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HISTOIRE
DE TOURAINE.
TOME III.
DÏÏBeSSS LÎBRAÎRE
y (T IMPRiMERlE DE H. POURNIER, i
RUE liK SElWt, M" 14.
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HISTOIRE
DE
TOURAINE,
DEPUIS LA CONQUÊTE DES GAULES PAR LES ROMAINS,
jusqu'à l'année 1790
DU DICTIONNAIRE BIOGRAPHIQUE
BE TOUS L£S HOMMES CÉlÈBRES WÉS DAWS CETTE PROVINCE.
Par J.-L. CHALMEL.
TOME m.
^Q-HOmitm
PARIS,
CHKZ H. FOURNIER Je, LIBRAIRE, RUE DE SEIiNE, N*» 14.
A TOURS,
CHEZ A. MAME, IMPRIMEUR-LIBKAIRE;
KT CHEZ MOIST, UBRAïHE.
Jincnnxxvin.
WîA^SSE LIBRAIRE
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De
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HISTOIRE
DE TOURAINE.
SECONDE PARTIE
CONTENANT
LES ANTIQUITÉS DES VILLES, TERRES ET LIEUX TITRES
DE LA PROVINCE, PAR ORDRE ALPHABETIQUE.
AMBOISE, BARONNIE.
La ville d'Amboise est située à six lieues au levant
de celle de Tours, au pied d'un coteau baigné par la
Ijoire. Son château , qui a été long-temps le séjour
de plusieurs de nos rois , est sans contredit le plus
ancien de ceux de la province. On y voyait encore du
temps de saint Martin des traces de son antiquité.
Sulpicc-Sévère rapporte qu'il y avait alors un temple
magnifique où se trouvait une idole qui maintenait
les liabitans dans leurs anciennes superstitions. Ceux-
ci s'étant opposés à ce que Marcellus , curé d'Amboise,
la fît abattre , saint Martin fut obligé d'aller lui-même
sur les lic^ix pour la détruire. Cependant l'existence
3. I
1 HISTOIRE DE TOURAINE.
(le ce temple ne serait pas la preuve qu'il y eût alors
un château. Ceux qui ont parlé de son antiquité se
sont principalement appuyés sur le traité qui a pour
titre : « de Compositione castri Ambasiœ , etc. , »
par le moine Jean , dit l'anonyme de Marmoutier ;
mais cet ouvrage , rempli de fables et d'anaclironismes,
ne peut mériter aucune confiance. Les faits y sont
presque toujours ou inventés, ou altérés par l'igno-
rance ou la crédulité. Selon cet auteur, dont le récit
a prévalu jusqu'à certain point , ce château devrait sa
première fondation à Jules César, qui, après avoir
pris Bourges, serait venu camper à dix lieues d'Am-
boise, pour de là se porter sur la ville de Tours. Ces
détails à la rigueur pourraient être vrais; mais ils ne
sont appuyés de l'autorité d'aucun autre écrivain,
aucun auteur avant Sulpice-Sévère n'ayant parlé de
la ville d'Amboise , dont César à coup sûr n'eût pas
manqué de faire mention dans ses Commentaires. A
1^ vérité on y voit qu'il laissa deux légions en Tou-
raine • mais il est probable que ces treize mille hommes
furent répartis sur différens points de la province,
puisque leur séjour n'avait d'autre but que de tenir
le pays en respect.
Malgré toutes ces incertitudes on ne peut se refu-
sai' à croire qu'il existait un fort ou une espèce de
camp retranché pour la sûreté de quelques cohortes,
que César aura dû placer sur les hauteurs d'Amboise.
Ce n'est pourtant que par la tradition qu'on a pu
avancer que ce fort , détruit par les Ba-caudes , fut
reconstruit vers l'an 35o par Anicien, que nous savons
AMBOISE. 3
avoir été en ce temps comte ou gouverneur pour les
Romains du pays des Turones. Effectivement cette
éminence avait conservé depuis le nom de Motte-
Anicien ; mais on doit ranger au nombre des fables la
donation qu'une prétendue Lupa aurait faite à Clovis
du domaine d'Amboise, et cela parce qu'il y avait,
dit-on, une porte appelée la Porte de Louve. Ainsi,
tout en convenant de l'antiquité du fort Anicien, on
peut assurer sans crainte que nous ne savons rien de
positif sur l'origine du château d'Amboise , qui ne s'est
agrandi que successivement.
Ce qu'il y a de plus certain, c'est que, vers l'an 54o,
saint Baud , sixième évêque de Tours et grand réfé-
rendaire du roi Clotaire I", était seigneur du château
qui existait alors : son fils eut des enfâns qui conti-
nuèrent sa postérité. Adalard, archevêque de Tours,
et Raymond son frère, évêque d'Angers, le possé-
daient au commencement du neuvième siècle ; mais
lorsqu'ils étaient encore en bas âge, Cliarles-le-Chauve
leur en avait oté le gouvernement et y avait mis gar-
nison. Ce n'était probablement qu'un acte conserva-
toire; car le roi Eudes, à la prière de ces deux pré-
lats, le rendit à Ingelger I", qui avait épousé leur
nièce Adelinde. A Ingelger succéda FouIques-le-Roux
son fils, comte d'Anjou, père de Foulques-le-Bon, et
à celui-ci Geoffroy -Grisegonn elle. Après lui vint
Foulques -Nerra, dont le fils Geoffroy, qui n'avait
^ft point d'enfans, laissa se^ états à Geoffroy-le-Barbu et
• à Foulques-Réchin ses neveux.
Amboise se trouvait partagé entre trois seigneurs.
I.
4 HISTOIRE DE TOURA.INE.
Le comte d'Anjou possédait le principal château, avec
cette partie de la vilk, jusqu'à l'Amasse, qu'on nom-
mait autrefois la maison consulaire. Sulpice d'Amboise
avait l'autre moitié qu'on appela depuis La Tour. Elle
s'étendait jusqu'à l'église de Saint-Denis, excepté un
petit canton qui formait la baronnie de la Maison-
Fort. Le domaine dépendant de La Tour, en deçà de
l'Amasse, avait été donné à Hémon, premier seigneur
de Buzançais, par Charles-le-Chauve. Archambault
de Buzançais, son petit-fîls, y avait élevé une tour en
bois que Sulpice de Buzançais, trésorier de Saint-
Martin , fit reconstruire en pierre. C'est ce qu'on ap-
pelait la Tour-Fondue. Il y avait une autre forteresse
au-dessus du château, au lieu nommé autrefois la
Motte-Anicien, puis la Motte-aux-Conins , ensuite la
Motte -Fourcroy. Les seigneurs de ces trois places,
dans la même enceinte, se firent long-temps la guerre,
jusqu'à ce que ceux de la Tour , ayant détruit la Motte-
Fourcroy, se rendissent maîtres de l'ancien château,
et donnassent naissance à l'illustre maison d'Amboise,
qui réunit les trois seigneuries dans un seul et unique
château.
Lysois ou Lizoye , seigneur de Bazougers , sénéchal
d'Anjou , est celui qu'on reconnaît pour le chef de
cette famille. Il était fils de Hugues , seigneur de La-
vardin, et d'Adeline de Sainte- S usanne. Son nom,
célèbre parmi tous ceux du pays , fut d'un heureux
présage pour la grandeur de la maison d'Amboise,
que nos anciens poètes français ont depuis surnommée
la race de Mars» Il rendit d'importaus services à
ÂMfiOISË. 5
Foulques-Ncrra, qui l'en récompensa par la seigneu-
rie de Cicogné, et lui procura l'alliance d'Hersinde ou
Elindc de Buzançais, qui lui apporta en dot la tour
d'Amboise, d'où cette famille a pris son nom, ainsi
que les seigneuries de Mouzay et de Verneuil. De ce
mariage sortirent quatre garçons et trois filles, savoir:
Sulpice, seigneur d'Amboise ; Lysois, seigneur de
Verneuil; Hugues et Albëric. Les filles furent Euphéf
mie, femme de Bouchard de Montrésor; Sibylle,
épouse de Thibault des Roches, seigneur de Roche-
Gorbon , et Elisabeth mariée a Fourcroy de Thorigny,
seigneur de la Motte-Fourcroy.
Sulpice, premier du nom, se rendit maître de la
Motte-Fourcroy, fit raser cette forteresse jusqu'aux
fondemens, défendit la tour d'Amboise pendant cinq
semaines contre toules les forces de Foulques-Réchin,
et parvint ainsi h lui en faire lever le siège. Il fit
depuis sa paix avec le comte à condition que la tour
serait mise en séquestre , et donna son fils pour otage.
Il épousa Denise de Fougères, qui lui apporta de
grands biens en mariage, avec les terres de Ghau-
mont, de Saint-Gyr et la Voirie de Ghâteauneuf à
Tours , qu'elle avait héritée de son oncle maternel ,
Geoffroy de Ghaumont, fils de Gelduin II, seigneur
de Saumur. Sulpice mourut au château de Roche-
Gorbon le i*' juin 1080 , laissant un fils et deux filles,
dont l'une, nommée Adenorde ou Honneur, épousa
le seigneur de Limeray; l'autre, du nom de Hermen-
sande, fut mariée à Archand)aud seigneur de Bray,
aujourd'hui Reignac.
6 HISTOIRE DE TOURAINE.
Hugues , premier du nom , fils de Sulpice , qui avait
été donné en otage au comte d'Anjou , ne fut mis en
liberté qu'en io85 à la sollicitation de Lysois son
oncle paternel. Mathieu Paris rapporte qu'il fut fait
prisonnier par les Anglais dans un combat , et con-
duit à Bonneval d'où il trouva moyen de se sauver
en corrompant son gardien Guillaume de l'Espi-
nay. Il se croisa en 1096 dans l'église de Mar-
moutier, en présence du pape Urbain II, et fît le
voyage de la Terre- Sainte. A son retour Geoffroy-
Martel, fils aîné de Foulques -Réchin, lui donna sa
sœur utérine en mariage, avec promesse de lui laisser
le château d'Amboise après la mort du comte son
père; mais Huguéis n'attendit pas que Foulques-Ré-
chin eût cessé de vivre; car Geoffroy -Martel étant
mort auparavant, il commença par s'en rendre maître
dans la crainte que le vieux comte ne voulut pas
ratifier la promesse de son fils. Il réunit aussi à son
domaine le château de Montrichard , que les comtes
d'Anjou avaient usurpé sur Gelduin de Saumur et de
Ghaumont, son bisaïeul maternel. Ce fut à lui qu'on
dut la construction d'un pont de pierre sur la Loire
en face du château d'Amboise, ainsi que celle de
l'église de Saint-Thomas , et surtout la fondation de
treize pauvres, en mémoire des treize apôtres, nour-
ris pendant tout le carême aux frais des seigneurs
d'Amboise, et habillés complètement le jour de Pâques,
et non , comme quehjues-uns l'ont dit , le jour de la
Fête-Dieu, qui ne fut instituée qu'en 1264 par le
pape Urbain IV, Il mourut en 1128 au retour du
AMBOISE. 7
second voyage qu'il avait fait à la Teire-Sainte avec
Foulqiies-le-Jcunc, comte d'Anjou, depuis roi de Jé-
rusalem. D'Elisabeth, fille de Guillaume do Jaligny
et d'Ermengarde de Bourbon, il laissa trois enfans :
1** Sulpice, son successeur; 2* Hugues, qui épousa
Lisoye, fille unique de Geoffroi-le-Roux , seigneur de
Colombiers, dont il n'eut point d'enfans; 3" Denise,
mariée a Oldin de Bourbon, morts aussi sans lignée.
Sulpice II, seigneur d'Amboise et de Chaumont,
naquit en iio5, et fut souvent heureux dans les
guerres fréquentes qu'il eut avec ses voisins. Il défit
Bouchard de Saint -Amand, sénéchal de Vendôme ?
auprès de Cangy, a deux lieues d'Amboise, et le fit
prisonnier avec sept chevaliers, battit Geoffroy-Gri-
segonnelle, comte de Vendôme, et le fit de même
prisonnier; enfin dans une autre rencontre auprès de
Ville-Chauve, il remporta un pareil avantage sur Jean
de Vendôme, fils du comle, et l'emmena prisonnier
dans son château de Chaumont. Enflé de tant de suc-
cès, il osa s'attaquer à Geoffroy- le -Bel, comte de
Touraine, son seigneur, et enleva des bourgeois de
Châteauneuf , qui , suivant la coutume, allaient rendre
hommage à leur comte au nom des autres habitans,
afin d'être maintenus dans leurs privilèges pendant la
guerre. Il fit cependant la paix avec lui ; mais il ne
fut pas aussi heureux dans la guerre qu'il eut à sou-
tenir contre ïhibaut-le-Bon , comte de Blois, guerre
.dont nous avons donné les détails au quatrième livre
de notre histoire sur l'année 1 1/(3. Il mourut en 1 153,
ayant épousé Agnès , fille de Hervé de Donzy, seigneur
8 HISTOIRE DE TOURAINE.
de Saint-Aignan. De ce mariage naquirent deux fils
et deux filles , Hugues et Hervé , Denise et Elisabeth.
Denise épousa Ebbon , seigneur de Déols en Berri ,
et Elisabeth André T' d' Aluye , seigneur de Châteaux
et de Saint-Christophe en Touraine.
Hugues II, seigneur d'Amboise, de Chaumont et
deMontricliard, avait été fait priso«nier ainsi qu'Hervé
son frère par Thibaut comte de Blois. Tous les deux
ne furent mis en liberté qu'en 1 1 54 au mois de sep-
tembre par le traité de paix fait entre ce comte et
Henri duc de Normandie, depuis roi d'Angleterre,
à la condition que le château de Chaumont serait
démoli. Quelque temps après Thibaut surprit le châ-
teau d'Amboise. Mais en décembre i iSy il fut obligé
de le rendre au roi d'Angleterre, qui le fit fortifier et
y mit une bonne garnison. Dans le même temps
Louis-le-Jeune ayant déclaré la guerre à ce même roi
d'Angleterre Henri II, les trois frères, Henri comte
de Champagne , Thibaut comte de Blois , et Etienne
de Sancerre, beau-frère du roi Louis, s'emparèrent de
Chaumont, et y bâtirent une nouvelle forteresse ; mais
Henri, étant promptement accouru avec tout ce qu'il
avait de troupes en Touraine, l'emporta d'assaut et le
remit entre les mains de Hugues d'Amboise, qui ^ pour
venger la mort de son père , ne cessa de faire la guerre
au comte de Blois jusqu'à la paix, qu'amena enfin le
mariage de Sulpice , son fils aîné , avec Isabelle , fille
aînée de Thibaut. Hugues II avait épousé Mahaud,
fille de Jean I" de Vendôme et de Richilde de Lavar-
din , dont il eut : i° Sulpice; 2° Jean ; 3** Guillaume,
AMBOISE. 9
chanoine de Chartres; 4"* Isahelle, comtesse d'An-
goulême ; 5" Agnès , femme du comte d'Evreux ;
6° Denise. On y ajoute une Marguerite mariée à Re-
naud , seigneur de Berrie dans le Loudunois.
Sulpice III , seigneur d'Amboise , de Chaumonl et
deMontrichard , fut un des premiers qui quittèrent le
service du roi d'Angleterre , comte de Touraine , pour
suivre le parti de Philippe-Auguste. En i ioi il se
jeta dans Châteauneuf par ordre du roi , empêcha par
cette démarche les courses de la garnison anglaise qui
tenait le château de Tours, et conserva le pays sous
l'obéissance du roi de France. D'IsabeMe de Blois,
comtesse de Chartres, son épouse, il eut deux enfans,
Hugues, mort jeune, et Mathilde qui suit.
Mathilde, dame d'Amboise, de Montrichard et de
Chaumont, comtesse de Chartres, fut mariée deux
fois. La première à Richard , vicomte de Beaumont ,
et la seconde à Jean, comte de Soissons; mais elle
n'eut point d'enfans de ses deux maris , et mourut en
1256, laissant sa succession paternelle à Jean de
Berrie, son cousin-germain.
Jean de Berrie, premier du nom, chevalier, devint
seigneur d'Amboise, de Chaumont, de Montrichard,
de Lirtieray, par la mort de Mathilde d'Amboise.
Nous avons dit qu'une Marguerite d'Amboise avait
épousé un Jean de Berrie. L'abbé de Marolles prétend
au contraire que ce fut Jean d'Amboise qui épousa
Marguerite de Berrie. D'après lui la ligne directe
n'aurait pas été interrompue. Mais comme il n'ap-
porte point de preuves, la question reste au moins
lO HISTOIRE DE TOUR AINE.
indécise. Jean, devenu seigneur d'x4mboise, affran-
chit les habitans de Limeray de la taille et de quelques
autres droits onéreux moyennant quarante livres de
rente, et il en donna ses lettres au mois de décembre
1 256. Il mourut dans son château de Berrie le 6 juillet
j 274, laissant d'Agnès sa femme , entre autres enfans,
Jean qui suit.
Jean de Berrie , deuxième du nom , seigneur d'Am-
boise , de Chaumont , de Montrichard, de Bléré et de
Berrie, prit en 1296 qualité d'héritier ah intestat à^i
Sulpice III d'Amboise. Il eut de Jeanne de Charost
son épouse trois fils, Pierre P% Hugues, qui a fait la
tige des seigneurs de Chaumont, et Gilbert, grand-
archidiacre de Tours en i3o4-i3i2.
Pierre T', seigneur d'Amboise, de Montrichard et
de Bléré, prit alliance avec Jeanne dame deChevreuse
et de Maurepas , qui était veuve en i?>ii. Il en eut
cinq fils : Jean , mort au berceau , auquel on donna
ce prénom en l'absence du père , qui avait prescrit
qu'on le nommât Ingelger, en mémoire de celui qui
avait rapporté d'Auxerre les reliques de Saint-Martin.
Cette faute fut réparée à la naissance du second fils,
Ingelger qui suit; 3° Anceau, seigneur de Civray et
de Bléré; 4" Guy; 5° César, chanoine et chantre de
l'église de Tours , mort le 4 mai 1 36 1 .
Ingelger, seigneur d'Amboise, de Montrichard, de
Bléré, de Civi-ay, de Gamaches, de Berrie et de Che-
vreuse, surnommé le Grand, fut fait prisonnier à h
bataille de Poitiers en 1 356. Depuis ayant été déli-
vré, il fut au nombre des cautions du roi Jean en
AMBOISE. 1*1
i36o pour faire rendre TAngoumois au roi d'Angle-
terre. Les frères Sainte-Marthe disent qu'il fut marié
deux fois, la première avec Marie de Flandre, dame
de Nesle, de Mondoubleau, de Ruremonde, etc., et
la seconde avec Isabeau , fille de Louis II , vicomte de
Thouars, avec laquelle il acheta une partie de la terre
de la Fertë-Bernard , de Jean comte d'Anjou et du
Maine, vente confirmée par Philippe de Valois, qui,
en i344? céda à Ingelgerle reste de la seigneurie. De
sa première femme il n'eut que deux filles, Jeanne,
femme de Charles de Trie comte de Dammartin , et
Marguerite, mariée à Pierre de Sainte-Maure. De la
seconde il eut Pierre II qui suit , Ingelger, seigneur
de Roche - Corbon , et- deux filles. Ingelger épousa
Jeanne, fille de Pierre de Graon, dont il eut Louis
d'Amboise, que l'on verra après le suivant.
Pierre II, vicomte de Thouars, comte de Bonon,
seigneur de Mauléon , de Renais, du Brandon, de Châ-
teau-Gonthier, d'Olonne, de Talmont , de l'Ile-de-
Rhé, de Rléré et de Montrichard , servit utilement
Charles VII dans les guerres que ce prince eut à sou-
tenir contre les Anglais. Il fonda les cordeliers d'Am-
boise et mourut en i4i6. Il avait épousé en premières
noces Jeanne, fille de Jean II, vicomte de Rohan ,
dont il n'eut point d'enfans , non plus que de sa seconde
femme Isabeau, fille de Bertrand Goyon de Matignon
et de Marie de Rochefort.
Louis d'Amboise, unique de ce nom, fils aîné d'In-
gelger et de Jeanne de Graon , hérita de tous les biens
de Pierre II, son oncle paternel. Nous avons parlé au
12 HISTOIRE DE TOURAINE.
huitième livre fie ses intrigues , de ses complols à la
cour de Charles VII, ainsi que de la peine de mort
prononcée contre lui. Ses biens furent confisqués par
suite de cette condamnation, mais ils lui furent ren-
dus quelque temps après , à l'exception cependant des
villes d'Amboise et de Château-Gonthier, qui demeu-
rèrent annexées à la couronne par lettres du mois de
septembre i434. Louis fut ainsi le dernier seigneur
d'Amboise. Il fut marié deux fois : la première à
Jeanne , fille de Jean III sire de Rieux , et la seconde
avec Nicole, fille de Jean de Chambre et de Jeanne
Chabot, dont il n'eut point d'enfans ; mais la pre-
mière lui donna trois filles : i" Françoise, mariée le
21 juillet i43i à Pierre duc de Bretagne; 2° Jeanne,
première femme de Guillaume d'Harcourt , comte de
Tancarville; 3** Marguerite, épouse de Louis, fils de
ce même Georges de La Trémouille que son père ,
Louis d'Amboise , avait enlevé à Chinon sous les yeux
du roi. Elle eut en dot la principauté de Taimont,
avec les seigneuries de Berrie, de l'île de Rhé,
d'Olonne, de Marennes, etc. Après la mort de son
père elle recueillit tout l'héritage, ses deux autres
sœurs n'ayant point laissé d'enfans.
Il y a eu trois autres branches de la maison d'Am-
boise dont il n'entre point dans notre plan de faire
mention. Ce sont celles de Chaumont, d'Ambijouxet
de Bussy, toutes les trois du nom d'Amboise. Cette
maison portait d'or à trois pals de gueules.
La ville d'Amboise, peu considérable dans son
principe, commença a prendre quelque accroissement
AMBOISE. l3
SOUS le gouvernement des comtes d'Anjou. Les sei-
gneurs du nom d'Amboise l'agrandirent encore; mais
ce fut principalement sous les règnes de Charles VII ,
de Louis XI et de Charles VIII, qu'elle parvint au
degré de population oii elle est aujourd'hui. Ce der-
nier roi, qui y était né en 1470, avait intérieurement
le désir d'y établir son séjour. Aussi, voulant rendre
le château d'Amboise le plus magnifique de ceux qui
existaient alors, il avait appelé près de lui les meil-
leurs artistes de l'Italie; mais sa mort prématurée fit
évanouir ce projet. Il n'y eut d'achevé que la chapelle
et les deux tours qui s'élèvent depuis le pied du roc
jusqu'au corps -de -logis nommé les Sept -Vertus.
Louis XII, son successeur, fit faire la grande galerie
et le balcon qui regarde du côté de l'ancien couvent
des Minimes. On dut ensuite à François P^ l'appar-
tement du roi et de la reine. Enfin , la superstitieuse
Catherine de Médicis , veuve de Henri II, fît construire
à côté une chambre soutenue par quatre piliers de
pierre, et qui n'avait qu'une simple ouverture sans
plancher , ce qu'elle fit pour éviter la prédiction d'un
astrologue qui l'avait avertie de craindre la chute
d'un grand édifice.
L'institution de l'ordre de Saint-Michel à Amboise
par Louis XI, le i^^ août 1469, et la conjuration
qui y éclata en 1 56o , ont trouvé leur place dans le
cours de notre histoire.
Depuis la réunion de la ville d'Amboise h la cou-
ronne, le château eut des gouverneurs particuliers
qu'on nomma d'abord cliâtclains, et ensuite capi-
l4 HISTOIRE DE TOTJRAINE.
laines ; mais leur nomenclature n'offre pas assez d'in-
térêt pour trouver place ici. Nous dirons seulement
que Gaston de France, duc d'Orléans, frère unique
de Louis XIII, ayant eu la ville et le château
d'Amboise en augmentation d'apanage , sur la fin de
l'année 1629, il y mit pour gouverneur le marquis
de Puy-Laurens; mais Gaston s'élant brouillé avec
son frère, au mois de février i63i, le château fut
assiégé le 3o mars par ordre du roi, pris, et remis
le 5 avril suivant entre les mains du maréchal de
Chatillon, qui en donna le commandement au sieur
de Saint-Règle.
Le gouvernement d'Amboise avait aussi un lieu-
tenant de roi, place qui fut créée le 1" avril 1639
en faveur de Laurent Le Blanc de La Vallière, troi-
sième du nom, et dont fut également pourvu son
fils, Laurent IV, père de la célèbre duchesse de
La Vallière.
Amboise, baronnie., avait deux chatellenies, deux
prévotés, et cent quarante-six fiefs qui en relevaient.
Son bailli de robe-courte a subsisté depuis la réunion
de la ville à la couronne jusqu'en i5i6 que le roi y
établit un bailli de robe-longue. Nous avons déjà dit
comment ce bailliage fut supprimé en 1764 lors de
l'érection d'Amboise en duché-pairie. On y comptait
une élection , un grenier à sel , et une maîtrise des
eaux et forêts.
La ville, à l'exception des faubourgs, 'jouissait de
l'exemption de tailles, en vewti de lettres patentes
données par Loufis XI au mois d'octobre 1482. Les
AMBOISE. l5
fonctions de maire, d'abord électives annuellement,
avaient subi toutes les variations qui depuis Tan-
née 1692 avaient dénaturé le régime municipal.
Le collège pour l'instruction de la jeunesse y fut
fondé par Henri III en 1 678.
Quant au spirituel, il se composait d'une collé-
giale, de deux paroisses, indépendamment de la
succursale de Notre-Dame, à Textrémité nord des
ponts, fondée en i358, de deux chapelles, d'un
hôtel-Dieu et de trois monastères.
La collégiale placée dans l'intérieur du château, et
dédiée d'abord à Notre-Dame, le fut ensuite à saint
Florentin , après que le corps de ce saint y eut été
apporté par Foulques-Nerra. Elle était, dans le prin-
cipe, desservie par six chanoines et un chevecier,
fondés par ce même comte d'Anjou , et par Sulpice
de Buzançais, seigneur de la tomMl'Amboise. Dans
ces derniers temps le nombre en était de dix a la col-
lation du roi, ainsi que le doyenné institué en 1390
par le pape Boniface IX, à la prière d'Ingelger; mais
depuis l'érection d'Amboise en duché-pairie, la colla-
lion de tous les bénéfices avait été dévolue au titu-
laire de ce duché, qui n'en a compté que deux, le
duc de Choiseul et le duc de Penthièvre.
L'église paroissiale de Saint-Denis fut bâtie par
saint Martin , oui y plaça pour euro un prêtre nommé
Marcellus. C'e^ ce que nous apprend le testament de
saint Perpète,.qui légua à cette église un calice d'ar-
gent, et une croix dariSs tequelle il y avait des reliques
.^
l6 HISTOIRE DE TOURAIJNE.
de saint Denis. Il en dépendait une chapelle dédiée
à saint Simon.
Le duc de Choiseul avait donné à l'église de Saint-
Denis un cimetière dans lequel il s'était réservé une
place particulière, séparée de l'enceinte commune. Un
monument en marbre y avait d'avance été érigé par ses
soins, sans beaucoup de faste, sinon dans les inscrip-
tions. Ses restes y avaient été déposés ; mais à cette
époque, où l'asile même de la mort n'était pas res-
pecté, ce tombeau fut détruit ainsi que tant d'autres
beaucoup plus respectables. Cependant, en 1802, ses
débris ayant été retrouvés , il fut rétabli aux frais d'un
habitant d'Amboise, le sieur Perrault, reconnaissant
des bienfaits de l'ex-ministre , cause première de sa
fortune.
La chapelle de Saint-Florentin , dans l'intérieur de
la ville, fut érigée en paroisse l'an io44î ^n faveur
seulement des nobles et de leur suite , et en outre pour
tous les étrangers pendant l'espace d'une année à l'é-
gard de ces derniers.
Cette église renferme un monument assez curieux,
surtout quand on en connaît l'allégorie. Placé d'abord
dans l'église du prieuré de Bon-Désir près le château
de la Bourdaisièrc, construit par Francjois 1" pour la
famille Babou , il en fut retiré lors de la suppression
de ce prieuré et transféré dans la collégiale du châ-
teau d'Amboise, d'où il est passé en 1 802 dans l'église
paroissiale de Saint -Florentin, où on le voit encore
aujourd'hui dans la nef en face de^k porte.
C'est un
AMBOISE. l'y
sarcophage ouvert par le devant , laissant voir le Christ
étendu mort. Sur le derrière sont sept figures debout,
en costume oriental, au nombre desquelles sont quatre
femmes. Elles représentent Nicodême à la tête du
tombeau ; au pied Joseph d'Arimathie ; à gauche on
remarque la Vierge, saint Jean-Baptiste et une des
saintes femmes. A la gauche de saint Jean sont les
deux autres saintes femmes, en tout huit figures, y
compris celle du Christ. Les quatre figures de femmes
sont les portraits fort ressemblans de Marie Gaudin,
épouse de Philbert Babou de La Bourdaisière , et de
ses trois filles, qui furent successivement maîtresses
de François 1*'. Celui-ci à sa haute stature est parfai-
tement reconnaissable dans le Joseph d'Arimathie, et
le Christ est le portrait non moins ressemblant de
Philbert Babou, pour lequel ce tombeau fut exécuté.
Il est en terre cuite et peinte, ainsi que les autres
figures, qui sont de grandeur un peu plus que natu-
relle. Peut-être dans le Nicodême et le saint Jean a-t-
on voulu représenter les deux fils de Babou , Jacques
et Philbert, qui furent l'un après fautreévêques d'An-
goulême et doyens de Saint-Martin. Il esta croire que
ce monument fut l'ouvrage de quelques-uns de ces
artistes italiens que ramenèrent avec eux Charles VIII
et François I", et qui furent les meilleurs fruits de
leurs désastreuses guerres d'Italie.
Auprès de ce tombeau est une autre figure prove-
nant également de Bon -Désir, et qu'on dit être celle
d'Agnès, épouse de Victor Gaudin, père de l'épouse
de Philbert Babou. D'autres pensent, ce qui est plus
3. 2
ï8 ' HISTOIRE DE TOURAINE.
probable , que c'est celle de la dame Babou elle-même.
Cette figure en marbre blanc représente une femme
nue près de rendre le dernier soupir; elle tient de la
main gauche un linceul, qui, se repliant sous son
cou , vient en passant sous le coude cacher le ventre
et une partie des cuisses, laissant les jambes à décou-
vert. L'humidité du roc où dans l'origine ce marbre
était placé l'a empreint d'une teinte verdâtre qu'il
conserve toujours, mais qu'on pourrait peut-être faire
disparaître.
Il y avait dans cette même église de Bon-Désir, au
dessus du tabernacle, une Vierge de bronze en ronde-
bosse du poids de sept cents Uvres, ouvrage précieux
coulé à Florence. Cette Vierge tient l'Enfant Jésus et
n'est vue qu'à hauteur de ceinture. Elle est portée sur
un nuage soutenu par des têtes de chérubins. Les
bords de la draperie sont dorés : mais le reste de la
figure conserve la couleur du métal. Depuis la sup-
pression de Bon-Désir, ce monument avait été placé
au haut du rond-point de l'église de Saint-Florentin,
et on lisait au bas cette inscription : « Henricus II,
« religionis christianœ protector piantissimus, in me-
V moriam suse devotœ visitationis , hue me apportari
« curavit anno i555 die 22" martis. »
L'Hôtel-Dieu d'Amboise est peut-être le premier en
France qui ait été gouverné par des sœurs hospita-
lières. Mathilde, dame d'Amboise, par ses lettres du
12 juillet 1243, leur accorda le droit d'usage et de
chauffage dans sa forêt, ainsi que le droit de pêche
dans la Loire et l'Amasse, avec exemption de dîmes et
I
AMBOISE. 19
faculté d'acquérir toutes sortes d'héritages dans ses
fîefs sans payer aucuns droits.
Les Cordeliers furent fondés en i4t2 par Pierre
d'Amboise, deuxième du nom, qui leur accorda de
même le droit d'usage et de chauffage dans sa forêt.
Plusieurs seigneurs de la même famille y ont eu leur
sépulture. On voyait dans le choeur, derrière le grand
autel , le tombeau de Charles d'Amboise , seigneur de
Chaumont, mort à Tours le 22 février i48i. A côté
du chœur, dans la chapelle de Saint-Jean, était celui
de Charles II d'Amboise, grand-maître, maréchal et
amiral de France.
Dans la chapelle de Notre-Dame-de-Pitié était le
tombeau de Guillaume Gouffier, père du trop célèbre
amiral Bonnivet. Sa base en pierre était couverte
d'une table de marbre noir, sur laquelle était éten-
due la figure en marbre blanc d'un chevalier revêtu
de son armure, ayant derrière lui son casque posé sur
un carreau , et à ses pieds un griffon ailé. On y lisait
cette épitaphe :
« Cy gist feu messire Guillaume Gouffier, seigneur
« de Boisy, de Bonnivet et d'Oyron, premier cham-
« bellan du roy Charles VII , et depuis gouverneur du
«fils du roy Charles YIII, lequel trespassa en cette
«ville d'Amboise le vingt- troisième jour de may
« 1495. »
A la tête de ce tombeau s'élevait une pyramide de
marbre noir posée sur une base de pierre et couron-
née d'un cœur de bronze doré. Ce monument plus
récent avait été érigé à la mémoire de Henri de Gouf-
2.
no HISTOIRE DE TOURAINE.
fier, marquis de Boisy, tué au combat de Saint-Iber-
querque le 24 août i63g. On y lisait une longue ëpi-
taphe de quarante-trois lignes en style lapidaire, et
eu outre deux autres épitaphes en vers, dont nous
ne rapporterons que la dernière et la meilleure, signée
Coslardeau , que nous croyons être le même que Julien
Coîardeau , assez bon poète du temps , auteur d'une
description en vers du château de Richelieu.
Je compte dans ma race uue suite d'aïeux
Du vieux sang de Gouffier, souverains d'Aquitaine.
Ma vertu me donnait une preuve certaine
D'être né d'une tige illustre en demi-dieux.
Mon épée a gravé ma gloire en mille lieux :
Tous les peuples du Rhin, de Flandres, de Lorraine,
Savent bien si je fus soldat et capitaine ,
Dign c du lit d'honneur où je dors glorieux.
La valeur et l'adresse, à mon sang naturelles,
N'ont jamais soutenu ni combats ni querelles ,
Ni choc des ennemis que mon bras n'ait vaincu.
J'ai bravé la fortune et surmonté l'envie.
Passant, que veux-tu plus? Vois comme j'ai vécu.
Et juge par ma mort de l'éclat de ma vie.
Dans le caveau de la chapelle de Saint-Jean était
le tombeau d'une Charlotte de Rostaing , qui , selon
son épitaphe , était fille d'honneur de Louise de Lor-
raine , reine de France ; ses armes sont une roue d'or
en champ d'azur écartelé d'or.
On a vu dans le corps de notre Histoire l'époque de
la fondation des minimes d'Amboise, faite par le roi
Charles VIII à la recommandation de Louis XI son
père. C'est ici le lieu de parler d'un ancien monument
AMBOISE. tÀ I
auquel on a donné le nom de Greniers de César, parce
que tout ce qui porte quelque caractère d'ancienneté
est attribué sans examen au siècle de ce conquérant
des Gaules : mais tout ce que Ton raconte au sujet de
ces greniers n'est fondé que sur la tradition populaire,
toujours fort suspecte. Une seule chose , très-douteuse
encore , pourrait donner quelque vraisemblance à
cette tradition. Ce sont les traces d'un ancien camp
romain, qu'on a prétendu reconnaître sur la plate-
forme où ces greniers ont été creusés. Mais le camp
lui-même est chose assez problématique. En admet-
tant son existence, ce serait de là qu'on serait des-
cendu dans ces Greniers, dont nous allons essayer de
donner la description.
Ce sont deux édifices taillés dans le roc , ayant
chacun quatre étages , au miheu desquels est un es-
calier en pierre de cent vingt marches communiquant
de l'un a l'autre. Dans le premier se trouve une cave
qui a deux cent dix pieds de long sur cinquante-huit
de large , et au-dessus trois greniers l'un sur l'autre
voûtés en pierre, carrelés, et renduits non pas en
ciment, mais avec une couche de mortier fin tel que
celui dont on se servait autrefois pour appliquer les
peintures à fresque. Au plus haut étage sont quatre
cuves taiUées dans le roc, revêtues de briques cimen-
tées en dedans , ayant environ quarante pieds de pro-
fondeur sur neuf de largeur, et se terminant en une
voûte qui se ferme avec une pierre de deux pieds et
demi de diamètre. Le second édifice est pareil au pre-
mier^ excepté qu'on n'y trouve point de cuves. A
0
22 HISTOIRE DE TOURAINE.
l'extrémité de ces deux greniers , au midi , on voit
deux tours rondes également creusées dans le roc en
forme de puits. Elles sont partagées dans leur éléva-
tion par des divisions qui font que le faux ciel de la
première sert de plancher à la seconde, et ainsi des
autres. Quelques personnes ont imaginé que ces tours,
enduites du même mortier que les caves , étaient des
espèces de foudres propres à contenir des approvi-
sionnemens de vin : mais il resterait à savoir par oîi
on aurait pu introduire et sortir des vaisseaux pour
en extraire le vin. Ces tours n'étaient donc que des
entonnoirs ou conduits , par lesquels on jetait le blé
déposé sur la plate-forme pour l'emmagasiner dans
les greniers, et l'ouverture qui se trouve au milieu
des planchers ou étages de chacune de ces deux tours
vient à l'appui de cette opinion et détruit victorieu-
sement la première.
Quoi qu'il en soit , un pareil travail a dû être long
et dispendieux , et la conception en est encore plus
ingénieuse que l'exécution n'en est hardie. C'est ce
qui l'aura fait attribuer aux Romains ; et quoique
pourtant rien n'y porte le caractère distinctif de leurs
ouvrages, il serait possible qu'ils eussent entrepris
celui-ci , non pas du temps de César, mais à l'époque
où leur puissance, déjà chancelante dans les Gaules,
leur faisait craindre de s'en voir expulsés , ce qui
arriva en effet en ^So. Malgré la vraisemblance de
ces conjectures, on pourrait sans inconvénient se
ranger au nombre de ceux qui ont pensé que ces tra-
vaux étaient dus aux premiers comtes d'Anjou , pos-
ARTAKNES. 23
sesseurs du domaine d'Amboise , et que c'était le lieu
où ils déposaient ies provisions du château et de la
garnison. I^es nombreuses forteresses élevées par
Foulques -Nerra prouvent qu'il était capable de pa-
reilles entreprises.
Le monastère des Ursulines ne datait que de Tan-
née 1626.
Nous avons parlé des monnaies que Clovis fit frap-
per à Amboise lors de son entrevue avec Alaric en
5o4. On assure qu'elles étaient d'or pur, et qu'elles
portaient sa tête d'un côté avec une croix ancrée sur
le revers. Mais ces monnaies ne sont pas venues jus-
qu'à nous. Nous ne connaissons que celles qui furent
fi'appées par les monétaires du règne de Charles-Ie-
Chauve. Ce sont des oboles d'argent où on lit du côté
de la tête, soit Amhacia vic^ soit Ambacia castrum,
soit tout simplement Ambacia. Le revers offre l'em-
preinte d'une croix, et autour le nom du monétaire.
On y on distingue trois, savoir: Reicisilus , Dom^
macliarus et Sabellicus.
ARÏANNES, BARONNÎE.
Artannes (^Artannœ) est un bourg situé à quatre
lieues de Tours au midi , à la gauche de l'Indre. C'était
une dépendance de l'archevêché de Tours. Le château
anciennement bâti par les archevêques était pour eux
un lieu de plaisance où ilsaimaicnt à se retirer. Il avait le
titre de baronnie ainsi que toutes les grandes seigneu-
ries dépendantes de l'archevêché qui relevaient immc-
24 HISTOIRE DE TOURAINE.
diatement du roi. Ce fut Henri II , roi d'Angleterre ,
comte d'Anjou et de Touraine, qui établit que les ar-
chevêques, évêques et autres seigneurs relevant de lui
tiendraient leurs terres à titre de baronnie, titre qui
leur donnait plusieurs privilèges particuliers, entre
autres celui de pouvoir accorder la grâce à ceux qui
avaient été condamnés au simple bannissement. Ce
privilège fut aboli lors de la réformation de la cou-
tume de Touraine en iSSg. Quoique nous ne con-
naissions d'autres seigneurs*^\ç.^tte baronnie que les
archevêques de Tours, il paraît ejj^endant qu'il y avait
en Touraine une famille qui en portait le nom ; car
nous voyons que, vers i43o ou i436, un Jean d'Ar-
tannes épousa Imblette, fille de Jean de Voyer, pre-
mier du nom, seigneur de Paulmy.
Il dépendait de la baronnie d'Artannes une châtel-
lenie et trente seigneuriëisou fiefs rendant hommage
à l'archevêque, qui y avait sa justice exercée par un
bailli, un procureur fiscal et un greffier.
AZAY, VICOMTE.
Le nom d'Azay est propre à quatre communes de
la Touraine : i ** Azay-le-Vicomte ou le Cliétif , Azia-
cum-Captivum ; 2" Azay-le-Rideau , Aziacum ' Ri-
delli; 3° Azay - sur - Cher , Aziacumsuprà-Carum ;
4° Azay-le-Féron , AziacurmFjirronu, Ces deux der-
niers étaient des terres non titrées sur lesquelles nous
n'avons rien à dire. Nous ne nous occuperons que des
deux premiers.
AZAY-LE-HIDEAU. Îi5
Azay-le-Chëtif ou le Chadieu est situe sur la rive
gauche de l'Indre à deux lieues et demie nord-ouest
de la ville de Loches. Il avait le titre de vicomte ; mais
nous ignorons à quelle époque en remonte l'érection.
Cette terre a long-temps appartenu à la famille, de
Carreleu , et nous voyons qu'en i3i2 un Hervé de
Carreleu en était seigneur. Si nous remontons plus
haut, un titre de l'abbaye de Marmoulier nous prouve
qu'en I2i3 un Guillaume d'Azay fut le premier des
baillis de Touraine institués par Philippe-Auguste. Il
est assez probable que ce Guillaume était seigneur
d'Azay-le-Chétif , puisqu'à la même époque Hugues
Ridel l'était d'Azay-le-Rideau.
AZAY-LE-RIDEAU.
Azay-le-Rideau est une petite ville également située
sur l'Indre à cinq lieues au-dessous de Tours, sur la
route de Chinon. Ce n'était qu'une simple châtellenie,
mais qui datait d'une époque assez reculée. Cepen-
dant la première connaissance que nous ayons de ses
seigneurs châtelains ne remonte qu'à Hugues Ridel ou
Rideau, que nous voyons figurer en iai3 au nombre
des chevaliers bannerets de la Touraine institués par
Philippe- Auguste, ce qui indique une famille déjà
ancienne à cette époque, et qui paraît avoir donné à
cette ville le nom qu'elle porte encore. Autrefois en-
tourée de murs et fortifiée, elle devait être plus im-
porlante si nous en jugeons par les différens sièges
26 HISTOIRE DE TOURAINE.
qu elle a soutenus. Les Bourguignons s'en emparèrent
sous Charles VI, et elle fut reprise par le dauphin en
i4i8, ainsi qu'on l'a vu dans le cours de notre His-
toire.
' Jean Berthelot, conseiller du roi, maître de la
chambre aux deniers , était seigneur d'Azay-le-Rideau
sous le règne de Louis XI. Il épousa Perrinelle Tho-
reau, dont il eut entre autres enfans Gilles qui suit.
Gilles Berthelot , seigneur d'Azay-le-Rideau , con-
seiller secrétaire du roi et maître de la chambre des
comptes de Paris à la place de son père , fut maire de
Tours en iS^o après Guillaume de Beaune. Ceux de
sa famille avaient leur sépulture dans la paroisse de
Saint-Denis , et dans une chapelle particulière qu'on
nommait la chapelle des Berthelot. Ce fut lui qui fît
démolir le vieux château d'Azay et en fît reconstruire
un plus vaste et plus beau. Ce château, bâti au milieu
d'une île formée par l'Indre, est, par son site et sur-
tout par son architecture , l'un des plus pittoresques
et des plus remarquables de ceux qu'offre encore la
province.
Antoine Raffin, dit Potton, seigneur d'Azay-le-Ri-
deau , de Beaueaire , etc. , capitaine de cent archers de
la garde du roi, gouverneur de Cherbourg, servit
avec distinction sous François I". Il fut nommé de-
puis gouverneur du dauphin François à la place de
d'Urfé , qui avait été envoyé ambassadeur à Rome.
François Raffin, seigneur d'Azay-le-Rideau, épousa
Nicole Leroy de Chavigny, dont il n'eut qu'une fille
qui fut mariée à Guy de Lesignem , dit de Saint-^
BAUÇA.T. a 7
Gelais , seigneur de Lan sac , auquel elle porta en dot
la seigneurie d'Azay-le-Rideau.
Guy de Lesignem fut seigneur d'Azay du chef de
sa femme, dont il eut Artus qui suit.
Artus de Lesignem, seigneur de Lansac, seigneur
d'Azay-le-Rideau, épousa Françoise, fille de Gilles de
Souvré marquis de Courtenvaux , gouverneur de Tou-
raine et du dauphin depuis Louis XIII. De ce mariage
naquit une fille qui épousa le marquis de Vassé.
......... marquis de Vassé fut seigneur d'Azay-
le-Rideau du chef de sa femme, qui lui apporta cette
terre en dot.
Elle est passée depuis dans les maisons de Cosse ,
de Courdemanchc et de Biencourt, qui la possède
actuellement.
BAUÇAY, BARONNIE.
Bauçay ou Baucé {Baucœum)^ commune située à
une lieue et demie de Loudun , a donné son nom à
une famille assez illustre d'où sont sortis quelques
guerriers qui ont signalé leur bravoure en différentes
occasions. Hugues I" fut chevalier banneret de Tou-
raine sous Philippe-Auguste. Hugues III , dit le Grand,
accompagna Charles de France, frère de saint Louis,
comte d'Anjou , roi de Naples, de Sicile et de Jéru-
salem, dans son voyage d'Italie , et se trouva à la jour-
née de Bénévent où Mainfroy, prince de Tarente,
qui avait usurpé la couronne de Naples, fut battu et
tué le 26 février 1 1^^, On trouve le récit de cette
H^^-
HS HISTOIRE DE TOURAINi:.
bataille dans une lettre que Hugues III écrivit en ce
temps aux chevaliers et gentilshommes de Touraine
et d'Anjou. Il se croisa depuis avec Guy son frère en
1268, lors de la seconde expédition de saint Louis.
Après la mort de ce monarque , tous les deux furent
tués en 1270 dans un combat contre les Sarrasins,
leur valeur les ayant emportés trop avant dans les
rangs ennemis. Guillaume Guyart en parle ainsi dans
son Roumans de la branche aux réaux lignages.
Hue et Guy de Baucé deux frères ,
Avec eulx ly filz et ly père
De Préciguy qui les suy virent ,
Entre Sarrasins s'embattirent
Bruyans comme foudre et acerres.
Hugues IV, fils de Hugues-le-Grand, assista au sacre
de Guillaume Lemaire, évêque d'Angers en 1290. Il
n'eut qu'une fille , mariée à Charles d'Artois , prince
du sang royal , qui fut fait prisonnier à la bataille de
Poitiers en i356. Mais après la mort de Louis d'Ar-
tois , fils de Charles , cette baronnie retourna à la
famille du nom de Bauçay, éteinte dans le seizième
siècle. Elle était passée depuis, pour les deux tiers
seulement , dans la maison de Richelieu.
BEAULIEU, BARONNIE.
Beaulieu (^Bellilocus) est une petite ville qui n est
séparée de celle de Loches que par un petit bras de
l'Indre qu'on traverse sur un pont au milieu duquel
était une porte fortifiée formant la limite des deux
BEA.ULIEU. ag
territoires. Cette proximité eût dû en opérer la ré-
union, si l'antipathie qui de tout temps a régné entre
les habitans des deux communes n'y eût pas apporté
des obstacles qu'on n'a pas assez pris soin de surmon-
ter; car si , en 1 790 , on eût fermé l'oreille à de vaines
clameurs, la fusion serait probablement faite depuis
long-temps , et peut-être de deux villes sans impor-
tance fût-on parvenu à en faire une seule plus digne
de ce nom.
Cette baronnie ayant de tout temps été possédée
par les religieux bénédictins de Beaulieu, nous ren-
verrons à la quatrième partie pour ce qui concerne
cette abbaye.
C'est à elle que le Beaulieu d^aujourd'hui doit son
origine et son accroissement. On sait qu'elle fut fon-
dée vers l'an 1010 par Foulques-Nerra. Cependant,
et sans se perdre dans les ténèbres des temps celti-
ques , on peut croire que même avant cette fondation
il existait déjà dans ce lieu une réunion d'habitations,
puisque Foulques-Nerra dans sa charte le désigne
sous le nom de Burgum, On croit même que c'était
en cet endroit que le duel s'exécutait toutes les fois
qu'il était ordonné , ce qui l'avait fait appeler Belli
locus , lieu du duel, et non Bellus locusj ce lieu ne
pouvant être renommé pour la beauté de son site. Mais
ceci n'est qu'une simple conjecture, et l'on n'en est pas
moins fondé à croire que sans l'abbaye et sans les pri-
vilèges particuliers qu'en sa considération Foulques-
Nerra accorda aux habitans, BeauHeu fût resté comme
3o HISTOIRE DE TOURAINE.
tant d'autres un village sans aucune importance. De
serfs qu'ils étaient, les habitans de Beaulieu ayant été
affranchis par le comte d'Anjou, ils purent se livrer
à l'agriculture et au commerce avec la certitude que
leur héritage passerait à leurs enfans. Telle fut la cause
première de leur prospérité. Ils éprouvèrent peu de
vicissitudes jusqu'au commencement du quinzième
siècle. A cette époque de la faction des Armagnacs et
des Bourguignons , les Anglais étaient entrés en
France, appelés par des princes français, assez aveuglés
par l'esprit de parti pour invoquer les secours de
l'étranger ; mais ces mêmes princes, les ducs d'Orléans
et de Berri, ayant fait leur paix avec le roi , l'inter-
vention des Anglais leur devenait inutile. Ceux-ci,
furieux de manquer une si belle occasion de déchirer
le royaume, s'en vengèrent par le pillage de tout le
pays qui se trouvait sur leur passage. Beaulieu sans
défense se vit en proie à l'excès de leur brigandage.
Vainement les moines tentèrent de se fortifier dans
leur abbaye, elle fut prise et incendiée. La ville
éprouva le même sort. L'église fut à peine sauvée de
la destruction : mais le trésor, les vases sacrés, les
ornemens , tout fut pillé comme en pays ennemi , et
l'abbé fut emmené prisonnier en Angleterre , où il
était encore détenu plus de quinze ans après. Tels
étaient pourtant les auxiliaires que les factions cher-
chaient à se donner tour à tour.
Ce désastre fit sentir, mais un peu tard, la néces-
sité de mettre à l'avenir Beaulieu à l'abri d'un coup de
BEà.ULIEU. 3l
main; en conséquence on Fentoura d'une forte mu-
raille, qui fut en outre défendue par trois portes gar-
nies chacune de leur boulevard.
Agnès Sorel avait son hôtel àBeaulieu, oîi elle sé-
journait assez habituellement lorsque Charles VII
n'habitait pas le château de Loches. Il n'y était connu
que sous le nom de maison de la reine. Il devint par
la suite la demeure des capitaines de la ville de Beau-
lieu, et lorsqu'ils fuirent supprimés en 1764 on en fît
une caserne de cavalerie.
En 1 44o Charles VII mit à Beaulieu une garnison
chargée de s'opposer aux courses que faisaient dans
tous les environs les troupes qui occupaient le châ-
teau de Loches, que Chaumont, gouverneur de la
province, avait livré aux partisans du dauphin Louis,
alors en rébellion ouverte contre son père. Cette gar-
nison était commandée par Jean I" de Voyer, vicomte
de Paulmy.
Ce fut aussi à Beaulieu que se tinrent les confé-
rences d'après lesquelles la reine-mère, en 1^76,
ramena François duc d'Alençon dans le parti du roi
son frère, et que la paix fut signée entre eux le 10
mai de la même année.
Les murailles de Beaulieu furent détruites vers
l'an 1660.
Cette ville avait anciennement son maire et ses
quatre échevins particuliers. Indépendamment de son
abbaye, on y comptait trois paroisses : Saint-André,
Saint -Laurent et Saint -Pierre, dont la population
pouvait s'élever de deux mille à deux mille deux cents
37. HISTOIRE DE TOURAINE.
ames. Il y avait de plus quatre chapelles , un monas-
tère de religieuses chanoinesses de Saint -Augustin,
fondé par Catherine Boursaut de Viantais, d'où ces
religieuses étaient connues vulgairement sous le nom
de Viantaises.
Les bénédictins étant, comme nous l'avons dit,
barons de Beaulieu, leur justice seigneuriale était
exercée par un bailli, un lieutenant, un procureur de
cour et un greffier.
Nous avons désigné Beaulieu par le nom latin de
Belliiocus, mais nous devons dire qu'on trouve éga-
lement dans les chartes et dans les anciens titres
Belluslocus et Bellilochia.
BERRIE, BARONNIE.
La baronnie de Berrie {Beria ) , située sur la Dive,
commune de Nueil, dans le duché de ïouraine, est
une des plus anciennes seigneuries du Loudunois.
Elle a pris son nom de sa situation dans une grande
plaine ; car suivant Adrien de Yalois dans sa notice
des Gaules , beria signifie plate campagne. La famille
du nom de Berrie a paru long-temps avec éclat dans
notre province.
Béranger I" vivait avant le dixième siècle, du temps
de Corbon des Roches.
Béranger II lui succéda dans le cours du même
siècle. Il est probable qu'il était son fils.
Gauthier de Berrie vivait vers l'an loio, à l'époque
de la mort d'Effroy de Preuilly.
BERRIE. 33
Robert de Berrie est cité clans l'histoire du Maine
comme contemporain de Herbert , surnommé Eveille-
Chien, qui fut comte du Maine de ici 5 à io36.
Centurien de Berrie servit dans les guerres d'outre-
mer vers l'an 1090.
Normand de Berrie était chevalier du temps de
Mathiide , abbesse de Fontevrault.
Pierre de Berrie vivait en iioo, ainsi que son
épouse nommée Sarrasine ; il en eut un fds nommé
Etienne.
Etienne de Berrie fut marié deux fois sans que nous
connaissions les noms de ses deux femmes. Du pre-
mier lit il eut Renaud et Guyot, ce dernier mort sans
lignée, et en outre Marie, femme d'Emery de Brienne.
Du second mariage il n'eut que deux filles , dont Tune,
Madeleine, fut religieuse à Fontevrault.
Renaud de Berrie eut également deux femmes. La
première fut Marguerite d'Amboise qui le fit père de
Gilbert seigneur de Berrie , de Jean qui hérita de la
seigneurie d'Amboise, de Guillaume qui fut chanoine
de Saint-Martin de Tours , et de Guy dont la destinée
ne nous est pas connue. Du second lit il eut une fille
mariée à Jean de Sazilly. Nous avons vu précédem-
ment de quelle manière ce Jean de Berrie hérita par
sa femme Marguerite des biens de Mathiide sa cousine.
Gilbert eut en partage la seigneurie de Berrie;
mais étant mort sans enfans , elle passa dans la maison
d'Amboise.
Jean de Berrie, deuxième du nom , seigneur d'Am-
boise, etc.
3. 3
34 HfSTOmÉ BK TOUR AINE.
Pierre I*', seigneur de Berrie, d'Amboise, etc.
ïngelger, dit le Grand, seigneur deBerrie, d'Am-
boise, etc.
Pierre II, seigneur de Berrie, d'Amboise, etc.
Louis d'Amboise, seigneur de Berrie , etc. On peut
consulter sur ces cinq derniers leur article à celui de
la ville d'Amboise.
Louis de La Tremouille devint seigneur de Berrie
par son mariage avec Marguerite , qui en hérita après
la mort de son père Louis d'Amboise.
Louis de La Tremouille, deuxième du nom, succéda
à son père dans la seigneurie de Berrie.
François de La Tremouille, fils du précédent sei-
gneur de Berrie , etc.
Louis de La Tremouille , troisième du nom , sei-
gneur de Berrie, premier duc de Thouars, prince de
Tarente et de Talmont.
Cette terre, étant sortie de la maison de La Tre-
mouille, passa ensuite à un conseiller au parlement
de Paris, du nom de Thomas Dreux.
BLÉRÉ, VILLE.
Bléré {Blireius) est une petite ville assez ancienne
située sur le Cher à six lieues sud de Tours et à deux
lieues d'Amboise. Elle avait titre de château et était
renfermée de murs aujourd'hui détruits, qui avaient
été élevés par les soins de Jean Gonsalve d'Ars, alors
gouverneur de son château. On a vu long- temps sa
tombe et ses armes dans la chapelle de Saint - Jean
BLÉRÉ. 35
fondée par lui dans Tëglise paroissiale de la ville dédiée
à saint Christophe.
L'auteur du Traité de la construction du château
d'Amboise n'a point paru embarrassé relativement à
l'origine de la ville de Bléré. Selon lui ce n'était d'a-
bord qu'une forteresse bâtie par un certain Blireius,
qui la donna en dot à Fausta, nièce du comte Ani-
cien par sa fille Placida. De celle-ci serait issue cette
Lupa, dont nous avons déjà parlé, épouse (^Eudoxe,
gouverneur de Tours pour les Romains. Mais il est
facile de voir que tous ces personnages inconnus dans
l'histoire ne sont que de pures inventions de l'auteur,
ou peut-être des fables puisées dans quelque chronique
encore plus ancienne.
Quelle que soit l'antiquité de Bléré, rarement notre
histoire en fait mention. Il en est parlé dans les Ta-
blettes du voyage de Philippe-le-Bel en i3oi ; mais
elles ne nous en apprennent rien , sinon que la reine
et lui couchèrent à Bléré le aS août.
Le pont de Bléré est antérieur à ce voyage d'envi-
ron cent quarante ans. Il était difficile d'en établir
sur la Loire : mais le Cher ayant moins de largeur et
surtout moins de profondeur, Henri II, simultané-
ment roi d'Angleterre et comte de Touraine, en fit
construire plusieurs sur cette rivière; celui de Bléré
fut de ce nombre, et date par conséquent du milieu
du douzième siècle.
Les seigneurs d'Amboise l'ont toujours été de la
ville de Bléré jusqu'à l'époque de la condamnation de
Louis d'Amboise, dont tous les biens furent confis-
3.
36 HISTOIRE DE TOtIRAINE.
quës et acquis à la couronne en i43i. Alors il serait
plus que superflu de rcpc'ter ici ce que nous en avons
dit.
Jean de Sainte-Maure, seigneur de Mongauger et
de Nesle, fils de Pierre de Sainte-Maure et de Mar-
guerite d'Amboise , eut la seigneurie de Blërë pour
son partage dans la succession de Pierre d'Amboise;
mais il la vendit en i446.
Pierre Bérard, chevalier, maître - d'hôtel du roi
Louis XI , acheta d'abord de Jean de Sainte-Maure la
seigneurie de Chissay, et ensuite celle de Bléré par
contrat du i4 juillet i446. Depuis ce temps elle rele-
vait du roi à cause de son château de Tours. Il fonda
dans l'église de Blërë une chapelle et quatre chape-
lains j conjointement avec son épouse Jeanne Chëritëe,
de laquelle il eut trois enfans : Jean, François et Mar-
tine. Celle-ci fut mariëe à Pierre Marques, seigneur
de Chenonceaux, qui, le 3t janvier i46i , fît hom-
mage au roi de cette terre, ainsi que de celles des
Odets, du Coudray et du bourg de Saint-Martin -le-
Beau.
François Bërard, premier du nom, seigneur de
Blërë, de Chissay et de la Croix-de-Blërë , ëpousa
Charlotte de Lahaye déjà veuve, dont il eut Jacques
qui suit, et Jeanne, femme de Charles-le-Breton , sei-
gneur de Chanceaux. Elle ëtait sans doute veuve une
seconde fois en iSo^; car elle comparut à la première
rëformation des coutumes de Touraine comme tutrice
de ses enfans mineurs.
Jacques Bërard, chevalier, seigneur de Blërë, Chis-
BLÉR^. 37
say, les Roches- Saint-George et la Croix-de-Blëré ,
s'allia Madeleine, fille de Guy Cliasteignier, seigneur
de la Roche-Posay , d'où sortirent François qui suit ,
et Reno,qui eut en partage la Croix-de-Blérë , sei-
gneurie particulière voisine, mais indépendante do
celle de Bléré.
François Bërard, deuxième du nom, seigneur de
Blëré, vendit cette terre, en iS^a, à François Chas-
leignier, seigneur de la Roche - Posay , son cousin -
germain, qui la revendit depuis à Gaspard de Schom-
berg son beau-frère. II avait épousé Anne de Ronsard.
Il n'en eut que deux filles, dont l'aînée Louise fut
mariée deux fois , la première à Gilles de Faverolles,
et la seconde à Joseph d'Esparbès.
François Chasteignier, seigneur de la Roche-Posay
et de Bléré, ne posséda pas long -temps celte der-
nière, qui lui fut retirée par son beau-frère Gaspard
de Schomberg.
Gaspard de Schomberg fut à son tour dépossédé
de la même manière par Louise Bérard -, fille aînée de
François II , qui avait épousé Gilles de Faverolles.
Gilles de Faverolles, premier du nom , seigneur de
Faverolles, lieutenant de la vénerie du roi, gouver-
neur du château d'Amboise , devint seigneur de Bléré
du chef de sa femme Louise Bérard. Il en eut Gilles
qui suit, Jeanne, mariée à Charles de Vaumin, et
Philippe, femme du seigneur de la Borde - d'Anet.
Gilles P^ étant mort, sa veuve, comme on l'a dit , se
remaria à Joseph d'Esparbès.
Gilles de Faverolles, deuxième du nom, seigneur de
38 HISTOIRE DE TOURAINE.
Bléré , mestre-de-camp du régiment de Picardie , fut
tué à Pontoise en 1S89, âgé de vingt-quatre ans. Il
avait épousé à dix-neuf ans Péronne, fille de Charles
Kairvel, seigneur de Méré, et de Guyonne de Grève-
cœur. Il en eut Joseph, qui suit, François, mort
jeune, et Charles de Faverolles.
Joseph de Faverolles, seigneur de Bléré, gentil-
homme ordinaire de la chambre du roi, épousa Claude,
fille de Jacques de Rigné. De ce mariage vinrent plu-
sieurs enfans, sur lesquels, pour acquitter les dettes
de la succession, la terre de Bléré fut vendue par dé-
cret. Elle passa depuis ce moment dans la maison de
Bercy, et à l'époque de la suppression des titres et
des droits féodaux, Charles-François de Malon de
Bercy en était propriétaire.
Le conventionnel Tallien est né à Bléré dans le
château de M. de Bercy. Envoyé en mission dans le
département d'Indre-et-Loire, il n'oublia point qu'il
y avait vu le jour. Il y fit preuve de beaucoup de dou-
ceur et de modération, et y fit beaucoup de bien,
parce qu'il y fit le moins de mal possible.
A la source du ruisseau de Fontenai, auprès de
Bléré, commence un canal voûté qui se prolonge
dans une étendue d'environ quatre lieues, puisqu'on
en retrouve encore des vestiges jusque dans la com-
mune de Larçay. Cette voûte, très-élevée dans son
principe, va s'abaissanl jusqu'à la hauteur de deux
à trois pieds, et règne le long du coteau qui domine
la rive gauche du Cher. Quels sont les auteurs, quel
put être le but d'un pareil ouvrage ? C'est ce qu'il
BUzA?fÇAis. 3gi
serait difficile aujourd'hui de déterminer, puisqu'il
n'en est pas même fait mention dans nos auteurs
du moyen âge ni dans les chartriers de la province.
Un canal construit à grands frais, et suivant le cours
d'une rivière, ne pourrait s'expliquer que par l'at-
tention qu'avaient toujours les Romains de se pro-
cui^r des eaux de fontaine, même dans le voisinage
des grands fleuves. Mais où celui-ci portait-il ses
eaux ? rien ne nous annonce que les Romains eussent
un camp ou une station dans les environs de Saint-
Avôrtin. 11 est encore moins prësumable que ce canal
traversât le Cher pour apportera Tours, de six lieues,
des eaux de source qu'on eût facilement trouvées sur
des points bien moins éloignés.
Si Ton eût découvert le lieu où se terminait ce
canal, on eût pu obtenir quelques notions historiques
propres à mettre sur la voie; mais dans l'absence de
ces renseigneraens, le plus sage est sans doute de
s'abstenir de toute espèce de conjectures.
BUZANÇAIS, COMTÉ.
Buzançais (^Buzenciacum) , petite ville située sur
l'Indre à vingt -deux lieues sud de Tours et à cinq
lieues de Châtcauroux. Elle participait à la circon-
scription vicieuse qu'on remarquait anciennement
dans plusieurs provinces de France; ainsi elle ressor-
tissait du duché de Touraine pour le temporel et la
justice : mais elle était du diocèse et de la généralité
d« Bourges pour le spirituel et les finances. C*cst donc
40 HISTOIRE DK TOURAINE.
seulement comme comté dépendant du duché de Tou-
raine que nous l'envisageons ici.
Charles-le-Chauve donna le château de Buzançais
à un seigneur de sa cour nommé Hémon , ainsi que
les domaines de la Mothe, de Châtillon et d'une
partie d'Amboise , comme récompense des services
qu'il avait rendus à l'état. Cette place ayant été mise
entre les mains de Henri II, roi d'Angleterre et comte
de Touraine, pendant la guerre qui avait lieu entre
l'Angleterre et la France, Philippe-Auguste s'en em-
para en II 73 au nom de Louis VII son père. Les
Anglais , appelés en France lorsque ce royaume était
divisé entre les Armagnacs et les Bourguignons, brû-
lèrent Buzançais et démolirent ses fortifications à la
même époque où ils firent subir un sort pareil aux
villes de Loches et de Beaulieu, ainsi que nous l'avons
dit à l'article de cette dernière.
Buzançais fut érigé en comté , avec union des châ-
tellenies d'Écueillé et de Brion , par lettres patentes
vérifiées au parlement le 1 7 décembre 1 533, en faveur
de Philippe Chabot , comte de Charny , grand-amiral
de France , et depuis ce temps il fut érigé en gran-
desse par Philippe V, roi d'Espagne, en faveur du
duc de Beauvilliers , qui avait été son gouverneur
lorsqu'il était duc d'Anjou.
Hémon fut donc , comme on vient de le voir , le
premier seigneur de Buzançais.
Sulpice , surnommé Mille-Boucliers , seigneur de
Buzançais, de Châtillon-sur-Indre, de Verneuil et de
la tour d'Amboise, fut père de Robert P'^ et d'Hervé,
BDZANÇAIS. ' 4l
célèbre trésorier de l'église de Saint-Martin de Tours,
dont nous avons eu occasion de parler dans notre
histoire.
Robert , premier du nom , donna, en 989, son con-
sentement à la fondation de l'abbaye de Miseray. Il
eut deux fils , Archambaud , et Sulpice seigneur de
Verneuil et de la tour d'Amboise, qui succéda vers
l'an ioi4 à son oncle Hervé dans la dignité de tré-
sorier de Saint-Martin. Ce fut ce même Sulpice qui
fit reconstruire en pierre la tour d'Amboise , qui alors
n'était qu'en bois.
Archambaud de Buzançais épousa la fille de Roger,
dit le Diable, seigneur de Montrésor, dont il eut
Robert, qui continua la postérité, et deux filles, sa-
voir : Hersende , dame de Verneuil , mariée à Lysois,
chef de la maison d'Amboise, et Hcrmensande, femme
de Foulques, seigneur de Villantrais.
Robert, deuxième du nom, dont nous ne savons
rien, non plus que des deux suivans, eut pour fils :
Geoffroy I", qui fut père de
Robert III, comme eux seigneur de Buzançais.
Robert IV, fils du précédent, se croisa pour la
Terre-Sainte eu 12 23. A son retour il assista à un
tournoi où il trouva la mort , ayant été, dit-on , étouffé
par l'excès de la chaleur. L'auteur de la Chronique
d'Anjou , qui rapporte cette circonstance, dit que cette
même année le soleil fut si ardent pendant tout l'été,
que les blés et les prés furent entièrement brûlés par
la trop grande sécheresse , et que l'on ne recueillit
aucuns fruits honnis des pommes et des noix.
/|1 HISTOIRE DE TOURAINE.
Raôiil de Buzançais paraît avoir été le dernier de
cette branche. Après lui la seigneurie passa dans la
maison de Prie.
Jean de Prie , premier du nom , seigneur de Buzan-
Çais, l'était également de Moulins en Berri. En I265
il donna soixante sous de rente au prieuré de Brouil-
lemont, de l'ordre de Grandmont. Ce n'est souvent
que par ces sortes de donations et de chartes monas-
tiques que beaucoup de dates nous sont connues. Il
eut deux fîls, Jean qui suit, et Robert.
Jean de Prie, deuxième du nom, assista les roisPhi-
lippe-le-Bel et Pliilippe-le-Long contre les Flamands.
Il eut de son épouse , nommée Gillette , Philippe et
Jean , qui fut seigneur de Châteauclos.
Philippe de Prie , seigneur de Buzançais , sénéchal
de Beaucaire et de Nîmes , servit au siège d'Ypres au
mois de septembre i3a8, et fut marié avec Isabea»
de Sainte-Maure, qui en était veuve en i347- De ce
mariage sortirent Jean qui suit y Philippe ;, chevalier,
seigneur de Moulins en Berri, et André, chevalier.
Jean de Prie , troisième du nom , capitaine de la
Rochelle, rendit hommage au roi de la ville et châ-
telleniede Buzançais le lo juillet 1389. Il avait épousé
philippine Gourant , dont il eut Jean IV, Guillaume
et une fille nommée Sarrasine, qui fut mariée a Es-
chivard VI, baron de Preuilly.
Jean de Prie, quatrième du nom , rendit hommage
au roi le 25 mars j/^ii, D'Isabeau de Chenac il eut
Jean et Antoine, ainsi que trois filles.
Jean de Prie^ cinquième du nom, seigneur de Bu-
BUZAirÇA-IS. 4^
zançais , grand-pan e lier de France et capitaine de la
grosse tour de Bourges, fut tué l'an 1427 en défen-
dant cette place contre les Anglais, qui à cette époque
avaient envahi une grande partie de la France. N'ayant
point laissé d'enfans de Marguerite de I^imeray sou
épouse, son frère Antoine lui succéda.
Antoine de Prie, grand-queux de France, seigneur
deBuzançais, de Montpépon et de la Mothe de Prie,
épousa Madeleine , fille de Hugues d'Amboise , sei-
gneur de Chaumont. Sainte-Marthe s'est trompé en
disant qu'elle se nommait Marguerite de Joinville. De
ce mariage naquirent Louis, qui suit; René, cardi-
nal; Ayniard, grand-maître des arbalétriers, et trois
filles.
Louis de Prie, chevalier, chambellan du roi , grand-
queux de France, rendit hommage au roi pour Bu-
zançais le 7 mars i484' Nous ne lui connaissons qu'un
fils de Jeanne de Salezart son épouse.
Emon ou Edmond de Prie, fils d'Antoine et de
Madeleine d'Amboise , fut marié deux fois ; la pre-
mière avec Jeanne, fille de Charles de Beauveau, sei-
gneur de Tigny, et la seconde avec Anne de Cha-
bannes, comtesse de Dammartin, dont il n'eut point
d'enfans. Du premier lit vinrent Gabriel et René,
successivement seigneurs de Buzançais.
Gabriel de Prie, chevalier, seigneur de Buzançais,
Prie, Ferrière- l'Arçon, Prcssigny, fut marié à Jac-
queline de Marans, dont il n'eut point d'enfans.
René de Prie , baron de Buzançais , succéda à son
44 HISTOIRE DE tOURAINE.
frère; mais, étant également mort sans lignée, sa
succession passa à son oncle.
Aymard de Prie, chevalier, seigneur de Montpé-
pon, grand-maître des arbalétriers de France , vendit
à l'amiral Chabot la seigneurie de Buzançais , qui
faisait partie de la succession de René de Prie , son
neveu.
Philippe Chabot, comte de Charny et de Buzan*
çais , amiral de France , était fils de Jacques Chabot,
baron de Jarnac et de* Madeleine de Luxembourg.
Nous avon5 dit que c'était en sa faveur que la baron-
nie de Buzançais avait été érigée en comté l'an i533.
Il en avait rendu hommage au roi deux ans aupara-
vant, d'où on peut conclure qu'il en était devenu pro-
priétaire vers i53o ou i53i. Il épousa Françoise de
Longwy, dame de Laigny et de Mirebeau, dont il
eut : 1° Léonore; a" François, comte de Charny;
3" Françoise , femme de François de la Rochefoucauld,
baron de Barbezieux ; 4" Antoinette , mariée à Jean
d'Aumont , maréchal de France ; 5° Anne , épouse de
Charles, duc d'Alençon; 6" une autre Anne, abbesse
du Paraclet.
Léonore Chabot, comte de Buzançais, puis de
Charny, grand-écuyer de France, lieutenant-général
au gouvernement de Bourgogne, fut marié deux fois;
la première avec Claude, fille de Claude Gouffier duc
de Roannais et marquis de Boisy ; la seconde avec
Françoise , fille de Joachim de Longwy. Il eut du
premier lit Catherine Chabot qui suit , et Charlotte,
BUZANÇAIS. 45
épouse de Jacques-le- Veneur, comte de Tillières. Il
n'eut de son second mariage que Marguerite Chabot,
femme de Charles de Lorraine, duc d'Elbeuf.
Catherine Chabot, comtesse deBuzançais,à défaut
d'héritiers mâles , épousa en premières noces Guil-
laume de Saulx-Ta vannes, fils du maréchal de ce nom,
et en secondes noces Aimé de Rochechouart, puîné de
la maison de Mortemar, dont elle n'eut point d'en-
fans. Il lui naquit du premier mariage trois filles et
deux fils , Claude et Joachim ^ baron d'Arc-sur-Til.
Claude de Saulx, comte de Buzançais, vicomte de
Ta vannes, épousa Françoise, fille de Nicolas Brulart,
premier président au parlement de Bourgogne, dont
il eut : 1** Gaspard, abbé de Sainte -Marguerite de
Troyes ; 2° Jacques, qui suit ; 3** Noël , comte de Beau-
mont ; 4" Nicolas , chevalier de Malte; 5° Louis, comte
de Saulx, et quatre filles.
Jacques de Saulx, dit le comte de Tavannes, épousa
Louise-Henriette Pottier, dont il eut René, marquis
de Tavannes, tué au siège de Candie en 1668, Charles
qui suit , Henri , chevalier de Malte , et une fille reli-
gieuse à Dijon. Aucun d'eux n'ayant laissé de posté-
rité, le comté de Buzançais échut à Charles de Lor-
raine,
Charles de Lorraine, duc d'Elbeuf, troisième du
nom, était fils de Charles H et de Catherine-Henriette
légitimée de France. Il hérita de ce comté à cause de
Marguerite Chabot son aïeule maternelle; mais il le
vendit peu de temps après à Jean Phelipeaux.
Jean Phelipeaux , seigneur de Villesavin , secrétaire
46 HISTOIRE DE TOURAINE.
du roi, n'eut de sa femme N. Blondeau de Villesavin,
qui lui succéda, qu'une fille unique.
Léon Bouthillier , comte de Cliavigny, en épousant
Anne Phelipeaux de Villesavin , en reçut en dot le
comté de Buzançais. De ce mariage sortirent sept
garçons et cinq filles. Léon mourut en 1694 grand-
trésorier des ordres du roi et secrétaire d'état.
Armand- Jean , fils aîné de Léon , fut le dernier de
cette famille qui posséda le comté de Buzançais, qui
a passé aux ducs de Beauvilliers.
Charles-Paul de Beauvilliers a été en 1790 le der-
nier comte de Buzançais.
CHAMPIGNY.
Champigny ( Campiniacum ) est une petite ville
située sur les ruisseaux de Vende et d'Amable, aux
confins de la Touraine et du Poitou du coté du midi.
Quoique simple châtellenie , son château , sa Sainte-
Chapelle , et surtout les princes dont cette terre était
le patrimoine , pouvaient la faire figurer parmi les
plus titrées de la province. Mais malgré sa splendeur,
ce château n'eut pas une longue durée. Construit dans
les premières années du seizième siècle , il n'existait
déjà plus vers la fin du dix-septième. Les immenses
communs et la Sainte-Chapelle , qui seuls sont restés
debout, témoignent encore quelle devait être sa ma-
gnificence , cause de sa destruction par le cardinal de
Richelieu , jaloux pour son château d'un pareil voisi-
nage.
CHAMPIG!?T. ' 4?
La ville de Champigny fut assiégée en 1667 par
les protestans et prise par capitulation. Le duc de
Montpensier,qui en était seigneur , «ayant pas voulu,
de peur d'affaiblir l'armée royale , que le duc d'Anjou,
frère du roi, qui la commandait, y jetât des troupes
pour la défendre.
II y avait un chapitre composé de cinq dignitaires
et onze chanoines. Le nom de Sainte-Chapelle avait
été donné à son église, parce qu'on y conservait, dit-
on , Tune des épines de la couronnes de Jésus-Christ,
et l'un des trente deniers au prix desquels il fut vendu.
On y comptait en outre un couvent de minimes, un
autre de religieuses de Saint-François , une aumône-
rie et un collège.
Le plus ancien seigneur de Champigny qui soit
venu à notre connaissance est un certain Bemier qui,
au commencement du douzième siècle , fut témoin à
une donation faite à l'abbaye de Fontevrault par Pe-
loquin de l'Ile-Bouchard. Il n'eut qu'une fille , qui
porta cette seigneurie dans la famille de Blo ou de
Blé.
Gosselin de Blo, premier du nom. On présume
qu'il fut père de celui qui suit.
Robert de Blo suivit le parti de Henri-le-Jeune ,
qui s'était révolté ainsi que ses frères contre leur père
Henri II , i»oi d'Angleterre, et s'était retiré en France
auprès de I^uis-leJeune son beau-père. MaisHenri II,
ayant passé la mer en 1173, mena son armée en
Touraine, et après avoir pris les châteaux de La Haye
et de Preuilly, assiégea Champigny, ou Émery de Blo,
48 HISTOIRE DE TOTTRAINE.
frère de Robert , s'était jetë avec plusieurs chevaliers
et une partie des gentilshommes voisins. Le château
fut emporté d'assaut, et six chevaliers y furent faits
prisonniers, savoir: Émery de Blo, Baudouin de Bri-
zay, Hugues de La Mothe, Gaultier de Pons, Orry
de Blo et Simon de Brénezay ; mais le château fut
rendu à Robert l'année suivante par le traité de paix
fait entre le roi d'Angleterre et ses fils au mois de
septembre 1 1 74* Robert eut de sa femme Hermen-
sande Josselin . Robert et Adenorde.
Josselin, deuxième du nom, fils aîné de Robert, était
un des bannerets qui accompagnèrent Philippe-Au-
guste dans la guerre contre l'empereur Othon , le roi
d'Angleterre et le comte de Flandre.
Emery succéda à Josselin II son père. Il se trouva
à Chinon en 1242 avec plusieurs autres chevaliers
que le roi y avait mandés pour aller réduire le comte
de La Marche. Il est probable qu'il mourut sans en-
fans; car nous voyons par un compte d'Émery de
Gennes, bailli de Touraine, daté de l'an 1254? qu'il
était dû cent quatre-vingts livres pour le rachat de la
terre d'Émery de Blo.
Hugues, seigneur de Bauçay, hérita des seigneuries
de Blo et de Champigny. Il assista au sacre de Guil-
laume Lemaire, évêque d'Angers, en 1291. Jeanne
de Bauçay, sa fille, épousa en secondes noces Charles
d'Artois, auquel elle porta en dot la seigneurie de
Champigny.
Charles d'Artois, comte de Longueville et de Pé-
zénas , prince du sang , était le troisième fils de Robert
CHAMPIGNT. 4^
d'Artois , troisième du nom , comte de Beaumont-le-
Roger, et de Jeanne de Valois, sœur consanguine de
Philippe de Valois , roi de France. Il fut fait prison-
nier à la bataille de Poitiers en i356, selon le Labou-
reur : Louis , duc d'Anjou , lui ayant imputé plusieurs
crimes, le contraignit à lui abandonner les châteaux
de Champigny et du Goudray.
Louis de France , premier du nom , duc de Tou-
raine et d'Anjou, lils du roi Jean et de Bonne de
Luxembourg , mourut le ^o septembre 1 384, laissant
de sa femme Marie de Bretagne Louis et Charles,
prince de Tarente.
Louis, second du nom, roi de Naples, de Sicile,
de Jérusalem et d'Aragon , duc d'Anjou , mourut au
château d'Angers le 29 avril 1417- H engagea la sei-
gneurie de Champigny à Pierre de Beauveau , seigneur
de la Roche-su r-Yoïi et sénéchal d'Anjou, pour la
somme de quinze mille livres, et lui en fit depuis le
transport viager à charge de rachat. Enfin il lui en
vendit la propriété d'accord avec son fils aîné moyen-
nant dix-sept mille ducats d'or , six cents livres de
rente et quatre cents écus d'or de pension.
Pierre de Beauveau, seigneur de Champigny et de
la Roche-sur- Yon , gouverneur d'Anjou et du Maine,
était fils de Jean II de Beauveau et de Jeanne de Ri-
gny. Il épousa Jeanne, fille de Pierre de Craon, qui
était veuve d'Ingelger, seigneur d'Amboise et de Ro-
chc-Corhon, et dont il eut deux enfans, Louis, qui
suit, et Jean III, seigneur de Beauveau.
Louis de Beauveau, premier chambellan de René,
i
5o HlSTOIRt: DE TOlIRAIJyE.
duc d'Anjou, roi de Sicile et de Naples, sénéchal
d'Anjou , n'eut qu'une fille , Isabelle de Beauveau ,
mariée le 9 novembre i454 à Jean, comte de Ven-
dôme et de Chartres. C'est ainsi que cette terre passa
pour la seconde fois à des princes de la famille
royale.
Jean de Bourbon, deuxième du nom, comte de Ven-
dôme et de Chartrfes , de Montoire et d^ Lavardin ,
seigneur de Champigny, eut d'Isabelle de Beauveau,
entre autres enfans, François de Bourbon, d'où sont
sortis nos sept derniers rois et Louis de Bourbon ,
prince de la Pvoche-sur-Yon , qui fît la suite des sei-
gneurs de Champigny.
Louis T"" de Bourbon , prince de la Roche-sur-Yon,
épousa Louise, fille de Gilbert de Bourbon, comte de
Montpensier. Ce fut lui qui jeta les premiers fonde-
mens du château de Champigny et de sa Sainte-Cha-
pelle, remarquable surtout par les beaux vitraux
dont elle est décorée , et où sont représentéeis en dix
grands tableaux les principales actions de la vie de
saint Louis. Ces vitraux ont été réduits et destinés par
M. Marseuvre avec autant de talent que d'exactitude.
Louis I" n'eut pas la satisfaction de voir s'achever
l'ouvrage qu'il avait commencé. Il mourut en iSao
et eut son tombeau dans cette Sainte-Chapelle , déjà
en grande partie construite. Il eut deux fils et une
fille : Louis II, Charles, prince de la Roche-sur-Yon,
et Susanne, seconde femme de Claude I", sire de
Rieux.
Louis II de Bourbon , duc de Montpensier , souve-
CHAMPIGNT. 5t
rain de Bombes, dauphin d'Auvergne et gouverneur
de Tourainc, fît achever le château et la Sainte-Cha-
pelle de Chanipigny. Nous parlons plus amplement
de lui dans le cours de notre histoire et à l'article des
gouverneurs. Il mourut le 2 3 septembre i582 , et fut
enterré comme son père dans la Sainte-Chapelle. Ca-
therine de Longwy, sa première femme, fut la seule
qui lui donna des enfans.
François de Bourbon , fds aîné du précédent , duc
de Montpensier, prince de la Roche-sur-Yon ^ dau-
phin d'Auvergne , eut également le gouvernement de
Touraine. Il mourut le 4 juin i ^92 , âgé de cinquante
ans , laissant de Renée d'Anjou , marquise de Mézières,
son épouse,
Henri de Bourbon, duc de Montpensier, etic. , né à'
Mézières en Touraine le 12 mai i573; il mourut à
Paris le 27 février 1608, et eut sa sépulture dans la
Sainte-Chapelle. Il avait épousé Henriette-Catherine,
fille et unique héritière de Henri de Joyeuse , maré-
chal de France, d'oîi sortit
Marie de Bourbon, duchesse de Montpensier, de
Châtcllerault , de Saint-Fargeau , souveraine de Bom-
bes , dauphine d'Auvergne , marquise de Mézières et
dame de Champigny, mariée à Gaston d'Orléans, frère
de Louis XIII. Be cette alliance naquit
Anne-Marie-Louise d'Orléans, duchesse de Mont-
pensier, etc., princesse célèbre par son esprit, ses
écrits et surtout par son union avec le duc de Lauzun.
Elle mourut à Paris sans enfans le 16 avril 1693, lais-
sant son héritage à la maison d'Orléans,
4-
52 HISTOIRE DE TOURAINE.
CHATEAUNEUF, baronnie.
La baronnie de Ghâteauneuf ( Castrum Novum^
MartinopoUs) était renfermée dans l'enceinte de la
ville de Tours et possédée de tout temps par les tré-
soriers de Saint-Martin. Deux châtellenies et dix fiefs
en dépendaient. Il y avait une justice exercée par les
juges ordinaires. Nous avons souvent, dans le cours
de notre histoire , parlé de l'origine du bourg de Ghâ-
teauneuf, de son agrandissement et de son agglomé-
ration à la ville de Tours ; ainsi nous ne répéterons
point ce que nous en avons déjà dit.
CHATEAU-REGNAULT, marquisat.
La ville de Château - Regnault ( Castrum - Regi^
naldi) est située à six lieues nord de Tours , au pen-
chant d'une colline dont ie vallon est arrosé par la
petite rivière de Bransle. La grosse tour du château,
communément appelée le donjon , était le principal
manoir de ses anciens seigneurs qu'on appelait autre-
fois seigneurs du château, mais dont le nom fut en-
suite changé en celui de Château-Renaud ou Regnault,
en considération de R.egnault, petit-fils de Guicher,
premier du nom , qui fit bâtir le premier château.
Cette place parut d'une telle importance pendant les
guerres de la Ligue, que le roi Henri IV y établit un
gouverneur particulier pour défendre le pays. Du
temps même de Charles VII, il y avait une garnison
CHATKAU-RKCNAULT. 53
qui incommodait fort la ville de Tours, au point que
SCS habitans furent obliges d'envoyer, en ifiiG, des
députés à la reine de Sicile, ducliesse de Tourainc,
pour se plaindre des courses que faisait cette gar-
nison.
Le domaine était d'une assez grande étendue, et la
justice une des plus considérables de la province. Dix-
sept paroisses en relevaient, dont dix en première
instance et sept par appel. Baronnie dans le principe,
en [620 Louis XIII l'érigea en marquisat en faveur
d'Albert de Rousselet.
Quoique ses seigneurs rendissent bommage à Blois,
la justice relevait du bailliage de Touraine. A la vérité
les anciens comtes de Blois, qui étaient seigneurs de
Cbâteau-Rcgnault, ont souvent tenté d'attirer cette
justice dans leur capitale ; mais le roi Jean termina
ce différend en ordonnant que le bailli des exemptions
mettrait au ressort de Tours la terre et la cbâtellenie
de Cbateau-Regnault.
Guiclier, troisième du nom, fut le premier qui
voulut se soustraire a l'obéissance de Geoffroy-Martel
en se mettant sous la protection de Tbibaut, comte
de Blois , à qui Geoffroy venait d'enlever la Touraine;
mais Henri II , roi d'Angleterre et comte de Touraine,
s'opposa à cette usurpation. A la vérité son fils aîné,
révolté contre lui, abandonna h Tbibaut, dans l'as-
semblée des états de France, tous les droits que son
père avait sur Cbàteau-Regnaull ; mais cet abandon
illégal fut révoqué par le traité de paix liiit à Mont-
Louis le 3o septembre 1 1 74 entre le père et les enfans.
54 HISTOIRE DE TOIJUAINE.
Guicber est le plus ancien des seigneurs de Châ-
teau-Regnault dont nous ayons connaissance. Il vivait
dans le dixième siècle. Son nom nous a été transmis
par Regnault son petit-fils, dans un titre qui se trou-
vait à l'abbaye de Marmoutier.
Geoffroy, fils de Guicber, fut enterré à Marmou-
tier, où les seigneurs de Cbâteau-Regnault avaient
droit de sépulture.
Regnault ou Renaud, premier du nom, fils de
Geoffroy, succéda à son père. Ce fut de lui , comme le
rapporte la cbronique de Tours , que le cbâteau prit le
nom de Cbâteau-Regnault. Il mourut vers l'an 1020,
laissant Guicber, son fils, béritier de ses domaines.
Guicber II eut plusieurs enfans , entre autres
Guicber III, qui continua la postérité, et Regnault,
mentionné dans une cbarte de 1066 avec Pétronille
sa sœur, femme de Foulques-Loyson , comte de
Vendôme , laquelle mourut à Cbâteau - Regnault
en 1078.
Guicber III ne fut pas plus tôt en possession de
Cbâteau-Regnault qu'il prit les armes en faveur de
Tbibaut II, comte de Tours et deBlois ; mais Tbibaut
ayant été contraint, en 1044? ^^ céder la Touraine
à Geoffroy-Martel, Guicber refusa de reconnaître
celui-ci pour son nouveau soigneur, et de lui rendre
bommage, ce qui obligea Geoffroy de se saisir de
Cbâteau-Regnault, qu'il donna à Regnault de Cbâteau-
Gontbier, qui en eut le gouvernement pendant dix-
buit ou dix-neuf ans.
L^ conformité du nom de Regnault dans ces deux
CHA.TEAU-IltG]VAULT. 55
familles a fait croire à quelques historiens que Châ-
teau-Regnault devait son nom à Regnault de Chaleau-
Gonthier : mais c'est une erreur; car même Guicher
ne cessa point de jouir des revenus de sa terre,
quoique Regnault de Château-Gonthier en eut pris
possession , et nous voyons qu'étant à Blois au mois
de septembre 1062 , il prétendit que les habitans de
Saint-Laurent-en-Gatines devaient lui apporter à
Blois les redevances qu'ils avaient coutume de lui
payer à Château-Regnault. Guicher rentra enfin dans
la jouissance de son château. La guerre s'étant
déclarée quelques années après entre Geoffroy de
Preuilly, comte de Vendôme , et Lisoys d'Amboise
au sujet des dîmes de Saint-Cyr-sur-Loire , dont le
comte de Touraine prétendait l'hommage, Guicher
s'engagea dans le parti du comte de Vondôme, son
oncle ; mais Lisoys , secondé par Robert des Roches ,
seigneur de Roche-Corbon , et par Jean d'Aluys, sei-
gneur de Châteaux et de. Saint-Christophe, leur
résista courageusement, et les contraignit de se reti-
rer en désordre. Guicher fut pris par Jean d'Aluys
et conduit à Châteaux ou il mourut prisonnier.
Regnault II, voulant venger la mort de son père,
se mit à faire des courses sur les terres du seigneur
d^Amboise; mais Hugues de Chaumont, accompagné
de ses vassaux et d'Hélie de La Flèche, comte du
Maine, son cousin, prit le château de Moran, appar-
tenant à Regnault, et le détruisit de fond en comble.
Quelque temps après, Regnault ayant eu avec
Geoffroy son frère un démêlé relativement à leurs
56 IIISTOIRTi: DE TOURAINE.
partages, Sulpice d'Amboise, qui avait succédé à
Hugues, prit la défense de Geoffroy, et força Re-
gnault de céder à Geoffroy une partie de sa terre ^
contre la coutume de la province qui ne permettait
pas de démembrer les baronnies, les cadets n'ayant
droit qu'à des rentes en argent. Regnault, mécontent
de ce traité forcé , eut recours au comte de Vendôme
son cousin , et afin de le lier plus étroitement à sa
défense, il lui fit hommage de sa terre de Château-
Regnault, imitant en cela l'usage des anciens Gaulois
qui se mettaient sous la protection de quelque grand
pour se soustraire à l'oppression de leurs ennemis.
Le comte de Vendôme se mit donc en campagne pour
soutenir les droits de son nouveau vassal. Sulpice
d'Amboise s'étant avancé jusqu'à Ville-Chauve entre
Moran et Château-Regnault , le comte , sans attendre
le reste de ses troupeè conduites par Regnault , atta-
qua brusquement Sulpice, qui soutint vaillamment ce
premier effort , mit en déroute les troupes du comte,
le prit lui-même et l'emmena prisonnier au château
de Chaumont.
Ce Regnault fui un des principaux bienfaiteurs de
l'abbaye de Fontaine-les-Blanches , à laquelle il donna
en I [4o le droit d'usage, de chauffage et de pacage
dans sa forêt. Il mourut peu de temps après , ne lais^
sant qu'une fille,
Sibylle de Château-Regnault. Elle fut d'abord fian-
cée à Hugues, fils aîné de Sulpice II d'Amboise, qui
la fît élever auprès de son fils jusqu'à ce qu'elle eût
atteint l'âge de puberté : mais l'archevêque de Tours
CHATEAU-REGNAULT. IJ']
l'ayant menacé des censures ecclésiastiques s'il accom-
plissait ce mariage entre parens au degré prohibé,
Sulpice fut oblige de la renvoyer à Cbâteau-Regiiault,
ou elle épousa Josselin, seigneur d'Auneau ou des
Aunelles. Sulpice, irrité de ce mariage, fit la guerre
à Josselin , et ayant mis le siège devant Château-Re-
gnault, l'emporta d'assaut et brûla tout hormis l'église.
Josselin étant mort peu de temps après, Sibylle se re-
maria à Thibaut de Champagne, comte de Blois et de
Chartres, auquel elle porta en dot la seigneurie de
Château-Regnault. Ce mariage, omis par tous les his-
toriens, a été prouvé par la charte de fondation de
l'abbaye de Boullay.
Thibaut de Champagne, comte de Blois, sénéchal
de France, était fils de Thibaut-le-Grand, comte de
Champagne , de Blois et de Chartres. La chronique
de Tours rapporte qu'en i\^i il voulut enlever Alié-
nor de Guienne que le roi Louis VII venait de répu-
dier , mais qu'elle réussit à échapper à sa poursuite.
Thibaut mourut en 1 191 au siège d'Acre, autrement
Ptoiçmaïde. En 11 64 il avait épousé en secondes
noces Alix de France, fille de Louis-le-Jeune et d'A-
liénor de Poitou. Il eut pour enfans , sans qu'on sache
précisément de quels lits, Thibaut, Henri et Philippe,
morts en bas âge, Louis, qui continua la postérité,
Marguerite , comtesse de Blois , Elisabeth , comtesse
de Chartres et de Chateau-Regnault, et Alix, abbesse.
Louis de Champagne succéda à son père l'an 1 191,
et fut tué à la bataille d'Andrinople le i4 avril i2o5,
laissant de Catherine, comtesse de Clermont, Thi-
58 HISTOIRE DE TOITRAINE.
haut dit le Jeune, Raoul et Jeanne, tous deux morts
en bas âge.
Thibaut, dit le Jeune, comte de Blois , de Chartres
et de Clermont, épousa en premières noces Mahaut,
fille de Robert V comte d'Alençon et de Jeanne de
la Guerche. Il eut pour seconde femme Clémence, fille
puînée de Guillaume des Roches, sénéchal de Tpu-
raine ; mais étant mort sans enfans, tous ses biens pas-
sèrent à ses deux tantes Marguerite et Elisabeth de
Champagne. La première eut en partage le comté de
Blois ; l'autre eut le comté de Chartres et la seigneurie
de Château-Regnault. Marguerite épousa en troisiènies
noces Gauthier d'Avesne, père de Marie, femme de
Hugues de Châtillon, par qui la terre de Château-
Regnault passa dans cette maison.
Elisabeth de Champagne, comtesse de Chartres,
eut pour premier mari Sulpice IIÏ, seigneur d'Am-
boise, Chaumont, Bléré et Montrichard. De ce ma-
riage sortirent Hugues, mort jeune, et Mathilde, qui,
mpurant sans postérité , laissa sa succession aux enfans
de Hugues de Châtillon et de Marie d'Avesne sa coa-»
sine-germaine.
Hugues de Châtillon, comte de Saint-Paul, fils puîqé
de Gaucher de Châtillon et d'Elisabeth de Saint-
faul , eut le comté de Blois à cause de Marie d'Avesqe
son épouse. Alors Hugues de Montmirail et Elisabeth
de Champagne leur cédèrent à perpétuité la châtel-
leoie de Château-Regnault avec toutes ses dépen-
dances, ainsi que la forêt de Blémars, à la charge
seulement du douaiie d'Elisabeth affecté sur cette
CHATFAU-REGNA.ULT. 5^
terre. Hugues eut pour fils Jean , Guy, comte de Saint-
Paul , et Hugues de Chatillon.
Jean, comte de Blois et de Chartres, seigneur de
Château-Regnault, épousa Alix de Bretagne, dont il
eut une fille unique.
Jeanne de Chatillon, comtesse de Blois et de Char-
tres , fut accordée dès l'âge de neuf ans à Pierre de
France, comte d'Alençon, fils du roi saint Louis; et,
en faveur de ce mariage, Alix leur donna la seigneurie
de Château-Regnault, ainsi que les autres places que
son mari lui avait assignées pour douaire, se réser-
vant seulement cinq cents livres de rente pendant sa
vie. Elle en donna ses lettres au mois de mars 1277.
Jeanne, devenue veuve en 1283, mourut le 17 jan-
vier 1292 sans laisser de postérité. Par son testament,
daté du dimanche, jour de la fête de Saint- Julien
lagi, elle donna douze mille livres en legs pieux,
dont trois cent cinquante livres à ses pauvres ména-
gers de Château-Regnault; deux cents livres aux
pauvres filles du même lieu afin de les marier ou de
les mettre en religion ; pareille somme aux pauvres
femmes nobles; vingt livres à l'Hôtel -Dieu et qua-
rante sous de rente sur le festage de Château-Re-
gnault.
Hugues de Chatillon, fils aîné de Guy, comte de
Saint-Paul et de Mahaut de Brabant, hérita le comté
de Blois et la seigneurie de Château-Regnault par le
dc'cès de Jeanne de Chatillon , sa cousine- germaine.
Il avait épousé Béatrix de Flandre , dont il eut deux
enfans, Guy et Jean. Hugues fit son testament en 1 3,99,
6ô HISTOIRE DE TOUR AINE.
par lequel il fît plusieurs dons aux pauvres, aux hô-
pitaux et à la maladrerie de Cliâteau-Regnault.
Jean de Châtillon , dit de Blois , eut en partage les
seigneuries de Cliâteau-Regnault et de Milaçay, à
condition de les tenir à foi et hommage du comte de
Blois. Il mourut sans enfaus, et sa succession échut à
son frère aîné.
Guy de Châtillon, comte de Blois et de Dunois, fut
fiancé dès l'âge de dix ans avec Marguerite de Valois,
fille de Charles de France, comte de Valois, d'Aleii-
çon et de Chartres, par contrat passé à Saint-Ger-
main-en-Laye au mois d'octobre 1 298. De ce mariage
naquirent trois enfans, Louis, Charles et Marie.
Il paraît que les rois de France avaient conservé
quelques droits. utiles dans la terre de Château-Re-
gnault ; car nous voyons par le registre de la chambre
des comptes intitulé : Tabula major dividens, etc.,
année 3325, que le dimanche après Pâques iSaa,
« Ot grant conseil à Pontoise en l'abbaye, où ly rois
« reprent et remet arrières son domaine toute la terre
a qui fust baillée à Pierre de Machauz au prix de
(c 2 55 hvres i4 sous parisis de rente en la chastelle-
« nie de Chastel-Regnaut par ly rois Philippe et le
a frère du roy Monsieur, laquelle terre il ot en ré-
« compensation de la ville de Lisi et de Villan-
« trais, etc. ))
Louis de Châtillon , premier du nom , comte de
Blois, de Dunois et de Soissons, épousa Jeanne de
Hainaut, dame de Chimay, qui , étant devenue veuve,
fit avec Bouchard , comte de Vendôme , le 8 novembre
CHATEAU-REGNAULT. 6Î
i347? ^" accord par lequel il fut convenu que tous
les fiefs, arrière-fiefs et dépendances de Ghâteau-Re-
gnault enclavés dans le comté de Vendôme demeure-
raient au comte de Blois. Il laissa trois fils, Louis,
Jean et Guy, tous les trois successivement seigneurs
de Chateau-Regnault.
Louis, deuxième du nom, comte de Blois, de Du-
nois et de Soissons, ne fut point marié.
Jean, troisième du nom, comte de Blois, épousa
Marguerite de Gueldres, dont il n'eut point d'enfans.
Guy, comte de Soissons, puis de Blois, épousa
Marie de Namur, dont il n'eut qu'un fils qui mourut
sans postérité en iSgi. Cet événement donna sujet à
Charles VI , qui était alors à Tours , d'aller trouver
le comte à Château-Regnault pour l'engager à vendre
cetle seigneurie ainsi que le comté de Blois à Louis ,
duc de Touraine , son frère , qui avait eu de très-
grands biens de Valentine de Milan sa femme. Le
comte y consentit , et le contrat fut passé à Paris au
mois d'octobre iSqi moyennant deux cent mille
francs d'or et six mille livres annuellement pour le
douaire de Marie de Berri, veuve de Louis de Châ-
tillon.
Louis de France , duc de Touraine et depuis duc
d'Orléans, comte de Blois, fils de Charles V, roi de
France, fut assassiné le 9.3 novembre 1407. Sa mort,
ainsi que son mariage avec Valentine de Milan^ furent
deux sources de calamités pour la France, l'une en
faisant naître les factions des Bourguignons et des
Armagnacs, et l'autre en devenant la cause des désas-
62 HISTOIRE DE TOURAINE.
treuses guerres d'Italie, qui avaient pour objet la
conquête du Milanais. Louis eut de Valentine Charles
duc d'Orléans, Philippe comte de Vertus, Jean comte
d'Angoulême , et Marguerite, femme de Richard
d'Étampes. Il eut encore un fils naturel, Jean comte
de Dunois , célèbre dans l'histoire sous le nom du
bâtard d'Orléans, chef de la branche de Longueville.
Charles, duc d'Orléans et de Milan, comte de Va-
lois, de Beaumont et de Blois, fut pris à la bataille
d'Azincourt et conduit en Angleterre, où il resta pri-
sonnier pendant vingt-cinq ans. Il en sortit en i44o
par l'entremise de Philippe -le -Bon, duc de Bour-
gogne , moyennant une grosse rançon , pour le paie-
ment de laquelle il vendit, en 144^? la seigneurie de
Château-Regnault à Jean de Daillon, comte du Lude,
par contrat de réméré ; mais l'ayant retirée , il la
revendit au comté de Dunois au prix de vingt mille
écus d'or, par lettres du 29 mars i449'
Jean, bâtard d'Orléans, comte de Dunois et de
Longueville, grand - chambellan de France, épousa
eh premières noces Marie, ou, selon d'autres, Jeanne,
fille du président Louvet, dont il n'eut point d'enfans.
Sa seconde femme fut Marie, fille de Jacques d'Har-
court, comte de Tancarville, et de Marguerite de
Melun. Il mourut en 1470 âgé de soixante ans, com-
blé d'honneurs, de gloire et de richesses, laissant de
son dernier mariage François ; Marie, épouse de Louis,
seigneur de La Haye et de Passavant, et Catherine,
femme de Jean de Sarrebruck.
François d'Orléans, premier du nom, comte de
CHATEAU-ftEGÎ^AULT. 63
Dunois , de Longueville et de Tancarville , etc. , fut
marié avec Agnès de Savoie , dont il eut François qui
suit, Louis duc de Ixjngue ville, et Jean, cardinal.
François d'Orléans , deuxième du nom , comte de
Dunois, etc., grand-chambellan de France, mourut eil
13 12, laissant de Françoise d'Alençon, son épouse,
Renée d'Orléans , comtesse de Dunois, qui mourut
1(B îi mai i5i5, âgée de sept ans.
Louis d'Orléans, duc de Longueville, souverain
de Néufchâtel , marquis de Rothelin , comte de Du-
nois, etc., grand-chambellan de France, succéda à
Renée d'Orléans , âà nièce, dans tous ses domaines. Il
épousa Jeanne Hochberg , marquise de Rothelin. De
cette alliance naquirent Claude qui fut tué devant Pavie
en 15^5; Louis, qui suit; François, marquis de Ro-
thelin ^ {>ère de J^éonor d'Orléans qui continua la pos-
térité, et Charlotte, épouse de Philippe de Savoie,
duc de Nemours.
Louis d'Orléans , deuxième du nom , comte de Du-
nois, souverain de Neufchâtel, etc., grand-chambellah
de France, prit alliance avec Marie, fille aînéfe de
Claude de Lorraine , duc de Guise , qui la laissa
Veuve et mère de deux enfans , François , et Louis ^
né posthume.
François d'Orléans, troisième du nom , duc de Lon-
gueville, mourut le 2^ septembre i55l, âgé de sei^ô
ans, sans avoir été marié.
Léonor d'Orléans , marquis de Rothelin , comte de
Dunois, etc., fils de François d'Orléans, marquis de
Rothelin , recueillit la succession de Fi-ançois , son
64 HISTOIRE DE TOURAINE.
cousin - germain. Il épousa Marie, fille unique de
François de Bourbon comte de Saint-Paul , dont il
eut Henri d'Orléans, duc de Longueville; François,
comte de Saint - Paul et de Fronsac , gouverneur de
Touraine; Catherine; Antoinette, épouse de Charles
deGondy, marquis deBelle-Isle, auquel elle porta en
dot la seigneurie de Ghâteau-Regnault ; et enfin Éléo-
nore, mariée à Charles de Matignon comte de Tho-
rigny.
Charles de Gondy, marquis de Belle-Isle, général des
galères de France, était fils d'Albert de Gondy, duc
de Retz, pair et maréchal de France. Il fut tué au
Mont-Saint -Michel Tan i5i6, laissant d'Antoinette
d'Orléans sa femme un fils unique qui continua la
postérité.
Henri de Gondy, duc de Retz et de Beaupreau,
marquis de Belle-Isle. Ce fut lui qui céda la seigneurie
de Château-Regnault à Albert, fils de François de
Rousselet , seigneur de la Pardieu , et d'Emérence
de Gondy, fille naturelle du maréchal de Retz.
Albert de Rousselet, chevalier, seigneur de la Par-
dieu, baron de Lilly, Noyers et la Blanchardaye ,
capitaine de cinquante hommes d'armes, gouverneur
de l'île et des forts de Belle-Isle , fit preuve de tant de
valeur et de conduite dans son gouvernement pen-
dant les guerres de la Ligue, qu'il excita la jalousie de
tous les seigneurs de Bretagne, qui essayèrent de le
noircir auprès de Henri IV ; mais ce sage monarque
se contenta de répondre qu'il reconnaissait son cousin
de la Pardieu pour gentilhomme d'honneur et de mé-
CHATEAU-REGNAULT. 65
rite, auquel il n'eût pas confié la principale force de
son état s'il ne l'eût tenu pour tel. Il épousa en 1 545
Madeleine, fille deN. le maréchal, baron de Noyers,
«t de Cécile de Croixmare , dont il eut un fils
unique.
Albert de Rousselet, deuxième du nom. Ce fut en
sa faveur que la terre de Château-Regnault fut érigée
en marquisat en 1 620 par Louis XllI , en considéra-
tion des services de son père.
François de Rousselet fut le premier qui porta le
titre de marquis de Château-Regnault. En 1622 il
épousa Louise , fille de Noël Compans , seigneur
d'Arcy , maître en la chambre des comptes , et de
Louise de Dreux. De cette alliance sortirent François,
qui continua la postérité, Balthasar, abbé commen-
dataire des abbayes de Pornic en Bretagne et de Fon-
taines-les-Blanches en Touraine, et François-Louis j
comte de Château-Regnault, maréchal de France et
vice-amiral, célèbre par ses exploits maritimes sous le
règne de Louis XIV. Ce dernier mourut en 17 16 âgé
de quatre-vingts ans.
François de Rousselet, deuxième du nom, marquis
de Château-Regnault, épousa en j658 Marie, fille de
Jean Leguy , seigneur de la Giraudière. De ce ma-
riage est né
Albert-François de Rousselet , marquis de Château-
Regnault, dont le fils François n'eut que des filles.
L'aînée fut mariée à
Estaing (Jean-Baptiste-Charles-Henri comte d'),
marquis de Saillans et de Château-Regnault, vicomte
3. :>
66 msTorwK di tottraïne.
de Ravel , connu par ses services sur terre et sur mêr
sous les règnes de Louis XV et de Louis XVI, et sur-
tout par sa fin tragique en 1793. Nous parlerons de
lui à l'article des gouverneurs de Touraine.
CHATILLON-SUR-INDRE.
Châtillon ( Castillio ) , ville royale à seize ligues de
Tours, sur les confins de la Touraine et du Berri, est
située sur un coteau qui s'aplanit doucement jusqu'aux
belles et riches prairies qu'on trouve à ses pieds. Elle
d<^pendait au temporel du duché de Touraine et était
régie par ses coutumes ; mais pour le spirituel et pour
la taille, elle était du diocèse et de la généralité de
Bourges, amalgame bizarre qu'a fait disparaître le
nouvel ordre de choses, d'après lequel Châtillon n'ap-
partient plus à la Touraine. Il y avait un présidial
créé en i63i , une pré voté et une maréchaussée. Son
château placé sur une hauteur avait une ancienne tour
fort élevée qu'on nommait la tour de l'Aigle.
En parlant de Buzançais, nous avons dit que
Gharles-le-Chauve donna également Châtillon à l'un
de ses favoris nommé Hémon. On présume que Ro-
bert, petit-fils de ce Hémon, épousa la fille de Bou-
chard , comte de Montrésor, dont il eut Archambaud,
seigneur de Buzançais, Sulpice, trésorier de Saint-
Martin , seigneur de Verneuil, et une fille qui eut en
partage la seigneurie de Châtillon qu'elle apporta en
dot à son mari , dont le nom est inconnu.
