Martin 
de Valencia Coyolchich iquhqui et d'autres dont 



DES CHIGHIMÈQUES. 201 

je ne mets pas ici les noms. Il y avait trente- 
un ans que Gortez était entré dans le pays^ 
quand on écrivit cette relation^ qui est la 
meilleure de toutes^ la plus certaine et la plus 
authentique^ car elle fut écrite d'un commun 
accord, et par des gens parfaitement instruits» 



1 



â ^ 



CHAPITRE LXXXIV. 



Séjour de Gortez à Tlaxcallan. 



Certes; resta vingt jours à Tlaxcallan ^ où il 
fut parfaitement traite par les habitants; il 
leur demanda, pour lui et pour les siens, la 
permission de parcourir la ville, de visiter les 
temples et les palais des quatre chefs. Quand 
il se fut assuré que c'étaient des gens civilisés^ 



204 HISTOIRE 

chez lesquels il y avait des notions d'ordre et 
de police^ une justice administrée régulière- 
ment , et avec lesquels on pouvait traiter en 
toute sûreté, il se mit à leur prêcher la reli- 
gion chrétienne et à les détourner de Fido- 
lâtrie et des sacrifices humains, leur disant 
que leurs dieux étaient des démons. Il ne 
réussit pas entièrement à les persuader pour 
cette fois ; mais il établit dans la grande salle 
du palais de Xicotencatl un oratoire avec une 
croix et une image de Notre-Dame, où Ton 
dit la messe presque tous les jours; il fit 
placer avec une grande solennité une autre 
croix dans la salle où il recevait le sénat. Les 
Tlaxcaltèques étaient très-étonnés de voir que 
les Espagnols adoraient le Dieu qu'ils appe- 
laient TonacaquahuitI ou l'arbre de la nour- 
riture. Les chefs de la république résolurent 
de donner leurs filles en mariage à Cortez et 
à ses principaux compagnons. Xicotencatl lui 
donna deux de ses filles, nommées Tecuiloat- 
•'''tuet Tolquequetzaltzin ; Maxiscatzin choisit 



DES GHIGHIMÈQUES. 205 

pour cela Zicuetzin^ fille d'Altlapaltzin ; le 
seigneur de Quyahuiztlan donna Zacancoz- 
catl, fille d'Axoquentzin ; on joignit à ces 
princesses beaucoup d'autres jeunes filles , et 
on les donna à Cortez et à ses compagnons , 
avec beaucoup d'or, d'étoiSes, de plumes et 
de pierreries. Maxiscatzin dit à Cortez qu'on 
lui envoyait toutes ces jeunes femmes , filles 
des principaux capitaines , pour que lui et ses 
guerriers les prissent pour épouses. Cortez le 
remercia et les partagea entre les siens , pour 
ne pas avoir l'air de mépriser ce présent. Pour 
montrer aussi sa libéralité, il leur demanda 
quelques messagers , qu'il envoya à Cempoal-. 
lan, d'où ils rapportèrent quantité d'étoffes , 
de vêtements, de cacao, de sel , de coquillages 
et de poissons, qu'il partagea entre les quatre 
chefs et les autres principaux nobles de Tlax- 
callan ; ce qui était pour eux un présent très- 
précieux, parce qu'ils manquaient de tout 
cela. On envoya donc à Cempoallan cent vingt 
nobles et deux cents Indiens de charge; ils 



206 H16TOIKE 

dirent aides par un Edpagndl que Cortez avait 
laissé à Gempoallan et par le seigneur de cet 
endroit, qui se nommait GhieomacatK On leur 
ordonna en même temps d'ouvrir une route 
régulière depuis Gempoallan jusqu'à Tlaxcal*- 
lan. Xieotencatl choisit pour faire ce voyage 
un noble nommé Icueten ; M axiscatzin désigna 
Tôtôltzin Ghiuhatlapiltzin ; Tlehuexolotzin 
envoya Yaotzin et d'autres que je ne nommerai 
pas pour éviter la prolixité. 

Pendant le séjour de Tlaxcallan , les habi- 
tants de Huexotzinco, qui étaient de la même 
nation et se gouvernaient aussi en républi- 
. que , vinrent pour se soumettre à Gortez. Le 
tableau que l'on garde encore dans les ar- 
chives de la municipalité de Tlaxcallan , i^e- 
présente le prêtre Juan Diaz baptisant à celte 
époque les quatre chefs de la république : 
Cortex fut leur parrain. Les trois premiers, 
qui étaient des vieillards, furent Xieoten- 
catl, qui fut nommé D. Barthélémy; Gitla- 
popocatzin , qui fut nommé D<. Balthazar , et 



DES dtttOIllItÈQUES. 207 

Tlehue^coloteiti , qui fut tidinmëD. Gôntalù; 
Ma^iscatïiti , qui était tin jeune homme , fut 
appelé D. Juan. 

Pendant tout ce temps, les ambassadeurs 
de Motecuhiomà invitaient sans cesse CoHet 
à ëe mettre en route pour Mexico. Quand ils 
le virent prêt à partir, ils l'engagèrent à pas- 
ser par Chololan, ville riche, populeuse et 
alliée de Motecuhzoma. Il se décida, malgré 
les objections des Tlaxcâltèques , à suivre ce 
conseil. Il emmena avec lui seulement six mille 
guerriers, quoiqu'on lui en offrît bien da- 
vantage; ils étaient commandés par Atlépa- 
palotzin, Tlacatecuhtli, Quanaltecatl , Tona- 
mactequiniltzin , Imiztli, Matzin et Axaya- 
cat2in; mais ce dernier retourna à Tlaxcallan. 
Dix mille habitants de Chololan vinrent au- 
devant de Cortez à quelque distance, le con- 
duisirent dans leur ville avec de grandes dé- 
monstrations de joie, et, après lui avoir donné 
les meilleurs logements , ils lui servirent un 
festin splendide ce soir-là. Les ambassadeurs 



208 HISTOIRE 

de Motecuhzoma recomnoiencèrent à solliciter 
Cortez de ne pas se rendre à Mexico^ soule- 
vant de nouvelles difficultés ; ce qui excita ses 
soupçons contre eux et contre les habitants de 
Ghololan. Il ordonna aux Tlaxcaltèques , ses 
alliés 9 de se mettre sûr la tête un signe qui 
les fit facilement distinguer, parce qu'il vou- 
lait faire sur les Chololtèques et les Mexicains 
un exemple terrible. Il ordonna à tous les 
chefs et à tous les nobles de Ghololan de se 
rendre dans une grande salle où ils se réunis- 
saient ordinairement quand ils avaient à 
traiter des affaires d'importance (i), leur an- 
nonçant qu'il voulait quitter la ville; il fit 
aussi réunir tous les gens du peuple dans la 
grande cour, sous prétexte de choisir ceux 

(i) Ce fut le peu de confiance que Ton avait en Motecuh- 
zoma qui fit manquer Taffaire de Ghololan, il avait offert 
aux habitants un secours de trente mille hommes , mais ceux- 
ci le refusèrent , craignant qu il ne profitât de Foccasion pour 
se rendre maître de la ville {Chimalpain , chap. 56). Quelques 
auteurs disent qu Alvarado fut averti de ce complot par sa 
maîtresse, d autres, que ce fut une vieille Indienne qui prévint 
Marina. [Torquemada , Xw , IV. ch. 89. Bernai Diaz. ch. 83. 
f^efancouNy p. 3, ch. Vil.) 



DES CHICHIMÈQUES. 209 

qui lui étaient nécessaires pour porter des 
fardeaux; il arriva donc tant de monde de 
tout rang , que la salle et la cour étaient en- 
tièrement remplies. Quand les trente princi- 
paux furent arrivés , Cortez les fit arrêter et 
fit fermer les portes de la salle pour que per- 
sonne ne pût sortir; il fit ensuite appeler les 
ambassadeurs mexicains et leur dit que les 
prisonniers lui avaient avoué qu'ils avaient 
par leurs ordres tramé une conspiration contre 
lui pour l'assassiner^ mais qu'il ne pouvait 
croire que cet ordre vînt de Motecuhzoma (i). 
Les Mexicains cherchèrent à s'excuser, disant 
qu'eux et leur maître étaient entièrement 
innocents d'un pareil crime. Cortez fit exé- 
cuter quelques-uns des trente seigneurs et 
tirer un coup d'arquebuse, qui était le signal 
convenu avec les Espagnols pour qu'ils mas- 
sacrassent tous ceux qui se trouvaient dans 

(i) Le principal chef de Ghololan se nommait Tequanhu- 
chuetzin ; cette famille existe encore , et un de ses membres 
fut envoyé par Puebla aux Gortès d'Espagne en 182 1. 

(Chimalpain, cb. 55 , noie.) 
13. 14 



210 HISTOIRE 

la cour, ce qu'ils exécutèrent; de sorte qu'en 
moins de deux heures il en périt plus de cinq 
nillç; ils pillèrent et brûlèrent les temple et 
es principales maisons dq la yillie, et surtout 
e grand temple où s'étaient réfugiés les prê- 
tres et les nobles. Ce fut là que périt le plus 
de monde. Cette action répandit la terreur 
dans tout le pays^ et la ville fut déserte en 
un instant. Le butin fut très - considérable , 
tant en or et en pierreries qu'en plumes et en 
étoffe$ ; car c'était une des villes les plus riches 
de Teinpire , parce que presque tous les habi- 
tants faisaient le commerce. Cortez. remit en- 
suite les prisonniers en liberté, à condition de 
faire rentrer les fugitifs dans la ville en leur 
promettant paix et repos. En un jour de temps 
la ville fut aussi peuplée qu'auparavant > et 
les habitants devinrent ses amis et ceux des 
Tlaxcaltèques. Le sénat, voyant qu'à cause de 
cette affaire Cortez commençait à manquer de 
vivres, lui en envoya, et ce fut Maxiscatzin 
qui les lui amena avec les gens de son quar- 



DES CHIGHIMÈQUES. 211 

tier. Cortez les remercia beaucoup et les ren- 
voya y en leur disant que s'il avait jamais 
besoin de leur secours il les ferait appeler. Us 
s'en retournèrent donc , et pendant les quinze 
jours que Cortez resta à Chololan , les Tlaxcal- 
tèques l'aidèrent et le servirent de toutes les 
manières. Vers cette époque , les ambassadeurs 
de Motecuhzoma revinrent avec un nouveau 
message de leur maître , et lui offrirent six 
dindons en or richement travaillés^ avec beau- 
coup d'étoflFes et de vivres; ils l'assurèrent 
que toutes les accusations qu'on avait portées 
contre leur maitre étaient calomnieuses ^ qu'il 
était son véritable ami , et que s'il en voulait 
la preuve il vînt de suite à Mexico , où il l'at- 
tendait avec impatience et lui préparait la 
meilleure réception. Cortez se décida donc à 
se remettre en route. 



n 



CHAPITRE LXXXV. 



Voyage de Gortez à Mexico. — Ce qui se passa dans cette Tille 
jusqu'à Farrestation de Motecuhzoma. 



En quittant Chololan^ Gortez alla coucher 
dans un endroit nommé QuauhtecatI, entre le 
volcan et les montagnes Neigeuses. Le lende- 
main , dans la matinée , on aperçut le lac sur le 
bord duquel est bâtie la ville de Mexico , ainsi 
que beaucoup d'autres belles villes ; il alla cou- 



21 4 HISTOIRE 

cher avec son armée à Âraetaca , et se logea 
dans la maison de Cacamatzin^ seigneur de 
cette ville, qui le reçut très-bien , et se plai- 
gnit beaucoup de la tyrannie de Motecuh- 
zoma; il coucha la nuit suivante à Iztacpa- 
lapan , chez Cuitlahuatzin , frère de Motecuh- 
zoma , et seigneur de cette ville. Cacama , roi 
de Tezcuco et neveu de Motecuhzoma , y vint 
au-devant de lui avec toute sa cour; il était 
porté sur un palanquin en or. Quand il eut 
salué Cortez et lui eut offert un présent consi- 
dérable en or et en pierreries y il l'engagea à 
rester où il se trouvait, lui promettant que 
Motecuhzoma s'arrangerait de manière à avoir 
une entrevue avec lui pour recevoir son am- 
bassade ; mais Cortez s'y refusa , et continua 
le lendemain sa route vers la capitale , accom- 
pagné d'un grand nombre de seigneurs de 
Mexico, Tezcuco et Tlacopan. Quand il fut 
arrivé près d'une source qui est à l'entrée de 
la ville, à l'endroit où l'aqueduc se joint avec 
la chaussée, il y trouva plus de quatre mille 



DES CHICHIMÈQUES. 215 

nobles richement vêtus , et qui , à mesure qti'il 
passait devant eux , le saluaient humblement 
à la mode du pays , en Inettànt leur main par 
terre et en la baisant , ce qui était la manière de 
saluer les grands seigneurs. Plus loin , auprès 
d'un pont , il rencontra Motecuhzoma qui ve- 
nait à pied au -^devant de lui. Il donnait le 
bras d'un côté à son neveu , le roi Cacama de 
Tezcuco , et de l'autre à son frère Cuitlahuat- 
zin. Us avaient sur la tête des panaches de 
plumes vertes ornées d'or et de pierreries, tel» 
qu'en portaient les seigneurs qui étaient capi- 
taines généraux de Mexico et de Tezcuco, 
Motecuhzoma, Cacama et Cuitlahuatzin étaient 

vêtus de la même manière , excepté que les 
deux rois portaient sur la tète des diadèmes 
d'or et de pierreries , et des franges qui pen- 
daient du cordon qui attachait leurs cheveux ; 
leurs souliers étaient d'or ornés de pierreries 
et de perles. On étendait devant eux des pièces 
d'étoffes pour qu'ils marchassent dessus. Ils 
étaient suivis de gardes et de serviteurs ri- 



1 



21 6 HISTOIRE 

chement vêtus ^ au nombre de trois mille. 
Quand Cortez s'approcha d'eux ^ il descendit 
de cheval, et après les avoir salués profon- 
dément il voulut embrasser Motecuhzoma, 
mais on l'en empêcha. Quand ils se furent 
salués plusieurs fois, Cortez jeta au cou de 
Motecuhzoma une chaîne de verroterie qui 
imitait les perles et les diamants. Motecuh- 
zoma mit à celui du général espagnol un collier 
d'or très-riche dans lequel étaient enchâssés 
des coquillages (camarones), couleur de coquil- 
lages que les Mexicains estimaient beaucoup ; 
ils allèrent ainsi jusqu'à la ville. Motecuh- 
zoma laissa avec Cortez son neveu Cacama et 
son frère Cuitlahuatzin , et retourna à son 
palais. Il marchait le premier et Cortez im- 
médiatement après , donnant la main à Ca- 
cama. 11 le conduisit aussi avec grande pompe 
à un riche palais qui appartenait au roi de 
Mexico, et qui avait été occupé par le roi 
Axayacatzin , son père. Quand ils furent arri- 
vés à la porte , Motecuhzoma prit Cortez par 



DES CHICHIMÈQUES. 217 

la maiii; leconduisit dans une grande salle et le 
fit asseoir sur une riche estrade^ en lui disant : 
« Reposez-vous et mangez, car vous êtes ici dans 
votre maison; je reviendrai bientôt. » (Ce fut le 
8 novembre 1 51 9 que Cortez entra à Mexico.) 
On apporta aussitôt un repas que Cortez prit 
avec les siens, et Motecuhzoma à part, dans 
ses appartements. Quand le roi eut mangé, il 
revint auprès de Cortez , et le faisant asseoir à 
côté de lui sur l'estrade, il lui dit d'un air 
grave qu'il se réjouissait que des gens si nobles 
fussent venus le visiter dans sa cour, et qu'il 
était affligé qu'ils eussent cru qu'il voulait les 
maltraiter. Il s'excusa de tout ce qu'il avait fait 
pour l'empêcher de venir à Mexico, et lui ra- 
conta qu'une prophétie qui lui avait été trans- 
mise par ses ancêtres annonçait qu'un grand 
seigneur, qui avait autrefois gouverné ce pays, 
devait revenir un jour avec les siens pour 
en prendre possession et lui donner de nou- 
velles lois , et que sans doute le roi d'Espagne 
était celui qu'ils attendaient. Il lui fit une 



218 HISTOIRE 

longue description de ses richesses, et les lui 
offrit ; puis ayant fait apporter une quantité 
de joyaux et d'étoffes , il les distribua entre 
les Espagnols selon le rang qu'ils lui paru- 
rent occuper, Cortez employa les six premiers 
jours à parcourir la ville et à l'examiner. Les 
principaux seigneurs de l'empire vinrent le 
visiter et lui offrir leurs services. On fournit 
des vivres en abondance à ses compagnons et 
aux six mille Tlaxcaltcques qu'il avait amenés. 
Au bout de ce temps , ayant bien réfléchi sur 
la position difficile où il se trouvait , il résolut 
de s'emparer de Motecuhzoma. C'était une ac- 
tion certainement bien hardie de se saisir de la 
personne d'un aussi puissant roi au milieu de 
son palais, de sa couret de ses vassaux, àlui qui 
n'avait que si peu de compagnons ; une audace 
qui fait frémir rien que d'y penser. Que dire 
donc de celui qui l'a entrepris et a réussi ? Il prit 
pour prétexte l'affaire de Ghololan et d'autres 
tentatives qu'il attribuait à Motecuhzoma pour 
le faire périr lui et les Espagnols, ainsi que 



DES GHIGHIMÈQUES. 219 

Iejf|[^urtre de quatre Espagnols commandés 
pgjc ]fi capitaine Pedro de Yrcio, qui avait été 
cçfji^is prés de la Vera-Cruz par ordre de 
Qji^auhpopocatzin , seigneur de Guyoacan ^ un 
dç^jgrands de l'empire , qui résidait à Nauht- 
]an.^ comme gouverneur des côtes de la mer 
du Nord, à ce que disaient les lettres que 
Cortez prit avec lui pour les montrer à Mo- 
tecuhzoma si cela était nécessaire. Il se pro- 
menait dans la salle en méditant ce plan , 
quand il aperçut une porte qui lui parut nou- 
vellement murée; craignant quelque trahison, 
il la fît ouvrir pendant la nuit , et l'on décou- 
vrit au delà des salles remplies d'or, de plu- 
mes, d'étoffes, et d'autres objets de grande 
valeur , et en telle quantité qu'on pouvait à 
peine en croire ses yeux. Il fît murer de nou- 
veau la porte pour qu'on ne s'aperçût de rien. 
Le lendemain ,. quelques Tlaxcaltèques et quel- 
ques Espagnols vinrent le trouver, et lui 
dirent qu'ils avaient appris que Motecuhzoma 
voulait les faire périr, et qu'il avait donné 



220 HISTOIRE 

Tordre de couper les ponts. Dans une lettre 
originale que j'ai entre mes mains^ signée par 
les trois chefs de l'empire et adressée à l'em- 
pereur notre sire de glorieuse mémoire, ils 
se justifient de cette accusation et prétendent 
que ce fut une calomnie des Tlaxcaltèques et 
de quelques Espagnols qui étaient impatients 
de sortir de la ville et de mettre à l'abri les 
immenses richesses qu'ils avaient entre les 
mains. Soit que cette accusation le décidât, soit 
que sa résolution fût déjà prise , il se détermina 
à s'emparer de Mutecuhzoma. Il plaça une 
garde d'Espagnols dans les endroits où les ca- 
naux se croisaient, et dans tous les endroits où 
il devait passer pour revenir du palais à son 
logement, où il laissa la moitié de sa force. 
Il ordonna aux alliés de le suivre, et mar- 
chant par deux ou par trois avec des armes 
cachées, il fit avertir Motecuhzoma qu'il allait 
venir le visiter. Celui - ci vint au - devant de 
lui jusqu'au haut de l'escalier, l'introduisit 
dans la salle où une trentaine d'Espagnols le 



DES GHICHIMÈQUES. 221 

suivirent, et ils se mirent à causer amicale- 
ment ensemble, comme ils en avaient Thabi- 
tude. Voulant donner à Cortez une marque 
d'amitié, Motecuhzoma lui donna des médail- 
lons d'or très-riches , et lui oflFrit une de ses 
filles pour épouse ; mais Cortez lui répondit 
qu'il était déjà marié, et que la loi évangé- 
lique ne lui permettait pas d'avoir plus d'une 
femme. Il tira ensuite de sa poche les lettres 
du capitaine Pedro de Yrci >, commença à 
se plaindre au roi du meurtre des quatre Es- 
pagnols que Quauhpopocatzin avait commis 
par son ordre, et à lui reprocher qu'il mé- 
ditait une trahison , et qu'il voulait faire cou- 
per les ponts. Motecuhzoma, se voyant accusé 
d'une perfidie si grande et si loin de sa pen- 
sée , s'écria que tout cela n'était qu'un tissu de 
mensonges , et ayant fait appeler un de ses ser- 
viteurs, il ôtade son bras un bracelet sur lequel 
était sculpté son portrait, qui était comme son 
sceau royal, et lui ordonna d'aller en toute 
hâte mander Quauhpopocatzin. Quand le ser- 



222 HISTOIRE 

viteur fut parti , Cortez dit au roi de Mexico : 
« Je dois m'assurer de votre personne et ¥êûs 
conduire à mon logement ^ où vous serez bien 
traite et bien servi jusqu'à ee que Quauhpo- 
pocatzin soit arrivé. Excusez-moi ; mais il ie 
faut^ car mes compagnons me tueraient si 
j'en agissais autrement. Ordonnez à vos sujets 
de ne pas remuer , car vous paierez tout le 
mal qui nous arrivera.» Motecuhzoma fut tel- 
lement stupéfait de ce discours , qu'il resta 
quelque temps sans pouvoir proférer une pa- 
role. Enfin il dit à Cortez d'un air grave : « Je 
ne suis pas de ceux que l'on met en prison ; 
même si j'y consentais , mes sujets ne le souf- 
friraient jamais.» Cortez insista sur la nécessité 
d'en agir ainsi. Enfin , après une discussion 
de plus de quatre heures , Motecuhzoma lui 
dit qu'il consentait à venir avec lui , et, ap- 
pelant ses serviteurs, il leur ordonna de se 
rendre au palais de Cortez et d'y préparer un 
appartement pour sa réception. Tous les Es- 
pagnols se rendirent aussitôt au palais, ainsi 



DES CHICHIHÈQUES. 223 

qu'un grand nombre de seigneurs de la ville 
parents et amis du roi , qui cherchaient à lire 
dans ses yeux s'il voulait qu'ils le délivras- 
sent; mais sur l'ordre de celui-ci , ils le poin- 
tèrent sur son palanquin d'or couvert de pier- 
reries. 11 traversa la ville au milieu du plus 
grand tumulte. On voulait le délivrer , mais 
il assura qu'il n'était pas prisonnier, et qu'il 
allait volontairement loger avec Cortez , ce que 
les Mexicains crurent, puisqu'ils le voyaient 
expédier les affaires comme auparavant, sor- 
tir du palais , et même aller à la chasse à une 
ou deux lieues; mais ils observèrent qu'il 
avait toujours des Espagnols avec lui pour le 
garder : du reste , il était servi par les siens , 
parlait à qui il voulait en public ou en secret, 
et sortait pour aller prier ses dieux , ou leur 
offrir des sacrifices. 11 était gardé par huit Es- 
pagnols et trois mille Tlaxcaltèques. Cortez 
lui dit un jour pour l'éprouver que Ses com- 
pagnons avaient pris une certaine quantité 
de byoux d'or qui se trouvaient dans le pa- 



1 



224 HISTOIKE DES CHICHIMÈQUES. 

lais. Motecuhzoma lui répondit qu'il les leur 
abandonnait de bon cceur, et leur en donne- 
rait encore davantage s'ils le désiraient , mais 
qu'ils ne touchassent pas aux plumes^ parce 
que c'était le trésor des dieux. 



t 



CHAPITRE LXXXVI 



De ce qQÎ se passa à Mexico jiuqa a ce que Gortez fît mettre 
des fers à Motecuhzoma. — Gacama , roi de Tezcuco , prend 
les armes pour délivrer son oncle et chasser les Espagnols. 
— Son oncle Ixtlilxochitl le prend par trahison et le livre 
à Gortez. 



