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IIISTOIIIB
DES PROGKÈS
DK LA
CIVILISATION
EN RUROPK.
lanmiii n J.-B. gros, suce, n J. gràtiot,
Rue da Foin Saint* J«e(|iies» n« ft.
HISTOIRE
DES PROGRÈS
DE LA
CIVILISATION
EN EUROPE
DKPIIIS L'finR CUn|}.TIRNNB JUSQU'AU XrX° SIÈCLE;
PAR H. ROUX FERRAND.
w S'il riibti* 111)0 iriciuT «le |irrv(jii Icn pro^rAi
tifl lV»prit liiiiiiaiti, do lui iliii((fi', <lti \etacei\i'
MT, l*lii!«lniii> <lc (CMi <|u'i'llt' •• r.iiu nt iloil é(ro
L Im»o lucinif'ff, »» (OoNiJURfUT.)
TOUR ClNQUIliUi:.
• • - •
...
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PARIS, i..iUV^'•••
CHRXL. IIACHETTr,,
LIDnAIRK PR L'I'NIVRIIKITK ROYALE DBI'RANCR,
iiur, l'iKiiiii! HAimAziti> M° 13;
KT CIIUZ PAULIN, HUE DE SEINE, N* 0.
18ft0.
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HISTOIRE
DtB
PROGRÈS DE LA CIVILISATION
EN EUROPE
Bx»vu vÈBx oBBivixHxsnwftV'AV ie*»ilwui.
CHAPITRE PREMIER.
Dans le passage lent et gradué du quatorzième
au quinzième siècle, un grand fait s^est accompli
en Europe. Depuis la mort de Charlemagne^ dont
le génie puissant avait tout uni, tout centralisé,
ces éléments divers, qu'il avait attirés à lui , se
sont divisés par une sorte de réaction qui se re-
trouve dans Tesprit des peuples comme dans les
lois de la phy8i<}ue. Tout a , dès lors, tendu à la
séparation , à Tisolemcnt, à une existence ou lo-
cale ou spéciale... Eh bien ^ cW cet état qui dis-
jiaraît peu à peu au quinzième siècle : par une
oscillation ou une réaction contraire^ rKuro(Xf ,
V. i
sans s^en rendre compte , s'est ^ dans tous les cen-
tres d'action , rapprochée de l'unité.
La royauté, le clergé ont acquis plus de puis-
sance ; les intérêts généraux, les idées générales
ont prévalu... non de suite et instantanément par
une révolution ou une conmiotion violente, l'hu-
manité procède rarement ainsi j mais par un tra-
vail sourd et caché dont les peuples ignoraient
eux-mêmes les causes et les résultats. Le seizième
siècle accomplit ce travail préparé par son devan-
cier.
Le seizième siècle vît aussi s'accomplir un autre
fait non moins intéressant à étudier et que faisait
prévoir depuis long-temps la tendance des esprits
penseurs et impatients du joug... Mais toutes ces
transformat ions, tous cesboule versements matériels
ou moraux , nous les retrouverons bientôt. Nous
n'avons dû que les indiquer maintenant pour les
reprendre plus tard. Les événements européens
réclament leur place dans ce volume comme dans
les précédents j et , suivant notre marche accou-
tumée, c'est de la France que nous allons d'abord
nous occuper^ car c'est d'elle que part tout pro-
grès. Qu'elle ait été conduite par la framée de
Glovis^ par la croix de Gharlemagne , par rori-
flamme de Saint-Louis , le panache de Henri IV
ou les aigles de Napoléon» toujours elle a été la
— 5 —
première entre les nations européennes dans la
voie de la civilisation \
La démence du roi et Todieux gouvernement
de princes fastueux y avides, sans talents et désu-
nis entre eux, avaient mis la France plus mal
qu'elle n'était avant Cliarles V. Le désordre des
finances était tel que, même en temps de paix ,
l'argent manquait pour tous les services publics ,
et la situation des cultivateurs était si pénible, quïls
abandonnaient leurs champs en friche et se réfu-
giaient dans les bois d'où Ton voyait ensuite sortir
des bandes de pillards qui infestaient les grands
chemins '. L'état était abandonné, sans police ,
sans justice, sans lois, sans travaux publics : l'au-
torité semblait prendre à tâche de ruiner le com-^
merce comme Pagriculture, par des emprunts for-
cés , des variations de monnaies, des impôts de
tout genre.
Les ducs d'Orléans et de Bourgogne régnaient
tous les deux sur cette malheureuse France, vic-
time de leurs dissensions. On était accoutumé à
voir dans le conseil ces deux princes, toujours
dW avis opposé et prêts à se déchirer. Un jour
cependant leur onde , le duc de Berry, essaya de
— u -
les reconcilier, et pour mieux y réussir, les fit
communier ensemble aux Auguslius et dîner chez
lui ; là , ils se jurèrent une amitié éternelle. Le
lendemain, à la nuit ^ le duc d'Orléans fut assassiné
à coups de hache dans les rues de Paris... La
cour en était tout en émoi ; le duc de Bourgogne
s'écria « que jamais en ce royaume, si mauvais et
si traître meurtre n'avait été commis et perpé-
tré ^. » Mais, troublé bientôt après^ il avoua que^
tenté par le diable, il avait commis le crime.
Cependant^ il résolut d'en laver son honneur et
demanda jour au roi pour donner publiquement
les motifs de cet assassinat. Ce jour fut le 8 mars
1/iO/i. L'assemblée était nombreuse et composée
de princes^ nobles et bourgeois. Maître Jean Petit,
cordelier normand , prononça un long discours ,
lequel prouvait : i^ Que la convoitise est la source
de tous maux; 2^ Qu'elle a fait des apostats ;
3"" Qu'elle a fait des déloyaux; U'' Diverses autres
vérités tendant toutes à prouver que monseigneur
de Bourgogne aynii irès-bien agù.. Ce discours des
plus curieux, qui se trouve tout au long dans
Monstrelet, donne une idée de l'éloquence de ce
siècle. Le pouvoir du duc de Bourgogne , au lieu
de diminuer, s'en accrut singulièrement. Il de«
vint en peu de temps seul maître du royaume^
qu'il mena avec une verge de fer;
— 5 —
Mais le jeune duc d'Orléans songeait à venger
son père : uni au comte d'Armagnac, ilsorganisèrent
unefaction puissante qui prit le nom de ce dernier et
lutta durant de longues années avec celle des Bour-
guignons. On se battait partout, et Ton se battait
avec la fureur que mettent les partis à s'entre-dé-
chirer, avecTaviditédu pillage que peuvent avoir
des troupes qui n'ont que le pillage pour solde.
Les terribles bouchers de Paris , sous le nom de
CabochienSj firent ruisseler le sang dans cette
ville pour soutenir le duc Jean-sans-Peur et ne
pas rester en arrière des pillards d'Armagnac. La
France n'avait ni gouvernement ni roi ; Charles,
dans ses moments lucides, rendait des ordonnan-
ces dont une frénésie empêchait l'exécution. Tour à
tour Armagnac et Bourguignon, il ne recouvrait
une étincelle de raison que pour attiser la guerre
civile.
Les Anglais ne pouvaient avoir d'occasion
plus favorable pour étendre leurs conquêtes. Leur
roi Henri V, soutenu par d'Armagnac, s'empara
de la Normandie et se fit appeler roi de France.
Tel était l'aveuglement des partis, qu'au lieu de
défendre leur pays, ils négociaient tous deux avec
le roi d'Angleterre qui agissait là comme le troi-
sième larron de la fable ^. Enfin , on en vint aux
grands moyens ; les 4'4rmagnac çt \e cl^uphii^
— 0 —
résolurent de se défaire de Jean-^ans-Peur ; ils
tnënagèrent une entrevue sur le pont de Monte*
reau, et ce dernier y fut assassiné, comme Tavait
été le duc d'Orléans dans la rue Barbette, à coups
de hache.... Le dauphin s'en lava plus tard, non
par réloqueuce d'un cordelier^ mais en écrivant
aux bonnes villes du royaume que : «c reprochant
au duc de ne pas repousser les Anglais, celui-ci
répondit plusieurs folles paroles et chercha son
cpée à nous envahir et villener en notre personne;
laquelle, nous avons su, il contendait à prendre
et mettre en sa sujétion. De laquelle chose, par
divine pitié, et par la bonté et aide de nos loyaux
serviteurs, nous avons été préservés , et, il, par sa
folie^ mourut en la place ^. )»
Ce fut le tour du fils de Jean-sans*Peur de ven*
ger son père, et pour cela il se ligua avec Henri Y,
qui, profitant toujours de l'occasion, s'empara de
Montereau et de Melun où il égorgea nombre
de bourgeois et deux moines ; prit Meaux, où il fit
pendre six chevaliers reconunandés à sa merci,
et vint enfin mourir à Yincennes, que le nouveau
duc de Bourgognelui avait livré avec la Bastille et
le Louvre. Son fils était encore au maillot; il
confia l'Angleterre au duc de Glocestre et la
France à Bedfort ! Nous allons la lui voir enlever,
cette France , et par les mainsd'une femme...
— 7 —
Charles VI mourut quelques semaines après
Hem:i V, abandonné de tous; à peine remarque-t-
on sa maladie. Il avait régné quarante-deux ans..;
Le peuple versa des larmes à sa mort^ non qu'ail
en eût reçu du soulagement, mais dans un temps
où tout ce qui touchait au pouvoir opprimait le
pauvre^ le pauvre devait de la reconnaissance à
la main puissante qui ne s'appesantissait pas sur
lui.
Princes et chefs de factions, à cette malheureuse
époque, souillaient leur vie de crimes et la termi-
naient victimes d'assassinats ou de la vengeance
du peuple : c'est ainsi que périt d'Armagnac ,
dépouillé et déchiré par la populace de Paris.
Triste retour du sang qu'il avait fait verser.
Charles VII , comme Charles V , arrivait au
trône sous de funestes auspices et précédé par
une odieuse renommée. La gravité des circon-
stances suffit à peine pour donner un peu d'éner-
gie à son caractère indolent et ami des plaisirs :
proclamé roi par quelques nobles attachés à sa
mauvaise fortune, il combattit et fut battu en plu-
sieurs rencontres. Cinq mille français perdirent
la vie à la bataille de Verneuil. Les Anglais étaient
sur le point d'entrer en vainqueurs à Orléans^ et
ce dernier refuge du parti de Charles allait, en
ouvrant ses portes, donner la France aux Anglais,
— 8 —
lorsqu'un miracle la sauva. N'est-ce pas, en effol,
une sorte de miracle que l'apparition inattendue
à'une jeune paysanne qui, rêvant qu'elle doit
sauver la France^ endosse la cuirasse^ et^ la lance
au poing, anime les soldats, tue des Anglais, dé-
livre Orléans, fait sacrer le roi à Reims et meurt
au milieu des flammes sans pousser un cri ? C'est
la vie de Jeanne d'Arc... Notre cadre est bien
restreint^ mais comment ne pas sacrifier quelques
pages à des aventures aussi extraordinaires , aussi
glorieuses pour notre pays?
Nëe à Domremy, en Champagne, vers 1Ù12,
Jeanne n'avait devant les yeux, depuis son en-
fance, que la misère du peuple de son village, et
n'entendait que des imprécations contre les An-
glais auteurs de ces maux. Toutes ses prières
étaient pour la délivrance de son pays et la des-
truction de l^élranger. Cette idée était devenue
chez elle une idée fixe. Elle avait des visions; elle
croyait entendra un ange lui dire d'aller trouver
le roi ou ses hommes d'armes ; deux saintes lui
apparaissaient aussi et troublaient chaque nuit son
sommeil... Enfin Jeanne obéit. Renvoyée comme
folle par le sire de Raudriconrt, elle ne se rebuta
point et passa plusieurs jours en prières, essayant
sans cesse de parler aux gentilshommes. Elle crut
alors entendre des voix lui dire de prendre un
— 9 w
vétemenl d^honime et de chausser l'ëperon. Elle
partît pour Chinon, où, après trois jours d'hési-
tation^ le roi consentit à la voir. Elle embrassa
ses genoux en disant : Très-noble Seigneur, le roi
des cieux vous mande par moi que vous serez
sacré et couronné à Ueims^ et que vous serez son
lieutenant au royaume de France. Charles Técouta
avec complaisance, et la fit interroger par tous
ses conseillers ; là, chaque docteur lui expliquait
savamment ses doutes : « Je^ne sais ne A ne 6,
disait-elle, mais je viens de la part du roi du ciel
pour faire lever le siège d'Orléans et conduire le
roi à Reims. » Enfin, il fut décidé qu'on accep-
terait ses offres. Ses saintes pratiques lui don-
nèrent en peu de temps un prodigieux renom dans
Pesprit du peuple et de Tarmée, dont elle corrigea
les mœurs dissolues et réforma la discipline. Tous
se sentaient, dit la chronique, reconfortés par la
vertu de cette simple fille. Chacun voulait tou-
cher son vêtement, son cheval ou son étendard.
Avant de commencer les hostilités, elle écrivit au
duc de Bedfort de retourner en son pays : « Si
vous ne le faites, lui disait-elle, attendez nouvelles
de la pucelle qui vous ira voir bien fièrement à
votre grand dommage; je suis ici envoyée de par
le roi du ciel pour vous bouter hors de toute
France. » Les Anglais rirent et méprisèrent sa
^ 40 —
lettre, et cependant huit jours plus tard ils avaient
abandonné le siège d'Orléans*. ». Le roi et ses
guerriers, pleins d'admiration et de confiance» ne
doutèrent plus de la mission divine de Jeanne.
A peine guérie d'une grave blessure qu'elle avait
reçue sur la brèche^ elle voulut amener le roi à
Reims, et cette fois l'on n'hésita plus. On la suî«
vit de victoire en victoire; toujours animée du
même zèle, elle soignait les blessés, leur fiBÛsail
donner la communion, animait les soldats; et les
Anglais, partout battus, cédaient pas à pas leter^
rain de France. Enfin Ton arriva à Reims, où le
roi fut sacré le 17 juillet 1429^ après avoir été
fait chevalier par le duc d'Alençon. Jeanne au-
près de lui, tenant fièrement son étendard victo-
rieux, versait des larmes de joie : « Gentil roi,
s'écria-t-elle à Tinstant de la cérémonie, or est
exécuté le plaisir de Dieu. » Elle croyait sa mis-
sion accomplie, et supplia le roi de lui permettre
de se retirer à Domremy ; mais Charles ne voulut
pas perdre un si bon appui , il n'eût plus été
sûr de ses troupes. Jeanne, toujours attachée à
son roi^ lui gagna encore des batailles et des
villes. La fortune se lassa cependant de lui être
fidèle y et elle expia cruellement quelques an-
nées de triomphe : blessée et prisonnière, elle fut
amenée au camp des Anglais, qui cruient, en
à
— 41 —
la voyant, avoir de nouveau conquis la France.
Après six mois passes dans les prisons d'Arras
et de Cretoy, Jeanne fut conduite à Rouen, où
l'on fit forger pour elle une cage de fer qu'on
plaça dans la grosse tour du château. C'est là
qu'elle était journellement insultée par ses gar-
diens et les seigneurs anglais. Son procès se jugea,
et la plus odieuse sentence fut portée contre elle.
On voulait lui faire avouer ce qu'on appelait ses
sorcelleries. Des tortures affreuses ne purent lui
arracher autre chose que des prières et ces simples
mots : « Tout ce que j'ai fait, j'ai bien fait de le
faire, » Cependant, lorsqu'on lui annonça qu'elle
serait brûlée, la nature l'emporta un instant ; elle
se prit à pleurer et à s'arracher les cheveux :
« Hélas! disait-elle, réduire en cendres mon
corps qui est pur ! J^aimerais sept fois mieux qu'on
me coupât la tête... Ah! j'en appelle à Dieu , le
grand juge des cruautés et des injures qu'on me
fait. » Ainsi, protestant de son innocence et se
recommandant au ciel, on l'entendit encore prier
à travers les flammes, et le dernier mot qu'on put
distinguer fut «/^^i/^.' «
Jeanne n'existait plus; mais l'armée qu'elle
avait guidée, les généraux accoutumés à vaincre
à ses côtés, et les Dunois, les Xaintrailles, conti-
nuèrent ses conquêtes. Indolent témoin des efforts
— 4i —
de ces braveâ^ Charles oubliait dans les plaisirs
qu'il avail encore des ennemis, et cependant le
duc de Bedfort, ayant repris courage, fit cou-
ronner Henri VI à Paris pour s'attacher les ha-
bitants, ce qui ne lui réussit guère ; car il ne fallut
que la défection du duc de Bourgogne, honteux
enfin de son alliance avec Tétranger, pour rendre
cette ville et In France à son roi : son entrée dans
Paris fut admirable, disent les anciens récits : on
y vit tous les princes et tous les seigneurs cha-
marres d'or et de broderies, ainsi que les pages et
les guerriers revêtus d'armures éclatantes, les
étendards flottant au milieu. On y vit une caval-
cade composée des sept vertus tftéologales et
caixlinalesj et des sept péchés capitaux* Des
saints mystères étaient joués sur la route du cor-
tège : ici, c'était toute la Passion, et le traître
Judas se pendant par désespoir ; ailleurs, Saint*
Micliely pesant les dinesy ou Marguerite foulant
aux pieds le dragon. La joie du peuple était
grande, et Charles avait les larmes aux yeux d'être
M bien reçu... Aussi jura--t-il en entrant dans la
cathédrale qu'il tiendrait loyaument et bonne-
ment tout ce que bon roi devait faire. Il tint une
partie de ses promesses : maître enfin paisible de
son royaume, il y rétablit un ordre qu'on n'était
pluq hç^bitué ^ y voir depuis Churle» V. 5^s derr
^ 43 —
toièi^es années, plus heureuses pour ses sujets,
furent empoisonnées de chagrins domestiques;
son fils Tabreuva de douleurs : ce fils fut plus
tard Louis XI.
Charles VI, tombé en démence; quelques grands
se disputant en son nom la tyrannie ; leurs que-
relles devenues des guerres civiles; les Anglais,
secondés par nos discordes , usurpant un instant
la couronne de nos rois ; la France changée en un
vaste champ de bataille , sa ruine presque cer-
taine ; puis tout-À-coup un triomphe inespéré, et
nos anciens vainqueurs tombant de toutes parts
avec leur conquête et leur gloire ; après vingt ans
d'mie oppression orageuse, le peuple trouvant
enfin la paix et des lois ; changements et réformes
dans les mœurs, Fétat et PEglise; la noblesse
échangeant son indépendance pour la faveur, et
préparant elle*méme sa servitude que Louis XI
va rendre plus dure et plus honteuse encore ^. . .
Tel est le spectacle que nous ofire la première
moitié du XV' siècle.
La seconde lui ressemble peu.
£levé au milieu des troubles, témoins des
guerre suscitées à la couronne par une foule de
princes et de seigneurs, Louis, né despote et dis-
simulé voulut régner seul : sans égard pour les
services passés, le rang ou la naissance, il donna
— 4H —
•
toutes les charges k des serviteurs dévoues et ha-
biles ; il s*en ëtait fait une quantité de toutes con-
ditions que Ton savait prêts à lui obéir en tout, à
exécuter ses volontés sans ménager personne^ et
à ne reconnaître ni bien» ni mal, ni juste ni in-
juste, lorsqu'il s agissait d'accomplir un comman-
dement du roi. a C'était^ dit M. de Barante^ un
grand motif de crainte et de méfiance^ chacun
tremblait pour soi et se trouvait contraint de mé<-
nager humblement des gens de rien qu'au fond
on détestait et méprisait. »
La féodalité allait recevoir le dernier coup; elle
se releva un instant, sous prétexte de soulager le
peuple de son despotisme ; les nobles se liguèrent
contre le monarque ; le duc de Bourbon lui écri*-
vit une lettre insultante où il lui reprochait son
amitié pour des hommes de néant, sa haine pour
les grands 9 etc. Les ducs de Bretagne, de Bour-
gogne, de Berrjr, de Charolais et nombre d'autres
unirent leurs étendards , armèrent leurs vassaux,
et cette croisade de nouvelle espèce se nomma
Ligue du bien public. Le bien public joue toujours
un rôle dès qu'il s'agit de mettre le peuple de son
côté. Louis avait une armée régulière et discipli-
née , grâce aux bons généraux de son père ; mais
il fallait, pour faire face à tant d'ennemis, di-
viser ses forces : une grande bataille livrée à
— 45 —
Montlfaâry n*eut d'autre résultat que de verserbea u-
conp de sang. La politique astucieuse de Louis XI
gagna du temps et termina tout à l'avantage de la
monarchie. Seul contre tous, cela semble assez
difficile j mais c'était là le caractère de son génie.
« Sa ruse, dit Mézerai, était admirable. Il trou-
vait le moyen de gouverner leurs maîtresses, leurs
favoris et tous ceux qui les approchaient. Il en
étudiait les humeurs et les désirs afin de les ga-
gner. Il caressait jusqu'aux moindres valets, ache-
tait leur fidélité, quoi qu'elle coûtât, et ne se re-
butait pas pour avoir été éconduit deux ou trois
fois; mais il persistait toujours à force de pré-
sents et de caresses, tant qu'il eût gagné ceux qu'il
croyait lui être utiles... »
Geprincese laissa cependant tromper, et souvent
il se prit dans ses propres filets : sur le point de ter-
miher par une bataille ses différends a vecla maison
de Bourgogne, Louis XI, comptant sur son habileté
de négociateur et sur le peu de finesse de Charles-
le-Téméraire , fut se mettre dans les filets de son
ennemi. Charles^ étonné de cette visite, apprit
pendant le séjour de son hôte royal à Péronne la
révolte des Liégeois; furieux à cette nouvelle, il
accusa Louis de les avoir engagés à secouer le joug
de la Bourgogne , et le retint prisonnier. Le roi
de France fut obligé^ pour sortir d'embarras , de
— ré-
signer tout ce qu^OD voulut , et d'aller en personne
combattre les Li^eois, dont il avait rëellement
excite la rébellion^ et au milieu desquels il criait à
côté de son terrible vassal : Ville gagnée ! Vive
Bourgogne. Il obtint ainsi sa liberté.
A son retour dans Paris ^ plusieurs kabilants
avalent instruit des geais et des pies à prononcer
le nom de Pémnne. Louis se vengea de sa mésa-
venture sur ces malhemreux oiseaux et leurs mali*
cieux instituteurs.
Le cardinal Balue, Tune de ces créatures tirées
du plus bas étage, le trahit quelque temps après ;
mais pour cette fois Louis découvrit la trame et
enferma le cardinal dans une cage de fer de huit
pieds carrés , invention du prélat lui-même. Ci-
tait justice, car. à en croire divers historiens^ Ba-
lue était un être sans moeui^s, sans foi^ ingrat^
vindicatif, effronté, ne connaissant ni patrie, ni
souverain , ni religion ; immolant tout à son in-
térêt ou à ses plaisirs... Si ce portrait est vrai,
on ne peut plaindre Louis XI; quand on donne
sa conflance à de pareils hommes, on doit s'atten-
dre à tout 8.
La guerre avec la Bourgogne n'était pas finie.
Louis avait trop peu de foi pour tenir les traités
signés à Péronne, et le duc un caractère trop im-
pétueux pour y souffrir la moindre infraction. Des
— 47 —
intrigues de cour vinrent se joindre à ces causes
de troubles, et l'empoisonnement du duc de
Guyenne^ frère et ennemi de Louis , ayant donne
à Gharles-le-Téméraire un juste prétexte, il rava-
gea les provinces du roi avec une férocité digne
du sixième siècle. Arrivé devant les murs deBeau-
vais , la résistance des bourgeois et Faudacieuse
résolution d'une femme le forcèrent à lever le
siège : Jeanne Hachette se présenta sur la brèche^
répée à la main, arracha l'étendard bourguignon^
renversa le soldat qui le portait , appela ses com-
pagnes , et , de concert avec elles , fit pleuvoir sur
les assaillants des pierres et du feu. LesBeauvai-
siens , animés par leur exemple , repoussèrent
Charles et les siens, Louis récompensa le service
des femmes de Beauvais en instituant une pro-
cession où elles avaient le pas sur les hopimes, et
leur permettant de porter les habits et les bijoux
qu'elles voudraient. Etait-ce bien là la récompense
qui convenait à de pareilles héroïnes ?
Charles VU avait formé lés gardes écossaises ;
Louis XI institua la garde suisse, et fit avec cette
nation un traité maintenu jusqu'à nos jours ^.
Charles*le-Téméraire^ ne sachant où porter s^^
brigandages^ se hasarda dans les montagnes de ce
peuple, pauvre, fier et courageux ; les Suisses lui
envoyèrent des députés porteurs de ces paroles :
V. a
• Qu'y a-t-îl à gagner avec non»? Pays stérile ,
villes pauvres , toutes nos richesses rassemblées ne
valent pas les brides de vos chevaux , les ëpées
de vos chevaliers... » Charles ne tint compte de
la harangue ; il attaqua les Suisses , et ses premiers
succès furent marqués par des cruautés qu'il ex-
pia bientôt. Chassé des gorges sauvages de Gran-
son, il vint assiéger Mérat... Dix-huit mille Bonr-
guigncms y furent exterminés , et leurs os rassem-
blés ont formé une chapelle expiatoire sur le
champ de bataille , jusqu^au moment ou les ba-
taillons bourguignons de 1798 ont détruit ce mo-
nument^ qui rappelait une défaite de leurs ancê-
tres. A cette défaite de Granson le trésor et les
équipages du duc restèrent au pouvoir des vain-
queurs ; jamais ces montagnards n'en avaient vu
de pareils ; ils prenaient l'argenterie pour de l'é-
tain ; un Suisse ramassa le beau diamant du duc^
le jeta comme un morceau de verre, le reprit, le
livra à un prêtre pour un florin; le prêtre le vendît
un éeu. Depuis ce temps il a été évalué deux mil-
lions^ et est estimé le second des diamants de la
couronne.
Peu de temps après cette double défaite ,
Nancy, dont le duc voulait faire la capitale d^un
nouveau royaume, tomba au pouvoir de Louis XI.
Charles 9 désespéré^ s'abandonna au plus violent
déêèêpbit : il laidsa croître 9a barbe et é^ Ofiglei ,
né changea plus d'habits, et^ au milieu des neiges
d'un hiver aflfireux ^ fut mettre le siège devant
Nancy, D y cottibàttit en furieux et y trouva k
■
iROi*t. Le politique Louis ne put contetiir sa joie
k cette nouvelle inattendue et s'empressa d'en
^ofiter. Sa tyrannie rf'eutpltts de bornés f eMôfirë
d» fattléo» Otîvier-Ie-^DaiÉn , barbier qti'il nink
Ibfe rtfînîsire, de sèn compère Tristan ^*^, df*ast*i>
logues^ d*èrniites et ^autres personnages de trelte
a6T(e> il s*enl!ferma dans son château dé Pîèssts^
lè^TourS , dorit les portes et les fenêtres hrfrJssrfes
êë fers , les avenues couvertes de trappes , Tiso^
hilent dé tout ce qu'il y avait de pur à la c<mr;
et, de là, au milieu des reliques qu41 se faisait
apporter de tous les coins de l'Europe , il dictait
ses traités^ ses ëdits, ses éxecutions, ses Véngean^
ces^.., et au knilieu des craintes étemelles de ta
mort , il s*amusait à y tracer le dessin de son tom-
beau futur... Son corps languissant dépérissait à
vue d'œil ; prêt à mourir enfin , il défendit qu'on
j^ciOnçftt le mot terrible et voulut qu*on TâVer-
Itt de son heure suprême en lui disant : Parlsz
petë» Il retrouva dti courage à ses derniers moments
«K estptra eii invoquant sa bonne vîer*ge... Cette
v4eipgé> témoin de toua ses erime^^ et dont il por*
tifti Ai#kli lillMrge en ptonib^eoûime pMf le^tûOt-
— 10 —
mettre avec impunitë! Après chaque forfait U
s^agenouillait devant elle et lui demandait hum*
blement Tabsolution... La France doit beaucoup
à Louis et n*ose lui en savoir gre. Mauvais fib^
mauvais frère , mauvais ëpoux , roi cruel et aana
foi^ il a cependant su rendre à ses sujets une jus-
tice sévère , réprimer les vexations des grands ,
encourager l'industrie , mettre de Tordre dans
l'administration , réunir à la couronne plusieura
provinces importantes, et affermir la monarchie.
Louis XI peut être un grand roi , mais à coupait
ce ne fut pas un bon roi. Son successeur ne fut ni
Tun ni Vautre; au contraire de Louis, ditCom»
mines, Charles YIII avait bon cœur et mauvaise
tétc : ce Gommines , autrefois secrétaire du duc
de Bourgogne, et que Louis attacha à lui pendant
sa captivité à Pérou ne, a été Thistorien le plus
célèbre de son règne. SHl rendit quelques services
à son maître pendant sa vie, il fut bien funeste à
sa mémoire en consignant, jour par jour, toutes
les horreurs de sa vie privée et le peu de foi de ses
actes royaux. Non seulement Louis fut toujours
perfide, mais en trompant ses voisins il leur* ap-
prenait à Tétre ; aussi fut-il souvent dupé , et ses
vengeances alors étaient terribles. De sombres ca«
chots, des cages de fer et son tombeau , voilà les
seuls monuments que nous a légués son règne.
Plus de quatre mille victimes Tont précédé au
tribunal suprême, où il arriva dëcoré du titre en-
core inusité de roi trèS'Chrétien , . . . il eût mérité
plutôt celui de roi trèa^superêtitieux ; on n*avait
pas encore appris à distinguer deux choses si dif-
férentes. Tous les rois depuis Louis XI ont porté
ce titre de roi très^hrétien , bien peu Tout mé-
rité!
Charles n avait pas quatorze ans lorsqu'il monta
sur le trdne. Dans un pays où la couronne est hé-
réditaire, il ne peut y avoir de troubles que pour
la régence ; aussi , à chaque minorité, voit-on une
guerre civile. Le duc d'Orléans, gendre de Louis,
voulait gouverner sous le nom de Charles VIII^
mais les états de Tours ne le lui permirent pas.
Il fut se faire un parti dans les provinces^ fut
battu et rentt*a en grâce en attendant de régner à
son tour. Le grand, ou pour mieux dire le seul
événement du règne de Charles^ est la guerre de
Naples : le jeune souverain , entouré de jeunes
courtisans , se prend de passion pour la gloire ,
rassemble toutes ses forces et jure de ne revoir
son palais qu'après avoir conquis l'Europe ; il en-
tre en vainqueur à Florence, à Rome, où régnait
l'horrible Borgia qui daigna le proclamer empe-
reur d'Orient, à Naples enfin, d'où il repartit après
avoir pris le titre à! Auguste. C'est tout ce que
lui TiUt M oûoquâte : à peine wri?^ an Fran^Bâ
dis lui fol enleva par Ferdiaandi!^ Caiholiçue^
GoDwlve de Çofdouei qui reodireat le royaume
à BPfi aouver^in, Charles mourut d'uue apoplexie.
I^ ëtato de Tours avaient été convocpaés par çp
prince, en iU^ i iU firent une peinture efl^yantis
iles n^lbeuTB du peuple» mais n^ cbangèreiH r i#n
à .«a situation. « Le peuple, disaient-ils, oppriiM
a 4m £0113 par des gens de guerre qu'il pa^^ ^pepea-
4|i|t ppur en être pi*otége , et par les oIScieiBS
iJs^g^s de penoey oir les revenus du roi , astiabass^
iU ^ fn^Â^pns 4lévastees, et erre sans «uj^istanas
à^a^ Içn f^êt^. La piMpart dê^ laboureui^ k qui
9P |i ê^in jti6qu'4 leurs chevaux , attelant leufs
fl^^ies et leurs en&nts à la charrue) et^ nVisant
niéine labourer que la nuit , dans U crainte 4'êtfe
a^Tetdis et jetés da«>s les cachots , se eachent , pen-
dant le jour^ landisque d'autres ^ redits au déses-
poir, iiiieut chez les étra^geI;s^ après avoir égorgé
leur fanaille , qu'ils n'étaient plus en état de nour-
rir ^^^. »
Louis XII commença son régne par œ mot
célèbre qui mit un terme aux divisions inté-
rieures : « Le roi de France ne venge pas les in*
f jures du duc d'Orléans. ^ Les peuples sont bien
pKÙns difficiles à contenter qu'on ne le croit
généralf(0ient« î^mj pédant k la manie des foi|-
i^ «5 —
quétea qui 3'^tait emparée de la noblesse fran-
çaise^ et encouragé par son ministre le cardinal
d'Amboise, dépensa Targent de ses sujets à des
victoires inutiles en Italie, où il s'avilit par l'al-
liance de rhorrible famille des Borgia : battu en
France par les Anglais et les Impériaux, trahi
par le pape, les Suisses et Ferdinand-le-Catho-
Uque, il eut un règne peu brillant à Textérieur,
mais il aima réellement son peuple et en fut aimé.
Grâce à cet amour du bien public et à une sage
économie dans quelques parties de l'administra-*
tion, tout prospéra dans le royaume : le com-
merce devint florissant , l'industrie augmenta
rapidement, les villes se bâtirent mieux, les fau-
bourgs s'agrandirent , les landes et autres lieux
incultes se défrichèrent. Cependant, les denrées
se soutenaient à plus haut prix, preuve de plus
grande consommation. Les péages, gabelles, greflès
et autres revenus semblables augmentaient des
deux tiers sur le règne précédent ^^. Ce bien--
être était si réel et si bien senti qu'à une assem-
blée des états généraux qui eut lieu à Tours,
l'orateur chargé d'ordinaire de porter au roi les
griefs et les doléances de la nation , lui fit le ta-
bleau de la France heureuse, et lui donna, au nom
de ses mandataires , le titre de Père du peuple l
Qu^U^ plus douce récompense peut demander un
— il» -^
roi ? Louis en ëtait digne. II versa des larmes de
joie en le recevant... Les Français en versèrent
de douleur à sa mort : a Ce bon roi, disaient>il8,
nous a fait vivre en paix ; il a ôtë la pillerie des
gens d'armes et mieux gouverne qu'aucun roi ne
fit '\ >
En rësumë , le r^ne de Louis XII ne fut pas
celui d^un grand capitaine^ encore moins d'un
grand politique ; mais ce fut celui d'un bon père
qui administre en conscience et avec amour le
bien de ses enfants. Son successeur ne devait pas
rimiter. Aussi Louis qui le connaissait, disait-il
souvent de lui : Ce gros garçon gâtera tout...
Ambitieux de tous les genres de gloire , Fran-
çois P' désirait surtout briller dans les jeux guer-
riers, et dans les fêtes de sa cour. Une figure noble
et belle, une taille ëlevëe, de Tadresse, de l'esprit
et beaucoup de vivacité lui eussent fait un nom
s'il n^eût été que simple baron ; mais ces bril-
lantes qualité , nécessaires au courtisan , nuisi-
rent à rhéritier du trône , et surtout au succes-
seur de Louis XII.
Aussi présomptueux que brave, il crut conqué-
rir TEurope avec autant de facilité que le prix
d'un tournoi ; après s'être fait des ressources par
la vente des charges de judicature , il mena les
Français au-delà des Alpes , battit les Suisses à
— 25 —
Afarignan; et, après cette victoire chèrement
achetée et un traite de paix perpétuelle avec cette
nation, qui s'engagea à ne plus servir aucun état
contre la France ^ il se fit armer chevalier par
Bayard. Jojeux d'un tel honneur, le chevalier
sans peur et sans reproche s'écria en sortant son
épée : « Tu es hien heureuse d'avoir aujourd'hui
à si vertueux et si puissant roi donné Tordre de
chevalerie!... Ma bonne épée, tu seras moult
bien comme relique gardée et sur toute autre ho-
norée «*! »
Ce premier succès obtenu à vingt ans augmenta
encore la présomptueuse confiance de Fran-
çois I". Le trône d'Allemagne était sans souve-
rain ; il crut pouvoir Toccuper, mais il avait af-
faire à un terrible concurrent. Charles-Quint,
peu doué de qualités brillantes; en avait de plus
solides, qui toutes manquaient au jeune prince :
grand politique , habile négociateur, il l'emporta
facilement sur lui, et de ce moment datent tous les
malheurs de François I*'. Une partie de l'Europe
se ligua contre la France, et le roi compta parmi
ses ennemis Tun de ses meilleurs généraux, le
connétable de Bourbon. Ce dernier, vainqueur à
Marignan, ne reçut en récompense que des mor-
tifications, et s'en vengea cruellement en prenant
parti pour Charles-Quint. Bajard, la fleur des
chevaliera de Troque ^ perdit la vie eadëfeA**
dant contre lui son pays et son roi. Ce roi ioqpnn
dent 3'inquiëtait peu de la coalition : Tamour^
les plaisirs et les lettres lui firent toujours our
blier ses infortunes.
A en cxoire Brantôme ^ Tan^iral fionnivet li»
détermina à repasser les Alpes en lui parlant
ayee feu des charmes d'une belle. Milanaise ; iL
consulta &eA vieux guerriersi mais . n'épouta pua
leurs remontrances : il y perdit la foitaille dû
Pavie et la liberté. Le roi de France, vaincu pat
son sujet le duc de Bouii>on et prisonnier de
Cbarles-Quinti écrivait à sa mère : Tout est pardn
fors Thonneur. £n effet, il erétait battu comme no
lion et refusait avec dignité les propositions avi^
liasantes de Tempereur^ Il faiblit plus tard ; «en**
nuy é de sa prison 9 il aœepta le traité » revit aa
patrie et manqua à ses engagements , objetitaot
que la France ne pouvait ratifier un contrat ooé»-
reux auquel elle nWait point eu de part. Charles*
Quint 9 pris dans ses propres filet$| se contenta
dWe somme de douce cent mille écus ^ et VEurr
rope fut tranquille quelques années.
La civilisation marche vite en temps de paix»
et François I*^ Taida de tout son pouvoir ; les arts
et les lettres lurent surtout encouragés par ce
prince ^irituel et ami dea plaisirs» U achetait d«s
«• ty «-
tMÊÊSÉSt pfêimmf loi proptfsfttt «en laodàb Vax
aitisteB français , faisait Tmir à grands frais ded
Hummerits dé ritalfç-at de là Gràee^ eonsultait
Buàéf Ijaioalts , «oirespondait a^ec Ëra^ïae^ visî^
teit dumieuRS aleliws le Prknatîee -et liëonardde
Yintrik ïre premier, il fit n^i^er ^^ Fmnce la
phjnâque et la l)9tamt!|«re ; il oonmi^nça le Louvre
^ bfrtit lest^teail^x de iïliambord et de Footai--
mbieaiii Ses seins len pluseetift étaient dirigés
^mrê l'tédwoatûiti..^ Toal «liait au «aieuic , lorsqiie
ie dépsfrt de Gharke^mat pOat TAfrique lui
dMkflia de iHMTelles idëes de t)aiH|«^s { il peoê%
fiimofe Ml MtlaRaisy et le due Sforoe lui ayant
fbonri vtm prilÊ&xtm l^itime^ «1 -s^nlp^a du Pi^
taofil vl entra en Lombaidie^ ^utmd r'ein|)eteur
itnxmma *yi^ili<|(»rat de l'AiriqUe^ DeveuU tiusai
tmpmdimt t|uè son lival , il né eefigeait à lûeo
moins ^'à s'emparer de la Franee* Mais i^e fdtea
Tain qu'il se {»*ësenta derani Marseille «t Arles ;
les provençaux le contraigpîrettt 4 i^às^ar les
Alpes. Montmèrency avait tout brûlé sur eon
passage, et eè terrible expédient liti avait réussi. ^ •
L'ambition d^an roi est un cruel flëau pour nùn
peuple. Ces dtoux tentatives de conquête n^euïwnt
d'iaitre résultat que la ruine de la IVovence ; ils
avaient ftiil une solitude de la plus riobe contrée
de là FtaHM^ IHiwre praplei^
— M —
François I* n^avait pas abandoniië le Milabais;
il se ligua avec le sultan Soliman contre leur en*
nemi eommun^ et Charles-Quint eût pu succom-
ber sous leurs coups réunis, si son astucieuse poli-
tique ne fut venue à son secours : il employa le
pape , entama des négociations, les fit traîner en
longueur et obtint une trêve de dix ans. Ce fut
alors que, se fiant à la loyautë de son ennemi le
plus acharné , il ne craignit pas de lui demander
une entrevue que François accorda, sans en pro-
fiter, comme l'eût peut-être fait son rival. Elle
eut lieu à Âigues-Mortes, où, d'après la relation
d'un témoin oculaire , il nVst gracieusetés que le
roi ne fît à l'empereur : «c II se rendit à Vauvert
et de là à la plage ; les souverains s^embrassêrent
cordialement et firent leur entrée à Aigues-Mortes
au bruit de Tartillerie de la ville et du port : après
avoir repu, Tempereur fut se jeter dans son lit, et
la reine étant venue heurter à Fantichambre , le
sut éveillé , et vint avertir le roi, qui s'y rendit
avec quelques seigneurs et lui dit en entrant : Et
puis, mon frère, comment vous trouvez- vous?
Avez-vous bien reposé ? L'empereur répondit
qu'oui, et qu'il avait tant banqueté qu'il lui au-
rait convenu dormir. Le roi lui répliqua qu'il
prétendait qu'il eût en France le même pouvoir
qu'en Espagne et lui donna en signe d'amitié un
— 29 —
diamant estimé trente mille ëcus, avec ces mots
autour de la bague. Dilectionis testis et exem-
plum. L'empereuç ôta son bonnet pour remercier
le roi qui avait aussi ôtë le sien, et ayant pris ]e
cordon de Tordre quUl portait au col, il le mit à
celui du roi, qui en fit de même*.. Après le sou-
per, la reine se déroba et alla voir si la chambre
où l'empereur son frère devait coucher était prête,
et ayant trouvé tout disposé^ elle en avertit ce
prince et Faccompagna jusqu'à la porte. Le len-
demain le roi vint Vy prendre, ils entendirent la
messe et l'empereur se rembarqua pour l'Es-
pagne ; le roi revint à Aigues-Mortes après l'avoir
accompagné dans sa galère, et le 17 juillet 1538
il alla coucher à Nîmes. » Telles sont les véri-
tables circonstances de cette entrevue, rapportée
par deux témoins oculaires ^^.
Cette entrevue singulières^ semblait devoir ter-
miner tous les différends. ••• Peu de temps après
les deux princes se battaient sur toutes leurs fron-'
Uères, le sang coulait en France comme en Italie,
et la politique notait plus seule à faire des vic-
times : le fanatisme était venu y mêler ses fu-
reurs. Ce serait ici le moment de parler de Luther
et de la réforme, si cet événement, immense dans
les fastes de TËurope, ne devait ti^ouver sa place
ailleurs.
Noos n^Muadneamê pis aénie li làomXf Mbs
le pontificat duqtiel Det i$?ëaeaEieBt s'aoconpls»-
saît, eût pu étouffer les semenoes du sohisDm 9n
agissant autrement qu'il ne fit, et essayant de
gagner Thërësiarque. Le fait est^ et ici de sont las
fidts seuls qui nous occupent ^ qu'A le m^Msa et
rexeommunia en 1530.
Qc fougueux théologieii, sèufeAii par fMd^rie,
duc de Saxe , devint alors FeiitteBli ifv^wnci-
liable de la papauté t k Sa>e^ la Hesse, BvûJÊh
mkhj le Danemarck^ la Sukde secouéMnt le f&9^^
2^uÎDgle ajouta aux erreurs de Luther^ e( entiilAia
la {dus grande partie de la Suisse» Peu de tamps
après Grenète embrassa les nouvelles opinions,
et devint Tune des capitales des protestatta de
toutes les sectes nëes du Iuthéi4ani8me> pMtni
lesquelles se distingua Celle de Calvin, dont k doe-
trine fit de rapides progrès. Des opinions neuves,
hardies, des problèmes importants à r(&ietedM> une
grande liberté de penser, firent à Calvin des pF*-
séljtes parmi les érùdits; le vnlgaira y trottva
d'autres avantages , au pretmer rang desquels ^n
doit placer celui de ne pas payer k dtme.
Charles^Qnint avait accordé aux luthériens la
liberté de conscience^ et François 1% p^ ^^^
singulière bisarrerie de sa poIHiqne, seUguèlt tt9tc
les hérétiques d'Allemagne et kissait brâicr Mtiz
-.-—-. -.»»•■•
^ 94 —
de MOétftM. Plttsieiirs bourgs du Languedoc et de
Pretenee où s'étaient conservées les traditions
^6s Albigeois, avaient embrassé la réformé; ils
iîirent condamnés au feu. Le parlement d^Aix
a^aft sollicité la sentence; elle fut cruelle, et
l'exëeistion épouvantable. Les malheureux villa-
geois étaient poursuivis dé toôhefs en rochers à
ia lue^r des feux qui consumÂiént leurs maisons.
Diii9 k seule ville de Cabrîêrës on égorgea plus
de sept cents habitants et toutes les femmes furent
>«rtlée» dans un grenier plein dé paille ; celles qui
tentaient de ' s'échapper par les fenêtres étaient
Mpoussées à coups de piques ; enfin , selon la te^
Hcw de la sentence, téÉ maisons Jurent rasées ^
le» bois coupés, et ce pays naguères si fertile,
éevint inculte et désert *^ Ce fut là le prélude des
jttetres civiles qui ont ensanglanté la France. On
Irit depuis lorâ des rois ordonner ces massacres et
se SôuiUer euic-méiûes du sang de leurs sujets. On
doit, du moins, à la riaémoîre de François I" de
tfifé quHl fut affligé de ces horreurs, et qu'il re-
eommanda en môttii^antà son fils Henri II défaire
informer au sujet des injustes vexations du
paHérrtetlt StAlx en cette occasion
' Quelques tictbires^ au nombre desquelles on
itistingue celle de Gérîsoles, mais qui furent sans
féMdtàt, terminèrent le règne de François l^^y
— tt —
qu'on ne peut mettre au nombre des bons rois^ el
qu^on ne doit cependant pas frapper de réproba-
tion, n fit beaucoup de fautes, leva beaucoup
d'impôts, vendit les charges publiques^ s'aban-
donna aux plaisirs^ par fois même à la dëbauchey
mais il aima les lettres^ protégea les arts, adoucit
les mœurs des Français et ne fut étranger à aucun
genre de gloire : léger, prodigue, imprudent^ am»
bîtieux ^^j il fut aussi loyal, généreux^ spirituel,
affable. Ses contemporains avaient quelque droit
de se plaindre de lui^ la postérité doit l'absoudre.
Digne fils de François 1*% Henri II avait les
goûts, les vices , et presque toutes les vertus de
son père ; aussi continua-t-il son règne : conune
lui, amoureux et esclave de Diane de Poitiers^ le
crédit déjà bien grand de cette favorite augmenta
au lieu de diminuer; comme lui, rival de Charles-
Quint, il lui prit, avec Paide du premier des
ducs de Guise^ plusieurs villes de Lorraine et se
laissa battre plus tard ; comme lui, il fit brûler les
hérétiques; comme lui, enfin, il fut passionné
pour la chevalerie et les jeux guerriers^ et périt
dans un tournoi. Vers le milieu de son règne il
prit une singulière fantaisie à Charles-Quint :
après neuf voyages en Allemagne^ six en Espagne^
sept en Italie^ quatre en France^ dix aux Pay»-
Basj deux en Angleterre et deux en Afrique;
- 55 —
après des victoires et des conquêtes innombra-
bles, ce hëros du XVF siècle, fatigué sans doute
d^une carrière si laborieuse, s'^enferma dans un
cloître, ou il regretta plus d'une fois son an*»
cienne splendeur et son activité passée. Phi-
lippe II, son fils, occupa sa place dans VEurope,
qu'il remplit de sang et de bûchers. Les trésors
qu'il tira du Mexique et du Pérou luî fournirent
les moyens de guerroyer sur tous les points : il
fut nu moment de prendre et saccager Paris. . .
Le nombre des calvinistes s'accrut singulière-
ment sous ce règne , et peut-être en raison des
maux qu'ils soufirirent* L'expérience nous a ap-
pris que la persécution est ]e plus mauvais de
tous les moyens pour anéantir les sectes reli-
gieuses : sous Henri U, les calvinistes se compa-
raient aux premiers chrétiens , et cette compa-
raison aurait intéressé en leur faveur si Calvin ,
tout puissant à Genève , n'eût pas livré aux
flammes le fameux Servet^ qu'il accusait de ne
pas croire à la Trinité I Les passions des hommes
ont de tout temps dénaturé la morale religieuse
et corrompu ses bienfaits. Le moyen le plus
simple de faire triompher sa religion^ n'était-il
pas de l'embellir par l'exemple des vertus chré-
tiennes ? Mais elles étaient oubliées, on égorgeait
au nom du Christ!. ..
V. 3
— !W —
La mort de Henri II laissa Yétki eti pnlie âilt
factions : un roi enfiint est une bonne fbrtone
pour les princes ambitieux, et il y en avait bon
nombre à cette époque.
Des massacres multiplies et Pexëcution d'un
conseiller au parlement, distingue par sa nais»
sance , ses talents et Taustëritë de ses mdeurs >
avaient irrite les reformes contre les GnisQ
qu'un zèle outre pour la religion avait tiMddS
odieux à tout ce qui n'était pas fanatique. Lëé
princes protestants vôulureht en profiter : une
conspiration dont Gondé était le chef vint ëcfaouétr
à Amboise, devant le gënie de Guise; les conju-
res périrent en braves , et les supplices redoublè-
rent Gondë, qu'on n'avait pu convaincre^
allait pourtant être pendu, quand François II s^é^
teignt . Infirme dès sbtt enfance^ ce priiice ne fut
pour rien dans Thistoire dé son règne. Il laissa ta
couronne à Charles IX, âgé de dîîc ans, c'est diiiè
que rien n'était changé à Tétat des choses que 16
nom du roi. ,
Le duc de Guise avait fait épouset à Français If
là belle et célèbre Marie Stuart, qui^ malgré toii
atjûour pour la France , fat obligée de retourttét^
eh Ecosse où l'attendaient de nouVeilés et gràndëa
infortunes ^^.
Nous voici arrivés à ce règne dé Ohàtteâ IX ,
— 56 —
qui a acquis dans l'histoire une bien déplorable
c(flëbrîlë. n me dera impossible de suivre tous les
fils de celte astucieuse politique^ qui conduisît la
France et son roi au plus grand des crimes. Quand
des têtes comme celles de Catherine , de Phi-
lippe 11^ des deux Guise ^ de Calvin et du jésuite
LaîneK^ successeur dlgnace de Loyola; quand
d'illustres personnages tels que Montmorency^
Goàdé, l'Hôpital, l'amiral Col igny et Thëodofe
dé Bèse se trouvent en pre?sence soutenant de«
int^ét» divers, ori doit s'attendre à Uh^é lutté
d^antanl plus terrible que le peuple partage leur
furetir en insthiment aveugle, et ne demande
qu^un signal pour frapper. Le cadre adopté jus-
qu'ici m'interdit les détails de ce drame long et
sanglant; contentous^nous d'en retracer les pritici-
paut résultats.
Le plus beau rôle appartient au chancelier l'Hô-
pital : il essaya vainement de concilier les esprits,
il avait à ftiire à l^ambition et au fanatisme. Ca-
therine de Médîcis, tantôt pour les calvinistes,
tantôt pour les catholiques , ne voulait que gou-
verner, et rien ne lui coûtait pour en venir à aés
fins : superstitieuse et non pieuse, la religion n'é-
tait iche* elle qu'un moyen.
Une ambition effrénée animait tes Gnise , q[m
ne TiftMeut rien moins qu'au trône , ^ le module
9.
— 5« -
Coligny n'avait pour devise que sa religion , son
pays et son roi* Ce roi^ le personnage le plus nul
de la cour^ n entendait et ne voyait que par les
oreilles et les yeux de Catherine.
La France ëtait en feu ; chaque province avait
sa guerre civile^ plusieurs parlements répétaient
le signal du parlement de Paris : courrez sus aux
huguenots ^M et les huguenots périssaient par mil-
liers; à Toulouse^ en cinq mois, on en tua cinq
mille ^; vaiqueurs sur quelques points^ ils souil-
laient leur triomphe par des représailles non
moins horribles : un de leurs cbefs^ le baron des
Adrets^ est devenu célèbre par sa cruauté dans un
temps où elle était si commune, t Aussi , dit Bran-
tôme , le craignait-on plus que la tempête qui
passe par de grands champs de blé ; jusque là que
duns Rome on appréhendait qu^il arm&t sur mer
et qu'il la vînt visiter. » La mort qui décimait les
masses hérétiques et catholiques n'épargnait pas
les chefs: Montmorency, le maréchal Saint- An-
dré, le roi de Navarre, père de Henri IV, furent
tués en combattant; le duc de Guise termina sa*
belliqueuse carrière sous le poignard de Poltrot ,
gentilhomme protestant. On s'était battu avec
acharnement à Rouen, à Dreux, à Orléans, et, dans
tous ces combats célèbres^ pas un étranger ne fut
tué; le Français n'en voulait qu'au Français! si
— 37 —
Ton pouvait justifier cette ardeur fanatique , - le
duc de Guise serait un grand homme : doue des
plus nobles qualités ^ il était Toracle, le seul espoir
de^son parti et depuis long-temps faisait pâlir l'as-
tre de Catherine^ qui le haïssait mortellement et
qui dissimula mal sa joie en héritant de son pouvoir.
Tous ces^ grands événements, pressa, accumu-
lés l'un sur l'autre y ne laissaient pas les haines
s'assoupir : une nouvelle bataille fut livrée à Jar-
nac; le prince de Condé, vaincu^ y fut assassiné
de sang-froid par Montesquieu après avoir rendu
les armes. Goligny sauva les débris de Farmée y
qui prit pour chef le jeune Henri de Navarre^
destiné à jouer un bien plus grand rôle. La ba-
taille de Montcontour, aussi funeste à la réforme
que celle de Jarnac , fut suivie d'une afireuse
boucherie de huguenots; leur sang ruissela dans
le Béam, la Saintonge , la Guienne et le Poitou.
Fatigué d^une si longue campagne, le due d'Anjou
et Catherine accordèrent à leurs ennemis une paix
perfide , et semblèrent revenir à des sentiments
humains, à des idées de tolérance. Ils firent plus:
ils' attirèrent à la cour le vieux amiral, que Ca-
therine et Charles IX accueillirent avec des ap-
parences de vénération, d'amitié^... et le jeune
roi de Navarre, à qui Charles fit épouser sa sœur.
Ce monarque avait atteint sa majorité, mais IV.
— 58 —
cenéf nt que sa raàre avait pria mr lui était Irap
fort pour que oet ëyënement oKange&t rien aux af-
fiEiirea du royaume. Son caractère était auasi timide
que soinbre , haineux et dissimule. Gatherine l'a-
vait aoooutumé à trembler devant elle ; il eonau-
mait sa triste existence à craindre y à soupçonner
tout ce qui. l'entourait et n'avait quelque plaisir
que dans les vices auxquels il se livrait avec eette
brutalité qui en augmente la laideur. Aus« sa
mèi>e ne lui tnvait-elle qu'un défiiut : celiti de
ne pas savoir donner à ses goûts une forme agréa-
ble et polie. On ne peut tout réunir, et la bo»ue
femme avait tort de se plaindre de cettQ légère
imperFeetion.
La cour, quoique appauvrie par tant de guerres
civiks, élait Piniage du goût, de la grâce et de
Populence. Cent cinquante tillea d'honneur oliôi-
sies parmi les plus belles et les p)u3 nobles de
France y répandaient un cliarme corrupteur qui
laissait peu de place à la politique et aux pensées
sérieuses^ on y oubliait la religion pour les dfu-
êe$, les spectacles , les concerts et les fêtes de tout
genre. Catherine seule veillait au milieu de ce
sommeil enchanteur ; elle veillait pour caresser
ses ennemis, semer la discorde dans leurs rangs
et les anéantir après. L*un des soins les plua as^
sidus de Tastucieuse italienne était d'instruire son
— 59 —
fibà jouer^dansThomble tragédie qu'elle prépa-
jW>t y vku rôle digne d'elle. Son disciple fit mer-
YfiUIe cette fois : sa sœur élevait quelque .scru-
pules religieux sur ce mariage , qui devait attirer
à Paris le roi de Nayarre et sa cour ; Charles cour-
rrac^ s'^ria : « Si ma sœur fif argot refuse , je la
conduirai épouser en plein prêche. » Le pape ,
q^ n'était pas dans le secret , se plaignait avec
amertume de cette alliaqce avec un roi huguenot :
.« Groyea en ma parole, dit Charles au légat du
pontife , je sais ce quQ je fais et ma mère aussi ;
encore un peu de temps çt le pape sera obligé de
IdBuer mon zèle pour la religion é » Us appelaient
cela de la religion!... Lorsque l'amiral, trompé
pas les lettres du roi , quitta ses champs malgré
les conseils de tous ses proches pour se rendre à la
cour^ le jeune hypocrite osa lui dire en Pembras-
sant : « Nous vous tenons maintenant , mon père,
vous i^ nous échapperez plus ! » La reine de Na-
varre y £emme simple et austère, mais clairvoyante,
pouvait âiire échouer leurs desseins , elle fut em*
poisonnée. Charles l'appelait sa bonne et chère
iantey sa mieux aimée
Mais en voilà bien assez pour faire connaître la
part qu'eut le roi dans cette infernale machina-
tÀQimi dont la préméditation est assess prouvée par
tou^le^ auteurs c^mtemporains.
— W) —
Henri de Guise, fils du dernier duc de ce noniy
ne respirait que vengeance depuis la mort de son
père^ qu^on affectait d'attribuer au vénérable ami*
raL II n'eut pas la patience d'attendre le dénoue-
ment , ou craignait de manquer sa proie : il en-
voya un assassin qui ne fit sa besogne qu'à moi-
tié. Coligny blessé, étendu sur son lit de douleurs,
y reçut la visite du roi, et sa grande àme, que
rien ne pouvait détromper, était encore touchée
en entendant son roi lui parler comme le fils le
plus tendi e : t Mon père , lui disait-il , vous êtes
blessé vraiment > mais je sens la douleur de votre
plaie. Par la mort Dieu ! je vengerai cet outrage
si roidement qu'il en sera mémoire à jamais... » et
le monstre , irrité contre la maladresse de Guise »
aiguisait des poignards plus sûrs.
Il hésitait cependant au moment fatal. On ne
pouvait lui arracher ce signal tant désiré par Ca-
therine et les fanatiques. Il jetait des regards fa-
rouches sur ses courtisans rassemblés autour de
lui ; tous frémissaient et croyaient voir Tarrét de
leur mort dans un moment d'hésitation et de i*e-
pentir. Galherine elle-même craignait de n'avoir
pas comnuiniqué assez de scélératesse à son fils^ et
s^étudiaità Taffermir en montrant la plus grande
liberté d'esprit. Troublé jusque dans son &me, dit
un contemporain, il était comme muet, éprouvant
des convulsions et des tressaillements. L'ordre fu-
neste est enfin sorti de sa bouche, la cloche sonne,
et cette fête infernale, préparée avec tant de soin,
commence :
Le palais, les Tuileries, les bords du fleuve,
les places publiques^ les rues^ les édifices sacrés
et profanes sortent, comme par un jeu de théâtre^
de ces demi-ténèbres qui les enveloppaient, et
resplendissent de clartés. Toutes les façades des
maisons sont éclairées comme en plein jour;
presque à chaque fenêtre brille un flambeau , on
dirait un vaste incendie qui rougit au loin Thori-f
zon. Goligny fut la première victime immolée à
la fureur de Guise et de Catherine. La mort du
vieux guerrier fut digne de sa vie.
Quelques bourgeois qui avaient devancé Theure
du meurtre, vinrent se réunir aux soldats de
Guise, et tous ensemble, à un signal, partent pour
leur expédition homicide. Guidés par ces clèirtés
terribles qui enveloppent la capitale comme dans
un cercle de feu, ils reconnaissent Thabitalion
des hérétiques à des signes fraîchement tracés.
Ombrez, dépôt* le roi y est le mot d'ordre des
meurtriei^s : quelques uns se hâtent d'obéir, et
leur vie s'éteint avec la lumière qu'ils ont allumée
pour reconnaître qui les appelle ; d'autres ^ ou-
vrant leurs fenêtres pour voir qui frappe à cette
-» lAi —
havre âvtneëe^ toniheiit ttteiiits de viftgt haUei à
U fois; un autre s'enveloppe dans d'ëpab ipéit-
meoU et feint de dormir profondément } «Ion sa
porte d'habitation vole en éclats, et d^iK cm trais
iMisassins y se détaehaut ^ vont Tégorger duns son
Ut. Quelquefois ils n-ensauglantent pas le fojer
domestique, mais» amehant la victime de sa çon-
^he , ils la traînent dans la rue et la livrent à la
populace.
Qatberine, alors à sa fenêtre, compte et iicnmne
tout bas à l'oreille de son fils, les cadavres qam 1^
^ soldats entassent dans la cour du Louvre^ sourit à
ceux qui dépouillent les morts, les mpntee à ses
tourtisans, et semble s'enivrer au miliea de eelte
vapeur de carnage, qui s'élève comme un nuage
autour d'eUe*
Pendant que le sang coule ainsi à grands flots
sous les yeux de la reine, les gardes de nuit y les
quartenters, les dizeniers, les boui^eois auxquels
on a distribué des armes, sortent de leurs de-
meures, en répétant : Tuel tue! Le bruit des
clocbes y le frottement des armes , le retentisse-
ment des pavés , la marche vagd^nde des assas-
sins^ le mouvement de translation des flambeaux,
se mêlent à ces cris que l'écho nocturne rend
plus horribles encore. Alors le massacre <leirieiit
général; point de ^é pour l'âge ^ le sexe eu la
«i|]|qi|Q^ ^n T'«P««n»ît Vt^oF^UqW î quicqnque
l^^nii^ ^ {WT^ ^ ri|pfvr(>ehç 4'uf(« b^iodi? aripëe,
O» ^t. ^(WT9i9f é ) f^ l)^é^u$ ; q^^ Krefus^ de
«4pf^4]^ «»ij 4^m%acle l$i vi^ est l^^^(^\ie; qui
u» fKWrte f9A m feras d^ ci;m^ feln^cbe, est he'r^-
Ui&r VuppeU?, 6»st hérétique. Ije3 ^ssas^fn^ p'ont
pas besoin de parler; il n'y a pas ici déjuges;
|oi»t 9Sk feoiifreau } §i i^ r^r^îs p^r-plo^ tW»bçii|t de
telfs.là¥i»fij, cVrt pwr 9e plwpd^* de leur f^tigup,
OU pOOT î««dt#r nu pfttkut i WSqre Je plu# §pu-
mmpkt
P^ursuiYÎs de low^ep piMTli par le% i^^ii^^Qiçs. dopt
ifi^^endi^ k qapîtajii» , tr^q^^ fitOi^mQ die^ feétes
iisiuves, eu vain kft prot^sUiut^ ^s^yent^-ils. de
trempa lei destÎB : s'jlsi §e jeUpl^t: dws des teqi-
plea catholicpies , d^ g9r4e# ^rm^s veiUeut aux
portas { sHl3 s'(^pFoch^i|t du ï^ouyi^e) \^ Sui^iies
sont là qui \^ aUeud^ut) le o^Qusquçt en arV^ut ,
et Charles VU çst ^yqq e\m 1 Tarquebusç à la m^Wy
Iq monalre tire mv s^ si\|^t3 ^l
Ce joar, lu nuit suiy^te çt 1^ Jour qui vint «n-
suitfi écJlanrèrent de nouvelle Si^^u^ d^ meurtre.
- w -
blics restèrent suspendus; les rues désertes ta'ëtaieiit
traversées qu'à de longs intervalles^ par quelques
voyageurs qui regardaient autour d'eux, et se
hâtaient de fuir cette ville homicide ; toutes les
fenêtres étaient closes, et les portes des habita-
tions fermées. Les catholiques, frappés de terreur
comme les réformés, n'osaient sortir; quelques
centaines d'individus armés tenaient dans leurs
mains la vie d'un demi-million de leurs sem-
blables •
Le crime était consommé et le supplice de
Charles commençait. Ses terreura toujours crois-
santes ne lui permettaient pas de prendre un ins-
tant de repos ; soit crainte ou remords , il rejetait
la responsabilité de cette journée : «c Ecrivez ^
disait-il, que les Guise ont tout fait... > Mais
Catherine est là pour le calmer ; elle lui prouve
par de longs raisonnements que son action est
juste et agréable à Dieu, elle lui montre les
prêtres de Nismes jetés vivants dans un puits ,
les sépulcres des rois violés à Cléry et à
Vendôme, l'église de Saint-Martin détruite , les
ruines de dix mille monastères, les reliques des
saints jetées au vent!... Et Charles, rassuré^ rit
de ses visions et se jette dans les bras de sa
mère ^* ... De pareils êtres peuvent-ils, après de
pareils forfaits, vivre et régner encore? Ecoutez,
— «5 -
et voyez la fin : Le massacre a parcouru la
France , Gatlierine s'est délivrée de tous . ses en-
nemis, elle a atteint son but, elle va être heu-
l'euse... Mais la nuit du 2U août a pour jamais
éloigné le sommeil de ses paupières; ses cheveux
ont blanchi en quelques heures; sa figure s'est
ridée , et dégoûtante du sang de ses sujets , elle
n'inspire plus que Thorreur... Charles est plus
hideux encore : à peine âgé de vingt-quatre ans,
il a toutes les infirmités de la vieillesse , sa tête
fi^affaisse sur sa poitrine , son œil hagard est
conmie obscurci ; on dirait qu'il n'entend plus ,
qu^il n'est déjà plus de ce monde. •. Il a peur de
sa mère.. • de lui-même! Enfin, il meurt aban-
donné de tous, même de ses complices ^ et la
postérité maudit encore son nom...
Nous en avons assez dit pour prouver que la
religion et ses ministres sont innocents du crime
de la Saint - Barthélémy , qui fut seulement
l'œuvre d'une femme horrible, d'un souverain
lâche et tremblant devant sa mère qui avait su
le fasciner comme elle avait su fanatiser le peuple
de Paris, pour le faire servir à ses coupables
desseins... Ce jour là, sans doute, on eût vu
Timage du Christ se couvrir d'un sombre voile
et des larmes couler sur les joues cicatrisées de
celui qui mourut pour le salut des hommes , de
.. f)\3 —
celui dbtit Tétistetttce huttàim et la Tôttguè
agonie ont divinise Tahiôur et la charitë...
Mais revenons à notre rëcit dont aucun épisode
ne viendra plus maintenant arrêter la course Ra-
pide. Nous avons voulu , efi ire dissimulant îien ,
montrer du moins dans le^ fbits è\it-méme^
quels Airent lès Vra%$ atttet^H d«S ittbhstruieûi
masûiactes trbp )souvent tisprùchës âù 6)Bitho!it^iM1iè.
Le due d^AnJôU, ^ là nouvelle àe là tnôft de
sôH frère , àttlVa en toute b&t^ de PblbgM tt^ t>ii
lui aVàit dontt^ utrè coûlroUM d6fit lé poMs !e
Atîguaît. Vainquent à Jaruac et à BTxitthîotttotWf,
les fàtaatiques croyaient^ aveb quelque faistm^'
Voiïr en lui un chef et Guîse ttu riVal ; il ne iîA
qu'un roi faible et bul. Son caractère tst un sîlft^
gulier mélange de quatitéSs et de vicres opposés.
Oh tw>uve en lui , dit Vitet^ les è^fltàVâjgàtfceS d^ùn
idiol, les puérilîtës d^ln enfant tna! ^ev^, dé ïâ
snperslition... et parfois de h ]péhétratîtm et dû
jbgeWent. Assez brave pôtir tfôtteerVer sron î^àtig-
fVoid et payer de sa pef^Ube ^ttt un bhamp èé
bataille, il pAlîsèaît à la vue d^uft'è demi-ddUfcaÎYie
de bôîirgeois armes dépiques^. Henri ëtailnëaveô
d'heûreusès dispositions; à Gatlierine appartefuaréfttt
ses dé&utsèt sa nùUitë. Aussi fatale^i^êseûfanta '(^\
ses sujets, cette mëgèrè l'es abrutissait pdur gouiref-*
ner... Mais ton Yèffiè âàit pas^. Elle H^a^âflft
plus dé Jpàrtîâaiis paMni les fàtaatiqiies dë^rôtii^s à
Tambitieux duc de Guise, elle en avait p'çxi daaé
les rangs des politiques ou amis dé la royauté 6t
des lois, elle était en horreur aux Huguenots .••
Henri de Guise est le héros du règne d^tienri III:
A un courage brillant, à Un coup-d'œil rapide et
sûr^ il joignait les avantages extâ*ieurs lés plus
séduisants; Adoré de la popukcé qui lé éôn^iafssâit
sdMle nom ds Bcàafré^ poussé ^ar ht dudiesse de
MotitpéJDisitèr sA sceur^ et isés notnbtièù^ paKisàtts,
il rêva la reyànté^. Pour arrivera sdhbut^ il fitreVï-
vM une ligtte ^catholique ibiagitiée autrefois par le
cârdiftàl dé L6rhiine, [et Oi^gahisa nne guerre
civile qui affligea la Franefè jusqu'au côurobUttr
Dïéiit d'Henri IV.
Ou avait n^assacré desmillieris dé protestànts^léu^
sang len enfanta d'autres; le parti persécuté, décimé,
était devèUu plus pùissant.Henrilir, vaincu et forcé
de fiiiré ce sacrifice ^ sa sûreté, signa une paix hon-
tisùiire avec les réfohïïés : il s'y déclarait contré te
ilkaa^ck^ dé la Saint- Barthélémy qu'il avait aidé,
et réhabilitait la mémoîté de Goligny et des chefs
pfotéaÀan^îs qu'il avait fait égorgfer ; l'exerciée dé
Ifettf Wliglôn étaitlîbt*e ; ib étaient admis aux chaip-^
g^, ette. , etCi Les fanatiques Ue virent dians le traité
qU'ncfe Injure à la relîgioU, ilss'unifc'eUt éOUtk*e leurs
eiilMH!ili» ^t jurèîrekitdén'^èéirqa'à^isecbefdé la
— w —
sainte ligue. Henri mëprisë, haï des deux côtes ne
yit d'autre moyen desortir de cette situation qu*en
se déclarant chef de cette ligue organise'e contre
lui : il n'en retira d'autre fruit qu'un surcroît de
mëpris... Pendant que Henri de Navarre exerçait
avec sa noblesse dévouëe^ une bravoure et d'ans-
tères vertus que devait plus tard admirer la France;
pendant que Henri de Guise entretenait Tardenr
fanatique de ses partisans et de son peuple pari-
sien , le roi Henri le plus puissant des trois par
son titre, passait ses jours et ses nuits dans des dé-
bauches infâmes avec des favoris dignes de lui.
Le désordre de ce temps était hideux ; il semblait
que la Saint-Barthëlemy eût laisse dans les esprits
un besoin de sang que rien ne pouvait assouvir.
Toute éducation se tournait au profit du crime ;
le comble de la maladresse était d'être puni pour
un assassinat ; il n'en était aucun du reste dont on
ne fût absous, soit en prêtant de l'argent au roi ,
soit en épousant une des filles d'honneur de la
reine-mère. Le trésor royal s'épuisait en largesses
pour les êtres les plus vils, malgré les sages re-
montrances des présidents de Thou, Hariay et
Séguier. Toutes les places du parlement étaient
envahies par ces mêmes favoris qui avaient le
double emploi d'aider aux dépenses et de les voter.
Un tel état devait amener une crise ; on comp-
— rtg —
tait à Paris plus de vingt mille conspirateurs contre
la dynastie du Valoîs ( c'est le nom qu'on donnait
à Henri III) ; des procureurs , des huissiers , des
marchands et des moines ourdissaient chaque jour
de nouveaux complots pour enlever le roi et s'em-
parer du Louvre. Un conseil qui conserva le nom
des Seize mettait en mouvement les seize quartiers
qui divisaient la capitale. Un transfuge nomme
Poulain dëjouait chaque jour leurs projets en les
communiquant au premier ministre, d'Epernon ;
enfin le duc de Guise^ malgn^ l'ordre formel du roi,
vient à Paris le braver en face , et son entrée est
un triomphe. Henri III tremble devant son sujet ,
il fait venir les Suisses à son secours ; le peuple
s'oppose à leur entrée. Les rues sont barricadées
par des chaînes de fer , des poutres^ des tonneaux
de fumier. Grillon après avoir reçu l'ordre de les
forcer , reçoit l'ordre contraire^ il se retire en ex-
primant hautement son mécontentement. Le roi
s'enfuit à Ghartres et laissa Paris en proie à Guise
et aux siens.
Ce fut là tout le résultat de ces grandes menées.
Guise ne sut pas profiter de sa victoire, et il en re-
douta les suites : il recula devant son ouvrage au
point que, voulant donner à cet attentat une cou-
leur de justice, il alla trouver le célèbre président,
Achille de Harlay, et en reçut pour toute réponse
V. A
— 50 ^
ces paroles prononcées a yeo une mëfnîsante fierté :
«C'est grand pitié quand le valet diasse le mat-
tre. Au reste^ mon ame est à Dieu^ ma foi à mon
roi^ mon corps entre les mains des méchants j ils
en feroùt ce qu'ils voudront. Vous me parles
d'assembler le parlement^ mais quand la majesté
du prince est violée , le magistrat n'a plus d^an-*
torité. }^
Le caractère de Guise était plus politique qu0
bouillant, il crut avoir nieilleur parti du roi aux
prochains états qui devaient se tenir à Blois, et se
prépara à y frapper lés grands coups. Henri III
qui le voyait s'agrandir sans cesse , le prévint :
digne élève de Catherine^ il reçut son ennemi eh
frère^ et le Ht assassiner par ses gardes, ainsi quo
le cardinal de Lorraine. Trop indécis à son tour
pour profiter de son crime et de la première
consternation des ligueurs sanà chef ^ il retomba
dans son indolence accoutumée et laissa Paris
dans le trouble, sans songer à y reparaître en roi<
La ligue en profita : le parlement fut mis à la
Bastille, Mayenne succéda à ses frères^ et ob le
proclama lieutenant-général de la couronne dé
France en attendant un plus noble titre. La fureol^
fanatique des parisiens ne connut plus de bornes*
Les rues , les marchés , les églises retentissent dé
sanglots et d'imprécations : Invoquons ces deui
— 64 —
saints ntartjrrs! Vengeoiis-les de lèura bouKremixl
sMorièrent les Seize. On agite le^ poignards jusque
dans le sanctuaire. Des hommes Audacieux s^of-
frent pour aller soulever les yillés les plus' impôt»
taiktés du royaume i Gbaoun olïre une partie dé
ses biens pour contribuer aux frais de lec^' Toy àge^
T^iiê ks loces dëebaihës tiennent servir la cause
du fanati^Éfiè* Tout excès est permis & tfui fait 1m
plue exécrables seroiefntd*
Gath^iae tenait de meuriri
Henri effraye de se yoir sanel guide au miiiea
dee feolrpétes qui le menaçaiGàt, s6 laissait aller au
dësespoir lorsque^ pour la première fois^ sa pensée
se Wirfta ySv» le roi de Navarre et ses hugilenots;
il sd|ela dans letirs bras éomnle un bomme perdu/
et (pii de se^t maùx^ choisit le moindre^ Il en
était de plus dangereux pour Itri que le lojal
Béarnais : à peine ralliance es^-élle faite que les
revers du roi se changent en succès y Paris est sur
le peiitt d^étre pris> les deux monarques soilt à
SaiJ^-Gleud^ lorsqu'un matift ( i'' août 1S89) le
roi est averti qu'un jeune dominicaid demandé à
lui jparler pour des afiaire^^ impor iantés et secrètes^
GUoi^i 9e> montre disposé à Téécuter malgré seé
courtiianfi à (|lii il répond : Eb ) que ûè dinAeUi
pA^ W préiclicateurs de Paris ^ si Toa nte vojaiC
triûter \fif religieux sans considération 1 II le fait
Â.
— 52 —
entrer. Jacques Glëment demande alors à lui par*
1er sans tënK>ins. Resté seul avec le roi, il tombe
h ses genoux, lui remet une lettre et pendant
qu'il la lit, lui enfonce son couteau dans le ventre.
Henri tombe en criant : Âh ! le mëchant moine !
Il m'a tué !..' Jacques Clément restait immobile,
les mains levées vers le ciel ; le roi arrache le cou-
teau de la plaie, en donne deux coups à l'assassin ,
les gardes accourent et Fachèvent. Dans le pre-
mier moment la blessure du roi ne fut pas jugëe
dangereuse, mais le couteau était empoisonné. •••
La dudiesse de Montpensier, avait dirigé ce
coup....
Ainsi se termina la guerre des trois Henri. Dans
cet heureux temps le poison et le poignard fai^
saient justice de tout : l'ambition du Guizard fut
punie par le f^aloiSy le méprisable Valois tomba
sous le couteau d'un moine; un poignard attendait
aussi le loyal et brave Béarnais....
Henri IV (car nous pouvons enfin lui donner
ce nom chéri) Henri IV, avec quelques sujets fidèles^
était entouré d'ennemis implacables que lui fai-^
saient et sa religion, et sa bravoure, et la simplicité
de ses mœurs. Toute la noblesse corrompue
d'Henri III se retira pour se joindre à la ligue;
Targent manquait comme les soldats ; la galté et
le courage restaient seuls. Il était difficile de
— 65 —
prendre Paris avec de pareilles ressources. Paris
fut pris cependant; mais que de peine, que de
constance, que d'habileté ne fallait-il pas au roi
des braves pour en venir là! Vaincre Mayenne
avec des forces dix fois moindres, payer ses troupes
avec des éloges et des saillies, donner partout
l'exemple d'une valeur téméraire, vaincre encore
à la célèbre bataille d'Ivri, bloquer la capitale
affamée, battre les Espagnols.... Tout cela fut un
jeu pour Henri. Il pouvait entrer dans Paris que
les ligueurs etTardeur du fanatisme défendaient
seok, il abjura pour épargner le sang des Français;
et les Français qui avaient su Fapprécier en le
combattant, lui ouvrirent leurs portes avec joie «s.
La ligue tomba alors , et avec elle s'éteignit
le XVI" siècle et ses souvenirs de sang ^.
,.r. . .,
.. i^ • ■
— 6* —
Gil4P|TBE SECOND.
3^As le nkîit des ëvënements européens^ nous
avâos lia laisser k la Fr^»ipe una large part, q«i^-
4|He resserre que fl&t notre eadre. Maie les C|îte ce
nuikiplleat )é tnesure ^e nous avançons, ce ré'
msqmi absoebjsrak le Toliimp tout entier si noveac-
condîons uqe place igale aux autoss ëtats. Nous
410US oonteoieRops donc d^un eoup^d'œil mpide
flilirieB fastes des «allons de TËurc^pe pepidaiâ les
quinzième et aeieième eièdes avant dWrWer à
rapprëciation morale des faits qui perdront dès-
lors leur spécialité pour se confondre et s'unir ^
La longue rivalité de TÂngleterre et de la
France ; la lutte contre la France au-dehors, la
guerre des deux roses au-dedans, sont les deux
grands faits de l'histoire d'Angleterre au XV*siècle,
Les maisons d'Yorck et de Lancastre pesaient alors
sur l'Angleterre conomie pesaient sur la France
celles d'Armagnac et de Bourgogne. Nous avons
i- 55 —
TU la lutte des deux royaumes et la lâche ven-
geance que les Anglais tirèrent de leurs défaites
en brûlant rhéroïne qui les avait chassés de la
terre de France. Trente ans de désordres et la
guen*e civile, lune des plus furieuses qui figurent
dans l'histoire, suivfsnt ce honteux auta^Orfé^
comme une punition du ciel... L'ambition et les
prétentions à la cQurx)nne de deux princes rivaux
;en furent la cause ou le prétexte. La force décida
par deux fois entris les deux prétendants : War^
wiok et son armée placèrent sur le trôneÉdouard
d Yoi^ck; mécontents de ce souverain, ils se révol-
tèrent ensuite^ et Henri de Lancastre qui avait
fait son entrée dans Londres » sous le ventre d'un
cheval et aux huées de la populace, fut proclame
par le peuple et le parlement. Ce dernier, qui avait
nommé Edouard roi légitime de l'Angleterre, le
déclara traître et usurpateur. •• Plus tard, Edouard^
vainqueur de Warwick, le faiseur de rois ^, rentra
dans sa bonne ville de Londres où Henri YI fut
assassiné par le duc de Glocester, qui annonçait
déjà ce que devait être Richard UL
Ainsi ilnit la guerre des deux roses qui coûta
la vie à plus d'un million d^hommes et à quatre-
vingts princes du sang royal.
Frère du feu roi et tuteur de son fils, Glocester
voulut s'emparer du trône. Fouii)è et brave ^
— 52 —
entrer. Jacques Glëment demande alors à lai par*
1er sans témoins. Reste seul avec le roi, il tombe
h ses genoux, lui remet une lettre et pendant
qu'il la lit, lui enfonce son couteau dans le ventre.
Henri tombe en criant : Âh! le méchant moine!
Il m'a tué !.. Jacques Clément restait immolule,
les mains levées vers le ciel ; le roi arrache le cou-
teau de la plaie, en donne deux coups à Fassasun,
les gardes accourent et Fachèvent. Dans le pre-
mier moment la blessure du roi ne fut pas jngfc
dangereuse, mais le couteau était empoisonne. •••
La dudiesse de Montpensier, avait dirige oe
coup....
Ainsi se termina la guerre des trois Henri. Dans
cet heureux temps le poison et le poignard fai«
saient justice de tout : l'ambition du Guizard fat
punie par le F^aloiSy le méprisable Valois tomba
sous le couteau d'un moine; un poignard attendait
aussi le loyal et brave Béarnais....
Henri IV (car nous pouvons enfln lui donner
ce nom chéri) Henri IV, avec quelques sujets fid^es^
était entouré d'ennemis implacables que lui fiô*
saient et sa religion, et sa bravoure, et la simplicité
de ses mœurs. Toute la noblesse corrompue
d'Henri III se retira pour se joindre à la ligue;
l'argent manquait comme les soldats ; la galté et
le courage restaient seuls. Il était difficile de
— 63 —
prendre Paris avec de pareilles ressources. Paris
fut pris cependant; mais que de peine, que de
constance, que d'habileté ne fallait-il pas au roi
des braves pour en venir là! Vaincre Mayenne
avec des forces dix fois moindres, payer ses troupes
avec des ëloges et des saillies, donner partout
l'exemple d'une valeur téméraire, vaincre encore
à la célèbre bataille d'Ivri, bloquer la capitale
affamée, battre les Espagnols.... Tout cela fut un
jeu pour Henri. Il pouvait entrer dans Paris que
les ligueurs etTardeur du fanatisme défendaient
seok, il abjura pour épargner le sang des Français;
et les Français qui avaient su l'apprécier en le
combattant, lui ouvrirent leurs portes avec joie «s.
La ligue tomba alors , et avec elle s'éteignit
le XYI* siècle et ses souvenirs de sancr ^.
■ 'f
'I ■■•■.?•
— w —
Gil4PITBE SECOND.
0aiis le nkîit âes ëvënements européens ^ sons
avaas dû laisser k la France une large parl^ ^«et-
que resserre que fôt notre cadre. Maie les l^ito 6^
muJtipIleat )é mesure que nous avançone, ce ré*
eii|wrf absoebierak le Tolump tout entier si noM se-
condions uqe place ^gale aux autces ëtate. Nous
nous oontenierops donc d'un coupr^l'œil nplde
fluries fastes des saisons de TËurope pepidMrt les
quinzième et «eieième eièdes avant d^wtwén h
rapprëciation morale des faits qui perdront dès-
lors leur spécialité pour se confondre et s'unir ^
La longue rivalitë de TÂngleterre et de la
France ; la lutte contre la France au-dehors^ la
guerre des deux roses au-dedans, sont les deux
grands faits de l'histoire d'Angleterre au XV* siècle.
Les maisons d'Yorck et de Lancastre pesaient alors
sur l'Angleterre comme pesaient sur la France
celles d'Armagnac et de Bourgogne, Nous avons
i« 55 —
TU la lutte des deux royaumes et la lâche ven-
geance que les Anglais tirèrent de leurs dë&ites
en brûlant Thëroïne qui les avait chassés de la
terre de France. Trente ans de désordres et la
guen*e civile, lune des plus furieuses qui figurent
dans l'histoire, suivpnt ce honteux auto-dorfé^
comme une punition du ciel... L'ambition et les
prétentions à la couronne de deux princes rivaux
.en furent la cause ou le prétexte. La force décida
•par deux fois entris les deux prétendants : War-
wieà et son armée placèrent sur le trône Edouard
dTorck; mécontents de ce souverain, ils se révol-
tèrent ensuite^ et Henri de Lancastre qui avait
fait son entrée dans Londres » sous le ventre d'un
cheval et aux huées de la populace, fut proclame
par le peuple et le parlement. Ce dernier, qui avait
nommé Edouard roi légitime de l'Angleterre, le
déclara traître et usurpateur... Plus tard, Edouard,
vainqueur de Warwick, le faiseur de rois % rentra
dans sa bonne ville de Londres où Henri YI fut
assassiné par le duc de Glocester, qui annonçait
déjà ce que devait être Richard UL
Ainsi iinit la guerre des deux roses qui coûta
la vie à plus d'un million d^hommes et à quatre-
vingts princes du sang royal.
Fr)èf e du feu roi et tuteur de son fils, Glocester
voulut s'emparer du trône. Fouii)e et brave ^
— 66 —
féroce et habile, il fit le mal par goût et par am-
bition. Doue d'une ftme atroce dans un corps
hideux, il sembla se yenger sur Tespèce humaine
des disgrâces de la nature. Il dirigea les partis
d'une minorité turbulente de manière à attirer
tout à lui; il se fit nommer protecteur ; il fit tom-
ber dans ses pièges la reine-mère et ses deux fils ,
qu'il fit passer pour b&tards \ Cette usorpatictt
aussi rapide que sanglante s'accomplit en deux
mois. Le peuple, qui eut à peine le temps de
Tapercevoir^ fut loin de s'y prêter : interroge ^
il la condamna par son silence. Le parlement
ratifia encore.
Richard III fut en tout semblable au duc de
Glocester ; le peuple fatigué de sa race aida
Henri VU , le premier des Tudors, à monter sur
le trône, et, selon son habitude toute pacifique ,
le parlement le reconnut comme roi légitime. Le
Pape sanctionna aussi ce changement de dynastie.
Gela se passait en 1485. Deux ans plus tard
Funion de la Bretagne à la France se cimenta
d'une manière durable par le mariage de Char»
les YIU et d'Anne de Bretagne. Les Anglais
n'étaient plus d'ailleurs en état de s'y opposer.
Henri YII mit cependant lesiége devant Boulogne,
mais Charles Féioigna avec de l'or ; avare et des-
pote, Henri faisait consister tout l'art du souve-
•-i- 57 •■— .[.y.zr; — .-- •■'
Tain , à dépouiller le peuple pour payer ses gardes
et une armée.
Son successeur Henri YIII, aussi despote et
plus capable de tenir les rênes , et de conduire
la nation à son but, accomplit pour TAngleterre
Tére du pouvoir absolu que Louis XI avait ac-
compli pour la France.
£n Angleterre comme en France, le douzième
siècle fut celui des communes: la liberté parlemen-
taire dura les deux siècles suivants, puis elle tomba
avec la féodalité, sous la verge de fer des deux
Henri. Les Plantagenet virent la première révo-
lution, et sous les familles d'York et de Lancastre ,
la chute de la royauté féodale prépara les voies
au despotisme qu'établirent les Tudors. Tantôt
catholique zélé, tantôt luthérien, selon que le
Pape, le clergé entrait dans ses vues, Henri VDI
avait surtout la prétention odieuse de diriger les
consciences. Il aimait à faire des articles de foi,
comme les autres rois des ordonnances; s'il eut en
effet besoin de s^arroger les droits de souverain
pontife dans ses états, poursanctionner sa conduite
privée^ tour à tour amant ^ époux et bourreau de
Catherine d* Aragon, d'Anne Boleyn, de Jeanne
Seymour, d'Anne de Clèves et de Catherine Ho-
ward , il ne fut subjugué que par l'adresse de la
veuve d'un de ses lords^ qui après avoir été cou-
^ 9B ^
d'AB^Jcstcnre, m et
pour flatter les caprices théologiens db
gnioaûre époux ^.
QuaBid OB Et la ¥ie d'ioi tjrvi, dii n
aa hisUmea nedeme, «o s'étame qac
pies aient pu le «apporter loag-teflapi»; ^famtMk im
lit celle de Henri ^ soayeraîji chi Tfîiiftww flipclc l
on a« peut le cencevoir. Le» Wîs wléÈÊàewiL pas
seuleoMBt fies pîéges temianôk
num des dilenpwy sauf laaUqot ne Lear
aucniifi issaey C2g eUea puai^saiettL fe ponr
A>atare. Ce fut uo erme de rqjarde
lifléa ka 4cve premif rs mariayi du roi; c*«i fiiÉ
UB de refirdet ceouua iUégkbncs»
ué^ de çai BBaiia^. Quaudoa
ces ({uestioBS ^ dew: farandbauts, W
était ua flrÎBae de kaulc trahîaou. rnu—aiii !■
Anglaîfl^ ce peuple si prompt à la lémile et d
jaloux de sa liberté^ ont-ik pu eudur
raoDl, pendaul irente-sepi ans, nue t
pncîeuse si songent en contradictiou
méfltt^ ai qui opprimait jusqu'à la cnaaeiaMBe?
Gela ue peut s'expliquer que par une jpni^mh
comq>liou et une grande ind
dans Les classes supérieures K
Hoiri YIII avait institué sei
uiimtairesetdouze conseillers pour gouvemevpM-
I* •
-M 50 —
4mt la miaOTité âe md fils Edouard : Mais l'nn de
ees dmirfers^ le éoe de Somerset j protestant zël^,
parvint à se faire nommer protecteur ^ et soo actÎTitë
MÉtf gafel^ ^ifervit $ya succès de ia réforme en An-
gtétcfre"; S réussi t plo^diâldlement en Seosse oà la
cmrr iSbiit «nrie au olerg^. Somerset y marcba arec
^iaÈ^ttk fiàiHe hommes. Il Touiait, suivant une des
iiêes àfHemi YIII, marier eon Toi Edouard avec
là féuoe M arie^-Stuart; les Eoofss^is firent échouer
ee préfet qirî tte plaisait ni ji iear foi cathcdicpie ^
irf % leur fi^ê (fid^pendasce. Somerset et le pri-
«Éat^raoïmer c^figèr^t dora tOQs le^rs efforts sur
t^Afij^tefre^ ils abolii^nt les messes privées, pros-
^rMrent la plupart des cérëmotiies catholiques
fl «sniogèrant à la royauté ledvoit de nommer les
4irè^9ê: Shj^ aotve e6të om brM^it cpux qui doa-
liilSBt 4^ my^àiftê ad? $ par la réarme. . •
Bêmewet expia crueUenuçnt pins tard son »m-
WdoR : sa iéte , demandi^ par le puissant War-
miA et accordée par le faillie J^douanl^ routa sur
i^fchafimd.
Le jeiM^ roi traiba desmaine de Somerset dans
celles de Warwick et mourut à seize ans avant
dVivoir pu manifester une Tolontë. Marie lui suc-
céda, ardente cathoUque et douëe d\ine ënei^e
nre «hasuoe femme, elle soumit , emprisonna «u
At moirter aar l'rf<;hafaad ses ^nenns pc^itiq^s
— 60 —
et religieux. Les statuts d'Edouard furent abdis,
la messe i*etablie et le serment de saprématM
supprime.
Philippe n^ fils de Charles-Quint, aspirante do-
miner r Angleterre et TEspagne, demanda la mab
de Marie et Tobtint. La chambre basse 8*oppo8a à
cette alliance impoliUque , elle iut dîaaoaley le
parlement se montra cette fois indocile; ilfot
casse. Gardiner^ après s'être lâchement plie à toutes
les exigences despotiques et capricieuses de
Henri VII, fut, sous Blarie, le plus ardent persé-
cuteur des protestants : dans l'^espace de trois ans,
disent les historiens , deux cent soixante dix-aept
victimes montèrent sur Tëchafaud ou sor le
bûcher. La seconde fille de Henri \II n^ëchappt
à la mort que par une vie retirée et studieuse , et
en mettant à profit cette dissimulation qui » pins
tard , lui servit à gouverner. L'administration
du royaume allait cependant fort mal , on con-
tractait des emprunts ruineux , on vendait les
domaines de la couronne^ et la révolte était
près d'ëclater sur tous les points, quand Bbrie
mourut.
m
Elisabeth repara tout. L'étude , la retraite' et
les soujBrances avaient développé son esprit peu
ordinaire, mais TAng^le terre changeant de foi
au gré du sort et selon le caprice de ses souve-
— 64 —
rains, fut de nonveàu sous Fempire de la reforme.
Les protestants sortirent de prison pour prendre
place au conseil, et le parlement reconnut la
suprématie spirituelle de la reine. La messe fut
abolie ainsi que la lithurgie romaine , et les
^yéques qui refusèrent de prêter serment furent
chassés sans pitié. Le besoin d'absolutisme aigrit
peu à peu le caractère d'Elisabeth ; elle sévit
cruellement contre ses ennemis , et n'épargna pas
même sa sœur/ Marie Stuart, qui^ chassée
d'Ecosse j était venue chercher un asile dans ses
états ^« Une cour de haute commission , sorte
d'inquisition protêistante ^ instituée par le parle-
ment j recherchait alors les dissidents et les
jugeait avec autant de célérité que de rigueur :
cinquante ecclésiastiques furent exécutés en quel-^
ques années. Jacques YI apprit en Ecosse la
mort de sa mère , et son premier mouvement fut
de la venger, mais la tête du roi l'emporta
bientôt sur le cœur de son fils , il songea que cette
Angleterre , dont il espérait un jour être le souve-
rain, était trop puissante pour lui laisser des
chances de succès, et que cette levée de bou-
cliers détruirait ses rêves d'avenir. Philippe II ,
qui n'avait pas les mêmes raisons de s'abstenir ,
y vit , au contraire , un motif de faire expier la
réforme à la protestante Elisabeth. Il équipa
une flotte immeiiBe destinée à un^ deMente en
Angleterre , et la nomma j d'avance y tbwmtablei
Elisabeth sut intéresser l'honneur national dam
cette guerre formidable , et Piwincible ÙA
yaincue. Ses deux cents voiles et ses trente niDe
hommes battus par la tempête le fiorent ennîte
par la flotte habile et l^àre d'Elisabeth.
Ce succès enivta la nation anglaise et an son»
veraine ; le Portugal^ r£spagne# la H<dJuide et
la France virent les troupes d'Elisabeth ^ ^
se trouvaient partout où l'intérêt du pratflitMp
tisme les appelait (i).
Elisabeth avait eu beaucoup d'amaatBf nris
malgré les vobux réitérés du parlement, elle qe
voulut jamais un époux ^ craignant , sans doute |
de se donner un maître. Au cél^e Leicester
avait succédé le jeune comte d'Essex | qui profita
ou abusa de la faiblesse de sa souveraine pour ai
faire donner le commandement d'une armée igA
se fit battre en Irlande. Mis en jugement et aaavé
de Téchafàud par Elisabeth , il noua des intrigues
avec Jacques Y I ^ et se révolta contre sa bien»
faitrice ; cette fois il fut pris et décapité... Mais
Elisabeth ne put se pardonner sa mort| et «
souvoiir cruel la conduisit elle-même au tombemi;
Elle s'éteignit avec le seizième siècle.
Malgré le despotisme, les mœuri rrlftrhrfWj
-es-
la cramtë religieuse , et la hautaine sMCéptïhilîtê
de oette reine , l'Angleterre la regretta , dar elfe
avait des vues élevées, une main ferme, et
réckty respecte au dehors, prospérait à Tinté-
rieur: les dettes étaient éteintes, les arsenau:lt
remplis j la nation riche et satisfaite ».
En Espagne , le XV* siècle n'offrit rien d'îd-
térissant que les luttes incessantes des MaUTeêr et
des Gwtiifens jusqu'au règne d'Isabelle et d&
Ferdinand i
Leur union fut l'ouvrage delà noblesse, que les
deiix souverains abaissèrent plus tard en lui en-
levant ses prérogatives. Le déspotîsifte royal tlë
s'aocorde pas avec celui de Faristocratie : Loufs
XI humilia aussi les grandd , et favorisa le {)eupléf
qtt^il voulait gouverner seul , La pensée première
et dominante de Ferdinand fut Fe^pulsioti dëg
Maures : aidé de tous les corps de Tétat et dé
Te^lt national de ses peuples , il leur enleva ,
en peu dé temîps, toutes leurs possessions, e^cept^
la riche Grenade cobtre laquelle il tourna , alorâ ,
ses forces réunies. Elle résista dît arts , et suc^
comba : la puissance musulmane expiïti avefc elle
dans le monde chrétien »• De Tetptilsioii dëA
Maures et des Juifs ^ date la naiââàiice de Tlii-
— 6* —
quisition qui, bientôt, leva sa tête hideony et
s'abreuya de sang chrétien^ après avoir épuisé
celui des inGdèles *^.