Son fils Ganillon fit la guerre à Albéric de Mon-
CHATILLON-SUR-INDRE. 67
trésor, son oncle maternel, et s'empara de ses états;
mais Hugues d'Amboise, ayant pris le parti d'Albéric,
trouva Ganillon qui pillait la campagne sur les rives
du Cher, lui livra bataille, le défît et le retint en pri-
son jusqu'à ce qu'il lui eût rendu hommage pour Châ-
tillon , qu'il lui eût abandonné ses prétentions sur
Montrichard, et enfin qu'il eût restitué Montrésor à
son oncle. Depuis ce temps nous ne trouvons plus
aucune trace des seigneurs de Châ tillon jusqu'au dou-
zième siècle.
Les comtes de Touraine ayant uni cette place à leur
domaine, Jean-sans-Terre , frère de Richard Cœur-
de-Lion , la céda au roi de France au mois de janvier
I î 93 avec quelques autres terres pour garantie du
traité fait entre eux , à condition que le roi pourrait
y mettre en garnison quatre chevaliers et quarante
vassaux entretenus aux dépens du prince anglais, qui
serait en conséquence obligé de lui donner tous les
mois deux mille livres monnaie d'Anjou , et d'y mettre
des provisions pour au moins deux ou trois mois.
Mais ce traité resta sans exécution, et la Touraine
ayant été réunie à la couronne en i ao4 , Philippe-
Auguste assiégea Châtillon , qui ne tarda pas à se
rendre. C'est depuis cette réunion que nous voyons
reparaître les seigneurs de cette ville.
Dreux de Mello, connétable de France, pour prix
des services qu'il avait rendus à Philippe - Auguste
dans ses guerres contre les Anglais, reçut de lui les
seigneuries de Loches et de Chatillon , par lettres de
5.
68 HISTOrRE DE TOURAINE.
Tan i2o4» à la charge de foi et hommage- lige, se
réservant seulement le droit de régale sur les abbayes
qui en dépendaient. Il mourut le 3 mars 121 8, lais-
sant de sa femme Ermentrude de Moucy, Dreux et
Agnès mariée en 1209 à Garnier Dutraisnel.
Dreux de Mello II succéda à son père aux seigneu-
ries de Châlillon et de Loches, qui furent rachetées
par le roi saint Louis moyennant six cents livres de
rente, par lettres données au camp d'Egypte près le
Nil en décembre 1249. Il mourut l'année suivante
sans laisser d'enfans.
Pierre de Brosse , seigneur de Langeais et de Dam-
ville, avait probablement obtenu la seigneurie de
Châtillon pendant sa faveur auprès de Philippe- le-
Hardi. On trouvera son article dans notre quatrième
volume. Après son supplice , en 1 278, ses biens furent
confisques et acquis à la couronne. Il n'y eut plus de
seigneurs de Châtillon jusqu'au suivant.
Tanneguy Duchâtel, chevalier, seigneur de Rénac
et du Bois-Raoul , grand-écuyer de France , gouver-
neur de Roussillon, obtint de Louis XI, en 1472, à
titre d'engagement, les seigneuries de Châtillon , de
Passy et de Nonancourt, pour l'indemniser des grosses
avances qu'il avait faites , tant pour le service que
pour les funérailles de Charles VII , que lui seul n'a-
bandonna point. Ce dévouement parut si beau, que
même cent ans après, quand le corps de Henri II fut
conduit sans pompe à Saint-Denis , on trouva sur le
corps ces mots écrits' en grosses lettres : Oîi est main."
CHATILLON-SUR-INDRE. 69
tenant Tanne guj Duchastel? 11 fut tue au siège de
Bouchain en 1479? et fut enterré h Cléry par ordre
de Louis XI.
Jeanne de Raguenel , vicomtesse de Bëlière , etc. ,
veuve de Tanneguy Duchâtel , jouit du domaine de
Châtillon comme ayant la garde noble de Gillette,
Jeanne et Françoise ses filles.
Anne de Bretagne, reine de France, femme de
Charles YIII , eut quelque temps la seigneurie de
Châtillon, par lettres données aux Montils-les-Tours
le 4 octobre i493. Mais sur les représentations qu'on
fit au roi que ce château convenait peu »i la grandeur
d'une reine de France, il lui donna en échange, le i8
mai i494> le château de Meun-sur-Yeurre.
Jeanne de France , première femme de Louis XII,
après la dissolution de son mariage, en 1498, obtint
pareillement Châtillon et son domaine pendant sa vie.
Le roi y ajouta le duché de Berri et Châteauneuf-sur-
Loire. Elle mourut le 4 février i5o4.
Charles Solar, communément appelé du Solier ou
de Soliers, comte de Moret, seigneur de la Carte,
gentilhomme de la chambre du roi, fut seigneur de
Châtillon après Jeanne de France. Il mourut le i^^
février i55is, et eut sa sépulture aux Minimes du
Plessis.
Florent Guyot de Lessart , dont nous avons fait
mention au dixième livre de notre Histoire, ayant été
obligé, en i589, de remettre son gouvernement de
Saumur entre les maitis du roi de Navarre par ordre
de Henri IH , reçut de lui comme indemnité à titre
^O HISTOIRE I>E TOURAINE.
d'engagiste, la seigneurie et le domaine de Châtillon.
George Isorë, marquis d'Hervaut, lieutenant-gé-
néral pour le roi en Touraine, a pareillement joui de
Châtillon par engagement.
Le président de Barillon Ta depuis obtenu au même
titre , ainsi que son gendre
Jean-Baptiste Amelot, maître des requêtes. Cette
terre est ainsi restée dans la même famille jusqu'à
Antoine-Jean Amelot de Chaillou , ancien ministre-
d'état, qui la possédait encore en 1789.
Lorsqu'il n'y avait point à Châtillon de seigneur
engagiste, le roi y plaçait des gouverneurs particu-?
liers ; ainsi quand les princes et les principaux sei-
gneurs se retirèrent de la cour, en 1616, le seigneur
de la Mardelle, gentilhomme de Touraine, reçut du
maréchal de Souvré, gouverneur de la province,
l'ordre d'aller prendre le commandement de Châtil-
lon , et il fut porté en cette qualité sur l'état du roi à
raison de cent livres par mois pour ses gages, et de
deux cent trente-trois livres pour un sergent et dix-
neuf soldats.
Châtillon avait une collégiale desservie par un
prieur et douze chanoines. On tient que son église
fut bâtie vers l'an gSg par l'un des principaux habi-
tans qui y mit des reliques de saint Oustille, dont
p.ichard I", archevêque de Bourges, lui avait fait pré-
sent. Il y avait en outre un couvent d'Augustins et un
de religieuses Ursulines.
CHENONCEAUX. 7I
CHENONCEAUX, chatelleiîie.
Chenonceaux n'est qu'un très-petit bourg situe sur
sur la rive droite du Cher, à huit Heues de Tours, et
à une heue et demie au-dessus de Bléré. Quoique
son château n'eût que le titre de chatellenie qui lui
fut donne en i5i3 par lettres patentes de Louis XIÎ,
son architecture et les personnages qui l'ont succes-
sivement habité ont rendu ce lieu assez célèbre
pour qu'il ne nous fût pas permis de le passer sous
silence. Heureusement pour la Touraine, dont il est
aujourd'hui l'édifice le plus remarquable en ce genre,
il n'a point souffert les atteintes de la révolution,
dont il paraît avoir été préservé par le respect qu'im-
primaient à tout ce qui l'environnait l'âge, les vertus
et la bienfaisance de celle qui la possédait alors ,
madame Dupin , qui y a doucement terminé sa longue
et brillante carrière en 1799, dans sa quatre-vingt-
treizième année.
IjB terre de Chenonceaux, avant d'avoir acquis la
célébrité dont elle jouit encore, avait appartenu à
une famille du nom de Marques, originaire d'Au-
vergne, famille qui n'était pas sans illustration puis-
qu'on assure qu'elle était alliée à la maison de France.
Nous voyons, par des titres originaux, qu'en 1274
un Guillaume Marques fît don aux religieux de
Montoussan des fiefs de Bléré, Franciieil et Chisseau.
Jean Marques, premier du nom, seigneur de Che-
nonceaux , prit parti , sous le règne de Charles VI ,
Hîi HISTOIRTî DE TOTJKAIKE.
contre le dauphin , que la faction de Bourgogne venait
de faire déclarer déchu de ses droits à la couronne ,
et reçut garnison anglaise dans son château. Mais il
ne tarda pas à subir la peine de sa félonie, car le
maréchal Laval de Bois-Dauphin ayant battu les
Anglais dans les prairies de Vintin , auprès de Che-
nonceaux , rasa les fortifications du château , et en fit
couper les bois à hauteur d'infamie. Il paraît qu il
mourut en i43o.
Jean Marques, deuxième du nom, seigneur des
Odets, de Bléré, du Couldray, fit hommage au roi,
le 12 mai i43i, pour la terre de Chenonceaux.
En 1432 il obtint des lettres patentes qui l'autori-
saient à relever les fortifications de son château, à
raison des services qu'il avait rendus à l'état, et en
considération de sa parenté avec la maison de France.
Il mourut en 1460.
Pierre Marques, fils du précédent, rendit au roi,
le 3i janvier i46i, un pareil hommage pour les
terres de Chenonceaux, les Odets , le Couldray et le
bourg de Saint- Martin-le-Beau. Il fît construire au
milieu du Cher un moulin dont nous aurons bientôt
occasion de parler. Ce fut lui qui, en 1496, vendit
Chenonceaux à Thomas Bohier , l'un de ses créan-
ciers. Il avait épousé Martine, fille de Pierre Bérard,
seigneur de Bléré et de Chissay.
Thomas Bohier, baron de Saint-Cyergue, seigneur
de Chenonceaux, la Tour-Boyer, JNazelles, Chissay,
Saint-Martin-le-Beau , général des finances de Nor-
mandie, lieutenant-général des armées, vice-roi de
CHENOTN'CEAtJX. 7 3
Naples, etc., était fils d'Astremoine Boîiier, ou le
Boiiyer, originaire d'Auvergne, et de Béraulde Du-
prat, tante du fameux chancelier de ce nom, cir-
constance qui n'aura pas nui à Faccroissement de sa
fortune sous François I". Elle avait été commencée
par son mariage avec Catherine, fille de Guillaume
Briçonnet, qui, veuf, embrassa l'état ecclésiastique,
et fut connu sous le nom de cardinal de Saint-Malo.
Bohier, en i5i5, jeta, sur les fondemens du moulin
que Pierre Marques avait fait établir sur la rivière ,
ceux du nouveau château qu'il fît élever, au lieu de
celui qui existait anciennement. L'église du bourg se
trouvant au milieu de ses avenues, on assure qu'il la
fit incendier, et qu'il la rebâtit à ses frais au lieu où
elle est encore. Elle fut consacrée par son beau-père
le cardinal de Saint-Malo, en vertu d'une bulle de
Léon X; mais chargé avec Lautrec de poursuivre la
conquête du Milanais, Bohier ne put, pendant son
long séjour çn Italie, s'occuper que passagèrement de
cette importante construction. Le soin d'en diriger
les travaux fut laissé à son épouse , et elle ne montra
pas moins de goût que son mari dans l'exécution de
leurs plans. En examinant bien les détails d'archi-
tecture du château, on y prend comme sur le fait la
révolution la plus importante dans les arts, c'est-à-
dire le passage du style gothique au style grec, ou
plutôt au style italien des Bramante et des Michel-
Ange. En effet, jamais le style gothique ne fut si
parfait qu'au moment où il fut abandonné pour
l'italien , qui de son côté ne fut jamais plus pur qu'à
^4 HISTOIRE DE TOUR AINE.
Fepoque où il fut adopté. Partout on voit le chiffre de
Bohier ainsi que sa devise : S'il vient à point m'en
souviendra. François I", par lettres patentes de 1 5 1 7,
lui accorda la permission de construire un pont sur
le Cher ; mais trop occupé de l'achèvement de l'édi-
fice principal, il ne put profiter de cette faveur. Il
mourut dans le Milanais le i4 mars i^iZ ou i5?4
nouv. style. Son corps fut rapporté d'Italie à Tours et
inhumé dans l'église paroissiale de Saint-Saturnin, où
il s'était fait construire une chapelle enrichie d'or et
d'azur. Il y avait son tombeau en marbre blanc. Les
restes de son épouse , morte deux ans après lui , y
furent également déposés, et on y lisait leurs épita-
phes. Ce monument n'a été détruit qu'à l'époque de
la révolution. De son mariage avec Catherine Briçon-
net naquirent cinq fils : 1° Antoine, qui suit ; a* Fran-
çois , évêque de Saint-Malo ; 3** Guillaume , bailli du
Cotentin; 4** Gilles, évêque d'Agde; 5** un autre An-
toine, gouverneur de Touraine.
Antoine Bohier , baron de Saint-Cyergue , la Tour-
Bohier, la Chesnaye, Saint-Martin-le-Beau , Augy,
est encore traité de seigneur de Chenonceaux dans le
testament de Guillaume Briçonnet, évêque deMeaux,
daté du Ji janvier i533. Ce ne fut effectivement
qu'en 1 535 qu'il s'en dessaisit en faveur de François I".
Guy Bretonneau , p. 38 de son Histoire généalogique
de la maison Briçonnet , nous apprend que « Bohier
«ayant, en son voyage d'Italie, fait de grandes dé-
cc penses pour le service de Sa Majesté , se trouva re-
ff devable de grand nombre de deniers après sa mort. »
CHENONCEAUX. 7?
Ce qui est exact. Mais il ajoute : « Sa veuve donna ce
« beau château tle Chenonceaux au roi Henri II pour
« ia somme de cent mille livres. Catherine de Médieis,
« veuve de Henri , qui première le posséda , l'aug-
t< menta de plusieurs édifices fort magnifiques. » Et
ici il commet un double anachronisme; car comment
la veuve de Bohier, morte en iSaô, aurait- elle pu
vendre son château à Henri II, qui ne régna qu'en
1 547 ? Ensuite on va voir que Catherine ne le posséda
pas avant Diane de Poitiers. Thomas Bohier s'étant
en effet trouvé redevoir au roi cent quatre-vingt-dix
mille livres, son fils Antoine fut obhgé d'en tenir
compte , et la terre de Chenonceaux fit partie de cette
restitution, ou plutôt en fut le prétexte. Anne de Mont-
morenci en vint prendre possession pour le roi en 1 535.
Diane de Poitiers était fille de Jean de Poitiers ,
comte de Saint-Vallier,et descendait ainsi de Marie,
fille naturelle de Louis XI, qui épousa Aymar de Poi-
tiers, comte de Saint -Vallier. Aussitôt la mort de
François I", en 1 547, Henri II, son successeur, donna
à Diane sa maîtresse le château de Chenonceaux et
le duché de Valentinois. Les héritiers d'Antoine Bohier
ayant élevé des réclamations , et voulant revenir sur
la cession faite à François r% Diane, en i555, ra-
cheta Chenonceaux. Ainsi de Thou n'a pas été bien
informé quand il a dit au XXIIP livre de son histoire,
tome III, page 374 : « Astremoine (i) Bohier et Ca-
« therine Briçonnet avaient bâti cette maison de plai-
(i) De Tbou s'est encore trompé en ceci; c'est Thomas qu'il faut lire.
76 HISTOIRE DE TOtJRA.lîN'E.
« sance, que le baron de Saint-Cyergue leur fils avait
« donnée, par une folle vanité, à la duchesse, etc. »
Aussitôt que Diane fut en posssesion paisible de Che-
nonceaux, elle fît abattre et reconstruire la façade du
bâtiment au midi due à Th. Bohier. Elle fit également
exécuter les neuf arches du pont projeté trente-huit
ans auparavant, et qui du corps-de-logis conduit sur
la rive gauche du Cher. C'est dans les premières piles
de ce pont , qui sont creuses , que sont pratiquées les
cuisines du château; mais elle n'eut pas le temps de
donner k ce séjour autant d'éclat et de magnificence
qu'elle l'aurait désiré, et que lui permettaient son
goût et sa fortune, puisque peu d'années après elle
s'en vit dépouillée par la violence autant que par la
frayeur que lui inspirait le ressentiment d'une rivale,
jalouse, vindicative et toute-puissante.
Catherine de Médicis , veuve de Henri II , était
mère de François II, de Charles IX et de Henri III.
En i55o elle avait acheté de Charles de La Roche-
foucauld et de sa femme Antoinette d'Amboise la
terre de Chaumont- sur -Loire pour le prix de cent
vingt mille livres. Henri 11 étant mort en i559, elle
put alors sans contrainte faire éclater sa haine long-
temps comprimée contre celle qui avait été l'objet
constant des affections de son époux. Maîtresse ab-
solue sous le règne momentané de son fils François II,
comme elle le fut sous les deux règnes suivans, elle
contraignit la duchesse de Valenlinois de lui céder
Chenonceaux en retour de Chaumont. La ratification
de cet échange forcé ne fut fait à Chinon que le 10
CHENONCEA.UX. 77
mai i56o, quoique la duchesse eût déjà fait prendre
possession de Chaumont, dès le 27 avril précédent,
par son secrétaire Canette, tant elle redoutait la ven-
geance de l'Italienne Catherine. Le 1 7 mai de Tannée
suivante, elle obtint les lettres de reconnaissance de
sa foi et hommage. Dès le moment que Catherine fut
en possession de Chenonceaux, elle en fit l'objet d'une
prédilection toute particulière. Elle imagina de faire
couvrir le pont que Diane avait fait construire, et de
former ainsi une belle et longue galerie, à l'aide de
laquelle on est porté sans s'en apercevoir sur la rive
opposée. C'est à elle qu'on doit le grand bâtiment qui
est au levant de l'avant-cour, les douves et les ter-
rasses. Ce fut aussi par elle que les jardins furent
agrandis et embellis. On admirait surtout ce parc ma-
jestueux qui régnait le long du Cher, avant que l'ac-
cumulation des années eût fait sentir la nécessité d'en
renouveler les arbres séculaires , auxquels les années
à leur tour ne tarderont pas à rendre leur première
beauté. Userait sans intérêt de relater ici toutes les cir-
constances où la cour vint visiter ces beaux lieux, plus
faits pour des âmes douces et vertueuses que pour celle
qui avait été froidement l'auteur et le témoin de
l'horrible journée de Saint- Barthélemi. Nous dirons
cependant qu'en 1577 Henri III conçut le projet
d'imposer un autre nom à Chenonceaux. Il était venu
y passer quelques jours , lorsqu'il y apprit que ses
troupes s'étaient emparées de la ville d'Issoire et de
quelques autres places occupées par les protestans.
Dans l'effusion de sa joie, il voulut que dorénavant
J$ HISTOIRE DE TOTJRAINE.
Chenonceaux fût appelé le château de Bonnes-Nou-
velles ; mais ce caprice de moment ne put l'emporter
sur la force de l'habitude, et le château conserva son
nom* Catherine termina ses jours à Blois le 5 janvier
1 589, ayant avant sa mort légué Chenonceaux à Louise
de Vaudemont, femme de son fils Henri III.
Louise de Lorraine était fille aînée de Nicolas duc
de Mercœur , comte de Vaudemont , et de Marguerite
d'Egmont sa première femme. Pendant la grande fa-
veur des Guise, elle épousa Henri HI le i5 février
1575. Aussitôt la mort de Catherine, elle entra en
possession de Chenonceaux , et s'occupa de la con-
servation de cette belle propriété au milieu de la
guerre qui désolait l'intérieur de la France ; car nous
voyons que dès le i"' février iSSq elle écrivit à Gilles
de Faverolles, capitaine de deux cents hommes de
guerre à pied, de veiller à ce qu'il n'y fût fait aucune
violence. Ce fut là qu'elle se retira lorsque, six mois
après, son époux fut tombé sous le fer de l'infâme
Jacques Clément. Les malheurs du temps l'empêchè-
rent sans doute de suivre l'exécution des plans d'em-
bellissemens tracés par Catherine et consignés par
Androuet Ducerceau dans son ouvrage intitulé : Les
plus excellens bâtimens de France. Elle mourut à
Moulins le 29 février 1601. Après elle Chenonceaux
passa dans la maison de Vendôme.
César, duc de Yendôme, fils naturel de Henri IV
et de Gabrielle d'Estrées , né en 1 594 , fut légitimé
l'année suivante. En 1 609 , à l'âge de seize ans , il
épousa Françoise , fille de Philippe - Emmanuel de
CHKWOîTCEATIX. 7^
Lorraine, duc de Mercœur, nièce de Louise de Vau-
dcmont ,à qui Henri IV alla lui-même à Chenonceaux
porter la nouvelle de ce mariage. Celle-ci ^ n'ayant
point eu d'enfans, fît à Tëgard de sa nièce ce que
Catherine de Médicis avait fait pour elle, c'est-à-dire
qu elle lui donna sa terre de Chenonceaux pour en
jouir après sa mort, qui ne tarda pas à l'en mettre ea
possession; car, en 1612 , elle avait cessé de vivre.
César, qui mourut en i665, eut de ce mariage Louis,
mort cardinal en 1669; François, duc de Beaufort,
et Elisabeth , femme de Charles- Amédée de Savoie.
Louis- Joseph , duc de Vendôme , généralissime des
armées de France et d'Espagne, était fils de Louis,
dont il est parlé ci- dessus. Son père étant devenu
veuf, avait embrassé l'état ecclésiastique, et fut créé
cardinal de Vendôme en 1667. Louis-Joseph et Phi-
lippe son frère , grand-prieur de France , lui ayant
succédé, l'aîné eut en partage la terre de Chenon-
ceaux. Quoique né en" i654, il ne se maria qu'en
1710a Marie- Anne de Bourbon-Condé , à laquelle,
par son contrat de mariage, il fît don de Chenon-»
ceaux. 11 mourut sans enfans le 10 juin 1712, et la
duchesse son épouse en 1718. La princesse de Condë
sa mère hérita d'elle Chenonceaux, et le vendit, en
1720, au duc de Bourbon , qui n'y vint qu'une seule
fois en allant conduire mademoiselle de Vermandois
sa sœur à l'abbaye de Beaumont-lcs-Tours, dont elle
fut depuis abbesse. Le duc revendit Chenonceaux à
M. Dupin en 1733.
Claude Dupin , issu d'une ancienne famille noble
I
8o HISTOIRE DE TOURAINE.
du Berri , avait commencé par être capitaine au régi-
ment de Noailles, cavalerie; mais une affaire d'honneur
l'ayant obligé de quitter le service , il obtint un bon
de fermier-général , après avoir épousé mademoiselle
Louise - Marie - Madeleine - Guillaume Defontaine.
M. Dupin est connu dans la littérature par ses obser-
vations sur l'Esprit des Lois , réfutation la meilleure
sans contredit de toutes celles qu'a fait naître cet
ouvrage justement célèbre. Montesquieu en fut telle-
ment alarmé , qu'il interposa le crédit de la marquise
de Pompadour pour amener M. Dupin à la suppres-
sion de l'édition tout entière. Cinq ou six exemplaires
seulement ont échappé à cet acte de déférence envers
le grand homme dont il était l'ami , et sont par con-
séquent très-rares aujourd'hui. L'ouvrage a pour titre :
Observations sur un livre intitulé : de V Esprit des
Lois^ Paris (1753), 3 vol. in-8.
Il est digne de remarque que chaque siècle, depuis
le quinzième , offre à Chenonceaux sa physionomie
particulière. Manoir d'une famille factieuse pendant
les guerres que l'Anglais faisait à la France ; sous
François 1", monument de la protection que ce prince
accordait aux arts, ainsi que de son goût pour les
plaisirs ; témoin de la magnificence et des intrigues de
Catherine de Médicis , et peu de temps après du gé-
néreux pardon accordé par le grand Henri aux fana-
tiques qui osaient lui disputer un trône dont il fit la
gloire et les délices ; retraite au seizième siècle de la
pieuse veuve de Henri III , et au dix-septième de l'un
des plus grands capitaines du règne de Louis XIV;
CHENONCEA.UX. 8 1
il était réservé à M. et à madame Dupin de marquer
à leur tour l'époque brillante du diK-huitième siècle,
en réunissant dans leur riant asile les personnages les
plus illustres ou les plus aimables de cette période si
féconde en grands hommes, parmi lesquels se faisaient
encore remarquer M. Dupin par son goût et son éru-
dition , madame Dupin par sa beauté , ses grâces et
son esprit. Là J.-J. Rousseau , qui leur fut attaché
quelque temps en qualité de secrétaire , composa plu-
sieurs' pièces pour le théâtre du château , sur lequel
fut joué pour la première fois le Devin de Village. On
connaît ces vers empreints d'une douce mélancolie,
qu'il a intitulés l'Allée de Silvie , du nom d'une des
allées du parc :
Qu'à m'égarer dans ces bocages
Mon cœur goûte de voluptés!
Que je me plais sous ces ombrages!
Que j'aime ces flots argentés ! etc.
Chenonceaux réunissait habituellement dans la belle
saison l'élite de ce que les lettres, les sciences et les
arts, offraient de plus distingué, tels que Fontenelle,
Mairan, Buffon, le comte de Tressan, Montesquieu,
le marquis de Saint-Aulaire , l'abbé de Saint-Pierre ,
Mably, Condillac son frère, MM. de Sainte-Palaye,
lord Bollnghrocke et Voltaire lui-même. Au mi-
lieu de tant de célèbres personnages brillaient aussi
mesdames de Boufflers, de Luxembourg, de Rohan-
Chabot, de Forcalquicr, de Mlrepoix, de Tencin et
la marquise du DcffaiU, tons attirés, moins peut-être
3. G
89. HISTOIRK DE TOimAlNE.
par le charme des lieux que par celui de la société de
leurs maitres.
A l'époque de la révolution , madame Dupia se re-
tira à ChenoneeauXyOÙ, comme nous l'a vous dit, elle
mourut âgée de quatre-vingt-treize ans.
Le c^mte René de Villeneuve , son petit-ruevieu , a
eu en partage la terre de Cliewonceaux , qui semble
n*avoir pas changé de possesseur , grâce à l'affabilité
et aux prévenances dont sont l'objet les étrangers , l^s
savans, les artistes, enfin tous ceux auxquels tant
d'intéressans souvenirs inspirent le désir de visiter ce
romantique séjour.
CHmON, COMTÉ.
La ville de Chinon ( Cai'no, Chinones) est située
sur la droite de la Vienne au nord - est de Tours ,
dont elle est éloignée de dix lieues. Le château est
sur la hauteur qui commande la ville et la campagne.
Quoique le temps de sa fondation soit fort incertain,
il n'en est pas moins vrai qu'elle était déjà une ville
assez considérable dans le cinquième siècle, lorsque
les Francs commencèrent à s'établir dans les Gaules.
Dès Tan 462 elle fut assiégée par ^Egidius-Afranius,
gouverneur des Gaules pour les Romains , siège dont
nous avons donné les détails dans le premier livre de
notre Histoire, et qui indique suffisamment qu'il de-
vait alors y avoir un château ou du moins un fort
pour la défense de la ville. Ainsi ce château n'avait
pu être l'ouvrage que des Romains, puisque les Francs
CHINON. 83
n'avaient pas encore pénétré dans ces contrées. Mais
il était sans doute peu considérable et devait être à
peu près ruiné , lorsque , suivant d'Argenlré, Thibaut
le-Tricheur, premier comte héréditaire de Touraine,
le fît reconstruire à l'aide des grands biens dont il
avait hérité, en 953 , de son petit-fîls Drogon,'duc de
Bretagne. Henri II , roi d'Angleterre et comte de Tou-
raine, le fît fortifier pour y déposer ses trésors. Phi-
lippe-Auguste, l'ayant repris sur les Anglais en 1 204,
y ajouta de nouvelles fortifications. Enfin le roi Char-
les YII y fit bâtir la grosse tour du château appelée
d'Argenton, ainsi que celle qui était auprès de la porte
des Prés. Il fit aussi renfermer la ville de murailles gar-
nies de tours , dans le temps où c'était presque la seule
place un peu forte qui lui restât. Il y ajouta les portes
de la Barre , du Vieux-Marché , de Verdun et la Bas-
tille du pont.
Après la mort de Thibaut, Cliinon tomba dans le
partage d'Emme ou Emmeline sa fille , mariée à Guil-
laume III , duc de Guienne et comte de Poitou. La
Chroiîique de Maillezais rapporte qu'Emmeline ayant
conçu de la jalousie contre la vicomtesse de Thogars,
à laquelle le comte faisait une cour trop assidue, la
rencontra un jour dans la campagne, et après l'avoir
accablée d'outrages , la livra à la discrétion de ses
palefreniers. Craignant la colère de son niari, elle se
tiiU ensuite soigneusement renfermée dans son châ-
teau de Chinon : mais le faible Guillaume ne songea
point à venger l'affront fait à la vicomtesse.
Son neveu Eudes II, comte de Touraine , fut depuis
6.
{54 HISTOIRK DE TOURAIJVK.
mis en possession de cette place , que Thibaut III
donna pour sa rançon à Geoffroy-Martel , ainsi qu'on
l'a vu dans le cours de notre Histoire sur l'année io44-
Geoffroy-le-Bel , comte d'Anjou , donna par sou
testament à Geoffroy Plantagenet, son second fils, la
ville et le château de Chinon avec Loudun et Mire-
beau, en attendant qu'il fût en possession des trois
provinces de Touraine , d'Anjoia et du Maine, qui de-
vaient lui appartenir lorsque son frère Henri serait
paisible possesseur du trône d'Angleterre; mais Henri II,
qui ne voulait point de partage , passa la mer en
1 1 56 , assiégea et prit la ville et le château de Chi-
non. Philippe- Auguste les réunit depuis à la cou-
ronne.
Chinon fut pris en i4i^ par Jean duc de Bour-
gogne pendant les guerres des Bourguignons et des
Armagnacs. La paix s'étanl faite entre les deux mai-
sons , le duc Jean s'obligea , par le traité d'Arras du
mois de septembre r4i45 ^^^ rendre Chinon au roi de
France. Cependant on fut obligé d'en venir à la force
ouverte pour la retirer de ses mains. Raoul de Gau-
court rassembla des troupes à ses frais, l'assiégea et
la réduisit sous l'obéissance du roi , ayant employé à
cette entreprise plus de douze mille écus d'or, dont
Louis XI donna depuis ses lettres de reconnaissance
a Charles de Gaucourt son fils.
Après la mort de Charles VII , Louis XI donna
Chinon et les émolumens du grenier à sel à la reine
sa mère pour surcroît de douaire. Les lettres en furent
expédiées à Maillé le 6 octobre i46t.
CHINON. 85
Ce fut en ce lieu que François T', duc de Bretagne,
rendit foi et hommage à Charles VI pour le duché de
Bretagne et le comté de Montfort, le i4 mars i445.
I^ domaine fut engagé à Henri de Lorraine, duc de
Guise, avec Issoudun et Vierzon , par lettres du 4
juillet i58i, pour treize mille trois cent trente-trois
écus un tiers, ou quarante mille livres, qui furent
remhoursés au prince de Join ville en 1616 par le duc
de Bourbon, des mains duquel il repassa en 1629
dans celles du roi.
Le cardinal de Richelieu , qui convoitait ce do-
maine pour composer le duché qu'il avait le projet
de faire créer en son nom, et qui ne voulait pas en
devenir possesseur à titre d'engagiste, comme l'avaient
été les précédens seigneurs, en fît opérer par le roi
l'échange avec Louise-Marguerite de Lorraine , prin-
cesse de Conti , contre d'autres terres , au nombre
desquelles figure une principauté de Chateau-Regnault
qui nous est inconnue. Ainsi, quoique peu timoré
de son naturel, n'osant pas cependant faire person-
nellement l'acquisition d'un domaine royal, il la fit
faire par un prête- nom, qui la lui rétrocéda dès
le jour suivant- au même prix de cent dix -neuf
mille trois cent vingt livres. Ce domaine et celui de
l'Ile-Bouchard , que le cardinal avait acheté du duc
de La ïrémouille, formèrent la portion la plus con-
sidérable du duché qui fut érigé, dans le cours de la
même année, sous l'appellation de Richelieu. Jusque-là
le château de Chinon n'avait pas cessé de faire partie
du domaine de la couronne.
86 HISTOIRE DE TOUR4JTfE.
François, duc d'Anjou, en 1576, obtint en aug-
mentation d'apanage le duché de Touraine, dont on
privait ainsi Marie Stuart, veuve de François II, re-
tirée dans son royaume d'Ecosse. Ce prince ayant été
abusivement autorisé à aliéner certaines parties du
domaine de son apanage, vendit ou plutôt engagea,
le 4 juillet i58i, différentes terres qui dépendaient
du château de Chinon.
Henri I" de Lorraine, duc de Guise, prince de
Joinville , fils de François~le-Balafré , se rendit acqué-
reur de ces aliénations.
Henri II de Lorraine , duc de Chevreuse , succéda
à son père en i588 dans la seigneurie de Chinon, et
la vendit, en 161 6, au duc de Bourbon.
Louis m, duc de Bourbon, la posséda jusqu'en
1629, époque où, à l'instigation du cardinal, Louis XIII
la lui retira pour la donner, en échange d'autres pro-
priétés , à la princesse de Conti.
Louise-Marguerite de Lorraine, princesse de Conti,
vendit , le 20 février i63i, à Guillaume Millet, prête-
nom du cardinal de Richelieu, le château de Chinon
et ses dépendances.
Armand-Jean Duplessis, cardinal de Richelieu, de-
vint propriétaire du château et du domaine de Chi-
non, en vertu de la déclaration de command faite à
son profit par Guillaume Millet, qui les lui rétrocéda,
ainsi que nous l'avons dit plus haut.
Armand -Jean Wignerod fut substitué au nom et
aux armes de Duplessis-Richelieu par le cardinal son
grand-oncle , et devint, en sa qualité de duc de Ri-
CHINON. *^' 87
chelieu, seigneur de Chinon. Il mourut en 1715, âgé
fie quatre-vingt-six ans.
Louis-Fran roi s- Armand Duplcssis, duc de Riche-
lieu, maréchal de France, né en 1696, mourut le 8
août 1788, âgé de quatre-vingt-douze ans.
Louis-Sophie-Antoine Duplessis-Richelieu , fut d'a-
bord connu sous le nom de duc de Fronsac, et devint
duc de Richelieu après la mort du maréchal. Son fils
0Îné porta le nom de comte de Chinon. Celui-ci , de*
venu à son tour dac de Richelieu, passa au service
de Russie, où il se fît connaître sous les rapports les
plus favorables comme gouverneur de la province
d^Astracan. Rentré en France après la restauration, il
y est mort président du conseil des ministres , ne lais-
sant point d'enfans de son épouse N. de Rochechouart.
En lui s'est éteinte la branche masculine des Duples*
sis-Richelieu.
Nous trouvons, pour gouverneurs des ville et chA-
teau de Chinon ,
Etienne de Tours, qui y fut placé en cette quâhté
l'an 1 167 par Henri II, roi d'Angleterre.
Robert de Turnham , seigneur anglais , sénéchal
des trois provinces.
Aimery, vicomte de Thouars, sénéchal des mêmes
provinces, nommé par Jean-sans-Terre en 1 1 99 j mais
contraint de se retirer au mois d'octobre de l'année
suivante.
Roger de Lascy, Anglais, fait prisonnier quand
Philippe-Auguste prit la ville.
Guillaume des Roches, sénéchal héréditaire des
88 HISTOIBE DE TOURAINE.
trois provinces en 1 204. Tous les autres sénéchaux
héréditaires eurent ce même gouvernement.
Jean Pastoureau , dit Tailloche, par nomination du
duc de Bourgogne en i4i3.
Guillaume de Remeneuil , bailli des ressorts et
exemptions de Touraine, nommé par le roi en i4i4?
contraignit par la force Jean Pastoureau de lui re-
mettre ce gouvernement.
Louis de France , duc de Guienne , l'obtint par
lettres du mois d'avril i4i5. Il mourut la même an-
née le ) 8 décembre. La ville ayant été donnée en
otage l'an i433 à Artus III, comte de Richemont,
connétable de France , il y mit pour gouverneur Guil-
laume Bellier ; mais celui-ci , manquant à la foi qu'il
avait jurée au connétable, fît, le i3 mars i4^6, une
ouverture dans les murs de la ville , dont il donna
l'entrée aux troupes du roi , qui s'en emparèrent mal-
gré la présence de Marguerite de Bourgogne, femme
du connétable, qui s'y était retirée.
Raoul de Gaucourt , premier chambellan de Char-
les VII, était gouverneur de Chinon en i43î2. Ce fut
son lieutenant , Olivier Frétard , qui pendant la nuit
facilita l'entrée du château au sire de Bueil et autres
conjurés pour enlever le sire de La Trémouille, mi-
nistre d''état et favori du roi qui se trouvait alors au
château.
Charles de Gaucourt , maréchal de France , gou ver-
neur de Paris et de Chinon , par lettres de Louis XI
du 10 décembre i463.
Philippe de Commines , chevalier , seigneur d'Ar-
CHINON. 89
genton, assez connu par ses mémoires, obtint ce gou-
vernement en 1477 > ayant sous son commandement
quatre-vingts liommes d'armes et quarante hommes
de trait. Il mourut le 17 octobre 1319.
Jean Tiercelin, seigneur dea Brosses. En i485 il
fut nommé avec l'archevêque de Tours, le sire de
Beaujeu et le comte de Dunois , exécuteur testamen-
taire de Charlotte de Savoie , veuve de Louis XI.
Adrien de Monberon, seigneur d'Archiac, cham-
bellan du roi Charles VIII.
N. Tiercelin, seigneur de la Roche -du -Maine.
Brantôme dit qu'en son absence les protestans enle-
vèrent Chinon par surprise , mais qu'il les en chassa
bientôt après.
François Leroy, seigneur de Chavigny , comte de
Clinchamp , lieutenant-de-roi en Touraine, nommé
par Henri III gouverneur de Chinon. Il mourut en
1606.
Jacques de Rouville succéda au précédent, son oncle
maternel, et mourut en 1628.
Chinon ayant été accordé au prince de Condé pour
sûreté du traité de paix fait à Loudun au mois d'avril
161 6, ce prince en donna le commandement à Ro^
chefort, gentilhomme de sa maison , qui, lorsqu'il eut
été arrêté , se jeta dedans pour le défendre.
Charles Tiercelin , seigneur de Ballon , maréchal-
de-camp, fut pourvu du gouvernement de Chinon en
1616, lorsque le prince de Condé eut prescrit à Ro-
chefort d'évacuer la place.
90 HISTOIRE DE TOURA.INE.
Charles ïiercelin j deuxième du nom , nommé aux
mêmes fonctions le i5 octobre 1619.
Louis de Bascle, capitaine de cent arquebusiers à
cheval, eut les gouvernemens de Chinon, Loudun,
Mirebeau et Faye-la-Vineuse. Il mourut à Chinon , où
il eut sa sépulture dans l'église de Saint-Maurice.
On remarque dans la commune de Cinais, voisine
de Chinon, les traces d'un ancien camp que, suivant
l'usage, on attribue aux Romains; mais, pouf peu
qu'on ait l'habitude de leurs divers genres de con-
struction et de la méthode de leur castramétation , on
voit facilement que ce travail ne remonte pas plus
haut que nos anciens comtes de Touraine , et que
c'est encore un ouvrage de Henri II , roi d'Angle-
terre , qui avait fait de Chinon la principale place
d'armes.
Il nous reste quelques monnaies d'argent frappées
à Chinon sous la seconde race, quoique, dans son
ti^ailé, Leblanc n'en ait pas fait mention. Nous en
possédons deux, dont l'une est une obole qui nous
semble appartenir au règne de Charles -le -Chauve,
époque où presque toutes les villes de France avaient
leur coin particulier. D'un côté on y voit une croix,
avec ces mots dans le cercle qui l'entoure : CAINONI
CASTRO, et au revers TVRON; ce qui ne permet
pas de la confondre avec les pièces émanées des mo-
nétaires.
La seconde est un denier d'argent que nous attri-
buons à Louis IV, fils de Louis-le-Bègue , les mon-
CHINON. 91
naies de ce dernier étant faciles à reconnaître au mo-
nogramme. Celle-ci a d'un côté la figure du roi , avec
ces mots à l'entour : LVDOVICYS REX , et au re-
vers une croix dans un cercle , autour duquel on lit
également : CAINONI CASTRO. Leblanc nous offre
Tempreinte d'un denier de ce même Louis IV, frappé
à Arras , tout-à-fait semblable au notre du coté de la
figure ; ce qui ne peut que nous confirmer dans notre
opinion.
L'église collégiale de Chinon, Saint-Mesme, Sanc-
tus-Maximus^ était une des plus anciennes de la pro-
vince quant à sa fondation , mais non quant à la con-
struction qui a dû être renouvelée, plusieurs fois.
C'était dans le principe un monastère situé hors la
ville , qui fut sécularisé vers le milieu du onzième
siècle. L'église de Saint-Martin , qui datait du sixième,
n'était alors qu'une petite chapelle , qui fut depuis
agrandie et convertie en paroisse. La ville s'élant suc-
cessivement accrue, les habitans, pour leur commo-
dité, firent bâtir la paroisse de Saint-Etienne, dont
le clocher fut fait aux frais de Charles VII, qui voulut
en cela seconder leur zèle. Ce fut également à lui
qu'on dut la construction de l'église de Saint-Jacques
dans le faubourg de ce nom. On croit que les églises
de Saint- Melaine et de Saint- Georges, qui étaient
dans l'intérieur du château , étaient l'ouvrage de
Henri II , roi d'Angleterre et comte de Touraine. On
y comptait en outre , indépendamment de l'hospice,
gouverné par des sœurs hospitalières, un couvent
9^ HISTOIRE DE TOURAINE.
d'Augustins et trois monastères de filles capucines ,
ursulines et calvairiennes.
Ce fut le même Henri II qui y établit la justice, et
qui l'ërigea en châtellenie royale , avec union des
villes de Candes, Champigny, La Haye, l'Ile-Bouchard,
Saint-Epain, Azay, Sainte-Maure et Bourgueil. Elle
était composée d'un lieutenant-général, un lieutenant
particulier, un lieutenant-criminel, un assesseur, huit
conseillers, un procureur et un avocat du roi, avec
un greffier. H y avait grenier à sel , maîtrise des eaux
et forêts , maréchaussée et mairie en titre d'office de-
puis la déclaration du roi de 1692.
Par l'étendue qu'occupent encore les ruines du châ-
teau de Chinon , on peut juger facilement quelle de-
vait être son importance. Quoique ces ruines semblent
aujourd'hui n'avoir formé qu'un tout , il n'en est pas
moins certain que leur ensemble se composait de trois
châteaux différens réunis dans la même enceinte ,
mais construits à trois diverses époques : la première
vers 950 , sous Thibaut-le-Tricheur ; la deuxième sous
Henri H, vers 11 60, et la dernière sous Philippe -
Auguste , sans compter les fortifications qui y furent
ajoutées sous le règne de Charles VH. Mais, ainsi que
tous les châteaux forts situés dans l'intérieur de la
France , celui-ci a été livré à la destruction rapide du
temps, lorsque le royaume n'a plus eu à craindre
d'être troublé par des guerres intestines. Telle est la
masse imposante de ces ruines, que peut-être plu-
sieurs siècles encore n'en auront pu faire disparaître
CINQ-MAARS- qS
les traces, s'ils ne sont secondés par la main des
hommes.
CINQ-MAARS, marquisat.
C'inq'Maars^SanctuS'Ikfedardiis) est une ancienne
baronnie qui fut érigée en marquisat vers i63o par
Louis Xin en faveur de Henri Ruzé , grand-écuyer,
fils du maréchal d'Effiat. Le bourg est situé à quatre
lieues ouest de la ville de Tours, entre le coteau et
la rive droite de la Loire. Grégoire de Tours, dans
la Vie de sainte Monégonde, nous apprend que de son
temps il se nommait Fi^ena , et que son église était
sous l'invocation de saint Médard , dont ce bourg lui-
même a fini par prendre le nom , qui depuis a été
dénaturé en celui de Saint -Mars, et enfin de Cinq-
Maars ou Cinq-Maars-la-Pile , à raison d'un monu-
ment dont nous parlerons après avoir dit un mot sur
les seigneurs de cette baronnie, dont plusieurs le
furent en même temps de la Guerche et de Maillé.
Hardouin est le premier dont nos anciens titres
fassent mention. On le voit présent avec Geoffroy son
frère et Jean-le-Pauvre, seigneur de Saint-Antoine-
du -Rocher, à une donation faite par Hardouin de
Maillé, premier du nom, à l'abbaye de Marmoutier
l'année que Philippe P*^ prit à femme Bertrade, épouse
de Foulques-Réchin , c'est-à-dire en 1092.
Hardouin H, fils du précédent, était un des prin-
cipaux favoris de Geoffroy-Planta genêt , comte de
Touraine, et fut un des cinq chevaliers qui l'accom-
#
94 HISTOIRE DE TOUIIAINE.
pagnèi'eiit, en iiay, lorsqu'il alla «\ Roqen épouser
Matlîilde, fille de Henri I", roi d'Angleterre.
Barthélemi était très -probablement fils de Har-
douin II. Il eut un procès avec le chapitre de Saint-
Martin, qui fut juge en 1178, en présence de Guil-
laume de Montsoreau , par le sénéchal du roi d'An-
gleterre et le prévôt de Tours, qui lui donnèrent gain
de cause. S.es enfans furent André, Pierre et Guil-
laume de Saint-Maars, chevaliers.
André épousa Marguerite , dont il eut Barthélemi.
Au mois de juillet 12.Q2, sur le point de partir pour
la Terre-Sainte, il se désista des droits de corvée qu'il
avait sur les habitans de Saint-Maars , sujets du cha-
pitre de Saint-Martin, qui avaient été adjugés à son
père par la sentence dont nous venons de parler. Bar-
thélemi son fils et Pierre son frère ratifièrent ensuite
cet abandon.
Barthélemi, deuxième du nom , nommé dans le titre
dont nous venons de parler , n'eut qu'une fille mariée
à Jean de l'Ile, fils de Barthélejni , troisième seigneur
de rile-Bouchard.
Jeai^ de l'Ile, chevalier, seigneur de Saint-Maars
et de ï-^ Guerche , du chef de sa fem^ie, n'eut que deux
es : Jeanae qui suit , et Eustache , épouse de Jean
de Maillé , seigneur de Clairvaux. Au mois d'avril
1 336 il coi^^titua une rente de quatre muids de fro-
ment -au chapitre de l'église de Tours , au profit de
l'Hotel-Dieu, moyennant cent dix livres tournois.
C'est ce Jean de l'Ile , mal à propos nommé sei-
gneur de l'Ile-Bouchard, qui, pour en abuser, poursui-
CINQ-MAABS. 1^5
vit, en 1 337, une jeune fille dont il causa la mort; «ar
pour échapper à sa brutalité , elle se précipita dans la
rivière. Cependant on n'osa pas l'inhumer à raison de
son suicide sans consulter le pape, dont l'histoire ne
nous a pas transmis la réponse.
Jeanne de l'Ile fut mariée à Bonabes de Rougé,
quatrième du nom. Par des lettres du 1 8 septembre
1^73, il donna pouvoir à deux chanoines de Saint-
Martin de terminer un différend qu'il avait avec le
<;hapitre. H mourut l'an 1377 , laissant Jean et Galiot
de Rougé, ainsi que deux filles. D'Argentré dit qu'il
combattit à la bataille de Poitiers et qu'il fut un des
otages du roi Jean.
Jean de Rougé, dievalier, baron de Saint-Maars
et de la Guerche , mourut sans enfans , laissant sa
succession à son frère.
Galiot de Rougé épousa Marguerite de Beauma-
noir, dont il eut Jean et Jeanne 4e Rougé, femme
d'Armet de Château-Giron, d'où vinrent Patry et une
filie nommée Valence , qui épousa Geoffroy d/e Châ-
teau-Giron.
Jean de Rougé, deuxième iiu nom, mourut le 8
février i4 1 ^ sans laisser d'enfaijsde Béatrix de Rieu|t
«on épouse.
Patry de Château-Giron , fils aîné d'Armet et de
Jeanne de Rougé, succéda à son oncle en i4i5. II
avait épousé Louise de Rohan dont il n'eut point
d'enfans. Ainsi la succession passa a Valence , dont
nous venons de parler.
Geoffroy de Château -Giron, Alias de Malétroil,
96 HISTOIRE DE TOURAINE.
mourut en i463. Il eut de Valence de Château-Giron
sa cousine, Jean, Gillette et Marguerite.
Jean de Chateau-Giron , dit de Malétroit, succéda
à son père en i463, et Tan i474 il échangea la ba-
ronnie de Saint-Maars av€c Louis de La Trémouille
et Marguerite d'Aniboise contre la seigneurie de Fou-
gerai en Bretagne.
Louis j fils de George de La Trémouille, dont nous
avons parlé à l'article des seigneurs d'Amboise.
Louis II de La Trémouille , dit le chevalier sans
reproche, tué à la bataille de Pavie en 15^5. Après
lui cette seigneurie passa à
François Dufor , chevalier, qui comparut en idSq
au procès-verbal de la seconde réformation de la cou-
tume de Touraine en qualité de Seigneur de Cinq-
Maars-la-Pile , auquel succéda "*
Mathurin de Broc , dont nous ne connaissons que
le nom. Celui-ci paraît l'avoir vendue à Martin Ruzé,
grand-maître des mines de France , qui , étant mort
sans enfans, laissa tous ses biens à Antoine Coëffier
d'Effiat son petit-neveu , à la condition de prendre le
nom et les armes de Ruzé. Cette famille l'a possédée
jusqu'en 1 768 , époque cil elle la vendit au duc de
Choiseul, qui l'échangea ensuite avec le duc de Luynes
contre la terre de la Bourdaisière .
Il nous reste maintenant à parler du monument
connu sous le nom de Pile-Cinq-Maars ou Saint-Mars ,
qui a été l'objet des recherches de plusieurs antiquai-
res, et qui l'est encore de la curiosité de tous ceux
qui le voient.
CINQ-MAARS. 97
Nous dirons d'abord que c'est une pyramide qua-
drangulaire de quatre-vingt-six pieds six pouces de
hauteur, et de douze pieds six pouces de largeur sur
chacune de ses quatre faces. Cette largeur est égale
depuis la base jusqu'au sommet, qui est surmonté de
cinq piliers de dix pieds de haut , assez semblables à
ceux qu'on remarque sur les mosquées. Celui du mi-
lieu a été renversé par quelque ouragan, et ceux des
quatre angles sont seuls restés debout. Cette pile est
un massif plein entièrement composé de briques de
treize pouces trois lignes de longueur sur huit pouces
neuf lignes de largeur et un pouce et demi d'épais-
seur, séparées par des couches de mortier à chaux et
à ciment dans l'épaisseur d'un pouce.
La pile est placée sur le penchant du coteau , et
l'on remarque sur la face qui regarde le midi ou la
Loire onze carreaux ou tableaux figurés avec des
briques saillantes d'une couleur un peu plus pâle , que
l'on a pris pour des armoiries, quoiqu'il n'y ait aucun
signe de blason, mais seulement des comparlimens en
forme de mosaïque , disposés deux par deux , excepté
celui du quatrième rang , qui est seul et semblable
aux deux qui le précèdent.
Ce qui doit étonner, c'est qu'aucun auteur un peu
ancien n'ait parlé de cette pyramide. De là l'incerti-
tude oii l'on est encore et sur l'époque et sur l'objet
de sa construction. Le titre le plus ancien où nous
voyons qu'il en soit fait mention en ces mots : in
parochiâ Sancti Medardi de Pila , ne date que de
l'an 1218. Ainsi il est évident que le monument exis-
3. n
g8 HISTOIRE DE TOUR AINE.
tait avant cette époque. Les uns ont cru qu'il n'était
pas de beaucoup antérieur; d'autres, au contraire,
toujours tentés de voir partout l'ouvrage des Romains ,
lors de la conquête des Gaules, ont prétendu y re-
connaître leur manière de bâtir. Ainsi, au lieu de
Saint-Médard, nom primitif, on a fait Saint-Mars et
ensuite Cinq-Maars. Il n'en a pas fallu davantage
pour assigner au monument des origines analogues à
ces nouveaux noms. Selon les uns cette pyramide fut
élevée par César en mémoire d'une victoire éclatante
qu'il aurait remportée sur ces bords. Malheureuse-
ment l'histoire ne nous offre aucun événement âe
cette espèce dans l'étendue de notre province, évé-
nement sur lequel César lui-même n'aurait pas gardé
le silence. Selon d'autres , ce fut le tombeau de cinq
généraux tués en combattant, et dont César aurait
voulu consacrer la mémoire par un monument du-
rable. Mais malheureusement encore on n'a vu nulle
part dans l'empire romain des tombeaux d'une pa-
reille construction et surtout des tombeaux sans in-
scription. Enfin , raisonnant toujours d'après la base
vicieuse des mots cin^ mars ou quinque martes ^ on
a dit que la pile avait été construite en Thonneur du
consul Quintus Marcius , compagnon de César, et
mort dans les Gaules. Mais d'abord il faudrait qu'il y
fût venu et qu'il fût mort en Touraine. Or il n'en est
point fait mention dans les Commentaires. Nous voyons
au contraire que ce Quintus Marcius Rex n'a jamais
rien fait de remarquable, et n'est connu que pour
avoir été consul l'an 68 avant Jésus-Christ, dix ans
CINQ-MAA.RS. gg
avant que César eût paru sur les rives de la Loire.
On doit donc rauger toutes ces suppositions au nombre
des fables , puisqu'elles ne se rattachent à aucun fait
avoué par l'histoire. Quelques médailles d'Antonin
trouvées aux environs ne sont pas une preuve plus
concluante : car en quels lieux de nos contrées n'en
a-t'On pas trouvé de semblables ?
Quoi qu'en ait dit La Sauvagère, nous croyons,
comme le comte de Caylus , assez bonne autorité en
ce genre, que rien ici n'annonce un travail des Ro-
mains, ni la forme, ni les ornemens , ni l'absence de
toute inscription. On verrait bien plutôt le cachet
sarrasin dans les mosaïques ou arabesques et dans les
piliers , que nous avons dit ressembler aux minarets
qui couronnent les mosquées : mais les Sarrasins ne
s'étant jamais établis sur les bords de la Loire , d'où
ils furent chassés en 7 3 2 par Charles-Martel , il est
certain qu'ils n'ont pu entreprendre ni exécuter un
pareil travail. S'il nous est permis d'émettre une opi-
nion , ou si l'on veut une conjecture , nous serons
tentés de croire que la Pile-Saint-Mars fut élevée par
les Visigoths , qui s'emparèrent enfin de la Touraine
après avoir expulsé les Romains en 480. Ils l'auront
fait pour célébrer leur conquête autant que pour in-
diquer les limites de leur royaume d'Aquitaine , de
même qu'ils l'avaient fait sur les bords de la Creuse,
oii ce royaume finissait avant qu'ils fussent maîtres
de la Touraine. De là est venue la dénomination de
Port-de-Piles , Portas de Pilis , parce qu'il y avait
également deux pyramides qui formaient la ligne de
7-
lOO ' HISTOIRE DE TOUR AINE.
démarcation des deux états. Qu'on y observe quelque
chose de la manière de construire des Romains, cela
ne surprendra pas en réfléchissant que les ouvriers
que ceux-ci employaient habituellement n'avaient pas
abandonné le pays avec les armées romaines, et que
si les dessins et le goût étaient gothiques , la main-
d'œuvre pouvait et devait être romaine. C'est peut-
être une distinction à laquelle on n'a pas fait jusqu'ici
assez d'attention. Ces monumens n'ayant donc d'autre
objet que celui de déterminer des limites, on ne doit
pas s'étonner si les auteurs contemporains ont dédai-
gné d'en parler. C'est l'origine la plus probable que
nous ayons cru pouvoir assigner à ce monument. On
n'élève pas de pareilles masses pour couvrir une sé-
pulture, et l'on ne construit pas des phares où il est
impossible de monter, puisque, comme nous l'avons
dit, celte pile est un massif plein qui n'a ni escalier
ni fenêtres. Les pyramides de Saint-Mars et du Port-
de-Pi'es n'ont pu être construites que dans un but
quelconque. Masses de briques , elles ne pouvaient être
d'aucune utilité, si ce n'est de servir de bornes irré-
cusables et inamovibles à deux états voisins et rivaux.
La tradition populaire veut qu'il y ait un souterrain
sous la Pile-Saint-Mars. Mais il est difficile de se prê-
ter à cette idée ; car on n'eût sûrement pas bâti une
pareille masse sur le vide , et on eût encore moins
entrepris d'y creuser après coup.
Quoique notre conjecture puisse rentrer dans la
catégorie de toutes celles qui ont été faites à ce sujet,
nous n'en conviendrons pas moins que ce monument.
L I LK-BOIJ CH ARD. I O l
à quelque siècle qu'il se reporte, mërîle d*êtrc con-
servé, et qu'il conviendrait que le gouvernement fît
acte de propriété; car les terrains- adjacens ayant été
aliénés, il serait possible qu'un beau jour leur posses-
seur élevât la prétention de l'être également de la pyra-
mide, quoiqu'elle n'ait été nominativement désignée
dans aucune adjudication.
Il paraît que vers le milieu du siècle dernier on a
voulu s'assurer si la pile était véritablement massive;
car on y a fait du côté du nord une excavation à quatre
pieds de terre, qui, poussée plus avant, aurait pu en
compromettre la solidité.
L'ILE-BOUCHARD, baronnie.
La ville de l'Ile-Bouchard {Insula Buccardi) a pris
son nom du lieu de son assiette dans une île qui est
au milieu de la Vienne, et de Bouchard, l'un de ses
premiers seigneurs. Elle est située sur les confins
de la ïouraine et du Poitou. Elle renferme deux
paroisses , Saint-Gilles et Saint-Maurice , qui forment
deux communes distinctes. Elle avait précédemment
un couvent de religieux de Saint-François de la petite
observance et un couvent d'ursulines. Sa justice, qui
s'étendait sur quinze paroisses, était exercée par un
sénéchal, un lieutenant, un procureur du roi el. un
greffier.
Le château, placé au milieu de la Vienne, avait été
construit vers le neuvième ou le dixième siècle par les
barons de TIle-Bouchard pour leur demeure et pour
103 HISTOIRE DE TOURAINE.
leur sûreté. La chronique de Tours nous apprend
qu'un de ces barons accompagna Ingelger dans son
expédition d'Auxerre, en 887, pour réclamer les restes
de saint Martin, et que les chanoines, par reconnais-
sance, lui donnèrent l'île de Bréhémont avec la sei-
gneurie de Rivarennes dont ses descendans ont joui
pendant plus de quatre cents ans.
Les comtes d'Anjou tentèrent à différentes reprises
de s'emparer de cette place , qui était fort à leur bien-
séance ; mais n'ayant pu y réussir , ils s'en vengèrent
en faisant des courses sur les habitans de la campagne,
auxquels ils enlevaient leurs grains et leur bétail , se
retirant ensuite avec leur butin dans leurs châteaux
de Loudun et de Mirebeau. Nous indiquerons dans la
série des seigneurs comment les comtes d'Anjou fini-
rent par s'en rendre maîtres, et comment elle fut
réunie à la couronne.
Les Anglais la surprirent sous le règne du roi Jean ;
mais ils furent contraints de la rendre par le traité de
Brétigny, ainsi que nous le voyons par les lettres du
roi Edouard, données à Calais le 24 octobre i36o.
Sa situation l'ayant rendue une place importante,
surtout pendant les guerres de la religion , on a sou-
vent été obligé d'y mettre un gouverneur particulier
avec une garnison pour empêcher les protestans de
s'y établir. François Lebascley était en cette qualité en
1498 ; Henri de Craon, seigneur deCoulaines, en i SSy;
et Charles Durosel, en i65o, eut ordre de la garder
pendant le voyage que le roi fît en Guienne à cette épo-
que. Elle fut cependant prise en 1662 au mois de mai
L ILE-BOUCHARD. Io3
par les religioniiaires, qui s'y firent détester par leurs
cruautés : mais ayant été instruits de l'arrivée du duc
de Montpensier, gouverneur de la province, qui ve-
nait pour les chasser de ce poste, ils en sortirent au
mois de juillet. En i568 les princes, ayant assiégé les
châteaux de Champigny et de Savigny, firent tous
leurs efforts pour s'emparer de File -Bouchard en y
envoyant leurs régimens de Monhrun et de Mireheau ;
mais ils furent obligés de renoncer à leur entreprise.
Le prince de Condé, en i6i5, s'étant retiré mé-
content de la cour avec quelques seigneurs de son
parti , eut permission de loger cent hommes d'armes
dans le château de l'Ile-Bouchard pour sûreté de sa
personne et de ceux qui devaient assister à la confé-
rence de Loudun indiquée au mois de juillet i6i6.
Depuis ce temps les murs , les fortifications et le
château sont tombés en ruines , et il en reste à peine
quelques traces.
Nous avons dit que l'origine di# château de l'Ile-
Bouchard pouvait remonter au neuvième ou au dixième
siècle. Cependant , à l'exception de celui qui accom-
pagna Ingélger, et dont le nom ne nous a pas été
transmis , ses seigneurs ne nous sont connus que de-
puis le commencement du onzième siècle.
Bouchard , le plus ancien d'entre eux , vivait vers
Tan ioi5. Il épousa Adenorde dame de Bivière, dont
il eut Hugues, Émery de l'Ile, religieux à Marmou-
tier, Geoffroy, surnommé Fuel, seigneur de Nuzay,
et Machilde ou Mathilde.
Hugues laissa deux cnfiins : Bouchard qui lui suc-
I04 HISTOIRE DE TOURAIISK.
céda, et N. de l'Ile, femme d'Archambaud Borel, d'où
sortirent Peloquin , Thomas et Barthélemi.
Bouchard , deuxième du nom , était en bas âge
lorsque son père mourut; ce qui obligea Thibaut II,
comte de Touraine, d'aller lui-même sur les lieux
pour y établir un gouverneur pendant la minorité.
Mais les chevaliers qui gardaient le château ne vou-
lurent recevoir le comte qu'à la condition qu'il don-
nerait des otages, et promettrait de ne rien entre-
prendre sans leur avis ; ce qui leur fut accordé. Le
comte y laissa pour gouverneur Emery de l'Ile , oncle
de Bouchard , qui fut depuis religieux à Marmoutier,
ayant auparavant remis le château à Geoffroy Fuel ,
son frère, pour le rendre à Bouchard à sa majorité.
Cependant Geoffroy-Martel , ayant conquis la Tou-
raine en io44» donna l'investiture de l'Ile-Bouchard
à Geoffroy Fuel, qui lui céda à ce prix la seigneurie
de Rivière, dont le comte fit don à la Trinité de Ven-
dôme ; mais GeoffjjSDy la reprit après la mort du comte,
et en chassa les moines.
Lorsque Bouchard eut atteint l'âge de sa majorité,
il reprit l'Ile-Bouchard sur son oncle, qui s'empara
du prieuré de Tavant , où il se fortifia à la hâte et se
mit à faire des courses dans la campagne. Mais Bou-
chard , ayant rassemblé un grand nombre de gens de
guerre, fit le siège de Tavant, qu'il emporta d'assaut.
Il en fit abattre les tours et les murs , emmena son
oncle prisonnier, et donna depuis la seigneurie de
Rivière à l'abbaye de Marmoutier pour la dédomma-
ger de la perte des bâtimens de Tavant. Il mourut
l'ile-bouciia-rd. io5
peu de temps après, c'est-à-dire vers Tan 1070 o\u
1 07 1 , sans avoir été marie , ayant pris trois jours
avant sa mort l'iiabit de Saint-Benoît, suivant la dé-
votion de ces temps. Il eut sa sépulture dans l'église
deTavant, où assistèrent Foulques-Récliin , Josselin
de Blo, seigneur de Ghampigny, Guillaume de Mont-
soreau, Hugues de Sainte-Maure, Guy de Nevers et
plusieurs autres.
Geoffroy de l'Ile hérita de la baronnie de l'Ile-
Bouchard après la mort de son neveu, et reprit la
seigneurie de Rivière sur l'abbaye de Marmoutier.
Archambaud Borel fut après Geoffroy seigneur de
rile-Boucbard. Sa femme, dont nous ignorons le nom,
lui donna Peloquin , qui suit.
Peioquin, premier du nom , mourut jeune, laissant
deux fils, Peloquin et Barihélemi. Eustacbie sa veuve
épousa en secondes noces Robert de Blo, qui fut
nommé tuteur du jeune Peloquin et de sa baronnie.
Peloquin de l'Ile, deuxième du nom, succéda à son
père. Mais étant tombé dans la disgrâce de Foulques-
le- Jeune, comte de Touraine , il perdit son château,
qui fut emporté par le comte. Cependant, s'étant depuis
réconcilié avec lui , il lui fut fort utile à la bataille de
Séez et à la. prise du château d'Alençon. Geoffroy-le-
Bel ayant succédé à son père Foulques-le-Jeune , les
principaux barons de ses états d'Anjou et de Tou-
raine se révoltèrent contre lui. De ce nombre était
Peloquin, dont le château, ainsi que ceux de ïhouars
et de Mirebeau , fut assiégé et pris. Mais la paix s'étant
faite, le comte le rendit à Peloquin, à condition qu'à
I06 HISTOIRE DE TOURAIÎÎE.
l'avenir il lui serait plus fidèle. Il mourut en ij4o,
n'ayant point eu d'enfans d'Hersende, sa femme.
Barthélemi, premier du nom, frère de Peloquin,
lui succéda dans tous ses biens. Il donna plusieurs
droits et privilèges au prieure de ïavant , du consen-
tement de Gerberge son épouse.
Bouchard , troisième du nom , légua à l'abbaye de
Marmoutier , au profit du prieuré de Tavant, un droit
de pêche, dont il donna ses lettres en 1184, du con-
sentement de sa femme Pétronille et de ses enfans
Bouchard , Barthélemi , et Béatrix.
Bouchard IV succéda à son père. Avant que de
faire le voyage de la Terre-Sainte, il donna à l'abbaye
de Cormeri quelques droits dont le produit devait être
pmployé à la nourriture et à l'habillement des moines.
Dans ses lettres , qui sont du ^3 avril 1 1 89 , il se dit :
Par la grâce de Dieu , seigneur de Vile-Bouchard.
Barthélemi II confirma , en 1207 , le don que Bou-
chard ÏII avait au prieuré de ïavant. Il accompagna
Philippe-Auguste à la bataille de Bovines le 27 juillet
12x4? en qualité de seigneur châtelain et de chevalier
banneret. Il avait épousé Elisabeth, fille d'Olivas,
seigneur de Rochefort , qui lui porta cette terre en
mariage. Il en eut Bouchard et Eustache.
Bouchard V épousa Almodie , autrement nommée
Alicie, qui était veuve dès l'an laSo. Elle vivait en-
core au mois de novembre 1275. De ce mariage na-
quirent deux fils et deux filles : Barthélemi, Olivier,
Almurine , abbesse du Ronceray d'Angers en 1 3o4 ,
et Alix, qu'André Duchesne donne pour femme à
l'ile-bocchard. 107
Pierre de Brion , frère de Simon de Brion, pape sous
le nom de Martin IV.
Barthélemi III abandonna, en i sSs, au chapitre de
Saint-Martin ses droits de cens et de foi et hommage
sur Saint-Épain , pour compensation de six livres de
rente qu'il devait à cette église. Il mourut en 1288,
et fut enterré, comme Bouchard son père, aux cor-
deliers de Tours, près la sacristie. Nous voyons par le
rôle des usages de Touraine , qu'il avait épousé la fille
de Jodon de Doue. Cette famille était fort ancienne
et alliée aux seigneurs de Montreuil-Berlay ou Beslay.
Un Jodon et Grécia , sa femme , sont nommés dans
un titre de Saint-Florent de Tan 1096. Les enfans de
Barthélemi furent Bouchard , Barthélemi dit le Jeune,
Jean , seigneur de Cinq -Maars- la -Pile, Almurine,
femme de Hugues de Bauçay , et Agnès , morte en
i362.
Bouchard VI épousa Agnès de Vendôme, dont il
eut Barthélemi et Eustache de llle , femme de Renaud
de Pressigny.
Barthélemi IV épousa, selon André Duchesnc,
Jeanne de Saint-Palais, qui était veuve en i336. Il
en eut trois enfans : Bouchard , Barthélemi et N. de
nie.
Bouchard VII eut la garde noble, jusqu'en i336,
de son frère et de sa sœur encore mineurs. Il s'en
remit en i34S au comte d'Angoulrmc , connétable de
France, au sujet d'un procès qu'il avait avec le roi
Jean, et fut un des principaux barons portant ban-
nière qui accompagnèrent le brave Saintré dans son
Io8 HISTOIRE DE TOURAINE.
expédition contre les Sarrasins. On le compte aussi
au nombre des otages du roi Jean. Il avait épouse
Agathe de Bauçay, veuve de Jean de la Porte, che-
valier, dont il eut Jean, Bouchard et Jeanne, femme
de Pierre d'Avoir, bailli de Touraine, morte en rSgS.
Jean de l'Ile fut tué à la bataille d'Azincourt en
i4i5, laissant une fille unique de Jeanne de Bueil,
son épouse.
Catherine de l'Ile, fille du précédent], fut mariée
quatre fois : la première à Jean des Roches ; la seconde
à Hugues de Challon ; la troisième à Pierre de Giac,
surintendant des finances et ministre d'état sous
Charles YIÏ. On sait qu'il fut accusé d'avoir empoi-
sonné sa femme pour épouser cette Catherine de l'Ile.
Ce fut un des prétextes dont se servit le connétable
de Richemont , qui , lui ayant fait faire son procès ,
le fit coudre dans un sac et jeter dans la rivière. Veuve
ainsi pour la troisième fois , Catherine se remaria à
George de La Trémouille par contrat du 2 juillet
jl[i5. Elle mourut le 1" juillet i474- Son mari, qui
était mort dès l'année 144^? avait eu sa sépulture à
rUe-Bouchard. Leurs enfans furent Louis, George et
Louise, épouse de Bertrand de La Tour d'Auvergne.
Louis de La Trémouille hérita de la seigneurie de
rile-Bouchard par la mort de George son frère puîné.
Il épousa, le 2a août i44^7 Marguerite d'Amboise,
dont il eut Louis II, Jean, archevêque d'Auch et de-
puis cardinal, George et quatre filles.
Louis II de La Trémouille , surnommé le chevalier
sans reproche, né en i46o, a vécu sous cinq rois, et
109
se signala dans toutes les batailles où il commanda
presque toujours en chef. Nous avons ses mémoires
au quatorzième volume de la collection de ceux rela-
tifs à l'Histoire de France. Il termina glorieusement
sa carrière à la bataille de Pavie le 9.4 février iS-iS.
Il avait épousé Gabrielle , fille de Louis de Bourbon ,
premier comte de Montpensier, dont il eut Louis,
prince de Talmont, mort de ses blessures le lendemain
de la bataille de Marignan, le i4 septembre i5i5.
François de La Trémouille épousa Anne de Laval,
et mourut en i54t. H en eut Louis III, qui suit.
Louis , troisième du nom, premier duc de Thouars,
prince de Tarente et de Talmont , mourut le 26 mars
1577.
Claude de La Trémouille, mort en 1604. Ce fut
son fils qui vendit la terre de l'Ile-Bouchard au car-
dinal de Richelieu, et depuis ce temps elle était restée
unie au duché de ce nom.
LA BOURD Aïs 1ÈRE.
La fiourdaisière n'était qu'une simple châtellenie
située à trois lieues de Tours, au levant, sur la rive
droite du Cher, entre Azay et Yerets qui sont sur la
rive gauche. Le château , qui avait peu d'importance
dans son origine , en acquit davantage lorsqu'il eut été
reconstruit avec certaine magnificence aux frais de
François P% en faveur de la famille Babou, qui le
possédait alors. Il avait d'ailleurs été la propriété du
célèbre maréchal de Boucicant , et devint ensuite le
IIO HISTOIRE DE TOURAINE.
berceau cle Gabrielle d'Estrees. A ces litres il avait
droit de figurer dans cette partie de notre Histoire.
Jean le Meingre, dit Boucicaut, deuxième du nom,
était seigneur de Commacre et de la Bourdaisière.
Nous ne répéterons point ce que nous avons déjà dit
de lui , ni ce que nous en dirons dans notre quatrième
volume. Son fils Jean III ayant été tué, en i4i5, à
la bataille d'Azincourt, où lui-même fut fait prison-
nier, sa succession, en il^Q^iy époque de sa mort en
Angleterre, passa au fils aîné de son frère Geoffroy.
Jean le Meingre de Bouci'caut, quatrième du nom,
fils de Geoffroy, seigneur de la Bourdaisière et de
Commacre, mourut à Tours en i484- Il eut sa sépul-
ture dans l'église de Saint-Martin, à laquelle il avait
fait par son testament plusieurs dons, qui furent ac-
ceptés par acte du chapitre du 19 mars i484»
Jean le Meingre de Boucicaut, cinquième du nom,
fils du précédent, ne survécut pas long-temps à son
père, étant mort à Avignon en 1490- H paraît que ce
fut à cette époque que la Bourdaisière passa dans la
famille Babou.
Philbert Babou , seigneur du Soulier , est le pre-
mier en qui ait commencé l'illustration de cette mai-
son, originaire du Berri. Selon les uns il descendait
d'un des commis de Jacques Cœur, et, suivant Bran-
tôme , son père Laurent Babou était notaire à Bourges.
Philbert Babou épousa à Tours, où il fut élu maire
eu i52o, Marie Gaudin, dame de la Bourdaisière,
Wt célèbre par sa beauté, qui en fit une des maîtresses
^ de François V\ De là les faveurs sans nx)mbre que le
LA BOURDAISIKRE. 1 1 I
monarque répandit sur cette famille. Quand il eut
créé, en i52 2 , la place de trésorier de l'épargne, ce
fut Philbert qui le premier en fut gratuitement pourvu.
Sa femme lui donna quatre garçons et trois filles. Si
l'on en croit la chronique scandaleuse, ces trois filles
partagèrent comme leur mère les bonnes grâces du
roi. L'uQ de leurs fils, Jacques Babou, fut doyen de
Saint-Martin à douze ans , et à vingt évêque d'An-
goulême. Nommé l'an i532 en qualité de chargé d'af-
faires à Rome, il mourut à la Bourdaisière comme il
se disposait à partir , âgé seulement de vingt-un ans.
Son frère Philbert lui succéda dans son doyenné , son
évêché et son ambassade à Rome, où il mourut car-
dinal en iSyo.
Jean Babou, seigneur de la Bourdaisière et de Sa-
gonne, chevalier des ordres du roi, gouverneur de
Brest et grand-maître de l'artillerie de France. Il fut,
en 1 532 , le premier des grands-baillis d'épée de Tou-
raine institués par François F'', et il en exerça les
fonctions jusqu'à sa mort en iSôg. Il avait épousé
Françoise , fille de Florimond Robertet , ministre
d'état, dont il eut quatre garçons et six filles : i" George
qui suit ; 2" Jean comte de Sagonne, tué à la bataille
d'Arqués en i SSg ; S"" Philbert ; 4° Fabrice , morts
jeunes tous les deux. Des six filles, Marie épousa Claude
de Beauvilliers , duc de Saint- Aignan. Françoise fut
mariée à Antoine d'Estrécs , et fut mère de la célèbre
Gabrielie , née à la Bourdaisière en 1 565. Isabelle prit
alliance avec François d'Fscoubleau , seigneur d'Al-
luye, et Madeleine avec Honoré Isoré d'Hervaut. I^s
112 HISTOIRE DE TOURA.INE.
deux autres furent religieuses à Beaumont-les-Tours.
George Babou , seigneur de la Bourdaisière , grand-
maître de rartillerie. Tandis que son frère Jean com-
battait sous les bannières de Henri IV, celui-ci s'était
jetë dans la faction de la Ligue , digne pourtant par
sa bravoure d'une cause plus belle et plus juste. C'est
par elle qu'il avait été nommé grand-maître de l'ar-
tillerie et gouverneur de la ville de Chartres , que ,
avec une poignée de troupes, il défendit vaillamment,
depuis le 9 février 1691 jusqu'au 19 avril suivant,
contre toute l'armée royale. Il y soutint deux assauts •
mais enfin Châtillon ayant fait jeter un pont sur la
rivière, il fit une capitulation honorable. Sa nièce,
iGabrielle d'Estrées, lui procura par la suite une place
de capitaine de cent hommes d'armes de la maison
du roi , et le collier de l'ordre à la troisième promo-
tion de chevaliers le 5 janvier lo^S.
U eut pour femme Marie, fille de René II Dubel-
lay et de Marie Dubellay, princesse d'Yvetot. De ce
mariage naquirent un fils et deux filles : 1" George,
qui fut tué en duel , ayant eu de Marie Hennequin son
épouse une fille morte jeune. Les filles furent Marie,
épouse de Charles Saladin de Savigny , dit d'Anglure,
et Anne, abbesse de Beaumont.
Le nom de Babou s'étant éteint , la Bourdaisière
passa à Hercule de Rohan , duc de Montbazon , et
ensuite à Charles d'Albert, duc de Luines, par son
mariage avec Marie , fille de ce même Hercule. Depuis
ce moment les seigneurs de la Bourdaisière ne furent
plus autres que ceux de Luines.
LA. BOTJKDAISIÈRE. Il3
Lorsque le duc de Choiseul fut exile h Chanteloup,
il acheta du marquis d'EfTiat la terre de Cinq-Mars ,
et la donna au duc de Luines en échange de celle de
la Bourdaisière ; mais cet échange cachait, assure-
t-on , un sentiment de vengeance assez puéril contre
son rival et son ennemi, alors en faveur, puisqu'il
avait pour but de priver le château de Verets, situé
sur la rive opposée , de l'agréable point de vue que
lui offrait celui de la Bourdaisière. Or on sait que
Verets appartenait au duc d'Aiguillon. Ce fut des
débris de la Bourdaisière que l'architecte Le Camus
construisit la belle pagode de Chanteloup. Mais
d'autres matériaux auraient causé moins de regrets,
et la feraient trouver encore plus belle.
Il y a eu après l'aliénation de la Bourdaisière , par
le domaine national, une circonstance que nous ne
devons pas omettre ici. L'acquéreur, M. Dubernade,
négociant de Morlaix , ayant voulu faire faire quel-
ques changemens, en chargea M. Guyot, expert-
géomètre à Tours, qui trouva pratiqué dans l'épais-
seur d'un mur un petit cabinet éclairé seulement par
une espèce de meurtrière, et dont la porte était
murée avec beaucoup de soin. Son intérieur ne
contenait qu'une simple table de bois sur laquelle
était posée une cassette dont l'ouverture mit au jour
une grande quantité de lettres bien conservées et
très-lisiblement écrites. C'était la correspondance de
François P^ avec madaine Babou; mais tombées entre
les mains de deux jeunes demoiselles, qui n'en con-
nurent pas le prix, ces lettres furent détruites succes-
3. 8
Il4 HISTOIRE BE TOURAINE.
sivement, et malgré les recherches que l'on fît faire
peu de temps après , on ne put en recouvrer aucune.
Cette perte est d'autant plus regrettable qu'il n'était
pas impossible que beaucoup de ces lettres contins-
sent des détails confidentiels qui auraient pu jeter
quelques lumières sur certains faits historiques, ou
ignorés ou mal connus.
On a vu à l'article de Saint-Florentin d'Amboise
les détails dans lesquels nous sommes entrés au sujet
du tombeau de Philbert Babou.
LA GUIERCHE, vicomte.
La Guierche ou la Guerche ( Guerchium , Guir-^
cia), située sur la rive droite de la Creuse, h dix-sept
lieues de Tours , n'était autrefois qu'une simple châ-
teilenie, érigée depuis en vicomte en faveur d'André
de Villequier par le roi Charles VII , qui en racheta
l'hommage ainsi que tous les droits de Pierre Frottier,
seigneur de Prèuilly, en mai il\5i, ce qui fut ratifié
en octobre 1467 par Prégent Frottier son fils, lors-
qu'il eut atteint sa majorité. L'ancien château, peu
considérable, fut reconstruit à neuf par Charles VII
pour la célèbre Agnès Sorel , qui avait coutume d^
l'habiter lorsque le monarque faisait son séjour à Lo-
ches. Il devenait ainsi le rendez-vous de ses chasses
dans la forêt de la Guierche. C'est ce qu'indiquent
encore des restes de sujets peints h fresque sur les
murs. Ce château, qui pour l'époque ne manquait pas
d'une certaine magnificence, n'offre plus qu'une image
très- imparfaite de ce qu'il était au quinzième siècle.
LA GUIERCHE. Il5
L'aile droite et les coinmims ont disparu. Le corps-de-
logis a été baissé d'un étage et les tours mises à ce
niveau. Les douves ont été comblées. Le pont de pierre
qui communiquait de la rive droite à la gauclie de la
Creuse , fut rompu en 1698. Enfin les murs dont elle
était entourée ont été depuis long-temps démolis. Son
église, dédiée à Saint-Marcellin, existait bien avant
la fin du douzième siècle, ainsi qu'on le voit par une
cbarte de Barthélemi de Vendôme, archevêque de
Tours, datée de l'an J f g/h
Nous n'avons point trouvé de seigneurs de la
Guierche antérieurement au quatorzième siècle, quoi-
que probablement il y en ait eu avant cette époque ,
suivant l'ancien axiome féodal : JSulle terre sans
seigneur.
Jean de l'Ile , seigneur de Cinq-Maars , second fils
de Barthélemi III, seigneur de l'Ile-Bouchard, était
châtelain de la Guierche en i336. Il n'eut que deux
filles, dont l'aînée Jeanne porta cette seigneurie en
dot à son mari , du nom de Rougé.
Bonabes de Rougé, quatrième du nom, chevalier,
seigneuc d'Erval et de Neuville , alla s'établir en Bre-
tagne, où il avait des terres. S'étant mis au service du
roi de France , il assista à la bataille de Poitiers , où
il fut fait prisonnier et conduit en Angleterre; il en
sortit en payant rançon , et mourut en 1377 , laissant
de Jeanne de l'Ile, son épouse. Jean et Galiot de Rougé,
successivement seigneurs ;de la Guierche , ainsi que
deux filles.
8.
•IffWPWPPPPWP
H6 HISTOIRE DE TOURAINE.
Jean de Rouge étant mort sans enfans, sa succes-
sion échut à son frère.
Galiot de Rouge épousa Marguerite de Beaumanoir,
dont il eut Jean, qui suit, et Jeanne, mariée à Armel
de Château-Giron , d'où naquirent Patry et Valence
de Château-Giron , dont il va être parlé.
Jean II de Rougé , sire de Derval , de Cinq-Maars-
la-Pile , etc. , prit alliance avec Béatrix de Dreux , et
mourut sans postérité le 8 février i4i5.
Patry, fils aîné d'Armel de Château-Giron et de
Jeanne de Rougé, hérita de Jean II, son oncle ma-
ternel, les seigneuries de Derval, Rougé, Guémené,
la Guierche et Cinq-Maars-la-Pile. Il épousa Louise
de Rohan , dont il n'eut point d'enfans.
Valence de Château-Giron, sœur de Palry, succéda
à son frère, mort en 14^7. Elle s'était mariée à son
parent Geoffroy de Château-Giron , dit de Malétroit,
sire de Combout. De ce mariage naquirent trois en-
fans , Jean , Gillette et Marguerite. Valence mourut
le 7 septembre i435, et son mari en i463.
Jean de Château-Giron , dit de Malétroit , leur fils
aîné, succéda à sa mère en i435. Ce fut lui proba-
blement qui vendit à Charles VII le domaine de la
Guierche , relevant de la baronnie de Preuilly , que
possédait alors Pierre Frottier, de qui, comme nous
l'avons dit, le roi racheta tous les droits seigneu-
riaux.
Agnès Sorel , dame de la Guierche , par concession
de Charles VII, consentit sans doute à s'en démettre
LA. GUIERCHE. I r 7
en faveur de sa cousine, Antoinette de Maignelais,
lors de son mariage avec le seigneur de Villequier.
André de Villequier, seigneur de Montrësor et des
îles d'Oleron , gentilhomme de la chambre du roi ,
reçut en dot, lors de son mariage avec Antoinette de
Maignelais, la châtellenie de la Guierche, qui fut
érigée pour lui en vicomte. Il fit son testament le 1 5
juin 1454 î et laissa en mourant un fils nommé Artus.
Il y avait dans ce même temps une Marguerite de
Maignelais, dame de Cholet , maîtresse de François II,
duc de Bretagne , d'où sont sortis les comtes de
Vertus.
Artus de Villequier , comte de Montrésor, vicomte
de la Guierche , épousa Marie de Monbrun , dont il
eut :
Baptiste de Villequier , marié d'abord avec Jacque-
line de Miolans, et par contrat du iS mai iSiq avec
Anne de Rochechouart , dame d'Etableau, dont il eut
Claude, René et Jaqueline de Villequier. Il comparut
en 1559 à la deuxième réforraation de la coutume de
Touraine.
Claude I" de Villequier, chevalier de Tordre du
Saint-Esprit, capitaine de cinquante hommes d'armes,
fut marié à Renée d'Appelvoisin , dont il eut :
George de Villequier, chevalier de l'ordre, qui , en
i58i , accompagna le duc d'Anjou dans son expédi-
tion de Flandre. Il épousa Louise Lejay, dont il n'eut
point d'cnfans.
Claude II, baron de Villequier, comte deClervaux,
avait pour père René, fds do Baptiste et de Louise
Il8 niSTOlIlE DE TOURAINE.
de Savonnièree/ Il mourut erv 1607 à dix-neuf ans,
sans avoir été marié.
Charlotte-Catherine de Villequier, fille également
de René et de Françoise de La Marck, sa première
femme, fut mariée deux fois; la première à François
d'O, surintendant des finances, et la deuxième à
Jacques d'Aumont en 1607. Ils eurent entre autres
enfans César et Antoine d'Aumont, maréchal de
France.
César d'Aumont, gouverneur de Touraine, dit le
marquis d'Aumont, épousa en premières noces Renée-
aux -Epaules, dite de Laval, et en secondes noces
Marie Amelot de Cornetin ; ce dernier mariage lui
donna pour enfans Jacques , mort sans alliance en
1657 ; Anne F% religieuse ; Anne II , femme de Gilles
Fouquet, marquis de Mézières; Marie, religieuse;
N. d'Aumont, dite mademoiselle de la Guierche, et
N. dite mademoiselle de Clairvaux.
François-Hélie de Roger d'Argenson, archevêque
de Bordeaux, ayant acquis, après la mort de César
d'Aumont, en 1661 , la vicomte de la Guierche, la
laissa en mourant à son neveu.
Marie -Pierre de Voyer d'Argenson, baron des
Ormes, etc., ministre de la guerre et intendant de
Tours en 172 1.
Marc- René de Voyer d'Argenson, baron des Or-
mes, etc., grand-bailli de Touraine, lui succéda. Celte
terre est encore dans la même famille en la personne
de M. Marc -René d'Argenson , plusieurs fois membre
de la chambre des députés , oîi il s'est constamment
I
LA HATE. I 1 9
signale par son courage civique, l'une des vertus les
plus rares en France , et par son zèle pour la défense
des droits qu'un monarque législateur a garantis à la
nation française.
LA HAYE, BARONNIE.
La Haye {Haïa ou Haga), ville située sur la rive
droite de la Creuse , est éloignée de Tours de dix
lieues du côté du midi. Dans le principe elle était
possédée par les seigneurs de Loches, au nombre des-
quels un certain Garnier , fils d'Adeland, eut une fille
nommée Roscille, qui fut mariée à Foulques-le-Roux,
comte d'Anjou. L'auteur de l'Histoire d'Anjou rap-
porte que Foulques se rendit maître de La Haye par
des voies violentes et injustes ; ce qui pourrait donner
à penser que Roscille aurait eu un frère sur lequel
le comte d'Anjou aurait usurpé la seigneurie de La
Haye, qui, peu après cependant, retourna dans la
même famille.
Le seigneur de La Haye était l'un des huit barons
de Touraine qui devaient porter l'archevêque de Tours
le jour de son entrée, et comme au dîner il faisait les
fonctions d'échanson , il avait la coupe du prélat, ainsi
que les restes des vins et des viandes qui avaient été
servis.
La ville de La Haye était assez passablement for-
tifiée pour que le roi Jean, en t356, y rassemblât
l'armée qui poursuivait le prince de Galles, et qui,
120 HISTOIRE DE TOURAINE.
l'atteignant près de Poitiers , y perdit cette bataille si
funeste à la France.
Le maréchal de Sancerre la défendit contre les An-
glais en 1369, et Ton y entretint bonne garnison tout
le temps que durèrent les guerres de religion. Le roi
de Navarre , en iSSy , tenta vainement de l'enlever
à Lavardin , qui y tenait pour la Ligue. Mais lorsque
le royaume fut pacifié , ses fortifications furent démo-
lies, et son château tomba en ruines.
Depuis Adeland , dont nous avons parlé plus haut,
et qui devait vivre vers l'an 900, voici quels sont
ceux que nous trouvons pour seigneurs de La Haye.
Sanson , ou plutôt Sanction. Il accompagna EudesP',
comte de Touraine , au siège de Langeais , en 995 , et
assista à la fondation de l'abbaye de Beaulieu en 10 10.
Il restitua, en io5o , quelques domaines à l'église de
Tours , du consentement de ses enfans Renaud , As-
selin et Hervé , qu'il avait eus d'Hameiine son épouse.
Renaud, premier du nom, fut présent, en io59,
à la donation des bois de Gâtines faite par Geoffroy-
Martel en faveur de l'abbaye de Marmoutier.
André était probablement fils de ce Renaud. Nous
le voyons, en 11 Ov^, assister à un acte de ratification
faite par Berlay de Montreuil au profit de Saint-Ni-
colas d'Angers.
Cassinotle , dame de La Haye , obtint par héritage,
mais nous ignorons comment, non-seulement la ba-
ronnie de La Haye , mais encore la vicomte de Tours.
Elle fut mariée à Gosselin II , seigneur de Sainte-
Maure, qui fut assassiné avec son frère dans une ré-
LA. HAYE. lïil
volte de la garnison de La Haye. Cassinotte , devenue
veuve , se remaria très - vraisemblablement à Jean de
Montbazon , et lui porta en dot la baronnie de La
Haye; car nous voyons par un titre de l'abbaye de
Marmoutier que Hugues , fils de ce Jean de Montba-
zon et Renaud, petit-fils de Cassinotte, furent sei-
gneurs de La Haye. Ces deux époux vivaient encore
en 1126, temps auquel ils ratifièrent, avec leurs en-
fans Hugues et Renaud, une donation faite à l'abbaye
de Fontevrault. Il y avait aussi un Barthélemi de La
Haye , qui est nommé avec son frère Renaud dans une
charte de l'abbaye de Marmoutier.
Renaud, deuxième du nom, épousa Hersende de
Colombiers. Ils donnèrent à l'Hotel-Dieu de Tours ,
en II 59, conjointement avec Hamelin leur fils, une
dîme qu'ils avaient près le Ruau d'Epeigné, du con-
sentement de l'archevêque Joscion.
Hamelin fut élevé par Cassinotte son aïeule. Il fut
marié ; mais nous ne connaissons que le nom de son
fils Geoffroy.
Geoffroy, premier du nom, suivit le parti des fils
de Henri II, révoltés contre leur père. Mais Henri
étant passé en France au printemps de l'année 1 1 78,
Geoffroy alla le trouver à Angers, et lui remit son
château, oii le monarque anglais mit garnison. Ce-
pendant la paix s'étant faite entre le père et les enfans,
La Haye fut rendue à Geoffroy.
Hugues vivait en i2o5, selon André Duchesne. On
présume qu'il fut père de celui qui suit.
122 HISTOIRE DE TOURAINE.
Philippe est, suivant toute apparence, celui qui
figure sur la liste des chevaliers bannerets de Tou-
raine , où il est dit seulement : Dominus Hajœ. Il
épousa Isabelle de Passavant, qui lui porta cette terre
en mariage. Elle en était veuve en 1255, ainsi qu'on
le voit par ses lettres du mois de mars de la même
année , scellées de son sceau , qui est le même que
celui des seigneurs de Montbazon ; ce qui confirme
que Renaud II descendait de Jean de Montbazon. De
ce mariage sortit Barthélemi , et Geoffroy , qui fut
archevêque de Tours.
Barthélemi , seigneur de La Haye et de Passavant,
assista à l'arrière-ban de France en x3o4. H avait,
selon les frères Sainte-Marthe , épousé Édeline de Lu-
signan , fille de Geoffroy II , dont il eut Geoffroy et
Isabelle , femme de Philippe Isoré.
Geoffroy, deuxième du nom, épousa Marie de
Maillé, dame de la Croix-de-Bléré, qui, en iSyo, fît
aveu à l'archevêque de Tours pour la seigneurie de
La Haye , en l'absence de son mari. Il ne laissa qu'une
fille héritière de tous ses biens.
Isabelle, dame de La Haye, prit alliance avec Pierre,
seigneur de Marmande, dont elle n'eut pareillement
qu'une fille.
Marguerite de Marmande , dame de La Haye,
Marmande et Saint-Michel , épousa Jean III , comte
de Sancerre, qui^ comme baron de La Haye et de
Saint -Michel -sur -Loire, assista, en i385, à l'en-
trée de Séguin d'Antou, archevêque de Tours, et
LA HATE. 123
y fît les doubles fonctions d'écuyer tranchant et d'é-
chanson. Deux filles, Marguerite et Jeanne , furent les
seuls fruits de ce mariage.
Marguerite de Sanccrre fut mariée trois fois ; la
première à Girard, seigneur de Retz ; la seconde à
Béraud, dauphin d'Auvergne, comte de Clermont et
de Mercœur, et la troisième à Jacques, seigneur de
Monberon et de Maulévrier. Par le second contrat
de mariage , son père et sa mère l'instituèrent héri-
tière de tous leurs biens, à l'exception de Marmande,
Faye-la-Vincuse et Saint-Michel-sur-J^oire, qu'ils se
réservèrent. De ce second mariage Marguerite eut
un fils avec lequel elle fit, le 22 novembre 1^09 ? "^e
transaction eu vertu de laquelle les terres de La Haye
et d'Azay devaient rester au seigneur de Monberon,
son troisième mari.
Jean de Torsay , chambellan du roi Charles VI et
grand-maître des arbalétriers de France, paraît avoir
acquis de Jacques de Monberon la seigneurie de La
Haye. Il avait épousé Marie d'Argenton, veuve de
Bertrand de Cazelas, chevalier de Béarn , dont il eut
une fille unique. Il mourut en 14^3.
Jeanne de Torsay, sa fille, fut également mariée
trois fois , l'une à André de Beaumont, en i4*^4 ? ^^^^^
elle eut Jacques de Beaumont; l'autre à Jean de Ro-
chechouart, seigneur de Mortemart, qualifié de baron
de La Haye dans un titre de i432 ; et la dernière h
Philippe de Molun, qui vivait encore en i444-
Jacques de Beaumont, cbambellan du roi, seigneur
de La Haye, la Roche-Raffîn, Bressuire, etc. , épousa
124 HISTOIRE DE TOTTRAINE.
Louise, fille de Jean de Rochechouart , son beau-père,
et de Jeanne Turpin , sa première femme , par con-
trat du 9 janvier i45i. Il fut fait sénéchal de Poitou
par lettres de Charles VIII du 2 3 mars i49i- H eut
de ce mariage trois filles, dont l'aînée, Jeanne j fut
dame de Bressuire. Philippe , la seconde, eut La Haye,
et la troisième la seigneurie de Beaumont.
Philippe de Beaumont fut alliée avec Pierre de La-
val , seigneur de Loué et de Benais , fils de Guy Laval
et de Charlotte de Sainte-Maure. De ce mariage na-
quirent Gilles et Guy de Laval, qui fut seigneur de
Lezay.
Gilles de Laval , baron de La Haye , de Loué , de
Bressuire, épousa Françoise de Maillé.
Pierre de Laval comparut l'an i5o7 au premier
procès-verbal de réformation des coutumes de Tou-
raine en qualité de seigneur de Ija Haye. Il paraît que
ce fut lui qui vendit cette baronnie à Guillaume de
Morenne , qui la rétrocéda à Louis de Rohan , sei-
gneur de Guémené.
Louis de Rohan- Guémené eut procès contre les
officiers de la reine Éléonore , veuve de François P'
et duchesse de Touraine, qui avaient fait saisir la
seigneurie de La Haye, faute par lui d'avoir exhibé
son contrat d'acquêt, payé les droits seigneuriaux et
rendu la foi et hommage. Il comparut , en 1 659, à la
seconde réformation des coutumes de Touraine. Mais
en 1 588 cette terre fut annexée à celle de Montba-
zon, qui fut alors érigée en duché -pairie en faveur
de Louis de Rohan , septième du nom. Celui-ci étant
LANGEAIS. Il5
mort sans enfans , le duché passa à Hercule son frère,
et depuis ce temps il est resté dans la même famille,
branche dite de Montbazon.
La ville de La Haye avait deux paroisses : Saint-
George et Noire-Dame.
La justice y était exercée par un bailli, un procu-
reur de cour et un greffier. Six paroisses en relevaient
en première instance , et deux autres en appel. Le
maire avait été créé par l'édit de 1692.
Ce fut à La Haye que naquit l'illustre René Des-
cartes le 3i mars iSgô. On y conserve encore reli-
gieusement la maison où reçut le jour le père de la
philosophie moderne, et la chambre qui fut son ber-
ceau est décorée d'un buste en terre cuite envoyé au
propriétaire de cette maison par le ministre de l'in-
térieur, et solennellement inauguré par le général
Pommereul, préfet d'Indre-et-Loire, le samedi 2 oc-
tobre j 802. Depuis ce moment la ville a pris le nom
de La Haye-Descartes. On se rappelle à ce sujet une
plaisanterie de Voltaire. Il raconte qu'étant à La Haye
en Hollande, on lui adressa une lettre qui fut dirigée
sur La Haye en Touraine , mais que le directeur de
la poste écrivit au dos : Inconnu dans le pays.
LANGEAIS, BARONNiE.
Langeais, autrefois Langez [Jlinga^^ia)^ ville
située à la droite de la Loire , entre le fleuve et le
coteau, à six lieues de Tours, fut un des premiers lieux
de la province où saint Martin prêcha l'évangile; ce
ia6 HISTOIRE DE TOUR AINE.
qui prouve sa haute antiquité. Il y fit bâtir une église
où il plaça des reliques de saint Jean , et qu'il mit sous
son invocation. C'était en dernier lieu simultanément
une paroisse et un chapitre composé de quatre cano-
nicats , dont l'un était uni à la cure. La seconde pa-
roisse était dédiée à saint Laurent.
Le château fut bâti par Foulques-Nerra sur la fin
du dixième siècle. Eudes I", comte de Touraine, irrité
d'une pareille entreprise de la part du comte d'Anjou,
en fît le siège en 994 , ainsi que ce fait nous est con-
firmé par la charte de fondation de l'abbaye de Bour-
gueil, datée de cette même année. Quoique nous ne
sachions pas précisément quel en fut le succès , nous
devons croire qu'il se rendit maître de la place, puis-
que ses successeurs la possédèrent depuis jusqu'à Thi-
baut II, comte de Touraine, son petit -fils, qui la
donna pour sa rançon à Geoffroy-Martel, comte d'An-
jou, en io44-
On tient pour constant que le château fut rebâti en
son dernier état sous le règne de Philippe -le- Hardi
par son ministre Pierre de la Brosse , dont nous avons
déjà rapporté la fin tragique. Les Anglais s'emparè-
rent de Langeais sous le roi Jean ; mais ils furent
obligés de le rendre en i36o par le traité de Bréti-
gny. Ils le reprirent encore en 14^8. Comme les
troupes de leur garnison faisaient des courses fré-
quentes jusqu'aux portes de Tours , les habitans com-
posèrent avec le commandant, et achetèrent leur tran-
quiUité moyennant une somme de deux mille cinq
cents écus d'or.
LANGEAIS. 127
Sous Jean de Montsoreau , archevêque de Tours ,
il y eut, en 1270, un concile provincial tenu à Lan-
geais, où assistèrent tous les cvêques suffragans.
Ce fut pareillement le lieu où on rédigea pour la
première fois par écrit les coutumes de Touraine dans
l'assemblée qui s'y tint le i4 mars 1460, par ordre
de Charles VII, et où fut célébré, le 26 décembre
1491, le mariage de Charles YIII avec Anne, du-
chesse de Bretagne.
Hubert est le premier des seigneurs de Langeais
qui soit venu à notre connaissance. Il est probable,
ainsi qu'on le verra à l'article de son fils , qu'il vivait
vers l'an 980. Il eut trois enfans : Hubert II ; Foul-
croy, père de Raoul, archevêque de Tours, et Robert
de Langeais, qui se trouve présent à la donation du
bourg et de l'église de Semblançay par Hubert, son
frère.
Hubert , deuxième du nom , surnommé le Gros-
Chevalier, accorda aux religieux de Marmoutier
l'exemption des droits de péage, tant par eau que par
terre , pour toutes celles de leurs provisions qui pas-
seraient dans l'étendue de ses domaines. Cette dona-
tion eut lieu sous Ébrard , qui fut abbé de Marmou-
tier de ioi5 à io32, et il la confirma depuis, du
consentement de Geoffroy son fils, sous Albert, qui
gouverna cette abbaye de 1082 à 1064. Hubert II
eut plusieurs enfans : i** Hamelin., seigneur de Lan-
geais; 2° Geoffroy, doyen de Saint-Martin de Tours ;
3° Hugues qui donna plusieurs domaines à l'abbaye
de Bourgueil, en loSg; 4* Gautier, qui ratifia, en
128 HISTOIRE DE TOTTRAmE.
To65, la donation de quelques propriétés situées au
Sentier , faites à l'abbaye de Marmoutier par Hamelin
et Hugues , ses frères.
Hameîiu de Langeais succéda à son père, et con-
firma l'exemption de péage, dont nous avons parlé,
par lettres de l'année 1106, sous l'abbé Guillaume
de Comborn.
Ingelger de Langeais ratifia la même exemption,
du consentement d'Hermensande , son épouse, de
Ricliilde, femme de Marcellus, et de ses autres en-
fans.
Léonin donna le lieu de Chaufournais , paroisse de
Neuillé-Pont-Pierre , à Robert d'Arbrissel , du con-
sentement de Barbotte sa femme , de Dreux son frère
et de Guy , fils de Dreux. Cette donation eut lieu né-
cessairement avant l'année 11 1 7 , époque de la mort
de Robert d'Arbrissel.
Depuis ce temps Langeais appartient aux comtes
de Touraine, et en 1204 il fut réuni à la couronne
de France ; ce qui donna lieu aux seigneurs enga-
gistes.
Robert de Vitré, premier baron de Bretagne, fut
un des principaux partisans du jeune comte Artus ,
dont il était parent. Il l'enleva dé Rennes, en 1 196,
par ordre de Constance sa mère , pour le soustraire
à Richard, roi d'Angleterre. Artus, devenu comte de
Touraine, lui donna le château et le domaine de Lan-
geais par lettres du mois de juin 11 99 ; mais après la
mort de ce prince. Vitré les rendit à Philippe- Au-
guste, qui lui donna en échange Saînt-Sever, avec
LANGEAIS. 129
quelques terres en Nonnaiulic par lettres de Tan
1206.
Guiliaunie des Roches, sénéchal de Touraine, oh-
tint de Philippe-Auguste la ville de Langeais, à con-
dition de la garder à ses frais tant qu'elle ne sérail
pas assiégée par le roi d'Angleterre en personne. 11 la
remit depuis entre les mains du roi, s'étant seulement
réservé les droits de sénéchaussée.
Hugues de Lézignan , deuxième du nom , comte de
La Marche et d'Angoulême, avait épousé Isabeau,
veuve de Jean-sans-ïerre. Pour dédommager le comte
du douaire qu'Isabeau avait en Angleterre , Louis VIII
lui donna la ville de Langeais, à condition qu'il ne
pourrait la fortifier sans son consentement. Il la ren-
dit depuis à saint Louis moyennant dix mille six cents
livres, que le roi s'obligea de lui payer chaque année
pendant dix ans. Par le traité fait à Clisson en i23o,
Louis la lui donna de nouveau avec quelques autres
places, comme garantie du mariage de Hugues, fds
aîné du comte, avec Isabeau de France. Mais la ré-
bellion du père empêcha le mariage du fils. Obligé de
prendre les armes contre lui, saint Louis le défit à
Taillebourg, et reprit sur lui Langeais, ainsi que les
autres places qui furent confisquées et de nouveau
réunies à la couronne.
Alphonse de France, frère de saint Louis, comte de
Poitiers et de Toulouse , fut mis en possession des
terres du comte de La Marche, par lettres données
au camp près la ville de Pons au mois d'août 1242.
3. 9
j3o histoire de touraixe.
Il mourut sans postérité en Italie, le ii août 1271.
Pierre cle Brosse ou de la Brosse, chambellan de
France, second fils de Pierre de la Brosse, sergent à
masse de saint Louis, acquit d'Alphonse de France la
seigneurie de Langeais. Peu de temps après il racheta
de Maurice de Graon , sénéchal des trois provinces ,
les droits qu'en cette qualité il avait sur Langeais. Il
avait tellement capté la faveur de Philippe-le-Hardi,
qu'il eut seul l'administration de l'état; ce qui excita
contre lui la jalousie des ducs de Bourgogne , de Bra-
bant et d'Artois, qui parvinrent à lui faire faire son
procès et à le faire condamner à mort en 1278. Tous
ses biens furent confisqués et réunis à la couronne.
Il avait épousé Philippe, fille de Mathieu de Saint-
Yenant , dont il eut : Pierre de la Brosse , qui suit ;
Jeanne, femme de Simon de Beaugenci; Isabeau,
alliée à Mathieu de Vatebois; et Perrenelle, mariée
à Etienne II de Jaulnay. Pierre son fils avait été fiancé
en 1274 avec Jeanne, sœur de Guillaume Larche-
vêque , seigneur de Parthenay ; mais la fin funeste de
son père le priva de cette alliance ainsi que de la sei-
gneurie de Langeais.
Depuis ce moment jusqu'en i466, il n'y eut plus
à Langeais que des gouverneurs qu'on nommait châ-
telains.
François d'Orléans , comte de Dunois et de Lon-
gueville, fils du célèbre bâtard d'Orléans, obtint de
Louis XI, par lettres données h Montargis le 2 juillet
1466, la ville et le domaine de Langeais en assigna-
LANGEAIS. l3li
lion de dot et pour garantie de quarante mille ëcus
d'or que le roi promit en mariage h Agnès de Savoie,
sa belle- sœur.
Jean-Bernardin de Saint-Severin , duc de Somma
au- royaume de Naples , gentilhomme ordinaire de la
maison du roi , fut gratifié de la seigneurie de Lan-
geais par lettres de Henri II du 16 septembre i547'.
Cette famille était établie en France depuis le traité
de mariage projeté entre Charles d'Anjou, prince de
Tarente , et Polyxène de Saint-Severin ; mais on sait
que ce traité n'eut pas d'exécution.
Marie, dame de Belleville, veuve de François de
Balzac d'Entraigues, eut la chàtellenie de Langeais à
titre d'engagement pour neuf années , par contrat
définitif du 1 3 février 1 63 1 .
Louise-Marguerite de Lorraine , fille de Henri P%
duc de Guise et veuve de François de Bourbon, prince
de Conti, eut cette même chàtellenie à titre d'échange,
par lettres de Louis XIII du 1 février r63i, dont
nous avons déjà parlé à l'article de Chinon. Mais dix-
huit jours après elle la revendit au maréchal Antoine
d'Effiat.
Antoine Coeffier, dit Ruzé, marquis d'Effiat, baron
de Cinq-Maars, maréchal de France, acquit de la
princesse de Conti la terre de Langeais, qui, au moyen
de l'échange , cessa de faire partie du domaine en-
gagé. Elle est restée dans la même famille jusqu'à
l'année 1768, que le marquis d'P^ffiat la vendit au duc
de Luines, qui la réunit à son duché. Elle avait pré-
cédemment été possédée par Armand-Charles de La,
9-
l3l HISTOIRE DE TOURAINE.
Porte, (lue de Mazarin et de la Meilleraie, du clief
de Marie Ruzé d'Effîat , sa première femme , et ensuite
par l'une de leurs filles , qui avait épousé le marquis
de Bellefons.
Il y avait à Langeais un siège royal dont la juri-
diction était de très-peu d'étendue. Il était composé
d'un lieutenant-général et criminel , de deux conseil-
lers et d'un greffier.
LA VALLIERE, duché-pairie.
Châteaux, aujourd'hui Château- la- Vallière, était
autrefois la première baronnie d'Anjou, et fait main-
tenant partie du département d'Indre-et-Loire. Plu-
sieurs barons de Saint-Christophe avaient en même
temps, ainsi que nous le verrons à leur article, été
seigneurs de Châteaux, et la réunion de ces deux terres
pour en former un duché avait fini par en placer le
siège en Touraine.
Pierre Trousseau, seigneur de Vérets, l'était aussi
de Châteaux en 1 394.
Hardouin de Bueil, évêque d'Angers, en était éga-
lement seigneur en i/joy et même en i4^4î i^^lis
nous ne savons comment il possédait ces deux baron-
nies. Il fallait qu'il n'en eût qu'une portion, puisqu'il
est certain qu'a celte même époque Jean Larchevêque
en prenait le titre. Mais sans nous arrêter a la baron-
nie de Châteaux , qui dans le principe ne faisait pas
partie de notre province, nous ne nous occuperons ici
que du duché de La Vallière.
LA VALLlèRE. l33
Louise-Françoise de La Baume-le-Blanc do La Val-
lière, née à Ambolsc le samedi 6 août i644> ^"^ de
Louis XIV, entre antres enfans , Marie-Anne de Bour-
bon, née le 17 octobre 1666 et légitimée de France
le t4 mai 1667. Le roi, par ses lettres patentes du
même mois, érigea en duché-pairie, en faveur de la
mère et de la fîUe, avec clause de réversion à défaut
d'héritiers directs , les baronnies de Châteaux , de
Saint-Christophe et de Vaujour , sous l'appellation de
La Vallière.