Aussitôt que Cortez eut Motecuhzoma en son 
pouvoir, il voulut l'empêcher de sacrifier aux 
idoles , et se mit à les renverser , ce qui ir- 
rita beaucoup les Mexicains. Ils furent sur le 
point de massacrer Cortez, qui l'avait ordonne, 

et Motecuhzoma , qui l'avait permis. Le géné- 
13. 15 



226 HISTOIRE 

rai espagnol consentit donc, à la prière de ce 
dernier, à les laisser subsister pour le moment. 
Il se contenta de leur représenter l'aveugle- 
ment dans lequel ils vivaient, et de leur mon- 
trer le chemin de la vertu et la vérité de la loi 
évangélique ; ce qui , disait-il , avait été le prin- 
cipal but de sa venue, et non le désir des riches- 
ses, puisqu'il n'avait pris que ce qu'on lui avait 
donné, n'avait touché ni à leurs femmes ni 
à leurs enfants , et ne leur avait fait aucun 
mal ; que son principal but était de sauver 
leur âme. Il n'y a , leur répétait-il , d'autre 
dieu que le Dieu des chrétiens triple , un et 
éternel et sans fin, qui a créé et conserve 
toutes choses , qui gouverne le ciel et la terre. 
Il ajouta beaucoup d'autres raisons pour les 
amener à notre sainte foi catholique et leur 
faire détester leur idolâtrie, ce qui les calma 
un peu , et Motecuhzoma en vint à promettre 
à Cortez qu'il ne ferait pas de sacrifices hu- 
mains pendant tout le temps qu'il serait dans 
sa capitale. Il permit aussi que dans Ja cha- 



DES GHICHIMÈQUES. 227 

pelle qui se trouvait au haut du grand temple, 
qui avait cent quatorze marches d'élévation , 
on plaçât un crucifix et une image de Notre- 
Dame entre les deux idoles deHuitzilopochtli. 
Il y avait vingt jours que Motecuhzoma était 
prisonnier, quand Quauhpopocatzin arriva à 
Mexico avec son fils et quinze nobles qu'on 
accusait d'avoir trempé dans la mort des quatre 
Espagnols.Motecuhzoma, après lui avoirparlé, 
le livra à Cortez : d'après la lettre dont j'ai 
parlé plus haut et les relations mexicaines , il 
n'était pas coupable , et les quatre Espagnols 
avaient été massacrés par ces naturels du pays 
à cause des excès qu'ils avaient commis. Cor- 
tez alla à l'arsenal de Motecuhzoma et en fit 
tirer toutes les armes qui s'y trouvaient ainsi 
que dans ceux des temples, et en fit élever 
sur la grande place un bûcher, sur lequel on 
brûla Quauhpopocatzin , son fils, et les quinze 
nobles qui l'avaient accompagné; acte non 
moins audacieux que les précédents. Avant 
cette exécution , il fit mettre des fers à Mote- 



228 HISTOIRE 

cuhzoma , et lui fit de grandes menaces pour 
l'épouvanter davantage. Il les lui ôta ensuite , 
et lui promit de le remettre en liberté ; mais ce 
prince était tellement épouvanté qu'il n'osait 
rentrer dans son palais. Pendant ce temps Cor- 
tez ne négligeait pas de s'instruire de toutes 
les particularités qui pouvaient lui être utiles ^ 
s'informant quelles étaient la grandeur et la 
richesse des états de Motecuhzoma ^ de son 
neveu Gacama, et de Totoquihuatzin de 
Tlacopan , de tout ce que contenaient les do- 
maines de ces trois chefs , des mines d'or et 
d'argent, de la distance qu'il y avait jusqu'à 
la mer du Sud ; s'il y avait, sur la côte de la 
mer du Nord, un port meilleur et plus com- 
mode pour les vaisseaux espagnols que celui 
de la Vera-Cruz. Il demandait tout cela à 
Motecuhzoma , qui lui répondait fort exacte- 
ment, car il ne lui cacha jamais rien. Il en- 
voya de divers côtés pour reconnaître le pays , 
la grandeur et les fortifications des villes d'où 
on lui apportait des échantillons de mine- 



DES GHICHIMÈQUES. 229 

rai , et des alliés que l'on y pourrait trou- 
ver. D'après les historiens de Tezcuco, deux 
frères du roi Cacama , dont l'un se nom- 
mait Netzahualquentzin et l'autre Tetlahue- 
huezquititzin ^ furent chargés ainsi qu'un 
grand nomhre de gens de service, tous natifs 
de Tezcuco y d'accompagner les «messagers 
que Cortez y envoyait , afin d'en considérer 
la puissance, la force et la grandeur, et de 
prendre possession de l'or qui se trouvait 
dans le trésor royal. Les deux princes se 
rendirent au palais que leur aïeul Netzahual- 
coyotzin avait construit à Mexico pour s'em- 
barquer de là avec les Espagnols dans des 
canots. Ils allaient y monter quand arriva un 
messager de M otecuhzoma , qui, tirant Netza- 
hualquentzin à part, lui recommanda, au 
nom de son oncle , de bien traiter les Espa« 
gnols, et de leur donner tout l'or qu'ils 
voudraient, puisqu'il voyait l'état où il se 
trouvait. Les Espagnols pensant que cet en- 
tretien secret cachait quelque trahison, un 



230 HISTOIRE 

Espagnol s'approcha de Net2sahua1quentzin9 et 
après l'avoir battu , il le traîna devant Cortez 
qui le fit pendre à l'instant. Cacama fut très- 
offensé de cette conduite , et fit partir à sa 
place un autre de ses frères nommé Tecpacxo- 
chitzin , pour aller avec les Espagnols. Ceux- 
ci eurent à Tezcuco un entretien avec Ixtlilxo- 
chitl et s'emparèrent de l'or dont ils remplirent 
un grand coflV^e qui avait deux brasses de 
long y une de large y et une toise de haut. Mon 
contents de cela, les Espagnols, qui étaient au 
n<Mnbre de vingt, ordonnèrent a Tetlahue- 
huezquititzin et aux autres seigneurs de la 
ville d'en réunir davantage, parce que cela 
ne suffisait pas. Chaque seigneur fut donc 
obligé d'en tirer de son trésor particulier , et 
on en réunit une quantité égale à la première. 
Tout cela fut porté à Cortez qui fut bien 
étonné quand il vit toutes ces richesses, et 
encore plus quand on lui décrivit la grandeur 
et la force de Tezcuco et sa population nom- 
breuse. Il se réjouit aussi beaucoup d'avoir 



DES CHfCHIMÈQUES. 231 

pour ami Ixtlilxochitl , qui était la personne 
la plus estimée et la plus célèbre de tout le 
royaume. Il chercha alors à s'emparer de la 
personne de Gacama. Mais , quoiqu'il fût à 
Mexico y il n'osait le fkire , parce que c'était 
un homme vaillant et sans crainte^ qui pa- 
raissait le mépriser ^ et qui se montrait ouver- 
tement offensé de la prison de Motecuhzoma 
son onde. Gacama ^ voyant que les excès de 
Cortez et de ses compagnons augmentaient 
chaque jour^ réprimanda dm^ement la noblesse 
mexicaine de ce qu'elle pliait devant une poi- 
gnée d'étrangers au lieu de les tuer* Ils s'excu- 
saient y en disant que c'était pour ne pas of- 
fenser Motecuhzoma , qui leur montrait tant 
d'amitié , qu'ils ne prenaient pas les armes et 
souffraient tous les affronts que leur avaient 
feits les étrangers^ en emprisonnant leur roi^ 
en brûlant Quauhpopoeatzin ^ ses fils et ses 
parents^ quoiqu'ils fussent innocents , et eu 
employant à cet usage les armes et les muni- 
tions opi'ils avaient amassées pour la défense 



1 



CHAPITRE LXXXVII. 



Motecnhzoma et les autres seigneurs de l'empire se reconnais- 
sent vassaus^ du roi de Castille. — Ce qni arriva à Gortez 
jusqu'à la prise de Pamphile de Narvaez qui venait 
l'attaquer. 



Quand Cortez eut en son pouvoir les deux 
rois Motecuhzoma et Cacama^ il leur dit de 
rétinir tous les seigneurs de l'empire , parce 
qu'il voulait leur parler de l'objet de sa venue 
et commencer leur conversion à notre sainte foi 
catholique. Ils convoquèrent donc tous les 



236 HISTOIRE 

grands , et quand ils furent réunis dans une 
salle, chacun prit place selon son rang, Mo- 
tecuhzoma s'assit entre Cacama et Totoqui- 
huatzin, car Cortez l'avait remis en liberté 
pour ce jour-là , quoiqu'il lui eût laissé des 
gardes. Il commença un long discours pour 
justifier la conduite qu'il avait tenue, et en 
vint même à dire qu'il remerciait Dieu de ce 
que c'était sous son règne qu'ils avaient eu 
connaissance des Espagnols et de ce puissant 
roi dont ils désiraient la venue depuis des siè- 
cles , et qui certainement était celui qui avait 
envoyé les Espagnols à sa cour : « Si Dieu, leur 
dit-il , a décidé que l'empire des Gulhuas, des 
Aculhuas et des Tecpanèques doit finir , je ne 
veux pas m'opposer à sa volonté et je me 
soumettrai de bonne grâce au roi de Castille ; 
je le regarderai comme mon seigneur su- 
prême, sous la protection duquel je veux vi- 
vre, et je vous prie d'en faire de même. » En 
tenant ce discours Motecuhzoma soupirait et 
versait tant de larmes que tout le monde en 



DES GHIGHIMÈQUES» 237 

fut attendri , même Cortez et les autres Es- 
pagnols qui étaient présents; quand il se fut 
un peu remis, il prêta solennellement serment 
à Don Carlos, roi de Gastille, et après lui Ca- 
cama son neveu, roi de Tezcuco, Totoqui- 
huatzin , roi de Tlacopan , et tous les grands 
qui se trouvaient là; ils promirent de se con- 
duire en bons et loyaux vassaux. Pour gage 
de leur fidélité , les trois rois remirent entre 
les mains de Cortez plusieurs de leurs enfants 
et lui donnèrent en outre quantité d'or, de 
pierreries, de plumes, d'étofiFes, etc., pour 
leur nouveau maître; tous les seigneurs en 
firent autant par leur ordre. D'après les his- 
toriens de Tezcuco , Cacama et ses deux frères 
Coanacochtzin et Ixtlilxochitl donnèrent en 
otages quatre de leurs frères, Tçcocoltzin, 
Tecpacxochitzin , Huixcacamatzin et Tenan- 
cacaltzin, ainsi que quatre de leurs sœurs. Cor- 
tez les consola en leur disant qu'à l'avenir ils 
seraient bien traités et aussi maîtres dans leurs 
états qu'auparavant. 11 s'occupa ensuite de la 



238 HISTOIRE 

conversion des naturels , en leur disant que , 
puisqu'ils étaient vassaux du roi d'Espagne, 
il fallait qu'ils devinssent chrétiens comme lui; 
il y en eut quelques-uns, mais très-peu, qui se 
firent baptiser. Motecuhzoma demanda aussi le 
baptême , mais quoiqu'il eût appins quelques 
oraisons comme le Credo et l'Âvê Maria, il eut le 
malheur de remettre cette cérémonie jusqu'au 
jour de Pâques; ce qui fit qu'il ne jouit jamais de 
ce bonheur; car les nôtres, occupésdesembarras 
où ils se trouvaient, négligèrent sa conversion, 
et il mourut sans avoir reçu le baptême. Au mo- 
ment où tout réussissait à Cortez, Pamphilede 
Nar vaez arriva au port de la Vera-Cruz avec dix 
vaisseaux qui portaient neuf cents Espagnols , 
beaucoup de chevaux, une nombreuse artil- 
lerie et des provisions en abondance avec l'in- 
tention de prendre Cortez mort ou vif. Il était 
envoyé par Diego Velazquez , gouverneur de 
Cuba, qui reprochaità Cortez de s'être soustrait 
à sa juridiction et d'avoir manqué à la disci- 
pline, en s'étant fait proclamer capitaine gé- 



DES GHICHIMÈQUËS. 239 

néral de Terre-Ferme et en v établissant des 
colonies en son propre nom , tandis qu'il était 
son subordonné. Les religieux et les membres 
de l'audience de Saint-Domingue firent tout ce 
qu'ils purent pour empêcher cette expédition. 
Ils envoyèrent à Cuba le licencié Figueroa 
pour sommer, au nom du roi et au leur, le 
gouverneur Velazquez de ne pas faire partir 
cettearmée, lui déclarant qu'ils se plaindraient 
au roi des entraves qu'il apportait à la propa- 
gation de la foi et à la conquête de ce pays. 
Mais ils ne purent l'empêcher. Motecuhzoma 
fut averti à l'instant de l'arrivée de cette flotte, 
et aussitôt il engagea Cortez à se préparer à 
partir. ïl l'avait déjà fait plusieurs fois, mais 
celui-eilni avait toujours répondu qu'il n'avait 
pas de vaisseaux pour se rembarquer. Cortez 
fut très-affligé de cette nouvelle et écrivit aus- 
sitôt à Pamphile de Narvaez , pour le prier de 
ne pas empêcher le conversion de cette nation 
et de se joindre à lui ; il lui représenta qu'il 
pouvait sans peine rendre un notabte service 



240 HISTOIRE 

à son Dieu et à son roi. Narvaezne voulut pas 
y consentir parce qu'il pensait qu'il parvien- 
drait facilement à s'emparer de Cortez , en ré- 
pandant parmi les naturels le bruit que c'é- 
tait un fugitif, un voleur et un traître, et qu'il 
venait pour lui faire trancher la tête et déli- 
vrer Motecuhzoma , parce que le roi son maî- 
tre était indigné de la manière dont il l'avait 
traité. Cette conduite irrita beaucoup de ses 
compagnons, et l'auditeur Ayllon lui défendit 
sous peine de mort de se conduire de la sorte, 
car il ofiensait gravement Dieu et le roi en 
entravant la conversion de ces nations. Pam- 
phile de Narvaez ne lui répondit qu'en le fai- 
sant arrêter et en l'envoyant à Diego Velaz- 
quez; mais il s'échappa et gagna Saint-Domin- 
gue. L'audace de Narvaez en vint au point de 
faire faire le procès à Cortez et de le condam- 
ner à perdre la tête ; il lui déclara la guerre, 
ce qui faisait rire non-seulement les colons 
de la Vera-Cruz, mais même ceux qu'il avait 
amenés avec lui. Cortez fit tout son possible 



DES CHIGHIMÈQUES. 241 

pour l'apaiser par de bonnes raisons^ il lui 
écrivit souvent pour lui demander la paix; et 
quand il vit que ses lettres ne servaient à rien 
il se décida à avoir une entrevue avec lui. 
Apres avoir annoncé son dessin à ses compa- 
gnons, il ditàMotecuhzomaqu'il voulait aller 
à la Vera-€ruz pour empêcher les nouveaux 
venus de faire aucun dégât sur les terres de 
l'empire, et leur ordonner de ne pas repartir 
sans lui. Il lui promit de revenir promptement 
et le pria de rester en attendant avec les Es- 
pagnols afin qu'on ne leur fit aucun mal , et 
de lui donner des Indiens pour l'accompagner. 
Motecuhzoma, Cacama et Totoquihuatzin y 
consentirent, et lui fournirent tout le monde 
dontil avait besoin ; ils lui dirent qu'ils avaient 
l'intention de célébrer une fête solennelle 
nommée Toxcatl qui avait lieu annuellement, 
lui promettant qu'il n'y aurait pas de sacri- 
fices humains, puisqu'il les avait défendus. 
Cortez leur répondit de se divertir comme ils 

l'entendraient. Il laissa, pour le remplacer, le 
13. 16 



1 



242 HISTOIRE DES GHIGHIMÈQUES. 

capitaine Pedro de Alvarado, avec cent cin- 
quante Espagnols. Cortez quitta Mexico avec 
deux cent cinquante de ses compagnons et les 
alliés. Pendant la route, il apprit que Narvaez 
se trouvait à Cempoallan. Il s'y prit si adroi- 
tement qu'il y arriva avant que celui-ci en fût 
averti , s'empara de sa personne et l'envoya 
sous bonne garde à la Vera-Cruz, sans avoir 
perdu plus de deux soldats. Tous ceux qui 
étaient venus avec Narvaez passèrent de son 
côtéj car la plupart le suivaient malgré eux. 



CHAPITRE LXXXVIII. 



Massacre de la noblesse de Mexico par Pedro de Alvarado 
et ses compagnons. — Ce qui est cause de la, révolte de 
Mexico. — Les Espagnols sont serrés de si près <pi'ils sont 
forcés d'abandonner cette ville. — Mort du grand Motecuh- 
zoma , de Cacama et d*antres seigneurs. 