En ce temps-là 9 Colomb découvrait rAmériqiae,
Bias et Gama arrivaient aux Indes par le cap de
Bonne-Espërance , et une odieuse ingratiliide
paya de tels bientaits ^^
Louis XII venait d'envahir Tltalie, Ferdinand
l'arrêta par un traite qu'il viola ensuite; après
bien des guerres et des débats, le pape et les Vé-
nitiens s'unirent à Ferdinand contre Looia^ qin
vit s'évanouir ses espérances en Italie après k
bataille de Cérignoles.
La mort d'Isabelle et des dissentions civiles
suivirent ces succès de Ferdinand; le vieux itH
fut nommé régent malgré l'opposition des grandS|
et le cordelier Ximénès se mit à la tête des af*
faires jusqu'au moment où la mort du souvenu
et la jeunesse de Charles-Quint lui donnèrenl 'ff
régence.
Charles de Luxembourg fut la tige de la dynas-
tie autrichienne qui remplaça^ sur le trône de
Castille , la maison de Bourgogne établie en Ara-
gon et en Castille, depuis quatre siècles et demi.
Charles avait un esprit actif, élevé et entrepre-
nant, un caractère ferme et absolu. U di^^racia
Ximénès, convoqua les certes, leur demanda de
— 65 —
l'argent pour aller en Allemagne recueillir l'hé-
ritage de son aïeul Maximilien, et se faire pro-
clamer empereur. Au lieu d'accorder des subsides^
Valladolid leva l'étendard de la révolte; les prin-
cipales villes d'Espagne suivirent son exemple,
et malgré tous ces troubles, la Gorogne donna de
l'argent et Charles partit. Le cardinal Adrien^
nommé régent,* ne put bientôt plus contenir la
révolte ; il écrivit à Charles^ qui promit son re-
tour, arma secrètement la noblesse en la flattant»
et les amis de la liberté et des lois furent vaincus.
Le retour de Charles- Quint rétablit l'ordre;
Padilla y et dix-huit de ses compagnons , eurent
la tête tranchée.
En 1521, le roi et l'empereur se liguèrent avec
le pape et l'Angleterre contre François P% qui
d'abord résiste à tout, s'empare de Novare, de
Fontarabie, et se les laisse enlever bientôt après,
ainsi que Biagrajo ; il prend l/i.,000 Suisses à sa
solde, entre en vainqueur dans le Milanais, et
vient échouer à Pavie , où Charles-Quint le fait
prisonniar, et ordonne sa translation à Madrid;
François P' acheta sa liberté par la cession de
l'Italie, des Pays-Bas et de la Bourgogne !
Après la paix de Cambrai, signée par le Saint-
Père, Charles fut couronné empereur; mais ne
pouvant rester dans Tinaction, il passa en Afrique
V. 5
— 60 *
pour secourir Muley-Hasscm^ expulsé par Hiria-
dan-Barberousse^ et réussit encore à le tromper.
Bientôt la guerre recommence en Italie ;
Charles en chasse les Français , assiège MarBeille
et l'aurait peu^-étre prise , sans la peste qui Tint
décimer son armée.
Les trente années qui suivirent cet ëvéneeient
furent encore employées à combattre; tanlAt
vaincu et plus souvent vainquem*^ Gharlea-Qaint
finit par succomber à la journée de Renti, en
Artois^ complètement battu par les Français. Il
avait conquis vingt couronnes au moins, mais la
fortune abandonne les veillards, et dès ce naoment
il forma le projet de se retirer du monde, et
choisit pour refiectuer le monastère de Saint-Jiist.
Toujours avide de célébrité de tout genn, il
voulut faire ses funérailles encore vivant 9 et la
mort le prit au mot.
11 persécuta vivement^ pendant son r^iae, La*
tlier et les protestants ; mais il fut surpris à las-
pruck par Télecteur Mauiûce et Henri H^ pai de
France, et fut obligé de signer, en ib&i, le tnM
de Passau , qui sanctionnait la liberté da oalle
protestant.
Philippe II ne fît qu^accomplir les désaatres
préparés sous le règne de son père; Charles avab
laissé la monarchie épuisée d'hommes et d\ugca|,
— 67 —
mais ces ruines encore brillanlas miraient pu
être relevées sous un autre successeur.
Philippe envahît la Picardie, prit Saint-Quen-
tin et fit égorger la garnison ; il bâtit ensuite le
palais de l'Escuinal, pour ëteinîser le souvenir de
cette victoire, qui fut suivie de la paix. Les hos-
tilitës recommencèrent , et les Français , encore
vaincus à Graveline , firent encore la paix. La
princesse Isabelle de France fut le gage de ce ndti-
Veau traité.
De retour en Espagne, Philippe apprend qu'ûfi
a cëlëbrë un auto-da-fë il y a peu de jours, et en
ordonne un second en son honneur; soixante^
dix victimes furent hrûléespour ramour de Dieu
et la gloiî'e du roi. . •
Les Pays-Bas souffrirent plus que TEspagM
même des cruaute?s religieuses de Philippe. Lt
sang des hommes libres y coulait .^ grands flbts,
et les pères n'exislaîent plus quand les fils corn-*
iliencèrent % jouir de quelque inde'pendance.
L'odieux Granvelle ëlaît en Flandre, le digne
ministre du roi.
Philippe assaisonnait tous ses crimes de consul*
tations théologiques ; il se faisait démontrer par
des moines la nécessité de IVissassinat ; il accotn-
pHssait un devoir en égorgeant son fils eft aotl
épouse, et il écrivait aux princes de FEurope que
5.
— 60 —
pour secourir Mutey-Hasscfn^ expulse par Hàrian
dan-Barberousse^ et réussit encore à le tromper.
Bientôt la guerre recommence en Italie ;
Charles en chasse les Français , assiège Marseille
et Taurait peut-être prise , sans la peste qui Tint
décimer son armëo.
Les trente années qui suivirent cet ëvénesient
furent em^ore cmplojées à combattre; tantôt
vaincu et plus souvent vainqueur^ Gharles-Quint
finit par succomber à la journée de Renti, en
Artob^ complàtement battu par les Français. Il
avait conquis vingt couronnes au moins, mai^ la
fortune abandonne les veillards, et dès ce moment
il forma le projet de se retirer du monde, et
choisit pour reficotuer le monastère de Saint-Just.
Toujours avide de célébrité de tout genre > il
voulut faire ses funérailles encoi*e vivant , et la
mort le prit au mot.
11 persécuta vivement^ pendant son règne, Imh
tlicr et les protestants ; mais il fut surpris à los*
pruck par Téleoteur Mam^ice et Henri 11^ roi de
France, et fut obligé de signer, en i55S^ le traitjé
de Passau , qui sanctionnait la liberté du oolle
protestant.
Philippe II no fit qu'accomplir les désastres
préparés sous le règne de son père; Charles avait
laissé la monarchie épuisée d'hommes et d^irgent»
— 67 —
mais ces ruines encore brillantes auraient pu
Are relevées sous un autre successeur.
Philippe envahit la Picardie, prit Saint-Quen-
tin et fit égorger la garnison ; il bâtit ensuite lé
palais de ITEscurial, pour ëteniîser le souvenir de
cette victoire, qui fut suivie de la paix. Les hos-
tilitës recommencèrent , et les Français , encore
vaincus à Graveline , firent encore la paix. La
princesse Isabelle de France fut le gage de ce nou-
veau traite.
De retour en Espagne, Philippe apprend qu'ûfi
a cëlëbrë un auto-da-fé il y a peu de jours, et en
ordonne un second en son honneur; soixante^
dix victimes furent brûlées />owr V amour de Dieu
et la gloire du roi. . .
Les Pays-Bas sottffrirent plus que TEspagne
même des cruaute?s religieuses de Philippe. L«
sang des hommes libres y coulait à grands flbts,
et les pères n'exïslaient plus quand les fils com-
iliencèrent % jouir de quelque indépendance.
L^odieux Granvelle était en Flandre, le digne
ministre du roi.
Fliilîppe assaisonnait tous ses crimes de consul*
talions théologiques ; il se faisait démontrer pMr
dei moines la nécessité de IVissassinat ; il accotn-
pfissait un devoir en égorgeant son fils eft soti
épouse, et il écrivait aux princes de FEurope que
5.
— 68 —
la religion im^saii slux voisdepenibles clei^oirs.:
Le sanguinaire duc d*Albe succëda à Granvelle,
et dix-huit mille personnes périrent sous la main
des bourreaux. La révolte suivit ces massacres et
l'exercice public de la religion réformée fut in-
troduit dans les Pays-Bas.
La reine Elisabeth avait réduit les Espagnols,
dans les Pays-Bas, au seul pays de Namur,
Luxembourg et Limbourg. Le prince de Parme
arriva, et fit rentrer la Flandre, l'Artois et le
Hainault, sous la domination espagnole. Ce fut
alors que se forma Tunion des sept Provinces-
Unies, à la suite de laquelle les provinces protes-
tantes se séparèrent des catholiques.
Philippe met à prix la tête du prince d'Orange,
dont le génie avait contribué à la nouvelle répu-
blique, et ce prince meurt assassiné dans sa tente.
En 158'i, à la prise d'Anvers, cent mille réfu-
giés transportèrent dans la Hollande, leur fortune
et leur industrie : les protestants de France vinrent
augmenter ce nombre, et unirent leurs efforts pour
relever l'industrie de cette nation hospitalière.
En 1585, les Maures, persécutés aussi par l'in-
quisition, se révoltent et s'emparent de plusieurs
villes; mais ils sont repoussés et battus par
don Juan d'Autriche, sur la vie duquel nous re-
grettons de ne pouvoir donner plus de détails. Ce
— 69 —
jeune prince, vainqueur de la Porte, au golfe de
Lepante, mourut empoisonné à 32 ans ; le célèbre
Cervantes, se distingua aussi à Lépante, et y fut
blessé.
Philippe, repoussé du Portugal qu'il voulait
réunir à laGastille, arme une flotte de cent voiles,
et le Portugal se soumet après la défaîte du prînce-
prétre don Antonio. Fier de ce succès, Philippe
arme successivement deux flottes contre FAngle-
terre ; elles sont dispersées par la tempête. Il fut
plus heureux dans ses desseins contre la France
où son or fomentait des guerres de religion ; mais
Henri lY mit fin à ses noires machinations. Ce
prince avait déjà envahi la Picardie et les Pays-
Bas, lorsque Philippe demanda la paix en cédant
Calais à la France. Il mourut peu de jours après
ce traité, à Page de 61 ans.
Dissimulé, fanatique et cruel , Philippe II avait
rempli l'Espagne de ses crimes , et son royaume
sortit délabré de ses mains. Le caractère national
fut dépravé par sa politique : l'inquisition seule
gagna à son règne, et peut-être aussi l'étiquette
des cours.
Le Mexique , le Pérou et les Philippines furent
conquis de son temps ^*.
— 70 —
L*£cosse, rirlande et le Portugal ^ bieuqu'ayaDt
eu.» dans les premiers temps surtout, uue Vie k
part de TAngleterre et de TEspagne , n'ont pi^
pris 9 dans les destins de FEurope, une place as-
9ea importante pour que nous en fassions l'dajet
d'un résuma spécial : le fait le plus intéressant» \a
piHSit seul par lequel le Portugal mérite une pUda-
brillante, la plus brillante peut-être parmi les Wr^
tioa» européennes du xv"" siècle i ce sont les àfih
^Ottvertes de sa marine.
Le prince Henri donna y en &4i0 , la premièf e
impulsioa aux entrepi*ises aventureuses des Pw-
tugaia. Il cultivait depuis long-temps les sciencif
et était assez verhé cbns les mathématiques pour
ialroduire des perfectionnements dans Fart si
peu avancé alors de la navigation. Fixé k Sagres^
ville qu^il avait fondée lui-même à rcxtrémité du
cap Saînt-Vinçent, il traçait de là ritinérairc de
set. vaîaseaiix explorateurs. Il avait établi wm
éccde de navigation y la première qui ait existé en
Em!ope, et dana laquelle Cbristophe Colomb vini
plus tard perfectionner ses connaissances et pres-
sentir peut-être ce nouveau monde quHl devail^
dnmer à l'ancien ^^.
En peu d'années la domination portugaise s'é^
tendit sur des contrées plus vastes que celles qui
avaient été soumises aux Romains. Ce fut là une
— 74 —
gransde épocfae^ non seulemait pour le Portugal ,
raak enc^ire pour le monde entier. Une ardeur
d'ëaiigrtttion pareille à celle des croisades j mais
nme par d'autres motifs , s'emparait de' tout ce
qufi àTait une imagination yive et un cœur in-^
trépide, et le Midi ne manque jamais de ces ima-
ginations et de ces cœur»-là ^^...^ L'univers sem-
blait s^aignindir devant ceux qui poursuivaient ses
limites... Les ëvënements qui nous occupent au-
jourd%ui paraissent bien mesquins quand on les
compare à ses rapports inattendus qui venaient
anncrtiCier des mondes nouveaux, des nations in^
oomiues , une civilisation étrangère à nos arts , à
nosmceurs, à nos croyances. Le monde, vieilli ,
n'a plus de ces grandes révélations à espérer...
La valeur portugaise brilla d'un vif éclat dans
Hûde. Elle fut couronnée par de nombreuses con-
quêtes, ccWiquêtes plus glorieuses que celles des
Espagnols en Amérîcpie , puisqu'elles furent plus
disputées, plus utiles à l'Europe, puisqu'elles
arrêtèrent le débordement de la puissance mu-
sulmane.
Ces hardis aventuriers régnèrent en maîtres ab-
solus sur des contrées qui leur prodiguaient toiit
les trésors du luxe oriental ; il est cependant vrai
de dire que les Portugais ne parurent point uni-
quement guidés par cette soif de l'or qui enfante
^ 7t —
presque toujours la soif du sang. Us furent rigou*
reux envers les peuples qui , en voulant conser-
ver ou recouvrer leur indépendance, ne leur pa-
raissaient que des sujets rebelles; mais ils ne fu-
rent point barbares, et la justice tempéra aoavoit
leur sévérité.
. Parvenu , par ses conquêtes dans Tlnde , à l'a-
pogée de sa puissance, le Portugal ne put que dé-
cliner, car les moyens même qui l'avaient fondée
devaient amener sa décadence. Si l'or abondait
dans toute la Péninsule, l'agriculture, les arts
utiles y languissaient : la meilleure partie de la
population était sur les mers, Fautre v^était,
attendant, dans le plus indolent repos, les navi-
res, For et les récits qu'ils apportaient; toute la
vie du Portugal était là. L^Orient était son tribu-
taire , qu'avait-il encore à s'agiter pour vivre et
jouir?... Mais c'est au milieu de ce luxe, de ce
repos , de ce far mente honteux , abrutissant |
que les nations s'énervent, déclinent et finiraient
par s'éteindre , si les nations pouvaient périr ^K
Dans la période précédente, l'histoire de l'Italie
se liait intimement à celle de l'Allemagne ; dans
celle que nous parcourons aujourd'hui elle se lie
davantage aux divers événements qui ont agité
— 75 —
la France et PEspagne. Charles VIII, Louis XII ,
François l^ surtout et Charles-Quint, en ont fait
le théâtre d'une lutte incessante et pleine d'in-
térêt.
Elle se divisait , à la fin du x v® siècle , en une
foule de petits états indépendants, parmi lesquels
nous citerons le duché de Savoie , qui s^étendait
jusqu'à Nice, et qui comprenait le Piémont ; le
duché de Milan , qui occupait Tltalie septentrio-
nale jusqu'au delà de Parme; la république de
Venise , qui était sortie de ses lagunes pour s'é-
tendre jusqu'aux Alpes au nord , jusqu'à Bergame
à Touest, et à Test jusqu'au golfe de Trieste ; la
république de Gènes , dont les possessions entou*
raient le fond du golfe sur lequel s'élève sa capi-
tale, et comprenaient de plus l'île de Corse et
quelques villes de la Crimée et de la Grèce; la
république de Florence , qui s'était emparée des
ports de Pise et de Livourne ; le duché de Fer-
rare , illustré par le gouvernement de la maison
d'Esté ; le duché de Modène , Tétat de Mantoue ,
la république de Bologne, celles de Lucques, de
Sienne, de Saint-Martin et celle de Piombino,
qui comprenait l'île d'Elbe, située vis-à-vis les
côtes. Enfin , les états de TEglise et le royaume de
Naples, qui occupaient tout le centre et le sud
de la Péninsule.
— w —
Oki comprend qn^ayec nn pareil morcellement,
il est impossible de dire quelque chose de corn-»
pèet et de svivi sur Thistoire dltalie , qui se re-
trouve d'ailleurs dans les annales des autre» na-
tions. Tour k tour dominée par des princes Aran-
gert, tourmentée par les factions intérieures, par
les guerres ^états à états, le plus souvent conribée
aoug le joug avec des sentiments de nationalité et
d'indépendance, elle ne se souvient plus de son
aniiqae imité , de sa domination universelle que
pour gémir sur sa condition présente. Cette do-
mination y cette souveraineté temporelle n'existe
plus pour elle et ne doit plus exister. La su-
prématie pontificale lui a succédé : Rome gou-
verne toujours TEuropc et le monde catholique **,
mais son empire est tout spirituel , et la pensée
seule lui est soumise i7. Sans chef ^ sans instite-
ttons , sans loi^ , sans unité^ Tltalie vaincue , dé-
chhrée, conquise , étale aux regards de ses enfants
comme à ceux de l'Europe des ruines de toute es-
pèce. Sans animation , sans énergie , elle attend ,
prosternée aux pieds des autels ; elle prie Dieu de
lui envoyer un vengeur qui lave tant et de si
cruelles humiliations, ou, pour nous servir des
énergiques expressions de Macchiavelli : « Rimane
come senza vita e aspetta quai possa esser quelio
elle sani le sue ferîtc o ponga fuie aile dlrcpsîoni
— 76 —
e a' saixhi di Lonabardia aile espilazionî e taglie
del Reame e di Toscana e la guarisca di quelle
sue piaghe già par il lungo tempo inGstolite. Yede
si corne la prega Dio che le mandi quaicuno che
la redima da queste crudeltà ed insolenzie. Vede-
asi iicora lutta pronta e disposta a seguire una
baiidiera purcbë cisia alcuno che la pigli*.* d
— 76 —
CHAPITRE TROISIEME.
^*a^i
Notre cadre s'agrandit avec les siècles et se Iié-
risse de difficultés nouvelles : comment l'espace
consacre jusqu'à présent à la revue des états du
Nord et de l'Orient pourra-t-il suffire à parler de
la Russie, de la Pologne^ de la Hongrie et de la
Bohême^ de la Suède, du Danemarck, de la Hol-
lande^ de la Prusse, de l'empire Germanique, de
la Suisse et du Bas-Empire... Dix états! dont Pan,
à nous en croyons M. deHumbold, a pour étendue
une portion de terre égale à la partie visible de
la lune ^..
On nous pardonnera donc de ne jeter sur chacun
d'eux qu'un conp-d'œil rapide et général.
Les destinées de la Russie dans les deux siècles
qui nous occupent ont été bien différentes : des
guerres extérieures, des guerres civiles, des at-
tentats domestiques, des trahisons, des revers et
une barbarie constante, remplissent la première
période, mais une ère nouvelle semble corn-
lancer avec le règne d'Ivan IIL Oubliée de l'Eu-
— 77 —
rope y et jusque 4à en proie aux brigandages des
hordes sauvages qu'elle doit soumettre plus tard,
la Russie ya se préparer à entrer sur la scène du
monde européen. Usés par leurs dissentions, les
Tartares, si long-temps le fléau et la terreur des
provinces russes, n'offraient plus une cause im-
minente de péril. Supérieurement organisés pour
parcourir le monde et le dévaster^ ces peuples
étaient peu propres à fonder une puissance du-
rable; l'immense sol de la Chine qu'ils envahi-
rent aussi , neutralisa , en l'absorbant, leur vertu
belliqueuse, et ils reçurent de la paix et du repos
le joug qu'ils avaient coutume d'imposer par la
guerre et les massacres.
Dans le courant du Xyp siècle, la Russie, ré-
générée par les deux Ivan *, et, comme nous
1 avons dit, par des circonstances heureuses et la
force d'une civilisation sans cesse en progrès, vit
arriver dans sa capitale les ambassadeurs de l'em-
pereur d'Allemagne, du pape, de la république
de Venise, de la Pologne et du Danemarck; les
arts pénétrèrent sous les glaces du nord à la suite
de ces premières relations ; l'Italie et l'Âng^e-
tmre envoyèrent à Moscou des ouvriers , des ar-
tistes , des savants encouragés par Fattrait de
grandes récompenses à ces transplantations loin-
taines. Tout changea dès lors, tout s^embellit, et
— Tô-
les princes du noitl, qui prirent le titre dé grands-
ducs, commencèrent h dormir soos des lambris
inconnus à leurs ancêtres. L'aigle notre à deas
têtes remplaça à cette époque le saint Oeoi^^ à
cheyal^ qui avait été jusque là ie type armoriai
des soureraiiiB de Kief et de VokidiBÛr >; les
troupes fiireiit soumîtes à une diaoipline qui leur
était inconnue, et le mousquet remplaça Tare
Léi ^Tasions des Tartares avaient interrompu
les rdations avec IHMent ; il &llait se frayer des
routes vers les nations occidentaies; le (dus heu*
feux hasard servit encore le cssar Ivan : des an<^
glais, jetés pu* le naufrage vers rembomcliure de
la Dwina, devinrent les négociateurs du prramr
traité qui ait existé entre rAngletonre et la
Russie ! alors le czar ouvrit un mafché à Narva i
et, mdgré les diâenses de leurs gouvememums
jaloux et inquiets, les Anglais, les Français, les
Lubeckois et les trafiquants des autres villes un-
séatiques y accoururent avec enq>ressement.
Encouragépar le succès, le csar cherdka vers le
sud-<est ces routes si long-temps négligées, qui me-
naient dans les riches contrées delà Perse, de Tlnde
et de la CSûne. C'est dans cette exploration que w
fit à la fois la découverte et la conquétede la SU
bérie.
Yoilà le beau côté de cette époque ménoraUe
— io-
de la Russie; voyons maintenant le revers de la
médaille; il est horrible.
Ivan IV, le Louis XI de Tempire russe ^ mais
plus barbare cent fois que le monarque français^
savait allier la plus froide , la plus hideuse féro-
cité au génie des conquêtes et de la civilisation ;
pendant qu'il attirait dans ses états les savants
et les artistes des pays les plus en progrès, il as-
sistait comme par passe-temps à des scènes de car-
nage dignes d'Héliogabale et de Caligula , et y
prenait part lui-même. A en croire MuUer^ îi ar-
riva un jour à Novogorod dans le dessein de punir
cette opulente cité de Tidée qu'elle avait eu de se
donner à la Pologne. Il entre avec son fils dans
une enceinte construite exprès pour servir de
théâtre à sa vengeance^ et où les principaux ha-
bitants avaient été renfermés. Tous deux^ montés
sur des chevaux vigoureux, ils se précipitent sur
ces infortunés, la lance au poing, et tuent jusque
l'épuisement de leurs forces. Quand le fer leur
tombe de la main^ le reste des victimes est livi^
aux opritchmkis y comme les restes d'un festin
sont livrés aux chiens ou aux esclaves. Ensuite
les glaces du Volkof sont rompues , et Ton y pré-
cipite les habitants par centaines.
Les villes de Pleskof et de Twer, également ac-
cusées d'être dUntelligence avec la Pologne, fu-
— 80 —
rent aussi châtiëes avec rigueur^ mais non pas
dëpeuplëes. Sur le bruit de toutes ces fureurs et
de tous ces meurtres, les malheureux habitants de
Moscou attendaient le retour du czar dans le si-
lence de la consternation. Il arrive, il entre, et
aussitôt quatre-vingts fourches patibulaires s'élè-
vent dans la place publique de la capitale^ de
nombreux instruments de supplice y sont ap-
portes, de grands feux sont allumés, et Teau
bouillonne dans de vastes chaudières d'airain. A
cet appareil chacun frémit au fond de son asile ;
mais bientôt trois cents citoyens, tous illustres
par la naissance , et même des princes de la fa-
mille du czar, sont tirés des cachots^ et paraissent
portant l'affreuse empreinte des tortures qu'ils
ont déjà subies; traînés, poussés par des soldats
cruels, ils arrivent à demi immolés sur le lieu de
ces exécutions sanglantes. Les courtisans, devenus
bouiTcaux, tirent, non pas leurs glaives, mais
leurs couteaux, et pièce à pièce emportent la
première victime : c'était un secrétaire d'état qui
venait d'être suspendu par les pieds à une po-
tence. Trois jours après il fit encore trancher la
tête à plusieurs personnages des mêmes familles,
et portant sa fureur sur les restes inanimés
de sa haine^ il les frappa de sa hache. Les corps
abandonnés sur la place furent déchirés , et les
■ — SI —
os disperses par les chiens. Huit cents femmes
furent nojées. G'e'taît un jeu pour Ivan de voir
lentement couper par morceaux, ou plonger à
différentes reprises dans des chaudières bouil-
lantes ceux qui lui e'taient suspects '*...
J'aurais pu passer sous silence tant de scèncif
d'horreurs , mais je n'aurais accompli qu'une
partie de ma tâche. Nous connaissons maintenant
la Russie, nous savons à quel prix elle achetait
au XVP siècle cette civilisation naissante à la-
quelle Pierre I**^ devait donner cent ans plus
tard une extension si grande; conlinuojis notre
course.
La Pologne e'tait alors une naiionj une nation
libre, puissante et redoutable, victorieuse sous
les Jagellons ^ dos chevaliers de Tordre teu to-
nique et maîtresse de la plus grande partie de la
Prusse; la Pologne, jointe à la Lithuan'e, avait
sous ses lois un vaste territoire qui s'e'tendait des
monts Krapacks aux rives de la Baltique. Plus
vieille que la Russie de puissance et de civilisa-
tion, elle voyait avec défiance cette nation nou-
velle sortir de l'obscurité et la combattre avec rage,
comme si elle avait eu dès lors le pressentiment
de son oppression future (iouvernée par une
V 6
— 82 —
brave mais turbulente noblesse, 1» bourgeoisies
était elFacëe, malheureuse^ et le peuple était serf.
La féodalité semblait être Tessence des moeurs^
polonaise/s, aussi s^y implanta-t-elle de façon àa.
ne point faire place, comme le reste de rEurope^
à un pouvoir uni<][ue et souverain qui Teût miem?
défendue. Sans peuple, sans bourgeoisie ,^ sans
unité de gouvernement , elle n'eut pour défense
et pour soutien que Tépée de la plus chevale-
resque et de la plus brave noblesse du monde^ et
ce soutien était faible en présence des. péril^ ûn-
menses qui entouraient à cette époque les nations
européennes.
A la fin du XV* siècle, la Pologne étendait son
influence sur la Hongrie et la Bohême. Sans cesse
minées par les dissentions civiles et par la con-
quête étrangère, ces deux nations , séduites par
les brillantes apparences des nobles polonais ,
s'étaient appuyées sur leur loyale protection : la
Pologne fut loyale en effet autant que brave, mais
impuissante pour ses alliés comme pour elle. Bes
états autrichiens absorbèrent la Hongrie et la
Bohême, et s'en servirent dans leurs guerres in-
cessantes contre l'empire turc.
Sigismond, qui commença son r^ne avec le
treizième siècle, fit pour la Pologne ce qu'avait
fait Ivan pour la Russie ; moins cruel cependant
— 85 —
et plus génëreux, il sut civiliser sans détruire, et
donna un essor immense à la grandeur de la Po-
logne. L'empereur Maxîmilien , d'abord son en-
nemi, rechercha son alliance, et la Pologne prit
une place honorable en Allemagne^ où elle oblin.
le droit de voter dans la diète impériale.
En paix avec ses voisins, Sigismond s'occupa à
augmenter Finstruction ; il favorisa Findustrie.
Les villes devinrent plus florissantes^ les maisons
plus commodes, et les champs furent mieux cul-
tives. Maïs le monarque polonais fut moins heu-
reux dans ses efforts contre la réforme religieuse.
Les doctrines de Luther, celles de Zwingle, de
Calvin, de Melanchton avaient chacune de nom-
breux sectateurs, et trouvaient des soutiens jusque
dans les ran^s du sénat. Cette tendance continua,
■.■■■"■■'■ ^ •
s'accrut même sous son successeur Sigîsmond-Au-
guste^ et ce fut là , comme dans la plupart des
états de l'Europe, le grand événement du seizième
.1 •
siècle «.
Nous avons laissé la Suède puissante et heu-
reuse encore des lois de Saint-Eric' et de son
union avec la Norwège et le Danemarcl. L'union
de Colmar, qui eut lieu la dernière année du
XIV* siècle, en réservant à chaque .nation ses
6.
— S'I
cïroîts parliculicrs, aviiit ru c(\o\ conslilne un
rojauiiic Scandinave capable de lutter contre les
Slaves et les Allemands, maïs cvAU* union ne dnra
qu^ui demî-sieele : en l'i»^(), la Suède avait un
roi à elL*^ el d(vs piinces allemands, les comtes
d'Oldenhuif:;, régnaient sm* le Oanemarck et la
Norsvège. La féodalité qui convcMiait aux derniers
états pesait sur la Suède, qui linit par s'en dtîbar-
rasser.
Depuis la lin d(î l'imiou, jus(|u'à ravénement de
(jusiave \\ a/a, l<'s (as! es de la Suède oflVenl peu
d'inl('rel : (uharl(\s \ II! , (^hrislian V^ ^ Charles
(]anulsou, Sh cii-Slure, ,](Mm F"', Suante-Sture et
Chrislern II, rè^nenl lour à tour sur la Suède ou
radmiuistieut sans la rendre heureuse; Christern II,
surtout, pesa s'^r elle comme un de ces fléaux que
le ciel envoie parfois aux p(»uples pour les punîr
de leurs crimes». Sa t y raimie prépara l'usurpation
de Gustave c|ue sanctionna la Suède heureuse de
sa délivrance». [/av('U(»ment de (îe jninccî est en-
touré d'aventures romauescpies qui rappellent
celles dWIfred-le-tirancP. A rinsu[)portable ty-
rannie de Christiern succédèrent i\Q^ jours plus
heureux; Gustave, après avoir rétabli la paix et
le calme dans ses étals, s'occupa à former des al-
liances ifnpv)rtantes qui pussent fain; entrer la
Suède daîisie système» politique d(» l'Europe, et
— 85 —
signa avec le nanemarçk une paix (!:• Mcixaiitc aîîs
qui^ liîallieineusoDic/it, ne dura gM^'u'c plus que
lui. Après le recrue de ce grand homme ipii, ce-
pendant, et autant da :s l'intérêt de l'Elat que
dans celui de sa famille, avait rendu la couronne
héréditaire, la Suéde fut tourmentée par (î'inces-
santés questions de partage et d'iieredile. Tous les
vœux patriotiques du vieillard furent contraries
par l'ambition et Fincapacite' de son (iîs, et les
plans qu'il avait conçus étoufl'es (hxiis leurs pre-
miers développements. La di{)lonjatie jus(jue-!à
inconnue dans les états dulNord, reiiiplaca la vo-
lonté ferme et droite du conquérant icgislaicur qui
n'avait jamais eu de favoris ni de mini.strcs. Nous
ne suivrons pas les détails de ces divers régnes qui
offrent peu d'intérêt; nous ne parierons pas ici
non plus de la réforme : établie par Gustave, dont
elle servit l'ambition, elle produisit en Suède^,
comme en Danemarck, et partout ailleurs, des
ferments de discordes intérieures et de guerres ex-
térieures qui se développèrent après que la main
d'un homme de génie ne put plus contenir les di-
vers éléments de troubles qu'elle st)ulcve et porte
avec elle.
L'histoire du Danemarck est presque constam-
— sè-
ment liëe à celle de la Suède et de la Norwège.
Dans les siècles que nous parcourons, vers la tin
du quatorzième, Marguerite, fille de Valdemar III,
avait rëunî sur sa léte les trois couronnes, et formé
par le traité de Colmar une monarchie qui sem-
blait devoir être indissoluble, mais cet édifice ne
put se soutenir après celle qui l'avait élevé, la
maison d'Holstein fut appelée au trône en iUkS.
Les atrocités de Ghristiern II, séparèrent de nou-
veau la Suède du Danemarck et firent tomber de
la tête de ce monarque les deux couronnes qui
lui restaient : quelques liistoriens pensaient que
la cruauté de ce prince qui , en effet, pesa
plus sur la Suède que sur le Danemarck, n^est
pas la seule cause de la clécli(''ance de Ghristierp
et de l'avènement de Frédéric de Hblstein ,
mais surtout un système de gouvernement hos-
tile à Taristocratie et favorable au peuple ,
système bon en lui-même, mais accompli despo-
tîquement et nuisible aux classes riches et puis-
santes.
Les seigneurs danois, enfaisant cette révolution,
se réservèrent, comme condition expresse, le droit
de yie et de mort sur leurs paysans ^°.
Au quinzième siècle seulement la Hollande
prend uîie vîeà part et pleine d'intërét. Son corif-
merce s^ëtend, et ses provinces font une portion
notable de la ligne anséatîque i^j sa marine com-
mence à se faire respecter dans le Nord et termine
avec honneur une guerre contre les états Scandi-
naves.
Elle éUît, un siècle plus tard, le plus beau
fleuron du vaste empire de Gharles-Quînt, qui se
plaisait à le rëpëter lui-même , tout en IVpuîsant
d'hommes et d'argent pour soutenir ses guerres
perpétuelles. Mais, c'est avec Philippe II, son fils,
que commença pour la Hollande une ère nouvelle.
C'est de ce souverain que date réellement l'histoire
des provinces unies : un peuple peu nombreux va
conquArir sa nationalité sur des oppresseurs puis-
sants et riches j délivré de ses oppresseurs il les
poursuivra à son tour sur toutes les mers, détruira
leur puissance navale, formera des établissements
coloniaux, et pendant deux siècles remplira l'Eu-
rope de sa renommée, jusqu'au moment où miné
lui-même par des dissentions intérieures^ il verra
s^éclipser sa grandeur momentanée ^^..
Si le résumé de l'histoire d'une nation pen-
dant deux siècles pleins de faits importants, est
▼ _ VsS —
diflicile à faire, inèino duanJ celle nation a de
ruiiile el une vit» à elh», coîiibien celle difliculté
ne doit-elle pas s'iîc^croilre lorscju'il est question
(Tun ern|)îre in<;:cel(' ci>m:ne celui d'Allemagne.
De releclii,»!! di» Sij^isinoiul, d(»rnier empereur de
la maison de Liixeiiibourir, à la inicrre de trente
ans, <jui commence? le di\-se|)llcme siècle, que
d'événements gciiéiaux ou parliels î La condam-
nalion de Jean lluss el de Jérôme de Pragues, au
concile de Constance^ la guerre des Ilussiles, qui
ta suivit, l'clévalion de la maison de Habsbourg,
les règnes de Frédéric IV et dt* Maximilien d'Au-
triche, la diète de W'orius, ia division de Fem-
])ire en Cercles, et l'établiîisemcnl d'un tribunal
suprême; enlin, les deux vies si pleines et si fé-
condes de Charles-Quint et de Luther qui re-
muèrent, non .seulement 1 AUcnuigne et l'Europe,
nuiis le monde entier. En voilà plus qu'il n'en
faut poar justifier la crainte avec laquelle nous
suivons une marche que chaque pas rend plus épi-
neuse et plus rude.
L'Allemagne, vaste corps composé d'états si
divers, de principautés indépendanteSp de do-
maines ecclésiastiques, de républiques commer-
çantes, n'obéissait pas aux chefs qu'elle se choi-
sissait; de là des guerres nouvelles que chaque
événement religieux ou politique venait com-
j;)iiqaer encore. Vers la liu du (juinzième siècle,
la prospéiite' des villes allemandes avait atteint
ison apogée, et si un tel morcellement avait com-
pose une union durable, TAUemagne eût été' plutôt
une vaste et puissiuiîe rJ[)ul)]îque qu'un empire '^.
Mêlée par sa posilioa centrale à toutes les af-
faires de l'EuroDe, celle l^izarre constitution reçut
le nom de saint cjnpire Romain, bien qu'il ne
fût, comme Fa observé Voltaire avec autant de
justesse que de malice^ ni salnt^ ni empire^ ni
romain... Ce n'était, en effet, que l'informe amal-
galmede pouvoirs hétérogènes mal définis et mal
pondérés. Aussi, que voit-on dans les annales de
Tempire germanique depuis la domination de la
maison d'Autriche? Les efforts constants des em-
})creurs pour soumettre à leur autorité des états
avides d'indépendance, et les guerres religieuses
venant en aide aux guerres politiques ou les ame-
nant elles-mêmes.
Il est cependant vrai de dire que Maximilien et
Charles-Quint donnèrent de la splendeur à la cou-
ronne impériale : le premier abolit le droit du
plus fort et rétablit la paix publique en fondant
des cours de justice et des diètes provinciales et
divisant l'Allemagne en Cercles. L'état militaire,
ainsi que la justice, reçut sous son règne des formes
plus déterminées et l'artillerie fut perfectionnée.
— 00 —
Nous ne nous étendrons pas sur le règne de
Charles-Quint qui se He à Thistoire de tous le*
états de l'Europe, non plus que sur les graves»
événements qui suivirent la réforme et que nous
devons retrouver bientôt sous un autre point de
vue. Qu'il nous sufTise de dire que fatigué du
trône et d'une vie si pleine, ou peut elre ambi-
tieux de tous les genres de gloire et de célébrité,
Charles abdiqua en 1556, et mourut deux ans
après, accablé de regrets et d'ennui, dans un
cbuvciil (VEspagne, laissant ses immenses étals
en proie aux discordes civiles qu'amènent tou-
jours la fin de la te(e puissante et de la main
ferme qui seules peuvent tenir les renés ^*.
I/iuiilé que nous regrel lions de ne |)as trouver
dans les annales si variées de l'empire Germa-
nique, nous la retrouvons dans la Suisse : celte
intéressante contrée, bien que formée de la réu-
nion de plusieurs cantons, est unie, au XV* siècle,
par le lien puissant de la persécution et la néces-
sité de résister à de terribles ennemis.
Nous avons laissé la ligue helvétique victo-
rieuse et l'orgueil bourgeois abaissant avec joie
Porgueil aristocratique; chaque année était mar-
quée par l'extinction de quelqu'anrienne maison
'O I
et quelque nouveaux progrès de la classe
moyenne ^^. Le territoire helvétique s'étendait,
l'industrie s'améliorait, s'agrandissait et pénétrait
dans les cantons les plus sauvages, lorsque la
guerre civile et la guerre étrangère vinrent ar-
rêter ces progrès, couvrir de sang et de deuil les
niontagnes de la Suisse, et donner à la réputation
guerrière de ses habitants un éclat plus grand
encore. Après les désastres causés par la sépara-
tion de Zurich, que Charles VII vint défendre
avec ses Armagnacs, commandés par le dauphin
Louis, trente mille hommes allemands ou français
succombent devant seize cents montagnards.
Une pareille défaite décida la retraite du dau-
phîn, et le premier traité de paix et d'alliance
entre la France et la Suisse fut signé. La guerre
alors s'alluma entre Gharles-le-Téméraire et les
treize cantons. Louis, plus avisé cette fois, sou-
tient et excite les Suisses, et donne passage àuX
troupes qui marchent contre son beau cousin de
Bourgogne. Celui-ci animé par tous ces obstacles,
lève une armée considérable, s'assure de la
Franche-Comté, qui liait ses vastes domaines et
à grandes cJievauchees vient avec moult geh^
dormes de pied et de cheval^ répandant la ter-
reur au loin par son ost innombrable. Là estait
cinquante mille, voire pluSy de toutes langues
— Oi —
et contives^ forces canons cl autres enf:;i/is d
la nouvelle facture^ pa^'illons et accoutrenu'nL^
tous reluisants cTor^ et grandes bandes de valets^
marchands ( t filles de joyrujo amours ^^,
Cet attirail inimcnsi» cl imililc, loin (raidcr à
la victoire cli* Chiirîcs, contribua à la hoiUciist?
défaite ({u'il (.ssaya il <[uc \iut renouveler [:1ns
honteusement enroi\' i.* t'!('.\astre de 3Iorat.
La Suisse avait ainsi conlinnc* sa liberté el an-
pri:> à l'Lurope la p.iissniCxî de 1 inranleiie «jne
niait la cbevaieresijue nol^lesse àc^ siècles preee-
denUi. L'alliance des (prisons, Taccession d(î eincj
nouveaux cantons avaicnl, après cette double vic-
toire, porté la Suisse au plus liant point de i^ran-
deur, et les bourj^eois de lierne et les bergers
d'Uri virent les rois et les papes solliciter leur
alliance et les s(?cours de leurs bras éprouvés.
François 1**^ voulut cependant abaisser l'orgueil
helvétique, i! sj fraya sur les Alpes des chemins
nouveaux avec un bagage immense d'artillerie;
aidé par un corps de montagnards des Pyrénées
il gravit les cimes les plus difliciles et un coniLat
furieux s'engagea. Les Suisvses y soutinrent digne-
ment leur réputation : j'ai vu dix-huit batailles
rangées, disait Trivulce, mais celle-ci est le com-
bat des géans! François P' épouvanté, d'une vic-
toire qui lui coûtait tant, traita avec eux, et ce
— 95 —
traite, qui suivit la bataille de Marignan, fut la
Ijïase de tous les traites poste'rieurs. Délivrés de
Xa guerre c'trangère, les discordes religieuses, suites
fDrdinaires de la réforme, les armèrent les uns
cïontre les autres et les renfermèrent dans leurs
montagnes.
Après avoir rapidement parcouru les fastes de
l'empire Grec pendant sa longue et déplorable
vie , nous sommes enfin parvenus au dernier
siècle de son existence, au règne du dernier de
ses souverains qui soutinrent si faiblement le nom
et la majesté des Césars, à la limite qui sépare le
moyen âge des temps modernes ^7.
A défaut de génie, le dernier Constantin pos-
sédait au moins ce courage du soldat qui sait
mourir en héros pour défendre un nom illustre
et le garder de la honte attachée à une lâcheté.
Mais il avait un terrible adversaire : Mahomet II,
fanatique et ambitieux, avait pour le siècle où il
vivait une instruction peu commune, on assure
qu'il parlait cinq langues ^^; inflexible et dur, il
versait des ruisseaux de sang pour satisfaire ses
caprices et punir la moindre infraction à sa vo-
lonté de fer ^^. Avec la bravoure du guerrier, il
avait les qualités du général, et ici c'était un
— d/* -
monde que le soldat et le général allaient con—
quérir, c'était un monde que défendait cet em-
pereur. Jamais lutte fut-elle plus intéressante ?
Séparée de l'Europe par les Turcs et par le
tdiiime» réduite à quelques arpeois de terre,
Gonstantinople la grande, la bellei la riche )
voyait sous ses murs trois cents mille Barbares
et point d'alliés, 4)oint d'amis... Les Anglais re-
tenaient Cliarles \II, la Hongrie était en proie à
des divisions intérieures, FAutriche s'organisait ;
Venise délibéra froidement si elle renoncerait à
ses conquêtes d'Italie , et GêneS| enfin, envoya
quatre vaisseaux ^ ! . . .
Pendant ce temps^ quatorze batteries dont la
grosseur était fabuleuse, des béliers, des navires^
partout des feux grégeois, Tartillerie moderne
venant en aide à Tartillerie ancienne, entouraient
les murs de la ville, et Sainte-Sophie répondait
seule par son lugubre tintement aux cris des as-
saillants enivrés de sang et de pillage.
Constantin, découragé, voulut donner un jour
de |;loire à la cité de ses pères. U se prépara à
mourir et y ediorta les siens : un fossé inuuense
avait été creusé autour des murs de la ville^
Mahomet y poussa ses plus mauvaises troupes^
les cadavres remplirent bientôt cet intervalle, le
but de Mahomet fut atteint, et sur ce pont san-
— So-
ûlant ses farouches janissaires montèrent à | as-
^ut; trois fois ils furent repoussés par la yaletir
de Constantin^ trois fois ils revinrent à la chaîne,
et après ce dernier effort de la tenaci^té et du
nombre , «ur le courage du désespoir, Mahomet
en Ira à ctieyal dans Sainte-Sophie^ renriplie de
chrétiens prosternés, et en fit abattre Tautel que
Constantin ne pouvait plus défendre : il était
mort en combattant, et du moins ses jeux ne
furent pas affligés du spectacle affreux du sac de
sa belle cité^ qui fut pillée, ensanglantée et dé-
truite^ pendant trois jours et trois nuits ^K.. Le
siège avait duré quarante jours, et d'incroyables
efforts avaient été faits des deux côtés; la chjiite
du dernier César de Bysance avait été plus glo«-
rieuse que la longue prospérité de ses lâches pré-
décesseurs ^.
Après la prise de Constantinople, et lorsquUl
ne fut plus temps de remédier au mal, rËurope
s'émut : Nicolas V prêcha la croisade, mais cette
ardeur que la honte avait allumée^ s'éteignit tivec
le temps, et l'intérêt privé des nations leur fit
contracter des aUiances avec les Turcs vain-
queurs; la commerçante Venise avait donné
l'exemple,. •
Sainte-Sophie devenue mosquée, la ville d^
Constantins devenue la proie de Mahomet» n'in-
— 9t; —
(ercsse plus que raibicmeut l'Europe chrétienne-
Que nous înipoitent en effet les querelles dci»
Bajazct et des Sîzim et les révoltes de sérail ?
Que nous importent une longue série d'événe-
ments qui ne se lient quelque peu à l'Europe que
par le règne civilisaleur de Soliman et la défaite
de Sélim dans le golfe de Lépante ^3?
Abandonnons le récit des faits : tant d'événe-
ments, tant de révolutions, tant de vies et
de morts célèbres, press(\s, accumulés, sans
suite, sans liaison, sont de nature à fatiguer la
plus patiente et la plus courageuse attention.
Voyons maintenant la vie religieuse, sociale, mo-
rale et intelleciuelle, de cette Europe si divisée
dans ses affaires intérieures, mais souvent réunie
par un même lien et autour de grands centres
d'actions comnnms à toutes les portions de son
vaste territoire. Ainsi, la réforme sera pour son
histoire ce qu'ont été la république de Rome,
l'empire des Césars, le christianisme, l'invasion
des Barbares, le règne de Gharlemagne, et plus
récemment enfin la féodalité et les croisades....
Evénements or. idées, bons ou nuisibles à l'hu-
manité, mais attirant fortement son attention et
la réunissant par un lien commun dans une pen-
sée commune.
— 07 -•
CHAPITRE QUATRIÈME.
Nous avons laissé la papauté divisée et TÉglise
en proie au scliisme le plus violent etle plusdé*
plorable qu^elle eût eu encore à supporter. La
majeure partie de TËurope était restée fidèle à
Home et à Urbain^ les partisans de Clément YII
appartenaient tous à TOccident.
Deux pontifes infaillibles, tout-puissants^ sol-
licitant tous deux les suffrages populaires^ exigeant
tous deux les tributs des fidèles et l'hommage des
souverains^ s'anathématisant mutuellement et
lançant l'un sur Tautre leurs foudres autrefois si
terribles et i9aintenant vaincues et sans effets
puisqu'elles frappaient chacune une tête invio-
lable, c'est là le plus affligeant spectacle, le plus
tiiste effet des passions humaines mêlées aux
choses divines... Et ce scandale dura plus d'un
quart de siècle ! . . . On voyait des populations en-
tières abhorrer ce que d'autres vénéraient, et PE-
glise n avait aucun moyen de faire cesser un si
V. T
fâcheux ëtat ! Cependant telle ëtait encore Pau-
réole divine dont la papauté était entourée, que^
malgré les réflexions qu^uu pareil état de choses
devait araetMr, la Vftp^^ 1^ oi il était reconnu,
voyait les populations à ses pieds, les souverains
conduisaient sa haqu^f^» le denier de Saint
Pierre n'était jamais refusé, et de pieux pèlerins
venaient, comme par le passé, se prosterner de-
vant sa sainteté, au8Sii\Gtpbrettx que des essaims
d^abeifksf • *-
Malgré cette ferveur, malgré ce respeêt reli-
gienx, suite d'une immense et profon4e ^éqffra-
tion^ on ne pouvait se dissimuler que les antiques
rapports de la papauté et de la chrétienté avatqnt
été dissous. Les conséquences de ce scMsme ne
s^arrétèrent pas en effet au Saint-^ége : il y avait
de toute nécessité deux classes de cardinaux, ^*é-
véques, de simples prêtres, de fidèles... comment
le fidèle eût-il pu éclaircir ce que rEgiiae ne
pouvait décider? Eh ! bien nous n'hésitais pas k
le dire : c'est encore une preqve de la dlviai^é
de la foi catholique; si la vérité n'eût pas ^ U^^
quelle puissance humaine ehtré^iaté à uneéprMve
pareille 1 ?
L'Université de Paris voulut mettre un terme
au schisme, mais ce fut en vain. Les esprits étaient
tellement exaspérés, et le furent si long-tempi,
qu'à la mort même d^Urbain on uomroa un nou-
veau pape plutôt que de se rëunir à Clément VII,
et que djQ coupables représaille$ leunent lieu à la
mort ^e ce dernier : !3oniface IX et Benoît XIJI
succëdèreut à Urbain YI et à Gltfment Y II, et
\U ne devaient p^s être les dei*n{6r$ : à Boni-
fijice IXy succécia Innocent YII9 et à Innocent,
Gr^oire XII; c'étaient donc Grégoire XII e^
Blenoit XIII> qui se prétendaient papes et agis-
saient QQ^nme tçlç, donnant à l'Europe le spec-
tacle 4'une complète désorganisation du haut de
oe siège que Jésus-Christ avait institué comme le
principe et le type de l'unité chrétienne *.
Cependant les cardinaux pressés par les souve-
:i^ins et par les peuples profondément affligea
du .^cand^le quoffrait TEglise, prirent sur eux
de çenvoquer un concile général'. Cette grande
meyMire eut TefiFet qtf elle devait avoir : du con-
cile de Pise date pour l'Eglise une nouvelle ère,
nouvelle surtout en |cela que les conciles gé-
aéraux eurent plus de pouvoir que par le passé
et s'attachèrent à consulter les manifestations
Içs pjius pures de Topiaion de leur temps. Ce
Qoncil^ s'ouvrit le 2:5 mars 1409. Il s'y ti-ouva
^ cardinaux, les 4 patriarches d'Alexandrie,
d^^^tioql^e j, de Jéi'usçlem et de Grenade, 19. ar-
c^eiréques pr^ents et l/i par procureurs, 80 évc-
7.
nion^ et les dernières promotions de Cirdiiidvx
qu'ils ont faites l'un et Tautre.
On convint ensuite que les cardinanic crëfti
par les prétendus papes sëparës l'iln de l'autns
procéderaient pour cette fois à Pëlection sous ratt-
toritë du concile, sans prétendre déroger àTëléo^
tion des cardinaux. On fit une procession solen-
nelle pour demander à Dieu les grâces nécessaires
pour l'élection d'un pape : en conséquence , leà
cardinaux, au nombre de vingt-quatre, étant eii*
très au conclave qui avait été préparé dans l*âi^
chevêché, el dont là garde fut confiée au Grand-*
Maître de RHodes, y demeurèrent enfermés dti
jours, après lesquels ils élurent unismlliiettiwit
Pierre de Candie , de l'ôirdre dés frères mineûH ^
cardinal dé Milan, âgé de soixAhte-dik ans, etqili
prît le nom d^Atôxandre V.
Dès qu'il fut élu, Jean Gw'scmi, clianceliei^ de
l'université de Paris , prononça , en présence du
nouveau paj^e et de tout le concile, un discôiiî^
dahs lequel il prit jpour texte dés paroles dés actek
des apôtres : JDomme, siin lémporè hàc ^stiMês
regHum Isfael? a Seigneur^ sefra-ce ente tethp»
que vous rélablirei le royaume d'Israël? % Ilp^ouva
la validité du cohcîle de Pise el son autorité, pat*
J'e^emple du concile de Nicée qui fut assembW
pw Constantin seul } et par le ciotjuième concile
œcam^qiie, contré Théodore^ db^iple de Nés--
torius', as^mblë par lesr jpèrès eux-mêmes; il ex^
horta le pa|pe à ne se dispenser d'aucun de ses de->
voirs , et à couper, sans différer, la racine du
schisme^ par k vive poursuite des deux concur-
rerits'2 it s^étéya ccmtre le relâchement du clergé^ .
et surtout dés moines mendiants: il parla des abus
et exhorta les pères àuÉ concile à travailler sërieu-
semént à la rëformation de TËglise.
Le nouveau pape prësida la dix-neuvième ses-
sion qui eut lîeti le i^* juillet ; il y fit un discours .
sur ces paProlee^ de sain^ Jean : Fiet unum ovilè et
unus prtstor.
Dans lès deiùc sessions qui suivirent on régla
les affaire» de TEglise pour réparer autant que
pos^Mé les maux que le schisme avait causés ^.
L'Eurbpe entière avait applaudi à Tidée du
concile ainsi qu'à ses décisions, inais l'entliour
siasmé ne tarda pcis à diminuer lorsque le nouveau
Pape fut' ëonhd. Gâ vieillard, impuissant j^our
une si tûde fâché, hé put tenir les rênes d'une
main assez ferme pour réparer les maux de FE^
glise comtné Fàvàit désiré le concile, et les ûar-
diriaurjf, séduits p^t la modeste piété du père près-
qu'inconnu qui n'avait excité parmi eux aucune
rivalité, nfe tài*dèrent pas à s'apercevoir qu'ils
avàiéiït ci^éé ub trdsièmé pape. Les deux pre^
— -!(» —
miers avaient fulminé contre la mesure de< car-«
dinaux : « le pape seul, disait Grégoire XII, avait
le droit de convoquer un concile, et en son ab-«
sence l'empereur comme avojer de TEglise. • Ua
ne le reconnurent donc pas et opposèrent leur»
actes souverains aux actes souverains du mendiant
de Candie ^... Le vieillard ëteint, le cardinal
Gossa qui avait peut-être fait de Pierre de Gandie
un marche-pied, fut élu à sa place sous le nom de
Jean XXIII ; mais le mal s'était enraciné, et un
nouveau concile devint indispensable.
L'extinction définitive du schisme n^était pas
la seule afiaire importante à résoudre, on s'occu-^
pait aussi de la réforme de l'Eglise devenue né-
cessaire, peut-être même aussi imminente que
l'autre, et en effets si cette mesure eût pu avoir
un plein succès elle eût évité de bien grands et de
bien longs malheurs à la chrétienté.
Le concile fut convoqué à Gonstance en lAl/i,
par Jean XXIII, et ouvert par une messe ponti-
ficale à laquelle assista Tempereur Sigismond en
habit de diacre.
Nous reproduisons ici les principales décisions
qui furent prises dans les U5 sessions de cet im-
portant concile.
Iro session. — On prit d'abord la résolution d*o»
pineppar nations, et pour cela, on partagea le coa-»
cileencinqnatioDs: Tltalie, la France,!' Allemagne, .
TÂngleterre, et plus tard TEspagne. Od nomoia
un certain nombre de députés de chaque nation,
avec des procureurs et des notaires, qui avaient à
leur tête un président que l'on changeait tous les
mois. Gela faisait comme des tribunaux séparés
oii les députés de chaque nation s'assemblaient
en particulier pour délibérer des choses qui de-
vaient être portées au concile. Quand on était
convenu de quelque article, on l'apportait à une
assemblée générale des cinq nations ; A, si lar-*
ticle était unanimement approuvé, on le signait
et on le caclietait pour le porter dans la session
suivante, afin d'y être autorisé par tout le con-
cile, qui ne manquait jamais d'j acquiescer.
Ainsi, quand on tenait une session, tout était
déjà conclu, et il n'était plus question d^y prendre
l'avis de chaque personne ; mais seulement â!y
ratifier ce qui avait été résolu par le plus grand
nombre des nations.
Dans une de ces congrégations, on présenta une
liste de griefs très-considérables contre le pape,
et on lui envoya des députés pour l'engager à re-
noncer de lui-même au pontificat. Il répondit
qu'il le ferait, si les deux autres contendants pre-
naient Je même parti; mais il remit de jour en
jour à donner une formule claire et précise de ^
— 100 —
ceMiOn. Pendant cé temps-lï ^ 1^ d^tës deVtt^
myevsité âe Paris arrivèrent à Constance, ajnMt
à leur tête le célèbre Gcrson, ctteincêTîèr <fe
université , et, en mdme tenlps, ààk&HrMdéMr
rbî Charles VI.
ir session. — 2 Mars. — Le pape y prùiiofi^
une formule prëcîse , par laquelle il fâfsaft sërfntèrit
de renoncer au pontificat , si son abdicâtioti
pouvait éteindre le schisme. Elle aVait êiédré6iêé
par trois nations du concile; mais, cdmcàe^ âaiti
une congrégation qui se tînt ensuite , on pi^d^KtSi
dcdontier un pape à l'Église, Jean XXIÏÏ, s^é-
tant ddguîsd en postillon , sortît secrèfenieht
de Constance, et se retira à SchaflFhouse. L'èttf-
pereur , voyant le trouble que la fuite du jOipé
avait causé dnrtS les esprits , déclara que la fé^
traite de Jean XXIII n'empêchait pas le côhcile
de travailler h la réunion de l'Église. Gerson , de
concert avec les nations , fit un discours , pout
établir la supériorité du cohcîle au-dèsàtts dû
pape.
Ce discours fut l'origine dé la question ^nî fût
vi\'emént agitée alors ^ si lô concile est ait-dëàsds
du pape ou non. Gerson prouva que rÉglîse ôtf
le cohcîle a pu, et peut en plusieurs cas, s*aii*
sembler sans un exprès consentétnent ou éôA-
mandement du pèrpe^ qtiand méthe il atiTaft été
canoniquembiit ëlu^ et qu'il vivrait t^^liét'e^
ment.
IIP et IV^ sessiondé— -^La métne disousdîon coih
tinue et eat enfin terminée par tiil décret remar*
quable^ pointant que le concile de Gbnstancé,
légitimement assemblé^ au nom du Saint-ËspHt^
et représentant TEgiise catholique militante ^ a
reçu immédiatement de Jébu^-Ghri^t Une puis-^
sance à laquelle toute përsdhiie , de quelque état
et dighité qu'elle soit , même papale , est obligée
d*obéir dand ce qui regarde la foi, l'éxtirpatidn
du slâhidtne) et la réformation de TÉglièie dans
son chef et dans ses membres.
Dans les sessions suivantes, Jean XXIII fut
mis en aô^^Usaiion et mandé à là barre dli Concile.
Sur Mh reftii d'y comparaître , on prbfcéda icorittisi
Itii ell iûêïùé temps que cotitre les héirésiarquèa
Wîcifef, Jérôfaede Prague et Jean Hus*— DansI
la X* séssibh > le concile df^olara le Pape atteint
et convaincu d'averti' ëkercé publiquement la si-
monie, entendant le^ bénéfices , et, comme tel,
le suspendit de toutes les fonctions de Pape , et
de toute administration tant spirituelle que tem-
porelle ^ OH lui envoya notifier ce qui s'était passé
dans le concile , il l^pôndit qu'il n'avait rîén à
opposer à ce qu'on lui reprochait, qu'il reobK-
nai9Mit Ift coticile comxM mnt et Infaillible^ et il
livra y en même temps que le sceau^ Panneau da
pécheur et le livre des suppliques qu'on lui de-
manda ; et il fit prier le concile d'avoir ^;ard à
sa subsistance et à son honneur. Ce fut après cette
session que Jean XXIII fut conduit dans nne
ville de Souabe , à deux lieues de Constance.
XI' session. — Jërôme de Prague comparut
devant le concile y fut arrête , et mis en prison.
Xiy* session.—- On reçut l'abdication de Gré-
goire XII: il la fît faire en son non^ par Charles
de Malatesta. On somma Pierre-de-Lune de faire
la même chose ^ ce qu'il refusa opiniâtrement,
et persista dans son refus jusqu'à sa mort, en
1424.
XY^ session. — On termina l'affaire de Jean
Husy que Ton fit comparaître. Le promoteur da
concile demanda que les articles prêches et en-
seignes par Jean Hus , dans le royaume de Bo-
hême et ailleurs , étant hérétiques, séditieux, cap^
tieuXy offensant les oreilles pieuses , fiissent con-
damnés par le concile ; et que les livres dont ces
articles étaient tirés fussent brûlés. On lut dn«
quante-huit articles tirés des écrits de Widef, et on
le condamna. On lut quelques-uns de ceux de Jean
Hus: il ne voulut jamais reconnaître qu'il. était
coupable ; et le concile , après avoir condamné
tous ces articles, le condamna lui-même à être
àé^ndé , et abandonne au jugement séculier ; en
conséquence, on procéda à sa dégradation, et on
le livra au bras séculier qui le fit brûler. Le con-
cile difolara ensuite hérétique , scandaleuse et
séditieuse, la proposition de Jean Petit : savoir ,
qu'un tyran peut être tué licitement, et d'une
manière méritoire , par chacun de ses vassaux
et sujets, même clandestinement, par embûches
■
secrètes , par flatteries ou caresses , nonobstant
toute promesse^ serment et confédération faite
avec lui 9.
XXP session. — Jérôme de Prague, après avoir
parlé avec beaucoup de hardiesse, fut exhorté
par les pères à se rétracter ; et , ayant persévéré
dans son opini&treté, il fut, par sentence du con-
cile , déclaré hérétique , relaps et excomunié. En-
suite on le livra au bras séculier, qui lui fit subir
le sort de Jean Hus.
XXXVir session. — On y prononça (après
s^en ^tre occupé dans un grand nombre de sessions
précédentes) la sentence de déposition contre
Benoit ; elle déclare que Pierre-de-Lune , dit
Benoît XIII, a été et est parjure; qu'il a scanda-
lisé Téglise universelle; qu'il est fauteur du schisme
et delà division qui régne depuis si long-temps,
un homme indigne de tout titre, et exclu pour tou-
jours de tout droit ^ la papauté , et comme tel t
■ • «< •
lis concile le dégr^iàe , le dépoae et )e jir-j
tputes 9f» digpUâ «t piEjce^; lui dëfiçqd (
gftrd^r «informais copime pape; dëfep<
les cbrëtiei!», de quelque ordre qu'ils soient,
obéir, sous peine d^étre traités comqae fautei
schisme et d^hérësie, etc. Cette sentence fi
prouvée de tout le concile , et affichée ç
ville de Constance.
Çel^ fait , on entama Tœuvre de 1^ i*ëfo]
clergé ; mais on ne voulait la terminer quV
rélection d'un pape. En conséquence , 0|i
da ^ œttQ él^tion , et au bout de trois jgu]
conclave, le cardinal Colonne fut élu et prît le
de Martine V, après son couronnement. Les nf I
lui ayant demandé de travailler à la réformai
qv'il avait pfomise après son élection , il
vêla sa promesse. ^
XLir session. — Le nouveau pape y pi\âd<|^
et Tempereur y fut présent. Les nations pn^ntlV
rent un mémoire pour Taffaire de la réfomatMl? :
mais Martin^ importuné de leurs in^ances , dMÉt*
un {MTojet vague sur lequel on ne pouvait rien i)(tft^^
cdure, et après cette sorte d'ajournement de 'M-
question la plus importante, le concile £«l'liBH;
miné. U avait duré trois ans et demi. v )
On a reproché à ce conçue , si important d'wl*
leurs et si sage dans la plupart de ses déereta, sa
le
Qd de
end
faute
4^ s^éffkA emtre jbi^a Hu» et Jéràme
» edoq » argu^ de Ui qu'il n'âail pa^
ique. L^ parlisana du concile répondent
^pjpqssiDt que la rjgueuc soit exo^sive, la
jà% ppiptélé fs^uâiee, et que si les conciles
Iqu^^ont ip^illibleâ dausieurs décision,
p^uyent être , d^aip.iès la nab^re hummine
ffs auÊsursy in^pecpable^ dans Vapplication.
I%i«soo« aux Théologiens le soin de d^ider
çteslïipn^.
.neste 9 le supplice de Jean Hiis porta ses
comme la plupart des autres persécutions *;
toont, expjoitée par un autre enthousiaste ^
^ fut la source de mille hocrencs et d une
civile et politique qui désola Prague et
emagne*
Le pape avait ajourné à cinq ans la réforme et
AOUi{e£^u concile général , maïs il ne devait pas
k pnéûder^ Ge soin fut rései^vé à son succes^ur
ft^è^ie IV* Ge pontife, lié par des promesses anté*
lleafas ^ devait avant tout s.'occuper de réformer
lt,oaiUf 4^ Kqme , et se mettre à la discrétion des
fudinajux les plus inQuenta pouv la tenue des cour
mLqsw II. avait promb eq outre à ce corps^ si puis-
fgnfc alors^ delui laisser l'administration des villes
dont chaque cardinal avait la garde j ms|is le pou-
voir change facilement les idées i repentant de sa
faiblesse y il rrfumsBait avec iMitear le ooncile de
Bâle qui devait être pr^dë par le cardinal Gësa-
rioi f occupé alcMTS à diriger une armée allemaâde
contre les Hussites , et aussicdt après aa réunion
il résolut de le dissoudre, pour Pajoiumar à dix-
huit mois ; mais il trouva une rénstance à laqudle
il ne s'attendait pas. Les pères du eoncile firent
au l^t du pape une réponse sy nodtSe^ dans kh
quelle ils posent les mêmes principes; et ils les
appuient par de solides raisons : « i* snr ce qnè
pei^sonne ne peut contester l'autorité de l'Bgfiae»
et que tout ce qu'elle reçoit doit être reça par
t )us les tidèles ; qu'elle jouit seule du privil^
ae Pinfaillibilité y et qu'ainsi elle seule peut fiiire
des lois qui obligent universellement tous les
fidèles ; 2^ sur ce que les conciles généraax sont
d'une autorité égale à celle de TËglise, parce
qu'ils représentent l'Eglise catholique, qui tient
sa puissance immédiatement de J.-G., comme Ta
décidé expressément le concile de G>nstance9 donc
les conciles généraux sont in£adllibles, puisqu'ils
sont l'Église même ; â"^ sur ce que le pape, quoique
chef ministériel de l'Ëglise, n'est pas cep«ida«t
au-dessus de tout le corps mystique, parce que
ce corps mystique, même sans c<mipter le pape,
ne peut pas errer dans les choses de foi» au lien
que le pape, quoique chef de ce corps, peut errer;
ce* que Teitpërience fait voir. D'ailleurs, ôe même;
corps a déposé des papes convaincus d'erreur
daus la foi; et, au contraire, le pape n*a jamais
condamné ou excommunié le reste du corps de
TEglise. »
Malgré la solidité de ses raisons, Eugène voulant
toujours que le concile fût dissous , ce même con-
cile crut devoir opposer son autorité à la sienne '•
Eugène IV fut invité à se rendre au con-
cile ; il répondît en annulant ses travaux , mais
le concile luttant avec lui de fermeté, somma
de nouveau le pape de comparaître dans son sein
et de révoquer ses bulles; à défaut , le concile de-
vait s'emparer de l'administration de FEglise et
considérer le pa^e comme n'existant plus.
Les travaux continuèrent en effet dans qua-
rante-cinq sessions successives qui ne durèrent
pas moins de douze ans... Ne pouvant reproduire
ni même résumer les décisions de cette assemblée,
nous nous contenterons d^indiquer les plus im-
portantes.
Dans la première session le cardinal Julien
avait exhorté les pères à mener une vie sainte et
pure, à avoir de la charité les uns pour les au-
tres, et à ne travailler que pour le bien de l^É-*
glise. On exposa ensuite les motifs de la convo-
cation, du concile, savoir : 1^ extirper les héré-
V, 8
sies ; T réunir tout le peuple Clirélien à TEglite
catholique; 3" donnci* des instruclions sur les
vérités de ]<i foi ; U'^ a{)aiâer les guerres entre les
princes chrétiens ; 5" réformer TEglise dans son
chef et dans ses membres ; G"* rétablir autant quMl
est possible rancicnnc discipline de FEglise. On
renouvela les décrets du concile de Constance
contre ceux qui troubleraient le concile par des
intrigues secrètes ou par une violence ouverte,
et contre ceux qui se retireraient sans avoir fait
part de leurs raisons. Enlln, le concile fit un dé-
cret portant que le saint concile de Bàle était
légitimement assemblé, et que les prélats dtvaient
s'y rendre.
Dans la plupart des sessions suivantes on ne
s'occupa que du pape, qu'on finit par déclarer
contumax s'il ne se rendait dans la chaire où
rappelaient son devoir et ses promesses.
Pendant ce temps, Eugène IV convoquait un
autre concile à Ferrare, mais les pères assemblés
à B&Ie^ arrivés alors à leur vingt-sixième session»
refusèrent la bulle de translation, cassèrent ras-
semblée de Ferrare comme schismatique^ et con<«
tînuèrent leurs travaux ^°.
Voulant frapper un coup d^autorité^ ils dres-
sèrent contre Eugène huit articles portant ; que
c'est une vérité de foi catholique que le concile
— 445 —
général est supérieur au pape; qu^il ne peut ëlre
dissous ni transféré sans le consentement général.
Et Pon établit ces propositions comme articles de
foi''.
On s'occupa ensuite de Télection d'un nouveau
pape. Le conclave présidé par le cardinal d'Arles
nomma Amédée, duc de Savoie. On lui députa
vingt*cinq ecclésiastiques qui furent le trouver
dans sa solitude, vainquirent avec quelque peine
sa résistance^ et il prit le nom de Félix V ^*.
Cette élection fut la source d'un nouveau
schisme; les Français ^ quoique partisans du con-
cile de Bâle, reconnurent toujours Eugène pour
ne pas renouveler les scandales passés. :Lcs An-
glais et les Ecossais en firent autant, mais les sou-
verains d'Aragon, de Hongrie, de Bavière et
d'Autriche, reconnurent Félîx^ ainsi que les
universités d'Allemagne et de Cracovie.
Pendant ce temps, Eugène avait rassemblé jus-
qu'à soixante-douze évêques dans un autre con-
cile, et s'occupait, sans pouvoir y parvenir, de
la réunion des sectes d'Orient au Saint-Siège. Il
mourut en \,W]y après seize ans de pontificat, et
après avoir guerroyé tout ce temps spirituelle-
ment et temporellement.
Ce pontificat est le seul reconnu par l'Egliae,
malgi'é les décisions du oonoile deBwle, et c'est
8.
un hommage rendu à ruiiilé^ car rînflexîbîlîfë
de son caractère hautain lui (it beaucoup de
mal.
Félix V e'tait trop accommodant et trop peu
ambitieux pour continuer le schisme ; il reçut de
Nicolas y le chapeau de cardinal^ aussi humble-
ment qu'il avait reçu la tiare du concile de Bàle.
Malgré toutes les agitations et les schismes qui
avaient ébranlé le pontificat, dit avec raison un
historien protestant^ mais impartial, malgré les
coups que lui avaient portés les conciles généraux,
il se serait relevé promptement après la dissolu-
|tion de l'assemblée de Bâle, et il eût peut-être
repris toute sa vigueur ancienne^ si de nouveau^
Grégoire Vil eût encore siégé à Rome. Peut-
être même la papauté se serait-elle élevée plus
haut que jamais, si, comprenant dans toute leur
urgence les besoins du temps et satisfaisant aux
vœux des hommes le plus éclairés, elle eut donné
au monde ce que trois conciles avaient promis en
vain: des réformes. Point de doute que, dans ce
cas^ la reconnaissance des peuples et la vénération
des fidèles n'eussent redoublé d'ardeur pour ce
sacerdoce qui, huit siècles auparavant^ avait ci-
vilisé l'Europe^ livrée par le paganisme à l'inva-
sion des Barbares. Qu^on se le persuade bien, si
Rome elle-même eût commandé des réformes.
— M7 —
la reforme telle que lajit le seizième siècle , û'eût
pas même été proposée.
Les améliorations yenant d'en haut se font à
bien moindres frais et satisfont à un degré bien
supérieur que celles qui s'opèrent d'en bas. Il y a
une loi pour arrêter les unes; les autres ne po-
sent l'épée qu'après épuisement.... Mais tel n'é-
tait pas le sort de l'Eglise , elle devait subir Lu-
ther, puis Calviu, et les nombreux novateurs nés
de ces deux réformateurs célèbres , et souilrir de
tous, quoique se conservant toujours dans sa foi
et dans sa vérité primitive, car la vérité est
UNE.
Nicolas V avait des intentions généreuses ; il^
s'occupa d'abord de pacifier Tltalie, considérant
cet objet comme un préliminaire indispensable à
son projet^ d'unir les princes chrétiens contre
les Turcs; mais il n'y put parvenir, non plus
qu'à faire renaître l'harmonie entre la France et
l'Angleterre. Dans les moments de calme que lui
laissait sa politique conciliatrice, mais faible, il
cultivait et protégeait les lettres ; sa mort arriva
doucement sur ces entrefaites, après douze ans de
ppntifîcat. On n'a chargé sa mémoire que d'une
faute : c'est d'avoir affecté le produit des indul-
gences à une guerre politique, au lieu de le ré-
server pour la croisade projetée.
Alphonse Borgia ou Calixte III| son raooesseur,
à qui la France doit la révision du procès do
Jeanne d^ Arc, fut la cause bien innocente de bien
grands malheurs pour la chrëtientë, en prépa-
rant à son neycU) fort jeune encore^ les Toies an
pontificat ^».
Le savant Pie II , qui avait été le secrétaire du
concile dcBftle^PaulII, Sixte lY, Innocent VIII^
se succédèrent, apr^s Calixte, à des intervalles
rapprochés, mais sans pouvoir redonner ik la pa-«
pauté cette vie et cette autorité qui lui manquaient
depuis Grégoire VIL Ils roulèrent daus le même
cercle de bonnes pensées de réformes sans en
^mettre aucune à exécution. Il fallait une autre
main que les leurs. Ce fut bien pis encore, ou plu-
tôt ce fut un épisode, heureusement unique^ mais
horrible et désastreux, que le pontificat d'A-^
lexandre VI, d'Alexandre Borgial
Après la mort dlnnocent VIII^ la ville sainte
fut abandonnée à la fureur du peuple qui pillait
les palais^ maudissant la mémoire du pape défunt
et lui reprochant de n'avoir des pauvres aucune
compassion. Les rues étaient remplies de voleurs
et d*assassins^ et les cardinaux étaient obligés -de
s'entourer de gardes pour protéger leurs jours.
Lorsque cette première fureur populaire fut oaU
. xuicj, l'dvéque do Gonoorde, («isant romson fu«
nèbre d'Innocent, en présence do toute la cour
romaine, exposa le triste ëtat où se trouvait VE^
glise et exhorta les cardinaux à dlire un pape in-
rëprochable dans ses mœurs et accoutume à la
pratique de toutes les vertus, qui fôt sans amh^
tion^ savant, charitable et saint, tel en un mot
que devait être un vicaire de Jésus -Glirist.
Le conclave élut Borgia !
Roderic Borgia était de la première noblesse
(lu rojaume de Valence. Il monti^a de bonne
heure une haute capacité et les mauvaises disposi-
tions qui lui en firent faire un si funeste usage :
(ral)ord avocat^ ses débauches le jetèrent dans le
métier des armes, et plus tard il embrassa par gu«
pidité et ambition IVtat ecclésiastique. Elevé au
cardinalat^ par Calixte III, son oncle, dont il avait
sans doute trompé la crédule tendresse, il abusa
(le sa confiance pour faire un trafic indigne des
chai'ges et des dignités les plus saintes. Il se livra ^
en secret encore^ car il songeait à Tavenir^ à de
honteux débordements que notice plume se refuse
ii décrire. Gr&ce à sa profonde dissimulation et à
son habileté^ sa réputation de sainteté couvrait ai
bien toutes ses infamies que le peuple romain
salua par des acclamations de joie la nouvelle
élection du conclave au sein duquel ses immenses
richesses avait acheté une majorité*. •
— 420 —
Mais inipalient de secouer cette rude et trop
longue contrainte^ Alexandre VI, âgé alors de
53 ans^ apprit à la chrétienté qu'il était père de
cinq enfants tous faits à son image, tous héritiers
de ses vices. Il semblait jouir, du haut de la chaire
de Saiat-Pierre, du mépris du monde Clirétienl
Ses trésors ne pouvant suffire à ses orgies, il tra-
fiqua de tout ce que son autorité suprême lui met-
tait sous la main, aussi dit-on de lui :
F'endit Alexander claves , allaria, Clirislum :
Emerat ille prias, vendere jure potest ^**
Il éleva son second fils, Géi>ar Borgîa, à la di-
gnité de cardinal; celui-ci, digne acolyte de son
père^ se fit par ses débauches et ses empoisonne-
mcQts un nom pareil au sien ^^. Ils étaient
aidés dans leurs trames anti-chrétiennes par
leur fille ^ leur sœur, leur maîtresse! Lucrèce
Borgia qui préparait les poisons et enivrait ses
complices de toute la lubricité de Messaline. C'é-
tait Satan et les démons dans la chaire de Saint-
Pierre ^<*! on eût dit que Dieu eût voulu punir
l'Eglise de ses fautes, mais hélas ! à cette punition
passagère comme la vie humaine, devait succéder
une punition plus durable : Luther j né de$
Borgia^ des erreurs et des schismes passés, de-
Vait être plus funeste à TEglise que les déborde-
ments de NeVon et de Messaline.
Mais laissons la vie privée de cette hideuse fa-
mille et des détails dont nous devons le récit à
la malheureuse idée qu^eut le chapelaia Bernard
d'écrire le journal des actions de son maître. Di-
sons, pour être juste avec tous, même avec le
Diable, que la vie politique d'Alexandre VI, mé-
rita moins que sa vie privée et sa vie pontificale^
['exécration de la postérité ; mais Thomme y re-
parut souvent, malgré ses efiforts, Ua varice ou
plutôt le besoin d'or, le dominait tellement, qu'il
dépouilla tous les princes^ ses voisins, pour aug-
menter ses trésoi-s. On Taccusa même d'avoir livi'é
Zizim à Charles YIIl, après l'avoir préalablement
empoisonné pour le prix de trois cent mille écus
d'or^ reçus de Bajazet. On a peine à concevoir,
iprès tout cela, son alliance avec ce bon Louis XII.
U parvint sans doute à le tromper et à fasciner ses
yeux comme il avait fait, plus jeune, du pape Ca-
lixte, qui éleva aucardinalat un pareil monstre,
et l'y éleva innocemment.
Ce pontificat termine le XV* siècle, pendant
lequel les convictions et la foi catholique durent
nécessairement s'affaiblir dans toutes les clas-
ses : à Rome même , où l'on ne passait pour
im homme éclairé qu'en parlant ou écrivant
1
— 4M —
contre la momie du Christ et les mystères de la
religion; à la cour on ne parlait qu'ironîcjuc-
ment des institutions de l'Eglise et des livres
saints. In quel tempoj dît Carraciolo, nonpareva
fosse s^alantuomo e biion cortigiano coltd che
dei dogmi délia chiesa non m'evn qualche opir
nion cTronen ede^etica i^...
Cet état anormal et monstrueux va porter ses
fruits dans le siècle suivant : nous allons assister
à la désorganisation de PEglise et de la chrë*"
ticntë, à la rcfforme de Luther, sources de toutet
les guerres civiles qui ont afïligë Phumanitë, de
tout le sang vcrsd pendant deux siècles entiers •%
mais ht'las! résultat h jamais déplorable desf&nte»-
de l'Eglise; de cette Eglise fondée parle Christ eb
dénaturée par Thommc. Ainsi le monde cr^d dâr
Dieu fut dénaturé et perverti par Thomme Kbitr
et pécheur.
f
i'.
'•/i'
CHAPITRE CINQUIÈME.
Nous venons de le voir, la papauté, favorisée
>ar le développement antérieur de Thistoire^
Haiit au contraire sourdement minée dans les
ièoles que nous parcourons. Les nations de 1-Ëu-
*ope se sentant fortes dans leur indépendance et
lans leur unité, souffrirent impatiemment un
oug qu'elles avaient long-temps reci^ercbé comme
M bienfait. Lorsque survint le schisme, les
^rinces adhérèrent suivant leur politique parti^-
îulière à l'un ou à Fautre pape^ et dès-lors le près-*
tige fut détruit. Le respect pour la Tiare, par la
Faute de TËglise elle-même, ne fut plus qu'un
acte de politique. On se représente souvent à tort
la papauté comme ayant eu jusqu'à la réforme
une puissance illimitée, mais dans le fait, pen-
dant le XY® siècle, les états avaient envahi une
partie considérable du pouvoir ecclésiastique. En
France^ les rois nommaient aux évéchés; Phi-.
lippe-le^Bel insultait k h Tiare, Edouard III re^
fusait le tribut payé par ses prédëcesseurs^ et Fer-
dinand-le-Catholique, lui-mcme, résista plus d^une
fois au représentant du Sainl-Siége.
A quoi tenait cet état de choses? à la fatalité,
au malheur des temps? Non. Mais seulement aux
progrès des uns, aux fautes des autres ^ ; et puis,
il faut le dire, à ce besoin de liberté et de nou-
veauté que ressentait depuis long-temps Tintelli-
gence humaine ^ remuée par Abeilard et les pen-
seurs des hiècles précédents '.
L'unité monarchique^ le bien le plus précieux
des peuples, existait enfin en Europe. Plus mor-
celée qu'au temps de Cbarlemagne, elle étail
mieux répartie et mieux gouvernée. Elle pouyail
espérer quelque repos de ce côté, mais Forage
grondait d'un autre : l'antique unité religieuse
devait s'efifacer^ le trône pontifical, naguère élevé
bien haut, allait, sinon s'écrouler, du moins subii
ime épreuve terrible, une épreuve telle, que sans
la volonté divine, qui sait toujours séparer et re-
hausser ce qui émane d'elle^ TEglise abâtardie e1
livrée aux plus coupables désordres se fût anéantie
devant la puissance rationaliste. Mais, sidansuc
combat entre hommes, l'un a été forcé dereculei
devant Luther, dans le couibat de la foi et de l'au-
torité divine contre la raison individuelle, celle
ci devait être vaincue^ et elle Ta été. La réfoniu
' ^ i*aît couler bien du sang, elle a eu tine appa^
^ence de puissance tant qu'un fanatisme ignorant
J 'a persécutée ; laissée à elle-même, réduite à ses
propres forces, aussitôt qu'elle n'a plus été pro-
"tégée par la persécution, elle a décru en raison
inverse du progrès des lumières. Ce qu'il y avait
clans le clergé d'humain et de peccable a péché et
en a été puni *. Mais Dieu n'a laissé triompher un
instant la raison en délire que pour mieux mon-
trer plus tard sa faiblesse, sa nullité; et comme il
^ permis que l'Eglise fût punie^ il a voulu que
son caractère divin ressortît au-dessus de ses fautes
et se montrât plus haut que les orages humains,
crayonnant de splendeur et de puissance.
Depuis long-temps, nous l'avons vu par les dé-
crets des conciles, TEglise avait perdu avec les
TÎchesses et le pouvoir, la pureté des anciens
jours ; elle semblait et par ses mœurs * et par le
choix de ses pontifes, abandonnée de l'esprit di-
vin. Quelques-uns des papes schismatiques, en-
suite Sixte IV, Innocent VIII, Jean XXIII, Eu-
gène IV^ et plus tard Alexandre VI, avaient fait
monter dans la chaire de Saint-Pierre toutes les
passions humaines ; Jules II était un capitaine
plutôt qu'un prélat^; la charité avait fait place à
la luxure chez le premier, à la soif des combats
cbez le second; Léon X, leur successeuri eut U
passion des arts et du luxc^ moins condamnable
sans doute» louable même dans T Bonyeniiis
temporels, mais coupable chez un pontife, sur-
tout^ lorsque au mépris de sa sainte missioni il
spéculait sur la pieuse crédulité de son troupeau
pour en obtenir cet or qu^il prodiguait BXOf. 9X*
listes. La postérité se souviendra sans doute que
Léon a favorisé le génie de Michel-Ange et de
Raphaël I qu'il a tendu la main au génie tout moiH
dain et si peu ortliodoxe d'Ârioste^ mais elle ne peut
oublier que c^est avec Tor arraché à ses ouailleSi
au moyen des indulgences^ qu'il payait les arts et
les lettres ^« Cet oubli des convenances était d'au*
tant plus condamnable quUl passait du pontife aux
vicaires. On voyait alors un cardinal Bembo ne
jurer que par Cicérone et recommander au pr^
dicateur Sadolet de ne pas se gâter le goût par
la lecture de Saint-Paul!
Amoureux de tous les genres de gloire, la gloire
de TËglise seule touchait peu l'imprévoyant Léon:
les premiers pas de Luther l'ctonnèrent sans
Talarmer , et il répondait aux évéques effrayés de
l'audace du novateur, que ce moine était un
homme tràs-remarquable, et qu'une basse envies'at*
tachait à lui ifra Martino, disait-il, a belUssimo
ingénia, e coteste non sono che invidiefratesche...
Cet asprit supérieur , si admiré du confiant pon-
tife^ devait exdcuter ce que n'avait pu mettre à
fia Arnaud dp Brescia en Italie , Yaldua en
Fnmce , Wictef en Angleterre...
Il attaqua d'abord Tabus des indulgences , et de
Fabus allant au principe , il nia leur valeur; puis
arriva Tintercession des Saints, puis la confession,
le purgatoire , le cëlibat des prêtres , la transsub-
stantiation, et enfin Fautoritë de l'Eglise et le carac-
tère de son chef,. • Il fit plus : passant des opinions
aux actes , il osa brûler sur la place de Wiitem-
bergla bulle qui condamnait son hérésie. •.
Si Luther n'eût pas trouve une partie de TEu-
pope prëparëe à soutenir tant de hardiesse , et à
embrasser une reforme quelle qu'elle fût , le
lutikérianisme n'eût jamais éié une religion ,
mais Tamour de la dispute et de la nouveauté
qui avait saisi l'Allemagne lui faisait beau
jeu. I iput se livrer sans crainte à toutes ses
passions, élever chaire contre chaire, autel contre
autel} il no devait pas périr , car la politique des
princes avait pria parti pour lui ; le génie fiscal du
diergë italien les oppressait et les ruinait , ils avaient
aoutena les Hussites , ils soutenaient Luther; ils
auraient soutenu tout réformateur hardi qui eût
&vopiséleur haine ^ sans s'enquérir si la réforme
était raisonnable et bonne. Cette disposition des
esprits était connue de Luther, et la grande image
cle Cbarles-Qiûnt lui-même ne put Teffrayer : € J«
suis sommé, disait-il^ decomparaîia à Worms, e
dussé-je voir conjures contre moi y autant de dia
blés qu'il y a de tuiles sur les toits, je m'y ren*
drai...» D pi*écliait une croisade contre le Pape qn
était d'après lai € un loup possédé du malin espri
contre lequel il fallait ameuter' les villages et le
bourgs sans attendre la sentence des juges , ni di
concile... Si j*étais le maître deTempirCy disait-i
ailleurs , je ferais un petit paquet du Pape et de
cardinaux, et je jetterais tout cela dans ce petit fosa
qu'on appelle Mer de Toscane, ce bain les guéri
Tait ; j*y engage ma parole et je donne Chriii pou
caution "... » Du reste , il ne craignait le Pape ei
aucune façon, car il était sûr de le yaincre
4C Dewt viderit uter primo defecerit Papa of
» Lut fieras! d Toutecetteboufibnnerie était pou
Luther une arme ;1 avait par elle cette partie
de la population indifférente et rieuse^ comme i
avait par sa science, par ses hardiesses thëologi
ques et par son courage d'homme , la partie gravi
et passionnée. Aussi ne ménageait-il pas plus le
souverains temporels que les souverains spirituels
Henri YIIl était surtout traité dans ses écrits ava
un mépris calculé pour flatter la haine des prince
allemands 9. A son retour de Worms, l'un d'eux h
fit enlever pour le soustraire à des dangers imagi<
ns^ifes : )! sç tint près d'un an caclid dans un manoir
féodal , ignore du genre humain^ et de là il inon-
(iaît rSwQpfi d^ se9 écrits qui, arrivant de qe pré-
dicateur invisible d^Qi^t nul pe ço^niiissait le $ùr\f
ïC^^ frappaient que pli^s violemment Timagipation
impre^onal^le de cette AU^tnagne qu'il voulait
surtout fiëduire et passionner poi)r {ui tP.
QuViîv^itril de tout cela 1 qne les priuççs
all^mandsi m^lan^ enfin Faction jira4P^iratiQa et à
l'éloge j ûfidnX main ba^se sur les propriété e^c^e-*
aiaaliqùes ; que h peuple voul^t ausai faire ^ vér
fornam et pilla les égUs^a^ foodit les métaux pré*
oieux^ démolit les châteaux, brûla les livrée
€ Toutes inv^ations 4u diable, dans le çeul but
3» de rétablir Tégalité naturelle précbéc par
» Gbriet!... »
Quelle était donc cette doctrine neuve et siprQr
gnewive qu^on allait substituer à la doctrine catho-
lique upiver^elW) ancieaae connue le Sauveur?
U Mirait décile d^ fqrBaerd^opipiooâ^sans ce^^
modifiées, de Luther un corps de doctrine complet*
De toui H^ pamphlets réuni» et commentés: par de
«avtiita d^teure des deux; comniunions , il ré*
tolte:
i^ Que nScriture siainte est la seule base de la
foi , ba^a inviolable et sacrée ;
2^ QuVu(Bune oMonté humaine, n^existe plus
V. 9
— ^50-.
et que chacun peut interpréter à son grë le livre
delà loi.
De là ces innombrables variations dont Bossnet
a tire plus tard un si grand parti 11 *
De là aussi l'abolition de la confession^de la
messe^ de la communion sous les deux eetpèces y
des vœux monastiques ^ du célibat force, de là
croyance à Texpiation des âmes après la mort d'où
étaient nées les indulgences... G^est ainsi que ju-
geant la chose sur l'abus de la chose, et substituant
une passion humaine à une autre passion humaine,
il errait grossièrement. D'après le réformateur et
de son autorité privée, les sacrements se trouvaient
réduits à trois : le Baptême, la Pénitence, TEui-
charistie... Quant à la présence réelle il Pavait
d'abord admise, mais les contrariétés personnelles
qu'il éprouva plus tard la lui firent rejeter^*.
n expliquait ces variations en disant: qu^il fallait
conserver la présence réelle quand on la rejetait
comme impie et la rejeter lorsqu'on Vimposah
comme nécessaire.
Par une singulière aberration d'esprit, Phomttîe
dn libre examen niait la liberté morale; Lïberum
arbilrium non est Dominus actuum suorum.' Il
aflîrmaît que l'homme livré à lui-même péchait
toujours et mortellement : Diim facit quod in se
est, peccat mortdliter... que dans une bonne ac-
— m —
tion tout appartenait à Dieu et rien à l'homme :
actum honumesse iotum a />efo..»La philosophie
et la religion condamnent également de telles as-
sertions *'.
Il fallait que les fautes des serviteurs de Dieu
fussent bien grandes y et que la politique passion-
nde des princes fût bien forte pour qu^unc partie
de TËurope abandonn&t ses anciennes croyances
pour suivre un pareil raisonnement !
Pendant que Luther, retire au château de Wart-
bourg, essayait de former un corps de doctrine ,
et que la rêveuse Allemagne s^empressait de tout
adopter par amour pour la nouveauté, par haine
des idées positives de TOccident , qui riait encore
desbouffoneriesdeLuther&ans pouvoir les prendre
au sérieux , la Suisse était le théâtre d\ine autre ré-
formation ; révoltée, dans la simplicité etla pureté
de ses mœurs, du traiic des indulgences dont elle
ne pouvait comprendi^e d*autre motif que celui de
la rapacité des prélats guerroyeurs et fastueux 9
elle écoutait avec faveur un jeune enthousiaste
nommé Zwingle qui enseignait duhant delà chaire
de Zurich qu*unc vieptire et unéftme religieuse
étaient plus agréables à Dîeu que les pénitences les
plus austères. Jusque h\ tout était bien, mais eni-
vré de son succès^ et brûlant de devenir Pémule
de Luther, dont la réputation grandissait dans la
9.
i
— 4pt —
Suisse allemande^ il rejota successivement la
Me^e, la Confession, le Purgatoire, ri|itercpssi|W
des Saints, le Célibat des prêtres et de plus.la.Prë-r
scnce réelle; allant ainsi, dès ses premiers pa3| plus
loin que le moine d'Erfurth y il opéra *4^iis pes
montagnes une véritable révolution religieuse •
dont le berceau de la liberté helvétique sut prqsr
que seul se garantir^*.
La porte était ouverte à la raison humaine ; les
hérésies avaient beau jeu : auxBcghards, aux Loi-
lards^ aux Albigeois^ aux Vaudois, aux Stediq-
guiens et aux Flagellans , à Wiclef, Jean Huss ,
Jérôme de Prague, Luther, Zwingle, MelanchtOQ
et Œcolampade ^^ succédèrent les Sacramentaire^
les udnabaptisteSj les Ubiquitaires et Calvin.
La première de ces sectes fondée par Carlostad se
contentait de supprimefla présence réeilej elle fat
l)i6ntôt dépassée par la suivante qui prêchait \a^
nécessité d'un second baptême , parce que Jfésu^r
Christ n^avait été baptisé quêtant adulte , et
qu'il fallsiit absolument l'imiter en ce point... Lu-
ther, d'après eux , était un esprit timide qui n'avait
fait qu'entrevoir les principes de la vraie liberté
chrétienne. Il n'y a dans TEcriture ni évêques, ni
cures , donc toute hiérarchie ecclésiastique dQÎt
être abolie. Le livre de la loi est là, il suffit à tous ,
chacun peut l'ipterpréter à son gré et ne doit pas
dièrbher aillèiirs des commentairësiiliilîles.., L'in-
tetprëtatidii fut bientôt faite chez les ps(ySans dés
campagnes de Soùabë et de Frant^onie : Jêsiià-
Christ si ëtabli FëgsUitë parmi lés Hbilibtiês, pârtkrit
fhïÈ de drbit d\é chasse et de péclie, plus d'iiii-
pdts. ; . et s'énflàmmant à là voix déltûtiser ils jire-
tt6ient les armes en criant : <t SuS^ ^ii$, siis ! il lest
tèfnlps que tes méchants tremblent ! ^« >> Boris et
méchants, tout tremblait en eflfet devant ceà foi*-
tëttéà ^uî ^liiviretot le cours du Rhin, et furent
plftrte!* la flatnmë et lé fet* jusque dans les protîn-
ces de France. Dûnd toutes les villes où ils pas-
saient, letu* fureur religieuse les portait d'abord à
brâleples archiva^ lestilUsëésj les bibliothèques.
Gçtte préttlière justice faite, ils égorgedient lès
t*ibhes^ les nobles et les ptétreâ, abattant tout ce
cjdi ëldil jilus hnutqu'eiix , tdut ce qui lélir faîsïiit
bhibragè. Ldthèr fulminait fctintre eux, dat^ sâhs
pouvoir les drrétèr ^7; le boh Mëlahchtdn pleurait^
mdis Ses Itfrld^s philanttopiqUës ne rëmëdidiefat
pus niiètli an mal; le tigre ëtait lanëë, il dëtol-a
jtiàtfu'à ce que ik fditti fût kssduvië. Altird 6ri le
mttsela. La ildblesse allemande s'èîlrajra dtÉ dkU--
get : prisé iU dëpôurtu^ elle avait ëproUvë dès
ftertës; ralliée et armëe, elle v$[itic(fail lëâ Atidbap-
tidléS ebiflttie la riûblëâie frahçaisë àtàît Vaitifcu
lë&/âèf^tél?à$dus lërbi Jëâti. .
faiblesse, il rëuiÛMait ayeo l«itear la ooncile éâ
Bàle qui devait être prëtidë par le cardinal GëBa-
rioi f occupé alors à diriger une armée aUemand*
contre les Hussites , et aussitôt après sa rëunioa:
il résolut de le dissoudre, pour rajoumer à dix«
huit mois ; mais il trouva une résistance à laquelle
il ne s'attendait pas. Les pères du eoneile firent
•
au légat du pape une réponse synodde , dans kh
quelle ils posent les mêmes principes j et ils les
appuient par de solides raisons : « 1* snr ee que
pei^sonne ne peut contester l'autorité de PÉgliae»
et que tout ce qu'elle reçoit doit être reçu par
t )us les ddèles ; qu'elle jouit seule du privil^e
ue Pinfaillibilité , et qu'ainsi elle seule peut fiun
des lois qui obligent universellement tous Ica
fidèles ; S"* sur ce que les conciles généraux sont
d'une autorité égale à celle de TEgUseï parce
qu'ils représentent l'Eglise catholique, qna tie&t
sa puissance immédiatement de J.-G., comme Vêl
décidéexpressémentle concile de Constance, donc
les conciles généraux sont infaillibles, puiaqu*ili
sont l'Église même ; â"" sur ce que le pape, qnoiqm
chef ministériel de PEglise, n'est pas cependaat
au-dessus de tout le corps mystique, parce qpie
ce corps mystique, même sans compter le papa^
ne peut pas errer dans les choses de foi^ au iliea
que le pape, quoique chef de ce corps, peuterrerf
ce* que l'elpérience fait voir. D'ailleurs, 6e même
corps a déposé des papes convaincus d'erreur
dans la foi; et, au contraire, le pape n'a jamais
condamné ou excommunié le reste du corps de
rSglise. ^
Malgré la solidité de ses raisons, Eugènevoulant
toujours que le concile fût dissous , ce même con-
cile crut devoir opposer son autorité à la sienne^.