La Vallière est une terre située en Touraine dans
la commune de Reugny, d'où la famille de La Baume-
le-Blanc avait pris celui de La Vallière.
Marie-Anne de Bourbon épousa, le 16 janvier 1680,
Louis -Armand de Bourbon, fds aîné d'Armand de
Bourbon, prince de Conti, qui mourut sans postérité
le 9 novembre 1686, à l'âge de vingt- cinq ans.
La duchesse de La Vallière étant retirée aux Car-
mélites, la princesse de Conti, douairière, resta en
possession du duché : mais n'ayant point eu d'enfans,
d'après la clause de retour, le duché devait s'éteindre,
et les domaines qui l'avaient formé retourner à la
couronne. En 1698 elle obtint du roi son père des
lettres patentes qui l'autorisaient à disposer de ces
domaines en faveur de son neveu le marquis de La
Vallière. Ces lettres patentes furent enregistrées au
siège de Tours le 12 août 1698.
Charles-François de La Baume-le-Blanc, marquis
de La Vallière, fils de Jean -François, frère de la du-
chesse, épousa Marie-Thérèse, fille du maréchal de.
l34 HISTOIRE DE TOURAINE.
Noailles. Ce fut en faveur de ce mariage qu'on songea
à faire revivre le duché de La Vallière. Des lettres
patentes du 7 février 1723 rétablirent l'union des
baronnies de Saint-Christophe, Châteaux, Courcelles
et autres pour n'en composer, y est-il dit, qu'un seul
et même corps de terre sous l'appellation de duché-
pairie de La Vallière. C'est peut-être le seul qui offre
cette double érection. Les lettres patentes furent en-
registrées au parlement le 22 février 1723, et le 28
mai suivant à la chambre des comptes. Quoique la
princesse de Conti ait encore vécu jusqu'en 1739, le
nouveau duc entra pourtant en possession du do-
maine dont il ne devait jouir qu'après la mort de la
princesse douairière. Il eut de son mariage Louis-
César, qui suit, et Louis-François, mort sans posté-
rité.
Louis-César de La Baume-le-Blanc, duc de La Val-
lière, né le 9 octobre 1 708 , est connu dans le monde
savant par la riche et curieuse bibliothèque qu'il avait
rassemblée à très-grands frais , et dont les parties les
plus précieuses furent dispersées par la vente qui en
fut faite après sa mort, arrivée le 16 novembre 1780.
Nous avons de lui la bibliothèque du Théâtre-Fran-
çais en 3 vol. in-i2. Il na laissé qu'une fille.
Louis Gaucher, duc de Châtillon, etc., épousa la
fille unique de Louis-César, qui lui porta en dot le
ducbé de La Vallière.
Adrienne-Emilie-Elisabeth de La Baume-le-Blanc
de La Vallière, duchesse de Châtillon, était veuve,
en 1790, de Louis Gaucher, duc de Châtillon, lors-
LIGUEIL. IÎ5
qu'elle vit finir en elle le titre de duché de La Vaî-
Hère , dont elle a conserve le domaine utile que depuis
elle a alie^né. C'est en elle qu'a fini également la pos-
térité de La Baume-le-Blanc.
Nous avons parlé dans notre introduction des forges
de Chateau-la-Vallière , nom qui a prévalu aujour-
d'hui , lorsque l'on devrait dire plus correctement :
Chateaux-la-Vallière.
La commune de Courcelles-la-Suse, qui concourait
à former le second duché de La Vallière, offre du
minerai dans lequel se trouvent quelques parties d'é-
taiu et d'argent, mais en très-petite quantité.
LIGUEIL , BARONWIE.
Ligueil {Ligolium ou Liiggogalus) est un gros
bourg à quatre lieues de Loches, sur la rive droite
du Lestrigneul. C'était autrefois une petite ville ayant
son château avec titre de baronnie , et renfermée de
murailles. Nous aurons peu de choses à en dire, parce
que nous ne lui connaissons d'autres seigneurs que
les doyens du chapitre de Sainl-Martin de Tours. Ce
fut Eudes Clément, vingt-sixième doyen , qui, en 1 2 1 3,
l'acheta de Barthélemi Payen pour rester à perpétuité
affectée au revenu du doyenné. Il est certain cepen-
dant que l'église de Saint-Martin avait déjà joui de
ce domaine plusieurs siècles auparavant ; car nous
voyons par une charte de Charlemagne de l'année
770, qu'Aulland , prédécesseur d'Ithicr, abbé de
Saint-Martin , avait consacré à la mense annuelle des
l36 HfSTOIRE DE TOURAINE.
frères plusieurs domaines, au nombre desquels était
celui de Ligueil qu'ils perdirent ensuite, et que leur
restitua Cbarles-le-Ghauve par un diplôme donné à
Tours en 862. Dépouillés de nouveau , ils furent remis
en possession l'an 899 par Charles-le-Simple. Enfin
Hugues Capet les y maintint par une charte de l'an
987. Malgré cela il paraît que le domaine de Ligueil
était encore passé en d'autres mains, et ce fut pro-
bablement pour mettre un terme à ces alternatives de
jouissance et de dépossession , que le doyen Eudes Clé-
ment se détermina à consolider irrévocablement par
une acquisition authentique une propriété si souvent
disputée à féglise, dont il était le premier dignitaire.
On voit par les différentes dates que nous venons
de citer que Ligueil est une ville déjà assez ancienne.
La fertilité des plaines au milieu desquelles elle se
trouve située explique et justifie la persistance de
l'église de Saint-Martin à se maintenir dans une pa-
reille propriété.
Nous n'avons eu que trop souvent occasion de si-
gnaler les désastres qui affligèrent la Touraine pen-
dant le cours des guerres de religion , principalement
en i562. Les protestans , dans celte même année,
s'emparèrent de Ligueil, que ne purent défendre ses
faibles murailles et d'assez mauvaises fortifications.
Ils y commirent les mêmes excès que dans toutes les
autres villes qui étaient tombées en leur pouvoir , en
pillant et dévastant les églises, profanations qui exas-
péraient le peuple au plus haut degré. Aussi lorsque
la chance commença à tourner, les catholiques ne
LOCHES. 187
restèrent pas en arrière, et se livrèrent même à des
actes de cruauté dignes des nations les plus barbares.
La populace, peu contente d'avoir massacre tous les
protestans qui tombèrent sous ses mains, se saisit du
ministre, lui creva les yeux, et le fit brûler à petit feu
sur la place publique, sans songer qu'elle autorisait
par là des représailles aussi cruelles. Mais la vengeance
ne raisonne ni ne réflécbit. On doit croire pourtant
que le souvenir de ces excès s'était affaibli par le
temps ; car on ne dit point qu'ils se soient renouvelés,
quand, sept ans après, les réformés se saisirent de
nouveau deLigueil, où commandait Claude de Gouf-
fîer , et dont ils furent à leur tour cbassés par Jean III
de Voyer, vicomte de Paulmy, que le duc d'Anjou
avait cbargé de cette expédition.
Ligueil, comme nous l'avons dit, n'est plus qu'un
gros bourg non fermé depuis que ses murs et son
cbaleau ont disparu sans qu'il reste de tiaccs de ses
anciennes fortifications, si ce n'est celles des larges
fossés qui entouraient la ville. On croit que ce cb«iteau
fut bâti par Foulques- Nerra, qui en effet en hérissa
la province au nord et au midi , puisqu'il est certain
que ce fut lui qui fît construire ceux de Chaumont,
Longeais, Monlrésor, Sainte-Maure, Faye-la-Vineuse
et plusieurs autres encore.
LOCHES, VILLE ROYALE ET COMTJÎ.
La ville de Loches {^Lochia, Lucca, etc.), di-
stante de celle de Tours de dix lieues au sud-est, est
t38 histoire de touraine.
située sur la rive gauche de l'Indre , au bas du coteau
sur lequel son château est assis. Il serait difficile d'in-
diquer, même approximativement, l'époque de sa
fondation. Le moine Jean , connu sous le nom de
l'anonyme deMarmoutier, qui n'est jamais embarrassé
pour trouver des origines , dans son histoire passa-
blement fabuleuse de la construction d'Amboise, at-
tribue celle de Loches à un personnage probablement
de son invention, qu'il nomme Tursiomod us Lochiùs,
et qu'il fait tout à la fois fils de Théodoric , roi des
Visigoths de Toulouse et frère d'Alaric, avec lequel
il partage les états de son père. Cet anachronisme joint
à d'autres prouve quel degré de confiance peut inspi-
rer cet auteur et combien on doit se mettre en garde
contre tout ce qu'il avance. Ce que nous pouvons dire
de plus positif, c'est que Loches existait déjà au milieu
du cinquième siècle, puisque, selon le témoignage de
Grégoire de Tours , l'évêque saint Eustoche y fit
construire une église vers l'an 45o ou 4^5 , ce qui
supposait un bourg ou une réunion d'habitations déjà
assez considérable, et qui par conséquent devait re-
monter à une époque beaucoup plus éloignée. D'après
le même historien , on serait également fondé à croire
que le château ne datait que des commencemens du
sixième siècle ; c'est du moins , en se pénétrant bien
de ses expressions, ce qu'on peut entendre de ce pas-
sage de la vie de saint Ours , où il est dit que ce so-
litaire, qui vivait vers l'an ^So, fit bâtir un autre
monastère appelé Loches, et situé sur l'Indre au pied
d'un coteau dominé maintenant par le château qui
LOCHES. 1^9
porte le même nom , cm nunc castrum supereminet.
D'où Ton doit naturellement conclure que dans l'opi-
nion de Grégoire, ce château n'existait pas encore du
t«mps de saint Ours ; autrement il n'eût pas dit : cui
nunc castrum , mais simplement cui catirum super^-
eminet. On voit effectivement, par la portion la
plus ancienne qui reste de cet édifice , la tour carrée,
que c'est un ouvrage du moyen âge.Cette tour à quatre
étages peut avoir cent vingt à cent vingt-quatre piedâ
de haut, et pouvait contenir environ douze cents
hommes de guerre.
Les traces d'une voie romaine que l'on distingue
encore dans quelques endroits du voisinage de Loches
nous portent à croire que César la fit exécuter par
ses légions , lorsque , après s'être emparé de la ville de
Bourges, il se disposa à marcher sur le pays des Tu-»
rones ; et comme cet habile conquérant ne s'avançait
jamais sans les plus sages précautions, il est à pré-
sumer que , indépendamment de cette voie , il aura
profité de la situation avantageuse que lui offrait le
coteau de Loches pour y établir une mansion , ainsi
qu'il avait l'habitude d'en placer de distance en dis-
tance à mesure qu'il s'avançait dans le pays.
Loches était sans doute un de ces nombreux ha-
meaux qui couvraient le sol des Gaules, mais dont les
noms ne nous ont pas plus été conservés que ceux des
cités principales. Ainsi les mots Leuccœ, Lochiœ ^
ne sont que des noms latins ou au moins latinisés,
qui auront été substitués au nom primitif, dont il
serait plus qu'inutile de prétendre aujourd'hui trou-
l4o HÎSTOmt DE TOUR AINE.
ver la racine ou re'tymologie dans le mot Loches, qui
n'a probablement rien de commun avec le nom gau-
lois.
Quoique dans l'origine le territoire de Loches fût
incontestablement compris dans celui des Tiirones ,
il fut long-temps par la suite sans faire partie inté-
grante de la Touraine. D'abord soumise comme tout
le reste à la domination des Romains, lors de leur ex-
pulsion àes Gaules en l\^o^ la ville de Loches passa
sous celle des Visigoths. Elle en dépendait encore en
742 , lorsque Hunald , duc d'Aquitaine, refusant pour
ce duché la foi et hommage à Pépin et à Carloman,
prit les armes contre ces deux Ç\\s de Charles- Martel.
Ceux-ci, marchant à sa poursuite, assiégèrent, pri-
rent et ruinèrent la ville de Loches, dont ils firent
les habitans prisonniers, et qu'ils traînèrent à leur
suite jusqu'au vieux Poitiers, où ils les relâchèrent
après avoir partagé le butin qu'ils avaient fait dans
cette expédition. Il est évident , d'après cela , que
Loches était alors étrangère à la France. Les comtes
d'Anjou la possédèrent ensuite, avant même qu'ils
eussent réuni la Touraine à leurs autres possessions;
et voici comment cette ville passa sous leur autorité.
Sous Charles-le*Chauve le midi de la Touraine ne
faisait plus partie du royaume d'Aquitaine. Ce mo-
narque donna Loches et son domaine à Adeland, l'un
des principaux seigneurs de sa cour , comme récom-
pense des services signalés qu'il avait rendus à l'état.
Adeland eut pour fils et héritier Garnier, que quel-
ques-uns nomment Gautier, qui fut seigneur de Lo-
LOCHES. l4l
ches, de Villantrais et de La Haye. Celui-ci eut une
fille nommée Roscillc, qui c'pousa Foulques 1% dit le
Roux , auquel elle porta en dot la ville de Loches :
mais il paraît que La Haye et Villantrais ne firent
point partie de cette dot , puisque Foulques s'en em-
para dans la suite par ruse ou par violence.
Foulques-le-Roux avait succédé à son pèreingelger
dans une partie de l'Anjou, qui, en ce temps, était
partagé en deux portions égales portant chacune le
titre de comté. Celle au-delà de la Mayenne appar-
tenait à Robert-le-Fort , qui résidait à Châteauneuf,
et l'autre, en-deçà, était possédée par Foulques, qui
faisait sa demeure à Angers. Ce fut lui qui , sous l'es-
pèce d'anarchie du règne de Charles-le-Simple , réunit
en sa personne les deux portions de ce riche comté,
dont il fut probablement redevable à Hugues -le-
Grand ; car nous voyons que Geoffroy Grisegonnelle,
son petit-fils, se disait comte d'Anjou par la grâce de
Dieu, et par la faveur de Hugues son seigneur, ainsi
que par celle de sa mère Gerberge : gratiâ Dei et
senioris mei largitione Andegavensis cornes , matris
quoque meœ Gerbergœ ; voulant sans doute faire
connaître par ces mots gratid Dei qu'il ne devait qu'à
sa naissance et à ses ancêtres le comté d'Anjou en-deçà
de la Mayenne, et par les autres expressions qu'il était
redevable de l'autre partie à Hugues -le -Grand son
oncle, ainsi qu'à sa mère.
Les successeurs de Foulques dans le comté d'Anjou
possédèrent donc comme lui la ville de Loches et
celle de Beaulieu , qui n'étaient pas les seuls dotnaines
\^Ql histoire de TOURAmE.
qu'ils eussent en Touraine. De là le désir qu'ils mani-
festèrent toujours d'envahir cette province, désir que
montra plus que tout autre Foulques-Nerra , quand
il l'entoura d'une ceinture de châteaux et de forte-
resses qu'il fît bâtir à grands frais et avec une promp-
titude qui pourrait étonner si l'on ne savait que ces
cpmtes disposaient à leur gré des bras de leurs sujets,
qui presque tous, surtout dans les campagnes, n'é-
taient alors que des serfs attachés à la glèbe.
Richard Cœur-de-Lion ayant été retenu prisonnier
par l'empereur Henri VI, lorsqu'il revenait de la
T^rre-Sainte , Jean-sans-Terre , son frère , se mit en
devoir de s'emparer de ses états. Il fallait pour cela
mettre Philippe-Auguste dans ses intérêts. Pour mieux
l'y décider , il lui abandonna plusieurs places , entre
autres celle de Loches. Par le traité fait entre eux au
mpis de janvier iiqS, il fut stipulé que la garnison
serait entretenue aux dépens du prince anglais, qui
serait obligé d'y tenir toujours des provisions pour
deux mois et d'y maintenir onze chevaliers avec cent
quarante écuyers. Mais le roi Richard , de retour en
Angleterre , passa en France en 1 194? reprit la ville
de Loches, et y fît prisonniers quatre-vingts écuyers et
Sioixante-quatre chevaliers, au nombre desquels était
Guy de Laval , gouverneur de la place pour le roi de
France. Philippe- Auguste à son tour l'assiégea, en
1204, aussitôt qu'il eut réuni la Touraine à sa cou-
ronne ; mais cette fois elle fît une plus longue et une
plus vigoureuse défense , et elle ne se rendit que par
composition au commencement de l'année isto5, après
LOCHES. 143
avoir soutenu un siège de près d'un an. C'est de cette
époque seulement qu'elle peut être considérée comme
appartenant à la Touraine.
Le roi la donna comme récompense à Dreux de
Mello, connétable de France, qui s'était rendu cé-
lèbre par un grand nombre d'exploits militaires , tant
dans l'intérieur du royaume qu'à la Terre-Sainte, où
il avait accompagné le monarque en 1 1 9 1 . Loches
appartenait alors à la reine Berengaire, veuve de Ri-
chard , et elle en jouissait comme faisant partie de son
douaire , ce qui lui fit intenter un procès à Dreux de
Mello; mais Philippe-Auguste étant intervenu dans la
cause, Berengaire, au mois de janvier 12145 donna
sa déclaration portant qu'elle n'entendait point con-
tester au roi l'hommage et la souveraineté, mais seu-
lement le domaine utile contre qui que ce fût. Cepen-
dant Dreux continua d'en jouir jusqu'à sa mort, qui
eut lieu en 1218. Il était âgé de quatre-vingts ans,
laissant d'Ermentrude de Moucy, son épouse, deux
fils et une fille. Il paraît que Guillaume^ l'aîné des
deux, était mort avant son père.
Dreux de Mello., deuxième du nom , fils puîné du
précédent, lui succéda dans les seigneuries de Loches
et de Châtillon-sur-Indre , dont son père, en 1206,
avait promis au roi 4e lui remettre les châteaux,
toutes les fois qu'il l'exigerait. Il épousa Isabelle, dame
de Mayenne , dont il n'eut point d'enfans, et mourut
dans nie de Chyprele 8 janvier 1 249. Un mois aupa-
ravant il avait vendu ses deux seigneuries au roi saint
Louis moyennant six cents livres de rente, dont il
l44 HISTOIRE DE TOUR AINE.
donna ses lettres datées du mois de décembre 1249,
au camp d'Egypte proche du fleuve du Nil, la vingt-
quatrième année du règne de saint Louis.
Le domaine de Loches fut engage le 26 juin i5g4
h Gaillard de Saint-Pastour pour la somme de quatre
mille cinq cents livres. Il le fut depuis à un seigneur
de Braque, qui prit le titre de comte de Loches. En
1790 le marquis de Verneuil prenait ce même titre
en qualité d'engagiste.
Depuis sa réunion à la couronne , Loches eut des
gouverneurs particuliers. Tous ne nous sont pas con-
nus. Voici ceux dont l'histoire ou les archives nous
ont transmis les noms.
Pierre de la Brosse ^ sergent d'armes du roi saint
Louis , est un des premiers. II paraît d'après cela que
son fils, dont nous avons déjà parlé plusieurs fois,
n'était pas d'une si basse extraction qu'on le croit
communément. Le roi Philippe de Valois, en i345,
lui accorda trente livres de rente pour lui et ses hé-
ritiers en ligne directe.
Enguerrand Dubin , chevalier, était gouverneur de
Loches lorsque, le 5 septembre i36o, il fit un traité
avec les habitans de Tours.
Philippon de Voyer, sire de Paulmy, fils de Guil-
laume et de Nicole de Pressigny, eut également le
gouvernement de Loches.
Pierre de Voyer, sire de Paulmy, fils de Jean, pre-
mier du nom , et d'Alix de Cluys , figure au rang des
gouverneurs de Loches.
Pierre d'Amboise, seigneur de Chaumont, remit,
LOCHES. 145
en 144O7 Itî château de Loches, que le roi lui avait
confié , entre les mains du duc de Bourbon et des
autres seigneurs mécontens qui avaient suivi le parti
du die d'Alençon. Mais, par le traité fait à Cassel dans
le cours do la même année, il s'obhgea de le rendre
'au roi.
Olivier Dain , barbier du roi Louis XI, fut placé
par lui moins comme gouverneur que comme geôlier
du château de Loches.
François de Ponbrillan , chambellan du même roi,
obtint de lui, en 1479? ^i^ mille arpens de terres et
bois dans la forêt de Loches et aux environs pour y
construire places fortes , maisons et métairies, projet
qui, comme on croit bien, ne fut point exécuté. Ce
même Ponbrian fut enlevé par la garnison de Beau-
genci au mois de septembre i485, tandis qu'il se
rendait à Tours.
Louis Brossin, chevalier de Tordre du roi, gentil-
homme ordinaire de sa chambre et capitaine de
cent hommes d'armes, gouverneur de Loches, était
beau -frère de Jean de Taix, colonel de l'infanterie
française.
Honorât de Savoie, marquis de Villars, baron de
Pressigny, maréchal de France, gouverneur de Lo-
ches , y mourut en 1 58o.
Gaillard de Saint-Pastour, seigneur de Salerne.
Nous avons vu plus haut qu'il avait obtenu le do-
maine de Loches, à titre d'engagiste, en 1594.
Jean-Louis Nogaret de La Valette, duc d'Epernon,
mourut daiis son gouvernement de Loches, le i3
3. 10
l46- HISTOIRE BE TOURAINE.
janvier 1642. II est trop connu dans l'histoire pour
que l'on entre ici clans aucuns détails sur ce qui le
concerne. ^
Bernard de La Valette et de Foix , duc d'Éperaon ^
succéda à son père, et mourut à Paris le 2 5 juillet
1661.
François de Beauvilliers, duc de Saint-Aignan,
pair de France, chevalier des ordres du roi, premier
gentilhomme de sa chamhre, réunit au gouverne-
ment de la Touraine celui des ville et château de
Loches. Il mourut en 1687, membre de l'académie
française.
Paul de Beauvilliers^ duc de Saint-Aignan , pair de
France, chevalier des ordres, fut créé chef du conseil
des finances et gouverneur du duc de Bourgogne. Il
mourut en 1714? %^ ^e soixante ans.
Paul-Hippolyte de Beauvilliers , fils puîné du pré-
cédent, chevalier des ordres du roi. Comme son
aïeul, il fut admis à l'académie française, et mourut
en 1776.
Le château de Loches avait en outre un lieutenant
de roi, et une compagnie d'invalides en formait la
garnison.
L'église collégiale de Notre-Dame, située dans
l'intérieur du château, a été bâtie vers Tan 98^ par
Geoffroy -Grisegonnelle, qui y était représenté à
genoux sur un pilastre derrière l'autel, du coté
gauche. A droite était une autre statue également en
pierre que quelques-uns ont cru être celle du roi
Lothaire, qui permit à Geoffroy de bâtir cette église
LOCHES. 14-7
par lettres patentes données à Laon le i3 août 984 ;
mais comme on nV distinguait aucun signe de
royauté, d'autres ont pensé que ce pouvait être la
figure de Foulques-Nerra , qui aura voulu être placé
auprès de son père , fondateur de cette église. Quoi
qu'il en soit , ces deux statues méritaient d'être con-
servées comme monumens des arts du moyen âge.
On nous assure cependant qu'elles ont échappé à la
destruction par les soins d'un habitant de Loches
qui les a recueillies et placées dans son jardin.
Cette église n'était auparavant qu'une simple cha-
pelle dédiée à sainte Madeleine, et l'opinion commune
est qu'elle avait été bâtie par saint Eusloche, cin-
quième évêque de Tours, vers l'an 45o. Geoffroy, en
la faisant reconstruire , y avait fondé douze chanoines.
Ses lettres , sans date , furent données en présence de
ses deux fils Foulques et Maurice, de Hardouin,
archevêque de Tours, et de plusieurs autres. L'église,
située au plus haut du château , est couverte en pierre,
et offre à son sommet deux pyramides (i) hautes d'en-
viron vingt-cinq toises, accompagnées de deux clo-
chers qu'on tient avoir été bâtis aux frais de Thomas
Paccius ou.Pascius, prieur de Loches et auteur d'une
chronique d'Anjou dont nous parlerons dans notre
Biographie. Entre ces deux tours est la nef surmontée
dans toute sa longueur de deux voûtes pyramidales
(i) Et non pas trois, ainsi que nous ravuns dit, toro. I, pag. 3i5.
La tour la plus voisine du portail a Bq"», fi5<' ou 119 pieds métriques
de hauteur perpendiculaire; et celle plus rapprochée du sanctuaire, dont
la base n'a pu étro mesurée , peut avoir 4^5 pieds de plus.
10.
I/J8 HISTOIRE DE TOURMNE.
en pierre, de forme octaèdre, recouvertes en ardoises,
et dont les sommets sont élevés au-dessus du pavé de
l'église de 80 pieds 9 pouces métriques, ou 26"", Ç)'y.
Au milieu du chœur se voyait le tombeau d'Agnès
Sorel. Nous ne placerons point ici ce que nous avons
à dire de cette femme célèbre dans notre quatrième
volume. Nous dirons seulement que ce tombeau, qui
remonte à la renaissance des beaux arls en France,
était relégué dans une chapelle où, tout-à-fait dé-
gradé , il était menacé d'une destruction totale. L'ad-
ministrateur qui était alors à la tête du département,
le général Pommereul, consacra à sa restauration une
somme de 1 865 fr. La statue d'Agnès, envoyée à Paris,
en revint aussi parfaite que dans son état primitif,
et le monument fut placé dans une tour dont l'entrée,
donnant sur la terrasse du château , est décorée de
quatre colonnes et de leur entablement surmonté d'un
fronton. On lit sur une des faces du sarcophage cette
nouvelle inscription :
Les chanoines de Loches , enrichis de ses dons ,
Demandèrent à Louis XI
D'éloigner son tombeau de leur chœur.
J'y consens, dit-il , mais rendez la dot.
Le tombeau y resta.
Un archevêque de Tours moins juste
Le fit reléguer dans une chapelle.
A la révolution il y fut détruit.
Des hommes sensibles recueillirent les restes d'Agnès,
Et le général Pommereul, préfet d'Indre-et-Loire,
Releva le mausolée de la seule maîtresse de nos rois
Qui ait bien mérité de sa patrie ,
LOCHES. 149
En mettant pour prix à ses faveurs
L'expiiîsion des An;,'Iaîs hors de la France.
Sa restauration eut lieu l'an M. DCGC . VI.
Les anciennes inscriptions y ont été conservées.
Sous le Jubé se voyait un autre tombeau que Ton
disait être celui du duc de Sforce, quoique rien ne
pût autoriser cette opinion. Dans le mur de la nef à
gauche était celui de Raoul de Préaux et de sa femme.
Leurs figures y étaient sculptées en bas- relief, ainsi
que celles des chanoines qui avaient assisté à leurs
obsèques l'aumusse sur la tête ; maison n'y remarquait
ni date ni inscription.
Les tapisseries qui décoraient le chœur de cette
église, et qui étaient un don d'Agnès Sorel, passaient
pour être d'un fort beau travail , mais relativement
au temps où elles avaient été faites ; car quant au
dessin et à la vérité du costume, on peut en juger par
une Susanne qui était représentée avec des manchettes
de dentelles, dont pourtant on ne pouvait s'empêcher
d'admirer la finesse et la beauté.
Mais un monument auquel on n'a pas apporté assez
d'attention est un autel antique d'un seul bloc de
pierre de forme circulaire, qui a été renversé, et dont
on a creusé le dessous pour en faire un bénitier. Il
est orné dans son pourtour de diverses sculptures où
l'on peut distinguer un guerrier nu dans l'attitude de
combattre, un vase, une tête casquée; le surplus est
enclavé dans le mur, et peut-être y est-il encore in-
tact. Il serait facile de remplacer par un bénitier plus
élégant et pUis conforme a sa destination ce monu-
l5o HISTOIRE DE TOURIINE.
ment antique, qui pourrait ainsi enrichir un musée
ou tout autre édifice public.
Au bas de la porte du chçsur se trouvait unb tombe
garnie de lames de cuivre sur lesquelles était gravée
répitaphe suivante :
Sous ce piteulx édifice dolent
Se gist le corps de messlre Roland
De TEscoûel, trèz léal chevalier,
En son vivant chambellan , conseiller
Du roi des Francs , et grand veneur de France :
De Montargis baillif de granî prudence.
Maître des eaux et forêts de Touraine ,
De Loches fust général capitaine ,
Et de Bourgouiu; moult vaillant el expert.
Seigneur aussi estoil deKéripert ,
Et de Kemblec, voire de Grillemonl,
Qui trcspassa, comme tous vivans font,
Le jour mortel dixiesrae de décembre
Mil et cinq cents , de ce suis-je remembre :
Et puis luy mort fust mis soubs cette lame.
Priez à Dieu qu'il veuille avoir son amc.
L'église paroissiale sous l'invocation de saint Ours
est dans l'intérieur de la ville, avec une succursale
sous le nom de Saint- Antoine.
Le couvent des Cordeliers était situé au dehors;
fondé vers l'an 1229, il fut consacré, en laS^, par
Farchovêque de Tours, Juhel de Mayenne : mais il
avait été supprimé dès l'année 1774- H y avait éga-
lement un couvent de capucins fondé en 161 9 et une
maison de religieuses ursulines établie en 1627; de
plus un hôpital qui ne datait que de 1629, et un col-
lège sous la direction de rehgieux barnabites. La
LOCHES. I^f
chartreuse du Ligct élait située dans la foret de Lo-
ches. Nous avons rapporté son origine en parlant de
Henri II, roi d'Angleterre et comte de Touraine, au
sujet du meurtre de Thomas de Cantorbéry.
La justice consistait en un siège royal relevant par
appel du présidial de Tours et compose d'un lieute-
nant-général, mi lieutenant particulier, un lieutenant-
criminel, un assesseur, huit conseillers, un procureur
et un avocat du roi. Il y avait élection^ grenier à sel,
maîtrise des eaux et forêts. La pohce se faisait jadis
par deux élus assistés du procureur de la commune,
qui ne pouvaient juger les causes que jusqu'à la con-
currence de cent sous. Lorsque la somme excédait ,
ils devaient en référer a l'assemblée des habitans, qui
était présidée par le lieutenant-général. Ceci s'observa
jusqu'en i56o, époque où le roi Charles IX permit
aux habitans de se choisir un maire, un procureur de
ville, trois échevins, deux élus et un greffier. Ces
élections se faisaient tous les ans en présence du lieu-
tenant-général. Mais ce corps de ville subit, comme
tous les autres , les fréquens changemens qui eurent
lieu sur la fin du règne de Louis XIV et sous celui
de son successeur.
On trouve à une lieue de Loches , dans la com-
mune de Perrière , les restes d'un aqueduc dont quatre
arcades assez bien conservées existent encore. On a
prétendu, suivant la coutume, que c'était un ouvrage
des Romains destiné à porter les eaux du ruisseau
d'Orfon à la ninnsio ^ qu'on croit avoir été établie par
eux à Cornillé. Mais d'a])ord rien n'y porte le carac-
iS^ HISTOIRE DE TOI]RAI?ÎE.
tère des constructions romaines. En second lieu com-
ment supposer qu'on eût à grands frais entrepris un
pareil travail pour porter de l'eau au-delà de la ri-
vière de rindre, et dans un lieu surtout où se trouve
un ruisseau abondant dont les eaux sont les plus sa-
lubres et les plus limpides de toutes celles des alen-
tours? On peut avancer avec plus de raison que cet
aqueduc n'est qu'un ouvrage moderne destiné à quel-
que établissement qui a disparu , et qu'il doit êlre pos-
térieur au commencement du onzième siècle, époque
de la fondation de l'abbaye de Beaulieu , puisque dans
le titre de cette fondation il est parlé de ce ruisseau
d'Orfon, sans qu'il y soit fait aucune mention de cet
aqueduc. Mais , ainsi que nous l'avons déjà remarqué,
il n'est ni ruines ni monumens anciens qu'on ne soit
tenté d'attribuer aux conquérans des Gaules.
LOUDUN, DUCHÉ-PAIRIE.
La ville de Loudun (^Lauscluniwi) a appartenu
autrefois aux comtes de Poitou, puis à ceux d'Anjou
et ensuite aux ducs de Touraine , si bien que chacune
de ces trois provinces se croyait également fondée à
la revendiquer, principalement le Poitou, puisqu'elle
se trouvait comprise dans son diocèse , et que la cir-
conscription ecclésiastique déterminait presque tou-
jours l'état civil. D'un autre coté elle dépendait du
duché de Touraine pour le temporel, du présidial de
Tours pour la justice, et du bureau de la généralité
de Tours pour les finances. Cest sous ce triple rap-
LOUDUN. l53
port que nous on faisons mention, la partie ecclé-
siastique étant étrangère aux objets que nous traitons
ici. Cependant nous n'avons pas cru devoir donner
place dans notre biographie aux hommes célèbres nés
dans le Loudunois.
Loudun est à quatorze lieues de Tours du coté du
midi , sur les confins du Poitou et de l'Anjou. Cette
ville est située sur une hauteur; aussi l'on prétend
qu'elle a pris son nom du mot celtique dun^ d'où l'on
a fait Loudun d'après l'usage du pays, où l'article le
se prononce lou. Mais cette étymologie pourrait bien
être controuvée, puisque le mot latin Lausdunuin
était connu bien long-temps avant qu'il fût question
du dialecte loudunois. Quant au mot Juliodunuin ^
ce ne fut qu'au seizième siècle que le poète Salmon
Macrin s'avisa de l'imposer au lieu de sa naissance.
Les comtes de Poitou ont toujours été les seigneurs
de Loudun jusqu'en 986. A cette époque Guillaume-
Fier-à-Bras , duc d'Aquitaine et comte de Poitiers ,
étant en guerre avec Geoffroy-Grisegonnelle, comte
d'Anjou , il s'ensuivit un traité de paix d'après lequel
Guillaume céda à Geoffroy le Loudunois, soit que
Geoffroy eût battu le duc de Guienne, comme le
prétendent les historiens d'Anjou, soit qu'il eût été
vaincu par lui; ce qui est bien moins probable,
puisqu'il agrandit ses domaines aux dépens de ceux
de son ennemi.
Environ deux siècles après , Gcoffroy-le-Bel , par
son testament en forme de partage , donna Loudun à
Geoffroy-Plantagenet, son second fils, par provision
l54 HISTOIRE DE TOURAIiyE.
et jusqu'à ce que Henri, son aîné, fût reconnu roi
d'Angleterre ; mais Geoffroy n'en fut pas moins dé-
pouillé par son frère et contraint de l'abandonner,
par le traité fait en ii56, moyennant mille livres
sterling et deux mille livres monnaie d'Anjou.
Loudun , devenu partie intégrante de la Touraine,
fut avec elle réuni à la couronne , en 1 2o4 , et Phi-
lippe-Auguste le donna, pour le récompenser de ses
services, à Aimery, vicomte de Thouars, qui lui en
fit hommage.
Au mois de février 1 366, Charles V en fit don, à
l'exception de l'hommage , de la souveraineté et du
ressoit, à Louis duc d'Anjou, son frère, pour le dé-
dommager de Chantoceauxj qui venait d'être cédé au
duc de Bretagne. 11 lui accorda depuis la Touraine en
augmentation d'apanage, l'an 1370, sa vie durant
seulement, à la condition que Loudun et le Loudu-
nois seraient réunis au duché de Touraine après sa
mort et celle de son fils aîné. Ils en donnèrent le même
jour leur reconnaissance par lettres datées de Vin-
cennes le 17 mai 1376. Cependant René, roi de Si-
cile, ne laissa pas d'en jouir. Mais étant mort en
1480, sans laisser d'enfans, Louis XI, pour éviter les
difficultés qui pouvaient s'élever à ce sujet, donna à
Charles d'Anjou , neveu du roi de Sicile , tant pour
lui que pour ses héritiers mâles, les comtés de Beau-
fort en Vallée, de Mirebeau , de Sablé et de la Roche-
Guyon, à la charge par lui de renoncer aux droits
qu'il pouvait avoir sur le duché d'Anjou, sur Baugé,
Saumur et Loudun.
LOUDUÎf. ï55
Louis XI, ayant ainsi réuni Loudun à la couronne,
y érigea la même année un siège royal dont les appels
allaient au présidial de Tours.
Loudun fut érigé en duché, l'an 1 579, par Henri ïïl,
en faveur de Françoise de Rohan, dame de la Gar-
nache , pour en jouir pendant sa vie ; ce qui lui fut
confirmé par Henri IV en avril iSqi. Mais le duché
fut éteint après sa mort. Ce domaine fut depuis en-
gagé à Charles Bellegigue de La Trémouille , duc de
Thouars, prince de Tarente, qui en a joui, ainsi que
ses descendans , à titre de duché-pairie.
Cette ville possédait deux chapitres, trois paroisses,
une maison de jésuites, trois couvens de religieux ,^
autant de religieuses, une communauté de filles de
l'Union chrétienne et une de sœurs hospitalières.
L'un de ces couvens, celui des Ursulines, a acquis
une bien triste célébrité par le procès de l'infortuné
Urbain Grandier, curé et chanoine de Saint-Pierre
de Loudun , procès dans lequel on ne sait ce qui doit
affliger et révolter le plus, ou la condescendance cou-
pable des religieuses, ou la fourberie des exorcistes,
ou la perversité des juges assez scélérats ou assez
stupides pour entendre et rejcevoir comme preuves le
témoignage des diables.
Loudun avait un temple de protestans que Louis XIV
fit raser. Cependant le nombre de religionnaires y
fut toujours assez considérable relativement à sa po-
pulation. /
La justice y était exercée par un bailli, un prési-
dent, un heutenant-civil , un lieutenant-criminel, un
l56 HISTOIRE DE TOUR AINE.
assesseur, dix conseillers, deux conseillers vérifica-
teurs des criées , un avocat et un procureur du roi ,
un substitut et un greffier. Il y avait aussi une élection
et un hotel-de-ville.
Le Loudunois avait sa coutume particulière , qui
fut rédigée séparément en i5i8. Elle était restée, à
peu de chose près, la même que l'ancienne coutume
de Touraine avant la réformation de iSSg.
MAILLÉ, coMTi,
ou
LUINES, DUCHÉ-PAIRIE.
Maillé (Malliacurn) , aujourd'hui Luines,est une
petite ville située à trois lieues au-dessous de Tours,
sur la rive droite de la Loire et entre deux coteaux
couverts de vignobles. Ce lieu avait donné son nom à
une des plus anciennes familles du royaume alliée à
la maison royale de France et aux maisons d'Amboise,
de Bauçay, de Chateaubriant , de Champchevrier, de
Laval, de Roban, de Sainte-Maure et de plusieurs
autres non moins illustres. Nous trouvons des preuves
irrécusables de l'ancienneté de Maillé dans le testa-
ment de saint Perpète, qui date de Tan 47^1 et par
lequel il recommande a son successeur de ne jamais
rétablir dans ses fonctions le prêtre curé de Maillé.
On en trouve de même dans Grégoire de Tours , qui
nous dit que de son temps on y voyait encore les ves-
tiges d'un ancien monastère qui était placé sur le haut
MAILLÉ. l57
du coteau. Or ce monastère devait déjà remonter à
une époque assez reculée, puisque alors on n'en voyait
plus que les ruines. Il est assez probable que ce fut
sur ce même emplacement que l'on construisit depuis
le château de Maillé, puisqu'il était également sur le
point le plus élevé du coteau. Quant à l'église de
Saint-Venant , elle fut bâtie par les anciens seigneurs
et donnée avec le monastère de Saint -Solenne, en
1084, à Fabbaye de Marmoutier par Hardouin II de
Maillé.
Cette baronnie. Tune des plus anciennes de la Tou-
raine , fut érigée en comté en faveur de Jean de Laval,
baron de Roche-Corbon , Bressuire , etc. , par lettres
de Charles IX données à Boulogne au mois de juin
iS'jCLy à la charge qu'à défaut d'hoirs mâles elle re-
prendrait son premier litre de baronnie. Mais il n'y
eut pas lieu à la clause de retour. Elle fut même érigée
depuis en duché-pairie en faveur de Charles d'Albert
sous l'appellation de Luines , par lettres patentes de
Louis XIII données à Amboise au mois d'août 161 g.
On y avait postérieurement uni la baronnie de Sem-
blançay , la vicomte de Thouars et la châtellenie de
Neuvy, par lettres du mois de février i663.
Quoique Maillé , ainsi que nous venons de le dire,
nous soit connu dès le cinquième siècle, les noms des
seigneurs qui l'ont possédé ne se trouvent <lans aucun
titre antérieur au dixième siècle.
Gelduin de Saumur, premier du nom, était sei-
gneur de Maillé, d'Ussé, de Pont-le-Voy et de plu-
sieurs autres grandes terres. II prit alliance avec Ger-
l58 niSTOIIlÈ DE TOURAINE.
berge, fille de Bérenger et sœur d'Hiîdegarde, femme
d'Airaery , vicomte de Thouars. Il eut pour fils Gel-
duin et une fille nommée Âdelaïs, femme de Ber-
lay 1% seigneur de Mon treuil, aujourd'hui Montreuil-
Beslay.
Gelduin de Saumur, deuxième du nom, fut un des
principaux partisans d'Eudes II , comte de Touraine.
Il l'accompagna dans toutes ses expéditions , et se
trouva l'an 1016 à la bataille de Montrichard, ainsi
qu'au siège de Montboyau en 1026. Il perdit dans
cette circonstance le château et la ville de Saumur ,
qui lui furent enlevés par Foulques - Nerra , comte
d'Anjou. Pour l'en dédommager, Eudes lui donna le
château de Chaumont-sur-Loire. Gelduin fonda l'ab-
baye de Pont-le-Voy en io35 , et donna la seigneurie
de Maillé à Gosbert à la charge de foi et hommage ,
clause qui fut la cause première des guerres qui eurent
lieu entre les seigneurs d'Amboise et de Maillé, ceux-
ci, comme héritiers de Gelduin, prétendant avoir droit
à l'hommage de Maillé. Gelduin épousa Adenorde,
autrement Honneur, dont il eut Geoffroy-le-Bel, sei-
gneur de Chaumont,qui fut fait prisonnier, en io44>
à la bataille de Saint-Martin-lc-Beau et conduit au
château de Baugé, d'où il ne sortit qu'à condition qu'il
rendrait hommage à Geoffroy- Martel pour toutes les
terres qu'il possédait en Touraine. On dit qu'il mou-
rut âgé de cent ans.
Gosbert de Maillé a été le premier et le chef de la
maison de Maillé. En io3o il eut un différend avec
les religieux de Marmoutier relativement au droit de
MAILLÉ. 1 59
péage , qu'il voulait exiger sur toutes leurs denrées
passant par eau et par terre dans toute l'étendue de sa
seigneurie : mais il se désista de ses prétentions en pré-
sence d'Eudes, comte de Touraine, et de Gelduiud«
qui il tenait Maillé. Ses enfans furent Hardouin; Gel-
duin, seigneur de Maillé après son frère; Sancelin ou
Sanzo, clerc; Geoffroy; et Milesende, femme de Ro-
bert de Blo.
Hardouin, premier du nom, vivait en 1062, et
mourut quelque temps après ses enfans , laissant son
frère héritier de ses domaines. Il donna la terre de
Martigny à l'abbaye de Marmoutier, à la charge par
Gelduin son frère d'indemniser de ce qu'ils y possé-
daient ses trois chevaliers , Alfroy, Geoffroy et Gar-
nier. Ces chevaliers étaient proprement des vassaux
qui étaient obligés d'accompagner leur seigneur à la
guerre et do faire la garde dans son château. Cette
donation fut depuis ratifiée par ce Geoffroy de Chau-
mont, que nous venons de voir prisonnier à Baugé,
duquel Maillé relevait à foi et hommage.
Gelduin , qui succéda à son frère , épousa en pre-
mières noces Agnès, dont il eut Hardouin, Hugues,
Josbert ou Gosbert, Ammeline et Marguerite.
Hardouin H fit bâtir à Maillé l'église de Saint- Vei-
nant, qu'il donna à l'abbaye de Marmoutier en 1084,
avec l'église de Saint-Solenne , en présence d'Agnès
sa mère. C'est de lui que parle., dans une de ses let-
tres, Geoffroy, abbé de Vendôme, en se plaignant à
Raoul, archevêque de Tours, des vexations qu'il exer-
çait contre son abbaye de la Trinité, ce qui le fit ex-
l6o HISTOIRE DE TOUR UNE.
communier par ce prëiat. Ge fut aussi sur ce même
prétexte que Foulques-Rëcliin , lui ayant déclaré ia
guerre, assiégea et prit le château de Maillé en 1096,
y après avoir désolé toute la contrée. Il avait épousé
Béatrix , dont il eut cinq fils et deux filles : Jacquelin,
Barthélemi , Clérembault , Adaôe et Agnès. Les deux
autres garçons nous sont inconnus.
Jacquelin de Maillé se rendit fameux ainsi que ses
quatre frères dans les guerres des comtes d'Anjou
contre Henri, roi d'Angleterre. 11 accompagna Foul-
ques-le-Jeune dans toutes ses expéditions militaires ,
et assista à la bataille de Séez en 1118. On le choisit
entre les capitaines les plus vaillans et les plus habiles
pour attaquer l'avant-garde de l'ennemi. Ce fut un
des principaux barons qui accompagnèrent Geoffroy
d'Anjou, fils de Foulques-le-Jeune , lorsqu'il alla à
B-Ouen épouser Mathilde , fille de Henri T', roi d'An-
gleterre, en II 27. L'an ii5i , par l'ordre du comte
d'Anjou, il fit la guerre à Sulpice d'Amboise, auquel
cependant il rendit par la suite des services impor-
;^ tans. De sa femme Adeline il eut Hardouin, qui
suit.
Hardouin HI fut père d'un autre Hardouin , sei-
gneur de Maillé, et de Jacquelin de Maillé , chevalier
de l'ordre des Templiers , qui se signala à la bataille
^ de Tibériade, oii il mourut glorieusement l'an 1 187.
Hardouin IV, sénéchal de Poitou, s'était réuni à
Amaury I" de Graon pour secourir les barons de Bre-
tagne , qui s'étaient révoltés contre leur duc Pierre ,
fils de Robert de Dreux; mais le 3 mars 1222 il fut,
MAILLÉ. l6l
ainsi qu Amaiiry, fait prisonnier auprès de Château-
briant. Depuis il fut caution de Louis IX pour le traité
de paix fait avec le comte de Foix le i6 des calendes
de juin 1229. Il eut de sa femme Emme, autrement
nommée Ammette, Hardouin V et Catherine, dame
de Saint-Brice et de Cliahaigne.
Hardouin V fît le voyage de la Terre-Sainte avec
saint Louis. Il fut marié deux fois : la première avec
N. de Cliampchévrier , dont il n'eut point d'cnfans,
et la seconde avec Jeanne de Bauçay, de laquelle il
eut Hardouin et Jean, seigneur de Clervaux. Quel-
ques-uns ajoutent un autre Jean de Maillé, seigneur
de Brézé, d'où seraient descendus les marquis de
Brézé. Hardouin V et Jeanne , sa femme, eurent leur
sépulture dans la nef de l'église des Cordeliers de
Tours, sous une tombe placée auprès de la chaire du
prédicateur.
Hardouin VI , dit le Jeune Chevalier, accompagna
Philippe-le-Bel dans les guerres de Flandre en i3o3.
Il mourut le 24 février i336, et fut de même inhumé
aux Cordeliers de Tours dans la chapelle de Maillé,
qui depuis était devenue la sacristie. Il avait épousé
Jeanne, fille de Barthélemi de Montbason , qui lui
apporta en dot les seigneuries d'Isernay, de Bois-
Robert et de l'Archeraye avec trente livres de rente
sur le péage de Colombiers. De cette alliance sortirent
Hardouin , Jeanne, Marie (^J lias) de Maillé, mariée à
Robert de Silly, morte en odeur de sainteté, et Isabelle,
femme de Jean de Beaumont, seigneur deBressuire.
Hardouin YIl , chevalier, se trouva , en i34o, à la
3. n
iGîl HfSTOIRE DE TOURAINE.
bataille où Eudes IV, duc de Bourgogne, hattit Tar-
mée d'Edouard III, et il y fut fait prisonnier avec le
comte d'Harcourt et le vicomte de Melun. On le
compte au nombre des cautions du roi Jean. 11 mou-
rut le 27 mai i38i, et fut, comme les précédens, en-
terré aux Cordeliers de Tours. Il avait épousé M ahaud,
fille de Jean Levayer, chevalier, seigneur de la Clarté,
qui après sa mort se remaria à Jean de Laval. Du
premier lit était né Hardouin , qui suit.
Hardouin VIII , baron de Maillé et de Roche-Cor*
bon , seigneur de Bauçay et des Montils-les-Tours ,
vicomte de Tours , assista au sacre de Charles VII à
Reims le 8 juillet 14^9, et y fit les fonctions de
duc et pair de France à la place du comte de Cham-
pagne qui porta l'étendard de France à cette céré-
monie. Il épousa à Angers, le 1 3 juin i4i2, Perre-
nelle, fille d'Ingelger d'Amboise et dç Jeanne de Craon,
qui lui porta en mariage la baronnie de Roche-Cor-
bon , la vicomte de Tours et la terre des Montils. Elle
mourut le i3 juillet i44i- Son mari était mort le 2
mai 1432, et tous deux eurent leur sépulture dans
l'église des Cordeliers de Tours. De ce mariage na-
quirent Hardouin-Juhez et Mahaud. Quelques généa-
logistes prétendent que les marquis de Carman , sei-
gneurs de la Guéritaude , descendaient de Juhez de
Maillé. Cependant nous voyons cent ans auparavant
un Guy de Maillé, seigneur de la Guéritaude, dont
la veuve Jeanne de Sillé donna les dîmes de Veigné
à l'abbaye de Cormeri , le mercredi après la Saint-
Denis, l'an 1372.
( ,^
MAILLÉ. l63
Hardoiiin IX, baron de Maillé, etc., sënëchal de
Saintonge. Ce fut lui qui vendit à Louis XI, pour le
prix de cinq mille cinq cents écus d'or, la baronnie
des Monlils-les-Tours, à la condition de l'union des
trois seigneuries do Maillé , de Roche-Corbon et de
la vicomte de Tours sous une même foi et bommage.
L'acte en fut reçu sous le sceau royal de Tours par
Pons Jean de Bire le i5 février t463, époque des
premiers travaux faits au cbâteaii du Plessis. Il fonda,
en i486, le chapitre de Maillé. De sa première femme
Antoinette, fille de Guy III, seigneur de Chavigny,
morte le 20 février 147^, il eut Jacques, mort sans
postérité; François, qui suit; Hardouin, qui épousa
Françoise de Latour-Landry à condition d'en prendre
le nom et les armes ; et Françoise, mariée à François
de Beaujeu, seigneur de Linières. Après la mort
d'Antoinette, Hardouin épousa Marguerite de La
Rochefoucauld, dame de Barbezieux, d'où Louis de
Maillé et Claude , femme de Jean sire de Rieux.
François, baron de Maillé et dernier de cette fa-
mille, épousa Marguerite, fille de Louis de Rohan,
seigneur de Guémené, dont il n'eut que deux filles du
nom de Françoise. L'aînée fut mariée à Gilles de
Laval , auquel elle porta en dot la baronnie de Maillé,
et la cadette à François de Bastarnay.
Gilles de Laval, premier du nom, chevalier, sei-
gneur de Loué et de Benais , baron de Maillé , de
Roche-Corbon, de Bressuire et de J^a Haye, vicomte
de Tours, fils aîné de Pierre de Laval, eut de Fran-
çoise de Maillé , son épouse, René, mort sans cnfans;
II.
l64 HISTOIRIÎ DE TOURAINE.
Gilles, qui suit, et Anne, mariée à Philippe de la
Chambre, baron de Montsoreau.
René de Laval , seigneur de Maille et de Roche-
Corbon , signa en cette qualité le second procès-verbal
de réformation de la coutume de Touraine en 1569.
11 n'eut point dfe postérité, et son héritage passa à
Gilles son puîné.
Gilles II de Laval épousa Louise , fille de Jean de
Sainte-Maure , comt^î de Nesle et de Joigny. De ce
mariage naquirent Jean, qui suit, et René, marié à
Renée de Rohan.
Jean de Laval , capitaine de cent gentilshommes de
la maison du roi, qui érigea en sa faveur la baronnie
de Maillé en comté , par lettres données à Roulogne
au mois de juin 1572. Il épousa en premières noces
Renée de Rohan, veuve de René son frère, dont il
eut Guy, qui suit, et en secondes noces Françoise,
fille de René de Birague , chancelier de France.
Guy de Laval, chevalier, etc., prit pour femme
Marguerite, fille du chancelier Philippe Huraut de
Chiverny. Il fut tué à la bataille d'Ivry en combat-
tant sous la bannière de Henri IV , et sans laisser
d'enfans. Après sa mort sa veuve se remaria à Anne
d'Anglure, seigneur de Givry et de Narbonne, et en
troisièmes noces à Arnaud-le-Daijgereux, dont elle eut
un fils unique du même nom.
Arnaud-le-Dangereux, seigneur de Beaupuy, comte
de Maillé.
Charles d'Albert , seigneur de Luynes , ayant ac-
quis par décret le comté de Maillé, la baronnie de
MAILLÉ. l65
Roche-Corbon et la vicomte de Tours, obtint des
lettres de Louis XIII données à Amboisc au mois
d'août 1619, portant création de Maillé en duché-
pairie sous le nom de Luynes. Il en prêta serment au
parlement le i4 novembre de la même année. On sait
comment il devint favori du roi , qui le fit conseiller
d'État, chevalier de ses ordres, premier gentilhomme
de sa chambre, grand -fauconnier, gouverneur de
Picardie, etc., gardé des sceaux et enfin connétable
de France. On a dit que cette famille était issue des
comtes d'Alberti en Italie , quoique pourtant son nom
patronimique fût Cadenet. Celui-ci épousa, le 11 sep-
tembre 16 17, Marie, fille d'Hercule de Rohan, duc
de Montbason , et de Madeleine de Lénoncourt. Il
mourut en Languedoc le i5 décembre 1621, d'où
son corps fut apporté à Luynes et enterré dans l'église
du ^château. De son mariage vint Louis-Charles d'Al-
bert, qui suit. Sa veuve se remaria, en 1622 , avec
Claude de Lorraine, duc de Chevreuse, pair et grand
chambellan de France.
Louis-Charles d'Albert , duc de Luynes , etc. , fut
marié trois fois : la première, en i65i , avec Marie,
fille et héritière de Louis Séguier, marquis de Nesle;
la seconde, le i4 décembre 1661, avec Anne de Rohan,
sa filleule, morte en 1684? et la troisième en i685,
avec Marguerite, fille d'Etienne d'Aligre, chanceher
de France , qui elle-même était veuve du marquis de
Vaneville. Il eut du premier lit Charles-Honoré , qui
suit, et Paule-Charlotte-Françoise , épouse de Henri-
Charles de Reaumanoir, marquis de Lavardin.
i66 HISTOIRE BE TOURAINE.
Charles-Honorë d'Albert, chevalier des ordres du
roi , duc de Chevreuse, fut reçu duc de Luynes, au
mois de décembre 1688, sur la démission de son
père. Il avait épousé, le i^' février 1667, Jeanne-
Marie, fille de Jean-Baptiste Golbert, ministre et
secrétaire d'Etat, dont il eut cinq enfans, Honoré-
Charles qui suit; Louis- Auguste, vidame d'Amiens;
Marie-Anne , épouse du duc de Montmorenci ; Thé-
rèse, mariée au comte de Mortain, et Marie -Fran-
çoise, nommée mademoiselle de Chevreuse.
Honoré - Charles d'Albert, duc de Chevreuse,
nommé ordinairement le duc de Montfort , ne jouit
d'abord que du domaine du duché de Luynes , son
père s'en étant réservé la nue-propriété pour avoir
toujours l'entrée au parlement. Il épousa, en février
1694 , Anne-Marie , fille de Philippe de Coursillon ,
marquis de Dangeau , gouverneur de Touraine.
Charles-Philippe d'Albert, duc de Luynes et de
Chevreuse , pair de France , comte de Monfort et de
Tours, né le 20 juillet 1695.
Marie-Charles-Louis d'Albert , duc de Luynes et
de Chevreuse , pair de France , etc. , né le 24 avril
1617.
Louis d'Albert, duc de Luynes et de Chevreuse, etc.,
colonel - général des dragons, épousa en pre-
mières noces, le 28 janvier 1735, Thérèse- Pélagie
d*Albert de Grimberghem. Étant devenu veuf, il se
remaria, le 27 avril 1738, à Henriette-Nicole d'Eg-
mont-Pignatelli , dont il eut
Louis-Joseph- Charles -Amable d'Albert, duc de
MAILLlé. 167
Luynes, né le l\ novembie 174B. Il avait épousé, le
19 avril 1768, Giiyonne-Élisabeth-Josephe de Laval
Montmorenci. Il est mort le ai mai 1807, après
avoir aliéné la plus grande partie du domaine qui
constituait son ancien duché de Ijuynes.
Le chapitre que nous avons dit avoir été fondé
en i486, par Hardouin, neuvième du nom de
Maillé, était composé d'un doyen avec six cha-
noines, sept prcbendiers, un marguillier, et deux
enfans choriaux.
Louis -Charles, duc de Luynes , fît démoHr , en
i658, la tour du château, dont les matériaux ser-
virent à bâtir l'enclos des religieuses chanoiaesses
du Saint- Sépulchre, ordre de Saint -Augustin , qui
furent par lui établies le 21 octobre 1662, à la
charge d'y avoir deux prêtres, une messe tous les
jours, école et caléchisme.
Ce fut de même à lui , que Luynes fut redevable
d'un hospice qu'il fonda le 22 novembre 1664. Il
eut sa sépulture le 10 octobre 1690, «ayant voulu»
dit son épitaphe, qu'on y lisait en lettres d'or sur
un marbre noir, «être enseveli avec les pauvres
qu'il avait tendrement aimés et généreusement secou-
rus.» Sa seconde femme Anne de Rohau, eut sa sépul-
ture dans le même tombeau.
On lisait également dans l'église des chanoinesses
une longue épitaphe apologétique du connétable de
Luynes, surmontée de ses armes, au bas desquelles
étaient ces mots : Pacc micat ^ belloque furit.
Les restes d*un aqueduc et quelques ruines
l68 HISTOIRE DE TOURAINE.
éparses sur les hauteurs de l'ancien Maillé, ont été
l'objet (les recherches d'un de nos compatriotes,
le chevalier de la Sauvagèrc, qui y a vu l'ouvrage
des Romains , ainsi que dans tous les monumens
qu'il a eu occasion d'examiner. Ces ruines l'ont con-
duit à imaginer que la ville de Tours devait autre-
fois avoir été bâtie sur ces hauteurs, et que ce n'est
qu'à une époque qu'il ne peut indiquer qu'elle a été
reportée au lieu où nous la voyons aujourd'hui. Il
s'appuie pour cela du nom de Cœsarodunum , parce
que, dit-il, la terminaison celtique Dun ne s'applique
qu'aux villes situées sur des éminences : mais il n'a
pas fait réflexion que le nom de Cœsarodunum ,
comme nous l'avons dit ailleurs , n'avait été imposé
à la capitale des Turones, que plus de deux siècles
après la conquête , et dans un temps où la ville de
Tours était incontestablement sur le bord de la
Loire. Ce n'est pas le tout; il forme sa conviction
sur deux vers de Paulin de Périgueux , dans sa Vie
de saint Martin , qu'il cite de cette manière :
Gallorum quondam valde florebat in oris ,
Urbs Tnromim distans ab agris , populisque referla.
Ce qui n'offre aucun sens; car, qui pourrait ex-
pliquer urbs Turonwn distans ab agris Pl\ y trouve
cependant celui-ci, que long-temps avant lui elle
florissait dans les Gaules^ quelle était très-peu-
plée , et qu'elle était distante de la ville de Tours
d^ son temps. Il n'y a à tout cela qu'une légère ob-
MAILLÉ. 169
servalion h faire , c'est que saint Paulin n'a point
dit, en faisant l'éloge de Tours, distans ab agris,
mais bien distenta agris^ ce qui est fort différent,
et ce qui s'entend à merveille. Nous nous bornerons
à relever ces deux erreurs , bien convaincu que le
paradoxe de la Sauvagère , ne mérite pas une plus
longue réfutation.
D'après la conjecture de notre compatriote sur la
situation de son ancien Cœsarodunum , il est évi-
dent que Taquéduc dont il s'agit ici ne pouvait être
qu'un ouvrage de Jules-César. Quoique nous ne
puissions pas réfuter cette seconde assertion aussi
victorieusement que la première, ni déterminer l'é-
poque de la construction de cet aqueduc, nous allons
à notre tour exposer notre opinion particulière. S'il
n'y a eu sur les hauteurs de Maillé, ni ville de Tours,
ni camp romain , notre aqueduc a dû avoir une
destination quelconque, et voici ce que nous avons
recueilli à cet égard.
Grégoire de Tours (chapitre xxi, de la gloire
des confesseurs) nous apprend qu'il découvrit le
corps de saint Solemne ou Solenne, évêque de
Chartres , mort vers 5 1 1 , dans le monastère de
Maillé, situé sur le haut d'un coteau oii l'on distin-
guait quelques ruines : mais il ne dit pas que ces
ruines appartinssent à l'ancien Cœsarodunum , cir-
constance qu'à coup sûr il n'eût point oubliée. Or ,
ce monastère ne pouvait ctre que l'église que nous
avons vu saint Eustoche fonder à Maillé vers 45o.
11 ne fit que s'accroître par la suite , et il existait
lyO HISTOIRE DE TOURAINE.
encore en 1084, puisque Hardouin deuxième de
Maillé, en fît don, ainsi que du prieuré de Saint-
Venant qu'il venait de fonder, à l'abbaye de Mar-
moutier. Placé sur un lieu aussi élevé , le premier
soin de ses moines devenus plus nombreux et plus
riches , dût être de se procurer de l'eau plus abon-
damment et avec moins de peines. N'en pouvant
trouver qu'à une certaine distance , c'est-à-dire , à
l'étang des Arènes et à la fontaine , dite aujourd'hui
de la Pie -Noire, ils songèrent à rapprocher cette
distance au moyen d'un aqueduc , procédé alors plus
connu que celui des canaux souterrains. La citerne
profonde qu'on remarque encore au lieu où était le
monastère, indique assezun réservoir pour les besoins
les plus communs. Si l'on opposait la dépense qu'a
pu occasioner la construction d'un pareil édifice, il
nous serait facile de fournir des preuves de travaux
beaucoup plus considérables exécutés dans ces temps
par des maisons religieuses. Quant au chemin qu'on
a baptisé du nom de César, et que la Sauvagère
attribue en effet à ce conquérant , nous en trouvons
l'origine dans la Charte de fondation de Hardouin II,
par laquelle il permet , en 1084? aux moines, d'ou-
vrir un grand chemin au milieu de ses terres , ce
que probablement il n'eût pas fait s'il y en eût déjà
existé un autre de la façon des Romains.
Au reste , quelle que soit l'époque de la construc-
tion de cet aqueduc qui ne peut être que fort ancien
par rapport à nous, nous dirons qu'indépendamment
de ses piliers plus ou moins ruinés , et dont les voûtes
MAR MANDE. I7I
sont tombées , il en reste encore huit arcades entières
au moyen desquelles on peut juger de son élévation.
Elle est de vingt-quatre pieds du cintre à la base, qui
repose sur un mur de fondation ou espèce de
chaussée pratiquée dans toute l'étendue que parcou-
rait Taquéduc, et dont on retrouve encore des ves-
tiges dans les vigjies et dans les champs voisins,
mur que la Sauva gère a pris pour des restes de celui
de l'enceinte de son Cœsarodunum . Les piliers ont
cinq pieds six pouces sur chacune de leurs quatre
faces , à six pieds de terre seulement : mais là ils
diminuent progessivement d'environ six pouces par
toise. Tous sont construits en moellon dur, de pierre
calcaire de six pouces de parement , posés sur un lit
de mortier à ciment, d'un pouce , d'épaisseur. L'ou-
verture de chaque arcade est de dix pieds par la
base, et de douze pieds six pouces vers le cintre , au
moyen de la diminution progressive des piliers dont
nous avons parlé.
Si l'on nous accorde que la ville de Tours n'a
jamais existé primitivement sur les hauteurs de
Luynes , on pourra croire également que cet aque-
duc n'a jamais eu d'autre origine et d'autre destina-
tion que celles que nous lui assignons.
MARMANDE, barootie.
La baronnic de Marmande ( Mirmanda ) , au-
jourd'hui commune de Marigny-Marmande, située au
midi de la Touraine, faisait autrefois partie de l'élec-
iqi HISTOIRE DE TOtîRAlNE.
tion de Loudun et du duché de Tours. Elle a donné
son nom à une ancienne famille qui s'est fondue
dans celle de Sancerre , mais qui devait être bien
antérieure au onzième siècle, temps où nous la
voyons figurer pour la première fois dans un titre
de l'abbaye de Marmoutier.
Bouchard I", seigneur de Marmande, et son épouse
Elisabeth , vivaient, d'après ce même titre , l'an 1 080.
C'est tout ce que nous en savons , et pendant l'espace
d'un siècle nous ne trouvons qu'un seul nom entre
ceux qui ont dû lui succéder.
Acharie, seigneur de Marmande, pouvait être
petit-fils de Bouchard r""; il nous est connu par la
guerre qu'il eut à soutenir, vers l'an 1 148 ou 11 5o,
contre le vicomte de Chatellerault, le seigneur de
Faye et celui de l'Ile-Bouchard , à la suite de laquelle
son château fut rasé de fond en comble, et lui-niême
fait prisonnier et renfermé au château de Nouâtre :
mais par la suite il recouvra sa liberté , grâce aux
bons offices de Bernier, abbé de Noyers.
Guillaume , seigneur de Marmande , accompagna,
en iai4, Philippe- Auguste, en qualité de chevalier
banneret, à la célèbre bataille de Bovines, contre
l'empereur Othon, le roi d'Angleterre et le comte de
Flandres. Il avait épousé Béatrix, seconde fille de
Gautier de Montsoreau et de Marguerite de Loudun ,
dont il eut Bouchard qui suit.
Bouchard , deuxième du nom , seigneur de Mar-
mande, ratifia, au mois d'août 1276, la vente des
bois de laChateigneraie, faite quelques années aupa-
MA.RMANDE. I yS
ravant par Thomas do la Roche-Clermau, à Vincent
de Pilmil , archevêque de Tours.
Guillaume , deuxième du nom , seigneur de Mar-
mande , était probablement fils du précédent; car,
par un compte du bailliage de Touraine, rendu
en 1278 par Denis de Paray , bailU, nous voyons
que Guillaume II vivait dans cette même année, ce
qui indique que Bouchard II serait mort dans l'in-
tervalle de 1276 à 1278.
Pierre, chevalier, seigneur de Marmande, de La
Haye , de Faye-la-Vineuse , et de la Roche-Clermau,
institua , le 1 1 juillet 1 343, avec Isabelle de La Haye ,
son épouse , quatre chapelains à Chinon , du consen-
tement de Pierre de Frctaud , archevêque de Tours.
Il n'eut qu'une fille unique qui hérita des baronnies
de Marmande et de La Haye.
Marguerite , dame de Marmande , fut mariée à
Jean III, comte de Sancerre, fils aîné de Louis II,
connétable de France , et de Béatrix de Roucy. De
cette alliance sortirent Marguerite et Jeanne.
Marguerite , deuxième du nom , comtesse de
Sancerre , baronne de Marmande , de Saint-Michel
sur Loire, de La Haye , et de Faye» fut mariée
quatre fois. La première à N., seigneur de Retz; la
deuxième à Béraud II , comte de Clermont , dauphin
d'Auvergne; la troisième à Jacques dcMonberon,
et la quatrième à Jean III de Bueil , comte de San-
cerre. Elle eut deux enfans de son second ma-
riage , Marguerite de Clermont , et Béraud III ,
comte de Clermont et dauphin d'Auvergne, avec
1^4 HISTOIRE DE TOUR AINE.
lequel la mère transigea , le 11 novembre i4o9i
à la condition qu'elle conserverait en toute propriété
la seigneurie de Marmande et les autres terres
situées en Touraine et en Anjou. Béraud III étant
mort sans enfans , Marguerite, sa sœur, hérita de
tous ses biens , qu'elle porta par mariage dans la mai-
son de Bueil.
Jean , troisième du nom , sire de Bueil , grand-
maître des arbalétriers de France, eut de Margue-
rite, son épouse, Jean de Bueil qui suit; Pierre,
seigneur de la Motthe-Sonzay ; Louis, mort sans
postérité ; Guillaume-Hardouin , évêque d'Angers , et
trois fdles.
Jean , cinquième du non! , sire de Bueil , comte
de Sancerre, baron de Marmande , amiral de France,
épousa en premières noces Jeanne de Montejan ,
dont il eut Antoine de Bueil , comte de Sancerre.
Il épousa en secondes noces Marguerite , fille d'An-
toine Turpin-Crissé qui donna naissance à Edmond
qui suit.
Edmond de Bueil , baron de Marmande , seigneur
de Faye-la-Vineuse , fut marié à Françoise de Laval.
Il fallait que son mari fut mort en 1 507 , car elle
figure comme tutrice de ses enfans mineurs à la
réformation de la coutume de Touraine, faite en
cette même année. De cette alliance sortirent Louis ,
Isabelle et Françoise qui donna sa procuration en
15^9 pour assister à la réformation de la coutume
de Touraine;, comme dame en partie de la baroimie de
Marmande. Elle mourut depuis sans avoir été mariée.
j
MÉSIÈRES. 175
Louis de Buell, baron de Marraaude, mourut
sans alliance , laissant sa succession à ses sœurs, dont
Taînée Isabelle avait épousé Joachim Gillier.
Joachim GilUer, seigneur de Puy-Garreau , baron
de Marmande et de Faye , eut de son mariage avec
Isabelle de Bueil un fils unique.
Bonaventure Gillier épousa Marie , fille de Phil-
bert Babou , seigneur de la Bourdaisière. De ce ma*
riage sont issus René qui suit , et Anne , épouse de
René de Larochefoucauld , seigneur de Neuilly-le-
Noble , en Touraine.
René Gillier , baron de Puy-Garreau et de Mar-
mande, eut pour femme Claude, fille de Pierre de
Laval , baron de Lezay , d'où sont sortis Urbain , et
Magdeleine , épouse de Balthazar le Breton , seigneur
de Villandry , baron de Mondoucet.
Urbain Gillier, marquis de Puy-Garreau, baron
de Marmande , eut d'une épouse dont nous ignorons
le nom, Urbain et Gabriel Gillier, comte de Clé-
rembault.
Urbain, deuxième du nom, marquis de Puy-Gar-
reau , baron de Marmande, mourut sans postérité.
Louis Gillier, marquis de Puy-Garreau, baron de
Marmande , laissa plusieurs enfans sur lesquels la
baronnie de Marmande fut décrétée et adjugée à
Gabriel Gillier, comte de Clérembault, leur oncle
paternel , dans la famille duquel elle est restée.
MÉZIÊRES , MARQUISAT.
Le château de Mézièrcs { Maceria)^ ancienne-
1^6 HISTOIRE DE TOUR AINE.
ment nommé Mazère , du mot latin macéra , était
seulement du duché de Touraine, et situé sur la
Claîse, dans la paroisse de Subiray. Il y avait dans le
château une chapelle desservie par les chanoines du
heu. On donne à ce pays le nom de Brenne ; ainsi
Tondit Villiers en Brenne ; Saint-Siran en Brenne, etc.
On croit, mais nous ne l'affirmerions pas, que cette
dénomination lui vient de Geoffroy de Brenne, pre-
mier mari de Jeanne de Mézières , pour distinguer
ce Mézières de plusieurs autres lieux de Touraine et
d'Anjou qui portent le même nom. Cette seigneurie
fut érigée en marquisat en faveur de Nicolas d'Anjou ,
seigneur de Saint-Fargeau , fils de Nicolas d'Anjou
et d'Antoinette de Chabannes , par lettres patentes
de Charles IX du i6 juillet i566.
Jeanne de Mézières , épousa Hervé, troisième du
nom, seigneur de Vierzon , fils de Guillaume IL De
ce mariage naquit une fille unique.
Jeanne de Vierzon , dame de Mézières , fut mariée
deux fois : la première à Geoffroy de Brenne, que
Ton suppose avoir donné son nom au pays de Brenne.
Il était fils aîné de Robert de Brenne, comte de
Dreux et seigneur de Rochecorbon ; et la seconde
à Geoffroy de Brabant, sire d'Arschot, frère puîné de
Jean , duc de Brabant. Jeanne n'eut point d'enfans
de Geoffroy de Brenne. Elle eut sa sépulture dans
l'église des cordeliers de Vierzon qu'elle avait fait
bâtir , où on lisait cette épitaphe :
Johanne , dame de Yierz9n,
De Maizière et Rochecorbon ,
BJEZIERES. 177
Cy fist l'iune et l'autre maison.
Dieu li face à lanue pardon.
Nous aurons lieu de parler plus amplement de
Geoffroy de Brenne, à l'article des seigneurs de Roclie-
corbon.
Geoffroy de Braban , sire d'Arschot, fils de Henri,
duc de Brabant, et d'Alix de Bourgogne, fut sei-
gneur de Mézières et de Rociiecorbon , du chef de
Jeanne , son épouse. Il en eut Jean de Brabant , qui
suit, et Alix, dame de Mézières , après la mort de
son frère , laquelle fut mariée à Jean , baron d'Har-
court.
Jean de Brabant , seigneur de Mézières et de Ro-
checorbon, épousa Marie , dame de Mortagne , dont
il n'eut point d'enfans. Il fut tué à la bataille de
Coutras, l'an 1 3o2 , laissant sa succession à son beau-
frère, ou plutôt à Alix, sa sœur.
Jean d'Harcourt , troisième du nom , dit le Boi-
teux , vicomte de Chatellerault , fils de Jean II , dit
le Pieux, maréchal et amiral de France, posséda les
seigneuries de Vierzon et de Mézières, qui, comme
nous l'avons dit, échurent à Alix sa femme. Il mou-
rut le 9 novembre iSaô, laissant quatre fils et quatre
filles.
Jean d'Harcourt , quatrième du nom , fils aîné du
précédent , seigneur de Mézières , se trouva engagé
dans les intérêts de Charles d'Évreux, roi de Na-
varre, dit le Mauvais. Arrêté le 6 avril i355 , son
procès lui fut fail , et , ayant été condamné à avoir la
tête tranchée, il fut exécuté au mois d'avril i357,
3. 1^
rjS HISTOIRE DE TOCRAINE.
SOUS le règne du roi Jean : mais Charles V , parvenu
a la couronne, reconnut que le jugement avait été
rendu avec trop de précipitation, et que les formalités
judiciaires n'avaient pas ctë observées. En consé-
quence, il rétablit sa mémoire par une déclaration de
l'année 1 374. Il avait été marié avec Blanche , fille
aînée de Jean de Ponthieu , comte d'Aumale, et de
Catherine d'Artois. De ce mariage sortirent onze
enfanis.
Jean d'Harcourt , sixième du nom, fils de Jean V,
seigneur de Mézières, fut marié a Catherine, fille de
Pierre de Bourbon, premier du nom, comte deClei^-
mont et de la Marche. Il mourut le 29 février i388,
laissant plusieurs enfans.
Jean d'Harcourt, septième du nom, vicomte deClia-
tellerault, seigneur de Mézières , fils aîné de Jean VI,
épousa , le 1 7 mai 1 389 , Marie , fille de Charles de
Yalois , comt€ d'Alencon. Il eut avec son frère Louis
d'Harcourt, archevêque de Rouen , un différend re-
liatif à la succession de leur mère. Par un accord
fait entre eux le 18 février i4o4? Louis renonça à
toutes ses prétentions , moyennant la vicomte de
Chatellerault , les seigneuries de Mézières et de l'île
Savary , dont il jouirait pendant sa vie seulement.
Jean , après la mort de Louis, étant rentré en posses-
sion de ses domaines, vendit, en i44o? sa seigneurie
de Mézières et la vicomte de Chatellerault à Charles
d'Anjou.
Charles d'Anjou , comte du Maine , troisième fils
<le Louis d'Anjou , deuxième du nom , roi de Sicile
MÉZièRES. 179
et d'Yoland d'Aragoa , était né au cliàteau des Mon-
tils-les-Tours,en i4i4- Il rendit aveu à Charles VII
pour la seigneurie de Mézières, au château de Chinon,
le i4 janvier 144^5 ^t mourut le 16 avril 1472.
De sa seconde femme, Isabelle de Luxembourg, il
eut Charles IV, roi de Naples , et Louise, femme de
Jacques d'Armagnac, duc de Nemours. Il eut aussi
deux fils et une fille naturels. Louis, qui fut la souche
des marquis de Mézières, Jean, mort sans postérité,
et Jeanne, mariée à N. d'Autriche.
Louis d'Anjou , bâtard du Maine , fut légitime à
Amboise au mois de mai 1468. Son père, de son
vivant , lui avait donné la baronnie de Mézières, par
lettres expédiées à Poitiers, le 10 mars i465. Cette
donation fut confirmée le 10 août suivant, par
Charles IV , roi de Sicile. Cent ans après cette ba-
ronnie fut érigée en marquisat par le roi Charles IX ,
le 16 juillet i566. Louis d'Anjou fut marié à Anne,
fille de Louis de J^a Trémouille, premier du nom , et
de Marguerite d' Amboise. De cette alliance vinrent
Louis, mort jeune; René qui suit; Anne, et Renée
femme de François , vicomte de Rochechouart , tous
les quatre nés à Mézières.
René d'Anjou, marquis de Mézières, seigneur de
Saint-Fargeau , né à Mézières, le 5 octobre i483,
servit dans la marine et participa à la prise de la
ville de Gènes , en 1507. l\ épousa Antoinette, fille
aînée de Jean de Chabannes , comte de Dammartin ,
et de Susanne de Bourbon -Roiissillon , dont il eut
Nicolas, Louis abbé de Pont -le- Voy, et trois filles.
l8o HISTOIIIE DE TOUR AINE.
Ce fut en sa faveur que Charles IX , en 1 567 , érigea
la terre de Mézières en marquisat.
Nicolas d'Anjou , marquis de Mézières , comte de
Saint - Fargeau , eut pour femme Gabrielle , fille
imique de Guy d'e Mareuil, et de Catherine de Cler-
mont. Il mourut en î 568, ne laissant de ses cinq enfans
qu'une fille née à Mézières, le 21 octobre i55o , et
mariée en 1 566 à François de Bourbon , duc de
Montpensier.
François de Bourbon , dauphin d'Auvergne , duc
de Montpensier, gouverneur, lieutenant - général
de Touraine, fut marquis de Mézières, en i567, ^
cause de sa femme Renée d'Anjou, de laquelle il
n'eut qu'un fils.
Henri de Bourbon, dernier duc de Montpensier,
prince de Dombes , marquis de Mézières , épousa
Henriette-Catherine de Joyeuse, fille unique de
Henri , comte du Bouchage , maréchal de France.
De ce mariage est sortie une fille unique.
Marie de Bourbon, duchesse de Montpensier,
première femme de Gaston Jean-Baptiste de France,
duc d'Orléans. Elle mourut au Louvre, le 4 juin
1627.
Anne-Marie-Louise d'Orléans , duchesse de Mont-
pensier, de Chatellerault, de Saint - Fargeau , mar-
quise de Mézières , souveraine de Dombes , princesse
de la Roche-sur- Yon et dauphine d'Auvergne, née à
Paris, le 29 mai 1627 , et morte au Luxembourg, le
5 avril 1693, sans avoir été mariée. Avant sa mort
elle avait vendu le marquisat de Mézières à N. , du-
MIRÉ. l8l
chesse de Mortemart , qui Ta transmis aux ducs de
son nom.
MIRE, BARONNIE,
Miré ( Miriacus Ficus ) , est un bourg de très-
peu d'importance , situe à environ trois lieues sud-
sud-ouest de Tours, entre les communes de Ballan
et d'Artanne : mais ses landes, connues sous le nom
de landes de Gliarlemagne, ont droit à quelque
renommée puisqu'il paraît certain que c'est sur ce ter-
rain aride et découvert que se donna, en 7 32, la cé-
lèbre bataille dans laquelle Charles-Martel défît les
Sarrasins, commandés par Abdérame, qui y perdit la
vie ainsi que la plus grande partie de son armée.
Nous renvoyons à ce sujet à ce que nous avons dit
de cette bataille dans notre troisième livre , année
782.
Les anciens barons de Miré ne nous sont connus
que parce qu'ils étaient au nombre des huit qui
avaient le droit de porter l'archevêque de Tours , le
jour de son entrée solennelle dans sa cathédrale.
Nous avons déjà dit que, dans cette cérémonie, le
baron de Miré, faisant l'office d'écuyer-tranchant ,
pouvait s'approprier les couteaux et les fourchettes
qui avaient servi au dîné. Depuis que cette baronnie
avait cessé d'exister, c'était l'église de Tours qui fai-
sait remplir par l'un de ses membres les fonctions
d'écuyer-tranchant. C'est en cette seule circonstance
que nous voyons qu*il soit fait mention des barons
i8a histoire.de touba.ine,
(le Miré , qu'on ne voit point figurer ailleurs clans
notre histoire , au point qu'il nous serait impossible
d'indiquer l'origine de cette baronnie, ainsi que l'é-
poque oii elle s'est éteinte.
Parmi les chevaliers bannerets, dont nous avons
donné la liste d'après André Duchesne , se trouve un
Guillelmus de Meriaco que nous n'oserions pas assu-
rer être un baron de Miré , parce qu'il y a également
eu Touraine une commune de Méré. Cependant les
noms chez Duchesne sont écrits d'une manière si
incorrecte , et la seigneurie de Méré était si peu im-
portante , qu'il ne serait pas impossible que ce ban-
neret eût été réellement un baron de Miré.
MONTBAZON, duché-p/Virie.
Le château et la ville de Montbazon ( Mons Baso-
nis ) sont situés sur l'Indre , à trois lieues de Tours,
sur la route qui conduit à Poitiers. Le château fut
bâti à la fin du dixième siècle par Foulques Nerra,
comte d'Anjou, seigneur de Loches , qui s'emparait
volontiers et sans titres des situations les plus avan-
tageuses pour y construire des citadelles. Les reli-
gieux de Cormery prétendirent toujours que la pro-
priété du fond du château de Montbazon leur
appartenait , et que c'était pour cela que ces sei-
gneurs leurs devaient cinq sous de rente payables
tous les ans dans une bourse neuve, le jour de la
conversion de saint Paul, jour auquel ils avaient
MOIVTBAZON. l83
coutume d'appeler le seigneur de Montbazon à l'of-
fertoire de la messe.
Ce château ne fut pas plus tôt bâti que, malgré la
distance , l'abbaye de Cormery en sentit toute l'in-*
commodité , les soldats de la garnison faisant des
courses sur ses terres et jusqu'à ses portes. Ils s'en
plaignirent à Foulques, qui leur accorda des lettres
de sauve-garde pour tous leurs biens, lettres dont la
confirmation par le roi Robert était soigneusement
conservée dans les archives du monastère.
Eudes II, comte de Touraine, s'étant emparé de
Montbazon , Foulques Nerra vint l'assiéger dans le
dessein de le reprendre; mais Eudes étant accouru
au secours avec de bonnes troupes, le comte d'Anjou
fut obligé de se retirer.
Ce fut en ce château que Pierre , <luc de Bretagne ,
qui avait succédé à François , son frère aîné , vint
rendre foi et hommage au roi Charles VII, le 3 no-
vembre i45o, pour son duché de Bretagne, ainsi
que nous l'avons détaillé dans notre histoire.
Cette seigneurie fut érigée en comté par
Charles IX , au mois de décembre 1 669 , en faveur
de Louis de Rohan , sixième du nom , prince de
Guémené, et depuis, en duché-pairie en faveur de
Louis VII, de Rohan, par lettres données à Paris
au mois de mai i588, et enregistrées au parlement,
séant à Tours , le ^7 avril iSSg. lia justice y était
exercée par un bailli, un procureur de cour et un
greffier. Douze paroisses en relevaient , et les appels
allaient au présidial de Tours.
l84 HISTOIRE DE TOURAIKE.
Le château n'offre plus que des ruines au milieu
desquelles reste encore debout une grosse tour dé-
gradée seulement vers sa sommité, sur laquelle on
a récemment établi un télégraphe.
On distingue deux familles de Montbazon. La pre-
mière n'a subsisté que pendant un siècle. La seconde
s'est fondue dans la maison de Rohan. Un titre de
l'abbaye de Cormery , sous le roi Robert II , fait men-
tion d'un Godefroy de Montbazon. Un autre titre
parle d'Aldegaire de Montbazon ; enfin , dans un in-
ventaire des titres deMarmoutier, nous avons trouvé
un Hugues de Pocens, seigneur de Montbazon, cité,
ainsi que sa femme Adenarde, à la date du 28
février 1095 : mais, selon toute apparence, ils n'en
furent que gouverneurs, l'usage d'alors étant que
ces sortes d'officiers portassent le titre de seigneurs
des lieux oîi ils commandaient.
Payen de Mirebeau , autrement nommé Hémery
Payen, seigneur de Colombiers, est reconnu pour le
chef de la première famille de Montbazon. Il était
fils de Guillaume de Mirebeau, auquel Foulques
Nerra avait donné le gouvernement de Montbazon.
Il épousa Bélutea de Sainte-Maure , dont il eut trois
enfans, Jean, Geoffroy et Archambaud , du consen-
tement desquels il fit quelques dons à l'abbaye de
Fontevraut sous le règne de Philippe T'.
Jean, seigneur de Montbazon, épousa, comme
nous l'avons dit à l'article de La Haye, Cassinotte,
dame de La Haye, et vicomtesse de Tours, du con-
sentement de laquelle il ratifia le don fait par son
3IONTBAZOÎÎ. l85
père à Tabbaye de Fon levraut. On présume qu'il fut
père de Pierre qui suit.
Pierre, seigneur de Montbazon , eut un fils nommé
Jean, qui vendit, en iii5, la seigneurie de Mont-
bazon à FouIques-le-Jeune , comte de Touraine,
entre les mains duquel et de ses successeurs elle
demeura jusqu'à Tannée i2o4, époque de la ré-
union de la Touraine à la couronne. En effet, Mont-
bazon fut donné en douaire à Eléonore de Poitou ,
veuve de Henri II, roi d'Angleterre, et Ricbard
Cœur-de-Lion, son fils, l'assigna pareillement pour
douaire avec la ville de Loches à la reine Berengaire,
son épouse. C'est ici que finit la première branche
des seigneurs de Montbazon.
Philibert Savary, seigneurs de Colombiers , reçut
Montbazon de la générosité de Philippe- Auguste. Il
mourut peu de temps après en avoir pris possession ,
c'est-à-dire vers i2o4ou i2o5.
Pierre Savary, deuxième du nom, seigneur de
Montbazon et de Colombiers, s'obligea, l'an 1206,
envers Philippe-Auguste, de remettre Montbazon
entre ses mains toute les fois qu'il en serait requis ;
promettant de ne le point fortifier sans son agrément.
Ce même roi le choisit, en iii/^, avec Guy Turpin ,
l'abbé de Marmoutier, et l'archidiacre de Tours,
pour traiter de la paix avec le roi d'Angleterre. Il
assista la même année à la bataille de Bovines, et
donna, au mois de juillet 1220, à l'Hotel-Dieu de
Tours tout ce qu'il possédait au heu de Bois-Robert,
dans la paroisse de Savonnières, excepté le droit de
l86 HISTOIRE DE TOURAINE.
chasse. Il épousa la fille de Gautier, seigneur de
Montsoreau. Un titre de l'abbaye de Marmoutier
BOUS apprend qu'elle se nommait Féno, son fils
Emepy et ses filles Mabille , Mathilde et Tiphaine.
Il paraît qu'il y eut encore un autre fils nommé
Pierre.
Hëmery ou Emery Savary, seigneur de Montbazon,
épousa Alix. De cette alliance vinrent Philippe et
Pierre qui, en laSa et I233, étaient sous la tutelle
d'André de Chavigny. Celui-ci étant mort, ils eurent
pour tuteur, en 1^38 et 1^39, Pierre, leur oncle
paternel , qui , suivant l'usage, prenait le titre de sei-
gneur de Montbazon. Alix était morte au mois de
juin 1232.
Philippe ou Philbert Savary , fils aîné d'Emery ,
promit au roi saint Louis , Tan 124^, de lui remettre
son château de Montbazon quand il l'exigerait. Il
mourut en i2 5o sans postérité.
Pierre Savary , troisième du nom , frère d'Emery ,
s'obligea en ia5o de payer au roi 70 liv. pour le
rachat de la terre de Montbazon qui lui était échue
par la mort de Philippe, son neveu. Ses enfans furent
Geoffroy, et Renaud archevêque de Tours. Nous
trouvons aussi un Jean de Montbazon qui fit, avec
Hugues de Ghâtillon , une transaction que Geoffroy
s'obligea, en 1271 , ainsi que Guillaimie de Sainte-
Maure, de faire ratifier par ses enfans.
Geoffroy Savary , autrement nommé Payen Valet,
assis^ta Philippe-le-Hardi, l'an 1 27 1 , contre le comte de
Fôix, accompagné d'un chevalier et de cinq écuyers.
MONTBAZON. 187
Il fut fait chevalier Fan 1287 , et donna quittance
de 22 liv. qu'il avait reçues propallio novœmilitiœ.
Il épousa Jeanne , fille de Bouchard VI , comte de
Vendôme, morte le 2 5 décembre i3o2 , et enterrée
dans l'église des cordeliers de Tours. Il paraît qu'il
n'en eut qu'un fils.
Barthélemi , premier du nom , seigneur de Mont-
bazon , de Colombiers , d'Isernay et de Bois-Robert.
Il fut marié deux fois ; la première avec Marie , fille
de Robert II , de Dreux , et la seconde avec Jeanne
Barbe, dame de Grillemont. Il mourut en i347, ^^
sa veuve se remaria à Hugues de Villaines. Les
enfans du premier lit furent Barthélemi, et Jeanne,
femme de Hardouin VI de Maillé. Jean de Mont-
bazon fut le seul fruit du second mariage.
Barthélemi II , nommé ordinairement Berthelon
ou Berthin , eut trois enfans , Barthélemi qui mou-
rut en 1349, ^^"^ enfans de Jeanne de Maulevrier,
son épouse ; Renaud , et Jean avec lesquels leur père
se déclara héritier de Barthélemi , son fils aîné , par
acte du 5 avril i35o. En i35i , il assigna une rente
de trois muids de froment à l'Hotel-Dieu de Tours ,
sur les dîmes de Savonnières, moyennant 100 florins
d'or, nouvellement faits à VÉcu. Il fut une des cau-
tions du roi Jean , et vivait encore en i362.
Renaud, seigneur de Montbazon, fonda dans son
château une chapelle, d'accord avec Eustache d'An-
thenaise, son épouse. De leur mariage, fait en i35o,
sortit Aine fille unique.
Jeanne, dame de Montbazon, Colombiers, Mont-
l88 HISTOIRE DE TOUR AINE.
soreau , etc. , fut mariée deux fois ; la première avec
Simon , fîls puîné de Bouchard VII , comte de Ven-
dôme , et la seconde à Guillaume II de Craon ,
vicomte de Ghâteaudun , auquel elle porta en mariage
les seigneuries de Montbazon , Colombiers , Savon-
nières , Montsoreau , la Perrière , Moncontour , le
Brandon, et plusieurs autres grandes terres. Elle
fit son testament en 1 894 , et eut sa sépulture dans
l'église des Cordeliers de Tours.
Guillaume de Craon , troisième du nom, seigneur
de Montbazon , vicomte de Ghâteaudun , baron de
Sainte-Maure , Pressigny , la Ferté - Bernard , eut de
son alHance avec Jeanne de Montbazon : 1° Guil-
laume IV; 2** Jean ; 3° Marguerite, épouse de Guy
de La Rochefoucauld; 4° Marie, femme de Louis Cha-
bot; 5" Isabelle, qui épousa Guillaume Oudart, sei-
gneur de Verrières; 6" Louise, femme de Milez de
Hangest , dit Rabâche ; 7'* enfin , Jeanne , femme de
Pierre de Tournemine , seigneur de la Hunaudaye.
Guillaume de Craon, quatrième du nom , cheva-
lier, seigneur de Montbazon, etc., rendit hommage
au roi Charles VI , en 1 392 , pour les seigneuries
de Montbazon et de Sainte-Maure. Il mourut en
1396. D'après son testament fait en cette année,
son corps fut apporté aux Cordeliers de Tours , où
il eut , selon sa volonté , sa sépulture auprès de sa
mère.
Jean de Craon, chevalier, second fils de Guil-
laume III, succéda à son frère, mort sans postérité.
Il fut tué à la bataille d'Azincourt, l'an i4i5 , sans
MONTBAZON. 189
avoir eu d'enfans de Jacqueline de Montagu , son
épouse : sa succession échut ainsi à ses deux sœurs
Marguerite et Marie qui la partagèrent en i4i9-
Guy de La Rochefoucauld hérita , du chef de Mar-
guerite de Craon , son épouse , les seigneuries de
Montbazon , Sainte-Maure , Nouâtre et le Brandon.
Marguerite ayant survécu à son mari, elle rendit
foi et hommage à Charles VII, pour les terres qu elle
possédait. De leur alliance naquirent cinq enfans,
1" Foucauld III; 2° Aymard; 3" Hector, mort jeune;
4** Catherine-Agnès; 5° Létice.
Aymard de La Rochefoucauld eut en partage les
seigneuries de Montbazon , de Sainte-Maure et de
Nouâtre , ce qui fut le sujet d'un procès entre sa
mère et lui ; mais ils transigèrent le i8 août i453.
De son mariage avec Jeanne de Martreuil, il eut
Jean qui suit; Françoise, mariéeà Jean d'Estoute ville
chevalier, seigneur de Torcy; Jeanne, épouse de
Jean Dufou ; et Guillemette.
Jean de La Rochefoucauld mourut sans avoir été
marié , vers Tan i465.
Françoise de La Rochefoucauld fut dame de Mont-
bazon , de Sainte-Maure et de Nouâtre , par le décès
de Jean , son frère. De son mari Jean d'Estouteville ,
prévôt de Paris , et grand-maître des arbalétriers de
France, elle eut Louis, mort sans postérité, laissant
sa sœur Jeanne, épouse de Jean Dufou , héritière de
tous ses biens.
Jean Dufou, chevalier, chambellan du roi Louis XI,
et son premier échanson , bailli et gouverneur de
\
igO HISTOIRE DE TOURAINE.
Touraine , fut , du chef de sa femme , seigneur de
Montbazon , Sainte-Maure et Nouâtre. Il eut d'elle
une fille unique.
Renée Dufou fut mariée deux fois : la première
avec Louis de Rohan , seigneur de Guémené , troi-
sième du nom, mort le 29 août 149B, et la seconde
avec Guillaume de La Marche. Du premier lit elle
eut un fils du nom de son père.
Louis IV de Rohan , seigneur de Guémené ,
Montbazon, etc., bailli et gouverneur de Touraine,
fut marié avec Marie , fille puînée de Jean II, vicomte
de Rohan , qui le rendit père de Louis V et de Renée.
Louis V de Rohan , seigneur de Guémené ,
Montauban , Montbazon , Sainte-Maure et Nouâtre ,
épousa Marguerite de Laval - Montmorenci, dont
Louis VI de Rohan.
Louis VI de Rohan, prince de Guémené , comte de
Montbazon, etc., sénéchal d'Anjou, épousa Eléonore,
fille de François de Rohan , seigneur de Gié, dont il
eut quatre fils et six filles : Louis qui suit ; Pierre
prince de Guémené; Hercule; Alexandre; Renée,
Lucrèce , Isabelle , Eléonore , Sylvie et Marguerite.
Louis VII de Rohan, premier duc de Montbazon,
pair de France , prêta serment en cette qualité , le
^7 avril 1689, et mourut le 1*' novembre de la
même année sans avoir été marié, de sorte que le
duché de Montbazon retourna à Louis, pi^ince de
Guémené , son père, qui en disposa en faveur d'Her-
cule de Rohan, son troisième fils, du consentement
de Pierre qui se trouvait son aîné.
MONTÉ AZON. 19 1
Hercule de Rohan , duc de Montbazon , comte de
Rochefort, grand- veneur ch France, gouvei^neur de
Paris et de l'Ile-de-France, fut confirmé dans le duché
ck Montbazon que lui avait cède son père, par lettres
de Henri IV données à Chartres, au mois de mars 1 594-
Il mourut à Couziers , près Montbazon , le 1 6 octobre
1654, âgé de quatre-vingt-six ans, ayant été marié
deux fois. La première à Madeleine de Lénoncourt,
morte le 28 août i6o3 , et la deuxième avec Marie
de Bretagne , fdle du comte de Vertus. Du premier
lit il eut Louis VIII qui suit , et Marie , femme du
connétable de Luines. Il eut du second lit François,
prince de Soubise; Marie-Éléonore, abbesse de Male-
noûe , et Anne , seconde femme de Louis-Charles ,
duc de Luines.
Louis VIII de Rohan , prince de Guémené, due de
Montbazon, grand- veneur, chevalier des ordres du
roi. Il mourut à Paris le 19 février 1667, à soixante-
huit ans. Il avait épousé Anne de Rohan , princesse de
Guémené, sa cousine-germaine. De ce mariage sont
venus Louis, nommé M. de Rohan et Charles qui
suit.
Charles de Rohan , duc de Montbazon , prince de
Gi;émené, etc. , épousa Jeanne-Armande fille de Henri
de Schomberg , maréchal de France , de laquelle il a
eu trois fils et trois filles , Charles , Jean-Baptiste dit
l'abbé de Rohan , et Jean dit le prince de Montau-
ban; Thérèse, Elisabeth et Charlotte.
Charles II de Rohan, duc de Montbazon, etc., fut
marié deux fois. La première ea août 1678, a Marie-
iga HISTOIRE DE TOURAINE.
Anne , fille du duc de Luines , et la seconde en dé-
cembre 1679, à Charlotte - Elisabeth de Cochefilet.
De ce mariage sont issus François-Armand , nommé
le prince de Rohan; Louis -Henri -Casimir, nomme
le comte de Rochefort ; le chevalier Charles de Rohan
et cinq filles, Charlotte, Thérèse, N. nommée
mademoiselle de Rochefort , Marie-Anne et Eléonore-
Angélique, dont aucune ne fut mariée.
François-Armand , prince de Guémené , duc de
Montbazon , succéda à Charles II , son père. Son
fils, le duc de Montbazon , est mort à Cousiers, où il
était dans une espèce d'exil pour parvenir à l'extinc-
tion de ses dettes.
Ainsi que nous l'avons vu , plusieurs terres impor-
tantes, telles que celles de Nouâtre, de Colombiers,
autrement Villandry, et surtout de Sainte-Maure ,
étaient tombées par alliance dans la maison de
Rohan, et avaient concouru à faire ériger Montba-
zon en duché -pairie. Ce fut, si l'on en excepte Loudun,
le premier duché -pairie qui fut érigé dans la Tou-
raine proprement dite , où dans les derniers temps
ils étaient au nombre de cinq, sans compter celui de
la province.
MONGOGER, duché-pairie.
Mongoger, Mongauger, ou Mongogier (^ Mon-
gaugerius ) , est un château situé à environ huit lieues
sud-ouest de Tours dans une commune du même
nom réunie depuis à celle de Saint-Epain. Il avait
3I0NG0GER. igS
autrefois donné son nom à une famille de Mongogier,
fondue dans la maison de Sainte-Maure , par le ma-
riage d'une fille de Philippe de Mongogier avec
Hugues II , seigneur de Sainte-Maure. Depuis elle
passa à un puîné de cette maison , d'où sont venus
les Sainte-Maure-Mongogier , héritiers du nom et
des armes de Sainte-Maure. Cette terre fut par la
suite érigée «n marquisat, et enfin en duché-pairie,
ainsi que nous allons le voir.
Philippe de Mongogier est le seul de ce nom dont
nous ayons connaissance; il maria, comme nous
venons de le dire, sa fille à Hugues II, seigneur de
Sainte-Maure , dont il eut
Pierre de Sainte-Maure, seigneur de Mongogier,
qui épousa Mahaud dont le nom de famille n'est pas
venu jusqu'à nous. De ce mariage naquirent quatre
garçons et deux filles, savoir : Pierre qui suit , Guil-
laume, chancelier de France en l'^ig, Guy et
Hugues , Jeanne et Iseult , mariée à Geoffroy de Pal-
luau. On tient que la branche de Sainte-Maure,
ducs de Montausier et marquis de Jonsac, tirait son
origine de ce Guy de Sainte-Maure.
Pierre de Sainte-Maure , deuxième du nom , sei-
gneur de Mongogier , fut marié à Marguerite d'Am-
boise , dame de Blo , dont il eut :
Jean de Sainte-Maure, seigneur de Mongogier,
qui épousa Jeaime , dame Des Roches en Anjou , et de
La Haye-Jouslin. De ce mariage vinrent Jean II et
Charlotte de Sainte-Maure , femme de Guy de Laval,
seigneur de Loué.
3 i3
1^4 HISTOIRE DE TODRAIPfE.
Jean de Sainte -Maure , deuxième du nom, sei-
gneur de PvTongogier, de Nesle, de La Haye et Des
Roches, prit alliance avec Jacquette de Puysieux,
nièce de Renaud de Chartres , archevêque de Reims
et chancelier de France. Il en eut un fils unique
nommé Charles. Devenu veuf, il se remaria avec
Louise de Rochechouart , dont il eut un autre fils du
même nom de Charles.
Charles de Sainte-Maure, fils aîné de Jean, sei-
gneur de Mongogier et de Nesle, fut marié à Cathe-
rine de Tourville , dont il n'eut qu'une fille.
Antoinette de Sainte-Maure , dame de Mongogier
et de Rivarennes , fut mariée à Louis de Barathon.
De leur mariage naquit
Guyonne de Barathon , qui porta en dot la sei-
gneurie de Mongogier à Jacques de Brillouet, son
mari , dont elle n'eut également qu'une fille.
Charlotte de Brillouet fut femme de Louis do
Boauveau, seigneur des Aurais et de Rivarennes.
Nous ignorons s'ils eurent des enfans , mais la terre
de Mongogier passa en d'autres mains.
Louis de Burgensis fut seigneur de Mongogier par
l'acquisition qu'il en fit. Premier médecin de Henri H,
il l'avait été précédemment de François P"*, et con-
trihua beaucoup , dit-on , à abréger la captivité de
ce monarque, en persuadant à Charles-Quint que l'air
de Madrid serait mortel à son prisonnier , qui pour-
tant n'était malade que d'ennui; ce qui fit craindre à
l'empereur de perdre les dix-neuf cent mille écus
d'or qu'il espérait pour la rançon du roi. Ce médecin
MONÛOGER. 195
était né a Bîois, vers i494) ^t? suivant la coutume de
SCS confrères , il latinisa son nom de Bourgeois en
celui de Burgensis , sous lequel il est plus particu-
lièrement connu.
Claude de Burgensis, fds du précédent, secrétaire
des finances du roi, seigneur de Mongogier et de
Saint-Épain , terres que ses héritiers vendirent après
sa mort.
Michel Duguast, chevalier de l'ordre du roi, dont
nous avons parlé à l'article des gouverneurs de la
ville et château d'Amboise. De cent mille écus qu'il
avait reçus pour l'indemniser des fortifications qu'il
avait ajoutées à ce château , il acquit la seigneurie
de Mongogier, qui pour lui fut érigée en marquisat,
et , après sa mort , vendue par décret sur ses héri-
tiers. Elle rentra alors dans la maison de Beauveau,
qui l'avait déjà possédée quelque temps. Un autre
Louis de Beauveau en était possesseur au commen-
cement du dix-huitième siècle. De lui elle est entrée
dans la maison de Choiseul. C'est en faveur de César-
Gabriel, comte de Choiseul-Chevigny, qu'en 1762
ce marquisat fut érigé en duché-pairie sous l'appel-
lation de Praslin , pendant le ministère de son parent
le duc de Choiscul-Stain ville.
Regnault-César-Louis de Choiseul fut, en 1790,
le dernier qui ait porté le titre de duc de Praslin.
La terre de Mongogier est encore possédée par une
dame du nom de Chois^iul , madame de Gorlier-
Choiseul.
iq6 histoire de tour xVine.
MONTRÉSOR, comté.
Montrcsor ( Mojis Thesauri ) est situé à treize
lieues sud-est de la ville de Tours, sur la rive gauche
de rindrois, et à quatre lieues de Loches. C'était
sans contredit le plus ancien comté de la province,
puisque Balderic ou Baudry , abbé de Bourgueil et
évêque de Dol , donne déjà, vers j Ii5, le titre de
comte à Bouchard I". A la vérité , on ne voit pas
comment est venu aux seigneurs de Mon trésor ce
titre qui n'appartenait alors qu'aux plus grands sei-
gneurs, espèce de souverains dans leurs possessions.
Une tradition populaire existe encore dans le pays
au sujet de l'origine du château de Montrésor, qu'on
prétend avoir été bâti par le roi Contran qui lui
imposa ce nom à cause d'un trésor qu'il trouva
dans ce lieu. Voici la fable que racontent Aimoin ,
Sigebert et Paul Diacre. Ils disent que Contran,
roi d'Orléans et de Bourgogne , s'étant endormi près
d'un ruisseau swr les genoux de son écuyer, rêva
qu'il était entré dans une grotte où il avait trouvé
un trésor inestimable. A son réveil, son écuyer lui
rapporta qu'il avait vu sortir de sa bouche une espèce
de petit lézard qui s'était dirigé vers le coteau voi-
sin , d'où il était revenu reluisant comme l'or, et
était rentré dans sa bouche. Le roi fît alors fouiller
dans le lieu , et y trouva des richesses immenses.
Beaucoup d'étymologies reçues ne sont guère moins
MONTRESOR. ig'J
absurdes. D'un autre coté, le fragment de l'histoire
d'Anjou, écrite par Foulques-Réchin , nous dit que
ce fut Foulques-Nerra, son aïeul, qui fît bâtir Mon-
trésor : mais rien n'est encore moins certain si,
comme le dit la chronique de Tours, le seigneur de
Montrésor était du nombre de ceux qui , en
887 , accompagnèrent Ingelger dans son expédi-
tion d'Auxerre pour reprendre les reliques de saint
Martin. Maan prétend au contraire , dans son his*
toire de la cathédrale de Tours , que Montrésor fut
ainsi nommé parce qu'il dépendait de la trésorerie
de cette église. Nous voyons en effet que Tarche-
vêque Hugues refusa de consacrer l'église de Beau-
lieu qu'avait fait bâtir Foulques-Nerra , parce que
ce comte s'était emparé du terrain sur lequel était
construit le château de Montrésor, terrain qui était
la propriété de son église. 11 résulte de ces diverses
opinions que Montrésor était peut-être, même avant
le huitième ou neuvième siècle, un simple castel
que Foulques-Nerra, grand constructeur de châ-
teaux , aura fait agrandir et fortifier en s'emparant
pour cela, selon sa coutume, des terrains qui pou-
vaient lui convenir.
Il dut y avoir des seigneurs de Montrésor depuis
celui qui accompagna Ingelger; cependant, l'histoire
de ces temps ne nous en indique aucun.
Roger, surnommé le Diable, est le premier que
nous voyons prendre le titre de seigneur de Mon-
trésor. Il paraît assez probable qu'il n'était que gou-
verneur de ce château, mais que, suivant l'usage
iqS histoire de touraine.
observé dans ce temps , il s'en fit et en devint sei-
gneur. Il eut deux fils : Bouchard qui continua la
postérité , et Guillaume , mort en 1 07 1 .
Bouchard, premier du nom. Balderic, qui en fait
un des héros de son siècle, dit de lui dans ses car*
mina heroica.
Si quis Achilleos roirando recensuit actus,
Actùs Bucardi pluris habens recolat.
Il fut marié deux fois. La première avecEupliémie
d'Amboise, fille de Lysois et d'Elinde de Buzançais.
La seconde à Agnès, veuve d'un marquis de Lom-
bardie, dont l'histoire ne nous a pas conservé le
nom. Avant ce mariage , il s'était fait moine et
avait été relevé de ses vœux par le pape. Nous
croyons qu'il ne revint pas en ïouraine et qu'il fit
l'abandon de tous ses biens au fils qu'il eut d'Eu-
phémie d'Amboise, ainsi qu'une fille, épouse de
Robçrt II, seigneur de Buzançais. C'est à ce Bou-
chard I" que Balderic, qui était son contemporain,
donne le titre de comte.
Albéric de Montrésor fut père de Villaine, autre-
ment nommée Wille, qui fit plusieurs donations à
l'abbaye de Baugerais. L'abbé de Marolles croit que
cette Wille fut mariée dans la maison de Vendôme,
et que d'elle vint Mathilde, mariée à Geoffroy de
Fallu au.
Geoffroy de Palluau, premier du nom , seigneur
de Montrésor et de Palluau , fit plusieurs donations a
MOXTRÉSOR. 199
l'abbaye de Baugcrais , du consentement de Mabaud
ou MatbJlde, nièce de Bartbëlemi de Vendôme,
arcbevêque de Tours en 1 1 74. H prêta serment de
fidélité à Pbilippe-Auguste , en 1 2o5 , avec promesse
de lui remettre à sa volonté la forteresse de Mon-
trésor, sous la caution de Robert de Buzançais. L'an
1209, s'étant croisé pour la Terre-Sainte, Guy Séné-
baud renouvela en son nom la même promesse. Son
frère Roger de Palluau était un des cbevaliers ban-
nerets créés, en 1210, par Pbilippe-Auguste. Geof-
froy était fils de Haraud de Palluau. Il eut de Ma-
llîilde, son épouse : Boucbard qui suit, Guy de
Palluau, seigneur de Langé en i23i et i236, Jean,
Isabelle , Pierre , seigneur d'Oigniez dans la paroisse
de Préaux en 1 2^5 , et Eglantine de Palluau , femme
de Renaud de Pressigny. Matbilde testa en 1235,
et donna dix sous de renie a l'abbaye de Baugerais
pour célébrer son anniversaire.