Pendant que Cortez était à la Yera-Cruz y 
les Mexicains célébrèrent une de leurs prin- 
cipales fêtes nommée Toxcatly qui tombait le 
jour de Pâques. Comme Cortez leur avait dé- 
fendu les sacrifices humains^ on exécuta sim- 
plement une danse solennelle » à laquelle prit 



1 



244 HISTOIRE 

part toute la noblesse mexicaine , couverte 
de tous les bijoux d'or et de pierreries qu'elle 
possédait , car elle ne se défiait guères du sort 
qui l'attendait. Selon les historiens de la 
ville de Tezcuco, d'après lesquels j'écris cette 
narration , quelques Tlaxcaltèques, se rappe- 
lant que dans cette occasion on avait sacrifié 
une quantité innombrable de victimes de 
leur nation , et désireux de se gorger de 
butin , ce que Gortez avait empêché jusque- 
là, allèrent les dénoncer à Pedro de Alvarado, 
qui commandait à sa place. Celui-ci , qui n'a- 
vait pas de meilleures intentions qu'eux , ne 
fut pas difficile à convaincre. Il considéra que 
toute la principale noblesse et tous les chefs 
de l'empire s'étant réunis à cette occasion, 
il ne serait pas difficile de le subjuguer une fois 
qu'on les aurait massacrés. Laissant donc 
quelques Espagnols pour garder Motecuhzoma 
etCacama, il se rendit secrètement avec le 
reste à la grande cour du temple, plaça quel- 
ques Espagnols et les Tlaxcaltèques pour gar- 



DES CHIGHIMÈQUES. 245 

der les portes; puis il chargea à la tête des au- 
très tous ceux qui s'y trouvaient, et en fit un 
grand massacre; car les Mexicains étaient sans 
armes et ne se défiaient de rien. Les Espagnols 
tuèrent en peu d'heures presque tous les no- 
bles , et s'en revinrent à leur quartier chargés 
de dépouilles et de richesses. Tous les habi- 
tants accoururent au bruit, et prirent les 
armes pour secourir leurs seigneurs : ils re- 
poussèrent Alvarado et les siens jusqu'au pa- 
lais qu'ils habitaient, et où ils gardaient Mo- 
tecuhzoma et Cacama. Si ces deux rois ne 
leur avaient ordonné de s'arrêter, ils auraient 
démoli le palais après les avoir tous tués, 
tant ils étaient irrités de la trahison que l'on 
avait commise envers leurs seigneurs ; cepen- 
dant ils se séparèrent à la nuit, et sur l'ordre 
de leurs rois , ils continuèrent à fournir aux 
Espagnols les vivres dont ils avaient besoin. 
Cortez rentra à Mexico victorieux et bien ac- 
compagné, car il amenait mille soldats et cent 
chevaux. Gomme il avait appris sur la route que 



246 HISTOIRE 

les Mexicains s'étaient révoltés contre ceux 
qu'il avait laissés derrière lui^ et que sans Mo- 
tecuhzoma ils auraient tous péri^ il marcha à 
grandes journées jusqu'à Tezcuco , où il fit re- 
poser ses troupes : il y fut parfaitement reçu 
par son ami Ixtlilxochitl^ qui lui renditcompte 
de tout ce qui s'était passé , et le prévint qu'à 
Tezcuco même on était irrité contre les Espa- 
gnols , parce qu'il y avait dans cette ville un 
grand nombre de parents et d'alliés de ceux 
qu'Alvarado avait fait périr. Après avoir ré- 
fléchi sur la conduite qu'il devait tenir , Cortez 
quitta Tezcuco et entra à Mexico le jour de ia 
Saint-Jean , 24 juin 1 520. Il trouva la ville 
tranquille ; mais les habitants ne vinrent pas 
au-devant de lui , et ne lui firent aucune fête. 
Motecuhzoma se réjouit de sa venue. Mais les 
Espagnols furent encore bien plus satisfaits 
de le voir revenir victorieux, et avec des ren- 
forts aussi considérables. Chacun lui raconta 
ses fatigues et ses dangers. Le lendemain 
Cortez fit venir le seigneur qui était chargé de 



^ 



r 



DES CHICHINÈQUES. 247 

riijspection du marché^ et le réprimanda de 
ce qu'il ne se tenait pas comme à l'ordinaire. 
Il lui parla si durement que le seigneur sou- 
leva contre lui toute la ville; car les habitants 
étaient si fatigués de l'oppression et de la 
cruauté des étrangers , qu'il ne ftit pas diffi- 
cile de leur faire prendre les armes. A dater 
de ce moment y on se fit une guerre terrible. 
Dans le premier combat, les Mexicains tuèrent 
quatre Espagnols, le lendemain ils en bles- 
sèrent plusieurs; ils renouvelaient sans cesse 
les attaques, et ne leur laissaient pas un 
moment de repos. Le septième jour, ils atta- 
quèrent avec tant de fureur le palais où 
étaient logés les Espagnols , que Cortez n'eut 
d'autre ressource que de prier Motecuhzoma 
de monter sur une haute tour et d'ordonner 
aux siens de déposer les armes. Il le fit de 
bonne volonté , et supplia ses vassaux de 
cesser la guerre ; mais ils étaient si animés 
et si furieux de la lâcheté de leur roi , et de 
sa servilité à l'égard des Espagnols, que, 



I 

^ 



248 HISTOIRE 

sans récouter, ils l'accablèrent d'injures et de 
reproches, et lui lancèrent une grêlede pierres 
et de flèches. Un caillou l'atteignit à la tête , 
et il mourut de sa blessure le quatrième 
jour (i). Ainsi finit ce grand roi dont per- 
sonne n'égala jamais dans un moment la puis- 
sance et l'orgueil ; car il se faisait presque 
adorer y et pendant quelque temps il fut au 
comble de la puissance et de la richesse. ïl 
était de taille moyenne, d'une complexion 
faible, très-basané et peu barbu. Il était plus 
rusé que brave, grand justicier et très-sévère 
dans tout ce qui regardait la dignité royale , 
prudent et spirituel. La mort de ce puissant 
monarque fut fatale pour Cortez et les siens , 
car elle affermit les Mexicains dans leur ré- 
volte. Ils serrèrent les Espagnols de plus 
près , et regrettèrent peu leur roi , qu'ils mé- 



(i) Quelques auteurs indiens ont prétendu que Motecub- 
zoma fut tué par les Espagnols, mais c*est évidemment une ca- 
lomnie. La mort de ce prince , qui était devenu leur humble 
esclave, ne pouvait que leui^ nuire ; la suite le démontra, car 
ses successeurs leur firent une guerre acbamée. 



DES CHIGHIMÈQUËS. 249 

prisaient à cause de sa faiblesse pour les étran- 
gers^ et de la lâcheté avec laquelle il s'é- 
tait laissé arrêter et maltraiter. Us procla- 
mèrent aussitôt le roi Gacama, son neveu ^ 
quoiqu'il fût prisonnier ; mais ils espéraient 
le délivrer, et le regardaient, à cause de ses 
grandes qualités , comme l'homme qu'il leur 
fallait dans ces circonstances. Cependant ils ne 
purent atteindre leur but; les Espagnols, qui 
voulaient quitter la ville cette nuit même, 
tuèrent (i) de quarante-sept coups de poi- 
gnard Cacama qui, quoique prisonnier, se 
défendit bravement et ne tomba que couvert 
de blessures. Les Mexicains furent très-alfli- 
gés de sa mort, et proclamèrent à sa place 
Cuitlahuazin , seigneur d'Iztacpalapan , frère 
de Motecuhzoma , qui avait été son capitaine 
général. Cuitlahuazin fît aux Espagnols la 



(i) Torquemada (Hv. II, ch. 72 et liV. IV, ch. 56) dit que 
Gortez fit étrangler Cacamatzin. Mais celui-ci dit, dans ses let- 
tres, qu*il périt dans la fuite ainsi que beaucoup d^autres pri- 
sonniers. Presque tous les auteurs sont d*accord avec lui sur 
ce point. 



250 HISTOIRE 

guerre la plus cruelle ; jamais il ne voulut 
leur accorder de trêve. Il leur livra plusieurs 
combats , qui furent si désastreux pour eux , 
que Cortez perdit l'espérance de se maintenir 
à Mexico , et résolut d'en sortir , ce qu'il exé- 
cuta^ mais avec tant de peine et de danger , 
qu'il ne put presque rien sauver des richesses 
qu'il avait amassées. La plupart des Espa*- 
gnols qui succombèrent périrent parce qu'ils 
s'occupèrent trop de sauver leur butin. Cortez 
quitta Mexico dans la nuit du 1 juillet 1 620 
espérant, mais en vain, que les Mexicains ne 
s'apercevraient pas de son départ. Ils l'attaquè- 
rent avec fureur , et lui tuèrent quatre cent 
cinquante Espagnols, quatre mille Indiens al- 
liés et quarante-six chevaux (i) dans l'endroit 
que l'on nommeaujourd'hui le saut d' Al varado. 

(i) Les auteurs varient considérablement sur le nombre des 
Espagnols qui périrent dans cette retraite. Cortez » dans sa ietr 
treà Charles V, dit i5o; Bemaldiaz (ch. isS) dit 870; Solis 
(liv. IV, eh. 18) dit 200; Torquemada (liv. IV, ch. 4), 71; 
Gomara , Herrera et Betancourt (p. 3, ch. 11), s 90; Chimai- 
pain (ch. i33) , de 45o à ôoo ; et enfin Oriedo (Hy. 33), 1 170. 
Mais ce dernier nombre est tellement exagéré qu'il surpasse 



DES CHICHIMÈQUES. 251 

Les Mexicains appelaient ce canal Tolteca Aca- 
lopan, et le quartier qu'il traversait Ma- 
zatzintemalco. Dans cette affaire et dans les 
autres combats qui eurent lieu pendant la 
retraite , on tua , parmi les seigneurs qui ac- 
compagnaient Cortez comme alliés ou comme 

* 

otages, quatre nobles mexicains, dont deux 
étaient fils de Motecuhzoma ; ils se nommaient 
Zoacontzin, Izoacpopocatzin , Zecpactzin et 
Tencuenotzin ; des quatre filles de Netzahual- 
piltzintli qui lui avaient été données en otage 
il en périt trois ; mais ce fut un bonheur pour 
Tune d'elles, car elle avait reçu le baptême 
sous le nom de Dona Juana. Cortez l'avait 
beaucoup aimée, et lui avait fait donner ce 
sacrement, parce qu'elle était isur le point 
d'accoucher. Deux fils de Netzahualpiltzintli et 

celui des Espagnols que Cortez avait avec lui. Bemaldiaz 
fait obserrer que la perte tomba principalement sur ceux qui 
étaient venus avecNarvaez. Ne connaissant pas les difficultés 
que présentaient les canaux dont les rues de Mexico étaient 
coupées , ils s^étaient chargés de butin et furent presque tous 
noyés ; cet événement est désigné dans les historiens espa- 
gnols sous le nom de la triste nuit , la noche triste. 



1 



252 HISTOIRE DES GHICHIMÈQUES. 

Xiuhtotozin , seigneur de Teotihuacan; un 
des grands du royaume de Tezcuco et capi- 
taine général d'Ixtlilxochitl ^ qui l'avait en- 
voyé au secours de Cortez, succombèrent 
aussi dans cette occasion. 



CHAPITRE LXXXIX. 



Gortez se retire à Tlazcallan. — Événemento qui eurent lieu 

à cette époque. 



Quand Cortez fut parvenu à sortir de 
Mexico après avoir fait des pertes considéra- 
bles , il se retira par les hauteurs de Tlacopan 
du côté des montagnes de Totoltepec, par l'en- 
droit que l'on nomme Nuestra-Senora de los 
RemedioS; où la reine des anges vint à son 



254 HISTOIRE 

secours d'une manière miraculeuse , d'après la 
relation tlaxcaltèque que j'ai déjà citée ; Cortez 
s'y arrêta tout affligé et versant d'abondantes 
larmes sur le sort de tant de ses compagnons 
qui avaient péri , et dont il avait été obligé de 
laisser les cadavres entre les mains de ses 
ennemis. Il considérait en même temps 
le miracle manifeste que la Reine des anges 
et saint Pierre, ses patrons, ainsi que saint 
Jacques, protecteur des armées espagnoles, 
avaient fait en le sauvant avec une grande 
partie de ses soldats; il dit, par la bouche de 
Marina, aux chefs qui se trouvaient auprès 
de lui, et qui étaient Axotecatl Quetzalpopocat- 
zin, frère de Maxiscatzin , Ghalchiuhtecatl , 
Galmecahua et d'autres nobles tlaxcaltèques, 
ainsi qu'Atezcaltzin et Tecpacxochitzin et 
d'autres seigneurs , fils de Netsahualpiltzintli 
et de Motecuhzoma qu'on lui avait donnés len 
otage : « Necroyez pas que je pleure par manque 
de courage ; mais je donne ces larmes au triste 
sort de mes compagnons et à la reconnaissance 



DES CHIGHIMÈQUES. 255 

que Je dois à Dieu pour les miracles qu'il a 
opérés en ma faveur, à l'intercession de sa Mère 
et des saints apôtres. Je ne crains ni les Cul- 
huas, ni âme qui vive. Quand ils me tueraient 
avec tous mes compagnons, il viendra d'autres 
chrétiens pour les subjuguer ; malgré leur ré- 
sistance, la loi évangélique s'établira dans ce 
pays. Quant à vous qui êtes mes loyaux amis , 
je vous promets, si je remporte la victoire, et 
si je fois la conquête du pays, non seulement 
de vous conserver vos états et vos domaines ; 
mais je m'engage encore, au nom du roi d'Es- 
pagne , mon maître , à les augmenter et à vous 
donner une partie des terres que nous gagne- 
rons. » Tous ces nobles le consolèrent et l'en- 
couragèrent; il coucha cette nuit à Quaximal- 
pan, où il eut une escarmouche avec Tennemi. 
Il arriva le lendemin à Teocalhueyacan après 
avoir combattu les Mexicains tout le long du 
chemin ; il s'y reposa un jour avec son armée 
quoiqu'ils n'eussent que de l'herbe à manger ; 
le lendemain il se remit en route, et coucha à 



256 HISTOIRE 

Tepotzotlaii où il ne trouva que peu de résis- 
tance; il s'y reposa aussi un jour et coucha 
le Jour suivant à Ayqualco, puis à Aztaque- 
mecan^ où il fut obligé de livrer un combat 
qui fut long et sanglant. Un fameux capitaine 
mexicain y nommé Zinacatzin y natif de Teoti- 
huacan y tua le cheval de Martin de Gamboa y ' 
ce qui fournit aux Espagnols un souper pour 
cette nuit. Le lendemain , ils arrivèrent avec 
beaucoup de peine dans les plaines d'Otumpan 
où ils furent atteints par plus de 200,000 
hommes qui les poursuivaient et qui enve- 
loppèrent l'armée de Cortez de tous les côtés, 
de sorte que celui-ci ne pouvait ni avancer ni 
reculer. Cortez, croyant qu'il ne restait plus 
qu'à mourir avec honneur , invoqua Dieu et 
saint Pierre son patron, piqua des deux, et 
se précipita comme un lion furieux au milieu 
des ennemis , renversant tout ce qui se trou- 
vait devant lui ; il arriva ainsi jusqu'à l'en- 
droit où se trouvait Zihuatcaltzin , général 
de cette armée, qui portait l'étendard royal 



DBS GHICHIMÈQUES. 257 

de Mexico^ c'était un filet d'or qu'on nom* 
mait matlaxopili; il le renversa mort d'un 
coup de lance, et lui enleva l'ëtendard. Cet 
exploit effraya tellement les Mexicains , qu'ils 
se débandèrent et commencèrent à fuir d^ 
tous les côtés; les nôtres reprirent courage 
et en tuèrent un très-grand nombre. Cette 
victoire fut vraiment miraculeuse , car Cortez 
avait à la tête une blessure dangereuse. Les 
Espagnols et leurs alliés étaient épuisés par la 
faim y la fatigue et les blessures ; mais ^ grâce 
à la protection de la Vierge et de saint Pierre , 
qu'invoquait Cortez, et à celle de saint Jacques, 
qu'appelaient les Espagnols, saints qui, d'a- 
près ce que disent les naturels, vinrent en 
personne à leur secours, ils mirent en déroute 
200,000 ennemis qui se précipitaient sur eux 
comme des tigres furieux et ils s'emparèrent de 
l'étendard royal de Mexico qu'ils emportèrent 
comme un trophée de leur victoire. Cette ba- 
taille eut lieu dans un endroit appelé Metepec. 

Ils en livrèrent une autre à Tevocan,dans 1^-r 
13 17 



25.8 HISTOIliE P|g9 QHICHIMÎQUES. 

qudie ils tuèrent une infinité d'ennemis ^ et 
qyi fut W dernière de cette retri^ite* Les Es- 
pagnols, couchèrent cette nuit à Temelacayoean 
et le Içnderoain à X^^teloko près de HuyotH- 
pan au pjed de la montagne de QuauhtepetK 
CqHi^ remercia les TIaxealtèques et les autres 
alliés qui l'avaient si fidcle^ient servi dans 
cette retraite, etpraipit nonrwuleniept de leur 
conserver leurs dcxpaaiqes , mais enopre de les 
augmenter et de l^ur &ire toute sorte defa^ 
veurs; il fut reçu dans cet endroit p^rCihual- 
quauhtzin^ qui lui apportait quantité de vi^ 
VI ee^ au nom du sénat de TlMcaUaA^ et couchfa 
à Hueyptlipan , où on lui fit le meilleur ac- 
cueil. Maxizcatzin vint l'y recevoir, et Cor- 
tez, voulant lui prouver ^ reeonnai3san0e , 
lui fit présent de l'étendard royal de Meiçioo, 
ce qui le combla de joie; il se hâta de l'a- 
jouter à ses armes. 



CHAPITRE XC. 



Cortex est bien accaeilli à Tlazcallan. — Ce quil fait pendant 
son séjour dans cette ville. — Mort de GaitlfihaatziB. — 
Election de Quanhtemoc , de Goanacochtzin , et de Tetle- 
lianquetsaltsin. 



Gortez s' étant reposé quelque temps à Hue- 
yotlipan, Maxizcatzin , et beaucoup d'autres 
chefs à la tête de plus de cinquante mille 
bommesT de troupes alliées vinrent l'engager 
à se porter sur Tlaxcallan; les quatre princi- 
paux chefs , suivis de toute la noblesse , 



260 HISTOIRE 

le reçurent et raccompagnèrent à son entrée 
dansla villcy qui se fit avec de grandes réjouis- 
sances publiques. Ou soigna les blessuresde ses 
soldats malades et on les traita le mieux possi- 
ble, si Ton s'en rapporte à la relation de Tlax- 
callan que j'ai citée, et que je suis tant pour 
cette histoire, que pour tout ce que j'écrirai par 
la suite. Cette chronique a été composée d'après 
les rapports et les peintures que firent, peu de 
temps après la conquête, les chefs indiens 
qui eux-mêmes furent acteurs dans la plu- 
part des événements qui se sont passés à cette 
époque. Quant à ce qui a rapport aux Espa- 
gnols , je prendrai pour guides l'Histoire des 
Indes de Francisco de Gomara , la chronique 
d'Antonio de Herrera, la Monarchie indienne 
de frère Juan de Torquemada , et les lettres 
et rapports de l'invincible Don Fernando 
Cortez, marquis del Valle, adressés à sa ma- 
jesté, car il fut témoin oculaire des faits. Tous 
ces ouvrages sont fort détaillés , les lecteurs 
curieux pourront y recourir s'ils le désirent. 