Eugène IV fut invité à se rendre au con-
cile ; il répondît en annulant ses travaux , mais
le concile luttant avec lui de fermeté , somma
de nouveau le pape de comparaître dans son sein
et de révoquer ses bulles; à défaut , le concile de-
vait s'emparer de Padministration de FEglise et
considérer le pa^ comme n'existant plus.
Les travaux continuèrent en effet dans qua-
rante-cinq sessions successives qui ne durèrent
pas moins de douze ans... Ne pouvant reproduire
ni même résumer les décisions de cette assemblée,
nous nous contenterons dUndiquer les plus im-
portantes.
Dans la première session le cardinal Julien
avait exhorté les pères à mener une vie sainte et
pure, à avoir de la charité les uns pour les au-
tres, et à ne travailier que pour le bien de l'É"
glise. On exposa ensuite les motifs de la convo-
cation du concile, savoir : 1^ extirper les liéré-
V. 8
sies ; ^ réunir tout le peuple Clir^tieu à TËglIlK»
catholique; 3" donner des instructions sur les
vëritës de la foi ; U^ apaiser les guerres entre les
princes chrétiens ; 5"^ réformer TEglise dans son
chef et dans ses membres ; G'^ rétablir autant qu'il
est possible l'ancienne discipline de TEglise. On
renouvela les décrets du concile de Constance
contre ceux qui troubleraient le concile par des
intrigues secrètes ou par une violence ouverte,
et contre ceux qui se retireraient sans avoir (ait
part de leurs raisons. £nlin, le concile fit un dé-
cret portant que le saint concile de Bàle était
légitimement assemblé, et que les prélats devaient
s'y rendre.
Dans la plupart des sessions suivantes on ne
s'occupa que du pape, qu'on finit par déclarer
contumax s'il ne se rendait dans la chaire où
rappelaient son devoir et ses promesses.
Pendant ce temps, Eugène lY convoquait un
autre concile à Ferrare, mais les pères assembles
à Bàle^ arrivés alors à leur vingt-sixième session^
refusèrent la bulle de translation, cassèrent ras-
semblée de Ferrare comme sclxismatique^ et Qon*
tinuèrent leurs travaux ^^.
Voulant frapper un coup d'autorité^ ils dres*
sèrent contre Eugène huit articles portant ; que
c'est une vérité de foi catholique que le concile
gënëral est supérieur au pape ; qu^il ne peut être
dissous ni transféré sans le consentement général.
Et Ton établit ces propositions comme articles de
foi''-
On s'occupa ensuite de l'élection d'un nouveau
pape. Le conclave présidé par le cardinal d'Arles
nomma Amédée, duc de Savoie. On lui députa
vingt-cinq ecclésiastiques qui furent le trouver
dans sa solitude, vainquirent avec quelque peine
sa résistance^ et il prit le nom de Félix V ^^.
Cette élection fut la source d'un nouveau
schisme; les Français ^ quoique partisans du con-
cile de Bâle^ reconnurent toujours Eugène pour
ne pas renouveler les scandales passés. .Les An-
glais et les Ecossais en firent autant, mais les sou-
verains d'Aragon^ de Hongrie, de Bavière et
d'Autriche, reconnurent Félix^ ainsi que les
universités d'Allemagne et de Cracovie.
Pendant ce temps, Eugène avait rassemblé jus-
qu'à soixante-douze évêques dans un autre con-
cile, et s'occupait, sans pouvoir y parvenir, de
la réunion des sectes d'Orient au Saint-Siège. Il
mourut en lft47, après seize ans de pontificat, et
après avoir guerroyé tout ce temps spirituelle-
ment et temporellement.
Ce pontificat est le seul reconnu par l'Eglîae,
malgré les déciaions du coaoile de Baie, et c'est
8.
un hommage rendu à rniiilé, car rînflexîbîlîfé
de son caractère hautain lui fit beaucoup de
mal.
Félix V e'tait trop accommodant et trop peu
ambitieux pour continuer le schisme ; il reçut de
Nicolas y le chapeau de cardinal^ aussi humble-
ment qu'il avait reçu la tiare du concile de Bâle.
Malgré toutes les agitations et les schismes qui
avaient e'branlé le pontificat, dit avec raison un
historien protestant^ mais impartial, malgré les
coups que lui avaient portés les conciles généraux,
il se serait relevé promptement après la dissolu-
|tion de l'assemblée de Bâle, et il eût peut-être
repris toute sa vigueur ancienne, si de nouveau^
Grégoire VII eût encore siégé à Rome. Peut-
être même la papauté se serait-elle élevée plus
haut que jamais, si, comprenant dans toute leur
urgence les besoins du temps et satisfaisant aux
vœux des hommes le plus éclairés, elle eût donné
au monde ce que trois conciles avaient promis en
vain : des réformes. Point de doute que, dans ce
cas, la reconnaissance des peuples et la vénération
des fidèles n'eussent redoublé d'ardeur pour ce
sacerdoce qui, huit siècles auparavant, avait ci-
vilisé l'Europe, livrée par le paganisme à l'inva-
sion des Barbares. Qu'on se le persuade bien, si
Rome elle-même eût commandé des réformes^
— M7 —
la réforme telle que la fit le seizième siècle ^ û'eût
pas même été proposée.
Les améliorations venant d'en haut se font à
bien moindres frais et satisfont à un degré bien
supérieur que celles qui s'opèrent d'en bas. Il y a
une loi pour arrêter les unes; les autres ne po-
sent Tépée qu'après épuisement.... Mais tel n'é-
tait pas le sort de l'Eglise , elle devait subir Lu-
ther, puis Calvin, et les nombreux novateurs nés
de ces deux réformateurs célèbres , et souûrir de
tous, quoique se conservant toujours dans sa foi
et dans sa vérité primitive, car la vérité est
UN£.
Nicolas V avait des intentions généreuses ; il^
s'occupa d'abord de pacifier l'Italie, considérant
cet objet comme un préliminaire indispensable à
son projet^ d'unir les princes chrétiens contre
les Turcs; mais il n'y put parvenir, non plus
qu'à faire renaître l'harmonie entre la France et
l'Angleterre. Dans les moments de calme que lui
laissait sa politique conciliatrice, mais faible, il
cultivait et protégeait les lettres ; sa mort amva
doucement sur ces entrefaites, après douze ans de
pontificat. On n'a chargé sa mémoire que d'une
faute : c'est d'avoir aflfecté le produit des indul-
gences à une guerre politique, au lieu de le ré-
server pour la croisade projetée.
Alphonse Borgia ou Galixte III^ son suoceaseur)
à qui la France doit la révision du procès de
Jeanne d'Arc, fut la cause bien innocente de bien
grands malheurs pour la chrëtientéi en prëpt*
rant à son neveu, fort jeune encore, les voies au
pontificat ^*.
Le savant Pie II , qui avait été le secrétaire du
concile deBâle,PaulII, Sixte IV, Innocent VIII,
se succédèrent, après Galixte, à des intervalles
rapprochés, mais sans pouvoir redonner h la pa-
pauté cette vie et cette autorité qui lui manquaient
depuis Grégoire VIL Ils roulèrent dans le même
cercle de bonnes pensées de réformes sans en
'mettre aucune à exécution. Il fallait une autre
main que les leurs. Ce fut bien pis encore, ou plu-
tôt ce fut un épisode, heureusement unique, mais
horrible et désastreux, que le pontificat d'A-«
lexandre VI, d'Alexandre Borgia 1
Après la mort dlnnocent VIU, la ville sainte
fut abandonnée à la fureur du peuple qui pillait
les palais^ maudissant la mémoire du pape défunt
et lui reprochant de n'avoir des pauvres aucune
compassion. Les rues étaient remplies de voleurs
et d'assassins, et les cardinaux étaient obligés de
s'entourer de gardes pour protéger leurs jours»
Lorsque cette première fureur populaire fut oaU
îliécji revécue 4e Concorde) faisant l'onôsoo fu«
n^re d'Innocent, en présence de toute la cour
romaine, exposa le triste ëtat où se trouvait VE^
glise et exhorta les cardinaux à ëlire un pape ir-
réprochable dans ses mœurs et accoutumé à la
pratique de toutes les vertus, qui fût sans amh^
tion^ savant^ charitable et saint, tel en un mot
que devait être un vicaire de Jésus -Ghrist.
Le conclave élut Borgia !
Roderic Borgia était de la première noblesse
du royaume de Valence. Il montra de bonne
heure une haute capacité et les mauvaises disposi-
tions qui lui en firent faire un si funeste usage :
d'abord avocat^ ses débauches le jetèrent dans le
métier des armes, et plus tard il embrassa par cu-
pidité et ambition Pétat ecclésiastique. Elevé au
cardinalat^ par Galixte III, son oncle, dont il avait
sans doute trompé la crédule tendresse, il abusa
de sa confiance pour faire un trafic indigne des
charges et des dignités les plus saintes. Il se livra^
en secret encore^ car il songeait à Tavenir^ à de
honteux débordements que notre plume se refuse
à décrire. Grâce à sa profonde dissimulation et à
son habileté^ sa réputation de sainteté couvrait si
bien toutes ses infamies que le peuple romain
salua par des acclamations de joie la nouvelle
élection du conclave au sein duquel ses immenses
richesses avait acheté une majorité.. •
— 420 —
Mais impatient de secouer cette rude et trop
longue contrainte^ Alexandre VI, âgé alors de
53 ans^ apprit à la chrétienté qu'il était père de
cinq enfants tous faits à son image, tous héritiers
de ses vices. Il semblait jouir, du haut de la chaire
de Saipt-Pierre, du mépris du monde Glirétienl
Ses trésors ne pouvant suf&re à ses orgies, il tra-
fiqua de tout ce que son autorité suprême lui met-
tait sous la main, aussi dit-on de lui :
Vendit Alexander claves y allaria , Cluistum :
Emerai iUe prias, venciere jure potest ^*.
Il éleva son second iîls, César Borgia, à la di-
gnité de cardinalj celui-ci, digne acolyte de son
père, se fit par ses débauches et ses empoisonne-
ments un nom pareil au sien ^^. Ils étaient
aidés dans leurs trames anti-chrétiennes par
leur fille ^ leur sœur, leur maîtresse! Lucrèce
Borgia qui préparait les poisons et enivrait ses
complices de toute la lubricité de Messaline. C'é-
tait Satan et les démons dans la chaire de Saint-
Pierre^*! on eût dit que Dieu eût voulu punir
l'Eglise de ses fautes, mais hélas ! à cette punitioa
passagère comme la vie humaine, devait succéder
une punition plus durable : Luther , né des
Borgia^ des erreurs et des schismes passés, de-
vait être plus funeste à TEglise que les déborde*
ments de NeVon et de Messaline.
Mais laissons la vie privée de cette hideuse fa-
mille et des détails dont nous devons le récit i
la malheureuse idée qu^eut le chapelaia Bernard
d'écrire le journal des actions de son maître. Di-
sons, pour être juste avec tous, même avec le
Diable, que la vie politique d'Alexandre VI, mé-
rita moins que sa vie privée et sa vie pontificale^
l'exécration de la postérité ; mais l'homme y re-
parut souvent, malgré ses efforts. L'avarice ou
plutôt le besoin d'or, le dominait tellement, qu'il
dépouilla tous les princes^ ses voisins, pour aug-
menter ses trésors. On l'accusa même d'avoir livré
Zizim à Charles VIII, après l'avoir préalablement
empoisonné pour le prix de trois cent mille écus
d'or, reçus de Bajazet. On a peine à concevoir,
après tout cela, son alliance avec ce bon Louis XII.
Il parvint sans doute à le tromper et à fasciner ses
yeux comme il avait fait, plus jeune, du pape Ca-
lixte, qui éleva aucardinalat un pareil monstre,
et l'y éleva innocemment.
Ce pontificat termine le XV^ siècle, pendant
lequel les convictions et la foi catholique durent
nécessairement s'affaiblir dans toutes les clas-
ses : à Rome même , où Ton ne passait pour
un homme éclairé qu'en parlant ou écrivant
contre la morale du Christ et les mystères de la
religion; à la cour on ne parlait qu'ironique-
ment des institutions de TEglise et des livres
saints. In quel tempoy dit Garraciolo, nonpareça
fosse ^alantuomo e biton cortigiano coltd che
dei dogml délia chiesa non ave\^a qualche opi-
nion erronea edefetica i^...
Cet état anormal et monstrueux va porter ses
fruits dans le siècle suivant : nous allons assister
à la désorganisation de PEglise et de la chrë«*
tiontë^ à la reforme de Luther, sources dé toutéi
les guerres civiles qui ont aflligé l'humanitë, de
tout le sang versd pendant deux siècles entiers ••,
mais hdlas ! rcsidtat h jamais ddplorable des fautes
de PEgHse; de cette Eglise fondée parle Christ et
dénaturée par Thommc. Ainsi le monde crë^ de
Dion fut déiiaturd et pfcrvertî par Thomme lîbrti
et pécheur.
CHAPITRE CINQUIÈME
Nous yenons de le voir, la papauté, favorisée
par le développement antérieur de riiistoire^
était au contraire sourdement minée dans les
siècleb que nous parcourons. Les nations de l-Ëu-
rope s(B sentant fortes dans leur indépendance et
dans leur unité, souffrirent impatiemment un
joug qn'ellês avaient long-temps recherché comme
un bienfait. Lorsque survint le schisme, les
princes adhérèrent suivant leur politique parti-
culière à Fun ou à Tautre pape^ et dés4ors le pres-
tige fut détruit. Le respect pour la Tiare, par la
faute de l'Eglise elle-même, ne fut plus qu'un
acte de politique. On se représente souvent à tort
la papauté comme ayant eu jusqu'à la réforme
une puissance illimitée, mais dans le fait, pen-
dant le XY^ siècle, les états avaient envahi une
partie considérable du pouvoir ecclésiastique. En
France^ les rois nommaient aux évéchés ; Phi-* .
lippe-le^Bel insultait h la ïiare, Edouard III re^
fusait le tribut payé par ses prédécesseurs, et Fer^
dioand-le-Catholique, lui-même, résista plus d^une
fois au représentant du Sainl-Siége.
A quoi tenait cet état de choses? à la fatalité,
au malheur des temps? Non. Mais seulement aux
progrès des uns, aux fautes des autres ^ ; et puis,
il faut le dire, à ce besoin de liberté et de nou-
veauté que ressentait depuis long-temps Tintelli-
gence humaine ^ remuée par Abeilard et les pen-
seurs des siècles précédents '.
L'unité monarchique^ le bien le plus précieux
des peuples, existait enfin en Europe. Plus mor-
celée qu'au temps de Charlemagne, elle était
mieux répartie et mieux gouvernée. Elle pouvait
espérer quelque repos de ce côté, mais Torage
grondait d'un autre : Tantique unité religieuse
devait s'effacer^ le trône pontifical, naguère élevé
bien haut, allait, sinon s*écrouler, du moins subir
ime épreuve terrible, une épreuve telle, que sans
la volonté divine, qui sait toujours séparer et re-
hausser ce qui émane d'elle^ TEglise abâtardie et
livrée aux plus coupables désordres se fût anéantie
devant la puissance rationaliste. Mais, sidansun
combat entre hommes, l'un a été forcé de reculer
devant Luther, dans le combat de la foi et de Tau-
torité divine contre la raisou individuelle,, celle*
ci devait être vaincue^ et elle Ta été. La réforme
U lait couler bien du sang, elle a èa tine appa<-
rence de puissance tant qu'un fanatisme ignorant
Ta persécutée ; laissée à elle-même, réduite à ses
propres forces, aussitôt qu'elle n'a plus été pro-
tégée par la persécution, elle a décru en raison
inverse du progrès des lumières. Ce qu'il y avait
dans le clergé d'humain et de peccable a péché et
en a été puni ^. Mais Dieu n'a laissé triompher un
instant la raison en délire que pour mieux mon-
trer plus tard sa faiblesse, sa nullité; et comme il
a permis que l'Eglise fût punie^ il a voulu que
son caractère divin ressortît au-dessus de ses fautes
et se montrât plus haut que les orages humains,
rayonnant de splendeur et de puissance.
Depuis long-temps, nous l'avons vu parles dé-
crets des conciles, TEglise avait perdu avec les
richesses et le pouvoir, la pureté des anciens
jours ; elle semblait et par ses mœurs ^ et par le
choix de ses pontifes, abandonnée de Tesprit di-
vin. Quelques-uns des papes schismatiques, en-
suite Sixte IV, Innocent VIII, Jean XXIII, Eu-
gène IV, et plus tard Alexandre VI, avaient fait
monter dans la chaire de Saint-Pierre toutes les
passions humaines ; Jules II était un capitaine
plutôt qu'un prélat^; la charité avait fait place à
la luxure chez le premier, à la soif des combats
chez le second ; Léon X, leur successeur, eut la
passion des arts et du luxe, moins condamnable
sans doute, louable même dans les souverains
temporels, mais coupable chez un pontife, sur-
tout; lorsque au mépris de sa sainte missioUi il
spéculait sur la pieuse crédulité de son troupeau
pour en obtenir cet or qu^il prodiguait au^ ar^
tistes. La postérité se souviendra sans doute que
Léon a favorisé le génie de Michel-Ange et de
Raphaé'l| qu'il a tendu la main au génie tout mon-
dain et si peu ortliodoxe d'Ârioste, mais elle ne peut
oublier que c^est avec Tor arraché à ses ouailles,
au moyen des indulgences^ qu'il payait les arts et
les lettres^* Cet oubli des convenances était d'au-
tant plus condamnable qu'il passait du pontife aux
vicaires. On voyait alors un cardinal fiembo ne
jurer que par Cicéron, et recommander au pré-
dicateur Sadolet de ne pas se gâter le goût par
la lecture de Saint-Paul!
Amoureux de tous les genres de gloire, la gloire
de TËglise seule touchait peu l'imprévoyant Léon:
les premiers pas de Luther Tétonnèrent sans
Talarmer , et il répondait aux évéques effrayés de
l'audace du novateur, que ce moine était un
homme tràs-remarquable, et qu'une basse envies'atr
tachait à lui ifra Martino, disait-il, a belUssùno
ingenio, e coteste non sono che invidiefratesche...
Cet esprit supérieur, si admiré du confiant poQ-
tifci devait exécuter ce que n'avait pu mettre à
fin Arnaud dff Brescia en Italie , Yaldus en
France , Wic^f en Angleterre...
Il attaqua d'abord l'abus des indulgences , et de
Fabus allant au principe , il nia leur valeur ; puis
arriva Tintercession des Saints, puis la confession,
le purgatoire , le cëlibat des prêtres , la transsub-
stantiation, et enfin Fautoritë del'Egliseet le carac-
târe de son chef,. • Il fit plus : passant des opinions
aux actes 9 il osa brûler sur la place de Wittem-
bergla bulle qui condamnait son hérésie.*.
Si Luther n'eût pas trouvé une partie de l'Eu-
rope préparée à soutenir tant de hardiesse , et à
embrasser une reforme quelle qu'elle fût , le
lutkérianisme n'eût jamais été une religion ,
mais Tamour de la dispute et de la nouveauté
qui avait saisi l'Allemagne lui faisait beau
jeu. I iput se livrer sans crainte à toutes ses
passions, élever chaire contre chaire, autel contre
antel^ il ne devait pas périr , car la politique des
princes avait pris parti pour lui ; le génie fiscal du
dergé italien les oppressait et les ruinait , ils avaient
aoutena les Hussites , ils soutenaient Luther; ils
auraient soutenu tout réformateur hardi qui eût
iavoriséleur haine ^ sans s'enquérir si la réforme
était raisonnable et bonne. Cette dispontion de»
esprits était connue de Luther^ et la grande image
de Cbarles-Qiûnt lui-même ne put Teffrayer : c Je
suis sommé, disait-il^ de comparaîtra Worms, et
dussé-je voir conjurés contre moi , autant de dia-
bles qu'il y a de tuiles sur les toils, je m*y ren-
drai...» n prêchait une croisade contre le Pape qui
était d'après lui « un loup possédé du malin esprit
contre lequel il fallait ameuter* les villages et les
bourgs sans attendre la sentence des juges , m du
concile... Si j*étaisle maître deTempirCy disait-il
ailleurs ) je ferais un petit paquet du Pape et des
cardinaux, et je jetterais tout cela dans ce petit fossé
qu'on appelle Mer de Toscane, ce bain les guéri-
rait ; j'y engage ma parole et je donne Chriii pour
caution "... » Du reste , il ne craignait le Pape en
aucune façon , car il était sûr de le yaincre :
€ Deus viderit uter prinio defecerit Papa an
» Liitherus! » Toutecetteboufibnnerie était pour
Luther une arme ;1 avait par elle cette partie
de la population indifférente et rieuse^ comme il
avait par sa science, par ses hardiesses théologi-
ques et par son courage d'homme , la partie grave
et passionnée. Aussi ne ménageait-il pas plus les
souverains temporels que les souverains spirituels:
Henri YIIl était surtout traité dans ses écrits avec
un mépris calculé pour flatter la haine des princes
allemands 9. A son retour de Worms, Pun d'eux le
fît enlever pour le soustraire à des dangers imagi-^
mivfis : il $ç tiqt près d^uQ an caclu: dans un manoir
féodal j ignore du genre humain^ et de là il inon-
(iait rS^rop^ d^ se$ écrite qui, arrivant de ce pré-
dicateur invisible ^x^t mvX 9e connaissait le sort^
n'^n fr9ppai9nt que plus violemment Fimagiiiation
imf^easioiiable de cetifi AUi^l^agae qu'il voulait
surtout aëduire et passipnner poqr l[ui ^^.
QuVurriy^ltTil de |;put cela J q^e les priuçps
allw)aiid«i mélaol en^ Faction ^ Tadmiratioi^ e( à
l'éloge y âri^qt vmn h^^e sur les propriété eçpV^
Cliques ; que le peuple yqulut aussi faire ss^ vér
fonm et pilla les égli^f^ fonj^lit les métaux pré*
cieuX) diémolit les châteaux, brûla les livret
c Toutes inventions du diable, dans le sfeul but
]» de rétablir l'égalité naturelle préchée par
» Cibvirt!... »
Quelle était donc cette doctrincf neuve et sipr^r
greisive qu'on allait substituer à la doctrine catho-
Uque upiverAelle^ ancienne comme le Sauveur?
U^rait difficile de fQrixier dies opipions^ sans cqi^
modifiées, de Luther un corps de doctrine complet*
De tout ^ pampblet9 réwi» et c^mmenté^par de
gawantii dateurs des deu:K comoiunions , il ré*
suite:
i^ Que l^ritijire sj^inte est la seule base de la
foi I ba^nft inviolable et sacrée ;
2^ QuViwune autorité humqine. n'existe plus
V. 9
— 150 —
et que chacun peut interpréter à son grë le livre
de la loi.
De là ces innombrables variations dont Bossuet
a tire plus tard un si grand parti ^ ^ *
De là aussi Tabolition de la cohfession^de la
messe^ de la communion sous les deux ectpéces ,
t
des vœux monastiques ^ du célibat forcé, de la
croyance à Texpiation des âmes après la mort d*où
étaient nées les indulgences... C'est ainsi que ju-
geant la chose sur l'abus de la chose, et substituant
une passion humaine à une autre passion humaine,
il errait grossièrement. D'après le réformateur et
de son autorité privée, les sacrements se trouvaient
réduits à trois : le Baptême, la Pénitence, l'Eu-
charistie... Quant à la présence réelle il Pavait
d'abord admise, mais les contrariétés personnelles
qn*il éprouva plus tard la lui firent rejeter ^^
n expliquait ces variations en disant: qu*il fallait
conserver la présence réelle quand on la rejetait
comme impie et la rejeter lorsqu'on Vimposait
comme nécessaire.
Par une singulière aberration d'esprit, rhomitoe
du libre examen niait là liberté morale; Liberum
atbilrium non est Dominus actuum suorum.' Il
aflirmait c[ue riïomme livré à lui-même péchait
toujours et mortellement: Diim facit quod in se
est, peccat mortriliter... que daiis une bonne ac-
— 151 —
tion tout appartenait à Dieu et rieti à riiotiiine :
actum bonumesse totum a Deo.,*ha philosophie
et la religion condamnent également de telles as-
sertions ^'.
n fallait que les fautes des serviteurs de Dieu
fussent bien grandes , et que la politique passion-
née des princes fût bien forte pour qu^une partie
de PEurope abandonnât ses anciennes croyances
pour suivre un pareil raisonnement !
Pendant que Luther, retiré au château de Wart-
bourg, essayait de former un corps de doctrine ,
et que la rêveuse Allemagne s'empressait de tout
adopter par amour pour la nouveauté, par haine
des idées positives de l'Occident , qui riait encore
desbouffoneries de Luther sans pouvoir les prendre
au sérieux , la Suisse était le théâtre d'une autre ré-
formation ; révoltée, dans la simplicité etla pureté
de ses mœurs, du traiic des indulgences dont elle
ne pouvait comprendre d'autre motif que celui de
la rapacité des prélats guerroyeurs et fastueux j
elle écoutait avec faveur un jeune enthousiaste
nommé Zwîngle qui enseignait du haut delà chaire
de Zurich qu'une vie pure et une âme religieuse
étaient plus agréables à Dieu que les pénitences les
plus austères. Jusque là tout était bien, mais eni-
vré de son succès^ et brûlant de devenir Témule
dé Luther , dont la réputation grandissait dans la
9.
— ipt —
Suisse allemnndc , il reji^ta successivement la
Messe, la ConfessioD) le Purgatoire, rililerc^ssion
(les Saints, le Célibat des prêtres et de plus laPsë-r
sence réelle; allant ainsi, dès ses premiers pas, plus
loin que le moine d^Erfurth , il opéra *4<^ns pes
montagnes une véritable révolution religieuse,
dont le berceau de la liberté lielvétique sut pres-
que seul se garantir^*.
La porte était ouverte à la raison humaine ; les
hérésies avaient beau jeu : auxBcghards, aux Loi-
lards^ aux Albigeois^ aux Yaudois^ aux Stediq-
guiens et aux Flagellans, à Wiclef, Jean Huss ,
Jérôme de Prague, Luther, Zwingle, Melanchton
etŒcolampade ^'^ succédèrentles Sacramentaire^
les Anabaptistes^ les Ubiquitaires et Calvin.
La première de ces sectes fondée par Garlostad se
contentait de supprimer la présence réellej elle fut
bientôt dépassée par la suivante qui prêchait li|
nécessité d^un second baptême , parce que Jésusr
Christ n^avait été baptisé quêtant adulte , et
qu'il fallait absolument Timiter en ce point... Lu«»
tlier, d'après cu2( pétait un esprit timide quin*avfiit
fait qu'entrevoir les principes de la vraie liberté
chrétienne. II n'y a dans rEcrituro ni évéques, ni
cures I donc toute hiérarchie ecclésiastique dqît
être abolie. Le livre de la loi est là, il suffit à tous ,
chacun peut Tipterpréter à son gré et ne doit pas
dièrcher aillëiirs des commehtairësiiitltiles... L'in-
tei|3irétati0ii fut bientôt faite chez les ps(j$ans dès
eaiB|fagné9 de Souabè et dé Frantroiiie : J&iiâ-
Christ d ëtabli l'ëgdliië parmi lés hbtUhiéSy psiHâdt
plm de drbit de chasse et de péclie , plus d'itii-
p6ts. ; . lét s'énflammant à la voix déMudser ils lire-
liaient les arrhes en criàni : <t Suâ^ hxié^ siis ! il est
tënips que tes mëcharits tremblent ! *^ ^ Boris et
méchants, tout tremblait en efiet devant ceÈ fol*-
WttÉiA i]ui âtiivirefot le cours du Rhin, et forent
pdfHef la flammé et le fet* jusque dans les protîn-
ces de France. Dans toutes les villes où ils pas-
saient, leuf fureur religieuse les portait d'abord à
bràlerles archiveî^, leslnusëesj les bibliothèques.
O^tte prëlilière justice faite, ils egdrgedient lès
ribhes^ les nobles et les ptétreà, abattant tout ce
cjdi ëldit plus haulqu'eiix , tout ce qui létir faîàdit
btnbragè. Ldthfer fulminait tbntre eux, niais sàhs
pouvoir les ërrétèr ^^j le bon Mëlahchttfn pleurait^
mais ses làrHi^s philantropiqtiés ne rêtnëdifliefat
pH$ niiëUi au mal; le tigre ëtait lance, il détofa
jtt*qtfà ce que Èk faim fût àssduvié. Altird 6ri le
ttiUsela. La tidblesse alleiridndes'éffrajra d« dritt--
ger : prise iii dëi)ôurVu, elle avait éprcrtivë dès
piertéâ; ralliée et armée, elle vafincjùil ]ëà AlWbap-
tidtëd ebiîMle la ridblèâie française àtàit ValUfcu
lteà/âcgtti?àtouà lërbi Jéaa. .
Cependant une opinion plus sérieuse se prépftF
rait : la réforme à son premier &ge n'avait guère
fait que détruire , il lui fallait fonder quelque
chose de stable ou përir^et trop d'esprits pcoi-
seurs Tavaientadoptée» trop de souverains ravalent
soutenue et favorisée pour qu elle périt ainsi. Bon
ou mauvab il lui fallait un corps de doctrine qui
soutînt Texamen et la controverse ; Calvin le lui
donna.
Calvin n'avait ni Fimpétuosité^ ni la bmsque
franchise, ni la bouffonnerie de Luther; son style
était amer^ tiîste, mais fort, serrée pénétrant; sa
popularité fut prompte et grande à Genève^ où il
s'était fixé , à Strasbourg et ailleurs. La rigimir
avec laquelle il exerçait son pouvoir causa
quelques troubles dans la république, mais son
talent et sa fermeté triomphèrent de ses ennemis,
U était inflexible dans ses sentiments , invariable
dans ses démarches ^^ et capable de tout sacrifier
pour la défense de son système. Un homme de ce
caractère subjugue facilement des esprits fatigués
du vague^ et auxquels le besoin de croire à quelque
chose fait adopter la première doctrine donnée
avec assurance, soutenue avec talent et gravité.
Quelle était donc cette doctrine et en quoi dif-
fétait-elle de celle de Luther ? Simplement dansla
négation de la présence réelle et Tabolition com-
plète àe rëpiscopat, comme de tout ce que.le cAlte
poavait avoir d'extëricQr et de solennel **. Adop-
tant cependant un terme moyen entre Luther j
^Zwîngle etCarlostad^ pour ne paraître suivre les
traces d'aucun d'eux , il se rapprocha tellement
de ce qu'il niait d'une manière absolue, que l'on put
croire qu'il ne repoussait pas ce qu'il condam-
nait. En effet il admet que nous participons réel-
lement au vrai corps et au vrai sang de Jësus-
Ghrist; et il le disait avec tant de force que les
Luthériens croyaient presque qu'il était des leurs :
car il répète cent et cent fois <c que la vérité
nous doit être donnée avec les signes; que sous
CES SIGX9ES nous recevons vraiment le corps et le
sang de Jésus^Christ ; que la chair de JésuS"
Christ est distribuée dans ce sacrement; qu'elle
nous pénètre; que nous sommes participants non
seulement de V esprit de Jésus-Christy mais de
sa chair ^ que nous en avons la propre substance j
et que iious en sommes faits participants; que
Jêsus-^Christ s unit à nous en entier , et pour cela
qu^il s'y unit de corps et d^ esprit^ qu'il ne faut
poifit douter que nous ne recevions son propre
corps , et que sHl y a quelqiûun dans le monde
qui reconnaisse sincèrement cette vérité f c'est
Im^w.
L'épiscopat aboli ^ chacun était le maître de
— 480 —
8*iibwiidre, et pimr pm qu^ua obrëtien fflt bton
àUÊpùêé eh 8â fiiTMf , ce qui aitÎTë asaes fréquenn
meut) il était asmrrf non senlement de sa ytct li/f oii<
iion, comme le disait Luther, Ifiais eâoorede OTh^
jMilut... Aussi le prince Frédéric III^ Too de ma
fAttiiiers disciples^ disait^il arec confiance i mâU
gi'ë la malice de mes actions passées et celle contre
lacjudle j'atirai à combattre tonte iHa ticy je sais
tfês-cerlainement que je serai sttuvë **..•
Uri autre point de différence enti^ Latllêft et
Calvin créait qde, d'aptes lé premier) le ÛàHk
justifia pouvait déchoir de la gr&ce^ ë% que le
second soutenait nii contraire que la gtkcë «ne
fois reçue rie peut pins se perdre.
EhQtïj et pôTir fie pas entrer dtfns d'autres At^
tai jjf étrûti^m h ncttfé o&titre et tn ddborsf dé IRitrb
(rlari y noxis d'r^6rrs en (e'Mfiifiant qùè , bieb qtMr le
bdfAéfùe filt côn^^ré fm Ëalvlnf , il n'unit plus
duB^ ttécesâlté ab^lne , puisque^ d'après sa d«e-
Itïnëj (jtlA tiàtt d un fidèle^ ntfit dans fcdiiwk»
«I ûÉhÉ U grftce ^ et qui a k grftcè ne peut plèw
déèHôir. Voilà dottc , èoiMlie Tobsérte tfo^kuet ,
Hr gfài^étetidtie àdes géttératiôni infinie». 9fi\ y
É 0« sMl fid^é Atitïë toiltè Une rac« ^ U desMO-
à&iïce à€ (ee fidélè est tOùtë ptédésti^e; 9i dfl y
trouve un hoRune qui meurt dans le criACi elle
B&t pétdUe tti entier... .é*.
— 157 —
Mous ne pouyoDs^ comme nous veuaoa deie
direy donner ici Taimlyse de la doctrine de Goivdtt
qui, maigre quelques contradictions inévitables^
puisqu'elles tenaient à l'essence de sa doctrine ,
à sa c^viation du vrai, est incomparablement
plus forte^ plus suivie , plus compréhensible que
celles de Luther, de Zwingle^ de Mélancthon^
de Garlostad, d^QEcolampade et des Yaudois
prédécesseurs. Mais, plus on Texamine, plus
on est convaincu que pour toucher à une religion
qui s'appme sur les paroles mêmes du Christ, il
faut que la raison se sente bien forte et que la vé-
rité nouvelle quelle avance soit bien palpable.
Or, est-ce ce qui existe ici? autant d^hommes^ au^
tant d'interprétations, quand Pinterjprétattoa de
TËglise est si ckire et sa doctiine si pure et si
belle! Que les hommes en aient abusé pour faire
le mal^ soit ; mais c'est une preuve de pluâ que
rhomme dénature ce qu'il toudie aulieu de le
rectifier. Pouvons-nous, après cela, nous glorifier
de notre raison et la mettre au-dessus de la vérité
immuable et une que le sauveur nous a laissée ^.
D'après ce que nous avons vu de la doctrine
de Luther et de Calvin, il semblerait que la pre-
mière vertu du réformateur doit être la tolérance^
puisque la base de cette doctrine est la liberté de
conscience et la suprématie de la raison humaine
sur Taiitoritë... Eh! bien^ nous voyons Calvin
faire brûler Servct pour avoir trouve dans récri-
ture un sens diffifrent de celui qu^l y trouvait lui*
même **. Si tout homme est juge du sens de IV-
criture et peut Fintcrpreter à sa façon, pourquoi
ces rigueurs? Si les ministres catholiques ont ëté
trop durs, trop impitoyables, dans la répression
des hérésies, pourquoi cette dureté^ cette cruauté?
Nul homme, rcpi*endra-t-on, n'est sans irritation
et sans passions ; nul homme ne peutse dépouiller
de la partie humaine qui est en lui. Mais alon^
et c^est là où nous voulions en venir ^ pourquoi
réformer une institution dipinc parce qu'elle a
été faussée par ses ministres humains ? Réformes
les ministres, changez-les, mais ne vous en prenex
pas à la religion y surtout quand il n'y a d'autres
résultats possibles que le doute, Fégarement, la
haine, la division^ la guerre, une guerre inces-
sante et éternelle. . .
— 450
MM»»M^%/»t^^»* »>M^^i»<i<»i^»%%^^M#»»uv% v^^'*>*^m/^m\/%/vkty%ik/k^^A0V¥*mvy%
CHAPITRE SIXIÈME.
L'histoire de la reforme protestante et de ses
principaux chefs a absorbe tout le chapitre prë-
cèdent; voyons maintenant ce qu^ëtait devenue
TEglise et le parti qu'avait pris la papautë pen-
dant cette révolte ouverte contre son autorité, et
les lois divines qu'elle est chargée de faire exé-
cuter j voyons surtout les fruits de cette terrible
leçon qu'elle vient de recevoir, et l'influence de
la réforme sur les mœurs et les lumières de l'Eu-
rope chrétienne.
A la mort de Léon X, qui a été jugé par la pos-
térité de tant de manières diverses % le précep-
teur de Charles V fut élu sous le nom d'Adrien Y L
L'élection n'était pas tombée depuis long-temps
sur un homme aussi digne : Adrien avait une ré •
putation irréprochable ; il était pieux, économe^
actify bienveillant, mais sévère ^. a Nous savons^
ditrily peu après son élévation, que depuis long-»
temps d'abominables excès ont eu lieu près du
— mo —
SaiutrSiége^ et la corruption s'est répandue de k
tête aux membres. Nous avons tous dévie, il n j
en a eu aucun qui ait fait du bien \.. » et ilsW
gagea à tout changer, il fît èsjperer line rëforae
telle qu^on pouvait la désirer, mais Tœuvre ii'é*
tait pas facile, la bonne volonté d^un seul, quel*
que haut placé qu'il fût, était loin d'y suffire; le
mal était trop enraciné^ il fut plus fort que liûet
Pentraîna; aussi sa dernière parole fut^élié ub
ci*] de douleur et si significatif qii*il a été gi^vÎ!
sur son tombeau : Pouirjùoî y a-t-^I dek iéiiifis
daHê lesquels le meilleur homme hé peîii ifvtsfi
Jpctii'e que succomber !
Clément YII hii succéda. C'était lin llfc^aicis.
Il eiît, comme Adrien, l'ambition diibiêri étptot-
étrb plus de lumières pour robtëhit* <• Riais les
événements ne favorisèrctit pas s^ Ibtëtttibâi.
Poursuivi par la fatalité dans ses actes les j^liis
importants, il acheva de se perdre êii se pMû-
pitant plein de cohfiahce h'u devant dé ses éhki^
idis teiiiporels et spirituels.
Les malheurs de tlome, hbfribldneiii sàdc^gëè,
d là défection de rÂUéhiàgrië, fii*éUt {^Vëfit
sdigtiër son cœur ^. La ix^flifme giîîUdtt et àè dé-
veloppa devant ses yèii^ ^i^ qtt*il lui îht {MS-
sible de Varrétër, bt il laissa le Sàiht^iëgë ft««i
une t*ëptitâtiou Gomprdtâiscy sahs à'utôrité d|)irl-
^« luolle ni teiuporellO| aprâs avoir eonstaiitment
'* comballu pour ces dqux causes. L'i^llQmagitfj
'- duNopd, de tout temp^ si/avorable !^ la p9p&Mt^>
^ cette Allemagne flout la cQMversion avait servi ei^
'' Occident à fonder la puissance du sidge romain^
cAle AU«in{igne qui autrefois avait si efiicaqe-
ment aidé les papus dans rétablissement de If^
hiérarclne, travaillait, apvèa s'âtre rëyoltëci ^ faire
pas^r ses convictions dans la Scandinavie, en
Angleterre, pu Suisse, eu France, et jusqu'en Es-
pagne, mçilgre les eflforts de Charles-Quint... La
lutt« dps intc^réts spirituels et temporels dans la-
i[uclle la pnpautd s'ctait placde^ paraissait soule-r
vt^ tout exprès pour procurer aux opinions de 1^
i^ëforme une domination plus grande ^.
Ta|it de douleurs, augmentées de violenta cha-
grins domestiques, conduisirent au tombeau ce
|)ape bon et éclairé, mais moins fort que son
ùècle et Iq^ circonstances qui rentouraien|;.
Alexandre Farnùse, sous le nom de Paul III|
succéda à Clément YII; il était Agé de soixante
ans, mais encore vert et plein d'ardeur; quarante
années de cardinalat Tavulent initié aux affaii^fs,
et telle était qa position à ilome qu'il attendait b^
Tigre con^fiie on attend un héritage \ De grand»
éf éneoients, de grandes choses, étaient en eiïc^
réservées à son pontificat : la réaction catholique
— 1W —
manifestée par le concile de Trente» et la mis-
sauce de l'ordre des Jésuites.
Paul m avait des manières ais^y nobles et
magnifiques, il ëtait adoré dans Rome où son au'
torité était plus grande que celle de ses prédëces'
seurs, bien qu'il laissât aux princes de llSglise la
liberté de manifester hautement leur opinion
pour que la lumière jaillît de la discussion ; mais
en même temps il maintenait ses droits et savait
faire respecter sa volonté. Sa pi*udence et sa cir-
conspection étaient connues des souverains de
TEurope, et Fissue des négociations lui était
rarement défavorable; en un mot, il était re-
douté au dehors et aimé des siens. Yoilà^ sans
doute, bien des éléments de succès, bien des qua-
lités dans un pontife du XVI* siècle; pourquoi
faut-ii dire après cela que son cœur était dur et
que cet esprit élevé était superstitieux. Gomme
Louis XI, avec lequel d'ailleurs il avait beaucoup
de traits de ressemblance, il crojait à l'astro-
logie et à l'influence des constellations qu^I con-
sultait fort souvent ».
Laissant de côté ses négociations, ses démêlés
avec TEmpire, et toute sa vie politique, nous
nous attacherons plus particulièrement à peindre
les deux phases importantes de son ponlifîcat|
dont nous avons parlé.
— 4*5 —
D'accord avec Charles-Quint , le concile de
Trente^ dont le pape avait plusieurs fois retarde
Touverturei craignant de ne pouvoir le dominer
assez, fut ouvert le iâ décembre i5&5. Ce concile»
le dernier des Œcuméniques » si long et si im-
portant, qne Sarpi Tappelle Vllliade du XW
siède '» fut ouvert par trois cardinaux, légats du
pape. Quatre archevêques et vingt-deux évéques
seulement, assistaient à la première session, mais
ce nombre s'accrut beaucoup dans les sessions
suivantes : deux points importants appelaient
surtout Tattention de cette réunion si ardemment
désirée, et devenue si célèbre : la réfor me en elle-
même» c'est-à-dire l'hérésie des novateurs et en-
suite la réformation des abus de la cour de Rome,
â la révision sévère des lois et des règlements de
l-Eglise, la foi àconserver, la discipline à rétablir.
On procéda d'abord avec système, etTontiaita
de in révélation^ des sources dans lesquelles il
&ùt en puiser là connaissance et la preuve. Après
quelques dLscus^on^ entre les évéques dont les
opinions se seraient volontiers rapprochées du
protestantisme , et les évéques o^tliodoxes, il fut
convenu que là tradition non écrite reçue de la
bioiiehe du Christ, propagée par les apôtres, doit
Hi^adinise comme récriture elle-même, <jue la
iFulgate en était la] traduction aulheulique, et
qu'elle devait être imprimée avec les plus grandes
précautions.
Passant ensuite au dogme imporlael et poaiii/
de la justification et des doctrines qui s'y rat^
tachent, on entendit les mêmes évoques , de
Gliiozza, de Bellune, de la Cava, de Sienne, et In
cardinal Poole qui, presque comme Luther, attri-
buaient uniquement la justification au mérite di|
Christ, déclarant que les œuvres ne sont que les
preuves de la foi, Pespérance et la charité ses
compagnes. Cette doctrine repoussée avec fbroe^
on écouta avec un peu plus de faveur, mais sans
l'admettre cependant, une modification prësentëe
par Séripando, général des Augostins ; ceux qui
la combattirent le plus vivement furent Garaffa,
Salmeron et Lainez, amis et émules d'Ignace de
Loyola, dont nous aurons bientôt à nous oc-
cuper.
Enfin^ l'assemblée conclut, et tout en admettant
avec les évéques dissidents les mérites du Ghrist,
comme base première, eUe ne leur atla'ibua If jui-
trfication qu^autant qu'ils produisent la n^^ioiManqe
intérieure, et par conséquent, les bonnes crawiv
desquelles tout dépend : « les pécheurs^ dil le
concile, sont disposés à être justifiés, lorsqu^efXffiMi
et aidés par la grftce, et qu'ajoutant foi kla pa-
role sainte quHls entendent, ils se portent li|iM-
ment vers Dieu, croyant que tout ce qu'il a ré-
\élé et promis est véritable, et surtout que Tîm-
pieest justifie par la grâce que Dieu lui donne par
]à r^emption de Jësus-Ghrist ; et lorsque, se re-
connaissant pêcheurs, quVtant frappés utilement
de là crainte delà justice de Dieu, et ajant recours
à la divine miséricorde ils conçoivent rèsperance
et ont confiance que Dieu leur sera propice à cause
de Jésus-Ghrist, et commencent h Taimer comme
-source de toute justice ; et que , pour cela , ils se
tournent contre leurs péchés , par la haine qu'ils
en conçoivent , et par la détestation ; c'est-à-dire
par la pénitence qu'il faut en faire avant le bap-
tême; enfin, lorsqu'ils se proposent de recevoir le
baptême , de commencer une vie nouvelle , et
d'dbseirver les commandements de Dieu. »
■ Le concile explique ensuite la nature et les ef-
fets de la justification , en disant qu'elle ne consiste
pas seulement dans la rémission des péchés, mais
aussi dans la sanctification et le renouvellement
intérieur de l'âme ^o.
' Cest ainsi que fut exclue à jamais Topinion de
Luther , celle de Calvin , ainsi que celle des évé-
qoès métiiateurs qui, sans ado|)ter ce qui était gé
nâralèmeiit regardé comme nue hérésie par
l^Églîse, auraient cependant adopté une opinion
moyenne et conciliatrice.
V, 10
— VAS —
Il fut convenu conunc corollaire que les sacre-
ments doivent être conservés tels qu'ils existent ^
car ib embrassent toute la vie de Thomme» ils sont:
la pierre fondamentale de la liiérarchie, ils aa«>
noncent la grâce , la communiquent^ et complÀ-
tent le rapport qui rapproche Thomme de Diea«
Le concile , après avoir dëfini et expliqué la
doctrine catholique^ condamne, dans les trente-
trois canons suivants, les erreurs contraires à cette
doctrine j et déclare que TËglise ne reconnaitra
jamais une opinion qui pourrait s'en écarter ^K
Ici se termine la partie du concile de Trent?
qui a rapport à la conservation de la doctrine ca-
tholique. Les sessions n'étant pas continues, nou0
retrouverons sous les successeurs de Paul III la
reformation de la discipline ecclésiastique f qui
n est pas la partie la moins importante de ce con-
cile 19. Bevcnons un peu sur nos pas pour con-
naître la vie d*un homme qui a tant influé sur les
événements religieux de cette époque et de Fa-
venir.
Parmi toutes les nations de TEuropei l'Eispagne
était la plus empreinte, à la fin du XY® siècle^- de
ces idées de chevaleiîe qui commençaient à d^
cliner ailleurs. Le séjour des IVIaures, les oonqoâ-
tes du Nouveau-Monde avaient surtout contribarf
à les y conserver pendant qu'elles se perdiûent
en ÏVanee et eh AUemagne. Aa milieu de e^t en-
diettstasftie chevaleresque et guerrier ëtàU Wé
dans lé Guijtùscoa un jeune desoendant de k ntH
ble làaîaon de Lôjbla neninsé Inîgô ^^. Sa pre^
imère jeunesse se passa à la ctmr'dé Fcrditiaiid le
Gadielique et dans èeUe tâu due de Maj&ra ; Mn
tme itaipressioiniable et ardenfè s^y déreloppâ
•0tis Tebipii^ê des passions qfui rentouraientr ht
mége de' Pampëlunë contre écs Français lot dott ^
Tlsccarion de déployer nné Valeur dont il eût rins^
Itt tàk^ parler l'fitirôpe entière y liJaià son «fdo!^
inétoie te trDmpa 5 et il ne trouVà qu une inakdie
lengue et dduloûreuse \k où il eût voulu abqttértt-
une gloire ^pieliii présentaient sahs oesse Ses sbn^-
ges endidusiastes; Il pôtta cependant dtfiti sié^
souSraBees ce eouriage patieiit et calme qni est le
pMpre des km^ fbrtenieiit trempées. Reténtt au
Ut par ses blesàUres,- il feuilletait^ pour cllarmèt
sta ettnui^ dés rotnaiis dk ehëvalerie au milieu
desquels se tfouvètètit FlMi*îATioir et la vie d4e%
Saints. Cette lecture faouy elle le sttrprit> rattdélfit^
et]^ à peu son enthousiasme cfaangea d'objet; il
eMS^t le néant dés gloives hdniaines et des plai-
sirs de ee modde. Il Int ensuite^ il médita TE vatii
giWy et son ^rt fut à jamais fixé... Mafe) dépôts-
Hnt aussitôt le bùt^ son imagination brâlatitérévà
U destûmée la plus extiraordinairé ^ la plus hautis ^
10.
à laquelle un chrétien puisse prëtendre. G'âait
une sorte de chevalerie spirituelle en harmonie
avec ses premiers goûts et ses nouvelles idées , qb
combat pei^pétue contre sa chair et contre Satan
en rhonneur delà vierge sans tache et de son di-
vin fils. Sa guërison accomplie , il mit en action
tous ses rêves , il suspendit son épëe sous Pimage
de la vierge aux pieds de laquelle il fit la amlle
des armes j et ëdiangea sa lourde et brillante
cuirasse contre Thabit grossier des ermites du
Mont-Ferrat. Puis, après avoir fait une confession
générale , il partit pour Jérusalem. Arrêté dans
sa roule par des circonstances plus fortes que sa
volonté, il s'enferma dans la cellule d'un couvent
de dominicains , et s'y livra aux plus durs exer-
cices de pénitence. Il se levaità minuit ponrprier^
passait sept heures de la journée à genoux ^ se dé-
chirait le corps ^ et trouvait qu'il n'avançait pas
encore assez vite dans la vie du Seigneur. Il était
sans cesse tourmenté de l'idée qu'il serait rejeté
de Dieu , et se livrait aux plus cruelles souffran-
ces , aux plus dures privations , soit popr expier
sa vie passée , soit pour conjurer les fentatîoM
présentes qui venaient sans relâiche assaillir sa
jeune et bouillante imagination i*. Un jour ce-
pendant il lui sembla se réveiller d'un sommdl
f;itigant ^ et sentir que ses doutes si poignants n'é-
talent que de$ taotaUoDa du démon ; il prit dds
lors une grande et ferme résolution ; celle d^en
finir avec sa vie passée^ de l'oublier pour no s'at-
tacher qu'à son avenir, et de quitter a jamais Sa-
tan pour Jésus-ClirÎHt. Sortant alors de sa cellule,
il se prit h pleurer à chaudes larmes , ayant, dit-
ily la vision de la sainte TriaitéM. C'est aiasi que
par intuition les uijfstèrcs de la foi lui furent tous
révélés en diverses circoustances... Il lui sembla
dés lors être un homme tout nouveau qui mour-
rait avec joie pour défendre la vérité de sa
croyance et de ses saintes apparitions i s.
Reprenant alors sa route vers Jérusalem, il es-
pérait ^ dans son ardeur et son immense amour
pour la loi du Christ, y faire de nombreuses et
éclatantes conversions : mais isolé ^ sans compa-
gnons ^ sans crédit, sans pouvoir aucun, son pro-
jet échoua encore, et force lui fut alors de retour-
ner dans sa patrie , jusqu'à ce que Dieu voulût
aplanir ces obstacles incessants qui s'élevaient
devant tous ses desseins les plus pieux. Ignorant
comme un chevalier du XVI* siècle ^ sans aucune
notion de théologie, que pouvait-il espérer? Il
résolut de s'y appliquer, et c'est alors que Fhori-
son s'éclaircit réellement devant lui. Déjà plus
éclairé des vérités d^une religion pour laquelle il
avait combattu avec tant d*ardeur , sans la bien
\
— 450 —
connaftre , il se rendit à IHiniveraitë de Phrb , k
plus célèbre de l'Europe , et là son humilitë eut
encore à s'exercer, car Fimpitoyable discipline
de cette savante maison le plaça dans les premiè-
res classes de grammaire^ avant de Tadmetlre à
faire la philosophie religieuse. Sa volonté forte
ne se rebuta d'aucun dc^goût , son obéissance fut
passive, et ses progrès prompts et continus *^. Oe
l'ut le rpie Lojola fit la connaissance de deux jeu-
nes étudiants qu'il entraîna dans sa fortune y et
dont les noms se trouvent ainsi toujours lies au
sien ; Pierre Faberde Savoie , et François Xavier
de Pampelune. <cOn est étonné et attendri, dit le
{U'O^ostant Hanke^ en contemplant cette pauvre
cellule de Sainte-Barbe, où se trouvaient réunis
trois hommes si extraordinaires, trois hommes
dominés, enlraînés par une dévotion rêveuse,
exaltée, formant de vastes plans, préparant de
gigantesques entreprises, et ne sachant encore où
les conduiraient ces entreprises et ces plans ^^••. »
D^utres jeunes gens enthousiastes vinrent se
joindre à ce noyau dont les progrès remarqua-
bles et Texaltation mystique commençaient à
faire du bruit dans Funiversité : Salmeron, Boba-
dilla et surtout Lainez partagèrent la vie de
Loyola et de saint François Xavier.
Ils formèrent de nouveau le projet de visiter
la Terre-Sainte, et pour la Iroisième fois Ignaicç
fut obligd d'y renoncer. Il comprit alors que
Dieu n approuvait pas ses vues etchaqgea dH4ees.
n se mit , après avoir fait avec ses compagnons
un voeu de cliasteté , de pauvreté' et d'obéisSauce
absolue^ à la discrétion du pape Paul III. Ils se
firent alors ordonner prêtres àVenise, etprenantle
nom de soldats de Jésus, se présentèrent au Saint-
Père j lui ofii*ant de J aire en tout temps ce quil
leur ordonnerait^ de parcourir le monde ^ daller
préclier chez les Turcs y chez les Païens, les Inji-
4èle^^ à son commandement l sans objection!
sans condition ! sans salaire! sans retard !..*^^
C'était prendre le contre-pied de l esprit de
l'ëpoque. Pendant que tous les hommes supérieurs
tenaient à honneur d avoir une doctrine à eux
et de faire opposition à la volonté' souvQiaine,
ce fut une chose monstrueuse pour les uns, sublime
pour les autres que cette obéissance passive. EUç
devait en eflfet enfanter des miracles de dévoue-
ment et de force. Le pape^ on le conçoit, adju-
rant un si noble abandon , une ollre au;ssî géi)^.
reuse, Faccepta et autorisa Tassocialion en 15^
Alors la société s'organisant nomma pour spn
chef cet Ignace qui les aidait tous engendrés en
Jésus et lui fit^ un VQP« solenqel d'pbéi§saQçe
comme celui-ci l'avait fait au pape.
Elaguant de leur règle tout ce qui pouvait lea
détourner de leur but , ils scf vouèrent spéciale-
ment à la prëdication^ à la confession et à Fins-
truclion gratuite du peuple , les trois moyens les
plus puissants de régénération.. • Ainsi se méta-
morphosèrent les rêves mystiques du jeune cheva-
lier, ainsi se réalisa cette grande destinée ré->
vélce par tant de miraculeuses visions! Le pauvre
soldat malade y ignorant et ignoré^ à peine assex
savant pour épéler TImitation et FEvangils se
trouvait maintenant à la tête d^une société créée
par lui, illuminée de son esprit, une société qui
plus tard remua l^urope et le monde et fit
trembler les souverains sur leur trône chance-
lant.
Cette fortune de la Compagnie de Jésus ne fut
pas un des moindres titres de gloire du pontificat
de Paul III. Si elle porta de mauvais fruits elle
en porta de bons aussi, et le bien et le mal qu*elle
fit furent immenses comme les succès et les tra-
verses qu'elle éprouva dans sa longue carrière
dont la trace n^est pas effacée parmi nous, au
XIX* siècle. ••
Rome^ Parme^ Venise, en Italie ; Barcelonne»
Valence, Salamanque, en Espagne; Lœven, dans
les Pays-fias, furent les premières villes qui reçu-
rent et favorisèrent les jésuite^ soutenus par la
- 1W -
puissante famille Farnèse» Des collèges furent
fondes près des universités pour y ëlever des
hommes plus jeunes; un nombre immense d'élèves
s'y présenta et fut admis, ce quine'cessîta l'intro-
duction de professeurs laïques qui néanmoins
prononçaient les trois vœux indispensables : chas-
teté, pauvreté, obéissance. Ce fut la source d'une
hiérarchie nouvelle quî^ dans ses divers degrés,
reliait entre eux tous les membres. Voilà le bon
côté de cette célèbre société; mais malheureuse-
ment cette oi^anisation si forte reposait sur des
lois que la nature et la civilisation repoussèrent
également. L'obéissance absolue avait fait con-
damner tout amour de la famille comme un pen-
chant charnel et mauvais, l'héritage du jésuite
ne doit pas aller à ses parens mais à la société
qui ainsi accapare tout : amour ^ confiance,
richesses, elle veut Thomme tout entier pour s'en
servir comme d'un moyen , d'une machine
obéissante et passive. Toute opinion contraire à
celle du supérieur est condamnée comme une
hérésie ; tout le corps est un seul être dont le supé-
rieur est la tête ; les autres membres fonctionnent
automatiquement.
Avec une pareille organisation il y avait un
danger à prévoir: c'était que ce chef si puis-
sant ne se laissât séduire par Ta lirait du pouvoir
et ne secouât pour lui-même le joug qu^il impo*
sait aux autres; mais le gênerai e'tait forcé par la
constitution de recevoir du corps entier la r^le
de sa vie quotidienne. Ainsi ses repas, ses véte-
meqts , son sommeil tout était prévu, réglé, et il
était sévèrement surveillé, de telle sorte que le
possesseur d'une si vaste puissance était privé de
cette liberté dont jouit le dernier des hommes^^
Le règlement était le despote du chef suprême
comme ce chef était maître absolu du corps
entier, âmc^ corps et biens. Entre eux, c'était un
contrat sy nallagmatique . . .
Une semblable organisation ne semble pas
humainement possible , et cependant elle était
indispensable à racccomplissement de si pénibles
devoirs; elle existait ; son influence fut imniomse
sur la société du XVP siècle ; elle suvveillait les
mœurs et les croyances de la jeunesse comme son
instruction. La méthode des disciples de Luther
et de Calvin naturellement discoureuse^ démons-
trative et polémique portait à Texamen et à la
controverse j celle des disciples d'Ignace était
courte, serrée, basée sur Tessor de Fesprît rélî-
gieux et sur la spontanéité du dévouement et cte
Tobéissance. On y voyait en entier Tesprit mili-
taire et Pesprit ascétique du fondateur. A sa
mort et après treize ans de combat^ Ignace
» 155 —
epmptoit déjà treize provinces à lui ou aux siens ^^^
sans compter les possessions dans les Indes Orien-
tales^ le Brésil, etc. La rapidité de cette marche
annonçait dëjà T^xtension que la société devait
prendre dans la suite et la puissance à laquelle
elle était destinée^ puissance (|ui lui fut fhtale
plus tard lorsqu'elle porta ombrage aux souverains
dç l'Europe.
C'était donc au centre du catholicisme, à Rome
même, auprès du Souverain Pontife, que s'était
consitituée une direction nouvelle^ opposée à l'es-
prit dv réforme, née pour la combattre. Ces deux
tendances inoculées à Vcsprit des populations
enthousiastes de l'époque firent p&Iir momentané-
ment Tautorilé des souverains temporels et spiri-
tuels et couslituerent un combat sans An dans ta
société désorgiinisée. On lisait sur une bannière :
libre examen, puissance de la raison, révolte légi-
time; sur Tautre: autorité absolue ^ obéissance
passive, rigueurs salutaires... Et des deux côtés
cette devise fut suivie. Mais revenons à l'histoire
do la papauté...
La mort <Je Paul III avait donné la tiare à son
l^at le cardinal Monte qu'on choisit, non parce
qu*il était le plus capable, mais, selon la coutume
un peu égoïste des cardinaux , parce qu'il était
l'un des plus i^gcs. Kien de saillant sous ce nou«
- 466 -
veau pontife i ai ce nW 1« conatruolion d'un
immense et magnifique palais dana lea aoins de
laquelle Jules IH passa sa vie et oublia le reste
du monde, sans toutefois oublier sa famille. Le
népotisme était en général le défaut des papes
médiocres.
La nnllité de JuU's III avait fait sentir la
nécessité de donnera VËglise un pontife sérieux»
capable et ferme qui put lui donner enfin la
direction dont'elle avait tant besoin.
Marcel II fut élu et ses intentions promettaient
i la chrétienté un avenir plus beau ; mais Dieu
l'enleva k l'Église le 22' jour de son pontificat.
Son successeur , Paul I Y. fut élu dans le même
esprit. C'était Garaffa , le plus sévère de tous les
cardinaux. Presque octogénaire^ maiâ vert encore
et de tête et de corps^ il eut assez d'énergie pour
se proposer la restauration entière du catho-
licisme et pour rétablir Tinquisition qui se mou-
rait faute d'appui. La réforme du clergé ne Poc-
cupa pas moins vivement: « Nous promettons et
faisons serment^ dit-il dans sa première bulle, de
mettre un soin scrupuleux à ce que les réformes
de l'Eglise universelle et de la cour de Rome soient
exécutées...» et aussitôt il se remit à Tœuvre.
Mais il semblait qu'un génie malfaisant s'attachât
à renverser tous les efforts tentés en faveur de
— 457 —
cette reforme 8Î dtésirëeet si nécessaire; la guepre
absorba pendant plusieurs année» les facultés du
yieillard' forcé de s'y livrer; la tendance de la
papanté fot encore une fois changée et le sort
de l'Église remis en question. Pendant ces guerres
incessantes il avait laissé à des neveux qu'il avait^
suivant Pusage , élevés au pouvoir, le soin de
Tadministration ecclésiastique. Ils en abusèrent^
et le pape 9 plus pape cette fois que parent^ les
chassa de Rome et renouvela tout le personnel
comme le système de son gouvernement*'. A
l'issue de sa lutte avec Tempereur Philippe H et
le duc tfAlbe (lutte qui n'avait pas tourné à son
avantage, car ce n'est que lorsqu'il vit ses projeta
ruinés, ses alliés battus, ses états envahis et sa
capitale menacée qu'il se prêta à la paix,) à l'issue
de sa dernière lutte son esprit ardent revint à
ses projets de réforme et y mit toute son énergie.
Il introduisit dans les églises une discipline plus
sévère , défendit toute espèce de mendicité y fit
enlever ies tableaux scandaleux que le goût des
arts profanes avait osé placer dans le sanctuaire.
On frappa en son honneur une médaille -sur
laquelle on voyait un Christ tenant un fouet et
chassant les marchands du temple. Il expulsa de
la ville les moines défroqués et força^la cour à
observer le jeûne et la communion pascale. It ne
— 45i *
voulut plu8 entendre parier du produit des dis
penâtf deinariegey non plus que des autres abus de
œ genre» Enfin tous les jours de la vie du pautife
furent marqués par quelque ordonnanee oosoar-
nant le rétid>lis6eaient de TÉglise dans sa pureté
prinûtive. Pourquoi feiut-il après cela qu'ii eiât
avoir besoin de Tinquisition pour favoriier
Texécution de ses projets de réforme ^^!
Le peuple en général, et le peuj^e Italien Sur-
tout, ne conii»*end pas les réformes ; il n'en saisit
pas le bien et ne voit que l'apparente dureté ^
despote. Aussi à peine la dépouille mortelle de
Paul IV fut-elle refroidie qu'il se prit à ta maa-^
dire avec .fureur et qu*il renversa les statuts et
les monuments élevés sous son pontificat.
La sévérité de Paul IV eut un résultat plus
Acheux enecNre : le protestantisme se fit une armb
morale du rétablissement de l'inquisition ; toutes
les tendances opposées à la papauté se relevèrMt
de nouveau avec énergie. Les partisans des prélats
mondains^ persécutés par la rigide orthodoxie da
Paul IV se vengèrent de leurs soufirances méritées
et une nation eut lieu. A cette époque de l'IiiM
toire de TËglisey nous voyons la presque totsjiité
de Tidlemaglie échapper au Saint-Siège ainsi qiie
la Scandinavie I l'Angleterre, la Pologne^ la
Hongrie et d'autres provinces importantes. La
— 469 —
France et surtout Tlttlie et l*Eapagne rësistaMM
eticora^ maris la premiàre résistait faiblement t àm
élëmeots de discordes s'y faisaient jour et prépà*^
raient d^a&euses tempêtes pour l'avenir.
U #st rare qu'après un pap^ sëvère le monda
clirétian n'en ait pas eu un doux et torrent et
viM'vetêâ, Les réactions sont le cours dece monde
imparfait et misérable. On n'atteint pas le bul^
on I0 d^pusse èb Ton voit partout les oaoillatioos
de Topinion comofie celle du pendule.
A Paul ly succéda Pie IV, aimable et bôti,
doux et tolérant, aimant sa table ^ son palais y sa
maison des champs j sa promenade ; facile aveé
touSi cbaâtable pour tous, il se fit aimer^ mais né
tint pas le moins du monde à continuer l'œuvre
de flOn prédécesseur^ Il aimait peu à être eontrifié>
et ne se laissa pas. dominer pur sa fiinnlle ; mais
rien- de grand ne sortit de son règne pontifiosdf^ si
eto n'esl cependant la dernièra moitié du concile de
Tredttt^ ma décisions duquel il eut pen de part^^
bien qn'on Ini en ait souvent attribué la gle^r e^.
Ithomm^ vertueux y le saint de cette époque
doneé pour les- Italiens fut Charles Borromée
neveu de Pie IV. U ne regarda pas sa haute
position coffinM un droit de tout faire, maife
comme un devoir rigoureux de bien fait*ei « On
ne sait natte chose de lui , disait Soratizo'> si ce
— 400 •-
n^eAt qu'il est pur de toute tache ; il vit ai religieu*
semeut qu'il ne laiase rieo à désirer à la piëtë la
plus exigeante.» Sa seule rëcrëaiion était U
réunion de quelques savants qui venaient eauser
avec lui des moralistes grecs et chrétiens^ de leur
vie et de leurs œuvres. Il ne voulut pas trop se
rapprocher de son oncle pour ne pas s'exposer
aux velléités de luxe et d'ambition qui eussent
pu surpreiidi^esa faiblesse, et ne lui fit des visites
iissidues (|ue pour l'exhorter à la mort.
Il eut été facile à Charles Borroniée de suc-
céder à Pie IV, et c'eut été pour le monde un
bonheur bien grand ^; mais il ne voulut se mê-
ler à aucime intrigue de ce genre , et ce fut au
contraire sous son inspiration, que le cardinal
d'Alexandrie fut élu sous le nom de Pie Y *•
C'était encore lu une réaction.
Mais, avant de continuer notre rapide coup*
d'œil sur Thistoire de la papauté, il convient de
dire un mot des dernières sessions du concile de
Trente : la première partie du concile avait -été
consacrée à séparer ù jamais le dogme des chi-
nions protestantes ; et, de la doctrine de laJMti-
fication, sortit tout le système dogmatique de
TËglise, tel qu'il est encore aujourd'hui.
Dans la seconde période, en 1563 , la hiérar-
chie fut fondée par les canons sur rordination
— 464 —
pour les théories, et par les (dations de réforme
pour la pratique. Les fidèles furent soumis à atie
discipline ecclésiastique très-sévère, et du glaive
de rexconununication. Des séminaires furent
fondés sons l'empire de la règle la plus austère,
afin de mieux préparer Tayenir. Les paroisses
furent régularisées^ l'administration des sacre-
ments réorganisée^ la coopération des moines sou-
mise à de» lois déterminées. La Surveillance du
clergé fut confiée aux évéques ; enfin, ces derniers
s'engagèrent solennellement (et ce fut là le point
Ifj^le plus important de la deuxième partie de cette
assemblée) h observer les décrets du concile de
Trente et à une soumission absolue aux ordres
du pape. Toute la direction de la discipline ré-
formée se trouva donc ainsi concentrée dans
Rome, et l'Eglise devînt plus forte de son unité^
les princes chrétiens ayant tous donné leur ad-
hésion à ces sages mesures qui honorent le pon-
tificat de Pie IV ^•.
Pie V (Michèle Ghislieri), était de basse ex-
traction, il ne chercha jamais à s'élever, arriva
sans le croire ni le vouloir au pontificat, et vécut
comme pape avec la rigidité d'un simple moine*'.
La papauté, loin de servir son ambition , lui eiit
paru insupportable sans les grâces de la prière.
Le seul bonheur quM pût éprouver était celui
V 11
d'une méditation fervente et du sentiment qu'il
avait acccoDipli ses devoirs dans toute leur ri-
gueur. On le voyait dans les processions âe re*
lever de son adoration les jeux noyés de lacmesi
parcourir les rues de Kome pieds ni|s^ tête oue,
le visage rayonnant d^une joie pure.,, et le peuple
eutrainé par tantde piété mêlait ses larmes ^ux
siennes w. Un siècle de cette vie et le peupla
romain eût fait un pas immense ^ il eût été meil*
leur et plus heureux... Mais il faut le dire; à
cette admirable piété se joignait une sevérîité
d'autant plus grande que Pie Y considérait cettfi*^
(^en*e comme un lieu d^exil où les plus cruelles
souffi^ances n'étaient rien qu^une préparation à
la mort , porte du salut éternel , et de là ses
rigueurs pour toute impiété, sa joie à toute con-*
version , de là Tinquisitiou et ses horreurs, de
là les imprécations des écrivains philosophes
contre la mémoire d^un pontife qui n'était cou-
pable que dVprouver pour les hommes un amour
trop rapproché du ciel pour avoir rien d^humatn.
Aucune considération ne pouvait Tarrêter: le
dévot^ Tentliousiaste Philippe 11^ exaspéré lui-
même de sa sévérité excessive , lui écrivait un
jour <( qu'il ne devrait pas essayer de voir ce que
peut faire un roi puis:5ant poussé aux dernières
extrémités!»
Ea gén^l le stjlè de ses oi<dcfrfnarH^eâ est (^
qve-sè^ cardinaux et se» jirëlat» lés plus t!eii!tié^x
étaient ioatevA obiî^ë» d^ hii rappelée ^H}
n'araît pB& affaire* ii des a^^g^ ihais à uiïè' s(N4i^
d'IiomBiib» »/
Ge fat là le daractère ^,nétA dé' sôti pëhHÈMt
qui dura six nnnée^ , pendaM lesquelles on "^
lar reforme dé la cour de Reime dont on ê*êlsâi
tabC oicfoupé enfiâ réedisëe. Lcfs dépensé» der Id
mfeâsMF ptfpaf e furent ettr^oixKnatréfneinft ' rés*- '
trtiiitèa; Pie V rivait ateo fort peu et disait
soutrem,4<iélm qni veut gouyemet le» autwâfîle^t
commeacer par se gotrverner lui>fnéme.» En un
mot il prêchait d'exemple potir r^onomîeconrme
pour la piëtë\, et c'est toujours et en tont le
meitlefir niojen , aussi ftif^il suivi de sueêès, an
môioa de aé côté.
n iCvait défendu k se» ffevëux IVntrée de ses
psdais e^ n'écouta jamâii» leiirs ambiHeuses de*
mandes?. It établit poni^ les éOuventé ks régler lëi
plus F^ornreisses , à tel poiM, dit, sloto hisltnièn
Tiepolo, qtte Ton rît des religieuses s'évacl^ir
et d*aâirea périr de d^spoir : spesse i^olté,
ajaute-t*il V »^? àar rime^ a qucttche dièùrâinè
inàarréinun àUro maggiore ^ pfvcedehdo massi--
niomentepep iyia degU estrend v>. Pauvre nature
humaine! La vie de Pie V n'est-elle pas un
* 4M ^
noavel cxempleque la perfoclion ne lui est pas pos-
sible et qiiMI y a de la folie et de Timpiëtë à y
prétendre?... Il mourut comme il avait vëca^
comme un saint , qui n*a eu d'autre pss ion que
celle du bien, mais qui, sublime dans le bot,
s'est trompe dans les moyens. Un des plus grands
éloges qu'on puisse adresser à sa mémoire c'est
que malgré cette rigueur inouie sa perte fut sentie
très-vivement à Rome et dans toute la chrétien^
Il avait constitué une vigoureuse unité el laissait
après lui une puissance organisée pour maintenir
la direction imprimée au monde catholique^ ^
Aussi prit-il de nouvelles forces sous ce ponti-*
ficat et s'avsnça*t-il à la rencontre de son jeune et.
implacable ennemi avec une ardeur que . rien
désormais ne put affaiblir et qui n*eut dsnitre
tort que Texcès et la cruauté. Mais la cruautéi
passe avec Texagération et le bien reste. Si la
Saint -Barthélémy fut une action horrible et
rinquisition un hideux abus de l'autorité , la
réforme progressive de Téglise dans les XtVI*
et XYIP siècles fut un sublime spectacle.
Grégoire XIII (HugoBuon Gonipagoo ) avait
une tendance très-prononcée à rindulgence.et=à:
la bonhomie ; s'il eût vécu un siècle plus tAt ileut.
laissé flotter les rênes et eût probablement suivi
le torrent du siècle ; mais on vit par lefTort qu'il
fit Sur lui-même tout ce (juepeutla pensëe domi*
nante d'une époque , même sur la volonté toute
puissante de celui qui est. appelé. à ]a diriger* Il
y avait à la cour de Home un parti vigilant et déjà
riche en racines vivaces ; à sa tête étaient les
jésuites qui ne tardèrent pas à s'en^arer de Tes-
prit du pape et à le diriger dans une voie toute
religieuse et :plus sévère que ne Teût comporté
son caractère facile et doux^^.
Grégoire XIII s'occupa avant tout de propager
rinstruction ecclésiastique dans toute sa pureté ;
il favorisa avec générosité le coU^e des jésuites ,
il acheta des édifices pour eux et pour les profès
de Rome; il fonda et soutint des collèges en Alle-
magne et dans d'autres parties de TEurope. U
ajouta à ces travaux la réforme du calendrier pour
obéir au vœu du concile de Trente^ et le publia
lorsqu^il fut terminé avec une très-grande solen-
nité. Après ces éloges , disons^ pour être juste ,
que Grégoire* XIII se lia avec les Guise et qu'il
favorisa la ligue en France. A la fin de sa carrière
Rome se ressentit de la iaiblesse de son souverain^
les états de l'église furent infectés de brigands
puissants et redoutables auxquels le pape fut
obligé de pardonner une série d'exactions et de
meurtres dont la nomenclature le faisait tooibler.
Les Piocolomini en étaient les principaux chefs ^'.
— ItB —
Apràft IrcÎM MpiëtB thi pontifiottt de <0p^
goîrc XUI ) Sixte» Quint oco^mi le saifit rfttgo»
Sorti des derniers nmgi de peiif>le'* , œ pape é|^
cnojnit appelé die Dten au premm* rang de YRr
f^isb 9 et clioqoe ^^ dans aa carriène Tavait -c&h^
finmé dans cette idée. Ne dootant pasidii «neeès
de toutes ses 4iiU«prises et de le proteelièn Hpê-
cîalc du Seigneur , it dëdara à son at<ëneiBent
qu'il voulait exlciMniner les bandits , la piM
f^randc plaie de llt4iUe , et qvte , s^l n^yfek pas
la foroe sottisaMe ^ une lëgien d^anges viendrait
^sombattpe pour Ini. 11 entreprit celte œuvre difll^
cile«vee ix^tetion«t jir^i^nient^ €% la eandtfffift Sur^
i»w< avec -une .ytfv4rit<^ excessive. Aucun môyeti
«e iiii eoùià ^mn eft ^eiih* à ses Tins : les t^testom^
lNÛiMità<e<^nt<«^'nrsflnns lefî (kalsdelïgîisc, ettOtft
U»c«»l)lait au hoiVi\ dtme «nnce devant celte vt>-
tenUé de fer que lîen ne pouvait attendrir W ^ et
que Sisbe^uint porta -aUleArs que dans l'^extcrmi*
«aWîotfi des 4>andits. Gi'^ire Xllî avait ëtë se-
vèfe^ ënergiqeitt dans les Yttesures g^ttérsAes de MU
«dii^istvation; son-snceessenr fut implacable dam
4esdf^fri5 individu^. Il ëtoufik ainsi par hi crainte
}es in^si^télligencts de pnissanfts vtrisins qtfitrou*»
Paient la pM( au Ssiint-Siége. 13 avait trouva les
nanees ^pinsëes , il sut les rétabHr et amasser en
4reis ans quptre initiions et demi de sctidi, tl en
— 167 —
forma un trésor qu'il déposa au château Saint-
Ange, nie contoct-a à la sainte vîerçe èt'dëTefndft
d^y toucher, sauf ïes cas extraordinaires de croi-
sade , de famine ou d^învasîon , engageant même
«es successeurs à «^astreindre à cette juste oMiga-
tîdn , sous peine de la colère cëleste.
Les économies dé la maison souveraine étaient
sans doute pour beaucoup dans ce résultat "extra-
ordinaire, mais ses ennemis lui reprochent d'y
ayoir fait entrer pour beaucoup aussi la vente des
emplois et des impôts écrasants pour son peuplé.
Ces ressources servirent à faire de Rome Tufie des
plus bdles viHes du monde. Le sort de celte ca-
pitale est bien singulier : après avoir étédétruîHc
et reconstruite plusieui-s foîs^ la ville desCésars et
des papes ctail devenue , au commencement é»
XV* siècle , un vaste village : lout souvenir lie
i^anti^ité avait disparu, le Capitolc était ie mont
âes chèvres , !e forum le champ des vadies , «t
Téglîse Saint-Pierre menaçait ruine. Loiwjueflfi*
cdas eut replacé toute la dirétienté sous son obé^
dience, et acquis d'immenses richesses par les
contributions des pèlerins acoouinis av jubilé , it
conçut la pensée de rendre à Rome «on ant^ve
splendeur^ mais ce ne pouvait être Vcsuvve Jlfmm
seul iiomme ; tous les papes y ont ooopére pen-
dant des siècles , et surtout Iules II ^ Léon X «t
^ 408 —
Si JLte-Quiot. Ce dernier eut sur ses devanciers Ta*
vantage d'avoir donne de Teau aux sept collines
mourant de soif. Aussi , pénétre du sentiment de
sa gloire , fit-il représenter sur le nouveau cours
d'eau qu'il nomma agua Jelice > une statue de
Moïse faisant couler d'un coup de baguette l'onde
bienfaisante'^. Sixte -Quinl n'^avait cependant
|)as le sentiment des arts , à peine s'il pouvait
tolérer au Vatican le Laocoon et l'ÂpolIon du
Belvédère, et il déclara qu'il démolirait le Gapi»
tôle si on n'en enlevait pas les impudiques statues
des dieux païens. Minerve seule fut laissée j mais
Sixte exigea qu'elle représentât Rome chrétienne.
Il lui arracha sa lance, qu*il remplaça par une croix
de même dimension '^ La politique de Sixte V
avait été conforme h sa vie : plein de vues ambi-'
tieuses, accordant tout à son imagination exaltée
et à ridée que Dieu lui-même le guidait, il rêvait
et voulait accomplir tout ce qu'il rêvait. Il fut
saisi d'une tristesse profonde lorsqu'il vit à la fin
de ses jours que la fortune l'avait abandonné j et
il mourut ( en 1590 ) au milieu de la situation la
plus critique , sans avoir pu prendre une seule
résolution capable d'amener à bonne tin les ques-
tions importantes agitées sous son règne. Il eut
jusqu'à la douleur de vbir reparaître avant sa
mort ces bandits qu'il avait eu la gloire de dé-
'^i truire dans les premiers temps de son ponti£cat.
^i' Au moment où il rendait, sa. grande âme,
^} un orage ëclala sur le Quirinal. La foulie se
I persuada que fra FeUce avait fait un pacte
avec le diable ^ et que c*ëlait après ce pacte
qu'il s'était élevé du degré le plus bas au sommet
des honneurs : le pacte accompli , son âme avait
été enlevée par le démon au milieu de Torage.
C'est sous cette image grossière que la populace
exprimait son mécontentement de tant de sévé-
rité » de tant d'impôts. En conséquence elle ren-
versa avec une sauvage furie les statues qu'elle
lui avait élevées cinq ans avant au Gapitole.... Sic
transit gloria mundi! ^
De la mort de Sixte-Quint à la fin du XVI**
siècle, cinq papes, cinq conclaves; et ce qu'il
y eut dHmportant dans cette période de dix
ans 9 ce n'est pas le règne des papes ^ ce sont
les conclaves : à chacun d'eux les intrigues des
puissances européennes se renouvelaient plus croi-
sées y plus fortes , plus vivaces et plus irritées.
Urbain VII, Grégoire XIV, Innocent IX vécu-
rent à peine quelques mois après leur élection ;
on eût dit que cette élection n'était qu'un atter-
moiement| un moyen de gagner du temps^ à dé-
faut de victoire certaine. Presque toujours cepen-
dant le parti catholique exalté , le parti de la
Itgiie et de l'Espagne l'emporta. Le dernier re-
présentant de ce parti fut Santorio San Severina,
créature dX)Iivarcz , dont un seul mot peint ïe
caractère mieux que ne pourraient le fiiîre its
Tolvmes. Il parle incidemment, à propos du
massacre des Huguenots , drt gfusto sdegno âel
re Carlo di gloriosa memoria , m quel cetdnv
^mo di S. Bartolommeo lietissbno à catto-
Ifci!.*. Déplus, il ëtait l'âme de VînquisStîon , et
son ftge peu avancé faisait tout espérer à ses fana-
tiqties pniiisans. Il e'iait sur le point d*étreélii,
lorsqu'une voix , la seule qui fit la majorité au
condate, celle du cardinal Golonna, se détacha
de son parti. Après une longue méditation , dans
laquelle le sombre fimatismc de Tinquisilion lui
appamt plus dangereux , ri s'écria : « Je vois que
Dieu ne veut point de San Scveriita : Ascaniu
Cotonna aussi n'en veut pas !... Et sortant airssî>-
tdt de la chapdle Pauline où f?taîent ses amis , fl
se rendit à la chapelle Sixtine auprès des adver-
saires de San Severina. Sa voix donna !a tiare jk
Aldobrandini , Tami , le protégé de Sîxte V . <jw
prît le nom de Clément VIH. Cet événement f<*
remarqué et passa alors pour un indice -de la yt^
lonté divine qui réprouvait i'înqmsitiott -et «es
excessives rigueurs ; Vesprit piWie y gagna.
H en résulta dans îa marc4ie do la papauté un
cbagemetti impKntaat pour l'Emiof». Oofmfa
ioDjffteBipB lïlspa^^ j doamiQit iBt j'aîAdt Au
SmBÏ^&ége eMatBè fe SmiA-âîég» Hûdiâtf la
Franet mal ^ouTernée n'avaitjdansla bafaDce «u>-
itipe»ma«{nVin p^s très-faible^ et la lîgiie unie
à PJiUîppEe II venait encwe agrandir la piâssaticç
Esfmgtmie. Mais Henri IV était monté sur te
laône , il avek abjuné et se montrait hon oathpljr
qae. S sollicitait la recon»aissaiic«ctrat)solutia(fi
ida pape { les exah^s «'y opposaient , disant (j«ia le
fape Joi^Bâsie n^aTott pas le droit d'afasondm
iMi liënéfekpie «i^Iaps ; les prëdéeeastui^s deCA^mciiit
aBl'enKtnrt pasâiit^ San Screrina eètxeijetëc^tle
idée conune xm^Ae^ Clëftiesit tscr^vetna ^ luésita ,
GftF riispa^tte Ml ^nd jetait ie plus fart«oatien
tk :Saiot*St:é^e ; «Mais voyant ia f^nissatioe^dllen^
ri IV ftu^nmtier, il céia , et la politique eim>-
fmnneprit dèsll^rs 4ine face difl\^^en1)eX'J0fl«tiictî
ftaiifMiÎM wa larda pas à se «i^oiitrer , et air«c ^lle
des idén de tolerasice et de pais:«
Les jténtitas «sfaassés de Fvanoe j rtiparuneiit^ «et
fieori (de Navurs nte araigait *pu ide okoisîr
parmi eux 8ontnaiiBsanir'>«. L'Ëlpagttc èaon iOttr
les persécuta, et le pape s'établit en médiateur »».
La tactique principale et la plus digne d'éloges
du Saint-Siège était à celte époque de ne s'aliéner
aucune des puissances sur lesquelles repose l'é-
quUifare du monde catholique » d'apaiser les dif-
férends qui surgissent entre elles^ et de conser? er
son influence sur tous les états de la clirëtienU!.
C'est ainsi que TEurope dut à Clément YIII la
paix de Vervins conclue en 1598. Quelque éloi-
gnés que f\]ss(>nt Tun de l^ultrc le vieux Philippe
et le jeune iieuri, la politique conciliatrice du
pape sut les nuir. Henri y perdit ses anciens al-
liés les Anglais et les Hollandais , et Philippe ^
satisfait de ce triomphe du catholicisme > o'hédti
plus à rendre toutes ses conquêtes. Ce fut là, diaent
quelques historiens , le triomphe le plus doux -cl
la joie la plus vive qu'éprouva le saint père dam
les quatorze années de son pontificat ^.
Ici finit le résumé , bien incomplet sans doote^
de rhistoire de la papauté pendant ces deux siè*
clés. Le XVF nous semble avoir racheté bien des
fautes du XV* : les effets de la réforme catholique
s'y font déjà sentir , et cependant eUe n'est que
préparée pour le siècle suivant, dans lequel les
communautés religieuses achèveront l'œuvre que
les papes éclairés et consciencieux de cette der^
nière époque ont si bien commencée.
es:
^1 CHAPITRE SEPTIËKE.
Nous avons vu dans les conciles œcuméniques,
dans celui de Trente surtout, des documents pré-
cieux sur l'histoire de TEglise, et des détails sur
la réforraation catholique qui dénotent un pro*
grès réel dans l'Eglise, dans les moeurs, et dans
l^Dtention des pasteurs appelés à la gouverner.
Cherchons maintenant dans les conciles provin«
cianx et particuliers ces petits détails de mœurs
locales que les conciles généraux ne peuvent nous
offrir. Le même progrès s'y fait apercevoir. L'im*
s moralité a fait place à la passion d&s discussions
thëologiques, à une tendance prononcée pour
Texamen et la controverse. C'est le doute, Tin-
crédulité, l'hérésie, que l'on veut frapper ; on
sent le besoin d^éloigner de la crédule naïveté du
peuple, les erreurs qui corrompent la foi primi;-
tive... Ainsi, dans le concile d^Oxford^ tenu en
i^08, on défend aux maîtres des arts libéraux de
traiter de théologie ou des dogmes de foi, et à
Inirs élèves d'en disputer; de publier des livres
qui ne loient approuvés par racM^mie ^(kr
ford ou par douze docteurs choisis par rcvéque;
on ne soufire fttm do Iraduetîoii de Vttrkure qai
ne soit revue et autorisée par qui de drait; on
défend d avancer aucune proposition qui ait an
mauvais sens^ sous prétexte qu'elle peut en avoir
un bon, de disputer des points de doctrine dé-
cidée par rEgtise, si' ^ n'est pour PexpliqM^»
etc.
Le ooBOÎte deTertose» i&29^ excotnmunié céni
qui éditfiiffent Tesptit des grands contre rÉ^Rsé.
Le concile dé Bourges, 1598, otdànvtë kûi
curé» de dénonkcet* aux irêqvtcs ceux ék lëtnré' pi-
roiâsiens qu'ils satitont être infectés de» efriJorf»
de Luther, ainsi €{ue ceux qiti s'occuperont lier
magie.
Concile de Pàfiis, 1538. — La pr^ce qm se
lit au commmencement de ce concile fiiil vbîr là'
coAfonnité des erreurs de Luther, de Zuinglë^ é(
des autres nouveaux hérétiques, avec celles cRr
Manès, d'Arius, de Vigilance, de Pierre Vâldd,
de Matflile de Padoue, et de Wiclef. Il y est ré^
mmjaéy sur la fin, que les novateurs ne s'ac-
cordent point entré eux ; que les uns abattent lès
images qui sont tolérées par les autres ; que lés
uns rejettent les pratiques humaines comme un
poison, et que les autres les défendent comme
- m —
tréMitileft; qua quelques-uns eMeigiient laria*
bapttfme^ et que \m miteê oab eette praëqne e(M
Wrew^ qu'ik ne s'aceordent pea sar FEudm-
nstie ; que les uns croient qu'elle n'est que le
$i^fu^ du 0orpa et du «ang de Jësui4jtirilfc^ etqfcie
lea aolire» feat profetwiott de croire qu'elle eaf
véritablertient le corps» et le sang do J^aua-Qirtt* f
tiMua qu'ils a'élmgnerit lea uns et lea antres de la
sénté^ en ee qu ils assurent que la substance du
pain et du vin y demeure ; qu'il y en a qui se
vantent d/avoir le Saint-Esprit^ qui bur deme
rioteiligeHCe de TEcriture sans qu'ils aient besoin
d'interprâle, sentiment que les autres rejettent ;
que ces contradicticms fout assez connaître cem*
bien ils sont éloignes de la vëritë, qui est teu*
jours la ntém^, et ne se combat jamais.
Concile de Gaml>rai, i565« — ' Il ne swa' point
permis aux libraires et aux imprimeurs de vendre
et de faire venir des livres^ sans qu'ils en aient
fait approuver le catalogue pai* qui de droit ) et
l'on priera les magbtrats de les obliger de faire
tous les ans leur {M^ofession de foi^ selon la doc-
trine du concile de Trente, et de promettre obéis-
lance au Saintr-Sk«ge.
Les évéques, les cures, et les prédicateurs^ ex»
termineront^ autant qu'ils pourront, tous les
livres de magie et de divination.
— 478 —
On puisera les livres de prières de tout ce
qu^il pourra y avoir de faux et de superstitieux.
IjCs cures prêcheront tous les dimanches et
toutes les fêtes solennelles.
Us instruiront leurs paroissiens sur les tradi-
tions apostoliques, de même que sur la vertu et
rinstitution des cérémonies saintes.
Ils témoigneront beaucoup de charité en trai-
tant les questions de controverse, et se conten-
teront d^expliquer ce qu'il faut croire, sans in-
jurier les hérétiques. S'ils ne sont point assez
habiles pour traiter ces sortes de matières^ ils se
borneront à exhorter leurs auditeurs à la crainte
du Seigneur, à la pratique de tous les devoirs de
1.1 religion^ et à la fuite de tous les vices.
Ils ne permettront à personne de prêcher dans
leurs églises sans l'autorisation de Tordînaire, et
«^abstiendront de tout dogme, non-seulement hé-
rétique, mais encore superstitieux ou fSsibuleux.
Les curés n'aui*ont point de livres qui puissent
corrompre la religion ou les mœurs : ils n'en au->
ront que de bons et qui soient approuva par
des univei'sités catholiques
' Il est peu de conciles de ces deux siècles qui
ne portent quelques statuts pareils & ceux que
nous avons cités, et que nous pourrions multiplier
à rinfioi, mais ce ne sont pas les seules matières
— -477 —
dont on s'occupait alors : l'Eglise songeait sérieu-
sement à ramëlioration de ses mœurs; elle avait
compris, en présence de la reTorme protesranle,
qu'il fallait sortir de toute ignorance et com-
battre les erreurs par la vérité, comme par la
pureté de doctrine et la pureté morale.
Ainsi, dans le concile de Nantes, en 1431, on
lit la défense « de pratiquer les cérémonies ridi-
cules du 1®*" de mai^ du lendemain de Pâques et
fie la fête des fous. Au l®** demaî^ on rançonnait
ceux qui avaient été surpris au lit. Le lendemain
(le Pâques, ceux qu'ion trouvait aussi couchés,
étaient conduits à TEglisc, et on leur administrait
une espèce de baptême. Pour la fête des fous,
c'était une mômerie qui commençait à Noël, et
durait jusqu'à la fête des Innocents. On habillait
des enfants en papes, en cardinaux, en évêques;
et^ le jour des Innocents^ l'office se faisait dans
les collégiales par les enfants de chœur et le bas
clergé. Tout cela était accompagné cTZ/rerér^Aice^
et de débauches. . .
On fît aussi^ dans le concile de Nantes, des rè-
glements contre les vexations pécuniaires^ pour
l'absolution des censures^ contre les bruits scan-
daleux qui se faisaient aux secondes noces (c'est
ce qu'on appelle encore charharï)*^ contre les
prédicateurs qui prêchaient sur les éthafauds ,
V. 12
dans les places publiques. Le prétexte de ce der-
nier usage ëtait la multitude des auditeurs; mais
cela dégénérait en spectacle et en action théâtrale^
auviépris de la divine parole i ».
Concile de Sens, 1528. — Il estdit que le faste,
le luxe et l'avarice^ sont ordinairement la cause
pour laquelle les ecclésiastiques ont une mauvaise
réputation : c'est poun|uoi on les avertit de se
souvenir qu'ils ne sont pas appelés pour être ser-
vis, mais pour servir.
Par le trentième article, il est permis aux ec-
clésiastiques de faire un petit métier honnête pour
pouvoir subsister sans avilir le Sciccrdoce; et,
par le trente-unième, il leur est défendu d'être
marchands.
Concile de Cambrai, 15G5. — Les évêques au-
ront soin de rétablir ou d'entretenir les écoles
chrétiennes pour instruire les enfants des élé-
ments de la religion.
Il y aura des maîlres d'école pour Tinstruction
de la jeunesse dans tontes les ])aroisses. Les curés
s'informeront, tous les mois, des progrès des en-
fanls; et ils apporteront tous leurs soins pour
qu'on leur inspire la crainte et Tamour du Sei-
gneur, dès leur plus tendre enfance.
Les doyens ruraux visiteront, louslessix mois,
ou au moins tous les nns, ces petites écoles, et
rendront compte à l'ordinaire delà manière d'îns-
ttuire la jeunesse.
Les carîllonneurs ne toucheront sur les cloches
que des cantiques et des hjmnes, et jamais des
aits lascifs et déshounétes.
Concile de Tours^ l68â. — Analhéme à qui-
conque ose contredire à la puissance du roi, qui
ne vient que de Dieu seul^ et qui refuse opiniâ-
trefeent d'obéir à ses justes ordonnances.
On prie le pape d'accorder aux évéques et à
leurs grands- vicaires, officiaux et pe'nitencîers^ la
permission d'absoudre de Théresie. On prie aussi
le roi de faire publier le concile de Trente.
Tous ceux qui forceront une fille ou une femme
à se faire religieuse, seront également excommu-
niés.
Lés ecclésiastiques qui donneront la sépulture
dans leurs églises ou dans leurs cimetières, aux
hérétiques, encourront l'excommunication ma-
jeure. On n'enterrera personne auprès du grand
aufèl, et toutes lés fosses en seront éloignées au
moins dé cinq ou six pieds. On excepte de cette
règle les évéques, les curés et les fondateurs.
Les oflBiciaux seront prêtres^ de bonne réputa-
tion^ ou habiles dans le droit canonique.
Concile d'Avignon^ 1594. — On défend dé
bâiir les secondes noces , de dire la Inesse de
1S.
nuit, et il osl expressëmcnt déPendu aux femmes
de prc'senter fleurs ou gAtcaux à ceux qui entrent
dans IVglise, comme elleft ont coutume de le faire
hvs jours de fcte^ etc.
Il serait tit)p long de donner le détail des or-
donnances de règle et de discipline, dont les con-
ciles dotaient clia(|ue pays selon ^es besoins di- \
vers ; il nous suffit de voir que les mœurs et les
lumières pe'nètrent parlout. Cette tendance est
surtout sensible dans la seconde moitié du XVI»
siècle, car alors^ elle descendait du pontife aux
simples cures, et des conciles aux chapitres. En
présence de la réforme protestante, on avait senti
le besoin de redoubler de se? vérité et de refaire
les mœurs. Vu ce sens, on lui doit quelque re-
connaissance. C'est le seul bien qu'elle ait pro-
duit, et, nous devons le croire par lamai*chedes
choses, ce l)îen, un peu plus tard, peut être, au-
rait été opéré sans elle.
Ainsi, les conciles de cette époque, rédigeant
de véritables codes de morale divine et de sagesse
chrétienne, travaillaient lentement, mais avec
fruil, à n'cjénérer la société ecclésiastique et civile.
Heureux les peuples, s'ils n'avaient eu qu*à suivre
cetlebieiiniisante impulsion, mais le remMe avait
paru trop lent et trop [)eu (inergiqucau zèle exalté
de quolqn<»s-uris, (ît Tinquisition moderne rem-
— 18) —
plaça plus furieuse encore, et plus iuiplloyabîc,
l'inquisition du X11I« siècle «.