Boucbard de Palluau, seigneur de Montrésor,
deuxième du nom, fît, en 1239, une fondation à
l'abbaye de Baugerais, du consentement de Marie,
son épouse. De celte alliance sortirent Geoffroy et
Adenorde, ou Honneur , religieuse h l'abbaye de la Vir-
ginité. Son frère Geoffroy et son oncle Pierre de
Palluau lui assurèrent sa vie durant 21 liv. de rente,
et deux muids et demi de méteil, racbelables moyen-
nant quarante sous de rente. Ils en donnèrent leurs
lettres au mois de décembre 1254.
Geoffroy de Palluau , deuxième du nom , dit
Payen, cbevalier, fît, en I255, le voyage de Jéru-
200 IlISTOIRB DE TOURAINE.
salem. En 127 1 , il donna à l'abbaye de Bau gérais
les forges qu'il avait dans le bois de Chédon. Il eut
de sa femme, dont le nom n'est pas venu jusqu'à
nous , Geoffroy, Marguerite et Perrenelle , religieuses
à l'abbaye de la Virginité.
Geoffroy de Palluau, troisième du nom, était sei-
gneur de Montrésor, en 1276; il l'était encore en
1297, comme on le voit par la donation de six livres
de rente à prendre sur la taille de Montrésor , qu'il
fit à l'abbaye de la Virginité, en considération de ce
que ses deux sœurs y avaient été i^ecues religieuses.
Il eut de Marguerite, son épouse, Bouchard et
Geoffroy.
, Bouchard de Palluau , troisième du nom , seigneur
de Montrésor, de Luçay-le-Mal et de la Motthe,
donna , en iv3io, dix livres de rente à l'abbaye de
Villeloin, où il eut sa sépulture. Il était mort avant
i3f9; car, en cette année, Hélie de Brosse, cheva-
lier , qui probablement était tuteur de son fils , rendit
hommage en son nom à Philippe-le-Long pour la
seigneurie de Montrésor. L'aveu, qui est daté du lundi
avant la Toussaint , porte qu'il est dû quarante jours
de service au roi, dans son ost. Ce fils mineur étant
mort jeune, l'héritage échut à Geoffroy, son oncle.
Geoffroy de Palluau, quatrième du nom, seigneur
de Montrésor, etc., succéda à son neveu. Nous avons
de lui deux titres de i325 et i335, relativement à
cinq sous de rente qu'il reconnaît devoir ^ l'abbaye
de Baugerais à cause de son château de Montrésor.
Il épousa Iseult de Sainte-Maure, sœur de Guillaume,
MONTRKSOR. 201
chancelier de France, et il en eut Pierre, et Isabelle
de Palluaii, à laquelle cet oncle Guillaume laissa
par son testament du 17 janvier i334 mille liv.
qu'il lui avait promises en mariage , et mille autres
liv. qu'il ordonna lui être payées par Pierre de Pal-
luau, son frère. L'abbé de Marolles a cru qu'Iseult
était femme de Pierre de Palluau ; mais il s'est trompé,
puisqu'il est certain qu'elle était sa mère.
Pierre de Palluau, chevalier, seigneur de Mon-
trésor, etc., donna à l'abbaye de Baugerais, en
1371, une rente de quatre septiers de seigle, à la
charge de deux messes solennelles par an, et en
iSqt il ratifia la donation faite par son aïeul à l'ab-
baye de Villeloin , en i3io. Il eut un fils d'une
femme qui ne nous est pas connue.
Jean de Palluau , seigneur de Montrésor , etc. ,
fils du précédent , mourut sans alliance, de sorte que
sa succession échut à son cousin Jean deBueil qui suit.
Jean de Bueil, chevalier, grand-maître des arba-
létriers de France , petit-fils de Jean II de Bueil et de
N. de Palluau, fit hommage au roi, à cause de sa
seigneurie de Montrésor, le 2 octobre 1398. Il fut
marié à Marguerite, fille de Beraud II, comte de
Clermont, dauphin d'Auvergne, et de Marguerite dç
Sancerre. De ce mariage vinrent Jean , Pierre , Louis
et Anne.
Jean de Bueil, deuxième du nom, chevalier, sire
de Bueil, amiral de France, comte de Sancerre et
de Montrésor , vendit cette dernière terre le 5 mars
202 HISTOIRE DE TOURAINE.
i45i, à André de Villequier, fils de Colas et de
Marie de Gamaclie.
André, baron de Villequier, vicomte de la
Gnierche , capitaine de cinquante hommes d'ar-
mes, et premier gentilhomme de la maison du roi
Charles VI, eut d'Antoinette de Maignelais , son
épouse , Artus de Villequier , vicomte de la Guierche,
et Antoine qui suit. Artus se disait seigneur de Mon-
trésor en i483 : mais il est certain que cette sei-
gneurie passa ensuite à son puîné.
Antoine de Villequier , seigneur de Montrésor ,
vicomte de Saint-Sauveur-le-Vicomte, épousa Char-
lotte de Bretagne, sur lesquels la seigneurie de Mon-
trésor fut vendue par décret en 1491 ^ Imbert de
Bastarnay, second fils d'Artaud de Bastarnay et de
Catherine Gastonne.
Imbert de Bastarnay , chevalier, baron du Bou-
chage et d'Auton , seigneur de Montrésor et de
Bridoré, chambellan de Louis XI, rendit foi et hom-
mage-lige, en 1495, au roi Charles VIII, pour la
seigneurie de Montrésor. Il y fonda, le 16 mars 1 5^ i ,
une collégiale dont le chapitre était composé d'un
doyen , un chantre et six autres chanoines. Mort le
î'j. mai iDi3, il eut sa sépulture dans l'église de
cette collégiale. Il avait épousé Georgette , fille de
Falco de Monchenu, qui mourut le 2 août i5ii , et
fut enterrée auprès de son mari. De cette alliance
naquirent Jean, mort sans lignée, François , mort
de même avant son père, mais ayant épousé, le 99
4
]MO!STPÉSOR. 203
mai i5oa, Françoise de Maillé , dont il eut un fils
qui continua la postérité, et deux filles, l'une mariée
à Jean de Dailloii, comte du Lude, et l'autre à Jean
de Poitiers de Saint-Vallier.
René de Bastarnay , chevalier, seigneur du Bou-
chage, d'Auton, de Montrésor, de Bridoré, de
Saint-Michel , etc. , fils de François , dont nous venons
de parler, rendit foi et hommage au roi en i53q,
pour son château de Montrésor. De son alliance avec
Isaheau , fille de René , bâtard de Savoie , comte de
Villars, vinrent Claude, tué à la bataille de Saint-
Denis en 1567, âgé de vingt-deux ans, sans laisser de
postérité de sa femme Jacqueline, comtesse do Montbel;
René, mort jeune; Françoise, épouse de François
d'Ailly, vidame d'Amiens, qui suit; Marie, femme
de Guillaume II de Joyeuse , maréchal de France ;
Anne, morte sans enfans de l'amiral Bernard de La
Valette ; Henriette , morte sans alliance , et Gabrielle,
mariée à Gaspard de la Châtre. René de Bastarnay
et Isaheau , son épouse , furent inhumés dans l'église
de Montrésor, où l'on voyait leur tombeau. Ce céno-
taphe se composait d'un dé de marbre blanc, posé
sur un socle de marbre noir et surmonté d'une table
de même marbre sur laquelle étaient couchées trois
figures de marbre blanc, représentant au milieu
Isaheau, à droite René, son mari, et à gauche
Claude, son fils. Dans les quatre niches des angles,
on avait sculpté les quatre évangélistes, et dans
douze autres niches les douze apôtres , le tout en
marbre blanc. Claude avait eu sa sépulture particu-
204 HISTOIRE DE TOURAINE.
lière dans chapelle du château , sur laquelle on
avait élevé un piédestal de pierre surmonté d'un
bloc de marbre noir. Les quatre faces de ce pilier
étaient revêtues de panneaux de marbre blanc sur
l'un desquels on lisait :
a Cy gist enclos le cœur de feu haut et puissant
« seigneur messire Claude de Bastarnay, chevalier,
« baron d'Auton , capitaine de cinquante hommes
« d'armes des ordonnances du roi , gentilhomme
« ordinaire de la chambre de Sa Majesté , capitaine
ce et gouverneur du Mont-Saint-Michel , lequel décéda
a à Paris le dix-huitième jour de novembre 1667 ,
« estant au vingt-deuxième an de son âge. »
Ces monumens ont été impitoyablement détruits
aux époques désastreuses de la révolution.
François d'Ailly , vidame d'Amiens , fut seigneur
de Montrésor, du chef de Françoise de Bastarnay,
son épouse : mais il n'en eut point d'enfans. Elle
mourut en grande réputation de sainteté, le 17
octobre 161 7, âgée de quatre-vingts ans, et fut
enterrée dans l'église de Montrésor.
Henriette - Catherine de Joyeuse , fille unique de
Henri , second fils de Guillaume de Joyeuse et de
Marie de Bastarnay , hérita la seigneurie de Mon-
trésor, en 1617, par la mort de Françoise, sa grand'
tante maternelle; mais elle ne la garda pas long-
temps, et la vendit en 1620 à Henri de Bourdeilles,
son cousin, du consentement de Charles de Lorraine,
duc de GuiseJ, sou second mari. Elle avait été mariée
en premières noces à Henri de Bourbon , duc de
MONTRKSOR. ao5
Montpensier, dont elle eut Marie de Bourbon, épouse
de Gaston d'Orléans, frère unique de Louis XIÏI.
Henri de Bourdeilles, vicomte et baron de Bour-
deilles , chevalier des ordres du roi , s'allia avec
Madeleine, fille de Gaspard de la Châtre, et de
Gabrielle de Bastarnay, dont il eut François -Sicaire
de Bourdeilles, marquis d'Orchiac, et Claude qui
suit.
Claude de Bourdeilles, comte de Montrésor, abbé de
Launay .11 mourut sans postérité en 1 663. Ainsi que son
grand-oncle Brantôme , ila laissé desmémoires curieux
en deux volumes, connus sous le nom de Mémoires
de Montrésor. On a dit que c'était en sa faveur
que cette terre avait été érigée en comté , mais il
serait difficile d'en produire la preuve. Nous avons
indique au commencement de cet article que Mon-
trésor jouissait de ce titre plus de cinq cents ans
auparavant.
Paul de Beauvilliers , duc de Saint-Aignan , pair
de France, gouverneur des ducs de Bourgogne,
d'Anjou et de Berry, ministre d'État, fut comte de
Montrésor par l'acquisition qu'il fit de cette terre
après la mort de Claude de Bourdeilles.
On peut voir à l'article de Loches la suite des
ducs de Saint-Aignan , qui furent en même temps
comtes de Montrésor , jusqu'en ces derniers temps,
c'est-à-dire jusqu'en 1790, que cette terre était pos-
sédée par indivis entre Paul-Marie-Vicloire de Beau-
villiers, duc de Saint-Aignan, Charles-Paul-Fran-
çois de Beauvilliers, comte de Buzançais, et leur
206 HISTOIRE DE TOURAINE.
sœur Colette - Marie - Paul - Hortense - Bernardine ,
épouse d'Antoine -Charles -Guillaume, marquis de
La Roche-Aymon, qui en est resté propriétaire.
La petite ville de Montrésor n'est pas très-ancienne
et paraît n'avoir dû son existence qu'au cliateau d'où
elle a tiré son nom. Ce château , autrefois flanqué de
tours , et entouré de douves profondes , est aujour-
d'hui tout-à-fait ruiné.
L'église fondée par Imbert de Bastarnay en i5ai ,
fondation ratifiée en iSiS par Fournier de Beaune ,
archevêque de Tours, ne fut construite qu'en i5/|4?
par René de Bastarnay.
MONTRICHARD , ville.
Cette ville, nommée en latin Mons Ricardi o\x
Mons Tricardi et située sur le Cher à neuf lieues
de Tours du côté du levant, avait toujours fait partie
de la Touraine, et n'en a été distraite que depuis la
nouvelle division du territoire de la France. Son
château fut bâti par Foulques-Nerra, au retour de
son premier voyage à la Terre-Sainte, environ l'an
loio, pour réprimer les courses des seigneurs de
Pont-le-Voy et de Saint-Aignan, qui incommodaient
les habitans d'Amboise et de Loches. Rigord , histo-
rien presque contemporain, dit qu'il fut nommé
Montrichard , c'est-à-dire Montrlcheur, ou trom-
peur , parce qu'il fallait y monter par un chemin
fort étroit et presque impraticable. Mais cette éty-
mologie ressemble beaucoup à celles dont nous avons
MONTRICHARD. 207
eu lieu de parler. La propriété du fonds où fut bâti
ce château appartenait à Gelduin , premier du nom,
seigneur de Saumur et de Pont-le-Voy, qui se plai-
gnit de celte entreprise à Eudes II, comte de Tou-
raine et de Blois. Le comte aussitôt manda ses vas-
saux pour l'aider à venger Gelduin. Ayant donc
rassemblé ses troupes , il leur donna rendez-vous à
Pont-le-Voy, où il ne tarda pas à les rejoindre :
mais Foulques-Nerra , s'étant mis en mesure de dé-
fendre sa conquête, alla au-devant du comte de Blois,
et gagna la bataille de Montricbard ou de Pont-le-
Voy, qui se donna le i6 juillet 1016, et dont nous
avons fait le récit dans le quatrième livre de notre
Histoire.
Le château étant tombé au pouvoir des seigneurs
d'Amboise , héritiers de Gelduin, Hugues I"', sei-
gneur d'Amboise , fît bâtir la grosse tour de Montri-
cbard, avec la grande salle à coté. Il fut depuis for-
tifié de nouveau par les rois d'Angleterre, comtes de
Touraine , qui étaient obligés d'y entretenir une
garnison de cinq cents hommes pendant la guerre.
La ville et le château furent pris d'assaut, en 1 188,
par Philippe- Aiigusle : mais deux ans après ils furent
rendus au roi d'Angleterre par le traité fait à Colom-
biers, près Tours, le 5 juillet 1190, et Richard
Cœur-de-Lionfît alors rétabhr le château et renfermer
la ville de murs. Ce château, étant retourné entre les
mains des seigneurs d'Amboise qui y entretenaient
garnison , fut pris par Foulques-Guidas, capitaine
d'Amboise, et Jamet Dutillay, capitaine de Blois,
ao8 HISTOIRE DE TOURAINE.
qui y entrèrent par Fentremise d'un maçon occupé à
réparer une brèche.
Montrichard fut pris au mois de septembre iSSg,
par Claude de Marolles , l'un des plus fameux ligueurs.
Ayant fortifié le château à la hâte ; il fit des courses
jusqu'aux portes de Tours : mais La Trémouille ayant
été désigné pour marcher contre lui , et le roi étant
alors près de se rendre à Tours , Marolles n'attendit
pas son arrivée, et rendit la place.
Roger, que nous avons vu premier seigneur de
Montrésor , le fut aussi de Montrichard ; il n'avait
d'abord été établi que gouverneur de ces places,
dont il finit par se rendre tout-à-fait propriétaire.
Bouchard , fds de Roger. ( Voj. son article aux
seigneurs de Montrésor. )
Albéric , fils de Bouchard, seigneur de Montrésor,
eut un démêlé pour la propriété de Montrichard
avec Sulpice d'Amboise , premier du nom, son oncle
maternel , qui avait épousé Denise de Fougère,
petite-fille de Gelduin de Pont-le-Voy. Sulpice pré-
tendait que le château de Montrichard avait été bâti
sur un fonds appartenant à Gelduin, dont il était
héritier universel. Le différend fut terminé à l'amiable
par leurs amis communs , a condition qu'Alberic et
ses successeurs tiendraient la ville et le château de
Montrichard à foi et hommage des seigneurs d'Am-
boise. Mais après la mort de Sulpice, Albéric ayant
refusé de rendre hommage à Hugues , son fils amé ,
ce seigneur assembla ses sujets et ses vassaux pour
le ramener à son devoir. Ceux de Sainte-Maure et
MONTRICHARD. aOQ
de La Haye vinrent au secours d'Albéric , de sorte
qu'il y eut de part et d'autre plusieurs combats dont
eurent a souffrir les campagnes voisines d'Amboise ,
de Loches , de La Haye , de Sainte-Maure , de Mon-
trésor et de Montrichard. Epfin^ Hugues ayant invo-
qué l'appui de Raoul de Beaugency, de Piobert de
Rocliecorbon et de plusieurs autres, rencontra x\lbé-
ric dans cette partie de la Touraine qu'on appelle
Champagne, et après un assez long combat le défit
complètement, prit douze chevaliers, fit une cen-
taine d'autres prisonniers, et alla mettre le siège de-
vant Montrichard : mais il se hâta de le lever sur
l'avis qu'il reçut que le comte d'Anjou venait au
secours des assiégés. Il y retourna quelque temps
après, et attaqua la place avec tant de valeur qu'elle
fut obligée de capituler. Montrichard alors fut mis
en dépôt entre les mains du comte d'Anjou , qui le
rendit à Hugues, en iiio, après s'être fait rem-
bourser de ce qu'il avait dépensé pour les nouvelles
fortifications.
Louis , dernier seigneur d'Amboise et de Montri-
chard, vit, comme nous l'avons dit ailleurs, tous ses
biens confisqués et réunis à la couronne. Mais Mon-
trichard se trouvant au nombre de ceux qui lui
furent rendus, il le vendit , le 18 mars i448 ? ^ Guil-
laume d'Harcourt et à Perrenelle d'Amboise, sa
femme , moyennant la somme de onze mille ëcus.
Guillaume d'Harcourt, comte de ïancarville,
vicomte de Meulan , baron de Mongommeri , après
la mort dePerrcnelle d'Amboise, sa première femme,
3. i4
aïO HISTOIRE DE TOURAINE.
épousa, au mois de juillet t454 , Yolaiid de Laval,
et échangea avec Louis XI la seigneurie de Moutri-
chard , contre la vicomte de Gournay en Normandie
et La Ferté en Bray, par contrat passé à Tours, le
5 novembre i46i . Depuis, sous le règne de Louis XII,
la ville et le château de Montrichard furent aliénés
à faculté de rachat perpétuel au seigneur de Gri-
gnault , pour la somme de 7000 liv. qui fut rem-
boursée à ses héritiers.
Jacques de Génouillac, dit Galiot, sénéchal d'Ar-
magnac, chevalier de l'ordre du roi, grand-écuyer
de France et général d'artillerie , obtint, en i5i6, de
François I" , la terre et seigneurie de Montrichard
avec tous les droits de justice pour la somme de
ao,ooo ducats que ce roi lui avait accordés pour
récompense de ses services, à la charge de rem-
bourser les héritiers Grignault. Ce fut lui qui fit
bâtir le palais , le minage et la boucherie. Il mourut
en 1 546 , et fut enterré aux Célestins de Paris. Mon-
trichard étant depuis rentré à la couronne , la reine
Eléonore d'Autriche , veuve de François I" , Marie
Stuart, veuve de François II, et François de France,
duc de Touraine , en jouirent à titre d'apanage.
Scipion de Piovenne, chevalier, seigneur de Fou-
chant en Touraine , eut aussi la jouissance de Mon-
trichard, qui lui fut donné par François II, en i55g,
avec la charge de grand-écuyer.
Philippe Huraut , chevalier, comte de Chiverny,
chancelier de France, acheta Montrichard de HenrillI,
le 23 octobre i585 , pour la somme de 6,1 34 écus,
MONTRICHARD. » 211
à faculté de rachat perpétuel , et il en jouit tant
qu'il vécut. Il mourut le 29 juillet 1699, ayant
épousé Anne, fille du premier-président Christophe
de Thou, dont il eut Henri, comte d'Esclimont;
Henri, comte de Chiverny; Louis qui suit; Margue-
rite, Anne et Catherine.
Louis Huraut, comte de Limours , baron de Vriel,
fut seigneur de Montrichard après son père. Il
épousa Isabelle d'Escoubleau , dont il n'eut point
d'enfans, ce qui le décida à vendre Montrichard à la
marquise de Sourdis, sa belle-sœur.
Jeanne de Monluc , épouse de Charles d'Escou-
bleau , marquis de Sourdis et d'Alluye , dame de
Montrichard, laissa pour enfaus Paul, marquis d'Al-
luye; Henri, comte de Monluc; l'abbé et le cheva-
lier de Sourdis , et Isabelle, femme d'Antoine Rusé,
marquis d'Effiat , père d'Antoine qui suit :
Antoine Rusé, marquis d'Effiat, premier écuyer
du duc d'Orléans, eut Montrichard dans son partage.
, Il avait épousé Marie-Anne , fille de Louis' Olivier ,
marquis de Leuville , dont il n'eut point d'enfans.
La terre de Montrichard est tombée ensuite à la
princesse de Chabanais , puis à son fils le marquis
deChabanais, en son nom Colbert de Saint-Pouange,
et est enfin rentrée au domaine royal.
La paroisse de Notre-Dame est située dans le
faubourg de Nanteuil ; mais il y a dans l'intérieur
de la ville une succursale sous l'invocation de sainte
Croix.
Un hôpital fut fondé à Montrichard , vers la fin
14.
212 HISTOIRE DE TOIl RAINE.
du dix-seplième siècle, par le marquis d'Effiat , sei-
gneur engagiste, pour y recevoir six pauvres in-
firmes , savoir : deux de la ville , deux de Ghissay ,
et deux de Cinq-Mars-îa-Pile. Il y avait en outre un
couvent de religieuses ursulines.
NOUATRE,BARONNIE.
La baronnie de Nouâtre ( Noastrum) , située sur
la Vienne au-dessus de l'île Bouchard , peu considé-
rable d'ailleurs , ne figure ici que sous le rapport de
son ancienneté. Il y a eu autrefois une famille du
nom de Nouâtre, mais dont il serait impossible au-
jourd'hui de retrouver la filiation. Nous nous borne-
rons donc à indiquer ce que nous avons pu recueillir
dans quelques anciens litres.
Marray, baron de Nouâtre , vivait en 1027. C'est
ce qu'on voit par un titre du monastère de Cormery ,
dont Bouchard était alors abbé. Il eut un fils du
même nom.
Marray II , baron de Nouâtre , fils et héritier du
précédent. Nous ignorons de même avec qui il prit
alliance de laquelle sortit celui qui suit.
Gueunon ou Ganillon, baron de Nouâtre, était
un des principaux partisans de Foulques-Nerra ,
comte d'Anjou et seigneur de Loches.
Clerpas, baron de Nouâtre. Nous ne pourrions
pas dire de qui il était fils; mais il vivait vers la fin
du onzième siècle, du temps de Guy, deuxième du
nom, abbé de Cormery.
FALLU AU. 21 3
L'histoire ne nous a point conservé le nom du
seigneur de Nouâtre qui reçut Acarie prisonnier dans
son château, vers l'an 1 148, ainsi que nous l'avons
dit à l'article des seigneurs de Marmande.
Dans le treizième siècle , Nouâtre était possédé
par les seigneurs de Pressigny et de Sainte-Maure,
d'où il passa dans la maison de La Rochefoucauld, et
de là dans celle deMontbazon, ainsi qu'on peut le voir
aux articles Montbazon , Pressigny et Sainte-Maure.
Le château de Nouâtre était très-ancien , puisque
nous avons vu qu'en gij il existait déjà , et que ce
fut là que se jugea, par l'épreuve du feu , un procès
survenu entre les curés d'Antogny et de Pussigny.
Sa position au sein de la Vienne le rendait très-fort :
mais il n'en reste plus que la roche sur laquelle il
était assis.
Cette baronnie fut réunie, en i588, au duché de
Montbazon , la maison de Rohan possédant déjà
depuis long-temps la terre de Nouâtre.
PALLUAU, BARONNIE.
VsiWiiau (Paludellus) , baronnie du duché de Tou-
raine, dépendait de la généralité de Bourges, tant
pour le spirituel que pour les finances; situé sur la
rivière de l'Indre , à quinze lieues de Tours , le châ-
teau est sur une hauteur et la ville est au-dessous.
11 paraît qu'elle était anciennement fortifiée, car
nous voyons qu'en iiSB Philippe-Auguste la reprit
sur les Anglais , ainsi que Montluçon. Il y avait une
2l4 HISTOIRE DE TOUR AINE.
collégiale. La paroisse nommée Onzay est au-delà
tle la rivière. Palluau fut érigé en comté vers les com-
mencemens du dix-septième siècle , en faveur de
Henri de Buade , vice-roi du Canada.
Jean de Palluau, qui vivait vers 107 5, est le pre-
mier des seigneurs de Palluau dont nos anciens
titres fassent mention. On le voit figurer dans une
donation faite par Foulques-Réchin.
Geoffroy, premier du nom , était seigneur de
Palluau , en Ii55 , selon des titres de l'abbaye du
Landais. Il pouvait être fils, ou petit-fils de Jean.
Guillaume de Palluau eut plusieurs enfans de
Béatrix , sa femme , savoir : Geoffroy qui suit , Har-
raud , seigneur de Montrésor , et Hervé , chanoine
de Saint-Martin de Tours.
Geoffroy de Palluau , deuxième du nom , sur le-
quel nous ne savons rien.
Pierre de Palluau, dont la femme se nommait
Létice.
Geoffroy de Palluau, troisième du nom, vivait
encore en i236. On a parlé de lui sous le nom de
Geoffroy I", seigneur de Montrésor. Nous ne pour-
rions dire comment la seigneurie de Palluau passa
entre les mains de la maison d'Argy et de celle-ci
dans la famille de Tranchelion.
Archarabaud d'Argy , chevalier , fils de Guillaume
et de Philippe de Mœuvres , était seigneur d'Argy et
de Palluau, en 1249. Il fonda en 1260 un anniver-
saire dans l'abbaye du Landais, pour Guillaume
d'Argy , son fils ; ce fut sans doute à défaut de pos-
PALLUAIJ. 2l5
tëritë que la terre de Palluau changea de proprié-
taire.
Charles de Tranchelion , seigneur de Palluau et
de Ville-Savin , épousa Anne de Silly.
Guillaume de Tranchelion , seigneur des Roches ,
près rile-Bouchard , fît hommage de la seigneurie de
Palluau au roi Charles VI, en i4oo, et à Charles Ml,
le i8 juillet i438. Il fut marié deux fois. La première
avec Isabeau de Menou , dame de Sennevières, dont il
eut Jean qui suit , et Jeannet, seigneur de Senne-
vières. Sa seconde femme fut Guillaume d'Orcy.
Jean de Tranchelion , seigneur de Palluau , épousa
Jeanne de Roucy, dont il eut une fille unique nom-
mée Charlotte , qui porta son héritage dans la maison
de Brachet.
Gilles Brachet, chevalier, baron de Maignac, de
Palluau et de la Péruse , eut de sa femme Charlotte
de Tranchelion , entre autres enfans ,
Jean Brachet, chevalier, seigneur de Palluau, qui
eut pour femme Jeanne , fille de Jean de Blanchefort,
seigneur de Saint-Janvrin. De ce mariage sortit
Claude Brachet , chevalier , seigneur de Palluau.
Il épousa Anne , fille de Pierre de Conighan , sei-
gneur de Cangé près Tours. Il n'en eut qu'un fils.
Claude Brachet, deuxième du nom, chevalier,
seigneur de Palluau et de Villegouin , fut marié à
Françoise , fille d'Edme de Prie. Il vivait en iSSq,
et assista à la seconde réformation de la coutume de
Touraine.
Antoine de Buade, seigneur de Frontenac, cheva-
2l6 HISTOIRE DE TOUIIAÎNE.
lier de l'ordre du Saint-Esprit , fut seigneur de Pal-
luau par acquêt. Il on rendit hommage le 17 sep-
tembre 1606, entre les mains du garde-des-sceaux
Brulard de Sillery. De sa femme Jeanne de Secondât,
il eut Henri qui suit et Roger , abbé d'Obasine.
, Henri de Buade , comte de Palluau et de Frontenac,
premier-maître-d'hôtel du roi , fut nommé vice-roi
du Canada. Nous avons dit que ce fut pour lui que
Palluau fut érigé en comté. Il eut d'Anne Pheli-
peaux, son épouse, Louis qui suit, Anne et Hen-
riette.
Louis de Buade , comte de Frontenac et de Pal-
luau , seigneur de l'Ile-Savary, n'eut d'Anne de La-
grange de Trianon, son épouse, qu'un fils nommé
François, tué dans une campagne d'Allemagne sans
avoir été marié.
Roger de Buade, fils puîné d'Antoine, abbé
d'Obasine et d'Angle , reçut son prénom de Roger ,
duc de Bellegarde , qui fut son parrain. Il joignit à
sa terre de Palluau celle de l'Ile-Savary qu'il acquit
de Louis de Couhé, seigneur de Betz. Mais à sa
mort sa succession fut vendue.
Jacques Clérembault, chevalier, comte de Pal-
luau par acquêt. Il avait épousé Louise de Villepied
dont il eut
Louis-Philippe Clérembault , chevalier , comte de
Palluau, seigneur de l'Ile-Bouin , maréchal de France ,
célèbre par son esprit et sa bravoure, dont les enfans
sont morts sans postérité. La baronnie de Palluau
fut alors unie au comté de Montrésor.
PAULMY. 217
PAULMY, VICOMTE.
Le château de Paulmy ( Palmariutn ) est situé à
dix lieues de la ville de Tours , du coté du midi , sur
la petite rivière du Brignon, qui se jette dans la Glaise
à quatre lieues de sa source. 11 fut bâti en \[\l\\ par
Pierre de Voyer , seigneur du lieu. Etienne Jodelle ,
meilleur poète latin que français, prétend que ce
château fut appelé Paulmy, à cause des palmes et
des lauriers qui ont honoré les victoires des seigneurs
de cette maison. C'est ce qu'il donne à entendre
dans l'épitaphe de Jean II de Voyer.
Ex titulis tibi jure tuis facit inclyta nomcn
Palma, diîi palmas Musis ac Marte tulisti.
Vivere rite, mori quoque rite, fit imica genti
Palma piae : reliquas terris fas quaerere palmas,
Hsc tibi siiprema est quœsita in œthere palma.
Cette étymologie poétique se fonde sur ce que
Paulmy se nomme en latin Palmarium.
Il y avait autrefois dans le château une chapelle
pour la sépulture des seigneurs, consacrée en 1476
par l'archevêque de Tours, sous l'invocation de
saint Nicolas. Jean II y fut enterré. Elle était des-
servie par un doyen et quatre chapelains : mais en
161 5 Louis de Voyer la fit détruire et remplacer par
un couvent qu'il fît bâtir dans l'intérieur de son parc.
Ainsi, en 1622 , les cinq anciens desservans ou cha-
2l8 HISTOIRE DE TOURAINE.
pelains furent changes en Augustins réformés de la
province de Bourges.
Paulmy, dans Forigine, n'était qu'un hameau
dépendant de la paroisse de Ferrière -l'Arçon , mais ,
par lettres patentes du i septembre lySy, on en fit
une paroisse particulière formée du démembrement
de quatre autres , et desservie par le prieur de ces
Augustins.
Le château et le beau parc de Paulmy, qui avait
alors deux lieues d'étendue , eurent d'autant plus à
souffrir des excès commis par les protestans dans la
province, depuis 1 662 jusqu'en i575, que le vicomte
de Paulmy, Jean , troisième du nom , fut un des chefs
de l'armée royale qui les poursuivirent avec le plus
de vigueur. Aussi son château fut-il pillé et dévasté
en 1569, époque où le vicomte se rendait person-
nellement caution des cinquante mille livres que
Charles IX empruntait à la ville de Tours , pour la
solde de ses troupes. La famille de Voyer, dans
laquelle cette terre se trouve encore , est aujourd'hui ,
ainsi qu'on va le voir , l'une des plus anciennes de la
Touraine.
Mathieu de Voyer , chevalier , seigneur du Breuil
dans la paroisse de Saint- Aubin-le-Dépeint , vivait
en \ioi, Robert III, comte d'Alençon, qui mourut
en 1217, lui donna pour ses bois du Breuil une
exemption de toute espèce de droits , excepté le ser-
vice pendant huit jours dans son château d'Essé. Il y
eut procès entre ses héritiers et ceux de Robert qui
prétendaient le tiers des bois; mais un arrêt du par-
PAULMY. 2T9
lement de la Pentecôte 1 269 déclara qu'il n'était
rien dû. Nous ignorons quels furent ses successeurs
immédiats jusqu'au suivant.
Etienne de Voyer est le premier que nous voyons
faire souche. L'abbé de Marolles , dans ses mémoires ,
nous apprend qu'un titre de son abbaye de Bauge-
rais, parle d'une rente de blé que lui donna Agathe,
femme de cet Etienne , à prendre sur sa dîme de Fer-
rière-l'Arçon. On pourrait conclure de là qu'elle lui
avait apporté en dot cette seigneurie, ou du moins
la portion où se trouvait Paulmy, dont ses descen-
daus auront porté le nom. Etienne , dans les titres ,
est nommé Stephanus Vigerii.
Renaud de Voyer, chevalier, par un acte du jeudi
avant la Saint-George (19 avril) 1285, obtint pour
lui et ses héritiers , de Berthelemy , seigneur de La
Haye et de Passavant , la remise de plusieurs droits
qui lui étaient dus comme baron de La Haye.
Guillaume de Voyer , qualifié de varlet , rendit
aveu du lieu de la Touche des Ferreaux, situé dans
la paroisse de Mouzé ou Mouzay, le mardi avant
l'Epiphanie i333. Ce même lieu de Mouzé fut,
l'an 1680 , érigé en vicomte en faveur de Pierre de
Voyer.
PhelippinouPhelipponde Voyer , écuyer , seigneur
de Paulmy, est relaté dans des actes de i374 et 1378.
Il se maria deux fois : la première a Jeanne de Ver-
neuil, et la seconde à Marguerite Sigoignc. Il vivait
encore le 2 février i[\\\. On ne hii connaît qu'un
fils.
220 HISTOIRE DE TOU INE,
Jean de Voyer , premier du nom , seigneur de
Paulmy , épousa en i4o8 Alix , fille de Mouton de
Cluys, qui ^n était veuve en i443. De ce mariage
naquirent : Pierre 1"; Jeanne, épouse du seigneur de
Preuilly; Jeanne II et Marie, vivantes en i443;
Imblette, mariée la même année à Jean d'Artannes,
et enfin Josseline , qui épousa, en i458 , Hélion de
la Motlhe, dit Bouchardon.
Pierre de Voyer, premier du nom, seigneur de
Paulmy et de La Roche de Gennes, épousa, en i434 j
Marguerite de Betz. Il mourut vers i48i ou 1482;
car sa veuve transigea avec Jean, l'un de ses fils,
en i483. Les enfans furent : Pierre H; Bertrand,
grand-prieur de France; Jean; Jeanne, mariée en
1482 , à Mathurin de Gannes; et Jacquette , mariée
en i485 à Victor de l'Espinay.
Pierre II de Voyer, seigneur de Paulmy, de La
Roche de Gennes, etc. , s'allia par contrat passé à
Chinon , en il^'ji <, à Jeanne des Aubuys dont il eut
Jean II , Nicolas , Pierre , Renée , mariée en 1 5o5 à
Jacques de Saint- Jouy , et Marie , femme de Bertrand
le Gay , chevalier.
Jean de Voyer, deuxième du nom , seigneur de
Paulmy, rendit hommage de ce fief, le 2 3 avril i532,
à Jean de Laval , seigneur de La Haye, et de La
Roche de Gennes le 10 mars i547- ^^ mourut à
La Haye, âgé d'environ quatre-vingts ans, fet fut
enterré dans la chapelle de Paulmy , où on lisait son
épitaphe faite par Jodelle. Il fut marié deux fois ; la
première à Louise , fille de Guillaume Dupuy , sei-
PAULMY. 221
gneur de Baigneux, et la seconde à Françoise de
Haulbuys. Il eut du premier lit seulement, Jean III,
qui suit ; François ; Renée, femme de Jacques Herpin,
seigneur de Guindray ; Anne, épouse de François An-
celon , seigneur de Fonbaudry , près Preuilly , en
1 53o ; Catherine , mariée en 1 536 à Isaac de Mons ,
écuyer; et Jeanne, qui, en i542, épousa René Persil,
écuyer, seigneur des Genêts.
Jean III de Voyer , seigneur de Paulmy , Argenson ,
Rippon , Balême et La Roche de Gennes j chevalier
de l'ordre du roi, gentilhomme ordinaire de sa
chambre , épousa , le c) novembre 1 538 , Jeanne de
Gueffaut, dame d' Argenson, dont il eut : René de
Voyer de Paulmy ; Pierre , qui fît la branche d' Argen-
son ; Yolande , mariée en 1 563 avec Pierre Frottier ;
Anne; Louise, femme de Louis Fumée; et Margue-
rite, mariée en i573, à Robert Robin, écuyer*
Jean III, mourut en 1571. La même année Jean
Bien né publia son Tombeau, vol. in-4, qui contient
en plusieurs langues les pièces composées en son hon-
neur par Antoine Valet et autres.
René-Victor de Voyer, vicomte de Paulmy, de
La Roche de Gennes, etc., grand-bailli deTouraine,
en 1 57 1 , mourut en i586. Il avait épousé Claude
de Turpin-Crissé, avec laquelle il fonda à Paulmy
un collège pour douze élèves : il n'en eut qu'un
fils.
Louis de Voyer, vicomte de Paulmy, etc., che-
valier de l'ordre du roi, gentilhomme ordinaire de
sa chambre , capitaine de cinquante hommes d'armes
22 2 HISTOIRE DE TOURAmE.
et conseiller d'ëtat, né en iS'jS. En i6o5 ,il épousa
Françoise de Larçay, dont il eut : Jacques qui suit ;
François , seigneur de Boizé; Gabriel , évoque de
Rhodez ; René , comte de Dorée ; Hardouin , cheva-
lier de Malte; et Léonor, mariée en 1629 à Léo-
nor Barjot , comte de Ronce.
Jacques de Voyer , vicomte de Paulmy , etc., che-
valier de l'ordre du roi , gentilhomme de sa chambre ,
mort en 1674* H avait épousé, en i638, Françoise
deBeauveau, dont il eut Jean-Armand, Gabriel,
Marc- Antoine , Louis-Basile - Alexandre , Jacques ,
René , Marie et Françoise , religieuses.
Jean-Armand de Voyer, vicomte de Paulmy, etc.,
épousa en premières noces Anne-Radegonde de Mau-
roy , et après sa mort, arrivée en 1674? elle se re-
maria à François de Crussol-d'Uzès. Il eut pour
enfans Séraphin- Jean- Armand , mort sans alliance au
combat de Senef, en 1674, et Marie-Françoise-Cé-
leste, héritière de sa branche par la mort de son
frère. Elle épousa , le 3o août r 689 , le comte de La
Rivière, auquel elle porta en dot la vicomte de
Paulmy, etc.
Charles-Yves-Jacques du Plessis, comte de la
Rivière et de Ploeuc , vicomte de Paulmy et de La
Roche de Gennes, du chef de sa femme Marie-
Françoise-Céleste de Voyer qui mourut en 1732 , et
dont il eut
Charles-Yves-ïhibaud, comte de La Rivière, de
Mur, de Ploeuc, marquis de Paulmy, qui épousa
Louise-Julie de Barberin de Reignac. Il revendit les
PRESsiGNT. aaS
biens qu'avait apportés sa mère à Marc-Pierre de
Voyer , comte d' Argenson , baron des Ormes , alors
ministre de la guerre.
Marc-Pierre de Voyer , comte d'Argenson , mar-
quis de Paulmy , ministre de la guerre, sur-intendant
des postes , etc. , racheta , comme nous l'avons dit ,
les terres de Paulmy, de La Roche de Gennes et de
Mouzé. Le 24 mai 1719, il avait épousé Anne Lar-
cher , dont il eut
Marc-René de Voyer , deuxième du nom , baron
des Ormes , connu sous le nom de marquis de Voyer,
grand-bailli, lieutenant-général pour le roi en Tou-
raine , directeur-général des haras , né le 2 a sep-
tembre 1772, mort en 1781 ; il avait épousé Constance
de Mailli, dont il eut Marc-René qui suit.
Marc René de Voyer, troisième du nom, actuel-
lement vivant, né en 1771 , a épousé Sophie de Ro-
sen , veuve de Victor prince de Rroglie , dont il a
eu René et quatre filles, dont l'une morte en bas
âge.
PRESSIGNY, BARONNE.
Précigny , ou le grand Pressigny ( Prisciniacum^
Preciniacum)^ est nommé dans les anciens titres
Précigny-le-Souverain. On l'a depuis appelé le Grand,
pour le distinguer d'une autre paroisse qui en est
distante de deux lieues, nommé le Petit-Pressigny.
Le Grand, qui avait le titre de haronnie, est à sept lieues
sud-ouest de Loches , et à dix-sept lieues sud-est de
2^4 HISTOIRE DE TOURAINE.
Tours, non loin des bords de la Glaise. Grégoire de
Tours, dans la vie de saint Nizier, § 1 1, nous apprend
qu'il y avait une église bâtie depuis long-temps à
Pressigny , lorsqu'il y plaça des reliques de cet évêque
de Lyon. Ainsi, l'on ne peut révoquer en doute l'an-
cienneté de ce lieu, dont il est également fait men-
tion dans une charte de Gharles-le-Ghauve , de l'an
862, relative à la mense des chanoines de Saint-
Martin de Tours. Il serait difficile d'après cela d'in-
diquer l'époque où son château fut construit. Ge fut
Guillaume I" qui, vers 11 90, y fonda un chapitre
composé de sept chanoines.
Pressigny avait donné son nom à une famille dont
la souche doit remonter à des temps assez reculés.
Gependant nous n'en trouvons de traces que vers la fin
du onzième siècle , lorsque cette famille se confondit
avec celle de Sainte-Maure.
Guillaume de Pressigny, chevalier, est le plus
ancien dont nous ayons connaissance. Il épousa vers
II 60, Avoise ou Avoy, dame de Sainte-Maure, qui
lui porta en dot to;is les biens de son père Guil-
laume F'^, seigneur de Sainte-Maure. Il en eut entre
autres enfans Guillaume II , qui continua la posté-
rité. Il portait tantôt le nom de Pressigny , tantôt
celui de Sainte-Maure, selon les actes qu'il faisait
dans l'une ou dans l'autre de ces deux seigneuries :
quelquefois aussi il prenait le titre de Pressiguy-
Sainte-Maure, mais il scellait toujours du sceau de
Pressigny.
On trouvera à l'article des seigneurs de Sainte-
PRESSIGNY. !225
Maure les détails relatifs aux six noms suivans,
distingués par des italiques.
Guillaume II, seigneur dePressigny et de Sainte-
Maure.
Guillaume III , idem, chevalier banneret eu
1214.
Josbert, seigneur de Pressigny et de Sainte-Maure.
Guillaume IV, seigneur de Pressigny, de Sainte-
Maure et de Nouâtre, en iiiSo.
Guillaume V, idem , en 1271.
Isabeau, idem, en i3io. Celle-ci, fille unique de
Guillaume V, porta tous les biens de la maison de
Craon , par son mariage avec Guillaume I".
Guillaume de Craon , deuxième du nom , cheva-
lier , seigneur de Montbazon , de Sainte-Maure , de
Nouâtre , fit hommage au roi à cause de sa baronnie
dePressigny, le 6 septembre iSqî. Il épousa, le i3
avril 1 396 , Jeanne de Montbazon , dont il eut : Guil-
laume III; Jean de Craon; Marguerite, alliée à Guy
de La Rochefoucauld; Marie de Craon qui suit; Isa-
belle et Louise.
Marie de Craon épousa Louis Chabot, seigneur
du Petit-Château et de la Grève en Poitou, fils de
Thibaut Chabot , et d'Amicie de Sainte-Maure. Elle
lui porta en mariage les seigneuries de Pressigny, de
Colombiers, Monconlour , Montsoreau et Jarnac;
leurs enfans furent Thibaut Chabot qui suit, et
Renaud qui fit la souche des seigneurs de Jarnac.
Thibaut Chabot, seigneur de la Grève et de Mont-
soreau, fit hommage au roi, le 17 mars il\i'2. , pour
3. i5
2l6 HISTOIRE Dt TOUR AINE.
les seigneuries de Pressigny , de Colombiers et de la
Ferrière. Il épousa Bonnissarde , autrement Brinis-
sant, fille de Guillaume, seigneur d'Argenton, en
Poitou, qui, étant veuve de lui, fit hommage au roi
des terres de Pressigny et de la Ferrière, le 8 juin
1433. Ses enfans furent : Louis qui suit; Catherine,
femme de Charles de Chatillon; et Jeanne, dame
de Montsoreau.
Louis Chabot , baron de Pressigny , demeura en
la garde noble de sa mère , et eut depuis pour tuteur
Guillaume d'Argenton , son aïeul maternel , qui
vendit la baronnie de Pressigny à Bertrand de Beau-
veau , et à Françoise de Brézé , sa seconde femme.
Bertrand de Beauveau était fils puîné de Jean II de
Beauveau , et de Jeanne de Rigny , chevalier, bailli-
gouverneur de Touraine , baron de Pressigny et de
Briançon. Il fut marié quatre fois : k première à
Jeanne de La Tour Landry ; la deuxième à Françoise
de Brézé-Maulevrier ; la troisième à Ide du Châte-
îet , et la quatrième à Blanche , fille naturelle de
René, roi de Sicile, par contrat du 20 novembre
14(37. Du premier lit il eut Louis, mort jeune, et
Antoine qui continua la postérité; Jean, évêque
d'Angers ; Catherine , femme de Philippe de Lénon-
court; Charlotte, femme de Yves de Scépeaux,et
Marguerite , mariée à N. de Maigneville. Du second
lit vinrent Jean et Jacques de Beauveau-Tigny; Charles,
depuis baron de Pressigny, Bertrand, Pierre et trois
filles. Enfin, du treizième lit, il eut René, Jean
et Guyonne qui épousa Jean-Juvénal des Ursins.
PRESSIGNY. a a 7
La baronnie de Pressigny ayant été acquise par
lui conjointement avec sa seconde femme , dont les
enfans, suivant leurs conventions matrimoniales,
devaient succéder aux acquêts , le père ordonna par
son testament, le lo février 1468, que cette baronnie
appartiendrait à Antoine , fils aîné de cette seconde
femme.
Antoine de Beauveau , comte de Policaste , baron
de Pressigny et de Sillé-le-Guillaume , prit, du vivant
de son père, le titre de baron dePressigny.il assista,
le 10 novembre i449> ^ l'entrée de Charles VII
dans la ville de Rouen, et moui'ut au mois de mai
1489 , laissant d'Anne dlnterville , son épouse,
Louis , Bertrand , Jean , Artus , et deux filles.
Louis de Beauveau , chevalier , baron de Pressigny,
de Sillé , etc. , épousa Renaude Huré , dont il n'eut
qu'un fils. Aussitôt la mort de son père, il rendit
hommage au roi pour les seigneuries de Pressigny et
de Ferrière -l'Arçon , par acte du 1 1 juin iSSg;
mais il fut obligé de rendre la première à son oncle.
Charles de Beauveau , seigneur de Passavant , de
Tigny et de Ternay , troisième fils de Bertrand de
Beauveau, et de Françoise de Brézé, sa seconde
femme, après la mort de Jean et Jacques , ses frères
aînés, succéda à la baronnie de Pressigny, qui lui
appartenait suivant les conventions matrimoniales de
sa mère. Il épousa Barbe de Lange, et mourut en
i5o8.
R^né , bâtard de Savoie , fut reconnu par Phi-
lippe II, duc de Savoie, son père , qui lui donna, en
i5.
a a 8 HISTOIRE DE TOUR AINE.
1457, le comté de Villars. Il acheta Presslgny et
Ferrière-l'Arçon dont il fit hommage à François P',
le 18 juillet i523. Il mourut peu de temps après la
bataille de Pavie, des blessures qu'il y avait reçues.
Il eut d'Anne de Lascaris , comtesse de Tende,
Claude , comte de Tende , Honorât qui suit; Made-
leine, mariée à Anne de Montmorenci , connétable
de France ; Marguerite, épouse d'Antoine de Luxem-
bourg , comte de Brienne , et Isabelle, mariée à René
de Bastarnay, comte du Bouchage.
Honorât de Savoie , marquis de Villars , comte de
Tende , maréchal et amiral de France , fît hommage
au roi de la baronnie de Pressigny , le ^5 novembre
1 546. Il avait épousé Françoise de Foix , dont il eut
Henriette, mariée en premières noces à Melchior
Des Prés , seigneur de Monpezat, et en deuxièmes à
Charles de Lorraine, duc de Mayenne.
Macé Bertrand , premier du nom , seigneur de la
Basinière , trésorier de l'épargne , fit l'acquisition de
la baronnie de Pressigny. Il épousa Marguerite de
Yertamont, dont il eut un fils qui suit.
Macé Bertrand, deuxième du nom, seigneur de
la Basinière, de Clichy, de la Garenne, baron de
Vouvant et de Pressigny, trésorier de l'épargne,
épousa, en i645, Françoise de Barbezieux, fille
d'honneur de la reine -mère, dont il eut Louis,
mort en 1686, N. Bertrand; N. abbé, tué en duel
dans la place des Victoires ; Marguerite, femme de
Jean-Jacques de Mesme , comte d' A vaux , et Marie-
Anne qui suit.
PREITILLT. a 39
Marie- Anne Bertrand de la Basinière fut mariée
à Claude Dreux , marquis de Nancré , capitaine aux
gardes , gouverneur d'Arras , lieutenant-général des
armées , mort en i68g.
La baronnie de Pressigny a été possédée depuis ,
et jusqu'en nos derniers teinps, par la famille Gilbert
de Voisins.
Pierre Gilbert de Voisins, président à mortier
au parlement de Paris, en était propriétaire, en
1789-
Le château de Pressigny était très-fort autrefois ,
et même encore dans le cours du quinzième siècle,
car l'histoire nous apprend qu'après s'en être emparé
en 1417, le duc de Bourgogne, Jean-sans-Peur, y
mit une garnison qui en fut délogée par Charles VII,
en i4i8. Ce château est aujourd'hui entièrement
détruit , et son parc, qui était très-vaste et très-bien
planté, a été converti en terres labourables. La collé-
giale dont nous avons parlé au commencement fut
supprimée, en 178a , par l'archevêque de Tours.
PREUTLLY , BARONNIE.
Preuilly ( Prulliacum ) est une petite ville sur la
Claise , à dix-neuf lieues sud-sud-est de Tours, et «1
neuf lieues sud-sud-ouest de Loches. Elle avait le
titre de première baronnie de Touraine. Nous jugeons
en effet de son ancienneté par le testament de saint
Perpète, fait en 47^, par lequel il donne à l'église
de Preuilly un calice et doux burettes d'argent. Elle
23o HISTOIRE DE TOURAINE.
a donné son nom au château et à une des plus an-
dîëïïnes familles du royaume d'où sont sortis les
comtes de Vendôme. Ce château fut bâti au commen-
cement du dixième siècle, par le vicomte Atton , qui,
peu de temps après, c'est-à-dire vers 9 3 5, acquit
soixante-deux arpens de terre auprès de son manoir,
par échange avec Hugues -le -Grand, pour d'autres
terres que le vicomte possédait dans la voirie de
Dolus. Ils en donnèrent leurs lettres au mois d'avril
936 , la première année du règne de Louis d'Outre-
mer. La seigneurie de Preuilly était dans son prin-
cipe beaucoup plus considérable. Pressigny et la
Guierche en relevaient il y a plus de quatre cents
ans. On y comptait encore cinq châtellenies et cent
fiefs qui lui devaient foi et hommage. Sa justice
était une des plus grandes de la Touraine, et s'éten-
dait sur vingt-sept paroisses , dont sept en première
instance et vingt par appel. Les barons de Preuilly
étaient avoués de l'église de Saint-Martin , et avaient
seuls le privilège de porter son étendard en l'absence
des comtes d'Anjou.
Les Anglais se saisirent du château , sous le règne
du roi Jean, et s'y retranchèrent si bien qu'ils purent
faire des courses dans toute la Touraine, et jusque
dans l'Anjou. Le pillage qui en était la suite obligea
les seigneurs voisins de se réunir pour les chasser de
ce poste. Jean de Bueil , depuis grand - maître des
arbalétriers de France , fut le chef de cette entre-
prise , et le célèbre Duguesclin voulut en cette occa-
sion combattre sous sa bannière. Les Anglais en
PREUILLY. a3l
furent chassés, et le seigneur de Preuilly rentra
dans son château qu'il mit en état de résister à une
nouvelle attaque.
On croit que ce fut en ce temps que les barons
de Preuilly ordonnèrent à leurs principaux \assaux
de fortifier leurs châteaux , soit pour y recevoir gar-
nison , soit pour y renfermer les prisonniers de
guerre. Nous observerons à ce sujet que , pendant
toute la durée des hostilités , le seigneur de Preuilly
était maître absolu du château de son vassal , dont
il devait user en bon père de famille, et le rendre
dans le même état qu'il l'avait pris. Au nombre des
châteaux qui relevaient à ce titre de la baronnie de
Preuilly, nous voyons Doiré , près Châtelleraull,
Rouvray, la Gâtelinière , Launay-sur-Fourche, Tour-
neau, Monéor, la tour de la Gharlottière et le Roul-
let, nommé depuis Verneuil-le-Château.
La ville et le château de Preuilly furent pris
pendant les guerres de la religion par un enseigne
du capitaine Belon. Ses intelligences avec quelques-
uns des habitans lui en facilitèrent l'entrée , le 2
juin i562 , et il s'y maintint avec sa troupe jusqu'au
16 octobre suivant. Sans attendre qu'il en fût chassé,
il prit le chemin de la Charilé-sur-Loire.
Le vicomte Atton, quoiqu'il eût fait bâtir le châ-
teau de Preuilly , pouvait bien n'en pas être le pre-
mier seigneur , de même qu'il est assez probable que
ce ne fut pas lui qui, en 888, accompagna Ingelgcr
dans son expédition d'Auxerre ; car , en ne lui sup-
posant que vingt-cinq ans à cette époque, comme
aSîJk HISTOIRE DE TOUR AINE,
nous avons vu plus haut qu'il traita, en 936, avec
Hugues-le-Grand , il aurait alors été âgé de soixante-
douze ans. Nous observerons que dans cet acte d'é-
change il est qualifié di illustre , titre qui ne se
donnait qu'aux plus grands seigneurs et aux princi-
paux officiers de la couronne. Nous savons que sa
femme se nommait Emme; mais nous ignorons s'il
en eut des enfans , et de quelle manière la baronnie
de Preuilly passa dans la famille de ce nom. Au
reste , s'il y a une lacune entre lui et le suivant , elle
ne peut être tout au plus que d'une génération.
Effroy ou Euffroy est le premier que l'on voit pa-
raître sous le nom de Preuilly, vers l'an 965. Ce fut
lui qui , en l'an 1 001 , fonda dans la ville l'abbaye
de Saint-Pierre, où il eut sa sépulture. On y lisait
cette épitaphe en vers rimes et léonins , suivant
l'usage et le goût du temps un peu récent où elle
fut composée :
Inter mortales quos Gallia nobilitavit ,
Quondam regales geuus et probitas decoravit,
Tutor eram patrise, pax jnris et emoluraentum ,
Dux quoque militise , subvertens castra furenttim.
Sic cum vidèrent mihi facta , meiqiie valerent
Sensus et mores, in Christo splendidiores,
Fanum fundavi , cuUuque sacro decoravi ,
Iq quo nunc jaceo sublimis honore trophaeo.
Effredus nomen, plebs, clerus funeris omen
Supplens, subveniat prece, veto munere fiât.
Effroy, qui était aussi seigneur de la Roche-Posay,
avait épousé Béatrix d'Issoudun , dont il eut Geof-
PREUILLY. 233
froy, Robert et Gosbcrt, ou Gaudebert qui fonda
l'église de Bossay, Fan ioa4, ou, suivant la tradi-
tion du pays, en io8o, ainsi qu'on l'a consacré par
cette inscription. «L'an mille quatre-vingts de grâce,
« monsieur de Preuilly Godebert, fils d'Effroy , fonda
« cette place. » Mais cette date ne saurait s'accorder
avec le temps où vivait son successeur.
Geoffroy , premier du nom , baron de Preuilly ,
seigneur de la Rocbe-Posay, épousa Almodie , avec
laquelle il vivait encore en io3o, car ils cédèrent en-
semble à cette époque à l'abbaye de Marmoutier
un droit de forage qu'ils avaient sur la terre de Mar-
ligny. C'est ce titre qui nous a transmis le nom de
ses enfans , savoir : Geoffroy, Guy , Gosbert, Hilde-
garde et Adenorde ou Honneur, dont quelques-uns
ont été omis par André Duchêne. Notre Geoffroy est
mentionné dans plusieurs cbartes de Geoffroy Mar-
tel, et notamment dans celle de io5o , par laquelle
il soumet au saint-siège l'abbaye de Vendôme.
Geoffroy II, baron de Preuilly et de la Roche-Po-
say j fut tué le jeudi-saint 1 066 avec quelques autres
barons qui tenaient le parti de Foulques-Réchin ,
contre Geoffroy-le-Barbu , son frère , comte de Tou-
raine. La chronique de Tours et celle de Saint-Mar-
tin le font l'inventeur des tournois : mais il ne fit que
les renouveler et en dresser les réglemens , car on
sait qu'ils étaient en usage dès le règne de Charles-
le-Chauve. Il eut d'Ameline, son épouse, deux fils :
Geoffroy, comlo de Vendôme, surnommé Jourdain ,
qui épousa Euphrosine , fille de Foulques Loyson ,
234 HISTOIRE DE TOURAIT^E.
comte de Vendôme , souche des comtes de Vendôme
de la première branche , et Eschivard qui suit.
Eschivard , premier du nom , baron de Preuilly et
de la Roche-Posay , se révolta contre Foulques-le-
Jeune, comte de Touraine , qui se vit ainsi forcé de
lui faire la guerre; il l'assiégea vainement dans son
château ; mais l'ayant rencontré en campagne , il le
battit et le fit prisonnier. Cependant il lui pardonna
depuis sa rébellion. Les enfans d'Eschivard furent
Pierre; Joubert ou Gosbert , chevalier, qualifié de
seigneur de la Guierche dans un titre du Cartulaire
de Saint-Martin, de l'an ii 68; Jourdain et Gautier.
Pierre, ditMon trabel ou Montrabut, baron dePreuilly
et delà Roche-Posay. Il accompagna le comte d'Anjou
dans les guerres qu'il eut avec Henri P', roi d'An-
gleterre , et se trouva à la bataille de Séez, en ii 1 5.
Il fut enterré dans l'abbaye de la Mercy-Dieu qu'il
avait fondée. Il n'eut qu'un fils d'une femme dont le
nom est inconnu.
Pierre II de Mon trabel , baron de Preuilly , etc. ,
suivit le parti de Henri II , qui s'était révolté contre
son père. Celui-ci , étant venu en Touraine, assiégea
et prit le château de Preuilly, l'an i lyS : mais il le
rendit l'année suivante, par le traité de paix fait entre
le roi d'Angleterre et ses enfans. Ce prince le choisit
depuis, avec Maurice de Graon et Guillaume Meingot,
pour traiter de la paix avec Louis VII , dit le Jeune ,
l'an T177. Il eut un fils unique qui lui succéda.
Eschivard II , baron de Preuilly , etc. , se trouva
à la Roche-Martel au Loudunois, l'an 11 83, aux
PREIILLT. 2 35
obsèques de Henri au Courl-Mantel , fils aîné du roi
d'Angleterre, qui y mourut le samedi 5 juin. Après
l'assassinat d'Artus, comte de Touraine, il rentra
dans le parti de la France, et, en 1206, jura la trêve
conclue entre Philippe-Auguste et Jean-sans-Terre.
La même année, il entreprit le voyage de la Terre-
Sainte , et étant prêt à partir , il donna à l'église de
Saint-Martin cinq sous de rente (i), à prendre sur
les droits qui lui étaient dus par la Monnaie de Tours.
Ce fut en considération de ce don que le chapitre le
nomma chanoine honoraire. Il mourut vers 1260,
et fut enterré dans l'abbaye dePreuilly. De sa femme
Marille il eut Geoffroy lïl , Josbert qui épousa
N. de La Trémouille , d'où vint Guy ou Gace de
Preuilly, seigneur de la Roche-Posay. C'est depuis
notre Eschivard II qu'on commença à dire, par alté-
ration, Preuilly-l'Eschoart, parce qu'alorson écrivait
Eschiuard.
Geoffroy III , baron de Preuilly, fut caution envers
le roi Louis VIII , en juillet 1 2 1 8 , que Guillaume
de Paye ne ferait la guerre ni à lui ni à ses sujets.
Il eut quatre enfans , dont Eschivard qui continua la
branche ; Jourdain , marié à Guy-de-Leste de Mon-
treuil, avec laquelle, au mois de novembre ï23i , il
engagea les dîmes d'Autrêche à l'église de Tours,
pour la somme de quatre cents livres; et Isabelle,
femme de Geoffroy Payen , seigneur de Bossay , en
1223. Le roi saint Louis, en 1229, lui confia la
(t) On sait qu'en ce cas il faut toujours entendre des sous d'or.
236 HISTOIRE DE TOURAINE.
garde de sa maison du Bouchet qu'il promit de lui
rendre à sa volonté.
Eschivard III , baron de Preuilly et de la Rocbe-
Posay, accompagna Louis IX, en 12^1, contre
Hugues de Lézignhem , seigneur de La Marche , et
par lettres du mois de septembre 1256, il accorda à
son beau-frère Geoffroy Payen le droit de chasse
dans les bois de Bossay et de Chambon; la même
année il composa avec les habitans de Preuilly pour
la taille qu'ils payaient à ses prédécesseurs , moyen-
nant cinquante livres de rente. Il laissa d'Alix , sa
femme, deux fils, Geoffroy qui suit, et Eschivard,
qui servit Philippe - le - Bel dans les guerres de
Flandres , en i3o2 et i3o3.
Geoffroy IV succéda à son père aux seigneuries
de Preuilly et de la Roche-Posay , et fit hommage en
1274 ? 3^1 célèbre Pierre de Brosse, seigneur de Lan-
geais et de Ghâtillon-sur-Indre , des terres qu'il
tenait de lui, à cause de la terre de Châtillon. Par
son testament fait en 1^85 , il voulut avoir sa sépul-
ture dans l'abbaye de Preuilly , auprès d'Eschivard ,
son père. Il avait épousé Marguerite , dont il eut
Eschivard IV , et Jeanne , femme de Guillaume
Meingot, seigneur de Surgères.
Eschivard IV , baron de Preuilly et de la Roche-
Posay, contracta mariage avec Marguerite Turpin,
dame de Cingé et d'Azay-le-Féron , fille de Guy Tur-
pin de Crissé. De ce mariage naquirent trois fils et
trois filles, i" Eschivard; 2° André, seigneur d'Azay-
le-Féron; 3° Grisel; 4" Marguerite, mariée à Jean,
PREUILLT. l'd'J
chevalier, seigneur de Pierre Buffîer, et de Château-
Neuf en Timerais; 5° Jeanne, femme de Bernard
Robert, chevaher, seigneur de Saint-Jal; 6* Isabeau,
reHgieuse.
Eschivard V, baron de Preuilly, etc. , fut fait che-
vaher en i34ij et mourut en i348 ou 1349- ^^
épousa Isabeau de Mongeron, dont il n'eut qu'un fils.
Eschivard VI, baron de Preuilly, etc., eut procès
avec Bernard Robert et Jeanne de Preuilly, sa tante
maternelle, pour la succession de Marguerite Turpin,
son aïeule, sur lequel il y eut un arrêt de rendu
en i363; mais il fut depuis terminé par une transac-
tion de 1 369. Il fut marié trois fois : la première, avec
Blanche, fille de Guillaume de Montendre, seigneur
de Gié et de Mauléon, dont il n'eut point d'enfans;
la deuxième, avec Isabeau, fille de Guy, seigneur de
Brizay; et la troisième, avec Sarrasine de Prie, fille
de Jean de Prie, seigneur de Buzançais. Du second
lit seulement il eut Orable de Preuilly, femme de
Renaud de Mauléon, seigneur de Toufou. Il mourut
le a 3 avril 1409? ^t fut enterré dans l'abbaye de la
Mercy-Dieu , laissant de son troisième mariage deux
fils et deux filles : savoir, Gilles; Antoine, seigneur
de la Roche-Posay ; Louise , mariée à Geoffroy Cha-
teigner, auquel elle porta en dot la seigneurie de
la Roche-Posay, après la mort de Pierre de Preuilly,
son neveu; enfin Jeanne, premièrement mariée à
Nicolas Braque, seigneur du Laz et de Coucy en
Gatinois, ensuite à Gaucher Aubin, seigneur de
Malicorne , maître-d'hotel du roi Charles VI.
238 HISTOIRE DE TOURA.11VE.
Gilles, unique du nom et le dernier de cette famille,
baron de Preuilly , rendit hommage à Charles VI pour
la baronnie de Preuilly, le 28 juin 1409. Il s'allia
avec Françoise, fille de Guillaume de Naillac, vicomte
de Bridieu , seigneur du Blanc en Berry. Il fut tué
au combat du pont de Saint-Cloud, Tan 1412, dans
le parti du duc d'Orléans contre le duc de Bourgogne,
et ne laissa que quatre filles : i** Marie de Preuilly,
femme de Jacques Pot, dont elle n'eut point d'en-
fans; 2^ Marguerite, qui suit; S"* Isabeau, religieuse;
4** Jeanne, mariée à Raoul de Gaucourt, grand-
maître de France. Aussitôt après la mort de Gilles
de Preuilly, Gaucher Aubin, son beau-frère, fit
hommage au roi de la baronnie de Preuilly, au nom
de ses nièces, le 18 décembre i4i2.
Marguerite de Preuilly, seconde fille de Gilles,
devint héritière de la baronnie et du Blanc en Berri
par la mort de Marie, sa sœur aînée. Elle fut mariée
le 6 août 14^1 à Pierre Frottier, seigneur de Mel-
zéart , grand-écuyer de France, auquel elle porta en
dot sa terre de Preuilly. Elle mourut le 12 août i445,
et son mari en 14^9, laissant deux enfans, George
et Prégent Frottier. George fut fiancé fort jeune avec
Marguerite d'Amboise, par contrat du 27 janvier
i435; mais il mourut du vivant de son père avant
la conclusion du mariage.
Prégent Frottier , deuxième du nom , succéda à sa
mère dans la baronnie de Preuilly et la seigneurie du
Blanc. Il se saisit du château de la Roche-Posay en
vertu d'une lettre de cachet qu'il avait obtenue par
PREUILLY. 239
surprise du roî Louis XI , et s'empara de tout 1 argent
et des meubles de Louise de Preuilly, sa grand' tante
maternelle , veuve de Geoffroy de Chateigner. Cette
veuve rendit plainte au parlement , qui permit d'in-
former; mais elle se désista et transigea avec lui. Il
épousa Isabeau de JBilly. De ce mariage sortirent
Grisegonnelle Frottier; Pierre, seigneur d'Azay-le-
Féron; Charles, seigneur de la Messelière; Isabelle,
femme de Guillaume d'Avarie ou de Varie , seigneur
de rile-Savary, et Jeanne , femme de Léon Taveau ,
seigneur de Mortemar.
Grisegonnelle Frottier , baron de Preuilly et sei-
gneur du Blanc, épousa Françoise, fille de Jean
d'Amboise, seigneur de Bussy, par contrat du 3i
mai 1664. De ce mariage sortit Jean Frottier qui
suit.
Jean Frottier, baron de Preuilly, seigneur du Blanc,
reçut , en 1 5^3, l'aveu de la terre de Fombaudry rele-
vant de Preuilly. Il épousa Louise de Reillac, et n'en
ayant point d'enfans, il transporta ses terres de
Preuilly et du Blanc à Louis de Clermont d'Anjou,
son oncle maternel.
Louis de Clermont d'Anjou , baron de Preuilly ,
seigneur de Gallerande, d'Azay-le-Féron et du Blanc,
reçut l'hommage de ses vassaux le 8 octobre iSag,
et le 2 1 du même mois il confirma à René de Menou
plusieurs privilèges pour sa terre de Boussay. Il épousa
Renée d'Amboise , dame de Bussy, et en eut plusieurs
enfans qui prirent le nom et les armes d'Amboise.
François de Vendôme, prince de Chabannaig,
0,4o HISTOIRE DE TOURAINE.
vidame de Chartres , était baron de Preailly en 1 544.
Il mourut à trente-huit ans, le i6 décembre i56o,
sans enfans de Jeanne d'Estissac. Après sa mort le
roi donna les rachats, lots et ventes qui lui appar-
tenaient sur la terre de Preuill}^, en qualité de comte
de Poitiers, à Claude Gouffier, seigneur de Boisy,
grand-écuyer de France, par lettres patentes du 19
juillet i56i. ,
Antoine de La Rochefoucauld, baron de Barbe-
zieux, ayant acquis, comme nous l'avons dit, avec sa
femme Antoinette d'Amboise, les droits d'Antoine
Frottier, héritier en partie de Jean Frottier, s'em-
para de toute la terre de Preuilly ; mais il y fut trou-
blé par les époux de Madelaine et Renée Frottier,
cousines - germaines de Jean. Ils s'accommodèrent
depuis et vendirent leurs droits. Peu de temps après
Jean Chateigner, seigneur de la Roche-Posay, s'étant
fait relever de la transaction faite par Louise de
Preuilly sa mère, avec Prégent Frottier, obtint, le
II mars i552, un arrêt définitif par lequel le tiers
de la baronnie de Preuilly lui fut adjugé contre Louis
de Luxembourg et Antoinette d'Amboise, qu'il avait
épousée après la mort d'Antoine de La Rochefou-
cauld son premier mari.
François Chateigner, chevalier de l'ordre du roi,
seigneur de la Roche-Posay, et de Preuilly en partie,
épousa Louise de Laval, dont il eut un fils unique,
mort à l'âge de treize ans, de manière que toute sa
succession échut à Louis d'Abain, son oncle, qui
réunit toute la baronnie de Preuilly.
PREUILLT. ll\ I
Charles de La Rochefoucauld, seigneur de Barbe-
zieux, etc., fils aîné d'Antoine et d'Antoinette d'Am-
boise, succéda à son père dans la baronnie de
Preuilly. Il mourut eu i583; mais après sa mort sa
veuve et ses enfans vendirent cette terre, le a4 avril
i586, à Charles d'Escars, évêque et duc de Langres,
sur lequel elle fut retirée féodalement par Louis
Chasteigner, seigneur d'Abain en i588, le i8 dé-
cembre.
Louis Chasteigner, baron de Preuilly, seigneur de
la Roche-Posay et d'Abain , épousa Claude Du Puy.
Après sa mort , sa veuve et ses enfans vendirent la
terre de Preuilly à César , duc de Vendôme , le 26
janvier 1607.
César, duc de Vendôme , comte de Buzançais, etc.,
fils naturel de Henri IV et de Gabrielle d'Estrée,
jouit de la baronnie de Preuilly depuis 1607 jus-
qu'à 1660 qu'il la vendit à Louis de Crevant, moyen-
nant 200,000 livres et 6000 de pot-de-vin.
Louis de Crevant d'Humières, chevalier des ordres
du roi , vicomte de Brigueil , seigneur d'Argy, d'Azay-
le-Féron , etc. , baron de Preuilly , fut marié avec
Jacqueline, fille de Jacques, marquis d'Humières,
dont il eut Hercule, tué au siège de Royan , et Louis,
mari d'Isabelle Phelipeaux, d'où sont issus Louis qui
suit, cinq autres fils et trois filles religieuses.
Louis de Crevant d'Humières , maréchal de France,
grand-maître de l'artillerie, duc d'Humières, baron
de Preuilly, etc., épousa Louise-Antoinette de La
Châtre, dont il eut Henri-Louis, tué au siège de
3. 16
242 HISTOIRE DE TOUR AINE.
Luxembourg en i634y Marie-Thérèse, épouse du
prince de Senghien ; Marie-Louise, religieuse; Anne-
Louise et Julie.
I^uis-Nicolas Le Tonnelier, baron de Breteuil,
Fomhaudry, Tournon, etc., acheta la baronnie de
Preuilly 378,000 livres, d'Anne-Louise de Crevant,
héritière de feu le maréchal d'Humières , par contrat
du 1 1 avril 1699. Il avait épousé Anne-Gabrielle de
Froullay, et eut d'elle Louis-Alexandre, François-
César et une fille.
Louis-François , marquis de Gallifet , baron d'Ho-
non, acquit, en l'jl^i^la. baronnie dePreuilly de Louise-
Micolas de Breteuil. Il fut le dernier de ces barons
qui se soient fait installer à Saint-Martin en qualité
de chanoine honoraire.
Hyacinthe-Marie Du Tertre, baron de Sancé, a
été le dernier des barons de Preuilly en 1789.
La ville de Preuilly, indépendamment de son
abbaye, comptait trois paroisses, Notre-Dame, Saint-
Pierre et Saint-Melaine. On ne sait comment le corps
de ee dernier, qui était évêque de Redon, fut trans-
porté à Preuilly, où on en fit la reconnaissance,
l'an 1224, le dimanche avant l'Ascension. La justice
était exercée par un bailli, un avocat, un procureur
fispal et un greffier. Il y avait un maire en titre
d'office, et six échevins ou conseillers, un grenier à
$d, un bureau de contrôle et un des fermes.
REiGNAC. a43
REIGNAC, MARQUISAT.
Reignac, situé à trois lieues nord-ouest de Loches,
et à sept lieues de Tours, se nommait dans l'origine
Bray oXi Brays. On Tappela depuis Le Fau, et enfin
Reignac, nom qu'il porte exclusivement aujourd'hui.
Grégoire de Tours, liv. X, ch. xxxi, § 4, nous
apprend que saint Brice , évéque de Tours, fit con-
struire pendant son épiscopat cinq églises au nombre
desquelles était celle du lieu nommé Bricca^ que l'on
croit être notre Bray, ce qui placerait cette commune
au rang des plus anciennes de notre province. Cepen-
dant son nom ne se trouve plus prononcé dans notre
Histoire jusqu'au douzième siècle où il est question ^
en II 20, d'un Archambaud, seigneur de Bray, qui
épousa Ermensaude, fille de Sulpice I" d'Araboise.
Un siècle plus tard, en I2i3, Pierre de Brosse ou de
La Brosse, premier du nom, en était probablement
seigneur, puisqu'il fit don des dîmes qu'il y possédait
à l'église de cette paroisse. Il eut pour successeur son
fils Pierre II, sergent à masse du roi saint Louis.
Celui - ci fut père de Pierre III de La Brosse ,
chambellan , puis principal ministre du roi Philippe-
le-Hardi, sous le règne duquel il fut pendu, ainsi
que nous l'avons dit dans notre septième livre, à
l'année 1278. Ses biens ayant été confisqués et réunis
à la couronne , nous ignorons en quelles mains passa
alors la seigneurie de Bray.
La famille Du Fau en était propriétaire dès les
244 HISTOIRE lîE TOUR AINE.
commencemens du quinzième siècle, et ce fut elle qui
lui imposa le nom Du Fau, substitué à celui de Bray.
Jean, seigneur Du Fau, maître- d'hôtel du roi
Louis XJ, épousa, en 1472? Jeanne de Bourbon,
fille naturelle de Charles V% duc de Bourbon, et de
Jeanne Souldet, légitimée en 146:2. ,
Ce fut en faveur de son fils Louis, seigneur Du
Fau, que cette ten-e fut érigée en baronnie. Har-
douin Du Fau vivait dans le seizième siècle, et com-
parut en i559 à la deuxième réformation des cou-
tumes de Touraine. Adrien Du Fau, son fils, seigneur
Du Fau et d'Espinay, lui succéda. La branche mas-
culine s'étant éteinte , la terre passa dans la famille
Gillis, vers l'an i58o, par le mariage de Marthe Du
Fau avec Alexandre Gillis.
Louis Barberin , comte de Reignac , marquis de
Vartigny et lieutenant pour le roi de la Haute-Tou-
raine , ayant acquis la baronnie Du Fau , lui fit à son
tour changer de nom en obtenant, en 17 10, des lettres
patentes qui l'érigèrent en titre de marquisat sous
l'appellation de Reignac. Louis Barberin n'ayant
laissé que deux filles de son mariage avec Marie-
Marguerite de la Vallée de Pimodan, le marquisat de
Reignac passa par l'une d'elles dans la maison de
Laval, et de là aux marquis de Lafayette et de Lusi^
gnem , qui en jouissaient encore par indivis en 1 789 ;
mais cette terre a été dépecée par l'injuste inscription
sur la liste des émigrés de l'illustre général Lafayette,
dans le temps même qu'il gémissait dans les cachots
d'Olmutz.
ROCHE-CORBON. 2l[3
On n'aperçoit plus de traces de l'ancien château de
Bray qui était situé sur le coteau qui domine le vil-
lage, autrefois fermé par des ponts-levis. Le nouveau
château a été reconstruit entre le hourg et la rivière
de l'Indre. Le comte de Reignac s'était plu à l'agran-
dir et à remhellir. Il y mourut en 17 19, et eut sa
sépulture dans la chapelle qu'il y avait fait bâtir. On
y lisait son épitaphe sur un mausolée érigé par son
épouse et par ses deux filles, la comtesse de La Ri-
vière et la comtesse de Laval-Montmorenci.
Lorsque le roi venait pour la première fois au
château de Loches, le seigneur de Bray devait l'at-
tendre à la porte de la ville, lui tenir l'étrier pour
descendre de cheval, et le conduire à l'éghse ou au
château , en menant par la bride le cheval dont il
était alors libre de disposer à son gré. Le même
cérémonial s'observait à l'entrée de la reine, et son
cheval, ou son carrosse, ou sa litière devenait éga-
lement la propriété du seigneur de Bray.
ROCHE-CORBON, raroiynii:.
Roche-Corbon [Rupes Corbonis) est un village
situé à une lieue est de la ville de Tours, sur le
coteau qui règne le long de la rive droite de la Loire.
Il se nommait anciennement Les Roches, du nom de
l'une des plus anciennes familles de la province, dont
sortait le célèbre Guillaume Des Roches , sénéchal de
Touraine, d'Anjou et du Maine, sous Philippe-
Auguste. Le château qui existait dans l'origine fut
a46 HISTOIRE DE TOURAI]\E.
rebâti par Robert Des Roches, petit-fils de Corbon,
et depuis ce temps on le nomma toujours Roche-
Corbon pour ie distinguer de plusieurs autres châ-
teaux qui s'appelaient également Les Roches. Ce
Robert était cousin de Hugues d'Aniboise , premier
du nom. Celui-ci s'étant croisé pour la Terre-Sainte ,
en 1095, lui laissa le gouvernement de la tour d'Am-
boise. Or, Robert craignant que Foulques-R.échin ,
comte de Tourame et d'Anjou, ne fît quelque entre-
prise sur le château de Roche-Corbon tandis qu'il
garderait la tour d'Amboise, le fit fortifier, et y fit
élever une tour carrée dans un des angles du château
qui regarde la Loire. Par ce moyen les soldats de la
garnison pouvaient instruire ceux de la tour d'Am-
boise de ce qui se passait, et réciproquement, ce qui
s'exécutait au moyen d'un certain nombre de flam-
beaux allumés qu'on élevait au haut de ces deux tours
correspondantes, et qu'on abaissait selon les signes
dont on était convenu. La tradition lui a conservé le
nom de Lanterne de Roche-Corbon. Elle est encore
entière, et c'est, avec quelques fragmens de murs,
tout ce qui reste de l'ancien château. La tour elle-
même n'a pas plus de trente pieds de haut ; mais elle
est construite sur le point le plus élevé du rocher
qui n'a souffert aucune altération, quoiqu'il y ait eu
des éboulemens fréquens dans les autres parties du
roc.
Ingelger, seigneur d'Amboise, surnommé le Grand,
fit reconstruire encore, vers 1 35o, le château de Roche-
Corbon qui lui avait été porté en dot par Jeanne de
ROCHE-CORBON. 247
Thouars sa seconde femme. Cette baronnie fut depuis
unie, ainsi que la vicomte de Tours, à celle de
Maillé par lettres de Louis XI, données en 1462 en
faveur de Hardouin IX de Maillé. Cette union fut
confirmée par Charles IX lors de l'érection de Maillé
en comté, et enfin par Louis XIII, au mois de no-
vembre 1619, lorsque Maillé fut érigé en duché de
Luines. C'est depuis cette époque qu'on a laissé smi
château tomber en ruines.
Les Anglais s'emparèrent de cette place au com-
mencement de l'année i4^8; et comme ils occupaient
également celle de Maillé, c'est-à-dire, au-dessus et
au-dessous de la ville de Tours, les habitans, fort
incommodés de leurs courses, furent obligés de les
faire cesser au prix de cinq cents écus d'or qu'ils
payèrent au commandant.
Corbon, chevalier, seigneur Des Roches, neveu de
Hardouin, archevêque de Tours, vivait sur la fin du
dixième siècle. C'était un des plus riches seigneurs
de la Touraine. En 999 il donna le métairie de Sully
à l'abbaye de Bourgueil , du consentement d'Aldesende
sa femme. Il était alors vassal d'Archambaud de Sully,
archevêque de Tours. Ce vassal était un officier que
le roi donnait a l'archevêque pour prendre soin de
ses revenus, maintenir la paix dans sa maison, et
rendre les honneurs aux commissaires qui venaient
dans la province de la part du roi. Corbon fut en-
suite vassal royal , et assista en cette qualité à plu-
sieurs jugcmcns rendus à Tours, ainsi que nous l'ap-
prennent plusieurs titres de l'abbaye de Marmoutier,
248 histothe de touraine.
commençant par ces mots ; In nomine Sahatoris
Dei , ego Corbo gratia Dei vasus dominicus et
indominicatus : ces mots vasus dominicus signifient
vassal royal. Il y avait plusieurs sortes de vassaux
royaux distingués par la nature de leurs emplois.
Les uns étaient occupés au service du roi , ainsi
que le sont encore les officiers commensaux; d'au-
tres l'étaient à garder les frontières du royaume,
tels que nos gouverneurs de provinces; il y en avait
d'autres qui faisaient valoir les domaines et les fiefs
qu'ils tenaient du roi à titre de bénéfice, ou qu'ils
possédaient en propre. Ces fiefs se donnaient ordi-
nairement aux militaires pour leur entretien tant
qu'ils étaient au service du prince, ou même pendant
leur vie pour les récompenser de leurs services; c'est
pourquoi on appelait ces domaines des bénéfices. Il
y en avait aussi d'autres qui se tenaient auprès des
comtes pour les aider dans l'administration de la jus-
tice. Corbon était au nombre de ces derniers. Il assis-
tait le comte de ïouraine au jugement des causes; et
comme les comtes et vicomtes avaient déjà de son
temps négligé leurs plus belles fonctions, qui étaient
de rendre la justice, il était devenu par ce moyen le
principal juge de la province. Cette dignité de vassal
royal avait été déjà, avant lui, possédée par un
autre Corvon, ainsi que nous le voyous par un juge-
ment que rendit Tbibaut, vicomte de Tours, le 8 des
calendes de juillet 908, car Corbon ou Corvon n'é-
taient qu'un même nom par le cbangement très-
fréquent du V en B. Ce Corvon nous semble donc
I\0CHE-CORBON. ^49
devoir être le père de notre Corbon, parce que l'un
et l'autre se trouvent dans le même siècle revêtus
de la même dignité au même lieu. Corbon Des Ro-
cbes voulant témoigner qu'il ne tenait pas sa dignité
à titre de bénéfice, comme les autres vassaux, mais à
titre héréditaire et successif, se sert du mot latin
indominicatus qui répond au mot propriétaire, 11
eut d'Aldésende, son épouse, Corbon, probablement
mort jeune; Thibaut qui suit; Handouin; Guillaume
et Hervé. On Croit que Guillaume Des Roches, qui
fut sénéchal héréditaire des trois provinces, était issu
d'un petit-fils de Hardouin.
Thibaut Des Roches, premier du nom, seigneur de
Roche-Corbon , épousa Sibylle d'Amboise, fille de
Lysois, dont il eut Robert et N. Des Roches.
Robert Des Roches, soigneur de Roche-Corbon,
assista, en ioqG, à la dédicace de l'église de Mar-
moutier, faite par !e pape Urbain II. Il vivait encore
en 1127, car dans cette même année il accompagna
Hugues d'Amboise au siège de Montrichard, et fut
présent à la donation que fit Renaud, seigneur de
Château -Regnault, à l'abbaye de Fontaines-les-
Rlanches. Il fut marié deux fois : la première , selon
toute apparence, avec Ammcline, fille de Gelduin,
seigneur de Maillé; la seconde, avecMaycnce, dont
la famille nous est inconnue. Il eut plusieurs enfans :
savoir, i** Thibaut, qui continua la postérité; 2° Ro-
bert; 3" Sulpice, moine à Marmoutier ; 4° Ganelon ,
doyen de l'église de Tours en 1 1 4 ^ et 1 1 49 ; ^'^ Lucie ;
aSo HISTOIRE DE TOUR AINE.
6' Sibyile, qui fut mariée avec Renaud II, seigneur
de Château-Regnault.
Thibaut Des Roches , deuxième du nom , seigneur
de Roche-Gorbon , accompagna sulpice d'Amboise
dans la guerre qu'il eut à soutenir contre Thibaut ,
comte de Blois ; mais Sulpice ayant été pris dans une
embuscade avec deux de ses enfans, Thibaut Des
Roches eut le temps de se sauver dans le château
de Chaumont, près duquel l'action se passait. Il eut
pour enfans Geoffroy, Hugues, Hervé et Robert; mais
on ignore quelle fut sa femme.
Geoffroy Des Roches succéda à son père , comme
on le voit par une enquête faite sur un différend
entre le seigneur de Roche-Corbon et le chapitre de
l'église de Tours ; mais nous n'avons pu apprendre de
même comment cette baronnie passa dans la maison
de Dreux. Nous trouvons en ce même temps un Geof-
froy Des Roches, gouverneur de la ville et du château
de Tours qu'il rendit assez lâchement au roi d'An-
gleterre, et il pourrait bien se faire que ce fût le
notre, si, comme il est plus que probable, il n'y en
avait pas alors deux du même nom.
Robert de Brenne, chevalier, seigneur de Roche-
Corbon. On croit, mais sans certitude, qu'il était fils
de Robert de France , comte de Dreux et de Brenne.
Il fit plusieurs transactions avec Téglise de Tours
en r2oV, i2o4, 1214 et 12x8. Il y a deux choses à
remarquer dans celle de ïii/\; c'est qu'il avait un
fils du nom de Geoffroy , dont les généalogistes né
ROCHE-CORBON. iBl
parlent point, et en second lieu , c'est que sur son
sceau est une colice chargée de six fleurs de lis, ce
qui fait voir que Robert n'avait ni quitté les armes
de France, ni pris celles de Dreux, comme le pré-
tendent tous les généalogistes. Il fut marié deux fois :
la première, avec Mahaut de Bourgogne, dont il fut
séparé pour cause de parenté; la seconde, avec
Yoland, fille de Raoul I", sire de Coucy. Ses enfans
furent: Geoffroy de Brenne qui suit; Robert; Pierre
de Dreux ou de Brenne, duc de Bretagne; Henri,
archevêque de Reims; Jean, et six filles.
Geoffroy de Brenne, chevalier, seigneur de Roche-
Corbon , fils aîné de Robert , fut aussi seigneur de
Mézières, du chef de sa femme. Nous avons de lui
un sceau où l'on voit un cavalier tenant une épée
nue de la main droite, et sur le bras gauche un écu
chargé d'un lion rampant , entouré de ces mots :
Sigillum Gauffredi de Brenna, et au contre-sceau,
une biche courante , autour de laquelle on lit : Ru-
pium Corhonis. En i23o, à la prière de Louis IX, il
fit remise au chapitre de Saint-Martui , de Tours ,
de l'hommage qui lui était dû pour les dîmes de
Saint-Pater. Il épousa Jeanne de Vierzon; mais ils
ne vécurent pas long-temps ensemble, Geoffroy étant
mort jeune.
Jeanne de Vierzon. Nous en avons déjà parlé à
l'article des seigneurs de Mézières. Elle jouit à titre
de douaire de la baronnie , et prit , suivant l'usage
du temps, le titre de dame de Roche-Corbon. Elle se
remaria à Geoffroy de Brabant. On lit autour de son
aSct HISTOIRE DE TOURAINE.
sceau : Johanna de Vierzon et de Rupihus Corh.
Jean , deuxième du nom , surnommé le Bon , fils
de Robert IV , comte de Dreux , et de Bëatrix de
Montfort , hérita la seigneurie de Roche-Corbon, après
la mort de Jeanne de Vierzon. Sa première femme
fut Jeanne , fille unique de Humbert de Beaujeu , sei-
gneur de Montpensier et connétable de France , et
la seconde fut Perrenelle, fille de Henri III, de
Sully, dont il eut pour fille unique , Jeanne de Dreux,
première femme de Louis, vicomte de Thouars. Jean
était mort en i338.
Louis, vicomte de Thouars, seigneur de Roche-
Corbon , eut , de son mariage avec Jeanne de Dreux ,
deux fils et trois filles : Jean , mort du vivant de sa
mère; Simon, qui mourut en i363, sans enfans de
Jeanne d'Artois ;Perrenelle,femmed'Amaury deCraon;
Isabeau dont nous parlerons tout à l'heure , et Mar-
guerite , femme de Guy Turpin , seigneur de Crissé.
Amaury de Craon , quatrième du nom , seigneur
de Sainte-Maure, etc. , était fils de Maurice de Craon
et de Marguerite de Mello. H y a apparence que
Perrenelle dé Thouars, son épouse, fut dotée de la
baronnie de Roche-Corbon , car il la possédait déjà
en i348. Il fut fait prisonnier «\ la bataille de Poi-
tiers, en 1 356, et conduit prisonnier en Angleterre,
d'où il eut permission de revenir en France, pour
travaillera sa rançon. Lorsqu'il fut libre, le roi le
nomma avec le maréchal Boucicaut pour traiter de
la paix avec le duc de Bretagne. Il mourut le 3o mai
1379, sans avoir eu d'cnfans. Après sa mort, sa
ROCHE-CORBON. ^53
veuve se remaria à Clément Rouault , dit Tristan ,
chevalier, seigneur à cause d'elle de la baronnie de
Roche-Corbon. Us ne lais^^t n^nt également aucune
postérité.
Isabelle de Thouars , seconde fdle de Louis , et de
Jeanne de Dreux, dont nous avons déjà parlé, fut
héritière , après la mort de sa sœur , de la baronnie
de Roche-Gorbon. Elle eut trois maris : i° Guy de
Nesle, maréchal de France; îi° Ingelger, fils de
Pierre d'Amboise; 3° Guillaume d'Harcourt. Du
deuxième lit, naquit Pierre , seigneur d'Amboise;
Ingelger, et quelques autres dont nous avons fait
mention dans la série des seigneurs d'Amboise.
Ingelger ou Ingerger d'Amboise, deuxième du
nom,fds d'Ingelger ¥^ et d'Isabelle de Thouars,
eut en partage la seigneurie de Roche-Gorbon, celle
de La Ferrière et la vicomte de Tours. Il s'acquit
beaucoup de réputation dans les armes , et fît la
guerre d'Afrique, en iSgo , avec le duc de Bourbon.
Il mourut vers l'an i4io, et laissa de sa femme
Jeanne de Graon deux fils et quatre filles : i*" Louis;
a° Jean; 3° Perrenelle; 4**Isabeau, alliée au seigneur
de Montigny-Griant ; 5" Jacqueline, femme de Jean
deLaTrémouille; 6° Marie. Les deux fils moururent
jeunes , ou du moins sans avoir été mariés.
Perrenelle d'Amboise, épousa, le i3 juin i^ii
Hardouin VIII , baron de Maillé , auquel elle apporta
en mariage la baronnie de Roche-Corbon , la vicomte
des ponts de Tours et la terre des Montils. Son fils,
Hardouin IX de Maillé, vendit cette dernière à
254 HISTOIRE DE TOURAlNE.
Louis XI, qui y bâtit son château du Plessis-les-
ïours dont elle prit le nom. Par l'une des clauses de
la vente , Roche-Corbon et les ponts de Tours furent
réunis à Maille , et depuis ce moment n'eurent pas
d'autres seigneurs que ceux de Maillé et de Luines,
auxquels nous renvoyons.
Il dépendait de la baronnie de Roche-Corbon trois
châtellenies et vingt-deux fiefs, au nombre de ceux-
ci était le château de Saint-George, dans la commune
de ce nom , distante de Roche-Corbon d'une demi-
lieue. Il était situé sur le penchant du coteau qui
domine et termine la vallée qui le partage , à quel-
ques toises de distance de la Loire. Ce château
ne joue aucun rôle dans notre histoire, et il n'en
existe plus de traces depuis long-temps, si ce n'est un
escalier Àe cent vingt-deux marches et cinq paliers,
taillé dans le roc , espèce de chemin couvert, con-
duisant sur le sommet du coteau , et dont l'issue
déguisée avec soin , d'ailleurs très-facile à défendre ,
permettait la sortie et la rentrée des troupes , ainsi
que l'introduction sans danger des approvisionnemens
du château.
ROCHE-POSAY (la), baronnie.
La Roche-Posay ( Rupes Pusiaca ) , nommée an-
ciennement la Roche de Pouzay, située sur la Gar-
tempe, à dix-neuf lieues sud de Tours, était du du-
ché de Tour aine pour le temporel , mais du diocèse
de Poitiers quant au spirituel , quoique sa cure fût
I
ROCHE-POSAY. 255
à la collation de l'archevêque de Tours. Sa position
entre deux coteaux élevés donne naissance à un
ruisseau qui disparaît pendant l'été , et a une source
d'eau minérale très-limpide et sans aucune saveur.
Ces eaux ont quelque réputation dans le pays , mais
en général , elles sont peu fréquentées.
Cette source ne fut découverte qu'en iS^S. Millon,
premier médecin du roi, en donna l'analyse dans
une brochure intitulée : Description des fontaines
médicinales de Roche-Posay ^ en Touralne; Paris,
1617, in-8.
Les barons de Preuilly sont les plus anciens sei-
gneurs de la Roche-Posay que nous offre notre his-
toire; peut-être en existait-il avant eux ; mais ce serait
en vain qu'on en chercherait quelques traces anté-
rieurement à Euffroy , qui vivait en 965. Trois
familles principalement ont composé la série des sei-
gneurs de la Roche-Posay. Ce sont celles de Preuilly,
de Chasteignier, et d'Isoré d'Hervaut. Nous ne ré-
péterons donc pas ici les détails que nous avons
déjà donnés sur les quinze premiers seigneurs de
Preuilly, qui l'étaient en même temps de la Roche-
Posay, Nous nous bornerons seulement à rappeler
leurs noms en cette dernière qualité.
Effroy ou Euffroy de Preuilly, seigneur de la Ro-
che-Posay, vivait en 965.
Geoffroy de Preuilly vivait encore en io3o.
Geoffroy de Preuilly , deuxième du nom , mort
en 1068.
Eschivard I*', 'vivait en i iio.
Q.56 HISTOIRE DE TOURAINE.
Pierre , son fils , dit Montrabel , premier du nom ,
était à la bataille de Se'ez, en 1 1 15.
Pierre , dit aussi Montrabel , deuxième du nom ,
assiégé par Henri II , en ii yS.
Eschivard II , assista^ en ii 80, aux funérailles de
Henri au Gourt-Mantel.
Geoffroy ITI, cité dans un titre de 12 18.
Eschivard III. On a de lui des lettres datées de
1256.
Geoffroy IV, fît hommage à Pierre de Brosse,
en 1274.
Eschivard IV, de laSi à i3i8.
Eschivard V, de i3i8 à i349.
Eschivard VI, mort en 1409, âgé de quatre-vingts
ans.
Gilles de Preuilly, tué en i^i^, eut pour fille
Marguerite , qui épousa Prégent Frottier.
Antoine de Preuilly , frère de Gilles, fut tué en
14^3, laissant Pierre et Louise de Preuilly.
Pierre de Preuilly , étant mort sans alliance , la
seigneurie de la Roche-Posay , passa à sa sœun Louise,
qui fut mariée à Geoffroy Chasteignier.
Geoffroy Chasteignier , devint baron de la Roche-
Posay , du chef de Louise de Preuilly, sa femme, de
laquelle il eut Guy Chasteignier.
Prégent Frottier était fils de Pierre Frottier, et de
Marguerite de Preuilly , dont nous avons parlé plus
haut. Mécontent sans doute de ce que la baronnie de
la Roche-Posay avait été distraite de celle de Preuilly,
et quelle était passée à Guy Chasteignier, du chef
ROCHK-POSA.T. I^J
diî Louise, alors veuve de Geoffroy Chasteignier, il
obtint de Louis XI, en 1471 > "°6 lettre de cachet,
en vertu de laquelle il se mit en possession du châ-
teau de la Roche-Posay , d'où il chassa violemment
sa grand'tante maternelle. Il y eut entre eux un
procès à ce sujet ; mais il se termina par une transac-
tion dont le résultat fut que la Roche-Posay demeura
dans la famille Chasteignier.
Guy Chasteignier , épousa , en 1 480 , Catherine du
Puy, dont il eut
Jean Chasteignier , premier du nom , baron de la
Roche-Posay , qui fut père de
Jean Chasteignier, deuxième du nom , baron de la
Roche-Posay.
Jean Chasteignier, troisième du nom, comparut à
Langeais, en iSSg, lors de sa seconde réformation
des coutumes de Touraine. Il avait épousé Claude de
Montléon, dont il eut Roch - François , qui suit, et
Jeanne , qui épousa , le 1 5 juillet 1 573 , Henri Clufîn.
Roch-François Chasteignier, baron de la Roche-
Posay , de Touffou , de Talmont , chevalier de Tordre
du roi, se distingua , en i555, dansla guerre d'Italie,
au siège de San-Balcgno , où il tailla en pièces les
six cents mousquetaires que commandait Emmanuel
de Luna , qui n'entra dans la place assiégée qu'avec
quatre-vingts de ses hommes , le reste ayant été tué
ou pris. Il avait épousé, le 27 septembre t566,
Louise de Laval.
Louis Chasteignier, seigneur d'Abain et de la
Roche-Posay, ambassadeur en Suisse, prit alliance
3. . ly
258 HISTOIRE DE TOUR AINE.
le i5 de janvier 1667, avec Claude Dupuy, dont ^
entre autres enfans , il eut Jean qui suit.
Jean Chasteignier , quatrième du nom , seigneur
de la Roche-Posay , lieutenant-gënéral au gouverne-
ment de la Haute et Basse Marche , eut pour femme
Diane , fille de Charles de Fonsèque , baron de Sur-
gère, dont il eut
Charles Chasteignier, baron d'Abain et de la
Roche-Posay, comte de Chinssé. Il avait épousé
Charlotte de Jousseran. Des enfans nés de ce mariage,
il ne resta qu'une fille , Marie - Gabrielle . qui , en
1662, épousa René Isoré d'Hervault.
René Isoré d'Hervault, troisième du nom, mar-
quis de Pleumartin , baron de la Roche-Posay, lieu-
tenant-général pour le roi , dans le Haut Poitou , et
ensuite dans la Touraine. Ce fut en sa faveur que la
terre de Pleumartin fut érigée en marquisat par
lettres patentes du mois de janvier i652. Depuis ce
temps , la terre de la Roche-Posay est constamment
restée dans la même famille.
Armand-Louis-François Isoré d'Hervault , marquis
de Pleumartin , fut , en 1790 , le dernier baron de la
Roche-Posay.
SACHE, BARONNIE.
La commune de Sache {Sacciacum)^ située sur
la rive gauche de l'Indre , dans le canton d'Azay-le-
Rideau , avait donné son nom à une ancienne famille,
dont la descendance nous est totalement inconnue.
SACHE. 269
Nous savons seulement qu'en 1260, le mardi après
l'octave de la Trinité, un Guillaume de Sache tran-
sigea avec le chapitre de l'église de Tours, et s'ohli-
gea de lui payer, conjointement avec le prieur de
Sache, quinze septiers de seigle pour les dîmes et
novales. Depuis ce temps , il s'écoule un assez long
espace sans que nous voyions aucun seigneur de Sache
reparaître sur la scène.
François Savary , seigneur de Sache et du Pont-
de-Ruan, épousa Marguerite, fille de N. Bérard, sei-
gneur de Bléré, dont il eut François qui suit, et
Jeanne , mariée à Louis d'Aloigny.
François Savary , deuxième du nom , seigneur de
Sache et du Pont-de-Ruan , eut une fille unique
nommée Renée, qui porta son héritage dans la
famille de Rouxelley.
François de Rouxelley, seigneur de La Treille en
Anjou, le devint de Sache et du Pont-de-Ruan, par
son mariage avec Renée Savary , d'où naquit
René de Rouxelley , soigneur de Sache , du Pont-
de-Ruan et de La Treille , chevalier des ordres du
roi. Il épousa Marguerite de Montmorenci-Bouteville,
dame de Roche-Millet et de Corbeil-le-Cerf , par con-
trat du 23 juin 1589. De ce mariage vinrent plu-
sieurs enfans, entre autres René qui suit, et une
fdle nommée Marguerite , comme sa mère ; elle voulut
se faire carmélite; mais ses parens s'y étant con-
stamment opposés, elle persista à vouloir en suivre
le règle au sein même de la maison paternelle , et-
mourut en 1628, victime des austérités qu'elle s'im-
'7-
^Qo HISTOIRE DE TOURAINE.
posait. Nous en parlons plus en détail dans le qua-
trième volume. On lui donna, après sa mort, la qua-
lification de Bienheureuse.
René de Rouxelley , deuxième du nom . fils du
précédent, seigneur de Sache , du Pont- de- Ruan
et de La Treille , eut entre autres enfans François
qui suit.
François de Rouxelley, deuxième du nom, sei-
gneur de Sache , du Pont-de-Ruan et de La Treille,
épousa Henriette - Antoinette , fille de Hyacinthe de
Quatreharbes , chevalier d'honneur de Madame ,
charge dont il obtint la survivance. Il mourut en
1692. On le nommait le marquis de Sache, quoique
cette terre n'eût que le titre de baronnie.
Au commencement du dix-huitième siècle, N. de
Villiers était propriétaire de la baronnie de Sache,
qui se composait alors des seigneuries de Sache, Vil-
laines , Thilouze , Pont-de-Ruan , Méré dans la com-
mune d'Artannes, et Vallesne dans celle de Sache.
Etant célibataire, il démembra sa baronnie en ven-
dant la terre de Villaine au seigneur d'Azay-le-Rideau,
celle de Thilouse à N , et le surplus , c'est-à-dire ,
Sache, Vallesne, Pont-de-Ruan et Méré à celui qui
suit.
N. Péan, chef d'escadre , après avoir été amputé
d'une jambe, obtint sa retraite, et se maria à la
dame veuve de Blois , avec laquelle il acquit ce qui
restait de la baronnie de Sache. Après sa mort, sa
veuve, qui avait eu une fille de son premier mariage,
la dota de la seigneurie de Méré , que celle-ci vendit
SA.INT-ANTOINE-DU-ROCHER. 'aGi
à la dame veuve Landriève. De son côte , la mère
vendit Sache, Vallesne et le Pont-de-Ruan à
Jean Butet, ancien négociant à Tours qui, lors de
l'assemblée de la noblesse, en 1789, prit encore la
qualité de seigneur de Sache. Depuis, cette propriété
à été partagée entre ses deux filles, mesdames de
Savary et de Margonne.
SAINT-ANTOINE-DU-ROCHER.
Saint-Antoine-du-Rocher n'est qu'un simple vil-
lage non titré , situé à environ trois lieues nord-ouest
de la ville de Tours. Nous n'en eussions pas fait men-
tion s'il ne se trouvait sur son territoire un monu-
ment celtique le plus grand et le mieux conservé de
ceux, en petit nombre, que renferme la province.
C'est un de ces édifices grossiers connus sous le nom
de dolmen ou dolmein , mot qui signifie en breton
tal?/e de pierre, et formé de taol , table , contracté
en dol , et de inen , pierre , au pluriel mein.
Trois pierres, dont deux debout et une placée
horizontalement au-dessus , composent assez ordinai-
ment ces dolmen que l'on considère comme des
autels druidiques. Celui-ci , connu dans le pays sous
le nom de grotte de fées , est formé de douze pierres,
savoir : deux à l'ouverture, i , 2; trois du côté gauche ,
3 , 4 y 5; une au fond , 6 ; trois du côté droit , 7,8,9;
et trois placées horizontalement au-dessus , 10, 11
et 1 2 . Les pierres numéros i et 2 sont rentrantes de cinq
pieds, de manière à former une espèce de vestibule; des
262 HISTOIRE DE TOL'IIAJNE.
trois pierres posées aplat, celle du milieu , numéro 10^
domine les deux autres d'environ deux pieds, et l'on
pourrait croire que c'était véritablement la table ou
l'autel , dans la supposition où ce monument eût été
destiné aux sacrifices. Ces trois pierres sont beau-
coup plus grossesque lesautres , qui toutes sont brutes
et du même grain que celles qui se trouvent dans le
voisinage. On serait volontiers tenté de croire que
le nombre trois, si respecté dans l'antiquité, a pré-
sidé à la distribution de ce dolmen. Il est à remar-
quer aussi que les trois pierres horizontales sont pla-
cées de manière que chacune d'elle ne porte que sur
trois pierres, savoir : le numéro 10 sur 5 , 6, 7 ; le
numéro 1 1 sur 4,5,7, et le numéro 12 sur 3, /j, 9 ;
et qu'ainsi il reste trois pierres i , 2,8, qui ne
portent rien : aussi le numéro 8 est-il un peu incliné.
On retrouve encore le nombre trois dans cette sorte
d'arrangement.
Ce monument est placé a mi-cote à environ cin-
quante toises de la petite rivière de la Choisdle. Sa
direction est du levant au couchant; ainsi, l'entrée
se trouve au levant, contrairement h l'usage observé
pour les temples du christianisme. A quelque dis-
tance de l'entrée on aperçoit une treizième pierre en-
terrée, dont on ne découvre que la surface; mais,
selon toute apparence, ce n'est qu'une prolongation
de la roche sur laquelle le monument est assis.
Sa longueur totale est de trente-quatre pieds sur
onze pieds de haut , et sa largeur est de neuf pieds
dans œuvre.Le bloc numéro 1 1 adix-huit pieds de long.
SAINT- A.NTOINE DU ROCHER. .i63
Le bloc numéro i o , qui forme le milieu de la
couverture, cubant environ quarante pieds, et la
pesanteur spécifique de cette sorte de pierre étant de
170 liv. par pied cube , il en résulte que son poids
doit être de 4o,8oo liv.
Le bloc numéro 1 1 cubant , à très-peu de chose
près , trois cents pieds , son poids doit être de
5 1,000 liv.
Enfin 5 le bloc numéro 1 1 , étant de cinq cents
pieds cubes , pèsera 85,ooo liv.
Total pour les trois pierres de la couverture ,
1 76,800 liv.
Nous avons dit qu'il se trouvait dans notre pro-
vince peu de monumens de cette espèce , et l'on
devrait même s'étonner qu'il y en existât encore
d'après les arrêts sévères qui les proscrivirent dès
les premiers siècles du christianisme. Nous voyons
en effet dans les Capitulai res un édit du roi Chil-
debert, publié en 554 , qui ordonne d'abattre les
statues et les monumens des dieux du paganisme,
portant en outre que quiconque ne rejetterait pas de
son champ les simulacres qui s'y trouvaient , et em-
pêcherait les prêtres de les détruire , serait consi-
déré comme sacrilège. Quelques années après , Chil-
péric renouvela cette ordonnance, et prescrivit de
même de détruire toutes les pierres qui couvraient les
champs xle la Gaule. Nous ne devons pas être sur-
pris maintenant si les monumens druidiques sont
devenus si rares dans un pays voisin des lieux où
les rois faisaient leur résidence, et où même ils fai-
264 HISTOIRE DE TOlTRAINE.
saient d'assez fréquens voyages. Peut-être les anciens
monumens que l'on rencontre encore n'ont-ils dû
leur conservation qu'aux bois épais dont les cam-
pagnes étaient alors couvertes, et surtout a rattache-
ment secret que les habitans portaient toujours au
culte de leurs aïeux , puisque nous avons vu , au
troisième livre de notre Histoire , que le vingt-et-
unième canon du concile de Nantes, en 658, en-
joignit aux évêques de faire abattre et brûler les
arbres que le peuple révérait encore.
En consacrant cet article au dolmen de Saint-
Antoine-du-Rocber, nous avons cru qu'il serait in-
utile de parler de quelques autres monumens de la
même nature, mais beaucoup moins considérables,
qui se trouvent disséminés sur quelques points de
notre territoire. Si l'on nous objectait qu'ils se ren-
contrent en très-grand nombre dans la Basse-Bre-
tagne, nous répondrions que l'Armorique, dans tout
le moyen âge, fut gouvernée par des princes particu-
liers , et n'était point soumise aux lois françaises.
SAINT-CHRISTOPHE, baronnie.
Saint - Christophe , ou Christophle , ainsi qu'on
écrivait autrefois , est un gros bourg , distant de
Tours de six lieues du coté du nord, sur le penchant
du coteau, dont le vallon est arrosé par le Gavot,
ruisseau qui tombe dans le Loir. C'était la première
baronnie de Touraine, et le Sergent bailliager de
la province : mais depuis l'érection de Châteaux en
SAINT-CHRISTOPHE. 265
duché pairie, sous le nom de La Vallière , avec l'u-
nion de la baronnie de Saint-Christophe, elle ne
reconnaissait plus le bailli de Touraine pour la jus-
tice, et ses appels allaient droit à Château -La
Vallière , et de là au parlement de Paris. 11 reste
encore à Saint-Christophe quelques traces du châ-
teau qui était sur la hauteur du côté de l'orient. On
voit sur les registres de la maison-de-ville de Tours,
de l'année il[i6y que les habitans de Tours étaient
fort incommodés par les courses de la garnison de
Saint-Christophe, et qu'ils furent obligés de recourir
à la reine de Sicile, duchesse de Touraine, pour
l'inviter à y faire mettre un terme. On pourrait pré-
sumer de là , que cette place était alors plus impor-
tante qu'elle ne l'est aujourd'hui.
Nous voyons dès le dixième siècle paraître sur la
scène des })arons de Saint-Christophe.
Hugues d'Aluys est le premier qui se présente.