DES GHICHIMÈQUES. 26 1 

Pour revenir à la traduction de ces relations 
et de ces peintures, celles de Tlaxcallan dit 
que €ortez s'établit dans le palais de Xicoten- 
catl, où l'on érigea la première croix. Ce chef, 
qui lui adressa plusieurs discours , lui dit , à 
l'occasion de l'heureux succès de la conquête 
de Mexico et de la vengeance qu'il avait tirée 
de cette ville : « Seigneur, soyez le bienvenu , 
» reposez-vous ; car vous êtes dans votre pa- 
» trie etdans votre palais. On m'a dit que lors* 
» que vous vous seriez reposé à Hueyotlipan, 
» vous aviez l'intention de retourner à Mexico 
» pour punir la rébellion des Culhuas , qui 
» avaient osé se soulever contre vous , contre 
» les Tlaxcaltèques et vos autres alliés. Cette 
» démarche suivant moi n'aurait pas été sage, 
» et puisque vous êtes arrivé dans cette ville, 
» je vous engage à vous y reposer avec vos 
» troupes; et mon avis est, qu'avant de rien 
» entreprendre , vous devez soumettre les ha- 
» bitants de Tepeyacac ; cette province est 
» grande , bien fortifiée, et c'est de là que les 



' 



262 HISTOIRE 

» Mexicains font venir toutes leurs troupes ; 
» ellea pourraient vous attaquer par le flanc ^ 
» et faire courir de grands dangers à vos al- 
» liés. 11 est donc nécessaire de les vaincre 
» d'abord ainsi que les auti'es alliés de M exioo, 
i) qui demeurent dans les environs ; afin que 
n VOUS puissiez plus sûrement achever votre 
» conquête à laquelle tout le monde s'inté^ 
j) resse. » Cortez approuva ces avis, et son- 
gea aussitôt à les mettre en exécution. Tandis 
que ces événements se passaient à Tlaxeallan, 
la petite vérole apportée par un nègre de l'ex- 
pédition de Narvaez, faisait les plus grands 
ravages à Mexico; des milliers d'Indiens mou- 
raient tous les jours; le roi Guitlahuazin suc- 
comba à l'épidémie, après un règnede quarante 
sept jours, Totoquihuazin, roi de Tlacopan, fut 
aussi emporté par le fléau. Les Mexicains élu- 
rent pour roi Quauhtemoc , brave guerrier qui 
n'avait que dix-rhuitans. Ses talents militaires 
étaient fort importants dans les circonstances 
où l'on se trouvait. 11 était revêtu de la dignité 



DES CttîCtIittÈQUES. 263 

de grând-^prêtré, et selgtleiit* déTIàlcIoIco. Les 
habitants dé TIacopan choisirent pour les goU- 
veMIér le prlriée hét^ëditàii^e Tëtlfepanquetzalt- 
iiti. La villfedë TezcuCîo avait nommé pour âuc- 
cessëUr au t^oi Ca^àma, Cbanâcoèhtzih ; oies 
trois chéfe étaient des homthès dé courage et 
d'origine mèjtlfcàine. Lëlir côurontiemént ftit 
accottipàgné de fêtes sôlëtihèlles et de grands 
sacHflces, datis lesquels ftlt^ètit immolés lespri- 
sottnièrs espagnols, tlàxcaltèques , hùexotzin- 
<?as, éhôlokèqûes et autres, appartenant biix 
nations alliées de Cortéz, et pris dans diffé- 
ventë ëômbèitfe où dans la fameuse retraite. Les 
trois roîè se concertèrent àur la conduite à 
teï^xt pour chasser tout à fait du terHtoire de 
l'etnpîré où pour extèrittittër éettë poignée 
d'Eâpagtidls avcë leur chef Cor tëz. Le rtieillëùt- 
ûiùjeh qu'ils trouvèrent ftit d'éfttJï^r dàift léUï* 
pûjS M éhëft de l'eftipîiSè ^Uî Wèèfvàiêht Cot*- 
tëÈ ivti^ leurs terrés. Ils lettt ôflRrîreM des pri- 
vilèges considéi'ablés et ilttèpiiîx perpétuçHe, 
afin qùë paï» la suite ils ne soutinssent pas >a 



264 HISTOIRE 

cause des étrangers qui pourraient venir pour 
les subjuguer^ Ils firent faire aussi des propo- 
sitions de paix aux autres rois et princes éloi- 
gnés avec qui les chefs de l'empire avaient été 
en guerre continuelle. Non-seulement ils sti- 
pulèrent des traités de paix, mais encore ils 
leur rendirent une portion de territoire et des 
lacs dont ils les avaient dépouillés , et leur de- 
mandèrent des secours afin de détruire entiè- 
rement les Espagnols. Des ambassadeurs fu-^ 
rent chargés de traiter cette affaire avec la plus 
grande chaleur et de faire des rapports exagé- 
rés sur les cruautés et la tyrannie exercée par 
ces étrangers, prétendant que les chrétiens 
s'emparaient de leurs richesses et de leurs 
possessions. Ils firent aussi fortifier Mexico le 
mieux qu'ils purent. Les Culhuas envoyè- 
rent à Tlaxcallan six seigneurs du plus haut 
rang ; ils s'acquittèrent de leur mission avec 
une grande éloquence, cherchant à persuader 
aux chefs du gouvernement de tuer Cortez ou 
dé le chasser de chez eux, lui et les siens, at^ 



DES GHIGHIMÉQUES. 265 

tendu que c'étaient des étrangers qui ne ve- 
naient qu'avec l'intention perfide de les dé- 
pouiller de leurs états. Ils leur tinrent d'autres 
discours semblables, leur rappelèrent qu'ils 
étaient tous parents, que par conséquent il 
fallait oublier leurs dissensions, puisqu'il était 
plus naturel de prendre le parti des siens que 
celui d'une poignée d'étrangers qui ne venaient 
que pour conquérir le pays. Ils engagèrent la 
parole de leur roi , et leur promirent que par 
la suite ils observeraient une paix inviolable, 
et qu'ils partageraient avec eux les revenus 
des provinces soumises à l'empire. Les am- 
bassadeurs s'emparèrent tellement de l'esprit 
des chefs du gouvernement, qu'ils finirent 
par les convaincre presque tous, et que ceux- 
ci dirent entre eux que les Gulhuas avaient rai- 
son , et que les propositions des rois mexi- 
cains étaient si avantageuses, qu'on ferait fort 
bien d'embrasser leur parti plutôt que celui des 
Espagnols, qui n'étaient que des étrangers dont 
on ignorait les desseins» Xicotencatl , un des 



266 NidtoïKE 

quatre ûhefy , se prononça plus fortement pour 
ce parti ; c'était le pluB àgë ; il leur rappc^la 
qu'à Tépoque de sa jeunesse , lorsqu'il com- 
mandait lés armées > la plus grande concorde 
régnait entre les rots de Mexic*o, dé TezûMô^ 
leurs parents et leurs voisins ; que lors 
de leurs premières guerres , qui eurent lieu 
pour soumettre le roi d' Azcaputialco , qui avait 
usurpé l'empire, ainsi que dans la conquête 
de quelques plx)vinces éloignées , pendant les- 
quelles il avait suivi le parti dé cîes princes, 
lui , et tous les chefs du gouvernement avaient 
pris part aux dépouilles et aux revenus dès 
provinces conquises; qu'ensuite une question 
de religion avait altéré leur amitié, et qu'il en 
était résulté les discordes qui étaient nées par 
la suite; que si on réglait les affkires, cofnme 
les ambassadeurs l'avaient proposé au nom 
de leur maître, il était certain qu'il serait fort 
avantageux à la république de faire ce qu'on 
lui demandait. 

Maxizcatzin s'opposa de toute sa force à la 



DES GHIGHIMBQUES. 267 

proposition de Xicotencatl; il soutint chaude- 
ment le parti de Gortez et des siens ^ en s'ap- 
puyant sur quantité de raisons. Cette dis- 
cussion avait lieu dans la salle de prière de 
Xicotencatl où Ton avait érigé une croix. Tous 
ceux qui étaient présents virent entrer une 
nuée qui couvrit la croix, et toute la salle resta 
dans l'obscurité. Maxizcatzin , voyant ce mi- 
racle, sentit augmenter à un tel point le cou- 
rage et l'ardeur avec lesquels il défendait le 
parti des chrétiens, qu'il interpella vivement 
Xicotencatl le jeune, qui soutenait avec chaleur 
le parti de son père. Ik en vinrent aux mains; 
Maxizcatzin lui donna un coup de poing si 
violent qu'il le renversa en bas de l'escalier 
qui est à l'entrée de la salle. Tous les membres 
de l'assemblée, témoins d'un ai grand miracle, 
furent ébranlés et adoptèrent l'opinion de 
Maxizcatzin * Il s congédièrent les ambassadeurs 
et leur dirent qu'ils voulaient secourir les 
chrétiens , quand ils devraient perdre la vie , 
eux, leurs femmes et leurs enfants. Aussitôt 



1 



268 HISTOIRE 

qu'ils les eurent renvoyés avec cette réponse, 
la nuée se dissipa , la clarté revint dans la 
salle et la croix apparut resplendissante, ce 
qui fut cause que par la suite ces chefs suivi- 
rent avec ardeur le parti de Cortez. Si les am- 
bassadeurs envoyés à Tlaxcallan eurent un si 
mauvais succès , ceux qui furent expédiés dans 
le royaume de Michoacan et d'autres provin- 
ces revinrent avec d'excellentes nouvelles près 
des rois mexicains. Tous les chefs qu'ils avaient 
visités leur promirent des secours contre Cor- 
tez, et offrirent même de le tuer ou de le chas- 
ser lui et tous les siens du pays , comme aussi 
de châtier tous ceux qui avaientpris leur parti. 
Le courage des princes mexicains se ranima , 
et tous se liguèrent. Les amis de Cortez, de 
leur côté, jurèrent de mourir ou de vaincre, 
et surtout de se faire tuer plutôt que de tom- 
ber entre les mains des ennemis , persuadés 
que les captifs seraient traités plus cruelle- 
ment que des esclaves. Ils prirent toutes les 
dispositions pour soutenir la cause de Cortez. 



I 



DES GHIGHIMÈQUES. 269 

Ce général soignait ses blessures dans la 
ville de Tlaxeallan^ lorsque tout à coup les 
soldats mutinés se présentèrent à lui , décidés 
à l'abandonner^ et lui signifièrent au nom du 
roi de les emmener de ce pays. Cette rébellion 
affligea profondément Cortez; mais il sut si 
bien s'emparer de leur esprit et les encou- 
rager, que tous changèrent d'avis et jurèrent 
de mourir avec lui partout où il voudrait les 
conduire. Vingt jours après, Cortez résolut de 
marcher contre les habitants de Tepeyacac, 
comme Xicotencatl le lui avait conseillé. Il 
rassembla donc plus de quatre mille hommes 
tlaxcaltèques , huetxotzincas et chololtéques , 
commandés par le chef des Tlaxcaltèques , 
nommé Tianguiztlatoatzin , le fils de Xico- 
tencatl et d'autres chefs des quatre capitales. 
Le premier jour ils allèrent jusqu'à Tzinpan- 
tzinco où ils passèrent la nuit : les troupes 
s'organisèrent, ce qui employa un jour. Le 
surlendemain Cortez atteignit les ennemis à 
Zacatepec, où il se donna une sanglante ba^ 



270 HISTOIRE 

taille, dans laquelle périrent un grand nombre 
de Mexicains et de Teepanèques; il arriva le 
quatrième jour au soir à Axatzinco où i) fit 
prisonniers tous ceux qu'il y trouva. Le 
sixième, il entra dans la ville de Tepeaea 
sans éprouver aucune résistance ; car elle 
avait été abandonnée par les habitants et 
les Mexicains qu'elle contenait, etit ep fit on 
certain nombre prisonniers. Cortez employa 
vingt jours à soumettre cette province, dé- 
truisit toutes les idoles qu'il y trouva, et fonda 
une ville à laquelle il donna le nom de Segura 
de la Frontera. Il revint ensuite par Chololan. 
Ayant fait reposer ses troupes, il marcha contre 
les habitants de Quauhquecholian , qu'il sou-^ 
mit en peu de temps. Il chassa les Mexicains 
de leurs positions , se reposa un jour dans cette 
ville, marcha sur \tzocan, dont il s'empara 
avec quelque difficulté; les habitants, qui se 
défendirent vaillamment , étaient très- nom- 
breux; beaucoup de Mexicains perdirent la 
vie à la défense de cette place. Il y séjourna 



DES GHIGHIMÈQUES. 271 

vingt jours qu'il employa à préparer la conti- 
nuation de la conquête; il se rendit dans la rë^ 
sidenced'Hahuecatzin, chef de cette province, 
et il en partit pour revenir à Tepeyacac. Les 
Tlaxcaltèques retournèrent chez eux après y 
avoir passé quelques jours. De retour à Tlax- 
callan, Gortez apprit la mort d'un grand nom- 
bre de chefs et de nobles de cette république, 
qui avaient succombé à la petite vérole, ma- 
ladie qui déjà s'était étendue dans tout le pays. 
Il fut surtout affligé de la perte deMaxizcatzin, 
qui lui était fort attaché , et en porta le deuil. 
Avant de partir de la province de Tepeyacac, 
il envoya conquérir celles de Zacatlan et de 
Xalatzinco qui tenaient pour les Mexicains , et 
dont les habitants avaient massacré plusieurs 
Espagnols. Cette conquête était fort impor- 
tante, car ces provinces se trouvaient sur la 
route delà Vera-Cruz ; il envoya pour cette ex- 
pédition vingt cavaliers, deux cents fantassins, 
un grand nombre de Tlaxcaltèques, et d'autres 
alliés. 



CHAPITRE XCI. 



Cortez marche de nouveau contre Mexico. — Son arrivée 

à Tezcuco. 



Les ouvriers étaient alors très-occupés à la 
construction des brigantins que Cortez vou- 
lait employer au siège de Mexico. Quand il vit 
que l'ouvrage était assez avancé , il envoya 
chercher à Vera-Cruz la ferrure, les clous, 

les voiles , les agrès et tout ce qui était néces- 
13. 18 



274 HISTOIRE 

saire pour les terminer. Le lendemain du jour 
de Noél de 1 520, il passa en revue sa troupe, 
qui se montait à quarante cavaliers et cinq 
cent cinquante fantassins. Il créa quatre com- 
pagnies de soixante hommes chacune, et pour 
ne pas laisser au zèle de ses soldats et de ses 
alliés le temps de se refroidir, il répandit le 
bruit qu'il allait commencer sur-le-champ le 
siège de Mexico, et qu'il ne le lèverait qu'après 
l'avoir détruite, ce qui combla de joie les 
Tlaxcaltèques et tous les alliés, parce qu'ils dé- 
siraient beaucoup se venger de cette ville qui 
les tyrannisait depuis si longtemps. Il fit un 
long discours à ses soldats , leur rappela tout 
ce qu'il leur avait déjà dit, et leur représenta 
qu'ayant déjà commencé à répandre la foi de 
J.-C. parmi ces nations, ils ne devaient pas 
faiblir avant d'avoir entièrement extirpé Ti- 
dolàtrie et toutes les infamies , horribles aux 
yeux de Dieu, que l'on commettait dans ce 
pays si riche, ce qui leur mériterait non-seu- 
lement le ciel dans l'autre vie> mais beau- 



DES CHICHIHÈQUES. 275 

coupde gloire et de richesses daiis^ceHé^eî^ avec 
les moyens de vrvrc à leur aise dan» leur vieil- 
lesse. Tons montrèrent la meilleure volonté et 
déclarèrent qu'ils étaient prêts à risquer leur 
vie et tout ce qu'ils possédaient. Ils jurèrent 
d'observer ses ordonnances, qui toutes étaient 
utiles au service de Dieu , conformes à la reli- 
gion qu'ils professaient, et dignes d'un géné- 
ral chrétien. Cortez fit ensuite un discours au 
sénat de Tlaxcallan qui déclara que les TlaxcaK 
tèques ainsi que tous les alliés étaient prêts à 
sacrifier leur vie et leur foi^tune dans la guerre 
de Mexico* Avant de quitter Tepêyacac, Cor- 
tez, voulant Savoir s'il pouvait compter sur 
le roi de Tezcuco, qui était alors Coana* 
cochtzin , lui envoya iln noble de cette ville , 
son parent, et qui se nommait Huitzcaca- 
matzin^ Il avait accompagné Cortez dans sa 
retraite jusqu'à Tlaxcallan , celui-ci le chargea 
de déclarer à Coafîacocbtzin qu'il était détermi- 
né à continuer la guerre jusqu'à ce qu'il etit 
entîèreiiient subjugué les Mexicains , et qu'il 



276 HISTOIRE 

lui faisait savoir cette détermination y afin qu'il 
le reçût sans résistance dans ses états ^ puis- 
que dés le commencement il s'était mis ^ ainsi 
que son royaume, sous la suzeraineté du roi 
Charles. Il ajouta encore beaucoup de raisons 
propres à le convaincre, parce que, deTezcuco, 
il pouvait facilement assiéger Mexico en assu- 
rant ses derrières* Huitzcacamatzin délivra 
son message au roi de Tezcuco; mais celui-ci, 
qui était du parti des Mexicains, ne voulut pas 
l'écouter et le fit mettre en pièces. Cortez, 
voyant qu'il ne revenait pas, se décida à en- 
voyer un autre ambassadeur ; et pour que l'on 
eût toute confiance en ses paroles , il choisit 
Tecpacxochitzin , que l'on nommait aussi Gui- 
cuitzcatzin, un des quatre princes, fils de Net- 
zahualpiltzintli , qu'on lui avait donnés en 
otage à Mexico ; mais quand ce prince fut arrivé 
à Tezcuco et qu'il eut délivré son message à 
son frère, celui-ci le traita comme on avait 
traité Huitzcacamatzin. Depuis la révolte des 
Mexicains et la retraite de Cortez, Lxtlilxochitl 



DES CHIGHIMÈQUES. 277 

avait été obligé de quitter la ville et de se re- 
tirer dans une maison des champs qu'il pos- 
sédait dans la province de Tepepulco , une de 
celles qui lui étaient soumises. Quand il eut 
appris que son frère Coanacochtzin avait fait 
massacrer les messagers de Cortez et qu'il lui 
défendait l'entrée de ses états , il revint àTez- 
cuco pour agir en faveur des Espagnols. Il y 
arriva le jour des Innocents de l'an 1 520 , au 
moment où Cortez, ayant terminé tous ses 
préparatifs, sortait deTlaxcallan, à la tête de 
vingt mille guerriers, d'après la relation tlax- 
caltèque déjà citée; Cortez passa par Tezmo- 
locan et Tlepehuacan sans rencontrer au- 
cune résistance au pied des montagnes, et 
arriva heureusement au bord du lac. Ixtlilxo- 
chitl vint au-devant de lui jusqu'à Tlepehua- 
can, renouvela son alliance avec lui, et lui 
donna une enseigne en or comme gage d'a- 
mitié. Il le conduisit ensuite dans son canot 
jusqu'à Tezcuco, lui exprimant tout son regret 
de la révolte de son oncle et de ses parents de 



1 



278 HISTOIRE 

Mexico, ainsi que de ceux qui avaient embrasse 
leur parti, et le pria de pardonner au roi son 
frère et à ses vassaux les torts qu'ils avaient 
eus envers lui , ajoutant qu'il venait pour les 
excuser et prier Coûtez d'agréer leurs services. 
Ils couchèrent cette nuit à Coatepec, sur le 
territoire de Tezcuco , et y entrèrent le len- 
demain lundi , dernier jour de décembre, car 
Ixtlilxocfaitl eut soin de fournir aux Espagnols 
des logements et tous les vivres dont ils avaient 
besoin. Mais le roi, qui craignait la colère de 
G^rtez, parce qu'on avait tué par son ordre 
quarante^inq Espagnols et trois cents Tlax- 
caltèques, en leur enlevant tout le butin qu'ils 
emportaient, voulant éviter le châtiment dont 
il était menacé et étant d'ailleurs tout dévoué 
aux Mexioïins , s'embarqua avec les nobles 
et les seigneurs de çon parti. Ils emmenèrent 
avec eux leurs femmes et leurs richesses et se 
réfugièrent à Mexico. La nouvelle de ce dé- 
part jeta le trouble parmi les habitants; les 
uns s'embarquèrent pour suivre leur roi , les 



DES CHIGHIMÈQUES. 279 

autres se réfugièrent dans les montagnes^ et 
Ixtlilxochitl^ malgré ses efforts^ ne put les re- 
tenir et se trouva presque seul. Quand Cortez 
€t les siens se furent aperçus de cette désertion, 
ils craignirent qu'elle ne cachât quelque trahi- 
son et voulurent saccager la ville pour punir 
les fauteurs de trouble. Ixtlilxocfaitl les en em- 
pêcha en les suppliant d'avoir pitié du pauvre 
peuple qui était innocent; mais il ne put em- 
pêcher les Tlaxcaltéques ^ alliés de Cortez , de 
piller les maisons de quelques seigneurs et de 
mettre le feu au plus beau des deux palais du 
roi Netzahtlalpiltzintli. De sorte que toutes les 
archives de la Nouvelle- Espagne furent consu- 
mées, ce qui fut une grande perte pour le pays ; 
car les anciennes annales, ainsi que beaucoup 
d'autres documents curieux, périrent dans 
cette occasion • Le palais était un des plus beaux 
édifices qu'il y eût dans ce pays. Quand la ville 
fut parfaitement tranquille, Cortez renvoya 
che» eux les guerrier^ de Tlaxcallan , de 
Huexotzineoetles autres alliés. L'armée mexi- 



280 HISTOIRE 

caîne les atteignit auprès de Tlepehuacan et les 
aurait fort maltraités si les Espagnols n'étaient 
venus à leur secours. Ils les accompagnèrent 
jusqu'au versant de Tetzmolocan , d'où ils re- 
gagnèrent tranquillement leurs demeures. 
Cortez, qui aimait beaucoup Tecocoltzin, le 
seul des quatre fils de Netzahualpiltzintli qui 
eût survécu, le nomma seigneur de Tezcuco. 
Ixtlilxochitl s'en réjouit beaucoup et le fit re- 
connaître par tous les habitants, leur repré- 
sentant que son frère Goanacochtzin avait 
abandonné la ville , et que quant à lui il tenait 
trop à son honneur et à sa réputation pour 
s'exposer au reproche d^avoir usurpé la cou- 
ronne pendant la vie de son frère; mais on le 
considéra toujours comme le chef du gouver- 
nement. 