Les Juifs furent la cause première de ce redou-
blement de rigueur : les richesses immenses (|irils
avaient su amasser en Espagne avaient attiré sur
eux Tenvie, la haine et la persécution ; ils pou-
vaient éviter la mort en se faisant Chrétiens, ils
en profitèrent; mais la plupart de ces conversions
forcées durèrent peu, et le danger passé, les Juifs
retournèrent secrètement au Judaïsme. De h\ Tes-
piounage, Tinquisition et des peines terribles
contre les apostats ^ L'avidité du roi Ferdinand^
qui confisquait les biens des condamnes, aida au
sfièle de Torqueniada^ prieur du couvent des Do-
minicains de Séville et grand inquisiteur. La
reine Isabelle résistait; sa charité de fenmie souf-
frait de ces affreuses tortures; on sut lever ses
scrupules, et rien n'empêcha |)lus Tinquisition de
fleurir et de fructifier dans l'un des plus beaux
pays du monde *. Repoussée en France, ù Rome
même, et surtout à Naples ', elle leva sa tête hi«
deuse dans la Péninsule et y but le sang de tout
ce que lui laissa Témigration ^. Le nombre des
prisonniers était tel que les prisons étaient trop
petites, et qu'on fit servir quelques couvents à
cet usage. Ils en sortaient pour être enfermés dans
des statues de pliÀtre exposifes à un feu ardent
- 181 —
qui desséchait et consumait peu à peu leurs corps.
Des plaintes nombreuses arrivèrent au pape, mais
la vulonlé de Sixle lY ne fut pas assez foite ou
assez puissante pour faire cesser un état de choses
que lolérail Ferdinand.
Jusqu'en 1^8^, tout cela s'était fait sans lois,
sans l'èglementSy en manière d'essai j mais à cette
épo(jue, Torquemada convoqua une junte géné-
lale à Siivilie, et l'on y dttcréta les premières lois
peruianv'ules de rinquisition d'Espagne. Ce nou-*
veau Code avait vingt-huit articles : « les troi^
premiers déterminaient la manièi*e d'installer les
tribunaux dans les villes^ la publication des cou*
surtîs contre Icb hérétiques et les apostats qui ne
se dciionceraieiu \)i.\s voloutuirement, et fixaient
le déLi de grâce, pour éviter la coniiscatiqu des
bicii>.
Le quatrième article portait que les conléssions
volontaires, faites avant le temps de grâce, de-
vaient être écrites sur l'interrogatoire des inqui-
siteurs. Par celte manière de procéder, on n^aOr
cordait la gruce à un homme que loi*squ*il en av%ît
fpit Iivrt;r d'autres à la persécution.
L'ai l.iclc cinquième défendait de donner aecrà-
tement l'absolution, excepté dans le seul cas ou
personne n'aurait eu connaissance du crique du
réconcilié.
— 485 —
Par le sixième article, le réconcilié se trouvait
condamne à la privation de tout emploi hono-
rifique^ et de l'usage de l'or, de l'argent, des
perles, de la soie, et de la laine line.
L'article septième imposait des pe'nitences pé-
cuniaires^ même à ceux qui avaient fait une con-
fession volontaire.
Le huitième portait que le pénitent volontaii^e,
qui se présenterait après le terme de grâce, ne
pourrait être exempté de la confiscation de ses
biens, qu'il avait encourue de droit le jour de
son apostasie ou de son hérésie. On voit^ par ces
deux ai*ticles, tout ce* que la cupidité de Ferdinand
s'était promise de Tinquisition.
Le neuvième article ordonnait de n'imposer
qu'une pénitence légère aux sujets âgés de moins
de vingt ans, qui se présenteraient volontairement.
L'article dixième imposait l'obligation de pré-
ciser le temps ou le réconcilié était tombé dans
ITiérésie, afin desavoir quelle portion de ses biens
appartenait au fisc.
Si un hérétique, détenu dans les prisons se-:
crêtes du Saint-Office, touché d'un véritable re-
pentir, demandait l'absolution,' l'article onzième
portait qu'on pourrait la lui accorder, en lui im-
posant pour pénitence un emprisonnement per-
pétuel*
L(^ douzicine article autorisait les inquisiteurs
à condamner à la relaxation, comme faux pënitent,
tout réconcilie dont ils jugeraient la confession
imparfaite ou la repentance simulée. Ainsi, la
vie d'un homme dépendait de l'opinion d*un in-
quisiteur.
L'article treizième prononçait^k même peine
contre ceux c[ui se vanteraient d'avoir caché plu-
sieurs crimes dans leur confession.
Le (juatorzièmc portait que, si Taccusë con-
vaincu persistait dans ses dénégations, il devait
être condamné comme impénitent. Cet article fît
conduire au bûcher des milliers de victimes,
parce qu'on regarda cojnme convaincues, des per-
sonnes qui étaient bien loin de Tétre.
D'après le quinzième article, toutes les fois
(|u'il existait une demi preuve contre un accusé
qui niait son crime, il devait être soumis à la
question : s'il s^avouait coupable dans les tour-
ments, et confirmait ensuite sa confession, il était
condamné comme convaincu^ et, s'il la rétractait,
il devait subir une seconde question.
Il était défendu par le seizième article de com*
muniquer aux accusés la copie entière des décla—
rations des témoins.
Le dix-septième prescrivait aux inquisiteurs
d'interrpger eux-mêmes les témoins.
— 185 —
Le dix-huitième voulait qu'an ou deux inqui-
siteurs fussent toujours présents à la question, afin
de recevoir les de'clarations des prévenus.
Le dix-neuvième exigeait qu'on condamnât,
comme hérétique convaincu, tout accusé qui ne
comparaîtrait pas après avoir été assigné dans les
foiines. I
Le vingtième portait que, s'il était prouvé par
les livres ou par la conduite d'un homme mort
qu'il avait été hérétique, il devait être jugé et con-
damné comme tel, son cadavre exhumé, et la to-
talité de ses biens confisquée aux dépens de ses
héritiers naturels.
D'après le vingt-unième article, il était or-
donné aux inquisiteurs d'étendre leur juridiction
sur les vassaux des seigneurs, et de censurer ces
derniers, s'ils y mettaient quelque obstacle.
Le vingt-deuxième article voulait qu'on accor-
dât aux enfants de ceux dont les biens auraient
été confisqués, une portion de ces mêmes biens
à titre d'aumône. Cet article devint illusoire, car
jamais les inquisiteurs ne se sont occupés du sort
de ces malheureux : l'abandon et la misère étaient
toujours leur partage.
Les autres six articles de ce code étaient relatifs
aux procédés que les inquisiteurs devaient obser-
ver entre eux et envers leurs subordonnés.
— 180 —
Cette constitutiop fut augmentée plusteors fois,
même dans les premiers temps; mais nuilgré
toutes ces modifications , les formes de procédure
ont toujours été à peu près les mêmes, et les
inquisiteurs n'ont jamais renonce à Tarbitraire
qui fait le fond de celte cruelle juri^ru-
dence. 11 était impossible à l'accusé d^établir
sa défense convenablement, et les juges, placés
entre Falternativc de reconnaître son innocence,
ou de le soupçonner coupable, adoptaient toujours
ce dernier parti, et n'avaient plus besoin de
preuves.
Un code aussi sanguinaire^ dont rexecuUoQ
était confiée à des hommes qui croyaient se ren-
dre agréables à Dieu en faisant brûler des mil-
liers de lem*s semblables, ne pouvait que reudi*e
l'inquisition odieuse. Aussi excita-t-elle le plus
vif mécontentement, et les peuples des Espagnes
lui opposèrent une résistance qui fut souvent
sanglante.
Nous ne nous appesantirons pas sur des détails
horribles qui, (mtrele dégoût qu'ils inspirent, peu-
vent n'être pas exacts 7; et pour caractériser cette
institution, aussi peu populaire que peu chrétienne,
nous nous borneiH>ns à donner après ces statuts
la peinture d'un auto-da-fé. Ce tableau des mceurs
de l'époque en dira plus que tontes les réflexions.
Le Saint-Office c^lëbrait deux sortes d'auto-
da-fe. Les auto-da-fe' particuliers avaient lieu
plusieurs fois dans Tanuëe, les éxecutions géné-
rales ou grands auto-da-fé étaient réservés pour
les grandes occasions, telles que Tavènement ou
le mariage d^un souverain, la naissance d'un en-
fant rojalou l'anniversaire des jours mémorables.
Tous les condamnés , dont plusieurs gémissaient,
dans les prisons depuis longues années, en étaient
tirés alors, morts ou vifs, pour figurer dans cetto
barbare cérémonie.
Un mois avant le jour fixé pour l'auto-da-fé gé-
néral , les membres de Tinquisition , précédés de
leur bannière^ se rendaient en cavalcade, du pa-
lais duSaini-Oilice à la grande place pour y s^n*-
noii^ccr aux babitanU» qu'à un moi$ de là, à pareil
jour, il y aurait une exéculiou générale des per-
sonnes condamnées par Tinquisition : cette ca-
valcade faisait ensuite le tour de la ville au son
des trompettes et des timbales. Dès cet instant on
s'occupait des préparatifs nécessaires pour rendre
la cérémonie aussi solennelle que magnifique |, à
cet efict , on dressait sur la grande place un tb0à-
tre de 50 pieds de long^ élevé jusqu'à la hauteiM:
du balcon du roi, lorsque la ville où devait avoir
lieu Tauto-da-fé était la résidence royale. A l'ex-
trémité et sur toute la largeur de ce théâtre s'éle^
yait) à la droite du balcon du roi, un aniphiiht^ft-
tre de yingt«cinq à trente degrés destinés pour le
eonseil de la wSuprc^me et pour les autres conseils
d'Espagne. Au-dessus de ces degrés, l'on voyait,
sous un dais, le fauteuil du grand inquisiteur,
qui se trouvait i)eaucoup plus élevé que le balcon
du roi. A la gauche du théâtre et du balcon , on
dressait un second aniphitliéiUre où les condam-
nés devaient être placrs. Au milieu du grand
théâtre^ il y en avait un autre fort petit, (|ui sou-
tenait deux espèces de cages en bois, ouvertes par
le haut, dans lesquelles on plaçait les condamnés
pendant la lectui*e de leur sentence. En face de
ces cages se trouvaient deux chaires , une pour le
relateur ou lecteur des jugements, l'autre pour le
prédicateur; et enfm on dressait un autel auprès
de la ])lace des conseillers.
Le roi^ la famille royale, ainsi que toutes les
dames de la cour, occupaient le balcon royal.
D'autres balcons étaient également pré])arés pour
les ambassadeurs et pour les grands de la cou-
ronne , et des échafauds pour le peuple.
Un mois après la publication de Tauto-da-fé,
la cérémonie commençait par une procession com-
posée de charbonniers , de dominicains et de fa-
miliers^ qui partait de l'église et se rendait sur lu
grande place ; elle s*cn retournait après avoir
planld pr(\s de Taulel une croix verte, eotourëe
d*an crêpe noiri et Tétendard de llnquisition.
Les dominicains seuls restaient sur le théâtre^ et
passaient une partie de la nuit à psalmodier.
A sept heures du matin , le roi , la reine et
tonte la com* paraissaient sur les balcons.
A huit heures^ la procession sortait du palais
de rinquisition, et se rendait sur la place, dans
Tordre ^suivant :
1° Cent charbonniers armés de piques et de
mousquets. Ils avaient le droit de faire partie de
la procession, parce qu'ils fournissaient le bois
destine? h brrder les hérétiques.
2o Les dominicains, précédés d'une croix blan-
che.
3" L''élendard de llnquisition^ porté par le duc
de Médina- Céli, suivant le privilège de sa fa-
mille. Cet étendard était de damas rouge, sur le-
quel on avait brodé d'un côté les armes d^Espa-
gne, de Tautre une épée nue, entourée d'une cou-
ronne do laurier.
/l^ L(\s grands d'Kspagne et les familiers de l'In-
(fuisition.
5" 'Joutes I(\s victimes, sans distinction de sexe,
pîarées stiivant Irvs peines plus ou moins sévères
aiixfjuell(?s elles étaient condamnées.
délies rondanniées à de légères pénitences mar-
cfaaient les premières , la tête et les pieds nus , re*
yétues d^un san-bénito de toile , avec une grande
croix de saint André jaune sur la poitrine , et une
autre im le dos. Après cette classe marchait celle
des condamnés au fouet, aux galères et à Fempri-
sonnement.
Venaient ensuite ceux qui, ayant évité lé feu
en avouant après leur jugement^ devaient être
étranglés seulement; ils portaient un san-bénito^
sur lequel étaient peints des diables et des flam-
mes ; un bonnet de carton de trois pieds de haut,
appelé corozay peint comme le san-benitOy était
placé sur leur télé.
Les obstinés^ les relaps et tous ceux qui de-
vaient être l)rûlés vifs, marchaient les derniers^
vêtus comme les précédents, avec la différence
que les flammes peintes sur leurs san - bérdto
étaient ascendantes. Parmi ces malheureux il J
en avait souvent qui marchaient bâillonnés. Tovs
ceux qui devaient mourir étaient accompagnés cle
deux familiers et de deux religieux. Chaque conh
damné, à quelque classe qu'il appartînt, tenait à
la main un cierge de cire jaune.
Après les victimes viv«intes , on portait les sta-
tues en carton des condamnés au feu^ morts avant
Tauto-da-fé ; leurs os étaient aussi portés dans à&
Une grande cavalcade, composée de conseillers
de la Suprême, des inquisiteurs et du clergé,
Fermait la marche. Le grand inquisiteur était le
dernier^ vêtu d^un habit violet : il se faisait es-
corter par ses gardes-du-corps.
DèvS que la procession était arrivée sur la place,
et que chacun était assis , un prêtre commençait
la messe jusqu'à l'évangile. Le grand inquisiteur
descendait alors de son fauteuil^ et, après s'être
fait revêtir d'une chape et d'une mitre , il s*ap-
prochait du balcon où était le prince, pour lui
faire prononcer le serment par lequel les rois
d^Kspa{rnc s'obligent de protéger la foi catholique^
d'extirper les hérésies, et d'appuyer de toute leur
autorité les procédures de l'inquisition. Sa Ma-
jesté Catholique , debout et la tête nue , jurait de
l'observer. Le même serment était prêté par toute
rassemblée.
Un dominicain montait ensuite dans la chaire
et faisait contre les hérésies un sermon rempli de
louanges de l'inquisition. Dès que le sermon était
fini, le relateur du Saint-Office commençait à lire
les sentences ; chaque condamné entendait la
sienne à genoux dans la cage , et retournait en-
suite à sa place.
A la fin de cette lecture, le grand inquisiteur
quittait son siège et prononçait l'absolution de
— 19Î —
ceux qui étaient réconciliés; quant aux malheu-
reux condamnés à perdre la vie, ils étaient livrés
au bras séculier, placés sur des ânes, et conduits
au quemadero pour y recevoir la mort Là se
trouvaient autant de bûchers qu^il y avait de vic-
times. On commençait par les statues et les os
des morts, que Ton brûlait; après Içs statues, on
attachait successivement tous les condamnés aux
poteaux élevés au milieu de chaque bûcher, et
Ton y mettait le feu. I^ seule grâce que Ton fai-
sait à ces malheureux, c'était de leur demander
s'ils voulaient mourir en bons chrétiens: dans ce
cas , le bourreau les étranglait avant de mettre le
feu au bûcher.
Les réconciliés condamnés à la prison perpé-
tuelle^ aux galères et au fouet, étaient ramenés
dans les prisons du Saint-Oflice, d'où ils sortaient
pour subir les pénitences qui leur étaient impo-
sées , et pour être conduits à leur destination.
Telles étaient les formalités et les cérémonies
employées dans ces barbares exécutions, que Ton
a osé apj^cltT actes de foi ^ auxquelles le roi et la
cour assistaient comme à une grande fête. L^Es-
pagne leur doit la perte de la moitié de sa popu-
lation , et la honte de les avoir froidement sup-
portées ^ .
Après la mort deTorquemada;, quarante-qua-
— -195 —
tre autres grands«inquisitenrs se succëdèrent , et
tous introduisirent des changements pins ou
moins notables^ soit dans les règlements, soit
dans les cërëmonies, mais sans que rien pût justi-
fier les crùautës dont TEspagne fut le théâtre pen-
dant plusieurs siècles' •
Après la mort de Charles-Quint, Philippe II
eut l'heureuse idëe décrier un tribunal ambulant
de rinqoisition , charge de découvrir et de pour-
suivre les hërëtiques sur les navires. Ce tribunal
maritime fut de courte durée, parce qu'on s'aper-
çut qu'il mettait des entraves à la navigation. A
cette inquisition des flottes succéda l'inquisition
des douanes , dont l'objet était d^empêcher Tin-
troduction des livres défendus... Ainsi , pendant
que les conciles de la France et de Fltalie es-
sayaient de lutter glorieusement contre les doc-
trines subversives, TEspagne prenait à tâche de les
justifier par ses excès et son ignorance sangui-
naire *^. Les mœurs y étaient-elles meilleures ? la
crainte avait-elle produit de bons effets?.. L'his-
toire prouve le contraire, et d'une manière irréfra-
gable : nous pourrions en donner des preuves nom-
breuses, mais elles trouveraient mal leur place ici,
et d'ailleurs le fait n'est pas de nature à être nié ou
controversé ^\ Pendant que l'Espagne, en proie à
l'inquisition , voyait sa population diminuer par
V. 13
une émigration constante^ la cour xoinaiiie et
Vltalie avaient un sort biea différent, biea dîffî-
rent surtout de celui qu'elles avaient eu aoua les
pontifes dissolus ou batailleurs. Dé[à sous Pau^ lY
on s'en était aperçu; mais l'exemple de Pie Y et
de Grégoire XIII produisit un effet extraordinaire.
Ce qu'en rapporte Tiepolo , qui vivait au milieu
du XYIe siècle^ est fort remarquable. € Rien, dit-
il , n'a fait tant de bien à TËgLise que cette, suc-
cession de papes d'une vie irréprochable; tons
ceux qui les ont suivis sont devenus meilleurs, les
cardinaux et les prélats cherchent avec soin à évi-
ter tout scandale, ei la ville entière s'efforce à
leur exemple de sortir de la déconsidéi:atioi3. où
elle était tombée. Rome enfin s'approche, de U
perfection dans les limites imposées à la nature
humaine... ^^ » <{ Non pour cela, observe Tiia'
pai^tial historien de la Ipapauté , que la cour pa-
pale ne renfermait que des bigots ou des hyvfi^
crites , nous aimons à reconnaître au contraire
qu'elle était composée d^hommes distingués qpi
pratiquaient à un haut degré toute l'austiéritérer
lîgieuse de leur époque '^ :#.
La population mobile de Rome suivait tput^p
ces phases^ et sa croissance ou sa décroiswnee
marquaient la somme de bonheur ou de ma}l|çu]r
qu'on trouvait sous tel ou tjsl pontife. EocoiBe xér
— 495 —
dttite 60US Paul IV à 4&9OOO t^mm, elle se relet»
MeDtôl et fut portée à 70)000. Elle ëialt de flm
de 1^,000 80US Sixte-Quint ; et celte rimsae a'é-
Ciit pas âenleindut reiuaine, ei^^dk>rsl'et»i^ratîéH
et le re^^r etisseat été tnoins prl^mpt^, mais FI-
talie entière , et même la France et l'Ëspagnei
foorfiissâkîlStleur Gotilingeilt. « Ainii^dit Ralfke,
à GOté dû Lombard attentif et docile, on dSstin^
guait l'habitant de Gènes erdyant yenir ^ b<mt dé
tout a?e6 son argent^ le Vénitien cbericbanf à dé*
cxHi¥rir les secrets des étrangers^ le Florentin ë6o-
noble etbayard^ le Rooatâgtet prudeitt ti èvare^
le Napolitain prétentieux et cérémonieux. Géux
des pays dn nord cherchaient seulement à jcmir
du elimat et de la vie. Le Français renonçait dif^
ficilement aux mœurs de sa patrie; TEspàgnoli
enveloppé de son soltana, son manteau sUr 1'^
p^e^ méprisait tous les âati'es , et silencieux se
tenait à l'écart». • »
Le clergé y ayait ud esprit t^ublic^n qui {è^
DBÎt sans doute à ee que diaoua portait sous la
aoatane^ non le bâton de maréchal , mai3 la mitfë
de pape. Depuis un siècle surtout les cbangemèal^
avaient été si multipliés^ et tant de j^apes s'étaient
élevés de fort bas , qui tous ay aient eu leurs cffo-
tures, que chacun pouvait se oroke appelé à fairtf
aussi fortune* Et de là tes cA)sé^uiosités daikl
15.
— 406 —
étaient entoures cardinaux et archevéqnes, qui
tous avaient leur cour assidue et prévenante. On
vivait comme an milieu d'une loterie dontkB
chances incalcnlables et précipitées entretenaient
constamment dans tous les joueurs la même espé-
rance.
Voilà les deux côtés de Fltalie ou XVI^ siècle^
le religieux et le mondain ; le prélat et Phomme;
le ciel et la terre... Mais comme rien nepeutét^e
parfait ici-bas, c'était cependant une amélioration
qu*îl nous est doux de constater, surtout en re-
gard de la Saint-Barthélemi française et de Tin-
quisition espagnole.
Et en effet, avec un tel état, peu à peu les nioetirs
s'améliorent, et la conséquence naturelle de ce
progrès est de porter à la tête de la hiérarchie ceux
dont l'existence entière est le plus en rapport
avec les exigences de l'époque. Peuples et ponti-
fes réagisssent ainsi les uns sur les autres; les pon-
tifes ont façonné le peuple^ qui à son tour ré-
clame, exige des pontifes vertueux, zélés pour le
bien et dignes de leur haute position. Le XIX*
siècle souffrîrait-îl encore un Borgia , ou seule-
ment un cardinal' Dubois?
En attendant^ comme nous Tavons dit pins
haut , des sommités aux villes et aux hameaux des
divervses contrées de l'Europe, nous retrouverons
— i07 —
les mêmes destinées ; ainsi, au XY*^ siècle les cou-
vents étaient déserts, ou Ton y passait la vie la
plus molle et la moins religieuse ; les jeunes abbés
qui recevaient les ordres donnaieut un repas et un
bal où ils dansaient eux-mêmes; les abbes di-
saient la messe en bottes, pendant que le cheval
et la meute préparés pour la chasse à cor et à cris
attendaient, bruyants et impatients, à la porte
de Téglise ^^. Les laboureurs travailluieut les jours
de fête et dimanches , ou allaient danser dans les
cimetières; les églises étaient pleines de prome-*
neurs et de discoureurs pendant la messe, et le
seigneur du lieu t^'y permettait de baiser au front
les jolies filles qui entraient. Les religieuses sor-
taient seules , les sorciers avaient accès partout ,
débitant leurs prophéties , et tout cela et tant
d autres choses encore, les indulgences le répa-
raient et le lavaient... ^^
Voyez ce que disaient de leur siècle les hqoi-
mes qui l'honoraient le plus : Dante ^ catholique
et théologien zélé^ admet tous les dogmes de Fé-
glise romaine , mais il ne cesse de tonner contre
les abus et la corruption de son clergé ; il place
dans son enfer tous les hérétiques, mais il y place
aussi les trafiquants de prières ^^. Il respecte les
droits spirituels du clergé , mais il a en horreur
ie pouvoir auquel il attribue la dégradation reli-
— 4«8 —
gieuse ; il le signale comme destrncteur de mu
pays et peuple Tenfer de ses ministres : € Là ils ae
lancent des rochers, là ils sont prëctpilés dans des
chaiidièrrs de poix bouillante; plus loin on lef
voit enchaînés dans une prison de glace, ou
roulant du sommet d'une pyramide de flammes
qui tourne autour d'eux. ^^ > Ainsi que Dante»
Pétrarque était bon catholique, plein de xèle pour
les intérêts du Saiiit-Siéi^e; et |iendant qu'il con-
struisait à Arqua une chapelle dédiée à laVierge,
il tonnait contre les excès du clergé de son temps
en ternies singulièrement énergiques ^•.
Eh bien ! ce qui existait déjà au temps du Dapte
et de Pétrarque n avait cessé de croître et d'empi-
rer jusqu'à la Hn duXV*^ siècle. Au XVI', au con-
traire, M Tintoléranco était plus grande, plus
O'Iicuse , d^in autre côté , la rivalité menait an
bien. Dans un temps où la pensée et la bouche
étaîent sans cesse pleines de haines et de disputes
théologiquos , on entendait dans les réanipqs po-
pulaires des conversai tions et des mots pareils à
cenx-ci : fr Pour faire enrager les hugnenots, jf
veux fonder nn bel hôpital. — Afin que les pa-
pistci le voient , je veux faire tous les jours distri-
buer de grands pains devant ma pqrte.-— Gessona
nos querelles, nos discus»ons, elles font 1^ plaisir
des huguetiofA. — Aimons-noue , sçoonrOBS-nons^
les papistes le sauront. — A cause des huguenots,
ne chantons pas de chansons galantes.— Point de
baîs^ point de danses, soyons moins relâches que
les papistes ^^. »
Au milieu de ce conflit perpétuel , tantôt bon,
tantôt mauvais, mais mauvais surtout, Henri IV
apparût à tous comme un sauveur; il remplit là
France de sa force et de sa tolérance. Il dit aux
frères : oubliez vos haines et embrassez-vous ;
enfin il mit à ses pieds les fanatiques des deux
commutiions, les uns reconnaissants, les autres
morts... *
Nous avons vu dans le cours du XVP siècle
le protestantisme naître et s'étendre avec une
rapidité effrayante pour l'Eglise; nous en avons
dit les causes, nous en verrons plus tard les re'-
sullats ; essayons aujourd'hui de résumer en
quelques mots l'histoire philosophique de cfe
siècle.
Le génie et Ténergie morale de Grégoire Vil
avaient délivré l'Eglise de la servitude que voulait
Ini imposa la féodalité, mais le grand homme
ne put consolider et continuer son œdvre : Tislai-
nîisme d'un côté, les schismes de l'autfe re-
muèrent et ébranlèrent la chrétienté ; le Saint-^
Sî^e , vîctorieuK et tranquille en appdfehce^ eut
bientôt à se combattre lui-même, et fut d'abord
— 200 —
eiilraiiié à se si^rvir de sa souveraineté spirituelle
pour agrandir sa souveraineté temporelle. Pousses
dans celte direction par les Laïques romains j les
pontifes en arrivèrent bientôt à une couiusion
toUde entre les deux puissances établies en leur
personne y et Ton vit Jules II, le casque en tête,
ambitionner la gloire des Césars. L'administra-
tion ecclésiastique suivit nécessairement cette
impulsion , et l'argent étant devenu d'une néces-
sité absolue pour faire une guerre incessante, la
simonie corrompit bientôt les plus hautes dignités
de TEglisc. Des désordres de tous genres suivirent
(*e premier égarement , et Uome , la mère de
rËglise chrétienne , vit tous les vices surgir dans
son sein ! Aux monstrueux plaisirs d'Alexandre ,
à Tardeur belliqueuse de Jules , avaient succédé
les élégants plaisirs de la cour de Léon. U y avait
là beaucoup moins de scandale , sans doute, mais
plus de danger y peut-être ^ pour l'austérité du
dogme catholique : lorsque le chef de TÉglise,
dit un spirituel écrivain , ^* s'enivrait de musique
et de parfums, dans ce temple magnifique , pour
l'érection duquel Jules II avait démoli la vieille
basilique sanctifiée par les tombeaux des martyrs;
lorsque sur les eaux de Bolsene, ou sous les
bosquets ombreux de Malliana , il passait sa vie
d^ms le commerce des artistes , des poètes et des
— 201 —
philosophes, au milieu de ces nobles causeries ,
le catholicisme ne pouvait manquer de se dé-
pouiller de son caractère pour revêtir les formes
idéales d'une poésie, les apparences d'une phase
transitoire de l'intelligence humaine.
Au platonisme florentin de la cour des Mé-
dicis succéda* bientôt, au sein de Rome même,
une philosophie plus audacieuse. L'immortalité
du principe pensant était niée jusque dans les
écoles publiques; et lorsque Erasme visita
- l'Ualie , lorsque le jeune Luther vint lui-même ,
portant aux marches de la confession de Saint-
Pierre une foi ardente et encore entière , Tépi-
curéisme avait envahi les doctrines au même
degré que les moeurs. Les chefs de Fauguste hié-
rarchie romaine , abaissés au rang de princes d'un
étiit temporel, souriaient trop souvent à des
dogmes dont le sens allait s'oblitérant chaque
jour, et des paroles blasphématoires se mêlèrent
plus d'une fois à celles par qui se consomme sur
l'autel le sacrifice de la nouvelle alliance.
Or^ à la même époque, et par réaction conti*e
ces déplorables tendances, un mouvement op-
posé, provoqué par Tétude des écritures, se ma«
nifestait dans le nord de l'Europe ; mouvement
de spiritualité exaltée qui eut b le a tôt dépaissé
toutes les bornes , parce qu'aucune force morale
n'était alors en mesure de le contenir et de le
r^ler dans le sens d*un^ hante et intelligente
orthodoxie.
Lorsque Luther commença sa prédication, le
terrain sur lequel il semait Thérésie, était dé^
profondément remué, d'une part, par les efforts
d^associations ascétiques, de Vautre, par les tra-
vaux de Beuchlin et d'Erasme , par la vulgarisa-
tion des saintes Ecritures ^.
Néanmoins, toutes ces causes ne seraient point
parvenu PS h donner au protestantisme une posi-
tion importante en Allemagne^ si la politiqtle
romaine ne s'était trouvée par ses intérêts tem-
porels en dissidence presque constante avec celle
des empereurs , et si ceux-ci ne s'étaient, sans uni
scrupule , servi de la réforme comme d'un instru-
ment pour abaisser et contenir la papauté.
On comprend en effet sans peine, en étu-
diant cette époque pleine de vie et féconde en
leçons, que le protestantisme s'est moins établi
par la force intime de son principe que par lés
complications émanées de la politique romaine
et de ta politique impériale. Les alliances les
plus diverses furent formées , non dans un bot
CitèhoKque , mais dans un but îvmain , et i
chaque phase nouvelle, des complications suc-
cessives amenaient des intérêts nouveaux, dans
I — 805 —
I lesquels la religion était pour bien peii. Gettë
marche des choses ne pouvait être favo^ablé k
J'Eglise ; aussi vit-elle sans surprise , mais avec
douleur, la Saisse, la Hollande, la Suède, le
Danemark, l'Angleterre et la plus grande partie
de l'Allemagne échapper à son jong; le protes-
tantisme gagnait aussi la France, et sans là po-
litique et heureuse abjuration d'Henri IV, il est
difficile de dire ce qui serait advenu. Voilà donc
l'Europe divisée , et divisée par Rome elle-
même, qui eut eu tant d'intérêt et tant de gloire à
tout réunir. Pourquoi faut-il que l'esprit de
l'homme se mêlant trop long-temps à l'esprit du
pontife ait anrené cette déplorable scission qui
hri.sa la magnifique unité de l'Europe chrétienne!
Ce divorce désastreux qui ensanglanta les con-
trées les plus belles du globe, et fit des hommes
autant de bêtes sauvages qui s'entre- déchirèrent
pendant des siècles, au nom d'un Dieu de paix et
d'amour! Ce sont là les fautes de l'Eglise, elle les
a bien expiées...
Elle voulut plus tard y porter remède, mais la
plaie était trop profonde, trop envenimée, et les
remèdes héroïques qu'elle employa^ l'inquisition
par exemple, furent une faute et un malheur de
plus. Le dix-septième siècle nous consolera un peu
de tant d'erreurs et de désastres : ce que n'auront
pu faire malgré leurs efforts les successeur im-
mëdiats d'Alexandre VI» de Jules II, et de Lëon X,
il sera donné de le faire aux successeurs de Sixte-
Quint et de Clément YIII, et aux communautés
religieuses qui se fondèrent sous leur pontiâcat.
Nous verrons TEglise ramenée à Torthodoxie et à
la vertu la plus sévère, par la force du principe
catholique qui ne peut périr ^, et par les desseins
immuables de Dieu sur son Eglise ^.
— 105 —
*^^ %tt0**l^%é9/^fUt0t/V^^
CHAPITRE HUITIÈME.
— »> ■■
Nous avons donne beaucoup à l'Église dans ce
volume, J3arce que l'Eglise, au XVF siècle, est
presque toute l'hîstoîre. Ainsi l'invasion^ Char-
lemagne , la fëodalitë , les croisades ont tour i
tour captivé Tattention, assume toutl'întërét jus-
qu'à cette ëpoque; ainsi la papauté, la réforme
sont toute la vie du XVI* siècle, l'Eglise le
centre de toute action et de toute vie ; mais pour
cela nous n'abandonnerons pas les parties acces-
soires, et fidèles à notre plan, nous continuerons
la revue des divers éléments de la civilisation de
chaque époque , laissant seulement un peu plus
d'espace à celui qui en réclame davantage.
L'absence d'idées générales, d'intérêts généraux
bien compris , bien appréciés a surtout caracté-
risé le XVP siècle ; la société en souffrance ne
savait ce qui pouvait assurer son bien-être, elle
ignorait même ce qui lui manquait pour exis-
ter réellement. Cette recherche, ce travail d'orga-
nisation fut le caractère du XV*; tout était
— 106 —
spécml. 11 refit tout . avec des idées de géné-
ralité et dWdre iuconiius avant lui. La société
en un mot s'organisa , se transloima| se créa un
gouvernement. Toutefois avant de réjjlementer
et de réformer, un premier travail était néces-
saire: il fallait purger TEurope des bandits qui
Tinfestaient. (Charles \ H vu vint à bout en
France avec les compagnies d'ordonnance i et le
paiement régulier de la taille fut le prenûer
résultat de railermissemeut de Tordre 2. En même
temps s'organisait le grand instrument du pou-^
voÎTi l'administration de la justice: les parle-
ments furent successivement établis à Grenoble^
à Bordeaux^ à Dijon et plus tard à Rouen et à
Aix. Ces corps de magi.slrature travaillèrent k
établir entre eux une confédération nécessaire à
leur puissance, prenant en général pour modèle*
et pour guide le parlement de Paris , (|uî était
le plus ancien et celui dont la juridiction était la
plus étendue et le pouvoir le plus éminent^. Cet
établissement donna les moyens de recourir à
des j^ges plus éclairés et plus int^res qfie leB
juges sei|^euriaux et contribua puissamméat à
améliorer en France la justice seigneuriale*
Louis XI, sous lequel celte amélioration de la
justice et cet accroissement graduel de Tordre
devinrent plus sensibles, opéra une véritable révo-
\
lutiou dans U isanière de gouvemer. Jnacpi^
lui la force avait été le seul mobile, il iïwtnta et
mit à ]a place la politique et la diplomatie. La
persuaiâon» l'adresse, le meosoQge, aoe prudence
uae dUsjnnuIatiQii ex.eessivesfuFeiiitse&prifteipakflr
armes"^ ; apoies U:ès-peu coouues jusqa^à kii efc
très-peu îippréciées , surtout par son beau cousioc
de Bourgogne, Gharles-le-Te'méraire, qui pouïv
vait être pria pour type de la politique des siècles
précérfenJU, On a souvent blâmé Louis XI ^ on- %
voulu flétrir sa mémoire, et il est vrai de dire que
cejbte politique nouvelle, toute de mensonge, dé
finasaerie et de duplicité était loin d'être morale^
m«ii& eWe- était cependant un progrès , un trè»-
gran4 progrès, puisque la supériorité mteifeo
tue lia* a siutcédé par elle à la supériorité OMh-
térielle eb qu'elle a été une transition pooi^
ar<riv.ar à la^ diplomatie qui règle le d^it de»
n^toos. etépai^ne tant de sang, à ces oégoeia^
tions^ de souverains à souverain» par ambassa^-
deurs plioa dignes et moins odieuses que VqvA ee
qui ay^ait} précédée
L(mis Hix eût voulu rassembler les coutàitiies
des^ royaumes, en composer un code unifonne^el
lie rendre obligatoire pour toutes les provittce»|'
cette réforme d'une immense utilité resta^ e»
projet-}. loFraucen^'était pas mdrepour la receroîi^-
{
— t08 —
Quant k la justice criminelle^ toutes les fois qu'elle
se trouva mélëe à la politique elle demeura
livrée au plus révoltant arbitraire : le prévôt
Tristan résumait alors à lui seul toute la justice,
mais cet arbitraire même était un bienfait lors-
qu'il s'agissait de punir les brigandages, les vols,
ainsi que les exactions et les violences des gens
de guerre.
Une autre révolution opérée par LiOÛis XI et
qui se rattachait toujours à son système Jordre
et de domination, c'était l'abaissement sinon
Textinction de la noblesse. En France comme
dans toute l'Europe les guerres du moyen-ftge
s'étaient faites avec des gentilshommes suivis de
leurs vassaux, les croisades, la prise de Gonstan-
tiuople, la conquête de la Grèce, les luttes contre
les Turcs, les guerres de succession avaient eu lieu
avant que la bourgeoisie pût y prendre part ; et
reût-elle pu^ trop occupée de ses propres afl&ires,
elle n y eût sans doute pas songé. Les rois de
France s'^entouraient de la noblesse ancienne et
la plus guerroyante. Louis s'attacha à augmenter
les privilèges de toutes les villes importantes, il
permit aux bourgeois de ces villes d'acquérir des
fiefs nobles et les mit au niveau de la noblesse. Il
fit plus, avec son œil de lynx , il devina les capa*
cités et les prit dans tous les rangs, de préférence
^ S09 --
dans r^jtage le plus bas ; il courbait tellement ceux
qu*il admettait à ses conseils^ qu^ii nivelait bar*
bier , chevalier ou bourreau sans avoir égard à
d'autres qualités , à d'autres vertus que celles
de Tintelligence et de l'activité , lorsqu'elles
étaient jointes à une obéissance passive. Le ciel
sembla Taider dans son dessein eu décimant à
cette époque les plus grandes familles de France
et dEurope parmi lesquelles on compte dix-sept
maisons souveraines^; et la mort de la noblesse
n'a pasété, comme on le croit communément, une
simple chute de titre, elle a été, après le christia-
nisme, la révolution la plus profonde qui se soit
opérée dans le sein des sociétés modernes ; dans
les lois des peuples la mort de la noblesse cor-
respond à Tabolition du droit féodal et à la for-
mation du droit civil ; dans la politique , la
mort de la noblesse correspond à Tavènement
des bourgeoisies.
Les bourgeoisies ont donc pris la place de la
noblesse dans la conduite des nations ; elles ont
envahi et conquis toutes les fonctions sociales , la
juridiction, la guerre, le sacerdoce, la science^.
Les transformations des grandes masses d'hom-
mes au milieu desquelles on voit germer de nou-
vellesidées et de nouvelles passions, ne sont jamais
soudaines, les siècles les ont préparées en silence
V. U
— 210 —
et un œil attentif peut seul les Jiscerder à tnvfM
les mille faits qui se croisent et détruisent ISinité.
Cependant il est facile de comprendre que cette
chute de la noblesse , que raccroissenlent des
lumières protégées par Timprimerie naissante à
dà changer la face de Tétat social : aussi le pas-
sage du XY^ au XVl^ siècle est-il généralement
considéré comme la transi lion du moyen^ge aux
temps modernes et de la barbarie à la cÎTilisation
réelle , à cette civilisation dans laquelle le poil-'
voir et la liberté , les lumières et les vertus ne
s^exduent pas ».
Malheureusement les successeurs de Louis XI ,
loin de profiter de la sagesse de ses vues^ songè-
rent surtout à l'agrandissement du territoire , et
perpétuèrent ces chocs de peuple à peuple qui
les aigrissent au lieu de les rapprocher par cette
douce fralernité qui seule peut établir le botiheiif
général. Ils attisèrcut ainsi ces haines nationalâl
qni ont tant retardé les progrès de la civilisaticm
européenne, quand tout concourait à les assurel*.
A l'intérieur , au contraire, Fénergie leur manqua
pour étouffer les complots d'une aristocratie qtii
relevait la tête. Madame de Beaujeu j à laquelle
Louis mourant avait remis les rênes de l'état
pendant la minorité de Charles , ne trouvant au-
cun antre moyen de sortir d'embarras, convoqua
les étAts^jgénérmx. thxnoiê aVftit fortnë une Iig:tié
de {)riiicêft^ dont le but était d'eûleVer à la l^o^âu^
té tout ce qu'elle avait conqui» de forces datië le
règne ptëcëdeût , pour le rendre h l'eriâtocràtlè ;
cette tentative tomba devant k mesure haf die ^
sage de la régente. Le penple rappiiyà,ear, paf
le seul fait de la convocatioa des états, la fiatii:^
entrait dans Texercice de ses droits politiquë^^ et
une monarchie représentative s'établisëait. Lé^
députée convoqués en 1484 représentaient la iicN
blesse ^ le elergé et la bourgeoisie. Ils siégèrent àU
nombre de â46. L'assemblée y établit :
10 Qm la souveraineté résidait dans le peuple,
composé, non de la populace seulement, mais dé
la totalité des citoyens ;
2® Que ce peuple avait le droit de régler par
ses députés la succession au trône , la régence et
tontes les affaires politiques et socialéis d'une
moindre importance.
Entrant ensuite en fonctions , les députés com-
posèrent le conseil du roi de tous les princes du
sang^ de quelques ministres du dernier règne et
de douze députés dés états-généraux.
Tous les objets de législation et d'administrti-
tion devaient être examinés par le conseil, mais
au roi seul était réservé le droit d'expécKer les let-
tres-patentes ^ règlements et ordoonaiites. Les
U.
— ta —
AatJi ferlèrent aussi souverainement les impôts
selùn la naturelle frofichiae âe France. Ils s*ë-
levaient sous Louis XI à quatre millions sept cent
mille francs ; les «^tats les rëduisirent à deux mil-
lions cinq cent mille francs. ILs dëgrévèreot quel-
ques provinces qui avaient été écrasées à dessein
par Louis.
Sur tous les autres objets les états ne statuèrent
pins, ils requinent^ ils supplièrent... Chaque corps
écrivit des cahiers de sollicitations : ainsi le
cahier de TEglise demandait le prompt rétablis-
sement do la Pragmatique, pour empêcher qu * les
annates, resserves, expectatives, indulgences, dé-
cimes, dispenses, n^attirassent en Italie tout Tar-
gent du royaume, et que les dignités et bénéfices
ecclésias!i(|ue8 ne fussent plus conférés, soit à des
étrangers, soit à des hommes sans instruction et
sans mœurs. Le clergé réclamait de plus ses im-
munités et privilèges, souvent violés par Louis XL
Les nobles demandaient qu^on ne convoquât que
dans les plus grands dangers le ban et Tarrière-
ban ; que leurs vassaux ne fussent plus tenus de
servir que sous leur bannière ; qu'on rendît leur
droit de chasse aux seigneurs , etc. La bourgeoisie
suppliait le roi de la mettre à Tabri des vexations
des agents du fisc et des violences des gens de
guerre; de supprimer lesoflices inutiles, de ré-
duire les traitements, de proscrire les cumuls et
de diminuer les pensions.
Les trois ordres insistèrent pour que les justices
préyôtaies fussent abolies et qu'aucun citoyen ne
pût être distrait de ses juges naturels. Ils récla-
mèrent l'interdiction de tout commerce aux offi-
ciers de justice et de finances , et un grand nom-
bre d autres améliorations. Enfin rassemblée de-
manda à être convoquée tous les deux ans.
Malheureusement pour la France^ les réformes
utiles ne furent exécutées qu'à demi ; chaque classe
réclama j de nouvelles ligues se formèrent, et la
discorde éclata partout, parce qu'une direction
unique et puissante n'était point imprimée au]$
affaires de l'état. Charles VIII enti*aina la France
dans une autre voie, celle des conquêtes, et toute
amélioration fut ajournée. L'assemblée de iUSU
ne fut qu'un jalon pour l'avenir.
Ces guerres incessantes avaient occupé , d Sa-
bord , et plus tard ruiné et décimé la haute aristo-
cratie; Louis XII, débarrassé de ce côté, régoa
sans é tats- généraux ^, mais, hâtons-nous de le
dire , il ne profita de son pouvoir arbitraire que
pour faire le bien plus facilement et plus vite ,
pour améliorer la condition du peuple et accroî-
tre la prospérité du pays «o. 11 fut pour le peuple
ce que madame de Staël appelle spirituellement 2//t
acddêni heurêus. H eût ëtë mieux pour la nation
que Louis XII s'attachât à consolider le bienfait
d'une monarchie représentative : la Fiance, ajnsi
gouyeniée , n'eût probalilement pas paissd par le^
épreuves tLTribles de Tabsolutisme et de l'anar^
chie réactionnaire qui l'a suivi.
Frampois T^ proGta d^es dispositions de f^^ouisXU
et remplaça la monarchie mixte de ses trois pré-
déresseurs [)ar la monarchie absolue , sans racoiJr
rir au concours d'aucun des ordres et corps^ de
Télai. Il négocia en lôl6, avec le pape Léon X,
le poucordat destiné à remplacer la PragmatiqMe*
Le clergé et Tuniversité de Paris ^^y opposèrenl; ,
\& parleinc!Ji rel'usa d'cnni^isirer, le roi mep?,^
ru;nvi'i'si(é delà privaliou de ses privilèges et le
paileuu'ut (lelVxil. \U oI)éireut, mais en protes-
laut que lu i'urcc seule les faisait céder. Une fois
engagé dans celte route, François F*" ne s arrêta
pas. Il supprima les état^-généraux et les remplaça
par une assemblée composée de notables , qui ne
prit aucune part aux aflfaircs intérieures et au gour
vernement. L'absolgtisme était complet, ilne^V
gij^ait plus que de le formuler? et le roi y pourvut
en ejjtployant le premier dans ses édits les mots:
Car tel est noire bon plaisir. Ce qui restait de
puissance aux princes du sang, à la noblesse el; aux
villes ne suffisait pas désormais pour disputer ^ la
— «46 —
rpjauté Tautorité exclusive qu'elle s'iétait attri-
buée; il fallait qu'ils trouvassent un auxiliaire
dans UD principe nouveau qui rendit des chances
de svpcès à une nouvelle lutte contre le trône. Ce
principe dit la liberté de conscience et la réforme
religieuse.
Le règne de Henri II fut l'apogée du pouvoir
royal jusqu'au despotisme de Richelieu et de
Louis Xiy ; peu à peu s^étaient évanouies les der-
nières |;races de^ franchises communales et das
droits des états : une seule assemblée de notables
fut copvoquée en 1558, après la bataille deSaint-
Quentip, pour obtenir des subsides; encore ces
notables furent~ils tous nommés par le roi...
Quanta la justice^ Henri institua de nouveaux
juges nommés pvcsidiaux^ devant lesquels on
pouvait appeler à^^^ sentences des tailles, et per-
pétua 1? vénalité introduite sous le dernier règnie,
cp créant soixante -dix charges nouvelles au par-
lement de Paris, qui toutes furent livrées à ^t&
j^ix exorbitants. Cet abus , qui provoqua les
plaintes éloquentes du président deTliou^ rabaissa
la dignité de la magistrature. Enfin , on trouve
encore à cette époque déplora J)lc ,un 4^rnier
exeqiple (}e9 combats judiciaires ^'.
A la mPrt de tiei;^ri II , dont le règne fut un/e
Qouv/Blle preuve des écueils nombrieux dis ji^absp--
— «6 —
lutisuie, un nouvel état de choses commença. La
monarchie absolue peVit, les Français Tëchangè-
rcnt contre un singulier mélange de royauté, d'aris-
tocratie et de démocratie dans lequel rien n^était
iixé ni coordpnné. Sous François II et Charles IX
le renouvellement des états généraux rendit à la
nation une part de souveraineté dentelle était pri-
vée depuis Louis \I, et la hitte religieuse donnaà
la partie calviniste du peuple une liberté que sanc-
tionna redit de Nantes, et que la faiblesse d'Hen-
ri III refusa et laissa prendre ; elle laissa périr pièce
à pièce Tordi^e politique établi sousLouisXI, etle
pouvoirabsoluétabli par François P"' ^^. La France
reprit sous Henri IV, Richelieu et Louis XIY, cet
ordre sans lequel un état ne peut long -temps
exister, cette énergie qui donne le calme et qui
amène à son tour d'autres maux... Mais cette
époque n*est plus la nôtre : après ce rapide coup*
dœil sur Tétat politique et social de la France,
parcourons plus rapidement encore les autres
contrées de l'Europe. Nous y verrons le même
travail d'organisation, cette lutte de rintelligence
contre la force, des lumières contre la barbarie,
de Tordre contre Tanarchie.
Commençons 'notre course par TAngleterre.
Quel spectacle oflFre-t-elie à la même époque ?
La guerre étrangère et la guerre civile, ia .
— 217 —
lutte des deua; roses au dedans, la lutte contre la
France au dehors. Toutes deux, en épuisant les
forces du royaume^ concentrèrent la puissance
entre les mains de la royauté. Henri V en profita
le premier et quand arriva le terme des débats
sanglants des maisons d^York et de Lancastre,
ses successeurs ne laissèrent plus reprendre le des-
sus à une aristocratie affaiblie et ruinée ^'. Avec
Henri VII , le premier des Tudors, commença
l'ère de la centralisation politique que nous ve-
nons de remarquer en France et que nous retrou-
vons en Espagne.
Ici, le XV siècle amenait la fin de la conquête
de Grenade et de la longue et dramatique lutte des
Chrétiens et des Arabes. L'union de Ferdinand et
d'Isabelle unissait les deux principaux royaumes,
la Castille et TAragon ; et le pouvoir royal aidé
de rinquisition saisissait les rênes d'une main
ferme. Le temps où les Gortès signifiaient au roi de
dépenser cent cinquante inaravédis par jour ^ et
pas davantage, et de recommander aux gens
de sa suite de manger plus modérément ^^, était
bien loin des mœurs du XV* et XVP siècles. Phi-
lippe I" et Charles P' firent des lois sans consul-
ter les Coriès; Philippe II et sessucccsscMirs abo-
lirent tous les privilèges constitutionnels. Des
tentatives étaient faites, il est vrai, par le peuple
— Î18 —
pour ressaisir le pouvoir : une pétition datée de
1555 demandait que les lois passées dans les Cor-
tès pe pussent être révoquées que par les Coûtes ^';
mais le caractère de Tépoque se peint en eqtier
daps la réponse : « à ceci nous répondrons qpe
nous agirons comme il convient à notre gpUYfer-
nement. » Les représentants de la Castille ne ces-
sèrent pas pour cela d'élever leurs voix patrio-
tique contre les ordonnances illégales , mais ces
remontrances faites dans les termes les plus res-
pectu.ciix furent peut-être en ce pays les deraiers
accens de la liberté mourante ^^.
En Allemagne, quoique plus lentjement peut-
étre, la mémo marche des choses avait lieu, et la
çonditiojp politique des nations subissait des trans-
formations analogues. D'abord l'empire de Char-
lemagne, fractionné par les princes yassaux, avait
dpn.né naissance à une multitude de s0uv.er9inet.es
dont l'indépepdance semblait résider dans la par-
nianence de leurs querelles. Ces quejrcljles se vi-
daient toujours par le mojep des afugiies et ^y^
toute l'atrocité des temps ^ la trahispqi et lassas-
§îpat étaient le fruit et la fin des pjL^goci;9ljioo$ les
mieux conduites. La couropne impériale n fitait
plus qu'un Q091 , et S9 médiation j ijjb^soirjç. Les
papes avaient profité de la faiblesse d^ suicces-
mUY^ immédiats de Charl.eni^gne^, pour sarroger
sur l'empîrç upe juridiction nncQxe plus ^b;w|p9
que sur )e reste du monde prosterné à lieyrs pfei}^,
Les factions des Guelfes et des Gîbelîijs ay^i/epl;
je^s^ngl^pté à la fois rAllemagne et llt^lie, trois
siècles d^^i'^nt. Les formes seules de ]^ subordip^r
tion féodale, dit Robertson, conservaient ^u%
débris de l^mpire une apparence de liaispn et
de dépendance respective. Les peuples g.éip?^-
saient $ous les maux inséparables d'un tel ordre
de ch.QS/es. L'oppression, les rapines, les putr^gcs,
tpuf le cortège inévitable des guerres pa^tipiir
lières, pesaient sur la Germanie, I^ con^ipierçe
et rjndustrie étaient paralysp's. L'excès des pai-
$ère^ publiques provoqua e^fin quelques ffinjL^-^
livcs d'juj]ii/>u de Ij^ part des co^u^nuneç ROfl^fi l^
jjobji'sse. Le3 cercles /et leurs juridictijopâ prpvinir
cibles fwr.ept créés; mais les désordres et les mal-
Leurs publics n'eurent véritablement un ternje
.et pn fr^in que sous Maximilien V'^ qui foff.d?
définit iyempnt J^ prépondérance de s^ iqtai/sp^
et l'exercice régulier de Ta.utorité /cepjtr^le*
Cliarles VII avait, le premier en France, créé
pour le maintien de l'ordre une milice perma-
nente; jie prjemier aussi, Maxii^jlie^ , dan$ ^i^
étals héréditaires, atteint le ipeme but par Ip
même /cnoye^i. Louis XI avait établi ^a FrajpÀip
Si poste ai^x lettres, Maximilien l'int^odifit qa AJ-
— «0 —
lemagnej partout les mêmes progi*ès de lu civi-
lisation sont pareillement exploités au profit du
pouvoir central ^'.
En Italie, si la royauté ne s'établit pas, la tur-
bulente deHioci^atie s'etciiit devant Tunité. Le
pouvoir tombe entre les mains d'une famille
riche, puissante, ou considérée. Dans le Nord, le
duché de Milan absorbe les républiques Lom-
bardes; Florence, si iinlente à défendre ses pri-
vilèges, n^en tombe pas moins sous la domination
des Médicis, Gènes devient sujet des Milanais,
Naples, d'un souverain étranger ^*...
Les autres Etats de l'Europe n'apparaissent en-
core que sur un plan fort reculé, et nous ne les
amènerons pas sur la scène du monde politique
avant qu'ils y aient conquis un rang ^^ ; il nous
suffisait de constater ce fait que les nations et les
gouvernements de ces deux siècles tendaient au
même but : la centralisation, l'unité. Les libertés
traditionnelles périssent, des pouvoirs nouveaux
s'c^^vent plus concentrés, plus réguliers, plus
forts.
Le cadre que nous nous sommes imposé , et
la route toujours plus pleine et plus pressante
que nous avons encore à parcourir, nous inter-
disent des détails que nous eussions aimé à donner
à nos lecteurs. Nous avons essayé d'y suppléer
— aai —
en iodiquantlessources auxquelles peuvent puiser
ceux d'entre eux quî, après avoîr vu ce tableau
succinct, voudront en étudier les diverses par*
ties. Gela dit, nous ne pouvons mieux terminer
ces données sur l'état politique et social de l'Eu-
rope, que par les belles paroles tombées, en 1828,
de la chaire de M, Guizot : « C'est au XV® siècle
que les relations des gouvernements entre eux ont
commencé à devenir fréquentes, régulières, per-
manentes. Alors , se sont formées pour la pre-
mière fois, ces grandes combinaisons d'alliance,
soit pour la paix, soit pour la guerre, qui ont
produit plus tard le système de l'équilibre ; la
diplomatie date, en Europe, du XV^ siècle... Le
nouvel ordre de faits a été très-favorable au dé-
veloppement delà royauté! D'une part^ il est de
la nature des relations extérieures des états de
ne pouvoir être conduites que par une seule per-
sonne ou un petit nombre de personnes, et d'exiger
un certain secret; de l'autre, les peuples étaient
si imprévoyants, que les conséquences d^une com-
binaison de ce genre leur échappaient j ce n'était,
pas pour eux un intérêt direct, intérieur; ils s'en
inquiétaient peu^ et laissaient de tels événements
à la discrétion du pouvoir central. Ainsi, la di-
plomatie en naissant tomba dans la main des
rois; et l'idée qu'elle leur appartenait exclusive-
— î« —
metity que leur pajs, même libre, même ayant lé
droit de voter ses impôts, et d'intervenir dans
Ses affaires, n'ëtait point appelé à se mêler de
Celles dà dehors ; cette idée, dis-je, s'établit dans
tous les esprits en Europe comme un principe
convenu^ une maxime de droit commun. •• Scms
quel(}ue point de vue que se présente à nous Thi^
ioil*ë de rËiu*ope, à cette époque, soit que liOi
regards se portent sur Fétat intérieur du pays^ Ob
sur les relations des pays entre eux, soit que nous
côrïsidérions Tadministration de la guerre, de la
justice, des impôts, partout nous trouvons le
ihéme caractère ; partout nous voyons la même
tendance à la centralisation^ à Tunité, à la for-
mation et à la prépondérance des intérêts géné-
raux, des pouvoirs publics. C'est là le travail caché
du XV^ siècle, travail qui n'amène encore aucun
résultat très-apparent, aucune révolution, pfo-
prekttent dite, dans la société, mais qui les pré-
pare toutes 20. , . »
Le ÎVI« siècle, nous Pavons dit, acheva Tosavre
du XV® : tout occupé de ses affaires religieuses,
et bien que contrarié par les idées d'examéû et de
liberté qui découlaient de la réforme, il trouva
un travail commun, le suivit et Paméliora. La
ceiitràlisation , l'autorité, qui en étaient la base
et la conséquence, parvinrent à Papogée de là
-£28-
puissaace avec le XYII° siècle et Loui» XIV} une
rëactiou contraire les mina et les renversa au
XVIIP.
Napoléon, par une autre réaction pli|s violente,
et plus prompte, les re'tablit pour un temps li-
mité, et de toutes ces oscillations est née une li-
berté sage, réglée, plus mesurée et plus solide-
ment assise : celle dont nous jouissons aujour-
d'hui.
— 1««^ —
>.%^^%<»^f»l%^^^ %%*^<^»<
CHAPITRE NEUVIEME.
A mesure que la civilisation avance et que tout
tend vers Tunité , les divisions doivent nécessai-
rement s'effacer. Quelque désir que nous aj^ons
de conserver un pian unifonne, cela devient im-
possible : comment en effet peindre les mœurs de
château , les mœurs féodales quand il n'j a plus
de féodalité , les mœurs chevaleresques quand il
n'y a plus de chevaliers , les mœurs de la corn*
mune quand la commune n'est plus qu'une do
mille parties toutes semblables de TEtat , sans c»-j
ractère spécial? Que faire alors? Prendre au ha-
sard, sans ordre, ni plan , tous les traits carac-;
téristiques de. l'époque que nous voulons peindre»
les présenter naïvement tels que nous lestrouyoni^
sans divisions , sans compartiments arrêtés à Fi
vance. Peu de mots suffiront pour tirer de ce
bleau les enseignements qu'il contiendra. Jel
d'abord un coup d'œil sur les mœurs privées,
la famille et sesdi verses phases comme sur les li(
— «t5 —
tii la rattachent à la grande association , & la pa-^
rie ; nous essaierons ensuite de présenter les dif^i-
Srences qui existent de peuple à peuple dans la
»atrie commune dont nous retraçons THistoire;
Le Christianisme, on le sait, a changé con^
^lètement le point de rue du mariage ; de là là
iëvëritë pour le concubinage des clere^ et même
les laïques ; mais à k sainteté du mariage ohré'*
tien et à son caractère inviolable étaient mêlés les
Qiages que les mœurs de Fépoque amenaient et
changeaient souvent. On est déjà accoutumé par
k récit des mœurs féodales à ces détails plus que
singuliers; nous les retrouverons non moins ex*
travagants au XV^ et même au XV P siècle; la
raison humaine marche lentement ; et ce n'est
qu-après des tâtonnements sans fin , des essais de
tout genre , que nous sommes parvenus à cett^
simplicité digne qui nous est maintenant si natu-
relle , que nous rions , ^ans pouvoir y croire, aux
naïves folies de nos pères. C'est en Allemagne
surtout que se trouvent les usages les plus singu<^
liers : nous y voyons Martin Luther, le grand
informateur lui*méme , assistant à la noce d'une
jeune fille ^ conduisant la mariée , et enlevant à
l*époux un soulier qu'il place sur le ciel du lit ,
V. 15
afin de lui donner ainii la supreioatie ol le gofir
veruenent de k SGiaUoii ^
Le mariage était regardé cQuioie conaonmé
lorsque la couvartiuc avait été étendue piur )|^
deux époux ; les parents et les amis jetaient alcHrs
leui*s cadeaux sur le lit ; le matin on servait au
nouveau AMMi^le un meta ^u'il mai^i^i d^pioîçîé.
Chez Les riches , c'4taijt ^ne poule r^tiiQy ffâ^'w^
appelait; poul^ de^ ttoces, Q^é^ii epiçpfe au jlij^
qu'ik payf^^iit les d^Um ^ mwiage ; ^W?'»
comme ie mrévQuhU b^'nistr^M Ut dostH^mg^
riet^ Les diz variez,^, dirent que le lit t^ Jiém^
jab&mistj se Us n^ avaient de$ difi mmiez deu^,
fmsncs d'or pouvles orilUera.... les varies^ 4fi^4ii
•hammel , à {fui ht droit des orUUeffS 0fpafft§uitût^
. A en croire Baluse ^ le mari qui batt#Â%.||l
£emme sans ,exces y ne vîc^it fias la. paÂx. dii« tté^
tnagé^ et l'on bafouait oeluÀ.qui se laisÀailtjp^li^
•par «sa moitié) les :maris xjuise laissent b&tbMi
pflir leurs femmes» dit la «outuipe de Senlid^iMp
ixmtamtrains et ca^dempne^ à ch^ifaUGhifir. itm
rosne, le visaige par deiêers la.qwîuedit'ditm$Mk
hèShùïûxxmes deSakâto^ge^deDrou^yet daphir
jsisnRs autres villas âoM €K)Q£orine9 en cela àioaUii
tdeSenlis; etlecapoirail-on? quelques petites mSÙm
.des Gévennes cQnsei*vent encore cet usaga^ an
JiJEX* siècle!...
^ Allemagne^ les femmes eaceintes pouvaient,
pour satisfaire leur envie^ preadre à leur volonté
des fruits , des légumes, et jusqu'à dçs vQlailles ^
sans être passibles crauc^ne peine. Bien plus , le
scheff est cFavis que les gens de Schonaw doivent
entretenir un verger , afin que , si une femme vient
à passer y elle puisse contenter son envie, e^ quHl
n^y ait dommage plus grave...
En France 9 les niariages des veuves pu noces
réchauffées *, devaient avoir Ueu la nuit. Le ma-'
riage de la reine Ëléonor avec François P^, le roi
lui-même! fut célébré un^ heure devant le jour K
Jusqu'au rt^ne de Henri III en France , on
coucha nu à nue , ce qui donna lieu au provei*be
où^ en voulant parler d'une promesse difficile à
tenir, on disait : elle ressemble à celle d'une ma-
riée qui voudrait entrer au lit en chemise ^.
Les promesses de la mariée , cbez les pauvres
cultivateurs de France au XV ^ siècle, avaient
qu^kpie diQse de touchant : Je te prends . disait*
elle 9 à espoux et mari , et te promets que je te
porterai §oj et loyauté de mon corps et de mes
biaos, et cy te garderai sai;^ et malade en quel-
qu'estat qu'il plaise à Dieu, que tu sois ne pour
]^e ne pour meilleur , je ne te changerai }us(pi^à
là mort ^.
La foniie la plus dure , la plus oppressive et la
15.
— 2Î8 —
plus choquante du mariage dans les temps de féo-
dalité, citait la marquette (cazzagia); mais rien
n'indique que ce droit honteux ait jamais étë pajë
en nature. Il se rachetait dans le nord de l'Eu*
rope ; en Ecosse , on donnait un certain nombre
de vaches; on payait encore à Ulva, après le
XVr siècle , la mercheta mulierum *.
En France , les ecclésiastiques eux-mêmes per-
cevaient quelquefois ce droit bizarre en qualité de
seigneurs , et il existe un arrêt du 19 mars 1&09
qui défend à l'évéque d'Amiens d'exiger une in-
demnité des personnes nouvellement mariées ?.
Ce droit aboli , il en resta long-temps encore
un autre beaucoup plus tolérable : c'est celui qui
enjoint aux nouveaux époux « de convier lesser-
jenns du seigneur au mets de mariage, lequel dit
mets doit être composé d'un membre de mouton,
deux poulets , quatre quartes de vin valant quatre
pintes, quatre pains, quatre chandelles et dn sel,
et cela 1^ jour des espousailles en peine de 60 sois
parisis d'amende.
Le prêtre ou chapelain^ après la célébration^
aura aussi ses plats, et les exigera si besoin est
publiquement, sous peine d'excommunication •••
On rencontre encore une redevance à peu près
pareille en 1615.
Un droit plus beau, plus humain du moins,
— 220 —
s^il n'est pas plus fondé sur la raison , c^est celui
qu'a eu, jusqu'au XVF siècle, en France, une
jeune fille de sauver un criminel en Tépousant :
on lit dans le journal dW bourgeois de Paris,
écrit en 1429 : « Au moment où Pan allait exe--
cuterwi très bel jeune fils , dUens^iron i^ingt-quatre
ans^ qui aurait fait des pilleries autour de
Paris , une jeune fille , ne'e des Halles , le pint
hardiem^nt denuinder; et tant fit par son bon
fourchas , qu^il fut remené au C/uistellet, et
depuis furent espousez ensemble. »
Un édit de Henri II défendait aux Français de
donner , en mariage , une dot de plus de dix
mille livres tournois et condamnait les contreve-
nants à une forte amende. Il était aussi défendu
aux financiers de donner à leurs filles plus du
dixième de leurs biens. L'amour de la réforme
dégénérait en minutieà cette époque : L'Hôpital,
après avoir réglé tous les détails de rhabillement
des Français par l'édit de janvier 1563 , descendit
à ceux des repas : il régla gravement le nombre
de plats qui pouvaient couvi'ir la table. « Qu'en
quelques noces ^ dit-il, banquets, festins, ou
tables privées^ que ce soit n'y ait plus de trois
services^ à savoir : les entrées de table, puis la
chair ou poisson et finalement l'issue. » Il ne
permet que six plats à chaque service , et défend
— 250 —
de les doubler ; «c comme , par exemple > ne se
pourront servir deux chapons , deux lapins^ deux
perdrix^ mais seulement un de chaque espèce. «
It est ptds indulgent pour le rôti. « Quand aux
l^oulels et pigeonneaux se pourront ser vif josqu^à
trois; allouettes, une douxaine^ grires, bëcassines
et autres tels oiseaux, jusqu'à quatre, et ainsi
d'espèces semblables selon la diversité des pays
à qui nous chargeons nos juges de pourvoir plus
particulièrement. » Cette effrayante sobriëlë ne
pouvait qu'irriter rt indisposer les grands sd-
gnenrs de la cour de Catherine. Mais Phomme
d'e'tnt tenait peu de compte des plaintes des cour-
tisans, do plus, il défendait de hanter les ca-
barets, et sa vîgihuice infatigable ne s'arrêtait
point à ces réformes, elle s'occupait même du
prix des comestibles j la main qui avait rëdîgé
tant d*édits profonds signait des ordonnances
pour la vente de la volaille. Imitant, en cela ,
Texemple de Charlemagne, il ne croyait pas in-
digne de lui de diminuer la misère du pauvre en
prévenant la cherté des objets de première né-
cessité. 5
Les répressions , dont nous venons de parler,
touchaient peu les habitudes bourgeoises des pro-
vinces; voici le menu d'un repas de ce genre en
Champagne au XVl^ siècle :
- «51 ^
« Tous les jours le pot bouillant est placil au
milieu de la table. 11 ent rclev({ par un grand plat
de mouton, de veau et de lard. A la fin du repas
on porte avec le fruit une tarte , un gftteaa , et
c'est tout. Avec cela du vin rouge ou bbmc dans
des verres dont le fond est garni de pimpre-
nelle.*» »
On se moquait encore , à C6tte (époque » du
ridicule usage de manger avec une fourchette.
Cette fantaisie nouvelle, de ne plus se servir des
doigts y avait bien pu gagner Paris, disait-'On,
mais a coup sAr, elle ne gagnera pas les cam-
pagnes ^•. Apri^H le repas, la prière, qui se re-
nouvelle au nionient où l'on se s($pnre pour se
coucher, et 5 laquelle on Joint l'oraison du vo^^a-
geur s'il y eu a quel([u*un de pressent ^'.
Dans les maisons plus riches, et qui tenaient
le milieu entre la petite bourgeoisie et la haute
noblesse, il y avait moins de respect pour les
prières, et plus d'attention au menu des repas,
avant les(|uels on avait soin de mener les convies
au bain ^s.
Ce que nous venons de dire se retrouvait
pour les mœurs gcînc'rales, en France surtout,
f^tis on approchait de ta cour et du souverain,
— 252 —
plus on trouvait de dissolution. La classe
moyenne était plus morale , et celle du peuple
rëlait plus encore» ce qui n'existe pas aujour-
d'hui : la corruption s'est peu à peu infiltrée
dans les basses classes^ la classe éleyëe a senti le
besoin de moraliser en éclairant , et c'est main-
tenant^ d'en bas^ que vient la résistance.
La cour de Catherine et de ses deux fils était
hideuse de corruption et de cruauté, ce qui ne
Tempéchait pas d'être la plus élégante^ la plus
galante des cours de l'Europe : le poison était un
auxiliaire de Tamour ; le fer accompagnait , pro-
tégeait la débauche qui ne connaissait plus de
sexe, et le plus souvent c'était dans les maisons
royales que se commettaient les attentats les plus
exéci'ables. Avec cela , cette brillante jeunesse de
Catherine croyait à la sorcellerie^ se pressait au
sermon dont elle ne prenait que l'exagération
superstitieuse;» laissant aux pauvres d'esprits la
bonne et douce piété , et ses lectures se portaient
sur les romans dont Ainadis des Gaules était
devenu le plus j^arfait modèle. Aussi le brave
Lanoue , que ses mœurs guerrières tenaient plus
long-temps éloigné de la cour, disait-il : <c Les
livres ne sont que vilaines peintures, et si quel«
au^un cependant les voulait blâmer, on lui cra-
^*^waît au visage, et connais telles personnes, qui,
après avoir appris à amadiser de paroles , l'eau
leur venait à la bouche, tant elles désiraient
tâter un petit morceau des friandises qui j sont
narrées. »
La galanterie était inséparable des duels , et
les duels avaient graduellement amené l'assassinat
qui était devenu chose commune. Villequier
donna Tun des premiers exemples des meurtres
domestiques si communs depuis lors : il égorgea
sa femme enceinte, sur un soupçon; il Tégorgea
dans le Palais du Koi, presque sous ses yeux, et
le roi pardonna. Cet exemple encourageant fut
suivi. Le moindre soupçon qui, avec de pareilles
mœurs , devait nécessairement être fondé , était
puni de mort. Le vendredi^ disait-on , était le
jour le plus propice à la préparation des breu-
vages empoisonnés sur lesquels des médecins
étaient appelés à donner leur avis I... Et ce
peuple cruel était timide : une comète répandait
Tépouvante dans les cœurs qui ne craignaient pas
de diriger les fils de la Saint-Barthélémy, et
d'ordonner le massacre des hérétiques; Nostra-
damus et Cosme Ruggieri étaient tout-puissants
dans une cour où tous tremblaient : c'est qu'ils
commandaient aux autres et y lisaient l'avenir^^. ..
Le souverain pontife , justement îjffligé de cet
état de choses , refusa à la mort d'Henri III de
rendre à sa mëmoire les honneurs dus aux rois ,
et la cour de France se vengea de Tëdit par un
arrêta quî défend de porter le deuil des papes.
Cependant, hâtons-nous de le dire, cet ëtàt de
chose était accidentel et du surtout à Gathertoe.
Le règne d'Henri IV en fît disparaître non pas
toute rîmmoralite' , elle était trop forte et trop
enracinée pour cesser ainsi tout-à-coup et com-
plètement , mais le bon roi fît tout ce qu*il était
humainement possible de faire, et la France, un
moment égarée par ses souverains , revint avec
bonheur à celte douceur de mœurs qui lui est na-
turelle. Avec Paslucieuse et cruelle Italienne dis-
parurent la débauche, l'astuce et la cruauté. La
loyale franchise du béarnais ramena la galanterie
chevaleresque, et chassa le hideux cortège des fa-
natiques et des mignons.
Mais revenons aux règnes de ses trois indignes
prédécesseurs, puisque nous sommes condamnés a
en retracer Thistoire, et replaçons-nous dans cette
cour dissolue dont nous n'avons pas esquissé
toutes les faces.
La féodalité^ en mourant^ avait laissé à la no-
blesse un nombre immense de privilèges qui
maintenant nous paraîtraient exorbitants et veica-
toires et qui alors, par une comparaison toute ré-
cente, étaient considérés comme un bienfait.
— 855 —
Ainsi , le noble seul portait Vépée et le véte^
ment rouge ^ il marchait après le clergé et avant
la bourgeoisie dans les solennités; il ne payait pas
les tailles, ne payait pas les passages de bacs, était
etempt du guet et des factions aux remparts; il
franchissait un degré ou deux de juridiction dans
les procès ; enfin, il ne pouvait être emprisonné
pour dettes^ et en cas de crime capital, était
exempt de Tignôminie du gibet '^.
Mais si le noble comparé au bourgeois était un
être honoré, grand et heureux^ sa position était
bien infime auprès des Princes du Sang royal de-
puis la chute dé la féodalité. Ainsi c'était un gentil-
homme qui servait le souverain à table, c'était un
noble qui tous les soirs battait le lit du prince pour
s'assurerquepersonnen'yéiait cachée «b. à tel point,
dit un historien du XV» siècle, que sur sept cents
officiers nobles du roi, delà reine ou du Dauphin,
il n'en est aucun qui n'eût pu vous dire d'un air
lassé : vous plairait-il de prendre ma charge, pré-
sentez vos épaules ^®. Tout à la cour était obliga-
tion, et la préséance, et la place à table, et la
conversation , et le deuil... «c II n'y a pas long*
temps, raconte dans ses mémoires la vicomtesse
de Furnes, que j'allai voir la veuve du vicomte qui
venait de mourir ; je la trouvai dans sa chtfmbre
tendue de noir, couchée dans un lit blanc. Elle
— «50 —
y duit depuis quatre semaines et me dit qu^ellc ne
se Icvcrait que dans deux. » La douleur officielle
triait, on le voit, fort bien observée, à défaut de
vraie douleur "!
Jetons maintenant un dernier coup-dœii sur
la cour. Suivons-là dans ses excursions autour de
la capitale : aussilol qu'elle arrive dans une ville
de r&idence roj^ale, les locataires des plus belles
maisons sont tenus de déguerpir^ les portes dési-
gnées sont marquées à la (^raie blanche, si la mai-
son est destinée aux princes ; à la craie jaune si
elle est destinée à leurs gens; et si quelqu'insolent
bourgeois a Taudace d^cftacer ce signe de la vo-
lonté royale^ il aie poing coupé. Les logements, il
est vrai, sont payés; il en coûte 3 sous par jour
aux seigneurs , et un sou pour leurs chevaux. Le
prix des vivres est fixé par le prévôt de ThôteL
Lorsque la ville est ainsi royalement habitée, les
étrangers doivent se tenir à une distance telle que
la prudence et le respect 1 exigent : quatre lieues
est le terme ordinaire. Si deux bourgeois se que-
rellent et se battent dans la ville honorée de la
présence des princes, uneordonnancede Henri III
veut qu^on les assouune. Conunent croirait-on
que François II se débarrassa des nombreux solli-
citeurs qui Tempéchaient de jouir des plaisira du
voyage : il menaça de les faire pendre, et fit dres-
ser à cet effet une potence plus ëlevëe que le clo-
cher de la paroisse 18.
En revanche , ces bons boui^eois étaient ad*
mis , non à prendre leur part des perdrix aux pattes
dorées et des omelettes sucrées de perles fines et
parfumées de musc , mais à sentir la bouche des
courtisans au sortir de la table du prince ^^. Heu-
reux bourgeois ! heureux temps , que ne sauraient
trop regretter les Français tyrannisés par la
royauté du XIX» siècle!....
Passons des plaisirs aux douleurs , et des festins
aux funérailles ; vanité d'outre-tombe, dernier
mot de l'orgueil qui s'éteint pour retrouver un
monde où toute hauteur s'abaisse , où toute puis-
sance humaine s'évanouit, où toute humble vertu
reprend sa place au-dessus du vice couronné.
Parlons d'abord des funérailles royales, et
empruntons notre récit à un chroniqueur du
XV siècle :
« L'an 1Û22, le mercredi 21 octobre ^ feste des
onze mille vierges, environ six heures du matin,
le roy Charles YI, que Dieu absoilte., trespassa,
et pourceque on ne peut promptement faire Tob-
sèque du dict roy, son corps, vuidé des entrailles
et rempli d'espices et d'herbes sentant bon , fut
mis en un coffre plombé , et gardé en la chapelle
de l'hostel Saint-Pol, jusquesau 10 denovend)re
en uiTanet , et cependant furent ehantëes messçi
et le service des trespassés solenneUement t en If
dite chapelle, cfaascun jour par les gêna d'Eglise et
Cottëge de la dite ville de Paris.
« Le duc de Bcdfort , régent du royaume 4^
France, vint à Paria le & novembre^ ela|irèa sa
yesue , on apoîsta de faire l'euterremenl et serr*
vice du roy, duquel le corpa estoit en la chapella
de son hostel lez Saint*Pol , et fut son ohsèqae
moult noble , voir est que grans aUercationa i
moult de diverses opinions de la manière coiuDMiit
elle serait fiiite; car en ce temps y avoit pen de
gens i qui souvenoit comment on av<Nbt accoutume
de faire au temps passé porter les roys de Franee
en sépulture ^ et en quel ordre les gens y dev^eqt
aller chascun son estât.
« Premièrement^ une litière (ut tahe à limeps
devant et derrière , et les dits limons furent fouraf
et couvers de cuir ou de drap noir y pour moiey
Uecey ceulx qui porteroient le corps , car le eoffire
où le corps estoit bouté avec le plomb et aultree
cbeses qui y.estoient dedans, peaoient bien qne-^
torze cents. En icelle litière fut mis le eoffire et
tout le corps du roy ^ et sur le dit cofire on mit nae
coesteet un-cocssin^ et deux draps de Un^ linceuDC^
beaox et déliez^ et par dessus, en manière de-
converture, un grand poêle de di^ap d'or sur Aa^^p
vermeil, bordé autour d'au bord de veluyau MXkt^
courone de fleurs de Ijra d'or et de brodure^
esloU le dit bord large d^enviroa demi-pied y et la
dit poele e;>toit si large , que de cbascun coatë il
traignoit à terre ou bien pi*às^ et si estoit la dite
litière luiulc de la hauteur d'oo homme , on ne
vojoit pas le cofire^ car il estoit mui^s^ $ou8 W
coest^ et le dit poele ; mais sur toutes ces choses fut
m^e rim^ige du rojr> la plus propre qu'on la pou-
voit faire à la ressemblance du dit roy , yestu de
cot^e royale , et par dessus un mantel demi le drap
du poele 9 et estoit le mantel fourre d*heriniue ou
dis loutre ^ les chausses avaient été semellées dW
drap de soje azur> tissu ù tleur de lys^ en les mains.
avoit d^s gjindâ blancs , et sur aa tète avoik une
couronne » et Fune de ses mains tenait un ceptre ,
et eu Tautre maie une verge comme celle qui fut
envoyée du cid, car au bout avoit eu aernblanee
une main qui seignits ou benist et eatuient ka
dites couronne , ceptre et verge > tout d'une ma-*-
oière en façon d argent doré.
« Maistres d'hoste), eschansons, pannetters^
traeeliiers ^ varleta de chambre ^ fouriers , varlels
lie porte I et tpus les officiers de l'hostcl du roy^
furent vostu» de brunette; les eschansona, pan-
netiers et varleta de chambre y portoient okascun
vine tordie pesant quatre livres , et sur leur poi-
— tw —
trine et espanles avoient escussons aux armes de
France , estoient bien deux cents portant lesdites
torches. Le corps et la litière furent portés par les
yarlets de porte, car c^est leur droit; et estoient
bien cinquante aux limons de la dite litière , qui
estoient tous las de la porter, et bien souvent leur
convenoit reposer et mettre la litière sur deux
grands tréteaux propices qu^on portoit après ; ainsi
fut portd le corps à Nostre-Dame , à heure de
vespres.
« Uordre des gens fut tel : les ordres mendians^
c'est h savoir Jacobins, Gordeliers , Carmélites et
Augustins ù belle procession furent premiers; les
Collèges , si comme Sainte-Catherine-de- Vaulx f
des escoIiers,lesMathurins, les Billettes , Sainte-
Croix^ et leurs semblables après, les Paroisses,
les Eglises collégiaux^ si comme Saint-Benoist-le-
bien-tourné, Saint-Mery , le Sépulcre , Saint-Gcr-
main-FAuxerrois, et leurs semblables après; les
collèges de Notre-Dame et de la Sainte-Chapelle
du palais après, et toutes les dites gens d'église
deux à deux , alloient d'un descostés de la rue, et
les escoliers et supports de TUniversité de Paris
alloient de Tautre costé de la rue , après les dites
processions , alloient neuf prélats , que évesques,
que abbés , revestus de cbappes noires et mittres
blanches, entre lesquels estoit le patriarche de
— 2ÏM —
Constantinople^ lors administrateur de l'ëveschë
de Paris , lequel fit l'office ; le prevost de Paris
alloit entre les prëlats et le corps , devant la li-
tière , une verge en sa main ; les chambellans du
roy , varlets tranchants , et escuyers d'escuiries ,
et les maistres-d'hostel ailoient entre le prevost et
la litière, les quatre présidens du parlement,
vestus de leurs manteaux vermeils fourrés de vair,
tenoient les quatre cornets du poêle , et les sei-
gneurs et les greffiës du Parlement entour la li-
tière de costë et d'autres , et tenoient ce que pen-
doit du poêle , car c'est leur droit que ils qui en
parlement repre'sentent la personne du roy, et
qui gouvernent la justice souveraine du royaume,
soyent au plus près du corps du roy ; les huissiers
de parlement , tenant leurs verges , estoient aux
quatre cornets de la litière, emprès les présidens
pour garder que nuls gens ne se boutassent entre
eux, et le premier huissier avoit son bonnet
fourré en teste , aussi les présidens et seigneurs et
greffiers du Parlement avoientvestu leurs chape-
rons fourrés , ainsi comme ils les ont en la cour
du dit Parlement.
« Le prevost des marchands et eschevins de la
ville portoîentun ciel haut à huitbastons, tel que
l'on a accoustumé de porter sur le corpus Domini,
té jour de la Feste-Dieu aux processions, lequel
V. 16
ciel estoit grand et large et bien hault, et A eataiit
de même drap du poêle, et quand let dits pra«-
vost et eschevins estoient las de pcHrter le dit ciel|
qui estoit bien pesant, on mettoit en leur liea no-
tables bourgeois qui le portoient jusque oe quU
estoient las.
« Le duc de Bedfort, régent le rojaume dé
France, le chancelier de France , les maistres des
requêtes et autres conseillers et ofliders du roj^
alloient derrière la litière , et après le peuple en
grand nombre , et allant par les rues ^ gens
aux buis et fenestres, et sur les estaulz, qui
ploroient et menoient grand deuil , et non sans
cause j car grand désolation fut , et ne sçayoient si
de long-temps auroient roy en France.
« Ainsi fut porté le corps du bon roj à Nostre-
Dame, et fut mis au cœur de l'Eglise à tout la
litière sous la chapelle qui noblement fut foite et
allumées , car chascun cornet de la dite chapelk
ayoit un gros cierge tout rond pesant yingtrcinq
livres de cire et sur la dite chapelle tant qaU y
pouvoit de cierges de deux livres , tout autour ds
TEglise par bas ayoit torches de quatre livres à
deux rangs, et par le haut du chœur et lont
autour de TEglise par en haut dessous les voultes
et par tout les pilliers du lieu ayoit cierges bieii
drus iVune )iife. Toute Féglise à Pentour fut
vironnëe ou enceinte d'un parement de toile perse-
eemé de fleur de Ijs; furent parés tous les pilliers
de la dite Eglise par le haut de tant que la dite
toile estoit large. On arriva à la dite Eglise
Nostre-Dame. Ainsi comme après les vespres et
chanta les vigilles des morls notablement et à trait,
auxquelles furent les neuf prélats devant dits.
Léandemain qui fut mardi dixième jour de no-
vembre, environ huit heures au matin, en la dite
Eglise et en Tordre et manière devant dite, furent
faites les recommandances et après fut chantée
la messe des morts et nul n'alla à Toffrande si
non le duc de Bedford. Après la messe chantée
chascun alla disner où il ot appareillé, et environ
douze heures on se reassembla en la dite Eglise de
Nostre-Dame pour aller à Saint-Denis et fut porté
le corps par les gens et en l'ordre du jour précé-
dent , et quant on fut hors la porte Saint-Denis
qu'on dit la Bastille, les varlets de porte du roy
qui jusques là a voient porté le corps le laissèrent
et les hannoùars porteurs de sel le portèrent. La
litière fut mise au chœur de TEglise sous la cha-
pelle qui y fut faite semblable à celle de Nostre-
Dame de Paris, et peut-être qu'elle n'estoit pas si
large : mais le luminaire fut pareil et le parement
de la toile perse peinte à fleurs de lys autour du
moustier et autour de chascun pillier: ce soir
16.
furent chaulés vîgilles à neuf ])saulmes par les
religieux de céans : certes collèges et autres gens
d'Eglise de Paris s'en retournèrent quant le corps
fat livré aux dits religieux, et le landemain qui fut
mercredi feste de Saint-Martin , la messe de re-
quiem fut chantée à grand solemnité.
Quant la messe fut chantée le corps fut porté
enterrer en la chapelle emprès le degré devers la
bonne main, ou furent enterrés ses père et mère,
et fut porté le corps du chœur jusques à la sépul-
ture par les vai'lets de porte du roy qui par ayant
Fa voient porté,
A l'entrée y ot grand débat entre les religieux
d'une part et aucuns officiers de l'hostel du roy,
ne sçoit si cstoient sergens d'armes ou fourriers
ou varlets de porte et estoit pour le poêle et aul-
très habillements estant entour le corps du roy
que chascune des dites parties disoit à lui appar-
tenir et que tels estoient leurs droits, et tirèrent
l'un de ça, l'autre de la, et à peine qu'ils neyien-
drent à voye de fait, mais le régent fit mettre le
débat en main de justice et fut le corps enterré.
Après l'enterrement et illec mcsme avant que
auscun se repartis , un crieur de corps cria à
liaulte voix , priez pour l'ame de très excellent
prince Charles VI, roy de France.
Ces chosesainsi faictes, le disnéfut appareillé en
l'abbaye à tous venans, le duc de Bedfort dîsna en
chambre , la grande salle fut toute pleine de
tables et de gens.
Tandis qu'on faîsoit le service on fit une
donnée de six doubles dont les cinq valoîent huit
deniers parisis à tous ceuxquiy voudroîent venir,
et là reçurent plus de cinq mille personnes, Dieu
lui présente à Tâme.
Voilà le récit d'un fait, en 1422; voici main-
tenant le règlement tel que le donne un auteur
de l'époque écrivant un demi-siècle après: c^est
la fourme et la manière après le trespas du
rqy y comment il se doit porter en litière pour
porter au lieu où il a élu sa sépulture : première-'
ment, comment avoir une litière portée par
certains officiers royaux^ et doit estre en la dite
litière, une fourme ou forme en semblance de
roy couché en lit ^ en grands draps , la forme
toute vestue en forme de homme comme roy^
c^est à sçavoir vestu d'un pourpoint, tunique
et dalmatique de drap d'or à fleurs de lys
fourré d hermine s, Jermé dessus Vespaule d'un
bouton de perles , tenant en sa main dextre un
grand sceptre et en la main senestre une main
de justice ai^ecques anneaux esdites mains j en sa
tête une couronne ^ les sandales ^ chausses^ sem*
— 2^ —
blables aus dits vestements , ai^ec souliers de
niesme, couvei^t ladite litière de draps dorpen-'
dant de tout coste de la dite Utière, et de dans
la dite litière vers la teste du dit rofj à deux oril^
iers de velour vermeil à quatj^e trouppes de perle
chaci/Hj au pied de la dite litière^ deux lanciers
(Vor pleins de cire ^ ardents continuellement
jusqu après la sépulture y une croix y con bénois^
tiers et deux ascensiers doj\ et pour couvrir la
dite litière, un ciel de drap âtor à quatre lances,
et après la sépulture du dit roy ^ est couverte
la place d'un drap d'azur àjleurs de Ijrs à une
croix blanche de velous.
Ajoulons à cela^ (Ftiprcs d'aiilres historiens, que
depuis la renaissance des arts on a moulé le visage
des souverains avec du plaire et reproduit son
effigie en cire; on a de plus fait accompagner
le cercueil royal de quarante musiciens jouant des
symphonies avec des instruments voilés de longs
crêpes de deuil... Le caveaude Saint-Denis a reçu
plus tard le cadavre autour duquel une voix lugu-
bre criait trois fois : le roi est mort ! Une voîx
plus sonore et plus éclatante criait ensuite yiyb
LE ROI ! Et ce cri j qui annonçait à la France le
nouveau souverain , terminait la cérémonie *>.
Chaque château , chaque manoir imitait en
petit l'exemple du roi. Une tombe , des cërë-
monies plus modestes dont le rëcit oflfrirait pen
d'intérêt étaient destines aux bourgeois et au
peuple j que la plus simple croix conduisait à la
dernière demeure. L'Eglise, dont les prières et les
câ'ëmonies ne varient pas, n'avait consenti à
s'adjoindre que des corneurs^ le faux-bourdon et
des pleureurs dont les gémissements payés faisaient
un triste contraste avec le déchant et le bruit
des cors de cuivre des ménétriers**.
Racontons maintenant quelques usages de ce
monde du XY^ siècle qui nous apparaît sous une
forme si grotesque comparée à celle de notre
siècle poli , civilisé.
C'était au moyen âge et jusqu'au XV* siècle
encore une affaire importante et solennelle que
de se faire saigner. Dans les maisons princières
on réunissait tous les chevaliers des environs;
quand Topération réussissait on en remerciait
Dieu et l'on passait plusieurs jours en fête. Pour
les époux et les fiancés c'était l'occasion d^un
usage touchant : le jeune homme allait chez celle
qu'il aimait lui demander du bon sang. La
fiancée baisait et bénissait la plaie^.
Il n'était pas d'usage d'embrasser les grands ,
non plus que de leur serrer cordialement la main,
comme cela se fait aujourd'hui : on les embras-
sait aux genoux^ on leur serrait respectueusement
la botte 9 les plus intimes se permettaient de
baiser un doigt ^. Devant les grandes dames on
fléchit un genou et l'on baise le bas de la robe;
entre femmes d'un certain rang les baisers étaient
de droit : une femme du monde pouvait et devait
dire à la maîtresse de maison qui ne l'eût pas
reçue avec cette marque de déférence : madame
vous devez me baiser^*.
Si dans la conversation on s'adressait à un grand
seigneur ou à un prince de l'Eglise^ on devait
rappeler monseigneur; on disait à un chevalier
ou à tout gentihomme messiœ; à un magistrat
monsieur^ maître; à un avocat ou un médecin et
même au bourreau maître j ce dernier répondait
presque toujours alors : «Dieu vous garde de mes
mains.... ))^ Aux supérieurs des communautés^ :
nos maîtres ; aux moines, dom , diminutif de do^
minus; aux religieux : révérend père ou frère, et
sœur ou mère aux religieuses *\
En France comme partout , au XV* sîède
comme au XIX^, le peuple des campagnes et la
populace des villes s'est toujours moucha sans
mouchoir, la noblesse commença la première au
XY^ siècle à se défaire de ce sale usage et de là
le proverbe... a II ne se mouche pas avec la man«
che*'. j>
Si Ton présentait une lettre, on devait la baiser
— afto —
ayant de la donner, sur l'adresse étaient les mar-
ques du respect le plus profond , ainsi c'était à
monseigneur le très-illustre éiféque; à vertueux
et excellent docteur ; à très-illustre et très-révé^
rend seigneur^ mon très-honoré maître le duc
de...^ et ainsi de suite, selon le rang du correspon-
dant^.
Par contre les jurements et blasphèmes étaient
punis avec d'autant plus de force au XVP siècle
que Tusage en était devenu très-fréquent ; une
ordonnance de 1534, renouvelée par Giiarles IX
en 1561^ fait « inhibition expresse à toutes les per-
sonnes de quelqu'état, qualité ou condition qu'elle
soit de renier , malgréer , dépiter , blasphémer et
faire autres vilains et détestables serments sur la
peine d'être condamnés pour les premières fois
en amende pécuniaire , double ou triple selon les
récidives, pour la cinquième à être mis au caveau,
sujets à toutes les vilainies que chacun voudra
leur impropérer, pour la sixième fois seront me-
nés au pilory et là auront la lèvre coupée d'un
fer chaud..,. Pour la septième fois la lèvre de
dessous et là où il adviendra que de rechef ils
commettront les dits jurements et délits , auront
la langue coupée tout juste...}^ i*
On comptait dans Paris tous les ans un grand
nombre de meurtres, bien que la police, encore
diDf Tenfaoce y ftt tous ses efforts pour les prë»
venir.
Il n*dtait permis à personne d'avoir j^us dViM
porte à sa maison , ie chef de la polioe avait le
droit de faire murer les autres ; on ne devait pas
laisser sa maison inhabitée sans y laisser un garda
de ville. Ainsi dans chaque maison sans excop»
tion il y avait un homme aux aguets et qui au
premier signal sonnait la cloché jusqu'à ce que
les cloches vobines l'eussent entendu , alors et à
l'instant toutes les fenêtres s'illuminaient, tout le
monde sortait en armes et les malfaiteurs étaient
poursuivis, environnés et arrêtes.
Le soir, point de réverbères, mais des lanternes ;
chaque citoyen était tenu d'en avoir une à la main :
ce mouvement de milliers de lanternes, dit un des
contemporains, faisait spéciale aux sombri» soi-
rées de l'hiver ^.
Gela n'empêchait pas les voleurs^ les aasasaina
et une autre classe de bandits appelés champiims
de fourmilier à Paris et de porter leurs coups
jasques sous le palais des Rois. Ils s'engageaient
en compagnies appelées compagnie des Guilleris^
des Plumets y des Grisons^ des Tires^laines ou
voleurs du peuple , des Tire-soie ou voleura de *
bon ton. Lsi compagnie des Jlfaupaia-garçona était
celle des meurtriers qui se louaient publiquement
— «54 —
au plus offrant, et puis, oomme nous Tavoiis dit>
les champions qui faisaient leur métier plus noble^*
ment en épousant la querelle des premiers venus
et la vidant les armes à la main. Joignes à cela
les turbulents écoliers de l'université et les ou*«
vriers sans travail, vous aurez le plus joli assem«
blage de population qu'ait jamais offert une société
organisée**. C'était cependant celle des XV* et
Xyi* siècles dans le pays le plus civilisé de l'Eu*
rope!...
Les punitions devaient être sévères dans ce aiè^
de de désordi^ et les supplices en harmonie avec
la licence éhonUfe des mœurs qu'on réprimait avec
plus de sauvagerie que d'efficacité. Le bourreau,
si haut pincé dopuis Louis XI, était nécessairement
l'homme le plus utile du royaume. Un gibet et
un pilori permanents, une justice et une échelle,
x>mme on disait alors ^ étaient dressés au milieu
les places^ scellés dans les pavés sans compter les
loyades juridiques : « n*est-il pas consolant , dit
m de nos plus illustres romanciers, qu'après avoir
)erdu successivement toutes les pièces de son ar<»
nure, son luxe de supplices, sa pénalité dlmagt*
lation et de fantaisie , sa torture à laquelle elle
efaisait tous les ans un lit de cuir au grand Ghâ*
elet, la peine de mort, cette vieille suzeraine de
I société féodale presque mise hors de nos lois et
de nos villes , traquée de code en code | chassëe
de place en place, n*nit plus dans notre immense
Paris qu'un coin dcslionorc de la Grève » qu^ane
misérable guillotine furlivc , inquiète , honteuse,
qui scnd)le toujours craindre d\Hre prise en fia*
grantdclil, tant elle disparail vite après avoir fait
son coup ! 3«. j)
Ces expressions ne sont pas trop fortes, et quand
on lit les histoires du temps, on est presque tenté
de les trouver en dessous de la vérité. Sans nous
appesantir outre mesure sur ce triste sujet, il est
bon do savoir en quoi consistaient alors la torture
et les supplices.
Le tourmentrnr pissait d abord une corde au-
tour des bras du patient et le suspendait au mojren
d'une poulie, tandis (|u'un poi(b de cent livres
pendait i\ ses pieds; sorti de là sans avoir rien
avoué, on lui serrait les deux jambes entre deux
planchettes et Ton enfonçait des coins de bois de
manière si rendre la douleur lente et progressive.
Le brodecpiin venait ensuite ; enfui chaque mem-
bre semblait appelé à témoigner de la force et de
la patience du malheureux (|ue Ton martj'risait
ainsi dans le but d'arracher de lui un aveu vrai
ou faux et qu'il rétractait d'ordinaire, quand la
douleur n'était pas \h pour le forcer à mentir.