C'était un des favoris et des plus zélés partisans de
Foulques-Nerra , il l'accompagna dans toutes ses
guerres , et le reçut dans son château lorsqu'il tra-
versait la Touraine pour aller d'Angers à Aniboise.
Il laissa deux enfans de Richilde , son épouse : Jean
et Hugues.
Jean d'Aluys, premier du nom, baron de Saint-
Christophe et de Châteaux, accompagna Foulques-le-
Jeune, comte d'Anjou , à la bataille de Séez, en
1 1 1 5 , avec Hugues, son frère , et seconda utilement
le seigneur d'Amboise dans la guerre qu'il eut contre
Geoffroy de Preuilly , comme nous l'avons dit précé-
266 HISTOIRE 1)K TOUR. UNE.
déminent. Il épousa une fille de Robert II , seigneur
de Semblançay , dont il eut Hugues qui suit.
Hugues d'Aluys, quatrième du nom, baron de
Saint-Christophe et de Châteaux , était un des plus
considérables barons du royaume. Il passa en Angle-
terre avec les troupes que le roi Louis-le-Jeune
envoyait au secours des fils de Henri II, révoltés
contre lui : mais l'armée conduite par Robert, comte
de Leicester , fut défaite en j 1^3 , et Hugues d'Aluys
fut comme lui fait prisonnier. Conduit au château de
Falaise , il en sortit bientôt moyennant une légère
rançon, S'étant croisé pour la Terre-Sainte , avant
que de partir, il restitua à l'église de Tours tout ce
qu'il avait pris injustement sur ses sujets. Il en donna
ses lettres sans date, du consentement de Guiburge
de Charocé , sa femme , et d'André , son fils unique.
André d'Aluys , baron de Saint-Christophe et de
Châteaux, épousa Elisabeth, fille de Sulpicell d'Am-
boise, qui mourut à la fleur de son âge, et fut en-
terrée dans l'abbaye de Ponl-le-Voy, laissant un fils
et une fille, Hugues et Agnès.
Hugues d'Aluys, cinquième du nom, baron de
Saint-Christophe et de Châteaux , succéda à son père.
Sa femme nous est inconnue. Il n'en eut qu'un
fils.
Jean d'Aluys , deuxième du nom , baron de
Saint-Christophe et de Châteaux , est nommé entre
les principaux seigneurs du royaume qui portaient
bannière, sous Philippe-Auguste, en 1214. En
laSg, il fit plusieurs donations à l'abbaye de la
SAIKT-CHRISTOPUE. 'iCj
Clarté-Dieu , où il eut sa sépulture à Tentrée des
galeries. Sur son tombeau , élevé de deux pieds, il
était représenté armé de sa cotte-d'armes, l'épée au
côté, et son écu sur le bras sans aucunes armoiries.
Il eut pour fils *
Hugues d'Aluys, sixième du nom , baron de Saint-
Cliristoplie et de Châteaux. Il ratifia les dons faits
par son père, en lîiSg, à l'abbaye de la Clarté-
Dieu, et lui-même lui abandonna toute la justice, au
mois de juillet 1248, du consentement d'Alix, sa
femme, et de ses quatre filles, Catlierine, Margue-
rite , Constance et Isabelle ; l'aînée mourut jeune. Les
deux autres furent dotées de cent livres de rente, et
la seconde lui succéda.
Marguerite d'Aluys , devenue unique héritière de
Hugues , fut mariée à Rotrou de Montfort , seigneur
de Semblançay , de Pernay et de la Motthe-de-Son-
zay, auquel elle porta en dot les baronnies de Saint-
Christophe et de Châteaux. Ils échangèrent, en laSy,
avec les religieux de la Clarté, le bourg que leur
avait donné Hugues IV, contre quelques terres, et
trente livres de rente sur le péage de Saint-Chris-
tophe; et, en 1267, ils payèrent la somme de trois
cents livres qu'ils devaient à l'abbaye de La Boissière,
pour l'exécution du testament de Hugues, leur aïeul
maternel. Jeanne fut le seul fruit de ce mariage.
Jeanne de Montfort , fdle de Rotrou et de Mar-
guerite d'Aluys, fut mariée, en 1276, à Guillaume
l'Archevêque , deuxième du nom , seigneui' de Par-
thenay, Mervant, Vouvent et Taillebourg, en h
*l6S HISTOIRE DE TOURAINE.
famille duquel elle porta les baronnies de Saint-
Christophe, Châteaux, Semblançay , Montfort, et
plusieurs autres belles terres et seigneuries. On tient
que cette famille descendait d'un archevêque de
Bordeaux qui quitta son archevêché pour se marier,
et qu'en raison de cela , les garçons prirent le nom
d'Archevêque, et les filles celui de Parthenay. Mais
ce récit ressemble fort à un conte fait à plaisir; car
cet archevêque avait sans doute un nom que ses en-
fans n'auraient pas répudié.
Notre Guillaume eut de Jeanne de Montfort
trois fils et trois filles, i" Hugues, seigneur de
Saint-Christophe; i° Jean qui continua la postérité;
3*" Guy, baron de Soubise et de Taillebourg; 4** Ma-
rie de Parthenay , femme de Girard Chabot; 5° Isa-
beau , dame d'Apremont, mariée en 12 56, à Jacques
d'Harcourt; 6** Létice , mariée en 12 83 , à Maurice
d'Harpedane , seigneur de Belleville.
Hugues Larchevêque , cinquième du nom , sei-
gneur de Parthenay, de Saint-Christophe, de Châ-
teaux et de Semblançay , épousa Isabeau de Nesle ,
dont il n'eut point d'enfans , de sorte que sa succes-
sion passa à son puîné.
Jean Larchevêque , seigneur de Parthenay, Saint-
Christophe , etc. , prit alliance avec Marie , fille de
Guichard V , comte de Beaujeu , dont il n'eut qu'un
fils.
Guillaume Larchevêque , seigneur de Parthenay ,
Saint-Christophe, Semblançay, Châteaux, les Ponts-
de-Tours, Secoudigny, Fontenay, Vouvant, Chas-
SAINT-CHRISTOPHE. l6c)
telaillon et Bczay, épousa, en i34o, Jeanne deMa-
thefelon , fille de Thibaut et de Béatrix de Dreux.
Il mourut le mardi 17 mai i4o7- Ses enfans furent
Jean qui suit, Jeanne de Parthenay , femme de Guil-
laume vicomte de Melun et de Tancarvillc , et
Marie , épouse de Louis de Cliallon , comte de
Tonnerre.
Jean Larchevê^ue, deuxième du nom , succéda à
son père aux baronnies de Saint-Christophe et de
Châteaux. 11 fut marié à Brunissant, vicomtesse de
JJmoges , dont il n'eut point d'enfans. Il suivit le
parti de Philippe-le-llardi, duc de Bourgogne,
contre le roi Charles VI, l'an i4j5. Il fut condamné
pour ce sujet , et ses biens confisqués à la couronne
furent donnés à Charles dauphin de France, duc de
Touraine , qui s'en dessaisit en faveur du comte de
Richemont, connétable de France. Mais il se vit
remis en grâce Tannée suivante , et fut rétabli dans
tous ses biens. Il était encore baron de Saint-Chris-
tophe en 1445.
Nous venons de dire, d'après les généalogistes,
que Jean Larchevêque n'avait point eu d'enfans. Ce-
pendant nous trouvons à Tours, en 14^7 > "^^ Guil-
laume Larchevêque qui ne pouvait être que son fils.
Il y a à ce sujet une anecdote qui mérite d'être rap-
portée. Maittaire, dans ses annales typographiques,
a cru que la ville de Tours avait été la première en
France où l'imprimerie avait été introduite dès
l'année 1^6'], se fondant pour cela sur la souscrip-
tion de l'ouvrage de Florius , de Amore Camilli et
110 HISTOIRE ïiE TOlIRAINfi.
jE milice, à la fin duquel on lit : Francisci Florii
Florentini liber félicite?^ exp Ictus est Turonis , et
éditas in domo dorn. Guillermi archiepiscopi ^
Turonensis ^ pridie kalendas januarii, anno Do-
mini 1467. Il est claii' qu'il s'agit ici de Guillaume
Larchevêque Tourangeau , et non de l'archevêque de
Tours qui était alors Gérard de Crussol. Quant au
mot editus , on a fort bien prouvé par plusieurs
exemples que libri editi ne signifie autre chose que
livres publiés, quoique manuscrits; et celui-ci ne
pouvait être autrement qu'écrit à la main , puisqu'il
n'y eut d'imprimerie en France que trois ans plus
tard.
Les baronnies de Saint-Christophe et de Châ-
teaux furent , comme nous l'avons dit, réunies pour
former le duché de La Vallière.
SAmT-MICHEL, baronnie.
Saint-Michel-sur-Loire est situé à une lieue au-
dessus de Langeais. C'est un bourg qui n'est consi-
dérable ni par son titre , ni par sa population ; cette
baronnie est cependant l'une des plus anciennes de
la province. Elle a été possédée , il y a plus de neuf
cents ans , par une famille qui n'avait point d'autre
nom, mais qui a fini par être fondue dans celle de
Marmande On ne doit pas confondre cette terre
avec celle de Saint-Michel-des-Bois , dans l'arrondis-
sement de Loches, qui n'était qu'une simple chatel-
lenie.
SAÏNTE-MAURÉ. U7I
Ëbbon est !e premier baron de Sainl-Micbel dont
nous ayons connaissance. Il signa les lettres que
Foulques-Rëcbin donna , le 3 des ides de mars 1073,
en faveur de labbaye de Marmoutier.
Depuis ce temps , les seigneurs de Saint-Michel
ne figurent que très-rarement dans l'histoire de la
province. Cependant nous trouvons, en 12 14, parmi
les chevaliers bannerets créés par Philippe- Auguste,
un seigneur de Saint-Michel qui n'est désigné par
aucun prénom , ainsi que quelques autres qui sont
venus après lui.
Yers iSgo, Marguerite, fille aînée de Jean III,
comte de Sancerre, et de Béatrix de Roucy , est
indiquée comme baronne de Marmande et de Saint-
Michel.
Dans les commencemens du seizième siècle, et
même sur la fin du quinzième, cette baronnie était
possédée par la famille d'Espinay.
En 1 507 , nous voyons assister à la première ré-
formation des coutumes de Touraine Jacques d'Es-
pinay , premier du nom ; et, en i oSg , un autre Jac-
ques d'Espinay comparaît également à la seconde
ré formation.
Il est probable que ce fut quelque temps après
que cette baronnie fut fondue dans celle de Mar-
mande.
SAINTE-MAURE, baronnie.
La ville de Sainte-Maure, située à neuf lieues de
O.'J'l IIISTOirxE DE ÏOURA.IJfE.
Tours , du coté du Poitou , doit son nom et son ori-
gine à une sainte du même nom , qui avait ëtë en-
terrée dans ce lieu avec sa sœur nommée Britte.
Grégoire de Tours rapporte qu'un des principaux
habitans du pays y bâtit une église qui fut consacrée
par saint Eufrone , évêque de Tours, en 570. La
dévotion y ayant attiré plusieurs personnes , il s'y
forma en peu de temps un bourg où Foulques-Nerra,
comte d'Anjou, profitant de sa situation élevée, fit
bâtir un cliâteau au commencement du onzième
siècle. Ce cliâteau a donné son nom à une famille
long-temps célèbre , mais dont l'existence connue ne
peut guère remonter qu'à la construction de ce châ-
teau, oïl, selon sa coutume, Foulques-Nerra aura mis
des gouverneurs qui en sont devenus propriétaires.
Geoffroy de Sainte-Maure, fils d'Amaury, était
seigneur de Sainte-Maure dès le commencement du
onzième siècle.
Gosselin, autrement Josselin, qu'on reconnaît pour
le chef de la famille de Sainte-Maure, fut surnommé
le Poitevin. C'était un des chevaliers les plus consi-
dérables de son temps , qui prit part aux actions les
plus célèbres de cette époque. On le voit présenta la
fondation de l'abbaye de Beaulieu , en 1012 , et en-
core en io4o , à celle de la Trinité de Vendôme. Il
eut plusieurs enfans de sa femme Aremburge, savoir:
Hugues qui lui succéda , Guillaume, Gosbert, Clerc,
et Geoffroy. Il est probable qu'il eut aussi une fille
du nom de Bélutia , qui fut mariée à Emery , dit
Payen , seigneur de Colombiers.
S.UNTt-MAURE. l'-J^
Hugues , premier du nom , chevalier , baron de
Sainte-Maure, eut plusieurs démêlés avec les princi-
paux seigneurs de Touraine, particulièrement avec
l'archevêque de Tours , et Tabbé de Marmoutier. Le
pape Grégoire VII, irrité de ses procédés, le somma
de comparaître au premier synode qu'il tiendrait à
Rome pour donner ses moyens de défense , le mena-
, çant des censures ecclésiastiques, s'il n'obéissait à ses
ordres. Nous ignorons s'il fut docile à l'injonction de
l'impérieux Hildebrand. Il fonda à Sainte-Maure,
vers l'an 1060, le prieuré de Saint-Même. Le titre
de cette fondation est remarquable en ce qu'il s'y
dit': par la grâce de Dieu, seigneur et propriétaire
à titre héréditaire du château de Sainte-Maure. Un
titre de donation faite à l'abbaye de Fontevraud ,
par Bélutia , sa sœur, et approuvée par lui, vient à
Tappui de ce que nous avons dit des enfans de Gos-
selin. Il épousa Adénorde , autrement Aénor ou Hon-
neur , fille de Berlay , premier seigneur de Montreuil
et d'Adelaïs de Saumur , dont il eut trois garçons et
une fille, Gosselin, Hugues, Geoffroy et Denise,
mariée à Gosbert , qui fit le voyage de la Terre-
Sainte.
Gosselin ou Josselin , deuxième du nom , baron
de Sainte-Maure, jouissait ainsi que ses frères d'une
grande réputation de bravoure et de puissance , for-
tifiée de l'appui de Foulqucs-Réciiin, qui les rendait
redoutables à leurs ennemis. Ils déclarèrent la guerre
à Hugues , premier seigneur d'Amboise , à l'instiga-
tion du comte qui cherchait l'occasion de se venger
3. j8
2^4 HISTOIRE DE TOUR AINE.
de la prise du château d'Amboise , dont Hugues s'ëfait
emparé. Ils prirent le prétexte de réclamer le par-
tage de leur aïeule, tante de Geoffroy-le-Bel. Après
la mort de Foulques-Réchin , ils s'attachèrent à
Foulques , son fils aîné , dit le Jeune , et le secon-
dèrent à la bataille de Séez, en iii5. Gosselin
épousa Cassinotte, dame de La Haye, dont il n'eut
point d'enfans. L'auteur du traité de la construction
d'Amboise, assure que les deux frères de Gosselin
furent massacrés par les soldats de la garnison de
La Haye, révoltés de leur cruauté.
Hugues , deuxième du nom , chevalier , était fils ,
ou de Hugues ou de Geoffroy, fils de Hugues I", et
d'Adenorde deBerlay, et succéda à son oncle Gos-
selin. Il eut un démêlé avec le chapitre de Saint-Martin
de Tours , au sujet des exactions et des mauvais traite-
mens qu'il avait exercés envers les habitans de Saint-
Epain, sujets de cette église. Il en fit satisfaction, en
Il 55, en présence de l'archevêque Engebaud , et du
consentement de ses deux fils Guillaume et Gosselin.
Les lettres portent que , par l'ordre de l'archevêque ,
ayant l'habit de pénitent, il alla nu-pieds depuis
l'archevêché jusqu'au tombeau de saint - Martin ,
tenant en main une poignée de verges , dont il se
donna plusieurs fois la discipline. Ces sortes de péni-
tences publiques étaient alors assez en usage à l'égard
des grands , et s'exécutaient avec beaucoup de sévé-
rité , par le soin des évêques qui , sous prétexte de
religion , voulaient s'acquérir une sorte de supré-
matie sur les grands seigneurs. La chronique de
SAINTE-MAURE. 275
Tours rapporte que lîugues II fut, avec Raoul de
Faye , un des principaux moteurs de la rébellion des
enfans de Henri II, roi d'Angleterre. L'an 1172, il
les accompagna dans cette guerre, et remit son châ-
teau entre leurs mains. Selon toute apparence, il
épousa la fille de Philippe, seigneur de Mongoger,
qui lui apporta cette terre en mariage. Il en eut
Guillaume, Gosselin et Josbert, doyen de l'église de
Tours , qui donna à son chapitre plusieurs maisons
dans le cloître que son père lui avait léguées avec la
terre de Charentilly.
Guillaume , premier du nom, seigneur de Sainte-
Maure , avait été présent, en i t55 , «\ la satisfaction
faite par son père à l'église de Saint-Marlin. On ne
sait pas le nom de sa femme, dont il n'eut qu'une
fille nommée Avoyse.
Guillaume , deuxième du nom , seigneur de Sainte-
Maure et de Pressigny , reçut en dot d'Avoyse , sa
femme , la baronnie de Sainte-Maure. Il fonda avec
elle, dans l'église de Tours, la chapelle de Saint-
Jacques, où leurs armes sont peintes sur les vitraux.
Leurs enfans furent i** Guillaume qui suit; 2** Jos-
bert, seigneur de Sainte-Maure, après son frère;
3" Hugues, doyen de Saint-Gatien , en 1 29.2-129,9;
4* Garcie; 5° Aremburge, femme de Renaud de Su-
blaines; 6" Pétronille; 7" Domite.
Guillaume , troisième du nom , seigneur de Sainte-
Maure et de Pressigny, laissa tout-à-fait le nom
de Pressigny pour prendre celui de Sainte-Maure.
Il promit au roi que Guillaume de Faye ne prendrait
18.
276 HISTOIRE DE TOURAINE.
les armes, ni contre lui, ni contre ses sujets, sous
peine de deux cents marcs d'argent, qu'il s'obligea
de payer en cas contraire. Il en donna acte au mois
de juillet iai8. C'était souvent par de pareilles pré-
cautions que le souverain était obligé de s'assurer de
la fidélité de ces grands seigneurs. Ou il ne fut pas
marié , ou il n'eut pas d'enfans.
Josbert , seigneur de Sainte-Maure et de Pressi-
gny, succéda au précédent , son frère aîné. Il ratifia , au
mois de janvier I2a8, la fondation de la chapelle de
Saint- Jacques dont nous avons parlé , et fut une des
cautions du roi saint Louis , pour son traité de paix
avec le comte de Foix, en 1229. Il épousa Agnès,
fille de Bouchard V, comte de Vendôme, dont
Guillaume , quatrième du nom, seigneur de Sainte-
Maure, de Pressigny, de la Croix-de-Bléré , le Plessis,
Nouâtre et Ghissay , fut présent en i25o, à une or-
donnance rendue au château de Saumur, par Gharles,
comte d'Anjou et de Provence, touchant le salaire
des avocats en cour laye. Il épousa Jeanne de Rançon,
dont il eut plusieurs enfans qui héritèrent en partie
de Geoffroy , seigneur de Rançon et de Taillebourg ,
mort sans postérité. Gette succession fut la source
d'un procès contre Hugues Larchevêque, qui fut jugé
par Alphonse de France , frère de saint Louis , le
vendredi i5 août 1269. Ses enfans furent Guil-
laume qui suit, et Pierre, seigneur de Mongoger,
père de Guillaume , chancelier de France.
Guillaume , cinquième du nom , seigneur de Sainte-
Maure , de Pressigny et de M^sillac , vivait en 1271.
SAINTE-MACRE. 277
Il n'eut qu'une fille, Isabeau, héritière universelle de
tous ses biens.
Isabeau de Sainte-Maure, dame de Sainte-Maure,
de Pressigny et de Marsillac, prit alliance avec
Amaury de Craon. Elle mourut le 16 décembre
i3io, et fut inbumée aux Cordeliers d'Angers , dans
la chapelle de Craon , ayant eu de son mari Maurice,
seigneur de Craon et de Sablé, et Guillaume, sur-
nommé le Grand , qui continua la postérité.
Guillaume de Craon, seigneur de Sainte-Maure,
de Pressigny et de La Ferté-Bernard , épousa Mar-
guerite de Flandre , vicomtesse de Cbâteaudun ,
fille puînée de Jean de Flandre , seigneur de Nesle ,
vicomte de Cbâteaudun. Il en eut sept enfans :
1° Guillaume qui suit; 2° Pierre , seigneur de Sablé,
qui assassina le connétable de Clisson , le 1 4 juin
iSgi. Ses biens furent confisqués, ses châteaux dé-
molis, et son hôtel converti en cimetière. On sait
que le connétable ne mourut pas de ses blessures.
3° Jean , seigneur de Montsoreau et de Nouâtre ;
4" Guy, seigneur de Sainte -Julitte en Touraine;
5° Marie , femme en premières noces de Marie d'An-
ton, et en secondes de Hervé, seigneur de Mauny ;
ô'^Béatrix , mariée à Renaud de Maulévrier; 7° Jeanne,
épouse de Pierre de Tourneminc, seigneur de la
Hunaudaye.
Guillaume II de Craon , vicomte de Cbâteaudun,
seigneur de Sainte-Maure , de Pressigny , Maulé-
vrier , etc. , chambellan du roi Charles VII , épousa
Jeanne do Montbazon, dont nous avons déjà indiqué
27 B HISTOIRE DE TOUR AINE.
la descendance à larticle des seigneurs de Montbazon.
Cette baronnie fut unie à Montbazon , par lettres
d'érection en duché, du mois de mai i588. Sa jus-
tice, exercée par un sénéchal, un procureur de cour
et un greffier , comprenait trois paroisses qui en rele-
vaient en première instance , et deux autres en appel.
Le corps de ville était composé d'un maire, un éche-
vin , un conseiller , un greffier et un receveur. Il y
avait grenier à sel , contrôle et maréchaussée.
L'hôpital, qui n'avait été établi qu'en i75o, était
desservi par des religieuses de la Providence. L'église
paroissiale n'avait rien de remarquable. Les ducs de
Montbazon l'avaient choisie pour le lieu de leur
sépulture. On voyait précédemment un tombeau en
pierre dure du pays sur lequel étaient sculptées trois
figures en marbre blanc, ayant chacune la tête ap-
puyée sur un carreau de marbre pareil. Celle du
milieu représentait une femme; les deux autres aussi
de grandeur naturelle étaient celles de deux hommes
revêtus de leurs habits de cour , et décorés du cor-
don de Saint-Michel. On lisait sur une des faces du
tombeau :
« Cy gist messire Loys de Rohan, en son vivant
« conseiller , chamberlandu Roy, nostre sire, seigneur
a de Montbazon , Sainte-Maure et Nouastre , lequel
a décéda le vingt-neuvième jour d'aoust, l'an de
u grâce 1498. Priez Dieu pour son ame. »
Ce tombeau était celui de Louis de Rohan , qua-
trième du nom, auquel son épouse Renée Dufou
apporta la terre de Montbazon en mariage. Dans
SAINTE-MAURE. 1']^
l epitaphe , les deux femmes n'étaient pas nommées ;
mais il est probable que l'une était cette Renée Du-
fou , épouse de Louis , et l'autre Louise de Rieux , sa
mère.
Dans la chapelle à gauche , près celle de Notre-
Dame-des-Vertus , on lisait les vers suivans , gravés
sur une table de marbre noir, adossée au mur et
surmontée d'un cœur doré.
Ici repose un cœur où nul vice du monde
Ne sçut oncq acquérir la force de germer ,
Non plus qu'on dit qu'en Crète, isle riche et féconde,
Rien qui soit venimeux ne sçauroit se former.
Les plus rares vertus dont on prise l'exemple
Logeaient dedans ce cœur en un corps jeune et beau :
Mais ainsi que vivant il leur servoit de temple,
Maintenant qu'il est mort il leur sert de tombeau ;
Car alors qu'il mourut, aussi moururent-elles,
Et dans lui pour jamais s'enterrèrent en deuil,
Ne pouvant vivre ailleurs en ces plaines mortelles,
Et ne se voulant pas choisir d'autre cercueil.
Non, je faux : les vertus d'une ame si parfaite
N'ont point senti le coup que donne le trépas;
Ains vivent d'une vie à la mort non sujette.
Et la font elle-mesme encor vivre ici-bas.
Pour le moins leur mémoire incessamment vivante
La maintient immortelle au cœur de son époux ,
A qui, bien que la perte en soit triste et cuisante,
Le nom ne laisse pas d'en estre cher et doux.
Aussi , portant en l'ame une juste tristesse
De voir que cette tombe enferme tout son bien ,
Il donne ses soupirs au regret qui le blesse ,
Et grave sur ce cœur les paroles du sien ;
Paroles qui font voir que rien ne le contente ;
Sinon le souvenir de leurs aimables feux ,
Et que dedans le vase où, trompant son attente,
La mort n'a mis qu'un cœur , l'amour en loge deux.
280 HISTOIRE DE TOUR AINE.
On lisait sur un marbre placé au-dessous : «Haulle
« et puissante dame Magdelaine de Lénoncourt, femme
a de hault et puissant seigneur messire Hercule de
(( Rohan , duc de Montbazon , pair et grand-veneur
« de France , lieutenant-général au gouvernement de
ce Bretagne, laquelle décéda en sa maison de Coupuray
« en-Brie, le 28 août i6o3. »
SEMBLANÇAY, barownie.
Le château de Semblançay {Semhlancœuin) ^ situé
à quatre lieues nord de la ville de Tours , n'était pas
moins considérable par son ancienneté que par sa
position au milieu d'un étang rempli d'eaux vives ,
que sa largeur et sa profondeur rendaient autrefois
impraticable ; de même que par là le château deve-
nait en quelque façon inaccessible. La chronique de
Tours nous apprend qu'un seigneur du lieu, en 888,
accompagna Ingelger lorsqu'il rapporta d'Auxerre
le corps de saint Martin , et que les chanoines , vou-
lant reconnaître ce service , lui donnèrent l'église et
le bourg de Semblançay avec les vinages d'outre-
Loire. Le même auteur nous dit encore que Foul«
ques-Nerra , s'en étant rendu maître , y fit bâtir et
fortifier cet ancien château, dont il ne reste plus
rien maintenant.
Semblançay et la Roche-Posay étaient les deux
seuls endroits de la province où se trouvassent des
eaux minérales : mais ni les unes ni les autres n'ont
encore pu acquérir aucune célébrité.
SK M blanc: A Y. -281
Pendant l'espace de deux siècles, c'est-à-dire
depuis l'expédition d'Ingclger jusque vers Tan 1060,
nous ne connaissons aucun de ceux qui ont possédé
Semblançay.
Alleaume, chevalier, est le premier qui soit men-
tionné dans les anciens titres. On y voit qu'en 1064
il donna le bourg et Tégli'je de Semblançay à l'abbaye
de Marmoutier , du consentement de Rostalde ou
Rohaide , sa femme , en présence de Robert de
Langeais, son frère. 11 mourut en io83.
Robert , premier du nom , succéda à son père
dans la seigneurie de Semblançay. Il se désista, en
1091 , des prétentions qu'il pouvait avoir sur un clos
de vigne qui avait appartenu à l'abbaye de Mar-
moutier du temps de son abbé Bernard , c'est-à-dire
sept à huit ans seulement auparavant. Il vivait en-
core fort vieux, en iio5, temps auquel il se fit
moine à Marmoutier, du consentement de sa femme
Ammeline , dont il avait eu deux enfans : Alleaurae
qui suit, et Robert de Semblançay, moine dans la
même abbaye , vers i i4o ou ï 1 5o.
Alleaume , deuxième du nom , chevalier , seigneur
de Semblançay, assistait Foulques-le-Jeune , en i j 1 5,
à la bataille de Séez ou d'Alençon. Sa femme Bos-
chère le fit père de deux enfans, Robert et Philippe.
Nous voyons ce dernier témoin dans un acte de
Ikigues d'Aluys , seigneur de Saint-Christophe , en
1174.
Robert , deuxième du nom , seigneur de Semblan-
282 HISTOIRE DE TOUR AINE.
çay , fut un des chevaliers qui accompagnèrent Geof-
froy-Ie-Bel , comte d'Anjou , dans la ville de Rouen ,
en II 28, lorsqu'il alla épouser Mathilde, fille de
Henri P', roi d'Angleterre et duc de Normandie. Il
eut deux enfans , Guillaume et N. qui épousa
Hugues ni d'Aluys , baron de Saint-Christophe.
Guillaume, premier du nom, seigneur de Sem-
blançay et de la Carte , prétendit à une indemnité
des dîmes des Ruaux , dans la paroisse de Balan , qui
avaient été données à l'Hôtel- Dieu de Tours, par
Renaud , seigneur de La Haye , et par Hamelin , son
fils : mais il s'en désista depuis en faveur des pauvres ,
par un titre daté de 11 5g. Il n'eut qu'une fille nommée
Edeline.
Edeline ou Asceline , dame de Semblançay , fut
mariée deux fois ; la première à Guillaume Hostile
qui était bailli du Maine. Il fut un des principaux
officiers de Henri II , et l'un de ceux à qui ce mo-
narque adressa ses lettres pour la fondation de la
Chartreuse du Liget; il y est nommé immédiatement
après le sénéchal d'Anjou. Il fit aussi plusieurs dons
à l'Hôtel-Dieu de Tours, en ratifiant ceux que Ro-
bert et Guillaume lui avaient faits précédemment.
Il mourut sans enfans, et sa veuve se remaria à Robert
de Perrenay , aujourd'hui Pernay. De ce second ma-
riage sortirent Robert , Gautier et Geoffroy. Gautier,
chevalier et seigneur de la Motthe- Sonzay donna ,
en 1228, à l'église de Tours ce qui lui était dû
pour les dîmes de Sonzay. Quant à Geoffroy , il fut
SEMBLANCAY. 283
chanoine de la même église , et fît son testament en
1253, ce qui doit être à peu près l'époque de sa
mort.
Robert de Perrenay, deuxième du nom, seigneur
de Semblançay , assista, en J2i4, à la convocation
du ban et de Tarrière-ban de France, et accorda au
prieur de Semblançay le droit de moyenne justice ,
ainsi que plusieurs autres droits. De son alliance
avec Persois vinrent deux filles, Isabelle et N. de
Perrenay , femme de Guy Turpin.
Isabelle de Perrenay , dame de Semblançay , fille
aînée du précédent, fut mariée deux fois; la pre-
mière à Rotrou de Montfort , premier du nom , dont
elle était déjà veuve en 1 200 ; en secondes noces ,
elle épousa Herbert Turpin , frère de Guy, qui avait
épousé sa sœur puînée. Cet Herbert, en I223, pre-
nait le titre de seigneur de Semblançay. Du premier
lit seulement vinrent Geoffroy et Rotrou de Mont-
fort qui suivent.
Geoffroy de Montfort, seigneur de Semblançay.
On ne sait s'il fut marié : mais n'ayant point laissé
d'enfans , sa succession passa à son frère.
Rotrou de Montfort , seigneur de Monfort et de
Semblançay , s'allia avec Marguerite d'Aluys , fille de
Hugues, seigneur de Châteaux et de Saint-Chris-
tophe , dont elle eut Jeanne , fille unique.
, Jeanne de Montfort épousa Guillaume Larche-
vêque, seigneur de Parthenay, Mer vaut. Vouant et
Taillebourg, auquel elle porta en mariage les baron-
nies de Semblançay, Montfort, Châteaux et Saint-
V'
284 HISTOIRE DE TOUR AINE.
Christophe. D'après un titre de l'abbaye de Mar-
moutier, tous les deux vivaient encore en 1291. De
ce mariage sortirent trois fils : Hugues et Jean, suc-
cessivement barons de Semblançay, et Guy, baron
de Soubise.
Hugues Larchevêque , seigneur de Semblançay et
de Montfort, etc., prit alliance avec Isabeau, fille
de Raoul de Clermont , seigneur de Nesle , conné-
table deFrance , laquelle, après la mort de son mari ,
prit le titre de dame de Semblançay , dont elle n'é-
tait que douairière, mais dont les dispositions entre-
vifs avaient été approuvées par lettres patentes du
roi Louis-Hutin, du i" décembre i3i4. Elle signa
en cette qualité le contrat de mariage d'Alix de
Flandre, sa petite-nièce, avec Jean de Luxembourg,
au mois de juillet , et donna en même temps à l'ab-
baye de Marmoutier huit livres de rente, sept
sommes de vins et deux muids de froment , à la me-
sure des Ponts-de-Tours. Elle mourut en 1334, sans
enfans , et eut sa sépulture au milieu du chœur de
l'église des Cordeliers.
Jean Larchevêque , frère de Hugues , hérita de lui
la seigneurie de Semblançay , dont il était en posses-
sion dès l'année i348; car nous voyons qu'en cette
même année il fit faire le procès au prieur de Sem-
blançay, au sujet de quelques crimes qu'il avait
commis. Il n'eut qu'un fils, du nom de Guillaume.
Guillaume Larchevêque, troisième du nom, sei-
gneur de Semblançay , de Parthenay , de Saint-Chris-
tophe, de Bézay et des Ponts-de-Tours, épousa
SEMELANÇAY. 285
Jeanne de Matliefeion , dont il eut Jean , qui fut sei-
gneur de Parthenay et de Saint-Christophe ; Jeanne
qui suit , et Marie, aUiée , en iSyo, avec Louis de
Ghallon , comte de Tonnerre et de Saint-Aignan.
Jeanne de Parthenay fut dotée par son père et par
Jean , son frère , de la seigneurie de Semblançav.
Elle épousa Guillaume , vicomte de Melun , comte
de Tancarville. De ce mariage sortit Marguerite.
Marguerite de Melun épousa Jacques d'Harcourt,
seigneur de Montgommery, auquel elle porta en dot
la seigneurie de Semblançay. Elle n'eut également
qu'une fille unique.
Marie d'Harcourt fit de même passer la barounic
de Semblançay dans une nouvelle famille , par son
mariage avec Jean de Beaumont , mariage d'où ne
sortit qu'une fille.
Marie de Beaumont , fut mariée à Guillaume Gha-
maillard, chevalier, seigneur d'Anthenaise , auquel
elle porta la vicomte de Beaumont , et les seigneuries
de Semblançay et des Ponts-de-Tours , comme seule
héritière de Louis , vicomte de Beaumont, son oncle
maternel. Ils eurent pour enfans Simon , mort sans
postérité , et Marie qui suit.
Marie Ghamaillard , fut mariée le 20 octobre 1371
à Pierre II , comte d'Alençon et du Perche, surnommé
le Noble , qui , par ce mariage, reçut les seigneuries
de Semblançay et des Ponts-de-Tours, dont il rendit
hommage le 10 février iSqS, en déclarant qu'il les
tenait à cause de sa très-chère et amée compagne,
comtesse et vicomtesse. H mourut le 20 septembre
286 HISTOIRE DE TOURiUNE.
i4o4, et sa femme le 18 novembre 1/425 , ayant eu
six enfans , Pierre, qui mourut jeune, Jean qui con-
tinua la postérité , et quatre filles.
Jean , premier du nom, duc d'Alençon, comte du
Perche et vicomte de Beaumont , fut seigneur des
Ponts-de-Tours et de Semblançay. Gilles Bry s'est
trompé en disant dans son histoire du Perche que
Jean avait acheté la terre de Semblançay , puisqu'il
est évident qu'il la tenait du chef de sa mère. Il fut
tué à la bataille d'Azincourt , en i4i5, ayant eu de
son mariage avec Marie de Bretagne deux fils et
trois filles.
Jean II, duc d'Alençon, pair de France, comte du
Perche , seigneur de Semblançay et des Ponts-de-
Tours, fils aîné de Jean P% fut convaincu d'intelli-
gence avec les Anglais , condamné à mort au châ-
teau de Vendôme, le 10 octobre i458 , et toutes ses
terres confisquées au profit du roi. L'arrêt porte que
le roi a retenu et retient à lui le châtel et châtellenie,
terre et seigneurie de Semblançay, en Touraine, en-
semble les péages que ledit d'Alençon prenait en la
ville et châtellenie de Tours.
Antoine d'Aubusson, seigneur de Monteil, cham-
bellan du roi, bailli de Touraine, jouit pendant
quelque temps de la seigneurie de Semblançay , que
le roi Charles VII lui donna par lettres du 20 no-
vembre i458. Louis XI, parvenu à la couronne,
par lettres données à Tours, le 10 octobre i46i,
rendit la liberté au duc d'Alençon , et le rétablit dans
tous ses biens : mais , étant retombé dans son pre-
SEMBLANÇAY. 287
mier crime, il fut de nouveau arrêté , condamné à
mort le i4 juillet i474 > ^t ses biens furent confis-
qués à la couronne. Il mourut depuis, à Paris, de sa
mort naturelle, laissant de Marie d'Armagnac, sa
seconde femme , René, et Catherine , femme de Fran-
çois, appelé communément Guy, comte de Laval.
René , duc d'Alençon , comte du Perche , etc. ,
fut remis en possession de tous les biens de son père.
Le roi lui avait donné, par provision , les revenus du
comté du Perche, avec les seigneuries de Semblan-
çay , des Ponts - de - Tours , et de quelques autres
terres ; mais , ayant été calomnié auprès du roi , il
fut arrêté , enfermé au château de Chinon , et con-
damné par une commission, le 11 mars \[\%'i.
Louis XI étant mort l'année suivante, il fut reconnu
et déclaré innocent. Il vécut encore jusqu'au i" no-
vembre 1492 t laissant un fils et deux filles : Charles
qui suit; Françoise, femme de François II d'Orléans,
duc de Longueville, puis de Charles de Bourbon,
duc de Vendôme ; et Anne , mariée à Guillaume
Paléologue , marquis de Montferrat.
Charles , dernier duc d'Alençon , etc. , seigneur de
Semblançay et des Ponts-de-Tours, relira, le 3o avril
i5i6, la seigneurie de Baugé, avec quelques autres
terres et châteaux , que François I" avait engagés à
Louis de Rohan , seigneur de Montbazon , auquel il
donna en échange Semblançay et les Ponts-de-Tours.
Louis de Rohan , cinquième du nom ^ seigneur de
Guémené , Montbazon, Sainte-Maure , vendit la même
année, par acte du 21 octobre i5i6, les seigneuries
a 88 HISTOIRE DE TOURAINE.
de Neuvy , de Semblancay , et des Ponts-de-Tours ,
à Jacques de Beaune , surintendant des finances ,
qui depuis ne fut connu que sous le nom de Sem-
blançay.
Jacques de Beaune, chevalier, fils aîné de Jean
de Beaune , argentier de Charles VIII , alors Dau-
phin de France , baron de Semblançay , vicomte de
Tours , seigneur de Neuvy , de la Carte , près Balan ,
et de Bezay , chambellan du roi François V^ , surin-
tendant des finances , bailli et gouverneur de Tou-
raine, épousa Jeanne Rusé, dont il eut trois fils et
deux filles : i° Guillaume, qui continua la postérité;
2° Jacques, évêque de Vannes; 3° Martin, arche-
vêque de Tours ; Marie , femme de Raoul Huraut II
de Chiverny , général de France ; et Anne , épouse
de René Duchesnel , bailli et gouverneur de Touraine ,
de i5ioà i5i2. On connaît sa catastrophe, dont on
trouvera les détails à son article dans notre qua-
trième volume.
Guillaume de Beaune , baron de Semblançay , vi-
comte de Tours, etc., général des finances en la
généralité de Languedoc , fut pourvu , en survivance
de son père , de la charge de gouverneur de Tou-
raine, le 22 décembre i522. Il épousa Bonne Cote-
reau , dame de Vauperreux et de Maintenon , dont il
eut : i" Jacques qui suit; 2** Jean, seigneur de la
tour d'Argy et de Vauperreux, premier maître-d'hô-
tel de Catherine de Médicis; 3" Martin, évêque du
Puy ; 4** Renaud , archevêque de Bourges ; 5** Claude ,
femme en premières noces de Louis Burgensis , sei-
SEMBLANÇAY. 289
gneur de Mongoger et premier médecin du roi, et
en secondes noces de Claude Gouffîer , duc de Roan-
nais; et Bonne , morte en bas âge.
Jacques de Beaune , deuxième du nom , chevalier ,
baron de Semblançay , vicomte de Tours, seigneur
delà Carte , de Neuvy, ambassadeur en Suisse , épousa
Gabrielle de Sade, dont il eut i*" Jean; 2" Claude,
3° Marie j toutes deux mortes au berceau; 4" Char-
lotte qui succéda à Jean.
Jean de Beaune, baron de Semblançay, etc.,
favori du duc d'Alençon , frère du roi Henri III ,
mourut sans avoir été marié.
Charlotte de Beaune fut héritière de tous les
biens de son frère. Elle eut la réputation d'être la
plus belle femme de son temps. Elle fut mariée deux
fois; la première avec Simon de Fizes, seigneur de
Saumur et secrétaire d'état ; la seconde avec François
de la Trémouille , marquis de Noirmoutier. De ce
dernier mariage vinrent deux fils, Louis qui suit, et
François.
Louis de la Trémouille , premier du nom , marquis
de Noirmoutier, baron de Semblançay , vicomte de
Tours, etc. , épousa Lucrèce , fille de Vincent Rahier,
trésorier de l'épargne , dont il eut
Louis de la Trémouille , deuxième du nom , duc
de Montmirail, marquis de Noirmoutier, etc.; il
vendit, en 1648, la baronnie de Semblançay et la
vicomte de Tours , avec la terre de Neuvy, à N. Mal-
lier, sieur du Housset, qui la revendit a
Louis - Charles d'Albert, duc de Luines, grand-
* 3. 19
I
aQO HISTOIRE DE TOURAINE.
fauconnier de France. On peut voir la suite de la
descendance à l'article de Luines.
SENNEVÏERES, baronnie.
Sennevières est situé à deux lieues est-sud-est de
Loches, à Tentrée de la forêt, et à douze lieues sud-
sud-est de la ville de Tours. Hadrien de Valois , dans
sa Notice des Gaules, croit que son nom latin de
Sinapariœ lui vient de ce qu'il croissait beaucoup
de sénevé dans ses environs. Quoi qu'il en soit , ce
bourg peut être mis au rang des plus anciens de la
province. Ce fut en ce lieu que saint Ours fit bâtir
un monastère au commencement du cinquième siècle.
Plusieurs personnes attirées par sa piété et par son
exemple , se rangèrent sous sa discipline. Saint-Leu-
baste ayant succédé à saint Ours, ce monastère se
rendit célèbre jusqu'au temps oii il fut tellement
ruiné par les guerres, qu'il n'en resta plus aucun
vestige. On tient même que l'église , mise sous l'in-
vocation de saint Leubaste, qu'on nomme mainte-
nant saint Libesse , ne fut bâtie que long-temps après
la mort de saint Ours.
Les barons de Sennevières y avaient une justice
exercée par un bailli , un procureur fiscal et un gref-
fier. Le bourg ni le château n'offraient rien de remar-
quable.
Malgré l'ancienneté de Sennevières , ses seigneurs
ainsi que ceux de beaucoup d'autres lieux ne remou-
SENNEVIERES. -29 1
tent pas, du moins à notre connaissance, au-delà dtr
onzième siècle.
Renaud de Sennevièrcs fut un des seigneurs do
Touraine qui se croisèrent en 1 146. On présume que
celui qui vient après fut sou fils.
Renaud II de Sennevières fut témoin à une dona-
tion faite en faveur de l'abbaye de Villeloin, par
Henri II, roi d'Angleterre et comte de Touraine,
Tan 1178. Il est probable que ce Renaud eut une
fille qui porta la seigneurie de Sennevières dans la
famille Péan , ou plutôt Payen , alors fort considé-
rable en Touraine.
Geoffroy Payen, surnommé le Chien, seigneur de
Sennevières et de Boussay , était frère de Barthélemi
Payen , l'un des chevaliers banneiets de la Touraine
en 12 14.
Jean Payen, seigneur de Sennevières, eut d'une
femme inconnue une fille nommée Jeanne , qui fut
mariée à Nicolas de Menou , deuxième du nom , com-
munément nommé Colas.
Nicolas de Menou, seigneur de Boussay, le fut
aussi de Sennevières , du chef de sa femme Jeanne
Péan , qui lui apporta cette terre en mariage. Jeanne
étant morte , il se remaria avec Marguerite de Cler-
mont. Il eut du premier lit, Amaury qui suit; Jean,
seigneur de Boussay, Perrinet, Admains et Alix,
mariée à Véron-le-Vert , mais morte sans postérité ,
ainsi que son frère Perrinet.
Jean de Menou, chevalier, seigneur de Senne-
vières, de Boussay , Dumée et de Cougny, capitaine
^9-
292 HISTOIRE DE TOUR.A.INE.
de cinquante hommes d'armes des ordonnances du
roi. Il fut fait prisonnier à la bataille de Poitiers, et
conduit en Angleterre où il resta cinq ans, jusqu'à
son échange. De retour en France , il épousa en
1 369 Agnès de Galardon , qui le fit père de quatre
enfans. Jean mort sans postérité, Perrinet, seigneur
de Boussay , amiral de France ; Collinet , qui a fait
la branche des seigneurs Dumée , et Isabelle qui suit.
Jean fit partage à ses enfans en i4oi, et vivait
encore en 1^02.
Isabelle de Menou fut apanagée de la seigneurie
de Sennevières, qu'elle porta dans la maison de
Tranche-Lion , par son mariage avec Guillaume de
Tranche-Lion , chevalier, seigneur de Marteau , puis
de Palluau , auquel Geoffroy de Fougères rendit par
aveu la moitié de la grande dîme de Bridoré , l'an
1419, à cause de sa seigneurie de Sennevières. Ses
enfans furent Jean de Tranche-Lion, seigneur de
Palluau, et Jeannet qui suit.
La famille de Menou , l'une des plus anciennes de
la province, s'est maintenue jusqu'à nous en Touraine,
dans les branches de Boussay et Dumée, ainsi qu'en
Nivernois et Auxerrois , par la branche de Charnisay
et du Chiron.
Jeannet de Tranche-Lion, seigneur de Sennevières ,
puîné de Jean , qui eut en partage la baronnie do
Palluau , épousa N. de Chévrières de la maison de
Pody. De ce mariage sortit un fils unique.
Antoine de Tranche-Lion , seigneur de Senne-
vières. Le chapitre de l'église de Tours lui rendit
SENNEVIÈRES. 298
aveu pour la Tour Ysoré, en iS/jS. Il n'eut qu'un
fils de son mariage avec Antoinette de Siry.
Gabriel de Tranche-Lion, chevalier, seigneur de
Senncvièrcs, gentilhomme; ordinaire de la chambre
du roi Henri III. Il épousa Renée, fille de René de
Marray, seigneur de la Roche-Chargé, auprès d'Arn-
boise , dont il eut Charles qui continua la postérité;
François , Antoinette , mariée à Charles Guénant ,
seigneur du Breuil Guénant, et N. de Tranche-Lion,
épouse d'Émery Dupuy , seigneur de la Roche-Pelo-
quin.
Charles de Tranche-Lion , seigneur de Rochefort,
gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, gou-
verneur de Châtillon-sur-Indre. Ce fut en sa faveur
que Louis XIII érigea en baronnie la terre de Scn-
nevières. Il épousa en 1098 Jeanne, fille d'Honorat
Ysoré, baron d'Hervaut, seigneur de Pleumartin, de
Coiron et du grand Bossay. Sa mère était Marguerite
Babou. De ce mariage vinrent plusieurs enfans, entre
autres René, seigneur de Bussy en Bourbonnais;
Charles, destiné à l'église, et Charlotte. La seigneu-
rie de Sennevières, ayant été saisie sur eux, fut ven-
due par décret à
Bertrand de Grateloup, écuycr, sieur Dufay , ca-
pitaine au régiment de Piémont et sous-lieutenant du
duc d'Épernon à Metz. Il épousa N. dont, entre
autres enfans, il eut celui qui suit.
Gabriel de Grateloup, chevalier, baron de Senne-
vières , lieutenant-général pour le roi , et gouverneur
des ville et château de Loches.
!294 HISTOIRE DE TOURAINE.
TOURS, VILLE, VICOMTE.
Tours est une de ces anciennes villes gauloises
dont on chercherait en vain l'origine, et dont le nom
primitif n'est pas venu jusqu'à nous. César, qui parle
en plusieurs endroits des peuples appelés Turones,
ne nomme point leur ville capitale, non plus que
beaucoup d'autres, et la désigne toujours sous le nom
de cité des Turones. Le géographe Ptolémée nous
apprend que sous l'empereur Hadrien Tours se nom-
mait Cœsarodunum , ce qui prouverait , selon Sca-
liger, que dunum ou dun^ vieux mot celtique,
signifie ville ou fort, aussi bien que montagne ou
lieu élevé, puisque Tours est situé dans un vallon.
C'est probablement cette terminaison en dunum qui
a fait croire à quelques-uns que le Tours des Gaulois
existait ou sur les hauteurs de Saint-Symphorien ou
même sur celles de Luines, et qu'il n'a été transporté
sur son assiette acluelle que du temps de César; mais
ils n'ont pas réfléchi, d'après leur système étymolo-
gique , que s'il en eût été ainsi , on n'eût pas alors
terminé en dunum le nom d'une ville bâtie en plat
pays. Ce fut seulement vers le quatrième siècle qu'on
commença à donner aux cités le nom de leurs
peuples; ce qui arriva surtout lorsque les Francs
eurent chassé les Romains de la Gaule.
Les étymologistes trouvent l'origine du nom de
Tours dans le mot celtique Tur , et en construction
TOURS. 2^5
Turon , qui tourne , qui change , ce qui , selon eux ,
aurait fait dire à Lucaiu , liv. I", vers 436:
Nec uUra
Instabiles Turones circumsita castra coercent.
Mais il est bien reconnu que ces vers et les trois
suivans ne sont point de l'auteur de la Pharsale, et
qu'ils ont été interpoles dans son poëme où on a soin
de les mettre en italiques pour indiquer la supposition.
Les villes des Gaulois étaient en ge'neral peu consi-
dérables. Ce n'étaient que des espèces de boiu^gades,
à l'exception des cités ou capitales des différens
peuples, qui étaient défendues par des bastions et des
murs faits de poutres entrelacées de pierres et de
terre délayée en guise de mortier, ce qui pouvait leur
suffire entre Gaulois, mais non contre des troupes
munies de machines de guerre dont ils ignoraient
l'usage. Tours devait être ainsi construit dans le prin-
cipe en sa qualité de capitale. Il fallait cependant
qu'il l'emportât sur la plupart des autres villes, si
nous en croyons le témoignage d'Ammien MarccUin ,
contemporain de l'empereur Julien. Cet historien
nous dit que Tours et Rouen faisaient Fornement de
la Seconde Lyonnaise. Paulin de Périgueux , qui vivait
dans le cinquième siècle, assure de même que Tours
était autrefois l'une des villes les plus florissantes des
Gaules par sa richesse et sa population.
Gallorum quondam valdc florebat in oris
Urbs Turonum, distenta agris, populisquc referla.
1(^6 mSTOIRE DE TOURAII^E.
De la Gaule autrefois Tours effaçait les villes
Par ses peuples nombreux, et ses plaines fertiles.
Elle jouissait encore de cette réputation de pro-
spérité au commencement du treizième siècle , sous le
règne de Philippe- Auguste , quoiqu'elle fût alors bien
loin d'avoir l'étendue que nous lui voyons aujour-
d'hui. Ce fait est constaté par ces vers de Guillaume-
le-Breton , au troisième livre de sa Philippide ;
Inde iter accélérât Turonis festinus in urbem
Quam geminum nitidâ flumen circumfluit undâ.
Hinc Liger, iude Carus : medio sedet inter utrumque
Clara situ, speciosa solo, jucunda fluentis ,
Fertilis arborîbus, uberrima fruge , superba
Cive, potens clero, populis numerosa, referta
Divitiis, lucis et vitibus ubique lucens;
Quam sacro saneti praesentia corporis ornât
Prœsulis eximii Martini, gloria cnjus
Omnibus ecclesiis summum decus accuraulavit.
Il dirige ses pas vers les remparts de Tours ,
Que deux fleuves voisins embrassent dans leur cours.
Assis entre les bords du Cher et de la Loire,
Tours , d'un peuple nombreux et l'amour et la gloire.
Dans un site enchanteur offre aux yeux étonnés
Ses fertiles coteaux de vignes couronnés.
Ses vergers, ses jardins , ses eaux délicieuses.
Et d'un brillant clergé les cohortes pieuses.
C'est peu que tant de biens , et Tours possède encor
Dans son temple célèbre un plus rare trésor,
Le corps de saint Martin , de ce prélat illustre ,
Qui sur l'Église entière a répandu son lustre.
On ne peut disconvenir en effet que l'accroissement de
TOURS. 297
la ville de Tours, dans les siècles qui suivirent la mort
de saint Martin , ne soil dû en grande partie aux fré-
quens pèlerinages des chrétiens qui venaient de toutes
parts visiter son tombeau. Le séjour de plusieurs de
nos rois acheva dans la suite ce que la dévotion des
premiers temps avait commencé. A la vérité l'assiette
de cette ville est aussi riante qu'avantageuse, grâce
au large vallon dans lequel elle est placée entre la
Loire ^ qui baigne ses murs au nord, et le Cher qui
n'en est éloigné que d'un quart de lieue du coté du
midi.
Son enceinte actuelle ne date que de la fin du
seizième siècle ,. époque où l'on résolut de l'entourer
de nouvelles fortifications; mais ce projet ne reçut
qu'un commencement d'exécution. Elle avait alors
douze portes, sans y comprendre celles de l'intérieur
qui fermaient les cloîtres de Saint-Gatien et de Saint-
Martin. Il n'en reste plus aujourd'hui, si ce n'est
celle de Saint-Eloi qui a été conservée dans sa forme
primitive, à l'exception de son pont-levis devenu un
pont solide.
On peut diviser la ville en quatre parties : 1° la
cité ou ancienne ville; 2" Château-Neuf ou Martino-
polis; 3° la ville neuve; 4*^ les faubourgs; division
que nous allons rendre plus claire.
1^ La cité s'étendait au levant, depuis la Ruelle et
la tour du Cupidon jusqu'à la tour feu Hugon , du
côté de la Loire; au nord, le long des murs du
château; au couchant, jusqu'à la rue des Amandiers;
et du côté du midi, le long de la rue des Ursulines
298 HISTOIRE DE TOURA.INE.
jusqu'au point de départ. Les terrains qui l'environ-
naient étaient fermés par de larges fossés où coulaient
les eaux de la Loire , et en outre par un chemin cou-
vert destiné à empêcher l'approche de l'ennemi. On
assure que les murs du cloître qui s'avancent en
forme de ravelin du côté des Ursulines, n'ont été
bâtis que pour soutenir les terres qu'on avait tirét\s
en jetant les fondemens de la cathédrale, et qu'en-
suite ou les fortifia d'un bastion pour ajouter à la
défense de la ville. En ce cas cette partie ne daterait
que du douzième siècle.
Il y avait près de la cité , au nord et au nord-ouest,
un faubourg qui prenait depuis une des tours de Tar-
chevêché jusqu'à celle nommée autrefois la tour de
Saint-Vincent, aujourd'hui le portail de la chancel-
lerie, et qui de là, passant au milieu de la paroisse
de Saint-Pierre du Boile, finissait à une tour paral-
lèle. Entre ces deux tours était la principale porte de
la cité. Le corps de ville ayant depuis obtenu de
Charles VII la permission d'abattre la tour de Saint-
Vincent , et d'y faire bâtir une porte pour aller direc-
tement de la cathédrale à Saint-Martin, le roi donna
la propriété des murs et des fossés au chancelier
Guillaume Juvénal des Ursins qui fit bâtir la porte ,
que de là on nomma portail de la Chancellerie. De
même la rue qu'on perça prit le nom de la Scelleric
ouScellerie. On pourrait retrouver encore dans quel-
ques anciennes maisons voisines des restes de murs à
créneaux qui avaient formé la clôture de ce faubourg
appelé faubourg de la Trésorerie.
TOURS. îi99
Quant aux anciens murs de la cite, dont il ne
reste plus que quelques fragmens, on peut se con-
vaincre encore qu'ils avaient été construits sur le
modèle indiqué par Vitruve. Ce sont de petites pierres
de trois pouces en carré, taillées seulement on dehors,
et dont les liaisons sont faites de deux tiers de chaux
et d'un tiers de sable mêlé de ciment. On y remarque
plusieurs rangs de grandes briques placées en forme
de cordons à distances inégales. Il y avait des tours
éloignées de quatre-vingts pieds les unes des autres,
selon la règle observée par les anciens architectes,
excepté pourtantdu côté de la Loire, parce que la
ville y était assez bien défendue par le fleuve qui
baignait ces murs dont les fondemens se composaient
de très -grandes pierres superposées sans aucune
espèce de liaison, ainsi qu'on a pu le voir par les
fouilles qui ont été faites.
2° Chateau-Neuf, dont nous avons souvent parlé
dans notre histoire, se composait des maisons qui
s'étaient successivement agglomérées autour de l'é-
glise de Saint-Martin. Ce bourg décrivait un carré
assez régulier qui traversait le cloître au sud, passait
le long des maisons du grand-marché, parcourait la
rue de la Rôtisserie jusqu'au porlail Saint-Denis, qui
formait une des portes de Chateau-Neuf nommée la
porte Pctnicienne, parce que par elle on entrait dans
le faubourg de Sainl-Pierre-le-Puellier; traversait
ensuite la rue du Petit-Soleil jusqu'au portail de
l'Ecrignole, abattu en 16G0, et continuant par la rue
de Jérusalem, allait finir à une tour placée à l'extrë-
3oO HISTOIRE DE TOURAINE.
mite de la rue Quincangrogne, et détruite tout ré-
cemment.
3° La ville neuve n'était proprement composée que
de tout ce qui avait été bâti entre la cité et Château-
Neuf, et qui avait fini par les lier ensemble. Elle con-
serva cette dénomination long-temps encore après la
réunion qui fut opérée de ces trois parties en une seule
et même ville par lettres patentes du roi Jean, données
à Beauvais le 3o mars i354.
4* Les faubourgs de la Ville perdue , de Saint-Éloi ,
de Saint-Etienne , de Saint-Pierre-des-Corps et de
Saint-Symphorien, ne faisaient point alors partie in-
tégrante de la ville. Le faubourg Saint-Père, ou
Saint-Pierre-le-Puellier , était , comme Château-Neuf,
sous la dépendance du chapitre de Saint-Martin.
Mais tous se trouvèrent enveloppés dans son enceinte
au moyen des fortifications dont elle fut entourée,
et qui furent détruites en 1724, époque où les fossés
furent comblés.
L'intérieur de la ville n'offre aucun monument
d'antiquité. Son château, presque entièrement détruit
et converti en caserne de cavalerie, ne pouvait être
considéré que comme datant du onzième siècle, ayant
été rebâti par Henri II, roi d'Angleterre et comte de
Touraine. Il fut agrandi un siècle après , par Phi-
lippe-le-Hardi. La Tour Hugon, nommée dans les an-
ciens titres la Tour du Comte, était auparavant le
seul manoir des comtes de Touraine.
Ce château formait un carré irrégulier, flanqué de
quatre tours, dont une seule est encore debout;
TOURS. 3oi
c'est celle qui a pris et conserve le nom de Tour de
Guise , depuis la prison du prince de Joinville , dont
nous avons rapporté l'évasion dans notre dixième
livre, année iSgr. Il n'occupait qu'une partie de
l'enceinte de l'ancien palais que, dit-on, les empe-
reurs romains avaient à Tours : mais , si ce palais a
réellement existé, l'époque de sa construction et
celle où il fut détruit sont des faits absolument in-
connus. Du reste, il n'offrait rien qui fût digne de
fixer l'attention : seulement on remarquait au-dessus
de la porte principale trois figures en relief, dont
les connaisseurs faisaient assez de cas ^ l'une repré-
sentait un architecte, vêtu à la romaine, tenant à la
main une équerre à angle obtus, sans doute pour
désigner l'irrégularité des angles du château; les
deux autres étaient des figures de femme , dont l'une
était nue, et l'autre en costume romain : mais elles
n'avaient aucun attribut qui indiquât l'emblème que
nécessairement elles devaient offrir.
Au-dessus d'une fausse porte, pratiquée au nord
dans la muraille de ce château , pour aller à la ri-
vière qui coulait immédiatement au bas , se trouvait
une pierre que l'ignorance offrit long-temps à la cré-
dulité comme étant le tombeau de Turnus , pré-
tendu fondateur de la ville de Tours. On y voit, car
on la conserve encore , une coupe sculptée en bas-
reliefs , d'où sort à droite et à gauche un fleuron en
forme d'arabesque dans les contours duquel se trouve
de chaque coté un oiseau ressemblant à une colombe.
Cette pierre, haute de deux pieds et demi, et longue
3oa HISTOIRE DE TOURAINE.
de quatre pieds quatre pouces, avait sûrement fait
partie de quelque édifice d'ordre corinthien avant que
d'être employée dans la construction du mur. Tel
était ce fameux tombeau , dont les historiens du sei-
zième siècle , et même des écrivains plus modernes ,
s'autorisaient pour faire remonter à Turnus la fon-
dation de la ville de Tours.
Il ne se trouve aujourd'hui aucunes traces des
édifices que les Romains pouvaient avoir construits
à Tours pendant un séjour de près de cinq cents ans,
si ce n'est quelques ruines informes ensevelies dans
les caves et dans les fondations de plusieurs maisons
situées dans le voisinage de la cathédrale. Les siècles
plus rapprochés n'ont pas été plus féconds en con-
structions dignes de remarque. Les temples même
n'offraient rien qui fût au-dessus du médiocre, à
l'exception pourtant de la cathédrale, d'une archi-
tecture assez élégante , et dont on admire le portail ,
orné d'une belle rosace , entre ses deux tours jumelles
de deux cent seize pieds de haut , dont les nom-
breuses sculptures étaient garanties par des verres
que le temps a détruits, mais dont on aperçoit en-
core des vestiges. L'église de Saint-Martin était
beaucoup plus ancienne , quoique toutes ses parties ne
fussent pas du même âge. Le chevet , ou rond-point ,
était la seule qui méritât quelque attention. Le reste
n'était qu'une vaste carrière où le goût était aussi
oublié que la matière y était prodiguée : mais nous
renvoyons^ la quatrième partie, où nous traitons des
établissemens ecclésiastiques. Nous nous bornerons
TOURS. 3o3
à dire ici qu'en tout temps ils furent très-nombreux
à Tours. En 1777, on y comptait encore, outre ces
deux chapitres , seize paroisses , dont deux étaient
en même temps collégiales; deux séminaires, trois
hospices , deux prieurés, six chapelles , onze couvens
d'hommes et neuf de filles , dont nous ne présente-
rons ici que la simple énumération.
Paroisses :
Saint-Clément, place du marché, aujourd'hui la
halle au blé.
Sainte-Croix, rue de la Longue Echelle , supprimée
le i" janvier 1782.
Saint-Denis, rue du Change, supprimée à la même
époque.
Saint-Etienne , place de l'Archevêché , détruite.
Saint- Hilaire, rue de l'Intendance, détruite.
Notre-Dame de l'Ecrignole , place Saint-Martin,
détruite.
Notre-Dame-La-Riche, conservée comme paroisse.
Saint-Pierre-des-Corps , conservée comme paroisse.
Sai^Pierre-du-Boile, Grande Rue, détruite.
Saint-Pierre-le-Puellier , carroi de Saint-Pierre,
détruite.
Saint-Pierre du Chardonnet, rue du Chardonnel,
supprimée le 1*' janvier 1782.
Saint-Saturnin , Grande Rue , détruite.
Saint-Simple, au nord de la place d'Aumont, sup-
primée le 17 juin 1777.
Saint-Symphorieu , faubourg du même nom , con-
servée comme paroisse.
3o4 HISTOIRE DE TOURAINE.
Saint-Vincent, rue de la Scellerie, détruite.
Il y avait en outre une succursale dans l'île Saint-
Jacques qui a été détruite lors de la construction du
nouveau pont.
Saint-Gatien , autrefois Saint-Maurice, cathédrale,
a été conservée. La paroisse Saint-Martin y a été
réunie.
Saint-Martin , collégiale détruite. La rue Saint-
Martin a été percée sur son emplacement.
Le grand et le petit séminaire , rue Chaude. Le
collège en occupe les bâtimens.
L'Hôtel-Dieu , en face de la cathédrale , détruit.
L'Hospice des enfans trouvés, à l'extrémité du fau-
bourg Saint-Pierre-des-Corps , détruit.
L'Hôpital - général de la Charité réunit aujour-
d'hui les deux précédens.
Le prieuré de Saint-Eloi , à l'extrémité occidentale
du Mail j détruit.
Le prieuré de Saint- Jean-des-Coups forme le ci-
metière de l'Est.
La chapelle de Saint-André , à l'extrémité nord de
la rue Rapin , détruite.
La chapelle de Tous les Saints , place du Grand
Marché, supprimée vers 1770.
La chapelle de Saint-Sébastien, faubourg Saint-
Étienne , supprimée dans le siècle dernier.
La chapelle de Saint-Protais et Saint-Gervais, sur
les murs de la ville , supprimée.
La chapelle du Petit-Saint-Martin , fossés Saint-
Martin , détruite.
TOURS. 3o5
La chapelle de Sainte-Anne, à l'extréinité de la
Ville perdue , détruite.
Le couvent des Augustins , à l'angle des rues de
l'Intendance et de la Galère , détruit.
Le couvent des Bénédictins de Saint-Julien , rue
Traversaine, aujourd'hui rue Royale , détruit.
Le couvent des Capucins , sur le coteau de Saint-
Symphorien , détruit.
Le couvent des Carmes. Son église forme la pa-
roisse de Saint-Saturnin , succursale.
Le couvent des Cordeliers , rue de la Scellerie ,
aujourd'hui salle de spectacle.
Le couvent des Feuillans , près la place de l'Arche-
vêché , détruit.
Le couvent des Jacobins, place de la Foire-le-Roi ,
aujourd'hui magasins du munitionnaire.
Le couvent des Jésuites, aujourd'hui Saint-Fran-
çois-de-Paule , paroisse succursale.
Le couvent des Minimes , rue Chaude , bâtimens
détruits, église conservée, formant chapelle à l'usage
du collège.
J^e couvent des Oratoriens, rue de la Guerche,
détruit.
Le couvent des Récollets, rue des Récollets, au-
jourd'hui caserne d'infanterie.
Le couvent des Annonciades, ou Bleues, place de
l'Archevêché, supprimé en 1777.
Le couvent des Calvairiennes , faubourg Saint-Sym-
phorien , détruit.
3. ao -
3o6 HISTOIRE DE TOURAINE.
Le couvent des Capucines, place d'Aumont, dé-
truit.
Le couvent des Carmélites, rue de Mont-Fumier,
rétabli.
Le couvent des Repenties, faubourg La Riche,
rétabli.
Le couvent des Sœurs-Grises , rue des Récollets,
rétabli.
Le couvent des sœurs de l'Union-Chrétienne , rue
Chaude, détruit.
Le couvent des Ursulines, rue du même nom,
détruit.
Le couvent des Visitandines , rue Chaude, détruit.
On y a reconstruit depuis le vaste hôtel de la Pré-
fecture. Cet édifice et celui de rArchevêché sont les
seuls de la ville qui aient quelque importance.
Tous ces établissemens ecclésiastiques pouvaient
être en rapport avec l'ancienne population; mais dès
1^77 on en avait déjà senti l'exubérance, en sup-
primant cinq paroisses qui en laissaient encore trop
de onze.
On croit que vers la fin du seizième siècle la popu-
lation de Tours ne s'élevait pas à moins de quatre-vingt
mille âmes; en 1672 on y comptait de même soixante
mille communians , dont trente mille, dit-on, en
état de porter les armes. On se demande comment la
ville, avec cent trente-huit rues et quatre mille cinq
cents maisons, pouvait contenir autant d'habitans :
mais on ne fait pas attention que de quarante mille
f
TOURS. 3o7
individus, alors employés aux travaux de la soie,
plus de la moitié logeait dans des chambres , dans
des greniers , et même dans des caves où la plupart
des métiers étaient établis. En 1698, après la révo-
cation de l edit de Nantes , la population était tombée
à six mille six cent soixante-dix-huit feux , non com-
pris environ mille deux cents ecclésiastiques, tant
réguliers que séculiers; la consommation des bœufs,
qui précédemment était d'environ quatre-vingt-dix
par semaine, fut réduite à vingt-six. En 1763, on
comptait encore quarante mille âmes ; mais ce re-
censement fut fait sans doute d'une manière fort in-
exacte, puisque celui qui eut lieu quatre ans après,
et qui repose sur des détails plus circonstanciés , ne
s'élève qu'à vingt-sept mille âmes. Quoi qu'il en soit ,
en 1 790 il n'en restait pas plus de vingt et un mille
qui forment la population actuelle.
L'industrie et le commerce étant déchus en pro-
portion, et ne s'étant pas encore relevés , les capitaux
ont cherché une autre direction en se portant vers
les reconstructions. Ainsi disparaissent journellement
les masures et les antiques maisons bâties en colom-
bage et recouvertes d'ardoises depuis le haut jusques
en bas, pour faire place a des habitations qui, en
élargissant les rues, reçoivent plus d'élégance et de
commodité, et donnent à la ville un aspect moins
sombre. Les habitans semblent s'être dit : ne pou-
vant la faire riche ^faisons-la belle. Ce goût paraît
avoir pris naissance lors de la construction du nou-
veau pont et de la rue qui la traverse dans sa moyenne
20.
3o8 HISTOIRE DE TOURAINE.
largeur qui n*est que de quatre cents toises du pont
au Mail, sur mille trois cents toises de longueur.
Ce Mail, planté de quatre rangs d'ormeaux (i), est
}3ordé dans toute son étendue , du coté du midi , par
une terrasse ou rempart long de neuf cent quatre-
vingt-dix-huit toises, sur vingt-quatre pieds de large ,
formant une double promenade d'où la vue s'étend
d'abord sur les riantes campagnes que le Cher arrose ,
et ensuite sur le riche coteau que baigne la Loire.
Ce sont les sources des coteaux du Cher qui ali-
mentent les sept fontaines de la ville, commencées
en 1 507. Les quatre premières furent terminées en
i5 1 1 , et deux autres en i5 ig. Une seule est remar-
quable par sa belle pyramide de marbre blanc de
Gênes, ornée de sculptures, présent du surinten-
dant de Beau ne de Semblançay : mais elle est défi-
gurée par un bassin en pierre commune , qu'avec
l'amour du beau le corps de ville d'alors eût pu
faire exécuter en marbre pareil. Les cinq autres sont
de la simplicité la plus mesquine. Quant à celle exé-
cutée dernièrement pour remplacer l'ancien réser-
voir appelé la Belle Fontaine , elle ne se distingue
que par un excès de mauvais goût qui la fait ressem-
bler à ces anciens tombeaux qu'on trouvait sur les
voies romaines.
Il en est une septième placée à l'extrémité sud de
la rue Royale. Celle-ci plus moderne, et construite
(i) 1374 ormeaux, sur deux rangs de chaque côté, espacés de trois
toises chacun.
TOURS. 3o9
en même temps que la rue par les soins de l'inten-
dant Ducluzel ( et non De Cluzel comme le porte
l'inscription), est d'une élégante simplicité qui se
lie à l'ordre d'architecture de cette partie de la rue.
Depuis l'année i347) ^^ commune était adminis-
trée par six, et ensuite par quatre élus, expression
du vœu des habiîans. Mais Louis XI, en 1462,
leur substitua un corps de ville, composé d'un maire,
de vingt-cinq échevins perpétuels , et de soixante-
quinze pairs à vie, auxquels il accorda le privilège
de noblesse. Nous ne retracerons point les nom-
breuses modiGcations que ce régime éprouva jus-
qu'en 1771 , époque où l'office de maire fut de nou-
veau rendu vénal, et où les échevins étaient réduits
à quatre. Nous dirons seulement que de Jean Bri-
çonnet , en 1462 , à Etienne Benoît de la Grandière ,
en 1 790 , la ville de Tours a compté deux cents
maires dans une période de trois cent vingt-neuf
ans.
Quoique Tours fût une ville royale depuis la ré-
union de la Touraine à la couronne, elle avait dans
son sein , outre la baronnie de Château-Neuf, dont
nous avons parlé, une autre seigneurie connue sous
le nom de vicomte des Ponts-de-Tours , qui datait du
temps où les comtes de Touraine abandonnèrent
l'administration de la province à des suppléans nom-
més pour cela vicomtes. Adralde en fut le premier ,
en 889. Cette vicomte passa successivement de famille
en famille, jusques à celle de Maillé. Louis XI, en
i463, ayant acheté de Hardouin de Maillé la terre
3X0 HISTOIRE DE TOURAINE.
des Montils , consentit à l'union de la vicomte de
Tours aux baronnies de Maillé et de Roche-Corbon.
C'est ainsi qu'en dernier lieu elle fit partie du ducbé
de Luines, avec lequel elle s'est éteinte.
Nous ne parlerons point des événemens dont la
ville de Tours a été le théâtre , parce qu'on les a
trouvés répandus dans tout le cours de notre histoire,
et qu'il en sera encore fait mention dans ce qui nous
reste à dire.
VÉRETS, BARONNIE.
Le château de Vérets ( Pagus de Viretis ) , situé
auprès du bourg de ce nom , sur le coteau que baigne
la rivière du Cher, à trois lieues sud de Tours, fut
bâti, il y a environ trois cent cinquante ans, par Jean
de La Barre , premier gentilhomme de la chambre de
Charles VIII , qui fit placer au-dessus du grand esca-
lier la statue équestre en pierre de ce prince. Il y
était représenté à l'âge de vingt-cinq ans , tel qu'il
était à la bataille de Fornoue^ selon la description
qu'en a donnée Sala , son pannetier, qui l'avait suivi
au voyage d'Italie. L'opinion vulgaire des habitans
du pays était que cette figure représentait le fils aîné
de Jean de La Barre , également seigneur de Vérets ;
mais on peut croire qu'ils n'avaient pas lu l'ouvragé
de Sala , où il est dit en parlant de cette bataille et
de Charles VIII : <.< Il estoit petit decorps, mais fort bel
« homme, et avoit alors vingt-cinq ans. Ainsy que le
tf roy estoit parmy les rangs combattant , un escadron
VtRETS. 3ll
« d'environ vingt-cinq hommes bien armés et bardés,
« cogneurent de loin leroy au garnement de ses armes
« qui estoit tout semé de croix de Hiérusalem , et
« à son cheval , qui estoit par adventure le plus beau
(f et le meilleur qu'on eut sçeu choisir. Le duc Charles
ff de Savoye , qui son cousin-germain estoit, le lui
« avoit donné , et pour ce le nommoit Savoye, etc. »
Il ne fallait donc pas beaucoup de discernement pour
voir qu'on n'aurait pas mis sur la statue d'un simple
seigneur de Vérets, une cotte d'armes semée de
croix de Jérusalem qui n'appartenaient qu'à la maison
royale de France, car on sait que Charles VIII écar-
telait de France et de Jérusalem.
Les Anglais s'emparèrent de ce château pendant
leurs guerres avec le roi Jean , et furent obligés de le
rendre en i36o, par le traité de Brétigny.
En 1730, le poète Ducerceau fut trouvé mort
dans le parc de Vércfs. Ce jésuite faisait alors l'éduca-
tion du fds du duc d'Aiguillon. On prétendit qu'il avait
été tué par son élève. Sa sépulture précipitée dans le
cimetière de Vérets , où on ne lui donna pas même
une pierre sépulcrale , sembla confirmer cette opi-
nion, qui d'ailleurs ne reposait sur aucune conjec-
ture raisonnable.
L'archevêque de Tours de Chapt de Rastignac
mourut de même subitement, dit-on , au château de
Vérets, en i-ySo. Son mandement contre le père
Pichon fit accuser les jésuites de sa mort. Cette ac-
cusation a été accueillie par l'auteur des Jésuitiques,
qui a dit, ode 2, strophe 5 :
3 12 HISTOIRE DE TOURAINE.
Sous leurs coups Rastignac succombe ,
Et je vois entrer dans la tombe
Maillard et La Rochefoucauld.
Mais cette mort subite est plus qu'apocryphe,
puisqu'il fut ordonné des prières de quarante heures
dans tout le diocèse , pour la conservation de ses
jours.
Voici ce que nous avons pu recueillir sur les dif-
férens seigneurs de Vërets.
Pierre Trousseau , chevalier, seigneur de Vérets,
de Launay , de Trousseau et de Châteaux , aujourd'hui
Château-la-Vallière, était chambellan de Philippe de
Valois, au mois de janvier i 3do. Il fut nommé en 1 369
gouverneur du château de Tours, et en 1 370, par lettres
patentes de Charles V, du 12 février, il fut retenu au
nombre de dix hommes d'armes. Il eut plusieurs en fan s.
Guillaume Trousseau , chevalier , seigneur de
Vérets, vicomte de Bourges , etc. , fils aîné de Pierre ,
fut au nombre des cautions pour le traité de paix de
Brétigny, en i36o.
Catherine de l'Isle , dame de Vérets, lui succéda
vers i388.
Catherine de La Trémouille était dame de Craon
et de Vérets , en i43o.
Jean de La Barre , premier gentilhomme de la
chambre du roi Charles VIII, prévôt de Paris, comte
d'Etampes, vicomte de Bridieu et baron de Vérets ,
épousa Marie de la Primaudaye, dont il eut Margue-
rite, mariée le 10 mai 152^ à François de Cour-
tenay.
VÉRETS. 3l3
François de Courtenay fut seigneur de Vérels
du chef de sa femme.
Jean d'Estouteville , chevalier, seigneur châtelain
de Vérets, comparut en cette qualité à la deuxième
réformation des coutumes de Touraine , en i559.
Pierre Forget Dufresne , secrétaire d'état.
Denis Le Bouthillier, seigneur de Rancé, baron
de Vérets et de Larcé , eut deux fds. François , cha-
noine de Notre-Dame de Paris, mort en 1640 , et le
célèbre abbé de Rancé, qui suit :
Armand-Jean Le Bouthillier de Rancé , abbé de
la Trappe. Son frère aîné François étant mort, il se
trouva héritier de la terre de Vérets, On prétend
qu'au retour d'un voyage il vint à sa terre, d'où il
se hâta de se rendre à Couziers , pour y voir sa maî-
tresse, la belle duchesse de Montbazon, dont il
ignorait la mort toute récente. Etant monté par un
escalier dérobé qui conduisait à la chambre de la
duchesse, il fut frappé de terreur en voyant dans un
bassin d'argent la tête séparée du corps, parce que
l'on avait fait le cercueil de plomb beaucoup trop
court. Tel est le motif que l'on donne h sa conver-
sion; mais ce récit a bien l'air d'une fable : car com-
ment supposer que Rancé eût pu entrer dans le' châ-
teau sans rencontrer au moins quelque domestique
qui n'eût pas manqué de lui annoncer la mort de la
duchesse? Quoi qu'il en soit, avant que de se rendre
à la Trappe , Rancé, en 1 660 , vendit à l'abbé d'Effîat
sa terre de Vérels, moyennant la somme de 3oo,ooo
liv. qu'il donna à l'Hôtel-Dieu de Paris.
3î4 HISTOIRE DE TOUR \INE.
Jean Riizé d'Effiat , abbé de Saint-Sorlin de Tou-
louse, et de Trois-Fonlaines, mort le 19 octobre
1698, avait revendu la terre de Vërets au duc de
Mazarin , qui suit :
Armand-Charles de La Porte , fils du maréchal de
La Meilleraye , duc de Richelieu-Mazarin , pair de
France, etc., épousa Hortense Mancini, nièce du
cardinal Mazarin, à condition d'en prendre le nom
et les armes. Il en eut un fils unique.
Armand de La Porte , duc de Mazarin , etc. , baron
de Vérets, n'eut qu'une fille qui fut mariée au mar-
quis de Richelieu.
Louis Duplessis, marquis de Richelieu, neveu de
Marie-Madelaine , duchesse d'Aiguillon, qui n'avait
point d'enfans , fut substitué par elle dans son duché
et dans tous ses autres biens. En conséquence, il fut
institué duc d'Aiguillon, par arrêt du parlement de
Paris, en r-ySi.
Emmanuel-Armand Duplessis-Richelieu , duc d'Ai-
guillon , connu par son ministère, sous le règne de
Louis XV, après avoir fait exiler à Ghanteloup le
duc de Ghoiseul, fut exilé lui-même, en 1775, dans
le château de Vérets qu'il avait fait reconstruire dans
un goût plus moderne. En 17.60, quelques cailloux
agatisés trouvés par hasard engagèrent le duc à faire
faire des fouilles auprès de son château, et l'on y
trouva beaucoup de pétrifications et de fossiles , dont
à la vérité la Touraine abonde, des cailloux sus-
ceptibles de recevoir le plus beau poli, mais surtout
des agates de diverses couleurs. Il ne paraît pas que
VERNOU. 3l5
Ton ait donné plus de suite à ces recherches. Il eut
une fille mariée au comte de Chabrillant , et un fils
qui suit :
Armand-Désiré Duplessis -Richelieu, duc d'Ai-
guillon , fut le dernier des seigneurs de Vérels. Il
s'est fait connaître dans le parti de la minorité de la
noblesse de l'assemblée constituante , et est mort
à Hambourg , le 4 i^i^i ^ ^oc>.
Le château de Vérets a été entièrement détruit de-
puis cette époque.
VERNOU , BARONWIE.
Vernou {Vernotum\ suivant la Notitia Galliarum,
fol. 594? est un nom commun à plusieurs bourgs de
France , placés dans le voisinage des forêts. On lient
en effet que notre Vernou était autrefois couvert do
bois , et que la forêt de Reugny s'étendait jusques-là :
mais ces bois en très-grande partie ont fait place à
de riches vignobles, principalement sur les coteaux.
Le village est situé sur la Eransle, à quatre lieues
nord-est de la ville de Tours.
De tout temps cette baronnie a été dans le tem-
porel des archevêques de Tours , qui en ont été les
premiers et les derniers seigneurs; ainsi nous n'avons
à cet égard à offrir aucuns détails particuliers; ils y
avaient leur justice, dont relevaient trois châtelle-
nies et dix fiefs. L'archevêque Victor Le Bouthiilier
avait obtenu en faveur de Vernou rétablissement
d'un marché qui s'y tenait tous les lundis.
3l6 HISTOIRE DE TOURAINE.
VILLANDRY, marquisat.
Villandry ( Filla Andriaca)^ situe vers l'embou-
chure du Cher, îi trois lieues au-dessous de Tours,
n'était autrefois qu'un petit château connu sous le
nom de Colombiers , dont nous avons eu occasion de
parler dans notre Histoire au sujet de la paix qui y fut
conclue en 1 189, au mois de juillet, entre Philippe-
Auguste et Henri H , roi d'Angleterre et comte de
Touraine.Il fut rebâti par Jean Le Breton, secrétaire-
d'ëtat,qui en devint acquéreur, en i532, ainsi que
de la châtellenie de Savonnières , et ce fut son petit-
fils, Balthasar Le Breton, qui obtint la réunion de
ces deux seigneuries et leur érection en marquisat,
sous l'appellation de Villandry , par lettres patentes
de Louis XHI de 16 19, qui ne furent vérifiées au
parlement que le 26 novembre 1639.
Le bourg de Savonnières dont il est ici question ,
nommé en latin Saponaria , ainsi que nous le voyons
par le testament de saint Perpète, fait le i^' mars 47 5 ,
était à cette époque déjà renommé par les savons
blancs qu'on y fabriquait. Comme l'usage en était
fréquent parmi les Romains , et qu'ils estimaient beau-
coup les savons blancs qui venaient de la Gaule , il
s'en faisait un très-grand commerce; c'est pourquoi
il y avait toujours non loin des grandes villes un lieu
nommé Savonnerie ou Savonnières.
Nous avons parlé dans notre introduction des sou-
VILLANDRY. 3 1 7
terrains , ou grottes de Savonnières , connus sous le
nom de Caves Gouttières.
Ces deux chatellenies, avant le treizième siècle ,
avaient chacune leurs seigneurs particuliers, dont
ceux qui suivent étaient mentionne's au cliartrier de
Marmoutier.
Geoffroy , dit Le Roux , ainsi que nous l'avons vu
précédemment à l'article de Hugues I" d'Amboise ,
était seigneur de Colombiers , vers la fin du onzième
siècle, et avait épousé Lisoye, fille de ce même
Hugues d'Amboise, dont il n'eut point d'enfans.
Emcry Payen était seigneur de Colombiers et de
Montbazon , en io83.
Auger, seigneur de Colombiers , vivait en 1094.
Lélice, dame de Savonnières en 11 85, fut ma-
riée à Philippe, seigneur de Montoire, d'où est sortie
une branche des seigneurs de Vendôme.
Philbert Savary, seigneur de Colombiers, étant
devenu seigneur de Savonnières, et Philippe-Auguste
lui ayant donné le château de Montbazon, au com-
mencement du treizième siècle, les seigneuries de
Colombiers et de Savonnières furent unies à celle de
Montbazon , ce qui dura environ deux cents ans ,
jusqu'à Guillaume de Craon, troisième du nom. Jean
de Craon, son frère puîné, étant comme lui mort
sans enfans , leur succession fut partagée entre leurs
sœurs.
Marie de Craon , seconde fille de Guillaume de
Craon et de Jeanne de Montbazon , eut en partage
les seigneuries de Montsoreau , Jarnac , Pressigny ,
3l8 HISTOIRE DE TOURAINE.
Colombiers et Savonnières qu'elle porta en dot à
Louis Chabot.
Louis Chabot , seigneur du Petit-Château et de la
Grève, était fils de Thibaut Chabot, sixième du nom.
De sa femme, Marie de Graon, il eut Thibaut et
Renaud.
Thibaut Chabot , septième du nom , fit hommage
a Charles VII, le 17 mars 14^7 , des seigneuries de
Colombiers et de Savonnières. Il prit pour femme
Brunissant d'Argenton , dont il eut trois enfans ,
Louis qui suit et deux filles.
Louis Chabot, baron de Pressigny, seigneur de
La Grève, de Colombiers et de Savonnières rendit
par aveu la seigneurie de Savonnières, à Philippe de
Coëtquis , archevêque de Tours, le i" juin i436. Il
épousa Jeanne, fille de Guillaume de Coursillon,
dont il eut une fille unique.
Marie Chabot, fille du précédent, dame de Savon-
nières et de Colombiers , fut mariée deux fois; la pre-
mière à Joaclîim Rouault, et la seconde à Navarret
d'Anglade. Celui-ci , pendant la minorité d'Adolphe
Rouault, né du premier mariage, vendit les biens de
la succession de son père Joachim. Il y eut procès à
ce sujet, et en i5o5 intervint un arrêt du parle-
ment d'après lequel les biens furent revendus au
profit du mineur. Henri Bohier s'en rendit acqué-
reur.
Henri Bohier , chevalier , sénéchal de Lyon , sei-
gneur de Chesnaye , deuxième fils d'Astremoine Bo-
hier, devint seigneur des terres de Colombiers et de
VILLANDRY. 3ig
Savonnières, par l'achat qu'il en fit en i5o5 : mais
elles furent revendues sur lui par décret forcé.
Jean Le Breton, chevalier , baron de Mondoucet,
seigneur de Villesquin , conseiller du roi et secré-
taire d'état , acquit les cliâtellenies de Colombiers et
de Savonnières , en* vertu de l'arrêt rendu par les
juges des finances, le 4 mars i532, moyennant la
somme de 35,ooo liv. , formant 132,290 liv. de notre
monnaie, le marc d'argent étant alors à i3 liv.
5 sous. Il épousa Anne Gédouin , dont il eut deux
enfans , Claude et Balthasar. Lui-même était fils de
Charles Le Breton, seigneur de Chanceaux, et de
Jeanne, fille de François Bérard , premier du nom ,
seigneur de Bléré.
Claude Le Breton , seigneur de Villandry, de Co-
lombiers et de Savonnières, épousa Claude, fille de
Florimond Robertet, secrétaire d'état sous les rois
Louis XII , François I" et Henri IL II mourut sans
enfans, en i556. Il reste de lui des lettres écrites en
i536 et 1537, relatives au règne de F'rançois L^ :
elles étaient conservées parmi les manuscrits de
Pierre Dupuy , numéro i65.
Balthasar Le Breton , premier du nom, succéda à
Claude, son frère, et fut , ainsi que nous l'avons dit
en commençant, le premier marquis de Villandry.
Il avait épousé Madelaine , fille de René Gillier,
baron de Marmande et de Puy Carreaux, dont il eut,
entre autres enfans , Balthasar qui suit.
Balthasar Le Breton, deuxième du nom, seigneur
de Villandry, épousa N. de Coulas, dont il eut un fils.
3aO HISTOIRE DE TOURAINE.
Ballhasar-Leonor Le Breton-Gouias, seigneur de
Villandry, prit alliance avec Marie-Claude Bonneau
de Rubellez. Cette union ne leur donna qu'une fille,
Henriette-Marguerite, qui porta la terre de Villandry
dans une autre famille.
Louis-François , comte d'AÛbigny , seigneur de
La Touche, épousa en 171 3 Henriette-Marguerite
Le Breton-Goulas, et devint par là seigneur de Vil-
landry. Sa femme mourut en 1721 , âgée de trente-
deux ans.
Esprit-François- Henri , marquis de Castellane ,
maréchal-de-camp, ayant acquis la terre de Villandry,
en fit reconstruire entièrement le château tel qu'il
existe aujourd'hui; il en fut aussi le dernier seigneur,
et depuis sa mort cette terre est passée successive-
ment en différentes mains.
USSÉ, CHA.TELLENIE.
Le château d'Ussé ( Ussœum ) se trouve dans la
commune de Rigny , canton d'Azay-le-Rideau , sur
la rive gauche de la Loire, au point où l'Indre vient
terminer sa course dans ce fleuve. Il ne pouvait être
remarquable autrefois que par ses eaux , ses bois , et
son site heureux sur le penchant d'une colline , d'où
l'œil découvre à travers le bassin de la Loire les
riches coteaux de la rive opposée : mais depuis sa
reconstruction , ses vastes bâtimens sa belle et noble
architecture en ont fait l'un des édifices de ce genre
dont le sol de la Touraine ait le plus à s'enorgueillir.
ussÉ. 32 r
Il est vrai qu'il est eu partie l'ouvrage du célèbre
Vaubaii, qui venait quelquefois dans cette agréable
retraite passer chez son gendre les courts instans
de loisir que lui permettaient les innombrables occu-
pations qui remplirent le cours de sa vie. Ce fut sur
ses plans et ses dessins que les travaux en furent
exécutés.
Gelduin de Saumur est le premier que, dans l'his-
toire de notre province, nous voyons paraître comme
seigneur d'Ussé, en même temps qu'il l'était de Maillé
et de Pont-le-Voy, vers la fin du onzième siècle.
Gelduin, deuxième du nom, son fils, le fut égale-
ment après lui : mais depuis eux il s'écoule un assez
long espace de temps sans que nous ayons connais-
sance d'aucun des seigneurs d'Ussé,
Jacques d'Espinay possédait cette terre vers i48o.
Il comparut à ce titre au procès-verbal de réforma-
tion des coutumes de Touraine, en i Soy. Ce fut lui qui
fit construire la chapelle du château que consacra le
cardinal André d'Espinay, son frère, archevêque de
Lyon, mort en i5oo.
Jacques d'Espinay, deuxième du nom, seigneur
d'Ussé, y fonda, en i538, une collégiale de huit
chanoines, tous à la collation du châtelain. François
d'Espinay, surnommé le Brave-Saint-Luc, était de
cette même famille. Ce fut lui qui fut envoyé à Senlis ,
en 1^94, vers Henri IV , pour traiter de la reddition
de Paris.
Claude I", sire de Rieux , seigneur de Rochefort ,
d'Ancenis et d'Ussé , avait probablement acheté cette
3. 21
3^2 HISTOIRE DE TOUR AINE.
terre de la famille d'Épinay, ou plutôt ce fut sa
femme Suzanne de Bourbon , fille de Louis prince
de La Roche-sur- Yon , qu'il épousa en secondes
noces, en 15^9, car il était mort en i533. Il n'eut
de ce second mariage qu'un fils, nommé Claude,
comme lui, qui mourut sans avoir été marié, en
i548.
Suzanne de Bourbon , après la mort de son époux
et de son fils, devint dame d'Ussé, et comparut en
cette qualité à la seconde réformation des coutumes
de Touraine , en iSSg. Elle mourut en 1570.
Claude II, en mourant, avait laissé héritière de tous
ses biens Louise de Rieux, sa sœur paternelle du
premier lit. Celle-ci fut mariée à René de Lorraine,
marquis d'Elbeuf, auquel elle porta en dot toute
cette succession.
Louis Bernin de Valentinay, premier du nom,
contrôleur-général de la maison du roi , fut acquéreur
de la terre d'Ussé. Il épousa Catherine, fille d'André
Coudreau , seigneur de Planchouri en Touraine , et
maire de Tours en i65i. Il eut de ce mariage Louis
qui suit.
Louis Bernin de Valentinay , deuxième du nom ,
contrôleur-général de la maison du roi , épousa
Jeanne-Françoise, fille aînée du maréchal de Vauban,
qui, comme nous l'avons dit, donna ses soins à la
reconstruction du château d'Ussé , où l'on reconnaît
facilement la main de ce grand homme.
Louis de Bernin de Valentinay, troisième du nom,
seigneur d'Ussé , contrôleur-général de la maison du
ussK. 3a 3
roi , était fils de Louis II , et de Jeanne-Françoise de
Vauban. Il prit alliance, en 1708, avec Anne-Tlieo-
dore de Carvoisin.
Louis-Vincent Roger , marquis de Chalabre, était
seigneur d'Ussë , lorsqu'il quitta la France à l'époque
de la révolution. Cette terre était déjà sous le séquestre
lorsqu'un fils légitimé en réclama et en obtint la res-
titution ; elle a passé depuis à M. le duc de Duras ,
premier gentilhomme de la chambre du roi , qui en
est aujourd'hui propriétaire.
On a cru voir dans la chronique du petit Jehan
de Saintré, long et ennuyeux roman d'Antoine de
La Salle, rajeuni, raccourci et rendu supportable
par le comte de Tressan, quelque analogie entre Ussé
et les li^ux où le romancier place le théâtre des aven-
tures de la dame aux belles cousines. Quoique Saintré
fût effectivement né sur la rive opposée de la Loire,
nous ignorons comment on prétendrait chercher
quelque air de vérité dans des faits entièrement fabu-
leux.
On remarquait à Ussé deux caisses de momies ,
l'une en marbre blanc, l'autre en basalte, ou plutôt
en pierre de touche, toutes deux couvertes d'inscrip-
tions hiéroglyphiques, que tenta vainement d'expli-
quer Court de Gébelin , trop peu versé dans ce genre
d'études, dont les étonnans progrès semblent être
réservés aux travaux et à la sagacité de M. Cham-
pollion. Ces caisses, venues de la Haute-Egypte, furent
débarquées à Marseille en i63i ; plus de vingt ans
après, elles furent achetées par le surintendant Fou-
•21,
324 HISTOIRE DE TOURAINE.
quet , et revendues après sa mort, en 1680. Le
célèbre Lenostre , qui en fut acquéreur, en fît présent
à Louis II de Valentinay , qui les fît placer dans son
château d'Ussé. Enfin , pendant le séquestre momen-
tané dont nous avons parlé, ces deux monumens
précieux ont été transportés à Paris, et réunis à tous
ceux que renferme le Musée des Arts.
FIN DE LA SECONDE PARTIE.
HISTOIRE
DE TOURAINE.
TROISIÈME PARTIE,
CONTENANT
LE TABLEAU HISTORIQUE DES SENECHAUX, GOUVER-
NEURS, LIEUTEir ANS-GÉNÉRAUX, GRANDS-BAILLIS,
INTENDANS, ETC., DE LA PROVINCE.
k«/^%%/«/^ «./*/«.«/«/«, %^/W<«.'V «.<&'«. «^■«>
CHAPITRE I.
SÉNÉCHAUX.
La dignité de sënëclial de ïourainc a pris nais-
sance sous les comtes héréditaires. Les fonctions de
ces officiers comprenaient l'intendance de la maison
du prince, l'administration de la justice, la dispo-
sition des charges de judicature, la direction des
troupes, enfin le gouvernement des places fortes. Le
sénéchal de Touraine l'était en même temps de
TAnjou et du Maine; mais généralement on ne le
3^6 HISTOIRE DE TOURAINE.
désignait que. sous le nom de sénéchal d'Anjou. C'était,
après le comte, le personnage le plus important, et
les évêques même, soit par écrit, soit en parlant de
lui, se servaient toujours de l'expression de seigneur,
titre qui ne se donnait alors qu'aux princes et aux
grands-officiers de la couronne.
Ces places furent amovibles jusqu'à la fin du dou-
zième siècle; mais, en 1204, Philippe- Auguste, ayant
réuni ces trois provinces à sa couronne, conféra la
dignité de sénéchal à titre héréditaire à Guillaume
Des Roches, qu'Artus, duc de Bretagne, avait déjà
institué, en iigS, sénéchal héréditaire et feudataire
d'Anjou. La sénéchaussée passa après lui à la maison
de Craon , qui la posséda jusqu'à ce que le titre en
eût élé supprimé, ce qui eut lieu pour la Touraine
en i323, et en i33o pour les deux autres provinces,
au moyen des arrangemens faits avec les titulaires
dont il sera parlé à leur article.
Ce n'a été qu'à force de recherches que nous avons
pu former une nomenclature exacte des sénéchaux
amovibles; mais il ne nous a pas été possible de
déterminer aussi bien la durée exacte de leurs fonc-
tions. Il en est même quelques-uns dont nous n'avons
pu connaître que les noms.
La série des sénéchaux héréditaires ne se compo-
sant que de sept individus, il nous a été plus aisé de
la donner plus complète.
Lorsque cette dernière dignité eut été abolie,
une partie de ses attributions passa aux grands-
baillis, qui, dès ce moment, furent institués gou-
SÉNÉCHACX. 3^7
verneurs des provinces. Auparavant ces baillis avaient
l'administration de la justice ainsi que la conduite
des nobles et des autres militaires lorsque la guerre
survenait. Quelquefois les rois envoyaient en outre
des lieutenans qui souvent n'avaient que le titre de
capitaines, et auxquels on donnait la direction des
gens de guerre de trois ou quatre provinces contiguës.
C'est ce qui s'observa assez régulièrement jusqu'au
règne du roi Jean, c'est-à-dire, tant que la Touraine
se trouva exposée aux courses continuelles des Anglais
qui étaient maîtres de la Guienne et d'une partie du
Poitou; mais après le trop célèbre traité de Brétigny,
en i36o, les baillis reprirent la plénitude de leur
autorité, et firent rentrer dans leurs attributions
toutes les parties qui en avaient été distraites par la
force des circonstances.
Indépendamment des grands-baillis-gouverneurs,
il y avait dans chaque province un lieutenant-général
pour le roi, qui pouvait être considéré comme un
vice-gouverneur. Les fonctions de gouverneur et de
grand-bailli commencèrent à être désunies et distinctes
en i543. Alors il s'en forma trois, différentes de dé-
nomination et d'attributions, savoir : gouverneurs,
lieutenans-généraux et grands-baillis d'épée. Ceux-ci
avaient leurs lieutenans chargés exclusivement de
l'administration de la justice , et connus depuis sous
le nom de lieutenans-gcnéraux du bailliage.
En i532 les gouverneurs des provinces furent au-
torisés à prendre le titre de gouverneurs lieutenans-
généraux; mais les lieutenans-généraux pour le roi
3lS HISTOIRE DE TOURAINE.
n'en subsistèrent pas moins, et leurs attributions
n'en éprouvèrent aucun changement.
Ces ëclaircissemens préliminaires nous ont paru
indispensables pour mettre à même de bien connaître
la nature des fonctions des divers officiers dont nous
avons à parler. Les sénéchaux amovibles étant les
plus anciens, ce sera "par eux que nous commen-
cerons.
§1-
SENECHAUX AMOVIBLES.
Lysois, chef de l'ancienne famille du nom d'Am-
boise, était fils aîné de Hugues de Lavardin. Après
que Geoffroy-Martel eut réuni la Touraine à son
comté d'Anjou, il créa Lysois de Bazogers sénéchal
des trois provinces pour le récompenser des services
signalés qu'il lui avait rendus, principalement à la
bataille de Nouy qui l'avait rendu possesseur de la
Touraine. Lysois fut revêtu de la dignité de séné-
chal, vers l'an 1046 ou 1047. L'époque de sa mort
n'est pas bien connue : on pense qu'elle eut lieu peu
de temps après celle de Geoffroy-Martel , c'est-à-dire
vers 1060 ou ro6i.
Algérius ou Auger de Bazogers , frère de Lysois ,
lui succéda dans l'office de sénéchal, sous Geoffroy-
le-Barbu et Foulques-Réchin. On croit communément
qu'il mourut vers 1080.
Pierre. On ne lui connaît pas d'autre nom. Il suc-
céda à Auger, en jo8o. Il est fait mention de lui,
SÉNÉCHAUX. 329
comme sénéchal des trois provinces , dans un titre
de Téglise de Saint-Aubin d'Angers, daté de jo83.
Giroye, ou Giroir. Claude Ménard le nomme Gi-
rard dans son histoire d'Anjou. Un titre de l'abbaye
de Marmoutier de to85 l'indique comme sénéchal
des trois provinces, fonctions que, d'après l'article
suivant, il paraît avoir exercées seulement jusqu'en
1088.
Payen de Maugé prend la même qualification en
1089, dans une charte de l'abbaye de Saint-Nicolas
d'Angers.
Durand Broquet. On ne sait rien de lui.
Etienne Bautan. Il est fait mention de lui dans un
titre de l'abPjaye de Marmoutier, de \iii.
Geoffroy, sans autre dénomination. Il pourrait se
faire que ce fût Geoffroy Fuel, seigneur de l'Ile-Bou-
chard, qui vivait en ce temps. Ce sénéchal fut pré-
sent à un jugement rendu à l'audience , dans la salle
du comte Geoffroy, au profit de l'abbaye de Mar-
moutier, le 3 août, jour de l'invention de saint Clé-
ment, sans indication d'année. Le comte Geoffroy,
dont il est parlé dans ce jugement, ne pouvait être
que Geoffroy-le-Bel , mort en 1 1 5 1 .
Blo ou Blé ( Robert de ) , fils de Gosselin de Blo ,
seigneur de Champigny et grand-père de Josselin,
qui fut l'un des chevaliers bannerets , sous Philippe-
Auguste. Il a été fait mention de lui h l'article des
seigneurs de Champigny.
Jean Jouslain de Tours , autrement nommé Josselin
et même Gosselin , seigneur de Fontaine-Milon en
33o HISTOIRE DE TOURiVINE.
Anjou. Ce fat Geoffroy- le-Bel qui le nomma séné-
chal, dignité qu'il conserva depuis ii58 jusqu'en
ji63, ayant été maintenu par Henri lî, roi d'An-
gleterre. Il signa, en i iGq , le privilège que le prince
avait accordé à l'abbaye de Saint-Florent, portant
exemption du droit de péage sur le pont de Saumur.
De Barvine , sa femme , il eut un fils nommé Geof-
froy, qui épousa Hilarie.
Guy Des Moulins paraît comme sénéchal , en 1 1 64 ,
dans le cartulaire de l'abbaye de Ronceray , d'Angiers.
Guillaume , fils d'Hémon , fut premièrement séné-
chal de Bretagne, sous le duc Geoffroy, puis séné-
chal d'Anjou, sous Henri H, en ii-yo. C'est de lui
que Guillaume, évêque d'Angers, se plaignit au roi,
prétendant qu'il l'avait empêché de juger une cause
que le pape avait renvoyée devant lui au sujet d'un
bénéfice de l'église de Saint-Martin de Tours. Les
deux parties étaient Hugues de Marson et Olivier ,
neveu du sénéchal. Le prélat l'accusait d'avoir inti-
midé les témoins de Hugues , et de les avoir détour-
nés par menaces d'aller déposer à Tours. Il paraît en
effet qu'il avait une telle autorité, que Barthélemi,
doyen de Saint^Martin , pria un jour le roi Louis VII
de lui recommander une affaire pendante devant lui.
Etienne de Marçay , ou plutôt de Marchay. Il est
indiqué comme sénéchal dans des titres de ii-ya et
1 1 80, époque où il fonda l'hôpital de Saint-Jean d'An-
gers. Il mourut en 1 190 : mais, quelques années aupara-
vant, il avait remis la dignité de sénéchal entre les
m^iqs de Henri II. Ce fut probablement en 1 18/4 ou
SJÉNÉCHAUX. 33 1
II 85, puisque, comme on le verra à l'article sui-
vant, nous avons une sentence rendue par son suc-
cesseur , en 1 185.
Etienne. Il est nommé en latin Stephanus de
Turonis ^ cFoù nous avions pensé qu'il fallait tra-
duire Etienne de Tours; mais il paraît certain qu'il
était anglais. Matthieu Paris l'appelle Stephanus de
Tournliam. Quant à nous , nous croyons que son
véritable nom était Etienne de Tournon. C'est ainsi
qu'il est désigné dans la charte de Henri II qui
donne les Ponts-de-Cé à l'abbaye de Fontevraud , où
il est dit : Teslibus Stephano de Turon , senescalco
andegavensi ^ etc. C'était un des principaux confîdens
de Henri II qui , en 1 1 69 , lui confia la garde de son
trésor en lui donnant le gouvernement de la ville et
du château de Chinon. Lorsque ce roi fonda la Char-
treuse du Liget , ce fut lui qu'il choisit pour l'exécu-
tion de ses lettres , conjointement avec Guillaume ,
chancelier d'Angleterre, et Guillaume de Hostile.
Etienne commandait dans la ville du Mans, lors-
qu'elle fut assiégée, en 1 189, par Philippe-Auguste:
mais après la mort de Henri II, son fils Richard Cœur-
de-Lion le fit emprisonner, le destitua de sa charge,
et le dépouilla de tous ses biens. On ota même à
son fils, sous prétexte de sa basse extraction, la
femme qu'il avait épousée pendant la fortune de son
père, parce que les lois du royaume ne permettaient
pas aux femmes nobles de se mésallier.
Peau , ou Payen de Rochefort , favori du roi Ri-
chard, profita de soa crédit pour obtenir la dignité
33î2 HISTOIRE DE TOURAINE.
de scnëclial des trois provinces , après la disgrâce
d'Etienne. Il fut témoin , avec l'archevêque de Tours
etlevêque d'Angers,à la confirmation du droit d'usage
dans la forêt de Chinon , que Richard donna à l'ab-
baye de Turpenay, le 19 avril 11 90. Mais sa faveur
n'ayant pas été de longue durée, avec elle il perdit,
en 1 192, sa dignité de sénéchal.
Robert de Turneham était anglais, d'une famille
illustre , et shérif de Wiltshire , selon Dugdale dans
son Baronnage. Il eut beaucoup de part à la faveur
du roi Richard , qu'il accompagna dans son voyage
de Palestine , où il commanda l'aile gauche de son
armée navale à l'attaque de l'île de Chypre, en 1 191 ,
et après qu'elle eut été prise, il en fut nommé vice-
roi, conjointement avec Robert de Chamwrill. Celui-
ci étant mort , il en eut seul le gouvernement. De
retour en France , il fut nommé sénéchal des trois
provinces; mais, en 11 99, Jean-sans-ïerre ayant
succédé à Richard, il lui remit la dignité de séné-
chal et ses autres gouvernemens, ainsi que le trésor
du feu roi. Jean cependant, ne voulant pas le laisser
sans récompense, lui donna la sénéchaussée du Poi-
tou , où il alla réprimer quelques désordres et con-
tenir la noblesse dans les bornes de son devoir.
Aimery, vicomle de ïhouars. Vers la fin d'avril
1 199, le roi Jean l'investit delà dignité de sénéchal,
ainsi que du gouvernement de la ville et du château
de Chinon : mais sa conduite l'ayant fait soupçonner
d'intelligence avec les Français, il fut contraint ;, au
mois d'octobre suivant , de remettre entre les mains
SlêNÉCHAUX. 333
du roi sa dignité et son gouvernement. Aimery était
frère aîné de Guy de Tliouars , qui , en 1 199 , épousa
Constance, duchesse de Bretagne, veuve de Geof-
froy II , et mère d'Artus , comte de ïouraine.
§11.
SÉNÉCHAUX HÉRÉDITAIRES.
Guillaume Des Roches, seigneur du Chateau-du-
Loir, de Sablé, de Baugé, de Mouliherne, de Sau-
mur, de Précigné, et de plusieurs autres grandes
terres, fut nommé sénéchal amovible des trois pro-
vinces , par lettres d'Artus de Bretagne, du mois ,de
mai 1 J99, confirmées par Philippe-Auguste; d'où il
résulte qu'il y eut alors deux sénéchaux , l'un nommé
par le roi Jean , qui se prétendait comte de Touraine ,
et l'autre par Artus , son neveu , qui l'était plus légi-
timement, comme représentant Geoffroy., son père,
qui était l'aîné de Jean-sans-Terre. Philippe-Auguste,
en vertu de l'arrêt de confiscation prononcé contre ce
dernier, ayant réuni ces trois comtés à sa couronne
de France, continua Guillaume Des Roches dans ses
fonctions de sénéchal , (ju'il rendit même héréditaires
en sa faveur par ses lettres du mois d'août 1 204.
Il mourut en ia'25i , et eut sa sépulture dans l'ab-
baye de Bonlieu, auprès du Chateau-du-Loir. On y
voyait son tombeau et celui de sa femme Marguerite
de Sablé. Il en eut un fils et deux filles : Robert,
334 HISTOIRE DE TOURAINE.
mort en bas âge , Jeanne et Clëmence. Celle-ci fut
mariée premièrement à Thibaut VI comte de Blois ,
puis à Geoffroy vicomte de Châteaudun. Jeanne
l'aînée épousa Amaury de Craon. Ce fut par ce ma-
riage que la dignité de sénéchal passa dans l'illustre
maison de Craon.