On voit, dans les manuscrits et lés relations 
de la province de Ghalco, qu'Omacatzin, Itzca- 
huetzin, Necuametzin, Quetzalcoatzin, Citlalt- 
zin , Yaozeuhcatzin et les autres principaux 
chefs de cette province se réunirent pour dé- 



DES GHICHIMÈQUES. 281 

cider de la conduite qu'ils devaient tenir; s'ils 
feraient alliance avec Cortez ou s'ils réuni- 
raient leurs forces à celles des Mexicains. 
Ils envoyèrent les deux derniers à Tezcuco 
pour demander l'avis d'Ixtlilxochitl , celui-ci 
leur répondit : « Dites aux chefs de Chalco 
qu'ils se gardent bien de prendre les armes 
contre Cortez et ses compagnons; s'ils le font, 
ils n'en recueilleront que de la honte; qu'ils 
aident les chrétiens et reçoivent tranquille- 
ment la sainte foi catholique. » Quand les 
chefs de Chalco eurent reçu la réponse d'Ixtlil- 
xochitl, ils envoyèrent des ambassadeurs à 
Cortez pour faire alliance avec lui; il reçut 
aussi la soumission de quelques villes qui, 
jusque-là, avaient suivi le parti de Coanaco- 
chtzin, comme Otompan, Huexotla, Coatli- 
chan , Chimalhuacan et Atenco , de sorte que 
tout le royaume de Tezcuco se soumit à Ixtlil- 
xochitl et embrassa le parti de Cortez. On 
chassa partout les troupes mexicaines à l'aide 
des secours qu'envoyèrent les Espagnols 



2S2 UtôTOlRE 

quand cela fut nécessaire. Gonzalo de San- 
4Qya1 entre autres fut envoyé dans la pro- 
vinjce de Chalco pour aider les habitants à 
le^pulser les Mei:^icains. Cortez se fortifia dans 
Tezcuco et s'occupa à réunir tout ce qui était 
oéce$3aire pour former le siège de Mexico ; il 
fit apporter tous les bois qu'il avait fait pré- 
parer à Tlaxcallan. On en coupa d'autres en 
quantité dans la forêt de Tollantzingo qui avait 
été plantée sous le règne de Netzahualcoyotzin ; 
et après en avoir construit des brigantins, 
on s'occupa de les gréer et de les armer. 
Quand ils furent terminés^ Ixtlilxochitl ^ par 
ordre de Cortez, fit creuser, pour les amener 
dai|S le lac, un canal qui avait près d'une 
demi-lieue de long et la profondeur nécesr 
saire ; il commençait dans l'intérieur des jar- 
dins du roi Netzahualcoyotzin , son grand- 
père, et s'étendait jusqu'au lac. Il commanda 
pour ce travail huit mille hommes propres à 
la guerre, qui y travaillèrent pendant cin- 
quante jours , car c'était un essai pour voir 



DES GHICHIMÈQUES. 283 

combiien une seule province pouvait fournir 
de guerriers; il tira ceux-ci de la province 
d'Aculhuacan , et l'on trouva dans le recense- 
ment qu'on en fit, qu'elle pouvait envoyer 
deux cent mille hommes au secours des chré- 
tiens. Cortez se réjouit beaucoup de voir la 
puissance du roi de Tezcuco, dpnt une seule 
province pouvait lui fournir tant de guerriers; 
Ixtlilxochitl fit aussi réunir assez de vivres 
pour nourrir l'armée de Cortez et de ses alliés , 
et fit apporter à Tezcuco tout le maïs et toutes 
les fèves qu'il y avait dans les greniers des dif- 
férentes provinces de l'empire. Il fit très-bien 
fortifier l'enceinte de cette ville et les princi- 
paux édifices , particulièrement les palais de 
son ayeul Netzahualcoyotzin cpii étaient oc- 
cupés par Cortez et les Espagnols, afin de 
pouvoir résister aux Mexicains si par malheur 
ils étaient vainqueurs ; de l'autre côté, Quauh- 
temoc ainsi que Coanacochtzin et Tetlepan- 
quetzaltzin ses alliés fortifièrent Mexico de 
leur mieux, y réunirent des vivres et des 



284 HISTOIRE 

soldats afin de pouvoir résister aux assail- 
lants et leur faire tout le mal possible. 
Ils envoyèrent de tous cotés des ambassa- 

c/ 

deurs pour encourager les chefs qui avaient 
embrassé leur parti , parmi lesquels se trou- 
vait, comme je l'ai dit plus haut, le roi de 
Michoacan qui était très-puissant et chef 
d'une ilation belliqueuse. Si Dieu n'avait pas 
ouvertement protégé Cortez , la puissance de 
ce dernier souverain aurait empêché la réus- 
site de ses desseins; mais Dieu opéra un mi- 
racle en sa faveur. Quand les ambassadeurs 
du roi de Mexico allèrent trouver pour la 
première fois Tangapan, roi de Michoacan , 
ils lui rendirent compte de la manière dont 
Cortez avait traité les habitants de Chololan et 
du massacre de la noblesse mexicaine par 
ordre d'Alvarado, et lui dirent qu'ils étaient 
de cruels tyrans, qui ne songeaient qu'à s'em- 
parer du bien d'autrui. La sœur du roi assi- 
stait à ce récit, et en fut tellement effrayée, 
qu'elle se persuada que la prophétie de ses 



DES CHIGHIMÈQUES. 285 

ancêtres allait être accomplie^ et que cette 
nouvelle nation deviendrait maîtresse du pays ; 
pour ne pas le voir, elle se laissa mourir de 
faim. On plaça, selon l'usage que Ton suivait 
dans ce pays à l'égard des rois et des grands 
seigneurs , son corps dans un des souterrains 
du grand temple où, après l'avoir veillé pen- 
dant quelques jours, on devait le brûler pour 
en conserver les cendres. Gomme elle était 
sœur du roi , on comptait observer cette céré- 
monie à son égard; mais elle ressuscita le qua- 
trième jour et ordonna, à ceux qui veillaient 
auprès d'elle , d'aller appeler le roi son frère , 
parce qu'elle avait des choses importantes à lui 
communiquer relativement au bien de son 
royaume et de ses vassaux. Les gardiens, 
tout étonnés , allèrent prévenir le roi qui ar- 
riva en toute hâte ; elle lui dit d'écouter sans 
crainte ce qu'elle venait lui annoncer de la 
part du vrai Dieu , seigneur du ciel et de la 
terre ; que Dieu lui ordonnait de déposer les 
armes et de licencier l'armée qu'il avait réu- 



1 



CHAPITRE XCII 



Combat d'iztacpalapan. ~ Cortez Ta reconnaître Mexico. — 

Guerre d*AcapuchtIan. 



11 y avait sept jours que les Mexicains 
n'avaient fait d'excursions sur le territoire 
de Tezcuco , et que les nôtres n'en étaient pas 
sortis , parce que des deux côtés on s'occupait 
à se fortifier et à réunir les munitions néces- 
saires. Au bout de ce temps, Cortez se mit 
13. 19 



290 HISTOIRE 

«n campagne à la tête de deux cents Espagnols, 
de quatre mille Tezcucains commandés par Ix- 
tlilxochitl, de quelques Tlaxcaltèques et autres 
alliés. Ils côtoyèrent le lac et se dirigèrent du 
côté d'Iztacpalapan ; mais les Mexicains les 
ayant aperçus du haut du rocher de Tepepolco, 
ils en donnèrentavis à leurs compatriotes qui , 
deux lieues ayant Iztacpalapan, attaquèrent les 
nôtres par terre et par eau. Les Espagnols 
firent cette route toujours en combattant; 
mais quand ils arrivèrent dans cette ville, ils 
trouvèrent que les habitants avaient aban- 
donné toutes les maisons construites sur la 
terre ferme, et s'étaient réfugiés dans celles qui 
sont dans le lac. Les Espagnol s entrèrent dans 
l'eau et s'en emparèrent malgré une vigou- 
reuse résistance ; ils ravagèrent presque toutes 
les fnaisons du lac, et jtuèrent plus de six 
mille jindieqs.Quai^d la nuit fut venue, Ciortez 
rappela son monde, et fît mettre le feu à 
quelque^ maisons; il se souvint alors qu'en 
venant, il avait été forcé de passer sur uae 



DES CHIGHIMÈQUES. 291 

chaussée étroite qui séparait les deux lacs , et 
que les ennemis pourraient bien y avoir placé 
ûae embuscade; il marcha donc en toute 
hâte ; mais quand il arriva à la chaussée , il 
fallut la passer à gué ; plusieurs Indiens alliés 
furent noyés , et on perdit tout le butin , car 
les ennemis avaient rompu les digues, et la 
chaussée était inondée. Au lever du soleil y ils 
aperçurent une quantité innombrable de ea-^ 
nots remplis de guerriers qui venaient pour 
leur couper le passage; ils continuèrent leur 
route jusqu'à Tezcuco en combattant de temps 
en temps ceux qui se tix)uvaient sur le lac. 
On ne perdit qu'un seul Espagnol dans cette 
expédition. 
Les Tlaxcaltèques arrivèrent enfin avec les 

bois et les ferrures des brigantins qui étaient 
portés par huit mille hommes. Ils envoyaient 
en outre vingt mille guerriers. L'alguazil- 
mayor Gon^alô de Sandoval , qui les accom- 
pagnait , était à la tète de deux cents fantas- 
sins espagnols et de seize cavaliers. Pendant 



292 HISTOIRE 

qu'on travaillait à la construction des bri- 
gantins, G>rtez voulut aller reconnaître les 
environs de Mexico; mais comme il n'avait 
pas une confiance entière dans la loyauté des 
Tezcucains y il ne leur fit pas part de son pro- 
jet, afin qu'ils n'en prévinssent pas les enne- 
mis. Ce soupçon n'avait rien d'étrange, car 
presque toutes les familles des deux villes 
étaient unies par des liens de parenté ; mais 
plus tard il se détrompa et reconnut la grande 
loyauté d'Ixtlilxochitl et de ses vassaux. Cortez 
se mit donc en route avec vingt- cinq cava- 
liers y trois cent cinquante fantassins , six 
pièces de campagne et trente-deux mille alliés 
tlaxcaltèques et tezcucains. Leurs princi- 
paux chefs étaient Ghichemccatltecuhtli pour 
les premiers , et Ixtlilxochitl pour les autres. 
Us passèrent la nuit dans une plaine entre 
Ghiuhnauhtla et Xaltocan , où ils eurent une 
escarmouche avec un gros d'ennemis qu'ils 
mirent bientôt en déroute. Le lendemain ils 
attaquèrent Xaltocan, ville forte, construite 



DES CHIGHIMÈQUES. 293 

dans le lac, qui, c|uoiqu'elle fit partie du 
territoire de Tezcuco , s'était déclarée en fa- 
veur de Coanacochtzin et des Mexicains. Mal- 
gré la vigoureuse résistance des habitants, elle 
fut prise et brûlée en grande partie : les Espa- 
gnols allèrent coucher une lieue plus loin, et se 
remirent en marche le lendemain de très- 
bonne heure. Les ennemis les attaquèrent en 
poussant de grands cris , mais ils s'avancèrent 
toujours en combattant jusqu'à Quauhtitian, 
qu'ils trouvèrent entièrement abandonné , et 
où ils passèrent la nuit. Ils allèrent ensuite 
à Tenayocan , qui ne leur fit aucune résis- 
tance, puisàAtzcaputzalco, et arrivèrent enfin 
à Tlacopan , point que Cortez désirait surtout 
examiner y parce que c'était de là qu'il voulait 
attaquer Mexico. Après un combat acharné, 
il chassa les ennemis de la ville , et comme il 
était déjà tard , il alla se loger dans le palais 
des rois de Tlacopan, dont les bâtiments 
étaient assez vastes pour contenir toute son 
armée. Le lendemain, les alliés brûlèrent et 



1 



294 HISTOIRE 

pillèrent la ville. Il y passa six jours en escar- 
mouches ccmtinuelles avec les ennemis , et 
aririva tout près de Mexico^ Cortez aurait 
beaucoup désiré avoir une entrevue avec 
Quauhtemoc; mais. comme il ne put l'obtenir^ 
il ne s'occupa plus que de mettre le siège de- 
vant sa capitale. Il se décida à retourner à 
Tezcuco pour faire terminer les brigantîns 
et l'attaquer à la fois par terre et pdr eau. Il 
coucha le premier jour à Qtiauhtitlan , et lé 
second à Aoolman. Il fut inquiété sans cesse 
dans sa retraite par les ennemis^ qui pensaient 
qu'il se retirait par crainte : on en tua une 
quantité; les cavaliers surtout leur firent 
beaucoup de mal. Il entra le troisième jour 
à midi dans Tezcuco y où on hii fit une bril- 
lante réception. Les Tlaxcaltèques s'en re* 
tournèrent dans leur pays chargés de dé- 
pouilles. Les Mexicains tourmentaient beau-» 
wup \ts habitants de la province de Chaleo, 
parce qu'ils étaient alliés des Espagnols. Sur 
leur demande y Gortez leur envoya Gonzalo de 



DES GHlGlillIÈQUES. 295 

Sandoval avec vingt cavalier^ et trois clents 
fiiutassins. U trouva en arrivant toute la na*^ 
tion sous les armes ^ et qui l'attendait avee 
isffpatience , ailisi que ceux de Hûexotzinco 
et de Quaufac(tieehoHan , qui étaient venus à 
leur secours ; ils marchèrent aussitôt contre 
Huastepec, où il y avait ntië garnison mexi- 
caine , qui faisftit sans cesse des incursions 
dans la province de Ghalco , et leur enlevèrent 
de vive force cette ville et d'autres qu'ils 
oocfupaienty eiïtre autres Âcapùchtlan ^ qui 
leur donna beafucoup de mal , parce que c'é- 
tait un endi^it très-bien fortifié. Ils y tuèrent 
un si grand nombre de Mexicains^, que pen- 
dant deux heuï^s on ne put pas^ boir^ l'eau 
du ruisseau qui tMverse cette ville, parce 
qu'elle était teitite de sâi^. Après avoir ainsi 
dfaàtié les ennemis et pacifié lé pays, Sandoval 
revint àTescmcô avec 6é» soldatsc Le^ Mexi-^ 
cains , voulant se vengef' des Ghalcàins , en- 
voyèreiit contre exile vttié nouvelle armée; 
mais ceox-ei marchèrent à sa rencontre et 



296 HI8T0IRE 

combattirent avec tant d'ardeur qu'ils les mi- 
rent en déroute , et les chassèrent du pays 
après leur avoir tué beaucoup de monde et* 
fait un grand nombre de prisonniers , parmi 
lesquels se trouvaient quarante des princi- 
paux chefs. Ils avaient fait demander du se- 
cours à Ciortez } mais quand Sandoval arriva 
dans leur pays, il trouva que les Chalcains 
avaient su se défendre eux - mêmes. Il resta 
quelque temps sur leurs frontières , et voyant 
que les Mexicains ne les attaquaient plus, il re- 
tourna à Tezcuco. Cïortez reçut à cette époque 
des nouvelles de la Vera-Cruz. On lui annon- 
çait qu'il venait d'y arriver trois vaisseaux, 
chargés de soldats, d'armes et de chevaux. 
Ce secours fut vraiment miraculeux, car 
Cortez en avait le plus pressant besoin : il 
arriva facilement à Tezcuco, le mercredi saint 
17 mars 1 521 , car toute la route jusque-là était 
libre d'ennemis. Cortez envoya aux rois 
Quauhtemoc , Coanacochtzin et Tetlepan- 
quetzaltzin , qui se trouvaient à Mexico , deux 



DES GHIGHIMÈQUES. 297 

des seigneurs que les Chalcains avaient faits 
prisonniers, pour les inviter à la paix, leur 
promettant d'oublier le passé. Les messagers 
lui demandèrent une lettre de créance pour 
que les rois crussent en leur parole. Gortez 
la leur accorda. Mais ils ne revinrent jamais 
rapporter la réponse; ils furent immolés aux 
idoles : car c'était une loi chez cette nation 
que tout noble qui revenait dans son pays 
après avoir été fait prisonnier devait être 
sacrifié. Ixtlilxochitl faisait tous ses efforts 
pour rallier aux Espagnols non-seulement 
les Tezcucains , mais encore les habitants des 
provinces éloignées , les assurant que quand 
même il aurait des reproches à leur faire pour 
les guerres passées , Cortez était si bon qu'il 
les recevrait néanmoins pour ses amis. 11 
concilia ainsi Tozapan, Mexicaltzinco, Nauht- 
lan et d'autres provinces voisines : elles of- 
frirent à Ixtlilxochitl les étoffes et les autres 
objets qui appartenaient aux trois chefs de 
l'empire; mais il leur dit de les donner à 



1 



298 HISTOIIB DBS GHIGHIMÈQUES. 

Ciortes et de se déclarer ses amis ^ en se recoti-' 
naissant vassaux de S. M. et en liiî ps^àM 
un tribut en étdffes de coton. Cortéz reçut 
très-bien leurs envoyés , et leur prcmiit d'être 
toujours leur amî; de sorte qu'ils s'en re- 
tournèrent très-contents« 



CHAPITRE XCIII. 



CoTttz va recoDDaitre dficore une fois Mexico et les bords du 
lac. — Combat de Tlayacapan. — Guerre de Xocbimilco. 



Le aamedi saint , Cortez fut averti par le's 
Chalcains que les Mexicains avaient réuni 
une armée considérable composée des habi- 
tants des bords du lac et de ceux de Tlaluhua- 
ean , et qu'ils marchaient contre eux pour 
en tirer vengeance et dévaster leur province. 



300 HISTOIRE 

Cortez réunit donc son armée , et le vendredi 
1 5 avril , il marcha contre eux avec trente ca- 
valiers et^ trois cents fantassins, laissant à Tez- 
cuco vingt cavaliers et trois cents fantassins 
sous le commandement de l'alguazil-mayor 
Gonzalo de Sandoval. Ixtlilxochitl l'accompa- 
gna à la tête de vingt-quatre mille Aculhuas. 
L'intention de Cortez était d'abord de délivrer 
la province de Ghalco en en chassant les Mexi- 
cains, puisqu'elle était son alliée et s'était dé- 
clarée en sa faveur. Il voulait ensuite rava- 
ger le territoire desTlalhuicains et des peuples 
des rives du lac que l'on nomme Ghinampane- 
cas, et reconnaître encore une fois Mexico 
avant de mettre le siège devant cette ville, dont 
la prise devait amener la soumission de tout 
Tiempire, puisque tous ses chefs s'y étaient 
retirés , et que de là ils envoyaient des ordres 
pour réunir des forces contre les Espagnols et 
leurs alliés; car depuis que Cortez avait soumis 
Tepeyacac et les provinces voisines, et en avait 
chassé les Mexicains, tout le pays situé de 



DES CHICHIMÈQUES. 301 

Tautre côté des montagnes était parfaitement 
tranquille et favorisait sa cause. En quittant 
Tezcuco, Cortezse dirigea d'abord vers la ville 
de Tlalmanalco^ capitale de la province de 
Ghalco , où il fut très-bien reçu par les caci- 
ques qui la gouvernaient. Après avoir examiné 
avec eux ce qu'il y avait à faire et avoir aug- 
menté son armée de quatre mille hommes^ tant 
decette nation quedeTlaxcalla, Huexotzingo, 
Quauhquechollan^ et autres provinces alliées, 
Cortez prit la route de la province de Totola- 
pan, qui touche à celle de Chalco du côté du 
midi. C'était là que se trouvaient les princi- 
pales forces des ennemis , particulièrement 
dans la ville de Tlayacapan, qui est construite 
sur des rochers dont la hauteur la rend inex- 
pugnable. Après avoir traversé des montagnes 
très-difficiles , on v arriva vers le soir. L'on 
découvrit au haut d'un rocher très-escarpé , 
dont les guerriers défendaient l'approche, les 
femmes , les enfants et tous ceux qui étaient 
hors d'état de porter les armes. Dès que les 



1 



302 HISTOIRE 

ennemis aperçurent les nôtres ^ ils commeti- 
cèrent à leur lancer , avec des frondes , une 
grêle de pierres y de flèches et de javelots. 
Cortez, décidé à risquer l'assaut^ ordonna à 
Christoval Gorral , capitaine de soixante fan- 
tassins y de commencer l'attaque par l'endroit 
le plus difficile y et ordonna à quelques arque^ 
busiers de le suivre. Francisco Verdugo et 
Juan Rodriguez de Vtllafuerte devaient, à la 
tète de leur troupe, donner l'assaut d'un au- 
tre coté ; Pedro de Yrcio et Ândres Monjaraz , 
d'un troisième. II envoya de même des arque- 
busiers pour les protéger; il leur ordonna 
d'attaquer simultanément aussitôt qu'ils en- 
tendraient , un coup de mousquet qui était le 
signal convenu. Mais quoiqu'ils fussent suivis 
d'Ixtlilxochitl et des siens, ainsi que des guer^ 
rierjB de Chalco, ils ne purent gravir que ck 
deux côtés ; car le rocher était si escarpé que 
l'on pouvait à peine y monter en s'aidant des 
pieds et des mains. Ceux qui étaient en haut 
les accablèrent d'une grêle de dards qui tuè- 



DES GHICHIMÈQUES. 303 

rent deux Espagnols et en blessèrent piiM de 
vingt. Les alliés perdirent beaucoup plus de 
monde. De nombreuses bandes d'ennemis qui 
coupaient la campagne vinri^t charger les 
nôtres en queue, de sorte qu'ils furent obli- 
gés de redescendre pour les combattre dans la 
plaine^ Après une sanglante escarmouche, ils 
les mirenten fuite, en tuèrent un gi^nd nom- 
bre , et les poursuivirent à un autre rocher 
située environ une lieue et demie du premier. 
On pasi$a la nuit au pied, quoique l'on souffrit 
beaucoup du manque d'eau; et le lendemain 
Cortez commença à le gravir avec les siens , 
par deuK sentiers qui conduisaient au som-<- 
met. Quoiqu'il y eut un grand nombre de 
guerriers popr défendre Je passi^gé , ils fumnt 
frappée de terreur en voyant arriviM* les Esi- 
pagnols, et prirent la fuite, malgré les secours 
que leur envoyaient ceux qui étaient en haut. 
On en tua un grand nombre; il y en eut aussi 
beaucoup qui, en fuyant trop vite, tombèrent 
dans les précipices. Enfin , voyant qu'ils ne 



304 HISTOIRE 

pouvaient résister, ils se rendirent et déposè- 
rent les armés. Cortez alors ordonna qu'on ne 
leur fit aucun mal et leur pardonna. Ceux qui 
occupaient l'autre rocher , touchés par sa clé- 
mence, se rendirent aussi. Cortez resta deux 
jours dans cet endroit avec son armée, et en- 
voya les blessés à Tezcuco; il partit ensuite 
pour Huastepec, où il fut très-bien reçu. On le 
logea avec son armée dans une maison de 
campagne que possédaient les rois de Mexico; 
il partit le surlendemain pour Quauhtepec, où 
l'attendaient un grand nombre de guerriers 
ennemis ; mais ils prirent la fuite en l'aper- 
cevant. Les habitants lès imitèrent. Les Espa- 
gnols ne firent que traverser cette ville et les 
attaquèrent dansXilotepec , où ils s'étaient for- 
tifiés. Beaucoup furent tués ou pris, ainsi 
qu'une quantité de femmes et d'enfants ; le 
reste abandonna la ville. Ils y demeurèrent 
deux jours. Au bout de ce temps, les habitants, 
voyant qu'ils allaient y mettre le feu , vinrent 
se rendre à eux, ainsi que ceux de Quauhtepec. 