Les supplices étaient diversiliés à Tinfini : l'eaU|
la terre , le feu , Pair » tous les élëments ëtaient
mis à contribution par les inventeurs. Ainsi, on
lit dans Floquet et Garpentier que les faux mon-
nayeurs étaient bouillis en chaudière ^ dans les
chartes du comté de Bigorrc , que les meutriers
étaient ensevelis vivants sous leurs victimes ; dans
l'histoire de Zurich que Ton murait les coupables
de manière à ce qu'ils ne res^is sent plus ne soleil ni
lune... on sortait ensuite les cadavres par une
ouverture pratiquée sous le seuiL
Les suicides étaient punis aussi..., on faisait
subir au cadavre un supplice analogue au genre
de mort qu'il s'était choisi, et cela dans la crainte
superstitieuse que le mort ne revùit et nerrât^^^
La liste des supplices n^en finirait plus si Ton
voulait s'y arrêter : elle variait , elle était riche
comme l'imagination des hommes, et chaque na-
tion tenait à l'honneur d'inventer les siens ; la
guillotine même était connue au XY*"' siècle et l'in-
vention tant vantée du docteur Guillotin était à
ipeitïQ xmM amélioration ; Demetrij riche génois,
auteur d'un soulèvement , estendit le col sur le
chappus. Le bourreau prini une corde à laquelle
tenait attaché un gros bloc, à tout une doulouère
trenchante^ luintée dedans^ venant d^àmont en-
tre deux poteaux y et tira la dite corde en ma^
nière que le bloc tranchant à celuy Génois tomba
ffuuc injures grarei,
« ^ hmn en pniilic''. Li
uHt f}ae le viol ,
iji prévùLi y as-
roy
était .<
tendue ,
(levait ni<.
courir tout .
— Cctle peint
■ ^^ AM» 'pp^t amûs m
^ fenkK-mùÊ cdai-
, iaiUMUoi puber ed
I loaL cil Te promenant
■a. Us fiuil Anne de
r*> Uc nMle police
■^>p«nlu piirai les ul^
.« fttttnolnji tlt mon-
.^•a |in>vrrhe.
X n ctC quclifue.
ttCtsun /uoulni
»4ftliojrvr Iiuilcenti
^p^^^teu lï l'«riDtfe*
^^ ^Hi il» ajpins T aa
■ :..„ft. vilK- «n
■ '"'lieu dit
". 'i.rbareî,
V^ttlt '' ' ->li»iHll1 <iu oi-
■iiid qui y
dnp les d6UX8enrit€uri du oonfteil de TilUi» OU k^l
n'en a pas les moyens ^ il sera emprisonné ^et Vou
enlèyera le toit de sa maison (année IdQ/j.).
Si deux femmes se querellent jusqu'à se battt*e^
en se disant en même temps des injures f elles por<
teront tout le long de la ville , et par la voie com»
mune^ deux pierres attachées par des chaînes , et'
ces pierres pèseront à elles deux un cent ; la pre«
mière les portera de la porte orientale h la porté
occidentale , pendant que Fautre la stimulera d'un
aiguillon de fer fixé à un bâton , et toutes^ deux
iront en chemise'^.
La femme adultère , d'après le droit de Soleure,
(1506)f devait déguerpir sans rien emporter de la
maison qu'une quenouille et quatre pfennigs» En
Espagne » elles étaient brûlées; à Brunswick, on
les enterrait toutes yives^ et de préférence f ea-^
tremetteuse ^ s'il y en avait une ; de plus , on en-
fonçait à ces dernières un pieu dans le sein. Les
mômes crimes, on le voit 9 étaient bien diverse-
ment punis f selon le degré de moralité des na-
tions
Le code militaire de France, au XV* siècle,
était en rapport avec les mœurs : sévère, dur, mais
peu conséquent , restant en deçà des limites de la
justice et d'une bonne discipline , ou les dé^
passant.
— 256 —
Lorsque le soldat donnait un soufflet à un ca-
marade , il devait en recevoir un autre de sa main
en présence de la compagnie assemblée. Les ré^
glemens permettaient le duel pour injures graves,
mais ils exigeaient qu'il eût lieu en public''. La
désertion était punie de mort^ ainsi que le viol,
et le vol même dans quelques cas. Les prëvôts j as<
sistés des six avocats du plus prochain si^e» pou-
vaient condamner à mort sans appel; mais an
ordre du connétable suffisait : Pendez-moi celui-
ci! tranchez-moi celui-là! faites-moi passer cet
autre par les piques ! disait tout en se promenant
ou en récitant son chapelet , le vieil Anne de
Montmorency. La mémoire de cette police ex-
péditive ne s'est pas encore perdue parmi les sol-
dats : Dieu nous garde des patenoires de num-
sieur le connétable , est passé en proverbe.
La police des colonels-généraux a été quelque-
fois bien plus terrible : Au pont de Gé^ on montre
Tendroitoùle colonel Strozzi fit noyer huit cents
filles de joie ^ restées malgré ses bans à Farméé**.
A côté des supplices étaient les asjrles : au
moyen-âge et jusqu'à Louis XII , toute ville en
France a eu ses asyles. Ils étaient ^ au milieu du
déluge de lois pénales et de juridictions baiiMires,
des espèces d'îles, qui s'élevaient au-dessus du ni-
veau de la justice humaine. Tout criminel qui y
— Î57 —
abordait ëtait sauvé. Il y avait dans une banlieue
presque autant de lieux d^asjrles que de lieux pa-
tibulaires; deux choses mauvaises^ qui tâchaient
de se corriger l'une par l'autre, mais aucune d'elles
n'abandonnait ses droits ; la roue , le gibet , l'es-
trapade , faisaient bonne garde autour des lieux de
refuge. On a vu des condamnés qui blanchissaient
ainsi dans un cloître ou sous un porche d'église.
De cette façon, l'asyle était une prison comme
une autre; il arrivait quelquefois qu'un arrêt so*
lennel violait le refuge et restituait le condamné
au bourreau , mais la choSe était rare; et à moins
d'un arrêt du Parlement, malheur à qui violait à
main armée un lieu d'asjle. On sait quelle fut la
mort de Robert de Clermont, maréchal de France ,
et de Jean de Chàlons, maréchal de Champagne,
et pourtant il ne s'agissait que d'un misérable as-
sassin de la classe du peuple , mais les deux maré-
chaux avaient brisé les portes de Saînt-Méry > là
était l'énormîté.
Les églises avaient d'ordinaire une logette pré-
parée pour recevoir les suppliants ; en lil07, Ni-
colas Flamel leur fit bâtir une chambre sous les
voûtes de Saint-Jacques-la-Boucherie ; à Notre-
Dame , c'était une cellule établie sur les combles
des bas-côtés , etc. '^.
On voyait à cette époque les vœux les plusex-
V. IT
— 258 —
travagans , accomplis avec une religieuse fidélité;
le vœu de pauvreté était le plus fréquent ; celui
qui le faisait^ abandonnait hôtel, richesses» luxt»
honneurs et toute espèce de bien-être, ponr
vivre de la vie des mendiants.
Ce n'était pas chose très- rare non plus que les
vœux de réclusion perpétuelle: « On rencontrait
souvent dans les rues les plus fréquentées de Paris
ou des provinces y une sorte de caye murée €t
grillée y au fond de laquelle priait jour et nuit on
être humain | volontairement dévoué à quelque
grande expiation, et^cet étrange spectacle^ ce
souffle , cette voix , cette prière éternelle dans une
boite de pierre , cette face a jamais tournée vers
l'autre monde^ rien de tout cela n'était aperçu par
la foule; elle honorait , sanctifiait au besoin le
sacrifice , mais n'en comprenait pas les souffrances
et s'en appitoyait médiocrement ; elle apportait
de temps en temps quelque pitance au malheu-
reux pénitent , regardait par le trou s^il viv^L.
encore y ignorait son nom , savait à peine depuis
combien d'années il avait commencé à mourtr|. et^
à rétranger qui les questionnait sur le squelettes
vivant qui pourrissait dans cette cave , les voisinstf
répondaient simplement : C'est le reclus!... cV
la recluse ^0 J,,., „
Nous avons suivi jusqu'à présent avec intérêt li
— 259 —
sort des Juifs. Ces parias de l'Europe mérileot
notre pitié, non par leur probité et la pureté de
leurs mœurs, mais par Texcès de leur misère.
Voyons quel était leur état social aux XV® et XVI*
siècles.
En France, sous Charles VI, un édit royal
statue que nul Juif ne pourra plus demeurer dans
le royaume ; que ceux qui y seront quitteront le
territoire de France dans Fespace d'un mois, et
que les officiers du roi saisiront tous leurs
biens » etc. Cet édit mit fin à Texistence légale des
Juifs en France , et ils comptent cet exil subit et
inattendu au nombre des plus rudes persécutions
qu'ils aient essuyées. La démence du roi empêcha
cependant qu'il fût exécuté à la lettre.
Dans la Provence, qui n^appartenait pas alors
à la France, les Juifs étaient moins avilis et moins
persécutés ; on lit dans une ancienne charte d'Aix,
« qu Ils payaient à l'archevêque une certaine quan-
tité de poivre , pour avoir la permission d'avoir
une synagogue au livre de la loi , une lampe per-
pétuelle et un cimetière. Cependant, les statuts
municipaux de Marseille , Arles et Aix , ne leur
permirent pas de témoigner contre un Chrétien ,
ni d'aller aux étuves et bains publics , sauf le ven-
dredi^ jour qui leur était réservé comme aux cour-
tisanes et aux esclaves* { Par contre ^ Tun d'eux
n.
— 260 —
était tenu d'aller chaque dimanche entendre le
sermon à la cathédrale, sur une escabelle à côte
du sacristain.
Les statuts d'Avignon leur défendent de toucher
le pain et les fruits exposés au marché^'.
£n Espagne, en i/ilS, il parut une ordon-
nance en vingt-quatre articles ^ qui reléguait les
Juifs dans des quartiers isolés et clos. La tolérance
qu'on leur avait quelque temps accordée , cessa :
ils ne purent plus être médecins y ni apothicaires,
ni droguistes, ni aubergistes, etc. Il leur fut dé-
fendu d'avoir des domestiques et des ouvriers
chrétiens ; on leur ôta le droit d'avoir des juges
de leur nation et de porter le don. Us durent
laisser croître leur barbe ^ sous peine de cent
coups de verges et d'une amende. Les hommes
portèrent des tabarcs sur leurs habits, et les
femmes des mantilles descendant jusqu'aux pieds;
l'or devait être banni de leur parure; enfin ^ il
leur était interdit de s'enfuir du royaume,sous peine
de servitude personnelle et confiscation des biens;
défense était faite à tous les seigneurs de les rece-
voir dans leur fuite. En i/!i96 f un édit de Mannel
ordonna un bannissement général , et y joignit
l'ordre cruel d'arracher aux parens les enfants au-
dessons de quatorze ans pour les faire baptiser.
Une foule de Juifs ^ un peu plus civilisés à cette
— 261 —
époque , et moins faits aux avanies des temps pré-
cédens, se tuèrent de désespoir*^.
En Italie , les Juifs furent menace's , au XV® siè-
cle , de plusieurs persécutions violentes. On les
accusa à plusieurs reprises, d'avoir immolé des
enfants pour leurs pâques , et on épuisa contre les
accusés tous les genres de supplices qu'eussent en
effet mérité des crimes aussi horribles. Mais les
malheureux n'étaient réellement coupables que
de grosses usures. Cependant , malgré ces injus-
tices^ les Juifs exilés d'Espagne se réfugièrent vo-
lontiers en Italie. On cile un rabbin exilé de Lis-
bonne, Joseph Ben -Don-David^ auteur de plu-
sieurs ouvrages sur le Thcdmud^ qui fut pendant
vingt-deux ans rabbin de la synagogue d'Imola, et
qui laissa trois fils, dontPun fut médecin àPadoue.
En 1559, Pie IV permit aux Juifs d'acquérir et
de posséder des biens-fonds jusqu'à la valeur de
1,500 ducats d'or^ et de les affermer à des Chré-
tiens , d'avoir des boutiques hors de la Juiverie ,
de faire le commerce de grains et comestibles, de
pratiquer tout autre métier quelconque, et de
quitter en voyage la barette jaune *^.
Bien que ces persécutions soient encore déplo-
rables , il y a cependant loin de là aux jours ter-
ribles du XIIP siècle où Von jetait péle-méle au
bûcher Juifs, lépreux, feux et fagotsl....
Nous n'entendons pas dire pour cela que les
lumières avaient fait un grand pas; les citations
que nous venons d'accumuler seraient à notre as-
sertion un éclatant démenti : le XVI* siècle «*ë-
teignîiit lentement en Europe, en France surtout,
sons laisser d'autres traces que le sang^ d*autre
expérience que celle des malheurs qu'entraînent
la nullité des rois, la corruplion des cours, les
dissensions religieuses, Tignorance et le fanatisme
du peuple. Pour donner une idée du point où en
étaient encore les lumières en France , il suflb^it
de transcrire une page de De Thou, le gi'ave his-
torien de celte époque : un gentilhomme d'Arles
reproche nu président du parlement d'Âixsatrop
grande rigueur envers les Huguenots : a Je crois^
dit-il, (]iie vous vous souvenez de ce que you^
pensiez , lorsque n'étant encore qu'avocat à Au-
tun, vous y plaidâtes la cause des rats. Vousavex
fait imprimer ce plaidoyer ; et comme je connais
votre modestie et votre candeur, vous souffires
volontiers qu'on vous rappelle le souvenir de ce
temps-là. Or, voici comment vous exposiez le fait
de votre cause : Un grand nombre de rats s'ëtant
répandus dans le territoire d'Auiun , où ils man-
geaient tous les blés, on ne trouva point de meil-
leur remède à ce mal que de les faire exconamn->
nierpar révéq[ue du lieu, ou par son grand^yioaire^
— 265 —
il fut d'avis qu'avant toute chose on fit donner
aux rats trois assignations ^ mais il ne voulut point
prononcer la sentence qu'on n'ait nomme un avo-
cat pour plaider la cause des absents. Ce fut voua
qui entreprîtes leur défense, et qui , pour remplir
YOlre ministère avec exactitude, fîtes sentir aux
juges, par d'excellentes raisons, que les rats n'a-
vaient pas été ajournes dans les formes : vous
obtîntes que les cures de chaque paroisse leur fe-
raient signifier un nouvel ajournement, puisque,
dans cette affaire , il s'agissait du salut ou de la
ruine des rats. Après cela , vous fîtes voir que le
délai qu'on leur avait donné était trop court pour
pouvoir tous comparaître au jour de l'assignation ;
d'autant plus qu'il n'y avait point de chemin où
des chats ne fussent en embuscade pour les sur-
prendre. Vous employâtes ensuite plusieurs pas-
sages de l'Écriture sainte pour défendre vos clients,
et enfin vous obtîntes qu'on leur accorderait un
plus long terme pour comparaître. Cette cause, que
vous défendîtes si bien , vous acquit la réputation
d'un vertueux et savant avocat. Or , je vous ren-
voie aujourd'hui à ce plaidoyer _, et je vous pro-
pose vos propres arguments : n'est-il pas étrange
que celui qui, dans la cause des rats, a insisté si
fortement sur Tordre et les formes de la justice ,
paraisée aujourd'hui les négliger , lorsqu'il s^aglt
de la vie et des biens de tant d'hommes **... >
Nous ajouterons à ces faits deux arrêts du par-
lement de Paris : Tun de l/i/i6, qui condamna une
truie et un homme à être brûlés ensemble comme
atteints et convaincus de pécJié morieU L'autre
de 15/^6 , qui condamne une vache et un hooune
à être pendus ^ et puis brûles , et leurs cendres je-
tées au vent pour actions criminelles. Une sentence
du juge ecclésiastique de Montpellier , datée de
1565 9 reproduit le même fait, mais la coupable
est une mule. En Suisse , à la même époque ^ un
juge (le Bule faisait brûler un coq comme sorcier
pour avoir fait un œuf!
Nous multiplions ces tableaux, et nous insistons
sur ces preuves de Fesprit du temps , non pas tant^
on le voit^ pour faire remarquer la différence qui
existe entre les lumières et les mœurs du XVI* siè-
cle et celles du siècle précédent, que pour bien
établir le point d où nous allons partir, et constater
le progrès réel qui va rapidement s'opérer dans
les siècles suivants à Taide de la boussole et de
l'imprimerie ^ ces deux grands moteurs de la civi*
lisation européenne.
Mais si nous nous sommes laissés entraîner par
rinlérêt attaché à ces divers usages , à ces détails
de mœurs en Fraqce, on sentira qu'il nous est imr
possible d^étendre à toute l'Europe cette façotn
— 265 —
d'agir; si les documents ne nous manquaient pas,
l'espace nous manquerait, et nous lasserions la pa-
tience de nos lecteurs déjà fatigues de citations.
Bornons-nous donc à dire quelques mots des deux
Etats qui sont placés aux deux bouts de la civilisa-
tion de cette époque , et entre lesquels la France
tient le milieu : Fltalie et TEmpire russe.
La belle Italie devançait alors tout le reste de
l'Europe : elle en avait la conscience ; et comme
Tancien peuple romain , elle était fière de voir les
grandes nations tributaires de ses lumières et de
son industrie. Elle leur reconnaissait bien une su-
périorité de forces matérielles, assez souvent ra-
valée par l'apparition des bandes germaniques et
de la chevalerie française , mais elle se reposait sur
la supériorité de sa politique et de sa diplomatie.
Le XV® siècle nous offre en effet un perpétuel
exemple de ce jeu savant et compliqué où se dé-
battait la question de Téquilibre de la puissance
entre cinq ou six Etats de forces à peu près égales,
jeu dans lequel Tltalie avait toujours eu le dessus,
depuis la mort de Louis XI surtout.
La richesse était un autre avantage de Tltalie,
le conunerce y prospérait comme les arts, comme
1 es lettres, et toutes ces causes réunies concourent
puissamment à la douceur, sinon à la pureté des
KQceurs. Dans aucun pajs, peut-être^ l'état des
— 5168 —
tendre la mort dans cet état. L*atrocitë de ce sup*
plice fait supposer qu'elles assassinaient souvent
leurs époux en représailles des rigoureux traite-
ments auxquelles elles étaient exposées.
Enfin la vie matérielle était encore bien dure
et bien triste.
Les Russes ne connaissaient pas ces titres héré-
ditaires de comte et de baron, qu'ils n'ont adopté
que sous Pierre P^. Ils avaient des princes et de
la haute et petite noblesse. Le titre de kniaz , oa
^ de prince ne fut long-temps accordé qu'aux des-
cendants de Rourik, leur premier souverain. Les
princes tuteurs, convertis au GhristianismCi por-
tèrent aussi ce titre.
Les armes ordinaires des Russes étaient Parc, le
javelot, la hache, la massue, le casque, la lance et
la cotte de mailles. On connaissait peu llnfànterie
avant le règne de Vassili Ivanowitch. . . Voilà
à peu près les données les plus certaines que nous
offrent les historiens qui se sont occupés de la vie
morale des peuples, et jusqu'ici ces historiens sont
rares, mais fussent-ils plus nombreux et moins
concis sur cet intéressant sujet, notre cadre nous
refuserait des détails plus longs. Nous croyons
avoir assez dit pour donner une idée générale des
mœurs de la France et des divers Etats européens ^
auxXV; et XVr siècles ^
— 269 —
CHAPITRE DIXIÈME.
Nous voîci revenus à Thistoire de rintelligence
humaine^ à la philosophie ^ aux lettres qui su-
bissent dans ces deux siècles une transformation
complète. Mais ayant d'entreprendre celte tâche,
disons un mot des établissements scientifiques, de
ces nombreux foyers d'instruction répandus dans
les divers états européens. Toutes les nations ne
marchaient pas également dans la carrière de la
science. Ce qui leur était commun c'était le be-
soin de savoir, que venaient à chaque instant ir-
riter et alimenter de nouvelles découvertes.
L'Italie, l'Ecosse, l'Allemagne, l'Espagne et la
France rivalisaient d'ardeur. Les universités déjà
nombreuses au XIV* siècle se multipliaient à
l'infini , le XV* compte vingt-trois créations im-
portantes, et le XVP au moins autant \ A
côté de ces écoles, où devait s'instruire la jeu-
nesse sortie des collèges, s'élevaient des académies
destinées à compléter l'instruction des hommes.
— 270 —
Celles de Florence^ de Padouc, de Parme, de
Venise datent de la première moitië du XVP
siècle. La bibliolhèquc du Vatican , fondée par
Nicolas V, fut agrandie sous Léon X. La biblio-
thèque .Ambroîsienne doit une partie de ses ri-
chesses au vénérable archevêque de Milan^
Saint-Charles- Borromée. La bîhliotlièque Palatine
d^Heidelberg passait pour une des plus riches de
FEurope avant la guerre de trente ans. Les
princes enrichissaient à l'en vi ces précieux dépots
des connaissances humaines...* Et telle était
rtmportance qu'on attachait à la science et à
Pamour de Tantîquité que le roi de Naples, Al-
phonse-le-Magnanime , en traitant avec Florence,
stipulait que la république lui céderait un beau
manuscrit de Tile-Lîve...
La philosophie avait la première place dans
les études sérieuses : le règne de la scolastique a
eu tk*ois périodes bien distinctes : elle jeta ses
fondements dans la première , la seconde est son
époque brillante; sa décadence et sa chute se
trouvent dans la troisième , au XV* siècle : le
champ qn^elle défricha dans son passage fut en
apparence stérile^ mais si des subtilités nom-
breuses et de creuses théories ont encombré là -
voie qu'elle se traçait, le progrès ne s^j fait pas ^
moins sentir au fond : elle avait conduit^ à f^s^
— «74 —
lents ^ il est vrai , les esprits à Tétude detf «nci^iiA 9
et f après avoir éclairé les générations de plusieurs
siècles des lumières de l'antiquité ^ elU prépâ:hsi
le retour à l'évangile 1 le vrai^ le seul fondement
de toute philosophie raisoïinablè. La «cotastiqne
avait exercé les facultés de rintelligetkce ; Tiatel^
ligence se dégageant de ses langes était revenue
au spirilualisfue , à la piété '.
Deux systèmes résument la philosophie qui lui
succéda > et deux hommes sont Texpressioii de «s
deux systèmes : Aristote et Platon. Âpres la
chute de Tempire grec ^ quelques savants étaient
venus, Aristote et Platon, à la main^ demander
un asile à Tltalie : Rome^ IVaples, FlorenOa
surtout leur avait donné une généreuse hospitalité»
et bientôt la guerre avait commencé dans les
écoles , entre les interprètes du Lycée ei ceui de
l'Académie. Cette guerre dura plus d'un siécU ,
pendant lequel la pensée de ces deux colosses de
rintelligence a souvent disparu sous les coùl-
ikientairès ^*. Les esprits positifs préféraient Técole
péripatéticienne, les rêveurs, les enthousiastes et
les novateurs du XYP siècle ^ se tournaient vers
JPlaton. Les doctrines de ces deux illustres phi-
losophes, encore rivaux ^ vingt siècles après leur
Tnorty sont assez connues pour qu'il ne soit pas
l>esoin de les rappeler ici^ celles de leurs adeptes
1
— 872 —
sont trop nombreuses , trop diverses , trop dif-
férentes pour que nous essayons de les analyser.
Quelques esprits modères et conciliateurs vou-
lurent y en vain , tenter une paix impossible , le
cardinal Bessarion y épuisa sa science ; le dissen-
timent était trop profond.
Le XW siècle s'écoula dans ces luttes de
l'esprit , confondant souvent , comme aux siècles
antérieurs , la philosophie et la théologie , et les
ruinant toutes deux, en y mêlant les passions hu-
maines.
Nous citerons parmi les plus illustres philo-
sophes de ces deux siècles, Théodore de Gaza,
Georges de Trébisonde, Gemistius Pletho^ Marcile
Ficin à qui Ton doit une version latine de Platon
et des Alexandrins y les deux comtes Jean Pic et
François Pic de la Mirandole, Nicolas de Guss,
Taurellus, J. Bruno qui renouvella lacahalle,
et périt sur le bûcher, Ramus (Pierre de la
Ramée ) victime de son fanatisme anti-aristoté-
lique ^ ; r Allemand Jean Reuchlin , Acchillini di
Bologne, Zimara et Simon Porta de Naples
Jules-César Yanîni brûlé à Toulouse comme athée -^
Capellanna, Paracelse de Einsiedeln, Jérôme
Cardan de Pavie, Pierre Pomponazzi de Padoue -«
Génésius Sépulvéda , Crémonini , André Cisalpine
d'Arezzo , précurseur de Spinosa qui représen^
tait Dieu , non comme la cause , mais comme la
jsubstance du grand tout , et qui admettait une
âme unique pour toutes les créatures animëçs K
Le premier Lorenzo Valla et le Stoïcien Juste-
Lipse se firent aussi remarquer^ car à cette ëpoque,
pour qu'un système eût quelque crédit, il fallait
qu'il se rattachât sinon à Platon et Aristote , au
moins à quelqu'autre prince de la philosophie
l^recque : jusqu'à Descartes , on n'osa pas penser
seul et a^oir un système à soi. Telezio de G)senga
et Patrizzi de Glisso, après avoir professé le
Néoplatonisme , enseignèrent une philosophie
naturelle , et expliquant la nature par des hypo-
thèses, voulurent pénétrer dans les principes
essentiels des choses. Ulric de Hutten et Erasme
de Rotterdam , célèbre parmi les plus célèbres
par son esprit satirique , contribuèrent à la ré-
forme sans vouloir adopter aucun système ^ mais
en sapant par la base tout ce qu'on avait reconnu
jusqu'alors comhie saint et sacré. Uéloge de la
folie est resté comme un modèle de scepticisme
et d'ironie qu'imita Rabelais , plus jeune que lui
de seize ans. Erasme^ disait-on après la réforme,
a pondu les œufs que Luther a fait éclore...^
Nous nous rapprochons d'une époque où lés
disputes philosophiques prennent un caractère
plus grave. Ici, nous citerons seulement Mé*
V. ' 18
lanchton j penseur sërienx et éruditi tfbl MNih
calmer enrëclairant la fougue du gtàùd têRtfiàM^
teur. Les autres appartiennent en entlm* & TM^
toire religieuse, et nous avons eu à en pUlXér^.
A côte de ces philosophes croyants et ImMiMÉMb
s'élevait un représentant de Pjrrhon et d*EpidiMiy
un sceptique , un sensualiste célèbre dont la HiHUk
croyance céda cependant au lit de mort à là
conviction religieuse, it Montaigne que néttiM>-
trouverons avec ses émules et ses amis Labdââé
et Charron , en nous occupant des lettrés mû^
{laises.
La philosophie et la théologie étaient ëiM^
péennes, à cette époque surtout; les troi^nîMA
religieuses et morales sont choses trdp sékiéttMlr'^
trop vastes ) pour être circonscrites à un pliyi,lk
changer de nation à nation suivant les méstM'W
les usages ; les lettres , au contraire , reflet êÊk
mœurs de chaque peuple, et assujetties à sa1ifi%illi
doivent être étudiées dans Je pays qu'elles ié|ltfr
sentent. La France aura naturellement la priotftl^
ne ftasions^nous pas français , elle devrait Tairdlt
encoure , car elle a été sans cesse investie dHittll
mission civilisatrice , et comme nous Tavofts iSi^à
dit^ a toujours marché la première dans la "tbie
du progrès : qu'on la prenne sous ChùrieiAhglié »
ressuscitant Tempire et constituant TAIIeiittigtlë^
— 275 —
SOUS les Arabes , s^approprîant la cîvîlisatîon et
les arts de l'Orient; sous Grégoire Vil, contri-
buant , par son ardente milice de Gluni , à Te'ta-
blissement de la monarchie pontificale; sous
Philippe r', donnant des souverains à l'Angle-
terre , à ritalie , à la Sicile et à Jérusalem ; sous
saint Bernard etsainl Louis, intervenant comn^e
médiatrice entre les états euro|)éens3 sous Phi-
lippe-le-Bei , jetant les fondements du pouvoir
administratif; sous Jean II j essayant en iâ57 la
révolution de 1789 ; sous Charles V et Jeanne
d'Arc , s'affranchîss£«it de la domination anglaise i
sous Charles VIII , entreprenant la cqnquétt
italienne ; sous François T^^ réprimant Forgueil
espagnol : la France semble présider à tous les
mouvements, et occuper partout la première
place. Quand elle ne crée pas., elle reçoit et per-
fectionne. En contact avec les nations voisines,
dont elle peut être regardée comme le centre,
elle a entretenu avec elles un échange perpétuel^
un commerce non interrompu dUdées et de
principes. Elle a formé la scolasti<{ue ; elle a
ouvert un asile à la renaissance ; elle n'est pas
restée inaccessible à la réformation. C'est en s'i-
dentifiant avec TEurope , et en lui imposant son
esprit, quMle a pu, renouvelant au dernier
siècle ce qu'elle avait fait sous les premiers Ca-
— Î7C —
pëtiens 9 voir des princes français s'asseoir sur les
principaux trônes, merveilleuse conquête qui té«
moigne de Tuniversalité de notre caractère et de
son immense sympathie ^2 !
Cependant, après avoir accompli cette première
tâche nous essayerons de jeter un coup d'œil ra-
pide sur les autres contrées de FEurope.
Le langage , première base de toute littëi*ature,
conunençait, au XY^ siècle , à devenir plus clair,
plus correct, plus philosophique^ plus nourri
d'idées, et cependant la littérature française, sui-
vant seulement l'impulsion qu'elle recevait du
dehors, était laissée en arrière par celle de la plu-
part des autres nations : c'est que des essais multi-
pliés, bizarres^ contradictoires, avaient précédé
un progrès réel. Avant que la langue se fût épuréci
enrichie et complétée , les ouvrages les plus re-
marquables se trouvaient parmi les romans de che-
valerie; les contes, les fabliaux sont la lecture
des gentilshonunes de cette époque ; et comme les
vers des trouvères étaient jugés fatigants, le grand
travail du XV^ siècle fut de les traduire en prose,
soit pour leur enlever de la monotonie, soit pour
leur donner une forme plus moderne, plus en
harmonie avec les progrès de la langue. Âinsi^ les
romans d'Ogier le danois et des autres paladins
de Charlemagne furent traduits sous Charles VII.
— Î77 —
Deux cent quarante -'cinq romans de chevalerie
furent imprimes dans le langage moderne de 1Û62
à 1520 '*. C'était une Traie fureur; aucun homme
d'armes ne concevait là guerre , aucun prince ne
comprenait la politique autrement qu'il ne la trou-
vait dans les romans. Louis XI est une exception.
Mais si les romans, la seule ëtude du plus grand
nombre, h'en étaient pas une pour ce prince, les
fabliaux étaient son délassementfavori. Ces contes
demi-dévots , demi-galants ou satiriques^ étaient
empruntés aux légendes , à Bocace , à l'antiquité
même, qu'on torturait pour la traduire en Notb'
velles. Les Cent Noupelles-Noupelles furent com-
posées, traduites ou recueillies sur Tordre du dau-
phin Louis^ comme contes qui sont moult plai-
sans à raconter en toute bonne compagnie pour
manière de joyeuaeté.,.^ et en effet ils sont attri-
bués aux plus grands seigneurs de France et de
Bourgogne, au jeune duc Charles et au dauphin
lui-même^*. Les mésaventures conjugales de la
noblesse et de la bourgeoisie sont le thème fré-
quent de ces productions licencieuses mises à la
mode par le roman de la Rose dont le succès avait
gâté le goût et nui aux mœurs françaises ^^.
La poésie lyrique était aussi cultivée à cette
époque, et elle était aussi presque exclusivement
le partage des grands seigneurs, qui décidément
voulaient sortir de Tignoranceoù lesayaieotlaisaéi
jusqu'alors la barbarie , la féodalité et la nëceanté
de guerroyer à tout instant. Charles, duc d'Orlëanai
le père de Louis XII , Toncle de François V,
acquit par ses ballades une réputation qui ne fut
pas, disent les historien^^ sans influença sur la
politique; ce sont au moins celles qui malrquen^
le mieux les progrès de la langue et du goût. Nous
en citerons une à l'appui de cette assertion, Ceat
un madrigal qu'il adressa en 1^33 au duc de Ikmiw
bon I son compagnon de captivité en Angleterre,
lorsque celui-ci obtint la permission d^ rentrer
en France :
Puîsqu'aÎQsi est que vous allez en FraDce^
Que de Bourbcn , mon compaigoon trës-chicri
Où Dieu vous doiit^ selon la dësirance
Que tous ayons', bieo pouvoir besongnier.
Mon lait vous veulx descouvrir et chargieri
De tout en tout^ en sens et en folie;
Trouver ne puis nul meilleur mcssaigier,
11 ne faut jà que plus je vous en die.
Premièrement , si c'est votre plaisance ,
Recommandez-moi , sans point l'oublier,
A ma Dame ; ayez-en souvenance
Et lui dites , je vous prie et requier.
Les nanx que j'ai , quand ne faut «sioignier
Wittgv^ n<M| v/euïl fa dpuce compaîgQÎe.
— 879 —
Voof farez bitn que Q*at de td aiesder,
n ne faut jà que plus }è V99> ^ iJ^*
Ùr y fûtes, comme j'ai la fiance.
Car in) aiui 4QÎt pour Tautiae Tailler.
Si Tons ditcz : je ne sïiiç ^ans doutanœ
Qui esûcelle : yeuiUezl^ m'ens^igoier?
Ip vous répond que pe vous £aut serdper
Fors que celle qui est la mieux garnie
Se tous les biens qu'on saurait sonhaitier :
n ne ikut jà que plus je tous en die.
Si Ton pouvait être certain de l'authenticité
des poésies de Clotilde de Surville qui viyait à
la mén^e époque, peut-être y trouverait-on un
progrès plus réel encore, dans les pensées surtoiit
et dans ces sentiments nobles et purs qui fpnt de
la poésie Tinstitutrice du gepre humain*^.
En l/i31 naquit Villon que Boileau nous pré-
sente comme le premier poète qui ait su donner
des règles à la langue et à la versification; ce juge-
ment, qui n'a pas été confirmé par la postérité j
n^était pas juste en eflFet : Villon peut tout au plus
être considéré comme le Créateur de la poésie
burlesque*^; ipiage de sa vie agitée, ordurîère et
cependantoriginale et poétique, qu'eût terminée la
potence, si Louis 3LI ne se tût trouvé dans un de
— i80 —
ses moments de clémence le jour où la oorde atten<-
dait le rimeur qui la narguait.
La poésie du XVr siècle (dans leqad. nous
entrons après Villon ) se ressent de l'inflaence de
la niforme comme toutes les autres branches de
la littérature. Si Marot , par exemple , ne f&t pas
né dans des temps de luttes et dliérësies , poète
ingénieux et galant , il eût chanté comme Horaœ
ou Anacréon... Il traduisit les psaumes de David!
c'est que le calvinisme était alors de mode à la
cour, comme le yoltairianisme au XVIU* siècle.
La tolérance de François V^ le permettait ainsi **|
mais ce bon temps ne dura pas, et Marot* protes-
tant par bon ton^ Marot exilé auprès de la duchesse
de Ferrare , sollicita son retour aussitôt qu'il eud
appris l'art difficile
De parier peu et de polUoniser^
£t d'un seul mot de Dieu ne dcriser.
Le caractère de la poésie de Marot, lorsque ce
n'est pas le sectaire qui écrit, c'est la grftce et la
délicatesse : jamais , dit avec raison un critique
moderne, jamais, même dans la raillerie, son Ion
n'est amer ni emporté. Il plaisante de l'Eglise et
du Clergé en réformé mondain , plutôt qull ne
l'attaque en prédicateur fanatique. Admirateur et
héritier de Tesprit libre penseur de Tillon , la li-
berlé de sa vîe se ressent aussi un peu des exem-
ples de son devancier > mais son libertinage est
plus élëgant et plus poli.
L'ëcole de Marot finit à Genève avec de Béze,
sectaire grave et enthousiaste qui n'avait pris du
poète que le côté sérieux ; en France elle conti-
nua dans Saint-Gelais, prélat courtisan^ flatteur^
délicat^ naïf et gracieux comme son maître, mais
sans portée^ sans ce ton incisif qu'aimait tant
la cour de François I*'» Saint-Gelais et de Bèze
furent la monnaie de Marot , qui avait su réunir
ce qu'exigeaient Tardente austérité du calvinisme
et les mœurs licencieuses du grand monde.
Les rondeaux de Saint-Gelais sont c?n général
d'un ton heureux , et s'ils s'écartent souvent du
bon goût , ils s'éloignent rarement du bon ton.
Le poète savait qu'un évêque qui conte fleurette
offre un contraste bizarre , même à la cour; mais
au lieu de se laisser décourager par cette difficulté,
il en profitait avec un art piquant qui devançait
le XV m® siècle , Voltaire et l'abbé de Bernis j
c'est ainsi qu'il disait aux dames :
Si du parti de celles voulez être
Par qui Venus de la cour est bannie^
Moi , de son fils ambassadeur et prêtre.
Savoir vous £iis qu'il vous excommunie.
*S8t —
Certes , il faut bien s'identifier avec les ptamn
(le la cour de France à cette ëpoqi|e pour ne ^
être indigne de ce double rôle de prêtre d^ fénfBt
Christ et de Cupidon... Eh bien, celan*ët^it dcm
(ju^unegentillessci une espièglerie de PfëlçtfMQp
faisait des madrigaux sur les niartyrSi on ëcrivai| i\p
langoureux petits vers sur les psautiera deq daippB
pendant que la reforme grondait à \^ porte dfli
ëglises et des Palais : on chantait et Yqu précb^d
on chantait et Ton persécutait. Tout cela allait
ensemble et nul ne s^en étonnait. • .
Au milieu de ce déluge de fureurs et defadis^rs
singulièrement accouplées, quelques érudits cul^«
vaieat en silence la poésie antique, Pub^ll^J et
Ronsard sortirent de celte nouvelle école : arri^,
s^écriele premier, plus de cette poc^sie qui qe Wiit
pas sortir de la vie commune j prei^oiis TessQr^
imitons Tancienne Italie : marchons, et de ffi»
dépouilles comme de celles de la Qrèce OrQQRS
pos temples et nos autels... Cette nouvelle et m-
blime ardeur ne donna cependant pas & ]fiW
poésies le caractère d'originalité qui aurait d^ PQ
sortir ; ils ont beau comparer leurs dames à Diane,
à Vénus , à Hélène ; pour être grecques ou niy-
thologiques; elles n'approchent pas plusdel^ure
ou de Béatrix que la France n'approcl^ do Tlta-
lie du XVP sièclci cl cependant lionsard était le
ciemi-dieu de rëpoc|ue : 901^ styl» lyi^îcfue^ tout
essoufilë d'enthousiasme^ plaisait à la foula dorée;
Is^ r^orme même , qui le haïsaait comme oathoU^
qi|e, l'admirait comme poète. Les hommes qui
soumettaient les dogmes à leur examen et ne
craignaieut pas de détruire l'antique autorité de
Vqglise s'inclinaient devant Finfaillibilité de Ron*
sa^d^ A.U5si ce poète, infatué de sa gloire^ s'écriait*»
il) en parlant de ses nombreux: coufràres an
4pQUon :
Vous dtes me$ au jets , je suis seul votre roi !.. «•
La France ne s'inclinait pas seule devant eo
puissant; génie si complèteqieqt onhlifi aujour-
d'h^i. D^ns les universités d'Allemagae et d'Aur
gjeterre on expliquait tantôt lloqdèfe et tantôt
(lons^^^U..
Ponpi les poètes de Fécole de Ronsard deux
^e^lefpçnt méritent QQtre attention : d'Aubigné
et Desportes* A peine âgé de huit ^n^» d^Aubigné
passant par Amboise yit des téte^ de Huguenote
attachées h, h poteppe ej; entendit fiop père qui,
sous peine de m^édictipn, lui ordonnait de ven-
ger le meurtre 4^ ses frères. Le jeupe homme,
poète plutôt que beUiquevix, les vengea pur des
impréc^^ipos rimées ; se» satire^ bibliques e^rent
un grai^d s^^pés dans son p^irti. Despo^t^l 9y eon*-
traire, favori d*Henri III, chanta ses mignons et
ses maîtresses , devint plus tard un riche abbë él
laissa doucement couler sa vie , sans sMnqàiëter
du lendemain y dans les douceurs de la gloire, de
la fortune et du plus dolcefar niente.
A Tëcole de Ronsard succéda celle de R^[nier,
qui n'eut cependant pas Tambîtion d^étre Vwa
des réformnteui^ de la poésie. Ronsard^ en vou-
lant rehausser le ton de la poésie, avait pris Tem-
pliase pour de la noblesse et copia les anciens en
les boursoufflant. Régnier chanta plus naturelle-
ment ses impressions et laissa davantage à la na-
ture *^.
On remarque à cette époque un changement
notable dans l'esprit de la littérature qui^ trop
longtemps mêlée aux agitations politiques^ com-
mence à rentrer dans sa sphère. Les poètes ne
sont plus catholiques ou reformés, ils sont poètes.
Le repos succède à l'agitation , la réaction amène
l'amour de Tart pour lui- même, et Malherbe » le
vrai roi des poètes du XVI* siècle^ naft de cette
douce révolution due à la lassitude autant qu*aa
génie ferme et conciliateur du bon Henri. '
Laissant de côté la foule des rimeurs à la suite **^
c'est donc de Malherbe seul que nous allons nous
occuper. Non que ce poète riche d'une imagina-
tion brillante et d'un génie créateur ait lanéàé
beaucoup de chefs-d'œuvre, mais il eut un mé^
rite peut-être plus grand, car il embellit et fixa la
langue. Que les reformés soient vaincus par la
ligue , que cette ligue elle-même succombe sous
les coups du roi Qu'importe à Malherbe?
mais qu'un mauvais rimeur produise un sonnet
réprouvé par le goût ou d'un style barbare ,
alors il s'émeut et s'indigne, car il s'agit du sa-
lut de la poésie française! C'est qu'il avait donné,
lui, le vrai caractère de cette poésie, le vrai gé-
nie de cette langue^ c'est qu'il avait la conscience
d'avoir trouvé et embelli ces matériaux dont al-
laient se servir Corneille et Racine pour en bâtir
un temple immortel à la gloire des lettres fran-
çaises... Sa sévérité, dit un critique ^ passe les
paroles au crible ; s'il donna peu à l'imagination,
en revanche, il sépara^ classa les pensées et les«
mots, régla leur emploi avec toute la rigidité
d'un grammairien; un économiste ne réglerait
pas avec plus de soin les finances de l'État : tout
est à sa place, rien n'est oiseux , rien n'est jeté au
hasard. Il déclarait une guerre à mort à la servile
imitation des anciens, introduitepar Ronsard, en
même temps qu'il dégascormait ^ comme le dît
Balzac, la cour et la ville. Cette sévérité s'accor-
dait merveilleusement avec la tendance des
mœurs du siècle : sous Henri IV, la monarchie
— »6 —
s'affermissait, la dëbaudie ëhontëe s^enfuySiit,
Tëtiquette et la bienséance naissaient; car n
joueuses que fussent les a]lui*es du Bëamais, elles
avaient la noblesse et la dignité qui manquaient
à ses prédécesseurs.
N'exagérons rien cependant , et n^allohs pas
croire que Malherbe ne fAt qu'un puriâte Du un
froid rhéteur. Nous »\ons voulu indiquer le ca-
ractère de son talent , mais ce caractère n^exduait
par les sentiments et la grâce; on en jugera par la
pièce suivante, son chef-d^œuvre , il est vrai,
mais qui serait un chef-d^ceuvre encore dans no-
tre époque... il donnera en même temps la mesnie
des progrès qu'avait faits la langue à la fin dn
XVI" siècle.
CONSOLATION. — a M. du PEainsa.
1599.
Ta douleur, du Perrier^ sera donc éternelle ?
Et les tristes discours
Que te met ai l'esprit Tamitié paierndle
L'aogmeoteront toujours?
Le malheur de ta fille au tombeau descendue
Par un commun trdpas ,
Est*ce quelque dédale où ta raison perdue
Ne se retrouve pas ?
Je sais de quds appas son e&iance était pleiof i
Et n'ai pas entrepris »
iDJurieui ami , de soulager ta peine
Avecque son mépris*
Mais elle était du monde où les pliu beUes okoses
Ont le pire destin )
Et rose elle a vécu ce que vivent les rosM i
L'espace d'un matin.
Puis quand ainsi serait que » selon ta priire ^
Elle ttea& •btem
D'avoir en cheveux blanes terminé sa oarrike ^
Qu'en fût*il avenu ?
Penses-tu que plus vieille en la maison eéleste
Elle eût eu plus d'accueil ?
Ou qu'elle eût moins senti la poussière funeste
Et les vers du cercueil ?
Non , non, mon du Perrier, ftisshAt que II Parque
Otel*tmedii corps,
L'âge s'cvanouit au-deçà de la barque ,
Et ne suit point les morts.
Ne te lasse donc plus â*inntiles complaintes;
Mais , sage à Tavenir,
Aime une ombre comme ombre , et des oendrei éteintes
Éteins le souvenir.
CeA Um Je le eonfesse» nue jute eoutume
Que le Cttur affligé/
Par le canal des yeux venant son amertomey
Cherche d'être ali^.
Même quand il avient que la tombe sépare
Ce que nature a joint ;
Celui qui ne s'émeut a Tâmed'un barbare y
Ou n'en a du tout point*
Mais d'étiie inconsolable et dedans sa mémoire
Enfermer un ennui »
N'est-ce pas se haïr pour acquérir la gloire
De bien aimer autrui?
De moi dqà deur fois d'une pareille foudre
Je I ne suis tu perclus;
Et deux fois la ra ison m'a si bien £ût résoudre
Qu'if ne m'en souyient plus.
Non qu'il me soit g^ief que la terre possède
Ce qui me fut si cher;
Mais en un accident qui n'a point de remède
Il n'en faut point chercher*
La mort a clés rigueurs à nulle autre pareilles :
On a beau la prier ^
.j
La cruelle qu'elle est se bouche lei oreilles ,
Et nous laisse crier.
Le pauvre en sa cabane ^ oii le chaumn le couyre ,
Est sujet h ses lois;
Et la garde qui veille aux barrières du Louvre
N'en défend point nos rois.
De murmurer contre die et perdre patience
IlestmnlÀ propos;
Vouloir ce que Dieu veut e»t la seule science
Qui nous met en repos.
N()\is cti nvons fini avec la poésie. La sme de
nos prosateurs riVsl ni moins leeonde ni moins
inleressanle. L'iiisloire, qui jusqu'alors n'avait etd
([Wi}. chronique ^ va désormais prendre rang dans
la littérature; à Froissart avaient suecédé : Monstre-
let, narrateur sans imagination , sans cet enthou-
siasme naïf (|ui fait supporter les longueurs de
Froîssart; le roi d'armes Berry, qui eherolia de
honne foi , mais sans talent^ i\ consacrer les hauts
faits royaux etcheva1eres(pics ; (îhartîer, nomme?
par Charles VU historiographe de France, et qui
ne sut faire qu^m long])anc^gyriquedesou maître;
Jacques du Clercy et Mathieu de Coucy, person-
nages puissants, i^ portée de bien savoir, mais fa-
tigants par leur prolixitcf... Avec Commines, com-
mença cette sdrie de mémoires intéressants que
V. 19
nous connaissons sur lesXY* et WX^ «î^ttt ®^
que termina V Histoire unwerseUe de Thou^ qui
enfin éciivit thistoire.
Nous ne nous arrêterons pas à parler d^Olivier
de la Marche , de d'Aubigné^ de Lanoue ^ du ma-
réchal de Fleurange^ deCondë, deTEstoile^ du
cynique Brantôme et du bouillant M ontluc ^ de la
spirituelle et voluptueuse Marguerite de Navarre,
de Dubellay , de Tavannes, de la Chastre^de Go-
ligny , etc. *>, force nous est de nous en tenir à
Commines , qui ouvre , et à de Thou^ qui clôture
cette curieuse série. Le premier, doué de ce coup
d*œil sec et froid qui ne permet à aucune passion
de se livrer à Texamen des événements, dénué
d'ailleurs d'imagitiation , avait été l'ami^ le con-
fident et la victime de Louis XL Instruit par de
telles leçons , soumis à de pareilles épreuves ^ avec
ce caractère i il ne peut plus avoir la naïve bonr
homie et le moi piquant de nos chroniqueurs ; il
écarte au contraire , comme sM eut dû en souffrir
encore, tous les souvenirs de la vanité person-
nelle, il s'efface même dans les circonstance^ où
il a dû jouer un grand rôle. Cette impassible froi-
deur^ que Brantôme chercha plus tard à imiter,
étonne d^abord^ et puis irrite le lecteur, quelque
peu ému du spectacle de Thistoire ; résigné aux
vices , aux malheurs , aux sottises des lioaunesi
il accepte tout^ il explique tout^ il es\, fataliste
Ainsi nou^ avofis vu de nos jours un écrivain^
plus jeupe et moins éprouvé, nous raconter les
horreur? de la révolutîoa avec ce calme froid qui
explique tout pt ne s'e'meut fie rien. La trame des
événements se lie, aux yeux de ces hjstûriens, par
une combinaison nécessaire des carijctères hu-
mains et des circonstanççs qui les environnent».
De Tlîou, président au Parlement, érudit,
consciencieux et grave, fit faire à l'histoire un
pas immense ; au récit diffus des chroniqueurs, il
substitua le premier une 4qrralion claire et métho-
dique , il distribua les faits selon les règles de
l'art et du goût, et mêla à son répit des réflexiorjs
judicieuses et souvent profondes, mais qui se bor-
nent au présent, et préjugent rarement l'avenir.
Son style, imité des anciens, qu'il ain^ait jus-
qu'au point d'adopter leur langue quand la sienne
était déjà formée, son style est toujours grave et
majestueux , et s'il ne devança pas les historiens
modernes dans les vues philosophiques et géne-
ralisatrices, c'est que peut-êire il prévoyait que
son siècle ne Teût pas compris
94
En continuant la revue de nos prosateurs les
plus célèbres y nous retrouvons en première ligne
19.
Monlaigne^ La Boêlie cl Charron , écrivains mo-
ralistes; la politique nous donna Pasquier, THô-
pital et Bodin ; la jurisprudence Cujas^; la satire
philosophique Erasme , Rabelais et la Ménippee.
Le caractère de la littérature philosophique de
ces deux siècles^ c'est une horreur profonde de
tout frein ; l'esprit libre penseur se montre par-
tout, depuis les fabliaux légers jusqu'aux gros li-
vres de morale , dans la controveree religieuse
comme dans la poésie satirique; ce ton naïf et
malin qu'on admire dans toutes les productions
de cette époque , les rend inimitables et délicieuses
à lire. Ce n'est précisément ni de la sédition en
politique, ni de l'incrédulité en religion , ni de
l'obscénité dans les romans de mœurs *^; c'est une
sagacité pénétrante , vive et malicieuse, une ori-
ginalité piquante y qui ne laisse aucun repos à l'es-
prit , et cependant le délasse et lui plaît. Quoi de
plus attrayant que les Essais de Michel Mon-
taigne*', de plus gai, de plus fort, de plus spiri-
tuel que l'histoire drolatique de Gargantua et de
Pantagruel? et cette Satire Ménippee j combien
de fois ne l'avons-nous pas lue et relue , sans nous
en lasser jamais? Cependant, au dire des plus
savants critiques, son principal mérite ; c'est l'à-
propos, cet à-propos qui tua la Ligue Mais il y
a autre chose encore : la Ménippee , fille des
Contes drolatiques , est Tœuvre de cinq ou six
Homère de cabaret^ admiratcurn de Rabelais et de
J*îinliquîUî^ mêlant volontiers AriHtopbnno et Lu-
cien, 1(*8 J^Huites^ Mayenne et Luther, Gargantua^
lo DigcHte et TOrgie. IIh avaient nom Pithou ,
Ha()in^ Le Roy, Gillot et autres. Us buvaient,
riaif^rit , lançaient des dpigrammes contre la Ligue^
racontaient les joyeux triomphes du Bdarnais , et
do longs chapitres de la Mdnippée mvb^xQwl de ces
rcndc/.-vous bachico-littdraires, comme nos plus
spirituels vaudevilles des salons gastronomiques
de V<*ry^« Quelquefois ils s^ëlevaient, ils de-
venaient vraiment dloquents^ et là encore ils trou-
vaient leur modèle en Rabelais , l'un des meilleurs
types do Tdpoque. N'y a-t-il pas en eflfet^ dans
Rabelais , des moments de la plus noble éloquence?
n'y a.-t-il pas aussi du pathétique le plus délicat?
Nous n'en donnerons comme preuve que ce Por-
trait de Panurge, pauvre savant, si malin et si
naïf^ arraché à la misère par Pantagruel, et de-
venu son (»mi de cœur et son confident ; caractère
esquissé avec esprit et môme avec gr&ce; on croit
y retrouver Timage de Rabelais^ et le témoignage
de sa reconnaissance envers le cardinal du Bellay,
qui levait emmené en Italie, et Tavait protégé
contre les persécutions.
Ainsi, dit un critique , ainsi se confondent dans
— 191» —
cet ëtrange gënle , la raillerie particulière à notre
nation , la bouffonnerie de son ëpoque^ rallëgorit
monstrueuse et métaphysique^ née du moyen*
âge , ^érudition qui commençait à dey.enir puis*.
santé et dont il pressentit les progrès^.
Bien autre était lecole de Pasquier^ de Bodin et
delHôpital, qui s'élevait à côté, riche de science
aussi , mais sérieuse, mais digne, voulant le bien,
et mêlant pour Taccomplir Faction aux écrits et à
une éloquente parole'^.
 coté de cette mission que s*étaient donnée
des hommes supérieurs, mais de caractères si di-
vers, se range celle des orateurs sacrés^ en tête
desquels nous pourrions placer la noble fille à qui
la France du XV* siècle doit son salut. Ces belles
paroles, ces mots si simples, mais inspirés , de la
vierge de Vaucoulcurs ne sont-ils pas de rélp*
quence? une éloquence sublime, car elle vient de
Dieu3<.
On connaît assez généralement les noms des
Maillard, des Ménot, des Raulin^ sermonaires
qui vivent encore sur une vieille réputation , mais
que notre siècle délaisse ; rebuté qu'il est par It
mélange bizarre de latin et de \ieux français, par
des bouffonneries dont il perd le sel , enfin par
des caractères gothiques hérissés d'abréviations.
La tache est rude, nous en convenons, mais si
l'on dë]|)Ôuillér«éuvirfe(îe cette écorcegrdsfeiêré, fei
Fon oublie la forme pour aller au fond dfefe idéês^
si l'on a la patience d'ëlagiifet* et de choisit ôh !
alors on trouve la récompense d'un travail aride ^
car dans ce fumier brille pluà d'iihe |)erle. A aés
bou&bnneries quelquefois dé inaùVais ion , mais
que tolëràit^ que demandait même le siècle , ^é
mêlent des traits piquants qui frappaient fort et
juste ; • ces vêtements dont voué vous parez, dit
Menot aux courtisahs ddrës, si ôii les rtiëttâlt
sous le pressoir, le sang des pauvres en défcoulfe-
rait! —Lorsque vous êtes aii palais, crie-t-il àiik
âvobats, il semble que voué soyei prêts h voiis
ehtre-dëvorer, et que vous avez surtout uh Vil*
plaisir de protéger r innocence et lorsque vous
étésisortis de Tâudiehcfe, voiis allez énserfiblë à la
buvette, pour y avaler la sÛbsiaHce dé vdS fcliëHls,
semblables à des renards qui paraissent voutôir
s'entre-déchirer, et puis se pre'cîpitenl tdUà ëft
commun sur les poulaillers. Vous, Messieurs, dit il
aux juges, d'où tenez-voUs ces maisons, cëà
bourses d'or, celte tunique de soie , rbligô coïhHié
le sang du Christ? celte tunique crie vengeance
contre vous !.... Je voUs dis que le sarig du Gllrlsi *
crie miséricorde pour lé pauvre dépouille
Mais , répondez-vous , il nous faut dés '^pibëS êl
le sel pour empêcher nos provisîofts dé sd pburtrif !
C'est donc là la source des taxes que vous imposex^?
eh bien ! ces taxes seront le sel et les ëpices pour
poudrer vos chaînes dans Tenfer. — Il n'épargnait
pas même les siens : Messieurs , disait-il en fixant
le banc des chanoines^ vous qui avez cinq ou siX
cloches sur i^os têtes ^ pensez-vous qu^on vous
donne ces nombreux bënëfices seulement pour en-
tretenir les cuisines^'?.... Ce n'est pas là seule-
ment de la boufTonnerie , c'est un sentiment pro-
fond des misères du peuple , qui se trahit en invec-
tivcs très-souvent éloquentes, contre la classe
riche qui l'opprimait et vivait de son sang. Ce qui
est aujourd'hui le texte des déclamations les plus
exagérées , était au XV® siècle une déplorable vé-
rité.
Maillard, plus savant , plus grave que Ménot»
n'épargnait pas plus que lui la haute classe , et
s^attaquaità Louis Xllui-méme. Ce prince, irrité,
menaça un jour de le faire jeter à la rivière.
Bast? répondit celui-ci , j'irai plus vite au Paradis
par eau , que le roi avec ses chevaux de poste. •— >
Préchant un dimanche à la cour rassemblée à
Bruges, il trouva piquant de l'apostropher en dé-
tail : après avoir établi un parallèle entre la pra-
tique et les devoirs , il montra que la société se
divisait en deux parts , celle de Dieu et celle du
Démon ; il apostropha son auditoire en commen-
— «97 —
çant par le prince et la princesse , et leur dit en
les sommant de répondre : « Étes-vous de la part
de Dieu?.... — Il attend la réponse. — Baissez la
tête , s^écrie-t-il; » puis s'adressant aux magistrats:
ft Et vous y gros fourres , éles-vous de la part de
Dieu?.... Baissez le front!..., Mais il vaut mieux
citer le passage tout entier, et dans Tidiôme de
Maillard, qui laissait le latin plus volontiers que
Ménot :
a Or acoustez, m'entendez* Sainct Jacques nous en parle en
sa canonique. Or dictes , sainct Jacques mon amy. Quiconque
deffâillera çn Tung des commandemens , il sera coupable de
tous les aultres. Certes^ Seigneurs , il ne souffist mye de dire:
je ne suis pas meurtrier, je ne suis pas larron , je ne suis pas
adultère; se tu as failly au moindre, tu es coulpable de tous*
Il ne faut qu'ung petit trou pour noyer le plus grant navire qui
soit sur la mer : il ne fault que une petite faulse poterne pour
prendre la plus forte ville ou le plus fort chasteau du monde;
il ne Êiult que une petite fenestre ouverte pour de'rober la plus
grant et puissant boutide de marchand qui soit en Bruges.
Hëlas pêches , puisque pour defïault d'ung nous sommes coul-*
pables de tous , qu'est-il de vous aultres qui en rompez tant
tous les jours* À qui commenceray-je premier? A ceulx qui
sont en ceste coiutine , le prince et la sua altessa, la prin*
cesse. Je vous asseure. Seigneur, qu'il ne soufGst mye d'estre
bon homme; il fault estre bon prince, il fault faire justice, i[
faut regarder que vos subgetzse gouvernent bien. £t vous^dame
la princesse , il ne souffist mye d'estre bonne femme , il fault
— M8 —
aroir regard à rostre famille, qu*dle se pmteme biôi adoi
droict et raison* J*en dict autant k tous les aultres de toiiz ca*
tats. A ceulx qui maintiennent la justice , quils ûssént jroict et
réisbn àdiascun : les cheraliers de Tordre que faites tes si^nnenis
qtii appartiennent à yotre iHrdre ; ces aermenis sont hbsé fjtwm
comme Ton dist ; maïs tous en ayez fiit ung anltrë premier qél
TOUS gardes mieulx , c'est que tous ne ferez rien de tout ee qaa
TOUS jureres. Ditz-je Tray ? qu'en que tous plaist ? — * En bonne
îajf frère , il en est aînsy . Tirez oultre. — EsteK-TOus U , les
officiers de la panneterye , de la fruitterye, de la boutillerie^
Quant TOUS ne dcTriez desrober que ung demy lot de TÎn o«
■ne torche , tous n'y lauldrez inye. ^^ fin bonne foy, frère ,
TOUS ne dictes que dn moins.— Où sont les trésoriers ^ ka nigm*
tiers ? Estes-Tous là qui fiiîctes les bcsoignes de ToSlre ttittrè et
les TOitres bien? accoustez : à bon entendeur il ne fii«k ^
demy mot. I..es dames de la court, jensnes gàrches iH«cqo€s ^ 3
fault laisser toz alianrcs. Il n'y a ne si né c[ua< JêUMe gaudb^
seor là, bonnet ronge, il fault baisser toz regards. Il n'y n de
quoi rire j non , femmes d'estat , bourgeoises , nlanAand^ , tons
et tontes généralctaient qaciz quilz soient. Il se ftikl ôstér Mtos
de la serTitude du dyable et garder tous lès colhmlndertieiRs dé
IKen. En les gafdant , vous raseret et destmiittt la cité de Jbf-
rico : et c'est de quoy je Teul jc tmdtr en iny le tbensnie (tliéttS)
allègue, 9H civitas Jherico anathigma bt émnit^qtté rà érf
Suiyéflt nne digression sur les quâlit& que dttlt
réunir un hon prêcheur , et des reproclies ^ cênk
qui ne viennent au sermon que pour reprendre le
prédicateur, ou qui s'y rendent et écoulent sans
— «99 —
profiter et sans s'amender. Puis tout à coup Mail-
lard s'écrie :
« Or, levez 1rs esperits | qa'en dictes vous, Seigneurs ? estes-
tous de la part de Dieu ? le prince et la princesse , en csles-
vous? Baissez le firont. Vous aultres^ gros fourrez, en estes-
vôus? Baissez le front. Les chevaliers de l'ordre, en esles-vous?
Baissez le front. (jëdtilz-hoTumes , jeubes gàudisseui^, en estes-
ireus? Baissez lé froUt. Et vous, jcUbes gércliei , ûnèà fé&ellés
le court , en estes- Vous ? Baissez le fit>nt^ VoM; estét cftbHptël
au livre dés dampnez. Vostre chambre est toute kierqui^ kma
les dyables. Dietes-moj , s'il vous ]^laist , ne vous tttes-vous pas
myrées aujourd'hui, lavées et espoussetëes ? Dj bien, frère. — '
À ma voulenté , que vous fusiez aussi soigneuses de nectoyer
vos âmes. — Quel remède , frère? «*- Je veulx dite que se , le
temps passe , si pro quia^ proh dolory il n'a éii dès mues ,
laissons nostre mauvaise vie , Dieu aura pitié de nous : si que
non , je vous convye avec tous les dyables. »
Ces personnalités, ces attaques directes, aux-
quelles nos mœurs se refuseraient aujourd'hui,
étaient souvent plus fructueuses que de vagues
généralite's , qui menacent tout le monde et n'at-
teignent personne^'. Deux siècles plus tard, la
chaire était devenue une tribune académique, le
mot propre y avait fait place à la périphrase , et il
fallait y pour émouvoir, des Massillon , des Bour-
daloue ou des Bossuet; encore n'affirmerions-nous
— 300-~
pas que leurs prédécesseurs n'aient exercé [dus
d^nfluence sur les masses.
Raulin , plus sérieux que Maillard , fait ra-
rement diversion à la gi^vité de ses préceptes;
c'est un calviniste subtil^ un tiiéologien consommé,
mais ce n*est pas un orateur; il donne des con-
seils et ne lance pas d'invectives^ il signale le dé-
sordre des mœurs et ne le foudroie pas ; ses ser-
mons ne sont que des traités didactiques sur la
confession , le mariage et Teucharistie; aussi Teflêt
était-il médiocre sur cette foule impressionnable
et avide d'émotions. Raulin n'en est pas moins
un des sermonaires du XY^ siècle les plus appré-
ciés de la postérité y qui Ta mieux compris que les
contemporains ^.
— 501 —
CHAPITRE ONZIÈME.
Tournons maintenant nos regards vers la belle
Italie , la première entre les nations au siècle
J*Auguste. Ici nous ayons à conside'rer le pontife
lous un aspect diflFérent : si nous l'avons blâmé
îomme pape^ nous l'exalterons comme souverain.
Tamais en effet la tiare n'avait brillé de tant
le splendeur , toutes les couronnes s'effaçaient
levant elle : c'est que le nom de Léon X réveillait
la fois toutes les idées de poésie , d'art et de
;loire, c'était la pensée recouvrant ses droits, la
►oésie recommençant des chants interrompus , le
tatuaire reprenant son ciseau , le peintre sa
►aletle, c'était l'antiquité retrouvée avec son culte
►Dur les arts , ses couronnes pour les artistes , sa
)assion intelligente pour les monuments, c'était
a vieille Rome ressuscitée, c'était un monde tout
louveau ^ un monde fait comme à dessein pour
iternîser sa mémoire , qu'il baptisait de son nom
în le peuplant des plus belles intelligences que
Keu eût jamais créées...
— 801 —
L'imprimerie avait prëcëdë sa venue et l'Italie
avait été Tune des premières à cëlëbrer cette
découverte, premier jalon d'une civilisation nou-
velle. Pendant que la France était encore dans
renfance, Tllalie commençait une ère d'érudition,
et lorsque Téruditiuii arrivait en France au
X\V siècle, rilalie déjà brillait d'un vif éclat
parmi toutes les nations européennes, jusqu'au
moment où le XVir' siocle donna le sceptre à la
Fri^nce qui ne le perdit plus.
Dès le commencement du XY* siècle plusieurs
letU^és Bysantins, dégoûtés des humiliations de
leur pays, émigraient en Italie : ils y enseignèrent
la langue de leurs aïeux, y firent connaître }eui's
grands écrivains et inoculèrent la science dai)§
cette imagination populaire , toute jeune et toute
méridionale qui donnait des charmes nouveaux à
la vieille érudition grecque; mais l'exagération
vint se mêler au bien : on ne parla bientôt plus
en Italie la langue de Bocace et de Pétrarque,
On n'écrivit plus qu'en latin ; mais dans cette exa-
gération même , le goût se retrempa , et lorsque,
après un repos d'un siècle , Tidiôme natal se
réveilla sous la plume du Tasse , d'Àrioste et de
Machiavel, on le vit plus pur , plus fort ^ plilS
flexible encore, sans avoir rien perdu de sa gr&ce
et de sa vigueur.
— 505 —
Il y eut cependant quelque^ exceptions à ce labo*.
ri^ux travail des savant 4*Italie absorbes dans la
contemplation de Vaqticjuité renaissante. Giustp
de^ Conli^ Burchiello, Tommaso de Re^gio^i
Laurent ^e ^édicjs et Politien brillent comiuQ
Italiens 9 dans rilalie latinisée par la piiode : le
premier imita Pétrarque avec quelque bqnlieur^
Burchiello eût été célèbre s'il eût été plus intelli-
gible 9 Tommaso traduisit Y Enéide ; Laurent, aui
acr|uit tous les genres de gloire, fut encore le
meilleur poêle de son siècle, ou du moinSy ne par-
tagea la palme qu'avec Politien. L'amour ne le
rendit pas poète comme tant d^autres, mais ce fut
la poésie qui le rendit amant ; voulant célébrer la
belle Simonetta, maîtresse de son frère Julien (qui
venait de mourir) il chercha un objet pour l'ins-
pirer et se figura Tavoir perdue pour la chanter,
ce qu'il fit dans plus de 160 sonnets ou canzoni.
Son poëme de VOmhrone est plein de descriptions
charmantes et écrit avec beaucoup de facilité.
Ange-Politien débuta par un poé'me qu'il n'a
pas terminé et qui n'est connu que sous le nom de
Stanze , sur la joute de Julien de Médicis ; il le
dédia à Laurent , et c'est de là que date leur
amitié. Cette pièce est un des plus brillants mor-
ceaux de poésie du siècle. Elle offre la fraîcheur
et la fertilité d'une jeune imagination et le style
. SOI» —
forme de Tàge mûr. Dans la description de Ttle de
Chypre et du palais de Yëaus on reconnaît le
premier modèle des îles d^Âlcine et d*Armide »
Politien ny est pas au-dessous de TÂrioste et du
Tasse \ Son poëme du Taifola d Orphée est le
premier dans ce genre, et fait époque dans la
poésie dramatique italienne.
On ne cite guère dans ses Canzoni que celle
qui commence par ces vers :
MoDti , yalli , antri , colli , etc.
qui est la meilleure faite depuis Pétrarque.
Après Politien viennent les trois frères Pulci.
Bernardo, qui traduisit le premier en italien les
églogues de Virgile et fit uu poëme sur la passion
de J,-C.
Luca^dontona un poème sur le tournoi de Julien.
Luigi , le dernier et le plus célèbre des trois
frères, a donné à l'Italie le poëme du Mot^ante
Magyare 9 premier modèle des poëmes romanes-
ques dont les exploits deCharlemagne et de Roland
sont le sujet. Le Boyardo a fait un RoUmdamour
reuxtyoL on ne Ht presque plus: ÀriosteelBerniFont
tué, Fun en le continuant, l'autre en le refaisant.
Vers la fin de ce siècle se distinguèrent quel-
ques femmes poëtes. La princesse Balliste et sa
petite fille Constance.
Le goût pour Fart oratoire fut à cette époque
— 500 —
aussi commun parmi les femmes que le talent
poc^tique. La plus célèbre de ces femmes fut Cas-
sandra Fedele, née 5 Venise en l^iCS. Politien
■
en faisait le plus grand cas et lui a (Çcrît des let-
tres pleines d'dloges 3,
Un prédicateur rem])lit^ à la fin du XV* siècle,
ritalie de son nom : Savonnrola souleva le pays
par son éloquence républicaine et mourut mé-
prisé de ce peuple qu'il avait si long-temps do-
miné, parce quMl n'avait pas eu le courage de
mourir en martyr,
A ces hommes déjîi célèbres succédèrent des
liomuies plus célèbres encore : h Laurent, Léon X;
à Politien, le Tasse; à Boyardo, TArioste. Mais
Home n'était pas seule à fournir des protecteurs
aux lettres : à Florence losgi*andsducs Cosme V^y
Frtiuçois et Ferdinand de Médicis; à Ferrare les
princes de la maison d'Esté, lesGonzagueàMan-
toue, les La Rovère à Urbin , et en Piémont les
ducs de Savoie recherchèrent , honorèrent et ré-
compensèrent généreusement les littérateurs et les
artistes.
Deux hommes remplirent de leur renommée lu
p(^riode dont nous retraçons la vie : Tasse et
Arioste. C'est d'eux surtout que nous aurons h
nous occuper.
Arioste naquit en lli7b d'une famille alliée aux
V. ao
-- 50fi —
ducs de Ferrare ; accueilli, fétë par Léon X, Hip-
poljrte d'£ste et son père Alphonse P^, il n'en re-
çut cependant aucun secoiu*s; il fat admis dans
leur intimité, et malgré cela il vécut et mourut
pauvre. Un mal de langueur, provenu d'un lonjg
tr^yailet deTattention forcée qu'il avait mise^ la
correction d'une nouvelle édition de sou Roland»
Tenleva à V Europe à Tâgc de 59 ans.
La gloire de TArioste est toute dans son Roland|
,ip^is cette épopée toute de verve Ta fait un des
premiers poètes modernes. L'un des caractères
d'originalité de son talent, c'est de faire sortir la
l^aisanterie du sérieux même de l'exagération. Riçn
ne devait plaire davantage aux Italiens, que ce ri-
dicule piquant jeté sur toutes les idées sérieuses et
exaltées de la chevalerie. Il est dans leur caractère
d'aimer à réunir dans les objets d'une haute impor-
tance, la gravité des formes à la légèreté .des sen-
timents; Arioste est le plus gracieux modèle de ce
genre national.
Le Tasse emprunte aussi de l'imagination orien^
taie ses tableaux les plus brillants; mai3 il j
réunit souvent un cliarme de sensibilité quin'ap-
partient qu'à lui seul. Ce qu'on trouve le j))us^i;a-
rement , en général, dans les ouvrages it^lieiii ,
quoique tout y parle d'amour, c'est de la sensibi-
lité. La recherche d'esprit qui s'est introduite sur
— 507 —
ce sujet dès l'origine de leur littérature, est Fob-
stacle le plus insurnaontahle à la puissance d'é*
mouvoir.
La Jérusalem n'est pas cependant une gloire
moins grande que celle du Roland ; ce poê'm^»
quoique sérieu:^^ eut unç popularité immense. Le
Tasse s'adresse à tous les siècles, il parle à toutes
les nations, c'est son secret pour se faire lire par Im
Italiens, les Français, les Suédois, les Anglais^ les
Grecs et les Turcs eux-mjéoies ; le grand poète 9
ressuscité le héros de la guerre sainte ; les cham"
pions du Christ aux prises avec l'islamisme , lui
offraient une vaste matière, le choc des passîops
et le contraste de deux croyances. Ce qui distingue
surtout Tasse des autres poètes , c'est qu^îl a sa
chpisir un certain notnbre d'idées accessibles à
tous les peuples i heureux celui asse« parfaitement
organisé pour les puiser à cette source, cet homme*
là est vraiment poète ; la nationalité n'est rien pour
lui; son cœm- sympathise avec l'humanité entièi*e.
£n exaltant les gloires du pays^ il a sympathisé
aussi avec la postérité, et Ton entend encore les
bateliers du Lido chaqter les stances de la Jéru-
salem avec le même charme qui les faisait chanter
il y a déjà quatre siècles. • .
Après ces deux çolQnnes de la littératgre ita*
lienne, comment parler d'urne foiiie d'«ûritains à
In fliiitc qui ont donne i\ Tltalie la réputations
quelque peu méritée, d\ivoir des musiciens plutôt
que des j>o«*tes'?
Parmi les prosateurs de cette époque, un seul
sort de la foule avec éclat^ et il sort surtout par
Poriginalltts l'inattendu de son talent. C^est peut-
être, dit Madame de Staël y par antipathie pour
Texagération italienne que Machiavel a montré
une si cflTrayanle simplicité dans sa manière d*ana-
lyser la tyrannie; il a voulu que Thorreur pour le
crime naquit du développement môme de ses
principes; et poussant trop loin le mépris pour
Tapparence même de la déclamation, il a laissé
tout faire au sentiment du lecteur. Les réflexions
de Machiavel sur Tite-Live sont bien supérieures
à son Prince. Ces réflexions sont un des ouvrages
où l'esprit humain a montré le plus de profon-
deur. Un tel livre est dû tout entier au génie de
1 auteur; il n'a point de rapports avec le carac-
tère général de la littérature italienne.
Les troubles de Florence avaient contribué sans
doute à donner plus dVnergie à la pensée de Ma-
chiavel ; mais néanmoins en étudiant ses ouvrages,
on sent ({u'ils appartiennent à un homme unique
de sa nature au milieu des autres hommes. Il écrit
comme pour lui seul, reOet qu'il doit produire
ne Ta jamais occupé.
— 509 —
L'on peut accuser Machiavel de n'avoir pas
prévu les mauvais effets de ses livres; maïs ce
qu'on ne peut croire, c'est qu'un homme d'un tel
génie ait adopté la théorie du crime. Cette théorie
est trop courte et trop imprévoyante dans ses plus
profondes combinaisons.
On nous pardonnera de ne pas nous étendre
sur les successeurs de ces grands écrivains et d'en
rejeter dans nos notes la froide nomenclature *•
Guicciardini seul mérite que nous nous y arrêtions
un instant dans notre course rapide : Machiavel
avait écrit Thistoire de Florence ; Guicciardini
nous a laissé l'histoire de l'Italie depuis l'expé-
dition de Charles VIII jusqu'à la mort de Clé-
ment VIL II avait été avocat, professeur de droit,
homme d'état avant d'être historien. Il fut gou-
verneur de Modène et de Reggio sous Léon X;
sous Clément VII, il gouverna toute la Uomagne.
En 153^^ il se retira dans sa maison de campagne,
voisine de Florence, et consacra le reste de ses
jours à écrire son histoire, qui ne fut publiée que
vingt et un ans après sa mort, en 1561. Cet ou-
vrage, composé à la manière antique, présente un
heureux mélange de réflexions et de récits. Mon-
taigne en a parfaitement apprécié les quaUtés et
les défauts : « Guicciardini est historiographe di-
ligent, et duquel, à mon advis, autant exactement
— Mo-
que de mil aultrei on peut apprendre la
affaires de son temps ; aussi , en la plupart, en a-t-il
^.é acteur lui-mesme et en rang honorable '. » .
L'Espagne, aux siècles qui nous occupent, auâài
étrangère et plus insouciante encore que Fltalie
aux travaux philosopliiques, fut dëtournëede toute
émulation littéraire par la tyrannie oppressive et
sombre de l'Inquisition ; la poésie fit à de longs
intervalles quelques efforts heureux pour sortir
de son engourdissement ^ mais ce n'est qu'après
les grands succès de Charles-Quint que l'Espagne,
plus paisible , vit tiaitre ci) qu'elle appela aveb
orgueil son siècle (ïor^ bien înfeVîcur cependant
aux beaux siècles de rilalic et de la France. Doù
Henrique de Villena , le marquis de Santilkné,
Juan de Mena VEnnius espagnol, le rival dti
Tasse l'immortel Camocns , Garcilasso de là
Yéga , rhistorien Mariaua sont , dans tOUé lés
genres, les princes des lettres de cette époqtté ; et«
àVL dire des Espagnols , il n^en est aucun qilî ne
Tait emporté sur tous ses rivaux européens. C'est
le propre de l'ignorance , et on ne peut pas trop
le reprocher à l'orgueil deâ Espagnols ; n'étâit-cè
pas assez pour Cette nation malheureuse de con-
naître et d'exalter ses propres auteurs ! Là cticl^è
— 544 —
quî étudie , analyse et compare , ne pouvait en
être comprise
Passons maintenant de la littérature vive et
brillante du Midi à la littérature mélancolique et
intime du Nord.
La guerre des Deux Roses avait fait perdre
à l'Angleterre le goût des lettres : vers le milieu
du XV siècle , les noms d'York et de Lancàstre
remplissaient le royaume et absorbaient tous les
esprits. Six batailles rangées avaient commencé
cette effrayante série de massacres devant lesquels
s'enfuyait la muse de la poésie , que semblait vou-
loir recueillir rÉcossé. A cette époque , les mon-
tagnes Scandinaves , pleines encore du souvenir
de Wallace , retentissaient de vers à sa louange.
Si la guerre et lès préoccupations politiques sont
latales aux lettres , le souvenir de ces scènes de
carnage se poétise, et le temps ennoblit jusqu'il la
cruauté. Aussi pendant que Henri Vt îui-ni^me
se plaignait des chagrins que lui donnait lVt£(t
précaire de sa puissance ^ , Jacques et Edouard
couronnaient en paix de nombreux poètes par*
mi lesquels on distingue les noms de Henri-Soun,
— 542 —
Dunbar Lindsay , et plus tard Drummond que
les Ecossais considèrent comme le plus pur des
poètes de ces deux siècles. La poësie anglaise,
plutôt orale qu'écrite , était, avant la rèforDiation,
simple , mais incorrecte , Thistoire curieuse ,
mais renfermée dans le cercle individuel. Au
X.yV siècle j on voit la haute poésie prendre le
dessus avec les événements et la méditation qui
en découle, la grande histoire tue la petite, et
cette révolution litléraire s'accomplit par la marche
graduelle de la civilisation au moment de Tune
des plus terribles révolutions de la pensée hu*
maine, au moment où l'unité catholique ya se
rompre, où la fraternité européenne va faire place
à d'interminables divisions.
Le Luthérien Henri YIII faisait de la thëolo*
gie , des vers et de la musique ; la papiste Marie
a laissé aussi des lettres latines et françaises;
Elisabeth a laissé Shakespeare, et sa gloire en
est plus belle et plus durable que celle de ses
devanciers.
Nous allons retrouver le grand poète comme
prince du théâtre au XVP siècle ; disons seule-
ment, pour en finir avec TAngleterre, que la
littérature protestante, ouverte par Luther, vit
briller au premier rang Knox et Buchanan, ami»
de Théodore de Bèze , Thomas More , ce Surrey
— 313— ' ^^
qui^ au dire de Pope^ fut emprisonne par Henri
VIII, pour avoir fait gras, et d'autres nobles per-
sonnages, tels que Lord Rochford qui partagea
le sort de sa sœur Anne de Boley n , sir Walter
Raleig y le comte d'Essex et enfin Spenser , le der-
nier et le plus célèbre.
Spenser est conside'ré comme le premier chaî-
non de la littérature moderne en Angleterre , et
cependant sa poésie tient plutôt de celle du
Roman de la Rose et du Roland furieux que de
l'école moderne. Spenser, pauvre et rebuté de scg
parents , des protecteurs qu il avait recherchés ,
des écoles où il avait en vain sollicité des grades ^^
et enfin de la dame de ses pensées , Spenser , la
honte et le désespoir dans le cœur , sentit y naître
le génie ! il se fit poète , et fut admiré.
Son premier ouvrage Shepherd*s Calendar ,
le Calendrier du Berger j l'ayant mis en évi-
dence^, il en profita pour sortir de la misère en
dédiant à lord Sidney, à Elisabeth elle-même,
ses autres ouvrages parmi lesquels les Anglais
citent , avec orgueil , la Reine des Fées , Fairiè
Queen^ allégorie perpétuelle, incompréhensible
pour tout autre qu'un Anglais du XVI* siècle,
mais riche de poésie , féconde et variée comme
VOrlando,
Bien autre ëtait à cette ^oquè la fitCératùré dé
rAllemagne.
A voir rAllemagne actuelle , et naiénié FAlié-
magne des niehelungen ^^ on ne la soupçonnerait
pas d'avoir e'té, au XVP siècle, une nation gaie,
celle de TEurope, peut-être, qui prisait le plus
les contes burlesques et drolatiques' à Tëpoqûe
où le sërieux y pénétra avec Luther. Un dernier
èflbrl fut tentd pour ressaisir là gahé qui s'é-
chappait, et rien nY^st plus curieux que ce d^
bordemcnt de satires contre le clergë que semolait
autoriser et provoquer la reTorme naissante,
mais qui ne brillent pas toutes par un goût pur
et sévère, ClausNarr, Kurz-von , s^étàient fait
alors une position littéraire égale à celle qu'occu •
pait en France notre Rabelais ; les aventures dn
curé de Galemberg^ du moine Rush et les bons
tours du curé Amis étaient , grâce aux bienfaits
• . . . •
de la presse naissante , dans tous les chftteaux et
dans toutes les tavernes ; toujours entre la pipe et
le pot de bière. Donnons en quelques mots unfe
idée de ces contes et de la vie du curé Amii. Ce
joyeux compère, plus riche d'esptit que de re-
, , exiguïté
de sa bourse le mettait sans cesse aux expédients y
— 545 —
et grâces à la crédule bonhomie dés Alléffiâîidâ ,
il réussissait toujours. Ainsi, il est reçu dâfi^ lib
château où il fait très-bonne cnère , et coiifche
près du bufiFet; la carcasse à^un chapon y gisait
dans un plat : le cure, saisi d'une idée lumineuse,
va au marché en acheter un fort beau et plein
de vie , il le met à la place des os du défunt , et
se recouche. Grande merveille , le matin ! — Lé
bhapon est ressuscité , notre hôte est un saint !
— L'histohe court la ville , et le curé , pressé de
monter en chaire , avoue que chaque fois qu'un
bienfait y une simple aumône lui ont été donnés^
Dieu Ta rendu au centuple à ses bienfaiteurs..*.
Le lendemain , il partit du château , pliant sous
le poids des pièces d'argent , et riaiit dé tout soîî
coeur.
Ainsi decenttourstousdumémegenre, où legro-
tesque le dispute au bouffon. L'Allemagne , on le
voit , traitait ses curés comme la France ses clercs
de la Basoche , et TEspagne ses barbiers ; c'était
un type comme nous avons vu de nos jours les
Mayeux et les Macaires; mais les curés n'étaient
pas les seuls : de toutes les gentillesses gernia-
liiques , la plus exquise est la création des âchild
Bourgeois : tout ce qui se fait de ridicule, de fou,
d'absurde en Geirnanie leur est attribué, c'est
Tidéal de la bêtise , comme l'ont été Turcoing en
— 31G —
Flandre, Gothain en Angleterre et la Cham-
pagne en France ^^. Ces bons paysans^ dit la
légende , s'en vont à la foire à pied de peur de
nuire à la santé de leur jument, ils répondent
eux-mômcs qu'ils ne sont ^pas chez eux , ils em-
portent h\ lumière du soleil à la cave dans une
boîte , et sont surpris de ne plus l'y retrouver,
ils descendent de la montagne a bras une meule
de moulin qu'ils n'eussent eu qu'à rouler, et, sur
l'observation qu'on leur en faite moitié chemin,
ils la remontent à grande peine pour la lancer de
plus haut.... Nous pourrions raconter encore de
quelle manière s'y prit un énorme chat pour
détruire les principales maisons de la ville, la
grande guerre des Schild Bourgeois contre le
matou y les traités diplomatiques auxquels celte
guerre donna lieu, et tout le reste de cette facé-
tieuse Iliade , mais nous préférons renvoyer nos
lecteurs au iSarenburgh. En les y lisant, sans
cesse répétées et renouvelées sous toutes les
formes , qu'on ne raille pas de voir tant de puéri-
lités recueillies par tant de graves savants : ces
joyeux enfantillages, qu'ont remplacés des puéri-
lités rêveuses et tristes , tiennent leur place dans
l'histoire des nations. N'est-il pas curieux de voir
les métamorphoses que leur génie a subies k
travers les âges?
- 5n -
Toutefois , ce serait se faire une fausse îdëe du
caractère de la littérature allemande que de sup-
poser qu'elle est toujours ainsi burlesque et rieuse*
Les Allemands du siècle de Lutlier étaient oc-
cupc?s (le soins trop importants pour s'amuser
exclusivement de ces contes joyeux : il y avait
le côté sérieux de la nation près du côté burlesque,
et si on lisait les puerilia de Stans Sachs dans les
tavernes et les échoppes , on lisait volontiers, et
non sans enthousiasme, le Teuerdank de Mel-
cliior Pfinzing dans les salons aristocratiques.
Le premier , sorte d'allégorie dans le goût du
roman de la Rose , était dû à la plume féconde
du secrétaire de Tempereur Maximilien Y^j
l'autre à celle d'un cordonnier qui chanta pour
le peuple, et eut une immense renommée ^^
Stans Sachs mourut en 1576, après avoir été
tailleur et cordonnier, après s'être marié deux
fois , et la seeonde à Tûge de 66 ans, avec sept
enfants; après avoir fait comme il s'en vante lui-
même , 10,840 pièces de vers **.
La vie de Sachs donne une idée de ses écrits :
ce poète ouvrier fut long-temps l'objet du dédain
de crîtques allemands; le célèbre Wiland^
frappé de l'injustice de ses compatriotes, se jeta,
avec quelques autres critiques, dans un excès
contraire, et prêta au cordonnier Nurenburgeois^
— 548 -*
upe supériorité cju'il n'avait réellement pas. Les
imitateurs de Sachs furent nombreux, et le
nombi*e de ce qu^on nommait alors les maîtres en
chant s'augmenta tellement que la seule ville de
Nurenberg en comptait 250 au milieu du XVP
siècle.
Pendant ce temps , un rigorisme extrc^me por-
tait les poètes protestants de la haute classe à nf
s'occuper que de matières religieuses, et pen-
dant que les bûchers se dressaient en Espagne et
en Italie, l'Allemagne^ où régnait une sorte de
liberté de conscience, ne retentissait que de
chants joyeux et de cantiques sacrés.
Luther, lui-même , composait et chantait, bien
que la poésie , séparée de l'empire religieux q^'^
lui attribuait, fût à ses yeux chose bien futilej
et peu digne d'occuper un esprit penseur.
La poésie didactique et les fables eurent aussi
quelques auteurs : on cite , parmi les plus célèbres,
George RoUenhagcn^ Sébastien Brandy Thomas
Murner, Jean Fischart, Ulric de Hutten, Biir
Kart Waldis etc i*. Ce dernier eut le mérite de
prêter à ses nombreuses fables un charme et upg
naïveté qui appartiennent peu à son siècle.
Le nord) moins civilisé de l'Europe , suivait
peu à peu les traces des nations plus avancée^ ;
En Hongrie, au XY^ siècle^ Rilassa et Rincii
çQ^pOf^WPt; dfi9 ode3 p^r dç3 sujets sacres ^ït^i^
.005 po^$ie$ f^ i^esseatent dQ Tiniperfectip)} 4^
IfiQgagie et d/e la 4iffîicqlté du mètre. Les œuyjrs^
dfi Boi ajenicza et d|p jGronc^zi^ et la traduction qi^
y^rs hongrois de Pierre de Pros^ence et de Iq
J?i&//£; Hiagi^elonne^ pressentent; les méniçs défaits,
L^ XV^ sièçl^ vit naître le drame hongrois^
qui début^ par des chansons dramaticjues et de?
difiilogjues eu vers. Dans ce siècle^ aux chants
gjiferriiçrs succédèrent les chroniques en vers quj
trjf itèrent cJeThist^re de la Hongrie , et des sujets
IfBS plus remarquables de Taptiquité. La première^
écrite par Szekely en ^559^ est conservée dan^
les archives du pays. Temesvari, Haltajr et
Xuiçdi %^^nt liçs sectatevirs et les imitateurs
de S;e;e]kely . Piins ces poèmes , comme dans les
ppësies lyriqu^QSy le ^tyle manque de gi*&ce^ le vers
^ dur / et |e mèti*^ n^est soumis à aucune ^àgle.
L'art dramatique , que nous avons éxjé si long-
t^ps réduits à chercher dans son expression la
plus obscure , la moins développée , dans la lé-
gende dçs premiers Chrétiens^ dans la tradition
p^ïenye des ^arbares , qui s'est recouvert des plij
de la statuaire, s'est réfléchi dans les vitraux des
églises ; puis ^ grandissant à Tombre du cloître ^
DfiMa enfin aux mains des confrëries laïques; l'art
dramatique touche à son complet développement:
marchant à peu près de front en France et en An-
gleterre, on Yoit dans les deux nations la BAk^
YÉvan^lej et jusqu'aux livres apocryphes dé-
pouillés et mis à sec, tant était grand alors comme
aujourd'hui le besoin du nouveau. De temps en
temps on voyait l'esprit inquiet des auteurs es-
sayer de secouer le joug clérical , et se lancer dans
le profane. C'est ainsi qu'on vit représenter à Or-
léans^ en 1^50, le mystère de la guerre de Troie!
immense innovation qui^ peu à peu, nous a amené
réternelle famille des Atrides, et nous a conduit
jusqu'à Racine...
Au Xy* siècle, les spectacles commencent à être
accompagnés de paroles , et ces paroles sont des
vers! En 1^32^ Henri YI, après son couronne-
ment à Paris, fît son entrée triomphale à Londres;
il y eut à cette occasion des représentations mê-
lées de paroles et de spectacles allégoriques; mais
les personnages religieux dominaient. Waton
croit que ces vers furent écrits par Lydgate. On
vit , entre autres symboles dramatiques, un géant
qui représentait le courage religieux; Enoch et
Ely , la sainte Trinité , la Miséricorde, la Vérîté|
les sept arts libéraux personnifiés et précédés de
leur reine dame Sapience , qui parla en vers |
parurent successivement dans cet intermède royal.
En 1474^ le prince Edouard^ fils d'EdouardIV,
visita Coventr j , et eut à son entrée des reprë-
sentations théâtrales* Edouard-le-Gonfesseur^ puis
saint Georges, armé de pied en cap^ lui adressè-
rent des stances : il y eut un combat entre saint
Georges et le Dragon.
En France , les entrées de Charles VIÏ et de
Louis XI furent surtout remarquables. par la quan-
tité des personnages qui y jouèrent un rôle. A
celle de Louis XI ^ en ib6i , on vit trois femmes
nues représentant des sirènes ; àFentrée de Charles-
le-Téméraire à Lille , le Jugement de Paris fut
représenté par trois femmes. Colonia , dans son
histoire de Lyon, rapporte qu'au passage de
Louis Xn ei| 1^99 , après son mariage avec Anne
de Bretagne , les confréries de la Passion de cette
ville jouèrent la F'ie de sainte Madelaine. Les-
Pères Augustins avaient fait construire un grand
tjiéâtre aux Terreaux : on y joua la f^ie de saint
Nicolas de Tolentin.
Pendant les XIV et XV' siècles, ces pièces
théâtrales, quelque î^l le nom qu'on leur donna,
furent représentées sur les marchés et les places.
L'Italie fut la première à bâtir un th^tré qui se
rapprochait de celui des ancienfs. En 1499 , un
Lyonnais fit construire un théâtre où il y avait
V. SI
des logis et des balcons C'est ainsi que, pea
à peu, le progrès du luxe et des lumières est arrive
jusqu'au théâtre Saint- Charles de Naples et à
V Opéra de Paris. Jje même progrès se fait aper-
cevoir dans les décors et les costumes : ces der-
niers cependant sont restés en arrière en France
bien plus long-temps que ne semblait le compor-
ter le degré de notre civilisation*
Le nombre des acteurs était prodigieux tant
que les représentations restèrent en plein vent ;
on en compta jusqu'à six cents , dont cent an
moins parlaient. ••• Tel fut le drame deSaûljouë
en 1571 j et dont la représentation dura quatre
jours ^K
Les antécédents du théâtre espagnol lai sont
communs avec tous les autres théâtres des pajs
échappés à la domination romaine ; il se rattadie
à l'antiquité par Tîntermédiaire du moyen-âge.
Mais une fois qu'il a quitté son point de départ ,
le théâtre espagnol va toujours en a'âotgaanl; de
plus en plus des formes antiques ^ jusqa^k.ce qu'fl
devienne lexpression originale d^ la civiljaatitta
nouvelle du milieu de laquelle il est sorti.
On peut placer, à la fin du XYF siècle , les
conunencements vraiment dramatiques du théfttilB
espagnol. Nous le verrons sortir des habitudes
religieuses et sociales du peuple^ sans impul*
— sss —
sîon étrangère^ sans intervention savante, de
sorte que la popularité en restera le principal
caractère. Ce ne sont d^abord que des dialogues
rustiques , des ëglogues pastorales , où des bergers
s'entretiennent entre eux au sujet des fêtes que
l'on va cëlëbrer. Ces drames , ou plutôt ces rëcits
dialogues , étaient écrits en mètres lyriques , ac-
compagnes de chants rustiques , viUancicos , qui
répondaient à nos joyeux noëls. Une fois que les
populations eurent pris goût à ces sortes de
drames, on ne tarda pas à les appliquer à des
sujets tires de la vie commune , à des faits mon*
dains et profanes ^ qui ouvrirent à Part naissant
une voie nouvelle. Ainsi dés le commencement,
le théâtre espagnol se divise en deux branches ^
le drame religieux et le drame profane ; mais » \
la différence des autres pays romans^ où le drame
profane prit le dessus , et finit bientôt par régner
seul , les deux branches dramatiques furent €ul«
tivées parallèlement en Espagne^ avec la môme
complaisance , avec le môme succès. Cette pre-
mière période peut être représentée par Lope de
Hueda^ qui mourut en 1560.
A partir de 1565 > on représenta un grand
xioiid)re de pièces classiques qui furent accueillies
Favorablement des classes élevées , et pendant une
TÎngtaine d'années , on n'entend plus parler du
drame populaire; mais il ne cessa pas pour cela
(rêtrc cultivé ; c'est même ù cette époque quMl
reçut la forme définitive qu'il a conservée. Cette
Jutte, dont il sortit vainqueur > le rendit plus
cher au peuple, et lui fit contracter de fortes
antipadiies pour le genre classique dont Tenvt*
hissement détruisait son existence populaire. Il
faudra plus tard une révolution pour rappeler le
drame classique en Espagne *^.
11 n'en était pas de même en Allemagne ; vonëe
aux mystères comme les autres parties de l'Eu-
rope, elle vit paraître, à la fin du XY^ siècle,
une traduction de Térence qui fit révolution.
Dès cette époque (Lutlier avait alors paru),
toutes les pièces religieuses^ qui furent repré-
sentées, furent des satyres. Ainsi, à Eisleben,
patrie de Luther , on jouait un mystère intitulé :
LE JOLI JEU DE DAME JUTTA qui fut pCLpC ^ et qui,
étant à Rome sur le Saint-Siège y fit un poupon *'.
C^est la fable de la papesse Jeanne , long-temps
exploitée par les partisans de la réforme. Ce
mystère qu'on décora plus tard du nom de tra*
gédie est un salmigondis incroyable : on y voit
figurer neuf démons^ Lîtlis, mère du Diable,
Satan , Astarols , la papesse , son amant , un pos*
sédé , Jésus-Christ , la Vierge , saint Nicolas , dcft
cardinaux, des anges et enfin la Mort
— 5t5 —
L'éditeur de ce chef-d'œuvre assure qu'il avait
ëté représenté en 1480, et que Tauteur, dont il
possède le manuscrit original sur parchemin,
s'appelait Théodoric Schernebeck. Gottsched re-
garde cette pièce comme la plus ancienne tragé-
die allemande imprimée ; il Ta reproduite dans
le second volume de son Histoire de fart dra-
matique en Allemagne. Voici le début de la pre-
mière scène traduit fidèlement, sauf quelques
noms de diables intraduisibles :
SATAN.
Allons, allons, mes diableteaax,
Accoarez des monts et des plaines ,
Du fond des bois, du sein des eaux,
Des près, des buissons, des fontaines ;
Accourez du fond des roseaux ^
Venez de tous les coins du monde :
N'attendez pas que je vous gronde !
Joli troupeau de Lucifer,
Avec moi grillé dans l'enfer,
N'attendez pas que je vous gronde.
Venez de tous les coins du monde
En mon honneur danser la ronde
Autour de mon sceptre de fer.
C'est un possédé du démon qui découvre et
trahit la grossesse de madame Jutta; elle ac-
couche , meurt et tombe dans l'enfer , d'où elle ne
tarde pas à sortir par rinterces3ion de la vierge
Marie.