Voici ce qu'on lit à ce sujet dans l'enquête sur les
usages d'Anjou , de Touraine et du Maine : « et en-
ce sèment ot missires Guillaume Des Roches deux
« filles , desquelles missires Amorris de Craon ot
a l'aisnée, et porceot lidiz Amorris toutes lesappar-
« tenances au D. Guillaume , sans que l'autre fille
« qui fut comtesse de Blois, et puis vicomtesse de
« Châteaudun, ot rien en l'héritage, ne ez con-
« quesles , oultre son mariage que son père lui donna,
« sans que missire Jeufroy Marciau qui ot l'autre à
« femme en eust ne tenist rien oultre cinquante livres
a de rente que li diz Robert li avoit donné en ma-
« riage. » En effet, les dots des plus grandes dames
n'excédaient jamais, en ce temps, cinquante ou
soixante livres de rente.
Amaury de Craon , premier du nom, de 1222 à
1226. Il était seigneur de Durtal et de Sablé , et fils
de Maurice II de Craon. On vient de voir comment
il se trouvait possesseur de la dignité de sénéchal
des trois provinces. Il fit la guerre en 1222 à Pierre
Mauclerc , duc de Bretagne , et prit sur lui la Guerche
et Châteaubriant ; mais dans le combat du mois de
mars, il fut battu et fait prisonnier avec quelques
seigneurs de Touraine et d'Anjou. Guillaume-le-Bre-
SIENÉCHAUX. 335
ton parle de lui en ces termes, au douzième livre de
sa Philippide :
Hinc sub Aitialrico Cenomanensis, et omnis
Andcgavensis eques, Turonique,et quisquis ab iisque
Carnuto laudis aliquid « vel honoris habebat.
Il mourut en Anjou, au mois de mai 1226, et fut
enterré dans l'abbaye de La Roë. Après sa mort , sa
veuve exerça la charge de sénéchal qu'elle avait ap-
portée en dot à son mari , et dont elle fît hommage^
lige, en 1226, au roi saint Louis, qui dit à ce sujet
dans ses lettres : « Notum sit omnibus quod nos di-
(f lectam et fidelem nostram Johannam de Credona
« recepimus in feminam ligiam nostram de sene-
« caltiâ Andegaviae, Turoniœ et Ccnomanioe tenenda
« de nobis et habenda; sicut bonae memoriœ Guillel-
« mus de Rupibus pater ejus eam tenuit et habuit. »
Jeanne, par cet hommage , s'engagea envers le roi
de s'en rapporter au jugement de ses pairs s'il s'éle-
vait entre lui et elle quelque contestation au sujet de
cette sénéchaussée. Elle eut de son mariage avec
Amaury deux filles et Maurice qui suit.
On lit dans les preuves de l'histoire de Bretagne,
tom i", page 847 , qu'un Thierri de Galardon était
sénéchal de Touraine en 1 220 , et qu'il fit, par ordre
de Philippe-Auguste, une enquête à Nantes au sujet
dos droits du duc de Bretagne sur les sels ; mais il y
a erreur, et ce sénéchal de Poitou ne pouvait l'être
336 HISTOIRE DE TOURAINE.
de la Touraine , puisqu'à cette époque la sénéchaussée
était déjà devenue héréditaire.
Maurice de Craon, quatrième du nom, seigneur
de Sablé, de Briolé , de Chantocé, d'Ingrande, etc.
A la mort de sa mère , en 1 2 36, il hérita de la dignité
de sénéchal. Il avait épousé Jeanne, dont le nom de
famille n'est pas plus connu que l'époque de la mort
de son mari. Elle en eut Amaury II et Maurice que
quelques-uns ont confondu avec son père.
Amaury de Craon, deuxième du nom, seigneur
de Sablé, etc., succéda à son père Maurice IV, dans
la dignité de sénéchal. Il avait épousé Yolande, fdle
de Jean de Dreux , premier du nom , et de Marie de
Bourbon-l'Archambault ; étant mort sans postérité,
en 1 268 , l'office de sénéchal passa sur la tête de son
frère puîné Maurice V.
Maurice de Craon , cinquième du nom , succéda à
son frère , en 1 268 , non-seulement dans la dignité
de sénéchal, mais encore dans les seigneuries de
Craon et de Sablé. Par un compte que rendit à la
chambre Gaultier de Villette, bailli de Touraine,
pour le ternie de l'Ascension 1269, on voit qu'en
cette année Maurice était sénéchal. Il épousa Isa-
belle de Lusignhem , fille de Hugues X , comte de
La Marche, et d'Isabelle, comtesse d'Angoulême,
dont il eut Maurice qui suit, et mourut en 1282.
Maurice de Craon , sixième du nom , succéda à
son père en 1282, et mourut lui-même en 1292,
le II février, qui devait alors être I283. Il avait
SÉNÉCHAUX. 337
épouse, en 1277, Maliaut de Malines, fille de Gau-
tier Berthouletde Marie d'Auvergne. Les enfans nës
de ce mariage furent : Amaury qui suit ; Marie , femme
de Robert de Brienne , vicomte de Beaumont ; Isa-
belle , mariée a Olivier de Clisson ; et Jeanne , morte
sans alliance.
Amaury de Craon, troisième du nom, seigneur de
Sablé et de Briolé, fut, en T292 , le dernier sénéchal
héréditaire des trois provinces. Charles-le-Bel , ayant
conçu le dessein d'éteindre cette dignité , traita d'a-
bord de la sénéchaussée de Touraine avec notre
Amaury qui la lui céda au mois de juin i323j avec
tous les droits et émolumens qui en dépendaient, du
consentement de Béatrix de Roucy , dame de la Suze,
son épouse, qui en donna ses lettres le 4 juin. Il
traita de même avec le roi Philippe de Valois , au
mois de mars j33o, pour celles de l'Anjou et du
Maine, qu'il lui abandonna moyennant mille cinq
cents livres de rente.
Ce fut ainsi que s'éteignit cette dignité, qui s'était
maintenue pendant cent trente ans. Amaury mourut
le 26 janvier i332. Il avait épousé Isabelle, dame
de Sainte-Maure , fille et unique héritière de Guil-
laume IV, seigneur de Sainte-Maure; et en secondes
noces Béatrix, fille de Jean IV de Roucy et de
Jeanne de Dreux. Du premier lit il eut Maurice VIT
et Guillaume de Craon, surnommé le Grand, qui
devint seigneur de Sainte-Maure, comme on l'a vu
à son article.
21
338 HISTOIRE DE TOURAINE.
CHAPITRE II.
GOUVERNEURS DE TOURAINE.
Les baillis, dont les fonctions étaient subordonnées
à celles du sénéclial , devinrent, lors de l'abolition de
cette dignité , les premiers officiers de la province ,
parce que, comme nous Tavons dit, on réunit à ce
titre celui de gouverneur , et celui de bailli n'en fut
distrait que quand les gouverneurs furent créés lieu-
tenans-généraux,
s I-
GRAIfDS-BAILLIS-GOUVERNEURS.
Davoir (Pierre), chevalier, sire de Château-Four-
mont, est le premier bailli de Touraine que nous
trouvons avoir été revêtu du titre de gouverneur. Il
existe à la maison-de-ville de Tours des titres des 29
août i385, 18 août 1 386 et 6 novembre 1387, où
il est nommé gouverneur au bailliage de Touraine.
Il était chambellan de Louis V d'Anjou , duc de
Touraine et roi de Sicile. H y a de lui des lettres
données au Mans, le a3 octobre 1 383 , dans lesquelles
il prend la qualité de lieutenant-général au pajs de
GOUVERNEURS. 33^
Touraine pour mondit seigneur le duc d'Anjou,
Elles sont adressées au sénéchal de Tours.
Il paraît qu'il eut le titre de gouverneur vers Tan
i38o. Il mourut sans enfans, en iSgo.
Prunelé (Jean de ), chevalier , sire d'Herhaut, de
Marchainville et de Beauverger, de l'une des plus
anciennes maisons de la Beauce. Il était chambellan
du roi Charles VI et du duc de Touraine. Celui-ci le
nomma bailli et gouverneur de la province après la
mort du sire de Cliateau-Fourmont. Il mourut, en 1 4 1 7,
dans un âge fort avancé. Il avait épousé Mabille, fille
de Guy-le-Baveux et de Marie d'Amboise.
Remeneuil (Guillaume de), ouRiveneuil , e tmême
Remenel , suivant Froissard , chambellan du roi
Charles VI et duc de Bourgogne , fut pourvu de la
charge de bailli - gouverneur de Touraine, par la
reine Isabeau de Bavière, par lettres du 18 no-
vembre 14 17. Il était fils de Guyon de Remeneuil
et de Jeanne de Brenezay. De Marguerite d'Azay ,
son épouse , il eut un fils qui, comme lui, fut obligé
de sortir de France pour avoir pris le parti du duc de
Bourgogne contre le roi Charles VII. Leurs biens
furent confisqués et acquis a la couronne; mais après
leur mort on les rendit à leurs héritiers.
Avaugour ( Guillaume d' ) , seigneur de Roche-
Mabillc , chambellan du roi Charles VII , issu d'une
des plus illustres maisons de Bretagne , fondue par
la suite dans celle de Rohan - Soubise. Après la dis-
grâce des Remeneuil, en i4?3, il fut nommé bailli-
gouverneur de Touraine , et il assista en cette qualité
22.
34o HISTOIRE DE TOURÂINE.
à l'entrée de Charles VIÏ dans la ville d'Angers , le
jg octobre i424- On assure qu'il fut un de ceux qui
donnèrent au dauphin le mauvais conseil de faire
assassiner le duc de Bourgogne à Montereau, et que
ce fut le motif de sa disgrâce, en i4^5. Il fut en effet
à cette époque privé de son emploi, qui fut donné au
sire de Tassé.
Baudouin de Champagne , seigneur de Tassé ou
Tucé, et de La Bourdaisière, chevalier, conseiller et
premier chambellan du roi Louis XI , grand-cham-
bellan de René , roi de Sicile , fut bailli-gouverneur
de Touraine, en î/^q^S, Il avait assisté à la bataille
du Petit-Baugé, où les Anglais furent défaits le sa-
medi 22 mars 14^1? et fut nommé, en i436, par
Charles VII , pour demander à l'archevêque de Tours
dispense d'âge en faveur du dauphin Louis, fiancé
à Marguerite d'Ecosse.
Il était le second fils de Pierre de Champagne,
premier du nom, et de Marie de Laval. Il épousa
Jeanne , fille et unique héritière du sire de Tusse ^ à
la charge d'en prendre le nom et les armes.
Avaugour (Guillaume d'), de i44o à i/^lfi. Étant
rentré en grâce auprès du roi Charles VII, il fut
réintégré dans son gouvernement , et en donna avis
au parlement par une lettre du 11 avril 144^? où il
est dit : « qu'il plaise à la cour commettre et ordonner
« aucun notable homme , pour être son juge et lieu-
ce tenant à Tours. » Il ne conserva ce gouvernement
que jusqu'en i446' H paraît qu'il n'en avait pas
moins fixé sa résidence à Tours , car y il mourut en
GOUVERNEURS. 34 1
1472 , et fut inhumé le 8 mai aux Cordeliers , dans
la chapelle de Saint-Lidoire, oîi l'on voyait ses armes
dans les vitraux. Sa femme, Blanche de La Tour',
mourut à Angers , le 1 mars de Tannée suivante. Son
corps fut apporté à Tours et enterré auprès de celui
de son mari , ainsi qu'elle l'avait ordonné par sou
testaments
Beauveau ( Bertrand de), de i446 ^ i45o, baron
de Pressigny et de Briançon , chambellan du roi ,
président des comptes, grand-conservateur des do-
maines du roi, gouverneur-bailli de Touraine, capi-
taine des châteaux de Tours et d'Angers , suivant des
titres de i446 et i447- ^ ^^^ envoyé en Ecosse, en
1448 7 avec l'éveque de Maillezais et Guillaume Cou-
sinot 5 maître des requêtes , pour renouveler l'alliance
avec Jacques II. Disgracié par Louis XI, il mourut à
Angers , le 3o septembre i474- I^ avait eu quatre
femmes ; 1° Jeanne de La Tour-Laudry ; 2° Françoise
de Brézé; 3° Ide Duchastelet; 4° Blanche d'Anjou,
dame de Mirebeau. Il fut auteur de la branche de
Beauveau-Pressigny , en Touraine.
Il est peint aux premiers vitraux de la cathédrale
de Tours , à genoux , avec cinq de ses fils ; en regard ,
dans la même vitre , est sa seconde femme Françoise
de Brézé , avec leurs quatre filles , et au-dessous des
armes qui sont d'azur , à un ccusson d'or vidé et rem-
pli d'argent, en cœur à l'orle de huit croisettes d'or,
trois au chef, deux en fasce et trois en pointe. De ses
trois premières femmes , il eut dix-sept enfans, dont
l'aîné, Antoine, continua la brandie.
34^ HISTOIRE DE TOURAINE.
Aubusson (Antoine d') de i45o à 1460, seigneur
de Monteil-au- Vicomte et de Semblançay, cham-
bellan du roi, bailli-gouverneur de Tou raine, jus-
qu'à la fin de l'année i459, car en i458, il rendit
encore une sentence en faveur de l'abbaye de Mar-
moutier. Il servit fidèlement Charles VII contre les
Anglais, se trouva, en i453 , à la prise de Castillon
en Périgord, où le général Talbot fut tué. Accom-
pagné de plusieurs gentilshommes français, il con-
duisit mille hommes de pied à Pierre d' Aubusson ,
son frère, grand-maître de l'ordre de Saint-Jean-de-
Jérusalem , si célèbre par le siège de Rhodes , qui le
fît général de ses troupes.
Il était fils aîné de Renaud d'Aubusson et de Mar-
guerite de Combornc. Il épousa en premières noces
Marguerite de Villequier,^ et en deuxièmes, Louise
de Peyre.
Rar (Jean de), de 1460 à 1466, seigneur de
Raugy, de la Guerche, de Savigny et d'Estrechy,
chambellan des rois Charles VII et Louis XI, général
des finances, bailli et gouverneur de Touraine jus-
qu'en 1 465 , capitaine des villes et châteaux de Tours
et d'Amboise. Il se rendit utile à Charles VII , tant
de ses biens que de sa personne, et contribua beau-
coup à la réduction de îa Normandie. Il fut fait che-
valier le 20 juillet 1449 > aupî'ès du château d'Har-
court, par le célèbre comte de Dunois, à la tête de
l'armée qui était en bataille pour combattre le géné-
ral anglais Talbot. Il mourut le jour de Pâques 1469,
et fut enterré dans l'église des Jacobins de Rourges,
GOUVERNEURS. 343
où Ton voyait sur son tombeau son effigie et son
épitaphe.
Il était fils de Jean de Bar, seigneur de Villemart,
premier valet-de-chambre du roi. On ignore le nom
de sa femme, mais on voit par ses armoiries qu'elle
portait d'azur au cygne d'argent, à la bande de
gueule brochant sur le tout. Il en eut six enfans ,
dont Robert, seigneur de la Guerche et de Chan-
teloup, fut député de la noblesse de Touraine aux
États tenus à Tours , en 1 484.
La Trémouille (George de) , de 1466 à i479j sei-
gneur de Craon , de l'Ile-Bouchard, chevalier de
l'ordre , premier chambellan du roi , bailli-gouver-
neur de Touraine , et bailli des exemptions d'Anjou
et du Maine. Il résulte d'un compte de la ville de
Tours pour i466, que, par délibération du 3o mai,
il futarrêtéparlecorpsde ville qu'illui serait f ait pré--
sent de deux cents écus d' or neuf s ^ pour reconnais-
sance de bailli- nouvel^ et à ce quileût les affaires
de la ville en plus grande considération. Il assista,
en 1 467, aux états-généraux de Tours sous le nom de
sire de Craon , et se trouva à l'affaire de Liège, eu
1468. Chevalier de l'ordre de Saint-Michel , en 1469,
lieutenant-général au gouvernement de Champagne
et de Brie, en i474? il mourut en ï479- ^^ avait
épousé Marie de Montauban , dont il n'eut point
d'enfans.
Il était le second fils de (îeorge P* de La Tré-
mouille, et de Catherine de l'Ile, dame de l'Ile-Bou-
I
344 HISTOIRE DE TOURAI^VE.
cliard , qui porta cette terre dans la maison de La
Trémouille.
George II fut le premier gouverneur de Tou-
raine qui annexa à son gouvernement celui de la ville
et du cliâteau de Tours.
Daillon (Jean de ), de i479 à i48o, seigneur du
Lude , chambellan de Louis XI , et l'un de ses favoris;
capitaine de sa porte et de cent hommes d'armes de
ses ordonnances; gouverneur d'Alençon, du Perche
et du Dauphiné, en i474 î ^^ ^^ ^'i^^^- d'Arras et du
comté d'Artois, en 1477; lieutenant-général enRous-
sillon, et depuis en Picardie, gouverneur, bailli de
Toui'aine , des ressorts et exemptions de l'Anjou et
du Maine, en i479' Il fallait, dit Brantôme, que ce
fût quelque chose de poids , car le roi se connaissait
en gens de bien.
Fils de Gilles de Daillon et de Marguerite de Mon-
beron, il épousa d'abord Renée, dame de Fontaine,
fille de René et de Jeanne de Vendôme, et en
deuxièmes noces Marie , fille de Guy de Laval et de
Charlotte de Sainte-Maure.
Dufbu (Jean), de 1480 à i48.3, seigneur de Ros-
tenay ou Roslrenen , et de Nouâtre, chambellan de
Louis XI, et son premier échanson. Il entra en exer-
cice des fonctions de bailli-gouverneur le 9 novembre
1480 ; mais trois ans après il se vit disgracié et des-
titué de ces deux charges qui furent momentanément
séparées. Celle de grand-bailli fut donnée à Yves Du-
fou, son frère, également chambellan du roi, grand-
GOrVERNEURS. 34$
veneur de France , gouverneur d'Angoulême , et celle
de gouverneur de la ïouraine , à Guy Pot.
Dufou avait épousé Jeanne de La Rochefoucauld ,
fille d'Aj^mar, seigneur de Montbazon et de Sainte-
Maure. De cette alliance sortit Renée Dufou, qui
fut mariée à Louis II de Rohan, auquel elle porta
en dot ces deux seigneuries ainsi que celle de
Nouâtre.
Pot (Guy), comte de Saint-Pol, seigneur de La
Roche-Pot, de Château-Neuf, de Damville, de la
Prugne et de Toiré, chambellan du roi Louis XI,
bailh du Vendômois, fut établi gouverneur de la
Touraine après la disgrâce de Jean Dufou; mais il ne
jouit pas long-temps de cet emploi , car nous trou-
vons qu'il eut un successeur dans le courant de
la même année. Il était le second fils de Renier Pot
et de Radegonde Guénant, auparavant veuve do
Guy V , sire de La Trémouille.
Il épousa Marie de Villiers de l'Ile-Adam , sœur de
Philippe, grand-maître de Rhodes. De cette alliance
naquirent deux enfans : i° Renier , mort sans posté-
rité; 2" Anne, dame de Damville, héritière univer-
selle de son frère. Elle fut mariée, le 17 juillet i484>
à Guillaume, sire de Montmorenci , fils de Jean,
grand-chambellan de France.
Laval (Louis de), de i483 à 1489, seigneur de
Châtillon en Bretagne, chevalier de l'ordre de Saint-
Michel, fut nommé gouverneur de Touraine après
Guy Pot, et le fut aussi du Dauphiné, de Paris, de
Gênes, de Champagne et de Brie. Il était en même
346 HISTOIRE DE TOURAINE.
temps grand-maître des eaux et forêts de France.
Son père , Jean de Montfort , prit le nom et les
armes de Laval h cause d'Anne de Laval , son épouse ,
fille et unique héritière de Guy XII , sire de Laval
et de Vitré, et de Jeanne de Laval, veuve de Ber-
trand Duguesclin , connétable de France.
On l'appelait ordinairement le seigneur de Châ-
tillon , et c'est sous ce titre ce qu'il est désigné dans
plusieurs lettres patentes des rois Charles VII et
Louis XI, ainsi que dans l'histoire de Charles VII,
composée par le hérault d'armes du Berri , et publiée
sous le nom d'Alain Cliartier. Il mourut sans laisser
d'enfans, le 21 août 14B9.
Dufou ( Jean ). Après la mort de Louis de Laval ,
Charles VIII le rétablit dans les deux charges dont il
avait été dépouillé. 11 ne les conserva que trois ans
environ , et s'en démit en faveur de Louis de Rohan
au commencement de l'année 1492-
Rohan (Louis IV de ), de 1492 à i5o2, seigneur
de Guémené, de Montbazon, de Nouâtre, de Sainte-
Maure et de Montauban , fils aîné de Louis III, et
de Renée Dufou. Sur la démission de Jean Dufou,
son aïeul maternel, il fut, par Charles VIII, pourvu
de la charge de bailli-gouverneur de la Touraine , et
reçu au parlement , le 5 juin 149^ ? ^^ présence de
Pierre de Rohan, maréchal de France, son grand-
oncle, et de Louis de Rohan, son père, du consen-
tement de Raoul Dufou, évêqued'Évreux, son grand-
oncle maternel , qui présenta au parlement la procu-
ration eUle consentement de son frère Jean.
GOUVERNEURS. 347
11 avait épouse Marie de Rohan, fille de Jean III,
vicomte de Rohan , et de Marie de Bretagne.
Duchesnel (René), écuyer, seigneur d'Ange,
conseiller et chambellan du roi , succéda à Louis de
Rohan, en iBoi. Nous voyons qu'en 1 5 lo, con-
jointement avec le maire Victor Blondelet , il donlïa ,
le 28 octobre, les provisions de procureur de l'hotel-
de-ville de Tours. Il exerça les fonctions de bailli-
gouverneur jusqu'en i^iQ.
De Beaune ( Jacques ) , vicomte de Tours, seigneur
de Semblançay et de la Carte près Ballan , surin-
tendant des finances, fils de Jean de Beaune et de
Jeanne Binet. Il fut bailli -gouverneur de Touraine
depuis 1 5 19 jusqu'en iSay, époque de son supplice,
dont nous donnons les détails dans notre quatrième
volume. Il avait obtenu , pour Guillaume , son fils
aîné, la survivance de cette charge qui fut enregistrée
à la cour de parlement le ïi décembre iSaa; mais
la condamnation du père priva le fils des avantages
que lui promettaient ces dispositions.
C'est à tort que quelques-uns ont mis Jean de
Beaune, père de Semblançay, au rang des gouver-
neurs de Touraine, en i5i i et iSis; à cette époque,
il avait été exilé à Montpellier par Louis XI, et il
est certain qu'il y mourut de chagrin de sa disgrâce,
en 1480.
La Marthonie (Robert de), chevalier, seigneur
de Bonne en Périgord, province où il était né d'une
très-ancienne famille. Il était maîtrc-d'hotel du roi
François I", sous le règne duquel il eut la direction
348 HISTOIRE DE TOURAINE.
des vivres de toutes les armées de France , conjoin-
tement avec Charles Duplessis , seigneur de Savon-
nières, et Pliilbert Babou de La Bourdaisière. Nommé
bailli-gouverneur en 1527 , il en exerça les fonctions
jusqu'en i53o. Il était le quatrième fils d'Etienne de
La Marthonie , conseiller au parlement de Bordeaux,
et d'Isabeau de Pompadour. Son oncle , Pierre Mon-
dot de La Marthonie , premier-président au parle-
ment de Bordeaux , fut appelé par François I" pour
occuper le même poste au parlement de Paris.
Villemart (Jean de), écuyer, conseiller du roi,
seigneur de La Motthe et de l'Ile-Barbe , fut le der-
nier pourvu du titre de bailli-gouverneur de Touraine.
Il n'exerça ces deux fonctions que pendant les années
i53o et i53i. Alors, elles furent désunies lorsque
les gouverneurs furent érigés en lieutenans-géné-
raux.
§11.
GOUVERNEURS-LIEUTEN ANS-GÉNÉRAUX.
Clermont (Jacques de) , gentilhomme ordinaire de
la chambre du roi. Ce n'est que par les provisions de
son successeur que nous voyons que dès la création
il avait été nommé gouverneur -lieutenant -général
du roi au pays et duché de Touraine , emploi dont ,
est-il dit dans ces provisions , il donna sa démission
en faveur d'Antoine Bohier. Du reste, aucun acte
I
GOUVERNEURS. 349
n'indique qu'il en ait jamais exercé les fonctions, que
Ton peut en conséquence considérer comme ayant
été vacantes depuis i53i jusqu'à i543.
Ce Jacques était fils de Louis de Clermont , maître-
d'hotel de François I" et de Renée d'Amboise , sœur
du cardinal George. Il fut la tige des barons de Bussi
au moyen dei la donation du cardinal, son oncle , qui
lui imposa l'obligation de prendre le nom et les armes
de la maison d'Amboise, qui portait d'or à trois pals
de gueule.
Bohier ( Antoine , deuxième du nom) , de i543 à
i56o, chevalier, baron de Saint -Cyergue, de La
Tour-Bolîier , de Chenonceaux ,Saint-Martin-le-Beau,
Nazelle et Berri, conseiller du roi en ses conseils
d'état etprivé, et général de ses finances. Il fut pourvu
de la charge de lieutenant-général au pays et duché
de Touraine, par lettres patentes du roi François I",
données à la Ferté-sur-Oise le il\ octobre i543, et
enregistrées au parlement le i3 novembre suivant,
avec la clause ordinaire , « pour en jouir et user sui-
« vant les ordonnances royaux, et comme avaient
« accoutumé ses prédécesseurs. » Mais ayant fait re-
montrer au parlement par Gilles Le Maître , avocat
du roi , qu'il était le premier gouverneur-lieutenant-
général qui eût été reçu à la cour, il y eut, le 20 no-
vembre , arrêt portant que la clause, « comme
« avaient accoutumé ses prédécesseurs , » serait rayée.
Il alla le lendemain remercier la cour , et prit séance
au-dessus des conseillers , au rang des lieutenans-
généraux des provinces, usage abrogé depuis, le
35o HISTOIRE DE TOUR AINE.
gouverneur de Paris ayant seul conservé ce privilège.
Antoine était fils de Thomas Boliier , chambellan
des rois Louis XI, Charles VIII et Louis XII, géné-
ral des finances, lieutenant-général des années , mort
au camp de Yigelli, en i524. H avait épousé Anne
de Poncher, dame de Villemenon, dont il n'eut
qu'une fille nommée Anne, mariée à Nicolas de Céri-
zay , baron de La Rivière.
Bourbon ( Louis de ) , surnommé le Bon , duc de
Montpensier , pair de France , souverain de Dombes,
prince de La Roche-sur-Yon , dauphin d'Auvergne ,
comte de Castres et de Morlain , seigneur de Cham-
pigny , fils aîné de Louis de Bourbon , prince de La
Roche-sur-Yon , et de Louise de Bourbon , comtesse
de Montpensier et dauphine d'Auvergne , gouverneur-
lieutenant-général au pays et duché de Touraine ,
d'Anjou et du Maine , par lettres patentes du roi
François II , données au mois d'août 1 56o.
Il se rendit aussitôt dans son gouvernement , visita
toutes les places et forteresses, et arrêta la révolte de
la ville d'Angers, alors remplie de religionnaires
étrangers , dont il ramena plusieurs à son parti , entre
autres Gaspard de Schomberg , seigneur allemand ,
qui fut depuis colonel des reitres , et qui servit uti-
lement les rois Charles IX , Henri III et Henri IV ,
pendant les guerres des protestans.
La guerre civile ayant recommencé en i ^62 , le
duc de Montpensier se rendit à Angers , au mois de
juin, et s'étant jeté dans le château qui tenait pour
le roi , il attaqua les rebelles dans la ville même ,
GOUVERNEURS. 35 1
força les retrancheniens, et fît exécuter les principaux
de ceux qui furent pris. Il reprit ensuite Saumur et
tous les autres châteaux de la province, dont les rc-
ligionnaires s'étaient empares. En Tourainc , ceux-ci
n'attendirent pas son arrivée , et abandonnèrent
Tours, Chinon, Loches, Cormery, Ligueil, l'Ile-
Bouchard , en un mot toutes les places qui , depuis
deux mois , étaient en leur pouvoir.
Ce fut lui qui fit bâtir le château de Champigny
on Touraine. Il en acheva la Sainte-Chapelle, qui fut
dédiée à saint Louis. Il fonda aussi au même lieu un
couvent de religieuses de l'ordre de saint François :
enfin , en 1 565 , il se démit de son gouvernement en
faveur de son fils , pour passer b celui du Dauphiné.
Il mourut à Champigny, le ^3 septembre i582. Il
fut marié deux fois , la première à Jacqueline de
Longwy, comtesse de Bar-sur- Aube , fille de Jean,
et de Jeanne bâtarde d'Angouleme. Sa seconde femme
fut Catherine de Lorraine, fille de François, duc de
Guise; il n'eut point d'enfans de ce dernier mariage,
du premier il eut cinq filles et François de Bourbon
qui suit. ,
Sous lui le gouvernement- général comprenait la
Touraine, l'Anjou, le Maine, le comté de Laval, le
grand et le petit Perche, le Vendomois, le comté de
Blois, les bailliages d'Amboise et du Loudunois,
division qui, comme on va le voir, reçut quelques
restrictions sous son successeur.
Bourbon (François de), duc de Monlpensier, de
Châtcllerault et de Saint-Fargeau , pair de France ,
i
3^5a HISTOIRE DE TOURAINE.
souverain de Dombes , prince de La Roche-sur- Yon ,
dauphin d'Auvergne, marquis de Mëzières , comte de
Mortain et seigneur de Champigny, ne en i542. On
l'appelait le prince dauphin d'Auvergne, du vivant
de son père, auquel il succéda en i565 jusqu'en
iS^o dans le gouvernement de Touraine, suivant
les provisions qui lui en furent données par Charles IX
à Champigny , le 3o septembre. Peu de temps après
il se démit du gouvernement d'Anjou, entre les mains
du roi , qui l'en dédommagea par celui d'Orléans et
d'Étampes. Les lettres lui en furent délivrées à Mou-
lins le premier mars 1 566, et vérifiées au parlement
avec les provisions de celui de Touraine le 1 1 mai
suivant ; « aux conditions de garder les ordonnances
« royaux , de ne rien entreprendre contre l'autorité
a de la cour , et de n'avoir qu'un lieutenant en cha-
-Jc^çun de ses gouvernemens. » On voit par là qu'ils
se réduisaient à deux. Son père étant passé depuis
au gouvernement de Bretagne, il le remplaça dans
celui du Dauphiné , par provisions données au camp
cle Thonne-Boutonne le lo septembre 1069. Il s'en
démit en if)^5, et obtint le gouvernement-général
de Normandie , sur la démission du duc d'Epernon ,
par lettres du 1 5 juillet i488. Il y commanda jusqu'à
sa mort, arrivée à Lisieux, le 4 j^^*^ 1^9^? ^ l'^g^
de cinquante ans. De Renée d'Anjou , marquise de
Mézières, en Touraine, il eut un fils unique nommé
Henri , né à Mézières le 12 mai i573, et mort en
1608.
Cossé ( Artus de ) , seigneur de Gonnor , comte de
L
GOUVERNEURS. i^SS
Secôndigny, chevalier des ordres du roi , grand-pan-
noticr, marécha^ de France, et surintendant des
finances, fut pourvu de la charge de gouverneur,
lieutenant-général en Touraine , par lettres patentes
de Charles IX , vérifiées au parlement le 1 7 avril
iSyo. Il eut part aux affaires sous la régence de Ca-
therine de Médicis, mais n'ayant pas gardé assez de
mesure dans sa conduite et dans ses paroles , il se
rendit suspect d'intelligence avec le duc d'Alençon ,
et fut enfermé avec le duc de Montmorenci. Cette
disgrâce ne fit que l'attacher davantage aux intérêts
du prince , dont la protection parvint à lui procurer
la liberté. Il acquit beaucoup de gloire au siège de
Metz, dont il était gouverneur, lorsque cette place
fut vainement attaquée par Charles-Quint, avec une
armée de cent mille hommes. 11 se signala également
aux affaires de Saint-Denis et de Moncontour. Il
était de petite taille , mais bien fliit, et si brave que
le duc de Montmorenci, en mourant, le désigna au
roi comme l'un des plus capables de lui succéder au
commandement des armées. Il obtint le bâton de
maréchal, en 1^6'j , et le collier de l'ordre du Saint-
Esprit, en décembre i5i8. On l'appelait ordinaire-
ment le maréchal de Cossé , pour le distinguer de
son frère qu'on nommait le maréchal de Brissac. On
l'avait surnommé le Maréchal des Bouteilles, parce
que, aimant la bonne chère, il ne marchait jamais
sans une grande quantité de provisions de toute es-
pèce. Il quitta le gouvernement de la Touraine en
l'année 1 676 , et mourut dans son château de Gonnor
3. . a3
354 HISTOIRE DE TOURA-INE.
en Anjou , le 1 5 janvier 1 582. Il eut pour père René
(le Cosse, grand -pannetier et grand - fauconnier de
France , et pour mère Charlotte de Gouffîer. Devenu
veuf de Française DuBouchet, dont il eut trois filles,
il épousa en secondes noces Anne-Charlotte Le Roi ,
dont il n'eut point d'enfans.
La Tour ( Henri de ) , duc de Bouillon , prince de
Sedan , vicomte de Turenne et maréchal de France ,
de 1576 à ifï83. Le gouvernement de Touraine et
d'Anjou lui fut donné le i4 mai 1576, par lettres de
François de France , duc d'Alençon , qui avait en
apanage l'Anjou et la Touraine. Castelnau rapporte
dans ses Mémoires que Charles IX, ayant eu quelque
soupçon qu'il favorisait secrètement le parti protes-
tant en Normandie, lui fit permuter ce gouvernement
avec le duc de Montpensier pour celui de Touraine :
cependant, nous n'avons trouvé cette particularité
dans aucun autre historien. Il eut une très-grande
part aux événemens les plus mémorables , tant dans
la paix que dans la guerre, sous les rois Charles IX,
Henri III , Henri IV et Louis XIII , commanda une
compagnie de trente lanciers au siège de La Rochelle,
en 1 573 , combattit pour le roi de Navarre à la ba-
taille de Coutras , en i586, le suivit au siège de
Paris, en 1690, et fut envoyé par lui, en i5gi,
vers Elisabeth, reine d'Angleterre. Il fut également
député vers les princes protestans pour leur deman-
der du secours, défit en i5g^ les troupes du duc
de Lorraine ; enfin , Henri IV le choisit une seconde
fois pour aller conclure un traité d'alliance contre les
I
GOUVERNEURS. 355
Espagnols avec les états de Hollande et la reine Eli-
sabeth. On l'accusa d'être un des principaux moteurs
des troubles qui agitèrent la France sous la régence
de Marie de Médicis , jusqu'à la mort du maréchal
d'Ancre.
Il termina sa carrière à Sedan, le aS mars i6^3.
Son père était François de La Tour, vicomte de Tu-
renne , gouverneur de Bresse , et sa mère Eléonore
de Montmorenci , fille du connétable. Jacques VI ,
roi d'Ecosse, en parlant de cette famille, disait
qu'elle était une des premières de la chrétienté.
En premières noces , il épousa Charlotte de La
Mark , duchesse de Bouillon et princesse de Sedan ,
morte sans postérité. Malgré cela, il conserva la prin-
cipauté de Sedan pour ses enfans du second lit,
sans avoir égard à la revendication du comte deMau-
levrier qui s'en prétendait légitime héritier. De sa
seconde femme, Isabelle de Nassau, fille de Guil-
laume, prince d'Orange, i 1 ewt, indépendamment de
six filles , Frédéric-Maurice , duc de Bouillon , et
Henri de La Tour, devenu depuis si célèbre sous le
nom de maréchal de Turenne , l'un des plus grands
hommes de guerre que la France eût produits.
Aurilly ( Jacques d' ) , conseiller de François de
France, duc d'Alençon et duc apanagiste de Tou-
raine, grand-maître de sa garde-robe, fut nommé
par lui, en i583, au gouvernement de Touraine :
mais le duc étant mort en i584 , le roi lui retira ce
gouvernement dans la même année.
Joyeuse (Henri de), comte du Bouchage, puis
23.
356 HISTOIRE DE TOURAINE.
duc (le Joyeuse , pair et maréchal de France, chevalier
des ordres du roi , grand-maître de sa garde-robe ,
de i584 à i585. Après la mort du duc d'Aîençon ,
Joyeuse fut pourvu par le roi du gouvernement-général
de Touraine, d'Anjou, du Maine et du Perche:
mais il ne le conserva que peu de temps , ayant été
nommé, vers le commencement de i585, au gouver-
nement de Languedoc qu'il quitta au mois de sep-
tembre 1587 pour entrer aux Capucins, où il fit
profession sous le nom de père Ange. Il sortit de son
couvent en i ^gi , à la sollicitation des seigneurs du
Languedoc, pour reprendre le gouvernement d-e cette
province pendant les guerres de la Ligue. Il fut fait
maréchal de France, en 1696 : mais trois ans après
il rentra aux Capucins, oii il mourut le o.'j septembre
1608, âgé de quarante-six ans. C'est de lui que Vol-
taire a dit dans la Henriade :
Il prit , quitta , reprit la cuirasse et la haire.
Son père Guillaume II, vicomte de Joyeuse, avait
eu trois garçons de son mariage avec Marie de Bas-
tarnay, héritière du comté du Bouchage. Lui-même
avait épousé Catherine de La Valette, dont il eut
Henriette-Catherine, femme en premières noces de
Henri de Bourbon, duc de Montpensier, et en secondes,
de Charles de Lorraine, duc de Guise.
Dubois (Louis), seigneur des Arpentis, chevalier
des ordres du roi , maître de sa garde-robe et capi-
taine de cinquante hommes d'armes de ses ordon-
GOUVERNEURS. SSy
nances, fut (Uabord lieutenant général au gouverne-
ment de ïouraine , par lettres du 17 janvier iSyS,
puis gouverneur lieutenant- général vers la fin de
i585. La guerre civile s'étant alors déclarée dans les
provinces, il eut ordre de se rendre de suite dans son
gouvernement pour apaiser les troubles suscités par
les querelles des catholiques et des protestans. Il fit
plusieurs réglemens utiles à la discipline militaire
dans ces temps de désordre et d'anarchie , et fut dé-
coré du collier du Saint-Esprit , au huitième chapitre
tenu par Henri 111, le 3i décembre i585, où il est
qualifié de gouverneur lieutenant -général de ïou-
raine.
Il était fds de Louis Dubois, deuxième du nom,
chevalier, seigneur des Arpcntis, Montreuil , Au-
trêche, etc., et de Louise, fdle de Jacques de Sur-
gères, et avait épousé Claudine, fille de Claude de
Robertet , seigneur d'Alluye, et d'Anne Briçonnet.
Il mourut en i588.
Souvré ( Gilles de ), marquis de Courlenvaux,
conseiller du roi en ses conseils d'état et privé , pre-
mier gentilhomme de sa chambre, capitaine de cent
hommes d'armes de ses ordonnances, fut pourvu de
la charge de gouverneur lieutenant-général au duché
de Touraine, par Henri III, après la mort de Louis
Dubois , avec lequel il avait été reçu chevalier de
l'ordre, en i585. Il se signala h la bataille de Con-
tras, en 1587, et conserva la ville de Tours sous
l'obéissance du roi , pendant les troubles de la Ligue.
Il y reçut Henri III avec toute sa cour au mois de
358 HISTOIRE DE TOUR AINE.
janvier i ^89 , et fut choisi par Henri IV pour être
gouverneur du dauphin Louis. Crée maréchal de
France en i6i5, il mourut en 1626, âge de quatre-
vingt-quatre ans. Dès l'année t6jo, il s'était démis
de son gouvernement en faveur de son fils.
Il avait suivi en Pologne Henri III, qui eut tou-
jours pour lui beaucoup d'affection. Ce prince avait
résolu de perdre le maréchal de Montmorenci.
o L'exécution de ce projet , dit de Thou, fut commise
« à Gilles de Souvré , grand-maître de la garde-robe :
« mais Souvré était trop honnête homme et trop en-
« nemi de la violence pour obéir aveuglément. 11 sut
a habilement traîner l'affaire en longueur. Il donna
« au repentir le temps de succéder à la haine , et aux
a faux bruits de la mort de Damville, frère du maré-
« chai , celui de s'évanouir. Ce fut ainsi que le roi , à
a qui la reine sa mère avait persuadé que celt,e mort
« était nécessaire, fut malgré lui redevable a Souvré
« de la vie de ce grand homme. »
Gilles de Souvré était fils de Jean , seigneur de
Courtenvaux , et de Françoise Martel. Il avait épousé
Françoise de Bailleul , dont il eut Jean qui suit , et
Jacques de Souvré , grand-prieur de France. Ce fut
en faveur de Gilles que la terre de Courtenvaux fut
érigée en marquisat par lettres patentes du mois de
mars 1609.
Souvré (Jean de), marquis de Courtenvaux, con-
seiller du roi en ses conseils d'état et privé , chevalier
de ses ordres, premier gentilhomme de sa chambre,
capitaine de Fontainebleau et de cent hommes d'armes
GOUVERNEURS. Sog
des ordonnances, fut nommé au gouvernement de
Touraine, sur la démission de son père, datée du
mois de mai i6to.
Le 26 mai 1616, il rendit une ordonnance pour
Tembeliissement de la ville de Tours , et pour les for-
tifications que Henri IV avait prescrit d'y faire dès
Tannée 1 59 1 . Cette ordonnance est signée par le père et
par le fils, quoique le premier ne fût plus gouverneur
depuis 16 10. Le fils à son tour se démit de cet em-
ploi entre les mains du roi , dès l'année 1627.
Il avait épousé Catherine , fille de Charles de Neu-
ville , marquis de Villeroi , baron d'Allincourt , dont
il eut Louis de Souvré lue à l'attaque des lignes
d'Arras, le a juin 1640, et Charles^ marquis de
Courtcnvaux, qui n'eut que trois filles dont l'une fut
mariée au marquis de Louvois.
Coëffier, dit Ruzé (Antoine ), marquis d'Effiat,
de Ghilly et de Longjumeau, baron de Massy et de
Cinq-Mars, chevalier des ordres du roi, conseiller en
ses conseils d'état et privé, surintendant des finances,
grand- maître des mines et minières de France, et
grand-bailli de Touraine.
Le marquis de Courtenvaux s'étant, comme nous
l'avons dit, démis du gouvernement de Touraine, celui-
ci en fut pourvu par lettres patentes de Louis XIII,
données à Villeroi, le 27 juillet 1627. Il s'en démit
en i63o pour passer à celui d'Anjou , ensuite à ceux
d'Auvergne et du Bourbonnais. Il fut fait maréchal
de France, en iG3i
Le 3o septembre 16x0, il épousa Marie, fille de
36o HISTOIRE DE TOURAINE.
Jean de Fourcy, surintendant des bâtimens, dont il
eut Martin, marquis d'Effiat , Henri, marquis de
Cinq-Mars, Jean, abbé de Saint-Sorlin, et Marie
première femme de Charles , duc de La Meilleraye ,
pair et maréchal de France. Le roi l'avait envoyé
prendre le commandement de l'armée en Allemagne,
lorsqu'il mourut en chemin à Luzzelstein, près Trêves,
le 27 juillet i632.
On peut consulter son article au tome iv de cette
Histoire.
Orléans (François d'), comte de Saint-Pol, duc
de Fronsac et de Château-Thierri , pair de France et
chevalier des ordres du roi. Les provisions en vertu
desquelles il fut nommé gouverneur de Touraine
sont datées de Paris, le 3i janvier i63o, enregis-
trées au parlement le 1 mars suivant. Il avait aupa-
ravant le gouvernement-général de l'Orléanais, Blai-
sois, Vendomois et pays Charlrain, dont le roi dis-
posa au mois de février de la même année en faveur
de son frère le duc d'Orléans.
Nous voyons qu'il prit possession de son gouver-
nement de ToîU'aine, et fit son entrée solennelle dans
sa capitale, le i3 août i63o : mais il n'en jouit pas
long-temps, étant mort à Château-Neuf-sur-Loire, le
7 octobre i63i , ne laissant d'Anne de Caumont,
marquise de Fronsac, son épouse, auparavant veuve
de Claude d'Escars, seigneur de Carency, ([u'un fils
nommé Eléonor, tué au siège de Montpellier, le 3
septembre 1611.
Il était le deuxième fils de Léonor d'Orléans, duc
GOUVERNEURS. 36 1
de Longueville et d'Estouteville , souverain de Neuf-
Châtel, marquis de Rothelin , et de Marie de Bour-
bon, fille uiiiquc <h François de Bourbon, comte de
Saiut-Pol, et d'Adrienne d'Estouteville.
Aubépine (Charles de F), chevalier, marquis de
Château- Neuf, abbé de Préaux, conseiller du roi en
ses conseils d'état et privé, commandeur de ses ordres,
né le 23 février i58o. D'abord conseiller au parle-
ment de Paris, en i6o3, il fut envoyé ambassadeur
en Hollande, en 1609. II négocia en 161 7 le retour
des princes , fut chancelier des ordres du roi , en
survivance de son père, l'an 1620; envoyé en 1621
et 1622 vers l'empereur Ferdinand, et vers Bethlem
Gabor , prince de Transylvanie , pour réconcilier ces
deux souverains dont la mésintelligence mettait l'Al-
lemagne en feu; ambassadeur à Venise, en 1626,
puis en Angleterre, en 1629 et i63o, au retour il
reçut les sceaux de la main du roi , le 4 novembre ,
et fut nommé gouverneur lieutenant-général de Tou-
raine par lettres patentes données à Saint-Michel , le
22 juin i632. Malgré tant d'importans services, de-
venu suspect au cardinal de Richelieu , le roi lui or-
donna de remettre les sceaux entre les mains de La
Vrillièro , secrétaire d'état , ce qu'il fît à Saint-Ger-
main-cn-Laye, le soir du 25 février i633.Lemême
jour il fut arrêté et conduit prisonnier au château
d'Angoulême, oîi il demeura jusqu'au mois de janvier
1643. Il fut, du moment de son arrestation, privé de
fait de son gouvernement de Touraine. Cependant ce
ne fut qu'en 1637 que le roi lui donna un successeur.
362 HISTOIRE DE TOÙRAINE.
Henri II de Bourbon , prince de Condé , fut établi
par Louis XIII lieutenant- général, commandant
pour les provinces de Nivernais , Berri, Bourbonnais ,
Touraine, Poitou, Aunis , Saintonge, Angoumois,
Haute et Basse-Marche, Limousin, et Haute et Basse-
Auvergne. Cette commission est datée de Paris , le
12 août i63i. Il paraît en effet que , déjà en 1682,
le prince de Condé commandait à Tours , puisque ce
fut lui qui, au moyen de lettres de cachet dont il les
menaça , contraignit les membres du corps-de-ville à
admettre les jésuites repoussés par eux et par la gé-
néralité des habitans.
Lorraine ( Henri de ), comte d'Harcourt et d'Ar-
magnac , chevalier des ordres du roi , grand -écuyer
de France et sénéchal de Bourgogne.
te ne fut, comme nous l'avons dit, qu'en 1637
que le roi se décida à retirer définitivement les pro-
visions du marquis de Château-Neuf, qui furent
transmises à Henri de Lorraine par lettres patentes
données à Saint-Germain-en-Laye , le i5 décembre
de la même année. Il y est dit : « qu'il avait com-
te mandé l'armée navale avec autant de conduite que
« de valeur, fait descente dans les pays ennemis, et
« remporté tous les avantages qu'on pouvait attendre
« pour la gloire et la réputation des armes de Sa
« Majesté; qu'il avait donné des preuves signalées de
« son courage dans l'action des îles de Sainte - Mar-
« guérite et de Saint -Honorât en Provence, que
« quoique les ennemis eussent fortifié ces îles avec
« tant de soin , de peine et de travail , qu'on croyait
GOUVERNEURS. 363
a cette entreprise une des plus difficiles et hasardeuses
a qui se fussent trouvées depuis un fort long temps ,
« néanmoins il avait attaqué les retranchemens des
« ennemis avec tant de conduite et de courage qu'il
« les avait chassés. »
Le 4 janvier i638, il prêta serment de fidélité
entre les mains du roi à Saint-Germain-en-Laye, et
ses lettres furent enregistrées au parlement le 27
avril suivant. En lô/p , il se démit de ce gouverne-
ment pour ceiui de Guienne; en i643, il obtint la
charge de grand-écuyer, et fut envoyé dans la même
année ambassadeur en Angleterre. De là il passa
avec le titre de vice-roi en Catalogne , et eut ensuite
le gouvernement d'Alsace, dont il se démit pour
celui d'Anjou. H mourut subitement le iS juillet
1666.
Il était le second fils de Charles de Lorraine , duc
d'Elbeuf , grand-écuyer de France , et de Marguerite
Chabot.
De son mariage avec Marguerite de Combout ,
veuve d'Antoine Delage, duc de Puy-Laurens, sor-
tirent cinq garçons et une fille : i* Louis de Lorraine,
comte d'Armagnac , grand-écuyer de France ; 2* Phi-
lippe , dit le chevalier de Lorraine ; 3° Alphonse-
Louis , chevalier de Malte , général des galères de la
religion ; 4" Raymond-Bcranger,abbé de Saint-Faron;
5** Charles, comte de Marsan; 6" Armande- Hen-
riette, abbesse de Notre-Dame de Soissons.
Pottier (Louis), marquis de Gesvres, maréchal-
de-camp, bailli de Caen et de Valois, de 1642 à
364 HISTOIRE DE TOUKAINE.
1643. Le roi lui donna le gouvernement de Touraine
aussitôt que le comte d'Harcourt fut nommé à celui
de Guyenne ; mais il n'en jouit que pendant à peu
près l'espace de dix mois , car il fut tué le 6 août de
l'année suivante , au siège de Tbionville , n'étant âgé
que de trente-trois ans , sans avoir été marié , et fort
regretté à cause de sa bravoure et de ses autres qua-
lités. Il était fils de René Potier , duc de Tresmes , pair
de France , capitaine des gardes-du-corps du roi, et
de Marguerite de Luxembourg.
Aubépine ( Charles del'), de i643 à j65o.
Louis XIV étant monté sur le trône, le marquis de
Château-Neuf sortit enfin de sa prison après dix an-
nées d'une injuste captivité. Le roi lui rendit son gou-
vernement de Touraine, le 29 décembre de cette
même année, immédiatement après la mort du mar-
quis de Gesvres. Le mercredi 2 mars i65o, il reçut
une seconde fois les sceaux des mains du même La
Vrillière à qui il les avait remis en i633. Ce fut
alors qu'il donna sa démission du gouvernement de
Touraine ; mais l'âge et la prison ayant affaibli sa
santé, il rendit les sceaux au président MoIé, le 3
avril i65i , et mourut à Leuville, près Montlhéri ,
le 26 septembre i653, âgé de soixante-treize ans et
demi. Son corps fut porté à Bourges, oîi il eut un
tombeau sur lequel on lisait son épitaphe.
Son père était Guillaume de l'Aubépine , seigneur
de Château-Neuf-sur-Gher , chancelier des ordres du
roi, et sa mère Jeanne Bochetel.
Aumont (César d') , marquis d'Aumont et de Clair-
GOUVERNEURS. 365
vaux , vicomte de I^ Guerclie en Touraine, seigneur
d'Ivry-les-Châteaux, conseiller du roi en ses con-
seils d'état et privé, chevalier de ses ordres et capitaine
de cinquante hommes d'armes de ses ordonnances.
Après la démission du marquis de Château-Neuf, il
fut pourvu du gouvernement de Touraine, au mois
de juin i65o. Ce fut de son temps que l'on déblaya
et que l'on forma à Tours la place qui porte encore
son nom , quoique depuis quelque temps on lui ait
imposé celui de place du Cirque. Comme il n'y avait
point alors d'issue pour aller au Mail , on en prati-
qua une au moyen dim terrain qu'on acheta de la
famille Chaloineau dont cette rue a pris et conserve
le nom. Il mourut le 20 avril 1661.
Il était fils aîné de Jacques d'Aumont , baron de
Chappes , gentilhomme de la chambre du roi , prévôt
de Paris , et de Charlotte-Catherine de Villequier , et
par conséquent petit-fils du maréchal d'Aumont, qui
avait servi les rois Henri III et Henri IV avec un
égal succès à la guerre et dans les négociations.
Sa première femme fut Renée de Laval , fille de
René aux Épaules, dit Laval, et sa seconde fut Marie
Amelot de Carnetin , de laquelle il eut cinq filles et
un garçon mort en bas âge.
Beauvilliers (François de), dnc de Saint-Aignan,
pair de France , comte de Séry, vicomte de Jalongnes,
baron de La Ferté-Hubert, de La Salle et de Ché-
mery , seigneur de Montigny-la-Grange , chevalier des
ordres du roi, premier gentilhomme de sa chambre,
enfin gouverneur de ville et citadelle du Ilayre.
366 HISTOIRE DE TOUKAINE.
La charge de gou ver neur-iieutenant- général de Tou-
raine, vacante par la mort du marquis d'Aumont ,
lui fat accordée par lettres patentes données à Fon-
tainebleau, le i" mai 1661. Il s'en démit en 1664.
Il commença par servir pendant les années i634
et i635, en qualité de capitaine d'une compagnie de
chevau-légers , dans l'armée que le cardinal de La
Valette commandait en Allemagne. Il se distingua
surtout au combat de Steinbruck en Alsace, sous le
duc de Rohan, ainsi qu'à la retraite de Mayence où,
avec quatre cents chevaux, il soutint par sa valeur
et sa prudence l'effort de plus de quatre mille cava-
liers ennemis , étant resté seul de tous les comman-
dans à la tête de son escadron. En i636 , il se trouva
au siège de Dole, où il fut blessé à la cuisse, ensuite
à ceux de Corbie , de Landrécies , de Chimay , de
Barlemont , deMaubeuge et d'Yroi. Il était au passage
de Colme , en i645, et à la prise du fort de Lincke,
en 1649- I^O'^s de la première guerre civile, il rendit
au roi un service important en lui amenant à Saint-
Germain quatre cents gentilshommes qu'il avait levés
à ses frais, et en i6v^o eu remettant sous son obéis-
sance la grosse tour de Bourges, et plusieurs châ-
teaux en Berri. Chevalier de l'ordre en 1661 , il fut
créé duc et pair en i663 , et mourut le 16 juin
1687. Il aimait et cultivait les lettres. On a de lui
quelques poésies éparses dans différens recueils et
qui l'avaient fait admettre à l'académie française.
Il était fils aîné d'Honorat de Beauvilliers , comte
de Saint-Aignan , mestre-de-carap de la cavalerie
GOUVERNEURS. 367
légère de France, et de Jacqueline, fille du maréclial
de Montigny. En premières noces il avait épousé An-
toinette Servien , dont il eut douze enfans , cinq
garçons et sept filles. Il eut encore deux garçons et
une fille de sa seconde femme, Françoise Géré de
Rancé.
Son fils Paul, duc de Saint- Aignan , fut gouver-
neur du duc de Bourgogne , père de Louis XV , et
mérita que l'académie française proposât son éloge
pour sujet de l'un de ses prix.
Courcillon (Philippe de), marquis de Dangeau ,
comte de Mesle et de Givray , baron de Sainte-Her-
mine , de Saint-Amand et de Bressuire , seigneur de
La Bourdaisière et de Chausseraye , fut pourvu du
gouvernement de Touraine par lettres patentes don-
nées à Saint-Germain en Laye, le 4 niars 1664, sur
la démission du duc de Saint-Aignan.
Après avoir été colonel du régiment du Roi , il fut
nommé aide-de-camp de Sa Majesté, en lô'ji, et
continua toujours de servir en cette qualité dans toutes
les campagnes que le roi fît depuis. En 1679, il fut
choisi pour être placé auprès du dauphin, et en
i685, pour être chevalier d'honneur de la dauphine,
sur la démission du duc de Richelieu que le roi ve-
nait de nommer pour exercer le même emploi auprès
de la duchesse de Bourgogne , et d'envoyer au-devant
de cette princesse pour la recevoir aux frontières de
France et de Savoie. Le 3o décembre 1688, il reçut
le collier de l'ordre du Saint-Esprit, et en 1691 ,
368 HISTOIRE DE TOURAmE.
après la mort de Louvois qui était grand-vicaire de
l'ordre de Notre-Dame du Mout-Garmel et de Saint-
Lazare, il en fut nommé grand-maître au spirituel
et au temporel , tant de ça que de là les mers. L'an-
née suivante, le roi le fît conseiller-d'état d'épée.
L'académie française l'admit au nombre de ses
membres, en 1667, et celle de Padoue en 1680.
Le roi le désigna en 1687 , après la mort du duc de
Saint-Aignan , pour être le protecteur de l'académie
d'Arles. Il fut aussi employé dans plusieurs ambas-
sades.
Il tenait son nom du château de Courcillon sur les
confins du Maine et de la Touraine. Sa famille, l'une
des plus anciennes de France , était alliée à celles de
Craon , Perrenay , Montfort , Chabot , Saintré , Tais ,
Liancourt, en un mot à ce qu'il y avait de plus
illustre. Le roi les avait toujours traités de cousins,
jusqu'à l'époque où ils changèrent de religion.
Le marquis de Dangeau, né en i638, mourut à
Paris, en r720, âgé de quatre-vingt-deux ans. Ses
mémoires, long-temps connus manuscrits, n'ont été
imprimés par extrait qu'en 181 7.
Il avait fait recevoir en survivance du gouverne-
ment de Touraine le marquis de Courcillon , son fils,
qui mourut avant lui. Celui-ci avait pour mère Sophie
de Bavière, comtesse de Loevensteln , sœur du car-
dinal prince de Furstemberg, seconde femme du mar-
quis de Dangeau , qui, de son premier mariage avec
Françoise Morin , sœur de la maréchale d'Estrées ,
GOTJVERPnEURS. ^69
n'eut qu'une fille marie'e à Honore-Charles Dalbert ,
duc de Chevreuse, auquel elle porta en dot tous les
biens de la maison de Courcillon.
BourLon-Gondé ( Charles de ), comte de Cliaro-
lais, pair de France, chevalier des ordres du roi, né
le 19 juin 1700. Il partit secrètement de Chantilly,
en 1717 , pour aller faire la campagne de Hongrie,
en qualité de volontaire dans l'armée impériale contre
les Turcs. Après cette campagne il voyagea en Italie,
et de là se rendit en Bavière, et fit un assez long
séjour à la cour électorale de Munich. Il revint en
France , en 1720, et le 16 juin, fut admis au con-
seil de régence. Le o septembre suivant il succéda
au marquis de Dangeau dans le gouvernement de
Touraine. Il représenta le comte de Toulouse à la
cérémonie du sacre de Louis XV, le 2 5 octobre 1722,
fut fait chevalier des ordres dans l'église de Reims,
le 27 du même mois, et mourut sans alliance en
1760.
Il était fils de Louis III de Bourbon-Condé , et de
Louise-Françoise de Bourbon, légitimée de France,
appelée auparavant mademoiselle de Nantes, fille de.
Louis XIV.
Choiseul f Etienne-François), d'abord duc de Choi-
seul-Stainville , ensuite duc de Choiseul - Amboise ,
pair de France, grand-bailli des Vosges et de Mire-
court, fut colonel du régiment de Navarre, en 1745;
brigadier des armées, en 17/iG; maréchal-de-camp,
en 1748; ambassadeur à Rome, en 1753, et à
Vienne, en 17^9; chevalier des ordres du roi et de
3. ^ 24
#r
370 HISTOIRE DE TOUR AINE.
la Toison-d'Or, en 1761 ; ministre de la guerre la
même année jusqu'à la paix; colonel - général des
Suisses et Grisons, en 1762; ministre des affaii*es
étrangères , en 1 768 ; enfin ministre de la marinie ,
et pour la seconde fois , des affaires étrangères.
Après la mort du comte de Cliarolais , en 1 760 ,
il obtint le gouvernement de la Touraine , où il s'é-
tait établi par l'acquisition de la terre de Chanteloup,
dont il fit rebâtir le cbâteau avec beaucoup de ma-
gnificence.
Le duc de Cboiseul , sacrifié dans des intriguer de
cour au parti des ducs d'Aiguillon et de Richelieu,
appuyés par la favorite Dubarri, se vit exiler à Chan-
teïoup , en 1770. Ce fut là qu'il composa et qu'il im-
prima lui-même sa comédie intitulée : «Le Royaume
(( d'Arlequinerie , ou Arlequin prince héréditaire , de-
« venii homme d'esprit par amour , y> satire fort mé-
diocre contre Louis XV . dont il n'aurait pas dû ou-
.blier les bienfaits. Malgré sa disgrâce, il ne fut pas
^i- ! pi^i^e de son gouvernement de Touraine, qu'il con-
" vj^% serva tant qu'il vécut. Il était né en 1719, et mourut
à Paris en 1785.
Il était fils de François - Joseph de Cboiseul ,
deuxième du nom , baron de Stainville , et de Beau-
pré, que le comte de Stainville son oncle maternel
. avait institué son héritier universel, à la charge de
prendre son nom et ses armes. Sa mère était Fran-
çoise-Louise de Bassompierre.
Le 12 décembre 1760, il épousa Louise -Hono-
rine Crozat du Châtel , de laquelle il n'eut point d'en-
i
É
GOTVER NEUR S . 3^1
fans. Nous avons déjà parlé de lui a Tarlicle d'Ani-
boise.
Estaing ( Jean-Bapliste-Charles-Henri, comte d'),
marquis do Saillans et de Cliateau-RÊgnault , vicomte
de Ravel , lieutenant-général des ^^f^s , vice-amiral
de France, chevalier des ordres du roi, grand
d'Espagne de premiète classe, citoyen de l'état de
Géorgie , fut d'abord colonel d'un régiment d'infan-
terie , passa dans l'Inde en qualité de brigadier, et
fut fait prisonnier en 17^9, au siège de Madras.
Relâché sur parole, il n'en porta pas moins les armes;
il équipa deux bâtimens , détruisit le comptoir de
Gomron dans le golfe Persique, et s'empara de
tous les établissemens anglais dans l'île de Sumatra :
mais pris une seconde, il fut envoyé en Angleterre,
et jeté dans un cachot à Portsmouth. En 1763, il
fut fait lieutenant-général des armées navales y'tîhe-
vaîier des ordres du roi et gouverneur de Saint-Do-
mingue, en 1764, jusqu'en 1766. La France, en
1778 , ayant envoyé des forces de terre et de mer au
secours de la nouvelle Angleterre, il y commanda
une escadre de douze vaisseaux , et prit l'île de la
Grenade, après avoir échoué devant celle de Sainte-'"
Lucie. Blessé deux fois au siège de Savanah , qu'il
manqua de prendre par un délai de vingt-quatre
heures imprudemment accordé à l'ennemi, il fut
contraint de repasser en France, en 1780. L'année
suivante il eut le commandement d'une flotte qu'il
ramena heureusement de Cadix à /Brest, et il était
24.
toTtr
3n'2 iiisTorRi: de iôura.ine.
encore à la tête des flottes combinées de France et
d'Espagne, lorsque la paix se fît en 1783, entre la
France et l'Angleterre.
La mort du duc de Clioiseul , en 17 85, lui pro-
cura le gouveaBnent de Touraine, où, comme son
prédécesseur , il avait ses principales possessions. Ce
fut à ce titre, qu'en 1787, il fut nommé à l'assem-
blée des notables. Dans les crises de la révolution il
crut pouvoir ménager les deux partis , et se rendit
suspect a la cour, comme il le fut ensuite aux comi-
tés de la Convention, qui le firent périr sous la hache
révolutionnaire, le 29 avril 1793 , à l'âge de soixante-
cinq ans. Il était né en 1729, de Charles-François
d'Estaing, marquis de Saillans , et de Marie-Henriette,
fille de François-Edouard Colbert, marquis de Man-
ié vrier.
En 1746, il avait épousé Marie de Rousselet de
Château-Regnault , fille du maréchal de ce nom , de
laquelle il eut, en 1768, un fils mort à l'âge de dix
ans , en qui s'éteignit la famille d'Estaing qui datait
au moins du douzième siècle.
Il portait de France au chef d'or. On rapporte à
ce sujet, qu'un d'Estaing combattant, en 12 14, à la
bataille de Bovines auprès de Philippe-Auguste, et
lui ayant sauvé la vie, obtint de ce monarque le pri-
vilège de porter sur son écu les armes de France.
, Le comte d'Estaing aimait et cultivait les lettres.
11 est auteur d'un petit poëme intitulé le Rêve.,
Paris , 1755, in-i 2 , et des Thermopjles, tragédie de
GOUVERJSEURS. 373
circonstance , Paris, 1792, in-8. Il fut le dernier des
gouverneurs de Tourainc, dont les fonctions et le
titre furent abolis en 1790.
s ni-
LTEUTENAKS- GÉNÉRAUX DU ROI AU GOUVERNEMENT
DE TOUR UNE.
Les lieutenans -généraux , avant que François V^
eût institué des gouverneurs , avaient dans les pro-
vinces le même emploi et la même autorité que ceux-
ci eurent depuis. Ils étaient chargés de maintenir les
sujets dans l'obéissance due au souverain, de rassem-
bler la noblesse en cas de guerre, en un mot, de
faire tout ce qu'eût fait le monarque lui-même , s'il eût
été présent. Cependant leurs fonctions embrassaient
plus particulièrement tout ce qui concernait les
armes; ils avaient en conséquence la direction des
gens de guerre dans leur département qui , par rap-
port à nous, ne se bornait pas toujours à la ïouraine,
mais qui souvent comprenait aussi l'Anjou , le MaiiTè,
le PoTOu, l'Aunis, et quelquefois aussi le Limousin
et la Saintonge.
Dans le principe, la commission qu'ils recevaient
du roi n'était que pour une année. Lorsqu'elle était
expirée, il leur fallait de nouvelles lettres s'ils n'é-
taient pas remplacés. Par la suite la durée de leurs
fonctions fut indéterminée.
Louis de Bourbon et François , son fils , tous les
3^4 HISTOIRE DE TOURAINE.
deux princes du sang, avaient eu sous Charles IX le
gouvernement de la Touraino : mais étant obligés
d'être presque toujours à la cour, il s'attribuèrent le
droit de se choisir des lieutenans pour les remplacer
pendant leur absence, ce qui mit le roi dans la né-
cessité d'y établir aussi un lieutenant de sa part , afin
de balancer l'autorité du gouverneur, et c'est pour
cela qu'il prii le titre de lieutenant-général du roi.
Cette double autorité ayant beaucoup plus d'incon-
vénient que d'avantage , on ota bientôt aux gouver-
neurs le droit usurpé de nommer leurs lieutenans , et
les rois se le réservèrent à eux seuls.
Guy, septième du nom, comte de Forêt, est le
premier que nous trouvions avoir été revêtu , en
i347 1 ^" ^^^^'^ ^^ lieutenant-général du roi es par-
ties de Poictou , Sainctonge , Touraine , Limousin
et autres pays circouvoisins. 11 était fils aîné de
Jean , comte de Forêt. Il épousa Jeanne , fille de
Louis 1", duc de Bourbon et de Clermont , surnommé
le Grand, et de Marie de Hainaut. De cette alliance
sortit Jeanne de Forêt, dame d'Ussel, femme de
Béraud II, comte de Clermont et dauphi© d'Au-
vergne. '0
Saintré (Jean de), connu dans l'histoire sous le
nom du Petit Jehan de Saintré, chambellan du roi
Jean , sénéchal d'Anjou et du Maine, fut établi, vers
l'an i35i, lieutenant -général du roi dans les pro-
vinces de Touraine, Poitou, et autres lieux circon-
voisins. Il était né en Touraine et fut amené à la cour
de Philippe de Valois, à l'âge de treize ans, par le
GOUVERNEURS. '^']0
seigneur de Pouiliy , son parent. Ce fut un des plus
vaillans chevaliers de sou temps ; il resta toute sa
vie incommodé des blessures qu'il avait reçues, en
i356 , à la bataille de Poitiers, et mourut au Pont-
Saint-Esprit sur le Rlione , le i3 octobre i368, âgé
de cinquante-cinq ans. ( P oj: son article dans notre
Biographie, toineiv.)
Clermont ( Jean de ) , dit de Nesle, chevalier , sei-
gneur de Chantilly, vicomte d'Aunay, maréchal de
France, fit les fonctions de lieutenant-général de
Touraine, au mois de mai t356, visita les fortifica-
tions de la ville et du château de Tours, accompagné
des principaux de la noblesse de la province qui
étaient venus pour le compHmenter , et y ordonna
quelques ouvrages : mais il fut tué quatre mois après
la bataille de Poitiers.
Fioissard rapporte que la veille du combat , pen-
dant une suspension d'armes, il eut un démêlé avec
Jean Chandos, l'un des plus vaillans chevaliers d'An-
gleterre , et il en décrit ainsi le sujet. Pendant la
suspension d'armes obtenue par l'entremise du car-
dinal de Périgord qui voulait faire la paix entre les
deux couronnes, Chandos vint visiter le camp fran-
çais. Clermont de son coté voulut aller voir celui des
Anglais , où il remarqua que la bannière de Chandos
portait sa devise, c'est-à-dire u/ie dame bleue ou-
vrée de bordures à rais de soleil. Il s'arrêta devant
Chandos, et lui demanda fièrement depuis quand il
portait sa devise. L'Anglais lui répondit sur le même
ton : Depuis quand portez-vous la mienne? car elle
376 HISTOIRE DE TOURAINE.
€sl aussi bien à moi qu'à vous. Clermont repartit :
Je >vous ferai voir demain que vous n'avez pas droit
de la prendre. Et vous me trouverez prêt à la
défendre, répliqua Chandos. Clermont ajouta en
en se retirant , que c'étaient là les manières ordi^
naires des Anglais, qui prennent des Français ce qui
leur semble beau, sans rien inventer d'eux-mêmes.
Ces paroles furent cause de sa mort; car le lende-
main, jour de la, bataille, son cheval ayant été tué
sous lui , les Anglais ne voulurent pas le recevoir à
rançon, et lui ôtèrent la vie, pour se venger de ce
qu'il avait dit de leur nation.
Il avait été lieutenant du roi en Picardie, eu
i,353,\avant que de l'être en Touraine. Il était le
I , r: Second fil^de Raoul de Clermont , seigneur de Mon-
«^j^^* gobert, etficïë Jeanne de Chambly. Son épouse, Mar-
guerite de Mortagne , vicomtesse d'Aunay , le fit pcre
de Jean de Clermont, marié à Claire de Lezay de
Boëslec.
Louis , (ils de France , comte d'Anjou et du Maine,
et depuis duc de Touraine, second fils du roi Jean
et de Bonne de Luxembourg, succéda, en i356, à
M Jean de Clermont dans la lieutenance- générale de
;' Touraine, dont il fut pourvu par Charles, duc de
Normandie , son frère aîné, qui prit le gouvernement
&t^^ du royaume pendant lu prison du roi, son père. On
HB trouve dans les archives de la maison -de- ville de
W^ ^ Tours, qu'il ordonna divers ouvrages pour la défense
de cette ville, dont il donna ses lettres le mercredi
avant la Toussaint de l'an 1359.
V
GOUVERNEURS. 377
, Craon ( Guillaume de ) surnommé le Grand , vi-
comte de ClKiteaiidiin , chambellan de Philippe de
Valois et du roi Jean , remplaça le duc d'Anjou vers
la fin de l'année i357, et tut nommé lieutenant-gé-
néral des parties de ïouraine , d'Anjou, du Maine
et de Bretagne. Il porta depuis le titre de lieutenant
de M. le duc de Normandie, dauphin de Viennois
pour ces mêmes provinces.
C'était le troisième fils d'Amaury de Craon , troi-
sième du nom , dernier sénéchal héréditaire de Tou-
raine, et d'Isabeau de Sainte-Maure. Il épousa Mar-
gueiite de Flandre , vicomtesse de Châteaudun , dont
il eut sept enfans. Il mourut vers i384.
Larchevêquc (Guillaume), seigneur de Parthenay,
de Semblançay , de Saint-Christophe, de Bezay et des
Ponts < de-ïours ; lieutenant- général pour le roi ès-
parties de Touraine, Poitou et Saintonge , entre les
rivières de Loire et de Charente, par nomination du
mois de décembre i358.
Il était fils unique de Jean Larchevêquc, premier
du nom , seigneur de Semblançay , et avait épousé
Jeanne de Mathefelon.
Boucicaut (Jean Le Meingre de ), premier du nom,
maréchal de France, donna, le lo février i36i , ses
lettres en qualité de lieutenant-général du roi en
Touraiué, par lesquelles il accorda aux habitans (Je
la ville de Tours un certain droit de péage pour h s
mettre à même de faire face à une sonnne-de dix-»
huit mille moutons d'or qu'ils étaient obligés de
378 ÏILSTOIIIE DE TOUR AIR E.
payer (i) à la ciiarge qu'il eu serait enipioyë quatre
mille à la clôture et fortillcations de la ville. Il y a un
autre titre de l'an iSôy, où il prend seulement la
qualité de capitaine pour le roi es-parties de Poitou,
deTouraine, Limousin et autres pays circoiivoisins.
Nous parierons plus amplement de lui dans notre
biographie.
Bueil (Jean de), seigneur de Montrésor, conseil-
ler et chambellan du roi, grand -maître des arbalé-
triers de France. Il fut envoyé, l'an iSôg, en qualité
de lieutenant-général , pour commander les gens de
guerre en Touraine , Anjou et Poitou. Froissard dit
qu'ils se montaient à vingt mille combattans, dont
Jean de Bueil était capitaine avec Louis de Saint-
Julien et Guillaume Des Bordes. Saint - Julien était
capitaine et gouverneur de La Roche-Pozay, et Des
Bordes l'était de La Haye. De Bueil et Duguesclin
chassèrent, en loGg , les Anglais qui occupaient ces
différentes places , ainsi que le château de Preuilly.
Il avait épousé Marguerite de Clermont, dame de
Marmande , dauphine d'Auvergne, dont il eut Jean,
sire de Bueil, qui fut amiral de France.
Monberon (Jacques de), seigneur d'Avoir, con-
seiller et chambellan du roi , fils de Robert et d'Yo-
lande de Mathas , était un des plus zélés partisans
du duc de Bourgogne. Il fut nommé, vers la fin de
(i) Le mouton d'oi- fin, de 5i au marc, pesait 'î deniers 6 grains, et
valait 2 5 sous d'alors, ou a 4 fr. 5o cent, d'aujomd'liui.
GOUVERNEURS. 879
i4i6, lieulenant-géneral pour le roi eu ïouraine,
où il fit, en il[iS, quelques réglemeiis clans lesquels il
s'intitule lieutenant-général pour le roi ès-parties de
ïouraine, d'Anjou, du Maine, de Poitou, Saintonge
et La Rochelle. On voit aux archives de Tours une
lettre de Jean II, duc de Bourgogne , dont l'adresse
est â notre cher et hien-aimé cousin^ le sieur Mon-
beron , maréchal de France et gouuerneur de Ïou-
raine : mais dans tous les autres actes il est^seule-
ment qualifié de lieutenant-général.
Il fut fait maréchal de France à la place de Pierre
de Rieux, seigneur de Rochefort, qui avait suivi le
parti du dauphin Charles, régent du royaume pen-
dant la maladie de- Charles VI , son père , et qui fut
destitué le 22 janvier i4''iï.
De sa première femme Marie ;, fille de Renaud de
Maulévrier , et de Béatrix de Craon , il eut deux
enfans, savoir : François, haron de Monheron , et
Yoland, femme de Michel-Juvénal des Ursins. Sa
seconde femme fut Marguerite, comtesse de Ton-
nerre.
Nous sommes fondé à croire qu'entre Jean de
Bueil et lui il existe une lacune que toutes nos re-
cherches n'ont pu nous mettre à même de remphr;
car, comme nous l'avons dit, ces sortes de commis-
sions n'étant que pour un an , sauf renouvellement ,
il ne doit pas paraître probable qu'il n'y ait eu aucun
autre lieutenant -général dans/ un espace de plus de
quarante ans, c'est à-dire depuis iSÔg, époque de la
nomination de Jean de Bueil,jusqu'à celui-ci, en i4i6.
38o HISTOIRE DE TOURAINK.
Harcourt (Jean ci' ). comte d'Aumale et de Mor-
tain , seigneur d'Anvers et de Quatre-Mare , né en
1396 , lieutenant et capitaine-général de Normandie,
capitaine de la ville et château de Rouen , ainsi que
de la forteresse de Sainte-Catherine-du-Mont, par
provisions du il[ avril 1/117, fut nommé lieutenant-
général pour le roi , dans les provinces de ïouraine ,
d'Anjou et du Maine, et il y en exerça les fonctions
en 1422 et i4?3. Il défît les Anglais sur les fron-
tières du Maine et de la Bretagne , vers le commen-
cement de 14^4) tandis qu'ils s'en retournaient char-
gés de butin, et emmenaient avec eux beaucoup de
prisonniers. Il leur tua quatorze cents hommes sur
la place, et plus de trois cents dans leur retraite,,
leur reprit tout leur butin , et fit prisonnier leur chef
Alexandre, frère du comte de Suffolk. Il fut tué le
J'y août de la même année, à la bataille de Verneuil-
au-Perche. Il était fds de Jean VII, comte d'Har-
court et d'Aumale , et de Marie d'Alençon.
Il avait épousé Marguerite de Preullay, vicomtesse
de Dreux. On assure cependant qu'elle ne fut point
sa femme, et que leur fils, Louis d'Harcourt, arche-
vêque de Narbonne , fut légitimé par lettres du roi
données à Ruffec, au mois d'avril jâl\i.
Orléans ( François d'), premier du nom , comte de
Dunois et de Longueville, grand -chambellan de
France, gouverneur du dauphin de Viennois, fils de
Louis XI.
On ne voit point qu'après la mort de Jean d'Har-
court, il ait été nommé d'autres lieutenans-généraux
GOUVKRNr.URS. 38 1
pour le roi , jusqu'à celui-ci , qui en eut les provisions
pour les pays deïouraine, Anjou, Maine et Poitou,
par lettres patentes du grand-sceau, données à Paris,
par Louis XI, le 29. avril if\']/\. Sa commission expi-
rant, il en reçut une nouvelle, également pour un
an, datée du Plessis, le ai janvier i^'jS.
Il était né de Jean d'Orléans, comte de Dunois et
de Longueville, connu dans l'histoire sous le nom
de bâtard d'Orléans. Il épousa Agnès de Savoie,
sœur de la reine Charlotte, femme de Louis XI, dont
il eut François II, duc deLopgucville.
Beaumont (Jacques de), seigneur de Bressuire,
de La Haye, de Lamothe Saint-Héraye , de Beaumont-
la-Ronce, de Lezay, clc. , capitaine de cent arque-
busiers, sénéchal de Poitou et d'Angoumois, et
chambellan du roi Louis XI, qui le choisit, en i479>
pour commander ses troupes dans les provinces de
Touraine et d'Anjou, avec le titre de lieutenant-
général. Il était fils d'André de Beaumont, seigneur
de Lezay, et de Jeanne deTorsay. Sa femme, Jeanne
de Rochechouart-Mortemar, ne lui donna que trois
filles.
On remarque encore ici une interruption dans les
lieutenans-généraux. Il est probable qu'il n'en fut
point nommé sous Charles VIII, Louis XII et Fran-
çois I" : du moins n'en trouve-t-on aucunes traces.
Champagne (Jean de), sire de Pescheseul, Parce,
Avoisé, Ravaudun, Vallon, Clervaux , Bailleul, le
Plcssis-Fourmantière, le Plessis-Tacé, Crénon , la
Réaulté, Martigny, Beaumont, Duretal, Lézigné,
38a ' HISTOIRE DE TOUR AINE. *
Saint-Bernard, Magne, Béni, Longcharaps, Briant,
Bessé et la Vauvrille, premier baron du Maine, che-
valier de l'ordre du roi , gentilhomme ordinaire de
sa chambre, capitaine de cent hommes d'armes de ses
ordonnances, fut créé, en i542, par le roi Henri II,
lieutenant-général des provinces deTouraine, d'An-
jou et du Maine. 11 était connu sous le nom de
Grand-Jean , à cause de sa taille élevée. Sa haine
contre les protestans dégénérant en cruauté réflé-
chie , il en fît noyer un grand nombre dans le vivier
de sa terre de Pescheseul , qu'il appelait le grand
Gobelet. Son fanatisme allait si loin que peu s'en
fallut, dit-on, qu'il ne fît subir le même sort à sa
femme, sur le simple soupçon qu'elle inclinait vers la
réforme. Il sauva la vie à Charles IX, qui avait pensé
périr dans la Sarthe , en 1 5^ i , et mourut à Pescheseul
le 3 juillet 1576.
Il était fils de Pierre III , sire de Champagne , et
d'Anne de Fourmantière. Sa femme , anne de Laval ,
lui donna deux fils et deux filles.
Brichanteau (Nicolas de ) , seigneur de Beauvais et
de Nangis , chevalier des ordres du roi , et capitaine de
cinquante hommes d'armes de ses ordonnances. Ce
fut le duc de Montpensier, gouverneur en chef de la
Touraine, qui l'en créa lieutenant-général en i562.
Il fît preuve de beaucoup de bravoure à la bataille
de Dreux, oîi il reçut plusieurs blessures graves, des
suites desquelles il mourut dans son château de
Nangis , en i564j laissant de sa femme Jeanne Da-
guerre, Antoine de Brichanteau, marquis de Nangis,
'iip
GOUVERNEURS. 383
grând-aiTiîral de France, mort en 1617. Il était fils
de Louis de Brichanteau et de Marie de Veres.
Chabot (Paul de), seigneur de Glairvaux, cheva-
lier de l'ordre du roi , capitaine de cinquante hommes
d'armes de ses ordonnances. 11 fut lieutenant-général
de Toiiraine , également par nominalion , en i563,
de Louis, duc de Montpensier. Quoiqu'il prît le
ûtre de lieutenant -général du roi, en la ville de
Tours et pays de Touraine, en l'absence de moaséï»
gneur le duc de Montpensier , il n'en est pas moins
vrai qu'il n'était que l'un de ces lieutenans que les
gouverneurs se choisissaient eux-mêmes.. Celui qui
précède était dans le même cas. On trouve nne or-
donnance de Paul de Chabot, du 21 août i563,
interprétative d'un règlement fait la veille par le duc
de Montpensier pour la police de la ville de Tours.
11 était fils de Robert de Chabot , seigneur d*As-
premoat, et d'Antoinette d'illiers. Il avait épousé
Jacqueline, fîUe de Jacques de Montigny, de laquelle
il n'eut point d'enfans. «
Le Roi ( François ) . comte de Clinchamp , sei-
gneur de Chavigny et de La Baussonnière, capitaine
de cinquante hommes d'armes, des ordonnances et de
cent gentilshommes de la maison du roi , fut créé
chevalier de ses ordres, le 3i décembre 15^8, et
pourvu de la charge de lieutenant -général des pro-
vinces d'Anjou, de Touraine et du Maine, par la
faveur du duc de Guise, et pour partager l'autorité
du duc de Montpensier , gouverneur en chef. Il reste
plusieurs réglemens qu'il fit à Tours pour la disci-
r
384 HISTOIRE DE TOUR AINE.
pline militaire , pour la garde et la défense de la ville ,
pendant les années i56i, i563, i564 et i565, ce
qui prouve qu'il exerçait concurremment avec les
deux précédens. Le roi le nomma depuis gouver-
neur du château de Cliinon.
Ce fut en sa faveur que la terre de Clinchamp
fut érigée en comté par lettres patentes du mois de
décembre i565. Il mourut aveugle, le i8 février
1606, âgé de quatre-vingt-sept ans, ne laissant
point d'enfans de ses deux femmes Antoinette de
ïurenne , et Renée d'Avaugour , dite de Bretagne.
Son père était Louis Le Roi, seigneur de Chavigny,
capitaine des gardes du roi.
Tripier (Innocent), seigneur de Monterud et de
Pleumartin , chevalier de l'ordre du roi , gouverneur
et lieutenant -général des pays et duchés d'Orléans
et d'Etampes, et aux pays de Touraine, Maine, comtés
de Laval, grand et petit Perche, Blois, Dunois,
bailliages d'Amboise et de Loudunois pour le prince
dauphin, ^près lui les lieutenans-généraux au gou-
"vernement de Touraine furent nommés indépendam-
ment et sans le concours du gouverneur en chef.
Prie (René de), baron de Toucy, seigneur de
Monpépon , chevalier des ordres du roi , conseiller
en son conseil privé, capitaine de cinquante hommes
d'armes, lieutenant - général aux pays et duché de
Touraine, depuis i568 jusqu'à i^'j'j.
C'est un des hommes qui aient le mieux mérité de
la province par sa conduite pleine de sagesse et de
modération , pendant les guerres intestines suscitées
GOUVERNEURS. 385
par la différence des opinions religieuses. Après les
déplorables excès auxquels les deux partis s étaient
portés en Touraine, il sut si bien se concilier l'es-
time et Taffection de Tun et de l'autre qu'il eut le
talent, sinon de les réunir, ce qui était impossible,
du moins de les maintenir en paix et de les empêcher
de faire aucune entreprise de la nature de celles qui
avaient déjà fait répandre tant de sang. Ce fut sur-
tout dans l'horrible journée de Saint-Earthélemi que
la province recueillit le fruit de sa prudence et de
son humanité. La Touraine resta calme et dut se
trouver heureuse de n'avoir pas un gouverneur du
caractère de Jean de Champagne, car à coup sûr
des flots de sang auraient inondé cette province, ou
les protestans étaient en grand nombre. Nous avons
déjà rendu hommage à la noble résistance qu'il
opposa à des ordres sanguinaires.
Il était fils d'Edme de Prie , baron de Toucy , et
de Charlotte de Rochefort-Pleuvant, et avait épousé,
le 19 novembre iSoq, Jossine de La Selle, fille d'An-
toine , seigneur de Beusville.
Dubois (Louis), seigneur desArpentis, fut pourvu
de la charge de lieutenant-général au gouvernement
de Touraine, par lettres patentes du roi Henri III,
du mois de novembre 1577, vérifiées au parlement,
le 17 janvier 1578. Il fut depuis nommé au gouver-
nement en chef la Province, ainsi qu'on l'a vu au
paragraphe précédent, auquel nous renvoyons.
La Châtre (Claude de), chevalier, baron de la
Maison-Fort, chevalier des ordres du roi , capitaine
3. 25
386 HISTOIRE DE TOURAINE.
de cent hommes de ses ordonnances et gentilhomme
ordinaire de sa chambre, fut d'abord page du con-
nétable de Montmorenci, qui contribua beaucoup à
son avancement pendant ses premières campagnes.
S'étant ensuite attache au duc de Guise, il se jeta
dans le parti de la Ligue, pour lequel il s'empara du
Berri, ce qui lui valut d'être nommé par ce même
parti maréchal de France, en i585. Il avait été
nommé lieutenant-général ail gouvernement de Tou-
raine et des villes d'Amboise, Loches, Châtillon-
sur-Indre, Buzançais, Loudun et pays Loudunois.
Ce fut lui qui , eii i Sg i , facilita l'évasion du prince
de Joinviile , détenu au château de Tours.
S'étant réconcilié avec Henri IV , il lui remit les
villes d'Orléans et de Bourges, et fut confirmé par
lui dans la charge de maréchal de Ft-ance. Il fit les
fonctions de connétable de France, aU sacre de
Louis XIII , qui lui donna , la même année , le com-
mandement de l'armée qu'il envoyait dans le pays de
Juliers. Il mourut le i8 décembre i6i4j âgé de
soixante-dix-huit ans.
Il était fils aîné de Claude de La Châtre , baron de
la Maison-Fort, et de Catherine de Menou, fille de
Jean de Menou. De Jeanne Chabot, son épouse, il
eut Louis de La Châtre, comme lui maréchal de
France.
Ruzé (Henri d'Effiat, dit) , marquis de Cinq-Mars,
grand-écuyer de France, né en 1612. Son père,
ayant été nommé gouverneur de Touraine, lui fit
obtenir, en 1628, quoique âgé seulement de seize
GOUVERNEURS. 387
ans , les provisions de lieutenant-général pour le
roi, clans la même province. Il en exerça les fonc-
tions jusqu'en i632, époque où il s'en démit en
faveur du marquis de Ruffec.
C'était le second fils du maréchal d'Effîat , dont
nous avons parlé à l'article des gouverneurs , et de
Marie de Fourcy. Par la faveur du cardinal de Riche-
lieu, il fut nommé capitaine des gardes et grand-
maître de la garde-robe, en j 537 ' P"*^ grand-écuyer
de France, en lôSg. Le grand crédit dont il jouis-
sait auprès de Louis XIII ayant donné de l'ombrage
au cardinal, celui-ci le traita fort durement, et lui
défendit de se trouver dorénavant , en tiers , dans les
conseils secrets du roi. Le cardinal cependant allait
être disgracié lorsqu'il découvrit le traité que Gaston
d'Orléans, le duc de Bouillon et Cinq-Mars avaient
fait avec l'Espagne. Il en donna avis au roi, et Cinq-
Mars eut la tête tranchée à Lyon, le 12 septembre
1642. ( Voj. notre Biographie, tome iv.) Il n'avait
pas été marié.
Aubépine ( François de 1' ), chevalier, seigneur de
Haute-Rive, marquis de Ruffec , maréchal des camps
et armées du roi, colonel d'un régiment d'infanterie
française entretenu en Hollande, frère de Charles
de l'Aubépine , marquis de Château-Neuf, gouver-
neur de Touraine, en i632 et i645 , fut nommé
lieutenant -général de cette province, par lettres du
2 '2 juin i632 , et prêta serment entre les mains du
roi , le 21 juillet suivant : mais son frère ayant été
arrêté, ainsi que nous l'avons dit précédemment, il
25.
y
f
^m:
388 HISTOIRE DE TOURAINE.
se retira à Sedan , et de là à Leyde , où il entra au
service du prince d'Orange. Il passa seul le fossé à
Bréda , et contribua pour beaucoup à la prise de
cette ville, dont il fut établi gouverneur. Il mourut
à Paris, le i'^ mars 1670, âgé de quatre-vingt-quatre
ans. Il avait épousé, le 17 novembre 1637 , Eléonore
de Yolvire , marquise de Ruffec, fille unique de Phi-
lippe de Vol vire, marquis de Ruffec, et d'Aymerie
de Rochecbouart - Mortemar, dont il eut deux gar-
çons et deux filles.
Gassion (Jean de) avait déjà acquis une grande
réputation militaire, lorsqu'il obtint la charge de
lieutenant-général au gouvernement de Touraine,
par lettres de Louis XIII, du 4 septembre i64o,
dont il prêta serment de fidélité entre les mains du
roi, le 6 mars 164 1. Nommé maréchal de France,
le 17 novembre i643, il reçut un brevet du roi,
qui lui , ?rmeltait de traiter de l'emploi de lieutc-
iiant-gcnéral , dont il se démit, en 1644? en faveur
du marquis d'Hervaut.
Gassion , l'un des plus grands capitaines de son
tem'J)», commença à servir dès l'âge de seize ans,
dans la compagnie des gendarmes du prince de Pié-
mont, suivit le parti du duc deRohan,dans la guerre
des religionnaires, se signala au siège de Pignerol ,
aux combats de Veillane, de Carignan et de Gazai. Il
passa ensuite au service de Gustave, roi de Suède,
sous lequel il fit des prodiges de valeur qui lui méri-
tèrent d'être nommé capitaine de ses gardes. Ce prince
ayant été tué à Lutzen, en i632, Gassion repassa
I
GOUVERIVEURS. 389
en France avec son régiment, et continua de se dis-
tinguer dans toutes les occasions par une intrépidité
quelquefois imprudente , mais toujours heureuse.
Il ne trouvait rien d'impossible , et lorsqu'on objec-
tait quelques difficultés au cardinal de Richelieu, il
répondait : Gassion les lèvera. En butte aux tracas-
series du cardinal Mazarin , il s'exposa en simple
soldat au siège de Lens, où il fut blessé d'un coup
de mousquet, le iS septembre 1647. Il en mourut à
Arras, le 2 octobre suivant, n'ayant jamais été marié,
parce que, disait-il, il voulait mourir soldat et gar-
çon.
Il était né à Pau , le 20 août 1 609 , de Jacques
Gassion, président au parlement de Béarn, et de
Marie d'Esclaux.
Isoré (George), chevalier, seigneur de Pleumar-
tin , marquis d'Hervaut , conseiller du roi en ses
conseils d'Étal et privé, capitaine de cent Iv^mes de
ses ordonnances , obtint les provisions de lieStenant-
général pour le roi en Touraine, le 1 août 16/^4 > a"
moyen de la cession que lui en avait faite le maré-
chal de Gassion , et prêta serment de fidélité entrél;^.
les mains de Louis XIV , le 1 y du même mois. Sé'l^*"
.lettres portent que « Sa Majesté n'avait pas pu faire
« un meilleur choix que celui de sa personne, tant à
« cause de ses louables et recommandables qualités ,
a que pour les témoignages particuliers qu'il avait
« donnés , de longue main , de sa grande fidélité et
« affection à Sa Majesté et à son Etat , que pour la
« prudence et conduite qu'il avait fait paraître dans les
390 HISTOIRE DE TOURAINE.
a emplois honorables qu'il avait eus dans les années
t( dedans et dehors le royaume , dans lesquels il s'était
« signalé en sa valeur et générosité. » Le roi , vou-
lant récompenser plus particulièrement son mérite ,
augmenta ses gages de trois mille livres , ce qui les
porta à neuf au lieu de six qu'ils étaient auparavant ,
et l'on y ajouta l'entretien de douze gardes et d'un
capitaine.
Aubépine ( François de 1' ). Le marquis de Châ-
teau-Neuf, son frère, ayant été rétabli dans son gou-
vernement de Touraine, celui-ci, rentré en France,
sollicita et obtint également de rentrer dans l'em-
ploi de lieutenant-général , ce qui ne lui fut pas très-
difficile , ce même frère ayant été de nouveau nommé
garde-des-sceaux ; il fut donc réintégré en vertu de
deux arrêts du conseil des 12 juin et 2 septembre
i65o. ( F'oj'. plus haut son premier article.)
Isoré ( George ) , marquis d'Hervaut , obtint à son
tour, le 3 juin i65i , un arrêt du conseil qui le ré-
tablissait dans les fonctions de lieutenant-général. Il
ne les reprit cependant qu'à la suite d'un arrange-
ment fait avec le marquis de Ruffec. Il était fils aîné
de René Isoré, deuxième du nom , baron d'Hervaut,
et de Marguerite de Chambéraud. Son aïeul , Hono-
rât Isoré , avait épousé Madelaine Babou de La Rour-
daisière.
De sa femme Marie de Roncherolles de Pont-
Saint-Pierre il n'eut qu'un fils qui fait l'objet de
l'article suivant.
Isoré (René, troisième du nom), chevalier, mar-
GOUVERNEUBS. SqI
quis d'Hervaut et de Pleumartiii , licutcnant-général
pour le roi dans le Haut-Poilou, obtint, en 1661,
la survivance de son père , pour en jouir conjointe-
ment avec lui , et à la charge d'en faire les fonctions
pendant son absence. Ce fut pour lui que la terre de
Pleumartin fut érigée en marquisat par lettres pa-
tentes du mois de janvier i652.
Il e'pousa Marie-Gabrielle Chasteignier de La
Roçlie-Posay , fille de Charles et de Charlotte Jous-
seran de Londigny.
Mathieu Isoré d'Hervaut, *de cette même famille
de Touraine, fut nommé archevêque de Tours, en
1694.
Razilly (Gabriel de Launay de), chevalier, mar-
quis de Razilly, seigneur de Beaumont en Véron,
Vélort, Fontenay et les Aumêles , conseiller du roi,
en ses conseils d'Etat et privé. Après la mort du
marquis de Pleumartin , il lui succéda dans l'emploi
de lieutenant-général au gouvernement de Touraine ,
par lettres patentes données à Versailles , au mois
d'avril 1676, et prêta serment de fidélité entre les
mains du roi , au mois de mai suivant.
En 1690, il fut nommé sous-gouverneur des ducs
de Bourgogne , d'Anjou et de Berri , petits-fils de
France et fils du grand dauphin , choix qui doit don-
ner une haute opinion de son mérite et de sa probité,
puisque par là il se trouvait associé à deux hommes
tels que Bossuet et le duc de Montausier.
Il était né dans cette contrée de l'arrondissement
de Chinon qu'on nomme le Véron , au château de
3C)1 HISTOIRE DE TOURAÏNE.
de Razilly, qui a donné son nom à cette ancienne-
famille de Touraine. Son père était Claude Delaunay
de Razilly , gouverneur des îles de Rhé et d'Oleron,
vice-amiral de France , ensuite vice-roi de la Nou-
velle-France. Nous en parlons dans notre quatrième
volume. Sa femme le fit père de cinq garçons et de
sept filles. Le second de ses fils lui succéda.
Razilly ( Armand - Gabriel Delaunay de ) , cheva-
lier , marquis de Razilly, par le décès de son frère
aîné, mort colonel du régiment de son nom. D'abord
guidon de la gendarmerie , lorsque son père eut
cessé de vivre , en 1726, le roi , dans la même année ,
le pourvut de l'emploi de lieutenant-général au gou-
vernement de Touraine, qu'il conserva jusqu'à sa
mort, arrivée au château de Razilly, dans le cours
de l'année 1769. Ainsi, depuis 1676, la charge de
lieutenant-général avait été occupée par le père et
le fils pendant l'espace de quatre-vingt-treize ans
consécutifs.
Argenson (Marc-René de Voyer d' ), deuxième du
du nom , marquis d' Argenson , vicomte de La Guerche
et de La Roche de Gennes, baron des Ormes, com-
mandeur des ordres du roi, ministre d'État, direc-
teur-général .des haras de France , etc. , fut pourvu
de la charge de lieutenant-général pour le roi au
gouvernement de Touraine , après la mort du mar-
quis de Razilly, en 1769, et la conserva jusqu'à sa
mort, en 1782. Son fils, âgé seulement alors de onze
ans, lui fut donné pour successeur; mais son extrême
jeunesse ne lui permit pas d'en exercer les fonctions.
GOUVERNELRS. SqS
Il était né de Marc-Pierre , comte d'Argenson ,
intendant de Tours , en 1721 , et ensuite ministre de
la guerre, en 174'^? et avait épousé Constance de
Mailli, dont il eut Marc-René, troisième du nom ,
et N. épouse du comte de Murât.
394 HISTOIRE DE TOURAINE.
CHAPITRE IIL
BAILLIS, GRANDS-BAILLIS D'ÉPÉE, ET
BAILLIS DES RESSORTS.
L'ÉTABLISSEMENT dcsbaillis se trouve dans le testa-
ment que fit le roi Philippe- Auguste , en 1 191 , avant
que d'entreprendre le voyage de la Terre-Sainte.
Par leur institution , ces officiers avaient dans leurs
attributions les armes, la justice et la finance. Ils
faisaient la recette du domaine dans leur bailliage,
dont ils rendaient compte à la chambre de six mois
en six mois. Quelquefois aussi on les nommait séné-
chaux, usage qui s'était assez généralement conservé
en France dans les provinces qui avaient appartenu
aux Anglais, à l'exception pourtant de la Touraine,
où le titre de bailli avait prévalu; mais en général ,
on appelait sénéchaux ceux qui appartenaient à des
seigneurs particuliers , et baillis ceux des provinces
qui étaient immédiatement sous l'autorité du roi.
Les baillis de Touraine, dans l'origine, rendaient
eux-mêmes la justice et prononçaient les jugcmens ;
mais ce droit leur fut oté dans la suite, lorsque le
titre de bailli fut annexé à celui de gouverneur , et
ils n'eurent plus que la voix honoraire ou consulta-
tive, sans pouvoir participer aux délibérations. Fran-
BAILLIS. 395
cois I" sembla vouloir les en dédommager par sa
déclaration du mois de mars 1628, portant que les
sentences , appointemens , contrats et tous autres
actes de justice seraient intitulés de leurs noms et
qualités. Ce fut alors qu'ils furent connus sous la
dénomination de grands-baillis, ou baillis d'épée;
institution illusoire, sans but et sans utilité, qui pla-
çait à la tête des tribunaux des hommes qui n'avaient
rien de commun avec la magistrature , pas même
voix délibéralive dans les actes inscrits de leur nom.
Il est vrai qu'ils avaient des lieutenans par qui la
justice s'exerçait. Anciennement ces lieutenans étaient
à la nomination des baillis qui disposaient de ces
charges à leur volonté ; mais Charles VII les priva
de cette prérogative , en ordonnant qu'à l'avenir les
lieutenans ne pourraient être choisis que sur l'avis
des cours souveraines , ce qui commença à s'exécuter,
pour la Touraine , en i440' Louis XII modifia en-
core cet ordre de choses, par son édit de 1498,
qui prescrivit que l'élection des lieutenans-généraux
et particuliers se ferait à l'audience des sièges locaux,
en présence des baillis ou sénéchaux , des avocats et
procureurs du roi , ainsi que des autres officiers du
bailliage qui seraient convoqués quinze jours après
la vacance des offices, si les baillis étaient présens,
ou un mois après , en cas d'absence. Mais le même
roi changea encore ces dispositions par la déclaration
de i5i'2, portant qu'en chaque siège on nommerait
trois personnes des plus capables, l'une desquelles
serait choisie par Sa Majesté. C'est ce qui eut liçu
396 HISTOIRE DE TOI] RAINE.
pour la première fois à Tours, en i566, après la
mort du lieutenant particulier Gervais Goyet.
On sait que depuis ces mêmes charges furent créées
en titre d'office , moyennant finance , ainsi que tous
les autres emplois de la magistrature. Il fallait, il est
vrai, l'attache de la cour souveraine du ressort;
mais il était bien rare qu'on ne l'obtînt pas.
Les gages des baillis n'étaient autrefois que de cent
vingt-quatre livres par an, non compris vingt-sept
•livres pour la nourriture d'un palefroi et d'un som-
mier, c'est-à-dire d'un cheval de main et d'un cheval de
charge : vingt livres pour deux robes et vingt autres
livres pour un clerc ou écrivain, en tout cent quatre-
vingt-onze livres. Ce traitement fut augmenté depuis
à diverses époques. Déjà en 1269, les baillis avaient
trente sous par jour et cent livres par an pour toute
espèce de frais.
Il y eut pendant quelque temps une autre sorte de
baillis qui étaient également à la nomination du roi:
c'étaient ceux des ressorts et exemptions de Tou-
raine , d'Anjou et du Maine.
Philippe-le-Bel , ayant donné l'Anjou et le Maine
en apanage à Charles de Valois , son frère établit le
bailli de Touraine pour connaître des causes des
exempts ou privilégiés de ces deux provinces, ce
qui s'exécuta tant qu'elles furent l'apanage du duc
d'Anjou; mais quand la Touraine devint apanage à
son tour, les rois établirent un juge spécial pour
connaître des causes des privilégiés des trois pro-
vinces, sous le titre de bailli des exemptions des res-
BAILLIS. 397
sorts de Toiiraine, d'Anjou et du Maine : c'est pour-
quoi, dans toutes les lettres d'apanage données pour
le duché de Touraine, il y a toujours eu réserve d'é-
tablir un bailli des ressorts pour Tours , Château-
Neuf, Chinon et autres lieux exempts. Dans les in-
struclions données à ces officiers, il est dit que le
bailli aura son siège à Tours ou à Château-Neuf, et
qu'il placera dans les autres lieux un lieutenant avec
des notaires et des sergens.
Peu de temps après que la Touraine eut été réunie
à la couronne, ce fut le bailli de Touraine qui fut en
même temps bailli des exemptions, même après la
réunion de l'Anjou et du Maine; mais alors les séné-
chaux de ces deux provinces revendiquèrent leurs
droits. Il s'éleva à ce sujet une contestation portée au
conseil du roi Charles VIII, qui, par une déclara-
tion du 5 février 1489, ordonna que, nonobstant la
réunion des comtés d'Anjou et du Maine à la cou-
ronne , les privilégiés de ces deux provinces conti-
nueraient de plaider devant le bailli de Touraine.
C'est pour cela que lors de la première rédaction des
coutumes de Touraine, faite à Langeais, en i453,
elle fut intitulée : Coutumes de Touraine et des res-
sorts et exemptions d'Anjou et du Maine.
Cependant , les réclamations s'étant reproduites
avec plus de force et avec autant de fondement ,
Charles IX ôta au bailli de Touraine la juridiction
des exempts d'Anjou et du Maine, et l'attribua aux
sénéchaux respectifs des deux provinces, par lettres
du 28 juillet i568, enregistrées au parlement le 4
398 HISTOIRE DE TOURiVlNE.
août suivant, nonobstant l'opposition des maires et
échevins de Tours qui avaient employé tout ce qu'ils
avaient de crédit pour faire maintenir le bailli de
Touraine dans ses précédentes attributions.
On conhut encore une autre espèce de baillis qui
étaient nommés par les ducs apanagistes, mais comme
ils formaient une juridiction particulière, distincte de
la juridiction royale, nous nous abstiendrons d'en
parler. Il nous a suffi de faire connaître dans cet
exposé l'origine des baillis, leurs diverses attribu-
tions , et les modifications que leur régime a éprou-
vées.
§1-
BAILLIS DE TOURAINE.
Gliillàume d'Azay, de 11 93 à 19.14. Ce fut le pre-
mier bailli établi par Philippe-Auguste. On lui trouve
cette qualité dans un titre de l'abbaye de Marmou-
tier, daté de 12 13. Ridel ou Rideau étant alors sei-
gneur d'Azay-le-Rideau, celui-ci l'était sans doute,
ou d'Azay-le-Vicomte , dit aussi le Chétif , ou d'Azay-
le-Féron.
Crespière ( Robert de ) , de 1 2 1 4 à 1 2 1 6. Il pre-
nait le titre de bailli du roi en Touraine et en Poi-
tou, pour se distinguer du bailli des trois provinces,
qui n'était proprement que son lieutenant. Il donna,
en I2i4, des lettres en faveur du prévôt d'Oé, de
l'église de Saint-Martin de Tours.
Des Loges (Robert), de 1216 à 12 19. On l'appe-
BAILLIS. 399
lait le éënëchal , parce que , en effet , il l'était du
Poitou. Il jouissait encore de ces deux emplois en
12 18. Nous avons de lui des lettres en faVeur des
chanoines de Saint-Martin pour l'ensaisinement de
l'abbayfe de Corthety , 011 il promet de leur dontler
main-forte cdntre ceux qui Voudraient les troubler
dans leur possession. Ces lettres sont date'es du ven-
dredi après la chaire Saint-Pierre, l'an 12 17.
Gallardon (Geoffroy de), de 12 19 à 1227. Il se
disait pareillement sénéchal de Touraine et de Poitou.
On voit de lui une sentence, rendue en 12^9, au
profit de l'abbaye de Marmoutier.
Leclerc ( Richard ), de Ï227 à 1280, bailli d'An-
jou , de Touraine et du Maine.
Fougères (Guillaume de), de 1280 à 1240. May-
nard l'appelle improprement Fougère, bailli du roi
en Touraine, il l'était également dans l'Anjou et le
Mairie, ainsi qu'on le voit par un titré daté de Toiirs,
le lendemain de la fête de la Madelaine, Tàh 1280.
De Bonnes (Josse) , de 1240 a 1249, bailli de
Touraine, il rendit compte à la chambre, en cette
qualité, de la recette du domaine du roi, en 1248,
semestre de l'Ascension. Dans le mémorial de la
chambre des comptes, il est nommé Jodocus de
Bonnis. Il existe un titre de la même année , souscrit
de Richard , bailli de Jeanne de Craon , sénéchale
des trois provinces , ce qui confirme encore que les
sénéchaux avaient leurs baillis particuliers.
Bruère (Geoffroy), de 1249a 12 54- Nous voyons
que, à la Chandeleur 1249, *^ rendit compte de la re-
400 HISTOIRE DE TOURAINE.
cette du bailliage de Touraine. Il y prend la qualité
de chevalier.
Gans (Hémery de), chevalier, de 12^4 «^ iiS6.
Il rendit compte à la chambre de la recette du bail-
liage de Touraine, pour les termes de la Toussaint
1254, et de l'Ascension 1^55. Par le premier de ces
comptes , on voit qu'il était du , par Hugues de Bau-
çay, cent quatre-vingts livres , pour le rachat de la
terre de Champigny, dont il avait hérité d'Hëmery
de Blo , mort sans enfans.
Magny (Raoul de), de I256à 1260. Cette famille
était très -ancienne. Il y eut un Renaud de Magny,
chevalier, tué au siège de Saint-Jean-d'Acre, en
1 191. Raoul rendit compte, pour le terme de l'As-
cension 1260, et la même année, il fut nommé par
le parlement de Pâques , avec Jean de Quarrois ,
chevalier, pour informer, s'il était vrai que les gens
du comte d'Anjou se fussent portés en armes sur la
ville de Tro. Son procès-verbal à ce sujet se trouve
dans le registre Olim.
Sancerre (Gervais de), de 1260 à 1261. On le voit
assister, en qualité de bailli de Touraine, à un juge-
ment qui fut rendu , en 1 260 , au parlement de Pâques,
au profit de l'abbaye de Fleury, contre son abbé.
Yilletle (Geoffroy de), de 1161 à 1266. Il était
maître des requêtes du roi saint Louis, et son am-
bassadeur vers la république de Venise , bailli de
Touraine, et châtelain de la ville et du château de
Tours. C'était un des hommes en qui saint Louis
avait le plus de confiance dans les affaires impor-
BAILLIS. 4oi
tantes. Il se tenait souvent auprès du monarque,
qui, dans ce cas, dit Joinville , appelait monseigneur
Villette, et monseigneur Pierre de Fontaine, en leur
disant : Délivrez-moi les parties. Personne n'était
alors revêtu de la dignité de bailli sans avoir acquis
par l'étude et l'expérience une parfaite connaissance
des affaires.
Ville tte (Gaultier, ou Guitier de), chevalier, de
1266 à 1273, succéda à scn frère Geoffroy dans
l'office de bailli de Touraine. En cette qualité , il fit ,
l'an ia66, une enquête, par ordre de saint Louis,
pour savoir si la garde des chemins appartenait au
roi dans la voirie de Cormeri.
Le comte d'Angouleme ayant été accusé par le
clergé et parle peuple d'avoir altéré ses monnaies,
le roi nomma Gaultier de Villette et Guy de Neaufle,
doyen de Saint - Martin de Tours , pour aller faire
une enquête à Angoulême. Sur leur rapport , il fut
jugé au parlement de la Chandeleur, que le comte
serait tenu de faire réformer sa monnaie, et d'en
faire frapper une autre de bon aloi.