DES GHIGHIMÈQUES. 305 

Les Espagnols continuèrent leur route, et se 
dirigèrent vers Cohuacan, capitale de la pro- 
vince de Tlilhuaca, qui est une demi-lieue 
plus loin. Cette ville était très-bien fortifiée, 
et défendue par une forte garnison. Ils trou- 
vèrent les ponts rompus, de sorte qu'on ne 
pouvait y arriver de ce côté ; mais ayant fait 
un détour d'une lieue et demie, ils trouvèrent 
un passage assez difficile par lequel ils purent 
pénétrer dans la ville; dès que les ennemis 
les curent aperçus , ils prirent la fuite et l'a- 
bandonnèrent. Cohuacan fut pillée et brûlée 
en grande partie; son seigneur, qui se nom- 
mait Yoatzin , se réfugia dans les montagnes; 
Ixtlilxochitl lui fit reprocher sa rébellion et 
l'engager à venir se rendre et demander par- 
don de ce qu'il avait fait. Il vint donc le len- 
demain offrir ses services aux chrétiens, et pro- 
mit de les aider dans toutes les occasions, 
comme il le fit en effet. De là, les Espagnols 
se dirigèrent sur Xochimilco, la ville la mieux 

fortifiée et la plus populeuse du lac d'eau 
13. 20 



306 HISTOIRE 

douce. Les ennemis avaient coupé les ponts 
à toutes les entrées de la ville, et y avaient 
élevé des palissades ; mais les nôtres les atta- 
quèrent si vigoureusement par terre et par 
eau, qu'en moins d'une demi-heure ils fu- 
rent maîtres de la plus grande partie de la 
ville. Le combat dura cependant jusqu'à la 
nuit, et se renouvela le lendemain; deux Es- 
pagnols y furent tués et Ck>rtez y courut le 
plus grand danger parce que son cheval s'a- 
battit. Aussitôt que les ennemis le virent par 
terre, ils le chargèrent de tous les côtés, mais 
il se défendit valeureusement avec sa lance 
jusqu'à ce que Chichiraecatltecuhtli , général 
des TIaxcaltéques, arriva à son secours et le 
tira d'embarras, aidé par un des serviteurs du 
général. Les ennemis prirent la fuite et les 
nôtres se retirèrent dans l'intérieur de la ville, 
où ils passèrent la nuit à combler avec des 
pierres et des poutres les canaux dont on avait 
rompu les ponts, afin de pouvoir les traverser 
avec les chevaux. Ce travail futterminéavant le 



DES GHICHIMÈQUES. 307 

lever du soleil. Les nôtres cependant faisaient 
bonne garde et bien leur en prit , car une ar- 
mée mexicaine arriva ce jour-là par terre et 
par eau au secours des Xochirailcos ; ils atta- 
quèrent les Espagnols qui se trouvaient dans 
la ville; mais ceux-ci , par ordre de Cortez, se 
retirèrent dans une forteresse située dans un 
endroit nommé Tepuhpan. Les autres, après 
avoir poursuivi les ennemis, vinrent les y 
rejoindre, et le combat s'étant renouvelé, 
ils tuèrent plus de cinq cents Mexicains. 
Le lendemain, ils défirent une autre troupe 
des ennemis. C'était le second secours qui leur 
arrivait de Mexico^ Ils retournèrent ensuite à 
Xochiniilco et trouvèrent ceux qu'ils y avaient 
laissés dans le plus grand embarras, car les en-^ 
nemis les serraient de près. Les nôtres avaient 
à peine eu le temps de se reposer , quand ils 
furent attaqués par une nouvelle armée mexi- 
caine plus nombreuse que les deux premières. 
Ce ne fut qu'après le combat le plus acharné 
qu'ils pai^vinrent a les repousser jusqu'au lac 



308 HISTOIRE 

et à les forcer à se rembarquer dans leurs ca- 
nots. Us revinrentensuiteàXochimilco, qu'ils 
pillèrent et brûlèrent pendant trois jours j ils 
se remirent ensuite en marche pour Cuyoa- 
can; mais ils furent attaqués en queue par les 
Xochimiicas et les alliés, qui poussaient des 
cris épouvantables. Cortez les chargea à la 
tète de sa cavalerie, et les repoussa jusque dans 
le lac. Les Espagnols arrivèrent à Cuyoacan 
vers le milieu de la journée, et trouvèrent cette 
ville entièrement abandonnée. Cortez se logea 
dans le palais du cacique, et alla le lendemain 
reconnaître la ville de Mexico à l'endroit où se 
réunissent les deux chaussées dont l'une vient 
de Xochimilco , et l'autre d'Iztacpalapan. Les 
ennemis y avaient construit une forte palis- 
sade et y avaient placé une bonne garnison, 
qui était soutenue* par de nombreux canots 
chargés de soldats. Ils se défendirent brave- 
ment, mais les Espagnols finirent par s'en 
emparer. Cortez , voyant que c'était un des en- 
droits les plus convenables pour attaquer 



DES GHIGHIMÈQUES. 309 

Mexico , y laissa une forte garnison et se re- 
mit en marche après avoir brûlé seulement 
quelques temples et quelques palais. Il se di- 
rigea vers TIacopan, qui est située deux lieues 
plus loin; il ne s'y arrêta pas, et continua sa 
marche vers Quauhtitlan j on y passa la nuit, 
combattant toujours les Mexicains qui étaient 
' sur le lac. Ils tuèrent, dans ces divers com- 
bats , plusieurs ennemis d'un rang élevé ; mais 
ils perdirent deux Espagnols, serviteurs de 
Gortez, qui furent sacrifiés aux idoles, ainsi 
que quelques alliés. Les Espagnols couchèrent 
le lendemain à Xilotzinco qui était abandon- 
née ainsi que Quauhtitlan , et le jour suivant 
à Âcolman, sur le territoire deTezcuco, où on 
leur fit la meilleure réception. Ils arrivèrent le 
soir même à Tezcuco. Sandoval et ceux qui y 
étaient restés se réjouirent beaucoup de voir 
que Cortez et ses compagnons avaient si bien 
réussi dans leur entreprise. Ils avaient aussi 
été attaqués par les Mexicains , qui avaient cru 
s'emparer facilement de Tezcuco dans Fab- 



310 HISTOIRE DES GHICHIMÈQUES. 

sence de Cortez et d'Ixtlilxochitl. Cortez reçut 
aussi des nouvelles de Francisco de Barientos 
et de ses compagnons qui se trouvaient dans 
la province de Chuihnauhtlan qui touche, au 
midi y à celle de Tototepec; ils lui annonçaient 
que le seigneur de cette province se déclarait 
son allié, et qu'ils avaient eu plusieurs ren- 
contres avec les Mexicains. C'étaient ces deux 
Espagnols qui commandaient ses troupes; ils 
avaient voulu rejoindre Cortez , mais on ne les 
avait pas laissés partir. Celui-ci se réjouit beau- 
coup de cette bonne nouvelle , et leur ordonna 
de rester où ils étaient jusqu'à ce qu'il eût pris 
Mexico. 



CHAPITRE XCIV. 



C}oi*lez fait ses préparatifs pour attaquer Mexico par terre 

et par eau. 



Quand on eut fini de construire et d'armer 
les brigantins et de creuser le canal qui devait 
les conduire au lac , ainsi que de préparer les 
machines nécessaires pour le siège de Mexico, 
on lança les brigantins à Teau le 28 avrirl 
1534; c'étaient Ixtlilxochitl et son frère Teco- 



1 



31 2 HISTOIRE 

coitzin qui avaient fourni tout ce qui était 
nécessaire. Cortez passa ensuite en revue son 
armée qui se composait de 86 cavaliers, plus 
118 hommes armés d'arquebuses et de mous- 
quets, et 700 portant des épées et des boucliers; 
il avait 3 gros canons en fer , 15 plus petits 
en bronze, et 10 quintaux de poudre; il fit un 
discours à ses soldats pour leur recommander 
d'observer soigneusement les ordonnances mi- 
litaires et pour les encourager, en leur repré- 
sentant que Dieu les avait secourus dans toutes 
les occasions; que leur nombre qui, pendant 
quelque temps, avait été réduit à rien, s'était 
considérablement augmenté ^ et qu'ils avaient 
reçu des renforts d'armes et de chevaux; 
qu'ainsi leur victoire était assurée, et qu'ils 
serviraient non- seulement Dieu, en répandant 
la sainte foi catholique, mais aussi le roi, en 
ajoutant à la couronne de Castille un empire 
aussi étendu , qui contenait des provinces si 
nombreuses et si riches; qu'il fallait donc se 
décider à vaincre ou à mourir. Tous répon- 



DES GHIGHIMÈQUES. 313 

dirent qu'ils étaient prêts à faire le sacrifice 
de leur vie et montrèrent le plus grand désir 
de terminer cette entreprise d'où dépendait 
la conquête du pays. Dès le lendemain^ Cortez 
adressades messages aux provinces deTlaxcal- 
lan , deHuexotzinco et de Chololan, pour prier 
les chefs d'envoyer dans dix jours les troupes 
auxiliaires qu'ils lui avaient promises, ceux 
de Tlaxcallan à Tezcuco, et les deux autres à 
Chalco. Ixtlilxochitl et son frère Tecocoltzin 
donnèrent des ordres dans les royaumes de 
Tezcuco et d'Acolhuacan et dans toutes les 
provinces qui en dépendent. On envoya des 
gens de guerre et de service pour aider Cortez 
au siège de Mexico, et l'on apporta toutes 
les munitions de guerre et de bouche dont 
l'armée avait besoin ; celles qu'ils avaient réu- 
nies à Tezcuco n'étaient pas suffisantes, car 
on en consommait tous les jours une grande 
quantité tant dans la ville que dans les sorties 
que l'on faisait contre les Mexicains. Les Tlax- 
caltèques arrivèrent à Tezcuco au jour fixé. 



314 HISTOIRE 

c'est-à-dire cinq jours avant la Pentecôte. Les 
gens de Huexotzinco et de Cbololan ne furent 
pas moins exacts à arriver à Chalco ; on leur 
fit à tous la meilleure réception. Les guerriers 
de Tlaxcalla étaient au nombre de cinq mille, ils 
étaient commandés par Quauhxayacatzin, Miz-* 
tlymatzin, Tenanamazcuicuitzin , Tequanit- 
zin, Zeyecatecuchtli^Tepilzacatzin^ Chiahuate- 
colotzin, Cuitlizcatly Gocomitzin,Tzicahcuacatl, 
Michcuahtecuhtii , TIachpanquizquatzin , Ti- 
zatemoczin, Chicuazenmazatl ^ Ixconauhqui- 
tecuhtli et Tlahuihuiztli. Chacun de ces chefs 
avait, selon son rang et son office, une devise 
différente en plumes, en or et en pierreries. 
Ixtlilxochitl et son frère les recurent très-bien, 
les logèrent dans leurs palais , et leur four- 
nirent tout ce dont ils avaient besoin : pen- 
dant le peu de jours qu'ils restèrent à Tezcuco, 
ils leur firent toute sorte de fêtes. Les guer- 
riers de Huexotzinco, qui étaient au nombre 
de plus de dix mille, étaient commandés par 
Nelpilonitzin, Tozquencoyotzin, Xicotencatl, 



DES CHICHIMRQUES. 315 

Mecacalnacatl , Quauhxayacatzin ^ Huitziliuit- 
zin, Jecatlapizqui, Tetepotzquanitzin, Quauh- 
tonatiuhtzin ^ Tehuatecuhtii et d'autres, qui 
étaient distingués par leurs devises comme, 
ceux de Tlaxcallan; il en était de même des 
Cholotèques, qui envoyèrent aussi dix mille 
hommes. Ces deux armées furent très-bien 
accueillies dans la province de Ghalco. Le 
second jour de la Pentecôte , Cortez fit ranger 
son armée en bataille sur la place de Tezcuco, 
afin de désigner ceux qui devaient composer 
les garnisons des trois villes qui sont autour 
de Mexico et suivi^e les capitaines qu'il avait 
désignés pour les commander. Le commande^ 
ment de la première, qui devait occuper Tla- 
copan, fut donné à Pedro de Alvarado; elle 
se composait de 30 cavaliers, 1 8 arquebusiers, 
1 50 fantassins armés de boucliers et 25,000 
Tlaxcaltèques. Les officiers qui devaient com- 
mander sous lui , étaient George d'Alvarado , 
son frère, le capitaine Pedro de Yrcio, Gu- 
tierrez de Badajoz qui portait l'étendard. 



316 HISTOIRE 

Juan Volante y Ândres de Monjarraz^ bisca- 
yen , Âlonzo Ortiz de Zuniga , qui comman- 
dait les arquebusiers^ et Diego Velazquez. 
Christoval de Olid , natif de Baeça , fut mis à la 
tête de la seconde , qui se composait de 33 ca- 
valiers, 18 arquebusiers, 160 fantassins et 
2,000 Tlaxcaltèques ; il devait s'établir à 
Cuyoacan. Cortez avait réservé pour lui la di- 
rection des opérations navales; mais comme 
on en murmurait, disant qu'il avait choisi 
pour lui le poste le moins dangereux, il le 
donna à Rodriguez de Villa Fuerte, et prit 
l'armée de Christoval de Olid, qu'il fit son 
mestre de camp. Les officiers de ce corps 
étaient Christoval de Tapia, le trésorier Juan 
de Alderete, le facteur Bernardo Vazquez de 
Tapia, l'inspecteur {vecdor) Rodrigo Alva- 
rez Chico, Antonio Vazquez qui commandait 
la garde du général et fut remplacé depuis 
par Francisco de Terrazas qui était major- 
dome de Cortez. Gonzalo deSandoval, Algua- 
zil mavor de l'armée, reçut le commandement 



DES CHIGHIHÈQUES. 317 

du troisième corps; il lui donna 24 cavaliers, 
{en blanc dans le M S.) arquebusiers, 1 3 arbalé- 
triers et 150 fantassins choisis qui étaient 
venus avec Cortez et 40,000 hommes de Tez- 
cuco, Huexotzinco, Gholula et Chalco ; il devait 
attaquer Iztacpalapan et détruire cette ville ; 
s'avancer ensuite par la chaussée du lac, appuyé 
par lesbrigantins, forcer les palissades, et s'é- 
tablir à Tepeaquilla où est aujourd'hui l'ermi- 
tage de Notre-Dame de Guadeloupe. Sandoval 
avait sous lui Fernando de Lerma, galicien, le 
capitaine Rodrigo Rangel , Luis Marin etVasco 
PorcuHo; outre ces capitaines qui furent 
nommés pour ces trois corps d'armée, il y 
en eut d'autres qui eurent des commande- 
ments , tels que Ruy Gonzalez et Antonio de 
Arriaga. Pour monter les treize brigantins 
qui devaient attaquer par le lac, Cortez choi- 
sit 300 hommes, la plupart marins de pro- 
fession; il y avait, à bord de chaque bri- 
gantin, un capitaine, un inspecteur {vee- 
dor), 25 soldats et 6 arquebusiers; leurs 



31 8 HISTOIRE 

capitaines étaient : Juan Rodriguez de Villa 
Fuerte de Medellin , que commandait l'amiral 
Juan XaramillOy natif de Salvatierra^ Fran- 
cisco Verdugo, natif d'Arevalo, Francisco 
Rodriguez Magarino , natif de Merida , Chri- 
stoval Flores de Valence, Pedro Barba de 
Séville, Antonio de Caravajal , natif de Za- 
mora, Garcia Holguin^natif de Gaceres, Ge- 
ronimo Ruiz de la Mota, natif de Burgos^ 
Pedro de Brihosses, natif de Salamanque^ 
Rodrigo de la Vera , de Médina del Campo , 
Juan de Portillo et Juan de Manulla. 

Quand les ordres furent donnés, Pedro de 
Alvarado et Christoval de Olid , qui devaient 
aller à Tlacopan et à Cuyoacan , partirent de 
Tezcuco , le 1 mai 1 521 , et allèrent coucher 
à Acolman, où ils se prirent de querelle sur 
la distribution des logements; mais Gortez se 
hâta d'envoyer apaiser ce diflFérend. Ils pas- 
sèrent la nuit suivante à Quauhtitlan, sur le 
territoire mexicain, et le jour suivant à Tlaco- 
pan où ils se fortifièrent dans le palais du roi. 



I 



DES CHiCHIMÈQUES. 319 

qui avait abandonné cette ville et se trouvait 
à Mexico avectous les siens depuis l'expulsion 
des Espagnols. Aussitôt que les Tlaxcaltcques 
furent arrivés , ils attaquèrent les ennemis 
qui défendaient l'entrée de la chaussée qui 
conduit à Mexico ; le combat dura jusqu'à la 
nuit sans qu'ils éprouvassent de dommage : 
ils rentrèrent alors dans leurs quartiers et 
recommencèrent l'attaque cinq jours de suite. 
Les Espagnols interceptèrent les canaux qui 
conduisaient l'eau douce dans la ville, depuis 
le lac de Chapultepec. Les ennemis les défen- 
dirent vaillamment par terre et par eau, parce 
que l'existence de la ville en dépendait. On 
gagna quelques ponts et quelques barricades 
et on répara les mauvais pas afin que les cava- 
liers pussent charger. Quelques Espagnols et 
quelques alliés furent blessés. On tua un grand 
nombre de Mexicains. Le sixième jour, on était 
déjà à l'entrée de la ville. Sandoval partit alors 
avec son armée pour se rendre àlztacpalapan, 
selon l'ordre que Cortez lui avait donné; il 



320 HISTOIRE 

fut accompagné parles Tlaxcaltèques d'Ocote- 
lulco et deQuyahuiztlan ; car ceux de Tizapaii 
et de Tipeticpac étaient à Tlacopan avec Alva- 
rado. A cette époque , et avant le départ de la 
flotte , Cortez fit pendre Axayacatzin , un des 
quatre chefs de Tlaxcallan , pour quelques ex- 
cès qu'il avait commis. Ceux qui s'étaient di- 
rigés sur Guy oacan se fortifièrentdans le palais 
du seigneur de cette ville, qui était à Mexico 
avec tous ses vassaux « car la ville était entiè- 
rement déserte. Les nôtres allèrent ensuite 
attaquer la chaussée qui mène de cette ville à 
Mexico ; mais ils trouvèrent une très-grande 
résistance ; car les ennemis l'avaient rompue 
en plusieurs endroits et avaient élevé des pa- 
lissades et d'autres fortifications. Les Espa- 
gnols des deux camps.se réunissaient tous les 
jours pour courir la campagne; ils tuaient un 
grand nombre d'ennemis et enlevaient les 
convois de maïs et d'autres provisions qu'on 
voulait conduire à la ville. Quand Cortez fut 
averti que les Espagnols avaient établi leur 



DES GHICHIMÈQUES* 321 

camp dans l'endroit où il les avait envoyés, il 
mit à la voile avec les brigantins , le vendredi 
après la Fête-Dieu , quoiqu'il eût été requis 
par les officiers de son armée de prendre le 
commandement des troupes de terre qu'on 
croyait plus dangereux; mais l'événement 
prouva que c'était le contraire , .et sa présence 
y fut bien utile* Avant de s'embarquer^ Cortez 
fit partir Gonzalo de Sandoval ppur Iztacpala-* 
pan, où il lui avait assigné son poste. Les auxi- 
liaires Âculhuas allèrent jusqu'à Âztahuacan h 
la rencontre des alliés de Gha1co> de Huexot- 
zinco et de Ghololan , et formèrent avec eux 
un corps de 30,000 hommes. Les habitants de 
Chaleo étaient commandés par Quetzaleoa- 
tzin, Totomihuehcatzin , Chopalazcatzin , Ix- 
peoacatl, Tecuhxolotl, Quetzayacoltzin , Ta- 
zauhquaquillitlalatepanecatl , Nequametzin , 
Ecatecolotl , Quetzamacatzin , Xochpoyoca- 
caxloquetzqui , Xocotecatl et autres, qui tous 
étaient reconnaissables par leurs armes et 

leurs devises. Ils avaient avec eux les troupes 
13. 2\ 



322 HISTOIRE 

des caciques Acitzin et Macatzin j qui ne 
pouvaient les commander eux-^mémes parce 
qu'ils étaient en bas-ège. On les avait chargés 
de rester dans le pays pour envoyer des 
provisions et des renforts pendant tout le 
temps que durerait la guerre. Ils arrivè- 
rent à Iztacpalapan un peu après midi , at- 
taquèrent cette ville et la brûlèrent. Mais 
enfin les ennemis voyant que Sandoval 
avait avec lui plus de 40^000 alliés^ il$ se 
réfugièrent dans leurs canots. Il s'empara 
donc facilement de la ville et s'y établit en 
attendant les ordres de Cortez. I xtlilxochid , 
Tecocolotzin et un autre de ses frères étaient 
restés à Tezcuco pour réunir le plus de soldats 
possible et les envoyer rejoindre Cortez. Ils 
lui expédiaient aussi, tant par terre que 
par eau, toutes les provisions nécessair^ss; ils 
employaient à ce service plus de vingt mille 
porteurs et de mille canots; 32,000 hommes 
de guerre les escortaient afin qu'ils ne fus- 
sent pas enlevés par l'ennemi. Ce ne fut pas 



DES CHICHIMÈQUES. 323 

là le moindre service qu'il rendit à S. M. en 
faisant subsister une armée aussi considérable^ 
et cela à ses frais et à ceux de ses frères et de 
ses parents. 



n 



CHAPITRE XCV. 