Tout cela n'est pas plus bizarre que beaucoup
de pièces de Lope et de Galdëron j postérieurs à
ce Schernebeck de plus d'un siècle. Il y a déjà,
dans cette entrée et cette apostrophe de Satan,
quelque chose du génie qui mit sur le théâtre
les sorcières de Macbetli et les fantàmes d^
songes de Richard III.
Bientôt on s'accoutuma à revêtir de la forme
dramatique tous les événements ^ toutes les idées.
Un homme, tant soit peu connu, faisait-il un
pèlerinage à Jérusalem, lisait-on une histoire
dans la mjthologie ou dans la l^ende dorée| vite
on en faisait une comédie.
Ici , nous retrouvons le maître chanteur de
Nuremberg, ce célèbre cordonnier qui compta
parmi ses œuvres 52 comédies et 28 tragédies
profanes, 26 comédies et i07 tragédies spiri^
tuelles ^^... Et qui y jouait lui-même le principal
rôle.
Voici , pour seul échantillon , le sujet de Tune
des nombreuses comédies de Sachs. On yerni
quUl ne lui a pas fallu de bien grands efforts de
génie pour composer tant de chefs d'oeuvres : il
est vrai que ce qu'on y remarquait , et ce qu'on
y recherchait le plus^ était cette intarifisaUe
gaité qui dëridâit leà Allemands quelque pea fa-
tigues des discussions thëologiques amenées par
la réforme :
<t Les enfants dEve , dissemblables entre
eux ^ et comment Dieu y notre Seigneur^ leur
adresse la parole. » (155S). Le personnage qui
récite le prologue nous apprend que le sujet de
la pièce a été traité en latin par Philippe Mé-
j'anchton. On le retrouve ;, en effet , dans le tome
1*' (p. 342) de sa correspondance. Lettre ùu
comte Jean de Wied. Eve , dit Mélanchton , re-
gardant un matin à sa fetiétre, vit venir le
bon Dieu avec une escorte d'anges. Comme c'é-
tait fête le lendemain) elle avait commencé à
débarberuiller ses enfants ^ mais tous ne l'étaient
pas encore. Craignant donc qàe le bon Dieu ne
les vit sales et malpropres, elle les fit cacher
dans un tas de foin et de paille qui se trouvait là
pour les bestiaux; ensuite, ayant fait ranger les
autres en haie, elle leur montre comment ils
doivent saluer le bon Dieu après elle^ en baisant
leur main , et fléchissant un peu le genou. Us
souhaiteront le bonjour, et puis s'en retourneront
à leur place , où ils se tiendront en silence. La
leçon ainsi faite , le Bon Dieu entre ; tout S6 passe
selon le souhait de la bonne mère, et Dieu, en
s'en allant 9 lui donne de grands éloges pour
avoir* fait la toilette de aes enfanta ^ et surtont
pour les avoir habitues de bonne heure à la
politesse.
Hans Sachs a brodé sur ce thème les plus
énormes et les plus ridicules anachronismes :
Dieu, dans sa comédiei interroge les fils d*Àdam
sur le catéchisme de Lutlier ; Abel répond par*
faitement, et Gain tout à rebours. On demande à
Gain son Credo : il embrouille le Credo avec le
Pater; on lui demande le Pater; dès les pre-
miers mots il confond la (in avec le commence-
ment et travestit la prière d'une façon iinpie.
Âbcl parle comme un professeur de théologie de
la confession d'Augsbourg , Gain comme un petit
polisson qui ne veut rien apprendrci etc. ^K
Telle est en Allemagne la ))arodie des saints
mystères représentés depuis deux siècles dans
TEurope chrétienne. Jjh parodie y tua Fart nais-
sant... A cette époque Tempire Grec venait de
s'écrouler, ses plus illustres débris remplissaient
ritalie et donnaient en retour d'une noble hos*
pitalité, les manuscrits d'Aristophane^ de Mé-
nandre, d'Eschyle, de Sophocle et d'Euripide ; on
les connut I on les étudia , on les admira^ et à
compter de ce moment il n y eut plus dans l'Eu-
rope de théâtre national; toute œuvre postérieure
au XVr siècle adopta systématiquement la fonne
— 519 —
et l'allure grecques^ môme quand le fond ëtaît
tire d'une autre histoire. Il en fut de la tragédie
comme de Tarchitecture : la renaissance tua le
gothique.
Les merveilleuses compositions de Rotrou, de
Corneille et de Racine, sanctionnèrent la révolu-
tion qui avait détrôné l'art national, et, comme
le dit M. Alexandre Dumas, leur poésie fut l'huile
sainte qui sacra roi l'art étranger. La civilisation
du Christ fut reniée pour celle de Jupiter : nos
vierges, nos martyrs et nos guerriers firent place
aux demi-dieux et aux héros du paganisme : ce
fut un culte splendide^ mais ce n'en fut pas moins
une idolâtrie.
Il n'y eut point jusqu'à Molière, cet apôtre de
la comédie populaire, qui ne se fit un instant
apostat; mais^ pareil aux Israélites dans le désert,
il ne perdit jamais de vue la colonne de feu : elle
le conduisit à la terre promise.
L'Angleterre seule opposait encore au XVP
siècle un colosse au génie envahissant des So*
phocle et des Euripide ^^ : Shakespeare , objet
d'une admiration si juste, si grande, si cons-
tante en Angleterre, et si peu compris dans
notre France. C'est que le grand poète était
surtout national ; on a beau retourner et méditer
un mot de Shakespeare, jamais on ne peut le con-
cevoir dit d'âne autre manière, taqt ches loi h
pensée et Pexpression se lient étroitement. Cette
adaptation si iotime, entre ce qu'il penae et oa
qu'il dit, a rendu Shakespeare en Angleterre 1V>-
riginal d'un genre dont nul autre n'a approdié.
Il ne faut pas, dit un judicieux critiqueî lui de»
mander des leçons de rhctoriquei il a au con»
traire un mépris souverain pour les précautions
ordinaires des formes de la phrase et de la pé-
riode. Son vers , tout brut , et sans quHl le re-
manie, semble sortir visiblement du fond d*ane
âme profondément sensible et convaincue. Il fiiut
aller chercher dans les écrits de ce grand poète
Fexempie d'un langage, naturel et franC| toujoun
l'esclave de sa pensée. Jamais Shakespeare n'ap-
prit à personne à écrire. Il est trop grand mattre
pour être bon professeur. Un trait de son genrCi
et ce n'est pas le moins frappant, c'est l'espritt le
sarcasme, le sel de son discours. On ne sait, à y
regarder de près, s'il y avait plus de sérieux que
de gaîté dans ce cœiur qui sentait si vivement.
Du reste^ son style s'adapte parfaitement aux ca*
ractères : qu'il fasse parler un vieillard ou un^
jeune fille, un roi^ un guerrier, un honune gros-
sier, et même un être imaginaire, une fée ou
spectre, à Tinstant il leur donne et il leur
serve un langage spécial.
U résulte de lè que SJhfJiespeare e^t dbaolument
intraduisible; les efforts înouiâ et inutiles des
écrivains français en sont la preuve. Traduire
Shakespeare, c'est le dénaturer; le préciser, en
style moderne, c'est le travestir. C'est que
Shakespeare n'était point un auteur^ il ci^éa la
tragédie comme Molière créa plus tard la co-
médie : en la jouant, il la sentait arriver dans
son cœur, sur ses lèvres, et il écrivait... Aussi 1^
Français ont-ils long-temps méconnu Shakespeare
comme les Allemands et les Anglai3 ont méconnu
notre Molière ^\
— 35Î —
CHAPITRE DOUZIEME.
Il ja dans rarchiteclurc religieuse deux choses;
le fonds et la forme. La première doit-étre im-
muable ^ Tautre change à tout vent. C'est toujours
la même charpente intérieure^ la même disposi-
tion des parties, et comme le dit un illustre ëcri-
yain, quelle que soit l'enveloppe sculptée et
brodée d*une cathédrale^ on retrouve toujours
dessous, au moins k Pétat de germe et de rudi-
ment, la basilique romaine. Elle se développe
éternellement sur le sol selon la même loi : ce sont
imperturbablement deux nefs qui s'entrecoupent
en croix, et dont Tcxtrémité supérieure^ arrondie
en absides, forme le chœur; ce sont toujours des
bas-côtés, pour les processions intérieures, sortes
de promenoirs latéraux où la nef principale se
dégorge par les entrecolonnements. Gela posë^ le
nombre des chapelles, des portails, des clochers,
des aiguilles, se modilic à Tinfini, suivant la fan-
taisie du siùclc, du peuple, de l'art. Le service
du culte une fois pourvu et assuré, rarchiteclurc
— 333 —
fait ce que bon lui semble. Statues, vitraux, ro-
saces, arabesques, dentelures, chapiteaux, bas-
reliefs, elle combine toutes ces imaginations. De
là la prodigieuse yariëtë extërieure de ces (édi-
fices au fond desquels rëside tant d'ordre et d'u«
nite'. Le tronc de Tarbre est immuable ; la vë-
gétatiou est capricieuse.
Ainsi, durant les six mille premières années
du inonde rarchitecture a étë la grande écriture
du genre humain, et cela est tellement vrai que
non seulement tout symbole religieux, mais en-
core toute pensde humaine a sa page dans ce livre
immense.....'
Durant la première période du moyen-âge, pen-
dant que la théocratie organise TEurope, on voit
peu à peu, sous le souffle du Christianisme et sous
la main des barbares à demi civilises, surgir des
ruines des architectures grecque et romaine,
cette mystérieuse architecture romane, emblème
du catholicisme pur et immuable de l'unité pa-
pale. Toute la pensée d'alors est écrite dans ce
sombre style roman. On y sent partout Tautorité,
l'impénétrable, l'absolu Grégoire VII , partout le
prêtre, la caste, jamais le peuple ; mais les croisades
arrivent; c'est un grand mouvement populaire,
source de l'esprit de liberté, l'autorité s'ébranle,
l'unité se biQTnrque, la féodalité avait demandé à
partagêr arec la thëocralie^ le pcniplc est Ik^
maintenant qui Ta se faire la part du lion : li
seigneurie perce sous le sacerdoce, la commune
sous la seigneurie, la face de l'Europe est cfaangëei
celle de l'architecture Test aussi : comme la dri-
lisation elle a tourne la page, et l'esprit nouveau
des temps la trouve prcte à ëcrire sous sa «dictëe.
Elle est revenue des croisades avec Togî ve comme
les nations avec la liberté. Alors, tandis que Rome
se démembre peu à peu, Tarchitecture romane
meurt. L*hiërogljrphe déserte la cathédrale et sW
va blasonner le donjon. La cathédrale elle-méme|
cet édifice autrefois si dogmatique^ envahie dé-
sormais par la bourgeoisie, par la commune^ par
la liberté, échappe au prêtre et tombe au pouvoir
de Fartiste. L^artiste la bâtit à sa guise. Adieu le
mystère, le mythe, la loi. Voici la fantaisie et le
caprice. Pourvu que le prêtre ait jsa basilique et
son autel, il n^aura rien à dire. Les quatre murs
sont à l'artiste. Le livre architectural n'appartient
plus au sacerdoce, h la religion, à Rome; il estli
l'imagination , à la poésie , au peuplé. De là les
transformations rapides et innombrables de cette
architecture qui n'a que trois siècles, si frappantes'
après rimmobilité stagnante de Tardiitecturé nn
mane qui en a six ou sept. ti*art cependant
marche à pas de géant. Le génie et l'originalité
populaires font la besogne qae feraient les ^véqùes.
Chaque race ëcrit en passant sa ligne sur le livre;
elle rature les vieux hiëroglyphes romans sur le
frontispice des cathédrales, et c'est tout au plus si
l'on voit encore le dogme percer ça et là sous le
nouveau symbole qu'elle y dépose. La draperie
populaire laisse à peine deviner Tossement reli-
gieux. On ne saurait se faire une idée des licences
que prennent alors les architectes même envers
l'Eglise : c'est l'aventure de Noë sculptée en
toutes lettres ^ comme sous le grand portail de
Bourges; c'est un moine bachique, à oreilles
d'Ane et le verre en main, riant au nez de toute
une communauté, comme sur le lavabo de l'abbaye
de Blosseville. Il existe à cette époque pour la
pensée éciûtc en pierre, un privilège tout-à-fait
comparable à notice liberté actuelle de la presse.
C'est la liberté de l'architecture.
Au XV* siècle tout change.
La pensée humaine découvre un moyen de se
perpétuer, non seulement plus durable et plus rt^
sifilant queTarchitecture, mais encore plus simple
et plus facile. L'architecture est détrônée, elle se
dépouille et s'effeuille^ elle n'exprime plus rien,
pas même le souvenir de l'art d'un autre temps*
Réduite à dle-méme^ abandonnée des autres arts
parce que la pensée humaine l'abandonne^ elle
— 356 —
appdle des manœuvres à défaut d'artistes. La vitre
remplace le vitrail. Le tailleur de pierre succède
au sculpteur. Adieu toute sève, toute originalité,
toute vie> toute intelligence. Elle se traîne d'a-
telier en atelier, de copie en copie, Michel-Ange^
qui^ dès le XYP siècle, la sentait sans doate
mourir, avait eu une dernière idée, une idée de dé-
sespoîr. Ce Titan de Part avait entassé le Pantfaécm
sur le Partkénon, et fait Saint-Pierre-de-Ronie.
Grande œuvre qui méritait de rester unique^ dei^
uière originalité de Tarchitecture, signature d'un
artiste géant au bas du colossal registre de pierre
qui se fermait. Michel- Ange mort, que &it cette
misérable architecture qui se survivait à ell^
même à Fétat de spectre et d'ombre ? Elle proid
Saint-Pierre-de-Rome, et le calque, et le parodie...
mais plus rien d'original * !
Il ue parait pas qu'aucune modification réelle
ait été introduite au XY^ siècle dans le plan des
Eglises. La forme générale demeura la même jus-
qu'au temps où Ton abandonna le style ogival
pour revenir à Parchitecture classique. Nous n*eih .
trerons pas, à ce sujet, dans des détails que M
comporte pas notre œuvre. Nous nous contente-.
rons de renvoyer nos lecteurs, soit à PexceUent
cours de M. de Gaumont, sur les antiquités- ttio*
numentales, soit aux basiliques elles-mêmes qu^on ^
-i5S7 -r
trouve encore avec profusion dans TEurope chrë-*
tienne, et notamment à Rouen, Bayeux^ Lisieux,
Saint-Lô^ Gaen, Nantes^ pour le XV' siècle ; à
Dieppe , É vreux , Saint * Quentin , Beau vais ,
Âlençon, Chartres, Tours, Poitiers, Albj, etc.
pour leXVIe.
En général, les Eglises du XY siècle furent
moins grandes et moins élevées que cdles du XIY<'
et la profusion de penacles et de figures pyramidales
qui les décorent ne peut dissimuler entièrement
ce défaut capital. On ne peut nier cependant que
le style ogival de la troisième époque n'oflte de
grandes beautés, et il existe des monuments d'une
rare élégance et d'une exécution admirable qui
appartiennent tout entiers à ce style.
Outre les sommes considérables que le clergé
consacrait à la construction -et à la réparation
des Eglises, l'usage où l'on était d'accorder les
grâces spirituelles à ceux qui contribuaient aux dé-
penses fournissait de grandes ressources au XV^
siècle^ comme dans les siècles précédents s. A
Rouen, Tabbaye de Saint-Ouen fut obligée plu*-
sieurs fois, malgré ses immenses domaines, d'avoir
recours à ce moyen pour la continuation des tra-
vaux de sa magnifique Eglise.
Cependant, vers la fin du XV^ siècle le zèle
des fidèles comnoençait à se lasser^ et quelquefois
V. 22
il fallait le stimuler en accordant des permissions
nouvelles, en adoucissant sous quelque rapport la
sëvérité des abstinences.
Tout le monde sait que la tour qui termine la
façade de la cathédrale de Rouen^ au aud^ fut
construite au moyen des aumônes offertes par les
fidèles qui obtinrent la permission de manger du
beurre pendant le carême'. Nous pourrions citer
des concessions du même genre faites pour de
semblables motifs dans divers diocèses.
Les artistes étaient nombreux et habiles^ mais
au zèle religieux qui les animait aux XIW et XIV°
siècles^ vintsc joindre un autre sentiment^ l'amour-
propre et le désir de briller. S ils travaillaient
pour Tamour de Tart et pour la gloire de Dieu
ils pensaient aussi à leur propre gloire.
Ce fut au XV''' siècle que les architectes habiles
formèrent en Alsace et en Allemagne des sociétës
différentes de celles qui avaient existé et qu^ils
voulurent se distinguer des autres en créant des
loges maçofiigues .
Les diflérences entre Tarchitecture du XY*
siècle et celle du XYP sont si peu de choee,
qu'elles ne sont appréciables qu'aux jeux (fan
observateur attentif. U s'établissait en FrancCi en
Angleterre et en Allemagne» vers la fin do XV*
siècle, un système de décoration monmnentale qui
— SS9 —
consistait surtout à surcharger de ciselures toutes
les parties des édifices et à substituer aux co-
lonnes et aux entablements un nombre considé*
rable de filets et de nervures. Le dernier âge du
stjle ogival était celui des travaux partiels, des
restaurations, des retouches et des substructions.
Les artistes s'attachaient particulièrement à rendre
les détails d'ornement avec une extrême finesse :
et ne pouvant élever de grandes constructions^
ils produisaient des morceaux d'une élégance ad-
mirable, d'une exécution éblouissante *. Mais le
stjle ogival, après avoir parcouru les diverses
périodes de perfectionnement et de dégénérâtion,
qui sont le lot de toute œuvre humaine, touchait
enfin à son terme, et la seconde moitié du XVP
siècle vit le plein cintre, abandonné depuis le
XIP siècle, reprendre le dessus.., une immense
révolution s'opéra alors dans Tarchitecture.
La découverte des manuscrits de Vitruvé, les
travaux d'Albertî, de Brunelleschî, et de plusieurs
autres architectes italiens ; le goût qui s^était ma-
nifesté si ouvertement pour l'antiquité classique,
à la fin du XV® siècle et au commencement du
XVP; enfin, cet esprit d'innovation et de réforme
qui fermentait dans la société , aussi bien parmi
les artistes que parmi les théologiens^ tout avait
préparé les esprits pour ce grand changement
— 540 —
qui, clans nos contrées, s'opér i rinoipaicmcnt
sous les rognes de Louis XII el de François ^*^
De même qu'au Xir sièele une aix^hitecture de
transition s'était formée lorsqu'on avait abandonné
le cintre pour Fogive, on vit paraître^ lorsqu^on
revint au cintre, un style mixte résultant de la
combinaison des formes classiques avec les orne-
ments du XV^ siècle. Le plein cintre romain se
montra couvert de la riche parure du style ogival
quaternaire. C'est ce style mixte qu'on appelle
architecture de la renaissance , parce que dès
lors y on regarda le moyen âge comme un temps
d'ignoranee et de barbarie.
L*abside de TEglise Saint-Pierre et celle de
Notre-Dame à Caen, la chapelle de rancien
ëvéché de Uayeux , le portail de l'Eglise Trinitë
à Falaise peuvent fournir des exemples de style
de la renaissance dos le milieu du XYP siècle.
Cette architecture se dégage des accessoires qu^elle
avait empruntés au style ogival ; c'est aussi à peu
près à cette époque que ce dernier style qui avait
continué d'être usité dans les monuments reli-
gieux concurremment avec celui de la renais-
sance, cesse d'être employé, et on peut fixer
approximativement à 1550 le terme de la përiode
ogivale.
En i^ésumé, on peut dire que les premières
Eglises ont été calquëes sur les basiliques ro*
maînes, que rarchîtecture usitée en France de-
puis le V* siècle n^était elle-même que rarchî-
tecture romaine plus ou moins altérée , qu*elle
a subi (le nombreuses modifications au XF et au
XIP siècle ; enfin , que le style ogival , adopté à
celte époque, après avoir brillé d'un vif éclat , a
gi*aduellement déchu dans le XV* siècle , et a été
abandonné dans le XVP pour celui de la renais-
sance dont nous suivrons la destinée dans le vo-
lume suivant ^.
Quelle époque pour les arts que celle qui a vu
naître Léonard de Vinci , le Perugin , Volterre ,
del Piombo , le Véronèse , Jules Romain , Titien ,
Corrège , del Sarto , Primatice , Parmezan , les
trois Carrache, Albert Durer , ï. d'Udine , Cara-
vage, Bassan, Tintoret, Michel- Ange et enfin
Raphaël, se groupant autour de ce Léon X dont
la bienfaisante influence se fit sentir parmi les
peintres comme parmi les poètes et les savants.
Une autre circonstance contribua à donner
à l'art ce vif éclat j la découverte de la pein-
ture à rhuile : ce fut vers le milieu du XV* siècle
que Jean de Bruges , cherchant à composer un
vernis pour donner plus d'éclat à ses ouvrages.
reconnut que les couleurs s'unissaient plus
ment à riiuile qu'à Teau y qu'on avait employé
jusqu'alors; que les teintes en recevaient plus de.
force et les mélanges plus de douceur; que cette
peinture portait avec elle un lustre naturel , et
qu'elle avait une grande soliditë. C'est ainsi que
les plus belles découvertes ont été souvent le
produit du hasard, et non le fruit des combi»
naisons du génie : celle-ci causa une des révolu-
tions les ])lus célèbres et les plus pitxnptes dans
les annales des beaux -arts.
Un tableau peint à l'huile fut envoyé à Al-
phonse V^y roi de Naples. On ne put s'empêcher
de Tadmirer , et plusieurs peintres se rendirent en
Flandre pour en apprendre le secret. Jean de
Bruges en fit part à Antonello da Messina y qui le
douna à quelques uns de ses élevés. André del
Castagno en devint possesseur par un crime af-
freux, et rapporta à Florence^ où il peignit»
sous les auspices de Laurent de Médicis^ la con-
juration et le supplice de Pazzi. Jean et Grentîe
Bell in furent ses rivaux à Venise , où ils repré^
sentèrent , en plusieurs tableaux y les événements
mémorables des guerres de la république contre
Tempereur Frédéric y en faveur du pape Alexan-
dre III , qui , en reconnaissance des services que
lui rendirent les Vénitiens , donna au doge le
droit d^ëpouser la mer. Peu de temps après^
André Verocchîo, qui eut pour disciples le Pe-
rugîn et Léonard de Vinci, se fit une réputation
par ses portraits ^ si ressemblants qu'on assurait
que pour parvenir à ce degré d'exatitude, il
prenait au moule les traits des personnes qui se
faisaient peindre.
Léonard excellait dans l'expression , et avait
une grande entente de l'ejBfet des lumières et des
ombres. On lui reproche d'avoir soigné les détails
de manière à altérer l'harmonie de l'ensemble,
d'avoir arrêté trop fortement les contours de ses
figures, et donné une couleur fausse à ses carac-
tères. Afilîgé de quelques tracasseries que ses
rivaux lui suscitèrent près de la cour de Rome ,
il quitta cette ville et se fixa en France, où il
inspira aux grands le goût de la peinture. Fran-
çois I*^ le combla de bienfaits et d'amitié, et il
mourut dans les bras de ce prince.
Dans le même temps, Michel-Ange Buona-
rotti , de Florence , architecte , peintre et sculp-
teur , faisait des pas immenses dans cette triple
carrière. Élève de Ghirlandaïo, il lutta contre
Léonard de Vinci , et surpassa bientôt son émulé
par la simplicité et la grandeur de sa composition ^
dont il ne reste qu'une gravure connue sous le
nom des grimpeurs. Il fit ensuite , d un bloc de
M. Vin mm
marbre qu*un artiste barbare avait essayé de
mettre en oeuvre , une figure colossale de David
pour le Palais de Justice de Florence; et sur
sa réputation , qui surpassait dëjà celle de tous
les artistes connus , le pape Jules II Tappelli à
Rome ^ et le chargea de l'érection de son mau-
solée. Michel-Ange entreprit avec ardeur ce mo-
nument immense, qui devait être composé de
quarantes figures; la statue de Moïse, remar-
quable par la beauté des formes et une étonnante
hardiesse d'exécution , fut terminée en peu de
temps, ainsi que plusieurs statues accessoires.
Jules n^ qui croyait que ce travail devait aller
aussi vite que sa bouillante imagination, parut
s'impatienter et se dégoûter d'un ouvrage aussi
dispendieux. Michel-Ange, mécontent de quel-
ques paroles mortifiantes , l'abandonna. Jules ne
put trouver d'artistes capables de terminer ce
que Michel- Ange avait si bien commencé^ et il
se vit obligé de menacer Florence de sa colère et
même d^une déclaration de guerre^ pour ravoir
son sculpteur. Michel-Ange jeta en bronie sa
statue j lui donna de la grandeur, de la majesté ,
un air de hardiesse et de courage , et lui mit en
main une épée au lieu de Févangile , par Texprés
conunandement du pape.
Raphaël Sanzio» d'Urbin, devint bientôt
— 5^ —
dans la peinture^ le rîyal redoutable de Michel-
Ange. Ne pauvre , son père l'avait d'abord occupe
à dessiner des pièces de faïence ; mais son gënie
ne pouvait s'arrêter à un si misérable travail j et
à peine eut-il aperçu les ouvrages du Perugin ,
qu'il vit s'ouvrir devant lui la carrière qu'il a
parcourue avec tant de gloire. Le Perugin lui
donna des leçons ^ et Raphaël adopta sa pianière.
Il la quitta dès qu'il eut. vu les cartons de Michel-
Ange et de Léonard de Vinci. Ëtonnë des beautés
qu'il y découvrit, il les étudia avec soin, réforma
la sécheresse de son pinceau et la roideur de ses
compositions, et parvînt, autant par ses études
que par les inspirations de la nature, à réunir la
grâce à la sublimité. Les progrès qu'il fit faire à
l'art^ et qui le portèrent à la perfection , furent si
rapides, et il y a une telle distance entre les ta-
bleaux qu'il peignit dans la manière du Perugin
et ceux qui font sa réputation , que Ton conçoit à
peine qu'ils soient de la même main.
Michel- Ange et Kaphaèl, divisés d'intérêt, le
furent aussi par la jalousie. Léon X parut mécon-
naître les talents de Michel-Ange, et réserva toute
sa bienveillance pour Raphaël , qui , chargé déjà
des fresques du Vatican, les continua sous son
pontificat. Michel-Ange, au contraire, qui peignait
les plafonds de la chapelle Siiçtine, abandonna ses
travaux , ou du moins ne les suivit qu'avec dëgoût.
II a représenté divers sujets de l'histoire sacrée
sons des formes gigantesques , et a donné aux
figures de prophètes un caractère tellement élevé
qu'il en est prcîsquo eflrayant.
Raphaël adoucit, dans ses compositions élé-
gantes et gracieuses, la hardiesse et la vigueur de
Michel -Ange : adroit courtisan, il eut soin de
ilatter le pape en représentant souvent ses actions
dans des sujets allégoricpies. Il orna de ses pro-
ductions immortelles lessalles et lesloges duVati**
can, eteomposa pour celles-ci une suite de tableaux
tirés de lliistoire sacrée , dans l'exécution desquels
il se lit aider par plusieurs de ses élèves, entre
autres : Jule Romain, Jean d'Udine et Polydore
de Caravage. Ses quatre tableaux principaux des
salles du Vatican sont : la Théologie^ la Phi-
losophic^ la Poésie et la Justice. Le sujet qui
constitue la première est la dispute sur les sacre-
ments, vaste tableau qui offre deux scènes dis-»
tîncles et qui pèche contre l'unité. Une lumière
étrangère éclaire les personnages divins qui rem-
j)lissent la partie supérieure de cette composition.
On y remarque des accessoires où Ton a employé
la dorure^ et d'autres défauts qui se ressentent de
la première manière de l'artiste. La philosophie
c:>t représentée par l'école d'Athènes, conception
admirable, traitée avec le talent le plus parfait.
On reconnaît la poésie à rAssemblëe des Muses et
des auteurs célèbres sur le Parnasse , où le peintre
s'est réservé une place à lui-même ; et le tableau
de la justice divisé , comme celui de la théologie ,
en deux scènes, rappelle l'établissement de la loi
canonique et celui de la loi civile. Grégoire IX
reineiiiknt les Décrétâtes à un avocat consistorial,
et Justinien donnant les Pandectes à Tribonîen.
Michel-Ange et Raphaël remplirent les temples
et les palais d'Italie de leurs chefs-d'œuvre, parmi
lesquels se font surtout admirer le Jugement der-
nier et la Transfiguration.
Michel' Ange vécut quatre-vingt-dix ans, Ra-
phaël mourut à trente-sept ans pleuré du pape,
des amis des arts et des artistes eux-mêmes qu'il
aidait de ses conseils et de sa fortune : il la partagea
toute entière entre ses élèves. A ces grands hom-
mes succédèrent avec des mérites divers Titien ,
Corrège , et tous ceux enfin dont nous avons cité
les noms immortels , mais dont il nous est mal-
heureusement impossible d'analyser ici le talent
et les œuvres ^.
Lasculptures'essayaitàFlorenceen même temps
que l'architecture et la peinture. Tandis que les
Médicis faisaient partout fouiller le sol étrusque
pour en tirer des statues antiques , Donatelloi
— M8 —
Ghibcrti, Brunelleschi lui-même furent les pre-
miers sculpteurs modernes ; ils sculptaient ou ci-
selaient à Tcnvi le marbre, le bronze, l'argent.
Un concours eut lieu entre eux pour les portes en
bronze du baptistaire de la cathédrale; mais à
peine Donatello et Brunelleschi eurent- ils vu
Fessai de Ghiberti qu^ils se retirèrent, laissant à
leur rival tout Thonneur de Touvrage. Et cepen-
dant eux-mêmes ils avaient produit des che&-
d'œuvre; on cite particulièrement la statue de
saint Marc, par Donatello. Michel- Ange dit un
jour, après Pavoir contemplée dans une religieuse
extase : Marco^ perche non mi parU?
Le XV"" siècle connut , en même temps que les
premiers chefs-d'œuvre , Part heureux de les re-
produire. Le Florentin Marco Finiguerra avait
déjà essayé de tirer des empreintes d'armoiries.
PoUajuolo et Botticelli , concevant tout le prix
de cette découverte , essayèrent de la perfection-
ner. Montegna lui donna de Fimportance par des
essais plus heureux; elle acquit enfin un prix
inestimable lorsque le Flamand Albert Durer, et
surtout Marc-Antoine de Boulogne, gravant sur
cuivre les dessins de Baphaël, firent ainsi con-
naître au monde entier ses chefs-d'œuvre : Tltalie
seule en avait joui jusques alors,
i L'invention de la gravure à Peau forte suivit de
près celle de burin, et il devient dôs-loTS impos-
sible de citer tous les artistes qui se sont fait un
nom dans cet art.
C'est encore de Fltalie que nous vient la mu-
sique, non qu'on ne la connût dans les autres
contrées de l'Europe, mais c'est là surtout qu'elle
régnait comme les autres arts, comme les lettres :
rilalie au XVP siècle ëtaît la sentînele avancée
de la civilisation comme le fut la France un siècle
plus tard.
Une ligne avait été ajoutée au cadre qui était
en usage , et les clés avaient été imaginées pour
élever les sons d'un octave.
La première forme de poésie italienne, à la-
quelle on ait essayé d'adopter la musique , est le
madrigal; le plus ancien des madrigaux connus
fut composé par un nommé Lemmo de Pistoïa et
mis en musique.
Vers la fin du XVP siècle la musique fut en
grand honneur dans la majeure partie de l'Europe,
Chaque nation la cultiva avec le caractère qui lui
était propre, et déjà Ton distinguait la mélodie
italienne et riiarmonie allemande. La musique
dramatique n'existait point encore; mais la musi*
que religieuse était à son plus haut point de per«
fection. On connaît ces cantiques à la Vierge,
Laudi spirituali^ d'un style si simple et d'une
mëlodie si touchante» que chanUient en chœur les
confréries italiennes. La chapelle Sixtine redit
encore les accents inspires de Palestrina, et ce
Miseivre dont Texpression ëtait d'accord avec le
Jugement dernier de Michel-Ânge. On cite encore
du même artiste un morceau qu'il composa à Toc*
casion du tremblement de terre de 1575. Emilio
del Cavalière se fit un nom dans ce genre de mu-
sique moins sévère qui était Fornement obligé
des fêtes de cour, la musique de danse et de
concerts. En France, comme en Allemagne et
en Italie^ on cultivait la musique sacrée. Le maître
de chapelle de François V^^ Jean Mouton ^ riva-
lisait avec Nicolas Grombcrt, maître de chapelle
de l'empereur Charlcs-Quint.
Le goût de Tart musical devint bientôt telle-
ment populaire 9 que Ton établit des professeurs
de musique dans les universités. Les souverains ,
les hommes célèbres étaient presque tous musi-
ciens : Henri VIII jouait de la flûte et du clavecin;'
Charles IX était assez fort sur le violon ; Elisa-
beth était une virtuose sur Tépinette; Luther
voulait réformer le chant d^Eglise, en même
temps que le dogme et la discipline.
L art de fabriquer les instruments avait fait de
grands progrès au milieu du XYI* siècle. Les
luthiers de Crémone étaient célèbres ^ entr^autres
i
les Amatî , dont les instruments étaient renommes
dans toute l'Europe. Le violon^ diminutif de la
viole ^ commença à être mis en usage dans les
premières années du XVP siècle/ Il parait qtill
fut d'abord fabriqué en Fi*ance ; car on voit ,
dans plusieurs compositions^ qu^on lui donnait
alors , en Italie j le nom de violino alla Fran^
cese ^
Après les arts, les sciences, pour suivre l'ordre
que nous avons adopté jusqu^ici.
Long-temps négligées en Occident, elles com-
mençaient à marcher d'un pas rapide au XYP
siècle : un moine italien, un Toscan, avait été
visiter l'Orient en homme érudît et curieux pour
recueillir les traditions de la science arabe; de
retour en Italie , il occupa long-temps une chaire
de mathématiques importante, et résuma dans
un savant traité toute la science algébrique du
temps, d'autres Italiens suivant ses traces parvin-
rent à établir les équations du quatrième degré.
Viette fit plus tard une révolution dans la langue
algébrique en se conservant des lettres de l'al-
phabet pour représenter toutes sortes de grandeurs
connues ou inconnues.
Il ne fallait rien moins que ce grand dévelop-
pcmcnt des sciences mathématiques rtfani an
perfectionnement des instruments d^optique pour
arriver aux découvertes astronomiques qui con-
tribuèrent à immortaliser le siècle-
Copernic vivait alors, il appartenait par sa
naissance à la ville de Thom , par ses études k
l'université de Gracovie^ mais ce n'est qn*eB
Italie, à Bologne, que son génie se développa :
une observation astronomique du Bolonais Moria
lui donna la première idée du mouvement te^
restre , et d^observations en observations Co-
pernic en arriva à faire une révolution complète
dans la science. Tel était le génie de ce grand
homme que plusieurs des conséquences qu'il avait
tirées de ses principes, sans être lui-même à
portée de les vériGer , furent plus tard reconnues
vraies. Quand il avait dit que Vénus et Mercnre,
plus rapprochés que nous du soleil , tonmaient
comme la terre autour de cet astre , on lui avnt
répondu : mais si Mercure et Vénus tournent
autour du soleil^ et que nous tournions dans un
])lus grand cercle, nous devons voir Mercure et
Vénus tantôt pleins , tantôt en croissant, comme
la lune ; or, c'est ce que nous ne voyons pas.
C'est pourtant ce qui arrive, répondit GopemiC|
et c'est ce que vous verrez si vous trouvez mojea
deperfectionner votre vue ouïes instrumentsqnib
— S65 —
suppléent. En effets rinyention du télescope et
les ol)servalîons de Galilëe prouvèrent que Co-
pernic avait raison.
Mais cet ensemble d'observations et de calculs
sublimes, qui révélait au genre humain quelques
unes des lois de l'univers, ne fut d'abord reçu en
Europe que comme une hypothèse. Encore cette
b jpothèse n'ëtait-elle admise que chez les savants
^t les hommes éclairés. Parmi les autres, c'était
tin concert d'épigrammes et de quolibets. On jouait
[Copernic sur le théâtre^ comme autrefois on
ivait joué Socrate, comme dans le même temps
3n jouait Ramus, qui de son côté rétablissait
['ordre dans Tentendement. Copernic souriait de
ces sarcasmes, « Que voulez-vous , disait-il à ses
îmis^ je ne sais pas ce qui plaît au vulgaire, et
le vulgaire ne comprend pas ce que je sais. »
Cependant , pour se mettre à Tabri des ignorants
et des envieux , il dédia son système au pape
Paul IIL II était alors retourné dans son pays ,
où il fut fait chanoine de Warmie. Calme au
milieu des querelles religieuses qui divisaient
l'Europe , il resta toute sa vie attaché aux formes
catholiques et à ce culte intime qu'il avait vourf
à la science. « Je vous supplie, écrivait-il ari
pontife , de protéger mes livres contre les insi •
nuatîon^s malveillantes. Il ne manquera pas do
V. '23
«561» —
gens qui abuseront contre moi de certains pas*
sages de rëcriture qu'ils prendront à la lettre
et quUls détourneront de leur véritable sens. >
Cette prédiction se réalisa; car Copernic pré-
voyait aussi infailliblement les inconséquences de
l'esprit humain que la marche régulière des corps
célestes. Plus d'un demi siècle après la mort de
ce grand homme , son système ^ que Galilée avait
complété, fut condamné comme hérétique par
Tinquisition romaine.
Ce furent encore les observations de Copernic
qui amenèrent plus tard la réforme du calendrier:
ce savant polonais en avait entretenu Paul III ,
mais ce pontife , trop occupé de querelles de re-
ligion pour tenter lui-même une réforme scienti-
fique^ en laissa la tradition et le soin à Grégoire
XIII, de qui émane la bulle du 1^^ mars 1582
qui réforme le calendrier '.
La prise de Gonstantinople et Témigratioa des
Grecs fut plus favorable encore aux sciences
qu'aux lettres. Les études prirent avec la lecture
de: Anciens une direction toute nouvelle , il fallat
les reprendre ab ovOy et on se trouva précisé-
ment au point où Ton en était resté un siècle
après le règne d'Auguste. Les traduction! de
Platon ; d^Aristote y et surtout celle d^Hippocrate
entreprises par Philelphe , étaient dans tontes les
mains ; Dioscoride et Pline furent reproduits par
Hermolaâs. L'anatomie fut ëtodiëe avec plus de
soin qu'elle ne Tavait jamais été $ Yesale ^ Co-
lombe et Ettst^ch^ lui firent faire tout les progrès
dont elle dti^it suaoeptibld à une époque où Ton
ne connaissi^t pi^ enocire la cireiilation du sang.
C'est principalement à BaiUou , Duret et HouUer,
médecins de l'école de Paris » qu'est dà le t éta-
blissement de la méthode hippocratique ou d'ob-
servation. Ils pensaient ^ comme les maîtres^ que
la nature seule guérit lea maladies; qu'il faut être
bien sobre dans l'application des remèdai) de la
saignée surtout^.*
Cette époque vit nattre deux cruelles maladies :
le scorbut et le mal vénérien ; ce dernier , con-
tracté par les Espagnols dans File «d'Haïti ^ fut
apporté par eux à Naples et en France, d'où il se
répandit bientôt dans toute l'Europe. La mé-
decine, d'abord impuissante à le combattre, a
ensuite trouvé des secrets povr en amoindrir sen-
siblement les funestes effets.
Parmi les méderîns du XW siècle , célèbres
à divers titres , on distingue surtout Femel et ce
Paracelse que sa vie et sa doctrine rendirent éga-
lement illustre .
Suivant notre cadre habituel nous enssiofis
fait volontiers précéder l'histoire des découvertes
de quelques données sur Féconomie politique de
l'époque, mais les découvertes du XV* siècle
sont si importantes^ si fécondes que force nous
est d*en parler avant de passer outre. Le siède
précédent avait donné à l'Europe la boussole j et
une pareille découverte ne pouvait rester stérile :
Tactivité de Tesprit humain cherche sans cesse ,
veut tout avoir ^ tout voir , tout perfectionner!
une connaissance mène à l'autre : la boussole
conduisit à la découverte d'un nouveau monde.
Un homme de génie, frappé des entreprises
des Portugais, conçut qu'on pouvait faire quelque
chose de p]us grand, et^ par la seule inspection
d'une carte de notre hémisphère , jugea qu^l de-
vait y en avoir un autre , et qu'on le trouverait
en voguant toujours vers l'Occident. Son courage
fut égal à la force de son esprit; il eut a com-
battre les préjugés de tous ses contemporains;
Ijrènes le traita de visionnaire ; l'Angleterre ne
l'écouta pas; il fut rebuté par le Portugal; la
France et F Allemagne ne pouvaient laider; Venise
ne voulut pas favoriser un enfant de Gènes » sa
rivale : Colomb n'espéra plus qu'en la cour d*Es-
pagne.
Ferdinand et Isabelle réunissaient par leur
— 367 —
mariage toute l'Ë8pagDe« . Ces deux souverains
consentirait , après huit ans |de sollicitations ^ au
bien que le Génois voulait leur faire. La cour
d'Espagne ëtait pauvre ; il fallut que le prieur
Ferez et deux n^ociants avançassent 17,000
ducats pour les frais de l'armement. Le 23 août
i&92, Colomb eut de la cour une patente^ et
partit enfin du port de Palos^ en Andalousie, avec
trois petits vaisseaux , et un vain titre d'amiral.
L'art de la construction était encore dans Ten-
f ance au XY^ siècle ; les vaisseaux n'étaient £aiits
que pour des voyages très courts dans lesquels
on ne s'écartait point des cotes : le courage et le
génie de Colomb éclatèrent surtout dans la con-
fiance avec laquelle il se hasarda^ avec des na-
vires si peu propres à une longue navigation,
dans des mers inconnues^ sans cartes pour le
guider , sans connaissance des courants » sans ex-
périence antérieure des dangers qu'il avait à
craindre; mais son empressement à accomplir
rimmense projet qui depuis long-temps occupait
toutes ses pensées lui fit compter pour rien toutes
ces circonstances qui auraient arrêté un esprit
moins audacieux que le sien.
Ce fut pour les marins le sujet de vives inquié-
tudes que de voir disparaître les côtes, Colomb,
pour les rassurer, dissimula une partie du chemin
-559 «^
qu'on faisait ; mais la crainte de ses compagnon^
augmenta chaque jour ; il sut en prëyenîr les con*
séquences en multipliant les fables , les encoura-
gements y les traits de fermetd , avec une sup^
rioritii et une présence d'esprit inconcevables.
Enfin j la révolte de ses équipages allait le forcer
à renoncer à son entreprise lorsque , déterminé
par les signes multipliés qui annonçaient le voisi-
nage de la terre j et surtout par une conviction
intime et puissante qu^ellc ne pouvait être éloi-
gnée, il promit solennellement que si dans trois
jours on ne la voyait point ^ il reprendrait la routé
crEspagnc.
Le soir du il octobre, quoique Ton n'aperçût
que ciel et eau , 11 fit prendre à ses vaisseaux des
précautions pour qu'ils ne fussent pas jetés à la
côte : tous les équipages veillaient. Vers dix heures
(lu soir, Colomb, placé sur le gaillard d'avant,
découvrit le premier et fit voir à ses gens une
lumière qui était en mouvement h peu de distance.
Un peu après minuit on entendit crier : Terre!
d'un des vaisseaux de l'escadre qui était en avant.
Au jour on aperçut distinctement vers le nord
une île plate et verdoyante couverte de boîs et
arrosée de plusieurs ruisseaux : l'Amérique était
découverte ! Au lever du soleil les équipages s'a-
vancèrent vers l'île au son de la musique , enseigne
— s»—
déploj^ëe. Colrnnb fui kl pt^etiiier qiri wit h pied.
sur le Nouyeau-MotKieyle iSoottibrei &d9; il eajurit»^
solennellement pOB$ë86io&«u ncmid'IssdïeUeek d«
Ferdinand, pendant qu'a» grand nontbre de sauvai,
ges entouraient ayed étonaerne»! le» Eaiopéens*«
Colomb dëcouvrit peu de jours apfè& Cuba et
Saint -Domtngite qui vient de reprendre son nom
originaire^ eelui d^Haïti, qui a vi| en trois centa.
ans trois races d'bommes maîtriser son sol.
Les Antilles étaient découvertes , et le pas qu'il.
y avait à faire pour arriver au continent allait
être franchi. Un événement wdinaire manqua de
priver le monde du fruit de ses travaux. Çolomhy
qui voulait annoncer luinoiéDûie le& résultats de
son entreprise à la cour d'Espagne > fut.assaiUl à
son retour par une effroyable tempête. Gtoyant
que le vaisseau allait périr, ce ^rand homme ne
voulut pas que sa gloire fut anéantie et l'hunaanîté
dépouillée des avantages de son entreprise : il
écrivit à la liàte sur du parchenûn une relation
abrégée de sa découverte; il la mit ensuite dans
un gâteau de cire^ enfermé danaun tonneau qu'il
jeta à la mer avec l'espoir cpi'il serait poussé vêts
quelque câte habitée. Tranquille alors^ ii ne rck
douta plus rien des éléments.
Ferdinand et Isabelle furent étonnés autant que
ravis de le voir revenir avec des sativages ,* des
- 500 —
fruits d'Amérique» et surtout de Por. Ils le firent
asseoir et couvrir comme un grand d^£spag^e| le
nommèrent grand-amiral et vice-roi du Nouveau-
Monde;il était regardé partout comme un homme
unique envojë du ciel. C'était à qui s'intëresse-
rait dans ses entreprises, à qui s'embarquerait
sous ses ordres. Il repart avec une flotte de dix*
sept vaisseaux ; il trouve de nouvelles îles : les
Antilles et la Jamaïque. Le doute s'était changé en
admiration à son premier voyage ; au second lad-
miration se tourna en envie.
Il était amiral, vice-roi, et pouvait, dit Vol-
taire, ajouter à ce titre celui de bienfaiteur de
Ferdinand et d'Isabelle. Cependant des juges en*
voyés sur des vaisseaux pour veiller sur sa con-
duite le ramenèrent en Espagne. Le peuple , qui
entendit que Colomb arrivait , courut au-devant
de lui , le regardant comme le génie tutélaire de
l'Espagne. On tira Colomb du vaisseau ; il parut f
mais avec les fers aux pieds...
Il fit cependant un troisième voyage dont le
résultat^ aussi important que celui des deux pre-
miers pour l'Espagne et le monde entier, fut encore
plus malheureux pour lui. Colomb , emprisonné
de nouveau , périt dans la disgrâce , et fit ense-
velir avec lui les fers dont le soupçonneux et
ingrat Ferdinajnd avait osé le charger.
^ 564 —
La boussole avait amené la découverte d'un
nouveau monde , le vin avait conduit à Teau-de-
vie , le papier précéda et peut-être amena Tinven*
tion de rimprimerie.
Après quelques essais infructueux, un habitant
de Mayence^ qui ne supposait pas faire ainsi une
révolution , imagina de graver sur deux planches
de bois des pages entières que Ton imprimait en-
suite autant de fois que Ton voulait. Ce fut là le
premier pas .- c'était beaucoup j mais ce n'était pas
assez ; il fallait un travail immense pour graver
ainsi un seul ouvrage i et Gutemberg voulait
abréger le temps. Il mit en œuvre un nouveau
moyen : il sculpta en relief des lettres mobiles ou
sur bois ou sur métal. Ces lettres se plaçaient les
unes à côté des autres, enfilées par un cordon
comme les grains d'un chapelet. Ces tentatives lui
réussirent peu et épuisèrent sa fortune. Il se vit
obligé^ en iUUUj de retourner à Majence et de
s'associer avec un orfèvre appelé Fusth qui lui
fournit de l'argent. Us admirent dans lem* société
un homme industrieux et éclairé, Pierre Schœfier,
Allemand. Ce fut lui qui acheva la découverte de
l'imprimerie en trouvant le secret de jeter en
fonte les caractères que jusqu'alors on avait sculp-
tés un à un.
Ce ne fut qu'en 1469 que l'imprioieric com-
mença à élrc excrcëe dans la capitale de la Franée.
On doit son élabiissement aux docteurs de la Sor*
bonne, qui appelèrent à Paris trois imprimeuA
de Mayence. Le caractère dont ils se servirent
pour Pimpression de leur premier ouvrage est
rond, de gros romain. Il s^y rencontre sotiTenl
des lettres à demi formées, des mots achevés à h
main, des inscriptions manuscrites, les lettres ïxAf
tiales en blanc pour donner le moyen de les priiH
dre en azur ou en or.
Cependant les ouvriers n'dtaient pas encoK
fort habiles ni trop expéditifs; les livres ne s*inH
primaient pas vite, et Ion n'en tirait pas un grand
nombre d'exemplaires. Les progrès vinrent pett
à peu.
La science passa avant les lettres : les livres
furent d*aI)ord pour les konmies d'étude ou les
hommes d'Eglise. Pour les uns conune pour les
autres le point capital fut qu'un volume cdntitit
le plus possible, et on s'inquiéta peu qu'il fût
portatif, car dans ce temps-là on ne lisait guène
que devant une table et la plume à la main. Lés
ouvrages qui eurent les premiers les honneurs de
l'impression furent les écritures saintes, les livres
admirables des saints pères et les chroniques,
dont les rares manuscrits n'avaient pu être connas
jusqu'alors que d'un petit nombre de savants. A
-ses —
mesure que le goût de Tétude se rendit, et que
le besoin des livres se fit sentir, on les vît se mo-
difier dans leur forme et devenir plus portatifs-
Ce fut d'abord le papier qui fut moins grand ; puis
Timprimerie faisant un pas vers le progrès, on
imagina de mettre plus de quatre pages sur une
feuille, et les in-quarto ne firent que précéder de
peu tous les in-octavo et les autres formats. Mais
si on voulut des volumes qui pussent se trans-
porter avec facilité 9 on ne cessa pas pour cela de
vouloir qu'ils continssent beaucoup ; aussi la ma-
tière y fut-elle pressée , le caractère fin , les marges
petites et le texte presque toujours divisé en deux
colonnes. Tout le problème était alors de faire
peu de volumes avec de grands ouvrages, et c'est
au génie de nos éditeurs modernes qu'il était ré-
servé de trouver le secret de faire beaucoup de
volumes avec de petits livres. Le dernier siècle a
élevé de la sorte des monuments typographiques
qui sont encore fort estimés de nos jours ^ et qui
n'ont jamais été surpassés pour l'exactitude et le
mérite de la correction. Il est même arrivé que
les veilles laborieuses et les efforts d'obscurs im*
primeurs ont enfanté des renommées plus durar
blés que celles que créent les affaires publiques.
Cest ainsi que les noms des Elzévirs, des Âlde,
des Henri-Étienae et des Barbou sont connus de
— 56U —
tout le monde , tandis que personne ne pourrait
nommer peut-être les ministres du temps.
L'imprimerie rojale fut établie un siècle après
par François I*', qui fit fondre des caractères hé-
braïques, grecs, latins; elle devint plus florissante
sous Louis XIII par les soins de Richelieu.
Les premiers imprimeurs avaient été poursuivis
par le peuple comme sorciers, un tribunal même
fit confisquer leurs livres ; et, sans Louis XI qui
les protégea en arrêtant les poursuites et aehe*
tant les ouvrages, la science eût eu de nouvelles
victimes •o.
Descendons de ces importantes découvertes,
qui changent la face du globe et améliorent le sort
de ses habitants, aux inventions d'un ordre in-
férieur, mais qui ont aussi leur utilité et leur in-
térêt.
La taille du diamant est au nombre de ces der-
nières : elle ne doit son origine qu*au hasard.
Louis de Berguem Tessaya le premier, à Bruges,
en i/i50. Ce jeune homme, qui sortait à peine des
classes^ n'était pas initié dans le travail de la
pierrerie ; il avait éprouvé que deux diamants s'en-
tamaient si on les frottait Tun contre l'autre; ilra-
massa la poudre qui provenait de ce frottement;
et, h Taîdc des roues de fer qu'il inventa, par-
vint à polir et à tailler les diamants avec celte pou-
tire. Lcsanciens tiraient, dans les premiers temps,
lenrs diamants d'Ethiopie; on en tira ensuite des
Indes^ de l'Arabie , de Chypre et de la Macëdoine :
on ne les tire guère aujourd'hui que de Golconde
et du Bengale. Les mines qu'on exploite ne sont
connues que depuis quelques siècles.
On attribue aussi au hasard la dëcouyerte de
celle de Golconde. Un pâtre aperçut une pierre
qui jetait de Fëclat : il la ramassa et la vendit
pour un peu de riz à quelqu'un qui n'en connais-
sait pas mieux la valeur. De main en main elle
tomba enfin dans celle d'un joaillier ; la chose fit
du bruit, et chacun de chercher les lieux où le
diamant avait étë trouvé. Les recherches ne
furent pas long-temps infructueuses , et Ton finît
par découvrir dans les rbches les plus arides du
royaume de Golconde une mine de diamants.
Plus de trente mille ouvriers sont occupés à les
extraire : plusieurs d'entre eux en avalent pour
les vendre ensuite à des Européens. Avant cette
importante découverte, on ne voyait des diamants
qu'aux daines de la plus haute condition. Agnès
Sorel fut , dit-on , la première qui en orna sa
belle chevelure.
Le plus magnifique des diamants connus est
celui du grand Mogol, qui est estimé près de
douze millions. Notre régent en vaut cinq. La
-306-
c^èbre Catherine paya trois millions celui qu die
acheta. Ce dernier diamant passe pour avoir
forme un des deux yeux de la statue de Sdie-
nngham^ dans le temple de Brama : un grenadier
français , amoureux des beaux yeux de la statue,
s'introduisit dans Fenceinte sacrëei et réussit à
en voler un^ qui passa par bien des mains avant
d'arriver à Timpératrice.
Uu nommé Claude Briagues trouva plus tard
le moyen de graver sur le diamant.
Puisque nous sommes au milieu des cours et
du luxe des souverains , passons des diamants aux
carrosses.
£n 1&57| la reine de France reçut du roi de
Hongrie un cadeau qui étonna beaucoup la capi-
tale : c^était un cliar ifonlant et moult ridie;
mais pendant long-temps elle fut seule à }Ouir du
plaisir de se promener ainsi : les seigneurs
féodaux en repoussèrent Tusage , et nous voyons
encore^ en i5S8, Jules de Brunswick défimdre
à ses vassaux de se servir de carrosses : « c'est avec
bien du chagrin, leur dit-il, que nous nous
sommes apcarçus que Tusage mâle et louable de
monter à cheval, armé de toutes pièces, B*ett
affaibli dans nos principautés, comtés et sei-
gneuries \ il faut en chercher la cause dans Tha-
bîtude qu^ont prise noâ vassaux de fainéanter, et
de se faire conduire en Carrosse. »
L'infante d'Espagne Marie avait, en 1631 , un
carrosse de verre dans lequel deux personnes
avaient place. Du temps dé François V^ on n'en
comptait que trois dans Paris : ils appartenaient
à la reine , à Diane de Poitiers et à Rend de Laval ^
que sa grosseur monstrueuse empêchait de tnon-
ter à chevaL Les c&rrosses avaient de grandes
portières de cuir qu'on abaissait pour y entrer.
L'usage des glaces nous est venu d'Italie } c'est
Bassompierre qui , sous Louis XIII , en fit mettre
le premier à son carrosse.
La découverte de Colomb^ fbneste à l'Espagne,
qu'elle ruinait en la couvrant d'or, donna à l'Eu-
rope une foule de productions plus précieuses
que cet or lui-*mâme. Tandis que l'indolent espa-
gnol , trop fier de sa richesse et de sa souve-
raineté lointaine, végétait dans un lâche repos,
de nouvelles sources de commerce s'étaient ou-
vertes aux peuples industrieux. L'indigo, le tabac,
le coton, la vanille, le cacao, le quinquina, la
cochenille , vinrent du nouveau monde enrichir
la vieille Europe. Les Hollandais et les Anglais
surent par-dessus tous les autres profiter de ces
trésors inconnus.. •
L^an 1520, les Espagnols apportèrent du cho*
— SfiS —
colat (lii Mexique en Europe. L'archevêque de
livon , frcre du cardinal de Ridielieu , en a le
premier fait usage en France. Des moines espa-
gnols lui avaient vendu ce secret pour guérir ou
modérer les vapeurs de sa rate. U se coDSomme
en Europe , au XIX* siècle , vingt-trois millions
de cacao par an.
Rien n'est plus incertain que Torigine du caK
ou plutôt de son usage. D'après Fausto Najrone,
le café fut découvert par le prieur de quelques
moines , après qu'il eut été averti par un gardeur
de chèvres ou de chameaux que quelquefois son
bétail veillait et sautait toute la nuit après avoir
mangé du café. Ce supérieur en fit prendre une
infusion à ses moines^ qui donnaient en disant
l'office de nuit. D'autres disent qu'on doit la dé-
couverte du café à un Muphti qui , pour faire des
prières plus longues que les autres Dervis^ en fit
rcxpérience. Enfin ^ on rapporte qu'au milieu du
XV" siècle un certain G emma-Reddin, faisant on
voyage en Perse , y trouva des gens de son pays
qui prenaient du café et vantaient cette boisson;
à son retour il fut malade^ en prit et fut gnéri.
Dès lors il mit cette liqueur en vogue à A4jen;
de h\ elle passa à la Mecque : de l'Arabie heu-
reuse, elle fut portée au Caire et à Gonstanti-
nople. Plusieurs fois les sultans Tout interdite,
— 569 —
d'autres l'ont permise; enfin l'usage s'en établit
peu à peu.
Le premier café qui parvint en France ar-
riva h Marseille en 16ÛÛ , et le premier qui en
introduisit Pusage à Paris fut un envoyé de
Mahomet IV.
On a essaye de cultiver le café en Europe^
mais sans succès pour la qualité. On dit qu'un
Français des environs de Dijon en fit le premier
Texperience. Il eut du fruit, mais fade , insipide,
et ne put eh faire usage. La consommation an«
nuelie du cafë en Europe est de cent quarante
millions de livres.
Les hommes , non contents de satisfaire leur»
besoins et leurs services , ont encore su s'en crëer
de factices. C'est ainsi que s'est peu à peu établi
l'usage de remplir son nez d'une poudre sale dont
l'odeur chatouille agréablement des organes
blasés, et d'aspirer une fumée plus sale encore,
qu'on rend ensuite à l'air pour en aspirer de nou-
veau. Les partisans du tabac soutiennent qu'il est
un véritable besoin , et citent l'histoire à l'appui
de leur assertion : Si les Gaulois et les Germains »
nous disent-ils, ne connaissaient pas le tabac,
ils en avaient l'équivalent; ils recevaient la fumée
du chanvre brûlé sur des pierres rougies au feu ,
et s'enivraient de cette vapeur , ainsi que leurs
V 84
'^ 570 ^
druides devant leur dieu TeuUtàs, quMls croyaient
honorer ainsi. Quoiqu'il en soit, la plante de
tabac fut introduite en Europe en i560. Elle
parvint tout*à-coup à un si haut deffré de fa-
veur, que chacun a voulu lui donner wn doul
On rappela tour à tour nicotianej herbe du
grand-'prieur, herbe à la reine ^ parce que
Nicot, ambassadeur de France à la cour de
Portugal, l'ayant reçue d'un marchand flamand^
la présenta k son arrivée à Lisbonne au Grand-
Prieur, et puis k son retour en France , à la
reine Catherine de Médicis* Elle fut aussi oom-
mée herbe de samte-Croix , herbe de torrwr
Buana , noms des deux cardinaux qui les pre-
miers la mirent en réputation dans TltaUe* Aux
Indes , au ^BapééX , dans la Floride » elle portait
le nom de p^un > qu'elle y conserve encore ;
mais les Espagnols lui donnèrent celui de
iabacco, parce qu^ils la connurent premièrement
à Tabago, Tune des Antilles c c'est de cette lie
que sir Fr. Drake Fapporta en Angleterre en
1585. Ainsi cette plante, qui n'était qn-one
simple production sauvage d^une petite fin d'A-
mérique » se répandit en peu de temps 4tiii lova
les climats. On la cultive surtout aigoiird'hvi au
Brésil, dans la Virginie , le Maryland, le Mexi«
que, ll(alÎ0t rflspegne, la Hollande , l'Angle-»
•i- 874 ifef
terre, et dans quelques contrdes de la France ,
telles que la Bourgogne,, T Alsace , le Bëarn , et
surtout les environs de Tonnerre, près d^Âgen.
Le tabac, comme on le voit, a eu de nombreux
partisans : au nombre de ces derniers il ne faut
pas compter un empereur des Turcs, un czar,
un roi de Perse, qui en dc^fendirent Pusage à
leurs sujets , sous peine d'être privés de la vie ou
du nez ; un roi d'Angleterre, qui a écrit un traite
contre la maudis plante ; un pape enfin , qui
excommunie les fidèles qui se permettent de
priser dans les Eglises ^^
Le chocolat, le café, le tabac, agissent d'une
manière différente pour exciter les organes : ils
donnent à Tesprit de Fhomme cette activité qui
Faide à supporter une vie souvent pleine de
douleur. Le lait d'&nesse vint après comme un
contre-poids pour calmer des sens trop vifs et
des imaginations trop exaltées.
Nous avons vu que Poppée , épouse de Néron ,
prenait des bains de lait d'ànesse ; mais personne
ne dit qu'on se fût avisé d'en boire comme re-
mède jusqu'à François F'. Voici comment on le
connut : ce monarque se trouvait faible et ma-
lade; les médecins ne purent le rétablir. On
parla au roi d'un juif de Constantinople qui pas-
sait pour Irès-liabile médecin; François P' or-
24.
— Ô7Î -
donna à son ambassadeur en Turquie de faire
venir à Paris ce docteur , quoiquHl eu pût coûter.
Il arriva , et n^ordonna pour tout remède que du
lait d'ànesse. Lj remède réussit y et les courtisans
des deux sexes s'empressèrent de suivre le même
régime. Depuis lors les ânesses n'ont pas cessé
de croître en réputation , et sont en aussi grande
yënëration auprès des dames, que la plante
du tabac Test auprès de leurs époux. Ajoutons^
pour terminer ce sujet, la découverte des pommes
de terre. Celte plante , dit sir J. Banks, dont on
fait maintenant un usage si étendu, fut apportée
en Angleterre par les colons que sir Walter
Raleig avait envoyés , en vertu d'une patente de
la reine Elisabeth , pour découvrir et cultiver en
Amérique de nouvelles contrées non possédées
par les chrétiens. Quelques uns des navires de sir
Walter, qui firent voile en 158Ù, apportèrent
avec eux la pomme de terre en 1586. Elle ne fut
d'abord cultivée que comme objet de curiosité;
mais après deux siècles d'insouciance, les nations
du nord, éclairées par Texpérience, cultivèrent
à Tenvi ce précieux végétal. C'est Parmentier
qui , par ses écrits et les efforts soutenus de la
plus active philaulropie , parvint à généraliser
cette culture en France, Il prouva qu'elle pouvait
flatter les goûts les plus délicats , et qu'on pour*
I
— 575 — -
rait la cultiver dans les terrains les plus stériles.
II demanda la plaine des sablons pour faire ses
essais. Louis XVI la lui accorda, et donna sa
protection à la nouvelle culture : il parut le jour
d'une fête solannelle devant toute la cour, portant
à sa boutonnière un bouquet de fleurs de pommes
de terre , et dès ce moment leur vogue fut assurée.
Depuis Parmentier, on a tiré de la pomme de
terre de Peau-de-vie , de la potasse , une couleur
jaune , une autre grise , du papier d'emballage ;
etc. C'est une véritable mine d'or...
Le XVP siècle^ presque exclusivement absorbé
par les disputes religieuses, ne vit aucune de ces
découvertes importantes qui signalèrent les deux
précédens , mais de nombreux perfectionnements
eurent lieu dans les inventions déjà faites.
C'est ainsi qu'on vit succéder à Thorloge les
montres portatives ou montres de poche. On les
nomma d'abord œujs de Nuremberg, parce
qu'elles avaient une forme ovale, et que la pre-
mière avait été fabriquée par un ouvrier de Nu-
remberg. Elles furent d'Allemagne chez les An-
glais, qui un siècle après , perfectionnant encore
firent la montre à répétition.
C'est ainsi que les bombes et les mortiers fu-
rent employés dans les sièges pour aider l'artil-
lerie, contre laquelle on avait appris à défendre
— 574 -
les murs 9 et que les pistolets , inventes par un
armurier de Piatole 9 tinrent la place des fusils
ti*op lourds pour les cavaliers.
C'est ainsi que les dames ^ fatiguées dea bn>*
«bettes de bois, d'ivoire ou d'épine qui leur ser-
vaient à ajuster leurs parures, adoptèrent avec en*
thousiasme les épingles qui, d'Angleterre, se ré-
pandirent avec rapidité dans le monde civilisé.
C^cst ainsi qu'à des couleurs pâles et sans lustre
succéda le brillant vernis apporté de la Gliine
])ar des missionnaires.
Le XVr siècle est aussi Tépoque où furent
élablis, en diverses contrées de TEurope, des
jardins botaniques y et l'Italie eut la gloire de
donner Texemplc. Le premier fut celui de Pa-
doue^ en 1533. Quelques années après furent for-
més ceux de Florence , de Pisc , etc. Paris avait
\\\\ jardin botanique, en 1591; celui de Mont-
pcUier, établi par le médecin Ricber de Bellevalj
date de Tannée 1598.
Quant au Jardin des Plantes , la première idée
de ce magnifique établissement , le seul qui existe
en Europe , est dû à Guy de la Brosse , médecin
de Louis XIII ta.
Si nous avons rabaissé d'abord et puis exalté
- «76 -
Léon X en le consîdéraiit comme pontifo et
comme souverain , si nous avons exalte Charles-
Quint sous de certains rapports et que nous le
rabaissions so«lfi d'autres^ c'est que ces deux grau-
ci os figures du XVI^ siècle eurent rëellemeut leur
l)on et leur mauvais côté : Gharles^Quint , si
grand comme politique, (ut le flëau de l'industrie
ot du commerce de son temps ; s'il n*a pas tuë Vé^
conomie politique naissante c^ que les ëvëne^
ments sont plui ftnrta que les homme» et que la
civilisation retardée regagne toujours le terrain
perdu.
Ce n'est pas sans raison qua les histeriena s'ac-
cordent à considérer Ib règne de Gharles^^Quint
comme le point de départ dSm nofuvel ordre so^
cial en Europe. A dater de son règne, en eflbt, il
s'opère un changement rapide et profond dans la
marche de la civilisation. Les idées sont aussi
agitées que les empires et pour la première fois ,
depuis bien des siècles^ le monde semble convo-
qué à la lutte définitive du despotisme et de la
liberté. La découverte de l^Âmérfque, Pexpulsion
des Maures d'fispagne, la réformation protestante^
la traite des noira^ sont des événements contem-
porains de Gharles-Quint , et chacun de ces évé-
nements poiH;e dans ses flancs le germe de vingt
révolutions. Au régime municipal qui s'était
— 576 —
établi sous Tiofluencc du travail dans toutes les
villes libres de rAUemagne , de la Belgique , de
l'Espagne et des républiques italiennes , nous al-
lons voir succéder la domination de quelques
puissantes monarchies qui se partageront TEurope
après ravoir minëc.* Charles-Quint a été le prin-
cipal instrument de cette révolution , dont le
contre-coup devait être si fatal à Téconomie poli-
tique^ en mettant sous la protection de la force les
plus funestes doctrines qui aient affligé Thumanité.
La nécessité de soutenir des guerres sans cesse
renaissantes , réduisit ce monarque , dès les pre-
mières années de son règne, à des expédients finan-
ciers qui enlevèrent la majeure partie des capitaux
aux industries productives, pour les engloutir
dans le gouffre de la consommation stérile. Son
trésor était toujours vide; les troupes étaient
mal soldées^ et elles prirent Thabitude de vivre
au moyen de pillages , de concussions ou de
taxes arbitraires. Des mesures violentes et oppres-
sives remplacèrent partout le système régulier de
contributions établi par les financiers italiens.
Alors commencèrent les extorsions de toute espèce,
les logements militaires, les impôts excessifs sur la
consommation^ qui faisaient renchérir le prix de
la main-d'œuvre au détriment des manufactures.
On augmenta les droits sur les matières premières
— 377 —
à rentrée et sur les produits fabriques, à la sortie.
Au libre exercice des arts on substitua le mono-
pole des métiers et celui du commerce. Partout
s'ëlevèrent, flanquées de privilèges, les manufac-
tures impériales et royales dont il fallut acheter
des licences pour avoir le droit de travailler. Tout
cet attirail restrictif s'établissait peu à peu dans
les lois et dans les mœurs ; puis vinrent les sophis-
tes qui en firent des doctrines^ et c'est ainsi que
toutes les hérésies économiques dont l'Europe est
encore infestée , sont devenues d'autant plus difli-
ciles à détruire qu'elles se présentent avec la sanc-
tion du temps et le caractère de l'autorité. Charles-
Quint les rendit plus funestes, en les organisant,
en les faisant pénétrer dans Tadministration dont
elles devaient devenir la règle de conduite et le
dogme inviolable ^'.
Le règne de Charles-Quint a surtout été con-
traire aux progrès de l'économie politique, en ce
sens qu'il a détourné violemment l'Europe des
voies régulières de la production pour la préci"
piter dans les hasards de la guerre et dans le
vieux système d'exploitation engendré par la féo-
dalité. Tout ce que nous avons aujourd'hui de
fausses doctrines et de funestes préjugés à com-
battre y nous le devons à son gouvernement con-
tinué et empiré par sou exéci'able successeur.
— S78 —
Uhumanitë a des reproches plus graves enccm
à faire à la mémoire de Charles-Quint : il a réta*
bli sur une immense échelle l'esclavage qui yenait
de mourir, et rexploitation humaine qui touchait
a son terme. La traite des nègres fut organiseSe
sous ce rogne comme une institution l^itime et
i-égulîère, et Ton renouvela des Grecs et des Ro-
mains la doctrine funeste en vertu de laquelle ks
profits du travail social appartenaient de droit i
quelques priviUfgiés. Des millions d^hommes péri-
rent en Amérique victimes de ce préjugé détes-
table, et r Afrique n\i pas encore cessé, après trois
cents ans, de payer son tribut de sang et de larmes
au système qui en a été le fruit. On ne saurait sa
faire une idée de toutes les absurdités qui furent
imaginées à cette époque pour assurer aux hommes
de la métropole les béaéiiccs et les revenus de la
nouvelle colonie : jamais Paudace du privilège ne
sMtait manifestée d^une manière aussi tjranni-
que. La métropole imposa tous ses produits à la
colonie et lui interdit de se les procurer, même
sur son propre sol. Il fut défondu aux Américains
de planter le lin, le chanvre et la yignei d*éU-
blir des manufactures , de construire des navireSi
de faire élever leurs énfans ailleurs qaen Espa-
gne. En même temps, on leur prescrivait certaines
consommations inutiles, et ils étaient assujettis il
— 579 -»
dea avanies dont Fhistoire semblerait fabuleuse
aujourd'hui. Le fouet du commandement repré-
sentait alors toute la civilisation espagnole ^^...
La découverte du Nouveau^Monde et de ses
trésors porta aussi un coup funeste à l'industrie^ .
au travail et à la science économique : la nation
espagnole, la première en possession'des richesses
du Pérou, s'accoutuma peu à peu à Pidée de faire
fortune sans travailler, et elle dédaigna les occu-
pations agricoles; chaquie citoyen espagnol se crut
un gentilhomme investi de son fief dans le Nou-
veau-Monde , et la législation coloniale vint bien-»
tôt confirmer ce fâcheux préjugé. L*Amériqu© fut
considérée comme une propriété nationale de la
métropole , et celle-ci lui imposa des règlements
dont la tyrannique absurdité est devenue égale-
ment funeste aux deux pays. Telle a été Forigine
des préjugés coloniaux qui ont entravé si long-
temps la prospérité du monde et frappé de stérilité
aux mains de ses auteurs , la découverte du nou-
veau continent. L'esclavage noir, cette honte de
la civilisation, n*en est qu'un épisode, et, quoi-
qu'il existe encore, nous espérons que sa dernière
heure n'est pas loin de sonner. Mais il est d'autres
vices qui seront longtemps incurables, parce que
leur origine remonte aux premiers jours de la
conquête, et qu'ils ont profondément pénétré dans
— 580 —
les mœurs coloniales. On s'est trop habitué à viirre
aux dépens des travailleurs de tout ordre ; et tan-
dis qu'au Mexique et au Pérou les colons cxploi-
taicut sans pitié les malheureux indigènes, la
mcîtropole, non moins impitoyable, enlevait aux
colons le fruit de leurs rapines sous les noms de
tarifs, de dîmes, etc. Cette mauvaise économie
politique a infecté FEurope et préparé les riva-
lités industrielles et commerciales, d'où sortiront
presque toutes les guerres modernes *^.
Cet état de choses dura jusqu^au bon roi et à
l'excellent ministre qui préparèrent et virent naître
l'aurore d'une nouvelle ère pour Téconomie. po-
litique : Henri IV et* Sully réparèrent autant
qu'il était en eux le mal qu'avait fait Charles-
Quint. Ils frappèrent sur la noblesse dissolue et
paresseuse autant que riche, et M quelque sei-
gneur^ comme d'Epernon , osait leur résister, ijs
soutenaient en hommes de guerre leurs opérations
de finances ^^.
Labourage et pâturage, disait Sully, sont les
deux mamelles de TEtat. Et, en conséquence de
ce système pacifique , il porta surtout ses soins à
l'agriculture , et lui prodigua des encouragemenb
si utiles que peu d'années après les champs tombés
en friche par les malheurs de la guerre avaient été
remis en culture. Il abolit les entraves les plus
— 381 —
gênantes pour la cîrculatîon et supprima les fa-
veurs de toute espèce que Thabileté des courtisans
avait surprises aux rois.
Ce n'est pas que Sully lui-même fût exempt
d'erreurs , il e'taît de son siècle et faisait un pas...
La science économique^ à sa naissance^ était
heureuse de marcher, si doucement que ce fût , et
quelque lents que fussent ses progrès, ils prépa-
raient ceux que les Malthus, les Ricardo, les
Smith, les Say et les Rossi ont pu faire plus tard.
On reprocha à Sully Tabandon des manufactures
qu'il voyait prospérer avec peine au détriment de
l'agi'iculture , son idée favorite. Il disait qu'on
énervait les gens de la campagne en les rendant
sédentaires, et qu'ils étaient ensuite inhabiles à
supporter le casque et manier Tépée.., l'époque
excusait Sully. Henri IV eût-il été un bon roi s'il
n'avait su combattre et montrer son panache flot-
tant aux braves qui le suivaient dans la mêlée *'?
Quelques aperçus sur l'état matériel des peu-
ples aux XV® et XVP siècles termineront ce que
nous avions à faire connaître sur cette intéres-
sante période de l'histoire européenne.
Nous avons déjà beaucoup dit sur ce sujet dans
le chapitre consacré aux mœurs et aux usages des
diverses classes de la société, nous pous contente^
roDa (loDC de quelques d<$taila sur le prix des dci^
réeSf sur les chemins , les auberges , les yoitursBf
sur le costume, etc. Mais ici notre t&che derieit
presque impossible : chaque paya ayant aoquis
une nationalité) une physionomie à part^ oomment
les caractériser toutes? ce serait là im Inyail
immense et hors de notre cadre. On nous pai>
donnera donc si nous nous attachons plus parti-
cul icrement à la France, qui a toujours mardbë
en t^*te de la civilisation. Lltalie de Lëon X, II*
talie artiste et lettrée était bien au-dessus
au XVI* siècle , mais c^était tout ; Paris ayait
le scq)lre pour ne plus Tabandonner» et la |^in
éphémère de l'Italie céda mÀne celui des lettrai
devant la grande image de Louis XIV.
Une diflercnce exorbitante dans leprixdesdsttr
récsse fait ressentir d'un siècle à l'autre dansTEa-
rope septentrionale, et Ton y racoonaU Vw da
Pérou :
Ainsi^ le setier de froment se vendait au XY* fflè-
clc 20 sols, au XVF cinq fois davantage } on boMif
environ 12 fr. au XV siècle; 60 fr. au XVI\ Et
ainsi du reste *^.
Les chemins, dit un savant écrivain , gagnaient
surtout au XVI* siècle : on les creusait et on la
remplissait de pierres, ce dont on ne s'était ja-
mais avisé jusqu'alors, et puis on plaçait des poteau
— 585 —
OÙ on lisait une charitable et prudente inscription :
Chemin du diable. ~ Brîganderie. — Passage
périlleux. — Bois de deux lieues. — Passez vile.
— ^Pays cultivé. --^ fs^yu d'ouri. — Pays de loup.
-^ Landes^ etc#, etc. Des guides manuscrits ou im-
primés donnaient) outre ces indications, le relevé
des productions agricoles et industrielles du pays,
le nom des bonnes auberges, etc. ^^.
Mais, ajoute-t*il, cfest surtout à ces dernières
<|u'on voit la différence des peuples et des pays
que Ton traverse. On y est aussi bien et mieux
que cbeis soi. Quelle supériorité sur les auberges
d^spagne; ici Von est obligé de tout porter, ex-
cepté rhuile , le vinaigre et le sel ^. Afin d'établir
une louable hiérarchie dans la sodété, od limite
la dépense des voyageurs à pied et à cheval. La
dînée du premier est affichée à six sols , celle du
cavalier à 12 sols : le premier voudrait dîner splen-
didement comme le second^ il ne le pourrait. . . les
lois françaises empêchent l'up de trop dépenser,
Pautre de ne pas dépenser assez.
En France cependant, et malgré sa supériorité
reconnue , on était obligé dans certaines auberges
nommées repues de manger du corbeau , du ser-
pent, du cheval pour du perdreau» de Tanguille
ou du bœuf. Mais il faut dire, pour être vrai> que
les repues étaient alors aux auberges ce que les
nuhorgos sont aujourd'hui aux liôteb. Dans les pre-
mièrcs cntraientles voyageurs à pied ou en charette
tentée, dans les secondes les litières à franges, à
devises et lettres d'or, les carrosses *> remboorréii
matelassés, couvertsdc cuir, de drap ou de ydoiirB|
garnis de mantelets de custode^ et de rideaux; le
tout sculpte j peint et clouté de millions de petita
clous dorés...
Cela était certes bien plus beau que les équi-
pages de notre temps, sinon plus commode; ce
qui Tétait aussi beaucoup plus , c'étaient les boise-
ries sculptées des églises et des appartements, les
parquets, les meubles, etc. On voyait au XVI* siè-
cle des alcôves à rameaux, à feuillage^ à grillage,
à chiifre que perfectionna sans doute le XVII* siè-
cle, et que nous avons abandonné pour ce que
nous appelons le simple et le confortable.
L'un des objets où l'aristocratie du temps met-
tait le plus de luxe était les grilles des jardins
dans les châteaux : les chiffres, les écussonsy
brillaient au milieu des plus inextricables dessins;
mais c'est que , malgré la hausse subite des jonr-
nées et des matières premières , le prix de la livre
de fer ne valait encore que 6 deniers , la livre de
cuivre 3 sols et la livre d'argent 37 fr.; aussi les
prodiguait-on^ car c'était là le luxe à la moàe^
ainsi que les tapis dont ou commençait à xe«
— 585 —
couvrir les parquets des maisons princièreSê
A ces nouvelles inventions s'en mêlaient d'au»
très relatives à la toilette des grandes dames et
des merveilleux du temps. Ceux-ci portaient dgs
chausses à la gigoUe^ le haut enfle par de lëgèi^es
lames de fer, des habits brodes de perles , etc.
Considéré dans son ensemble Thabillement des
femmes avait la forme d'une horloge de sable, ou
de deux cloches opposées à leur sommet. Le corps
de jupe, très-serré à la ceinture, allait s^élargi$*
sant jusqu'en bas. Le corps de robe très*serré auçai
à la ceinture, et tendu sur le corset de baleine ^
allait de même s'élargissant jusqu'aux épaules oii^
pai^ le développement de la fraise, il prenait aussi
une très-grande ampleur. Les ceintures étaieaS ou
en argent ou en étain , à grillage sur velours ou
sur satin. Les souliers de soie ou de velours dé-
chiquetés en barbe d'écrevisse, lacés et serrés
comme les jarretières par des nœuds de ruban;
en ville les souliers à patins étaient préférés. L^
dames portaient des patins plus hauts, plus déliés,
ou d'élégantes mules.
tt En France, dit un contemporain, il n'y a
que les clercs et les nobles qui puissent porter (ite
la soie ; et parmi les clercs i\ n'y a que les prélaU,
et parmi les nobles il n'y à que les hauts geu^Jf!-
hommes ou les gens de guerre qui puissent pQfb^r
V. »5 ' '
8oie sur soie. En outre la couleur aussi bien que
rëtoffe distingue les ëtats : les mënétriers sont
habillés de bleu ou de vert ; les bateleurs portent
un bas de chausse d^une couleur et un bas de
chausse d^nne autre; les bourgeois sont hahillës
de noir; les archidiacres, les hauts dignitaira
ecclésiastiques , d^écarlate; les nobles le sont de
même. Aussi, qu«and je vois entrer dans ma liou-
tique un bonnet rouge, j'ôte mon chapeau, car je
suis bien sûr que c'est au moins un gentilhomme.
Quelquefois les grands seigneuis s'iiabilient
comme la dernière classe du peuple, c'est-à-dire
de blanc; mais c'est de velours blanc avec des
bottes blanches.
D'autres fois ils veulent cacher leur qualité,
ou pour acheter ù meilleur marché , ou pour
d'autres raisons; mais je les reconnais au seul '
fourreau de leur (?pée, quelqu'usé qu^en soit le
velours.
Nos jeunes clercs de palais, et marne nos
jeunes marchands , veulent au contraire quelque^
fois passer pour des gentilshommes , et se donner
les airs de porter des chaînes d*or, des ferrement
d'or , des chapeaux à plumes ; on voit qu'ils n'
sont pas accoutumés , on voit bientôt ce qu'ils
sont.
Quand ils portent une épée , l'observation
— 587 —
encore plus facile à faire. Les gentilshommes,
surtout à la cour , la portent sur les reins ; mais
eux au contraire la portent sur la hanche pour se
donner de temps en temps le plaisir de la re-
garder.
Du reste, les grands seigneurs ne portent pas
toujours leur épëe , ils la font quelquefois porter.
Dernièrement y il vint chez moi un homme ha-
billé d'une couleur dont je ne me souviens pas
bien y mais c'était d'une couleur bourgeoise. Il
était suivi par un valet qui lui portait son épée.
Mon garçon de boutique, nouvellement arrivé du
village, le reçut fort lestement. Je vous assure
que je le tançai de manière que ce seigneur dut
en être bien conleot.
La soie est de même exclusivement réservée aux
femmes nobles. On les reconnaît aussi è leur
cachelet, à leur cache-nez^ ou à leur cache-col,
à leurs petites mules ou multins de taffetas , sur*
tout à la largeur de leurs vertugadins. Il faut
savoir encore que les femmes de la cour , ainsi
que les dames de distinction , portent ordinai-
rement des caleçons ou des hauts de chausse.
Mais, ai-je dit à ce marchand, plusieurs
femmes sont successivement entrées, toutes en
chaperon ; comment avez«vous pu faire pour les
distinguer? Monsieur, m'a-t-il répondu, les
S5.
-568-
boorgeoiaeB ayaiept un chaperon de drap, les
nobles en avaient un borde de soie. Si jamais
Y0U3 allez en ILorraine^ vous verrez encore qu*on
y distingue au chaperon les femmes des ndto
des femmes des annoblis : celles-ci ne peuvent
en faire sortir les cheveux. ^ »
Les app^rten^ents étaient éclairés avec Thuile
de navette et Fhuile de noix , parfois avec de la
chandelle de suif, et dans les grandes niiûsoos
de la diandelle jaune, lavée et blanchie à la
rosée. La première coûtait â sous la livre , la se-
conde 18 sous ; on en vendait en outre de la cire
peinte et bariolée de mille couleurs
Nous voici arrivés au terme de notre œuvre ! Un
pas encore dansnotre course rapide et nous aurons
laissé derrière nous le XYIIP siècle comme les
précédents! Mais quelle route inunense^ eflrajantei
s*est ouverte à mesure que nous avancions ! Qu^est
devenue cette unité de Tempire Romain, de Char*
lemagne^ celle qu^avaient créée les prédications
d'Urbain et de Pierre l'hermite? Quelle confu^on
de peuples divers, de mœurs^ de coutumes, de
lois diverses , se mêlant, se séparant^ se ralliant
par les guerres, les mariages, les traités!... Il y
a quatre siècles k peine le quonde ne se connaissait
— S89-»
pas : la boussole ouvre les mers, Pimprimerie
ouvre Pentendement) porte aux nations nouvelles
ce pain de l'intelligence qui^ comme la boîte de
Pandore, serait sans la religion une source de
maux : on dirait que le monde intellectuel n^a
été jusqu'alors qu'un enfant dans ses langes, et
Tesprit^ accoutume à cet inépuisable foyer de
connaissances, ne comprend pas comment le
monde civilise a pu exister sans Timprimerie.
Maintenant tout va marcher ensemble et de con-
cert, la matière et Tesprit; un monde nouveau
va vivre et se développer. Essayons d*en retracer
les phases. Mais hélas! que sont nos faibles res-
sources pour une tâche aussi immense?
NOTES
£T
PIECES JUSTIFICATIVES.
CHAPITRE PREMIER.
(I) . . . Jamais l'humanité n'a rëellement ïtAl dm pas en arrières la féo-
dalité, issue du démembrement de l'empire carlovinglen, a été elle-même ui
progrès. Sans doute, il n'est pas donné de voir, sans une secrète émotioii, la
société secouant par intervalles an sommeil d'isolement, répandre dans les mi-
sérables hostilités des seignemn le plus pur sang du peuple. Mais œ sommeil
que l'on serait presque tenté de prendre ponr un signe de mort, n*est aoire
chose que la préparation à la vie plus active et la transition de l'enEuioe à la
Jeunesse. Mais ce sang doit féconder les germes de liberté que le christianisme
a apportés au monde. A peine le réveil de l'an mil a en lien, et rhumaniléi qui
avait cru un instant qu'elle allait finir, dépouillant les baillons d'une feinte
vieillesse, se remit à vivre d'une vie nouvelle, et la trêve de Dieu ouvrit qm
ère plus brillante de progrès. La France devait, comme toujours, entier la pre-
mière dans cette voie. Préludant à une renaissance universelle, elle place sur
le trône pontifical un de ses enfants, un grand pape, le plus savant homme de
son époque. Gerbert donne des rois à la Pologne et à la Hongrie t le premier,
il lait un appel aux princes pour les exciter à délivrer l'orient chrétien. La cha-
rité reparait avec la science, et semble vouloir reconstituer le monde. Gré-
goire VII, le plus formidable instrument que Dien ail Jamais choisi pour briser
les rois au Jour de sa colère, surgit avec son génie dominateur, et de sa voix ré-
formatrice soulève les peuples contre les abus du despotisme féodaL It la
France qui l'a compris, parce qu'il lui parlait son langage, Crit retentir parlottl
le cri de liberté. Et voilà que les coounnnes 8*aflhmchissent du Joug dei sei-
gneurs, et qu'un indicible mouvement transporte les esprits, depuis lliiunMe
i
— 592 —
dMumière do la pUioe jusqu'au laperfee doiOoD de la moDUgue. SaiiteBit h
croii d'une nuin et de l'autre \'^\^ des belliqueux Nonnandt , la Fnnee
donne des rois à l'Angleterre, i l'Italie, au PortuKal, à JéniFalem et à Couta-
tioople. Ce n'est (las assez : elle iropoie au monde l'autorité de laint Benard
et la Justice de saint Louis. Kntrainéc par un irrésistible besoin d'extenka,
die tente à la fois la croisade à l'orient et au midi, et lutte «tcc on égal hé-
roïsme sur denxciiampi de batirilkL Partout elle pUnlt son Éri^Mn, pKtail
elle propage son influence, c'est-à-dire la civilisation, dont eÛe peot être ngv-
dée comme Tapôtre. Pourquoi cet ascendant? pourquoi cette mUon? Ceit
que la France, avec la vigueur de lajcnnesBC, a su en acquérir la liberté ; c'ait
qu'elle a reçu de la Providence un caractère et un rôle d'initiation ; c'ert que
de bonne heure, elle s'est créé un pou|4o. et que ce peuple a été k patpte
chéri et choisi dt Dieu. Voilà pourquoi la France a marcbé la prcmitee dav
la voie du progrès social. On trouverait à peine une époque où elle n'ait pas
été à la tète des nations : même dans ses mauvais Jours, elle n'a Jamais abdk|iié
la supériorité de son génie. Contemplez-la. par exemple, au milieu de la gnem
éB cent au. Bile était loin de la victoire de Bouvine et des trion^iliet d9 pà-
■ppeAuguate. lonqu'cUe viiit nobleaae aotsaonBée par na glalTU vèSiBm»
■on roi prisonnier à Londres, et sa bannière rongie du sang d^ a^ cnfnto.
ITeAton pta dit qu'elle allait devenir une province de 1* Anglelann • il «^
eeasanC d'être elle-niénie, elle (devait subir la dure loi du vaini|B8ar ? MiiaaQn;
la France resta France : Jeanne^i'Arc opéra le miracle d'una gloriMH et
prompte déiivrtnoe. Senlemeni, comme si nous deviona toujonn tirer It Uan
éhi mai, notre nationalité s'était aoUdemeni constituée. eU à la piaqe d« l^arii-
iKTitie aeigneuriale. le peuple avait grandi dans les élata-génénnu I| i;|^
I consommer l'antre : Louis XI s'en chargea. Voua aavei oommeot il «mplqp
tontes lea ressources du despotisme à compléter la ruine de l'édifioe tjJQrtMi <U
niveler tout soua son sceptre de fer. Aussi, quand la main dt oel m^ilOfiliB
médedn eut appliqué un remède salutaire sur les plaies de la Wtme^wmtafik^
t-eRepaa à recouvrer ses forcea, et à se préparera une nouveUe IdUs. ffTHI*
du courage de la virilité, et mettant à profit les dlssentiona de l'An||c|KiQt, aHa
■'élança, aona Charles Vin, à la conquête de l'Italie, et endialu iM «toeivQ^
m char de aa fortune. Sur le point d'^onter à ses lauriers une oounMBitippf
ffato, elle tat, il est vrai, contrainte de suspendre aa oouraei etpcuitaUÉnn
même qu'èUe aemblait reculer devant l'heureux génie de Cliarte^)nin|g
I aes prindpei de aacrilce, elle sauvait l'Europe de la de
Mala quel est au|milieu dea armes ce bruit sinistre? Pouiquoii
tingtontéea? La vote d'un homme a-t-eUe donc pu, de Witlenh«t«i db WMI*
bourg, soulever les peuples contre l'BgUse du Chiiat? ànHimmm ■■*
sieurs, et laissons passer la justice de Dieu. S'il permet cet afflreoz dédutae-
roent des passions, c'est iK>ur les briser et les anéantir par un dioc mntncL SlV
ne s'oppose pas à ce qu'on perle bur le temple une main sacrilège, c'eat qntt
— 595 —
pént le rebâtir en trois jours. £t eft effet, I t^it» fe fànâttsine ê*éA éMiàê,
tràtiiânt après lui son hideni cortéjlé, étiwHo&t'fVMtiPé Ht rëUttAtMà tëtk-
nehce , et le csithbltèlMibèt èMtduré (Sttiûé notfvtlHe' gftaérttlMr M' fpoWMes,
soutenu par de nouTeaux ordres monastiques, apparaît plus pur et pft^ffiji^-
tueux. Voici venir Henri IV ayec TJdlft âé f^inïèl, et Snllf ittec son esprit répa-
rateur— (Al. Girmain.)
(2) Foy. Sismondi, HisU des FraneaiSft il
(5) roy. Monstrelet. 1. 1 .
(4) Les préjugés et'lâ (leité dieYâlerèèqoé èê fi tiôMoltè française aidèrent
autant l'Angleterre que les négôdaHom dei BourgiM|ftAiA ef des d'Armagnacs.
Elle dédaignait . les secours de Tinfiinteriè et des É^îhèâ, tîrJs des communes»
et craignait que le peuple n'acquit le senttmenVde M Axte en apprenant l'usage
de l'arbalète ; elle refusait le dévo(kment de la mfiloe' parisienne. ... Et pendant
ce|temps les Anglais s'em^ahrteiM du roya^ime «tec leur treo manri, et maiv
eboient avec confiance à la tète de la classe populaire.
(0) lfon8treIel«t.4. f
(6) Dépositiokis des divers chevaliers français et anglais , chronique de la
Pucelie. Monstrelet, Chartier, etc.
(7) Hignet, Éloge de ChaHet VtL
(8) La duplicité et la fineiiB de Bahie (oa La Bahie) étaient r4usai à tromper
révéque JuvenaldetUrsinietlepape Fien^ qui l'avaient élevé sans le bien
connaître ; mais Louis XI ne l!af ait attiré et élevé que parce 40*11 k conoeris-
aaitbicn....
Vcy. la biogr. de M icband* Baraute; et les d&veiiei ehrariquei 4r tenpf.
(•) Il 7 eut.cependant une interruption. Noué verrons plna kerd <fue FHhi-
fioét I?", après avoir battu les Suisses à Harigain, refit aveo ettc ce tnilé qui a
dnréittsqu'en1830.
(10) Ce Tristan, que Lonis appehUt80Daom|ière,»*étalkvieB:deiiQi«t <pie
l'exécuteor des hautes «Bovrei*. . . . G*étJât rhomne le plm oompé du rojfttume.
(44) Mablr, t III, éfapris h tahier du étati de rourit I4M.
(Ul) dattdeSeysselj BM. Hnpaiêréde LevUXL
(15) Fleuiangei* Mimoires. —Le pape Jules U mérita plus que Louis XII
le loin de grand eapitaine. « .
(14) HUU de Sayrd, I529r.
(15) ffitt» de Langnedoct ti 8é
(16) Après vin^ àiis de guerre déclarée on dlrimltlë ^eerète, àprei tM
d'ifijùres réciproques» des démentift et dès carttis. tâié telle éûHhiitte Mt en
erièt paraître biefi singcAètè ; ^âb fhiiitohrèile eeé deiiî Éottafi|ttes ëM-fÉttè
de contrastes aussi f\rapl(^tt et ausii bruiqaèi. (lUMÉMMIi.)
(17) DeThou, 1. 1 , et Anquetil, t. tl.
(18) DeThou, 1. 1.
(19) Que d'argent et de Miig ont ooAté à l'Earopo rambHfcm de Françoù cl
de Uuriei ! Dieu let fit naitra envioui de ia grandeur l'un de rautrc ; c*eilc8
qui a CMné la raine d'nn mUlion de famUleB. (Hortloc.)
(») Marie-SCuntoonpoia le<fen soiTanlsinr le niTireiiiB.la oondoiMità
DoaTmi
Adieu, plainnt.lpayt de France,
O ma patrie,
La plut chérie,
Qui a nourri ma Jeune enfance :
Adieu, France : Adieu, rocs beauljoun :
La nef qui dl^oint noi amoun
N'a eu de mol que la moitié;
l'ne part te reste, elle est tienne:
Je la Rc à ton amitié
: ; . : . I oiir que de l'autre il te souvienne.
(2n Ce nom de Huguenots, qu'on donna aux calTlnlstes, Tient d'un wil
allemand qui signifie confédérés ou alliés |>ar serment. Celui de protesUnl,
d'une formule de protestation contre l'Kglise romaine, dans laquelle Im ré-
formés aTaient cru mettre leur conscience en sftreté.
On les appelait indifféremment réformés, calvinistes, hugnenoCi,
naires et protestants. Ce dernier nom seul est resté.
Cf'oy. PLUQUir,FiJi]iT, «te)
(tt). Lacretelle : Guerres de religion, t «1.
(23). Quelques seigneurs réformé», réveillés par la marche des
Guise, sortent à demi vêtus, s'approchent de la Seine, près da Lonvnb ^
âcbent de reconnaître ce qui se passe sur l'autre rive t ils voient des
se lever et [s'abaisser, des torches qu'on agite précipitamment i dei
des pistolets, des épieux; ils entendent des cris de mort!... Mail qnai eil
donc ce groupe qui se presse près du balcon et se penche pour écouler? Ib
l'ignorent i ils s'approchent encore ;|à l'éclat des vêtements, an
ment des cottes d'armes, au mouvement des panaches, à œa
brillantes allumées dans le fond de l'appartement, à d'autres
croient que (Charles e«tà la fenêtre. Le vidame, en levant les mate an cU»
crie : < Maudit! il nous regarde tuer! > Il s'enfuit précipitammiBL Leti
se diseut entre eux : «Traversons le fleuve; c'est le roi que lai Gniaai
taqnent jusques dans son palais; allons à son secours. • Us a'aiment
gagnent les' bords de la Seine. Une barque de pécheurs est amarrde au riragl
Is vont s'y Jeter, lorsqa'en levant les yeux sur la rive opposée^ ils aperçoIfHll
Catherine, dont le doigt immobile semble montrer le fleuve, des ooortSrtas
qui chargent des armes, et Charles, penché sur la fenêtre du Louvre, uneai^
quebose à la main, dont il fait feu sur les ombres malheureuses des protestanls.