Lhuissier (Robert), de 1273 à 1274? rendit
compte pour ces deux années de la recette du bail-
liage de Touraine. Ou le retrouve bailli du Berri
en 1289.
Saint-Soulange (Renaud de), de 1274 à 1276'.
Il mourut quelque temps après avoir rendu à la
chambre des comptes celui de la recette du domaine ,
pour le terme de la Toussaint 1275. Le jeudi après
la Saint-Denis, 1 274 , les chanoines de Saint-Martin ,
3. 26
4o^ HISTOIRE DE TOURAINE.
par une déclaration faite à Jean Picard , serviteur et
alloué du bailli , menacèrent d'interdiction la cour
séculière, pour avoir saisi dix-neuf muids de vin et
cent livres des cens d'Émery d'Avoir , chevalier. Celui-
ci en appela au roi ; mais il fut décidé que l'appel
devait être porté devant le bailli de Touraine.
Ydré (Philippe d'), de 1275 à 1277. ^^" compte
de la Recette du domaine date depuis la mort de
son prédécesseur jusqu'à l'Ascension 1276. Après
être sorti de sa charge , il fut choisi avec Guillaume
Dupuy^ pour être juge d'un différend entrfe le roi
Philippe-le-Hardi et l'archevêque de Tours, Jean de
Montsoreau, au sujet du domaine de la forêt de
Teillay , autrement de Chinon ^ dont l'archevêché
possédait une partie.
Humbaut de Châteaux, de 1277 à 1278. Il était
probablement seigneur de Châteaux, aujourd'hui
Château-la- Vallière. Soû compte pour la recette du
domaine, en l'année 1277, se trouve encore à la
chambre des comptes.
Herbert Turpin , chevalier, de 1278 à 1279. Il
était fils de Herbert Turpin-Crissé , premier du nom,
chevalier banneret de Touraine, en 12 14, et fut un
de ceux que le roi manda à Chinon, le lendemain de
l'octave de Pâques 1241 , pour marcher contre le
comte de La Marche. Il rendit son compte à l'As-
cension 1278, et en 128 1 , il fut caution pour cin-
quante livres de rente, que Jean Potin, chambellan
du roi , avait sur les péages de Tours et de Semblan-
çay, dont il était baron.
BAILLIS. 4o^
Parroy , ou plutôt Paroyc ( Denis de ) , chevalier
du roi, de i^ygà i:tS5f fils de Simon , sixième du
nom, d'une ancienne famille de Lorraine, qui des-
cendait en ligne directe des comtes de Metz et de
Lunëville. On trouve ses comptes rendus pour les
six années pendant lesquelles il fut bailli de Tou-
raine.
Barbou (René), de i285 à 1289. Après avoir eu
la garde de la prévôté de Paris en 1270, il obtint
l'office de bailli de Touraine, et fut nommé en cette
qualité pour évaluer le revenu de la ville d'Ingrande,
que Charles, comte d'Anjou , roi de Sicile et de Jé-
rusalem avait donné à Maurice, S*" du nom deCraon,
le lundi après le dimanche que Von chante oculi ,
Van de grâce ia88. H rendit son dernier compte
à la chambre en 1289.
Fontenay ( Pierre de ), de 1289 à 1291.
Bcaumanoir (Philippe de) , chevalier , est nommé
au compte de l'année 1 292 , et dans un titre de l'ab-
baye de Marmoutier, du mois d'août de la même
année. Il fut aussi bailli de Clermont , et conseiller de
Robert de Clermont , fils de saint Louis. C'est lui
qui le premier écrivit les coutumes de Bcauvoisis,
dont le manuscrit a été imprimé en 1690.
Maugés, ou Mauger ( Robert ), de 1293 à 1295.
Pannetier (Jean ), de 1295 à 1298, suivant son
dernier compte rendu à l'Ascension.
Trousseau, ou Troussel (Jacques), de 1298 à i3o2.
11 était frère de Pierre Trousseau, dont nous avons
parlé à l'article des seigneurs de Vérets.
26.
4o4 HISTOIRE DE TOI] RAINE.
Saimel (Pierre de), de i3o2 à i3o3.
Fontenay (Pierre de), de i3o3 à i3o4. H prenait ,
comme Denis de Paroye, le titre de chevalier du
Toi. Cependant , nous croyons que c'est le même que
celui dont il est parlé un peu plus haut. C'est à tort
que la Thaumassière , dans son histoire de Berri, lui
donne le titre de gouverneur de Touraine, dont il
n'était que bailli.
Guyart de La Porte , de i3o4 à i3o6.
Vaucelles (Jean de) chevalier, de i3o6 à i3i3.
Nous voyons par les archives de la ville de Tours ,
que le bailli Jean de Vaucelles , en 1 3 1 1 , fît couper
les ponts du Cher, c'est-à-dire ceux de Vançay et de
Saint-Sauveur, pour fermer le passage à un parti
d'Anglais qui, venu du Poitou, se dirigeait sur la
ville de Tours.
Chévrier (Guy), de i3i3 h i3i6.
Vaudrighen ( Jean de ), de j3i6 à i3i8.
-f^^'Chaillox (Raoul de), chevalier, de i3i8 à i32i.
Benchivilliers (Renaud de), de i3sii à i324.
On a de lui une sentence , rendue la veille de Notre-
Dame d'août, au profit de l'abbaye de la Clarté-
Dieu.
Récuchon (Robert), de i325 à i328. Il fut un
des commissaires nommés par le roi Charles-le-Bel ,
en juillet 1 326, pour la recherche des francs-fîefs et
nouveaux acquêts, et désigné de nouveau en la même
qualité, l'an i328.
Puymar (Ithier de j , écuyer, de iSiS à j336. Il
est nommé Puy à Mar, dans une sentence qu'il ren-
BAILLIS. 4o5
dit en septembre i332, pour la justice et grande
voirie de Marmoutier , et Pnymar , dans une autre
sentence rendue à Loudun au profit de la même
abbaye.
Crève-Cœur (Alexandre de), de i336 à i338. Il
était frère d'Antoine de Crève-Cœur, qui fut prévôt
de Paris, depuis i348 jusqu'à i353.
Bigot (Jean), de i338 à i347. ^^ ^"^ anobli,
ainsi que toute sa postérité , par lettres du roi Phi-
lippe de Valois, données au mois de février i437,
avec pouvoir de recevoir l'ordre de chevalerie. Ou
voit par son compte de i343, que les gages du gou-
verneur des ville et château de Tours étaient, à
cette époque, de cent vingt-cinq livres par an, y
compris une robe évaluée six livres. De son temps ,
le bailliage comprenait les villes royales de Tours ,
Langeais, Loches , Châtillon-sur-Indre, Chinon et
Ijoudun.
Guichard d'Ars, chevalier de l'ordre du roi, de
i348 à i35i. Il tint ses premières assises du bail-
liage, au château de Tours ,*rah de grâce i348 , sui-
vant un titre de l'abbaye de Marmoutier.
Maillé ( Jean de ) , chevalier , seigneur de Chan-
çay, de i35i à i353. Selon toute apparence, ce
Jean de Maillé était le seigneur de Clervaux , fils de
Jean I" de JVIaillé , et de Jeanne de Parlhenay, Il
testa en i386 , et mourut peu de temps après.
Gayen (Etienne), de i353 à i354.
Mauvinet (Guillaume), chevalier de l'ordre du
roi, de i354 à i356.
4o6 HISTOIRE DE TOURAINE.
Mauvinet (Maurice), chevalier de l'ordre du roi,
de i356 à iSSg. Il était frère du précédent, et avait
épousé Florie de Linière , qui , devenue veuve , se
remaria au maréchal de Boucicaul, le père.
Bernier (Jean), chevaher, de iSog à i36i , fut
installé bailli le i^' juin 1 36o , et prêta serment à la
cour le 27 du même mois. Fait chevalier par le duc
d'Anjou, il fut depuis prévôt de Paris, en i362, et
bailli de Beaucaire en 1373.
Brion ( Jean de) , chevalier, de i36i à 1370. Il
prend le titre de sénéchal de Touraine dans des
titres de i36i , 1367 , et 1369. Il fut nommé , en
i364, l'un des commissaires du roi pour la recher-
che des nouveaux acquêts et indemnités dues par
les gens d'église de Touraine. Il eut la même com-
mission le 21 janvier i366. Il prenait aussi quelque-
fois le titre de gouverneur au bailliage de Touraine,
titre qui n'était autre chose que celui de bailli. On
voit même par d'anciens actes qu'il avait distincte-
ment la qualité de bailli du roi , et de sénéchal du
duc de Touraine. Il ^taî\, selon toute apparence, de
la famille de Simon de Brion, pape , en 1261 , sous
le nom de Martin IV , dont nous parlons au quatrième
volume.
Avoir (Pierre d') , de 1370 à i38o. Il était bailli
royal , et en même temps sénéchal du duc de Tou-
raine; mais, en i38o, ayant été établi gouverneur de
la province, il fut le premier en qui la qualité de
bailli fut unie à celle de gouverneur. C'est donc
dans la liste de ceux-ci qu'il faut chercher la suite
BAILLIS. 4^
des baillis , jusqu'à l'année i53!2 , époque où, comme
on va le voir, ils prirent une forme et une dénomi-
nation nouvelles. Nous ne pouvons cependant nous
dispenser de mentionner celui qui suit.
Baudouin de Crénon , chevalier, est indiqué comme
bailli deTouraine, par le Laboureur, page 511 de
ses additions aux Mémoires de Castelnau. Ce Bau-
douin, qui avait époust^ Marie, sœur de Jean de Bueil,
comte de Sancerre , aura pu être pourvu de la charge
de bailli de Touraine, vers i38o, lorsque Pierre
d'Avoir fut nommé gouverneur, et révoqué bientôt
par suite de cette nouvelle création. Dans ce cas, ce
serait lui, et non le précédent, qui aurait été le der-
nier des baillis de Touraine.
Nous ignorons l'époque de sa mort ; mais il servait
encore, en iSga et iSgS, avec un bacheher et quatre
écuyers. Il eut sa sépulture dans l'église de Mansi-
gné, diocèse du Mans, où il avait un tombeau en
pierre , sur lequel on voyait sa statue , ayant un
trou au genou , sans doute pour indiquer la blessure
dont il mourut.
§ "•
GRANDS-BAILLIS , OU BAILLIS d'ÉP^E.
Nous ne comptons que douze grands-baillis d'épée
dans l'espace de deux cent cinquante ans, c'est-h-
dire depuis i5'32 jusqu'à 1782.
Babou (Jean ) , chevalier , seigneur de La Bour-
daisièrc et de Sagonne , conseiller du roi , chevalier
4o8 HISTOIRE DE TOURAINE.
de ses ordres, gouverneur de Brest et grand-maître
de Fartillerie de France, grand-bailli de Touraine,
de i532 à i56g.
Nous avons vu précédemment que Jean de Ville-
mart avait été le dernier des gouverneurs qui eût
porté le titre de bailli en i532. Le roi François P'
créa pour lors des grands-baillis, ou baillis d'épée,
et celui-ci fut le premier qui fut revêtu de cette
dignité dans la même année. Il était fils de Pbilbert
Babou , et fut aïeul de Gabrielle d'Estrée , par Fran-
çoise Babou sa fille.
Voyer (René-Victor de), vicomte de Paulmy ,
chevalier de l'ordre du roi et du Saint-Sépulcre, fut
nommé gentilhomme du duc d'Orléans, depuis duc
d'Anjou, le i6 juillet i565, et gentilhomme ordi-
naire de la chambre du roi, le i8 septembre 1567.
Marie, reine d'Ecosse, duchesse de Touraine^ le
pourvut de la charge de grand-bailli , par lettres du
12 février 1571. Gouverneur du château de Loches,
en 157.5 , il fut choisi pour être gouverneur de Henri
de Bourbon, prince de Bombes, le 19 juin 1579.
Il mourut au mois d'avril i586, après avoir fondé
un collège à Paulmy. Il était fils de Jean, troisième
du nom, et de Jeanne de Gueffaut, dame d'Argen-
son , et avait épousé Claude de Turpin-Crissé.
Voyer d'Argenson ( Pierre de ) , troisième du nom ,
frère puîné du précédent, fut pourvu après sa mort
de la charge de grand-bailli , par lettres du a6 avril
i586, enregistrées au parlement le 6 juin suivant,
chevalier des ordres du roi , en i6o5, et gentilhomme
BAILLIS. --^'r^rr 4^9
ordinaire de sa chambre. Il assembla les états de la
province en i6i4, et mourut le 22 décembre 1616.
Il avait épousé Elisabeth Huraut de Chiverni, dont
il eut trois garçons et deux filles , et fut le premier
de la branche d'Argenson , terre que sa mère avait
portée dans la famille.
Voyer d'Argenson ( René de ) , premier du nom ,
seigneur d'Argenson, de la BailloUière , de Châtre en
Touraine, et de Weil-le-Mesnil en Berri, conseiller
d'état, et ambassadeur auprès de la république de
Venise , fut pourvu de la charge de grand-bailli en
161 6, après la mort de son père, et s'en démit en
1627. Le roi le nomma, en i63i , intendant-général
des provinces de Berri, Touraine, Limousin, An-
goumois, Haute et Basse - Marche , Haute et Basse-
Auvergne , pour en faire les fonctions sous le prince
de Condé, gouverneur - général de ces mêmes pro-
vinces. Après avoir été intendant d'Auvergne et
intendant des armées, il fut nommé, le 24 juin
i65o, à l'ambassade de Venise. Ce fut à cette époque
que, étant veuf, il embrassa l'état ecclésiastique , et
reçut la prêtrise le 24 février i65i. Il se rendit de
suite à Venise, où il mourut, le i4 juillet de la
même année , âgé de cinquante-quatre ans et demi.
Il eut sa sépulture dans l'église du grand couvent
des Cordeliers , oii son fds aîné , René II , qui lui
succéda dans cette ambassade , lui fit ériger un très-
beau mausolée.
Sa femme Hélène de La Fon, morte en i638, lui
donna quatre garçons et une fille.
4 10 HISTOIRE DE TOUR AINE.
Coèffîer (Antoine, dit Ruzé), de 1627 à i633i.
Lorsque René de Voyer eut donné sa démission,
celui-ci obtint la charge de grand-bailli, par lettres
du roi Louis XIII, données à Villeroi le 27 juillet
1627. On a vu ce qui le concerne d'ailleurs au cha-
pitre des gouverneurs , § I.
Ruzé (Henri ), marquis de Cinq-Mars et de Lan-
geais, fils du précédent. Son père étant mort en
i632, il lui succéda dans la charge de grand-bailli
de ïouraine. (Voyez son article parmi les lieutenans-
généraux, chap. II, § I, et tome 4-)
Voyer d'Argenson ( Pierre de ) , second fils de
René 1", vicomte d'Argenson, seigneur de Châtres
et de Mousay , conseiller du roi en tous ses conseils ,
gentilhomme ordinaire de sa chambre. Après le sup-
plice du marquis de Cinq -Mars, il rentra, le i4
juin 1643, dans la charge de grand-bailli, que sa
famille avait déjà possédée trois fois ; mais il s'en
démit en 1662 , ayant été nommé gouverneur de
la Nouvelle-France , ou Canada.
Dubois ( Louis ) , marquis de Givry et de Vende-
nesse, etc., lieutenant- général des armées du roi.
D'après la démission du vicomte d'Argenson, il fut
pourvu de la charge de grand-baiUi de Touraine ,
par lettre du 11 avril 1662, et reçu au parlement
le 18 du même mois. Il était fils de Pierre Dubois,
et de Françoise Olivier de Leuville, et avait épousé
Marie, fille de Thomas de Morant, intendant de
Tours, dont il eut le fils qui suit. Il mourut, en
1699, âgé de quatre-vingt-trois ans.
BAILLIS. 4lY
Dubois (Louis-Thomas, dit Olivier), marquis de
Leuville, de Vendenesse et de Givry , lieuteuant-gë-
neral des armées, et gouverneur de Charlemont,
succéda à son père, en i6()9, dans la charge de
grand-bailli de Touraine, et mourut, en 1742, de-
vant Égra en Bohême , où il commandait. De sa se-
conde femme Marie de Voisin , fille du chancelier
de France, il n'eut qu'une fille, mariée au marquis de
Poyanne.
Baylens (Charles-Léonard de), Olivier de Leuville,
marquis de Poyanne , lieutenant-général des armées
du roi , chevalier de ses ordres , colonel des carabi-
niers, succéda à son beau-père, en 174^^? dans la
charge de grand-bailli de Touraine , qu'il exerça jus-
qu'en 1759. De son épouse, Antoinette - Madelaine
Olivier de Leuville , il n'eut qu'une fille , qui a épousé
le duc de Sully. Elle descendait du célèbre chance-
lier de France François Olivier de Leuville, mort à
Amboise en i56o.
Voyer d'Argenson (Marc-René de), deuxième du
nom. C'est le même que celui dont nous avons déjà
parlé , et qui termine la liste des lieutenans-généraux
pour le roi en Touraine. La charge de grand-bailli
rentra encore une fois dans la famille, en 17 5g, par
ia cession que lui en fît le marquis de Poyanne. Il la
conserva jusqu'à sa mort en 1782.
Voyer d'Argenson (Marc-René de), troisième du
nom, comte d'Argenson , marquis de Paulmy.^ vicomte
de la Guerche, etc. Son père étant mort en 1782,
le roi lui donna pour successeur le marquis de La
4l2 HISTOIRE DE TOUR AINE.
Vaiipaiière; mais celui-ci eut la générosité de re-
fuser cette place, en exprimant le désir qu'elle ne
sortît pas de la famille d'Argenson , et qu'elle fût
conservée au fils du marquis de Voyer, qui n'était
alors âgé que de onze ans, étant né en 1771. H en
fut en effet pourvu malgré son extrême jeunesse;
mais, quoiqu'il eût déjà été reçu au parlement, son
âge et la révolution , qui bientôt amena un autre
ordre de choses , l'empêchèrent d'en exercer les fonc-
tions. C'est lui qui, en 181 5, éleva à la chambre
une voix courageuse pour dénoncer l'assassinat des
protestans du Midi , voix qui fut étouffée par les
clameurs d'un parti nombreux et violent qui ne res-
pirait qu'exils, proscriptions, et plus encore, si on
eût secondé ses désirs.
Nous avons parlé dans, le préambule de ce chapitre,
des lieutenans-généraux de bailliage, institués pour
siéger et rendre la justice au nom des baillis d'épée :
mais nous croyons inutile d'en donner la nomen-
clature. Nous dirons seulement qu'on en a compté
cinquante-sept depuis Guillaume Travaillard, qui
en fut le premier en i3i2, jusqu'à M. Valleteau de
Chabrefis, qui en a été le dernier en 1790.
Nous remarquons que Guillaume Travaillard,
dans un titre daté de i3i2, prend la qualité de sous-
bailli , ce qui répondait à celle de lieutenant.
BAILLIS. <■ 4^3
SI".
BAILLIS DES RESSORTS ET EXEMPTIONS.
Nous avons expliqué la différence qu'il y avait
entre ces officiers et ceux du bailliage. Comme ils
sont en petit nombre , nous allons en donner la suite
pour compléter l'histoire de nos baillis.
La Treille (Jean de ) , de 1370 à 1376. Il est le
premier qui ait été spécialement commis, en 1370,
pour connaître des causes des privilégiés des trois
provinces. On lui donna depuis les exemptions du
Poitou, ainsi qu'on le remarque par un titre de
1372. En quittant ces fonctions, il passa bailli
d'Arras, dont il prêta serment à la cour en 1376.
Il fut ensuite bailli d'Amiens, en 1379, ^^ Rouen
en i383, et de Gisors, en iSgi.
Armeville (Thomas d'), écuyer, fut bailli des
ressorts des quatre mêmes provinces que son prédé-
cesseur en 1375, 1376 et 1377.
Négron ( Pierre de ) , chevalier , conseiller du roi ,
seigneur de Négron près Amboise , bailli des ressorts
de Chartres , fut commis par le roi aux mêmes fonc-
tions pour la Touraine , l'Anjou , le Maine et le Poi-
tou. C'est ce qu'on voit par un titre du 25 septembre
1379.
Ailgembourse ( Pierre d' ). Celui-ci n'eut dans ses
attributions que les trois provinces , depuis l'année
1377 jusqu'en 1391.
4ê^ histoire de touraine.
Bueil (Pierre de), chevalier, chambellan du roi,
se trouve avec la qualité de bailli des exemptions de
Touraine , Anjou , Maine et Poitou , dans des titres
des années 1407, i4o8 et i4i3. Il exerça , en effet,
depuis 1391 , jusqu'à i4i6. Il était frère de Jean de 1
Bueil , quatrième du nom , grand-maître des arbalé-
triers de France, et , comme lui , se rendit célèbre par
sa bravoure et ses faits d'armes contre les Anglais.
Tous les deux étaient nés au château de Bueil en
Touraine.
Montejean ( Renaud de), chevalier, chambellan
du roi , fut nommé par la cour de parlement , le 11
janvier ï4i6j bailli des exemptions de Touraine,
d'Anjou, du Maine et du Poitou. Il fut père de
Jean P' de Montejean, qui épousa Marie, fille de
Hardouin VIII de Maillé, et de Perrenelle d'Am-
boise.
Remeneuil (Guillaume de) , chevalier , conseiller
et chambellan du roi , fut bailli des exemptions de
Touraine, en 1417 ? et dans la même année, il fut
nommé gouverneur-bailli de Touraine, comme on
l'a vu au § I du chap. II. Depuis lui , nous ne trou-
vons plus de baillis spéciaux pour les exemptions.
Il paraît que les baillis -gouverneurs en firent les
fonctions jusqu'en i568, époque où, comme nous
l'avons dit , Charles IX en donna les attributions
aux baillis et sénéchaux des trois provinces , chacun
en ce qui le concernait.
.VI:
IICTENDANS. 4^5
JQ, iij'
CHAPITRE IV.
INTENDANS DE ÏOURAINE.
Les rois des deux premières races se reposaient ^
pour l'administration intérieure de leurs provinces,
sur des commissaires que l'histoire nous fait con-
naître sous le nom de missi dominici. Il y en avait
ordinairement deux pour chaque province ^ un comte
et un ecclésiastique qui était presque toujours ua
évêque. L'un avait dans son département les affaires
civiles, et l'autre, celles du clergé, qui n'étaient pas
alors les moins importantes, eu égard à Ja grande
influence que ce corps avait dans l'état. Cet ordr*
de chose se maintint en Touraine jusqu'au règne de
Louis-le-Bègue; mais il ne fut plus question de ces
commissaires sous le gouvernement des comtes hé-
réditaires qui , fixant habituellement leur résidence
dans leurs provinces, y avaient leurs officiers parti-
culiers , et souvent rendaient eux-mêmes la jus-
tice à leurs sujets. Ces comtes, à la vérité, étaient
les grands vassaux de la couronne ; mais ils étaient
réellement les souverains de leurs états, et plus d'une
fois on les a vus faire la guerre au monarque. On ne
parla donc plus de ces missi dominici^ pendant près
de sept cents ans , lorsque enfin les troubles violens
I
4f 6 HISTOIRE DE TOURAINE.
suscites par la différence des opinions religieuses
firent sentir à Charles IX , vers 1 564 •> ^^ nécessité
d'avoir dans chaque province un commissaire dé-
parti, revêtu de grands pouvoirs, pour maintenir
l'ordre, et surtout pour faire exécuter les nombreux
édits que faisaient naître, abroger, et renaître les
vicissitudes d'une guerre intestine, et des pacifica-
tions toujours méconnues dans les succès , mais invo-
quées dans les défaites.
Henri III , quoique son royaume ne fût pas moins
en proie aux fureurs des factions, mais vivement
pressé par les remontrances de trois ordres, dans les
états tenus àBlois en 1676, abolit ces commissaires
par un édit de i58o. Cette révocation, qui fut géné-
rale, dura trente-huit ans, c'est-à-dire depuis i58o
jusqu'à 161 8, époque, où ils furent rétablis et
maintenus pendant trente ans , sans aucune innova-
tion.
Louis XIV, par une déclaration donnée à Saint-
Germain-en-Laye , le î^o. octobre 1648 , les abolit de
nouveau , mais non pas entièrement , car il les con-
serva dans les provinces de Bourgogne , Languedoc,
Provence , Lyonnais , Picardie et Champagne. Cette
suppression, selon toute apparence, ne fut pas de
longue durée , car à peine aperçoit-on un léger in-
tervalle dans la série de nos intendans.
Ces magistrats n'eurent d'abord dans leurs attribu-
tions que la justice et la police, ce qui les mettait
dans l'obligation de faire enregistrer leurs commis-
sions aux présidiaux , où ils avaient séance. Depuis
INTENDANS. 4^7
le cardinal de Richelieu , vers 1 687, on y ajouta le droit
de connaître de toutes les affaires qui concernaient
les impôts et l'administration des fonds publics. Dès
ce moment, ils prirent le titre d'intendans de justice,
police et finances , qualité qui leur était donnée par
leurs provisions.
Nous allons présenter le tableau de tous ceux qui
ont exercé les fonctions d'intendant , d'abord dans la
Touraine , ensuite dans la généralité de Tours.
1 565-1 566. Viole (Jacques), seigneur d'Andresel
et d'Aigremont , conseiller au parlement de Paris ,
est le premier que nous voyons revêtu de la qualité
d'intendant, pour la province de Touraine seule-
ment. Les lettres patentes de Charles IX, données à
Blois, le 4 décembre i565, lui conféraient le pou-
voir « de connaître de toutes causes civiles et cri-
« minelles, malversations des juges, port d'armes,
« assemblées illicites, séditions et autres cas sembla-
« blés; présider en toutes les justices du bailliage,
ce évoquer devaai lui les causes des juges inférieurs,
if juger en dernier ressort avec dix conseillers du bail-
ce liage ou avocats tels qu'il voudrait choisir; convo-
cc quer et assembler les officiers et habitans , voir
ce les départemens des élus, leur faire administrer la
«justice, écouter leurs plaintes, et en cas d'abus,
ce malversations ou négligence , en donner avis à Sa
ce Majesté. »
Nous avons cité ce passage , pour faire voir quelles
étaient dans ces premiers temps les attributions de
3. ' ay
4l8 HISTOIRE DE TOURAINE.
ces magistrats. Ces lettres furent enregistrées au prë-
sidial (le Tours le 19 décembre id65.
Jacques Viole n'exerça ses fonctions d'intendant
que pendant environ six mois. Il paraît qu'il s'en dé-
mit en faveur de son neveu Bruslart. Il revint a
Tours en iSôg, mais seulement comme commissaire
du roi pour faire exécuter un arrêt du conseil qui
rétablissait le corps-de-ville sur le même pied quil
était par l'édit de création , arrêt contre lequel il exis-
tait une opposition très-prononcée de la part des
habitans , qui ne voyaient pas sans humeur un corps
composé de cent privilégiés.
Déjà, en i559, il avait été nommé par le roi,
avec Christophe de Thou et Barthélemi Faye , pour
la réformation des coutumes de Touraine. Né en
1617, de Jacques Viole et d'Isabeau Caille, il mourut
à Paris, le 3o juillet i584. Son fils, Jacques Viole,
fut premier président aux requêtes du palais.
' 1 566-1 58o. Bruslart (Pierre, troisième du nom),
succéda a son oncle Jacques Viole, par lettres pa-
tentes du 16 juillet i566, et ne fut pourvu comme
lui que de l'intendance de la Touraine. Il monta
sur le siège et y tint l'audience le i^' août suivant.
Ses fonctions cessèrent au moyen de l'édit de i58o,
qui révoquait tous les intendans, ou plutôt les com-
missaires départis; car alors ils n'avaient pas d'autre
qualité.
Il mourut en i584 j étant président des enquêtes.
Il avait épousé Marie Cauchon , qui lui porta les
terres de Puisieux et de Sillery. Cette dernière ayant
INTENDANS. 419
été érigée en marquisat en 1 619, ce fut son fils
aîné, Nicolas , qui le premier prit la qualité de mar-
quis de Sillery.
( Intervalle de trente-huit ans. )
i6i8-i63o. Aubery l'aîné (Jean), conseiller d'état
et du conseil privé du roi , maître des requêtes , fut
le premier qui fut pourvu de la commission d'inten-
dant de justice et police dans les provinces de Tou-
raine, Anjou et le Maine, par lettres patentes de
Louis XIII du 3o juillet 1618, époque où les in-
tendances furent rétablies , et quelques-unes , au
nombre desquelles était la Touraine , érigées en gé-
néralités. Il était fds de Jacques Aubery, lieutenant
civil de Paris , qui fut envoyé par Henri II en An-
gleterre, en i555, pour y traiter de la paix.
« Jean Aubery, disent Ancillon et Du Maurier
« dans leurs Mémoires , était un homme habile , es-
te timé des savans, et en commerce de lettres avec le
« célèbre Duplessis-Mornay. Il épousa en premières
(c noces Catherine de Bellièvre , dont il eut une seule
« fille qui fut très-estimée à la cour, où elle était
« ordinairement avec Marguerite de Montmorenci ,
« princesse de Condé. M'"" Aubery a été célébrée par
« Voiture , qui a fait plusieurs vers à sa louange. »
Son père mourut en i636, doyen des conseillers
d'état.
i63o-i637. Ktampes (Jeand'), chevalier, sei-
27.
/|!iO HISTOIRE DE TOURAINE.
gneur de Valençay, conseiller d'état et du conseil
privé , conseiller au parlement de Paris , maître des
requêtes , et président du grand conseil , fut nommé
intendant de la généralité de Tours par lettres pa-
tentes données à Fontainebleau le 5 juin i63o, vé-
rifiées au parlement le i4 septembre i63i.
Il fut envoyé ambassadeur auprès des Grisons
lorsqu'il quitta son intendance, en lôSy, et ensuite
vers les États de Hollande. Il était fils de Jean d'É-
tampes , chevalier des ordres du roi , et de Sara
d'Aplincourt , et né h Tours ainsi que le cardinal
de Valençay son frère. Il mourut le 4 février 167 1 ,
âgé de soixante- dix-sept ans.
1637-1641. Martin (Pierre), seigneur de Lau-
bardemont, conseiller du roi en ses conseils d'état
et privé, maître des requêtes, fut le premier inten-
dant qui ait eu les finances dans ses attributions. Son
mot affreusement célèbre :« Donnez-moi une ligne de
l'écriture d'un homme, et j'y trouverai de quoi le
faire pendre», fut sans doute ce qui lui mérita la
préférence , de la part du cardinal de Richelieu , pour
présider la commission chargée d'instruire le procès
d'Urbain Grandier. Le dévouement servile qu'il mon-
tra au cardinal dans cette horrible affaire lui valut
l'intendance de la généralité de Tours , qu'il conserva
jusqu'à la fin de 1640. En 1642, il fut encore choisi
par le cardinal pour assurer la condamnation de
Cinq-Mars et de François-Auguste De Thou. Ainsi
sa conduite iustifîait ses maximes. Il laissa en mou-
rant une mémoire abhorrée et un nom devenu
IjSTENDANS. 4^1
injure. On fît sur lui ce quatrain, au sujet du procès
de Grandier :
Vous tous qui voyez la misère
De ce corps qu'où brûle aujourd'hui ,
Appreuez que son commissaire
Mérite mieux la mort que lui.
Il eut d'Éléonore Fourre de Dampierre , son épouse,
un fils nommé comme lui Pierre Martin de Lau-
bardemont qui, quoique marié à la veuve de Jean
de Bragelogne , s'associa, dit-on, à une troupe de
voleurs dans laquelle il fut tué. Si le fait est vrai, ce
fils n'avait pas dégénéré.
164 1- 1642. Renouard (Jean- Jacques), seigneur
de Yillayer, conseiller du roi, maître des requêtes
ordinaire de son liotel , fut nommé intendant de jus-
tice, police et finances de la généralité de Tours,
par lettres patentes données à Saint-Germain-en-
Laye le j6 janvier 1641 , et enregistrées au prési-
dial de Tours le i5 mai suivant. Il avait été reçu
conseiller au parlement le i4 jî^iin i632, et conseiller
d'état en 1674- H en mourut le doyen en mars 169Î ,
âgé de quatre-vingt-sept ans.
L'académie française, en i658, l'avait admis au
nombre de ses membres; mais il n'est pas à notre
connaissance qu'il ait publié aucun ouvrage. Ce fut
en considération des services qu*il avait rendus dans
j. ses divers emplois, disent les lettres patentes d'érec-
tion, que la terre de Villayer, en 1749? f"t érigée
en comté pour Claude-François de Kenouard , l'un
4^2 HISTOIRE DE TOUR^\mE.
de ses descendans. Ce comté était passé dans la fa-
mille de Rosmadec.
1642-1643. Besançon (Charles de), chevalier,
seigneur de Jaligny et du Plessis, baron de Bazoches,
conseiller d'état, maître des requêtes, obtint l'inten-
dance de la généralité de Tours par lettres patentes
données à Saint-Germain-en-Laye en 1642. Mais
il ne la conserva que jusqu'au commencement de
l'année i643, ayant été à cette époque appelé au
conseil d'état.
1643-1647. Héere (Denis de), seigneur de Vau-
doy , de Poncelet, de Rademont, du Four, du Grès ,
du Colombier, du fort de Presle, etc., conseiller du
roi en ses conseils d'état et privé. Il fut reçu con-
seiller au parlement le 28 mai 1627, maître des re-
quêtes le 12 septembre i636, intendant de }a géné-
ralité de Bourges en i638, et de celle de Tours
par lettres patentes données à Saint-Germain-en-
Laye le 29 avril i643, enregistrées au présidial de
Tours le jeudi 28 mai suivant. 11 y fut maintenu
jusques en 1648, époque où les intendans furent de
nouveau supprimés, mais presque immédiatement
rétablis.
En 1644 on lui avait adjoint le comte de Serrent,
et en 1647 le président Paget. C'est, relativem.ent à
notre province, le seul exemple que nous ayons de
ces sortes d'adjonctions. Cependant ces deux colla-
borateurs aj^ant eu comme lui le titre et la commis-
sion d'intendant de la généralité , nous les placerons
ici dans Tordre de leurs nominations.
IJVTENDAWS. 4^^
1644-1647. Bautru ( Guillaume de ) , troisième
du nom, comte de Serrent, conseiller d'état, et du
conseil prive du roi, fut adjoint en i644 *^ Denis
de Héere, avec le titre d'intendant pour la partie de
l'Anjou, province dont sa famille était originaire.
En 1647 , il quitta ces fonctions pour être garde des
sceaux et chef du conseil de Monsieur, frère unique
du roi.
Il était fils de Guillaume de Bautru, comte de
Serrent , ambassadeur à Vienne , en Espagne et en
Savoie, qui fut l'un des premiers membres de l'aca-
démie française. C'était ainsi que son père un
homme h bons mots. Il mourut en t 7 1 1 , âgé de
quatre-vingt-treize ans. L'une de ses deux filles avait
épousé le frère aîné du grand Colbert.
1647-1648. Paget ( Jacques ) , seigneur de Ville-
nomble , président de la chambre des comptes de
Montpellier, et maître des requêtes en i644- En
1647, on le donna pour successeur au comte de Ser-
rent, et quoique adjoint il reçut commue lui par sa
commission le titre d'intendant de justice, police et
finances de la généralité de Tours. Il exerça donc
conjointement avec Denis de Héere , et se retira en
même temps que lui , d'après la déclaration du roi
du 22 octobre 164B qui révoquait les intcndans,
à l'exception des six provinces dont nous avons
parlé.
Son fils, Jacques Puget, fut exempt dans les gardes-
du-corps du roi.
1 649- 1 656. De Héere (jDcnis ). Lorsque Louis XIV
I
4^4 HISTOIRE DE TOURAINE,
eut rétabli les intendans , huit mois environ après les
avoir révoques, celui-ci fut pourvu d'une nouvelle
commission pour la généralité de Tours, que cette
fois il administra seul jusqu'à sa mort, en i556.
De Tours , son corps fut transféré à Paris, et inhumé
à Saint-Christophe. Il était arrière-petit-fîls de ce
Denis de Héere, conseiller au parlement, d'abord
ligueur outré, mais qui, ayant changé de principes,
fut arrêté par les ligueurs eux-mêmes , et conduit à la
bastille avec plusieurs autres conseillers au parle-
ment, d'après ce que dit le P. Maimbourg. Cepen-
dant on lit à la fin du tome II de la Satyre Ménippée
qu'il se trouvait le sixième sur la liste de ceux qui,
en i5ç)^, devaient sortir de Paris.
1656-1657. Hotman (Vincent), chevalier, sei-
gneur de Fontenay, Nancel, Marcigny , reçu le 3o
mai i65o conseiller au grand-conseil, maître des
requêtes le ^'5 août i656, fut en cette même année
nommé à l'intendance de la généralité de Tours,
qu'il quitta en lôS-y pour passer à celle de Bordeaux,
et à celle de Paris en i663. Il remplaça dans la
chambre de justice le procureur -général Talon :
enfin, en 1669, il fut fait conseiller d'état et inten-
dant des finances. Le i4 mars i683, il mourut sans
enfans de son mariage avec Marguerite Golbert. Il
était fils de François Hotman de Morfontaine , mort
ambassadeur en Suisse, et de la même famille que
François , Antoine et Jean Hotman , connus par divers
ouvrages. François, jurisconsulte célèbre, professait
le droit à Bourges lorsque ses écoliers, dont il était
INTEND ANS. ^'l5
chéri , l'arrachèrent aux assassins de la Saint-Bar-
thélemi.
1 657-1659. Bochard (Jean, septième du nom),
seigneur de Noray et de Champigny, conseiller au
grand conseil et maître des requêtes , succéda à Vin-
cent Hotman dans rintendancc de la généralité de
Tours , d'où il passa en 1659 à celle de Normandie.
Fils de Jean Bochard, conseiller d'état, et petit-
fîls de Jean Bochard, premier président au parle-
ment de Paris, il mourut le 9 août 1691. Le savant
et vertueux Bochard de Sarron , premier président
de ce même parlement , et mort révolutionnaire-
ment le 20 avril 1794? descendait de Jean, père de
celui dont il s'agit ici.
1 659- 1 66 1 . Morant (Thomas de) , chevalier , mar-
quis de Mesnil-Garnier, comte de Penzés, etc., con-
seiller au grand-conseil le 18 septembre i636,
maître des requêtes le 6 août i643, successivement
intendant de Bordeaux et de Montauhan en i65o;
de Bourgogne en i65i; de Caen en i653; de
Rouen en 1 655, obtint l'intendance delà généra-
lité de Tours en 1659. Après deux années de fonc-
tions dans cette place , il se retira, et fut nommé, le
3o août 1 663 , maître des requêtes honoraire et
conseiller d'état. Il mourut à Paris, le 16 octobre
1692 , âgé de soixante-seize ans , et fut inhumé dans
leglisc de Saint-Jacques du Haut-Pas. Ce fut en sa
faveur, que la terre de Mesnil-Garnier, auparavant
baronnie, fut érigée en marquisat sous l'appella-
426 HISTOIHE DE TOUR.UNE.
tion de Morant, en 1672. Son père, Thomas de Mo-
rant , maître des requêtes , avait été trésorier de l'é-
pargne en 16 17, et grand- trésorier des ordres du roi.
166 1-1663. Lejay ( Charles J, chevalier, baron
de Tilly, marquis de la Maison Rouge, seigneur de
Saint-Fargeau , de Villiers-sur-Seine, conseiller au
grand -conseil le 20 août i638; maître des requêtes
le 28 février 1642; intendant de Limoges en i6547
fut nommé en 1661 à l'intendance de la généralité
de Tours , d'où il passa à celle de Bordeaux, et enfin
à celle de Lorraine. Il mourut à Paris en novembre
167 1 , et eut sa sépulture aux Minimes.
Il était fils de Jacques Lejay ^ conseiller d'état ,
gentilhomme ordinaire de la chambre du roi , et
neveu du premier président Nicolas Lejay.
1 663- 1666. Colbert (Charles) , marquis de Croissy
et de Torcy , conseiller d'état , grand-trésorier des
ordres du roi , maître des requêtes , commença par
avoir en i663 l'intendance de la généralité de
Tours, qu'il conserva jusques en 1666, époque oîi il
fut nommé président du conseil souverain d'Alsace.
Il fut depuis ambassadeur en Angleterre, plénipo-
tentiaire au congrès de Nimègue pour la paix géné-
rale , et en dernier lieu ministre secrétaire d'état
au département des affaires étrangères, en 1689.
Second fils de Nicolas Colbert , il était par consé-
quent frère du grand Colbert. De Françoise , fîUe
de Joachim Béraud, grand-audiencier de France, il
eut trois fils qui formèrent la branche des Colbert-
INTENDAîfS. 4ï^7
Croissy. Il mourut le 28 juillet 1696, âgé de soixante-
sept ans.
1666-167 1. Voisin ( Jean -Baptiste ), seigneur de
la Noiraye , conseiller du roi en tous ses conseils et
maître des requêtes, fut nommé en 1666 à l'inten-
dance de la généralité de Tours , où il mourut le 26
septembre 1671. Il eut sa sépulture dans l'église de
Saint-Vincent , sa paroisse , où on lisait son épitaphe.
Son fils Daniel-François Voisin fut chancelier de
France le i5 juillet 17 14- On assure que Louis XIV,
déjà très-affaibli par l'âge, ayant accordé la grâce à
un fameux scélérat , Voisin refusa d'en sceller les
lettres. Le roi fît demander les sceaux, et les ren-
voya au chancelier après en avoir fait l'usage au-
quel ce magistrat s'était refusé : mais Voisin les re-
fusa, en disant : Ils sont pollués, Je n en veux plus.
Le roi se contenta de dire : Quel homme ! Les lettres
furent brûlées, et le chancelier reprit les sceaux en
ajoutant : Le feu purifie tout.
1672 -1674. Ribeyre (Antoine de), seigneur
d'Ompne, conseiller' au parlement de Paris le 26
mai 1667, maître des requêtes le 27 mai 1667 , in-
tendant de Limoges en 1671, et de Touraine en
1672. Il quitta son intendance, le 3o avril 1674?
pour aller occuper la place de lieutenant-civil au
nouveau châtelet de Paris. Il rentra cependant dans la
carrière administrative, et obtint en 1689 l'inten-
dance de Poitiers , ayant auparavant été fait conseil-
ler d'état, en i68v3. Le 7 octobre 17 12, il mourut
conseiller d'honneur au parlement.
4^8 HISïOIllE DE TOURAINE.
Il était de la province d'Auvergne , et fils d'Antoine
de Ribejre, lieutenant-général au présidial de Cler-
mont , ensuite conseiller à la cour des aides d'Au-
vergne. Sa sœur Jeanne épousa Charles Tubeuf , père
de celui qui suit.
1674-1680. Tubeuf (Charles), seigneur de Blan-
sac, de Vert et de Mondesir, maître des requêtes,
succéda en 1674 ^ son oncle dans l'intendance de
la généralité de Tours, emploi qu'il occupa jusqu'au
3 septembre 1680, époque de sa mort au chef-lieu
de sa résidence. Son cœur fut porté à Saint-Pierre-
du-Boiie, sa paroisse, et son corps aux Minimes du
Plessis-les-Tours , suivant ses dernières volontés.
Par le lieu de sa sépulture et celle de son prédé-
cesseur Voisin , on voit que les intendans n'avaient
point alors d'hôtel spécial , et choisissaient à leur gré
le lieu de leur domicile.
Ce fut lui qui le premier, en 1678, commença à
donner quelque embellissement à la ville de Tours en
faisant percer une rue qui la traversait du nord au midi,
et que de là on nomma rue Traversine. C'est la même
que plus tard nous verrons une seconde fois recon-
struite régulièrement et former la rue Royale.
Son père, Jacques Tubeuf, conseiller d'état, était
président en la chambre des comptes de Paris , in-
tendant des finances, et surintendant de la maison
de la reine Anne d'Autriche.
1680- 1689. Béchameil (Louis de), marquis de
Nointel , conseiller au parlement, maître des requêtes
au mois d'avril 1674, et intendant de la généralité
INTEND ANS. 4^9
(le Tours en tG8o, jusques en 1G89. En 1700, il
fut fait conseiller d'état, et mourut le 3 mars 1703.
Il avait épousé Marie Colbert, dont il eut une fille
qui fut mariée à Artus-Timoléon-Louis de Cossé, duc
de Brissac.
Le marquis de Nointel avait été comme son père ,
et après lui, surintendant des maisons, domaines et
finances de Philippe d'Orléans, Monsieur, frère
unique du roi.
Ce fut lui qui, en 1688 , fît élever à l'extrémité
nord de la rue Traversine, dont nous venons de
parler, un arc de triomphe à la gloire de Louis XIV.
Ce monument, qui portait pour seule inscription
LUDOVICO MAGNO , fut détruit en 1777. La con-
struction d'une nouvelle rue l'avait fait ériger ; la
reconstruction de la même rue l'a fait disparaître.
1689-1704. Hue (Thomas), chevalier, marquis de
Miroménil, seigneur de La Roque et de Latingy,
conseiller au grand-conseil le 29 mai 1609, maître
des requêtes le 10 décembre 1668, président au grand-
conseil le 9 mars 167 1 , eut l'intendance de Poitou
en 1672, d'où il passa à celle de Champagne en
1673, et enfin à celle de la généralité de Tours en
1689. Président honoraire en 1690, il obtint l'a-
grément d'en démembrer son office de maître des re-
quêtes. H mourut on août 17T2. Il était fils de Michel
Hue de Miroménil, conseiller au parlement de Rouen,
et de Marie Duval de Bonneval.
1704-17 10. Turgot (Jacques-Etienne), chevalier,
seigneur de Sousmont, Bons, Ussy, Brucourt, etc.,
43o HISTOIRE DE TOUR AINE.
maître des requêtes \e ^i mai 1690; intendant de
Metz en 1697 ; de la généralité de Tours en 1704,
et depuis de celle de Moulins en 1710, mort le a8
mai 1722. 11 était fîis posthume de Dominique Tur-
got, maître des requêtes, et père de Michel-Etienne
Turgot , prévôt des marchands, à qui Paris fut rede-
vable de ces grands égouts par où s'écoulent les im-
mondices de cette capitale.
1711-1717. Chauvelin (Bernard de), conseiller
au parlement, maître des requêtes le 23 février
1703; intendant de la généralité de Tours en 17 1 1 ,
de Bordeaux en 17 17 , et enfin d'Amiens en 1740»
Nommé conseiller d'état ordinaire, il mourut le 16
octobre 1755, âgé de quatre-vingt-trois ans. Il avait
épousé en 1700 Catherine, fille de Louis Martin,
seigneur d'Auzielles.
17 17-1721. Legendre (Gaspard-François) , cheva-
lier, vicomte de Montclar, baron de Salvagnac,
conseiller du roi en tous ses conseils et au parle-
ment de Paris, maître des requêtes, en 171 4 inten-
dant de Montauban , et de la généralité de Tours en
1717 , mort conseiller d'état. Il avait épousé Marie-
Anne Pajot.
J721-1722. Voyer (Marc -Pierre de), comte d'Ar-
genson , seigneur de Villantrais , de Lys , baron des
Ormes, né le 16 août 1696, de Marc- René, garde
des sceaux de France , et de Marguerite Lefebvre de
Caumartin. Avocat du roi au châtelet en 17 18 , con-
seiller au parlement de Paris le 29 août 17 19, maître
des requêtes le 1 7 septembre de la même année , et
irrTENDANs. 43 1
lieutenant de police le 26 janvier 1720, place dont
il donna sa démission le i" juillet suivant. Il fut
nommé intendant de Tours le 18 février 172 1 , et
grand cToix, chancelier, garde des sceaux de Tordre
de Saint-Louis , par la démission de René Louis ,
son frère aîné ; mais il ne conserva que très-peu de
temps son intendance , ayant é(é rappelé le 16 avril
17 2*2 aux fonctions de lieutenant de police de Paris,
dont il se démit de nouveau, en 1724, pour être
conseiller d'état. Le régent l'avait nommé, en 17^3,
son chancelier garde des sceaux, et surintendant de
ses finances, fonctions qu'il continua de remplir,
quand ce prince fut mort, auprès du duc d'Orléans
son fils. Maître des requêtes honoraire le 27 fé-
vrier 1724, il fut reçu membre honoraire de l'aca-
démie des sciences : enfin il obtint la surintendance
des postes et le ministère de la guerre, qu'il perdit
l'un et l'autre, en 1757, par les intrigues de la favo-
rite Pompadour, qui le fit exiler à sa terre des
Ormes , où il est mort, en 1764? avec la réputation
d'un homme de beaucoup d'esprit, de savoir et d'ha-
bileté dans les affaires.
Il avait épousé, le 24 mai 17 19, Anne Larcher,
qui le fit père de Marc-René, deuxième du nom,
dont nous avons |>arlc à l'article des lieutenans-géné-
raux du roi , ainsi qu'aux grands baillis.
1722-1725. Hérault (René), seigneur de Fon-
taine-l'Abbé et de Vaucresson , avocat du roi au
châtclet de Paris, le i4 septembre 1712, procu-
reur-général au grand-conseil le iG février 1718,
432 HISTOIRE DE TOURAINE.
et maître des requêtes le 28 novembre 1719, avec
des lettres de compatibilité. Le 4 mars , il fut pourvu
de la commission d'intendant de la généralité de
Tours, et le 28 du même mois nommé conseiller
d'honneur au grand - conseil. Son administration
comme intendant fut, heureusement pour la Tou-
raine,de très-courte durée. Le genre de talens dont
il avait déjà fait preuve le fît appeler en 1725 à îa
place de lieutenant de police de Paris , où il eut oc-
casion de développer son caractère inquiet et violent.
Ce fut à lui surtout qu'on dut de voir ériger l'espion-
nage en moyen administratif, invention immorale,
signe infaillible d'un gouvernement faible ou oppres-
seur, et portée depuis à un point de perfection ef-
frayante pour la société.
Après s'être rendu justement odieux dans cet em-
ploi , dont il pervertit les attributions pendant qua-
torze ans , il fut récompensé de ses services , le 20
décembre J739, par l'intendance de Paris : mais il
n'en jouit pas long-temps , éiant mort le 2 août 1740?
âgé seulement de quarante-neuf ans. Il avait épousé
en secondes noces Marie-Hélène , fille de Jean Moreau
de Séchelles , contrôleur - général des finances , en
1756.
1725-1726. Ravot ( Jean- Baptiste ), seigneur
d'Ombreval, avocat-général à la cour des aides de
Paris, maître des requêtes en 1722, fut nommé en
1725 à l'intendance de la généralité de Tours, qu'il
quitta l'année suivante. Après avoir administré plu-
sieurs autres provinces, il fut choisi en 1739 pour
INTENDANS. 4^^^
remplacer René Hérault dans les fonctions de lieute-
nant-général de police de Paris.
Il était fils de Jean-Baptiste Ravot d'Ombreval,
également avocat-général à la cour des aides de Pa-
ris , et de Geneviève Berlhelot.
1 7 26- 1 7 3 1 . Pomraereu (Michel-Gervais-Robert de),
marquis de Rizeys, conseiller au parlement de Paris
le 17 mars 1706; maître des requêtes le 17 janvier
1713, sur la démission de son père Jean-Baptiste ;
intendant d'Alençon en 1720, et de la généralité
de Tours en 17^6. Il passa en mars à l'intendance
de Pau, où il mourut le 17 février 1749-
Né en i685 , il avait épousé en 1724 Catherine,
fille de Jean Oursin , receveur-général des finances
à Gaen.
1731-1743. Le Clerc de Lesseville (Charles-Nico-
las ) , seigneur de Saint-Leu et de Saint-Prix , baron
d'Authon, conseiller au parlement de Paris le i5
avril 1702 ; maître des requêtes le 3 mai 171 1 ; in-
tendant de Limoges en 17 16, d'Auch en 17 18,
et de Tours en 1731 jusqu'à 1743 : mort le 17
février 1749*
Son père Charles Le Clerc de Lesseville, second de
la branche de Saillancourt, était conseillera la cour
des aides de Paris, et le fils avait épousé en 1708
Charlotte-Françoise Le Clerc de Lesseville , sa cou-
sine germaine , morte en 1 765 à l'âge de quatre-
vingts ans.
1743- 1745. Pineau de Lucé (Jacques), seigneur
de Yiennay, la Pèchellerie, conseiller au parlement
3. 28
434 HISTOIRE DE TOURAINE.
de Paris le i5 février l'j^o, maître des requêtes le
ai juillet 1737, président au grand conseil le 18
avril 1739, fut nommé intendant de Tours en 1743.
De là il passa à l'intendance du Hainaut en 174^?
et à celle d'Alsace en 1753. Il fut conseiller d'état
au mois d'octobre 1761 , et mourut en 1764.
Il avait épousé en I743 Marie -Charlotte -Fran-
çoise de La Live de Bellegarde.
Ce fut sous sa courte administration que l'on perça
et que l'on construisit la rue à laquelle on imposa son
nom.
1 745-1 756. Sa Valette de Magnanville ( Charles-
Pierre de), maître des requêtes en 1738; il fut
nommé en 174^ à l'intendance de la généralité de
Tours , qu'il ne quitta, en 1756, que pour passer à
l'emploi de garde du trésor royal.
Ce ne fut guère que depuis cette époque que
les intendans prirent un peu de fixité, et ne passèrent
plus rapidement d'une province à une autre plus
importante, après avoir à peine acquis quelques
notions sur le pays où ils ne faisaient qu'apparaître.
1 766-1 766. Lescalopier (Gaspard-César-Charles)
fat d'abord conseiller au parlement de Paris , puis
maître des requêtes ; intendant de Montauban en
i'74o, et de la généralité de Tours en 1756.
Il descendait en neuvième ligne de Pietro de l'Es-
eale, mort en i44^î ^^h ^^ premier, changea son
nom , et le francisa en celui de l'Escalopier. Ainsi que
les Scaliger , il prétendait , et peut-être avec plus de
fondement , être issu des princes de Vérone.
INTEWDANS. 4^5
Ce fut sous lui que furent conçus les premiers
projets d'embellissement de la ville de Tours, et sur-
tout la construction du nouveau pont, l'un des plus
beaux de la France. Au nombre des grands travaux
exécutes ou commencés sous son administration , on
doit compter l'ouverture de la nouvelle route de Tours
à Bayonne , la confection de la belle digue plantée
de quatre rangs d'ormeaux , dans une étendue de trois
quarts de lieue , pour joindre le coteau de Grand-
mont , et enfin un fort beau pont en pierres établi
sur le Cher , vers l'extrémité de cette chaussée.
1 766- 1 783. Ducluzel (François-Pierre) , chevalier,
marquis de Montpipeau , baron du Chezay, seigneur
de Blan ville, etc., d'une ancienne famille du Périgord.
Maître des requêtes en 1759, il fut nommé en
1766 à l'intendance de Tours, qu'il ne voulut plus
quitter , quoiqu'on lui en eût offert de plus impor-
tantes.
Il ne négligea rien pour porter à leur perfection
les grands travaux commencés sous son prédécesseur ,
et ne profita guère de son crédit et de ses liaisons
avec le duc de Choiseul, alors gouverneur de la
Touraine , que pour l'avantage de la province.
On ne pourrait lui reprocher qu'une mauvaise
opération faite , dit-on , par égard pour son épouse ,
femme d'ailleurs très-respectable. Comme elle ne pas-
sait qu'en tremblant sur le mauvais pont de bois du
canal de Sainte-Anne pour aller à sa maison de Saint-
Côme , au lieu d'en faire construire un plus solide ,
soit en bois , soit en pierre , on le supprima tout-à-
a8.
435 HISTOIRE DE TOURAINE.
fait, et avec lui la communication du Cher à la
Loire, opération non-seulement nuisible au com-
merce, mais encore à la salubrité de ce canton, où
se trouve placé l'hôpilal général, parce que ce canal,
interrompu dans son cours, s'était converti en un
vaste marais qui commence pourtant à se combler.
Cet intendant est mort à Tours en 178^, géné-
ralement regretté. Il n'était âgé que de quarante-
quatre ans. Son corps fut transporté à sa terre de
Montpipeau , pour laquelle il avait une prédilection
toute particulière. Il n'est point d'intendant qui ait
laissé à Tours une mémoire aussi révérée.
1783- 1789. Daine (Marius-Jean-Baptiste-Nicolas),
membre de l'académie royale de Berlin , et maître des
requêtes en 1 757. Il fut d'abord nommé à l'intendance
de Pau en 1767 ; à celle de Limoges en 1774? et
enfin à celle de la généralité de Tours en 1783. Il
la conserva jusqu'à l'époque des premiers troubles
de la révolution naissante , qui le déterminèrent à
quitter précipitamment la ville de Tours et à se re-
tirer à Paris , le nom seul d'intendant suffisant à cette
époque pour devenir une cause de proscription.
Quelque temps après il s'éloigna de la France, où
il revint cependant en des temps plus calmes, et
mourut à Paris en i8o4, âgé de soixante- treize
ans.
Il était beau-frère du célèbre baron d'Holbach,
dont il paraît qu'il n'avait pas adopté les principes
philosophiques , quoique lui-même cultivât les lettres.
On a de lui une traduction en prose des quatre
INTENDANS. 4^7
églogues de Pope. 11 a traduit également de Robert
Dodsiey, t Économie de la vie humaine, lon^-tem^s
attribuée au comte de Chesterfieid. Il avait la réputa-
tion d'être fort instruit ; mais surtout très-grand par-
leur. On assure que c'est à lui que la maligne mar-
quise Du Deffant dit un jour, après l'avoir écouté
long- temps : « Mon cher monsieur Daine, si vous pre-
niez un autre livre , celui-ci est un peu ennuyeux. »
On sait que la marquise était aveugle.
Ce fut le trente-troisième et dernier intendant de
Tours.
FIN DE LA TROISIÈME PARTIE,
HISTOIRE
DE TOURAINE.
QUATRIÈME PARTIE
HISTOIRE ECCLÉSIASTIQUE
I
Le diocèse de Tours avait moins d'étendue que la
province; il ne contenait que 3o3 paroisses, y com-
pris les seize de la ville de Tours , et renfermait en
outre i6 chapitres, 17 abbayes, 4 commanderies de
Tordre de Malte , 98 prieurés simples , 4^0 chapelles
fondées, 4^ monastères d'hommes et 29 couvens de
filles, en tout 943 établissemens ecclésiastiques; mais
nous n'entrerons dans quelques détails que relative-
ment aux plus anciens et aux plus importans de ces
établissemens , nous bornant à indiquer l'époque de
la fondation et de la destruction des autres.
La province ecclésiastique de Tours comprenait
les diocèses du Mans, d'Angers, de Nantes, de Rennes,
de Dol , de Saint-Malo , de Vannes , de Quimper, de
44o HISTOIRE DE TOTJRAIINE.
Léon, de Trëguier et de Saint-Brieuc; mais ces onze
suffragans sont étrangers à notre travail.
Le diocèse était divisé en trois archidiaconés , six
archiprêtrés , et subdivisé en vingt-trois doyennés
ruraux.
CHAPITRE I.
COLLÉGIALES.
SI-
SAINT-GATIEN, CATHÉDRALE.
La première église de Tours où les chrétiens com-
mencèrent à s'assembler, fut bâtie par saint Lidoire ,
successeur de saint Catien, vers le milieu du qua-
trième siècle, au moyen de l'abandonnement de sa
maison que fit un centurion nommé Cornélius, suivant
le témoignage de saint Jérôme , dans sa 44*" épître à
Marcellus. Crégoire de Tours, liv. x, ch. 3i , dit que
ce fut dans la maison d'un sénateur dont il ne nous
transmet pas le nom. Quoi qu'il en soit, c'est là que
furent sacrés saint Martin et tous les évêques ses suc-
cesseurs. Dès son origine, saint Martin la mit sous
l'invocation de saint Maurice, et elle y resta jusqu'à
la fin du treizième siècle, où elle porta indistincte-
ment le nom de Saint-Maurice ou de Saint-Catien ;
mais ce dernier a prévalu, et ce changement fut
opéré h l'occasion d'une confrérie que les chanoines
SAINT-GATIEN. 44 1
avaient établie en Thonneur de leur premier ëvêque.
Il est probable que cette église commença à jouir
du droit de métropole du moment que les Romains
eurent établi la ville de Tours métropole de la troi-
sième province lyonnaise. Telle est l'opinion de beau-
coup de savans, contraire à celle de la cour de Rome,
qui a toujours prétendu que le droit de métropolitain
ne dérive point de l'état civil, mais de l'autorité des
apôtres et des papes.
Grégoire, en parlant d'elle, ne la nomme jamais
que l'église sainte , l'église de Touis. Adrien I" ,
Urbain II, Alexandre III, s'expriment à son égard
dans les mêmes termes. Adrien II, écrivant à Charles-
le-Chauve en 871, la cite comme la seconde ou troi-
sième église de France. Nos rois l'ont toujours honorée
de leur bienveillance et d'une protection toute parti-
culière. Philippe-Auguste écrivit au pape Luce III qu'il
la considérait comme un des plus beaux fleurons de
sa couronne , et que quiconque attaquerait l'église de
Tours, s'attaquerait à sa propre personne. Ce prince,
ainsi que son prédécesseur, la défendit constamment
contre les entreprises de Henri II et de Richard-
Cœur-de-Lion, comtes de Touraine, lorsqu'ils ten-
tèrent de diminuer ses attributions. De même les
rois Jean, Charles V, Charles YI, Charles VII et
Henri IH ne permirent jamais que l'archevêché de
Tours fût distrait de la couronne toutes les fois
qu'ils donnèrent la Touraine en apanage.
Cette église fut brûlée deux fois. La première dans
un incendie général de la ville en l'année 56 1 , sous
44^ HISTOIRE DE TOURAINE.
l'ëpiscopat de saint Euphrône , et la seconde en ii 66
par un ëvënement dont nous avons donne les détails
au 6" livre de notre Histoire. Elle fut rétablie en
premier lieu par Grégoire de Tours , qui l'orna de
plusieurs peintures , ainsi qu'il le rapporte lui-même.
Mais la seconde basilique, celle qui existe encore
aujourd'hui, ne s'acheva pas aussi promptement.
G)mmencée vers 1170, son chœur ne fut terminé
que sous le règne de saint Louis , c'est-à-dire environ
un siècle après, ainsi qu'on le voit aux vitraux qui
sont bordés des armes de Blanche de Castille sa
mère (1). Les travaux se continuèrent à l'aide des
indulgences que les papes Eugène IV, Sixte IV et
Innocent VIH accordèrent à ceux qui contribueraient
à l'achèvement de cet édifice. Malgré cela , il ne fut
porté à sa perfection qu'en i5o7 et en i5io, époque
où ses deux tours jumelles furent achevées aux frais
de l'un de ses chanoines nommé Gavé.
L^ chapitre de Saint-Gatien était un des plus
anciens de France et le premier dont il soit fait men-
tion dans l'histoire. Grégoire de Tours nous apprend
qu'il fut établi par saint Baud , seizième évêque,
qui sépara la mense des chanoines d'avec le revenu
de l'évêque. Il était composé de huit dignités, sa-
voir : le doyen , le grand archidiacre , le trésorier , le
chantre, le chancelier, l'archidiacre d'outre Loire, l'ar-
chidiacre d'outre Vienne et le grand archiprêtre. On
(i) Dans l'un des vitraux du chœur on remarque les armes de la ville,
qui dans ce temps étaient une tour surmontée de trois autres petites
tours , et ornées des bannières de France.
SAINT-GATIEN. 44^
donnait autrefois le titre d'abbés aux cinq premiers
dignitaires qu'on nommait aussi les cinq prieurs;
ils étaient appelés, mais seulement pour la forme,
lorsque l'archevcque voulait conférer une dignité ou
une prébende de son église. Ce fut l'archevêque
Barthélemi II qui , à la prière de son chapitre, sup-
prima, en 1187, l'office d'écolâtre, dont le revenu
fut annexé à la dignité de chancelier. Des quarante-
neuf prébendes , l'une était affectée à l'Hotel-Dieu^
la seconde au collège de Tours, et deux autres à
l'entretien de la psallette. On y comptait en outre
huit personnats, l'archiprêtre de Loches, ceux de
rile-Bouchard , de Sainte-Maure et d'outre Vienne ,
le sous-pelletier, le sous-chantre, le grand pénitencier,
créé en 148 5 par une bulle d'Innocent VIII, et le
secrétaire. Il y avait de plus un maître et un sous-
maître de psallette, deux diacres, seize vicaires,
deux marguilliers , dix enfans de chœur et plus de
cent chapelains. Le grand sceau du chapitre était un
saint Maurice , et le petit était un écu d'argent à la
croix pattée de gueules.
Le doyen, élu par le chapitre, était confirmé par
l'archevêque. Nous en comptons soixante-trois depuis
Frandebertus en SSq jusqu'à N* Ducluzel qui en fut
le dernier en 1782, époque de sa mort.
Dans le 1" volume de notre Histoire, nous avons
donné quelques détails sur les premiers cvêques de
Tours. Il nous reste îi en offrir ici la liste complète
dégagée des erreurs de chronologie qu'on remarque
dans celles qui avaient été publiées précédemment.
444 HISTOIRE DR TOURAINE.
I. Saint Catien est généralement reconnu pour
avoir été le premier évêque de Tours en ^Si , jus-
ques en 3o4. Après sa mort, le siège resta vacant
environ trente-sept ans.
1, Saint Lidoire, ou Litoire, lui succéda en 34i ,
et mourut en 374*
3. Saint Martin, célèbre dans toutes les Gaules,
fut appelé au siège de Tours en 375 , ou même vers la
fin de 374. Ceux qui placent sa mort en 397 font
remonter son ordination en 37 1 ; mais nous démon-
trerons ailleurs qu'il mourut véritablement l'an 400.
4. Saint Brice avait été le disciple chéri de saint
Martin, auquel il succéda en 4oo. Après avoir quitté
et repris son siège, il mourut en 447*
5. Saint Eustoche fut élu immédiatement après la
mort de saint Brice. Le premier concile qui ait eu
lieu dans la province ecclésiastique de Touraine fut
tenu par lui à Angers le 4 octobre 453. Il mourut
en 4^4? ou en 461 suivant ceux qui font mourir
saint Martin en 397.
6. Saint Perpète , ou Perpétue. Crégoire de Tours
nous apprend qu'il fut ordonné soixante-quatre ans
après la mort de saint Martin. D'après notre suppu-
tation , ce dut être en 464' Premier concile tenu à
Tours en 461 , suivant les uns, et selon nous en 482.
Saint Perpète mourut le 8 avril 494»
7. Saint Volusien, de 494 à 498 ou 499? ^poq"^
où il fut exilé et mis à mort par les Visigoths.
8. Vérus. L'incertitude qui règne sur la date de
l'exil et de la mort de son prédécesseur, ne permet
I
SAINT-GATIEN. 44^
pas de préciser celle de l'ordination de celui-ci. On
présume que ce dut être vers l'an 5oo. Envoyé de
même en exil par les Visigolhs, il y mourut vers
l'an 507.
9. Licinius tint le siège depuis 607 jusqu'en 5 19.
10. Procule et Théodore siègent simultanément
en 519. On assure qu'ils moururent à peu de jours
d'intervalle, en 62 1.
11. Dinifîus. Quelques-uns placent entre lui et les
précédens un saint Arnoux , qui n'a jamais été
évêque de Tours. Dinifîus n'occupa le siège que jus-
qu'en t)2a ou 523 au plus tard.
12. Ommatius, de 5ii à 526.
i3. Léon, abbé de Sain l-Martin , est promu au
siège épiscopal en 52 5, et meurt en 527.
14. Francilion, de 527 à 529.
t5. Injuriosus, de 529 à 546.
16. Saint Bauld, de 546 à 552.
17. Contran P% ou Gonthaire, de 552 à 555. Il
y eut après sa mort une vacance de dix mois.
i8. Euphrône, de 556 à 573. Sous lui eut lieu,
en 566, le 17 novembre, le deuxième concile de
Tours.
19. Grégoire, dit de Tours. Il nous apprend qu'il
fut élu en 573. 11 occupa glorieusement ce siège jus-
qu'à sa mort en 595.
20. Pelage P% Pallade, ou Pelade, car dans les
manuscrits ce nom s'offre sous ces trois variantes.
Il succéda à Grégoire , et mourut en 602.
44^ HISTOIRE DE TOUR AINE.
2 1 . Luparius , Leuparius , ou Leopacharius , de
602 à 614.
22. Algérie ou Agiric, de 6i4 à 617.
23. Ginaldus ne siégea qu'environ quinze mois,
et mourut en 618.
24. Valatus ou Yalarius, de 618 à 619.
2 5. Sigelaïcus, de 619 à 622.
26. Leobald ou Liébaud, de 622 à 625.
27. Modégisile, de 625 à 638.
28. Latinus, de 638 à 65o.
29. Carigisile, de 65o à 652.
30. Rigobert , de 652 à 654-
3i. Papolène, de 654 à 660. L'année même de
sa mort , il assembla à Nantes un concile , qui fut le
premier de cette ville.
32. Chrotbert, de 660 à 695. Son nom a retenti
long-temps dans l'église de Saint-Martin , relative-
ment au privilège d'exemption qu'il lui avait accordé.
Nous ne plaçons pas après lui un évêque du nom de
Bert, ainsi que quelques-uns l'ont fait, parce qu'il
est démontré que ce Bert est le même que son pré-
décesseur.
33. Pelage ou Pelade , deuxième du nom , de 69$
à 700.
34. Evartius ou Ebartius, de 700 à 709.
35. Ibbon, de 709 à 724. H confirma le privilège
que Chrotbert avait accordé à l'église de Saint-
Martin.
36. Contran, deuxième du nom, était abbé de
SAINT-CATIEN. 44?
Saint-Martin , dont a son tour il confirma les privi-
lèges quand il eut succédé à Ibbon en 724. H mourut
en 73-2.
37. Didon ou Vidon, de 73^ à 733.
38. Raimbert ou Rigambert, de 733 à 752.
39. Aubert, de 762 à 754.
40. Ostald, de 754 à 760.
41. Gavien, de 760 à 765.
42. Eusèbe,de 76^ à 771.
43. Herling, de 771 à 792.
44- Josepli, premier du nom, de 792 à 81 5. En
796 , il tint à Tours un concile qui en est le troi-
sième.
45. Landran, premier du nom, de 81 5 à 836. Il
est le premier de nos évêques qui ait été décoré du
pallîum , et qui par conséquent ait été revêtu du titre
d'archevêque, que tous ses successeurs ont porté
depuis.
46. Ursmarus , second archevêque , succéda à
Landran en 836. En 843, il assembla un concile
à Loire en Anjou ; et dans la même année , un autre
à Colaines en Touraine. 11 mourut en 846.
47. Landran, deuxième du nom, de 846 à 852.
L'archevêque de Gonzié , dans son rituel de 1785, ne
l'a point compris dans la série de nos archevêques ,
probablement parce qu'il aura cru qu'il était le même
que Landran i*^**; mais c'est une erreur qui se dé-
montre par les deux conciles que Ursmarus présida
en 843. Landran 2** fut élu en 846, et siégea jus-
qu'en 852. Il présida eu 849 le concile de Paris , ce
44^ ' HISTOIRE DE TOURAINE.
qui le fit appeler également concile de Tours , ou des
quatre provinces.
48. Amalricus ou Amaury , de 85^ à 856. Il fut,
en 853 , l'un de ceux qui présidèrent le concile tenu
à Soissons le 10 avril, en présence du roi Charles-le-
Chauve. Il mourut au commencement de l'année 856.
49. Herard fut élu au mois d'avril 856. Le 16 mai
suivant, il assembla à Tours un concile, ou plutôt
un synode de tous les curés de son diocèse , où l'on
arrêta cent quarante canons de pure discipline. Il
présida le concile tenu à Soissons le 18 août 866
par ordre du pape Nicolas F"", et mourut fort avancé
en âge, sur la fin de l'année 871.
50. Actard , de 87 1 à 874. H avait été précédem-
ment évêque de Nantes, et deux fois violemment
chassé de son siège; la première par les Normands,
et la seconde par le duc de Bretagne. Il mourut au
mois d'octobre 873.
Entre lui et le suivant , Maan et Leclerc de Bois-
rideau placent un Ragenelmus ou Rageneaume; mais
c'est une méprise de leur part. Ragenelmus était
évêque de Tournay et non de Tours.
5i. Adalardus ou Adalandus,de 874 à 891. Il fut
excommunié en 882 , ainsi que les archevêques de
Rouen et de Bourges , pour avoir communiqué avec
Formose , évêque d'Ostie ; mais ils furent ensuite
absous par le pape Marin. Ce fut lui qui reçut à
Tours la châsse de saint Martin, rapportée d'Auxerre
en 887 par les soins du comte Ingelger. Il mourut
en 890.
SAINT-GAÏIEN. 449
52. Héberne, de 890 à y 16. Il était Yun des
moines de Marmoutier qui avaient accompagné en
Bourgogne les reliques de saint Martin. A son retour,
il fut choisi pour succéder à Adaland. Il mourut sur
la fin de 916, âgé de quatre-vingt-quatorze ans.
53. Robert, deuxième du nom, de 916 à ySa.
Ce fut lui qui, le i3 mai 917, consacra la nouvelle
église de Saint-Martin , dans laquelle il fît transférer
le corps du saint. Ayant fait un voyage à Rome, à son
retour il fut assassiné au passage des Alpes , en 93 1 ,
par des brigands qui, la nuit, le surprirent dans
sa tente ainsi que ceux de sa suite , qui presque tous
éprouvèrent le même sort.
54. Théotolon, de 93^ à 945. Il avait été doyen
de Saint-Martin, et s'était ensuite retiré à l'abbaye
de Gluny, où il apprit son élection. Il s'y refusa d'a-
bord avec assez d'opiniâtreté ; mais saint Odon , son
abbé et son ami, le força d'accepter. Ce fut lui qui
fît reconstruire l'église et l'abbaye de Saint-Julien de
Tours , qui avaient été ruinées par les Normands.
55. Joseph , deuxième du nom , de 945 à 967 ,
époque de sa mort le 18 juin.
56. Frotaire, de 957 à 960. La Chronique de
Tours le fait mourir en 966; mais ou ne doit pas
avoir grande confiance dans sa chronologie, qui se
trouve ici en contradiction avec des auteurs contem-
porains qui sont des guides plus sûrs.
57. Uardouin , de 960 à 980. L'an 985, il consa-
cra l'égUse de Notre -Dame- de -Loches, bâtie par
Geoffroy Grisegonnelle, comte d'Anjou et seigneur
3. 29
45o. HISTOIRK DK TOURAINE.
de Loclies. Il mourut peu de temps après celte céré-
monie, ayant tenu le siège, suivant le cartulaire de
Saint- Julien, dix-neuf ans onze mois et neuf jours.
58. Archambaud, de 981 à ioo5. Il était fils
d'Arcanaldus , seigneur de Sully ; il est en effet
nommé Arcenaldus, dans un titre de l'abbaye de
Marmoutier ; mais le nom d'Arcbambaud a prévalu.
Nous avons eu occasion de parler de lui au iv^ livre
de notre Histoire. Ce fut lui qui le premier attaqua ,
mais vainement , les privilèges d'exemption de l'église
de Saint-Martiii.
5c). Hugues, premier du nom, de ioo5 à 102 3.
Son père était Hugues de Châteaudun, et sa mère
Hildegîarde du Perche. Il excommunia Hubert,
évêque d'Angers, pour être entré à main armée dans
la Touraine, où il avait commis des excès indignes
d'un évêque. En ioi4j il consacra l'église de Saint-
Martin qu'avait fait reconstruire le trésorier Hervé,
et mourut le 1 2 mars , ou , selon d'autres , le i o
juin I023.
60. Arnoul, neveu du précédent, fut élu en loaS,
à la place de son oncle. En io3o, il consacra l'église
abbatiale de Noyers, et mourut en io52, ayant tenu
le siège environ vingt-neuf ans.
6ï. Barthélemi j premier du nom, de io53 à 1068.
En io55, il présida le cinquième concile de Tours,
convoqué relativement à l'hérésie de Bérenger, qui
Setnbla l'abjurer de bonne foi, mais qui ne tarda pas
à se rétracter. La même année , Barthélemi ouvrit à
Angers un autre concile, dont le but était le même,
s AIN T-G À TIEN. 4^1
et qui eut un pareil résultat. Enfin, le i*'inars 1060,
il présida le sixième concile de Tours. Il mourut le
11 avril 1066, la quinzième année de son épiscopat.
Après sa mort, le siège éprouva une vacance de
quatre ans.
62. Rodolphe, autrement Raoul I", de 1072 à
io85, fils de Foulcroy, seigneur de Langeais. Son
épiscopat s'ouvrit par un événement fort simple en
lui-même, mais dont pourtant on tira un mauvais au-
gure; il fut effectivement très-orageux. Comme il
était sur le parvis de l'église pour aller se faire instal-
ler, l'archidiacre, lui demandant, suivant l'usage, si
son entrée était pacifique, une pierre se détacha du
clocher, et tua auprès de lui un de ses officiers. Nous
renvoyons à ce que nous avons dit de ses différens
démêlés , au v^ livre de notre Histoire.
63. Rodolphe ou Raoul II , surnommé d'Orléans ,
pour le distinguer de son prédécesseur, auquel il
succéda en 1086. Son épiscopat est surtout remar-
quable par le concile que le pape Urbain II tint à
Tours en 1096, pour engager les chrétiens à se croi-
ser. Ce concile est le septième de Tours, et le trei-
zième de la province ecclésiastique. Raoul II mourut
le 26 août II 1 7 , selon le cartulaire de Pont-le-Voy.
La Chronique de Tours le fait mourir en 11 19.
64. Gilbert, neveu du précédent, deiiiBà iisS.
La noblesse, en opposition au clergé et au peuple,
avait élu de son côté Gautier, grand-chantre de Saint-
Martin ; mais, à la recommandation du roi, le premier
fut choisi par le pape. Étant allé à Rome pour y
^9-
452 HISTOIRE DE TOIIRAÏNE.
suivre le procès contre les évêques deDol, il y mourut
en iisS, suivant le témoignage d'Orderic Yilalis,
qui était contemporain. L'auteur de la Chronique de
Tours, et Guillaume de Nangis, qui n'écrivirent que
dans le siècle suivant, reculent sa mort de deux ans.
65. Hildebert, de ii25 à ii34. H était évêque du
Mans , lorsqu'il fut promu à l'archevêché de Tours.
Ainsi que Grégoire, il se signala par ses écrits qui
l'ont fait mettre au rang des pères de l'Église du
douzième siècle. Nous avons plus amplement parlé de
lui à la fin de notre v^ livre. Nous ajouterons qu'il
assembla à Nantes , au mois d'octobre ii 27 , un con-
cile composé de tous ses suffragans, dans lequel
Conan , duc de Bretagne , renonça au droit de sau-
vetage, en vertu duquel étaient inhumainement dé-
pouillés tous ceux qui faisaient naufrage. Hildebert
mourut le 18 décembre ii34 , âgé de plus de quatre-
vingts ans.
66. Hugues a*" , surnommé d'Étampes ou de Char-
tres, de II 34 à 1148. La Chronique de Tours, et
Guillaume de Nangis se sont également trompés en
le faisant mourir, l'une en 1 149? et l'autre en 1 1 5o.
67. Engebaud, de ii48 à 11 57. Il était fils de
Geoffroy de Preuilly , dit Jourdain , et d'Euphrosine
de Vendôme ; ainsi il avait pour frère Geoffroy-Grise-
gonnelle II, comte de Vendôme. Les auteurs varient
sur la date de sa mort ; mais la pancarte noire de
saint Martin lui donnant neuf ans d'épiscopat, il est
clair qu'il dut mourir en 11 57.
68. Joscius , Josse ou Joscion , de 11 57 à 1174»
SATIVT-GVnii.X. 453
Deux circonstances ont rendu son ëplscopat remar-
quable. La première est le concile assemblé à Tours par
le pape Alexandre III, le 10 mai 1 163. Ce concile fut
si célèbre, qu'il fit donner à la ville de Tours le nom
de seconde Rome. On y compta dix-sept cardinaux,
cent vingt-quatre éveques et quatre cent quatorze
abbés. Le second événement est l'embrasement de la
catliédrale de Tours, en 1166, à la suite d'une
émeute occasionée par le conseil que Joscion avait
donné au roi de remettre entre les mains seules de
ses commissaires les sommes que Henri II , roi d'An-
gleterre , avait fait lever dans ses états pour la Terre-
Sainte, et qui avaient été déposées dans cette cathé-
drale. Joscion mourut le i3 février 1174? si pauvre
par suite de son amour pour les procès, qu'il laissa
à peine de quoi faire face aux frais de ses funérailles.
69. Barthélemi II, de 11 74 à 1206. Il était fils
de Geoffroy Grisegonnelle , comte de Vendôme , et
de Mathilde de Châteaudun , par conséquent neveu
d'Engebaud, prédécesseur de Joscion. Ce fut lui qui,
en 1 189, fit à Foutevrauld les obsèques de Henri II,
roi d'Angleterre , et comte de Tourainc , en présence
de Richard-Cœur-de-Lion , son fils et son successeur.
Barthélemi avait pour frère Hugues de Vendôme,'
doyen de sa cathédrale , et pour neveu Jean de Faye ,
qui succéda à celui qui suit.
70. Geoffroy de La Lande, et non du Lude,
comme quelques-uns l'ont écrit, de 1207 à 1208.
On voit qu'il ne tint le siège que fort peu de temps,
étant mort à Tours le ig avril 1208, après Pâques.
454 HISTOIRE DE TOURAINE.
On croit que sa mort ne fut pas naturelle , et Guil-
laume de Nangis fait entendre qu'il aurait été em-
poisonné.
71. Jean de Faye, de 1208 à 1228. Lors de l'élec-
tion , les voix furent partagées également entre lui et
Robert de Vitré; mais Robert étant mort en allant à
Rome pour tâcher de faire valider son élection , celle
de Jean de Faye fut confirmée par le pape. Le mar-
tyrologe de la cathédrale place sa mort au 2 3 avril
1226; mais la chronique latine de l'abbaye de Saint-
Julien de Tours l'indique d'une manière bien plus
exacte, et qui ne peut laisser aucun doute. Elle dit
qu'il mourut en Tannée 1228, cycle de la lune xiii,
indiction i, épacte xii, circonstances qui ne peuvent
en effet s'appliquer qu'à l'année 1228 et non à 1226.
72. François Cassard, de 1228 à 1229. Maan l'a
omis dans sa liste des archevêques; mais les frères
Sainte-Marthe et André Duchesne prouvent qu'il le
fut véritablement, ce qui est en outre confirmé par
son épitaphe qu'on lisait dans l'église des Jacobins
de Lyon , où il mourut en 1237. Il avait été nommé
cardinal du titre de Saint-Martin-du-Mont.
73. JuheJ de Mayenne^ fils de Juhel, deuxième
du nom, de 1229 à i244- Nous trouvons trois con-
ciles tenus sous son épiscopat ; l'un à Château-Gon-
tier en I2 3i ; l'autre à Tours en 1236, et le dernier
encore à Tours en 1239. Maan parle de deux autres
qçijciles qui, selon lui, auraient eu lieu àSaumuren
15^4^ ^t 1243; mais ni l'un ni l'autre ne se trouvent
d^ns les recaeiU des coaciles. Juhel quitta au mois
SàïNT-GATIEN. 455
d'août 1244 l'archevêché de Tours , pour passer à
celui de Reims.
74. Geoffroy Marcel ou Marceau, de \il^S à laSl.
Il était fils de Geoffroy-Marceau et de Philippe de
Sablé , seconde fille de Robert d^ Sablé et de Clé"
mence de Mayenne. Il ne fut sacré qu'en ia45> après
la Pentecôte. On croit qu'il était neveu de Juhel de
Mayenne. Il mourut le 12 juillet I25i.
Maan a fait deux archevêques de ce Geoffroy
Marceau , en mettant l'un sous le seul nom de Geof-
froy , et l'autre sous celui de Martel.
75. Pierre de Lamballe, de I25i à I256. Ce sur-
nom lui venait du Ueu de sa naissance. En I253, il
tint un concile à Saumur, et un autre à Château-
Gontier en 1254-
76. PhiUppeF^de i256à 1257. Le peu de durée
de sou épiscopat Ta fait omettre par quelques auteurs ;
mais son existence a été prouvée et rétablie par les
auteurs de la Gallia Christiana^ d'après des titres
de l'abbaye de Baugerais , de l'année 1257.
77. Vincent de Pirmil, ou suivant d'auti-es de
Pinellis, de 1267 à 1270. Il ouvrit à Nantes, le
mardi après la Saint-Pierre 1 264 , un concile com-
posé de ses dix suffragans, et en 1268, le lundi
gprès la Madelaiue , il en tint un autre à Chateau-
Gontier. Sa mort est indiquée au [9 septembre 1270.
78. Jean de Monsoreau, de 1271 à i285. Il fut
élu le jeudi i(3 janvier, après la fête de Saint-Hilaire
1270, c'est-à-dire 1271, nouv^^au style. On compte
cinq conciles sons sou épiscopat. Il tint le premier à
4^6 HISTOIRE DE TOURAINE.
Rennes, le 22 mai layS ; le deuxième à Saumur, le
3i août 10, -76; le troisième à Langeais, en 1278; le
quatrième à Angers, le 11 octobre 1279; et le cin-
quième à Tours, en 1282. Il mourut le 26 janvier
1284. Il avait été pendant quelque temps expulse do
son siège , et privé de son temporel , par ordre de
Philippe-le-Hardi , fils de saint Louis , dont il finit
par recouvrer les bonnes grâces.
79. Olivier de Craon , fils de Maurice IV de
Craon. Élu par la voie du compromis, dont il fut fait
usage pour la première fois le 24 mai i285 , il mou-
rut à Rome dans la même année, sans avoir été sa-
cré, en sorte qu'on pourrait, à la rigueur, ne pas le
compter au nombre de nos archevêques.
80. Bouchard Daye , Dain , ou plutôt Daën , de
1285 à 1290. On se servit encore de la voie du com-
promis pour cette élection, qui fut confiée à Lui Bou-
chard, trésorier, et à Renaud de Montbazon, doyen
du chapitre de la cathédrale. Celui-ci désigna son
collègue, qui fut en conséquence proclamé le jeudi
20 décembre 1285. Il mourut au mois d'octobre 1290.
81. Philippe de Candé. Il paraît que la méthode
du compromis était alors en faveur, car on en fit de
nouveau usage pour donner un successeur au précé-
dent. L'élection ayant été remise à trois chanoines,
Philippe fut élu le 3 janvier 1291 ; mais il mourut le
i5 février suivant, quarante jours après son élection,
sans avoir pu prendre possession du siège ; ainsi il se
trouve dans la même catégorie que Olivier de Craon.
82. Renaud de Montbazon, de 1291 à i3i2.Il
SAllNT-GATIEN. 4^7
était fils de Geoffroy de Montbazon et de Jeanne de
Vendôme. Ce fut encore par la voie du compromis
que celui-ci fut élu; mais cette fois, le choix fut
confié à dix membres du chapitre, tant dignitaires
que chanoines , qui nommèrent leur doyen Renaud
le 29 avril 1291. Il alla à Rome la même année, et
obtint ses bulles au mois de décembre suivant. Il
mourut à Tours le 23 août i3i2. Il eut sa sépulture
dans la cathédrale, entre les deux piliers du sanc-
tuaire, oïl on lui érigea un grand monument qui fut
détruit en 1684 pour faire place h une balustrade
qui découvrait le grand autel.
83. Geoffroy de La Haye, de i3i2 à i'5i3 , fils
de Philippe, seigneur de La Haye, et d'Isabelle de
Passavant. Deux conciles eurent lieu sous son épisco-
pat; le premier à Saumur, le 3 octobre i3i5, et le
deuxième à Château-Gontier, en 1 320. Il mourut le
i3 avril 13^3.
84. Etienne de Bourgueil , lieu de sa naissance, de
13^3 à i335. Le pape Jean XXIl ayant nommé, de
piano Jure, un jeune homme qui n'était pas encore
dans les ordres, le chapitre s'en plaignit au roi, et
un arrêt du parlement du 2 mai i323 ordonna au
chapitre de s'assembler pour procéder suivant les
formes accoutumées h l'élection d'un nouvel arche-
vêque , et les suffrages se réunirent en faveur d'Etienne ,
quoique né de parens obscurs. Peu de temps avant
son décès, il fonda à Paris, en i334, un collège
pour les pauvres écoliers de son diocèse. Il mourut
le 6 mars j33'>.
458 HISTOIRE DE TOCRAINE.
65. Pierre de Fretaud, de i335 à 1357. I^ ^^^
principalement son élection à la recommandation du
pape Benoît XII. Le 20 novembre i336, il tint un
concile à Château-Gontier, et un autre à Saumur, en
3.34^; mais ce dernier n'est pas mentionné dans les
recuieijs généraux, quoiqu'il soit composé de trente-*
fleux. jçai>ons. Pierre Frétaud, ou, suivant d'autres, de
Fritof;, m(>urut le 21 mai i357.
B6. Pliijippe Blanche, de 135^ à i363. Ce fut le
premier qui se fit porter par les barrons le jour de son
lentrée. Il était si libéral envers les pauvres , qu'il ne
laissa pas de quoi se faira enterrer.
S'j, Simon de Pe^pul, 4^ i363 à iSyQ. H ne fut
sacre qu'en i364. H tint un concile à Angers, en
.i36l5 9 et obtint de Charles V, au mois de septembre
^372^ que dorénavant les archevêques de Tours
§çr|iieqt ppnseillers-nés au parlemeut de Paris.
88. Séguin d'Anton, de 1379 à i38o. Il fiit
pomwé direçtemjent par Charles V, en vertu dç l'in-
duit accordé k Sa Majesté par Clément VII, pape
d'Avignon , qui avait transmis au roi la faculté de
npmmer au^ premières dignités de toutes les églises
4e son royaume. Séguin d'Anton abdiqua son arche-
vêchié en 1 38o , et fut nommé patriarche d'Antioche.
8q. Aleaume Boistel, de i3SiQ à i383. Il fut
utilement employé dans diverses négociations par
Cliarles YI; mais il mourut en i383, n'ayant, dans
Iç cours de ces trois années, résidé que peu de temps
d^us spn diocèse.
90. Guy de Roye, de i383 à i384. H ne con-
SAINT-GATIEN. 4^9
serva qu'un an rarchevêché de Tours , d'où il passa
à l'archevêché de Sens , et ensuite à cohii de Reims.
En se rendant au concile de Pisc, il fut tué à Vollri
près Gènes, dans une sédition suscitée par l'un de
ses gens qui avait tué un homme du peuple avec
lequel il avait eu querelle.
91. 5éguin d'Anton, pour la seconde fois, de
i385 à 1395. Malgré son abdication pour le patriar-
cat d'Antioche, le pape Clément VII lui accorda,
au mois d'avril i385, de nouvelles bulles qui l'auto-
risaient à réunir l'admimstration spirituelle et tem-
porelle de l'archevêché de Tours, au spirituel et
temporel du patriarcat d'Antioche; mais au lieu du
titre d'archevêque, il ne voulut prendre que celui
d'administrateur perpétuel. Il mourut à Candes le a5
mai 1895, et eut sa sépulture dans l'église collégiale
du lieu.
92. Ameil Dubreuil, de i395 à i6i4' Son élec-
tion eut lieu le 26 juillet. Ce fut lui qui conseilla d'ei^
agir avec Benoît XIII par la voie de la douceur ^
préférable à celle des armes. Il fut en conséquenc.e
député vers lui en 14^7? pour l'amener à renoncer
au saint- siège; mais ses démarches furent vaines.
Il mourut à Tours le i*'' septembre 14^4-
93. Jacques Gélu, de i4i4 ^ ^^^'J- Sa nomina-
tion par le pape Jean XXIII eut lieu en vertu du
droit de résiervation. Il fit son entrée solennelle le
8 avril i4i5, et partit aussitôt pour le concile de
Constance, où le pape Benoît fut déposé. Le concile
ayant statué qu'il serait adjoint aux cardinaux , po^r
46o HISTOIRE DE TOURAÎNE.
l'élection du nouveau pape, cinq dcpulës de chaque
nation, Jacques Gélu fut du nombre des cinq prélats
français, et il eut même des voix au conclave. Au
mois de juillet 14^6, il permuta avec Philippe de
Coëtquis pour l'archevêché d'Embrun , où il mourut
le 7 septembre i[\Si.
94. Philippe de Coëtquis ou Coëtkis, de 1427 à
i44i- Il 116 fwt installé que le 29 mai 1428; il ou-
vrit à Nantes, le liS avril i43i , un concile synodal
de tous les évêques , abbés ^t chapitres de la province
ecclésiastique. Choisi pour être ambassadeur du roi
auprès du concile de Baie, il y fut créé cardinal le
12 novembre i44o> P^ï* l'anti-pape Félix; mais il ne
jouit pas long-temps de la pourpre , étant mort à
Tours huit mois après, le 12 juillet i44i*
gS. Jean Bernard, de i44i *^ i466. Charles VII
le nomma son ambassadeur à Rome, et il fut envoyé
dans la même qualité, en \t\^l\^ auprès de Henri IV,
roi de Castille. Il avait tenu à Angers, en i44^5 ^^^
concile qu'on ne trouve point dans les recueils. Tours,
qui était le lieu de sa naissance, fut témoin de sa
mort le 28 avril 1466. Il était âgé de quatre-vingts
ans.
96. Giraud Bastet de Crussol, de 1466 a 1468. Sa
nomination fut l'ouvrage du pape Paul II , et eut lieu
en vertu du privilège des grâces expectatives. Sacré
le i3 octobre 1466, il se démit de son archevêché
en 1468, pour l'évêché de Valence, en Dauphiné,
et fut ensuite nommé patriarche d'Antioche. Il mou-
rut à Valence en 1472.
SAINT-GATIEN. ^6 S
97. Hëlie de Bourdeilles, de 1468 à 1484. De
l'évêchë de Përigueux il passa à rarchevêché de
Tours. Aucun de ses prédécesseurs ne s'était encore
signalé par un zèle aussi ultramontain. 11 avait beau-
coup d'empire sur l'esprit de Louis XI , et ne con-
tribua pas peu à lui faire abolir la pragmatique
sanction, monument de sagesse et de politique de
Cbarles VIL Ce dévouement servile lui mérita le
chapeau que lui donna Sixte IV, en i483, sous le
titre de Sainte-Lucie. Il mourut l'année suivante au
château épiscopal d'Artannes, le 5 juillet, âgé seu-
lement de soixante-un ans.
98. Robert de Lénoncourt, de i484 à 1509. Le
chapitre s'étant assemblé plusieurs fois, sans avoir
pu s'accorder pour donner un successeur à Hélle de
Bourdeilles , le pape Sixte IV , à la demande du roi ,
nomma Robert de Lénoncourt, qui n'était âgé que
de vingt-cinq ans, avec la clause qu'il n'aurait l'ad-
ministration du siège que lorsqu'il aurait atteint sa
vingt-septième année. Cinq ans après, il permuta
son archevêché de Tours contre celui de Reims,
dont il fut pourvu le 7 avril 1 509.
99. Charles -Dominique de Carette, ou plutôt
Caretto, de i5o9 à i5i4. H était frère de Fabrice
Caretto, grand-maître de Rhodes. Il fut employé par
Charles VIII dans plusieurs négociations importantes
auprès du pape Pie II, de Ferdinand, roi d'Espagne,
et de Maximilien , roi des Romains. Le pape Jules II
le créa cardinal du titre de Saint-Vital, puis de Saint-
Nicolas, et enfin de Sainte-Cécile. Il avait échangé
46'^ HISTOIRE DE TOURAINE.
avec le précédent, contre rarchevêché de Tours
celui de Reims , qui est réputé le premier siège de
la Fï'ance. Il se démit de nouveau de celui de Tours
pour l'évêché de Gahors. Il est vrai qu'il était en
même temps archevêque de Thèbes. En iSio, il
avait présidé le douzième concile de Tours. Tl mourut
à Rome, au mois de juillet iSiy.
loo. Christophe deBrillac, de i5i4 à i520. Il
était fils de Jean de Brillac , chevalier, seigneur
d'Argy, de Monts en Touraine, et d'Anne de Tran-
chelion. Sous son épiscopat furent consacrées , par lui
l'église de Chenonceaux, reconstruite par Thomas
Bohier eu i5i5 ; et par Odarl , évêque de Troyes, le
àvt novembre iSig; celle de Vérets, bâtie par Jean
de La Barre , seigneur du lieu.
loi. Martin de Beaune, de jSso à i^a^jfilsdu
surintendant Jacques de Beaune de Semblançay. Ce
fut le premier qui fut nommé par le roi, en vertu d\i
concordat de Léon X. Il mourut à Tours le i juillet
1527, du chagrin que lui causa le procès de son
père , dont il ne vit pas du moins le supplice qui eut
lieu six semaines plus tard.
lOa. Antoine de La Barre, de iSay à i547. Le
6 février i533, il consacra l'éghse de Vosnes, au-
jourd'hui Rochecorbon , qui , du coteau où elle était
au*]f>àrcivant placée à côté du château , avait été trans-
férée dans le vallon ou on la vait encore à présent.
11 était né au château de Vérets, dont son père Jean
de La Barre était seigneur. Son diocèse le perdit le
12 janvier i547.
SAI^T'ÔAÏIEK. /f^â
to3. George d'Armagnac , de i547 ^ '55i , car-
dinal du titre de Saint-Jean et Saint-Paul, ndtnmé
par le roi François I". Il était fils de Pierre d'Anna^
gnac , comte de l'Ile-Jourdan , et de Yoland de Là
Haye-Passavant. Il se démit de cet arehev^clié éhtre
les mains du roi en 1 55 1 , et fut successivement arche-
vêque de Toulouse et d'Avignon , où il motiif'Ut le ^
juin i585.
104. Étieiine dé Poncher, de i55i à i553. De
l'évêché de Bayonne , Henri H l'appela à rarclieVêché
de Tours, lieu de sa naissance, en vertu de btilles
du pape Jules HI du 6 avril i55ï. Il mourut à Paris
le ï5 mars l553, à l'âge de quaraute-tjuatre ans.
!o5. Alexandre Farnèse, cardinal, de i553 à l65^,
fils de Pierre- Louis Farnèse, duc de Parme et de
Plaisance. En i554, il remit son archevêché entre
les mains du roi , et reçut en échange l'abbaye de
Bonport , diocèse de Saint-Brieuc. Il mottrut à Rome
le 3 mars 1589.
106. Simon de Maillé de Bréiié, de i554 à t5gf.
Il était déjà évêque de Viviers , lorsque la fateùr de
Diane de Poitiers , sa parente , lui procura l'archevê-
ché de Tours. De retour du coBfcile de Constance, en
i583, il assembla à Tours, au mois de: mai , un con-
cile qui fut obligé , h cause de la peste qui venait de
5e déclarer dans cette ville , de se transférer à Angers.
Son penchant pour la ligue hii attira des désagi*é-
mens qui le forcèrent de quitter la ville de Tours,
et de se reléguer dans son château de Brézé , où il
mourut le 1 1 janviet» 1 5g7 , Agé de quatre-vingt-
464 HISTOIRE DE TOURAIHE.
deux ans. Quelques années auparavant, il avait failli
d'y être écrasé par la chute du plancher de la chambre
dans laquelle il couchait , chute qui causa la mort de
plusieurs des siens.
107. François de La Guesle, de 1^97 à 161 4- H
était fils de Jean de La Guesle, premier président au
parlement de Paris , et n'en perdit pas moins le pro-
cès qu'il intenta au chapitre de Saint-Martin , dont
il voulait faire abolir le privilège d'exemption. Ce
fut son père qui perça de son épée Jacques Clément,
au moment oii il venait d'assassiner Henri IIL
1 08. Sébastien Dori-Galigaï , abbé de Marmoutier,
frère de la maréchale d'Ancre, de 1616 à 1617. Il
n'avait pas encore pris possession de son siège, lors-
que le maréchal , son beau-frère , fut tué sur le pont
du Louvre le 24 avril 16 17. Craignant la fureur
populaire qui se manifestait dans tout Paris, il se
réfugia au collège de Marmoutier, rue Saint-Jacques ,
d'oii il partit secrètement pour l'Italie, laissant vacans
son siège et son abbaye.
1 09. Bertrand d'Eschaux ,dei6i7ài64i. Nommé
à l'évêché de Eayonne, en 1598, il fut appelé au
siège de Tours le 20 juin 1617. Ce fut lui qui admit
dans l'intérieur de la ville de Tours les minimes,
les prêtres de l'Oratoire, les religieuses ursulines,
les fdles de la Visitation et celles du Calvaire. Il
mourut à quatre-vingt-cinq ans, le 2J mai 1641.
iio. Victor Le Bouthillier, de 1641 à 1670.
Ayant cédé son évêché de Boulogne à un neveu de
l'archevêque Bertrand d'Eschaux, il fut nommé
SAINT-GATIEN. 4^5
coadjuteur de ce dernier, et lui succéda de plein
droit après sa mort. Ce fut lui qui établit un séminaire
à Tours, et qui y appela les religieuses capucines
ainsi que celles de l'Annonciation appelées les Bleues.
11 termina sa carrière à soixante-treize ans , le 1 2 sep-
tembre 1670. Il était oncle du célèbre abbé de Rancë.
m. Charles de Rosmadec, de 1671 à 167a. Le
roi le fît passer, ainsi que quelques autres de ses
prédécesseurs, du siège deBayonne à celui de Tours,
cil sa cathédrale le reçut solennellement le 12 jan-
vier 1672. Mais le mauvais état de sa santé lui fit
sentir le besoin de prendre les eaux thermales. Il se
rendit h celles de Bourbon, où il languit encore
quelques mois, et finit par y mourir le 12 juillet de
la même année. Ses restes furent rapportés à Tours,
et inhumés à Saint-Gatien.
112. Michel Amelot de Gournay, de 1673 à 1687.
Il avait été nommé évêque de Lavaur l'année qui
précéda sa translation à l'archevêché de Tours, dont
il prit possession le 16 novembre 1673. 11 confia aux
prêtres de la Mission la direction du séminaire créé
par Victor Le Bouthillier, et établit à Tours, en 1670,
les filles de l'Union chrétienne. Sa carrière ne fut pas
longue. Il la termina le 17 février 1687, à l'âge de
soixante-trois ans.
11 3. Claude de Saint-Georges, de 1687 à 1693.
Il avait successivement occupé le siège de Maçon ,
en 1682, et celui de Clermont, en 1684, lorsqu'il
fut appelé à l'archevêché de Tours; mais d'après la
mésintelligence qui régnait alors entre les cours de
3. 3o
466 HISTOIRE Di: TOURA.INE.
Rome et de Versailles, il ne put parvenir à obtenir
ses bulles: c'est pourquoi, dans l'assemblée générale
du clergé de 1690, il ne prend que la qualité cVar-
chevêque désigné. Cependant, les difficultés ayant
été aplanies, il fut nommé, le 5 septembre 1693,
à l'archevêclié de Lyon, où il mourut en 1714»
ï ï/j. Matthieu Jsoré d'Hervaut, de 1698 à 1719.
Ji n'avait pas encore reçu ses bulles pour l'évêché dje
Condom, que le roi le transféra au siège archiépisco-
pal de Tours, le 17 novembre de la même année 1693.
Plusieurs de ses successeurs avaient tenté vainement
de soumettre à leur juridiction le chapitre de Saint-
Martin , et de faire abolir ses privilèges d'exemption.
Ce fut lui qui les attaqua avec le plus de chaleur et
de ténacité, et ses efforts furent couronnés du succès
que lui procurèrent deux arrêts du parlement dics
20 novembre 1700 et i3 avril 1709. Le chapitre de
sa cathédrale fut compris dans cette abolition. Il
jouit encore dix ans de son triomphe, étant mort à
Paris, en 17 19» dans sa soixante-neuvième année.
Il 5, Armand-Pierre de La Croix-Castries. Il fut
sacré à Paris le 29 octobre 1719; mais il n'avait pas
encore pris possession quand , dans le cours de cette
même année, au mois de novembre, il fut transféré
à l'archevêché d'Alby, oii il est mort le i5 avril 1747»
âgé de quatre-vingt-huit ans.
116. Henri-Osvald de La Tour d'Auvergne, de
17 19 à 17^1. Quoiqu'ayant été sacré dans l'année
de sa nomination, il ne vint point prendre possession
-de son siège, d'où il fut transféré à celui de Vienne
en Daupliiné, le 4 janvier 17^1. Il se démit de cet
archevêché lorsqu'il eut été créé cardinal, et mourut
à Paris le i3 avril 1747-
117. François Blouet de Camiily, de 1721 à 1723.
De révêché de ïulle, qu'il possédait depuis le 1 1
mai 1704, il passa à rarchevêché de Tours, oii il fit
son entrée le i" mai 1723. Après quelques mois de
séjour à Tours, ayant entrepris une tournée dans
son diocèse, il tomba malade à Ligueil, et il y mou-
rut le 17 octobre de la même année.
118. Louis-Jacques de Chapt de Rastignac, de 1 7 23
à 1750. Nommé à l'évêché de Tulle en 172 j , il passa
au mois d'octobre 1723 à rarchevêché de Tours. La
manière brillante dont il parut à l'assemblée géné-
rale du clergé, en 1726, donna une si haute idée de
ses talens, qu'il fut ensuite choisi pour présider celles
de 1745, 1747 ^t T748. Il avait été nommé en 1746
commandeur de l'ordre du Saint-Esprit. Ce fut lui
qui, en 174^, ht réunir pour toujours à l'arche-
vêché de Tours la mense abbatiale de Marmoutier.
On lui dut la fondation et la dotation du collège de
Chinon, ainsi que l'établissement de l'hospice de la
Madelaine pour les enfans trouvés, qui auparavant
étaient placés à l'hôpital. Il mourut au château de
Verets, en 1760, âgé de soixante-cinq ans.
1 iQ. Henri-Marie-Bernardin de Rosset de Fleury,
de X75oà i774' Gilles de Coëtlosquet, évêque de
Limoges, ayant refusé l'archevêché de Tours, le car-
dinal de Fleury le fit obtenir à son neveu, qui n'était
âgé que de trente-deux ans. Il fut sacré à Saint-Cyr,
3o.
/|()8 HrsToiiu- ni: iodlune.
le -jj) juin 1751 , CM présence du roi et de la famille
royale. En 1774? il ^1*^ appelé à rarcheVêché de Cam-
bray, qu'il n'accepta qu'après des refus réitérés et sur
l'ordre exprès du roi. 11 y est mort le 2 3 janvier 178 J ,
aussi chéri et aussi vénéré qu'il l'avait été dans son
ancien diocèse.
19.0. Joachim-François-Mamert de Conzié, de
1774 à 1790. Son frère aîné, Louis-François-Marc
Hilaire, évêque d'Arras, ayant refusé rarclievêché de
Tours après la promotion de M. de Fleury, celui-ci y
fut nommé à sa place. Il était député du clergé de
Touraine aux Etats généraux lorsque la constitution
civile du clergé , décrétée par l'assemblée consti-
tuante, le détermina à quitter la France et à passer
en Angleterre avec son frère, qui, comme lui, y
termina sa carrière.
î-21. Pierre Suzor, évêque constitutionnel. Il
était curé de la paroisse d'É cueille^ qui depuis a
été distraite de la Touraine, lorsqu'il fut nommé
éi^éque par rassemblée électorale du département
d' Indre-et-Loire ^ conformément aux dispositions
de la constitution civile du clergé. Il reçut à Châ"
teauroux V institution canonique par V évêque du
département de V Indre, et fut sacré à Paris ^
en 1 791 ? dans le mois qui suivit son élection.
Il n'occupa le siège que jusqu'en 1793, époque
oit toute espèce de culte fut abolie par la conven-
tion nationale; mais ^ en 1797, ^^ culte ayant été
rétabli., il assista au concile qui fut convoqué au
mois de fructidor. Bientôt une attaque d'apoplexie
S\i:VT-CATlEN. 4^9
Tobligea de renoncer à ses fonctions épiscopales.
Il se retira dans le sein de sa famille , à PreuHljr^
où il est mort le 1 3 ai'ril 1 80 1 , âgé de soixante-
huit ans.
11%, Jean de Dieu-Raymond de Boisgelin de Cicé,
ancien archevêque d'Aix, de 1802 à i8o5. D'après
le concordat conclu le i5 juillet entre la France et
le pape Pie VII, les difficultés qui s'étaient élevées
relativement aux institutions canoniques furent en-
tièrement aplanies, les archevêchés furent rétablis,
et les ëvêques purent aller administrer leurs dio-
cèses. M. de Boisgelin fut mis à la tête de celui de
Tours, en 1802, et bientôt après nommé cardinal.
Ses talens, plus que son nom et ses dignités, l'avaient
fait admettre à l'ancienne académie française. Il est
mort «î Angervilliers, près Paris, le 'in août i8o5.
123. Louis-Matthias de Barrai, de i8o5 à 1816.
En 1788, il avait été sacré évêque de Troyes, et
n'avait occupé que très-peu de temps ce siège, dont
il fut expulsé par la révolution. Rentré en France
sous le consulat, nommé ensuite premier aumônier
de l'impératrice Joséphine, il fut donné pour succes-
seur au cardinal de Boisgelin. Il est mort à Paris dans
l'année 18 16.
\i[[. Jean-Baptiste Duchillau, de 1817 à ï^^4'
Evêque de Châlons-sur-Saone en 1 781 , il fut nommé
par le diocèse de Langrcs l'un de ses quatre députes
aux étals généraux. Comme presque tous les prélats
de France, obligé de s'expatrier pour fuir la persé-
cution, il quitta sa patrie et n'y rentra qu'avec la
470 HISTOIRE DE TOURAmE.
famille royale. Désigné à rarchevêché de Tours, les
obstacles survenus à l'occasion du concordat de 181 7
Tempêchèrent de venir prendre possession de son
siège; mais enfin ces obstacles ayant été levés, il se
rendit dans son diocèse, oii il fit son entrée le 6 no-
vembre 1819. Il y termina sa longue carrière le 26
novembre 1824, à l'âge de quatre-vingt-neuf ans.