Victoire des Espagnols sur terre et sur le lac. 



Pendant que Sandoval attaquait Iztacpala- 
pan, Cortez arrivait avec les brigantins en 
vue de la ville de Tepepolco , que les ennemis 
avaient fortifiée , et où ils avaient placé une 
forte garnison d'habitants de Mexico et des 
villes voisines, dans l'intention de prendre les 



326 HISTOIRE 

nôtres en queue et de secourir la ville d'Iztac- 
palapan qu'ils seraient obligés d'assiéger. 
Quand ils aperçurent que la flotte se dirigeait 
du côté de ce rocher, ils commencèrent à faire 
des signaux avec de la fumée pour avertir les 
villes et les villages du lac. Cortez débarqua 
avec cent cinquante hommes , et après avoir 
gravi le rocher avec beaucoup de difficulté, il 
s'empara des remparts que l 'on avait élevéspour 
sa défense, et massacra toute la garnison, à 
l'exception des femmes et des enfants , que Ton 
épargna par pitié. Ce fut une victoire signa- 
lée; mais il y eut plus de vingt Espagnols de 
blessés. Quand ceux d'Iztacpalapan eurent vu 
la fumée du rocher, ils envoyèrent à son se- 
cours plus de cinq cents canots bien armés à 
leur manière» Cortez ordonna à ses brigantins 
de rester trahquillement au pied du rocher 
pour voir ce que fci^aient les ennemis. Ceux- 
ci > croyant que l'immobilité des nôtres était 
causée par la crainte , se dirigèrent droit vers 
eux ; ils s'arrétèrert t à une certaine distance > 



l 



DES GHIGHIHÈQUES. 327 

€l, àce moment y Dieu voulut qu'il s'ctevât un 
vent de terre très-favorable aux brigantins ; 
Cortez en profita pour attaquer l'ennani ; il 
rompit en un instant la ligne de leurs canota , 
en brisa un grand nombre et tua ceux qui 
tes montaient ; car ils se renversaient en 
heurtant les uns contre les autres , et leurs 
équipages se noyaient. Le peu qui échappè- 
rent se réfugièrent dans les canaux de Mexico, 
Cette victoire rendit Cortez maître du lac. 

Cortez recevait toujours des renforts; il se 
décida donc à attaquer Mexico en forçant les 
barricades que l'on avait élevées sur les chaus- 
sées qui y conduisaient ; il y réussit en passant 
à l'aide des brigantins les passages où l'on 
avait détruit les ponts. Un grand nombre de 
Mexicains furent tués ; les autres cherchèrent 
à ise sauver à la nage, en se précipitant dans 
l'eau du côté opposé à celui où se trouvaient les 
brigantins. Les Espagnols s'avancèrent ainsi 
pendant plus d'une lieue, et s*emparcrent des 
tours qui défendaient l'entrée de la ville à Aca- 



328 HISTOIEE 

chizanco et Tozilitlan. Cortez, api^s y avoir 
débarqué avec trente hommes, renvoya les 
brigantins, parce qu'il était déjà tard, s'em* 
para des tours, et força les remparts, qui 
étaient en maçonnerie, sans que les ennemis, 
malgré leur nombre , pussent s'y opposer. Il 
fit ensuite débarquer trois gros canons de fer 
qui étaient à bord des brigantins, et en fit 
monter un sur la chaussée, qui fit beaucoup 
de mal aux ennemis. Malheureusement la 
poudre prit feu par la négligence du canon- 
nier. Cortez envoya pendant la nuit un bri- 
gantin en chercher d'autre à Iztacpalapan. 
Quoique sa première intention eût été de se 
rendre à Aculhuacan, il prit le parti d'aller à 
la ville que nous venons de nommer, parce que 
cela lui parut convenable. Il envoya chercher 
la moitié de l'armée qui se trouvait à Cuyoa- 
can , et cinquante hommes de celle de Gonzalo 
de Sandoval, qui arrivèrent le lendemain. 
La position de Cortez fut très-périlleuse pen- 
dant toute la nuit , et il eut bien de la peine 



DES GHIGHIMËQUES. 329 

à se défendre contre les Mexicains , qui l'atta- 
quèrent vers minuit : mais ils furent effrayés 
par quelques décharges d'artillerie et de mous- 
queterie et n'osèrent passer plus avant. Quand 
les renforts furent arrivés , les nôtres renou- 
velèrent le combat^ et forcèrent le passage 
d'un canal dont on avait détruit le pont y et 
une palissade; de sorte qu'ils arrivèrent aux 
premières maisons de la ville. Cortez , voyant 
que les ennemis placés de l'autre coté de la 
chaussée lui faisaient beaucoup de mal ^ parce 
que les brigantins ne pouvaient y arriver , 
y fit pratiquer une tranchée par laquelle il 
fit passer des brigantins qui les prirent entre 
deux feux, détruisirent plusieurs canots et 
brûlèrent quantité de maisons du faubourg. 
Le lendemain y Sandoval quitta Iztacpalapan , 
avec sa troupe, et se dirigea sur Cuyoacan. 
Il combattit pendant la route un parti de 
Mexicains, le battit et brûla plusieurs mai- 
sons. A l'aide de deux brigantins, que Cortez 
lui envoya^ il traversa l'endroit de la chaussée 



330 HISTOIRE 

que les ennemis avaient coupée , y laissa tout 
son monde ^ et prenant avec lui dix cavaliers 
il alla rejoindre Cortezj mais avant d'y arriver, 
il fut obligé de combattre ceux que Ciortez 
avait mis en fuite. Dans cette occasion, Sando- 
val eut le pied percé d'un coup de javelot ; mais 
l'artillerie et la mousqueterie de Cortez firent 
un tel carnage, que dorénavant les ennemis 
n'osèrent plus s'approcher desiprèSé Le com- 
bat se renouvela pendant six jours. Les brigan- 
tins incendiaient les maisons qui se trouvaient 
aux alentours de la ville: ils découvrirent 
enfin un canal par où ils pouvaient parvenir 
dans lès faubourgs, et même dans l'intérieur 
de la ville; ce qui fut très-important; car 
les canots n'osaient plus approcher, et se 
tenaient à un quart de lieue de distance du 
camp de Cortez. Pedro de Alvarado avertit 
Cortez que les ennemis entraient et sortaient 
de la ville par l'autre chaussée, du côté 
de Coyobasco, que les villes mexicaines et 
tecpanèques leur envoyaient par là des se- 



DES GHIGHIMÈQUES. 331 

cours d'hommes et de vivres > et cfue s'ils 
étaient trop pressés ils pourraient opérer leur 
retraite par ce coté* Cortea ordonna à San- 
doval d'aller, malgré sa blessure occuper la 
petite ville de Tepeyacac, dans l'endroit où 
est aujourd'hui Notrc-Dame-de-Guadeloupe; 
il se mit en marche avec vingt cavaliers , dix- 
huit arquebusiers et cent fantassins, et laissa 
les cinquante autres à Cortez. Il emmena aussi 
16,000 alliés de Tezcuco, de Chalco et de 
Huexotzinco. 

Gortez se décida à pénétrer dans l'intérieur 
de la ville, en faisant soutenir l'attaque par 
les brigantins. Il envoya ordre à une partie 
de la garnison de Guyoacan de se rendre au- 
près de lui; le reste garda l'entrée des chaus- 
sées, pour empêcher ceux des villes alliées de 
Mexico d'attaquer les nôtres en queue. Ces 
villes étaient Xochmilco, Cuyoacan, Iztacpa- 
lapaUi Huitzilopoehco, Gulhuacan, Zitahuac 
et Mizquic. Il laissa aussi à Guyoacan , pour 
garder ce poste , 1 6>000 hommes de Huexot- 



APPENDICE. 



APPENDICE 



A LA SECONDE PARTIE. 



Les noms d'hommes et de lieux avaient , chez les 
anciens Mexicains comme chez presque toutes les 
nations , une signification. Il est d'autant plus né- 
cessaire de la connaître qu'il serait impossible au- 
trement de déchiffrer le peu de manuscrits astèques 
qui ont échappé aux désastres de la conquête. 

Pour représenter le nom d'une ville ou d'un indi- 
vidu 9 les Mexicains peignaient Tobjet d'où ce nom 
était tiré : ainsi le nom de la ville de Chapultepec , 
qui veut dire, montagne des sauterelles , était repré- 
senté par une montagne ( tepec ) sur laquelle était 

une sauterelle ( chapulin ), 

13. 22 



338 APPENDICE. 

Mais ce n'est pas toujours chose facile que d'ex- 
pliquer ces noms propres ; ils sont en général 
composés de deux ou trois mots contractés en un 
seul par la suppression de plusieurs lettres. Souvent 
le mot est entièrement dénaturé par Faddition d'une 
ou de plusieurs lettres au commencement, ce qui rend 
impossible Fusage des dictionnaires , d'ailleurs très- 
incomplets. Les missionnaires espagnols , qui nous 
ont laissé des traités sur cette langue , ne disent point 
d'après quelles règles ces contractions avaient lieu. 
J'ai cru cependant remarquer que quand deux mots 
sont réunis ensemble , c'est celui qu'on place le pre- 
mier , et qui perd ses lettres finales , qui est le régime 
de l'autre : ainsi dans ahuatepec ( montagne des 
cbènes ) , le mot aAiiaf/ ( chêne ), qui est le régime de 
tepec ( montagne ) , perd les deux dernières lettres tl ; 
mais cette règle est loin d'être sans exception. 

Une autre difficulté non moins grande vient des 
terminaisons que l'on ajoutait aux mots pour en for- 
mer des noms de lieu. Les terminaisons chan^ tlan , 
apan^ pçlco , ozco , tzinco, doivent indiquer des 
nuances différentes ; mais je n'ai pu en trouver nulle 
part 1 explication. Il doit cependant y avoir une 
différence de signification entre Tepepolco et Te- 
petzinco , dérivés tous deux de Tepec , entre ChaU 
cbiuhapan et Chalchiuchtiilan. 



APPENDICE. 339 

L'on ajoute quelquefois à la fin des noms propres 
les syllabes tzin et ton, La première est honorifique, 
et la seconde au contraire désigne les gens d une 
condition inférieure. On trouve indifiéremmentdans 
les auteurs Netzahualcoyotl et Netzahualcoyotxin , 
Ghacha et Gbacbaton. 

Le mot tecuhtli , à la fin d'uu nom propre , en est 
indépendant , et désigne seulement que celui qui le 
portait était revêtu de la dignité de tecuhtli. On dit 
également tockin et tochintecuhtli. 

Quand le mot ostoc ( caverne ) entre dans ia com- 
position d'un nom de ville , il semble indiquer qu'elle 
fut fondée par les Chiehimèques , qui dans Torigine 
habitaient des cavernes. 

Je terminerai en faisant observer que divers noms 
d'hommes et de lieux sont tirés de diverses langues 
qui^ parlaient au Mexique , telles que l'otomi , la 
totonaque, la mistèqueou la tarasque, et qu'on cher- 
cherait vainement à les expliquer par le mexicain. 

Voici le peu de noms contenus dans cet ouvrage 
dont je crois avoir trouvé le sens : j'espère qu'on 
voudra bien lire ce travail avec IMndulgence que 
mérite un premier essai ; peut-être un jour quelque 
Mexicain , versé dans la langue astèque , nous don- 
nera-t-il un travail complet à cet égard; ce ne sera 



^40 APPENDICE. 

qu'alors qu'on pourra déchiffrer complètement les 
manuscrits qui nous restent. 

ÂGAMAPiCHTLi OU AcAMAPicHTziN , premier roi de Mexico , 
ccHnposé de accUl roseau, maitl main, et pachoa 
•serrer, qui serre des roseaux dans sa main. Uhiérogly- 
phe de ce roi est en effet une main qui tient une 
poignée de roseaux. 

AcATELOLco, uom de ville au milieu des roseaux ; i^acatl, 

roseau. 
AcATLAN, pays des roseaux ; A'acaU , roseau. 
AcATOMATL, vasc dc roseau ; d'accUl , roseau , et tomatl, 

yase. 
AcocoTziN ; i^acocotli, nom d'une plante. 
AcoLMAN ; d^oco./Jt^ épaule. 
AcoLMizTLi , épaule de lion ; A'acolli, épaule , eimztli, 

lion. 

Agoyogan , d'ocoyoc/tt , saignée faite à une rivière pour 
faire des irrigations. 

AcozAMiL, ce nom n'est pas mexicain. Il signifie dans la 
la langue duYucathan, File des Hirondelles, voyez 
Gogolludo , Historia de Yucathan. 

Ahuatepeg , montagne des chênes ; dc akuatly chêne ; et 
tepec , montagne. 

Ahuagoyogan, pays des chênes, de ahuatl. 

Ahubgatlan , abime profond rempli d'eau. 

Ahuitzotl ou Ahuitzotzin , nom du huitième roi de 
Mexico. Espèce de loutre qui est aussi l'hiéroglyphe 
de ce roi. 

Ahuilizapan , aujourd'hui Orizava. Ce nom , selon Clavi- 
gero ( t. II , p. 254 ) , veut dire dans l'eau du plaisir. 



APPENDICE. 34f 

Amantzin ; probablement d'y^ffumani ^ devin. 

Amaxtlan ; XAmaxac. Endroit ou une rivière se divise 
en plusieurs branches. 

Anahdag , pays entre les eaux ( les deux mers). 

Apantecuhtli ; iiapantli , aqueduc, et tecuJUli. 

Atlpapalotzin ; papillon d*eau ; d'atl, eau , eipapaloU, 
papillon. 

Atbnco ; i'atl y eau ; et tmtli , lèvre ou bord : sur le bord 
de l'eau. 

Atlihueza, eau qui se précipite selon Lorenzana , p. xi. 

Atlixco , au-dessus de Feau. 

Atonatiuh , soleil d'eau ; d'à// , eau , et Umatiuh , soleil. 

Atotonilco , lieu de l'eau chaude A'Aiotonilli. 

Atototzin ou Atotoztli , espèce de pélican ; d'citf , eau ^ 
eitototl y oiseau. 

Atoyac ou Atoyatl , fleuve, 

Atzgagoatl , composé de atzcall, fourmi , et coaU , 
serpent. 

Atzcap€tzalco , capitale des Tecpanèques ; d'atzcuptU- 
zalli , fourmilière. 

Atzcalxochitzin, composé de atzcail, fourmi, et xochiti, 
fleur. 

AxAPOCHGo, endroit où Ton trouve Yaxalli, sable qui 
servait à polir les pierres précieuses. 

AxAYACATL , huitième roi du Mexique; d^atl , eau^ et 
xayacatl, face. Son hiéroglyphe est une figure devant 
laquelle est le signe de Teau. 

Ayocan , pays des tortues ; d'ayotl, torlue. 

AzTLAN , lieu d'où les Mexicains tiraient leur origine. — 

lïAztatl^ héron. 



342 APPENDICE. 

AzTATLixTBGAN, pays des héroiis. 

Cacama, c'est le nom qu'on donne ans petits épis qui 
croissent à côté de Tépi principal. Il convenait donc 
très-bien à un bfttard, comme Tétait le prince qui 
portait ce nom. 

Ghalchiuhapan, pays des émeraudes ; de Chalchiuh, éme- 
raude. 

Chalcsiuhtlapietzin , émeraude brillante ; de Chalckiuh 
et tîanextiliztli, éclat. 

Chalchiuhtotomazin, qui chasse Foiseau couleur d'éme • 
raude ; de Chalchiuh, émeraude , et totomani , chas- 
seur d'oiseau. 

Chalco, dans l'émeraude. Probablement à cause des 
prairies qui enyfaronnaient cette ville. 

Chapultëpec , montagne des sautereDes ; de chŒpulin , 
sauterelle, et tepec, montagne. 

Caltanni , habitation d'en bas ; voyez Lorenzana, p. 111. 

Chiauiitlan ; de chiahuitl, espèce de vipère. 

Gqiahuitkcolotl ; de chieihuitl et de tecolotl, hibcNi. 

Chightziin ; de chichi , chien. 

Gbilcbiquiltzin , tacheté de vert ; de chiehieoa , tacheter, 
et quiltic , vert. 

GnicoiNQUAUH ou GHir.oNQDAUHTLi, ucuf aiglcs ; de chicuna, 
neuf , et qtiauhtli, aigle. 

Ghicomacatzin ; do chicomCy sept; acail^ roseau. 

Ghicomoztoc, endroit d'où les nations deTAnahuacse 
croyaient originaires; de Chicome , sept; oztoc , ca- 
verne. 

Ghiqdazbnmazatl , six cerfs ; de ehieuazen , six ; et 
mazatl , cerf. 



APPENDICE. 343 

Ghicdmayocan , pays des neuf tortues ; de ehkuna, neuf ; 
ayotly tortue. 

Ghicuhcoàtl , huit serpents ; de eMcuei^, huit ; et coati , 
serpent. 

Ghilapain , pays du chiU ou poivre. 

Ghimalhuacan ; de chimalli , bouclier. 

Ghimalpopogatzin , roi de Mexico ; de chimalli ; et de 
popoca, fumée. L'hiéroglyphe de ce roi est en effet un 
bouclier d'où il sort de la famée. 

Ghimalpiltzintli ; de chimalli et de piltzintli , enfant. 
GiTLALcoATL j dc citlalU , étoile ; coati , serpent. 
GiTLALPOPocATzm , comètc ; mot à mot , étoile fumante. 
GiTLALQDADHTziN ; dc citlalU ct de quauthMy aigle. 
GiTLALTEPEC ; dc citlalU et tepec , montagne. 
GiTLALTziN ; de citlalU , étoile. 

GoATZAGUALco. Ou prétend que ce nom vient de coati y 
serpent , et coatzalan , se cacher ; et signifie l'endroit 
où se cache le serpent , parce que ce fut dans cette 
province que disparut Quetzalcoatl. 

m 

GoATEPEG , montagne des serpents. 

GoATETL , pierre du serpent ,• de coati et tetl , pierre. 

GoATLiGHAN , pays des serpents. 

GoAxoGHiTziiM , flcur des serpents. Gette fleur est décrite 
par Hernandez , p. 156. 

GoGOLiTLAN , pays malsain ; de cocoliztli , maladie. 
GozGAQUAUHTLi , cspècc d'aîgle à tête rouge. 
GËTLAHuixocBiTziN , fflcur décTîte par Heruaudez , p. 376. 
GuETLAxoGHiTzm , flcur décrite par Hernandez, p. 375. 
CuETLACffTiTLAN , pays dcs loups ; de cuictlachtli, loup. 
C0ETLAcoAPA!v , aujourd'huî Pud>la de los Angeles-^ selon 



344 APPENDICE. 

Boiurini ( p. 78 ) , et Médina (p. 122 ) , l'endroit où 
on lave les entrailles des victimes. 

Ct7ictiETZALT2iN ; de cuicuetzotl, hirondelle. 

GuLHUACAN , pays des serpents , selon Yeytia , 1. 1, p. 21. 

Epcohuac. Boturini ( p. 78 ) , traduit ce nom par serpent 
qui brûle. 

Ehcatepeg , montagne qui s'élève dans Tair ; A*ehcatl ^ 
air ; et tepec , montagne. 

Ehcatonatuih, soleil d'air; d^éhcatl et tona^tuft ^ soleil. 

HuANAxATo , est selon Médina (p. 257) , une corruption 
du mot tarasque quarmhwUo, qui veut dire montagne 
des grenouilles. 

HuAXACAc ou Oaxaca ; de huaocin, espèce d'arbres ; et 
xacail y pointe. 

HuEHDETLAiM , uom d'uuc proviucc ; de htiehtie, vieux, ou 
de htiehuetl , tambour. 

HuERUETLAPALLAN , le vicux Tlapallau. (^oyejscemot.) 
HuExoTLAN ; de huexotl , saule. 
HuExoTziNco \ de huexotl, saule. 

HuExoTziNCATziN , qui a remporté la victoire contre 
Huexotzinco. 

HuiLOTEPEG , montagne des pigeons ; de huilotl, pigeon ; 
et tepec, montagne. 

HniLOTLAN , pays des pigeons. 

HiTiTziLiHuiTL , espèce d'oiseau. 

HuiTziLiHUAGAN , pàys OÙ sc trouvc cet oiseau. 

HniTziLOPOCHGo , lieu dédié à HuUzilopochtli. 