— 395 —
pressés sur la rive itaucbe, mab vainement, dit Brantftmet car l'arquebiise ne
va pas si loin. Tue! tue! dit-iià ses aoldats, en leur dëeignant les réformés!
tue ! tue ! répètent ses gardes en inclinant la tête i tue! tue ! répond sa mère!
tue ! tue! mugit ce peuple rassemblé aooa les fmétres de son prince.
(HisToiBB DB LA SiiifT-BABTBÉLinT, d'après Ics cbronlques, mémoirea ot
manufcrits contemporains).
(24) roy, la même histoire, I vol. in-8». — lâiS.
(28) « On a trop long-temps, dit l'anlear de l'histoire de USaint-Bartiiélemry
que nous avons déljà dté, accusé la religion de cette horrible journée : il but
que le saog retombe sur qui l'a répandu» et la religion n'en versa pas une
goutte. Si le signal du meurtre fût sonné par la cloche qui avait coutume d'ap-
peler les cathoUques à la prière, si les assassins parèrent leurs Yétements d'une
croix, symbole de la foi des chrétiens, si presque tons InToqoèrent le nom de
Dieu! avant et après le crime, c'est que Catherine fut bien aise de conyrir de
Toiles sacrés cet attentat politique : elle seule le médita et l'aooomplit* Gharlea
ne hit que l'instrument de cette femme étrangère ; ce fut ponr sauver quel*
ques lambeaux d'un pouvoUr expirant Qu'elle eut recours à ces sacrifiœs hr|
mains» etc... •
L'auteur eût pu i^ter que l'ambition de Guise aida la reine mère; ce n'était
pu donner des armes contre son système, cjir l'ambition politique exclut l'Idée
de religion.
Si notre cadre nous l'eût permis» nous aurions présenté à côté de ce tableau
hideux le spectacle consolant d'hommes généreux qui opposèrent une noble ré*
•istanoe à ces ordres sanguinaires. Nous nous contenterons de dter id leurs
noms devenus diers à la postérité» et en première ligne ceux de Oordes, Cba-
bot-Cbami, de Tendes, Satait-Héran, Mandelot» Jean Hennujer, évéque de
Lisieux, et du vicomte d'Orthe, de ce vieux commandant de Bayonne qui
écrivit au roi t qu*U n*aoaii trouvé dans sa gamisùn que de bon^ cUoyemê
et de braves soldats, mais pas un bourreau, ...
Nous aurions tracé aussi phis au long le portrait de ce roi si Msarre, de ce
roi poète, enthousiaste» mais abruti et si complètement fasciné par sa mère ,
qu'il n'est plus qu'un automate sans volonté devant ces volontés aussi tenaces
que sanguinaires. Nous donneronsjolontiers id qudques traita du portrait
qui nous est laissé par les historiens du temps.
Le Jeune monarque» d'après eux (et qui le connaîtrait mieux que ceux qui le
voyaient et suivaient toutes ses actiona?)» avait dansses Jeunes ans une surabon-
dance de vie qu'il ehcrdiait à user à la chasse, sa passion dominante, on do
moins Vune de ses deux passions dominantes t comme ce distique en
tait foi:
■ « Pour aimer fort Diane et Cythérée aussi ,
« L'une et Pautre m*ont mis dans ce tombeau ieyt ^
4 FM ii m^' M.^Lw — .M— ■ jBiiomwriimBii
.«of c« I •pMlimi|«VayaMilllbil.iryi
{■nipartropiHniiT.ai n\ lliliref.BeNpta'*"^^**^]
▼WfBfs fdicVcjM. Fif6t"ii innTAis ifinpi, ra d0 plliyft CM d\B fnni
chawl, voilà lir nionanitie bisaot fioérir ncsHiciin lei poflfM lliMtvd , dtW
BaU, ilann «on cahinrt, derimit H mmpiMaAt avi« aai. •• fSiiNnt ilt (»«
■vcc te DnttlioiMfew Anyotf mni ^ffwf^fw. t av ètfi M otfMAiA» Mumoii
I II iiMW*. fwrfMt le même rnttwmriaimg. An romell, Tûllft ni fol ée HV
tm qui étonne fia ttelOanh inr ton él(N|iimoe : la rrttK4iiêrt panlt, cailla
ranni (j^\ pleiiK et (|iU demande pardott (l*€tfe ntt HHM iiohlM. . . .
iroiH Mriohs pn anari. rrrc pin* de place, pr^ientait Molei lotf ÎMtt * h
(pMitfcHi, donner (|nelqnei-ani de cet prfteitei dont CiIlNriÉBttfiK MMi
te lerrlr nipiH de cens cpi'^lle Tonialt filtre leifh I ladNMftii.
Le dc^fn» en Fnmce . ne traMt pat toofom tai fétoittéi i ¥ÉMiplMM 9k
qoèlipief pointa, lia ae raaaemblalent detant mi flenvo, oeMkno U ttMHIbli
KMoe Oh le Hhin. appelalmt à leur arenon dca étfingeia o« iet MltoÉH^cl
la Inlte recommençait. Vainqueur». Ils ne i»anIonnaient paa eomaae toi (M*
liens de U i^uiHlve B^IIMi et Riidaient nppreatfon posr op|NPMlOH- Q■al^B^
Ibta ils demandaient en expiation le sang des eatiMillipief. Tanitt Bi i
la croli (lu Christ et les Images des ulnts. en brisaient nos pdntnrei
et les rfpNsentatloiis maifériellea de la adencft et déa iffi dont Ha
dans la terre potir y chercher les cendres de nta érêquei » dv hm
qu'ils Jetamt Mi Tent. comme I Lyon, h Angraléme, I mmci. i1MN(MHl
Ik renrerMiiflit II plenre du sanctuahf et diapertaleiil IM MMMr i
Cétalt la pMpart dn tétaps des rétagiés de Oenêf<e ou de TA
nate, qui \ cn:;oateM âhnl. par dliorriMei iiprdwBeii lM«oltte<
la mémcdre d^ Lnther on de tilthi déchirtfe dkM dtl ehmti
frères tournés en dérision Jusque sur le lien dU snpplM HJMVpfUlMiMdh à
coups de liatehf. et hrAr^n an mRIrti des eris de Joie etdé dMMik iMn fh^àt
prières flnéfl anx flammes on Jetés dans b rirlérê. AlMl, dei
qnes élefalettt entfif ira dMk partis une étemelle aéfMntlorii
rby. r/Hff . rfp M snînî PartMtmy, chronlqnei. Wénwifcm cl
du XW sitidc.
<18) tftM. hitirofl. ant Ihirri^adfs,
ffi) telOmal f9r«. fût dérobée la irtie croix «Init M II
dn palais. I Paris, dto i|ot>l le peuple et (oote U ville ftmntlDft
rélerà incomhwntnn bfttir. qu'elle atalt éMwlevde per Im
grands et même de la reine mère, que le peuple avait tant en
valse réputation, que tout oe qui arrivait de «ilenooMlrt M Ml
disait-on, qu'elle ne faisait Jamais bien que qnaid eUe pwNll filifi :
iJaurnaide J^enry///. Ll«.)
' (28) Pendant la famine la plus affreuse, au moment où, aenle, elle pontH
onvilr au roi les portes de sa capitale, le bon Henri laissait pMNr daa vlvifict
— 507 —
nourriMilt les viellUrds et les feiiiiiMis qve1liy«Dne diaisait comiM bonchei
inutiles. « srignaiir, disalt-ll on Yoyant leur misera, tu sait qui en est U oiBse,
mais donne-moi le moyen de sauver oeax (pie la malice de mes ennemis s*opi-
nidtrc si fort à faire périr. > (HiiDOUui di Piiiriub)
(S9) La paix av^it été établie au dehors par le traité de Verfins, elle le tai
surtout au dedans par l'édlt de Nantes. Les protestants repriiebalent à Henri IV
•on altjuration ; il répondit en les autoriunt à conserver pendant huit ans les
places dont ils étaient mattrcs (V. le traité de Saint-Germain dn 6 déc. I0B7),
en s'cngagcaut 4 |>ayer les garnisons protestantes, à maintenir leurs gouverne-
monts, et puis vint le bmoux édit, dont les hases avaient été long-temps disan-
te dans les conrércnoet de Châtellerault par Schomberg, Jeannin; de Thou.
Colignon, qui tous appartenaient à ce parti modéré dont THoipttal atalt éM le
pcrsëcutrur. c Nous avons (permis et permettons à ceox do la religion prétendue
réformée, vivre et demeurer par toutes les villes de noitre royaume, tans eilrtt
cuquis. moicités ni astr^ts à faire chose contre lenr consdcnqo. • leieelgMWi
et gciiUlbiiommes qui professaient la religion réibrmée, étalent «torisés à
exercer loiu* cuite dans l'intérieur do leurs châteaux. Les réibrmés ponratant
pratiquer librement leur religion daniL toutes les villes désignées par rédtt de
i*oitiers et dans les faubourgs de toutes les autres villes, excepté cettes où II y
avait dos archevêchés ou év^chés. et les lieux et sclgn^ories appartenant n»
ecclésiastiques. L'exercice de la religion ^orm^ était partlcuUéitment dé-
fendu à Paris et à.çim^ lieues aux environs. Cependant les protestants, soitdMli
la capitale, soi^dans les autres villes où reiercloe dé teur outte étatt prolilM*
ne devaient point être rechorohès pour leurs opinions reUglenses.
Les nibrais.élaleat lanas d'ohaerver les fkes Oei'tgUae roqiaiBe. et ^
payer la dlme eodésiastiquo ; ils devaient avoir des dvwKiéroB aéparés, Da
teste, ledit proolamait l'égaUté entre Iles deuxenltes. t II ne aen faâct dilii-
lenoe ny disikictton, pour !• foict de UieMcion, à ceoevoir les eacQUeci ^
universités, collèges et eaeolMt ot les malades es bqipitaïax* maladrcdes et an-
■mane publique.... Afin que la iosUoe soit rendqe à uQisuh)(^taaWM anonne
kaine ou faveur, urdonneos qu'ea PQstre oour de parleiuont.de ?ariat mm
establio une diambro composée d'un p(ésid«nt ft seiie conseillers , laq«ieUe
sera aiHielée U c*am(»r# i(e r^icfi et c«ii¥)ialM (||ia çanm at piqp^
de la religion, tant dana les ressorts de fadiote ottur que dansoelni 4a nea par*
leanents de Normandie et de Bretagna. • U devait être établi en <wtre une
dMnbie mi-partie de catholiques, et de proteaUnta dans ka parlementa da
Tesilooso. de Grenoble et do Bordeaux.
Indépendamment de ledit en quaire-vingt-douie articles , donné par le rei
au mois d'avril I8M, et enregistré au parlement le t février suivant» U y anrait
un édit secret, qui comprenait cinquante^ articlei, ot qui fM oommûniqpié
seulement aux chefs du parti calviniste.
— SB8 —
CHAPITRE DEUXIÈME.
(1) Urtformation, noTention de l'imprimerie et de U booHOle. il HooiÉe
CB grandt rétoltaU. U centralUatioo de la paittance dTile I la chûle de la Mo-
dalité, etc.. ne sont-ils pas communs à plutieun Datkmt. et lennoooiéiiMMa
D'intéreaeDt-clles pat l'EaroiMî entière ?
(2) Kin^' maker. . . Céuit le surnom qu'on donnait à Warwick, en Â■sl^
terre, an milieu du quinzième siècle.
(5) Ce passage de l'Iiistoire d'Angleterre est le fqjetderonedei pin inléreH
aantes et des meilleures tragédies de G. DelsTlgne.
(4) Le seul Jour où Catherine Par, veure du lord Lallmer. et éçom
d'Henri Vlii, s'aTisa d'aroir une opinion dilTérente de eeDe de aon rayai ami.
le bûcher se dressa; mate prévenue à temps, Catherine ra? int anr ses pas aree
adresse, flatta Henri, entra dans ses vues, et lui dit avecnn lelnl enlbwliwM
qu'elle se trouvait bien heureuse d'être sous la direction d'un al aannt tbéola-
gien. Henri, transporté de joie d'une dodltté orttiodoie qol flattait t«t sot
amonripropre, s'écria i Traiment, tous voilà devenue m doetenr! Mm éber
ccBur, nous sommes toujours amis. . . •
(8) roy. Bodin. Cette indifférence rdigieuie n'eitotA W|WBilMit pas ai
XVr siècle : mais la crainte était plus forte encore que la foi dwi OM MÉM
corrompue et dé> démoralisée par le règne précèdent
(6) Si nous ne nous étendons pas davantage sur la fin célètoa do Hato*
Stuart, c'est toojours notre cadre qu'il faut en aocnaer. Morte • conpiilB de
beaucoup de désordres, crut n'être qu'une victime rdlgicose... UéêfmÊiÊm
que fussent les Camtes on les crimes de cette femme oâèbre, aa norti porlÉMr
elle un intérêt qui les a fait oublier. Les circonstances qui enloMt as di^
niers moments sont fort touchantes, et ont bien contribné à Irira
cette illustre infortunée le voile du pardon. Après avoir écrit aea
lontés f t de tendres lettres d'adieu à ses pareuts de France,
à ses domestiques les oljeta précieux qui lui restaient eDe vooint ae :
la mort selon u croyance; mais cette tiveur lui fût refusée. Ble
dans son oratoire, où elle communia avec une hostie consacrée, qne le pi^a
Pie y lui avait Jadis envoyée, et qu'elle avait précieusement gardée poor oot
instant suprême. Quand elle descendit dans la grande cour du cliAteao, àà k»
instruments du supplice étaient préparés, comme elle portait à U natal m i
— 599 —
dfiz, le comte de Kent Ini dit d*an ton séYère t < Ifadame, il font «voir le Christ
dans le cœur et non pas à la main. » Pour l'avoir pins sûrement dans le cœur,
il est bon de Favoir sons les yeux. • Ces paroles exprimaient bien le caractère
des deux personnages et celui des deux cultes qui étaient en présence. Marie
fut condanmée à subir, avant le coup mortel, l'exhortation puritaine du doyen
de Peterborough, qui la menaça de la damnation étemelle si elle ne renonçait
à Vidddtrie. Puis elle ôta elle-même ceux de ses vêtements qui auraient pa
gêner le coup mortel, consola ses femmes et son vieil intendant Meiwill, qui
fondaient en larmes auprès d'elle. Elle posa sa tête sur le billot Le doyen pro-
nonça la formule ordtaiaire : c Ainsi périssent tous les ennemis de la reine! »
Une seule voix répondit am^n; c'était cdie du comte de Kent
La royauté absolue était si bien établie alors en Angleterre, que cet acte vio-
lent et atroce ne fit qu'assurer Elisabeth sur le trône.
(7) Henri IV avait demandé et obtenn des secours d'Elisabeth contre la ligne.
(8) Voy, Hume, Ronjoux, Bodin, etc.
(9) Lorsque la discorde entre les diflérentes tribus eut préparé la mine de
l'empire des Maures, et quand la bravoure et la persévérance castillane l'eurent
complètement consommée, le catholicisme, dont les conquêtes avaient été moins
rapides, se trouva dans la Péninsule, au milieu d'une population dont an moins
la moitié était son ennemie implacable. Le pouvoir royal, dont les taitérêts
étaient les mêmes que les siens, ne vit d'autre moyen de consolider ses soooès,
que celui de détruire cette population, dont Texistenoe pouvait un Jour les oom^
promettre. Toutefois, Ferdiiâind et Isabelle n'eurent point recours, comme
Charles IX, à une Saint-Barthélémy ; ils se bornèrent à expulser les Maures, au
lieu de les massacrer. Mais ils instituèrent l'inquisition» qui effectua en détail ce
que fit en masse cette sanglante Journée. \
Ce tribunal fut manifestement, dans son origine, une institution politique di-
rigée contre la population maure, qui, toute vaincue qu'elle était, n'en était p: t
moins maîtresse du pays, de son industrie et ses richesses. Il atteignit ce but
par les mêmes moyens qui réussirent aux décemvirs de Rome et aux inquisi-
teurs d'état de Venise, pour soutenir une autorité tyrannlqne. Seulement, au
lieu de tomber sous la hache du licteur, ou de mourir lentement sous le plomb
du palais Saint-Marc, les victimes forent brûlées vives.
(MOBBAU DE JONNis.)
(10) LIorente qui. en qualité de secrétahre de ce terrible tribunal, avait 'pu
compulser les archives, affirme, dans une lettre à M. Ciausel de Conssergues,
publiée en 1 824, que, dans le cours de 277 années, les effets de ses arrêts lurent
ataisi qu'il suit De 1481 Jusqu'en 1788, il y eut :
S4,S82 condamnés, brûlés en personne;
1 7.690 brûlés en effigie ;
291,450 incarcérés, reclus, et presque tous dépouillés de leurs biens.
— 1*00 —
Lonqn'fprèi la disparitloo des Maarei, llnqaititkm ceai d*€tre QDeimttta-
(II) UwpKHé»c1<ipot<now itfi* »noi iumUmp <wiWM)g<«i tm
é— FortigiiKt dw gingwili, ^/m nom nfrmgnfnm ^Êfkm
» to iNitet ^ YM C0MMNM tt imlDiMtL CimtaitoMMi 4^
Mlto 4|M«Be rardow d« déooavertts ëlitt tatte il réwilMlM coin te
mpèaiHiUrtgwiic, pila afaictéU forçai agitypalariw
ptaMvai aa«a la proieatta da la oow da lUMOi, «t êlwrtaaYl a«Ml tnoi II
ligne de <i^iiiii rcaUta (IttS). GeltB Hgiie, tiréa à omt Iia««i à roMal éa l'ai
éaiAcaf«ii«daaBeidnGap*Vert,oo«|MdlL'OaéaD alla «osée aodaKfar-
tiea : tout les payi dëcouvarli o« à découvrir appirtanatart m» Poringik k
l'ait da U Ucne, et» àrawat. aoi Eapagnob. Mais les Portqgala ae plai|9licit
d'être gênés dans leors conquêtes, tandis que les EqMgnols avaient rôoén
tout entier omrert devant eux ; et les députés des deux élali. réunis rannéeâni*
vime à TotdBrillMb dans la Vlallla-Caitllie. signarent un trattd pwtaiml U
HgnedadéHuraitiMidMi raaoiéa àtroAsoaitsûixaBlaMUilIncaà l^asot*
rme des Iles du Cap-Vart
Fvy. RaynaUl, Barroa, et rexcallent ouvrage de H. Filon, auquel noviaih
voyais noa lacteun. Cet auteur a traité avec un soin particuUar cette pvttDtl
I IriHoira d'Europe an XVP siècle.
(la) Fby . mobertaoa, Babbe, ifariana. Kocb, Dumaioil. aie.
(a)^ay.F«rrària, La Oède, Laatan, Gebaoar, Maltebnin, Flta. BabbCi
châtelalUfl aie.
(U)L*oBthouslMiaa en étail venu à un tel point, en Portngal svloa^ qm
les dames de Lisbonne, dit Gebauer, refunient leur nudn à celai qni ■Tanilt
pas encore signalé son audace sur le rivage africain par quelque brillani bit
d'aniies.
(1!Ô ^oy- les mêmes historiens cités phis haut.
(16) La période que nous parcoorons dans ce volume contenant le adbdlBe
siêde» nous sommes forcés de substituer le mot cathoUqoe an mot ch^ddeQ.
(17) Le quinzième siècle, comme les trois précédents, est plein de oea i
solennels qui Jugent les rois, les reconnaissent ou les déposent, et qd
nent par rezcommonication ces sentences politiques que Philipp^MIel
presque seul de reconnattre. Cette primauté ne fiit altérée ni par les i
térieurs ni par les désordres du grand s<AiBmc s elle est iBuaortalle pane qMIa
est divine. Nous pensons qu'on sera curieux de oonnatire à ce i
SdMBli, oélèhreUstoiian protestant t < L'autorité du pape rapaaai
que les efforts des hoounes ne peuvent renverisr, soir, oonme le
de centmauooa de chréticnf, parce qu'elle fajtueepwtiawifrtliyidacalii
ÉigliM contre laquelle il eitdit çp» les portes de renfer ne prévaudront pat
soir, comme le pensent les dinklentB, paroe que cette autorité repose sur le
fondement le plus solide, sur lequel one institution humaine puisse s'appuyer,
savoir : sur la croyance à son ori^ne divine, croyance eoracinée et consolidée
par un grand nombre de fidla, de lois, d'institutions ; sur la sagesse des maximes
et le choix prudent des moyens dont les mhiistres et agents de ce pouvoir fi •
reut usage. •
V. S6
— DOS —
GIIAPITKE TROISIÈME.
(i ; La RoMle; niaii y compris, à la Térité, lea potm^OM cn Arie. — ROM
donoeruns ici on aperçu de la putilion géographique de cet dIvefB pifi. l»
grand ducbé de Ruuie ou de UoilLuf ie, avait pour llmilei la tnède et 11 UnÊÊ»
à l'Ouest, le ducbé de LiUiuaoie et les royanmef Tartares an flod et à lïrt. La
royaume de Pologne CtNicbait à la mer Baltique et le proloQgeait aa Snà-mafL
jusqu'aux rivages de la mer Noire. Le royaume de Suéde powédiK toate li
partie orientale de la Péninsule Scandinave et la Finlande : le DaMoaickcoBi-
prenait les lies Danoises et le Jutland; U Norwége s'étendait anr tonlai kl
ctites occidentales et septentrionales de U Scandinavie, elle
l'Islande, les lies Orcades, et quelques autres. La Pnisae et la Uvonie
paient uue très grande partie des côtes orientales de U mer Baltk|nei lai
gric s'étendait de l'empire d'Allemagne aux mootagnes qoi aéparoil la'
sylvanie de la Moldavie et de la Valacbie et Jusqu'à Belgrade sar le
Elle touchait par la Croatie les rivages de l'Adriatique. L'eoBpire <
s'étendait de la Ueusc à l'Oder et de la Baltique anx Alpes : œt
prenait la Bohême, la Bavière, la Saxe, la Poméranie, le BiaiidebuiUfc kê
dudiés de Brunswick, de Ueddcmbourg, de Lorraine, de Savoie, le
Holsteinet le l'alatiuat; la Confédération Helvétique et ta ligne
comprenaient une foule de grandes villes, d'états on de cmtona, 4|a1 1
trop long d'énnmérer ici et qu'on retrouvera avec détails dans le M
de Kruse.
(2) Ivan III, Vassiliewitch ; Ivan IV, premier txar, snmonuiié par ka
le terrible, et pir les étrangers le tyrao, et qui, certes, méritait
degré ces deux noms. C'est une bien singulière destinée que œUe de ce i
verain à si Juste titre maudit de ses contemporains et béni de ta pmlérMtf I
(3) Ce Saint-Georgei, à cheval, se retrouve encore sur plottaon
monnaies de Bussie.
(4; ; oy. Eicchorn, Klaprutb, Karamsin, Huiler, Lévesqne,
Deppiog, Rabbe, etc. — Ivan IV, pour compléter sa
Louis M. alliait à sa férocité et à son génie despotique et dvilluteiir, HN
bigoterie excessive basée sur ia superstition et sans oonnaissaiioe dea loii iH
de U morale du christ, c'est ahisi ({u'il avait coutoiOB d'eotieiidn ta asMe
— W)5 —
ayant de verser le sang, ttqn'li fonda des monastères RptH avoir tué son iSU
dont la popularité lui taisait ombrage...
(5) La dynastie des JageUons commença en 1S87, et finit en 4874. Les prin-
cipaux rois furent Uladislas V, Uladislas YI, Casimir IV, Jean 1er, Alexandre»
Sigismond 1er, et Sigismond-Angnste.
(6) Foy, Rulbière, Ol^olski, Solignac, Kocb, Tbiessé, Dlngoss, Malte-firtm,
Filon, etc.
(7) Saint-Eric, ainsi qnenous Tavons vn dans le volume précédent, avait
promulgué au milieu du XII« siècle un système de lois fort remarquable pour
le temps et qu'il avait surtout puisé dans les anciennes traditions du pays ; ce
(X>de fut appelé Saint Erie's Lag.
(8) yoy, La notice de Heiberg sur le règne de ChrisUem IL
(9) Parmi les otages enlevés par le roi de Danemarck, se trouvait Gustave
Wasa, fils d'un sénateur. Ce Jeune seigneur réussit à s'évader, traversa Tarmëe
danoise sous un costume de paysan, parcourut les villages pendant la nuit,
excitant le peuple à la liberté, mais ses premiers efforts furent vains. Au
milieu de ses efforts il apprit la mort de son père tombé sous les coups de
ChrisUem et son ardeur de vengeance redoubla. Il résolut de s'adresser aux
montagnardrdc la Dalicarlie où il arriva après mille périls, et là, sans secours,
sans amis, sans moyens d'existence. Il fut contraint de s'engager dans Texpiol-
tation des mines. C'était, dit M. Cb. Coquerel, à qui nous empruntons ces dé-
tails, c'était un sort bien singnlier que celui de ce grand homme, confondu
avec les ^plcs mineurs, occupé des travaux les plus pénibles, se nourrissant
d'aliments grossiers, et n'ayant pour sa couche qu'un grabat d'écorce, où
souvent les froides humidités des mines vensdent interrompre son sommeil.
Qnelle forte trempe de caractère ne dut-n pas avoir, pour songer à renverser
alors une domination consolidée sur trois royaumes et cimentée par l'alllanee
d'une foule de rois ! Cependant il réussit à échanger son habit de mineur pour
le manteau royal, et l'ouvrier des mines de cuivre a fondé une dynastie.
Gustave se rendit sans délai à Mora, centre de réunion de tous les villages
Dalécarliens. Il eut soin de s'offrir devant les montagnards avec le costume de
son rang. La noblesse de son maintien, la résolution de ses paroles, la dignité
de sa démarche, tout lui concilia leur admiration. Ils étaient firappés de llié-
rotsme du vaste plan qu'il leur développa, ses traits réguliers et imposants, ce
visage où éclatait la noble impatience de briser le Joug de fa tyrannie, produi-
sirent l'impression fl plus profonde : et quand ils entendirent ce jeune homme,
dépeindre l'état de la Suède, le despotisme de Christlem, l'abaissement de là
patrie, les malheurs du peuple, quand 11 répéta les paroles de vengeance des sé-
nateurs, quand il excita les Dalécarliens à prendre les armes pour la plus sainte
des causes et à sauver l'honneur de l'antique Scandinavie, un cri d'enthou-
siasme s'éleva dans l'assemblée. Les paysans, portant les mains vers le ciel, un
les étendant vers Gostave, firent le serment de le suivre, pour vaincre ùù
S6.
noarira v étal. Oowloiirittalori yen les TieUltfdt pour enteodratavatk
ntrépoodirent que « U vent du nord • Tenant des contréea où riége, daMls
glaoefv lepalaii enchanté des bérot, ayant •oalBé pendant le'diaoom, e'êtM
leprétaged'inbiliibletsacoèti et anuitM Gnstafe, à la tète deqniln ccnU
iNNnmei, commença cette lërie de victoires qui se tennina piv TezU dn lym
«tla déllTrance de sa patrie.
(10) ^oy. Mallet, Lami, Vertot, Pilon, etc.
(11) Lapêcbedu barcoft derint an XV« siècle ponr la HoUande one aoace
de richesses. L'art de eaqurr ce poisson, déoonrert par Gdllanne nwifcfliii,
a valu à son auteur une célébrité durable.
(13) Guillaume de Nassau, après avoir pris part ani dernières billes des
calvinistes, avait profité de la paix de Saint-Germain ponr rester en Vranoe.
Il était lié avec les chefs du parti, et particulièrement avec Gottsnyt «pi
8*taitéresssit vivement à la liberté des Pays-Bas. L'amiral hd cooicilU de taire
la guerre sur mer. C'était un avantage pour les BaUvesi car les Bsp^DOis
n'avaient point de vaisseaux sur ces parages, Guillaupie suivit le conseil : il
organisa ce qu'on appelait les gueux^marins, et, dès le l«r avril 1572, deux
cent doqnanle de cet intrépides pirates surprirent la ville de Briel, dans FUe
de Woom. A dater de ce jour la n>publique Batave était fondée. Les villes de
Zélandeet de Hollande ne tardèrent point à se donner anx tasuiféSyCtle
prince d'Oraoge fut prodamé Stathouder, — Nous retrouvenMis la Ugne an-
aéatique dans le chapitre consacré au commerce.
(13) Les progrès du commerce, des sciences et des arts, conlriboall
à atigrocoter l'imposant de la confédération germjniqne : aeiac
Avaient été successivement établies sur le modèle tie celle de Leipalc cC dm-
naient au peuple une masse de connaissances toutes nonveUei que l'ImprkMrie
répandait avec autant de profusion que de vitesse. Nous retronveraos l'Aile-
magne sons ses formes les plus importantes dans les chapitres oonaacréaà b
rdigion, aux sdences et au commerce.
(U) D'après les mémoires, encore manuscrits» du cardinal de GnuTdk,
rnn des plus curieux monuments de llUstoire du seixième aiède, Chvici-
t^nint abdiqua parceque la force lui manquait pour venir à boni de UNHea ces
entreprises et que chaque nouvel obstade effrayait sa vidUesse IhMgiM^ dtee
si longue lutte contre les hommes et les choses. Son abdicatioii eot Uen à
Bruxdles avec le plus grand éclat : il voulut être lui-même JnM|a*ia booL II y
avait probablement plus d'ostentation qne de véritable pléH dans œs pvoleB
qu'il prononça en baisant la terre où il devait mourir : ù mère «««MiMim des
bonunes. Je suis sorti nu du sein de ma mère, je rentrerai nn dana ton aein. >
rny, Robertson, GranveUe, Strada, Scheffer, Schmidt, PfèffBl, etc.
(15) Yers le milieu du XVe siècle Appenzel imita Uri, Schwlu etUodemal,
d bientôt après la Rhétie entière secoua le joog. La guerre dvlle soMt de
pièces victoires de >>
(Kl) CvH f(;iiiin(>M, (Moluii SchllUnKi ëtalont iilufl do trois mille. Lo cain|i de
CliarlcH <^tntt uik) cnpiUilo mubllo, dont tuâtes les nuits et toutes les Journéee
nVcoulattiit daiiit Ioh plalMini et los fêtes. Une nouvelle d()putaUon vient repré-
mmtcr nu prince tihndraire qu'il ne trouvera pas en Suisse la valeur des éperons
(lon'M (|ut) Htm clitivaliers portent. « Hien ne voulut-il entendre » dit lo même
liifltoiirn, et J^ lo conduisait son malheur. » Il atta<iue Grandron, offre unect-
piiulatioii honorable à la garnison (ful maotiuait do vivres, pend aux arbres des
riivii*(>uti tous ces malheureux qui s'étaient fiés h sa parole, et coolinoe sa
route. Kai8lH d'horreur, les oonfétlérés • témoignent, dit le même autour, oour-
niÊk 8i furieux, que dire ne se peut, Jurant tous que vengés seraient lews
fri^trcM par sang et vie, sans nul répit. • Ils forcent un défilé riilre le coteau do
Vnuniareiis ot la chartreuse do la Lance, no trouvent en lurésenoe de l'ennemi,
re<;<)iv(«iit, sans s'ébranler, plusieurs charges de cavalerie, s'écrient i Grtm»
dson ! Grandson ! ot marchent. Alors le reste de Tarméo confédérée psnit
sur lofl hnut((urs, éclaire des feux du soleil k son midi i le ion éclatant do oor
d'irnderwalden. lo sombre mugissement du taureau d'Uri. trompette fomée
d'un rouleau d'écoroe, rotentissoul du-haut des collines. Fatiguées d'une pn*
nûistti attaque, les troupes du duc s'étonnent de cotte nouvelle lutte. « Cepeo*
<lant. dit encore le chroniqueur, elles avancent à grand bruit de trompes. ...
et npparaiMHent devant les ligues gens d'armes bourguignons superbement ao*
contrées ; c'était une fourmiiUêre. Les ligues font planter on terre phtaes et
banditiros, ot d'un commun accord, à genoux, requièrent faveur du Dieu fort,
(«0 (|ue le duc voyant, cria : Fartaini Geoiy^t f^ eanailles crient môreil
genê de rnnmi, féu sur eta vUaim ! Mais les ligues, comme grêle, se meut
dessus les siens, taillant, dépléçeant deçà delà tous ces beaux galants. Tant et
si bien déconfits fureuttà Vauderouto ces pauvres Bourguignons, que somblê-
rent-ilH fumée épendue par vent de bise. » C'était, selon l'expression d'un autre
chrouhiueur alors présent. NohilUng. un troupeau do bétail chassé par lei
Suintiez. Los vainqueurs poursuivent pondant une doml-lieue lesvalnoua, qui,
daus leur terreur, no laissent (pio miilo morts sur le diarop de bataille. Cent
vingt plOccB do canon, «luatre oonts tontes, celles du duc, brodées on or et en
perles, aix cents bannières et drapeaux, plus de quatre quintaux de vaisselle
d'argent, les sceaux du duo, ce diamant célèbre qui pasia par tant de mains,
et fut pendant plus d'un siècle lo premier diamant de la couronne de France t
tel fut lo butin dos Suisses. Plusieurs miUlons de florins so répandent en
Nuisso. somme énorme daus ce temps et dans un pays si pauvre.
Charles, désespéré, se renferme pendant six semaines. La douleur abat loii
esprit et mue sa complexion^ Les autres rois voient avec plaisir une chute si
subite et si terrible. Les soigneurs ot les vassaux abandonnent un tyran dont
la puissance s'écroule. I>éjà les villes impériales s'unissent à la confédération
suisse : ou so plaint des sacriHcos exigés par une guerre inutile. Sourd à tous
les avis, le duc rallie en Franche-Comté les débris de son armée, fait faire
des lov^ dlioinmes ft d'argent, change en caooni et a ftuih tas doeheict
les liaUcries dn cubinr. et s'avance inrri de deaz mille seiRneon et chen-
tten; en U.ut inixante mille bomnios. Il assiège Moral, défendu par Biiia-
berg, avojf r de Brme, rappelé d'nn exil inja«te. Les portes étaient onTcrto,
et Bnbenberg, à la tête de ses qninie cents homme*, qui frisaient sm ewe
des sorties, répondait aux sommations de l'ennemi : • Entrrt , on rom n-
Cependant les Gonféilérét arrivent poar sauTer Morat. Trenle-an mille te»
lassins et «luatrc mille chevaux, la plus forte armée que la Snisae eftt levée
jusqu'alors, avaient marché sans relAche, la nuit et le Joor. sons des torraMs
de pluie. Elli* tombait encore i|uand le soleil parut, l'n tiers de l'hibArie
IMNiait des armcA à feu que l'on allumait avec des mèches. L'espadon, épée
longue de quatre pieds et «lemt sur deux pouces de large, pendait sur le doi
des fantassins, qui avaient au cûté une autre épée ctmrte. Les bataillons sniaseï,
de trois à quatrt* mille hommes, formés en carrés, hérissées de piques de diz-
buit pieds, citadelles mouvante», s'avançaient son« le feu, et recevaient toalB
les charges sans en .recevoir d'échec; Le soleil perce un nuage ; an moment
même les Suisses achèvent leur prière. Diru novs éclaire, s'écrie HaUvyll.
que les confédérée ont nommé général en chef, en souvenir d'nn oomeil qaTii
a donné à la balaille île fîraiidson. Les ligues immenses des Bonitolgnoni
soutiennent le choc violent de» Sni^st^s. René, duc de Lorraine, charge d'un
cMé. Ilallwyll de l'autre. Dubenlx^rg prend l'ennemi 3i dos. et le général de
Luceme, c;a9par«l de liertenstein, guerrier li cheveux blancs, achève de le
eemer. La mort vole dauii tous les rangs : des milliers combattent, des ndUlen
tombent. La retraite est coupée .inx fuyards, dont les cada^TCS rempUssent le
lac de Uorat Le duc fuit ceiK'Qdant, i^lle. abattu, consterné et presque seul.
« Petite ftat. dit une chronique, la perte des ligues ; cent trente dans Tassant
des pals et canons ; les coiilevrenides et batteries frappèrent deux centqnatre-
viiigt. • Les vainqcenrs donnent au duc de Lorraine la tente dd doc de Bonr-
gogne et tout le canon que celui-ci lui avait pris ft Nancy. « En place des prf-
ciosilés prises à Grandson, dit encore le chroniqnenr. messieurs des Ugnei
trouvèrent à lfor;.t deux mille cour:isane$ et joyeuses donzelles; et déUbémt
que telles marchandises ne bailiereient grand profit aux leurs, si les laliaènnt-
ils courir. ■ Fribourg et Berne, qui avaient le plus souflSnrt, enrent la pins
grande partie des canons, et retinrent soa^t les drapeaux douze mille honunes,
avec lesquels ils soumirent le pays de Vaud et menacèrent Genève.
René, duc de Lorraine, profite de l'occasion, fait une guerre à oatmmà
son ennemi humilié, et reprend Nincy. Huit mille Suisses viennent à son w-
cour». Sous les murs de cette ville s'engage un grand combat. Mais l'araide de
René l'emportait sur celle du duc. en nombre, en force et en oonnge. Le
comte Campo-Basso. napolitain, trahissait le doc ; avant le comliat, fl paMi
avec près de trois cents hominc< djtns le camp de l'ennemi. Les Snissesi iadi-
— ftÛ7 —
gfiés, Iqi firent répoiidre gii'il i^ût à 8*éloi|per ; qu*!^ oç voulaient nuls traîtres
parmi eux. Aisément yaincp, Charles Ta périr dans un mar^s. couvert d*une
l^re couche de glace ^ et René, après lui avoir rendu les honneurs fimèbres,
rentre dans Nancy à |a tête des vainqueurs, sous un arc de triomphe formé
des débris des (^ens et des çbevauq^, dont les habitants avsUent été forcés de
se nourrir pendant le çjy^. Quatre ana après la bataille de liorat, les osse-
ments des Bourgpignops firent exhumés; on les plaça d^s un ossuaire, avec
cette inwrlpUco svbliine pv la modestie et la fierté de TexpieBsion :
Dio on. mx.
CilQliI IWLTTI «r lOBTlSSON
BUBflDNMJI DUCIS
BXERCITU8 MURÀTUM OBSIDENS
in BlLVBTIU fiJSSUS
Hoc SUI MONDIfSHVD» 111400».
{Foy. PB. GBA8LB8, d*après Schilling, MOllii,
CoHiiiBS et autres chroniqueurs.)
^ (f 7) La prise de Constantinople est, en effet, le point choisi par les historiens
pour marquer le passage d'une époque à Tautre, et si nous ne Tarons pas
fait ainsi, c'est que nous étions liés par notre division par siècles, qui n'est
peut-être pas moinp rationnelle, surtout pour une histoire de la civilisation.
(18) Quinquelinguasprselersuamnoverat:grsçam, latinam, chaldaîcam.
pnsicaoi...
(f 9) Gib])on révoque en doute l'histoire du melon que fit chercher Maho-
met II dans le ventre de dix de ses pages, pour connaître celui d'entre eux qui
était coupable de gourmandise.
(20) Les quatre vaisseaux de Gênes firent cependant tout ce qui était en leur
pouvoir :ils triomphèrent sous les yeux de Mahomet de 18 galères musul-
manes, et entrèrent dans le ^port aux acclamations des assiégés. Dans' son
dépit, le sultan fit amener devant lui le commandant de sa flotte, et te frappa
cent fois de son bdton ctor qui pesait cinq livres (cinq cents dragmes.)
Foy, DocÀS. BouiLLÀRD et Gibbon.
(21) .... Les captifs mâles se trouvèrent liés avec des cordes , les- femmes
avec leurs voiles et leurs ceintures : les sénateurs furent accouplés à leurs es-
claves, les prélats aux portiers des églises, des jeunes gens de race plébéienne
à dé nobles vierges, cachées jusqu'alors au jour et aux regards de leurs plus
proches parents. Cette captivité confondit les rangs de la société et brisa les
liens de la nature; et les gémissements des pères, les larmes des mères, les la-
mentations des enfants, ne purent émouvoir les inflexibles soldats de Mahomet.
Les cris les plus perçants étaient ceux des religieuses, qu'on voyait arrachées
des autels le sein découvert, les bras étendus et les cheveux épars; nous de-
— :é08 —
Toos croire qae pen d'entre ellei parent préférer les griOa te idnil àedhi
(In monastère : lei mes ëuknt pleines de œs malheareux cspttli, de ces sift-
maui domestiques rudement conduits en longues fllek Le
de retonmer chercher un nonrean bnlin, hâtait, par des i
leur marche tremblante. An même instant, les mêmes ioènes de npins ss
répétèrent dans toutes les églises et dans tons les eonfcnts, lonn les pilais et
toutes les habitations de la capitale ; le lien le plus sacN on le plos soMrihs
ne put défendre la perMmne ou la propriété des Orées. Uns dt eotanteariit
de ces infortunés lurent traînés dans le camp et sur la flottes UsABentéchangéi
ou Tendus d'après le eapriee ou l'Intlrét de lenrs miitrm. «t
les diverses provinces de l'easpire ottoman.
(OUMM.)
(XI) loi/* Cbalcocondyles, Léonard de ChiOi, Dncm, Fhnumn» le
Totr, Gibbon et les historiens modernes.
r25) Le règne de Soliman-ie-Magnifique avait été l'^iogée de b
ottomane. Sous son indolent successeur Sélim II» les Turcs enlevèrent Chypn
aux Vénitiens, mal secondés par l'Espagne i mais ils furent déUts don le
tiûMt de Lépaote par les flottes combinées de Philippe II, de Yenlse et dn pape,
sons \c% «mires de D. Juan d'Autriche. Depuis cet échec • les Tbêkm avonèrent
que Dieu, qui leur avait donné l'empire de la terre, avaK latasé eatad dt la msr
aux infidèles.
Sous Amurat III . Mahomet III et Acmet I«r (1574-1617) , les Tares son.
tinrent, avec des succès divers, de longues guerres contre les Tttum et lis
Hongrois.
— 1109 —
CHAPITRE QUATRIEME.
(4) Quoique l'on fût partagé sur le droit des concurrents, on n'en demearait
pas moins attaché au siège ^ostolique. à la chaire de saint Pierre; et ce
schisme, tout déplorable qu'il était en lui-même, nnisit peut-être moins aux
consciences que d'autres scandales. C'est la réflexioD de saint Anlonin, arche-
vêque de Florence, qui écrivait vers le milieu dii siècle soivant : • On poorait,
dit-il, être de bonne foi et en sûreté de conscience dans l'un on l'antre parti :
car, quoiqu'il soit nécessaire de croire qu'il n'y a qu'un seul chef YisiUe âfo
celte Eglise, s'il arrive cependant que deux souverains pontifes soient créés en
même temps, il n'est pas nécessaire de croire que celui-ci ou celui-là est le pape
légitime ; mais il faut croire seulement que le vrai pape est celni qui a été ca-
noniquemeut élu, et le peuple n'est point obligé de discerner quel est ce pape :
il peut suivre en cela le sentiment et la conduite de ses pasteurs particuliers. »
(2) Noas donnons ici, comme par le passé, la nomenclature des papes des
XVe et XVIe siècles. XVe siècle,^ Innocent Vil, Grégoire XU, Benoit XIV,
Alexandre V, Jean XXIU, Martin Y, Eugène IV, Nicolas V» CalUste HI, Pie H,
Paul U, Sixte IV, Innocent VlU. Alexandre VI.
XVr siècle. — Pie m, Jules n, Léon X. Adrien XI, Clément VU, Panl m,
Jules III, Marcel n, Paul IV, Pie IV, Pie V, Grégoire XIU, Sixte-Qnint, Ur-
bain VII, Grégoire XIV, Innocent IX, Clément VIII.
(5) Le concile de Pise n'est pas regardé comme général par tous les théolo-
giens, non plus que les conciles de Constance et de Bâte par les théologiens
d'Italie. Mais cela n'enlève rien à leur autorité dans l'Église.
(4) voy, Lenfant, Histoire du Concile de Pise, et le père Richard, Analyse
des Conciles. Voy. aussi les oeuvres de J. Gerson.
(5) Pierre Philargus, qui fut élu sous le nom d'Alexandre V, au concile de
Pise, avait, quelques mois avant, mendié dans l'ile de Candie, d'où il (ut retiré
par le cardinal Cossa, qui le proposa comme un moyen terme qui ne devait
pas exciter la jalousie à cause de sa vieiUesse et de sa grande piété.
{Biog.eedéskut.^
(6) Jean XXIU était d'une famille noble de Naples, né avec de Tesprit, de
l'audace, de l'ambition, mais sans fortune. Il avait fait, dans sa jeunesse, le
métier de corsaire, qu'il abandonna bientôt pour se pousser dsns l'état ecdé-
•ijMtiqQe. n Bt lei étiKlei MM trop d'cmrie d0 defcnlr nn^
4lBtrodiiire«qNPès do pape BonUue DL. en Tendant an pin hant prii ki W-
néfioei et aei indolgf ncct. Ce pape ie fit cardinal, et loi donna la légation de
Bologne. La corruption de let mœurs, ton faite et ta tyrannie loi méritèNil
la diif{rJlce d'Innocent VU et de Grégoire XII t malt tons lenrt elTorts et Um
kinrs foudm échouèrent contre la témérité du légat, qui aontlnt Tit^iii
d'eui M rébellion» par les démarches les p*at hardies et par les Toies les pin
odieuses. Ce fui on grand scandale pour l'Église, de Toir les fimcUons di vi-
cahre de Jésus-Christ confiées à un homme qui n'ayalt ni adence, ni ¥ertii,et
qui avait montré Jusque là tons les vices des maîtres avides, dnfs et cmeb.
(BisMre des Papes, tirée des anfenn ecdésiaiL)
(7) #^flf. k prenier chapitre de ce folnme. relatif ai aaiaon dtiea»#etit
(S) Jtm Hoas, né en I99S. avait été snccessivenent à Prague profesaevr. pré-
étealear. reelear de roniverslté et confesseur de la reloe. Les erreurs de Wi-
def amenèrent les siennes : le pape, pour lui. était hérétique. Il l'appelait nnH-
clirlst. ges partisans forent nombreux : Jean Xin l'eieonmania et JetartaderdR
•nr Prague tant qu'elle snulfrïrait l'hérésiarque dans ses murs. H en appela da
pape k nn eoncHe général ; il fat Jn^. condamné à mort à celnl de coortanes
et pois hrftié. H supporta son suppliée avec la fermeté d*nn enthousiaste. Ses
partisans se levèrent en masse, et. commandés par Ziska. ils brAlèrent à lenr
lonr les églises, les abbayes, égorgeant prêtres et moines. Cet épisode dsi
sneinsniigienies fut long et horrible.
(Voy. Bitlaria ti monaiMeilla /. ^iniH.)
OfiDcaiSyivIaa (pie U) dit que Ica hnsiltes rAcièient ta tem dtna l'eadrait eu
leur maître avait été brûlé, et l'emportèrent prédensament I Prigpw
((Ell|(4S SfLVIBp, BigL èoMp.)
0>) Vfff • XMUtfOrt (ku cmeile d^ «iU, VÀn^liftfi 4m f««fi^ eu 4»« Ai-
ekardf etc.
(10) Quelques historiens ecclésiastiques prétendent que dès œ moment le
concile de Bile, quoique légalement convoqué, cessa d'être œcamâilque, mais
cehil de Ferrare ne le fut pas davantage.
(11) Histoire du eoneile d*i Bdle, XXXIIc et XXXin*' sessions.
(12) Amédée. après avoir abdiqué I4 spvvffiiget^ ^ Sff^ ^ CiywrdB
son fils, s'était retiré à Ripaille, sur le lac de Genève, où, sons lliabit d*her-
mlte, U menait une vie de pénitent selon les uns, de qrbarlte aelop d'aolm,
ce qui donna lien k ce dicton populaire faire ripaUU.
(13) Alenndre Borgia (Alexandre TI) était le neten ^àJt^houm Borgla
(CalistelU).
(U) Ce distique fat appliqué avec deux autres contre une statue nraUlée
fljlilHilUàU p(W!te fi'na HiHeyg iMéJéem, muamà Boifntan, tt énlnt Fori*
gl^> <lw iiB<ti»»iadffi. Mi atgmiiae, tascwaaatéa et Igs d^pnataHwnti <■ pape,
accréditèrent protfiptement cette invention de la vengeance populaire. La
statue paria toua les Jours, «t les flattenrs d'Alexandre VI loi comeillèreiit de la
Seterdaiu le Tibre. « SUe m changerait m grenovIUe, répondit llmpiidettt
pontife , et j'en seraii importuné nuit et Jonri J'aime mlein ime pierre
muette. *
(15) Un tiistorien ou chroniqueur italien du XVe si^le raconte de la manière
suivante une partie des cruautés de César Borgia. ... H primo, il fratello cfie
si chiamava lo Duc adi Gandia, io fcce buttar infîume. Fece ammaziare lo Co-
gnato, che cra figlio del duca di Galabria, era lo più bello giovane che mai f|
vedassi in Roma. Ancora fece anunazzare Vitellozo, lo;più Valentuomo che
fusse in quel tempo, etc.
(16) Lucrèce Borgia vivait en même temps avec son père et ses deux frères
César et le duc de Gandie. Le cardinal ne put souffrir co partages le duc
disparut, et quelques jours après on trouva son cadavre dans le Tibre,
Alexandre VI en éprouva un chagrin d'autant plus violent, qu'il préférait ce
fiis à tous les autres; il resta trois jours sans manger, mais il finit par oublier
cet assassinat, et célébra le retour du meurtrier, qui s'était réfugié à Naplcs,
par une grande chasse, que signalèrent le faste et la débauche la plus immo-
dérée. Rome, disent les historiens du temps, était une caverne de voleurs, un
sanctuaire d'iniquité ; et Pontanus a consacré les déportements de Lucrèce
Borgia et de son père par cette épitaphe :
Hoc tumulo dormit Lucretla nomine, sed re
Thais, Alexandri filia, nupta, uurus.
Cette Messaline faisait ouvertement les honneurs du palais pontifical ; elle
y rassemblait tout ce que Rome renfermait de femmes impudiques, donnait
audience aux cardinaux, maniait toutes les affaires, ouvrait toute la corres-
pondance de son père, expédiait les brefs, et poussait l'effronterie, ajoute le
journal de Burchard, jusqu'à paraître dans la basilique de Saint-Pierre avec
ses compagnes de débauches, aux grandes solennités de l'église. Les hommes
les plus reconmiandables de ces temps d'immoralité prêchaient en vain contre
ces désordres ; en vain la faculté de théologie de Paris réclamait un concile
général pour y mettre un terme. Le prédicateur Savonarole expia sur un
bûcher sa généreuse indignation, n avait prédit la chute des Hédicis et des
Borgia, Alexandre VI l'interdit, Savonarole résiste et reparaît dans la chaire,
il subit l'épreuve du feu avec un autre ecclésiastique qui avait embrassé sa
cause, la douleur leur arrache quelques concessions, Alexandre en profite pour
le dégrader, faire jeter au bûcher l'homme le plus extraordinaire, le plus éner-
gique de son temps et celui qu'il redoutait le plus. i
(roy, les auteurs ecclésiastiques, la biographie de Mlchaud, etc.)
(17) Fo^.BUBCARDlDlABIOlf-EGiBDI, Corp. Mit.
(18) La réforme, dans une histoire bien faite, ne serait pas simplement un
— ^2 —
tcWnw qui a doimé DMianoe à dei guerrai et ftaeaMé dei dladènet ; ce iff A
on schiBiiie de Untei les faBllIet, pénétrant dam l'iotériev de chaiiiie wê/Iêoê,
annaot lei taitérétt lei ona contre les autres, oppoiant le fila an père, et le
frère à la Mrur ; noua Terrions toutes les âmes énniea de cette grande et n-
dontable passloo. nous la retrouTerions dans le salon do bootseois» daMTd-
cote de la prinoeste et dans la place publique, etc.
(RiY. dd PUt-Ilad.p c f .)
— IH5 —
CHAPITRE CINQUIÈME.
(1) 11 y avait plosieiin aiècies qu'on désirait la réfonnatkm de la dbcipiine
ecclésiastique : Qui me domiera, disait saint Bernard, que je voye avant que
de mourir, l'Église de Dieu comme elle élait dams les premiers jours?
Si ce saint liomme a en quelque chose à regretter en mourant, c'a été de n'ayoir
pas TU un changement si heureux, n a gémi tonte sa fie des maux de l'Église,
n n'a cessé d'en ayertir les peuples, le cleigé» les érèqnes, les papes mêmes :
ne craignait pas d'en avertir aussi ses reUgienx, qui s'en affligeaient avec
lui dans leur solitude, et louaient d'autant plus la bonté divme de les y avoir
attirés, que la corruption était plus grande dans le monde. Les désordres
s'étaient encore augmentés depuis. L'Église romaine, la mère des ^ises, qui
durant neuf siècles entiers, en observant la première avec nue exactitude
exemplaire la discipline ecclésiastique, la maintenait de toute sa force par tout
l'univers, n'était pas exempte de mal ; et dès le temps du concile de Vienne,
un 'graod évèque, chargé par le pape de préparer les matières qui devaient
y être traitées, mit pour fondement de cette sainte assemblée qu'il y fallait ré'
former l'Église dans le chef et dans Us memhres. Le grand schisme arrivé
un peu après mit plus que jamais cette parole à la bouche, non seulement des
docteurs particuliers, d'un Gerson, d'un Pierre d'Ailli, les antres grands
hommes de ce temps-U, mais encore des condles, et tout en est plein dans le
concile de Plse et dans celui de Constance. On sait oa qui arriva dans le con-
cile de Bâle, où la réformation fut malheureusement éludée, et l'Église replongée
dans de nouvelles divisions. Le cardhial Julien représentait à Eugène IV les
désordres du clergé, principalement de celui d'Allemagne. • Csf désordres,
lui disait-Il, excitent la hahie du peuple contre tout l'ordre eodésiastiqne. La
cognée est à la racine, l'arbre pendie» et, au lien de le soutenir pendant qu'il
en est temps encore, nous le précipitons à terre. »
(B088UBT, Histoire des variations, etc.)
(2) «I A mon avis, dit M. Guixot, sur la haute impartialité duquel nous ahnons
à nous étayer, à mon avis la réforme n'a été ni un acddent, ni une simple vue
d'amélioration religiense, le fruit d'une utopie d'humanité et de vérité. Elle a
eu une cause plus puissante que tout cela, et qui domine toutes les causes par-
ticulières. Elle aété un grand élan de liberté de l'esprit humain, un besoin
DooTeau de penier, Ue Juger Ubreiarat. iKHir son compte, avec tes
forcet, dft faits et de* Idées qiic Jusqurii-la rKumpe receraitides mains di
ranU»riti}. C'est une grande tentative d'arTranchissoment de la penste fao-
nuine ; et. pour appeler les choses par leur nom. une insurreciiom detêt-
prit humain etmtrr tf |>oMpo<r ahs^iu Hnna l'ordre apirifise/. Tel al,
selon moi. le véritable caracten*. le nractère général et dominant de la ré-
forme... . >
(3) Nuiis avons rapidement iiamnini . dans le volume quatrième, l*hlitQlR
des div4*rses communautés dissidenteti : l<*s stédinguiens. les flagellans. In
«icletites, les hnssites,ont pré|>aré l.utlier ; Luther ouvrit la vole à CalTlB,et
ainsi fut amenée une révuliitiuu inévitable, une anarchie inleOectaelle, qpl
plus tard amena une n-action non moins înêvitalile. Jean IIum est le leai îa
prédécesseurs de LuUicr «fui appartienne au \ V siècle.
v4) L'opiuiou de la plupart d4>8 lilsinrii'ua de la réforme est que si Eoae
cUe-inèmc eAt songé à une rvîornw sàifusr, la réftirmo. telle que la fireit
Luther et Calvin, bnisi|ur, al>Miluo, rjdicaic. u'f At lias même été proposée.
(5. « llalheur, s'écrie un vénérable prélat du \v.> siècle, malheur qui bH
naître dans mos yeux une abon<lante soun.'iu de iarnie«. Cens qui étaient Ml
l»ar une obligatiou sévère de la loi ont apostasir, la vii;ne du Seigneur est n
vjgéc ï s'ils [Mûrissaient seuls, ce serait un mal. et crpenilani on |H)urrait le luj^
Itorter. Hais connue ils circulent dan» toute la chrétionlé de la même manièrB
(pie les veines dans le corps, leur dcpravation entraîne nécessaireiuent la rabM
du monde!.... ■
(6) Jules II. dans les rangs suiial:iTne<. fut rcliollc : devenu maître. Il Ibraia
des caMcs en grand. Son anlcur ixmr dominer lui lit commettra Uen des
injustices : sa passion )H>ur la guerre déshonora «on caractère.
vLiiciEi, Histoire de reniée),
Ixs voies ([n'avaient {mê Jules II pour assurer sou élévation, n'avaient pa
fait espérer un pontife fort religieux, ui le nom de premier empereur RMuIn
(lu'il avait choisi, un prince paciliiiue. Son caractère se trouva tel qn*on rivait
imaginé. Tout entier à la guerre et A la pi)liti.|ue, il alumionna le soin delà fol
et des impurs & ses ministres les plus subalternes. L'Italie se vit plni d*aiit foli
â la tète des armées, et l'Kurope entière fut Iniulevcrsée par ses iutrlgnei. On
renuriiuait dam son curactèn^ un fond (i'iti(|ui(^tude, (jui ne lui permettait pM
d'être sans projets. (*t une certaine audace (|ui lui en taisait préférer les pbn
lianlis; il mesurait s(\s eutrepriscs, plutôt sur son aud)iti(m que sur ses foroei,
et les prétentions cliiméri«pieH de (|ueli|u(>$-uiiN de ses prédécesseurs étalent à
«es yeux des droits insé|Mirables de w place.
[Histoire du divorce df Hturi y III ,t de Catherine d^Àrragon).
Ce caractèrt* de Jules II et de (pielques-uns de soi pnmét^csseiirs, est en paille
Justine par l'esprit de son temps. Les papes avairnl eu. du II* au XIVc stdcle, dé
grandes Idées et de nobles tendances, dit le protestant Ranke, mali au ternie
— M5 —
I sommes arrivés, les circooiUnoM iraioit arrêté tel 4im tiotfNMi t
spirituel fat entraîné à diriger d'une manière eielnslve Uwle Maaelh
:s l'agrandissement de la prinei|Mni(é lenporeUe.*. et depnii Wn^
I si^ie olxiissait à cette direction.
(V. l'aiiUÀre dé la pépautë^ 1 1)«
existe aa sujet de Léon X an phénomène assez cnrlenx en lilstMh! (A
peut-être dans ililstoire religiettsè. ùarrei la ^ii|»ârt des anteoM
stiques, vous y temcqike ce poittte Ait fà»tueuâs, ùr^^UêUMUS, mé'
tie vie 1/noHe et iioiwfîuêiue^ eîe. ttM» ensuite an dû {Aûl céHiMk
a calvinistes, Roëeoê t il est rempli d'âoges sor Léon %. . . AtsnrèiMHt
uice, Kinon la vérité, est do oOté des protestants. Céte se conçoit» ee-
1 8()UB un rapport : Hé détalent moins etiger d*tan pape <iue des éorf-
riiiodoxes qui eussent vontu volt Vtglkd régénérée par leà Vertds éC
le de son ctiof, an lied de la voir se précipiter tonjonré davantage dantf
qui a conduit à la réfontae. . .
oy. les œuvres de Iutubb. ^
iillicr rcproclia au Pharaon d'Angleterre de groailr la nombre dia
aux de Saint-Thomas, c'est-à-dire de partager les opIalonadiSataitii
!-d'Aquln sur les sacrements. — L'église d'Angleterre étiAt to frmiâe
uée, et les docteurs de Paris des ânes : aHni parUiênte$\ le |iBpi
1 loup fossûdé du malin, toutunuvee le turc et lêdiabU.
{roy. les œuvres deLOTBEB et celles de lliLiRcntiiO ii)«
[:'esl pendant 00 séjour à Warbottt*gqne tntlier aurait eu avec le dikblé
use conférence nocturne, qui se termina par l'abolition des messes prl-
<e récit de cette conférence, dont ses disciples ont voulu contester FâU-
ité, fut publié en idss, c'est-à-dire, tteize aUs avant sa mort, sans iiii*tt
ais réclamé contre un pareil ouvrage Imprimé sous son nom.
er, retiré dans ce château dcWarbourg, y laissa croître sa barbé et en
vec l'épéc, la cuirasse, les bottes et les éperons, sous le nom de cheva'
orgês. Le célèbre peintre Luoas Cranâcihs l'a représenté sous ce costumé
tant à wittemberg en sortant de Warbourg, qu'il appelait ton He de
\ot . (TiBiBitD, Biogr, de Luther,}
Ces deux points fondamentaux du protestantisme furent adoptés par
comme par Luther, mais les applications en furent diverses et ianom*
n Calvin prétendait entre autres choses que Dieu a fait sur le oiel etsur
c tout ce (|u'il a voulu ; il en conclut que les crimes des hommes et
vertus sont l'ouvrage de sa volonté. Si Dieu n*opérait pas daua nos
toutes nos déteriulqations , l'Écriture nous tromperait dono lors»
nous dit qu<; Dieu ôte la prudence aux vieillards et lecœw aux prlniMi
erre, àtiii ({u'ils s'égarent. Prétendre que Dieu permet seulement cea
— MO —
BunxreC gn'il n'en YenC pu. qn*U ne les prodoH pu, e'ert lenfiariei In
règles dolangigeet tons les principes de rinterpréUtion de l*BGritiire.
(IngiU. L I . c. 7. — rop. ausri PhiqQet. Bosmet, etc.)
(IS) Lallier ftat toojoiin fort incertain sar la question de la f mnmMM-
tUUiom : il voulait d'abord atta«|urr la présence réelle, t On loi eiU lUt gml
plaisir. disait-Il. de lui donner quelque moyen de la nier, parce qne rien wU
wralt été phu utile daus le dessein qu'il avait de jinire à la papanlé. » nrateit
cependant sans en faire un article de foL Puis, dans a dlspole ODoIra le n^
d'Angletcne, qui s'en était fait le champion, il la proscrivit haatanenL Easrib
il la pasN. par accommodement, à certaines églises dltalle, qni. A oettecondl*
tion, paraissaient vouloir entrer dans la réforme. Carlostad Tafant TloiflHiMt
attaquée, il se décida à la garder. Il la garda effectivement p— '*?»!> ptande
vingt ans, et ne l'abandonna qn en 1545, par complaisanoe poor le landgrave de
liesse, qui voulait appuyer la réforme, mais une réforme ndieale. Il prttti-
dait expliquer ces variations, en disant qu'il fallait conserver U préienoe ridto
quand on la rejetait comme impie, et qu'il fallait )a njeter qnand oq napo-
sait comme nécessaire. Enfln, son dernier mot fut de la rétablir en IMSb una
avant sa mort: et Calvin, qui la rejeta sans hésiter, dit que par cette déddon
Luther avatt relevé l'idole dans le temple de Dieu. Ainsi, avec beancoop 4«
caractère d'enthousiasme et même d'éloquence. Luther manquait de méthode
et de fixité dans les idées. Un prédicant se plaignait à lui de ne pouvoir par-
venir à croire ce qu'a enseignait aux autres. Dieu soit béni ! s'écria Luther, je
ne suis donc pas le seul à qui cela arrive.
(Filon, d'après Matherius. Bayle, Gaillard et les oeuvres de Luther.)
(13) La liberté, bannie de Tàme humaine, c'est Dieu qui y^M?mplH dired^
ment tous les événements de ce monde, et il faut renoncer à s'opposer & qooiqw
ce soit, même aux triomphes des méchants, sous peùie de se révolter contre la
volonté divine. Luther ne recula point devant cette contéquenoe de a
trine. Comme on parlait des Turcs qui menaçaient l'Europe d'une
nouvelle. Luther dit qu'il (allait bien se garder de les combattre, qno ce
combattre Dieu lui-même, qui venait visiter nos iniquités par le moyen des
Ottomans : Pneliari advenus Torcas est repognare Deo, TisUanll i«iq»rfi«t—
nostras per illos (I>e capt. Babyl.) C'était tout-à-fait le fatalisme tnic Nous ne
présumons pas que Luther ait .trouvé cela dans la Bible, et s'il Ty a vu , c'était,
il faut l'avouer, un singulier commentateur des livres saints !
(14) A Uri. Schwytz et Unterwalden. les mœurs étaient afanpies, le deqsé
pauvre et les couvents peu nombreux. Le peuple, élevé dans les habitudes ri-
lendeuses d'une foi contemplative, avait peu de gQùt pour la science dea éooleii.
Aussi l'indignation des gens d'Uri. de Schwytz et d'Cnterwaklen fot-de
grande, quand on leur annonça que les pèlerinages allaient finir, que les naît
des églises allaient être dépouillés et blanchis. ... et que peut-être lia
raient de a rendre chaque année à la chapelle de Gaillaorne TeD. . . .)
(HOTTIlIfin.)
I A ces noms célèbres nous ponrrioiis en Conter d'autres, si nous ne de-
les retrouver ailleurs : Rabelais et Érasme, sans être aussi sérieux que
ir, n'en ont pas moins été funestes à TÉgUse. Tout le monde connatt
re de llabelais, l'ironie du pbilosopbe de Rotterdam U'a pat été si popu-
mais elle est tout aussi poignante. Nous n'en citerons qu'un exemple»
lans Y Éloge de la folie, satire qu'il composa pendant les prédications de
er. c II n'y a pas d'espèce d'hommes au monde qui vive plus doucement et
moins de soucis que ces vicaires de Jésus-Christ. lis croient avoir asset
tour le Seigneur lorsqu'au milieu des plus fastueuses cérémonies, dans un
reil mystique et presque théâtral, leur sainteté vient prodiguer des béné-
3ns ou lancer des anathémes. Faire des miracles, le temps en est passé ;
aire le peuple, cela donne trop de- mai ; expliquer l'Écriture sainte, c'est
ire de l'école; prier, c'est quand on n'a rien à faire; verser des larmes,
ne convient qu'aux femmes; vivre dans la pauvreté, c'est une honte;
r, c'est une lâcheté, indigne assurément de celui qui admet par grâce les
grands rois à baiser ses bienheureux pieds ; mourir, c'est bien triste ; être
iflé, c'est infâme! » Et cependant (s'il faut co croire une correspondance
iée au XYIe siècle) le pape Paul lU oubliant ces paroles haineuses , son-
t à le faire cardinal : quàm statuUset Pauius III in futuram synodum all-
: eruditos in cardinallum ordinem allegere, propositnm est et de Erasmo,
6)« Sus, sus, sus {dran, drauj dran), il est temps ; les méchants tremblent.
» sans piUé, quand même Esaû vous donnerait de beUes paroles. Soulevez
rilles et les villages. . . . Sus, sus, sus ! pendant que le fan diauffe, que le
^e tiède de sang n'ait pas le temps de refroidir. Forgez Nemrod sur ren-
ne ; tuez tout dans la tour. Tant que ceux-là vivront, vous ne serez jamais
nrés de la crainte des hommes.... Sus, sus, sus, pendant qu'il fait jcnir,
1 vous précède, suivez. Dieu vous dit de ne rien craindre n'ayez peur du
ibre. Ce n'est pas votre combat, c'est celui du Seigneur. Soyez hardis , et
I éprouverez la puissance du secours d'en haut. Âmcn. Deuoéà Mûlliau-
en 1525. Thomas Mûnzer, serviteur de Dieu contre les impies. •
(f^oy. les mémoires de Luther.)
Oncer ou Mtknzer disait de Luther : qu'il était l'ante-christ ou un nouveau
e , et que s'il devait y en avoir deux, Luther était le plus dur, car 11 n'y
it plus moyen de souffrir ses emportements.
7) Foy» Lutherus : adoei^sus rustieos.
18) Calvin, observe M. Ifichelet, était plus conséqnent dans ses écrits que
s sa conduite, car il commença par réclamer la tolérance auprès de Fran-
I V, et finit par faire brûler Servet, bannir Bolsec, et trancher la tête â
ques Gruel.
^oy, les œuvres de Michelet, l'histoire de Genève et les lettres de Calvin à
Palais.)
y, 27
— «18 —
^oy. amii BoMKt, Plnquet, Maimboorg. Bannie, C^iefigne, FOob. «t m
grand Bonfara d'autarei htotortct tow d*«oeonlfliir lei h^bm
(19) OBiiepeatcloaler.6tlet|iliitcélèfereiproCttlMlien
Calf la n*aU prit pour le foodi deta doctrine œlle dea Yandola, |
ett œ qu'il dit qa'U n'f a dani la Cène dn Seigneur qae dn patai et dn ite, nw
platane réelle ec locale da corpe et du ttog de Jte»-Cliriit: en ce qil ne
vent ni TëntratloB, dI Invocation dea sainli, ni chef rirfble de rtf gjw, ai Ht-
Farahiei. ni éyéqatê, ni prétref,nimeMei, ni Ries, al fanage, ni cnb, tf béaé-
dldiooi, niancane de cet eérémoniet tacréet dont l'nMienne i^flae a'ertto-
JoDii tente pour bire l'ollioe difin avec Mentéanee, et œtle aafatte nmertéqil
iBaprimedantrioM de ceus qui let regardent arec un «eU on pcn tpMad
let tenllBentt d'une dévotion tendre et retpectnente, poor honoaq Dieo dai
tel redootablet mystèret. De torte quele caltininne . formé de noDreaniark
modèle dct Vaudoii , n'est qu'un squelette de religion , tl J'ote m'eipriner
ainti. n'ayant ni tue, ni oncti<m, ni oroementt ni rien qui tente et qnl iaiplre
la dévotion, et qui, entrant par les sens dant le fond de famé, l'attira et réHfe
par let chotes viables au Dieu invisible, ainsi que lui-même l'ordonne.
(MAiiBOUio. Hiitoire du eahdnUwu.)
Les luthérieot avaient retenu let cérémonies dn culte qnl n'étaient pm lor-
meltemcnt en oppotitiou avec leurs noureaux dogmes; mais Calvin let fnt-
crivit tontes comme une tdolitrie. Son culte, nu et dépouillé, pamt , anx foa
de piusieurs, avoir élevé la religion au-dessos dn vulgaire, en lui Alant tont ce
qui n'a pour objet que de frapper les sens. Ce motif Inl eondlia on gnni
nombre d'hommes du monde, tandis qu'une portton contidéndile dea geM da
peuple, entraînée par i'unonr des nouveautés et par Fesprit de parti, troava
prédtément dant cette absence de toute cérémoniet le moyen le pina
«le marquer sa séparation d'avec le parti opposé. Il était en efSet Uen
d'appeler idoUtres ceux qui vont à la messe ou qui placent des inugea dai
eurs temples que de disputer avec eux sur la foi jvstifietrUe on aor to pré-
teuce réelle, . . .
(20) F'oy, les institutions de Calvin, liv. lY. Nous ne pouvons donner idle
résumé de ces institutions, car ce n'est point une œuvre de théologie qne now
avons eotreprise. Notre but sera atteint si. en donnant let pointa principna
dei doctrinet des deux cbefis de la réforme , nous en faisons connallra TtÊgrit,
renvoyant aux ouvrages de Luther et de Calvin ceux de nos ledenra qpl Ton-
draient approfondir cet intéressant sojet : la question de la Oèna aviait, dia let
commencements de la réforme, causé d'étranges divisions entre lea «f *"■—<■
Luther, conservant aux paroles ceci est moti corpSf leur sou littéral, cnfllt
que J.-C. est substantiellement présent dans le sacrement de la Cène; H nUt
seulement que le pain, après la consécration, devint une simple of^poranM ^
pain> et fLt réellement le corps de J.-C, comme Le diient Iri rathnliiiiMi Car
ostad ayc^nt soutenu que notre Cène n'était qu'une figure et une <
— mo —
ion do celle de J.-G. avec ses disciples, Luther s'emporta avec excès contre
lui, et publia à ce sujet un grand nombre d'écrits. Zwingle défendit ropinion de
Carlostad, qui fut embrassée par toutes les églises de Suisse, par celle de Stras-
bourg, et môme dans plusieurs parties de l'Allemagne. Cette querello sur le
sens littéral et le sens figuré devint une guerre civile qui coûta beaucoup de
sang aux deux partis. Calvin n'écrivit sur cette question qu'après les troubles
qu'elle avait excités. Il présenta une troisième opinion. Il nia que le corps de
J.-c, qui est au ciel, pût être substantiellement présent sur la terre, comme
e disaient le» partisans de Luther et du sens littéral ; mais il n'en soutint pas
moins (|ue, dans la Cène, l'homme est nourri de la propre substance de J.-C,
(ini, du haut du ciel, nous y fait participer, à. peu près comme le soleil, malgré
sa distance prodigieuse, nous communique, quand il nous éclaire, la substance
niêinc de ses rayons. Ainsi, selon lui, la Cène n'était pas une simple figure des-
tinée à conserver le souvenir de la Cène de J.-C, mais une Cène réelle, où
J.-C. se donne véritablement à nous. ... Ainsi, depuis que les réformés se
sont séparéH de l'Église Jusqu'à* Calvin, voilà déjà trois manières différentes
d'expliquer ce (|uc l'Éciiture nous dit sur le sacrement de l'Eucharistie. Et ces
trois explications o[)i)Osécs sont données par trois cticfs de parti qui prétendent
tous troi» ne suivre que l'Écriture, et qui disent qu'elle est assez claire pour que
les simples iidèlcs découvrent la vérité.
(•21) roy, La confession de foi de l'électeur Palatin, Frédéric III, S. Gcn.
2' part.
(22) Foij. Uosmat î Histoire des variations ^ livre 0. — Il serait difficile
d'expliquer ici assez brièvement, et avec une clarté suflisante comment il alla
plus loin (|uc Luther sur la matière du libre arbitre, et Injustice imputative
et du mérite d(;s bonnes (ruvrcs ; mais ce qui est phis aisé à saisir que ces sub-
tilités théologiqnes, ce (lui frappa alors tous les esprits, ce sont les conclusions
hardies (|n'il tirait de ses principes. Il n'attaqua pas seulement la primauté du
siège de Uome, comme on l'avait fait avant lui, mais l'autorité même des con-
ciles généraux ; il ne reconnait pas plus le caractère d'évêque et de prôtre
que de celui de chef visible de l'Église , il n'admet d'autres vœux que ceux du
baptême, d'autres sacrements que ceux du baptême et de la cène, et ne veut
pas même qu'on regarde ceux-là comme indispensabiement nécessaires au
salut. 11 traite la messe d'impiété, et les honneurs rendus aux saints, de véri-
table idolâtrie. (de Babànte : Biograp, de Calvin),
(23) Nous citerons encore ici la parole puissante et impartiale de notre grand
liistorien : « quels rq)rochcs adressent à la réforme ses adversaires? Deux
principaux : i»la multiplicité des sectes, la licence prodigieuse des esprits, la
destruction de toute autorité spirituelle, la dissolution de la société religieuse
dans son ensemble; 2ola tyrannie, la persécution. « Vous provoquez lalicence,
a-t-on dit, aux réformateurs, vous la produisez ; et quand elle est là, vous
voulez la contenir, la réprimer, et comment la réprimez-vous? par lei
— U20 —
moyeiit tel plus dan, les plut flolenli. Yoiis vamk tous ponéenlei rbàPMe,
cl en ^txiu (Tane Mtorlté UlëgiCliiie... •
Le parti réfonué eo éUit trèt-emtamM*^. Quand on lui impulait la mnltf-
pMdlé des lecm, au lieu de Tavouer, au lieu de soutenir la légitimité de leur
libre déirelappemeiit, il auatliématisait les sectes, Il k'en dé*olait, il s'en eics-
sait. Le taxait-on de persécution ? il se défendait afec quelque embarras; il
alléguait la nécessité; Il avait. disait-Il, le droit de réprimer et de pimîr l'er-
reur, car il était en possession delà vérité; ses croyances, ses iu^titiilioui.
étaient seules légitimes; bi l'église romaine n avait pas le droit de punir la
réformés, c'est qu'elle avait tort contre eux.
Et quand le reprodie était adressé au parti dominant dans la rélî»nne. boo
par ses ennemis, mais par s<'8 propres enfants; quand les sectes qu'il anatbé*
matlsait lui disaient : ■ nous faisons ce que vous avez fait; nous nous sé|)aruitt
comme vous vous êtes séparés. • Il était encore plus embarrassé pour répoudre,
et ne répondait bien souvent que par un redoublement de rigueur.
C'est qu'en efTet, eo travalUaut à la dej^troction du pouvoir absolu dans
l'ordre spirituel, la révolution rfligieuse du seizième siècle n'a pas connu les
trais priiidpeide la liberté lutelk-ctudle : elle affrancbissait l'esprit Immaio,
et prétendait encore à le gouverner par la loi ; en Ealt, die faisait prévaloir le
libre examen; en prindpe, elle croyait substituer un pouvoir légitime à un
pouvoir illégitime. Elle ne s'était point élevée Ju8(|u'à la première raison, elle
n'était point descendue jusqu'aux dernières conséquences de son oeuvre. Ausi
est-elle tombée dans une double faute : d'une part, elle n'a pas connu ni m-
pecté tous les droits de la pensée bnmaine; an monit-nt où elles les réclamait
pour sou propre compte, elle les violait ailleurs; d'antre part, elle n*a pas sa
mesurer, dans l'ordre iuteUectuel, les droits de l'autorité. . . •
(Gdizot. Cours d'histoire moderne, I8S8).
(S4) Calvin a osé faire l'apologie de sa conduite envers Servet et a entrepris
de prouver, lui protestant contre l'autorité en matière de foi, qu'il fallait dé-
truire les hérétiques (^Foyez l'ouvrage intitulé : Fidelis expositio erro-
rumMichaeiis Serveti et brevis eorumdemrefutatiouài docetmrjuregia'
éH eoereendos esse hœretieos. 1554. — Au reste, la condamnation de Servft
se fut pas la seule, c ainsi, dit M. de Barante. un magistrat fût privé de ses
emplois, et condamné à deux mois de prison, parce que sa vie était déréglée, et
qu'il était lié avec les ennemis de Calvin ; ainsi, Jacques Gruet eut la tête truk-
chée pour avoir écrit des lettres impies et pour avoir travaillé à ivnvener les
ordonnances eodésiastiques ».
(f^oy. Barante père, Pluquet, Capefigue. et tous les biographes de Calvin).
Les persécutions des protestants suisses ne s'arrêtèrent pis là : on trouve
dans l'histoire de la réformation suisse, dans Ruchat. dans HoUer, etc, des dé-
tails sur la spoliation des Eglises, sur une sorte d'Inquisition exercée sur les
consciences, et enfin sur la vente des biens ecclésiastiques : les Bemoii, devenus
— ^121 —
maîtres de ces biens, en donnèrent nue portion aoi yilksetanx oommunes, afin
de les gagiiiT à ia réforme* et l'autre servit au salaire des ministres réformés :
ainsi, le |irieur(3 de Divonnc fat vendu, en 4342, pour l,CM)0 écns, celui de
Pcrroy pour 3,300 Hurins C4}lâ3 fr.)» la terre de Villars, près Morat, qui vaut
anjoui-cl litii 500,000 fr., fut cédée à Tavoyer J.-J. de WattoviUc, pour 6,800 liv.
de Berne, etc., etc.
— I»!2 —
CnVIMTllE SIXIÈME.
I) Le peuple romain ne pouvait loi pardonner d'aToir dépeBii tant d'aiSBit
*t payer ses dettes ; il accompagna ses fonëraiDe» en ioTccthrant sa méniafra :
t Tu es parvenu comme on renard. disalt*U. tu as régné comme nn Ikni et ta
es mort comme un chien. » La postérité pardonna à Léon, et donna ton nom I
un grand siècle.
(3^ Vir est sui tenax, in concedendo parcissimus, in recipiendo nolhis; ia
sacriGcio qootidianus et matutinus ; ira non agitor ; jocis non dndtur.
{Foy. SiiiCTO.)
^'i Instmctiopro Francisco cheregato. (roy. Rbtnalocs. Rami, elc)
(4) Non supcrbo, non simoniaco, non avaro. non Ubidinoso; sobrio, paico,
roligioso, devoto . . . ( Vbttou.)
(5) C'est sons son épiscopat qo'ent lieu ce fameux sac de Rome qui dnra cin-
quante jours, pendant lesquels le papo. retiré au château Saint- Ange, ne poo-
vait que pleurer sur les atrocités dont ses sujets étaient victimes. Les Impérianx
entrèrent dans Rome le 6 mai 1527. et jamais butin plus riche ne tomba dans les
mains d'une armée plus sauvage : Ca uecisione non fu moita , dit VeClori,
fterchè rari ti uccidono quelii che non si vogliono difendere;mala frtim
fit inestimabile in danari,di gioii\ doro latorato, di vesiiH^ é^arassh
paramentl di cazu, etc. Nous n'entrerons point dans les affireux détailtdn sac
et do pillage de Rome, qui se trouve dans tous les historiens du XVI siècle.
(yoy. surtout Jacques Bonaparte, Relation du sac de Romet Gnicd ArdU
et Vcttori.)
(6) f'oy. Soriano, Vettori et Léopold RoniLe.
'J^ ()ouphriu5 Panvinius, (|ui a écrit la fie de Paul III, prétend qn*il n'arait
jamais pardonné à. Clément Vil de lui avoir enlevé douze années de papanlé.
(8) E venido, la cosa a que ay muy ftocos cardenaies que ^oomeierUm
negocios aunque sea para compta una carga de lena, sino e* opor «smUo
deaigun asirologo o hechizerc. . . On voit, par cette citation de Mendoaa,
qu'il avait conununiqué à ses cardinaux cette faiblesse qui, dn rate, fttUi
eelle du siècle ; la cour brillante et éclairée d'Elisabeth d'Angieterre en oBre
de fréquentes preuves.
(9) On peut appeler assez proprement ce concile llliade de notre aiède...
(Fra Paolo Sarpi, Histoire du Coneiie de 7V*eiit«.)
Scipion Henri critique amèrcmeut Fra Paolo pour avoir donné oe n«Mn an
concile; mais ou ne voit pas pouiiiuoi, puisque tant déraisons montrent la
justesse de cette applicatii)n. (F. LKOOIATIB»)
(10) yoy. Sarpi, //iftoi/d </u Concile de Trente, le P. Richard, Anai$u
des Conciles , Cbemnitins, Examen du concile de Trente , Léopold JUnke»
Histoire de la Papauté, 1 abbé Beigier, etc., elc
(U) f'o^. lei mêmes onvrages.
' (1 2) Le concile de Trente s'ouvrit en 1 548 ; le pape Paul III moumt en 1 549,
et le concile se termina en 1065, après avoir dnrô 16 ans et sous cin<) papes
différents : Paul III, Jules HI, Marcel n, Paul IV et Pie IV.
(Voy. VHUUÀre du Concile de Trente de Sarpi.)
(13) Ignatius, dont on a flSritpIns tard Ignace.
(14) Maffei, Orlandino, Ribadeneira, et beaucoup; d'autres historiens, ont
raconté avec détails cette singulière phase de la vie d'Ignace de Loyola.
(13) roy. tous les contemporains et les diverses vies de saint Ignace : c Fie
dieron tania eonfirmacione sémpre de la fè. » HU vUU haudmediocriter
tum confirmatus est ut sœpè etiam id cogitavU quod eisi nulla scriptwa
mysteriaillafideidoeerett tamen ipse oh ea ipsa quœ viderai, statuerit
siH pro his etsemoriendum. {Aela antiquisslma.)
(16) Quand sonhumitfté mettait ainsi Ignace sur les bancs des Jeunes éco-
liers, il se sentait bien souvent saisi par des élancements et des ravissements
qui le détournaient des analyses grammaticales, et venaient se confondre avec
les notions logiques qu'il devait étudier. Il eut assez de Jugement pour com-
prendre (juc ce ne pouvait être que des tentations du malin esprit pour empêcher
les progrès dans l'étude, et assez de noblesse pour le déclarer hautement et se
soumettre à une discipline rigoureuse afin de chasser ces visions. (LiOF. Ranke.)
(17) Histoire delà Papauté, Yoy. aussi Orlandinus, Ribadenelra, Pacchi-
nus,NigroDi, etc.
(18) F01J. les mêmes auteurs.
(19) Constitutiones, cb. IX. Les délégués, prévenus par l'admonitor, pou-
vaient convoquer une réunion générale, autorisée dans ce cas à prononcer la
destitution du général. Les Jésuites ne pouvaient pas même accepter une di-
gnité quelconque dans l'ordre ecclésiastique.
(20) Foy, Sacchinus et Ranke. La plus grande partie du collège des jésuites
était en Espagne : en 1556, il y en avait dix en CastUle, cinq eu Aragon, nonante-
cinq en Andalousie, vingt-huit membres de l'ordre étaient occupés dans lo
Brésil, cent dans les Indes, depuis Goa Jusqu'au Japon.
(21) Parmi les améliorations introduites dans l'administration des affaires de
l'Église, on citecelie-ci t « Une botte fut établie dans laquelle chacun pouvait
jeter ses griefs, le pape seul en avait la clé. >
(22) Garraccielo, Fita di Paolo IF, Léopold Ranime, Histoire de la Pa-
pauté, Biographie universelle, Bistoire des Papest tirée des auteurs eC'
clésiasliques, etc. Nous retrouverons dans le chapitre suivant des détails sur
l'inqukition, qui, placés ici. couperaient trop le fil de notre récit.
(23) Foy, Sarpi et les écrivains contemporahis.
(24) Saint Ciiarles Borromée, né sur les bords du lac Majeur, dans le Mila-
nais, fut le modèle de toutes les vertus au milieu d'un siècle corrompu, et le
restaurateur de la discipline ecclésiastique dans le vaste diocèse que hii confia
le pape Pie IV, son oncle. Il fit plus, il parvint à imprimer dans l'Ame du sou*
viTrfin piiilifo un drf(r(^ «lYoerftio pour le bien de l'i^UM» qpÉ» dMi «B<
p''ii.iirr infliiiK*, •rmlitiit frurpjsvcr les lorcei onUmlm de la aatiire, et H
iTtisftir i iloiinrr immvrinfut cl âoie auxdemièiCiiéuioeidaooiiclledeTnale.
Sa vie privée ré|:oii«Uit& cet haul» vertui publiques x U noonca à U iplai
(Inir (lif la cour rotnaine. fit disparaître les pelnUiiei proCuMs de sob palais,
réiliiisit le nombre des domestiques. U se fondanma à une ahilhienca tétèn.
couchait ^ur des planches, étudiait ou priait dans la noU» et sa ■■!«■ cÉta
était plutôt une commuiiauté qu'un palais. Ansià en softi^U de gnads et
saints |H:r!u>nDa5es fomiûi à won êculc.
(Voy. la Biotjr, unit, et la fie de laint Ck. Borrcmée, par Godean, ddita
de rabhi- Sephrr.)
(23^ • l^irsque U vie Irréprochable et les sentiments de ealnlelé en ardlnri
d'Alexandrie me furent connus, je; pcnui que la répoMiq— chrétienBe M
pouvait être mieux gouvernée que par lui. et Je lui consacrai tons mes efforts. •
{yie de Ck, BorromÊéeJ)
{W II existe beaucoup d'éditions du concile de Trente et un gtwd noabn
d'onvraj;es qui y ont rapport Nous dteroos particulièrement les suivwlB :
<. Concilium Trideiitinnm . 1564.
Id. cum orationibns, 1567.
Trad. en français des actes du concile de Trente, par l'abbé Ckamit, 1C7i
Histoire du concile de Trente par le cardinal Sforsa PallaficiBO, 1681.
5. IstoriadelconciliodlTrento,1666.
6. Antonio Haldassari condlii Tridentini istorla.
7. Pra Paolo, Histoire du concile de Trente en italien. Cette Ustoire savaMs,
et rftiniéc d'ailleurs, ne doit être lue qu'avec beaucoup de.droonspedion p«
les (Mtholiipies, car l'auteur ne l'est pas toujours.
8. instr. et lettres des rois de France sur le concile de Trente» lecwiHv
parPupery, 1651.
9. DionyKii Pelavii disscrUtio de Tridentini conciUi, etc., etc. «64a.
';27} Ne mai ha lasciato la camisiada rassa che comelfrate inconrinciddi portKI.
Fa le orazione divotissimamente e aicun volte coUe lagrime. (Paul TnrOlAi)
v28) rofj, Ranke, Histoire de la PapauW, d'après Paole Tiepolo. etc.
^119) Nous défendons, dit Pic V dans une de ses bulles, à tout médecin ds
f isiter son malade plus de trois jours, s'il n'obtient pas l'attestation qn'U a re-
nouvelé la coufessiou de ses péchés. Une autre buUe, sur la pcoftmatton dn dl*
manche, porte que le délinquant doit rester debout tout un Jonr devant las
portes de l'église les mains liées derrière le dos, et pour U seconde fois, on W
fera traverser la ville en le fustigeant; pour la troisième^ on Ini peraon II
langue et on l'enverra aux galères.
(Voy. les Bulles de Pie y, Informationi, qpistolet etc.)
(fO) P. Tiepolo. Foy. aussi Catena vita Pio. Pie V donna aonlappniMta
aix mesures sanguinaires du duc d'Albe dans les Pays-Bas, auquel il eoTOya
l'ëpée et le chapeau consacrés. Rien ne prouve, et ancim historien n*a pu
prouver, qu'il ait eu connaissance des préparatifs de la Saint-Bartbélemy.
(31) Pie V, disent quelques auteurs ecclésiastiques, peut être dépeint par la
seule citation de sa bulle in eœnd Domini, qui contient tout son caractère :
cette bulle, en effet, déclare excommuniés tous ceux qui en appellent au oondle
général des décrets et sentences du pape ; toutes les universités, collèges ou
chapitres qui enseignent que le pape est soumis au concile général» tous les
princes qui fondent des impôts sans la permission du Saint-Siège, etc., etc. Il
faut ajouter , pour être Juste, que si la domination formait la plus grande
partie du caractère de Pie V, on voyait en même temps ce sahit pape favoriser
l'institut de la doctrine chrétienne, laver les pieds des lépreux, les embrasser
et les consoler, ruiner son corps de macération en élevant son âme et consa-
crer toutes ses veilles à la prière, k l'étude et à l'administration de ses états.
(32) Nella religione la toUo^ mm solo d'imitar , ma ancore ifavanior
Pio V, (P. TlSPOLO.)
(33) Voy. Schiller, Ranke, dispœcio donato^ ete» — L*un de ces brigands
refusa le pardon solennel du pape, prétendant < ehe il vioer fuoruscito H
torni più à conto e di maggior sieur ta, . . »
(34) Le jeune Félix (depuis Sixle-Quint) avait été plus d'une fois réduit à
garder les porcs dans la Marche. Faute de 5 bajocchi par mois, son père ne
pouvait l'envoyer aux écoles ; un de ses parens, .un franciscain, se laissa toucher
par la position de cet enfant et paya ses mois d'école. La bonne action porta
ses f mils!...
(35) Pas un jour ne se passait sans exécution : en tous lieux, à la ville, dans
les forêts, dans les champs, on rencontrait des poteaux sur lesquels les tètes
des bandits se trouvaient exposées. Aucun moyen ne coûtait à Sixte-Quint pour
parvenir à ce but : on raconte entr'autres choses que trente brigands s'étaient
retranchés sur une hauteur près d'Urbino. Des mulets furent conduitsdanslea''
voisinage portant une grande provision de vivres , le convoi fiit piUécomme oa
l'avait prévu et les vivres consommés par les brigands^ilsétaientempoisonnés.
—RagguagliotoSixto, dit l'historiende cette époque, wepre^e graneonUnto...
(36) roy. Les historiens de l'époque et V Histoire de la Papauté de Raake»
Foy. aussi les stances du Tasse sur l'aqua felice di Roma,
(37) vita Sixtiipsivs manu emendata. Foy. dansle même ouvrage le récit
plein d'intérêt de la translation de l'obélisque devant l'église Saint-Pierre*
(38) Le père Cotton. Ceci se passait dans la dernière année du seizième
siècle. — L'édit par leqhel les jésuites furent rétablis en France ne fut cepen-
dant publié qu'en 1605.
(39) Henri IV avait imposé à cette société robUgation de choishr ses cheli
parmi des Français.
(40) Les dernières années de ce pontificat sont moins importantes et n'ap-
partiennent pas, d'ailleurs, au seizième siècle.
— ki» —
CIIAPITIIE SEPTIEME.
ri) Le P. Alcbard, Analyse des Conciles ; Lobineao, Histoire de Bt*-
tagne ; TraTors, Histoire des Étéques de Nantes; et le P. Berthier, iTttfoirt
de tâgiise gattieane,
(1; rojf. le tome IV de cette histoire, chip. VI. p. 149 et soi?.
(5) Le Jntr converti qui voulait retoarner au juddsme, était bien le maRie
de sortir d'Espagne; et en y demeunnt. il savait à quoi il s'exposait, dit sé-
rieusement M. de Maistre ; nul n'a le dnùt de se plaindre de la loi qui est bfie
pour tous. > Cest U. il faut l'avouer, une singulière morale et une plus sinp-
n^re tolérance. « Quanta la torture, ajoute M. de Maistre. toutes les dédana-
tions disparaissent devant la froide logique ; les inquisiteurs l'ordonnaient ca
vettn des lois espagnoles , et totUes les nations modernes ont employé ce
OMyen terrible de connaître la vérité. . . . Quant à la peine du feu, c'est en-
core on moyen universel, ...» Et quand cela serait, ce qui est fort dooten.
le moyen et l'usage en sont-ib moins odieux pour cela ? Qui veut trop
prouver ne prouve rien, et peut être, avec quelque Justice, accusé de par
«alité.
(4) Le danger croissant tous les Jours, Ferdinand-le-CathoUqoe n*inu@ina,
pour sauver l'Espagne, rien de mieux que l'inquisition. Isabelle y répugna
4'aborti, mais enfin son époux l'emporta, et Sixte IV expédia les bulles d'initi-
tntiota en Tannée 1 47S . (Josipb de Mâistib.)
(8) Charles-Quint , effrayé des progrès dn luthérianisme en Allemagne,
▼oalut introduire l'inquisition à Naplcs pour l'empêcher d*y pénétrer; il n'igno-
rait pas que son grand-pére avait déjà échoué dans cette entreprise, mais il es-
saya de nouveau et de nouveau fut forcé d*y renoncer : les Napolitains se aon-
levërent. coururent aux armes, et le vice-roi et l'empereur capitulèrent A
Itome, l'inquisition exista, mais plus courte et infiniment moins féroce qu'en
E^gne. A Venise, on laissait la liberté aux étrangers, mais les indigènes pro-
testants Ibrent obligés d'abjurer; plusieurs prirent la fuite.
{^roy, Rinx, etc.)
(6) Une multitude innombrable de juifs, et même de chrétiens, émigraea
France, en Portugal, et Jusqu'en Afrique; d'autres furent à Rome demander
Justice au pape, mais la volonté de Sixte IV ne fut pas assez forte ou assez pnis-
iMBte pour porter remède au mal.
— «27 —
(7) Noos ne prenons en effet, dans les dhrers doemnento qui nous tout of^
ferts, que ce qui a le caractère dé la pins grande anthenticité, sans cependant
nier l'éTidcnce, et user du subterfuge dont se sert IL J. de Malstre ponrpfmiTer
que les inquisiteurs ecclésiastiques n'ont Jamais été pour rien dans les eondm-
nations à mort. Qu'importe cette formule adopkée par eux ; Déclar&ns ^e
l'accusé doit être abandonné au bras séeuUer, que nous prions iris^af'
feetuevsement de la meilleure et (à plus forte maniêf-e, d^en a§ir à
regard du coupable avec bonté et commisération, . . . Qu'Importe cette for-
mule, si la mort la suivait presque topjoors? N'est-ce pas seulement l'hypo-
crisie jointe à la cruauté?
(8) L. Gallois, roy. aussi Lorente, Layallée, Caraffa» oairatfoto, Ranke,
Bromate, etc. Après cette peinture, dont on écartera si on le tent tons tés
détails qui peuvent être empreints d'un caractère d'exagération, Men que pris
dans les récits contemporains, n'est-il pas surprenant de Hre, dans les lettres
sur rinquisitioQ de M. J. de Maistre, « ^'1/ ne peit y avoir dans l'uttHrers
rien de plus calme, de plus drcoDspect, de plus humain par natare que l'iu-
quisition. Dans ce tribunal, établi pour effrayer l'imagination, et qui de^t être
nécessairement environné de formes mystérieuses et sévères, le principe reli-
gieux conserve toujours son caractère ineffaçable ; au milieu môme de l'appa-
reil des supplices, il est doux et miséricordieux. ... En effet, il porte dans ses
bannières la devise inconnue à tous les tribunaux du monde : MisnicoBDiA et
JDSTICIA. »
Plus loin, M. de Maistre reproche au tribunal, le croira-t-on? no exeès d'in-
dulgence. {Lettre HT, p. 75.)
(9) Le XVill' siècle vit encore des auto-da-fé . et le WX" des inquisiteurs;
mais CCS derniers, il faut le dire k la gloire de notre époque, n'en avaieiit que le
titre, et n'étaient que d'horribles ombres du passé ; et d'aiBeors, à eetle époqve,
il fallait être en Espagne pour en supporter même l'ombre.