12 5. Augustin-Louis Dumontblanc fut nommé
en 1817a l'évêcbé de Saint-Diez , et le 1 2 août 1 82 1 ,
sacré en qualité d'archevêque de Cartilage et de coad-
juteur à l'archevêché de Tours, dont il a pris pos-
session en vertu de ce titre successif, le jour même
de la mort de son prédécesseur. Ainsi que lui, il a
été appelé par le roi h siéger dans la chambre des
pairs.
Sn.
SAINT-MARTIN DE TOURS.
Quelque illustre qu'ait été la cathédrale de Tours,
on peut assurer que l'église de Saint-Mai^tin fut plus
célèbre encore par l'immense réputation que son
patron eut dans toutes les Gaules, où sa mémoire
était en telle vénération , que des contrées les plus
éloignées on venait prier à son tombeau, et que le
voyage de Tours était assimilé à celui de Jérusalem.
L'église dédiée à saint Martin par saint Brice, son
successeur, ne fut autre d'abord que l'oratoire de
Saint-Etienne, situé à cinq cent cinquante pas de dis-
SAIiVT-MARTïN. 471
tance de la ville, dans le cimetière des chrétiens.
Saint Perpète en fit élever une beaucoup plus vaste
sur le même emplacement, vers l'an 469. Elle se vit
considérablement endommagée par un premier in-
cendie quelle éprouva en 56o, à l'occasion de l'asile
que Chramne y avait reçu. Le roi Clotaire, causé
première de ce désastre , se chargea de la faire réta-'
blir. On croit qu'elle n'eut pas moins à souffrir en
801 d'un second embrasement; mais en 853 , elle fut
en grande partie ruinée par les Normands, qui, en
Tannée goS , l'incendièrent de nouveau, ainsi qu'une
grande partie de la ville de Tours. Robert, second fils
de Robert-le-Fort , comme lui abbé de Saint-Martin,
la reconstruisit presque entièrement. Elle fut de
même enveloppée dans le désastre qui consuma, en
994, le bourg de Châteauneuf. Cette fois, ce fut son:
trésorier Hervé qui la fit sortir de ses ruines plus
vaste et plus belle qu'elle n'avait été jusque-là. Elle fut
terminée en ioi4; niais en 1096 et en ii23, elle
eut encore à souffrir des ravages du feu, la première
fois par un accident dû à une imprudence, et la
seconde à la suite d'une guerre intestine entre les
chanoines et les habitans de Châteauneuf, Enfin le
commencement du treizième siècle fut pour la der-
nière fois témoin d'une pareille catastrophe. Jean-
sans-Terre s'étant emparé de Châteauneuf le 3 1 août
iao3, y fit mettre le feu, et l'église de Saint-Martin
ne put échapper entièrement aux ravages des flammes.
Des temps plus calmes permirent de réparer toutes
les parties que le feu avait altérées, et depuis ce mo-
47 2 HISTOIRE DE TOUR AINE.
ment , aucun événement fâcheux ne vint troubler la
paix de cette église, jusqu'à l'époque où elle eut à
déplorer la perte, non-seulement de son riche trésor
entièrement pillé par les protestans en i5ô?. , mais
encore celle de toutes ses reliques , et surtout du corps
de son patron, cause première de son opulence et de
tout Téciat qu elle avait répandu.
Tout ce qui tient a l'histoire et aux antiquités de
l'église de Saint-Martin, se compose de faits assez
nombreux et assez intéressans pour avoir été de notre
part l'objet d'un ouvrage spécial qui deviendra une
suite nécessaire , et en quelque façon indispensable
de notre Histoire. Nous nous bornerons donc ici à
indiquer sommairement , ainsi que nous le ferons pour
les autres établissemens ecclésiastiques , ce qu'il im-
porte le plus de ne pas ignorer.
L'église de Saint-Martin fut d'abord un monastère
desservi par des moines sous la conduite d'un abbé
régulier. En vertu d'un privilège de l'évêque Chrot-
bert et d'une bulle du pape Adéodat, il fut soustrait à
la juridiction du métropolitain, et eut ou s'attribua
le droit d'avoir son évêque spécial. Ces religieux,
devenus opulens et sans doute las de l'uniformité de
la vie monastique, se transformèrent , vers l'an 848,
en chanoines séculiers. Cependant ils continuèrent
d'avoir des abbés, mais séculiers comme eux, parce
qu'aucune charte n'avait encore légalisé leur collé-
giale. Le dernier de ces abbés fut Hugues le Grand ,
père de Hugues Capet. Celui-ci ayant été élu roi par
la nation, annexa pour toujours à la couronne la
SAINT-MARTIl^r DE TOURS. 47 ^
dignité d'abbé de Saint-Martin, ainsi que le pape
Urbain II, en 1096, réunit au Saint-Siège le titre
d'évêque de Saint-Martin, d'où cette collégiale s'in-
titulait dans tous ses actes au Saint-Siège apostO'
lique sujette sans moyen. Les moines, qui étaient
précédemment en nombre indéterminé, devenus
chanoines, furent fixés à deux cents par Charles-le-
Chauve, ensuite à cent cinquante, et enfin à cin-
quante, en 1^37, moyennant l'établissement de
cinquante-six vicaires.
Quoique la Touraine ait été long-temps soumise \
des comtes héréditaires, l'église de Saint-Martin n'en
resta pas moins constamment annexée à la couronne
de France, soit avant, soit après que la province y
eut été réunie. Les rois, chanoines-nés de toutes les
cathédrales, étaient, indépendamment de cela, cha-
noines de l'église de Saint-Martin.
Peu de chapitres avaient un clergé aussi nombreux.
Sans y comprendre vingt-huit chanoines honoraires,
dont quatorze ecclésiastiques et quatorze laïques, il
comptait d'abord onze dignitaires, savoir: le doyen,
le trésorier, le chantre, l'écolâtre, le sous-doyen, le
cellerier, le granger, le chambrier, l'aumonier, l'abbé
de Cormery et le prieur de Saint-Come. Après eux
venaient les quinze prévôts, savoir : de Mahyet, de
Saint-Épain, d'Oé, de Chablis, de Léré, de Milccy,
de La Varenne , de Suèvre , de Courçay, de Chalautrc,
de Blasiay, de Restigny, d'Antogny, d'Anjou et de
Vallières.De plus cinquante-un canonicats, dont huit
474 HISTOIRE DE TOUR AINE.
prébendes étaient distraites pour des services parti-
culiers, ce qui les réduisait à quarante-trois chanoines
effectif. Les sous-dignités étaient au nombre cinq :
le sous-chantre, le sous-pelletier ou supplétier, le
sous-écolâtre , le sénéchal et le chefvccier. Il faut y
ajouter les trois personnats ou prestimonies de Mo-
rîgnaii , de Châtillon , et de Milan en Italie; cinquante-
six vicaires, six aumôniers, trois clercs d'aumône,
quatre marguilliers , quatre incepteurs, deux péni-
tenciers, deux sacristains, un oblatier et quatre-
vingts chapelains , au total deux cent soixante-trois
bénéfîciers, auxquels il faut ajouter les emplois sui-
vans : dix enfans de chœur, un maître de chapelle, un
maître de latin, un organiste, huit musiciens semi-
prébendës, un pauvre de Saint-Martin fondé par
IjOuis XI, quatre bâtonniers, un maître de sonnerie ,
et trente sonneurs à gages.
Indépendamment des chanoines d'honneur, le
chapitre avait établi des associations de confraternité
avec les églises les plus célèbres de l'Europe, au
nombre de douze cathédrales et d'autant d'abbayes.
Enfin il comptait vingt-neuf églises sous sa dépen-
dance, tant au dedans qu'au dehors de la province.
C'est ce qui lui composa long-temps une espèce de
diocèse pour lequel il avait son contingent particulier
dans la répartition des décimes.
Nous renvoyons pour tous les autres détails à l'ou-
vrage dont nous venons de parler.
Les autres collégiales du diocèse, beaucoup moins
SAINT-VKNANT. 475
considérables, offrant par ce\sL même bien moins
d'intérêt, nous aurons peu de chose à dire sur ce
qui les concerne.
s in-
SAlNT-VENANT.
Dans l'origine Saint -Venant était un monastère
d'hommes placé dans l'intérieur du cloître de Saint-
Martin , et fondé vers l'an 460 par saint Silvin, qui
fut son premier abbé; mais après la mort de saint
Venant, son successeur, l'église fut mise sous l'invo-
cation de ce secohd abbé, qui y fut inhumé, et dont
les restes furent transférés à Paris, en 856, pour le
soustraire aux ravages des Normands. Quand la châsse
de saint Martin revint d'Auxerre, où on l'avait mise
à l'abri de ces barbares, ce fut dans l'église de Saint-
Venant, à raison de sa proximité, qu'elle resta dé-
posée, jusqu'à la reconstruction de la basilique de
Saint-Martin qu'ils avaient détruite.
Les moines de Saint -Venant furent sécularisés
dans le neuvième siècle, probablement en même
temps que ceux de Saint-Martin. Nous parlons dans
notre 4' vol. , p. 174 , de saint Guillaume Firmat,
qui, au onzième siècle, était chanoine de Saint-
Venant.
Le chapitre était composé de dix chanoines, tous
à la nomination de celui de Saint-Martin. Ils étaient
reçus dans le choeur où ils partageaient les honneurs
47^ HISTOIRE DE TOURAINE.
et les prérogatives des autres chanoines. Il y avait
même une prébende qui leur était spécialement
affectée et dont ils partageaient entre eux le revenu.
Une église paroissiale fut, vers le quatorzième
siècle, établie dans son sein pour la commodité des
particuliers qui habitaient le cloître ou son voisinage.
La cure était à la présentation du chapitre de Saint-
Venant, et à la collation du chapitre de Saint-Martin
qui était en possession de conférer tous les bénéfices
des églises qui dépendaient de la sienne. Cette pa-
roisse a disparu en même temps que le chapitre.
s IV.
SA.INT-PIERRE-LE-PUELLIER.
Cette église fut bâtie par saint Perpète, sixième
évêque de Tours, vers Tan 670, sous l'invocation de
saint Pierre et saint Paul. Grégoire de Tours la dé-
signe suffisamment en disant qu'elle était dans le
voisinage de Saint-Martin (i). A la vérité il fait men-
tion d'une autre église qu'il indique sous le nom de
Saint-Pierre seulement ; mais comme il la place vers
la cathédrale , il n'est pas possible de les confondre.
(i) L'auteur de la vie de sainle Clotilde s'est trompé en disant que ce
fut celte reine qui fit bâtir l'église de Saint-Pierre et Saint-Paul, qui
était devant la porte de Châteauneuf. Mais ceux qui ont prétendu que
cette vie avait été écrite dans le sixième ou le septième siècle, se sont
trompés également, puisqu'il y est fait mention de Châteauneuf qui ne
fut connu qu'au commencement du dixième.
SAINT-PIERRK-LJ-PIIELLIER. /|77
Sainte Clotide , femme de Clovis 1", s'étant retirée
à Tours, vers l'an 5i2, y établit une communauté de
filles (i), qu'elle plaça auprès de cette église, ce qui
lui fît donner le nom do Saint-Pierre-le-Puellier,
S. Petrus puellarum , ou a Puellis. Philippe PF
en fit don, ainsi que du faubourg Saint-Père dans
lequel elle était située, au chapitre de Saint-Martin,
parce que les rois de France en étaient seigneurs
comme héritiers de la reine Clotilde, qui, lors de sa
mort, en avait la possession. Cette donation fut con-
firmée par lettres patentes de Louis-le-Gros et de
Louis-le-Jeune , ainsi que par une bulle du pape
Calixtc II, du consentement de Gilbert, soixante-
quatrième archevêque de Tours, sous la réserve de
tous ses droits épiscopaux.
Les papes Honoré II et Innocent II confirmèrent
de nouveau cette première bulle , mais sans aucune
réserve; et ce fut l'origine du différend qui s'éleva
dans le douzième siècle entre le litigieux archevêque
Joscion et le chapitre de Saint-Martin. La cause
portée à Rome fut jugée en faveur de larchevêque;
mais le chapitre lui ayant fait fermer les portes du
faubourg, Joscion s'en plaignit à Louis VII, par une
lettre qu'on lit au 4" vol. des historiens de France.
Ce monastère de filles existait encore au temps de
Charlemagne. 11 en est fait mention dans le testa-
ment de l'abbé Ithier, en 780, sous le nom de mo^
nasterium puellarum , et il n'y a pas à s'y méprendre
(i) Quelques-uns pensent que ci' nionastèie ne fut établi que par sainte
Menegoude après la mort de sainte Clotilde. '
47^ HISTOIRE DE TOUR AINE.
puisqu'il n'existait alors clans toute la province au-
cune autre communauté de filles. Il fut depuis con-
verti en un monastère d'hommes, et enfin, dans le
dixième siècle , érigé eu chapitre et en paroisse simul-
tanément.
Le nombre des chanoines avait sans doute été plus
grand dans le principe que dans les derniers temps,
puisque nous apprenons par une bulle d'Alexandre 111,
qu'en 1176 il fut réduit à dix pour les rappeler, y
est-il dit, à leur première institution. Ce chapitre et
sa paroisse reconnaissaient toujours la juridiction de
Saint-Martin. C'était tout ce qui restait à celui-ci de
son ancienne propriété.
§ V.
LA BASOCHE.
Nous avons rapporté dans notre m* liv. , p. i[\^% ,
l'événement qui donna naissance à l'église de La
Basoche, ou Notre-Dame-de-la-Consolation. Quoique
cet événement datât de l'an 838, elle ne fut cepen-
dant construite qu'en 885. Dans cette année , Charles-
le-Gros voulant faciliter l'exécution du vœu des habi-
tans de Tours, leur accorda, par ses lettres patentes,
l'emplacement du palais des Plaids , connu alors sous
le nom de Salle maudite^ avec quatre-vingt-seize
perches de terrain, y compris le mur et le chemin de
ronde.
Ce ne fut long-temps qu'une simple chapelle placée
LE PLESSIS-LES-TOURS. 479
sur les murs de la cité, auprès de la tour du Cupidon;
mais, en 1171, elle fut érigée en chapitre par une
huile du pape Alexandre III, donnée à Tusculum Iç
20 juin. Ce chapitre, à raison de son origine, était
alor§ sous la dépendance de celui dp Saint-Martin;
mais environ deux cents ans après, c'est-à-dire verp
le milieu du treizième siècle, il en fut distrait pour
êjLre agrégé à celui de la cathédrale dans le cloîtrp
de laquelle il se trouvait placé. Cette mutation se fît
au ipoyen d un accord par lequel le chapitre de Saint-
Pierre-le-Puellier rentra sous la juridictioa de celw
de Saint-Martin.
L'église collégiale de La Basoche n'était composée
que de quatre chanoipes, dont le revenu devait ê^ce
assez médiocre, car lors de l'échapge, ceux de Saintr
Gatien se dessaisirent d'une de leurs préhendes çf»
feveur des premiers auxquels ils accordèrent eq outrç
Mpe part dans les distributions manuelles et journar
lières.
Ce chapitre a été supprimé au commencement du
siècle dernier.
§ VI.
LE PLESSIS-LES-TOURS.
Louis XI, en montant sur le trône, ayant établi
sa résidence au Plcssis-les-Tours, dont il fît recou-
istruire le château nommé auparavant les Montils,
fît consacrer dans l'intérieur une cliapelle royale,
48o HISTOIRK DE ÏOURAINE.
dont il donna ses lettres au mois de novembre 1462.
Il n'y plaça d'abord que quatre chapelains dotés de
400 liv. de renie à prendre sur le greffe de la pré-
vôté de Chinon, et le tabellionnage dudit lieu. Il
paraît que le monarque, dans le choix des quatre
premiers titulaires, ne fut point dirigé par l'éclat des
noms; car nous voyons qu'il tomba sur les personnes
de Nicolas Caudevant, Jean Thuseau, Jean Barbeau
et Guillaume Jacob.
Par la suite j voulant donner plus de lustre à cette
fondation , il se décida à y établir un collège de cha-
noines auquel ces quatre vicaires seraient unis; et,
à cet effet, il assigna 4ooo liv. de rente, y compris
les 400 liv. des vicaireries ; et pour rendre cette fon-
dation stable, perpétuelle et irrévocable, o le bon
plaisir vouloir et consentement de notre saint-père
le pape, il créa, i** douze chanoines prébendes, qui
tous seront de l'âge de cinquante-cinq ans, en ce
compris lesdits quatre chapelains; 2° huit vicaires,
aussi de l'âge de cinquante-cinq dns, et quatre enfans
de l'âge de douze à treize ans, au lieu de l'un desdits
chanoines, avec un do^^en et un chantre; la collation
des canonicats à lui réservée ainsi que le doyenné;
la collation de la chanterie, simple office, ainsi que
des huit vicaires réservée au chapitre ; sans que les-
dits doyen, chapitre et liabitués dudit collège soient
ores et pour le temps à advenir subjects à aucun
ordinaire, sinon de notre saint-père le pape seule-
ment, sans aucun moyen , le tout selon le bon plaisir,
vouloir et consentement du saint-père.
SAINT-FLORENTIN d'aMBOISE. 4^1
Et pour parfaire la fondation de 4,000 liv. , le roi
donne le greffe de la prévoté de Chinon, les péages,
les deffais diidit lieu ; le greffe du bailliage de Chinon
pour la somme de 4oo liv. , et le péage par eau de
Langeais, la ferme des bouchages de Saumur, la
ferme des nomblages dudit lieu, les exploits de jus-
tice, les foires de may et niy-aoust, les deux étaux à
boucher, 1 etau h poisson, la ferme du maire, des re-
gistres, etc., le tout donné en franchise, aumosne,
amorty et indemne. Donné à Tours, au Plessis du
Parc-lez-Tours , en novembre 1482.
Ces lettres, enregistrées a la chambre des comptes
le 18 juillet t483 et le 29 du même mois en la cour
de parlement, ne reçurent l'approbation de Rome
qu'au mois de septembre i485, après la mort du
fondateur. Ce fut Guy Vigier, abbé de Marmoutier,
qui installa le chapitre le 16 août i486. Dans les der-
niers temps il n'était plus composé que d'un doyen
et de sept chanoines.
§VII.
SAINT-FLORENTIN d'aMBOISE.
Sous Foulques-Nerra , comte d'Anjou et seigneur
du château d'Amboise , il y avait dans l'intérieur do
ce château une église dédiée à Notre-Dame, bâtie, à
ce qu'on croit, par Foulques II dit le Bon, aïeul de
Foulques Norra. Celui-ci ayant rapporté , on ne dit
pas d'où, le corps de saint Florentin, évêque d'Arles,
3. 3i
482 HISTOIRE DE TOURAINE.
martyriçp en I^o6 , érigea, de concert avec Sulpice P',
seigneyr de J^ tour d'Anjboise, la chapelle du cjiâ-
teau en collégiale qu'il mit sous l'invocation de saint
Florentin , et en même temps il dota le chapitre, qui
fut compose d'un chefvecier et de sï%. chanoines. 11 y
eut par la suite im doyen qui ne fut institué qu'en iSqp
par le pape Boniface IX , à la prière d'Ingelger dit le
Qrand.
Ce fMt dans l'église de S^int-Florentin que se fit 1^
cérémonie de l'institution de l'ordre de $aint-Micl^el,
créé par Louis XI en j469, ordre que Henri III rem-
plaça? en 1^79, par celui du Saint-Esprit.
Depuis ce temps le chapitre n'avait éprouvé aucun
changement jusqu'à l'époque ou le duc de Chpiseid,
jpendant son ministère, fît ériger en sa faveur la ville
4'AKiï^oJse en duché-pairie, d'après l'échange qu'il
avait fait de plusieurs de ces terres contre ce domine
de la couronne. Alors le nombre des chanoines fut
porté à neuf, non compris le doyen et le sous-doyen
qui devinrent tous à la collation du seigneur, sans
que pourtant le collège perdît son titre de chapitre
royal. Le duc de Penthièvre, acquéreur du duché
d'Amboise après la mort du duc de CJioiseul, était
prieur et chanoine d'honneur du chapitre.
§ VIII.
BUEIL.
La collégiale de Bueil fut fondép en 1476? spi^is
SAINT-MARTIN DE CANDES. 4^3
l'invocation des saints Innocens, par Jean sire de
Bucil, chevalier, haron de Châteaux et de Mar-
mande, comte de Sancerre. C'est de cette famille de
Touraine quêtait issu notre poète Honorât deBueil,
marquis de Racan.
Le chapitre était composé d'un doyen et de six
chanoines, et le droit de patronage appartenait au
seigneur, ou, en cas d'extinction, au seigneur q,ui le
représenterait.
§ IX.
SAINT-MARTIN DE CANDES.
On sait que saint Martin mourut à Candes, village
de §on diocèse situé au hord de la Loire, à l'embou-
chure de la Vienne. Il y était venu pour y rétablir la
concorde parmi des clercs divisés entre eux. Il paraît,
par cette circonstance que rapporte Sulpice Sévère,
qu'il y avait déjà une église que saint Martin lui-
même avait fait construire; mais ni lui ni Grégoire
de Tours ne nous ont dit sous quelle invocation.
Quoi qu'il en soit, ce fut probablement dans cette
même église que s'établit à Candes le culte qu'on ne
tarda pas à y rendre à saint Martin. Il en résulta
d'abord un monastère qui devint ensuite yne collé-
giale dont la sécularisation remonte à la même t^poque
que celle de l'abbaye de Saint -Martin, c'est-à-dire
vers Van 848. On y comptait douze chanoines, dont
le preniier avait le titre de chefvecicr. L'archevêque
de Tours nommait à tous ces canonicats.
3i.
484 HISTOIRE DE TOURAINE.
§x.
SAINT-MEXME DE CHlîfON.
Cette église remonte aux premiers temps où le
christianisme commença à se répandre en Touraine,
quoique précédemment il y en eût une que saint
Brice avait fait construire dans le cours de son épis-
copat. Celle dont il s'agit ici doit son origine à saint
Mexme ou saint Maxime (sanctus Maximus). Il passe
pour avoir été l'un des disciples de saint Martin, ce
qui pourrait être a la rigueur, quoiqu'on prétende
qu'en /^6i ou 4 6^ il était renfermé dans le château
de Chinon , assiégé par le général romain ^gidius
Afranius, et que ce fut à ses prières que les assiégés
durent une pluie abondante au moment où, à défaut
d'eau, ils étaient sur le point de se rendre. Quoi qu'il
en soit , suivant l'opinion commune, ce fut vers 44^?
qu'en sortant de l'île Barbe , près Lyon , il vint s'éta-
blir en Touraine où il fonda un monastère. Ces reli-
gieux assistaient à l'office de l'église paroissiale bâtie
par saint Brice, parce qu'alors les monastères en
général n'avaient que des oratoires.
On ne pourrait pas dire précisément en quel temps
ces moines furent sécularisés. Si, comme on l'a dit,
ce fut en 1 145 , ce ne put être que par Luce II, qui
fut tué le 9.5 février de cette même année, ou par
son successeur Eugène III. Ce qu'il j a de plus cer-
tain, c'est qu'en loii nous vovons un Robert, abbé
SAINT- JEAN DK LANGEAIS. 4 85
de Saint-Florent, enterré dans i'églisc de Vabbaye de
Saint-Mexme, et qu'en iioi le chapitre existait déjà,
comme le témoigne une lettre de Tarchevêque de
Tours, Hugues d'Etampcs. Ainsi la sécularisation
de 1145 doit être reléguée au nombre de ces dates
controuvées par certaines chroniques peu scrupu-
leuses a cet égard. Hugues , dans cette lettre , parle
de la dignité de chefvecier qui avait été substituée à
celle d'abbé , circonstance qui indiquerait que la sé-
cularisation n'aurait eu lieu que depuis peu de temps.
Ce chapitre avait un chefvecier à la tête de onze
autres chanoines.
Malgré les marques d'antiquité qu'offraient encore
l'église de Saint-Mexme ainsi que ses caveaux, il est
certain qu'elle ne remontait pas au-delà du neuvième
siècle, parce qu'on connaissait en France le peu d'é-
glises qui étaient antérieures à cette époque.
§ XI.
SAINT-JEAN DE LANGEAIS.
En 1/186 Hardouin IX de Maillé fonda dans le
bourg de ce nom un chapitre composé d'un doyen,
six chanoines, un marguillier et deux enfans choriaux.
Ce chapitre a subsisté jusqu'en 166*2 que Charles
d'Albert, duc de Luynes, y substitua des chanoinesses
religieuses de Saint- Augustin ; mais la ville de Lan-
geais faisant partie de son duché de Luynes, il y
transféra le chapitre de Maillé, qui ne se composa
486 HISTOIRE DE TOTJRAINE.
plus que de quatre chanoines, dont l'un était en
même temps curé de la paroisse de Saint-Jean. Ces
canonicals étaient à l'entière collation du seigneur.
. §XII.
NOTRE-DAME-DE-LOCHES.
D*après les détails que nous avons donnés précé-
demment, pâg. 145, ainsi qu'au premier volume de
notre Histoire, liv. iv, pag. 3i5, il nous reste peu de
choses à dire sur la collégiale de Loches, dont nous
avons placé la fondation en 963; mais elle ne put
avoir lieu qu'en 966 ou au plus tôt à la fin de 960 ,
après le voyage que Geoffroy Grisegonnelle fît à
Rome, et non, comme nous l'avons dit, à Jérusalem,
où il pai*aît certain qu'il n'est jamais allé. Lui-même
nous donne ces indications dans sa charte de fonda-
tion , quoiqu'elle ne soit point datée. Il y dit en effet :
«Romam petii, ibidemque postquam adveni, magni-
«ficandi Johannis papœ prœsentiâ honorifîce sus-
ce ceptus cxtiti. — J'allai à Rome , et après y être arrivé
«je fils honorablement admrs en la présence du très-
« vénérable pape Jean. » Or, le pape Jean XIII, dont
il s^agit ici, n'ayant été intronisé que le 1" octo-
bre 965, la fondation du chapitre de Loches, au
retour de Geoffroy, ne peut guère dater que de
l'année 966.
Ses chanoines, au nombre de douze, éhsaient eux-
mêmes leur prieur qui était installé sous le portique
]>rOTRK-D AME- DE-LOCHES. 4^7
de l'église; mais Vers Tan i44^î Agnès Sorcl obtint
de Charles Vil la suppression d'une de ces pré-
bendes, dont le revenu fut affecté à l'entretien de
quatre enfans de cbœur et d'un maître de chapelle;
en sorte qOe le chapitre re^ta composé d'un doyen ,
un gt'and-chantre et neuf chanoines, ce qui fut ratifié
par une bulle du pape Nicolas V, la deuxième année
de son pontificat. L'église de Loclies avait le droit
de haute, moyenne et basse justice, et Tofficialité de
Tours n'avait sur elle aucune juridiction.
En faisant mention du tombeau d'Agnès Sorel,
placé dans le chœur de cette église, nous n'avons
point rapporté les différentes inscriptions et épitaphes
dont il était accompagné* Nous allons suppléer à ce
silence, renvoyant, pour ce qu'on ne trouvera pas ici,
à l'article Sorel du iv'' vol. Sur Tune des faces du
tombeau étaient gravés les vers suivans: -
Fulgor apoUineus , rutilantis luxqiie Diana:
Quam jubaris radii clarificare sol«nt ,
Nunc tegilops, et opem negat atrox Iridis arcus,
Dum furiœ prima tela supcrveniunt.
Nunc elcgis diclare decet , planctuque sonora,
L,ietitiam pcllal Uirtureus geniitus.
Libéra dlim quondam qiiae subveuiebat egeuis
Ecclesiisqne , modo cogitur »gra niori.
O morss.Tva niniis, qua» jam juvcuilibus annis
Abstulit a terris mcotbra serena suis.
Manibus ad tuniulum cinicti celebretis bonorcs ,
Effundendo preces, quas nisi parca sinit.
Qua; titulis decorata fuit, decoratur amiclu ,
lu laudis tituluui picta ducissa jacet.
Occubuere simul sensus, spccics et bouestas
488 HISTOIRE DE TOURAINE.
Solas virlutes, nicritum , famamque relinquens ,
Corpus ciim specie mors rniseranda rapit.
Prœmia sunt mortis liictus , quaerimonia , tellus :
Huic ergo célèbres fundite, qiueso, preces.
Sur une plaque de cuivre attachée à un pilier du
sanctuaire, du côté de l'épître, on lisait l'acrostiche
que nous rapportons au tom. iv, pag. 467 , et celle-ci
également en vers léonins, rimes seulement h la fin
de chaque hémistiche :
Hac jacel in tumba simplex milisqiie columba ,
Candidior cycnis , flammâ rubicimdior ignis ;
Agnès pulchra nimis terrae latitatur in irais.
Ut flores veris faciès hiijiis mulieris.
Belaltaeque domum nemus astans Vinceniainim
Rexit, et a specie nomen suscepit utrumque,
Severiamque Roquam , Vernonis et ulique genîem
Acissoldiinum regimen dédit omnibus unum.
AUoquiis mitis, compescens scandala litis;
Ecclesiisque dabat, et egenos sponte fovebat.
Illi Scurellte cognomen erat Domicellœ ;
Et non mirelur quis si species decoretur
Ipsius , est ipsa per quam depicta Ducissa.
Hoc factura sponte, certâ ratione movente,
Pro laudum titulis , meritorum sive libellis.
Hic corpus ; reliqua sunt gemeticis inhumata
Illam cura sanctis comitetur vita perennis.
Mille quadringentis quadraginta novera tulil annis
Nona dies mensis hanc abstulit inde secundi,
Palmis extcnsis Iransivit ab ordine mundi.
§ XIII.
MOjNTRÉSOR.
Le chapitre de Montrésor dut son existence à
PRESSIGNY. 4^9
îmbert de Bastarnay, baron du Bouchage, seigneur
de Montrésor, qui, le 26 mars id^i, y fonda une
collégiale confirmée en i523 par Martin de Beanc,
archevêque de Tours. Elle se composait d'un doyen,
un chantre et six chanoines, dont la nomination
appartenait aux seigneurs qui de droit y avaient leur
sépulture. Nous avons parlé à la pag. 204 du tom-
beau de Claude de Bastarnay : à Tépitaphe en prose
nous allons ajouter celle en vers qui la précédait.
Arrête ici passant , arrête ici tes yeux ;
Contemple ce pilier, si tu es curieux
De sçavoir ce qui est en iceluy compris.
Sache que c'est le cœur d'un seigneur de hault prix.
Qui vivant a monstre , par brave expérience ,
Quelle estoit de ce cœur l'honneur et l'excellence :
Mais mort qui a toujours envy sur la vertu ,
L'a en ses jeunes ans, de son corps devestu ,
L'épiant, pour ce faire, en belliqueux arroy,
Combattant vaillamment pour Dieu et pour son roy ;
Délaissant à sa mort à son roi la victoire,
Et à ce gentil cœur immortelle mémoire.
Veux-tu sçavoir, amy, par avai:! fon départ.
Quel estoit ce seigneur? voi-le de l'autre part.
Ce dernier vers se rapporte à Tépitaphe en prose
dont nous venons de parler.
§ XIV.
PRESSIGNY.
Rien ne nous indique, même indirectement, à
quelle époque prit naissance la collégiale du grand
490 HISTOIRE DE TOURAINE.
Pressigny, ni par conséquent quel fat celui des sei-
gneurs de ce lieu auquel elle fut redevable de sa
fondation. Nous ne serions pas éloigné de croire
qu'elle a pris son origine dans le monastère que
Guillaume, baroii de Pressigny et de Sainte-Maure,
institua en 1190, à la prière de Renaud, abbé de
Pont-Ie-Voy, monastère que quelque autre seigneur
ixurû converti en collégiale, d'autant plus que par la
suite nous n'en trouvons plus dé traces.
Le chapitre, dont tous les membres étaient à la no-
mination du seigneur, se composait d'un doyen et de
six chanoines, dont l'un était de droit curé de la
paroisse. Dès l'année 1-782 îl avait été supprimé par
l'archevêque de Tours.
CHAPITRE IL
ABBAYES.
Parmi les dix-sept abbayes que contenait le diocèse
de Tours, il n'en était qu'une seule, celle de Mar-
moutier, qui eût acquis de la célébrité. Ce sera aussi
la seule, comme la plus ancienne de la France, à
laquelle nous consacrerons un article de quelque
étendue, en lui donnant même le pas sur les autres,
que nous rangerons ensuite dans leur ordre alpha-
bétique.
J
MAHMOUTIER. 491
SI-
MARMOUTIER.
L'abbaye de Marmouticr était plus ancienne que
la monarcbie française, car son origine remonte au
quatrième siècle, tandis que l'autre ne date que du
cinquième. Saint Martin ayant été appelé au siège
de Tours, en l'année 87 5, s'occupa presque aussitôt
de se cboisir un lieu de retraite où il pût réunir ith
certain nombre de disciples et se livrer avec eux à
la méditation et à la prière. Le vallon qui règne ati
bas du coteau de Marmouticr, lieu alors inculte et
solitaire , lui parut favorable à son projet. En peu de
temps il y rassembla environ quatre-vingts disciples,
nombre considérable pour cette époque, et qui rie
fit que s'augmenter par la suite, ce qui fit donner à
ce monastère le nom de Majtis Monasterium , Mait*e
Môuslier, et depuis Marmouticr.
Les ravages causés par les Not*mands nous ont
privés de tous les documens qui auraient pu nom
écldirer sur l'histoire de cette abbaye pendant les
septième et huitième siècles , et même sur les pré-
cédens; mais nous savons que dans le neuvième,
Louis-le-Débonnaire, à l'exemple de Charicmagne ,
jjon père , prit Marmouticr sous sa protection , dé-
fendit à tous les officiers de son empire de le troubler
dans aucune de ses possessions, et l'exempta do tous
les droits du fisc. Charles-le-Chauve en fit autant
492t HrSTOIRE DE TOIJRAINE.
en 849. Les détails qui nous sont parvenus sur les
dévastations exercées par les hordes du Nord , témoi-
gnent qu'il y avait alors à Marmoutier cent quarante
religieux, dont cent quinze furent massacrés par ces
barbares. Les vingt-cinq autres, après s'être cachés
dans les grottes profondes du coteau, se réfugièrent
auprès des chanoines de Saint-Martin, et furent
choisis pour accompagner la châsse qui renfermait les
restes de leur patron qu'on transportait en Bourgogne.
Ainsi le monastère ruiné resta long-temps vide et
abandonné ; mais enfin , pour que le service divin n'y
fût pas tout-a-fait interrompu, le chapitre de Saint-
Martin y plaça des chanoines réguliers vers l'an 958.
Ceux-ci n'y restèrent que jusqu'en 987 , époque où
l'abbaye reprit sa première forme. Le rétablissement
de la règle y fut opéré par saint Mayeul et par treize
autres religieux de l'abbaye de Cluni, après un in-
tervalle de cent quarante-deux ans. Cette restauration
fut principalement l'ouvrage de Robert, comte de
Tours, et de Berthe, son épouse. Ce prince y eut
sa sépulture, ainsi que son fils, Eudes IL Thibaut,
fils de ce dernier, obligé de céder la Touraine au
comte d'Anjou , Geoffroy-Martel , se réserva expres-
sément l'abbaye de Marmoutier, ce que son vain-
queur lui accorda. Elle jouissait alors d'une si grande
réputation que les seigneurs venaient y demander
des sujets pour les abbayes qu'ils fondaient. Foulqucs-
Nerra en obtint, en 1020, pour l'abbaye de Saint-
Nicolas d'Angers. Geoffroy Martel y eut également
recours pour celle de la Trinité de Vendôme; Hubert,
MATiMOUTIEK. 49^
pour celle de Noyers, en io3o, et Guillaume-le-
Conquérant, en 1066, pour celle de la Bataille en
Angleterre. Enfin, les religieux de Marmoutier, vers
la même époque, furent aussi les restaurateurs des
abbayes de Saint-Florent de Saumur, de Saint-Julien
de Tours, de Saint-Serge et de Saint- Aubin d'Angers.
On peut juger du rôle important que jouaient dans
l'Église et dans l'État les abbés de Marmoutier, par le
choix qu'on fit d'eux, en 1 196 et en i2o4, pour être
les négociateurs entre les couronnes de France et
d'Angleterre.
Pour soustraire l'abbave aux vexations des nou-
veaux comtes de Blois, saint Louis la mit sous la
protection du trône. Charles VII, en donnant la Tou-
raine en apanage au duc d'Anjou, son frère, ne se
réserva que l'abbaye de Marmoutier.
Elle fut mise en commende en i539. Ce fut chez
elle que commença la congrégation gallicane or-
donnée par le concile de Trente et par les états gé-
néraux de Blois, en 1^79. Environ vingt-cinq années
après elle vit naître en son sein la réforme dite de
Bretagne, qui depuis a été fondue dans l'illustre
congrégation de Saint-Maur.
On sait que cette abbaye était dépositaire d'une
relique nommée sainte ampoule, devenue célèbre
dans notre histoire par le sacre de Henri IV. Nous
voyons par le second concile de Châlons, en S-yg,
qu'un très-grand nombre de chrétiens, et que les
rois même venaient visiter cette relique, principa-
lement aux deux fêtes qui suivaient celle de Pâques.
494 IIISTOTJIE DE TOURAINE.
I^Oi|is XI, dans la maladie dont il mourut , avait
obtenu un/3 bulle du pape pour se faire apporter la
sainte ampoule de Marmoutier, ainsi que celle de
Il^im3.
Quoique Marmoulier eût beaucoup perdu par 1^
distraction des biens qu'il possédait en Angleterre
avant le schisme, et par le pillage des protestans
ep i562, ce monastère était encore Tun des plus
considérables de la congrégation de Saint-?tlaur. S'il
n'était plus le premier par ses richesses, il l'était
toujours par sa splendeur et son antiquité. Sa bibho-
thèque, assez nombreuse, renfermait beaucoup d'édi-
tio|îg. du quinzième siècle^ et surtout de manuscrits
(Jpnt plusieurs n'ont pas été inutiles à la république
des lettres par l'usage qu'en ont fait les savans béné-
dictins, auxquels nous devons les excellentes éditions
de$ saints pères. Ces manuscrits formaient trois cent
soixante volumes contenant huit cent vingt ouvrages
différens, suivant le catalogue raisonné que nous en
avons rédigé.
L'église était une des plus belles de royaume. Ce
fi^t Hugues de Roche-Corbon , son quatre-vingt-nçu-
vième abbé, qui, en 12:20, entreprit sa reconstruc-
tion. Continuée par Etienne P^, Robert IV, et Eudes
)i^ : I}i:accolis , elle fqt enfin terminée sous Je^n de
Monthelon, vers i3ao.On avait récemment construit
dans l'intérieur de la maison conventuelle un escalier
qui, par sa hardiesse, sa hauteur, sa largeur et
la beauté de son exécution , attirait sans cesse les
curieux.
MAHMOLlTIEH. 49^
C'était à Marmoutier que se tenaient ordinairement
les chapitres généraux de la congrégation de Saint-
Maur depuis l'année 1661. D. Ambroise-Augustin
Clievreux a été le dernier supérieur de l'ordre
en 1783, et continué en 1788. Depuis sa création,
lyi^rs l'an 378, ou y a pûmpté<ient yingt-trois abbés,
.(tpnt les treize derniei's étaient dps ^bbés commpiîi-
Jataires, sayojr: Jean et Charles, cardinaux deLoi>
raine; Jeap de fjaJ!pçhefoucauld ; François, cardinal
de Joyeuse; Gli^iies, cardin^il de BoMrbop; S41?,astii^^
DoriGaligai, frère de la maréchale d'Ancre; Alex^n^
dre de Bourbon-Vendôme, fils naturel ^ç ïje^ri IV
et de Gabnelle d'Estrées; Pierre, ç^r^inaldeBérulle;
Arn?and-Jean du .Plessi3, cardinal de liigheLieu;
Emmanuel-Joseph, comte de Richelieu; Jules-Paul
de J^ionne, enfin Louis de Bourbon-Condé , comte de
Çlermont.
En 1740, la mense abbatiale ayant été réunie po^'
toujours à rarchevêché de Tours , en faveur de M. de
Rastignac, le comte de Çlermont fut dans la néces-
sité de donner sa démission. Il fut aiu^i le dernii^
abbé de cet antique monastère, le plus anciew ^i^s
ceat quatre-vingt-treize établi^^eraens ^e çp genre
qui existaiçpt çn Fi^nçp,
L'église et les vastçs bâtimeas di^ mon«astère, re-
construits à i^euf dans le dernier siècle, ont été
aliénés en 1 797 , et si co^i^pLètewent livré? ji }q, dé-
molition , qu'il n'en reste pas aujourd'hui la moindre
trace, si ce n'est le vieux portique qui formait la
principale çntrée au midi.
49^ HISTOIRE DK TOURAINE.
§11.
AIGUË 'VIVE.
Aiguc-Yive ou Aigues-Vives (Sancta-Maria de
Aqua-Viva), de l'ordre des chanoines réguliers de
Saint-Augustin, congrégation de France, était située
au milieu des bois , dans la paroisse de Faverolles , à
une lieue sud-ouest de Montricliard. Elie fut nommée
Aigues-Vives à cause de la quantité de fontaines et
d'eaux vives qui se trouvaient dans son voisinage.
Pérégrin , auteur d'une histoire de l'abbaye deFon-
taines-les-Blanches, dont nous parlerons à cet article,
nous apprend que Geoffroy, premier ermite qui ait
habité ce lieu de fontaines, n'ayant pas voulu suivre
la règle de Cîteaux que la plupart de ses confrères
avaient embrassée, se retira à Aigues-Vives en 1 127.
Depuis, étant mort à Montricliard, son corps fut
rapporté à Aigues-Vives , oîi il eut sa sépulture
dans le cimetière, probablement dans celui de la
paroisse.
Garlet de Mont richard , l'un des principaux che-
valiers du seigneur d'Amboise, fit don aux solitaires
d'Aiguës -Vives de bois et autres domaines qu'il pos-
sédait auprès du prieuré deBelvau,du consentement
de Payenne , sa femme , et de ses enfans , et y fonda
ainsi , en 1x47? une abbaye oiJi furent placés des
chanoines réguliers. Elle fut confirmée en 1 177, par
lettres de Henri II , roi d'Angleterre , comte de ïou-
BACGERAIS. 497
raine, et ratifiée depuis, en 121 5, parSulpice troi-
sième , seigneur d'Amboise et de Montrichard.
§ m.
BAUGERAIS.
Baugerais (Baugeriacum ou Baugeretum), de l'ordre
de Citeaux , paroisse de Loche , à trois lieues de Châ-
rillon-sur-Indre, et à pareille distance de Loches.
Les titres de cette abbaye portent que le domaine
en fut donné par quelques personnes pieuses de ce
voisinage, en 1 1 53 , à un certain Serlon et à quelques
autres solitaires qui s'étaient réunis à lui. Henri II
confirma cette donation par lettres données à Châ-
tillon-sur-Indre , à condition qu'ils vivraient selon la
règle observée dans l'abbaye de Sainte-Barbe : mais
quelques jours après, ce prince ayant changé de des-
sein, donna ce même lieu à l'abbaye du Loroux, en
Anjou, h la charge d'y établir une abbaye de l'ordre
de Citeaux; ce qui fut exécuté en ii^S. Plusieurs
gentilshommes de Touraine, qui s'étaient croisés
pour la Terre-Sainte, s'empressèrent d'enrichir de
leurs dons ce nouveau monastère. Nous trouvons dans
ce nombre Geoffroy de Palluau , seigneur de Mon-
trésor ; Robert de Buzançais ; Jean Savary , seigneur
de l'île; Sulpice d'Amboise ; Hélie de Grillemont;
Archambaut et Renoul d'Argy ; Guillaume et Robert
de Sainte-Maure; Jean d'Appclvoisin et plusieurs
autres.
3. 3a
49^ HISTOIRE DE TOURAINE.
Nous ne croyons pas que celte abbaye ait jamais
été bien considérable. Depuis le commencement du
siècle dernier on n'y comptait que trois religieux.
§ IV.
BEAULIEU.
L'abbaye de la Trinité de Beaulieu ( Bellilocus ,
Bellilochia), de l'ordre de Saint-Benoît, congrégation
de Saint-Maur, n'était séparée de la ville de Lockes
que par la rivièrje de l'Indre. Raoul-Glaber, historien
à peu près contemporain , rapporte qu'après son se-
cond voyage à la TeiTc-Sainte, Foulques-Nerra fît
bâtir à Beaulieu, dont il était seigneur, une église en
l'honneur de la Sainte-ïrinité, dans laquelle il mit
un fragment de la vraie Croix , et un morceau du
saint Sépulcre, qu'il avait rapportés de Jérusalem ,
morceau que, suivant quelques-uns de nos crédules
chroniqueurs, il avait détaché avec ses dents. Pour la
desservir, il fit venir des r^Jigieux de Saint-Genouph ,
au diocèse de Bourges. Nous avons rendu compte
dans notre iv^ liv. , pag. 829 du démêlé qui s'éJeva
entre lui et Hugues, archevêque de Tours, au sujet
du refus de ce prélat de consacrer la nouvelle église.
Les historiens varient sur l'époque de sa construc-
tion : mais Foulques-Nerra n'étant revenu pour la
seconde fois de la Terre-Sainte qu'en 1 008 , on doit
enci'oire les auteurs de la Gallia Christiana ^ quand
BFAULIF.TT. , 499
ils fixent à l'an 1012 , la consccratioH de l'église de
Beaulieu.
Foulques-Nerra , par son testament, fit don à l'ab-
baye de tous les domaines qu'il possédait en ce lieu,
ainsi que de la justice, des cens, rentes , coutumes et
généralement tout ce qui pouvait lui appartenir, sans
réserve aucune. Il ota même à la ville de Loches le
droit de frapper sa monnaie , qu'il transféra aux re-
ligieux de Beaulieu ; il accorda aussi plusieurs privi-
lèges aux habitans, qu'il affranchit de tous droits de
servitude. Parmi les signataires de ce testament , on
remarque , après celles du comte et de Hildegarde sa
femme, celles de Geoffroy de Preuilly, de Lysoisd'Am-
boise, de Sanction de Lahaye et de Gosselin de Sainte-
Maure.
Foulques-Nerra avait son tombeau dans l'église de
cette abbaye, auprès de la sacristie.
llaoul-Glaber , aux récits duquel on ne doit pas
toujours ajouter foi , donne pour cause de la fondation
de Beauheu , une circonstance assez apocryphe. Il
prétend que Constance, épouse du roi Robert, femme
d'ailleurs bien capable de commander un assassinat,
pria Foulques-Nerra, son oncle, de la débarrasser de
Hugues de Beauvais, favori du roi, qui mettait la
division entre elle et son époux, et que Foulques
confia cette mission à douze de ses chevaliers qui
poignardèrent Hugues de Beauvais, sous les yeux
même de Robert. Foulques ensuite alla confesser ce
crime au pape qui, pour expiation, lui enjoignit
d'aller à la Ïerrc-Sainte , et de fonder une abbaye à
Sa.
i
5oO HISTOIRE DE TOl]RAII<îE.
son retour. De son côté , le moine anonyme de Mar-
moutier, assure qu'étant à Jérusalem , le comte touché
de repentir de tout le sang qu'il avait fait répandre,
fit vœu de faire construire une église à son retour,
et que telle fut l'origine de celle de Beaulieu. Il est
juste cependant de dire qu'il existe une lettre at-
tribuée à Fulbert, évêque de Chartres, dans laquelle
ce prélat lui reproche le crime dont parle Glaber.
§ V.
BE AUMONT-LES-TOURS.
"^^^îl n'y a eu long-temps, dans le diocèse de Tours,
d'autre abbaye de filles que celle de Beaumont-les-
Tours, de Tordre de Saint-Benoît (Bellus-Mons) ,
située à la porte de la ville , du côté du sud-ouest.
p.nqYers le milieu du sixième siècle, Ingeltrude, veuve
d'un prince de la famille royale , ayant fondé auprès
de l'église de Saint-Martin , un monastère qu'on
nomma Notre-Dame-de-l'Ecrignole (Sancla-Maria de
Scriniolo), plusieurs filles de qualité se rangèrent sous
sa discipline, entre autres Berteflède ou Berthoflède,
fille du roi Caribert. Elle y attira aussi sa propre
fille Bertegonde, qu'elle excita à quitter son mari
dans l'espoir qu'elle dirigerait le monastère après elle.
Dans le neuvième siècle ce monastère éprouva le
même sort que celui de Saint-Martin , et fut réduit
eu cendres par les Normands : mais il se releva bientôt
de ses ruines , et ceux qui ont écrit que ces religieuses
BEAUMO:VT-LES-TOCRS. 5oi'
avaient été réduites à faire leur office dans l'église
do Saint-Martin, se sont étrangement Irouipés. Ce-
pendant vers la fin de ce même siècle , Hervé de Bu-
zançais, trésorier de Saint-Martin, homme aussi
pieux qu'opulent, entreprit de leur faire construire
des bâtimens plus vastes et plus commodément placés.
Il choisit à cet effet la paroisse de Beaumont, qui lui
pei-mit d'exécuter son projet au moyen de l'échange
qu'il fit avec Ebbon, l'un de ses vassaux, de cet em-
placement , contre un autre fonds de terre égal en
revenu. Les religieuses y furent transférées en 1002 ,
et Hervé les dota de ses propres fonds , à la condition
seulement qu'elles paieraient tous les ans vingt sous de
cens au chapitre de Saint-Martin, qui ne contribua
à la dotation que par vingt arpens de vignes, situées
près le bourg de Chîkeau-Neuf, entre la Loire et le
Cher; car à cette époque la Loire tournait et cou-
lait au midi de la ville. A ces dons étaient joints deux
autres domaines: i" celui nommé CurteiU'Liutzam^
que nous croyons être Lièze , avec toutes ses dépen-
dances ; 2" celui qui y est désigné sous le nom de
Quiacuni Villa , Cussay. Le comte Eudes el Landry
son frère, sire de l'île Bouchard y donnèrent leur con-
sentement le i5 des calendes d'octobre ou 17 sep-
tembre 1007, et le roi Robert approuva le tout par
SCS lettres patentes , données au bois de Boulogne le
26 du même mois.
Les fastes de celte abbaye royale offrent trente-
sept abbesses d(^puis Ersendis ou Théophanio en
1007, jusqu'à Marie-Agnès de Viricu, dont les fonc-
i
5o2 HISTOIRE DE TOURAIKE.
tions ont cesse avec l'abbaye , en 1 790. Il y avait
soixante religieuses.
§ VI.
BOIS-AUBRY.
Bois-Aubry (Boscus Alberici) , de Tordre de Saint-
Benoît , était situé à trois lieues au sud de l'Ile-Bou-
chard, sur les confins du Poitou. Ce n'était dans
l'origine qu'un prieuré nommé Luzé ou Luzeray (mo-
nasterium Liicisense). Un gentilhomme nommé Brice ,
seigneur de Clieillé , y mit le prêtre Robert : celui-ci
y fît bâtir une chapelle dédiée à saint Michel , qu'il
donna depuis à l'abbaye de ïyron , diocèse de Char-
tres, du consentement de ce même Brice de Cheillé,
qui y joignit en même temps d'autres domaines, dont
vingt bouées de terre , c'est-à-dire autant que vingt
bœufs pouvaient en labourer dans un jour, avec pro-
messe du double si les moines de Tyron y érigeaient
une abbaye. Cette condition ayant été exécutée, le
prieuré converti en abbaye reçut sa consécration de
Hugues, archevêque de Tours, en 1 138.
La suppression eut pu s'en effectuer, même avant
l'année 1790, car à cette époque, et depuis long-
temps, on n'y comptait plus que deux religieux.
s VII.
CORMERY.
L'abbaye de Gormery (S. Paulusde Gormeriaco),
COR MER Y. 5o3
de l'ordre de Saint-Bcnoîl, congrégation de Saint-
Maur, était située dans la petite ville du même nom,
à quatre lieues et demie sud-est de Tours, sur la
gauche de l'Indre. Elle fut fondée en 791 par Ithier,
abbé de Saint-Martin, qui en fit bâtir l'église du con-
sentement de SCS religieux, et la dota de plusieurs
domaines qu'il possédait en ïouraine et en Poitou ,
ainsi que de quelques autres propriétés dépendantes
de Saint-Martin.
AlcliTvin lui ayant succédé, obtint de Charlemagne
la permission d'établir des moines à Cormery, pour
y faire le service divin de la manière dont il était cé-
lèbre dans Féglise de Saint-Martin. L'empereur en
donna ses lettres datées de Tours , au mois de juin de
l'an 800, premier de son empire, à condition que le
monastère de G:)rmery serait sous la puissance de
celui de Saint-Martin. Louis-le-Débonnaire confirma
ces dispositions à Aix-la-Chapelle, Van 820, en y
ajoutant la permission d'élire eux-mêmes leur abbc
qui cependant ne pourrait recevoir son investiture
que de l'église-mère.
Les comtes d'Anjou étaient les avoués, c'est-à-dire
les défenseurs et les protecteurs de l'abbaye de Cor-
mery , probablement comme seigneurs de Loches.
L'église ayant été détruite^ par les Normands dans
te dixième siècle, fut rebâtie par le roi Robert, et
consacrée en io54, par Barthélemi I", archevêque
de Tours.
L'abbé, qui portait la mitre et la crosse, était cha-
noine et dignitaire de l'église de Saint- Martin ,
5o4 HISTOIRE DE TOURAIINK.
ayant séance au chœur après le trésorier. Il jouis-
sait en outre d'une maison canoniale dans l'intérieur
du cloître.
s VIII.
FONTAmES-LES-EL àNCHES .
Dans la paroisse d'Autrèche, entre Ambolse et
Ghâteau-Regnault , se trouvait l'abbaye de Fontaines-
les-Blanches ( Fontanae albœ , ou Beata Maria de Fon-
tanis), ordre de Citeaux, filiation de Clairvaux. Pé-
régrin son septième abbé, qui en a écrit l'histoire
jusqu'à l'an 1200, nous a transmis les détails de son
origine et de sa fondation. Cette histoire se trouve
dans le Spicilegium de Dachéry, tom. 11, in-fol. ,
pag. 573, ou tom. x,in-4°, pag. 367. Son nom de.
Fontaines-les-Blanches lui fut donné par rapport
aux sources qui arrosent le lieu où elle était placée ,
ainsi qu'à la couleur de l'habit de ses religieux.
Un solitaire, nommé Geoffroy, fut le premier
ermite qui se retira dans un lieu inculte , auprès du
pont de Rune; il s'associa bieutôt d'autres hommes
pieux , entre autres Geoffroy de Bouillon , Girard de
Lomenie, Hervé de Galardon , etc. , etc. Sept d'entre
eux embrassèrent la vie monastique, mais leur re-
traite étant trop resserrée, et surtout trop incom-
mode, ils se transportèrent à Fontaines, où ils bâtirent
auprès de leur nouvelle demeure, une chapelle sous
l'invocation de sainte Maric-Madclaine, Leur nombre
FONTA.INES-LES-BLANCEIES. 5o5
s'étant accru , ils résolurent d'adopter la règle de quel-
que ordre monastique, et se décidèrent pour celle de
Citeaux. Alors ils députèrent vers Geoffroy , abbé de
Savigny , qui leur envoya un de ses religieux nommé
Eudes, pour les instruire dans la règle qu'ils venaient
d'embrasser. Ayant choisi ce même Eudes pour leur
abbé, ils le firent sacrer par l'archevêque Hilde-
bert, le jour de la Saint-Martin 1126. Pérégrin dit,
en 11 54; mais ce doit être une erreur, Hildebert
étant mort dans cette même année. Renaud II , sei-
gneur de Château-Regnault, leur accorda la justice
du lieu de Fontaines avec usages, chauffage, droit
de pacage et de glandée dans la forêt de Blémars.
Quelques autres seigneurs leur firent don de divers
domaines dans le voisinage de l'abbaye, donation que
Hildebert ratifia par ses lettres du 7 août i 127.
Quelques années après, Serlon, abbé de Savigny,
ayant adopté la réforme de saint Bernard , abbé de
Clairvaux, les religieux de Fontaines suivirent son
exemple vers l'an 1 1 5o , et le pape Alexandre 111 ,
venu à Tours, en 1162, confirma les dotations de.
cette abbaye par une bulle du 19 octobre, indiction xi,
la quatrième année de son pontifical.
Pérégrin, chap. iv, rapporte qu'un des solitaires
de Fontaines s'étant trouvé à Jérusalem le samedi-
saint I i3o, jour où s'opère le prétendu miracle du
fou descendu ciel, le cierge que portait Guillaume,
allumé spontanément, fut aperçu resplendissant de
lumière, cl qu'aussitôt il fut proclamé patriarche à
la place de celui qui était mort peu de temps aupa-
5o6 HISTOIRE DE TOURAINÊ.
ravaiit. Il est bien vrai qu'en ii 3o , Guillaume suc-
céda à Etienne dans le>^ patriarcat de Jérusalem ;
mais il est également certain qu'il était déjà depuis
long-temps prieur du Saint-Sépulcre, et que par
conséquent ï\ «'arrivait pas de la Touraine.
r'
§. IX.
i GATINES.
Gâtrnes (Gastinac, ow Beata Maria de Gastinetis),
abbaye de l'ordre de Saint-Augustin, était située dans
la paroisse de Villedomer, à six lieues nord-est de
Tours. Ce nom lui vint du sol de ce canton commu-
nément nommé les Gâtines, Dans son principe elle ne
fut, comme beaucoup d'autres, qu'un simple ermi-
tage habité par des anachorètes. Mais en ii 38 , Hu-
gues, archevêque de Tours, y fonda une abbaye du
consentement des chanoines de sa cathédrale , sei-
gneurs du fief,- qui se réservèrent la nomination des
abbés. Mais ils ne jouirent pas long-t^mps de ce pri-
vilège ; car il fut bientôt changé en celui de confir-
mation, qu'ils perdirent enfin par l'effet du concordat
de François P^.
En concourant à cette fondation par le don de
plusieurs domaines, le chapitre de la cathédrale de
Tours imposa à l'abbé et aux moines de Gâtines
l'obligation de recevoir tous ceux de ses membres
qui, relevant de maladie, auraient besoin d'aller res-
pirer l'air de la campagne, et de les défrayer jusqu'à
LA CLARTE-DIEU. ^07
la fîadeleurconTalescence; mais les chanoines usèrent
bien rarement de cette faculté.
L'abbaye de Gâtines, mise sous l'invocation de
Notre-DaiTMi , fut brûlée par accident sur la fin du
douzième siècle, et rétablie vers Tau laoi ou 1202,
par Thibaut de Champagne , dit le jeune , comte de
Blois, de Chartres, de Clermont, et seigneur de Châ-
teau-Regnault. L'église ayant de même été recon-
struite, fut sacrée par l'archevêque de Tours, Geoffroy
de Lalande, le 29 avril laon. Elle fut long-temps
desservie par les chanoines réguliers du même ordre.
Les religieux n'y étaient qu'au nombre de cinq.
§x.
LA CLARTÉ-DIEU.
L'ordre de Citeaux avait dans la commune de
Saint-Pater , à six lieues nord de la ville de Tours ,
l'abbaye de la Clarté-Dieu (Bcala Maria de Claritatc
Dei), qui fut fondée vers l'an 1240, sous le règne de
saint Louis. Guillaume, abbé général de Citeaux,
avait reçu de Pierre, évêque de Winton en Angleterre,
une somme d'argent à la condition de l'employer à la
fondation d'une abbaye de son ordre; il chargea donc
de celte commission Jean , abbé Lepau-au-Maine , et
celui-ci, en I239,acheta le fief de Belvet d'Ebbon de
la Chaîne, chevalier, et y fit balir un monastère du
consentement de Juhel de Mayenne, archevêque do
Tours. Cette fondation fut approuvée et confirmée par
5o8 HISTOIRE DE TOURAlîfE.
lettres patentes du roi saint Louis , du mois de juin
1248, quoique l'église et les bâtimens eussent été
achevés dès l'an 1240.
L'abbé de Giteaux y avait envoyé douze religieux
avec trois frères convers , accompagnés de Renaud ,
qu'il leur donna pour abbé, et tous prirent possession
de l'abbaye le dimanche, jour de la Madelaine, 22
juillet de cette même année 1 240.
y Ebbon de laXhaîne leur vendit en outre tous les
domaines qu'il possédait dans la baronnie de Saint-
Christophe, vente qui fut ratifiée par Jean d'Aluys,
baron de Saint-Christophe, en 1248, ainsi que par
Hugues d'Aluys , son fils aîné.
On voyait dans l'église de la Clarté un monument
en pierre assez élevé, avec un tombeau haut de deux
pieds, sur lequel était représenté un Geoffroy de
Courcillon, seigneur de Mairolles, près Beaugency.
On y remarquait onze écussons portés par des hérauts
d'armes. Le premier était celui de ce même Courcil-
lon , portant d'or à la bande de gueules fuselée de six
pièces, avec un lion d'azur au canton gauche. Dans
le fond du monument étaient deux personnes à
genoux, dont l'une était Amaury de Fromentières,
chevalier et seigneur de Chambon. Quant à l'autre ce
pouvait être ou Ebbon de La Chaîne ou Jean d'Aluys.
Même après l'aliénation de l'abbaye, ce monu-
ment avait été conservé par le premier acquéreur ;
mais depuis les mutations nous ignorons s'il existe
encore.
MONCÉ. 609
§ XI.
MONCÉ.
Moncë, ou Moncey (Monceyum, Mons Cœlestis),
abbaye desservie par des religieuses de Tordre de Ci-
teaux, située dans la paroisse de Limeray , à deux
lieues d'Amboise, et sur le penchant d*un coteau non
loin duquel passe la Cissc.
Les circonstances de la fondation de cette abbaye
nous ont été transmises par Fauteur de la Chro-
nique de Tours , qui sur cela est d'autant plus digne
de foi que non-seulement il était contemporain ,
mais encore qu'il habitait le monastère de Mar-
mouticr , qui n'est qu'à sept lieues de distance de
Mon ce.
Yers l'an 1212, deux religieuses de Beaumont-les-
Tours,Hermengarde Duplessis etPerrenelle deMëré,
ainsi que deux autres religieuses du monastère de
Saint- Avit , diocèse de Chartres, nommées l'une Pèle-
rine et l'autre Agnès de Linières, résolurent de suivre
la règle de Citcaux, qui était alors en grande faveur.
A cet effet, elles se réunirent dans une maison située
à Moncé, maison tout simplement en bois, et qu'elles
firent construire elles-mêmes sur le sommet du coteau.
Elles y demeuraient depuis trois ans, lorsqu'un bour-
geois de Tours , nommé Hcrmenard , leur fit bâtir un
monastère en pierre, avec des offices et une église. Il
acheta ensuite des rentes et des domaines en quantité
5 10 HISTOIRE DE TOURAINE.
suffisante pour fournir à l'entretien de vingt reli- i
gieuses. Ce nombre fut bientôt rempli , et ayant élu
pour leur prieure Hermengarde Duplessis, elles pri-
rent solennellement possession de leur monastère
le 27 décembre 1216. Leur église fut consacrée le 7
juin iQ.i3 ^Y^SLV Maurice, cvêque du Mans.
Quelques auteurs ont pensé que ce fut Sulpice
d'Amboise qui leur fit construire ce monastère à
<îondition qu'elles s'engageraient par vœu à garder la
clôture. Sulpice IIP du nom vivait en effet à cette
époque : mais peut-être la version de la Chronique
de Tours est -elle plus sûre, d'autant plus que
le même Payen Hermenard est celui qui, en 1224?
fit bâtir une église aux Cordeliers de Tours.
La supérieure de Moncé ne prit d'abord que le
titre de prieure. Elle était élective par la commu-
nauté, qui n'était également qualifiée que de prieuré.
Cet ordre de choses fut maintenu jusqu'en i652 que
le pape Innocent VIII, à la demande du roi, érigea
Moncé en abbaye, en faveur de madame d'Epinoy,qui
en fut ainsi la première abbesse.
§ XII.
NOYERS.
L'abbaye de Noyers (Nuceria , ou Beata Maria de
Nucbariis), de l'ordre de Saint-Benoît , congrégation
de Saint-Maur, était située dans le village du même
nom , sur le bord septentrional de la Creuse , à la
PREUILLT. 5 II
droite de la Vienne, et à une lieue du Port-de-Piles.
On tient par tradition quelle fut fondée par le roi
Robert , et consacrée en io3o par Arnoul, acdaevêcpie
de Tours, sous l'invocation de Notre-Dame. L'auteui'
de la Chronique de Maillezais prétend que la Suda-
tion ne date que de l'an ïo46,sous le roi Henri il*'.,
mais cette opinion est contredite par les titres .même
de l'abbaye qui portent pour abbé , en iq3o , Evrard ,
.mort le 6 noveoibre io56.
§ XIII.
PREUILLI.
Saint-Paul de Preuilli (Pruliacum ou Proillium),
était une abbaye de l'ordre de Saint-Benoît, dans
l'intérieur de la ville qui est située sur la rive droite
de la Glaise, à neuf lieues sud-sud-ouest de Loches,
et à dix-neuf sud-sud-est de Tours. Effroy, baron de
Preuilli ainsi que de La Roche -Posay, et Béatrix
^'Issoudun , sa femme, la fondèrent en Tan rooi.
Hervé, trésorier de Saint-Martin, n'en fît pas con-
s-lruire lesbâtimens comme le dit l'auteur de la Chro-
nique de Saint-Maixent ; il fut seulement invité par
Effroy à y mettre des religieux, qu'effectivement il fît
venir de l'abbaye de Massé en Berri. Ces bâtimens
furent achevés en 1009. Cependant l'église fut con-
sacrée sous l'invocation de Saint-Paul, par l'arche-
vêque de Tours, Archambaud de Sully, qui était mort
'Cn ioo5. Eifroy dota l'abbaye de domaines et de
rentes pour l'entretien de sept religieux.
5l2 HISTOIRE DE TOUR AINE.
Sur la fin du dix-septième siècle on voyait encore
dans l'église son tombeau avec son épitaphe , ainsi
que ceux de quelques seigneurs de Preuilli. ^Voy,
p. a 32.)
-?:f)ILes religieux, dans les derniers temps, étaient en-
core au nombre de sept , conformément au titre de
leur fondation; mais on y en avait compté jusqu'à
trente-trois au commencement du douzième siècle.
L'abbaye de Preuilli fut au nombre de celles que
les protestans pillèrent en i562.
§XIV.
SAINT-JULIEN.
Tours ne renfermait dans son intérieur qu'une
seule abbaye, celle de Saint-Julien (Sanctus Julianus de
Scalarlâ), de Tordre de Saint-Benoît, congrégation
de Saint-Maur. On la nommait Saint-Julien-des-
Echelles, non qu'il fallût y monter ou descendre , mais
parce qu'elle était située sur le bord de la Loire , au
lieu oîi arrivaient les bateaux, ce qu'on nommait alors
Eclielles,commeon dit encore aujourd'hui les échelles
du Levant.
Grégoire de Tours rapporte que son église fut bâtie
avant qu'il eût été appelé à l'épiscopat, par des religieux
qui étaient venus d'Auvergne, et la Chronique de Tours
ajoute qu'elle avait été dédiée à saint Maurice. Ces
religieux ayant appris que Grégoire , en revenant de
Clermont, en avait rapporté des reliques de saint
SAINT- JULIEN. 5l3
Julien, le prièrent d'en gratifier leur église, ce qu'il
leur accorda : alors elle fut mise sous l'invocation de
ce saint, et il la consacra le 29 juin 576.
En io3o, un certain Geoffroy, fils d'Othon, et
Guilburge son épouse, firent don à l'abbaye de
Saint-Julien de l'église de Saint-Médard, avec toutes
ses dépendances , lieu connu depuis sous le nom de
Saint-Mars ou Cinq-Mai's-la-Pile.
L'abbaye fut détruite en 856 par les Normands,
ïhéotolon, arcbevêque de Tours, la fît reconstruire
en 938 , et la dota , d'accord avec sa sœur Ger-
sinde, de plusieurs domaines de leur patrimoine.
En 942 il y fit venir Odon , abbé de Cluni, son ami
et son compatriote , pour y faire revivre la règle.
Le 24 février i .224, un orage épouvantable ébranla
tellement la voûte de l'église qu'elle tomba avec une
partie des murs qui la soutenaient. Elle ne fut bien
rétablie que sous le règne de saint Louis. Robert ,
prieur de Rhédon, contribua à la reconstruction de
la voûte, ainsi que l'indiquait l'inscription qui y était
placée.
On a prétendu que les comtes d'Anjou avaient été
autrefois les avoués de l'abbaye de Saint-Julien , et
l'on en donne pour raison une lettre de Henri II,
roi d'Angleterre, par laquelle il assure que le roi de
France lui-même avait reconnu , aux états-généraux
d'Orléans, que ce droit appartenait aux comtes d'An-
jou, comme sénéchaux héréditaires de France : mais
cette lettre est d'autant plus suspecte , que les rois
d'Angleterre, comtes d'Anjou, n'ont jamais eu cette
3. 33
5l4 HISTOIRE DE TOTJRÂINE.
qualité. Les véiûtables avoués ot protecteurs de Saint-
Julien ont toujours été les archevêques de Toui's, ainsi
que l'écrivait k Louis VII l'archevêque Joscion , x[m
vivait ^u fcempfe de ce même Henri II.
dI Ijq pâfxe Jean XXIÏI -exempta Fahbaye ide Saint-
Jwlien de la juridiction de Tordinaire, parti^n^ bulle
du i6 septembre 14115 mais rarchevêque Jacques
Gélu obtint du pape Martin V la révocation de cette
bulle au concile de CoûstancC) en 1417.
u. George, Pierre, Clément et Louis de Catinat,
neveu du célèbre maréchal de ce nom , furent sans
interruption abbés commendataires de Saint-Julien ,
depuis i6a5 jusqu'en 17 14'
§ XV.
SEUILLY.
Seuilly s'est dit également Seuillé ( Sulliacum , ou
B. Maria de Sulleyo). C'était une abbaye de Tordre
de Saint-Benoît , congrégation de Saint-Maur, située
à une lieue de l'Ile-Bouchard , an nord-ouest de la
Vienne; elle avait commencé par n'être qu'un simple
prieuré, dont jouissaient autrefois les seigneurs de
Monsoreau , suivant les usages des onzième et dou-
zième siècles.
Guillaiume II, chevalier, seigneur de Monsoreau,
fit don du prieuré de Seuilly à l'abbé de Saint-
Etienne-de-Va«x , en Limousin, du consentement de
Mâbille sa mère , qui joignit à cette dotation la moitié
SEUILLY. 5î 5
du nioulin de Virelay. Raoul I", archevêque de
Tours, s'opposa d'abord à cette institution, mais il
finit par y donner son consentement.
Gautier, ayant succédé à Guillaume son père,
obtint de labbé de Saint-Elienne-de-Vaux Tagré-
ment d'ériger Seuilly en abbaye, sous le titre du
Saint-Sépulcre, à la condition d'une redevance an-
nuelle de 20 sous.
En considération de cette érecti on, Qauticr donna
a la nouvelle abbaye plusieurs domaines ^ entre autres
le bois de Bort , nommé depuis le bois de Fonte-
vrauld, à la condition de l'essarter et de le mettre en
culture. Ce bois fut , entre l'abbé et Robert d'Arbris-
sel , le sujet d'un procès qui fut terminé par le j)ar-
tage de l'objet litigieux entre les deux parties, accord
que sanctionna Giraud, légat du saint-siège, et auquel
souscrivirent Raoul, archevêque de Tour3, et Pierre ,
évêque de Poitiers.
Les religieux de Seuilly voulant se soustraire à la
juridiction de l'abbé de Saint-Etienne-de-Vau3(,
élurent d'eux-mêmes leur abbé, et refusèrent de
payer les 20 sou3 de rente. Godin, abbé de Saint-
Maixent, à qui celui de Vaux en avait référé, offrit
à celui-ci de se charger de la rente , s'il voulait lui
céder ses droits. La proposition ayant été acceptée,
l'abfcaye de Seuilly depuis ce moment releva de celle
de $aint-Maixent,ce changement ayant été approuvé
par Engebaud, archevêque de Tours, qui J'en mit 09
possession en i j 5o.
Ce fut dans l'abbaye de Seuilly , dont était voisine
33.
5l6 HISTOIRE DE TOUR AINE.
la maison de la Devinière , que Rabelais commença
ses premières études.
§ XVI.
TURPENAY.
L'abbaye de Turpenay (Turpiniacum) , de l'ordre
de Saint-Benoît, congrégation de Saint-Maur, se
trouvait sur la paroisse de Saint-Benoît de Lac-Mort,
entre le Cher et l'Indre, près la forêt de Chinon.
Elle fut fondée en 1107, par Foulques-le-Jeune ,
comte de Touraine, d'Anjou et du Maine, qui donna
aux religieux quatre bouées de terre, avec le droit
d'usages, chauffage, pacage et glandée dans la forêt
de Teillay, aujourd'hui forêt de Chinon. Cette dona-
tion fut confirmée depuis par lettres patentes de
Richard-Cœur-de-Lion , données à Chinon, le 19
avril 1 1 89. Les seigneurs de l'Ile-Bouchard ac-
crurent , par leurs libéralités , les possessions de ces
religieux.
Henri Clément, maréchal de France, appelé com-
munément le Petit-Maréchal, eut sa sépulture dans
cette abbaye. 11 était fils de Robert Clément, ministre
d'état et gouverneur du roi Philippe-Auguste. Son
frère, Albéric Clément, fut aussi maréchal, et l'on
sait qu'il n'y en avait qu'un seul à cette époque;
Henri, qui mourut en Poitou, l'an iii4? avait de-
mandé à avoir sa sépulture à Turpenay.
VILLELOIN. 017
§ XVII.
■
VILLELOIN.
Villeloin (Villalupa, ou Sanctus-Salvator Villalu-
pcnsis) : cette abbaye de l'ordre de Saint-Benoît,
congrégation de Saint-Maur, était située sur l'Indrois,
à trois quarts de lieue de Montrésor, et à cinq lieues
de Loches. Elle dut sa fondation à un gentilhomme
de Touraine , nomme Maynard , fondation qui re-
monte à l'année 85o. Charles-le-Chauve autorisa Au-
ducher, abbé de Cormeri, à accepter les domaines
donnés à cet effet par Maynard. Sa charte est datée
de Vermerach, le 6 des calendes de juin, ou 27 mai
85o. En conséquence, il soumit ce monastère à celui
de Cormeri, conformément aux intentions du fon-
dateur ; ainsi , x\udacher gouverna simultanément les
deux monastères. Cette cumulation eut lieu jusqu'à
Hubert , quatrième abbé qui, en 960, fut nommé par
les moines de Villeloin, au moyen du droit d'élection
qui venait de leur être accordé. Depuis ce moment
ils eurent leur abbé distinct de celui de Cormeri.
L'église de Villeloin ne fut construite , ou du
moins achevée, qu'environ neuf ans après la fonda-
tion; car nous trouvons quelle fut consacrée le 8 mai
859, par Hérard, archevêque de Tours. Le nombre
des religieux fut fixé a vingt.
Cette abbaye ne fut pas épargnée lors des ravages
commis dans ces contrées, en 1^12 , par les troupes
5l8 HISTOIRE DE TOURAINE.
anglaises : aussi son abbé fut-il dispensé par le roi
(lu subside qui était demandé au clergé. Micbel de
MaroUes, qui obtint ce bénéfice le 5 décembre 1626,
en fit réparer labbatiàle, qui fut reconstruite à neuf
en 1772. La maison conventuelle le fut en 1782,
époque très-voisine de celle où elle devait cesser
d'exister. Elle ne comptait alors que quatre religieux.
On s'étonne que le laborieux Marolles n'ait pas écrit
î'histoirê de âes deux abbayes de Rangerais et de Vil-
leioin j et qu'il se soit borné à donner une liste exacte
de leurs abbés.
CHAPITRE m.
PRIEURÉS EN COMMENDE.
§1-
ifl PRIEURÉ DE SAÎNT-COME.
• La Loire forme différentes îles dont quelques-unes
ont certaine étendue» Celle de Saint-Gôme se trou-
vait à une demi-lieue au-dessous de la ville de Tours ;
mtiis depuis à peu près un siècle on l'avait réunie au
continent , dont elle n'était séparée que par un faible
cours d'eau.
<i;> C'est dans cette île qu'était situé le prieuré de
SAINl>COME. 619
Saint-Come, desservi pendant un long espace de
temps par des chanoines réguliers de l'ordre de
Saint-Augustin.
Le domaine de cette île appartenait à Féglise de
Saint-Martin. Hervé, son trésorier, en ayant obtenu
la jouissance pour s'y retirer et y vivre avec plus de
recueillement, y fît bâtir une chapelle sous l'invoca-
tion de Saint-Côme , d'où l'île avait pris son nom :
mais forcé en quelque sorte par les instances de ses
confrères de reprendre ses fonctions, il donna de
leur consentement cette île aux religieux deMarmou-
tier pour y venir prendre leur récréation , à condition
qu'ils reconnaîtraient les chanoines de Saint-Martin
pour leurs premiers seigneurs , et qu'ils en paieraient
le cens au cellerier du chapitre. Hervé abandonna en
même temps la chapelle qu'il avait faitconstruire,vou-
lant que douze moines y fussent entretenus pour ne
pas y interrompre le service divin. Ces dispositions
fbrent ratifiées par GelduinH, deSaumur, qui tenait
nie à foi et hommage de Eudes, comte deïouraine.
Les moines de Marmoutier avaient à peine un
siècle de jouissance qu'ils refusèrent de reconnaître
la suprématie du chapitre et de payer le cens con-
venu. Ce fut la matière d'un procès qui fut jugé par
les nobles du pays. En vertu de leur sentence les
moines se virent expulsés de l'île et le chapitre rentra
dans sa propriété.
Ce fut là que l'archidiacre Bérenger se retira, après
sa dernière rétractation. Il y mourut le 1" janvier
1088, suivant l'épitaphe que lui fit Hildobcrt qui avait
020 HISTOIRE DE TOUR AINE.
été son disciple. Cette date est indiquée par le qua-
trième vers où il est dit :
Jani prima dies abstulit, ausa nefas.
Après la mortdeBérenger, quelques chanoines de
Saint-Martin, ayant résolu d'abandonner leurs béné-
fices pour embrasser la vie religieuse selon l'ordre
des chanoines réguliers de Saint- Augustin, obtinrent
du chapitre l'île de Saint-Come, à la charge d'ob-
server effectivement la vie religieuse, de ne point
changer d'ordre , d'assister aux obsèques des chanoi-
nes , aux processions des rogations , et de présenter
à la confirmation du chapitre le prieur qu'ils auraient
élu, dans le cas où ils excéderaient le nombre de
douze. En conséquence de cette cession, ils firent
construire les bâtimens qui leur étaient nécessaires, et
ils en prirent possession la veille de Noël de l'année
1092. D'abord ils n'étaient que cinq; mais plusieurs
chanoines de Saint-Martin ayant suivi leur exemple ,
ils se trouvèrent, en iioi, au nombre de quinze ou
seize , ce qui leur permit d'élire un prieur. Ces prieurs
étaient installés au chœur de Saint-Martin au rang des
dignitaires, quoique , depuis le concordat, ils ne pris-
sent plus l'investiture du chapitre.
Ce prieuré fiit supprimé en i y 4^, et ses revenus
retournèrent à leur origine , c'est-à-dire au chapitre
de Saint-Martin. Il en dépendait trente bénéfices.
Le poète Ronsard, clerc tonsuré du diocèse du
Mans , conseiller et aumônier du roi Charles IX , fut
lîOIS-I\Ai:iER. 521
reçu prieur commendatairc de Saint-Come le ven-
dredi 1 5 mars 1 564 > P^*' permutation , et par la même
voie fut fait chanoine de Saint-Martin et installé le
1 6 janvier i565. Quoique prieur il ne lui fut pas
permis de siéger au ehapitre au rang des dignitaires,
mais seulement à son rang de chanoine. Le i5 mai
1570 il permuta son canonicat pour le prieuré de
Guingalais au châleau du Loir, avec M. Florentin
Regnard , conseiller au parlement de Paris et prési-
dent aux enquêtes.
Ronsard mourut à Sain l -Corne, le mardi au soir
27 décembre i585. Sur son tombeau se lisait cette
épitaphe qu'à coup sûr on ne lui eût pas faite un
siècle plus tard.
Cave, viator, cave : sacra haec humus est.
Abi néfaste , quam calcas humum sacra est.
Ronsardiis jacet hic ,
Quo oriente oriri musse , et occideote commori
Ac secum inhumari voluerunt.
Hoc non invideant qui sunt superstites.
Nec parem sortem sperent nepotes.
Obiit
VI. Kal. Jan. no. lo. lxxxv.
En 1742, époque de la suppression du prieuré, le
chapitre de Saint-Martin fit enlever le cénotaphe de
Ronsard, qu'il fit placer dans sa salle capitulairc.
2 2 HISTOIRE DE TOURAINE.
§ II.
Ce n'était guère que sous le nom de prieure de
Grandmont qu'était connu celui de Bois Rahier ( de
Bosco Raberii), de Tordre de Grandmont en Limou-
sin: il était situé à une lieue sud de la ville de Tours,
sur le coteau qui est à la gauche du Cher . Ce fut une
fondation faite en 1177 pâl* Henri II, roi d'Angle-
terre et comte de ïouraine.
Il paraît par les lettres de fondation , qui sont sans
date, que Henri y affecta le lieu de Bois Rahier avec
les terrains , bois, prés et généralement tout ce qui
en dépendait, francs de toute espèce de droits. Il y
ajouta les bois et boires depuis les ponts de Vançay,
aujourd'hui Saint-Avertin , avec usages dans les fo-
rêts de Loches, de Chinon et de Bréchesnay ( nemus
Brusennium). Il donna de plus 3oo livres de rente,
monnaie d'Anjou, à prendre sur les afforages de
Loches, et quelques autres rentes qui lui étaient dues
au Château du Loir. Ces lettres furent données à Nort-
hampton, en présence de Richard, archevêque de
Cantorbéry et autres. Depuis elles furent confirmées
en France par Charles YH, au mois d'avril i433;
par Louis XI, en 146 1 ; par Louis XÏU et Louis XIV,
en 161 1 eta645.
L'éghse était desservie par six religieux. Le prieur
de cette maison était l'un des deux supérieurs de
viLLiEr.s. 623
l'ordre qui avaient le droit de confirmer lo gênerai,
après son élection. Ce privilège leur avait été con-
firmé par une bulle du pape Jean XXII.
Le prieuré ayant été supprimé en 17 , les reve-
nus en furent affectt's au séminaire de Tours, et les
bâtimens étaient devenus une maison de plaisance
pour les archevêques.
§ ni.
PRIEURE DE POMMIERS-AIGRES.
Le prieuré de Pommiers-Aigres ( de Pomerio acri),
communément nommé Grandmont, près Chinon,
de l'ordre des religieux de Grandmont , était situé
dans la paroisse de Lac-Mort. Il avait la même ori-
gine que le précédent, et était de même une fonda-
tion faite par Henri II , en 1 177 ou 1 178. Ce prieuré
de peu d'importanoe n'était desservi que par deux
religieux» L'abbé Régnier Desmarcts, de l'académie
française, en a été prieur jusqu'en l'année 1713.
PRIEURS DE VILLIERS.
On a prétendu rjuc le prieuré de Villiers { Ville-
rias ) pareillement de l'ordre de Grandmont , et situé
dans la commune deCoulange, canton de Montré^
«or, était une troisième fondation de cette espèce.
524 HISTOIRE DE ÏOU RAINE.
faite on 1 170 par Henri II. D'après des lettres pa-
tentes de Richard-Cœur-de-Lion , datées de 1196,
quelques-uns ont cru que la fondation de Villiers ne
pouvait pas être antérieure à 1192. Mais il est bien
plus probable que ces trois prieurés datent de la
même époque, et qu'ils furent, de la part de Henri II ,
une expiation du meurtre de Thomas de Cantorbéry
dont ce monarque avait, sinon ordonné, du moins
provoqué la mort.
Ce prieuré fut compris dans la suppression qui
atteignit les deux précédens.
§ V.
PRIEURÉ DE SAINT-JEAN-DU-GRÈS.
Saint-Jean-du-Grès ou du Gréez , situe entre Truye
et Azay-sur-Cher, paraît avoir été fondé vers l'an
1017 par Foulques-Nerra , qui fît don de l'église et
de ses dépendances au chapitre de Saint-Martin.
En 1 163 , ce chapitre en fît l'abandon à quelques
ermites qui s'étaient retirés dans les bois dont ces
lieux étaient couverts. La charte d'abandon , signée
par le doyen Barthelemi, le trésorier Geoffroy et
autres chanoines, porte pour clause expresse, que
cette église restera a toujours sous la protection et
dépendance du chapitre de Saint-Martin.
En i6o3 , le prieuré passa à l'ordre des chanoines
réguliers de Saint-Augustin qui s'affranchirent bien-
tôt de leurs obligations envers l'église fondatrice, à
LA. BOURDILLIKRE. 5^5
laquelle ils ne payaient plus que deux sous de cens.
C'est auprès du prieuré du Grès qu'était située la
Tour des Brandons, bâtie par Foulques-Nerra , et
dont nous avons parlé au tom. 1", pag. 3 14.
§ VI.
PRIEURÉ DE LA BOURDILLIÈRE.
La Bourdillière , prieuré de filles de l'ordre de
Cîteaux, était située dans la paroisse de Génillé, à
deux lieues et demie nord de Montrésor, et à onze
lieues sud-est de Tours.
Louis de Menou , seigneur de Génillé , ayant ac-
quis le château de la Bourdillière, y fonda, en 1661,
en prieuré perpétuel , une communauté de filles de
l'ordre de Cîteaux, destinée selon toute apparence
à procurer un établissement aux filles nombreuses
qui se trouvaient dans sa famille : c'est pourquoi sans
doute il se réserva la nomination de la supérieure.
Sept de ses sœurs, dont la plupart étaient engagées
dans d'autres couvens , obtinrent la permission de se
réunir à la Bourdillière, et l'aînée en fut nommée
supérieure. Quatre des filles du fondateur vinrent
accroître ce nom])re, qui bientôt après fut encore
augmenté par l'admission de treize de ses nièces, en
sorte que l'établissement, porté ainsi à vingt-quatre,
se trouva entièrement composé des membres de la
même famille.
Louis de Menou , en 1668, obtint de Louis XIV
526 HISTOrRE DE TOURAINE.
des lettres de confirmation de ce prieuré, sous le
nom de Notre-Dame de la Bourdillière , et comme il
avait renoncé à son droit de nomination, le roi
donna pour çoa<ljutrice à Claude de Menou , sœur
du fondateur, Catherine de Menou sa fille : dès ce
moment, le prieuré de la Bourdillière fut mis au rang
des monastères de fondation royale.
Il existait encore quatre-vingt-treize prieurés
simples, trente monastères d'hommes et vingt-sept
couvens de filles; mais on conçoit aisément que
nous n'entreprendrons point l'énuméralion fastidieuse
de tant d'établissemens qui ne pourraient offrir au-
cun intérêt historique. Nous croyons seulement devoir
terminer cette quatrième partie par quelques détails
sur les églises paroissiales de la ville de Tours.
CHAPITRE IV.
ÉGLISES PAROISSIALES DE TOURS.
§1-
JSA.IWT-CLÉMENT.
Daiys l'origine, Saint -Clément était un hospice
destiné à recevoir les pauvres gentilshommes qui
venaient visiter le tombeau de Saint-Martin. Il y en
SAJ^T-CLÉMENT. 5*7
avait un autre à côte , nommé l'hospice de Saint-
André, pour les personnes d'une moindre condition.
Ces sortes d'élablissemens avaient été recommandés
aux chapitres et aux grands monastères , par le con-
cile tenu en 816 à Aix-la-Chapeïle , confirmant le 7*
canon du concile général de Nice.
Le comte Eudes, alors «bbé de Sainte Martin,
donna à titre de bénéfice à Tua de ses chanoines
riiospioe de Saint-Clément avec les revenus qui en
dépendaient; mais Robert son frère, et son successeur
dans cette abbaye, restitua cet hospice aux pauvres,
en 896. Cependant les voyages au tombeau de Saint*
Martin étaient devenus moins frequens, et, n'étant
plus entrepris que par des personnes opulentes , cet
établissement devint sans utilité, et ne tarda pas à
recevoir une autre destination. La populaûon du
bourg de Ciiâteauneuf s'étant accrue, il fut érigé en
paroisse sous k même vocable de Saint -Clément.
Mais comme l'église était peu spacieuse, elle fut re-
construite vers le milieu du quinzième siècle , par les
soins et en partie aux frais de Jean Briçonnet l'aîné ,
premier maire de Tours, qui était né , at qui demeu-
rait sur cette pai^oisse.
La cure était à la présentation de l'aumônerie de
Saint-Martin. La paroisse a été supprimée à la ré-
volution et le bâtiment forme aujourd'hui, provi-
soirement sans doute, la halle aux blés.
5^8 HISTOIRE DE TOUR AINE.
SAINTE-CROIX.
Baudonivie qui a écrit la vie de sainte Radegonde
dont elle avait été la compagne , nous apprend que
cette reine, avant que de se retirer à Poitiers, avait
demeuré pendant quelques années à Tours, auprès
de i'église de Saint-Martin, où elle allait prier tous
les jours. Durant son séjour, elle y fît construire un
monastère qui fut occupé par des hommes; mais
avant son départ elle en fit don, ainsi que de lat
maison qu'elle occupait, à l'église de Saint-Martin.
Grégoire de Tours parle de cet oratoire ou couvent,
et dit qu'il était situé auprès de la basilique de Saint-
Martin. L'église de Sainte-Croix en était en effet
très-rapprochée. Il est même probable qu'alors elle
se trouvait dans l'enceinte du cloître. L'empereur
Justin ayant envoyé à sainte Radegonde un mor-
ceau de la vraie croix, cette relique resta déposée
dans l'oratoire de ce monastère jusqu'à ce qu'elle
eût été transférée à Poitiers; mais la reine y laissa
un morceau du voile qui l'avait enveloppée. C'est à
ce sujet que Grégoire de Tours mit sous l'invocation
de la sainte croix l'église qu'il fît ensuite bâtir pour
ce monastère , qui paraît avoir subsisté jusqu'à la fîn
du douzième siècle. Il n'existait plus en 1200, car
à cette époque son église fut érigée en cure, dont la
SAINT-DENIS. 5^9
présentation appartenait à l'abbé de Bourgueil, ce
qui fut confirmé, en i2o3,parunebuile du pape In-
nocent III.
Cette paroisse devenue ifttitiW, attendu la dimi-
nution de la population de la ville, avait été sup-
primée des le ï*' jiiri^ief i'jQl.
§ ttî-
SAIïn'-DETflS.
Ce fut Renaud , abbé de Pont-le-Voy, qui , vers
Fân 1 187 ou I ï88, fit construire à Toxtrs une église
qui fut mise sous l'invocation de saint Denis. Mais
cette construction se trouvait placée dans la voirie
de Châteauneuf , qui appartenait au cbapitre de Saint-
Martin , dont Renaud aurait dû pt'endre le consen-
tement avant que de rien cntreprcndi^e. Il è^hsuivit
un procès dans lequel l'abbé eût nécéssâireftierit suc-
combé s'il ne l'eût pas terminé par une transaction
passée en 1 189, d'après laquelle le cbapitre consentit
que les murs et la voûte de l'église , ({uï étaient déjà
achevés, fussent conservés. L'abbé en doima ses let-
tres, où il est dit : « Cum gratiâ capituli obtinuiftitis
quod prescfiptae ecclesiae parrete.^ et volta, sictit erant
exaltati, remanercnt.»
La présentation de la cure appartenait à l'abbé de
Pont-le-Voy et la collation à l'archevêque de Tours.
Ainsi que la précédente, elle fut supprimée au mois
de janvier 178a.
3. M
53o HISTOIRE DE TOUR AINE.
§ IV.
«AINT-toENNE.
Il est certain que , dès les premiers temps où le
christianisme eut à Tours un culte public , il y avait
im oratoire placé auprès d'un cimetière des chrétiens.
Grégoire de Tours en parle au chap. 34 du livre de
la Gloire des Martyrs, en disant qu'il avait été an-
ciennement érigé par les liabitans en l'honneur de
saint Etienne ; mais que le trouvant beaucoup trop
resserré, il l'avait fait agrandir sous son épiscopat,
c'est-à-dire vers les commencemens du septième siè-
cle. Les anciens historiens ne nous ont rien appris de
l'usage auquel il fut postérieurement destiné. Nous
voyons seulement qu'il était placé dans le bourg de
la trésorerie, voisin de la cathédrale; ainsi il n'y a
pas de doute que ce fut ce même oratoire qui fut
converti en une église paroissiale dont la population se
composait en grande partie des liabitans de la cam-
pagne , ainsi que cela existait encore à l'époque de sa
suppression , et c'est ce qu'on appelait Saint-Etienne
extra muros.
L'oratoire érigé en paroisse étant devenu par la suite
trop peu spacieux, les liabitans, vers l'an i35o, ré-
solurent d'en faire construire un plus commode; mais
le terrain leur manquant , ils y suppléèrent en y ajou-
tant celui du cimetière , qui fut remplacé par une
portion de celui de Saint-Sébastien , que l'Hotel-Dieu
SAINT-HILAIRE. 53 1
de Tours consentit à leur céder pour y enterrer leurs
morts.
La cure était à la présentation du trésorier de la
cathédrale qui , en cette qualité , était seigneur d'une
partie de la paroisse.
§v.
SAINT-HILAIRE.
Nous pouvons mettre cette église au nombre des
plus anciennes de la ville de Tours , puisqu'elle date
d'environ l'an Goo. C'est ce qu'on pouvait reconnaître
à la construction de ses murs dont une partie était
bâtie en petites pierres carrées de même nature que
les anciens murs de la cité.
Ce n'était dans le principe qu'une simple chapelle
qu'un certain Gautier donna à l'église de Saint-Mar-
tin, à condition que le revenu en serait employé au
soulagement de ceux de ses bénéficiers qui seraient
malades. Le chapitre en fit don à son tour à un diacre
nommé Geoffroy, pour lui et pour ses héritiers. Tom-
bée entre les mains d'un gentilhomme que le titre
désigne sous le nom de Simon de Marchille, celui-ci
la donna, vers 1 1 3o, à Hildebert, archevêque de Tours,
qui l'érigea en cure dont la présentation appartenait
à l'abbé de Toussaints, d'Angers, de Tordre des cha-
noines réguliers de Sainl-Augustin , congrégation de
France , dite de Sainte-Geneviève. Aussi le curé avait-
il le titre de prieur.
34.
5^9^ HISTOIRE DÏ3 TOUR AINE.
A cette époque, le lieu où l'ëglise de Saint-Hilaite
était située ne faisait pas encore partie de la ville de
Totïts j àiiîsî qu'on le voit par laf charte d'Hildebert:
« Je teiix , dit-il , qu'on sache que l'un dé ilos ba^-dtts
« nommé Simon , mais surnommé Matôhille, est VëBîtt
« vers nous, et a remis en nos mains l'église de Saint-
ce Hilaire, située entre la ville de Tours et celle de Châ-
« teauneuf. — Notum fieri volo quemdam de baronibus
« nostris, Simonem nomirie, sed cognomento Marchil-
«lum, ad nos venisse et ecclesiam B. Hilarii inler ci-
« vitatem Turotiis, et castellum È.Maftini sitam, quam
«defetido nostro tenebat, iri tnanunostra dimisisse» »
§ VI.
W0TRE-DAME-L4-RICIÏÏ?.
11 pass^ pour conâtâitt qiië l'église de Nôtré-Damê-
la-Riche à été bâtie sut l'un des cimetières des chfé-
tj^fts 011 Saint-Gatien avait eu sa sé^ilture. Sainf-
Lidoire ^ sOU successeur, fît construire à côté une
chapelle dans laquelle il fut enterré ; mais Saint-Maf-
ti*i iît transférer ses restes, ainsi que ceux de Saint*-
Oâtièô,' dttus mti aùti^ chapelle dédiée à Saint-Mé-
dârd , et presque attenante à celle de Notre-Dame-laf-
Riehe. Grégoire de Tours , au livre de la Gloire àés
Martyrs , dit qu'elle fut consacrée sous le nom de la
Vierge et de Saint-Jean-Baptiste. Jusqu'au douzième
siècle , elle fut connue sous le nom de Notre-Dame-
la-Pauvre, pour la distinguer de Notre-Dame-de-l'É-
notre-dame-de-l'écrignole. 533
crignole. Mais vers ce même temps, les reliques de
Saint-Gatien y ayant été déposées , elle prit de là la
deBomination de Notre-Dame-la-Riche qu'elle con-
serve encore aujourd'hui , étant une des paroisses qui
ont été maintenues.
Elle fut démolie en i562, probablement par suite
de sa vétusté et des ravages commis à cette époque
par les protestans. L'ancien édifice devait être plus
grand et plus élevé que celui qu'on voit aujourd'hui,
si l'on en juge par le haut pilier qui était resté de-
bout et qui n'a été détruit qu'en 1789 , sans qu'on
aperçoive le motif qui jusque-là l'avait fait res-
pecter.
Louis XI y avait annexé l'une des prébendes du
Plessis , qui se trouvait sur le territoire extra muros,
La cure était à la présentation de l'abbé de Vil-
Icloin.
§ VII.
N OTRE-D AME-DE-Ii'ÉCRIGBTOLE .
Il Hôus reste peu de choses à dire sur l'église de
i'Éçrignole , dont nous avons rapporté l'origine à l'ar-
ticle de l'abbaye de Beaumont qui, en 1002, fut for-
mée de ses débris.
Les incursions des Normands ayant tout-à-fait
cessé , l'église que ces reHgieuses avaient abandonnée
pour leur nouvel asile fut reconstruite sur de nou-
veaux fondemens et érigée en paroisse, dont la cure
534 HISTOIRE DE TOURAINE.
était à la présentation de l'abbesse de Beaumont, et
à la collation de l'archevêque.
Quand on eut reconnu l'opportunité de restreindre
le nombre des paroisses de la ville de Tours , Notre-
Dame-de-l'Ecrignole fut une de celles mises en pre-
mière ligne, et sa suppression fut effectuée le 7 juin
1777.
§ VIII.
SAINT-PIERRE-DU-BOILLE.
Quoique Grégoire de Tours ne nous apprenne
point à quelle époque remontait la construction de
l'église de Saint-Pierre-du-Boille , il n'en paraît pas
moins constant qu'elle a été la plus ancienne des
églises paroissiales de la ville. Ce fait nous est dé-
montré par un passage du testament de saint Per-
pète, huitième évêque de Tours, qui avait déjà pres-
crit qu'on célébrât la fête de Saint-Pierre et Saint-
Paul dans l'église qui leur était dédiée. Il y est dit :
« Je donne et lègue à l'église de Saint-Pierre les ta-
» pisseries que je lui ai souvent prêtées pour la fête de
» son patron. — Ecclesiœ Sacti-Petri peristromata quae
» ei ad utendum in natali ejusdem sœpe concessi, om-
» nino et absolute do , lego. » Or sous l'épiscopat de
saint Perpète les trois autres églises, que nous allons
voir sous l'invocation de saint Pierre, n'existaient
pas encore.
Celle-ci fut bâtie sur les remparts du Bourg de la
SAINT-PIERRE-DES-CORPS. 535
Trésorerie qui sVtcnclait depuis la tour de Saint-
Vincent, ou portail de la Chancellerie , en tournant
par la rue du Cygne, jusqu'à la porte de la cite où
étaient anciennement les prisons. A.ussi fut-elle nom-
mée Sanctus-Petrus de Ballo; ballum étant un mot de
la basse latinité employé au lieu de vallum qui si-
gnifie rempart.
Probablement elle avait été reconstruite , et peut-
être plusieurs fois depuis sa fondation ; mais elle le
fut en dernier lieu vers la fin du quinzième siècle,
et terminée en 1 5^0 par les soins de Guillaume Gal-
loclieau , qui contribua à l'achèvement de la voûte,
comme on le voyait par l'inscription qui se trouvait
à la clef. La cure était à la présentation du chapitre
de la cathédrale , en conséquence de la cession faite
par l'archevêque Barthélemi II , approuvée par une
bulle d'Innocent III , eu date du i5 mai 1 198. Cette
paroisse n'existe plus.
§ IX.
SAINT-PIERRE-LE-PUELLIER.
Nous n'avons rien à ajouter à ce que nous avons
déjà dit de cette église, considérée comme collé-
giale, f^oj, le ch. l*"', § 4»
§ X.
SAINT-PIERRE-DES-CORPS.
L'église de Saint-Pierre-des-Corps peut aussi être
536 HISTOIRE DE TOURAINE.
citée pour son antiquité. Quelques-uns ont pensé
qu elle était l'ouvrage des premiers chrétiens de la
ville de Tours, qui, ayant un cimetière hors des
piurs^yava^ent construit une chapelle, suivant l'usage
observé dans ces temps ; et comme on y déposait les
corps avant que de les enterrer, ils prétendent que
de là elle aurait pris le nom de Saint -Pierre- des-
(Corps; mais, s'il jcn était ainsi, les chapelles des au-
tres cimetières auraient dû recevoir la même déno-
mination. D'ai4tres au contraire y ont trouvé une
origine historique heaucoup plus vraisemblable , en
disant que cette chapelle avait été ainsi nommée
9près que les Normands, en 838, eurent été défoits
sous les murs de Tours, en assiégeant cette ville.
Comme l'action principale se passa au levant de la
cité, précisément tout près du lieu oii l'église est
située , ce fiit là , disent-ils , qu'on rassembla et qu'on
enterra tous ceux des ennemis qui étaient tombés en
grand nombre sous les coups des assiégés. C'est pour-
quoi on appela ce lieu Saint-Pierre-des-Corps , ainsi
qu'on nomma Saint-Jean-des-Coups le prieuré qui
fut construit non loin de là , en commémoration de
cette victoire attribuée à l'exposition des reliques de
saint Martin.
C'est après cet événement qu'elle fut érigée en
paroisse , dont la cure était à la présentation du doyen
de la cathédrale , et à la nomination de l'archevêque;
mais les chanoines s'en prétendaient toujours les curés
primitifs. Elle a été conservée comme paroisse du
faubourg qui en porte le nom.
SAINT-SATURNIÎÎ. 537
§ XL
SAINT-PIERRE-DU-CHARDONNET.
Cette église est bien moins ancienne que la pré-
cédente. Ce n'était dans l'origine que la chapelle af-
fectée au cimetière du Bourg de Chateauneuf, et
celle-ci servait véritablement à y déposer les corps
avant leur inhumation. Aussi était-elle connue sous
le nom de Saint-Pierre-du-Cimetière. On a prétendu
que les chardons qui y croissaient l'avaient fait ap-
peler Saint-Pie rre-<Ju-Chardonnet , Sanctus-Petrus de
Cardoneto ; mais comme il y a eu à Paris et ailleurs
des églises portant cette même dénomination , nous
pensons qu'on doit y chercher une autre étymologie.
Ce cimetière et sa chapelle étaient en dehors des
murs : mais la ville s'étant accrue de ce côté , tous les
deux se trouvèrent alors compris dans son enceinte ,
et l'église fut érigée en paroisse pour ces i?ouvelles
habitations , placées au-delà des fossés qui furent
comblés. La cure était à la collation du chapitre de
Saint-Martin. L'église était de la plus petite dimen-
sion , et les paroissiens très-peu nombreux : aussi
fut-elle comprise dans la réduction qui eut lieu en
1782.
SA^IJTT-SATURWIN.
La paroisse de Saint-Saturnin était considérée
538 HISTOIRE DE TOURAINE.
comme la principale de la ville. C'en était effective-
ment et la plus spacieuse et la plus peuplée. Gré-
goire nous apprend qu'il avait fait bâtir à Tours une
chapelle dans laquelle il avait mis des reliques de
saint Saturnin. Cette chapelle étant tombée entre les
mains de Théotolon, cinquante-quatrième archevêque
de Tours , il la donna à perpétuité au monastère de
Saint-Julien qu'il venait de faire reconstruire, les
Normands l'ayant entièrement détruit en 856. Les
lettres qu'il donna à ce sujet , en 945 , portent qu'il
la leur abandonne avec les terres et vignes adjacentes,
prés, pacages, jardins, cours d'eau, meubles et im-
meubles , et généralement tout ce qui en dépend. On
voit par là que son emplacement, et tout ce qui l'en-
tourait, ne faisaient point encore partie de la ville.
Les lettres de Théotolon ont cela de particulier que son
nom , et ceux des personnes en présence desquelles
elles furent données, sont signées en caractères grecs
sur l'original.
Ce fut le cardinal Briçonnet , né à Tours , qui, vers
l'an 1 5oo , lit bâtir la haute et belle tour qui soute-
nait le clocher. Nous avons parlé du monument qui y
avait été érigé à Thomas Boliier et à son épouse. La
cure était à la présentation de l'abbé de Saint-Julien.
Cette église a été aliénée et convertie en habitations.
§ XIII.
SAINT-SIMPLE.
Nous ne pourrions dire à quelle époque remonte
SAIMT-STMPnOBIEW. SSq
Texistence de rëgliso de Saint-Simple , puisque Fau-
teur, ou plutôt le continuateur de la Chronique de
Tours, est le pi-emier, ou peut-être le seul, que nous
trouvions en avoir fait mention au sujet d'un miracle
qui s'y opéra, dit-il, le lendemain de la Saint-Bar-
thélemi 12^4 sur une femme privée de l'usage de ses
membres. Il nous apprend également que cette église
fut presque entièrement brûlée un vendredi, à mi-
nuit, jour de Saint-Luc , c'est-à-dire le i8 octobre de
la même année. Elle était située dans le bourg de
Châteauneuf pour lequel elle fut érigée en paroisse ,
vers l'an i36o. Mais comme elle était de très-peu
d'importance , elle fut comprise dans la première ré-
duction opérée le 17 juin 1777.
s XIV.
SAINT-SYMPHORIEN.
On ne peut révoquer en doute l'ancienneté de
cette église, qui fut construite pour l'usage des habi-
tans du faubourg de ce nom, parce qu'alors il n'y
avait point de ponts qui le joignissent «1 la ville, et
que le passage de la Loire était souvent difficile et
périlleux. On a cru qu'elle avait été bâtie par l'évêque
Perpète; mais nous estimons qu'elle fut l'ouvrage du
prêtre Eu frosne, son ami, et qu'à cet égard on a mal
interprété le ch. xiv du liv. 11 de Grégoire de Tours,
chapitre qui n'est que la suite du précédent. En effet,
après avoir parlé au ch. xiii de la reconstruction de
54Ô HISTOIRE lîE TOURAllîE.
la basilique de Saint-BIartin , il continue, et dit, sans
aucune transition : « Eo tempore et basilica beati
pSymphoriani, Augustodunensis martyris, ab Eu-
fffronio prœsbytero aedificata est. Et ipse Eufronius,
« hujus deinceps urbis episcopatum sortitus est. — En
ff ce même temps l'église deSaint-Symphorien, martyr
ff d'Autun, fut bâtie par le prêtre Eufrosne , qui, dans
« la suite, fut nommé évêque de la même ville. » Il est
donc évident que Grégoire n'a ici en vue que saint
Sympborien de Tours, autrement il n'eût pas manqué
de dire ; Le prêtre Eufrasne bâtit à Autun , ^iont il
fut ensuite évêque, etc. Ce qui vient à l'appui de
notre opinion, ce sont les mots eo tempore; car
Eufrosne était notoirement à Tours lorsqu'on rebâ^
tissait Saint-Martin. Dans le même temps il faisait
élever celle de Saint-Symphorien ; or ce ne pouvait
être que celui de Tours.
Le faubourg <Je Saint-Symphorien a conservé sa
cure dont auparavant la nomination appartenait à
l'abbé de Marmoutier.
§ XV.
SAINT-VEWANT^
Nous renvoyons pour jcette paroisse a ce que nous
en avons dit en sa qualité de collégiale au § 3 du
SAINT- VINCENT. 54 1
§ XVI.
s A TNT- VINCENT.
Grégoire de Tours, à la fin de son dixième livre,
nous donne indirectement l'époque de la construction
de Téglise de Saint-Vincent. Après avoir rapporté
l'incendie de la basilique de Saint-Martin par Willa-
caire , en 56o , il ajoute que dans le même temps fut
bâtie l'église de Saint-Vincent, ce qui ne put avoir
lieu que par l'évêque Euphrone, qui occupa le siège
de Tours depuis 5 Sa jusqu'à 573.
Le curé de Saint-Vincent était en possession de
faire porter une croix double aux processions. Ce
privilège lui venait de ce que le palais archiépiscopal
se trouvait dans la circonscription de celte paroisse-
Mal gré cela il n'avait aucune espèce de prééminence
sur les autres curés. Il avait le titre de prieur, parce
que la cure avait été autrefois desservie par des
chanoines réguliers de Saint-Augustin de l'abbaye
de Saint-George-des-Bois , au diocèse du Mans, dont
elle dépendait, et dont l'abbé avait la présentation.
Le curé portait toujours le titre de prieur, de l'ordre
des génovéfains, comme celui de Saint-Hilaire, et
ainsi que lui était vêtu de blanc.
FIN DU TROISIKME VOLUME.
ERRATA
Page».
Lignes.
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24
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22
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217
6
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24
a65
7
TOME I".
iÇ^âcez : de Blérë.
3oi ; lisez: 3o4.
Baudomine; lisez : Baudonivie.
du Clain; lisez : de l'Auzance.
1367; lisez: 1637.
6^5; lisez : 61 5.
avait ; lisez : avaient.
sa fîUe ; lisez : sa femme.
Nous attribuons à Robert-le-Fort un gros
tournois que, mieux informés, nous
croyons appartenir à Robert H, duc
de Bourgogne.
388
3
repnetir ; lisez : repentir.
392
10
Tarchevêque ; lisez : Tévêque.
TOME II.
27
6
Effacez : et.
43
7
La Châtre; lisez : La Cbartre.
265
i3
mios ; lisez : mois.
326
18
Carroir ; lisez : Carroy.
359
i3
d'un des; lisez: lun des.
371
^9
1669; ^'•^^2* 1569.
45o
i3
Courtevanes; lisez : Courtenvaux.
TOME m.
7»
14
la possédait ; lisez : le possédait.
79
8
1G12; lisez: 1601.
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DC Chalmel, Jean Louis
611 Histoire de Touraine
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