Ilhoicamina , surnom de Motccuhzoma I , qui lance des 
flèches jusqu'au ciel ; A'ilhuicail , ciel ; et mitl , flèche. 



APPENDICE. 345 

L'hiéroglyphe de ce roi est en eflet une flèche qui 
frappe le ciel. 

IxTLiLxocHiTL ; de xochM, fleur; et ij;^K/ltc^ basané. 

IxoTL ; A'ixotla, donner un coup de sabre sur la tête. 

Itzgoatzin , roi de Mexico , serpent en obsidienne ; 
diitzli , obsidienne ; et coati y serpent. 

IxAYOc , pleureur; d'iœayotl, larme. 

IxAYOPiLTzm , enfant qui pleure ; d'iœayotl ^ larme ; et 
pilzintli y enfant. 

IxHUACAN , terrain sec. Foy, Lorenzana , p. 1. 

IzTACALco ; d'istoc y blanc. 

IzTAGPALAPAN , viUe blauchc. 

IzTACPAPALOTziN, papiUon blanc ; ^Liziac^ blanc ; papalotl, 
papillon. 

IzTACQUAUHTLi OU IzTAGQUAUHTziN , aiglc blauc ; d'istoc , 
blanc ; eiquauthli^ aigle. 

IzTiAGAUHTziN ; dHztlocay prophètc. 

Maguilcoatl , cinq serpents ; de nuicuilli y cinq ; et 
coati y serpent. 

Malin ALOGA de ma/ina/fo'^ tordre. 

Matzigotzin ; de matzicoltic y manchot. 

Matlalcihuatzin , fenune verte ; de Matlatl , vert , et et- 
huatly femme. 

Matlaltzingo, lieu de verdure. 

Maxtla, roi d* Atzcaputzalco , caleçon ou pagne. 

Maxlagan, pays des pagnes. 

Mazatl, cerf. 

Mazahuagan , pays des cerfs. 

Megonetzin, Fenfantdu Maguey. Voy. Veytia, tom. ï, 
pag. 26&. 



346 APPENDICE. 

Mbztitlan, de meztli, lune; et tetl, pierre. 

MiTL, flèche. 

MiTLizTAG, flèche blanche; de mitl^ flèdie et iztac blanc. 

MicHOACAN, pays du micki , espèce de poisson. 

MixTLi, noage. 

MixcoATziN , serpent de nuage ; de mixtli nuage et coati , 
serpent. 

MoTKciJHzoMA , seîgncur séTère. 

MoTOLiNiATziN dc motoUfiia , pauvre. 

Netzahualcoyotzin , roi de Tezcuco, renard Jeûneur; de 
nezahtuiy jeûner et coyotl, renard. 

Netzahualpilztzintli ; de nezahua^ jeûner, et piltzintU, 
enfant pour lequel on a jeûné. 

NocRcoANi ; de nochtli , figuier dMnde. 

NoffOALco , Fendroit du dénombrement. 

OcELOPAN , pays des tigres, d'ocelotl, tigre. 

OcELOTEPEc , montagne des tigres. 

OcoTocH , (Tocotl^ pin. 

OcoTziwco et OcoTELULco , ville des pins, 

OcoTEPEc, montagne des pins. 

Ometoghtu ; deux lapins d'orne, deux, tochili, lapin. 

Omacatzin , deux roseaux ; d'orne , deux, acaily roseau. 

Otomgatepec , montagne des Otomites. 

OzTocTicpAc , au^essus de la caverne ; d'ozêoe , caverne , 
et ticpaCy au-dessus. 

Pachoacan de Pachoa^ endroit resserré , parce que cette 
ville est construite dans un défilé. 

Papalotepec, montagne des papillons de Pa/Mifo^. 

Papalotlan , pays des papilUms 



APPENDICE. 347 

Patntzin , coureur de Payna , courir légèrement. 

PocHTEPEc ou PopocATEPEG, volcau; dc tcpec, montagne , 
eipochtli, fumée. 

PocHOTL, nom d'une plante. 

QuAN ALTECATL , boHune quî a une crête ; dc tecail , homme, 
et quanacatl, crête. 

QuATLAPANQui , tétc fcnduc ; moutaguc dont la cime est 
partagée en deux. 

QuAUHATLAPALTziN; Ae quauhatlapalU , aigle rouge. 

QuAUHATLAPAzco , pays des aigles rouges. 
QcAUHAXAYACATL ; dc quauhtU j aigle , et axayacatl , qui a 
la tête dans Fcau. Yoy. cemot. 

QuAUHQUETZALLi , plumc d'aiglc ; de quetzatli , plume , et 
quauhtli,9\g\Q, 

QuAUBTiTUPi , pays des aigles. 

QuAUHTLAGTLi , oorps d'aiglc ; de quauhtli^ aigle, et tlactli^ 
corps. 

QuAUHTLATOA, qui a la voix d'uii aigle; de tlatoGy par- 
ler, qui se dit aussi des animaux. 

QuAUHTLATziNco, viUc daus la forêt; de Quauhtlan, 
forêt. 

QuAUHTONATiUH ; dc qtumktU ^ Bigle ^ et tonatiuh , s/cÀeîl. 

QuETZALcoATL , scrpcut couYcrt de plunnes ; de quetzeUli , 
plume , et coati ^ serpent. 

QuETZALMALiN , plumc torduc ; de quetzal et malina, 
tordre. 

QuETZALMiTLi , flèctie cmpluméc; de quetzcUli^ plume , et 
mitl, flèche. 

QnETZALMAMALiTziN , plumc feuduc ; de quetzalli et de ma- 

mali, fendre. 
QuETZALTEcuHTLi , quetzalH ci Ac tecuhtli, chevalier. 



348 APPENDICE. 

QuETZALTEcoLorziN , plume de hibou ; de tecolatl , 
hibou. 

QuETZALTEPEc , montague de plumes ou ornée de 
plumes. 

QuETZALxocHiTziN ; de quetzàlU et de xochitl , fleur. 

QuiADHTEPEc , moutagoe de la pluie ; de quiahuitl , 

pluie. 

QuiAHUizTLAN , pays pluvieux. 

QuiNAMETziN , géaut. Voy. Veytia, tom. I , pag. 142. 

Teapazgo ; de teapaztli^ tas de pierre. 

Tecpatl , cailloux. 

Tegpan, palais d'un roi ou d'un seigneur. 

Tecpanxochitl, fleur du palais. 

Teconaltegatl , charbonnier ; de teconalli , charbon , et 
tecatl , homme, 

Tecpanéque, qui habite un pays pierreux. Voy. Glavigero, 
tom. 1, pag. 152. 

Tecuhxolotl; de 070^0^/^ œil, eXtecufUliy chevalier. 

Telpoch , jeune homme. 

Temacpalgo, ville livrée par trahison j de temactli^ chose 
livrée. 

Temamatlatl , escalier de pierre. 

Temaghcaotli ; de temachtli, qui enseigne. 

Tenamaxguigditl , pierre peinte. Voy. Lorenzana , p. v. 

Tenamitec , endroit entouré de murailles ; de tenamitl, 
mur d'enceinte. 

Tendghtitlan , figuier sur la pierre ; de tenuch , figuier 
d'inde, et tetl, pierre. 

Teotihuacan , ville des dieux ; de teotl, dieu. 



APPENDICE. 349 

Tbotlatzinck: , de teotlatli , plaine étendue 

Teoyualminqui , fameux guerrier qui tue. Voy. Veytia , 
tom. II , pag. 213. 

Tepeghpan , pays des montagnes. 

Tepeyacac , sur la pointe de la montagne ; de tqpec et 
yacatly pointe. 

Tepeticpac, au haut de la montagne ; de tepec, montagne, 
ticpac, au-dessus de. 

Tepetlaoztog , caverne dans la montagne. 

Tepetlatzingo , yille sur la montagne. 

Tepologan , endroit dangereux. 

Tbpoloatecuhtli ; dc tecuhtli , chevalier et tepoloani , 
vainqueur. 

Tepozotlan ; de tepoztli , fer. 
Tequanitzin; de teqiumi^ béte féroce. 
Tequaistbpeg, montagne des bétes féroces, 
Tequixquinahua ; de tequixquitl , salpêtre. 
Tetoistli , petite pierre. 
Tetzauh , mauvais augure. 
Tetzauhpiltzintli , enfant de mauvais augure. 
Tezgagoatl de coati ^ serpent, eitezcatlij miroir. 
Tezgogo , endroit où l'on s'arrête. 

Tezgooogihuatzin , femme de Tezcoco ; de dhnuUl y 
femme. 

Tezmologa!^ ; de ^^mo//i^ jonc vert. 

Teyatzin ; de U/yoa, gagner une bonne renommée. 

Tezgatlpopoga, miroir fumant; de pochtli, fumée, et 
tezcatli , miroir ou chose très-polie. 

TizoG ; ce nom du septième roi de Mexico veut dire trans- 



350 APPENDICE. 

percer ; au» son hiéroglyphe est^l une cuisse cou- 
verte de blessures. 

Tlacahdepantzin ; de tlacahua , maître de qui Ton est 
resclave. 

Tlacateotzin , homme-dieu ; de tiacail , homme, et taM, 
dieu. 

TiACAELLEL , hommc de grand cœur. Yoj. darigero , 
pag. 209. 

Tlaghco , jeu de balle. 

Tlachinotzin ; de tlachinoa , brûler des forêts. 

Tlahcican ', de tlahuic ^ cinabre. 

Tlahuitolan j de tl(ihuUly ocre rouge. 

Tlamaca, plaine étendue. Yoy Lorenzana , pag. 3. 

Tlapallan, pays rouge ; de HapalUy rouge. 

Tlalaxapan; deilalaùoiy pou. 

Tlatelulgo; de tlatelli, monticule. 

Tlatlauquitepec , montagne rouge. Voy. Boturini , p. 3. 

Tlaxcallan , endroit du pain , parce qu'on y cultivait 
beaucoup de maïs. Yoy. Boturini , pag. 78. 

Tlazalan, ravin. 

Tlazalantlanoztoc, caverne dans un ravin -, de tlazalan^ 
ravin, ostoCy caverne. 

Tlbqoexolotzin , œil de feu ; de tletl y feu , et xolotl , œil. 

TocHiNTEccHTLi; dc tochin^ lapiu (Molina le traduit ainsi; 
mais je pense que cela veut dire cochorhSinde). 

TocHPAN , pays des lapins. 

TocHTEPBc, montagne des lapins. 

ToLLAN ; de to//in, jonc ou glayeul. 

ToLocAN , de tollin. 



APPENDICE. 351 

ToLPETLAc , lieu où l'on fabrique des nattes. Voy. Botu- 
rini , pag. 78. 

TONATIUHTZIN , SOlell. 

TopiLTziN, justicier; de Topilli , insigne qui distinguait 
les juges. 

ToTONAPAN, eau des poules; de Tototl, poule, et AU, eau. 

ToTOTEPEc , montagne des poules. 

TnzAPAN , pays des taupes ; de tuxa , taupe. 

TziHUAxocHiTziN j de XocJM y fleur, et TxîMio^I ou et- 
hwsil , femme. 

TziNACANosTOc , caveme des chauves-souris ; d'O^tocet 
2^zmaca/i, chauve-souris. 

TzoNTECOMAMA, tétc chargéc. Voy. Boturini, pag. 78. 

TzoNTEcoMATL , tête coupéc et séparée du corps. 

Xalisco , ville dans les sables ; de Xalli y sable. 

Xaltocan , pays sablonneux. 

XicoTEPEc , montagne des Abeilles ; de Xicotli y espèce 
d'abeille qui dépose son miel dans les arbres. 

XiHuiTLTEMOc ; Ae ocikuitl y année. 

XiHuiTLPOPOcA ; iexihuitl et Aepopocay fumée. 

XiLOTEPEc ; de xilotly épi de maïs. 

XiQuiPiLco , de xiquipilli , sac ou bourse. 

XocHQUETZALLi; de xochUl y hcrbc, et quetzalli y plumes. 

XocHiTL , fleur, d'où sont dérivés xoehimilcOy xochi- 
palco , ville des fleurs ; xochitlan , pays des fleurs ; 
xochitepec, montagne des fleurs. 

XocHiQDETZALTziN ; dc xochUl y ct dc quetzalU , plume. 

XocHTUNAL , Gguier en fleur; de xochitl et tunal y Gguier- 
d'inde. 



352 APPENDICE. 

XoLOTL, œil. 

XoGONUscHGO , xocoTiTLAN ; de xocoil , espècc de fruit. 

Yahualibuagan ; de yoAiia/t , rond. 

Yaotl, ennemi. 

Yauhtepec ; peut-être de yahuitl , maïs noir. 

Zagatlan , pré couvert d'herbe. Voy. Veytia , pag. 218. 

Zkmpoallan ; de Zempoalli qui veut dire vingt , parce 
qu'on y tenait un marché tous les vingt jours • 

ZoLTEPBG , montagne des Cailles ; de zoli , caille. 

ZoYOLAN ; peut-être de Zoloa, endroit resserré. 



FIN DE l'appendice. 



TABLE DES MATIÈRES 



CONTENUBS 



DANS CE VOLUME. 



Ghapitkiç L. ^ Couronnement da Uèi-«ig|9 et trèirp^- 
dent NetzahualpiltsintH -Acamapixtli i 

Cbaf. LI. — Guerre d'Axayacatzin , roi de Mexico, contre 
Moqoihuîtzin, roî de Tlatelolco , et se» alliés. • • « 7 

Ghap. lu. -^ Commencement du règne de Netzahual- 
piltzintli. — Prudence et sagesse que Dieu lui donna 
dés son enfance , et qui sont très-vantées par les au- 
teurs. II 

Châp. lui. — Guerres et conquêtes des trois chefs de 
Tempire. — Mort de Xihuilltemoc , seigneur de Xochi- 

milco i5 

13. 23 



354 TABLE 

GiAF. LIV. — Mort d'Axayacatzin. — Il a pour gucces- 
sémr Tiçotzicallzin. — Bnfanb de ces denxroîs. ... si 

Ghap. LV. — Première expédition du roi Netzahnalpilt- 
zintli contre les habitants d'Ahuilizapan , Tototlan , 
Oztocticpac et antres provinces de la cdte de la mer 
du Nord sS 

CaAP. LVl. — Netzahnalpiltzintli construit un palais et 
augmente le grand temple qu'avait construit son 
père. — Dépense ezcessiye que faisait ce prince. . . S 2 

GiAp. LVIl. — Des nombreuses concubines deNetzahual- 
piltxintli. — De la reine Tenacatzihuatzin , son épouse 
légitime. — Des enfants qu'il eut d'elle et de ses con- 
cubines 35 

Gair. LVIII. — Mort de Tiçotzicaltzin, roi de Mexico. — 
Ahuitiotun lui succède dg 

Ghap. LIX. —Expédition de Netsahualpiltsnntli centre la 
cdte de Nauhtla. — Il fait , avec les rois de Mexico et 
de TIacopan , la conquête de quelques provinces si- 
tuées sur les côtes de la mer du Sud 45 

Gflàp. LX. — Ahuitzotzin termine le grand temple de 
Mexico. — Sacrifices qui ont lieu a son inauguration. 
— Mort de Ghimalpopocatzin , roi de TIacopan. — Il est. 
remplacé par Totoquihuatzin » second du nouk ... 47 

Ghap. LXl; -*- Guerre de Netzahualpiltzintli contre Hue- 
huetsindeHnexotsinco. — Il est vainqueur et fait son 
ennemi prisonnier 5i 

GiAP. LXIl. Action extraordinaire de Teuhchimaitzin , 
noble *db sang royal de Tescuco. 67 

Gbap. LXlII. — Guerres et conquêtes de l'empire contre 
les nations éloignées. . 63 



DES MATIÈRES. 355 

Page». 

Ghàp. LXIV. — Extrême sëTérité, de NetzahualpiUzintli 
eontre son éponse adultère 65 

Geàp. LXy. — NoareHes conquêtes des armées impë* 
riales 71 

GSAP. LXVI. — Grande inondation de la yille de Mexico 
causée par une source nommée Acuecnexatl 73 

Ghap. LXViL — NetzahualpiUzintli apaise une querelle 
entre les princes Acapîoltzin et Xochiqnetzaltzin ses 
frères. ^^ Il punit serèrement quelques-uns de ses 
fils 77 

Ghap. LXVIII. — NetzahualpiUzintli améliore la législa- 
tion et Fadministration de la justice 85 

Ghap. LXIX. — Naissance du rdeureux prince Ixtlilxo- 
chitl , et ce qnll fit pendant son «nfance. 9^ 

Ghap. LXX. — Mort d*Ahuitzotzin, roi de Mexico. — Le 
fameux Motecuhzoma , deuxième du nom , lui suc- 
cède 101 

Ghap. LXXI. — De diyers événements qui, d'après les 
annales , eurent lieu à cette époque 107 

Ghap. LXXII. — De quelques signes et présages qui an- 
noncèrent la destruction de Fempire m 

Ghap. LXXlll. — Révolte de quelques provinces con- 
quises , et autres événements ii5 

Ghap. LXXIV. — Trahison de Motecuhzoma qui fait 
périr la fleur des guerriers de Tezcuco en les livrant 
aux Tlaxcaltèques, et se rend par ce moyen maître de 
tout Fempire 119 

Ghap. LXXV. — Mort de NetzahualpiUzintli 117 



366 TABLE 



1?- 
• Patçes. 

GiAP. LXXVI. -*• Querelle qui telèye etttre les enfiiate 
de Netzahualpiltzintli relativemeiit à la flooceMÎon. . tSi 

Ghap. LXXVII. — De rinyincible FemMid Gortez , pre* 
mier marqui» de la yallée d*Oaxaca, et du commen- 
cement de ton expédition iSg 

Ghap. LXXVIIL -^Gortez comoieiice la conquête de la 
Nouvelle- Espagoe. — 11 arriye à Potonchan 45 

Ghap. LXXIXr — Voyage de Gortez jusqu'à son arrivée 
à la Yera-Gruz i53 

Ghap. LXXX. — Gonduite de Mote<$uhzofnA en appre- 
nant larrivëe de Gortez et de set compagnons! — 
Gelui-ci a connaissance des factions qui divisent le pays. 1 63 

Ghap. LXXXI. — Entrevue de Gortez avec les seigneurs 
de Gempoallan et de Quiahuiztlan. — Ils lui offirent 
de se rallier à lui contre Motecuhzoma 171 

Ghap. LXXXII. — Séjour de Gortez à la Vera-Cruz. — 
Il détruit ses vaisseaux 177 

Ghap. LXXXIII. — Gortez part pour Mexico. — Ge qui 
lui arriva pendant la route iS5 

Ghap. LXXXIV. — Séjour de Gortez à Tlaxcallan. . . . îo3 

Ghap. LXXXV. — Voyage de Gortes à Mexico. •*- Ge <|ai 
se passa dans cette ville jusqu* à l'arrestation de Mote- 
cuhzoma %i3 

Ghap. LXXX VI. — De ce qui se passa à Mexico jusqu'à 
ce que Gortes fît mettre des fers à MotecuhzooiCL. — 
Gacama, roi de Tezcuco , prend les armes pour dél li- 
vrer son oncle et chasser les Espagnols. -*- Son oncle 
Ixtlilxochitl le prend par trahison et le livre à Gortez. 3 a 5 

Ghap . . liXXXVII. — Motecnheoma et les autres seigneurs 



DES MATIÈRES. 357 

Page». 

de l'empire se reconnaissent rassaux du roi de GastiUe. 

— Ce qui arriva à Gortez jusqu'à la prise de Pamphile 

de Nanraez qui venait l'attaquer 235 

Gbàf. LXXXVHI. — Massacre de la noblesse de Mexico 
par Pedro de Alvarado et ses compagnons. — Ce qui 
est cause de la révolte de Mexico. —Les Espagnols sont 
serrés de si près qu'ils sont forcés d'abandonner cette 
ville. — Mort du grand Motecubzoma , de Gacama et 
d'autres seigneurs 143 

Ghap. LXXXIX. — Gortez se retire à Tlaxcallan. — Évé- 
nements qui eurent lieu à cette époque 253 

Ghap. XG. — Gortez est bien accueilli à Tlaxcallan. — 
Ge qu'il fait pendant son séjour dans cette ville. — 
Mort du roi Guitlahuatzin. — Élection de Quauhtemoc, 
de Goanacochtzin , et de Tetlepanquetzaltzin 359 

Ghap. XGI. — Gortez marche de nouveau contre Mexico. 

— Son arrivée à Tezcuco 273 

Ghap. XGlI.->Gombat d'iztacpalapan. — Gortez va recon- 
naître Mexico. — Guerre d'Acapuchtlan 289 

Ghap. XGUI. — Gortez va reconnaître encore une fois 
Mexico et les bords du lac. — Gombat de Tlayacapan. 

— Guerre de Xochimilco 299 

Gbap. XGIV. — Gortez fait ses préparatifs pour attaquer 
Mexico par terre et par eau Su 

Ghap. XGV. — Victoires des Espagnols sur terre et sur 
le lac 325 

Appenoige 3;i5 

FIN DE LA TABLE DES MATIERES. 



IMPRIMERIE DE FAIN ET THDNOT, 

me Racine , 98 , près de l*Odéon. 



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