(10)11 n'est besoin que d'un seul exemple entre mfUe, poor doniler une
idée de l'ignorance superstitieuse des Inquisiteurs d'Espagne : « ^û eomnit-
saire de l'inquisition voulant s'assurer de la vérité des fklts Xnltuptùptt expé*
rience, fit venir une vieille sorcière, lui promit sa grâce, à cdàdflkm qu'elle
ferait devant lui toutes ses opérations de sorcellerie, et inl pèrarit des'éèhapper
pendant son travail, si elle en avait le pouvoir. La iFleflle «yant accepté la pro-
position, demanda la boite d'onguent qu'on avait trouvé sur elle, et monta avec
le commissaire dans une tour, où elle se pilaça arec lui devant une Tenétre.
Elle commença, à la vue d'un grand nombre de personnes, par se metOre 4e
son onguent dans la paume de la main gauche, an poignet, an noeud du cottde,
sous le bras, dans l'aine et au cdté gauche ; enstdle die dit d'une voit Ms-
forte : Es-tu là? Tous les spectateurs entendirent dans les airs une ttlï qoi
répondit : Oui, mevoid. La femme alors se mit à descendre le lodg'deteltour.
la tète en bas, en se servant de ses pieds et de ses malnB k la «imNiii M lé-
— î*28 —
lardt i tfrtfée an nlUen de la haateur, die prit ton toI dans Talr. derant lei
aMlstanis. qui ne ceM^reot de la voir qne lonqu'elle eot dépiiië llioriaoo.
Dans rétoonenifiu où ce prodige avait plongé toot le monde, le i*in"i*tMrn
Ht publier qu'il accorderait une 1001010 d'argent considérable à quiconque ta!
ramènerait la sorcière. Elle fat arrêtée par des bergers, qui la loi préaentèieit
au bout de deux Jours. Le commissaire lui demanda pourquoi elle n'avait pM
viiléasseï loin pour échapper à ceux qui la cberdiaient. A quoi ello répoadll
qne son maître n'avait voulu la transporter qu'à la distance de trois lieues, «1
qu'il l'avait laissée dans le champ où Ifs bergers l'avaient rencontrée. . . .
Cette expérience ayant convaincu le commissaire que cette malbeanne
était réellement une sorcière, il fit livrer a l'Inquisition plui de cent finqnwln
autres femmes de la même secte, que le Saint*Ofllee onndainna aérieoMnMl
comme magiciennes. •
Il n'est pas nécessaire de prévenir nos lecteurs que ce sont des Uatorteni e^
pagnols oontemporaius «lui parlent
(11) Il l'a été oeiHuidant, comme nous l'avons vu par M. de Matalm. Nom
attacherions plus d'importance aux assertions du brillant écrivain, b*U n'avan-
çait le plus gravement du monde 1 <* que l'inquisition était avant tomt /Mis
et miséricordieuse, et qu'elle n*est coupable que d'unexeée d^imdmlfenee s
T qu'à elle seule appartient le bonheur dont a joui fSspagnê mu
Xf^i'siéele.,,,
(12) P. Tiepolo. 1576, cité par Hankc.
(13) L. Ranke, Uistoire de la Papauté, t. i.
(14) D'après on titre conservé dans la coomiune de MontIgnf-le-Rci , le
curé avait le droit de dire la messe en bottes, deux pistoleti anr ranCd, à nt
o6tés deux dogues enchaînés, et de plus, à la porte de l'égUse. un dMfnl pié-
paré pour la chasse à cor et à cris.
(AiARTOif , Annuaire de la Càle^éCOr.)
(15) y, les conciles du XVc siècle; HUtoria et reformaUo mmêvantêiaiti
Sermumes JfeuoCf ; Chroniques de Jean de Troyes ; le Grand eomehtmkr,
Montlancon; Jfomiineii/^ de la Monarchie firançalsei Gallim ekrUiimm;
O. Veissette, BisU du Languedoc, etc., etc., etc.
(16) y, le Purgatoire, chap. X.
(17) F, le Purgat,, chap. X et XX.
(18) Fontana.
(19) /^.lesbistdcNismM,dell6ntauban,de Génère, etc. K. amallei Mr*
monaires protestants au temps de Henri IV, VMiist, des t^rmufàti «n
Xr* sUcle par Alexis MonteU, etc.
(90) y. le Journal de Uenriir, MontCauoont Oallia ekriêUmna, Pé*
réfixe. etc.
(21) L. de Camé.
(22) Il n'élait pas rare en effet, ft cette époque, de voir les questloiiB les ph»
— ^28 —
ardues résolues dans les plus boargeolses, dam les moUii sanntes Nniitoiis.
Tous, depuis l'écolier jusqu'au professeur, depuis l'artisan jusqu'au prince.
méditaient sur le libre arbitre et la grâoe, et remuaient dans ses profon-
deurs le modo de l'action divine sur l'hunumlté et les rapports de l'homme
avec son Dieu. Des quoitions que Platon n'entrevoyait qu'à travers un voile
que ne remuait pas saus effroi le génie^des Pères et des docteurs, étaient l'en-
tretien habituel de la famille, le mobile de toutes les passions.
(23) Au V< siècle, l'arianisme a été quelque chose de plus grand, de plus
puissant, de mieux constitué surtout que ne l'est la réforme; au VI1«, la con-
quête luuiulmane débordait l'Europe catholique ; au X», les courtisans lai-
Mieut les papes, et les seigneurs féodaux revêtaient la mitre éplscopalei au
XV«, Home était l'asile de tous les vices et de tons les crimes i au commence-
ment du XVI% il paraissait évident que la France, les Pays-Bas, l'AUemagna
entière avec la Hongrie et la Pologne allaient échapper au catholicisme i au
XV1I1«, les prêtres, devant la philosophie oonflante dans les progrès de la
raison humaine, osaient à peine^ du haut des chaires chrétiennes, confesser
leur Dieu crucifié. Quelques années plus tard, les derniers vestiges de la fol
étalent noyés dans le sang. ... Et pourtant le vieux dogme est debout, écoutant
saus émotion de prophétiques menaces , et sommant les doctrines diverses de
le formuler, les hiérarchies nouvelles de produire leurs titres. . . .
(L. ni CiBNi )
(24) .... Église chrétienne, catholique ovl unioerstlU, paro^n'elle em-
brasse tons les temps et tous les lieux, qu'elle est une dans m foi, d3ns sa morale
et dans son cultu. qu'elle est gouvernée par le même chef et ne porte le nom
d'aucun pays ni d'aucun homme parlicoUer. . . . Église fondée par Jésus-Christ
lui inAnic, ({ui, avec ses Apûtres, en forma le premier noyau, et de laquelie,
comme du grain de sénevé, devait sorthr un grand arbre, qui, d'après les ordres
de son divin fondateur, fût perpétuée par sahit Pierre et les Apôtreii 9«'i/ ê^"
voya dans le monde comme son Père l'avait envoyéM qu'il chargea, non de
distribuer des livres et d'eu abandonner l'interprétation à chaque individu,
mais tVinsti-uire tous les peuples de la terre, et de leur apprendre à garder
tous ses commandements, en leur adressant ces paroles mémorables : Qui
vous t'coute m'écoute, qui vous risette me rejette, et 11 appela cette Église
son corps, c'est-à-dire l'organe visible de son esprit. . . .
(Ui Hallbi, Hitt»dcla lié forme protestante dans la Suisse,)
— IjôO —
CHAI>ITK1-: lilJITlEMK.
(1 ) L'ëUbllMenieiit dfii compaicntes île troii|>et régulfèret . par IV
lie Gharlet \U, m MM. fnt une mmure pollthiue et très popnlaira. Oa peu le
rrgtrder comme le premier exemple d'une année peramenlecn Barope.
(HàLLAM.)
•
(2) Les éUU-généraux ne furent convoqués qne rarement loiis Cbntas fl et
Charles Vil. Tous doux levèrent des impdls sans leur oonoosm. CcpealMt en
trouve* sous le dernier de ces princes, de fortes preuves qoa radhéstai dei
représentants de la nation était encore jiiRée nécessaire ponr la vaMHé de
toute ordonnance qui Imposait une taxe {générale, quoique la gravilé des dr-
oonstanoef pAt excustcr des mesures arbitraires. C'est ainsi qui» 44K.
Charles Vil déclare qu'il a renouvelé, avec le conseniement des troUmràru,
les aides qui avaient été prt^ct^deroment al»olies. L'édit important qui créa tes
convpagniet d'ordonnance |>orte au&si qu'il a été Lit de l'avis et du eonseU
des élats g^éraux assemblés à Orléans. Il semble même résulter daa
employés dans le quarante et unième article de cet édit, que nul
pouvait être légalement établi sans ce consentement. Qnelque* écrifalna eut
prétendu que la taille perpétuelle, établie vers le même temps, fut réelleBBeBt
consenlie par les états de 1439.
(y, Hallam. BoulalaviUiers, Bréquigny, Goizot. et les ordonnanoei dei rais
de France.)
(3) Dans le principe, le parlement n'était qu'une simple oonr ou
de Justice institué pour Juger les procès Miivant les lois. Ll se bomlt
pouvoir.
Avant Charles M, chaque parlement était annuel, et ne tenait que deux
sessions dans l'année, l'une ï Pd'^ucs et l'antre à la Toussaint.
Les rois nommaient chaque année les juges qui devaient le oompoaer.
Suus (Uiarles VI, le parlement fut rendu permanent : à cette époque les Joges
(Commencèrent k jouir de leurs onices pendant tout le ri-gnc du priuœ qui ks
avait nommé», mais ils avaient bcsuin d'être confirmés par son successenr.
~ A la uièuie é|>oque, le parleincnl acquit le druit de présenter lul-méoe
au roi les personnes qu'il désirait pour remplir les places qui venaient k
vaquer.
Cette compagnie était considi'rée par ses lumières, et quoiqu'elle n'eût aneui
— W54 —
droit de prondro part I r«dmliiiitr«tiiMi d# V^^, li# rp|« éV4#Rt dMi| l*||i|ii
d'appeler k kuir conseil quelques-un» de ni princii^]^ nietalins.
Ce tpil augmenta beaucoup le lustre dn parletneot. Cttt luNige que les cq|a
suivirent, depuis Charles V, do venir, acoompagnéi dea primoea et dea grtwM,
y tenir les asii'mbk^s solennelles appelées lila de juHiee% dana lesquell^ tt|
réglaient les alTairos les plus importantes. Coi usage» en flattant la vM^té dea
Juges, leur inspira le déilr de devenir hununet d'état.
Dans h» cil-constances où le Joug du pouvoir absolu des roia paraiiaalt tro|^
dur. tous ceux qui en étaient vicUiucs. privés de la protootioi| dea étala géné-
raux tombés en dtî^iuétude, tournèrent leurs regarda vert le parlement, aeul
corps dont Ils pouvaient attendre queltiucs socours) et ils l'invitèrent à at
ivuàrc le pn)tccleur du peuple.
On vit des provinces y porter leurs protestations et leurs appels dea prdom
nauccs par lcs(picllos le gouvernement les surchargeait dl^pOta icMtrateia
C'est ce que tirent aussi la noblesse du Languedoc, en IS7I, la oomteiae de Va-
I entin()ls. le sire de Tourny, et plusieurs barons, on 1383. L'université de Parla
riuvita, en 1413, à foire des remontrnnces au roi, sur la mauvaise administra-
tion des flnances.
Cette conflance dont le publie honorait le parlement flt comprendre Itoua
ceux qui se disputaient l'autorité royale combien il .leur serait avantageux de
s'attacher cette compagnie. Les ministres la consultèrent sur les opératlona
qu'ils méditaient. Chaque parti qui occupa le mlniatère> déairant, pour s'y
arferuiir, donner plus de crédit à ses ordonnanoes, prit l'habitude de IcaWre
publier au parlement, et de les faire tranaortare dana aea regiilrei, afin de |iA*
rattre avoir l'approbation de cette cour.
Telle Tut l'origine do reureglsiremcnt; formalité dont le parlement aboaa al
fi)rt dans la suite, qu'elle devint entre les rois et lui l'ocoaaion dea pliu vlolenls
déniiMés dont le dernier a donné naissance à la lévoluiion.
(r. Mably, Thoiiret, ctn.).
^4) Le roi Jean, disait en 1360 : si la bonne foi était bannie de la terre, on
devrait la retrouver Oans la bouche des rois. . . Louis XI changea cette belle
niaxiiue, el conuno poiu* répondre au bon roi, il disait > « qui ne sait dlisl-
inulor. ne sait régner. — Si mon chapeau uvalt mon seeret, je le brAlerals. . .t
II (!st dDulourcux d'avoir à appeler cela un progrès, mais TRurope était trop
vioilir ou trop Jeune pour supporter les résultats de la maxime du roi Jean.
^5) Louis M est bien l'un des premiers souverains de rSuropo qui ait fiUt
succéder la di(»lou)atie k la force, mais il n'est pas le seuls le mouvement élall
gt^ieral : « c'est au quinxième siècle, dit If. Guiiot, que les relations dea goa-
vernenu*nls entre eux ont commencé à devenir fréquentes, régulières, perma-
ncnte;}. Alors se sont formées pour la première fols ces grandes eombânalsona
d'alliance, soit pour la paix, soit po^r la guerre, qui oi^t prodllU pina tard le
système (le l'équilibre. La diplomatie date, en Europe, du quinxième liècle»
— 4SS —
la feit, totm foyei fart la Un deeeilècletefpriiidpalet pnlMiner i du coiiaagi
européen, let papa, lei ducs de MlUn, les VénlUaii, lat anapareiin d'Allir
nainie, tel rois d'Kipagne et let robde France te rapprocher, négocier, iTea»
tendre, s*anlr, te iMlanoer. Alnti, an moment où CharleaVUI Ikllaoneipé*
ditloo pour aller conquérir le royaume de !Saplct. une srande ligne te noue
contre lai entre l'EiiiaRne, le pape et Ift Véoitlent. La ligne de C^ndirai m
forme queliiuot annces plut tard (an 1508). contre lee Vénltient. La sainte Dgne,
dirigée contre Loult XII, tiiccùdc en I5H à la ligue de Cambrai ■. Ce nontel
ordre de faltt n'a pu qu'être farorable à la royauté et an développeneul île
tonpouToâr : Il diplomatie, pour être bien conduite, vent noc lAle unique et
forte.
(6) Uant l'espace d'un tiècle. Il s'écroula dlx-tept malsons souveralues > Ici
malsons de Foix, d'Arragou, d'Armagnac, de Chiloos, de Milan, d'Urltùi, de
Reoii.d'Albret, des comtes palatins du Rhin, de Glèvcs, deLatour, de Val-
fin, de Visca, d'Bst, de Rurlck. de Tudor et de Joniaque. . . .
Il était donc dans la destinée de la noblesse de disparaître pcédsément i
cause de la part qu'elle prenait à la couduiie des sociétés naissantes, cunuae
sllMeunelttiaTalt permis de donner la fie au peuple qn'en la perdani, uu
comme s'il était dans les deOinées de tout instrument de dviUsalion de is
roni;ire nécessairement à l'œuvre. (A. GiAinia ni CAstAOïac.)
(7) y, le même antenr. *- '\ aussi Dnclos. Cayx, etc.
(!) Les Yieilles garanties nationales , et les usurpations poalétlenrca de la
féodalité, périssaient oonfoadoes au profit du pouvoir royal. Lee états gêné*
ranx, négligés, avaient cédé aux rois toute la iHiissance législative. Les jm-
tiees royales avalent étouffé peu à peu les Justices seigneariales i et les teala-
tivet beureuses de Charles VII et de Louis XI, pour avoir de l'argent tans le
concourt des états, et une force armée permanente sans le conoonn des gnaéi
vassaux, avaieut complété cette transformation d'un gouvernement preniae
démocratique dans l'origine, puis aristocratique, en monarchie pnre et ah*
aolne. (RAnt.)
(9) Louis XII convoqua les états généraux «né fois (en 480g), et dam 1a seul
but de s'autoriser de leur assentiment pour rompre le mariage de u fllle avec
Charles de Luxembourg, et à violer un traité qui entraînait le démembrenMBt
du territoire.
(10) Louis s'attacha surtout à écarter du peuple le fardeau des lro|iAts i U
commença par abolir le droit de Joyeux avènement, qui s'élevait à S00,000 fr..
et la dixième partie des talilei. Il n'exigea pour toutes contributions que deux
millions et demi environ, etc. (r. les mémoires du tenpa.)
(11) Henri II, affligé de la mort de Lachâtaigneraie, dont II avait autorité le
duel avec Jamac. se décida enfin à abolir par un édlt les oonbats Judidahts.
Deia «ntrei duels eurant cependant lien après cet édit. Cette contume tonte
Itarbare arait autant de peine I se déraciner alors, que le simple duel en a au-
jourd'hui.
(y. Cayx, Précis de tHisU de France).
(12) r. le même auteur.
(IS) F. Hume, Onizot« et surtout Hallam f(l*Surope au moyen âge\ dans
lequel on trouvera de précieux détails sur la constitution anglaise du XVf au
XVie siècle.
(14) r. Marina.
(15) H» a su^licado el reino a F» M, no sepromulguen nuevas leges, ni
en todo ni en parte las antiguas se alteren sin que sea por Cartes. . . y por
ser de tanio impùrtanda vuelve el reine a suppticarlo humUmente a F. M,
{Teoria de las Cortés.)
(16) r. Marina, Teoria de Las Cartes, Hallam, Rabbe. etc.
(17) F, Guizot, Rabbe, Robertson et Hallam. F» aussi Goxe, Pfefrel, Scbmidt»
Pntter et Struvins.
(18) Voyez Sismondi, Histoire des républiques Italiennes, Guicciardini ,
l'abbé Dubos, Scipione Ammirato, etc.
M. de Sismondi estime qu'il pouvait y avoir alors en Italie, sur dix-buit
millions d'habitants, seize à dix-huit mille hommes Jouissant des droits poli-
tiques ; tandis qu'an Xiy« siècle on en aurait peut être compté cent quatre-vingt
mille, et qu'au XlUe siècle le nombre des citoyens aurait pu s'élever Jusqu'à un
million huit cent mille. La liberté n'était donc plus qu'un privilège, et les répu-
bliques Italiennes étaient devenues des aristocraties.
(49) Quelques états européens, et notamment la Pologne, pourraient échapper
à cette exclusion : la Pologne, en effet, avait une constitution, mais les détails
nous échappent, et comme nous l'avons dé|jà dit, notre œuvre, toute généra-
lisatrice, ne les comporte pas. Voyez pour ce qui concerne ce peuple, à part
entre tous les peuples du Mord, les œuvres de Dlugoss, Sollgnac, Contant d'Or
ville, Koch, Rulhière, Thiessé, etc. , etc.
(90) Cours d'histoire modemey professé en 4828, 1 la Sorbonne.
518
— n» —
CHAPITRE NEUVIÈME.
(0 mdU^ Mémoires de Luther.
(3) iiaritagia reetUefaeta. F. Lalber et Dncange.
(3)DDcaiige.
(4) De Mayer. Galerie du Xyh siècle.
(3) sututfl «ynodanx de Troref, Forma sponsalimm.
(fi) Y. Bracton. Jonhioo et Uichelet.
\J)_ 11 j est dit expressément que cbacan des liabitants pomi coDchet liée
sa finiune la première nuit de set nooes sans permissUm de tévéque. F» Las-
rière. t.1.
(5) Statuta eccles. Meldeni, dté par Mlchelet.
(9) F. les dlters édits de Charles IX de «98S à 4887.
CIO; Eiitrapel et Rabelais, cités par Honteil.
(I I ) Eotrapel et Rabelais , cités par Montell.
(12) f\ les biojo'aphiej et en particolier les Heures du XFtt sUde.
(13) A. Monteil, t. 5.
(1 4) La sorodierie s'était aussi fait jour dans le peuple, qnl . pfaM
imitait de bonne foi ce qn'il Toyait dans les rao^ plos élefés qm les
Ainsi, des enchanteurs de bas étage lui Tendaient da vent, de la ploie, des
mans, des pliiltres, etc. selon leurs besoins. La magie noire et 4ilaDcbe
en honneur dans tuutes les classes de la société des XVe et XTI« slfrla Oa
peut consulter, pour s'en convaincre, les traités de nécromancie de lYprapti.
et les divers ouvrages de sorcellerie dont le nombre est aaseï grand. Les t||kt-
graphies de quelques villes s'en occupent aussi sérieusement, oeUci de Ttofm,
Rouen. Arras. Provins, par exemple.
(13; V. les procès-verbani des états provinciaux, les statuts de dlvert dio-
cèses, les coutumes d'Amiens, du Haine, de Bretagne, de Toaraiiie. de Ter*
mandois. du Bourbonnai«. etc.. etc.. le traité de la noblesse par Laioipe» toi
notes recueillies par AI. Monteil, etc.
(16) y. Godefroy, André Lavigne et les historiens de Oiarles YII, Lonii XI
et Charles Vlll.
(17) V. les Honneurs de la cour, par la vicomtesse de Fnmes. Cette noite
dame raconte de plus qu'à la mort du roi la reine de France ne peot aortir iTiB
an et ne doit voir pendant six semaines d'antre lumière que celle dei
— «55 —
(18) r. redit du 7 juillet 1606 sur les logements à la cour et suite du roi,
'édit du 24 mars 1539 %\ktlefaici des vivres de la cow\ l'ordoniianoe do
12 janvier 1578 sur les querelles et l'Histoire générale de Daubigoé, citée par
A. Monteil.
Si monseigneur veut venir avec ses amis, les voisins devront lui donner bêtes
qui volent et nagent, bêtes sauvages et privées, et on le traitera bien. On don-
nera au mulet de l'orge d'été, au faucon une poule, et au chien de chasse un
pain ; aux lévriers aussi on donnera du pain en suffisance, lorsqu'on l'emporte
de tabJe, et on devra donner aussi, pendant qu'on sera à table, foin et avoine en
suffisance aux chevaux. ... Et la femme du fermier fera coucher le seigneur de
la cour sur un lit écorché (tout prêt) et sur des draps qui craquent (secs). Si
mieux elle agit, mieux elle remercie. Le seigneur envoyé entrera à cheval avec
quatre chevaux et demi (quatre chevaux et un mulet), avec cinq chevaux et
demi (cinq hommes et un garçon) ; on lui préparera un lit écorché avec des
draps qui craquent et un feu sans fumée. G. 258. Les seigneurs justiciers de-
vront, la veille du jour d'assemblée, à l'heure du repas, se présenter avec deux
hommes et demi, deux chevaux et demi, deux chiens et demi, et demander le
repas ; s'il est prêt, ils descendront de cheval et boiront chopine ; si, au con*
traire, il ne l'est point, ils se retireront dans la première auberge, s'y feront pré-
parer un repas, et ce repas, c'est la petite propriété (das niedere eigentkum)
qui le paiera (année 1575). Ceci est pour l'Allemagne, r. Micbelet, Origine
du Droit français.
(19) Description de l'isle des Hermaphrodites.
(20) ... Et premièrement à François Clouet , peintre et valet de chambre
dudit seigneur. . . à sçavoir vingt solz en plâtre, huile et pinceaulx pour mouler
le visaige et effigie d'icelui deffeunct roy... douze livres dix sols pour vingt-
cinq livres de cire blanche.... employée pour ladite effigie... quarante-hait
solz pour six livres de céruse pour mettre avec la cire blanche. Roole des par-
ties et sommes payées pour les obsèques et pompes funèbres du feu roy
Henri II. . . . An milieu du cœur fut mis la bière dudit feu seigneur sur trois
trettaux. . . autour étaient seize gros cierges de cire blaucbe. . . Toute la dicte
église entre les pilliers... innombrable quantité de cierges et luminaires...
Services pendant plusieurs jours. . . Le lendemain mardy. .. à la fin de la
messe. . . le cardinal de Bourbon et ses religieux vinrent devant la cave où
devoitêtre inhumé ledit seigneur... Le corps dudit seigneur roy fut dévallé
en ladicte cave... Le corps ainsy dévallé, Normandie , le plus ancien roy
d'armes, appela à haute voix... Monseigneur de Sedan, apportez votre en-
seigne, ce qu'il fit. . . la mit bas et dans la cave. .. etc. des autres. . . Monsei*
gncur d'Annebaud, apportez la bannière de France, ce qu'il fit, et fut mise ea
bas en ladite cave. . . Le roy d'armes cria par trois fois le roy est mort. . . et
après vive le roy, répété par tous les roys d'armes. . . (Pompe funèbre de Fran-
çois 1er.)
28.
(M ) V. U IUblk>tlièqiie biDçalM de G<mjet et letGoolei tfSatrapel, ci^
Al. Mooteil.
(32) Léop. Rankf , d'après let dironiquet det XIV et XVe lièclef .
(23) f\ let UéiDOiret de BaMompierre, de Sally. de Francton, ete.— Le«eoi-
trals feicelUieat alors |)ar un baiser : Moi Itambtrt, j'aeeorde de meê bêmu
ce qui a été donné à la sainte Vierge et à saint Cyprien, sansi
cependant tout droit seigneurial ;j'ai promis en baisant le crucifix
Véijlise de Saint- Just, et J'ai confirmé cette promesse par un baiser,
(2«) V. les mémoires du temps et les Contes d'Eutrapel.
(25) Les sens Âgés, dit U. Monteil. peuvent se soutenir de cette plirtK(^
t'était coosenrée jusqu'au XVlll'; siècle) de la part du bourreau, <|u'od reeoB-
naissait alors a la potence et à l'échelle brodée qu'il portait tur ton liaML U
bourreau, à cette époque, était beaucoup plus en contact avec la popuhliai
qu'il ne l'est aujourd'hui.
(26) V. les niéiiioin'i du temps et les Contes d'Eutrapel.
(27; V. les Mémoires de Franciou et le Recueil det prorerttes.
(29) V. les Mémoires de Francion. V. aussi l'Ile det HermaphrodiCet et la
Confession de Sancy.
(29) Ordonnance signée li Saint-Gerroain-en-Laye. Juillet f SS4 ,
en t06l.
(30) V. X Histoire de Paris, par Félibien et Lobineau. V. anal let
du Parlement. 1526. 1558. 1598.
(31 ) V. le Journal de Henri tll et Henri lf\ Tordonnanoe de llloit, 1879.
couccruant la justice, les Mémoires de d'Aubigné. etc.
(32; V. Hugo. Notre-Dame de Paris,
(33) Micbelet. Origine du Droit français.
(34) J. d'Auton. dlé par Michelet.
(35) Année 1449.
(36) Micbelet, Origine du Droit : La femme qui dira vilenie à outre, <i
comme de putage, paiera, ou elle portera ta pierre, toute nue an sa che-
mise, à la procession, cl celé la poindra après, an la nage d'un açuillo».
(CAIPtXTin.)
(37) Le dod judiciaire était cependant fort rare à cette époque, et Ibrt re-
marqué par les historiens comme des érénements tinguUen. même chei les
gentilshommes, parmi lesquels ils étaient si communs. On en trouTe quelques
exemples dans Monstrdet. Martin Did>elloy, Lauriere, etc.
(38) V. les ordonnances de 1514. 1534. I VSO et 1586, relatifes aux genres
d'armes dtéet par Monteil- y> aussi les vuvrei de Branldme et de Jean de
Caurre.
(39) V. Hugo, Notre-Dame de Paris.
(40) Idem, idem.
(41 ) V. Ruffi . Depplng. etc.
— Uù7 —
(42) Voy. le Natalilium fidei, Mb. 5. -- De rébus Emmanuelis^ etc.
(45) Declaratio et limitatio constUuHonis Pauli IF, — Voy. le Bulta-
rium magnum romanum.
(44) De Tbou. ffist. unioersellf, 1. 1. — A cette même époque on enterrait
les animaux à l'égal des hommes. On lit dans Baluze une singulière formule
pour rappeler la reine d*uu essaim d'abeilles : Je t'adjure, lui criait-on so-
lennellementi Ud mère des abêtîtes^ au nom de Dieu, Roi du ciel, et du ré»
dempteur.filsde Dieu , je t'adjure de ne voler loin ni haut, mais dere»
venir au plus vite à ton arbre. Là, tu te placeras aoec toute ta lignée ou
tes compagnes. J'ai là un bon vase bien préparé où vous travaillerez au
nom du Seigneur, ^ Adjuro te, mater avioritm.. .etc. — Les angoOlet d«
lac Léman* les papillons de Saluoes» les sangsues de Bemet jouent aussi ao
grand rôle dans les fastes de la justice criminelle en Suisse.
(45) VidXï\sotL^Descript*ofBrit.
(46) Pfefrel.
(47) Voy, iEoeas Sylvius de moribus germcmorwn, Hallam, etc.
(48) Voy. Rulhière, KJapproth. Lévesque, Depping, Rabbe, etc.
r49) Nous dirons à ceux de nos lecteurs que ce sujet intéresserait plus parti-
culièrement, qu'indépendamment des ouvrages de science et d'hbtoire qu'on
peut consulter pour connaître les mœurs des W*' et XVIc siècles, il est des ou-
vrages moins sérieux, mai^ d'un grand mérite, qui peignent admirablement
cette époque : ainsi, Gilblas pour l'Espagne, le Château de Kenilwort pour
l'Angleterre, i Prçmessi sposi pour l'Italie, Quentin Durward, et Notre-
Dam>e de Paris pour Ja France, etc. Quant à Voltaire, qui a fait un ouvrage
spécial sur VEspi'it et le^ mœurs des nations, on ne trouve rien chez loi.
— 1(38 —
CII.VPITUE DIXIÈME.
(I) Void le Ubieaa des dif enet académies fondées pendant le ccnizb des XT«
et XVic siècles, avec la date de leur création.
Turin I40S
Ail IMt
Ingolstadt MIO
Leipsick I4M
Saint-André, en Ecosse 4411
Louvain 4411
Déle I4S
Poitien 4419 et I4SI
• Bordeaux 144©
Besançon 148i
Caen i4tt
Glascow I4S8
Valence, en Dauphiné 1451
Bâle 140»
Fribourg 1460
Bude 141»
Bourges 14G6
Tobingnc 1477
t'psal réformée en 1477
Aberdeen 1477
Copenhague 147«
Palma 148S
An XVi*: siècle, l'électeur de Saxe. Frédéric-le-Sage, fonda l'nnifviilé de
Wittemberg, en 1502; l'électeur de Brandebourg. Joacfaim, fonda eelte de
Francfort sur l'Oder; le cardioal'Ximénès établit enlEspagne ronlversité dTAl-
cala(l5l7); Charles-Quint fonda celle de Séville ^1 521), celle de Coopostdle
(1332), celle d'Oviedo (1556), celle de Grenade (1537), et celle de Tortose
(1340). L'université de Strasbourg fut fondée, en 4538, par le sénat deoelte
ville. Le roi de Danemarck, Frédéric le>, fonda celle de Copenhagoe (ISS),
tandis que le pape, Paul Ul. fondait celle de Macerata, dans la marche d*An-
cône. Albert Ki fonda celle de Kœnigsberg, en 4544. Le roi de PortogaL
Jean lU. avait fundé ceUc de Goùnbre, en 4641 . Cosme U dota Florence d'i
— ^59 —
unlYersité (f84^; le cardinal de Lorraine en donna une à la Tille de Hheidif
(4547), an moment où JacqnetVl réorganisait celle de Glasoow. Charks-Quint,
qui en avait tant fondé en Espagne, en fonda une en Sicile, à If esaine (484S) ;
trois ans plus tard il transportales oonnainances européennes dans le Nouveau-
Monde par l'établissement des universités de Mexico et de Uma.
En France, depuis Philippe-Auguste, Tuniversité jouissait de nombreux pri-
vilèges, et entr'autres de celui de ne point relever de la justice séculière dans
les causes criminelles. Ce privil^e était si cher à runiversité, qu'eUe le dé-
fendit en toute occasion, et par tous les moyens qui étaient en son pouvoir.
En 4304, elle cesse ses leçons pour obtenir vengeance du prévôt de Paris, qui
avait condamné à mort et fait exécuter un de ses membres. En 4384 , elle accusa ,
devant l'évëque de Paris, Hugues Aubriot. aussi prévôt, et dont le crime était
d'avoir fait emprisonner des écoliers. En 4407, le sire de TignonvUle, égale-
ment prévôt, avait fiit arrêter deux écoliers, coupables des plus grands forfaits;
il avait eu, avant de les faire juger, la précaution d'offrir de les remettre à la
justice de l'université i eUe répondit qu'elle désavouait de pareils membres:
ils furent pendus. Jean-Sans-Feur. qui en voulait au sire de TignonvUle pour
ses actives recherches an sujet du meurtre du duc d'Orléans, excita si bien
contre lui ses partisans dans l'université, qu'elle ordonna la cessation des études
et des sermons, alla trouver le roi en corps, demanda vengeance au sire de
Tignonville, et menaçant, si elle lui était refusée, de quitter Paris. Le roi céda,
Tignonvillefut destitué et condamné à des excuses; il s'acquitta de ce dernier
devoh: d'une façon assez ironique :
« Messeigneurs, dit-il, outre Je pardon que vous m'accordez je vous ai
grande obligation ; car lorsque vous m'avez attaqué, je me tins pour assuré
d'être mis hors de mon état; mais je craignais qu'il ne vous vint aussi en idée
de conclure à ce que je fusse marié, et je suis bien certain que si une fois vous
eussiez mis cette conclusion en avant, il aurait fallu, bon gré, mal gré, me
marier par votre grâce; vous avez bien voulu m'exempèer de cette rigueur, ce
doptje vous remercie três-humblement ».
Ce n'était pas, au reste, pour ce seul privii^ que l'université combattait i
coup de cessation de sermons et d'études ; elle les défendait tous ainsi, et ses
prétentions en ce genre étaient si multipliées, et souvent si Insoutenables,
qu'elle fut fréquemment obligée de recourir à ce moyen extrême. Il lui réussit
long-temps ; chacun tremblait devant cette interdiction, et elle finissait tou-
jours par arriver à ses lins. Le premier échec qu'elle reçut lut de la part des
Anglais, au moment où Paris leur appartenait; l'université réclama contre des
impôts que, malgré son droit reconnu, on voulait lui imposer. Loin d'écouter
CÊB doléances, le roi Henri la fit taire, et la menaça de prison. Cette défaite fut
sHîvie de phisieurs autres. L'université avait la prétention de n'être jugée,
dans toutes ses contestations, que par le roi s elle récusait la juridiction du par-
lement: s car, disaient les écrivaini dn XVe siècle, la cour de parlement cpt
— k'AO —
•œor de ronlf mité, et non u maltiene ■. Opentat. cB 1418, cl m|pl
toolet Mfl plaintes, Charlei Vil loi donna le pariemeat pour Juge, « pvceqw,
dil-il, les grandes et haotes afErires de notre royawmc, en qool ■ow aoMMi
oonflnneU' nient occupés, ne nous pennettent pas de vaquer ni flrtcwJiiiui
notre penonne . ouïr, discnter et décider des qoereOei, g
questions de notre fiDe Tunlrersité de Paris, ni des mppOti ^ktXtti et
moalt plus irrandes choses que celle de ladite oniTenité, notre diln oonr da
parteaent connaît, décide et détermine de Joor en Jour ■• Ldob xn ^anl
rendo. en 1498, une ordonnance qni rédoifalt I la durée dei étndei. ka prM-
légrs scolastiques. et mettait des bornes an droit des nenbreide fàulicuM
de n'être JuRé^ qu'à Pari», Inni? ersité fit cesser les daases et lea
chargeant les prédicateurs de notifier au people sa résolnllon, et de la |
G Hnme opprimée. Tout Paris fût dans l'agitation; on redoutait
querelle que pouvait rendre sandante le grand nombre des membres de fn-
ni vmité : en 1 461 , U s'élevait à plus de 15,000. Loals XU ne fléeUt pm deval
celte crainte: il s'avança à la tête de sa maison mflUafarei mnfverritéUI. en-
voya k Corheil une dépntatlan ; elle fut fort mal reçue. Le cardinal
dit à reui qui la composaient, qu'ils mériteraient une punMon
s'ils n'avaient affain* à un maître qui aimait à pardonner : « Betoumes.
t-il, versceui qui vous ont envoyés; faites que tout rentre dans ledevoirt
i-flarei par une conduite irréprochable, le souvenir de voire faute, et ne crifr
gnez point après cela, de manquer de privilèges •. Le roi les tnlla encore phi
mal : fl Allex, dit-il, et values de ma part les honnêtes gens qui sont parai vnui,
car pour les mauvais Je n'en tiens aucun compte, ils m'ont taié aol-niêiM
dans leurs Kcrmons. . . Ah ! Je les enverrai bien prêcher aUlenrs s. Il tint parolBb
se rendit à Paris, traversa le quartier de l'université k la tête de ses gesUb-
lionimes et de ses garde», armés de toutes pièces et la lanoe en arrC^ et ail
dans cet appareil au parlement, où il ordonna une nouvelle pnUkCtloB di
l'ordonnance. L'université céda, et céda pour toujours.
O'oir les diverses histoires de IVndfcntt^
(2i Voyez Filon, Histoire de C Europe au seisUnu àlècU*
(3). . . Au surplus, le soolasticisme n'avait pas été inutile, I avrit
lacune. Il avait jeté on pont quelconque entre les derniers restes des
anciennes et cette heureuse restauration des sdenœs, qui a cpéré orite de ii
religion. Si le scolaticlsme fut d'abord un champ aride et stérile, lU
théories, de subtilités, trop peu de vie et de force, il s'enridilt et i
tant à mesure que Fétude des langues fit des progrès ; à mesure qnc céDc de ii
géographie, de l'histoire, des sciences naturelles, des mathémathpwset i
f éconda les esprits. En effet, la philosophie n'est pas demeurée
pendant ces siècles, et la théologie a fait quelques pas. Après
Hippement que les études ont reçu dans les derniers temps, les seul isliqpMCt-
'rent peu de ressources I notre âge; .maislleurs ouvrages fonat utiles à cou
— V*4 —
aiixqaeb ils étaient destinés. Ils ont exercé les facultés de rinteUigence d'une
manière remarquable, digne d'admiration. Us ont rempli une autre destinée t
au milieu decette'littérature populaire si frivole, si licencieuse et si profondé-
ment corruptrice, ils ont offert aux esprits un aliment noble et grave. Dans une
société où le pouvoir matériel, les forces brutes dominaient presque exclusi-
vement, ils sont venus en appeler à l'intelligence, au spiritualisme. . .
(Màtteb, Histoire universelle de l'Eglise).
(4) Patrizd estime qu'au commencement du XVIe siècle, il avait été écrit plus
de douze mille volumes sur la philosophie d'Aristote. L'un d'eux y trouve jus-
qu'aux sacrements, qu'un autre non mofais fou cherche. . • . dans les Méta-
morphoses d'Ovide.
(5) V. les chapitres précédents, Telatib à la réforme.
(6) J. Bruno renouvela la eabbale^ science merveilleuse, venue de Ray-
oiond Lulle. Il fut traduit au tribunal de l'inquisition, condamné comme héré-
tique, et brûlé le 17 février 1600.
(7) Ramus fut assassiné comme hérétique à la Saûit-Barthélemy. Un de ses
adversaires en philosophie l'indiqua aux assassins. Pierre la Ramée, fils d'un
l)erger picard, avait gardé les troupeaux ; devenu domestique à ruoiversité de
Paris, il apprit sans maître les langues antiques, et, s'apercevant de la stérilité
de la science enseignée, il leva l'étendard contre Aristote. Ramus, dit un cri-
tique, fut le précurseur de Descartes : il brisa tous les liens d'une logique pé- ,
dantesque. Il ne refait pas l'esprit humain comme Descartes, mais il refait le
raisonnement, et la raison peut travailler désormais sans craindre que l'instru-
ment trahisse ses efforts. Ramus, en émancipant la logique , fit pour la philo-
sophie ce que l'inventeur des télescopes fit pour l'astronomie t il ne découvrit
rien, mais il prépara toutes les découvertes à venir.
(S) Une bulle de Léon X, et le concile de Latran, condamnèrent ces doctrines
en 1513.
(9) On peut avancer, scoute Buhle. que les Lettres d'Ulric et l'Éloge de la
folie d'Érasme furent les ouvrages qui nuisirent le plus à l'autorité papale.
(10) V. Hatter, Filon, Tennemann, Buhle, Cousin, Laurent, G. Arnoolt, 'Da-
gald Steward, etc., etc.
(11) Montaigne, dit Pasquier, demeura trois jours entiers plein d'entende*
ment, mais sans pouvoir parler; et comme il sentait sa fin approcher, il pria
par un bulletin sa femme d'avertir quelques voisins, afin de prendre congé
d'eux. Quant ils furent arrivés, il fit dire la messe dans sa chambre, et, au mo-
ment de l'élévation, le pauvre gentilhomme s'étant soulevé comme il put sur
son lit, les mains jointes, il expira dans cet acte de piété le 13 septembre 1503.
Ce qui fut, ajoute Pasquier, un beau miroir de l'intérieur de son âme.
(12) Ainsi, i^oute le jeune et déjà célèbre historien auquel nous empnmtons
ces dernières paroles, soit que nous mettions la France en rapport avec les
états voisins, soit que nous la considérions en elle-même, nous retronroiis par-
— loéî —
tant la M da profrèi. Celle loi dontae noue liWolre. elle en cit eonee
le Bee nécewiire. BMiyei 4e ▼cet y MMMtnlie, et nos amuta, il belieietd
éfenaUqoeivM m«I phn qu'me éaiRine indécUffraUe, oa dci Unibewi de
ckraaiiiaci arides. BlenlM Tout ne reDoooticrei plot dans noe prddeu né-
Molm, daot mm oambnum» eoUecUont. dans dm rattei archhrei, qn'aae
Irtirc morte i taol il eit vrai que ce qui fait la vie de cet gnmdt répertoink
c'cit la fol aa pnifirèt. (GiiBài?i.)
(IS) V. fMtmoiMll. Hiêt. âeëFranfùU, et VlllemalD , Coure tfe LiUrraturt
<f 4) V. SiflBondl. V. antti Ifê Cent Nouvelles nouvelleM.
(15) Le Roman de la Jiose était placé par l*aiiqukr lol-nCnc à eAlé de !•
Divine comédie du Dante! Aoatl, pendant le XV* siècle, lei hnllaleiiri de cet
mmnf ma oaTnme te tnocédèrent en grand nombre.
(Ml) Mnoade de Sitmondi.
^7) V. les œuvres de Villon, recneillieii par Clément Ifarot. en fdSS.
F(I*)V. de Thon, dn Belle j, Blahe de Montlnc, I«anoae et lea aatret mémoires
dn tempt.
(49) Un |oar an Jenne poète italien, qui voulait fiire un poème épique,
vint, en tremblant, demander conseil au chantre de Francut. Rontard te*
coeilllt le Jeune homme, et Jeta un regard favorable sur set etsals. Voyei les
caprices delà postérité! Il y avait là deox poètet épiques, l'on déjà grand et
admiré, l'autre Jeune et inconnu. C'est le |iius Jeune et le plus obscur qu'elle a
choisi, et dont elle a conservé le nom en le changeant ; car quand il vint voir
Ronsard 11 ne se nommait encore que Messev Torquato T^tso, et depuis la
France Ta appelé Li TissK. (SiiiiT-lfiBC GiiiAoïii.)
llj!!i(Mb(! devança pour Ronsard le Jugement de lapottérité; pent-ltie
anttI y entrait-il on peu de Jalousie contre un poète qui était preaqoe ton
contem|H>rain. Il avait effacé dans un eiemplaire des poésies de Ronsard to«
les vers qui lui paraissaient pauvres, et ce nombre augmentait tout let Jours.
Un amt lui ayant demandé s'il trouvait nullement bon ce qui n'était pat effacé:
Pas plus que le reste, répondit-il, et de peur que la postérité ne le crût comme
son ami, il effara tout. Lorutiu'il trouvait quelque chose de défectueux deos
tet vers en les lisant à ses amis, il s'arn'tait i)Our dire en riant : Ici je Rùrnar'
disais ... r V. la Biographie de Malherbe.)
(20 ") Contraire à ces resveurs dont la muse insolente.
Censurant les plus vieux» arroganirocnt se vante
De réformer let vert, non les tiens seulement.
Mais veulent déterrer les Crées du monument.
Les Latins, let Hébreux, et toute 1 «uitit|uaille.
£t leur dire à leur uca t|u'ils u'ont rieu lait qui vaille*
Ronsard eu son mestier n'était qu'un apprcntif,
U avait le cerveau fantastique et rétif :
D«iportei n'est imi net i du BeUiy trop taeile s
Bellean ne parie pu eomme on parle I la YlUet
Il a des motabargneui, bouffis et rele^ei;
Qui du peuple aqjourd'huy ne sont pts approovei.
Gomment I il nous faut donq, pour faim une cMTre grande.
Qui de la oalomnie et du temps se deffende.
Qui trouve quelque place entre les bons antbenrs.
Parler comme à sainot Jean parlent les orochetenn!
(RBomii.>
(21) Parmi ces rimeurs à la suite. Il est cependant Inste d*en disttogaer
quelques-uns i Dnbartas, par exemple, qui eot une réputation momêntmiée
égale à oelie de Marot et de Ronsard. Ses œuvres poétiques, si parfaitement
oubliées aujourd'hui, eurent six éditions. Puis ce Desportes, auquel la langoe,
alors en grand travail, doit le Joli mot pudeur, qui a remplacé ce vilain mot
vergogne ; Deiportes, qui eût été Pamy s*il eût vécu deux siècles plus tard, et
que, an rebours de Dubartas, on n'apprécia pas assei. Nous ne citerons en-
preuve que les six vers suivans :
. . . Que de plaisir de voir deux colombelles
Bec contre bec, en agitant leurs ailes,
Mille baisers se donner tour à tonr.
Puis, tout ravi de leur grâce naïve,
Dormir au ftais d'une source d*eau vive
Dont le doux bruit semble parler d'amour.
(22) La liste des auteurs de mémoires serait longue encore i nous nous bor^
nous aux principaux, à ceux dont la lecture si attrayante résume ce XVIe lièale
si fertile en é? ènements de tout genre et en passiona de toute sortA. Dana cea
mémoires particuliers que leurs auteurs écrivirent, non pour briller parmi lea
gens de lettres, mais pour exprimer vivement et perpétuer Iqipn passiona, leur
caractère s'imprime avec cette force qui, sous les rides même du style, oeouna
le dit Montaigne, nous frappe et nous émeut enoore. Qbaeun de ees aeftewrs
d'une scène sanglante se repiie sur lui-môme pour se défendre, s'excuser, s'ei-
pUquer, combattre les opinions adverses, raconter ses périls, développer sea
raisons, peindre ce qu'il a vu, ce qu'il a osé, ce qu'il a souffert. Notre nation,
par son penchant à raconter et son humeur un peu vaine, semblait prédes-
tinée à produire les meilleurs mémoires historiques.
23) V. les Mémoires de Comines et ÏNiet, de ia RévoêuUon franpaiêe de
M. Mignet.
v24 V. chasles, Saint-Marc Girardin, Villemalnet Barante.
^25) Cujas est le plus célèbre des Jurlseomultes de ces deux sMdei , mais il
n'est pas le seul célèbre. François 1er, qui voulait doter la France de la eivili-
satioo italienne, attira dans ses états le célèbre Alciat, et lui dettna nne ehairo
— ir-i —
dans l'unlTenilé de BourR». Mais la France poiiédilt d^àdtt Jurlieomiiiti,
Uéi le GoaimeiioeiiieoK du XVlt iMde, Bodé commenU lei PandMtoit MealAt
Charlet Dumoulin publia set aaTanU ouTragei, et Cqjai paitit, «hil de loai la
modernet qui • |)énétré le phM atant dans l'esprit da droit roowbi. Godelhqr.
de Paris, composa ploslears traités remarqnabifs snr le droit cItU «t «r b
droit pul>Uc. c Td advoeat, dit Pas<iuier. oontrebit parflbia le açafanl» qnl M
reluit que de la plume de Godefiroy. •
(36) Ce n'était pa» là en effet le caractère ((énéral. mab od ne peoftp» dire
cependant que dans Rabelais, le type et le modèle de l'époque, on tronie mm-
vent de l'obscorité dans les paroles et de l'Irréligloa dans lea pensées t lei
coups portent parfois plus haut que ceux de Lntber. . . ot, per eiemple, quand
pour donner une Idée de la généalogie de Pentagmel, Il parodie oelle dD
Jésut-Cbrist
(27) A mesure que nous avançons, et que notre cadre s'agmdlt, nom ne
pouvons parler avec détail roènie des hommes les plus Ulustret. Montaigne ert
de ce nombre. Si nous ciwions pu dire toute notre opinion sur ton noopte,
nous aurions ecsayé dm pruiiver que cri lioiinne qui condamne tonie faiMva*
tlun en innovant, qui doute rn aftirniant, qui croit nous dédommager de I1n-
mobillté à lM|iielle II nous conUauiue par je ne sais quelle liberté InlÉrlenre.
parfaite, égoïste, n'dt le re pn^entant d'aucune opinion dominante de Tépoque.
Il n'est que lui. Disons avec un judldeiu critique, qu'en vérité Tâme serait en
triste bienfeit de la lYovidcnce. si égofsto et indifférente comme la fidt Mon-
taigne, elle s'occupait de ses pensées, Jusqu'à négUger ses actioni. BUe manqM
à ses destinées, quand elle renonce à la société, quand elle se reoloraM en elto>
même pour Jouir solitairement de u liberté et de son InlelUgenee. Mail mm
l'a donnée pour animer le monde et pour travailler à l'cravre da la dvUlsatloii
La Uberté phllosophiqne n'est sainte et respectable qu'autant qn'éUe eil la nèn
et la nourrice de la liberté religieuse et de la liberté politique, qn'antant qa*ék
vit pour lenr rappeler sans cesse leur légitimité, et les afformlr qnaud ettH
diancellent*
charron, oet autre ami de Montaigne, héritier de ses armoIrlM et de aesdo^
trincs, se contenta de reproduire systématiquement et d'engérar ateo né>
thode les pensées que son maître avait émises sous la forme plna kiblleBMl
modeste du soupçon et du doute. Montaigne avait montré le rUIenle da dag-
roatisme ; Charron dogmatisa le sceptiscisme; l'un disait en rliot fmnâiiêT
l'antre affirmait qu'il ne «avait rien. U vérité des religions, rantorHé de rîjglliib
la certitude de la morale même, tarent attaquées par Charron t n ponMaJnaiie*!
l'abnégation de toute r^e', l'indépendance désodées qne tai afalt BBieigiya
Montaigne.
(28) Ce sont lesétats de la ligne qnl fbnt l'action prlndpÉte de la Mlyr» M^
nippée^ ce sont ses orateurs qui en sont les personnages t rardwfémie da
Lyon représente rarobitioii épiscopale, Mayence l'égblsme des princes t tow
les traits de chaque acteur, se trouve peinte une des passions de lliunumité.
Chacun a une part de férité contemporaine qui marque sa date et son nom,
et une part de vérité abstraite et philosophique qui lui donne quelque chose
d'étemel. C'est par là que la Ménippée est autre chose qu'un admirable pam-
phlet, car les pamphlets ne peignent des gens que le costume et les dehors. La
Ménippée, qui est une comédie, perce jusqu'à l'homme, et sous ses ridicules
du Jour, elle montre et bit ressortir les passions étemelles de notre nature. —
Les passages les plus beaux de la Ménippée sont attribués à F. Pithou, Juris-
consulte; l'idée première qui transforme en deux charlatans le parti de Lor-
raine et celui d'Espagne appartient à Pierre4e-Roy, chanoine. Parmi les autres
auteurs, l'un S. Gillet, était conseiller-clerc au parlement, l'autre N. Rapin ,
était prévôt de la connétablie. De simples poètes assistaient aussi parfois à la
réunion qui avait lieu d'ordinaire chez le chanoine Leroy.
(29) Rabelais poussa si loin l'ironie, qu'a eût pu s'en trouver mal; aussi se
donnait-il une peine infinie pour déguiser la pensée sous des bouffonneries
presqu'absurdes. mais en même temps il avait soin d'arranger les choses de
façon à ce qu'on ne pût se méprendre sur ses intentions : « Posé le cas, dit-il,
dans son prologue de Gargantua, posé le cas que, an sens littéral, vous trouvea
matière assez Joyeuse, toutesfois pas demeurer là ne tauit; ains à plus hault
sens iuterpréter ce que par advenlure cuydiez dict en gayeté de cueur. . . Yeis-
tez-vous oncques chien rencontrant quelque os modulaire? C'est, comme dict
Platon, la beste du monde plus philosophe. Si veu l'avez, vous avez peu noter
de quelle dévotion il le guette, de quel seing il le guarde, de quelle ferveur il le
tient, de quelle prudence il l'entomne. de quelle affliction il le brise, et de quelle
diligence il le sugce. Qui l'iuduict à ce faire? Quel est l'espoir de son estude?
Quel bien prétend-il ? Rien pins que ung peu de mouelle ».
Rabelais, auquel nous regrettons de ne pouvoir donner plus de place dans
cette revue du XVIe siècle, est ainsi jugé par un de nos plus spirituels critiques :
« Quel est ce personnage étrange, à demi homme, à demi brute, comme le ca-
liban de l'auteur anglais^ Quelle bacchanale l'environne et le suit? Des géants,
des nains difformes, se pressent autour du char qui le porte; ils traînent des
objets révérés avec de longs éclats de rire; leurs jeux obscènes effraient les
regards; et la diversité de leurs costumes, l'audace de leur verve, la singu-
larité des masques qu'ils empruntent et qu'ils déposent, répandent une con-
tagieuse gaité. Voyez le roi de ces saturnales, le père de cette troupe folâtre,
fille de la folie et de la débauche ; monté sur un chariot dont la forme rappelle
la cuve de nos vendanges; revêtu du froc, l'œil animé, appuyé sur les faciles
compagnes de ses plaisirs et suspendant à sa marotte la couronne des rois, le
rabat du prêtre, le c»'>rdon du moine et l'écritoire des pédants? MerveUlenx as-
semblage ! Impitoyable et hardi railleur ! il passe devant les palais et les au-
berges, se moquant avec une égale licence des monarques et des paysans dn
Bas-Poitou, confondant la carte Sde l'Europe avec celle de U Touralne ; raillant
A h Mi le vilB«H» it nMgnn , cètal de PiYle, et le tifenter de «m v^
DiM fon imtKOftUlÊ feMleiioe, le emé BabeM$ nÊÊt noMieutemat I»
■Mioee, tasc^MiclH. lei été^ts^ lei eordiii^au, mali le pape lÉiniêt,«<l
lai anM^M * ta KllSim > et te Méfier qiii défoie flervet. piédiaM IWMil
iNea. e'éleiot pour cet tromie qnl. de toatet les patenioei du cM eldik
tatre, aereipealejaiuli que la dive booteUe et ta «piiiiteiUBee lacrée k
Ce ta cyBk|iie dont Boiif admirerons bientôt la ralnn protondei dirit m
tmâtiitr tooraasaaD, d'one vire Imagination, d'âne mdiiMdi e iw wWilf MB, #
moarspenorthodoMi} toar à toar bénédictin, dianolnei cmé»
l'art d'Hippoerate, eoramentaleur tafant, boufTon de mi maindra, al i
deaai ouaillai. Inexorable pour les trarert nombren de aon tempe, dêifil
apeiçot «a ridicule, il Tattacinei et la goerre à ontranee qnlllitre à aoai
est son anique pensée. Puérile, grossier, d'one liberté tana bomet, fl
Jniqn'au délire lei priTllégfi de la boulTonnerte. Dana aea éerila a*c
choquent et ae confondent la ? érité. la fiction, la licence, TàBégorie. la
des allnslona obatures, des oontei vnigairet; dei inrenHona iHjaimwi,
ce^ablea, inaensées. Frappé de la confosion et des oontmlet de aon alède. ■ m
reproduit tonÉonnlefl follet, en augmentant lenr détordre; et oomnwlfeit
édMpper à la Teugeance de ceux qu'l firappe. Il prend pour égide dea Isrmei
et un style si grotesque, que l'iTrase semble en dicter les propoa el en goWr
la marehe. Bn ?ain let commcntatenn ont essayé d'écUdrclr et de défamB*
ce chaot, d'otfi JalHlssent encore de nombreux rayons de lumière. Wabiilriirt
▼outa que raHler les institutions, les morars, les Idées : s'il portail dea eoi|i
an haaid, set atteintes étaient profondes. U n'y a, chei loi, qne attira et p^
rodk. Le plan même de ses fictions est burietqnement imtlé des ronanidè
chcfalerie. alors en vogue. Étrange difertisBement qu'il ae dôme, otk toothi
est bon, où tout lui sert, poumi qu'il alimente sa gafté par le apeetade de la
folie unitenelle >. (PB. CniAts).
(30) Les lettres de P«quler sont un des plus précieux moamnenla de nb»
toire du XVIe siècle. Ce sont de ▼éritables mémoires où perce U plnegnadft
sagaoUé, aidée d'une pariaite connaissance des faits. Bodin a lalaaé denz tnMî
méthodiques : l'un, turlout, sur la rr'pHblique, est fbrt estimé, Men qaTU aè
ressente de l'esprit réfeur et incertain de son auteur.
(SI) Certes, il faudrait admettre que tons les éTénemenls de Itiiatoiraae dé-
veloppent au hazard, sans Intervention d'une puissance supérieure qnl légpi
let destinées de l'homme, on bien reconnaître dans ce fait là, entre tonaiii
autres, et à un degré plus prononcé, l'action de la puissance
L'histoire a reeneilli un certain nombre de mots de la Pncelle dans '
eetle oonriction profonde, imperturbable, se montre atec évidence.
(SI) Voy. La Revue française, de novembre 1939. Toy. aussi Gém^
jrittoire de Vélwiuenee aux XV* et XTI« tiêcles; Sitmondi, Hfaloiria êm
FranfQit, t. «t, etc.
Nouf doonoDi, pour faire connaître la manière de Menot, le texte d'an apo-
logue tiré d'un de les lermoni sur la flatterie t Simias tenelMUit ftatum et lia*
bebant uxores et aueiiorei t et allqulf babouin trantf vit i ô dloH domlnus i et
traneitls fie line fodendo iMXiofein oarl»r Bt de<|w> teneor TObia faoere bo-
norem : qui eitia Ita infect» perionœ et Inbooeit»? et le babou/in fut em-
poigné, et idndltur cjui cauda. O dicit dominui , o quam fellx ett qui est in
corta vestra? Ecoe hoc didt vulpes , et itaUm data eat ei cauda longa et tunlca
mi^iu et autoritaf ficieodl quaoumqne ToUet. Sla eatii ad ÔKMOm alici^ii
borgentis, domine Joannei x dicatls dominie t ecce eitii tam honesta. O do^
nrioe ioannea rne portabiUs Vaumusi», et pertabitli caudam Tulpli, 9ive ptt
flaUe. Habebltia eoiin beneficlum, nonne sic fit hodie. 81 sH usai talia qoi aie-
terlt in domo alicuius domini, vel forte servierit à torcher ealeeanienta iUo-
rom et eos docendum ad icholasi et quod bene ioiYlt Indere de Ungnâ, Uxh
dando domlnum : o apporteblt eum babere beMAcluni, et aie bona éomkd
difttribuuntur! et quando est elevatus tune neminem cognosdtt est anpetbdi
sicttt unus magnuadiabolus et sape dedlgnaturÂvIdere snot perentei et forte
eos qui sunt in causa quare talia bona liabet »,
Au milieu de ce déluge de bouffonnerie on peut Toir combien le récit est
vivant et dramatique, et comme la satire et la morale y sont habilement en-
châssés.
(SS) Voici le Jugement d'Henri Estienne, sur nos sermonaires, dont il était
presque contemporaio : < 11 sera pins expédient à mon advis, avant qu'entrer
plus avant en ce propos, et discourir plus amplement du train de noitre siècle,
'Informer de quel pied marchoyent nos prédécesseurs, je dl ceux qui eitof ehl
il y a soixante ou quatre vingts ans. . . A qnl donc nous adresserons4iotts pour
faire telle enqucite? aux prescheiirs qui estoient lori{ et entr*autres pour la
France, h père Olivier Maillard et fk^re Michel Ménoti pourVltaUe, I frère
Michel Barelote, ou soit de Barcleta, lesquels combien qu'ils aient falsifié ta
dootrine cbestlenne par toutes sortes de songes et de rêveries, et par ptusieura
mesebans propos, loi uns provenans d'Ignorance, les autres de pure malice,
si est-ce toutesfois qu'ils se sont aisoz vaillamment escarmouchez contre tel
vices d'alors, comme on pourra cognoistre par ce qui s'ensuit. . .t .
(H. EsTisnnrt, Apologie pour Hérodote),
(S4) Ce père Michel Ménnt mourut en I5lê, Olivier Maillard en «soa, et
Raullii en 1914.
Nous] ne nous étendrons pas davantage sur l'éloquence de la chaire, parce
que nous avons eu souvent l'occasion de parler des plus oélèbrei prédicateur!
de la réforme et que noui trouverons souvent celle de parler des orateon
étrangers, de Uarlettc surtout, qui était I cette époque le héros de la chaire
italienne, ainsi (lue le constate le proverbe nathmal < qui neseH Bnrttittare
n€$eit prœtUeare !....
'r- W8 —
CHAPITRE ONZIÈME.
(I) Il y a det sUneet entMrement hnltéet, eiitr*aiitrei la ISm cC lai
PolItteB.
(a) ^of.Giiigneiié.Sa'.fiet vuiemaio. — DtooDi loi ooaoM M. Gémei. et
afecptaidevéritéqiielui. qnell. VlUemain a dérobé tout eeu ^ denkrt
le ralTTC dans la même carrière, et ne leur a laiMé d*aatre naaoufce pour k
défrayer que l'emprtmt. Ilenreiiteiiieot il leur crt pennit, alnoii d'Mqpillerta
detle qn'lb oontracteot, au molm de Tamortlr par on aveo rinoère et iii ilw
adndratkm.
(S) Le TaMe lol-Bitaie a donné iiea à cette critfc|iie< aadane deStaflie
ditalt-elle pat : « Quand on Ut dan Le Taaae cet ven :
Ckiama gli ahitafor deW ambre Heme
Il ra^co suon delta tartarea tramba :
TVffiiaii le tpasloze atre catemet
E l'aer cieco a quel romor rhmboinka i
Il n*eft personne qui ne soit transporté d'admiratioo. Cepesdant« oneunianil
le sens de ces paroles, oo n'y trouve rien de sobllme i c'est coanae grand bb-
slden que Le Tasse tous fait trembler dans cette strophe i et l« beam ahsée
Jomelli produiraient sur vous un effet h peu près semblable ••
(4) Chronolosie des écrivains iuttens des XV* et X¥I« aitelei i Steobrttl,
mort en 1403; Laudivio, 1405; Villani, 1406t Bruni, 4444 1 BurchiellOi lUIs
Conti,4440: VaUa, 1457s Vegk). 1458; Auri^M, 1489; BraociQlini,44a»|llr
netti, 1459; Guarino, 1460; Plccdomlnl, 1464; Gonrani, 44«i
447l:Pulci. 44«0; Albert!, 1480; PlaUna, 1481; FUotfo, 44M;
4489, Giustinlani. 1489 ; BeUindoni. 441M ; Médids, 14tt; Pic 44e« t MUaaa,
4494; Pulci. 4470; Bojardo, 1494; Aveugle. 4490; RobeitO, 440Bt GablMe.
4490; VInciguerra. 1495: Savonarola, 1498 ; Leto, 4498; FiciBO, 44Mi lùMOdo,
4499; AquUano, 1500; VerardI, 1500.
XVle siècle. — Pontano. 1508; Landino, 4504; SabeBioo, 480ts Uleeoia da.
4508; Spi«nuoU. 1516: Léon X, 4581; RucflUi. 4SM; lladllafcBI.45BBrsllar-
tdU,15S7; Castlglione,l5»; Navagero. 18»; Porto, 48»; SanBanro.4a»
Broccardo, 45SI: Egidio, 1532; Ariosto. 4533; Acooiti, 45S4| Xuria, 408,
Castaldi,4536; Bemi. 4536; Mauro. 15SS: Guicdardini, 4810; OiMeelOBl,
1541 : Benivieni, 1549; Beoloo, 1548; Molxa. 1544; Fdengo. 4844, Benbo» «BIfi
Gotoona. 4547 s FiremaoU, 4548 : Arcarido. 4543 ; NeUi, 4846 ; BoiiCidio»48B8i
— 4ÏW —
Triflsino, hSSO t Aroaseo, 45S2 ; Fracastoro, 4S9S; Tolomel, I5S9, Epicaro, 1855;
lltrdf. Vm% AretiM, 49K; Can. «Wt MèfU, UM| Ubsniio. I5S7 ; Landi.
4599; Segoi, 4S9»t Amlm, IS»; Dlirilo^ «flHi Caiak»ttf^, 48621 GeUi,
4563 ; Ochino. 48d4 ; Varcbi, 48SS ; Simeoili. 4565 ; ancBili, 4863 j Caro, 4566-
yida,4896;AiigtUBara,4«8s€BneMoelil,«567;Dolce, 4968; Pogiaoi. 1566;
Taittillo,4a88; Ta8M>,4986; BONO, 1469; Franco, 4560t Mro», 1374 ; Pavaxi»
4870; Verdinotti, 4878; Caatdvetro, 4SH ; Cataao. 4$74« GinkU, 4878; Donj.
1574; Rota, 4978; Mnzto, 19r6;GardaBO, 49716; JfanolBi, 4860s ficanlUaeae^ 4862;
Corso. 45»; T«Oofi, 4866; Srino, 4968; Gottanso, 4966; Sperooi, 4866;
Tdesio, 4866 ;9alTfalf. 1966; Beeeari,<4«0; VilvaMBC, 19664 Gooehi, 4860;
Ongaro. 488S; TasSO, 1998; Panila, 4998» HauoBi, 4966 ;ft(argiiioi> 4«66.
XVIIe tiécle. — CaporaU, 4604 ; Ammirato. 4604 ; Ginstiniani, 4666: An*
niiitatf, 4666 ; toraUl, 4666 ; BOBffelU, 4666 ;4Mdl, 4660 ; Ooa^
CBUoi, 1645; ^Poita, 1615; AMi, 4«f ?; AittiMeW) 4«ll ; iarpi, 4666; Ccta, 46^i
Béni, 1623; Marini, 4635; CitUdial, 4617; €«i, 4680; Karai, 4tfi4 HililO.
4651; TasBOBl, «688i âiM»r«ra, 4667; !.«». I6S7{ ftieCKd^
Ciampoli, 1643 ; Bentiyogiio, 4644 ; Mambelli, 4644; Pallayicino, 4644 fBm»*
cioUni, 4648; Testi, 4646 ; Buonarroti, 1646; Baoïnattoi, 46é7« ToriCflUi, 4647 ;
CaTtOeri, 4647. •
(6) Lliistoire deGinoclaidiBi, dU M . Mlon, it léfMOMiait HqpiÉBnMat d«s
tonte rBorapes elle fat traduMi en latin, 4 Bâte, m 4866; tn feancaif, pm
Chomeday, eo 4866; en allemand, en 4374; en espagnol, en 4884 ; en flamw^i»
(9) Kingdomes are hoU eares,
SlùU y 9 dtcoyd o/ HaU,
Bythes are ready snarei
And hasten to deeaie.
. L66 royanmea ont ffiUle wMxdi. la pvliMnoe n*a point do dorée. Lès rk^^
ne sont que des piéses et bientôt elles se flétrteent. ^
(7) 6penser,^ avait en qoelques sncoès dans ses classes, éduma oemplO-
tement à Cambridge dans les concoors ponr le degré de fetitm on d'i^i^ à
rnaifeistté.
(6) ^oy.I.etei|M4,dup.XL
(9) C'est à oetle époqae que nous est vean d'AUemagnele mot upié^e, 91
«*9 pas d'antre origine qœ le nom du maJâmSpiegei^ dont lesboa» tonraonten
dans leur époqne la même célébrité que ceux de Giiblas et de MascariUe.
(%Qij On connaît le proverbe : 69 moutoM U 1 Clumpemois fiml eenl MTm,
lA ville de Berbeaet, dans Icliangnedoc, est anssi cél^hccsons oenipporU
(14) IhirimlemtU^PwriHa
auvn SCmtCnWtn orVItCn acTWviOWm Setf ,
{lebensbeschreibung ttans Swhstmywn, If, RabiscBi 1709, fn V, nfu4
99
— .'♦JO —
Lct PuerUia îarttA mùMê d« Basêiguoi de rfUrtnnt rrg^ rfcMf iJKTinriiM
nr E^other. et d'une foule d'mtfct poëilet du méiDeceiM, pmnft lwn«iilci ob
dittinsoe une élégie sur la mort du réfonnateor.
(12) llam Sadu aloule à celle liaiianCe nomenrtatiire 73 ehiBMOi popin
ItlKsoQ religieuMi» et trouTe avec utkfaeUoo » pour fniit des lo^ptoaUeai
iNNinei ou naoYaiiei de la muae. la loaima éno.me de 18.140 pUeei de ven,
doul il flt un cboiz qn'll répartit en cinq livres, et qu'il pnblia aoni le fonMI
In-folio, depuis l'année 1888 Jusqu'en «861 . Ilans tedis oMNinit e& ISIiL
(13) EMiiCB. afmd Bomlerweek't ces, tL Bered^ L 0. p. 403.
(U) V. Rou.uoAfliii'8, Koca'8 " Ccmfpenéium , Bmmiimio» Boom-
wu, etc.
(l8;Oo tnmre dans Aleiis Montett de prédem détails anr le tMMio au
XV« et XVI« siècles. V.t 3. p. 73» 86 etc., 1 6. p. 100. etc. Ut aont liop kmi
poor les reproduire Ici, mèoie dans les notes.
(16) V. Ilagnin, pour le tbUtre en fténéral. Monteil pow ta Fionco «t nnri^
pour rfespagne.
(17) SUiêben, I06S, In^.
(18) V. le prospectus des enivres de H. Sadis, publié par Bertnckde Weffnv.
(10) Les réfomuteurs ne se contentaient pas de se moqner des mpUm
de la reUgion ; ils allaient plus loin, comme on le Terra par Pneodote mk"
▼ante:
■ L'empereur Cliarles-Quiat se trouvait à AugriKmig, avee aon fMvo Fenli-
nand, roi des Romains. 'Que'ques acieors ambulants firent deaMUnder Ot obtin-
rent U permiision de jouer une pièce muette pendant le repoi do tanrs ma-
Jestés. Or, ces acteurs étaient hérétiques ; ils voulurent eipoeer am pcineai
l'origioe et les progrès de leur secte.
D'aiiord parut ou |)ers(iunagc vêtu en docteur, portant an dos ui pardunin
sur lequel son nom était inscrit ; on y lisait x Riucaua on Gamioii. U portidt
sous le bns un faoot, dont H défit gravement le lien; après quoi, ■ 86 mit i dis-
perser les branches à droite, k gauche, au hasard. Cela bit, U se Nlin dln pot
tranquille et lent
Il (nt remplacé par un acteur qui, voyant tontes ces brandws é|iones^ «■-
mcnra par les raskcmbler ; ensuite, il tftcba d'i^ter les draitcs ivoc laa ler-
tues ; mais, n'ayant pu y réussir après bien du travail et maigid ai
abandonna la besogne et sortit On put alors lire sur aon due i
ROTTUDAn.
Un gros moine kii succéda : c'était Luther. Il portait à tamalB on
ardent plein de braise et de tisons. H renversa son réchaud sur lobûla
celé, et souffla de toute son haleine ; la flamme ne tarda pas à s'élever. tIto ol
brillante. Luther contempla un moment son ouvrage • et a'en alta on lémli
gnant qu'il était charmé d'avoir si bien réussi.
Un comédien vint ensuite, en habit d'empereur, qui tirtaoB épée oCoo ait 4
espadonner coùtre le bûdior. tHals Yorant <ta*tu Heu de l'ételodre U ne faisait
que l'attUer, il partit a^eo des gestes de ddpit et de colère.
Le dernier personnage était le pape lui-même, dans toute la gloire de ses or-
nements pontiKcaux. l'aspect des flammes sembla.Tépouvanter beaucoup. De
tous côtés il cherchait du secours. U aperçoit deux crachés dans un coin ; il
s'empare de la première venue et la vide dans les flammes. Hélas ! funeste er«
reur ! il avait pris, au lieu de la cruche à Teau, la cruche à l*bnile ! L'incendie
aussitôt grandit avec fureur, et, sur le point d'en être lui-même atteint, le pape,
désespéré, s'enfuit et termine ahisi la pièce.
L'empereur et son frère, irrités de l'audace des comédiens, les firent cher-
cher partout ; mais il fut impossible de les trouver. Ils s'étaient dérobés, par
une fuite modeste et prudente, aux éloges et à la récompense dont ils pré-
voyaient bien qu'on voudrait payer leurs talents. • ( F . G.)
Cette pantomime théologique peut servbr de résumé à l'histoire religieuse,
comme à l'histoire de l'art théâtral en Allemagne, pendant le XVIe siècle.
[20) Shalcespeare ne lût pas le seul poète dramatique de sott époque, puisque
Robert Green, Heywood, Decker, Rowley, Peal, Cbapmano, Ben^lonhsoa,
Beaumont, Fletcher et d'autres encore vivaient à peu près dans le même
temps, mais l'auteur d'Othello leur est tellement supérieur, que* dans un cadre
pareil au nôtre, il est excusable de ne s'occuper que de lui.
(21) F, Chateaubriand, Dubois, Coquerel, Guiiol , etc. Molière Jouait en
effet son Pourceaugnac, de même que Shaleespeare, le bateleur^ grimaçait son
Falstaff. Camarade du pauvre Mondorge, l'auteur du Tartuffe avait changé son
illustre nom de Poquelin pour le nom obscur de Uolière, afin de ne pas désho-
norer son père le tapissier.
jivant qu'im peu de Urre obtenu par prière
Pour jamais sous ta tombe eût enfermé Molière,
Mille de ses beaux traits, aujourd'hui si vantés.
Furent des sots esprits à nos yeux rebutés.
Ainsi, ces voyageurs voilés, qui viennent de foi% I autre s'asseoir à notre
table, sont traités par nous en hôtes vulgaires. Nous ignorons leur nature im-
mortelle Jusqu'au Jour de leur disparition. En quittant la terre, ils se transfi-
gurent à nous, disant^ comme l'envoyé du ciel4 Tobie t ■ Je suis l'un des
sept qui sommes présents devant le Seigneur. >
Ces divinités méconnues des hommes à leur passage, ne ae méconnaissent
point entre elles. ■ Qu'a besoin mon Shakespeare, dit Milton, pour ses os vé-
nérés, de pierres entassées par le travail d'un siècle; où faut-il que ses saintes
reliques soient cachées sous une pyramide à pointe étoilée? Fils chéri de It
mémoire, grand héritier de la gloire, que t'importe un si faible témoignage de
ton nom, toi qui t'es b&tl, à notre mtnreiUeux étonnement, un monument de
— 451 —
flfoir BO pvBil tombctUy WÊKiÊuÊÊtnkBÊkéiB
9Vhmt neeé* «ly Skakgpmr^ for \it komor^d ftoso^
T%e iabamr ofam âge in pUed stones ?
Or that hîs kaliùo'd relique* skomtd ht Md
thtâer m tUnrp-pifîniînQ pyramMf
Dear son ofmêmorjf, greùt Aeflr offame,
fflkaf need^st tkam iMeh weah wîkusê oftk$ nmme?
Tkou im cur womder and aMoniihmtnt
n$i bwiit ikpMtifm Hf^ang moiiKiiiéiit.
Ând jo tcjmfeftr'd In j»dk pomp dort ile,
That kings, for tuch a tomd, voutd uUktûdk.
#
-.%!»-.
CHAPITRE DOUZIÈME.
(1) Voir, »iir ce lojet, lei adtnirabtoi pʧm dt Notrê^Pam$ de furie»
(2) Quelquefois le» prlncoi ou lei srancU de l'état aeeottfalaBt deaaeeoura
comidérablfi on arfiott avtorlMlaat det eonpaa tslraordi&alrea dt Miou
remeltatont dea kopMË, fomt aider aux dépeMea*
(Voir t'KMal mr l'afoMteotnre du mofeii-Age, |iir Ht de Cewioot),
(9; c'est pour oette raison (fn'on désigne eneoee «4onrd'M eetle leuf aons
le nom de Tom' de Béu/rn,
(4) Les tiUlettcs de pierre de Itraibonrf loelaiilfnt dyde lonn-4fliiiped'uoe
haute ooDsldérstioti à cause des travaux exécutéi p<4PJ'éieetloa de lenr ca-
th(iilra!e, lorsque Dotzliigor, qui répara le chœn^de cetle baslliquei profila de
son ascendant pour réunir en un seul corps toutrs Tes oorporattona éparses,
et pour former une raale a««eeiatl(Hi ^ul eompreiieN le pina fs^waét partie de
1* Allemagne* Gotfe ooiiipagrife< fem0eefil4Mt M! MiieMMer ew iMPrpar
une asseniblée générflle des mekrea dei>ai0irerf eto teg«», ftnue I MttibeMiei
elle flt des réglementa peur la réeepcloi* det eppremia, dea ecwfiagnwia eldes
maîtres, étabHtdes atgoeaieeretapef feaqneie aefc nemfciwa pont atef le Preen«
naître, et ad<)pta poof grande iMirree de tente II eenfrelariitd HeeiMieetes
de la cathédrale de straibourg. celle aiaoelillott fnt eonimde dene le leite
par le» emperenra d*AlleiMigtte# Le maglptfaf de âtraibonrg œnfle pmiant
quehine temps la déelshm de tontea taa WMMUglensra, en fHH ée Mtlneiits,
au dicf do son atelier de tailleurs de pierres i et le dne de HIMn d—aade^en
\m,hùt magistrat, nftavdilieele eepeble de diriger la conatwetlo»ée le su-
perbe église métropolitaine de %ti eapHate.
La suprématie du grend*maltre de Talaller de gtrasbourg sur lea toges d'en
grande partie de l'iUleingoei ne eene qu'aptes la téùÊSoù de eelle iHùiê I le
France.
(Voy. VEiin* mit^^qm de M, âekwtlghiHttêr, mm* 13^ emUédfuh dé
Strasbourg),
(5) |l ne faut pas oublier, dH M« de Canmont, am|«el nene emprmitepf la
plus grande partie de ces dennéesi (iiie eette oleasMeatlon eif surtout applicable
ant monummtfde FOueit. I^aprèadea observaHone feemtea, lesprotlnoes
dn centre et du midi de le vranee, plw Mèlea an plein einif e» eerMenl eon-
serve retie arcade longitenipa «tant le iuiWMiiidiiiiiildn régai» de l'egMe, et
pout-ôtrc Jusqu'au XlVc siècle, quoique le style ogival y m^mMImÊtlèm:
ployé dèi le XIII . M. Leduc. aMiqnain ûUdaSÊê, qil a nptam de «■
▼oyagc en AoTergne eten Profcnoe une rlcbeoollectkm de deirini, pcaw qee
beiiiGoop d'égllset romaneide cette parUe deU France youireienf fcha «e
dater qae da Xllb tiède etfinéiiie da cummenccinent da XIV*.
(6) Oq cite surtout, parmi lea ourraseï dfs plot grade laaitrei. le Jmgtmmt
dernif»; de Mlcbd-Aiigei ila jyantfigut'ati4m, de BaptuAs 1» Ck^é eu
géants, de Jule« Romalnt la IV«fiiTfcf fo« de £asar^de8éb»llal delHeafees
|a DtrnenU de croix, de Daniel de Valtenet ICiiV^«riiia d'AMMitw, di
Titien, et quelques autres moàni odélires.
Voy. Vaiari, FèUblen, de Roujooi, etc.
(7) Voy. Laborde. Bettinelil/de Eoi^oux, Petit, FAao. ete.
(8) Voy. Botsuet, Gassendi, Filon, etc. — c Les Pratestnti, dit VMMre. ai
sujet do calendrier grégorien, s'obstinent à ne pas recevoir dn ndhv dn p^
une ▼ërlté qu'il eAt tsllu recevoir des Turcs s'ils Pavaient propotée.. .s
Qè) Voy. Kurth Spreogel. TourteUe, etc.
(10) L'imprimerieavait été caractérisée par ce ven de révéqoe de TeraM»,
devenu populaire r^
Intprimit illa DIB quantum non teribitur JNNO.
Voici ce qu'on lit dans une bbtolre de l'origine de rimprimerie • docUepee
après cette admirable découverte x • Vbbs l'an 1440, JiiN GuTnauM» Jiài
GBNSPLEiKcn , surnonuné GomMuiG. on Jean Zdhjunoin di Guniune,
natif de Strasbourg et Bourgeois de Mayence, selon les uns. ou natitde Vayenee
et Bourgeois de Strasbourg aebn les antres, simple domestique selon qacbpMt
uns, teulemmt Orlèvre selon quelques autres, mais Gentilbomme teiOBFbi-
sieurs, et véritablement de l'ancienne Famille de Ziin^figen. qui avaH nn
Hdtel de oe Nom das Mayenœ, et une espèce de Palais nommé gnirewlerf
dans le Voisinage d< cette We. Mgina.llfflprimerie à Strasbourg, el la per-
fectionna enfin à llayence. ^
Apait beaucoup de Tentatives inutiles, alant déjà dépensé praqae tout aoB
Bien sans avoir pu réduire cette Théorie en Pratique, et désespémnt de pouvoir
y K^ussir tout seul, il découvrit son Secret à quelques iricbet Pomcgeoia de
M aïencf , qui l'asBisfèrent de leurs Uolens, <t avec lesquels A t'amocia à net
égard. Les seuls, qu'on connaisse, sont Jban MBDiNBieiyOn pfaitdtlInBni-
BAcn, dont on ne nous a conservé que le Nom; et Jian FosTi limiimu do trta-
bonne Famille de cette Ville, originaire d'AschafTenbourg» et Gribvve
fession, qui contribua beaucoup à l'Avancement de cette admirable
Un de set DomestiqueB, nommé pitoia ScBOimnn ou Scnonon. «aLidki
Opiuo, ce qui signifie en Français Biigbb, natif de Gemsbeira dHii lo
graviat de Darmstadt, et Clerc du Diocèse de llalenoe, alant pénétré
cbose de leur Secret, y fut entièrement admis, et s'appliqua tetenMnt aMe<
àleperfectioniwr.
— ï*66 —
. A rOMi d0 tnrailler, tts le raodlraiit I U fln prtllcablet et, quelque im«
ptffUtqa'ilfM encore, GhevUler n'a poM dû ne le regarder liiiipleaMot que
eoMme la grmmre éeê inieriffHons lendoe phif uClle, et oomme antii pea
digne da Titre d*art lumveUenuiU Hwenté, que tlatrodnctlon de rHafle dant
la Peintore lorf de loo Senonf eUement «d XV« liècle. Car, f'il eit vrai qu'on
a ioq|oarf graré inr le Bolf , la Pierre, et les llétanz, U ne Teit paf niofaïf, que,
poorgraTermirleBoif, I rutage de rimprbnerie, H a faUn Imaginer de dif-
poier les Caraolèref«t let Nota de droite I ganobe, comme ceoi det Languea
Oitentalei; de ne lea paa grarer en ereoi« comme dam let inicriptloni, maii
de les tailler en relief, comme aur la Monnaie et tar lea Mëdaillet} de les co*
lorer d'une Encre éfialsee et gluante, mais non trop fluide { d'imposer dessus du
Papier ou du Parcliemin trempé pour en recerolr l'Empreinte t de les glisser
ensuite dans nue Presse propre Iles y imprimer { en un mot, de faire en sorte
qu'ils pussent être imprimés seuls et nettement sur le Papier ou le Parchemin
préparé, et y être plus dans leur Ordre naturel} et toot cela est certainement
quelque chose de phis qu'une simple Imltatioo on Amélioration de hi Orarure
des inscriptions, anécessairement demandé de la pénétration et de l'application,
et a sans doute rencontré bien des difQcnltés à surmonter,
HiuaiuaiHiNT, ces diven associés y réussirent vers l'An M* GGGC. L. t Ils
portèrent enfin la Chose Jusqucià acherer l'impreasion, non senieaMntde
quelques simples Lirrets, tels qu'un Alphabet pour les plus petites écoles, et
nn Douai , espèce de Grammaire Latine à TUsage des pins basses Gbuaes. mais
même d'un Ouvrage aussi considérable qu'une Compilation de Grammaêrt, de
Bhétùrique , et de Poétique, solfie d'un ample DUtionnairB* et intitulée
Catholieon .loRAWiia JANUinaïa.
C'aer de cette même sorte d'Imprimerie de Caractères tatUés en relief, que
sont encore sortis le Donatuê, les ConfessUmalia, le Bréviaire, PseauUer^
Manuel on Horologium Beatœ Virginie Mariœ, de la Gfand' Hère de Joseph
Scaliger, l'Art memorandi notabiiit per Pigurae evangelietarum, et un
Livre Latin de figurée de la Bible conservé dans le Cabinet de M. Scbelhom,
le Cantieum ou VHietoria Beatœ Mariœ virginU i» Figwrii comené à
Harlem, VHittoria S, Johannie evangelietœ in Pigurie, côté du papier, dont
on était obllgéde coller ensuite les deux Faces blanches l'une contre l'antre, afin
de cacher ce Défrati elles causaient nécessafarement, et donUe Peine, et double
Dépense, pour ne produhie, après tout, qu'un ouvrage assea imparfiit.
DÉGOÛTÉ donc de ces imperfections, nos trois Inventeurs portèrent plus
loin leurs Recherches. A force de réfléchir sur leur nouvelle Invention, ils s'a-
Tisèrent de diviser les unes d'avec les autres les Lettres de leurs Tables on
Flanches, et d'en fSaçonner séparément de semblables, de Plomb, d'Étain, et
de Cuivre. Mais, elles demandaleut trop de Temps, de Soin», et de Travail, et ne
pouvaient qne trèt-difflciiement se former de Proportion égale et ccovenable.
Aussi, ne volons-nous pas qu'ib en aient fait aucun usage.
— «é5« -
MmmUÊkf, kiWBaidrolt tld^liprilfffcCitf i0f«lli^i
tMCdetof<ni,fpf««BAKi'avlM4etytar du
triOBfi de Uirli|iicf et JiHtMer dn WMlêiii et d#
Nvt et iépflrdnf doM tt pvt à iM gid eonpMi
PI^K CBllèffBt dont H Ullltt iKlOlft t M VD BMitt dS ANHÉt IMÉ I i
oenalre pour fonnrr dei canelêffi leb <f id oMfli qm
depub : et U te reodlt ahui riareiitear «t te P6PI dt ta fdHCiMB ot
prloirftc*.
Voy. Aottf Berf^lanoi. Momlb, Tritbentat» MiWiitoot, elo.
ni) Amont fT,||ichelFéddP0Tlth,JMqiM9 Martel ViWéVUI.
{IX) Vof. îfoëU voltrtre, RobertMto. te DkHoûnméré âê rfwbref rM, ki
Âmmsemcntê phiMûçîqaes , et mon BUMre mbréféê éê$ êéêmmeflm 9i
intentions, 6* édition.
(\5) Blanipii. hiUffire de léetmtmU poHOqm.
(Il) M. iif.
( 1 5) La découverte dn ffoorenhlIondiB aurait dA faire de l'BipigMtopiM fkkt
et ie idwhemftu paya de l'Eoiope. L'étaMiieemcntde rhmnhUtuM iH'iiaprtilin
des Mam^ gâtèrent tout. Lei manaflMtorea retiréei deai
restèrent saoa exercice t n a'emnMt tme dépopulaHeÉ
avrnftWe ne pomrattfiMreeoanattre cette Unie, eUeaeerofaa paa awir hwpinde
cnltnre et d'indnatrle } aon sol, c'étaient set valsaeaaB, aeaBBOiMnM« toi vefaiei;
tm fndastrle, Tor. toujours l'or ! Ge niélÉl devenu cuwiiiwn ptimeltiit et «-
rusiit tous les besoins do luxe ; on le voyait briller Joaqn'MMpiidadflBcheiiBT
L'Espagne aurait Uenldt senti la vérité de U fable de Midaa, li toi tranUes de
la France n'avalent amené dans aon aein dea owrien et dei takanHnInp*
rais. Cet or avait tourné U tète de Ghartes-Qatait!..
(MHAfMV
(16) Forbounals, Rechereket atrr let finances,
^17) Solly a pris le sohi de rébumiT hii-mtaie aee
dans un exposé qui lut fut demandé par Henri IV, et «in'il a
liémoires : « Pour voir si mes idées ne rapportaient an ateoBHb dtt4l. terol
voulut que Je loi donnasse une note de tout ce que Je erofola eipibln de
verser on simplement (le ternir la gloire d'os paiÊStali rofi— i M la
kà comme un abrégé des principes qui m'ont servi derftgtab Cet OHNade U
ruine on de l'aRaiblIssement des monarchlea sont Ica taUdiÉ mÊKéêi tes «t
nopoles, principalement sur le Ué; le négHgement dncoaHanve^da faaiQféi
labourage, des arts et métiers ; le grand nombre de cM^vi Im fnlidices
ofticf S; l'autorité excessive de ceux qui Ips exercent, lea IMs» taatemMHiet
l'iniquité de la Justice ; Toisivcté, le Inxe et terni M ^ ff o mppeslg tadé-
bauciie et la corroption des moNirs; la confusion dos oomÉUêomêi taa Wii*
tioiu dans la mounaic ; les guerres injustes et imprudentes; le éeêfoiUwu en
— ^67 —
sùuwrains } lear attachement aveugle à eertainês personnes ; leut pitfyea-
tion en fayenr de certaines oondftioni on de certaines professions; la cupidité
des ministres et des gens en fayeur ; Vavilissement des gens de qualité} le
mépris et l'oubli des gens de lettres; la tolérance des médiantes coulumes et
l'infracUon des bonues lois ; la mnltipliclté des édits embarrassants et des règle-
ments inutiles •.
c Henri IV, dit l'historien de Mayer, sentit le besoin da commerce, mais il
youlait trop le ^eyoir à ses propres forces, il l'appelait au milieu du tumuite
des armes, il s'iaiaginait que le commerce et rindustrie florlraient sur jur sol
déchiré par les instrument dp carnage ; il ne savait pas <|iie c'est auprès de
l'arbre de la paix que l'iDdustrie sans alarmes s'élèye, fleurit, et croît!..»
Henri IV savait tout cela, et Sully aussi, mais peut-on lenr faire un crime de la
guerre quand elle seule pouvait consolider les bienfaits de l'agriculture? Qne
fût devenu Henri IV sans son courage et son énergie guerrière? Ht doiUm pas
plutôt lui savoir gré d*avohr songé à allier les deux choies dana une auMl dé-
plorable époque?
(18) Je vendrai, annéet
Lesetier de froment
Celui de seigle . . .
Celni d'orge ....
Celui d'avoine . • •
Cehû de fèves ...»%...*. •
Le mnid de vin •
Un bœuf • 4S
Une vache 8
Un mouton »
Un porc gras ^ S
Un oison
Une cane
Une poule
Un chapon
Le cent d'oeufs
La livre de beurre
Le boisseau de navets
Le cent de noix . »
La livre de cire
Prix du setier de froment, mesure de Paris. ... 5
Du setier de seigle 4
Du se lier d'avoine S
Prtxdu rouicideyin, meiure de Paris ft
Uv.
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7
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40
18
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— »«58 —
7
11
Pilxd'un cheYal fia
D'un cheval «le Irait 190
n'unbffuf 00
D'uue vache • • • M
l>*un niouioo
D'uuporc ».... 4(
l>ilx d'une poule
D'uBchapoo • .
D'un dindon
PrizdeUlhrredebenrre
De fromage
De la domaine d'orab .
De la livre dedre
De la voie de boif
Du cent de cottereli B
Prix de la hotte de foin »
Ne cooduei paîi de cet prix que le iermler doive
8'enrichlr.
Car 11 faut qu'il paie au premier va&et de charrue
pour let gagea 48
Aux autrei valeti S8
Alaménagère fS
Anxiervantes • • . • 10
Au maître berger 36
II but que, pour le aciage. U donne aux moiaton-
nrart par arpent de champ de Ihmient, trois bois-
seaux de froment, et que par arpent de champ d'a-
voine il leur paie . s
11 but qu'il paie aux faucheurs, par arpent de pré. •
Il faut qu'il donne aux batteurs en grange la vingt*
quatrième partie du bM qu'ils ont battu.
11 faut que pour les difléreotes façons des vignes II
paie aux vignerons, par arpent M
U but qu'il pale aux journaliers la journée d'été. • •
Et U journée d'hiver •
(19; voy. U Guide des chemins de France, pçr Ckarieê Bêtkmtê* JfmriÊ
4865.
(SO) V. Hitpaniœ itinerarium.
Câl) V.HonteU, BUtoirc des Finançais dte dhersétmU.
(ii) Caiio iosso. V. Le Dictionnaire ctymotogique de Mrfngffc
(23) ||ontett,d'aprâflleZ>ic<ioiiiiair0d« j\rico/,/e XiraiUdê to méftin, $lu
B
48
B
B
— HbÙ —
^WVWV%l^*^VV%.'V%*WV%**%***V*%*%WV%***v^V*A../V%'*A/% -w%%/v%
TABLE DES MATIERES
OOUTENUES dans LB cinquième VOLUMKi
»—*
cHAPrraE premier.
Exposé des événemeiits européeuA pendant les qoinsième et seizièaie
siècles : — Ocddenk : France. Page I.
CHAPITRE SECOND.
Suite du même exposé : — Occident ; Angleterre. — Écosie. — Es-
pagne. — Portugal. — ttalie. Page M.
CHAPITRE TROISIÈBIE.
Suite du même exposé : peuples du Nord et de l'Orient : Russie : Pc.
logne. — Hongrie. — Suède. — Danemarck. — Hollande. — Empire
germanique. — Suisse. — Bas-Empire. Page 76.
CHAPITRE QUATRIÈME.
État de rËglise au quinzième siècle : -- Schisme d'Occident. — Pa«
pauté. — Travaux et décisions des principaux conciles. .Page 97.
CHAPITRE CINQUIÈME.
Suite de l'histoire de l'Église : — Seizième siècle. — Coap-d'œllsar
la réforme. — Luther. — Zwingle. — Mélanchton. •— Œcolampade*
— Carlostad. — Sacramentaires , anabaptistes, nbiquitaires. — Cal-
vin. — Considérations générales sur la réforme. Page 125.
CHAPITRE SIXIÈME.
Suite de l'Église : seizième siècle. — Papanté. — Concile de Trente. ^
Ignace de Loyola. — Ordre des Jésuites. Page 159.
CHAPITRE SEPTIÈME.
Suite de l'Église : Mœurs religieuses. ^ Travaux des conciles. — In-
quisition. — Considérations générales sur l'hittoire eedéaiastiqae de
cette époque. Page 175,
ClIAPnRK HUITIÈME.
Ktat politique et social : Li^giilaiioii. — Adiuluislritloa de la jaillce.
— l^ric.iienti, etc. Page SOS,
GIIAPITIIK NECVIKME.
Mœuri privées ci publiques eu Kruuce et dam let dif en l^lala euro-
péens : Ci>nsidéralioiis prtliniiaairet. — Mariagca» -^ Hepai. — Or-
doDunrn^s soinpluaires du cJiaDcdîer l'Hôpital. — Mœurt géndrale
des ffraiids, de la liourgeoisie et du peuple. — Tftbicau de la cour de
Cathoriue et de sci trois flis. — Privilt^ rertëa à la nuMease aprèi
la chute du rt^sme ftkKial. ^ FunérailLs. — Usages dif era admis
daiu la société.— Polia* de Parii.^ Multiplicité des vols. — Aauaiiiii
et champioas. — Uépression drs dtMits et des criinea, — Tortures et
supplices divers. — (Iode militaire eu Frauco. — Asiles, leurs privi-
lèges. — Vœux de pauvreté et de réclusion perpétuelle.
Etat des Juifs daos les dWersea eontréet de rfiurope. ^ CooildéraUona
générales sur la tnpcritiUon de eette époqoe. — Pnlmnoe de fioi-
tradanus et de Gosmo Ruggieri. — Procès contre lea anlmain» etc.
Etal moral de l'Italie, de l'Allemagne, de la Roasio, etc. Page 2II.
CHAPITRE DIXIÈME.
Unlverittés. ^ Philosophie.— Lettres en Fnnee : poMe. — Iflrtnlni
— Politique et religion. — Satire Ménippée. — ;
GHAPXTEE ONZIÈME.
Sollc des lettres : peuples du Midi.— Italie : Arloste» Taaae» MieUatd »
etc. — Espagne et Portugal. — Peuples du Mord : — Angleterre. —
Allemagne.— Hongrie, etc.— Théâtre, ses progrte an aetalème alèda.
— Shakespeare. Page 301 .
CHAPITRE DOUZIÈME.
Beaui-arts : Architecture, Peinture, Sculpture, Mudqne. — Seieneea
oiactes. — Sciences physiques. — Médecine. — Inventions et déeou-
Tertes : Amérique, Imprimerie, Taille du diamant, Carroaw, Ghocolati
Café, Tabac, etc. — Perfectionnements divers. — Économie politiqiie.
— Coiumerco. — Industrie. — Agriculture. — État matériel dea
peuples. — Coucluiiou de la cluquiùmo époque. Page 5SS.
Kotc« et pièces justincativea. Page S90,
{
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